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Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26 DOI 10.1007/s12612-011-0199-9 Résumé L’hospitalisation représente la première cause de déclin fonctionnel chez les personnes âgées ; 30 à 60% d’entre elles perdent de l’autonomie sur les activités de base de la vie quotidienne (AVQ). Cette perte d’indépendance résulte de l’affection aigue qui a motivé l’hospitalisation mais est aussi liée aux modalités de prise en charge. Objectif : cet article est la première étape d’un projet visant à prévenir la «dépendance iatrogène» à l’hôpital. Méthode: lors d’une réunion de deux jours à Monaco, un groupe de travail composé de 20 experts internationaux a analysé 106 articles relevants, défini les axes de travail et rédigé une synthèse. Résultats: 1- La “Dépendance Iatrogène” (Iatrogenic Disability) a été définie par le groupe d’experts comme la dépendance le plus souvent évitable en relation avec les soins. Elle fait intervenir trois composantes intriquées et cumulatives : 1) la fragilité préexistante du patient, 2) la sévérité de la pathologie qui a conduit le malade à l’hôpital 3) enfin la structure hospitalière et les soins qu’elle dispense. 2- La prévention de la «dépendance Iatrogène » implique des étapes successives. La première consiste à prendre conscience que l’hospitalisation peut créer de la dépendance. Les études épidémiologiques ont permis d’identifier les populations à risques grâce à des scores composites (HARP, ISAR, SHERPA, COMPRI, …). La deuxième étape consiste à considérer que le déclin fonctionnel n’est pas une fatalité. Des référentiels qualité ont déjà été rédigés. Des interventions pour prévenir la dépendance sur des populations ciblées ont été mises en place: simple consultation gériatrique, interventions monofactorielles (mobilité, confusion, iatrogénie …) ou interventions multidomaines (GEM Units et ACE Units, HELP, Fast Track, NICHE …). Ces actions, essentiellement centrées sur la fragilité du patient, ont des résultats limités car elles prennent peu en compte le fonctionnement de l’institution, non orientée vers la prévention du déclin fonctionnel. La dispensation des soins affiche aussi des dysfonctionnements: manque de connaissances en gériatrie, défaut d’évaluation et de prise en charge du statut fonctionnel. Les nouvelles interventions devront non seulement repérer les patients à risques pour qu’ils bénéficient d’une prise en charge spécialisée mais aussi avoir pour cible la structure hospitalière et les soins. Ceci implique de réaliser une « démarche qualité » graduée et de repenser l’organisation de l’hôpital autour de la personne âgée. Mots clés Vieillissement Personne âgée Hospitalisation Dépendance iatrogène Déclin fonctionnel Risque mesuré Evaluation gériatrique. Introduction Du fait du vieillissement démographique, les personnes âgées (PA) constituent une part croissante de la population hospitalisée; alors qu’en 1992 les plus de 65 ans représentaient 37% des patients hospitalisés [1], ils représentent aujourd’hui environ 50% [2]. Ces patients sont particulièrement vulnérables en raison d’une diminution de la réserve physiologique et de la forte prévalence des maladies chroniques. L’hospitalisation est un évènement sentinelle dans cette population car elle constitue un stress susceptible de précipiter l’entrée dans la dépendance [3]. Trente à 60% des patients âgés perdent de l’autonomie sur les activités de base de la vie quotidienne (AVQ) au décours d’une hospitalisation [4]. Cette perte d’autonomie résulte de la maladie ou de l’accident qui a motivé l’hospitalisation mais est aussi liée aux modalités de prise en charge durant le séjour, à l’organisation ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE C. Lafont, S. Gérard,T. Voisin, B. Vellas () 1. Gérontopôle, Departement de Médicine Gériatric, CHU Toulouse, France; [email protected] M. Pahor () Department of Aging and Geriatric Research, University of Florida – Institute on Aging, Gainesville, FL, USA; B. Vellas () Président de l’IAGG, Inserm U 1027, Gerontopole, CHU Toulouse. Membres du I.A.G.G. / A.M.P.A Task Force les 21 et 22 janvier 2011:Pr. S. Andrieu, C. Balandier, Dr. P. Bonhomme, P. Decourt, Dr. S. Connee-Bertrand, F. Couriol, Pr. J. Fitten, Pr. F. Forette, Pr. A. Franco, D. Gabeloux, Dr. C. Lafont, Dr. S. Louchart de Lachapelle, P. Migliasso, Pr. M. Pahor, Dr. A. Pesce, Dr. P. Porasso, Pr. P. Robert, G. Ruault, Dr.A. Salva, Pr. B. Vellas, RM Van Lerberghe Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ? C. Lafont S. Gérard T. Voisin M. Pahor B. Vellas et les membres du I.A.G.G. / A.M.P.ATask Force © Springer-Verlag France 2011

Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ?

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Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26DOI 10.1007/s12612-011-0199-9

Résumé L’hospitalisation représente la première cause dedéclin fonctionnel chez les personnes âgées ; 30 à 60%d’entre elles perdent de l’autonomie sur les activités de basede la vie quotidienne (AVQ). Cette perte d’indépendancerésulte de l’affection aigue qui a motivé l’hospitalisation maisest aussi liée aux modalités de prise en charge. Objectif : cetarticle est la première étape d’un projet visant à prévenir la«dépendance iatrogène» à l’hôpital. Méthode: lors d’uneréunion de deux jours à Monaco, un groupe de travailcomposé de 20 experts internationaux a analysé 106 articlesrelevants, défini les axes de travail et rédigé une synthèse.Résultats: 1- La “Dépendance Iatrogène” (IatrogenicDisability) a été définie par le groupe d’experts comme ladépendance le plus souvent évitable en relation avec les soins.Elle fait intervenir trois composantes intriquées etcumulatives : 1) la fragilité préexistante du patient, 2) lasévérité de la pathologie qui a conduit le malade à l’hôpital 3)enfin la structure hospitalière et les soins qu’elle dispense. 2-La prévention de la «dépendance Iatrogène » implique desétapes successives. La première consiste à prendre conscienceque l’hospitalisation peut créer de la dépendance. Les étudesépidémiologiques ont permis d’identifier les populations àrisques grâce à des scores composites (HARP, ISAR,SHERPA, COMPRI, …).

La deuxième étape consiste à considérer que le déclinfonctionnel n’est pas une fatalité. Des référentiels qualité ontdéjà été rédigés. Des interventions pour prévenir ladépendance sur des populations ciblées ont été mises enplace: simple consultation gériatrique, interventionsmonofactorielles (mobilité, confusion, iatrogénie …) ouinterventions multidomaines (GEM Units et ACE Units,HELP, Fast Track, NICHE …). Ces actions, essentiellementcentrées sur la fragilité du patient, ont des résultats limitéscar elles prennent peu en compte le fonctionnement del’institution, non orientée vers la prévention du déclinfonctionnel. La dispensation des soins affiche aussi desdysfonctionnements: manque de connaissances en gériatrie,défaut d’évaluation et de prise en charge du statut fonctionnel.Les nouvelles interventions devront non seulement repérerles patients à risques pour qu’ils bénéficient d’une prise encharge spécialisée mais aussi avoir pour cible la structurehospitalière et les soins. Ceci implique de réaliser une «démarche qualité » graduée et de repenser l’organisation del’hôpital autour de la personne âgée.

Mots clés Vieillissement • Personne âgée • Hospitalisation •Dépendance iatrogène • Déclin fonctionnel • Risque mesuré• Evaluation gériatrique.IntroductionDu fait du vieillissement démographique, les personnes âgées(PA) constituent une part croissante de la population hospitalisée;alors qu’en 1992 les plus de 65 ans représentaient 37% despatients hospitalisés [1], ils représentent aujourd’hui environ50% [2]. Ces patients sont particulièrement vulnérables en raisond’une diminution de la réserve physiologique et de la forteprévalence des maladies chroniques. L’hospitalisation est unévènement sentinelle dans cette population car elle constitue unstress susceptible de précipiter l’entrée dans la dépendance [3].Trente à 60% des patients âgés perdent de l’autonomie sur lesactivités de base de la vie quotidienne (AVQ) au décours d’unehospitalisation [4]. Cette perte d’autonomie résulte de la maladieou de l’accident qui a motivé l’hospitalisation mais est aussi liéeaux modalités de prise en charge durant le séjour, à l’organisation

ARTICLE ORIGINAL / ORIGINAL ARTICLE

C. Lafont, S. Gérard, T. Voisin, B. Vellas (�)1. Gérontopôle, Departement de Médicine Gériatric, CHU Toulouse,France;[email protected]

M. Pahor (�)Department of Aging and Geriatric Research, University of Florida– Institute on Aging, Gainesville, FL, USA;

B. Vellas (�)Président de l’IAGG, Inserm U 1027, Gerontopole, CHU Toulouse.

Membres du I.A.G.G. / A.M.P.A Task Force les 21 et 22 janvier 2011:Pr. S. Andrieu,C. Balandier, Dr. P. Bonhomme, P. Decourt, Dr. S. Connee-Bertrand, F. Couriol,Pr. J. Fitten, Pr. F. Forette, Pr. A. Franco, D. Gabeloux, Dr. C. Lafont, Dr. S. Louchartde Lachapelle, P. Migliasso, Pr. M. Pahor, Dr. A. Pesce, Dr. P. Porasso, Pr. P. Robert,G. Ruault, Dr. A. Salva, Pr. B. Vellas, RM Van Lerberghe

Comment réduire la dépendance iatrogènechez les sujets âgés hospitalisés ?C. Lafont • S. Gérard • T. Voisin • M. Pahor • B. Vellas et les membres du I.A.G.G. / A.M.P.ATask Force© Springer-Verlag France 2011

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de la sortie et au suivi du patient après la sortie. Il y a donc une« part » évitable dans la majoration de dépendance observéeaprès un séjour à l’hôpital. Ceci rend nécessaire une réflexionsur les pratiques de soins avec pour objectif le développement etl’implantation de procédures visant à améliorer les soins et lesservices à la personne âgée « en perte d’autonomie » ou « àrisque de perte d’autonomie ». Cet article constitue la premièreétape d’un projet visant à prévenir la dépendance « iatrogène »chez les personnes âgées hospitalisées.

