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La réduction de la mortalité infanto-juvénile au Niger entre 2000 et 2010 Analyse de la politique de santé de l’enfant et du rôle de l’UNICEF. par Hercot David Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de Master en Santé Publique Politique et Management des Systèmes de Santé Antwerpen, Belgique, Juin 2013

Child Survival case study Niger DH FRANCAIS final avec annexe

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La réduction de la mortalité infanto-juvénile au Niger entre 2000 et 2010

Analyse de la politique de santé de l’enfant

et du rôle de l’UNICEF.

par

Hercot David

Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de

Master en Santé Publique Politique et Management des Systèmes de Santé

Antwerpen, Belgique, Juin 2013

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 3 of 48

Clause de non responsabilité

Cette dissertation a été écrite en tant que partie du curriculum du Cours de Maîtrise à l'Institut de Médecine Tropicale (IMT). Elle n'a pas été soumise à une évaluation par les pairs. Les opinions exprimées dans ce document sont celles de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de l'IMT ou d’autres parties. La reconnaissance du crédit attribué au travail d'autres personnes et d’éventuelles inexactitudes et erreurs factuelles sont de la seule responsabilité de l'auteur.

Remerciements

En mettant le point final à ce mémoire, je repense aux nombreux collègues et partenaires que j’ai croisé au cours de ma carrière et qui travaillent avec passion pour faire avancer la santé dans tous les coins du monde. Ils m’ont ouvert les yeux sur la complexité et l’inégalité de ce monde. Ce mémoire est l’aboutissement de toutes ces années d’engagement pour la santé des plus vulnérables, depuis les bidonvilles de New Delhi jusqu’au Niger puis à Anvers.

Je souhaite remercier Khaled Bensaid et Wim Van Damme qui ont eu successivement à me superviser et qui m’ont tellement appris.

Je voudrais aussi remercier Laetitia sans qui je n’aurais jamais pris ce chemin.

Vous aussi, lecteur, je vous suis reconnaissant de prendre le temps de parcourir, ne fusse que quelques minutes, cette synthèse de tellement d’apprentissages.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 5 of 48

Table des matières

1 Liste des figures ............................................................................................................... 6

2 Liste des tableaux ............................................................................................................ 6

3 Acronymes ....................................................................................................................... 6

4 Résumé ........................................................................................................................... 7

5 Introduction .................................................................................................................... 11

6 Objectifs ......................................................................................................................... 13

7 Position de l’auteur ........................................................................................................ 13

8 Contexte ........................................................................................................................ 13

8.1 Le Niger .................................................................................................................. 13

8.2 Le système de santé .............................................................................................. 15

8.3 Evolution de la politique de santé de l’enfant ......................................................... 19

9 Méthodes ....................................................................................................................... 23

9.1 Les interventions et les stratégies .......................................................................... 23

9.2 Aide extérieure pour la santé .................................................................................. 24

9.3 Analyse des détenteurs d’enjeux ............................................................................ 24

10 Résultats .................................................................................................................... 25

10.1 Les interventions et les stratégies .......................................................................... 25

10.2 Aide extérieure pour la santé .................................................................................. 33

10.3 Analyse des détenteurs d’enjeux autour de la réforme de la santé communautaire en 2008 ............................................................................................................................. 37

11 Discussion .................................................................................................................. 40

12 Vers ou va la politique de survie de l’enfant au Niger? .............................................. 41

13 Liste des annexes ...................................................................................................... 43

14 Références ................................................................................................................. 44

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 6 of 48

1 Liste des figures

Figure 1 Mortalité infanto-juvénile, 1990-2010 et objectif à atteindre en 2015 selon les objectifs du millénaire pour le développement dans différents pays d'Afrique ...................... 11 Figure 2 Nombre moyen de consultations curatives par personnes et par tranche d’âge dans le service publique de santé, Niger, 2011. ............................................................................ 16 Figure 3 Evolution du nombre moyen de consultations curatives par personnes dans les centres de santé du service publique avant et après la mise en place de la gratuité, par groupe d’âge, Niger, 2005-2011. .......................................................................................... 17 Figure 4 Aide extérieure pour la santé par habitant. Comparaison de différentes sources de données, Niger, 1990-2010. ................................................................................................. 33 Figure 5 Nombre de donateurs présents par année, Niger, 1990-2010 ............................... 36 Figure 6 Opinion, importance et influence des principaux détenteurs d’enjeux de la politique de santé communautaire en 2008. ....................................................................................... 39

2 Liste des tableaux

Tableau 1 Principaux indicateurs en 2011 ............................................................................ 14 Tableau 2 Nombre de structures publiques de première ligne au Niger entre 1982 et 2011 15 Tableau 3 Structure de l’analyse des détenteurs d’enjeux au Niger concernant la politique de santé au niveau communautaire en 2008. ............................................................................ 24 Tableau 4 Description et contribution à la réduction de la mortalité infanto-juvénile des principales interventions à haut impact mises en œuvre au Niger entre 2000 et 2008 par stratégie de mise en œuvre .................................................................................................. 26 Tableau 5 Dépenses de santé. Comparaison de différentes sources de données, Niger, 2008. ..................................................................................................................................... 35

3 Acronymes

AFD Agence Française de Développement GAVI Global Alliance for Vaccine and Immunisation IHME Institute for Health Metrics and Evaluation, basé à Seattle.

http://www.ihme.org/ INS Institut National de Statistiques du Niger MEF Ministère de l’économie et des Finances MSF Médecins Sans Frontières OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement OMS Organisation Mondiale de la santé ONG Organisation Non Gouvernementale PEV Programme Elargi de Vaccination PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement UNFPA Fonds des Nations Unies pour la Population UNICEF Fonds International des Nations Unies pour l’Enfance

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 7 of 48

4 Résumé

Entre 2000 et 2010, la mortalité infanto-juvénile, c’est-à-dire des enfants de moins de cinq

ans, au Niger est passée de 226 à 128 décès pour 1 000 naissances vivantes. Elle a

d’avantage diminué au Niger que dans les pays voisins malgré un contexte fragile. Ce

mémoire étudie les principaux mécanismes et éléments du contexte qui ont permis

d’atteindre ce résultat. Il analyse en particulier le rôle joué par les interventions à haut impact

pour la survie de l’enfant.

Il s’agit d’une étude de cas explicative et rétrospective basée sur une revue de la littérature,

d’observations réalisées lorsque nous travaillions pour UNICEF au Niger entre 2005 et 2008

et d’une série d’interviews et de rencontres. Les bases de données de l’Organisation

Mondiale de la Santé (OMS) , de l’Institut pour l’Evaluation de la Santé de Seattle (IHME) et

du système d’information sanitaire du Niger ont également été utilisées.

L’état de santé de la population, et des enfants en particulier, est le résultat d’un grand

nombre de déterminants sociaux de la santé. Il est également influencé par la capacité du

système de santé à répondre aux besoins de la population. Cependant, dans le cas du

Niger, la plupart des indicateurs sociaux ont peu progressé au cours de la décennie. Le

Produit Intérieur Brut par habitant a progressé de 9%. La population a augmenté de 50 %.

La production agricole par habitant est régulièrement insuffisante depuis 1963. La capacité

des femmes rurales à subvenir aux besoins de leurs enfants se réduit au fur et à mesure

que la taille de leurs parcelles de terre diminue.

La plupart des indicateurs de performance du système de santé ne se sont pas autant

amélioré que la réduction de la mortalité infanto-juvénile. Le nombre d’accouchements

assisté par un personnel qualifié atteint 18 % et le taux de césarienne est de 1 %.

Une étude de 2012 conclut que la réduction de la mortalité infanto-juvénile entre 2000 et

2008 est principalement liée à la mise en œuvre d’une série d’interventions à haut impact

sur la mortalité des enfants, des interventions ayant un bon rapport coût-efficacité. Elle

estime que l’amélioration du traitement du paludisme, de la diarrhée et de la pneumonie est

responsable de 22 % de la réduction observée de la mortalité, que la vaccination, les

moustiquaires et la vitamine A y contribuent à hauteur de 45 % tandis que la réduction de la

malnutrition aiguë et chronique est responsable de 19 %.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 8 of 48

Ces interventions ont été mises en œuvre à travers trois stratégies. La première, améliore

les services curatifs par l’augmentation du nombre de centres de santé, la suppression du

paiement direct pour les soins curatifs des enfants depuis 2007 et le développement d’un

réseau de cases de santé communautaires. La deuxième consiste en une répétition

fréquente de campagnes nationales et de sorties depuis les centres de santé vers les

populations pour leur fournir des interventions préventives tel que la vaccination, la

supplémentation en vitamine A ou la distribution de moustiquaires imprégnées à longue

durée d’action. La troisième permet de prendre en charge la malnutrition aiguë des enfants

dans près 600 centres depuis la « crise nutritionnelle de 2005 ».

Une fois les salaires et les dotations des hôpitaux payés, la majorité des moyens financiers

du secteur de la santé, qu’ils proviennent de l’aide extérieure ou des recettes propres du

gouvernement, sont utilisés pour les interventions à haut impact pour la survie des enfants.

L’aide extérieur a progressivement augmenté depuis l’an 2000. Dans un premier temps, ce

sont les « Initiatives Mondiales de Santé » qui ont apporté leur aide, principalement pour les

campagnes et les sorties préventives. Après 2005, l’aide s’est encore accrue en valeur

absolue et en nombre d’intervenants. Il semble qu’ en 2008, l’UNICEF et Médecins Sans

Frontières, qui se consacrent principalement à la survie des enfants, contribuent pour

environ 40 % des 10 dollars par habitant d’aide au secteur de la santé.

Tous les acteurs ne sont pas unanimes sur l’importance accordée à la survie des enfants.

Certains acteurs, principalement le ministère de la santé et l’OMS, souhaitent développer un

système de santé organisé autour de centres de santé intégrés. Contre leur avis, le

« Programme Spécial » du président a construit plus de 2 500 cases de santé

communautaire entre 2000 et 2006. Suite à cela, 80 % de la population habite à moins de

cinq kilomètres d’une structure offrant au minimum un petit nombre d’interventions dont le

traitement du paludisme, de la diarrhée et de la pneumonie.

La politique de survie de l’enfant, axée sur la mise en œuvre d’interventions à haut impact, a

probablement joué un rôle important dans la réduction observée de la mortalité

infanto-juvénile. Ces résultats ont été obtenus grâce à une forte absorption des moyens du

secteur de la santé, en particulier l’aide extérieure et, en partie, contre l’avis de certains

acteurs dont le ministère.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 9 of 48

La mortalité observée en 2008 peut descendre encore un peu avec la même approche. Mais

la politique actuelle ne touche pas à certaines causes de décès des enfants. Elle ne fait pas

l’unanimité parmi les décideurs. Elle ne renforce que peu le système de santé et est fort

dépendante du maintien des moyens financiers et humains disponibles au risque de voir le

taux de mortalité des enfants augmenter à nouveau si ceux-ci devaient se réduire.

