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Chapitre I : Synthèse bibliographique CHAPITRE I SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE 11

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

CHAPITRE I SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

1 INTRODUCTION ..................................................................................................................................... 13

2 GENERALITES SUR LA FPH DES ACIERS EN PRESENCE D’HYDROGENE SULFURE ........ 13 2.1 MECANISMES DE CHARGEMENT EN HYDROGENE DE L'ACIER ...................................................... 14

2.1.1 Mécanismes classiques de chargement cathodique en milieu acide................................. 14 2.1.2 Transfert protonique direct .............................................................................................. 16 2.1.3 Intervention de l'H2S en tant que promoteur d'entrée d'hydrogène .................................. 16 2.1.4 Rétrodiffusion de l'hydrogène........................................................................................... 18

2.2 COMPORTEMENT DE L’HYDROGENE AU SEIN DU METAL ............................................................. 19 2.2.1 L'hydrogène diffusible ...................................................................................................... 19 2.2.2 L'hydrogène piégé ............................................................................................................ 20

2.3 FISSURATION DES ACIERS PAR L'HYDROGENE............................................................................. 21 2.3.1 Les différentes formes de FPH ......................................................................................... 22 2.3.2 Les différents modèles de FPH......................................................................................... 24

2.4 PARAMETRES INFLUANT SUR LA FPH......................................................................................... 26 2.4.1 Paramètres liés au milieu ................................................................................................. 26

a) Rôle de la température ..................................................................................................................... 26 b) Influence conjointe du pH et de la PH2S ........................................................................................... 27

2.4.2 Paramètres liés au matériau............................................................................................. 31 a) Conditions de surface....................................................................................................................... 31 b) Effet des éléments d'alliage.............................................................................................................. 32 c) Rôle de la microstructure ................................................................................................................. 33

2.5 LES PRINCIPAUX ESSAIS NORMALISES DEDIES A L’EVALUATION DE LA SENSIBILITE DES ACIERS A LA FPH ................................................................................................................................................... 34

2.5.1 Essai normalisé SSC NACE TM0177 méthode A ............................................................. 34 2.5.2 Essai normalisé HIC NACE TM0284 ............................................................................... 36

2.6 SYNTHESE .................................................................................................................................. 39 3 PRESENTATION ET MISE EN ŒUVRE DE LA TECHNIQUE D’EMISSION ACOUSTIQUE... 40

3.1 DEFINITION DE L’EMISSION ACOUSTIQUE ................................................................................... 40 3.1.1 Le signal d’EA .................................................................................................................. 41

a) Définitions associés au signal d’EA................................................................................................. 41 3.1.2 Chaîne d’acquisition de l’émission acoustique ................................................................ 42 3.1.3 Caractéristiques du signal................................................................................................ 43 3.1.4 Sources d’émission acoustique associés à la corrosion assistée mécaniquement ............ 45 3.1.5 Émissivité des sources d'EA ............................................................................................. 46

3.2 APPLICATION DE L'EA AU CAS DE LA FPH DES ACIERS EN MILIEU H2S ...................................... 49 3.2.1 Identification des sources émissives ................................................................................. 49

a) Émissivité des processus électrochimiques...................................................................................... 50 b) Émissivité de la couche de FeS........................................................................................................ 52 c) Émissivité des différents modes de fissuration en milieu H2S ......................................................... 54

3.3 SYNTHESE .................................................................................................................................. 57 4 BILAN DE L’ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE ET DEMARCHE DE LA THESE.............................. 58

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

1 Introduction Ce chapitre présente une synthèse des travaux relatifs à l'étude de la Fragilisation par

l’Hydrogène (FPH) des aciers. Cette synthèse doit nous permettre de faire le point sur l’état des

connaissances mais également d’identifier un certain nombre de questions en suspens, auxquelles

ce travail va chercher à répondre.

Dans un premier temps, toutes les étapes relatives à la FPH en milieu H2S sont présentées,

depuis les mécanismes de pénétration de l’hydrogène dans le métal jusqu’aux différents

mécanismes de fissuration proposés. Ensuite, sont recensés les différents paramètres influant sur

la FPH au sein des aciers. Enfin, parce que l'un des objectifs de ce travail est aussi d'améliorer les

moyens de caractérisation de la FPH, les principaux essais couramment utilisés pour la

qualification d’aciers opérant en milieu contenant de l’H2S sont présentés. Ce bilan souligne

l’intérêt de développer et mettre en oeuvre une méthode de suivi, en temps réel, des essais afin

d’obtenir des informations sur les mécanismes et les cinétiques de fissuration.

Dans une seconde partie, l’opportunité d’une instrumentation des essais par la technique

d’émission acoustique (EA) est évaluée. Cette technique est d’abord décrite puis les principaux

résultats obtenus lors d’études par EA de la FPH des aciers en milieu H2S sont présentés.

2 Généralités sur la FPH des aciers en présence d’hydrogène sulfuré

Cette première partie de la revue bibliographique fait le point sur l’état des connaissances

sur le mode de dégradation des aciers par FPH. Elle décline les aspects relatifs à :

l'origine de l’hydrogène qui participe à la fragilisation,

son cheminement et ses interactions avec la microstructure des matériaux,

les différents modes de fragilisation résultant et leurs mécanismes,

et les paramètres conditionnant la sensibilité à la FPH.

Enfin, les essais normalisés visant à évaluer la sensibilité des aciers à la FPH couramment

utilisés dans l'industrie pétrolière sont présentés.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

2.1 Mécanismes de chargement en hydrogène de l'acier L'entrée de l'hydrogène dans un métal résulte de sa mise en contact avec différentes sources

possibles d'hydrogène, soit d’hydrogène à l’état gazeux, soit issu d’une espèce hydrogénante

(H2O, H3O+, H2S, HS-...). Plus précisément, ces espèces sont présentes en solution à l’état de gaz

dissous ou résultent des phénomènes de réduction, appelés aussi processus de décharge

cathodique de l’hydrogène et qui sont liés aux réactions de corrosion. Notre étude a été conduite

dans des milieux contenant de l'H2S. Ce gaz est en effet reconnu comme étant une espèce

hydrogénante favorisant l'absorption de l'hydrogène de la solution électrolytique vers un métal

[BRA 00]. Les paragraphes suivants ont pour objectif d’actualiser les différents mécanismes

proposés dans la littérature sur le chargement en hydrogène à partir d'un milieu aqueux contenant

de l'H2S.

2.1.1 Mécanismes classiques de chargement cathodique en milieu acide

Les processus de décharge cathodique de l’hydrogène ont fait l'objet de nombreuses études

[BOC 71] [FRU 60] [PAR 51]. Lorsque le matériau est en contact avec un milieu acide, la source

d’hydrogène est le proton H+, plus ou moins solvaté, c'est à dire H+, nH2O (par exemple l'ion

hydronium H3O+). Au voisinage de l'électrode, l’ion subit une réaction de désolvatation selon

l'équation 1:

(Eq 1) OHHOH 23 +→ ++

Trois étapes sont associées à la décharge cathodique de l'hydrogène :

Le transfert électronique à travers la double couche qui conduit à l’adsorption chimique

selon l’équation 2, dite de Volmer :

(Eq 2) adsmétal HeH →+ −+

Une fois adsorbé, l’hydrogène peut alors soit se recombiner pour former de l'hydrogène

gazeux, soit pénétrer dans le métal :

La recombinaison des atomes adsorbés conduit au dégagement de di-hydrogène gazeux,

selon deux mécanismes possibles illustrés par les équations 3 et 4 :

réaction de Tafel (Eq 3) 2HHH adsads →+

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ou réaction d’Heyrovsky (Eq 4) 2HeHH métalads →++ −+

La pénétration dans le métal conduit à l’absorption d'une partie ε de l’hydrogène suivant

l’équation 6 :

( ) 21 Hε− (Eq 5) ( ) adsHeH 22 →+ −+ 2ε (Eq 6) absH

La figure I.1 résume les différentes étapes des mécanismes classiques de dégagement et de

chargement de l'hydrogène au sein d'un métal [PRO 02].

Solution Métal

Figure I.1 Illustration des mécanismes classiques de chargement en hydrogène [PRO 02].

Il faut rappeler cependant que les indices définis sur la figure I.1 ont été écrits à une époque

où l’hydrogène dissous était perçu sous une forme atomique et non sous sa forme actuelle de

proton Hdiss+ et d’un e-. Il faut donc lire Hdiss

+ + e- en lieu et place de Hdiss.

Les cinétiques relatives de chacune de ces étapes conditionnent la quantité d'hydrogène

absorbé au sein du métal. Elles dépendent de trois paramètres principaux : le taux de

recouvrement en hydrogène adsorbé, l'énergie d'adsorption, et la surtension de l’hydrogène η

[BRA 00a].

Quel que soit son état, le transfert de l’hydrogène en solution vers le métal est un

mécanisme complexe faisant intervenir des sites présentant des niveaux d'énergie différents. De

façon schématique, l'absorption de l'hydrogène peut être considérée comme un passage d'un site

d'adsorption chimique en surface vers un site interstitiel au sein du métal [BRA 00a] sous la forme

d’un hydrogène dissous tel qu’indiqué ci-dessus. A noter également que le mécanisme de

Frumkin [FRU 63] envisage un transfert global identique mais étape intermédiaire particulière en

surface.

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2.1.2 Transfert protonique direct

Si la description précédente faisait appel à une étape d’adsorption préalable du proton, les

travaux de Darmois [DAR 60], Galland [GAL 68] et plus récemment Crolet [CRO 01] convergent

vers un autre mécanisme. Sans exclure l’étape de dégagement d’hydrogène, ils évoquent la

pénétration directe du proton de la phase aqueuse vers la phase solide. La réaction globale de

corrosion fait intervenir une réaction cathodique protonique, comme un échange de cations entre

les deux phases solide et liquide, telle que :

(Eq 7) ++++++ +→+ métaleélectrolyteélectrolytmétal HFeHFe 22

La figure I.2 proposée par Crolet [CRO 04a] reprend de manière schématique ce mécanisme

de transfert protonique direct.

Figure I.2 Illustration du mécanisme de transfert protonique direct [CRO 04a]. (iK courant cathodique)

Sur ce schéma, le proton solvaté en solution pénètre dans le métal sans changement d’état.

Le métal est en effet constitué par un édifice d’ions dont la cohésion est assurée par le nuage

électronique. A noter aussi que le mécanisme de Frumkin qui fait intervenir l’association en

surface puis une redissociation immédiate, revient à un transfert direct du proton.

+2Fe

2.1.3 Intervention de l'H2S en tant que promoteur d'entrée d'hydrogène

Comme les espèces AsH3, H3P, SbH3, l’H2S est considéré comme un promoteur d’entrée de

l’hydrogène dans les matériaux. En premier lieu, rappelons qu'en solution aqueuse, H2S se

comporte comme un diacide selon les réactions acido-basiques suivantes :

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

(Eq 8) +− +→ HHSSH 2

et + (Eq 9) −− +→ HSHS 2

En second lieu, en présence de sulfure d'hydrogène et en milieu acide, les ions ferreux issus

de la réaction anodique précipitent sous la forme de sulfure de fer pour former un film en surface

de l'acier (Eq10) :

(Eq. 10) )(

22sFeSSFe →+ −+

Plusieurs mécanismes possibles ont été envisagés pour expliquer l'action des promoteurs

d’entrée d'hydrogène. Les principaux mécanismes sont basés, soit sur la modification des énergies

de liaison entre le métal et l'hydrogène adsorbé, soit sur le blocage des sites d'adsorption de

l'hydrogène, voire les deux ensemble [BRA 00a].

Par exemple, pour certains auteurs [NEW 69], le promoteur d'entrée d'hydrogène, dans

notre cas l'H2S, diminuerait l'énergie de liaison entre le métal et l'hydrogène adsorbé. Il en

résulterait une diminution de l'énergie de barrière à franchir pour le transfert de l'hydrogène vers

le métal. Ce mécanisme ne permet pas à lui seul d'expliquer l'augmentation de la perméation de

l'hydrogène sous des conditions potentiostatiques [PRO 02]. Plus récemment, d'autres auteurs ont

proposé que les adsorbats de sulfure se fixent sur les sites d'adsorption de l'hydrogène, abaissant

ainsi la probabilité de recombinaison (Eq 3). La réaction d'absorption au sein du métal est alors

favorisée (Eq 6) [IYE 90]. Dans ce dernier mécanisme, l'H2S joue le rôle de "poison", bloquant la

réaction de recombinaison de l'hydrogène (Eq 3) en faveur de la pénétration de l'hydrogène dans

le métal (Eq 6). Les mécanismes d’absorption de l’hydrogène en milieu H2S basés sur le blocage

de la réaction de recombinaison de l’hydrogène (Eq 3) sont remis en cause par la mise en

évidence de l’existence d’une rétrodiffusion de l’hydrogène en surface [CRO 01]. Ce dernier point

est détaillé ci-après (paragraphe I.2.1.4).

