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COMMENT ÉVALUER UN COLLABORATEUR Deuxième édition www.editions-organisation.com www.apec.fr Nadia Aubin © Éditions d’Organisation, 2002, 2004 © Éditions APEC, 2002, 2004 ISBN : 2-7081-3141-9

COMMENT ÉVALUER UN COLLABORATEUR - … · COMMENT ÉVALUER UN COLLABORATEUR T ous les grands groupes ont réfléchi à la question de ... moment privilégié pour formuler ses souhaits

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COMMENTÉVALUER UN

COLLABORATEUR

Deuxième édition

www.editions-organisation.com www.apec.fr

Nadia Aubin

© Éditions d’Organisation, 2002, 2004© Éditions APEC, 2002, 2004

ISBN: 2-7081-3141-9

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OÙ EN EST-ON?

1Chapitre

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Évaluation: les optimistes y voient autantd’occasions d’exprimer leurs désirs d’évolutionou voir récompenser leur investissementpersonnel. Les pessimistes, eux, tremblent:devront-ils réviser à la baisse leurs prétentionssalariales? L’alternative n’est pas aussi simplecar l’enjeu est de taille. Mais c’est un fait :aujourd’hui on vous évalue à tous les niveaux devotre vie professionnelle: lors d’un recrutement,chaque année lors de l’entretien, de manièreinformelle… Bref, être jugé est devenu unpassage obligé: des grands groupes, oùl’évaluation est un basic de la fonctionressources humaines, jusqu’aux PME qui leuremboîtent le pas. Même si, pour ces dernières, il reste du chemin à parcourir.

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Tous les grands groupes ont réfléchi à la question del’évaluation et mis en place des outils…», observeFrançois Humblot, membre du Syntec et dirigeant deHumblot-Grant Alexander, un cabinet spécialisé dans

le recrutement et la mobilité interne. Si dans les années 80 etmême au début des années 90, une entreprise sur deux ne s’étaitpas réellement penchée sur la question de l’évaluation, aujour-d’hui, sauf dans les petites et moyennes entreprises où beau-coup reste à faire, la situation a bien changé! En effet, nousavons tous, ou presque, entendu parler du «redoutable» entre-tien annuel d’appréciation, encore considéré comme une bêtenoire, même par les plus rompus à l’exercice. Ceux qui s’y sontfrottés n’ont pas été épargnés par le trac! Mais les méthodesd’évaluation ne se limitent pas à ce rendez-vous institution-nalisé. Loin de là. Les occasions de «passer sur le grill» d’une manière formelle ou informelle ne manquent pas. Lorsd’une opération de recrutement, par exemple, dans le cadre del’entretien et de la batterie de tests qui souvent l’accompagnent.Lors de la période d’essai, temps d’observation réciproque mais

LA RECONNAISSANCED’UN CAPITALHUMAIN

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positif pour les deux partenaires s’ils savent en tirer profit. Puis,une fois l’engagement scellé, le cadre, plus que tout autre sala-rié est sous-pesé, scruté, examiné, sondé. Pour baliser étroite-ment son travail ? Sans doute. Mais surtout parce quel’évaluation sert d’abord d’aiguillon à sa mobilité ascendante oulatérale. Pour les «évalués», ces moments ne figureront jamaisau «top cinq» des moments les plus agréables ou les plus facilesde leur vie professionnelle. Mais pour l’évaluateur l’enjeu n’estpas non plus des moindres: savoir gérer et développer les res-sources humaines de l’entreprise est devenu «un avantageconcurrentiel certain» et «un projet stratégique majeur.», consi-dèrent les professionnels des ressources humaines interrogéspar le cabinet de conseil en ressources humaines Aster(1).

L’ É M E R G E N C E D E L A N O T I O N ID E « C A P I TA L H U M A I N » I

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les notions de «capitalhumain» et d’éthique investissent progressivement les rap-ports d’activité de certains grands groupes. Le groupe Suez(173000 collaborateurs dans plus de 100 pays), dont les troismétiers mondiaux sont l’énergie, l’eau et la propreté, soulignedans son rapport annuel 2000, son engagement pour le «déve-loppement durable» comme projet de société devant aboutir à«concilier les dimensions économiques, sociales et environne-mentales.» Chez Würth, le leader mondial de la fixation pro-fessionnelle, un groupe actif dans 76 pays au travers de ses 236sociétés, c’est le capital humain qui est pourvoyeur de valeurajoutée. Il faut à tout moment, le motiver, le fidéliser et déve-

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(1) Entreprise et Carrières. 10-16 juillet 2001. Aster, cabinet deconseil et d’ingénierie en ressources humaines a réalisé cetteenquête auprès de 60 entreprises, en mai 2001.

