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Cahier technique n° 191 La logique floue F. Chevrie F. Guély Collection technique

Collection technique Cahier technique n° 191

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Cahier techniquen° 191 La logique floue

F. ChevrieF. Guély

Collection technique

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Les Cahiers Techniques constituent une collection d’une centaine de titresédités à l’intention des ingénieurs et techniciens qui recherchent uneinformation plus approfondie, complémentaire à celle des guides, catalogueset notices techniques.

Les Cahiers Techniques apportent des connaissances sur les nouvellestechniques et technologies électrotechniques et électroniques. Ils permettentégalement de mieux comprendre les phénomènes rencontrés dans lesinstallations, les systèmes et les équipements.Chaque Cahier Technique traite en profondeur un thème précis dans lesdomaines des réseaux électriques, protections, contrôle-commande et desautomatismes industriels.

Les derniers ouvrages parus peuvent être téléchargés sur Internet à partirdu site Schneider.Code : http://www.schneider-electric.comRubrique : maîtrise de l’électricité

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La collection des Cahiers Techniques s’insère dans la « Collection Technique »du groupe Schneider.

Avertissement

L'auteur dégage toute responsabilité consécutive à l'utilisation incorrectedes informations et schémas reproduits dans le présent ouvrage, et nesaurait être tenu responsable ni d'éventuelles erreurs ou omissions, ni deconséquences liées à la mise en œuvre des informations et schémascontenus dans cet ouvrage.

La reproduction de tout ou partie d’un Cahier Technique est autorisée aprèsaccord de la Direction Scientifique et Technique, avec la mention obligatoire :« Extrait du Cahier Technique Schneider n° (à préciser) ».

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.1

n° 191La logique floue

CT 191 édition mars 1998

François GUÉLY

Diplômé de l’École Centrale de Paris en 1988, entré chezTélémécanique, au Japon, en 1990, docteur en automatique en 1994,il est responsable du service Automatique Avancée de Schneiderdepuis 1995. Il a participé à l’élaboration de l’extension vers la logiquefloue de la norme des langages pour automates programmables.

François CHEVRIE

Entré à Télémécanique en 1987, il a rejoint le Service AutomatiqueAvancée de la Direction des Recherches en 1993. Ingénieur CNAM enAutomatisme Industriel, il a réalisé son mémoire sur l’intégration dela logique floue dans les automates Schneider.Il a participé activement à la réalisation de l’offre produit logique flouepour la gamme d’automates Micro/Premium, et à plusieurs mises enœuvre de cette technique notamment dans l’automobile et en agro-alimentaire.

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.2

Lexique

Activation :Voir degré de vérité.

Base de connaissance :Ensemble des fonctions d’appartenance et desrègles d’un système flou contenant l’expertise, laconnaissance de l’opérateur, de l’expert, etc.

Conclusion :Une conclusion de règle est une propositionassociant une variable linguistique et un termelinguistique écrite après le alors de la règle. Uneconclusion peut être formée par la combinaisonde plusieurs propositions.

Condition :Voir prédicat

Défuzzification :Transformation, après inférence, d’un ensembleflou d’une variable linguistique de sortie envaleur numérique.

Degré d’activation :Voir degré de vérité.

Degré d’appartenance :Un élément x appartient à un ensemble flou Aavec un degré d’appartenance compris entre 0et 1, donné par la fonction d’appartenance µA(x).

Degré de vérité :Le degré de vérité, ou encore degré d’activation,d’une règle prend une valeur y comprise entre0 et 1 déduite des degrés d’appartenance desprédicats de la règle. Il influe directement sur lavaleur des conclusions de cette même règle. Ondit aussi que la règle est active à y.

Ensemble flou :Dans la théorie classique des ensembles, c’est lafonction caractéristique qui définit l’ensemble :cette fonction ne prend que les deux valeursdiscrètes 0 (l’élément n’appartient pas...) ou 1(...appartient à l’ensemble). Un ensemble flou estdéfini par une fonction d’appartenance qui peutprendre toutes les valeurs réelles comprisesentre 0 et 1.

Fonction d’appartenance :Fonction µA(x) qui à toute valeur d’entrée xfait correspondre son degré d’appartenance àl’ensemble A. Cette valeur graduelle estcomprise entre 0 et 1.

Fusion capteurs :Voir Fusion de données.

Fusion de données :La fusion de données consiste à extraire, à partirde plusieurs données, une ou plusieursinformations pouvant être de natures différentes.Exemple : des grandeurs R, V et B de la couleurd’un biscuit, on déduit l’état de cuisson du biscuit.On parle également de fusion capteurs.

Fuzzification :Transformation d’une valeur numérique en degréd’appartenance flou par évaluation d’une fonctiond’appartenance.

Inférence :Cycle de calcul des degrés d’activation de toutesles règles de la base ainsi que de tous lesensembles flous des variables linguistiques setrouvant dans les conclusions de ces règles.

Prédicat :Appelé encore prémisse ou condition, un prédicatde règle est une proposition associant unevariable linguistique et un terme linguistiqueécrite entre le si et le alors de la règle. Unprédicat peut être formé par la combinaison deplusieurs propositions.

Prémisse :Voir Prédicat

Singleton :Fonction d’appartenance µA(x) « en bâton »,c’est à dire nulle pour tout x, sauf en un pointsingulier xo.

Terme linguistique :Terme associé à une fonction d’appartenancecaractérisant une variable linguistique.

Variable linguistique :Variable numérique appliquée en entrée, pourfuzzification, ou en sortie, après défuzzification,d’un module de logique floue. On lui attribuel’adjectif linguistique car elle est utilisée, dans lesfonctions d’appartenance et les règles, par sonnom et non pas par une valeur numérique.

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La logique floue

Sommaire

1 Introduction 1.1 La logique floue aujourd’hui p. 41.2 Historique de la logique floue p. 4

1.3 Intérêt et utilisation de la logique floue pour le contrôle p. 5

2 Théorie des ensembles flous 2.1 Notion d’appartenance partielle p. 6

2.2 Fonction d’appartenance p. 6

2.3 Opérateurs logiques flous p. 8

2.4 Règles floues p. 9

3 Exemple didactique d’application 3.1 Introduction p. 14

3.2 Présentation de l’exemple p. 14

3.3 Variables et termes linguistiques p. 15

3.4 Règles et sorties p. 15

4 Mise en œuvre 4.1 Quand peut-on utiliser les bases de règles floues ? p. 16

4.2 Conception d’une application p. 16

4.3 Exploitation d’une application p. 17

4.4 Choix de la technologie de mise en œuvre p. 17

4.5 Normes p. 18

5 Application du flou 5.1 Types d’utilisations p. 19

5.2 Exemples de réalisations industrielles p. 20

6 Conclusion p. 24

Annexe p. 26

Bibliographie p. 28

Au départ théorie, la logique floue s’affirme comme une techniqueopérationnelle. Utilisée à côté d’autres techniques de contrôle avancé, ellefait une entrée discrète mais appréciée dans les automatismes de contrôleindustriel.

La logique floue ne remplace pas nécessairement les systèmes derégulation conventionnels. Elle est complémentaire. Ses avantagesviennent notamment de ses capacités à :c formaliser et simuler l’expertise d’un opérateur ou d’un concepteur dansla conduite et le réglage d’un procédé,c donner une réponse simple pour les procédés dont la modélisation estdifficile,c prendre en compte sans discontinuité des cas ou exceptions de naturesdifférentes, et les intégrer au fur et à mesure dans l’expertise,c prendre en compte plusieurs variables et effectuer de la « fusionpondérée » des grandeurs d’influence.

Quel est l’apport de cette technique dans la conduite d’un processusindustriel ?Quel peut être l’impact sur la qualité et le coût de fabrication du produit ?

Après quelques notions théoriques de base, ce Cahier Technique répond àl’ automaticien et à l’utilisateur potentiel au travers d’exemples industriels,en termes de mise en oeuvre et d’avantages concurrentiels.

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1 Introduction

1.1 La logique floue aujourd’hui

La logique floue, dans la plupart des applicationsactuelles, permet de prendre en compte toutessortes de connaissances qualitatives deconcepteurs et d’opérateurs dans l’automatisationdes systèmes.

Elle suscite en France un intérêt médiatiquedepuis le début des années 90. Les nombreusesapplications dans l’électroménager etl’électronique grand public réalisées notammentau Japon en ont été l’élément déclenchant.Machines à laver sans réglage, camescopesanti-bougé et de nombreuses autres innovationsont fait connaître le terme « logique floue » à unlarge public.

Dans l’automobile les transmissionsautomatiques, les contrôles d’injection et d’anti-cliquetis, l’air conditionné sont réalisés sur desvéhicules de série grâce à la logique floue.