Méthodologie

Groupe de travail

Un groupe de travail multidisciplinaire et multi professionnel aété constitué lors d’un Workshop de deux jours à Monaco le 20et 21 janvier 2011. Il était composé de 20 experts internationaux;tous, professionnels de santé ayant un mode d’exercice publicou privé, d’origines géographiques ou d’écoles de formationsdiverses (médecins gériatres, psychiatres, médecins spécialistesde médecine physique et réadaptation fonctionnelle, médecinsde santé publique, mais aussi directeurs d’établissements, cadresde santé, membres de la Direction Générale de l’Organisationde la Santé et membres de la Société Française de Gériatrie).

L’objectif de ce Workshop était de réfléchir à la terminologieà adopter pour nommer « la part » de la dépendance nondirectement liée à la maladie ou à l’accident, motifd’hospitalisation, sur laquelle il serait possible d’agir enoptimisant la prise en charge des sujets âgés, d’en donner unedéfinition et d’identifier les moyens permettant de mesurer saprévalence.

Recherche documentaire

Trois chargés de projet (Dr. C. Lafont, Dr. S. Gérard, Dr. T.Voisin) ont été désignés pour sélectionner, analyser et synthétiserla littérature médicale et scientifique pertinente. La recherche aporté sur la base de données Medline (National Library ofMedicine Etats Unis). Elle a été limitée aux articles publiés entrele 01/01/1995 et le 01/01/2011 (seize dernières années). Lestermes de recherche sont soit des Medical Subject Heading(MeSH) terms, soit des termes du titre ou du résumé (motslibres). Ils sont combinés en autant d’étapes que nécessaire àl’aide des opérateurs « ET » « OU » « SAUF »: “Aged [MeSH]ORAged, 80 and over [MeSH] OR Frail Elderly [MeSH]”AND“Hospitalization [MeSH] OR Patient Discharge [MeSH]”AND“Functional Decline [All fields] OR Loss of Independence [Allfields] OR Functional Disability [MeSH]”.

La recherche a permis de constituer une liste de 428références correspondant aux publications indexées sur le sujet.

D’autres sources ont été explorées: sites Internet des sociétés

savantes compétentes dans le domaine ainsi que tous les sitesInternet utiles (agences gouvernementales, sites des programmesd’interventions etc.).

Les trois évaluateurs (CL, SG, TV) ont fait une premièresélection des articles relevants sur la lecture des abstracts. Desarticles supplémentaires ont été extraits de la bibliographie despublications sélectionnées, d’autres ont été apportés par lesmembres du workshop. Une sélection finale de 112 articles a étéutilisée pour rédiger cette revue.

Rédaction de la revue

Les trois chargés de projet ont rédigé une épreuve préliminairequi a été adressée pour correction aux experts du Workshop.L’épreuve a été réécrite en tenant compte des différentesremarques. Elle a été revue une nouvelle fois par le groupe detravail avant soumission définitive au comité de lecture.

Résultats

Terminologie et définitions

Pour nommer « la part » de la dépendance non directement liéeà la maladie ou à l’accident (cause de l’hospitalisation) surlaquelle il serait possible d’agir en optimisant la prise en chargedes sujets âgés, plusieurs termes ont été proposés par lesparticipants du workshop:- Dépendance induite,- Dépendance iatrogène,- Dépendance nosocomiale,- Dépendance évitable,- Dépendance liée aux soins,

Après un débat un premier vote a permis de retenir 2propositions :- Dépendance iatrogène : ce qui sous-entend une connexion

directe avec les soins- Dépendance évitable : ce qui évoque davantage un plan

d’action.

Lors d’un deuxième vote :- 11 experts se sont prononcés en faveur de Dépendance

iatrogène,- 9 en faveur de Dépendance évitable.

Le terme retenu a donc été : Dépendance iatrogène (iatrogenicdisability).

Le groupe de travail a formulé la nécessité de définir chacunde ces termes.

Dépendance (Disability ): « correspond à une limitation defonction (habituellement dans les actes de la vie quotidienne) ou

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à une restriction d’activité » (World Health Organization ICF2001) cité par Mc Cusker [5]. Cette limitation peut avoir unecause physique, psychique ou cognitive.

Iatrogène (Iatrogenic): En France le Haut comité de la santépublique [6] considère comme iatrogène « les conséquencesindésirables ou négatives sur l'état de santé individuel ou collectifde tout acte ou mesure pratiqués ou prescrits par un professionnelhabilité et qui vise à préserver, améliorer ou rétablir la santé»[7]. La Conférence Nationale de Santé a défini l’iatrogéniecomme « toute pathogénie d’origine médicale au sens large,compte tenu de l’état de l’art à un moment donné, qui ne préjugeen rien d’une erreur, d’une faute ou d’une négligence ». Enprenant en compte l’ensemble des actes de soins nécessaires audiagnostic et au traitement, cette définition présente l’intérêt dene pas limiter le champ de l’iatrogénie aux seuls médicaments.Elle a également l’avantage de dissocier l’iatrogénie de la notionde faute ou de responsabilité. Toutefois, l’expression de «pathogénie d’origine médicale » demeure trop restrictive.

La dépendance iatrogène (iatrogenic disability) a été définiecomme la dépendance le plus souvent évitable en relation avecles soins.

Argumentaire scientifique du projet

Déclin fonctionnel lors d’une hospitalisation, retentissementmédico-social et économique

De nombreuses personnes âgées perdent de l’autonomie lorsd’une hospitalisation. Les termes utilisés, dans la littérature, pouraborder cette problématique sont divers : déclin fonctionnel,perte d’indépendance, perte de points à l’ADL, nouvellesincapacités fonctionnelles …. Le déclin fonctionnel est définicomme une diminution des capacités à réaliser les taches de lavie quotidienne pour des raisons physiques, psychiques oucognitives [8]. Les méthodes de mesure sont hétérogènes, elless’appuient souvent sur des échelles telles que l’ADL et/oul’IADL ou encore l’OARS (Older American Ressources andServices) ADL, l’index de Barthel (IB), [9-13] ou la MIF(Mesure de l’Indépendance Fonctionnelle) [14] mais aussi surdes critères indirects tels que l’institutionnalisation, les réhospitalisations, les décès, voire sur des scores compositesutilisant ces mêmes critères. Les points de mesure diffèrent selonles études à la fois pour l’identification du temps 0 et pour lespériodes de suivi. Certains auteurs mesurent le déclin à partir dustatut pré morbide (base line 15 jours avant l’admission), d’autresà partir du statut à l’admission ou dans les 48 heures suivantl’admission. L’évaluation pour le suivi est réalisée soituniquement à la sortie soit à différentes étapes du suivi : 3 mois,6 mois, 12 mois, voire 18 mois après la sortie [15, 16].

Prévalence

Depuis 1980, les études longitudinales mettent en lumière uneprévalence élevée du « déclin fonctionnel » chez les patients âgéshospitalisés à la suite d’une maladie aigue. McVey LJ et al [17]observent que près de un tiers des patients de 75 ans et plusdéveloppent au moins une nouvelle incapacité dans les AVQaprès une affection aigue et une hospitalisation dans un hôpitalde vétérans. Hirch Ch et al [18] rapportent une altérationstatistiquement significative de l’ensemble des scoresfonctionnels de mobilité, de transfert, de toilette, d’alimentationet des soins d’apparence dans une population de 71 personnesâgées hospitalisées à l’hôpital universitaire de Stamford. Demême plusieurs autres auteurs observent dans cette populationfragile une altération de la mobilité et/ou des fonctions cognitivesdans les suites d’un séjour à l’hôpital. Toutefois la plupart despublications portent sur de faibles effectifs ou sur des populationsciblées (vétérans, femmes…) et utilisent des méthodesd’évaluations différentes de sorte que ces résultats sont difficilesà généraliser.

Pour dépasser ces limites The Hospital Outcomes Project forElderly (HOPE) [19] développe une étude prospectivemulticentrique (cinq hôpitaux universitaires géographiquementdistincts aux Etats Unis) dont l’objectif est d’évaluer le devenirde 1279 patients âgés vivant au domicile, hospitalisés pour unemaladie aigue. 31% des patients de cette cohorte perdent lacapacité à effectuer au moins un AVQ à leur sortie de l’hôpital ;40% d’entre eux n’ont plus la possibilité d’en réaliser trois ouplus ce qui est qualifié de « déclin catastrophique » [20]. A troismois, 19% des patients qui survivent ont, par rapport à leur étatantérieur, un déclin à l’ADL et 40% un déclin à l’IADL [1, 3, 21].

Dans certaines cohortes des chiffres de prévalence encore plusélevés ont été observés 40 à 42% pour Wu AW [22] et Wu HY[23], 47% pour de Saint Hubert M [24].

Facteurs de risque

Trois revues de la littérature [5, 25, 26] et de nombreux essaiscliniques ont permis d’identifier les facteurs de risque du déclinfonctionnel liés à l’hospitalisation.

Facteurs démographiques

L’âge avancé reste un élément principal du syndrome de fragilité[27] et la plupart des études montrent que l’âge est un facteur derisque indépendant de déclin fonctionnel pendant unehospitalisation [4, 28, 29, 30] ou après une hospitalisation [22,31, 32]. Le pourcentage de patients touchés par la perted’autonomie augmente régulièrement avec l’avance en âge. Lepoint de rupture semble survenir pour la tranche des 70-75 ans.Lors d’une hospitalisation le déclin fonctionnel touche

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respectivement 23% des sujets de 70-74 ans, 28% des 75-79 ans,38% des 80-84 ans, 50% des 85-89 ans et 63% des 90 ans et plus(p <0.001) [33]. Cette perte d’autonomie est le plus souventdurable. Elle est retrouvée 3 mois, voire 6 mois après la sortie.