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lopper ses compétences. En effet, sur les 2350 salariés quecompte le groupe en France, on recense 1650 commerciaux –un chiffre impressionnant. Cette force de vente démarchechaque année 150000 patrons de PME-PMI, d’artisans, plom-biers, électriciens, garagistes… dans un périmètre de cinquanteà quatre-vingts kilomètres autour de leur domicile, pour pré-server la proximité avec le client et… la vie familiale! Tous cescollaborateurs «méritent respect et considération. Et notam-ment reconnaissance.», explique Reinhold Würth, le présidentdu comité consultatif du groupe. Aussi l’entreprise les sonde-t-elle régulièrement: sont-ils satisfaits de l’emploi qu’ils exer-

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Francis Leclerc, Dg en management de transition chez Boyden Interim Executive:

«Discuter de résultats.»“«Chacun évalue ses collaborateurs et est, à son tour, évalué par sa hié-

rarchie… Une évaluation n’a d’intérêt que lorsque l’on a établi, au préalable

et avec ses supérieurs, une base d’objectifs à atteindre. C’est, en effet, sur

l’établissement d’un certain nombre de critères de performance (écono-

miques, qualitatifs, comportementaux) que l’on est en mesure, avec la

direction, d’analyser le travail accompli. Toute l’utilité de l’entretien d’éva-

luation, c’est de se retrouver face à son supérieur hiérarchique en discu-

tant des résultats. Pendant une ou deux heures, on s’extrait du quotidien

et l’on travaille sur un certain nombre de points que l’on n’a pas eu le

temps d’approfondir durant l’année. De plus, l’entretien offre à chacune

des parties, la chance d’expliquer sa position. Bref, il permet de mieux

débattre et de préparer l’avenir avec de nouveaux moyens. C’est un bilan

du comportement professionnel de l’individu par rapport à ses objectifs

professionnels, s’inscrivant dans une démarche positive».

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cent, des prestations sociales que leur entreprise leur offre, sesentent-ils motivés…? Le rythme fréquent des évaluations(hebdomadaire, mensuel, semestriel, annuel) du moins pourles commerciaux, permet de soulever toutes sortes de ques-tions et d’y apporter une réponse. Par la formation parexemple. Ou la promotion interne. «Bien sûr, lors de ces ren-contres, nous abordons la question du salaire. Mais nous insis-tons, plus particulièrement, sur les aptitudes professionnelles etsur l’identification des besoins en formation du salarié, expliqueLuc Greth, DRH. «L’entretien de développement» est unmoment privilégié pour formuler ses souhaits d’évolution ver-ticale ou transversale. Exemple: passer d’un poste de commer-cial vers le marketing.»

D É V E L O P P E R L E S R E S S O U R C E S H U M A I N E S IP O U R R E S T E R C O M P É T I T I F I

Sodexho, par exemple, le numéro 1 mondial de la restaura-tion collective, fonde sa réussite sur la valeur de ses collabora-teurs. «Les femmes et les hommes sont la grande force deSodexho.», ne cesse de répéter Pierre Bellon, le P-dg du groupecréé en 1966. Un credo largement repris, avec force conviction,par l’encadrement. Le groupe se donne pour – vaste et ambi-tieuse – mission de développer à tous les niveaux l’initiative etl’esprit d’entreprise; de perfectionner ses collaborateurs par laformation et l’apprentissage; de les motiver, les associer auxperformances de l’entreprise; d’identifier les compétences, dedétecter les jeunes à potentiel, de promouvoir les meilleurs etde faire émerger de nouveaux entrepreneurs. Au cours du ren-dez-vous annuel d’appréciation, les cadres sont invités à expo-ser les actions qu’ils ont mises en œuvre pour réaliser cesobjectifs. «Le développement des ressources humaines est notre