Dans le domaine des processus de production,continue et par lots, et dans les automatismes

(qui nous intéressent essentiellement ici) lesapplications se sont également multipliées. Lalogique floue s’y développe car il s’agit d’uneapproche essentiellement pragmatique, efficaceet générique. On dit parfois qu’elle permet desystématiser ce qui est du domaine del’empirisme, et donc difficile à maîtriser. Lathéorie des ensembles flous fournit une méthodepertinente et facilement réalisable dans desapplications temps réel ; elle permet detranscrire et rendre dynamiques les connais-sances des concepteurs ou des opérateurs.

Cet aspect adaptable et universel de la logiquefloue permet de s’attaquer à l’automatisation deprocédures telles que la mise en route, leréglage de paramètres, pour lesquelles peud’approches existaient auparavant.

Ce Cahier Technique présente la logique floueet son application dans le cadre des processusde production.

1.2 Historique de la logique floue

Apparition de la logique floueLe terme d’ensemble flou apparaît pour lapremière fois en 1965 lorsque le professeur LotfiA. Zadeh, de l’université de Berkeley aux USA,publie un article intitulé « Ensembles flous »(Fuzzy sets). Il a réalisé depuis de nombreusesavancées théoriques majeures dans le domaine eta été rapidement accompagné par de nombreuxchercheurs développant des travaux théoriques.

Premières applicationsParallèlement, certains chercheurs se sontpenchés sur la résolution par logique floue deproblèmes réputés difficiles. Ainsi en 1975, leprofesseur Mamdani à Londres développe unestratégie pour le contrôle des procédés et présenteles résultats très encourageants qu’il a obtenussur la conduite d’un moteur à vapeur. En 1978,la société danoise F.L.Smidth réalise le contrôled’un four à ciment. C’est là la première véritableapplication industrielle de la logique floue.

EssorC’est au Japon, où la recherche n’est passeulement théorique mais également trèsapplicative, que la logique floue connaît sonvéritable essor. A la fin des années 1980,c’est d’un véritable boum qu’il faut parler.Les produits grand public, machines à laver,appareils photographiques et autrescamescopes estampillés « fuzzy logic » ne secomptent plus. Dans l’industrie, le traitementdes eaux, les grues portuaires, les métros, lessystèmes de ventilation et de climatisation sonttouchés. Enfin, des applications existent dansdes domaines très différents tels que la financeou le diagnostic médical.A partir de 1990, c’est en Allemagne que desapplications apparaissent en grand nombreainsi qu’à une moindre échelle aux USA.Enfin en France, la logique floue devientaujourd’hui une réalité.

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1.3 Intérêt et utilisation de la logique floue pour le contrôle

Intérêt

La logique floue trouve ses origines dans uncertain nombre de constatations :c La connaissance que l’être humain a d’unesituation quelconque est généralement imparfaite,v elle peut être incertaine (il doute de sa validité),v ou imprécise (il a du mal à l’exprimer clairement).c L’être humain résout souvent des problèmescomplexes à l’aide de données approximatives :la précision des données est souvent inutile ; parexemple pour choisir un appartement, il pourraprendre en compte la surface, la proximité decommerces, la distance du lieu de travail, leloyer, sans pour autant avoir besoin d’une valeurtrès précise de chacune de ces données.c Dans l’industrie ou les techniques, les opérateursrésolvent souvent des problèmes complexes demanière relativement simple et sans avoir besoinde modéliser le système. De même, tout lemonde sait qu’un modèle mathématique n’estpas nécessaire pour conduire une voiture etpourtant une voiture est un système trèscomplexe.c Plus la complexité d’un système augmente,moins il est possible de faire des affirmationsprécises sur son comportement.

De ces constatations viennent naturellement lesdéductions suivantes :c plutôt que de modéliser le système, il estsouvent intéressant de modéliser le comportementd’un opérateur humain face au système ;c plutôt que par des valeurs numériques précises,le fonctionnement doit être décrit par desqualificatifs globaux traduisant l’état approximatifdes variables.

Utilisation pour le contrôle

La logique floue est bien connue desautomaticiens pour ses applications dans lecontrôle-commande de procédés, appelé alorscouramment « contrôle flou ». Tout comme uncontrôleur (ou correcteur) classique, le contrôleurflou s’insère dans la boucle de régulation etcalcule la commande à appliquer au procédésuivant une ou plusieurs consignes et une ouplusieurs mesures effectuées sur celui-ci.

Les bases de règles floues sont intéressantes encommande car elles permettent :c de prendre en compte une expertise existantede nature qualitative,c de prendre en compte des variables que l’onsait difficilement intégrer dans la boucle,c d’améliorer le fonctionnement de contrôleursclassiques, par :v autoréglage hors ligne ou en ligne des gainsde ces contrôleurs,v modification de leur sortie (feed forward) enfonction d’événements qui ne peuvent pas êtrepris en compte par une technique classique.

La capitalisation du savoir-fairePour que l’utilisation de règles floues puisse êtreenvisagée, il faut impérativement qu’il existe uneexpertise, un savoir-faire humain. Les bases derègles floues n’apportent pas de solution quandpersonne ne sait comment fonctionne lesystème ou ne peut le piloter manuellement.Lorsque ce savoir-faire existe et est transcriptiblesous forme de règles floues, la logique flouepermet de le mettre facilement en œuvre et lefonctionnement est facilement compréhensiblepar l’utilisateur.Au-delà de l’automatisation, la logique floue permetune réelle capitalisation du savoir-faire du terrain,souvent recherchée pour éviter la perte du savoir-faire ou pour le démultiplier dans l’entreprise.Lors du recueil d’expertise, l’oubli inconscientd’informations, la difficulté d’expliquer, la craintede divulguer son savoir sont des obstaclessouvent rencontrés. Cette étape doit donc êtrepréparée et menée avec soin, particulièrementsur le plan humain.

Dans les cas où une expertise humaine existe,l’utilisation de règles floues est envisageable, àplus forte raison lorsque des imperfectionsentachent la connaissance du système, lorsquecelui-ci est très complexe et que sa modélisationest difficile ou lorsque la façon de l’aborder passepar une vue globale de certains de ses aspects.Les règles floues ne se substituent pas auxméthodes classiques d’automatique mais lescomplètent.

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2 Théorie des ensembles flous

2.1 Notion d’appartenance partielle

Dans la théorie des ensembles, un élémentappartient ou n’appartient pas à un ensemble.La notion d’ensemble est à l’origine denombreuses théories mathématiques. Cettenotion essentielle ne permet cependant pas derendre compte de situations pourtant simples etrencontrées fréquemment. Parmi des fruits, il estfacile de définir l’ensemble des pommes. Parcontre, il sera plus difficile de définir l’ensembledes pommes mûres. On conçoit bien que la

Fig. 1 : comparaison d’un ensemble classique et d’un ensemble flou.

Contour « flou » ou « graduel »

Contour « net » x n'appartient ni à A ni à By appartient totalement à Az appartient totalement Bt appartient partiellement à BA : ensemble classique B : ensemble flou

x

y

zt

A B

pomme mûrit progressivement... la notion depomme mûre est donc graduelle.

C’est pour prendre en compte de telles situationsqu’a été créée la notion d’ensemble flou. Lathéorie des ensembles flous repose sur la notiond’appartenance partielle : chaque élémentappartient partiellement ou graduellement auxensembles flous qui ont été définis. Les contoursde chaque ensemble flou (cf. fig. 1 ) ne sontpas « nets », mais « flous » ou « graduels ».

2.2 Fonctions d’appartenance

Un ensemble flou est défini par sa « fonctiond’appartenance », qui correspond à la notion de« fonction caractéristique » en logique classique.

Supposons que nous voulions définir l’ensembledes personnes de « taille moyenne ». En logiqueclassique, nous conviendrons par exemple queles personnes de taille moyenne sont celles dontla taille est comprise entre 1,60 m et 1,80 m. Lafonction caractéristique de l’ensemble (cf. fig. 2 )

1

0

Degré d'appartenance µ

Variable : taille

Fonction caractéristique« taille moyenne »

1m60 1m80

Fig. 2 : fonction caractéristique.

donne « 0 » pour les tailles hors de l’intervalle[1,60 m ; 1,80 m] et « 1 » dans cet intervalle.L’ensemble flou des personnes de « taillemoyenne » sera défini par une « fonctiond’appartenance » qui diffère d’une fonctioncaractéristique par le fait qu’elle peut prendren’importe quelle valeur dans l’intervalle [0, 1].A chaque taille possible correspondra un « degréd’appartenance » à l’ensemble flou des « taillesmoyennes » (cf. fig. 3 ), compris entre 0 et 1.

1

0

Degré d'appartenance µ

Variable : taille

Fonction d'appartenance« taille moyenne »

1m72

Fig. 3 : fonction d’appartenance.

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.7

1

0,7

0,3

0Taille (m)

Petite Moyenne Grande

1,801,60 2

µ

Fig. 4 : fonction d’appartenance, variable et termelinguistique.

Plusieurs ensembles flous peuvent être définissur la même variable, par exemple les ensembles« taille petite », « taille moyenne » et « taillegrande », notions explicitées chacune par unefonction d’appartenance (cf. fig. 4 ).

