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Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 2

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 3

Sommaire

COMITE D’ORGANISATION ........................................................................................................................... 3

COMITE SCIENTIFIQUE.................................................................................................................................. 5

AVANT-PROPOS................................................................................................................................................. 7

OUVERTURE....................................................................................................................................................... 8

LES ACTIONS DE PROXIMITE, MAILLONS INCONTOURNABLES D’UNE POLITIQUE GLOBALE DE PREVENTION DU TABAGISME ......................................................................................................................................................... 9

L’EVOLUTION DES LOIS ET LES ACTIONS DE PROXIMITE .................................................................................... 11

TABLE RONDE - COMMENT ASSEOIR LES PROJETS SUR DE BONNES BASES : L’IMPLANTATION DES ACTIONS DE PROXIMITE................................................................................ 13

QUELLES LEÇONS TIRER DE L’EVALUATION FINALE DU DISPOSITIF « EMPLOIS JEUNES TABAC » ? .................... 14

ECOLE DU SOUFFLE : PROMOUVOIR LA PREVENTION DU TABAGISME EN ENTREPRISE........................................ 16

LIBER’TABAC : UN PROGRAMME REGIONAL DE LUTTE CONTRE LE TABAGISME DANS LES ETABLISSEMENTS SCOLAIRES. UN ECLAIRAGE SUR LA MANIERE DE SURMONTER LES OBSTACLES AUPRES DES PERSONNELS. ....... 20

BIEN-ETRE, LIBERTE DE CHOIX ET SANTE : PROGRAMME MOSELLAN PLURIANNUEL DE PREVENTION DU TABA-GISME ET DE PROMOTION DE LA SANTE DE FEMMES EN SITUATION DE PRECARITE HEBERGEES EN FOYERS ....... 23

TABLE RONDE - COMMENT FAIRE VIVRE UNE ACTION DE TERRAIN AU QUOTIDIEN : LE DEROULEMENT DES ACTIONS DE PROXIMITE .................................................................................... 28

UNE CITE SCOLAIRE SANS TABAC ...................................................................................................................... 29

PROGRAMME DE SENSIBILISATION ET D’ACCOMPAGNEMENT DES ETABLISSEMENTS SCOLAIRES A L’ARRET DU TABAC ............................................................................................................................................................... 31

VERS UNE ECOLE SANS TABAC POUR CHACUN ET POUR TOUS............................................................................ 35

TABLE RONDE - COMMENT SE QUESTIONNER SUR SA PRATIQUE : LE SUIVI ET L’EVALUATION DES ACTIONS DE PROXIMITE..................................................................................... 38

TABAGISME DANS LES LYCEES FRANÇAIS : PRINCIPALES EVOLUTIONS AU COURS DES QUATRE DERNIERES ANNEES ............................................................................................................................................................. 39

COMMENT EVALUER LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES PSYCHOSOCIALES CHEZ LES 9-11 ANS ? ............ 40

« AUJOURD’HUI JE NE FUME PAS », UN PROGRAMME PLURI PARTENARIAL DE PROMOTION DU SEVRAGE TABAGIQUE DANS LES LYCEES D’ILE DE FRANCE .............................................................................................. 45

PROGRAMME « LYCEE PILOTE SANS TABAC » ................................................................................................... 51

MISE EN PERSPECTIVES............................................................................................................................... 53

REGARDS CROISES AVEC LE QUEBEC : APPORT ET COMPARAISON AVEC LA POLITIQUE DE PREVENTION DU TABAGISME AU QUEBEC.................................................................................................................................... 54

POSTERS ............................................................................................................................................................ 77

SITOGRAPHIE .................................................................................................................................................. 86

ANNEXE.............................................................................................................................................................. 87

COORDONNEES DES INTERVENANTS.................................................................................................................. 88

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Comité d’organisation

• Geneviève Blanquet, secrétaire de la Fédération nationale des comités d’éducation pour la santé (FNES)

• Christine Gilles, chargée de mission, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Christine Kerneur, infirmière conseillère technique à la Direction générale de l’enseignement scolaire, ministère de l’éducation nationale

• Martine Lapergue, chargée de mission, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Karine Leclercq, assistante, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Marie-Josèphe Logez, déléguée de la Fédération nationale des comités d’éducation pour la santé (FNES)

• Annie-Claude Marchand, chef de département, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Pascal Mélihan-Cheinin, chef du Bureau des Pratiques addictives, Direction générale de la santé

• Manuela Verdol, chargée de mission, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

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Comité scientifique

• Monique Baudry, chargée de mission prévention à la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt)

• Docteur Jacques Danan, Inspection médicale du travail, Direction générale du travail (DGT)

• René Demeulemeester, coordonnateur des programmes, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Christine Gilles, chargée de mission, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Christine Kerneur, infirmière conseillère technique à la Direction générale de l’enseignement scolaire, ministère de l’éducation nationale

• Antoine L’Huillier, chargé de communication, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Annie-Claude Marchand, chef de département, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Viet Nguyen-Thanh, chargée de mission téléphonie santé, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Manuela Verdol, chargée de mission, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

• Jean-Louis Wilquin, chargé d’étude tabac, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

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Avant-propos

Pour réduire le tabagisme de manière efficace, il est indispensable d’associer programmes combinant plusieurs modalités d’intervention et efforts importants de coordination. Les actions présentées au cours de ce colloque en sont une belle illustration. Après plusieurs années de soutien aux actions de proximité, l’Inpes en coordination avec la Direction générale de la santé et des solidarités et le ministère de l’éducation nationale a souhaité organiser un temps de réflexion et de partage autour des actions de proximité en prévention du tabagisme. Ce colloque s’inscrivait également dans un tournant en terme de politique de prévention du tabagisme avec la sortie du décret du 15 novembre 2006 portant sur l’interdiction de fumer dans tous les lieux collectifs. Intitulé « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations », le colloque s’est tenu le 8 décembre 2006 au ministère de la santé et des solidarités à Paris. Il a rassemblé près de 200 participants. Cette journée a constitué un lieu privilégié de valorisation et de partage d’expériences sur les actions de proximité en prévention du tabagisme. Les échanges ont été structurés autour de 3 tables rondes portant sur l’implantation, le déroulement et le suivi/évaluation des actions. Les tables rondes dédiées à l’implantation et au suivi/évaluation ont été introduites par la présentation de l’évaluation de deux dispositifs nationaux (dispositif « emploi jeune tabac » et application de la loi Evin dans les établissements scolaires). La journée a été clôturée par une allocution de Madame Louise Guyon qui mettait en perspective la politique de prévention du tabagisme au Québec au regard des actions présentées au fil de la journée. Les actes tirés de cette journée sont présentés sous la forme d’un recueil des textes rédigés par les intervenants en vue de résumer ou de compléter les principaux points abordés par chacun au cours des débats.

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Ouverture

Allocution de Philippe Lamoureux, directeur général de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes)

Allocution de Pascal Mélihan-Cheinin, chef du Bureau des pratiques addictives, Direction générale de la santé (DGS)

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Les actions de proximité, maillons incontournables d’une politique globale de prévention du tabagisme

Allocution de Philippe Lamoureux Directeur général de l’Inpes

Bonjour à tous et merci d’être venus si nombreux. Cette journée d’échanges consacrée à la prévention du tabagisme est co-organisée avec le ministère de l’éducation nationale et la Direction générale de la santé. Dans le cadre du programme de prévention du tabagisme, les actions de proximité sont soutenues par l’INPES grâce à la mise en place de deux dispositifs :

- Les emplois jeunes tabac. Né en 2000 d’un partenariat entre le CNAMTS et le CFES, ce dispositif avait pour objectifs le renforcement de l’éducation de la santé sur l’ensemble du territoire, l’augmentation et la diversification des modes d’actions liés à la prévention du tabagisme, ainsi que la consolidation de l’articulation entre le niveau national et local par la mise en réseau des acteurs locaux en cohérence avec les priorités des programmes nationaux et régionaux ;

- Le lancement de l’appel à projets Tabac-Alcool dans le cadre de la mobilisation nationale contre le cancer (2003). Son objectif est de favoriser une meilleure articulation entre les actions de terrains et la politique nationale, tout en développant les actions de promotion et d’éducation pour la santé en régions.

Au total, avec ces deux dispositifs, 25 millions d’euros ont été consacrés aux actions de proximité en matière de prévention du tabagisme, en articulation avec le dispositif national de prévention et en liaison avec les campagnes de communication nationale, les enquêtes épidémiologiques et la mise en place de la ligne « Tabac Info Service ». Ces actions de prévention ont touché les cibles suivantes : la population scolaire, les salariés, les femmes enceintes, les professionnels de santé et les publics en situation de vulnérabilité. Elles ont été développées dans une démarche de promotion de la santé. Elles ont permis la mobilisation des personnels éducatif et hospitalier ainsi que celle des dirigeants d’entreprise. Dans chaque région de France, un programme de prévention a vu le jour. Les interventions se sont traduites par des actions en formation, par l’accompagnement des acteurs, la mise à la disposition de documentation et la réalisation d’enquête. Tout cela n’aurait pas été possible sans la mobilisation des acteurs de terrains qui ont su construire des partenariats féconds avec les différents interlocuteurs. A ce titre, je tiens à leur témoigner ma gratitude. Nos efforts semblent porter leurs fruits. Au 1er février 2007, fumer sera interdit dans les lieux publics. Notre victoire consiste à avoir su rendre socialement inacceptable le tabagisme. Nous devons la partager ensemble aujourd’hui. Cependant, il nous faut également réfléchir à notre stratégie d’adaptation pour tenir compte de cette évolution majeure. D’ores et déjà, nous voulons partager quelques sujets de réflexion. Nous allons réussir à apporter la démonstration que l’augmentation du prix de vente du tabac privilégie les catégories les plus favorisées : quand on augmente les taxes sur le tabac de 40 %, les gens qui

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arrêtent le moins de fumer sont proportionnellement les populations à faibles revenus. Nous sommes donc confrontés à un problème d’accroissement des inégalités en matière de santé. Je voudrais enfin vous informer que nous allons regrouper les crédits de l’Appel à projets Tabac-Alcool et des SREPS pour mener un projet plus global. Nous travaillons avec la DGS à ce nouveau dispositif. Pour finir, je souhaite remercier les intervenants qui ont accepté fort aimablement de s’être rendus disponibles pour participer à cette journée afin de partager les résultats de leurs travaux et leurs expériences. Je vous souhaite une excellente journée et vous remercie de votre attention.

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L’évolution des lois et les actions de proximité

Allocution de Pascal Mélihan-Cheinin Chef du Bureau des Pratiques addictives (DGS)

Monsieur le directeur général de l’INPES, Mesdames, Messieurs, Bonjour,

Au nom du Directeur général de la santé, je suis heureux de vous accueillir ici, au ministère de la santé et des solidarités.

Comme vous le savez, ces dernières années ont été marquées par une offensive contre le tabac conduite dans le double cadre stratégique du Plan Cancer et de la loi relative à la politique de santé publique du 9 août 2004.

Si la politique de renforcement de l’offre de soins a été poursuivie, l’histoire retiendra sans aucun doute une série de mesures réglementaires dont l’ampleur était restée inconnue depuis la loi Evin. A titre de mémoire, une vigoureuse action sur les taxes, des mesures spécifiques pour une prévention plus efficace auprès des jeunes avec la loi du 31 juillet 2003 et les dispositions de la loi de santé publique de 2004. Sans oublier le doublement des subventions aux associations nationales et la mise en place d’un appel à projets en régions organisé par l’INPES avec le soutien de la DGS et, plus récemment, de l’INCa. Cette politique a porté ses fruits et a eu, sur les jeunes et les femmes, cibles prioritaires, des effets durables : - une chute de 30% de la proportion des fumeurs réguliers chez les fumeurs de 14-15 ans,

en 2005 par rapport à 1999, d’après l’INPES ; - une chute de 10% de la proportion de fumeuses ; - la part des femmes enceintes de 25-35 ans qui fument a chuté de 30% entre 2000 et 2004. Mais ces résultats aussi brillants puissent-ils nous paraître, ne doivent pas nous laisser inactifs aujourd’hui. Avec 30% de fumeurs dans sa population, la France est encore loin de l’objectif de l’OMS de 20% de fumeurs en population générale. Fort heureusement, les perspectives sont encourageantes : - au niveau international, la lutte contre le tabac a été consacrée par le premier traité de

l’histoire de l’OMS. La convention-cadre internationale antitabac, la CCLAT, nous fixe des recommandations d’action et une structure pour notre réflexion stratégique ;

- dans notre pays, après un vaste débat sur les moyens de prévenir efficacement le tabagisme passif, comme vous le savez, le Gouvernement a décidé de renforcer la réglementation applicable à l’interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif. Ainsi, le décret du 15 novembre 2006 indique que l’interdiction de fumer est absolue et que les emplacements pour fumer ne peuvent être aménagés au sein de certains établissements (enseignement, centres de formation des apprentis, établissements destinés à ou régulièrement utilisés pour l’accueil, la formation, l’hébergement ou la pratique sportive des mineurs et établissements de santé).

A compter du 1er février 2007, il sera en conséquence interdit de fumer dans tous les lieux affectés à un usage collectif, hormis dans les emplacements qui seront mis, le cas échéant, à disposition des fumeurs. Cette interdiction sera étendue aux cafés, restaurants, débits de tabac, discothèques, casinos et cercles de jeux, le 1er janvier 2008. Les circulaires d’application,

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notamment du ministère de la santé et du ministère de l’éducation nationale, ont été publiées le 5 décembre. Dès à présent vous pouvez vous renseigner en appelant le 0 825 309 310. Un site internet, www.tabac.gouv.fr, entièrement dédié à l’information du public sur cette réforme, sera mis en ligne le 15 décembre prochain. Il sera notamment possible d’y télécharger la nouvelle signalétique. L’aide apportée aux fumeurs sera aussi renforcée avec, notamment, le doublement des vacations hospitalières de tabacologie, le remboursement des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac (un avis de la Haute Autorité en Santé devra permettre d’en définir la liste), mais aussi les campagnes d’aide à l’arrêt de l’INPES. Pour s’assurer que cette décision soit effective et à l’image des expériences étrangères réussies, des contrôles seront lancés et des sanctions sont prévues. Pour conclure, laissez-moi rappeler que la protection des non-fumeurs est par nature une action de proximité. Elle se réussit là on l’on travaille, là où l’on se détend, partout où la vie en collectivité se déroule. Ainsi, Ken Warner de l’Université du Michigan avait montré que la diminution du tabagisme aux Etats-Unis, loin d’être attribuable à une action politique fédérale, devait être mise à l’actif du mouvement de défense des droits des non-fumeurs et à la mobilisation citoyenne locale. « Penser globalement, agir localement », le slogan n’est pas neuf, mais cette journée tombe à pic pour l’illustrer, une fois encore. Bonne journée à tous et merci.

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Quelles leçons tirer de l’évaluation finale du dispositif « emplois jeunes tabac » ?

Jacques Bury Directeur du cabinet ADSAN, expert international des politiques de santé

Une évaluation ne peut retranscrire la réalité avec une totale fidélité. Nous avons essayé d’apporter un éclairage sur un programme qui nous a paru, dès sa genèse en 1998, posséder toutes les caractéristiques qui font l’histoire d’un succès. Sur le plan politique, le dispositif des emplois jeunes a constitué une formidable fenêtre d’opportunité. La détermination de plusieurs responsables politiques fut déterminante. La gestion du programme de prévention sur le tabagisme fut confiée au CFES en 2001-2002 et l’INPES en a hérité. Il fallait renforcer le volet proximité en s’appuyant sur le réseau des comités. 115 postes furent créés. Cette contribution en forme de ressources a servi de mesure d’appui à un programme national prévu pour durer cinq ans. Les objectifs de ce programme étaient les suivants : améliorer l’aide à l’arrêt, renforcer le réseau d’éducation à la santé, faire de la prévention du tabagisme. Commencer par dresser un état des lieux fut une excellente idée. Les finalités de l’évaluation consistaient à :

- Fournir des éléments pertinents aux partenaires ; - Valoriser les enseignements ; - Dégager les critères de qualités des actions ; - Mesurer les effets et les impacts du programme sur la coordination.

Plusieurs modules ont été proposés pour réaliser cette étude :

- Commencer une analyse critique des documents à disposition ; - Dresser un bilan qualitatif basé sur les états des lieux réalisés chaque année ; - Faire une évaluation de qualité de projets représentatifs ; - Produire des synthèses et des recommandations ; - Evaluer la professionnalisation grâce à des entretiens individuels et de groupe dans 6

régions. Ces entretiens ont concerné trois groupes et 58 personnes : emplois jeunes, directeurs et partenaires.

En 2002, une évaluation avait été réalisée par LC Conseil. Cette étude était remarquable et insistait sur un point : la phase de préparation du dispositif avait été escamotée. Etant donné l’urgence, ces lacunes sont explicables. On pouvait cependant regretter l’absence d’une analyse stratégique du positionnement des acteurs. Un autre problème était l’insuffisance de la communication verticale. Les recommandations des auteurs étaient donc les suivantes : il fallait commencer une réflexion sur l’avenir des porteurs de projets, corriger un déficit d’informations entre partenaires régionaux et locaux. Nous sommes partis de ce constat et avons essayé d’analyser :

- L’efficacité des partenariats local et régional. Sur ce point, l’hypothèse d’impact est vérifiée. Des ressources nouvelles ont été apportées en quantité, de manière durable. Cela a permis d’atteindre l’objectif du développement des synergies régionales entre structures d’éducation pour la santé autour du tabagisme, débouchant sur une

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légitimité nouvelle vis-à-vis des partenaires. Les emplois jeunes ont permis la réalisation des projets. Il y a eu un effet générationnel. Beaucoup de jeunes ont adopté une approche moins cloisonnée des problèmes. Si le dispositif fut principalement centré sur tabagisme, ce fut grâce au partenariat massif de l’éducation nationale. L’ouverture vers les entreprises fut moins naturelle.

- L’articulation et la concertation entre les niveaux régional et national. Ici, on ne peut

que regretter l’insuffisance des effectifs sur le plan national entraînant l’impossibilité de suivre le développement du programme au niveau local. Le manque de soutien pour gérer la mise en place du dispositif a semblé manifeste. Les directeurs ont été isolés. Ainsi, dans les six régions concernées, les acteurs de terrain n’ont pas eu (ou peu eu) le sentiment d’avoir appartenu à une politique nationale. La transformation du CFES devenu INPES a renforcé ce sentiment d’abandon. D’autant plus que l’INPES est perçue comme une institution plus contrôlante. En outre, tous les intéressés regrettent le faible nombre d’échanges interrégionaux.

- Les effets sur la professionnalisation. Sur ce point, et en contrepartie d’un niveau

salarial faible, les emplois jeunes ont profité d’une opportunité évidente de formation. L’apport des emplois jeunes aux équipes, en termes de compétences en matière d’éducation à la santé, est loin d’être négligeable.

- La perception globale du dispositif par les acteurs. Ici, nous avons perçu une

augmentation de légitimité des structures d’éducation pour la santé et le développement de stratégies communes régionales. L’un des points faibles du dispositif relève du dilemme persistant entre les tenants de la charte de l’éducation pour la santé et ceux qui adoptent une approche plus médicalisée ou réglementaire du problème. Ce débat a mis mal à l’aise un certain nombre d’acteurs.