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principal avantage compétitif.», insiste Pierre Bellon. La direc-tion des ressources humaines de Sodexho, analyse d’ailleurs

avec la plus grande attention, la totalité desentretiens annuels d’appréciation des cadresqu’elle sait riches d’informations sur lesaptitudes (humaines) de l’entreprise à pous-ser plus loin sa croissance. Un autre géant,de la photo celui-là, Kodak, s’appuie, luiaussi, sur l’évaluation des performances de

ses salariés cadres et non-cadres pour ajuster les compétencesà sa stratégie globale. De son côté, EDF a dû perfectionner sesoutils d’évaluation de ses cadres et agents, lorsque de mono-pole français de service public, il est devenu entreprise concur-rentielle européenne. Face à la multiplicité des enjeux quireposent désormais sur l’évaluation, les entreprises se devaientdonc de dépasser le stade de l’exercice annuel pour entrer dansl’ère des politiques d’évaluation chargées de stratégies et dotéesd’outils sophistiqués. Même si la bonne vieille méthode quiconsiste à observer «en cachette» ou d’une manière infor-melle, est loin d’être révolue!

Observer encachette...

une méthode quimarche toujours.

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Habitué à jouer le rôle de l’évaluateur (l’une des mis-sions de tout manager), le cadre rechigne à franchir labarrière pour rejoindre, son tour venu, la cohorte des«évalués». Pourquoi ne craindrait-il pas, lui aussi, de

devoir vivre une remise en cause douloureuse, malaise parfoisamplifié par la peur d’être noté «à la tête du client»? Aussi,qu’elle soit l’affaire de deux ou de plusieurs partenaires, l’éva-luation exige un savoir-faire conforté par un minimum de pra-tique. Ne serait-ce que pour éviter que le face à face d’unentretien ne vire au règlement de comptes: il est parfois diffi-cile pour l’évalué comme pour l’évaluateur, qui se côtoientdans l’entreprise à longueur d’année, de s’apprécier sans uneonce de subjectivité. Conscientes de la difficulté d’une évalua-tion objective, sans préjugés, comme du danger de confier lamesure des performances (y compris les performances com-

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LES CADRES N’AIMENT PAS VRAIMENT ÊTRE ÉVALUÉS

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portementales) à des non-initiés, les directions des ressourceshumaines sont de plus en plus nombreuses à former leurs hié-rarchiques aux techniques d’entretien de recrutement et d’en-tretien annuel d’appréciation (importance de l’environnement,questions à poser et à proscrire, attitude à adopter, manière deconclure l’entretien…). Une pratique à encourager et quidevrait d’ailleurs être proposée à «l’ensemble des personnelsconcernés par l’évaluation: les évaluateurs pour leur apprendreà mener ce type d’entretien bien particulier; les évalués pour lesaider dans leur préparation. Notamment sur la manière deconcevoir et présenter de futurs objectifs.», conseille Jean-LucOlivaux, consultant et animateur des bilans «Perspectives» del’Apec.

P A S I N C O M P É T E N T , IM A I S P A S À L A B O N N E P L A C E I

Pour vaincre les préjugés et rétablir une certaine confiance deleurs salariés, certaines entreprises vont jusqu’à éliminer com-plètement le mot évaluation de leur vocabulaire. Par exemple,comme c’est le cas chez Würth, en rebaptisant «entretien dedéveloppement» le classique entretien annuel. Würth espèreainsi fixer les esprits sur «les axes de progrès». EDF parle«d’appréciation des performances» avec, pour objectif, dedéboucher sur un plan de formation et/ou de nouvelles pers-pectives de carrière. Socomec, fabricant d’interrupteurs indus-triels et d’onduleurs a choisi « l’entretien professionnelindividualisé» diminuant ainsi le risque de toute référence auxjugements personnels et à l’idée de sanction du juge. Ce quin’est aucunement son but comme on le rappelle chez Sodexho:«L’évaluation permet de dire qu’un salarié n’est pas forcémentincompétent, mais qu’il n’est pas à la bonne place.» Reste qu’un

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collaborateur régulièrement évalué comme non performantpeut, un jour ou l’autre, être «invité» à quitter son entreprise:«Mieux vaut un départ bien géré qu’une mise au placard oùl’on perd de sa valeur professionnelle et de son employabilité,répond François Humblot. Mais il n’est pas bon de lier direc-tement le départ d’un salarié à l’évaluation. Ce n’est pas sonbut!»