Cette politique vise strictement la survie des enfants. Elle ne prend pas en compte le

développement global de l’enfant visant à lui permettre de devenir un adulte responsable. Il

n’est pas évident que cette politique contribue à la construction d’une société durable ou

chaque Nigérien puisse disposer des ressources nécessaires à son développement. A quel

point la survie peut-elle passer devant d’autres politiques de santé publique et d’autres

politiques publiques en général ? Et qui fait ce choix ?

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 11 of 48

5 Introduction

En l’an 2000, le Niger est classé avant dernier pays au monde en terme du taux de mortalité

infanto-juvénile, avec 226 décès pour 1 000 naissances vivantes (Figure 1). Les pathologies

infectieuses dont le paludisme, la rougeole, les diarrhées et les pneumonies sont les causes

les plus fréquentes de décès (1). Le retard de croissance touche 41 % des enfants (2). En

2008, une enquête montre que la mortalité infanto-juvénile atteint 128 décès pour mille

naissances (3). Le Niger remonte en douzième dernière place (4). Comment cela peut-il

s’expliquer ?

Entre 2000 et 2010, le taux de mortalité infanto-juvénile recule dans la plupart des pays en

développement. Comme le décrit le rapport sur les déterminants sociaux de la santé (5), les

déterminants de ce changement peuvent se situer à différents niveaux.

Tout d’abord, l’évolution des conditions de vie de la population. Celles-ci sont notamment

ciblées par les efforts de lutte contre la pauvreté qui visent par exemple à accroitre l’aisance

matérielle ou l’éducation de la population. A titre d’illustration, de meilleures conditions de

vie peuvent réduire l’incidence des maladies, par exemple les maladies diarrhéiques par

Figure 1 Mortalité infanto-juvénile, 1990-2010 et objectif à atteindre en 2015 selon les objectifs du millénaire pour le développement dans différents pays d'Afrique

Source: Childinfo.org, http://www.childinfo.org/mortality_ufmrcountrydata.php, accédé le 21 4 2013.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 12 of 48

l’amélioration de l’hygiène, et faciliter l’accès aux traitements. Au Niger cependant, la

situation a peu évolué si l’on se fie au pourcentage de la population vivant sous le seuil de

pauvreté (6).

Ensuite, l’amélioration de la performance du système de santé. L’amélioration de

l’accessibilité ou de la qualité des services et l’augmentation des moyens disponibles sont

des stratégies qui y contribuent. Comme nous le décrirons dans ce mémoire, des progrès

ont été enregistrés mais les moyens disponibles restent limités. D’ailleurs, en dehors du taux

de mortalité infanto-juvénile, les autres indicateurs, tel la mortalité maternelle ou le nombre

d’accouchements assistés par du personnel qualifié, ont peu progressé (7). Il est donc peu

probable que l’amélioration du système de santé suffise à expliquer les progrès pour la

survie des enfants.

Enfin la mise en œuvre d’une politique ciblée visant spécifiquement la réduction de la

mortalité infanto-juvénile . Celle-ci vise à rendre accessible un nombre limité d’interventions

à haut impact sur la survie de l’enfant. Elle recherche le meilleur rapport coût-efficacité pour

un objectif très ciblé.

Dans tous les pays, c’est une combinaison de ces trois niveaux qui fait reculer la mortalité

des jeunes enfants. Dans le cas particulier du Niger, une récente étude par Amouzou et coll.

conclut que le troisième niveau, l’accroissement de la couverture des interventions à haut

impact par les enfants de moins de cinq ans, explique la vaste majorité de la réduction de la

mortalité observée (3). Notre analyse montre que les interventions identifiées par Amouzou,

et coll. ont été mises en œuvre à travers trois stratégies d’amélioration des services de

santé : les services curatifs, les services préventifs organisés de manière périodique et la

prise en charge spécialisée de la malnutrition (8).

Dans ce mémoire, sans nier l’impact possible des deux premiers niveaux d’améliorations

des déterminants de la survie de l’enfant au Niger, nous étudions comment ces interventions

ont été mises en oeuvre. Nous étudions d’abord pour chaque stratégie l’organisation des

services permettant d’offrir les interventions. Nous regardons ensuite comment le

financement de la santé a évolué et quel impact cela a pu avoir sur les moyens disponibles

pour les interventions contribuant à la survie de l’enfant. Nous analysons enfin la position

des principaux détenteurs d’enjeux en matière de politique de santé communautaire au vu

de son rôle majeur sur l’accès aux soins pour les enfants. Ceci nous permet de conclure sur

les enjeux actuels de la politique de santé des enfants au Niger.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 13 of 48

Après la définition des objectifs de ce mémoire, nous situons la position de l’auteur par

rapport au problème étudié. Ensuite nous abordons successivement le contexte, les

méthodes et les résultats. Par la suite, nous discutons les limites et terminons par une

conclusion sur les enjeux actuels de la politique de santé de l’enfant au Niger.

6 Objectifs

L’objectif global de ce mémoire est d’étudier les principaux mécanismes et éléments du

contexte qui ont permis au Niger de réduire la mortalité infanto-juvénile de 226 à 128 décès

pour mille naissances entre 1998 et 2009 à travers la politique de mise en œuvre

d’interventions à haut impact pour la survie de l’enfant. Trois objectifs spécifiques sont

étudiés : Quelles sont les caractéristiques des interventions mises en œuvre ? Quel rôle a

joué l’aide extérieure ? Et enfin, quel est la position des principaux détenteurs d’enjeux ?

Partant de cette analyse du problème, nous identifions une série de défis auxquels font face

les décideurs de la politique de santé au Niger.

7 Position de l’auteur

L’auteur de ce mémoire a travaillé pour l’UNICEF au Niger entre 2005 et 2008. Se tenant

maintenant à l’extérieur, il revendique une certaine indépendance. Il n’en reste pas moins

influencé par son vécu et ses propres convictions car, comme nous le verrons, la politique

de santé de l’enfant ne répond pas seulement de la science mais est chargée de valeurs.

8 Contexte

8.1 Le Niger

Le contexte du Niger reste difficile depuis son indépendance. En 2013, le classement du

PNUD pour le développement humain le classe dernier ex-aequo avec la République

Démocratique du Congo. Le Niger est généralement inclus dans la liste des états fragiles.

C’est-à-dire des états qui font face à des défis important pour leur développement,

particulièrement en terme d’instabilité politique, de conflits et de faiblesse des institutions (9).

La richesse du pays, mesurée en terme de Produit Intérieur Brut par habitant, est très basse

malgré une augmentation lorsqu’elle est étudiée en parité du pouvoir d’achat (constant 2005

USD) passant de 597 à 650 USD par habitant, entre 2000 et 2010 (10). Le Niger est, à ce

titre, le dernier pays d’Afrique de l’Ouest et le sixième dernier au monde en 2013. Quatre

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 14 of 48

facteurs principaux peuvent expliquer une part importante de la situation du Niger : Un

accroissement rapide de la population nigérienne (3,3 % par an en moyenne) ; une grande

pauvreté économique de la population (60 %

de la population vit sous le seuil de

pauvreté) ; un taux d’analphabétisme élevé

de la population (71 %) ; et une insuffisance

des ressources

de l’Etat pour lui permettre de jouer son rôle

en particulier pour offrir les services sociaux

de base (11).

Les efforts des différents acteurs sont

régulièrement torpillés par des évènements

naturels, politiques ou militaires qui leurs

donnent un coup d’arrêt parfois important.

L’histoire récente le confirme encore : Une

instabilité militaire de longue date dans le

Sahel s’est aggravée par la présence

d’éléments islamistes radicaux, le coup

d’état « démocratique » de 2010 a gelé les

relations du Pays avec ses partenaires où

les sècheresses et inondations répétées qui

mettent régulièrement en péril les récoltes

depuis la grande famine de 1963 (12).

L’évolution de l’économie rurale au Niger

n’est pas favorable aux femmes et aux

enfants. La réduction de la surface agraire

disponible par ménage a des conséquences

sur la répartition du pouvoir dans les villages

et au sein des ménages ruraux. Les

femmes, et à leur suite les enfants, en sont

les principales victimes. La réduction du rôle

des femmes et des jeunes dans la

production agricole réduit leur accès aux

ressources, ressources traditionnellement

Tableau 1 Principaux indicateurs en 2011

Indicateurs clés 2011

Macro-économique

PIB nominal ( USD courant per capita) 412

Taux de croissance du PIB réel (en %) 2,1

Taux moyen d’inflation (en %) 2012 +0,8

Recettes de l’état en (USD per capita

2010) 72

Dont dons (USD per capita 2010) 18

Démographie

Population (millions) 15,7

Population rurale (en %) 79

Population pauvre (%) 59,5

Taux d’accroissement de la population (%) 3,3

Indice synthétique de fécondité (enfants

par femme) 7,1

Taux de mortalité infanto-juvénile 2006

(pour 1 000) 198

Taux de mortalité maternelle (pour 100

000) 648

Education

Taux brut de scolarisation (%) 72,9

Taux d’achèvement du cycle de base (%) 49,3

Source : Institut National de Statistiques du

Niger, http://www.stat-niger.org/statistique/

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 15 of 48

utilisées pour s’occuper des enfants (13).

Une grande partie des recettes du gouvernement fluctue en fonction des aléas climatiques

et de la volonté des donateurs internationaux. L’ouverture de nouveaux sites d’extraction de

matières premières depuis 2007 a permis d’accroitre les recettes propres de l’état qui

restent cependant très limitées. Elles sont estimées à 72 USD par habitant en 2010 selon

les chiffres publiés par l’Institut National de la Statistique (INS) et repris dans le Tableau 1

avec d’autres indicateurs socio-économiques du Niger.

8.2 Le système de santé

Malgré les efforts des différents acteurs et l’augmentation des moyens, le système de santé

reste peu à même d’offrir des soins de santé de qualité et globaux à l’ensemble de la

population. Pour illustrer notre propos, nous présentons ci-dessous une analyse succincte et

partielle, voir partiale, des différents blocs du systèmes de santé du Niger (14).

8.2.1 Organisation des services de santé

Le système de santé du Niger est basé sur le modèle du district sanitaire. Eu 2010, 48 % de

la population réside à moins de cinq kilomètres d’un centre de santé. De nombreux centres

ont été construits au cours de la dernière décennie (Tableau 2). D’après les données

administratives du Ministère de la Santé Publique du Niger, ci-après simplement dénommé

le ‘ministère’, en 2011, les centres de santé ont presté 0,6 consultations curatives par

habitants (7). Le nombre de consultations varie cependant fortement en fonction de l’âge

(Figure 2). Depuis 2007, et la politique de gratuité pour les enfants de moins de cinq ans, le

nombre de consultations curatives pour enfants de moins de cinq ans a explosé (Figure 3).