Taille

Petite Moyenne

Taille « tout à fait » moyenne

Taille petite et « pas du tout » moyenne

Taille grande et« pas du tout » moyenne

Grande

µ

Fig. 5 : fonctions d’appartenance linéaires parmorceaux.

Cet exemple montre la gradualité que permetd’introduire la logique floue. Une personne de1,80 m appartient à l’ensemble « taille grande »avec un degré 0,3 et à l’ensemble « taillemoyenne » avec un degré de 0,7. En logiqueclassique, le passage de moyen à grand seraitbrusque. Une personne de 1,80 m serait parexemple de taille moyenne alors qu’une personnede 1,81 m serait grande, ce qui choque l’intuition.La variable (par exemple : taille) ainsi que lestermes (par exemple : moyenne, grande) définispar les fonctions d’appartenance portentrespectivement les noms de variable linguistiqueet de termes linguistiques.

Comme cela sera vu plus loin, variables et termeslinguistiques peuvent être utilisés directementdans des règles.

Les fonctions d’appartenance peuventthéoriquement prendre n’importe quelle forme.Toutefois, elles sont souvent définies par dessegments de droites, et dites « linéaires parmorceaux » (cf. fig. 5 ).

Les fonctions d’appartenance « linéaires parmorceaux » sont très utilisées car :

c elles sont simples,

c elles comportent des points permettant dedéfinir les zones où la notion est vraie, les zonesoù elle est fausse, ce qui simplifie le recueild’expertise.

Ce sont des fonctions d’appartenance de ce typequi seront utilisées dans la suite de ce document.

Dans certains cas, les fonctions d’appartenancepeuvent être égales à 1 pour une seule valeurde la variable et égales à 0 ailleurs, et prennentalors le nom de « fonctions d’appartenancesingletons ». Un singleton flou (cf. fig. 6 ) définisur une variable réelle (taille) est la traductiondans le domaine flou d’une valeur particulière(taille de Paul) de cette variable (cf. annexe).

1

0Taille de Paul1,78 m

µ

Fig. 6 : fonction d’appartenance singleton

Fuzzification - Degré d’appartenance

L’opération de fuzzification permet de passer dudomaine réel au domaine du flou.

Elle consiste à déterminer le degréd’appartenance d’une valeur (mesurée parexemple) à un ensemble flou. Par exemple(cf. fig. 7 ), si la valeur courante de la variable« entrée » est de 2, le degré d’appartenance à lafonction d’appartenance « entrée faible » estégal à 0,4 qui est le résultat de la fuzzification.

1

0,4

0Entrée2

Faible

µ

Fig. 7 : fuzzification

On peut aussi dire que la proposition « entréefaible » est vraie à 0,4. On parle alors de degré devérité de la proposition. Degré d’appartenance etdegré de vérité sont donc des notions similaires.

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2.3 Opérateurs logiques flous

Ces opérateurs permettent d’écrire descombinaisons logiques entre notions floues,c’est-à-dire de faire des calculs sur des degrésde vérité. Comme pour la logique classique, onpeut définir des opérateurs ET, OU, négation.

Exemple : Appartement Intéressant = LoyerRaisonnable ET Surface Suffisante

Choix des opérateursIl existe de nombreuses variantes dans cesopérateurs (cf. annexe). Cependant, les plusrépandus sont ceux dits « de Zadeh » décrits ci-dessous. Leur utilisation sera reprise dansl’exemple didactique d’utilisation d’une base derègles floues.

Dans ce qui suit, le degré de vérité d’uneproposition A sera noté µ(A).

IntersectionL’opérateur logique correspondant àl’intersection d’ensembles est le ET. Le degré devérité de la proposition « A ET B » est leminimum des degrés de vérité de A et de B :

µ(A ET B) = MIN(µ(A),µ(B))

Exemple :« Température Basse » est vraie à 0,7« Pression Faible » est vraie à 0,5« Température Basse ET Pression Faible » estdonc vraie à 0,5 = MIN(0,7; 0,5)

Remarque : l’opérateur ET de la logiqueclassique est bien respecté : 0 ET 1 donnebien 0.

UnionL’opérateur logique correspondant à l’uniond’ensembles est le OU. Le degré de vérité de laproposition « A OU B » est le maximum desdegrés de vérité de A et de B :

µ(A OU B) = MAX(µ(A),µ(B))

Exemple :« Température Basse » est vraie à 0,7« Pression Faible » est vraie à 0,5

« Température Basse OU Pression Faible » estdonc vraie à 0,7.

Remarque : l’opérateur OU de la logiqueclassique est bien respecté : 0 OU 1 donnebien 1.

ComplémentL’opérateur logique correspondant aucomplément d’un ensemble est la négation.

µ(NON A) = 1 - µ(A)

Exemple :« Température Basse » est vraie à 0,7 « NON Température Basse», que l’on utiliseragénéralement sous la forme « TempératureNON Basse », est donc vraie à 0,3.

Remarque : l’opérateur négation de la logiqueclassique est bien respecté : NON(0) donne bien1 et NON(1) donne bien 0.

Ladder flouLe langage ladder, ou langage à contacts, esttrès utilisé par les automaticiens pour écrire descombinaisons logiques. Il permet en effet de lesreprésenter graphiquement. Schneider aintroduit l’utilisation de la représentation ladderpour décrire les combinaisons logiques floues.

En voici un exemple, traitant du confort de l’airambiant :l’air chaud et humide est inconfortable(transpiration excessive) ; de même la respirationdevient difficile dans un air froid et trop sec. Lessituations les plus confortables thermiquementsont celles pour lequel l’air est chaud et sec, oufroid et humide. Cette constatation physiologiquepeut être transcrite par le ladder flou de la figure 8correspondant à la combinaison suivante :

Confort bon = (Température faible ET Humiditéforte) OU (Température forte ET Humidité faible)

Elle représente une définition possible de lasensation de confort ressentie par une personnedans une ambiance thermique pour laquelle l’airest immobile.

Température

10 20 30 °C

Basse Elevée

Humidité

50 100 %

Faible Forte

Températurebasse

Humiditéforte

Températureélevée

Humiditéfaible

Confortbon

µ µ

Fig. 8 : ladder flou.

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Classification floueLa classification comprend en général deuxétapes :c préparatoire : détermination des classes àconsidérer,c en ligne : affectation des éléments aux classes.

La notion de classe et d’ensemble sontidentiques sur le plan théorique.Il existe trois types de méthodes d’affectation,selon le résultat produit :c booléen : les éléments appartiennent ou nonaux classes,c probabiliste : les éléments ont une probabilitéd’appartenance à des classes booléennes,comme par exemple la probabilité qu’un patientait la rougeole au vu des symptômes qu’ilprésente (diagnostic),c graduelle : les éléments ont un degréd’appartenance aux ensembles ; par exemple,

une salade appartient plus ou moins à la classedes « salades fraîches ».

Les méthodes de classification, qu’ellesproduisent un résultat graduel, booléen ouprobabiliste, peuvent être mises au point à partir :c d’une expérience (cas du « ladder flou »mentionné précédemment),c d’exemples utilisés pour un apprentissage (parexemple dans le cas de classifieurs à réseauxde neurones)c d’une connaissance mathématique ouphysique du problème (par exemple le confortd’une situation thermique peut être évalué àpartir d’équations de bilan thermique).

Les méthodes de classification graduelle (oufloue) permettent, notamment, de mettre au pointdes boucles de régulation. C’est le cas dansl’exemple de la cuisson industrielle des biscuitsexposé plus loin.

2.4 Règles floues

La logique floue et l’intelligence artificielleLa logique floue a pour objectif de formaliser et demettre en œuvre la façon de raisonner d’un êtrehumain. En cela, elle peut être classée dans ledomaine de l’intelligence artificielle. L’outil le plusutilisé dans les applications de logique floue est labase de règles floues. Une base de règles flouesest composée de règles qui sont généralementutilisées en parallèle, mais peuvent égalementêtre enchaînées dans certaines applications.

Une règle est du type :

SI « prédicat » ALORS « conclusion ».Par exemple : « Si température élevée et pressionforte ALORS ventilation forte et soupape grandeouverte ».

Les bases de règles floues, tout comme lessystèmes experts classiques, fonctionnent ens’appuyant sur une base de connaissance issuede l’expertise humaine. Il y a néanmoins degrandes différences dans les caractéristiques etle traitement de cette connaissance. (cf. fig. 9 ).

Une règle floue comporte trois étapesfonctionnelles résumées dans la figure 10 .

Fuz-zification

Entrées Sorties

Domaine flou

Valeurs numériques

Valeurs numériques

InférencesDéfuz-zification

Fig. 9 : base de règles floues et base de règles classiques.

Fig. 10 : traitement flou.

PrédicatUn prédicat (encore appelé prémisse oucondition) est une combinaison de propositionspar des opérateurs ET, OU, NON.

Les propositions « température élevée » et« pression forte » de l’exemple précédent sontcombinées par l’opérateur ET pour former leprédicat de la règle.

