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Partie 3/3. Théologie.
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Alioquin, si tu non dederis operam ad
permanendum per timorem et humilitatem,
et tu excideris. Matth. III, 10. — omnis
arbor quae non facit fructum bonum,
excidetur. Secundo ostendit idem quantum
ad Iudaeos, et, primo, proponit quod
intendit, dicens sed et illi, scilicet Iudaei, si
non permanserint in incredulitate,
inserentur, id est, in suum statum
restituentur. Ier. III, 1. — fornicata es cum
amatoribus multis, tamen revertere ad me,
dicit dominus. Secundo probat quod dixerat,
et primo, ex divina potentia, dicens potens
est enim dominus Deus iterum inserere
illos; et ideo non est de eorum salute
desperandum. Is. LIX, 1. — ecce non est
abbreviata manus domini, ut salvare non
possit. Secundo probat idem per locum a
minori, dicens nam si tu, gentilis, excisus es
ex naturali oleastro, id est ex gentilitate
quae naturaliter erat infructuosa, non
quidem, prout dominus fecit naturam, sed
secundum quod corrupta est per peccatum.
Sap. XII, 10. — iniqua est natio eorum, et
naturalis malitia ipsorum. Eph. II, 3. —
eramus natura filii irae. Et insertus in
bonam olivam id est, in fide Iudaeorum,
contra naturam, id est contra communem
cursum naturae. Non enim consuevit ramus
arboris malae inseri in bonam arborem, sed
potius e converso. Id autem quod Deus facit,
non est contra naturam, sed simpliciter est
naturale. Dicimus enim esse naturale, quod
fit ab agente, cui naturaliter subditur
patiens, quamvis etiam non sit secundum
propriam naturam patientis; sicut enim
fluxus et refluxus maris est naturalis,
propter hoc quod causatur ex motu lunae,
cui naturaliter subditur aqua, quamvis non
sit naturalis secundum formam aquae. Ita
etiam cum omnis creatura sit naturaliter Deo
subiecta, quicquid Deus facit in creatura, est
simpliciter naturale, licet forte non sit
naturale secundum propriam et particularem
naturam rei in qua fit, puta cum caecus
illuminatur et mortuus resuscitatur. Si,
inquam, hoc factum est contra naturam,
quanto magis hi qui sunt secundum
naturam, id est qui naturali origine pertinent
ad gentem Iudaeorum, inserentur suae
grâce et que son prochain est tombé, on ne
doit pas s’élever au-dessus de celui qui
tombe, mais plutôt craindre pour soi-même,
parce que l’orgueil est la cause de la chute, et
la crainte la cause de la vigilance et de la
prudence.
903. — C. Lorsque <l’Apôtre> dit : 22
Vois donc la bonté et la sévérité, etc., il porte
<les Gentils> à une considération attentive
des jugements divins. Et :
— Il les amène d’abord à cette considération
[n° 904s].
— Puis, il les instruit, comme si d’eux-mêmes
ils n’étaient pas capables de le faire [n° 913] :
25 "Car je ne veux pas, frères, que vous
ignoriez, etc."
Enfin, comme si lui-même ne pouvait pas les
scruter parfaitement, il s’écrie, en admirant la
sagesse divine [n° 934] : "O abîme des
richesses de la sagesse, etc."
904. — 1. Sur le premier point, <l’Apôtre>
montre premièrement ce qu’il faut considérer,
en disant : Vois donc, c’est-à-dire considère
diligemment, la bonté de Dieu, qui fait
miséricorde "Que Dieu est bon pour Israël,
pour ceux qui ont le cœur droit." Et encore :
"Méprises-tu les richesses de sa bonté ? " —
Et la sévérité de celui qui punit "Le Seigneur
est le Dieu des vengeances " Et encore :
"C’est un Dieu jaloux et qui se venge, le
Seigneur." Ainsi donc, la première
considération produit l’espérance; la seconde
la crainte, afin d’éviter le désespoir et la
présomption.
905. — 2. Il montre en deuxième lieu sur qui
doivent porter ces considérations, en disant :
envers ceux qui sont tombés, c’est-à-dire les
Juifs, <sa> sévérité. — "Le Seigneur a <tout>
renversé, il n’a épargné aucune des
magnificences de Jacob; il a détruit dans sa
fureur les fortifications de la vierge de Juda "
— Mais envers toi, à savoir envers toi, Gentil,
qui as été enté, la bonté. — "Tu as usé de
bonté envers ton serviteur; ô Seigneur."
906. — 3. En troisième lieu, il montre avec
quelle continuité <on doit> pouvoir
considérer ce qui vient d’être mentionné, non
comme quelque chose d’immuable, mais
comme pouvant se modifier dans l’avenir.
907. — a. Et il le montre d’abord quant aux
olivae, id est reducentur ad dignitatem
gentis suae, Mal. ult. : convertet corda
patrum ad filios, et corda filiorum ad patres
eorum.
Gentils, en disant : Vois la bonté de Dieu
agissant envers toi, toutefois de manière
continue, si tu demeures dans cette bonté.
"Demeurez dans mon amour > — Autrement,
si tu ne prends pas soin d’y demeurer par la
crainte et l’humilité, tu seras retranché, toi
aussi. — "Tout arbre qui ne produit pas de
bon fruit sera coupé et jeté au feu."
908. — b. Puis il montre la même chose quant
aux Juifs, et il commence par exposer son
intention, en disant : 23 Mais eux de même, à
savoir les Juifs, s’ils ne demeurent pas dans
l’incrédulité, ils seront entés, c’est-à-dire
seront rétablis dans leur condition "Tu as
forniqué avec beaucoup d’amants, cependant
reviens à moi, dit le Seigneur, et moi je te
recevrai."
909. — Ensuite il prouve ce qu’il avait dit, et
premièrement par la puissance divine, en
disant : car Dieu est puissant pour les enter
de nouveau; par conséquent il n’y a pas à
désespérer de leur salut : "Voici que la main
du Seigneur n’est point raccourcie pour ne
pouvoir sauver."
910. — Deuxièmement833
il prouve la même
chose par un argument a minori834
, en disant :
24 En effet, si toi, Gentil, tu as été coupé de
l’olivier sauvage <auquel tu appartenais>
par nature, c’est-à-dire de la gentilité, qui
était stérile par nature, non assurément en tant
que Dieu a fait cette nature, mais en tant
qu’elle est corrompue par le péché : "Leur
nation est méchante et leur malice naturelle."
Et encore : "Nous étions par nature fils de la
colère." — Et enté sur un bon olivier, c’est-à-
dire sur la foi des Juifs, contre nature, c’est-à-
dire contre le cours ordinaire de la nature. En
effet, il n’est pas habituel qu’un rameau d’un
arbre mauvais soit enté sur un arbre bon, mais
plutôt le contraire. Or ce que Dieu fait n’est
pas contre nature, mais tout simplement
naturel. En effet, nous appelons naturel ce qui
est produit par un agent auquel le patient (ce
qui subit l’action) est naturellement soumis,
833
Lieux parallèles t Somme Théologique P, Q. 105, a. 6; Q. 106, a. 3; Suppl., Q. 75, a. 3; 2 Sentences
dist. 14, Q. 1, a. 5, sol. 4; dist. 30, Q. 1, a. 1, sol. 4; 3 Cons. Cens., c. 98, 99, 100; De poSentences Q.
1, a. 3, sol. 3; Q. 5, a. 4; Q. 6, a. 1; De veritate, Q. 13, a. 1, sol. 2 et 3; Compend. theol., c. 136. 834
L’argument a minoré ("à partir du moins") consiste à conclure du moins au plus; il représente l’une
des deux formes possibles du raisonnement afortiori. En Mt 6, 26 (Dieu nourrit les oiseaux, à plus
forte raison les hommes qui valent plus), Jésus argumente a minons (3 Contra Gentiles c. 135).
même si ce qui est produit n’est pas conforme
à la nature du patient. C’est ainsi que le flux
et le reflux de la mer sont naturels, puisqu’ils
ont pour cause le mouvement de la lune,
auquel l’eau est naturellement soumise, bien
qu’ils ne soient pas naturels selon la forme de
l’eau. De même, toute créature étant
naturellement soumise à Dieu, tout ce que
Dieu fait dans la créature est naturel
absolument parlant, bien que cela ne soit
peut-être pas naturel eu égard à la nature
propre et particulière de la créature sur
laquelle son action s’accomplit : par exemple
un aveugle qui recouvre la lumière ou un mort
qui ressuscite835
.
911. — Si, dis-je, cela s’est fait contre nature,
à combien plus forte raison ceux qui <lui
appartiennent> par nature, c’est-à-dire ceux
qui par leur origine naturelle appartiennent à
la nation juive, seront-ils entés sur leur propre
olivier, c’est-à-dire seront-ils ramenés à la
835
Le texte de l’épître invite saint Thomas à soulever la question métaphysique du rapport entre la
causalité naturelle et la causalité surnaturelle. En comparant le peuple juif à l’olivier franc, c’est-à-dire
à un arbre déjà amélioré par la culture, et les peuples païens au sauvageon qui sera greffé sur le tronc
du premier (les patriarches), saint Paul inverse l’ordre naturel des choses. C’est en effet le rameau
franc " qui, normalement, est greffé (ou enté) sur le tronc du sauvageon afin de le transformer et de lui
communiquer sa nature d’olivier cultivé. Cette inversion du sens normal de la greffe correspond à l’
anomalie que présente l’histoire du salut le peuple élu (et qui le demeure c’est sa nature voulue par
Dieu) n’ayant pas accompli, dans l’ensemble, ce â quoi le destinait cette nature, ce sont les peuples
païens qui ont été greffés sur un tronc auquel leur nature païenne ne les destinait pas. Or, c’est en
principe la providence qui détermine la nature des êtres en fonction de la fin qu’ils doivent remplir
Dieu serait-il en contradiction avec lui-même ? La réponse de saint Paul est théologique : d’une part,
Dieu a tiré du mal un plus grand bien puisque en rejetant le salut dans le Christ, les chefs du peuple élu
ont rendu possible sa communication à toutes les nations; d’autre part, ce rejet est provisoire le peuple
élu réalisera un jour la vocation à laquelle sa nature le destine. Mais nous sommes là dans l’ordre de la
grâce. Comment peut-il contre venir à l’ordre de la nature dont Dieu est pourtant l’auteur ? Comment
saint Paul peut-il parler d’une opération i contre nature s ? Une réponse philosophique est requise. Elle
consiste, selon saint Thomas, à distinguer deux types de naturel : est naturel ce qui relève de la nature
d’un être (ou d’une chose), considéré en lui-même et séparément; mais est naturel également l’ordre
universel dans lequel cet être est inséré, avec toutes les relations qui en résultent pour lui. Ces deux
types peuvent présenter des natu ralités différentes. Ainsi, en vertu de sa nature propre, l’eau reste
immobile ou s’écoule vers le bas. Mais, en vertu de l’ordre naturel du monde qui la soumet au pouvoir
de la lune (en cosmologie médiévale il y a affinité entre la lune et l’élément humide), la mer peut se
soulever et se mouvoir vers le haut. D’une manière générale, il y a dans toute créature une capacité
naturelle d’obéir aux opérations des agents auxquels elle est subordonnée, même si elles excèdent sa
nature propre l’ordre hiérarchique universel prévaut sur celui des natures propres. Or, l’Agent premier
et suprême, c’est Dieu. Les opérations qu’Il effectue dans les êtres, quels qu’ils soient, présupposent
cette puissance d’obéissance, ou puissance obédien tielle par laquelle la créature est mise en rapport
avec l’Agent premier, lequel "peut faire passer toute créature à un acte plus élevé que celui auquel le
fait parvenir l’agent naturel" (Somme Théologique 3 Q. 11, a. 1). Ainsi les miracles eux-mêmes
rentrent-ils, d’une certaine manière, dans l’ordre naturel universel tel que Dieu le veut.
dignité de leur nation : "Il ramènera le cœur
des pères aux fils, et le cœur des fils à leurs
pères Ml 4, 6."
Lectio 4 Leçon 4 [Versets 25 à 32]
[n° 913] 25 Car je ne veux pas, frères, que
vous ignoriez ce mystère, afin que vous ne
soyez pas sages à vos propres yeux, c’est que
l’aveuglement est venu pour une partie
d’Israël, jusqu’à ce que la plénitude des
nations païennes soit entrée,
[n° 916] 26 et alors tout Israël sera sauvé, [n°
917] selon qu’il est écrit : "Il viendra de Sion
celui qui délivrera et qui détournera l’impiété
de Jacob."
[n° 920] 27 Et telle sera mon alliance avec
eux, lorsque j’aurai enlevé leurs péchés.
[n° 921] 28 Selon l’Evangile, il est vrai, ils
sont ennemis à cause de vous; mais selon
l’élection, ils sont très aimés à cause de leurs
pères.
[n° 924] 29 Car les dons et l’appel de Dieu
sont sans repentance.
[n° 930] 30 De même, en effet, que jadis
vous-mêmes n’avez pas cru à Dieu, et que
maintenant vous avez obtenu miséricorde à
cause de leur incrédulité,
[n° 931] 31 ainsi eux maintenant n’ont pas
cru, par suite de la miséricorde <exercée>
envers vous, afin qu’eux aussi obtiennent
miséricorde.
[n° 932] 32 Car Dieu a renfermé tout dans
l’incrédulité, afin de faire miséricorde à tous.
[86217] Super Rom., cap. 11 l. 4 Postquam
apostolus induxit gentiles in cognitionem
divinorum iudiciorum, in quibus divina
bonitas et severitas manifestatur, hic quasi
eis adhuc non sufficientibus considerare
praedicta, exponit quid sibi circa haec
videatur. Et primo proponit factum; secundo
probat, ibi sicut scriptum est, etc.; tertio
rationem assignat, ibi si enim, et cetera.
Circa primum tria facit. Primo proponit
suam intentionem, dicens : ideo induxi vos
ad considerandum bonitatem et severitatem
Dei, nolo enim, o fratres, ignorare vos
mysterium hoc, non enim omnia mysteria
capere potestis. Hoc est enim perfectorum,
912. — Après avoir fait entrer les Gentils
dans la connaissance des jugements divins,
qui manifestent la bonté et la sévérité de Dieu
[n° 903], comme s’ils n’étaient pas encore
capables de considérer ce qui a été dit,
<l’Apôtre> expose ici ce qu’il en pense lui-
même. Et
I) Il expose d’abord un fait.
II) Puis, il le prouve [n° 917] : selon qu’il est
écrit, etc.
III) Enfin, il en donne la raison [n° 930] : 30
De même, en effet, etc.
913. — I. Sur le premier de ces points il fait
trois choses
A. Il expose son intention, en disant : La
quibus dominus dicit Lc. VIII, v. 10. —
vobis datum est nosse mysterium regni Dei.
Sap. VI, 24. — non abscondam a vobis
sacramenta Dei. Sed ignorantia huius
mysterii esset vobis damnosa. 1 Co XIV, v.
38. — si quis ignorat, ignorabitur. Secundo
assignat suae intentionis rationem, ut non
sitis vobismetipsis sapientes, id est non de
sensu vestro praesumatis et ex vestro sensu
alios condemnantes, vos eis praeferatis.
Infra XII, 16. — nolite esse prudentes apud
vosmetipsos. Is. V, 21. — vae qui sapientes
estis in oculis vestris, et coram
vobismetipsis prudentes. Tertio proponit
quod intendit. Primo quidem quantum ad
casum particularium Iudaeorum, cum dicit
quia caecitas contingit in Israel, non
universaliter sed ex aliqua parte ut supra
ostensum est. Is. VI, v. 10. — excaeca cor
populi huius. Secundo ponit terminum huius
caecitatis, dicens donec intraret, ad fidem,
plenitudo gentium, id est non solum aliqui
particulariter ex gentibus, sicut tunc
convertebantur sed, vel pro toto vel pro
maiori parte, in omnibus gentibus Ecclesia
fundaretur. Ps. XXIII, 1. — domini est terra
et plenitudo eius. Dicuntur autem gentiles
ad fidem conversi intrare, quasi ex
exterioribus et visibilibus rebus quae
venerabantur, in spirituali et voluntate
divina. Ps. XCIX, 2. — introite in conspectu
eius in exultatione. Et est notandum quod
hoc adverbium donec potest designare
causam excaecationis Iudaeorum. Propter
hoc enim permisit Deus eos excaecari, ut
plenitudo gentium intraret, sicut patet ex
supradictis. Potest etiam designare
terminum, quia videlicet usque tunc caecitas
Iudaeorum durabit, quousque plenitudo
gentium ad fidem intrabit. Et huic concordat
quod infra subdit de futuro remedio
Iudaeorum, cum dicit et tunc, scilicet cum
plenitudo gentium intraverit, omnis Israel
salvus fiet, non particulariter sicut modo,
sed universaliter omnes. Os. I, 7. — salvabo
eos in domino Deo suo. Mich. ult. :
revertetur et miserebitur nostri. Deinde cum
dicit sicut scriptum est, etc., probat quod
raison pour laquelle je vous ai amenés à
considérer la bonté et la sévérité de Dieu,
c’est que ne veux pas, frères, que vous
ignoriez ce mystère, car vous ne pouvez pas
comprendre tous les mystères. C’est en effet
le propre des parfaits, auxquels le Seigneur dit
: "Pour vous, il vous a été donné de connaître
le mystère du royaume de Dieu." — "Je ne
vous cacherai pas les secrets de Dieu " Mais
l’ignorance du mystère vous serait
dommageable "Si quelqu’un l’ignore, il sera
ignoré."
914. — B. <L’Apôtre> donne ensuite la
raison de son intention : afin que vous ne
soyez pas sages à vos propres yeux, c’est-à-
dire pour que vous ne présumiez pas de votre
propre sens et qu’en condamnant les autres
d’après ce sens, vous vous préfériez à eux :
"Ne soyez pas prudents à vos propres yeux."
— "Malheur à vous qui êtes sages à vos yeux,
et qui êtes prudents vis-à-vis de vous-mêmes
1!"
915. — C. Enfin <l’Apôtre> expose ce qu’il
veut établir :
1. Premièrement, quant à la chute particulière
des Juifs, lorsqu’il dit : c’est que
l’aveuglement est venu pour Israël, non pas
dans sa totalité, mais en partie, comme on l’a
montré plus haut. <Il est écrit dans le livre d’>
Isaïe : "Aveugle le cœur de ce peuple "
2. Deuxièmement, il indique le terme de cet
aveuglement, en disant : jusqu'à ce que soit
entrée, à savoir dans la foi, la plénitude des
nations païennes, c’est-à-dire non seulement
quelques-unes d’entre les nations païennes en
particulier, comme celles qui s’étaient alors
converties, mais que dans la totalité, ou au
moins dans la plus grande partie, l’Eglise soit
fondée : "Au Seigneur est la terre et sa
plénitude." Or, on dit des Gentils convertis à
la foi qu’ils entrent, comme si à partir des
choses extérieures et visibles, qui étaient
l’objet de leur vénération, <ils entraient> dans
la réalité spirituelle et dans la volonté divine
"Entrez en sa présence dans l’exultation."
916. — Il faut noter que cette conjonction
"jusqu’à ce que" peut désigner la cause de
l’aveuglement des Juifs836
. Car Dieu a permis
836
Voir Glosa in Rom. XI, 25 (GPL, col. 1489 A).
dixerat de futura salute Iudaeorum. Et primo
probat hoc per auctoritatem; secundo per
rationem, ibi secundum Evangelium meum,
et cetera. Dicit ergo primo : dico quod
omnis Israel salvus fiet, sicut scriptum est
Is. LVI, 20 ubi nostra littera sic habet :
veniet ex Sion redemptor, et eis qui redeunt
ad Iacob, hoc foedus meum cum eis, dicit
dominus. Sed apostolus hoc inducit
secundum litteram Lxx et tangit tria verba
hic posita. Primo salvatoris adventum, cum
dicit veniet, Deus scilicet humanatus ad
salvandum nos, ex Sion, id est ex populo
Iudaeorum, qui significatur per Sion, quae
erat arx Ierusalem, quae est metropolis
Iudaeae. Unde dicitur Zachariae IX, 9. —
exulta satis, filia Sion, iubila, filia
Ierusalem, ecce rex tuus venit tibi, et cetera.
Io. IV, 22. — salus ex Iudaeis est. Vel dicit,
ex Sion eum venire, non quia sit ibi natus
sed quia inde doctrina eius exivit in
universum mundum, per hoc quod apostoli
in coenaculo Sion spiritum sanctum
receperunt. Is. II, 3. — de Sion exibit lex.
Secundo ponit salutem per Christum Iudaeis
oblatam, dicens qui eripiat, et avertat
impietatem a Iacob. Et potest ereptio referri
ad liberationem a poena. Ps. CXIV, 8. —
eripiet animam meam de morte. Quod vero
dicit avertet impietatem a Iacob, potest
referri ad liberationem a culpa. Ps. XIII, 7.
— avertet dominus captivitatem plebi suae.
Vel utrumque refertur ad liberationem a
culpa sed dicit qui eripiat, propter paucos,
qui nunc difficulter quasi cum quadam
violentia convertuntur. Amos III 12. —
quomodo si eruat pastor de ore leonis duo
crura, aut extremum auriculae, sic eruentur
filii Israel. Dicit autem avertet impietatem a
Iacob, ad ostendendum facilitatem
conversionis Iudaeorum in fine mundi.
Mich. ult. : quis Deus similis tui, qui aufers
iniquitatem, et transfers peccatum
reliquiarum haereditatis tuae ? Tertio
ostendit modum salutis, cum dicit et hoc
testamentum, scilicet novum, erit illis a me
cum abstulero peccata eorum. Vetus enim
qu’ils soient aveuglés pour que la plénitude
des nations entre, comme on le voit d’après ce
qui précède. Il peut aussi désigner le terme, à
savoir que l’aveuglement des Juifs durera
jusqu’alors, jusqu’à ce que la plénitude des
nations entre dans la foi. Et cette
interprétation s’accorde avec ce que
<l’Apôtre> ajoute ci-après à propos du
remède futur des Juifs, lorsqu’il dit : 26 et
alors, c’est-à-dire lorsque la plénitude des
nations sera entrée, tout Israël sera sauvé, non
en partie comme jusqu’à maintenant, mais
tous universellement : "Je les sauverai par le
Seigneur leur Dieu " — " Il reviendra et il
aura pitié de nous."
917. — II. Ensuite, lorsqu’il dit : selon qu’il
est écrit, <l’Apôtre> prouve ce qu’il avait dit
à propos du salut futur des Juifs.
Et :
A) D’abord, par l’autorité <scripturaire>.
B) Puis, par un raisonnement [n° 921] Selon
l’Evangile, etc.
918. — A. Je commence donc par dire que
tout Israël sera sauvé, selon qu’il est écrit
dans <le livre d’>Isaïe, là où notre version lit :
"Un rédempteur viendra de Sion, et pour ceux
qui dans Jacob reviennent de l’iniquité, dit le
Seigneur. Voici mon alliance avec eux, dit le
Seigneur." Mais l’Apôtre cite ce passage
selon la version de la Septante837
et fait
allusion à trois choses mentionnées ici.
1. En premier lieu, à l’avènement du Sauveur,
lorsqu’il dit : Il viendra, à savoir Dieu fait
homme pour nous sauver, de Sion, c’est-à-
dire du peuple juif, lequel est indiqué par le
<mot> "Sion", qui était la citadelle de
Jérusalem, la métropole de la Judée. Ce qui
fait dire <au prophète> Zacharie : <
pleinement, fille de Sion; jubile, fille de
Jérusalem; voici que ton roi viendra à toi,
juste et sauveur." <Et à l’Apôtre> Jean : "Le
salut vient des Juifs." Ou bien il dit qu’il
viendra de Sion, non parce qu’il y est né, mais
parce que c’est de là que sa doctrine s’est
répandue dans le monde entier, après que les
apôtres eurent reçu l’Esprit-Saint au cénacle
de Sion : "De Sion sortira la Loi."
837
Voir éd. Alfred Rahlfs, vol. II, p. 646. — Kai héxci heneken Siôn ho rhuomenos kai apostrepses
asebezas apo Iakôb.
testamentum peccata non auferebat, quia, ut
dicitur Hebr. X, 4. — impossibile est
sanguine taurorum et hircorum auferri
peccata. Et ideo propter imperfectionem
veteris testamenti promittitur eis novum
testamentum. Ier. XXXI, 31. — feriam
domui Israel, et domui Iuda foedus novum.
Quod quidem habebit efficaciam ad
remissionem peccati per sanguinem Christi.
Matth. c. XXVI, 28. — hic sanguis meus
novi testamenti, qui pro multis effundetur in
remissionem peccatorum. Mich. ult. :
deponet iniquitates nostras, et proiiciet in
profundum maris omnia peccata nostra.
Deinde, cum dicit secundum Evangelium
meum, etc., probat propositum per rationem.
Et primo inducit probationem; secundo
removet obiectionem, ibi sine poenitentia
enim. Dicit ergo primo quod eorum peccata
auferentur et quod postquam peccata
habent, manifestum est quod sunt inimici
Christi. Secundum Evangelium quidem
inimici, id est quantum ad doctrinam
Evangelii pertinet, quam impugnant,
propter vos, id est ad utilitatem vestri cedit,
ut supra dictum est. Unde dicitur Lc. XIX,
27. — verumtamen inimicos meos illos qui
noluerunt me regnare super se, adducite
huc, et interficite ante me. Io. XV, 24. —
nunc autem et viderunt, et oderunt me, et
patrem meum. Vel secundum Evangelium
dicit, quod eorum inimicitia ad utilitatem
Evangelii pertinet, cuius praedicatio,
occasione talis inimicitiae, ubique
diffunditur. Col. I, 5 s. : in verbo veritatis
Evangelii, quod pervenit ad vos, sicut et in
universo mundo est, fructificat et crescit.
Sed sunt charissimi Deo propter patres, et
hoc secundum electionem, quia scilicet ob
gratiam patrum eorum semen elegit. Deut.
IV, 37. — dilexit patres tuos, et elegit
semen eorum post eos. Quod non est sic
intelligendum quasi merita praestita patribus
fuerint causa aeternae electionis filiorum
sed quia Deus ab aeterno elegit gratis et
patres et filios, hoc tamen ordine ut filii
propter patres consequerentur salutem, non
quasi merita patrum sufficerent ad filiorum
salutem, sed per quamdam abundantiam
divinae gratiae et misericordiae hoc dicit,
919. — 2. En deuxième lieu, <il fait allusion>
au salut offert aux Juifs par le Christ, en
disant : celui qui arrachera et qui détournera
l’impiété de Jacob. L’arrache ment peut se
rapporter à la libération de la peine : "Il a
arraché mon âme à la mort " tandis que le
détournement de l’impiété de Jacob peut se
rapporter à la libération de la faute : "Le
Seigneur détournera la captivité de son
peuple." Ou bien l’un et l’autre se rapportent
à la libération de la faute, mais <l’Apôtre> dit
: celui qui arrachera, à cause du petit nombre
qui s’est maintenant converti, avec difficulté
et comme avec une sorte de violence
"Comme si le pasteur arrachait de la gueule
du lion deux jambes ou un bout d’oreille,
ainsi seront arrachés les fils d’Israël." Il dit
d’autre part : qui détournera l’impiété de
Jacob, pour montrer la facilité de la
conversion des Juifs à la fin du monde : "Quel
Dieu est semblable à toi, qui ôtes l’iniquité, et
passes sous silence le péché des restes de ton
héritage
920. — 3. En troisième lieu, <il montre> le
mode du salut, lorsqu’il dit : 27. — Et telle
sera mon alliance, à savoir la nouvelle, avec
eux, lorsque j’aurai enlevé leurs péchés. Car
l’ancienne Alliance n’enlevait pas les péchés,
parce que selon ce passage de <l’épître aux>
Hébreux : "Il est impossible que les péchés
soient enlevés par du sang de taureaux et de
boucs." Voilà pourquoi, à cause de
l’imperfection de l’ancienne Alliance, une
nouvelle Alliance leur est promise : "Je ferai
une nouvelle Alliance avec la maison d’Israël
et avec la maison de Juda." Cette Alliance
nouvelle sera efficace pour la rémission du
péché par le sang du Christ : "Ceci est mon
sang, le sang de la nouvelle Alliance, qui sera
répandu pour une multitude en rémission des
péchés." — "Il laissera de côté nos iniquités,
et il jettera au fond de la mer tous nos
péchés."
921. — B. En disant ensuite : 28 Selon
l’Evangile, etc., <l’Apôtre> prouve sa
proposition par un raisonnement. Et
1) Il commence par donner sa preuve.
2) Puis, il écarte une objection [n° 924] : 29
Car les dons et l’appel de Dieu sont sans
repentance.
quae intantum patribus est exhibita, ut
propter promissiones eis factas, etiam filii
salvarentur. Vel intelligendum est secundum
electionem, id est quantum ad electos ex illo
populo, sicut supra dictum est, electio
consecuta est. Si autem sunt domino
charissimi, rationabile est quod a Deo
salventur, secundum illud Is. LXIV, 4. —
oculus non vidit, Deus, absque te quae
praeparasti, et cetera. Deinde cum dicit sine
poenitentia enim sunt, etc., excludit
obviationem. Posset enim aliquis obviando
dicere quod Iudaei, et si olim fuerint
charissimi propter patres, tamen inimicitia,
quam contra Evangelium exercent, prohibet
ne in futurum salventur. Sed hoc apostolus
falsum esse asserit, dicens sine poenitentia
enim sunt, scilicet dona et vocatio Dei,
quasi dicat : quod Deus aliquid aliquibus
donet, vel aliquos vocet, hoc est sine
poenitentia, quia de hoc Deum non poenitet,
secundum illud I Reg. c. XV, 29. —
triumphator in Israel non parcet, nec
poenitudine flectetur. Ps. CIX, 5. — iuravit
dominus, et non poenitebit eum. Sed videtur
falsum. Dicit enim dominus Gen. VI, 6. —
poenitet me fecisse hominem. Et Ier. XVIII,
9 s. : loquar de gente et de regno, ut
aedificem et plantem illud. Si fecerit malum
in oculis meis, poenitentiam agam super
bonum quod locutus sum ut facerem ei. Sed
dicendum est quod sicut dominus irasci
dicitur, non propter hoc quod in eo sit
commotio irae sed quia ad modum irati se
habet quantum ad punitionis effectum, ita
quandoque poenitere dicitur, non quasi in eo
sit poenitentiae commutatio sed quia ad
modum poenitentis se habet dum mutat
quod fecerat. Sed adhuc videtur hoc quod
dona et vocatio non sint sine poenitentia,
quia dona divinitus concessa, frequenter
amittuntur, secundum illud Matth. XXV, 28.
— tollite itaque ab eo talentum, et date ei
qui habet decem talenta. Vocatio enim Dei
etiam quandoque mutari videtur, cum
scriptum sit Matth. XXII, 14. — multi sunt
vocati, pauci vero electi. Sed dicendum est
quod donum hic accipitur pro promissione,
quae fit secundum Dei praescientiam vel
praedestinationem. Vocatio autem hic
922. — 1. Il commence donc par dire que
leurs péchés seront enlevés et qu’après avoir
péché ils sont manifestement ennemis du
Christ. Selon l’Evangile, il est vrai, ils sont
ennemis, c’est-à-dire en ce qui concerne la
doctrine de l’Evangile qu’ils attaquent, à
cause de vous, c’est-à-dire que <leur attaque>
tourne à votre avantage, comme on l’a dit plus
haut." D’où ces paroles de Luc : "Quant à mes
ennemis, qui n’ont pas voulu que je règne sur
eux, amenez-les ici et tuez-les devant moi "
— "Mais main tenant ils ont vu <mes
œuvres>, et ont haï et moi et mon Père " Ou
bien il dit Selon l’Evangile, parce que leur
inimitié est utile à l’Evangile, dont la
prédication, à cause de cette inimitié, se
répand de tous côtés : "Par la parole de la
vérité de l’Evangile, qui vous est parvenu,
comme il est aussi répandu dans le monde
entier, où il fructifie et croît."
923. — Mais ils sont très aimés de Dieu à
cause de leurs pères, et cela selon l’élection,
c’est-à-dire qu’à cause de la grâce de leurs
pères <Dieu> a choisi leur postérité : "Il a
choisi leur postérité après eux." Il ne faut pas
comprendre ces paroles comme si les mérites
accordés aux pères eussent été la cause de
l’élection éternelle des fils, mais que Dieu de
toute éternité a choisi gratuitement les pères et
les fils, en ordonnant cependant que les fils
obtiendraient le salut à cause de leurs pères;
non point comme si les mérites des pères
suffisaient au salut des fils, mais <l’Apôtre>
dit cela à cause d’une surabondance de la
grâce divine et de la miséricorde, que <Dieu>
a si largement prodiguée aux pères, qu’en
raison des promesses qui leur ont été faites,
leurs fils aussi seraient sauvés. Ou bien il faut
comprendre : selon l’élection, c’est-à-dire
quant aux élus de ce peuple, comme on l’a dit
plus haut : "Ce que recherchait Israël il ne l’a
pas obtenu; mais l’élection l’a obtenu " S’ils
sont très aimés du Seigneur, il est raisonnable
qu’ils soient sauvés par Dieu, selon ce
passage d’Isaïe "L’œil n’a pas vu, ô Dieu, toi
excepté, ce que tu as préparé à ceux qui
t’attendent."
924. — 2. Lorsqu’il dit : 29 Car les dons et
l’appel de Dieu sont sans repentance, etc.,
accipitur pro electione, quia propter
certitudinem utriusque, quod Deus promittit,
iam quodammodo dat : et quos elegit, iam
quodammodo vocat. Et tamen ipsum
temporale Dei donum et temporalis vocatio,
non irritatur per mutationem Dei quasi
poenitentis sed per mutationem hominis, qui
gratiam Dei abiicit, secundum illud Hebr.
XII, v. 15. — contemplantes ne quis desit
gratiae Dei. Potest etiam quod hic dicitur
aliter intelligi, ut dicamus quod dona Dei
quae dantur in Baptismo et vocatio qua
baptizatus vocatur ad gratiam, sunt sine
poenitentia hominis baptizati, quod quidem
hic inducitur, ne aliquis desperet de futura
Iudaeorum salute, propter hoc quod non
videntur de peccato suo poenitere. Sed
contra hoc quod dicitur, est quod Petrus
dicit Act. II, 38. — poenitentiam agite, et
baptizetur unusquisque vestrum. Sed
dicendum est quod duplex est poenitentia :
interior et exterior. Interior quidem consistit
in contritione cordis, qua quis dolet de
peccatis praeteritis, et talis poenitentia
requiritur a baptizato, quia, ut Augustinus
dicit in libro de poenitentia : nemo suae
voluntatis arbiter constitutus, potest novam
vitam inchoare, nisi poeniteat eum veteris
vitae, alioquin fictus ad Baptismum accedit.
Exterior vero poenitentia consistit in
exteriori satisfactione quae a baptizato non
requiritur, quia per gratiam baptismalem
liberatur homo non solum a culpa sed etiam
a tota poena per virtutem passionis Christi,
qui pro peccatis omnium satisfecit, sicut
supra VI, 3 dictum est : quicumque baptizati
sumus in Christo Iesu, in morte ipsius
baptizati sumus. Unde dicitur Tit. III, 5 s. :
per lavacrum regenerationis et renovationis
spiritus sancti, quem effudit in nos abunde.
Sed cum claves Ecclesiae et omnia alia
sacramenta in virtute passionis Christi
operentur, videtur quod pari ratione omnia
alia sacramenta liberent hominem a culpa et
a tota poena. Sed dicendum est, quod passio
Christi operatur in Baptismo per modum
<l’Apôtre> écarte une objection. En effet, on
pourrait objecter en disant : que les Juifs, bien
qu’autrefois très aimés <de Dieu> à cause de
leurs pères, étaient cependant empêchés
d’être sauvés dans l’avenir, à cause de
l’inimitié dont ils faisaient preuve contre
l’Evangile. Mais l’Apôtre affirme que cette
objection est erronée, en disant : Car les dons
et l’appel de Dieu sont sans repentance,
autrement dit quand Dieu donne aux uns ou
qu’il appelle les autres, c’est sans repentance,
parce que Dieu ne s’en repent pas, selon ce
passage du premier livre des Rois : "Le
triomphateur en Israël n’épargnera point et il
ne sera pas touché de repentir." <Et selon ce
verset d’un psaume> : "Le Seigneur l’a juré et
il ne s’en repentira point."
925. — Mais cela semble faux, car le
Seigneur dit : "Je me repens d’avoir fait
l’homme." Et encore : "Je parlerai d’une
nation et d’un royaume, afin de l’édifier et de
l’affermir. Et s’il fait le mal à mes yeux et
n’écoute point ma voix, je me repentirai du
bien que j’ai dit que je lui ferai."
Réponse. De la même manière qu’on dit que
le Seigneur s’est mis en colère838
, non qu’il y
ait en lui le trouble de la colère, mais parce
qu’il se comporte à la manière d’un homme
irrité quant à l’effet de la punition, ainsi dit-on
parfois qu’il se repent, non comme s’il y avait
en lui un changement <dû au> repentir, mais
parce qu’il se comporte à la manière de celui
qui se repent, quand il change ce qu’il avait
fait.
926. — Mais il semble encore que les dons et
l’appel ne soient pas sans repentance, puisque
les dons divinement accordés se perdent
fréquemment, selon cette parole de Matthieu :
"Reprenez-lui donc le talent et donnez-le à
celui qui a dix talents." L’appel de Dieu est
aussi quelquefois, semble-t-il, sujet au
changement, puisqu’il est écrit : "Beaucoup
sont appelés, mais peu sont élus."
On répondra que <le mot> "don" est pris ici
pour la promesse, qui se fait selon la
prescience ou la prédestination de Dieu;
838 Lieux parallèles : I Contra Gentiles c. 89; 3 Sentences dist. 1, Q. 1, a. 2, sol. 4; Super Psalmos, in Ps.
5, lld; 17, 9; 17, 16; 29, 6; 37,
cuiusdam generationis, quae requirit ut
homo totaliter priori vitae moriatur, ad hoc
ut novam vitam accipiat. Et ideo tollitur in
Baptismo totus reatus poenae, qui pertinet
ad vetustatem prioris vitae. Sed in aliis
sacramentis operatur virtus passionis Christi
per modum sanationis ut in poenitentia.
Sanatio autem non requirit, ut statim omnes
infirmitatis reliquiae auferantur. Et eadem
ratio est in aliis sacramentis. Sed cum
confessio peccatorum pertineat ad
exteriorem poenitentiam, quaeri potest
utrum a baptizato confessio peccatorum
requiratur : et videtur quod sic. Dicitur enim
Matth. III, 6, quod baptizabantur homines a
Ioanne, confitentes peccata sua. Sed
dicendum est quod Baptismus Ioannis erat
Baptismus poenitentiae, quia scilicet
accipiendo illum Baptismum quodammodo
se profitebantur poenitentiam accepturos de
peccato suo et ideo conveniens erat ut
confiterentur, ut secundum modum peccati
eis poenitentia statueretur. Sed Baptismus
Christi est Baptismus remissionis omnium
peccatorum, ita quod non restat baptizato
aliqua satisfactio pro peccatis praeteritis,
propter quod nulla est confessionis vocalis
necessitas. Ad hoc enim necessaria est
tandis que <le mot> "appel" est pris ici pour
l’élection, attendu qu’en raison de la certitude
de l’un et de l’autre Dieu donne déjà en
quelque sorte ce qu’il promet, et il appelle
déjà en quelque sorte ceux qu’il a choisis.
Toutefois le don de Dieu, même temporel, et
son appel temporel, ne sont pas annulés par le
changement de Dieu, qui se repentirait, mais
par le changement de l’homme, qui rejette la
grâce de Dieu, selon ce passage de <l’épître
aux> Hébreux : "Veillant à ce que personne
ne manque à la grâce de Dieu."
927. — On peut encore839
comprendre ce
qu’on vient de dire d’une autre manière Nous
disons que les dons de Dieu accordés dans le
baptême et l’appel par lequel le baptisé est
appelé à la grâce sont sans repentance du côté
de l’homme baptisé840
. <L’Apôtre> parlerait
ainsi pour qu’on ne désespère pas du salut
futur des Juifs, étant donné qu’ils ne semblent
pas se repentir de leur péché841
.
Mais en sens contraire Pierre dit ces paroles :
"Faites pénitence, et que chacun de vous soit
baptisé au nom de Jésus-Christ, en rémission
de vos péchés, et vous recevrez le don de
l’Esprit-Saint."
Il faut répondre qu’il y a une double pénitence
: l’une intérieure, l’autre extérieure842
. <La
839
Lieux parallèles : 5. Th. 3a, Q. 49, a. 3, sol. 2; Q. 68, a. 5; Sentences dist. 19, Q. 1, a. 3, Q. 2, sol. 1;
4 Cont. Gentiles c. 59. 840
Lieux parallèles Somme Théologique 3a, Q. 62, a. 5; Q. 64, a. 2, sol. 2; 4 Sentences dise. 1, Q. I, a.
4, Q. 3. 841 Voir Glosa in Rom. XI, 29 (GPL, col. 1490 D).
842 Aux paragraphes 924-926, saint Thomas a envisagé une première interprétation de l’affirmation
paulinienne, " les dons de Dieu sont sans repentance s; interprétation classique, selon laquelle il faut
comprendre que Dieu ne change pas et que ses promesses sont irrévocables." C’est d’ailleurs ainsi que
le père Spicq traduit le terme grec amétamélétos employé par saint Paul, terme rare dans le Nouveau
Testament (deux occurrences) et ignoré de l’Ancien Testament (Lexique théologique du Nouveau
Testament, p. 105-109). S’il y a changement, c’est du côté des hommes. Il examine main tenant une
seconde interprétation, également possible, selon laquelle " sans repentance" se rapporterait aux
hommes, Dieu accordant ses dons aux hommes sans exiger d’eux qu’ils se repentent, c’est-â-dire sans
qu’ils fassent pénitence. Cette deuxième interprétation, qu’illustrerait le cas du baptême et qui
autoriserait à espérer le salut des Juifs même s’ils ne font pas publiquement pénitence pour avoir rejeté
Jésus, se justifie par le double sens du latin paenitentia qui traduit le grec amétamélêtos. Ici même, en
effet, paenitentia est rendu en 924-926 par " repentance", et en 927 par " pénitence", comme l’exige le
contexte. On passe ainsi d’un sens neutre et objectif où sine paenitentia signifie "sans se raviser",
donc" définïtif", à un sens moral et subjectif où cette locution signifie " sans pénitence", c’est-à-dire "
sans éprouver de peine et de regret pour le péché commis et " sans être puni pour l’acte fautif." La
raison en est que le latin paenitentia semble renvoyer au latin pœna, la (peine" (que l’on ressent ou que
l’on subit), bien que le second s’écrive avec un o (pœna), alors que le premier doit s’écrire avec un a
confessio in sacramento poenitentiae, ut
sacerdos per potestatem clavium
convenienter poenitentem solvat vel liget.
Deinde cum dicit sicut enim aliquando, etc.,
assignat rationem futurae salutis Iudaeorum
post eorum incredulitatem. Et primo ponit
similitudinem inter utriusque populi
salutem; secundo huius similitudinis causam
ostendit, ibi conclusit enim Deus, et cetera.
Dicit ergo primo : ita dico quod omnis Israel
salvus fiet, quamvis nunc sint inimici. Sicut
enim et vos, gentiles, aliquando non
credidistis Deo. Eph. II, 12. — eratis illo
tempore sine Deo in hoc mundo; nunc
autem misericordiam consecuti estis, infra
c. XV, 9. — gentes autem super
misericordia honorare Deum. Os. II, 23. —
miserebor eius quae fuit absque
misericordia. Et hoc propter eorum
incredulitatem, quae scilicet fuit occasio
vestrae salutis, ut supra dictum est. Ita et
isti, scilicet Iudaei, nunc, scilicet tempore
gratiae, non crediderunt, scilicet Christo. Io.
pénitence> intérieure consiste dans la
contrition du cœur, par laquelle on s’afflige
de ses péchés passés, et cette pénitence est
requise chez le baptisé, parce que, comme le
dit Augustin dans <son sermon sur> la
pénitence "Nul, à partir du moment où il est
établi arbitre de sa volonté, ne peut
commencer une vie nouvelle à moins qu’il ne
se repente de l’ancienne843
", autrement il
s’approcherait du baptême avec simulation
(fictus)844
. La pénitence extérieure, en
revanche, consiste dans la satisfaction
extérieure qui n’est pas requise chez le
baptisé, parce que par la grâce baptismale
l’homme est libéré non seulement de la
faute845
, mais aussi de toute la peine846
, par la
vertu de la passion du Christ qui a satisfait
pour les péchés de tous, comme on l’a dit plus
haut : "nous tous qui avons été baptisés en
Jésus-Christ, c’est en sa mort que nous avons
été baptisés." Aussi est-il dit : "Par le baptême
de régénération et de renouvellement de
l’Esprit-Saint, qu’il a répandu sur nous en
(paenitentia), qui est, semble-t-il, la graphie la plus ancienne et la plus correcte, et renvoie peut-être à
paene, "presque", ou à penitus, "entièrement." Mais la Vulgate et les médiévaux écrivent pœnitentia;
ils décom posent le mot en pœnam tenere, " se tenir dans la peine", et l’utilisent pour traduire le grec
métanoia, très fréquent dans les deux Testaments, avec le sens de " faire pénitence." Il est clair qu’un
tel sens ne peut s’appliquer à Dieu. Appliqué à l’homme, comme l’envisage maintenant saint Thomas,
il désigne deux choses distinctes, qui toutes deux se disent en français " pénitence." L’une, la
contrition, que saint Thomas va nommer la "pénitence inté rieure", l’autre qu’il nomme "pénitence
extérieure" : elle consiste dans la" peine" que le confesseur impose au pécheur; peine à l’obli gation de
laquelle il doit satisfaire pour que le sacrement de péni tence soit complet (la satisfaction fait partie
intégrante du sacrement). Or, dans le sacrement du baptême, qui efface toutes les fautes (originelle et
actuelles), la satisfaction, ou pénitence exté rieure, n’est pas demandée, seule est requise la contrition
ou péni tence intérieure. On peut donc dire, en ce sens, que le don du salut, dans le baptême, est sine
paenitentia, et donc que le don du salut aux juifs sera également "sans pénitence" extérieure et
imposée. Evidemment, ce salut ne leur sera pas donné sans le baptême. Saint Thomas est ainsi amené
à traiter brièvement du baptême, de la confession des péchés, de la satisfaction, aux paragraphes 928 et
929, dans ce qui peut paraître une digression, mais que requiert l’extrême complexité des questions. 843
Voir SAINT AUGUSTIN, Sermo CCCLI, ii, 2 (PL 39, 1537). L’authenticité de ce sermon est
considérée comme douteuse par quelques-uns. Voir Patrick VERBRAKEN, Etudes critiques sur les
sermons de saint Augustin, p. 147. 844
Lieux parallèles Somme Théologique 3a, Q. 69, a. 9 et 10; Q. 87, a. 3, sol. 2; 4 Sentences dist. I, Q.
2, a. 4, q 1, sol. 3; dist. 4, Q. 2, a. 1, Q. I, sol. 3; Q. 3, a. 2, q 1, 2, 3; dist. l2, Q. 2, a. l, q dist. 15, Q. 1,
a. 3, Q. 3, sol. 2. 845
Lieux parallèles Somme Théologique 3a, Q. 69, a. 1; Q. 79, a. 5, sol. 1; 2 Sentences dist. 32, Q. 1,
a. 1, arg. I, sed contr. ; a. 2, sol. 3; 4 Sentences dist. 4, Q. 2, a. 1, q Q. 2, a. 1, q Cons. Cens., c. 59, 72. 846
Lieux parallèles : Somme Théologique 3a, Q. 49, a. 3, sol. 2; Q. 68, a. 5; Q. 69, a. 2; Q. 86, a. 4,
sol. 3; 3 Sentences dist. 19, Q. 1, a. 3, Q. 2; 4 Sentences dist. 4, Q. 2, a. 1, Q. 2; dist. 14, Q. 2, a. 1, Q.
2, sol. 3, dist. 18, Q. 1, a. 3, Q. 2.
VIII, 43. — quare non creditis mihi ? Et
hoc est quod subdit in vestram
misericordiam, id est in gratiam Christi, per
quam misericordiam consecuti estis. Tit. III,
v. 5. — secundum suam misericordiam
salvos nos fecit. Vel non crediderunt ut per
hoc pervenirent in vestram misericordiam.
Vel non crediderunt, quod in vestram
misericordiam occasionaliter cessit, ut et
ipsi quandoque misericordiam
consequantur. Is. XIV, v. 1. — miserebitur
dominus Iacob. Deinde, cum dicit conclusit
enim, etc., assignat rationem huius
similitudinis, quia scilicet Deus voluit, ut
sua misericordia in omnibus locum haberet.
Et hoc est quod subdit conclusit enim Deus,
id est concludi permisit, omnia, id est omne
hominum genus, tam Iudaeos quam gentiles,
in incredulitate, sicut in quadam catena
erroris. Sap. XVII, 7. — una catena
tenebrarum omnes erant colligati. Ut
omnium misereatur, id est ut in omni genere
hominum sua misericordia locum habeat.
Sap. XI, 24. — misereris omnium, domine.
Quod quidem non est extendendum ad
Daemones secundum errorem Origenis, nec
etiam quantum ad omnes homines
singillatim, sed ad omnia genera hominum.
Fit enim hic distributio pro generibus
singulorum et non pro singulis generum.
Ideo autem Deus vult omnes per suam
misericordiam salvari, ut ex hoc humilientur
et suam salutem non sibi, sed Deo
adscribant. Os. c. XIII, 9. — perditio tua in
te, Israel, tantummodo ex me auxilium tuum.
Supra III, 19. — ut omne os obstruatur, et
subditus fiat omnis mundus Deo.
abondance par Jésus-Christ Notre
Sauveur847
."
928. Cependant,848
comme les clefs de
l’Eglise et tous les autres sacrements opèrent
aussi par la vertu de la passion du Christ, il
semble que pour la même raison tous les
autres sacrements libèrent l’homme de la
faute et de toute la peine.
Il faut répondre que la passion du Christ opère
dans le baptême par mode de régénération, ce
qui requiert de l’homme qu’il meure
totalement à la première vie pour recevoir la
vie nouvelle. C’est la raison pour laquelle
dans le baptême toute l’obligation à la peine,
qui appartient à la vétusté de la première vie,
est enlevée. Mais dans les autres sacrements
la vertu de la passion du Christ opère par
mode de guérison, comme dans la pénitence.
Or la guérison ne requiert pas qu’aussitôt tous
les restes de l’infirmité soient enlevés. La
même raison vaut pour les autres sacrements.
929. — Toutefois, comme la confession des
péchés appartient à la pénitence extérieure, on
peut se demander si la confession des péchés
est requise chez le baptisé. Il semble que oui,
car il est dit dans <l’évangile de> Matthieu
que les gens "étaient baptisés par Jean en
confessant leurs péchés."
Il faut répondre que le baptême de Jean était
un baptême de pénitence, parce qu’en le
recevant on s’engageait en quelque sorte à
faire pénitence de ses péchés849
. Il convenait
donc qu’ils confessent <leurs péchés> afin
qu’une pénitence proportionnée à la mesure
du péché leur soit infligée. Mais le baptême
du Christ est le baptême de la rémission de
tous les péchés, en sorte qu’il ne reste à
acquitter chez le baptisé aucune satisfaction
pour les péchés passés. Voilà pourquoi la
confession vocale n’est nullement nécessaire.
Si cette confession est nécessaire pour le
sacrement de pénitence, c’est afin que le
prêtre, par le pouvoir des clefs, lie ou délie le
pénitent comme il convient (convenienter)850
.
847
Sentences dist. 14, Q. 2, a. 1, Q. 2; 3 Contra Gentiles c. 158. 848
Lieux parallèles Somme Théologique 1a-2ae, Q. 87, a. 6; 3a, Q. 86, a. 4 849
Lieux parallèles : Somme Théologique 3a, Q. 38, a. 3; 4 Sentences dise. 2, Q. 2, a. 2. 850
Le mot "convenienter" sous-entend ici les qualités requises du confesseur science, discernement,
discrétion, prudence, justice, bonté, douceur, etc. Voir in 4 Sentences dist. 17, Q. 3, a. 5 (expositio
textus); S’il. Suppi., Q. 18, a. 4.
930. III. Lorsqu’il dit : 30 De même, en effet,
etc., <l’Apôtre> donne la raison du salut futur
des Juifs après leur incrédulité.
Et :
A) Il expose d’abord une similitude entre le
salut de l’un et l’autre peuple.
B) Puis, il montre la raison de cette similitude
[n° 932] : 32 Car Dieu a renfermé, etc.
931. — A. Il commence donc par dire :
J’affirme que tout Israël sera sauvé, bien que
maintenant ils soient ennemis. De même, en
effet, que jadis vous-mêmes, Gentils, vous
n‘avez pas cru à Dieu ("Vous étiez en ce
temps-là sans Christ, séparés de la cité
d’Israël, étrangers aux alliances, n’ayant point
l’espérance de la promesse, et sans Dieu en ce
monde ") — et que maintenant vous avez
obtenu miséricorde
— (" les nations honorent Dieu pour sa
miséricorde." Et encore "J’aurai pitié de celle
qui fut sans miséricorde ") — et cela à cause
de leur incrédulité, qui fut la cause
occasionnelle de votre salut, comme on l’a dit
plus haut, 3! ainsi eux, c’est-à-dire les Juifs,
maintenant, c’est-à-dire au temps de la grâce,
n'ont pas cru, à savoir au Christ "Pourquoi ne
me croyez-vous pas ?" Et c’est ce que
"Apôtre> ajoute : par suite de la miséricorde
<exercée> envers vous, c’est-à-dire par suite
de la grâce du Christ, par laquelle vous avez
obtenu miséricorde "Il nous a sauvés selon sa
miséricorde." Ou bien n'ont pas cru, afin de
parvenir ainsi à votre miséricorde. Ou encore
: n’ont pas cru, ce qui a tourné
occasionnellement à votre miséricorde, afin
qu’eux aussi obtiennent un jour miséricorde.
— < Le Seigneur aura pitié de Jacob."
932. B. En disant : 32 Car Dieu a renfermé,
etc., <l’Apôtre> donne la raison de cette
similitude : c’est parce que Dieu a voulu que
sa miséricorde ait lieu à l’égard de tous. Tel
est bien ce qu’ajoute <l’Apôtre> : Car Dieu a
renfermé, c’est-à-dire a permis que tout, c’est-
à-dire tout le genre humain, Juifs aussi bien
que Gentils, soit renfermé dans l’incrédulité,
comme dans une chaîne d’erreur "D’une
même chaîne de ténèbres tous étaient liés." —
afin de faire miséricorde à tous, c’est-à-dire
afin que sa miséricorde ait lieu à l’égard de
tout le genre humain : "Tu fais miséricorde â
tous, Seigneur." Parole qu’il ne faut
assurément pas étendre aux démons, selon
l’erreur d’Origène851
, ni même à tous les
hommes pris individuellement, mais à toutes
les classes d’hommes. Car cette extension
(distributio) s’applique aux diverses classes
d’hommes et non à chacun des hommes
compris dans ces classes. Aussi la raison pour
laquelle Dieu veut que tous soient sauvés par
sa miséricorde, c’est afin qu’ils trouvent en
cela un sujet de s’humilier et qu’ils attribuent
leur salut non à eux-mêmes, mais à Dieu : "Ta
perte <vient de toi>, Israël c’est seule ment en
moi qu’est ton secours." <Et encore> : "que
toute bouche soit fermée et que tout le monde
devienne soumis à Dieu "
Lectio 5 Leçon 5 [Versets 33 à 36]
[n° 934] Ô abîme des richesses de la sagesse
et de la science de Dieu ! Que ses jugements
sont incompréhensibles, et ses voies
insondables
[n° 938] 31 Car qui a connu la pensée du
Seigneur ? Ou qui a été son conseiller ?
[n° 940] Ou qui, le premier, lui a donné, et
sera rétribué ?
[n° 942] Puisque c’est de lui, et par lui, et en
lui, que sont toutes choses; à lui la gloire dans
les siècles des siècles. Amen.
[86218] Super Rom., cap. 11 l. 5 Supra
apostolus conatus fuit assignare rationem
divinorum iudiciorum quibus tam gentes,
quam Iudaei post incredulitatem
misericordiam consequuntur, nunc, quasi ad
haec investiganda se insufficientem
recognoscens, exclamando divinam
933. — Plus haut, l’Apôtre s’est efforcé de
donner la raison des jugements divins, par
lesquels les nations païennes comme les Juifs
obtiennent miséricorde après leur incrédulité
[n° 903]; comme s’il reconnaissait maintenant
son incapacité à les sonder, il pousse un cri
d’admiration devant l’excellence divine. Et
851 Voir ORIGÈNE, Peri Archon I, 6, 1-2 (SC 252, 202-205).
Saint Thomas (voir Somme Théologique I’, Q. 64, a. 2; Suppl., Q. 99, a. 2 et 3; 3 Sentences dist. 22, Q.
2, a. 2, Q. 2; 3 Contra Gentiles c. 144; Super Matth. 25, 46, éd. Marietti, n° 2113) connaît la doctrine
d’Origène sur I’apocatastase (réconciliation universelle de toute la création, avec les pécheurs, les
damnés et les démons) à travers saint Augustin (De civitate Dei XXI, 17 [n° 37, 448-450]). En réalité, si
l’on trouve trés nettement exprimé chez Origène l’espoir d’un rétablissement universel, sa position
est à nuancer, car il parle le plus souvent par maniére d’hypothéses et non pas par manière
d’affirmations définitives. Le texte cité, le Pers Archon, même s’il offre un exposé complet de ses
idées sur l’apocatastase, ne nous est parvenu que dans une traduction tardive et corrigée de Rufin.
excellentiam admiratur. Et primo admiratur
divinam excellentiam; secundo probat quod
dixerat, ibi quis enim cognovit, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo admiratur
excellentiam divinae sapientiae secundum
se consideratae; secundo per
comparationem ad nos, ibi quam
incomprehensibilia, et cetera. Excellentiam
divinae cognitionis admiratur. Primo
quantum ad altitudinem, dicens o altitudo.
Eccle. VII, 25. — alta profunditas, quis
inveniet eam ? Ier. XVII, 12. — solium
gloriae altitudinis a principio. Haec autem
altitudo attenditur quantum ad tria. Uno
quidem modo quantum ad rem cognitam,
inquantum scilicet Deus seipsum perfecte
cognoscit. Eccli. XXIV, 5. — ego in
altissimis habito. Alio modo quantum ad
modum cognoscendi, inquantum scilicet per
seipsum omnia cognoscit. Ps. ci, 20. —
prospexit de excelso sancto suo, dominus de
caelo in terram aspexit. Tertio quantum ad
certitudinem cognitionis. Eccli. XXIII, 28.
— oculi domini multo plus lucidiores sunt
super solem. Secundo admiratur
excellentiam divinae cognitionis quantum
ad eius plenitudinem, cum dicit divitiarum.
Is. XXXIII, 6. — divitiae salutis sapientia
et scientia. Quae quidem plenitudo
attenditur in tribus. Uno modo in
multitudine cognitorum, quia scilicet omnia
novit. Ioan. ult. : domine, tu omnia scis. Col.
II, 3. — in ipso sunt omnes thesauri
sapientiae Dei absconditi. Alio modo
quantum ad facilitatem cognoscendi, quia
statim omnia intuetur sine inquisitione et
difficultate. Hebr. IV, 13. — omnia nuda et
aperta sunt oculis eius. Tertio quantum ad
copiam cognitionis, quia eam omnibus
communicat affluenter. Iac. I, 5. — si quis
vestrum indiget sapientia, postulet a Deo,
qui dat omnibus affluenter. Tertio admiratur
divinam excellentiam quantum ad
perfectionem, cum dicit sapientiae et
I) II commence par admirer l’excellence
divine.
II) Puis, il prouve ce qu’il avait dit [n° 938] u
Car qui a connu, etc.
I. Sur le premier point, il admire l’excellence
de la sagesse divine
A) D’abord considérée en elle-même.
B) Puis, comparée à nous [n° 937] : Que ses
jugements sont incompréhensibles.
934. — A. Il852
admire l’excellence de la
connaissance divine.
1. En premier lieu, quant à son abîme, en
disant : 33 O abîme des richesses de la
sagesse et de la science de Dieu! — "<Sa>
profondeur est un abîme, qui la trouvera ?" Et
: "Le trône de la gloire est un abîme depuis le
commencement." Or on peut considérer cet
abîme sous trois rapports
a. D’abord, quant à l’objet de la connaissance,
à savoir en tant que Dieu se connaît lui-même
parfaitement853
"C’est moi qui habite dans les
abîmes les plus profonds."
b. Ensuite, quant au mode de connaissance, à
savoir en tant que par lui-même <Dieu>
connaît toutes choses854
— "Il s’est penché du
haut de son lieu saint, le Seigneur a regardé
du ciel sur la terre."
c. Enfin, quant à la certitude de la
connaissance : "Les yeux du Seigneur sont
beaucoup plus lumineux que le soleil,
explorant du regard toutes les voies de
l’homme et le profond de l’abîme, et
examinant les cœurs des hommes jusque dans
les parties les plus cachées."
935. — 2. En deuxième lieu, <l’Apôtre>
admire l’excellence de la connaissance divine
quant à sa plénitude, lorsqu’il dit : des
richesses. — "Sagesse et science sont des
richesses de salut." Cette plénitude peut être
considérée sous trois rapports :
a. D’abord, sous le rapport de la multitude des
choses connues, c’est-à-dire que <Dieu>
connaît toutes choses : "Seigneur, tu sais
toutes choses." — "En lui sont cachés tous les
852
Lieux parallèles Somme Théologique P, Q. 14; De veritate, Q. 2. 853 Lieux parallèles : Somme Théologique Ia, Q. 14, a. 2; De veritate, Q. 2, a. 2; 1 Contra Gentiles c. 47
et 48; 4 Contra Gentiles c. 11; Super Metaphys. 12, lect. 11 (éd. Marierti, n° 2614-2615).
854 Lieux parallèles Somme Théologique P, Q. 14, a. 5; De veritate, Q. 2, a. 4; 1 Contra Cent. 48 et 49.
scientiae Dei. Habet enim sapientiam de
divinis, Iob XII, 16. — apud ipsum est
fortitudo et sapientia, et scientiam de rebus
creatis, Bar. III, 32. — qui scit universa,
novit eam. Deinde cum dicit quam
incomprehensibilia, etc., ostendit
excellentiam divinae sapientiae per
comparationem ad nostrum intellectum. Et
primo quantum ad sapientiam, ad quam
pertinet iudicare et ordinare. Unde dicit
quam incomprehensibilia sunt iudicia eius,
quia scilicet homo non potest
comprehendere rationem divinorum
iudiciorum, quia in sapientia Dei latent. Ps.
XXXV, 7. — iudicia tua abyssus multa. Iob
XI, 7. — forsitan vestigia Dei
comprehendes, et omnipotentem usque ad
perfectum reperies. Secundo quantum ad
scientiam, per quam in rebus operatur. Unde
subdit et investigabiles, id est non perfecte
ab homine vestigabiles, viae eius, id est
processus eius, quibus in creaturis operatur.
Et si ipsae creaturae sint homini notae,
tamen modi quibus Deus in creaturis
operatur ab homine comprehendi non
possunt. Ps. LXXVI, 19. — in mari via tua
et semitae tuae in aquis multis, et vestigia
tua non cognoscentur. Iob XXXVIII, v. 24.
— per quam viam spargitur lux, et cetera.
Deinde cum dicit quis enim, etc., probat
quod dixerat, ad quod inducit duas
auctoritates, quarum una habetur Isaiae XL,
v. 13 ubi secundum litteram nostram sic
legitur : quis adiuvit spiritum domini, aut
quis consiliarius eius fuit ? Loco cuius hic
dicitur quis enim cognovit sensum domini,
aut quis consiliarius eius fuit ? Alia
auctoritas habetur Iob XLI, 2. — quis ante
dedit mihi ut, reddam ei ? Ex loco cuius hic
dicitur aut quis prior dedit illi, et retribuetur
ei ? In his autem verbis et sequentibus
apostolus tria facit. Primo ostendit
trésors de la sagesse et de la science."
b. Ensuite, sous le rapport de sa facilité de
connaître, puisque son regard embrasse
aussitôt toutes choses sans recherche et sans
difficulté : "Tout est à nu et à découvert à ses
yeux."
c. Enfin, sous le rapport de l’abondance de la
connaissance, puisque <Dieu> la
communique à tous en abondance : "Si
quelqu’un d’entre vous manque de sagesse,
qu’il la demande à Dieu, qui donne à tous en
abondance."
936. — 3. En troisième lieu, <l’Apôtre>
admire l’excellence divine quant à sa
perfection, lorsqu’il dit : de sagesse et de
science de Dieu. Car <Dieu> a la sagesse des
choses divines : "En lui sont la force et la
sagesse ", et la science des choses créées
"Celui qui sait toutes choses la connaît855
."
937. — B. Lorsqu’il dit : Que ses jugements
sont incompréhensibles, <l’Apôtre> montre
l’excellence de la sagesse divine en la
comparant à notre intelligence.
1. Et premièrement quant à la sagesse, à
laquelle il appartient de juger et d’ordonner.
Aussi <l’Apôtre> dit-il : Que ses jugements
sont incompréhensibles, c’est-à-dire l’homme
ne peut comprendre la raison des jugements
divins, puisqu’ils se cachent dans la sagesse
de Dieu : "Tes jugements sont un abîme
profond" — "Comprendras-tu peut-être les
traces de Dieu et découvriras-tu la perfection
du Tout-Puissant ?"
2. Deuxièmement, quant à la science, par
laquelle il opère dans les choses. Aussi
ajoute-t-il : et insondables, c’est-à-dire que
l’homme ne peut sonder parfaitement, ses
voies, c’est-à-dire comment il procède pour
opérer dans les créatures. Quand ces créatures
elles-mêmes seraient connues de l’homme,
cependant le mode selon lequel Dieu opère en
elles ne peut être compris de l’homme : "Dans
855 Ba 3, 32. On notera à quelle hauteur métaphysique la rigueur du commentaire thomasien lui
permet de s’élever. Distinguant les trois éléments de l’exclamation paulinienne [ "ô abîme", 2)" des
richesses", 3) de la sagesse et de la science de Dieu s], il rapporte chacun d’eux à un aspect de la
connaissance que Dieu a de lui-même et du monde. Le premier aspect pourrait, en quelque manière,
être rapporté au Père, source abyssale, le deuxième à l’Esprit-Saint, plénitude universelle, le
troisième au Fils, connais sance parfaite et de Dieu (sagesse), et de la création (science).
excellentiam divinae sapientiae per
comparationem ad intellectum nostrum,
dicens : dictum est quod incomprehensibilia
sunt iudicia eius et investigabiles viae eius,
quis enim cognovit sensum domini, per
quem scilicet iudicat et operando procedit;
quasi dicat : nullus, nisi eo revelante. Sap.
IX : sensum tuum quis scire poterit, nisi tu
dederis sapientiam, et miseris spiritum
sanctum tuum de altissimis ? Et 1 Co II, 11.
— quae sunt Dei nemo novit, nisi spiritus
Dei, nobis autem revelavit Deus per
spiritum suum. Secundo ostendit
excellentiam divinae sapientiae, secundum
quod in se habet altitudinem, quae quidem
est altitudo, quae est supremi principii, ad
quod duo pertinent : primo quod non sit ab
alio; secundo quod alia sint ab eo, et haec
ostendit, ibi quoniam ex ipso. Quod autem
sapientia Dei non dependeat ab altiori
principio, ostendit dupliciter. Primo quidem
per hoc quod non est instructa alieno
consilio. Unde dicit aut quis consiliarius
eius fuit ? Quasi diceret : nullus. Ille enim
consilio indiget, qui non plene cognoscit
qualiter sit agendum, quod Deo non
competit. Iob XXVI, 3. — cui dedisti
consilium ? Forsitan illi qui non habet
sapientiam. Ier. c. XXIII, 18. — quis affuit
in consilio domini ? Secundo per hoc quod
non est adiuta alieno dono. Unde subdit aut
quis prior dedit illi, et per hoc retribuetur ei
? Quasi prius danti. Quasi dicat : nullus.
Non enim potest homo dare Deo, nisi quae a
Deo accepit. Par. ult. : tua sunt omnia, et
quae de manu tua accepimus, dedimus tibi.
Iob XXXV, 7. — porro si iuste egeris, quid
donabis ei, aut quid de manu tua accipiet ?
Deinde cum dicit quoniam ex ipso, etc.,
ostendit altitudinem Dei, quantum ad hoc
quod in ipso sunt omnia. Et primo ostendit
eius causalitatem; secundo eius dignitatem,
ibi ipsi honor et gloria; tertio eius
perpetuitatem, ibi in saecula saeculorum,
amen. Dicit ergo primo : recte dixi quod
nullus prior dedit illi, quia ex ipso, et per
la mer a été ta voie, dans la multitude des
eaux tes sentiers, et tes traces ne seront pas
connues." — "Par quelle voie se répand la
lumière et se distribue la chaleur sur la terre."
938. — II. Lorsqu’il ajoute : 34 Car qui a
connu, etc., <l’Apôtre> prouve ce qu’il avait
dit. A cet effet, il cite deux autorités
<scripturaires>, dont l’une se trouve dans <le
livre d’>Isaïe. On y lit selon notre version 12.
— "Qui a aidé l’Esprit du Seigneur, ou qui a
été son conseiller ?" au lieu de ce qui est écrit
ici : Car qui a connu la pensée du Seigneur ?
Ou qui a été son conseiller 856
?" L’autre
autorité <scripturaire> se trouve dans <le livre
de> Job. <On y lit selon notre version> : "Qui
m’a donné le premier, afin que je lui rende ?"
au lieu de ce qui est écrit ici : Ou qui, le
premier, lui a donné et sera rétribué ? Or dans
ces paroles comme dans celles qui suivent,
l’Apôtre fait trois choses :
939. — A. Il montre en premier lieu
l’excellence de la sagesse divine, en la
comparant à notre intelligence, en disant : On
a dit : Que ses jugements sont
incompréhensibles, et ses voies insondables!
<Et il ajoute aussitôt> : Car qui a connu la
pensée du Seigneur ?, c’est-à-dire par laquelle
il juge et procède pour opérer; autrement dit,
personne, à moins qu’elle ne lui soit révélée :
"Qui pourra connaître ta pensée, si tu ne
donnes toi-même la sagesse, et si tu n’envoies
ton Esprit-Saint du plus haut des cieux ? "Et :
"Nul ne connaît ce qui est de Dieu, sinon
l’Esprit de Dieu." Or "Dieu nous l’a révélé
par son Esprit."
940. — B. En deuxième lieu, <l’Apôtre>
montre l’excellence de la sagesse divine,
selon qu’elle renferme un abîme en elle-
même, abîme qui est le propre du principe
suprême, lequel se caractérise de deux
manières :
1) D’abord, en ce qu’il ne dépend d’aucun
autre.
2) Puis, parce que les autres <principes>
dépendent de lui.
L’Apôtre montre ces caractères <en disant :>
856
Selon la Septante, éd. Alfred Rahlfs, vol. II, p. 619" us egn noun kuriou, kai us ausou sumboulos
egeneto.
ipsum, et in ipso sunt omnia. Et ita nihil
potest esse nisi a Deo acceptum. Ad
designandum autem Dei causalitatem utitur
tribus praepositionibus, quae sunt, ex, per et
in. Haec autem praepositio, ex, denotat
principium motus; et hoc tripliciter : primo
quidem ipsum principium agens, vel
movens; alio modo, ipsam materiam; tertio
modo, ipsum contrarium oppositorum, quod
est terminus a quo incipit motus. Dicimus
enim cultellum fieri ex fabro et ferro et ex
infigurato. Universitas autem creaturarum
non est facta ex praeexistenti materia, quia
et ipsa materia est effectus Dei. Et
secundum hoc omnia creata non dicuntur ex
aliquo esse sed, sicut ex opposito, dicuntur
esse ex nullo, quia nihil erant antequam
crearentur ut essent. Sap. II, 2. — ex nihilo
nati sumus. Ex Deo autem sunt omnia, sicut
ex primo agente. 1 Co XI, 12. — omnia
autem ex Deo. Notandum tamen quod haec
praepositio de, easdem habitudines
designare videtur, hoc tamen superaddit,
quia semper designat causam
consubstantialem. Dicimus enim cultellum
esse de ferro, non autem de artifice; quia
igitur filius procedit a patre ut ei
consubstantialis, dicimus filium esse de
patre. Creaturae vero non procedunt a Deo
tamquam ei consubstantiales; unde non
dicuntur esse de ipso, sed solum ex ipso.
Haec autem praepositio per, designat
causam operationis, sed quia operatio est
medium inter faciens et factum, dupliciter
[n° 942] : 36 Puisque c’est de lui, etc.
941. — 1. Que la sagesse de Dieu ne dépend
pas d’un principe plus élevé, <l’Apôtre> le
montre de deux manières857
a. D’abord, parce qu’elle n’est pas instruite
par un conseil étranger. Aussi dit-il : Ou qui a
été son conseiller ? Autrement dit, personne.
Car celui-là a besoin d’un conseil qui ne sait
pas tout à fait comment il faut agir; ce qui ne
s’applique pas à Dieu : "A qui as-tu donné
conseil ? sans doute à celui qui n’a pas de
sagesse." — "Qui a assisté au conseil du
Seigneur ?"
b. Ensuite, parce qu’elle n’est pas aidée par
un don étranger. Aussi dit-il : Ou qui, le
premier, lui a donné, et pour cela sera
rétribué comme s’il lui avait donné le premier
? Comme s’il disait : personne. En effet,
l’homme ne peut donner à Dieu que ce qu’il a
reçu de Dieu : "Tout est à toi, et c’est de ta
main que nous avons reçu ce que nous t’avons
donné." — "Si tu agis justement, que lui
donneras-tu, ou que recevra-t-il de ta main ? "
942. — 2. En disant858
ensuite 10. — 36
Puisque c’est de lui, etc., <l’Apôtre> montre
l’abîme de Dieu, en tant qu’en lui sont toutes
choses.
a) Et il montre d’abord sa causalité.
b) Puis, sa dignité859
[n° 950] : A lui
l’honneur et la gloire.
c) Enfin, sa perpétuité [n° 951] : Dans les
siècles des siècles. Amen.
943. — a. 860
Il commence donc par dire : J’ai
dit à juste titre que personne ne lui a donné le
857
Lieux parallèles sur la science en Dieu : Somme Théologique P, Q. 14, a. 1; 1 Sentences dist. 35, a.
1; 1 Contra Gentiles c. 44; De poSentences Q. 8, a. 1; Q. 9, a. 5; De veritate, Q. 2, a. 1; Compend.
theol., c. 28 et 35. — Sur la justice en Dieu : Somme Théologique Ia, Q. 21, a. 1; 4 Sentences dist. 46,
Q. 1, a. 1, q 1; 1 Contra Gentiles c. 93; De div. nom., c. 8, lect. 4. 858 Lieux parallèles : Somme Théologique P, Q. 44, a. 1 et 2; Q. 65, a. 1. 2 Sentences dist. 1, Q. 1, a. 2;
dist. 37, Q. 1, a. 2; 2 Contra Gentiles c. 15 et 16; De poSentences Q. 3, a. 5 et 6; Compend. theol., c.
68 et 69; De subsi. separ., c. 9; De div. nom., c. 5, lect. 1; Super Physicam 8, lect. 2 (éd. d’Auria, n°
1992-2058); Cou, in Symb. Apost., a. 1.
859 Lieux parallèles : Somme Théologique Ia, Q. 39, a. 8; 1 Sentences dist. 14 (expos. lin.); dist. 31, Q.
2, a. 1; Q. 3, a. 1; dist. 34, Q. 2; dist. 36, Q. l, a. 3, sol. 5; Deveritate Q. l, a. 7; Q. 7, a. 3; IIAdCor. lect.
3 (éd. Marsettî, n° 544). 860
Ces deux paragraphes (943 et 944), comme les suivants, renvoient à des notions classiques en
philosophie scolastique et souvent reprises par saint Thomas pour commenter le ternaire ex (Ou de),
per, et in, ou pour rendre compte de la formule ex nihilo appliquée â la création. On saisit à plein, ici,
la connexion étroite qui, pour les médiévaux, unit la grammaire et la philosophie. Outre ce que nous
haec praepositio per, potest operationis
causam designare. Uno modo secundum
quod operatio exit ab operante : sicut aliquid
dicitur per se operari, quod est sibi causa ut
operetur. Hoc autem est uno quidem modo
forma, sicut dicimus quod ignis calefacit per
calorem. Alio modo aliquid superius agens,
puta si dicamus quod homo generat per
virtutem solis, vel potius Dei. Sic igitur
omnia dicuntur dupliciter esse per ipsum.
Uno modo, sicut per primum agens, cuius
virtute omnia alia agunt. Prov. c. VIII, 15.
— per me reges regnant. Alio modo,
inquantum eius sapientia, quae est eius
essentia, est forma per quam Deus omnia
fecit, secundum illud Prov. III, 19. —
dominus sapientiae fundavit terram. Alio
vero modo haec praepositio per, designat
causam operationis, non quidem secundum
quod exit ab operante sed secundum quod
terminatur ad opera, sicut dicimus quod
faber facit cultellum per martellum, quod
non est sic intelligendum, quod martellus sic
cum fabro operetur, sicut in prioribus
intelligebatur, sed quia cultellus fit ex
operatione fabri per martellum. Et ideo
dicitur quod haec praepositio per,
quandoque designat auctoritatem in recto,
sicut cum dicimus : rex operatur per
balivum; quod pertinet ad hoc quod nunc
premier, puisque c’est de lui, et par lui, et en
lui, que sont toutes choses. Et ainsi rien ne
peut exister sans l’agrément de Dieu.
Or pour désigner la causalité de Dieu,
<l’Apôtre> se sert de trois prépositions, qui
sont "de" ou "à partir de" (ex), "par" (per), et
"en" (in).
— La préposition " de" ou "à partir de" (ex)
indique le principe du mouvement, et cela de
trois manières : D’abord en désignant le
principe même de l’action ou du mouvement;
ensuite la matière même; enfin, dans
l’opposition des termes contraires <de tout
processus>, le terme même à partir duquel se
produit le mouvement. On dit en effet que le
couteau se fait à partir du fabricant, à partir du
fer, et à partir de ce qui n’a pas encore la
forme de couteau. Toutefois, l’ensemble des
êtres créés n’a pas été fait à partir d’une
matière préexistante, puisque la matière est
elle-même l’effet de Dieu. Il s’ensuit qu’on ne
dit pas, de tous les êtres créés, qu’ils existent
à partir de quelque chose, mais que, comme à
partir d’un terme opposé, ils existent à partir
de rien, car ils n’étaient rien avant que la
création ne les fasse passer à l’existence :
"Nous sommes nés de rien." Mais c’est à
partir de Dieu, comme de leur premier agent,
que tous les êtres viennent à l’existence : "Et
toutes choses viennent de (ex) Dieu
avons déjà dit sur la matière considérée comme cause, nous rappellerons brièvement quelques données
relatives au trai tement du mouvement dans la scolastique, ce qui permettra de comprendre quelques
expressions techniques dont saint Thomas use ici. Le concept de mouvement englobe non seulement le
dépla cement d’un corps dans l’espace, mais aussi tout processus de production, de changement ou de
croissance—diminution. Comme le déplacement local, tout mouvement s’effectue entre deux termes
un " terme â partir duquel" (terminus a quo) et un "terme vers lequel" (terminus ad quem) a lieu le
mouvement. Ces deux termes constituent un couple d’opposés. Mais il y a deux sortes d’oppo sition
l’opposition des contradictoires dans laquelle l’un des opposés est la négation de l’autre, et
l’opposition des contraires dans laquelle l’un des opposés est l’antithèse de l’autre. Dans le cas du
mouvement, les termes opposés sont des contraires (point de départ, point d’arrivée), mais l’un n’est
pas la négation de l’autre ils s’opposent sans se contredire. Gomme tout mouvement, la création est un
processus, mais un processus d’un type particulier, dans lequel le point de départ, le terminus a quo, ne
saurait désigner une matière préexistante. Quand donc ce point de départ est appelé nihil, " rien", ce
rien d’où est tirée la créature (ex nihilo), ne signifie pas un quelque chose. Mais, puisque tout
processus a lieu entre une paire d’opposés, il tient seulement la place logique de l’un de ces opposés,
l’autre opposé étant l’existence même qui est conférée à la créature par l’acte créateur. Ce point de
départ, qu’est le nihil, n’a pas de valeur réelle car, comme le dit le père Sertillanges " Au vrai, la
création n’a pas de point de départ" (voir la note explicative [ à propos de Somme Théologique 1a Q.
45, a. 1, sol. 2, La Création, éd. de la Revue des Jeunes, Desclée et Cie, 1927, p. 183), Dieu produisant
tout l’être; il n’a qu’une valeur logique. Toutefois, il y a bien une cause à la production de l’être, mais
c’est une cause agente, non une cause matérielle et c’est Dieu : ainsi l’être des créatures est ex Deo.
dicitur. Quandoque autem in causali, sicut
cum dicitur : balivus per regem operatur;
quod pertinet ad praecedentem modum. Hoc
autem modo de quo nunc loquimur, dicuntur
omnia esse facta a patre per filium,
secundum illud Io. I, 3. — omnia per ipsum
facta sunt : non ita quod pater habeat a filio
hoc quod facit res, sed potius, quia virtutem
faciendi filius accipit a patre, non tamen
instrumentalem, aut diminutam, aut aliam,
sed principalem et aequalem, et eamdem. Io.
V, v. 19. — quaecumque pater facit, haec et
filius similiter facit. Unde licet omnia sint
facta a patre per filium, non tamen filius est
instrumentum vel minister patris. Haec
autem praepositio in, designat etiam
triplicem habitudinem causae : uno quidem
modo designat materiam, sicut dicimus
animam esse in corpore et formam in
materia, hoc autem modo non dicitur quod
omnia sint in Deo, quia ipse non est causa
materialis rerum. Alio modo designat
habitudinem causae efficientis, in cuius
potestate est effectus suos disponere, et
secundum hoc dicuntur omnia esse in ipso,
secundum quod omnia in eius potestate et
dispositione consistunt, secundum illud Ps.
XCIV, 4. — in manu eius sunt omnes fines
terrae. Et Act. XVII, 28. — in ipso vivimus,
movemur et sumus. Tertio modo designat
habitudinem causae finalis, secundum quod
totum bonum rei et conservatio ipsius
consistit in suo optimo, et secundum hoc
dicuntur omnia esse in Deo, sicut in bonitate
conservante. Col. I, 17. — et omnia in ipso
constant. Quod autem dicit omnia, est
944. — Il faut noter, il est vrai, que la
préposition <latine> de semble désigner les
mêmes relations (que la préposition ex) elle y
ajoute cependant quelque chose : elle désigne
toujours la consubstantialité de la cause (et de
l’effet). Ainsi nous disons que le couteau est
de fer, nous ne disons pas qu’il est du (de)
fabricant; puis donc que le fils procède du
père en tant qu’il lui est consubstantiel, nous
disons que le fils est du père. Mais les
créatures ne procèdent pas de Dieu comme si
elles lui étaient consubstantielles; aussi ne dit-
on pas qu’elles sont de (de) lui, mais qu’elles
sont à partir de (ex) lui
945. — Quant à la préposition "par" (per),
elle désigne la cause de l’opération, mais
parce que l’opération est intermédiaire entre
celui qui fait et ce qui est fait, cette
préposition peut désigner de deux manières la
cause de l’opération.
Selon une première manière, en tant que
l’opération vient de celui qui opère c’est ainsi
que l’on dit opérer par soi-même quand on est
soi-même la cause qui fait opérer. Cela
appartient, dans un sens, à la forme, comme
nous disons que le feu réchauffe par la
chaleur. Selon une autre manière, en tant que
l’opération est l’acte d’un agent supérieur, par
exemple lorsque nous disons que l’homme
engendre par la vertu du soleil, ou plutôt par
celle de Dieu861
.
Ainsi donc toutes choses sont dites être par lui
de deux manières : D’abord, comme par un
premier agent, par la vertu duquel toutes les
autres choses agissent : "Par moi règnent les
rois."
861
Les deux causes désignées par la préposition "par" (per) sont la cause formelle et la cause efficiente
("Ts-S0MAS, De principiis naturae; voir H-D. GARDEIL, Initiation à la philosophie de saint Thomas,
t. II, Cosmologie, p. 114). Ainsi, l’intermédiaire que signifie ce "para peut être intrinsèque à l’être qui
opère (c’est le cas de la forme, ou qualité essentielle par laquelle l’opérateur agit), ou extrin sèque :
c’est le cas lorsqu’un agent (ou opérateur) agit non seulement en vertu de sa forme (l’homme engendre
l’homme en venu de la forme humaine qui est en lui), mais aussi en vertu de l’action qu’exerce sur lui
un agent supéneur qui lui communique sa force. Or, c’est un principe de la cosmologie d’Aristote
admis par saint Thomas, que la génération est due à l’influence du soleil L’homme a d’abord pour
cause ses éléments, savoir le Feu et la Terre, comme matière, et sa forme propre, — puis une autre
cause, cause externe, c’est-â—dire le père, — et enfin, outre ces causes, le Soleil" (Métaphysique,
livre A, 5, 1071 a 10-15; trad. J. Tricot, t. H, p. 164). De même saint Thomas explique que "le soleil
est cause dans la génération de l’homme ou du lion", mais c’est une causalité non spécifique, qui ne
peut être cause de l’être individuel (2 Sentences dist. 1, Q. 1, a. 4 in corpore). A travers les causes
secondes, en ultime instance, c’est la cause divine qui est vraiment efficiente.
absolute accipiendum pro omnibus, quae
habent verum esse; peccata autem non
habent verum esse, sed in quantum sunt
peccata, dicuntur per defectum alicuius
entis, eo quod malum nihil est nisi privatio
boni. Et ideo cum dicitur ex ipso, et per
ipsum, et in ipso sunt omnia, non est
intelligendum de peccatis quia, secundum
Augustinum, peccatum nihil est, et nihil
fiunt homines cum peccant. Quicquid tamen
entitatis est in peccato, totum est a Deo. Sic
igitur, secundum praemissa, omnia sunt ex
ipso, scilicet Deo, sicut ex prima operatrice
potentia. Omnia autem sunt per ipsum,
inquantum omnia facit per suam sapientiam.
Omnia sunt in ipso, sicut in bonitate
conservante. Haec autem tria, scilicet
potentia, sapientia et bonitas, communia
sunt tribus personis. Unde hoc quod dicitur
ex ipso, et per ipsum, et in ipso, potest
attribui cuilibet trium personarum, sed
tamen potentia, quae habet rationem
principii, appropriatur patri, qui est
principium totius divinitatis; sapientia filio,
qui procedit ut verbum, quod nihil aliud est
quam sapientia genita; bonitas appropriatur
spiritui sancto, qui procedit ut amor, cuius
obiectum est bonitas. Et ideo appropriando
dicere possumus : ex ipso, scilicet ex patre,
per ipsum, scilicet per filium, in ipso,
scilicet in spiritu sancto, omnia sunt. Deinde
cum dicit ipsi honor et gloria, ostendit Dei
dignitatem, quae consistit in duobus quae
praemissa sunt. Nam ex eo quod ex ipso et
per ipsum, et in ipso sunt omnia, debetur ei
honor et reverentia et subiectio a tota
creatura. Mal. I, 6. — si ego pater, ubi est
Ensuite, en tant que sa sagesse, qui est son
essence, est la forme par laquelle Dieu a fait
toutes choses, selon ce passage des Proverbes
: "Le Seigneur, par la sagesse, a fondé la
terre."
946. — Selon862
un autre sens, cette
préposition "par" désigne la cause de
l’opération, non en tant que l’opération résulte
de celui qui opère, mais en tant qu’elle se
termine à une œuvre. On dit ainsi que
l’ouvrier fabrique le couteau par (per) son
marteau; ce qui ne signifie pas que le marteau
opérerait avec l’ouvrier, comme on l’a
expliqué au <paragraphe> précédent, mais
parce que, pour faire le couteau, l’ouvrier
opère au moyen (per) du marteau. Et voilà
pourquoi on dit que cette préposition "par"
désigne l’autorité, tantôt directement,
lorsqu’on dit par exemple : Le roi opère par le
bailli — ce qui concerne le cas dont nous
parlons maintenant —, tantôt dans son
principe causal, lorsqu’on dit par exemple : le
bailli opère de par le roi ce qui concerne le
mode (causal) du <para graphe> précédent.
Or, s’agissant du mode (causal) dont nous
parlons maintenant, on dit que le Père a fait
toutes choses par le Fils, selon ce verset de
Jean "Toutes choses ont été faites par lui ";
non que le Père tienne du Fils ce <pouvoir>
qui fait les choses, mais plutôt parce que le
Fils reçoit du Père la puissance de faire, non
de manière instrumentale, ou moindre, ou
différente, mais principale, égale et semblable
: "Tout ce que <le Père> fait, cela aussi le Fils
le fait pareillement." Par conséquent, bien que
le Père fasse toutes choses par le Fils, le Fils
n’est ni l’instrument ni le ministre du Père863
.
862 Lieux parallèles Somme Théologique 1 Q. 39, a. 8.
5. Jn 1, 3. — Lieu parallèle Super Ioan. 1, 3, lect. 2 (éd. Marietti, n° 76).
863 Au paragraphe précédent, saint Thomas a examiné deux sens de" par", soit qu’il indique la cause
formelle (intrinsèque ou imma nente à l’agent) : ainsi le feu brûle par la forme qualitative" chaleur "
qui est en lui; soit qu’il indique un agent supérieur qui influe sur l’agent propre et direct : ainsi
l’homme engendre l’homme par l’effet du soleil (quand il se rapproche de la terre). Il envisage
maintenant un autre sens, celui où "par" indique la cause intermédiaire, qu’on appelle, le cas échéant,
cause instrumentale. Il ne s’agit donc plus du rapport que l’opération a avec l’agent qui l’accomplit,
mais de celui qu’elle a avec l’œuvre produite le marteau n’est pas nécessairement lié à l’ouvrier (qui
peut utiliser d’autres outils), mais à la fabrication du couteau (pour battre le fer et forger la lame).
Ainsi le bailli est-il l’instrument propre de l’autorité du roi, en tant qu’elle s’exerce directement sur ses
honor meus ? Ex eo vero quod ab alio non
accipitur nec consilium, nec donum, debetur
ei gloria, sicut e contrario dicitur homini 1
Co IV, 7. — si accepisti, quid gloriaris,
quasi non acceperis ? Et quia hoc est
proprium Dei dicitur Is. XLII, 8. — gloriam
meam alteri non dabo. Ultimo ponit eius
aeternitatem, cum dicit in saecula
saeculorum, quia eius gloria non est
transitoria, sicut gloria hominis, de qua
dicitur Is. XL, 6. — omnis gloria eius quasi
flos agri, sed durat in saecula saeculorum, id
est per omnia saecula succedentia saeculis,
prout saeculum dicitur duratio
uniuscuiusque rei. Vel saecula saeculorum
dicuntur saecula, id est durationes rerum
incorruptibilium, quae continent saecula
corruptibilium rerum, et praecipue ipsa Dei
aeternitas, quae tamen pluraliter dici potest,
licet in se sit una et simplex, propter
multitudinem et diversitatem contentorum,
ut sit sensus : in saecula contentiva
saeculorum. Ps. CXLIV, 13. — regnum
tuum, regnum omnium saeculorum. Addit
autem ad confirmationem amen, quasi dicat
vere, ita est. Et sic accipitur in Evangeliis,
ubi dicitur amen dico vobis. Quandoque
tamen accipitur pro fiat. Unde in Psalterio
Hieronymi dicitur dicet omnis populus :
amen, amen, ubi nos habemus fiat, fiat.
947. — Quant à la préposition "dans" (in),
elle désigne aussi une triple relation causale
Elle désigne d’abord la matière, à la manière
dont nous disons que l’âme est dans le corps
et la forme dans la matière. Dans ce sens, on
ne peut pas dire que toutes choses sont en
Dieu, parce qu’il n’est pas la cause matérielle
des choses864
.
Ensuite, <cette préposition "dans"> désigne
une relation de cause efficiente, cause qui a le
pouvoir de disposer de ses propres effets.
Dans ce sens on dit que toutes choses sont en
<Dieu>, en tant que toutes choses sont sous sa
puissance et à sa disposition, selon ce verset
d’un psaume : "Dans sa main sont tous les
confins de la terre." Et des Actes : "C’est en
lui que nous vivons, que nous nous mouvons,
et que nous sommes."
Enfin, <cette préposition "dans"> désigne une
relation de cause finale, selon que tout le bien
d’une chose et sa conservation résident dans
son bien suprême. Dans ce sens on dit que
toutes choses sont en Dieu, comme dans la
bonté qui conserve "Toutes choses subsistent
en lui."
948. - Quant à l’expression : "Toutes choses",
elle doit être prise au sens absolu pour toutes
les choses qui ont véritablement l’être865
. Or
les péchés n’ont pas véritablement d’être,
mais ils sont péchés par défaut d’être, étant
donné que le mal n’est rien si ce n’est la
privation du bien. Ainsi, lorsque <l’Apôtre>
dit : c’est de lui, et par lui, et en lui, que sont
sujets (c’est le sens instrumental de" par" qu’envisage ce paragraphe 946), mais le bailli agit au nom
du roi qui est le principe supérieur et la source ou cause de l’autorité (ce qui nous renvoie au cas du
soleil, agent supérieur des processus de géné ration). C’est précisément en ce sens de cause
intermédiaire que le Fils est celui par qui tout a été fait; et cette causalité médiane (causa media) lui est
attribuée en propre (Somme Théologique P, Q. 39, a. 8, sol. 4). La personne du Fils, en effet, est
distincte de celle du Père, de même que le marteau est distinct de l’ouvrier et le bailli du roi. Et donc
c’est réellement par le Fils que le Père crée. Cependant le Fils n’est pas l’instrument passif du Père
créant le monde, comme le marteau est l’instrument passif de l’ouvrier fabriquant le couteau; et il n’est
pas non plus comme le bailli qui agit, certes, mais au nom du roi, avec une autorité moindre, et sans
être le principe de l’autorité qu’il exerce, alors que le Fils exerce le pouvoir créateur reçu du Père avec
une puissance égale et selon un mode aussi principiel. 864
Dieu n’est pas la matière, le substrat dont le monde est tiré, d’une part parce qu’il n’y a pas de
matière en Dieu, d’autre part parce que l’être du monde est tout entier créé, forme et matière. Ainsi est
écarté tout risque de ce qu’on appellera au xv siècle le panthéisme. 865
Lieux parallèles Somme Théologique Ia, Q. 49, a. 1 et 2; Q. 79, a. 1; 1a-2ae, Q. 75, a. 1; 2Sentences
dist. 34, Q. I, a. 3; Demalo, Q. l, a. 3; Q. 3, a. 1 et 2; De quodlibet II, Q. 2; Ad Rom. 7, 17, lect. 3 (éd.
Marietti, n° 571).
toutes choses, il ne faut pas entendre ce
passage des péchés; en effet, selon Augustin,
"le péché n’est rien et les hommes sont réduits
à rien lorsqu’ils pèchent866
." Cependant ce
qu’il y a d’entité dans le péché, tout cela est
de Dieu867
.
949. — Ainsi donc868
, d’après ce qui précède,
toutes choses sont de lui, c’est-à-dire de Dieu,
comme du premier pouvoir qui opère; toutes
choses sont par lui, en tant qu’il fait toutes
choses par sa sagesse; et toutes choses sont en
lui, comme dans la bonté qui conserve. Or ces
trois attributs, à savoir la puissance, la sagesse
et la bonté, sont communs aux trois
personnes; par conséquent la formule <de
l’Apôtre> : de lui, et par lui, et en lui, peut
être attribuée à chacune des trois personnes869
.
Cependant, la puissance, qui a le caractère de
principe, est appropriée au Père, qui est le
principe de toute divinité; la sagesse au Fils,
qui procède en tant que Verbe, parce qu’il
n’est autre chose que la Sagesse engendrée; la
bonté est appropriée à l’Esprit-Saint, qui
procède en tant qu’amour, dont l’objet est la
bonté. Et c’est pourquoi nous pouvons dire
par appropriation : de lui, c’est-à-dire du Père,
par lui, c’est-à-dire par le Fils, en lui, c’est-à-
dire en l’Esprit-Saint, sont toutes choses.
950. — b. Lorsqu’il dit : à lui l’honneur et la
gloire, <l’Apôtre> montre la dignité de Dieu,
866
SAINT AUGUSTIN, In Ev. Ioan 1, 13 (BA 71, 152-155); Enarr. in Ps. 123, 5, 9 (CCL 40, 1828-
1829). — Lieu parallèle Ad Rom. 8, 28, lect. 6 (éd. Marietti, n° 698). 867 Saint Thomas explicite ce qu’il entend ici par "entité dans le péchés, dans son commentaire des
Sentences de Pierre Lombard (2, dist. 37, Q. 1, a. 2, réponse â l’obj. 3) : "<Le mot> "être" se dit de
deux manières :
Soit qu’il signifie l’essence d’une réalité existant en dehors de l’âme et ainsi le péché en tant que
difformité, qui est une certaine privation, ne peut recevoir le nom d’être : car les privations n’ont pas
d’essence dans la nature des choses. Soit selon qu’il signifie la vérité d’une proposition; et ainsi la
difformité est appelée être, non point parce qu’elle possède l’être en réalité, mais parce que
l’intelligence compose <en unissant ici> la privation avec le sujet, comme une certaine forme. Par
conséquent, de même qu’à partir de l’union de la forme au sujet ou â la matière, il en résulte un certain
être subs tantiel ou accidentel, ainsi l’intelligence signifie-t-elle aussi l’union de la privation avec le
sujet par un certain être. Mais cet être n’est qu’un être de raison, puisque en réalité il est plutôt non-
être; et selon que <le péché en tant que difformité> a l’être dans la raison, il est évident que <son être>
est de Dieu * (Opera omnia, éd. Parme, t. VI, p. 721). 868
Lieux parallèles : Somme Théologique Ia, Q. 39, a. 8; De veritate, Q. 4, a. 8 sol. 3. 869
Voir Glosa in Rom. XI, 36 (GPL, col. 1492 D). — Lieux parallèles : Ad Rom. 2, 5, lect. 1 (éd.
Marietti, n° 187) 16, 27, lect. 2 (éd. Marietti, n° 1228).
qui consiste en deux choses mentionnées
précédemment. Car du fait que de lui, et par
lui, et en lui, sont toutes choses, l’honneur, le
respect et la soumission lui sont dus par toute
la création < Si donc moi <je suis> votre père,
où est mon honneur ?" Mais du fait qu’il ne
reçoit d’autrui ni conseil ni don, la gloire lui
est due, comme en sens contraire il est dit à
l’homme :" Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Que
si tu l’as reçu, pourquoi t’en glorifies-tu,
comme si tu ne l’avais pas reçu" Et parce que
c’est le propre de Dieu, il est dit dans <le livre
d’>Isaïe : "Je ne donnerai pas ma gloire à un
autre."
951. — c. En dernier lieu870
<l’Apôtre>
expose l’éternité <de Dieu>, lorsqu’il dit :
dans les siècles des siècles, parce que sa
gloire n’est pas transitoire, comme la gloire
de l’homme, dont il est dit : "Toute sa gloire
est comme la fleur du champ ", mais elle dure
dans les siècles des siècles, c’est-à-dire à
travers tous les siècles qui succéderont aux
siècles, selon que par siècle on entend la
durée de chaque chose. On appelle encore
siècles des siècles, les siècles, c’est-à-dire la
durée des choses incorruptibles, qui contient
les siècles des choses corruptibles, et
principalement l’éternité proprement dite de
Dieu qui, bien qu’elle soit une et simple, peut
cependant s’exprimer au pluriel, à cause de la
multitude et de la diversité des siècles qu’elle
contient, de sorte que le sens est dans les
siècles qui contiennent des siècles "Ton règne
est un règne de tous les siècles."
952. — <L’Apôtre> ajoute comme
confirmation871
: Amen, autrement dit : En
vérité, il en est ainsi. C’est dans ce sens que
ce mot est pris dans les évangiles, où il est dit
Amen, je vous le dis. Quelquefois cependant
cette expression est prise pour Fiat, qu’il en
soit ainsi. D’où il est dit dans le psautier de
Jérôme : "Tout le peuple dira : Amen,
amen872
", là où nous, nous lisons : < Fiat, flat,
qu’il en soit ainsi, qu’il en soit ainsi Ps 105, 48
(selon la Vulgate)."
870
Lieux parallèles Somme Théologique 1a Q. 10, a. 1; 1 Sentences dist. 8, Q. 2, a. 1; dist. 19, Q. 2, a.
1; De poSentences Q. 3, a. 14 et 20; Super librum De causis, lect. 2. 871
Lieu parallèle Super Is. 25, 1. 872
Ps 106, 48. Selon le Psautier iuxta Hebraeos, voir éd. Dom Henri de Sainte-Marie, Rome, 1954
("Collectanea Biblica latina", XI) p. 156 et dicet omnis populus amen Alleluia." Ou : "Amen, amen."
Caput 12 CHAPITRE 12
Lectio 1 Leçon 1 [Versets 1 à 3]
[n° 954] 1 Je vous demande donc avec
obsécration, frères, par la miséricorde de
Dieu, d’offrir vos corps en hostie vivante,
sainte, agréable à Dieu; ce sera votre culte
raisonnable.
[n° 965] 2 Et ne vous conformez point à ce
siècle, mais réformez-vous par le
renouvellement de votre esprit, afin que vous
éprouviez quelle est la volonté de Dieu <qui
est> bonne, agréable et parfaite.
[n° 968] Car je dis, en vertu de la grâce qui
m’a été donnée, à tous ceux qui sont parmi
vous, de ne pas s’exalter en pensée plus qu’il
ne convient, mais de penser avec sobriété,
selon la mesure de la foi que Dieu a départie à
chacun.