Pour s’être maintes fois prêté au jeu, tantôt comme évalua-teur, tantôt comme évalué, Olivier S., cadre dans le secteurénergétique, pense qu’une évaluation peut s’effectuer – et seterminer – plus ou moins bien, selon la personnalité de celuiqui la conduit. Si la personnalité de l’évaluateur est «très struc-turée», l’appréciation se fondera sur une trame très élaborée.Dans le cas contraire, elle se fera «au fil del’eau», confie-t-il avec malice. Ce qui n’estni un bon indicateur du degré de maîtrise del’exercice, ni des prolongements attendusou espérés par l’évalué. Olivier S. sait dequoi il parle: il a connu différentes versions de la «grande ren-contre annuelle» du N avec son N + 1. Un face à face durantlequel on dresse le bilan du travail accompli, avant de concluresur la liste des objectifs au programme de l’année à venir. Trèsréservé sur l’ensemble de ces techniques, Olivier S. ne trouveguère matière, non plus, à se rassurer avec le déjà fameux 360°qui expose au jugement des collaborateurs, des subordonnés,des supérieurs hiérarchiques, des clients, des fournisseurs:«Un vrai casse-gueule qui sollicite l’avis d’un grand nombre depersonnes et de n’importe qui!», commente-t-il.

Le regard de Patricia Mabilleau, aujourd’hui Ingénieur d’af-faires, chez Laser Com SA est plus serein. Cette ancienne deRank Xerox (elle y a gravi les échelons avec pour seul bagage,

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Gare aux évaluations au fil de l’eau !

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un BTS d’informatique) a vécu «positivement» le passageobligé par une série de tests psychotechniques, à chaque nou-velle étape de son ascension professionnelle. Y compris cefameux assessment center qui devait valider (ou infirmer) sonaptitude à encadrer une quinzaine de technico-commerciaux.Patricia n’est pas du genre à craindre l’épreuve du miroir. Elleregrette seulement cette difficulté «typique de la mentalitéfrançaise» à dire les choses en face. Elle se souvient encore dece technicien en informatique qui croyait fermement à sareconversion dans le métier de commercial, parce qu’il l’avaittoujours demandée et n’avait jamais rencontré la moindreobjection de la bouche de ses évaluateurs…

Q U A N D I L FA U T E N T R E R D A N S D E S C A S E S I

Jean G., non plus, ne supporte pas «l’hypocrisie» de certainséchanges à fleuret moucheté. Cadre supérieur, habitué à unecertaine proximité avec la hiérarchie qui caractérise la PME, ils’est retrouvé relégué à l’arrière banc des nombreux salariés dutroisième gazier mondial, suite au rachat de son entreprise.Résultat : une marge de manœuvre sur le terrain considérable-ment rétrécie, un budget rogné et des prises de décisions sou-mises à l’approbation de plusieurs supérieurs hiérarchiques!Pas facile d’obtempérer et de se laisser passer «le fil à la patte»quand on a longtemps fonctionné en électron libre. Difficile,également, de changer du jour au lendemain des réflexes pro-fessionnels acquis de longue date. Le rappel à l’ordre est vitearrivé: convié à un entretien d’évaluation, Jean G. le termineraen claquant la porte «parce qu’on m’expliquait qu’il fallaitdésormais entrer dans des cases»… Jean a préféré devenir (ourester) son propre patron en créant sa petite entreprise.

Cette peur de «la dictature des cases» prévaut également

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chez tous ceux qui ont pâti de la vogue de la gestuologie, lapsychomorphologie, la numérologie, l’astrologie et autresméthodes, inspirées, pour la plupart, par la voix de l’irration-nel. Fort heureusement, au fur et à mesure qu’elle s’affirmedans les entreprises, l’évaluation élabore son code de déonto-logie. L’entretien, quant à lui, reste l’outil privilégié. D’autrestechniques, en revanche, comme le 360° et l’assessment centersont très utilisées par les entreprises. Christian Balicco(1) quin’hésite pas à qualifier l’assessment center de «Rolls de l’éva-luation», explique le succès de ces trois méthodes par la mul-tiplicité des critères qu’elles convoquent et pour leur capacitéà augmenter le degré de fiabilité et de précision de l’évaluation.Un assessment center, par exemple, est réalisé en relationétroite avec les caractéristiques du poste de travail. Les exer-cices sont centrés sur l’observation et l’évaluation du compor-tement dans des situations proches de la réalitéprofessionnelle.