Base de règles floues Base de règles classiques (système expert)

Peu de règles Beaucoup de règlesTraitement graduel Traitement booléenEnchaînement possible mais peu utilisé Règles enchaînées A OU B ⇒ C,

C ⇒ D,D ET A ⇒ E

Règles traitées en parallèle Règles utilisées une par une, séquentiellementInterpolation entre règles pouvant se contredire Pas d’interpolation, pas de contradiction

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.10

Inférence

Le mécanisme d’inférence le plus courammentutilisé est celui dit « de Mamdani ». Il représenteune simplification du mécanisme plus généralbasé sur « l’implication floue » et le « modusponens généralisé ». Ces concepts sontexplicités en annexe. Seules les bases de règles« de Mamdani » sont utilisées dans ce qui suit.

Conclusion

La conclusion d’une règle floue est unecombinaison de propositions liées par desopérateurs ET. Dans l’exemple précédent,« ventilation forte » et « soupape grandeouverte » sont la conclusion de la règle.

On n’utilise pas de clauses « OU » dans lesconclusions, car elles introduiraient uneincertitude dans la connaissance (l’expertise nepermettrait pas de déterminer quelle décisionprendre). Cette incertitude n’est pas prise encompte par le mécanisme d’inférence deMamdani, qui ne permet de gérer que desimprécisions. Les règles floues « de Mamdani »ne sont donc a priori pas adaptées à du diagnostic

Pression

Forte

Si « pression forte » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne grande »

Si « pression moyenne » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne moyenne »

Elevée Grande

Température Ouverture vanne

Pression

Moyenne Elevée Moyenne

Température Ouverture vanne

µ µ µ

µ µ µ

de type « diagnostic médical » pour lequel lesconclusions sont incertaines. La théorie despossibilités, inventée par Lotfi Zadeh, apportedans ces cas une méthodologie adéquate.

De même, la négation est a priori interdite dansles conclusions pour des règles de Mamdani.En effet, si une règle avait par exemple laconclusion « Alors ventilation non moyenne »,il serait impossible de dire si cela signifie« ventilation faible » ou « ventilation forte ».Ce serait encore un cas d’incertitude.

Mécanisme d’inférence de Mamdanic PrincipeUne base de règles floues de Mamdanicomprend donc des règles linguistiques faisantappel à des fonctions d’appartenance pourdécrire les concepts utilisés (cf. fig. 11 )

Le mécanisme d’inférence comprend les étapessuivantes :

c FuzzificationLa fuzzification consiste à évaluer les fonctionsd’appartenance utilisées dans les prédicats desrègles, comme illustré par la figure 12 :

Fig. 11 : implication

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.11

Pression

Forte0,50,3

2,5 bars 17°C

Elevée Grande

Température Ouverture vanne

µ µ µSi « pression forte » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne grande »

Pression

0,5Min= 0,3

0,3

2,5 bars 17°C

Grande

Température Ouverture vanne

µ µ µSi « pression forte » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne grande »

}

Pression

Min= 0,3

2,5 bars 17°C

Grande

Température Ouverture vanne

µ µ µSi « pression forte » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne grande »

0,50,3 }

c Degré d’activationLe degré d’activation d’une règle est l’évaluationdu prédicat de chaque règle par combinaisonlogique des propositions du prédicat (cf. chap 2.3),

c ImplicationLe degré d’activation de la règle permet dedéterminer la conclusion de la règle, c’estl’implication. Il existe plusieurs opérateursd’implication (cf. annexe), mais le plus utiliséest le « minimum ». L’ensemble flou de

comme illustré figure 13 . Le « ET » est réaliséen effectuant le minimum entre les degrés devérité des propositions.

conclusion est construit en réalisant le minimumentre le degré d’activation et la fonctiond’appartenance, sorte d’ « écrêtage » de lafonction d’appartenance de conclusion(cf. fig. 14 ).

Fig. 12 : fuzzification.

Fig. 13 : activation

Fig. 14 : implication

Page 14: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.12

c AgrégationL’ensemble flou global de sortie est construit paragrégation des ensembles flous obtenus parchacune des règles concernant cette sortie.L’exemple suivant présente le cas où deux règles

agissent sur une sortie. On considère que lesrègles sont liées par un « OU » logique, et oncalcule donc le maximum entre les fonctionsd’appartenance résultantes pour chaque règle(cf. fig. 15 ).

Pression

0,3

2,5 bars 17°C

2,5 bars 17°C

Si « pression forte » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne grande »

GrandeElevéeForte

Température Ouverture vanne

Pression

Si « pression moyenne » ET « temp. élevée » ALORS « ouverture vanne moyenne »

Moyenne

Agrégation : MAXIMUM

ElevéeMoyenne

Température Ouverture vanne

Ouverture vanne

µ µ µ

µ µ µ

µ

Fig. 15 : agrégation des règles.

DéfuzzificationA la fin de l’inférence, l’ensemble flou de sortieest déterminé mais il n’est pas directementutilisable pour donner une information précise àl’opérateur ou commander un actionneur. Il estnécessaire de passer du « monde flou » au« monde réel », c’est la défuzzification.

Il existe plusieurs méthodes, la plus souventrencontrée étant le calcul du « centre degravité » de l’ensemble flou (cf. fig. 16 ).

µ

35,6° Ouverture vanne

∫∫xµ(x)dx

µ(x)dx

Règles « libres » et « en tableau »Les bases de règles floues, dans leur casgénéral, sont donc définies par des fonctionsd’appartenance sur les variables du système,et par des règles qui peuvent être écritestextuellement. Chaque règle fait appel à desentrées et des sorties qui peuvent êtredifférentes, comme le montre l’exemple qui suit :

R1 : SI « température élevée »ALORS « sortie élevée »

R2 : SI « température moyenne »ET « pression basse »ALORS « sortie moyenne »

R3 : SI « température moyenne »ET « pression élevée »ALORS « sortie basse »

R4 : SI « température basse »ET « pression élevée »ALORS « sortie très basse »

Fig. 16 : défuzzification par centre de gravité.

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.13

Schématiquement, on peut représenter les« zones d’action » des règles et leurrecouvrement dans le tableau de la figure 17 .

Temp.

Pression

Elevée

Basse

Basse Moyenne Elevée

Sortietrès

basse

Sortiebasse

Sortiemoyenne

Sortieélevée

Fig. 17 : implication représentée en tableau.

On constate que :c tout l’espace n’est pas forcément couvert ; lacombinaison « température basse et pressionbasse » n’est pas ici prise en compte ;l’explication est par exemple que cettecombinaison n’est physiquement pas possiblepour cette machine, ou qu’elle ne nous intéressepas ; il est préférable de le vérifier car il peuts’agir d’un oubli ;

c la première règle ne prend en compte que latempérature ; cette situation est tout à fait normaledans la mesure où elle reflète correctementl’expertise existante.Beaucoup d’applications définissent cependantdes « tableaux » de règles. Dans cette optique,l’espace est « quadrillé », et à chaque « case »correspond une règle. Cette approche al’avantage d’être systématique, mais :c elle ne permet pas toujours de traduiresimplement (en un minimum de règles)l’expertise existante,c elle n’est applicable que pour deux voire troisentrées, alors que des bases de règles « libres »peuvent être bâties avec un nombre importantde variables.

Remarquesc Une base de règles floues a un comportementstatique non linéaire par rapport à ses entrées.c Les bases de règles floues ne sont pasdynamiques en elles-mêmes, bien qu’ellesutilisent souvent comme entrées des variablestraduisant la dynamique du système (dérivées,intégrales, ...) ou le temps.c Le régulateur « PID flou », souvent présentécomme exemple didactique pour se faire uneidée sur la logique floue, présente comme intérêtprincipal de réaliser un PID non linéaire, ce quijustifie rarement de l’utiliser à la place d’un PIDclassique. Par ailleurs, il y a difficilement icipossibilité d’intégrer une expertise.

Page 16: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.14

3 Exemple didactique d’application

3.1 Introduction

La plupart des réalisations de logique floue fontappel à une connaissance spécialisée préalabledu domaine d’application. Afin d’être accessible

au lecteur, l’exemple qui suit est basé sur uneapplication fictive. Il est destiné à illustrer ladémarche de création d’une base de règles floues.

3.2 Présentation de l’exemple

Il s’agit d’un procédé de lavage de saladesdestiné à produire des salades pré-emballéespour les rayons « frais » des supermarchés.

Les salades sont coupées, puis lavées et enfinemballées. Ce lavage est destiné à débarasserles salades de la terre ainsi que des micro-organismes qui pourraient proliférer pendant ladurée de conservation du produit. Le fabricantsouhaite automatiser le procédé de lavage.

Le lavage est réalisé en continu. Les morceauxde salade sont placés dans des « tambours »qui se déplacent dans un « tunnel » comportantdes buses permettant de pulvériser de l’eauchlorée. L’eau permet d’évacuer la terre, alorsque le chlore est destiné à tuer les micro-organismes (cf. fig. 18 ).