Chez les sujets les plus âgés on observe, d’une part uneabsence de récupération pendant le séjour hospitalier pour lespatients qui ont décliné en pré admission (pour >90 ans vs 70-74ans OR=2.09 IC 95% 1.20-3.65) et d’autre part une perted’autonomie pendant l’hospitalisation chez ceux qui n’en avaientpas perdu avant (pour >90 ans vs 70-74 ans OR=3.43, IC 95%1.92-6.12) [33]. Comme autre facteur démographique, le sexeest parfois mentionné mais il semble jouer un rôle mineur [11].

Statut cognitif et psychologique

L’altération cognitive [3, 4, 10, 30, 34] apparaît comme unfacteur de risque majeur de déclin fonctionnel à la sortie del’hôpital mais aussi dans les trois mois qui suivent [35]. Le risqueest d’autant plus important que l’altération est sévère (Tableau 1).Une étude sur 2593 patients âgés fragiles [36] suivis pendant unan montre que le déclin fonctionnel sur lesAVQ est en moyennedeux fois plus important lorsque la personne a été hospitaliséepour une affection aigue.

La confusion est aussi prédictive d’une perte d’autonomie àla fois à la sortie de l’hôpital et 3 mois, 12 mois après [37](Tableau 1), laissant supposer que ce syndrome gériatrique peutavoir des conséquences durables. En effet la confusion estsouvent révélatrice d’une démence ce qui explique ce pronosticdéfavorable. Par ailleurs démence et confusion reposent sur lesmêmes facteurs étiopathogéniques (altérations du métabolismecérébral, faillite dans la médiation cholinergique,dysfonctionnement neuronal) qui altèrent la réponse au stress[10].

Enfin certains facteurs psychologiques, mauvais état de santésubjective [38], dépression et qualité de vie [22] constituent aussides facteurs de risque indépendants de déclin. Il en est de mêmedes formes frontières entre dépression et confusion [39].

Etat fonctionnel antérieur à l’hospitalisation

Le statut fonctionnel antérieur joue un rôle important dans ledéroulement de l’hospitalisation et représente un meilleurindicateur du devenir que la pathologie aigue ayant motivél’admission [40].

Chez les plus de 80 ans, la capacité à réaliser les AVQ deuxsemaines avant l’hospitalisation est le principal critère prédictifdu statut fonctionnel 2 mois et 12 mois après la sortie.

De nombreux auteurs [21, 22, 29, 31, 34, 38, 41] se sontintéressés à l’état fonctionnel pré morbide, mesuré deuxsemaines avant l’hospitalisation, pour évaluer le niveaufonctionnel de base. Certains considèrent qu’un déclin des

performances entre cette date et l’admission est fortementprédictif d’un déclin fonctionnel à la sortie de l’hôpital [42].

Ainsi, Sleiman I et al [13] utilisent la notion de trajectoiresdu statut fonctionnel en mesurant les modifications entre l’étatpré morbide et l’admission puis entre l’entrée et la sortie et enfinà distance de la sortie. La première trajectoire identifie le statutde base du patient et l’impact de la maladie qui causel’hospitalisation. La deuxième évalue les capacités du sujet àfaire face à la maladie et aux soins. Mais elle est également enrapport avec les procédures et les évènements survenant en coursde séjour.

Ainsi ces trajectoires peuvent-elles être utilisées commeindicateur de pronostic et même comme « un signe vital » quidoit alerter l’attention des soignants [33]. En effet, les patients quiaméliorent leurs performances fonctionnelles au cours del’hospitalisation ont moins de risque de décès oud’institutionnalisation dans les mois qui suivent [43].

Facteurs sociaux

Ils sont d’abord considérés comme prédictifsd’institutionnalisation mais ils sont aussi des facteursindépendants de déclin fonctionnel. En effet, le fait de vivre seul[11, 28] ou en maison de retraite [5] joue un rôle important dansla perte d’autonomie. Le défaut d’entourage (nombre de proches,visites de week-end), le mal logement ainsi que le fait d’êtrelocataire sont aussi des facteurs mentionnés.

La précarité et le défaut d’accès aux soins qui en résulte [44]favorisent la perte d’indépendance dans les mois qui suiventl’hospitalisation. Parmi les sujets de 70 ans et plus d’une cohortede 2200 patients, hospitalisés en médecine interne, 20% dessujets qui ont des problèmes financiers modérés et 25% de ceuxqui ont de graves difficultés financières sont plus dépendantspour les AVQ trois mois après la sortie de l’hôpital (p<0.001). Ils’agit d’un facteur de risque indépendant (Tableau 1).

Comorbidité et poly médication

Pour Mahoney et al [29], le fait d’avoir plus de quatrepathologies multiplie par deux le risque de perdre sonindépendance. Le type et la sévérité de la maladie ont aussi unrôle démontré ; certaines maladies aigues : accidents vasculairescérébraux, cancers, insuffisances cardiaques congestives,insuffisances coronariennes, pneumopathies, fractures du col dufémur, sont plus particulièrement incriminées [3, 45]. Lasurvenue d’escarres est aussi considérée [23, 34, 46] comme unélément de pronostic péjoratif.

Enfin la poly médication [42, 46] est un facteur de fragilité carelle favorise l’iatrogénie (chutes, confusion, désordresmétaboliques). Le risque de déclin fonctionnel est établi à partirde deux spécialités prescrites. Par ailleurs Sager et Rudberg [1],

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Tableau 1 Principaux facteurs de risque de déclin fonctionnel chez les sujets âgés hospitalisés. Revue de 10 études. L’âge n’estpas pris en compte dans ce tableau

Facteurs de Risque Méthode de mesure du déclin fonctionnel OR* IC 95% n Auteurs

Statut cognitif et psychiqueTroubles cognitifs ADL entre l’admission et la sortie

ADL entre l’admission et la sortie2.44 1.7-3.5 544 Pedone, 2005 [35]

Aggravation du statut cognitif 15.96 10.8-23.6Confusion ADL entre l’admission et la sortie 3 1.6-5.8 727 Inoye, 1998 [37]

ADL entre l’admission et 3 mois après la sortie 2.7 1.4-5.2

Formes frontières entre dépressionet confusion

ADL entre l’admission et 3 mois après la sortie 3.3 1.14-9.56 459 Givens, 2009 [39]

Statut Fonctionnel pré morbideADL entre l’admission et la sortie 0.21 0.09-0.47 156 Wu, 2006 [23]

ADL entre l’admission et 3 mois après la sortie 1.92 0.82-4.44

MobilitéDéambulateur ADL entre l’admission et la sortie 2.77 1.63-4.72 1212 Mahoney, 1999 [48]

Déambulateur ADL entre l’admission et 3 mois après la sortieADL entre l’admission et 3 mois après la sortie

1.72 0.94-3.14 1212Canne 1.72 1.06-2.8

Difficultés de marche ADL à J(-15) et à J30 après la sortieADL à J(-15) et à J30 après la sortie

2.7 1.3-5.6 514 Lang, 2007 [41]Risque de chute 2.1 1.3-6.8Instabilité Déclin à l’ADL pendant le séjour

Absence de récupérat° à l’ADL2.61.7

1.5-4.51.0-2.8

1557563

Lindenberger 2003 [49]

Statut NutritionnelMNA < 11 Déclin à l’ADL pendant le séjour 4.25 1.83-9.9 275 Salvi, 2008 [12]

Dénutris Déclin à l’ADL pendant le séjour 16.19 4.68-56.03 514 Lang, 2007 [41]

À risque de dénutrition ADL à J(-15) et à J30 après la sortie 2.2 1.7-7.6

Facteurs SociauxPauvreté Déclin à l’ADL 90 jours après la sortie 1.59 1.07-2.37 1540 Li, 2005 [44]Comorbidité et plotymédicationComorbidité > 4 Altération de l’indépendance de marche

entre J(-15) et la sortie1.9 1.2-3 1181 Mahoney, 1999 [48]

Fragilité- IMC <18.5 Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 3.41 1.49-7.81 1686 Volpato, 2007 [30]- VS** > 40 Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 1.75 1.11-2.75- Médicaments >8 Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 1.9 1.24-3.06

- Sévérité affection CIRS*** > 10 Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 2.17 1.21-3.89- Déclin cognitif. Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 2.01 1.28-3.15- Chutes Déclin à l’ADL entre J(-15) et la sortie 1.73 1.01-2.94*OR : ajustés sur les principaux facteurs associés, ceux-ci diffèrent selon les études ; **VS : vitesse de sédimentation ; ***CIRS : Cumulative Illness Rating ScaleScore.

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montrent que les effets secondaires des médicaments sont aussiimpliqués dans la perte d’indépendance de 20 à 25% des sujetsâgés (SA) hospitalisés ; ceci a été à l’origine de programmes derévision des ordonnances [47].

Mobilité

Les difficultés locomotrices sont le plus souvent évaluées à l’aidede tests objectifs de marche et d’équilibre, par la capacité à selever d’un siège ou par les items de mobilité de l’ADL.

Mahoney et al. [29, 48] montrent, à partir d’une cohorte de1212 sujets de 70 ans et plus, qu’utiliser des aides techniques demarche avant l’hospitalisation, canne ou déambulateur, constitueun facteur de risque de perte d’autonomie durant l’hospitalisationet dans les 3 mois qui suivent (Tableau 1). L’instabilité posturalerapportée par le patient [49] traduit une altération de la fonctiond’équilibration. Les sujets âgés de 70 ans et plus qui sedéfinissent comme « très instables » ont 2.6 fois plus de risquede perte d’indépendance que ceux qui se définissent comme«très stables». Cette instabilité est aussi prédictive de l’absencede récupération pendant le séjour (p<0.002). Les difficultés demarche, le risque de chute et la survenue de chutes récentes(jusqu’à un an avant l’admission) ou récurrentes sont autant defacteurs corrélés au déclin fonctionnel trois mois après la sortie[23, 32, 41].

Etat nutritionnel

Plusieurs auteurs [4, 22, 40, 50] mentionnent que la malnutritionaggrave la dépendance. Cependant, il existe des interrelationscomplexes entre le statut nutritionnel et la sévérité de la maladie(Tableau 1).

