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Comment maintenir et restaurer un état d’hydratation normal chez le petit enfant Antoine STRZELECKI DESC réanimation Juin 09

Comment maintenir et restaurer un état d’hydratation ... · Les besoins hydriques de maintenance sont fonction de la dépense énergétique. initialement exprimés en fonction

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Comment maintenir et restaurer un état d’hydratation normal chez le petit enfant

Antoine STRZELECKIDESC réanimation

Juin 09

Plan

1) Particularités physiologiques de l’enfant2) Besoins hydriques de maintenance3) Hydratation : méthodes4) Prise en charge des déshydratations

Particularités physiologiques de l’enfant

• Compartiments hydriques:

Shoemaker WC. Crit Care Medecine 1982;3

• Renouvellement des liquides (turnover)

beaucoup plus rapide que chez l’adulte 25%/heure à la naissance contre 6%/heure chez l’adulte

• Immaturité rénale

défaut de concentration des urines (inefficacité pompes Cl )diminution des capacités d’adaptation

• Dépendance vis-à-vis de l’entourage

besoins élevés+

turnover rapide+

immaturité rénale+

dépendance=

risque de déshydratation important

Besoins hydriques de maintenance

Le maintien d’une hydratation normale exigeun équilibre entre entrées et sorties d’eau

Entrées d’eau: - essentiellement exogènes (aliments, boissons)- endogènes (combustion lipides, protides et glucides)

Sorties d’eau: -pertes insensibles quotidiennes (400ml/m²/j)-par les urines-par les selles

Sorties d’eau• Pertes insensibles: = 1/3 de l’arbre respiratoire

2/3 de l’évaporation transcutanée:fonction de la surface corporellevarient avec l’âge: + importantes chez le jeune enfant car rapport surf.

corporelle/poids 3 fois + élevé chez le nv né (0.06m²/kg) que chez l’adulte (0.02m²/kg)

La fièvre augmente de 12% les pertes insensibles (10 ml/kg/j par d° de fièvre au dessus de 38°C) Boineau FG, Lewy GE. Pediatr Clin North Am 1990;37

• Par les urines : fonction de la charge osmolaire :osmolalité urinaire entre 200 et 600 mOsm/kg H20 idéale car reflète l’absence

de travail important de concentration ou de dilution des urinesHolliday MA, Segar WE , Pediatrics 1957;19

• Par les selles: négligeables dans les conditions physiologiques

• Les besoins hydriques de maintenance sont fonction de la dépense énergétique

initialement exprimés en fonction du poids, de la taille, de l’âge ou de la surface corporelle Harris, Benedict, Carnegie Institue of Whashington, 1919

Approche simplifiée par Hollyday et Segar (1957) :besoins hydriques de maintenance en fonction uniquement du poids ( 1 ml d’eau perdu associé à la consommation d’1 Kcal)

Formule de Hollyday et Segar :

100ml/kg/j pour les 10 premiers kg50ml/kg/j pour les kg entre 10 et 2020ml/kg/j pour chq kg de poids dépassant 20 kg

Hydratation: méthodes

Pour hydrater un malade de manière appropriée, il faut satisfaire ses besoins de maintenance et compenser ses éventuelles pertes excessives

mise en doute de la pertinence des apports hydro-éléctrolytiques traditionnellement recommandés:

• Pour prévenir ces hyponatrémies de dilution, 2 approchent s’opposent:

-restriction des volumes liquidiens de maintenance-utilisation d’un soluté isotonique

1) –Révision à la baisse des apports hydriques traditionnellement recommandés pour assurer les besoins hydriques de maintenance:

a) la référence au poids plutôt qu’à la surface corporelle entraîne une surestimation des besoins hydriques et énergétiques

b) les besoins proposés par Hollyday et Segar sont dérivés de besoins énergitiques qui, pour la moitié, sont destinés à la croissance

c) les pertes insensibles d’origine respiratoire réduites de 80% chez le patient intubé et ventilé Sosulski R, Polin RA. J Pediatr 1983;103

d) méconnaissance des conditions de stimulation non osmotique de la sécrétion d’ADH, fréquentes dans de nombreuses

Le niveau de cette restriction reste discuté: 50 ou 75% des apports traditionnellement recommandés mais exceptions (lorsque risque d’hypoperfusion tissulaire)

Débuter le 1er jour par des apports hydriques de maintenance correspondant à 50 ou 75% du volume traditionnel calculé selon la formule de Hollyday et Segar

Les jours suivants, ajuster les apports en fonction de l’évolution clinique (oedèmes, signes de déshydratation, poids) et biologique (diurèse et densité urinaire, ionogramme sanguin et urinaire)

2) – Eviter de perfuser un soluté de maintenance trop hypotonique

. Plusieurs auteurs suggèrent d’utiliser un soluté salé isotonique (glucose 5% avec NaCl 0,9%) Moritz ML, Ayus JC. Pediatrics 2003;111

. Distinction entre osmolalité et tonicité des solutés de maintenance

Si le G5% ajouté n’a pas d’effet sur la tonicité du soluté, il est néanmoins indispensable pour le métabolisme cérébral et tout soluté de maintenance pédiatrique doit comporter du glucose

. Quel soluté utiliser?