Les priorités suivantes ont été exprimées par lemarketing et ordonnées selon leur importance :c Vis-à-vis du clientv Garantir la qualité- Salades « bien propres » (apparence).- Absence de goût de chlore.v Garantir la sécurité- Niveau de micro-organismes acceptable.

c Vis-à-vis de la rentabilitév Maximiser la production.

Tambour

Vitesse dedéfilement

Mesure de turbiditéEau usée

en fin de lavage

Mesure hors ligne du taux :- de chlore- de micro-organismes

Débit d'eau Débit de chlore

Tunnel

v Économiser l’eau.v Économiser le chlore.

Les opérateurs contrôlant le procédémanuellement ont l’habitude de regarder l’eauusée en fin de lavage. Si cette eau est claire, ilsen déduisent par expérience que les saladesauront une apparence « propre ». On décidedonc d’installer un capteur optique « de turbidité »permettant de déterminer le degré detransparence de cette eau.

D’autre part, les opérateurs utilisent toutes lesheures un rapport d’analyse effectué dansl’usine, et donnant le taux de micro-organismesdans des salades lavées prélevées en bout dechaîne, ainsi que leur taux en chlore rémanent.

On souhaite donc utiliser ces informations pourcontrôler au mieux :c la vitesse de défilement des salades (quipermet d’augmenter le débit de production),c la quantité de chlore pulvérisée,c la quantité d’eau pulvérisée.

Des limites sont imposées :c sur la vitesse de défilement, par la mécanique,c sur le débit d’eau afin de ne pas abîmer lesfeuilles.

Fig. 18 : procédé de lavage des salades.

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.15

3.3 Variables et termes linguistiques

On décide donc de retenir les variablessuivantes :

c entrées :

v taux de micro-organismes : Taux_Microv taux de chlore rémanent : Taux_Clv turbidité de l’eau : Turbiditév vitesse de défilement : Vitessev débit d’eau : D_Eau

Taux_CI

Acceptable Elevé

µ

Var_D_Eau

Négative Positive Positivegrande

µ

Turbidité

Faible Forte

µ

Var_D_CI

Négative Positive Positivegrande

µ

Taux_Micro

Faible

Acceptable

Elevé

µ

D_Eau

Non élevé Elevé

µ

Vitesse

Non élevée Elevée

µ

Var_Vit

Négative Positiveµ

c sorties :

v modification du débit d’eau : Var_D_Eauv modification du débit de chlore : Var_D_Clv modification de la vitesse : Var_Vit

Une séance avec un opérateur expérimenté, unspécialiste de microbiologie et un « goûteur » desalades permet d’obtenir les fonctionsd’appartenance suivantes (cf. fig. 19 ) :

Fig. 19 : fonctions d’appartenance linéaires par morceaux.

3.4 Règles et sorties

Ecriture des règles flouesUne réunion avec des opérateurs permet dedéterminer les sept règles suivantes, quicorrespondent chacune à un cas de figuredonné (en italique) :SI « Turbidité forte » ET « D_Eau non élevé »ALORS « Var_D_Eau positive grande »(salades mal lavées)SI « Turbidité forte » ET « D_Eau élevé »ALORS « Var_Vit négative » (salades mallavées mais vitesse de bande élevée)SI « Taux_Micro élevé » ALORS « Var_D_Clpositive grande » (trop de micro-organismes)SI « Turbidité faible » ET « Taux_Micro nonélevé » ET « Vitesse non élevée » ET « Taux_Clacceptable » ET « D_Eau non élevé » ALORS« Var_Vit positive » ET « Var_D_Cl positive » ET« Var_D_Eau positive » (tout va bien et il estpossible d’augmenter la production)

SI « Taux_Cl élevé » ET « Taux_Micro nonélevé » ALORS « Var_D_Cl négative »(salades ayant un goût chloré mais pas demicro-organismes)SI « Vitesse élevée » ET « Taux_Cl acceptable »ET « Turbidité faible » ALORS « Var_D_Eaunégative » (tout va bien et la production estmaximale : économiser l’eau)SI « Taux_Micro faible » ALORS « Var_D_Clnégative » (aucun micro-organisme : diminuer lechlore pour l’économiser)

Défuzzification

Dans la mesure où on souhaite un comportementprogressif de la base de règles dans tous les caset une interpolation entre les règles, on choisit lecentre de gravité comme opérateur de défuzzifi-cation.

Page 18: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.16

4 Mise en œuvre

4.1 Quand peut-on utiliser les bases de règles floues ?

Le choix des bases de règles floues pourrésoudre un problème applicatif peut être faitquand les conditions suivantes sont réunies :c possibilité d’agir sur le procédé(contrôlabilité),c existence d’une expertise ou d’un savoir-faire,

c possibilité de mesurer ou d’observer lesgrandeurs importantes (entrées et sorties),c expertise qualitative (si elle est mathématique,l’automatique classique est à favoriser),c expertise graduelle (si elle est booléenne, lessystèmes experts sont plus adaptés).

4.2 Conception d’une application

Choix des opérateurs

Dans la plupart des applications, les bases derègles « de Mamdani » sont utilisées. Ce choixest adapté sauf si l’expertise comprend desindéterminations.

On choisit également le plus souvent d’utiliserdes fonctions d’appartenance « trapézoïdales »,car elles sont plus faciles à implémenter, et carelles simplifient le recueil d’expertise. Lesfonctions d’appartenance de sortie sont le plussouvent des singletons, sauf quand les règlessont enchaînées. Une fonction d’appartenancede sortie triangulaire signifie en effet uneincertitude sur la sortie à appliquer, et n’a pasbeaucoup d’effet sur l’interpolation entre lesrègles.

Enfin, la défuzzification est réalisée par le« centre de gravité » pour la régulation (on tientcompte de toutes les règles actives); l’utilisationde la « moyenne des maxima » pour lesproblèmes de prise de décision, permet detrancher lorsque des règles sont « en conflit » etévite d’aboutir à une décision intermédiaire.

Niveau expertise métier :

- Expert- Opérateur- Concepteur

Niveau programmation :

- Automaticien- Ladder / Grafcet

Recueil de connaissance

Validationdu principe

Validation dufonctionnement

Interprétation sous forme de règleset fonctions d'appartenance

Tests « boucleouverte »Implémentation

Méthodologie

La conception d’une base de règles floues estun processus interactif. La plus grosse part detravail se trouve au niveau du recueil desconnaissances. Un des intérêts de la logiquefloue est la possibilité de valider la base derègles auprès de ceux qui ont fourni l’expertise,avant de la tester sur un système réel. Lafigure 20 illustre la démarche employée.

Recueil de connaissance

Il peut être décomposé en trois étapes :

c lister les variables à prendre en compte ; ellesdeviendront les variables linguistiques de la basede règles ;c lister les grandeurs qualitatives à prendre encompte, préciser quand elles sont vraies etfausses ; ces grandeurs deviendront les termeslinguistiques de la base de règles ;c exprimer comment ces concepts sontmanipulés : quels sont les cas à considérer,comment ils se caractérisent, comment agir danschaque cas.

Fig. 20 : méthodologie de conception.

Page 19: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.17

La transcription sous forme de règles floues estalors directe. Il convient cependant d’écrire lemoins de fonctions d’appartenance et de règlespossible afin de limiter le nombre de paramètresqu’il faudra régler par la suite et conserver unebonne lisibilité de la base. On constate qu’il estplus facile d’ajouter des règles pour prendre encompte des situations nouvelles que d’enenlever.

Validation de la base de connaissanceElle est conduite en plusieurs étapes :c présentation de la base de règles aux expertsqui ont participé au recueil de connaissances etdiscussion : celle-ci permet d’identifier des pointsqui n’avaient pas été abordés, et de vérifier si lesrègles sont compréhensibles par tous ;c simulation « en boucle ouverte » : les expertscomparent le comportement de la base de règlesau comportement attendu d’après eux, sur descas choisis à l’avance ;

c si le procédé peut être simulé, on peut égale-ment effectuer des simulations en boucle fermée.

Mise au pointLes bases de règles ainsi écrites donnent souventsatisfaction dès leur premier essai. Il arrivecependant que l’on ait besoin de modifier ou demettre au point la base de règles. Les principesqui suivent permettent de se guider dans larecherche de la cause probable de l’écartconstaté :c si le comportement du correcteur en bouclefermée est contraire à ce qu’il devrait être,certaines règles sont probablement mal écrites ;c si l’on désire optimiser la performance, il est engénéral préférable de régler au mieux lesfonctions d’appartenance ;c si le système n’est pas robuste, qu’il marchedans certains cas mais pas toujours, il estprobable que tous les cas n’ont pas été pris encompte et qu’il faut ajouter des règles.

4.3 Exploitation d’une application

Le rôle des opérateursLe niveau d’implication des opérateurs pilotantune application faisant appel à la logique floueest très variable.