Associé à la théorie du transfert protonique direct, Crolet [CRO 01] propose donc une autre

voie d’absorption où les adsorbats de sulfure apparaissent comme des catalyseurs de la

réaction cathodique protonique, en favorisant électriquement la traversée de la surface par H

−adsHS

+

grâce à un environnement local semblable à un complexe neutre H2Sads, processus intervenant en

deux temps :

(Eq 11) adsadseau SHHSH 2→+ −+

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(Eq 12) +− +→ métaladsads HHSSH2

Selon la théorie proposée par Crolet, l’hydrogène sulfuré favorise ainsi l’absorption de

l’hydrogène au sein du métal selon le mécanisme schématisé sur la figure I.3.

Acier

HS- H+

HSH

SH- H+

Figure I.3 Catalyse du transfert direct de proton par des adsorbats [CRO 01]. −adsHS

2.1.4 Rétrodiffusion de l'hydrogène

L'hydrogène peut donc, comme explicité dans les paragraphes précédents, pénétrer dans le

métal. Lorsque la concentration en hydrogène 'dissous' dans le réseau cristallin devient trop forte

par rapport à son activité dans le milieu corrosif, il en résulte un phénomène de rétrodiffusion de

l'hydrogène [GAL 04] [CRO 01]. Ce phénomène a été mis en évidence expérimentalement par les

travaux de Crolet [CRO 01]. Dans ces essais, l'évolution de la contre-pression d'hydrogène a été

mesurée dans un capteur creux immergé dans le milieu hydrogénant. Grâce à ces essais, il a

montré l’existence d’un dégazage rapide en parallèle avec le chargement cathodique même en

milieu contenant de l’H2S.

Comme dans le cas du chargement en hydrogène, les avis divergent quant aux mécanismes

de rétrodiffusion. La théorie du transfert électronique (Eq 13) [GAL 04] s'oppose à celle du

transfert direct (figure I.4) [CRO 04] de la même manière que pour le mécanisme de décharge

cathodique.

(Eq 13) −+ +→ métaleélectrolytmétal eHH

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figure I.4 Mécanisme du dégazage physique catalysé par les adsorbats de sulfure [CRO 04].

2.2 Comportement de l’hydrogène au sein du métal Il existe deux types d’états énergétiques pour l’hydrogène dans le métal : d’une part

l’hydrogène en solution solide appelé également hydrogène diffusible et d’autre part l’hydrogène

piégé.

2.2.1 L'hydrogène diffusible

L'origine de la diffusion de l'hydrogène dans le métal est le gradient de concentration en

hydrogène entre la surface et le coeur du métal, créé par l'absorption de l'hydrogène. D'autres

forces motrices peuvent également être à l'origine de la diffusion : gradients de contrainte, de

température ou existence d'un champ électrique.

Dès lors que l’hydrogène est sous forme protonique, il diffuse très vite. A température

ambiante (25°C) les valeurs de coefficient de diffusion dans les aciers sont très différentes pour

les structures ferritiques α (D= 9,5 x 10-5 cm²s-1) et pour les structures austénitiques γ (D= 2,1 x

10-12 cm²s-1) [BRA 00a].

D'autres mécanismes de diffusion dans l'acier sont possibles.

Le premier est désigné par le terme de court-circuit de diffusion ; il est associé à la présence

de défauts linéaires (dislocations) ou planaires (joints de grain). Ces défauts constituent des lieux

du réseau où la diffusion est plus rapide. Ce mécanisme n'est pas observé dans les structures

ferritiques présentant des coefficients de diffusion réticulaire élevés mais intervient dans les

structures à coefficient de diffusion d'hydrogène faible telles que les structures austénitiques

stables (nickel ou acier inoxydable).

Le deuxième mécanisme proposé est le transport par les dislocations. Ce phénomène

constitue la base de certains mécanismes de fragilisation qui seront détaillés au paragraphe I.2.3.2.

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Ce processus suppose l'existence d’une association entre l'hydrogène et les dislocations et le

transport accéléré de l'hydrogène par les dislocations mobiles. Le transport accéléré a été mis en

évidence dans différentes études expérimentales [DON 76] [LOU 72] [CHE 80] [CHE 99] [BRA

06]. Cependant, d'après Chêne, les fondements physiques d'un transport 'longue distance' dans des

matériaux polycristallins restent à préciser en relation avec l'effet probable d'un mouvement

collectif de dislocations [CHE 07].

2.2.2 L'hydrogène piégé

La présence de pièges à hydrogène dans un acier influence grandement son comportement

en présence d'hydrogène. Le phénomène de piégeage a pour effet d'augmenter la solubilité

apparente de l'hydrogène, de diminuer sa diffusivité apparente et de favoriser des phénomènes de

surconcentration locale en hydrogène.

Le piégeage a pour origine l'existence d'une force d’attraction qui modifie la probabilité de

saut dans une direction donnée ou d'une perturbation locale du réseau cristallin qui modifie la

fréquence de saut. Ainsi, un site de piégeage est un site préférentiel pour l'hydrogène où le

potentiel est moins élevé que dans un site interstitiel (figure I.5).

Figure I.5 Allure schématique du potentiel de réseau 'vu' par l'hydrogène [GAL 04]. Q : énergie d'activation de la diffusion. Qp et Qd : énergies de piégeage et dépiégeage.

Différents vocables sont utilisés pour définir les différents types de piégeage :

interne ou superficielle pour la localisation du piégeage,

interaction électronique (champ électrique), chimique (gradient de potentiel chimique) ou

interaction élastique (champ de contraintes) selon son origine physique,

ponctuel (atome interstitiel, substitutionnel, lacune etc...), linéaire (dislocation), plan

(interface entre phases ou joint de grains) ou volumique (microporosité, fissure...) pour qualifier le

piège relativement à sa taille et à sa géométrie,

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

piège 'réversible' ou 'irréversible selon la valeur de l'énergie d'interaction hydrogène-piège.

La notion de piège 'réversible' et 'irréversible' est subjective mais permet d'évaluer la

capacité de 'dépiégeage' à une température donnée. L'hydrogène possède une probabilité de

'dépiégeage' plus ou moins grande, selon la profondeur du puits de potentiel (figure I.5), mais il

n'y a pas de frontière véritable entre pièges réversibles et irréversibles. Un piège est considéré

comme irréversible s'il présente, contrairement au piège réversible, une probabilité quasi nulle de

'dépiégeage'. Quelques valeurs d'énergie de piégeage estimées par différents auteurs sont

rassemblées dans le tableau I.2 [BRA 00a].

Tableau I.1 Énergies de liaison de l'hydrogène avec différents défauts microstructuraux dans les alliages base Fe ou Ni [BRA 00a].

Énergie de liaison ∆Hb (kJ/mol) Nature du site Fer ou aciers

ferritiques Aciers austénitiques ou

nickel Dislocation 20 à 58 10 à 20

Joint de grains 10 à 58 10 à 20

MnS : 29 à 57

AlN : 48 à 58

Fe3C : 57 à 84 Interfaces (précipités,

inclusions)

TiC : 95

Lacune 46 à 54 20 à 42

Surface interne, cavité 28 à 96 41 à 53

2.3 Fissuration des aciers par l'hydrogène La diffusion et le piégeage d'hydrogène au sein du métal peuvent conduire à une

dégradation des propriétés d'usage de l'acier : ce phénomène correspond à la fragilisation par

l'hydrogène (FPH). Ce mode de dégradation assistée par l'environnement peut prendre différentes

formes, elles mêmes régies par divers mécanismes. Dans ce contexte, nous nous proposons de

décrire, dans un premier temps, les principales formes de FPH provoquées en milieu H2S ; puis les

différents mécanismes de fissuration par l'hydrogène proposés dans la littérature sont présentés.

Enfin les paramètres intervenant sur la fissuration en milieu H2S sont recensés.

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2.3.1 Les différentes formes de FPH

Selon les conditions de service, plusieurs formes d’endommagement par l’hydrogène en

milieu sulfuré peuvent être rencontrées. Présentées ci-dessous, elles seront désignées dans la suite

de ce texte par leur terminologie anglo-saxonne [NACE 03].

La rupture différée par H2S (Sulfide Stress Cracking : SSC) désigne la fissuration d’un

métal associée à la corrosion et à une contrainte résiduelle et/ou appliquée en présence d’eau et

d’hydrogène sulfuré. Ce mode de rupture est un cas spécifique de rupture différée par l’hydrogène

(Hydrogen Sulfide Cracking : HSC). Elle implique la fragilisation du métal par l’hydrogène

produit par le processus de corrosion acide en surface (cf. Eq 1). Nous avons vu précédemment

que le chargement en hydrogène est facilité par la présence d'hydrogène sulfuré. L’hydrogène

peut diffuser dans tout le métal, réduire sa ductilité et accroître sa sensibilité à la fissuration. Les

matériaux métalliques à haute résistance mécanique et les zones dures des soudures sont

particulièrement sensibles au SSC.

Les fissures HSC/SSC s’amorcent toujours en surface des éprouvettes avec une incidence

de 90° au lieu de l’orientation à 45° prise près de la surface par la seule contrainte de service

[CRO 04a]. Un faciès typique de rupture SSC est présenté sur la figure I.6.

Figure I.6 Faciès de rupture SSC [TAN 99].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Sur cette figure, la flèche indique le site d’amorçage de la fissuration. La fissure se propage

d’abord à 90° par rapport à la direction de sollicitation, puis la rupture finale a eu lieu à 45°.

L’importance de l’état de surface pour l'amorçage de ce type de fissuration sera soulignée au

paragraphe I.2.4.2.

La décohésion interne (Hydrogen-Induced Cracking : HIC) se traduit par la fissuration

plane des aciers au carbone et faiblement alliés, liée à la diffusion de l’hydrogène en solution dans

l’acier puis à sa recombinaison pour former des molécules d’hydrogène sur les sites de

précipitation. La fissuration est due à une mise sous contrainte des cavités sous l’effet d’une

augmentation de la pression interne liée à l’accumulation d’hydrogène recombiné. La décohésion

interne ne requiert l’application d’aucune contrainte extérieure, et, à la différence du SSC, cette

fissuration peut se produire hors du milieu hydrogénant si la quantité d'hydrogène interne piégé

est suffisante.

Le terme HIC est un terme générique qui regroupe les types de fissures suivantes :

fissurations en gradins (Step Wise Cracking : SWC), et le cloquage (blister cracking).

Les figures I.7 et I.8 représentent respectivement une cloque (blister) et des fissures de type

HIC.

Figure I.7 Amorce de cratère de corrosion [REN 05]. Figure I.8 Fissuration de type HIC [BRU 99].

La décohésion interne sous contrainte (Stress Oriented Hydrogen-Induced Cracking :

SOHIC) traduit un empilement de petites décohésions internes de type HIC se développant

perpendiculairement à la contrainte principale (résiduelle et/ou appliquée), et entraînant un faciès

final dit en "échelle de perroquet" reliant les fissures HIC initiales parfois très petites. La

concentration de contrainte peut favoriser la dissolution locale de l’hydrogène en quantité

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

suffisante pour causer la germination d’un réseau de fissures empilées [NACE 03]. L’avancement

du processus conduit à la rupture des ligaments séparant les fissures formées (figure I.9).

Figure I.9 Fissuration de type SOHIC [KAN 98].

L’hydrogène peut être identifié sous deux vocables différents [CRO 04a] [GAL 04] :

l’hydrogène externe, qui est à l’origine de tous les phénomènes intervenant exclusivement avec

immersion effective et permanente dans le milieu corrosif hydrogénant, comme la rupture différée

par l’hydrogène (HSC ou SSC en milieu H2S) ; et l’hydrogène interne qui induit tous les

phénomènes perdurant après émersion, comme la décohésion interne (HIC). Le SOHIC reste

quant à lui une forme très particulière d’interaction entre l’hydrogène interne et le mode de

sollicitation.