Tableau 2 Nombre de structures publiques de première ligne au Niger entre 1982 et 2011

Année 1982 1992 1998 2000 2011

Hôpitaux de district/région ? ? ? 43 52

Centres de santé (1 et 2) 220 208 288 422 849

Cases de santé 0 26 ? 2478

Total 220 220 314 422 3327 Sources : UNICEF 1998 (15) & 2000 (16), Ministère 2011(7) & 2003

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 16 of 48

Pour améliorer l’accès aux soins, plusieurs initiatives ont également permis de développer

une offre de services de proximité. Premièrement, entre 2000 et 2010, 2 500 cases de santé

communautaires offrant un paquet limité d’interventions ont été construites portant la

couverture géographique combinées des centres et des cases à plus de 80 % de la

population. Une étude de Page et coll. réalisée en 2010 dans la région de Maradi a montré

que les cases de santé accueillaient un tiers des enfants consultant pour diarrhée (17).

Deuxièmement, et depuis 2005, près de 600 centres de prise en charge de la malnutrition

aigüe, sévère et/ou modérée sont venus renforcer ce dispositif (18).

Les hôpitaux ont également été améliorés entre 2005 et 2011. Le nombre d’hôpitaux de

districts dont le service de chirurgie de base est fonctionnels a atteint 26 sur les 33 districts

ruraux que compte le Niger (Tableau 2). Cependant, fin 2011, seul six d’entre eux disposent

du personnel requis selon le ministère (19). A ces hôpitaux de district ruraux, s’ajoutent les

hôpitaux de Niamey, six hôpitaux régionaux et trois hôpitaux privés hors de Niamey. Le taux

de césariennes atteint 1,1 % des naissances en 2009 selon les chiffres du ministère. Ceci

témoigne d’un accès insuffisant de la population aux services obstétricaux d’urgence selon

les normes de l’OMS.

Figure 2 Nombre moyen de consultations curatives par personnes et par tranche d’âge dans le service publique de santé, Niger, 2011.

Source: Annuaire statistiques 2011, Ministère de la santé Publique du Niger, 2013

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 17 of 48

En dehors de Niamey et Zinder, les deux centres urbains, il n’y a pas d’offre de services

privés allopathiques formels. Les praticiens traditionnels et les vendeurs de médicaments au

marché noir sont présents sur l’ensemble du territoire.

Le ministère organise des campagnes nationales ou sous-nationales en porte à porte, et des

sorties vers les villages à partir des structures sanitaires. Ces activités incluent par exemple

le suivi de la croissance, la vaccination des enfants et la consultation prénatale. Des

campagnes de riposte aux épidémies sont également organisées selon les besoins.

8.2.2 Ressources humaines

Le Niger dispose de 0,2 médecin et 1,4 infirmier par 1 000 habitants (10). La plupart des

personnes travaillant dans le secteur formel de la santé sont fonctionnaires de l’état. Sur les

8 000 agents de la fonction publique employés par le ministère en 2007, seul 12 %

travaillent en zone rurale. De plus, il existe un fort turn-over des agents en zone rurale (20).

A ces fonctionnaires s’ajoutent 2 500 agents de santé communautaire dans les case de

santé qui ont un statut différent. Les centres de nutritions emploient également plusieurs

centaines d’infirmiers. Il n’existe pas de chiffres à ce sujet car ils sont pour la plupart encore

employés par des ONGs. Selon les documents du ministère, le nombre de personnel

Figure 3 Evolution du nombre moyen de consultations curatives par personnes dans les centres de santé du service publique avant et après la mise en place de la gratuité, par groupe d’âge, Niger, 2005-2011.

Source : Ministère de la santé, Niger.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 18 of 48

médical formé est suffisant, ce sont les moyens financiers et les incitants pour s’installer en

zone rurale qui font défaut.

8.2.3 Médicaments

L’office national des produits pharmaceutiques et chimiques (ONPPC) est l’institution

officiellement en charge de l’approvisionnement des structures publiques en médicaments.

Cependant elle souffre de faiblesses structurelles qui entrainent régulièrement des ruptures

dans l’approvisionnement (21). Le secteur pharmaceutique privé s’est développé et sert de

substitut si nécessaire. Les acteurs internationaux de l’aide au développement opérant au

Niger mettent en place des mécanismes parallèles qui se veulent transitoire. Ces structures

temporaires souffrent elles aussi de ruptures de stock.

8.2.4 Gestion du savoir

La prise en charge des cas et les activités préventives sont mise en œuvre au niveau local

sur base de protocoles définis ou adaptés de la littérature internationale au niveau central.

Au fil des ans et des priorités stratégiques de chaque bailleur, les infirmiers sont invités à se

recycler et à participer à des formations. En parallèle avec les campagnes nationales et en

l’absence de coordination entre les différents intervenants, cela peut représenter une charge

de travail et un revenu additionnel considérable pour les équipes cadre de district et les

agents de santé (22).

8.2.5 Logistique et intrants

Les défis logistiques sont nombreux. Les problèmes de corruption et l’état des routes jouent

un rôle important. Le nombre insuffisants de véhicules en état de marche dans un pays

aussi gigantesque pose problème. Les réponses apportées par certains bailleurs sont peut-

être adaptées mais peu susceptible de répondre aux normes de qualité attendues comme

l’illustre le rapport 2010 de l’OMS : « En 2010, l’OMS a doté 165 villages en charrettes avec

attelages pour les évacuations des cas de complications de grossesse et du post-partum

immédiat de la communauté vers les Centres de Santé » (23).

8.2.6 Financement de la santé

Bien que les données disponibles soient peu fiables, il semble raisonnable de conclure que

le financement du secteur public est très limité. Le ministère parle de 10 USD par habitant

en 2008 (24). L’OMS estime à 8 USD par habitant les dépenses privées de santé la même

année. Vingt pourcent des dépenses totales de santé viennent de l’extérieur (10). Les

dépenses totales de santé sont parmi les plus faibles d’Afrique et bien en deçà du minimum

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 19 of 48

proposé par la commission macro economics and health de 35 dollars par habitant et par an

(25) .

Selon les travaux de l’institut pour l’évaluation du secteur de la santé (IHME), entre 2000 et

2009, le Niger a bénéficié d’un accroissement important de l’aide extérieure (26). Depuis

2007 et la mise en exploitation de nouveaux gisements, les ressources de l’état ont été

multipliées par 2,5. Dans le même temps, le budget alloué au ministère n’a cru que de 40 %

(27).

Le cadre des dépenses à moyen terme 2011-2015 a évalué à 6 USD par habitants et par an

les montants additionnels nécessaires pour atteindre les seuls objectifs de survie de la mère

et de l’enfant fixés par le ministère (24).

8.2.7 Gouvernance, qualité et utilisation

Le plan de développement sanitaire 2005-2009 a permis de focaliser l’attention des acteurs

centraux sur les résultats et dans une certaine mesure d’aligner de nombreux bailleurs

bilatéraux et multilatéraux sur les priorités définies de commun accord. Il a permis d’accroitre

la part du budget du ministère allouée aux districts ce qui a permis d’améliorer la

disponibilité des ressources au niveau local. Les moyens et les capacités restent très limités.

Malgré toutes les difficultés rencontrées, l’impression générale est que la qualité au niveau

des centres de santé et des hôpitaux s’est améliorée au cours de la décennie. Suite aux

efforts et aux réformes, la fréquentation des centres de santé et le nombre de césariennes

ont augmenté tout en restant bien en deçà des normes attendues.

8.3 Evolution de la politique de santé de l’enfant

Dans cette partie, nous survolons les grandes tendances de la politique de santé de l’enfant

au Niger. Une grande synchronicité est observée entre les politiques internationales de

santé et les politiques du Niger, signe du lien fort qui uni le Niger à la communauté

internationale, sans porter de jugement sur le sens de cette relation. D’Alma Ata à Busan en

passant par Bretton-Woods et Bamako, le Niger a vu sa politique de santé suivre les

grandes modes de la santé mondiale.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 20 of 48

8.3.1 Le système de santé avant 2000

Avant l’ indépendance, les services de santé sont concentrés dans les zones urbaines. Il

existe, en outre, un « service mobile d’hygiène et de prophylaxie » qui s’occupe notamment

de la vaccination en zone rurale. L’UNICEF s’est déployé en Afrique peu avant les

indépendances et s’est concentré sur les priorités des puissances coloniales, à savoir la

lutte contre les grandes endémies. Son appui était surtout en nature et en formation du

personnel (28).

Dès 1959, l’UNICEF au Niger appuie le développement de services de santé ruraux pour les

mères et les enfants (28). L’essentiel du système de santé reste cependant concentré au

niveau des agglomérations. A partir de 1974, les services sanitaires développent une

approche de santé villageoises de masse avec la mise en place d’équipes de santé

villageoises (29).

Avec la fin du boom de l’uranium, en 1980, la majorité des grands investissements s’arrêtent

et les moyens du gouvernement pour mettre en œuvre une politique sanitaire, qui étaient

déjà limités, se réduisent. La « situation de la survie de l’enfant s’aggrave par rapport au

début des années 1980 malgré les progrès du système de santé » selon un rapport de la

Banque Mondiale (30). Face aux faiblesses du système de santé et dans un contexte

d’ajustements structurels, le projet de soins de santé primaires de qualité et accessibles à

tous, financé par les utilisateurs, communément appelé « Initiative de Bamako », est

développé. Dès 1989, le gouvernement testait deux modèles de recouvrement des coûts

avec l’appui de l’USAID (31;32).

8.3.2 L’émergence des initiatives mondiales de santé de 2000 à 2005

Au tournant du siècle, l’intérêt des bailleurs pour la santé s’accroit. Progressivement, des

moyens supplémentaires sont alloués par les pays donateurs pour la santé dans les pays en

développement. Ces moyens passent par les canaux existants bilatéraux et multilatéraux

mais de nouveaux canaux spécialisés voient le jour tel que l’alliance mondiale pour les

vaccins et la vaccination (GAVI) ou le fonds mondial (Global Fund).

Dès 2003, GAVI appuie le Niger pour le renforcement du programme élargi de vaccination.

Les taux de vaccination s’améliorent rapidement. Selon les données administratives, la

couverture des enfants avec la troisième dose de « Diphtérie Tétanos Coqueluche » (DTC3)

passe de 35% à 52% dès 2003 (33). Depuis 2005, le taux administratif de couverture de

DTC3 est supérieur ou égal à 90% au niveau national avec de grandes variations au niveau

district. (7). La réalité peut, cependant, être éloignée des données administratives. Les

enquêtes trouvent un taux de DTC3 de 34,7% en 2006 et de 64,7% en 2009 (34;35).

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 21 of 48

Outre des moyens financiers, les bailleurs impulsent leur vision dans les politiques de santé

des pays. De plus en plus, les politiques de santé s’orientent vers plus d’efficience, pour

faire face à la demande de résultats par rapport aux objectifs fixés au niveau mondial

notamment dans le cadre des OMD. Dans la droite ligne de l’approche des « soins de santé

primaire sélectifs » (36), l’UNICEF et la Banque Mondiale, avec différents centres de

recherche à travers le monde définissent les interventions ayant le plus grand rapport coût-

efficacité afin de pouvoir sauver un maximum d’enfants (37;38).