Dans une étude portant sur 275 sujets âgés admis dans unsecteur de soins aigus Salvi et al [12] montrent qu’un MNA SF(Short Form) < 11 est un facteur de risque indépendant de déclinfonctionnel significatif durant le séjour à l’hôpital (p=0.001). Cerisque apparaît donc dès qu’il y a suspicion de dénutrition(p=0.001) et est d’autant plus élevé que la dénutrition est sévère(p<0.0001). Pour Lang et al [41], le seul fait d’être « à risque dedénutrition » multiplie par deux et plus le risque de perted’indépendance à trois mois.

Déficits sensoriels

Cécité et surdité favorisent le déclin fonctionnel etl’institutionnalisation [42, 43, 51]. Malgré leur forte prévalencechez les sujets âgés ils sont peu évalués en pratique clinique alorsqu’ils jouent un rôle important dans l’intégration sociale et lasécurité des personnes.

Syndromes gériatriques

Définis comme des « symptômes ne résultant pas de pathologiesspécifiques » [52] (confusion, troubles cognitifs, chutes,altération de la mobilité, incapacités fonctionnelles,incontinences…) ils sont considérés comme les « Giants ofGeriatric Medicine ». La présence d’un ou plusieurs de cessyndromes gériatriques accroît le risque de dépendance aprèsl’hospitalisation [11, 32]. Ainsi plusieurs études [31, 46]indiquent que les syndromes gériatriques sont un meilleurélément, pour identifier les sujets à risque de déclin fonctionnel,que la pathologie aigue ayant motivé l’hospitalisation ou lacomorbidité.

Données socio-économiques : coût de la dépendance iatrogène

Les conséquences de la perte d’autonomie lors del’hospitalisation sont sévères : majoration de la mortalité (16%de décès à 3 mois parmi les patients qui ont un déclin fonctionnelvs 7% pour ceux qui sont stables, p<0.001) [3], prolongation dela durée de séjour, augmentation des complications liées auxsoins, placement en maison de retraite. Ceci a pour corolaire unealtération de la qualité de vie et une majoration des coûts de laprise en charge à l’échelon individuel mais aussi collectif [53].

Alors que de nombreux facteurs de risque (FR) ont été mis enévidence, aucun pris isolément ou combiné à d’autres ne permetde dépister de manière fiable les populations à risque ce quiconstitue pourtant une étape primordiale si l’on veut mettre enplace des programmes de prévention. Cette observation est àl’origine du développement de modèles composites et de scorespour identifier les « sujets cibles ».

Identification des sujets à risque de perte d’autonomie lorsd’une hospitalisation

Les outils proposés à cet effet sont nombreux, mais seuls ceuxvalidés avec des patients hospitalisés ont été retenus pour cetterevue (Tableaux 2 et 3).

Le premier index prédictif du déclin fonctionnel pour lessujets âgés hospitalisés a été développé par Inouye S et al. en1993 [34]. Il prend en compte quatre paramètres identifiéscomme des facteurs de risque dans une cohorte dedéveloppement composée de sujets de 70 ans et plus hospitaliséspour une affection aigue : présence d’escarres, altération du statutfonctionnel, troubles cognitifs, faible niveau d’activité. Unestratification à trois niveaux est établie en fonction du nombre defacteurs de risque observés par interrogatoire du patient etobservation clinique (0 FR : risque faible, 1-2 FR : risqueintermédiaire, 3-4 FR: risque élevé).

Le scoreHARP (Hospital Admission Risk Profile) [31, 45] estun instrument de screening, simple qui permet de classer les

S11 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

Page 7: Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ?

patients âgés de 70 ans et plus, dès leur admission à l’hôpitalcomme « ayant un risque faible », « intermédiaire » ou « élevé»de perdre la capacité à réaliser les activités de la vie quotidienne.Cet outil a été développé à partir de deux cohortesindépendantes: une cohorte de développement et une cohorte devalidation faisant partie toutes deux de l’étude HOPE. Dans lacohorte de développement, une analyse en régression logistiquea permis d’identifier trois caractéristiques des patients commeétant des facteurs prédictifs indépendants d’un déclin fonctionnel: l’âge avancé, l’altération du statut cognitif et l’altération desIADL avant l’admission. Ces facteurs ont été pondérés pourconstruire les items du score HARP : âge (0, 1 ou 2), le MMSE(0 ou 1), IADL (0 ou 2). Le score final de 0 à 5 permet de classerles patients en 3 groupes: 0 ou 1 risque faible, 2 ou 3 risqueintermédiaire, 4 ou 5 risque élevé. Le sore HARP semble êtreun outil d’utilisation facile mais les utilisateurs potentiels ne sontpas définis. Il doit permettre d’identifier les personnes âgéeshospitalisées qui pourraient bénéficier d’un séjour en gériatrieou d’une évaluation gériatrique. Toutefois il n’a pas été évaluésur les patients opérés, ceux vivant en maison de retraite avantleur hospitalisation ou ceux hospitalisés dans des secteurs desoins intensifs.

Le score ISAR (Identification of Seniors At Risk) [42] permetune évaluation rapide de la personne âgée (65 ans et plus)hospitalisée. Ce score devrait idéalement être réalisé dans lesservices d'Urgences où il a été validé. Il permet de dépister lessujets âgés à risque (sujets fragiles, au sens gériatrique du terme)nécessitant une évaluation plus poussée réalisée par un gériatre.Il est constitué de six questions ciblées (indépendance avantl’admission et avant le début des symptômes, notiond’hospitalisation récente, troubles de la vue ou de la mémoire etpoly médication). Les réponses doivent être "oui" ou "non". Lasomme des items permet d’obtenir un score compris entre 0 et6. Si une réponse positive est donnée à plus de deux questions(score > à 2), le patient devra bénéficier d'une évaluationgériatrique. Cet outil est facile d’utilisation, rapide et peut êtrerenseigné par le patient ou l’entourage.

Le Score Hospitalier d’Evaluation du Risque de la Perted’Autonomie (SHERPA) [38, 54] développé dans deux hôpitauxuniversitaires de Louvain est composé de cinq questions (chutedans l’année écoulée, MMS abrégé < à 15/21, mauvaise santéperçue, tranche d’âge, nombre d’IADL réalisés de façonautonome). Il permet de classer rapidement en quatre groupesles patients âgés de plus de 70 ans, vivant à domicile ethospitalisés de manière non programmée, selon l’importance durisque de perte d’autonomie auquel ils sont exposés. SHERPA aété construit en donnant à chaque facteur de risque un poidsproportionnel aux odds ratio observés dans la cohorte dedéveloppement ce qui permet d’obtenir un score total de 0 à 11,5.Pour simplifier et éviter une accumulation de sujets dans lacatégorie de risque intermédiaire il a été défini quatre niveaux de

risque (faible : 0-3, léger : 3.5-4.5, modéré : 5-6, élevé : >6). Cetoutil permet également de prédire le taux de placements troismois après la sortie (p<0.001) [38] .

Le TRST (Triage Risk Screening Tool) [55] était à l’origineconçu pour identifier les sujets âgés à risque de ré hospitalisation.Il est aujourd’hui utilisé pour prédire le déclin fonctionnel, aprèsun passage aux urgences, des patients de plus de 65 ans vivant àdomicile avant l’hospitalisation. Il utilise un score à 6 items :existence d’une altération cognitive, difficultés de marche ou detransfert ou chutes récentes, absence d’entourage au domicile,prise de 5 médicaments ou plus, admission aux urgences dans les30 jours précédents, ou hospitalisation dans les 90 joursprécédents, « sources d’inquiétudes pour les infirmières » (par exabus d’alcool…). Il s’agit d’un score additif de 0 à 6 (0 : absencede risque, 6 : risque maximum). La présence d’une altérationcognitive ou de deux réponses positives place le sujet dans unecatégorie à haut risque.

Deux outils d’évaluation, non conçus à l’origine pour mesurerle risque de déclin fonctionnel chez les personnes âgéeshospitalisées, ont fait l’objet d’une étude de validation dans cetteindication.

Le SPPB (Short Physical Performance Battery) initialementconstruit [56] pour les patients ambulatoires a pour objectifd’identifier les sujets à risque de déclin fonctionnel,d’hospitalisation ou de décès. Il inclut un test de marche de 4mètres, 5 levers de chaise et un test d’équilibre. Chaque tacheest affectée d’une note de 0 à 4, le score total est de 0 à 12. Cetest est fiable, valide, sensible aux changements. Une étude devalidation [21] dans une cohorte de 87 patients âgés hospitaliséspour une affection médicale aigue montre que le score à lasortie de l’hôpital était prédictif d’un déclin fonctionnel, de réhospitalisations et de décès dans l’année suivant l’hospitalisation.

Le COMPRI (Care Complexity Prediction Instrument) [57]développé en Europe a pour objectif de dépister les sujets fragilesayant un risque de « soins complexes » (ce qui inclut le déclinfonctionnel), de santé précaire à la sortie de l’hôpital, de séjourprolongé. Il s’agit d’une échelle à 13 items avec une réponsedichotomique pour chacun d’eux. Le score est additif de 0 à 13.Cet outil est d’utilisation difficile et n’est pas spécifique dessujets âgés, il mesure plus la sévérité de la maladie que le déclinfonctionnel [58].

Points forts et limites de ces outils

Si l’on pose un regard critique sur ces outils [8, 24, 53, 59, 60],on constate qu’à ce jour il n’existe pas de « gold standard »permettant de mesurer le déclin fonctionnel de sorte que lavalidité prédictive de ces instruments est difficile à établir.Aucunde ces scores de pronostic n’a montré une sensibilité et unespécificité suffisante. Ainsi le score ISAR, le mieux validé n’aqu’une sensibilité de 74 % pour une spécificité de 45 % (pour un

Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26 S12

Page 8: Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ?