[86219] Super Rom., cap. 12 l. 1 Postquam
apostolus ostendit necessitatem virtutum et
originem gratiae, hic docet gratiae usum,
quod pertinet ad instructionem moralem. Et
circa hoc duo facit. Primo ponit doctrinam
moralem in generali; secundo specialiter
descendit ad quaedam particularia
pertinentia ad eos quibus scribit, circa
medium XV cap., ibi certus sum autem, et
cetera. Circa primum duo facit. Primo docet
usum gratiae, quantum ad hoc quod sit
homo perfectus; secundo quantum ad hoc
quod perfectus imperfectum sustineat, XIV
cap., ibi infirmum autem, et cetera. Circa
primum tria facit. Primo inducit ad
perfectionem vitae quantum ad sanctitatem
quam homo servat Deo; secundo quantum
ad iustitiam quam quis exhibet proximo,
XIII cap., ibi omnis anima, etc.; tertio
quantum ad puritatem quam homo conservat
in seipso, circa finem XIII capituli, ibi et
hoc scientes, et cetera. Circa primum duo
facit. Primo monet ut homo se exhibeat Deo
sanctum; secundo docet qualiter aliquis uti
debeat donis gratiae Dei, quibus
953. — Après avoir montré la nécessité des
vertus et l’origine de la grâce [n° 97],
l’Apôtre donne ici un enseignement sur
l’usage de la grâce, ce qui relève de
l’instruction morale. A cet effet :
— Il expose d’abord la doctrine morale en
général.
— Puis, il se penche spécialement sur
quelques détails qui concernent ceux à qui il
écrit, et cela vers le milieu du chapitre 15 [n°
1163] : 14 "Je suis bien persuadé, mes frères,
moi-même, etc."
Sur le premier de ces points :
Il commence par donner un enseignement sur
l’usage de la grâce, en tant que l’homme
<doit> devenir parfait.
Puis, en tant que devenu parfait, il <doit>
supporter celui qui est imparfait, au chapitre
14, [n° 1081] : 1 "Accueillez celui qui est
faible dans la foi, etc."
Sur la perfection :
* <L’Apôtre> exhorte d’abord à la vie
parfaite quant à la sainteté que l’homme
<doit> conserver pour Dieu.
* Puis, quant à la justice que l’on <doit>
sanctificatur, ibi dico enim per gratiam, et
cetera. Circa primum duo facit. Primo docet
qualiter aliquis se debeat exhibere Deo
quantum ad corpus; secundo quantum ad
animam, ibi et nolite conformari, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo inducit
observantiam eorum quae docentur : et hoc
dupliciter. Uno quidem modo ex parte sui
ipsius, cum dicit obsecro itaque vos, fratres,
quasi dicat : dictum est incomprehensibilia
esse iudicia Dei, et investigabiles vias eius,
itaque obsecro vos, fratres, ut scilicet
observetis ea quae dicentur. Utitur autem
obsecratione propter tria. Primo quidem ad
demonstrandum suam humilitatem. Prov.
XVIII, 23. — cum obsecrationibus loquitur
pauper, qui scilicet de sua abundantia non
confidit, et ideo non ex eo quod suum est,
sed ex eo quod Dei est, homines conatur
inducere ad bonum. Nam obsecrare est ob
sacra contestari. Secundo ut magis ex amore
moveat rogando, quam ex timore,
auctoritative imperando. Unde dicitur ad
Philem. 8 s. : multam fiduciam habens in
Christo Iesu imperandi tibi quod ad rem
pertinet, propter charitatem magis obsecro.
Gal. ult. : vos qui spirituales estis,
huiusmodi instruite in spiritu lenitatis.
Tertio propter reverentiam Romanorum
quibus scribebat. I Tim. V, 1. — seniorem
ne increpaveris, sed obsecra ut patrem. Alio
modo inducit eos ex parte Dei, cum dicit per
misericordiam Dei, per quam scilicet salvati
estis. Tit. II, 5. — secundum misericordiam
suam salvos nos fecit. Et ideo ex
consideratione divinae misericordiae
debemus facere quod monemur. Matth. c.
XVIII, 33. — nonne oportuit et te misereri
conservi tui, sicut et ego tui misertus sum ?
Vel potest dici per misericordiam Dei, id est
auctoritate apostolatus mihi misericorditer
commissi. 1 Co VII, 25. — misericordiam
consecutus sum a domino, ut sim fidelis.
montrer à l’égard du prochain, au chapitre 13
[n° 1016] :873
"Que toute âme soit soumise,
etc."
* Enfin, quant à la pureté que l’homme
<doit> conserver en lui-même, au chapitre 13
[n° 1060] : "D’autant plus que nous savons,
etc."
<Sur l’exhortation à la vie parfaite quant à la
sainteté, l’Apôtre>
I) Engage premièrement l’homme à s’offrir à
Dieu dans la sainteté.
II) Ensuite, il enseigne comment on doit
utiliser les dons de la grâce de Dieu, par
lesquels on est sanctifié [n° 968] : Car je dis,
en vertu de la grâce, etc.
I. Sur le premier point :
A) Il enseigne comment chacun doit s’offrir â
Dieu quant au corps.
B) Ensuite, quant à l’âme [n° 965] : 2 Et ne
vous conformez point, etc.
954. — A. Quant à l’offrande du corps, il fait
deux choses [n° 957]
1. Il commence par exhorter à l’observance
<des règles> qui sont enseignées, et cela de
deux manières [n° 956] :
a. De son propre côté, lorsqu’il dit : 1 Je vous
demande donc avec obsécration, frères,
autrement dit : il a été établi que les
jugements de Dieu sont incompréhensibles et
ses voies insondables, je vous demande donc
avec obsécration, frères, d’observer ce que je
vais vous dire.
2 — Or, <l’Apôtre> se sert de l’obsécration
pour trois raisons874
:
— En premier lieu, pour indiquer son
humilité : "C’est avec des obsécrations que
parlera le pauvre ", lui qui ne se confie pas
dans son abondance, et c’est pourquoi il
s’efforce de porter les hommes au bien non
point par son propre <témoignage>, mais par
celui de Dieu. Car user de l’obsécration, c’est
faire appel au témoignage des choses sacrées.
— En deuxième lieu, pour qu’il touche par
873
Voir GRATIEN, Décrets, III partie, dist. V, can. XXIV, col. 1418. 874 Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 83, a. 17, sol. 1; Q. 90, a. 1
4 Sentences dist. 15, Q. 4, a. 3; Ad Rom. 1, 10, lect. 5 (éd. Manetti, n° 86); 1 Ad Tim. 2, 1, lect. 1 (éd.
Marietti, n° 56); Ad Philip. 4, 6, lect. 1 (éd. Marietti, n° 157).
Secundo ponit admonitionem, cum dicit ut
exhibeatis corpora vestra, et cetera. Circa
quod sciendum est quod, sicut Augustinus
dicit X de Civit. Dei, visibile sacrificium,
quod exterius Deo offertur, signum est
invisibilis sacrificii, quo quis se et sua in
Dei obsequium exhibet. Habet autem homo
triplex bonum. Primo quidem bonum
animae, quod exhibet Deo per devotionis et
contritionis humilitatem, secundum illud Ps.
l, 19. — sacrificium Deo spiritus
contribulatus. Secundo habet homo
exteriora bona, quae exhibet Deo per
eleemosynarum largitionem. Unde dicitur
Hebr. ult. : beneficentiae et communionis
nolite oblivisci, talibus enim hostiis
promeretur Deus. Tertio habet homo bonum
proprii corporis : et quantum ad hoc dicit,
ibi ut exhibeatis, scilicet Deo, corpora
vestra, sicut quamdam spiritualem hostiam.
Dicebatur autem animal Deo immolatum
hostia, vel quia pro victoria hostium
offerebatur, seu pro securitate ab hostibus,
vel quia ad ostium tabernaculi immolabatur.
Exhibet autem homo Deo corpus suum ut
hostiam tripliciter. Uno quidem modo,
quando aliquis corpus suum exponit
passioni et morti propter Deum, sicut dicitur
de Christo Eph. V, 2. — tradidit
semetipsum oblationem et hostiam Deo. Et
apostolus dicit de se Phil. II, 17. — si
immolor supra sacrificium et obsequium
fidei vestrae, gaudeo. Secundo per hoc quod
homo corpus suum ieiuniis et vigiliis
macerat ad serviendum Deo, secundum illud
1 Co IX, 27. — castigo corpus meum, et in
servitutem redigo. Tertio per hoc quod
homo corpus suum exhibet ad opera
iustitiae et divini cultus exequenda. Supra
VI, 19. — exhibete membra vestra servire
iustitiae in sanctificationem. Est autem
l’affection en priant, plutôt que par la crainte
en commandant de manière autoritaire. Aussi
<l’Apôtre> dit-il à Philémon "Bien qu’ayant
dans le Christ Jésus une entière liberté de
t’ordonner ce qui convient, cependant je
préfère demander avec obsécration par
charité." Et aux Galates : "Vous qui êtes
spirituels, instruisez-le en esprit de douceur."
— En troisième lieu, par respect envers les
Romains auxquels il écrivait : "Ne réprimande
pas un vieillard, mais demande-lui avec
obsécration comme <à ton> père "
956. — b. Puis, <l’Apôtre> les exhorte du
côté de Dieu, lorsqu’il dit : par la miséricorde
de Dieu, c’est-à-dire par laquelle vous êtes
sauvés : "Ce n’est point par les œuvres de
justice que nous avons faites qu’il nous a
sauvés, mais selon sa miséricorde." Et c’est
pourquoi, en considérant la miséricorde
divine, nous devons accomplir l’exhortation
qu’on nous donne : "Ne fallait-il pas que toi
aussi tu aies pitié de ton compagnon comme
moi j’ai eu pitié de toi." Ou bien <ces mots> :
par la miséricorde de Dieu, peuvent se
comprendre comme suit : par l’autorité de
l’apostolat qui m’a été miséricordieusement
confié875
— "Ayant obtenu de la miséricorde
du Seigneur d’être fidèle."
957. — 2. Puis, <l’Apôtre> expose son
avertissement, lorsqu’il dit : d’offrir vos
corps, etc. A ce propos, il faut savoir que,
comme le dit Augustin876
, "le sacrifice
visible", que l’on offre extérieurement à Dieu,
"est le signe du sacrifice invisible877
", par
lequel on s’offre soi-même et ce que l’on
possède pour honorer Dieu.
958. — 878
Or l’homme a trois sortes de biens :
a. D’abord le bien de l’âme, qu’il offre à Dieu
par l’humilité de la dévotion et de la
contrition, selon ce verset du psalmiste : "Le
sacrifice <digne> de Dieu, c’est un esprit
875
Voir Glosa in Rom. 12, 1 (GPL, coI. 1496 B). 876
Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 81, a. 1 et 7; Q. 84, a. 2; 3 Sentences dist. 9, Q. 1, a. 3,
q 3; dist. 33, Q. 3, a. 4, q 1, sol. 2; Contra impugn. Dei cuit, et relig. 1; Super Bœt. de Ton., Q. 3, a. 2;
3 Contra Gentiles ç. 119. 877
SAiNT AUGUSTIN, La Gitè de Dieux, V (BA 34, 440-441). 878
Lieux parallèles : Somme Théologique Ia-2 Q. 84, a. 4; 2 Q. 73, a. 3; Q. 85, a. 3, sol. 2; Q. 104, a.
3; Q. 118, a. 5; Q. 152, a. 2 et 4; Q. 186, a. 7; 3 Sentences dist. 9, Q. 1, a. 3, q 3; 4 Sentences dist. 15,
Q. 1, a. 4, q 3; De maie, Q. 3, a. 1; De virtut., Q. 3, a. 1; De quodlibet 5, Q. 3, a. 2; Ethic. 1, lect. 12
[1098 b 12].
considerandum, quod hostia quae Deo
immolabatur, quatuor habebat. Primo
namque ipsa oblatio debebat esse integra et
incorrupta. Unde dicitur Mal. I, v. 14. —
maledictus dolosus, qui habet in grege suo
masculum, et votum faciens immolat debile
domino. Et propter hoc dicit viventem, ut
scilicet hostia nostri corporis quam Deo
offerimus, sit vivens per fidem formatam
charitate. Gal. II, 20. — quod nunc vivo in
carne, in fide vivo filii Dei. Est autem
attendendum quod naturalis hostia quae
prius viva erat, occidebatur, ut immolaretur,
ad ostendendum quod adhuc mors regnabat
in homine regnante peccato, ut supra V, 12
ss. dictum est. Sed haec hostia spiritualis
semper vivit et in vita proficit, secundum
illud Io. X, 10. — ego veni ut vitam
habeant, et abundantius habeant, quia iam
peccatum ablatum est per Christum : nisi
dicamus quod hostia corporis nostri vivit
quidem Deo per iustitiam fidei, sed
mortificatur concupiscentiis carnis. Col. III,
5. — mortificate membra vestra quae sunt
super terram. Secundo vero hostia Deo
oblata in ipsa immolatione sanctificabatur.
Unde dicitur Lev. XXII, 3. — omnis homo
qui accesserit de stirpe vestra ad ea quae
consecrata sunt, et quae obtulerunt filii
Israel domino, in quo est immunditia,
peribit coram domino. Et ideo subdit
sanctam, scilicet per devotionem, qua
corpus nostrum Dei servitio mancipatur.
Lev. XX, 7. — sanctificamini et estote
sancti, quia ego sanctus dominus Deus
vester. Proprie autem sanctitas dicitur per
respectum ad Deum, inquantum scilicet
homo servat ea quae sunt iusta, quoad
Deum. Tertio quantum ad ipsam sacrificii
consumptionem dicebatur sacrificium suave
et acceptum domino, secundum illud Lev. I,
v. 9. — oblata omnia adolebit sacerdos
super altare in holocaustum, et in odorem
suavissimum domino. Unde hic dicit Deo
placentem, scilicet per rectitudinem
intentionis. Ps. LV, 13. — ut placeam
brisé"
b. Ensuite879
l’homme a les biens extérieurs,
qu’il offre à Dieu par la largesse des aumônes.
D’où ces paroles de l’épître aux Hébreux :
"N’oubliez pas la charité et la communication
de vos biens; car c’est par de telles offrandes
qu’on se concilie Dieu."
c. Enfin l’homme a le bien de son propre
corps; et à ce propos <l’Apôtre> dit : d’offrir,
à savoir à Dieu, vos corps, comme une hostie
spirituelle. Or l’animal immolé à Dieu était
appelé hostie, soit parce qu’il était offert pour
la victoire sur les ennemis, soit pour la
sécurité contre eux, soit parce qu’il était
immolé à la porte du tabernacle du
témoignage.
959. — Or l’homme offre son corps à Dieu
comme une hostie de trois manières :
Premièrement, quand il expose son corps à la
souffrance et à la mort pour Dieu, comme on
le dit du Christ : "Il s’est livré lui-même pour
nous en oblation à Dieu, et en hostie de suave
odeur." Et l’Apôtre dit de lui-même : "Si je
suis immolé sur le sacrifice et l’oblation de
votre foi, je m’en réjouis."
— Deuxièmement, quand l’homme macère
son corps par des jeûnes et des veilles pour
servir Dieu, selon cette parole de <l’Apôtre
dans> la première épître aux Corinthiens : "Je
châtie mon corps et le réduis en servitude."
— Troisièmement, quand l’homme offre son
corps aux œuvres de la justice et au culte
divin : "Offrez vos membres à l’esclavage de
la justice pour la sanctification."
960. — En outre, il faut considérer le fait que
l’hostie qu’on immolait à Dieu réunissait
quatre conditions :
D’abord l’oblation elle-même devait être
entière et sans corruption. D’où ces paroles de
Malachie : "Maudit le fourbe qui a dans son
troupeau un mâle et qui, faisant un vœu,
immole un animal débile au Seigneur." Et
<l’Apôtre> dit880
: vivante, c’est-à-dire afin
que l’hostie de notre corps, offerte à Dieu,
soit vivante par la foi formée par la charité :
"Si je vis maintenant dans la chair, j’y vis en
879
Ps 50, 19. — Lieu parallèle : Super Psalmos, in Ps. 50, 19. 880
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 4, a. 3; Q. 23, a. 8; 3 Sentences dist. 23, Q. 3, a. 1; De
virtut., Q. 14, a. 5; De virtut., Q. 2, a. 3; Ad Rom. 1, 17, lect. 6 (éd. Marietti, n° 108); 3, 22, lect. 3 (éd.
Marietti, n° 302); 10, 8, lect. 1 (éd. Marietti, n° 829); 10, 11, lect. 2 (éd. Marietti, n° 833).
coram Deo in lumine viventium. Quarto in
ipsa sacrificii praeparatione apponebatur sal.
Unde Lev. II, 13. — quicquid obtuleris
sacrificii, sale condies. Et Mc. IX, 48 dicitur
: omnis victima sale salietur. Sal autem
discretionem sapientiae significat. Unde
dicitur Col. ult. : in sapientia ambulate ad
eos qui foris sunt, sermo vester semper in
gratia sit sale conditus. Unde et hic sequitur
rationabile obsequium vestrum, scilicet cum
discretione corpora vestra Deo exhibeatis
hostiam, vel per martyrium vel per
abstinentiam vel per quodcumque opus
iustitiae. 1 Co XIV, 40. — omnia honeste et
secundum ordinem fiant in vobis. Et in Ps.
XCVIII, 4. — honor regis iudicium diligit.
Aliter se habet homo iustus ad interiores
actus, quibus Deo obsequitur, et ad
exteriores. Nam bonum hominis et iustitia
eius principaliter in interioribus actibus
consistit, quibus scilicet homo credit, sperat
et diligit. Unde dicitur Lc. XVII, 21. —
regnum Dei intra vos est. Non autem
principaliter consistit in exterioribus actibus.
Infra XIV, v. 17. — non est regnum Dei
esca et potus. Unde interiores actus se
habent per modum finis, qui secundum se
quaeritur : exteriores vero actus per quos
Deo corpora exhibentur, se habent sicut ea
quae sunt ad finem. In eo autem quod
quaeritur tamquam finis nulla mensura
adhibetur, sed quanto maius fuerit, tanto
melius se habet. In eo autem quod quaeritur
propter finem, adhibetur mensura secundum
proportionem ad finem, sicut medicus
sanitatem facit tantum quantum potest,
medicinam autem non tantum dat quantum
potest, sed quantum videt expedire ad
sanitatem consequendam. Et similiter homo
in fide, et spe, et in charitate nullam
mensuram debet adhibere, sed quanto plus
credit, sperat, et diligit, tanto melius est;
propter quod dicitur Deut. IV, 5. — diliges
dominum Deum tuum, et cetera. Sed in
exterioribus actibus est adhibenda
discretionis mensura per comparationem ad
charitatem. Unde dicit Hieronymus : nonne
rationalis homo dignitatem amittit, qui
la foi du Fils de Dieu, qui m’a aimé et s’est
lui-même livré pour moi." Or il faut
remarquer que l’hostie naturelle, auparavant
vivante, était mise à mort pour montrer au
moyen de son immolation que la mort régnait
encore dans l’homme tant que régnait le
péché, comme on l’a dit plus haut. Mais cette
hostie spirituelle vit toujours et progresse en
vivant, selon ce passage de Jean : "Moi je suis
venu pour qu’elles aient la vie, et qu’elles
l’aient plus abondamment ", parce que le
péché a déjà été supprimé par le Christ; à
moins que nous disions que l’hostie de notre
corps vit assurément pour Dieu par la justice
de la foi, mais qu’elle est mortifiée par les
concupiscences de la chair : "Mortifiez vos
membres qui sont sur la terre "
961. — Ensuite l’hostie offerte à Dieu était
sanctifiée dans l’immolation elle-même. D’où
il est dit : "Tout homme de votre race, qui
s’approchera en état d’impureté des choses
qui auront été consacrées et que les enfants
d’Israël auront offertes au Seigneur, périra
devant le Seigneur’"Voilà pourquoi
<l’Apôtre> ajoute : sainte, à savoir par la
dévotion, par laquelle notre corps est consacré
au service de Dieu : "Sanctifiez-vous et soyez
saints, parce que c’est moi qui suis le
Seigneur votre Dieu " Or, à proprement
parler, la sainteté par rapport à Dieu consiste
en ce que l’homme conserve ce qui est juste à
l’égard de Dieu.
962. — Puis, quant à la destruction même du
sacrifice, l’hostie était appelée un sacrifice de
suavité et agréable au Seigneur, selon ce
passage du Lévitique : "Tout ce qui aura été
offert le prêtre le brûlera sur l’autel en
holocauste et en très suave odeur pour le
Seigneur." D’où ce que <l’Apôtre> dit ici :
agréable à Dieu, à savoir par la rectitude de
l’intention : "Afin que je me rende agréable
devant Dieu, dans la lumière des vivants."
963. — Enfin, dans la préparation même du
sacrifice on y ajoutait du sel. Ainsi <lit-on>
dans le Lévitique : "Tout ce que tu offriras en
sacrifice, tu l’assaisonne ras de sel." Et il est
dit dans <l’évangile de> Marc : "Toute
ieiunium vel vigilias praefert sensu
integritati, ut propter Psalmorum atque
officiorum decantationem, amentiae vel
tristitiae quis notam incurrat ? Deinde cum
dicit et nolite conformari, etc., ostendit
qualiter se debeat homo exhibere Deo
quantum ad animam. Et primo prohibet
saeculi conformitatem, cum dicit et nolite
conformari huic saeculo, id est, rebus quae
temporaliter transeunt. Nam saeculum
praesens est quaedam mensura eorum quae
temporaliter labuntur. Rebus autem
temporalibus homo conformatur per
affectum, eis amore inhaerendo. Os. IX, v.
10. — facti sunt abominabiles, sicut ea quae
dilexerunt. Iac. I, 27. — religio munda et
immaculata apud Deum et patrem haec est,
immaculatum se custodire ab hoc saeculo.
Conformatur etiam huic saeculo qui vitam
saeculariter viventium imitatur. Eph. IV, 17.
— testificor in domino, ut iam non amplius
ambuletis, sicut et gentes ambulant.
Secundo mandat interiorem mentis
reformationem, cum dicit sed reformamini
in novitate sensus vestri. Sensus autem
hominis hic dicitur ratio, secundum quod
per eam homo iudicat de agendis. Hunc
autem sensum homo in sua creatione habuit
integrum et vigentem, unde dicitur Eccli.
XVII, 6. — sensus implevit corda illorum,
et bona, et mala ostendit illis. Sed per
peccatum hic sensus est corruptus, et quasi
inveteratus, Bar. III, 11. — inveterasti in
terra aliena, et per consequens
pulchritudinem et decorem suum amisit.
Thren. I, 6. — egressus est a filia Sion
omnis decor eius. Monet ergo apostolus ut
reformemur, id est, iterato formam et
decorem mentis assumamus, quem nostra
mens habuit, quod quidem fit per gratiam
spiritus sancti, ad quam participando homo
studium habere debet, ita scilicet ut qui eam
nondum perceperunt, eam percipiant, et qui
victime sera salée avec le sel." Or le sel
signifie la discrétion de la sagesse881
. D’où
<ces paroles de l’Apôtre dans son épître> aux
Colossiens : "Conduisez-vous avec sagesse
envers ceux du dehors, en rachetant le temps.
Que votre parole soit accompagnée de grâce
et assaisonnée de sel, " Aussi ajoute-t-il ici ce
sera votre culte raisonnable, c’est-à-dire
offrez à Dieu avec discrétion vos corps
comme une hostie, soit par le martyre, soit par
l’abstinence, soit par quelque autre œuvre de
justice : "Que tout se fasse chez vous
honnêtement et avec ordre882
." Et encore :
"L’honneur du roi est d’aimer le jugement."
964. — Autre est le comportement de
l’homme juste dans ses actes intérieurs par
lesquels il honore Dieu, et autre son
comportement dans ses actes extérieurs883
.
Car le bien de l’homme et sa justice
consistent principalement dans les actes
intérieurs, à savoir ceux par lesquels l’homme
croit, espère et aime. D’où ces paroles de Luc
: "Le Royaume de Dieu est au-dedans de
vous." Mais ils ne consistent pas
principalement dans les actes extérieurs : "Le
Règne de Dieu n’est pas nourriture et
boisson." Les actes intérieurs revêtent donc le
caractère de fin, qu’on recherche pour elle-
même; tandis que les actes extérieurs, pour
lesquels les corps sont offerts à Dieu, ont pour
ainsi dire le caractère de moyens qui sont
ordonnés à la fin. Or dans ce qu’on recherche
comme fin on ne met aucune mesure, mais
plus la chose est grande, meilleure elle est. En
revanche, dans ce qui est recherché en vue de
la fin, on admet une mesure proportionnée à
cette fin. Par exemple, un médecin procure la
santé autant qu’il le peut, et administre un
traitement non pas seulement autant qu’il le
peut, mais dans la mesure où il le juge
expédient pour obtenir la santé.
Semblablement l’homme ne doit mettre
aucune mesure dans la foi, l’espérance et la
881
Lieux parallèles 4 Sentences dist. 6, Q. 2, a. 1, Q. 3, sol. 3 ad tertium; Somme Théologique 1a-2ae,
Q. 102, a. 3, sol. 14; Super Psalmos, in Ps. 10, 5b. 882
1 Corinthiens 14, 40. L’addition des mots in vobis (chez VOUS) figure dans la Biblia latina, éd.
Adolph Rusch, vol. IV, p. 332a; voir aussi DOM SABATIER, Bibl. sacr., t. III (Notae ad versionem
antiquam), p. 712. 883
Lieux parallèles Somme Théologique 1 Q. 64, a. 4; 2a-2 Q. 17, a. 5, sol. 2; Q. 27, a. 6; Q. 81, a. 7;
3Sentences dist. 33, Q. 1, a. 3, q. 4; De virtut., Q. 1, a. 1; De caritate, Q. 2, a. 9.
illam perceperunt, in ea proficiant. Eph. IV,
23. — renovamini spiritu mentis vestrae. Ps.
CII, 5. — renovabitur ut aquilae iuventus
tua. Vel aliter renovamini, scilicet in
exterioribus actibus, in novitate sensus
vestri, id est secundum novitatem gratiae,
quam mente percepistis. Tertio assignat
rationem admonitionis praedictae, cum dicit
ut probetis quae sit voluntas. Circa quod
considerandum est, quod, sicut homo qui
habet gustum infectum, non habet rectum
iudicium de saporibus sed ea quae sunt
suavia interdum abominatur, ea vero quae
sunt abominabilia appetit, qui autem habet
gustum sanum, rectum iudicium de
saporibus habet; ita homo qui habet
corruptum affectum quasi conformatum
rebus saecularibus, non habet rectum
iudicium de bono; sed ille qui habet rectum
et sanum affectum, sensu eius innovato per
gratiam, rectum iudicium habet de bono.
Ideo ergo dixit : nolite conformari huic
saeculo, sed renovamini in novitate sensus
vestri, ut probetis, id est, experimento
cognoscatis. —Ps. XXXIII, 9. — gustate et
videte, quoniam suavis est dominus—, quae
sit voluntas Dei, qua scilicet vult vos esse
salvos. —I Thess. IV, 3. — haec est
voluntas Dei, sanctificatio vestra—, bona,
id est, vult bonum honestum nos velle, et ad
hoc suis praeceptis nos inducit. —Mich. VI,
8. — indicabo tibi, o homo, quid sit bonum,
et quid Deus requirat a te—, et
beneplacens, inquantum scilicet bene
disposito est delectabile id, quod Deus vult
nos velle. Ps. XVIII, v. 9. — iustitiae
domini rectae laetificantes corda. Et non
tantum utilis ad finem consequendum, sed
etiam perfecta, quasi coniungens nos fini.
Matth. V, 48. — estote perfecti, sicut et
pater vester caelestis perfectus est. Gen.
XVII, 1. — ambula coram me, et esto
perfectus. Talem ergo experiuntur Dei
voluntatem illi, qui non conformantur huic
saeculo, sed reformantur in novitate sensus
sui. Illi autem qui in vetustate permanent,
saeculo conformati, iudicant Dei voluntatem
non esse bonam, sed gravem et inutilem.
Eccli. VI, 21. — quam aspera est sapientia
indoctis hominibus. Deinde, cum dicit dico
charité; il est d’autant plus parfait qu’il croit,
espère et aime davantage. C’est pour cette
raison qu’il est écrit : "Tu aimeras le Seigneur
ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et
de toute ta force." Mais dans les actes
extérieurs il y a une mesure de discrétion à
observer proportionnellement à la charité. Ce
qui fait dire à Jérôme : "L’homme raisonnable
ne perd-il pas sa dignité lorsque, préférant le
jeûne ou les veilles à l’intégrité de ses
facultés, il se laisse infliger le nom d’homme
triste ou insensé, parce qu’il se livre au chant
des psaumes et des offices ?
965. — B. Lorsqu’il dit : 2 Et ne vous
conformez point, etc., <l’Apôtre> montre
comment l’homme doit s’offrir à Dieu quant à
l’âme.
1. Et il défend en premier lieu de se
conformer au siècle, lorsqu’il dit : Et ne vous
conformez point à ce siècle, c’est-à-dire aux
choses qui passent avec le temps. Car le siècle
présent est comme la mesure des choses qui
s’écoulent avec le temps. Or l’homme se
conforme aux choses temporelles par
l’affection, en s’y attachant avec amour : "Ils
sont devenus abominables comme les choses
qu’ils ont aimées."
— "La religion pure et sans tache devant Dieu
le Père, la voici : Visiter les orphelins et les
veuves dans leurs tribulations, et se garder
sans tache à l’écart de ce siècle." On se
conforme aussi à ce siècle en imitant la
conduite de ceux qui vivent à la manière du
siècle : "Je vous dis donc, et je vous adjure
dans le Seigneur de ne plus marcher comme
les Gentils, qui marchent dans la vanité de
leurs pensées."
966. — 2. En deuxième lieu, <l’Apôtre>
commande la réforme intérieure du jugement,
lorsqu’il dit : mais réformez-vous par le
renouvellement de votre esprit. L’esprit de
l’homme est pris ici pour la raison, en tant
que par elle l’homme juge de ce qu’il doit
accomplir. Or l’homme a reçu dans sa
création un esprit intègre et vigoureux; d’où
ces paroles de l’Ecclésiastique : "<Dieu> a
rempli leur cœur de sens et il leur a montré les
biens et les maux."
Mais par le péché cet esprit s’est corrompu et
a semblé vieillir : "Tu as vieilli dans une terre
enim per gratiam, etc., docet qualiter donis
Dei homo debeat uti. Et primo docet hoc
quantum ad dona quae non sunt omnibus
communia, sicut sunt gratiae gratis datae;
secundo, quantum ad donum charitatis,
quod est omnibus commune, ibi dilectio
sine simulatione, et cetera. Circa primum
duo facit. Primo docet in generali, quomodo
debeat homo uti gratiis gratis datis; secundo
exequitur hoc per partes ibi habentes autem
donationes. Circa primum duo facit. Primo
proponit documentum; secundo rationem
assignat, ibi sicut enim in uno corpore, et
cetera. Circa primum tria facit. Primo
excludit superfluum, dicens : monui quod
reformemini in novitate sensus vestri, quod
quidem moderate facere debetis, dico enim,
id est, mando, per gratiam, apostolatus et
auctoritate apostolica, quae data est mihi.
Gal. II, 9. — cum cognovissent gratiam
quae data est mihi inter gentes. Eph. III, 8.
— mihi omnium sanctorum minimo data est
gratia haec, etc., omnibus qui sunt inter vos,
quia omnibus est hoc utile. 1 Co c. VII, 7.
— volo omnes homines esse sicut meipsum.
Hoc, inquam, mando, non plus sapere,
quam oportet sapere, id est, nullus
praesumat, de sensu aut sapientia sua
confidens supra suam mensuram. Eccle.
VII, 17. — non plus sapias quam necesse
est. Ps. CXXX, 1. — neque ambulavi in
magnis, neque in mirabilibus super me.
Secundo hortatur ad id quod est medium
dicens sed sapere ad sobrietatem, scilicet
mando vobis ut mensurate sapiatis
secundum gratiam vobis datam. Sobrietas
enim mensuram importat. Et quamvis
proprie dicatur circa potum vini, potest
tamen accipi circa quamlibet materiam, in
qua homo debitam mensuram observat. Tit.
II, v. 12. — sobrie et iuste et pie vivamus in
hoc saeculo. Tertio docet secundum quid
accipienda sit mensuram medii, dicens et
hoc, inquam, sicut Deus unicuique divisit, id
est distribuit, mensuram fidei, id est
mensuram donorum suorum, quae ordinatur
ad fidei aedificationem. 1 Co XII, 7. —
unicuique datur manifestatio spiritus ad
étrangère "; et par conséquent il a perdu sa
noblesse et sa beauté : "Toute la beauté de la
fille de Sion s’est retirée d’elle." L’Apôtre
nous avertit donc de nous réformer, c’est-à-
dire de reprendre de nouveau la forme et la
beauté que notre âme avait <autrefois>; ce qui
se fait par la grâce de l’Esprit-Saint, à laquelle
l’homme doit se prêter avec ardeur par sa
participation, c’est-à-dire de telle sorte que
ceux qui ne l’ont pas encore reçue la reçoive,
et que ceux qui l’ont reçue en profitent :
"Renouvelez-vous par l’esprit de votre
esprit." — "Ta jeunesse sera renouvelée
comme celle de l’aigle." Ou autrement
réformez-vous, à savoir dans les actes
extérieurs, par le renouvellement de votre
esprit, c’est-à-dire selon la grâce nouvelle que
vous avez reçue dans votre âme.
967. — 3. Enfin, <l’Apôtre> donne la raison
de l’avertissement dont on vient de parler,
lorsqu’il dit : afin que vous éprouviez quelle
est la volonté, etc. Sur ce point il faut faire la
remarque <suivante> : De même que
l’homme qui a un goût corrompu ne peut
juger correctement les saveurs et se prend
parfois à détester ce qui est suave, ou à
l’opposé recherche ce qui est détestable,
tandis que celui qui a un goût sain juge
correctement les saveurs; ainsi l’homme dont
l’affection est corrompue par une sorte de
conformité avec les choses du siècle ne porte
pas un jugement correct sur le bien, tandis que
celui qui a l’affection droite et saine, son
esprit étant renouvelé par la grâce, porte un
jugement correct sur le bien. Voilà pourquoi
<l’Apôtre> a dit : ne vous conformez point à
ce siècle, mais réformez-vous par le
renouvellement de votre esprit, afin que vous
éprouviez, c’est-à-dire que vous reconnaissiez
par l’expérience884
."
— "Goûtez et voyez combien le Seigneur est
doux." — quelle est la volonté de Dieu, c’est-
à-dire celle par laquelle il veut que vous soyez
sauvés — "La volonté de Dieu, c’est votre
sanctification." — <qui est> bonne, c’est-à-
dire <qui> veut que nous voulions nous-
mêmes le bien honorable, et nous y exhorte
884
Voir Glosa in Rom. XII, 2 (GPL, col. 1497 B).
utilitatem. Dat enim Deus huiusmodi dona,
non eadem omnibus, sed diversa diversis
distribuit, secundum illud 1 Co XII, 4. —
divisiones gratiarum sunt. Nec omnibus
aequaliter dat sed unicuique secundum
certam mensuram. Eph. IV, 7. — unicuique
nostrum data est gratia secundum
mensuram donationis Christi. Et ideo
apostolus sobrie sapiens secundum hanc
mensuram dicebat 2 Co X, 13. — non
autem in immensum gloriamur, sed
secundum mensuram regulae, qua mensus
est nobis Deus. Soli autem Christo datus est
spiritus non ad mensuram, ut dicitur Io. III,
34. Non solum autem alias gratias gratis
datas dat Deus mensurate sed etiam ipsam
fidem quae per dilectionem operatur. Unde
Lc. XVII, v. 5 discipuli Christo dixerunt :
domine, adauge nobis fidem.
par ses préceptes — "Je t’indiquerai, ô
homme, ce qui est bon et ce que le Seigneur
requiert de toi." —, agréable, en tant que pour
l’homme bien disposé il est agréable de
vouloir ce que Dieu veut : "Les justices du
Seigneur sont droites, elles réjouissent les
cœurs." Et non seulement <la volonté de
Dieu> est utile pour atteindre notre fin, mais
elle est aussi parfaite, nous unissant pour ainsi
dire à notre fin : "Soyez parfaits, comme votre
Père céleste est parfait." — "Marche devant
moi et sois parfait." Or ceux-là font
l’expérience de cette volonté de Dieu, qui ne
se conforment pas à ce siècle, mais qui sont
réformés par le renouvellement de leur esprit.
Au contraire, ceux qui demeurent dans leur
décrépitude, conformes au siècle, estiment
que la volonté de Dieu n’est pas bonne, mais
pesante et inutile : "Que la sagesse est
extrêmement amère aux hommes ignorants."
968. — II. Lorsqu’il ajoute : Car je dis, en
vertu de la grâce, etc., <l’Apôtre> enseigne
comment l’homme doit user des dons de
Dieu. Et :
— Il expose d’abord son enseignement quant
aux dons qui ne sont pas communs à tous,
comme le sont les grâces gratuitement
données.
— Puis, quant au don de la charité, qui est
commun à tous [n° 983] 885
— "Que votre
dilection soit sans simulation, etc."
Sur le premier de ces points <L’Apôtre>
enseigne d’abord en général comment
l’homme doit user des dons gratuitement
donnés886
.
Puis, il développe cela en détail [n° 976] : 6
"Nous avons toutefois des dons différents."
Sur l’usage des dons gratuitement donnés :
<L’Apôtre> commence par proposer son
enseignement.
Puis, il en donne la raison [n° 972] 4 "Car,
885
Lieux parallèles : Somme Théologique Ia-2 Q. 111, a. 1; 3 Con>. Gentiles c. 154; Compend. dieol.,
c. 214; Ad Rom. 1, 4, lect. 3 (éd. Marietti, n° 46); Ad Ephes. 1, 6b, lect. 2 (éd. Marietti, n 15). 886
Par définition, toute grâce est gratuite. Cependant la théologie distingue (Somme Théologique 1a-
2ae, Q. 111, a. 1) la grâce qui sanctifie la personne qui la reçoit, dite gratia gratum faciens, ou "grâce
qui rend agréable (à Dieu)", et la "grâce gratuitement donnée", gratia gratis data, qui permet de
coopérer au salut d’autrui. Saint Paul les appelle "charismes." N’étant destinés qu’â la sanctification
d’autrui, les charismes sont donnés indépendamment de la sainteté personnelle de qui en est gratifié.
En eux se manifeste donc tout particulièrement la gratuité de la grâce divine d’où leur nom de grâce
gratuitement donnée.
comme dans un seul corps, etc."
969. — En proposant son enseignement, il
écarte premièrement ce qui est inutile : Je
vous ai avertis de vous réformer par le
renouvellement de votre esprit et de devoir le
faire avec modération, car je dis, c’est-à-dire
je vous commande, en vertu de la grâce, de
l’apostolat et par mon autorité d’apôtre, qui
m’a été donnée — "Ayant connu la grâce qui
m’a été donnée." Et : "A moi, le moindre des
saints, a été donnée cette grâce d’annoncer
parmi les Gentils les richesses insondables du
Christ " – à tous ceux qui sont parmi vous,
parce que <mon commandement> est utile à
tous : "Je veux que tous les hommes soient
comme moi887
." Je vous commande, dis-je, de
ne pas s’exalter en pensée plus qu’il ne
convient, c’est-à-dire que personne ne
présume de son sens ou de sa sagesse en se
confiant exagérément en soi-même : "Ne sois
pas plus sage qu’il n’est nécessaire." — "Je
n’ai pas marché dans les grandeurs, ni dans
les choses merveilleuses au-dessus de moi."
970. — Ensuite, <l’Apôtre> exhorte à <se
conduire selon> un juste milieu, en disant :
mais de penser avec sobriété, c’est-à-dire je
vous commande d’être sage avec mesure
selon la grâce qui vous a été donnée. <Le
mot> "sobriété" suppose la mesure888
. Et bien
qu’on se serve de cette expression à l’égard
du breuvage du vin, on peut pourtant
l’appliquer à toute matière dans laquelle
l’homme observe une mesure légitime : "La
grâce de Dieu Notre Sauveur est apparue à
tous les hommes, nous enseignant à renoncer
à l’impiété et aux désirs du siècle, et à vivre
sobrement, justement et pieusement dans ce
siècle.
971. Enfin, <l’Apôtre> enseigne comment il
faut comprendre cette mesure du juste milieu,
en disant : et selon la mesure de la foi, c’est-
à-dire la mesure des dons <de Dieu>, laquelle
est ordonnée à l’édification de la foi, que Dieu
a départie à chacun, c’est-à-dire a distribuée :
"A chacun est donnée la manifestation de
l’Esprit pour l’utilité." Car Dieu accorde les
887
1 Corinthiens 7, 7. Le mot hommes (hommes) figure dans la Vetus latina, voir DOM SABATIER,
Bibl. sacr., t. 1H, p. 678 (Textus et notae ad versionem antiquam). 888
Lieu parallèle Somme Théologique 2a-2ae, Q. 149, a. 1.
dons de ce genre, non pas les mêmes à tous,
mais il distribue à chacun des dons différents,
selon cette autre parole <de l’Apôtre> : "Il y a
diversité de grâces." Il ne donne pas non plus
à tous également, mais à chacun selon une
mesure déterminée : "chacun de nous a été
donnée la grâce, selon la mesure du don du
Christ." Et voilà pourquoi l’Apôtre, avec sa
sobre sagesse, disait selon cette mesure :
"Nous ne nous glorifierons pas
démesurément, mais selon la mesure de la
règle que Dieu nous a mesurée." Au Christ
seul a été donné l’Esprit sans mesure, comme
il est dit dans <l’évangile de> Jean889
. Or
Dieu accorde avec mesure non seulement les
autres grâces gratuitement données, mais
aussi la foi elle-même, qui opère par la
charité890
; ce qui fait dire aux disciples du
Christ "Augmente en nous la foi."
Lectio 2 Leçon 2 [Versets 4 à 13]
[n° 972] 4 Car, comme dans un seul corps
nous avons beaucoup de membres, et que tous
les membres n’ont point la même fonction,
[n° 973] 5 ainsi, à plusieurs, nous sommes un
seul corps dans le Christ, étant tous en parti
culier les membres les uns des autres.
[n° 976] 6 Nous avons toutefois des dons
différents, selon la grâce qui nous a été
donnée : soit la prophétie, en accord avec la
foi;
[n° 980] 7 soit le ministère, en exerçant ce
ministère, soit celui qui enseigne, dans
l’enseignement;
[n° 981] 8 celui qui exhorte, en exhortant;
celui qui distribue, <agira> avec simplicité;
celui qui préside <le fera> avec sollicitude
celui qui exerce la miséricorde <le fera> avec
joie.
[n° 983] 9 Que votre dilection soit sans
simulation, haïssant le mal, vous attachant au
bien;
[n° 985] 10 vous aimant les uns les autres
avec la charité fraternelle; vous prévenant
d’honneur les uns les autres;
889
Celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu; car Dieu ne donne pas l’Esprit avec mesure " Un
3, 34). 890
Voir Glosa in Rom. XII, 3 (GPL, col. 1498 B). l2. Lc 17, 5.
[n° 987] 11 dans votre sollicitude ne <soyez>
pas paresseux; soyez fervents d’esprit, servant
le Seigneur;
[n° 990] 12 soyez joyeux dans l’espérance,
patients dans la tribulation; persévérants dans
la prière;
[n° 993] 13 prenant part aux nécessités des
saints; pratiquant l’hospitalité.
[86220] Super Rom., cap. 12 l. 2 Praemissa
admonitione, hic apostolus rationem
assignat sumptam ex similitudine corporis
mystici ad corpus naturale. Et primo in
corpore naturali tangit tria. Primo quidem
corporis unitatem, cum dicit sicut enim in
uno corpore; secundo, membrorum
pluralitatem, cum dicit multa membra
habemus : est enim corpus humanum
organicum ex diversitate membrorum
constitutum; tertio officiorum diversitatem,
cum dicit omnia autem membra non
eumdem actum habent. Frustra enim esset
membrorum diversitas, nisi ad diversos
actus ordinarentur. Deinde aptat haec tria ad
corpus Christi mysticum, quod est Ecclesia.
Eph. I, v. 22. — ipsum dedit caput super
omnem Ecclesiam, quae est corpus eius.
Circa quod etiam tria tangit. Primo quidem
fidelium quasi membrorum multitudinem,
cum dicit ita multi. Lc. XIV, v. 16. — homo
quidam fecit coenam magnam, et vocavit
multos. Is. LIV, 1. — multi filii desertae.
Quamvis enim sint pauci per
comparationem ad infructuosam
multitudinem damnatorum, secundum illud
Matth. VII, 14. — arcta est via quae ducit
ad vitam, et pauci inveniunt eam, tamen
absolute loquendo sunt multi. Apoc. VII, 9.
— post haec vidi turbam magnam, quam
dinumerare nemo poterat. Secundo tangit
972. — I. Après avoir donné son
avertissement [n° 953 et 968], l’Apôtre en
donne ici la raison en prenant une
comparaison entre le Corps mystique891
et le
corps naturel.
A. Et d’abord, concernant le corps naturel il
mentionne trois choses :
1. Premièrement l’unité du corps, lorsqu’il dit
: 4 Car, comme dans un seul corps.
2. Deuxièmement la diversité des membres,
lorsqu’il dit : nous avons beaucoup de
membres; en effet, le corps humain organisé
est constitué à partir de la diversité des
membres.
3. Troisièmement la diversité des fonctions,
lorsqu’il dit : et que tous les membres n’ont
point la même fonction. En effet, la diversité
des membres serait inutile s’ils n’étaient
ordonnés à des fonctions diverses.
973. — B. <L’Apôtre>892
applique en suite
ces trois caractères au Corps mystique du
Christ, qui est l’Eglise : "Il l’a établi chef sur
toute l’Église, qui est son Corps." Pour
procéder à cette comparaison <l’Apôtre>
mentionne encore trois choses :
1. Il mentionne d’abord la multitude des
fidèles, qui sont comme les membres <de ce
Corps>, lorsqu’il dit : ainsi, à plusieurs. —
"Un homme fit un grand dîner et y appela
beaucoup de monde." Et : "Les fils de la
délaissée seront plus nombreux." Car, bien
891
On sait que l’expression corpus mysticum a d’abord désigné le corps eucharistique, non pour nier
sa réalité de corps du Christ, mais pour indiquer son invisibilité. L’Eglise est bien corps, mais elle l’est
si réellement et si évidemment, grâce à saint Paul, qu’on n’éprouve aucun besoin de définir la nature
pamculière de ce corps. A la suite d’une longue évolution de plusieurs siécles, l’euchanstie est de plus
en plus souvent qualifiée de corpus verum (vrai corps), ce qui insiste sur la réalité de la présence du
Christ, tandis que l’expression çorpus mysticum devient progressivement la désignation propre de
l’Eglise. Cette évolution est en voie de consolidation défi nitive chez saint Thomas; voir Henri DE
LUBAC, Corpus mysticum. L’Eucharistie et l’Eglise au Moyen Age, p. 127-128. 892
Lieux parallèles Somme Théologique 3a, Q. 8, a. 1." ; 3 Sentences dist. 13, Q. 2, a. l; a. 2;
4Sentences dist. 9, a. 2, q De veritate, Q. 29, a. 4 et 5; Compend. theol., c. 214; Ad Ephes. 1, 23, lect. 8
(éd. Marietti, n° 70."); Ad CoL 1, 18s., lect. 5 (éd. Marietti, n° 46".).
corporis mystici unitatem, cum dicit unum
corpus sumus. Eph. II, 16. — ut reconciliet
ambos in uno corpore, et cetera. Huius
autem corporis mystici est unitas spiritualis,
per quam fide et affectu charitatis invicem
unimur Deo, secundum illud Eph. IV, 4. —
unum corpus, et unus spiritus. Et quia
spiritus unitatis a Christo in nos derivatur,
supra VIII, 9. — si quis spiritum Christi non
habet, hic non est eius ideo subdit in
Christo, qui per spiritum suum, quem dat
nobis, nos invicem unit et Deo. Io. XVII, 2
s. : ut sint unum in nobis, sicut et nos unum
sumus. Tertio tangit officiorum diversitatem
ad utilitatem communem reductam, dicens
singuli autem alter alterius membra.
Membrum enim quodlibet proprium actum
habet et virtutem; inquantum ergo unum
membrum sua virtute et actu alteri prodest,
dicitur membrum alterius, sicut pes dicitur
membrum oculi, inquantum oculum defert,
et oculus dicitur membrum pedis,
inquantum dirigit pedem. 1 Co XII, 2. —
non potest dicere oculus manui : opera tua
non indigeo. Ita etiam in corpore mystico
ille qui accepit gratiam prophetiae, indiget
illo qui accepit gratiam sanitatum, et ita est
in omnibus aliis. Unde dum unusquisque
fidelis secundum gratiam sibi datam alteri
servit, efficitur alterius membrum. Gal. ult. :
alter alterius onera portate. I Petr. IV, 10.
— unusquisque sicut accepit gratiam in
alterutrum illam administrantes. Deinde,
cum dicit habentes autem donationes,
exequitur per partes monitionem, quam
supra posuerat de sobrio et moderato gratiae
usu. Et primo ponit gratiarum diversitatem,
dicens : sumus, inquam, alter alterius
membra, non secundum eamdem gratiam,
sed habentes diversas donationes
differentes, non ex diversitate meritorum,
sed secundum gratiam quae data est nobis. 1
Co VII, 7. — unusquisque proprium donum
habet ex Deo, unus quidem sic, alius vero
sic. Matth. XXV, 14 s. : vocavit servos suos,
et tradidit illis bona sua, et uni dedit
quinque talenta, alii autem duo, alii vero
unum. Secundo docet diversarum gratiarum
usum, et, primo, in rebus divinis, quantum
ad cognitionem quidem, dicens : sive
qu’ils soient en petit nombre comparés à la
multitude stérile des réprouvés, selon cette
parole de Matthieu : "Resserrée est la voie qui
conduit à la vie et il en est peu qui la trouvent
", cependant, absolument parlant, ils sont en
grand nombre : "Après cela, je vis une grande
foule que personne ne pouvait compter."
974. — 2. Ensuite, il mentionne l’unité du
Corps mystique, lorsqu’il dit : "Pour
réconcilier à Dieu par la croix les deux
<peuples> réunis en un seul corps, détruisant
en lui-même leurs inimitiés." Or l’unité de ce
Corps mystique est spirituelle, et cette unité
nous unit les uns et les autres à Dieu par la foi
et la dilection, selon ce passage <de l’Apôtre>
aux Ephésiens "Soyez un seul corps et un seul
esprit." Et parce que l’Esprit d’unité dérive du
Christ vers nous, comme on l’a dit plus haut :
"Si quelqu’un n’a pas l’Esprit du Christ,
celui-là n’est pas à lui." <l’Apôtre> ajoute :
dans le Christ qui, en nous donnant son
Esprit, nous unit les uns aux autres et à Dieu :
"Pour qu’ils soient un" en nous, "comme nous
aussi nous sommes un."
975. — 3. Enfin, il mentionne la diversité des
fonctions qui se réduit à l’utilité commune, en
disant : étant tous en particulier les membres
les uns des autres. Car chaque membre a sa
fonction propre et sa propre vertu; et par
conséquent, en tant que par sa vertu et par sa
fonction il est utile à un autre membre, on dit
qu’il en est le membre, comme le pied est
appelé membre de l’œil, en tant qu’il porte
l’œil, et l’œil le membre du pied, en tant qu’il
dirige le pied : "L’œil ne peut pas dire à la
main : "Je n’ai pas besoin de ton office." De
même également, dans le Corps mystique,
celui qui a reçu le don de prophétie a besoin
de celui qui a reçu le don des guérisons, et il
en est ainsi de tous les autres. Par conséquent,
chaque fidèle, en servant l’autre selon la grâce
qui lui a été donnée, devient membre de
l’autre "Portez les fardeaux les uns des autres
"
— "Chacun de vous mettant au service des
autres la grâce qu’il a reçue, comme de bons
dispensateurs de la grâce multiforme de Dieu
"
976. En disant : 6 Nous avons toutefois des
dons, <l’Apôtre> développe en détail
prophetia, quam habentes, utamur ea
secundum rationem fidei. Dicitur autem
prophetia quaedam apparitio ex revelatione
divina eorum quae sunt procul. Unde I Reg.
IX, 9 dicitur : qui propheta hodie dicitur,
vocabatur olim videns. Sunt autem procul a
cognitione nostra, secundum se quidem
futura contingentia, quae propter defectum
sui esse cognoscibilia non sunt; sed res
divinae sunt procul a nostra cognitione, non
secundum se, cum sint maxime
cognoscibiles, quia, ut dicitur I Io. I, 5. —
Deus lux est, et tenebrae in eo non sunt
ullae, sed propter defectum intellectus
nostri, qui se habet ad ea, quae sunt in
seipsis manifestissima, sicut oculus noctuae
ad lucem solis. Et quia unumquodque magis
proprie dicitur tale, quod est secundum se
tale, quam quod est est tale secundum aliud;
inde est quod magis proprie dicuntur esse
procul a cognitione nostra futura
contingentia. Et propter hoc horum proprie
est prophetia. Amos c. III, 7. — non faciet
dominus Deus verbum, nisi revelaverit
secretum suum. Dicitur tamen prophetia
communiter etiam revelatio quorumcumque
occultorum. Hoc autem donum prophetiae,
non solum fuit in veteri testamento, sed
etiam in novo Ioel II, 28. — effundam de
spiritu meo super omnem carnem, et
prophetabunt filii vestri. Dicuntur etiam
prophetae in novo testamento, qui
prophetica dicta exponunt, quia sacra
Scriptura eodem spiritu interpretatur quo est
condita. Eccli. XXIV, 46. — adhuc
doctrinam quasi prophetiam effundam.
Ordinatur autem prophetiae donum, sicut et
aliae gratiae gratis datae, ad fidei
aedificationem. 1 Co XII, 7. — unicuique
l’avertissement qu’il avait donné plus haut [n°
968] à propos de l’usage sobre et modéré de
la grâce. Et il expose en premier lieu la
diversité des dons, en disant : nous sommes,
ai-je dit, les membres les uns des autres, non
selon le même don, mais ayant des dons
différents, non à cause de la diversité de nos
mérites, mais selon la grâce qui nous a été
donnée. — "Chacun reçoit de Dieu son don
particulier, l’un d’une manière et l’autre d’une
autre." Et : "Il appela ses serviteurs et leur
remit ses biens. A l’un il donna cinq talents, à
un autre deux, à un autre un, à chacun selon
sa capacité."
977. — II. En second lieu, <l’Apôtre> donne
un enseignement sur l’usage des différents
dons, et
A. Tout d’abord à l’égard des choses divines,
quant à leur connaissance, en disant : soit la
prophétie, dont nous devons user, si nous en
avons reçu le don, en accord avec la foi.
978. — Or893
on appelle prophétie une sorte
d’apparition, par révélation divine, de choses
qui sont éloignées. D’où ces paroles du
premier livre des Rois : "Celui qui est appelé
prophète aujourd’hui se nommait autrefois
voyant." Sont éloignés de notre connaissance
les futurs contingents894
en eux-mêmes,
lesquels ne sont pas objet de connaissance à
cause de leur défaut d’existence; tandis que
les réalités divines sont éloignées de notre
connaissance, non en tant que telles,
puisqu’elles peuvent être parfaitement
connues, selon ce qui est dit dans la première
épître de Jean : "Dieu est lumière et il n’y a
pas en lui de ténèbres ", mais à cause de la
faiblesse de notre intelligence, qui se
comporte à l’égard des choses
souverainement claires en elles-mêmes,
893
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2ae, Q. 171, a. 3; 3 Contra Gentiles c. 154; De veritate, Q.
12, a. 2; Super Psalmos, in Ps. 50; Super Isajan, 1, 1. 894
La philosophie appelle "futurs contingents" les choses dont la réalisation est possible, mais non
nécessaire, c’est—â-dire ce dont l’éventualité dépend du libre arbitre de l’homme (ou de la volonté
libre de Dieu) c’est ce qui peut ou arriver ou ne pas arriver. N’existant pas encore, ces choses
manquent d’être. Or, on ne peut connaître que ce qui est, puisque l’acte de connaissance requiert un
objet. Les futurs contingents sont donc, de leur nature propre, hors de la portée de notre connaissance
naturelle et ne sont connus que par le don de prophétie, alors que les réalités divines existent au
suprême degré et sont donc, par elles-mêmes, suprêmement connaissables. Mais elles ne le sont pas
pour nous, à cause de la faiblesse de notre intelligence. D’où la nécessité (relative), pour les connaître,
du don de prophétie.
datur manifestatio spiritus ad utilitatem.
Hebr. II, 3 s. : confirmata est, scilicet
doctrina fidei, contestante Deo signis et
prodigiis, et variis virtutibus, et spiritus
sancti distributionibus. Et ideo prophetia est
utendum secundum rationem fidei, id est
non in vanum sed ut per hoc fides
confirmetur, non autem contra fidem. Unde
dicitur Deut. XIII, v. 1. — si surrexerit in
medio tui propheta, et dixerit tibi : eamus,
et sequamur deos alienos; non audies verba
prophetiae illius, quia scilicet prophetizat
contra rationem fidei. Quantum ad
sacramenta ministranda subdit sive
ministerium in ministrando, id est, si quis
accepit gratiam vel officium ministerii, puta
ut sit episcopus vel sacerdos, qui dicuntur
ministri Dei. Is. c. LXI, 6. — vos sacerdotes
domini vocabimini, ministri Dei nostri :
dicetur vobis, exequatur illud diligenter
exequendo in ministrando, II Tim. IV, 5. —
ministerium tuum imple. Secundo tangit ea
quae pertinent ad res humanas, in quibus
potest aliquis alteri subvenire. Primo
quidem quantum ad cognitionem vel
speculativam vel practicam. Quantum ergo
ad speculativam primo dicit sive qui docet,
id est qui habet officium vel gratiam
docendi, utatur doctrina, id est ut studiose et
fideliter doceat. Iob IV, 3. — ecce docuisti
plurimos. Matth. ult. : euntes docete omnes
gentes. Quantum autem ad cognitionem
practicam subdit qui exhortatur, id est qui
habet officium vel gratiam exhortandi
homines ad bonum, utatur illo in
exhortando. Thess. II, v. 3. — exhortatio
nostra non fuit de errore, neque de
immunditia, neque in dolo. Tit. II, v. 15. —
haec loquere et exhortare. Deinde ponit ea
quae pertinent ad exteriora opera, in quibus
quandoque aliquis subvenit alicui aliquod
donum dando, et quantum ad hoc dicit qui
tribuit, id est qui habet facultatem tribuendi
et gratiam, exequatur hoc in simplicitate, ut
scilicet nihil mali ex illo intendat, quasi
donis homines ad malum alliciens. Vel
etiam cum aliquis ex modico dato intendit
multo maiora acquirere. Eccli. XX, 14 s. :
comme l’œil de la chouette à la lumière du
soleil. Et parce qu’on dit d’une chose qu’elle
possède tel caractère plus proprement quand
elle le possède par elle-même que lorsqu’il
résulte de son rapport à autre chose, il s’ensuit
que c’est plus proprement des futurs
contingents dont on dit qu’ils sont éloignés de
notre connaissance. Et sous ce rapport ils
relèvent spécialement de la prophétie : "Le
Seigneur Dieu ne fera rien sans avoir révélé
son secret à ses serviteurs les prophètes."
Cependant la prophétie est aussi appelée
communément la révélation des choses
cachées quelles qu’elles soient895
. Or ce don
de prophétie a existé non seulement dans
l’Ancien Testament, mais aussi dans le
Nouveau : "Je répandrai mon Esprit sur toute
chair; vos fils prophétiseront ainsi que vos
filles." On donne aussi, dans le Nouveau
Testament, le nom de prophètes à ceux qui
exposent des paroles prophétiques, car ce qui
est écrit dans l’Ecriture sainte est interprété
par le même Esprit : "Je répandrai encore ma
doctrine comme une prophétie."
979. — Or, le don de prophétie, comme les
autres grâces gratuitement données, est
ordonné à l’édification de la foi < A chacun
est donnée la manifestation de l’Esprit pour
l’utilité." La doctrine de la foi a été
confirmée, "Dieu attestant leur témoignage
par des signes, des prodiges, par différents
effets de sa puissance, et par des dons de
l’Esprit-Saint, qu’il a distribués selon sa
volonté." Voilà pourquoi il faut user de la
prophétie en accord avec la foi, c’est-à-dire
non en vain, mais pour que la foi soit
confirmée, et non cependant contre elle. Aussi
lit-on dans le Deutéronome : "S’il s’élève au
milieu de toi un prophète ou quelqu’un qui
dise qu’il a vu un songe, qui prédise un signe
ou un prodige, si ce qu’il a annoncé arrive et
qu’il te dise : "Allons, et suivons des dieux
étrangers que tu ne connais pas, et servons-
les", tu n’écouteras point les paroles de ce
prophète ", à savoir parce qu’il prophétise en
désaccord avec la foi.
980. — Quant à l’administration des
sacrements, <l’Apôtre> ajoute : 7 soit le
895
C’est—à-dire qu’il s’agisse des futurs contingents ou des réalités divines.
datus insipientis non erit tibi utilis, oculi
enim illius septemplices sunt. Exigua dabit,
et multa improperabit. Et Prov. c. XI, 28. —
simplicitas iustorum dirigit eos. Quandoque
autem aliquis subvenit alteri, eius curam
habendo, et quantum ad hoc dicit qui
praeest, id est qui est in praelationis officio
constitutus, utatur illo officio in
sollicitudine. Hebr. ult. : obedite praepositis
vestris, et subiacete eis. Ipsi enim
pervigilant quasi rationem reddituri pro
animabus vestris. 2 Co XI, 28. —
sollicitudo omnium Ecclesiarum.
Quandoque autem subvenit aliquis alicui
relevando eius miseriam, et quantum ad hoc
dicit qui miseretur, id est qui habet
facultatem et affectum miserendi, exequatur
hoc in hilaritate, quasi libenter hoc faciens.
2 Co IX, 7. — non ex tristitia, aut ex
necessitate. Hilarem enim datorem diligit
Deus. Eccli. XXXV, 11. — in omni dato
hilarem fac vultum tuum. Deinde cum dicit
dilectio sine simulatione, etc., docet usum
doni gratuiti, quod est omnibus commune,
scilicet charitatis. Et primo ponit ea quae
pertinent ad charitatem in generali; secundo
ponit quaedam specialiter pertinentia ad
dilectionem quorumdam, ibi necessitatibus
sanctorum, et cetera. Circa primum tria
facit. Primo ostendit qualis debeat esse
dilectio charitatis ex parte diligentis;
secundo, qualiter se debeat habere ad
proximum, ibi charitatem fraternitatis, etc.;
tertio, qualiter se debeat habere ad Deum,
ibi sollicitudine non pigri. Circa qualitatem
autem charitatis tria docet. Primo quidem,
quod dilectio debet esse vera. Unde dicit
dilectio sine simulatione, ut scilicet non
tantum in verbo, aut in exteriori apparentia,
sed sit in vero cordis affectu, et efficacia
operis. I Io. III, 18. — non diligamus verbo,
neque lingua, sed opere et veritate. Eccli.
VI, 15. — amico fideli nulla est comparatio.
Secundo docet quod dilectio debet esse
pura, cum dicit odientes malum. Tunc etiam
est pura dilectio, quando homo non
ministère, en exerçant ce ministère, c’est-à-
dire si quelqu’un a reçu la grâce ou l’office
d’un ministère, par exemple s’il est évêque ou
prêtre896
, ces derniers étant appelés ministres
de Dieu — "Mais vous, vous serez appelés les
prêtres du Seigneur; on vous nommera les
ministres de notre Dieu — qu’il y réponde en
exerçant diligemment ce ministère. —
"Remplis ton ministère."
981. — B. Puis <l’Apôtre> traite de ce qui se
rapporte aux choses humaines [n° 977] par
lesquelles on peut secourir autrui.
1. Et premièrement, quant à la connaissance
spéculative ou pratique.
a. A propos de la connaissance spéculative il
dit : soit celui qui enseigne897
, c’est-à-dire
celui qui a <reçu> la fonction ou la grâce
d’enseigner, qu’il se serve de la doctrine,
c’est-à-dire afin d’enseigner avec zèle et
fidélité : "Voilà que tu as instruit un grand
nombre <de personnes> "
— "Allez donc, enseignez toutes les nations."
b. À propos de la connaissance pratique il
ajoute : 8 celui qui exhorte, c’est-à-dire celui
qui a <reçu> la fonction ou la grâce
d’exhorter les hommes au bien, s’en serve en
exhortant. — "Notre exhortation a été
exempte d’erreur, d’impureté et de fraude." Et
encore : "Dis ces choses, exhorte et reprends
avec une pleine autorité."
982. — 2. <L’Apôtre> expose ensuite ce qui
regarde les œuvres extérieures, par lesquelles,
à l’occasion, on secourt autrui en lui donnant
un don, et à ce propos il dit : celui qui
distribue, c’est-à-dire celui qui a reçu la
faculté et la grâce de distribuer, qu’il le fasse
avec simplicité, c’est-à-dire qu’il ne s’y
propose rien de mauvais, comme d’attirer les
hommes au mal par des dons. Ou encore,
comme si à partir d’un don modique on se
proposait d’acquérir des choses plus
considérables : "Le don d’un insensé ne te
sera pas utile, car il a sept yeux. Il donnera
peu et il reprochera beaucoup." Et : "La
simplicité des justes les dirigera." Parfois, on
secourt autrui en prenant soin de lui, et à ce
896
Les grâces gratuitement données étant ordonnées à la sanctifi cation d’autrui relèvent du ministère
au sens large et donc englobent, de ce point de vue, le ministère sacerdotal. Cependant le pouvoir
d’ordre du prêtre ne peut être, au sens strict, considéré comme un charisme. 897
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 183, a. 2.
consentit amico suo in malum, sed ita diligit
hominem, ut eius vitium odiat. Unde dicitur
1 Co XIII, 6. — non gaudet super
iniquitate, congaudet autem veritati. Ps.
CXVIII, 113. — iniquos odio habui. Tertio
docet quod dilectio debet esse honesta, cum
dicit adhaerentes bono, ut scilicet aliquis
adhaereat alteri propter bonum virtutis. Gal.
IV, 18. — bonum autem aemulamini in
bono semper. Haec est pulchra dilectio, de
qua dicitur Eccli. XXIV, 24. — ego mater
pulchrae dilectionis. Deinde, cum dicit
charitatem fraternitatis, ostendit qualiter
charitas se debeat habere ad proximum. Et
primo quantum ad interiorem affectum, cum
dicit charitatem fraternitatis invicem
diligentes; ut scilicet non solum fratres
diligamus per charitatem sed etiam
diligamus ipsam charitatem, qua eos
diligimus et ab eis diligimur. Sic enim si
charam habemus charitatem, non de facili
eam dissolvi faciemus. Hebr. ult. : charitas
fraternitatis maneat in vobis. Cant. ult. : si
dederit homo omnem substantiam domus
suae pro dilectione, tamquam nihil despiciet
illam. Secundo, quantum ad exteriorem
effectum, cum dicit honore invicem
praevenientes. In quo tria designantur.
Primo quidem quod homo proximum in
reverentia debet habere, quod pertinet ad
rationem honoris. Nullus enim potest vere
diligere eum quem despicit. Phil. II, 3. — in
humilitate, superiores invicem arbitrantes.
Quod quidem fit dum aliquis suum
defectum considerat et bonum proximi. In
honore autem non solum reverentia
intelligitur, sed etiam necessariorum
subventio, sicut, cum dicitur Ex. XX, 12. —
honora patrem tuum, et matrem tuam,
praecipitur necessariorum subventio, sicut
patet per hoc quod dominus, Matth. XV, v.
3 ss., arguit Pharisaeos contra hoc
praeceptum impedientes filios a subventione
propos <l’Apôtre> dit : celui qui préside,
c’est-à-dire que celui qui a été établi dans la
fonction de supérieur s’acquitte de cette
fonction avec sollicitude. — "Obéissez à vos
préposés et soyez-leur soumis, car ce sont eux
qui veillent, comme devant rendre compte de
vos âmes." Et encore : "Outre ces choses, qui
sont du dehors, il y a ma préoccupation
quotidienne : la sollicitude de toutes les
Eglises." Parfois on secourt quelqu’un en
soulageant sa misère, et à ce propos
<l’Apôtre> dit : celui qui exerce la
miséricorde, c’est-à-dire que celui qui a la
faculté et le désir de faire miséricorde, le fasse
avec joie, comme s’y portant volontiers :
"Que chacun <donne> comme il l’a résolu en
son cœur, non avec tristesse ou par nécessité;
car Dieu aime celui qui donne avec joie." Et
encore : "Dans tout don montre un visage
joyeux."
983. — Lorsque <l’Apôtre> ajoute [n° 968] :
Que votre dilection soit sans simulation, etc.,
il donne un enseignement sur l’usage d’un
don gratuit, qui est commun à tous, c’est-à-
dire de la charité. Et il expose
a) D’abord, ce qui convient à la charité en
général.
b) Ensuite, ce qui convient spécialement à la
dilection envers certaines personnes [n° 993] :
13 prenant part aux nécessités des saints, etc.
a. Sur le premier de ces points, <l’Apôtre>
montre trois choses
— Premièrement, qu'elle doit être du côté de
celui qui aime la dilection de sa charité.
— Deuxièmement, comment elle doit
s’exercer à l’égard du prochain [n° 985] : 10
vous aimant les uns les autres avec la charité
fraternelle.
— Troisièmement, comment elle doit
s’exercer à l’égard de Dieu [n° 987] : dans
votre sollicitude ne <soyez> pas paresseux.
984. — À propos de la qualité de la charité898
,
<l’Apôtre> enseigne trois choses :
898
Les termes " amour", "dilection", "charité" (amor, dilectio, caritas) ne sont pas strictement
synonymes pour saint Thomas. " Ces trois termes signifient l’acte (d’aimer) de manière différente :
amour est celui qui, des trois, " la signification la plus commune. En effet, la dilection ou la charité
impliquent l’amour, mais la réciproque n’est pas vraie. La dilection, comme le nom l’indique, ajoute à
l’amour l’idée d’une élection préalable, de sorte que la dilection ne réside pas dans la puissance
concupiscible, mais seulement dans la volonté et la seule nature raisonnable. La charité, d’autre part,
ajoute à l’amour l’idée d’une certaine perfection, en ce que l’objet aimé est estimé d’un grand prix"
parentum. Secundo designatur quod effectus
dilectionis debet mutuo exhiberi, ut scilicet
homo non solum velit beneficia recipere,
sed etiam exhibere. Eccli. IV, 36. — non sit
porrecta manus tua ad accipiendum, et ad
dandum collecta. Et XIV, 15 s. : in divisione
sortis da et accipe. Et hoc designat, cum
dicit invicem. Tertio designatur quod
effectus dilectionis debet esse promptus et
velox, quod designatur, cum dicit
praevenientes, ut scilicet aliquis praeveniat
amicum in beneficiis. Eccli. c. XXXVII, 1.
— omnis amicus dicet : et ego amicitiam
copulavi. Deinde, cum dicit sollicitudine,
etc., ostendit qualiter se debeat habere
dilectio charitatis ad Deum. Et primo incipit
ab ipsa rationis attentione, cum dicit
sollicitudine sitis non pigri, scilicet ad
serviendum Deo. Mich. VI, 8. — indicabo
tibi, o homo, quid sit bonum, et quid Deus
requirat a te; postea subdit : sollicite
ambulare cum Deo tuo. II Tim. II, 15. —
sollicite cura teipsum probabilem exhibere
Deo. Secundo, quantum ad effectum, cum
dicit spiritu sitis ferventes, scilicet in Dei
dilectione. Procedit autem fervor ex
abundantia caloris, unde fervor spiritus
dicitur, quia propter abundantiam divinae
dilectionis totus homo fervet in Deum, Act.
XVIII, 25 dicitur quod Apollo fervens
spiritu loquebatur. I Thes. ult. : spiritum
nolite extinguere. Tertio, quantum ad
exterius obsequium, cum dicit domino
servientes, scilicet servitute latriae, quae soli
Deo debetur. Deut. VI, 13. — dominum
Deum tuum adorabis, et illi soli servies. Ps.
II, 11. — servite domino in timore. Vel,
secundum aliam litteram : tempori
servientes, ut scilicet Dei servitium congruo
tempore faciamus. Eccle. VIII, 6. — omni
negotio tempus est, et opportunitas. Quarto,
quantum ad mercedem servitutis, cum dicit
spe gaudentes, scilicet mercedis, quae est
Dei fruitio. Gen. XV, 2. — ego dominus
merces tua magna nimis. Supra V, 2. —
D’abord, que la dilection doit être vraie, ce
qui lui fait dire : Que votre dilection soit sans
simulation, en sorte qu’elle ne soit pas
seulement en paroles ou d’apparence
extérieure, mais qu’elle soit selon une
véritable affection du cœur accompagnée de
l’efficacité de l’œuvre : "N’aimons point par
la parole ou par la langue, mais en acte et en
vérité." Et encore : "Rien n’est comparable à
un ami fidèle899
."
Puis, il enseigne que cette dilection doit être
pure, lorsqu’il dit : haïssant le mal. Car la
dilection est pure lorsque l’homme ne
s’accorde pas avec son ami en vue du mal; au
contraire il l’aime dans la mesure où il prend
ses vices en aversion. Aussi est-il dit : "<La
charité> ne se réjouit pas de l’iniquité, mais
elle met sa joie dans la vérité " Et encore :
"J’ai eu en haine les hommes iniques."
Enfin, il enseigne que cette dilection doit être
honnête, lorsqu’il dit : vous attachant au bien,
c’est-à-dire que vous vous attachiez à autrui à
cause du bien de la vertu : "Au reste, attachez-
vous au bien pour le bien, en tout temps, et
non pas seulement lorsque je suis présent
parmi vous." Telle est cette belle dilection,
dont il est dit : "Moi, je suis la mère de la
belle dilection900
."
985. — Deuxièmement, lorsque <l’Apôtre>
dit : 10 avec la charité fraternelle, il montre
comment la charité doit s’exercer à l’égard du
prochain :
1. Quant à l’affection intérieure, quand il dit :
vous aimant les uns les autres avec la charité
fraternelle, c’est-à-dire de sorte que nous
aimions nos frères non seulement par la
charité, mais aussi la charité elle-même qui
nous les fait aimer et nous fait aimer d’eux.
Car si la charité nous est chère à ce point,
nous ne la laisserons pas facilement se briser :
"Que la charité fraternelle demeure en vous."
Et encore : "Quand un homme aurait donné
toutes les richesses de sa maison pour
l’amour, il les mépriserait comme un."
(Somme Théologique 1a-2ae, Q. 26, a. 3), sans doute à cause du rapport de caritas avec carus, "chers,
qui, en latin comme en français, a les deux sens " coûteux " et aimé." Mais ces distinctions ne doivent
pas être forcées. — Lieux parallèles 3 Sentences dist. 27, Q. 2, a. 1; De div. nom., c. 4, lect. 9. 899
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 183, a. 2. 900
Eccli (Si) 24, 24. Ce verset ne figure que dans la Vulgate et dans quelques manuscrits grecs.
gloriamur in spe gloriae filiorum Dei. Facit
autem spes hominem gaudentem ratione
certitudinis, sed tamen affligit ratione
dilationis. Prov. XIII, 12. — spes quae
differtur affligit animam. Quinto, quantum
ad difficultatem quam homo patitur in Dei
servitio. Unde subdit in tribulatione, scilicet
quam propter Deum sustinetis, sitis
patientes. Supra V, v. 3. — tribulatio
patientiam operatur. Sexto quantum ad
omnia praedicta dicit orationi instantes, in
quo orationis assiduitas designatur. Lc.
XVIII, 1. — oportet semper orare, et
numquam deficere. II Thess. V, 17. — sine
intermissione orate. Per orationem enim in
nobis sollicitudo excitatur, fervor
accenditur, ad Dei servitium incitamur,
gaudium spei in nobis augetur et auxilium in
tribulatione promeremur. Ps. CXIX, 1. —
ad dominum, cum tribularer, clamavi, et
exaudivit me. Deinde, cum dicit
necessitatibus sanctorum, etc., determinat
de charitate quantum ad speciales quasdam
personas. Et primo quidem quantum ad
indigentes; secundo quantum ad inimicos,
ibi benedicite persequentibus vos. Circa
primum duo facit. Primo inducit ad
exhibenda beneficia charitatis indigentibus
in universali, cum dicit necessitatibus
sanctorum communicantes. Ubi tria sunt
notanda. Primo quidem quod eleemosynae
ex charitate sunt impendendae indigentibus,
sive necessitatem patientibus. Eph. IV, 28.
— laboret operando manibus suis quod
bonum est, ut habeat unde tribuat
necessitatem patienti. Secundo, quod potius
est subveniendum iustis et sanctis quam
aliis. Unde dicit necessitatibus sanctorum.
Eccli. XII, 5. — da iusto, et non recipias
peccatorem. Quod quidem non sic est
intelligendum, quin etiam in necessitatibus
sit peccatoribus subveniendum, sed quia
non est eis subveniendum ad fomentum
peccati. Utilius tamen est subvenire iustis,
quia talis eleemosyna fructuosa est, non
solum ex parte dantis sed etiam ex suffragio
986. — 2. Quant à l’effet extérieur, quand il
dit : vous prévenant d’honneur les uns les
autres, Dans ce passage trois choses sont
recommandées
* En premier lieu, que l’homme doit avoir du
respect à l’égard de son prochain, ce qui
constitue l’honneur : "Que chacun par
l’humilité estime les autres supérieurs à soi."
C’est ce qui a lieu lorsque chacun considère
sa propre imperfection et le bien du prochain.
Or sous la dénomination d’honneur on
comprend non seulement le respect, mais
aussi la subvention des choses nécessaires;
ainsi ce précepte : "Honore ton père et ta mère
", ordonne de subvenir à leurs nécessités,
comme on le voit par ce reproche que le
Seigneur faisait aux pharisiens d’empêcher,
au mépris du précepte, de secourir leurs
parents.
* En deuxième lieu, que l’effet de l’amour de
charité doit être réciproque, de telle sorte que
non seulement l’homme veuille recevoir des
bienfaits, mais aussi en donner : "Que ta main
ne soit pas ouverte pour recevoir et fermée
pour donner." Et encore : "N’est-ce pas à
d’autres que tu laisseras <le fruit> de tes
peines et de tes travaux, dans le partage du
sort ? Donne et reçois, et justifie ton âme." Et
il recommande cela, quand il dit : les uns les
autres.
* En troisième lieu, que l’effet de la dilection
doit être prompt et rapide; ce qui est
recommandé lorsqu’il dit : vous prévenant,
c’est-à-dire que chacun devance son ami dans
ses bienfaits : "Tout ami dira Moi aussi, j’ai
lié amitié."
987. — Troisièmement, en disant : "dans
votre sollicitude, etc., <l’Apôtre> montre
comment la dilection de charité doit s’exercer
à l’égard de Dieu.
1. Il commence par <recommander>
l’attention même de la raison, en disant : dans
votre sollicitude ne <soyez> pas paresseux, à
savoir pour servir Dieu : "Je t’indiquerai, ô
homme, ce qui est bon, et ce que Dieu
requiert de toi." <Le prophète> ajoute : "C’est
recipientis. Lc. XVI, 9. — facite vobis
amicos de mammona iniquitatis, ut cum
defeceritis, recipiant vos in aeterna
tabernacula, scilicet suis suffragiis.
Secundo in speciali admonet ad
hospitalitatem, dicens hospitalitatem
sectantes, quia scilicet in hoc misericordiae
opere alia misericordiae opera includuntur.
Nam hospes non solum domum exhibet ad
manendum sed etiam alia necessaria
subministrat. Hebr. ult. : hospitalitatem
nolite oblivisci. I Petr. IV, 9. — hospitales
invicem sine murmuratione.
d’être soucieux (sollicite) de marcher avec
ton Dieu901
." <Et l’Apôtre dit dans sa seconde
épître à Timothée> : "Soucie-toi (sollicite) de
te montrer à Dieu digne de son approbation."
988. — 2. Quant à l’effet <de la dilection902
à
l’égard de Dieu>, il dit : soyez fervents
d’esprit, à savoir dans la dilection de Dieu. Or
la ferveur procède de l’abondance de la
chaleur; on dit donc ferveur de l’esprit, parce
qu’en raison de l’abondance de la dilection
divine l’homme brûle tout entier de ferveur
pour Dieu. On rapporte dans les Actes
qu’Apollos, fervent d’esprit, parlait et
enseignait avec soin. <Et l’Apôtre dit dans sa
première épître aux Thessaloniciens> :
"N’éteignez point l’Esprit."
989. — 3. Quant au culte extérieur <dû à
Dieu>, <l’Apôtre> dit : servant le Seigneur, à
savoir par le culte de latrie903
, qui est dû à
Dieu seul : "Tu adoreras le Seigneur ton Dieu
et tu ne serviras que lui seul904
." — "Servez le
Seigneur dans la crainte." Ou bien, selon une
autre version : "Servant dans le temps905
",
c’est-à-dire de telle sorte que nous
accomplissions le service de Dieu en temps
opportun : "A toute chose est son temps et son
opportunité."
990. — 4. Quant à la récompense de ce
service, il dit : 12 soyez joyeux dans
l’espérance, c’est-à-dire de la récompense,
laquelle consiste en la jouissance de Dieu
"Moi" le Seigneur "je suis ton protecteur et ta
récompense <sera> extrêmement grande " <Et
il est écrit> ci-dessus : "nous nous glorifions
dans l’espérance de la gloire des fils de Dieu."
Or l’espérance rend l’homme joyeux en
raison de la certitude, mais elle l’afflige
cependant en raison du délai : "L’espérance
901
Mi 6, 8. Le mot Deus au heu de Dominus figure dans certains manuscrits. Voir DOM SABATIER,
Bibi. sacr., t. II, p, 951 (Notae ad versionem antiquam). 902
Lieu parallèle r De malo, Q. 7, a. 2, obj. 17. 903
Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 81, a. 1, sol. 3 et 4; Q. 94, a. 1, sol. 2; 3 Sentences dist.
9, Q. 1, a. 1, q 1; AdRom. 1, 9, lect. 5 (éd. Marietti, n° 79); 1, 23, lect. 7 (éd. Marietti, n° 134); 1, 25,
lect. 7 (éd. Marietti, n° 142). 904
Citation de Dt 6, 13 ou 10, 20 à travers Mt 4, 10 ou Lc 4, 8. Le verset du Deutéronome portant
timehis (tu craindras) au lieu de adorabis (tu adoreras). 905
Cette version se lit notamment chez Ambrosiaster (Commen sana in Epistoiam ad Romanos XII, Il
[n° 8 1/1, 404-405]). Voir à ce propos DOM SABATIER, Bibi. sacr., t. III, p. 641 (Notae ad
versionem antiquam).
qui est différée afflige l’âme."
991. 5. Quant à la difficulté que
l’homme éprouve (patitur) dans le service de
Dieu, <l’Apôtre> ajoute : dans la tribulation,
à savoir que vous endurez pour Dieu, soyez
patients. — "La tribulation opère la patience."
992. — 6. <Pour résumer>906
tout ce qu’il
vient d’énumérer, il dit : persévérants dans la
prière, parole dans laquelle est recommandée
l’assiduité de la prière. — "Il faut toujours
prier et ne jamais se lasser." Et encore : "Priez
sans cesse " En effet, par la prière s’éveille en
nous la sollicitude, la ferveur s’enflamme,
nous sommes stimulés au service de Dieu, la
joie de l’espérance augmente en nous, et nous
obtenons le secours dans la tribulation :
"Lorsque j’étais dans la tribulation, j’ai crié
vers le Seigneur et il m’a exaucé "
993. — b. 907
En ajoutant : 13 prenant part aux
nécessités des saints, etc., <l’Apôtre>
détermine l’exercice de la charité à l’égard de
certaines personnes en particulier. Et
— D’abord, quant aux indigents.
— Ensuite, quant aux ennemis [n° 996] : 14
"Bénissez ceux qui vous persécutent."
994. — À l’égard des indigents, <l’Apôtre>
adresse deux exhortations : Il exhorte d’abord
à répandre les bienfaits de la charité sur les
indigents d’une manière générale, lorsqu’il dit
: prenant part aux nécessités des saints. Sur
ce point il faut noter deux choses
D’abord, que d’après <le précepte de> la
charité on doit faire l’aumône aux indigents
ou à ceux qui sont dans la nécessité : "Qu’il
prenne la peine de travailler de ses mains à
quelque chose d’utile, pour avoir de quoi
aider celui qui est dans la nécessité "
O Puis, qu’il faut de préférence secourir les
justes et les saints; aussi dit-il : aux nécessités
des saints. — "Donne au juste et ne reçoit pas
le pécheur." Ce qui ne veut pas dire qu’il ne
faut pas secourir les pécheurs nécessiteux,
mais qu’il ne faut pas les secourir dans le but
de les exciter à pécher. Cependant il est plus
utile de secourir les justes, parce que cette
aumône est fructueuse non seulement du côté
906
Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 83, a. 14; 4 Sentences dist. 15, Q. 4, a. 2, q 2, 3; 3
Contra Gentiles c. 96; Ad Rom. 1, 10, Iect. 5 (éd. Marietti, n° 83-84); Ad Col. 1, 3b, lect. 2 (éd.
Marietti, n° 9); I Ad Thess. 5, 17, lect. 2 (éd. Marietti, n° 130). 907
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 32. — "De l’aumône."
de celui qui donne, mais encore à cause du
suffrage de celui qui reçoit : "Faites-vous des
amis avec les richesses injustes afin que,
lorsque vous viendrez à manquer, ils vous
reçoivent dans les tabernacles éternels908
,"
c’est-à-dire par leurs suffrages.
995. — Ensuite, <l’Apôtre> exhorte
spécialement au devoir de l’hospitalité, en
disant : pratiquant l’hospitalité, à savoir parce
que cette œuvre de miséricorde renferme les
autres œuvres de miséricorde909
. Car celui qui
donne l’hospitalité prête non seulement sa
maison pour y demeurer, mais procure de plus
tout ce qui est nécessaire : "N’oubliez pas
l’hospitalité." Et encore : "Exercez
l’hospitalité entre vous sans murmure."
Lectio 3 Leçon 3 [Versets 14 à 21]
[n° 997] 14 Bénissez ceux qui vous
persécutent; bénissez et ne maudissez point;
[n° 1003] 15 réjouissez-vous avec ceux qui se
réjouissent, pleurez avec ceux qui pleurent;
[n° 1005] 16 ayez les mêmes sentiments les
uns envers les autres; n’aspirant pas à ce qui
est élevé, mais vous laissant attirer par ce qui
est humble. Ne soyez pas prudents à vos
propres yeux;
[n° 1007] 17 ne rendant à personne le mal
pour le mal; vous préoccupant de ce qui est
bien, non seulement devant Dieu, mais aussi
devant tous les hommes.
[n° 1010] 18 S’il se peut, et autant qu’il
dépend de vous, ayant la paix avec tous les
hommes;
[n° 1011] 19 ne vous défendant point vous-
mêmes, bien-aimés, mais faites place à la
colère; [n° 1013] car il est écrit "A moi est la
vengeance; c’est moi qui rétribuerai", dit le
Seigneur.
[n° 1014] 20 Au contraire "si ton ennemi a
faim, donne-lui à manger; s’il a soif, donne-
lui à boire; car, ce faisant, tu amasseras des
908
Lieux parallèles sur la bienveillance Somme Théologique 2 Q. 27, a. 2; 3 Sentences dist. 27, Q. 2,
a. 1, obj. et sol. 3. ; Ethic. 9, lect. 5 [1166 b 30-1167 a 18]. —-Sur la concorde Somme Théologique 2
Q. 29, a. 1; 3 Sentences dist. 27, Q. 2, a. 1, sol. 6; Ethic. 9, lect. 6 [1167 a 22-l 167 b 9]. —. Sur la
bienfaisance : Somme Théologique 2 Q. 31, a. 1; 3 Sentences dist. 27, Q. 2, a. 1, obj. et sol. 5; Ethic.
9, lect. 7 [1167 17-l168a21]. 909
Lieu parallèle : Ad Hebr. 13, 2, lect. 1 (éd. Marietti, n 728).
charbons de feu sur sa tête."
[n° 1015] 21 Ne te laisse pas vaincre par le
mal, mais sois vainqueur du mal par le bien.
[86221] Super Rom., cap. 12 l. 3 Supra
apostolus ostendit qualiter charitas sit
exhibenda indigentibus, nunc ostendit
qualiter sit exhibenda etiam inimicis. Et
primo ponit admonitionem; secundo probat
quod dixit, ibi scriptum est enim, et cetera.
Circa primum considerandum est, quod ad
charitatem tria pertinent. Primo quidem
benevolentia, quae consistit in hoc quod
aliquis velit bonum alteri et malum eius
nolit; secundo concordia, quae consistit in
hoc quod amicorum sit idem nolle et velle;
tertio beneficentia, quae consistit in hoc
quod aliquis benefaciat ei quem amat et eum
non laedat. Primo ergo ponit ea quae
pertinent ad benevolentiam; secundo ea
quae pertinent ad concordiam, ibi gaudere
cum gaudentibus; tertio ea quae pertinent ad
beneficentiam, ibi nulli malum, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo monet ut
benevolentia sit ampla, quae se extendat
etiam ad inimicos, cum dicit benedicite
persequentibus vos. Circa quod notandum
est, quod benedicere est bonum dicere.
Contingit autem bonum dicere tripliciter.
Uno modo enuntiando, puta cum quis
bonum alterius laudat. Eccli. c. XXXI, 28.
— splendidum in panibus benedicent labia
multorum et testimonium veritatis illius
fidele. Alio modo imperando, et sic
benedicere per auctoritatem, est proprium
Dei, cuius imperio bonum ad creaturas
derivatur : ministerium autem pertinet ad
ministros Dei, qui nomen domini super
populum invocant. Num. VI, 22-26. — sic
benedicetis filiis Israel, et dicetis eis :
benedicat tibi dominus, et custodiat te.
Ostendat dominus faciem suam tibi, et
misereatur tui. Convertat dominus vultum
suum ad te, et det tibi pacem. Et post :
invocabunt nomen meum super filios Israel,
et ego benedicam eis. Tertio benedicit
aliquis optando. Ps. CXXVIII, 8. — et non
dixerunt qui praeteribant, benedictio domini
996. — Plus haut910
[n° 993] l’Apôtre a
montré comment la charité doit être pratiquée
à l’égard des indigents, il montre maintenant
comment il faut aussi la pratiquer à l’égard de
ses ennemis. Et
I) Il commence par donner une exhortation.
II) Puis, il prouve ce qu’il a dit [n° 1013] : car
il est écrit, etc.
I. Quant à l’exhortation, il faut considérer
trois points qui se rapportent à la charité.
Le premier est la bienveillance, qui consiste à
vouloir du bien à autrui sans <jamais> lui
vouloir du mal; le deuxième est la concorde,
qui consiste en un accord entre amis dans
leurs vouloirs et leurs refus; le troisième est la
bienfaisance, qui consiste à faire du bien à
celui qu’on aime sans <jamais> le blesser.
A) <L’Apôtre> énumère donc d’abord ce qui
a trait à la bienveillance.
B) Puis, ce qui a trait à la concorde [n° 1003]
15 réjouissez-vous avec ceux qui se
réjouissent.
C) Enfin, ce qui a trait à la bienfaisance [n°
1007] ne rendant, etc.
997. — A. Concernant le premier point,
<l’Apôtre> fait deux choses
1. Il nous exhorte à une large bienveillance
qui s’étende même aux ennemis, lorsqu’il dit :
Bénissez ceux qui vous persécutent. Sur cela,
il faut remarquer que bénir c’est dire du bien.
Or dire du bien se fait de trois manières
a. D’abord en l’énonçant, par exemple
lorsqu’on loue le bien d’autrui : "Les lèvres
de la multitude béniront celui qui est
splendide dans les repas <qu’il donne>; et le
témoignage en faveur de sa vérité sera fidèle."
b. Puis en commandant. Bénir ainsi par
autorité est le propre de Dieu, dont le
commandement fait dériver le bien sur ses
créatures. Or ce ministère appartient aux
prêtres de Dieu qui invoquent sur le peuple le
Nom du Seigneur : "Le Seigneur parla encore
à Moïse, disant "Dis à Aaron et à ses fils
C’est ainsi que vous bénirez les enfants
910 Lieux parallèles : Super Psalmos, in Pc. 20, 4; 40, 14.
super vos. Et secundum hoc benedicere est
bonum alicui velle, et quasi bonum pro
aliquo precari. Et hoc modo accipitur hic.
Unde in hoc quod dicitur benedicite
persequentibus vos, datur intelligi quod
etiam ad inimicos et persecutores debemus
esse benevoli, eis bona optando et pro eis
orando. Matth. V, 44. — diligite inimicos
vestros, et orate pro persequentibus et
calumniantibus vos. Quod autem hic dicitur,
quodam quidem modo est in praecepto,
quodam autem modo est in consilio. Quod
enim aliquis in generali dilectionis affectum
impendat inimicis, non excludendo eos a
communi dilectione proximorum et a
communi oratione, quam quis pro fidelibus
facit, pertinet ad necessitatem praecepti.
Similiter etiam quod aliquis in articulo
necessitatis inimico dilectionis effectum
particulariter impendat, pertinet ad
necessitatem praecepti. Unde dicitur Ex. c.
XXIII, 4. — si occurreris bovi inimici tui,
aut asino erranti, reducas eum. Sed quod
aliquis in speciali dilectionis affectum et
orationis suffragium, aut qualecumque
subventionis beneficium exhibeat inimico,
interdum etiam extra articulum manifestae
necessitatis, pertinet ad perfectionem
consiliorum : quia per hoc ostenditur tam
perfecta charitas hominis ad Deum quod
omne humanum odium superet. Ille autem
qui poenitet et misericordiam petit, iam non
est inter inimicos aut persecutores
computandus. Unde ei absque omni
difficultate sunt charitatis indicia
ostendenda. Eccli. XXVIII, 2. — relinque
proximo tuo nocenti te, et tunc deprecanti
tibi peccata solventur. Secundo docet quod
benevolentia sive benedictio sit pura, id est
absque permixtione contrarii. Unde dicit
benedicite, et nolite maledicere, id est ita
benedicatis quod nullo modo maledicatis.
Quod est contra quosdam qui ore
benedicunt et corde maledicunt, secundum
illud Ps. XXVII, 3. — qui loquuntur pacem
d’Israël, et vous leur direz Que le Seigneur te
bénisse et qu’il te garde ! Que le Seigneur te
montre sa face et qu’il te prenne en pitié! Que
le Seigneur tourne son visage vers toi et te
donne la paix !"" Et ce qui suit : "Ils
invoqueront ainsi mon Nom sur les enfants
d’Israël, et moi je les bénirai."
c. Enfin on bénit en exprimant des souhaits
"Ils n’ont pas dit, ceux qui passaient "La
bénédiction du Seigneur soit sur vous." Dans
ce sens, bénir c’est vouloir du bien à
quelqu’un, et pour ainsi dire demander du
bien pour lui. Et c’est de cette manière qu’on
entend ce passage.
998. — Ainsi,911
dans ces paroles : Bénissez
ceux qui vous persécutent, <l’Apôtre> donne
à entendre que nous devons être bienveillants
même à l’égard des ennemis et des
persécuteurs, en leur souhaitant du bien et en
priant pour eux : "Aimez vos ennemis, faites
du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour
ceux qui vous persécutent et vous
calomnient." Or ce que <l’Apôtre> dit ici est
sous un certain rapport un précepte, et sous un
certain autre rapport un conseil912
. Car en
général on doit avoir l’affection de la charité
pour ses ennemis, en ne les excluant point de
la dilection commune due au prochain, ni de
la prière commune en faveur des fidèles, ce
qui regarde la nécessité du précepte.
Semblablement, le fait qu’on doive, en cas de
nécessité, pratiquer en particulier l’acte de la
dilection à l’égard d’un ennemi, cela regarde
<aussi> la nécessité du précepte. D’où ces
paroles de l’Exode "Si tu rencontres le bœuf
de ton ennemi, ou son âne égaré, ramène-le-
lui." Mais que, dans un cas particulier, on
montre à son ennemi l’affection de la charité,
le suffrage de la prière ou le bienfait d’un
secours quel conque, parfois même en dehors
d’un cas de nécessité évidente, cela relève de
la perfection des conseils, parce que cette
conduite montre que la charité de l’homme
envers Dieu est si parfaite qu’elle l’emporte
sur toute haine humaine. Quant à celui qui se
911
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 25, a. 8 et 9; Q. 83, a. 8; 3 Sentences dist. 30, Q. 1, a.
2; De virtut., Q. 2, a. 8; De perf. spir. vit., C. 14. 912
On distingue traditionnellement les préceptes qui obligent en conscience tous les fidèles, et les
conseils évangéliques qui ne s’appliquent qu’à ceux qui s’efforcent de suivre une voie de perfection,
c’est-à-dire, au premier chef, les religieux.
cum proximo suo, mala autem in cordibus
eorum. Et etiam contra illos qui quandoque
benedicunt, quandoque maledicunt, vel
quibusdam benedicunt, quibusdam
maledicunt. Iac. III, 10. — ex ipso ore
procedit benedictio et maledictio. Non
oportet, fratres mei, haec ita fieri. I Petr. III,
9. — non reddentes maledictum pro
maledicto. Sed contra hoc videtur esse quod
in sacra Scriptura plures maledictiones
inveniuntur. Dicit enim Deut. XXVII, 26.
— maledictus qui non permanserit in
sermonibus legis huius, nec eos opere
perficit. Ad quod dicendum est quod
maledicere est malum dicere : quod quidem
tripliciter contingit, sicut et benedicere,
scilicet enuntiando, imperando et optando;
et secundum quodlibet horum modorum
potest bene et male fieri. Si enim id quod est
materialiter malum, dicatur malum quolibet
praedictorum modorum, sub ratione boni
non est illicitum, quia hoc est magis
benedicere, quam maledicere :
unumquodque enim magis iudicatur
secundum suam formam, quam secundum
suam materiam. Si vero aliquis dicat malum
sub ratione mali, formaliter maledicit; unde
est omnino illicitum. Utrumque autem
horum contingit in hoc, quod aliquis
enuntiando malum profert. Quandoque enim
aliquis enuntiat malum alicuius ad
notificandum necessariam veritatem et sic
dicit malum sub ratione veri necessarii,
quod est bonum, unde est licitum. Et hoc
modo Iob III, 1 s. dicitur, quod Iob
maledixit diei suae, enuntians malitiam
praesentis vitae, sicut apostolus dicit Eph.
V, 16. — redimentes tempus, quoniam dies
mali sunt. Quandoque autem aliquis
enuntiat malum alterius sub ratione mali,
scilicet intentione detrahendi. Et hoc est
illicitum. Dicitur enim 1 Co VI, 10. —
neque maledici, neque rapaces regnum Dei
possidebunt. Similiter etiam in eo quod quis
repent et qui demande miséricorde, il ne doit
plus être compté parmi les ennemis ou les
persécuteurs. Il faut donc lui témoigner sans
lui opposer la moindre difficulté des marques
de la charité : "Pardonne ton prochain qui te
nuit, et lorsque tu prieras, tes péchés seront
effacés."
999. — 2. <L’Apôtre> nous apprend ensuite
que la bienveillance ou la bénédiction est
pure, c’est-à-dire sans mélange contradictoire.
Ce qui lui fait dire bénissez et ne maudissez
point, c’est-à-dire bénissez de telle sorte
qu’en aucune manière vous ne maudissiez.
Cette exhortation s’adresse à l’encontre de
ceux qui bénissent des lèvres et maudissent de
cœur, selon ce passage du psaume "Eux qui
parlent de paix avec leur prochain et qui ont le
mal dans leurs cœurs." Et aussi à l’encontre
de ceux qui tantôt bénissent, tantôt
maudissent, ou bénissent les uns et
maudissent les autres : "De la même bouche
sortent la bénédiction et la malédiction. Il ne
faut pas, mes frères, qu’il en soit ainsi." —
"Ne <rendant> pas malédiction pour
malédiction."
1000. — En sens contraire913
, il semble qu’on
trouve dans la sainte Ecriture plusieurs
malédictions. En effet, le Deutéronome dit :
"Maudit soit celui qui ne persévère pas dans
les paroles de cette Loi et ne les accomplit pas
par ses œuvres."
Il faut répondre que maudire, c’est dire du
mal; or comme pour bénir, maudire se fait de
trois manières : sous forme de déclaration, de
commandement et de souhait914
; et chacune
de ces manières peut être bonne ou mauvaise.
En effet, proclamer mauvais — quelle que
soit la manière susdite — ce qui est
matériellement mauvais n’est pas licite du
point de vue du bien, puisque alors on bénit
<on "bien-dit"), plutôt qu’on ne maudit car
c’est plutôt d’après sa forme que d’après sa
matière qu’on juge de chaque chose." Mais
proclamer le mal en ayant en vue le mal, c’est
913
Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 76, a. 1; 4 Sentences dist. 18, Q. 2, a. 1, Q. 2, sol. 1; De
virtut., Q. 2, a. 8, sol. 15; Super lob 3, 1, lect. 1; Super Mati, lI, 21 (éd. Marietti, n° 946); Ad Rom. 11,
2, lect. 1 (éd. Marietti, n° 866). 914
Autrement dit, pour juger s’il est permis de déclarer le mal de quelque chose, il faut considérer, non
la matérialité de la déclaration (qui est ce qu’elle est), mais la raison pour laquelle cette déclaration a
été faite c’est cette raison qui en constitue la forme, et qui la fait bonne ou mauvaise.
dicit malum imperando; contingit autem
quandoque quod aliquis dicit id quod est
materialiter malum sub ratione boni, puta
cum ex imperio alicuius provenit alicui
malum poenae propter iustitiam, quod
quidem est licitum. Et hoc modo
transgressores legis maledicuntur, id est,
poenae secundum iustitiam deputantur.
Quandoque vero aliquis imperando dicit
malum alterius iniuste, puta propter odium
et vindictam. Et talis maledictio est illicita.
Ex. XXI, 17. — qui maledixerit patri vel
matri, morte moriatur. Et idem est etiam,
circa id quod aliquis dicit malum optando.
Si enim hoc optet sub ratione boni, puta ut
per adversitatem alicuius perveniat ad
spiritualem profectum, hoc licitum est. Iob
V, 3. — vidi stultum firma radice, et
maledixi pulchritudini eius statim. Si vero
hoc homo faciat propter odium vel
vindictam, est omnino illicitum. I Reg.
XVII, v. 43. — maledixit Philisthaeus
David in diis suis. Deinde cum dicit
gaudere cum gaudentibus, etc., ponit ea
quae pertinent ad concordiam. Et primo
ponit concordiae documenta; secundo
removet impedimenta, ibi non alta
sapientes, et cetera. Concordia autem potest
dupliciter attendi. Uno modo quantum ad
effectum in bonis et in malis. In bonis
quidem, ut aliquis bonis aliorum
congaudeat; unde dicit gaudere, scilicet
debetis, cum gaudentibus. Phil. II, v. 17. —
gaudeo et congratulor omnibus vobis. Sed
hoc est intelligendum, quando quis gaudet
de bono. Sunt autem quidam qui gaudent de
malo, secundum illud Prov. II, 14. —
laetantur cum malefecerint, et exultant in
rebus pessimis. Et in istis non est
congaudendum. 1 Co XIII, 6 dicitur de
charitate, quod non gaudet super iniquitate,
congaudet autem veritati. In malis autem, ut
aliquis tristetur de malis alterius. Unde
subdit, flere, scilicet debetis, cum flentibus.