Au Niger, dès 2002, l’UNICEF démarre le projet de « stratégie accélérée pour la survie et le

développement de l’enfant » sous forme de projet pilote dans deux districts (39) et d’appui à

la direction de l’évaluation et de la planification du ministère (DEP) avec de l’assistance

technique et la mise en place de l’outil « Marginal Budgeting for Bottlenecks ». Ce projet vise

essentiellement la mise en oeuvre des interventions à haut impact malgré la présence du

terme « développement » dans son appellation (40). La vaccination infantile, les

moustiquaires imprégnées et l’allaitement maternel exclusif font partie de ce premier paquet.

Les faibles progrès enregistrés au cours de l’enquête à indicateurs multiples de 2006 (34) en

matière de survie de l’enfant et la pression internationale pour les progrès vers l’OMD quatre

poussent l’UNICEF à changer de stratégie. Ils abandonnent un autre projet, le projet pilote

« services de base intégrés » censé démontrer le bienfondé d’une approche intégrée du

développement et étendent les activités de survie « pure » à 17 puis pratiquement à

l’ensemble des 49 districts en dehors de Niamey.

8.3.3 La « catastrophe » de 2005 (2005-2010)

La situation nutritionnelle au Niger se dégrade progressivement depuis la grande

sècheresse de 1963. Une combinaison de baisse de la pluviométrie combinée à une

destruction d’origine anthropique du couvert végétal entraine régulièrement un déficit de

production céréalière qui cache mal une inégalité croissante dans l’accès aux ressources

(13). En 2005, lors d’une enquête rapide, Médecins Sans Frontières (MSF) observe des taux

de malnutrition que l’on qualifie de grave dans les situations d’urgence humanitaire

« classiques ». MSF alerte la presse internationale, entrainant une vague d’attention

internationale débouchant sur la mise en place d’une immense riposte selon le modèle

d’urgence humanitaire. Plus de 600 000 enfants seront pris en charge par ce dispositif en

2006. Cette crise a donné un coup de projecteur sur le Niger qui a attirer de nombreux

donateurs, une myriade d’ONGs et d’importantes quantités d’aide supplémentaire pour la

survie des enfants malgré une réticence des autorités du ministère.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 22 of 48

Avec l’éviction du président Mamadou Tandja en 2010, les nouvelles autorités adoptent un

discours qui plait mieux aux bailleurs. La presse relaie à maintes reprises des appels à la

communauté internationale pour lutter contre la malnutrition au Niger (41). Ceci d’autant plus

que les récoltes de 2010 et de 2012 sont encore moins bonnes que celle de 2005 qui a

déclenché cet élan d’aide supplémentaire vers le Niger.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 23 of 48

9 Méthodes

Pour ce mémoire, nous avons suivi les méthodes proposée pour une étude de cas

explicative et rétrospective. Nous avons procédé à une revue de la littérature grise en nous

inspirant de la synthèse réaliste (42). La littérature grise disponible sur le sujet est

conséquente et il est impossible de l’analyser méthodiquement dans le cadre du présent

mémoire. Nous avons évité de nous référer prioritairement aux documents fournis par

l’UNICEF pour nous permettre d’aborder le problème d’un point de vue plus large et plus

indépendant. Notre revue de la littérature a été complétée par une série d’observations

réalisées entre 2005 et 2008 lors de notre séjour au Niger, par une série d’interviews (3) et

de discussions informelles avec les acteurs et chercheurs au fait de la politique sanitaire du

Niger afin de trianguler autant que possible les informations.

Nous avons également utilisé trois bases de données quantitatives existantes : Les données

administratives des centres de santé du Niger (7), la base de donnée des comptes

nationaux de la santé de l’OMS (10) et la base de donnée de l’aide extérieure par pays de

l’IHME (26). Ces données sont incomplètes et parfois basées sur des avis d’experts plutôt

que sur des faits sans que la part de l’un et de l’autre ne soit toujours identifiée clairement.

Ceci limite la validité de ce que l’on peut en faire. Elles ont cependant le mérite de

synthétiser l’information.

Cette étude comporte trois volets. Le premier volet décrit les interventions à haut impact sur

la survie de l’enfant et les trois stratégies qui ont permis leur mise en œuvre. Le deuxième

volet étudie l’évolution de l’aide extérieure au secteur de la santé et sa contribution à la

politique de survie des enfants. Le troisième volet présente une analyse des détenteurs

d’enjeux autour de la réforme de la politique de santé communautaire et son impact sur la

survie de l’enfant.

A partir de ces trois volets, nous développons, dans la conclusion, une analyse critique des

enjeux de la politique de santé de l’enfant au Niger.

9.1 Les interventions et les stratégies

Dans ce volet, nous décrivons les interventions à haut impact citées comme principales par

Amouzou et coll. (3). A partir de la littérature scientifique, nous étudions pour chaque

intervention la durée de son effet au niveau individuel et définissons brièvement ses

modalités de mise en œuvre. Dans un deuxième temps, nous étudions les mécanismes et

éléments du contexte qui déterminent le succès de chacune des trois stratégies de

prestation de service utilisées pour mettre en œuvre les interventions.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 24 of 48

9.2 Aide extérieure pour la santé

Pour ce deuxième volet, nous avons comparé les données publiées par IHME (26) et

disponibles sur leur site aux données publiées par l’OMS dans la base de données des

comptes nationaux de la santé (10). Nous avons identifié un nombre de bailleurs absents de

la base de données IHME et avons complété la base de données à partir de rapports de

l’UNICEF, de MSF et de l’OMS qui sont les trois principaux acteurs absents de la base de

données IHME.

9.3 Analyse des détenteurs d’enjeux

L’analyse des détenteurs d’enjeux est réalisée principalement sur base des observations de

l’auteur, présent au Niger entre 2005 et 2008 en tant qu’expert auprès de l’UNICEF, et de

ses discussions avec les différents acteurs depuis 2005.

La question auquel cette analyse tente de répondre est de savoir si le ministère doit

s’investir au niveau des cases de santé communautaires construites par le « Programme

Spécial » du président. L’analyse se situe en 2008.

Dans un premier temps, Plus de 200 acteurs intéressés par la problématique de la santé

communautaire au Niger ont été listés. Ils ont été classés selon le groupe auquel ils

appartiennent en reprenant la classification proposée par Kingdon et Lemieux (43).

L’analyse retient les 25 acteurs les plus importants, à la fois des individus et des

organisations, sélectionnés pour leur capacité à influencer la politique au niveau du

ministère. Pour chaque acteur est défini sur une échelle numérique le degré d’importance

qu’il accorde au problème étudié, la position qu’il choisit en faveur ou contre la politique de

santé communautaire et sa capacité à l’influencer. Un commentaire détaille sa position. Le

tableau détaillé est présenté en annexe 1. Le Tableau 3 illustre la structure de l’analyse.

Tableau 3 Structure de l’analyse des détenteurs d’enjeux au Niger concernant la politique de santé au niveau communautaire en 2008.

Fonction Institution Niveau

Impo

rtanc

e

Pos

ition

influ

ence

Commentaire

Président Gouvernement National 4 10 10 Le président a utilisé l'argent de l'initiative pays pauvres très endettés pour (…)

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 25 of 48

10 Résultats

10.1 Les interventions et les stratégies

Ce volet décrit les interventions et les stratégies qui ont été mises en œuvre au Niger entre

2000 et 2010 pour réduire la mortalité infanto-juvénile. Dans un premier temps nous

décrivons brièvement le contenu des interventions avant d’analyser quelques mécanismes

et éléments du contexte pour chacune des trois stratégies principales utilisée pour mettre en

œuvre les interventions (3;8).

10.1.1 Les interventions à haut impact

Les interventions à haut impact pour la survie de l’enfant sont des activités sélectionnées

pour leur bon rapport coût-efficacité sur le taux de mortalité infanto-juvénile. Bien que la

définition fait référence au coût-efficacité, les experts utilisent souvent le coût marginal de

l’intervention pour étudier la pertinence de sa mise en œuvre, partant du principe que les

bases existantes du système de santé peuvent être mises à profit. L’article paru dans le

Lancet en 2003 « How many child death can we prevent this year ?» illustre cette approche

par interventions (37).

La distribution de moustiquaires imprégnées dans les zones à forte endémicité palustre ou

la vaccination des enfants contre la rougeole sont deux exemples d’interventions à haut

impact. En effet, la rougeole comme le paludisme sont des maladies qui ont un taux de

létalité important, en particulier dans un contexte de sous nutrition et de faible performance

des services curatifs. Dès lors, le fait de dormir sous une moustiquaire ou d’être vacciné

contre la rougeole réduit significativement le risque de contracter la maladie et, partant de là,

d’en mourir. De plus comme ces interventions peuvent être planifiées et ne doivent pas être

répétées trop souvent, elles sont plus faciles à organiser que la mise en place de soins

curatifs de qualité accessible en tout temps. La moustiquaire peut théoriquement servir

pendant quatre ans et les enfants correctement vaccinés contre la rougeole ont 95% de

chance d’avoir une immunité suffisante pour plus de dix ans (37). Dans le tableau 4 ci-

dessous, nous décrivons les interventions à haut impact identifiées par Amouzou et coll.

Pour chaque intervention nous reprenons sa contribution relative à la réduction de la

mortalité infanto-juvénile au Niger au cours de la décennie selon les auteurs, la durée de vie

de l’intervention pour chaque enfant si l’intervention n’était pas répétée ou poursuivie et

nous donnons enfin une description du contenu de l’intervention.

Dans notre expérience, il apparait clairement que la priorisation des interventions à haut

impact dans les politique de santé de l’enfant dans les pays en développement est

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 26 of 48

l’approche retenue par l’UNICEF pour atteindre l’OMD quatre visant à réduire la mortalité

infanto-juvénile de deux tiers à l’horizon 2015. L’UNICEF s’inscrit dans une approche de

soins de santé primaire sélectif visant à la mise en œuvre d’un paquet limité d’interventions

à haut impact. Certains acteurs critiquent cette focalisation à outrance sur les « fruits les

plus bas » (44) et sur une approche sélective des soins de santé primaire (45).

Tableau 4 Description et contribution à la réduction de la mortalité infanto-juvénile des principales interventions à haut impact mises en œuvre au Niger entre 2000 et 2008 par stratégie de mise en œuvre

Stratégie / Nom de l'intervention

Réduc-tion de la mortalité

Durée de vie

Description de l'intervention

Services Curatifs Traitement du paludisme

9% Immédiat

Distribution d'un traitement antipaludéen efficace dans les 24 heures du début de la fièvre

Traitement de la pneumonie

8% Immédiat

Traitement antibiotique

Traitement de la diarrhée (SRO+Zinc)

5% Immédiat

Administration de sels de réhydratation orale et de zinc

Activités préventives Dormir sous une moustiquaire imprégnée

25% 4 ans Distribution à chaque ménage

Supplémentation en vitamine A

9% 6 mois

Une capsule de vitamine A à haute concentration tous les six mois

Vaccination contre la rougeole

5% 20 ans

Administration d'un vaccin vers 12 mois

Vaccination contre le Hemophilus influenza B

4% > 5 ans

Administration de 3 doses de vaccins entre 2 mois et 12 mois.