Au final, les emplois jeunes tabac furent une source d’expériences réussies pour les jeunes. Beaucoup n’ont pas eu de mal à rebondir à l’issue de leur contrat. Le dispositif a apporté une contribution essentielle aux problèmes de prévention sur le tabagisme, contribuant à renforcer durablement les réseaux. De nombreux enseignements sont transférables.

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Ecole du souffle : promouvoir la prévention du tabagisme en entreprise

Christine Servanton Chargée de projets au Cres Champagne-Ardennes

Marie-France Stankiewicz Infirmière de l’entreprise « Lecico », Vitry-le-François

Le réseau d’éducation pour la santé de Champagne-Ardenne initie depuis 2004 le programme régional de prévention du tabagisme, « Ecole du Souffle », dans le cadre de l’appel à projet « Tabac/Alcool » de l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé. Basé sur une approche positive et globale de la santé, l’Ecole du Souffle a pour ambition de mobiliser les professionnels « relais », en développant trois axes selon les milieux de vie (scolaire, du travail et du soin) avec la progression suivante :

� 2004 : Propositions de formations actions aux professionnels relais des trois axes

� 2005 : Poursuite des formations et accompagnement méthodologique d’actions des professionnels formés

� 2006 : Création et diffusion d’une « boîte à outils » s’adressant à tous professionnels souhaitant mettre en place un projet de prévention autour du tabagisme.

Les cinq comités de la région, en tant que réseau d’éducation pour la santé, ont souhaité par ce programme mailler davantage le territoire, jouer leur rôle de proximité, impliquer les partenaires. La prévention du tabagisme en entreprise : Impliquer les entreprises dans la prévention du tabagisme, c’est sensibiliser ce lieu de travail et de vie à son rôle d’acteur de santé : comment appliquer la Loi Evin ? Minimiser les risques ? Protéger la santé des salariés fumeurs et non-fumeurs…? Tous les membres de l’entreprise, de la direction aux salariés, du Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) au service médical en passant par les syndicats, patronats… peuvent et se doivent d’être mobilisés. Nous avons mis en place deux types de formations visant à former des relais au sein des entreprises. Elles visent à apporter les connaissances et les outils nécessaires tout en valorisant la démarche d’éducation pour la santé :

1. Formation « Prévention du tabagisme en milieu du travail » relative à la mise en place d’une action de prévention du tabagisme et à l’application de la Loi Evin. Elle s’adresse aux membres des CHSCT, aux équipes de santé, aux équipes de sécurité.

2. Formation « Aide à l’arrêt du tabac en entreprise » qui consiste à former le personnel médical à la prise en charge et au suivi des salariés fumeurs qui souhaitent arrêter.

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Dans le cadre de nos formations, nous avons fait appel à des tabacologues, des psychologues et des médecins du travail concernant des sujets spécifiques relatifs à la législation, à la prise en charge du fumeur, au sevrage tabagique ou encore aux dépendances. Les contenus relatifs à la méthodologie de projet et à l’éducation pour la santé ont été assurés par les formateurs internes à notre réseau. Le principal support utilisé était le livret « Pas à pas vers une entreprise sans tabac », outil très complet et très accessible pour les acteurs de l’entreprise. Pour diffuser les offres de formation, notre réseau a pu s’appuyer sur la Chambre du Commerce et de l’Industrie pour l’envoi des invitations aux entreprises de plus de cinquante salariés sur la région Champagne Ardenne. Deux sessions «Prévention » et cinq sessions «Aide à l’arrêt du tabac » ont été réalisées. Les infirmières étant les professionnels les plus en demande de formation et les plus disponibles pour y participer. Ce sont environ soixante entreprises qui ont bénéficié de notre programme. Certaines ont mis en place un projet de prévention du tabagisme (communication sur la Loi Evin, sur les risques liés au tabac….), d’autres des projets d’aide au sevrage tabagique. Nombreuses sont celles qui nous ont sollicité pour un appui méthodologique dans la mise en place de leur projet. De plus en plus d’entreprises du fait du nouveau décret relatif au tabac en milieu du travail, et qui n’ont pas participé au programme Ecole du Souffle, nous contactent pour les aider à devenir « entreprise sans tabac ». Un exemple : L’entreprise LECICO France (anciennement Sarreguemines Bâtiment) – Marne Spécialisée dans la production de pièces sanitaires en céramique, l’entreprise utilise des matériaux riches en silice provoquant des maladies professionnelles. Le tabac et la silicose multiplient le risque de cancer pulmonaire. Face à ce constat et en parallèle d’actions développées pour prévenir la silicose, il était urgent d’agir sur le risque tabac. L’infirmière a donc souhaité lancer une campagne de sensibilisation à la prévention du tabagisme. Lors d’une réunion du Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail, il a été voté à l’unanimité l’arrêt du tabac dans l’entreprise pour avril 2006. La première étape de la campagne a été la diffusion d’un questionnaire sur la consommation de tabac auprès des salariés. Il s’agissait de faire un état des lieux du nombre de fumeurs, de leur consommation et de leur motivation à l’arrêt. Le taux de retour des questionnaires fut de 70%. Sur 193 personnes, 34 ont déclaré fumer.

fumer représente

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Pour la majorité des fumeurs, fumer représente un besoin et un plaisir.

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santé finances diverses

motivation des tentatives

15 salariés avaient déjà tenté d’arrêter de fumer pour des raisons de santé. Ils sont donc déjà sensibles aux risques liés au tabac. L’enquête a permis à l’infirmière d’identifier que 29 salariés étaient intéressés par un accompagnement pour arrêter de fumer. Afin de pouvoir accompagner les salariés de son entreprise, l’infirmière a suivi la formation « Aide à l’arrêt du tabac en entreprise » proposée par le réseau des comités d’éducation pour la santé, qui lui a permis d’avoir les connaissances et les outils nécessaires pour identifier la dépendance de chacun, prescrire les substituts nicotiniques, être à l’écoute et apporter des réponses aux questions posées par les fumeurs. De plus, la mise en place de radiographies pulmonaires pour chaque salarié, remplaçant les clichés photos, a été un facteur de prise de conscience des risques encourus. La direction a donné son accord pour la prise en charge des substituts, pendant un mois, pour les salariés engagés dans une démarche d’arrêt. Le budget s’élevait à 1 300 euros. Le médecin du travail et l’infirmière ont initié la mise en place de séances de sensibilisation auprès des 29 salariés motivés, en petit groupe. Pour chaque groupe, un tabacologue et une psychologue sont intervenus pour parler des risques liés au tabac, de la dépendance et des méthodes d’arrêt. Ils ont présenté la prise en charge d’un fumeur dans son parcours d’arrêt. Suite à cela, le médecin ou l’infirmière ont reçu les salariés en entretien individuel pour identifier aux moyens de tests : le niveau de dépendance à la nicotine, la motivation à l’arrêt, l’anxiété. Une mesure du CO a été proposée à chaque salarié grâce au prêt du testeur par la médecine du travail. Les résultats des tests ont permis de prescrire à chacun le substitut le plus approprié. Un partenariat avec une pharmacie a été mis en place pour l’achat des substituts. Sachant, que c’était aux salariés de faire la démarche d’aller chercher les substituts dans cette pharmacie. Un suivi individuel des salariés en sevrage était proposé par l’infirmière et le médecin qui se tenaient à leur disposition. L’infirmière s’était munie de boîtes de substituts nicotiniques pour « dépanner » les salariés en manque.

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28 personnes ont fait la démarche d’aller chercher les substituts, les plus motivés tout de suite après les séances de sensibilisation, d’autres plus tardivement. Ils ont attendus la réaction des premiers. A 6 mois, 9 ont diminué et 12 ont arrêté. 7 personnes n’ont pas encore fixé leur date d’arrêt. Une personne a eu besoin de plus de temps pour se manifester auprès de l’infirmerie et a reporté son arrêt. En terme de charge de travail pour l’infirmière, celle ci se partage entre 20 heures le premier mois de suivi et 16h les mois suivants (1 matinée par semaine). Dans la continuité du projet, l’entreprise est devenue sans tabac au 28 avril 2006, le règlement intérieur a été modifié, des pancartes ont été installées aux différentes entrées du site. Il semble important pour la réussite d’une telle action que la mobilisation soit effective et soit partagée par différents acteurs de l’entreprise. La direction a un rôle à jouer et une influence certaine sur le bon déroulement de l’action. Il s’agit de modifier les représentations de chacun vis-à-vis du tabac tout en appliquant une loi de santé publique. Un des points forts est aussi la nécessité d’installer une confiance entre les salariés et le personnel médical et cette confiance s’acquière avec le temps.

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Liber’Tabac : un programme régional de lutte contre le tabagisme dans les établissements scolaires. Un éclairage sur la manière de surmonter les obstacles auprès

des personnels.

Florence Morel et Jonathan Rougier Rectorat de l’académie de Clermont-Ferrand

Notre étude s’inscrit dans un programme académique financé par l’INPES, codirigé par le Rectorat, le CHU et la Ligue contre le Cancer de Clermont-Ferrand. Ce programme intitulé Liber’Tabac, d’une durée de trois ans, a pour objectif final de diminuer le nombre de fumeurs et le nombre d’initiations tabagiques dans les établissements scolaires.

À l’échelle mondiale, le tabac est la première cause de mortalité évitable dans tous les

pays industrialisés. En France, même si depuis quelques années la consommation de tabac a diminué chez les adultes (un adulte sur trois est fumeur), elle continue à augmenter chez les adolescents (presque un jeune sur deux est fumeur entre 18 et 25 ans). L’âge moyen d’initiation tabagique est passé de 14 ans et demi en 1996 à 13 ans et demi aujourd’hui. L’âge de chronicisation moyen a été avancé en conséquence de 16 à 15 ans, ce qui engendre des conséquences graves sur le phénomène d’accoutumance (les jeunes qui commencent à fumer tôt ont plus de risque de devenir de gros fumeurs). Par ailleurs notons que seulement 2 % des fumeurs adultes ont été initiés au tabac après 25 ans. Il semble donc que l’environnement scolaire joue un rôle important dans l’initiation tabagique (collège) et dans la régularisation de cette consommation (lycée). Nous avons aidé plusieurs établissements scolaires volontaires à devenir sans tabac afin de limiter les phénomènes d’initiation et de chronicisation. Les expériences de certains établissements scolaires, nos observations sur le terrain et les résultats de recherche en psychologie sociale, nous ont démontré que l’implication de tous les acteurs d’une communauté scolaire dans une démarche d’établissement sans tabac était un bon moyen de garantir l’efficacité d’une telle action.

Nous avons contacté trente-deux établissements scolaires de la région Auvergne pour leur présenter notre projet. Nous nous sommes adressés à l’ensemble des personnels de ces établissements lors de différentes réunions organisées par l’établissement. Nous avons recensé deux obstacles majeurs pour la mise en place de nos actions : le manque de volonté des personnels et les résistances des fumeurs à s’impliquer dans le projet. Dans un premier temps, nous avons conçu des interventions pour contourner ces deux obstacles. C’est ce que nous présentons dans cette communication.

Le premier obstacle concerne la motivation du personnel des établissements à participer à

nos actions. Souvent sollicitées pour des projets qui n’aboutissent pas, ou encore contraints par le volume des programmes académiques, les équipes éducatives sont quelquefois réticentes à participer à des actions d’Education à la Santé. Cette réticence à s’impliquer dans ce genre de projet peut s’expliquer par de multiples facteurs. Nous avons suggéré que le sentiment d’un manque de compétences à pouvoir influer sur la santé des élèves et une mauvaise perception de ce qu’est réellement l’Education à la santé pouvaient alimenter les résistances des personnels. Le sentiment de compétences renvoie à la croyance en sa capacité à mobiliser certaines ressources pour maîtriser une situation et atteindre des objectifs. Peu formés en éducation à la santé, les personnels des établissements scolaires pensent donc qu’ils n’ont pas la capacité à agir sur la santé des élèves.

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Cependant, d’autres études effectuées en Education à la santé, ont montré que, sans le savoir vraiment, les enseignants, à travers l’enseignement de leur matière, faisaient de l’éducation à la santé. Les enseignants auraient donc une perception erronée de ce que représente l’enseignement de l’éducation à la santé et ne se sentiraient donc pas capables de l’enseigner. Dans un premier temps, nous avons élaboré un questionnaire permettant de connaître les motivations des personnels à s’impliquer dans un projet d’éducation à la santé et de savoir dans quels domaines les adultes souhaitaient approfondir leurs connaissances pour pouvoir faire de l’Education à la santé. Les résultats de ce questionnaire ont confirmé nos attentes. La motivation principale des adultes à participer à un projet d’Education à la santé était la possibilité de pouvoir protéger la santé des élèves. La deuxième motivation évoquée est la possibilité à développer d’autres aspects du travail (organisation de débats, de recherche documentaires, de projets…). Les difficultés le plus souvent citées pour la mise en place du projet étaient le manque de disponibilité. Nous avons répondu point par point à ces trois constats en créant des contenus de formation adaptés aux motivations des personnels. Pour répondre à leur première motivation, tous nos contenus étaient présentés et construits en référence à la protection de la santé des élèves. Pour répondre à la deuxième motivation, nous avons conçu nos formations de telle sorte qu’elles permettent aux personnels de développer une interactivité constante avec les élèves. Enfin, pour contourner la difficulté de la disponibilité, nous avons aménagé nos formations pour qu’elles offrent aux équipes éducatives la possibilité de pratiquer l’Education à la Santé dans le cadre de leurs missions habituelles (par exemple, un des chapitres de cette formation s’intitule « faire de l’Education à la Santé dans toutes les disciplines »).

Le deuxième élément pouvant interférer avec la mise en place de notre action concerne les résistances des fumeurs. En effet, certains comportements, notamment ceux qui concernent la santé font partie intégrante de l’identité des personnes et sont alors difficiles à modifier. D’après les études sur ce thème, le tabagisme contribue à définir comment un individu se perçoit et fait partie intégrante de son identité. Fumer ne se limite alors pas à une dépendance physiologique qui peut avoir des effets négatifs sur la santé. Ce comportement remplit d’autres fonctions comme la définition de soi (comment je me perçois) et l’acquisition de certaines valeurs (profiter de la vie, insouciance). Dans la mise en place de nos actions, nous avons affirmé qu’il fallait éviter de stigmatiser les fumeurs. En effet, les études sur ce thème ont montré que les campagnes traditionnelles d’information ont tendance à donner une image extrêmement négative de l’identité du fumeur : « Ex. : Un fumeur c’est sale et ça pue, ras le bol du tabagisme dans les lieux publics !». (Campagne des années 1990). Ce type de message menace l’identité de l’individu et le stigmatise. Dans ce cas, le fumeur va être motivé à défendre son identité en niant l’information, en continuant à fumer et en refusant de s’investir dans un projet de santé. Ainsi, nous avons proposé de réduire les enjeux identitaires lors de nos interventions. Pour cela, nous avons orienté notre travail non seulement sur la prévention du comportement tabagique et plus précisément sur le développement des compétences psychosociales chez les élèves. Les compétences psychosociales renvoient, chez les adolescents aux habiletés cognitives et sociales. Les habiletés cognitives sont les capacités individuelles et abstraites à analyser, comprendre et agir sur son environnement (connaissances : anticiper un refus, savoir analyser une situation). Les habiletés sociales sont les capacités interactives et concrètes à analyser, comprendre et agir sur son environnement (être capable de s’affirmer par rapport à autrui, être capable de s’améliorer, résister aux pressions sociales). On retrouve très souvent le terme de « compétences sociales » utilisé pour regrouper habiletés cognitives et habiletés sociales. Ces thématiques des compétences sociales permettaient de regrouper les fumeurs et les non-fumeurs autour d’un même objectif : l’Education des élèves. L’identité des fumeurs n’était plus menacée et ils pouvaient

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transmettre leurs connaissances dans divers domaines en suivant la même trame : donner aux jeunes les moyens de faire des choix éclairés face à la consommation de substances psycho-actives. Même si au départ notre action a été bien accueillie dans les établissements scolaires, nous nous sommes rapidement heurtés, comme attendu, au manque de participation des adultes. Au terme de la première année scolaire, en veillant à la manière de présenter les actions dans les établissements scolaires, le nombre de personnes dans les groupes de travail a augmenté (plus grande participation des enseignants). En ce qui concerne les personnels de service, de nouvelles actions ont dû être mises en place suite à leur demande de s’impliquer dans le projet. Les enseignants ont participé de plus en plus nombreux aux formations qui leur étaient destinées. L’évaluation de ces formations a montré que l’aspect éducatif des thèmes abordés était pertinent. À partir de nos premiers résultats, nous nous sommes rendus compte qu’il fallait absolument veiller à ne pas mettre en cause l’identité des personnes dans un projet d’Education à la Santé. Cette précaution passe par la mise en évidence des difficultés rencontrées par les acteurs des établissements scolaires, la compréhension de leurs réticences à participer à un projet et l’organisation optimale de toutes les actions pour éviter une surcharge de travail et une démotivation. Il est intéressant d’utiliser le projet tabac comme une base pouvant servir à d’autres thèmes de travail, ceci permet aux fumeurs d’évoquer des centres d’intérêt qui revalorisent leur identité. Tous les messages informatifs adressés aux fumeurs doivent privilégier leur autonomie, le libre choix, le respect. Faire appel à des sources d’influence non-expertes est également un bon moyen de contourner la motivation défensive du fumeur. Durant ces trois années d’interventions, nous avons mis en place une méthode d’évaluation. Cette méthode est à la fois quantitative (nombre d’actions mises en place à l’initiative de LiberTabac ou à l’initiative des établissements scolaires, nombre de changements de comportements par rapport au tabac, nombre de personnes impliquées dans le projet, diversité professionnelle de ces personnes, etc.) et qualitative (dynamiques de groupe impulsées, satisfaction des équipes et des élèves, etc.). Les premiers éléments quantitatifs ont montré une mobilisation progressive de l’ensemble des équipes éducatives. Les premiers éléments qualitatifs ont mis en évidence des dynamiques de groupe propices à la créativité et à l’épanouissement individuel ainsi qu’un accroissement chez les élèves d’une capacité à lutter contre l’initiation tabagique et plus largement à réaliser des choix de manière autonome.

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Bien-être, liberté de choix et santé

Programme mosellan pluriannuel de prévention du tabagisme et de promotion de la santé de femmes en situation de précarité hébergées en foyers

Marie Persiani Chargée de projets au codes 57

Bien que le Baromètre Santé 2005 confirme une baisse générale de la consommation de tabac chez les 12-75 ans, les personnes en situation de précarité restent de grands fumeurs. Ces constats, corroborés par les rapports d’activités de 2000 à 2006 du Centre d’Examen de Santé (CES) de Metz en Moselle, ont amené celui-ci à proposer un projet d’incitation et d’accompagnement à l’arrêt du tabac pour les personnes en situation de précarité, avec mise en place de la gratuité des substituts nicotiniques, au niveau du bilan de santé.

Depuis 2001, un partenariat s'est donc développé entre le CES, le CODES 57, la CPAM de Metz, la DDASS de Moselle, le centre hospitalier régional Bon Secours et 3 structures hébergeant des jeunes filles et jeunes mères : le Centre Départemental de l’Enfance (CDE), le Nid Maternel et l'association Carrefour de Metz. Depuis 2005, le CODES 57 est le promoteur de ce programme qui bénéficie du même réseau de professionnels impliqués.

