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1 Cognition spatiale et dessin chez l’enfant Arnaud WITT LEAD CNRS UMR 5022

Cognition spatiale et dessin chez l’enfant - LEADleadserv.u-bourgogne.fr/files/filemanager/users/arnaud-witt... · Dessin et flexibilité cognitive : le paradigme d’innovation

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Cognition spatiale et dessin chez l’enfant

Arnaud WITT

LEAD CNRS UMR 5022

PLAN

Les niveaux de description

Chapitre 1 : Les aspects syntaxiques de l’acte graphique

– 1. Directions privilégiées dans le mouvement graphique et des systèmes de référence spatiaux.

– 2. Les règles graphiques syntaxiques

– 3. Evolution avec l'âge des règles graphiques syntaxiques

– 4. Syntaxe et représentation

– 5. Syntaxe et sémantique

– 6. Production de dessins complexes

Chapitre 2 : Le développement du dessin symbolique

– 1. Les études pionnières: Luquet (1927), Piaget & Inhelder (1947)

– 2. Les études plus récentes: Freeman (1980), Fenson (1985)

– 3. Les effets de contexte, les biais canoniques dans le dessin

– 4. Dessin et expression des émotions

Chapitre 3 : Le dessin et les changements représentationnels internes

– 1. Dessin et flexibilité cognitive : le paradigme d’innovation et le modèle de Karmiloff-Smith

– 2. Rigidité procédurale, flexibilité représentationnelle

– 3. Sensibilité de cette évolution à des effets de tâche ?

Chapitre 4 : Les influences culturelles dans le dessin

– 1. Culture et règles graphiques

– 2. Culture et orientation des dessins

– 3. Culture et contenu des dessins

Chapitre 5 : Cognition Spatiale, Dessin et pathologies

– 1. Cognition spatiale : Développement et bases cérébrales

– 2. Le dessin comme instrument d’évaluation

– 3. Troubles de la cognition spatiale et héminégligence

– 4. Mieux utiliser son cerveau pour dessiner 2

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INTRODUCTION

Activité graphique = vaste domaine d’étude,

incluant divers aspects

Plusieurs niveaux de description de l’acte

graphique

→ 3 niveaux (doc 1 ): sémantique, syntaxique,

cinématique ou dynamique

LES NIVEAUX DE DESCRIPTION

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Niveau sémantique : « quoi »

→ intentionnel

Niveau syntaxique :

« comment »

→ règles graphiques; manière

de planifier, d’organiser son

geste

Niveau cinématique ou

dynamique : aspects moteurs

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Chapitre 1

Les aspects

syntaxiques de l’acte

graphique

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Syntaxe graphique = logique de l’action

→ règles de séquençage et de diréctionnalité des mouvements

Grandes diversité dans la manière de réaliser un pattern

→ 1 segment = 2 ordres

→ 2 segments = 8 ordres

→ 3 segments = 48 ordres

→ 4 segments = + de 300 ordres

Utilisation de peu de variantes → règles générales

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1. Directions privilégiées dans le mouvement graphique et des systèmes de référence spatiaux

Les directions préférées

- Van Sommers

→ toutes les directions ne sont pas utilisées

avec la même fréquence

→ distinction gauchers/droitiers dans les

préférences : importance de facteurs

anatomique ou biomécanique

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Les systèmes de référence spatiaux

- Meulenbroeck et Thomassen

→ description anatomique simplifiée : en fonction de la

direction du mouvement, soit la main, soit les doigts,

soit les deux sont mis à contributions.

→ obliques : mouvement de la main ou des doigts

→ verticales : coordination des deux (soit congruente

soit incongruente)

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Deux systèmes de références spatiales:

- Système moteur : dépend de la structure anatomique

- Système géométrique : dépend du système perceptif

Directions dans l’espace non équivalentes, certaines dépendantes d’un système de « haut niveau » (géométrique), d’autres d’un système de « bas niveau »

Système de référence géométrique lié au niveau de planification de l’action

Système de référence anatomique déterminé par les contraintes biomécaniques de déplacements obliques des doigts et de la main

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2. Les règles graphiques syntaxiques

Les points de départ et sens de progression

- Goodnow et Levine → « règles » de l’action

graphique

Deux grandes catégories de choix :

- Relatifs au point de départ

- Relatifs au sens de progression et

enchainement

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Règles des points de départ:

- démarrer par le point le plus haut

- par le point le plus à gauche

- par une verticale

- par l’oblique à gauche dans les figures à sommet.