S13 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

Tableau 2 Caractéristiques des Scores d’identification des sujets à risqueAcromymesAuteurs

Items Stratificationdes Scores

Risque Relatif dedéclin fonctionnel

Modalités de passation Services d’évaluation

Predictive index forfunctional declineInouye et al. 1993USA [34]

4 items: 3 niveaux Hétéro-questionnaire Services de médecine- Escarres- MMS<20/30- Déclin à l’ADL>1 point- Faible niveau d’activitésociale

- 0: bas 1- 1-2 : modéré 4.6 (1.6-12.6)- 3-4 : élevé 12.9 (4.8-34.5)

HARPSager et al. 1996USA [31]

3 items: Score de 0 à 5 Hétéro-questionnaire Services de soins aigüs- Age (0-1-2)- MMS < 15/21 (0-1)- IADL (7 fonctions)2 semaines avantadmission (0-2)

- 0-1: faible risque 17% de déclin fonctionnel

- 2-3 : risque modéré 28% de déclin fonctionnel- 4-5 : risque élevé 56% de déclin fonctionnel

ISARMcCuster et al. 1999Canada [4]

6 items dichotomiques:- Dépendance prémorbide

Score de 0 à 6Pas de classificationmentionnée

Auto-questionnaireouHétéro-questionnaire

Services d’Urgence

- Modificat°aigue dedépendance- Hospitalisation récente- Troubles de la mémoire- Troubles de la vue- Trois médicamentsou plus

13 items dichotomiques:- Examen médical(4 items)- Bilan infirmier (3 items)- Etat de santé subjective- Difficultés de marche- 6 visites du médecinen 3 mois- Polymédication- Hospitalisation récente- Patient à la retraiteou non5 items :- Chutes récentes (0-2)- MMS < 15/21 (0-2)- Etat de santé subjective(0-1.5)- Age (0-1.5-3)- Déclin pré morbideà l’IADL (0-1-2-3)

6 items :- Altération cognitive- Difficultés de marche,de transferts ou chutesrécentes- Absence d’aidant- Cinq médicamentsou plus- Hospitalisation récente- « Cibles » pour lesinfirmières

- Vitesse de marche sur4 m (0-4)- Cinq levers de chaise(0-4)- Test d’équilibre (0-4)

Score > 2 traduit unrisque élevé

3.0 (1.3-6.94)

COMPRIHuyse FJ et al. 2001Hollande [57]

Score de 0 à 13 Hétéro-questionnaireet examen fait parle médecin et l’infirmière

Services de médecine> 6 indique la nécessitéde « soins complexes »

Non mentionné

SHERPACornette et al. 2005Belgique [38]

Score de 0 à 11.5 Hétéro-questionnaire Patients en provenancedes Urgences- 0-3: faible risque 1

- 3.5-4.5 : léger 2.0- 5-6: modéré 4.2- > 6: risque élevé 10.4

TRSTHustey et al. 2007USA [55]

Score de 0 à 6 2.58 (1.5-4.5) Auto-questionnaireouHétéro-questionnaire

Services d’Urgence ouConsultations externesDéclin cognitif ou

score > 2 signifierisque élevéPas de classificationmentionnée

Score de 0 à 12SPPBVolpato et al. 2007Italie [21]

0.86 (0.75-0.98) parpoint du score

Hétéro-questionnaire

Page 9: Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ?

Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26 S14

Tableau3C

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Acronymes

Critèresdejugement

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score ≥ 2) [42]. Les aires sous les courbes ROC sont comprisesentre 0.56 et 0.74 traduisant une valeur prédictive faible oumodeste. Les likelihood ratios (LH) mentionnés pour le score deInouye, les scores HARP, ISAR, et SHERPAsont compris entre1.4 et 2.3 pour les LH positifs et entre 0.3 et 0.5 pour les LHnégatifs. Or pour qu’un test soit cliniquement pertinent il fautque le + LH soit ≥ 10 ce qui permet d’affirmer la prédiction del’évènement quand le test est positif et le –LH doit être ≤ 0.1pour exclure l’évènement quand le test est négatif. Ceci laissesupposer que certains facteurs susceptibles d’expliquer le déclinfonctionnel n’ont pas été pris en compte dans les différentsmodèles. La reproductibilité n’est évaluée pour aucun desinstruments. En ce qui concerne la faisabilité : le temps depassation et les connaissances requises par les examinateurs nesont mentionnés que pour le COMPRI. Le succès de la diffusiond’un outil dépend de son acceptation par les professionnels desanté c'est-à-dire de sa facilité d’utilisation et du temps depassation. Le COMPRI est le plus complexe. Il fait intervenirdifférents professionnels de santé. Le même reproche peut êtreformulé pour le score d’Inouye qui nécessite parfois un avismédical. A l’inverse le TRST et l’ISAR sont simples et rapidesils ne comportent que peu d’items et peuvent être auto-renseignés. Pour l’instant l’utilisation de ces outils n’a pas étégénéralisée et il est donc difficile de prévoir s’ils sont applicablesdans des pays de culture médicale et de systèmes de soinsdifférents. Seul ISAR a été validé en Europe [61].

Trois auteurs ont comparé plusieurs scores de risque dans une

même population, différente de la population de validation ; cesétudes portent sur de faibles effectifs. Les principaux résultats,présentés Tableau 4, diffèrent peu de ceux obtenus dans lescohortes de validation. D’une manière générale ces instrumentsidentifient mieux les patients à faible risque et aucun ne faitpreuve d’une réelle supériorité permettant de le retenir commeinstrument de référence.Interventions ayant pour but de limiter la dépendance despersonnes âgées vulnérables hospitalisées

Depuis les travaux de Rubenstein et al [62] en 1984, il estdémontré que l’évaluation et la prise en charge des sujets âgésprésentant des syndromes gériatriques permet d’améliorer leurautonomie fonctionnelle, leur qualité de vie et diminue le taux deré hospitalisation [63]. Ce sont les patients les plus à risque quien bénéficient le plus. Des modalités de prise en charge intégréeont été développées avec une évaluation multidisciplinaire quipermet d’identifier précocement les sujets âgés vulnérables, deplanifier les soins, d’organiser la sortie et de mettre en place unsuivi [64-66]. Le but de ces modèles est avant tout de maintenirl’indépendance fonctionnelle, principal déterminant de la qualitéde vie, des coûts et du pronostic vital [67]. Retarder le déclinfonctionnel et augmenter les chances de vivre au domicile sontau moins aussi important que de réduire la mortalité des sujetsâgés fragiles [65]. Cette prise en charge a été initialementformalisée aux Etats-Unis dans les unités d’évaluation etd’intervention gériatriques (Geriatrics Evaluation and

S15 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

Tabeau 4 Comparaison des performances de plusieurs scores de risque dans des populations différentes de la populationde validationEtudes Outils comparés Caractéristiques de

l’échantillon analyséPrévalence dudéclin fonctionnel

Sensibilité % Spécificité % VPP**% VPN***% Aire sous lacourbe ROC†

Braes[60]

TRSTISARVIP*

Services d’urgencesn=314 sujets> 65 ans

Adm: 69.7%, J14: 28.5%,J30: 23%, J90: 22.6%

> 74> 77< 43

<36<50>86

<33<38<47

>83>84>76

0.55 to 0.580.63 to 0.640.59 to 0.65

Hoogerduijn[59]

HARPISARCOMPRI

Médecinen= 177 sujetsAge moyen : 76.6 ans51.7% d’hommes

27.8% 3 mois après lasortie

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893962

38.136.441.8

77.193.684.3

0.560.670.69

De Saint Hubert[24]

HARPISARSHERPA

Services de soins aigüsn= 98Age moyen: 81.8 ans57% de femmes

47% 3 mois après la sortie Non mentionné Non mentionné 0.680.580.73

*VIP : n’a pas pour objectif d’évaluer le déclin fonctionnel mais plutôt les difficultés à prévoir lors de la sortie ; **VPP : valeur prédictive positive ; ***VPN : valeur prédictive négative; † ROC : Receiver Operating Characteristics

Page 11: Comment réduire la dépendance iatrogène chez les sujets âgés hospitalisés ?

Management Units : GEMU). Cependant dans les serviceshospitaliers traditionnels le management des sujets âgés fragilesse heurte à l’identification de la population à risque et au suivides recommandations des référentiels gériatriques. De nombreuxprogrammes ont été développés pour limiter cet écueil. Certainssont centrés sur l’intervention d’une équipe spécialisée jouant lerôle d’expert, d’autres vont focaliser leur action sur un problèmespécifique pesant lourdement sur la dépendance, d’autres enfinvont mettre en place une prise en charge globale. Maisaujourd’hui, encore aucun de ces modèles n’est devenu un « goldstandard » et aucun n’a été généralisé à l’ensemble d’une nationou d’un système de santé.

Consultation gériatrique et équipes mobiles

L’évaluation des patients gériatriques au cours d’uneconsultation multidisciplinaire n’a pas montré de bénéfices surla mortalité, le déclin fonctionnel ou l’institutionnalisation à lasortie [65, 66, 68].

Interventions mono factorielles pour prévenir la dépendanceinduite par les hospitalisations

Mobilité

Un certain nombre d’interventions comportant des exercicesstructurés, un travail musculaire, des programmes de marche etd’équilibre [69-71] ont été proposées pour entretenir l’étatfonctionnel des patients durant l’hospitalisation. Dans un essairandomisé (n=300 sujets âgés hospitalisés) basé sur des exercicesde renforcement musculaire réalisés pendant le séjour etpoursuivis durant un mois il n’a pas été mis en évidence deréduction significative de la durée d’hospitalisation, par contre ila été noté un gain à l’IADL sans amélioration de l’état de santésubjective ni des performances physiques [69].

Confusion

A l’inverse, des interventions [37, 72] ont permis de réduire ledéclin fonctionnel en diminuant la fréquence des épisodes deconfusion dans des populations particulièrement à risque (45.5%vs 56.3%, p = 0.03) [72].

Iatrogénie médicamenteuse

Une tentative pour combattre l’iatrogénie s’est appuyée sur larévision des ordonnances [47] afin de minimiser le mésusagedes médicaments. Elle n’a pas eu d’impact sur le déclinfonctionnel.