A travers les actions réalisées la première année, nous avons constaté qu'aborder la santé par l'arrêt du tabac restreignait la prise en compte des besoins des jeunes femmes et jeunes mères. Le besoin s'est donc fait sentir de construire un projet de promotion de la santé, situant le tabac dans un contexte de santé globale et permettant de donner la parole aux femmes sur leur santé.

Afin d'explorer les problématiques liées au tabac, les réponses et les compétences des personnes concernant leur santé, nous avons utilisé différents outils et techniques tels que le Sacado, le brainstorming, le photolangage, l'entretien motivationnel, la peinture, la broderie, la photographie et des jeux de société. Des résultats non seulement quantitatifs mais bien plus qualitatifs ont été mesurés. L'adoption d'attitudes et de comportements plus favorables à la santé ont été constatés chez ces femmes, par les professionnels des structures. Elles ont apporté des améliorations à leurs lieux de vie, les rendant plus favorables à leur santé. Ce qui fait l'intérêt de notre programme, ce sont ces modifications jamais obtenues auparavant dans ces différentes structures. Matériel et méthodes Un comité de pilotage pluridisciplinaire, fil conducteur de notre démarche

Notre outil de travail est un réseau de professionnels mobilisés autour du public. Ce comité a pour mission de trouver des réponses aux besoins des personnes et orienter les actions, faire évoluer les services de santé, l'environnement et la politique dans les structures.

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Les professionnels impliqués ont des compétences diverses : ils comprennent deux médecins responsables de structures, un médecin tabacologue et nutritionniste, une conseillère en économie sociale et familiale, deux financeurs : une diététicienne et une assistante sociale, une chargée de projets psychologue de formation, deux infirmières, des partenaires extérieurs spécialisés en peinture, théâtre, vidéo ou musique. Nous organisons 4 réunions par an. Un programme pluriannuel de promotion de la santé : comment donner la parole aux

femmes ?

Notre démarche est globale aux 3 sites et se déroule en 6 étapes (soit 10 séances de 2 heures) : - 1 re étape : Faire émerger les représentations des personnes sur la santé, avec le Sacado. Cet outil permet de définir la santé de façon globale et positive, en 7 thèmes :

1/ Construire son espace 4/ Trouver son équilibre 6/ Avoir de grands rêves 2/ Entrer en relation 5/ Surmonter les situations 7/ Trouver son image 3/ S'échapper au quotidien

- 2e étape : Situer le tabac dans un contexte de santé globale. Il s'agit d'identifier les bénéfices, les motivations à fumer, à partir des thèmes du Sacado. Les motivations généralement évoquées sont : « le tabac permet d’entrer en relation », « le tabac permet de s’échapper au quotidien », « le tabac permet de surmonter les situations ». - 3e étape : Situer le degré de motivation des personnes par rapport à l'arrêt du tabac, selon les stades de changement du modèle de Prochaska et Di Clemente : indétermination, intention, préparation, action, consolidation, rechute. Lorsque l'on demande aux personnes d'exprimer ce que leur évoque le mot "tabac", nous constatons généralement que les termes utilisés sont majoritairement négatifs ("nervosité, manque, argent, dépendance, maladies, gêne, pollution, cancer, toux, grossesse, tentative d’arrêt"…), ce qui peut signifier une certaine lassitude par rapport à la cigarette pour certaines résidentes, qui ont alors déjà passé le stade d'indétermination. Lorsque les termes sont davantage positifs, l'objectif est de faire percevoir les risques et les problèmes liés au tabagisme, afin de faire apparaître un doute par rapport au tabagisme, pour les personnes qui n'ont pas l'intention d'arrêter de fumer. Pour les personnes qui ont l'intention d'arrêter de fumer, l'objectif est d'explorer l'ambivalence, à l'aide de l'entretien motivationnel (Miller et Rollnick, 1991), en aidant les personnes à exprimer les raisons en faveur du changement et les risques encourus à ne pas changer. Il s'agit également d'amener les personnes à prendre conscience de leurs ressources et compétences, afin de renforcer le sentiment d'efficacité personnelle. Un questionnement sur les motivations de chacune pour arrêter est suscité par le médecin. Deux réunions collectives permettent aux personnes de parler librement et de faire le point sur leur dépendance et leur envie d'arrêter. Pour les personnes qui se préparent à arrêter, le médecin les informe des aides à l'arrêt, de leur gratuité et leur explique le déroulement d'une consultation de sevrage. Enfin, il accompagne individuellement les personnes qui décident d'arrêter, en valorisant leurs changements. La gratuité des aides à l'arrêt favorise la motivation à l'arrêt, en facilitant le passage de l'intention et de la préparation à l'action.

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- 4e étape : Permettre aux femmes de mettre en évidence leurs compétences, leurs ressources sociales et individuelles et ce qu'elles font de bien pour leur santé. Ce sont ces éléments positifs qui vont nous servir de levier pour donner envie aux personnes d'arrêter de fumer. En explorant les alternatives au tabac, nous permettons aux femmes de réfléchir aux moyens d'obtenir les mêmes bénéfices en arrêtant leur consommation de tabac. - 5e étape : Créer des supports pédagogiques interactifs pour donner envie aux personnes de s'impliquer et les animer auprès des autres résidentes et des professionnels sur les sites. La question posée est "quels messages pourraient donner envie aux jeunes femmes et jeunes mères d'arrêter de fumer et/ou de se sentir bien ?" L'approche par les pairs facilite la transmission de savoirs, savoir-être et savoir-faire. Les personnes qui animent les supports réalisés développent leurs compétences : pour se positionner, argumenter leurs propositions, amener les personnes à diversifier leurs choix possibles en matière de santé, apporter du soutien, etc. Les personnes extérieures : les pairs, qui viennent voir les supports, sont amenées à interroger leurs représentations, leurs croyances, leur environnement, etc. et grâce à ce questionnement, elles peuvent faire évoluer leurs attitudes et pratiques vis-à-vis de leur santé. Chaque année les supports changent, ce sont les personnes qui les proposent, les créent, les illustrent, toujours soutenues par des intervenants extérieurs, pour que les réalisations soient bien finalisées, esthétiques, donc valorisantes. La démarche incite au respect des différences culturelles et les valorise. Le travail collectif permet à chaque femme de trouver ses propres leviers : la dynamique de groupe permet à chacune d'exprimer sa singularité. Des outils spécifiques sont créés par les femmes pour recueillir la parole des visiteurs lors des vernissages, de façon à savoir si ces supports ont suscité un questionnement sur la santé, le tabac et la liberté de choix. - 6e étape : Evaluer l'action avec les femmes, les professionnels impliqués dans les structures et les partenaires. Résultats Chaque année en moyenne, 10% des femmes qui participent au programme arrêtent de fumer. Cela peut paraître peu, mais c'est déjà beaucoup : les personnes avec lesquelles nous travaillons sont souvent fortement dépendantes, elles ont donc beaucoup de difficultés à arrêter de fumer. En outre, la modification des comportements demande du temps, les difficultés socio-économiques dans lesquelles se trouvent les personnes sont des freins aux changements, qui nécessitent de trouver un nouvel équilibre, d'autres stratégies d'adaptation, d'autres repères pour faire face aux difficultés du quotidien. Autre résultat important : ce sont les femmes qui prennent la décision d'arrêter de fumer, grâce au sentiment de liberté de choix que nous leur offrons et à leur confiance en soi que nous renforçons. Notre démarche n'essaie pas de convaincre mais valorise la parole de chacune, ce qui a permis à certaines de prendre conscience du fait que le tabac représentait un problème pour elles. Notre programme est pluriannuel et intégré aux activités des personnes dans les structures. Il s'inscrit dans le fonctionnement habituel, ce qui permet sa pérennisation.

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Une réflexion des personnes sur leur vie en général et à l'intérieur de leur établissement est menée. Grâce à cela, les résidentes peuvent adapter leur environnement, en organisant par exemple la gestion des salles collectives. Elles ont proposé des modifications dans leur lieu de vie : des salons fumeurs, une salle de jeux pour enfants et les chambres individuelles sont devenues totalement non-fumeurs, sur demande des résidentes, auprès des directions, après qu'elles aient organisé une concertation avec l'ensemble des femmes. Des négociations collectives ont permis d'autoriser des aménagements dans des espaces signalés : à la cafétéria, à l'extérieur des locaux… Nous observons une plus grande affirmation de soi des personnes à l'issue des actions. L'estime de soi des personnes est renforcée : le fait d'avoir été entendues par leur direction a permis aux femmes de se sentir écoutées et reconnues, ce qui les a valorisées. L'observation des jeunes femmes et jeunes mères a permis aux personnels de constater une réelle évolution dans les attitudes par rapport à la cigarette : elles ont souhaité la diminution du nombre de lieux fumeurs; elles ont arrêté leur pause cigarette lors des séances éducatives; elles font attention à ne pas exposer les enfants à la fumée; dans les supports réalisés, elles se transmettent des "bonnes pratiques" : vont fumer dehors, se motivent pour sortir, organisent des activités (karaoké, soirée crêpes, fête à l'arrivée d'une nouvelle résidente, etc.). Les supports réalisés sont valorisés dans chaque structure. Les posters réalisés sont affichés dans les locaux, les jeux pédagogiques réalisés par les résidentes sont utilisés régulièrement et présentés aux nouvelles arrivantes, les fresques en peinture et broderie sont installées dans les lieux de passage, etc. A l'extérieur, les femmes ont pu s'exprimer dans la presse locale et à la télévision, pour valoriser leur travail, s'exprimer sur leur quotidien et promouvoir des alternatives au tabac. Les activités de loisirs, sportives et culturelles dans les structures ou avec les professionnels des structures sont très représentées. Valoriser son image, prendre confiance à travers l'écoute qui leur est accordée par leur direction, l'importance de créer des moments de convivialité au sein des structures (des fêtes, des jeux, des débats), de pouvoir se détendre dans différents ateliers (gymnastique avec les enfants, sorties piscine et cinéma…), pouvoir parler de sa culture à travers des aliments, des danses, des vêtements d'autres continents, d'avoir un espace à soi, d'intimité pour se ressourcer, pouvoir identifier des personnes ressources au sein des structures, qui peuvent les accompagner dans la démarche d'arrêt, pouvoir adapter leur lieu de vie pour le rendre agréable : telles sont les propositions des résidentes pour améliorer leur santé. Les professionnels ont souligné que certaines résidentes très en opposition avec la structure, ne se sont investies que dans cette action, qui a donc permis à certaines jeunes filles de s'exprimer enfin et de réintégrer la structure. Les difficultés inhérentes à la mise en place et au déroulement des séances ont pu être résolues grâce à la régularité et la stabilité du comité de pilotage. Analyse et discussion La place des résidentes dans l'action a été centrale. Elle a déterminé les orientations du réseau de professionnels et des actions qui ont été réalisées. En impliquant les professionnels dès le début du programme, notre démarche a favorisé la pérennité des actions : l'entrée dans notre 6e année de fonctionnement en témoigne. Une construction collective est née du réseau et de la rencontre avec les femmes des structures.

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Au niveau individuel, chaque femme a pu avoir une réflexion personnelle sur sa situation. Chacune des résidentes a pris conscience de sa valeur, ce qui leur a permis d'avoir une image d'elles-mêmes plus valorisée. On peut supposer que leur estime de soi a été améliorée. Au niveau collectif, les femmes ont pu s'affirmer et participer aux décisions les concernant. Elles ont modifié leur environnement pour le rendre plus favorable à leur santé, en valorisant un quotidien sans tabac, la protection des enfants et d'autres moyens pour se détendre et créer de la convivialité. L'environnement a été développé de façon à ce que les personnes trouvent soutien, accompagnement et encouragement à l'arrêt. Les professionnels se sont sentis soutenus et ont eu connaissance de techniques d'animation et d'outils pédagogiques de recueil des besoins de leur population, qu'ils pourront réutiliser avec d'autres groupes, pour d'autres actions. Ils vont donc pouvoir réorienter leurs services au plus près des besoins des résidentes et de leurs enfants. L'action leur a également permis de se questionner vis-à-vis de leurs propres comportements. La politique mise en œuvre dans chaque structure a été de promouvoir la santé, en offrant des espaces sans tabac aux femmes, aux enfants et aux professionnels travaillant dans les structures.

La politique du programme, plus globalement, a facilité l'accès au sevrage, par la mise à disposition gratuite d'aides à l'arrêt du tabac et d'un accompagnement psychosocial individualisé.

Le programme, intégré aux activités des femmes dans la structure, a facilité l'implication des professionnels et la réflexion des femmes sur leur vie en général et à l'intérieur de leur structure.

Ces actions, inscrites dans un programme pluriannuel, favorisent le développement de la promotion de la santé dans les structures.

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Une cité scolaire sans tabac

Anne Lasnel

Infirmière à la cité scolaire du Pré-Saint Sauveur à Saint-Claude

Notre cité scolaire compte 1300 élèves âgés entre 11 et 22 ans. Notre établissement regroupe un collège, un lycée d’enseignement général et technologique et un lycée professionnel. Les collégiens n’ont jamais eu le droit de fumer. Cela a été toléré pour les lycéens. En 2003-2004, nous avons installé des zones non fumeurs. Elles furent réduites de moitié l’année suivante, le personnel ayant la consigne de ne pas fumer à la vue des élèves. Notre projet académique pour 2005-2009 a voulu responsabiliser les élèves et promouvoir l’éducation à la santé. L’interdiction de fumer est aujourd’hui généralisée à tout l’établissement car la prévention des risques et des conduites addictives constituent la priorité de notre engagement. Pour la respecter, il fallait dynamiser le Cesc (Comité d’Education à la Santé et la Citoyenneté). Sept personnes (infirmières, professeurs, agent de direction, et assistance sociale) ont donc reçu une formation en janvier 2006. Après un diagnostic des besoins propres à notre établissement, nous avons retenu le projet d’adhérer au plan anti-cancer, plan qui nous avait préalablement été présenté par le CODES du Jura. Nous avons alors constitué un comité de pilotage composé de volontaires, bénéficié d’un soutien logistique pour la mise en place d’actions et suivi une nouvelle formation de deux jours. Celle-ci a porté sur le programme « lycée sans tabac », avec au menu : - Les représentations du tabac et du fumeur ; - Les effets des composants ; - Le tabagisme passif ; - La dépendance physique ; - La dépendance psychologique. Au terme de cette formation, nous avons démarré la campagne d’information pour les élèves, les parents et le personnel, notamment par le biais d’un affichage permanent et la tenue d’un stand animé par les fédérations de parents d’élèves et les membres du comité de pilotage lors d’une journée portes ouvertes en avril 2006. Les parents ont été informés de notre démarche par une note lors de l’inscription de leur enfant. Pour clore l’année 2005-2006, nous avons organisé une journée sans tabac, le 1er juin. Nous avons alors proposé aux élèves des questionnaires pour comprendre pourquoi ils fument. Les résultats furent les suivants : 23 % fument car ils ont le plaisir du geste, 53 % déclarent utiliser la cigarette pour calmer leur anxiété, 37,8 % ne seraient pas dépendants (test de Fagerström), enfin 68 % des élèves disent ne pas être motivés pour arrêter. En outre, nous avons proposé des boissons et des fruits aux élèves pour les aider à se passer de tabac. Depuis septembre, nous appliquons la loi Evin. Nous essayons d’impliquer également un maximum les élèves les plus âgés (BTS) dans la réalisation de notre programme. Ceux-ci ont notamment réalisé une affiche, des tracts et des questionnaires suite à l’interdiction totale de fumer. Nous avons également réalisé une première information sur l’aide au sevrage tabagique. L’adhésion des jeunes semble modérée mais nous renouvelons l’opération en faisant appel à un tabacologue pour clarifier les choses. Nous voulons créer un espace « bien

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être », nous équiper de fontaines à eau et faire appel à une diététicienne. Nous avons pris contact avec le CODES 25 pour mener la prévention beaucoup plus tôt afin de toucher les élèves dès la sixième. Depuis le démarrage de notre campagne, le nombre d’élèves – et des personnels de l’établissement – qui fument a clairement diminué. Les fumeurs se sont regroupés à l’extérieur. L’obligation de se déplacer paraît être un frein à la consommation.

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Programme de sensibilisation et d’accompagnement

des établissements scolaires à l’arrêt du tabac

Ingrid Bruyère et Hayette Bouha Chargées de projets au CODES 42

A l’occasion de nos différentes rencontres avec les jeunes, nous avons été confrontées à une demande croissante d’accompagnement et de conseils autour de l’arrêt du tabac qui nous ont amenées à entreprendre une recherche-action autour du soutien des jeunes et du renforcement de leur motivation à l’arrêt du tabac. Au vu des résultats, nous n’avons cessé de faire évoluer cette démarche de façon à ce qu’elle s’inscrive dans une approche plus globale autour d’un programme de sensibilisation et d’accompagnement des établissements scolaires à l’arrêt du tabac. Objectifs généraux : - Impulser une dynamique autour de l’arrêt du tabac dans l’établissement ; - Accompagner cette dynamique par une action d’aide à la décision d’arrêt du tabac chez les jeunes. Objectifs opérationnels : - Favoriser l’implication de toute l’équipe éducative ; - Apporter un accompagnement méthodologique ; - Soutenir les jeunes volontaires dans leurs réflexions et leur démarche d’arrêt du tabac en créant un terrain favorable au renforcement de leur motivation et en les accompagnant dans la période de sevrage ; - Renforcer l’estime de soi et travailler sur la déculpabilisation. Tout au long de la mise en place de ce programme, nous nous efforçons de l’adapter aux besoins des jeunes et aux spécificités des établissements scolaires rencontrés. Méthodologie : A l’issue de quatre années de travail, nous avons pu dégager deux grandes étapes nécessaires à la réalisation de ce programme : La communication autour du programme

Nous travaillons à favoriser l’implication de l’équipe éducative par, notamment, un accompagnement méthodologique en organisant différentes rencontres avec les personnes ressources (CESC, chef d’établissement, infirmière scolaire, assistante sociale, etc.). Nous privilégions également la communication par les pairs en invitant tous les élèves délégués à relayer l’information au sein de leurs classes. En outre, nous travaillons avec les professeurs d’arts plastiques ou d’arts appliqués qui se chargent de réaliser avec leur(s) classe(s) la campagne de communication de l’établissement sur ce programme. Le cadre assigné à cette campagne est balisé par les valeurs d’Education pour la santé (ne pas jouer sur la peur, pas de slogan moralisateur ou culpabilisant etc.).

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Nous tenons aussi un stand d’une demi-journée au sein de l’établissement pour les élèves qui souhaitent s’informer et/ou s’inscrire au programme. La mise en place de l’action d’accompagnement accueillant de 6 à 18 jeunes

Cette action s’organise au sein même de l’établissement scolaire autour de six séances inspirées de l’expérience des « 6 jours pour décrocher » (organisé par Loiréadd’ pour les adultes du département) que nous avons adaptées aux problématiques des jeunes et à leurs réalités. Ces séances d’une heure se déroulent durant la même semaine soit entre midi et deux heures soit en soirée.