Vaccination contre le tétanos

2% > 5 ans

Vaccination des mères avant l'accouchement 2 à 5 doses.

Prise en charge de la malnutrition aigue Réduction de la prévalence de la malnutrition chronique (retard de croissance)

10% ? Effet collatéral de la prise en charge de la malnutrition aigüe combiné aux distributions générales de vivres et à l'amélioration de la situation économique du ménage, le cas échéant.

Réduction de la prévalence de la malnutrition aiguë (cachexie)

9% ? Prise en charge de chaque enfant avec des aliments thérapeutiques prêts à l'emploi distribués au niveau des centres de nutrition

Source : Amouzou et coll. (3), Chopra et coll. (46), Hercot et Coll. (8)

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 27 of 48

10.1.2 Trois stratégies à la loupe:

L’ étude de Amouzou et coll. (3) s’est concentrée sur les aspects d’organisation des services

pour la mise œuvre des interventions citées ci-dessus. A la lecture de leur travail, nous

concluons que trois stratégies ont permis d’atteindre la plus grande part de la réduction de la

mortalité infanto-juvénile (8). Par stratégie nous entendons un mode d’organisation des

services de santé qui permet de mettre en œuvre l’intervention. Chaque stratégie peut être

vue comme un sous ensemble du système de santé avec ses spécificités propres en terme

d’intrants, de modalités pratiques d’organisation des services mettant en œuvre

l’intervention, de gouvernance et de résultats observés.

Les trois stratégies identifiées sont responsables de 86 % de la réduction de la mortalité

infanto-juvénile au Niger entre 1998 et 2009. Il s’agit de (1) l’amélioration de la qualité et de

l’accessibilité des services curatifs ciblant les principales maladies tueuses de l’enfant : la

pneumonie, la diarrhée et le paludisme (22 %), (2) les activités préventives sous forme de

campagnes et de sorties vers les villages permettant d’offrir des interventions préventives,

tel la vaccination (45 %) et (3) la prise en charge de la malnutrition aigüe (19 %). Au-delà

des aspects organisationnels, les autres éléments du système ont un rôle important dans la

réussite de la stratégie jusqu’à présent mais plus encore pour l’avenir. Nous détaillons,

ci-après, les grands enjeux de chacune d’elles dans le contexte du Niger.

10.1.2.1 Amélioration de l’accessibilité et de la qualité des services curatifs.

Amouzou et coll. ont mesuré que les services curatifs sont responsables de 22 % de la

réduction du taux de mortalité infanto-juvénile Différentes réformes sont mises en œuvre en

parallèle depuis l’an 2000 pour améliorer l’accessibilité et la qualité des services curatifs

offerts par les structures publiques au Niger. Les principales réformes sont :

1. Un accroissement de la couverture géographique en centres de santé offrant des

soins de santé intégrés de qualité (Tableau 2).

2. Depuis 2007, la gratuité de certaines prestations pour les usagers au sein des

structures publiques, notamment les soins curatifs pour les enfants de moins de 5

ans.

3. Le développement d’un réseau de cases de santé en milieu rural offrant un paquet

limité d’interventions aux populations vivant à plus de cinq kilomètres d’un centre de

santé.

4. Une amélioration de la performance des hôpitaux de districts. Celle-ci a été

améliorée par la remise à niveau de blocs chirurgicaux dans les districts et le

renforcement des ressources humaines (47;48). Le nombre de décès d’enfants

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 28 of 48

évités par ce niveau nous semble encore fort limité actuellement et nous ne le

détaillerons pas ici.

10.1.2.1.1 Accroissement du nombre de centres de santé intégrés. Malgré que le nombre de centres de santé passe de 422 à 849 entre 2000 et 2011, seul 48

% de la population habite à moins de cinq kilomètres d’un centre de santé intégré en 2011

pour 32 % en 1992 (7). En outre le personnel est bien souvent mis à profit pour mettre en

œuvre les campagnes et sorties foraines décrites dans la section suivante. Ceci a un impact

sur la permanence et la qualité des soins décrit dans d’autres pays et confirmé par nos

observations au Niger (49;50).

L’UNICEF et l’OMS tentent de contribuer à une amélioration de la qualité des services pour

les enfants en soutenant depuis les années nonante la « prise en charge intégrée des

maladies de l’enfance » (PCIME). Celle-ci propose une prise en charge standardisée des

pathologies les plus sévères du jeune enfant.

10.1.2.1.2 Gratuité des services pour les enfants de moins de 5 ans

En avril 2006, le président de la république, déclare que les enfants de moins de 5 ans ont

accès sans paiement direct aux services de santé organisés par l’état.

Comme Ridde l’a décrit, et comme nous l’avons personnellement observé, aucune

préparation de la réforme n’avait été entreprise au préalable (51). En pratique cette mesure

n’a effectivement été mise en oeuvre qu’à partir de mars 2007. Le succès de la mesure

dépasse rapidement la capacité financière du trésor public qui en 2012 avait accumulé un

retard d‘impayés de 5.5 milliards de Francs CFA malgré des décaissements entre 2007 et

2011 qui s’élevaient à 32 milliards de FCFA et l’aide de plusieurs bailleurs de fonds. Les

retards de payements ont été si importants au cours des premiers mois que certains

prestataires étaient tentés de réintroduire la tarification. On lira à ce sujet les études de

Ridde, Olivier de Sardan et l’équipe du LASDEL (51-53).

Le nombre de consultations pour les moins de 5 ans passe en moyenne nationale de 0,41

nouveaux-cas par enfant et par an en 2005-2006 à 1,26 nouveaux-cas par enfant et par an

en 2008-2011 (Figure 3). Le système de santé est mis sous pression pour assurer cette

accroissement de l’activité tant en terme de disponibilité des intrants, de charge de travail

mais surtout de financement de la mesure. Malgré cela, le nombre d’enfants traités pour le

paludisme a été multiplié par trois entre 2005 et 2009 selon MSF (54).

10.1.2.1.3 Construction de 2500 cases de santé

Le « Programme Spécial » du président a permis de construire 2500 cases de santé entre

2003 et 2006. Ce programme est financé avec les fonds libérés par l’initiative « Pays

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 29 of 48

Pauvres Très Endettés » (55). Le ministère, appuyé par les partenaires a assuré la

formation des agents de santé communautaire qui les occupent. Initialement payés par le

programme spécial, leurs salaires ont ensuite été transférés sur le budget des collectivités

locales. Ce niveau supplémentaire de la pyramide sanitaire a permis d’accroitre la

couverture géographique à près de 80 % de la population.

Le niveau de qualité des services offerts par les cases de santé est très faible. Le

gouvernement et l’OMS ont tendance à ne pas les inclure dans la pyramide sanitaire: La

couverture géographique reprise dans l’annuaire 2011 ne les inclus pas (7). Cette position

se défend mais les cases de santé ont l’avantage de mettre à proximité des enfants des

médicaments vitaux avec un faible niveau de technicité. Selon nous, cette disponibilité

accrue suffit probablement à maintenir en vie un grand nombre d’enfants.

10.1.2.2 Les activités programmables

D’après les travaux de Amouzou, et coll. cette stratégie est responsable de 45 % de la

réduction observée de la mortalité des enfants de moins de 5 ans (3). Ces activités

consomment également une grande part des ressources du système de santé publique.

Cette stratégie comprend deux type de services : D’une part la « stratégie avancée

durable » mise en oeuvre autour du programme élargi de vaccination (PEV) renforcé depuis

2003 et, d’autre part, une très grande série de campagnes de porte en porte organisées

depuis l’an 2000. Outre un minimum de quatre campagnes annuelles de vaccination contre

la polio, on dénombre à plusieurs reprises au cours des années 2005 à 2010 trois à cinq

campagnes additionnelles pour vacciner contre la rougeole, la méningite ou le tétanos.

Certaines campagnes ont aussi visé la distribution d’antiparasitaires ou de moustiquaires.

10.1.2.2.1 Le PEV renforcé

Le PEV renforcé utilise l’approche « Reach Every District » et vise à organiser la vaccination

hors les murs en « stratégie avancé » (56). Le programme fourni aux agents de santé des

districts et centres de santé des vaccins et des moyens - logistiques et financiers -pour

vacciner les enfants dans leurs villages et hameaux à heures et dates régulières. Il est aussi

fait usage de ce contact pour offrir d’autres interventions tel que la consultation prénatale ou

l’éducation à la santé.

Depuis 2003, le financement des vaccins du PEV de routine est assuré en partie par l’Etat et

en partie par les bailleurs principalement par l’entremise de GAVI. Certains retards de

paiements ont entrainé le blocage des approvisionnements en vaccins parfois pendant

plusieurs mois, entrainant une baisse de la couverture vaccinale. Au-delà de l’achat des

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 30 of 48

vaccins assuré par le gouvernement et GAVI, l’UNICEF et l’OMS tentent bon an, mal an de

récolter l’argent nécessaire à la mise en œuvre du PEV renforcé.

10.1.2.2.2 Les campagnes

Depuis le début des années 2000, des campagnes nationales ou sous nationales ont été

organisées régulièrement pour différents problèmes de santé publique : Eradiquer la polio,

lutter contre la carence en vitamine a, le paludisme, la rougeole et le tétanos néonatal. Pas

moins de soixante campagnes d’éradication de la polio ont déjà été organisées au Niger

depuis 1995 (56). La polio ne tue pas énormément d’enfants mais l’importance des moyens

déployés pour lutter contre la polio a régulièrement permis d’y coupler, pour un très faible

coût marginal, des interventions à haut impact tel la supplémentation en vitamine A et la

distribution des moustiquaires.

Des campagnes d’urgence, contre la polio, la rougeole ou la méningite, sont également

organisées en riposte aux épidémies. Hormis les ressources humaines, ces campagnes

sont essentiellement financées par l’aide internationale, souvent des initiatives mondiales

pour la santé représentées localement par l’UNICEF ou l’OMS, mais également des ONG

internationales.

Le plus souvent ces campagnes font appel au personnel médical des centres de santé qui

quittent alors leur poste pour une à deux semaines selon les cas, et ce au minimum quatre

fois par an depuis 2003. Elles ont un effet négatif sur la permanence des soins curatifs mais

elles amènent à la presque totalité des enfants du pays des interventions à haut impact. La

durée de l’impact de ces interventions est cependant limitée dans le temps (voir Tableau 4).

Les campagnes doivent donc être reprises régulièrement soit parce que les enfants ne sont

plus couverts, soit parce qu’une nouvelle cohorte d’enfants n’en a pas encore bénéficié.