Iob XXX, 25. — flebam quondam super eo,
qui afflictus erat. Eccli. c. VII, 38. — non
desis plorantibus in consolatione, et cum
lugentibus ambula. Ipsa enim compassio
amici condolentis consolationem in tristitiis
affert dupliciter : primo quidem, quia ex hoc
maudire formellement : c’est donc
absolument illicite.
Ces deux cas peuvent se présenter quand on
profère le mal sous forme de déclaration. Car
parfois, on déclare le mal de quelque chose
pour faire connaître une vérité nécessaire :
ainsi on dit le mal (on "mal-dit") eu égard au
nécessairement vrai, ce qui est bien, et par
conséquent licite. C’est de cette manière
qu’on rapporte de Job qu’il "maudit le jour de
sa naissance ", déclarant ainsi le malheur de la
vie présente, comme l’Apôtre le dit aux
Ephésiens : "Rachetant le temps, parce que les
jours sont mauvais." D’autres fois, c’est en
vue du mal, c’est-à-dire avec l’intention de
dénigrer, qu’on dénonce le mal d’autrui, et
cela est illicite, car il est dit "Ni les médisants,
ni les rapaces ne posséderont le Royaume de
Dieu."
1001. — Il en va de même lorsque le mal se
dit sous forme de commandement; ce qui
arrive parfois quand on dit ce qui est
matériellement mauvais eu égard au bien, par
exemple quand à la suite d’un
commandement le mal de la peine échoit à
quelqu’un pour <satisfaire> la justice, ce qui
est licite. C’est dans ce sens que les
transgresseurs de la Loi sont maudits, c’est-à-
dire sont voués à la peine selon la justice.
Parfois aussi, en commandant, on dit du mal
d’autrui injustement, par exemple par haine
ou par vengeance. Une telle malédiction est
illicite : "Que celui qui maudit son père ou sa
mère, meure de mort."
1002. — Il en est de même du mal qui est dit
sous forme de souhait. Car si on le souhaite
eu égard au bien, par exemple pour que
l’adversité serve à un progrès spirituel, cela
est licite "Moi, j’ai vu l’insensé fortement
enraciné et j’ai maudit sa beauté aussitôt."
Mais si l’homme fait cela pour un motif de
haine ou de vengeance, cela est absolument
illicite "Le philistin maudit David par ses
dieux."
1003. — B. Quand <l’Apôtre> ajoute : 15
réjouissez-vous avec ceux qui se réjouissent,
etc., il expose ce qui a trait à la concorde.
Et :
1) Il expose d’abord des exemples de
colligitur efficax amicitiae argumentum.
Eccli. XII, 9. — in malitia illius, id est in
infortunio, amicus cognitus est. Et hoc
ipsum est delectabile cognoscere aliquem
sibi esse verum amicum. Alio modo, quia ex
hoc ipso quod amicus condolet, videtur se
offerre ad simul portandum onus
adversitatis, quod tristitiam causat. Et
quidem levius portatur quod portatur a
pluribus, quam ab uno solo. Secundo,
concordia consistit in unitate sententiae, et
quantum ad hoc dicit idipsum, id est idem
sitis, invicem sentientes, ut scilicet in eadem
sententia conveniatis. 1 Co I, 10. — sitis
perfecti in eodem sensu, et in eadem
sententia. Phil. II, 2. — eamdem charitatem
habentes unanimes, idipsum sentientes.
Sciendum est tamen, quod duplex est
sententia. Una quidem quae pertinet ad
iudicium intellectus circa speculabilia, puta
circa considerationes geometricas vel
naturales : dissentire autem in talibus non
repugnat amicitiae vel charitati, quia
charitas in voluntate est. Huiusmodi autem
iudicia non proveniunt ex voluntate, sed ex
necessitate rationis. Alia vero sententia
pertinet ad iudicium rationis circa agenda, et
in talibus dissensio amicitiae contrariatur :
quia talis dissensio habet contrarietatem
voluntatis. Et quia fides non solum est
speculativa sed etiam practica, inquantum
per dilectionem operatur, ut dicitur Gal. V,
6, ideo etiam dissentire a recta fide, est
contrarium charitati. Deinde cum dicit non
alta sapientes, etc., excludit impedimenta
concordiae, quae quidem sunt duo. Primum
est superbia, ex qua contingit quod dum
aliquis inordinate suam excellentiam quaerit
et subiectionem refugit, vult alium subiici et
eius excellentiam impedire. Et ex hoc
sequitur discordia. Prov. XIII, 10. — inter
superbos semper iurgia sunt. Et ideo ad hoc
removendum dicit non sitis alta sapientes,
ut scilicet inordinate vestram excellentiam
appetatis. Supra XI, 20. — noli altum
sapere, sed time. Eccli. III, 22. — altiora te
concorde.
2) Ensuite, il écarte ses obstacles [n° 1006] :
n’aspirant pas à ce qui est élevé, etc.
1004. — 1. Or la concorde915
peut être
considérée de deux manières [n° 1005] :
a. D’abord, quant à ses effets dans les maux et
dans les biens :
— Dans les biens, lorsqu’on se réjouit du bien
des autres; ce qui fait dire <à l’Apôtre> :
réjouissez-vous, c’est-à-dire vous devez
<vous réjouir>, avec ceux qui se réjouissent.
— " Si je suis immolé sur le sacrifice et
l’oblation de votre foi, je m’en réjouis et m’en
félicite avec vous tous." Mais ces paroles
doivent s’entendre de la joie du bien. Or il en
est qui se réjouissent du mal, selon ce passage
des Proverbes : "Ils se réjouissent lorsqu’ils
ont mal fait et tressaillent de joie dans les
choses les plus mauvaises." Mais ce n’est pas
dans ces choses qu’il faut se réjouir. Il est dit
de la charité qu’" elle ne se réjouit pas de
l’iniquité, mais <qu’>elle met sa joie dans la
vérité."
— Au contraire dans les maux, lorsqu’on
s’attriste des maux d’autrui; aussi <l’Apôtre>
ajoute-t-il : pleurez, c’est-à-dire vous devez
<pleurer>, avec ceux qui pleurent. — "Je
pleurais autrefois sur celui qui était affligé."
Et encore : "Ne manque pas de consoler ceux
qui pleurent et marche avec ceux qui sont
dans le deuil " En effet, la compassion d’un
ami qui s’afflige avec nous apporte de la
consolation dans les tristesses de deux
manières :
Premièrement, parce qu’on y recueille une
preuve efficace d’amitié : "Dans son
malheur", c’est-à-dire dans l’infortune, "l’ami
se fait connaître." Il est même doux de
constater que l’on a un véritable ami.
Deuxièmement, par cela même qu’un ami
s’afflige avec nous, il semble s’offrir à porter
sa part du fardeau de l’adversité qui cause la
tristesse. Et un fardeau porté par plusieurs est
assurément plus léger que celui qui est porté
par un seul.
1005. — b. Ensuite,916
la concorde consiste
915
Lieux parallèles sur la joie comme effet de la charité et sa compatibilité avec la tristesse : Somme
Théologique 2 Q. 28, a. 1 et 2 Q. 35, a. 2. —. -Sur le rôle de la compassion des amis Somme
Théologique 1a Q. 38, a. 3 Super lob 2, 11, lect. 2 Ethic. 9, lect. 13 11171 a 21-1171 b 20).
ne quaesieris. Sed sitis consentientes
humilibus, id est his quae sunt humilia, id
est quae abiecta videntur non recusetis cum
oportuerit. Ps. LXXXIII, 11. — elegi
abiectus esse in domo Dei mei. I Petr. ult. :
humiliamini sub potenti manu Dei, et cetera.
Secundum impedimentum concordiae est
praesumptio sapientiae, vel etiam
prudentiae, ex qua contingit quod aliquis
aliorum sententiae non credit. Ad quod
removendum dicit nolite esse prudentes
apud vosmetipsos, ut scilicet iudicetis solum
id esse prudentiae quod vobis videtur. Is. V,
21. — vae qui sapientes estis in oculis
vestris, et coram vobismetipsis prudentes.
Supra XI, 25. — ut non sitis vobismetipsis
sapientes. Deinde, cum dicit nulli malum
pro malo, etc., docet illa quae pertinent ad
beneficentiam, excludendo contrarium. Et
primo docet quod non sit alicui
malefaciendum ratione vindictae; secundo
docet quod non sit alicui malefaciendum
ratione defensionis, ibi non vosmetipsos
defendentes. Circa primum tria facit. Primo
prohibet vindictam dicens nulli malum pro
malo reddentes, scilicet sitis. Ps. VII, 5. —
si reddidi retribuentibus mihi mala. I Petr.
III, v. 9. — non reddentes malum pro malo.
Sed hoc est intelligendum formaliter, sicut
supra dictum est de maledicto : prohibemur
enim affectu odii vel invidiae reddere
malum pro malo, ita quod in malo alterius
delectemur. Sed si pro malo culpae quod
quis facit, reddat iudex malum poenae
secundum iustitiam ad compensandam
malitiam, materialiter quidem infert malum,
sed formaliter et per se infert bonum. Unde
cum iudex suspendit latronem pro
homicidio, non reddit malum pro malo sed
magis bonum pro malo. Et hoc modo
apostolus quemdam pro peccato incestus
tradidit Satanae in interitum carnis, ut
spiritus salvus fieret, ut habetur 1 Co V, 5.
Secundo docet quod etiam bona sint
proximis exhibenda, dicens providentes,
scilicet sitis, bona non tantum coram Deo,
dans une unité de sentiments. A ce propos
<l’Apôtre> dit : 16 ayez les mêmes
sentiments les uns envers les autres, c’est— à-
dire soyez unanimes afin de vous réunir dans
le même sentiment : "<Soyez> affermis dans
le même esprit et dans les mêmes sentiments."
Et : "Comblez ma joie, étant dans les mêmes
sentiments, ayant la même charité, la même
âme, la même pensée." Il faut savoir
cependant qu’il y a deux sortes de sentiments.
L’un qui touche au jugement de l’intelligence
dans ce qui est d’ordre spéculatif, par
exemple dans les considérations relatives à la
géométrie ou de la nature. Le dissentiment sur
de tels sujets ne s’oppose pas à l’amitié ou à
la charité, parce que la charité est dans la
volonté. Or les jugements de cette nature ne
procèdent pas de cette volonté, mais d’une
nécessité de raisonnement. L’autre sorte de
sentiment touche au jugement de la raison
concernant les choses à accomplir. Sur ces
sujets, le dissentiment s’oppose à l’amitié,
parce que ce dissentiment met la volonté en
opposition. Et comme la foi n’est pas
seulement spéculative, mais aussi pratique, en
tant qu’elle "opère par la charité", comme il
est dit dans les Galates, pour cette même
raison, être en désaccord avec la vraie foi
c’est s’opposer à la charité.
1006. — 2. Lorsqu’il dit917
— n’aspirant pas à
ce qui est élevé, etc., <l’Apôtre> écarte les
obstacles à la concorde. Ces obstacles sont au
nombre de deux :
a. Le premier est l’orgueil, qui fait qu’en
recherchant d’une manière immodérée sa
propre excellence et en fuyant la soumission,
on veut se soumettre autrui et empêcher son
excellence. Et de là naît la discorde : "Entre
les orgueilleux, il y a toujours des querelles."
Dans le dessein d’écarter cet orgueil,
<l’Apôtre> dit n’aspirant pas à ce qui est
élevé, c’est-à-dire ne recherchez pas
immodérément votre propre excellence : "Ne
songe pas à t’élever, mais crains." Et : "Les
choses qui sont au-dessus de toi, ne les
cherche pas."
916 Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 2 a. 3, sol. 2.
917 Lieux parallèles : Somme Théologique 2-2 Q. 29, a. 1, sol. 3; Q. 132, a. 5; Q. 162, a. 1."
ut scilicet curetis satisfacere conscientiae
vestrae coram Deo, sed etiam coram
omnibus hominibus, ut scilicet ea faciatis
quae hominibus placeant. 1 Co X, 32 s. :
sine offensione estote Iudaeis, et gentibus, et
Ecclesiae Dei, sicut et ego per omnia
omnibus placeo. 2 Co VIII, 21. —
providentes bona non solum coram Deo, sed
etiam coram omnibus hominibus. Hoc
tamen contingit et bene et male fieri. Si
enim hoc fiat propter favorem humanum,
non bene agitur. Matth. VI, 1. — attendite
ne iustitiam vestram faciatis coram
hominibus, ut videamini ab eis. Si autem
hoc fiat ad gloriam Dei, bene agitur,
secundum illud Matth. c. V, 6. — sic luceat
lux vestra coram hominibus, ut videant
opera vestra bona, et glorificent patrem
vestrum qui in caelis est. Tertio assignat
rationem utriusque dictorum. Ad hoc enim
debemus abstinere a retributione malorum,
et coram hominibus bona providere, ut cum
hominibus pacem habeamus, et ideo subdit
cum omnibus hominibus pacem habentes,
Hebr. ult. : pacem sequimini cum omnibus.
Sed hic addit duo, quorum primum est quod
dicit si fieri potest. Quandoque enim malitia
aliorum impedit ne cum eis pacem habere
possimus, quia scilicet cum eis pax haberi
non potest, nisi eorum malitiae consentiatur,
quam quidem pacem constat esse illicitam.
Unde dominus dicit Matth. X, 34. — non
veni pacem mittere, sed gladium. Aliud
autem addit dicens quod ex vobis est,
scilicet et si ipsi contra pacem agant, tamen
quod in nobis est facere nos debemus, ut
eorum pacem quaeramus. Ps. CXIX, 7. —
cum his qui oderunt pacem eram pacificus.
Et alibi : inquire pacem et persequere eam.
Deinde, cum dicit non vosmetipsos
defendentes, etc., ostendit quod non sunt
mala proximis inferenda per modum
defensionis. Et primo ponit documentum,
dicens non sitis vosmetipsos defendentes, o
charissimi, sicut de Christo dicitur Is. l, 6.
Mais vous laissant attirer par ce qui est
humble, c’est-à-dire ne repoussez pas selon
l’opportunité les choses humbles qui semblent
abjectes : "J’ai choisi d’être abject dans la
maison de mon Dieu." Et : "Humiliez-vous
sous la puissante main de Dieu, pour qu’il
vous exalte au temps de sa visite."
b. Le second obstacle à la concorde est de se
présumer sage ou même prudent; ce qui fait
qu’on ne croit pas à l’opinion des autres. Pour
écarter cet obstacle, <l’Apôtre> dit : Ne soyez
pas prudents à vos propres yeux, à savoir de
telle sorte que vous jugiez qu’il n’y a de
prudent que ce qui vous semble tel : "Malheur
à vous qui êtes sages à vos yeux, et qui êtes
prudents vis-à-vis de vous-mêmes " <Et
l’Apôtre disait> plus haut : "afin que vous ne
soyez pas sages à vos propres yeux."
1007. — C. En ajoutant : 17 ne rendant à
personne le mal pour le mal, etc., <l’Apôtre>
montre ce qui appartient à la bienfaisance, en
écartant ce qui lui est opposé. Et :
1) Il enseigne d’abord qu’on ne doit faire du
mal à qui que ce soit sous prétexte de
vengeance.
2) Puis, qu’on ne doit faire du mal à qui que
ce soit sous prétexte de défense [n° 1011] : 19
ne vous défendant point vous-mêmes, etc.
1008. — 1. Sur le premier point il fait trois
choses918
—
a. Il défend d’abord la vengeance, en disant :
ne rendant à personne le mal pour le mal,
c’est-à-dire soyez <ainsi> : "Si j’ai rendu le
mal à ceux qui m’en ont fait." Et : "Ne
rendant point mal pour mal, ni malédiction
pour malédiction; mais au contraire, bénissant
parce que c’est à cela que vous avez été
appelés, afin de posséder la bénédiction en
héritage." Mais il faut entendre cela de
manière formelle, comme on l’a dit plus haut
de la malédiction : car il nous interdit de
rendre, par un sentiment de haine ou de
vengeance, le mal pour le mal, en ce sens que
nous nous réjouissions du mal d’autrui.
Toutefois, si pour le mal dû à une faute
918 Lieux parallèles S. IaII. 2a-2 Q. 64, a. 2; Q. 65, a. 1, 2 et 3; Q. 108, a. ls. ; Q. 158, a. 3; 3 15, a. 9; De
malo, Q. 12, a. 1; a. 3, sol. 5.
— dedi corpus meum percutientibus, et
genas meas vellentibus. Et Is. LIII, 7. —
quasi agnus coram tondente se obmutuit, et
cetera. Unde et ipse dominus mandavit
Matth. V, 39. — si quis te percusserit in
una maxilla, praebe ei etiam alteram. Sed,
sicut Augustinus dicit in libro contra
mendacium, ea quae in novo testamento a
sanctis facta sunt, valent ad exempla
intelligendarum Scripturarum, quae in
praeceptis data sunt. Ipse autem dominus
cum alapa percussus esset, non ait : ecce
altera maxilla; sed : si male locutus sum,
testimonium perhibe de malo; si autem
bene, quid me caedis ? Ubi ostendit
praeparationem alterius maxillae in corde
esse faciendam. Paratus enim fuit dominus
non solum in altera caedi pro salute
hominis, sed in toto corpore crucifigi. Et
sicut Augustinus dicit ad Marcellinum, tunc
quidem hoc mandatum recte fit cum ei
creditur profuturum esse propter quem fit,
ad operandam in eo correctionem atque
concordiam, etiam si alius exitus
consequatur. Sunt igitur ista praecepta
patientiae semper in cordis praeparatione
retinenda et ipsa benevolentia, ne reddatur
malum pro malo, semper in voluntate
complenda est. Agenda sunt autem et multa
etiam cum invitis benigna quadam asperitate
plectendis. Secundo assignat rationem, cum
dicit sed date locum irae, id est divino
iudicio. Quasi diceret : committatis vos
Deo, qui suo iudicio potest vos defendere et
vindicare, secundum illud I Petr. ult. :
omnem sollicitudinem vestram proiicientes
in eum, quoniam ipsi cura est de vobis. Sed
haec intelligenda sunt in casu in quo nobis
non adest facultas aliter faciendi secundum
iustitiam; sed quia, ut dicitur Deut. I, v. 17.
— domini est iudicium, cum aliquis
auctoritate iudicis, vel vindictam quaerit ad
comprimendam malitiam et non propter
odium, vel etiam cum auctoritate alicuius
superioris suam defensionem procurat,
intelligitur locum dare irae, id est divino
iudicio, cuius ministri sunt principes, ut
commise par un individu, le juge, selon la
justice, inflige le mal de la peine
proportionnellement à la malice <de la faute>,
matériellement ce juge inflige un mal, mais
formellement et en soi il fait le bien. Par
conséquent, lorsque le juge fait pendre au
gibet un bandit convaincu d’homicide, il ne
rend pas le mal pour le mal, mais plutôt le
bien pour le mal. C’est ainsi que l’Apôtre
livra à Satan un fidèle coupable d’inceste
"pour la mort de sa chair, afin que son esprit
soit sauvé au jour de Notre Seigneur Jésus-
Christ, comme il le rapporte dans sa première
épître aux Corinthiens919
.
1009. b. Puis, <l’Apôtre> enseigne qu’il
faut encore faire le bien au prochain, en disant
: vous préoccupant, c’est-à-dire soyez
préoccupés, de ce qui est bien, non seulement
devant Dieu, c’est-à-dire pour que vous ayez
soin de satisfaire votre conscience devant
Dieu, mais aussi devant tous les hommes,
c’est-à-dire pour que vous accomplissiez ce
qui plaît aux hommes "Ne soyez une occasion
de scandale ni pour les Juifs, ni pour les
Gentils, ni pour l’Eglise de Dieu; comme
moi-même je m’efforce de plaire à tous en
toutes choses, ne cher chant pas mon propre
intérêt, mais celui du plus grand nombre, afin
qu’ils soient sauvés." Et encore "Nous nous
préoccupons de ce qui est bien, non seulement
devant Dieu, mais aussi devant les hommes."
Or cela peut se faire ou en bien ou en mal. En
effet, si cela se fait en vue de gagner la faveur
des hommes, cette action n’est pas bonne,
<selon ce verset de Matthieu> "Prenez garde
à ne pas faire votre justice devant les hommes
pour être vus d’eux; autrement vous n’auriez
pas de récompense auprès de votre Père qui
est dans les cieux." Mais si cela se fait en vue
de la gloire de Dieu, c’est une bonne action,
selon cet autre verset de Matthieu "Qu’ainsi
donc luise votre lumière devant les hommes,
afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu’ils
glorifient votre Père qui est dans les cieux."
1010. — c. Enfin,920
<l’Apôtre> donne la
raison de ces deux exhortations. En effet,
nous devons nous abstenir de rendre le mal
919
Lieu parallèle t Somme Théologique 2 Q. 40, a. 1, sol. 2. 920
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 29, a. 1; 3 Sentences dist. 27, Q. 2, a. 1, sol. 6.
dicitur infra XIII, 4. Unde etiam Paulus
procuravit se per armatos defendi contra
insidias Iudaeorum, ut patet Act. XXIII, 12
ss. Deinde, cum dicit sicut scriptum est, etc.,
probat quod dixerat. Et primo per
auctoritatem; secundo per rationem, ibi noli
vinci a malo, et cetera. Circa primum duo
facit. Primo probat quod dictum est de
prohibitione vindictae, dicens dictum est :
date locum irae, id est divino iudicio,
scriptum est enim, Deut. XXXII, 35, mihi
vindictam, scilicet servate, et ego retribuam,
dicit dominus. Nostra littera sic habet : mea
est ultio, et ego retribuam eis in tempore.
Ps. XCIII, 1. — Deus ultionum dominus.
Nahum I, 2. — Deus aemulator et ulciscens
dominus. Secundo probat per auctoritatem,
quod dictum est de benevolentia exhibenda
inimicis. In qua quidem auctoritate, primo,
ponit documentum ut subveniamus inimicis
in articulo necessitatis, quia hoc est de
necessitate praecepti, ut supra dictum est. Et
hoc est quod dicit sed, si esurierit inimicus
tuus, ciba illum; si sitit, potum da illi.
Matth. V, v. 44. — benefacite his qui
oderunt vos. Secundo rationem assignat,
dicens hoc enim faciens, carbones ignis
congeres super caput eius. Quod quidem
uno modo potest intelligi in malum, ut sit
sensus : si tu ei benefacias, bonum tuum
vertetur ei in malum, quia ex hoc incurret
combustionem ignis aeterni per suam
ingratitudinem. Sed iste sensus repugnat
charitati, contra quam ageret, qui alicui
subveniret ut ei proveniret in malum. Et
ideo est exponendum in bonum, ut sit
sensus hoc enim faciens id est, in necessitate
ei subveniens, carbones ignis, id est
amorem charitatis de qua dicitur Cant. VIII,
v. 6. — lampades eius, ut lampades ignis
atque flammarum congeres, id est,
congregabis, super caput, id est, super
mentem eius. Quia, ut Augustinus dicit in
libro de catechizandis rudibus, nulla est
maior provocatio ad amandum, quam
praevenire amando. Nimis enim durus
aux méchants et nous préoccuper de ce qui est
bien devant les hommes, afin d’avoir la paix
avec <tous>; et c’est pourquoi <l’Apôtre>
continue <en disant :> : 18 ayant la paix avec
tous les hommes. — "Recherchez la paix avec
tous." Mais il y ajoute deux choses, dont la
première est : S’il se peut. Car la malice
d’autrui empêche parfois que nous puissions
avoir la paix avec lui, à savoir parce qu’on ne
peut avoir la paix avec lui sans donner son
assentiment à sa malice. Cette paix est
évidemment illicite, aussi le Seigneur dit-il :
"Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le
glaive." Il ajoute l’autre chose, en disant :
autant qu’il dépend de vous, c’est-à-dire que
si eux-mêmes agissent contre la paix, nous
devons faire ce qui est en notre mesure pour
chercher à leur obtenir la paix : "Avec ceux
qui haïssent la paix, j’étais pacifique." Et
encore : "Cherche la paix et poursuis-la."
1011.. En disant ensuite : 19 ne vous
défendant point vous-mêmes, etc., <l’Apôtre>
montre qu’il ne faut pas faire du mal au
prochain sous prétexte de défense.
a. Il commence par donner un modèle, en
disant : ne vous défendez point vous-mêmes,
<mes> bien-aimés, comme il écrit à propos
du Christ : "J’ai abandonné mon corps à ceux
qui <me> frappaient, mes joues à ceux qui
arrachaient ma barbe." Et encore : "Comme
une brebis, il sera conduit à la tuerie, et
comme un agneau devant celui qui le tond, il
sera muet, et il n’ouvrira pas sa bouche."
D’où ce commandement du Seigneur lui-
même "Si quelqu’un te frappe sur la joue
droite, présente-lui encore l’autre921
." Mais,
comme le dit Augustin922
dans son livre Sur le
mensonge, les actes des saints dans le
Nouveau Testament […] servent d’exemples
pour l’intelligence des Ecritures, exemples
qui <nous> ont été donnés comme préceptes.
Quant au Seigneur lui-même, ayant reçu un
soufflet, il ne dit pas Voici l’autre joue, mais :
"Si j’ai mal parlé, rends témoignage du mal;
mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu
?" Il montre par là que cette disposition <à
921 Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 64, a. 7, s9 5.
922 Voir SAINT AUGUSTIN, De mendacio, XV, 26—27 (PL 40, 506-507).
animus qui dilectionem : et si nolebat
impendere, nolit rependere. Deinde, cum
dicit noli vinci a malo, etc., probat quod
dixit per rationem. Naturale est enim homini
ut velit adversarium vincere et non vinci ab
eo. Illud autem ab aliquo vincitur, quod ad
illud trahitur, sicut aqua vincitur ab igne
quando trahitur ad calorem ignis. Si ergo
bonus aliquis homo, propter malum quod
sibi ab aliquo infertur, trahatur ad hoc quod
ei male faciat, bonus a malo vincitur. Si
autem e contrario propter beneficium quod
bonus persecutori exhibet, eum ad suum
amorem trahat, bonus malum vincit. Dicit
ergo noli vinci a malo, scilicet eius qui te
persequitur, ut tu eum persequaris, sed in
bono tuo vince malum illius, ut scilicet ei
benefaciendo, eum a malo trahas. I Io. ult. :
haec est victoria quae vincit mundum, fides
nostra. Ier. XV, 19. — ipsi convertentur ad
te, et tu non converteris ad eos.
présenter> l’autre joue doit se faire dans le
cœur. Car le Seigneur ne fut pas seulement
disposé à être frappé sur l’autre <joue> pour
le salut des hommes, mais encore à être
crucifié dans tout son corps. Et comme le dit
Augustin <dans sa lettre> A Marcellin, < met
ce commandement en pratique avec rectitude
lorsqu’on croit que <son accomplissement>
sera utile à celui pour lequel on l’accomplit,
<c’est-à-dire> pour opérer en lui la correction
et la concorde, même s’il s’ensuit un autre
résultat. […] Par conséquent, ces préceptes de
patience doivent toujours être retenus dans la
disposition du cœur, comme la bienveillance
elle-même doit toujours être exécutée dans la
volonté, afin de ne pas rendre le mal pour le
mal. Mais il faut également faire beaucoup de
choses contre le gré de personnes qu’on doit
frapper avec une sorte de bienveillante
sévérité923
."
1012. — b. Puis <l’Apôtre> en donne la
raison, lorsqu’il dit : mais faites place à la
colère, c’est-à-dire au jugement divin924
.
Comme s’il disait : Confiez-vous à Dieu qui,
par son jugement, peut vous défendre et vous
venger, selon ce verset de la première épître
de Pierre : "Rejetant en lui toute votre
sollicitude, parce qu’il a lui-même soin de
vous." Il faut comprendre ces paroles dans le
cas où nous ne pouvons faire autrement selon
la justice; mais parce que, selon le
Deutéronome, "c’est le jugement de Dieu ",
lorsqu’on recourt à l’autorité d’un juge, soit
pour demander la vengeance en vue de
réprimer la malice, sans agir par motif de
haine, soit encore lorsqu’on se met à couvert
sous l’autorité d’un supérieur. Tel est le sens
de faites place à la colère, c’est-à-dire au
jugement de Dieu, dont les princes sont les
ministres, comme le dit <l’Apôtre> au
chapitre 13, 6. Ainsi Paul eut-il soin de se
défendre par des soldats contre les embûches
des Juifs, comme on le voit au chapitre 23 des
Actes des Apôtres.
1013. — II. Lorsque <l’Apôtre> dit car il est
923
Voir SAINT AUGUSTIN, Lettre CXXXVIII, 11, 11 et 14 (PL 33, 529-531; CSEL 44, 136-137 et
139-141). 924 Voir Glosa in Rom. XII, 19 (GPL, col. 1502 C).
écrit, etc., il prouve ce qu’il avait avancé. Et
A) D’abord, par l’autorité <scripturaire>.
B) Puis, par le raisonnement [n° 101 5] 21 Ne
te laisse pas vaincre par le mal, etc.
1014. — A. Sur le premier point il fait deux
choses :
1. Il prouve d’abord ce qu’il a dit sur
l’interdiction de la vengeance faites place à la
colère, c’est-à-dire au jugement divin, car il
est écrit : A moi est la vengeance, c’est-à-dire
réservez-la-moi, et c’est moi qui
rétribuerai925
, dit le Seigneur. Notre version lit
ainsi : "A moi est la vengeance, et c’est moi
qui > les "rétribuerai en son temps " Il est
écrit au psaume 93. — "Le Seigneur est le
Dieu des vengeances." Et au livre de Nahum :
"C’est un Dieu jaloux et qui se venge, le
Seigneur."
2. Ensuite il prouve par l’autorité
<scripturaire> ce qui a été dit de la
bienveillance qu’on doit témoigner à ses
ennemis. En s’appuyant sur cette autorité il
commence par donner un enseigne ment, à
savoir qu’il faut secourir ses ennemis en cas
de nécessité, parce que c’est une nécessité de
précepte, ainsi qu’on l’a dit plus haut. C’est
ce que <l’Apôtre> dit ici : 20 Au contraire si
ton ennemi a faim, donne-lui à manger; s’il a
soif; donne-lui à boire. "Faites du bien à ceux
qui vous haïssent." Puis il en donne la raison,
en disant : car, ce faisant, tu amasseras des
charbons de feu sur sa tête. Or cela peut être
interprété en mal; en voici le sens : Si toi, tu
lui fais du bien, ton bien se tournera pour lui
en mal, puisque ce bien <lui> fera encourir le
châtiment du feu éternel en punition de son
ingratitude. Mais cette interprétation répugne
à la charité, contre laquelle agirait celui qui
viendrait au secours de son prochain pour
qu’il lui en arrive du mal. Par conséquent il
faut interpréter ce passage en bien; en voici le
sens car, ce faisant, c’est-à-dire en le
secourant dans la nécessité, tu amasseras, à
savoir tu rassembleras, sur sa tête, c’est-à-dire
sur son esprit, des charbons de feu, à savoir
l’amour de charité926
, dont il est dit : "Ses
925
Dt 32, 35 "Mihi vindictam" version de la Vetus latina, voir DOM SABATIER, Bibi. sacr., t. III
(Textus et notae ad versionem antiquam), p. 642. Voir aussi He 10, 30 (DOM SABATIER, p. 924). 926
Voir Glosa in Rom. XII, 20 (GPL, col. 1503 B).
lampes sont des lampes de feu et de
flammes."
Car, comme le dit Augustin dans son ouvrage
La catéchèse des débutants, "il n’est pas, en
effet, d’appel plus grand à l’amour que de le
prévenir en aimant; et trop dur serait le cœur
qui, s’étant refusé à débourser de l’amour, se
refuserait à le rembourser927
."
1015. — B. En disant : 21 Ne te laisse pas
vaincre par le mal, etc., <l’Apôtre> prouve ce
qu’il a dit par le raisonnement. Car il est
naturel à l’homme de vouloir vaincre son
adversaire et de ne pas se laisser vaincre par
lui. Or celui-là est vaincu par son adversaire
qui est entraîné vers lui, comme l’eau est
vaincue par le feu lorsqu’elle est attirée vers
la chaleur du feu. Si donc un homme de bien,
en raison du mal que quelqu’un lui inflige, est
entraîné à lui faire du mal <à son tour>, le
bon est vaincu par le méchant928
. Mais si au
contraire, en raison du bien qu’un homme bon
fait à son persécuteur, il l’attire à son amour,
le bon vainc le méchant. <L’Apôtre> dit donc
: Ne te laisse pas vaincre par le mal, à savoir
celui que te fait celui qui te persécute, jusqu’à
le persécuter toi-même, mais sois vainqueur
de son mal par ton bien, à savoir de telle sorte
qu’en lui faisant du bien tu le tires du mal "La
victoire qui triomphe du monde, c’est notre
foi " Et : "Eux-mêmes se tourneront vers toi,
et toi, tu ne te retourneras pas vers eux."
Caput 13 CHAPITRE 13
Lectio 1 Leçon 1 [Versets 1 à 7]
[n° 1016] 1 Que toute âme soit soumise aux
pouvoirs supérieurs, car il n’y a point de
pouvoir qui ne vienne de Dieu; et ceux qui
sont ont été établis par Dieu.
[n° 1025] 2 C’est pourquoi celui qui résiste au
927
SAINT AUGUSTIN, De catechizandis rudibus IV, 7 (BA 11/1, 64-65). 928
Il est certainement possible de rapprocher cet enseignement de celui de Gandhi et de Lanza del
Vasto sur la non-violence, laquelle consiste à dire non à la violence, non à lui céder passivement
répondre au mal par le mal, c’est entrer dans le cercle du mal et se laisser vaincre par lui. Mais on ne
saurait trouver chez saint Thomas une condamnation de l’usage de la force lorsqu’il s’agit de
maintenir la paix â l’intérieur comme à l’extérieur : la peine de mort dûment appliquée (voir le
paragraphe 1008; Somme Théologique 1 Q. 100, a. 8, sol. 3; 2 Q. 25, a. 6, sol. 2; Q. 64, a. 2; Q. 108, a.
3; 3 Contra Gentiles c. 146; De virtut., Q. 2, a. 8, sol. 10; Col!, in decem praec., cap. de quint.
praecept.) ou la guerre légitime (Somme Théologique 2 Q. 40, a. 1) sont œuvre de justice.
pouvoir résiste à l’ordre <voulu> de Dieu; or
ceux qui résistent attirent sur eux-mêmes une
condamnation.
[n° 1029] 3 Car les princes ne sont pas un
sujet de crainte quant aux bonnes œuvres,
mais quant aux mauvaises. Or veux-tu ne pas
craindre le pouvoir ? Fais le bien, et il te
louera.
[n° 1034] 4 Car il est pour toi le ministre de
Dieu en vue du bien. Que si tu fais le mal,
crains; car ce n’est pas en vain qu’il porte le
glaive, puisqu’il est le ministre de Dieu,
vengeur pour la colère envers celui qui fait le
mal.
[n° 1036] 5 C’est pourquoi soyez soumis par
nécessité, non seulement à cause de la colère,
mais encore à cause de la conscience.
[n° 1037] 6 C’est aussi pourquoi vous payez
des tributs; car il s’agit de ministres de Dieu
pour cela même qu’ils le servent.
[n° 1042] Rendez donc à tous ce qui leur est
dû, à qui le tribut, le tribut; à qui la taxe, la
taxe; à qui la crainte, la crainte; à qui
l’honneur, l’honneur.
[86222] Super Rom., cap. 13 l. 1 Postquam
apostolus ostendit qualiter se debeat homo
exhibere Deo, utendo donis gratiae eius hic
ostendit quomodo debeat se exhibere
proximo : et primo quantum ad superiores;
secundo quantum ad omnes, ibi nemini
quicquam debeatis, et cetera. Circa primum
duo facit. Primo inducit homines ad
subiectionem quam debent superioribus;
secundo ad exhibendum subiectionis
signum, ibi ideo et tributa praestatis, et
cetera. Circa primum tria facit. Primo
proponit documentum; secundo rationem
assignat, ibi non enim est potestas, etc.;
tertio infert conclusionem intentam, ibi
ideoque, et cetera. Circa primum
considerandum est quod quidam fideles in
primitiva Ecclesia dicebant terrenis
potestatibus se subiici non debere propter
libertatem, quam consecuti erant a Christo,
secundum illud Io. VIII, v. 36. — si filius
vos liberaverit, vere liberi eritis. Sed
libertas per Christum concessa, est libertas
spiritus qua liberamur a peccato et morte,
sicut supra VIII, 2 dictum est : lex spiritus
in Christo Iesu liberavit me a lege peccati et
1016. — Après avoir montré comment
l’homme doit se comporter à l’égard de Dieu,
en usant des dons de sa grâce [n° 953],
l’Apôtre montre ici comment il doit se
comporter à l’égard du prochain; et
— D’abord, à l’égard de ses supérieurs.
— Puis, à l’égard de tous [n° 1044] Ne devez
rien à personne, etc.
Sur le premier point il fait deux choses
I) Il exhorte les hommes à la soumission
qu’ils doivent à leurs supérieurs.
II) Puis, à donner un signe de cette
soumission [n° 1037] : 6 C’est aussi pourquoi
vous payez des tributs, etc.
I. À propos de son exhortation à la
soumission
A) Il commence par proposer un
enseignement.
B) Puis, il en donne la raison [n° 1020] car il
n’y a point de pouvoir, etc.
C) Enfin, il en tire la conclusion qu’il s’était
proposée [n° 1036] : 5 C’est pourquoi soyez
soumis, etc.
1017. — A. Touchant son enseignement sur la
soumission, il faut remarquer que dans
l’Eglise primitive certains fidèles prétendaient
mortis. Caro autem adhuc remanet servituti
obnoxia, sicut supra dictum est. Et ideo tunc
nulli subiectioni homo, per Christum
liberatus, erit obnoxius, nec spirituali
scilicet, nec carnali. Unde dicitur 1 Co XV,
24. — cum tradiderit Christus regnum Deo
patri, et evacuaverit omnem principatum et
potestatem. Interim autem dum
corruptibilem carnem gerimus, oportet nos
dominis carnalibus subiacere. Unde dicitur
Eph. VI, 5. — servi, obedite dominis
carnalibus. Et hoc est etiam quod hic
apostolus dicit omnis anima potestatibus
sublimioribus subdita sit. Potestates autem
sublimiores hic dicuntur homines in
potestatibus constituti, quibus secundum
iustitiae ordinem subiici debemus. I Petr. II,
23. — subditi estote omni humanae
creaturae propter Deum, sive regi quasi
praecellenti, sive ducibus, tamquam ab eo
missis, et cetera. Dicit autem indefinite
potestatibus sublimioribus, ut ratione
sublimitatis officii eis subiiciamur, etiam si
sint mali. Unde I Petr. II, 18 subditur :
subiecti estote non tantum bonis et modestis,
sed etiam dyscolis. Quod autem dicitur
omnis anima, per synecdochen intelligitur
omnis homo, sicut et Gen. XVII, 14. —
delebitur anima illa de populo suo. Utitur
autem hoc modo loquendi, quia
subiectionem superioribus debemus ex
animo, id est ex pura voluntate, secundum
illud Eph. c. VI, 6 s. : non ad oculum
servientes, quasi hominibus placentes, sed
ex animo cum bona voluntate. Deinde cum
dicit non est enim potestas, etc., ponit
rationem admonitionis praemissae. Primo
quidem ex parte honesti; secundo ex parte
necessarii, ibi qui autem resistunt, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo praemittit
duo principia; secundo ex eis concludit, ibi
itaque qui resistit, et cetera. Primo enim
praemittit originem potestatis, dicens non
est enim potestas nisi a Deo. Quicquid enim
communiter de Deo et creaturis dicitur, a
Deo in creaturas derivatur, sicut patet de
sapientia, Eccli. I, 1. — omnis sapientia a
ne pas devoir se soumettre aux pouvoirs
terrestres, en vertu de la liberté qu’ils avaient
acquise par le Christ, selon ce verset de Jean :
"Si le Fils vous libère, vous serez vraiment
libres." Mais la liberté accordée par le Christ,
c’est la liberté de l’esprit, par laquelle nous
sommes libérés du péché et de la mort ",
comme on l’a dit plus haut "La Loi de l’esprit
de vie dans le Christ Jésus m’a libéré de la
Loi du péché et de la mort." Toutefois la chair
demeure encore soumise à la servitude,
comme on l’a dit ci-dessus [n° 563s]. Par
conséquent il y aura un temps où, libéré par le
Christ, l’homme ne sera plus soumis à aucune
servitude, qu’elle soit spirituelle ou charnelle.
C’est pourquoi il est dit : "Puis ce sera la fin,
quand <le Christ> remettra la royauté à Dieu
le Père, après avoir détruit toute principauté,
tout pouvoir et toute puissance." Mais
cependant, tant que nous portons cette chair
corruptible, il nous faut être soumis aux
maîtres selon la chair. Aussi est-il dit :
"Esclaves, obéissez à vos maîtres selon la
chair, avec crainte et tremblement, dans la
simplicité de votre cœur, comme au Christ
même." Tel est bien ce que dit ici l’Apôtre : 1
Que toute âme soit soumise aux pouvoirs
supérieurs. Or on appelle ici pouvoirs
supérieurs les hommes qui ont été établis dans
ces pouvoirs, pouvoirs auxquels, suivant
l’ordre de la justice, nous devons être soumis :
"Soyez soumis à toute créature humaine à
cause de Dieu; soit au roi, comme étant au-
dessus des autres, soit aux gouverneurs,
comme envoyés par lui pour la punition de
ceux qui font le mal et la louange des bons."
1018. — <L’Apôtre> dit d’une manière
indéfinie : aux pouvoirs supérieurs, pour
qu’en raison de la supériorité de leur fonction
nous leur soyons soumis, fussent-ils même
mauvais. C’est pourquoi <l’Apôtre> Pierre
ajoute : "Esclaves, soyez soumis à vos maîtres
en toute crainte, non seulement aux bons et
aux modérés, mais aussi aux difficiles."
1019. — L’expression : "toute âme" signifie,
par synecdoque929
tout homme, comme il est
dit dans la Genèse : "Cette âme sera
929
La synecdoque est une figure de rhétorique par laquelle on prend la partie pour le tout.
domino Deo est. Potestas autem de Deo et
de hominibus dicitur. Iob c. XXXVI, 5. —
Deus potestates non abiicit, cum ipse sit
potens. Unde consequens est, quod omnis
humana potestas sit a Deo. Dan. c. IV, 14.
— dominabitur excelsus in regno hominum,
et cuicumque voluerit, dabit illud. Io. XIX,
11. — non haberes potestatem adversum me
ullam, nisi tibi datum esset desuper. Sed
contra hoc esse videtur, quod dicitur Osee
VIII, 4. — ipsi regnaverunt, et non ex me :
principes extiterunt, et non cognovi. Ad hoc
dicendum est, quod regia potestas, vel
cuiuscumque alterius dignitatis potest
considerari quantum ad tria. Uno quidem
modo quantum ad ipsam potestatem, et sic
est a Deo, per quem reges regnant, ut dicitur
Prov. VIII, 15. Alio modo potest considerari
quantum ad modum adipiscendi potestatem,
et sic quandoque potestas est a Deo :
quando scilicet aliquis ordinate potestatem
adipiscitur, secundum illud Hebr. V, 4. —
nemo sibi honorem assumit, sed qui vocatur
a Deo tamquam Aaron. Quandoque vero
non est a Deo sed ex perverso hominis
appetitu, qui per ambitionem, vel
quocumque alio illicito modo potestatem
exterminée du milieu de son peuple."
<L’Apôtre> se sert de cette expression930
parce que nous devons aux supérieurs une
soumission de cœur, c’est-à-dire <une
soumission qui procède> d’une volonté sans
condition selon ce passage <de l’Apôtre aux>
Ephésiens : "obéissez à vos maîtres [...], les
servant, non à l’œil, comme pour plaire aux
hommes, mais comme des esclaves du Christ,
accomplissant de cœur la volonté de Dieu;
faisant votre service de bon gré, comme pour
le Seigneur et non pour les hommes."
1020. — B. Lorsqu’il dit : car il n’y a point
de pouvoir, etc., <l’Apôtre> donne la raison
de son exhortation. Cette raison se fonde :
1) Premièrement, sur l’honneur.
2) Deuxièmement, sur la nécessité [n° 1026] :
or ceux qui résistent, etc.
1. À propos de l’honneur :
a) Il commence par mentionner deux
principes.
b) Puis, il en tire une conclusion [n° 1025] : 2
C’est pourquoi, etc.
1021. — a. <L’Apôtre>931
commence par
mentionner l’origine du pouvoir, en disant :
car il n‘y a point de pouvoir qui ne vienne de
Dieu932
. En effet, tout ce qui se dit
930
Voir Glosa in Rom. XIII, 1 (GPL, col. 1504 A). 931
Lieux parallèles Somme Théologique I Q. 93, a. 3, sol. 2; Q. 96, a. 4, sol. 1. 932
Aucun verset de saint Paul n’a eu, pour l’histoire politique de l’Occident, des conséquences plus
importantes que celui-là. Avec le verset de Marc ("Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui
est à Dieu", 12, 17), il constitue le fondement de la doctrine poli tique chrétienne. S’adressant à des
chrétiens romains saint Paul a en vue le pouvoir de l’empereur (Néron) et celui de ses magistrats. Il
s’agit d’un pouvoir païen. Cependant, affirme saint Paul, "les pouvoirs qui existent ont été établis
(ordinatae) par Dieu s; bien que païens, ils obligent les chrétiens en conscience, de sorte qu’il y a faute
à leur désobéir. Comment cela est-il possible ? Saint Thomas s’efforce de répondre à la question. Il
commence par affirmer (n° 1017) que certains chrétiens, dans la primitive Eglise, s’esti maient
affranchis des obligations légales. Puis il articule sa réponse, laquelle touche à l’origine du pouvoir
politique et à son mode de désignation. Etant donné l’importance de son auteur, la doctnne
thomasienne a été l’objet d’innombrables commentaires et de vives discussions les partis les plus
opposés s’en sont réclamés, pour justifier parfois des préoccupations politiques assez étrangères aux
données historiques du xu’ siècle. — Depuis Rousseau, la question de l’origine du pouvoir a pris une
signification qu’elle n’avait pas avant lui qu’un homme puisse avoir légitimement autorité sur un
autre, voilà ce qui, pour un modeme, pose problème et réclame un fondement. Alors que, pour saint
Thomas (et pour saint Paul), cela va de soi la société est une réalité naturelle ordonnée au bien
commun et nécessairement dotée pour cela d’une autonté politique s’exerçant sur les sujets qui la
composent. Le pouvoir politique est aussi naturel que la société. L’interrogation porte donc, non sur
l’ongine radicale du pouvoir, mais sur sa légitimité eu égard à la Loi nouvelle le Christ ne nous a-t-il
pas affranchis de toute servitude ? La solution thomasienne est simple dans son principe dans la
mesure même où l’autorité politique est d’une nécessité de nature, elle est voulue par Dieu et vient de
lui, puisque la loi naturelle est l’expression de la Loi éternelle (Somme Théologique 1a-2ae, Q. 93, a.
adipiscitur. Amos VI, 14. — numquid non
in fortitudine nostra assumpsimus nobis
communément de Dieu et des créatures dérive
de Dieu vers les créatures, comme on le voit
3). Le pouvoir du prince et de ses officiers et magistrats est, par lui-même et en lui-même, c’est-à-dire
en dehors de ses conditions d’acqui sition et d’exercice, pouvoir de Dieu. C’est ce que saint Thomas
déclare ici même (n° 1022) en soi, le pouvoir est de Dieu et institué par Dieu. Telle est son essence.
Evidemment, considéré dans son existence, un pouvoir déterminé n’est légitime qu’à la mesure de sa
conformité à son essence, c’est-à-dire qu’à la mesure où il réalise sa fin, le bien commun, et où il
recueille le consentement de ses sujets; ces conditions étant remplies, les chrétiens doivent obéissance
de plein gré au prince non chrétien préalablement établi "Il faut ici considérer que la souveraineté
(dominium) et le directorat (praelatio) sont de droit humain, alors que la distinction des fidèles et des
infidèles est de droit divin. Or, le droit divin, qui vient de la grêce, ne supprime pas le droit humain qui
vient de la raison naturelle. C’est pourquoi la distinction des fidèles et des infidèles, prise en elle-
même, ne supprime pas la souveraineté et le directorat des infidèles sur les fidèles" (Somme
Théologique 2a-2 Q. 10, a. 10). Assurément, en régime de "chrétienté sacrale "(voir Charles
JOURNET, L’Eglise du Verbe incarné, t. I, p. 304."), l’Eglise peut suspendre le devoir d’obéissance
au prince hérétique ou apostat, encore qu’elle ne le fasse pas toujours par crainte du scandale ou par
impuissance; mais dans le cas du prince non chrétien, il ne saurait en être ainsi " Il n’appar tient pas à
l’Eglise de punir l’infidélité en ceux qui n’ont ‘amais reçu la foi> (Somme Théologique 2 Q. 12, n. 2).
On ne voit pas comment, dans ces conditions, on pourrait tirer la pensée thomasienne du côté de ce
qu’on a appelé I’ augustinisme politique’> pour lequel l’Eglise seule peut fonder un pouvoir légitime,
le pape étant l’intermédiaire obligé entre Dieu et l’empereur (dont le nom est parfois mentionné par
saint Thomas, du moins celui de Rome. Voir E. GILSON, Les Méta morphoses de la Cité de Dieu, p.
77) ou le prince à qui est déléguée la souveraineté temporelle. La preuve en est que le sacre des rois ne
leur communique pas le pouvoir de commander — pouvoir qu’ils possèdent, selon les divers modes
légitimes de sa dévolution, avant le sacre — mais " il institue ecclésialement " le pnnce et lui confère
les vertus nécessaires à sa charge " L’onction ne consacre les rois dans aucun ordre sacré, mais elle
signifie seulement que l’excellence de leur pouvoir descend du Christ, en sorte que, étant eux-mêmes
soumis au Christ, ils règnent sur le peuple chrétiens (S. Th., Suppl., Q. 19, a. 3, sol. 2). Cette
souveraineté du pouvoir temporel est affirmée constamment par saint Thomas, même dans le De
regimine(ou De regno ad regem Cypri) "On appelle roi celui à qui est dévolu le pouvoir suprême
(summa regiminis) dans tes choses humaines (II, c. 3 [n° 14], éd. Léonine, t. XLII, p. 466, 1. 84-85);
sur les réserves à observer dans l’usage théologique de ce traité inachevé, voir Jean-Pierre T0RRELL,
Initiation à saint Thomas d’Aquin. Sa personne et son œuvre, p. 247-249. — Cependant, la fin ultime
de l’existence humaine étant la Jouissance de Dieu, et non seulement la vie vertueuse qui n’en est que
le moyen, l’agent du bien vivre en société, à savoir le roi, est soumis à Celui là seul par la gràce de qui
cette fin peut être attemte, à savoir Jésus—Christ, " ce pourquoi Jésus-Christ est appelé dans
l’Ecriture, non seulement prêtre, mais aussi roi "Un roi règnera et il sera sage" (Jr 23, 5) d’où vient que
de lui découle un sacerdoce royal. Et qui mieux est, tous les fidèles du Christ, en tant qu’ils sont ses
membres, sont appelés rois et prêtres. C’est pourquoi, afin que l’ordre des réalités spirituelles soit
distinct de l’ordre des réalités terrestres, l’administration de ce royaume des fidèles a été dévolue non
aux rois terrestres mais aux prêtres, et prin cipalement au grand prêtre successeur de Pierre, le pontife
romain vicaire du Christ, à qui tous les rois du peuple chrétien doivent être soumis comme à Notre
Seigneur Jésus-Christ" (De regno ad regem Cypri, 1. 103-109). Ce qui ne veut pas dire que les rois
terrestres tiendraient la réalité de leur pouvoir temporel de l’autorité spirituelle du pape : ils la tiennent
de Dieu, parce que, intrinsèquement, tout pouvoir vient de Dieu. Quant au mode de dévolution, on sait
que saint Thomas est partisan de l’élection du roi par le peuple "C’est au peuple que revient l’élection
des princes" (Somme Théologique 1a Q. 105, a. 1); Thomas expose ici que le meilleur régime doit être
monar chique dans son principe, aristocratique dans son exercice et démo cratique dans son mode de
désignation du monarque, lequel peut être choisi dans le peuple). Evidemment, dans la pratique, il
arrive que l’indépendance naturelle du pouvoir temporel à l’égard de l’autorité spirituelle soit
difficilement conciliable avec la soumission religieuse qu’il doit à l’incontestable suprématie du pape.
D’où les nuances de la pensée thomasienne. Mais elle demeure dans son ensemble ferme et équilibrée
(comme le montre Jacques CHEVALIER, Histoire de la pensée, t. II, p. 544-548 et p. 808-8 10).
cornua ? Tertio modo potest considerari
quantum ad usum ipsius : et sic quandoque
est a Deo, puta cum aliquis secundum
praecepta divinae iustitiae utitur concessa
sibi potestate, secundum illud Prov. VIII,
15. — per me reges regnant, et cetera.
Quandoque autem non est a Deo, puta cum
aliqui potestate sibi data utuntur contra
divinam iustitiam, secundum illud Ps. II, 2.
— astiterunt reges terrae, et principes
convenerunt in unum adversus dominum, et
cetera. Dubitatur etiam de potestate
peccandi, utrum sit a Deo. Ad quod
dicendum est quod ipsa potentia qua
peccatur, a Deo est. Eadem enim potentia
est qua peccatur et qua recte agitur : sed
quod in bonum ordinetur, a Deo est; quod
autem ordinetur ad peccandum, est ex
defectu creaturae, inquantum est ex nihilo.
Secundo ponit, quod ea quae sunt, a Deo
ordinata sunt, cuius ratio est quia Deus
omnia per suam sapientiam fecit, secundum
illud Ps. CIII, 24. — omnia in sapientia
fecisti. Est autem proprium sapientiae
ordinate omnia disponere. Sap. VIII, 1. —
attingit a fine usque ad finem fortiter, et
disponit omnia suaviter. Et ideo oportet
effectus divinos ordinatos esse. Iob
XXXVIII, 33. — numquid nosti ordinem
caeli, et pones rationem eius in terra ?
Duplicem autem ordinem Deus in suis
effectibus instituit : unum quidem quo
omnia ordinantur in ipsum, Prov. XVI, 4. —
universa propter semetipsum operatus est
Deus, alium vero quo effectus divini
ordinantur ad invicem, sicut dicitur Deut.
IV, 19 de sole et luna et stellis, quod fecit ea
in ministerium cunctis gentibus. Deinde
cum dicit itaque qui resistit, etc., ex duabus
praemissis concludit propositum. Si enim
potestas principum, inquantum talis est, a
Deo est, et nihil est a Deo sine ordine,
consequens est, quod etiam ordo, quo
inferiores potestatibus superioribus
subiiciuntur, sit a Deo. Itaque qui contra
pour la sagesse :
"Toute sagesse vient du Seigneur Dieu." Or le
pouvoir est attribué à Dieu et aux hommes :
"Dieu ne rejette point les pouvoirs, puisqu’il
est lui-même puissant." D’où il suit que tout
pouvoir humain vient de Dieu "Le Très-Haut
dominera sur le royaume des hommes et il le
donnera à qui il voudra." — "Tu n’aurais sur
moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné
d’en haut."
1022. — Mais933
cette doctrine semble être
contredite par ce verset d’Osée : "Ils ont régné
par eux-mêmes et non par moi des princes se
sont élevés et je ne les ai pas connus." Il faut
répondre que le pouvoir royal, ou le pouvoir
de quelque autre dignité, peut être considéré
sous trois rapports :
— D’abord, quant au pouvoir lui-même, et
sous ce rapport il vient de Dieu, "par moi
règnent les rois", comme le dit le livre des
Proverbes.
— Puis, quant au mode d’acquisition de ce
pouvoir; sous ce rapport, parfois il vient de
Dieu, c’est-à-dire quand on acquiert ce
pouvoir de manière ordonnée, selon ce verset
de l’épître aux Hébreux "Personne ne
s’attribue à lui-même cet honneur, sinon celui
qui est appelé par Dieu, comme Aaron."
Parfois aussi il ne vient pas de Dieu, mais de
la convoitise perverse de l’homme, qui
acquiert un pouvoir par ambition, ou par
quelque autre moyen illicite : "N’est-ce point
par notre propre force que nous avons établi
nos cornes ?"
Enfin, quant à son usage; sous ce rapport il
vient parfois de Dieu, par exemple quand
celui qui en est dépositaire en use suivant les
préceptes de la justice divine, selon ce verset
des Proverbes : "Par moi les rois règnent, et
les législateurs décrètent des choses justes."
Mais parfois il ne vient pas de Dieu, par
exemple lorsqu’on use de ce pouvoir concédé
contre la justice divine, selon cette parole <du
psalmiste> : "Les rois de la terre se sont levés,
et les princes se sont ligués contre le Seigneur
933
Lieu parallèle : Somme Théologique 1a Q. 93, a. 3.
hunc ordinem resistit potestati, Dei
ordinationi resistit. I Reg. VIII, 7. — non te
abiecerunt, sed me, ne regnem super eos.
Lc. X, 16. — qui vos spernit, me spernit.
Resistere autem divinae ordinationi
contrariatur honestati virtutis. Unde contra
virtutem agit quicumque potestati resistit, in
eo quod pertinet ad ordinem suae potestatis.
Deinde cum dicit qui autem resistunt, etc.,
ostendit huiusmodi subiectionem non solum
esse honestam, sed necessariam. Et primo
proponit quod intendit; secundo probat
propositum, ibi nam principes, et cetera.
Dicit ergo primo : dictum est, quod qui
resistit potestati, Dei ordinationi resistit,
quod quidem secundum se est vitandum,
tamquam contrarium virtuti. Multi tamen
sunt, qui amorem virtutis non habentes, ea
quae sunt contraria virtuti non detestantur.
Unde tales cogendi sunt ad vitationem
malorum per poenas, et quantum ad hoc
subdit qui autem resistunt, scilicet divinae
ordinationi, sibi damnationem acquirunt,
contra potestatis ordinem agendo. Quod
quidem potest intelligi, uno modo, de
damnatione aeterna, quam merentur qui
potestatibus subiici nolunt in eo quod
debent. In cuius exemplum Dathan et
Abiron, qui Moysi et Aaron restiterunt, sunt
a terra absorpti, ut habetur Num. XVI, 20 ss.
Alio modo potest intelligi de damnatione
poenae, quae per ipsos principes infertur.
Prov. XX, 2. — sicut rugitus leonis, ita et
terror regis : qui provocant eum, peccant in
animam suam. Sed contra hoc videtur esse
quod apostoli et martyres principibus et
et contre son Christ."
1023. — On934
se demande encore si le
pouvoir de pécher vient de Dieu.
Il faut répondre que la puissance même par
laquelle on pèche vient de Dieu. Car cette
puissance par laquelle on pèche et on agit
avec droiture est une même puissance.
Quand elle est ordonnée au bien, elle vient de
Dieu; mais lorsqu’elle est ordonnée au péché,
elle vient de l’imperfection de la créature, en
tant qu’elle est issue du néant.
1024. — Puis, <l’Apôtre> expose <ce
principe, à savoir> que <les pouvoirs> qui
sont ont été établis par Dieu. La raison en est
que Dieu a fait toutes choses par sa sagesse,
suivant ce passage du psaume 103 "Tu as fait
toutes choses avec sagesse." Or le propre de
la sagesse est de disposer toutes choses avec
ordre935
— "<La sagesse>, au contraire,
atteint avec force d’une extrémité à une
<autre> extrémité, et elle dispose toutes
choses avec douceur." Voilà pourquoi il faut
que les effets divins soient ordonnés "Est-ce
que tu connais l’ordre du ciel, et en rendras-tu
raison sur la terre ?" Mais Dieu a établi deux
sortes d’ordres dans ses effets. Le premier,
selon lequel toutes choses sont ordonnées à
lui-même : "Dieu a opéré toutes choses pour
lui-même936
." L’autre, selon lequel les effets
divins sont ordonnés entre eux, comme il est
dit au Deutéronome à propos du soleil, de la
lune et des étoiles : < Le Seigneur ton Dieu
les a créés pour servir à toutes les nations qui
sont sous le ciel "
1025. — b. Lorsqu’il ajoute : 2 C’est
934
Lieux parallèles : I Sentences dist. 42, Q. 2, a. 1; 2 Sentences dist. 44, Q. l, a. 1; 3Sentences dist. 12,
Q. 2; Somme Théologique 1a let2; l Q. 79, a. 1; 2 Q. 6, a. 2, sol. 2; 3 Contra Gentiles c. 162; De malo,
Q. 3, a. 1. 935
Comme le fait remarquer le père R-A. Gauthier, o. p. (voir dans son Introduction à la Somme
contre les Gentils, p. 97-98), l’adage e Sapientis est ordinare. est habituellement réfèré â la Méta
physique d’Aristote (I, 29 [982 a 28]; AL XXV, 1, p. 8), alors qu’en réalité il n’y figure pas tel quel.
Saint Thomas le cite d’après saint Albert le Grand (voir son cours sur les Noms divins de Denys
l’Aréo pagite, Opera omnia, t. XXXVII-1; et la reportation de ce cours faite par saint Thomas lui-
même, ms. Napoli Naz. I B 54), lequel a dû l’emprunter à une tradition plus ancienne. — Lieux
parallèles 1 Contra Gentiles c. 1; 2 Contra Gentiles c. 24; 3 Contra Gentiles c. 77; 3 Sentences dist. 4,
Q. 1, a. 1, sol. 3; dist. 34, Q. 1, a. 2; Super Bœt. de Trin., Q. 2, a. 2 (éd. Léonine, 1992, t. L, p. 96, col.
1, 1. 98) Ethic. 1, Iect. 1 (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. I, p, 3, col. 1 [ a 1] Super Metaph. 1, lect.
2. 936
Pr 16, 4. Deus (Dieu) au lieu de Dominus (le Seigneur), proba blement cité de mémoire.
potestatibus restiterunt et ex hoc non
damnationem a Deo sed praemium
acquisiverunt. Sed dicendum est quod
apostolus hic loquitur de eo qui resistit
potestati inferiori, secundum quod est a Deo
ordinata. Habet autem hoc divina ordinatio
ut potestati inferiori non obediatur contra
superiorem, sicut etiam in rebus humanis ut
proconsuli non obediatur contra
imperatorem, nec balivo contra regem. Et
omnis potestas humana sub potestate Dei
ordinatur et nulli potestati humanae est
contra Deum obediendum, secundum illud
Act. V, 29. — oportet obedire magis Deo
quam hominibus. Deinde cum dicit nam
principes, etc., assignat rationem eius quod
dixerat. Et primo proponit rationem;
secundo ex ratione posita quoddam utile
documentum trahit, ibi vis autem non timere
potestatem, et cetera. Tertio huius
documenti necessitatem assignat, ibi si
autem malefeceris, et cetera. Dicit ergo
primo : dictum est quod qui resistunt
potestati, sibi damnationem acquirunt, nam
principes, qui hic potestates dicuntur, non
sunt timori, id est in timorem, boni operis,
id est propter bonum opus, sed mali, id est
propter malum. Quod quidem videtur esse
intelligendum secundum causam instituendi
principes. Ad hoc enim sunt instituendi
principes, ut illi qui amore virtutis non
provocantur ad vitandum malum et
faciendum bonum, cogantur ad hoc timore
poenae. Prov. XX, 8. — rex qui sedet in
solio iudicii, dissipat omne malum intuitu
suo. Et secundum hoc dicitur quod principes
non sunt timori boni operis sed mali,
quantum ad id quod principi ex officio
competit, sicut et Is. XXXII, 8 dicitur :
princeps ea quae sunt digna principe
cogitabit. Potest autem hoc referri etiam ad
malos principes, qui non sunt timori boni
operis sed mali : quia et si interdum iniuste
persequuntur bene operantes, non tamen illi
qui bene operantur, causam habent timendi,
pourquoi celui qui résiste, etc., <l’Apôtre>
déduit sa proposition à partir des deux
prémisses. Si en effet le pouvoir des princes,
en tant que pouvoir, vient de Dieu, et si rien
ne vient de Dieu sans ordre, il s’ensuit que
même l’ordre, suivant lequel les inférieurs
sont soumis aux pouvoirs supérieurs, vient de
Dieu. C’est pourquoi celui qui résiste au
pouvoir contre cet ordre, résiste à l’ordre
<voulu> de Dieu. — "Ce n’est pas toi qu’ils
ont rejeté, mais moi, afin que je ne règne pas
sur eux." <Et encore> : "Celui qui vous
méprise me méprise." Or résister à l’ordre
divin c’est s’opposer à l’honneur937
<qui
s’identifie à> la vertu. Par conséquent
quiconque agit contre la vertu résiste au
pouvoir, en ce qui appartient à l’ordre de ce
pouvoir.
1026. — 2. En disant : or ceux qui résistent,
etc., <l’Apôtre> montre que cette soumission
est non seulement honorable938
," mais
nécessaire. Et :
a) Il commence par exposer son intention.
b) Ensuite, il prouve sa proposition [n° 1029]
: Car les princes ne sont pas un sujet de
crainte, etc.
1027. — a. 939
<L’Apôtre> dit donc d’abord :
On a avancé que celui qui résiste au pouvoir
résiste à l’ordre <voulu> de Dieu, or il faut
éviter cette résistance en soi, en tant qu’elle
s’oppose à la vertu. Cependant un grand
nombre, qui n’ont point l’amour de la vertu,
ne détestent point ce qui lui est opposé. De
telles personnes doivent être contraintes à
éviter le mal par des peines, et <l’Apôtre>
ajoute à ce propos : or ceux qui résistent, à
savoir à l’ordre divin, attirent sur eux-mêmes
une condamnation, en agissant contre l’ordre
du pouvoir. Paroles qui peuvent s’entendre ou
bien de la condamnation éternelle que
méritent ceux qui ne veulent pas être soumis
aux pouvoirs, comme ils le doivent. Sur ce
point, nous avons l’exemple de Dathan et
d’Abiron qui, pour avoir résisté à Moïse et à
Aaron, furent engloutis par la terre, comme le
937 Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 145, a. 1.
938 Voir à ce propos chap. 9, y. 2; leçon 1, n. 13, p. 338 (éd. Marietti, n° 738).
939 Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 104, a. 4; Super Ioan. 2, 5 lect. 1 (éd. Marietti n° 354);
Ad Tit. 3, 1, leçt. I (éd. Marietti, n° 77-79).
quia hoc ipsum, si patienter sustinent, in
eorum bonum cedit, secundum illud I Petr.
III, 14. — si quid patimini propter iustitiam,
beati : timorem autem eorum ne timueritis,
ut non conturbemini. Ex hoc autem quod hic
dicitur, assignari potest ratio quare qui
potestati resistunt, sibi damnationem
acquirant : sive intelligatur de damnatione
punitionis, qua principes rebelles puniunt,
sive de damnatione qua homines puniuntur
a Deo. Si enim principes sunt timori mali
operis, consequens est quod si aliquis
potestati resistat, male operetur; et ita ipse
homo, male agendo, est sibi causa
punitionis temporalis et aeternae. Deinde
cum dicit vis autem non timere, etc., ex eo
quod dixerat quoddam utile documentum
tradit, scilicet vitandi timorem principum. Et
primo insinuat sua interrogatione hoc esse
desiderabile, dicens vis non timere
potestatem ? Quasi dicat : hoc debet homini
esse placitum. Prov. XX, 2. — sicut rugitus
leonis, ita et terror regis. Secundo docet
medium ad hoc perveniendi, dicens bonum
fac; quia, ut dicitur Prov. XVI, 13. —
voluntas regum, labia iusta; et in Ps. c, 6. —
ambulans in via immaculata, hic mihi
ministrabat. Tertio ostendit huius effectum,
dicens : et si benefeceris, non solum
timorem vitabis, sed etiam habebis laudem
ex illa, scilicet potestate; quod planum est si
accipiatur secundum finem, ad quem
institutae sunt potestates. Ad hoc enim
institutae sunt ut non solum a malis timore
poenarum retrahant sed etiam ut ad bonum
per praemia alliciant, secundum illud I Petr.
II, 14. — sive ducibus tamquam ab eo
missis ad vindictam malorum, laudem vero
bonorum. Verificatur hoc etiam de malis
principibus, quorum iniustam
persecutionem, dum boni patienter
sustinent, laudantur. Iac. V, 11. — ecce
beatificamus eos qui sustinuerunt. Quarto
rationem assignat, dicens Dei enim minister
rapporte le livre des Nombres. Ou bien ces
paroles peuvent s’entendre de la
condamnation à la peine qui est infligée par
les princes eux-mêmes : "Comme le
rugissement du lion, ainsi est la terreur du roi;
ceux qui le provoquent pèchent contre leur
âme940
."
1028. — Mais en sens contraire941
, il semble
que la résistance que les apôtres et les martyrs
ont opposée aux princes et aux pouvoirs n’a
pas attiré <sur eux> la condamnation divine
mais la récompense.
Il faut répondre que l’Apôtre parle ici de celui
qui résiste au pouvoir inférieur, en tant qu’il a
été établi par Dieu. Or l’ordre divin a ceci de
particulier qu’on n’obéit pas à un pouvoir
inférieur contre un pouvoir supérieur, comme,
dans les choses humaines, on n’obéit pas à un
proconsul contre l’empereur, ou bien au bailli
contre le roi. Tout pouvoir humain est
ordonné au pouvoir divin et l’on ne doit obéir
à aucun pouvoir humain contre Dieu, selon ce
passage des Actes : "Il faut plutôt obéir à
Dieu qu’aux hommes."
1029. — b. En disant : Car les princes, etc.,
<l’Apôtre> donne la raison de ce qu’il avait
dit. Et
— Il commence par énoncer cette raison.
— Puis, à partir de la raison alléguée, il en
tire un précepte utile [n° 1031] : Or veux-tu
ne pas craindre le pouvoir, etc.
— Enfin, il montre la nécessité de ce précepte
[n° 1035] : Que si tu fais le mal, etc.
1030. — Il dit942
donc d’abord : On a avancé
que ceux qui résistent au pouvoir attirent sur
eux-mêmes une condamnation, car les
princes, qu’on appelle ici pouvoirs, ne sont
pas un sujet de crainte, c’est-à-dire n’inspirent
pas la crainte, quant aux bonnes œuvres, à
savoir en raison des bonnes œuvres, mais
quant aux mauvaises, c’est-à-dire en raison du
mal. Il semble qu’il faille entendre ces paroles
selon le motif pour lequel les princes ont été
institués. Or ils ont été institués pour
940
Pr 20, 2 (citation non littérale pour la seconde partie du verset qui est mise au pluriel). 941
Lieux parallèles : Somme Théologique 2a-2ae, Q. 104, a. 5 et 6; 2 Sentences dist. 44, Q. 2, a. 2; De
quodlibet 12, Q. 17, a. 2. 942
Lieux parallèles Somme Théologique 1a Q. 95, a. 1, sol. I; a. 4; 3 Sentences dist. 40, Q. 1, a. 2;
Ethic., 5, lect. Il (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. II, p. 301, col. 2 [ a 35-1134 b 6]); De regno II, c.
4.
est tibi in bonum. Quod quidem manifeste
patet, quantum ad debitum ordinem
principum. Sunt enim sub regimine Dei,
quasi supremi principis, tamquam ministri
ordinati. Sap. VI, 3. — cum essetis ministri
regis illius, et cetera. Ad idem autem tendit
minister et dominus. Eccli. X, 2. —
secundum iudicem populi, sic et ministri
eius. Et ideo sicut Deus operatur in bonum
his qui bonum agunt, ita et principes si recte
ministerium suum impleant. Sed et mali
principes ministri Dei sunt, secundum
ordinationem Dei ad inferendas poenas,
licet hoc sit praeter intentum eorum;
secundum illud Is. X, 5. — Assur virga
furoris mei, et baculus ipse in manu mea
est. Ipse autem non sic arbitrabitur. Et Ier.
XXV, 9. — assumam universam
cognationem Aquilonis, et Nabuchodonosor
regem Babylonis servum meum, et adducam
eos super terram istam, et super habitatores
eius, et cetera. Et quia tales mali principes,
interdum, Deo permittente, bonos affligunt,
quod in bonum eorum cedit, secundum illud
supra VIII, 28. — diligentibus Deum, et
cetera. Deinde cum dicit si autem male, etc.,
ostendit necessitatem praemissi documenti.
Dictum est enim quod benefaciendo non
timebis potestatem, si autem malefeceris,
time : quia causam timoris habes. Prov. c.
X, 29. — pavor his qui operantur malum.
Sap. XVII, 10. — cum sit timida nequitia,
data est in omnium condemnationem.
Secundo assignat rationem dicens non enim
sine causa gladium portat. Loquitur autem
secundum consuetudinem principum, qui
quasi insignia suae potestatis deferebant
instrumenta puniendi, puta fasces virgarum
ad verberandum, et secures vel gladios ad
occidendum. Iob XIX, 29. — fugite a facie
gladii, quoniam ultor iniquitatum est
gladius. Tertio rationem exponit dicens
portat, inquam, gladium, quia est minister
Dei, vindex, id est vindictam exercens, in
iram, id est, ad exequendam iram Dei, id est
iustum iudicium eius, ei qui malum agit, id
est, contra malefactorem. Ez. XVII, 37 ss. :
ecce ego congregabo omnes amatores tuos,
et iudicabo te in iudiciis adulterorum, et
dabo te in manus eorum, et cetera. Prov.
contraindre par la crainte de la peine ceux que
l’amour de la vertu ne détermine pas à éviter
le mal et à faire le bien : "Le roi qui est assis
sur le trône de la justice dissipe tout le mal
par son regard." C’est dans ce sens que l’on
dit que les princes ne sont pas un sujet de
crainte quant aux bonnes œuvres, mais quant
aux mauvaises, en raison de la fonction qui
échoit au prince, comme on le dit aussi dans
<le livre d’> Isaïe : "Un prince pensera des
choses qui sont dignes d’un prince." D’autre
part, ces paroles peuvent aussi s’entendre des
mauvais princes, qui ne sont pas un sujet de
crainte quant aux bonnes œuvres, mais quant
aux mauvaises parce que, si parfois ils
persécutent injustement ceux qui font le bien,
ces derniers cependant n’ont aucun motif de
craindre, attendu que cette épreuve, s’ils la
supportent avec patience, tournera à leur bien,
selon ce verset de la première épître de Pierre
: "Si même vous souffrez pour la justice, bien
heureux serez-vous. N’ayez d’eux aucune
crainte et ne vous en troublez point." Par ce
qui précède on peut voir la raison pour
laquelle ceux qui résistent au pouvoir attirent
sur eux-mêmes une condamnation, soit qu’on
l’entende de la condamnation qui consiste en
la punition infligée contre les rebelles par les
princes, soit de la condamnation qui consiste
en la punition des hommes par Dieu. En effet,
si les princes sont un sujet de crainte quant
aux œuvres mauvaises, il s’ensuit que celui
qui résiste au pouvoir fait le mal, et qu’ainsi
l’homme lui-même, en agissant mal, devient
la propre cause de sa punition temporelle et
éternelle.
1031. — Lorsqu’il dit : Or veux-tu ne pas
craindre, etc., <l’Apôtre> tire de ce qu’il
avait dit un précepte utile, à savoir d’éviter la
crainte des princes.
Et premièrement, par son interrogation il
insinue que cela est désirable, en disant :
Veux-tu ne pas craindre le pouvoir ? Comme
s’il disait : Cela doit plaire à l’homme :
"Comme le rugissement du lion, ainsi est la
terreur du roi."
1032. — En deuxième lieu, il enseigne le
moyen d’y parvenir, en disant : Fais le bien,
parce que, comme il est dit : "Les rois veulent
des lèvres justes : celui qui parle avec droiture
XVI, 12. — abominabiles regi qui impie
agunt, quoniam iustitia firmatur solium. Ex
quo patet quod non solum est licitum sed
etiam meritorium principibus, qui zelo
iustitiae vindictam exercent in malos. Unde
dicitur Ez. XXIX, 19 s. : erit merces
exercitui illius, et operi quo servivit mihi
adversus eam. Deinde cum dicit ideoque
necessitate, etc., infert conclusionem
principaliter intentam, dicens : ideoque,
propter praedictas rationes, subditi estote
principibus ex necessitate, quia scilicet hoc
est ex necessitate salutis, vel subditi estote
voluntarie necessitati, quae vobis imminet
potentia principum, ut faciatis de necessitate
virtutem; non solum propter iram, id est
vindictam vitandam, quod pertinet ad
secundam rationem, sed etiam propter
conscientiam bonam conservandam, quod
pertinet ad primam rationem, quia qui
potestati resistit Dei ordinationi resistit. Tit.
III, 1. — admone illos principibus et
potestatibus subditos esse. Deinde cum dicit
ideo enim et tributa praestatis, etc. inducit
homines ad exhibendum suis superioribus
signum subiectionis. Et primo ponit signum
subiectionis; secundo inducit ad eius
exhibitionem, ibi reddite ergo, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo ponit
subiectionis signum, dicens ideo enim,
scilicet quia debetis esse subiecti, et tributa
praestatis, id est, praestare debetis, in
signum scilicet subiectionis. Et ideo
conquerendo dicitur Thren. I, 1. — princeps
provinciarum facta est sub tributo. Dicuntur
autem tributa, eo quod subditi dominis ea
tribuunt. Secundo assignat rationem, dicens
ministri enim Dei sunt, in hoc ipsum, id est,
pro ipso, scilicet tributa recipiendo,
servientes, scilicet Deo, et populo. Quasi
dicat : unusquisque de suo ministerio vivere
debet, secundum illud 1 Co IX, v. 7. —
quis, pascit gregem et de lacte eius non edit
? Et ideo cum principes nostri suo regimine
Deo ministrent, a populo debent tributa
suscipere, quasi stipendia sui ministerii, non
autem ita quod hoc debeant sibi computare
pro praemio. Proprium enim praemium
sera aimé <d’eux>." Et encore : "Celui qui
marchait dans une voie immaculée était celui
qui me servait."
1033. — Troisièmement, il en montre l’effet,
en disant : Et si tu fais le bien, non seulement
tu éviteras la crainte, mais il, c’est-à-dire le
pouvoir, te louera aussi. Ce passage est clair
si on l’entend de la fin pour laquelle les
pouvoirs ont été institués. Car ils l’ont été non
seulement pour détourner du mal par la
crainte des peines, mais aussi pour attirer au
bien par les récompenses, selon ce passage de
la première épître de Pierre : "Soyez soumis à
toute créature humaine à cause de Dieu; soit
au roi, comme étant au-dessus des autres, soit
aux gouverneurs, comme envoyés par lui pour
la punition de ceux qui font le mal, et la
louange des bons." Cela est aussi vrai à
l’égard des mauvais princes, dont la
persécution injuste, supportée avec patience
par les bons, est pour ces derniers un sujet de
louange : "Voyez, nous proclamons
bienheureux ceux qui ont souffert"
1034. — En quatrième lieu943
, l’Apôtre en
donne la raison, en disant : Car il est pour toi
le ministre de Dieu en vue du bien. Ce qui est
de toute évidence d’après l’ordre légitime des
princes. Car ils sont sous le gouvernement de
Dieu, comme sous celui du Prince suprême,
en tant que ministres constitués : "Lorsque
vous étiez les ministres de son royaume, vous
n’avez pas jugé équitablement." Or le
ministre et le maître tendent au même but :
"Tel le juge du peuple, tels ses ministres." Et
c’est pourquoi, de même que Dieu opère le
bien dans ceux qui le font, ainsi en est-il aussi
des princes s’ils remplissent avec rectitude
leur ministère. Quant aux mauvais princes, ils
sont ministres de Dieu, pour infliger selon
l’ordre divin des peines, bien que ce soit sans
intention de leur part, selon ce passage d’Isaïe
: "Malheur à Assur ! la verge et le bâton de
ma fureur, c’est lui; dans sa main est mon
indignation. […] Mais lui-même ne pensera
pas ainsi, et son cœur n’aura pas un pareil
sentiment; mais son cœur sera porté à la
destruction et à la ruine totale d’un grand
nombre de nations. Car il dira : Est-ce que
943
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 19, a. 3, sol. 2.
principis est laus et honor, ut philosophus
dicit in V Ethic. Et cum hoc non sufficit,
tyrannus fit. Sed hoc non est intelligendum
de laude humana solum vel honore, quia
tale praemium esset vanum, sed de laude et
honore divino, qui principibus bene
gubernantibus exhibetur. Sap. VI, 22. — o
reges populi, diligite sapientiam, ut in
perpetuum regnetis. Huiusmodi autem
tributa recipiunt ad sustentationem, laborant
autem principes ad omnium pacem. Unde
dicitur I Tim. II, 1 s. : obsecro primum
omnium fieri obsecrationes pro regibus, et
omnibus qui in sublimitate sunt constituti, ut
quietam ac tranquillam vitam agamus.
Baruch I, 11 s. : orate pro vita
Nabuchodonosor regis Babylonis, ut
vivamus sub umbra eius. Ab hoc tamen
debito liberi sunt clerici ex privilegio
principum, quod quidem aequitatem
naturalem habet. Unde etiam apud gentiles
liberi erant a tributis illi qui vacabant rebus
divinis. Legitur enim Gen. XLVII, v. 20-22,
quod Ioseph subiecit Pharaoni totam terram
Aegypti praeter terram sacerdotum, quae a
rege tradita fuerat eis, quibus et statuta
cibaria ex horreis publicis praebebantur. Et
infra dicitur quod in universa terra Aegypti,
quinta pars solvitur absque terra sacerdotali,
quae libera erat ab hac conditione. Hoc
autem ideo aequum est, quia sicut reges
sollicitudinem habent de bono publico in
bonis temporalibus, ita ministri Dei in
spiritualibus, et sic per hoc quod Deo in
spiritualibus ministrant, recompensant regi
quod pro eorum pace laborat. Sed
attendendum est : cum tributa dicat regibus
esse debita quasi laboris stipendium,
dupliciter peccare possunt principes
accipiendo tributa. Primo quidem si
utilitatem populi non procurent sed solum
ad diripiendum eorum bona intendant. Unde
dicitur Ez. XXXIV, 3. — lac comedebatis et
lanis operiebamini, et quod crassum erat,
occidebatis, gregem autem meum non
pascebatis. Alio modo ex eo quod violenter
diripiunt supra statutam legem, quae est
quasi quoddam pactum inter regem et
populum, et supra populi facultatem. Unde
dicitur Mich. III, 1. — audite principes
mes princes ne sont pas autant de rois ?" Et
selon un verset de Jérémie : "Je prendrai
toutes les familles de l’aquilon, dit le
Seigneur, et Nabuchodonosor, roi de
Babylone, mon serviteur; et je les amènerai
sur cette terre et sur ses habitants, et sur toutes
les nations qui sont autour d’elle; et je les
perdrai, et j’en ferai un objet de stupeur et de
sifflement, et <je les réduirai> à des solitudes
éternelles." Et bien que ces mauvais princes
affligent parfois les bons avec la permission
de Dieu, <leurs persécutions> tournent au
bien <des bons>, comme on l’a dit plus haut
"Or nous savons que tout coopère au bien
pour ceux qui aiment Dieu "
1035. — En ajoutant : Que si tu fais le mal,
etc., <l’Apôtre> montre la nécessité de ce
précepte. En effet, on a dit qu’en faisant le
bien tu ne craindras point les pouvoirs; au
contraire si tu fais le mal, tu as un motif de
craindre : "<Le Seigneur> est un effroi pour
ceux qui opèrent le mal" Et : "Comme la
méchanceté est timide, elle est livrée à la
condamnation de tous."
Puis, il en assigne la raison, en disant : car ce
n’est pas en vain qu’il porte le glaive.
Il parle ici suivant l’usage qu’avaient les
princes de porter, comme insignes de leur
pouvoir, des instruments de punition, par
exemple les faisceaux pour frapper, et les
haches ou les glaives pour tuer : "Fuyez la
face du glaive, parce qu’il y a un glaive
vengeur des iniquités."
Enfin, il explique cette raison, en disant : il
porte, dis-le, le glaive, puisqu’il est le
ministre de Dieu, vengeur, à savoir
l’exécuteur de sa vengeance, pour la colère,
c’est-à-dire pour exécuter <l’ordre de> la
colère de Dieu, en d’autres termes son juste
jugement, envers celui qui fait le mal, c’est-à-
dire à l’égard du malfaiteur : "Voilà que moi
j’assemblerai tous tes amants, auxquels tu t’es
prostituée, et tous ceux que tu as aimés avec
tous ceux que tu haïssais; et je les assemblerai
contre toi de toutes parts, et je mettrai à nu ton
ignominie devant eux, et ils verront toute ta
turpitude. Et je te jugerai comme on juge les
femmes adultères et qui ont répandu le sang;
et je livrerai ton sang à la fureur et à la
jalousie. > Et encore : "Abominables au roi
Iacob, et duces domus Israel. Et postea
subdit : qui violenter tollitis pelles eorum
desuper eis, et carnes eorum desuper
ossibus eorum. Deinde cum dicit reddite
ergo, etc., monet ad reddendum praedictum
subiectionis signum. Et primo quidem in
generali, dicens : ex quo tributum debetur
principibus, tamquam Dei ministris, reddite
ergo omnibus debita. Ex quo patet quod ex
necessitate iustitiae tenentur subditi sua iura
principibus exhibere. Matth. XVIII, 24. —
oblatus est regi unus qui debebat decem
millia talenta. Et Matth. XXII, v. 21. —
reddite quae sunt Caesaris, Caesari, et
cetera. Secundo specificat, et, primo, ea
quae sunt exteriora, dicens cui tributum,
scilicet debetis, reddite tributum, quia
scilicet principi tribuitur pro generali
regimine, quo patriam in pace et quiete
gubernat. Gen. c. XLIX, 15. — vidit
requiem quod esset bona, factusque est
tributis serviens. Cui vectigal, scilicet
debetis, reddite vectigal, quod scilicet
redditur principi in aliquibus certis locis de
mercimoniis, quae deferuntur pro
reparatione viarum et custodia. Vel vectigal
dicitur, quod datur principi, quando per
patriam devehitur, sicut sunt procurationes
et alia huiusmodi. Secundo ponit ea quae
sunt interius exhibenda. Est autem
considerandum quod principi debetur et
timor et honor : timor quidem, inquantum
est dominus, sua potestate malos coercens a
malis. Mal. I, 6. — si ego dominus, ubi est
timor meus ? Et ideo dicit cui timorem,
scilicet debetis, reddite timorem. Prov.
XXIV, 21. — Deum time, fili mi. Inquantum
autem quasi pater providet bonis quae sunt
in laudem eorum, debetur illi honor. Mal. I,
6. — si ego pater, ubi honor meus ? Et ideo
subdit, cui honorem, scilicet debetis, reddite
honorem. I Petr. II, 17. — regem
honorificate. Sed contra est quod dicitur
Lev. XIX, 15. — non honores vultum
potentis. Sed hoc est intelligendum quantum
ad hoc ut pro eo a iustitia non declines.
Unde subditur : iuste iudica proximo tuo.
sont ceux qui agissent en impies, parce que
c’est par la justice que s’affermit un trône "
Par conséquent et de toute évidence il est non
seulement licite mais aussi méritoire pour des
princes d’exécuter, par zèle de la justice, la
vengeance contre les méchants. D’où ces
paroles d’Ezéchiel "Ce sera une récompense
pour son armée et pour le service qu’il m’a
rendu contre Tyr."
1036. — C. En ajoutant : 5 C’est pourquoi
soyez soumis par nécessité, etc., <l’Apôtre>
déduit la conclusion qu’il avait
principalement en vue, en disant : C’est
pourquoi, pour les raisons alléguées, soyez
soumis aux princes par nécessité, c’est-à-dire
parce que cette soumission est de nécessité de
salut; ou bien, soyez soumis volontairement à
la nécessité que le pouvoir des princes fait
peser sur vous, afin que vous fassiez de la
nécessité une vertu, non seulement à cause de
la colère, c’est-à-dire de la vengeance à éviter,
ce qui se rapporte à la seconde raison, mais
encore à cause de la conscience, c’est-à-dire
en vertu d’une bonne conscience, ce qui
regarde la première raison, puisque celui qui
résiste au pouvoir de Dieu résiste à son ordre :
"Avertis-les d’être soumis aux princes et aux
pouvoirs, d’obéir au commandement, d’être
prêts à toute bonne œuvre."
1037. — II. En ajoutant : 6 C’est aussi
pourquoi vous payez des tributs, etc.,
<l’Apôtre> exhorte les hommes à donner un
signe de soumission à leurs supérieurs.
Et :
A) Il commence par indiquer le signe de cette
soumission.
B) Puis, il exhorte <les hommes> à le donner
[n° 1042] : Rendez donc à tous, etc.
1038. — A. Sur le premier point :
1. Il commence par indiquer le signe de cette
soumission, en disant : C’est aussi pourquoi,
c’est-à-dire parce que vous devez être soumis,
vous payez des tributs, en d’autres termes
vous devez les payer, à savoir comme signe
de votre soumission. Voilà pourquoi <le
prophète Jérémie> dit sous forme de plainte :
"La reine des provinces a été assujettie au
tribut." Or les tributs sont ainsi appelés parce
qu’ils sont la rétribution des sujets à l’égard
de leurs maîtres.
1039. — 2. Ensuite il en donne la raison, en
disant : car il s’agit de ministres de Dieu pour
cela même qu’ils le servent, c’est-à-dire par le
fait même qu’ils perçoivent des tributs ils sont
au service de Dieu et du peuple. Comme s’il
disait : Chacun doit vivre de son ministère,
selon cette parole de la première épître aux
Corinthiens : "Qui paît un troupeau et ne
mange point de son lait ?" Par conséquent,
puisque nos princes dans leur gouvernement
servent Dieu, ils doivent percevoir le tribut du
peuple, comme une sorte de salaire de leur
ministère. Ils ne doivent cependant pas le
regarder comme leur récompense, car leur
récompense consiste essentiellement en
louanges et en honneurs, comme le dit le
Philosophe dans l’Ethique à Nicomaque944
. Et
s’ils ne s’en contentent pas, ils deviennent des
tyrans. Mais cette interprétation ne doit pas
s’entendre uniquement de la louange et de
l’honneur selon le monde, parce qu’une telle
récompense serait vaine, mais de la louange et
de l’honneur selon Dieu que l’on témoigne
aux princes qui gouvernent bien : "O rois des
peuples, aimez la sagesse, afin de régner
éternellement." Or <les princes> reçoivent le
tribut pour leur entretien, mais ils travaillent
pour la paix de tous. D’où ces paroles de
l’Apôtre : "Je demande donc instamment
avant tout qu’on fasse des obsécrations, des
prières, des demandes, des actions de grâces
pour tous les hommes, pour les rois et pour
tous ceux qui sont élevés en dignité, afin que
nous menions une vie paisible et tranquille, en
toute piété et chasteté " Et de Baruch "Priez
pour la vie de Nabuchodonosor, roi de
Babylone, et pour la vie de Balthazar, son fils,
afin que leurs jours sur la terre soient comme
les jours du ciel; et afin que Dieu nous donne
la force, et qu’il éclaire nos yeux, pour que
nous vivions sous l’ombre de
Nabuchodonosor, roi de Babylone, et sous
l’ombre de Balthazar, son fils, et que nous les
servions durant de longs jours, et que nous
trouvions grâce en leur présence."
1040. — Cependant les clercs, par un
944
Voir ARISTOTE, Ethique à Nicoma que V, 6 [ bI; AL XXVI, fasc. 3, p. 241. Lieux parallèles :
Ethic., 5, lect. 11 (éd Léonine, 1969, t. XLVII, vol. II, p. 301, col. 2 [ b6J); De regno I, c. 7, 8, 9 et II,
C. 4.
privilège des princes, sont exemptés de cette
dette, ce qui relève de l’équité naturelle.
Aussi, chez les Gentils eux-mêmes, ceux qui
vaquaient aux choses divines étaient-ils
exempts des tributs. On lit en effet dans la
Genèse que Joseph soumit à Pharaon toute la
terre d’Egypte, â l’exception de la terre des
prêtres qui leur avait été donnée par le roi,
<prêtres> auxquels une quantité déterminée
de vivres des greniers publics était fournie. Et
plus loin, on lit que dans toute la terre
d’Égypte on devra payer le cinquième, â
l’exception de la terre des prêtres, qui était
exempte de cette sujétion. Or cette disposition
est équitable pour cette raison que, tout
comme les rois ont la sollicitude du bien
public dans les choses temporelles, ainsi les
ministres de Dieu, en servant Dieu dans les
choses spirituelles, donnent une compensation
au roi pour le soin qu’il met à leur <garantir>
la paix.
1041. — Toutefois, il faut remarquer que
lorsque <l’Apôtre> dit que les tributs sont dus
aux rois comme le salaire de leur travail, ces
derniers peuvent doublement pécher en
percevant ces tributs
a. Premièrement, s’ils ne procurent pas le bien
au peuple, mais n’ont que pour seule intention
de lui ravir ses biens. D’où ce qui est dit dans
Ezéchiel : "Vous mangiez le lait, et vous vous
couvriez des laines, et ce qui était gras, vous
l’égorgiez; mais mon troupeau, vous ne le
paissiez pas."
b. Deuxièmement, s’ils lui ravissent son bien
avec violence, en transgressant la Loi
instituée, qui est une sorte de pacte entre le roi
et le peuple, ou <en l’imposant> au-delà de
ses moyens945
. D’où ce qui est dit dans
945
Nous percevons mal, aujourd’hui, tout ce qu’impliquait, pour un homme de l’Antiquité ou du
Moyen Age, le paiement de l’impôt la charge symbolique de cet acte est trés forte et signifie une
soumission intime a l’autorité du prince et le consentement plénier â sa légitimité, puisqU’" il convient
à l’homme d’user de signes sensibles pour exprimer ses sentiments’, (Somme Théologique 2a-2 Q. 85,
a. 1). Cette valeur symbolique du tnbut comme signe de reconnaissance du pouvoir du prince exige
que, de son côté, le prince n’impose pas au-delà de ce que les sujets peuvent lui offrir. On voit ici
l’impor tance du consentement du peuple dans la conception thomasienne de l’Etat, ainsi que nous
l’avons signalé à la note il, p. 446. Assu rément, en tant qu’elle est naturelle, la loi s’impose à toute
raison humaine et dérive directement de la Loi étemelle dont elle est une participation. Mais le
gouvernement d’un Etat particulier requiert une pareiculansation de la loi naturelle en fonction des
temps et des lieux; d’où résulte une troisiéme Sorte de loi, la loi humaine (Somme Théologique Ia-2
Q. 91, a. 3), ou loi positive promulguée par le pouvoir légitime (de même qu’il existe une Loi divine
Michée : "Ecoutez, princes de Jacob et chefs
de la maison d’Israël." Et au verset suivant, il
ajoute "Vous qui enlevez violemment leur
peau de dessus eux, et leur chair de dessus
leurs os."
1042. B. Ensuite lorsqu’il dit : Rendez donc,
etc., <l’Apôtre> exhorte <les hommes> à
donner ce signe de soumission. Et
premièrement, en général, en disant : Du
moment que l’impôt est dû aux princes,
comme ministres de Dieu, rendez donc à tous
ce qui leur est dû. Ces paroles montrent qu’il
y a une nécessité de justice pour les sujets de
rendre aux princes ce qui leur est dû : "On
présenta <au roi> un <de ses serviteurs> qui
lui devait dix mille talents." Et encore :
"Rendez donc à César ce qui est à César, et à
Dieu ce qui est à Dieu."
1043. — Puis946
, <l’Apôtre exhorte les
hommes à donner ce signe de soumission> en
indiquant de manière précise, premièrement
les devoirs extérieurs, par ces mots à qui le
tribut, c’est-à-dire à qui vous devez, rendez le
tribut, à savoir parce qu’il est attribué au
prince pour son gouvernement général, par
lequel il gouverne la patrie dans la paix et la
tranquillité "<Issachar> a vu que le repos était
bon, il a soumis son épaule aux fardeaux et il
s’est assujetti aux tributs." — A qui la taxe, à
savoir à qui vous la devez, payez la taxe,
c’est-à-dire <les droits> que l’on paie au
prince en certains lieux sur les marchandises
qui sont transportées pour la réparation et
l’entretien des voies. Ou bien, on appelle taxe,
ce qu’on donne au prince pour le transport qui
s’effectue sur son territoire, tels les droits
positive promulguée pat Dieu dans sa Révélation). La loi positive humaine, c’est la loi politique au
sens propre du terme. Saint Thomas la nomme ici (ex statuta, c’est-à-dire " loi instituée." Dès lors
qu’elle est instituée, cette loi ne jouit plus de l’universalité et de la nécessité de la loi naturelle, elle ne
s’impose plus d’elle-même à la raison humaine. Promulguée par la volonté du prince, elle demande en
outre un accord de la volonté de ses sujets. Elle constitue donc un véritable pacte, pacte exprès (et non
seulement tacite) par la prestation du tribut. Il y a donc bien, chez saint Thomas, un contrat social, ou
plutôt sociopo litique. Ce contrat, toutefois, ne relève pas, comme chez Rousseau, d’une construction
rationaliste a priori de la Société politique, mais de la prise en compte de la situation politique concrète
des commu nautés historiquement constituées. Ces remarques permettront de saisir, sur un point
déterminé de philosophie politique, la puissante cohérence de la pensée thomasienne. Sur la " forme
thomiste du contrat social", voir Philippe VEYSSET, Situation de la politique dans la pensée de saint
Thomas d’Aquin, p. 83-84. 946
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 102, a. 2; Q. 103, a. 3; 3 Sentences dist. 9, Q. 2, a. 1;
Super Psalmos, in Pi. 40, t4; Coil. indecem praec., c. 4.
d’intendance et autres choses semblables. En
second lieu, <l’Apôtre> mentionne les devoirs
intérieurs. Il faut considérer que l’on doit au
prince et la crainte et l’honneur; la crainte, en
tant qu’il est maître, empêchant par son
pouvoir les méchants de commettre le mal "Si
moi je suis maître, où est ma crainte ?" Et
c’est pourquoi il dit à qui la crainte, c’est-à-
dire à qui vous la devez, rendez la crainte.
— "Mon fils, crains Dieu947
" Mais en tant que
semblable à un père il procure aux bons ce qui
sert à leur louange, l’honneur lui est dû "Si
donc moi je suis père, où est mon honneur ?"
Et c’est pourquoi <l’Apôtre> ajoute à qui
l’honneur, c’est-à-dire à qui vous le devez,
rendez l’honneur.
"Honorez le roi "
En sens contraire, il est dit au Lévitique :
"N’honore point le visage d’un puissant."
Mais il faut entendre ce passage dans ce sens
qu’on ne doit point, pour le puissant, s’écarter
de la justice. Aussi lit-on ce qui suit : "Juge
justement ton prochain."
Lectio 2 Leçon 2 [Versets 8 à 10]
[n° 1045] 8 Ne devez rien à personne, sinon
de vous aimer mutuellement; car qui aime le
prochain a accompli la Loi.
[n° 1050] 9 En effet : "Tu ne commettras pas
d’adultère, tu ne tueras pas, tu ne voleras pas,
tu ne porteras pas de faux témoignage, tu ne
convoiteras pas"; et s’il est quelque autre
commandement, il se résume dans cette
parole : "Tu aimeras ton prochain comme toi-
même." [n° 1058] 10 L’amour du prochain
n’opère pas le mal. L’amour est donc la
plénitude de la Loi.
[86223] Super Rom., cap. 13 l. 2 Supra
apostolus ostendit qualiter debeant fideles
ad superiores iustitiam observare, hic
ostendit quid debeant omnibus communiter
exhibere. Et circa hoc duo facit. Primo ponit
quod intendit; secundo reddit rationem, ibi
qui enim diligit, et cetera. Dicit ergo primo :
dictum est reddite omnibus debita, non
quidem particulariter, sed integraliter, et hoc
1044. Après avoir montré plus haut [n° 1016]
comment les fidèles doivent observer la
justice à l’égard des supérieurs, l’Apôtre
montre ici comment ils doivent la pratiquer en
général à l’égard de tous. A cet effet
I) Il commence par exposer son intention.
II) Puis, il en donne la raison [n° 1048] : car
qui aime, etc.
1045. — I. On a commencé par dire Rendez à
947
Pr 24, 21. Deum ne figure pas dans la Vulgate, mais dans la Septante. Voir éd. Alfred Rahifs, vol.
II, p. 224 ephoboi2 ton theon.
est quod subdit nemini quidquam debeatis.
Quasi dicat : ita plene omnibus omnia debita
persolvatis, ut nihil remaneat, quod solvere
debeatis. Et hoc quidem propter duo. Primo
quia in ipsa mora reddendi peccatum
committitur, dum homo iniuste detinet rem
alienam. Unde dicitur Lev. XIX, 13. — non
morabitur opus mercenarii tui apud te
usque mane. Et eadem est ratio de aliis
debitis. Secundo quia quamdiu aliquis
debet, est quodammodo servus et, cui debet,
obligatur. Prov. XXII, 7. — qui accipit
mutuum, servus est foenerantis. Sunt tamen
quaedam debita, a quibus homo numquam
potest se absolvere. Et hoc contingit
dupliciter. Uno quidem modo propter
excellentiam beneficii, cui aequivalens
recompensari non potest : sicut philosophus
dicit de honore qui exhibetur Deo vel
parentibus, secundum illud Ps. CXV, 12. —
quid retribuam domino pro omnibus quae
retribuit mihi ? Alio modo propter causam
debendi, quae semper manet; vel etiam
propter hoc quod illud quod redditur,
numquam exhauritur sed semper in
reddendo crescit. Et propter has causas
debitum dilectionis fraternae ita solvitur,
quod semper debetur. Primo quidem quia
dilectionem proximo debemus propter
Deum, cui sufficienter recompensare non
possumus. Dicitur enim I Io. IV, 21. — hoc
mandatum habemus a Deo, ut qui diligit
Deum, diligat et fratrem suum. Secundo
quia causa dilectionis semper manet, quae
est similitudo naturae et gratiae. Eccli. XIII,
19. — omne animal diligit sibi simile, sic et
omnis homo proximum sibi. Tertio quia
charitas in diligendo non deficit sed proficit.