- Séance 1 : « Mes représentations sur le tabac » Après l’identification des conditions de fonctionnement du groupe (respect de la parole de l’autre, confidentialité…), recueil des attentes, travail sur les représentations du tabac, remise d’un carnet de bord, mesure du taux de CO, etc. - Séance 2 : « Mon histoire avec le tabac » Explication des dépendances (physique, psychologique, comportementale), réalisation du test de Fagerström, questionnaire sur leur histoire avec le tabac, présentation de la boucle de Prochaska, Di-Clemente et Raw, etc. - Séance 3 : « Quelles sont mes motivations et comment les renforcer ? » Utilisation du métaplan® pour recueillir leurs motivations, faire le point sur le coût du tabac, mise en commun des bénéfices liés à l’arrêt. - Séance 4 : « Quels sont mes freins à l’arrêt et comment les surmonter ? » Travail sur les freins repérés lors de la séance 3, intervention d’une diététicienne sur tabac et alimentation. - Séance 5 : « Les stratégies utilisées par les industriels du tabac » Découverte des stratégies à travers l’exposition « Industrie du tabac : en parler pour mieux prévenir ». - Séance 6 : « Et demain ? » Bilan du week-end, mesure du taux de CO, évaluation orale et écrite du programme, signature dans le livre d’or, etc.

- Une rencontre à un mois fixée avec le groupe de jeunes permet de faire le point sur l’évolution de leur projet d’arrêt et de leur motivation.

L’évaluation du programme s’effectue à différents niveaux et principalement à l’aide de questionnaire d’évaluation :

• par les jeunes qui évaluent à la fois le contenu des séances mais aussi l’évolution de leurs consommations et de leurs motivations ;

• par la personne référente de l’établissement qui évalue l’organisation du programme et l’impact auprès des élèves ;

• par les chargées de projets du CODES qui évaluent le processus et les résultats.

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Résultats A ce stade de notre travail nous avons pu dégager un certain nombre d’éléments d’appréciation qui nous semblent importants : Ce programme a permis aux établissements scolaires de construire une culture commune autour de la problématique du tabac et de faire en sorte que cette question ne soit plus seulement portée par l’infirmière scolaire mais par l’ensemble de l’équipe éducative. Il a également, dans certains cas, permis de redynamiser le CESC. Tous les jeunes de l’établissement sont concernés et touchés par ce programme et plus précisément par le biais de la communication avec des niveaux d’implication différents. Nous avons été agréablement surprises par les productions des jeunes qui ont fait preuve de beaucoup d’imagination et parfois même d’un professionnalisme étonnant. Les séances d’aide à la décision d’arrêt du tabac n’ont pas pu être mises en place dans certains établissements faute de participants en nombre suffisant. Concernant les établissements où les séances ont été mises en place, l’échantillon actuel n’est pas suffisamment important pour en extraire des données représentatives, nous pouvons toutefois en retirer un certain nombre d’éléments encourageants :

• Globalement, les jeunes volontaires sont satisfaits à la fois de l’organisation et du contenu des séances, ce qui se vérifie également par leur assiduité. Ils considèrent que l’objectif des séances (renforcer la motivation et aider à la décision d’arrêt du tabac) a été atteint. On a pu constater une diminution de leur consommation de tabac ainsi qu’une diminution de leurs craintes vis à vis de l’arrêt.

• Lors de la rencontre à un mois, on a relevé un renforcement positif de leur motivation puisque leur envie d’arrêter de fumer ainsi que leur capacité à résister à l’envie ont augmenté, et inversement, leur envie de continuer à fumer a diminué. De la même façon, à l’issue des séances certains jeunes ont fait de nouvelles tentatives d’arrêt et plusieurs d’entre eux ont réussi à arrêter.

• Quant aux personnes référentes, elles se déclaraient satisfaites de l’organisation du programme ainsi que de la collaboration avec le CODES. Elles nous ont fait part des changements de comportements des élèves pendant le programme ainsi que l’émergence d’une dynamique de groupe ou encore du rôle de relais qu’elles ont assuré après nos interventions.

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Discussion Dans certains établissements, malgré une implication de l’équipe éducative ainsi qu’un réel travail de communication, les séances n’ont pas pu être mises en place principalement à cause de facteurs imprévisibles (conditions climatiques, grèves, événement dans l’établissement, etc.). Les séances permettent aux jeunes en utilisant la « porte d’entrée tabac » d’avoir du temps pour pouvoir parler plus largement de leur santé dans un cadre privilégié les amenant ainsi à partager facilement leurs expériences et échanger librement. En quatre ans, nous avons constaté une évolution de l’accueil réservé à ce programme, les équipes éducatives étaient plutôt sceptiques quant à la mobilisation des jeunes et leur intérêt autour d’un tel projet. Aujourd’hui, et plus encore avec les mesures législatives, nous recevons de plus en plus de demandes d’établissements que nous ne pouvons d’ailleurs pas toutes satisfaire. Ce programme s’inscrit en cohérence avec le développement d’un axe régional de formation des personnels de l’Education Nationale que nous coordonnons et qui vise à une meilleure appropriation de la question du tabagisme en milieu scolaire en l’abordant dans une perspective de promotion de la santé par des actions d’éducation pour la santé. Enfin pour nous, la mise en place de ce programme dans les établissements scolaires représente à chaque fois un nouveau défi, une remise en question constructive qui nous a permis de dégager les conditions de sa transférabilité.

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Vers une école sans tabac pour chacun et pour tous

Régine Paugam

Infirmière conseillère technique à l’inspection académique du Finistère

Les professionnels de la santé à l’éducation nationale sont missionnés par l’Etat pour participer à la politique générale de santé publique, en particulier dans le domaine de la promotion et de l’éducation pour la santé. Ils travaillent en partenariat de façon à favoriser l’équilibre et le bien-être physique, mental et social des élèves afin de contribuer à la réalisation de leur projet personnel, professionnel et social. Le tabagisme des jeunes représente aujourd’hui un enjeu prioritaire de Santé publique, et dans le cadre du plan cancer annoncé en 2003, le gouvernement a clairement invité les établissements scolaires à participer à la prévention du tabagisme en les renvoyant nécessairement à la mise en application de la loi Evin du 10 janvier 1991, loi qui jusqu’à aujourd’hui n’était pas parvenue à s’imposer dans les établissements scolaires.

La circulaire du 11 décembre 2003 de l’éducation nationale vise à ce que 22 établissements scolaires pilotes deviennent des lieux non- fumeurs en France. Le plan d’action stratégique de l’Etat en région Bretagne affiche une priorité très forte dans le champ de la prévention des conduites addictives, établissant un lien très étroit avec le projet académique qui pour sa part consacre une de ses quatre priorités à la seule problématique des conduites à risques chez les jeunes et de leur prévention dans le cadre de l’Ecole. Dans le Finistère, simultanément, en décembre 2003, suite aux recommandations de la MILDT, le Préfet dans le cadre de la mise en application du plan d’action stratégique de l’Etat dans le département (PASED), décide la création du pôle de compétence « Toxicomanies et conduites addictives » dont les missions sont de mettre en œuvre les orientations du Projet territorial de l’Etat relatives à la lutte contre les toxicomanies. Ce pôle est placé sous la responsabilité d’un commissaire de police, il comprend deux ateliers, l’atelier « répression » où siègent Police et Gendarmerie, ainsi que les Douanes, et un atelier « prévention » confié à un médecin inspecteur de la DDASS. L’Education nationale y est représentée par l’infirmière conseiller technique de l’inspecteur d’académie ainsi que Jeunesse et sports. Dès janvier 2004, l’objectif prioritaire du pôle de compétences Toxicomanies et conduites addictives est la prévention du tabagisme et la mise en application de la loi Evin dans les établissements scolaires et plus particulièrement les lycées. Aujourd’hui, le nombre de consommateurs de tabac en Bretagne se situe très au dessus de la moyenne nationale. En effet, 48% des jeunes de 17 ans sont des consommateurs quotidiens, le comportement tabagique est le même pour les garçons que pour les filles (indicateur des conduites addictives en Bretagne, juillet 2006). Il existe une différence significative entre l’usage quotidien du tabac chez les jeunes Bretons et ceux du reste de la France qui est de 32,9% en 2005 (enquête ESCAPAD 2005).

L’action porte sur 31 lycées publics soit environ 17000 élèves.

Il est décidé de monter un plan d’actions et en avril 2004 nous proposons une journée de formation à destination des équipes d’établissements afin d’assurer à tous une vision commune de la situation du tabagisme chez les jeunes, un langage commun en termes de santé publique et une culture partagée des objectifs et stratégies de prévention ; beaucoup d’infirmières y participent mais aussi des CPE, des médecins scolaires et des gestionnaires ;

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 36

27 établissements sur 31 répondent et 61 personnes bénéficient ainsi d’une formation dispensée par le professeur J-D DEWITTE, chef de service du centre de pathologies environnementales et professionnelles du CHU de Brest, tabacologue, professeur à L’UBO et directeur du centre de médecine préventive universitaire et une infirmière tabacologue.

De septembre à décembre 2004, nous avons réfléchi, avec les trois médecins tabacologues référents pour le département, à la mise en place d’un protocole destiné à afficher de façon lisible notre volonté politique et stratégique en matière de prévention du tabagisme en milieu scolaire et nous avons créé un comité de pilotage animé par l’infirmière conseiller technique de l’inspecteur d’académie, composé d’infirmières et de médecins scolaires, des trois tabacologues, de 3 chefs d’établissement et du médecin inspecteur référent de la DDASS, soit 15 personnes.

En janvier 2005, la charte « ECOLE SANS TABAC » a été élaborée avec l’aide du Comité départemental de lutte contre les maladies respiratoires. Cette charte destinée aux établissements a pour objectif d’aider à la mise en application de la loi en proposant une démarche de base qui a vocation à harmoniser les pratiques au sein des établissements en leur offrant une aide à la mise en œuvre. Cette charte comprend notamment une fiche autorisant l’infirmière du lycée à distribuer des substituts nicotiniques en tant que de besoin : l’Ecole ne peut en effet devenir un centre de sevrage tabagique donc la distribution de pastilles n’est autorisée qu’à titre de dépannage, en accord avec un médecin tabacologue référent. Une autorisation parentale sera demandée pour les élèves mineurs.

En mars 2005 le pôle décide de doter les lycées de testeurs de monoxyde de carbone et de substituts nicotiniques ; les infirmières seront formées à l’utilisation des testeurs par les médecins tabacologues. 27 testeurs et 500 boîtes de substituts sont distribués dans les établissements.

Toutefois, un suivi régulier est nécessaire et le lien entre la conseillère technique et les infirmières d’établissement est particulièrement important ; en effet le « co-pil » se réunit une fois par an, mais un bilan bisannuel (au printemps et en fin d’année) est réalisé lors de réunions de bassins qui permettent d’apprécier l’évolution de la mise en application de la loi. C’est une façon de renforcer la mobilisation et de maintenir une attention soutenue à cet objectif.

Chaque établissement rencontre des problèmes différents ; une fois dans l’année nous transmettons un questionnaire dans chaque lycée pour connaître les étapes de l’action qui passe bien sûr par le comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté et ou le comité de vie lycéenne. Peu d’établissements ont imposé une application abrupte et intégrale de la loi ; la plupart d’entre eux ayant choisi de prendre le temps nécessaire pour associer élèves et personnel à une réflexion de fond afin d’obtenir l’adhésion conscientisée de tous au sens et aux bénéfices attendus par la loi et donc à son application dans l’Ecole.

Les partenaires habituels de la prévention que sont le comité départemental d’éducation à la santé et l’association nationale de prévention en addictologie ont continué à intervenir à la demande des établissements.

Pour permettre un meilleur suivi sur le terrain, une infirmière éducation nationale volontaire est formée au DU de tabacologie (formation prise en charge par le Pôle ).

Depuis janvier 2006 elle intervient à la demande des établissements et pratique des consultations individuelles de première intention auprès d’élèves volontaires, en vue de leur engagement dans une démarche de sevrage ; elle assure aussi des interventions de suivi, en tant que de besoin, dans le cadre du lien avec leur médecin tabacologue traitant, elle aide également les établissements à résoudre les problèmes liés à l’application de la loi.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 37

Aujourd’hui, après trois ans de réflexion et d’expérimentation, sur les 31 lycées du département :

• 14 sont sans tabac pour les élèves et le personnel ;

• 11 sont sans tabac pour les élèves ;

• 6 conservent des zones fumeurs ; il s’agit en particulier des lycées professionnels où la démarche est plus difficile à mettre en place, un souci se pose également dans les internats ; par contre aucun parent n’a désapprouvé la modification du règlement intérieur concernant l’interdiction de fumer ;

• L’équipe de direction est impliquée dans 95% des cas, le règlement intérieur a été modifié dans 72 % des établissements, la Charte adoptée en conseil d’administration dans 67% des lycées. La majorité des établissements ayant réussi à faire appliquer la loi, proposent maintenant des activités aux élèves : yoga, arts martiaux, relaxation pour rendre attractif l’internat sans tabac et faire en sorte que les élèves ne sortent pas devant le lycée pour fumer sur la voie publique, ce qui pose un problème d’insécurité majeure et soulève des protestations de la part des riverains.

Les établissements privés sous contrat sont entrés dans la démarche depuis la rentrée 2006 et nous associons le directeur diocésain de l’enseignement catholique aux membres du « co-pil »

Le 16 novembre a eu lieu à la faculté de médecine de Brest une journée d’échanges d’expériences associant les établissements privés et publics avec la présence du docteur G Errard - Lalande tabacologue à l’unité de tabacologie du CHRU Bretonneau de Tours et la participation des médecins tabacologues du département. 170 personnes étaient présentes, les échanges étant très constructifs, nous nous promettons de poursuivre ces rencontres où chacun expose son expérience et fait part de ses difficultés au sein de l’établissement qu’il dirige.

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Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 39

Tabagisme dans les lycées français : principales évolutions au cours des quatre dernières années

Cristina Diaz Gomez OFDT

Serge Karsenty CNRS

En 2002, une étude menée par l’OFDT à la demande du ministère de l’Education nationale et de la MILDT faisait le point sur la loi Evin en milieu scolaire, pour la première fois depuis son entrée en vigueur en 1991. Ses résultats mettaient en lumière les difficultés d’application de la loi notamment dans les lycées, très peu d’entre eux ayant mis en place de réelles interdictions de fumer ou des emplacements strictement réservés aux fumeurs de plus de 16 ans. Quatre ans après cette première enquête, le ministère de l’Education nationale, la MILDT et le ministère de la Santé ont souhaité connaître l’évolution des pratiques au sein des lycées, dans un contexte général marqué par un renforcement de la lutte anti-tabac, avec notamment les augmentations successives du prix des cigarettes en 2003 et 2004 et la mise en œuvre du plan cancer. La nouvelle étude confiée à l’OFDT a été menée du mois de mars au mois de mai 2006 auprès d’un échantillon représentatif de 235 lycées de toutes catégories et statuts. Les analyses portent sur les réponses de 235 proviseurs, plus de 2 300 membres du personnel et près de 9 500 élèves. Les principaux enseignements de l’enquête vont dans le sens d’une notable amélioration de l’application de la loi et du respect des interdictions de fumer avec une évolution plus importante sur quatre ans qu’elle ne l’avait été depuis le décret de 77 (loi Veil) ou celui de 1992 (loi Evin). Ces résultats font également apparaître une baisse du tabagisme chez les élèves. Principales conclusions : – Rétrospectivement, il est possible d’affirmer qu’en 2002, l’absence de « zones

fumeurs » clairement désignées dans presque la moitié des lycées signifiait que la loi y était ignorée.

– On a donc assisté simultanément en 4 ans, à une croissance des mises en règle de lycées autorisant le tabac sur des territoires délimités et à une forte croissance des lycées où le tabagisme est prohibé.

– Ces améliorations se sont produites dans un contexte global de baisse des prévalences de fumeurs, qu’il s’agisse des jeunes ou des adultes.

De nombreux problèmes perdurent néanmoins (accès aux moins de 16 ans, affichage, situation dans les salles des professeurs, etc.) mais il semble pourtant que la transparence des règles soit la meilleure première étape pour réussir le passage à un lycée totalement non-fumeurs.

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Comment évaluer le développement des compétences psychosociales chez les 9-11 ans ?

Elisabeth Fellinger Directrice du CIRDD Alsace / toxibase

Laurent Konopinski AFPRA

Introduction Depuis 2003, le projet « Moins de tabac, moins d’alcool, moins de risques de cancer » est mené en région Alsace conjointement par trois partenaires : l’Association de formation et de prévention du risque alcool, drogues et dépendances (AFPRA), le Centre d’information régional sur les drogues et les dépendances (CIRDD) Alsace, et l’association « Connaître Pour Agir », implantée dans le Bas-Rhin. L’objectif est de développer un continuum éducatif de l’école au milieu de travail, pour réduire les consommations de tabac et d’alcool, facteurs de risques de cancers. Une partie de l’action conduite par l’AFPRA dans le Haut-Rhin concerne le canton rural de Ferrette. Sur son volet scolaire, le projet a démarré, en 2004, par une formation-action au profit de vingt-cinq professionnels, enseignants du collège de Ferrette et des écoles élémentaires, personnels médico-sociaux de l’éducation nationale, personnels éducatifs et membres de l’AFPRA. Tous étaient volontaires pour mettre en place un réseau local en éducation pour la santé chargé de mettre en œuvre les actions à conduire du CM1 à la 3e. En CM1 et CM2, un travail sur les compétences psychosociales des enfants a été effectué. Pour définir le concept de « compétences psychosociales, nous nous référons à la définition proposée par Gérard Cagni1 « les compétences psychosociales sont les capacités à répondre avec efficacité aux exigences de la vie quotidienne ainsi que l’aptitude à maintenir un état de bien-être mental en adoptant un comportement approprié et positif à l’occasion des relations entretenues avec les autres et son environnement ». Dans notre projet, nous avons traduit cet objectif de travail par la nécessité d’amener le plus tôt possible les enfants à faire des expériences positives au cours desquelles leur singularité est mise à profit dans le cadre d’un projet de création artistique. En 2005-2006 l’action de promotion des compétences psychosociales a bénéficié à cent quatre-vingt-cinq enfants de huit classes de CM1-CM2. Une équipe professionnelle pluridisciplinaire (enseignants, psychologue, artistes, etc.) a réalisé avec les enfants un spectacle de danse, chant et théâtre, sur la base d’une relecture contemporaine de fables de La Fontaine. Cette action a fait l’objet d’une évaluation dont nous vous présentons les principaux résultats. Matériel et Méthodes Afin d'évaluer l'impact de ce type d’action sur le développement des compétences psychosociales, l’AFPRA et le CIRDD ont élaboré un questionnaire d’autoévaluation destiné aux enfants. L’élaboration du questionnaire visait la traduction du concept de compétences

1 CAGNI, Gérard, « Usage nocif de cannabis : repérage précoce et conduites à tenir » in L’usage problématique de cannabis/Numéro spécial Toxibase-Crips, revue Toxibase n°12, Lettre du Crips n°70, p.60

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psychosociales en indicateurs opérationnels et accessibles aux enfants. Cette pratique existait déjà dans le champ de l’animation socioculturelle, une animatrice nous a fourni un premier questionnaire support pour la construction de notre propre démarche. Ce questionnaire a été remis à chaque enfant, au démarrage de l’action, puis en fin d'année scolaire à l’issue du programme de prévention, après le spectacle final. Le remplissage de ce questionnaire a fait l'objet d'une séance particulière permettant d'expliquer aux élèves chaque item évalué et les finalités de cette évaluation. Lors du remplissage de la grille après l’action, une nouvelle discussion a eu lieu avec les enfants afin de recueillir leur avis sur leur propre évolution en lien avec le projet. 11 items ont ainsi été formulés :

� Item1 : Je prends facilement la parole � Item 2 : Lorsque les autres parlent, je les écoute � Item 3 : Je respecte les autres � Item 4 : Je respecte les règles et les consignes � Item 5 : J’ai confiance en moi et dans les autres � Item 6 : Je sais critiquer et faire la part des choses � Item 7 : Je sais prendre des initiatives � Item 8 : Je sais aller vers les autres � Item 9 : Je ne crains pas le contact physique avec l’autre � Item 10 : J’ai assez d’imagination pour inventer � Item 11 : Je sais rester calme

Pour chacun de ces items, chaque élève a du se donner une note de 1 à 10 selon ce qui lui correspond le mieux : 1= pas du tout facilement, 5 = moyennement facilement, 10 = très facilement. 177 questionnaires « avant » et 177 questionnaires « après » ont été recueillis ; 5 élèves étant absents lors du 1er passage et 5 autres lors du 2d passage. Il est à noter que pour des raisons logistiques les évaluations n’ont pas toutes été faites au temps zéro de l’action, certaines classes ayant déjà démarré les ateliers. De plus il n’a pas été possible de faire passer le questionnaire « avant » et le questionnaire « après » par la même personne. Ces deux variables peuvent avoir introduit des biais dans les résultats et constituent un point méthodologique améliorable dans la perspective de la reproduction de ce type d’action d’évaluation. Résultats et Discussion

L'analyse globale des notes données par les enfants nous montre une évolution positive pour une majorité des items, avec une progression plus ou moins marquée. L'item 8 « Je sais aller vers les autres » ayant enregistré la plus forte progression. Juste derrière on retrouve les items 5 « J’ai confiance en moi et dans les autres » et 9 « Je ne crains pas le contact physique avec l’autre ». Seuls trois items : 2 « Lorsque les autres parlent, je les écoute », 6 « Je sais critiquer et faire la part des choses » et 11 « Je sais rester calme » n'ont quasiment pas évolué entre le début et la fin des actions, gardant une moyenne stable. L'analyse des données par groupe/classe montre une évolution différente des items selon le groupe, plusieurs paramètres pouvant influer sur ces résultats :

o l’effectif de la classe ;

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 42

o le sexe et le ratio garçons/filles ; o l’incidence de la mixité de niveaux : classes CM1, CM2, CM1 et CM2, CE2 et

CM1 et CM2 ; o l’enseignant ; o la pédagogie même si il existe une certaine homogénéité de pratique au sein du

réseau local ; o l’animateur extérieur ; o le type d’atelier : danse, voix, théâtre, arts plastiques qui ne mobilisent pas les

mêmes implications physiques et/ou relationnelles.

