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Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes 1

Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

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Page 1: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

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Page 2: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

1. Les bases biologiques de l’hérédité et la nature chimique des gènes : historique

2. La transmission et le décodage de l’information génétique: rappels

3. L’origine de la vie

4. Les éléments génétiques mobiles

5. La génomique + travail personnel (BIOL3, BMOL3P, BIOR3P)

Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

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Page 3: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

1. Les bases biologiques de l’hérédité et la nature chimique des gènes : historique

Hérédité : transmission des caractères à la descendance

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Page 4: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

En 1859, C. Darwin publie sa théorie " On the Origin of Species – By means of Natural Selection " … fait appel au principe de l’hérédité des caractères, mais les mécanismes de cette hérédité demeurent inconnus

A partir du néolithique, exploitation de ce principe d’hérédité lors de la domestication progressive d’espèces animales (ex. chien, porc, poulet,...) et végétales (maïs, blé, ..).

En 1900, première véritable percée : un lien est établi entre les découvertes récentes de la biologie cellulaire et des travaux plus anciens d'un certain … Gregor Mendel

> dias 5-9

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Page 5: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Fin 19ème: observations de plus en plus précises des noyaux et découverte des chromosomes :

- Oskar Hertwig (1875) : observe la fusion de deux noyaux (pronuclei) dans l’œuf fécondé d’oursin - Edouard Starsburger (1880) : description de la mitose (division du noyau) dans les cellules végétales – décrit des "particules facilement colorables qui se séparent en deux" - Walther Flemming (1882) : idem chez les cellules de larves d’amphibiens – division de particules " dans le sens de la longueur "

Moitié du 19ème : émergence de la "théorie cellulaire" (Schleiden & Schwann, 1839) et découverte que la reproduction sexuée est basée sur la fusion des gamètes ⇒ implique que la "substance héréditaire" transmise par les parents à la descendance doit se trouver dans ces gamètes.

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Page 6: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Edouard van Beneden (Univ. de Liège) (1883, 1887) : observations capitales sur Ascaris megalocephata : même nombre de chromosomes (n = 2) dans le noyau de chaque gamète – mais deux fois plus (2n = 4) dans le noyau des cellules germinales qui donnent naissance aux gamètes par méiose (" loi de réduction chromatique")

Une cellule d’Ascaris en métaphase I de la méiose

Une cellule d’Ascaris en métaphase II de la méiose

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Page 7: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

cellules germinales (2n)

gamètes (n)

zygote

mitose et cytocinèse

Fin du 19ème siècle : les chromosomes (transmis pour ½ par chaque parent) apparaissent comme les structures cellulaires qui ont toutes les chances de "loger" la fameuse substance héréditaire …

méiose

Ascaris megalocephata 7

Page 8: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Aa Bb x Aa Bb

La redécouverte en 1900 par H de Vries, C Correns et E Tschermak des lois de transmission des caractères de Gregor Mendel (déjà publiées en 1865 !)

AB Ab aB ab

[AB]

cf. chapitre III

[AB]

[AB]

[AB]

[AB]

[Ab]

[AB]

[Ab]

[AB]

[AB]

[aB]

[aB]

[AB]

[Ab]

[aB]

[ab]

9/16 [AB], 3/16 [Ab], 3/16 [aB], 1/16 [ab]

A partir d’observations réalisées sur la plante du petit pois (Pisum sativum), Mendel déduit que l es caractères visibles (couleur des f leurs , formes des g r a i n s , . . . ) s o n t déterminés par des "facteurs".

Ceux-ci sont dominants (A) ou récessifs (a) et sont présents en deux exemplaires chez les parents (AA, Aa, ou aa). Lors de la reproduction, chaque parent transmet à la descendance un seul des deux exemplaires de chaque facteur, avec une égale probabilité (0,5) pour chacun des deux (1ère loi). Les différents facteurs (A, B, ..) sont transmis indépendamment les uns des autres (2de loi), ce qui permet de prévoir les différentes combinaisons de facteurs au sein des gamètes ainsi que leurs proportions.

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Page 9: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

cellules germinales (2n)

gamètes (n)

zygote

méiose

Aa Bb x Aa Bb

En 1900 : lien entre les derniers acquis de la biologie cellulaire et les travaux de Gregor Mendel (reproduits et confirmés par de Vries, Correns et Tschermak) :

AB Ab aB ab

A a B b

A a B b

A b

a b

A a b b

[AB]

cf. chapitre III

[AB]

[AB]

[AB]

[AB]

[Ab]

[AB]

[Ab]

[AB]

[AB]

[aB]

[aB]

[AB]

[Ab]

[aB]

[ab]

9/16 [AB], 3/16 [Ab], 3/16 [aB], 1/16 [ab]

Les "facteurs" de G Mendel (cad les gènes) sont très certainement "portés" par les chromosomes

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Page 10: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

- Etude des constituants chimiques des noyaux de leucocytes : protéines et une nouvelle substance riche en phosphate et en azote, appelée "nucléine", qu'on peut précipiter (par extraction alcaline et acidification) (F. Miescher, 1871)

- Deux types d’acides nucléiques : l’ADN (initialement considéré comme étant propre aux animaux – ex. acide thymonucléique) et l’ARN (initialement considéré comme étant propre aux végétaux et à la levure)

- Grâce aux progrès de la biochimie, ont parvient à déterminer la composition chimique des protéines et de la "nucléine"

polymère d’acides aminés (20) polymère de nucléotides (4)

Nature chimique des gènes (ou "facteurs" de Mendel) ?