Avec la sortie du Niger des pays endémiques, il est fort probable que le nombre de

campagnes contre la polio, utilisées comme vecteurs d’autres interventions à haut-impact,

se réduisent drastiquement. Il y a donc une certaine pression pour intégrer ces activités

dans la routine (57). Cette intégration fait cependant face aux défis inhérents au système de

santé que ces campagnes verticales permettaient précisément de contourner :

sous-financement, faible couverture géographique, insuffisance du personnel et peu de

mécanismes opérationnels de régulation de la qualité et de la performance.

Cette stratégie a vraisemblablement permis d’accroitre la couverture de ces interventions

programmables de manière conséquentes entre 2000 et 2010. A titre d’exemple, le nombre

d’enfants recevant trois doses de DTC est passé de 22 % à 89 % entre 2000 et 2009 selon

les enquêtes de survie de l’enfant menées au Niger (35).

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 31 of 48

10.1.3 La prise en charge de la malnutrition aiguë

Amouzou et coll. avancent que 19 % de la réduction de la mortalité infant-juvénile sont liés

aux programmes de prise en charge de la malnutrition aiguë. C’est en 2005, suite à un

reportage de la BBC et aux déclarations de MSF que le problème de malnutrition au Niger

est apparu sous les feux des projecteurs de la presse internationale. Rapidement, une

réponse internationale s’est organisée. Plusieurs auteurs ont étudié les enjeux de cette crise

de 2005 notamment dans un livre édité par Crombé et Jézéquel paru en 2007 (12) et sur le

site du LASDEL par Olivier de Sardan, Koné et d’autres1.

Avant la prise de conscience internationale, les problèmes de nutrition étaient plutôt perçus

par les autorités comme une insuffisance de production analysée en terme de zones ou la

disponibilité alimentaire était insuffisante. Elles proposaient une réponse structurelle et

veillait à maintenir l’équilibre des prix du marché en calculant les quantités de céréales

distribuées (58). Différents acteurs étaient présent pour prendre en charge la malnutrition

des enfants sans toutefois couvrir une part significative des besoins.

Entre juillet et décembre 2005, le nombre de centres de nutrition est passé de 144 à 861

(58). De nombreuses ONG ont accru ou débuté leurs activités. Plusieurs bailleurs dont

ECHO et DfID ont financé des plans d’urgence à moyen termes (59). L’UNICEF à lui seul a

récolté plus de 6 millions d’Euro pour la malnutrition en 2005 (18). Les experts de santé

publique présents au Niger ont, eux aussi, prêté plus d’attention à la malnutrition à compter

de cette date. Cette mobilisation a permis de poursuivre l’accroissement des volumes d’aide

au secteur de la santé entamée dès les années 2000 pour atteindre 10,4 USD par habitant

en 2008 (voir section 10.2).

Un changement opérationnel qui a probablement eu des conséquences importantes sur la

couverture des services est l’introduction dans le protocole national de prise en charge des

enfants malnutris sévères des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi en 2006. Ce

changement fut si bénéfique que l’approche testée au Niger est maintenant validée au

niveau international (54;60).

Ce n’est pas seulement au niveau des intervenants que les choses ont changé. Dans son

étude Koné parle de changement de perception par les populations Haussa de la réalité

même du concept de malnutrition suite à l’introduction d’un nouveau mot dans le vocabulaire

Haussa pour désigner la malnutrition « kwamisu » (61).

1Etudes et Travaux n°53, 59, 63 à 68 disponibles sur le site: http://www.lasdel.net/collection.php

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 32 of 48

Entre 2005 et 2010, les autorités ont tenu un discours assez réticent sur l’approche curative

des enfants malnutris. Avec le changement de régime, suite au coup d’état et aux élections,

il semble que les autorités, pour des raisons que nous n’explorerons pas ici, changent de

discours et font ouvertement appel aux organisations internationales pour venir en aide aux

enfants souffrant de malnutrition (59;62;63).

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 33 of 48

10.2 Aide extérieure pour la santé

Bien que les informations disponibles sur le financement de la santé au Niger soient peu

fiables, il apparait que les dépenses publiques et l’aide extérieure combinée n’ont encore

jamais atteint les 20 dollars par habitant et par an, même en 2008, qui semble être l’année

où le plus d’aide a été allouée au Niger au cours des vingt dernières années (10). Dans

cette partie nous présentons les résultats de notre analyse de l’aide extérieure apporté au

secteur de la santé au Niger. Nous étudions l’année 2008 en détail avant de décrire

l’évolution historique. Nous observons dans quelle mesure la réduction de la mortalité des

enfants est synchrone avec l’augmentation de l’aide dans le secteur de la santé. Nous

essayons aussi de comprendre quel part de ce budget bénéficie au volet de survie de

l’enfant.

Notre analyse des données disponibles sur le site de l’IHME montre que de nombreux

bailleurs actifs au Niger ne sont pas repris comme donateurs au Niger. L’absence de

l’UNICEF et de MSF est particulièrement préoccupante. Pourtant, selon nos estimations, ces

deux acteurs représentent 40% de l’aide extérieure au secteur de la santé en 2008. La vaste

majorité de leur budget contribue à la survie de l’enfant. D’autres acteurs tel que Cuba et

l’Arabie Saoudite (au niveau des bilatéraux), l’OMS, l’UNFPA, et le PNUD (au niveau des

multilatéraux) et des myriades d’ONGs sont également absents de la base de données par

pays bénéficiaire de IHME. L’IHME justifie qu’il est difficile d’éviter les doubles comptages et

de comptabiliser l’aide qui n’est pas enregistrée selon les standards OCDE. Ils optent pour

USD constant 2010 ; Source : IHME, OMS, auteur.

Figure 4 Aide extérieure pour la santé par habitant. Comparaison de différentes sources de données, Niger, 1990-2010.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 34 of 48

une approche conservatrice qui est préjudiciable à l’analyse par pays. Dans la Figure 4 nous

illustrons les estimations de l’aide extérieure allouée au secteur de la santé au Niger

entre 1990 et 2010 selon l’OMS, le IHME et nos recherches (10;26).

10.2.1 L’année 2008, une année faste pour l’aide au secteur de la santé.

L’année 2008 est l’année où l’OMS a calculé le plus haut taux de dépenses totales de santé

au Niger pour les 15 dernières années soit 19 dollars par habitant (10). D’après les données

officielles, en 2008, le budget du ministère est de 10 dollars par habitant soit 55,3 milliards

de FCFA. Ce montant inclut une part variable d’aide extérieure « on budget » estimée à 34

% en 2007 (24).

Une grande part de ces dépenses sert à couvrir les frais de fonctionnement. Nous avons pu

trouver des chiffres de 2011 qui montrent que les fonds publiques servent à couvrir les couts

récurrents, principalement les salaires (20 %) et les crédits aux structures de références (50

%). Le reste servant à des investissements pour développer et réhabiliter l’infrastructure

sanitaire. Ce qui laisse un marge infime pour la mise en œuvre du plan de développement

sanitaire. On voit ici tout le poids que peut avoir l’aide extérieure surtout lorsqu’elle est une

aide hors budget. Le volume de l’aide hors budget est assez obscure, faute de système de

monitoring performant.

Nous avons estimé que le Niger a reçu en 2008, 10,4 dollars par habitant en aide extérieure

pour la santé. A ce montant s’ajoute les dépenses de l’état sur fonds propres et les

dépenses directes des ménages. La nouvelle estimation des dépenses totales de santé

dépasse alors les 26 dollars par habitant. On est encore loin toutefois des 35 dollars par

habitant nécessaire pour offrir un paquet minimum de services tel que recommandé par la

commission macro-économie et santé de l’OMS en 2001 (25).

Il ne nous a pas été possible d’établir un relevé de la part de l’aide extérieure allouée à la

survie de l’enfant mais au vu de l’importance de l’appui apporté par l’UNICEF et MSF,

celle-ci dépasse largement les 50 %. Si on y ajoute les montants déboursés pour la gratuité

par le gouvernement, l’AFD et la Banque Mondiale, cela représente la plus grande

proportion des dépenses publiques de santé du Niger hors investissements, salaires et

dépenses des hôpitaux. Ces données sont cependant d’une fiabilité toute relative. Dans le

Tableau 5 ci-dessus, nous illustrons les variations importantes selon les sources des

dépenses dans le secteur de la santé au Niger. On voit notamment que le montant de l’aide

varie de 3,8 à 10,4 dollars par habitant selon la source.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 35 of 48

Tableau 5 Dépenses de santé. Comparaison de différentes sources de données, Niger, 2008.

Bailleur Montant (000.USD)

per capita USD

Source

Dépenses totales de santé 281 065 19,1 WHO Dépenses gouvernementales de santé 145 668 9,9 WHO

Dépenses gouvernementales de santé 121 843 8,3 MEF (24) Ressources extérieures allouées à la santé 56 490 3,8 WHO Ressources extérieures allouées à la santé 85 987 5,8 IHME Ressources extérieures allouées au programme sectoriel santé

112 770 7,7 AFD (64)

Ressources extérieures allouées à la santé 153 530 10,4 D Hercot Fonds Commun 18 000 1,2 AFD

UNICEF budget santé et nutrition 30 309 2,1 UNICEF

Tous les montants sont en dollars courants de 2008

10.2.2 Evolution historique de l’aide au secteur de la santé

Nous avons identifié trois périodes caractérisant d’une part les volumes de l’aide au secteur

de la santé au Niger entre 1990 et 2010 illustrée dans la Figure 4 et d’autre part le nombre

d’acteurs tel qu’illustré dans la Figure 5. Jusqu'en 2000, l'aide extérieure a oscillé entre 1 et

2 USD par habitant. Seul quelques acteurs sont présents. Les Etats Unis, la France et la

Commission Européenne sont les principaux. Les agences des Nations Unies et quelques

autre acteurs bilatéraux ou ONG sont également présents avec des montants d’aide peu

importants. La survie de l’enfant n’est pas une priorité.

Entre 2000 et 2005, l'aide par habitant augmente lentement pour atteindre environ 4 USD.

Quelques nouveaux acteurs interviennent. On note notamment l’arrivée des initiatives

mondiales de santé tel que le Rotary, GAVI et le Fonds Mondial. L’essentiel de ces

nouveaux acteurs visent déjà les interventions bénéficiant aux enfants.

Entre 2005 et 2008, le niveau de l’aide a connu une nouvelle augmentation. Il est resté au-

dessus de 6 USD et a culminé à 10,4 USD en 2008. Le nombre d’acteurs a également

augmenté pour atteindre 22 en 2009 selon IHME.

La chute observée en 2009 est la conséquence des tensions politiques qu’a connu le Niger

et le gel de l’aide décidé par certains pays donateurs. Il est difficile de prédire les niveaux

d'aide au-delà de 2010 vu les nombreux changements au niveau national et international.