Evaluation des compétences psychosociales avant & ap rès

0

2

4

6

8

10

Item 1 Item 2 Item 3 Item 4 Item 5 Item 6 Item 7 Item 8 Item 9 Item 10 Item 11

Avant

Après

Cette diversité de paramètres complique la perspective d’une analyse plus fine qui concernerait l’incidence de tel ou tel facteur sur l’objectif de développement des compétences psychosociales. Il n’existe pas dans notre échantillon deux groupes comparables sur l’ensemble des déterminants moins un. A ce titre nous préférons éviter de conclure sur l’incidence particulière d’un facteur au regard d’un autre. Seule l’analyse globale du processus avec l’aide des commentaires des enfants eux-mêmes nous permet de dégager des tendances. Entre le début et la fin de l'action on peut constater une évolution dans le développement des compétences psychosociales des enfants du canton de Ferrette selon leur propre jugement. En effet, la plupart des items évalués montrent une progression. Il faut toutefois souligner que l'évolution observée n'est pas toujours très grande. Les élèves s'étant donné des notes assez élevées dès le départ, les notations à la fin de l'année ne pouvaient être beaucoup plus élevées.

Avant Après Evolution

(en points)

Item 1 6,3 7,0 0,7

Item 2 8,3 8,3 0,0

Item 3 8,1 8,3 0,2

Item 4 8,3 8,8 0,5

Item 5 7,7 8,7 1,0

Item 6 7,4 7,4 0,0

Item 7 7,5 8,1 0,6

Item 8 7,1 8,3 1,2

Item 9 7,3 8,3 1,0

Item 10 7,9 8,8 0,9

Item 11 7,9 7,9 0,0

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On peut se demander si les élèves ne se sont pas "sur notés" au départ. Cette question a d'autant plus de sens que dans certaines classes on observe une diminution dans la notation à la fin de l'année scolaire. Nous formulons l’interprétation qu'ils ont réajusté leur évaluation. Ce réajustement à la baisse n’est pas pour autant à interpréter comme une régression de leurs compétences psychosociales :

♦ d’une part il y a lieu d’analyser les items sur lesquels on constate le plus fréquemment une baisse. Par exemple, l’item 6 « Je sais critiquer et faire la part des choses » pour lequel on constate une baisse dans 3 groupes sur 7 est l’item sur lequel les enfants ont le plus buté en terme de compréhension. La formulation et l’idée qu’il recouvre restent abstraites. Cet état de fait a peut-être introduit un biais,

♦ d’autre part, les entretiens collectifs menés avant et après l’action avec les enfants laissent entendre que c’est plutôt la capacité des enfants à ajuster par eux-mêmes leur propre perception de leur personnalité qui ressort de cet exercice ; ces résultats tendent à souligner l’hypothèse d’un développement de leur esprit critique, aiguisé par l’apport de confiance lié à l’expérience vécue en commun. Ces aspects sont assez sensibles sur les items 2 « Lorsque les autres parlent je les écoute » et 11 « Je sais rester calme » où les enfants ont souvent du mal à être constants en terme de comportement et surtout critiques sur leurs limites dans ces registres, limites régulièrement épinglées par les adultes.

La tendance générale de progression à la hausse des notes, notamment pour les items 8, 5 et 9 qui ont connu une progression dans toutes les classes, renforce l’idée d’un gain de confiance chez les enfants entre le commencement et la fin de l’action. Cette progression favorable sur des items à connotation fortement relationnelle nous conforte également par rapport à l’hypothèse de départ puisque nous souhaitions aboutir à un renforcement des capacités des enfants à faire société en espérant réduire le passage futur à des produits psychotropes de consommation conviviale comme l’alcool ou le tabac. À l’usage, en particulier dans la discussion avec les groupes d’enfants, cette grille s’est aussi révélée comme un outil pédagogique à part entière. Outil qui a aidé les enfants à prendre conscience de leurs compétences, de la connaissance qu’ils ont d’eux-mêmes, de leur comportement et de leurs limites. Cette évaluation introduite dans le processus de l’action a contribué à l’atteinte de nos objectifs pédagogiques en éducation pour la santé. Il n’y a donc pas eu de contradiction entre le processus d’évaluation et la démarche éducative mais plutôt convergence et renforcement positif réciproque. Cette évaluation sera reconduite en 2007 dans le cadre d’une action similaire avec des améliorations : passation du questionnaire « avant » réellement avant le démarrage de tous les ateliers, passation du questionnaire « après » par le même intervenant qu’au départ. En parallèle, sur le volet « milieu de travail » de l’action, l’AFPRA accompagne depuis trois ans la principale entreprise locale, Wifor, deux cents salariés, implantée à Roppentzwiller dans la mise en place et l’animation d’un programme de prévention des risques alcool, tabac et cannabis ; dans un premier temps, Wifor a inclus dans son règlement intérieur les règles en vigueur en matière de consommation d’alcool, de tabac et de drogues et informé l’ensemble des salariés de ses orientations en matière de prévention. Puis l’encadrement a bénéficié d’une formation à l’abord relationnel des conduites à risque vis-à-vis de l’alcool et du tabac, pour pouvoir orienter précocement les consommateurs à risque voire dépendants vers les ressources locales en matière d’aide. Ce temps de formation de l’encadrement répondait aussi

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à un objectif de développement des compétences psychosociales des adultes en vue de la gestion des situations de crise au poste de travail. Nous pensons que l’usage de ce type d’outils d’évaluation pourrait être reproductible dans ce cadre de formation de professionnels, après bien entendu une adaptation du questionnaire.

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« Aujourd’hui je ne fume pas », un programme pluripartenarial de promotion du sevrage tabagique dans les lycées d’Ile de France

Stéphane Tessier Directeur du CRESIF

Emilie Bissette Coordinatrice régionale du programme au CRESIF

Delphine Bantegnie et Chloé Lebeau2 Coordinatrices départementales du programme au CRESIF

Introduction Le tabagisme est la dépendance la plus banalisée dans la société française. Elle est aussi la porte d’entrée d’une consommation identitaire, initiatique de produit, supplantant l’alcool qui jouait autrefois ce rôle. La majeure partie des fumeurs a débuté sa consommation à l’adolescence, fumant pour s’intégrer dans un groupe, faire comme les autres, avoir une contenance, transgresser l’interdit. En 2005, 34,2% des jeunes français fumaient quotidiennement d’après le baromètre santé, 34% des garçons et 32% des filles d’après l’enquête ESCAPAD. Cela représente une baisse importante puisqu’en 2000 on comptait 43,9% de fumeurs. Le même baromètre montre que 6 fumeurs sur 10 veulent s’arrêter. Mais, alors que les programmes de lutte contre l’initiation tabagique sont nombreux dès l’école primaire, très peu d’actions sont prévues en faveur du sevrage tabagique chez les lycéens pour lesquels on se préoccupe d’abord de l’initiation d’autres produits illicites. La région Ile de France, 8 départements et 12 millions d’habitants, est dans une situation plutôt meilleure à l’égard du tabagisme que les autres régions, puisque 34,2% des moins de 17 ans déclaraient avoir fumé (incluant les irréguliers) dans le dernier mois. Ses 500 000 lycéens se répartissent dans 679 établissements, éclatés en trois rectorats et huit inspections académiques. Les interventions en milieu scolaire sont souvent décrites comme inefficaces ou mal documentées. Une récente méta-analyse Cochrane comparant différentes approches méthodologiques, démontre cependant qu’un certain nombre d’expériences obtiennent des résultats significativement positifs en matière de baisse de consommation de tabac mais, paradoxalement, se référent à l’étude Hutchinson comme étant la plus solide statistiquement parlant, pour poser la question de la justification de telles actions dont le coût est élevé. Il est vrai que ces projets en milieu scolaire sont souvent très difficiles à mener, les établissements étant soit réticents, soit consommateurs d’actions ponctuelles. Dans notre cas, le programme visait à faire évoluer positivement les étapes de consommation des élèves selon le modèle de Prochaska, mais aussi, la création d’une culture du sevrage tabagique au sein de l’établissement en mobilisant fortement (3 à 5 fois par an) les lycées en

2 Remerciements Le CFES relayé par l’INPES, la CRAMIF, la DRASSIF, les DDASS et CPAM des départements concernés, la Mairie de Paris, le Conseil Général 95 ont soutenu l’action depuis son initiation. Le Conseil Régional d’Ile de France depuis 2006. Les auteurs remercient toutes les animatrices, aujourd’hui appelées à d’autres fonctions mais qui ont permis à cette action de se développer : Alice Puech Pecot, Florence Gabillard, et celles qui sont intervenues une année ou plus au cours de l’action : Aurélie Prudhomme, Aurélie Goldberg, Aline Métais, Laure Astruc, Mélanie Rolland, Caroline Soussy, Perrine Nicolas et Khady Thiam. Aujourd’hui Amélie Chazaud dans le 95 a pris le relais.

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associant actions collectives et semi-individualisées. Le postulat était, même si cela ne leur était pas demandé, que les lycéens ciblés dans les classes devaient d’une façon ou d’une autre communiquer avec leurs pairs sur le sujet du tabac et des produits, puisque la consommation de produit fait l’objet d’une socialisation spécifique dans les espaces récréatifs et de loisirs, déconnectés de la classe. Objectif de l’action Donner aux lycéens les outils pour contrôler leur tabagisme, tant face à la pression de leurs pairs, qu’à celle des cigarettiers. Dans ce but, concevoir et opérationnaliser une démarche active de promotion du sevrage tabagique auprès des lycéens d’Ile de France. L’optique retenue était le défi, dans un registre ludique en suivant le slogan « Aujourd’hui, je ne fume pas ! » (AJNFP) que des affiches parodiant des titres de films célèbres mettaient en exergue. Matériel et méthodes Elaboration

Un programme d’une telle ampleur3 nécessitait une longue phase d’élaboration, de concertation, de négociation et de mobilisation qui, n’ayant aucun caractère scientifique n’est jamais décrite. L’ensemble de cette démarche fait l’objet d’un autre article. L’année 2001-2002 a vu la conception et la structuration de comités de pilotage4, la création d’outils de communication spécifiques au programme. En 2002-2003, le projet est entré dans une phase expérimentale dans 20 lycées pilotes. La généralisation a été effective à la rentrée 2003-2004 au cours de laquelle 47 lycées ont participé au programme. De 47 à 50 lycées participent chaque année depuis 2004/2005. Exemple de déroulement « type » dans un lycée

Au départ, les lycées étaient proposés par l’inspection académique parmi les volontaires qui s’adressent aujourd’hui directement au CRESIF. Trois à quatre journées par an y sont organisées sur l’ensemble de l’année scolaire. Le principe des interventions est de faire mesurer et comprendre par les jeunes les conséquences sanitaires mais aussi sociales et économiques du tabagisme, et non de le proscrire. Cette perspective permet d’induire chez le jeune une réflexion adaptable aux autres consommations. L’action collective a pour but d’interpeller les lycéens de façon obligatoire et concerne les mêmes quatre classes tout au long de l’année. Un outil d’animation a été spécialement créé5 comprenant 13 fiches sur différents thèmes articulés autour du tabac. L’animation est résolument ludique et participative, évitant toute image ou référence à l’horreur ou la terreur, sans pour autant occulter la dangerosité du produit. L’entretien semi-individualisé est organisé sur un stand de CO-testeur où les jeunes accèdent librement, y remplissent un questionnaire qui sert à la fois d’amorce de dialogue et d’outil d’évaluation. Une carte où figurent sa consommation de tabac et son taux de CO est remise à chaque lycéen, lui permettant de suivre leurs évolutions parallèles. Installé dans un lieu visible, pendant une heure à une heure et demi, généralement durant la pause de midi, le stand 3 Cet objectif, porté par le réseau francilien des comités d’éducation pour la santé (CRESIF pour les 75, 77 et 94, CPS91, CODES 92 et CODESS95), était financé au départ et jusqu’en 2005 par la CRAMIF. Il a croisé la mise en place d’un dispositif pérenne de soutien aux actions de lutte contre le tabagisme du CFES (aujourd’hui INPES) par le biais de la création d’emplois aidés cofinancés par le CFES puis l’INPES, les « emplois jeunes tabac ». Six postes ont été stabilisés sur la région pour ce programme, pour une période de cinq ans : 4 départements bénéficiant d’un temps plein, deux d’un mi-temps et une coordinatrice régionale, jusqu’en 2007. 4 L’Ile de France dispose de trois académies 5 Fiches actions du programme téléchargeables sur www.cresif.org

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est l’occasion de détailler ce qui a été dit en séance collective, de le sortir du cadre de la classe, de répondre aux questions des élèves qui n’en ont pas bénéficié, et d’orienter. Les animations sont organisées et suivies, voire parfois co-animées par une personne référente de l’établissement, le plus souvent l’infirmière. Pilotage

Au sein de chaque établissement, des réunions associant l’animateur, les partenaires extérieurs et le personnel médico-éducatif des lycées sont régulièrement organisées. Deux à trois fois par an, un comité de pilotage départemental réunit les partenaires locaux6 pour adapter le programme en tenant compte des spécificités du département. Parallèlement, le programme est suivi par un comité régional associant tous les acteurs concernés par cette problématique7. Outils de suivi et d’évaluation

Plusieurs outils ont été mis en place : - Grille animateur, tableau de bord de l’action, évaluation du programme par les personnes référentes. - Questionnaire préalable à l’entretien individuel CO testeur - Questionnaire suivant l’action collective Premiers résultats En 2004-2005, parmi les 2 989 lycéens participant aux actions collectives et ayant répondu, seuls 2,1% s’étaient mis à fumer pendant l’année alors que 6% des élèves s’étaient arrêtés, ce qui représentait 1 fumeur sur 5, toutes situations tabagiques confondues. Ces chiffres, tout intéressants étaient-ils, restaient bien entendu spéculatifs puisque nous n’avions pas d’état des lieux initial, ni de comparaison. C’est pourquoi nous avons conduit en 2005-2006 une évaluation combinant la comparaison à un état des lieux initial et l’évolution dans des lycées non concernés par le programme afin de mieux estimer les évolutions et de distinguer l’effet spécifique du programme d’une éventuelle baisse généralisée du tabagisme. Résultats 2005-2006 Données du questionnaire du CO Testeur

2 699 lycéens ont répondu. 56% des élèves testés sont fumeurs, dont 78% sont réguliers (au minimum une cigarette par jour, et entre 8 et 9 en moyenne). 14% déclarent avoir déjà fumé et s’être arrêté, et 30% n’ont jamais fumé. Parmi ces derniers, la quasi totalité déclare avoir un entourage fumeur (famille et /ou amis). Seuls 5% ont un entourage strictement non fumeur. 72,5% des lycéens fumeurs se disent prêts à arrêter durant 24 heures, le stand est donc une étape bienvenue dans leur démarche de sevrage. Questionnaire de fin d’année

Posé aux classes ayant bénéficié des actions collectives, 2 427 élèves dont 56% de filles y ont répondu. Les fumeurs progressent dans leurs étapes à l’égard de leur consommation

6 Classiquement l’inspection académique, la CRAMIF, la CPAM, la DDASS, la préfecture, l’ANPAA, la Ligue contre le Cancer, le CMR, et autres associations départementales de prévention 7 CRAMIF, DRASSIF, les trois rectorats, les 5 inspections académiques, conseil régional, URML, MILDT, le CRIPS-CIRDD, les 5 CPAM, les 2 CODES, les 5 DDASS, la Mairie de Paris, les 4 autres conseils généraux, les 5 chargés de mission départementaux toxicomanies, les CMRT, les comités de la Ligue contre le Cancer, Paris sans Tabac

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 48

tabagique : ils prennent conscience de leur consommation, certains entrent dans une démarche de sevrage, d’autres entament au moins une réflexion sur la question. 21,5% des élèves sont fumeurs (22,9% des filles et 19,9% des garçons). 76,2% des fumeurs sont des fumeurs réguliers. Le graphique ci-contre montre l’état du statut tabagique des lycéens fumeurs et ex-fumeurs selon les étapes de Prochaska. Le taux d’arrêt (fumeurs s’étant arrêté dans l’année) est de 13,7% chez les garçons et 12,5% chez les filles. En incluant les lycéens ayant arrêté avant l’année scolaire, le taux d’arrêt global de notre échantillon est de 21,8%. Acquis du programme Les élèves disent que le programme leur a permis de : - Acquérir des connaissances sur le tabac (54,1%) ; - Savoir comment aider les autres à s’arrêter de fumer (21,8%) ; - Mieux respecter l’entourage (11,5%) ; - S’interroger sur les raisons qui les poussent à fumer (9,6%) ; - Prendre conscience de sa consommation de tabac (7,9%) ; - Trouver ses propres moyens d’arrêter de fumer (4,2%) ; - Savoir demander de l’aide (1,4%). Spécifiquement, parmi les élèves qui fument et n’envisagent pas d’arrêter, 20,2% ont pris conscience de leur consommation, 16,3% s’interrogent sur les raisons qui les poussent à fumer et 15,8% disent que le programme leur a permis de mieux respecter l’entourage. 26,9% des non fumeurs savent comment aider les autres à arrêter de fumer, ce qui participe à l’amélioration des relations entre fumeurs et non fumeurs. Enfin, 28,2% des élèves disent que le programme ne leur a rien apporté. Appréciation générale du programme Les élèves attribuent au programme une note de 4,49 (4,45 chez les garçons et 4,69 chez les filles) sur une échelle allant de 1 à 8. 59,3% des élèves l’ont bien apprécié (note de 5 à 8). 46,1% des élèves ont des remarques positives. L’apport de connaissances est le plus fréquent (17,5%), 26,9% des élèves ont des remarques négatives : la durée trop courte est la plus fréquente.