Il est important de noter que la distinction entre les modes de fissuration SSC et SOHIC ne

s’est faite que tardivement [UME 85] [SMI 97] [CRO 04a].

A noter aussi la grande différence des faciès d’endommagement observés en laboratoire

pour des essais courts sur de petits échantillons et les faciès observés sur le terrain après de

longues expositions de grands ‘’échantillons’’.

2.3.2 Les différents modèles de FPH

Différents modèles ont été proposés dans la littérature pour expliquer les phénomènes de

FPH.

Le premier modèle proposé dès 1940 par Zapffe et Sims [ZAP 41] repose sur la

recombinaison et l'accumulation de l'hydrogène atomique en hydrogène moléculaire sous forme

gazeuse sur des défauts qui jouent le rôle de pièges. Si la sursaturation en hydrogène dans le

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

réseau est grande, la pression d'hydrogène dans les microcavités ainsi créées peut être

suffisamment élevée pour conduire à une fissuration. Ce modèle explique bien les phénomènes de

fissuration interne tels que la fissuration HIC en milieu H2S.

Les modèles suivants font intervenir l'application d'une contrainte extérieure et seraient

donc applicables aux phénomènes de fissuration SSC et SOHIC. Cependant, la littérature ne

mentionne souvent pas de distinction entre les différents modes de fissuration auxquels ces

modèles s'appliquent.

Le modèle de fissuration basé sur la réduction des forces de cohésion a été introduit par

Troiano [TRO 60] et développé par Oriani [ORI 77]. Il propose que l'hydrogène conditionne les

ruptures de liaisons atomiques en pointe de fissure agissant ainsi sur les forces de cohésion

interatomique. L'hypothèse de base de ce modèle est que la rupture fragile intervient quand les

contraintes locales dépassent les forces de cohésion du réseau qui sont réduites par la présence

d'hydrogène. Dans ce modèle, l’hydrogène en solution solide d’insertion diminue les forces

requises pour séparer le cristal selon un plan cristallographique, c'est-à-dire qu’il abaisse les

forces de cohésion du réseau et l’énergie nécessaire pour favoriser le clivage. Ce modèle suppose

des concentrations locales en hydrogène élevées dans le réseau, en particulier aux défauts et

interfaces.

Plusieurs autres modèles reposant cette fois sur une augmentation de la plasticité locale

induite par l'hydrogène sont proposés dans la littérature.

Beachem [BEA 72] suggère que l'enrichissement en hydrogène en pointe de fissure facilite

le mouvement des dislocations et les mécanismes de déformation plastique conduisant à la rupture

du matériau. Cette observation est à la base du mécanisme nommé Hydrogen Enhanced Localized

Plasticity (HELP). L’augmentation de la mobilité des dislocations serait liée à la réduction des

interactions entre dislocations mais aussi entre les dislocations et les autres obstacles (atomes de

carbone, joints de grains) en présence d’hydrogène. Les dislocations pourraient ainsi produire des

empilements plus denses et plus compact en présence d’hydrogène. Il en résulterait une

distribution de zones microscopiques présentant de très grande déformation entourées de zones

moins ductiles du fait de l’empilement des dislocations. Lorsque l’application d’une contrainte

conduit au dépassement de la limite de contrainte à la rupture dans ces zones, il y a rupture de

l’éprouvette. La rupture serait alors ductile d'un point de vue microscopique et fragile d'un point

de vue macroscopique [EAS 81].

Le modèle proposé par Lynch [LYN 88] repose sur l’affaiblissement des liaisons

interatomiques en pointe de fissure. L’accommodation de la plasticité conduirait à la formation de

microcavités en avant de la fissure et leur coalescence serait à l’origine de l’avancement de cette

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

dernière. Dans ce modèle, l'adsorption en surface de l'hydrogène pourrait conduire à une

diminution des contraintes nécessaires pour créer des dislocations. En conséquence, une

localisation de la déformation plastique se produirait.

Toutefois ces explications sont contredites par l’orientation à 90° de l’amorce de fissure

SSC en surface telle qu’expliquée dans [CRO 04a].

En remplacement Crolet [CRO 04a] propose en effet un mécanisme de rupture différée sous

contrainte où l'insertion en force de protons dans le réseau cristallin dilate celui-ci. Ceci

impliquerait donc localement des contraintes tri-axiales mais uniquement dans les toutes

premières mailles cristallines. Le chargement en hydrogène par transfert protonique direct se

traduirait donc par une tension de surface croissante à laquelle s’ajoutent les contraintes de

service, le tout pouvant conduire à l’amorçage de fissures et donc à la rupture à terme.

2.4 Paramètres influant sur la FPH Les phénomènes de FPH en milieu H2S décrits dans les paragraphes précédents sont le

résultat de l'interaction entre un matériau (volume et surface) et un milieu d'exposition. Les

conditions de dégradation mais aussi son amplitude sont donc dépendantes à la fois des

paramètres liés au matériau mais aussi de ceux liés au milieu d'exposition. Ces différents

paramètres sont recensés et explicités dans les paragraphes suivants.

2.4.1 Paramètres liés au milieu

La composition du milieu peut accélérer ou inhiber la FPH. L'absorption d'hydrogène dans

le matériau est ainsi liée à un certain nombre de paramètres environnementaux dont les plus

importants sont le pH, la pression partielle d'H2S et la température [EFC 02]. Ces paramètres

peuvent jouer un rôle couplé, en particulier le pH et la pression partielle d'H2S, ce que nous

proposons de détailler dans les paragraphes suivants, en insistant sur les conséquences sur les

deux grands modes de fissuration en milieu H2S, à savoir le SSC et le HIC.

a) Rôle de la température

L'effet de la température du milieu sur les deux types de fissurations, HIC et SSC, a été

étudié. Il a été montré que la sensibilité à la fissuration SSC était maximale autour de la

température ambiante (25°C) (figure I.10) [TOW 72]. Le domaine de température de sévérité

maximale pour la fissuration de type HIC s'étend entre 15 et 35°C (figure I.11) [BIE 82].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figurefiss

Tem

ps à

rupt

ure

(h)

CLR

(%)

A b

diffusion d

la FPH. A

seraient pl

La fragilis

à partir de

supérieure

résistance

norme NA

d'utilisatio

b) I

La F

une place

sensibilité

quantité d

quantité d

Température (°C)

I.10 Effet de la température sur la uration de type SSC [TOW 72].

Figurefis

asse température, une vitesse de corrosion plus f

e l'hydrogène au sein du matériau peuvent expliq

température élevée, le phénomène d'absorptio

us importants. Ainsi, la possibilité de sortie de l'hy

ation disparaît au-delà de 100°C et selon les grade

65°C. Les aciers destinés à des équipements expo

s à cette dernière température, ne sont donc p

à la FPH que les aciers pour équipements opérant

CE MR0175/ISO 15156 [NACE 03a] définit préc

n des classes d'acier.

nfluence conjointe du pH et de la PH2S

PH en milieu H2S dépend à la fois du pH et de l

importante dans les phénomènes de FPH. Une

du métal à la fragilisation dans le milieu hydro

isponible d’ions H+ en solution augmente, ce q

’hydrogène absorbé par le métal (figure I.12).

27

Température (°C)

I.11 Effet de la température sur la suration de type HIC [BIE 82].

aible ainsi qu'un ralentissement de la

uer la baisse de sensibilité d'un acier à

n mais aussi celui de rétrodiffusion

drogène serait plus grande [GOL 78].

s d’aciers, elle commence à s’atténuer

sés en permanence à des températures

as soumis aux mêmes exigences de

à température ambiante [EFC 02]. La

isément les conditions de température

a pression partielle d'H2S. Le pH tient

acidification du milieu augmente la

génant. En effet, si le pH diminue la

ui conduit à une augmentation de la

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figure I.12 Courant de perméation en couche mince, en fonction de la concentration en hydrogène sur acier ARMCO en solution NACl 50g/L et CH3COOH 5 g/L avec différents ajouts de soude, saturée

sous différentes pressions d’H2S [DUV 04].

D’après la figure I.12, pour un pH donné, la quantité d’hydrogène absorbé augmente

également avec la pression partielle d’H2S. Nous avons déjà vu que l’H2S est considéré comme un

promoteur d’entrée d’hydrogène, même si les mécanismes d’action associés restent discutés

(paragraphe I.2.1.3). Dans tous les mécanismes proposés, la pression partielle d’H2S conditionne

la quantité d’hydrogène absorbée dans l’acier. Crolet a montré l’importance de l’activité de

l’hydrogène dans la solution solide qui est en équilibre avec l’hydrogène dissous en solution, c’est

à dire le pH, pour les phénomènes de fissuration interne (HIC, SWC). Pour les phénomènes de

fissuration externe (HSC/SSC), la sévérité du milieu est liée au flux d’hydrogène de chargement

de l’acier [CRO 04a]. Ces résultats de la littérature seront détaillés et mis en parallèle avec nos

propres résultats au chapitre IV.

Dans la pratique, un diagramme représentant le pH en fonction de la pression partielle d'H2S

est utilisé pour évaluer la nocivité d'un milieu ; ce diagramme est appelé diagramme de sévérité.

Les modes de fissuration SSC et HIC étant différents, il ne peut cependant être établi un

diagramme de sévérité universel pour tous les types de FPH.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

• Sévérité des milieux vis à vis de la fissuration SSC

La norme ISO 15156 [NACE 03a] définit la sévérité des milieux H2S vis à vis de la

fissuration de type SSC pour les aciers au carbone et aciers faiblement alliés à partir de la figure

I.13. Ce diagramme a été tracé sur la base de nombreux travaux expérimentaux, mais aussi par

retours d'expériences sur champs pétroliers.

)(

2mbarP SH )(

2mbarP SH

Figure I.13 Sévérité des milieux H2S vis à vis de la fissuration de type SSC selon la norme ISO 15156 [NACE 03a].

Les régions 0 et 1 du diagramme définissent des milieux peu sévères, la région 2 correspond

aux milieux de sévérité intermédiaire et la région 3 comprend les milieux considérés comme

sévères. La région 1 est également appelée région "non sour service" ou "sweet service" et la

région 3 "sour service". La norme ISO 15156 [NACE 03a] définit également différentes classes

d'aciers selon leur sensibilité à la fissuration de type SSC. Elle préconise l'utilisation d'une ou

plusieurs de ces classes pour chacune des régions de la figure I.13.

Il est important de souligner que ce classement des milieux n'a été établi que pour la

fissuration de type SSC. Les mécanismes régissant les phénomènes de fissuration SSC et HIC

n'étant pas les mêmes, il n'est pas possible de transposer directement ce diagramme pour la

sévérité des milieux vis à vis de la fissuration de type HIC. A noter que la première édition de la

figure I. 13 fut publiée dans [BON 87].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

• Sévérité des milieux vis à vis de la fissuration HIC

La sensibilité à la fissuration HIC des aciers est fortement dépendante de la microstructure

du matériau, et de son procédé d'élaboration, nous le verrons au paragraphe suivant 2.4.2.

Néanmoins, les facteurs environnementaux et notamment le pH et la pression partielle d'H2S

conditionnent l'amorçage et la propagation de la fissuration HIC. En ce sens, une étude récente

[KIT 08] a été conduite sur différents aciers destinés à la fabrication de conduites (pipeline)

sensibles à la fissuration HIC, afin de mieux comprendre le rôle de ces deux paramètres sur la

fissuration de type HIC. Un diagramme de sévérité préliminaire des milieux pour la fissuration

HIC a été proposé (figure I.14).

)(

2mbarP SH

Figure I.14 Sévérité des milieux H2S vis à vis de la fissuration de type HIC [KIT 08].

Comme pour le diagramme de sévérité des milieux vis-à-vis de la fissuration SSC (figure

I.13), les auteurs ont défini, pour la fissuration HIC, différentes sévérités des milieux, en fonction

du pH et de la pression partielle d’H2S, classées de 0 à 3. La région 0, dont la pression partielle

d’H2S limite doit encore être définie entre 1 et 10 mbar d’H2S, correspond à un milieu non sour

service, c'est-à-dire très peu sévère. La région 1 est associée à un milieu peu sévère, néanmoins

des essais de plus d’un mois doivent être réalisés afin de démontrer la possibilité d’utilisation

d’aciers de classe sweet service dans des milieux de cette zone de pH et pression partielle d’H2S.