On constate les cas suivants :

c système complètement autonome, l’utilisateurfinal ne connaît pas la logique floue et ne saitpas qu’elle est utilisée,c la logique floue est une « boîte noire » pouvantêtre débranchée ou passée en «mode manuel»par l’opérateur,c l’opérateur est capable de modifier (régler)les fonctions d’appartenance en fonction de lasituation et il le fait par exemple lors d’unchangement de production,c l’opérateur a une visibilité sur les règles(par exemple leur degré d’activation) ;il comprend et sait interpréter ce que la basede règles fait ; par exemple quand la situationest exceptionnelle il peut prendre le pas sur labase de règles ;c l’opérateur est le principal concepteur de labase ; les moyens de consigner lui-même son

savoir-faire et de valider le comportement obtenului ont été fournis.

Les changements dans la productionLors de la vie de l’application, la base de règlesdoit pouvoir être adaptée aux changements dusystème de production et des produits fabriqués.Ces changements peuvent être de diversesnatures :c les objectifs sont différents (température decuisson...), par exemple du fait d’un changementde produit fabriqué : il faut alors modifier lesconsignes ou les fonctions d’appartenanced’entrée des règles ;c les dimensionnements du système sontdifférents : il faut alors modifier des fonctionsd’appartenance ;c la nature du système a changé (par exempleportage de la base de règles d’une machine àune autre) : il faut alors revoir les règles et lesfonctions d’appartenance.

Les changements les plus fréquents sont dupremier type et peuvent alors être conduits pardes opérateurs qualifiés.

4.4 Choix de la technologie de mise en œuvre

La plupart des applications qui existentaujourd’hui sont réalisées avec des plates-formes matérielles courantes (microcontrôleur,microprocesseur, automate, microordinateur...).De nombreux logiciels d’aide au développementde bases de règles floues ayant pour ciblesmicrocontrôleurs, automates programmables,microordinateurs entre autres, permettent de

mettre en œuvre rapidement des bases derègles floues sans programmer.Il est possible de programmer directement lesinférences floues (assembleur, langage C...).Cette solution a l’inconvénient d’être moinsrapide en phase de prototypage et d’exiger unecompétence en programmation et une maîtrisedes algorithmes utilisés en logique floue.

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.18

électroménager...). Ils sont maintenant souventintégrés à l’intérieur même des microcontrôleurs,même de faible coût, où ils permettent d’accélérerles inférences floues.

La figure 21 illustre à titre d’exemple les besoinsapplicatifs que l’on peut rencontrer en nombre derègles (complexité de l’application) et temps decycle (rapidité), ainsi que les technologiesutilisables (chiffres de 1993). Les règlesconsidérées ici sont à un prédicat et uneconclusion.

Le choix technico-économique à faire est doncun compromis entre la flexibilité apportée par lessolutions logicielles, l’économie d’échelle et laperformance des solutions matérielles dédiées.

10-7

10-6

10-5

10-4

10-3

10-2

10-1

1

1 10 100 1 000 10 000

10

102

103

RISC

32 bits

16 bits

8 bits

4 bits

Nombre de règles

Technologie micro-programmation Technologie ASIC Technologie analogique

Temps de cycles (s)

Traitement d'images

Asservissement, automobile

Appareils photo

RégulationMachinesà laver Analyses financières

Diagnostic médical

Fig. 21 : performances des composants et domaines applicatifs.

4.5 Normes

ComposantsL’absence de normes est un des problèmesmajeurs qui retarde l’utilisation de composantsdédiés à la logique floue. Ils ne sont en effet pascompatibles entre eux, étant chacun le résultatde choix effectués par les constructeurs.

Logiciel

Dans le domaine du logiciel, le manque deportabilité a retardé également la généralisationde l’utilisation de la logique floue dans l’industrie.

Aujourd’hui, un groupe de travail auquelSchneider participe activement, intègre la normelangage « logique floue » à la norme langagedes automates programmables (premier draftofficiel de la norme IEC 61131-7 disponible en1997). D’autres initiatives dans le domaine de lanormalisation de la logique floue devraient endécouler.

Pour les applications très exigeantes en tempsde réponse ou pour obtenir un prix de revient degrande série très bas, l’utilisation de composantsdédiés à la logique floue est intéressante. Ceux-ci se développent car :c les opérations nécessaires pour effectuer desinférences floues sont élémentaires et réalisablesen nombres entiers,c il est possible de réaliser certaines opérationsen parallèle,c le calcul se déroule par étapes successives,ce qui permet de réaliser simplement desarchitectures «pipeline».

En particulier, de nombreux ASIC destinés à desmarchés particuliers existent (automobile,

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.19

5.1 Types d’utilisations

Fonctions réaliséesLe tableau qui suit montre les fonctions le plussouvent réalisées industriellement à l’aide desystèmes flous (X signifie utilisation possible, XXque la technique est bien adaptée à ce type deproblème.). Les bases de règles excellent là ouune interpolation et une action sont nécessaires,alors que les méthodes de classification sontadaptées pour les tâches d’évaluation et dediagnostic effectuées en général en amont. Ilarrive que des applications associent plusieursde ces fonctions, en préservant la gradualité del’information.

Logiquefloue

Théorie despossibilités

ExpertiseRègles floues

RéseauxneuronauxDonnées

AutomatiqueclassiqueModèle

Imprécisionet gradualité

Incertitude

Probabilités

bases de algorithmesrègles de classification

régulation, XXcommande

réglage XXautomatiquede paramètres

aide à la décision XX X

diagnostic X XX

contrôle de XXqualité

Logique floue et autres techniquesLa logique floue est avant tout une extension,une généralisation de la logique booléenne.Elle permet d’introduire une gradualité dans desnotions auparavant soit vraies soit fausses.

Les probabilités, sans remettre en cause lanature binaire des événements (soit vrais soitfaux), permettent de gérer l’incertitude del’occurrence de ces événements.

A la charnière entre ces deux approches, lathéorie des possibilités (inventée par LotfiZadeh) permet de prendre en compte à la foisgradualité et incertitude (cf. fig. 22 ) .

Les bases de règles floues sont souventcomparées pour les applications de commande /régulation aux réseaux neuronaux et à l’automa-tique classique. Ces trois approches nécessitentrespectivement pour pouvoir être appliquées uneexpertise, des données servant à l’apprentissage,et un modèle dynamique du procédé.

Leur comparaison n’est possible que quand lestrois sont simultanément disponibles, ce qui est

souvent le cas dans les études théoriques maisrarement en pratique ; si les trois sontdisponibles, les aspects pratiques sont souventprépondérants. En particulier, la logique flouepeut être préférée pour son intelligibilité par lesopérateurs.

Hybridation des techniques

La logique floue est souvent utilisée encombinaison avec d’autres techniques. Cesassociations sont heureuses quand chaqueapproche met en avant ses propres points forts.

c Apprentissage de règles floues ou neuroflou

Les bases de règles floues peuvent être modifiéesen utilisant des méthodes d’apprentissage.

Les premières méthodes dites de « self-organizing controller » ont été mises au pointdès 1974 et visaient à modifier heuristiquementle contenu des règles floues appartenant à un« tableau de règles ». L’expertise elle-même estmodifiée par l’apprentissage, mais les fonctionsd’appartenance restent inchangées.

Une deuxième approche plus souventexpérimentée consiste à modifier des paramètresreprésentatifs des fonctions d’appartenance. A la

Fig. 22 : comparaison de la logique floue et d’autrestechniques.

5 Applications du flou

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Cahier Technique Schneider n° 191 / p.20

différence de la première méthode, les règles etla structure de l’expertise ne sont pas altérées.La modification des paramètres des fonctionsd’appartenance est réalisée en utilisant desméthodes d’optimisation, par exemple desméthodes de gradient, ou des méthodesd’optimisation globale telles que les algorithmesgénétiques ou le recuit simulé. Cette approcheest souvent qualifiée de « neuroflou », enparticulier dans le cas où le gradient est utilisé.En effet, l’utilisation du gradient pour optimiserces paramètres s’apparente à la « rétropropaga-tion », utilisée dans les réseaux neuronaux dits« perceptrons multicouches » pour optimiser lespoids entre les couches du réseau de neurones.

Une troisième approche (que l’on peut qualifierd’optimisation structurelle de la base de règles)vise à déterminer simultanément règles etfonctions d’appartenance par apprentissage.On conduit alors en général l’apprentissage sans

référence à une expertise. Les règles obtenuespeuvent alors théoriquement être utilisées pouraider à bâtir une expertise.

c Utilisation de logique floue combinée àl’automatique

Une base de règles floues fait parfois partie d’unrégulateur. L’emploi de la logique floue poursimuler un terme proportionnel permet toutessortes de non-linéarités. Les cas particuliers defonctionnement dégradé comme les surcharges,la maintenance ou les pannes partielles sontaisément intégrés.

Une base de règles floues est plusavantageusement utilisée hors de la bouclede régulation, en supervision d’un régulateur.Elle sert alors à remplacer un opérateur pourajuster les paramètres du régulateur enfonction des conditions d’exploitation del’asservissement.