Interventions multi domaines pour prévenir la dépendanceinduite par les hospitalisations

Ces actions sont celles qui apportent les meilleurs résultats.Ainsideux modèles se sont développés parallèlement pour prendreen charge les patients âgés hospitalisés pour une affection aigue:les unités d’évaluation et d’intervention gériatriques (GEMU) etles unités de soins aigus pour personnes âgées ou Acute Care ofthe Elderly (ACE units).Les unités d’évaluation et d’intervention gériatriques (GEMunits). Dans ces unités, le gériatre en collaboration avec uneéquipe multidisciplinaire (infirmières cliniciennes, travailleurssociaux, kinésithérapeutes…) évalue le statut fonctionnel despatients, identifie les syndromes gériatriques et les prend encharge afin d’améliorer le statut clinique et fonctionnel. Lasélection des patients s’effectue donc sur le dépistage d’un ouplusieurs syndromes gériatriques. Cette approche peut être miseen place aussi bien dans un contexte d’hospitalisation qu’enambulatoire. Le but de ces unités [73] est d’optimiser la qualitédes soins en améliorant les diagnostics portés, la prescriptionpharmaceutique, l’orientation à la sortie. Par le biais d’uneévaluation multidisciplinaire qui établit et coordonne les soins àlong terme, ces unités diminuent les hospitalisations itératives,améliorent le statut psychosocial et fonctionnel du patient tout enréduisant l’utilisation inappropriée des ressources. La qualité dessoins est suivie grâce à des indicateurs cliniques (nombres desondes urinaires, incidence des escarres…).

Les unités de soins aigus pour personnes âgées (ACE units) [66,67] très proche dans leur concept des GEM units, ont étédéveloppées et testées dans les années 1990 à l’hôpitaluniversitaire de Cleveland. L’originalité de la démarche est decoordonner des interventions dans le but de conserver la mobilitéet d’entretenir les fonctions cognitives des sujets âgéshospitalisés en évitant toute rupture avec le quotidienne. L’autreélément clé réside dans une adaptation de l’environnement ausein de l’unité (sol anti-dérapant et anti-bruit, éclairage suffisant,calendriers et horloges dans toutes les chambres, espaces dedéambulation, aires d’activités et lieux de rencontre…). Uneéquipe multidisciplinaire (infirmière, kinésithérapeute,ergothérapeute, orthophoniste, travailleur social, diététicienne,…) ayant une expertise en gériatrie effectue des visitesquotidiennes, pour évaluer le statut fonctionnel du patient,planifier les soins durant le séjour et organiser la sortie dèsl’admission. Ce modèle est basé sur le principe de « gestion dela qualité totale ». Tout doit être examiné dés l’admission dupatient : le séjour hospitalier, la sortie et le maintien à domicile.

LesACE units ont permis d’obtenir une réduction de la duréede séjour, une diminution des placements, une augmentation dela satisfaction des patients et de leurs familles sans majorationdes coûts. Toutefois les résultats, sur le plan fonctionnel, sont

Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26 S16

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discordants selon les publications. Une amélioration descapacités à effectuer lesAVQ est observée dans certaines étudesmais pas dans toutes [74-76].

L’efficacité de ces unités gériatriques aigues (ACE et GEMunits) est étudiée dans une méta-analyse récente [77] quicompare la prise en charge de ces structures à celle des serviceshospitaliers conventionnels. L’unité aigue gériatrique est définiecomme une unité hospitalière gérée par une équipemultidisciplinaire responsable du traitement des personnes âgéesayant des problèmes médicaux aigus. Les critères principaux del’analyse sont le déclin fonctionnel (perte d’un point ou plus àl’ADL par rapport à la pré-admission), la capacité de vivre audomicile et le décès durant l’hospitalisation et trois mois après lasortie. Les critères secondaires sont la durée et le coûtd’hospitalisation ainsi que les ré-hospitalisations dans les troismois suivant la sortie. Cette méta-analyse porte sur 11 études (5essais randomisés, 4 essais non randomisés et 2 études castémoins). Une seule étude est réalisée en intention de traiter pourles résultats à la sortie. La population étudiée est hétérogène,l’âge des patients à l’inclusion diffère selon les études : plus de65 ans (3 études), plus de 70 ans (5 études) et plus de 75 ans (1étude). Deux études excluent les patients vivant en maison deretraite alors qu’une autre n’inclut que les patients vivant eninstitution.

Le fonctionnement des 11 structures retenues dans l’analyse,a pour points communs: l’utilisation d’une évaluation gériatriquestandardisée, une réunion multidisciplinaire hebdomadaire et uneorganisation précoce de la sortie.

Dans cette méta-analyse, 3 études permettent de diminuer ledéclin fonctionnel à la sortie de l’hôpital par rapport aux unitésconventionnelles (Tableau 5). Seule, une étude donne desrésultats sur le déclin fonctionnel à 3 mois ; elle ne montre pasde différence entre la prise en charge conventionnelle et les unitésgériatriques. L’amélioration observée (minoration de 18% de laperte d’indépendance) est comparable aux gains obtenus lorsqueles patients bénéficient d’une kinésithérapie au cours del’hospitalisation [71].

Dans les études randomisées comme dans les nonrandomisées, les patients pris en charge dans les unités de soinsaigus ont plus de chance de retour à domicile (OR = 1.30 ; IC95% : 1.11-1.52) (OR = 1.28 ; IC 95% : 1.12-1.47) ; ce bénéficepersiste à 3 mois. La durée d’hospitalisation, est plus basse(moins 9 jours en moyenne) avec toutefois une grande dispersiondes chiffres.

Par contre ces unités ne permettent ni de réduire la mortalitédurant l’hospitalisation, ni de diminuer le taux de réhospitalisation ou de décès à 3 mois.

Les aspects économiques d’une telle prise en charge sontétudiés dans 4 des 5 études randomisées montrant une réductiondes coûts relatifs par rapport aux unités traditionnelles. Lecoût/efficacité n’a pas été évalué en raison de la complexité des

calculs.

Le programme HELP (Hospital Elder Life Program) [51] estune intervention multidisciplinaire développée en milieuhospitalier pour prévenir le déclin cognitif et physique,promouvoir l’indépendance, faciliter la sortie et prévenir les réhospitalisations. Ce programme est aussi centré sur lareconnaissance et la prise en charge des syndromes gériatriques.Ainsi les soignants doivent rechercher chez tous les hospitalisésde 70 ans et plus les 6 facteurs de risques suivants:1) Déclincognitif, 2) Troubles du sommeil, 3) Altération de la mobilité,4) Déshydratation 5 et 6) Troubles de la vision ou de l’audition.

Des interventions sont mises en place en regard de chacunede ces cibles. Elles sont conduites par une équipemultidisciplinaire incluant une infirmière spécialisée en gériatrieet des médecins gériatres qui travaillent en lien avec les équipesde soin à la mise en place d’une prise en charge personnalisée.Acette équipe sont associés des bénévoles formés pour participerà la mobilisation précoce des patients, aider à la prise des repaset à l’hydratation. Ces volontaires sont aussi chargés de rendrevisite aux malades quotidiennement, de les resituer dans le tempset l’espace et de mettre en place certaines activitésthérapeutiques.

Les procédures qualité et l’impact des interventions mises enplace ont été évaluées. L’adhésion est de 89 %.

HELP a une efficacité démontrée dans la prévention de laconfusion et de la restaurtion non pharmacologique du sommeil.On observe en effet :- Une réduction de l’incidence de la confusion (9.9% groupe

intervention vs. 15% prise en charge habituelle, OR = 0.60,P=0.02) [78].

- Une réduction significative de la durée de la confusion (105jours vs. 161, P=0.02).

- Une réduction significative du nombre total d’épisodeconfusionnel (62 vs 90, P=0.03).

Mais aussi :- Une réduction significative du déclin fonctionnel (14% dans

le groupe intervention vs 33%) [51],- Une diminution des coûts induits [79],- Un effet dose-réponse en fonction de l’adhérence au

programme [80].

Le Fast Track : évaluation et prise en charge pré, per et post-opératoire;Le concept Fast Track (FT), ou réhabilitation précoce(ERAS: enhanced recovery after surgery), a été introduit parKehlet et al. en 1995 [81], dans le cadre de la chirurgie colique[82]. Ils suggèrent que la combinaison de la chirurgie parlaparoscopie, de l’analgésie péridurale, de la réalimentationprécoce et de la mobilisation rapide des patients, permet deréduire la douleur et les dysfonctionnements organiques induits

S17 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

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par le stress chirurgical. Par la suite, les mêmes auteurs ontdéveloppé un concept multimodal pour diminuer le tempsd’hospitalisation à 2-3 jours après la chirurgie colo-rectaleouverte [83, 84]. L’objectif principal est de faciliter lerétablissement et le confort des patients tout en diminuant lamorbidité, la durée d’hospitalisation et les coûts [85-87]. Il esttoutefois difficile de définir précisément le cadre de ceprogramme, car de nombreux éléments du FT font déjà partie

de soins classiques (SC) [88] et c’est l’ensemble des mesuresqui va déterminer le succès du FT, et non pas l’application isoléede l’une ou l’autre.