D’une part l’accroissement des recettes propre du Niger depuis 2007 et la crise économique

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 36 of 48

mondiale laissent présager un rôle accru des ressources propres du Niger pour financer le

secteur de la santé. D’autre part, la concentration prédite de l’aide vers les pays fragiles et

l’importance accordée à la survie de l’enfant comme priorité de la santé mondiale font

penser que les financements extérieurs seront maintenus, voir augmentés, pour la politique

de survie de l’enfant au Niger. Certains auteurs pensent que cette aide suivra des canaux

hors budget qui peuvent garantir une appropriation par les autorités des pays fragiles et des

résultats mesurables pour justifier l’aide auprès du public des pays donateurs (9).

L’éradication possible de la polio en Afrique à moyen terme verra aussi le Rotary réorienter

ses efforts. Cela signifie pour le Niger une opportunité de moins pour financer des journées

qui intègrent la vaccination contre la polio à d’autres interventions à haut impact quatre fois

par an en porte à porte sur tout le territoire.

Cette analyse révisée des données de l’OMS et de l’IHME montre à quel point entre 2000 et

2010 les moyens extérieurs à disposition du secteur de la santé au Niger se sont accrus.

Nous pensons que la grande majorité de cette aide a été utilisée pour la mise en œuvre des

interventions à haut impact sur la survie des enfants. Ces données montrent également

l’accroissement de la fragmentation de l’aide dans le secteur de la santé au Niger.

Figure 5 Nombre de donateurs présents par année, Niger, 1990-2010

Source Base de données IHME disponible sur le site healthmetricsandevaluation.org/

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 37 of 48

10.3 Analyse des détenteurs d’enjeux autour de la réforme de la santé communautaire en 2008

Dans cette section, nous étudions la position des acteurs par rapport à la réforme de la

santé communautaire mise en œuvre au Niger en prenant comme référence la période de

2008. Cette réforme a permis d’étendre la couverture géographique à 80 % de la population

pour un paquet de services très limité dans son étendue et sa qualité. Dans le cadre de la

survie de l’enfant, il s’agit principalement de la mise à disposition des populations de trois

interventions à haut impact : le traitement du paludisme, de la pneumonie et de la diarrhée.

Combiné à la gratuité, l’accès au traitement pour les enfants en zone rurale a été fortement

amélioré.

En 2008, se pose la question de savoir si le ministère doit s’investir au niveau des cases de

santé communautaires. Jusqu’alors, le projet a été porté par le « Programme Spécial » du

président qui souhaite que le ministère prenne la relève.

Les résultats de cette analyse sont présentés de manière succincte dans la Figure 6. Les

détails de notre analyse se retrouvent dans l’annexe 1 pour les 25 acteurs principaux.

Schématiquement on peut dire qu’un grand nombre d’acteurs sont plutôt contre l’idée d’un

programme de santé communautaire mais que les quelques acteurs qui le soutiennent ont le

pouvoir de faire passer la réforme et le soutien des acteurs de terrain, y compris des

populations rurales.

On peut regrouper les acteurs plutôt opposés en trois groupes selon leurs motivations.

Premièrement, une résistance normative qui veut que les acteurs mettent en œuvre les

interventions définies dans le plan de développement sanitaire et en respectant le rôle de

régulateur et d’agent de mise en oeuvre du ministère lui-même. Or, le volet communautaire

est peu présent dans le plan de développement sanitaire 2005-2010. On retrouve par

exemple dans ce groupe les assistants techniques qui œuvrent à la mise en œuvre du PDS,

la cellule de planification du ministère et les représentants des bailleurs qui ont décidé de

financer le fonds commun d’appui au PDS. Deuxièmement, une autre ligne de résistance a

trait à la pertinence perçue de mettre des moyens pour la mise en œuvre d’interventions

communautaires visant principalement les enfants de 1 à 5 ans au détriment d’interventions

pouvant agir sur la survie des mères, perçue comme plus prioritaire par certains. Il est vrai

que la mortalité maternelle au Niger est très élevée et la moins susceptible de progresser

par une approche communautaire. Dans ce groupe, se situe la secrétaire générale du

ministère et l’UNFPA. Troisièmement, un groupe d’acteurs défend la position centrale que

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 38 of 48

devrait jouer le personnel médical formé et compétent fournissant des interventions de

meilleure qualité dans des structures mieux équipées. Les assistants techniques de l’OMS

mais également le personnel médical du ministère et les syndicats soutiennent cette

position.

Certains acteurs influents sont plutôt favorables au développement d’un niveau de services

supplémentaire, moins technique et plus facile à mettre en œuvre à grande échelle.

L’UNICEF est particulièrement intéressé par cette approche qu’il défend depuis longtemps

(36;65). De nombreuses ONG locales et internationales, de même que les autorités locales

ne dépendant pas du ministère de la santé soutiennent cette réforme. L’acteur le plus

important qui a permis de passer au-dessus des résistances décrites ci-dessus a

probablement été le président de la République qui en faisant construire les cases de santé

à travers le pays sans l’aval du ministère a permis de facto d’installer un niveau

supplémentaire à la pyramide sanitaire. Une fois les cases construites, il a été possible à

l’UNICEF et ses acteurs alliés de plaider pour la mise en œuvre d’un paquet sélectif

d’interventions dans ces structures qui seraient sinon peut-être restées vides.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 39 of 48

Légende: En ordonnée, on a défini l’opinion des principaux acteurs par rapport à la politique de santé communautaires de peu favorable à très favorable En abscisse, les acteurs sont classés selon l’importance qu’ils accordent à la question indépendamment de leur opinion. A quel point ils sont prêts à se mouiller pour la question. La taille des sphères décrit la capacité de chaque acteur à influencer la formulation de cette politique de santé communautaire au Niger. Chaque couleur représente un groupe d’acteurs selon Kingdon et Lemieux : - Représentants élus : Mauve et ligne interrompue en alternance ; - Représentants nommés (dans ce cas des agents du MSP) : Vert et traits interrompus :; - Représentants nommés : agents et institutions internationaux : Bleu et 3D sauf UNICEF en plus foncé et sans 3D - Intéressés : ONG : Orange foncé, briques horizontale - Individus : population rurale : Orange clair, lignes ascendantes Source : auteur

Figure 6 Opinion, importance et influence des principaux détenteurs d’enjeux de la politique de santé communautaire en 2008.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 40 of 48

11 Discussion

Les résultats présentés dans ce mémoire sont le fruit d’une revue de la littérature grise, de

mes observations et de discussions avec des acteurs au Niger. Dans la mesure du possible,

les affirmations sont vérifiées et triangulées. Il faut cependant reconnaître un part de

subjectivité dans ce mémoire. La qualité du travail serait grandement améliorée s’il avait pu

se faire de manière plus itérative et en équipe. Mon départ du pays depuis 2008 peut

également m’avoir fait manquer certaines évolutions que je n’ai pas pu détecter dans la

littérature. Comme le soulignent Olivier de Sardan et Ridde, une bonne part de la littérature

grise n’est pas si indépendante que cela, y compris les rapports de consultants

« indépendants », et elle peut de ce fait refléter une certaine réalité perçue par le prisme de

l’auteur ou du commanditaire (52).

Ce mémoire développe l’hypothèse avancée par Amouzou et coll. selon laquelle les

interventions à haut impact ont joué un rôle majeur dans la réduction de la mortalité

infanto-juvénile au Niger (3). Bien que nous soyons assez convaincu de l’importance de

cette hypothèse, il est probable que d’autres déterminants de la santé ont joué un rôle

significatif. Ce mémoire n’aborde pas les changements hors du secteur de la santé.

Ceux-ci sont difficiles à étudier car la relation de cause à effet est complexe à démontrer. Le

changement d’attitude des mères ou des pères vis-à-vis de la malnutrition de l’enfant, tel

que décrit par Oumarou et coll. (66), pourrait à lui seul expliquer une grande variabilité de la

mortalité sans que cela soit mesurable selon les critères utilisés dans l’outil « LiST » à la

base des calculs de réduction de la mortalité utilisé par Amouzou et coll. (67).

Des études aussi répandues que les Enquêtes Démographiques et de Santé présentent

certaines limites qui peuvent influencer les résultats observés de manière significative. Leur

répétition limite ce biais sans pour autant l’exclure. Il n’est pas clair à quel point les

enquêteurs sont indépendants et neutres, étant en général fonctionnaires du gouvernement

ou d’une agence internationale. Les publications d’un centre comme le LASDEL, qui

s’affirme plus indépendant, sont d’ailleurs plus critiques (52;66).

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 41 of 48

12 Vers ou va la politique de survie de l’enfant au Niger?

Il ressort de cette étude que la mise en œuvre de la politique de survie de l’enfant

s’appuyant sur trois stratégies qui est décrite dans ce mémoire a joué un rôle important dans

la réduction de la mortalité des enfants de moins de cinq ans au Niger. On observe que

l’UNICEF et certains acteurs alliés poursuivent avec plus ou moins d’intensité un programme

de soins de santé primaires sélectifs, visant en priorité la survie des enfants jusqu’à leur

cinquième anniversaire.

Comme nous le montrons dans ce mémoire, certains éléments du contexte ont contribué au

succès de cette approche. L’augmentation de l’aide extérieure - principalement par des

canaux hors budget et verticaux - et les décisions du président, peut-être sous la pression

de « l’initiative pays pauvres très endettés » ont certainement joué un rôle clé.

La limite de cette approche « sélective » est que le nombre d’interventions qui ont un coût

marginal très faible est restreint. Même s’il reste de la marge au Niger, il y a une limite à

l’impact que l’on peut attendre de cette approche même du point de vue strictement

« survie » de l’enfant. Par ailleurs, on ne peut pas parler de renforcement du système de

santé au sens large. Les autres problèmes de santé, tels que la santé maternelle, la santé

de la reproduction, les maladies chroniques ou la traumatologie, sont toujours aussi peu pris

en charge. Ils sont d’ailleurs difficilement améliorés par des interventions simples, à faible

coût et à haut impact.

Est-ce que la politique de survie de l’enfant est durable au Niger ? La durabilité de la

politique dépend non seulement de la capacité des bénéficiaires, -état, collectivité,

individu,… - à poursuivre le financement mais, comme le soulignent Gilson et Schneider,

dépend aussi de la volonté politique et de la capacité managériale des personnes qui vont

poursuivre la politique (68).

Si on se place strictement du point de vue de l’objectif de « survie » des enfants jusqu’à leur

cinquième anniversaire, la durabilité de la politique de survie de l’enfant tel qu’elle est mise

en œuvre au Niger connait des opportunités et des menaces.

En terme d’opportunités soulignons tout d’abord l’adhésion de nombreux acteurs à certaines

interventions clés : la malnutrition, la vaccination et les soins curatifs. Deuxièmement,

l’inscription de l’approche survie dans les documents de politique générale de santé permet

d’assurer une certaine appropriation de la démarche par le ministère. Troisièmement, l’appui

que la communauté internationale semble vouloir donner à la survie des enfants dans les

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 42 of 48

pays fragiles malgré la crise que connait l’aide au développement devrait permettre de

poursuivre la mobilisation de ressources extérieures.