(1) Christian Balicco. Docteur en psychologie et consultant enRessources Humaines et auteur de : « Les méthodes d’évaluationen ressources humaines. La fin des marchands de certitudes »,2002, Éditions d’Organisation.

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Idéalement, l’existence de techniques reconnues comme le360° ou l’assessment, devrait permettre à toutes les entre-prises, grandes, moyennes et petites, de pratiquer l’évalua-tion de la même manière. Une vision pourtant qualifiée de

«purement idéale», par Nathalie Loux, consultant internatio-nal pour Franklin Covey, le numéro 1 en management et lea-dership aux USA. Et, si l’on en croit François Humblot, pourlequel «Tout reste à faire dans les PME!», on est encore loind’une possible uniformité des pratiques. Comment cela serait-il d’ailleurs possible? Rien que pour le traditionnel entretienannuel d’appréciation, on sait que tous les évaluateurs ne sontpas formés à l’usage de l’outil, que sa philosophie est diverse-ment appréciée, que les grilles d’évaluation peuvent se révélerinappropriées… Salaire et prime dictent parfois l’ordre du jourau lieu d’élargir l’entretien aux aspects qualitatifs tels que le

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UNE POSSIBLE UNIFORMITÉ DES PRATIQUESD’ÉVALUATION?

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degré d’intégration dans l’entreprise, les besoins en formationou les souhaits d’évolution.

Mais il est vrai, aussi, que les questions de mobilité horizon-tale ou verticale se posent différemment selon que l’on travailledans une petite ou une grande entreprise dans laquelle les pers-pectives d’évolution professionnelle et salariale sont générale-ment connues à l’avance. Autre handicap de la PME (quiconserve, par ailleurs, les atouts qui lui sont traditionnellementreconnus: polyvalence des postes, proximité du terrain et plusgrande clarté des missions…) : elle manque de temps et demoyens à consacrer au management. Le DRH, est souvent lechef d’entreprise lui-même, trop absorbépar la gestion quotidienne. Comme leregrettent la plupart des concernés: «Nousavons le nez dans le guidon, tout le temps.»Ce qui ne signifie pas que l’évaluation soitinexistante. Non. Mais elle se fait de manière plus informelle,au feeling, sur des critères jugés, un temps donné, fondamen-taux pour la vie de l’entreprise: le nombre d’absences pourcongés maladie, la propension à proposer des idées pourrésoudre les problèmes, à effectuer des missions non prévuesdans le contrat de travail, le comportement coopératif oufermé au groupe, l’affinité avec le hiérarchique…!

La start-up, elle, fait figure de marginale. Il y est fréquentd’accéder rapidement à de hautes responsabilités en dépit del’absence de règles d’évaluation et d’évolution des salariés. Unchef de projet peut devenir responsable marketing en moinsd’un an. Et réactivité oblige, les équipes se construisent etdurent le temps d’un projet. Non sans perdre quelques colla-borateurs en route. Mais les rescapés de la Nouvelle Écono-mie, ceux qui ont su résister à l’explosion de la bulle du Net,

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Dans les PME,l’évaluation estplus informelle.

Entretien ou bilan annuel individuel,

Entretien d’évaluation,

Entretien d’appréciation,

Entretien d’activité,

Entretien d’évaluation des perfor-

mances,

Entretien de développement,

Entretien de progrès,

Entretien professionnel personnalisé.

L’entretien d’évaluation s’appelle aussi:

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au printemps 2000, découvrent à leur tour l’importance desgrandes stratégies en même temps qu’ils renouent avec larigueur financière et même la rentabilité. Reprenant à leurcompte les modèles de la «vieille économie», les dirigeants destart-up se donnent les moyens de construire des modèlesd’organisation durables. Est-ce par hasard que, interrogés(1) surles facteurs qui pourraient entraîner l’échec de leur projet, ils évoquent à 77% (et bien avant la concurrence), les risquesliés à une gestion interne déficiente?