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Page 11: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

nt : nomenclature complexe, mais abréviations simples

= polymères de nucléotides (nt)

Les acides nucléiques

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RAPPEL

1'

2' 3'

4'

5'

dans l'ARN

ribonucléoside (adénosine) ribonucléotide (adénosine monophosphate)

base nucléoside nucléotide adénine (A) adénosine (A) adénosine

monophosphate (AMP)

guanine (G) guanosine (G) guanosine monophosphate (GMP)

cytosine (C) cytidine (C) cytidine monophosphate (CMP)

uracile (U) uridine (U) uridine monophosphate (UMP)

U, C : pyrimidines (1 cycle)

A, G : purines (2 cycles)

en abrégé, nucléoside et nucléotide

Page 12: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

nt : nomenclature complexe, mais abréviations simples

= polymères de nucléotides (nt)

1'

2' 3'

4'

5'

dans l'ADN

désoxyribonucléoside (ex. désoxyadénosine) désoxyribonucléotide (ex. désoxyadénosine monophosphate)

base nucléoside nucléotide adénine (A) désoxyadénosine

(dA) désoxyadénosine

monophosphate (dAMP)

guanine (G) désoxyguanosine (dG)

désoxyguanosine monophosphate (dGMP)

cytosine (C) désoxycytidine (dC)

désoxycytidine monophosphate (dCMP)

thymine (T) désoxythymidine (dT)

désoxythymidine monophosphate (dTMP)

T, C : pyrimidines (1 cycle)

A, G : purines (2 cycles)

Les acides nucléiques en abrégé,

nucléoside et nucléotide

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RAPPEL

Page 13: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

désoxyadénosine monophosphate, dAMP

désoxythymidine monophosphate, dTMP

désoxyguanosine monophosphate, dGMP

désoxycytidine monophosphate, dCMP

adénosine monophosphate, AMP

urididine monophosphate, UMP

guanosine monophosphate, GMP

cytidine monophosphate, CMP

H

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RAPPEL

Page 14: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

- liens phosphodiesters

- polarité 5'-3' :

5'-ACGTGG-3' ≠ 3'-ACGTGG-5'

convention de lecture / d'écriture :

ACGTGC = 5'-ACGTGC-3'

lecture

Liens entre nucléotides et polarité des a.n. 5'

3'

OH

14 RAPPEL

Page 15: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Chromosomes

Protéines ADN polymères ← 20 aa polymères ← 4 nt

Gènes ?

le plus probable

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Page 16: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

colonies Rough colonies Smooth

Le phénomène de transformation des bactéries R →S (Griffith, 1928)

Streptococcus pneumoniae

Les bactéries S fabriquent une capsule de polysaccharides. Les bactéries R portent une mutation dans un des gènes (capS) nécessaires à la biosynthèse de cette capsule.

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Page 17: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

- Avery & coll. (1944) : reprise des exp. de Griffith et d'Alloway avec comme objectif d'identifer la nature de la "molécule transformante" des bactéries S. Contre toute attente, ils découvrent qu'il s'agit de l’ADN et non des protéines (Avery, MacLeod, McCarty, 1944) Les gènes seraient donc constitués d’ADN ?

Oswald Avery

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- Alloway (1932) : lyse de bactéries S et filtration (pour éliminer les débris cellulaires), puis observation importante : bactéries R + lysat de S ⇒ transformation génétique de R en S Donc, une substance soluble de S a génétiquement transformé R en S

Page 18: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Les expériences d’Avery & coll. :

1) R + lysat de S ⇒ transformation génétique de R en S

2) R + ADN purifié de S ⇒ transformation génétique de R en S

Oui mais cet ADN n’est-il pas contaminé par des protéines ?

3) R + ADN (purifié de S) traité par une ADNase ⇒ pas de trans- formation génétique de R en S

Oui mais cet ADN, en agissant comme une sorte de support, est peut-être indispensable pour que les protéines (qui contaminent la préparation d’ADN) assurent correctement leur rôle de gènes …

4) R + ADN (purifié de S) traité par une protéase ⇒ transformation génétique de R en S

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Page 19: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Question clé au début des années 50s → comment une molécule d'apparence aussi simple peut-elle assumer la fonction de gènes ?