Cette recommandation s’applique également pour la région 2 considéré comme une région de

transition. La région 3 comprend les milieux balayés les plus sévères où l’utilisation d’acier de

classe sour service est fortement recommandée.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

L'utilisation de ces diagrammes permet donc la qualification d'aciers en fonction de la

sévérité du milieu. Cependant, les paramètres microstructuraux et les caractéristiques mécaniques

des aciers sont également des paramètres influant sur leur sensibilité à la FPH, qu'il convient de

prendre en compte.

2.4.2 Paramètres liés au matériau

L’endommagement par FPH dans un acier va dépendre, nous l’avons vu, d’un certain

nombre de paramètres liés au milieu mais également de paramètres intrinsèques liés au matériau.

La résistance d'un acier à la FPH est en outre à la fois dépendante de conditions de surface et de

conditions de volume. L'état de surface peut jouer un rôle dans l'adsorption puis l'absorption de

l'hydrogène au sein du matériau, alors que les paramètres métallurgiques vont intervenir dans les

phénomènes de piégeage de l'hydrogène et de propagation des fissures.

a) Conditions de surface

La sensibilité à la FPH d'un acier est liée à la quantité d'hydrogène absorbée dans la matrice

métallique. Cette quantité dépend d'une part de la quantité d'hydrogène disponible dans le milieu,

nous l'avons vu, ainsi que des éléments chimiques composant l'acier. Le rôle bénéfique du cuivre

a été démontré en milieu H2S, si sa teneur est supérieure à 0,20% [INA 78]. Le précipité de

sulfure de cuivre amorce la précipitation de sulfure de fer qui lui est protecteur. La couche de FeS

qui se forme à la surface de l'acier est fine et adhérente. Ce film est dissous si le pH du milieu est

inférieur à 4,0 ce qui signifie, que dans ce cas, l'effet favorable de la teneur élevée en cuivre ne se

manifeste pas [CRA 84]. Cet effet bénéfique du cuivre n'a été prouvé que pour la fissuration de

type HIC.

L’état de surface initial des éprouvettes joue un rôle également important notamment dans

le cas de la fissuration SSC. Nous verrons dans ce sens, dans la suite de ce chapitre, que la

rugosité des éprouvettes normalisées de traction est contrôlée. Perrolet et al. [PER 82] et Cernoky

et al [CER 06] ont montré l’importance de l’état de surface lors d’essais de résistance à la

fissuration SSC. Dans cette étude, les fissures SSC s’amorcent préférentiellement dans les défauts

de surface (écrouissage ou défauts d'entaille) créés par l’usinage. Cette étude sera détaillée et

comparée avec nos résultats au cours du chapitre IV.

Certains auteurs ont également montré que des fissures SSC se développaient à partir de

défauts en surface (des criques dans ce cas) de l’éprouvette associé à de la corrosion localisée

[ASA 94].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

b) Effet des éléments d'alliage

Comme nous l'avons vu dans les paragraphes précédents, l'hydrogène diffuse dans la maille

cristalline. La résistance à la FPH de l'acier est étroitement liée à l'interaction entre l'hydrogène et

les discontinuités de cette maille. Ces discontinuités peuvent être de natures différentes : joints de

grains, inclusions non-métalliques, précipités... Il convient donc de discuter leur rôle respectif.

La résistance à la FPH de type HIC des aciers diminue significativement si les joints de

grains sont affaiblis par la ségrégation de certains éléments tels que le phosphore et le soufre mais

aussi l’étain, l’arsenic, l’antimoine…[COU 92] Pour éviter ce phénomène, leurs teneurs doivent

être limitées : en présence d’un milieu contenant de l’hydrogène sulfuré (H2S) par exemple, les

teneurs maximales admises en S et P des aciers sont respectivement de 0,001% et de 0,01% [GAL

04]. La littérature n’évoque pas de teneur limite pour les autres éléments. La microségrégation du

phosphore aux joints de grains a été identifiée comme favorisant la décohésion des joints de

grains [CRA 82], augmentant la sensibilité à des aciers à la fissuration intergranulaire [CRA 82],

et de manière plus générale à la FPH [BLO 94].

Les inclusions non-métalliques sont des lieux privilégiés de nucléation des fissures du fait

de leur aptitude à piéger l'hydrogène, mais aussi du fait de la déformation locale de la maille

qu'elles induisent [PRE 82]. Ainsi, les inclusions de forme allongée et aigue, par opposition aux

inclusions de forme sphérique, sont les plus dangereuses car elles sont à l’origine de concentration

de contraintes importantes. Les inclusions de grande taille sont, par ailleurs, plus néfastes que les

petites car elles ont la faculté de piéger plus d’hydrogène. La présence d’inclusions non-

métalliques sous forme d’amas accentue en outre la sensibilité à la FPH de type HIC. Les sulfures

de manganèse (MnS) sont considérés comme les inclusions les plus dangereuses vis à vis de la

FPH de type HIC. En effet, elles ont tendance à former des amas locaux, mais sont aussi la plupart

du temps de forme allongée. Enfin, elles sont généralement localisées dans les zones de

ségrégation qui représentent déjà un point faible de la microstructure. Pour éviter la formation de

ces inclusions, les teneurs en soufre et manganèse doivent être limitées. De plus, lors de la

fabrication, des traitements tels que l'injection de calcium ou calcium/silicium peuvent être

réalisés pour réduire la teneur en soufre mais aussi modifier le type et la forme des inclusions

[GAL 04].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

c) Rôle de la microstructure

D'un point de vue microstructural, un classement selon un ordre croissant de résistance à la

FPH a été établi en fonction de la microstructure des aciers [COU 92] :

Martensite brute→Bainite brute→Ferrite/Perlite→Bainite revenue→Martensite revenue

Notons que, pour ce classement, l'auteur considère la FPH de manière générale et ne

différencie pas les divers modes de FPH.

Dans les matériaux ferrito-perlitique, la plus faible résistance à la FPH s'explique par la

présence de structure en bandes. Les bandes de perlite sont des sites privilégiés le long desquels se

propagent les fissures en présence d’hydrogène [SOJ 97] [BLO 94]. En effet, ces zones sont d'une

part des zones de ségrégation privilégiées d'éléments nocifs tels que le phosphore, le soufre, le

carbone, le manganèse et le nickel dont l'importance dans la sensibilité de l'acier à la fissuration

de type HIC a été soulignée au paragraphe précédent. D'autre part, elles présentent une résistance

mécanique plus élevée qui favorise la propagation de fissure.

Pour les structures non revenues (bainite et martensite), la présence de contraintes

résiduelles mais aussi les duretés élevées qu'elles impliquent peuvent expliquer leur mauvaise

résistance à la FPH de type SSC.

A l'inverse, la relaxation des contraintes résiduelles et l'homogénéisation de la

microstructure suite au traitement de revenu permettent d'expliquer la bonne résistance à la FPH

des structures revenues.

Notons également que plus la résistance mécanique des aciers est élevée, plus ils ont

sensibles à la FPH de type SSC.

En conclusion, la résistance des aciers à la FPH peut être ajustée en fonction de leurs

compositions chimiques, et de leurs modes d'élaboration. De manière générale, la teneur en

éléments ayant une forte tendance à la ségrégation (C, P, Mn, Ni), ou formant des inclusions (Mn,

S) ou des oxydes (O, Al) doit être limitée pour augmenter principalement la résistance à la

fissuration HIC. Le mode d'élaboration doit être choisi de manière à éviter la formation de zones

de ségrégation. Enfin, la mise en forme et le traitement thermique doivent être réalisés de manière

à obtenir une microstructure fine, homogène et sans zone de ségrégation c'est-à-dire de préférence

une microstructure trempée et revenue.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Plusieurs essais normalisés ont été définis afin d’évaluer la résistance des aciers aux

fissurations de type HIC et SSC. Les principaux essais utilisés dans l’industrie pétrolière, et sur

lesquels nous avons basés nos essais, sont présentés ci-après.

2.5 Les principaux essais normalisés dédiés à l’évaluation de la sensibilité des aciers à la FPH Le but premier des essais normalisés, comme les essais SSC NACE TM0177 méthode A

[NACE 05] et HIC NACE TM0284 [NACE 03b] décrits ci-après, est d’assurer des conditions

d’essai précises et reproductibles afin de caractériser un acier en vue de son application en milieu

aqueux hydrogénant contenant de l'H2S. Ils permettent aussi la comparaison entre données

provenant de divers laboratoires. Par conséquent, ces essais normalisés servent à l’évaluation et à

la sélection d’aciers au carbone ou faiblement alliés destinés à être utilisés en milieu H2S, et ce,

indépendamment de leurs formes ou applications finales. Ils ont été établis par la NACE

International et ils ont été complétés par la Fédération Européenne de Corrosion (European

Federation of Corrosion, EFC), dans le cadre de la publication d’un guide [EFC 02]. Ils sont

destinés avant tout aux utilisateurs de matériaux en milieu H2S, ainsi qu’à leurs fournisseurs. Les

essais normalisés de résistance à la fissuration SSC NACE TM0177 méthode A [NACE 05] et

HIC NACE TM0284 [NACE 03b], décrits ci-après, sont les essais généralement utilisés pour la

caractérisation des aciers en milieux de production pétrolière et gazière, ils ont donc servi de

référence pour les essais réalisés au cours de ce travail.

2.5.1 Essai normalisé SSC NACE TM0177 méthode A

Plusieurs méthodes prenant en compte différents modes de sollicitations mécaniques et

différents milieux hydrogénants contenant de l'H2S sont proposées dans le document NACE

TM0177 [NACE 05], afin d’évaluer la résistance d'un acier à la fissuration de type SSC. Seule la

méthode A est présentée ici. C’est un essai de traction sous charge constante uniaxiale où

l’éprouvette est immergée dans une solution contenant de l’H2S. Un exemple de montage

expérimental de l’essai standard est représenté sur les figures I.15 et I.16. L’échantillon est

maintenu dans un anneau dynamométrique, et c’est à partir de la déformation de cet anneau que la

contrainte appliquée à l’éprouvette est pilotée. Autour de l'éprouvette est installée une cellule

hermétiquement close dans laquelle se trouve la solution aqueuse contenant de l’H2S dissous. La

composition de la solution d’essai préconisée est la suivante : 5% en masse de NaCl, 0,5% d’acide

acétique (CH3COOH), dans de l’eau distillée ou déionisée. La solution doit être désaérée, avant

d’introduire l’H2S, au moins pendant 1 heure par litre de solution, à un taux de gaz inerte de

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

100mL/min. Elle est ensuite saturée en H2S pur introduit par barbotage. Le pH doit être compris,

après saturation en H2S, entre 2,6 et 2,8. Pendant le test, le pH n’est pas régulé mais augmente et

ne doit pas dépasser 4. Le respect de ces conditions permet une reproductibilité des essais.

Figure I.15. Éprouvette de traction dans la cellule d’essai NACE TM0177 méthode A [NACE 05].

Figure I.16. Montage de la cellule dans l'anneau de contrainte [AMA 03].

Les dimensions de la partie utile des éprouvettes sont données sur la figure I.17. Cette

dernière doit présenter une rugosité inférieure à 0,8 µm.

Dimension Éprouvette normalisée

D 6,35 ±0,13 mm

G 25,4 mm

R(min) 15 mm

Figure I.17. Dimensions de la partie utile des éprouvettes de traction de l’essai normalisé NACE TM0177 méthode A [NACE 05].