Phil. I, 9. — hoc oro, ut charitas vestra
magis ac magis abundet. Ideo dicit nisi ut
invicem diligatis, quia scilicet dilectionis
debitum ita semel redditur, ut tamen semper
maneat sub debito praecepti. Io. XV, 12. —
hoc est praeceptum meum, ut diligatis
invicem. Deinde cum dicit qui enim diligit,
etc., assignat causam eius quod dixerat,
tous ce qui leur est dû, non en partie, mais
intégralement, et c’est pourquoi il ajoute : 8
Ne devez rien à personne. Comme s’il disait :
Rendez à tous tout ce que vous devez, avec
une telle plénitude qu’il ne vous reste rien à
devoir acquitter. Et cela pour deux raisons
A. Premièrement, parce que dans le retard
même de la restitution l’homme commet un
péché, puisqu’il retient injustement une chose
qui appartient à autrui. D’où ces paroles du
Lévitique : "Le travail de ton mercenaire ne
demeurera point chez toi jusqu’au matin" La
même raison vaut à l’égard des autres choses
que l’on doit.
B. Deuxièmement, parce que aussi longtemps
qu’on est débiteur on est en quelque sorte
esclave et lié à l’égard de celui à qui l’on doit
: "Celui qui emprunte est l’esclave de celui
qui prête."
1046. — Cependant948
il est certaines dettes
dont l’homme ne peut jamais s’acquitter, et
cela arrive de deux manières :
1. D’abord, en raison de l’excellence du
bienfait dont on ne peut rendre l’équivalent,
comme le remarque le Philosophe à propos de
l’honneur que l’on doit à Dieu ou aux
parents949
, selon ce passage du psaume 115 :
"Que rendrai-je au Seigneur pour tous les
biens qu’il m’a faits ?"
2. Puis, en raison de la cause de la dette, cause
qui demeure toujours; ou encore, parce que ce
qui est rendu reste inépuisable et croît
toujours à mesure qu’on le rend.
1047. — C’est950
pour ces raisons que la dette
de la charité fraternelle s’acquitte, tout en
restant toujours à acquitter.
a. En premier lieu, parce que nous devons au
prochain la charité à cause de Dieu, à l’égard
duquel nous ne pouvons user d’une
réciprocité suffisante; car il est dit : "Nous
avons ce commandement de Dieu : Que celui
qui aime Dieu aime aussi son frère."
b. Puis, parce que le motif de la charité
demeure toujours, motif qui est la similitude
de nature et de grâce : "Tout animal aime son
948
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 80, a. 1; Q. 101, a. 1. 949
Voir ARISTOTE, Ethique à Nicomaque VIII, 14 [ b) AL XXVI, fasc. 3, p. 321. Lieu parallèle :
Ethic. 8, Iect. 14 (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. II, p. 497, col. 1 [1163 b 15." 950
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 25, a. 11; De vu-tut., Q. 2, a. 8, sol. 9.
debito dilectionis nos numquam absolvi,
quia scilicet in dilectione tota legis impletio
consistit. Unde circa hoc tria facit. Primo
proponit quod intendit; secundo manifestat
propositum, ibi nam non adulterabis, etc.;
tertio infert conclusionem intentam, ibi
plenitudo ergo legis, et cetera. Dicit ergo
primo : ideo dictum est quod non
intendamus nos expedire a debito
dilectionis, sicut ab aliis debitis, qui enim
diligit proximum, legem implevit, id est tota
impletio legis ex proximi dilectione
dependet. Sed hoc non videtur verum.
Dicitur enim I Tim. I, 5. — quod finis
praecepti charitas est. Unumquodque enim
perficitur cum ad finem pervenit : et ideo
tota legis perfectio in charitate consistit. Sed
charitas duos habet actus, scilicet
dilectionem Dei et dilectionem proximi;
unde et dominus dixit Matth. XXII, v. 40
quod tota lex et prophetae pendet in duobus
mandatis charitatis : quorum unum est de
dilectione Dei, aliud de dilectione proximi.
Non ergo videtur quod qui proximum
diligit, impleat totam legem. Sed dicendum
est quod illa dilectio proximi ad charitatem
pertinet, et legem implet, qua proximus
diligitur propter Deum; et ita in dilectione
proximi includitur dilectio Dei, sicut causa
includitur in effectu. Dicitur enim I Io. IV,
21. — et hoc mandatum habemus a Deo, ut
qui diligit Deum, diligat et fratrem suum.
Et, e converso, dilectio proximi includitur in
dilectione Dei, sicut effectus in causa; unde
ibidem dicitur : si quis dixerit quoniam
diligo Deum, et fratrem suum odit, mendax
est. Et inde est quod in sacra Scriptura
quandoque fit mentio solum de dilectione
Dei, quasi sufficiat ad salutem, secundum
illud Deut. X, 12. — et nunc, Israel, audi,
quid dominus Deus tuus petit a te, nisi ut
timeas dominum Deum tuum, et ambules in
viis eius, et diligas eum. Quandoque autem
fit mentio solum de dilectione proximi. Io.
XV, v. 12. — haec vobis mando, ut diligatis
invicem. Deinde cum dicit nam non
semblable, de même aussi tout homme aime
ce qui lui est proche."
c. Enfin, parce que la charité ne s’épuise pas
en aimant, mais elle progresse "Et voici ma
prière : que votre charité abonde de plus en
plus en science et en toute intelligence." Voilà
pourquoi <l’Apôtre> dit : sinon de vous aimer
mutuellement, c’est-à-dire que la dette de la
charité, une fois payée, l’est de manière
qu’elle demeure toujours sous l’obligation du
commandement : "Voici mon commandement
: que vous vous aimiez les uns les autres
comme je vous ai aimés."
1048. — II. Lorsque <l’Apôtre> dit car qui
aime le prochain, etc., il donne la raison de ce
qu’il vient de dire, à savoir que jamais nous
ne serons acquittés de la dette de la charité,
puisque c’est dans la charité que consiste tout
l’accomplissement de la Loi. A cet effet
A) Il commence par exposer son intention.
B) Puis, il fait connaître sa proposition [n°
1050] : En effet : Tu ne commettras pas
d’adultère, etc.
C) Enfin, il déduit la conclusion qu’il avait en
vue [n° 1059] : L’amour est donc la plénitude
de la Loi.
1049. — A. Il dit donc d’abord951
— On a dit
que nous ne pouvions être dégagés de la dette
de la charité, comme il en est des autres
dettes, car qui aime le prochain a accompli la
Loi, c’est-à-dire que tout l’accomplissement
de la Loi dépend de l’amour du prochain.
On objecte que cela ne semble pas vrai,
puisqu’il est dit que "la fin du précepte est la
charité." En effet, chaque chose est parfaite
lorsqu’elle est parvenue à sa fin. Il s’ensuit
donc que toute la perfection de la Loi consiste
dans la charité. Mais la charité a deux actes :
l’amour de Dieu et l’amour du prochain952
; ce
qui a fait dire au Seigneur qu’"à ces deux
commandements se rattachent toute la Loi et
les Prophètes ", dont l’un porte sur l’amour de
Dieu, l’autre sur l’amour du prochain. Il ne
semble donc pas que celui qui aime le
prochain accomplisse toute la Loi.
Il faut répondre que cet amour du prochain
951
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 44, a. 7; De v, rtut., Q. 2, a. 7 et 8; De perf. spir. vit., c.
13; Ad Gal. 5, 14, lect. 3 (éd. Marietti, n 304 et 305). 952
Lieux parallèles : Somme Théologique 2a-2 Q. 25, a. 1; De t’irtut., Q. 2, a. 4 et 8.
adulterabis, etc., probat propositum. Primo
quidem per inductionem; secundo vero per
medium syllogismi, ibi dilectio proximi, et
cetera. Circa primum, more inducentium,
enumerat quaedam praecepta, quae
dilectionem proximi implent. Et quia
praecepta tria primae tabulae immediatius
ordinantur ad dilectionem Dei, non facit
mentionem hic de eis, quamvis et ipsa
impleantur in dilectione proximi, prout
dilectio Dei includitur in dilectione proximi.
Enumerat autem mandata secundae tabulae,
praetermittit tamen praeceptum
affirmativum tantum quod est de honore
parentum, in quo etiam intelligitur, ut
omnibus reddamus quae debemus.
Enumerat autem praecepta negativa, per
quae aliquis prohibetur malum proximis
inferre. Et hoc duplici ratione. Primo
quidem, quia praecepta negativa sunt magis
universalia, et quantum ad tempora et
quantum ad personas. Quantum ad tempora
quidem, quia praecepta negativa obligant
semper et ad semper. Nullo enim tempore
est furandum et adulterandum. Praecepta
autem affirmativa obligant quidem semper,
sed non ad semper, sed pro loco et tempore;
non enim tenetur homo, ut omni tempore
honoret parentes, sed pro loco et tempore.
Quantum ad personas autem, quia nulli
hominum est nocendum, non autem
sufficientes sumus, ut unus homo possit
omnibus hominibus servire. Secundo quia
appartient à la charité et accomplit la Loi, en
tant que le prochain est aimé pour Dieu, et
qu’ainsi dans l’amour du prochain est
renfermé l’amour de Dieu, comme la cause
est enfermée dans l’effet. Car il est dit : "De
plus, nous avons ce commandement de Dieu :
Que celui qui aime Dieu aime aussi son frère
" Et inversement, l’amour du prochain est
renfermé dans l’amour de Dieu, comme
l’effet dans la cause, aussi est-il dit au même
endroit : "Si quelqu’un dit : "J’aime Dieu" et
qu’il haïsse son frère, c’est un Menteur." Il en
résulte que dans la sainte Ecriture on fait
parfois mention seulement de l’amour de
Dieu, comme s’il suffisait au salut, selon ces
paroles du Deutéronome "Et maintenant,
Israël, <écoute>! Que te demande le Seigneur
ton Dieu, sinon de craindre le Seigneur ton
Dieu, et de marcher dans ses voies, et de
l’aimer, de servir le Seigneur ton Dieu de tout
ton cœur et de toute ton âme." D’autres fois
on ne fait mention que de l’amour du
prochain : "Ce que je vous commande, c’est
de vous aimer les uns les autres."
1050. — B. Lorsqu’il dit953
: En effet Tu ne
commettras pas d’adultère, etc., <l’Apôtre>
prouve son propos :
1) D’abord, par une induction.
2) Puis, au moyen d’un syllogisme [n° 10581.
— 10 L’amour du prochain n’opère pas le
mal.
1051. — 1. Sur le premier point, à la manière
de ceux qui raisonnent par induction954
,
953
Lieux parallèles : Somme Théologique 1 Q. 100, a. 5; 3 Sentences dist. 37, Q. 1, a. 2, Q. 2; 3
Contra Gentiles c. 120 et 128; De virtut., Q. 2, a. 7, sol. 10. 954
La déduction (du latin de-ducere, "tirer de") est l’opération de la raison par laquelle elle tire d’un
antécédent la conséquence qui y est contenue. C’est l’acte essentiel du raisonnement rigoureux, dont la
forme parfaite est le syllogisme : le syllogisme n’est rien d’autre que la mise en forme du
raisonnement déductif. La possibilité de mettre le raisonnement sous forme syllogistique assure la
raison qu’elle est parvenue â une certitude. Par sa formation étymologique, l’induction (du latin in
"conduire dans", ou "vers") semble l’opposé de la déduction. En tant que l’induction consiste, partant
de cas particuliers donnés, à s’élever vers le principe général, la loi, qui rend compte de l’existence de
ces cas donnés et constatés, il semble bien en effet qu’elle suive une voie parallèlement contraire à
celle de la déduction. Aristote l’admet, mais "d’une certaine manière’) seulement (Premiers
analytiques II, c. 23 [68 b 33]; trad. J. Tricot, p. 313; AL III, I-4, p. 134). Car l’induction, qui est une
démarche de la pensée humaine, plutôt qu’une forme de raison nement au sens strict, n’exclut pas la
déduction; au contraire elle consiste à supposer (par intuition, par imagination) le principe d’où il sera
possible de déduire les cas particuliers, ou encore elle consiste à voir (à deviner ?) dans les cas que
nous présente l’expénence le principe qui les régit et dont ils sont comme autant d’illustrations, mais
avec un risque d’erreur, car peut-être qu’un autre principe (supposé) permettrait de rendre compte des
faits observés (par exemple en astronomie : Somme Théologique Ia, Q. 32, a. 1, sol. 2). Saint Thomas
magis manifestum est quod per dilectionem
proximi implentur praecepta negativa quam
affirmativa. Qui enim diligit aliquem, magis
abstinet a nocumento illius, quam ei
beneficia impendat, a quo quandoque homo
impeditur per impotentiam. Tripliciter
autem aliquis nocumentum proximo inferre
potest. Uno modo, facto; alio modo, verbo;
tertio, desiderio. Facto quidem tripliciter.
Uno modo quantum ad personam ipsius
proximi, et hoc prohibetur cum dicitur non
occides. In quo etiam intelligitur prohiberi
omnis iniuria in personam proximi illata. I
Io. III, 15. — omnis homicida non habet
vitam aeternam in seipso. Secundo quantum
ad personam coniunctam, scilicet uxorem, et
hoc prohibetur cum dicitur non adulterabis.
In quo etiam intelligitur prohiberi fornicatio
et omnis illicitus usus genitalium
membrorum. Hebr. ult. : fornicatores et
adulteros iudicabit Deus. Tertio quantum ad
res exteriores, quod prohibetur, cum dicitur
non furaberis. In quo etiam prohibetur
omnis iniusta subtractio rei alienae, sive per
vim, sive per dolum. Zach. V, 3. — omnis
fur, sicut ibi scriptum est, iudicabitur.
Nocumentum autem, quod quis proximo
infert verbo, prohibetur, cum dicitur non
falsum testimonium dices. Quod non solum
prohibetur in iudicio sed etiam extra
<l’Apôtre> énumère certains préceptes par
lesquels on met en pratique l’amour du
prochain Et parce que les trois préceptes de la
première table955
sont plus immédiatement
ordonnés à l’amour de Dieu, <l’Apôtre> n’en
fait pas mention ici, bien qu’eux-mêmes
soient accomplis par l’amour du prochain, en
tant que l’amour de Dieu est renfermé dans
l’amour du prochain. Mais il énumère les
commandements de la seconde table,
omettant toutefois l’unique précepte affirmatif
: celui de l’honneur à rendre aux parents, dans
lequel on comprend aussi <celui> de rendre à
chacun ce que nous lui devons.
1052. — Il énumère956
les préceptes négatifs
qui défendent de faire du mal au prochain, et
cela pour une double raison :
a. La première, c’est que les préceptes
négatifs sont plus universels, et quant au
temps et quant aux personnes Quant au temps,
parce que les préceptes négatifs957
obligent
toujours, de manière ininterrompue. Car en
aucun temps il n’est permis de commettre le
vol ou l’adultère. Quant aux préceptes
affirmatifs, ils obligent toujours, mais non pas
de manière ininterrompue, mais selon le lieu
et le temps; ainsi l’homme n’est pas tenu
d’honorer ses parents en tout temps, mais
selon le lieu et le temps. Quant aux personnes,
parce qu’il ne faut nuire à personne; mais il
n’a d’ailleurs pas consacré à l’induction de grands développements (H. GAis. DEIL, Initiation à la
philosophie de saint Thomas, t. I, Intro duction-logique, p. 132). On voit pourquoi, cependant, il est
amené à parler d’induction à propos du verset de saint Paul. L’Apôtre, en effet, énumère un certain
nombre de commandements de Dieu, dont aucun ne parle directement de l’amour du prochain, mais
que tous présupposent comme leur principe et dont chacun est une application a un cas particulier; ce
qui est d’autant plus convenant qu’en effet l’énumération est une des méthodes de la démarche
inductive une induction parfaite est celle qui peut se fonder sur une énumération complète des cas
considérés. 955
Les tables de la Loi sont traditionnellement représentées sous la forme de deux rectangles de pierres
arrondis au sommet. Sur le premier (celui de droite par rapport â Moïse) sont inscrits les trois premiers
préceptes qui se rapportent à Dieu; sur le second (celui de gauche) sont inscrits les sept autres qui se
rapportent à l’amour du prochain par induction. 956
Lieux parallèles : Somme Théologique 1a-2ae, Q. 71, a. 5, sol. 3; Q. 88, a. 1, sol. 2; Q. 100, a. 10;
2a-2ae, Q. 3, a. 3; Q. 33, a. 2; Q. 79, a. 3, sol. 3; Q. 140, a. 2, sol. 2; 2 Sentences dist. 22, Q. 2, a. 1,
sol. 4; dist. 35, a. 3, sol. 3; dist. 41, Q. 1, a. 2, sol. 4; 3 Sentences dist. 36, Q. 1, a. 6; 4 Sentences dist.
15, Q. 2, a. 1, q De malo, Q. 2, a. 1, sol. Il; Q. 7, a. 1, sol. 8; a. 10, sol. 9; Q 16, a. 4, sol. 22;
Dequodlibet 1, Q. 6, a. 2; 3, Q. 5, a. 4; Ad Rom. 10, 10, lect. 2 (éd. Marietti, n° 832); Ad Gal. 6, 1,
lect. 1 (éd. Marietti, n° 343); II Ad Tim. 2, 21, lect. 4 (éd. Marietti, n° 77). 957
La négation a, en effet, une portée plus universelle que l’affir mation elle ne fait qu’écarter quelque
chose et laisse donc subsister l’universalité de tout ce qu’elle n’exclut pas, tandis que l’affirmation ne
porte que sur ce qu’elle affirme.
iudicium, sive per modum detractionis, sive
per modum contumeliae. Prov. XIX, 5. —
testis falsus non erit impunitus, et qui
mendacia loquitur, non effugiet.
Nocumentum autem quod quis infert
proximo, solo desiderio, prohibetur cum
dicitur non concupisces rem proximi tui.
Ubi etiam intelligitur prohiberi
concupiscentia uxoris; supra VII, 7. — nam
concupiscentiam nesciebam, scilicet esse
peccatum, nisi lex diceret : non
concupisces. Ponuntur autem haec mandata
Ex. XX, 17 ss. Enumeratis autem pluribus
praeceptis, colligit omnia alia in communi
dicens et si quod est aliud mandatum,
affirmativum vel negativum, vel ad Deum,
vel ad proximum pertinens, per modum
supra dictum, instauratur, id est perficitur et
impletur, in hoc verbo : diliges proximum
tuum sicut teipsum. Quod quidem ponitur
Lev. c. XIX, 18; ubi nos habemus : diliges
amicum tuum sicut teipsum. Quod autem
dicit proximum tuum, referendum est ad
omnem hominem et etiam ad sanctos
Angelos, ut Augustinus probat in I de
doctrina Christiana. Nomine enim proximi
intelligitur quicumque facit alicui
misericordiam, secundum illud Lc. X, 36.
— quis tibi videtur illi proximus fuisse, qui
incidit in latrones ? Et ille dixit : qui fecit
misericordiam, et cetera. Et quia proximus
est proximo proximus, consequens est quod
etiam ille, qui ab aliquo misericordiam
recipit, proximus ei dicatur. Sancti autem
Angeli nobis misericordiam impendunt, et
nos omnibus hominibus misericordiam
debemus impendere et ab eis, cum necesse
fuerit, recipere. Unde patet quod et sancti
Angeli et omnes homines proximi nobis
dicuntur, quia beatitudinem, ad quam nos
tendimus, vel iam habent, vel ad eam
nobiscum tendunt. Ex quo patet quod
Daemones non sunt secundum hanc
rationem proximi nobis, nec sub hoc
praecepto eorum dilectio nobis iniungitur,
quia sunt totaliter a dilectione Dei exclusi et
non sunt computandi in numero
serait impossible qu’un seul homme puisse
servir tous les hommes.
b. La seconde raison, c’est qu’on voit mieux
qu’on accomplit par l’amour du prochain les
préceptes négatifs que les préceptes
affirmatifs; car celui qui aime le prochain
s’abstient plutôt de lui nuire que de lui
accorder des bienfaits, ce qu’il ne peut faire
quelquefois par impuissance.
1053. Or on peut nuire au prochain de trois
manières : soit en action, soit en parole, soit
par désir.
En action, triplement :
D’abord quant à sa personne; ce qui est
défendu par ce précepte : tu ne tueras pas.
Précepte qui comprend aussi l’inter diction de
toute injure faite à la personne du prochain :
"Aucun homicide n’a la vie éternelle en lui."
Puis, quant à la personne à laquelle on est uni,
à savoir l’épouse; et cela est défendu par ce
<précepte> qu’il cite : tu ne commettras pas
d’adultère. Précepte qui comprend aussi
l’interdiction de la fornication et de tout usage
illicite des organes de la génération : "Dieu
jugera les fornicateurs et les adultères."
Enfin, quant aux choses extérieures; ce qui est
défendu <par ce précepte> qu’il cite : tu ne
voleras pas. Précepte qui interdit aussi toute
soustraction injuste du bien d’autrui, soit par
violence, soit par ruse : "Tout voleur, selon
qu’il est écrit dans ce volume, sera jugé."
1054. — Le dommage que l’on cause au
prochain en parole est défendu <par ce
précepte> qu’il cite : tu ne porteras pas de
faux témoignage. Ce qui est défendu non
seulement au tribunal, mais aussi en dehors
du tribunal, soit sous forme de diffamation
(detractio)958
, soit sous forme d’outrage
(contumelia)959
— "Un témoin faux ne sera
pas impuni, et celui qui dit des mensonges
n’échappera pas."
— Le dommage que l’on cause au prochain
par le désir seul est défendu <par ce précepte>
qu’il cite : tu ne convoiteras pas le bien de ton
prochain. On comprend aussi sous cette
interdiction la convoitise de l’épouse : "car je
ne connaîtrais pas la concupiscence", c’est-à-
958
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 73; Ad Rom. 1, 30, lect. 8 (éd. Marietti, n° 162). 959
Lieu parallèle : Somme Théologique 2a-2 Q. 72.
proximorum, sed in numero hostium. Quod
autem dicit sicut teipsum, non est
referendum ad aequalitatem dilectionis, ut
scilicet aliquis teneatur diligere proximum
aequaliter sibi : hoc enim esset contra
ordinem charitatis, quo quilibet plus tenetur
suam, quam aliorum salutem curare. Cant.
II, 4. — ordinavit in me charitatem. Sed est
referendum ad similitudinem dilectionis, ut
scilicet similiter diligamus proximum sicut
nosipsos. Et hoc tripliciter. Primo quidem
quantum ad finem dilectionis, ut scilicet nos
et proximum diligamus propter Deum.
Secundo quantum ad formam dilectionis, ut
scilicet sicut aliquis seipsum diligit, quasi
sibi volens bonum, ita aliquis proximum
diligat, quasi ei bona volens. Qui autem
diligit proximum ad hoc solum ut eius
utilitate vel dilectione potiatur, non vult
bonum proximo, sed ex proximo vult sibi
bonum. Quo quidem modo homo amare
dicitur res irrationales, puta vinum vel
aquam, ut scilicet eis utatur. Tertio quantum
ad effectum dilectionis, ut scilicet aliquis
necessitati proximi subveniat, sicut sibi, et
quod nihil illicitum, propter amorem
proximi, committat sicut nec propter suum
amorem. Deinde, cum dicit dilectio proximi,
etc., manifestat propositum medio
syllogismi per hunc modum : qui diligit
proximum, nullum malum operatur ad
ipsum. Sed ad hoc tendit omne legis
praeceptum, ut abstineatur a malo. Qui ergo
diligit proximum, legem implevit. Quod
autem dilectio proximi malum non operetur,
habetur 1 Co XIII, 4. — charitas non agit
perperam, et cetera. Quocumque autem
dire qu’elle est un péché, "si la Loi n’eût dit :
"Tu ne convoiteras pas." Ces
commandements sont cités dans l’Exode.
1055. — Après avoir960
énuméré de
nombreux préceptes, <l’Apôtre> résume tous
les autres sous une formule générale, en
disant : et s’il est quelque autre
commandement, affirmatif ou négatif, se
rapportant ou à Dieu ou au prochain, selon la
manière mentionnée plus haut, il se résume,
c’est-à-dire atteint sa perfection et s’accomplit
dans cette parole : "Tu aimeras ton prochain
comme toi-même"; précepte qui figure dans le
Lévitique961
, là où <notre Vulgate962
> porte :
"Tu aimeras ton ami comme toi-même"
1056. — Ces mots963
. — "ton prochain"
doivent être étendu à tout homme et même
aux saints anges, comme le prouve Augustin
dans son traité De la doctrine chrétienne964
.
Car sous le nom du prochain on entend
quiconque fait à autrui miséricorde, selon ce
passage de Luc : "Lequel de ces trois te
semble avoir été le prochain de celui qui
tomba entre les mains des voleurs ? <Le
docteur de la Loi> répondit : Celui qui a
pratiqué la miséricorde à son égard Et parce
que le prochain est celui qui est proche d’un
autre, il s’ensuit que celui-là même qui a reçu
la miséricorde d’un autre est appelé son
prochain. Or les saints anges exercent à notre
égard la miséricorde, et nous aussi, nous
sommes nous-mêmes tenus de l’exercer à
l’égard de tous les hommes, et <nous sommes
en droit> de la recevoir d’eux dans un cas de
nécessité. Il est donc évident que les saints
anges et tous les hommes sont notre prochain,
soit parce qu’ils possèdent déjà la béatitude
960
Lieux parallèles Somme Théologique 1a-2ae, Q. 99, a. 1, sol. 2; 2 Q. 25, a. l; Q. 44, a. 1, a. 2, a. 7;
De virtut., Q. 2, a. 4, a. 7et8; 3Contra Gentiles c. 116, 117; 1 Ad Tim. 1, 11, lect. 2 (éd. Marietti, n°
11.") Ad Gai. 5, 14, lect. 3 (éd. Marietti, n; De perfect. spir. vit., c. 13; Sup. Matth. 22, 37-38 (éd.
Marietti, n° 1815-1820). 961
Lv 19, 18 selon la Vetus latina, voir DOM SABATIER, Bibi. sacr., t. I, p. 250. 962
Voir Biblia sacra iuxta vulgatam versionem, éd. Robert Weber et Roger Gryson, p. 161. 963
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2 Q. 25, a. 10 et 11; 3 Sentences dist. 28, Q. I, a. 3; De
virtut., Q. 2, a. 7, sol. 9; a. 8, sol. 9. 964
Voir SAINT AUGUSTIN, De doctrina christiana I, XXX, 33 (PL 34, 30-31; CCL 32, 25; BA 11,
220-223; BA 11/2, 118-119).
modo accipiatur hic malum, vel pro malo
transgressionis, vel etiam omissionis, poterit
hoc referri non solum ad praecepta negativa
sed etiam ad affirmativa. Inquantum vero
dilectio proximi includit dilectionem Dei,
intelligitur quod dilectio proximi excludit
malum, non solum quod est contra
proximum, sed etiam quod est contra Deum.
Et sic includuntur etiam praecepta tabulae
primae. Ultimo autem infert conclusionem
principaliter intentam, dicens plenitudo ergo
legis est dilectio, id est, per dilectionem lex
impletur et perficitur. Eccli. XXIV, 16. —
in plenitudine sanctorum detentio mea. Col.
c. III, 14. — charitatem habete, quod est
vinculum perfectionis.
vers laquelle nous tendons, soit parce qu’ils y
tendent avec nous965
. Il est aussi manifeste
que les démons ne sont pas notre prochain, et
que ce précepte ne nous ordonne pas de les
aimer, pour cette raison qu’ils sont totalement
exclus de l’amour de Dieu et qu’on ne doit
pas les compter au nombre de ceux qui sont
notre prochain, mais au nombre de nos
ennemis.
1057. — Quant à ces mots : "comme toi-
même", on ne doit pas les rapporter à l’égalité
de l’amour, c’est-à-dire de telle sorte que l’on
soit tenu d’aimer le prochain d’un amour égal
à celui qu’on a pour soi-même, car ce serait
contre l’ordre de la charité966
, qui oblige
chacun à prendre de son propre salut un soin
plus grand que de celui des autres : "Il a
ordonné en moi la charité." En revanche, il
faut rapporter ces mots à la similitude de
l’amour, c’est-à-dire de telle sorte que nous
aimions le prochain tout comme nous nous
aimons nous-mêmes; et cela de trois manières
:
D’abord, quant à la fin de l’amour, c’est-à-
dire que nous nous aimions nous-mêmes et le
prochain pour Dieu.
Puis, quant à la forme de l’amour, c’est-à-dire
que comme chacun s’aime soi-même en se
voulant du bien, ainsi doit-on aimer le
prochain en lui voulant du bien. Car celui qui
aime le prochain seulement pour l’utilité ou
965
À la question du pharisien : qui est mon prochain ?", le Christ répond par la parabole du bon
Samaritain et renverse l’interrogation initiale qui s’est montré le prochain de l’homme blessé ? Le
prochain, c’est donc aussi bien celui qui s’est approché de nous que celui dont nous approchons : au
premier chef le Christ venu dans notre chair pour nous sauver, ensuite les anges qui nous protègent et
nous aident, enfin tous ceux qui exercent à notre égard la misé ricorde ou à l’égard de qui nous
l’exerçons. Ce n’est donc pas une catégorie déterminée d’êtres, mais tout homme dans la mesure où
l’amour qu’il me porte et celui que je lui porte font de nous des prochains (voir Jean BORELLA, La
Chanté profanée, p. 205-225). 966
Il y a en effet, pour saint Thomas, un ordre dans la charité (Somme Théologique 2a-2ae, Q. 26). La
charité est une vertu théologale, c’est-à-dire qui " Dieu pour objet; même lorsqu’il s’agit de l’amour de
soi-même ou de l’amour du prochain, l’amour de charité est toujours en vue de Dieu et s’inscrit dans
l’œuvre du salut, comme le montre la parabole du bon Samaritain. Selon cet ordre nous devons aimer
Dieu plus que nous-mêmes (a. 3), nous-mêmes plus que le prochain en tant que l’amour est un acte de
la personne s’unissant peronnellement à Dieu (a. 4), notre prochain plus que notre propre corps en tant
que nous devons désirer le salut de sa personne plus fortement que celui de notre corps, puisque la
première participera directement à la béatitude, alors que le second n’y participera qu’indirectement (a.
5), et ainsi de suite pour les diverses sortes de prochains. On voit et la rigueur de la conception
thomasienne et l’exigence de sa visée spirituelle nous sommes assez loin, ici, de l’acception purement
humanitaire selon laquelle est pris aujourd’hui le terme (." Mais, évidemment, comme le souligne la
fin de ce paragraphe 1057, l’entraide fratemelle est partie intégrante de l’amour du prochain.
l’amour qu’il en retire ne veut pas le bien du
prochain, mais veut tirer du prochain un bien
pour lui-même. C’est de cette manière qu’on
dit de l’homme qu’il aime les créatures sans
raison, par exemple le vin ou l’eau, pour s’en
servir.
Enfin, quant à l’effet de l’amour, c’est-à-dire
qu’on doit subvenir aux nécessités du
prochain comme aux siennes propres, et ne
rien commettre d’illicite pour l’amour qu’on
lui porte, pas plus que pour l’amour de soi-
même.
1058. — 2. Lorsque <l’Apôtre> dit ensuite :
10 L’amour du prochain, etc., il prouve son
propos en recourant au syllogisme suivant :
Celui qui aime son prochain n’accomplit
aucun mal à son égard; or tout précepte de la
Loi tend à empêcher le mal; donc celui qui
aime le prochain a accompli la Loi. Que
l’amour du prochain n’opère pas le mal, nous
le lisons dans la première épître <de
l’Apôtre> aux Corinthiens : "La charité n’agit
pas insolemment; elle ne s’enfle pas; elle
n’est pas ambitieuse, elle ne cherche pas son
propre intérêt; elle ne s’irrite pas; elle ne
pense pas le mal; elle ne se réjouit pas de
l’iniquité, mais elle met sa joie dans la vérité;
elle souffre tout, elle croit tout, elle espère
tout, elle endure tout967
." De quelque manière
qu’on entende ici le mal, que ce soit le mal de
la transgression ou même le mal d’omission,
on pourra le rapporter non seulement aux
préceptes négatifs, mais aussi aux préceptes
affirmatifs. Car, en tant que l’amour du
prochain renferme l’amour de Dieu, on
comprend que l’amour du prochain exclue le
mal, et non seulement le mal contre le
prochain mais aussi contre Dieu. Et c’est ainsi
que <dans l’amour du prochain> sont
renfermés les préceptes de la première table.
1059. — C. Enfin, <l’Apôtre> déduit la
conclusion qu’il avait principalement en vue,
en disant : L’amour est donc la plénitude de
la Loi, c’est-à-dire par l’amour la Loi
s’accomplit et se parfait : "Dans la plénitude
des saints est ma demeure." Et encore : "Ayez
la charité qui est le lien de la perfection."
967
1 Corinthiens 13, 4-7. Lieu parallèle I Ad Cor. 13, 4-7, lect. 2 (éd. Marietti, n 774 et s.).
Lectio 3 Leçon 3 [Versets 11 à 14]
[n° 1061] 11 D’autant plus que nous savons
en quel temps nous sommes : c’est désormais
l’heure de nous lever du sommeil; car notre
salut est maintenant plus près qu’au temps où
nous avons cru.
[n° 1066] 12 La nuit est avancée, le jour est
proche. [n° 10701 Rejetons donc les œuvres
des ténèbres et revêtons les armes de la
lumière.
[n° 1073] 13 Comme durant le jour, marchons
honnêtement, [n° 1074] non dans les excès de
table et dans les ébriétés, non dans les
coucheries et les impudicités, non dans la
dispute et la jalousie;
[n° 1079] 14 mais revêtez-vous du Seigneur
Jésus-Christ et n’ayez pas soin de la chair
pour <en satisfaire> les désirs.
[86224] Super Rom., cap. 13 l. 3 Postquam
apostolus ostendit quomodo homo debet se
Deo exhibere pium, convenienter eius donis
utendo, et proximo iuste ei debita reddendo,
hic ostendit quomodo in seipso debeat
honestatem conservare. Et circa hoc duo
facit. Primo proponit temporis
congruitatem; secundo exhortatur ad
honestatem operum, ibi abiiciamus ergo, et
cetera. Circa primum tria facit. Primo ponit
temporis congruitatem; secundo assignat
rationem, ibi nunc enim propior est, etc.;
tertio adhibet similitudinem, ibi nox
praecessit, et cetera. Dicit ergo primo :
dictum est quae debetis observare et hoc,
non solum propter ea quae dicta sunt, sed
etiam scientes hoc tempus, id est per hoc
quod debetis considerare huius temporis
conditionem, quia ut dicitur Eccle. VIII, 6.
— omni negotio tempus est et opportunitas.
Ier. VIII, 7. — milvus in caelo cognovit
tempus suum, turtur, et hirundo, et ciconia
custodierunt tempus adventus sui, populus
autem meus, et cetera. Ad quid autem
congruum sit hoc tempus ostendit, subdens
quia hora est iam nos de somno surgere.
Quod quidem intelligendum est non de
somno naturae, qui quandoque dicitur mors,
1060. — Après avoir montré comment
l’homme doit pratiquer sa piété à l’égard de
Dieu en usant convenablement de ses dons et
en rendant équitablement au prochain ce qui
lui est dû [n° 953], <l’Apôtre> montre ici
comment il doit garder en lui-même
l’honnêteté968
. A cet effet :
I) Il commence par indiquer l’opportunité du
temps.
II) Puis, il exhorte à mettre en pratique
l’honnêteté [n° 1070] : Rejetons donc, etc.
I. Sur le premier de ces points
A) <L’Apôtre> mentionne d’abord
l’opportunité du temps.
B) Puis il en donne la raison [n° 1063] car
notre salut est maintenant plus près, etc.
C) Enfin, il emploie une similitude [n° 1066]
: 12 La nuit est avancée, etc.
1061. — A. <L’Apôtre> commence donc par
dire : On vous a rappelé ce que vous devez
observer, et cela non seulement en vertu des
raisons alléguées, mais d’autant plus que nous
savons en quel temps nous sommes, c’est-à-
dire parce que vous devez considérer la
condition de ce temps, car il est dit dans
l’Ecclésiaste : "A toute chose est son temps et
son opportunité." Et dans Jérémie : "Le milan
968
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 145.
secundum illud I Thess. IV, 12. — nolumus
vos ignorare de dormientibus, quandoque
autem est quies animalium virtutum,
secundum illud Io. XI, v. 12. — si dormit,
salvus erit. Nec enim intelligendum est de
somno gratiae, qui quandoque dicitur quies
aeternae gloriae, secundum illud Ps. IV, 9.
— in pace in idipsum, etc., quandoque
autem est quies contemplationis etiam in
hac vita. Cant. V, 2. — ego dormio, et cor
meum vigilat. Sed intelligitur de somno
culpae, secundum illud Eph. V, 14. —
exurge, qui dormis, et exurge a mortuis,
etc., vel etiam negligentiae, secundum illud
Prov. c. VI, 9. — usquequo, piger, dormies
? Tempus ergo est surgendi a somno culpae
per poenitentiam Ps. CXXVI, 2. — surgite,
postquam sederitis, etc., a somno vero
negligentiae per sollicitudinem bene
operandi Is. XXI, 5. — surgite, principes,
accipite clypeum. Eccli. XXXII, 15. — hora
surgendi non te tristet. Deinde, cum dicit
nunc enim, etc., assignat rationem eius quod
dixerat, dicens nunc enim propior est salus
nostra, quam cum credidimus. Quod quidem
secundum intentionem apostoli intelligitur
de salute vitae aeternae, de qua dicitur Is.
LI, 8. — salus autem mea in sempiternum
erit. Ad hanc autem salutem homo
ordinatur, primo quidem, per fidem. Mc. ult.
: qui crediderit et baptizatus fuerit, salvus
erit. Sed semper magis ac magis homo
accedit ad eam per bona opera et charitatis
augmentum. Unde dicitur Iac. IV, 8. —
appropinquate Deo, et appropinquabit
vobis. Hoc est ergo quod apostolus dicit :
ideo hora est iam nos de somno surgere,
nunc enim, quando scilicet per opera bona et
per charitatis augmentum profecimus,
propior, id est propinquior, est, scilicet
nobis, nostra salus, scilicet vitae aeternae de
qua dicitur Is. LI, 8. — salus autem mea in
sempiternum erit; quam cum credidimus, id
est quam cum a principio fidem accepimus.
Et potest hic intelligi duplex propinquitas.
Una quidem secundum tempus, qua viri
sancti, in operibus iustitiae proficientes,
connaît dans le ciel son temps; la tourterelle,
l’hirondelle et la cigogne gardent le temps de
leur arrivée; mais mon peuple n’a pas connu
le jugement du Seigneur."
1062. — 969
<L’Apôtre> montre à quoi doit
servir cette opportunité du temps, en ajoutant
: c’est désormais l’heure de nous lever du
sommeil. Ce qu’il faut entendre non du
sommeil naturel, qui est parfois appelé mort,
selon ce passage de la première <épître> aux
Thessaloniciens : <Nous ne voulons pas, mes
frères, que vous soyez dans l’ignorance
touchant ceux qui dorment "; parfois il
signifie le repos des forces animales, selon ce
passage de Jean : "S’il dort, il sera sauvé " Il
ne faut pas l’entendre non plus du sommeil de
la grâce, qui quelquefois se dit du repos de la
gloire éternelle, comme dans ce verset du
psaume 4 — "Dans la paix tout à la fois, je
m’endormirai et je reposerai "; parfois du
repos de la contemplation, même en cette vie :
"Moi, je dors, mais mon cœur veille " Mais il
faut l’entendre du sommeil de la faute, selon
ce passage <de l’épître> aux Ephésiens :
"Lève-toi, toi qui dors; lève-toi d’entre les
morts, et le Christ t’illuminera "; ou même de
la négligence970
", selon ce passage des
Proverbes "Jusques à quand, paresseux,
dormiras-tu ?" Il est donc temps de se lever
du sommeil de la faute par la pénitence :
"Levez-vous après que vous aurez pris du
repos, vous qui mangez un pain de douleur";
et du sommeil de la négligence, par la
sollicitude pour les bonnes œuvres : "Levez-
vous, princes, saisissez le bouclier" Et : "A
l’heure du lever ne t’attarde pas."
1063. — B. En second lieu, <l’Apôtre> donne
la raison de ce qu’il avait avancé, en disant :
car notre salut est maintenant plus près qu’au
temps où nous avons cru. Selon l’intention de
l’Apôtre cela s’entend du salut de la vie
éternelle, dont il est dit : "Mais mon salut sera
à jamais." Or l’homme est dirigé vers ce salut,
d’abord par la foi "Celui qui croira et sera
baptisé sera sauvé." Mais il s’en approche
toujours et de plus en plus par les bonnes
œuvres et par l’accroissement de la charité.
969
Lieu parallèle Super Ioan. 11, 11, lect. 3 (éd. Marietti, n° 1495). 970
Voir Glosa in Rom. XIII, 11 (GPL, col. 1510 A).
magis appropinquant ad terminum vitae
huius, in quo mercedem accipiunt. Alia vero
est propinquitas dispositionis vel
praeparationis, quia per augmentum
charitatis et operationem iustitiae homo
praeparatur ad illam salutem. Matth. XXV,
10. — quae paratae erant, intraverunt cum
eo ad nuptias. Sed secundum quod Ecclesia
haec verba adventus tempore legit, videntur
haec verba esse referenda ad salutem quam
Christus fecit in suo primo adventu, ut
intelligamus apostolum loquentem quasi ex
persona omnium fidelium qui fuerunt ab
initio mundi. Appropinquante enim iam
tempore incarnationis Christi, quo vaticinia
prophetarum crebrescebant, quod tempus
repraesentat Ecclesia, poterit dici : nunc
propior est nostra salus scilicet Christus,
quam cum credidimus, id est cum homines a
principio credere coeperunt Christi
adventum futurum. Is. LVI, 1. — iuxta est
salus mea, ut veniat, et iustitia mea, ut
reveletur. Posset etiam assumi ad tempus
misericordiae, quo quis incipit velle a
praeteritis peccatis discedere. Tunc enim
magis appropinquat suae saluti, quam a
principio, dum haberet fidem informem. Iac.
IV, 7 s.; resistite Diabolo, et fugiet a vobis;
appropinquate Deo, et appropinquabit
vobis, et cetera. Deinde, cum dicit nox
praecessit, dies autem appropinquavit, etc.,
ponit ad propositum similitudinem. Quod
quidem secundum intentionem apostoli sic
videtur esse intelligendum ut totum tempus
vitae praesentis nocti comparetur propter
ignorantiae tenebras, quibus praesens vita
gravatur. Iob XXXI, 1. — omnes quippe
involvimur tenebris, et cetera. Et de hac
nocte dicitur Is. XXVI, v. 9. — anima mea
desideravit te in nocte. Diei autem
comparatur status futurae beatitudinis
propter claritatem Dei, qua sancti
illustrantur. Is. LX, 19. — non erit tibi
amplius sol ad lucendum per diem, nec
splendor lunae illuminabit te, sed erit tibi
dominus in lucem sempiternam. Ad quem
diem refertur quod dicitur in Ps. CXVII, 24.
— haec dies, quam fecit dominus, exultemus
et laetemur in ea. Alio modo potest intelligi
quod status culpae nocti comparetur propter
D’où ces paroles de Jacques : "Approchez-
vous de Dieu et il s’approchera de vous."
Tel est donc ce que dit l’Apôtre : c’est
désormais l’heure de nous lever du sommeil;
car maintenant, c’est-à-dire lorsque par les
bonnes œuvres et l’accroissement de la
charité nous avons fait des progrès, il est plus
près, c’est-à-dire plus proche, notre salut,
c’est-à-dire celui de la vie éternelle, dont il est
dit "Mais mon salut sera à jamais." — Qu’au
temps où nous avons cru, c’est-à-dire que
lorsqu’au commencement nous avons reçu la
foi.
1064. — Cette proximité peut s’entendre de
deux manières :
1. La première quant au temps, au cours
duquel les hommes saints, progressant dans
les œuvres de justice, s’approchent davantage
du terme de cette vie, terme où ils recevront
leur récompense.
2. La seconde s’entend d’une proximité de
disposition ou de préparation, parce que par
l’accroissement de la charité et la pratique de
la justice l’homme se prépare à ce salut : "Les
vierges qui étaient prêtes entrèrent avec
l’époux dans la salle des noces."
1065. — Mais étant donné que l’Église lit ces
paroles au temps de l’Avent, elles semblent
devoir être appliquées au salut que le Christ a
apporté lors de son premier avènement, en
sorte qu’il faut comprendre que l’Apôtre parle
au nom de tous les fidèles qui ont existé
depuis le commencement du monde. Car déjà
à l’approche du temps de l’Incarnation du
Christ, lorsque les oracles des prophètes
devenaient plus fréquents, temps que
représente l’Eglise, on pourra dire : notre
salut est maintenant plus près, à savoir le
Christ, qu’au temps où nous avons cru, c’est-
à-dire lorsqu’au début les hommes ont
commencé à croire que l’avènement du Christ
aurait lieu : "Mon salut est près de venir et ma
justice d’être révélée." On pourrait aussi
appliquer <ces paroles> au temps de la
miséricorde, quand chacun commence à
vouloir rompre avec ses péchés passés.
C’est alors qu’on s’approche plus de son salut
qu’au commencement, au temps où on n’avait
qu’une foi informe : "Résistez au diable et il
tenebras culpae, de quibus dicitur in Ps.
LXXXI, v. 5. — nescierunt, neque
intellexerunt, in tenebris ambulant. Et de
hac nocte dicitur Sap. c. XVII, 20. — solis
autem illis superposita erat gravis nox,
imago tenebrarum, quae superventurae
erant illis. Dies autem dicitur status gratiae
propter lumen spiritualis intelligentiae, quod
iusti habent sed impiis deest. Ps. XCVI, 11.
— lux orta est iusto. Sap. V, 6. — sol
intelligentiae non est ortus nobis. Tertio
modo potest intelligi quod comparetur nocti
tempus praecedens Christi incarnationem,
quia nondum erat manifestata, sed sub
quadam caligine. II Petr. I, v. 19. — habetis
propheticum sermonem, cui benefacitis
attendentes quasi lucernae lucenti in
caliginoso loco. Et de hac nocte dicitur Is.
XXI, 11. — custos, quid de nocte ? Unde,
sicut in nocte apparent umbrae ita etiam illo
tempore eminebant legalia, quae sunt umbra
futurorum, ut dicitur Col. II, 17. Tempus
autem ab incarnatione Christi comparatur
diei propter potentiam spiritualis solis in
mundo, de quo dicitur Mal. ult. : vobis
timentibus nomen meum orietur sol
iustitiae. Unde et ipse dominus dicit Io. IX,
4. — me oportet operari opera eius qui
misit me, donec dies est. Et postea subdit :
quamdiu in mundo sum, lux sum mundi.
Quod ergo dicitur nox praecessit,
indifferenter accipi potest pro qualibet
praedictarum trium noctium. Iam enim
praecesserat eos quibus scribebat, et magna
pars temporis huius vitae, et, quod verius
est, praecesserat nox culpae; praecesserat
etiam tempus legis, quod fuit ante Christum.
Quod autem subdit dies autem
appropinquavit, videtur secundum
intentionem apostoli referendum esse ad
diem futurae gloriae, qui licet nondum
advenisset fidelibus Christi quibus
scribebat, tamen in propinquo erat eis.
Secundum praedicta posset etiam intelligi
tempus gratiae Christi, quod etsi iam
advenerit secundum temporum cursum,
s’enfuira loin de vous approchez vous de Dieu
et il s’approchera de vous."
1066. — C. Lorsqu’il971
dit : 12 La nuit est
avancée, le jour est proche, <l’Apôtre>
emploie une similitude pour <prouver> sa
proposition. Ce passage, selon l’intention de
l’Apôtre, doit, semble-t-il, s’entendre en ce
sens que tout le temps de la vie présente est
comparé à la nuit à cause des ténèbres de
l’ignorance972
qui s’appesantissent sur cette
vie : "Car nous, nous sommes enveloppés de
ténèbres." Et à propos de cette nuit il est dit
dans <le livre d’>Isaïe : "Mon âme t’a désiré
pendant la nuit." Mais l’état de la béatitude
future est comparé au jour à cause de la clarté
divine dont sont illuminés les saints : "Tu
n’auras plus le soleil pour éclairer pendant le
jour, et la clarté de la lune ne luira plus sur
toi; mais le Seigneur sera ta lumière éternelle,
et ton Dieu ta gloire." C’est à ce jour que se
réfère ce verset du psaume 117. — "Voici le
jour qu’a fait le Seigneur; exultons et
réjouissons-nous en lui."
1067. On peut encore entendre ce passage
autrement, en comparant l’état de la faute à la
nuit à cause de ses ténèbres, dont il est dit au
psaume 81. — "ils n’ont ni savoir ni
intelligence, ils marchent dans les ténèbres."
Et à propos de cette nuit il est écrit au livre de
la Sagesse : "Sur eux seuls s’étendait une
profonde nuit, image des ténèbres qui
devaient leur survenir " Mais on appelle jour
l’état de grâce, à cause de la lumière de
l’intelligence spirituelle que possèdent les
justes, mais qui manque aux impies : "La
lumière s’est levée pour le juste." Et encore :
"Le soleil de l’intelligence ne s’est pas levé
pour nous."
1068. — Enfin, on peut expliquer ce passage
d’une troisième manière, en comparant à la
nuit le temps qui a précédé l’Incarnation du
Christ, parce qu’elle n’avait pas encore été
manifestée et qu’elle se trouvait au contraire
dans une certaine obscurité : "Vous tenez la
parole des prophètes, à laquelle vous faites
bien d’être attentifs, comme à une lampe qui
971 Lieu parallèle sur les paragraphes 1066 à 1069 Super Ioan. 9, 4, lect. 1 (éd. Marietti, n° 1305).
972 Voir Glosa in Rom. XIII, 12 (GPL, col. 1510 B).
appropinquare tamen nobis dicitur per fidem
et devotionem, sicut et Phil. IV, 5 dicitur :
dominus prope est, et in Ps. CXLIV, 18. —
prope est dominus omnibus invocantibus
eum. Potest etiam hoc congruere his qui de
peccatis poenitere incipiunt, quibus dies
gratiae appropinquat. Deinde, cum dicit
abiiciamus, etc., concludit exhortationem de
honestate vitae. Et primo ponit
exhortationem; secundo exponit eam, ibi
non in comessationibus, et cetera. Circa
honestatem vitae tria tangit. Primo quidem
remotionem vitiorum concludens ex
praemissis : si nox praecessit, ut dictum est,
abiiciamus opera tenebrarum, quia, ut
dicitur Eccle. VIII, 6, omni negotio tempus
est et opportunitas. Unde, recedente nocte,
cessare debent opera noctis. Dicuntur autem
opera tenebrarum opera peccatorum : primo
quidem, quia in seipsis privata sunt lumine
rationis, quo illustrari debent humana opera,
Eccle. II, 14. — sapientis oculi in capite
eius, stultus in tenebris ambulat, secundo,
quia in tenebris aguntur, Iob XXIV, v. 15.
— oculus adulteri observat caliginem,
tertio, quia per ea homo ad tenebras ducitur,
secundum illud Matth. XXII, 13. — mittite
eum in tenebras exteriores. Secundo inducit
ad assumendas virtutes, quasi dicat : ex quo
dies appropinquavit, assumentes ea quae
congruunt diei, induamur arma lucis, id est
virtutes, quae et arma dicuntur, inquantum
nos muniunt. Eph. ult. : induite vos
armaturam Dei, ut possitis stare adversus
insidias Diaboli. Et dicuntur lucis arma, tum
quia lumine rationis decorantur et
perficiuntur, unde dicitur Prov. IV, 18. —
iustorum semita quasi lux splendens
procedit, tum quia lucis examen requirunt,
Io. III, 21. — qui facit veritatem, venit ad
lucem, tum quia per opera virtutum alii
illuminantur, Matth. V, 16. — sic luceat lux
vestra coram hominibus, et cetera. Tertio
exhortatur ad usum virtutum et profectum,
cum dicit sicut in die honeste ambulemus.
Haec enim duo videntur diei congruere.
luit dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour
brille et que l’étoile du matin se lève dans vos
cœurs." Et à propos de cette nuit il est écrit
dans <le livre d’>Isaïe : "Sentinelle, où en est
la nuit ?" Par conséquent, de même que
pendant la nuit apparaissent les ombres, ainsi
paraissaient pendant ce temps les choses de la
Loi, "qui ne sont que l’ombre des choses à
venir", comme il est dit dans <l’épître aux>
Colossiens. Mais le temps <qui s’est écoulé>
depuis l’Incarnation du Christ est comparé au
jour, à cause de la puissance du soleil spirituel
sur le monde; ce qui a fait dire à Malachie :
"Pour vous qui craignez mon Nom, se lèvera
le soleil de justice." Voilà pourquoi le
Seigneur dit aussi lui-même <11 me faut
travailler aux œuvres de Celui qui m’a
envoyé, tant qu’il fait jour." Et il ajoute
ensuite : "Tant que je suis dans le monde, je
suis la lumière du monde."
1069. — Donc ces paroles : La nuit est
avancée, peuvent être prises indifféremment
pour n’importe laquelle de ces trois nuits. Car
pour ceux à qui <l’Apôtre> écrivait, une
grande partie du temps de cette vie s’était déjà
écoulée, et ce qui est plus vrai encore, la nuit
de la faute avait précédé, comme avait
également précédé le temps de la Loi qui fut
avant le Christ. Mais ce que <l’Apôtre>
ajoute : le jour est proche, semble devoir se
rapporter, selon son intention, au jour de la
gloire future qui, bien que n’étant pas encore
arrivé pour les fidèles du Christ auxquels il
écrivait, était cependant proche pour eux.
D’après ce qui précède, on pourrait encore
l’entendre du temps de la grâce du Christ,
dont on dit que, bien qu’il soit déjà venu selon
le cours du temps, il s’approche cependant de
nous par la foi et par la dévotion973
, selon ce
que <l’Apôtre> écrit aux Philippiens : "Le
Seigneur est proche "; et selon ce qui est écrit
au psaume 144. — "Le Seigneur est près de
tous ceux qui l’invoquent." Ce sens peut aussi
s’appliquer à ceux qui commencent à se
repentir de leurs péchés : pour eux s’approche
le jour de la grâce974
.
973
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 82. 974
On observera que, dans ces diverses interprétations, saint Thomas ne mentionne pas l’imminence
de la seconde venue. Non qu’il l’ignore, évidemment, ni qu’elle ne joue aucun rôle dans sa
philosophie de l’histoire du salut (voir Max SECKLER, Le Salut et l’Histoire. La pensée de saint
Primo quidem honestas. Nam in die
unusquisque seipsum studet componere, ut
coram aliis honestus appareat. In nocte
autem non sic. Unde dicitur I Thess. c. V, 7.
— qui dormiunt, nocte dormiunt : et qui
ebrii sunt, nocte ebrii sunt : nos autem qui
diei sumus, sobrii simus. Unde 1 Co c. XIV,
40 dicitur : omnia honeste et secundum
ordinem fiant in vobis. Secundo homo in die
ambulat, non in nocte. Unde dicitur Io. XI,
10. — qui ambulat in nocte offendit. Et
ideo, quia dies est, oportet quod ambulemus,
id est de bono in melius procedamus. Unde
dicitur Io. XII, 35. — ambulate, dum lucem
habetis. Deinde, cum dicit non in
comessationibus, etc., exponit quod dixerat.
Et, primo, exponit quomodo sunt abiicienda
opera tenebrarum, quae sunt opera
peccatorum, de quibus quaedam enumerat.
Primo ponens ea quae pertinent ad
corruptionem concupiscibilis, cuius
corruptio est intemperantia, quae est circa
delectationes tactus et circa cibos. Unde,
primo, excludit intemperantiam ciborum,
cum dicit non in comessationibus. Dicuntur
comessationes superfluae et nimis accuratae
comestiones. Prov. c. XXIII, 20. — noli
esse in conviviis peccatorum, nec in
comessationibus eorum qui carnes ad
vescendum conferunt. Quod quidem potest
esse peccatum mortale ex hoc quod
secundum legem pro hac culpa aliquis
damnatur ad mortem. Dicitur enim de filio
protervo Deut. XXI, 22. — comessationibus
vacat, et luxuriae atque conviviis; lapidibus
eum obruet populus, et cetera. Dicitur autem
aliquis vacare comessationibus atque
conviviis, non quidem si comedat magnifice
secundum statum suae dignitatis, sicut
dicitur, Esther II, 18, quod Assuerus iussit
1070. — II. Lorsque <l’Apôtre> dit ensuite
: Rejetons, etc., il donne en conclusion une
exhortation sur l’honnêteté de la vie. Et :
A) Il commence par exposer son exhortation.
B) Puis, il l’explique [n° 1074] : non dans les
excès de table, etc.
A. Sur l’honnêteté de la vie <l’Apôtre>
mentionne trois choses :
1071. — 1. En premier lieu, l’éloignement
des vices, en concluant d’après ce qui
précède. Si la nuit est avancée, ainsi qu’on l’a
dit, rejetons les œuvres des ténèbres, car selon
l’Ecclésiaste, "à toute chose est son temps et
son opportunité." Donc, la nuit se retirant, les
œuvres de la nuit doivent cesser. Or on
appelle œuvres des ténèbres les œuvres des
pécheurs :
a. D’abord, parce que en elles-mêmes elles
sont privées de la lumière de la raison, qui
doit éclairer les œuvres humaines : "Le sage a
les yeux à la tête, l’insensé marche dans les
ténèbres."
b. Ensuite, <parce qu’> elles sont faites dans
les ténèbres "L’œil de l’adultère observe
l’obscurité."
c. Enfin, parce qu’elles conduisent l’homme
vers les ténèbres, selon ce passage de
Matthieu "Jetez-le dans les ténèbres
extérieures."
1072. — 2. Puis il exhorte à acquérir les
vertus, comme s’il disait : Dès lors que le jour
approche, en acquérant ce qui convient au
jour, revêtons les armes de la lumière, c’est-à-
dire les vertus qu’on appelle armes en tant
qu’elles nous défendent : "Revêtez-vous de
l’armure de Dieu, afin de pouvoir tenir contre
les embûches du diable." On les appelle armes
de la lumière, soit parce qu’elles sont
embellies et perfectionnées par la lumière de
Thomas d’Aquin sur la théologie de l’histoire, p. 216-222, qui montre que pour saint Thomas, l’ultima
aetas, l’êge ultime, n’est pas seulement j la fin de l’histoire, mais aussi déjà là, dans le temps de
l’Eglise, selon une relation de présence verticale qui fonde le caractère définitif de l’Eglise contre
Joachim de Flore — et des sacrements qu’elle commu nique). Mais si saint Thomas évite d’attribuer
aux versets pauliniens le sens d’une croyance (erronée) à l’imminence de la parousie, c’est qu’il
apparaît étranger à l’intention de l’Apôtre. C’est aussi l’opinion de beaucoup d’exégètes modernes
(voir HUBY, Saint Paul. Epître aux Romains, Paris, Beauchesne, 1957, p. 442-443). Le thème du
kairos, le "moment favorable", joue un grand rôle dans la pensée grecque (voir PLATON, République
II (370 b 8]; texte établi et traduit par Emile Chambry, dans PLATON, Œuvres complètes, t. VI, La
Répu blique, II, p. 67), comme dans la pensée biblique.
praeparari convivium magnificum propter
coniunctionem Esther, iuxta magnificentiam
principalem; sed quando aliquis hoc facit
praeter decentiam sui status, et praecipue si
ad hoc principalis eius cura existat, sicut illi
de quibus dicitur infra ult. : huiusmodi
Christo domino non serviunt, sed suo ventri;
et Phil. III, 9. — quorum Deus venter est.
Secundo excludit intemperantiam circa
potum, cum subdit et ebrietatibus, quae
pertinent ad superfluitatem potus extra
mensuram rationis hominem ponentis.
Eccli. XXXI, 35. — vinum in iucunditate
creatum, et non in ebrietate. Et est
considerandum quod ebrietas ex suo genere
est peccatum mortale, cum scilicet homo ex
proposito inebriatur, quia videtur praeferre
delectationem vini integritati rationis. Unde
dicitur Is. V, 22. — vae qui potentes estis ad
bibendum vinum, et viri fortes ad
miscendam ebrietatem. Si vero aliquis
inebrietur praeter intentionem, non ex
proposito, puta quia ignorat virtutem vini,
vel quia non aestimat se tanto potu
inebriandum, non est peccatum mortale,
quia non per se inebriatur sed per accidens,
id est praeter intentionem, quod quidem non
potest contingere in his, qui frequenter
inebriantur. Et ideo dicit Augustinus in
sermone de Purgatorio, quod ebrietas est
peccatum mortale, si assidua fuerit. Unde
signanter hic apostolus in plurali numero
dicit : non in comessationibus et
ebrietatibus. Tertio excludit intemperantiam
circa corporalem quietem, cum dicit non in
cubilibus id est non in superflua dormitione,
quam convenienter post comessationem et
ebrietatem prohibet, quia sequitur ex illis. Et
potest esse in hoc peccatum mortale, quando
propter quietem corporalem et somnum
omittit homo quae facere debet et inclinatur
ad aliqua mala facienda. Mich. II, 1. — vae
qui cogitatis inutile, et operamini malum in
la raison; aussi est-il écrit : "Le sentier des
justes s’avance comme une lumière éclatante
et croît jusqu’au jour parfait "; soit parce
qu’elles requièrent le contrôle de la lumière :
"Celui qui fait la vérité vient à la lumière ";
soit parce que les œuvres des vertus brillent
sur les autres : "Qu’ainsi donc votre lumière
luise devant les hommes pour qu’ils voient
vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui
est dans les cieux."
1073. — 3. Enfin, <l’Apôtre> exhorte à
pratiquer les vertus et à progresser <dans leur
pratique>, lorsqu’il dit : 13 Comme durant le
jour, marchons honnêtement. Ces deux
choses, <à savoir l’honnêteté et la marche>,
semblent convenir au jour.
a. D’abord l’honnêteté. En effet, durant le
jour chacun s’applique à se présenter tel qu’il
paraisse honnête aux yeux des autres. Mais il
n’en est pas ainsi durant la nuit. D’où <ce que
l’Apôtre> dit <dans sa première épître> aux
Thessaloniciens : "Ceux qui dorment de nuit,
et ceux qui s’enivrent, s’enivrent de nuit." Et
<dans sa première épître> aux Corinthiens :
"Que tout se fasse chez vous honnêtement et
avec ordre975
."
b. Puis <la marche>. L’homme marche durant
le jour, non durant la nuit. D’où ces paroles
Celui qui "marche durant la nuit trébuche."
Ainsi donc, puisqu’il fait jour, il faut que nous
marchions, c’est-à-dire que nous progressions
du bien vers le mieux.
D’où ces paroles de Jean : "Marchez pendant
que vous avez la lumière"
1074. — B. Lorsqu’il dit : non dans les excès
de table, etc., <l’Apôtre> explique ce qu’il
vient de dire.
1. Et il explique d’abord comment il faut
rejeter les œuvres des ténèbres, qui sont les
œuvres des péchés, et il en énumère quelques-
unes.
a. Il mentionne en premier lieu celles qui se
rapportent à la corruption du concupiscible976
.
975
1 Co 14, 40. L’addition des mots in vobis ("chez vous") figure dans la Bibiia latina (éd. Adolph
Rusch, p. 332a); voir aussi DOM SABATIER, Bibi. sacr., t. III (Notas ad versionem antiquam), p.
712. 976 Voir ARISTOTE, Ethique à Nicomaque III, 10 [1118 a]. Lieux parallèles Ethic. 3, lect. 19 (éd. Léonine,
1969, t. XLVII, vol. I, p. 182, col. 2 [ a 23]); Ethic. 3, lect. 20 (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. I, p. 184,
col. 1 [ a 26]); Somme Théologique 2a-2 Q. 142, a. 2, sol. 2.
cubilibus vestris. Potest etiam quod dicit
non in cubilibus vestris, referri ad
apparatum luxuriae. Unde dicitur in persona
meretricis Prov. VII, 17. — aspersi cubile
meum myrrha, et cetera. Gen. XLIX, v. 4.
— ascendisti cubile patris tui. Et ideo
convenienter, quarto, excludit
intemperantiam circa venerea, cum subdit et
impudicitiis, id est quibuscumque venereis
actibus, qui dicuntur impudici, quia non
cavent id quod est maxime pudore vel
confusione dignum : tum quia omnes
delectationes tactus, gulae et luxuriae sunt
communes nobis et brutis. Unde qui eis
inordinate insistit, brutalis efficitur. Ps.
XXXI, 9. — nolite fieri sicut equus et
mulus, quibus non est intellectus, et cetera.
Tum etiam quia specialiter in actibus
venereis ratio hominis totaliter absorbetur a
delectatione, ut non possit homo tunc
aliquid intelligere, sicut Aristoteles dicit in
libro Ethicorum. Unde et Osee IV, 11
dicitur : fornicatio, et ebrietas, et vinum
auferunt cor. Apoc. IX, 21. — non egerunt
poenitentiam super immunditia et
fornicatione et impudicitia, quam gesserunt.
Deinde excludit ea quae pertinent ad
corruptionem irascibilis, cum dicit non in
contentione. Quae quidem, ut Ambrosius
dicit, est impugnatio veritatis cum
confidentia clamoris. Potest autem intelligi
quod per hoc prohibetur omnis rixa, non
solum verborum, sed et factorum, quae ut
plurimum a verbis incipit. Prov. XX, 3. —
honor est homini qui separat se a
contentionibus. Solet autem contentio ex
invidia generari, et ideo subdit et
aemulatione. Unde Iac. III, v. 16 dicitur :
ubi zelus et contentio, ibi inconstantia et
omne opus pravum. Secundo exponit
quomodo debeamus induere arma lucis,
dicens sed induimini dominum Iesum
Christum, in quo scilicet abundantissime
fuerunt omnes virtutes, secundum illud Is.
IV, 1. — apprehendent septem mulieres
Cette corruption est l’intempérance, qui porte
aux plaisirs du toucher et de la nourriture977
.
Aussi rejette-t-il en premier lieu
l’intempérance des repas, lorsqu’il dit : non
dans les excès de table. On appelle excès de
table les repas trop abondants et trop soignés :
"Ne sois pas dans les festins des buveurs ni
dans les excès de table de ceux qui apportent
des viandes pour les manger ensemble." Or
cet excès peut être un péché mortel, puisque
selon la Loi pour une telle faute on était
condamné à mort. En effet, il est dit du fils
débauché "Il s’adonne aux excès de table, <se
livre à> la dissolution et <passe son temps>
dans les festins. Le peuple de la ville le
lapidera." On dit qu’on s’adonne aux excès de
table et aux festins, non quand on fait un
festin magnifique selon l’état de sa dignité,
comme il est dit au livre d’Esther qu’Assuérus
"commanda qu’on préparât un festin très
magnifique à tous les princes et à tous ses
serviteurs pour le mariage et les noces
d’Esther. Il donna aussi du repos aux peuples
de ses provinces et il fit des dons avec la
magnificence d’un prince "; mais lorsqu’on va
au-delà de la décence qui convient à son état,
et surtout quand on fait <de ces festins>
l’objet principal de ses soucis, comme le
faisaient ceux dont il est dit plus loin, au
dernier chapitre de cette épître : < ces sortes
de gens ne servent point le Christ Notre
Seigneur, mais leur ventre." Et dans l’épître
aux Philippiens : "Il y en a beaucoup […]
dont la fin sera la perdition, dont le Dieu est le
ventre, qui mettent leur gloire dans leur
ignominie et n’ont de goût que pour les
choses de la terre."
1075. — b. <L’Apôtre>978
rejette en second
lieu l’intempérance dans le boire, lorsqu’il
ajoute : et dans les ébriétés, excès qui
concernent la boisson et dont la démesure fait
déraisonner l’homme : "Le vin a été créé dès
le commencement pour la joie et non pour
l’ébriété." Il faut remarquer que l’ébriété est
de par sa nature un péché mortel, c’est-à-dire
977
Lieux parallèles : Somme Théologique 2 Q. 148, a. 2; Q. 154, a. 2, sol. 6; De maio, Q. 14, a. 2; Ad
Gai. 5, 21, lect. 5 (éd. Marietti, n° 326). 978
Lieux parallèles : Somme Théologique Ia-2 Q. 55, a. 3, sol. 2; Q. 76, a. 4, sol. 2 et 4; Q. 77, a. 7; Q.
88, a. 5, sol. 1; 2a-2 Q. 150, a. 2; 2 Sentences dist. 24, Q. 3, a. 6; Demalo, Q. 2, a. 8, sol. 3; Q. 7, a. 4,
sol. 1; 1 Ad Cor. 5, 11, lect. 3 (éd. Marietti, n°258); Ad Gal. 5, 21, lect. 5 (éd. Marietti, n° 326).
virum unum. Induimus autem Iesum
Christum, primo quidem, per sacramenti
susceptionem. Gal. c. III, 27. — quicumque
in Christo baptizati estis, Christum
induistis. Secundo, per imitationem. Col.
III, 9. — expoliantes vos veterem hominem
cum actibus suis, et induentes novum, et
cetera. Et Eph. IV, 24. — induite novum
hominem, qui secundum Deum creatus est
in iustitia, et cetera. Dicitur autem induere
Christum qui Christum imitatur, quia, sicut
homo continetur vestimento et sub eius
colore videtur, ita in eo, qui Christum
imitatur, opera Christi apparent. Per hoc
ergo induimur arma lucis, quando induimur
Christum. Tertio exponit quod dixerat sicut
in die honeste ambulemus, per hoc quod
subdit et carnis curam ne feceritis in
desideriis. In hoc enim pulchritudo
honestatis consistit ut homo non carnem
spiritui sed spiritum praeferat carni. Supra
VIII, 12. — debitores sumus non carni, ut
secundum carnem vivamus. Sed notandum
quod non dicit simpliciter carnis curam ne
feceritis, quia quilibet tenetur ut carnis
curam gerat ad sustentandam naturam,
secundum illud Eph. V, 29. — nemo
umquam carnem suam odio habuit, sed
nutrit et fovet, et cetera. Sed addit in
desideriis, ut scilicet inordinata carnis
desideria, id est concupiscentias, non
sequamur. Unde dicitur Gal. V, 16. —
spiritu ambulate, et desideria carnis non
perficietis.
lorsque l’homme de propos délibéré s’enivre,
parce qu’il semble préférer la délectation du
vin à l’intégrité de sa raison. C’est pourquoi
Isaïe écrit "Malheur <à vous> qui êtes
puissants à boire le vin, et <qui êtes> des
hommes vaillants à mêler des boissons
enivrantes." Que si quelqu’un s’enivre contre
son intention et non de propos délibéré, par
exemple parce qu’il ignore la force du vin ou
parce qu’il estime qu’une telle boisson ne
peut le porter à l’ivresse, ce n’est pas un
péché mortel; car ce n’est pas en tant que tel
qu’il s’enivre mais accidentellement, c’est-à-
dire contre son intention, ce qui toutefois ne
peut avoir lieu chez ceux qui s’enivrent
fréquemment. Voilà pourquoi Augustin979
dit
dans un Sermon sur le purgatoire que
l’ébriété est un péché mortel dès lors qu’elle
est fréquente. Et c’est ce qui explique
pourquoi l’Apôtre met ici expressément le
pluriel dans les excès de table et les ébriétés.
1076. — c. En troisième lieu, <l’Apôtre>
rejette l’intempérance dans le repos corporel,
lorsqu’il dit : non dans les coucheries, c’est-à-
dire non dans un sommeil abusif, qu’il interdit
avec raison après l’excès de table et l’ébriété,
parce qu’il en est la suite. Il peut y avoir en
cela <matière à> péché mortel, quand pour ce
repos corporel et ce sommeil on omet ce
qu’on doit faire et on se dispose à commettre
quelque autre mal : "Malheur <à vous> qui
formez des projets inutiles et qui vous
appliquez au mal sur vos couches " Cette
expression : non dans les coucheries, peut
encore s’entendre de la préparation à la
luxure; d’où ces paroles que les Proverbes
mettent dans la bouche de la courtisane <J’ai
parfumé ma couche de myrrhe, d’aloès et de
cinnamome." Et il est écrit dans la Genèse :
"Tu es monté sur la couche de ton père et tu
as souillé sa couche."
1077. — d. Aussi en quatrième lieu,
<l’Apôtre> rejette-t-il avec raison
l’intempérance980
dans les rapports sexuels,
lorsqu’il dit : et les impudicités, c’est-à-dire
dans tous les actes vénériens, qu’on appelle
979
Voir PSESJDO-AUGTJSTIN, Sermo 104, 2, sur k purgatoire (PL 39, 1946). La citation est de saint
Césaire d’Arles (Sermo 179, 2 [n° 104, 725." Lieu parallèle : 1 Ad Cor. 5 11, lect. 3 (éd. Marietti, n°
258). 980
Ps 31, 9. — Lieu parallèle : Super Psalmos, in Ps. 31, 9.
impudiques, parce qu’on ne veille pas à ce qui
est principalement digne de pudeur ou de
confusion, soit parce que toutes les
délectations du toucher, de la gourmandise et
de la luxure nous sont communes avec les
animaux privés de raison; aussi celui qui s’y
adonne en dépit de l’ordre leur devient
semblable "Ne devenez point comme le
cheval et le mulet, qui n’ont point
d’intelligence l" soit encore, en particulier,
parce que dans ces actes vénériens la raison
de l’homme est totalement absorbée par la
délectation, de telle sorte qu’alors il ne puisse
rien comprendre, comme le dit Aristote dans
son ouvrage de l’Ethique981
Aussi est-il dit
dans Osée : "La fornication, l’ébriété et le vin
emportent le cœur982
." Et dans l’Apocalypse :
"Ils ne firent pénitence ni de l’impureté, ni de
la fornication, ni de l’impudicité qu’ils ont
commises983
."
1078. — e. <L’Apôtre> rejette ensuite [Voir
n° 1074] les œuvres des ténèbres qui se
rapportent à la corruption de l’irascible984
,
lorsqu’il dit : non dans la dispute. Selon
Ambroise, la dispute est une attaque contre la
vérité accompagnée d’une clameur
effrontée985
. On peut aussi comprendre dans
ce mot l’interdiction de toute rixe986
, non
seulement en paroles mais encore en actions,
rixe qui la plupart du temps commence par
des paroles <injurieuses> : "C’est un honneur
pour l’homme de se séparer des disputes."
981
Voir AR1STOTE, Ethique à Nicomaque VII, c. 15 [1152 b] AL XXVI, fasc. 3, P. 291. Lieux
parallèles Ethic. 7, lect. 11 (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. II, p. 425, coI. 1 [1152 b 16]); Somme
Théologique 2 Q. 141, a. 2; Q. 142, a. 4. 982
Os 4, 11. Inversion dans la citation des mois vinum (vin) et ebrietas (ébriété), probablement citée de
mémoire. 983
Ap 9, 21 (cité d’après le sens). 984
On se souviendra que, selon Platon (République IV [; texte établi et traduit par Emile Chambry,
dans PLATON, Œuvres complètes, t. VII, 1° partie, La République IV, p. 36-41), l’âme humaine
comporte trois éléments fondamentaux auxquels on donne les noms de concupiscible (l’âme
désirante), d’irascible (l’âme affective, passionnelle, noble) et de raisonnable (l’âme intellectuelle).
Cette conception, devenue classique dans toute la philosophie grecque, a été reprise dans la pensée
médiévale comme un donné universellement reçu. 985
Glosa in Rom. XIII, 13 (GPL, col. 1335 C-D), sous le nom d’Ambroise, c’est-â-dire Ambrosiaster
(Ad Romanos, XIII, 13 [CSEL 81/1, 430]). — Lieux parallèles : Somme Théologique 2a-2 Q. 38, a. 1
IIAd Tim. 2, 14, lect. 2 (éd. Marietti n° 60). 986
Lieu parallèle : Somme Théologique 2a-2ae, Q. 41.
Quant à la dispute, elle est habituellement
engendrée par l’envie987
, et c’est pourquoi
<l’Apôtre> ajoute : et la jalousie. D’où ces
paroles de Jacques : "Là où est la jalousie et
l’esprit de dispute, là est l’inconstance et toute
œuvre perverse."
1079. — 2. <L’Apôtre> explique en suite
comment nous devons nous revêtir des armes
de la lumière, en disant : 14 mais revêtez-vous
du Seigneur Jésus-Christ, à savoir en qui se
trouvèrent très abondamment toutes les
vertus988
, selon ce verset d’Isaïe "Sept
femmes saisiront un seul homme en ce jour-
là989
." Or nous revêtons Jésus-Christ, d’abord
par la réception du sacrement : "Vous tous qui
avez été baptisés dans le Christ, vous avez
revêtu le Christ990
." Ensuite, par l’imitation :
< Dépouillez le vieil homme avec ses œuvres,
et revêtez le nouveau qui se renouvelle à la
connaissance, selon l’image de celui qui l’a
créé." Et encore "Revêtez-vous de l’homme
nouveau, qui a été créé selon Dieu dans la
justice et la sainteté de la vérité." Or on dit
que celui-là revêt le Christ qui l’imite, parce
que, de même que l’homme est renfermé dans
son vêtement et apparaît sous sa couleur, ainsi
dans celui qui imite le Christ, apparaissent les
œuvres du Christ. Il s’ensuit donc que nous
revêtons les armes de la lumière lorsque nous
revêtons le Christ.
1080. — 3. Enfin, <l’Apôtre> explique ce qui
précède : Comme durant le jour, marchons
honnêtement, en ajoutant : et n'ayez pas soin
de la chair pour <en satis faire> les désirs. Car
la beauté de l’honnêteté consiste en ce que
l’homme ne préfère point la chair à l’Esprit,
mais l’Esprit à la chair : "nous ne sommes pas
débiteurs envers la chair, pour vivre selon la
987
Envisagée sous le rapport de l’éloignement de celui avec qui on se trouve en désaccord ou de celui
avec qui on est en dispute, la dispute comme la discorde ont une affinité avec l’envie. En revanche, si
l’on considère ce à quoi s’arrête celui qui se dispute, son sens propre, la dispute a une affinité avec
l’orgueil et la vaine gloire. Voir Somme Théologique 2 Q. 38, a. 2, sol. 1. 988
Lieu parallèle Somme Théologique 3 Q. 7, a. 2. 989
Is 4, 1. Il faut sous-entendre ici l’interprétation traditionnelle de la Glose (GOS <Glosa marginalis
et interlin. >, t. III, p. 9h) : Sept femmes", c’est-i-dire les sept vertus ou les sept dons du Saint-Esprit, "
saisiront un homme, c’est-â-dire le Christ. — Lieux parallèles Super Is. 4, 1; Somme Théologique 3 Q.
7, a. 5 sed contra; Super Ioan. 1, 30, lect. 14 (éd. Marietti, n° 260). 990 Lieu parallèle Ad Galat. 3, 27, lect. 9 (éd. Marietti, n° 183 et 184).
chair." Mais il faut remarquer que <l’Apôtre>
ne dit pas simplement n’ayez pas soin de la
chair, parce que chacun est tenu d’en prendre
soin pour entretenir la nature, selon cette
parole <de l’Apôtre> aux Ephésiens :
"Personne n’a jamais haï sa chair, mais il la
nourrit et la soigne, comme le Christ l’Eglise
"Mais il ajoute : pour <en satisfaire> les
désirs, à savoir afin que nous ne suivions pas
les désirs désordonnés de la chair, c’est-à-dire
ses concupiscences. C’est pour cela qu’il est
dit aux Galates : "Marchez selon l’Esprit et
vous n’accomplirez pas les désirs de la chair "
Caput 14 CHAPITRE 14
Lectio 1 Leçon 1 [Versets 1 à 13a]
[n° 1082] 1 Accueillez celui qui est faible
dans la foi sans discuter sur les opinions.
[n° 10831 2 Car l’un croit manger de tout,
tandis que le faible ne mange que des
légumes.
[n° 1089] 3 Que celui qui mange ne méprise
pas celui qui ne mange pas, et que celui qui ne
mange pas ne juge pas celui qui mange, car
Dieu l’a accueilli.
[n° 1092] 4 Qui es-tu, toi qui juges l’esclave
d’autrui ? [n° 1094] Qu’il se tienne debout ou
qu’il tombe, <cela regarde> son maître; mais
il se tiendra debout, car Dieu est puissant pour
le maintenir.
[n° 1097] 5 En effet, l’un juge entre jour et
jour, tandis que l’autre les juge tous pareils.
Que chacun abonde en son sens.
[n° 1099] 6 Celui qui a telle opinion sur les
jours le fait pour le Seigneur. Et celui qui
mange mange pour le Seigneur, et il rend
grâces à Dieu; et celui qui ne mange pas ne
mange pas pour le Seigneur, et il rend grâces
à Dieu.
[n° 1101] 7 En effet, nul d’entre nous ne vit
pour soi-même et nul ne meurt pour soi-
même.
[n° 1102] 8 Car si nous vivons, nous vivons
pour le Seigneur; si nous mourons, nous
mourons pour le Seigneur. Soit donc que nous
vivions, soit que nous mourions, nous
sommes au Seigneur.
[n° 1104] 9 C’est pour cela même que le
Christ est mort et qu’il est ressuscité, afin
d’être le maître des morts et des vivants.
[n° 1105] 10 Mais toi, pourquoi juges-tu ton
frère ? Ou bien toi, pourquoi méprises-tu ton
frère ? Tous, en effet, nous nous trouverons
devant le tribunal du Christ.
[n° 1107] 11 Car il est écrit : "Je vis, moi, dit
le Seigneur : tout genou fléchira devant moi et
toute langue confessera Dieu."
[n° 1112] 12 Ainsi chacun de nous rendra
compte à Dieu pour soi.
[n° 1114] 13a Ne nous jugeons donc plus les
uns les autres.
[86225] Super Rom., cap. 14 l. 1 Postquam
apostolus ostendit quomodo aliquis debeat
perfectus fieri, hic ostendit quomodo
perfecti debeant se habere ad imperfectos.
Et primo ostendit quod non debeant eos
scandalizare vel iudicare; secundo ostendit
quod debent eos sustentare, cap. XV ibi
debemus autem nos firmiores, et cetera.
Circa primum duo facit. Primo prohibet
inordinata iudicia; secundo prohibet
infirmorum scandala, ibi sed hoc iudicate
magis, et cetera. Circa primum tria facit.
Primo proponit admonitionem; secundo
exponit eam, ibi alius enim etc.; tertio
rationem assignat, ibi Deus enim illum et
cetera. Circa primum considerandum est
quod in primitiva Ecclesia aliqui ex Iudaeis
conversi ad Christum, credebant legalia cum
Evangelio esse servanda, ut patet Act. XV,
1 s. Et hos apostolus vocat infirmos in fide
Christi, quasi nondum perfecte credentes
quod fides Christi sufficiat ad salutem.
Perfectos autem vel firmos in fide vocat eos
qui fidem Christi sine legalibus credebant
esse servandam. De utrisque tamen erant
1081. — Après avoir montré comment on doit
devenir parfait [n° 953], <l’Apôtre> montre
ici comment les parfaits doivent se comporter
à l’égard des imparfaits991
.
— Et il montre en premier lieu qu’ils ne
doivent ni les scandaliser ni les juger.
— Puis, il montre qu’ils doivent les supporter
[n° 1142] : 1 Or, nous devons, nous qui
sommes plus forts, etc."
Sur le premier de ces devoirs, <l’Apôtre>
défend deux choses :
— D’abord, les jugements désordonnés.
— Puis, les scandales des faibles [n° 1115] :
13 "mais jugez plutôt qu’il ne faut pas mettre
devant votre frère un obstacle ou <lui donner
une occasion de> scandale."
À l’égard des jugements désordonnés :
I) <L’Apôtre> donne en premier lieu un
avertissement.
II) En deuxième lieu, il l’explique [n° 1083]
Car l’un croit, etc.
III) En troisième lieu, il en donne la raison
[n° 1090] : car Dieu l’a accueilli, etc.
1082. — I. Sur l’avertissement <de
991
Le terme parfait " n’est pas ici à prendre au sens littéral qu’il a en français et où il désigne ce qui est
sans défaut. Il s’agit en réalité d’un terme technique qui s’applique à l’une des trois classes de
chrétiens, évalués selon leur degré de vertu et de charité, que l’Eglise distingue traditionnellement : les
commençants, les progressants et les parfaits (en ce sens la perfection n’est pas la sainteté, mais elle y
prédispose). " Ce qui d’abord incombe à l’homme, c’est principa lement de s’étudier à fuir le péché et
à résister à ses concupiscences qui le meuvent au rebours de la charité; et cela concerne les
commençants qui doivent en retenir en eux la charité et la réchauffer afin qu’elle ne se corrompe pas.
Ce qui lui incombe ensuite, c’est principalement de s’étudier à tendre vers ce qui fait avancer dans le
bien; et cette application concerne les progressants qui tendent principalement à ce qu’en s’accroissant
en eux la charité se fortifie. En troisième lieu, l’homme s’étudie principalement à tendre vers l’union
avec Dieu et à jouir de lui; et cela concerne les parfaits qui désirent "être déliés [ la condition terrestrel
pour être avec le Christ", Ph 1, 23" (Somme Théologique 2a-2 Q. 24, a. 9).
aliqui Romae inter fideles Christi.
Alloquitur ergo apostolus perfectos in fide,
dicens : dictum est quod sic debetis induere
dominum Iesum Christum, assumite autem,
id est affectu charitatis vobis coniungite ad
supportandum, infirmum in fide, sicut
expositum est, de quo potest intelligi illud
Sap. c. IX, 5. — infirmus homo et exigui
temporis, et minor ad intellectum iudicii et
legum. Infra XV, 7. — suscipite invicem,
sicut et Christus suscepit vos. Eccli. XXIX,
12. — propter mandatum assume
pauperem. Et hoc non in disceptationibus
cogitationum, id est non disceptando propter
hoc quod unus contra alium cogitat, dum
scilicet illi qui legalia servabant, iudicabant
tamquam transgressores eos qui non
servabant. Et illi qui non servabant,
contemnebant tamquam errantes et
ignorantes qui servabant. Supra II, 15. —
cogitationum invicem accusantium aut
defendentium, et cetera. Deinde, cum dicit
alius enim, etc., exponit quod dixerat. Et
primo ostendit qui sunt infirmi in fide;
secundo ostendit qualiter sint disceptationes
cogitationum vitandae, ibi is qui manducat,
et cetera. Circa primum considerandum est
quod inter caeteras legales observantias una
erat discretio ciborum propter aliquos cibos
in lege prohibitos, ut patet Lev. XI, 2 ss.; et
hac quidem observantia quotidie erat
utendum vel non utendum. Et ideo de hoc
mentionem fecit specialiter apostolus,
dicens alius enim, inter vos, qui scilicet est
perfectus in fide, credit se posse licite
manducare omnia, eo quod non reputat se
astrictum ad legales observantias. Matth.
XV, 11. — quod intrat in os non coinquinat
hominem. I Tim. IV, 4. — omnis creatura
Dei bona est, et nihil reiiciendum, quod cum
gratiarum actione accipitur, et cetera. In
veteri autem lege prohibebantur aliqui cibi,
non quia naturaliter essent immundi. Sicut
enim in verbis hoc nomen stultus significat
aliquod malum, quamvis hoc nomen sit
bonum, ita in rebus quoddam animal bonum
l’Apôtre>, il faut considérer que dans l’Eglise
primitive quelques Juifs convertis au Christ
croyaient qu’on était tenu d’observer les
observances légales en même temps que
l’Evangile, comme on le voit dans les Actes.
L’Apôtre les appelle faibles dans la foi du
Christ, attendu qu’ils ne croyaient pas encore
parfaitement que la foi du Christ suffit au
salut. A Rome précisément, parmi les fidèles
du Christ, certains adhéraient à l’une et l’autre
opinion. L’Apôtre s’adresse donc aux parfaits
dans la foi, en disant : On a dit que vous devez
revêtir le Seigneur Jésus-Christ, aussi
accueillez, c’est-à--dire unissez-vous par
l’affection de la charité pour supporter celui
qui est faible dans la foi, comme on l’a
expliqué. On peut entendre dans ce sens ce
passage de la Sagesse : "Je suis un homme
faible et de peu de temps, et peu capable de
comprendre le jugement et les lois. " <Ou ce
que l’Apôtre écrit> plus loin <dans cette
même épître> : "Accueillez-vous les uns les
autres, comme le Christ vous a accueillis pour
l’honneur de Dieu." <Enfin ce passage de>
l’Ecclésiastique : "A cause du
commandement, accueillez le pauvre." Et
cela, sans discuter sur les opinions, c’est-à-
dire en ne discutant pas le fait que l’un pense
à l’encontre de l’autre, en ce sens que tandis
que ceux qui observaient les observances
légales jugeaient comme transgresseurs ceux
qui ne les observaient pas, et que ceux qui ne
les observaient pas méprisaient comme égarés
et ignorants ceux qui les observaient : "Leurs
pensées tour à tour les accusant, ou même les
défendant."
1083. — II. En ajoutant992
: Car l’un croit
manger, etc., <l’Apôtre> explique ce qu’il
avait dit. Et :
A) Il montre d’abord qui sont les faibles dans
la foi.
B) Puis, comment il faut éviter les discussions
sur les opinions [n° 1089]
Que celui qui mange, etc.
1084. — A. Sur993
le premier point, il faut
considérer que parmi toutes les autres
992
Voir chap. 3, y. 22; leçon 3, n. 6, p. 175. 993
Lieux parallèles Somme Théologique 1a Q. 102, a. 6; Super Matth. 15, 11 (éd. Marietti, n° 1300-
1301); I Ad Tim. 4, 4, lect. 1 (éd. Marietti, n°’ 146 et 147); Ad Tit. 1, 15, lect. 4 (éd. Marietti, n° 38 à
43).
est secundum naturam, sed significatione est
malum, sicut porcus, qui significat
immunditiam. Et ideo prohibitus est antiquis
esus illarum carnium, ut significaretur in
eorum vitatione vitatio immunditiae. Tota
enim illius veteris populi vita figuralis erat,
ut Augustinus dicit in libro contra Faustum.
Veniente autem Christo qui est veritas,
cessaverunt figurae. Subdit autem quantum
ad infirmum qui autem infirmus est, olus
manducet, quasi dicat : illis cibis utatur
quibus non occurrit aliquod immundum in
lege prohibitum. In singulis enim generibus
animalium, puta terrestribus, volatilibus et
aquaticis, quaedam genera erant concessa et
quaedam prohibita; sed in herbis et
arboribus nihil erat prohibitum, ut patet
Levit. XI, T. Et huius potest esse ratio
duplex. Una est quia terrae nascentia fuerunt
a principio concessa homini ad edendum,
secundum illud Gen. I, 29. — ecce dedi
vobis omnem herbam afferentem semen
super terram, et universa ligna quae habent
in semetipsis sementem generis sui, ut sint
vobis in escam. Sed post diluvium primo
legitur homini concessus carnium esus.
Unde dicitur Gen. IX, 3. — quasi olera
virentia tradidi vobis omnia, scilicet
animalium genera. Alia ratio est, quia
primam prohibitionem de abstinendo a
quibusdam terrae nascentibus homo in
observances légales il y en avait une <qui
consistait> dans le discernement des aliments;
car certains aliments étaient défendus dans la
Loi, comme on le voit au chapitre 11 du
Lévitique ; et chaque jour on devait appliquer
ou ne pas appliquer cette observance. Voilà
pourquoi l’Apôtre a fait spécialement mention
de cela, en disant : Car l’un d’entre vous, à
savoir celui qui est parfait dans la foi, croit
pouvoir licitement manger de tout, parce qu’il
ne se croit pas astreint aux observances
légales." Ce n’est pas ce qui entre dans la
bouche qui souille l’homme; mais ce qui sort
de la bouche, voilà ce qui souille l’homme."
Et : "Toute créature de Dieu est bonne, et on
ne doit rien rejeter de ce qui se prend avec
actions de grâces, parce qu’il est sanctifié par
la parole de Dieu et par la prière."
1085. — Si994
dans la Loi ancienne certains
aliments étaient défendus, ce n’est point qu’ils
fussent impurs par nature; car de même que
dans le langage le mot "insensé" signifie
quelque chose de mauvais, bien qu’en lui-
même ce mot soit bon, ainsi, dans les choses,
tel animal est bon selon sa nature, mais est
mauvais par sa signification : par exemple le
porc, qui signifie quelque chose d’impur. Et
l’usage de ces chairs fut interdit dans les
temps anciens, afin de signifier dans leur
abstention même qu’il fallait éviter toute
impureté995
. Toute la vie de cet ancien peuple
994
Lieux parallèles : Somme Théologique 1a-2ae, Q. 102, a. 6, sol. 1; 3a, Q. 40, a. 4, sol. 2. 995
Nous dirions aujourd’hui que saint Thomas nous invite à ne pas confondre le signe et son référent,
ou encore, d’une manière moins abstraite, les mots et les choses. Ce n’est pas parce qu’il désigne une
chose mauvaise qu’un mot est mauvais. La "bonté " d’un mot s’apprécie en fonction de critères
linguistiques " insensé " est un "bon " mot parce qu’il est construit selon les règles de la formation des
adjectifs è signification négative. De même, lorsque ce ne sont plus les mots qui signifient, mais les
choses elles-mêmes qui sont prises comme symboles d’autres réalités le symbolisant, considéré dans
sa nature propre, c’est-à-dire en tant précisément qu’il ne symbolise pas, ne participe pas
nécessairement de la qualité de ce qu’il symbolise par ailleurs : le porc n’est pas nécessairement impur
sous prétexte qu’il symbolise l’impureté dans certaines cultures. Cependant on ne doit pas forcer la
séparation entre la nature propre de la chose prise comme symbole et ce qu’elle symbolise, comme si
l’institution culturelle qui fait de cette chose un symbole agissait d’une manière purement arbitraire. Il
faut bien que la signification symbolique conférée à la chose y trouve un certain fondement. C’est le
cas, par exemple, pour les éléments sensibles utilisés dans les sacrements. D’une manière générale,
c’est toute la création qui, en elle-même, nous parle de Dieu parce qu’elle est porteuse de ses vestiges;
mais, sans la grâce du Christ, la création, sacrée en elle-même, ne peut nous sanctifier : "les créatures
sensibles signifient quelque chose de sacré, à savoir la sagesse et la bonté divines, en tant qu’elles sont
sacrées en elles-mêmes mais non en tant qu’elles servent à notre sanctification" (5. Th. V, Q. 60, a. 2,
sol. 1).
Paradiso transgressus fuerat, ut patet Gen.
III, T.; et propter hoc non erat ei similis
prohibitio iteranda. Sed cum legalia
cessaverunt in Christi passione, videtur
quod inconvenienter apostolus infirmis in
fide permittat quod a cibis prohibitis in lege
abstineant, quod nunc in Christianis non
sustinetur ab Ecclesia. Sed distinguendum
est triplex tempus, secundum Augustinum,
quantum ad legalia. Quorum primum est
tempus ante passionem Christi, in quo
legalia suum robur obtinebant quasi adhuc
viventia. Secundum autem tempus est post
passionem Christi ante divulgationem
Evangelii, in quo quidem tempore legalia
mortua erant, quia nullus ad ea tenebatur,
nec observata aliquid conferebant alicui,
nondum tamen erant mortifera, quia sine
peccato poterant Iudaei ad Christum
conversi legalia observare : et pro illo
tempore loquitur hic apostolus. Tertium
autem tempus est post divulgationem
Evangelii, in quo legalia non solum sunt
mortua sed mortifera, ut quisquis ea
observet, peccet mortaliter. Exponitur autem
et aliter in Glossa, ut dicatur infirmus qui est
ad lapsus vitiorum carnalium pronus, et huic
consulendum est quod comedat olus, id est,
tenues et aridos cibos qui non sunt
fomentum vitiorum, et abstineat ab illis
quibus excitatur libido. Sed alius qui est
fortior credit se absque periculo posse
omnia manducare. Et haec differentia
apparet inter discipulos Christi qui non
ieiunabant, tamquam confortati praesentia
Christi et discipulos Ioannis Baptistae qui
ieiunabant. Unde et poenitentiam agentes a
quibusdam cibis abstinent non propter
eorum immunditiam, sed ad libidinem
refrenandam. Deinde, cum dicit is qui
manducat, etc., exponit quomodo sunt
vitandae disceptationes cogitationum. Et
primo quantum ad perfectos, dicens is qui
manducat, scilicet cum secura conscientia
était en effet une figure, comme le remarque
Augustin dans son ouvrage Contre Faustus996
;
mais à l’avènement du Christ, lui qui est la
vérité, les figures cessèrent.
1086. — <L’Apôtre> ajoute pour celui qui est
faible tandis que le faible ne mange que des
légumes, autrement dit, qu’il fasse usage des
aliments dans lesquels ne se rencontre pas
quelque chose d’impur et de défendu par la
Loi. Car dans chaque sorte d’animaux, par
exemple chez ceux qui vivent sur la terre,
dans les airs et dans les eaux, certaines
espèces étaient permises et d’autres
défendues; mais dans les herbes et dans les
arbres rien n’était interdit, comme on le voit
au chapitre 11 du Lévitique. Il peut y avoir à
cela deux raisons :
1. La première, c’est que les plantes de la
terre furent dès le commencement permises à
l’homme pour s’en nourrir, selon ce passage
de la Genèse : "Voici que je vous donne toute
herbe portant de la semence sur la terre, et
tous les arbres ayant en eux-mêmes la
semence de leur espèce, pour être votre
nourriture." Mais on lit qu’après le déluge
l’usage <de manger> de la chair fut pour la
première fois permis à l’homme. D’où ce qui
est dit dans la Genèse : "De même que les
légumes verts, je vous ai donné toutes ces
choses ", à savoir <toutes> les espèces
d’animaux.
2. La seconde raison, c’est que la première
défense de s’abstenir de certaines plantes de
la terre ayant été transgressée par l’homme en
paradis, comme on le voit au chapitre 3 de la
Genèse, il n’y avait donc pas lieu de réitérer
une semblable défense.
1087. — Mais997
puisque les observances
légales cessèrent au moment de la passion du
Christ, il semble qu’il soit inconvenant de la
part de l’Apôtre de permettre aux faibles dans
la foi de s’abstenir des aliments défendus par
la Loi, étant donné que cette défense n’est
plus maintenue actuellement par l’Eglise pour
996
Voir SAINT AUGUSTIN, Contra Faustum 1V, 2 (PL 42, 217-220; CSEL 25/1, 268-271); VI, 2
(PL 42, 227-228; CSEL 25/1, 285-286); VI, 7 (PL 42, 233-234; CSEL 25/1, 294-296). 997
Lieu parallèle Somme Théologique 1a-2ae Q. 103, a. 4, sol. 1.
omnia vel etiam sine periculo libidinis, non
spernat non manducantem, scilicet
indifferenter omnia, tamquam infirmum in
fide, vel quasi pronum ad vitia. Is. XXXIII,
v. 1. — vae qui spernis, nonne et ipse
sperneris ? Lc. X, 16. — qui vos spernit, me
spernit. Secundo loquitur quantum ad
infirmos, dicens et qui non manducat,
scilicet indifferenter omnia, vel quia est
infirmus in fide, de quo loquitur apostolus,
vel etiam quia pronus est ad libidinem, non
iudicet manducantem, scilicet indifferenter
omnia, quasi transgressorem legis, vel quasi
in libidinem praecipitem. Matth. VII, 1. —
nolite iudicare, et non iudicabimini. Supra
II, 1. — inexcusabilis es, o homo omnis qui
iudicas. Deinde cum dicit Deus enim illum
assumpsit, etc., assignat tres rationes propter
quas debemus a falso iudicio abstinere.
Secunda ponitur, ibi suo domino, etc.; tertia,
ibi tu autem qui iudicas, et cetera. Prima
ratio sumitur ex auctoritate iudicantis. Unde
primo ostendit hanc charitatem Deo
competere; secundo concludit quod
les chrétiens. Touchant ces observances
légales, il faut distinguer, selon Augustin998
,
trois périodes. La première, c’est le temps qui
précède la passion du Christ, où ces
observances légales étaient en vigueur et
étaient alors encore vivantes. La deuxième
période est celle qui s’est écoulée après la
passion du Christ, avant la diffusion de
l’Evangile; pendant cette période les
observances légales étaient frappées de mort,
puisque personne n’y était tenu et qu’elles ne
profitaient à personne; cependant elles ne
causaient pas encore la mort, car les Juifs
convertis au Christ pouvaient observer ces
prescriptions sans <commettre de> péché.
C’est de cette période que parle ici l’Apôtre.
La troisième période est celle qui s’écoule
après la promulgation de J’Evangile, période
pendant laquelle les observances légales non
seulement sont mortes, mais causent la mort,
de telle sorte que les observer, c’est pécher
mortellement999
.
1088. — La Glose1000
donne une autre
explication à ce passage. Elle dit : Le faible,
998 Voir SAINT AUGUSTIN, Lettre LXXXII, ii, 14-15 (PL 33, 281-282; CSEL 34/2, 363-364).
999
Comme on sait, et comme l’a montré Max Seckier dans son étude déjà citée (Das Heu in der
Geschichte. Ceschichttheologisches Denken bei Thomas von Aquin, 1964, traduit sous le titre Le Salut
et l’Histoire), saint Thomas n’est nullement celui qui aurait substitué à la conception cyclique du
temps celle d’un " ordre linéaire", malgré ce que semble affirmer Etienne Gilson (L’Esprit de la
philosophie médiévale, p. 369). L’ordre du créé est entraîné dans un processus " circulaire " En effet,
c’est lorsqu’il fait retour à son principe qu’un effet est souverainement parfaït. Ainsi le cercle, parmi
toutes les figures, et le mouvement circulaire, parmi tous les mouvements, sont souverainement
parfaits parce que en eux se réalise le retour au principes (2 Contra Gentiles c. 46). Et encore "La fin
des choses correspond à leur principe. C’est Dieu, en effet, qui est le principe et la fin des choses. Et
donc, la sortie des choses hors du principe correspond à leur retour vers leur fin" (5. Th. P, Q. 90, a. 3,
obj. 2). Mais cette histoire de l’univers n’exclut pas l’histoire du salut dont le pivot est l’avènement du
Christ qui ordonne, au sein de ce processus circulaire, la succession linéaire des âges où le Fils et
l’Esprit accomplissent leur œuvre de réunification du genre humain au Père, activité qui retrace et
prolonge dans l’ordre du créé le mouvement éternel de la circumincession trinitaire (1 Sentences dist.
14, Q. 2, a. 2 in corpore). Quant à la succession des âges, saint Thomas reprend la doctrine paulinienne
des trois ou quatre âges (Rm 5, 14). Il distingue donc trois états : l’état de nature, l’état de grâce, l’état
de gloire. L’état de nature correspond au temps avant la Loi (tempus ante legem); l’état de grâce se
subdivise en deux temps le temps de la Loi (tempus sué lege qui va de Moïse au Christ); le temps de la
grâce (tempus sub gratia qui va du Christ du premier avènement à celui du second); enfin l’état de
gloire, qui est également le temps de la grâce triomphante (Somme Théologique 2a-2ae, Q. 176, a. 6).