Arrêt pendant l'année

13%

Arrêt et repris23%

Veut arrêter28%

Fume33%

Vont de nouveau arrêter

3%

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 49

Comparaison des lycées avec et sans programme Le taux de sevrage est nettement supérieur dans les lycées programme comparativement aux lycées témoins avec un effet significativement important chez les garçons, moins flagrant chez les filles. En parallèle, on observe un taux d’initiation nettement inférieur dans les lycées du programme, significativement marqué chez les filles. 2005-2006 Programme

N=2427 Témoins N=296

p

Taux de sevrage (N/fumeurs) Garçons 13,7% 0 P<0,01 Filles 12,5% 9,7% n.s. Total 13% 3,6% P<0.02 Taux d’initiation (N/non fumeurs) Garçons 3,6% 5,2% n.s. Filles 4,4% 10,8% P<0.02 Total 4% 6,8% P≈0.05 Globalement, le programme a eu un effet différent sur les garçons et les filles. L’évolution entre les questionnaires initiaux et finaux est aussi différente : les garçons des lycées programmes sont moins souvent fumeurs en fin d’année (21% contre 21,7%), contrairement aux lycées témoins (26,3% contre 25%) alors que les filles sont plus nombreuses à fumer en fin d’année, mais surtout dans les lycées témoins (31,4% contre 27,6%, et 23,9% contre 21% dans le programme). Discussion Malgré un certain nombre de biais discutés par ailleurs, l’action a donc démontré une efficacité certaine en matière d’évolution des comportements tabagiques des lycéens comparativement à l’absence d’intervention spécifique. Au-delà des lycéens cibles, l’exemplarité de leur démarche et la structuration de leurs discours auront très certainement eu des répercussions favorables dans les classes non touchées par les actions collectives. Points forts de l’action

Le programme propose l’articulation d’une démarche collective obligatoire avec une démarche semi-individualisée qui permet à la fois de transmettre de l’information et de la rendre appropriable et diffusable dans la « culture » lycéenne de l’établissement. Le passage au stand est une démarche plus personnalisée que la participation aux ateliers-classe. Les élèves y objectivent un effet du tabac sur leur propre organisme et bénéficient, à leur demande, d’un entretien avec l’intervenant du CRESIF. La présence de ce stand, et la possibilité pour les lycéens de se tester eux-mêmes, concrétise le discours qui les concerne. De plus, l’inquiétude des non-fumeurs sur le tabagisme passif s’y est souvent manifestée. Contraintes

Dans certains lycées, la stratégie de lutte contre le tabagisme est perçue de manière un peu simpliste sous forme de répression avec quelques interventions ponctuelles. Dans ce cadre, la limitation à quatre classes est parfois mal comprise, en ne comprenant que l’effet de « contamination » des lycéens entre classes différentes par le stand de CO-testeur peut mieux diffuser l’information que de prendre toutes les classes. La libération d’heures de cours peut se révéler difficile et, en outre, l’intervenant du CRESIF doit parfois assumer l’ensemble du travail d’organisation.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 50

Facteurs de poursuite de l’action Dès son lancement, l’action « AJNFP » s’était fixé l’objectif d’autonomisation des établissements scolaires. Mais rares sont les établissements effectivement prêts à prendre en charge cette organisation. Une présence extérieure est indispensable pour maintenir le dynamisme de l’action. Conclusion L’action « Aujourd’hui Je Ne Fume Pas » a permis de prouver qu’un programme en milieu scolaire pouvait obtenir des résultats mesurables en termes de sevrage tabagique. Il fallut cependant de gros moyens pour atteindre les chiffres permettant de l’évaluer de façon statistiquement valable et surtout une stabilité sur plusieurs années permettant d’asseoir les partenariats et de développer des méthodologies reproductibles. Il faut souhaiter que les actuels PRSP donneront à l’éducation pour la santé l’envergure et la stabilité nécessaires pour élargir ce type de démarche à d’autres problématiques.

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Programme « Lycée pilote sans tabac »

Christine Celle Infirmière au lycée professionnel Pierre Bérégovoy à Fourchambault

Angélique Rochu ANPAA 58

En 2003, le lycée s’est inscrit dans un dispositif national expérimental mis en place dans 22 lycées en France et visant les élèves comme le personnel. Les objectifs de ce dispositif étaient les suivants :

- Créer une dynamique de prévention dans les établissements ; - Véhiculer un message positif autour de la non consommation de tabac ; - Apporter un soutien aux fumeurs pour parvenir à faire respecter la loi ; - Favoriser le respect des non-fumeurs chez ceux qui consomment du tabac.

En premier lieu nous avons créé un groupe de pilotage composé du Proviseur, du CPE, de l’assistante sociale, de l’infirmière et des représentants des professeurs et des élèves. Ce groupe a décidé des actions menées pour les trois années à suivre. Nous avons, par exemple, organisé un concours d’affichage réservé aux élèves (sous la direction de leur professeur d’arts plastiques) sur le thème des méfaits du tabac. En second lieu, nous avons insisté sur la formation des membres du comité de pilotage, grâce à notre partenariat avec l’ANPAA. Enfin chaque année, nous procédons à un état des lieux annuel afin de mesurer le nombre des fumeurs. L’ANPAA est partie prenante du projet, mais le comité de pilotage décide bien entendu de toutes mises en œuvre dans l’établissement. Dès le départ, le règlement intérieur a été modifié, les parents tenus informés de notre démarche. L’établissement est devenu lycée sans tabac progressivement. La salle fumeur des professeurs a été supprimée au profit d’un espace dans la cour à destination de l’ensemble du personnel et les élèves. Cette zone a diminué progressivement. Elle doit disparaître lors de la rentrée prochaine. Le comité de pilotage a mis en place un groupe d’information et de sensibilisation animé par le personnel de l’ANPAA, avec un objectif de transmission de connaissances. Une séance obligatoire d’une heure a été mise en place pour tous les élèves. Des consultations individuelles ont été proposées aux élèves comme aux personnels. Ceux-ci pouvant s’inscrire auprès de l’infirmière pour bénéficier d’un sevrage. Nous avons réalisé un suivi des élèves et des personnels qui sont venus consulter. La première étape consistait à évaluer la nature de la dépendance des fumeurs. Une seconde consultation individuelle était ensuite organisée avec le concours d’un médecin tabacologue de l’ANPAA. Un traitement adapté était alors proposé à chaque patient avec un suivi thérapeutique à moyen ou long terme. Notre projet s’est mis en place sur plusieurs années et c’est cet élément qui a contribué à sa réussite. Aujourd’hui, nous proposons une séance de sensibilisation à tout nouveau membre du personnel ou élève, alors que nous ne sommes plus lycée pilote. Nous avons pu sensibiliser 200 personnes, élèves et adultes. Nous avons également ouvert des consultations aux usagers de cannabis et d’alcool depuis un an et demi. Sur 37 demandes de sevrage, nous avons obtenu 27 arrêts et seulement 3 abandons.

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Le bilan sur trois ans est positif. Nous avons constaté peu de transgressions. La loi est mieux acceptée par la communauté. 68 % des élèves adhèrent aujourd’hui à notre projet contre 39 % la première année. En 2002, nous avions 60 % de fumeurs. En 2004, cette part est tombée à 46 % et continue progressivement de baisser : 34 % de fumeurs en 2005. En outre, les liens se sont renforcés entre les élèves et les adultes au sein du groupe de pilotage.

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Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 54

Regards croisés avec le Québec :

apport et comparaison avec la politique de prévention du tabagisme au Québec

Louise Guyon Coordinatrice scientifique,

Institut national de santé publique du Québec

Le tabagisme a-t-il un avenir ? J’ai pris connaissance avec beaucoup d’intérêt de vos actions et des questionnements qui en découlent. Et je peux vous dire qu’au Québec nous partageons les mêmes préoccupations - et nous expérimentons des situations qui se rapprochent beaucoup des vôtres. C’est pourquoi ce «regard croisé» que vous m’avez proposé est d’une grande pertinence. Et je sais gré l’INPES de cette invitation. Ce que je vous propose aujourd’hui c’est de vous présenter certaines de nos actions en tentant de les relier à la journée qui vient de se terminer. Les comportements tabagiques se sont modifiés sensiblement ces dernières années et il nous est parfois difficile de faire la part de ce qui revient à une conscience accrue des risques dans la population – à une dénormalisation de l’usage du tabac – à l’impact des législations et des réglementations ou à l’effet des programmes et des approches que nous avons mis en place.

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Le tabac a-t-il un avenir ?

La diminution de la consommation générale va-t-elle se poursuivre ?

Qui sont les fumeurs actuels ? Qui seront-ils demain?

Nos pratiques et nos politiques sont-elles «in» ?

Devant la baisse généralisée de l’usage dans plusieurs pays, certains commencent même à se poser la question « Le tabac a-t-il un avenir ? ». Cette diminution va-t-elle se poursuivre ?

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 55

Certains chercheurs estiment qu’un seuil critique sera atteint à 15% de fumeurs et qu’il sera extrêmement difficile de descendre au delà.

Les fumeurs de demain seront-ils différents de ceux pour qui nous avons développé des programmes et des politiques ? Et ces derniers seront-ils encore de mise dans les prochaines années ? En somme, allons-nous devoir refaire nos classes ?

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Hommes Femmes

Proportion de fumeurs actuels, selon le genre, population de 15 ans et plus, Québec, 1999 à

2005

Source de données: ESUTC 1999-2005

Je vous présente rapidement quelques statistiques sur les fumeurs québécois. Ces données proviennent de l’enquête annuelle sur l’usage du tabac au Canada. En 6 ans, la proportion des fumeurs est passée de 32% à 22% (chez les hommes) – et de 29% à 24% (chez les femmes). En dépit des variations annuelles – un peu en dents de scie – la baisse est constante. Et surtout nous assistons à un renversement du rapport hommes/femmes. Ces dernières sont maintenant plus nombreuses et – depuis 2001 –ne manifestent aucun progrès en terme de baisse du tabagisme.

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Source de données: ESUTC 1999-2005

Proportion de fumeurs actuels, selon l’âge, population de 15 ans et plus, Québec, 1999 à

2005

La baisse générale se retrouve à tous les âges, à une exception près : les 20-24 ans (courbe supérieure) chez qui on retrouve également les fumeurs les plus nombreux. Plus rassurante est la situation des 15-19 qui sont passés de 36% à 26%. Il nous restera à savoir s’il s’agit d’un phénomène de génération ou d’âge. – Les études de cohortes que nous menons actuellement vont nous permettre de mieux comprendre le phénomène. Si l’on s’attarde un peu plus sur les contextes de cette baisse généralisée de l’usage du tabac, on s’aperçoit qu’elle est plus complexe qu’on aurait pu le croire. J’attire votre attention sur quelques points :

5

Qui sont les fumeurs actuels?

� Une concentration croissante du tabagisme parmi les groupes les plus socialement et économiquement marginalisés.

� Une émergence des fumeurs occasionnels� Une émergence de fumeurs présentant des problématiques concomitantes� Polytoxicomanie� Santé mentale� Santé physique

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1. La concentration du tabagisme dans des populations économiquement et socialement marginalisées – et qui sont plus réfractaires aux interventions telles qu’on les a conçues jusqu’à maintenant.

2. Un émergence des fumeurs occasionnels – ou des personnes qui réduisent leur

consommation sans pour autant arrêter. Ces fumeurs sont souvent persuadés qu’ils sont en contrôle de leur consommation. Ils sont moins sensibles à l’augmentation des taxes. Ils sont parmi les plus à risque d’augmenter leur usage du tabac graduellement et ne se considèrent pas comme des acteurs dans la fumée de tabac environnementale. La conséquence : une perception des services d’aide à la cessation tabagique négative, jugés non pertinents dans leur cas.

3. Un augmentation des fumeurs qui présentent une problématique concomitante

� santé mentale, � santé physique, � polytoxicomanie.

Contrairement à la précédente, cette clientèle nous est signalée de plus en plus dans les services d’aide à la cessation tabagique. Elle représente un nouveau défi pour les intervenants qui se disent peu outillés pour les prendre en charge. À ceux-ci on pourrait ajouter un quatrième point important – et je l’ai relevé dans certaines présentations aujourd’hui – que l’on pourrait qualifier ainsi : une tendance vers un resserrement des « populations fumeuses » autour d’un certain nombre de caractéristiques ou de comportements néfastes pour la santé avec un risque accru de stigmatisation.

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Il y a plusieurs sources de résistance aux interventions pour diminuer le tabagisme

chez ces groupes.

Sentiment de «contrôle»

Relation de pouvoir

Identité sociale

Le sentiment local d’appartenance

Le plaisir

Il y a plusieurs sources de résistance aux interventions pour diminuer le tabagisme chez ces groupes.

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J’ai déjà mentionné le sentiment d’être «en contrôle» (fumeurs occasionnels). Mais l’usage du tabac peut aussi être vu comme un outil de contrôle (de pouvoir). La sociologie nous aide à mieux comprendre comment, particulièrement dans les populations marginalisées, le tabagisme peut être perçu par les fumeurs comme un moyen de retrouver ou de se réattribuer du pouvoir face à une classe sociale jugée contrôlante, voire méprisante, et dont l’ultime représentation est constituée par les porteurs du langage de la santé publique.

Ce dernier point a été mentionné avec justesse dans la présentation de Liber Tabac qui insistait sur le fait que «fumer» était beaucoup plus significatif que «dépendance», que c’était souvent une définition de soi. On retrouve donc dans ces groupes :

• Un sentiment de communauté autour du tabagisme ; • Une identité sociale : celle de fumeurs ; • Le sentiment local d’appartenance sociale : on fume dans des lieux et à des

moments privilégiés. Enfin, j’ajouterai à cette liste un autre phénomène que nous avons pu observer au cours d’action de terrain, particulièrement chez les très jeunes, et que j’appellerai les effets pervers de nos interventions. Par exemple : quelques expériences de prévention (heureusement peu nombreuses) ont démontré, à l’évaluation, une augmentation du tabagisme chez les enfants de niveau scolaire primaire lorsqu’ils furent soumis à des programmes de prévention. Les actions de terrain Tout ceci nous amène à réfléchir sur la nécessité de redéfinir nos actions et de chercher à les adapter plus étroitement à ces nouvelles configurations au cours des prochaines années. Dont toute cette question de l’adéquation entre la clientèle et les services – qu’ils soient d’ordre préventif ou curatif. Lorsque vous parlez de l’état des lieux, d’une connaissance de base de vos clientèles, c’est à cela que vous faites référence. Et pour paraphraser Jacques Bury, il est possible de mener des actions qui marchent, sur le terrain – et ce qui me frappe, c’est la souplesse que les dispositifs que vous avez mis en place permettent – comparativement à des structures nationales (nécessaires certes) mais plus lourdes, plus axées sur la reddition de compte. Je pense que les deux sont nécessaires. La question est comment les harmoniser, les rendre complémentaires ? Cela semble constituer un défi pour vous, et je peux vous dire que ça l’est pour nous aussi de l’autre côté de l’Atlantique. Parmi les nombreuses retombées de vos projets terrains, j’ai aussi retenu :

• Qu’ils ont permis, dans certains lieux de favoriser l’arrivée de la loi qui sera appliquée très prochainement, de la précéder ;

• Qu'ils constituent une porte d’entrée pour d’autres questions ou comportements de santé ;

• Une constante qui revient régulièrement : l’importance des partenariats : partenariats informés, formés, responsabilisés ;

• Un autre point a attiré mon attention : la créativité dont vous avez fait preuve tout en respectant les principes de base.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 59

Les choix d’actions au Québec J’aimerais maintenant vous présenter certaines des actions que nous avons implantées au Québec. D’abord quelques mots pour vous situer le contexte général dans lequel elles s’inscrivent. Le ministère de la Santé et des Services sociaux s’est doté d’un Plan de lutte au tabagisme – renouvelé tous les 5 ans et qui comporte 3 grands objectifs :

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Les choix du Québecun plan de lutte au tabagisme

Prévenir l’initiation au tabagisme

Encourager et soutenir l’abandon des habitudes tabagiques

Assurer la protection des non-fumeurs contre l’exposition à la fumée du tabac dans l’environnement

Il se déploie à partir d’un certains nombre d’axes, les principaux étant :

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Axes d’intervention

Politiques et LégislationInformation-Sensibilisation-Éducation-SoutienMobilisation Connaissance-Surveillance-Recherche-Évaluation

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 60

C’est un plan d’éducation à la santé qui s’appuie sur des modèles de dénormalisation

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Politiques et législation

Loi sur le tabacTaxationAccès financier aux aides pharmacologiquesRémunération des actes médicaux en abandon du tabagisme

Comme c’est le cas en France, les politiques et la législation touchent les domaines suivants :

1. Loi sur le tabac ; 2. Taxation (l’une des plus élevée au Canada) ; 3. Accès financier à certaines aides pharmacologiques pour soutenir le sevrage

tabagique (seule province canadienne actuellement à offrir ce soutien) ; 4. Rémunération des actes médicaux en abandon du tabagisme.

La loi québécoise sur le tabac a connu récemment une révision importante et à bien des égards des points de ressemblance avec ce qui se passe actuellement en France

� Restriction de l’usage dans les lieux publics ;

� Mesures restrictives dans les Points de vente ;

� Mesures restrictives en ce qui concerne l’étalage ;

� Promotion de saines habitudes de vie ;

� Taxation. Au niveau du soutien à l’arrêt tabagique – un programme général a été mis sur pied depuis 2001 – le Programme québécois d’aide à l’abandon du tabac. Il est offert gratuitement à tous les fumeurs qui souhaitent entreprendre une démarche de sevrage tabagique et se déploie à partir de 4 composantes qui sont :

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 61

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Le programme québécois d’aide à l’abandon du tabac

Centre d’abandon du

tabac

Site internet

Ligne téléphonique

Professionnels de la santé

1- Les Centres d’abandon du tabagisme (137 répartis sur l’ensemble du territoire)

dans lesquels des professionnels formés offrent du councelling individuel et de groupe ;

2- Une ligne téléphonique ; 3- Un Site internet ; 4- Du councelling donné par des professionnels de la santé (des outils de formation sont actuellement en préparation à leur intention) ;

Quelques leçons tirées de l’évaluation

Processus non-achevé

La plupart des fumeurs préfèrent une démarche autonome

L’habilitation des professionnels de la santé

Les services de cessation individuels ou de groupe sont les plus coûteux à l’état

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 62

Actuellement, suite à un mandat qui nous a été confié par le ministère de la santé et des Services sociaux, nous faisons une première évaluation de l’implantation de ces services qui, somme toute, sont relativement récents. Parmi les diverses activités d’évaluation en cours, nous avons mené un sondage auprès d’un échantillon représentatif de fumeurs et d’ex-fumeurs récents. Nous cherchions, entre autres, à connaître

� La notoriété de ces programmes ou ressources (i.e. sont-ils connus des fumeurs) ;

� Le degré d’utilisation ; � La perception de l’utilité chez ceux qui les utilisent.