Cependant des menaces existent. Premièrement, le financement des trois stratégies par le

gouvernement et certains bailleurs n’est pas garanti dans un contexte de faiblesse des

ressources financières et de différences dans la hiérarchie des valeurs selon les acteurs.

Une aide extérieure ciblée et un plaidoyer important semblent nécessaires pour maintenir

les acquis à long terme. Deuxièmement, des incompréhensions existent entre ceux qui

tentent de mettre en oeuvre la politique de survie et les populations bénéficiaires et

pourraient entrainer à terme un rejet de certaines interventions par les communautés.

Troisièmement, une menace plus générale pour le fonctionnement du pays vient de

l’instabilité géopolitique dans le Sahel. Elle a notamment comme conséquence une baisse

de l’aide technique et financière fournie par les ONG internationales. Celles-ci ont pourtant

considérablement contribué aux résultats engrangés depuis 2005. Le transfert vers des

ONG nationales (62), s’il a ses avantages, a aussi pour conséquence une réduction des

volumes financiers et de l’expertise additionnelle.

Prendre la perspective de survie de l’enfant comme objectif risque de nous faire passer à

côté de deux vrais enjeux au Niger: D’une part, la croissance démographique et la réduction

de la production vivrière liée aux changements climatiques mettent en danger la survie

alimentaire et économique de la population (12). D’autre part, les enfants sont en vie mais

ne bénéficient pas des conditions nécessaires à un développement psycho-affectif,

intellectuel et économique qui leur permet de devenir des adultes compétents et

responsables (69). Jusqu’où peut-on privilégier la survie des enfants par rapport à d’autres

politiques de santé et politiques publiques tel que l’éducation, le développement

économique,… ? Et qui peut poser ce choix ?

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 43 of 48

13 Liste des annexes

Annexe 1 : Analyse des 25 détenteurs d’enjeux principaux au Niger concernant la politique de santé communautaire en 2008.

D Hercot, 2013, Survie de l’enfant au Niger 44 of 48

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Annexe1Analysedesdétenteursd’enjeuxauNigerconcernantlapolitiquedesantécommunautaireen2008.David Hercot 

 

Juin 2013. 

 

 

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Responsables Elus 

Président  Gouvernement  National  4  10  10  Le président a utilisé l'argent de l'initiative pays pauvres très endettés pour financer la construction des cases de santé. Il a imposé le niveau case de santé dans la pyramide sanitaire contre l'avis des cadres du MSP. Ceux‐ci ont dû, forcés‐contraints, prendre en charge les aspects normatifs et de formation à posteriori. 

Responsables nommés 

Managers de district 

Ministère de la santé 

Intermédiaire 6  4  3  La plupart des cadres du niveau district ne sont pas favorables au niveau communautaire car cela leur rajoute un niveau de services à superviser et avec une chaine de commandement qui leur échappe en partie. Les agents de santé communautaire et les relais étant financés hors de leur cadre d'influence 

Secrétaire Générale 

Ministère de la santé 

National  8  2  7  En tant que secrétaire générale, et ex fonctionnaire de l'UNFPA, elle défend un PDS qui permette de réduire la mortalité maternelle. Elle plaide également pour un alignement des bailleurs sur les priorités du PDS qui ignore pratiquement le niveau communautaire.  

Responsable survie de l'enfant 

Ministère de la santé 

National  9  8  3  En tant que responsable de la direction mère enfant, elle est l'alliée principale de l'UNICEF au sein du MSP. Son pouvoir est cependant limité en tant que responsable de la PCIME. Sa nomination comme directrice de la division survie de l'enfant est une preuve du succès du lobbying intensif de l'UNICEF au sein du ministère malgré la résistance rencontrée. 

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Intéressés 

  UNICEF  National  10  10  5  L'UNICEF en tant qu'organisation a placé la survie de l'enfant en haut de ses priorités et y consacre la majorité de ses ressources humaines et financières qui pèsent lourds an Niger. Ils agissent avant de réfléchir comme le décrit Iskander et le projet est déjà bien en route quand ils se font rappeler à l'ordre par la Secrétaire Générale pour non‐respect des règles du jeu: le PDS. A partir de ce moment, ils vont développer un intense plaidoyer pour changer les règles du jeux tout en poursuivant la mise en oeuvre des interventions communautaires. Ils vont également développer une stratégie qui contourne le MSP en revigorant la politique des relais communautaires, encore plus périphériques et moins chère que les agents de santé communautaire. Ils vont, pour se faire, faire appel aux ONGs déjà impliquées en nombre suite à la crise nutritionnelle mais dont les financements commencent à se réduire au fil du temps. 

Bureau régional à Dakar 

UNICEF  International  8  10  4  Le bureau régional n'a qu'un pouvoir limité au niveau du pays. Ils agissent via le bureau national en mettant la pression pour les résultats sur celui‐ci. Ils viennent occasionnellement en appui pour des questions techniques ou de jeu de pouvoir. 

Chef de section santé  

UNICEF  National  10  10  3  Le chef de section santé s'est jeté corps et âme dans la survie de l'enfant dès son arrivée en 2005. Il appuie les actions du MSP qui vont en ce sens tel la gratuité, la PCIME au niveau des centres de santé, la disponibilité des intrants, les stratégies de vaccinations avancées, les campagnes. Mais il pousse plus loin sans attendre que toutes les contraintes inhérentes au processus politique sois mis en place et lance les camions de l'UNICEF au secours des formations sanitaires en rupture de stock de médicaments suite à la gratuité, en y incluant les cases de santé. Il milite en parallèle 

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pour la reconnaissance du paquet d'intervention communautaire et fait avancer via la division de la survie de l'enfant nouvellement créée les normes et procédures pour la prise en charge communautaire des enfants. Il est véritablement le champion de cette politique au Niger et ça ne manque pas de lui attirer quelques foudres de la part des tenants de la stratégie "Centre de santé".  

Représentant  UNICEF  National  6  10  5  En tant que représentant de l'UNICEF au Niger, il a un pouvoir considérable car il a accès aux plus haute autorités du pays. Il sait cependant qu'il doit utiliser ce passe‐droit avec parcimonie et que le pays a de nombreux problèmes à régler. Il a cependant le pouvoir de régler un différend entre l'UNICEF et un ministère ou de rajouter un peu de pression sur les cadres du ministère, par en haut. 

  OMS  National  9  2  6  L'OMS est très présente au niveau du MSP. Leur pouvoir financier est très limité mais ils ont un pouvoir d'influence sur la définition des politiques de par leur rôle et les liens historiques qui unissent la plupart des fonctionnaires avec le MSP leur maison mère. L'OMS promeut le développement d'un système d santé centré sur le personnel de santé qualifié et n'a donc que peu d'attirance pour des agents de santé communautaire. 

  UNFPA  National  4  4  2  L'UNFPA milite pour la réduction de la mortalité maternelle et la santé des adolescents. Ceux‐ci n'étant pas inclus dans le projet communautaire, ils ne l'appuient pas. Il n'ont cependant qu'une influence et un intérêt limité sur la question. 

Assistant Technique 

Coopération  Française 

National  8  2  4  En tant que père fondateur du modèle SSP au Mali, il milite pour une approche centrée sur le centre de santé. Il ne s'oppose pas à des actions communautaires en soi mais elles devraient être coordonnées par les centres de santé et leurs comités de santé. En outre, il s'oppose à l'idée du 

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paquet à haut impact et prône une approche globale de la santé. En tant que conseiller de la secrétaire générale, il a une influence significative sur les processus de formulation. 

Chef de file des PTFs 

Ambassade de Belgique 

National  2  6  5  En tant que chef de file, et responsable hiérarchique indirect de la cellule d'appui institutionnel il dispose d'une légitimité et d'un poids financier important. Il est plutôt en faveur du respect des règles et donc de la planification appuyée par les fonds belges mais se garde bien de prendre une position trop tranchée. Il semble conscient du poids mis par l'UNICEF pour faire avancer ce dossier. 

  Banque Mondiale 

National  4  7  8  La Banque Mondiale a joué un rôle important dans la mise à l'agenda durant les négociations avec la présidence sur l'utilisation des fonds dégagés grâge à l’initiative « pays pauvres très endettés » qui a débouché sur le programme spécial du président pour la construction de 2500 cases de santé en zone rurale. Toutefois, au niveau du pays, ils ne se mêlent que très peu des détails techniques de la mise en oeuvre des politiques. 

Cellule d'appui institutionnel 

CTB/BTC  coopération technique  Belge 

National  8  4  4  La cellule d'appui institutionnel assure la rédaction du PDS. Bien qu'ils soient axés sur les résultats, ils défendent le PDS auquel ils croient. Celui‐ci ne reprenant pas ce nouveau paquet ils sont de facto plutôt résistant. 

  Comités de santé  Local  8  8  1  Les comités de santé villageois sont très peu fonctionnels au Niger. Ils ont cependant une vision plus proche de celle de la population et peuvent exercer une influence très limitée sur les acteurs locaux y compris les responsables de district ou le personnel médical. 

  MSF_FR  National  2  4  2  Médecin Sans Frontière a plutôt axé son approche sur la mise en place de structures curatives et sur les campagnes d'urgence. Ils ne souhaitent pas s'investir dans des projets qui risque de se 

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chroniciser 

  Autres ONGs humanitaires 

National  10  10  1  A l'inverse de MSF, la plupart des ONG humanitaires voient plutôt d'un bon oeil de mettre en oeuvre des interventions proches des populations. Ils sont donc un soutien pour l'UNICEF qui peut mettre en oeuvre sa politique sans attendre le "go" du ministère. 

  ONGs nationales  National  8  10  0  Les ONG nationales ont très peu de ressources et ne demandent qu'à mettre en oeuvre les projets que veulent bien leur confier les bailleurs tel que l'UNICEF. En outre étant souvent proches de la population ils sont plus favorables à des interventions qui quittent les « représentants nommés » pour aller plus directement vers les bénéficiaires. 

  Syndicats  National  4  2  5  Les syndicats sont bien implantés et influents. Ils sont utilisés par les fonctionnaires pour pouvoir revenir travailler à Niamey au plus vite. Ils sont plutôt favorables à une politique "médicalocentriste".  

Individus 

  Population rurale  Local  4  10  0  Les Nigériens habitant en zone rurale n'ont que très peu de retombées de l'aide internationale. Ils voient donc d'un bon oeil toute initiative qui rapproche les services. Comme Oumarou (2013) le décrit, il est fort probable que leurs attentes soient différentes de celle que l'UNICEF a dessiné pour eux.  

  Population urbaine 

Local  2  4  1  Les Nigériens urbains quant à eux n'ont rien à gagner de services ruraux. Ils préfèreraient voir les hôpitaux renforcés et sont donc plus enclin à soutenir l'approche "médicalocentriste". Ils ont de par leur proximité avec le pouvoir une capacité un peu plus grande à se faire entendre. 

 

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