Q U A N D L E S S TA R T - U P D É C O U V R E N T IL E S R E S S O U R C E S H U M A I N E S I

Et les derniers chantres de l’aventure pure et dure, ris-quent tôt ou tard d’être rappelés à l’ordre par ces fameux«Venture Capitalists» (VC) qui ne concèdent plus à ouvrirles cordons de la bourse au premier business plan venu, sansune garantie réelle – et non virtuelle – d’un retour sur inves-tissements. Qui plus est, ces investisseurs épaulés par des

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(1) Étude réalisée par Zen Factory, la structure Netéconomie duGroupe Europe, cabinet conseil en management, à partir dumarché US et complétée par des entretiens avec quarante start-upfrançaises. 2001.

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cabinets conseils en management, s’immiscent désormaisdans la gestion de leurs jeunes pousses et y imposent larigueur du management : constitution de comités de direc-tion, planification des recrutements à l’international… cer-taines Dotcom à l’instar de Zebank, la banque virtuelle, quicompte comme actionnaires fondateurs le Groupe Arnaultet Dexia, ont recruté un directeur des ressources humaines.Et même «signé un accord sur les 35 heures», comme l’avaitannoncé fièrement, à l’automne 2001, Karen Altuzarra,directeur développement des ressources humaines, sur lesondes de BFM (et le site MediaRH). Alors que la banque enligne n’avait pas encore deux ans d’activité. D’autres(comme Asyrès) commencent même à instituer l’entretienannuel d’évaluation! Bref si toutes les directions de res-sources humaines n’ont, faute de moyens, mis en place desoutils d’évaluation sophistiqués, la nécessité de sonder, deconnaître… d’évaluer le capital humain ne fait plus de doutepour personne !

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Pratique

À lire : •• «« AApppprréécciieerr eett vvaalloorriisseerr lleess hhoommmmeess »»,, parPierre Caspar et Jean-Guy Millet, 1995, 292 pages, Éditions Liaisons. 35,06 €•• «« LLeess tteessttss ddee rreeccrruutteemmeenntt àà llaa lloouuppee »»,, parM. Bernié et A. d’Aboville, 2000, 160 pages,Éditions d’Organisation. 9,30 €•• «« LL’’éévvaalluuaattiioonn ddeess eennttrreepprriisseess »»,, par Emma-nuel Tchemeni, 1998, 112 pages, Economica.7,47 €•• «« PPiilloottaaggee ddeess ccoommppéétteenncceess eett ddee llaa ffoorrmmaa--ttiioonn »»,, par Pierre Massot et Daniel Feistham-mel, 2001, 204 pages, Afnor. 39 €

Sites Internet :www.chez.com/recrutement/: site dédié auxoutils de recrutements et d’évaluation.www.salaireonline.com : sur ce site d’offresd’emplois et de stages, vous trouverez unerubrique consacrée à l’évaluation de la rému-nération.www.competencespro.com/: site dédié à l’éva-luation et à la gestion des compétences.

Qui peut vous aider ?Pour aider les entreprises à optimiser leur poli-tique d’évaluation, l’Apec organise dans le cadrede ses sessions «Perspectives», des formationsde une à trois journées. Elles sont destinées auxmanagers pour bien conduire leurs entretiens etles aider à définir les critères mesurables d’éva-luation spécifiques.www.recruteurs.apec.fr

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Les entreprises utilisent des méthodes d’évaluation dessalariés, dans le cadre du recrutement, de la mobilité, dudéveloppement… êtes-vous prêt à être évalué?

1/ Quelles sont les méthodes d’évaluation les plus fiables?a) l’entretien................................................................................ ❏

b) la graphologie ........................................................................ ❏

c) les tests d’aptitude ................................................................ ❏

d) l’astrologie .............................................................................. ❏

e) les questionnaires de personnalité, comme le 360° .......... ❏

f) les mises en situation ............................................................ ❏

2/ Quels sont les critères auxquels ces méthodes doiventrépondre?

a) fidélité...................................................................................... ❏

b) praticité .................................................................................. ❏

c) rapidité .................................................................................... ❏

d) validité .................................................................................... ❏

> ÊTES-VOUS PRÊT À ÊTRE ÉVALUÉ?(1)

ENTRAÎNEMENT

(1) Questionnaire publié par Courrier Cadres

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3) Comment vérifier qu’une méthode répond à ces critères?a) en lisant la presse grand public ............................................ ❏

b) en contactant l’entreprise qui la commercialise.................. ❏

c) en demandant des articles parus dans des revues scientifiques .......................................................................... ❏

d) grâce aux livres de vulgarisation .......................................... ❏