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ConstatsPlan québécois d’abandon du tabac

Notoriété : les services offerts sont connus des fumeurs et anciens fumeurs récents;

Utilisation : les services sont peu utilisés ;

Perception de l’utilité : les utilisateurs des services perçoivent que ceux-ci sont utiles à la cessation tabagique;

Si ces services et ces aides sont bien connus, ils sont par contre très peu utilisés. Ce sont les aides pharmacologiques, particulièrement les timbres (patches) qui sont les plus connus et utilisés. Et dans ce dernier cas les utilisateurs nous ont déclaré que le programme de gratuité avait été un facteur important dans le choix qu’ils ont fait. Par ailleurs, les centres d’aide (qui constituent la ressource la plus coûteuse) est moins connue – et surtout très peu fréquentée. Il faut cependant noter à leur défense, que ceux qui s’en sont prévalus ont trouvé qu’ils les avaient beaucoup aidés dans leur démarche d’arrêt tabagique. Ces résultats ne devraient pas nous surprendre, ils sont très semblables à ce que l’on retrouve en Amérique du Nord, et dans des pays européens. Cependant, ils nous obligent à nous questionner sur la pertinence de ces grands dispositifs tels qu’ils se déploient actuellement. Nous avons également constaté que certains groupes qui étaient ciblés dans le programme de lutte au tabagisme, les jeunes et les femmes enceintes, étaient peu rejoints par ces programmes.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 63

La question du tabagisme chez les femmes enceintes est l’une de celles qui nous préoccupent particulièrement. Je vous présente très brièvement certains points qui sont ressortis d’une recherche que nous avons menée à l’INSPQ afin de documenter :

• Les représentations sociales des futures mères à propos de l’usage du tabac et de l’alcool pendant la grossesse ;

• La perception des messages qu’elles reçoivent sur ces pratiques ; • Qui sont les porteurs privilégiés de ces messages ;

Nous avons mené une recherche de type anthropologique auprès de femmes enceintes venant de milieux socio-économiques différents et nous avons aussi fait des entrevues de groupe avec des cliniciens qui travaillent auprès de futures mères. Nous avons observé une forte concentration des mères fumeuses dans les milieux plus défavorisés. Ces femmes avaient reçu et accepté le message de la santé publique, mais très souvent ce message entre en contradiction avec leur propre expérience et celles des personnes de leur entourage. Elles choisissent alors d’adapter leur comportement à leur milieu et développent une conception du risque qui se rapproche plus du « savoir populaire » que de la conception scientifique, privilégiée par la santé publique. À la lumière des résultats de cette recherche nous sommes revenus sur l’une de nos prémisses de départ et nous nous sommes demandé si le moment de la grossesse était toujours ce moment privilégié pour intervenir de façon préventive ou en soutien à la cessation.

Intervenir pendant la grossesse ?

MotivationMessage intégréConformité aux normesSoutien de l’entourage

Contexte normatifCumul des prescriptionsPressions de l’entourageStigmatisationDépendance

Nos résultats vont dans le sens de poursuivre sur cette lancée : • D’abord la motivation à protéger l’enfant et à lui donner toutes les chances possibles est toujours présente et constitue un ancrage important.

• Ensuite nous avons constaté que le message sur les méfaits du tabac est bien intégré, même si les connaissances restent superficielles. Le souci de se conformer à une image de « bonne mère » peut également inciter plusieurs à adopter de meilleures habitudes de vie, malgré la fragilité de cette motivation. • Dans plusieurs familles, le message est partagé et les mères reçoivent alors un soutien appréciable de l’entourage.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 64

Par ailleurs nous constatons que c’est en même temps une période particulièrement difficile : • Contexte normatif qui entoure la grossesse qui est générateur de stress et qui peut réduire la confiance en ses capacités.

• On a constaté l’existence d’un cumul des prescriptions qui est vécu comme une série de contraintes et qui en même temps risque de diluer l’information et de perdre de vue les priorités. Une participante nous dit : « tout le monde est aux commandes de ma grossesse, sauf moi…»

• Les mères qui vivent dans des environnements de fumeurs se retrouvent souvent dans des situations de conflits, autant en termes de valeurs ou de normes que de situations très pratiques à gérer.

• Pour celles qui n’arrivent pas à cesser de fumer ou à protéger le bébé contre le tabagisme ambiant il y a un risque plus grand de marginalisation. Elles seront portées à minimiser l’information, à se tourner vers un environnement qui partage leurs valeurs et leurs habitudes tabagiques.

En somme : la réponse est : oui, la grossesse demeure un moment privilégié parce que les mères sont réceptives aux messages et disposées à poser des gestes concrets, MAIS plusieurs éléments rattachés au contexte même de la grossesse rendent ce momentum plus fragile. Et le poids est encore trop souvent mis sur la responsabilité des mères. Pour terminer, nous avons relevé quelques pistes en lien avec ces premiers résultats D’abord, en terme de prévention et d’information :

• Améliorer et harmoniser les messages en faisant appel aux personnes concernées, c’est-à-dire en intégrant les mères elles-mêmes, leur entourage et les professionnels impliquant.

• Cibler non seulement les femmes enceintes, mais aussi les conjoints et leurs réseaux sociaux.

• Informer les jeunes femmes sur les effets néfastes du tabac pour elles et leurs enfants avant qu’elles ne deviennent enceintes (ce souhait a été mentionné par plusieurs des mères et des professionnels rencontrés).

• Revoir les stratégies avec les professionnels de la santé eu égard à l’ensemble des prescriptions et interdits.

Ensuite, en terme de pistes pour l’intervention :

• Recourir à des approches individuelles et soutenues dans le temps. • Améliorer le système de références. A cet effet, on a vu dans les travaux que nous menons sur l’évaluation des programmes de cessation du tabagisme que cette clientèle est très peu couverte par ces instances.

• Revoir les normes et les pratiques vis-à-vis des aides pharmacologiques. Enfin, en ce qui concerne la recherche :

• Améliorer la compréhension de la construction sociale du risque du tabagisme chez les femmes enceintes et ce, dans le contexte de l’ensemble des habitudes de vie et des diverses expositions.

• Expérimenter et documenter des interventions qui favorisent la cessation tabagique pendant la grossesse et qui est maintenue après la naissance.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 65

• Mener des recherches sur des interventions axées sur l’abandon de plus d’une substance, ou d’habitudes de vie à la fois, ainsi que les facteurs de succès.

J’ai été particulièrement intéressée par l’expérience menée dans les foyers de Metz. Elle correspond à cette recommandation que nous avons émise sur les approches individuelles et soutenues dans le temps. Au cours des dernières décennies, au Québec, nous avons fait des choix qui étaient en accord avec une approche et un idéal communautaires. Dans cette foulée nous avons mis en place des mécanismes de renforcement des compétences personnelles et d’intervention dans les milieux de vie, tout en diminuant sensiblement les centres d’hébergement mères/enfants. Mais ce sont tout au mieux des demi-succès, dans les cas de précarité et chez les très jeunes mères. À mon avis, il faut agir sur tous ces lieux, assurer la continuité entre un encadrement nécessaire, investir le milieu de vie et l’entourage.

Les jeunes représentent toujours notre priorité

Il a beaucoup été question des jeunes au cours de cette journée. La dernière partie de mon exposé portera sur les jeunes- et plus particulièrement les populations scolaires

26,824,7

17,8

14,8

34,1 33,4

26,222,9

0

10

20

30

40

Garçons Filles

1998 2000 2002 2004

Sources de données: EQTJ 2004

Prévalence du tabagisme au cours des 30 dernier jours, selon le genre – élèves 12-18 ans

Ces données proviennent d’une enquête sur les comportements tabagiques des jeunes élèves de 12 à 18 ans menée tous les 2 ans dans les écoles du Québec. La bonne nouvelle est que depuis 1998, il y a une diminution régulière de l’usage du tabac chez ces jeunes (l’indicateur ici est la prévalence au cours des 30 jours précédant l’enquête). L’enquête que vous avez présentée sur les lycées arrive à des résultats très semblables. La situation des filles continue cependant de nous préoccuper. Toutefois depuis 2002, elles semblent s’être engagées à leur tour dans une diminution de leur consommation. En 2004, la prévalence était de 15% chez les garçons et de 23% chez les filles. Chez ces dernières, la crainte de prendre du poids constitue une barrière significative à la difficulté de s’engager dans une démarche de cessation (contrairement aux adultes pour qui les questions de santé sont prédominantes). J’ai constaté que certains de vos projets avaient abordé cet aspect.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 66

2121

21,6

17,7

13,9

11,7

29,228,8

21,6

18,4

34,833,9

24,7

16,4

31,231,3

28,2

22,3

36,535,4

31,3

29,6

0

5

10

15

20

25

30

35

40

1ère sec. 2ème sec. 3ème sec. 4ème sec. 5ème sec.

1998 2000 2002 2004Sources de données: EQTJ 2004

Prévalence du tabagisme au cours des 30 dernier jours, selon le niveau scolaire

élèves 12-18 ans

Qu’en est-il avec l’avancement selon les niveaux scolaires ? On ne sera pas surpris de voir la prévalence augmenter régulièrement de la première année secondaire (12 ans) à la 5e. Cependant, j’attire votre attention sur l’évolution dans le temps des élèves de première année chez qui on remarque une diminution plus régulière.

Le développement de la dépendance à la nicotine chez les adolescents est une question complexe. Je vous présente brièvement deux études nord-américaines, l’une menée aux USA : A retrospective/prospective longitudinal study of the natural history of nicotine dependence - Joseph R. DiFranza, M.D.Robert J. Wellman, Ph.D.- University of Massachusetts Medical School :

• L’étude cherchait à savoir s’il y avait un seuil minimal en terme de durée, fréquence ou quantité de tabac pour induire le phénomène de dépendance. Elle visait également à apporter des informations sur le meilleur moment pour intervenir de façon préventive.

• Ils ont utilisé The Hooked on Nicotine Checklist comme mesure de dépendance.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 67

Les auteurs ont conclu :

22

THE DANDY STUDYThe Development and Assessment of Nicotine Dependen ce

in Youths (DiFranza et Wellman)

� Les symptômes de dépendanceà la nicotine se développent rapidementdès l’usage irrégulier du tabac

� Pas de dose minimum de nicotine

� Pas de période minimum de tabagisme

� Les filles semblent plus vulnérables

Regardons à présent l’étude canadienne de Jennifer O’Loughlin et ses collaborateurs :

� Étude longitudinale sur 5 ans � Âge des participants : 12-13 ans au départ � Suivis tous les 3-4 mois � Plus de 20 questionnaires auto administrés � Analyses qualitatives

Cette étude arrive sensiblement aux mêmes conclusions que celles de DiFranza. Très brièvement elle peut être résumée par le graphique suivant :

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 68

23

No. months after onset when probability of attaining milestone is 25% (O’Loughlin et al 2006)

100 cigarettes (19.5 months)

Smoke daily (23.1 months)

0 3 6 9 12 15 18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 months →→→→

Tolerance (13.0 months) ICD-10 Dependent(40.6 months)

Withdrawal symptoms (11.0 months)

Physical addiction (5.4 months)

Cravings ( 4.5 months)

Mental addiction (2.5 months)

Inhale (1.5 months)

Whole cigarette (2.5 months)

INITIATION Smoke weekly (19.4 months)

Smoke monthly (8.8 months)

• La ligne bleue centrale représente la trajectoire dans le temps en termes de mois.

• En haut de cette ligne, on peut voir les différentes étapes dans l’adoption du

tabagisme. L’inhalation de la fumée est un phénomène qui suit de près l’initiation. Arrive ensuite le fait de fumer une cigarette entière (2,5 mois) – l’usage mensuel (8,8 mois) et hebdomadaire (qui coïncide avec la mesure de 100 cigarettes au cours de la vie) et finalement l’usage quotidien à 23 mois.

• Les symptômes de dépendance à la nicotine sont représentés sous la ligne bleue. On

voit que le craving est rapporté à 4,5 mois, la dépendance physique à 5 mois, le sevrage (11 mois) et enfin la tolérance à 13 mois.

• La dépendance, évaluée selon les critères du ICD-10, est détectée à 40,6 mois après la

première bouffée, dans cette étude.

• Ce qui est mis en lumière ici est que le « craving » qui est un signal important de manque de contrôle sur le tabagisme, se manifeste très tôt dans le processus, bien avant l’usage régulier (mensuel).

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 69

24

Conclusions

� Le «Craving» est le premier symptôme expérimenté par l es fumeurs débutants

� Plusieurs fumeurs débutants ont des symptômes de sevragemême s’ils ne fument qu’occasionnellement

� On ne peut pas penser que les jeunes ne sont pas dépendant sparce qu’ils ne fument qu’occasionnellement

� L’usage quotidien ne doit pas être vu comme l’étape signif icative

(DiFranza et Wellman)

L’une des principales conclusions de ces deux études, qui ont été corroborées par une seconde enquête DANDY II, est que le modèle des étapes de changement du comportement est invalidé pour la majorité des jeunes. La dépendance peut s’installer très tôt, avant l’usage régulier et que les approches, autant en prévention qu’en cessation ou sevrage, doivent prendre en compte les trajectoires particulières des jeunes. Actuellement, nous menons à l’INSPQ une étude longitudinale en collaboration avec madame O’Loughlin auprès de jeunes en milieux scolaire, recrutés à 10 ans. Nous nous intéressons plus particulièrement aux contextes d’usage du tabac et à la consommation concomitante d’autres habitudes de vie (usage de l’alcool, des drogues, du jeu, alimentation et exercice physique). La prévention Je voudrais maintenant aborder la question de la prévention, à travers une étude menée récemment sur l’efficacité des mesures de contrôle du tabagisme chez les jeunes.

• Objectifs : faire le point sur l’efficacité des diverses mesures de contrôle du tabagisme chez les jeunes.

• Méthodologie : synthèse et méta-analyses.

• À partir des études nord-américaines publiées. Nous verrons en dernière partie comment cela a été inclus dans le projet «École en santé».

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 70

Les principaux constats sont ceux-ci

• Les programmes de prévention du tabagisme en milieu scolaire devraient combiner des mesures éducatives et environnementales (dans les présentations de la journée j’ai retrouvé plusieurs exemples de ce constat).

• Les politiques d’interdiction de l’usage du tabac à l’école constituent des mesures essentielles.

• L’implication des parents peut optimiser les actions antitabac à l’école. Ceci est fortement souhaité d’autant plus que l’on sait que les jeunes qui viennent de foyers fumeurs sont beaucoup plus difficiles à rejoindre.

• L’engagement des jeunes dans les actions antitabac est une stratégie novatrice et prometteuse.

• Les lois et règlements qui restreignent ou interdisent l’usage du tabac sont nécessaires.

• Le contrôle des prix par la taxation constitue un puissant moyen pour réduire l’usage du tabac chez les jeunes.

L’étude propose un ordre de priorités des mesures qui sont le plus susceptibles d’avoir un impact sur le tabagisme des jeunes et ceci, en se basant sur des critères d’efficacité et de faisabilité. Par ordre décroissant il cite :

• Taxes ; • Politiques scolaires ; • Campagnes médiatiques ; • Mesures de contrôle de l’usage du tabac ; • Programme scolaire et curriculum scolaire ; • Programmes communautaires, locaux, innovateurs et impliquant la participation des jeunes.

De son côté le Center for Disease Control And Prevention insiste sur le fait que la prévention en milieu scolaire représente un volet important de tout plan de prévention du tabagisme. Mais il ajoute que pour être efficace, elle doit s’insérer dans un programme global de contrôle tabagique. En effet, il importe qu’elle soit soutenue par des interventions multisectorielles complémentaires aux niveaux médiatique, politique et communautaire. De façon plus spécifique, en ce qui concerne la Prévention en milieu scolaire les lignes directrices émises par le CDC recommandent les mesures suivantes pour l’intervention en milieu scolaire :

• Développer et appliquer une politique sur l’usage du tabac à l’école.

• Informer les élèves sur les conséquences physiques et sociales de l’usage du tabac, le rôle des normes et de l’influence sociale sur l’usage du tabac et les compétences à résister à l’offre et à la pression à fumer.

• Assurer une éducation préventive de la maternelle à la première année du collégial.

• Assurer la formation des professeurs aux différents programmes.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 71

• Impliquer les parents et la famille dans les programmes de prévention de l’école.

• Soutenir les initiatives de cessation tabagique des élèves et des employés de l’école.

• Évaluer les programmes de prévention à des intervalles réguliers.

L’APPROCHE ÉCOLE EN SANTÉ, un projet en implantation dans lequel l’INSPQ est impliqué.

Il s’agit pour nous, d’une nouvelle façon de travailler avec les partenaires de l’éducation, la famille et la communauté autour de la réussite de la santé et du bien-être des jeunes. L’objectif en est d’accroître l’efficacité de nos interventions en promotion et prévention pour favoriser la santé, le bien-être et la réussite de tous les jeunes. Pour ce, nous avons développé une vision…

• Qui centre la promotion et la prévention autour des facteurs clés du développement du jeune, donc qui est insérée dans le projet pédagogique ;

• Qui implique des actions à plusieurs niveaux (jeune, école, famille, communauté) ;

• Et finalement un renouvellement des pratiques.

Il faut dire qu’actuellement dans plusieurs parties du monde, on assiste à un déploiement d’approches globales et intégrées de promotion et de prévention. École en santé est l’une d’elles.

Pourquoi école en santé?

• Parce qu’il y a des difficultés

33

École en santé… pourquoi?

� Morcellement et éparpillement des actions

� Isolement des acteurs� Essoufflement� Résultats décevants� Insuffisance de ressources

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 72

Parce que le monde a changé

34

École en santé… pourquoi?

� Besoins des jeunes� Conditions de vie� État des connaissances� Renouveau pédagogique� Restructuration du réseau de la

santé

En premier lieu, École en santé s’appuie sur un partenariat. Il y a une entente de complémentarité des services entre le réseau de la santé et des services sociaux - et le réseau de l’éducation et du Programme national de santé publique. L'approche École en santé est une démarche visant à réunir, dans le projet éducatif et le plan de réussite de l’école et dans les plans d’action des partenaires, une offre globale et concertée d’actions de promotion de la santé et de prévention. Celles-ci sont destinées aux jeunes qui fréquentent les écoles de l’éducation préscolaire et de l’enseignement primaire et secondaire.