Le programme FT [89] s’appuie sur une équipe entraînée etl’utilisation d’une organisation et de procédures de soinsspécifiques avec quatre objectifs :- Information du patient avant la chirurgie sur le déroulement

des soins péri-opératoires et prise en charge optimale des

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Tableau 5 Evaluation des interventions pour prévenir la dépendance chez les personnes âgées hospitaliséesLieux et site dedéveloppement

Programme Population cible Moyens Résultats OR Références

Consultation gériatrique et équipes mobiles de gériatrieEvaluation gériatriqueet propositions pourune prise en charge

Consultationmultidisciplinaire à lademande

MortalitéDéclin fonctionnelInstitutionnalisation

NSNSNS

Ellis [65]Parker [66]Gray [68]

Interventions mono factoriellesMobilité Patients hospitalisés

âge moyen 78 ans +/-5,6

Exercice physique Déclin fonctionnel NS Siebens [69]

Renforcementmusculaire

Patients hospitalisés> 70 ans

Renforcementmusculaire aveccharges

Déclin fonctionnel NS Mallery [70]

Confusion Patients hospitalisés> 70 ans

Action sur 7 facteursde risques

Diminution de laconfusion

Diminution de lafréquence du déclinfonctionnel

0.4 IC 0.24-0.7745.5% UG* vs 56.3% MI**,(P=.03)

Vidan [72]

Révision d’ordonnance Patients hospitalisés> 65 ans

Mésusage desmédicaments

MortalitéDurée de séjour

NSNS

Onder [47]

Interventions multidomainesGEM Patients hospitalisés

ou en ambulatoires> 65 ans

GériatreÉquipemultidisciplinaire

Déclin fonctionnel :- randomisé- non randomisé

0.82 IC 0.68-0.990.78 IC 0.65-0.94

Bartzan [77]

Hospital universitairede Cleveland, 1990

ACE Patients hospitalisésou en ambulatoires> 65 ans

GériatreÉquipemultidisciplinaireEnvironnement adapté

Retour à domicile :- randomisé.- non randomiséMortalitéRé hospitalisationDurée de séjourCoûts

1.30 IC 1.11-1.521.28 IC 1.12-1.47NSNSMoins 0.8 joursNon majorés

Landefeld [74]Counsell, [76]

Inouye, 1999 HELP Patients hospitalisés> 70 ansIntervention dirigéesur 6 cibles :- Déclin cognitif- Troubles du sommeil- Immobilité- Déshydratation- Vision et Audition

GériatreÉquipemultidisciplinaireBénévoles formés

Moins de confusion- Incidence- durée- nombre d’épisodesDéclin fonctionnelCoûts moindresEffet dose

0.66105 vs 160 jours62 vs 9014% vs 33%

Inouye [78]

Inouye [51]

Inouye [80]

Kehlet, 1995 Fast Track Initialement chirurgiecolique, non spécifiquedu sujet âgéPuis chirurgie lourdedu sujet âgé

Durée de séjourdiminuée

Wilmore [89]Basse [83]

Foundation Hartfort,1992, New York

NICHE Personnes âgéeshospitalisées

Amélioration de lapratique des soins IDEoutils,Sites InternetInfirmières expertes

Moins de chutes gravesMoins de confusionDurée de séjourCoûts

Moins 30%Moins 60%DiminuéeNon majorés

Swauger [90]

*UG Unité Gériatrique ; **MI Médecine Interne

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comorbidités,- Réduction du stress chirurgical : anesthésie régionale ou

épidurale, opérations mini-invasives, maintien d’unetempérature normale pendant l’acte chirurgical,

- Sédation de la douleur, prévention médicamenteuse desnausées et des vomissements,

- Modification de la prise en charge péri-opératoire :mobilisation précoce, utilisation minimales des sondes, drainset cathéters, nutrition orale précoce, réafférentation(orientation, horloge, calendrier, port des lunettes et/ouappareils auditifs).

La combinaison des moyens mis en œuvre dans FT a faitpreuve d’efficacité, elle permet de prévenir les complicationspost chirurgicales, le stress péri chirurgical, la duréed’hospitalisation et de convalescence. De ce fait FT favorise laré-autonomisation. Bien qu’à l’origine ce concept n’ai pas étédéveloppé spécifiquement pour les sujets âgés, les bénéfices decette prise en charge ont été démontrés dans des étudescomportant un nombre élevé de patients âgés à hauts risquesayant bénéficié de chirurgies lourdes : colectomie segmentaire,prostatectomie, anévrisme de l’aorte [83] .

NICHE [90] (Nurse Improving Care for Healthsystem Elder):est un programme national créé en 1992 par la FondationHartfort de l’université de New York. Il a pour but d’aider lesstructures à évaluer les soins gériatriques courants et à engagerdes interventions adaptées à l'âge des patients et fondés sur despreuves.

NICHE est centré sur la pratique des soins infirmiers etprocure un kit d’outils. Celui-ci comporte des guides de bonnespratiques pour les infirmières, des protocoles de soins infirmiers,un instrument d’évaluation gériatrique institutionnel avec desprofils et l’accès à une banque de données informatisées sur leserveur NICHE : « Try This »(http://consultgerirn.org/resources). Cependant l’un desprincipaux atouts de ce programme est la dispensation d’unenseignement visant à former des infirmières certifiées engériatrie [91]. Ces « Infirmières Ressource en Gériatrie » sontentrainées à identifier et prendre en charge les syndromesgériatriques (chutes, confusion…) en développant des stratégiesqui respectent ou favorisent la mobilité. Elles vont, à leur tour,aider les autres membres des équipes de soins à améliorer leurspratiques en s’appuyant sur des bases scientifiques. Les élémentsinclus dans le kit NICHE peuvent être adaptés aux besoins dessoignants en fonction de l’organisation des soins et desressources existantes. Leur utilisation en milieu hospitalierapporte une amélioration des connaissances dans la prise encharge des malades âgés, optimise le devenir des patients enévitant la confusion, en diminuant la fréquence des chutes gravesde 30% et celle des contentions de 60% [2, 90]. Il permet par

ailleurs de réduire la durée de séjour et le coût des soins tout enaugmentant la satisfaction des patients.

Discussion

Concept de « Dépendance Iatrogène »

Dans la base de données Medline l’association des termes «Iatrogenic » AND « disability » ne conduit à aucune référenceindexée. Mezey, [92] a été le premier à évoquer le fait que ledéclin observé durant ou après une hospitalisation pouvait êtreconsidéré comme une « maladie iatrogène ». La «maladieiatrogène» est décrite par Palmer [93] comme toute affectionrésultant d’une procédure de diagnostic ou de traitement ou d’unévènement qui n’est pas la conséquence directe de la maladie dupatient. La « Dépendance Iatrogène » répond à cette définitioncar la perte d’indépendance est liée à une cascade d’évènementsou de procédures, déclenchées par l’affection aigue etl’hospitalisation qui ont des effets délétères sur le statutfonctionnel du patient. Cette définition omet cependant un aspectimportant qui est l’aspect « évitable » de ce phénomène.Concernant le terme évitable il est important de préciser qu’il nepréjuge en rien d’une erreur, d’une faute ou d’une négligence. Legroupe de travail a donc défini la « dépendance iatrogène »comme « la dépendance le plus souvent évitable en relation avecles soins ».

La dépendance iatrogène fait intervenir trois composantes(Fig. 1) intriquées et cumulatives.

- la fragilité préexistante du patient : elle associe levieillissement et les conséquences des comorbidités et se traduitpar un défaut d’adaptation au stress. Rozzini et al. [94] donneune définition rétrospective de cette fragilité considérant que lamodification du statut fonctionnel lors d’une hospitalisation peutêtre le reflet d’une incapacité à réagir au stress et constitue enelle-même un stigmate de fragilité. Le phénotype de la « fragilité» [27] a été défini par Fried sur cinq critères (perte de poids,fatigabilité, activité physique réduite, marche lente et faible forcemusculaire). Ces critères sont prédictifs du risque de perted’indépendance pour des patients vivant au domicile mais nes’appliquent pas forcément aux malades admis dans les servicesde soins aigus. Une étude d’intervention est en cours pour validerl’impact des critères de Fried sur le risque de déclin fonctionnelet mesurer l’efficacité d’une intervention ciblée. Seule laméthodologie est publiée. Actuellement, l’appréciation de lavulnérabilité repose sur l’évaluation gériatrique standardisée quiprend en compte certains facteurs de fragilité et certainescomorbidités.

S19 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

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Fig. 1. Représentation schématique des différents facteursimpliqués dans le déclin fonctionnel de la personne âgéehospitalisée

- la sévérité de la pathologie ayant conduit le patient àl’hôpital joue un rôle indéniable dans le processus du déclinfonctionnel, ceci a été démontré par Ferruci et Pahor [95] dansl’étude en population EPESE (Etablished PopulationEpidemiologic Studies of the Elderly). Par ailleurs il est reconnuque certaines pathologies sont plus souvent corrélées à une perted’indépendance. Sager MA [3] dans la cohorte HOPE montreque six affections : accidents vasculaires cérébraux, fracture dela hanche, insuffisance cardiaque et coronarienne,pneumopathies et cancers, peuvent être incriminées dans ledéclin fonctionnel de 49% des patients hospitalisés.

- enfin l’hospitalisation [20] pèse lourdement dans la perted’indépendance des sujets âgés hospitalisés.

. la structure hospitalière qui accueille le patient peut êtreincriminée car le fonctionnement hospitalier est centré sur lemanagement des pathologies aigues et non sur l’amélioration dustatut fonctionnel. L’environnement est conçu pour délivrer dessoins rapides et efficaces basés sur de la haute technologie maisrien n’est prévu pour promouvoir l’état fonctionnel. Lesmodifications du mode de vie et du rythme de vie, induits parl’hospitalisation [96], notamment l’interruption brutale decertaines activités (toilette, préparation des repas), la privationde sommeil [33], un alitement parfois injustifié source dedéconditionnement [45, 97], les effets iatrogènes des traitements[98] ou l’utilisation de dispositifs invasifs (perfusions, sondesurinaires indues), [99] une nutrition inadéquate, constituentautant de facteurs déstabilisants pour le vieillard fragile.L’institution dans son fonctionnement actuel est incapable derépondre à cet état de fait en raison d’une inadéquation entre lesbesoins du sujet âgé hospitalisé et l’organisation générale desservices hospitaliers.

De même, la dispensation des soins en milieu hospitalieraffiche bon nombre de dysfonctionnements:1) insuffisance deconnaissance en gériatrie ou de leur transfert dans la pratiquequotidienne des intervenants, 2) manque d’uniformisation des

pratiques et manque de concertation entre les différentsintervenants, 3) absence de « conscientisation » autour de ceproblème, 4) défaut d’évaluation clinique systématique del’indépendance fonctionnelle et de son évolution, 5)préoccupation insuffisante des soignants vis-à-vis du statutfonctionnel du sujet âgé et notamment de la mobilité, 6) carencedans la proposition et la mise en place d’aide lors du retour àdomicile après un passage aux urgences, enfin 7) manqued’informations du patient et de son entourage sur son degré devulnérabilité.