Le critère de validation de cet essai est la non-rupture de l’éprouvette sous la contrainte

appliquée (% Re) pendant 720 heures (30 jours), à température ambiante et pression

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

atmosphérique. Le document Guidelines on materials requirements for carbon and low alloy

steels for H2S-containing environments in oil and gas production publié par la Fédération

Européenne de Corrosion (EFC 16) [EFC 02] recommande l’application d’une charge égale à

90% de la limite d’élasticité du matériau étudié. Cette charge est la plus sévère observée que l’on

puisse reproduire en laboratoire en étant sûr de rester dans le domaine d’élasticité. Après

exposition, en cas de non rupture de l'éprouvette, la surface de la partie utile est nettoyée puis

inspectée pour chercher d’éventuelles fissures. L’acier est considéré sensible à la fissuration de

type SSC s'il y a rupture de l'éprouvette ou si des fissures sont observées sur la partie utile sous un

grossissement X10. Nous avons vu que la température la plus défavorable est de l’ordre de 25°C

(cf paragraphe I.2.4.1.a). L’essai normalisé SSC NACE TM0177 méthode A [NACE 05] tient

compte de ce phénomène puisqu'il doit être réalisé à 24°C C3°± .

Cet essai, préconisé par certains utilisateurs, présente une distribution homogène de la

contrainte et de l'hydrogène dans les échantillons. Cet état de sollicitation est considéré comme le

plus représentatif des conditions de service [CRO 94]. Cette méthode constitue un bon essai de

caractérisation des aciers pour application en milieu pétrolier sévère, c'est-à-dire principalement

pour les tubes verticaux de puits ou les tubes horizontaux des lignes de surface.

2.5.2 Essai normalisé HIC NACE TM0284

L’essai standard NACE TM0284 [NACE 03a] propose une méthode d’évaluation de

résistance à la décohésion interne ou HIC. Il s'agit d'un essai d'immersion en milieu contenant de

l'H2S.

Pour chaque essai, 3 échantillons sont découpés dans chaque tube ou tôle testé ; ces

éprouvettes sont prélevées à des endroits spécifiques selon l’utilisation finale du matériau (tubes

pour conduites ou appareils sous pression). La localisation et l’orientation des découpes sont

précisées dans le document NACE TM0284 [NACE 03b]. Les éprouvettes sont de forme

parallélépipédique et leurs dimensions sont : 100 mm x 20 mm et de l’épaisseur du produit si

celle-ci est inférieure à 30 mm. Pour une épaisseur supérieure à 30 mm des prélèvements dans

l’épaisseur seront nécessaires. La composition de la solution d’essai préconisée est la même que

pour l’essai normalisé SSC [NACE 05], à savoir : 5% en masse de NaCl, 0,5% d’acide acétique

(CH3COOH) mélangé à de l’eau distillée ou déionisée. Avant d’introduire l’H2S, la solution doit

être désaérée au moins pendant 1 heure par litre de solution. Le débit de gaz inerte doit être au

minimum de 100mL/min. La solution est ensuite saturée en H2S pur introduit par barbotage. Le

pH après saturation en H2S doit être compris entre 2,6 et 2,8 (avant le contact avec l’échantillon).

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Pendant le test, le pH n’est pas régulé et augmente, mais ne doit pas dépasser 4. L’essai doit être

réalisé à 25°C . Les conditions de température permettent alors d’atteindre un taux de

sévérité maximale (cf paragraphe I.2.4.1.a).

C3°±

Le montage expérimental de l’essai standard HIC est représenté sur la figure I.18.

Figure I.18. Un exemple de dispositif expérimental de l'essai HIC normalisé NACE TM0284 [NACE 03b].

La durée d’immersion des éprouvettes est de 96 heures. Après l’essai, les éprouvettes

doivent être nettoyées avec un détergent et une brosse métallique ou bien légèrement décapées par

jet de sable. Les échantillons ne doivent pas être nettoyés à l’acide pour éviter toute absorption

d’hydrogène postérieure au test. Les éprouvettes sont découpées en 4 parties égales et les 3

surfaces à inspecter sont repérées.

Après un polissage mécanique et une légère attaque métallographique si nécessaire, les

différentes coupes sont observées en microscopie optique. Les fissures doivent être mesurées dans

chaque section, afin de déterminer différents critères d’endommagement (CSR, CTR, et CLR) :

Crack Surface Ratio, CSR=( )

%100***TW

ba∑

Crack Length Ratio, CLR= %100*W

a∑

Crack Thickness Ratio, CTR= %100*T

b∑

a, b, W et T sont définis dans la figure I.19.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figure I.19. Schéma d'un échantillon observé après un essai HIC : calcul des ratios CSR, CLR, et CTR.

La norme NACE TM0284 [NACE 03b] ne donne pas de critères de qualification, elle

préconise simplement le report des données (CSR, CLR, CTR) dans une fiche dédiée à chaque

matériau. Un certain nombre de critères d’acceptation, en deçà desquels le matériau est considéré

comme suffisamment peu sensible HIC ont été proposées par les documents EFC 16 et NACE

MR0175/ISO15156. Les valeurs de ces critères d’acceptation sont consignées dans le tableau I.3.

Tableau I.2 Critères d’acceptation pour l’essai HIC.

Critères d’acceptations EFC 16 [EFC 02] NACE MR0175/ISO15156

[NACE 03a]

CLR ≤ 15% ≤ 15%

CTR ≤ 3% ≤ 5%

CSR ≤ 1,5% a ≤ 2% a5% si toutes les fissures sont au centre de la zone de ségrégation et si l’ouverture de la

fissure est supérieure à >0,1 mm).

Comme mentionné précédemment, les essais normalisés [NACE 03b] déterminent la

résistance des aciers à la fissuration de type HIC dans des conditions de milieu sévères (pH

faibles, pH2S élevées) qui ne sont pas toujours représentatives des conditions réelles de service.

Aujourd’hui, des études sont menées afin de définir des conditions d’essais plus

représentatives des conditions d’exploitation [BOS 06]. Ces essais sont réalisés dans des

conditions moins sévères d’où l’importance de mieux connaître les effets du pH et de la pression

partielle d’H2S sur la fissuration HIC mais aussi sur la cinétique de fissuration. Même si certains

auteurs ont intégré le temps d’exposition comme variable d’essai [KITT 08], à ce jour, il n’y a pas

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

eu d’étude avec un suivi cinétique en temps réel de la fissuration HIC. Ce manque justifie l’objet

de cette thèse.

2.6 Synthèse La mise en service d'un acier en milieu aqueux contenant de l'H2S peut conduire au

chargement en hydrogène et éventuellement à la fissuration de cet acier. L'H2S est reconnu

comme étant un promoteur d'entrée d'hydrogène au sein du matériau même si les mécanismes

d'actions qui lui sont associés sont encore discutés.

La fissuration résultant de l'absorption de l'hydrogène au sein de l'acier est appelée

Fragilisation par l'Hydrogène (FPH) : elle se manifeste sous différentes formes dont les

principales en milieu H2S sont la décohésion interne (HIC), la décohésion interne sous contrainte

(SOHIC) et la rupture différée par H2S (SSC). Il est important de noter que, dans la littérature, les

modes de fissuration SSC et SOHIC sont encore souvent confondus. Par conséquent un soin

particulier sera apporté à l'identification des modes de rupture dans la suite de ce travail. Retenons

également que les mécanismes de fissuration liés à la fissuration SSC, bien que largement étudiés,

restent mal compris.

Différents paramètres, intrinsèques ou extrinsèques, peuvent influencer la FPH. La

résistance des aciers à la FPH dépend surtout de leur composition chimique, résistance mécanique

et microstructure, ce dernier terme intégrant la présence de zones de ségrégation et d'inclusions

non métalliques. Ces différents paramètres intrinsèques au métal sont bien sûr étroitement liés.

Pour les paramètres extrinsèques, la composition du milieu, la pression partielle d'H2S, le pH, la

température peuvent également favoriser ou non la FPH.

La norme ISO 15156 [NACE 03a] exprime la sévérité des milieux vis-à-vis de la fissuration

de type SSC en fonction de la pression partielle d'H2S et du pH du milieu. Les essais normalisés

NACE TM0284 [NACE 03b] et NACE TM0177 [NACE 05] évaluent la sensibilité des aciers à la

fissuration de type HIC et SSC respectivement mais dans des conditions sévères de milieu. Ces

tests donnent une réponse rapide sur la compatibilité de la nuance avec l'emploi en milieu sour

service. Actuellement, l'influence des paramètres du milieu sur les différents types de fissuration

prend de l'importance suite aux besoins industriels d'une sélection de matériaux adaptés aux

conditions réelles des champs pétroliers. Les essais normalisés ne permettent enfin pas d'obtenir

des informations sur les mécanismes à l'origine des fissurations HIC et SSC, ainsi que sur leurs

cinétiques.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Améliorer la compréhension des phénomènes d'endommagement en milieu H2S constitue

l'objectif principal du travail de thèse. Pour cela nous proposons de mettre au point une méthode

de suivi en temps réel de la fissuration d'un acier exposé à un milieu H2S.

La technique d'émission acoustique (EA) permet un suivi non destructif des défauts

évolutifs au sein d'un matériau. Elle est par ailleurs appliquée avec succès au suivi de différents

types de corrosion (uniforme, localisée, sous contrainte). Cette technique est donc potentiellement

intéressante pour l'étude et le suivi des phénomènes d'endommagement liés à la FPH.

3 Présentation et mise en œuvre de la technique d’émission acoustique

En premier lieu, les généralités concernant la technique d'EA sont présentées. L'accent est

mis sur les différentes sources d'EA susceptibles d’être émissives dans les essais de résistance à la

fissuration en milieu H2S. Ensuite, une synthèse des travaux ayant utilisé l'EA pour l'étude de la

fissuration en milieu H2S est proposée. Une attention particulière est apportée à l'identification des

sources d'EA actives au cours des essais réalisés et, dans la mesure du possible, à la

caractérisation de l'EA qui leur est associée.

3.1 Définition de l’émission acoustique L’AFNOR [ROG 88] définit l’Émission Acoustique comme un « phénomène de libération

d’énergie élastique sous forme d’ondes élastiques transitoires au sein du matériau durant des

processus dynamiques de déformation ». Par extension, le terme émission acoustique désigne

également la discipline scientifique et la technique de mesure du phénomène. L’AFNOR en

précise alors le principe de la façon suivante : « L’EA détecte principalement les modifications

internes évolutives sous l’effet de l’application d’une sollicitation. Ces phénomènes résultant

souvent de mécanismes irréversibles, un examen significatif devra dans la plupart des cas tenir

compte de l’histoire de la structure. Enfin, cet examen ne vise en aucun cas à donner une image

d’un défaut mais à graduer l’importance de son évolution et dans certains cas à évaluer la nocivité

de l’endommagement. L’examen peut en revanche fournir une localisation de la source d’EA. La

technique est essentiellement comparative. »

Le matériau génère lui-même le signal à analyser, il est donc essentiel de prendre en compte

les caractéristiques du matériau avant d’envisager l’utilisation de l'EA. D’autre part, un signal

d’EA ne peut être obtenu que si la structure est sollicitée ou active. Dans ces conditions, seuls les

défauts actifs ou évolutifs peuvent être détectés.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Cette technique est utilisée notamment pour l’étude des mécanismes d’endommagement des

matériaux. Il s'agit d'une méthode de contrôle non destructif (CND), non intrusive. En général, la

technique d’EA ne fournit donc pas d’information sur la taille du défaut se propageant, mais

renseigne sur l’évolution de ce défaut et sur sa localisation au sein de la structure. Cette méthode

volumique apporte ainsi une information locale à partir d’une analyse globale de la pièce

sollicitée. Notons en outre que l’EA n’est pas une technique de CND utilisée pour des analyses

post-mortem. Elle est aussi utilisée sur site comme une technique de surveillance des installations

en service, puisque l’émission d’ondes est étroitement associée aux mécanismes physiques qui

accompagnent l’amorçage et la propagation des défauts. Les ondes issues de la source d’EA sont

de différentes nature (volumiques, surfaciques, de Lamb…) et de fréquences diverses (50 Hz- 1,5

MHz). Elles subissent de nombreuses modifications (réflexions notamment) au cours de leur

propagation avant d’être détectées en surface du matériau. Cette détection passe en général par

l’utilisation d’un capteur piézoélectrique, résonant ou large bande, qui permet de transformer

l'onde élastique en un signal électrique, dont les caractéristiques sont à liées à celles de la source.