Ici (n° 1087), la division des temps — qui ne contredit pas la précédente mais qui y introduit des
subdivisions complémentaires — est faite du point de vue des observances de la Loi ancienne, selon
qu’elles sont néces saires (de Moïse au Christ), inutiles mais permises (époque évangé lique), nuisibles
et interdites (époque postévangélique, entrée des païens dans la foi). 1000
Voir Glosa in Rom. XIV, 2 (GPL, col. 1512 B).
iudicium ad homines non pertinet, ibi tu
quis es, et cetera. Dicit ergo primo : recte
dictum est quod qui non manducat
manducantem non iudicet, Deus enim
assumpsit illum, scilicet in servum a se
iudicandum. Zac. XI, 7. — assumpsi mihi
duas virgas, id est duos populos. Ps. XVII,
17. — assumpsit me de aquis multis. Ille
autem qui assumitur ad superioris iudicium,
non debet ab inferiori iudicari. Et ideo
concludit tu quis es, id est, cuius auctoritatis
vel virtutis es, qui iudicas alienum servum ?
Id est proximum tuum, qui est servus Dei ?
Requiritur enim in iudicante auctoritas,
secundum illud Ex. II, v. 14. — quis
constituit te principem et iudicem super nos
? Et, Lc. XII, 14. — quis me constituit
iudicem aut divisorem super vos ? Sed ex
hac ratione sequi videtur hominis iudicium
de alio homine esse illicitum. Sed dicendum
est quod intantum hominis iudicium licitum
est, inquantum agitur auctoritate concessa
divinitus. Unde dicitur Deut. c. I, 16. —
audite illos, et quod iustum est iudicate, et
postea sequitur quia Dei est iudicium, id est
auctoritate divina agitur. Si quis vero velit
sibi usurpare iudicium super ea quae non
sunt ei divinitus concessa ad iudicandum,
est iudicium temerarium, sicut si quis iudex
delegatus a Papa vellet in iudicando
transgredi mandati fines. Deus autem soli
sibi reservavit iudicare occulta, quae
praecipue sunt cogitationes cordium et
futura. Et ideo si quis de his iudicare
praesumpserit, est temerarium iudicium.
Unde Augustinus dicit in libro de sermone
domini in monte : in his duobus temerarium
est iudicium, cum videlicet incertum sit quo
animo quid factum sit; vel incertum qualis
futurus sit qui nunc vel bonus vel malus
apparet. Deinde cum dicit suo domino stat,
aut cadit, etc., ponit secundam rationem,
quae quidem sumitur ex fine meriti vel
demeriti. Posset aliquis dicere quod licet
homo non habeat iudiciariam auctoritatem,
tamen intromittere se debet iudicio alterius
propter damnum vel fructum qui inde
provenit; sed apostolus ostendit hoc ad
Deum magis quam ad homines pertinere. Et
sic etiam propter hoc debemus Deo
c’est-à-dire celui qui est enclin à succomber
aux vices de la chair, à celui-là il faut
conseiller de manger des légumes, c’est-à-dire
des aliments légers et secs, qui ne stimulent
pas les vices, et de s’abstenir de ceux qui
excitent le désir charnel. Mais un autre, qui
est plus fort, croit qu’il peut manger de tout
sans danger. Cette différence apparaît entre
les disciples du Christ qui ne jeûnaient pas,
fortifiés qu’ils étaient par la présence du
Christ, et les disciples de Jean-Baptiste qui
jeûnaient. C’est ainsi que ceux qui font
pénitence s’abstiennent de certains aliments
non à cause de l’impureté de ces aliments,
mais pour réprimer le désir charnel.
1089. — B. En ajoutant : Que celui qui
mange, etc., <l’Apôtre> explique comment il
faut éviter les discussions d’opinions.
1. Et premièrement, quant aux parfaits, en
disant : Que celui qui mange, etc., toutes
choses avec une conscience tranquille, ou
encore sans danger <d’exciter> le désir
charnel, ne méprise pas celui qui ne mange
pas, à savoir indifféremment de toutes choses,
en tant que faible dans la foi ou enclin aux
vices : "Malheur à toi qui méprises, est-ce que
toi-même tu ne seras pas méprisé ?" Et encore
: "Qui vous méprise me méprise; mais qui me
méprise méprise celui qui m’a envoyé."
2. Et deuxièmement, il parle en s’adressant
aux faibles : et que celui qui ne mange pas,
etc., à savoir indifféremment de toutes choses,
soit parce qu’il est faible dans la foi, comme
celui dont parle l’Apôtre, soit aussi parce
qu’il est enclin au désir charnel, ne juge pas
celui qui mange, à savoir indifféremment de
toutes choses, comme transgressant la Loi et
donnant libre cours au désir de la chair : "Ne
jugez pas pour n’être pas jugés." Et : "Tu es
inexcusable, ô homme, qui que tu sois, toi qui
juges "
1090. — III. Lorsque <l’Apôtre> dit car Dieu
l’a accueilli, etc., il donne trois raisons pour
lesquelles nous devons nous abstenir de faire
un faux jugement
A) <La première raison se fonde sur l’autorité
de celui qui juge. >
B) La deuxième raison est exposée à ces mots
[n° 1094] : <cela regarde> son maître, etc.
C) La troisième, <à ces autres mots> [n°
proximorum iudicia relinquere, nisi
inquantum vice ipsius fungimur in
iudicando per auctoritatem nobis
commissam : circa hoc tria facit. Primo
proponit quod intendit; secundo
exemplificat, ibi nam alius iudicat, etc.;
tertio probat propositum, ibi qui sapit diem,
et cetera. Circa primum duo proponit. Primo
quod quidquid circa hominem accidit, ad
Deum pertinet, cum dicit suo domino stat,
scilicet recte agendo Ps. CXXI, 2. — stantes
erant pedes nostri in atriis tuis, Ierusalem;
aut cadit, scilicet peccando Amos V, 1. —
domus Israel cecidit, et non adiiciet ut
resurgat. Ponit autem sub disiunctione stat
aut cadit, propter incertitudinem, quia multi
videntur cadere qui stant, et e converso,
secundum illud Eccle. VIII, 10. — vidi
impios sepultos, qui cum adhuc viverent, in
loco sancto erant, et laudabantur in civitate
quasi iustorum operum. Loquitur autem hic
apostolus secundum similitudinem hominis
servi, ad cuius dominum pertinet omne quod
circa servum agitur. Nec intelligendum est
quod Deo aliquid proficiat vel noceat, si
homo stet aut cadat. Dicitur enim Iob
XXXV, 6. — si peccaveris, quid ei nocebis
? Porro si iuste egeris, quid ei donabis ?
Sed quantum ad homines, id quod iuste
agimus, ad gloriam Dei spectat. Matth. V,
16. — ut videant opera vestra bona, et
glorificent patrem vestrum qui in caelis est.
Quod autem cadimus peccando, est
hominibus occasio blasphemandi Deum.
Supra II, v. 24. — nomen Dei propter vos
blasphematur inter gentes. Vel quod dicit
suo domino stat, aut cadit, exponendum est
in iudicio domini sui. 1 Co c. IV, 4. — qui
iudicat me, dominus est. Secundo ostendit
quod hominis statum iudicare ad Deum
pertinet, dicens stabit autem. Quasi dicat : et
si aliquis nunc cadat per peccatum, tamen
potest esse quod iterum stabit. Et hoc
omnino implebitur, si est praedestinatus. Ps.
1105] : ‘° Mais toi, pourquoi juges-tu, etc.
A. La première raison se fonde sur l’autorité
de celui qui juge, aussi
1) <L’Apôtre> commence-t-il par montrer
que cette charité est due à Dieu.
2) Puis, il conclut que le jugement
n’appartient pas à l’homme [n° 1092] "Qui
es-tu, toi qui juges, etc.
1091. — 1. Il dit donc en premier lieu :
Il a été dit avec raison que celui qui ne mange
pas ne juge pas celui qui mange, car Dieu l’a
accueilli, comme un serviteur qu’il jugera lui-
même : "J’ai pris pour moi deux houlettes ",
c’est-à-dire deux peuples : "Il m’a retiré des
grandes eaux." Or celui qui est remis au
jugement d’un supérieur ne doit pas être jugé
par un inférieur.
1092. — 2. Voilà pourquoi <l’Apôtre>
conclut : 4 "Qui es-tu, c’est-à-dire de quelle
autorité ou de quelle puissance es-tu
<revêtu>, toi qui juges l’esclave d’autrui,
c’est-à-dire ton prochain qui est le serviteur
de Dieu ? Car dans celui qui juge est requise
l’autorité1001
, selon ces paroles de l’Exode :
"Qui t’a établi prince et juge sur nous." Et de
Luc : "Qui m’a établi juge sur vous, ou pour
faire vos partages ? "
1093. — Mais ne1002
semblerait-il pas
découler de cette raison que le jugement d’un
homme par un autre est illicite ?
Il faut répondre que le jugement de l’homme
est licite en tant qu’il est exercé en vertu de
l’autorité accordée par Dieu. D’où ce qui est
dit dans le Deutéronome : "Ecoutez-les et
jugez selon ce qui est juste." Et puis ce qui
suit : "Parce que c’est le jugement de Dieu ",
c’est-à-dire parce qu’il est exercé en vertu de
l’autorité divine. Si quelqu’un veut usurper le
jugement sur ce qui ne lui a pas été permis par
Dieu à cet effet, par exemple si un juge
délégué par le pape voulait dans son jugement
transgresser les limites de son mandat, c’est
un jugement téméraire. Or Dieu s’est réservé
à lui seul <le droit> de juger des choses
1001
Trois conditions sont requises pour qu’un jugement soit licite la première, qu’il procède d’un
sentiment de justice; la deuxième qu’il émane de l’autorité d’un supérieur; la troisième qu’il soit
proféré avec prudence. Voir Somme Théologique 2 Q. 60, a. 2; 3a, Q. 59, a. 1; Contra impugn. Dci
cuit. et reiig., c. 21; Ad Rom. 2, 1, lect. 1 (éd. Marietti, n° 174."); I Ad Cor. 4, 3-5, lect. 1 (éd. Marietti,
n° 190."). 1002
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2ae, Q. 60, a. 6; Q. 67, a. 1.
XL, 9. — numquid qui dormit non adiiciet
ut resurgat ? Mich. VII, 8. — ne laeteris,
inimica mea, quia cecidi, resurgam. Et
propter hoc si videmus aliquem manifeste
cadentem, non debemus eum despicere,
temerarie iudicando de eo quod numquam
resurget, sed magis debemus praesumere
quod iterum stabit, non ex consideratione
conditionis humanae, sed considerando
virtutem divinam. Unde cum dicit potens est
Deus statuere illum, propter eius bonitatem
praesumere debemus, quod iterum statuet
eum, Ez. III, 24. — ingressus est in me
spiritus, et statuit me supra pedes meos,
sicut et supra dictum est : si non
permanserint in incredulitate, inserentur;
potens enim est Deus iterum inserere illos.
Deinde, cum dicit nam alius iudicat, etc.,
exemplificat quod dictum est. Et, primo,
proponit diversitatem humanae sententiae,
dicens : ideo dico quod suo domino stat, aut
cadit, nam alius iudicat inter diem et diem,
id est iudicat inter unum diem et alium, ut
scilicet uno die abstineat et non alio. Quod
quidem videtur pertinere ad infirmum in
fide, qui reputat adhuc legalia esse
observanda. Dicitur enim Lev. c. XXIII, 27.
— decimo die mensis septimi dies
expiationum erit, affligetisque animas
vestras in eo. Et Iudith VIII, 6 dicitur quod
Iudith ieiunabat omnibus diebus vitae suae
praeter sabbata et Neomenias et festa domus
Israel. Alius autem iudicat omnem diem
indifferenter esse observandum quantum ad
caeremonialia legis, quae iam cessaverunt.
Unde hoc videtur pertinere ad eum qui est
perfectus in fide. Ps. CXLIV, 2. — per
singulos dies benedicam tibi. Potest hoc
etiam referri ad abstinentias quae fiunt
causa cohibendae libidinis, quibus omni die
aliqui vacant, puta qui perpetuo a carnibus
vel vino abstinent vel ieiunant, quidam
autem interpositis diebus abstinent et ab
abstinentia cessant, secundum illud Eccle. c.
III, 1. — omnia tempus habent. Secundo
ostendit haec omnia posse ad Dei gloriam
pertinere, dicens unusquisque in sensu suo
cachées, comme le sont en particulier les
pensées des cœurs et les choses futures. Et
c’est pourquoi si quelqu’un a la présomption
de juger de ces choses, <il fait> un jugement
téméraire. C’est ce qui fait dire à Augustin,
dans son ouvrage
Du sermon sur la montagne : "Un jugement
est téméraire sur deux points lorsqu’il y a une
incertitude sur l’intention avec laquelle une
action a été accomplie; ou bien lorsqu’il y a
une incertitude sur ce que sera l’action, qui
actuellement paraît bonne ou mauvaise1003
."
1094. — B. En disant Qu’il se tienne debout
ou qu’il tombe, <cela regarde> son maître,
etc., <l’Apôtre> expose la deuxième raison
qui se fonde sur la fin du mérite ou du
démérite. On pourrait dire que, bien que
l’homme n’ait pas l’autorité judiciaire,
cependant il se doit d’intervenir dans le
jugement d’autrui à cause du dommage ou du
fruit qui en résulte mais l’Apôtre montre que
cela appartient plutôt à Dieu qu’aux hommes.
Et c’est pourquoi nous devons laisser à Dieu
le jugement du prochain, à moins que nous ne
nous acquittions à sa place du jugement, par
l’autorité qu’il nous a conférée. Sur ce point,
<l’Apôtre> fait trois choses :
1) Il commence par exposer son intention.
2) Puis, il l’appuie par un exemple [n° 1097]
En effet, l’un juge, etc.
3) Enfin, il prouve sa proposition [n° 1099]
Celui qui a telle opinion sur les jours, etc.
1095. — 1. Sur le premier de ces points,
<l’Apôtre> expose deux choses :
D’abord, que tout ce qui arrive à l’homme est
du ressort de Dieu, lorsqu’il dit : <cela
regarde> son maître, qu’il se tienne debout,
c’est-à-dire en agissant avec droiture — "Nos
pieds se tenaient dans tes parvis, ô Jérusalem
" — ou qu’il tombe, c’est-à-dire en péchant :
"La maison d’Israël est tombée et il ne se
trouvera personne pour la relever."
<L’Apôtre> se sert d’une particule disjonctive
: Qu’il se tienne debout ou qu’il tombe, en
raison de l’incertitude car beaucoup semblent
tomber qui se tiennent debout, et vice versa,
selon cette parole de l’Ecclésiaste1004
: "J’ai
1003
SAINT AUGUSTIN, De sermone Domini in monte II, XVIII, 61 (CCL 35, 157). 1004
Voir Glosa in Rom. XIV, 4 (GPL, col. 1513 B).
abundet, id est suo sensui dimittatur.
Abundare enim in sensu suo est sensum
suum sequi. Eccli. XV, 14. — Deus ab
initio constituit hominem, et reliquit illum in
manu consilii sui. Vel in sensu suo, id est
secundum sensum suum studeat abundare
ad gloriam Dei, secundum illud 1 Co XIV,
12. — ad aedificationem Ecclesiae quaerite
ut abundetis. Sed hoc videtur locum habere
in his quae non sunt secundum se mala. In
his autem quae sunt secundum se mala, non
est homo suo sensui relinquendus. Quod
autem aliquis iudicet diem inter et diem,
videtur esse secundum se malum, secundum
primam expositionem. Dicitur enim Gal. IV,
10 s. : dies observatis, et menses, et
tempora, et annos, timeo ne sine causa
laboraverim in vobis. Et loquitur ibi ad
litteram de his qui dixerunt dies
observandos secundum caeremonias legis.
Sed dicendum, quod apostolus hic loquitur
secundum tempus illud in quo, Iudaeis ad
fidem conversis, licitum erat legalia
observare, ut dictum est. Sed quantum ad
secundam expositionem videtur esse
illicitum, quod dicit : alius iudicat omnem
diem. Sunt enim quidam dies in quibus non
est licitum ieiunare. Dicit enim Augustinus
in epistola ad Casulanum : quisquis diem
dominicum ieiunio decernendum esse
putarit, non parvo scandalo esset Ecclesiae,
nec immerito. Illis enim diebus quibus nihil
certi statuit Ecclesia vel Scriptura divina,
mos populi Dei et instituta maiorum, pro
lege tenenda sunt. Et in decretis dicitur D.
30. — si quis presbyter propter publicam
poenitentiam a sacerdote acceptam absque
alia necessitate die dominica pro quadam
religione ieiunaverit, sicut Manichaei,
anathema sit. Sed intelligendum est quod
hic apostolus loquitur quantum ad illas
abstinentias, quae quolibet die licite fieri
possunt absque dissonantia communis
consuetudinis, vel eorum quae sunt a
maioribus instituta. Deinde, cum dicit qui
sapit diem, etc., probat propositum, quod
vu des impies ensevelis, qui, lorsqu’ils
vivaient encore, étaient dans le lieu saint, et
qu’on louait dans la cité comme si leurs
œuvres eussent été justes." L’Apôtre emploie
ici la comparaison d’un esclave et d’un
maître, dont le pouvoir s’étend à tout ce qui
concerne son esclave. Il ne faut pas entendre
que, lorsque l’homme se tient debout ou qu’il
tombe, Dieu en tire quelque profit ou quelque
dommage; car il est dit au livre de Job "Si tu
pèches, en quoi lui nuiras-tu ? Et si tes
iniquités se multiplient, que feras-tu contre lui
? Mais si tu as agi justement, que lui
donneras-tu, ou que recevra-t-il de ta main ?"
Mais ce que nous faisons justement à l’égard
des hommes se rapporte à la gloire de Dieu
"Afin que <les hommes> voient vos bonnes
œuvres et qu’ils glorifient votre Père qui est
dans les cieux." Mais lorsque nous tombons
en péchant, <nous donnons> aux hommes
l’occasion de blasphémer Dieu "le Nom de
Dieu est blasphémé à cause de vous parmi les
nations." Ou bien1005
, ces paroles <de
l’Apôtre> : <cela concerne> son maître, qu’il
se tienne debout ou qu’il tombe, doivent se
référer au jugement de son Maître : "Celui qui
me juge, c’est le Seigneur "
1096. — Puis, <l’Apôtre> montre qu’il
appartient à Dieu de juger l’état de
l’homme1006
, en disant : mais il se tiendra
debout; comme s’il disait Si quelqu’un tombe
maintenant par le péché, il peut arriver
cependant qu’il tienne de nouveau debout. Ce
qui s’accomplira absolument s’il est
prédestiné1007
. — "Est-ce que celui qui dort ne
continuera pas à se relever ?"
Et encore : "Ne te réjouis pas sur moi, mon
ennemie, parce que je suis tombée; je me
relèverai lorsque je me serai assise dans les
ténèbres." Donc quand nous voyons
quelqu’un tomber manifestement, nous ne
devons pas le mépriser en jugeant
témérairement à son égard qu’il ne se relèvera
jamais, mais nous devons plutôt être sûrs qu’il
se tiendra de nouveau debout, non en
considérant la condition humaine mais bien la
1005
Voir Glosa in Rom. XIV, 4 (GPL, coI. 1513 B). 1006
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2a Q. 33, a. 2, sol. I; Q. 60, a. 4. 1007
Voir Glosa in Rom. XIV, 4 (GPL, col. 1513 C).
scilicet unusquisque suo domino stet aut
cadat : et hoc tripliciter. Primo per actum
fidelium; secundo per intentionem eorum,
ibi nemo enim vestrum, etc.; tertio per
eorum conditionem, ibi sive ergo vivimus,
sive morimur, et cetera. Probat ergo primo
quomodo unusquisque fidelium suo domino
stat aut cadit, per hoc quod de omnibus quae
fecit secundum suam conscientiam gratias
agit Deo. Unde dicit qui sapit diem, ut
scilicet uno die abstineat et alio die ab
abstinentia cesset, domino sapit, id est ad
reverentiam Dei cibos discernit, sicut etiam
nos discernimus vigilias festorum in quibus
ieiunamus, a diebus festis quibus ieiunium
solvimus propter reverentiam Dei. Eccli.
XXXIII, 7. — quare dies diem superat, et
iterum lux lucem. Deinde loquitur quantum
ad illos qui iudicant omnem diem, quorum
quidam omni die a ieiunio cessabant, sicut
dicitur Matth. c. IX, 14 quod discipuli
Christi non ieiunabant. Unde dicit et qui
manducat, scilicet omni die, domino
manducat, id est ad gloriam domini, quod
per hoc patet, gratias enim agit Deo, scilicet
de cibo assumpto. I Tim. IV, 3. — abstinere
a cibis quos Deus creavit ad percipiendum
cum gratiarum actione fidelibus. Ps. XXI,
27. — edent pauperes et saturabuntur, et
cetera. Ulterius quantum ad eum qui sic
iudicat omnem diem, ut scilicet omni die
abstineat, subdit et qui non manducat, id est
abstinet omni die, domino, id est, ad
honorem domini, non manducat. Et hoc
patet per hoc quod gratias agit Deo qui sibi
dedit voluntatem, et virtutem abstinendi. I
Thess. ult. : in omnibus gratias agite. Sed
quod hic dicit apostolus de his qui omni die
vel abstinebant vel ab abstinentia cessabant,
debet intelligi quantum ad illud tempus in
quo hoc non erat contrarium statutis
maiorum, nec communi consuetudini populi
Dei. Deinde cum dicit nemo enim vestrum
sibi vivit, etc., probat idem ex intentione
puissance divine. Aussi, lorsque <l’Apôtre>
dit : car Dieu est puissant pour le maintenir,
nous devons être sûrs que par sa bonté il le
rétablira : "Un esprit entra en moi et m’établit
sur mes pieds." Et selon ce qui a été dit plus
haut : "s’ils ne demeurent pas dans
l’incrédulité, ils seront entés; car Dieu est
puissant pour les enter de nouveau."
1097. — 2. En ajoutant : 5 En effet, l’un juge,
etc., <l’Apôtre> appuie par un exemple ce qui
a été dit.
Et d’abord, il expose la diversité de l’opinion
humaine, en disant : Je dis donc qu’il se
tienne debout ou qu’il tombe, <cela regarde>
son maître, [...], en effet, l’un juge entre jour
et jour, c’est-à-dire entre un jour et un autre
jour, à savoir pour s’abstenir tel jour et non
pas tel autre. Ce qui semble s’appliquer au
faible dans la foi, qui croit qu’il faut encore
observer les prescriptions légales. Car il est
dit dans le Lévitique : "Au dixième jour de ce
septième mois, sera le jour très solennel des
expiations et il sera appelé saint; or vous
affligerez vos âmes en ce jour et vous offrirez
un holocauste au Seigneur." Et dans le livre
de Judith que cette dernière "jeûnait tous les
jours de sa vie, excepté les sabbats, les
néoménies1008
et les fêtes de la maison
d’Israël." — Tandis que l’autre les juge tous
pareils, c’est-à-dire qu’il faut observer
indifféremment les cérémonies de la Loi,
lesquelles ont déjà cessé <d’obliger>. Cela
semble donc s’appliquer à celui qui est parfait
dans la foi : "Chaque jour je te bénirai, et je
louerai ton Nom dans les siècles et dans les
siècles des siècles." On peut aussi rapporter ce
passage aux abstinences qui se pratiquent
pour réprimer les désirs charnels, abstinences
auxquelles certains vaquent tous les jours, par
exemple ceux qui s’abstiennent ou jeûnent
perpétuellement de viande et de vin, tandis
que d’autres le font à certains intervalles, et
cessent <ensuite> leur abstinence, selon ce
passage de l’Ecclésiaste : "Toutes choses ont
1008
La néoménie est le premier jour du mois, marqué par l’appa rition du premier croissant lunaire et
célébré par des sacrifices et des oblations. On s’abstenait ce jour-là de tout travail (voir André-Marie
GERARD, Dictionnaire de la Bible, p. 992-993).
fidelium. Et, primo, excludit inordinatam
intentionem, dicens : recte dico quod
unusquisque domino suo stat aut cadit,
nemo nostrum sibi vivit vel naturali vita vel
spirituali, de qua dicitur Hab. II, 4. — iustus
autem meus ex fide vivit. Sibi, id est propter
seipsum, quia hoc esset frui seipso. 1 Co X,
33. — non quaerens quod mihi utile est. Ps.
CXIII, 9. — non nobis, domine, non nobis,
etc.; vel sibi, id est, secundum suam
regulam, sicut qui dicunt Sap. II, 11. — sit
fortitudo nostra lex iniustitiae; vel sibi, id
est suo iudicio, 1 Co c. IV, 3. — sed neque
meipsum iudico. Et nemo moritur, scilicet
morte corporali vel morte spirituali
peccando, vel etiam morte spirituali qua
quis moritur vitiis, puta in Baptismo,
secundum illud supra VI, 7. — qui mortuus
est iustificatus est a peccato; vel sibi, id est
suo iudicio, vel propter seipsum aut suo
exemplo; sed exemplo Christi moritur
aliquis a vitiis. Rom. VI, 10. — quod enim
mortuus est peccato, mortuus est semel; et
infra : ita et vos existimate vos mortuos esse
peccato. Secundo ostendit qualis sit recta
intentio fidelium, dicens sive enim vivimus,
vita corporali, domino vivimus, id est ad
gloriam domini; sive morimur, morte
corporali, domino morimur, id est ad
honorem domini. Phil. I, 20. —
magnificabitur Christus in corpore meo sive
per mortem sive per vitam. Vel sic
exponatur quod dicit vivimus et morimur de
vita et morte spirituali, exponendum est
quod dicit domino, id est iudicio domini qui
constitutus est a Deo iudex vivorum et
mortuorum, ut dicitur Act. X, 42. Deinde
cum dicit sive ergo vivimus, etc., ostendit
propositum ex conditione fidelium. Et,
primo, concludit ex praemissis conditionem
fidelium, scilicet quod non sunt sui, sed
alterius. Illi enim qui sui sunt, sicut liberi
homines, sibi vivunt et sibi moriuntur. Quia
ergo dictum est quod fideles non sibi vivunt
aut moriuntur sed domino, concludit sic sive
ergo vivimus, sive morimur, domini sumus,
quasi servi eius qui habet potestatem vitae et
leur temps."
1098. — <L’Apôtre>1009
montre ensuite que
toutes ces pratiques peuvent se rapporter à la
gloire de Dieu, en disant : Que chacun abonde
en son sens, c’est-à-dire soit laissé à son
propre sens. Car abonder en son sens, c’est
suivre son propre sens : "Dieu, dès le
commencement, a créé l’homme et il l’a
laissé dans la main de son propre conseil." Ou
bien : en son sens, c’est-à-dire que <chacun>
selon son sens propre s’applique à s’enrichir
pour la gloire de Dieu, suivant cette parole
<de Paul> aux Corinthiens : "Puisque vous
désirez si ardemment les dons spirituels, faites
que pour l’édification de l’Eglise vous en
abondiez." Cependant cette règle ne semble
valable que pour les choses qui ne sont pas
mauvaises en soi; en revanche, dans les
choses qui sont mauvaises en soi, l’homme ne
doit pas être laissé à son sens propre. Or juger
entre jour et jour semble mauvais en soi,
suivant la première explication; car il est dit
"Vous observez certains jours, certains mois,
certains temps et certaines années. Je crains
pour vous d’avoir en vain travaillé parmi
vous." Dans ce passage, <l’Apôtre> parle à la
lettre de ceux qui soutiennent que des jours
doivent être fixés pour <pratiquer> les
cérémonies de la Loi.
Mais il faut dire que l’Apôtre parle ici du
temps pendant lequel il était licite aux Juifs
convertis à la foi d’observer les prescriptions
légales, comme on l’a dit [n° 1087].
Cependant, quant à la seconde explication, il
semble que ce qu’il dit : l’autre les juge tous
pareils, soit illicite. En effet, il est certains
jours où il n’est pas licite de jeûner. C’est
ainsi qu’Augustin déclare dans sa Lettre à
Casulanus "Quiconque penserait devoir
prendre la résolution de jeûner le jour du
dimanche ne donnerait pas qu’un léger
scandale à l’Eglise, et ce n’est pas sans raison.
En effet, à l’égard de ces jours sur quoi
l’Eglise ou l’Ecriture sainte ne statue rien de
certain, la coutume du peuple de Dieu et les
institutions des anciens doivent tenir lieu de
loi1010
." Et il est écrit dans les Décrets <de
1009
Lieux paralléles : Somme Théologique 2 Q. 147, a. 4; 4 Sentences dist. 15, Q. 3, a. 2. 1010
SAINT AUGUSTIN, Lettre XXXVI, iI, 2 (PL 33, 136 CSEL 34/2, 32).
mortis. 1 Co VII, 23. — pretio empti estis,
nolite fieri servi. 1 Co VI, 20. — empti enim
estis pretio magno. I Par. XII, 18. — tui
sumus, o David, et tecum, fili Isai. Secundo
assignat causam huius conditionis, dicens in
hoc enim Christus mortuus est, et resurrexit,
id est hoc adeptus est sua morte et
resurrectione, ut vivorum dominaretur, quia
resurrexit, vitam novam et perpetuam
inchoando, et mortuorum, quia mortem
nostram moriendo destruxit. 2 Co c. V, 15.
— pro quibus mortuus est Christus, ut qui
vivunt, iam non sibi vivant, sed ei qui pro
eis mortuus est, et resurrexit. Sic igitur per
omnia praedicta apostolus probavit, quod
unusquisque domino suo stat aut cadit, per
hoc scilicet quod fideles gratias agunt Deo,
et quod domino vivunt et moriuntur, et quod
domini sunt et in morte et in vita. Deinde
cum dicit tu autem quid iudicas, etc., ponit
tertiam rationem quae sumitur ex futuro
iudicio. Et circa hoc tria facit. Primo
proponit superfluitatem praesentis iudicii,
dicens tu autem quid iudicas ? Id est qua
utilitate vel necessitate iudicas, fratrem
tuum, temere de occultis, quae tuo iudicio
non sunt commissa ? Aut tu, alius qui
iudicaris, quare spernis fratrem tuum, pro
nullo reputans ab eo iudicari ? Mal. II, 10.
— quare despicit unusquisque fratrem suum
? Secundo praenuntiat futurum Christi
iudicium, quasi dicat : recte dico cur
iudicas, quia non debes timere quod absque
iudicio remaneat, omnes enim stabimus ante
tribunal Christi. Dicitur enim tribunal
Christi eius iudiciaria potestas, sicut et
Matth. c. XXV, 21 dicitur : cum venerit
filius hominis in maiestate sua, tunc sedebit
super sedem maiestatis suae. Dicit autem
omnes stabimus, quasi iudicandi, tam boni
quam mali, quantum ad remunerationem vel
punitionem. 2 Co V, v. 10. — omnes nos
manifestari oportet ante tribunal Christi, ut
referat unusquisque propria corporis prout
gessit, sive bonum sive malum. Sed quantum
ad discussionem non omnes stabunt ut
iudicandi, sed quidam consedebunt, ut
iudices. Matth. XIX, 28. — sedebitis super
Gratien> "Si un prêtre, en raison d’une
pénitence publique imposée par un prêtre, a
sans autre nécessité jeûné le dimanche en vue
d’une pratique religieuse, comme le font les
manichéens, qu’il soit anathème1011
." Mais il
faut comprendre que l’Apôtre parle ici de ces
abstinences qui peuvent se pratiquer
licitement tous les jours et sans rompre avec
l’usage commun ou avec les institutions des
anciens.
1099. — 3. Lorsque <l’Apôtre> dit : 6
Celui qui a telle opinion, etc., il prouve sa
proposition, à savoir que chacun se tienne
debout ou tombe, <cela regarde> son maître.
Et il prouve cela de trois manières :
a) D’abord, par la conduite des fidèles.
b) Puis, par leur intention [n° 1101] : En effet,
nul d’entre nous, etc.
c) Enfin, par leur condition [n° 1103] : Soit
donc que nous vivions, etc.
1100. — a. <L’Apôtre> prouve donc en
premier lieu comment chaque fidèle se tient
debout ou tombe pour son Maître, par le fait
qu’il rend grâces à Dieu de tout ce qu’il a fait
selon sa conscience. Aussi <Paul> dit-il :
Celui qui a telle opinion sur les jours, c’est-à-
dire celui qui un jour s’abstient et un autre
jour cesse de s’abstenir, le fait pour le
Seigneur, c’est-à-dire par respect pour Dieu
distingue les aliments, comme nous-mêmes
nous distinguons les veilles des fêtes en y
pratiquant le jeûne, des jours de fête où nous
rompons le jeûne par respect pour Dieu
"Pourquoi un jour est-il préféré à un jour, une
lumière à une lumière, et une année à une
année, venant <tous> du soleil ?" <L’Apôtre>
parle ensuite de ceux qui jugent tous les jours
pareils, et parmi ceux-ci certains ne
réservaient aucun jour au jeûne; ainsi, comme
on le rapporte dans <l’évangile de> Matthieu,
les disciples du Christ ne jeûnaient-ils point.
Aussi <l’Apôtre> dit-il : Et celui qui mange, à
savoir chaque jour, mange pour le Seigneur,
c’est-à-dire pour la gloire du Seigneur; ce que
manifestent les mots <qui suivent> : et il rend
grâces à Dieu, à savoir pour la nourriture qu’il
a prise : "<Ils ordonneront> de s’abstenir des
1011
GRATIEN, Décrets, première partie, dist. xxx, can. XVII, col. 110.
sedes, iudicantes duodecim tribus Israel.
Tertio, ibi scriptum est enim, etc., probat
quod dixerat. Et primo inducit auctoritatem;
secundo infert conclusionem, ibi itaque
unusquisque, et cetera. Dicit ergo primo :
dictum est quod omnes stabimus ante
tribunal Christi, et hoc patet per
auctoritatem sacrae Scripturae. Scriptum est
enim, Is. XLV, 23, vivo ego, dicit dominus :
quoniam mihi flectetur omne genu, et omnis
lingua confitebitur Deo. Littera nostra sic
habet : in memetipso iuravi, quia mihi
curvabitur omne genu et iurabit omnis
lingua. Tria autem in his verbis ponuntur.
Primo quidem iuramentum, quod interdum
in verbis Dei ponitur ad ostendendum id,
quod dicitur, firmum esse immutabilitate
divini consilii, non autem esse mutabile
sicut ea quae praenuntiantur secundum
causas inferiores, ut prophetia
comminationis. Unde dicitur in Ps. CIX, 4.
— iuravit dominus, et non poenitebit eum.
Homines autem, ut apostolus dicit Hebr. VI,
16. — per maiorem sui iurant. Quia vero
Deus non habet maiorem in quo maior
firmitas consistat veritatis, per seipsum
iurat. Ipse autem est ipsa vita et fons vitae,
secundum illud Deut. XXX, 20. — ipse est
enim vita tua, et longitudo dierum tuorum,
etc., Ps. XXXV, 10. — apud te est fons
vitae, etc.; et ideo forma iuramenti domini
est vivo ego, quasi dicat : iuro per vitam qua
ego singulariter vivo. Secundo praenuntiatur
subiectio communis creaturae ad Christum,
cum dicitur quoniam mihi, scilicet Christo,
flectetur omne genu. In quo designatur
perfecta subiectio rationalis creaturae ad
Christum. Solent enim homines in signum
subiectionis maioribus flectere genua. Unde
Phil. II, 10 dicitur : in nomine Iesu omne
genu flectatur caelestium, terrestrium et
Infernorum. Tertio praenuntiat fidei
confessionem qua omnes gloriam Christi
confitebuntur. Unde sequitur et omnis
lingua confitebitur Deo, id est confitebitur
aliments que Dieu a créés pour être reçus avec
actions de grâces par les fidèles et par ceux
qui ont connu la vérité." Et : "Les pauvres
mangeront et seront rassasiés; et ils loueront
le Seigneur, ceux qui le recherchent; leurs
cœurs vivront dans les siècles des siècles."
Enfin, <l’Apôtre> parle de celui qui juge tous
les jours pareils, c’est-à-dire qui s’abstient
chaque jour, et il ajoute : et celui qui ne
mange pas, c’est-à-dire celui qui s’abstient
tous les jours, le fait pour le Seigneur, en
d’autres termes ne mange pas pour honorer le
Seigneur1012
. Ce qui est une évidence
puisqu’il rend grâces à Dieu, qui lui a donné
la volonté et la force de s’abstenir : "Rendez
grâces en toutes choses."
En réalité, ce que l’Apôtre dit ici de ceux qui
tous les jours, ou pratiquaient l’abstinence, ou
ne la pratiquaient pas, doit s’entendre quant
au temps pendant lequel cette conduite ne
s’opposait pas aux institutions des anciens et
aux usages communs du peuple de Dieu.
1101. — b. Lorsqu’il ajoute : 7 En effet, nul
d’entre nous ne vit pour soi-même, etc.,
<l’Apôtre> prouve la même chose par
l’intention des fidèles.
Il commence par rejeter l’intention qui est
désordonnée : Je dis à juste titre que chacun
de nous se tient debout ou tombe pour son
Seigneur, car nul d’entre nous ne vit pour soi-
même, ni de la vie naturelle ni de la vie
spirituelle, dont il est dit : "Mais le juste vit de
la foi1013
." — Pour soi-même, c’est-à-dire en
vue de lui-même, parce que ce serait jouir de
soi-même : "Ne cher chant pas ce qui m’est
utile, mais ce qui est au grand nombre, afin
qu’ils soient sauvés." Et encore : "Non pas à
nous, Seigneur, non pas à nous, mais à ton
Nom donne gloire1014
." Ou : pour soi-même,
c’est-à-dire selon sa propre règle, comme
ceux qui disent, au livre de la Sagesse : "Que
notre force soit la loi de la justice." Ou encore
: pour soi-même, c’est-à-dire selon son propre
jugement : "Je ne me juge pas moi-même." —
Nul ne meurt, c’est-à-dire de la mort
1012
Voir Glosa in Rom. XIV, 6 (GPL, 1514 A). 1013
He 2, 4. Sur la variante vivi, au lieu de vivet, voir DOM SABATIER, Bibl. sacr., t. II (Notae ad
versionem antiquam), p. 964. 1014
Ps 113, 9 (numérotation de la Vulgate).
Christum esse dominum, secundum illud
Phil. II, 11. — omnis lingua confiteatur,
quia dominus noster Iesus Christus in gloria
est Dei patris. Omnis enim lingua intelligi
potest expressio cognitionis sive hominum,
sive Angelorum, secundum illud 1 Co XIII,
1. — si linguis hominum loquar et
Angelorum, et cetera. Hoc autem impletur
nunc in hac vita, non quantum ad singulos
homines sed quantum ad genera
singulorum. De quolibet enim genere
hominum nunc aliqui Christo subiiciuntur et
ei confitentur per fidem, sed in futuro
iudicio omnes et singuli ei subiicientur :
boni quidem voluntarie, mali autem inviti.
Unde dicitur Hebr. II, 8. — in eo quod ei
omnia subiecit, nihil dimisit non subiectum
ei : nunc autem necdum videmus omnia
subiecta ei. Deinde, cum dicit itaque
unusquisque, etc., infert conclusionem ex
dictis. Et primo conclusionem intentam ex
eo quod immediate dixerat, dicens itaque,
ex quo Christo flectitur omne genu,
unusquisque nostrum per se reddet rationem
Deo, scilicet ante tribunal Christi. Matth.
XII, v. 36. — de omni verbo otioso quod
locuti fuerint homines, reddent Deo
rationem in die iudicii. Et XVIII, 23. —
assimilatum est regnum caelorum homini
regi qui voluit rationem ponere cum servis
suis. Sed videtur quod non quilibet per se
rationem reddet, sed unus pro alio. Hebr.
ult. : obedite praepositis vestris et subiacete
eis. Ipsi enim pervigilant quasi rationem
reddituri pro animabus vestris. Sed
dicendum quod in hoc ipso quod praelati
pro aliis rationem reddent, reddent rationem
pro suis actibus quos circa subditos agere
debuerunt. Si enim fecerunt quod
competebat eorum officio, non eis
imputabitur si subditi pereant. Imputaretur
autem eis si negligerent facere quod eorum
officium requirebat. Unde dicitur Ezech. III,
18 s. : si dicente me ad impium, morte
morieris, non annuntiaveris ei, ipse in
corporelle ou de la mort spirituelle qu’est le
péché, ou bien1015
encore de la mort
spirituelle par laquelle on meurt aux vices,
ainsi dans le baptême, selon ce qui a été dit
plus haut : "celui qui est mort est justifié du
péché." Pour soi-même, c’est-à-dire soit à son
jugement, soit à cause de lui-même ou à son
exemple; mais c’est à l’exemple du Christ que
chacun meurt à ses vices : "Car en tant qu’il
est mort au péché, il est mort une fois pour
toutes." Et plus loin : "Ainsi de vous, estimez-
vous comme morts au péché, mais <ne>
vivant <plus que> pour Dieu dans le Christ
Jésus Notre Seigneur."
1102. Puis il montre quelle est la droite
intention des fidèles, en disant : 8 Car si nous
vivons, de la vie corporelle, nous vivons pour
le Seigneur, c’est-à-dire pour la gloire du
Seigneur; si nous mourons, de la mort
corporelle, nous mourons pour le Seigneur,
c’est-à-dire pour l’honneur du Seigneur "Le
Christ sera glorifié en mon corps, soit par ma
mort, soit par ma vie1016
." Ou bien si l’on
expose ces paroles : nous vivons et nous
mourons, en les appliquant à la vie et à la
mort spirituelle, alors ces mots : pour le
Seigneur, signifient au jugement du Seigneur,
"qui a été établi par Dieu juge des vivants et
des morts", comme le dit le livre des Actes.
1103. — c. En disant : Soit donc que nous
vivions, etc., <l’Apôtre> prouve sa
proposition par la condition <dans laquelle se
trouvent> les fidèles.
Et pour commencer, il déduit de ce qui
précède que leur condition est telle qu’ils ne
sont plus à eux-mêmes, mais à un autre. Car
ceux qui sont à eux-mêmes, comme le sont les
hommes libres, vivent et meurent pour eux-
mêmes. Or après avoir établi que les fidèles
ne vivent pas ou ne meurent pas pour eux-
mêmes, mais pour le Seigneur, <l’Apôtre>
conclut ainsi : Soit donc que nous vivions,
soit que nous mourions, nous sommes au
Seigneur, comme les esclaves de celui qui a
1015
Voir Glosa in Rom. XIV, 7 (GPL, col. 1514 G). 1016 Ph 1, 20. Pour la version citée ici, voir la Vetus latina, Epistula ad Philippenses, éd. H. J. Frede, vol.
XXIV/2, I fasc. 1, p. 71
iniquitate sua morietur, sanguinem autem
eius de manu tua requiram. Si autem tu
annuntiaveris impio, et ille non fuerit
conversus, ipse quidem in iniquitate sua
morietur, tu autem animam tuam liberasti.
Secundo infert conclusionem principaliter
intentam in tota praecedenti parte, dicens
non ergo amplius invicem iudicemus,
scilicet temerario iudicio, quod includitur
rationibus supradictis. 1 Co IV, 5. — nolite
ante tempus iudicare, et cetera.
pouvoir de vie et de mort : "Vous avez été
achetés à prix, ne vous rendez pas esclaves
des hommes." Et : "Vous avez été achetés à
grand prix." Et encore : "Nous sommes à toi,
ô David, et avec toi, ô fils d’Isaïe."
1104. — Puis <l’Apôtre> indique la cause de
cette condition, en disant : 9 C’est pour cela
même que le Christ est mort et qu’il est
ressuscité, c’est-à-dire ce qu’il a acquis par sa
mort et par sa résurrection c’est d’être le
maître des vivants, parce qu’en ressuscitant il
a commencé une vie nouvelle et perpétuelle,
et des morts, parce que en mourant il a détruit
notre mort : "Le Christ est mort pour tous,
afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour
eux, mais pour Celui qui est mort pour eux et
est ressuscité." Ainsi donc, par tout ce qui
précède, l’Apôtre a prouvé que chacun se
tient debout ou tombe pour son Seigneur,
étant donné que les fidèles rendent grâces à
Dieu, qu’ils vivent ou qu’ils meurent pour le
Seigneur, et qu’ils sont au Seigneur soit dans
la mort, soit dans la vie.
1105. — C. Lorsqu’il ajoute : 10 Mais toi,
pourquoi juges-tu, etc., <l’Apôtre> donne la
troisième raison qui se fonde sur le jugement
à venir. Et à ce propos il fait trois choses
1. Il expose en premier lieu l’inutilité du
jugement présent, en disant : Mais toi,
pourquoi juges-tu ?, c’est-à-dire quelle utilité
ou quelle nécessité y a-t-il pour toi de juger
ton frère témérairement sur des choses
cachées, qui ne sont pas laissées à ton
jugement ? Ou bien toi, qui seras jugé,
pourquoi méprises-tu ton frère, regardant
comme rien le fait d’être jugé par lui ? —
"Pourquoi donc chacun de nous méprise-t-il
son frère ? "
1106. — 2. En deuxième lieu, il annonce le
futur jugement du Christ, comme s’il disait :
Je dis avec raison pourquoi juges-tu <ton
frère>, puisque tu n’as pas à craindre qu’il
reste sans jugement ? Tous, en effet, nous
nous trouverons devant le tribunal du Christ.
On appelle tribunal du Christ son pouvoir
judiciaire1017
, ainsi qu’il est dit <dans
l’évangile de> Matthieu "Quand le fils de
l’homme viendra dans sa majesté, et tous les
1017
Lieu parallèle Somme Théologique 3 Q. 59.
anges avec lui, alors il s’assiéra sur le trône de
sa majesté." Et <l’Apôtre> dit : Tous nous
nous trouverons, comme pour être jugés, aussi
bien les bons que les méchants, et recevoir la
récompense ou la punition : "Nous devons
tous comparaître devant le tribunal du Christ,
afin que chacun reçoive le prix de ce qu’il
aura fait durant sa vie corporelle, soit en bien,
soit en mal1018
."
Mais quant au jugement de discussion1019
,
tous n’y comparaîtront pas pour être jugés,
car certains siégeront comme juges1020
—
"Vous serez assis sur douze trônes, jugeant les
douze tribus d’Israël"
1107. — 3. En troisième lieu, par ces mots :
11 Car il est écrit, etc., <l’Apôtre> prouve ce
qu’il avait dit.
a) Et il cite d’abord une autorité.
b) Puis, il en déduit une conclusion [n° 1112]
: Ainsi chacun de nous, etc.
1108. — a. On a dit que tous nous nous
trouverons devant le tribunal du Christ, et cela
est manifeste par l’autorité de la sainte
Ecriture; car il est écrit "Je vis, moi, dit le
Seigneur : tout genou fléchira devant moi, et
toute langue confessera Dieu1021
." Notre
version porte : "Par moi-même j’ai juré que
devant moi tout genou fléchira, et toute
langue jurera1022
."
1109. — Trois choses sont mentionnées dans
ces paroles :
— Premièrement le serment,1023
qui est
parfois utilisé dans les paroles de Dieu, pour
montrer que ce qui est dit <ainsi> est assuré
par l’immutabilité du conseil divin et non pas
1018
2 Corinthiens 5, 10. — Lieu parallèle " II Ad Cor. 5, 10, lect. 2 (éd. Marietti, n° 170-172). 1019
Le jugement de discussion désigne, dans le Jugement final, le moment où sont discutés les mérites
ou les démérites de tous ceux qui ne sont pas morts parfaitement purifiés. Si donc tous tes hommes
seront soumis au jugement "de sanction" par la sentence duquel ils seront ou élus ou réprouvés, tous
ne seront pas soumis au jugement de discussion. Seuls le seront les élus non parfaitement purifiés et
les damnés, afin que, dans l’un et l’autre cas, soit mani festée la justice divine. — Lieux parallèles " 5.
Th., Suppi., Q. 89, a. 6 et 7; Compend. theol., c. 243; Super Psalmos, in Ps. 1, 5; 5, 1 lb; 42, 49, 7-16;
Super Ioan. 3, 17 et l8b, lect. 3 (éd. Marietti, n° 483 et 488); 5, 24, lect. 4 (éd. Marietti, n° 776); Super
Matth. 25, 32 (éd. Marietti, n° 2084); I Ad Cor. 5, 13, lect. 3 (éd. Marietti, n° 261); II ‘ Cor. 5, 10, lect.
2 (éd. Marietti, n° 171); Ad Hebr. 10, 30, lect. 3 (éd. Marietti, n° 533). 1020
Lieux parallèles S. Th., Suppi., Q. 89, a. 1; 4 Sentences dist. 47, Q. 1, a. 2, q 1." ; Compend. theol.,
c. 245; Super Psalmos, in Pc. 49; 1 Ad Cor. 6, 1-6, lect. 1 (éd. Marietti, n° 264-276). 1021
Is 45, 24. Pour la version citée ici, voir la Vetus latzna, Esaias; éd. Roger Gryson, vol. XII/2, fasc.
4, p. 1105. 1022
Is 45, 23-24 (selon la vulgate). 1023
Lieu parallèle : Ad Hebr. 3, 11, lect. 2 (éd. Marietti, n° 184).
sujet au changement, comme il en est pour la
prédiction de ce qui dépend des causes
inférieures, telle la prophétie de menace1024
.
Aussi est-il dit au psaume 109. — "Le
Seigneur a juré et il ne s’en repentira pas."
C’est que les hommes, comme le dit l’Apôtre,
"jurent par celui qui est plus grand qu’eux."
Mais Dieu, n’ayant rien de plus grand que lui
pour donner de la fermeté à la vérité, jure par
lui-même. Or il est la vie même et la source
de la vie, selon ces paroles du Deutéronome :
"Car c’est lui-même qui est ta vie et la
longueur de tes jours, afin que tu habites dans
la terre au sujet de laquelle le Seigneur a juré
à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob, qu’il la
leur donnerait" Et du psaume 35. — "Auprès
de toi est la source de la vie1025
." Voilà
pourquoi la forme du serment du Seigneur est
: Je vis, moi, autrement dit je jure par la vie,
dont moi je vis d’une manière unique.
1110. Deuxièmement l’annonce de la
soumission de toute créature au Christ devant
moi, à savoir le Christ, tout genou fléchira.
C’est la désignation de la soumission parfaite
de la créature raison nable au Christ; car les
hommes ont coutume de fléchir le genou
devant les grands, en signe de soumission.
D’où ces paroles <de l’Apôtre> aux
Philippiens : "Qu’au nom de Jésus, tout genou
fléchisse dans le ciel, sur la terre et dans les
enfers."
1111. — Troisièmement l’annonce de la
confession de la foi, par laquelle tous rendront
gloire au Christ. D’où la suite de ces paroles :
et toute langue confessera Dieu, c’est-à-dire
confessera que le Christ est Seigneur, selon
cette parole aux Philippiens : "Que toute
langue confesse que notre Seigneur Jésus-
Christ est dans la gloire de Dieu le Père1026
."
Quant aux mots "toute langue", ils peuvent
s’entendre de l’expression de la connaissance
soit des hommes, soit des anges, selon ce
passage de la première épître aux Corinthiens
: "Quand je parlerais les langues des hommes
1024
Lieux parallèles : Somme Théologique 1a Q. 19, a. 7, sol. 2; 2a-2 Q. 174, a. 1; 4 Sentences dist.
46, Q. 2, a. 3; 3 Contr. Gentiles c. 154; De veritate, Q. 12, a. 10; Ad Rom. 3, 4, lect. 1 (éd. Marietti,
n°258); Ad Hebr. 6, 17, lect. 4 (éd. Marietti, n°322). 1025
Ps 35, 10. — Lieu parallèle Super Psalmos, in Ps. 35, løa. 1026
Ph 2, 11. L’addition du mot notre (noster) figure dans le Vetus latina, voir Epistula ad
Philippenses, éd. H. J. Frede, vol. XXIV/2, fasc. 2, p. 151.
et des anges, si je n’ai pas la charité, je suis
comme un airain sonnant ou une cymbale
retentissante." Or cette soumission
s’accomplit maintenant en cette vie, non en
chaque individu particulier, mais en chaque
catégorie d’hommes en particulier. Car de
chaque catégorie d’hommes quelques-uns
sont maintenant soumis au Christ et le
confessent par la foi, mais lors du jugement à
venir, tous et chacun en particulier lui seront
soumis : les bons volontairement, les
méchants malgré eux. Aussi est-il dit dans
l’épître aux Hébreux : "Par le fait qu’il lui a
tout soumis, il n’a rien laissé qui lui demeure
insoumis. Actuellement, il est vrai, nous ne
voyons pas encore que tout lui soit soumis."
1112. — b. En ajoutant : 12 chacun de nous,
etc., il déduit sa conclusion de ce qui précède.
Et d’abord la conclusion qu’il projetait à
partir de ce qu’il vient de dire ainsi, puisque
tout genou fléchit devant le Christ, chacun de
nous rendra compte à Dieu pour soi, c’est-à-
dire devant le tribunal du Christ : "Je vous dis
que toute parole oiseuse que les hommes
auront dite ils en rendront compte" à Dieu "au
jour du jugement." Et encore : "Le Royaume
des cieux est comparé à un homme-roi qui
voulut régler ses comptes avec ses serviteurs."
1113. — Cependant il semble que chacun ne
rendra pas compte pour soi, mais l’un pour
l’autre : "Obéissez à vos préposés, et soyez-
leur soumis, car ce sont eux qui veillent,
comme devant rendre compte de vos âmes."
Il faut répondre que par le fait même que les
prélats rendront compte, ils rendront raison
des actes qu’ils ont dû remplir à l’égard de
leurs sujets. Car s’ils ont fait ce qui était dû à
leur ministère, la perte de leurs sujets ne leur
sera pas imputée. Au contraire, s’ils négligent
d’accomplir ce que leur ministère requiert,
elle leur sera imputée. D’où ces paroles
d’Ezéchiel : "Si moi je dis à l’impie : Tu
mourras de mort, et que tu ne le lui annonces
pas, et ne lui parles pas pour qu’il se détourne
de sa voie impie, et qu’il vive, l’impie lui-
même dans son iniquité mourra; mais je
redemanderai son sang à ta main. Mais si tu
l’annonces à l’impie, et qu’il ne se détourne
pas de son impiété et de sa voie impie, lui-
même, à la vérité, mourra dans son iniquité;
mais toi, tu auras libéré ton âme."
1114. — Puis <l’Apôtre> déduit la conclusion
qu’il s’était principalement proposée dans
toute cette partie, en disant : 13 Ne nous
jugeons donc plus les uns les autres, à savoir
avec un jugement téméraire, ce qui est inclus
dans les raisons mentionnées plus haut : "Ne
jugez pas avant le temps, jusqu’à ce que
vienne le Seigneur, qui éclairera ce qui est
caché dans les ténèbres, et manifestera les
pensées secrètes des cœurs; et alors chacun
recevra de Dieu sa louange.
Lectio 2 Leçon 2 [Versets 13b à 20a]
[n° 1115] 13b mais jugez plutôt qu’il ne faut
pas mettre devant votre frère un obstacle ou
<lui donner une occasion de> scandale.
[n° 1117] 14 sais et j’ai la certitude dans le
Seigneur Jésus que rien n’est profane en soi,
excepté pour celui qui estime une chose
profane; pour lui elle est profane.
[n° 1122] 15 En effet, si ton frère est contristé
pour un aliment, tu ne marches plus selon la
charité. Pour ton aliment veuille ne pas causer
la perte de celui pour lequel le Christ est mort.
[n° 1125] 16 Que notre bien ne soit donc pas
une occasion de blasphème.
[n° 1127] 16 Car le Règne de Dieu n’est pas
nourriture et boisson, mais il est justice, paix
et joie dans l’Esprit-Saint.
[n° 1129] 18 Or celui qui par là sert le Christ
est agréable à Dieu et approuvé des hommes.
[n° 1130] 19 Poursuivons donc ce qui
contribue à la paix et observons mutuellement
ce qui contribue à l’édification.
[n° 1131] : 20a Ne va pas pour un aliment
détruire l’œuvre de Dieu.
[86226] Super Rom., cap. 14 l. 2 Postquam
apostolus prohibuit humana iudicia, hic
prohibet scandalum proximorum, et circa
hoc duo facit. Primo proponit quod intendit;
secundo manifestat propositum, ibi si enim
propter cibum, et cetera. Circa primum
1115. — Après avoir interdit les jugements
humains [n° 1081], l’Apôtre interdit ici de
scandaliser Je prochain, et à cet égard il fait
deux choses
I) Il expose d’abord son intention.
II) Puis, il prouve sa proposition [n° 1122] :
proponit tria. Primo enim docet scandala
esse vitanda, dicens : dixi quod non
iudicetis invicem sed unusquisque de suis
actibus iudicare debet, ne sint in scandalum
aliorum. Et hoc est quod dicit sed hoc
iudicate magis ne ponatis fratribus
offendiculum, vel scandalum. Scandalum
autem, sicut dicit Hier. super Matthaeum,
notat offendiculum vel ruinam, quam
impactionem pedis possumus dicere. Unde
scandalum est factum vel dictum minus
rectum, praebens alicui occasionem ruinae,
ad similitudinem lapidis ad quem in via
positum homo impingit, et cadit. Maius
autem aliquid videtur esse scandalum quam
offendiculum. Nam offendiculum potest
esse quicquid retinet seu retardat motum
procedentis : scandalum autem, id est,
impactio, videtur esse cum aliquis
disponitur ad casum. Non ergo debemus
fratri ponere offendiculum ut aliquid
faciamus, unde impediatur proximus a via
iustitiae. Is. LVI, 14. — auferte
offendiculum de via populi mei. Neque
etiam debemus fratri ponere scandalum,
aliquid faciendo, unde ipse inclinetur ad
peccatum. Matth. XVIII, 7. — vae homini
illi per quem scandalum venit. Secundo
docet id ex quo scandalum putabatur esse,
secundum suam naturam, sive secundum se
licitum. Circa quod sciendum est quod, sicut
supra dictum est, apud Romanos erant
quidam ex Iudaeis ad fidem Christi
conversi, qui cibos secundum legem
discernebant; alii vero habentes fidem
perfectam indifferenter omnibus cibis
utebantur, quod quidem secundum se
15 En effet, si ton frère est contristé, etc.
1116. — I. <L’Apôtre> enseigne1027
d’abord
que l’on doit éviter les scandales, en disant :
J’ai dit que vous ne devez pas vous juger les
uns les autres, mais que chacun doit juger ses
propres actes, pour qu’ils ne tournent pas au
scandale des autres. Et c’est ce que dit
<l’Apôtre> : 13 Mais jugez plutôt qu’il ne
faut pas mettre devant votre frère un obstacle
ou <lui donner une occasion de> scandale. Or
le mot "scandale", comme le dit Jérôme dans
son Commentaire sur Matthieu, désigne un
obstacle ou une chute, que nous pourrions
traduire par "heurt du pied" (impactionem
pedis)1028
. Voilà pourquoi le scandale est une
action ou une parole d’une moindre rectitude,
fournissant à autrui une occasion de chute,
semblable à une pierre placée sur le chemin,
contre laquelle l’homme se heurte et tombe.
Toutefois le scandale semble quelque chose
de plus important qu’un obstacle. Car
l’obstacle peut être quelque chose qui retient
ou retarde le mouvement de celui qui marche;
tandis que le scandale, c’est-à-dire le heurt,
semble se produire lorsque quelqu’un est
amené à tomber. Nous ne devons donc pas
mettre d’obstacle devant notre frère, pour que
notre entrave ne détourne pas le prochain de
la voie de la justice "Otez <l’obstacle> de la
voie de mon peuple1029
."
Nous ne devons pas non plus donner <une
occasion de> scandale à notre frère en faisant
quelque chose qui l’incline au péché :
"Malheur à l’homme par qui le scandale
arrive1030
."
1117. — Puis <l’Apôtre> enseigne ce qui
faisait regarder le scandale comme licite de
1027
Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2ae, Q. 43, a. 1; 4 Sentences dist. 38, Q. 2, a. 1; Ad Rom.
7, 8 lect. 2 (éd. Marietti, n° 543) Super Matth. 15, 12 (éd. Marietti, n° 1305). 1028
Voir SAINT JÉRÔME, Commentaire sur saint Matthieu 15, 12 (SC 242, 324-325). 1029
Littéralement "commun", en latin : communis. La Vulgate donne ici l’équivalent exact du mot grec
koinos de la basse grécité, lequel signifie en effet " commun * (Ac 2, 44; 4, 32). Dans un sens un peu
différent, il s’oppose " saint" (voir I M 1, 47). Ainsi, en Mc 7, 2. 5, les pharisiens se scandalisent de
voir certains disciples du Christ "manger les pains avec des mains souillées" (koinais, littéra lement :
"communes", "profanes"). La raison en est que "les pharisiens traitent de souillé tout ce qui est
commun " (Sœur Js D’ARC, Evangile selon Marc, p. 45, n. 2h). Le problème de traduction qui se pose
ici vient de ce que l’adjectif français " commun" a plutôt une nuance péjorative, celle de vulgarité, et
ne va pas jusqu’à celle de souillure. On pourrait ici le rendre également par " profane." Saint Thomas
va expliquer (n° 1117) qu’il signifie " impur " (immundus). 1030
Mt 18, 7 Lieu parallèle Super Matrh. 18, 6-9 (éd. Marietti, n° 1497-1502).
licitum erat. Unde dicit scio et confido in
domino Iesu, quia nihil est commune per
ipsum. Circa quod notandum est, sicut dicit
Hier. super Matth., quod populus Iudaeorum
partem Dei se esse iactans, communes cibos
vocat quibus omnes utuntur homines, verbi
gratia suillam carnem, lepores et huiusmodi;
et caeterae gentes, quae talibus utebantur
cibis, non erant de parte Dei, ideo talis cibus
immundus appellatur. Quod ergo dicit nihil
commune est, idem est ac si diceret : nihil
immundum est. Et hoc quidem apostolus,
primum, dicit se scire, quia ita est secundum
rerum naturam, secundum illud I Tim. IV, 4.
— omnis creatura Dei bona, et nihil
reiiciendum quod cum gratiarum actione
percipitur. Secundo dicit se confidere in
Christo Iesu, quia per seipsum nihil est
commune, quia scilicet cibi secundum suam
naturam nunquam fuerunt immundi,
vitabantur tamen aliquo tempore ut
immundi, secundum legis praeceptum
propter figuram, sed hoc Christus removit
implendo omnes figuras. Et ideo apostolus
per fiduciam quam habet in domino Iesu,
asserit nihil esse commune vel immundum
per ipsum, id est, ipso hoc faciente. Act. X,
v. 15. — quod Deus purificavit, tu ne
commune dixeris. Tertio ostendit quomodo
hoc posset esse per accidens illicitum,
inquantum scilicet est contra conscientiam
manducantis. Unde dicit : dictum est quod
nihil est commune, sed hoc intelligendum
est nisi ei qui, erronea conscientia, aestimat
quid, id est aliquid ciborum, commune esse,
par sa nature ou en soi. Sur ce point, comme
on l’a dit plus haut [n° 1082], il faut savoir
qu’il se trouvait parmi les Romains quelques
Juifs convertis à la foi du Christ, qui
discernaient les aliments selon la Loi; quant
aux autres, ayant une foi parfaite, ils usaient
indifféremment de tous les aliments, ce qui en
soi était licite. C’est ce qui fait dire <à
l’Apôtre> : 14 Je sais et j’ai la certitude dans
le Seigneur Jésus que rien n’est profane en
soi. A ce propos il faut noter que, selon ce que
dit Jérôme dans son Commentaire sur
Matthieu1031
, le peuple juif se vantant d’être
l’héritage de Dieu, appelle aliments profanes
ceux dont usent tous les hommes, par
exemple la chair de porc, de lièvre et autres
chairs semblables; et parce que les autres
nations, qui usaient de tels aliments ne
faisaient pas partie de l’héritage de Dieu, ces
aliments étaient appelés impurs. Donc ces
mots <de l’Apôtre> rien n’est profane,
équivalent à : rien n’est impur. L’Apôtre dit
d’abord qu’il le sait, parce qu’il en est ainsi
selon la nature des choses, selon ce passage :
"Toute créature de Dieu est bonne et on ne
doit rien rejeter de ce qui se prend avec action
de grâces." Il dit ensuite qu’il a la certitude
dans le Christ Jésus que rien n’est commun en
soi, car les aliments selon leur propre nature
n’ont jamais été impurs. Durant un certain
temps, cependant, on les avait évités comme
impurs, suivant ce que prescrivait la Loi à
cause de ce qu’ils figurent; mais le Christ a
supprimé ce précepte en accomplissant toutes
les figures1032
. Voilà pourquoi l’Apôtre, par la
1031
Voir SAINT JÉRÔME, Commentaire sur saint Matthieu 15, 11 (SC 242, 324-325). 1032
Le principe fondamental de l’exégèse chrétienne, c’est que le Christ accomplit les Ecritures, et
donc que le Nouveau Testament révèle la véritable signification de ce que contient l’Ancien
Testament, qu’il s’agisse de paroles, d’événements ou de pres criptions légales. C’est ce que déclare
saint Paul â propos du rocher de Nb 20, 8 qui, selon une tradition rabbinique, accompagnait Israël au
désert " Ces faits sont arrivés pour nous servir de figures " (1 Co 10, 6). Le terme grec est typos, "
type", " image", "symbole " annonciateur de ce que le Christ réalisera et qui, pour cette raison, est
nommé par saint Pierre " antitype " (antitypos) " Le baptême qui nous sauve aujourd’hui est
"l’antitype" de l’arche de Noé qui sauva jadis le reste du genre humains (I P 3, 21). L’arche est le type,
le baptême. La Vulgate a traduit typos par figura, et anntypos par une périphrase ("de forme
semblables, similis forma). Saint Thomas (avec toute la tradition chrétienne) a hérité de ce vocabulaire
qu’il rassemble en une formule souvent reprise e lex vetus est figura novae legis" ("l’ancienne Loi est
la figure de la Loi nouvelle " à quoi il ajoute, dans la ligne d’Origène, de saint Ambroise et de bien
d’autres (selon un enseignement de He 10, 1) que " nova lex est figura futurae gloriae " ("la Loi
nouvelle est la figure de la gloire future", Somme Théologique Ia, Q. 1, a. 10; 1a-2ae, Q. 102, a. 2; Ad
Gal. 4, 24, lect. 7 [éd. Marietti, n 254]). En ce sens, la figure est toujours une préfiguration lorsque
id est immundum, illi commune est, id est
ita est illicitum sibi, ac si esset secundum se
immundum. Tit. I, 15. — omnia munda
mundis, coinquinatis autem et infidelibus
nihil mundum est, sed inquinata est eorum
mens, et conscientia. Et sic apparet quod
aliquid, quod est secundum se licitum,
efficitur illicitum ei qui id contra suam
conscientiam agit, licet conscientia sua sit
erronea, quod rationabiliter accidit. Nam
actus iudicantur secundum voluntatem
agentium, voluntas autem movetur a re
apprehensa. Unde in id voluntas tendit quod
ei vis apprehensiva repraesentat, et
secundum hoc qualificatur, vel specificatur
actio. Si igitur ratio alicuius iudicet aliquid
esse peccatum et voluntas feratur in id
faciendum, manifestum est quod homo
habet voluntatem faciendi peccatum; et ita
actio eius exterior, quae informatur ex
voluntate, est peccatum. Et eadem ratione si
aliquis aestimet id quod est veniale
peccatum, esse mortale peccatum, si hac
conscientia durante illud faciat, manifestum
est quod elegit peccare mortaliter, et ita
actio eius propter suam electionem est
peccatum mortale. Si tamen aliquis post
factum habeat conscientiam erroneam, per
quam credat id quod est licitum a se factum
fuisse peccatum, vel quod est veniale fuisse
mortale, non propter hoc efficitur id quod
est prius, vel peccatum, vel mortale, quia
voluntas et actio non informantur ex
apprehensione sequenti, sed ex praecedenti.
Haec autem quae dicta sunt dubitationem
non habent, sed dubium potest esse, utrum
si aliquis habeat erroneam conscientiam ut
credat esse necessarium ad salutem quod est
peccatum mortale, puta si aliquis aestimet se
peccare mortaliter nisi furetur vel fornicetur,
utrum talis conscientia eum liget, ita scilicet
si contra conscientiam agat, mortaliter
peccet. Et videtur quod non. Primo quidem
quia lex Dei quae prohibet fornicationem et
furtum, fortius ligat, quam conscientia.
confiance qu’il a dans le Seigneur Jésus,
affirme qu’il n’y a rien de commun ou
d’impur en soi, c’est-à-dire que <Dieu> aurait
fait lui-même ainsi : "Ce que Dieu a purifié,
toi, ne l’appelle pas commun."
1118. — Enfin <l’Apôtre> montre comment
cela pourrait être illicite par accident, à savoir
en tant que cela s’oppose à la conscience de
celui qui mange. Aussi <l’Apôtre> dit-il : On
a dit qu’il n’y a rien de commun, mais il faut
entendre : excepté pour celui qui, par une
conscience erronée, estime une chose, c’est-à-
dire quelques aliments, profane, c’est-à-dire
impure; pour lui elle est profane, c’est-à-dire
illicite pour lui, comme si elle était impure en
soi : "Tout est pur pour ceux qui sont purs;
mais, pour les impurs et les infidèles, rien
n’est pur; leur esprit même et leur conscience
sont souillés."
1119. — On1033
voit ainsi qu’une chose, licite
en elle-même, devient illicite pour celui qui
agit contre sa conscience, bien que cette
dernière soit erronée : ce qui a lieu
accidentellement selon la raison; car les actes
sont jugés d’après la volonté de ceux qui les
commettent, et la volonté est mue par l’objet
appréhendé. C’est ainsi qu’elle tend vers ce
que la puissance d’appréhension lui
représente, et c’est selon cette règle qu’un
acte est qualifié ou spécifié. Par conséquent,
si la raison juge qu’un acte est peccamineux
et que la volonté se détermine à le commettre,
il est manifeste que l’homme a la volonté de
commettre le péché, et qu’ainsi l’acte
extérieur, qui est informé par la volonté, est
un péché. Pour la même raison si l’on estime
qu’un acte, qui est un péché véniel, est un
péché mortel, et que l’on commette cet acte
avec cette conscience, il est manifeste que
l’on a choisi de pécher mortellement et qu’en
conséquence, en raison de son propre choix,
cet acte est un péché mortel. Si en revanche,
une fois l’acte accompli, quelqu’un s’imagine,
par une conscience erronée, avoir commis un
péché en faisant quelque chose de licite, ou
advient ce qu’elle préfigure, elle disparaît en tant que telle. La valeur préfigurative de l’Ancien
Testament par rapport au Nouveau fonde ce que l’on appelle, dans les sciences de l’interpré tation
scripturaire (l’herméneutique) la typologie" (voir â ce propos Jean DANIÉL0u, Les Figures du Christ
dans l’Ancien Testament. "Sacramentum futuri"). 1033
Lieux parallèles Somme Théologique 1a-2ae Q. 19, a. 5 et a. 6.
Secundo quia hoc posito esset perplexus,
peccaret enim et fornicando et non
fornicando. Sed dicendum est quod etiam in
per se malis conscientia erronea ligat. In
tantum enim conscientia ligat, ut dictum est,
inquantum ex hoc quod aliquis contra
conscientiam agit, sequitur quod habeat
voluntatem peccandi; et ita si aliquis credat
non fornicari esse peccatum mortale, dum
eligit non fornicari, eligit peccare mortaliter,
et ita mortaliter peccat. Et ad hoc etiam facit
quod hic dicit apostolus. Manifestum est
enim quod discernere cibos quasi
necessarium ad salutem erat illicitum, quia
nec Iudaeis conversis etiam ante
divulgationem Evangelii licebat servare
legalia, spem ponendo in eis, quasi essent
necessaria ad salutem, ut Augustinus dicit.
Et tamen apostolus hic dicit quod si quis
habens conscientiam cogentem discernere
cibos, quod est aestimare aliquid esse
commune, et non discernit eos, scilicet
abstinendo ab eis, peccat ac si manducaret
immundum. Et ita etiam in per se illicitis
conscientia erronea ligat. Nec obstat quod
primo obiicitur de lege Dei, quia idem est
ligamen conscientiae etiam erroneae et legis
Dei. Non enim conscientia dictat aliquid
esse faciendum vel vitandum, nisi quia
credit hoc esse contra vel secundum legem
Dei. Non enim lex nostris actibus
applicatur, nisi mediante conscientia nostra.
Similiter etiam nec obstat quod secundo
obiicitur. Nihil enim prohibet aliquem esse
perplexum aliquo supposito, licet nullus sit
perplexus simpliciter, sicut sacerdos
fornicarius, sive celebret Missam, sive non
celebret quando debet ex officio, peccat
mortaliter; non tamen est perplexus
simpliciter, quia potest peccatum dimittere
et celebrare. Et similiter potest aliquis
conscientiam erroneam dimittere, et a
peccato abstinere. Est autem adhuc alia
dubitatio. Non enim dicitur scandalizare qui
facit opus rectum, licet etiam ex eo aliquis
sumat materiam scandali, legitur enim
Matth. XV, v. 12 quod Pharisaei audito
que ce qui est véniel fut mortel, une telle
croyance ne saurait faire que l’acte
auparavant accompli soit un péché, ni un
péché mortel, car ce qui donne leur forme à la
volonté et à l’action ce n’est pas
d’appréhender ce qui les suit mais ce qui les
précède.
1120. — Sur ce qui précède il n’y a aucune
difficulté, mais il peut s’en présenter une si la
conscience est erronée au point de croire
nécessaire au salut ce qui est péché mortel,
par exemple en estimant pécher mortellement
si l’on ne commet pas de vol ou si l’on ne
fornique pas. Une telle conscience oblige-t-
elle, en ce sens qu’en agissant contre elle on
pèche mortellement ?
Il semble que non. Tout d’abord, parce que la
Loi de Dieu, qui interdit la fornication et le
vol, oblige plus fortement que la conscience.
Puis, parce que cela étant établi, l’homme
serait perplexe et pécherait en commettant ou
en ne commettant pas la fornication.
Mais il faut répondre que, même à l’égard des
choses qui sont mauvaises en soi, la
conscience erronée oblige. Car, ainsi qu’on
l’a dit, la conscience oblige dans l’exacte
mesure où, si l’on agit contre sa conscience,
c’est qu’on a la volonté de pécher. Et donc si
l’on croit que ne pas forniquer est un péché
mortel, choisir de ne pas forniquer c’est
choisir de pécher mortellement, et de fait l’on
pèche mortellement. Et de plus on pratique
aussi ce que l’Apôtre dit ici. Car il est
manifeste qu’opérer un discernement entre les
aliments comme une chose nécessaire au salut
était illicite puisque, même pour les Juifs
convertis avant la diffusion de l’Evangile, il
n’était pas permis d’observer les prescriptions
légales, en mettant en elles son espérance,
comme si elles étaient nécessaires au salut,
ainsi que le dit Augustin1034
[n° 1087]. Et
cependant l’Apôtre dit que si quelqu’un force
sa conscience à opérer une distinction entre
les aliments, c’est-à-dire en estimant que tel
aliment est commun, et qu’il ne fait pas la
distinction entre eux, à savoir en s’en
abstenant, il pèche comme s’il mangeait
1034
Voir SAINT AUGUSTIN, Lettre LXXXII, II, 9 (PL 33 279; CSEL 34/2, 358-360); c. 2, 15 (PL
33, 281; CSEL 34/2, 364-366).
verbo Christi, scandalizati sunt. Sed non
discernere cibos est opus rectum : ergo non
est dimittendum propter scandalum eius qui
perversam conscientiam habet errans in
fide. Nam secundum hoc Catholici deberent
abstinere a carnibus et matrimonio, ne inde
haeretici scandalizarentur secundum
erroneam conscientiam. Sed dicendum est
quod aliquis scandalizare alium potest, non
solum faciendo aliquod malum, sed etiam
aliquid faciendo quod habet speciem mali,
secundum illud I Thess. c. ult. : ab omni
specie mali abstinete vos. Dicitur autem
aliquid habere speciem mali dupliciter.
Primo videlicet secundum opinionem eorum
qui sunt ab Ecclesia praecisi; secundo,
secundum opinionem eorum qui adhuc ab
Ecclesia tolerantur. Infirmi autem in fide,
aestimantes legalia esse observanda, adhuc
tolerabantur ab Ecclesia ante Evangelii
divulgationem. Et ideo non erat
comedendum cum eorum scandalo de cibis
in lege prohibitis. Haeretici autem non
tolerantur ab Ecclesia, et ideo de eis non est
quelque chose d’impur.
Donc, même pour les choses qui sont en soi
illicites, la conscience erronée oblige. On ne
peut opposer la première objection tirée de la
Loi de Dieu, parce que l’obligation de la
conscience, même erronée, et celle de la Loi
divine, sont la même obligation. En effet, si la
conscience prescrit de faire une chose ou de
l’éviter, c’est qu’elle croit que cet acte
s’oppose ou est conforme à la Loi de Dieu.
Car la Loi n’est appliquée à nos actes que par
l’intermédiaire de notre conscience1035
, On ne
peut pas davantage opposer la seconde
objection. En effet, rien n’interdit la
perplexité dans une supposition, bien que
personne ne soit perplexe absolument parlant
: par exemple un prêtre fornicateur, soit qu’il
célèbre la messe ou qu’il ne la célèbre pas,
quand il y est tenu par son ministère, pèche
mortellement; il n’est cependant pas perplexe
absolument parlant, étant donné qu’il peut
abandonner son péché et célébrer1036
.
Pareillement, on peut abandonner une
conscience erronée et s’abstenir du péché1037
.
1035
À propos du rôle de la conscience chez saint Thomas, voir J-P. TORISELL, Saint Thomas, maître
spirituel, p. 418." — Lieux parallèles : Somme Théologique 1a-2ae, Q. 19, a. 5; 2 Sentences dist. 39,
Q. 3, a. 2 et 3; Deveritate Q. 17, a. 4; De malo, Q. 2, a. 2, sol. 8; Dequodlibet 3, Q. 12, a. 2; 8, Q. 6, a.
3; Ad Rom. 9, 1, lect. 1 (éd. Marietti, n° 736); 14, 14-15, lect. 3 (éd. Marietti, n° 1119-1120); Ad Gal.
5, 3, lect. 1 (éd. Marietti, n° 282). 1036
Lieu parallèle Somme Théologique 3a, Q. 82, a. 10, sol. 2. 1037 Les textes qu’on vient de lire sont parmi les plus importants que saïnt Thomas ait consacrés au
problème de la " conscience erronée." Il montre à quelle hauteur il situe cette notion. Pour la bien
comprendre, il faut saisir le rapport qui unit la conscience à la syndérèse et la syndérèse à la raison.
La raison est une faculté (une puissance), la syndérèse un habitus, la conscience un acte. La raison
(qu’on ne distinguera pas ici de l’intelligence) est la faculté de la connaissance aussi bien théorétique
(connaissance des essences et des existences) que pratique (tout ce qui conceme l’agir, les fins et les
moyens de l’action). La raison pratique (Ou volonté raisonnable) obéissant à sa nature (que Dieu a
voulue) cherche le bien pour l’accomplir (Somme Théologique 1", Q. 79, a. 11). Or, de même que
l’intelligence spéculative (Ou raison théorétique), au contact des objets qu’elle appréhende (par les
sens), prend une conscience explicite des principes de la connaissance (dont elle acquiert ainsi la
possession
— c’est le sens du mot habitus " — en vue de leur application dans toute son activité cognitive), de
même l’intelligence (ou raison) pratique, au contact de l’expérience, entre en possession consciente
des principes de l’action bonne, principes qu’elle porte en elle et qui reflètent, inscrites dans notre
intelligence sous la forme de la loi naturelle, les exigences de la Loi ètemelle. C’est cette connaissance
des principes innés de l’action que saint Thomas appelle syndérèse on appelle la syndérèse, la loi de
notre intellect en tant qu’elle est un habitus contenant les préceptes de la loi naturelle, lesquels sont les
premiers principes des actes humains" (Somme Théologique 1a-2ae, Q. 94, a. 1, sol. 2). C’est donc un
similis ratio. Deinde cum dicit si enim
propter cibum, etc., manifestat quod dixerat.
Et primo primum, scilicet quod non sit
ponendum scandalum fratribus; secundo,
secundum et tertium, quomodo scilicet sit
aliquid commune, ibi omnia quidem munda
sunt, et cetera. Circa primum ponit quatuor
rationes quarum prima sumitur ex parte
charitatis, dicens si enim frater tuus
contristatur, de hoc quod reputat te peccare,
propter cibum quem tu comedis, quem ipse
reputat immundum, iam non secundum
1121. — Voici encore une autre difficulté : de
celui qui accomplit une œuvre honnête, on ne
dit pas qu’il scandalise, quoique le prochain
prenne de cette action matière à scandale. On
lit en effet dans <l’évangile de> Matthieu que
les pharisiens, ayant entendu la parole du
Christ, se sont scandalisés. Or ne pas opérer
de discernement entre les aliments est une
œuvre honnête; il ne faut donc pas y renoncer
à cause du scandale de celui qui a une
conscience perverse et qui s’égare dans la foi.
Car suivant ce principe, les catholiques
savoir moral que nous portons avec nous, de même que l’intelligence du logicien porte en elle le
savoir des règles du raisonnement vrai, qu’il fasse de la logique ou qu’il n’en fasse pas. En tant que tel,
ce savoir moral, c’est ce que les modemes (et beaucoup d’anciens) appellent la conscience. Le mot
syndérèsis (ou syntèrèsis), semble-t-il, n’existe pas en grec. II se lit pourtant dans un commentaire de
saint Jérôme sur Ezéchiel (c. 1, 7; PL 25, 22 CCL 75, 12), sous la forme syntêrèsis que saint Jérôme
traduit par étincelle de la consciences (scintilla conscientiae). Comme ce Père de l’Eglise savait
parfaitement le grec, on a supposé qu’il avait écrit syneid. èsis qui, lui, signifie effectivement
conscience", et qu’une erreur de copiste l’a transformé en syntàràsis. Quoi qu’il en soit, ce néologisme
est passé tel quel dans la lirtérature chrétienne (sAINT Ja DAMASCÈNE, De fide orthodoxa IV, 22
(PG 94, 1200 A; éd. Buytaert, p. 359); SAINT AUGUSTIN, Enarr. in Ps. 57, 1, 1 (CCL 39, 708), et,
sous la forme synderesis, dans le latin médiéval. Saint Thomas reçut très vraisemblablement cette
formule de saint Albert le Grand, qui la cite souvent dans sa Summa de creaturis, secunda pars, Quae
est de homme, Q. 71, De synderesi (éd. Borgnet, t. 35, 590-594). Saint Thomas doit donc lui faire une
place dans sa doctrine. Ce qu’il importe de souligner, c’est que, étant connais sance naturelle des
premiers principes de l’action, la syndérèse est infaillible et "ne comporte jamais d’erreurs (Somme
Théologique Ia, Q. 79, a. 12, sol. 3). Ce n’est donc pas elle qui peut être erronée. L’erreur ne peut
venir que d’une mauvaise application de ces principes aux cas parti culiers que nous présente l’action.
Or, l’acte par lequel nous appliquons les principes pratiques â une action déterminée, c’est cela que
saint Thomas appelle la conscience, parce qu’elle est la connaissance morale de ce que noua devons
faire ou de ce que nous avons fait. Mais c’est aussi pourquoi elle peut être trompée puisqu’elle n’est
rien d’autre que le jugement que la raison pratique porte sur telle ou telle action (à faire ou déjà faite);
la vérité de ce jugement dépend donc, non de la syndérèse (les principes sont ce qu’ils sont), mais du
discemement de la raison pratique, c’est-à-dire de sa capacité à appréhender le bien qui la meut
(comme dit saint Thomas) dans telle circonstance donnée or, cette raison peut se tromper (Somme
Théologique 1a-2ae, Q. 19, a. 6, sol. 2). Toutefois, nous n’avons aucun autre guide de nos actions que
notre volonté de faire ce qui nous paraît objectivement bien; et ne pas faire ce que noua croyons bien,
c’est vouloir faire le mal, et c’est un mal, même si notre discernement du bien se trompe. Ce qui peut
aller très loin "Croire en Jésus-Christ est de soi chose bonne et nécessaire au salut; mais la volonté n’y
est portée que selon que la raison la lui propose; si la raison lui présentait la chose comme un mal, la
volonté s’y porterait comme à un mal; non certes qu’elle soit un mal en soi, mais parce qu’elle est un
mal par accident à cause de l’appréhension <erronée> de la raison " (ibid., a. 5). Telle est la hauteur à
laquelle saint Thomas place la conscience. Comme il le dit ici-même " L’obli gation de la conscience,
même erronée, et celle de la loi divine, sont la même obligation [ Car la loi n’est appliquée à nos actes
que par l’intermédiaire de notre conscience, " Reste que, pour notre conscience, le devoir de
s’informer et de s’éclairer est d’autant plus nécessaire, et d’autant moins excusable toute négligence à
cet égard (ibid., â. 6). Enfin on ne saurait passer sous silence l’appui que trouve dans cette si ferme
doctrine thomasienne la déclaration du concile Vatican II sur la liberté religieuse : "qu’en matière
religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agsr, dans de justes limites, selon
sa conscience " (Déclaration sur la liberté reli gieuse, 2; Concile œcuménique Vatican II.
Constitutions, décrets, décla rations, Paris, Le Centurion, 1967, p. 673; Les Conciles œcuméniques, t.
II-2, Les Décrets. De Trente à Vatican II, Paris, Ed. du Cerf, 1994, p. 2032-2033).
charitatem ambulas, secundum quam
aliquis proximum suum diligit sicut
seipsum. Et ita vitat eius contristationem et
non praefert cibum quieti fratris, quia, ut
dicitur 1 Co c. XIII, 5. — charitas non
quaerit quae sua sunt. Secundam rationem
ponit, ibi noli cibo tuo, etc., quae sumitur ex
parte mortis Christi. Videtur enim parum
appretiare mortem Christi, qui pro cibo
fructum eius evacuare non recusat. Unde
dicit noli cibo tuo, quem tu scilicet
indifferenter comedis non discernendo
cibos, illum perdere, id est scandalizare, pro
quo, id est pro cuius salute, Christus
mortuus est. I Petr. III, 18. — Christus
semel mortuus est pro peccatis nostris,
iustus pro iniustis. Dicit autem illum perdi
qui scandalizatur, quia scandalum passivum
sine peccato scandalizati esse non potest.
Ille enim scandalizatur qui occasionem
sumit ruinae. 1 Co c. VIII, 11. — peribit
infirmus in tua conscientia frater, pro quo
Christus mortuus est. Tertiam rationem
ponit, ibi non ergo blasphemetur, et cetera.
Quae sumitur ex donis spiritualis gratiae. Et
primo ostendit inconveniens quod sequitur
contra huiusmodi dona ex eo quod alios
scandalizamus; secundo manifestat quod
dixerat, ibi non enim, etc.; tertio infert
conclusionem intentam, ibi itaque quae
pacis sunt sectemur, et cetera. Circa primum
considerandum est, quod ex hoc quod aliqui
indifferenter cibis utebantur in primitiva
Ecclesia cum scandalo infirmorum, hoc
inconveniens sequebatur, quod infirmi
fidem Christi blasphemabant, dicentes eam
voracitatem ciborum inducere contra legis
mandatum. Et ideo apostolus dicit : ex quo
per dominum Iesum factum est quod nihil
est commune, non ergo bonum nostrum, id
est fides vel gratia Christi, per quam
libertatem a caeremoniis consecuti estis,
blasphemetur ab infirmis dicentibus eam
gulae hominum indulgere. Iac. c. II, 7. —
ipsi blasphemant nomen bonum quod
invocatum est super vos; de hoc bono dicitur
in Ps. LXXII, 28. — mihi adhaerere Deo,
bonum est. Deinde cum dicit non enim, etc.,
devraient s’abstenir de viande et du mariage,
de crainte que les hérétiques, dont la
conscience est erronée, n’en soient
scandalisés.
Il faut répondre qu’on peut scandaliser autrui
non seulement en faisant quelque mal, mais
même en faisant quelque chose qui en a
l’apparence, selon cette parole <de l’Apôtre>
dans sa première épître aux Thessaloniciens :
"Abstenez-vous de toute apparence du mal."
Or une chose peut avoir l’apparence du mal
de deux manières : d’abord, selon l’opinion
de ceux qui sont séparés de l'Eglise; ensuite,
selon l’opinion de ceux qui sont encore
tolérés par l’Eglise. Mais les faibles dans la
foi, estimant que les prescriptions légales
devaient être, observées, étaient encore tolérés
par l’Eglise avant la diffusion de l’Evangile.
Et c’est pourquoi on ne devait pas, en les
scandalisant, manger des aliments interdits
par la Loi. Quant aux hérétiques, ils ne sont
pas tolérés par l’Eglise, et la même raison
n’existe donc pas à leur égard.
1122. — II. Quand <l’Apôtre> dit : 15 En
effet, si pour un aliment, etc., il prouve ce
qu’il avait dit. Et
— D’abord, la première proposition, c’est-à-
dire qu’il ne faut pas donner d’occasion de
scandale à ses frères.
Puis, la deuxième et la troisième proposition,
c’est-à-dire dans quel sens une chose est
commune [n° 1132] : 20b "Assurément,
toutes les choses sont pures, etc."
1123. — Sur le premier point, <l’Apôtre>
expose quatre raisons :
A. La première se fonde sur la charité : En
effet, si ton frère est contristé, en pensant que
toi tu pèches, pour un aliment que toi tu
manges et que lui regarde comme impur, tu ne
marches plus selon la charité, charité par
laquelle on aime son prochain comme soi-
même. Et ainsi il évite de contrister son frère
et préfère son repos à un aliment, puisque,
selon ces paroles de l’Apôtre aux Corinthiens
: "La charité ne cherche pas son propre
intérêt."
1124. — B. Il expose1038
la deuxième raison à
ces mots : Pour ton aliment veuille ne pas
1038
Lieu parallèle : Somme Théologique 2a-2ae, Q. 43, a. 1, sol. 4.
manifestat quod dixerat, scilicet in quo
bonum nostrum consistat. Et primo ostendit
in quo non consistat, dicens non enim est
regnum Dei esca et potus. Regnum autem
Dei dicitur hic id per quod Deus regnat in
nobis et per quod ad regnum ipsius
pervenimus; de quo dicitur Matth. VI, 10.
— adveniat regnum tuum; et Mich. IV, 7.
— regnabit dominus super omnes in monte
Sion. Deo autem coniungimur et subdimur
per interiorem intellectum, et affectum, ut
dicitur Io. IV, 24. — spiritus est Deus, et
eos qui adorant eum, in spiritu et veritate
adorare oportet. Et inde est quod regnum
Dei principaliter consideratur secundum
interiora hominis, non secundum exteriora.
Unde dicitur Lc. XVII, 21. — regnum Dei
intra vos est. Ea vero quae sunt exteriora ad
corpus pertinentia, intantum ad regnum Dei
pertinent, inquantum per ea ordinatur, vel
deordinatur interior affectus, secundum ea
in quibus principaliter consistit regnum Dei.
Et ideo cum esca et potus ad corpus
pertineant, ipsa secundum se non pertinent
ad regnum Dei, nisi secundum quod eis
utimur, vel ab eis abstinemus. Unde dicitur
1 Co VIII, 8. — esca autem nos non
commendat Deo. Neque enim si non
manducaverimus, deficiemus, neque si
manducaverimus, abundabimus. Pertinet
tamen usus, vel abstinentia escae et potus ad
regnum Dei, inquantum affectus hominis
circa hoc ordinatur, vel deordinatur. Unde
Augustinus dicit in libro de quaestionibus
Evangelii, et habetur hic in Glossa :
iustificatur sapientia a filiis suis qui
intelligunt non in abstinendo, nec in
manducando esse iustitiam, sed in
aequanimitate tolerandi inopiam, et in
temperantia non se corrumpendi per
abundantiam atque importunitatem
sumendi. Non enim interest quomodo, ut in
Glossa dicitur, quid alimentorum, vel
quantum quis accipiat, dummodo id faciat
pro congruentia hominum cum quibus vivit,
et personae suae et pro valetudinis suae
necessitate; sed quanta facultate et
severitate animi careat his, vel cum oportet
vel cum necesse est his carere. Secundo
ostendit in quo consistat bonum nostrum,
causer, etc., raison qui se fonde sur la mort du
Christ. Il semble, en effet, qu’il fasse peu de
cas de la mort du Christ, celui qui se refuse
d’en regarder le fruit. D’où ces paroles <de
l’Apôtre> : Pour ton aliment, c’est-à-dire pour
l’aliment que toi tu manges indifféremment,
sans opérer de discernement entre les
aliments, veuille ne pas causer la perte, c’est-
à-dire scandaliser, de celui pour lequel, à
savoir pour le salut duquel, le Christ est mort.
— "Le Christ lui-même est mort une fois pour
nos péchés, juste pour des injustes, afin de
nous offrir à Dieu, ayant été mis à mort selon
la chair, il a été vivifié selon l’Esprit." Or
l’Apôtre appelle perdu celui qui est
scandalisé, parce que le scandale passif ne
peut être sans péché du côté de celui qui est
scandalisé; car celui-là est scandalisé qui
prend occasion de chute : "Par ta science le
faible périra, ce frère pour qui le Christ est
mort."
1125. — C. Il expose la troisième raison à ces
mots : 16 Que notre bien ne soit donc pas une
occasion de blasphème. Cette raison se fonde
sur les dons de la grâce spirituelle. Et :
1) Il montre en premier lieu l’inconvénient
qui résulte pour ces dons de ce que nous
scandalisons les autres.
2) Puis, il explique ce qu’il a dit [n° 1127] :
17 Car le Règne de Dieu, etc.
3) Enfin, il déduit la conclusion qu’il s’est
proposée [n° 1130] : 19 Poursuivons donc ce
qui contribue à la paix, etc.
1126. — 1. Sur le premier point, il faut
considérer que dans l’Eglise primitive certains
usant indifféremment des aliments au
scandale des faibles, il en résultait cet
inconvénient que les faibles blasphémaient la
foi du Christ, en disant : que cette foi
favorisait la gloutonnerie contre le
commandement de la Loi. Et c’est pourquoi
l’Apôtre dit : Puisque depuis l’avènement du
Seigneur Jésus rien n’est commun, que notre
bien, c’est-à-dire la foi ou la grâce du Christ,
par laquelle vous avez obtenu d’être libérés
des cérémonies légales, ne soit donc pas une
occasion de blasphème pour les faibles, qui
prétendent qu’elle favorise la gourmandise
des hommes : "N’est-ce pas eux qui
quod regnum Dei vocat, dicens sed regnum
Dei est iustitia, et pax, et gaudium in spiritu
sancto. Ut iustitia referatur ad exteriora
opera, quibus homo unicuique reddit quod
suum est et ad voluntatem huiusmodi opera
faciendi, ut dicitur Matth. VI, 33. —
primum quaerite regnum Dei et iustitiam
eius. Pax autem referatur ad effectum
iustitiae. Per hoc enim pax maxime
perturbatur, quod unus homo non exhibet
alteri quod ei debet. Unde dicitur Is. c.
XXXII, 17. — opus iustitiae pax. Gaudium
autem referendum est ad modum quo sunt
iustitiae opera perficienda; ut enim dicit
philosophus in I Ethic. : non est iustus qui
non gaudet iusta operatione. Unde et in Ps.
XCIX, v. 2 dicitur : servite domino in
laetitia. Causam autem huius gaudii
exprimit dicens in spiritu sancto. Est enim
spiritus sanctus quo charitas Dei diffunditur
in nobis, ut dicitur supra V, 6. Illud enim est
gaudium in spiritu sancto, quod charitas
parit, puta cum aliquis gaudet de bonis Dei
et proximorum. Unde 1 Co XIII, 6 dicitur,
quod charitas non gaudet super iniquitate,
congaudet autem veritati. Et Gal. V, 22
dicitur : fructus autem spiritus est charitas,
gaudium, pax. Haec autem tria quae hic
tanguntur, imperfecte quidem in hac vita
habentur, perfecte autem quando sancti
possidebunt regnum Dei sibi paratum, ut
dicitur Matth. XXV, 34. Ibi erit perfecta
iustitia absque omni peccato. Is. LX, 21. —
populus tuus omnes iusti. Ibi erit pax absque
omni perturbatione timoris. Is. c. XXXII,
18. — sedebit populus meus in
pulchritudine pacis, in tabernaculis
fiduciae. Ibi erit gaudium. Is. XXXV, 10. —
gaudium et laetitiam obtinebunt, et fugiet
dolor et gemitus. Tertio probat quod dixerat,
scilicet quod in his regnum Dei consistit.
Ille enim homo videtur ad regnum Dei
pertinere, qui placet Deo et a sanctis
hominibus approbatur; sed hoc illi contingit
in quo invenitur iustitia, pax et gaudium :
blasphèment le beau (bonum) Nom qui a été
invoqué sur vous ?" A propos de ce bien il est
dit au psaume 72. — "Pour moi, mon bien est
d’adhérer à Dieu."
1127. — 2. Quand il ajoute : 17 Car le Règne
de Dieu, etc., il explique ce qu’il a dit, à
savoir en quoi consiste notre bien.
a. Et pour commencer1039
, il montre en quoi il
ne consiste pas, en disant : Car le Règne de
Dieu n'est pas nourriture et boisson. On
appelle ici Règne de Dieu ce par quoi Dieu
règne en nous et ce par quoi nous parvenons à
son Règne, dont il est dit "Que ton Règne
arrive." Et "Le Seigneur régnera sur <tous> à
la montagne de Sion1040
." Or nous sommes
unis et soumis à Dieu par l’intelligence
intérieure et par l’affection, ainsi qu’il est dit
dans <l’évangile de> Jean : "Dieu est esprit,
et ceux qui l’adorent doivent adorer en esprit
et en vérité." De là vient que le Règne de
Dieu consiste principalement dans les actes
intérieurs de l’homme et non dans des actes
extérieurs. Aussi est-il dit "Le Royaume
(regnum) de Dieu est au-dedans de vous."
Mais quant aux actes extérieurs relatifs au
corps, ils n’appartiennent au Règne de Dieu
que dans la mesure où par eux l’affection
intérieure se règle ou se dérègle à l’égard de
ce qui constitue principalement le Règne de
Dieu. Donc le boire et le manger appartenant
au corps, ils n’appartiennent pas en tant que
tel au Règne de Dieu, sinon en tant que nous
en usons ou que nous nous en abstenons.
D’où ces paroles <de l’Apôtre> dans sa
première épître aux Corinthiens "Ce n’est pas
la nourriture qui nous recommande devant
Dieu. Si nous n’en mangeons pas, nous
n’avons rien de moins; et si nous en
mangeons, nous n’avons rien de plus."
Toutefois l’usage ou l’abstinence de la
nourriture et de la boisson appartiennent au
Règne de Dieu, en tant que l’affection de
l’homme est ordonnée ou désordonnée sur ce
point. Aussi Augustin dit-il dans son livre Des
questions évangéliques1041
, et la Glose cite ce
1039 Lieu parallèle : Somme Théologique 1 Q. 108, a. 1, sol. I.
1040 Mi 4, 7. Omnes (tous) au lieu de eos (eux), probablement cité de mémoire.
1041 Voir sAINr AuousrlN, Quaesriones Evangeliorum II, 11 (PL 35, 1337-1338; CCL 44 B, 53-55).
ergo in his est regnum Dei. Dicit ergo :
dictum est quod regnum Dei est iustitia, pax
et gaudium in spiritu sancto, qui ergo in hoc
servit Christo, qui est rex huius regni,
secundum illud Col. I, 13. — transtulit nos
in regnum filii dilectionis suae, ut scilicet
vivat in iustitia, pace et spirituali gaudio,
placet Deo, qui est huius regni auctor, Sap.
IV, 10. — placens Deo factus dilectus et
probatus est hominibus, id est ab eis
approbatur, qui sunt huius regni participes.
Eccli. XXXI, 10. — qui probatus est in illo,
et perfectus inventus est. Deinde cum dicit
itaque, etc., infert admonitionem intentam,
dicens : ex quo regnum Dei consistit in
iustitia, pace et spirituali gaudio, itaque, ut
ad regnum Dei pervenire possimus,
sectemur ea quae pacis sunt, id est ea
studeamus adimplere per quae
Christianorum pacem conservemus, Hebr.
XII, v. 14. — pacem sequimini et
sanctimoniam, et cetera. Custodiamus
invicem ea quae sunt aedificationis, id est
ea per quae invicem nos aedificemus, id est
bonum conservemus, et in melius
provocemur. 1 Co XIV, 12. — ad
aedificationem Ecclesiae quaerite ut
abundetis. Quod quidem fiet si in iustitia et
spirituali gaudio vixerimus. Quartam
rationem ponit, ibi noli propter escam, et
cetera. Quae sumitur ex reverentia
divinorum operum, quibus hoc reverentiae
debemus, ut ea quae Deus operatur non
debeamus destruere propter aliquod
commodum corporale. Et hoc est quod dicit
noli propter escam, quae ad corporis
utilitatem pertinet, destruere opus Dei.
passage en cet endroit1042
. — < La sagesse est
justifiée par ses fils, qui comprennent que la
justice ne consiste ni dans l’abstinence ni dans
le manger, mais dans l’égalité d’âme avec
laquelle on supporte la privation, et dans la
tempérance qui fait qu’on ne se laisse pas
corrompre par l’abondance ou par
l’inopportunité de prendre la nourriture." En
effet, comme le dit la Glose1043
, <à la suite
d’Augustin, > "peu importe la manière dont
on use de la nature ou de la quantité des
aliments, pourvu qu’on le fasse à la
convenance des hommes avec qui l’on vit, et
à sa convenance personnelle, et selon la
nécessité de sa santé; mais ce qui importe,
c’est la facilité et l’égalité d’âme dont on est
capable, lorsque la nécessité s’impose de s’en
abstenir."