5.2 Exemples de réalisations industrielles

La logique floue est maintenant admise commefaisant partie des méthodes courantes pourcontrôler les processus industriels.L’automatique binaire et le régulateur PID sontencore suffisants pour bien des applications ;mais de plus en plus la logique floue estreconnue et utilisée pour ses atoutsdifférenciateurs, notamment en matière demaîtrise de la qualité de production et des coûts.En raison des avantages concurrentiels offertspar la logique floue dans certaines applications,l’intégrateur ou l’utilisateur final ne souhaitentgénéralement pas en faire état. Il y a dans cesapplications tout un savoir-faire capitalisé, oubien un astucieux raccourci technique. Laconfidentialité est alors de mise. Cela expliquequ’il n’a pas été possible de détailler de la mêmefaçon tous les exemples qui suivent.

Station d’épuration

Pour la plupart, les stations d’épuration modernesutilisent des procédés biologiques (développementde bactéries dans des réservoirs aérés) pourpurifier les eaux usées avant de les rejeter dansl’environnement naturel. La matière organiquecontenue dans l’eau de rejet est utilisée par labactérie pour créer ses constituants cellulaires.Celle-ci rejette du gaz carbonique (CO2) et del’azote (N2). De l’air est insufflé dans lesréservoirs. L’énergie utilisée pour cetteventilation représente couramment plus de lamoitié de l’énergie globale consommée par lastation. Pour assurer le développement correctdes bactéries et l’épuration, les concentrationsde NH4 et O2 dans les réservoirs d’aération

doivent être étroitement maîtrisées ; d’autantplus que pour réduire les coûts d’énergie, ledébit d’air est maintenu au minimum compatibleavec le processus biologique.

Il faut rajouter à ces exigences la prise en comptede quelques cas de fonctionnement particuliers,comme par exemple un débit amont très élevé,circonstance extrême où les paramètres sontprofondément modifiés, et les performancesd’épuration dégradées.

Bien qu’il existe des modèles mathématiquespartiels de stations, aucun modèle complet n’estdisponible, et la stratégie de pilotage de l’ensembledoit souvent être développée heuristiquement.

L’emploi de la logique floue aujourd’hui est assezfréquent dans une station d’épuration. La stationde la figure 23 , située en Allemagne, fonctionnedepuis 1994. Le contrôle flou a été réalisé sur unautomate programmable Schneider Modicon,grâce à ses modules fonctionnels standard derégulation floue.Le concepteur souligne l’intérêt d’utiliser la logiquefloue dans la régulation : les exceptions, situationsoù la capacité d’épuration est partiellementdégradée, sont traitées simplement et sansdiscontinuité.Voici la méthode choisie pour introduire ces étatsd’exception dans une boucle de régulation :

Un terme proportionnel qui doit s’adapter auxcirconstances exceptionnelles est identifié dansla boucle de régulation ; le terme proportionnelest d’abord transcrit en logique floue, puis cetélément de logique floue inséré dans la bouclede régulation.

Page 23: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.21

Réservoirs de précipitantspour les phosphates

Soufflerie

Sortie

Recirculation

Poste de conduite et bâtiment d'exploitation

Bâtiment grille

1 - Arrivée des eaux usées2 - Relevage mécanique entrée3 - Bassin de dessablement ventilé4 - Rigole Venturi5 - Boues exédentaires6 - Boues recyclées7 - Racleur à boues8 - Décantation finale I9 - Décantation finale II

10 - Voies de nitrification11 - Bassin de dénitrification

1234

8 7

567

10

9

11

Une fois les fonctions d’appartenanceconvenablement ajustées, deux règles suffisentà décrire ce régulateur proportionnel :

SI entrée basse ALORS sortie basse.SI entrée haute ALORS sortie haute.

Une troisième règle est rajoutée à la demandedes opérateurs qui y trouvent une meilleurecompréhension du fonctionnement :

SI entrée moyenne ALORS sortie moyenne(cf. fig. 24 ).

Une fois le terme proportionnel simulé, lesexceptions sont introduites sous forme d’autresrègles, dépendant d’autres combinaisons devariables d’entrée.

Un exemple simple de cette possibilité estillustré par la figure 25 .

Fig. 23 : synoptique de la station d’épuration.

µ

Entréebasse

Entréemoyenne

Entréehaute

µ

Sortiebasse

Sortiemoyenne

Sortiehaute

Fig. 24 : simulation d’un terme proportionnel derégulateur.

Exception y

Sortie commandée z

Variable d'entrée x

Zone correspondant au régulateur proportionnel

Zone d'influencede l'exception

Fig. 25 : introduction d’une exception dans un termeproportionnel.

Page 24: Collection technique Cahier technique n° 191

Cahier Technique Schneider n° 191 / p.22

Voici un autre traitement utilisant la logiquefloue : une partie des boues qui se déposentdans le bassin aval est recyclée et réinjectée enamont. Le tableau de la figure 27 présente lesrègles correspondant au recyclage des boues.La première règle traduit une exception, due àun trop fort débit amont. Dans ces conditions, unrecyclage important amènerait une surcharge

accrue de l’installation. L’état d’exception estdétecté par la turbidité élevée, car les bouessédimentent peu à cause du débit trop élevé.

Pour mémoire, d’autres fonctions de l’installationutilisent la logique floue :c injection d’air,c gestion des boues excédentaires.

Fig. 27 : tableau de règles de la fonction recyclage des boues.

SI turbidité de l’eau ET quantité écoulée ET niveau des boues ALORS quantitéévacuée de boues recyclées

élevée bas basse

normale bas basse

élevée bas normale

basse normal élevée

normale normal normale

élevée normal élevée

basse haut normale

normale haut élevée

Agro-alimentaire

L’automatisation des lignes de fours industrielspour la cuisson intéresse les fabricants debiscuits autant en France qu’en Allemangne.Pour ce type de régulation, une solutionconventionnelle ne peut donner satisfaction àcause des non-linéarités, de la multiplicité et del’hétérogénéité des paramètres sensibles. Lamodélisation du processus de cuisson estcomplexe et incomplète. Cependant, desopérateurs entraînés sont parfaitement à mêmede contrôler correctement la cuisson en utilisantleurs connaissances empiriques.

Le tableau de la figure 26 présente les règlescorrespondant à la recirculation. Le terme pro-portionnel est réalisé à partir de la variable d’entrée

Fig. 26 : tableau de règles de la fonction recirculation.

SI teneur O 2 nitri ET teneur O 2 dénitri ET teneur No x ALORS quantité recirculation

non basse supérieure à 0 basse

basse basse

normale normale

élevée élévée

« teneur en NOx ». Les deux variables d’entrée« teneur O2 nitri », « teneur O2 dénitri » définissentune situation d’exception dans la première règle.

L’exemple choisi est celui d’une chaîne deproduction de biscuits apéritifs.

Un groupe français a fait appel à Schneider quien collaboration avec l’ENSIA (Ecole NationaleSupérieure des Industries Agricoles et Alimen-taires), a développé une solution automatisée.

Les principales caractéristiques mesurables d’unbiscuit sont sa couleur, son humidité et sesdimensions. Elles peuvent être influencées parles variations de qualité des constituants de lapâte, des conditions d’ambiance, de la durée deséjour du biscuit dans le four... Ces influences

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doivent être compensées par le réglage desfours et la vitesse de défilement des convoyeurs.La régulation de la qualité de production d’unprocédé agro-alimentaire de ce type peut êtredécomposée selon les étapes fonctionnellessuivantes :c conditionnement et fusion de données,c évaluation de grandeurs subjectives (liées à laqualité),c diagnostic des écarts de qualité,c prise de décision.

La logique floue permet ici de prendre en comptedes grandeurs qualitatives tout au long de cettedécomposition et d’utiliser l’expertise « métier »existante. Des bases de règles floues ont étéutilisées avec profit, conjointement à d’autrestechniques (cf. fig. 28 ).

Fonctions Techniques associées

Fusion capteurs Interpolateur « boîte noire »à apprentissage

Evaluation subjective Classification floue

Diagnostic Ladder flou

Prise de décision Base de règles floues

Fig. 28 : fonctions et techniques associées.

Dessous biscuitbien cuit

Dessus biscuitbien cuit

Dessous biscuitun peu trop cuit

Dessus biscuitun peu trop cuit

Température section 1du four trop faible

Humidité biscuitforte

Dessous biscuitbeaucoup trop cuit

Dessus biscuitbeaucoup trop cuit

Dessous biscuitpas assez cuit

Dessus biscuitpas assez cuit

Fig. 29 : ladder flou de diagnostic des écarts de qualité.

c Evaluation subjective

La plupart des notions définissant la qualitédépendent de plusieurs variables. La qualité estévaluée entre autres par la couleur, qui esttridimensionnelle, d’où l’intérêt de définir desfonctions d’appartenance non booléennes àplusieurs variables. Les algorithmes declassification, à partir des variables d’entrée etde ces fonctions, fournissent les éléments dediagnostic (dessus biscuit bien cuit, trop cuit...).

c Diagnostic

Le ladder flou a été utilisé pour le diagnostic desécarts de qualité constatés sur les biscuits(cf. fig. 29 ). Le four comporte 3 sections.