3.1.1 Le signal d’EA

a) Définitions associés au signal d’EA

Un événement correspond à un microdéplacement à l’origine de l’émission d’ondes

élastiques transitoires au sein d’un matériau. Selon la fréquence d’apparition de ces événements,

on distingue :

l’émission acoustique par salves (appelée aussi discontinue), qui constitue une succession

d’ondes oscillatoires amorties séparées les unes des autres dans le temps, et qui est liée à des

événements énergétiques et localisés,

de l’émission continue, qui se manifeste par un signal stationnaire. Ce dernier type d’EA

contribue à l’augmentation de bruit de fond d’une amplitude moyenne ou peu élevée. Il est associé

à des événements microscopiques peu énergétiques mais très fréquents dans le temps.

Dans les deux cas, le terme de signature acoustique regroupe l’ensemble des

caractéristiques des signaux d’EA permettant d’identifier un type de source d’EA ou plus

généralement un endommagement dans un matériau donné. Cette signature est fonction de la

source, du matériau mais également de la chaîne d'acquisition d'EA.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

3.1.2 Chaîne d’acquisition de l’émission acoustique

Un schéma de principe d’une chaîne d’acquisition des signaux d’EA est représenté sur la

figure I.20.

Échantillon Acquisition et traitement Câble (pouvant

atteindre plusieurs mètres)

Figure I.20. Schéma d'une chaîne d'acquisition de signaux d'émission acoustique.

Avant d’être enregistrés à la surface de l’échantillon, les signaux d’émission acoustique

subissent de multiples altérations durant leur propagation au sein de la structure (réflexion,

réfraction, absorption, atténuation…).

La transformation des ondes élastiques arrivant en surface d’un matériau en signaux

d’émission acoustique est réalisée par l’utilisation de capteurs piézoélectriques. Ceux-ci sont

placés sur la surface du matériau, le couplage avec celui-ci étant assuré le plus souvent par

l’utilisation d’un gel silicone. Le rôle du couplant est d’améliorer la transmission des ondes entre

la surface de l’échantillon et le capteur.

A la sortie du capteur, le signal ne présente pas les qualités nécessaires à son transport

jusqu’à la chaîne d’analyse. En effet, l’amplitude du signal délivré par un capteur piézoélectrique

est de l’ordre du microvolt, en sortie haute impédance. Il est donc nécessaire de réaliser une

adaptation d’impédance. C’est le rôle du préamplificateur. Il réalise aussi une première

amplification, nécessaire à la conservation des informations contenues dans le signal pendant son

transport. Le gain du préamplificateur varie en général entre 20 dB et 60 dB, une préamplification

de 40 dB étant une valeur courante. Afin d’éliminer une partie des bruits d’origine mécanique,

électrique et électronique, une opération de filtrage est nécessaire avant d’amplifier une deuxième

fois le signal. Le rôle du filtre est d’augmenter le rapport signal sur bruit en limitant la bande

passante. Cette dernière amplification rend le dépouillement du signal plus facile. Le gain

Source

Capteur Filtrage Amplification Traitement Visualisation Enregistrement Pré-amplification

(avant transport)

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

ajustable peut être soit linéaire, soit logarithmique. Un gain de type logarithmique renforce les

signaux de faible amplitude et atténue les signaux de grandes amplitudes.

Le signal détecté peut ensuite être enregistré et traité grâce à un logiciel d'acquisition. Un

certain nombre de paramètres sont ensuite extraits afin de "décrire" les signaux.

3.1.3 Caractéristiques du signal

Les informations contenues dans les signaux de l’EA sont extraites à partir de traitements

spécifiques. Dans le cas d’une émission par salves, la démarche généralement mise en oeuvre

consiste à mesurer et extraire plusieurs grandeurs du signal. Il s'agit d'établir une corrélation entre

les mécanismes physiques à la source de l’EA et les caractéristiques des signaux obtenus. Les

principaux paramètres exploitables sont représentés sur les figures I.21 et I.22. Ils ne sont définis

qu’à partir d’un seuil d’acquisition fixé correspondant à une tension de référence, en général

supérieure à l’amplitude maximale la plus élevée atteinte par le niveau du bruit de fond.

Temps de montée

Amplitude crête

Nombre de coups

Figure I.21. Principaux paramètres d’une salve d’EA.

Les différents paramètres sont définis comme suit :

l’amplitude crête (V) : elle est déterminée sur une durée bien définie par l’amplitude

maximale atteinte par le signal ;

Amplitude

Temps

Seuil de détection

Durée

Nombre de coups au pic

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

l’ASL (V) : c’est la valeur efficace de l’amplitude du signal électrique issu du capteur ;

la durée (µs) : elle correspond au temps qui sépare le premier et le dernier dépassement de

seuil ;

le nombre de coups ou nombre d’alternances : il correspond au nombre de franchissements

de seuil par le signal sur toute sa durée ;

le nombre de coups au pic : il correspond au nombre de franchissements de seuil par le

signal entre le premier dépassement de seuil et l’amplitude maximale ;

le temps de montée (µs) : il correspond au temps qui sépare le premier dépassement de seuil

et l’amplitude crête du signal ;

la fréquence moyenne (Hz) : elle est obtenue par un traitement direct des données et

correspond au nombre de coups d’une salve divisé par sa durée ;

la fréquence au pic (Hz): c’est la fréquence du signal entre le premier dépassement de seuil

et l’amplitude crête (nombre de coups au pic divisé par le temps de montée) ;

la fréquence à la décroissance (Hz) : c’est la fréquence du signal en phase d’amortissement ;

l’énergie d’une salve (V.s) : elle correspond à l'enveloppe du signal.

l'énergie absolue d'une salve (atto (10-18) Joule) : elle correspond à l'énergie vraie. C'est

l'intégrale du signal au carré sur la durée de la salve.

Il est également possible d’extraire des paramètres fréquentiels à partir de la transformée de

Fourier du signal. En particulier, le barycentre fréquentiel (FCOG) est souvent utilisé ; il

correspond à l’abscisse du centre de gravité de l’aire sous la courbe donnant la densité spectrale

d’amplitude (figure I.22).

Figure I.22 Paramètres fréquentiels d'une salve d'EA [JAU 04].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

3.1.4 Sources d’émission acoustique associés à la corrosion assistée mécaniquement

Tout phénomène entraînant un déplacement interne ou une déformation localisée

irréversible génère des ondes élastiques qui se propagent dans un milieu, ce phénomène constitue

alors ce que l’on appelle une source d’EA. Dans le cas des métaux, les sources d’EA peuvent être

diverses : fissuration, mouvements de dislocations, transformations de phases, corrosion,

dégagement gazeux en surface… [ROG 88]. Dans le cas particulier des matériaux composites, la

rupture des fibres, très émissive, est la principale source d’EA. Les sources d’EA intervenant dans

les phénomènes de FPH des aciers en milieu H2S étudiés ici sont susceptibles à la fois d’être liées

à des processus de corrosion et de fissuration. Nous focaliserons donc l’étude bibliographique des

sources d’EA sur les processus de corrosion assistée mécaniquement.

Yuyama [YUY 86] a recensé les processus constituant des sources d’EA détectables en

corrosion sous contrainte (CSC) (figure I.23).

Figure I.23. Sources possibles d'émission acoustique actives pendant la corrosion sous contrainte. [YUY 86].

Les sources d'EA en CSC regroupent les processus physiques associés à la sollicitation

mécanique du matériau, auxquels s'ajoutent les processus de corrosion : dissolution du métal,

dégagement d'hydrogène résultant de la réduction du proton notamment. A ces dernières s'ajoutent

également les sources liées à la présence d'un film de produits de corrosion (oxydes notamment) :

croissance, rupture, gonflement...

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

De façon plus générale, ces sources liées aux processus (électro)chimiques sont également

actives dans de nombreux autres modes de corrosion : corrosion uniforme [JAU 04], corrosion par

piqûres [FRE 01], caverneuse [KIM 03], feuilletante [BEL 02], sélective [ASS 03], corrosion

abrasion [FER 99]. Dans ces différents cas de corrosion, l'efficacité de la technique d'EA a ainsi

été démontrée pour le contrôle, le suivi, et la localisation de l'endommagement, mais aussi pour

l'étude et la compréhension des mécanismes de corrosion, en particulier à partir de la

caractérisation des sources d'EA actives. Cependant, les sources associées aux phénomènes de

corrosion ne conduisent pas toutes à l’émission d’un signal suffisamment énergétique pour être

détecté par un capteur piézoélectrique placé en surface du matériau. Pour que le signal émis par la

source soit détecté, son amplitude doit dépasser le bruit de fond existant, lié à la nature de la

structure sollicitée et à l’environnement extérieur. C'est ce qui définit l'émissivité de la source.

3.1.5 Émissivité des sources d'EA

Yuyama et al [YUY 83] ont établi un classement des sources émissives possibles en CSC,

selon leurs amplitudes (figure I.24).

Figure I.24 Distribution en amplitude des différentes sources rencontrées en corrosion [YUY 83].

Ce classement indique que les sources dérivant directement des processus électrochimiques

(dissolution, dégagement d'hydrogène) ne sont pas parmi les plus émissives en termes d'amplitude

des signaux recueillis, qui sont en revanche nombreux. Il est ainsi considéré que les phénomènes

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

de dissolution anodique ne conduisent pas à une libération d'énergie élastique suffisante pour être

détectés [YUY 86], du moins avec la sensibilité des systèmes de détection utilisés.

Le dégagement d'hydrogène résultant de la réduction du proton a été quant à lui largement

étudié en tant que source d'EA. Arora [ARO 84] a montré que l'évolution de bulles gazeuses se

caractérise par des temps de montée courts (25-50 µs) et par des fréquences basses (50-150 kHz).

Druchenko et al [DRU 77] ont eux remarqué que la fréquence des signaux associés au

dégagement de bulles visibles ne dépassait pas 50 kHz, mais que des bulles plus fines pouvaient

engendrer des signaux de plus haute fréquence. Derenne [DER 98] a montré que le nombre de

bulles pouvait être relié au taux d'activité acoustique et que la taille des bulles influençait

l'amplitude des signaux générés. Plus précisément, la présence de petites bulles conduit à des

salves d'amplitude plus faible, ainsi qu'une durée et un temps de montée plus long. Arora [ARO

84] a mis en évidence que l'émission acoustique liée au dégagement d'hydrogène était due à des

impacts et des glissements se produisant à la surface du métal plutôt qu'au mouvement vertical des

bulles.

Plus récemment, Jaubert [JAU 04] a caractérisé deux phénomènes émissifs liés à l'évolution

de bulles gazeuses lors d'essais de corrosion en milieu acide sur un acier peu allié : le dégagement

d'hydrogène et le frottement des bulles sur les parois d'un échantillon vertical. Dans cette étude,

les salves caractéristiques du dégagement d'hydrogène présentent un barycentre fréquentiel centré

sur 150 kHz et celles liées au frottement des bulles sur la paroi un barycentre fréquentiel centré

sur 200-220 kHz. Jaubert a également montré que le dégagement de bulles d'hydrogène est plus

émissif à travers une couche d'oxyde/hydroxyde que sur une surface décapée. Les grandeurs

mesurées en EA sont également modifiées par la présence de cet oxyde en surface.

Les processus liés à la présence d'un dépôt à la surface du métal se corrodant occupent une

place à part, et leur émissivité est controversée. Si les travaux de Yuyama [YUY 86] montrent que

cette émissivité est élevée, en termes de nombre de signaux et de leur amplitude, d'autres auteurs

tels que Rawlings [RAW 87] ont montré que la formation et la croissance d'une couche d'oxyde

ne génèrent pas de libérations soudaines d'énergie suffisantes pour produire des ondes élastiques.

En revanche, la fissuration de cette couche peut conduire à une activité acoustique dont

l'amplitude des salves est supérieure à 60 dB. Fenn et Condello [FEN 86] ont observé qu'un dépôt

de produits de corrosion n'émettait des signaux acoustiques significativement différents du bruit

de fond, que lorsque son épaisseur excédait 10 µm.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Les signaux d’EA liés aux phénomènes de fissuration en CSC ont particulièrement été

étudiés. Des essais réalisés sur des aciers dans une solution de NaCl (3%), à différents potentiels

électrochimiques et pour différents niveaux de contraintes imposés, ont montré que l’apparition de

signaux de grande amplitude, localisée sur la zone fissurée, pouvait être reliée au processus de

CSC [YUY 83]. La distribution en amplitude de ces signaux, relatifs à la fissuration, permet de les

différencier des signaux liés aux autres sources et particulièrement de ceux associés dégagement

d’hydrogène [YUY 83]. Plusieurs études par EA réalisées sur les phénomènes de FPH des aciers à

hautes caractéristiques mécaniques [ROT 92] ont également permis d’établir que l’énergie

cumulée des signaux d’EA est proportionnelle à la surface intergranulaire fissurée et que la vitesse

de propagation des fissures de CSC est reliée au taux de comptage d’événements d’EA. Enfin,

d’autres auteurs ont montré que le pas d’avancement de la fissure était proportionnel à l’énergie

acoustique libérée [MAC 78]. De manière générale, les phénomènes de fissuration fragile, qu'ils

interviennent à l'échelle microscopique ou macroscopique, constituent donc des sources très

émissives, en termes non pas de nombre mais d'amplitude des signaux détectés [ROT 92].