Les gènes sont donc constitués d’ADN :

La "clé" se trouve peut-être dans la manière dont cette molécule se reploie dans l'espace → deux approches : - analyse par cristallographie aux rayons X de fibres et cristaux d'ADN pour déterminer la structure tertiaire de l’ADN (R Franklin & M Wilkins, King's college, Londres) - construction de modèles atomiques compatibles avec les connaissances sur les propriétés chimiques de l'ADN (L. Pauling au Caltech, et Crick et Watson à Cambridge, qui proposeront des modèles à trois chaines … )

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Page 20: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

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Le fameux cliché "51" de R. Franklin

- diffraction en "X" > l'ADN se réploie en hélice

- chaque tour d'hélice comporte ± 10 unités de construction

- dimension : 3,4 nm / tour d'hélice

cf Youtube 0tmNf6ec2kU : sur la contribution capitale de Rosalind Franklin à l'élucidation de la structure de l'ADN par Crick & Watson

Page 21: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Francis Crick James Watson

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Page 22: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Structure en double hélice de l'ADN (Watson & Crick, 1953)

Deux chaines polynucléotidiques :

- antiparallèles - enroulées en hélices droites - complémentaires :

squelette désoxyribose-

phosphate (ext.)

paire de bases appariées

(int.)

∼ 1,1 nm

diamètre: 2,37 nm 22

RAPPEL

Page 23: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

« It has not escaped our notice that the specific pairing we have postulated immediately suggests a possible copying mechanism for the genetic material »

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Page 24: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

Structure en double hélice de l'ADN :

pourquoi cette découverte a-t-elle été si importante ?

→ première explication convaincante aux trois grands problèmes posés par le concept "ADN, support chimique de l'hérédité" : nature, transmission et évolution de l'information génétique ?

- nature de l'information ? = séquence des bases

- transmission de l'information ? par réplication semi-conservative

5'- GTAATGTCTTGTC-3' 3'- CATTACAGAACAG-5'

5'- GTAATGTCTTGTC-3' 3'- CATTACAGAACAG-5'

5'- GTAATGTCTTGTC-3' 3'- CATTACAGAACAG-5'

- évolution de l'information ? par des changements de la séquence des bases

(Watson & Crick, 1953)

brin parental

brin néosynthétisé

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Page 25: Chapitre I. Acides nucléiques, gènes et génomes

J. Watson exposant son modèle de la double hélice d’ADN lors d’un congrès au Cold Spring Harbor en juin 1953

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Extrait de « La Statue Intérieure » de François Jacob F. Jacob, alors jeune étudiant chercheur, assiste en 1953 au congrès annuel du Cold Spring Harbor (USA)

"… Beaucoup d’excellents exposés dans ce symposium, de mises au point, de nouveautés. Mais le clou, ce fut la description, par J Watson, de la structure de l’ADN qu'il venait d’élaborer avec Crick. Quelques semaines plus tôt, en apprenant les détails de cette structure, Delbrück (l'organisateur) avait aussitôt décidé de l’ajouter au programme de son colloque sur les virus. Et afin que nul n’en ignore, il avait fait copier et distribuer à tous les participants la note de Watson & Crick parue dans Nature. L’air plus ahuri que jamais, la chemise au vent, les jambes nues, le nez dressé, les yeux écarquillés, coupant son discours de brèves exclamations qui soulignaient l’importance de son propos, Jim expliqua dans le détail la

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structure. Les jeux de modèles atomiques auxquels il s’était livré à Cambridge avec Franis Crick. Les arguments apportés par l’étude cristallographique aux rayons X et par l’analyse biochimique. La double hélice elle-même, avec ses caractéristiques physiques et chimiques. Les conséquences biologiques, enfin, les mécanismes qui sous-tendaient les propriétés reconnues au matériel génétique : pouvoir de se répliquer, de muter, de déterminer les caractères de l’individu. Un instant la salle resta muette. Il y eut quelques questions. Comment, par exemple, pendant la réplication de la double hélice, séparer sans les casser deux chaines enroulées l’une sur l’autre ? Mais pas de critique. Pas d’objection. Il y avait, dans cette structure, une telle simplicité, une telle perfection, une telle harmonie, une telle beauté même ; les avantages biologiques en découlaient avec tant de rigueur, tant d’évidence, qu’on ne pouvait pas ne pas la croire vraie. Il y aurait, peut-être, des détails à modifier, des précisions à apporter. Mais les principes, les deux chaines, l’alignement des bases, la complémentarité des deux séquences, tout cela avait la force du nécessaire, tout cela ne pouvait être faux. Même sans comprendre les détails de l’analyse cristallographique, même sans affinité avec la biochimie, impossible de ne pas admirer une structure qui répondait si bien aux exigences de la génétique. L’un des plus vieux problèmes posés depuis l’Antiquité par le monde vivant, l’hérédité, venait se résoudre dans les propriétés d’une espèce

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moléculaire. La production du même par le même, la variation, le réassortiment des caractères au fil des générations, tout cela découlait de la distribution complémentaire de quelques radicaux chimiques alignés au long de deux chaines. De tout évidence, c’était un tournant dans l’étude du monde vivant. Une période exaltante s’annonçait pour la biologie."

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