Le bilan de fonctionnement de l’ensemble estsatisfaisant.

Autres exemples

c Automatismes

Les correcteurs G.P.C. (Global PredictiveControllers) sont très performants, maisnécessitent le réglage de 4 paramètres N1, N2,Nu, l (horizons de commande , de prédiction,coefficient de pondération). Ce réglage est longet difficile, et nécessite habituellement un expert.La filiale NUM de Schneider développe descommandes numériques et souhaitait utiliser descorrecteurs G.P.C. dans ses futures réalisations.

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c Classée parmi les techniques de l’intelligenceartificielle, la logique floue permet de modéliserpuis de remplacer l’expertise de conduite deprocessus, expertise en provenance duconcepteur ou de l’utilisateur.

c Outil d’amélioration de la qualité, de laproductivité, elle procure des avantagesconcurrentiels à l’industriel en quêted’optimisation technico-économique.

c Ce Cahier Technique a montré dans quelsdomaines cette approche intéressantes’appliquait avec profit.

c Grâce à des automates adaptés et des outilsconviviaux, la logique floue est maintenantaccessible à tout automaticien désireux d’accroîtrele champ de ses compétences et la performancede ses réalisations. De tels outils sont disponiblesdans l’environnement de développement decertains automates programmables (cf. fig. 30 ).

Des possibilités d’évaluations simples sontoffertes par ces outils.

c Une évaluation limitée à la mise enconcurrence avec les autres outils traditionnelsdu contrôle n’a pas d’intérêt : ces outils, tels lesrégulateurs PID, gardent leur place et leursterrains d’applications.

c La logique floue a ses domaines deprédilection où elle fait merveille, dès qu’entrenten jeu une expertise, une prise de décisionnuancée, la prise en compte de phénomènesnon-linéaires, de paramètres subjectifs, voiredes facteurs de décision contradictoires. Uncontact avec un spécialiste Schneider permettraà un utilisateur ou un concepteur de trouverréponse au cas par cas, à sa légitimeinterrogation :

« Quels avantages décisifs la logique floueapporterait-elle dans mon application ? »

6 Conclusion

Schneider a développé pour elle une méthodede réglage automatique des paramètres de cescorrecteurs. Celui-ci est effectué à l’aide d’unebase de règles floues. Une vingtaine de règlessuffisent pour assurer un réglage rapide et fiabledes paramètres. D’autre part, la présence d’unspécialiste de contrôle-commande, difficile àassurer dans le contexte de l’installation d’unecommande numérique, n’est plus nécessaire.

c Automobile

Renault et Peugeot (PSA) annoncent une boîtede vitesse automatique qui grâce à la logiquefloue, s’adapte au type de conduite de celui quiprend le volant.

c Cimenteries

La première application industrielle de la logiquefloue, reprise ensuite par les autres

constructeurs, a été réalisée par la sociétéF.L. Smidth Automation du Danemark dans larégulation des fours à ciment. Ce procédé prenden compte de nombreuses variables, enparticulier les influences climatiques sur le fourqui mesure plusieurs dizaines de mètres.

c Electroménager et électronique grand public

Principalement au Japon, de nombreusesapplications atteignent le grand public. Parexemple, les camescopes numériques, ultra-légers, sont très sensibles au bougé. La logiquefloue pilote le système électronique anti-bougéde ces appareils.

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Fig. 30 : pour la logique floue, les automates Schneider disposent d’outils de développement conviviaux sur PC.

a - paramétrage du module de logique floue

b - définition des fonctions d’appartenance d - simulation - validation

c - écriture des règles

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Annexe

Fig. 31 : opérateurs entre ensembles flous

Les fonctions d’appartenance de sortiesingletons

Les fonctions d’appartenance « singletons » sontsouvent utilisées comme fonctions d’appartenancede sortie pour les règles floues. En effet, ellespermettent le même effet d’interpolation entreles règles que dans le cas des fonctionsd’appartenance triangulaires par exemple, pourdes calculs beaucoup plus simples. Il n’est pasnécessaire de calculer le maximum des fonctionsd’appartenance de sortie (agrégation) et le centrede gravité est également simplifié. La figure 32illustre ce calcul.

Fig. 32 : défuzzification de fonctions d’appartenancesingletons.

µA∩B = MIN (µA, µB)

µA∩B

µA∪B

µA

µA∪B = MAX (µA, µB)

µA = 1 - µA

Intersection

Opérateurde ZADEH

Opérationlogique

Union

Négation

ET

OU

NON

A∩BA B

A B

A_

_µA

_

A

A∪B

µB

µA µB

µA

µ

Action

Basse

Moyenne

Haute

Sortie

1

Opérateurs entre ensembles flousLe tableau de la figure 31 présente les différents opérateurs de ZADEH.

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Règles (implications)

Faits observés ConclusionsModus Ponens

A ⇒ B

A

Implication Modus Ponens

B

0 1

10 0

11 1

B'

A'

A ⇒ B

0 1

00 0

01 1

Règles (implications floues)

Fuzzification DéfuzzificationEntrées SortiesModus Ponens généralisé

Les inférences floues : Implication floue etModus Ponens Généralisé

Comme le montre la figure 33 , le mécanismeclassique d’inférence « par l’avant » ou « modusponens » consiste à partir de règles, aussiappelées implications et d’un mécanisme dedéduction (le modus ponens) à déduire desconclusions à partir des faits observés.

L’implication « A ⇒ B » est considérée vraie tantqu’elle n’est pas infirmée (A vrai et B faux) :voir figure 34 . Le modus ponens, sachant sil’implication est vraie ou fausse, permet de déduireune conclusion B’ à partir d’une observation A’.

Le même principe théorique peut être généraliséen logique floue. Le schéma général est donnépar la figure 35 .

Fig. 33 : principe de l’interférence par l’avant.

Fig. 34 : principe de l’implication et du Modus Ponens.

Fig. 35 : principe des interférences floues.

Le mécanisme généralisant l’implication estappelé « implication floue ». Il existe diversopérateurs d’implication floue, dont ceuxmentionnés ci-dessous :

MAMDANI : µA⇒B = MIN (µA, µB)LARSEN : µA⇒B = µA . µB

LUKASIEWICZ : µA⇒B = MIN (1,1 - µA + µB)

L’implication floue fonctionne comme l’implicationclassique, A et B étant des ensembles flous.

Le mécanisme généralisant le modus ponens estappelé « modus ponens généralisé ». Il obéit àla formule qui suit et permet de déterminer unensemble flou conclusion B’. Le plus souvent,l’opérateur T utilisé est le Minimum (appeléopérateur de Zadeh).

µB’(y) = MAXx (T(µA’(x), µA⇒B (x,y)) )

où T : opérateur de modus ponens (t - norme),

L’opérateur de Lukasiewicz se comporte commel’implication classique quand on se restreint àdes valeurs booléennes. Ce n’est pas le cas desopérateurs de Larsen et Mamdani, utilisés dansles bases de règles de Mamdani. Ces opérateurssont les plus largement utilisés car :

- on constate leur bonne robustesse dans lesapplications.

- les calculs sont considérablement simplifiés etpermettent une interprétation graphique simple(voir chap. 2.4). Les calculs sur l’entrée x et lasortie y sont découplés, comme le montre laformule suivante :

µB’(y) = MAXx (Min (µA’ (x), µA(x), µB(y)) )

= Min (µB(y), MAXx (Min (µA’(x), µA(x)) )

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Bibliographie

NormesIEC 61131-7 Programmable Controllers part 7Fuzzy Control Programming.

Ouvrages diversc Fuzzy models for pattern recognition, JamesC. BEZDEK & Sanker K. PAL, IEEE Press, 1992.

c Fuzzy sets and systems : Theory andapplications, D. DUBOIS, H. PRADE, AcademicPress 1980, Mathematics in Sciences andEngineering vol. 144.

c Evaluation subjective ; méthodes, applicationset enjeux, les cahiers des clubs CRIN, club CRINlogique floue.

c A.I. and expert system myths, legends andfacts, M.S. FOX, IEEE Expert 02/90, pp 8-20,29 réf.

c La logique floue et ses applications,Bernadette BOUCHON-MEUNIER, Addison-Wesley, 1995.

Internet

c http://pages.pratique.fr/~bmantel/pages/logfloue.html (simple et didactique)

c http://www.ipl.fr/ecam/laborato/logique_floue.html (brève présentation)

c http://www.cs.nthu.edu.tw/~jang/nfsc.htm(bibliographie, liens vers ressources en anglais)

c http://maxwell.univalle.edu.co/~paulo/fuzzy/bibliografia.html (bibliographie)

c http://mijuno.larc.nasa.gov/dfc/tec/fuzsysB.html(bibliographie)