Finalement, ces différentes tendances peuvent être résumées de façon qualitative par le

tableau I.4.

Tableau I.3 Détectabilité par EA de différentes sources en corrosion sous contrainte [POL 86].

Source Détectabilité en EA

Courant électrique

Dissolution du métal

Formation d’un film

Rupture de film

Evolution de gaz

Entrée d’hydrogène, Microfissuration

CSC discontinue

Fragilisation par l’hydrogène

Non

Non

Non

Dépendante de l’épaisseur

Oui, faible amplitude

Oui, faible amplitude

Oui, forte amplitude

Oui, forte amplitude

Si la synthèse des travaux de la littérature permet d'évaluer certaines caractéristiques de

signaux liés aux sources, il faut néanmoins garder en mémoire que les caractéristiques du signal

enregistré sont liées aux mécanismes sources, mais également aux modes de propagation des

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

ondes au sein du matériau et donc aux caractéristiques de ce dernier (problèmes d’atténuation,

échos…), et aussi à la détection (capteur résonant, large bande…) et à la chaîne d’acquisition

(amplification, filtrage).

Les potentialités de l'émission acoustique comme méthode de suivi et de contrôle de

l'endommagement ont donc été démontrées pour les phénomènes de corrosion assistée

mécaniquement. Les différents phénomènes physiques intervenant lors de ce mode

d'endommagement des matériaux conduisent en effet à l'émission d'ondes élastiques. Parmi les

différents phénomènes de fissuration assistée par l'environnement, la FPH des aciers en milieu

H2S occupe une place particulière. Nous nous proposons de détailler dans le paragraphe suivant

les études de ce mode d'endommagement réalisées par EA.

3.2 Application de l'EA au cas de la FPH des aciers en milieu H2S Dans un premier temps, il convient d'identifier les différents processus physico-chimiques

pouvant conduire à de l'EA détectable dans des conditions de FPH en milieu H2S. En ce sens, la

revue bibliographique faite sur les sources actives en CSC doit nous aider. A la suite de cette

identification, les principaux résultats extraits des différentes publications concernant la FPH en

milieu H2S suivis par EA seront présentés en examinant chaque source d'EA présente dans ce cas

de corrosion.

3.2.1 Identification des sources émissives

La revue bibliographique réalisée sur les phénomènes de fissuration en milieu H2S ainsi que

sur les sources d'EA détectables en CSC permet de recenser les différents phénomènes physiques

pouvant conduire à de l'EA détectable pour une éprouvette d’acier placée en milieu salin acide et

en présence d’H2S. Il s'agit des processus suivants :

o les processus électrochimique à la surface (recombinaison de l’hydrogène, éventuels

dégagement de bulles, entrée directe du proton),

o la formation et l’évolution de la couche de FeS à la surface de l’éprouvette (Eq 10),

o le deux types de fissuration (HIC et SSC) résultants de l’introduction de

l’hydrogène au sein de l’acier,

o l’absorption d’hydrogène au sein du métal

o la précipitation de l’hydrogène dans le métal.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

L’émissivité de cette dernière source n’a jusqu’alors pas été spécifiquement étudiée. En

revanche, les trois premières ont été partiellement, simultanément ou séparément, étudiées par

différents auteurs.

a) Émissivité des processus électrochimiques

La réaction cathodique de réduction du proton peut entraîner un dégagement d'hydrogène

gazeux à la surface du métal, après saturation locale de la solution en gaz dissous. Ce dégagement

de dihydrogène étant une source potentielle d'émission acoustique, plusieurs auteurs [WEN 93]

[TSA 98] [CAR 03] ont cherché à l’isoler.

Des essais de polarisation potentio-dynamiques menés sur des échantillons plats verticaux

dans la solution A du document NACE TM0177 [NACE 05] (5g/L NaCl et 0,5 g/L CH3COOH,

P(H2S)= 1bar) ont montré que l'activité acoustique enregistrée était nulle dans le domaine

cathodique [WEN 93] [TSA 98]. Le dégagement d'hydrogène ne serait donc pas suffisamment

émissif dans ces conditions d'essais et d'instrumentation d'EA pour conduire à une activité

acoustique détectable (figure I.25). Ces essais ont été réalisés sur un acier faiblement allié à haute

résistance mécanique communément utilisé dans l'industrie pétrolière.

Figure I.25 Énergie des événements acoustiques détectés lors d'un essai de polarisation potentio-dynamique [WEN 93] (seuil 40dB, filtre 100-300kHz à l'acquisition, capteur résonant à 175 kHz).

En revanche, pour d'autres auteurs, le dégagement d'hydrogène à la surface du métal

entraînerait l'émission de salves dont l'amplitude serait comprise entre 33 et 60 dB et dont le

nombre de coups serait compris entre 2 et 300 [CAR 03]. Ce résultat a été obtenu sur l'alliage

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

600® (alliage base nickel), en milieu acide sulfurique 5%, sur éprouvette Compact Tension (CT)

à courant cathodique imposé de -1 mA/cm² (figure I.26).

Figure I.26 Graphique de corrélation représentant le nombre de coups en fonction de l'amplitude des salves enregistrées lors d'un essai de 3,5 heures sous polarisation cathodique (I=-1mA, Ecat=-235

mV/SHE) sur une éprouvette non chargée mécaniquement [CAR 03] (seuil 32 dB, filtre 100-300 kHz à l'acquisition, capteur résonant à 150 kHz placé sur un guide d'onde).

Plusieurs raisons peuvent être avancées pour expliquer la différence de résultat entre les

deux études présentées ci-dessus.

D'un point de vue expérimental, les essais n'ont pas été réalisés dans le même milieu, l'un a

été conduit en milieu NACE solution A [NACE 05] (pH 3) et l'autre en milieu H2SO4 (pH 0). Or

l'augmentation de pH décale le dégagement d'hydrogène vers des potentiels plus cathodiques. En

milieu NACE, l’étape électrochimique globale n'est donc peut être pas suffisant pour conduire à

une détectabilité par émission acoustique. De plus, les différents choix expérimentaux concernant

la contre électrode, la vitesse et le sens de balayage (pour le test potentio-dynamique) peuvent

également conduire à des interprétations différentes. Il faut noter aussi que le montage

expérimental est différent : les éprouvettes utilisées n'ont pas la même géométrie. Sur l'éprouvette

CT, le dégagement d'hydrogène se fait entre deux surfaces horizontales, alors que sur l'éprouvette

plate utilisée en milieu NACE le dégagement se fait librement à la verticale. Les frottements des

bulles d'hydrogène entre les deux surfaces horizontales pourraient expliquer l'émissivité du

dégagement gazeux sur éprouvette CT. Ce phénomène a en effet été montré comme important

dans la détection du dégagement d'hydrogène par EA [JAU 04].

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Du point de vue de l’instrumentation acoustique, il faut noter que la fréquence de résonance

des capteurs utilisés lors de ces deux études est différente : 150 kHz pour l'essai détectant le

dégagement d'hydrogène contre 175 kHz pour l'autre. Le capteur résonant à 175 kHz est peut être

moins sensible pour la détection du dégagement d'hydrogène. Le seuil utilisé lors de l'acquisition

est également différent entre les deux études, mais l'amplitude des salves détectées sur l'alliage

600® reste au dessus du seuil fixé lors des essais potentio-dynamiques non émissifs (40dB).

Notons enfin que les résultats de Weng [WEN 93] et Tsai [TSA 98] sont également en

contradiction avec des résultats plus récents [KIM 06], qui montrent que le dégagement

d’hydrogène est détecté par EA pour des potentiels inférieurs à -1200 mV/ECS, lors de

polarisations cathodiques réalisées à potentiel décroissant (0.05 mV/s) depuis le potentiel de

corrosion d’un échantillon d’acier inoxydable austénitique en milieu salin neutre. A potentiel

croissant, à vitesse de balayage plus rapide (0.5 mV/s [TSA 98]) et à pH plus faible, les conditions

expérimentales retenues dans les travaux de Weng et Tsai sont là encore plus défavorables à la

détection du dégagement d’hydrogène par EA que celles adoptées dans les travaux de Kim.

D'après l'étude bibliographique, l'émissivité et la détection du dégagement d'hydrogène

restent controversées. Sa détectabilité dans nos conditions expérimentales devra donc être

déterminée.

b) Émissivité de la couche de FeS

Dans les conditions d'essai NACE solution A [NACE 05] (5g/L NaCl et 0,5 g/L

CH3COOH, p(H2S)= 1bar), la présence d'H2S conduit à la formation d’une couche de sulfure de

fer en surface de l'éprouvette. Des études ont montré que les réactions de corrosion en milieu

acide se produisant en l'absence d'H2S entraînent l’émission de peu de signaux détectables [AMA

03]. En effet, lors de la phase de désaération à l'azote en début d'essai NACE TM0177 méthode A

[NACE 05], l'activité acoustique et l'énergie cumulée des salves enregistrées sont faibles. Après

introduction de l'H2S dans la solution ces deux paramètres augmentent rapidement (figure I.27).

La formation et la présence de la couche de sulfure de fer en surface de l'éprouvette pourraient

expliquer cette augmentation de l'activité acoustique et de l'énergie cumulée.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Figure I.27 Activité acoustique et énergie cumulée enregistrées en fonction du temps lors des trois premières heures d'un essai NACE TM 0177 réalisé sur un acier martensitique trempé revenu [AMA

03] (seuil 30dB, nombre de coups >1 filtré à l'acquisition).

Dans le même sens, la période de forte activité acoustique enregistrée au début de l'essai

NACE TM0177 méthode A [NACE 05] a été associée aux réactions de corrosion en présence

d'H2S [GIN 99].

Il a été également mesuré lors d'essais de polarisation potentio-dynamique, menés sur des

échantillons plats verticaux [NACE 05] en milieu contenant de l'H2S, une activité acoustique

significative dans le domaine anodique [WEN 93] [TSA 98] (figure I.25). Les auteurs ont attribué

cette augmentation de l'énergie cumulée à la formation de la couche de FeS. En effet, ils ont

effectué un test potentio-dynamique dans les mêmes conditions de balayage mais en milieu acide

sulfurique et n'ont pas enregistré d'activité acoustique significative.

La présence de la couche de FeS apparaît donc être une source émissive en milieu acide

contenant de l'H2S. Les processus physiques à l’origine de cette activité acoustique restent à

préciser mais des études ont montré que des ruptures de film peuvent être à l'origine d'EA [RAW

87]. Il est donc possible que le dégagement d'hydrogène à travers la couche de FeS conduise à des

ruptures de film détectables en EA.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

c) Émissivité des différents modes de fissuration en milieu H2S

Les dernières sources d'EA que nous avons identifiées comme potentiellement émissives

sont les différentes formes de fissuration rencontrées en milieu H2S. Chaque forme de fissuration :

la décohésion interne (HIC), la rupture différée par H2S (SSC), la décohésion interne sous

contrainte (SOHIC), le cloquage (blistering) est susceptible d'être détectée par EA mais ne

conduit pas nécessairement au même spectre d’EA. L'émission acoustique a ainsi été utilisée dans

plusieurs études pour tenter d'identifier les différents processus physiques et étapes mis en jeu lors

de ces différents modes de fissuration induits par la FPH.

• Distinction entre l'amorçage et la propagation des fissures de type SOHIC

Gingell et al. [GIN 99] ont repéré grâce à la technique d'émission acoustique les phases

d'amorçage et de propagation de fissures lors d'un essai NACE TM0177 méthode A [NACE 05].