1128. — b. Puis, <l’Apôtre> montre en quoi
consiste notre bien, qu’il appelle Règne de
Dieu, en disant : mais le Règne de Dieu est
justice, paix et joie dans l’Esprit-Saint. — La
justice se rapporte aux œuvres extérieures, par
lesquelles l’homme rend à chacun ce qui lui
appartient, avec la volonté d’accomplir ces
œuvres, selon ces paroles de Matthieu :
"Avant tout, cherchez le Royaume (regnum)
de Dieu et sa justice1044
." Quant à la paix, elle
se rapporte à l’effet de la justice car la paix
est troublée surtout quand un homme ne rend
pas à autrui ce qu’il lui doit. D’où ces paroles
d’Isaïe : "La paix sera l’œuvre de la
justice1045
. La joie, elle, il faut la rapporter à
la manière avec laquelle les œuvres doivent
être accomplies; car, le Philosophe dit dans
l’Ethique à Nicomaque1046
: "Il n’est pas juste
celui qui n’éprouve pas de joie à pratiquer la
1042
Glosa in Rom. XIV, 17 (GPL, col. 1517 D). 1043
Glosa in Rom. XIV, 17 (GPL, col. 1517 C). 1044
Mt 6, 33. Voir n 196, n. 8, p. 136. 1045 Lieu parallèle Somme Théologique 2a-2 Q. 29, a. 3, sol. 3 "La paix est indirectement une œuvre
de la justice, c’est-à-dire en éloignant ce qui s’y oppose. Mais elle est directement une œuvre de la
charité, parce que cette dernière cause la paix selon sa nature propre. L’amour est en effet, selon la
parole de Denys (De div. nom. 4, 12), "une force unifiante", et la paix est l’union des inclinations appé
titives.
4. Is 32, 17. 1046
ARISTOTE, Ethique à Nicomaque I, 8 (1099 aJ; AL XXVI, fasc. 3, p. 153. Lieu parallèle Ethic. 1,
Iect. 13 (éd. Léonine, 1969, t. XLVII, vol. I, p. 47, col. 1(1099 a 17]).
Quod quidem non intelligitur de quocumque
Dei opere. Nam omnia quae in cibum
hominis veniunt, Dei opera sunt, sicut terrae
nascentia et animalium carnes, quae sunt
hominibus in cibum a Deo concessa, ut
patet Gen. c. I, 29 et IX, 3. Sed intelligitur
de opere gratiae, quod in nobis ipsis
specialiter operatur. Phil. II, 13. — Deus
enim est qui operatur in nobis velle et
perficere pro bona voluntate. Hoc igitur
opus Dei non debemus in proximo destruere
propter escam nostram, sicut facere
videbantur illi qui, turbatione et scandalo
proximorum, indifferentibus utebantur.
justice. " Et d’où ces paroles du Psalmiste :
"Servez le Seigneur avec joie."
<L’Apôtre> exprime la cause de cette joie, en
disant : dans l’Esprit-Saint. Car l’Esprit-Saint
est celui par qui "la charité a été répandue" en
nous, comme on l’a dit plus haut. Telle est, en
effet, la joie dans l’Esprit-Saint, que la charité
produit1047
, par exemple lorsqu’on se réjouit
du bien de Dieu et du prochain. Aussi
<l’Apôtre> dit-il dans la première épître aux
Corinthiens que "la charité ne se réjouit pas
de l’iniquité, mais [qu']elle met sa joie dans la
vérité." Et dans l’épître aux Galates que "les
fruits de l’Esprit sont : la charité, la joie, la
paix." Or ces trois fruits indiqués ici ne se
trouvent que d’une manière imparfaite en
cette vie, mais ils se trouveront parfaitement
quand les saints posséderont le Règne de Dieu
préparé pour eux, comme le dit Matthieu1048
.
Là se trouvera la justice parfaite exempte de
tout péché : "Quant à ton peuple, tous seront
justes." Là se trouvera la paix exempte de tout
trouble dû à la crainte : "Mon peuple se
reposera dans la beauté de la paix, dans des
tentes de confiance, et dans un repos opulent."
Là se trouvera la joie : "Ils obtiendront la joie
et l’allégresse, et la douleur fuira ainsi que le
gémissement."
1129. — c. Enfin, <l’Apôtre> prouve ce qu’il
avait dit, à savoir que le Règne de Dieu
consiste dans ces fruits. Car celui-là semble
faire partie du Règne de Dieu, qui plaît à Dieu
et reçoit l’approbation des saints; or cela se
réalise dans celui en qui se trouvent la justice,
la paix et la joie; donc le Règne de Dieu
consiste dans ces fruits. <L’Apôtre> dit donc :
On a établi que le Règne de Dieu est justice,
paix et joie dans l’Esprit-Saint, donc celui qui
par là sert k Christ, qui est le roi de ce Règne,
selon cette parole de Paul aux Colossiens :
"<Dieu> nous a transférés dans le Royaume
du Fils de sa dilection ", c’est-à-dire afin de
vivre dans la justice, la paix et la joie
spirituelles, est agréable à Dieu, qui est
l’auteur de ce Règne — "Plaisant à Dieu, il
est devenu <son> bien-aimé " — et est
1047
Lieux parallèles Somme Théologique 1 Q. 70, a. 3; 2a-2ae, Q. 28, a. 1; Q. 35, a. 2; ColI. in decem
praec., Prol. ; Ad Gal. 5, 22, lect. 6 (éd. Marietti, n° 330). 1048
Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite Venez les bénis de mon Père; possédez le Règne
préparé pour vous depuis la fondation du monde" (Mt 25, 34).
approuvé des hommes, c’est-à-dire ceux qui
font partie de son Règne reçoivent leur
approbation : <)Celui qui a été éprouvé par
l’or et trouvé parfait, à celui-là sera une gloire
éternelle."
1130. — 3. Lorsque <l’Apôtre> ajoute 19
Poursuivons donc ce qui contribue, etc., il
déduit par cette exhortation la conclusion
qu’il s’est proposée. Puisque, dit-il, le Règne
de Dieu consiste dans la justice, dans la paix
et dans la joie spirituelles, donc, pour que
nous puissions parvenir au Règne de Dieu,
poursuivons ce qui contribue à la paix, c’est-
à-dire appliquons-nous à accomplir ce qui
nous <permettra> de conserver la paix
chrétienne : "Recherchez la paix avec tous, et
la sainteté sans laquelle nul ne verra Dieu." —
Et observons mutuellement ce qui contribue à
l’édification, c’est-à-dire ce par quoi nous
pouvons nous édifier mutuellement; en
d’autres termes, conservons le bien et
excitons-nous <à faire> mieux "Puisque vous
désirez si ardemment les dons, spirituels,
faites que pour l’édification de l’Eglise vous
en abondiez." Or cela se réalisera si nous
vivons dans la justice et dans la joie
spirituelles.
1131. — D. <L’Apôtre> expose la quatrième
raison, en disant : 20 Ne va pas pour un
aliment, etc. Cette raison se fonde sur le
respect des œuvres divines; nous devons à
Dieu cette déférence de ne pas détruire, pour
quelque avantage corporel, ce qu’il a fait.
C’est bien ce que <l’Apôtre> dit Ne va pas
pour un aliment, qui profite au corps, détruire
l’œuvre de Dieu. Ce qu’il ne faut pas entendre
de toute œuvre de Dieu, car tout ce qui sert à
la nourriture de l’homme, comme les plantes
de la terre et la chair des animaux que Dieu
donne à l’homme pour nourriture, comme on
le voit dans la Genèse est l’œuvre de Dieu;
mais il faut l’entendre de l’œuvre de la grâce
qu’il opère spécialement en nous-mêmes :
"C’est Dieu qui opère en vous et le vouloir et
le faire, selon sa bonne volonté." Nous ne
devons donc pas détruire cette œuvre de Dieu
dans le prochain à cause de notre nourriture,
comme semblaient le faire ceux qui, en en
usant indifféremment, le troublaient et le
scandalisaient.
Lectio 3 Leçon 3 [Versets 20b à 23]
[n° 1132] 20b Assurément, toutes choses sont
pures, mais telle chose est mauvaise pour
l’homme qui mange en succombant au
scandale.
[n° 1134] 21 Il est bon de ne pas manger de
chair et de ne pas boire de vin, et de ne rien
faire qui offense, scandalise ou affaiblisse ton
frère.
[n° 1136] 22 Toi, as-tu la foi ? Garde-la pour
toi-même devant Dieu. Bienheureux celui qui
ne se juge pas lui-même dans ce qu’il éprouve
comme bon!
[n° 1139] 23 Mais celui qui fait une
distinction, s’il mange, est condamné, parce
que cela ne procède pas de la foi. Or tout ce
qui ne procède pas de la foi est péché.
[86227] Super Rom., cap. 14 l. 3 Postquam
apostolus posuit rationem ad ostendendum,
quod non debemus cum scandalo
proximorum indifferenter sumere omnia, hic
ostendit qualiter aliqui cibi possunt esse
mundi et immundi. Et circa hoc duo facit.
Primo proponit quae sunt munda ex sua
natura, dicens omnia quidem, quae scilicet
ad escam hominis pertinere possunt, munda
sunt, scilicet ex sui natura, quia ex sui
natura non habent quod animam hominis
inquinent, secundum illud Matth. XV, 11.
— non enim omne quod intrat in os inquinat
hominem. I Tim. IV, 4. — omnis creatura
Dei bona. Dicebantur autem in lege
quaedam immunda, non natura, sed
significatione, ut patet Lev. XI, 2 ss. Sed et
hanc immunditiam Christus removit,
implendo veteris legis figuras. Unde dictum
est Petro, Act. X, 15. — quod Deus
purificavit, tu ne commune dixeris, id est
immundum. Secundo, ibi sed malum est
homini, etc., ostendit qualiter aliquis cibus
homini possit fieri immundus, ut scilicet ex
eius esu secundum animam inquinetur, quod
quidem ostendit fieri dupliciter. Primo ex eo
1132. — Après1049
avoir exposé un
raisonnement qui démontre que nous ne
devons pas, au scandale du prochain, user
indifféremment de tous <les aliments> [n°
1122], l’Apôtre montre ici comment certains
aliments peuvent être purs et impurs. Et à cet
effet il fait deux choses
I. Il indique d’abord les choses qui sont pures
par leur nature, en disant : Assurément, toutes
choses, c’est-à-dire toutes les choses qui
peuvent servir à la nourriture de l’homme,
sont pures, c’est-à-dire par leur propre nature,
parce que par leur propre nature elles n’ont
rien qui puisse souiller l’âme de l’homme,
selon ce passage de Matthieu : "Ce n’est pas
tout ce qui entre dans la bouche qui souille
l’homme; mais ce qui sort de la bouche, voilà
ce qui souille l’homme1050
"; et de <Paul> à
Timothée "Toute créature de Dieu est bonne."
Or, dans la Loi, certaines choses étaient
appelées impures, non à cause de leur nature,
mais à cause de leur signification, comme on
le voit au chapitre 11 du Lévitique. Mais le
Christ, en accomplissant les figures de la Loi
ancienne, a supprimé cette impureté. Aussi
est-il dit à Pierre : "Ce que Dieu a purifié, toi
1049
Somme Théologique Ia-2ae Q. 102, a. 6 sol. 1. 1050
Mc 15, 11. Le mot omne (tout) figure dans certains manuscrits. Voir DOM SABATIER, Bibi.
sacr., t. III (Notae ad versionem antiquam), p. 90.
quod aliquis cibum quemcumque cum
scandalo proximorum manducat; secundo
ex eo quod contra conscientiam manducat,
ibi beatus qui non iudicat, et cetera. Circa
primum tria facit. Primo ostendit quid circa
esum ciborum sit malum, dicens : licet
omnia ex sui natura sint munda, sed tamen
malum est homini qui manducat,
quemcumque cibum, per offendiculum, id
est, cum confusione et scandalo
proximorum. Matth. XVIII, 7. — vae
homini illi per quem scandalum venit.
Secundo ostendit quid circa huiusmodi
usum ciborum sit bonum, dicens bonum est
non manducare carnem et non bibere
vinum; quorum primum praecipuum esse
videtur inter cibos, secundum inter potus. Et
ab his quidem abstinere ponit bonum esse,
vel propter carnis concupiscentiam
edomandam, secundum illud Eph. V, 18. —
nolite inebriari vino in quo est luxuria; vel
etiam ut homo reddatur habilior ad
spiritualia contemplanda, secundum illud
Eccle. II, 3. — cogitavi a vino abstrahere
carnem meam, ut animum meum
transferrem ad sapientiam. Sed hoc non
intendit hic apostolus dicere, sed quod
bonum est his non uti cum scandalo
proximorum, quod quidem apparet ex hoc
quod subditur neque in quo frater tuus
offenditur, et cetera. Quod dico, non solum
dico de vino et carnibus quod bonum est eis
non uti, sed quocumque alio cibo; frater
tuus offenditur, id est turbatur contra te,
quasi illicite agentem, per quod pax eius
perturbatur, aut scandalizatur, id est, ad
casum peccati provocatur, propter quod
laeditur eius iustitia, aut infirmatur, id est
saltem in dubitationem venit, utrum hoc
quod agitur sit licitum, per quod eius
spirituale gaudium diminuitur. Unde et ipse
apostolus dicit 1 Co VIII, 13. — si esca
scandalizat fratrem meum, non manducabo
carnem in aeternum, ne fratrem meum
scandalizem. Sed cum licitum sit his cibis
uti, si est ab his abstinendum propter hoc
quod vitetur scandalum proximorum,
videtur pari ratione quod ab omnibus licitis
quae non sunt necessaria ad salutem, sicut
sunt necessaria iustitia, pax et spirituale
ne l’appelle pas commun ", c’est-à-dire
impur.
II. Puis, [n° 1133] <en disant :> : mais telle
chose est mauvaise pour l’homme, etc.,
<l’Apôtre> montre comment un aliment peut
devenir impur pour l’homme, c’est-à-dire que
par l’usage qu’il en fait il souille son âme; ce
qui arrive manifestement de deux manières :
A) En premier lieu, lorsqu’on fait usage d’un
aliment quelconque au scandale du prochain.
B) En second lieu, lorsqu’on mange contre sa
conscience [n° 1138] : Bien heureux celui qui
ne se juge pas lui-même, etc.
1133. — A. Sur le premier point <l’Apôtre>
fait trois choses :
1. Il montre premièrement ce qui est mauvais
dans l’usage des aliments, en disant : Bien que
par nature toutes choses soient pures,
cependant telle chose est mauvaise pour
l’homme qui mange n’importe quel aliment
en succombant au scandale, c’est-à-dire pour
la confusion et le scandale du prochain
"Malheur à l’homme par qui le scandale
arrive."
1134. — 2. Il montre deuxièmement ce qui
est bon dans l’usage de ces aliments, en disant
: 21 Il est bon de ne pas manger de chair et de
ne pas boire de vin; la première mention
regarde principalement les aliments, la
seconde la boisson. Et <l’Apôtre> établit qu’il
est bon de s’en abstenir, soit pour dompter la
concupiscence de la chair, selon ces paroles
de Paul aux Ephésiens : "Ne vous enivrez pas
du vin qui renferme la luxure "; soit même
pour rendre l’homme plus capable de
contempler les réalités spirituelles, selon ce
passage de l’Ecclésiaste : "J’ai pensé dans
mon cœur à détourner ma chair du vin, afin de
porter mon esprit à la sagesse." Toutefois ce
sens n’est pas dans l’intention de l’Apôtre,
mais il veut dire qu’il est bon de ne pas user
de ces aliments <pour éviter> le scandale du
prochain. Et du reste, ce qui suit le montre
manifestement et de ne rien faire qui offense,
scandalise ou affaiblisse ton frère. Ce que je
dis, non seulement je le dis à propos du vin et
des chairs dont il est bon de s’abstenir, mais
de n’importe quel autre aliment qui offense
ton frère, c’est-à-dire qui le soulève dans son
gaudium, sit propter proximorum scandalum
abstinendum. Et ita videtur quod homini
non liceat sua repetere cum scandalo
proximi. Sed dicendum est quod si
scandalum ex infirmitate vel ex ignorantia
proveniat eorum qui propter hoc
scandalizantur, ad vitandum hoc scandalum,
debet homo a licitis abstinere, si non sunt
necessaria ad salutem. Hoc enim est
scandalum pusillorum, quod dominus vitari
iubet, Matth. XVIII, 10. — videte ne
contemnatis unum ex his pusillis. Si vero
huiusmodi scandalum ex malitia proveniat
eorum qui scandalizantur, tale scandalum
est quasi Pharisaeorum, quod dominus,
Matth. c. XV, 12 ss., docuit esse
contemnendum. Unde ad vitandum
huiusmodi scandalum non oportet a licitis
abstinere. Sed tamen circa scandalum
pusillorum attendendum est, quod propter
illud vitandum tenetur homo usum licitorum
differre, quousque reddita ratione hoc
scandalum amoveri possit. Si vero ratione
reddita, adhuc scandalum maneat, iam non
videtur ex ignorantia vel ex infirmitate
procedere sed ex malitia : et sic iam
pertinebit ad scandalum Pharisaeorum.
Tertio excludit quamdam excusationem.
Posset enim aliquis dicere : licet proximus
scandalizetur de hoc quod indifferenter ego
cibis utor, tamen ad ostensionem meae fidei,
per quam certum est hoc mihi licere, volo
indifferenter cibis uti. Sed hanc rationem
excludens apostolus dicit tu, qui scilicet
indifferenter cibis uteris, fidem habes,
rectam apud temetipsum, per quam constat
licitum esse his cibis uti. Bona quidem et
laudabilis est fides ista, sed habe eam in
occulto, coram Deo, cui talis fides placet,
Eccli. I, 34 s. : beneplacitum est Deo fides et
mansuetudo. Quasi dicat : non oportet quod
fidem istam manifestes per operis
executionem, ubi hoc fit cum scandalo
proximorum. Sed contra videtur esse quod
trouble contre toi, comme si tu agissais d’une
manière illicite, et par suite de quoi sa paix est
perturbée; ou qui le scandalise, c’est-à-dire
qui le provoque à tomber dans le péché et qui
en raison de cela lèse sa justice; ou qui
l’affaiblisse, c’est-à-dire qui le jette au moins
dans le doute en se demandant si ce qu’on a
fait est licite, ce qui diminue sa joie
spirituelle. Aussi l’Apôtre dit-il lui-même :
"Si un aliment scandalise mon frère, je ne
mangerai plus de chair, afin de ne pas
scandaliser mon frère."
1135. — Cependant1051
, puisqu’il est licite
d’user de ces aliments, si, pour éviter le
scandale du prochain, il faut s’en abstenir,
pour une raison analogue il semble qu’il faille
s’abstenir de toutes les choses licites, qui ne
sont pas nécessaires au salut, comme le sont
la justice, la paix et la joie spirituelles. Il
semble donc qu’il ne soit pas permis à
l’homme de réclamer ce qui lui appartient au
scandale du prochain.
Il faut dire que si le scandale vient de la
faiblesse ou de l’ignorance de ceux qui en
prennent occasion de se scandaliser, pour
éviter ce scandale, l’homme doit s’abstenir
des choses licites dans la mesure où elles ne
sont pas nécessaires au salut. Tel est, en effet,
le scandale des petits que le Seigneur ordonne
d’éviter : "Prenez garde de mépriser un seul
de ces petits; parce que, je vous le dis, leurs
anges voient sans cesse dans le ciel la face de
mon Père qui est dans les cieux." Mais si un
tel scandale provient de la malice de ceux qui
se scandalisent, ce scandale est semblable à
celui des pharisiens que le Seigneur nous a
enseigné à mépriser. Donc, pour éviter un tel
scandale il ne faut pas s’abstenir des choses
licites. Toutefois, à l’égard du scandale des
petits, il faut remarquer que, pour l’éviter, on
est tenu de différer l’usage des choses licites
jusqu’à ce que l’on puisse, après avoir donné
une explication, l’écarter. Mais si, après avoir
donné l’explication, le scandale demeure
1051 Lieux parallèles : 5. Th. 2a-2 Q. 43, a. 7 et 8; 3a, Q. 42, a. 2;
4 Sentences dist. 38, Q. 2, a. 4, Q. 1, 2, 3; Contra tmpugn. De, cuit, et relig., c. 15; Super Maul,. 15, 14
(éd. Marietti, n° 1308).
dicitur supra X, 10. — corde creditur ad
iustitiam, ore autem confessio fit ad
salutem. Non ergo videtur quod sufficiat
corde solum coram Deo fidem habere, sed
oportet huiusmodi fidem proximo
manifestare, confitendo. Dicendum est
autem quod eorum quae sunt fidei, quaedam
sunt quae non sunt perfecte per Ecclesiam
manifestata, sicut in primitiva Ecclesia
nondum erat perfecte declaratum apud
homines quod illi qui erant ex Iudaeis
conversi non tenerentur legalia observare, et
sicut tempore Augustini nondum erat per
Ecclesiam declaratum quod anima non esset
ex traduce. Unde in huiusmodi sufficit
homini quod fidem habeat coram Deo, nec
oportet quod fidem suam propalet cum
scandalo proximorum, nisi forte apud eos
qui habent de fide determinare. Quaedam
vero sunt ad fidem pertinentia iam per
Ecclesiam determinata, et in talibus non
sufficit fidem habere coram Deo, sed
oportet quod coram proximo fidem quis
confiteatur, quantumcumque ex hoc aliquis
scandalizetur, quia veritas doctrinae non est
dimittenda propter scandalum, sicut nec
Christus veritatem suae doctrinae propter
scandalum Pharisaeorum dimisit, ut habetur
Matth. c. XV, 12 ss. Sciendum etiam quod
licet circa talia oporteat quod homo fidem
suam manifestet confessione verborum, non
tamen oportet quod eam manifestet
executione operis, sicut si aliquis tenet fide
uti matrimonio esse licitum, non requiritur
ab eo quod matrimonio utatur ad fidei suae
manifestationem. Et sic etiam non
requirebatur ab eis, qui rectam fidem
habebant, quod fidem suam usu ciborum
manifestarent. Poterant enim manifestare
verbotenus confitendo. Deinde cum dicit
beatus qui non iudicat, etc., ostendit
encore, il semble qu’il ne vienne plus de
l’ignorance ou de la faiblesse, mais de la
malice, et qu’il appartienne alors au scandale
des pharisiens.
1136. — 3. En troisième lieu, <l’Apôtre>
écarte une excuse. En effet, on pourrait dire :
Bien que le prochain soit scandalisé de ce que
moi j’use indifféremment des aliments,
cependant pour montrer ma foi, d’après
laquelle il est certain que cela m’est permis, je
veux en user indifféremment. Mais l’Apôtre,
écartant ce prétexte, dit : 22 Toi, c’est-à-dire
toi qui uses indifféremment des aliments, as-
tu la foi droite en toi-même, cette foi par
laquelle il est certain qu’on peut licitement
user de ces aliments ? Cette foi est bonne et
louable, mais garde-la dans le secret devant
Dieu, à qui elle est agréable : "Ce qui est
agréable <à Dieu>, c’est la foi et la douceur."
Comme si <l’Apôtre> disait : Il ne faut pas
que tu manifestes cette foi par
l’accomplissement des œuvres, lorsque cela
se fait au scandale du prochain.
1137. — Mais1052
cela semble contredit par ce
verset du chapitre 10. — "on croit de cœur
pour la justice et on confesse de bouche pour
le salut." On voit donc qu’il ne suffit pas
seulement d’avoir la foi de cœur devant Dieu,
mais qu’il faut manifester cette foi au
prochain en la confessant.
On répondra en disant que, parmi les vérités
qui sont de foi, certaines ne sont pas
parfaitement manifestées par l’Eglise. Ainsi,
dans l’Eglise primitive, il n’était pas
parfaitement défini que ceux qui s’étaient
convertis parmi les Juifs n’étaient plus tenus
d’observer les prescriptions légales; et de
même, au temps d’Augustin1053
il n’était pas
encore défini par l’Église que l’âme ne se
transmettait pas1054
. Donc en ce domaine, il
1052
Lieux parallèles : Somme Théologique 3a, Q. 3, a. 2; 3 Sentences dist. 29, a. 8, Q. 2, sol. 3; De
quodlibet 9, Q. 7, a. 1; Ad Rom. 10, 10, lect. 2 (éd. Marietti, n° 831".). 1053
Voir SAINT AUGUSTIN, De libero arbitrés III, xxI, 59-62 (BA 6, 434-445); Lettre CLXVI (PL
33, 720-733; CSEL 44, 545-585). 1054 Il s’agit du difficile problème de l’origine de l’âme qui "est une question non résolue dans les
textes d’Augustin " (Edouard-Henri WÉBER, La Personne humaine au xiii’ siècle. L’avènement chez les
maîtres parisiens de l’acception moderne de l’homme, p. 32). Contrai rement à beaucoup de
médiévaux qui sollicitent les textes augus tiniens (et parfois les fabriquent) pour les accorder à la
quomodo ciborum usus efficitur aliquibus
immundus, ex eo quod est contra
conscientiam. Et circa hoc tria facit. Primo
ostendit quid circa hoc sit bonum, ut scilicet
de eo quod homo non facit non habeat
conscientiam remordentem. Unde dicit
beatus qui non iudicat semetipsum, id est
cuius conscientia eum non reprehendit vel
condemnat, in eo quod probat, id est
approbat esse faciendum. Sed hoc est
intelligendum, si recta fide approbet esse
aliquid faciendum. Si autem falsa opinione
approbat aliquid esse faciendum, puta si
arbitratur obsequium se praestare Deo, de eo
quod discipulos Christi interficit, ut dicitur
Io. XVI, 2, non excusatur ex eo quod circa
hoc non iudicat semetipsum; imo beatior
esset si circa hoc eum conscientia
reprehenderet, inquantum per hoc a peccato
magis prohiberetur. Sed in his quae sunt
licita, est intelligendum quod hic apostolus
dicit. Hoc enim ad gloriam hominis pertinet
quod eum sua conscientia non reprehendat.
2 Co I, 12. — gloria nostra haec est,
testimonium conscientiae nostrae. Iob
XXVII, 6. — neque enim reprehendit me
cor meum in omni vita mea. Secundo
ostendit quid circa hoc sit malum, ut scilicet
contra conscientiam agat. Unde dicit qui
autem discernit, id est, qui habet opinionem
falsam quod oportuit cibos discernere, si
manducaverit, scilicet cibos quos reputat
esse illicitos, damnatus est, ex hoc quod
quantum in ipso est, habet voluntatem
faciendi quod est illicitum, et sic delinquit
suffit à l’homme d’avoir la foi devant Dieu,
mais il ne faut pas la proclamer au scandale
du prochain, si ce n’est peut-être devant ceux
qui ont le pouvoir de définir ce qui est de foi.
En revanche, d’autres vérités appartiennent à
la foi et sont déjà définies par l’Eglise; à leur
égard il ne suffit pas d’avoir la foi devant
Dieu, mais il faut confesser sa foi devant le
prochain, quel que soit le scandale qu’il en
résulte, parce que la vérité de la doctrine ne
doit pas être délaissée à cause du scandale, à
l’exemple du Christ qui n’a pas délaissé la
vérité de sa doctrine à cause du scandale des
pharisiens, comme on le voit dans <l’évangile
de> Matthieu. Il faut savoir aussi que, bien
qu’à l’égard de ces vérités l’homme doit
manifester sa foi par la confession en paroles,
il ne doit cependant pas la manifester par
l’accomplissement des œuvres; ainsi ne
requiert-on pas de celui qui tient de foi qu’il
est licite d’user du mariage qu’il en use pour
la manifestation de sa foi. De même il n’était
pas requis de ceux qui avaient une foi droite
qu’ils manifestent leur foi en faisant usage des
aliments. Car ils pouvaient la manifester en la
confessant seulement en paroles.
1138. — B. En ajoutant1055
— Bienheureux
celui qui ne se juge pas, etc., <l’Apôtre>
montre comment l’usage des aliments devient
impur pour quelques-uns, du fait même que
cet usage s’oppose à la conscience. Sur ce
point il fait trois choses [n° 1139 et 1140].
1. Il montre premièrement ce qui est bien à ce
propos, à savoir que la conscience ne
doctrine de l’Eglise, saint Thomas, avec son habituelle lucidité critique, prend acte des hésitations du
grand Docteur de l’Occident. Dire que l’âme se transmet, signifie que l’âme est transmise par les
parents à l’embryon au moment de l’acte générateur. "Transmettre " se disant en latin traducere,
cette thèse a reçu le nom de traducianisme l’hypothèse inverse, qui affirme que l’âme est créée par
Dieu direc tement et infusée ensuite dans l’embryon, a reçu le nom de créatia nisme (c’est la
doctrine retenue par l’Eglise). Sans doute saint Augustin a-t-il commencé par combattre le
traducianisme quasi matérialiste de Tertullien (la matière ne peut pas produire de l’esprit), mais, tout
en déclarant sa perplexité, il n’écarte pas abso lument un traducianisme spiritualiste selon lequel
l’ême de l’enfant viendrait des parents, ce qui rendrait compte de la transmission du péché originel
(DTC, t. I, col. 2359-2361). — Voir aussi chap. 5, v. 12; leçon 3, n°408, n. 1, p. 219.
1055 Lieux parallèles Somme Théologique 1 Q. 19, a. 5; 2 Sentences dist. 39, Q. 3, a. 2 et 3; De
veritate, Q. 17, a. 4; De malo, Q. 2, a. 2, sol. 8; De quodlibet 3, Q. 12, a. 2; 8, Q. 6, a. 3.
proprio iudicio condemnatus, ut dicitur Tit.
III, 11. Tertio assignat causam eius quod
dixerat dicens quia non ex fide; ideo scilicet
condemnatus est. Potest autem hic fides
dupliciter accipi : uno modo de fide quae est
virtus, alio modo secundum quod fides
dicitur conscientia. Et hae duae acceptiones
non differunt nisi secundum differentiam
particularis et universalis. Id enim quod
universaliter fide tenemus, puta usum
ciborum esse licitum vel illicitum,
conscientia applicat ad opus quod est
factum vel faciendum. Dicitur ergo, ideo
eum qui manducat et discernit, esse
condemnatum, quia hoc non est ex fide, imo
est contra fidem, id est contra veritatem
fidei et contra conscientiam facientis. Hebr.
XI, 6. — sine fide impossibile est placere
Deo. Et quod haec sit sufficiens causa
condemnationis, ostendit subdens omne
autem quod non est ex fide peccatum est. Ex
quo videtur quod, sicut dicitur in Glossa
omnis vita infidelium peccatum sit, sicut
omnis vita fidelium est meritoria,
inquantum ad Dei gloriam ordinatur,
secundum illud 1 Co c. X, 31. — sive
manducatis, sive bibitis, sive aliquid aliud
facitis, omnia in gloriam Dei facite. Sed
dicendum est quod aliter se habet fidelis ad
bonum, et infidelis ad malum. Nam in
homine qui habet fidem formatam nihil est
damnationis, ut supra VIII, 1 dictum est.
Sed in homine infideli cum infidelitate est
bonum naturae. Et ideo cum aliquis infidelis
ex dictamine rationis aliquod bonum facit,
non referendo ad malum finem, non peccat.
Non tamen opus eius est meritorium, quia
non est gratia informatum. Et hoc est quod
in Glossa dicitur : nihil bonum est sine
summo bono, id est, nullum bonum
meritorium est sine gratia Dei, et ubi deest
agnitio vitae aeternae et incommutabilis
veritatis, quae scilicet est per fidem, falsa
virtus est in optimis moribus, inquantum
scilicet non refertur ad finem beatitudinis
aeternae. Cum vero homo infidelis aliquid
agit ex eo quod infidelis est, manifestum est
quod peccat. Unde in Glossa cum dicitur :
tourmente pas l’homme sur ce qu’il n’a pas
fait. Aussi dit-il : Bienheureux celui qui ne se
juge pas lui-même, c’est-à-dire que la
conscience ne reprend pas ou ne condamne
pas, dans ce qu’il éprouve comme bon, c’est-
à-dire dans ce qu’il approuve comme devant
être fait. Entendez : s’il approuve avec une foi
droite qu’une chose doit être faite. Mais si par
une opinion fausse il estime rendre un culte à
Dieu en mettant à mort les disciples du Christ,
comme on le dit dans <l’évangile de> Jean, il
est inexcusable pour ne s’être pas jugé lui-
même. Au contraire, il serait plus heureux si
sa conscience l’en reprenait, selon que ses
reproches l’éloigneraient davantage du péché.
Mais dans le domaine des choses qui sont
licites, il faut comprendre ce que dit ici
l’Apôtre : il appartient, en effet, à la gloire de
l’homme que sa conscience ne lui fasse pas de
reproche : "Ce qui fait notre gloire, c’est ce
témoignage de notre conscience : nous nous
sommes conduits dans ce monde, et plus
particulièrement envers vous, avec la
simplicité du cœur et la sincérité de Dieu, et
non point selon la sagesse charnelle, mais
selon la grâce de Dieu. "Et : "Mon cœur ne
me reproche rien dans toute ma vie."
1139. — 2. Deuxièmement, <l’Apôtre>
montre ce qui est mal à ce propos, à savoir
d’agir contre sa conscience. Aussi dit-il : 23
Mais celui qui fait une distinction, c’est-à-dire
celui qui a une opinion fausse d’après laquelle
il faut faire une distinction dans les aliments,
s’il mange, à savoir des aliments qu’il répute
illicites, est condamné, étant donné qu’il
dépend de lui d’avoir la volonté de faire ce
qui est illicite, et par conséquent "il pèche,
puisqu’il est condamné par son propre
jugement, comme le dit <Paul> dans son
épître à Tite.
1140. — 3. Troisièmement, <l’Apôtre> donne
la raison de ce qu’il avait avancé, en disant :
parce que cela ne procède pas de la foi, c’est-
à-dire voilà pourquoi il est condamné. Or ce
mot "foi" peut être pris ici de deux manières :
d’abord pour la foi qui est une vertu, ensuite
pour la foi selon qu’elle signifie la
conscience1056
. Et ces deux acceptions n’ont
1056
Voir Glosa in Rom. XIV, 23 (GPL, col. 1519G).
opus omne quod non est ex fide, peccatum
est, sic est intelligendum : omne quod est
contra fidem vel contra conscientiam,
peccatum est, et si ex genere suo bonum
esse videatur, puta si Paganus ad honorem
suorum deorum virginitatem servet, vel
eleemosynam det, hoc ipso peccat. Tit. I,
15. — coinquinatis et infidelibus nihil
mundum est, sed inquinatae sunt eorum et
mens, et conscientia.
d’autre différence entre elles que celle du
particulier et du général. Car ce que nous
tenons en général par la foi, par exemple que
l’usage des aliments est licite ou illicite, la
conscience l’applique à l’œuvre qui a été
accomplie ou à accomplir1057
. <L’Apôtre> dit
donc que celui qui mange et fait une
distinction est pour cette raison condamné,
parce que cela n’est pas de foi, au contraire
cela est contre la foi, c’est-à-dire contre la
vérité de la foi et contre la conscience de celui
qui agit "Sans la foi il est impossible de plaire
à Dieu." Et que cette cause de condamnation
soit suffisante, il le montre en ajoutant : Or
tout ce qui ne procède pas de la foi est péché.
De là il est évident que, selon le commentaire
de la Glose1058
, "toute la vie des infidèles est
péché ", comme toute la vie des fidèles est
méritoire, en tant qu’elle est ordonnée à la
gloire de Dieu, suivant ce passage de la
première épître aux Corinthiens "Soit donc
que vous mangiez, soit que vous buviez, et
quoi que vous fassiez, faites tout pour la
gloire de Dieu."
1141. — Cependant1059
il faut dire que la
conduite du fidèle à l’égard du bien est
différente de celle de l’infidèle à l’égard du
mal. Car dans l’homme dont la foi est formée,
il n’y a aucune condamnation, comme
<l’Apôtre> l’a dit plus haut [n° 595]. Mais
dans l’homme infidèle le bien de la nature
demeure malgré son infidélité. Voilà pourquoi
quand un infidèle, sous la prescription
(dictamen) de la raison, accomplit quelque
bien sans le rapporter à une fin mauvaise, il
ne pèche pas. Cependant son œuvre est sans
mérite, parce qu’elle n’est pas informée par la
grâce. C’est ce que dit la Glose : "Il n’est pas
de bien sans le bien souverain t>, c’est-â-dire
il n’est pas de bien méritoire sans la grâce de
Dieu, "et là où manque la connaissance de la
vie éternelle et de l’immuable vérité", à savoir
1057
Un rapport analogue existe en français : l’expression " de bonne foi signifie à peu près " en
conscience." La foi, comme vertu, est du côté des vérités générales; la foi, comme conscience, est du
côté des réalités particulières. 1058 Glosa in Rom. XIV, 23 (GPL, col. 1520 A; GOS, t. IV, p. 303b).
1059 Lieux parallèles Somme Théologique 2a-2ae, Q. 10, a. 4; Q. 23, a. 7, sol. 1; 2 Sentences dist. 41,
Q. 1, a. 2; 4 Sentences dist. 39, Q. 1, a. 2, sol. 5; De mais, Q. 2, a. 5, sol. 7; Ad Tit. 1, 15, lect. 4 (éd.
Marietti, n° 39."
celle qui procède de la foi, "on y trouve la
fausse vertu même dans les mœurs les
meilleures1060
", en ce sens qu’elle ne se
rapporte pas à la fin de la béatitude éternelle.
Mais quand l’homme infidèle fait quelque
chose en tant qu’infidèle, il est évident qu’il
pèche. Aussi, lorsque la Glose1061
dit : "Toute
œuvre qui ne procède pas de la foi est un
péché ", il faut comprendre cela de la manière
suivante : toute œuvre qui est contre la foi ou
contre la conscience est un péché, bien que de
par sa nature elle semble bonne. Par exemple,
si un païen, en l’honneur de ses dieux, garde
la virginité ou donne l’aumône, en cela même
il pèche "Pour les impurs et les infidèles, rien
n’est pur; leur esprit même et leur conscience
sont souillés."
Caput 15 CHAPITRE 15
Lectio 1 Leçon 1 [Versets 1 à 13]
[n° 1142] 1 Or nous devons, nous qui sommes
plus forts, supporter les faiblesses des faibles,
et ne point <rechercher ce qui> nous plaît.
[n° 1143] 2 Que chacun de vous plaise à son
prochain en vue du bien, pour l’édification.
[n° 1145] 3 Car le Christ ne s’est pas complu
en lui-même mais, ainsi qu’il est écrit : "Les
outrages de ceux qui t’outragent sont tombés
sur moi."
[n° 1148] 4 Car tout ce qui a été écrit a été
écrit pour notre instruction, afin que, par la
patience et par la consolation des Ecritures,
nous ayons l’espérance.
[n° 1149] 5 Et que le Dieu de la patience et de
la consolation vous donne d’être unis de
sentiment les uns avec les autres selon Jésus-
Christ,
6 afin que, d’un cœur unanime et d’une même
bouche, vous honoriez Dieu, le Père de Notre
Seigneur Jésus-Christ.
[n° 1150] 7 C’est pourquoi accueillez-vous
les uns les autres, comme le Christ vous a
accueillis pour l’honneur de Dieu.
[n° 1153] 8 Car je dis que le Christ Jésus a été
1060 Glosa in Rom. XIV, 23 (GPL, col. 1520 A; GOS, t. IV, p. 303b).
1061 Glosa in Rom. XIV, 23 (GPL, col. 1520 A).
le ministre de la circoncision pour <montrer>
la véracité de Dieu, pour confirmer les
promesses <faites> aux pères;
[n° 1155] 9 et les nations honorent Dieu pour
sa miséricorde, comme il est écrit : "C’est
pourquoi je te confesserai parmi les nations,
Seigneur, et je chanterai ton nom."
[n° 1159] : 10 Et <l’Ecriture> dit encore
"Réjouissez-vous, nations, avec son peuple."
[n° 1160] 11 Et ailleurs : "Louez le Seigneur
toutes les nations, et magnifiez-le tous les
peuples."
[n° 11161] 12 Et Isaïe dit de son côté : "Elle
paraîtra la racine de Jessé, et celui qui se
lèvera pour régir les nations, c’est en lui que
les nations espéreront."
[n° 1162] 13 Que le Dieu de l’espérance vous
remplisse de toute joie et de paix dans votre
acte de foi, afin que vous abondiez dans
l’espérance et dans la vertu de l’Esprit-Saint.
[86228] Super Rom., cap. 15 l. 1 Supra
apostolus docuit quod maiores debent
scandala infirmorum vitare, hic docet quod
maiores debent etiam infirmitates minorum
sustinere. Et circa hoc duo facit. Primo
proponit admonitionem; secundo manifestat
eam, ibi unusquisque vestrum, et cetera. Ista
admonitio duo continet, quorum primum
pertinet ad exteriorem exhibitionem. Unde
dicit : non solum debemus scandala
infirmorum vitare, sed etiam nos qui sumus
firmiores in fide, debemus sustinere
imbecillitates infirmorum. Sicut enim in
materiali aedificio eliguntur aliqua firmiora
ad sustinendum totum aedificii pondus quod
ex fragiliori materia superponitur, sicut sunt
fundamenta et columnae; ita etiam in
spirituali Ecclesiae aedificio, non solum
eliguntur, sed efficiuntur aliqui firmiores, ut
sustineant pondus aliorum. Unde in Ps.
LXXVI, 4 dicitur : ego confirmavi columnas
eius. Et Gal. VI, 2. — alter alterius onera
portate. Sustinent autem firmiores
imbecillitates infirmorum, dum eorum
defectus patienter ferunt, et pro posse
1142. — Après1062
avoir enseigné [n° 1081]
que les plus forts doivent éviter de scandaliser
les faibles, l’Apôtre enseigne ici que les plus
forts doivent aussi supporter les faiblesses des
plus petits. Et à cet effet il fait deux choses
I) Il commence par donner un avertissement.
II) Puis, il l’explique [n° 1143] : 2 Que
chacun de vous plaise, etc.
I. Cet avertissement comprend deux parties,
dont la première regarde sa manifestation
extérieure. Aussi <l’Apôtre> dit-il : Non
seulement nous devons éviter de scandaliser
les faibles, mais1063
nous aussi, qui sommes
plus forts dans la foi, nous devons supporter
les faiblesses des faibles. Car de même que
dans un édifice matériel on choisit des
matériaux plus solides pour soutenir tout le
poids de l’édifice, sur lequel reposent des
matériaux plus fragiles, telles sont les
fondations et les colonnes; de même dans
l’édifice spirituel de l’Eglise, non seulement
certains sont choisis, mais ils sont rendus plus
forts pour supporter le poids des autres. D’où
ce qui est écrit dans un psaume : "C’est moi
qui ai affermi ses colonnes." Et <dans l’épître
1062 Lieux parallèles 1 Ad Cor. 3, 10, lece. 2 (éd. Marietti, n° 148). Somme Théologique 2 Q. 4, a. 7, sol.
4.
1063 Lieu parallèle Somme Théologique 3a, Q. 42, a. 1.
sublevare nituntur. Secundum autem
pertinet ad interiorem intentionem. Unde
dicitur : et non debemus nobis placere, ita
scilicet ut semper illud velimus impleri
quod nobis placet, sed debemus
condescendere voluntatibus aliorum, ut
faciamus ea quae aliis placent et quae eis
sunt utilia. 1 Co X, 33. — sicut et ego per
omnia omnibus placeo. Deinde cum dicit
unusquisque vestrum, etc., manifestat
propositam admonitionem, et primo
quantum ad secundam partem; secundo
quantum ad primam, ibi propter quod
suscipite invicem, et cetera. Circa primum
duo facit. Primo exponit quod dixerat;
secundo rationem inducit, ibi etenim
Christus non sibi, et cetera. Dicit ergo primo
: ita dictum est quod nos non debemus nobis
placere, et hoc quidem est, quia
unusquisque nostrum, qui sumus firmiores,
debet placere proximo suo infirmo, id est,
condescendere ei in his quae ei placent, non
tamen in his quae mala sunt, sicut Is. XXX,
10 quidam requirunt : loquimini nobis
placentia, et cetera. Et ideo subdit in
bonum. Similiter etiam non debemus
intendere ut hominibus placeamus propter
humanum favorem vel gloriam, cum in Ps.
LII, 6 dicatur : Deus dissipavit ossa eorum
qui hominibus placent, sed ad honorem Dei,
et utilitatem proximorum. Unde subdit ad
aedificationem, id est propter hoc quod
aliorum voluntati condescendentes, ipsi
aedificentur in fide et dilectione Christi.
Supra XIV, 19. — quae aedificationis sunt,
invicem custodiamus. Deinde, cum dicit
etenim Christus, assignat rationem eius
quod dixerat exemplo Christi. Et primo
proponit exemplum Christi; secundo
ostendit eius exemplum esse a nobis
imitandum, ibi quaecumque scripta sunt;
tertio subiungit rationem, ut id implere
possimus, ibi Deus autem pacis et cetera.
Circa primum duo facit. Primo proponit
exemplum, dicens : dictum est quod non
debemus nobis placere, scilicet secundum
nostram privatam voluntatem, etenim
Christus, qui est caput nostrum, non sibi
placuit, dum elegit pati pro nostra salute, et
ea quae suae propriae voluntati erant
aux> Galates : "Portez les fardeaux les uns
des autres." Or les plus forts supportent les
faiblesses des faibles, lorsqu’ils portent
patiemment leurs défauts et s’efforcent de les
soutenir selon leur pouvoir.
La seconde partie regarde l’intention
intérieure, aussi est-il dit : Et nous ne devons
point <rechercher ce qui> nous plaît, c’est-â-
dire vouloir que s’accomplisse toujours ce qui
nous plaît, mais nous devons condescendre
aux volontés des autres pour faire ce qui leur
plaît et ce qui leur est utile : "Tout comme
moi je cherche à plaire à tous en tout."
1143. — II. Puis, lorsqu’il dit : 2 Que chacun
de vous, etc., il explique l’avertissement
exposé, et
A) Premièrement, quant à la seconde partie.
B) Deuxièmement, quant à la première partie
[n° 1150] : C’est pourquoi accueillez-vous les
uns les autres, etc.
A. Sur le premier point il fait deux choses
1) Il expose ce qu’il avait dit.
2) Il en donne la raison [n° 1145] : Car le
Christ ne s‘est pas complu en lui-même, etc.
1144. — 1. <L’Apôtre> commence donc par
dire : Il a été dit que nous, nous ne devons
point <rechercher ce qui> nous plaît pour
cette raison que chacun de nous, qui sommes
les plus forts, doit plaire à son prochain qui
est faible, c’est-à-dire doit condescendre â <sa
faiblesse> en ce qui lui plaît, non cependant
en ce qui est mal, à la manière de ceux qui,
dans <le livre d’> Isaïe, demandent : "Dites-
nous des choses qui nous plaisent, voyez pour
nous des erreurs." Voilà pourquoi <l’Apôtre>
ajoute : en vue du bien. De même aussi, nous
ne devons pas chercher à plaire aux hommes
en vue d’une faveur ou d’une gloire humaine,
puisqu’il est dit au psaume 52. — "Dieu a
dispersé les os de ceux qui plaisent aux
hommes; ils ont été confondus, parce que le
Seigneur les a méprisés ", mais pour
l’honneur de Dieu et l’utilité du prochain.
Aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : pour
l’édification, c’est-à-dire pour que,
condescendant à la volonté des autres, ils
soient eux-mêmes édifiés dans la foi et dans
la charité du Christ : "Observons
mutuellement ce qui contribue à
l’édification."
contraria, scilicet naturali voluntati
humanae, ut impleret divinam, quae sibi et
patri erat communis, secundum illud Matth.
XXVI, 42. — non mea voluntas, sed tua
fiat. Secundo ad hoc auctoritatem inducit,
dicens sed sicut scriptum est in Psalmo ex
persona Christi dicentis ad patrem : o pater,
improperia Iudaeorum improperantium tibi,
id est, te blasphemantium per sua mala
opera et per hoc quod veritati tuae doctrinae
contradicunt, ceciderunt super me, quia
videlicet opprimere me voluerunt, quia
voluntatem tuam eis proponebam, et eorum
mala opera redarguebam. Io. XV, 24. — sed
oderunt me et patrem meum. Potest et hoc
referri ad peccata totius humani generis,
quia omnia peccata quodammodo sunt
improperia Dei, inquantum per ea lex Dei
contemnitur. Is. I, 4. — dereliquerunt
dominum, blasphemaverunt sanctum Israel.
Sic ergo improperia improperantium Deo
ceciderunt super Christum, inquantum ipse
pro peccatis omnium mortuus est. Is. c. LIII,
6. — Deus posuit in eo iniquitates omnium
nostrum. I Petr. II, 24. — peccata nostra
pertulit in corpore suo super lignum.
Deinde, cum dicit quaecumque enim scripta
sunt, etc., ostendit quod hoc exemplum
Christi sit nobis imitandum, dicens
quaecumque enim scripta sunt in sacra
Scriptura, vel de Christo vel de membris
eius, scripta sunt ad nostram doctrinam.
Nulla enim necessitas fuit haec scribere, nisi
propter nos, ut ex his instruamur. II Tim. III,
v. 16. — omnis Scriptura divinitus
inspirata, utilis est ad docendum et
erudiendum, et cetera. Quid autem in
Scripturis ad nostram doctrinam contineatur,
ostendit subdens ut per patientiam et
consolationem Scripturarum, id est quas
Scripturae continent. Continetur enim in
sacra Scriptura patientia sanctorum in malis
sustinendis. Iac. ult. : patientiam Iob
audistis. Continetur etiam in eis consolatio,
quam Deus eis exhibuit, secundum illud Ps.
XCIII, 19. — secundum multitudinem
dolorum meorum in corde meo,
1145. — 2. Quand <l’Apôtre> dit : Car le
Christ ne s’est pas complu, etc., il donne la
raison de ce qu’il avait dit, par l’exemple du
Christ. Et :
a) Il commence par proposer l’exemple du
Christ.
b) Puis, il montre que nous devons imiter son
exemple [n° 1148] : 4 Car tout ce qui a été
écrit, etc.
c) Enfin, il y ajoute une raison pour que nous
puissions l’accomplir [n° 1149] : Et que le
Dieu de la patience, etc.
1146. — a. Sur le premier point, <l’Apôtre>
fait deux choses :
— Il commence par proposer l’exemple <du
Christ>, en disant : On a dit que nous ne
devons pas nous complaire en nous-mêmes,
c’est-à-dire selon notre volonté particulière,
car le Christ, qui est notre Tête, ne s’est pas
complu en lui-même, quand il a choisi de
souffrir pour notre salut et ce qui était
contraire à sa volonté propre, c’est-à-dire à sa
volonté humaine naturelle, afin d’accomplir la
volonté divine, qui lui était commune avec le
Père, selon ce verset de Luc : "Que ce ne soit
pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne."
1147. — Puis il cite l’autorité de l’Ecriture,
en disant : mais, ainsi qu’il est écrit dans un
psaume à propos de la personne du Christ
s’adressant au Père : O Père, les outrages des
Juifs qui t’outragent, c’est-à-dire qui
blasphèment contre toi par leurs mauvaises
œuvres et par leur opposition à la vérité de ta
doctrine, sont tombés sur moi, à savoir parce
qu’ils ont voulu m’opprimer quand je leur
proposais ta volonté et quand je blâmais leurs
œuvres mauvaises : "Ils ont haï et moi et mon
Père." Ce passage peut aussi se rapporter aux
péchés de tout le genre humain, parce que
tous les péchés sont en quelque sorte des
outrages envers Dieu, en tant que par eux la
Loi de Dieu est méprisée : "Ils ont abandonné
le Seigneur, ils ont blasphémé le Saint
d’Israël." Ainsi donc les outrages de ceux qui
outragent Dieu sont tombés sur le Christ, en
tant que lui-même est mort pour les péchés de
tous : "<Dieu> a mis sur lui <les iniquités> de
consolationes tuae laetificaverunt animam
meam. Unde et I Petr. I, 11 dicitur :
praenuntians eas, quae in Christo sunt,
passiones, quod pertinet ad patientiam, et
posteriores glorias, quod pertinet ad
consolationem. Quem autem fructum ex hac
doctrina suscipiamus, ostendit subdens spem
habeamus. Per hoc enim quod ex sacra
Scriptura instruimur eos, qui patienter
propter Deum tribulationes sustinuerunt,
divinitus consolatos fuisse, spem accipimus,
ut et ipsi consolemur, si in ipsis fuerimus
patientes. Iob XIII, 15. — et si occiderit me,
in ipso sperabo. Deinde cum dicit Deus
autem patientiae, etc., quia videbatur nimis
arduum ut purus homo possit exemplum
Christi imitari, secundum illud Eccle. II, 12.
— quid est homo ut sequi possit regem,
factorem suum ? Ideo adhibet orationis
suffragium, dicens Deus autem patientiae,
scilicet dator, Ps. LXX, v. 5. — tu es
patientia mea, et solatii, idest qui
spiritualem consolationem largitur, 2 Co c.
I, 3. — pater misericordiarum et Deus
totius consolationis, det vobis, a quo est
omne datum optimum, ut dicitur Iac. I, 17,
idipsum sapere in alterutrum, idest ut
invicem idem sapiatis, 2 Co ult. : idem
sapite, pacem habete, non quidem
secundum consensum in peccatum, sed
secundum Iesum Christum, de quo dicitur
Eph. II, 14. — ipse est pax nostra, qui fecit
utraque unum. Ut, per hoc quod idem
sapiatis, unanimes, existentes per fidem et
charitatis consensum, secundum illud Ps.
secundum aliam litteram : qui habitare facit
unanimes in domo, uno ore, idest una oris
confessione, quae ex unitate fidei procedit,
1 Co I, 10. — idipsum dicatis omnes; ut, pro
conformitate cordis, honorificetis Deum,
omnium creatorem, idipsum etiam
existentem patrem domini nostri Iesu
Christi, per quem nos sibi in filios
adoptavit. I Reg. II, 30. — qui
honorificaverit me, honorificabo eum. Mal.
nous tous." — "Il a porté nos péchés dans son
propre corps sur le bois1064
."
1148. — b. Puis, lorsqu’il dit : 4 Car tout ce
qui a été écrit, etc., <l’Apôtre> montre que
nous devons imiter cet exemple du Christ. Car
tout ce qui a été écrit, dit-il, dans la sainte
Ecriture, soit à propos du Christ, soit à propos
de ses membres, a été écrit pour notre
instruction. Car il n’y eut aucune nécessité
d’écrire cela, si ce n’est pour nous, afin que
nous en soyons instruits : "Toute Ecriture
divinement inspirée est utile pour enseigner,
pour reprendre, pour corriger, pour former à
la justice, afin que l’homme de Dieu soit
parfait et préparé à toute bonne œuvre."
<L’Apôtre> montre ce qui est contenu dans
les Ecritures pour notre instruction, en
ajoutant : afin que, par la patience et la
consolation des Ecritures, c’est-à-dire qui sont
contenues dans les Ecritures. Car dans la
sainte Ecriture est contenue la patience des
saints à supporter les maux : "Vous avez
appris la patience de Job " En elles est aussi
contenue la consolation que Dieu leur a
donnée, selon ce verset du psaume "Selon la
multitude de mes douleurs <qui étaient> dans
mon cœur tes consolations ont réjoui mon
âme." C’est de là qu’il est dit aussi : "En
prédisant les souffrances du Christ", ce qui
concerne la patience, "et les gloires qui
devaient les suivre ", ce qui regarde la
consolation.
<L’Apôtre> montre quel fruit nous recevons
de cette doctrine, en ajoutant nous ayons
l’espérance. Car, en apprenant par la sainte
Ecriture que ceux qui ont supporté avec
patience des tribulations pour Dieu ont été
divinement consolés, nous concevons
l’espérance d’être consolés nous-mêmes dans
la mesure où nous avons été patients dans les
mêmes tribulations : "Quand il me tuerait,
c’est en lui que j’espérerais."
1149. — c. <L’Apôtre> ajoute ensuite : 5 Et
que le Dieu de la patience, etc. Parce qu’il
semblait extrêmement difficile que l’homme
1064
Ps 67, 7. Il s’agit quasiment de la version du Psautier romain, à l’exception de la graphie du mot
unanimes, lequel figure notamment dans le texte du Psautier mozarabe. Voir dans l’apparat cntlque en
marge et en bas du texte du Psautier romain, éd. Dom Robert Weber, p. 148. Cette version est utilisée
dans l’antienne de l’Introït Deus in loco suo du Gommun du Graduel romain (XI’ dimanche après la
Pentecôte, actuellement XVII’ dimanche du temps per annum).
I, 6. — si ego pater, ubi est honor meus ?
Deinde, cum dicit propter quod suscipite
invicem, manifestat primam partem
admonitionis, in qua dixerat quod firmiores
debent imbecillitatem infirmorum sustinere.
Et circa hoc duo facit. Primo resumit
admonitionem; secundo inducit rationem
exemplo Christi, ibi sicut et Christus, etc.;
tertio subiungit rationem, ibi Deus autem
spei, et cetera. Dicit ergo primo propter
quod, id est, quia ea quae scripta sunt ad
nostram doctrinam ordinantur, scilicet
exempla Christi et aliorum sanctorum,
consequenter, suscipite invicem, secundum
charitatis affectum, ut scilicet unus sustineat
ea quae sunt alterius, sicut vult se sustineri
quantum charitas permittit : et unus alium
etiam suscipiat ad adiuvandum et
promovendum. Supra c. XIV, 1. —
infirmum in fide suscipite. Deinde, cum dicit
sicut et Christus suscepit vos, etc., assignat
rationem exemplo Christi. Et, primo, ponit
eius exemplum, dicens sicut et Christus
suscepit vos, scilicet in sua protectione et
cura. Is. XLII, 1. — ecce servus meus,
suscipiam eum. Lc. I, 54. — suscepit Israel
puerum suum, recordatus misericordiae
suae. Et hoc in honorem Dei, in quem
omnia referebat. Io. VIII, 49. — honorifico
patrem meum, et vos inhonorastis me. Ex
quo datur intelligi, quod nos invicem
debemus suscipere in his quae pertinent ad
honorem Dei. Secundo, ibi dico enim
Christum, etc., manifestat quod dixerat. Et
primo quidem quantum ad Iudaeos;
secundo, quantum ad gentiles, ibi gentes
autem, et cetera. Dicit ergo primo : dictum
est quod Christus vos suscepit, qui estis
congregati in unitate fidei ex Iudaeis et
gentibus. Et hoc patet quantum ad utrosque.
Dico, ergo, Christum ministrum fuisse
circumcisionis. Est enim ipse auctor fidei
quantum ad omnes, secundum illud Hebr.
XII, 2. — aspicientes in auctorem fidei, et
cetera. Sed in propria persona non exhibuit
seipsum nisi Iudaeis, secundum illud Matth.
XV, 24. — non sum missus nisi ad oves
quae perierunt domus Israel. Is. XLII, 2. —
non audietur vox eius foris. Et hoc quidem
propter veritatem Dei, ut scilicet veritas Dei
en tant que tel puisse imiter l’exemple du
Christ, selon ce verset de l’Ecclésiaste :
"Qu’est-ce que l’homme pour pouvoir suivre
le roi son créateur ?" <L’Apôtre> recourt au
suffrage de la prière, en disant : Et que le
Dieu de la patience — c’est-à-dire celui qui la
donne, selon ce verset du psaume 70. —
"C’est toi qui es ma patience, Seigneur " — et
de la consolation, c’est-à-dire celui qui
accorde la consolation spirituelle — que "le
Père des miséricordes et le Dieu de toute
consolation ", "de qui vient tout don excellent
", — vous donne d’être unis de sentiment les
uns avec les autres, c’est-à-dire d’avoir
mutuellement les mêmes sentiments : "N’ayez
qu’un sentiment, conservez la paix ", non à la
vérité en consentant au péché, mais selon
Jésus-Christ — dont il est dit : "C’est lui qui
est notre paix, lui qui des deux choses en a
fait une seule " — afin que, en ayant les
mêmes sentiments, d’un cœur unanime,
vivant en accord par la foi et la charité —
selon ce verset du psaume, <cité> d’après une
autre version : "Lui qui fait habiter dans sa
maison ceux qui ont le cœur unanime " — et
d’une même bouche, c’est-à-dire par la même
confession de bouche qui procède de l’unité
de la foi : "Je vous en conjure donc, frères,
par le Nom de Notre Seigneur Jésus-Christ,
de n’avoir tous qu’un même langage "; afin
que, par la conformité du cœur, vous honoriez
Dieu, le Créateur de toutes choses, et qui est
en même temps le Père de Notre Seigneur
Jésus-Christ, par lequel il a fait de nous ses
fils adoptifs : "Quiconque m’aura honoré, je
l’honorerai, " Et encore : "Si donc moi je suis
votre père, où est mon honneur
1150. — B. En disant ensuite : C’est pourquoi
accueillez-vous les uns les autres, <l’Apôtre>
développe la première partie de son
avertissement, dans laquelle il avait dit que
les plus forts doivent supporter la faiblesse
des faibles. A cet égard, il fait trois choses :
1) Il commence par reprendre son exhortation.
2) Puis, il en donne la raison par l’exemple du
Christ [n° 1152] : comme le Christ vous a
accueillis, etc.
3) Enfin, il y ajoute une prière [n° 1162] :
Que le Dieu de l’espérance, etc.
1151. — 1. Il commence donc par dire : C’est
promittentis comprobaretur. Supra III, 4. —
est autem Deus verax. Unde subdit ad
confirmandas promissiones patrum, id est,
ut per hoc implerentur promissiones
patribus factae. Lc. I, v. 69. — erexit cornu
salutis nobis in domo David pueri sui; sicut
locutus est per os sanctorum. 2 Co I, 20. —
quotquot sunt promissiones Dei, in illo est.
Deinde, cum dicit gentes autem, etc.,
ostendit etiam gentes susceptas a Christo. Et
primo proponit quod intendit; secundo
confirmat per auctoritatem, ibi sicut
scriptum est, et cetera. Dicit ergo : ita
dictum est quod Christus suscepit Iudaeos
propter veritatem Dei, ut promissiones
patrum implerentur, gentibus autem non
erant promissiones factae. Unde hoc non
habet locum quantum ad gentiles, sed sunt
propter misericordiam suscepti. Et hoc est
quod dicit gentes autem debent honorare
Deum super misericordia eis exhibita per
Christum, quia licet eis personaliter non
praedicaverit, ad eos tamen discipulos suos
misit, qui in gentibus ministerium
exercuerunt, sicut ipse exercuerat in Iudaeis,
secundum illud Matth. ult. : euntes docete
omnes gentes. Et de hac misericordia dicitur
in Ps. XXXII, 5. — misericordia domini
plena est terra. Lc. I, 50. — misericordia
eius a progenie in progenies timentibus
eum, et cetera. Sic ergo apostolus
conversionem Iudaeorum attribuit veritati
divinae, conversionem gentilium divinae
misericordiae. Contra quod videtur esse
quod dicitur in Ps. XXIV, 10. — universae
viae domini misericordia et veritas. Sed
dicendum est quod per hoc quod ascribit
vocationem Iudaeorum divinae veritati, non
excludit misericordiam, quia et apostolus ex
Iudaeis natus dicit I Tim. I, 13. —
misericordiam consecutus sum. Et hoc
ipsum misericordiae fuit quod Deus patribus
pourquoi, c’est-à-dire parce que ce qui a été
écrit a été ordonné en vue de notre instruction,
à savoir les exemples du Christ et des saints,
conséquemment accueillez-vous les uns les
autres par l’affection de la charité; autrement
dit, que l’un supporte ce qui vient de l’autre,
comme il veut lui-même être supporté, autant
que la charité le permet, et que l’un accueille
l’autre aussi pour l’aider et le faire progresser
: "Accueillez celui qui est faible dans la foi."
1152. — 2. En disant : comme le Christ vous
a accueillis (suscepit), <l’Apôtre> donne la
raison <de son avertissement> par l’exemple
du Christ.
Et il commence par citer son exemple, en
disant : comme le Christ vous a accueillis,
c’est-à-dire par sa protection et par sa
sollicitude : "Voici mon serviteur, je le
soutiendrai (suscipiam)." Et encore : "Il a
secouru (suscepit) Israël son serviteur, se
souvenant de sa miséricorde " Et cela pour
l’honneur de Dieu, auquel il rapportait toutes
choses : "J’honore mon Père, et vous, vous
me déshonorez."
Il nous est ainsi donné de comprendre que
nous devons nous accueillir les uns les autres
dans tout ce qui se rapporte à l’honneur de
Dieu.
1153. — Puis, par ces mots : 8 Car je dis que
le Christ, etc., <l’Apôtre> développe ce qu’il
avait dit. Et
a) Premièrement, à l’égard des Juifs.
b) Deuxièmement, quant aux Gentils [n°
1155] : Et les nations, etc.
1154. — a. <L’Apôtre> commence donc par
dire : On a dit que le Christ vous a accueillis,
vous, Juifs et nations païennes, qui êtes
rassemblés dans l’unité de la foi. Et cela est
évident quant aux uns et aux autres. Je dis
donc que le Christ a été le ministre de la
circoncision1065
, car il est lui-même pour tous
1065
Ministre de la "circoncision" : saint Thomas interprète cette affirmation comme s’appliquant (mais
pas de la même manière) en même temps aux Juifs et aux païens convertis. Ce qui suppose que le
terme "circoncision" doit être entendu au sens large de foi au vrai Dieu; et non au sens strict. Le Christ
est alors ministre de l’Alliance dont la circoncision fut le signe. La plupart des exégètes modernes
pensent que cette expression ne s’applique qu’aux Juifs (voir la Bible de Jérusalem qui traduit
"Ministre des circoncis") elle signifie que le Christ "s’est mis pendant sa vie sur terre au service des
Juifs, leur consacré son ministère (voir HUBY, Epître aux Romains, Beauchesne, 1957, p. 470-471).
promissiones facit de posterorum salute.
Similiter etiam per hoc quod vocationem
gentium ascribit divinae misericordiae, non
excludit totaliter divinam veritatem, quia
hoc ipsum ad divinam veritatem pertinebat,
quod propositum suum de salvatione
gentium implevit, quod dicit apostolus ad
Eph. III, 9 esse sacramentum absconditum a
saeculis in Deo. Sed aliquis modus veritatis,
scilicet pro impletione promissorum,
consideratur in vocatione Iudaeorum, qui
non consideratur in vocatione gentium,
quibus promissiones non sunt factae.
Deinde, cum dicit sicut scriptum est, etc.,
confirmat quod dixerat de conversione
gentium, per auctoritatem. Licet enim
gentibus non fuerit repromissa vocatio ad
fidem Christi, non tamen ex improviso
accidit, sed fuit praenuntiata vaticiniis
prophetarum. Inducit autem quatuor
auctoritates, quarum prima continet
gratiarum actiones Christi ad patrem, pro
conversione gentium per ipsum facta. Unde
dicit sicut scriptum est, in Ps. XVII, 50 ex
persona Christi : constitues me in caput
gentium, et ab insurgentibus in me Iudaeis
exaltabis me. O Deus pater, ego Christus
confitebor tibi, confessione gratiarum
actionis, in gentibus, id est pro gentium
conversione per me facta, et cantabo nova
quadam mentis exultatione nomini tuo, quod
eis manifestum est, secundum illud Io.
XVII, v. 6. — manifestavi nomen tuum
hominibus quos dedisti mihi. Vel aliter :
confitebor tibi in gentibus, id est, faciam
quod tibi gentes confiteantur confessione
fidei, Ps. LXVI, 4. — confiteantur tibi
populi, Deus, confiteantur tibi populi
omnes, et nomini tuo cantabo, id est faciam
quod gentes cantent tibi canticum quod
consistit in exultatione spiritus renovati. Ps.
XCV, 1. — cantate domino canticum
novum, cantate domino, omnis terra.
Secunda auctoritas continet adunationem
gentium et Iudaeorum. Unde subdit et
iterum dicit, Scriptura, o gentes quae eratis
l’auteur de la foi1066
, selon ce verset de
l’épître aux Hébreux : "Contemplant l’auteur
et le consommateur de la foi, Jésus qui, au
lieu de la joie qui lui était proposée, endura
une croix, méprisant la honte, et qui est
désormais assis à la droite du trône de Dieu."
Mais selon sa propre personne il ne s’est
manifesté qu’aux Juifs, selon ce verset de
Matthieu : "Je n’ai été envoyé qu’aux brebis
perdues de la maison d’Israël." Et encore :
"Sa voix ne sera pas entendue au dehors." Et
cela pour <montrer> la véracité de Dieu,
c’est-à-dire afin que la véracité de Dieu qui
promet soit confirmée : "Au contraire Dieu
est véridique." Aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il :
pour confirmer les promesses <faites> aux
pères, c’est-à-dire afin que par ce ministère
les promesses faites aux pères soient
accomplies : "<Le Dieu d’Israël> nous a
suscité une corne de salut dans la maison de
son serviteur David, comme il l’a promis par
la bouche de ses saints prophètes des temps
anciens." Et : "Toutes les promesses de Dieu
ont en effet leur oui en lui."
1155. — b. En ajoutant : Et les nations, etc.,
<l’Apôtre> montre que les nations païennes
ont été accueillies par le Christ. Et :
— Il commence par exposer son intention.
— Puis, il la confirme par l’autorité
<scripturaire> [n° 1158] : comme il est écrit,
etc.
1156. — Il dit donc : On a dit que le Christ a
accueilli les Juifs pour <montrer> la véracité
de Dieu, afin que les promesses des pères
soient accomplies, mais les promesses
n’avaient pas été faites aux nations païennes.
Elles ne concernent donc pas ces nations,
mais ces dernières ont été accueillies pour
<montrer> la miséricorde <divine>. Et c’est
ce que dit <l’Apôtre> et les nations doivent
honorer Dieu pour sa miséricorde qui leur a
été manifestée par le Christ; car, bien qu’il ne
leur ait pas prêché en personne, il leur a
cependant envoyé ses disciples, qui ont exercé
leur ministère dans ces nations, comme lui-
même l’avait exercé chez les Juifs, selon cette
Saint Thomas n’ignore évidemment pas cette signification — à laquelle il fait droit — mais il la situe â
sa place dans une interprétation plus large. 1066
Lieux parallèles 4 Sentences dist. 46, Q. 2, a. 2, Q. 2; De veritate, Q. 28, a. 1, sol. 8; Super Ptalm.,
in Ps. 24.
alienae, a conversatione Israel, ut dicitur
Eph. II, 12, laetamini, gentes, cum plebe
eius, idest simul communem exultationem
assumatis cum Iudaeis, qui olim erant plebs
eius. Is. IX, 3. — laetabuntur coram te,
sicut qui laetantur in messe. Io. X, 16. —
fiet unum ovile et unus pastor. Nostra autem
littera habet : laetamini cum Ierusalem et
exultate in ea, omnis qui diligitis eam.
Tertia autem auctoritas continet devotionem
gentium ad Deum. Unde subdit et iterum
scriptum est in Psalmis laudate, omnes
gentes, dominum, scilicet eius bonitatem
confitentes, Ps. : a solis ortu usque ad
occasum laudabile nomen domini; et omnes
populi, non solum populus Iudaeorum,
magnificate eum, id est credite esse
magnum, id est quod sua magnitudine
omnem laudem excedat. Eccli. XLIII, v. 33.
— benedicentes dominum, exaltate illum
quantum potestis : maior enim est omni
laude. Matth. I, 11. — ab ortu solis usque
ad occasum magnum est nomen meum in
gentibus. Quarta auctoritas continet
reverentiam gentium ad Christum. Unde
subditur et rursus Isaias ait erit radix Iesse.
In quo praenuntiat Christi originem, ex
David semine nasciturum. Iesse namque fuit
pater David. Dicit ergo erit radix Iesse, ex
cuius semine Christus nascetur. Is. XI, 10.
— egredietur virga de radice Iesse, et flos,
et cetera. Vel Christus erit radix Iesse, quia
licet ex Iesse processerit secundum carnis
originem, tamen sua virtute Iesse sustentavit
et gratiam ei influxit. Supra XI, 18. — non
tu radicem portas, sed radix te. Deinde
parole de Matthieu : "Allez donc, enseignez
toutes les nations les baptisant au nom du
Père, et du Fils, et du Saint-Esprit" Et il est dit
de cette miséricorde au psaume 32. — "La
terre est pleine de la miséricorde <du
Seigneur>." Et <dans l’évangile de Luc> "Sa
miséricorde se répand d’âge en âge sur ceux
qui le craignent."
1157. — L’Apôtre attribue donc la conversion
des Juifs à la vérité divine1067
, la conversion
des Gentils à la miséricorde divine1068
.
En sens contraire, il semble qu’il soit dit au
psaume 24. — "Toutes les voies du Seigneur
sont miséricorde et vérité."
Il faut répondre qu’en attribuant la vocation
des Juifs à la vérité divine, <l’Apôtre>
n’exclut pas la miséricorde, puisque lui-
même, étant né de parents juifs, dit : "J’ai
obtenu miséricorde de Dieu." Et ce fut par la
même miséricorde que Dieu a fait aux pères
des promesses de salut pour leur postérité. De
même aussi, quand il attribue la vocation des
nations païennes à la miséricorde divine, il
n’exclut pas totalement la vérité divine, parce
qu’il appartenait aussi à cette dernière
d’accomplir son dessein de salut à l’égard des
nations païennes1069
; ce que <l’Apôtre>
appelle "un mystère caché, dès l’origine des
siècles, en Dieu qui a créé toutes choses."
Cependant, dans la vocation des Juifs on
considère un mode particulier de la vérité,
c’est-à-dire en vue de l’accomplissement des
promesses, ce qui n’est pas pris en
considération dans la vocation des nations
païennes, à qui les promesses n’ont pas été
faites.
1067
Dt 32, 43 cité d’après la Septante. Voir A. Rahlfs, vol. I, p. 350. — euphranthête, ethnê, meta tou
laou autou ("nations, réjouissez-vous avec son peuple"). 1068
Voir Glosa in Rom. XV, 9 (GPL, col. 1522 B). 1069 On voit ici se confirmer la cohérence et l’ampleur de l’interpré tation thomasienne et combien
elle s’accorde avec les vues de saint Paul sur les relations mystérieuses qui unissent le destin d’Israel
à la révélation du Christ. En Jésus-Christ s’est accomplie la vérité des promesses de Dieu, dans le salut
apporté aux nations se révèle sa miséricorde. Mais la vérité n’exclut pas l’amour, ni l’amour la vérité
les promesses données aux patriarches (les " pères") sont œuvre de miséricorde, et le salut donné
aux nations est œuvre de vérité. L’extension à l’humanité entière de la grâce christique est inscrite
dans la vérité du mystère salvifique depuis l’origine des siècles." En ce sens, Jésus-Christ est bien
l’unique ministre de l’unique circoncision.
tangit Christi officium, subdens et qui
exurget in tantam gratiae excellentiam, ut
possit regere gentes, eos divino cultui
subiugando, quod nullus ante eum facere
potuit. Ps. II, 8. — dabo tibi gentes
haereditatem tuam. Reges eos in virga
ferrea. Ultimo ponit devotionem gentium ad
Christum, dicens in eum gentes sperabunt,
ut scilicet per eum haereditatem caelestis
gloriae consequantur. I Petr. I, 3. —
regeneravit nos in spem vivam per
resurrectionem Iesu Christi ex mortuis.
Deinde, cum dicit Deus autem spei, etc.,
subiungit orationem, dicens : dictum est
quod in Christum gentes sperabunt. Deus
autem spei, id est, qui nobis hanc spem
infundit, secundum illud Ps. LXX, 5. —
spes mea, domine. Vel Deus spei, i. e., in
quo sperandum est, repleat vos omni
gaudio, scilicet spirituali, quod est de Deo,
Nehem. c. VIII, 10. — gaudium enim
domini est fortitudo vestra, et pace per
quam homo in seipso et ad Deum et
proximum est pacatus, Ps. CXVIII, 165. —
pax multa diligentibus legem tuam, domine;
in credendo, quasi dicat : ut cum hoc quod
creditis, etiam pacem et gaudium habeatis,
quae quidem sunt charitatis effectus,
secundum illud Gal. V, 22. — fructus autem
spiritus sunt charitas, gaudium, pax. Unde
patet quod a Deo, qui est dator spei, optat
eis ut cum fide habeant charitatem, per
quam fides operatur, ut habetur Gal. V, 6,
ne fides eorum sit informis et mortua : quia
fides sine operibus mortua est, ut dicitur Iac.
II, 26. Et ut sic per plenitudinem harum
virtutum abundetis, proficiendo de bono in
melius, non solum in spe, sed etiam in
virtute spiritus sancti, id est in charitate,
quae in cordibus nostris diffunditur per
spiritum sanctum, ut supra V, 5 dictum est.
2 Co IX, 8. — potens est autem Deus
omnem gratiam abundare facere in nobis.
1158. — Lorsque <l’Apôtre> dit en suite :
comme il est écrit "C’est pourquoi je te
confesserai parmi les nations, Seigneur, et je
confesserai ton nom1070
", il confirme ce qu’il
avait dit à propos de la conversion des nations
païennes, par l’autorité <scripturaire>. Car,
bien que la promesse de la vocation à la foi du
Christ n’ait pas été faite aux nations païennes,
toutefois cette vocation n’est pas arrivée à
l’improviste, mais elle fut annoncée par les
oracles des prophètes.
L’Apôtre cite quatre autorités scripturaires,
dont la première contient les actions de grâces
du Christ à son Père pour la conversion des
nations païennes opérée par lui-même. Aussi
dit-il comme il est écrit au psaume 17 à
propos de la personne du Christ : "Tu
m’établiras à la tête des nations ", "et tu
m’élèveras au-dessus de ceux", c’est-à-dire
des Juifs, "qui s’insurgent contre moi." O
Dieu, mon Père, moi le Christ je te
confesserai, par la confession de l’action de
grâces, parmi les nations, c’est-à-dire pour la
conversion des nations opérée par moi, et je
chanterai avec une nouvelle exultation de
l’âme ton nom, qui leur a été manifesté, selon
ce passage de <l’évangile de> Jean : "J’ai
manifesté ton nom aux hommes que tu m’as
donnés." Ou encore1071
. — Je te confesserai
parmi les nations, c’est-à-dire je ferai en sorte
que les nations te confessent par la confession
de la foi : "Que les peuples te confessent, ô
Dieu, que tous les peuples te confessent." —
Et je chanterai ton nom, c’est-à-dire je ferai
en sorte que les nations te chantent un
cantique qui soit une exultation de l’âme
régénérée1072
. — "Chantez au Seigneur un
cantique nouveau, chantez au Seigneur, toute
la terre."
1159. — La deuxième autorité <scripturaire>
contient l’union des nations païennes et des
Juifs. Aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : 10 Et
<l’Ecriture> dit encore "Ô nations, vous
[qui] étiez en ce temps-là sans Christ, séparés
de la cité d’Israël t>, ainsi que le dit <Paul>
aux Ephésiens réjouissez-vous avec son
1070
2 R (2") 22, 50; voir Ps 17, 50. 1071
Voir Glosa in Rom. XV, 9 (GPL, col. 1522 C). 1072
Lieux parallèles : Super Psalmos, in Prol. ; Ps 4, 1; Ps 32, 3.
peuple, prenez part à l’exultation commune
avec les Juifs, qui étaient autrefois son peuple
"Ils se réjouiront devant toi, comme ceux qui
se réjouissent dans la moisson." Et : "Il y aura
un seul troupeau et un seul pasteur." <Enfin il
est écrit dans <le livre d’Isaïe>, selon notre
<Vulgate> : "Réjouissez-vous avec
Jérusalem, exultez en elle, vous tous qui
l’aimez."
1160. — La troisième autorité <scripturaire>
contient la dévotion des nations envers
Dieu1073
. Aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : 11 Et
il est écrit ailleurs dans les psaumes 8 —
"Louez le Seigneur toutes les nations — à
savoir en confessant sa bonté "Du lever du
soleil jusqu’à son coucher, louable est le nom
du Seigneur " — et tous les peuples, non
seulement le peuple des Juifs, magnifiez-le,
c’est-à-dire croyez qu’il est grand, que par sa
grandeur il dépasse toute louange : "En
bénissant le Seigneur, exaltez-le autant que
vous pouvez, car il est au-dessus de toute
louange." Et encore "Depuis le lever du soleil
jusqu’à son coucher, grand est mon nom
parmi les nations."
1161. — La quatrième autorité <scripturaire>
contient la révérence des nations à l’égard du
Christ. Aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : 12 Et
Isaïe dit de son côté : Elle paraîtra la racine
de Jessé1074
. Par ces mots <le prophète>
annonce l’origine du Christ, qui doit naître de
la semence de David, car Jessé fut le père de
David. <Isaïe> dit donc : Elle paraîtra la
racine de Jessé, de la semence duquel naîtra le
Christ : "Il sortira un rejeton de la racine de
Jessé et une fleur s’élèvera de sa racine " Ou
bien, le Christ sera la racine de Jessé, parce
que, bien qu’il procède de Jessé par son
origine chamelle, cependant il a soutenu Jessé
par sa puissance et a déversé sur lui sa grâce :
"Ce n’est pas toi qui portes la racine, mais la
racine qui te porte."
Puis, <l’Apôtre> traite du ministère du Christ,
en ajoutant : et celui qui se lèvera, avec une
telle excellence de grâce qu’il pourra régir les
nations, en les soumettant au culte divin; ce
que nul n’a pu faire avant lui : "Je te donnerai
1073
Lieu parallèle Somme Théologique 2 Q. 82. 1074
Is 11, 10 cité d’après la Septante. Voir A. Rahlfs, vol. II, p. 581 "estai hê rhiza tou lessai.
les nations en héritage. […] Tu les régiras
avec un sceptre de fer."
Enfin, il expose la dévotion des nations
envers le Christ, en disant : c’est en lui que les
nations espéreront, à savoir afin d’obtenir par
lui l’héritage de la gloire céleste : "Il nous a
régénérés pour une vive espérance, par la
résurrection de Jésus-Christ d’entre les
morts."
1162. — 3. Après avoir dit que les nations
espéreront dans le Christ, <l’Apôtre> y ajoute
une prière, en disant : 13 Que le Dieu de
l’espérance, c’est-à-dire celui qui a répandu
en nous cette espérance, selon ce verset du
psaume 70 — "C’est toi mon espérance,
Seigneur." Ou bien1075
— Que le Dieu de
l’espérance, c’est— à-dire en qui il faut
espérer, vous remplisse de toute joie, à savoir
<de la joie> spirituelle qui vient de Dieu :
"Car la joie du Seigneur est notre force." — et
de paix, par laquelle l’homme est apaisé en
lui-même à l’égard et de Dieu et du prochain :
"Une paix abondante est pour ceux qui aiment
ta Loi", Seigneur. — dans votre acte de foi,
autrement dit afin qu’en croyant vous ayez
aussi la paix1076
et la joie1077
qui sont les effets
de la charité, selon ce passage de l’épître aux
Galates : "Les fruits de l’esprit sont : la
charité, la joie, la paix." Il est évident par là
que c’est de Dieu, le donateur de l’espérance,
qu’il leur souhaite d’obtenir avec la foi la
charité, par laquelle la foi opère1078
, ainsi qu’il
est écrit dans les Galates, de peur que leur foi
ne soit informe et morte, car "la foi sans les
œuvres est morte", dit Jacques. — afin
qu’aussi, par la plénitude de ces vertus, vous
abondiez, en progressant du bien vers le
mieux, non seulement dans l’espérance, mais
encore dans la vertu de l’Esprit-Saint, c’est-à-
dire dans la charité, qui est répandue dans nos
cœurs par l’Esprit-Saint, comme on l’a dit
plus haut. Et <l’Apôtre écrit dans sa seconde
épître> aux Corinthiens : "Et Dieu est
1075
Voir Glosa in Rom. XV, 13 (GPL, coI. 1522 D). 1076
Lieux parallèles : Somme Théologique 1a-2ae Q. 70, a. 3; 2 Q. 29, a. 3; Coll. in decem praec.,
Prol. 1077
Lieux parallèles Somme Théologique Ia-2 Q. 70, a. 3; 2 Q. 28, a. 1 Q. 35, a. 2; Cou, in decem
praec., Prol. ; Ad Gal. 5, 22, lect. 6 (éd. Marietti, n 330). 1078
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 4, a. 3; Q. 23, a. 8; 3 Sentences dist. 23, Q. 3, a. 1; De
veritate, Q. 14, a. 5; De virtut., Q. 2, a. 3.
puissant pour faire abonder toute grâce en
vous"
Lectio 2 Leçon 2 [Versets 14 à 21]
[n° 1164] 14 Je suis bien persuadé, mes
frères, moi-même, en ce qui vous concerne,
que vous êtes vous-mêmes pleins de charité,
remplis de toute science, et qu’ainsi vous
pouvez vous avertir les uns les autres.
[n° 1165] 15 Cependant je vous ai écrit, mes
frères, assez audacieusement en partie,
comme pour raviver vos souvenirs, selon la
grâce qui m’a été donnée par Dieu,
[n° 1167] 16 pour être le ministre du Christ
Jésus auprès des nations païennes, sanctifiant
l’Evangile de Dieu, afin que l’oblation des
nations païennes soit acceptée, et sanctifiée
par l’Esprit-Saint.
[n° 1168] 17 donc sujet de me glorifier dans
le Christ Jésus pour Dieu.
[n° 1169] 18 Car je n’oserais parler de choses
que le Christ n’aurait pas faites par moi pour
<amener> les nations païennes à l’obéissance,
par la parole et par les œuvres,
[n° 1171] 19 par la vertu des signes et des
prodiges, par la vertu de l’Esprit-Saint; ainsi,
depuis Jérusalem en rayonnant jusqu’à
l’Illyrie, j’ai répandu l’Evangile du Christ.
[n° 1173] 20 Ainsi donc j’ai prêché cet
Evangile là où le Christ n’avait pas été
nommé, pour ne pas édifier sur le fondement
d’autrui, mais selon qu’il est écrit :
[n° 1175] 21 "Ceux à qui on ne l’avait pas
annoncé verront, et ceux qui n’en avaient pas
entendu parler comprendront."
[86229] Super Rom., cap. 15 l. 2 Postquam
apostolus generalibus admonitionibus
Romanos instruxerat, hic incipit eis
quaedam familiaria scribere. Et primo
quaedam pertinentia ad seipsum; secundo,
quaedam pertinentia ad alios ibi cap. XVI
commendo autem vobis Phoeben, et cetera.
Circa primum tria facit. Primo excusat
1163. — Après avoir donné aux Romains des
avertissements généraux, l’Apôtre leur
adresse maintenant des avertissements
familiers. Et :
— D’abord, en ce qui le concerne lui-même.
— Puis, en ce qui concerne les autres, et cela
au chapitre 16 [n° 1193] : "Je vous
recommande Phoébé, etc."
praesumptionem de hoc quod eos
instruxerat et reprehenderat; secundo
excusat suam tarditatem circa visitationem
eorum, ibi propter quod plurimum
impediar; tertio petit suffragia orationum
ipsorum, ibi obsecro autem vos, fratres, et
cetera. Et circa primum duo facit. Primo
excludit oppositam causam instruendi et
arguendi eos; secundo assignat veram
causam, ibi audacius enim scripsi vobis,
fratres, ex parte, et cetera. Circa primum
considerandum est, quod aliquis posset
credere apostolum ideo scripsisse Romanis,
quia aestimaret illum esse apud Romanos
qui posset instruere et corrigere. Sed hoc
ipse excludit, dicens certus sum enim,
fratres mei, per ea quae de vobis audivi,
quoniam idonei estis ad admonendum eos
qui inter vos admonitione indigent. Ad hoc
autem ut aliquis recte admoneat duo
requiruntur, quorum primum est ut non ex
odio vel ira, sed ex dilectione moneat
secundum illud Ps. CXL, 6. — corripiet me
iustus in misericordia. Et Gal. VI, 1. — vos
qui spirituales estis, instruite huiusmodi in
spiritu lenitatis. Et quantum ad hoc dicit
quoniam et ipsi pleni estis dilectione. Ez. X,
2. — imple manum tuam prunis ignis quae
sunt inter Cherubim, qui est ignis charitatis.
Secundo requiritur scientia veritatis, eo
quod quidam habent zelum Dei in
corrigendo, sed non secundum scientiam, ut
supra c. X, 2 dictum est. Et ideo subdit
repleti omni scientia, scilicet humana et
divina : et veteris et novae legis. 1 Co I, 5.
— in omnibus divites facti estis in illo, in
omni verbo et in omni scientia. Et ex hoc
concludit sic ita ut possitis convenienter
propter dilectionem et scientiam alterutrum
monere. Quia enim in multis offendimus
omnes, ut dicitur Iac. III, 2, oportet ut
invicem moneamus; quia, ut dicitur Eccli.
XVII, 12, unicuique mandavit Deus de
proximo suo. Deinde, cum dicit audacius,
etc., assignat veram causam quare eos
admonuerat et correxerat. Et circa hoc duo
En ce qui le concerne il fait trois choses :
— Il commence par s’excuser de sa
présomption1079
à les avertir et à les
reprendre.
— Puis, il s’excuse de sa lenteur à leur rendre
visite [n° 1178] : 22 "C’est pourquoi à
plusieurs reprises."
— Enfin, il demande le suffrage de leurs
prières [n° 1188] : 30 "Je vous demande donc
avec obsécration, frères, etc."
Sur le premier de ces points :
I) Il rejette d’abord la raison qu’on oppose à
ses instructions et à ses blâmes <adressés aux
Romains>.
II) Puis, il en donne la véritable raison [n°
1165] Cependant je vous ai écrit, mes frères,
assez audacieusement, etc.
1164. — I. Sur le premier point1080
, il faut
considérer le fait qu’on pouvait croire que
l’Apôtre avait écrit aux Romains en estimant
que lui seul, parmi les Romains1081
, pouvait
les instruire et les corriger. Mais lui-même
écarte cette <supposition> en disant : 14 Je
suis bien persuadé, mes frères, par ce que j’ai
appris de vous, que vous êtes aptes à avertir
ceux qui parmi vous ont besoin
d’avertissement. Or, pour avertir avec
rectitude, deux choses sont requises :
A. La première est que l’avertissement ne
vienne ni de la haine ni de la colère, mais de
la charité, selon ce verset du psaume 140. —
"Le juste me corrigera dans sa miséricorde. >
Et <selon ce passage de l’épître> aux Galates
: "Vous qui êtes spirituels, instruisez-le en
esprit de douceur." Quant à cette disposition,
<l’Apôtre> dit : que vous êtes vous-mêmes
pleins de charité. — "Remplis tes mains de
charbons ardents de feu qui sont entre les
chérubins ", ce qui signifie le feu de la
charité.
B. La seconde chose requise pour avertir,
c’est la science de la vérité. Car il en est qui
ont le zèle de Dieu en corrigeant, mais <ils ne
le font> pas selon la science, comme on l’a dit
plus haut. Et c’est pourquoi <l’Apôtre> ajoute
: remplis de toute science, c’est-à-dire de la
1079
Lieu parallèle : Somme Théologique 2 Q. 21. 1080
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 33, a. 1; 4 Sentences dist. 19, Q. 2, a. 1, sol. 6. 1081
N’oublions pas qu’en effet Paul est citoyen romain (Ac 22, 27).
facit. Primo ostendit quod hoc pertinebat ad
auctoritatem apostolatus sibi commissam;
secundo ostendit qualiter hac potestate usus
fuerit, ibi habeo igitur gloriam, et cetera.
Dicit ergo audacius autem, id est securius,
scripsi vobis, errores et defectus vestros
arguendo, quod quidem ad audaciae
praesumptionem posset ascribi propter hoc
quod offensionem vestram non timui. Iob
XXXIX, 21. — audacter in occursum pergit
armatis. Sed haec praesumptio excusatur ex
tribus. Primo quidem ex conditione eorum
quibus scribebat, quia etsi inter Romanos
essent aliqui respectu quorum talis
reprehensio audax et praesumptuosa
videretur, erant tamen aliqui, qui indigebant
dura reprehensione propter contentionum
insolentiam. Tit. I, 13. — increpa illos dure.
Et hoc est quod dicit ex parte, quasi dicat :
non videtur mea Scriptura esse audax
quantum ad omnes vos, sed quantum ad
partem aliquam vestrum. Vel potest intelligi
ex parte epistolae, in qua eos reprehendit.
Potest intelligi etiam ex parte Ecclesiae,
quae, scilicet, mecum est. Secundo
excusatur praedicta audacia ex intentione
apostoli. Non enim scripsit eis tamquam
reputans eos ignorantes, sed in memoriam
eos reducens cognitorum. Et hoc est quod
subdit tamquam in memoriam vos reducens,
quasi oblitos eorum quae sciebatis, sicut et
Phil. IV, 10 dicitur : occupati autem eratis.
Hebr. X, 32. — rememoramini pristinos
dies, in quibus illuminati magnum certamen
sustinuistis passionum. Tertio excusatur ex
auctoritate apostoli, quae hoc requirebat.
Unde subdit per gratiam, scilicet
apostolatus mihi commissi. 1 Co XV, 10. —
gratia Dei sum id quod sum. Huius autem
gratiae, primo, describit auctoritatem, cum
dicit quae data est mihi a Deo, quasi diceret
: non ab hominibus. Ad Gal. I, 1. — Paulus
apostolus non ab hominibus, neque per
hominem. Secundo specificat istam gratiam,
cum dicit ut sim minister Christi Iesu in
science humaine et de la science divine, de la
Loi ancienne et de la nouvelle1082
— "Vous
avez été comblés de toutes les richesses en
lui, toutes celles de la parole et toutes celles
de la science."
<L’Apôtre> conclut de la manière suivante :
et qu’ainsi vous pouvez, comme il convient
en raison de votre charité et de votre science,
vous avertir les uns les autres. Car, comme
<gnous faisons tous beaucoup de fautes",
selon Jacques, il faut que nous nous
avertissions réciproquement, étant donné, dit
l’Ecclésiastique, que Dieu "a ordonné à
chacun d’eux <de veiller sur> son prochain."
1165. — II. Ensuite, lorsqu’il dit : 15 assez
audacieusement, etc., <l’Apôtre> donne la
vraie raison pour laquelle il les avait avertis et
corrigés. A cet égard il montre deux choses :
A) Premièrement, que ce droit appartenait à
l’autorité apostolique qui lui a été confiée.
B) Deuxièmement, comment il a usé de ce
pouvoir [n° 1168] : 17 donc sujet de me
glorifier, etc.
1166. — A. <L’Apôtre>1083
dit donc assez
audacieusement, c’est-à-dire avec assez
d’assurance, je vous ai écrit, en reprenant vos
erreurs et vos défauts; ce qu’on pourrait
attribuer à une audace présomptueuse, étant
donné que je n’ai pas craint de vous offenser :
"Il s’élance avec audace, il court au-devant
des hommes armés." Mais cette présomption
est excusable pour trois raisons :
1. En premier lieu, en raison de la condition
de ceux à qui il écrivait, car, si parmi les
Romains il y en avait quelques-uns pour qui
un tel blâme semblait audacieux et
présomptueux, cependant il en était d’autres
qui avaient besoin d’un blâme sévère à cause
de leurs disputes insolentes : "Réprimande-les
durement." C’est ce que <l’Apôtre> dit en
partie, autrement dit, ce que je vous écris ne
semble pas audacieux pour vous tous, mais
pour une partie d’entre vous. Ou bien en
partie peut s’entendre de la partie de l’épître
dans laquelle il les réprimande1084
; ou encore
1082
Voir Glosa in Rom. XV, 14 (GPL, col. 1523 B). 1083
Lieu parallèle Somme Théologique lj-2ae, Q 45, a. 1. 1084
C’est le sens retenu par les exégètes modernes qui traduisent "Je vous ai écrit assez
audacieusement par endroits.
gentibus, id est ut serviam Christo in
gentium conversione. 1 Co IV, 1. — sic nos
existimet homo ut ministros Christi. Supra
XI, 3. — quamdiu sum gentium apostolus,
ministerium meum honorificabo. Tertio
ostendit huius gratiae actum, cum dicit
sanctificans Evangelium Dei, id est sanctum
esse ostendens et verbo veritatis et opere
bonae conversationis et miraculorum. Col. I,
5 s. : in verbo veritatis Evangelii quod
pervenit ad vos, sicut et in universo mundo
est, et fructificat, et crescit. Prov. VIII, 8. —
recti sunt sermones mei. Quarto ponit finem
huius gratiae, cum dicit ut fiat oblatio
gentium, id est, gentes per meum
ministerium conversae. In quo quasi
quoddam sacrificium et oblationem Deo
obtuli, secundum illud Phil. II, 17. — et si
immolor super sacrificium et obsequium
fidei vestrae, gaudeo et congratulor
omnibus vobis. Fiat accepta, scilicet Deo
per rectitudinem intentionis. Ps. l, 20. —
tunc acceptabis sacrificium iustitiae,
oblationes et holocausta; et sanctificata in
spiritu sancto, id est per charitatem et alia
spiritus sancti dona. 1 Co VI, 11. —
sanctificati estis in nomine domini nostri
Iesu Christi, et in spiritu Dei nostri. Deinde,
cum dicit habeo igitur gloriam, etc.,
ostendit quomodo auctoritate apostolica
fuerat usus. Et primo ponit fructum quem
fecit; secundo ostendit huius fructus
magnitudinem, ibi ita ut, et cetera. Tertio
ostendit difficultatem, ibi sic autem
praedicavi, et cetera. Circa primum tria
facit. Primo dat gloriam Deo de fructu quem
fecit, dicens igitur, quia talem gratiam
accepi et diligenter executus sum id ad quod
mihi haec gratia data est, habeo gloriam, id
est meritum dignum gloriae, sicut fidelis
minister. 1 Co IX, 15. — melius est mihi
mori, quam ut gloriam meam quis evacuet.
Sed hanc gloriam non mihi principaliter
attribuo sed eam habeo in Christo Iesu, id
est per Iesum Christum, cuius virtute
fructificare potui. Io. XV, v. 5. — sine me
de la part de L’Eglise1085
c’est-à-dire de celle
qui est avec moi1086
.
2. En deuxième lieu, cette audace est
excusable en raison de l’intention de l’Apôtre.
Car il ne leur a pas écrit comme si il les tenait
pour ignorants, mais pour leur rappeler des
choses connues. Aussi ajoute-t-il : comme
pour raviver vos souvenirs, comme si vous
aviez oublié les choses que vous saviez :
"Mais vous étiez occupés." Et encore :
"Souvenez-vous des anciens jours, où après
avoir été éclairés, vous avez soutenu le grand
combat des souffrances."
3. En troisième lieu, cette audace est
excusable en raison de l’autorité de l’Apôtre
qui exigeait cette réprimande. Aussi ajoute-t-
il : selon la grâce, c’est-à-dire de l’apostolat
qui m’a été confié : "C’est par la grâce de
Dieu que je suis ce que je suis."
1167. — a. L’Apôtre commence par indiquer
l’autorité de cette grâce, lorsqu’il dit : qui m’a
été donnée par Dieu; comme s’il disait : Non
par des hommes : "Paul, apôtre, non par des
hommes, ni par un homme, mais par Jésus-
Christ et Dieu le Père, qui l’a ressuscité
d’entre les morts."
b. Puis, il spécifie cette grâce, en disant : 16
pour être le ministre du Christ Jésus auprès
des nations païennes, c’est-à-dire pour que je
serve le Christ dans la conversion des nations
païennes "Qu’on nous regarde donc comme
des ministres du Christ." Et encore : "dans la
mesure où je suis, moi, l’apôtre des nations,
j’honorerai mon ministère."
c. Ensuite, il montre l’action de cette grâce, en
disant : sanctifiant l’Evangile de Dieu, c’est-
à-dire montrant qu’il est saint, et par la parole
de vérité, et par les œuvres d’une vie sainte, et
par les miracles1087
. — "Par la parole de vérité
de l’Evangile, qui vous est parvenu, comme il
est aussi répandu dans le monde entier, où il
fructifie et croît, ainsi qu’en vous, depuis le
jour où vous l’avez entendu, et où vous avez
connu la grâce de Dieu dans la vérité." —
"<Toutes> mes paroles sont droites "
d. Enfin, il expose la fin de cette grâce,
1085 En latin, ex parte peut en effet signifier de la part " (de l’Eglise).
1086 Voir Glosa in Rom. XV, 15 (GPL, col. 1523 D).
1087 Voir Glosa in Rom. XV, 16 (GPL, col. 1524 A).
nihil potestis facere. Et quia ipsi omnia
tradita sunt a patre, ut dicitur Matth. XI, 27,
et pater in eo manens, ipse facit opera, Io.
XIV, 10, ideo ulterius hanc gloriam refert ad
patrem, dicens ad Deum, scilicet patrem. Ps.
CXIII, 9. — non nobis, domine, non nobis,
sed nomini tuo da gloriam. Assignat autem
rationem eius quod dixerat, subdens non
enim audeo loqui aliquid eorum quae per
me non effecit Christus, quasi dicat : nihil
referam de fructu per me facto, quod per me
factum non sit. Alioquin gloriam non
haberem apud Deum, et si apud homines.
Quae quidem refero non tamquam per me
principaliter facta, sed sicut quae per me
Christus fecit. Et ideo hanc gloriam dixi me
habere in Christo Iesu. Is. c. XXVI, 12. —
omnia opera nostra operatus es in nobis.
Secundo ponit ipsum fructum, dicens in
obedientiam gentium, quasi dicat : gloria
mea haec est pro eo quod feci gentes fidei
obedire. Supra I, 5. — ad obediendum fidei
in omnibus gentibus. Ps. XVII, 44. — in
auditu auris obedivit mihi. Tertio ostendit
quomodo gentes ad hanc obedientiam
adduxerit. Quia autem supra X, 17 dictum
est fides ex auditu, auditus autem per
verbum Christi, ideo dicit in verbo, id est
per verbum praedicationis fidei. Argumenta
autem fidei praedicatae sunt bona
conversatio praedicantis, et quantum ad hoc
subdit et factis, quasi scilicet per recta opera
vos ad fidem allexi, Matth. V, 16. —
videant opera vestra, etc., et opera
miraculorum, quibus Deus dat testimonium
doctrinae praedicatae, secundum illud Mc.
ult. : domino cooperante et sermonem
confirmante sequentibus signis. Unde subdit
in virtute signorum, id est miraculorum
minorum, puta sanationes aegritudinum; et
prodigiorum, id est maiorum miraculorum,
quae ex sua magnitudine aliquid magni
portendunt, id est ostendunt. Sed hoc totum
non sufficeret nisi spiritus sanctus intus
corda audientium ad fidem commoveret.
Unde dicitur Act. X, 44 quod, loquente
Petro verba fidei, cecidit spiritus sanctus
super omnes qui audiebant verbum. Et ideo
lorsqu’il dit : afin que l’oblation des nations
païennes, c’est-à-dire les nations converties
par mon ministère, dans lequel j’ai offert
comme un sacrifice et une oblation à Dieu,
selon ces paroles de l’épître aux Philippiens :
"Et si je suis immolé sur le sacrifice et
l’oblation de votre foi, je m’en réjouis et m’en
félicite avec vous tous."
— soit acceptée, c’est-à-dire par Dieu à cause
de la rectitude de l’intention : "Alors tu
accepteras un sacrifice de justice, des
oblations et des holocaustes " — et sanctifiée
par l’Esprit-Saint, c’est-à-dire par la charité et
les autres dons de l’Esprit-V Saint : "Mais
vous avez été sanctifiés, mais vous avez été
justifiés au nom de notre Seigneur Jésus-
Christ, et par l’Esprit de notre Dieu "
1168. — B. Lorsqu’il dit ensuite : 17 J'ai donc
sujet de me glorifier, etc., <l’Apôtre> montre
comment il a usé de son autorité apostolique.