Règles des sens de progression:

- horizontale de gauche à droite

- verticale de haut en bas

- continuité quand possible

- ancrage (initier par point déjà dessiné)

- dessiner les parallèles en succession immédiate

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Règle de continuité

Van Sommers (1984) : certaines caractéristiques favorisent la continuité e.g. taille de la figure

→ principe d’économie

Principe d’ancrage (anchoring)

Mouvement prend source sur un tracé précédemment dessiné

→ Principe d’accrétion: le sujet ne procède pas par éléments dispersés mais tend à dessiner un élément graphique sur l’élément précédemment dessiné.

e.g. dessin du soleil

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Les conflits entre règles

Thomassen, Meulenbroeck et Hoofs (1991) : hiérarchie de l’application des règles graphiques

→ stratégies les plus économiques sont priviligiées

-Règles hiérarchiquement supérieures:

- continuité

- départ à gauche

- ancrage

-Règles hiérarchiquement inférieures

- départ vertical

- départ en haut

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Vinter (1994) Doc 2 et 3

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3. Evolution avec l’âge des règles graphiques syntaxiques

Goodnow et Levine (1973) Doc 4

→ évolution des principes syntaxiques avec

l’âge

Règle de départ en haut et règle de

départ à gauche : évolution

graduelle avec l’âge

Règle de départ par une verticale:

même évolution mais moins

respectée par les adultes

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Vinter (1994)

Principe de départ à gauche: bien

respecté depuis le plus jeunes âge

Principe de départ en haut:

augmente avec l’âge, mieux respecté

par les plus âgés.

→ changement à 5-6 ans: rôle de

l’éducation

Chez le petit: comportement

graphique réguler par l’axe du corps.

Principe de progression : faiblement

respecté par les plus jeunes,

évolution rapide avec l’âge.

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Sens de rotation

Thomassen et al: sens de rotation employé pour les figures libres et pour l’écriture.

→rotations horaires : sous contrainte de vitesse utilisées pour les figures, vitesse plus élevée que pour les rotations anti-horaires

→rotations anti-horaires : + utilisée en condition de production lente, production de lettres

- Syst moteur = 2 manières de gérer la prod du sens de rotation

sens horaire: tâche de dessin

sens anti-horaire: écriture

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Vinter et Meulenbroeck (1993)

-production de cercles

(main droite et main gauche)

enfants droitiers 4 à 9 ans

→ 4-5 ans proportion anti-horaire

faible

augmentation à 6 ans

→ chez les petits:

-main gauche = anti-horaire

fonctionnement en miroir des deux mains

-déterminants de bas niveaux (biomécanique)

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Modèle de développement (Nihei , 1980,83)

3 étapes en rapport avec le développement de

la syntaxe

- Première étape : stratégie d’ancrage fixe

- Deuxième étape : stratégie d’ancrage fluide

- Troisième étape : stratégie de départ

balistique

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Vinter (1994)

- 3-4 ans : planification locale « segment par segment »; pas de considération de la figure globale

- 6-8 ans : planification au niveau de la « figure » mais rigide; prod du premier segment détermine la séquence des mouvements; principe de continuité

- 9 ans : combinaison planification locale et globale; conduite graphique flexible; diminution du principe de continuité, application principes de progression gauche-droite ou haut-bas.

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Pourquoi ces principes?

→ principe d’économie générale, coût de la prod du mouvement

Simmer (1981,1984) : enfants 4-7 ans,

sélection des unités → proba à produire le moins d’erreurs

→ plus petite dépense d’énergie et d’effort

Lieblich et Ninio (1976) : mesure de la quantité d’effort → choix des mouvements qui exigent la plus basse dépense d’énergie.

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4. Syntaxe et représentation

Développement grapho-moteur = indicateur du développement de la représentation

Van Sommers (1984) sur adultes ; Vinter et Marot (2007) sur enfants 5-9 ans : relation syntaxe et représentation mentale des patterns dessinés

→ analyse des stratégies graphiques en situation de copie.