Lors des essais conduisant à une rupture de l'éprouvette, ils ont systématiquement observé une

période de forte activité associée aux réactions de corrosion, suivie d’une période sans activité

ponctuée par des sauts d'énergie et enfin parfois une période de forte activité continue durant

quelques heures (figure I.28).

amorçage amorçage

propagation propagation

Figure I.28 EA enregistrée au cours d'un essai NACE TM 0177 sur un acier ferrito-perlitique : a) énergie en fonction du temps b) nombre de salves en fonction du temps (seuil 40dB, filtre 100-300 kHz

à l'acquisition, capteur résonant à 150 kHz) [GIN 99].

La période de faible activité ponctuée par des sauts énergétiques correspondrait à une

période d'amorçage et celle de forte activité acoustique serait associée à la propagation et à la

coalescence des fissures. L'identification de ces phases a permis aux auteurs de réaliser des essais

interrompus. Ils ont ainsi pu décrire la formation et l’évolution d'une fissuration qui apparaît être

de type SOHIC.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

• Distinction entre la fissuration de type HIC et SSC

Weng et al [WEN 93a] ont réalisé des essais avec et sans charge sur un même acier

faiblement allié de résistance mécanique moyenne couramment utilisé dans l'industrie pétrolière.

Ils ont noté une différence de distribution fréquentielle des salves enregistrées au cours de ces

essais (figure I.29).

a) b)

Figure I.29 Distribution en fréquence de l'émission acoustique enregistrée sur une éprouvette (a) sollicitée à 80 % de sa limite d'élasticité et (b) sans charge appliquée, en milieu NACE en présence

d'H2S [WEN 93a] (seuil 40dB, filtre à l'acquisition 100-300 kHz, capteur résonant 175 kHz).

Cette différence fut attribuée à la différence d'endommagement (SSC ou HIC). Cependant,

il faut noter que cette explication n'est étayée d’aucune observation métallographique de fissures

permettant de valider le type d’endommagement (HIC, SSC ou SOHIC).

• Corrélation entre l’énergie et l’état de fissuration

Lors d’essais conduisant au développement de fissures HIC, Weng et al ont relié la

longueur fissurée (CLR%= rapport de la longueur fissurée cumulée sur la longueur totale de

l’échantillon) à l’énergie cumulée enregistrée [WEN 93] (tableau I.5). Ils ont fait varier la sévérité

du milieu en modifiant la concentration en H2S, ce qui a pour conséquence d’obtenir une

amplitude de l’endommagement variable.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

Tableau I.4 Ratio de la longueur fissurée et énergie cumulée enregistrée lors d'un test de perméation à l’hydrogène en milieu NACE pour différentes teneurs en H2S [WEN 93].

N° du test 1 2 3 4 H2S (%) 1,5 3,0 30,0 100,0 CLR (%) 0,0 0,0 1,1 1,9

Energie cumulée (dB.µs) 1,003 3,764 6,785 13,122

Pour les essais 1 et 2, aucun endommagement n’est observé mais les énergies cumulées sont

différentes et non nulles. Les auteurs ne commentent pas cette augmentation de l'énergie cumulée.

Nous pouvons supposer soit que le mode opératoire utilisé ne permettait pas de détecter les petites

fissures par métallographie, soit qu’une partie de l’énergie cumulée est due à une autre source que

la fissuration. Cette augmentation de l’énergie cumulée pourrait être associée à la couche de FeS

qui est susceptible de présenter des caractéristiques différentes selon qu’elle se forme sous 1,5%

ou 3% d’H2S. En effet, nous avons vu que la présence de cette couche de FeS serait responsable

de l’émission de salves très énergétiques [TSA 98].

D’autres auteurs ont établi un critère d'EA pour évaluer la sensibilité des aciers à la SSC à

partir de l’énergie cumulée enregistrée au cours d’un essai NACE TM0177 méthode A [NACE

05] instrumenté par émission acoustique [GIN 99] [CAY 97]. A partir de la courbe donnant

l’énergie cumulée en fonction du temps, Cayard et al [CAY 97] ont pu déduire que, si le matériau

est sensible à la fissuration SSC, c'est-à-dire si l'éprouvette rompt, alors l’énergie augmente avec

un taux supérieur à 610 mV.sec/heure pendant les 25 à 100 premières heures du test (figure I.30a).

Dans le même sens, Gingell et Garat [GIN 99] ont observé, dans des conditions expérimentales

proches, que les tests conduisant à l’enregistrement d’un taux d’énergie supérieur à 200 mVsec/h

entraînaient une rupture des éprouvettes en moins de 720h (figure I.30b).

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

a) b)

Figure I.30. Énergie cumulée en fonction du temps enregistrée lors de tests SSC NACE. a) sur des aciers martensitiques (seuil à 50 dB, gain 23 dB) [CAY 97] b) sur des aciers ferrito-perlitiques (seuil à 50dB, filtre à l'acquisition 100-300 kHz) (L’énergie associée à la rupture de l’éprouvette n’est pas

prise en compte dans le calcul de l’énergie cumulée). [GIN 99].

Il semble donc qu’un indicateur précoce de sensibilité à la FPH pourrait être établi à partir

de la mesure de l’énergie des salves pendant le suivi par émission acoustique. Il faut noter

cependant que Cayard et al [CAY 97] ont établi ce critère sur un acier martensitique alors que

Gingell et al [GIN 99] l’ont établi sur un acier ferrito-perlitique présentant une structure de

bandes, donc conduisant à des modes de fissuration différents. Les fissures observées par Gingell

et al apparaissent de type SOHIC, alors que dans les travaux de Cayard et al les observations de

fissures n'ont pas été consignées. De plus, les auteurs n’ont pas utilisé les mêmes paramètres

d’acquisition et de filtrage des signaux. Ceci peut donc expliquer les différences de valeurs entre

leurs deux critères. Il est important de souligner que ce critère est néanmoins réducteur, car il ne

prend en compte que l’énergie cumulée moyenne, alors que cette énergie cumulée varie de

manière importante en fonction du temps.

3.3 Synthèse La revue bibliographique réalisée a permis un début d’identification des différents

phénomènes pouvant conduire à de l'EA détectable dans le cas de la FPH en milieu H2S. Le

dégagement d'hydrogène en surface du métal, la présence d'une couche de FeS et les fissurations

HIC, SSC et SOHIC constituent les sources d'EA potentiellement actives lors d'un essai de

résistance à la fissuration FPH en milieu H2S. Dans les travaux antérieurs, les données d'EA ont

été traitées de manière globale sans distinguer les différentes contributions des sources d'EA.

L'objet de ce travail étant d’étudier la fissuration des aciers en milieu H2S, il apparaît donc

important de caractériser l’EA associée à chaque source puis d’effectuer une sélection des signaux

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

enregistrés pour ne garder que ceux liés à la fissuration, et s’affranchir ainsi des sources

« parasites ». Une analyse plus fine des phénomènes de fissuration sera alors possible.

D'après la littérature, le dégagement d'hydrogène, quand il est détecté, conduit à l'émission

de salves de faibles amplitudes alors que les ruptures des couches présentes en surface, donnent

lieu à des salves discrètes d'amplitudes élevées. Concernant les phénomènes de fissuration, le

paramètre "énergie cumulée" est celui qui est le plus souvent cité par les auteurs comme

paramètre discriminant et qui semble pouvoir être relié à l’endommagement au moins dans le cas

de la fissuration HIC. Il a également été utilisé par deux auteurs pour l'établissement d'un critère

de sensibilité ou non à la fissuration de type SSC, bien que celle-ci n'ait pas clairement été

identifiée dans leurs publications.

4 Bilan de l’étude bibliographique et démarche de la thèse Cette synthèse bibliographique a permis de détailler les phénomènes de Fragilisation par

l’Hydrogène susceptibles de se produire dans les milieux contenant de l’H2S. Les différents

mécanismes de chargement en hydrogène de l’acier ont été présentés. Puis, les principales formes

de FPH rencontrées en milieu H2S et leurs conditions d’apparition ont été identifiées. La

fissuration de type HIC est un phénomène lié au piégeage de l’hydrogène et à sa recombinaison

sous forme gazeuse sur des défauts internes de l’acier. La mise sous contrainte d’un acier sensible

à la fissuration de type HIC conduit à un type de fissuration particulier dénommé SOHIC. Enfin,

la fissuration de type SSC a lieu sous une contrainte résiduelle et/ou appliquée dans un milieu

contenant de l’H2S. Ses mécanismes sont encore mal connus.

L’influence des paramètres liés au matériau a été mise en évidence. Retenons que la

présence de défauts internes tels que les inclusions ou les zones ségrégées constituants des pièges

pour l’hydrogène sont défavorables à la résistance des aciers à la FPH, ainsi que les

microstructures à fortes contraintes résiduelles. Les aciers présentant de hautes caractéristiques

mécaniques sont reconnus comme plus sensibles à la fissuration de type SSC.

Les essais normalisés de résistance à la FPH permettent de séparer les aciers testés en deux

catégories : ceux qualifiés pour être utilisés en milieu H2S, appelés sour service, et ceux non

qualifiés appelés, non sour service ou encore sweet service. Aujourd’hui, plusieurs études sont

menées pour déterminer si des matériaux sweet service peuvent être utilisés dans des

environnements moins sévères que ceux définis dans les normes. Dans ces conditions, l’impact

des deux paramètres principaux définissant la sévérité d’un milieu, à savoir le pH et la pression

partielle d’H2S, sur les phénomènes de fissuration doit être évalué. A ce jour, les études menées

ne permettent pas une détection précoce de l’endommagement puisque les cinétiques de

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

fissuration sont difficiles à évaluer, et cet aspect n'est pas clairement pris en compte dans les

différents essais normalisés.

La technique d’émission acoustique semble donc prometteuse. Elle a été utilisée avec

succès pour l’étude de divers phénomènes de corrosion, présente des potentialités pour la

détection et le suivi de la fissuration des aciers en milieu H2S. Les phénomènes pouvant conduire

à de l’EA détectable lors d’essais conduits dans ce milieu ont été identifiés. Il s’agit du

dégagement d’hydrogène lié aux réactions de corrosion, de la formation et de l’évolution de la

couche de FeS et des phénomènes de fissuration. L’énergie des signaux apparaît comme le

paramètre acoustique le plus discriminant dans la plupart des études menées. Cependant, des

améliorations apparaissent nécessaires, car, dans tous les travaux cités, l’émission acoustique a été

traitée de manière globale. En particulier, les signaux liés à la fissuration n’ont pas été distingués

de ceux liés aux autres phénomènes physiques à l’origine de l’EA.

C’est en premier lieu cette voie d’amélioration qui sera privilégiée dans notre travail. Une

procédure expérimentale spécifique permettant d’isoler les différentes sources d’EA et de leur

associer une signature acoustique sera ainsi mise en place, sur la base des résultats de la

littérature.

Une attention particulière sera apportée à l’identification des modes de fissuration

impliqués, ce qui n’a pas toujours été le cas dans les études antérieures. En effet, les mécanismes à

l’origine des divers modes de fissuration par FPH étant différents, les sources d’EA potentielles

s’en trouvent modifiées. Là encore sur la base des travaux de la littérature, le choix judicieux des

nuances d’aciers testés, ainsi que la mise en place d’une procédure de caractérisation rigoureuse

des fissures nous permettront d’affiner la discrimination des signaux d’EA en fonction du mode

de fissuration impliqué et d’établir une signature acoustique de chacun de ces modes. Les résultats

obtenus constitueront une première étape dans la démarche de cette thèse.

Une fois la procédure de discrimination des signaux d’EA établie, l’émission acoustique

doit permettre d’apporter des informations cinétiques, d’évaluer l’influence du milieu sur l’état de

fissuration, mais aussi de quantifier l’endommagement et de localiser l’amorçage des phénomènes

de fissuration sous contrainte appliquée. Toutes ces données nouvelles doivent contribuer à une

meilleure compréhension et prévention des phénomènes de fissuration des aciers en présence

d’H2S. C’est le second objectif de ce travail.

Dans ce contexte, le chapitre suivant fait le point sur les méthodes expérimentales utilisées

au cours de la thèse et présente les matériaux d’étude. Les choix expérimentaux visant à répondre

aux objectifs de ce travail seront justifiés sur la base de la synthèse bibliographique.

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Chapitre I : Synthèse bibliographique

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