Et
1) Il expose d’abord le fruit qu’il a obtenu.
2) Puis, il montre la grandeur de ce fruit [n°
1172] : ainsi, depuis Jérusalem, etc.
3) Enfin, sa difficulté [n° 1173] : 20 donc j’ai
prêché, etc.
1169. — 1. Sur le premier de ces points,
<l’Apôtre> fait trois choses :
a. 1l commence par rendre gloire à Dieu pour
le fruit qu’il a obtenu, en disant : Donc, parce
que j’ai reçu une telle grâce et que j’ai
accompli avec soin ce ministère pour lequel
cette grâce m’a été donnée, j’ai sujet de me
glorifier, c’est-à-dire j’ai un mérite digne de
gloire1088
, comme ministre fidèle : "Mieux
vaut pour moi mourir que de laisser quelqu’un
m’enlever cette gloire." Mais je n’attribue pas
cette gloire principalement à moi-même, je la
tiens dans le Christ Jésus, c’est-à-dire par
Jésus-Christ, par la puissance duquel j’ai pu
produire du fruit : "Sans moi vous ne pouvez
rien faire." Et puisque < toutes choses <lui>
ont été données par <le> Père", comme il est
dit dans <l’évangile de> Matthieu, et que
"<le> Père demeurant en moi fait lui-même
les œuvres ", <l’Apôtre> rapporte en dernier
lieu cette gloire au Père, en disant : pour
Dieu, â savoir le Père : "Non pas à nous,
1088
Voir Glosa in Rom. XV, 17 (GPL, col. 1524 B).
subdit in virtute spiritus sancti. Hebr. II, 4.
— contestante Deo signis et prodigiis et
variis spiritus sancti distributionibus.
Deinde, cum dicit ita ut ab Ierusalem,
ostendit magnitudinem fructus ex
multitudine locorum, in quibus praedicavit,
dicens ita ut incipiens ab Ierusalem, ubi in
principio suae conversionis praedicavit in
synagogis Iudaeorum, ut dicitur Act. IX, 28.
Ut sic impleret quod dicitur Is. II, 4. — de
Sion exibit lex, et verbum domini de
Ierusalem. Usque ad Illyricum, quod est
mare Adriaticum ex parte opposita Italiae,
repleverim Evangelium Christi, id est omnia
illa loca replevi praedicatione Evangelii. Et
ne aliquis intelligat quod solum vadens per
rectam viam ab Ierusalem in Illyricum
praedicaverit Evangelium, addit per
circuitum, quia scilicet gentibus
circumquaque praedicavit et eas ad fidem
convertit. Unde sibi potest competere quod
dicitur Iob c. XXXVIII, 25. — quis dedit
vehementissimo imbri cursum ? Deinde,
cum dicit sic autem praedicavi, etc.,
ostendit difficultatem hunc fructum faciendi
: difficile enim est omnino ignaros ad fidem
convertere. Primo igitur difficultatem se
passum ostendit, dicens sic autem
praedicavi Evangelium, non quidem ubi
nominatus est Christus, idest non apud illos
qui nomen Christi audiverant. Ps. XVII, 44.
— populus, quem non cognovi, servivit
mihi. Is. LV, 5. — ecce gentes, quas
nesciebas, vocabis, et gentes, quae te non
cognoverunt, ad te current. Subdit autem
rationem, dicens : ne super alienum
fundamentum aedificarem. Potest autem
alienum fundamentum dupliciter intelligi.
Uno modo doctrina haeretica, quae est
aliena a verae fidei fundamento : et sic, hoc
quod dicit ne, ponitur causaliter. Ea enim
intentione apostolus voluit praedicare illis,
qui nomen Christi non audierant, ne si
praeventi essent a doctrina
pseudoapostolorum, difficilius esset eos ad
veritatem reducere. Unde Matth. VII, 27
dicitur stultus est qui aedificat domum suam
super arenam, cui comparatur falsa
doctrina. Alio modo per alienum
fundamentum potest intelligi doctrina verae
Seigneur, non pas à nous, mais à ton Nom
donne gloire." Il donne ensuite la raison de ce
qu’il avait dit, en ajoutant : 18 Car je n'oserais
parler de choses que le Christ n'aurait pas
faites par moi; autrement dit : Je ne ferai pas
mention du fruit obtenu par moi, puisqu’il n’a
pas été produit par moi autrement je n’aurais
pas sujet de me glorifier auprès de Dieu, mais
bien auprès des hommes. Ce que je rapporte,
ce n’est même pas en tant que produit
principalement par moi, mais <je le rapporte>
en tant que le Christ l’a produit par moi. Et
j’ai dit que je tiens cette gloire dans le Christ
Jésus. — "Tu as opéré toutes nos œuvres pour
nous."
1170. — b. Puis il mentionne ce fruit, en
disant : pour <amener> les nations païennes
à l’obéissance, autrement dit, ma gloire la
voici : c’est d’avoir fait obéir les nations à la
foi : < <prêcher> l’obéissance à la foi à toutes
les nations." Et encore : "Dès que son oreille a
entendu, il m’a obéi."
1171. — c. Enfin il montre comment il a
amené les nations à cette obéissance. Etant
donné ce qui a été dit plus haut : "la foi
provient de l’audition, et on entend par la
Parole du Christ ", <l’Apôtre> dit <ici> : par
la parole, c’est-à-dire par la parole de la
prédication de la foi. Mais la preuve de la foi
prêchée, c’est la vie sainte de celui qui
prêche; aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : et par
les œuvres; autrement dit Je vous ai attirés à
la foi par mes œuvres saintes : "Qu’ils voient
vos bonnes œuvres et qu’ils glorifient votre
Père qui est dans les cieux ", et par les œuvres
miraculeuses, par lesquelles Dieu rend
témoignage à la doctrine qui est prêchée,
selon ces paroles de Marc : "Le Seigneur
coopérant avec eux, et confirmant leur parole
par les signes qui l’accompagnaient " Aussi
ajoute-t-il : la vertu des signes, à savoir par la
vertu des miracles moins éclatants, par
exemple les guérisons des maladies, et des
prodiges, c’est-à-dire des miracles plus
éclatants, qui par leur grandeur présagent,
c’est-à-dire montrent quelque chose de grand.
Mais tout cela ne suffirait pas si l’Esprit-Saint
ne touchait pas intérieurement les cœurs des
auditeurs <pour les disposer> à la foi.
D’où ce passage des Actes où il est dit que
fidei ab aliis praedicata : et sic potest sumi
ne, consecutive. Non enim vitavit apostolus
praedicare illis quibus ante fuerat ab aliis
praedicatum, sicut ipsis Romanis specialiter
praedicavit, quos prius Petrus instruxerat,
sed, eo praedicante illis qui nihil de Christo
audierant, consecutum est, ut non aedificaret
super alienum fundamentum, sed ipse
iaceret prima fidei fundamenta, secundum
illud 1 Co III, 10. — ut sapiens architectus
fundamentum posui. Secundo, ad hoc quod
dixerat, auctoritatem inducit dicens sicut
scriptum est, Is. LII, 15, quoniam quibus
non est annuntiatum de eo, videbunt, et qui
non audierunt, contemplati sunt. In quibus
verbis propheta videtur praedicere, quoniam
gentiles excellentiori modo ad cognitionem
Dei essent perventuri quam Iudaei, qui ante
cognoverant. Ostendit ergo, primo,
excellentiam quantum ad causam
cognitionis, quae scilicet duplex est : scilicet
verba audita et res visae. Hi enim duo
sensus sunt disciplinabiles. Iudaei ergo in
notitiam mysteriorum Christi pervenerunt
per verba annuntiata eis a prophetis. I Petr.
I, 10 s. : prophetae, quae de futura in vobis
gratia prophetaverunt, scrutantes in quod
vel quale tempus significaret in eis spiritus
Christi, praenuntians eas, quae in Christo
sunt, passiones et posteriores glorias. Sed
gentiles huiusmodi Christi mysteria iam
realiter impleta vident, ideo dicitur quoniam
gentes, quibus non est annuntiatum per
prophetas de eo, id est de Christo, sicut fuit
annuntiatum Iudaeis, videbunt res iam
impletas. Lc. X, 24. — multi reges et
prophetae voluerunt videre quae vos videtis,
et non viderunt. Secundo ostendit
excellentiam quantum ad modum
cognoscendi, quia Iudaei ex Annuntiatione
prophetarum solum auditum habebant. Abd.
v. 1. — auditum audivimus a domino, et
legatos ad gentes misit. Sed gentiles ex
visione intellectum perceperunt. Unde
dicitur et, gentes scilicet, qui, ante, non
"tandis que Pierre provoquait encore ces
paroles" de foi, "l’Esprit-Saint descendit sur
tous ceux qui écoutaient la parole." Et c’est
pourquoi <l’Apôtre> ajoute : par la vertu de
l’Esprit-Saint. Il est écrit dans l’épître aux
Hébreux : "Dieu attestant leur témoignage par
des signes, par des prodiges, par différents
effets de sa puissance, et par les dons de
l’Esprit-Saint, qu’il a distribués selon sa
volonté."
1172. — 2. Ensuite, lorsqu’il dit : ainsi,
depuis Jérusalem, <l’Apôtre> montre la
grandeur du fruit dû à la multitude des lieux
dans lesquels il a prêché. Il dit : ainsi, en
commençant depuis Jérusalem, où au début de
sa conversion il a prêché dans les synagogues
des Juifs, comme le disent les Actes, afin
d’accomplir ce que dit Isaïe "De Sion sortira
la Loi, et la Parole du Seigneur de Jérusalem"
— Jusqu’à l’Illyrie, située au bord de la mer
Adriatique1089
, du côté opposé à l’Italie, j’ai
répandu l’Evangile du Christ, c’est-à-dire j’ai
répandu en tous ces lieux la prédication de
l’Evangile. Et de crainte que l’on comprenne
qu’il n’a prêché l’Evangile qu’en parcourant
seulement le chemin qui va directement de
Jérusalem à l’Illyrie, il ajoute : en rayonnant,
c’est-à-dire parce qu’il a prêché aux nations
tout à l’entour et qu’il les a converties à la foi
C’est ainsi qu’on peut lui appliquer cette
parole de Job : "Qui a donné cours à l’ondée
la plus impétueuse."
1173. — 3. En ajoutant : 20 donc j’ai prêché,
etc., <l’Apôtre> montre la difficulté de
produire ce fruit. Il est en effet
particulièrement difficile de convertir à la foi
les ignorants.
a. 1l montre donc en premier lieu qu’il a
éprouvé cette difficulté, en disant : Ainsi donc
j’ai prêché cet Evangile là où en vérité le
Christ n’avait pas été nommé, c’est-à-dire non
auprès de ceux qui avaient entendu nommer le
Christ : "Un peuple que je ne connaissais pas
m’a servi." Et : "Voici que tu appelleras une
nation que tu ne connaissais pas; et des
1089
La formule "en rayonnant" (per circulum) a été diversement interprétée il s’agit, pour certains, des
environs de Jérusalem. L’exégése de saint Thomas est celle de beaucoup d’interprétes actuels : Paul
n’a pas suivi un itinéraire rectiligne, mais il a circulé, allant et venant entre les points extrêmes de son
apostolat, de Jéru salem à l’lllyrie, terme qui désigne alors la nve onentale de la mer Adriatique, "du
côté opposé", c’est-à-dire " qui fait face " à la nve italienne (la Bosnie actuelle).
audierunt, praenuntiari Christum per
prophetas, intelligent, scilicet fidei
veritatem. Ps. II, 10. — et nunc, reges,
intelligite, et cetera.
nations, qui ne t’ont pas connu, accourront
vers toi à cause du Seigneur ton Dieu, et du
Saint d’Israël qui t’a glorifié."
1174. — <L’Apôtre> en donne la raison, en
disant : pour ne pas édifier sur le fondement
d’autrui. Or cette expression : "sur le
fondement d’autrui" peut s’entendre de deux
manières1090
— selon une première manière,
de la doctrine hérétique, qui est étrangère au
fondement de la véritable foi; et ainsi en
disant : pour ne pas on indique la cause. Avec
cette intention, en effet, l’Apôtre a voulu
prêcher à ceux qui n’avaient pas entendu
nommer le Christ, de crainte que s’ils eussent
été prévenus par les doctrines des faux
apôtres, il n’eût été plus difficile de les
ramener à la vérité. D’où ce qui est écrit dans
<l’évangile de> Matthieu : "<Celui-là est>
insensé qui <bâtit> sa maison sur le sable ",
auquel on compare la fausse doctrine. Selon
une autre manière, par sur le fondement
d’autrui on peut entendre la doctrine de la foi
véritable prêchée par d’autres; et dans ce sens,
l’expression pour ne pas peut être prise
comme indiquant la conséquence. Car
l’Apôtre n’a pas évité de prêcher à ceux à qui
d’autres avaient prêché d’abord, par exemple
il prêcha spécialement aux Romains eux-
mêmes que Pierre avait déjà instruits
auparavant. Mais par sa prédication à ceux
qui n’avaient pas entendu parler du Christ, il
s’en est suivi qu’il n’a pas édifié sur le
fondement d’autrui, mais que lui-même a jeté
les premiers fondements de la foi1091
, selon ce
1090 Voir Glosa in Rom. XV, 20 (GPL, col. 1524 C-D).
1091 Sur le fondement d’autrui" (en latin super alienum funda mensum), peut se traduire également "sur
un fondement étranger." L’interprétation de saint Thomas joue sur ces deux sens : un " fondement
étranger " à la vraie foi, c’est le premier sens, un "fondement étranger" à moi, Paul, c’est-à-dire le
"fondement d’autrui", second sens. Le premier sens est clair : l’extrême difliculté de ramener des
fidèles imbus d’une doctrine hérétique à la vraie foi, telle est l’intention qui a déterminé causalement
(causaliter) la volonté de saint Paul de ne pas prêcher à ceux qui avaient déjà entendu parler du Christ.
Mais le second sens pose un problème. Si l’on interprète super alienumfundamentum comme
signifiant non plus sur un fondement étranger " à la vraie foi, mais "sur le fondement d’autrui", c’est-
à-dire "posé par un prédicateur de la vraie foi autre que moi-même", on ne peut comprendre qu’il
s’agit là de la raison qui a determine le choix des lieux de l’évangélisation paulinienne, puisque saint
Paul a effectivement prêché là où d’autres apôtres (saint Pierre à Rome) avaient déjà parlé du Chnst. Il
faut donc mter préter la conjonction " ne" qui introduit la proposition (ne super fundamentum alienum
aedificarem) comme signifiant non plus la cause mentale (l’intention, ce que traduit "de crainte que"),
mais la conséquence qui a résulté de sa pratique évangélisatrice : j’ai prêché "de telle sorte que je n’ai
pas édifié sur le fondement d’autrui"; cette construction est grammaticalement possible en latin.
passage de la première épître aux Corinthiens
: "Comme un sage architecte j’ai posé le
fondement."
1175. — b. En second lieu, pour appuyer ce
qu’il avait dit, il cite l’autorité <scripturaire>,
en disant : selon qu’il est écrit : 21 "Ceux à
qui on ne l’avait pas annoncé verront, et ceux
qui n‘en avaient pas entendu parler
comprendront." Dans ces paroles, le Prophète
semble annoncer que les Gentils
parviendraient à la connaissance de Dieu
d’une manière plus excellente que les Juifs
qui l’avaient connu auparavant.
1176. — <L’Apôtre> montre donc d’abord
cette excellence quant à la cause de la
connaissance, laquelle est double : ce qu’on a
entendu et ce qu’on a vu. Or ces deux sens
sont susceptibles de se laisser former. Les
Juifs donc sont parvenus à la connaissance
des mystères du Christ par les paroles
annoncées par les prophètes : "C’est ce salut
qu’ont recherché et scruté les prophètes qui
ont prédit la grâce que vous deviez recevoir;
et comme ils cherchaient quel temps et
quelles circonstances l’Esprit du Christ qui
était en eux indiquait, en prédisant les
souffrances du Christ et les gloires qui
devaient les suivre, il leur fut révélé que ce
n’était pas pour eux-mêmes, mais pour vous,
qu’ils étaient dispensateurs des choses qui
vous sont annoncées maintenant par ceux qui
vous ont évangélisés par l’Esprit-Saint envoyé
du ciel, et que les anges désirent contempler"
Mais les Gentils virent ces mystères du Christ
déjà réellement accomplis, voilà pourquoi il
est dit que les nations auxquelles les
prophètes ne l’avaient pas annoncé, c’est-à-
dire <n’avaient pas annoncé> le Christ,
comme il l’avait été aux Juifs, verront les
mystères déjà accomplis : "Beaucoup de
prophètes et de rois ont désiré voir ce que
vous voyez, et ne l’ont point vu."
1177. — Puis, il montre l’excellence de la
connaissance de Dieu quant à son moyen d’y
parvenir, parce que les Juifs n’en avaient
Notons que le grec contient une précision qui fait défaut dans la Vulgate; saint Paul déclare, non pas
"je n’ai pas prêché", mais "tenant à honneur (philotimotmenon) de ne pas prêcher." Cette précision
indique, chez l’Apôtre, une intention ferme, un "programme d’apostolat", et présuppose qu’il ne
considère pas Rome comme relevant de son propre domaine d’évangélisation, même s’il y séjourne : il
n’est pas le fondateur de l’Eglise de Rome.
entendu parler que par l’annonce des
prophètes "Nous avons entendu une nouvelle
venant du Seigneur, et il a envoyé <des
messagers> vers les nations " Mais les Gentils
en ont pris connaissance visuellement1092
.
Aussi est-il dit : et ceux, c’est-à-dire les
nations, qui, auparavant, n’avaient pas
entendu les prophètes annoncer le Christ,
comprendront, à savoir la vérité de la foi "Et
maintenant, rois, comprenez, laissez-vous
enseigner, vous qui jugez la terre."
Lectio 3 Leçon 3 [Versets 22 à 33]
[n° 1178] 22 C’est pourquoi j’ai été empêché
à plusieurs reprises de venir vers vous, et j’ai
été retenu jusqu’à présent.
[n° 1180] 23 Mais maintenant puisqu’il n’y a
pas lieu de rester davantage dans ces régions,
et que j’éprouve un vif désir de venir vers
vous depuis bien des années déjà;
[n° 1181] 24 lorsque je me mettrai en route
pour l’Espagne, j’espère vous voir en passant
et que vous m’y conduirez, une fois que
j’aurai un peu joui de vous.
[n° 1183] 25 Mais maintenant je m’en vais à
Jérusalem pour le service des saints.
[n° 1184] 26 Car la Macédoine et l’Achaïe
ont jugé bon de faire une mise en commun
pour les pauvres d’entre les saints qui sont à
Jérusalem.
[n° 1185] 27 Or il leur a plu aussi, et elles leur
sont redevables. Car si les Gentils ont eu part
à leurs biens spirituels, ils doivent aussi les
servir de leurs biens temporels.
[n° 1186] 28 Lors donc que j’aurai terminé
cette affaire et que je leur aurai remis ce fruit,
je partirai pour l’Espagne <en passant> par
chez vous.
[n° 1187] 29 Or je sais qu’en venant à vous,
c’est dans l’abondance de la bénédiction de
l’Evangile du Christ que j’y viendrai.
[n° 1188] 30 vous demande donc avec
obsécration, frères, par Notre Seigneur Jésus-
Christ et par la charité de l’Esprit-Saint, de
1092 Cela ne veut pas dire qu’ils ont eu des visions du Christ, mais qu’ils ont pu voir, de leurs yeux,
l’édification et le développement de ce Corps du Christ qu’est l’Eglise répandue par toute la terre, ce
que les Juifs n’avaient connu que par la voix des prophètes.
m’aider dans les prières <que vous
adresserez> à Dieu pour moi,
[n° 1191] 31 afin que je sois libéré des
infidèles qui sont en Judée et que l’offrande
que je me fais un devoir de porter à Jérusalem
soit agréée des saints;
32 en sorte que je vienne vers vous avec joie
par la volonté de Dieu et que je me repose
avec vous.
[n° 1192] 33 Que le Dieu de la paix soit avec
vous tous! Amen.
[86230] Super Rom., cap. 15 l. 3 Postquam
apostolus se excusavit de praesumptione
quae ei potuisset adscribi, ex hoc quod
Romanos instruxerat et correxerat, hic se
excusat de eo quod eos visitare distulerat. Et
circa hoc tria facit. Primo ponit
impedimentum visitationis praeteritum;
secundo ponit visitandi propositum, ibi nunc
vero ulterius, etc.; tertio promittit
visitationis fructum, ibi scio autem, et
cetera. Dicit ergo primo : dictum est :
praedicavi Evangelium per multa loca, in
quibus Christus non fuerat nominatus,
propter quod, hactenus, impediebar
plurimum, ex huiusmodi occupatione,
venire ad vos. Et istud impedimentum usque
nunc duravit, unde subdit et prohibitus sum
usque adhuc. Quod quidem potest referri ad
multitudinem occupationum quas in aliis
locis habuerat, vel etiam ad divinam
providentiam per quam apostoli
impediebantur ne pervenirent ad quosdam et
dirigebantur in salutem aliorum, secundum
illud Act. XVI, 6. — transeuntes Phrygiam
et Galatiae regionem, vetati sumus a spiritu
sancto loqui verbum in Asia. Unde et supra
I, 13 dictum est : saepe proposui venire ad
vos, et prohibitus sum usque adhuc. Et hoc
est quod dicitur Iob XXXVII, 12 de
nubibus, per quas praedicatores intelliguntur
: lustrant cuncta per circuitum quocumque
eos voluntas gubernantis duxerit. Deinde
cum dicit nunc vero ulterius, etc., manifestat
propositum suum de eorum visitatione. Et
primo promittit eis suam visitationem;
secundo assignat causam quare oporteat
1178. — I. Après s’être excusé de la
présomption qu’on pouvait lui imputer pour
avoir instruit et corrigé les Romains [n°
1163], l’Apôtre s’excuse à présent de son
retard à les visiter.
Et sur ce point il fait trois choses :
A) Il expose en premier lieu l’empêchement
qu’il a eu.
B) En deuxième lieu, son propos de les visiter
[n° 1180] : 23 Mais maintenant, etc.
C) En troisième lieu, le fruit de sa visite [n°
1187] : 29 Or je sais, etc.
1179. — A. Il est dit : j’ai prêché l’Evangile
en beaucoup de lieux où le nom du Christ
n’avait pas été proclamé, c’est pourquoi, pour
le moment, j’ai été empêché à plusieurs
reprises, à cause de cette occupation, de venir
vers vous. Et cet empêchement a duré jusqu’à
maintenant, aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : et
j’ai été retenu jusqu’à présent. Paroles qui
peuvent s’appliquer à la multitude des
occupations qu’il avait eues en d’autres lieux,
ou même à la divine Providence qui
empêchait les Apôtres de parvenir chez
certains et qui les dirigeait en vue du salut des
autres, selon ce passage des Actes : < Comme
ils traversaient la Phrygie et le pays de
Galatie, il leur fut défendu par l’Esprit-Saint
d’annoncer la Parole de Dieu en Asie." Et
d’où ce qui a été dit plus haut <par l’Apôtre>
: "Je me suis souvent proposé de venir chez
vous, mais j’en ai été empêché jusqu’à
maintenant." Il est écrit au livre de Job à
propos des nuées, qui signifient les
prédicateurs1093
— "Elles répandent leur
lumière; elles éclairent de toutes parts, partout
1093
Voir Glosa ordinaria in Job XXXVII, 1 lb (GOS, t. II, p. 44 lb). — Lieux parallèles Ad Rom. 1,
13; Lect. 5 (éd. Marietti, n°91); Super Psalmos, in Ps. 17, 16.
eam differre, ibi nunc igitur proficiscar,
etc.; tertio assignat eis visitationis
terminum, ibi hoc igitur cum
consummavero, et cetera. Dicit ergo primo
ita : usque modo sum prohibitus, nunc vero,
iam peragratis omnibus his locis, ulterius
non habens locum, id est necessitatem
permanendi in his regionibus, in quibus iam
per me fundata est fides, cupiditatem habens
veniendi ad vos ex multis iam
praecedentibus annis secundum illud supra
I, 11. — desidero enim videre vos, ut
aliquid impartiar vobis gratiae spiritualis,
cum in Hispaniam proficisci coepero, quo
scilicet ire intendebat ut etiam in extremis
terrae fundamenta fidei collocaret,
secundum illud Is. XLIX, 6. — dedi te in
lucem gentium, ut sis salus mea usque ad
extremum terrae, spero quod praeteriens
videbo vos. Per quod dat intelligere quod
non intendebat ad eos principaliter ire, quia
reputabat eis sufficere doctrinam Petri, qui
primus inter apostolos Romanis fidem
praedicavit. Et quia tunc Romani
dominabantur in toto occidente, eorum
auxilio et ducatu se sperabat in Hispaniam
proficisci, unde subdit et a vobis deducar
illuc. Intendebat tamen aliquam moram
apud eos contrahere; unde subdit si vobis
fruitus fuero, id est consolatus secundum
illud quod supra I, 12 dictum est : simul
consolari in vobis. Et hoc ex parte, scilicet
temporis, quia per aliquod tempus
intendebat cum eis consolari. Sed contra est
quod Augustinus dicit in libro de doctrina
Christiana, quod illis solis rebus fruendum
est, quae nos beatos faciunt, scilicet patre,
filio et spiritu sancto. Inconvenienter ergo
dicit, se fruiturum esse Romanis. Sed
dicendum est quod sicut Augustinus dicit
ibidem, hominem in se non esse fruendum,
sed in Deo, secundum illud ad Philemonem,
20. — ita, frater, ego te fruar in domino,
quod est delectari in homine propter Deum.
Et sic intelligendum est quod dicit si fuero
fruitus vobis, scilicet in Deo. Vel quod dicit
ex parte, potest referri ad bonos, quibus
où les conduit la volonté de celui qui les
gouverne."
1180. — B. Lorsqu’il dit : 23 Mais
maintenant, etc., <l’Apôtre> manifeste son
propos de les visiter. Et
1) Il leur promet d’abord sa visite.
2) Puis, il donne la raison pour laquelle il
fallait qu’il la retarde [n° 1183] : 25 Mais
maintenant je m ‘en vais, etc.
3) Enfin, il leur fixe le moment de sa visite
[n° 1186] : 28 Lors donc que j’aurai terminé,
etc.
1181. — 1. Il dit donc : J’ai été ainsi empêché
jusqu’à ce jour, mais maintenant, ayant
parcouru toutes ces contrées, puisqu’il n’y a
pas lieu, c’est-à-dire puisqu’il n’y a pas de
nécessité de rester dans ces régions, où la foi
a été implantée par <mon ministère>, et que
j’éprouve un v désir de venir vers vous depuis
bien des années déjà — <l’Apôtre le disait
déjà au début de son épître> : "Car je désire
vous voir, pour vous faire part de quelque
grâce spirituelle " —, 24 lorsque je me mettrai
en route pour l’Espagne, c’est-à-dire où il se
proposait d’aller afin d’établir, même aux
extrémités de la terre, les fondements de la foi
— selon cette parole d’Isaïe : "Voici que je
t’ai donné comme lumière des nations, afin
que tu sois mon salut jusqu’à l’extrémité de la
terre " —, j’espère vous voir en passant.
<L’Apôtre> donne à entendre par là qu’il
n’avait pas l’intention d’aller principalement
chez eux, parce qu’il estimait que la doctrine
de Pierre, lui qui fut le premier des Apôtres à
avoir prêché aux Romains, leur suffisait. Et,
parce que les Romains dominaient alors sur
tout l’Occident, il espérait que grâce à leur
concours et sous leur conduite, il partirait
pour l’Espagne, aussi ajoute-t-il : et que vous
m’y conduirez. Il avait cependant l’intention
de s’arrêter quelque temps chez eux, aussi
ajoute-t-il une fois que j’aurai joui de vous,
c’est-à-dire après avoir été consolé — selon
ce qui a été dit plus haut : "de nous consoler
mutuellement chez vous " — un peu (ex
parte), c’est-à-dire quant au temps, parce qu’il
avait l’intention <de s’arrêter> quelque temps
poterat frui in Deo. Nam alia parte, scilicet
malis, non poterat frui, sed magis de eis
dolere, sicut dicitur 2 Co XII, v. 21. — ne
cum venero, humiliet me Deus apud vos, et
lugeam multos ex his qui ante peccaverunt.
Deinde cum dicit nunc igitur proficiscar,
assignat rationem quare differebat
visitationem. Et circa hoc tria facit. Primo
ponit causam, dicens nunc igitur
proficiscar, id est ideo non statim venio ad
vos, quia proficiscor Ierusalem ministrare
sanctis. Circa quod sciendum est quod
legitur Act. c. IV, 34 s., illi qui ex Iudaeis a
principio convertebantur ad fidem, venditis
possessionibus suis, de pretio communiter
vivebant, quod cum defecisset, maxime
quadam magna fame imminente, ut legitur
Act. XI, 27 ss., discipuli, scilicet Christiani,
ex diversis partibus mundi, prout quisque
habebat, proposuerunt singuli in
ministerium mittere habitantibus in Iudaea
fratribus, quod et fecerunt, mittentes ad
seniores per manus Barnabae et Sauli.
Ministerium igitur sanctorum hic dicit
eleemosynam, quam fidelibus Christi attulit
in Ierusalem, secundum illud 1 Co ult. :
quos probaveritis, hos mittam perferre
gratiam vestram in Ierusalem, quod si
dignum fuerit, ut et ego eam, mecum ibunt.
Secundo exponit quod dixerat de ministerio
sanctorum, dicens probaverunt enim, id est
approbaverunt, Macedonia et Achaia, id est
fideles utriusque regionis, per eum conversi,
collectionem aliquam facere, id est aliquam
collectam, in pauperes Christi, id est ad
usum pauperum, qui sunt de numero
sanctorum, secundum illud Eccli. c. XII, 4.
— da iusto, et non recipias peccatorem. Qui
sunt in Ierusalem, in paupertate viventes. 2
Co IX, 1. — de ministerio quod fit in
sanctos ex abundanti est mihi scribere
vobis. Scio enim promptum animum
vestrum, pro quo de vobis glorior apud
Macedones. Tertio assignat rationes
dictorum, quarum prima est beneplacitum.
pour se consoler avec eux.
1182. — Objection.1094
Augustin dit, dans son
ouvrage De la doctrine chrétienne, qu’il ne
faut jouir seulement que de ce qui nous rend
bienheureux, à savoir du Père, du Fils et de
l’Esprit-Saint1095
. <L’Apôtre> parle donc mal
à propos <en exprimant son intention> de
jouir des Romains.
Réponse. Comme Augustin le dit dans ce
même ouvrage1096
, l’homme ne doit pas
mettre sa jouissance en lui-même, mais en
Dieu, selon cette parole : "Oui, mon frère, que
moi j’obtienne cette jouissance de toi dans le
Seigneur ", ce qui veut dire mettre sa
jouissance dans l’homme à cause de Dieu.
Ainsi faut-il entendre ce qu’il dit ici : quand
j’aurai un peu joui de vous, c’est-à-dire en
Dieu.
Ou bien ces mots : en partie (ex parte)
peuvent s’appliquer aux bons, qui pouvaient
lui donner de la jouissance en Dieu.
Car de l’autre côté, c’est-à-dire du côté des
méchants, il ne pouvait pas jouir, mais plutôt
s’affliger à leur égard, selon ce qui est dit :
"Que venant de nouveau, Dieu ne m’humilie
parmi vous, et que je n’aie à pleurer beaucoup
de ceux qui, ayant déjà péché, n’ont point fait
pénitence des impuretés, des fornications et
des impudicités qu’ils ont commises."
1183. — 2. En disant : 25 main tenant je m’en
vais, etc., <l’Apôtre> donne la raison pour
laquelle il différait sa visite. Et à ce propos
a. 1l commence par en exposer la raison, en
disant : Mais maintenant je m’en vais, c’est-à-
dire la raison pour laquelle je ne viens pas
aussitôt vers vous, c’est que je m’en vais à
Jérusalem pour le service des saints. La
lecture des Actes nous enseigne ici que ceux
d’entre les Juifs qui s’étaient convertis à la foi
dès le début, ayant vendu leurs possessions,
vivaient en commun avec le prix <de leurs
ventes>; mais cette ressource venant à
manquer, surtout à cause d’une grande famine
qui menaçait, lit-on aussi dans les Actes, "les
disciples", c’est-à-dire les chrétiens des
1094
Lieux parallèles : Somme Théologique 1a-2ae Q. 11, a. 3, obi. 1 et sol. 1; Ad Philem. 1, 20, lect. 2
(éd. Marietti, n° 28). 1095
Voir SAINT AUGUSTIN, De doctrina christiana I, V, 5 (BA 11, 184-185; HA 11/2, 82-83). 1096
Voir ibid., xxii, 20-21 (BA 11, 202-207; BA 11/2, 100-103); xxxii 36-37 (HA 11, 224-227; HA
11/2, 122-125).
Unde dicit placuit enim illis, 2 Co IX, 7. —
unusquisque prout destinavit in corde suo,
non ex tristitia aut necessitate. Secunda
causa est debitum. Unde subdit et debitores
sunt eorum. Supra XIII, 7. — reddite
omnibus debita. Rationem autem debiti
assignat, dicens nam si gentiles facti sunt
participes bonorum spiritualium, quae erant
specialiter eorum, id est Iudaeorum, scilicet
notitiae divinae, et promissionum et gratiae,
secundum illud supra IX, 4. — quorum
adoptio est filiorum et gloria, etc.; et supra
XI, 17. — socius radicis et pinguedinis
olivae factus es. Sunt etiam facti participes
spiritualium eorum, per hoc quod illi
praedicatores eis miserunt. Debent et in
carnalibus ministrare illis, secundum illud
Eccli. c. XIV, 15. — in divisione sortis da et
accipe. Et Ps. sumite Psalmum, id est
spiritualia, et date tympanum, id est
temporalia. Et ex hoc sumitur argumentum
quod debentur sumptus non solum illis qui
praedicant, sed etiam qui praedicatores
mittunt. Deinde cum dicit hoc igitur cum,
etc., praefigit terminum quo ad eos sit
venturus, dicens hoc igitur cum
consummavero, scilicet ministerium
sanctorum, et assignavero eis fructum hunc,
id est eleemosynam gentilium, quae est
quidam fructus conversionis eorum, Os. X,
1. — vitis frondosa Israel fructus est ei
adaequatus; proficiscar per vos in
Hispaniam. Sed videtur hic apostolus
falsum dicere : nunquam enim in Hispania
fuisse legitur. In Ierusalem enim captus fuit,
et exinde Romam perlatus est in vinculis, ut
habetur Act. ult., ubi est occisus simul cum
Petro. Dicunt ergo quidam quod, sicut
dicitur Act. ult., cum venisset Romam
Paulus, permissum est ei manere sibimet
cum custodiente se milite; et postea dicitur,
quod mansit biennio toto in suo conductu, et
in illo spatio dicunt eum in Hispaniam
ivisse. Sed quia hoc certum non est, potest
melius dici, quod apostolus falsum non
dixit, quia proponebat se facturum quod
diverses parties du monde, "chacun selon ses
moyens, décidèrent d’envoyer des secours
aux frères qui habitaient en Judée; ce qu’ils
firent, en les envoyant aux anciens par les
mains de Barnabé et de Saul." <L’Apôtre>
appelle donc ici service des saints l’aumône
qu’il a apportée à Jérusalem aux fidèles du
Christ, selon ce passage de la première épître
aux Corinthiens : "Ceux que vous aurez jugés
dignes, je les enverrai avec des lettres, pour
porter votre charité à Jérusalem. Que si la
chose mérite que j’y aille moi-même, ils iront
avec moi "
1184. — b. <L’Apôtre> développe ensuite
ce qu’il avait dit du service des saints, en
disant : 26 Car la Macédoine et l’Achaïe,
c’est-à-dire les fidèles de ces deux régions,
converties par <l’Apôtre> lui-même, ont jugé
bon, c’est-à-dire ont approuvé, de faire une
mise en commun, c’est-à-dire une collecte,
pour les pauvres du Christ, c’est-à-dire pour
l’usage des pauvres qui sont au nombre des
saints — selon ce passage de l’Ecclésiastique
: "Donne à celui qui est juste et n’accueille
point le pécheur1097
" — qui sont à Jérusalem,
vivant dans la pauvreté : "Quant à ce service
en faveur des saints, il est superflu pour moi
de vous en écrire. Je sais en effet votre bonne
volonté, pour laquelle je me glorifie de vous
auprès des Macédoniens."
1185. — c. Il donne enfin les raisons de ce
qu’il a dit :
— La première1098
de ces raisons est le bon
plaisir. Aussi <l’Apôtre> dit-il : 27 Or il leur
a plu ainsi. — "Que chacun donne comme il
l’a résolu en son cœur, non avec tristesse ou
par nécessité; car Dieu aime celui qui donne
avec joie."
— La seconde raison est la dette. Aussi
ajoute-t-il : et elles leur sont redevables.
— "Rendez à tous ce qui leur est dû." Et
<l’Apôtre> donne le motif de cette dette, en
disant : Car si les Gentils ont eu part à leurs
biens spirituels, qui leur appartenaient
spécialement, c’est-à-dire aux Juifs, à savoir
la connaissance de Dieu, de ses promesses et
1097
Eccli (Si) 12, 4. Pour la version citée Ici, voir Vetus latina, Sirach (Ecciesiasticus) 2, 8, éd. W.
Thiele, vol. X112, fasc. 6, p. 404-405. 1098
Lieux parallèles : Contra impugn. Dei cuit, et reiig., c. VII Somme Théologique 2 Q. 187, a. 4 sol.
2; II Ad Cor. 11, 12, lect. 3 (éd. Marietti, n 401); II Ad TIses. 3, 8-9, lect. 1 (éd. Marietti, n° 73-74).
dicebat. Et sic verba eius erant intelligenda
quasi insinuantia eius propositum, non
autem futurum eventum qui ei erat incertus;
unde non poterat hoc praedicere, nisi forte
sub conditione quam Iacobus dicit
apponendam Iac. c. IV, 15. — pro eo ut
dicatis : si dominus voluerit, et : si
vixerimus, faciemus hoc aut illud. Et sic
etiam apostolus se excusat 2 Co c. I, 17, de
hoc quod ad eos non iverat, sicut
promiserat; dicens : cum ergo volui,
numquid levitate usus sum ? Aut quae
cogito, secundum carnem cogito, ut sit apud
me est et non ? Et sic ex hoc quod ex iusta
causa praetermisit facere quod promiserat,
se immunem dicit a levitate, carnalitate et
falsitate. Et sic etiam solvit hoc Gelasius
Papa, et habetur in decretis : beatus, inquit,
Paulus apostolus non ideo, quod absit,
fefellisse credendus est, aut sibi extitisse
contrarius, quoniam cum ad Hispaniam se
promisisset iturum, dispositione divina,
maioribus occupatus causis, implere non
potuit quod promisit. Quantum enim ipsius
voluntatis interfuit, hoc pronuntiavit quod
re vera voluisset efficere. Quantum vero ad
divini secreta consilii (quae ut homo non
potuit, licet spiritu Dei plenus, agnoscere)
superna praetermisit dispositione
praeventus. Licet enim propheticum
spiritum habuerit, tamen prophetis non
omnia revelantur, ut patet IV Reg. IV, 27,
ubi Eliseus dixit : anima eius in amaritudine
est, et dominus celavit a me, et non indicavit
mihi. Deinde cum dicit scio autem, etc.,
praenuntiat eis fructum suae visitationis,
dicens scio autem, scilicet ex fiducia divinae
gratiae, quoniam veniens ad vos, in
abundantia benedictionis Christi veniam, id
est, Christus abundantius suam
benedictionem dabit vobis in meo adventu,
de qua dicitur in Ps. LXXXIII, 7. — etenim
de sa grâce, selon ce qui est écrit plus haut :
"à qui appartiennent l’adoption des fils, et la
gloire, et l’alliance, et la législation, et le culte
et les promesses." Et encore : "Tu as été fait
participant à la racine et à la grasse sève de
l’olivier." Ils ont aussi eu part à leurs biens
spirituels, parce qu’ils leur ont envoyé des
prédicateurs. — Ils doivent aussi les servir de
leurs biens temporels, selon ces paroles de
l’Ecclésiastique : "Dans le partage du sort,
donne et reçois " et du psaume 80. —
"Recevez un psaume", c’est-à-dire <recevez>
les choses spirituelles, "et donnez du
tambourin ", c’est-à-dire <donnez> les choses
temporelles1099
. Et c’est sur cela que repose la
preuve que l’on doit une rétribution non
seulement à ceux qui prêchent, mais aussi à
ceux qui envoient les prédicateurs.
1186. — B. Lorsqu’il dit : 28 Lors donc que
j’aurai terminé cette affaire, <l’Apôtre> fixe
le moment où il viendra vers eux. Lors donc,
dit-il, que j’aurai terminé cette affaire, c’est-à-
dire le service des saints, et que je leur aurai
remis ce fruit, c’est-à-dire l’aumône des
Gentils, qui est en quelque sorte un fruit de
leur conversion — "Israël était une vigne
couverte de feuilles, le fruit l’égalait " —, je
partirai pour l’Espagne <en passant> par chez
vous.
Mais l’Apôtre semble s’exprimer ici de
manière erronée, car on ne lit nulle part qu’il
ait été en Espagne. En effet, il fut pris à
Jérusalem, et de là, enchaîné, il fut transporté
jusqu’à Rome, comme le rapportent les Actes,
et c’est en ce lieu qu’il fut mis à mort en
même temps que Pierre.
En se fondant sur ces mêmes Actes, à savoir
que Paul étant venu "à Rome, on lui permit de
demeurer seul avec le soldat qui le gardait ";
et plus loin, qu’" il demeura deux ans entiers
dans le logis qu’il avait loué ", d’aucuns1100
prétendent que ce serait pendant ce laps de
1099
Voir SAINT AUGUSTIN, Enarr. in Ps. 80, 3, 4 (CCL 39, 1122). 1100
Il s’agit principalement de saint Clément de Rome, pape vers 90-100. Dans sa Lettre aux
Corinthiens (vers 95), il affirme que saint Paul a enseigné la justice au monde " jusqu’aux bornes du
couchant", ce qui signifie effectivement, pour un Romain, " jusqu’en Espagne " (V, 7; voir dans Les
Ecrits des Pères apostoliques, p. 64; SC 167, 109). De même " l’auteur du fragment de Muratori
rapporte (vers 180) que Paul y est allé " (1. 39; voir dans l’Enchi ridionfontium historiae ecclesiasticae
antiquae, B. Herder, 1914, p. 90). On ne sait rien de certain sur ce voyage, comme le dit saint Thomas,
mais il n’est pas impossible que l’Apôtre l’ait accompli.
benedictionem dabit legislator, ibunt de
virtute in virtutem. Et sic Laban dixit ad
Iacob, Gen. III, v. 27. — experimento didici
quod benedixerit mihi Deus propter te.
Deinde cum dicit obsecro, ergo, etc., petit
ab eis orationis suffragia, et primo petit
eorum orationes, secundo ipse pro eis rogat,
ibi Deus pacis, et cetera. Circa primum tria
facit. Primo inducit eos ad orandum pro se
ex tribus. Primo quidem ex superna
charitate, cum dicit obsecro ergo vos,
fratres. Ad Philemonem propter charitatem
autem magis obsecro. Secundo ex
reverentia Christi, cuius ipse erat minister,
dicens per dominum nostrum Iesum
Christum; in quo omnes unum sumus, ut
supra XII, 5 dictum est. Tertio ex dono
spiritus sancti, quod eius ministerio
tradebatur, unde subdit per charitatem
spiritus sancti, quam spiritus sanctus in
cordibus nostris diffundit, ut supra c. V, 5
dictum est. Secundo petit auxilium orationis
eorum, dicens ut adiuvetis me in orationibus
vestris pro me ad Deum, scilicet pro me
fusis. Prov. XVIII, 19. — frater qui iuvatur
a fratre, quasi civitas firma. Hoc autem, ut
Glossa dicit, non ideo dicit apostolus quia
ipse minus mereatur quam alii minores, sed
ordinem sequitur. Primo quidem ut ab
Ecclesia pro rectore suo fiat oratio,
secundum illud I Tim. II, 1 s. : obsecro
igitur primum omnium fieri obsecrationes,
orationes, postulationes, gratiarum actiones
pro omnibus hominibus, pro regibus et
omnibus qui sunt in sublimitate constituti, et
cetera. Secundo, quia multi minimi dum
congregantur unanimes, magis merentur. Et
ideo impossibile est, ut multorum preces
non impetrent. Matth. XVIII, v. 19. — si
duo ex vobis consenserint super terram, de
omni re quamcumque petierint, fiet illis a
patre meo qui est in caelis. Tertio, ut dum
multi orant, multi etiam gratias agant
exauditi, secundum illud 2 Co I, 11. —
adiuvantibus vobis in oratione pro nobis, ut
per multos gratiae agantur Deo. Tertio
temps qu’il alla en Espagne. Mais parce que
cela n’est pas certain, il vaut peut-être mieux
dire que l’Apôtre ne s’est pas exprimé de
manière erronée, parce qu’il se proposait de
faire ce qu’il disait; et dans ce sens ses paroles
doivent être comprises comme une
insinuation de son propos, mais non <comme
se rapportant à> un événement futur, qui pour
lui était incertain; aussi ne pouvait-il prévoir
cela autrement que sous la condition que
<l’Apôtre> Jacques <nous> enseigne à
appliquer : "Que ne dites-vous au contraire
"Si le Seigneur le veut", et "Si nous vivons
nous ferons ceci ou cela"." Et c’est encore
ainsi que l’Apôtre <Paul> s’excuse de ce qu’il
n’était pas allé chez eux, comme il l’avait
promis, en disant : "Ayant donc eu ce dessein,
aurais-je fait preuve de légèreté ? ou bien, ce
que je projette, le projetai-je selon la chair, de
sorte qu’en moi il y ait le oui et le non ?" Et
ainsi du fait qu’il a omis, pour une juste
cause, de faire ce qu’il avait promis, il se dit
exempt de légèreté, de vues selon la chair et
de fausseté. C’est aussi de cette manière que
le pape Gélase résout cette difficulté, et on lit
dans ses Décrets "Doit-on croire, dit-il, que
Dieu nous en préserve!, que le bienheureux
Apôtre Paul ait voulu tromper, ou qu’il ait été
en contradiction avec lui-même, parce que,
bien qu’il ait promis d’aller en Espagne,
occupé à des affaires plus importantes par une
disposition divine, il ne put accomplir ce qu’il
avait promis. Pour autant que cela dépendait
de sa propre volonté, il a exprimé ce qu’il
aurait, en réalité, voulu accomplir. Mais quant
aux secrets du divin conseil (que l’homme n’a
pu connaître, bien qu’il ait été rempli de
l’Esprit de Dieu), il les négligea après avoir
été prévenu par une disposition divine1101
."
Car, bien qu’il ait eu l’esprit prophétique,
cependant toutes choses ne sont pas révélées
aux prophètes1102
, comme on le voit au
quatrième livre des Rois, où Elisée dit : "Son
âme est dans l’amertume, et le Seigneur me
l’a caché et ne me l’a point fait connaître."
1187. — C. Lorsqu’il dit ensuite : 29 Or je
1101
PSEUDO-GÉLASE, Décrets II, cause 22, Q. 2, can. 5 (PL 59, 154 C) voir aussi GRATIEN,
Décrets, deuxième partie, cause XXII, Q. II, can. V, éd. E. Friedberg, coI. 868. 1102
Lieux parallèles Somme Théologique 2 Q. 171, a. 4; De veritate, Q. 12, a. 1, sol. 5 et 6.
ponit ea quae vult sibi impetrari, quorum
primum pertinet ad hostes quos habebat in
Iudaea. Unde dicit ut liberer ab infidelibus
qui sunt in Iudaea, qui praecipue Paulum
impugnabant et odiebant, quia fiducialiter
praedicabat cessationem legalium. Act.
XXI, 21. — audierunt de te quod
discessionem doces a Moyse, et cetera.
Secundum pertinebat ad eos in quorum
ministerium ibat. Et hoc est quod subdit et
oblatio obsequii mei, id est Ecclesia in qua
eis ministro, fiat accepta sanctis qui sunt in
Ierusalem, scilicet ut ex hac provocentur ad
gratias agendum Deo et ad orandum pro
ipsis gentibus a quibus recipiunt. Eccli.
XXXI, v. 28. — splendidum in panibus
benedicent labia multorum. Tertium pertinet
ad ipsos quibus scribebat. Unde subdit ut
veniam ad vos in gaudio, et hoc per
voluntatem Dei, contra quam nihil agere
volebat. Supra I, 10. — obsecrans si
quomodo prosperum iter habeam in
voluntate Dei veniendi ad vos. Et refrigerer
vobiscum, id est ut ex vestra praesentia
refrigerium tribulationum mearum
accipiam. Deinde cum dicit Deus autem
pacis, etc., ostendit quod pro eis orat, dicens
: Deus autem, dator pacis, sit cum omnibus
vobis, per hoc scilicet quod vos ad invicem
pacem habeatis. 2 Co ult. v. 11. — idipsum
sapite, et Deus pacis et dilectionis erit
vobiscum. Subdit amen, id est fiat. Psalmista
: et dicet omnis populus, fiat, fiat.
sais, etc., <l’Apôtre> leur annonce le fruit de
sa visite. Or je sais, à savoir par la confiance
dans la grâce divine, qu’en venant à vous,
c’est dans l’abondance de la bénédiction du
Christ que j’y viendrai, c’est-à-dire que le
Christ vous donnera plus abondamment, à
mon arrivée, sa bénédiction, dont il est dit au
psaume 83. — "Car le législateur donnera sa
bénédiction, ils iront de vertu en vertu." Et
c’est dans ce sens que Laban dit à Jacob :
"J’ai connu par mon expérience que le Dieu
m’a béni à cause de toi."
1188. — III. Lorsqu’il dit : 30 vous demande
donc avec obsécration, etc., <l’Apôtre>
demande le suffrage de leurs prières. Et
A) Il commence par demander leurs prières.
B) Puis, il prie lui-même pour eux [n° 1192].
— Que le Dieu de la paix, etc.
1189. — A. Sur le premier point il procède de
trois manières
1. Il les engage premièrement à prier pour lui
pour trois raisons
a. D’abord en raison de la charité céleste,
lorsqu’il dit : Je vous demande donc avec
obsécration, frères. <Et l’Apôtre écrit> à
Philémon : "Cependant j’aime mieux te
demander avec obsécration par charité."
b. Ensuite par respect pour le Christ, dont il
était lui-même le ministre, en disant : par
Notre Seigneur Jésus-Christ, en qui nous
sommes tous un <seul corps>, comme on l’a
dit plus haut.
c. Enfin en raison du don de l’Esprit-Saint,
qui était transmis par son ministère, aussi
<l’Apôtre> ajoute-t-il : par la charité de
l’Esprit-Saint, charité que l’Esprit-Saint
répand dans nos cœurs, comme on l’a dit plus
haut.
1190. — 2. Puis il demande le secours de leur
prière, en disant : de m’aider dans les prières
<que vous adresserez> à Dieu pour moi,
c’est-à-dire répandues à mon intention : "Un
frère qui est aidé par son frère est comme une
cité forte." Or, remarque la Glose1103
"si
l’Apôtre parle ainsi, ce n’est pas qu’il mérite
moins que ceux qui lui sont inférieurs, mais il
se conforme à un ordre" :
a. En premier lieu, "que la prière soit faite par
1103
Glosa in Rom. XV, 30 (GPL, col. 1526 D).
l’Eglise pour celui qui dirige", selon ces
paroles de <l’Apôtre> à Timothée "Je
demande donc instamment, avant tout, qu’on
fasse des obsécrations, des prières, des
demandes, des actions de grâces pour tous les
hommes, pour les rois et tous ceux qui sont
élevés en dignité, afin que nous menions une
vie paisible et tranquille, en toute piété et
chasteté1104
."
b. En deuxième lieu, parce qu’"une multitude
de simples fidèles, quand ils se rassemblent
d’un cœur unanime" méritent davantage, et
voilà pourquoi "il est impossible que les
prières d’une multitude ne soient pas
exaucées1105
." <Il est écrit dans l’évangile de>
Matthieu : "Que si deux d’entre vous
s’accordent sur la terre pour demander quoi
que ce soit, cela leur sera accordé par mon
Père qui est aux cieux."
c. En troisième lieu, quand une multitude prie,
plusieurs, ayant été exaucés, rendent grâces,
selon ce passage de la seconde épître aux
Corinthiens : "Vous-mêmes nous aiderez par
la prière, afin que ce bienfait, qu’un grand
nombre de personnes nous auront obtenu, soit
pour un grand nombre un motif d’action de
grâces" à Dieu "pour nous1106
."
1191. — 3. Enfin, <l’Apôtre> expose ce qu’il
veut qu’on demande pour lui.
a. La première de ces demandes concerne les
ennemis qu’il avait en Judée, aussi dit-il : 31
afin que je sois libéré des infidèles qui sont en
Judée, lesquels combattaient principalement
Paul et le haïssaient, parce qu’il prêchait avec
hardiesse la suppression des observances
légales : "Ils ont entendu dire de toi que tu
enseignes aux Juifs, qui sont parmi les
Gentils, d’abandonner Moïse, disant qu’ils ne
doivent point circoncire leur fils, ni marcher
selon les coutumes."
b. La deuxième demande concernait ceux
auxquels il allait porter des aumônes, d’où ce
qu’il ajoute : et que l’offrande de mon service,
c’est-à-dire que l’Eglise dans laquelle je sers
pour eux, soit agréée des saints qui sont à
Jérusalem, en sorte que par là ils soient
1104
1 Tm 2, 1-2. — Lieu parallèle 1 Ad Tim. 2, 1-2, lect. 1 (éd. Marietti, n° 55-59). 1105
Voir Glosa in Rom. XV, 30 (GPL, col. 1526 D; GOS, t. IV, p. 305a). 1106
2 Co 1, 11 Lieu parallèle IIAd Cor. 1. 11, lect. 3 (éd. Marietti, n 28).
provoqués à rendre grâces à Dieu et à prier
pour les nations elles-mêmes, dont ils
reçoivent ces aumônes : "Des lèvres de la
multitude béniront celui qui est splendide
dans les repas <qu’il donne>."
c. La troisième demande concerne ceux-là
mêmes auxquels il écrivait, aussi ajoute-t-il :
32 en sorte que je vienne vers vous dans la
joie, et cela par la volonté de Dieu, contre
laquelle il ne voulait rien faire "demandant
avec obsécration, si en quelque manière c’est
la volonté de Dieu, de m’accorder enfin un
heureux voyage pour venir jusqu’à vous " —
Et que je me repose avec vous, c’est-à-dire
que par votre présence je reçoive un
soulagement à mes tribulations.
1192. — B. Lorsque <l’Apôtre> dit : 33 Que
le Dieu de la paix soit avec vous tous, etc., il
montre qu’il prie pour eux. Que le Dieu de la
paix, le donateur de la paix, soit avec vous
tous, c’est-à-dire pour que vous, vous ayez la
paix mutuellement "N’ayez qu’un sentiment,
conservez la paix, et le Dieu de paix et de
dilection sera avec vous." Il ajoute : Amen,
c’est-à-dire fiat, ainsi soit-il1107
. <Comme> le
psalmiste <l’écrit> au psaume 105. — "Et
tout le peuple dira : "Ainsi soit-il, ainsi soit-
il."
Caput 16 CHAPITRE 16
Lectio 1 Leçon 1 [Versets 1 à 16]
[n° 1194] 1 Je vous recommande Phoebé,
notre sœur, attachée au ministère de l’Eglise
qui est à Cenchrées,
[1195] 2 afin que vous la receviez dans le
Seigneur d’une manière digne des saints, et
que vous l’assistiez en toute affaire où elle
aurait besoin de vous; car elle en a elle-même
assisté un grand nombre, et moi en particulier.
[n° 1198] 3 Saluez Prisca et Aquilas, mes
coopérateurs dans le Christ Jésus,
[n° 1199] 4 qui ont exposé leurs têtes pour ma
vie; à qui je rends grâces, non pas moi
seulement, mais aussi toutes les Eglises des
nations païennes,
1107 Lieux parallèles Super Psalmos, in Prol. (in fine); in Ps. 40, 14.
5 et <saluez> aussi l’Eglise qui est dans leur
maison. [n° 1200] Saluez Epénète, mon bien-
aimé, qui est les prémices de l’Asie pour le
Christ.
[n° 1201] 6 Saluez Marie, qui a beaucoup
travaillé pour vous.
[n° 1202] 7 Saluez Andronicus et Junie, mes
parents et compagnons de captivité, qui sont
illustres parmi les Apôtres, qui même ont été
avant moi dans le Christ.
[n° 1203] 8 Saluez Ampliatus, qui m’est très
cher dans le Seigneur.
[n° 1204] 9 Saluez Urbain, notre coopérateur
dans le Christ Jésus, et Stachys, mon bien-
aimé.
[n° 1205] 10 Saluez Apelle, qui a fait ses
preuves dans le Christ.
[n° 1206] 11 ceux de la maison d’Ans tobule.
Saluez Hérodion, mon parent. Saluez ceux de
la maison de Narcisse, qui sont au Seigneur.
[n° 1207] 12 Saluez Tryphène et Tryphose,
qui ont travaillé dans le Seigneur. Saluez ma
très chère Persis, qui a beaucoup travaillé
dans le Seigneur.
[n° 1208] 13 Saluez Rufus, l’élu dans le
Seigneur, et sa mère, qui est aussi la mienne.
[n° 1209] 14 Saluez Asyncrite, Phiégon,
Hermès, Patrobas, Hermas, et les frères qui
sont avec eux.
[n° 1210] 15 Saluez Philologue et Julie, Nérée
et sa sœur, et Olympas et tous les saints qui
sont avec eux.
[n° 1211] 16 Saluez-vous mutuellement d’un
saint baiser. Toutes les Eglises du Christ vous
saluent.
[86231] Super Rom., cap. 16 l. 1 Postquam
apostolus proposuit fidelibus Romanis
quibus scribebat quaedam familiaria
pertinentia ad suam personam, hic ponit
quaedam familiaria pertinentia ad alios. Et
circa hoc tria facit. Primo monet quid ad
alios debeant facere; secundo ostendit quid
alii ad eos agant, ibi salutat vos, etc.; tertio
epistolam finit in gratiarum actione, ibi ei
autem qui potens, et cetera. Circa primum
duo facit. Primo ostendit quos debeant
salutare; secundo ostendit quos debeant
vitare, ibi rogo autem vos, fratres. Circa
primum mandat quasdam personas salutari
in speciali; secundo ponit in generali
1193. — L’Apôtre, après avoir exposé aux
fidèles Romains, auxquels il écrivait,
quelques détails familiers concernant sa
propre personne [n° 1163], donne à présent
quelques détails familiers concernant d’autres
personnes. A cet effet
— Il commence par donner une exhortation
aux fidèles sur ce qu’ils doivent faire pour
autrui.
— Puis, il montre ce que les autres font pour
eux [n° 1221] : 21 "Timothée, mon
coopérateur, vous salue, etc."
— Enfin, il termine son épître par une action
de grâces [n° 1223] : 25 "Et à Celui qui est
puissant, etc."
modum salutationis, ibi salutate invicem, et
cetera. Tertio salutat eos in communi ex
parte fidelium, ibi salutant vos, et cetera.
Circa primum loquitur de quadam muliere
Corinthia quae Romam ibat, quam eis
recommendat, describens eam, primo, ex
nomine, dicens commendo autem vobis
Phoeben, quae licet esset Deo devota, non
tamen erat tantae auctoritatis ut
commendatitiis litteris non egeret, sicut ipse
de se dicit 2 Co III, 1. — aut numquid
egemus, sicut quidam, commendatitiis
litteris ? Secundo describit eam ex fidei
religione, dicens sororem nostram. Omnes
enim mulieres fideles, sorores vocantur,
sicut et omnes viri fratres. Matth. XXIII, 8.
— omnes vos fratres estis. Tertio ex officio
pietatis, cum dicit quae est in ministerio
Ecclesiae, quae est in Cenchris, portu
Corinthiorum, ubi aliqui Christiani erant
congregati, quibus dicta mulier serviebat,
sicut et de ipso Christo Lc. c. VIII, 3 dicitur
quod quaedam mulieres ministrabant ei de
facultatibus suis. Et de vidua eligenda
dicitur I Tim. V, 10. — si hospitio recepit,
si pedes sanctorum lavit. Deinde dicit duo
in quibus vult eam commendatam haberi,
quorum primum est ut honeste recipiatur. Et
hoc est quod dicit ut suscipiatis eam in
domino, id est propter amorem Dei. Digne
sanctis, id est secundum quod dignum est
recipi sanctos, secundum illud Matth. X, 11.
— qui recipit iustum in nomine iusti,
mercedem iusti recipiet. Quidam libri
habent, digne satis, id est, convenienter;
tamen littera non concordat cum Graeco.
Secundum est ut eam sollicite adiuvent.
Unde subdit ut assistatis ei, scilicet
consilium et auxilium ferendo in
quocumque negotio vestri indiguerit.
Habebat enim forte aliquid expedire in curia
Caesaris. Sed contra hoc videtur esse quod
dicitur I Thess. IV, 11. — vestrum negotium
agatis, quasi dicat : non intromittatis vos de
negotiis alienis. Sed dicendum est quod
assistere negotiis alienis contingit dupliciter.
Uno modo saeculariter, id est propter
favorem hominum vel lucra, et hoc non
Sur le premier point, <l’Apôtre> montre deux
choses :
— D’abord, ceux que <les fidèles> doivent
saluer.
— Puis, ceux qu’ils doivent éviter [n° 1213] :
17 "Mais je vous prie, frères, etc."
I) Il recommande donc premièrement de
saluer quelques personnes en particulier.
II) II indique deuxièmement d’une manière
générale le mode de salutation [n° 1211] : 16
Saluez-vous mutuellement, etc.
III) Troisièmement, il les salue en général de,
la part des fidèles [n° 1212]
Toutes les Eglises du Christ vous saluent.
1194. — I. <Parmi les personnes qu’il salue
spécialement, l’Apôtre> mentionne une
femme de Corinthe qui allait à Rome. Il la
leur recommande, en la désignant d’abord par
son nom, en disant : 1 Je vous recommande
Phoebé1108
qui, bien que consacrée à Dieu,
n’avait cependant pas une autorité telle
qu’elle puisse se passer de lettres de
recommandation, comme <l’Apôtre> le dit de
lui-même : "Commencerons-nous de nouveau
à nous recommander nous-mêmes ? ou,
comme certains, avons-nous besoin de lettres
de recommandation auprès de vous, ou même
de vous ?"
Puis, il la décrit par sa foi et sa religion, en
disant : notre sœur. Car toutes les femmes
croyantes sont appelées sœurs, comme tous
les hommes sont aussi appelés frères : "Vous
êtes tous frères."
Enfin, <il la décrit> par son ministère de
piété, lorsqu’il dit : attachée au ministère de
l’Eglise qui est à Cenchrées, port de Corinthe,
où quelques chrétiens s’étaient rassemblés; et
cette femme les servait, comme il est dit du
Christ lui-même, que quelques femmes
"l’assistaient de leurs biens." Et sur le choix
des veuves il est dit : "Elle devra produire le
témoignage de ses bonnes œuvres : si elle a
élevé des enfants, si elle a exercé l’hospitalité,
si elle a lavé les pieds des saints, si elle a
secouru les affligés, si elle a pratiqué toutes
les formes de la bien aisance
1195. — Ensuite <l’Apôtre> mentionne deux
1108
Beaucoup d’exégètes modernes voient dans Phœbé la porteuse de la lettre de saint Paul.
convenit servis Dei. II Tim. c. II, 4. — nemo
militans Deo implicat se negotiis
saecularibus. Alio modo assistit aliquis
negotiis alienis ex pietate, puta in auxilium
indigentium et miserorum et hoc est
religiosum, secundum illud Iac. I, 27. —
religio munda et immaculata apud Deum et
patrem haec est : visitare pupillos et viduas
in tribulatione eorum. Et hoc modo
apostolus hic loquitur. Ultimo autem
ostendit apostolus meritum eius, quare hoc
sibi debeatur, dicens etenim ipsa quoque
multis astitit et mihi ipsi. Is. III, 10. — dicite
iusto quoniam bene, retributio enim
manuum eius fiet ei. Matth. V, 7. — beati
misericordes, quoniam ipsi misericordiam
consequentur. Deinde mandat salutari
quasdam alias personas sibi coniunctas,
dicens salutate Priscam et aquilam, qui erat
vir Priscae, sed mulierem praeponit, forte
propter maiorem fidei devotionem,
adiutores meos in Christo Iesu, id est in fide
Christi praedicanda. Apud enim eos
Corinthi hospitabatur, ut habetur Act.
XVIII, 2 s. Qui pro anima mea suas
cervices supposuerunt, id est seipsos mortis
periculo exposuerunt pro vita mea
conservanda, quod est indicium maximae
charitatis. Io. XV, 13. — maiorem hac
dilectionem nemo habet, ut animam suam
ponat quis pro amicis suis. Hoc autem
videtur factum fuisse Corinthi, ubi Paulus
persecutionem est passus, sicut habetur Act.
XVIII, 6. Vel forte melius dicendum est
quod alii se periculo pro apostolo
exposuerunt. Nam illud quod legitur Act.
XVIII, 2, factum fuit quando Prisca et
aquila de Roma recedentes Corinthum
venerunt, ut ibidem dicitur. Sed hoc
scribebat apostolus quando adhuc
aestimabat eos esse Romae. Vita autem
apostoli, non tam sibi quam aliis necessaria
erat, secundum illud Phil. I, v. 24. —
permanere autem in carne necessarium
propter vos. Et ideo subdit quibus non
solum ego gratias ago, sed et cunctae
choses sur lesquelles il veut que cette
recommandation soit prise en considération :
La première, c’est qu’on la reçoive avec
honneur; aussi dit-il : 2 afin que vous la
receviez dans le Seigneur, c’est-à-dire pour
l’amour de Dieu. D’une manière digne des
saints, c’est-à-dire ainsi qu’il convient de
recevoir les saints, selon cette parole de
Matthieu : "Qui reçoit un juste en tant que
juste recevra une récompense de juste "
Quelques manuscrits1109
lisent : "assez
dignement", c’est-à-dire convenablement,
mais cette version ne concorde pas avec le
grec. La seconde, c’est de l’aider avec
sollicitude; aussi <l’Apôtre> ajoute-t-il : et
que vous l’assistiez, c’est-à-dire en lui
apportant votre conseil et votre secours en
toute affaire où elle aurait besoin de vous. Car
peut-être avait-elle quelque affaire à traiter à
la cour de César <Néron>.
1196. — Objection. Il semble que <l’Apôtre>
dit dans sa première épître aux
Thessaloniciens : "Nous vous exhortons à
vous occuper de ce qui vous est propre ",
autrement dit : Ne vous immiscez pas dans les
affaires d’autrui.
Réponse. On peut prêter assistance à autrui
dans ses affaires de deux manières
A. D’abord, à la manière du siècle, c’est-à-
dire en vue de la faveur des hommes ou du
profit, et cette assistance ne convient pas aux
serviteurs de Dieu : "Quiconque est enrôlé au
service de Dieu ne s’embarrasse point dans
les affaires du siècle, afin de satisfaire celui à
qui il s’est donné."
B. Puis, on prête assistance à autrui dans ses
affaires par piété, par exemple en secourant
les indigents et les malheureux; ce qui est un
acte religieux1110
, selon ces paroles de Jacques
"La religion pure et sans tache devant Dieu le
Père, la voici Visiter les orphelins et les
veuves dans leurs tribulations, et se garder
sans tache à l’écart de ce siècle." Et c’est dans
ce sens que <l’Apôtre> parle ici.
1197. — Enfin, <l’Apôtre> montre le mérite
<de Phoebé>, qui lui donne droit à cette
1109
Voir notamment dans le codex Fuldensis; dans Glosa in Rom. XVI, 2 (GPL, 1527 D-1528 A), sous
le nom d’Haymon, Expo sitio in epistolam ad Romanos XVI, 2 (PL 117, 503 D). 1110
Lieux parallèles : Somme Théologique 2a-2ae, Q. 187, a. 2; Q. 188, a. 2, sol. 2.
Ecclesiae gentium : quarum sum apostolus
et doctor I Tim. II, 7. — doctor gentium in
fide et veritate. Et etiam salutate
domesticam eorum Ecclesiam. Habebant
enim in domo sua multos fideles
congregatos. Deinde vult alium salutari sibi
dilectione coniunctum, dicens salutate
Ephenetum dilectum mihi, qui est primitivus
Asiae in Christo. Primus enim in tota Asia
fuit ad fidem Christi conversus, quod erat ei
ad magnam dignitatem, Hebr. XII, 22 s. :
accessistis ad Ecclesiam primitivorum, qui
conscripti sunt in caelis. Tunc autem erat
Romae. Deinde dicit salutate Mariam, quae
multum laboravit in vobis, ad hoc ut eos ad
concordiam revocaret, quae cum hoc facere
non posset, significavit apostolo. Sap. c. III,
15. — bonorum laborum gloriosus est
fructus. Deinde dicit salutate Andronicum et
Iuniam, quos, primo, describit ex genere,
cum dicit cognatos meos. In quo ostendit
eos fuisse Iudaeos, de quibus supra c. IX, 3.
— qui sunt cognati mei secundum carnem.
Secundo ex passione pro Christo suscepta,
dicens et concaptivos meos. Fuerant enim
aliquando cum apostolo Christi incarcerati.
2 Co XI, 23. — in carceribus abundantius.
Tertio ex auctoritate, cum dicit qui sunt
nobiles in apostolis, id est nobiles inter
praedicatores, secundum illud Prov. ult. :
nobilis in portis vir eius. Quarto ex tempore,
cum dicit et ante me fuerunt in Christo Iesu.
Prius enim fuerunt conversi quam ipse
apostolus et ex hoc eis maior reverentia
debebatur. I Tim. V, 1. — seniorem te ne
increpaveris, sed obsecra ut patrem. Deinde
dicit salutate ampliatum dilectum meum in
domino, scilicet dilectione charitatis, quae
est in Christo. Phil. I, 8. — testis est mihi
Deus, quomodo cupiam omnes vos esse in
visceribus Christi. Deinde dicit salutate
Urbanum adiutorem nostrum in Christo,
scilicet in praedicatione fidei, Prov. XVIII,
19. — frater qui adiuvatur a fratre, et
cetera. Et Stachyn dilectum meum, quos
coniungit, quia forte simul habitabant, vel
aliqua alia necessitudine erant coniuncti.
Deinde dicit salutate Apellen, probum in
assistance, en disant : car elle en a elle-même
assisté un grand nombre, et moi en
particulier. — Il est écrit dans <le livre
d’>Isaïe "Dites au juste qu’il est heureux, car
il recevra le salaire de ses mains1111
." Et dans
<l’évangile de> Matthieu "Bien heureux les
miséricordieux, parce qu’ils obtiendront eux-
mêmes miséricorde."
1198. — <L’Apôtre> recommande ensuite de
saluer quelques autres personnes qui lui sont
unies, en disant : Saluez Prisca et Aquilas, qui
était l’époux de Prisca; mais il nomme
d’abord l’épouse, sans doute à cause de la
plus grande ferveur de sa foi; mes
coopérateurs dans le Christ Jésus, c’est-à-dire
dans la prédication de la foi du Christ. C’était
en effet chez eux qu’il recevait l’hospitalité à
Corinthe, comme on le lit dans les Actes.
1199. — 4 Qui ont exposé leurs têtes pour ma
vie, c’est-à-dire qui se sont exposés eux-
mêmes au péril de leur mort pour me sauver
la vie, ce qui est une preuve de très grande
charité : "Personne n’a de plus grand amour
que celui qui donne sa vie pour ses amis "
Cela semble avoir eu lieu à Corinthe, où Paul
a souffert la persécution, comme on le voit
dans les Actes. Ou bien, il vaut mieux peut-
être dire que d’autres s’exposèrent au danger
pour l’Apôtre, car ce qu’on lit au chapitre 18
des Actes se passa lorsque Prisca et Aquilas
s’éloignèrent de Rome pour venir à Corinthe,
ainsi qu’on le rapporte au même endroit. Mais
l’Apôtre écrivait cela quand il croyait encore
qu’ils étaient à Rome. Or la vie de l’Apôtre
n’était pas aussi nécessaire à lui-même qu’aux
autres, selon ce passage de l’épître aux
Philippiens : "Demeurer dans la chair <est>
chose nécessaire pour vous." Et c’est
pourquoi <l’Apôtre> ajoute : à qui je rends
grâces, non pas moi seulement, mais aussi
toutes les Eglises des nations païennes, dont
je suis l’Apôtre et le docteur : "J’ai été établi
moi-même prédicateur et Apôtre (je dis la
vérité, je ne mens point), docteur des nations
dans la foi et la vérité." — Et <saluez> aussi
l’Eglise qui est dans leur maison. Ils avaient,
en effet, dans leur maison plusieurs fidèles
qui se réunissaient.
1111
Is 3, 10 a et 11 b. Le verset I lb s’applique, selon Isaïe, à l’impie et non au juste.
Christo, id est approbatum in Christo forte
per aliquas tribulationes. Iob c. XXIII, 10.
— probavit me quasi aurum quod per ignem
transit. Deinde dicit salutate omnes qui sunt
ex domo, id est ex familia Aristoboli, in
cuius domo multi fideles erant congregati,
quem non salutat, quia forte ex aliqua causa
erat absens. Deinde dicit salutate
Herodionem cognatum meum, qui ex hoc
ipso dicitur fuisse Iudaeus. Deinde dicit
salutate omnes qui sunt ex domo Narcissi,
qui dicitur fuisse presbyter et peregrinabatur
per deserta loca ut fideles Christi
confortaret. Unde quia tunc eum absentem
noverat esse apostolus non mandat eum
salutari, sed familiam eius. Erant tamen in
eius familia aliqui infideles, et ideo ad
discretionem subdit qui sunt in domino, quia
solos fideles salutari mandat. II Io. V, 10. —
si quis venit ad vos, et hanc doctrinam non
affert, nolite recipere eum in domum, nec
ave dixeritis ei. Deinde dicit salutate
Tryphaenam et Tryphosam quae
laboraverunt in domino, id est in ministerio
sanctorum, quod dominus sibi reputat fieri,
secundum illud Matth. XXV, 40. — quod
uni ex minimis meis fecistis, mihi fecistis.
Deinde dicit salutate Persidem charissimam
meam, quam scilicet apostolus propter eius
devotionem specialiter diligebat. Unde
subdit quae multum laboravit in domino,
scilicet exhortando alios et ministrando
sanctis, et etiam in paupertate et aliis
spiritualibus laboribus. 2 Co XI, 27. — in
laboribus, in ieiuniis, in vigiliis, et cetera.
Deinde dicit salutate Rufum electum in
domino, id est, in gratia Christi, Eph. I, 4. —
elegit nos in ipso ante mundi
constitutionem, et matrem eius, scilicet
carne, et meam, quia fuit eius mater
beneficio. Aliquando enim servierat
apostolo, licet tunc Romae non esset. I Tim.
V, 2. — anus ut matres, iuvenculas ut
sorores in omni castitate. Deinde dicit
salutate Asyncritum, Hermem, Patrobam,
Hermam et qui cum eis sunt fratres, quos
simul salutat, quia simul concorditer
habitabant. Ps. LXVII, v. 6. — qui habitare
1200. — Il veut ensuite qu’on salue un autre
<fidèle> qui lui est uni par l’affection, en
disant : Saluez Epénète, mon bien-aimé, qui
est les prémices de l’Asie pour le Christ, car il
fut le premier dans toute l’Asie à se convertir
à la foi du Christ, ce qui était pour lui un
grand titre d’honneur : "Vous vous êtes
approchés de la montagne de Sion, de la cité
du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste,,
d’une réunion de myriades d’anges, de
l’Eglise des premiers-nés qui sont inscrits
dans les cieux, d’un Dieu juge de tous, et des
esprits des justes qui ont été rendus parfaits, et
de Jésus médiateur d’une Alliance nouvelle,
et d’une aspersion de sang plus éloquente que
celle d’Abel." <Epénète> était alors à Rome.
1201. — <L’Apôtre> ajoute : 6 Saluez Marie,
qui a beaucoup travaillé pour vous, c’est-à-
dire afin de les ramener à la concorde, et ne
pouvant y parvenir, elle le fit savoir à
l’Apôtre : "Le fruit des bons travaux est
glorieux."
1202. — Puis il dit : Saluez Andronicus et
Junie, qu’il décrit :
1. En premier lieu par leur naissance, lorsqu’il
dit : mes parents. Il montre par là qu’ils
étaient Juifs, et <de la race> de ceux dont il a
parlé plus haut : "qui sont mes parents selon
la chair."
2. En deuxième lieu, <il les décrit> par les
souffrances qu’ils ont endurées pour le Christ,
en disant : et compagnons de captivité, car ils
avaient été autrefois en prison avec l’Apôtre
du Christ : "Ayant enduré plus de prisons."
3. En troisième lieu, <il les décrit> par leur
autorité, lorsqu’il dit : qui sont illustres parmi
les Apôtres, c’est-à-dire illustres parmi les
prédicateurs1112
, selon cette parole des
Proverbes : "Illustre sera son époux aux
portes de la ville, quand il siégera avec les
sénateurs de la terre."
4. En quatrième lieu, <il les décrit> par
l’époque <de leur conversion>, lorsqu’il dit :
qui même ont été avant moi dans le Christ
Jésus. Car ils se convertirent avant l’Apôtre
lui-même, et pour cette raison on leur devait
un plus grand respect : "Ne réprimande pas un
1112
Voir Glosa in Rom. XVI, 7 (GPL, coI. 1528 C).
facit unius moris in domo. Deinde dicit
salutate Philologum et Iuliam, Nereum et
sororem eius Olympiadem, et omnes qui
cum eis sunt sanctos, id est in fide Christi
sanctificatos. 1 Co VI, 11. — abluti estis et
sanctificati estis. Deinde ostendit modum
quo se generaliter salutent, dicens salutate
invicem in osculo sancto, quod dicitur ad
differentiam osculi libidinosi, de quo dicitur
Prov. c. VII, 13. — apprehensum
deosculatur iuvenem. Et etiam dolosi, de
quo dicitur Prov. c. XXVII, 6. — meliora
sunt vulnera diligentis, quam fraudulenta
oscula inimici. Osculum autem sanctum est
quod in signum sanctae Trinitatis datur.
Cant. I, 1. — osculetur me osculo oris sui.
Exinde autem mos in Ecclesia inolevit ut
fideles inter Missarum solemnia invicem
dent oscula pacis. Deinde salutat eos ex
parte aliarum Ecclesiarum, dicens salutant
vos omnes Ecclesiae Christi, id est, in
nomine et fide Christi congregatae quia
omnes vestram salutem optant et pro vobis
orant. Iac. ult. : orate pro invicem ut
salvemini.
vieillard, mais demande-lui avec obsécration
comme <à ton> père."
1203. — Il dit ensuite : 8 Saluez Ampliatus,
qui m’est très cher dans le Seigneur, c’est-à-
dire par l’affection de la charité qui est dans le
Christ : "Dieu m’est témoin combien je
soupire après vous tous dans les entrailles du
Christ."
1204. — <L’Apôtre> ajoute : Saluez Urbain,
notre coopérateur dans le Christ, c’est-à-dire
<notre coopérateur> dans la prédication de la
foi : "Un frère qui est aidé par son frère est
comme une cité forte." — Et Stachys, mon
bien-aimé. <L’Apôtre> l’associe à Urbain,
<soit> parce qu’ils habitaient peut-être
ensemble, soit parce qu’ils étaient unis pour
quelque autre nécessité.
1205. — <L’Apôtre> continue : 10 Saluez
Apelle, qui a fait ses preuves dans le Christ,
c’est-à-dire qui a été éprouvé dans le <service
du> Christ, peut-être par quelques tribulations
: "Il m’a éprouvé1113
comme l’or qui passe par
le feu."
1206. — <L’Apôtre> poursuit : Saluez tous
ceux de la maison, c’est-à-dire de la famille
d’Aristobule, dans la maison duquel étaient
réunis un grand nombre de fidèles. Il ne le
salue pas, parce que peut-être était-il absent
pour quelque motif. Il dit ensuite : Saluez
Hérodion, mon parent, indiquant par là qu’il
était Juif. Saluez tous ceux qui sont de la
maison de Narcisse, qui, dit-on, était prêtre et
parcourait les lieux écartés pour affermir les
fidèles du Christ Aussi l’Apôtre, le sachant
absent, ne le fait pas saluer, mais sa famille.
Cependant, il y avait dans sa famille quelques
infidèles, aussi l’Apôtre ajoute-t-il par
discrétion : qui sont au Seigneur, car il ne fait
saluer que les fidèles : "Si quelqu’un vient à
vous et n’apporte point cette doctrine, ne le
recevez pas dans votre maison et abstenez-
vous de le saluer."
1207. — Il dit ensuite : 12 Saluez Tryphène et
Tryphose, qui ont travaillé dans le Seigneur,
c’est-à-dire au service des saints, service que
le Seigneur regarde comme étant rendu à lui-
même, selon cette parole de Matthieu : "Ce
1113
Voir Glosa in Rom. XVI, 10 (GPL, col. 1528 C).
que vous avez fait à l’un de mes plus petits,
c’est à moi que vous l’avez fait1114
." —
Saluez ma très chère Persis, à savoir celle que
l’Apôtre affectionnait spécialement à cause de
sa dévotion1115
aussi ajoute-t-il : qui a
beaucoup travaillé dans le Seigneur, à savoir
en exhortant les autres et en servant les saints,
même dans la pauvreté et les autres travaux
spirituels." Dans les travaux, dans les jeûnes,
dans les veilles, etc.1116
"
1208. — Saluez Rufus, l’élu dans le Seigneur,
c’est-à-dire dans la grâce du Christ — "Il
nous a élus en lui avant la fondation du
monde, afin que nous soyons saints et
immaculés en sa présence, dans la charité " —
et sa mère, c’est-à-dire selon la chair, qui est
aussi la mienne, parce qu’elle fut sa mère par
ses bienfaits. En effet, elle avait autrefois
servi l’Apôtre, bien qu’alors elle ne fût pas à
Rome : "Exhorte les jeunes hommes, comme
tes frères, les femmes âgées, comme tes
mères, les jeunes, comme tes sœurs, en toute
chasteté."
1209. — Il ajoute : 14 Saluez Asyncrite,
Phiégon, Hermès, Patrobas, Hermas, et les
frères qui sont avec eux; il les salue ensemble,
parce qu’ils habitaient ensemble et en bon
accord : "Lui qui fait habiter d’un seul cœur
dans sa maison."
1210. — Il ajoute : 15 Saluez Philologue et
Julie, Nérée et sa sœur, et Olympas, et tous
les saints qui sont avec eux, c’est-à-dire qui
ont été sanctifiés dans la foi du Christ "Mais
vous avez été lavés, mais vous avez été
sanctifiés."
1211. — <L’Apôtre>1117
montre ensuite le
mode par lequel ils se saluent d’une manière
générale, en disant : 16 Saluez-vous
mutuellement d’un saint baiser, à la
différence du baiser libidineux, dont il est dit
au livre des Proverbes : "Et se jetant sur le
jeune homme, elle l’embrasse." Et aussi du
1114
Mt 25, 40. Ce texte abrégé par rapport à la Vulgate semble emprunté à une antienne du commun
du Graduel romain (lundi après le premier dimanche de carême), qui vers le xr siècle a remplacé
l’antienne psalmique (Ps 3). Voir M. -Ph. SCHUERMANS, Parole de Dieu et rite sacramentel. Etude
critique des antiennes de communion nêotestamentaires, p. 42, n. 1. 1115
Lieu parallèle Somme Théologique 2a-2 Q. 82. 1116
2 Co 11, 27 (citation non littérale, plus proche de 2 Co 6, 5). 1117
Lieux parallèles II Ad Cor. 13, 12, lect. 3 (éd. Marietti, n 1 Ad Thes. 5, 26, lect. 2 (éd. Marietti, n
139).
baiser trompeur : "Les baisers que fait celui
qui aime valent mieux que les baisers
trompeurs de l’ennemi " Mais le saint baiser
est celui qu’on donne en signe de la sainte
Trinité : "Qu’il me baise d’un baiser de sa
bouche." De là cette coutume implantée dans
l’Eglise, que les fidèles se donnent
mutuellement le baiser de paix, au cours de la
sainte messe.
1212. — III. Enfin <l’Apôtre> les salue de la
part, des autres Eglises, en disant : Toutes les
Eglises du Christ vous saluent, c’est-à-dire les
Eglises rassemblées au nom et dans la foi du
Christ, parce que toutes souhaitent votre salut
et prient pour vous "Priez les uns pour les
autres, afin que vous soyez sauvés."
Lectio 2 Leçon 2 [Versets 17 à 27]
[n° 1214] 17 Mais je vous prie, frères,
d’observer ceux qui causent des dissensions et
des occasions de chute contre la doctrine que
vous avez apprise, et détournez-vous d’eux.
[n° 1218] 18 Car ces sortes de gens ne servent
pas le Christ Notre Seigneur, mais leur ventre,
et par de douces paroles et des bénédictions
ils séduisent les cœurs des innocents.
[n° 1219] 19 Votre obéissance s’est fait
connaître en tout lieu. Je me réjouis donc à
votre sujet, mais je veux que vous soyez sages
dans le bien et simples dans le mal.
[n° 1220] 20 Le Dieu de la paix écrasera
Satan sous vos pieds rapidement. Que la grâce
de Notre Seigneur Jésus-Christ soit avec
vous!
[n° 1221] 21 Timothée, mon coopérateur,
vous salue, ainsi que Lucius, Jason et Sosi
patros, mes parents.
22 Je vous salue dans le Seigneur, moi
Tertius, qui ai écrit cette lettre,
23 Caïus, mon hôte, et toute l’Eglise, vous
saluent. Eraste, le trésorier de la ville, vous
salue, ainsi que Quartus, <notre> frère.
[n° 1222] 24 Que la grâce de Notre Seigneur
Jésus-Christ soit avec vous tous. Amen.
[n° 1223] 25 Et à celui q est puissant pour
vous affermir selon mon Evangile et la
prédication de Jésus-Christ, selon la
révélation du mystère tu aux temps éternels,
[n° 1226] 26 qui maintenant est révélé par les
écrits prophétiques, selon l’ordre du Dieu
éternel, en vue de l’obéissance de la foi, <et
qui est> connu parmi toutes les nations;
[n° 1227] 27 à Dieu <qui> seul <est> sage,
par Jésus-Christ, (à qui) <reviennent>
honneur et gloire dans les siècles des siècles.
Amen.
[86232] Super Rom., cap. 16 l. 2 Postquam
apostolus mandavit quos salutarent hic
ostendit eis quos debeant vitare. Et circa hoc
tria facit. Primo docet quos debeant vitare;
secundo rationem assignat, ibi huiusmodi
enim, etc.; tertio promittit eis divinum
auxilium ad hoc implendum, ibi Deus autem
pacis, et cetera. Et quia illi quos vitari
volebat fraudulenter incedebant decipientes
sub specie pietatis, secundum illud Matth.
VII, 15. — veniunt ad vos in vestimentis
ovium, intrinsecus autem sunt lupi rapaces;
ideo, primo, inducit eos ad cautelam
habendam, dicens rogo autem vos, fratres,
ut observetis eos qui dissensiones et
offendicula praeter doctrinam quam vos
didicistis, faciunt. Ubi, primo,
considerandum est quod observare, nihil
aliud est quam diligenter considerare, quod
quidem quandoque in bono sumitur,
quandoque in malo. In malo quidem
sumitur, quando aliquis diligenter considerat
conditionem et processum alicuius ad
nocendum, secundum illud Ps. XXXVI, 12.
— observabit peccator iustum et stridebit
super eum dentibus suis. Et Lc. XIV, v. 1
dicitur : et ipsi observabant eum. In bono
autem accipitur, uno modo, quando quis
considerat praecepta Dei ad faciendum. Ex.
XXIII, 21. — observa igitur et audi vocem
eius. Alio modo quando diligenter
considerat bonos ad imitandum, secundum
illud Phil. III, 17. — imitatores mei estote,
fratres, et observate eos qui ita ambulant,
sicut habetis formam nostram. Tertio
observantur mali ad cavendum, et ita
accipitur hic. Erant enim quidam ad fidem
conversi ex Iudaeis, qui praedicabant legalia
esse observanda, et ex hoc, primo, quidem
in Ecclesia sequebantur dissensiones et
sectae, dum quidam eorum errori
1213. — I. Après avoir recommandé ceux
qu’ils devaient saluer [n° 1193], l’Apôtre leur
montre ceux qu’ils doivent éviter. Et dans ce
dessein il fait trois choses
A) Il montre d’abord qui ils doivent éviter.
B) Puis, il en donne la raison [n° 1218] Car
ces sortes de gens, etc.
C) Enfin, il leur promet le secours divin pour
accomplir cette recommandation [n° 1220] :
20 Le Dieu de la paix, etc.
1214. — A. Et, parce que ceux qu’il voulait
éviter s’avançaient frauduleusement,
séduisant sous une apparence de piété, selon
ces paroles de Matthieu : "Gardez-vous des
faux prophètes qui viennent à vous sous des
vêtements de brebis, tandis qu’au-dedans ce
sont des loups rapaces ", <l’Apôtre> les
exhorte tout d’abord à avoir de la prudence,
en disant : 17 Mais je vous prie, frères,
d’observer ceux qui causent des dissensions
et des occasions de chute contre la doctrine
que vous avez apprise.
1215. — Il faut d’abord remarquer ici
qu’observer, ce n’est pas autre chose que
considérer avec attention, ce qui est pris
parfois <dans le sens du> bien, parfois <dans
le sens du> mal.
On le prend <dans le sens du> mal, quand on
considère avec attention la condition et le
progrès d’autrui afin de lui nuire, selon cette
parole <du psalmiste> : "Le pécheur
observera le juste et grincera des dents contre
lui " Et il est dit dans <l’évangile de> Luc : "Il
arriva que comme Jésus était entré un jour de
sabbat dans la maison d’un chef des
pharisiens pour y manger du pain, ceux-ci
l’observaient"
On le prend <dans le sens du> bien, soit
quand on considère les préceptes de Dieu en
vue de les accomplir : "Observe et écoute sa
voix "; soit quand on considère attentivement
adhaererent, alii vero in vera fide
persisterent. Gal. V, 20. — dissensiones,
sectae, et cetera. Secundo sequebantur
offendicula et scandala, de quibus supra
XIV actum est, dum quidam alios
iudicarent, et alii alios spernerent, qui
dissensiones et offendicula faciunt. Is. c.
LVII, 14. — auferte offendicula de medio
populi mei. Dicit autem praeter doctrinam
quam vos didicistis a veris Christi apostolis,
ut ostendat quod huiusmodi dissensiones et
scandala ex falsitate doctrinae proveniebant.
Gal. I, 9. — si quis vobis evangelizaverit
praeter id quod accepistis, anathema sit.
Secundo, monet ut cogniti vitentur, dicens
et declinate ab illis, id est eorum doctrinam
et consortia fugiatis. Ps. CXVIII, v. 115. —
declinate a me, maligni, et scrutabor
mandata Dei mei. Deinde cum dicit
huiusmodi enim, etc., assignat eius quod
dixerat duas rationes, quarum prima sumitur
ex parte eorum quos vult vitari. Et primo
describit eorum intentionem, dicens
huiusmodi enim homines non serviunt
Christo domino, sed suo ventri. Non enim
praedicabant propter gloriam Christi, sed
propter quaestum, ut suum ventrem
implerent. Phil. III, 18. — multi ambulant
quos saepe dicebam vobis, nunc autem et
flens dico, inimicos crucis Christi, quorum
Deus venter est. Secundo describit eorum
deceptionem, dicens et per dulces sermones
seducunt corda innocentium, id est,
simplicium et imperitorum. Prov. XIV, 15.
— innocens credit omni verbo. Per dulces
sermones in quibus sanctitatem praetendunt,
secundum illud Ps. XXVII, v. 3. — qui
loquuntur pacem cum proximo suo, mala
autem in cordibus eorum. Et benedictiones,
quibus scilicet benedicunt et adulantur illis
qui eos sequuntur. Is. III, v. 12. — popule
meus, qui beatum te dicunt, ipsi te
decipiunt. Mal. II, 2. — maledicam
benedictionibus vestris. Secundam rationem
assignat ex conditione Romanorum, qui
faciles se exhibebant ad sequendum bonum
et malum. Unde primo commendat eos de
facilitate ad bonum, dicens vestra enim
obedientia, qua de facili fidei obedistis, in
omni loco divulgata est, propter dominium
les bons en vue de les imiter, selon cette
parole <de l’Apôtre> aux Philippiens : "Mes
frères, soyez mes imitateurs, et observez ceux
qui marchent selon le modèle que vous avez
en nous " Enfin on observe les méchants pour
s’en garder, et c’est dans ce sens que <le mot
"observer"> est pris ici.
1216. — Car il y avait quelques Juifs
convertis qui affirmaient qu’on était tenu aux
observances légales; ce qui entraînait
premièrement dans l’Eglise des dissensions et
des sectes, certains d’entre eux adhérant à leur
erreur, d’autres persistant dans la vraie foi :
"Or on connaît aisément les œuvres de la
chair, qui sont : la fornication, l’impureté,
l’impudicité, la luxure, les contestations, les
jalousies, les colères, les rixes, les
dissensions, les sectes, les envies, les
homicides, les ivrogneries, les débauches de
table, et autres choses semblables. Je vous le
dis, comme je l’ai déjà dit, ceux qui font de
telles choses n’obtiendront point le Royaume
de Dieu." Deuxièmement, cette affirmation
entraînait des occasions de chute et des
scandales, ce qui a déjà fait l’objet d’un
développement plus haut, au chapitre 14 [n°
1081 et 1131], les uns jugeant les autres, et les
autres méprisant ceux qui causent des
occasions de chute et des scandales : "Otez les
occasions de chute du milieu de mon peuple."
Et <l’Apôtre> ajoute : contre la doctrine que
vous avez apprise des véritables apôtres du
Christ, pour montrer que ces dissensions et
ces scandales provenaient de la fausseté de la
doctrine : "Si quelqu’un vous annonce un
évangile différent de celui que vous avez
reçu, qu’il soit anathème ! "
1217. — Puis, <l’Apôtre> avertit qu’après les
avoir reconnus on les évite, en disant : et
détournez-vous d’eux, c’est-à-dire fuyez leur
doctrine et leur compagnie "Détournez-vous
de moi, méchants, et je scruterai les
commandements de mon Dieu."
1218. — B. Lorsqu’il ajoute : 18 Car ces
sortes de gens, etc., <l’Apôtre> donne deux
raisons à ce qu’il a dit
1. La première d’entre elles est prise du côté
de ceux qu’il veut qu’on évite [n° 1219].
Il commence par exposer leur intention, en
disant : Car ces sortes de gens ne servent pas
quod tunc Romani obtinebant super alias
nationes. Unde quod a Romanis fiebat, de
facili divulgabatur ad alios. Supra I, 8. —
fides vestra in universo mundo annuntiatur.
Gaudeo igitur in vobis, quia scilicet fidei
obedistis, et hoc in charitate, de qua dicitur
1 Co XIII, 6 quod non gaudet super
iniquitate, congaudet autem veritati.
Secundo reddit eos cautos contra malum,
dicens sed volo vos esse sapientes in bono,
ut scilicet ei quod bonum est inhaereatis, I
Thess. ult. : quod bonum est tenete; et
simplices in malo, ne scilicet per aliquam
simplicitatem declinetis ad malum, ut talis
sit vobis simplicitas, quod nullum decipiatis
in malum. Matth. X, 16. — estote prudentes
sicut serpentes, et simplices sicut columbae.
E converso de quibusdam dicitur Ier. IV, 22.
— sapientes sunt ut faciant mala, bene
autem facere nesciunt. Deinde cum dicit
Deus autem pacis, etc., promittit eis
divinum auxilium contra huiusmodi
deceptores. Et primo ponitur promissio, cum
dicit Deus autem pacis, scilicet auctor, qui
dissensiones odit quas isti faciunt, conteret
Satanam, id est, Diabolum qui per istos
pseudoapostolos vos decipere conatur, sub
pedibus vestris, quia scilicet per vestram
sapientiam eum vincetis. Et hoc fiet
velociter, scilicet in adventu meo. Lc. X, 19.
— ecce dedi vobis potestatem calcandi
supra serpentes et scorpiones et omnem
virtutem inimici. Mal. ult. : calcabitis
impios, cum fuerint sicut cinis sub planta
pedum vestrorum. Secundo ponitur oratio ad
hoc obtinendum, cum dicit gratia domini
nostri Iesu Christi sit vobiscum, quae
scilicet sufficit ad vos tuendos. 2 Co XII, 9.
— sufficit tibi gratia mea. Deinde cum dicit
salutat vos, etc., salutat eos ex parte
aliorum, dicens salutat vos Timotheus
adiutor meus, scilicet in praedicatione
Evangelii. 1 Co IV, 17. — misi ad vos
Timotheum, qui est filius meus charissimus
et fidelis, et cetera. Addit autem et Lucius et
Iason et Sosipater, cognati mei, qui Iudaei
erant, scilicet vos salutant. Erat autem
quidam notarius Pauli nomine tertius, cui
Paulus concessit ut ex sua persona Romanos
salutaret. Unde subditur ego tertius qui
le Christ notre Seigneur, mais leur ventre. En
effet, ils ne prêchaient pas pour la gloire du
Christ, mais pour leur profit, afin de satisfaire
leur ventre : "Il y en a beaucoup dont je vous
ai souvent parlé (et je vous en parle encore
avec larmes), qui marchent en ennemis de la
croix du Christ, dont la fin sera la perdition,
dont Dieu est le ventre, qui mettent leur gloire
dans leur ignominie et qui n’ont de goût que
pour les choses de la terre."
Puis, il expose leur tromperie, en disant : et
par de douces paroles et des bénédictions ils
séduisent les cœurs des innocents, c’est-à-dire
des simples et des inexpérimentés :
"L’innocent croit à toute parole." — par de
douces paroles, par lesquelles ils affichent
leur sainteté, selon ces paroles du <psalmiste>
: "<Ces pécheurs> qui parlent de paix avec
leur prochain et qui ont le mal dans leurs
cœurs." — et des bénédictions, c’est-à-dire
par lesquelles ils bénissent et flattent ceux qui
les suivent : "Mon peuple, ceux qui te disent
heureux, ceux-là mêmes te trompent." Et
encore "Je maudirai vos bénédictions."
1219. — 2. Il donne la seconde raison en se
fondant sur la disposition des Romains, qui se
montraient enclins à suivre le bien et le mal.
Aussi commence-t-il par les louer pour leur
inclination au bien, en disant : 19 Votre
obéissance, par laquelle vous obéissez
facilement à la foi, s'est fait connaître en tout
lieu, à cause du pouvoir que les Romains
avaient alors sur toutes les autres nations, en
sorte que ce qui se faisait par eux parvenait
facilement à la connaissance de tous : "Votre
foi est annoncée dans le monde entier." — Je
me réjouis donc à votre sujet, à savoir parce
que vous obéissez à la foi, et cela dans la
charité, dont il est dit qu’"elle ne se réjouit
pas de l’iniquité, mais [qu'] elle met sa joie
dans la vérité."
Ensuite il les rend prudents contre le mal, en
disant : mais je veux que vous soyez sages
dans le bien, c’est-à-dire que vous adhériez à
ce qui est bien : "Retenez ce qui est bon " —
et simples dans le mal, c’est-à-dire que par
une certaine simplicité vous ne vous tourniez
pas vers le mal, en sorte que votre simplicité
soit telle que vous ne trompiez personne pour
le mal : "Soyez prudents comme des serpents
scripsi hanc epistolam, saluto vos in
domino. Deinde dicit salutat vos Caius
hospes, cui scribitur Ioannis tertia canonica,
in qua commendatur de charitate, quam
exhibebat sanctis. Et universa Ecclesia,
scilicet quae erat in domo eius congregata,
vel quae erat in illa provincia. Deinde dicit
salutat vos Erastus, arcarius civitatis, qui
scilicet custodiebat arcam communem, id
est communes redditus civitatis, et quidam
frater, id est, fidelis, nomine quartus.
Deinde salutat eos ex parte sua, dicens
gratia domini nostri Iesu Christi sit cum
omnibus vobis. Amen. Et finit epistolam
cum gratiarum actione, dicens ei autem,
scilicet Deo qui est Trinitas, qui potens est
vos confirmare, I Petr. ult. : modicum
passos ipse perficiet, confirmabit
solidabitque. Et hoc in fide quae est iuxta
Evangelium meum id est secundum
Evangelium quod ego praedico. 1 Co c. XV,
11. — sive ego, sive illi sic praedicavimus
et sic credidistis. Et etiam secundum
praedicationem Iesu Christi, qui primo
Evangelium praedicavit, secundum illud
Hebr. c. II, 3. — quae cum initium
accepisset enarrari per dominum. Unde
Matth. IV, 23 dicitur, quod circuibat Iesus
praedicans Evangelium regni. Subditur
autem, in revelatione mysterii, id est,
secreti, quod quidem potest referri ad id
quod dixerat iuxta Evangelium meum; vel
quia in ipso Evangelio revelatur secretum
incarnationis divinae, secundum illud supra
I, 17. — iustitia Dei revelatur in eo; vel
quia ipsi apostolo est Evangelium
revelatum. 1 Co II, 10. — nobis autem
revelavit Deus per spiritum suum. De hoc
autem secreto dicitur Is. XXIV, 16. —
secretum meum mihi. Vel potest melius hoc
referri ad hoc quod dixerat confirmare,
quasi dicat : Deus potest vos confirmare in
Evangelio meo et praedicatione, et hoc
secundum revelationem mysterii, id est,
secreti, scilicet de conversione gentium,
sicut habetur Eph. III, 8 s. : mihi autem
omnium sanctorum minimo data est gratia
et simples comme des colombes1118
."
Inversement il est dit de certains qu’"ils sont
sages pour faire le mal, mais ne savent pas
faire le bien."
1220. — C. En disant : 20 Dieu de la paix,
etc., <l’Apôtre> leur promet le secours divin
contre de tels trompeurs.
Et il expose premièrement sa promesse,
lorsqu’il dit : Le Dieu de la paix, c’est-à-dire
son auteur, qui hait les dissensions que ceux-
ci causent, écrasera Satan, c’est-à-dire le
diable, qui s’efforce de vous tromper par ces
faux apôtres, sous vos pieds, à savoir, parce
vous le vaincrez par votre sagesse. Et cela ce
fera rapidement, c’est-à-dire à mon arrivée
"Voilà que je vous ai donné le pouvoir de
fouler aux pieds les serpents et les scorpions,
et toute la puissance de l’ennemi." Et encore :
"Vous foulerez aux pieds les impies,
lorsqu’ils seront comme de la cendre sous la
plante de vos pieds."