35

p.35

Entente de complémentarité des services entre le réseau Entente de complémentarité des services entre le réseau de la santé et des services sociaux et le réseau de de la santé et des services sociaux et le réseau de

l’éducationl’éducation

Promotion/PréventionPromotion/Prévention(ensemble des jeunes, (ensemble des jeunes,

jeunes à risque)jeunes à risque)

Aide/RéadaptationAide/Réadaptation(jeunes en difficulté)(jeunes en difficulté)

Adaptation/RéadaptationAdaptation/Réadaptation/Intégration sociale/Intégration sociale

(jeunes avec déficience, (jeunes avec déficience, incapacité)incapacité)

École en santé (intervention globale et École en santé (intervention globale et concertée en promotion et en prévention)concertée en promotion et en prévention)

Santé et Services sociauxSanté et Services sociaux ÉducationÉducation Autres secteursAutres secteurs

Exemple:Exemple:•• Programme national de Programme national de santé publiquesanté publique

•• PAR, PALPAR, PAL•• Projet clinique du CSSSProjet clinique du CSSS

Exemple:Exemple:•• Projet éducatifProjet éducatif•• Programme de Programme de formation de formation de l’école québécoisel’école québécoise

•• Services Services complémentairescomplémentaires

•• CommunautaireCommunautaire•• Municipal Municipal •• SocioSocio--économiqueéconomique

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 73

L’approche École en santé suppose donc le déploiement d’une combinaison judicieuse d’actions. Cette combinaison est de nature intégrative en ce sens qu’elle est susceptible d’influencer à la fois plusieurs ou l’ensemble des facteurs clés de la réussite, de la santé et du bien-être des jeunes (estime de soi, compétences sociales, saines habitudes de vie, comportements sains et sécuritaires, environnements favorables, services préventifs), de favoriser le développement des compétences des jeunes et d’être renforcée à plusieurs niveaux (jeunes, familles, école, communauté). Cette combinaison d’actions doit respecter les conditions d’efficacité propres à la promotion de la santé et à la prévention, et trouver ancrage dans le renouveau pédagogique.

Comment cela se manifeste-t-il?

Dans un souci de savoir dans quelle mesure les interventions de promotion de la santé et de prévention actuellement disponibles en milieu scolaire contribuent à la mise en place de combinaisons d’actions de nature intégrative, un modèle d’analyse8 a été élaboré qui comprend un ensemble de critères (ces critères sont décrits en annexe). Ce sont les milieux qui, à partir des ressources en place et des actions déjà présentes, doivent établir quelles actions, ou combinaisons d’actions, seront privilégiées. Les actions les plus complètes seront privilégiées car elles permettent au milieu un minimum de démarches pour atteindre un même objectif.

Quels sont les domaines visés ?

36

Cibles du PNSP et EESvolet PRÉVENTION

� Traumatismes� Dépendances� Violence� Détresse psychologique� Suicide� ITSS-Grossesse� Maladies infectieuses� Maladies chroniques, cancers

8 Ce modèle est élaboré dans : Choinière, C., Roberge, M.-C., Arcand, L. et Martin, C. (Juillet 2006). Analyse des

interventions de promotion de la santé et de prévention en milieu scolaire au regard de leur cohérence et leur contribution à l’approche École en santé. Document de travail. Institut national de santé publique du Québec.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 74

Comment cela se concrétise-t-il ?

37

L’approche École en santé

Une démarche de planification systématique…

� À partir de l’école

� Inscrite dans le projet éducatif et le plan de réus site

� Qui ancre les actions dans :� la classe, l’école

� Les activités parascolaires

� Les activités du service de garde

� La famille

� Les milieux de vie des jeunes

Quel rôle joue l’INSPQ ?

� Offrir la fine pointe des connaissances en matière de moyens d’action en promotion et prévention ;

� Vérifier si les moyens d’action s’inscrivent dans la perspective d’École en santé ;

� Outiller les écoles et leurs partenaires et les aider à faire des choix appropriés parmi l’abondance de moyens d’action ;

Comment joue-t-il ce rôle ?

D’abord au niveau de l’implantation

� Production du guide et d’un exemple fictif de projet éducatif d’une école en santé ;

� Production de guides et outils pour les animations, formations et accompagnement ;

� Production d’un outil d’aide à la décision pour le choix des interventions PP découlant de l’avis scientifique ;

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 75

� Production d’un outil d’analyse de la situation et de planification dans la perspective PP pour les écoles ;

En ce qui concerne l’évaluation

� Formation d’une équipe évaluation ;

� Élaboration du cadre d’évaluation ;

� Consultation provinciale ;

� Sélection et précision des objets d’évaluation (axes prioritaires de recherche) ;

� Formation d’une équipe de chercheurs santé et éducation ;

� Recherche de financement (deux subventions obtenues déjà) ;

� Formation d’équipes de travail aux niveaux provincial et régional ;

� Analyse du contexte d’implantation ;

� Évaluation d’impact ;

� Développement d’indicateurs.

Dans le domaine du tabagisme, la littérature présente des directives très claires pour maximiser l’efficacité des programmes de prévention du tabagisme en milieu scolaire9. Pour prévenir le tabagisme chez les jeunes, une planification scolaire de prévention du tabagisme doit comprendre une politique scolaire sur l’usage du tabac.

•••• Des activités éducatives s’adressant aux élèves et réalisées dans les classes selon un mode d’enseignement interactif ;

•••• Des activités de vie scolaire menées par les élèves eux-mêmes ;

•••• Des activités préventives organisées par l’école et menées dans la communauté en complémentarité avec les activités à l’école ;

•••• Des activités de cessation offertes aux élèves et au personnel de l’école ;

De plus, le contenu des activités menées dans la classe doit essentiellement porter sur l’acquisition d’habiletés visant à contrer les pressions sociales à fumer. Un exemple concret de l’utilisation du modèle d’analyse proposé par l’approche École en santé a été présenté aux participants.

9 Lalonde, M. & Heneman, B. (2004). La prévention du tabagisme chez les jeunes : avis scientifique. Montréal: Institut

national de santé publique du Québec, Direction des individus et des communautés.

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 76

Conclusion

Nous vivons actuellement, et nous sommes parfois portés à l’oublier à cause des objectifs très serrés que nous nous sommes imposés, une période unique, car nous sommes en train de réaliser une révolution à propos d’une habitude de vie qui était la norme il y a à peine 20 ans. Cette révolution nous a permis de déployer nos connaissances, notre réflexion, nos compétences et ce, en très peu de temps.

On a assisté également à la structuration de partenariats nouveaux et efficaces. Et il importe aujourd’hui, au terme d’une étape importante dans les programmes que vous avez implantés, que cette expertise assure sa pérennité, que cette transformation des milieux (et de vous-même) puisse continuer à vivre et à se déployer.

Pour reprendre la question du début de mon exposé : je crois malheureusement que le tabac a encore de longues années de vie ici ou dans d’autres lieux moins protégés. Les comportements tabagiques évoluent, nous l’avons constaté ensemble. Et nos pratiques doivent continuer à évoluer si l’on veut continuer à marquer des points. Les actions de proximité que vous avez pilotées avec compétence et conviction ont leur place dans l’étalement des forces mises en place pour lutter contre le tabagisme.

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CCOOMMMMEENNTT PPRREEVVEENNIIRR LLEESS PPRREEMMIIEERREESS CCOONNSSOOMMMMAATTIIOONNSS DDEE TTAABBAACC ?? RREEAALLIISSAATTIIOONN DDEE SSUUPPPPOORRTTSS DDEE

CCOOMMMMUUNNIICCAATTIIOONN EETT DDEE PPRREEVVEENNTTIIOONN……

Dans le cadre du Dispositif National de Lutte contre le Tabagisme mis en place par l’INPES et la CNAMTS et du Programme Régional de Prévention du Tabagisme en PACA, financé par l’INPES dans le cadre du Plan Cancer, le CoDES 13 mène des actions de prévention en établissements scolaires.

A l’occasion de la Journée Mondiale Sans Tabac 2005, le CODES 13 a été sollicité par la Direction de la Santé Publique de la Ville de Marseille pour organiser un concours d’affiches, s’inscrivant dans une campagne de communication qui vise à prévenir l’initiation tabagique auprès des enfants de 8 à 12 ans. Un programme d’éducation pour la santé s’est développé auprès d’une classe de 1ère Dessinateurs Maquettistes dans un lycée. L’objectif de l’action est d’apporter des connaissances sur le tabagisme et de favoriser leur appropriation par la réalisation des affiches à destination d’enfants.

Déroulement de l’action

Séance 1 : Définir la santé globale, recueillir les représentations sur le tabagisme. Séance 2 : Connaître pour être responsable dans ses choix face à la collectivité Séance 3 : Réfléchir sur les comportements de consommations Séance 4 : Travailler sur les techniques et objectifs de communication en matière de lutte contre le tabagisme. Deux professeurs ont accompagné et aidé les élèves à finaliser leurs projets artistiques. Les élèves de l’établissement et un jury de professionnels ont sélectionné l’affiche gagnante.

Résultats / Evaluation

L’affiche primée, intitulée « Perds pas ton souffle », a été présentée lors de la conférence de presse présentant l’action de la Ville. Les élèves ont pu expliquer et mettre en valeur le travail accompli par la classe. Ils ont développé leurs capacités de réflexion, de créativité et construit une image positive d’eux-mêmes. Cette action a insufflé une dynamique de prévention autour du tabagisme au sein de l’établissement. L’affiche a été utilisée : - Comme support de la campagne de communication dans la ville, les établissements scolaires, sanitaires et sociaux, la CPCAM, la Médecine du travail, etc. - Pour la publication d’une brochure contenant les coordonnées de l’ensemble des consultations de tabacologie de la ville diffusée à l’occasion de Journée Mondiale.

Contact CODES 13 : Mlle GOEURIOT Daphné

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FFOORRMMAATTIIOONN EETT AACCTTIIOONNSS DDEE PPRREEVVEENNTTIIOONN DDUU TTAABBAAGGIISSMMEE EENN EENNTTRREEPPRRIISSEE

Dans le cadre du Programme régional de prévention du tabagisme en PACA, financé par l’INPES, la Mutualité Française PACA forme et met en œuvre, depuis 2005, des actions de prévention du tabagisme en entreprise.

Les objectifs spécifiques de l’action : � Former des acteurs de prévention du tabagisme en entreprises en s’appuyant notamment sur

leurs mutuelles � Intervenir au sein de l’entreprise à l’aide d’acteurs formés, en partenariat avec la médecine

du travail, le CHSCT, la DRH Les 6 unions départementales de la Mutualité Française PACA, des Mutuelles Interprofessionnelles, de Fonctionnaires et des entreprises participent à ce programme :

Première phase

Les unions départementales de la Mutualité Française mobilisent des mutuelles et des entreprises (repérage, rencontre des mutuelles et entreprises volontaires afin de déterminer motivations, faisabilité du projet…)

Deuxième phase

Deux formations de 3 jours sont organisées pour les représentants des mutuelles et des entreprises volontaires. En 2005, près de 25 représentants sont formés.

Troisième phase

Avec le soutien méthodologique et technique des responsables de l’Activité de Prévention et de Promotion de la santé des unions départementales de la Mutualité Française, les représentants des mutuelles et des entreprises formées mettent en œuvre les actions de prévention en entreprise (aide à la méthodologie de projet et au maintien de sa dynamique, à la recherche de financeurs...)

Les projets émergents portent sur 2 axes : � L’application de la Loi dans l’entreprise � L’aide au sevrage tabagique

LL’’aapppplliiccaattiioonn ddee llaa llooii ddaannss ll’’eennttrreepprriissee a concerné près de 5000 salariés dans 34 entreprises et 8 promoteurs partenaires : - Affichage « entreprise sans tabac » et/ou lettres d’information aux salariés - Mise en place d’espaces fumeurs - Chartre d’utilisation des véhicules de service LL’’aaiiddee aauu sseevvrraaggee ttaabbaaggiiqquuee s’est organisé de la manière suivante : - Réunion d’information sur les risques tabagiques, sur les méthodes et l’accompagnement au sevrage dans l’entreprise - Orientation vers le N° Tabac Info Service - Distribution d’outils de prévention pour le personnel des Établissements publics de santé de la région - Journée d’information auprès d’établissements publics de santé de la région PACA Cette action a été intégrée au programme régional santé et travail de la région PACA.

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Auteurs : Claire DESACHE, Christine LAVOGIEZ (avec la contribution du comité de pilotage régional)

Dans le cadre du Plan de mobilisation nationale contre le cancer (appel à projets INPES Tabac/Alcool), les CODES de la région Centre mettent en œuvre le projet « Tabac et milieu du Travail en région Centre » depuis décembre 2003.

OBJECTIFS : Objectif général : contribuer au développement des démarches de préven tion concernant le tabagisme en milieu du travail dans la région Centre . Objectifs opérationnels :

� Former 200 professionnels de la médecine du travail entre janvier 2004 et décembre 2006 � Sensibiliser le personnel de direction et les membres des CHSCT ou à défaut les représentants du

personnel, les travailleurs sociaux, … de 30 établissements de la région répartis sur les 6 départements � Faire bénéficier d’actions d’éducation pour la santé, au moins 30 % des salariés de 30 établissements.

MISE EN ŒUVRE DE L’EVALUATION : méthodologie commune d’évaluation. Avec le partenariat de l’Observatoire Régional de la Santé (ORS) du Centre, un sous-groupe de travail régional a élaboré le cahier des charges : objectifs, méthodes (critères, indicateurs, outils), organisation, répartition des tâches et calendrier. Evaluation du processus : - Evaluation de la légitimité du projet et des actions à entreprendre, recherche et consolidation du partenariat. - Pour le pilotage : schémas organisationnels régional et départemental pour une meilleure visibilité. - Pour le comité de pilotage régional et chaque comité départemental : carnet de bord et fiche commune d’état des lieux de chaque entreprise. Evaluation des résultats : outils élaborés pour chaque objectif opérationnel. - formation : questionnaires avant, de satisfaction immédiate et à 6 mois. - sensibilisation : questionnaire de satisfaction immédiate, questionnaire destiné à la personne ressource et entretien semi-directif qualitatif 3 mois après la sensibilisation. - actions d’éducation pour la santé : questionnaires avant l’action, de satisfaction immédiate et à 6 mois.

INTERPRETATIONS DES PREMIERS RESULTATS APRES 3 ANNEES DE MISE EN OEUVRE : Une évaluation de l’objectif de formation des professionnels de la médecine du travail a été réalisée : l’objectif n’est atteint qu’au deux tiers (objectif trop ambitieux, autres formations organisées, …). L’évaluation révèle : - une satisfaction générale et globale des professionnels formés ouvrant sur une demande de formation à distance, - une meilleure efficience dans l’accompagnement des salariés. L’évaluation étant en cours, la synthèse finale des résultats ne sera disponible qu’en 2007.

PERSPECTIVES : poursuite du projet en 2007.

Différents points de l’évaluation déjà mis en œuvre vont être développés.

Tabac et Milieu du travail en région Centre - Evaluation 2003-2006

INSTANCES de SUIVI : Comité de pilotage régional : 6 CODES de la région Centre (coordination du projet assurée par le CESEL), DRASS, DRTEFP, URCAM, ORS Centre, Médecine du travail �définit les orientations et en élabore la méthodologie Comité de pilotage départemental : composition variable selon les départements �garantit la mise en œuvre du projet. Comité de suivi intra-entreprise : infirmière du travail, membres de la direction, membres du CHSCT, membres du CE … �mène une réflexion autour de la mise en place de l’action et assure sa réalisation.

Contact : Claire DESACHÉ – CESEL 34 Rue du Dr Maunoury 28 018 CHARTRES – 02 37 30 32 66 – [email protected]

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Sitographie

• www.tabac.gouv.fr, site du gouvernement consacré à l’interdiction. Toutes les informations concernant le décret n°2006-1386 du 15 novembre 2006 fixant les conditions d’application de l’interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif y sont répertoriées. • www.inpes.sante.fr, différents outils et documents ressources sur la thématique tabac y sont mis à disposition du public. Dans la rubrique « le catalogue », en sélectionnant la thématique tabac, 33 outils et documents classés par public sont proposés aux acteurs et au grand public pour en savoir plus ou encore pour servir de support dans le montage de projets d’éducation pour la santé.

• www.fnes.fr, site de la Fédération nationale des comités d’éducation pour la santé.

• http://eduscol.education.fr/D0190/accueil.htm, pages consacrées à la prévention des conduites addictives en milieu scolaire, différents outils de prévention y sont notamment proposés.

• http://www.ofdt.fr/ofdtdev/live/publi.html, site des publications de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies.

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Annexe

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Coordonnées des intervenants

Nom-prénom Titre Organisme Adresse Tél/E-mail

Bissette Emilie Chargée de projet CRESIF 14, rue Lafayette 75009 Paris

01.48.24.38.00 [email protected]

Boggio Yann Politologue Cabinet ADSAN 59, route des Jeunes 1227 Carouge SUISSE

0041.22.30.05.192 [email protected]

Bouha Hayette Chargée de projet Codes 42 26, av. de Verdun 42000 Saint-Etienne

04.77.32.59.48 [email protected]

Bruyère Ingrid Chargée de projet Codes 42 26, av. de Verdun 42000 Saint-Etienne

04.77.32.59.48 [email protected]

Bury Jacques Directeur du cabinet ADSAN

Cabinet ADSAN 59, route des Jeunes 1227 Carouge SUISSE

0041.22.30.05.192 [email protected]

Celle Christine Infirmière Lycée Professionnel Pierre Bérégovoy Site Fourchambault

56, rue Gambetta 58600 Fourchambault

03.86.90.91.20

Diaz Gomez Cristina OFDT 3, av. du Stade de France 93218 Saint-Denis La plaine Cedex

01.41.62.77.36 [email protected]

Guyon Louise

Coordinatrice adjointe à la recherche Scientifique INSPQ

Institut National de Santé Publique du Québec

190, bd Crémazie Est H2P 1E2 Montréal QUEBEC

www.inspq.qc.ca

Karsenty Serge Sociologue CNRS 21, bd Gaston Doumergue BP 76235 44262 Nantes Cedex 2

02 40 20 65 34

Konopinski Laurent Directeur AFPRA AFPRA 7, bis rue des Franciscains 68100 Mulhouse

03.89.56.90.80 [email protected]

Colloque « Prévention du tabagisme : agir au plus près des populations » 89

Lasnel Anne Infirmière Education Nationale Cité scolaire du Pré

355, rue Charles Ragney 39000 Lons-le-Saunier

03.84.45.77.58 [email protected]

Morel Florence Psychologue Centre médico-psychologique – CHU Action Liber Tabac

Rue Montalembert BP 69 63003 Clermont Ferrand Cedex 1

04.70.75.20.71 [email protected]

Paugam Régine Infirmière Conseiller Technique

Inspection Académique du Finistère

1, bd du Finistère 29558 Quimper

02.98.64.15.22 [email protected]

Persiani Marie Chargée de projet Codes 57 20, rue Gambetta BP 30273 57006 Metz Cedex

03.87.68.01.02 [email protected]

Rochu Angélique Consultante Tabacologie

ANPAA 58 15, rue du Moulin d’écorce 58000 Nevers

03.86.61.56.89 [email protected]

Rosetto Anne-Marie Inspection SVT Académie de Versailles

06.70.77.72.91 [email protected]

Rougier Jonathan Pyschologue Centre médico-psychologique – CHU Action Liber Tabac

Rue Montalembert BP 69 63003 Clermont Ferrand Cedex 1

04.70.75.20.71 [email protected]

Servanton Christine Chargée de projet Cres Champagne Ardenne

45, av. du Général de Gaulle 51000 Châlons-en-Champagne

03.26.68.28.06 [email protected]

Stankiewicz Marie-France

Infirmière Entreprise Lecico France

Testard Delphine Responsable développement projet

ECLAT

235, av. de la Recherche Parc Eurasanté BP 86 59373 Loos Cedex

03.20.21.06.65 [email protected]