Prévention de la « Dépendance Iatrogène »

Prévenir la « dépendance iatrogène » c’est d’abord savoirreconnaître sa réalité. Cette prise de conscience transparaît àtravers les nombreux travaux réalisés durant les deux dernièresdécennies. Les principales actions engagées sont :

- L’identification des populations à risque en se basant sur lamise en lumière de facteurs de risque ou en utilisant des scorescomposites (HARP, ISAR, SHERPA, COMPRI, …).

- La rédaction de référentiels de qualité visant à améliorer laprise en charge des affections aigues du sujet âgé et à prévenir ladépendance (Tableau 6).

- La mise en place d’interventions mono factorielles ou multidomaines sur des populations ciblées.

Cependant jusqu’à ce jour les outils utilisés, pour identifierles sujets à risque, ont une validité discutable. Ils sont en effet,centrés uniquement sur le patient et bien des facteurs, expliquantle déclin fonctionnel, n’ont pas été pris en compte. Par ailleursla plupart n’ont pas été validés en dehors des systèmes de santédans lesquels ils ont été développés. De même l’ensemble desinterventions a pour cible unique: le patient et ce qui le définit enterme de fragilité. Ceci constitue une approche trop réductricedu problème.

Prévenir la « dépendance iatrogène » c’est aussi lui énoncerdes critères permettant de la définir de façon précise : 1)mesurable (grâce à des échelles et des critères temporels), 2) liéeaux soins (au sens large : traitements, procédures, structure), 3)évitable.

Enfin, c’est reconnaître que la part évitable est essentiellementliée à l’organisation de la structure comme le met en exerguePalmer [100] dans la description du « syndrome dysfonctionnel» (Figure 2). Lutter contre la part évitable de la dépendance nedoit donc pas se limiter à la prise en charge de la maladie aigueet de la fragilité du patient mais aussi prendre en comptel’organisation et la qualité des soins, laquelle doit faire part égaleentre le traitement de la maladie aigue et le maintien du statutfonctionnel de la personne âgée.

Peu d’études dans la littérature se sont intéressées à cet aspectorganisationnel. Il est évoqué à travers certains modèles de soinstels les GEM ou les ACE units qui proposent des services desoins intégrés durant l’hospitalisation, mais il n’y a pas vraiment

Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26 S20

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dans ce système de continuité après la sortie et aucun n’avraiment résolu le problème de la prise en charge des sujets âgéshospitalisés dans des services de spécialité non gériatriques.

Des bases plus solides apparaissent dans le programmeOPTIMAH (optimisation des soins aux malades âgéshospitalisés) [101, 102] déjà opérationnel au Canada avecquelques unités pionnières.

Ce programme associe une optimisation des soins hospitaliersvis-à-vis de la clientèle âgée et la création d’un continuum dansla prise en charge des patients grâce à un réseau ville-hôpital. Ils’appui sur un changement de culture face aux soins de lapersonne âgée hospitalisée : intégration du patient et de la familledans toutes décisions, valorisation des soignants par le biais deformations en gériatrie dispensées à l’ensemble des acteurs desoins. D’un point de vue organisationnel l’objectif est d’adapterla structure à la clientèle âgée, de manière à prévenir lescomplications évitables (perte d’indépendance 30 %, confusion30-50 %, iatrogénie 38 %). Cette adaptation prend en comptel’aspect architectural, les équipements médicaux et hôteliers, les

effectifs de soignants. Ceci implique une volonté de la directiond’établissement et un travail de collaboration de la directionadministrative, de la direction des soins infirmiers et de ladirection des services prestataires afin de parvenir à uneamélioration des soins à la personne âgée quel que soit le serviced’accueil.

Les cibles d’une unité OPTIMAH sont :- une intervention préventive systématique avec identification

des sujets à risque et surveillance de six aspects de santéidentifiés par l’acronyme AINEES (Autonomie et mobilité,Intégrité de la peau, Nutrition, Elimination, Etat cognitif etcomportement, Sommeil),

- la prévention et le traitement de la dénutrition,- la pharmacovigilance,- la formation de l’ensemble des soignants toutes professions

confondues et l’intégration des acquis dans la routine dessoins,

- l’implication des patients et de leurs familles dans les soins,les décisions et les modalités de sortie,

S21 Cah. Année Gérontol. (2011) 3:S6-S26

Tableau 6 Caractéristiques des principaux référentiels qualités pour la prise en charge des sujets âgés hospitalisésPaysAuteursRéférences

Sujet Description de l’outil Caractéristiques *

Carr M and Phillis HBritish-columbia,2003 [104]

Report and recommendations: acute carenurse network

Ce document à l’usage des infirmières procure des recommandations concernant lacontinence, les chutes, la confusion, l’intégrité de la peau,…Il fournit aux soignants des outils pour facilité l’évaluation et la prise en charge.

Non mentionnées

Australia2004,**AHMAC [105]

Best practice approaches to minimisefunctional decline in the older personacross the acute, sub-acute and residentialcare settings

Il s’agit d’un guide rapide de recommandations à l’usage de tous les soignants visant àprévenir le déclin fonctionnel chez les personnes âgées hospitalisées. Ces recommandationssont formulées en 5 chapitres:- cognition et psychisme- mobilité, vitalité et soins personnels- continence- nutrition- intégrité de la peau

1+2+3+4

Wenger,2007,USA [103]

Assessing Care Of Vulnerable Elderly 3 Ce programme qualité qui a pour cible les personnes âgées vulnérables contient 392 IQ***couvrant 22 thèmes de soin (p ex douleur, démence, chutes etc.) et 4 domaines de soin(prévention, diagnostic, traitement et suivi). Il s’applique aussi bien aux hospitalisés qu’auxpatients vivant dans la communauté.

1+2+3+4

National HealthService SC, PublicHealth Grande Bretagne2010 [106]

Care Quality Commission,Essential standards of quality andsafety

Il s’agit d’un référentiel très complet portant sur les bonnes pratiques professionnelles àl’intention des professionnels de santé et des usagers

* 1=Recherche systématisée de la littérature, 2=Niveau de preuve et gradation des recommandations, 3=Groupe d’experts pluridisciplinaires, 4=Relecture et validation externe; **AHMAC:Australian Health Minister’s Advisory Council; ***IQ indicateur de qualité.

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- le partage des informations au sein du réseau ville-hôpital.

Après quelques mois de fonctionnement, les résultatspréliminaires montrent que la dénutrition et les modificationscognitives sont dépistées plus précocement, que les contentionssont moins utilisées, que la consommation des protections abaissé, qu’il y a moins de patients souffrant dedéconditionnement.

Fig. 2. Facteurs de la dépendance liés au parcours de soin.Adaptation de la représentation de Palmer 1998 : le syndrome «dysfonctionnel » [100]

Concernant l’impact de la qualité des soins on disposeseulement d’une publication récente faisant référence àl’utilisation de l’indicateur de qualité (IQ) ACOVE [103]. Dansce travail,Arora VM [20] étudie, dans une cohorte de 898 sujetsâgés vulnérables, l’impact d’un projet « qualité des soins » surle déclin fonctionnel lié à l’hospitalisation. Six IQ ACOVE(évaluation cognitive, évaluation fonctionnelle, entretien de lamobilité, prise en charge de la douleur, évaluation et suivinutritionnel) sont systématiquement appliqués. D’autres tels quela prise en charge de la confusion ou des escarres sontsélectionnés en fonction des situations cliniques. Un seul IQACOVE s’avère efficace pour prévenir la perte fonctionnelle : ils’agit de l’évaluation et la prise en charge nutritionnelle(OR=0.37, IC 95% 0.21-0.64 p<0.001). Cependant dans cetteétude l’observance est faible 57.8% en moyenne. En dehors de

ce travail et du programme OPTIMAH rien de précis n’estformulé dans les interventions sur l’utilisation ou non desréférentiels de qualité concernant la prise en charge despersonnes âgées hospitalisées. Pourtant il existe plusieurs guidesde bonne pratique concernant l’ensemble des domaines de laprise en charge des personnes âgées (Tableau 6). La plupart ontété élaborés sous l’égide des états ou de leurs servicesdéconcentrés, en lien avec des organismes professionnels et desreprésentants des usagers. Certains traitent de manière spécifiquedes soins infirmiers d’autres sont davantage destinés auxmédecins. L’élaboration de ces référentiels de qualité repose engénéral sur un socle commun : 1) Revue systématisée de lalittérature, 2) Niveau de preuve et gradation desrecommandations, 3) Groupe d’experts pluridisciplinaires, 4)Relecture et validation externe. En dehors de ceux décrits tableau6 d’autres référentiels étrangers sont disponibles (Canada,Nouvelle Zélande, Catalogne,…) ; ils n’abordent que certainsaspects de la qualité de la prise en charge des personnes âgées etsont peu contributifs sur l’évaluation de la dépendance et de laprévention du déclin fonctionnel à l’occasion des séjourshospitaliers.

ConclusionLa lutte contre la « dépendance iatrogène » doit être une prioritéen raison de la fréquence du phénomène, de sa sévérité et de soncoût. Elle représente un objectif réaliste puisqu’il existe déjà desactions efficaces.

Elle doit inclure un dépistage des patients les plus à risquepour qu’ils puissent bénéficier d’une évaluation plus complètepar une équipe spécialisée.

Elle doit reposer sur une démarche qualité graduée avec desmesures à inscrire systématiquement dans les procédures de priseen charge des personnes âgées.

Enfin elle doit être une priorité organisationnelle, ce quiimplique de repenser l’organisation hospitalière autour de lapersonne âgée sachant que les plus de 65 ans représentent prèsde la moitié des patients hospitalisés [107-112].

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