4) À quoi servent les méthodes d’évaluation?a) à développer les personnes .................................................. ❏

b) à exclure.................................................................................. ❏

c) à cataloguer ............................................................................ ❏

d) à orienter ................................................................................ ❏

5) Que puis-je attendre en retour de mon évaluateur?a) rien .......................................................................................... ❏

b) ses remerciements ................................................................ ❏

c) une restitution détaillée de mes résultats............................ ❏

d) un retour d’information.......................................................... ❏

6) Comment fait-on pour mesurer le degré de mes caractéristiqueslorsque l’on me soumet à une méthode d’évaluation objective?

a) cela se voit .............................................................................. ❏

b) on me compare à d’autres personnes.................................. ❏

c) l’évaluateur s’y connaît .......................................................... ❏

7) Lors d’un questionnaire de personnalité ou d’un test d’apti-tude, ai-je intérêt à jouer le jeu?

a) oui ............................................................................................ ❏

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b) non .......................................................................................... ❏

c) sans importance .................................................................... ❏

8) Lors d’une évaluation, est-ce que je ne risque pas d’être cata-logué?

a) oui, car je suis jugé sur des résultats et des notes ............ ❏

b) non, car un ensemble d’indicateurs, les méthodes objectives entre autres nuancent et affinent le point de vue del’évaluateur .................................................................................. ❏

9) Sous quel angle cherche-t-on à m’évaluer?a) psychologique ........................................................................ ❏

b) professionnel .......................................................................... ❏

c) sous tous les angles, plus on me connaît mieux c’est ........ ❏

10) Dans le cadre d’un recrutement ou d’une mobilité interne,quel rapport existe-t-il entre mon évaluation et la fonction que jedois occuper?

a) Aucun. L’entreprise cherche seulement à me connaître .... ❏

b) Ma personnalité, mes motivations et mes aptitudes intéres-sent l’entreprise, quelle que soit ma fonction.......................... ❏

c) Une définition de fonction précise permet de savoir quellescaractéristiques l’entreprise attend de moi ............................ ❏

11) Les méthodes objectives d’évaluation:a) ne sont pas fiables à 100%.................................................... ❏

b) sont fiables à 100%................................................................ ❏

c) elles ont une meilleure fiabilité que la plupart des autresméthodes .................................................................................... ❏

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RÉPONSES1/ c), e) et f)

Les tests d’aptitudes, les questionnaires de personnalité et lesmises en situation sont parmi les méthodes les plus utilisées.

Elles répondent à des critères objectifs et quantifiables.

2/ a) et d)Pour être efficace, une évaluation doit être pérenne.En clair, le même test doit être effectué sur le même échantillon

de personnes, à intervalles réguliers.

3/ b) et c)Toute entreprise qui conçoit et commercialise des tests doit

publier les résultats de ses recherches dans des revues spéciali-sées en psychologie et, dans des manuels d’aide à l’utilisation destests et questionnaires.

4/ a), c) et d)Mais d’autres réponses sont également possibles. Une entre-

prise peut utiliser des méthodes pour recruter.L’objectif est toujours de valoriser et non de sanctionner.

5/ c) et d)L’évaluateur doit restituer et expliquer les résultats de votre éva-

luation, dans le cas d’un questionnaire ou d’un test, ou vous faireune synthèse s’il s’agit d’un entretien.

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6/ b)Les méthodes objectives mesurent des caractéristiques indivi-

duelles en comparaison à une population de référence. La parti-cularité d’une personne n’a de sens que comparée aucomportement des autres.

7/ a)Dans un questionnaire de personnalité, il n’y a pas de bonnes ou

de mauvaises réponses. Dans le cas d’un test d’aptitude, la sanc-tion sera immédiate, puisque les réponses sont bonnes oufausses. Une mauvaise prestation pénalise le candidat.

8/ b)C’est le travail d’un professionnel que d’analyser des résultats.

Pour cette raison notamment, les méthodes objectives nécessi-tent une formation.

9/ b)Dans l’entreprise, seuls les critères professionnels doivent inté-

resser l’évaluateur.

10/ c)Une entreprise doit s’attacher à évaluer ce qui est important

pour le poste.

11/ a) et c)La validité des méthodes d’évaluation ne dépasse pas 60%. Ces

méthodes aident surtout à réduire les risques inhérents à l’éva-luation des personnes.