3) – Remplacer les pertes excessives et répartir ce remplacement sur 24 h

En réanimation, il existe régulièrement des pertes importantes inhabituelles, dont la compensation doit être ajoutée aux besoins de maintenance:

-drains-pertes digestives anormales -polyurie

Ces compensations doivent tenir compte du débit et de la concentration électrolytique du type de liquide perdu:

3) – Remplacer les pertes excessives et répartir ce remplacement sur 24 h

Shwachman H. J Pediatr 1981

Besoins hydroéléctrolytiques de base:

- restriction (50 ou 75%) des apports traditionnellement recommandés

(le 1er jour puis à adapter selon l’évolution clinique et biologique)

- éviter les solutés trop hypotoniques

- remplacer les pertes excessives

Prise en charge des déshydratation

• La survenue d’une déshydratation dans un contexte de gastro- entérite reste une des principales causes de consultation aux urgences

• La diarrhée reste la première cause de mortalité infantile dans le monde et serait responsable de 21% des décès d’enfants de moins de 5 ans dans les pays en voie de développement. Kosek M. Bull World Health Organ 2003

• 200 à 300 décès/an chez l’enfant de moins de 1 an aux EUKilgore PE, Holman RC, et al. JAMA 1995

Méthode:

1) Patient instable:

-oxygénothérapie

-abord intra osseux si voie veineuse non rapidement disponible

-bolus de 20ml/kg de sérum salé isotonique ou de Ringer Lactate poussé à la seringue aussi vite que possible (American Academy of Pediatrics.1996) , à renouveler si besoin selon les signes vitaux (Fc, TA), l’état de conscience et le temps de recoloration cutanée

2) Patient stable ou stabilisé:

Evaluer la déshydratation un ensemble de signes cliniques permet le diagnostic:

-> extracellulaire: -yeux creux-fontanelle déprimée- pli cutané persistant-oligurie-absence de larme lors des pleurs-tachycardie-marbrures, temps de recoloration cutanée allongé

->intracellulaire: -soif-muqueuses sèches-hypotonie des globes oculaires-trouble de conscience

Altération état général, pâleur, yeux cernés

Evaluer la gravité

L’appréciation d’une déshydratation doit se fonder sur l’association de plusieurs de ces signes Friedman JN et al. J Pediatr 2004; 145

Steiner MJ et al. JAMA 2004; 291

Etude de Gorelick et al, (Pediatrics 1997;99):< 3 signes = hydratation normale ou deshydratation minime (<5%)

3–6 signes = déshydratation modérée (perte de poids de 5 à 9%) >6 signes = déshydratation grave (perte de poids >10%)

4 signes liés de façon indépendante à une déshydratation de 5% ou +:

TRC> 2s , sécheresse muqueuses, absence de larmes, altération de l’état général

2 signes = déshydratation modérée3-4 signes = déshydratation grave

Evaluation paraclinique initiale

les examens biologiques ne sont nécessaires ni au diagnostic ni à la conduite thérapeutique dans la majorité des cas

Armon K et al. Arch Dis Child 2001;85 American Academy of Pediatrics. Pediatrics 1996;97

les réserver aux déshydratations importantes, sans retarder le traitement

affirme le type de déshydratation: - isonatrémique (la plus fréquente)

- hyponatrémique- hypernatrémique (rare)

traitement

l’approche (1960-deficit therapy) privilégiant la voie veineuse est révolue

Privilégier une réhydratation par voie digestive Walker-Smith JA. J Pediatr Gastroenterol Nutr 1997;24 Murphy MS. Arch Dis Child

1998;79

Réhydratation IV : - état de choc- déshydratation > 10%- CI réhydratation orale (trble de conscience,

chirurgie)- échecs de réhydratation orale bien conduite

(5%)

Réhydratation orale efficace dans la majorité des cas et réduit les complications majeures et la durée d’hospitalisation

Fonseca BK, Holdgate A. Arch Pediatr Med 2004;158

traitement

Déshydratation > 10% : 20 ml/kg de NaCl 0,9% ou de Ringer Lactate i.v.

en 1 heure (ou plus rapidement)

.pour rétablir la perfusion cérébrale et digestive, améliorant ainsi la réalimentation précoce .indications de cette expansion volémique plus large que l’état de choc

-> tout enfant très déshydraté Phin SJ et al. J Pediatr Child Health 2003;39

.permet une normalisation plus rapide des concentrations d’ADH par rapport à une administration plus lente ou à un soluté hypotonique

Powell KR et al. J Pediatr 1990;117

.peut être répété si l’état circulatoire reste compromis

traitement

Déshydratation < 10% : réhydratation orale en 4h , de préférence par la

bouche, sinon par SGsi natrémie >150 mmol/L : réhydratation

plus lente

.L’efficacité de la SG identique à celle de la voie veineuse Nager AL et al. Pediatrics 2002;109

quantité à administrer = déficit liquidien évalué = poids d’admission * % estimé de la deshydratation

. Les Solutés de Réhydratation Orale (SRO) = eau + sodium + sucre + potassium

-> concentration idéale : 60mmol/L Na 20mmol/L K > 25 mmol/L Cl 74 – 111 mmol/L glucose

Fontaine O. Lancet 1995;345

Les autres boissons (eau sucrée, pure, Coca-Cola) inadaptées car soit pas ou peu de Na, soit trop de sucre

traitement

. Les déshydratations hypernatrémiques sont à risque d’œdème cérébral au cours de la réhydratation i.v.

- la réhydratation orale permet une correction plus rapide et plus sûre que la voie i.v. Sharifi J et al. Arch Dis Child 1985;60

- objectif de correction plus lente (12h) Pizarro D et al. J Pediatr 1984;104

. Si réhydratation i.v. : utiliser du G5% avec une concentration salée dépendant de la natrémie

quantité de soluté perfusé = déficit hydrique+ besoins de maintenance journaliers+ éventuelles pertes anormales

. Reprendre l’alimentation 4 à 6 h après le début de la réhydratationKing CK et al. Recomm Rep 2003;52

En résumé,

-Déshydratations : cause fréquente de mortalité infantilesavoir en évaluer la gravitéprivilégier dès que possible la réhydratation orale

-Besoins hydriques de bases : recommandations discutéesadapter selon l’évolution

-Enfant : particularités rendant le risque de déshydratation important