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3 catégories de stratégies

- Stratégies dites « element based » (propres à l’enfant jeune) :

stratégie de copie de rectangles isolés

stratégie de copie de rectangles juxtaposés les uns aux autres

stratégie de copie de rectangles juxtaposés et isolés

stratégie de copie de rectangles isolés avec une base commune

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- Stratégies graphiques « united-based » :

Stratégie d’embedding (d’emboitement : les rectangles sont emboités les uns dans les autres)

Stratégie d’accretion stacking (d’inclusion : les rectangles sont inclus les uns dans les autres)

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- Stratégies « frame-based » :

Stratégie de partial framing (dessin partiel du cadre d’abord, et complétion de la figure)

Stratégie de full framing (dessin complet du cadre d’abord, puis complétion par segments manquants)

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Evolution de l’utilisation des stratégies avec

l’âge

Une répartition claire apparait avec

l’âge:

-stratégies element-based: à 5 ans

puis déclin avec l’âge, disparition

après 8 ans.

→ conception du pattern =

assemblage non coordonné d’unités

élémentaires et indépendantes

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Evolution de l’utilisation des stratégies avec

l’âge

-stratégies unit-based: à partir de 6

ans

→ conception du pattern = entité

globale unitaire, avec des

rectangles liés les uns aux autres

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Evolution de l’utilisation des stratégies avec

l’âge

-stratégies frame-based: à partir de

10 ans

→ conception du pattern :

décomposable en parties et en tout

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Cette évolution répète celle des trois étapes de l’application des règles syntaxiques

- segment par segment

- sur la figure entière

- équilibre entre figure entière (tout) et segments (parties)

Syntaxe influencée par le sens que l’on donne à la figure

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5. Relations entre syntaxe et sémantique

Van Sommers : comment le sens (le

« quoi ») peut-il modifier, influencer la

stratégie graphique (le « comment ») ?

→ étude chez l’adulte

Vinter (1999): étude chez l’enfant

→ reproduction de dessins identiques avec

significations différentes

Figure 1- une pipe et rond de fumée / une

maison, son ombre et soleil

Figure 2 - un losange traversé par une ligne

/ une pyramide et son reflet

Figure 3 - 2 chiffres 4 face à face/ la lettre

M traversée par ligne

Figure 4 - la lettre N / la lettre Z retournée

de côté

Figure 5- un homme et un télescope / un

verre de cocktail avec une cerise

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Présentation des figures avec une

signification, puis avec l’autre.

→ certains patterns = pas de différences au

niveau des stratégies graphiques en fonction

du sens

→ d’autres patterns = modification de la

syntaxe en fonction du sens

M et losange = entité unique

dans une signification

→ tracé en continu : figure 4A et

5A

M et losange = deux entités

distinctes dans la seconde

signification

→ tracé séparé des deux entités

: figure 4B et 5C

Syntaxe perméable au

sens = influencée par la

représentation mentale

Mais aussi influence de

facteurs plus

géométriques et plus

biomécaniques

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Choix de la syntaxe → coopération ou

compétition entre deux forces

- Bottom-up : contraintes exécutives

géométriques ou biomécaniques

- Top-down : sémantique

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6. Production de dessins complexes

Règles graphiques → production de pattern

géométriques simples mais aussi production de

dessins représentationnels

Etude de la production graphique d’objets familiers:

- niveau local : application des règles graphiques sur

les principaux composants du dessin

- niveau global : ordre de production des unités

graphiques du dessin

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Niveau global :

- dessin = 4 unités représentationnelles

e.g. maison = corps + toit + porte + fenêtre

soit 24 ordres possibles

→ nombre limité de séquences est utilisé

→ dès 5 ans, schéma de production stable =

routine graphique

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Van Sommers (1984) :

- principe d’ancrage

→ par proximité

→ par similarité

- principe de progression des unités les plus génériques vers les unités les plus périphériques

→ Unités génériques = définir identité minimale de l’objet

→ Unités périphériques = enrichir l’objet

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Comment déterminer le caractère générique ou

périphérique d’une unité?

→ poids sémantique de l’unité graphique reflété par sa

fréquence d’occurrence

- fréquence forte = générique

- fréquence faible = périphérique

→ principe de progression corps-périphérie = priorité

de dessin des unités génériques par rapport aux

unités périphériques

Van Sommers (1984)

relation entre fréquence d’occurrence et rang de production

Production d’objets familiers →

routine graphique

Interaction entre principe

d’ancrage par proximité ou

similarité et principe de

progression « corps-périphérie »

Lien fort entre syntaxe et activité

conceptuelle de catégorisation