Puis il fait une prière pour obtenir cela,
lorsqu’il dit : Que la grâce de Notre Seigneur
Jésus-Christ soit avec vous, c’est-à-dire celle
qui suffit à vous protéger : "Ma grâce te suffit,
car ma puissance se déploie dans la faiblesse."
1221. — II. Lorsque <l’Apôtre> dit ensuite :
21 vous salue, il les salue de la part des
autres. Timothée, dit-il, mon coopérateur dans
la prédication de l’Evangile, vous salue. <Et
dans sa première épître aux Corinthiens,
l’Apôtre écrit> "C’est pourquoi je vous ai
envoyé Timothée, qui est mon fils bien-aimé,
et fidèle dans le Seigneur; il vous rappellera
mes voies en Jésus-Christ, selon ce, que
j’enseigne partout dans toutes les Eglises." Et
il ajoute ainsi que Lucius, Jason et Sosipatros,
mes parents, qui étaient Juifs, <lesquels> vous
saluent également. Il y avait encore un
secrétaire de Paul, appelé Tertius, auquel il
permit de saluer en son propre nom1119
les
Romains; aussi ajoute-t-il : 22 moi Tertius,
qui ai écrit cette lettre, je vous salue dans le
seigneur. Il continue en disant : 23 Caïus,
mon hôte vous salue, celui à qui s’adresse la
rédaction de la troisième épître canonique de
Jean, dans laquelle <ce Caïus> est loué pour
1118
Mt 10, 16. Lieu parallèle : SuperMatth. 10, 16 (éd. Marietti, n 839-841). 1119
Voir Glosa in Rom. XVI, 22 (GPL, col. 1530 B).
haec in gentibus, illuminare omnes quae sit
dispensatio sacramenti, et cetera. Unde et
ipse subdit temporibus aeternis, quia
videlicet occultum erat apud homines quod
gentes essent convertendae ad fidem. Vocat
autem haec tempora aeterna quasi diu
durantia, quia a principio mundi hoc fuit
occultum, sicut et in Ps. LXXV, 4 dicitur :
illuminans tu mirabiliter a montibus
aeternis. Et potest dici quod tempora
aeterna dicuntur ipsa aeternitas, de qua
dicitur Is. LVII, v. 15. — excelsus et
sublimis habitans aeternitatem, ut sicut
simplex Dei essentia per quamdam
similitudinem dimensionibus corporalibus
describitur, secundum illud Iob c. XI, 9. —
longior terra mensura eius et latior mari, ita
et simplex eius aeternitas per tempora
aeterna designatur, inquantum omnia
tempora continet. Subdit autem quod,
scilicet mysterium, nunc patefactum est, de
conversione gentium, per Scripturas
prophetarum, id est, secundum quod
prophetae praedixerunt, ut patuit supra XV.
Unde ad Eph. c. III, 5 s. dicitur : aliis
generationibus non est agnitum filiis
hominum, sicut nunc manifestum est sanctis
apostolis eius et prophetis in spiritu esse
gentes cohaeredes, et cetera. Est autem
patefactum per operis impletionem ex
praecepto Dei. Unde secundum praeceptum
aeterni Dei, qui scilicet aeterno proposito ea
quae vult temporaliter facit, quod quidem
praeceptum Dei ad obeditionem fidei est in
cunctis gentibus, id est, ut omnes gentes
obediant fidei. Supra I, 5. — ad
obedientiam fidei in omnibus gentibus. Si
autem loquamur de mysterio incarnationis,
sic construenda est littera : mysterii,
inquam, temporibus aeternis taciti, quia
antea non erat ita manifestum. Quod,
inquam, mysterium nunc patefactum est per
Scripturas prophetarum, qui hoc
praedixerunt secundum praeceptum aeterni
Dei, qui voluit mysterium incarnationis
patefieri, et hoc ad obedientiam fidei in
cunctis gentibus. Mysterii, inquam, licet
taciti apud homines, tamen cogniti soli Deo
la charité envers les saints, et toute l’Église,
c’est-à-dire celle qui était rassemblée dans sa
maison, ou qui était dans cette province.
Eraste, le trésorier de la ville, c’est-à-dire
celui qui gardait la caisse commune, ou les
revenus communs de la ville, vous salue, ainsi
qu’un frère, c’est-à-dire un fidèle, appelé
Quartus.
1222. — Puis <l’Apôtre> les salue lui-même,
en disant : 24 Que la grâce de notre Seigneur
Jésus-Christ soit avec vous tous. Amen.
1223. — III. Enfui, <l’Apôtre> finit sa lettre
par l’action de grâces, en disant : 25 Et à
celui, c’est-à-dire à Dieu, lequel est Trinité,
qui est puissant pour vous affermir. <Il est
écrit> dans la première épître de Pierre :
"Mais le Dieu de toute grâce, qui nous a
appelés par le Christ Jésus à son éternelle
gloire, après que vous aurez souffert un peu
de temps, vous perfectionnera lui-même, vous
fortifiera et vous affermira." Et cela dans la
foi qui est selon mon Evangile, c’est-à-dire
selon l’Evangile que moi je prêche : "Soit
moi, soit eux, voilà ce que nous prêchons et
voilà ce que vous avez cru." Et aussi selon la
prédication de Jésus-Christ, qui le premier a
prêché l'Evangile, suivant cette parole de
l’épître aux Hébreux : "<Ce salut>, ayant été
annoncé par le Seigneur, <avec qui> il
commença d’être, nous a été garanti par ceux
qui l’ont entendu." Aussi est-il dit dans
<l’évangile de> Matthieu que "Jésus
parcourait toute la Galilée, enseignant dans
leurs synagogues, prêchant l'Evangile du
Royaume, et guérissant toute langueur et toute
infirmité parmi le peuple ".
1224. — <L’Apôtre> ajoute : selon la
révélation du mystère, c’est-à-dire du secret.
Ce mot peut se rapporter à ce qu’il vient de
dire : selon mon Evangile, soit1120
parce que
le secret de l’Incarnation divine est révélé
dans l’Evangile lui-même, selon ces paroles
dites plus haut : "la justice de Dieu se révèle,
<dans cet Evangile> "; soit parce que
l’Evangile a été révélé à l’Apôtre lui-même :
"C’est aussi ce que Dieu nous a révélé par son
Esprit." A propos de ce secret, il est dit dans
<le livre d’>Isaïe : "Et j’ai dit : mon secret est
1120
Sur les deux interprétations données, voir Gloni sn Rom. XVI, 25 (GPL, col. 1531 A).
sapienti, quia ipse solus hoc cognovit et
quibus hoc voluit revelare, quia, ut dicitur 1
Co II, 11. — quae sunt Dei, nemo novit nisi
spiritus Dei. Vel potest intelligi de eo qui
solus est sapiens, scilicet per essentiam,
sicut dicitur Matth. c. XIX, 17, et Mc. X,
18. — nemo bonus, nisi solus Deus. Nec
excluditur per hoc filius, quia eadem est
perfectio totius Trinitatis, sicut e converso
dicitur : nemo novit patrem nisi filius,
Matth. XI, 27. Non excluditur pater a notitia
sui ipsius. Subdit autem per Iesum
Christum; quod non sic intelligendum, quod
Deus pater sit sapiens per Iesum Christum;
quia cum Deo sit idem sapere quod esse,
sequeretur quod pater esset per filium, quod
est inconveniens; sed hoc referendum est ad
hoc quod supra dixerat : nunc patefactum
est, scilicet per Iesum Christum. Cui, Iesu
Christo, est honor et gloria, per reverentiam
totius creaturae, secundum illud Phil. II, 10.
— in nomine Iesu omne genu flectatur. Et
gloria, scilicet quantum ad plenam
divinitatem, sicut ibi subditur : et omnis
lingua confiteatur quia dominus Iesus
Christus in gloria est Dei patris. Et hoc non
ad tempus, sed in saecula saeculorum.
Hebr. c. ult. : Iesus Christus heri et hodie,
ipse in saecula. Addit autem ad
confirmationem veritatis : amen. Vel potest
sic construi : cogniti soli sapienti Deo, cui
per Iesum Christum est gloria, qui Deum
glorificavit, secundum illud Io. XVII, 4. —
ego clarificavi te super terram. Est autem
advertendum quod haec constructio est
defectiva, et est sic supplenda : ei qui potest,
etc., sit honor et gloria per Iesum Christum,
cui est honor et gloria. Si autem non sit ibi
ly cui, erit constructio plana.
pour moi, mon secret est pour moi, malheur à
moi." Ou bien, mieux vaut rapporter ce mot à
ce que l’Apôtre avait dit : affermir, comme
s’il disait : Dieu peut vous affermir selon mon
Evangile et ma prédication, et cela selon la
révélation du mystère, c’est-à-dire du secret
touchant la conversion des nations païennes,
comme on le lit dans son épître aux Ephésiens
: "A moi, le moindre des saints, a été donnée
cette grâce d’annoncer parmi les nations les
richesses incompréhensibles du Christ, et
d’éclairer tous les hommes touchant la
dispensation du mystère caché depuis les
siècles en Dieu qui a créé toutes choses, pour
que les Principautés et les Puissances célestes
aient maintenant connaissance, par le moyen
de l'Eglise, de la sagesse multiforme de Dieu,
selon le dessein éternel qu’il a accompli dans
le Christ Jésus Notre Seigneur, en qui nous
avons la hardiesse d’approcher avec confiance
par la foi en lui."
1225. — <L’Apôtre> ajoute : aux temps
éternels, à savoir parce qu’il était caché aux
yeux des hommes que les nations païennes se
convertiraient à la foi. Et il appelle ces temps
éternels, comme ayant duré long temps, parce
que cela fut caché depuis la création du
monde, comme le dit aussi ce verset du
psaume 75. — "Toi, tu illumines d’une façon
merveilleuse du haut des montagnes
éternelles." On peut dire que les temps
éternels sont l’éternité même, dont il est dit :
"Le Très-Haut, le sublime, celui qui habite
l’éternité " car de même que la simple1121
essence de Dieu est décrite en recourant à une
similitude prise dans les dimensions
matérielles, selon ce passage de Job : "Sa
mesure est plus longue que la terre et plus
large que la mer ", ainsi sa simple éternité1122
est également désignée par les temps éternels,
en tant qu’elle renferme tous les temps.
1226. — <L’Apôtre> dit ensuite qui, c’est-à-
dire le mystère, est maintenant révélé,
touchant la conversion des nations, par les
écrits prophétiques, c’est-à-dire comme les
prophètes l’ont annoncé, ainsi qu’on l’a
expliqué plus haut [n° 1158s]. D’où ce qui est
1121
Lieu parallèle Somme Théologique Ia, Q. 3. 1122
Lieu parallèle Somme Théologique Ia, Q. 10.
dit aux Ephésiens : "Mystère qui, dans les
autres générations n’a pas été découvert aux
enfants des hommes, comme il est maintenant
révélé par l’Esprit aux saints Apôtres et aux
prophètes, que les nations païennes sont
cohéritières, membres d’un même corps, et
participantes avec eux de sa promesse en
Jésus-Christ par l’Evangile, dont j’ai été fait
le ministre, en vertu du don de la grâce de
Dieu, qui m’a été donnée par l’opération de sa
vertu." Or il est révélé par l’accomplissement
de l’œuvre selon l’ordre de Dieu. Aussi
<l’Apôtre dit-il> selon l’ordre du Dieu
éternel, qui selon son dessein éternel fait ce
qu’il veut dans le temps. Cet ordre de Dieu est
donné pour amener à l’obéissance de la foi
toutes les nations, c’est-à-dire pour que toutes
les nations obéissent à la foi, <comme
l’Apôtre l’a dit> plus haut "Pour <prêcher>
l’obéissance à la foi à toutes les nations."
1227. — Mais si nous parlons du mystère de
l’Incarnation, la construction du sens littéral
se fera comme suit du mystère, dis-je, tu aux
temps éternels, parce que auparavant il n’était
pas alors manifesté, mystère, dis-je, qui
maintenant est révélé par les écrits
prophétiques, les quels l’ont annoncé selon
l’ordre du Dieu éternel, qui a voulu que le
mystère de l’Incarnation soit révélé, et cela
pour <amener> à l’obéissance de la foi toutes
les nations. Ce mystère, dis-je, bien qu’il fût
tu aux hommes, a cependant été connu de
Dieu seul sage, parce que lui seul l’a connu et
ceux à qui il a voulu le révéler; car, selon ces
paroles de <l’Apôtre dans> la première épître
aux Corinthiens, "ce qui est en Dieu, personne
ne le connaît, sinon l’Esprit de Dieu." Ou
bien, on peut l’entendre de celui qui seul est
sage, c’est-à-dire par essence, comme on le
dit dans <l’évangile de> Matthieu "Pourquoi
m’interroges-tu sur ce qui est bon ? Dieu seul
est bon ", et dans <celui de> Marc : "Pourquoi
m’appelles-tu bon ? Nul n’est bon, que Dieu
seul " Ce qui n’exclut point le Fils1123
parce
que cette même perfection appartient à la
Trinité tout entière, comme lorsqu’il est dit
inversement : "Nul ne connaît le Père, si ce
n’est le Fils ", le Père n’est point exclu de sa
1123
Lieux parallèles Somme Théologique Ia, Q. 39, a. 8; Ad Rom. 11, 36, lect. 5 (éd. Marietti, n 949).
propre connaissance.
1228. — <L’Apôtre> ajoute : par Jésus-
Christ; ce qu’il ne faut pas comprendre dans
le sens où Dieu le Père est le seul sage par
Jésus-Christ1124
, parce que, comme en Dieu
être sage c’est être, il s’ensuivrait que le Père
serait par le Fils, ce qui ne convient pas1125
mais il faut rapporter cette expression à ce
que <l’Apôtre> avait dit plus haut : est
maintenant révélé1126
, à savoir par Jésus-
Christ, à qui soit honneur et gloire, par la
vénération de toute créature, selon ce verset
<de l’épître> aux Philippiens : "Afin qu’au
nom de Jésus, tout genou fléchisse dans le
ciel, sur la terre et dans les enfers1127
," — et
gloire, c’est-à-dire quant à la plénitude de la
1124
Voir SA AUGUSTIN, Contra Maximinum haereticum aria norum episcopum II, XIII, I (PL 42,
769); voir aussi Glosa in Rom. XVI, 27 (GPL, col. 1532 D). 1125 Le rapport que Dieu soutient avec les qualités que nous lui attribuons ne peut être conçu sur le
modèle du rapport qu’une créature soutient avec les qualités et les déterminations qu’on lui
attribue. Si je dis : le coquelicot est rouge, je constate que la couleur rouge attribuée au coquelicot
n’existe pas toute seule (en elle-même et par elle-même), mais de l’existence du coquelicot qui, lui,
est un être individuel existant par lui-même. On dit que le coquelicot a un exister substantiel (c’est
une substance, un sujet réel) et que le rouge a un exister accidentel (c’est un accident, qui, pour être,
doit être inhérent à un sujet). Il y a donc une distinction réelle entre l’être substantiel et l’être
accidentel. Et d’ailleurs les accidents peuvent changer (la couleur d’un arbre, par exemple) alors que
la substance demeure. Mais en Dieu, tout est Dieu. Les attributs divins ne sont pas des accidents de
la substance divine et ne forment pas avec elle un tout composé, car Dieu est entièrement simple et
il est tout ce qu’il est, absolument (Somme Théologique Ia, Q. 3, a. 6 et 7). D’une certaine manière,
on ne peut distinguer en lui la substance et les attributs et, à rigoureusement parler, on ne peut pas
même le ranger dans le genre "substance, (ibid., a. 5, sol. 1). Ainsi donc, quand on attribue la sagesse
à Dieu, puisque Dieu est sa sagesse, on désigne aussi bien l’être même de Dieu, Dieu dans sa pure
réalité " Pour Dieu, dit saint Augustin cité par saint Thomas [saint Thomas, Ia, Q. 13, a. 2].
[cependant] c’est tout un d’être et d’êtrefort ou d’être sage ou quoi que ce soit que l’on dise de cette
simplicité de sa substance ainsi signifiée" (De Trinitate, I. VI, iv, 6; BA 15, 480-483). Si alors on dit que
Dieu le Père est sage " par le Fils", c’est comme si on disait que l’être de Dieu le Père dépend du Fils,
ce qui est impossible. La sagesse est un attribut essentiel (qui convient à toute l’essence divine).
Cependant, la sagesse est parfois spécialement attribuée au Fils ("le Christ, force de Dieu et sagesse
de Dieu", I Co 1, 24). Cette attribution est possible parce que la sagesse a un rapport étroit avec
l’intelligence et que le Fils procède du Père par mode intel lectuel; cette analogie est éclairante.
Toutefois "le Père n’est point sage de la sagesse qu’il engendre — comme si le Fils seul était la
sagesse." Mais le Père et le Fils sont sages d’une sagesse unique qui est l’essence divine elle-même
(Somme Théologique Ia, Q. 39, a. 7, toI. 2). — Lieux parallèles Ad Rom. 2, 5, lect. 1 (éd. Marietti, n°
187); 11, 36, lect. 5 (éd. Marietti, n° 949).
1126 Rm 16, 26.
1127 Ph 2, 10.
divinité, comme la suite <du texte des
Philippiens> le dit "Et que toute langue
confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans
la gloire de Dieu le Père1128
." Et cette
vénération n’est pas pour un temps, mais dans
les siècles des siècles. — "Jésus-Christ est le
même hier et aujourd’hui, il le sera dans les
siècles1129
." Et pour confirmer cette vérité,
<l’Apôtre> ajoute : Amen.
1229. — Ou bien, on peut construire la phrase
de la manière suivante : connu de Dieu, seul
sage, à qui est la gloire par Jésus-Christ, qui
<en effet> a glorifié Dieu1130
, selon ce verset
de Jean : "Moi, je t’ai glorifié sur la terre1131
,
" Mais il faut remarquer que cette
construction est défectueuse et qu’il faudrait
alors compléter à Celui qui est puissant, etc.,
par "que soit l’honneur et la gloire" par Jésus-
Christ à qui <reviennent> honneur et gloire.
Mais s’il n’y avait pas ce pronom à qui (cui),
la construction serait claire1132
.
1128
Ph2, 11. 1129
He 13, 8. 1130
Voir SAINT AUGUSTIN, Contra Maximinum haereticum arianorum episcopum II, xm, 2 (PL 42,
769-770); Glosa in Rom. XVI, 27 (GPL, col. 1532 C). 1131
Jn 17, 4. 1132
On peut comprendre ce paragraphe assez elliptique de la manière suivante. La deuxième
construction envisagée rapporte l’adjectif cogniti ("qui est connu"), non plus à ‘parmi les nations",
mais aux mots qui le suivent immédiatement "soli sapienti Deo" ("du seul sage, Dieu"). Si l’on adopte
cette construction, le groupe" honor et gloria" ("à qui est honneur et gloire") ne peut plus être rapporté
au groupe ""oh sapienti Deo ("seul sage, Dieu"), puisque ce groupe est déjà rattaché à cogni ("qui est
connu"). "A qui reviennent honneur et gloire" ne peut être rattaché qu’au mot qui le précède
immédiatement, "Jésus-Christ." On aura "qui est connu du seul sage, Dieu, par Jésus-Christ à qui
reviennent honneur et gloire." Mais alors surgit une nouvelle difficulté. Puisque " honneur et gloires se
rapporte à Jésus-Christ et non à Dieu le Père, il ne peut non plus se rapporter au premier mot de la
doxologie ei ("à Celui qui est puissant"), qui annonce pourtant que quelque chose va lui être attribué;
mais quoi ? la phrase ne le dit plus. On est alors contraint de suppléer ce manque, dit saint Thomas, et
d’ajouter le groupe de mots suivants "que reviennent honneur et gloire." On aura donc, "à Celui qui est
puissant […] que reviennent honneur et gloire", et le texte se continuera ainsi" par Jésus-Christ à qui
reviennent honneur et gloire." Mais ce sens n’est pas satisfaisant puisqu’il répète la même formule,
une fois pour le Père et une fois pour le Fils. Il y aurait cependant une solution, c’est que le texte ne
contienne pas le pronom cui (à qui), car alors "honneur et gloire" pourrait se rapporter à ei (à celui),
c’est-à dire au premier mot de la doxologie; et l’on aurait " à Celui qui est puissant […] par Jésus-
Christ, honneur et gloire." Cette ultime remarque de saint Thomas est confirmée par la philologie. La
doxologie de saint Paul présente, en grec, une anomalie syntaxique, signalée par les meilleurs hellé
nistes il s’agit d’une anacoluthe, c’est-â-dire d’une rupture dans la construction normale de la phrase.
Certains y ont vu un hébraïsme (CORNELIUS A LAPIDE, Commentaria in Scripturam Sacram, t. 18,
In Epistulas Divi Pauli, p. 245). Comme l’a compris saint Thomaa, cette anacoluthe est constituée par
la présence insolïte du pronom relatif "à qui", en grec : hô, et que le latin a fidèlement rendu par cui
(ce sont les formes du datif, en grec comme en latin); pronom relatif inutile puisque celui â qui
honneur et gloire sont attribués " été déjà mentionné à Celui qui, etc. La traduction Ici donnée du texte
de taint Paul a respecté cette anomalie "à Celui qui est puissant […] â Dieu seul sage, par Jésus-Christ,
Table analytique
Abraham.
Il est le père non seulement de ceux qui ont été circoncis, mais aussi des croyants en l’état
d’incirconcision (chap. 4, 11; leçon 2, ° 344)
Il a été justifié de telle sorte qu’il a sujet de se glorifier devant Dieu (chap. 4, 3; leçon 1, n°
327).
Acception des personnes.
Il y a acception des personnes quand on donne à quelqu’un plus ou moins sans égard à sa
dignité (chap. 2, 11; leçon 2, n° 205).
Action.
L’action est toujours attribuée à l’agent principal, de préférence à l’agent secondaire (chap. 9,
16; leçon 3, n° 777).
Action de grâces.
Avant toutes choses nous devons commencer par rendre grâces (chap. 1, 8; leçon 5, n° 75).
L’action de grâces doit remonter à Dieu dans le même ordre que les grâces descendent de
Dieu vers nous, c’est-à-dire par Jésus-Christ (chap. 1, 8; leçon 5, n° 76).
Adam.
Voir aussi : PÉCHÉ.
Ressemblances entre Adam et le Christ.
De même que par Adam le péché et la mort sont entrés dans le monde, ainsi par le Christ sont
entrées la justice et la vie. De même que le corps d’Adam fut formé sans union charnelle,
ainsi le corps du Christ fut-il formé pareillement de la Vierge. De même que du côté d’Adam
qui dormait la femme a été tirée, ainsi du côté du Christ dormant sur la croix coulèrent le sang
et l’eau, comme le dit Jean, signifiant les sacrements par lesquels l’Eglise a été formée (chap.
5, 14; leçon 4, n° 429).
Adoption.
Celui qui est adopté comme fils de Dieu, devient conforme à son véritable Fils d’abord par le
droit de participer à l’héritage; ensuite par la participation à sa splendeur, etc. (chap. 8, 29;
leçon 6, n° 704).
Âme.
Elle vit de Dieu par la vie de la grâce (chap. 1, 17; leçon 6, n° 108).
Elle donne son assentiment à la raison contre le péché, mais uniquement par la grâce du Christ
(chap. 7, 25; leçon 4, n° 592).
Elle n’est seulement libérée de la vanité que lorsqu’elle s’appuie sur Dieu (chap. 1, 21; leçon
7, n° 129).
Ami.
Voir : COMPASSION.
Amour, aimer.
Voir aussi : DILECTION et PROCHAIN.
Aimer c’est vouloir du bien à celui que l’on aime (chap. 1, 7; leçon 4, n° 67; chap. 8, 28;
leçon 6, n° 699).
[à qui]< reviennent> honneur et gloire. — Voir SAINT AUGUSTIN, Contra Maximinum haereeicum
arianorum episcopum II, xiiI, 2 (PL 42, 769-770).
Nous devons aimer notre prochain comme nous-mêmes de trois manières : d’abord, quant à la
fin de l’amour, c’est-à-dire que nous nous aimions nous-mêmes et le prochain pour Dieu.
Puis, quant à la forme de l’amour, c’est-à-dire que comme chacun s’aime soi-même en se
voulant du bien, ainsi doit-on aimer le prochain en lui voulant du bien. Enfin, quant à l’effet
de l’amour, c’est-à-dire qu’on doit subvenir aux nécessités du prochain comme aux siennes
propres (chap. 13, 9; leçon 2, n° 1057).
L’amour du prochain est renfermé dans l’amour de Dieu, comme l’effet dans la cause (chap.
13, 8; leçon 2, n° 1049).
Anathème.
Mot grec composé de anà, qui veut dire "sur", et de thésis, qui veut dire "position", en sorte
qu’on appelle anathème ce qui est comme superposé; car lorsque dans un pillage on prenait
quelque chose qu’on ne voulait pas laisser à l’usage des hommes, on le suspendait dans le
temple. On a coutume de donner le nom d’anathème" à ce qui est séparé de l’usage commun
des hommes (chap. 9, 3; leçon 1, n° 739).
Ange
Voir aussi : DÉMON et DIABLE.
Ils sont <les esprits> inférieurs qui sont préposés à la garde de chaque homme en particulier
(chap. 8, 38; leçon 7, n° 728).
L’ange connaît Dieu par sa propre essence (chap. 1, 20; leçon 6, n° 120).
Ils nous ont apporté les lumières divines, étant donné que nous nous sommes éloignés de Dieu
(Prol., n° 4).
Les saints anges exercent à notre égard la miséricorde (chap. 13, 9, leçon 2, n° 1056).
Les saints anges et tous les hommes sont notre prochain, soit parce qu’ils possèdent déjà la
béatitude vers laquelle nous tendons, soit parce qu’ils y tendent avec nous (chap. 13, 9, leçon
2, n° 1056).
Péché de l’ange.
Par son péché, selon Jean Damascène, l’ange s’est détourné de ce qui est conforme à sa
nature, pour aller vers ce qui est contre elle (chap. 1, 26; leçon 7, n° 149).
Angoisse.
L’angoisse se dit du resserrement de l’âme de l’homme incapable de trouver le remède contre
les maux qu’il craint, ou dont il souffre déjà (chap. 2, 9; leçon 2, n° 200).
Apollinaire.
Il prétendit que le Christ n’avait pas eu d’âme, mais que le Verbe lui en tenait lieu (chap. 1, 3;
leçon 2, n° 38).
Apostolat.
Il ne peut être reçu dignement qu’en présupposant la grâce sanctifiante (chap. 1, 5 leçon 4, n°
61).
Nous sommes envoyés pour faire obéir les hommes à la foi (chap. 1, 5; leçon 4, n° 62); pour
étendre le nom du Christ, et non pour nous procurer un avantage temporel (chap. 1, 5; leçon 4,
n° 64).
Apôtre (s).
Le mot "apôtre" signifie la même chose qu’envoyé (chap. 1, 5; leçon 4, n° 61).
Ils ont été choisis en vue d’une dignité plus grande, c’est-à-dire pour recevoir immédiatement
le Christ lui-même et transmettre aux autres ce qui concerne le salut (chap. 8, 23; leçon 5, n°
678).
Ils ont eu l’Esprit-Saint les premiers dans l’ordre du temps, et plus abondamment que tous les
autres (chap. 8, 23; leçon 5, n° 676).
Ils ont été envoyés par le Christ comme investis de son autorité et de sa fonction (chap. 1, 5;
leçon 4, n° 61); sont venus au nom du Christ et comme dans sa personne (chap. 1, 5 leçon 4,
n° 64).
Ils ont été envoyés non point uniquement pour l’instruction de la nation juive seule, mais pour
<l’instruction> de toutes les nations (chap. 1, 5; leçon 4, n° 63).
Ils nous ont apporté la doctrine évangélique (Prol., n° 4).
Appropriations.
La puissance, qui a le caractère de principe, est appropriée au Père, qui est le principe de toute
divinité; la sagesse est appropriée au Fils, qui procède en tant que Verbe, parce qu’il n’est
autre chose que la Sagesse engendrée; la bonté est appropriée à l’Esprit-Saint, qui procède en
tant qu’amour, dont l’objet est la bonté. Et c’est pourquoi nous pouvons dire par appropriation
: de lui; c’est-à-dire du Père, par lui, c’est-à-dire par le Fils, en lui, c’est-à-dire en l’Esprit-
Saint, sont toutes choses (chap. 11, 36; leçon 5, n° 949).
Arche.
L’arche signifie l’Église (Prol., n° 6).
Arius.
Il prétendit que la filiation <du Christ> était créée, en sorte qu’il serait une créature très
excellente, mais qu’elle fut tirée du néant, après un temps où elle n’avait pas existé (chap. 1,
3; leçon 2, n° 32. — Ch. 9, 5; leçon 1, n° 747).
Prétendit que l’Esprit-Saint était une créature et qu’il était inférieur au Père et au Fils (chap. 8,
26; leçon 5, n° 692).
Assistance.
On peut prêter assistance à autrui dans ses affaires de deux manières d’abord, à la manière du
siècle, c’est-à-dire en vue de la faveur des hommes ou du profit, et cette assistance ne
convient pas aux serviteurs de Dieu; puis on prête assistance à autrui dans ses affaires par
piété, par exemple en secourant les indigents et les malheureux (chap. 16, 2; leçon 1, n°
1196).
Auditions.
Il y a deux sortes d’audition : l’une intérieure, par laquelle on entend Dieu qui révèle. Cette
dernière n’appartient pas communément à tous, mais relève à proprement parler de la grâce de
prophétie; l’autre, par laquelle on entend une personne qui parle extérieurement (chap. 10, 14;
leçon 2, n° 837).
Avarice.
Elle est un appétit immodéré de posséder (chap. 1, 29; leçon 8, n° 158).
Avertissement.
Pour avertir avec rectitude, deux choses sont requises la première est que l’avertissement ne
vienne ni de la haine ni de la colère, mais de la charité; la seconde chose requise pour avertir,
c’est la science de la vérité (chap. 15, 14; leçon 2, n° 1164).
Baiser.
Il y a trois sortes de baiser : le baiser libidineux, le baiser trompeur et le saint baiser (chap. 16,
16; leçon 1, n° 1211).
Baptême.
Il est appelé le sacrement de la foi (chap. 8, 1; leçon 1, n° 596).
La triple immersion dans le baptême se fait non seulement à cause de la foi en la Trinité, mais
aussi pour représenter les trois jours de la sépulture du Christ (chap. 6, 4; leçon 1, n° 474).
Les baptisés sont marqués du signe de la croix avec l’onction du saint chrême sur le front, qui
est le siège de la honte, afin qu’ils ne rougissent pas de l’Evangile (chap. 1, 15 leçon 5, n° 96.
— Chap. 10, 10; leçon 2, n° 832).
Par le baptême l’homme est libéré non seulement de la faute, mais aussi de toute la peine, par
la vertu de la passion du Christ, qui a satisfait pour les péchés de tous (chap. 11, 29; leçon 4,
n° 927).
Par le baptême l’homme est libéré du péché originel quant à l’Esprit, mais l’infection <du
foyer> du péché demeure quant à la chair (chap. 5, 12; leçon 3, n° 420).
Le baptême solennel se célèbre dans l’Eglise le samedi saint, où l’on fait mémoire de la
sépulture du Christ, et à la vigile de la Pentecôte, où l’on célèbre la solennité du Saint-Esprit,
dont la vertu communique à l’eau du baptême sa puissance de purifier (chap. 6, 4; leçon 1, n°
474).
Dans le baptême rien ne se fait par l’action de l’homme (chap. 2, 16; leçon 3, n° 223).
Baptême de Jean.
Le baptême de Jean était un baptême de péni tence, parce que en le recevant on s’enga geait
en quelque sorte à faire pénitence de ses péchés (chap. 11, 29; leçon 4, n° 929).
Béatitude.
La béatitude de l’homme vient de Dieu (chap. 4, 6; leçon 1, n° 333).
L’état de la béatitude future est comparé au jour à cause de la clarté divine dont sont illuminés
les saints (chap. 13, 12; leçon 3, n° 1066).
Bénir, c’est dire du bien (chap. 12, 14; leçon 3, n° 997).
Bénir ou dire du bien se fait de trois manières d’abord en l’énonçant, par exemple lorsqu’on
loue le bien d’autrui. Puis en commandant. Bénir ainsi par autorité est le propre de Dieu, dont
le commandement fait dériver le bien sur ses créatures. Or ce ministère appartient aux prêtres
qui invoquent sur le peuple le nom du Seigneur. Enfin on bénit en exprimant des souhaits.
Dans ce sens, bénir c’est vouloir du bien à quelqu’un, et pour ainsi dire demander du bien
pour lui (chap. 12, 14; leçon 3, n° 997).
Nous bénissons Dieu en tant que nous reconnaissons de cœur sa bonté et que nous la
célébrons de bouche (chap. 1, 25; leçon 7, n° 144).
Bien(s).
Le bien, selon Denys, implique une diffusion (chap. 2, 1; leçon 1, n° 182).
Bien de la grâce.
Le bien de la grâce n’habite pas mais dans l’Esprit (chap. 7, n° 573).
Bien divin.
On appelle bien divin le bien commun auquel tous participent (chap. 1, 20; leçon 6, n° 117).
Biens spirituels.
Ils peuvent être possédés en même temps par plusieurs (chap. 8, 17; leçon 3, n° 648).
Biens temporels.
Ils ne peuvent être possédés en même temps par plusieurs (chap. 8, 17; leçon 3, n° 648). dans
la chair, 18; leçon 3,
Bienfaisance.
Elle est un acte de la charité, elle consiste à faire du bien à celui qu’on aime sans jamais le
blesser (chap. 12, 1; leçon 3, n° 996).
Bienveillance.
Elle est un acte qui se rapporte à la charité, elle consiste à vouloir du bien à autrui sans jamais
lui vouloir du mal (chap. 12, 1; leçon 3, n° 996).
Charité.
La charité de Dieu peut se prendre en deux sens : soit de la charité par laquelle Dieu nous
aime, soit de la charité par laquelle nous l’aimons (chap. 5, 5; leçon 1, n° 392).
La charité de Dieu est dite être répandue dans nos cœurs, en ce sens qu’elle s’étend à toutes
les habitudes et à tous les actes de l’âme pour les parfaire (chap. 5, 5; leçon 1, n° 392).
La charité a deux actes : l’amour de Dieu et l’amour du prochain (chap. 13, 8; leçon 2, n°
1049).
La charité ne s’épuise pas en aimant, mais elle progresse (chap. 13, 8; leçon 2, n° 1047). la
charité de l’homme ne vient pas de lui, mais de la grâce de Dieu, qui est donnée à chacun
selon la mesure du don du Christ (chap. 8, 23; leçon 5, n° 678).
Chrême (saint).
Les baptisés sont marqués du signe de la croix avec l’onction du saint chrême sur le front, qui
est le siège de la honte, afin qu’ils ne rougissent pas de l’Evangile (chap. 1, 15 leçon 5, n° 96.
— Chap. 10, 10; leçon 2, n° 832).
Christ, Jésus-Christ.
Son nom signifie la miséricorde (Prol., n° 6).
Jésus signifie Sauveur, Christ signifie Oint (chap. 1, 1; leçon 1, n° 20).
Il sera la racine de Jessé, parce que, bien qu’il procède de Jessé par son origine charnelle,
cependant il a soutenu Jessé par sa puissance et a déversé sur lui sa grâce (chap. 15, 12 leçon
1, n° 1161).
Il est appelé apôtre (chap. 1, 5; leçon 4, n° 61).
Il est la vérité sans mensonge (chap. 9, 1 leçon 1, n° 736. — Chap. 14, 2; leçon 1, n° 1085).
Il est l’héritier principal de la gloire et il y est parvenu par ses souffrances (chap. 8, 17 leçon
3, n° 651).
Il est lui-même pour tous l’auteur de la foi (chap. 15, 8; leçon 1, n° 1154).
En lui se trouve toute la plénitude des grâces (chap. 5, 15; leçon 5, n° 433).
En lui se trouvèrent très abondamment toutes les vertus (chap. 13, 14; leçon 3, n° 1079).
Il a été choisi pour que sa nature <humaine> soit assumée dans l’unité de sa personne divine
(chap. 8, 23; leçon 5, n° 678).
Il est donateur de la grâce et même de la justice (chap. 5, 21; leçon 6, n° 467).
Il est la voie de la paix (chap. 3, 17; leçon 2, n° 289).
Il a été établi par décret divin comme le fondement de l’Eglise (chap. 9, 32; leçon 5, n°811).
Il est exempt de péché (chap. 3, 4; leçon 1, n° 261. — Chap. 3, 24; leçon 3, n° 307).
Il n’a pas contracté le péché originel, parce qu’il a pris chair de la femme seule, sans le
concours de la semence virile (chap. 5, 12; leçon 3, n° 414).
Il nous a pour frères, soit parce qu’il nous a communiqué la ressemblance de sa filiation, soit
parce qu’il a assumé une nature semblable à la nôtre (chap. 8, 29; leçon 6, n° 706).
Baptême du Christ.
Le baptême du Christ est le baptême de la rémission de tous les péchés, en sorte qu’il ne reste
à acquitter chez le baptisé aucune satisfaction pour les péchés passés (chap. 11, 29; leçon 4, n°
929).
Chair du Christ.
Il n’a pas eu la chair du péché, c’est-à-dire la chair conçue avec le péché, puisque sa chair fut
conçue par l’Esprit-Saint qui ôte le péché, mais il eut une chair semblable à celle du péché,
c’est-à-dire une chair semblable à la chair pécheresse, en tant qu’elle était passible (chap. 8, 3;
leçon 1, n° 608).
Esprit du Christ.
L’Esprit du Christ et l’Esprit de Dieu le Père sont un même Esprit; mais on dit l’Esprit de
Dieu le Père en tant qu’il procède du Père, et l’Esprit du Christ en tant qu’il procède du Fils
(chap. 8, 9; leçon 2, n° 627).
Filiation du Christ.
Diverses erreurs sur sa filiation : Pour Photin, il avait une filiation adoptive. Pour Sabellius,
cette filiation n’était que nominale. Pour Anus, cette filiation était créée (chap. 1, 3; leçon 2,
n° 30-33).
Réfutation de ces erreurs (chap. 1, 3; leçon 2, n° 34-41).
Il est, selon saint Hilaire, son vrai et propre Fils par origine et non par adoption, en vérité et
non au figuré, par naissance et non par création; car il procède du Père comme le verbe
procède du cœur" (chap. 1, 3; leçon 2, n° 33).
Grâce du Christ.
Au Christ homme a été donné la plus excellente des grâces (chap. 8, 23; leçon 5, n° 678).
La grâce du Christ n’habite pas dans la chair, mais dans l’Esprit (chap. 7, 18; leçon 3, n 573).
Humanité du Christ.
L’Apôtre énumère quatre bienfaits venant de l’humanité du Christ : premièrement sa mort
pour notre salut, lorsqu’il dit : qui est mort; deuxièmement, sa résurrection par laquelle il nous
vivifie, maintenant par la vie spirituelle, et enfin par la vie corporelle, lorsqu’il dit : qui est
aussi ressuscité; troisièmement, la confession même du Père, en disant : qu’il est à la droite
de Dieu, c’est-à-dire égal à Dieu le Père selon la nature divine; quatrièmement son
intercession, en disant : et qui même intercède pour nous, en étant comme notre avocat (chap.
8, 34; leçon 7, n° 719).
Incarnation du Christ.
La nécessité, le mode et le fruit de l’Incarnation du Christ (chap. 8, 3-4; leçon 1, nos 611, 607
et 609).
Le secret de l’Incarnation du Christ, de la race d’Abraham, était caché sous le sceau de la
circoncision (chap. 4, 11; leçon 2, n° 343).
Le secret de l’Incarnation divine est révélé dans l’Evangile lui-même (chap. 16, 25; leçon 2,
n° 1224).
L’Incarnation a un double effet : le premier est la suppression du péché; le second l’accom
plissement de la justification de la Loi en nous (chap. 8, 3; leçon 1, n° 609).
Intercession du Christ.
Le Christ intercède pour nous de deux manières : d’abord, en priant pour nous. Son
intercession en notre faveur consiste en sa volonté de nous sauver. Ensuite, il intercède pour
nous en mettant sous le regard de son Père l’humanité qu’il a assumée pour nous et les
mystères célébrés en elle (chap. 8, 34 leçon 7, n° 720).
Justification du Christ.
La justification du Christ passe à tous les hommes quant à la satisfaction, toutefois quant à
l’efficacité elle ne s’étend qu’aux fidèles seulement (chap. 5, 18; leçon 5, n° 443).
Mort du Christ.
Elle peut être envisagée selon trois points de vue : selon le point de vue de la raison même de
la mort, selon l’acte de ceux qui tuent le Christ, selon qu’elle procède de la volonté du Christ
souffrant, volonté qui fut disposée à endurer la mort par son obéissance au Père et par sa
charité envers les hommes. Selon ce dernier point de vue sa mort fut méritoire pour nos
péchés, et elle fut acceptée par Dieu à tel point qu’elle a suffi à la réconciliation de tous les
hommes, même de ceux qui ont tué le Christ, certains d’entre eux ayant été sauvés par sa
prière (chap. 5, 10; leçon 2, n° 403).
Elle nous fut salutaire, non seulement par mode de mérite, puisqu’il nous a mérité la
destruction des péchés, mais aussi par mode d’efficience; en effet, comme l’humanité du
Christ était en quelque sorte l’instrument de sa divinité, toutes les souffrances et les actions de
l’humanité du Christ nous furent salutaires, en tant qu’elles procédaient de la vertu de sa
divinité (chap. 4, 25; leçon 3, n° 360).
Elle nous est appliquée au moyen de la foi, par laquelle nous croyons que par sa mort il a
racheté le monde (chap. 3, 25; leçon 3, n° 309).
La mort même du Christ pour nous montre la charité de Dieu, puisque Dieu a donné son Fils,
afin de satisfaire pour nous en mourant (chap. 5, 8; leçon 2, n° 399).
Obéissance du Christ.
L’obéissance du Christ procède de l’amour de charité qu’il eut pour son Père et pour nous
(chap. 5, 19; leçon 5, n° 446).
Origine ou naissance du Christ.
Elle est éternelle (chap. 1, 3; leçon 2, nos 29.") et temporelle (chap. 1, 3; leçon 2, n° 34).
Il a été conçu dans le sein virginal par le Saint-Esprit (chap. 1, 4; leçon 3, n° 59).
Selon l’ordre naturel sous quelque rapport, c’est-à-dire en tant que conçu d’une femme et dans
l’espace de neuf mois, on dit que le Christ est né; en revanche sous un autre rapport, en tant
que le Christ est sorti <de la Vierge> non selon l’ordre naturel, sans semence d’homme, mais
par la vertu divine, on dit qu’il a été fait (chap. 1, 3; leçon 2, n° 39).
Passion du Christ.
— Vertu de la Passion.
Dans le baptême la vertu de la passion du Christ opère par mode de régénération, ce qui
requiert de l’homme qu’il meure tota lement à la première vie pour recevoir la vie nouvelle.
Dans les autres sacrements la vertu de la passion du Christ opère par mode de guérison,
comme dans la pénitence (chap. 11, 29; leçon 4, n°928).
Prédestination du Christ.
La prédestination du Christ, qui a été prédestiné pour être Fils de Dieu par nature, est la
mesure et la règle de la vie, et par conséquent de notre prédestination (chap. 1, 4; leçon 3, n°
48).
Il a été prédestiné, pour être le Fils de Dieu par nature, non à cause de ses mérites anté
cédents, mais par la grâce seule (chap. 1, 4; leçon 3, n° 48).
Elle n’implique pas ici l’antériorité qu’elle suppose (chap. 1, 4; leçon 3, n° 49).
Elle est attribuée nécessairement à la personne du Christ (chap. 1, 4; leçon 3, n° 51).
Prédication du Christ.
Le Christ a prêché l’Évangile le premier (chap. 16, 25; leçon 2, n° 1223).
Puissance du Christ.
Il a la puissance divine, puisqu’il donne lui-même l’Esprit-Saint (chap. 1, 4; leçon 3, n° 58).
La puissance du Fils et celle du Père sont la même (chap. 8, 11; leçon 2, n° 630).
Les deux signes de la puissance divine du Christ sont sa conception dans le sein virginal par le
Saint-Esprit et la résurrection des morts (chap. 1, 4; leçon 3, n° 59).
Résurrection du Christ.
Le Christ lui-même est ressuscité par sa propre puissance, parce que la puissance du Père et la
puissance du Fils sont la même (chap. 8, 11; leçon 2, n° 630).
La vie que le Christ a acquise en ressuscitant est conforme à celle de Dieu (chap. 6, 10; leçon
3, n° 490).
Sang du Christ.
Seul le sang du Christ a pu remettre les péchés, non seulement présents, mais passés, parce
que la vertu de son sang opère par la foi de l’homme, foi qu’eurent ceux qui ont vécu avant la
passion du Christ (chap. 3, 25 leçon 3, n° 310).
Satisfaction, rachat ou rédemption du Christ.
Nul autre ne pouvait satisfaire pour le péché du genre humain tout entier, si ce n’est le Christ
seul qui était exempt de péché (chap. 3, 24; leçon 3, n° 307).
La satisfaction du Christ obtint son efficacité pour justifier et pour racheter, de ce que Dieu
l’avait ordonné selon son propos (chap. 3, 25; leçon 3, n° 308).
Tribunal du Christ.
On appelle tribunal du Christ son pouvoir judi ciaire (chap. 14, 10; leçon 1, n° 1106).
Volonté du Christ.
Sa volonté divine lui était commune avec le Père (chap. 15, 1; leçon 1, n° 1146).
Le Christ a choisi de souffrir pour notre salut et ce qui était contraire à sa volonté propre,
c’est-â-dire à sa volonté humaine naturelle, afin d’accomplir la volonté divine (chap. 15, 3;
leçon 1, n° 1146).
Circoncision.
Elle était une sorte de profession obligeant les hommes à l’observance de la Loi (chap. 2, 25;
leçon 4, n° 238).
Elle a une similitude expresse avec la foi d’Abraham, d’abord quant à l’objet de la foi, car
Abraham crut à la multiplication de la postérité, puis quant à l’effet de cette foi, qui consiste
en l’éloignement de la faute, ce qui est désigné par le retranchement d’une membrane
superflue (chap. 4, 11; leçon 2, n° 343).
La circoncision corporelle signifie la circon cision spirituelle, qui devait avoir lieu par le
Christ (chap. 4, 12; leçon 2, n° 348).
Efficacité de la circoncision.
La circoncision n’avait de vertu efficace par l’œuvre elle-même accomplie (ex opere operato),
ni quant à l’éloignement de la faute, ni quant à l’opération de la justice. Elle était seulement le
signe de la justice, par la foi du Christ dont la circoncision était le signe, que le péché originel
était remis et que le secours de la grâce était conféré pour agir avec rectitude (chap. 4, 12;
leçon 2, n° 349).
Sans l’observance de la Loi la circoncision est inutile (chap. 2, 25; leçon 4, n° 237).
Institution de la circoncision.
Elle a été instituée pour deux raisons : en raison du culte divin, auquel les hommes étaient
portés par ces sortes de cérémonies, et pour signifier la circoncision spirituelle, qui devait
avoir lieu par le Christ dans l’âme et dans le corps (chap. 4, 12; leçon 2, nos 347-348).
Nécessité de changer la circoncision.
La circoncision était le signe de ce qui devait s’accomplir. Or le même signe ne convient
pas à une chose présente, passée ou future; aussi le baptême est-il le signe de la grâce présente
qui produit un effet plus abondant et plus efficace (chap. 4, 12; leçon 2, n° 350).
Pratique de la circoncision.
La circoncision se pratiquait le huitième jour, parce qu’elle signifie le huitième âge de ceux
qui sont ressuscités; et elle était pratiquée avec des couteaux de pierre, afin de signifier que la
circoncision spirituelle devait se faire avec la pierre, qui est le Christ (chap. 4, 12; leçon 2, n°
348).
Compassion.
La compassion d’un ami qui s’afflige avec nous apporte de la consolation dans les tristesses
de deux manières : premièrement, parce qu’on y recueille une preuve efficace d’amitié;
deuxièmement, par cela même qu’un ami s’afflige avec nous, il semble s’offrir à porter sa part
du fardeau de l’adversité qui cause la tristesse (chap. 12, 15; leçon 3, n° 1004).
Componction.
La componction implique une piqûre ou une douleur du cœur. Il y a une bonne componction,
celle par laquelle on éprouve de la douleur pour ses propres péchés, et une mauvaise
componction, à savoir l’envie, par laquelle on éprouve de la douleur pour le bien d’autrui
(chap. 11, 8; leçon 1, n° 874).
Concorde.
Elle est un acte qui se rapporte à la charité, et elle consiste en un accord entre amis dans leurs
vouloirs et leurs refus (chap. 12, 14 leçon 3, n° 996).
Obstacles à la concorde.
Il y en a deux : le premier est l’orgueil, qui fait qu’en recherchant d’une manière immo dérée
sa propre excellence et en fuyant la soumission, on veut se soumettre autrui et empêcher son
excellence. Le second obstacle à la concorde est de se présumer sage ou même prudent; ce qui
fait qu’on ne croit pas à l’opinion des autres (chap. 12, 16; leçon 3, n° 1006).
Concupiscence.
Elle est un péché général en tant que prise pour la convoitise d’une chose illicite, ce qui
appartient à l’essence du péché (chap. 7, 7; leçon 2, n° 538).
La concupiscence dépravée est généralement à l’origine de tous les péchés (chap. 7, 7 leçon 2,
n° 537).
Elle pervertit le jugement de la raison dans chaque œuvre à accomplir (chap. 3, 20 leçon 2, n°
298).
Confession.
Une triple confession est nécessaire au salut la première confession est celle de sa propre
iniquité. Cette confession est celle du pénitent; la deuxième est celle par laquelle l’homme
confesse la bonté de Dieu qui accorde miséricordieusement ses bienfaits. Cette confession est
celle de celui qui rend grâces; la troisième est la confession de la vérité divine. Cette
confession est celle de celui qui croit (chap. 10, 10; leçon 2, n° 832).
Connaissance.
La connaissance de l’homme commence par ce qui lui est connaturel, à savoir par les
créatures sensibles, lesquelles n’ont pas d’analogie pour représenter l’essence divine (chap. 1,
19; leçon 6, n° 114).
L’homme peut connaître Dieu par la raison de trois manières : premièrement par (la voie de)
la causalité, deuxièmement par voie d’excel lence, troisièmement par voie de négation. Les
Gentils ont eu cette <dernière> connais sance par la lumière innée de la raison (chap. 1, 19;
leçon 6, n° 114-115).
Depuis la création du monde les hommes ont commencé à connaître Dieu par ses œuvres
(chap. 1, 20; leçon 6, n° 121).
L’homme peut connaître Dieu par l’intelli gence, mais non par les sens ou l’imagination, qui
ne transcendent pas les choses corporelles (chap. 1, 20; leçon 6, n° 119).
L’homme connaît véritablement Dieu par la lumière de la sagesse (chap. 1, 21; leçon 7, n°
130).
La vraie connaissance de Dieu, en tant que telle, porte les hommes au bien, mais elle est liée,
comme détenue en captivité, par la passion de l’injustice (chap. 1, 18; leçon 6, n° 112).
Conscience.
Elle n’est rien d’autre que l’application de la connaissance reçue pour juger si une action est
bien ou mal faite (chap. 2, 15; leçon 3, n° 219).
Par le fait même que la conscience rend témoi gnage du bien ou du mal, c’est un signe évident
que l’œuvre de la Loi est inscrite dans le cœur de l’homme (chap. 2, 15; leçon 3, n° 219).
Même pour les choses qui sont en soi illicites, la conscience erronée oblige (chap. 14, 14;
leçon 2, n° 1120).
L’obligation de la conscience, même erronée, et celle de la Loi divine, sont la même obli
gation. Si la conscience prescrit de faire une chose ou de l’éviter, c’est qu’elle croit que cet
acte s’oppose ou est conforme à la Loi de Dieu. Car la Loi n’est appliquée à nos actes que par
l’intermédiaire de notre conscience (chap. 14, 14; leçon 2, n° 1120).
Nos corps ont été revêtus de dignité en devenant des réceptacles de l’Esprit-Saint (chap. 8, 11;
leçon 2, n° 630).
Corps mystique.
L’unité du Corps mystique, qui est l’Église, est spirituelle, et cette unité nous unit les uns et
les autres à Dieu par la foi et la dilection (chap. 12, 5; leçon 2, n° 974).
Il y a quatre sortes de crainte : la crainte humaine ou mondaine qui ne vient pas de l’Esprit-
Saint; la crainte de la peine ou la crainte servile, qui fait agir l’homme servi lement; la crainte
initiale, ainsi appelée parce qu’elle se trouve habituellement chez les hommes au début de leur
conversion; enfin la crainte sainte, qui est causée par la charité parfaite (chap. 8, 15; leçon 3,
n° 638-641).
Création, créature(s).
Triple acception du mot "création."
Selon un premier sens, les hommes justes sont appelés spécialement créatures de Dieu, soit
parce qu’ils persévèrent dans le bien dans lequel ils ont été créés, soit à cause de leur
excellence, parce que toute la création, dans un certain sens, est à leur service. Selon un
deuxième sens, le mot "création" peut être appelé la nature humaine elle-même, qui est
dépendante des biens de la grâce et qui chez les hommes injustes n’a pas encore été justifiée,
mais est informe. Selon un troi sième sens, le mot <4 création" peut s’entendre de la créature
sensible elle-même, comme le sont les éléments du monde (chap. 8, 19; leçon 4, nos 658-
660).
Aucune créature ne peut, par ses propres forces naturelles, voir l’essence de Dieu elle-même
(chap. 1, 20; leçon 6, n° 120).
Culte.
L’homme doit intérieurement à Dieu un culte fondé sur un sentiment de piété; extérieu rement
il lui doit un culte de latrie (chap. 1, 25; leçon 7, n° 142).
Coulpe.
Voir chap. 2, 8; leçon 2, n° 198.
Crainte.
Sortes de crainte.
Corps.
Culte de latrie.
Il consiste surtout dans les sacrifices et l’oblation, par lequel l’homme reconnaît que Dieu est
l’auteur de tous les biens (chap. 1, 25; leçon 7, n° 143).
II est dû à Dieu tout entier (chap. 1, 25 leçon 7, n° 144. — Chap. 12, 11; leçon 2, n° 989).
Cupidité.
Elle est le principe des péchés sous le rapport de la conversion au bien périssable (chap. 7, 7;
leçon 2, n° 538).
Démon (s).
Les démons sont totalement exclus de l’amour de Dieu et on ne doit pas les compter au
nombre de ceux qui sont notre prochain, mais au nombre de nos ennemis (chap. 13, 9; leçon
2, n° 1056).
Voir aussi : DIABLE.
Détraction.
La détraction consiste à amoindrir la réputation de quelqu’un en cachette, la personne
ignorant que l’on dit du mal d’elle (chap. 1, 30; leçon 8, n° 162).
Diable.
Il est le commencement du péché (chap. 7, 8; leçon 2, n° 541).
Il s’efforce d’empêcher la prédication, d’où procède le salut des hommes (chap. 1, 13 leçon 5,
n° 91).
Il s’efforce de tromper par les faux apôtres (chap. 16, 20; leçon 2, n° 1220).
Il produit dans l’homme toute concupiscence du péché (chap. 7, 8; leçon 2, n° 541).
Dieu.
Il est l’essence même de la bonté (chap. 8, 7; leçon 2, n° 622).
Il est immuable (chap. 1, 3; leçon 2, n° 38.
— Chap. 1, 21; leçon 7, n° 129. — Chap. 1, 23; leçon 7, n° 134).
Il est sublime (chap. 1, 23; leçon 7, n° 134).
Il est la vérité même (chap. 1, 25; leçon 7, n° 142).
Il est parfaitement incorruptible (chap. 1, 23; leçon 7, n° 134).
Il est riche par lui-même, et non par quelque autre trésor, car il n’a aucunement besoin de
biens étrangers (chap. 8, 17; leçon 3, n° 647).
Il est la vie même et la source de la vie (chap. 14, 11; leçon 1, n° 1109).
Il est le principe de l’être pour toutes choses (chap. 1, 25; leçon 7, n° 142).
Il est la cause suprême de toutes choses (chap. 8, 7; leçon 2, n° 621).
Il est cause de la connaissance, comme vérité première (chap. 1, 25; leçon 7, n° 142).
Il est Trinité (chap. 16, 25; leçon 2, n° 1223). Il est le Créateur de toutes choses (chap. 15, 5;
leçon 1, n° 1149).
Il était le Dieu des Hébreux seulement par le culte spécial qu’ils lui rendaient, toutefois il était
le Dieu de tous par son gouvernement universel (chap. 3, 29; leçon 4, n° 319).
Il est le Dieu de tous par sa création et son gouvernement, et spécialement le Dieu des justes à
cause du soin particulier qu’il en prend, par le culte spécial <que les justes lui rendent>, parce
qu’il est leur récompense (chap. 1, 7; leçon 5, n° 76).
Il habite dans l’âme par la foi (chap. 1, 17; leçon 6, n° 108).
Il scrute les cœurs, non parce qu’il cherche à connaître les secrets du cœur, mais parce qu’il
connaît manifestement ce qui est caché dans le cœur (chap. 8, 27; leçon 5, n° 694).
Il ne fait pas acception des personnes (chap. 2, 11-12; leçon 2, nos 206-207).
Action de Dieu.
Elle incline la volonté des hommes directement et par lui-même, en tant qu’acteur du bien;
mais en vue du mal, on dit que Dieu incline ou suscite les hommes occasionnellement, c’est-
à-dire en tant qu’il propose à l’homme, soit intérieurement, soit extérieurement, quelque chose
qui, dans la mesure où cela dépend de Dieu, le porte au bien; mais l’homme à cause de sa
malice en use avec perversité en vue du mal (chap. 9, 17 leçon 3, n° 781).
— A l’égard des bons.
Il ne les supporte pas seulement, comme si d’eux-mêmes ils étaient aptes pour le bien, mais il
les prépare et les dispose en les appelant à la gloire (chap. 9, 23; leçon 4, n° 794).
— A l’égard des méchants.
Il ne les dispose pas au mal, car ils ont d’eux-mêmes cette disposition par la corruption du
premier péché, mais il les laisse agir selon leurs convoitises (chap. 9, 23; leçon 4, n° 793).
— A l’égard des pécheurs.
Dieu appelle les pécheurs à la pénitence non en vertu d’une dette, mais gratuitement (chap. 2,
11; leçon 2, n° 206).
Amour de Dieu.
Il consiste en ce qu’il veut absolument le bien d’autrui (chap. 9, 13; leçon 2, n° 763).
Il n’est pas provoqué par le bien de la créature, comme l’amour humain, mais il cause au
contraire le bien même de la créature (chap. 1, 7; leçon 4, n° 67).
Bonté de Dieu.
La bonté de Dieu est d’une excellence telle qu’elle ne peut être suffisamment manifestée ni
d’une seule manière ni dans une seule créature. Elle se manifeste principalement dans les
créatures raisonnables (chap. 9, 22; leçon 4, n° 792).
Elle est sempiternelle (chap. 1, 25; leçon 7, n° 144).
Elle ne dépend de qui que ce soit (chap. 1, 25 leçon 7, n° 144).
Elle est principe de tout bien (chap. 1, 25 leçon 7, n° 144).
Causalité de Dieu.
Pour désigner la causalité de Dieu, <l’Apôtre> se sert de trois prépositions, qui sont "de" (ex),
"par" (per), et "en" (in). La prépo sition "de "(ex) indique le principe du mouvement, et cela
de trois manières d’abord en désignant le principe même de l’action ou du mouvement;
ensuite la matière même; enfin, dans l’opposition des termes contrairçs <de tout processus>,
le terme même à partir duquel se produit le mouvement. C’est à partir de Dieu, comme de leur
premier agent, que tous les êtres viennent à l’existence : et toutes choses viennent de (ex)
Dieu. La préposition "par" (per) désigne de deux manières la cause de l’opération : en tant que
l’opération vient de celui qui opère, en tant que l’opération est l’acte d’un agent supérieur, par
exemple lorsque nous disons que l’homme engendre "par" (per) la vertu du soleil, ou plutôt <
(per) celle de Dieu. Ainsi toutes choses sont dites être "par "(per) Dieu de deux manières
d’abord, comme par un premier agent, par la vertu duquel toutes les autres choses agissent;
ensuite, en tant que sa sagesse, qui est son essence, est la forme par laquelle Dieu a fait toutes
choses. La prépo sition "dans" (in) désigne aussi une triple relation causale : d’abord la
matière. Dans ce sens, on ne peut pas dire que toutes choses sont en Dieu, parce qu’il n’est
pas la cause matérielle des choses; ensuite cette prépo sition "dans" (in) désigne une relation
de cause efficiente. Dans ce sens on dit que toutes choses sont en Dieu, en tant qu’elles sont
sous sa puissance et à sa disposition; enfin cette préposition "dans "(in) désigne une relation
de cause finale. Dans ce sens on dit que toutes choses sont en Dieu, comme dans la bonté qui
conserve (chap. 11, 36; leçon 5, nos 943-947).
Colère de Dieu.
Elle n’est pas en lui comme le trouble de la passion, mais comme un effet de la justice qui
punit (chap. 9, 22; leçon 4, n° 793.
— Chap. 11, 29; leçon 4, n°925).
On dit que Dieu se venge ou se met en colère par similitude avec la colère humaine, mais il ne
verse pas dans la vengeance ou la colère à cause de sa tranquillité d’âme (chap. 1, 18; leçon 6,
n° 110).
Communication de Dieu.
Il a voulu communiquer à d’autres sa bonté naturelle, en les faisant participer à la simi litude
de sa bonté, pour que non seulement il soit bon, mais qu’il soit aussi l’auteur des bontés
(chap. 8, 29; leçon 6, n° 706).
Il est le donateur de l’espérance (chap. 15, 13; leçon 1, n° 1162).
Il est le donateur de la paix (chap. 15, 33; leçon 3, n° 1192).
Élection de Dieu.
Elle consiste en ce que par le bien qu’il veut à l’un, il le préfère à l’autre (chap. 9, 13 leçon 2,
n° 763).
Essence de Dieu.
Elle ne nous est pas connue <ici-bas> selon ce qu’elle est, c’est-à-dire en tant qu’elle est
unique en elle-même. Elle nous sera connue de cette manière dans la patrie. Cependant elle
nous est manifestée par quelques simi litudes prises dans les créatures, qui parti cipent de
multiples manières à ce qui est un en Dieu, et par cette participation notre intel ligence
considère l’unité de la divine essence sous le rapport de la bonté, de la sagesse, de la
puissance, et autres <perfections> du même genre qui sont en Dieu (chap. 1, 20; leçon 6, n°
117).
Éternité de Dieu.
Bien qu’elle soit une et simple, elle peut cependant s’exprimer au pluriel, à cause de la
multitude et de la diversité des siècles qu’elle contient (chap. 11, 36; leçon 5, n° 951).
Gloire de Dieu.
Elle est inhérente à lui, incompréhensible et infinie (chap. 1, 23; leçon 7, n° 134).
La gloire ou la clarté de Dieu est au principe de toute beauté et de toute forme (chap. 1, 23;
leçon 7, n° 135).
Image de Dieu.
Elle se reflète dans la raison naturelle (chap. 2, 14; leçon 3, n° 216).
Intelligence de Dieu.
L’intelligence divine est la cause et la mesure des choses, et voilà pourquoi, selon sa nature
propre, elle est indéfectiblement vraie, et chaque chose est vraie selon qu’elle se conforme à
lui (chap. 3, 4; leçon 1, n° 255).
Jugement de Dieu.
Dieu s’est réservé à lui seul le droit de juger des choses cachées, comme le sont en particulier
les pensées des cœurs et les choses futures (chap. 14, 4; leçon 1, n° 1093).
Le jugement de Dieu est selon la vérité (chap. 2, 2; leçon 1, n° 179).
Il se révèle être juste pour trois raisons : premiè rement, en raison de la dignité infinie de Dieu
contre lequel on pèche; deuxièmement, en raison de la volonté par laquelle on pèche;
troisièmement, en raison de l’effet du péché, qui est le retrait de la grâce (chap. 2, 6 leçon 2,
OS 192-194).
Les jugements de Dieu sont honorables, délec tables, utiles pour ne pas pécher (chap. 3, 2;
leçon 1, n° 250).
Justice de Dieu.
Dieu seul est juste et accomplit les promesses relatives à la justification des hommes (chap. 3,
21; leçon 3, n° 300).
De Dieu seul vient la justice (chap. 3, 10 leçon 2, n° 277).
La justice de Dieu a été manifestée main tenant, c’est-à-dire au temps de la grâce, soit par la
doctrine du Christ, soit par ses miracles, soit même par l’évidence du fait, étant donné qu’un
grand nombre d’hommes ont été justifiés (chap. 3, 21; leçon 3, n° 300).
Manifestation de Dieu.
Dieu s’est manifesté aux hommes soit en répandant sa lumière intérieurement, soit en
présentant à leur esprit les créatures visibles, dans lesquelles, comme dans une sorte de livre,
la connaissance de Dieu était lue (chap. 1, 19; leçon 6, n° 116).
Miséricorde de Dieu.
Elle peut être considérée sous trois rapports d’abord, relativement à la prédestination selon
laquelle de toute éternité Dieu s’est proposé de libérer les hommes; ensuite, rela tivementà la
vocation et à la justification, par lesquelles il sauve les hommes dans le temps; enfin, en
magnifiant par la gloire, quand il libère de toute misère (chap. 9, 15; leçon 3, n° 774).
— Extension de la miséricorde divine.
Elle ne s’étend pas aux démons, comme le soutenait Origène, ni même à tous les hommes en
particulier, mais à toutes les classes d’hommes (chap. 11, 32; leçon 4, n° 932).
— Raison du salut par la miséricorde divine.
La raison pour laquelle Dieu veut que tous soient sauvés par sa miséricorde, c’est afin que les
hommes trouvent en cela un sujet de s’humilier et qu’ils attribuent leur salut non à eux-
mêmes, mais à Dieu (chap. 11, 32; leçon 4, n° 932).
Mort de Dieu.
On peut dire que, pour nous, Dieu meurt en tant qu’il est en nous par la foi (chap. 8, 17; leçon
3, n° 648).
Parole de Dieu.
La parole de Dieu purifie notre cœur (chap. 10, 8; leçon 1, n° 828).
Puissance de Dieu.
C’est le propre de la puissance divine de sanc tifier les hommes par la communication de
l’Esprit-Saint (chap. 1, 4; leçon 3, n° 58).
Prédestination de Dieu.
Elle consiste en ce que Dieu dirige l’homme vers le bien qu’il lui veut, en l’aimant et en le
choisissant (chap. 9, 13; leçon 2, n° 763).
Elle est subséquente à l’amour (chap. 9, 13 leçon 2, n° 763).
Elle a prédestiné de toute éternité les bienfaits qu’il devait donner à ses saints (chap. 8, 29
leçon 6, n° 702).
Sa prédestination a pour objet les biens du salut (chap. 8, 29; leçon 6, n° 702).
Prescience de Dieu.
Dieu a la prescience même des péchés (chap. 8, 29; leçon 6, n° 702).
Règne de Dieu.
Il consiste principalement dans les actes inté rieurs de l’homme et non dans des actes exté
rieurs (chap. 14, 17; leçon 2, n° 1127).
Repentir de Dieu.
On dit parfois que Dieu se repent, non comme s’il y avait en lui un changement <dû au>
repentir, mais parce qu’il se comporte à la manière de celui qui se repent, quand il change ce
qu’il avait fait (chap. 11, 29 leçon 4, n° 925).
Sagesse de Dieu.
Lui seul est sage, c’est—à-dire par essence (chap. 16, 27; leçon 2, n° 1227).
Elle est manifestée à travers ses créatures (chap. 1, 20; leçon 6, n° 118).
Volonté de Dieu.
Elle est la cause des choses (chap. 1, 7; leçon 4, n° 67).
Pour Dieu, vouloir c’est faire (chap. 8, 28 leçon 6, n° 699).
Il a voulu que le mystère de l’Incarnation soit révélé (chap. 16, 27; leçon 2, n° 1227).
Dilection.
La dilection doit être vraie, pure et honnête J (chap. 12, 9; leçon 2, n° 984).
Discrétion.
Voir : SEL.
Dispute.
Elle est un assaut contre la vérité s’accompa gnant de clameurs effrontées (chap. 1, 29 leçon
8, n° 160. — Chap. 13, 13; leçon 3, n° 1078).
Elle est habituellement engendrée par l’envie (chap. 13, 13; leçon 3, n° 1078).
Ébriété.
Écriture sainte.
Est appelée < sainte", d’abord parce que les saints hommes de Dieu ont parlé sous l’inspi
ration de l’Esprit-Saint et que, divinement inspirée, elle est utile pour reprendre, corriger et
former à la justice; puis parce qu’elle contient des choses saintes; enfin parce qu’elle sanctifie
(chap. 1, 2; leçon 2, n° 27).
Sens de l’Écriture.
Le sens de l’Écriture se comprend par les actions des saints (chap. 1, 9; leçon 5, n° 80).
Contenu de l’Écriture.
Elle contient la patience des saints à supporter les maux et la consolation que Dieu leur a
donnée (chap. 15, 4; leçon 1, n° 1148).
Rôle de l’Écriture.
Elle convainc tous les hommes d’injustice pour deux raisons : d’abord pour réprimer leur
jactance, par laquelle ils se regardaient comme justes; ensuite, pour qu’en recon naissant leur
faute ils se soumettent à Dieu (chap. 3, 19; leçon 2, n° 294).
Église.
Elle est fondée sur le Christ, sur Marie et sur les Apôtres (chap. 8, 23; leçon 5, n° 678).
Elle est le Corps mystique du Christ (chap. 12, 4; leçon 2, n° 973).
Elle est signifiée par l’arche (chap. 3, 25 leçon 3, n° 308).
L’ébriété est de par sa nature un péché mortel, c’est-à-dire lorsqu’on s’enivre de propos
délibéré, mais elle est un péché véniel si l’on s’enivre accidentellement, c’est-à-dire contre
son intention (chap. 13, 13; leçon 3, n° 1075).
Édifice de l’Église.
Dans l’édifice spirituel de l’Église non seulement certains sont choisis, mais ils sont rendus
plus forts pour supporter le poids des autres (chap. 15, 1; leçon 1, n° 1142).
Élection.
Épreuve.
La fin de l’élection et de la miséricorde à l’égard des bons est de manifester en eux l’abon
dance de la bonté divine, en les retirant du mal, en les attirant à la justice et finalement en les
conduisant à la gloire (chap. 9, 23 leçon 4, n° 794).
Elle est une tristesse provoquée par le bien du prochain, tristesse qui incite à lui nuire (chap.
1, 29; leçon 8, n° 159).
Épîtres de saint Paul.
Contenu de ses épîtres.
Elles contiennent la quasi-totalité de la doctrine théologique (Prol., n° 6).
Finalité de ses épîtres.
Neuf sont écrites pour l’instruction de l’Église des nations païennes, quatre pour les prélats et
les princes de l’Eglise, ainsi que les rois, une pour le peuple d’Israël (Prol., n° 11).
Quatre causes de ses épîtres.
L’auteur, dans le vase <qu’est saint Paul>. La matière, dans le nom du Christ, qui est le
contenu du vase, parce que toute cette doctrine se rapporte à la doctrine du Christ. Le mode,
dans l’usage de porter; car cette doctrine est transmise par mode épistolaire. La distinction
<des parties> de l’œuvre, en fonction de l’utilité mentionnée (Prol., n° 10).
Sens du mot.
Il peut être entendu de deux manières : ou bien en tant qu’elle est dans celui qui est éprouvé,
ou bien au sens de ce qui est éprouvé (chap. 5, 3; leçon 1, n° 388).
Elle suppose une attente certaine d’un bien futur (chap. 4, 18; leçon 3, n° 368).
Elle rend l’homme joyeux en raison de la certitude, mais elle l’afflige cependant en raison du
délai (chap. 12, 12; leçon 2, n° 990).
Le signe de l’espérance véhémente que nous avons à cause du Christ, est que non seulement
nous nous glorifions de l’espérance de la gloire future, mais aussi des maux que nous
endurons pour elle (chap. 5, 3; leçon 1, n° 386).
Esprit-Saint.
Voir surtout chap. 8; leçons 1-7, nos 595-731).
Il est l’union et le lien du Père et du Fils (chap. 1, 7; leçon 4, n° 73).
Il est l’amour du Père et du Fils (chap. 5, 5; leçon 1, n° 392).
L’Esprit-Saint est la semence spirituelle qui procède du Père (chap. 8, 14; leçon 3, n° 636).
Il est la source dont les eaux, c’est-à-dire les effets, jaillissent en vie éternelle (chap. 8, 18;
leçon 4, n° 655).
Il habite dans l’âme (chap. 8, 2; leçon 1, n° 602).
Il est cause de la paix (chap. 8, 6; leçon 1, n° 618).
Action de l’Esprit-Saint.
Il dispose à l’accueil de la foi les cœurs de ceux qui écoutent la prédication de la doctrine, en
les touchant intérieurement (chap. 15, 19 leçon 2, n° 1171).
Endurcissement.
Voir : RÉPROBATION.
Espérance.
Envie.
Il enseigne non seulement ce qu’il faut faire, en illuminant l’intelligence sur ce qu’il faut
accomplir, mais incline aussi l’affection à agir avec droiture (chap. 8, 2 leçon 1, n° 602.
— Chap. 8, 14; leçon 3, n° 635).
Il cause dans les hommes spirituels le mouvement même de leur volonté et de leur libre
arbitre (chap. 8, 14; leçon 3, n° 635).
Il cause dans notre cœur des gémissements pareils à ceux de la colombe, c’est-à-dire en tant
qu’il nous fait désirer les réalités célestes qui sont différées pour notre âme (chap. 8, 26; leçon
5, n° 693).
C’est par l’Esprit-Saint que le péché est remis (chap. 8, 2; leçon 1, n° 605).
Il nous fait demander, en tant qu’il cause en nous de justes désirs (chap. 8, 26; leçon 5, n°
693).
Communication de l’Esprit-Saint.
À partir du moment où le Christ fut ressuscité, l’Esprit-Saint commence à être donné de
manière plus abondante et plus universelle (chap. 1, 4; leçon 3, n° 58).
Par le don du Saint-Esprit, qui est l’amour du Père et du Fils, nous entrons en partici pation de
son amour qui nous fait aimer Dieu (chap. 5, 5; leçon 1, n° 392).
Sa vertu communique à l’eau du baptême sa puissance de purifier (chap. 6, 4; leçon 1, n°474).
L’Esprit-Saint ne parvient à l’homme que s’il est uni au Christ Tête (chap. 8, 2; leçon 1, n°
605).
Eutychès.
Il a soutenu que même avant l’Incarnation il y eut deux natures <dans le Christ>, mais
qu’après il n’y en eut qu’une seule (chap. 1, 3; leçon 2, n° 37).
Évangile.
Le mot signifie la même chose que bonne annonce (chap. 1, 1; leçon 1, n° 23).
Il annonce une triple liaison de l’homme â Dieu : la première se fait par la grâce de l’union; la
deuxième par la grâce de l’adoption; la troisiâme par la gloire de la fruition (chap. 1, 1; leçon
1, n° 24).
Il opère le salut par la foi de trois manières par la prédication, par la confession, par l’Ecriture
(chap. 1, 16b; leçon 6, n° 100).
La matière de l’Evangile est le Christ (chap. 1, 2; leçon 2, n° 28.")
La parole de l’Evangile accomplit, c’est-à-dire perfectionne, et abrège les paroles de la Loi,
parce qu’elle renferme tous les sacrifices figu ratifs de la Loi en un seul sacrifice; parce
qu’elle renferme tous les préceptes moraux de la Loi dans les deux préceptes de la charité
(chap. 9, 28; leçon 5, n° 803).
Existence.
Toutes choses existent dans le Fils de Dieu, comme dans leur cause primordiale et "préo
pérative" (chap. 8, 32; leçon 6, n° 714).
Fils.
Voir aussi : CHRIST.
Il est consubstantiel et coéternel au Père (chap. 8, 3; leçon 1, n° 607).
Il est Fils du Père par nature (chap. 8, 32; leçon 6, n° 712).
Il est appelé Verbe et Sagesse engendrée (chap. 1, 3; leçon 2, n° 29).
Ayant la même puissance que son Père, il ressuscita par sa propre puissance (chap. 4, 24;
leçon 3, n° 379. — Chap. 11, 36; leçon 5, n° 946).
Il est la matière des saintes Ecritures qui exposent la divine sagesse (chap. 1, 3 leçon 2, n° 29).
Il apparaîtra au jugement aux bons et aux mauvais; mais aux bons selon la gloire de sa
divinité, au méchants selon la nature de son humanité (chap. 2, 16; leçon 3, n° 223).
Anéantissement du Fils.
On dit que le Fils de Dieu s’est anéanti ou amoindri, non en ce sens qu’on ait enlevé quelque
chose à la plénitude ou à la grandeur de sa divinité, mais parce qu’il a assumé notre pauvreté
et notre petitesse (chap. 9, 28 leçon 5, n° 805).
Communication du Fils.
Le Fils de Dieu a voulu communiquer aux autres la conformité à sa filiation, pour être non
seulement le Fils, mais encore le premier-né d’entre les fils (chap. 8, 29 leçon 6, n° 706).
La foi, qui est comme la première partie de la justice, nous vient de Dieu (chap. 3, 22; leçon 3,
n° 302. — Chap. 10, 1; leçon 1, n° 814).
Elle implique un certain assentiment, accom pagné de certitude, à ce que l’on ne voit point,
par la volonté (chap. 1, 17; leçon 6, n° 105).
Elle est le fondement de tous les biens spirituels (chap. 1, 8; leçon 5, n° 77).
Elle est intermédiaire entre la science et l’opinion (chap. 1, 17; leçon 6, n° 105).
La foi en la résurrection du Christ justifie (chap. 4, 24-25; leçon 3, n° 379-380).
La foi ne précède pas la grâce, elle est <infusée> par la grâce (chap. 5, 2; leçon 1, n° 383).
La foi n’est pas seulement spéculative, mais aussi pratique, en tant qu’elle opère par la
charité, c’est pourquoi être en désaccord avec la vraie foi c’est s’opposer à la charité (chap.
12, 16; leçon 3, n° 1005).
La foi du Christ confère le secours de la grâce pour accomplir les préceptes moraux de la Loi
(chap. 3, 31; leçon 4, n° 321).
Acte de foi.
L’acte de foi, qui consiste à croire, dépend de l’intelligence et la volonté mouvant
l’intelligence vers l’assentiment (chap. 1, 17; leçon 6, n° 106).
Triple est l’acte de foi, lequel consiste à croire Dieu (credere Deum), croire à Dieu (credere
Deo), et croire en Dieu (credere in Deum) (chap. 4, 3; leçon 1, n° 327).
La foi est-elle une vertu ?
Elle ne l’est pas, si on la prend pour l’objet de la foi, mais si on la prend pour l’habitus par
lequel nous croyons, elle est quelquefois une vertu, quelquefois non (chap. 1, 17; leçon 6, n°
106).
Elle est une vertu lorsqu’elle est formée par la charité (chap. 1, 17; leçon 6, n° 106).
Prédication de la foi.
La preuve de la foi prêchée, c’est la vie sainte de celui qui prêche (chap. 15, 18; leçon 2, n°
1171).
Au sens strict la fornication se commet avec des courtisanes, qui se prostituaient publique
ment près des voûtes, c’est-à-dire des arcs de triomphe. Mais dans ce contexte ce mot est pris
pour toute union illégitime (chap. 1, 29; leçon 8, n° 158).
Gentils.
Conversion des Gentils.
L’Apôtre attribue la conversion des Gentils à la miséricorce divine (chap. 15, 9; leçon 1, n°
1157).
Justification des Gentils.
Les Gentils sont justifiés par la foi elle-même immédiatement (chap. 3, 30; leçon 4, n° 320).
Fornication.
Théologie des Gentils.
Les Gentils avaient une triple théologie : la théologie civile, qui était observée par les pontifes
pour l’adoration des idoles dans les temples; celle de la fable, que les poètes exposaient dans
les théâtres; la théologie naturelle, que les philosophes observaient dans le monde, en
honorant les parties du monde (chap. 1, 25; leçon 7, n° 145).
Gloire, glorifier.
Voir aussi : SAINTS.
L’homme glorifie Dieu en lui rendant un culte de latrie (chap. 1, 23; leçon 7, n° 134).
Elle sera parfaite en nous dans la vie future mais, en attendant, elle est commencée en nous
dans l’état actuel par l’espérance (chap. 5, 2; leçon 1, n° 385).
Non seulement nous nous glorifions dans l’espé rance de la gloire, mais nous nous glorifions
même dans les tribulations, par lesquelles nous parvenons à la gloire (chap. 5, 3; leçon 1, n°
386).
Grâce.
Elle est le premier des dons de Dieu, parce que c’est par elle que l’impie est justifié (chap. 1,
7; leçon 4, n° 70).
Efficacité de la grâce.
Non seulement la grâce de Dieu s’est étendue vers des multitudes pour détruire le péché
introduit par Adam, mais aussi pour détruire les péchés actuels et procurer beaucoup d’autres
biens (chap. 5, 15; leçon 5, n° 433).
La grâce donnée par Jésus-Christ libère l’homme de ce corps de mort de deux manières :
premièrement, en faisant que la corruption du corps ne domine plus sur l’esprit, en
l’entraînant au péché; deuxiè mement, en détruisant totalement la corruption du corps (chap.
7, 25; leçon 4, n° 593).
État de grâce.
L’état de grâce est appelé jour à cause de la lumière de l’intelligence spirituelle que possèdent
les justes, mais qui manque aux impies (chap. 13, 12; leçon 3, n° 1067).
Origine de la grâce.
L’origine de la grâce est l’amour de Dieu (chap. 1, 7; leçon 4, n° 67).
Sortes de grâces.
— Grâce donnée gratuitement.
Lorsque par la grâce de la prophétie la précon
naissance des choses futures, qui n’est propre qu’à Dieu, est communiquée à l’homme, on
appelle cette sorte de grâce grâce donnée gratuitement (chap. 1, 4; leçon 3, n° 46).
Elle n’est pas directement ordonnée en vue de diriger vers sa fin ultime celui qui la reçoit,
mais <elle est donnée> pour que d’autres soient dirigés par elle (chap. 1, 4; leçon 3, n° 47).
— Grâce qui rend agréable.
Lorsque la créature raisonnable est unie à Dieu selon l’effet de la charité, cela se fait par la
grâce qui rend agréable, laquelle est une grâce d’adoption (chap. 1, 4; leçon 3, n° 46).
— Grâce d’union.
Cette grâce n’appartient qu’au Christ par l’union en son être personnel (chap. 1, 4 leçon 3, n°
46).
Hérésies.
Voir APOLLINAIRE, Arius, Eutychès, MACÉ DONIUS, MANICHÉENS, NESTORIUS,
ORIGÈNE, PÉLAGIENS, PLATONICIENS, PHOTIN, SABELLIUS, VALENTIN.
Hermès.
Les sectateurs d’Hermès croyaient que concernant les corps célestes, l’air et l’eau et d’autres
éléments semblables, il y avait dans leurs représentations quelque chose de divin (chap. 1, 25;
leçon 7, n° 143).
Homme (s).
Il est selon la raison (chap. 7, 17; leçon 3, n° 569).
Il occupe une place intermédiaire entre Dieu et les animaux sans raison, et est en relation avec
ces deux extrêmes : avec Dieu, par sa faculté de comprendre; avec les animaux sans raison,
par sa faculté de sentir (chap. 1, 24; leçon 7, n° 137).
Ils sont divinement remplis de grâces divines (Prol., n° 3).
Ils sont prédestinés à être des fils adoptifs par la grâce seule et non par leurs mérites (chap. 1,
4; leçon 3, n° 48).
Ils revêtent Jésus-Christ par la réception du sacrement de baptême et par son imitation (chap.
13, 14; leçon 3, n° 1079,).
Ils sont comparés dans la sainte Ecriture à un vase pour quatre raisons : à cause de leur
formation, de leur capacité, de leur usage, et de leur fruit (Prol., n° 1).
Les hommes spirituels agissent par leur volonté et leur libre arbitre, parce que l’Esprit-Saint
cause en eux le mouvement même de leur volonté et de leur libre arbitre (chap. 8, 14; leçon 3,
n° 635).
Il ne doit pas scruter la raison des jugements divins avec l’intention de les pénétrer, parce
qu’ils excèdent la raison humaine (chap. 9, 20; leçon 4, n° 789).
Aucun homme n’est juste de soi et en soi, mais de soi tout homme est pécheur (chap. 3, 10;
leçon 2, n° 277).
Ils sont des vases inutiles, soit à cause du péché, soit à cause de l’erreur (Prol., n° 9).
Ils se rendent inutiles lorsqu’ils se détournent de Dieu, pour lequel ils ont été créés (chap. 3,
12; leçon 2, n° 280).
Tout homme est menteur selon son intelligence, et il n’est vrai que dans la mesure où il
participe à la vérité divine (chap. 3, 4; leçon 1, n° 255).
Béatitude de l’homme.
La béatitude de l’homme vient de Dieu (chap. 4, 6; leçon 1, n° 333).
Bien(s) de l’homme.
Le bien de l’homme et sa justice consistent principalement dans les actes intérieurs, à savoir
ceux par lesquels l’homme croit, espère et aime (chap. 12, 1; leçon 1, n° 964).
Le souverain bien de l’homme réside dans la connaissance de Dieu, en ce qu’il adhère à lui et
est instruit par lui (chap. 3, 2; leçon 1, n° 249).
Il ne consiste pas seulement dans l’étendue de la charité, mais principalement dans sa
persévérance jusqu’à la mort (chap. 8, 28; leçon 6, n° 698).
L’homme a trois sortes de biens : le bien de l’âme, qu’il offre à Dieu par l’humilité de la
dévotion et de la contrition; les biens extérieurs, qu’il offre à Dieu par la largesse des
aumônes; le bien de son propre corps (chap. 12, 1; leçon 1, n° 958).
Chair de l’homme.
La chair de l’homme, avant le péché, n’était pas sujette à la souffrance (chap. 8, 3; leçon 1, n°
608).
Circoncision de l’homme.
Il est extérieurement circoncis dans sa chair, afin de pratiquer la circoncision dans son cœur
(chap. 2, 26; leçon 4, n° 240).
Connaissance de l’homme.
L’homme peut connaître Dieu par la raison de trois manières : premièrement par la causa lité,
deuxièmement par voie d’excellence, troisièmement par voie de négation (chap. 1, 19; leçon
6, nos 114-115).
La connaissance de l’homme commence par ce qui lui est connaturel, à savoir par les
créatures sensibles, lesquelles n’ont pas d’analogie pour représenter l’essence divine (chap. 1,
19; leçon 6, n° 114).
Depuis la création du monde les hommes ont commencé à connaître Dieu par ses œuvres
(chap. 1, 20; leçon 6, n° 121).
Devoir de l’homme.
L’homme doit intérieurement à Dieu un culte fondé sur un sentiment de piété; extérieurement
il lui doit un culte de latrie (chap. 1, 25; leçon 7, n° 142).
Dignité de l’homme.
Le suprême degré de dignité chez les hommes c’est de ne pas être porté au bien par les autres,
mais <d’y être porté> par eux-mêmes (chap. 2, 14; leçon 3, n° 217).
Gloire de l’homme.
Il appartient à la gloire de l’homme que sa conscience ne lui fasse pas de reproche (chap. 14,
22; leçon 3, n° 1138).
Héritage de l’homme.
) Il n’obtient pas l’héritage de la gloire d’une manière plus facile que le Christ, il lui faut
parvenir à cet héritage à travers des souffrances (chap. 8, 17; leçon 3, n° 651).
Ignorance de l’homme.
L’homme ignore totalement la Loi pour trois raisons par manque d’intelligence naturelle, par
défaut d’instruction, par défaut d’âge (chap. 2, 19-20; leçon 4, OS 229-230).
Inclination de l’homme.
L’inclination de l’homme, selon la raison, le porte à vouloir le bien et à fuir le mal (chap. 7,
16; leçon 3, n° 567).
Jugement de l’homme.
Le jugement de l’homme est licite en tant qu’il est exercé en vertu de l’autorité accordée par
Dieu (chap. 14, 4; leçon 1, n° 1093).
Le jugement de l’homme, alors même qu’il juge avec justice, n’est pas toujours selon la vérité
de l’objet, mais selon les dépositions des témoins, qui quelquefois ne s’accordent pas avec la
vérité (chap. 2, 2; leçon 1, n° 179).
Liberté de l’homme.
L’homme demeure toujours libre de contrainte quant à l’usage de sa raison, mais il n’est
cependant pas libre d’inclination (chap. 6, 20; leçon 4, n° 508).
Mensonge de l’homme.
Tout homme est menteur selon son intelligence, et il n’est vrai que dans la mesure où il
participe à la vérité divine (chap. 3, 4 leçon 1, n° 255).
Offrande de l’homme.
L’homme offre son corps à Dieu comme une hostie de trois manières : premièrement, quand il
expose son corps à la souffrance et à la mort pour Dieu; deuxièmement, quand l’homme
macère son corps par des jeûnes et des veilles pour servir Dieu; troisièmement, quand
l’homme offre son corps aux œuvres de la justice et au culte divin (chap. 12, 1; leçon 1, n°
959).
Œuvres des hommes.
Elles ne sont pas en mesure de produire l’habitude (habitus) de la justice divine, mais il est
nécessaire que le cœur de l’homme soit intérieurement justifié pour accomplir des œuvres
proportionnées à la gloire divine (chap. 4, 2; leçon 1, n° 325).
Il est réputé faire ce que la raison opère, parce que l’homme est selon la raison (chap. 7, 17;
leçon 3, n° 570).
Paix de l’homme.
Elle ne peut être parfaite aussi longtemps qu’il craint de perdre les biens qu’il possède, mais il
possède alors la véritable paix du cœur, quand il est en possession de tout ce qu’il désire et
qu’il ne craint pas de le perdre (chap. 2, 10; leçon 2, n° 204).
Plaisir de l’homme.
L’homme selon la raison trouve son plaisir dans la Loi de Dieu (chap. 7, 22; leçon 4, n° 585).
Prédestination de l’homme.
Il est prédestiné par filiation adoptive, laquelle est une participation et une image de la
filiation naturelle. Elle est due, comme pour le Christ, à la grâce seule et non à ses mérites
(chap. 1, 4; leçon 3, n° 48).
Prière de l’homme.
L’homme prie aussi longtemps qu’il ordonne toute sa vie en fonction de Dieu (chap. 1, 10;
leçon 5, n° 84).
Soumission et union de l’homme.
Nous sommes unis et soumis à Dieu par l’intelligence et par l’affection (chap. 14, 17 leçon 2,
n° 1127).
Vérité de l’homme.
Il n’a pas la vérité, parce que sa propre nature changeante tend vers le néant (chap. 3, 4 leçon
1, n° 255).
Vieillesse de l’homme.
La vieillesse de l’homme a été introduite par le péché, en tant que par le péché le bien de la
nature est corrompu. Or cette vieillesse domine dans l’homme aussi longtemps que l’homme
est soumis au péché. Et puisque ce qui domine dans l’homme est regardé comme l’homme
lui-même, dès lors dans celui qui est soumis au péché la vieillesse même du péché est appelée
le vieil homme (chap. 6, 6 leçon 2, n° 479).
Vocation de l’homme.
La vocation de l’homme est double : l’une est extérieure et se fait par la bouche du
prédicateur; l’autre est intérieure, elle n’est rien d’autre qu’un certain instinct de l’esprit, par
lequel le cœur de l’homme est mû par Dieu pour donner son assentiment à ce qui relève de la
foi ou de la vertu. Cette vocation est nécessaire, parce que notre cœur ne se tournerait pas vers
Dieu si Dieu lui-même ne nous attirait pas vers lui (chap. 8, 30 leçon 6, n° 707).
Homicide.
L’homicide ne consiste pas seulement en acte, mais aussi dans la volonté (chap. 1, 29 leçon 8,
n° 160).
Hospitalité.
L’hospitalité est une œuvre de miséricorde qui renferme toutes les autres œuvres de
miséricorde (chap. 12, 13; leçon 2, n° 995).
Ignorance.
Elle excuse la faute dès lors que celle-ci en procède et <que l’ignorance> la cause, à condition
toutefois qu’elle ne soit pas causée par une faute (chap. 1, 20b; leçon 7, n° 124).
Immolation.
Voir aussi : SAC
Immolation de l’hostie.
L’hostie qu’on immolait à Dieu réunissait quatre conditions : d’abord l’oblation elle-même
devait être entière et sans corruption; ensuite l’hostie offerte à Dieu était sanctifiée dans
l’immolation elle-même; puis quant à la destruction même du sacrifice, l’hostie était appelée
un sacrifice de suavité et agréable au Seigneur; enfin dans la préparation même du sacrifice on
y ajoutait du sel (chap. 12, 1; leçon 1, n° 960-963).
Impiété.
On qualifie d’impiété le péché qui est commis contre le culte de Dieu (chap. 1, 18; leçon 6,
n°111).
Interpellation.
Voir aussi : PROPHÈTES.
Invocation.
L’invocation se rapporte à la confession de la bouche qui procède de la foi du cœur (chap. 10,
14; leçon 2, n° 836).
Israélites.
Voir aussi : JUIFS.
Les véritables Israélites sont ceux qui sont droits et qui voient Dieu par la foi (chap. 9, 6;
leçon 2, n° 750).
Jouissance.
Il ne faut jouir seulement, écrit saint Augustin, que de ce qui nous rend bienheureux, à savoir
du Père, du Fils et de l’Esprit-Saint (chap. 15, 24; leçon 3, n° 1182).
Jugement.
Sortes de jugements.
Il y a trois sortes de jugements : le premier est juste, parce qu’il se fait selon la règle de la
justice; le deuxième est un jugement injuste, parce qu’il se fait contre la règle de la justice; le
troisième jugement est téméraire (chap. 2, 1; leçon 1, n° 174).
Jugement de discussion.
Tous ne comparaîtront pas au jugement de discussion pour être jugés, car certains siégeront
comme juges (chap. 14, 10 leçon 1, n° 1106).
Jugement téméraire.
Il se commet de deux manières d’abord, quand celui à qui un jugement a été confié procède
sans la connaissance exigée de la vérité; ensuite, quand on s’approprie le jugement des choses
secrètes, qui appartient à Dieu seul (chap. 2, 1; leçon 1, n° 174).
Juifs.
Ils sont comme nos préposés à la garde des livres d’où l’on rend témoignage à notre foi (chap.
9, 13; leçon 2, n° 761).
Conversion des Juifs.
L’Apôtre attribue la conversion des Juifs à la vérité divine (chap. 15, 9; leçon 1, n° 1157).
Faute des Juifs.
Ils pèchent en transgressant la Loi et contre le culte de Dieu (chap. 2, 21-23; leçon 4, nos
232.").
Justification des Juifs.
On dit que les Juifs sont justifiés par la foi, parce que la foi fut la cause première d’où
résultèrent la circoncision et les autres sacrements de la Loi; et ainsi la foi justifie les Juifs,
comme une cause première agissant par des causes intermédiaires (chap. 3, 30; leçon 4, n°
320).
Nom des Juifs
Ils ont pris leur nom du patriarche Juda (chap. 2, 17; leçon 4, n° 225).
Prérogative ou privilège des Juifs
Ils ont le privilège du culte de Dieu, et c’est pour cette raison qu’ils étaient appelés peuple de
Dieu, comme le servant et obéissant à ses préceptes; de l’amour d’élection, en ce que Dieu
leur accordait un grand nombre de bienfaits pour les conduire à une grâce spéciale; de
l’affranchissement du péché originel qui leur était accordé dans la circoncision (chap. 9, 25;
leçon 5, n° 799).
Ils ont un privilège dans la contemplation des choses divines, dans le partage des biens
temporels, dans leurs pères, dans les promesses et dans leur descendance (chap. 3, 2; leçon 1,
n° 249).
Par rapport à la nation à qui a été donnée la Loi; par rapport à la Loi elle-même; par rapport à
l’effet de la Loi (chap. 2, 17-18 leçon 4, n 225".).
Ils ont reçu en premier lieu l’adoption filiale (chap. 9, 13; leçon 2, n° 761).
Justice.
Justice de Dieu.
On appelle justice de Dieu celle par laquelle il justifie les hommes (chap. 1, 17; leçon 6, n°
102).
Justice des hommes.
On appelle justice des hommes celle par laquelle ils prétendent se justifier par leurs propres
forces (chap. 1, 17; leçon 6, n° 102).
Comparaison ou relation entre la justice et la Loi.
La justice, dit l’Apôtre, n’est pas causée par la Loi, mais elle n’est pas opposée à elle. La Loi
a attesté la justice du Christ par la prédiction et la préfiguration, et même par son effet, parce
que, ne pouvant justifier par elle-même, elle rendait témoignage qu’il fallait chercher ailleurs
la justice (chap. 3, 21; leçon 3, OS 300 et 301).
Justice distributive.
Elle a lieu quand on donne ce qui est dû (chap. 9, 15; leçon 3, n° 773).
Il appartient à la justice distributive de distribuer également à des égaux (chap. 9, 14; leçon 3,
n° 766).
Justice originelle.
Elle était une sorte de rectitude consistant en ce que l’âme de l’homme était soumise à Dieu,
les puissances inférieures à la raison, le corps à l’âme, et toutes les choses extérieures à
l’homme, c’est-à-dire de telle sorte que, aussi longtemps que l’âme était soumise à Dieu, les
puissances inférieures à la raison, dont il reçoit inlassablement la vie, tout lui servait et il n’en
éprouvait aucun dommage (chap. 5, 12; leçon 3, n° 416).
Elle avait été donnée divinement au premier homme, non seulement en tant qu’il était une
personne individuelle, mais aussi en tant qu’il était le principe de la nature humaine (chap. 5,
12; leçon 3, n° 410).
Justification, justifier.
Le mot peut être pris dans trois sens : dans le sens de réputer, en sorte que l’on peut être dit
justifié, quand on est réputé juste; dans le sens d’accomplir la justice, en tant que les œuvres
des observateurs de la Loi sont accomplies; au sens de cause de la justice, en sorte que l’on
qualifie de justifié celui qui reçoit de nouveau la justice (chap. 2, 13 leçon 3, n° 212).
Le premier acte de la justification que Dieu opère dans l’homme est le fait même de croire
(chap. 3, 22; leçon 3, n° 302.
— Chap. 4, 5; leçon 1, n° 331. — Chap. 3, 22; leçon 3, n° 302).
Nul n’est justifié si ce n’est par la justice du Christ, qui s’accomplit par la foi en lui (chap. 5,
18; leçon 5, n° 444).
Par la foi de l’Évangile les hommes sont justifiés selon un temps déterminé (chap. 1, 17 leçon
6, n° 102).
La foi de tous les articles <du Symbole> est requise pour la justification (chap. 1, 17 leçon 6,
n° 103).
Latrie.
Voir : CULTE.
Liberté.
La liberté accordée par le Christ, c’est la liberté de l’Esprit, par laquelle nous sommes libérés
du péché et de la mort (chap. 13, 1; leçon 1, n° 1017).
Libre arbitre.
Il porte au bien et au mal (chap. 11, 10; leçon 1, n° 877).
Limbes.
Les saints patriarches étaient retenus dans les limbes, sans souffrir à la vérité la peine du sens,
mais attendant d’entrer dans la gloire par la Passion du Christ (chap. 3, 26 leçon 3, n° 311).
Loi.
Elle est établie pour les injustes qui ont besoin d’être contraints extérieurement (chap. 2, 14;
leçon 3, n° 217).
Elle opère la colère de Dieu, c’est-à-dire sa vengeance, parce que par elle les hommes sont
devenus dignes de la vengeance de Dieu (chap. 4, 15; leçon 2, n° 357).
L’observance de la Loi sans la circoncision a sa valeur (chap. 2, 25; leçon 4, n° 237).
On peut être sous la Loi de deux manières selon une première manière, en tant que soumis
volontairement à son observance.
Selon une autre manière, on dit être sous la Loi lorsqu’on est comme contraint par la Loi; et
ainsi dit-on qu’est sous la loi celui qui est forcé de l’observer non volontairement par amour,
mais par crainte (chap. 6, 14 leçon 3, n° 497).
La Loi a attesté la justice du Christ par la prédiction et la préfiguration (chap. 3, 21; leçon 3,
n° 301).
Désignations diverses du mot "Loi."
Quelquefois le mot "Loi" désigne les cinq livres de Moïse, ou bien le décalogue des préceptes,
ou encore tout le contenu des préceptes cérémoniels, enfin quelque précepte cérémoniel
particulier (chap. 5, 20; leçon 6, n° 462).
Finalité de la Loi.
La Loi est donnée pour que l’homme connaisse ce qu’il doit faire, ce qu’il doit éviter (chap. 3,
20; leçon 2, n° 298).
Aux endurcis la Loi fut donnée comme un fouet, à ceux qui progressent comme un
pédagogue, aux parfaits, elle fut pour eux, dans ses préceptes cérémoniels, comme un signe, et
dans ses préceptes moraux, elle leur a été donnée comme une consolation (chap. 5, 20; leçon
6, n° 463).
justice de la Loi.
La justification de la Loi s’accomplit en nous qui non seulement sommes dans le Christ Jésus,
mais qui ne marchons pas non plus selon la chair, mais selon l’Esprit, c’est-à-dire qui ne
suivons pas les concupiscences de la chair, mais l’instinct de l’Esprit-Saint (chap. 8, 4; leçon
1, n° 613).
Loi de justice.
On appelle loi de justice la loi de l’Esprit de vie, par laquelle les hommes sont justifiés et à
laquelle le peuple juif n’est point parvenu; ou bien la Loi de Moïse, qui, bien comprise, est loi
de justice, parce qu’elle enseigne la justice; ou bien, on dit loi de justice, parce qu’elle rend
les hommes justes non véritablement, mais extérieurement, en leur faisant éviter le péché non
par amour, mais par la crainte de la peine que cette loi infligeait (chap. 9, 31; leçon 5, n° 809).
Loi de la foi.
L’Apôtre appelle loi de la foi, la Loi écrite intérieurement, qui règle non seulement les œuvres
extérieures, mais aussi les mouvements mêmes du cœur, parmi lesquels la foi est le premier
(chap. 3, 27; leçon 4, n° 316).
Loi des œuvres.
L’Apôtre appelle loi des œuvres la Loi extérieurement proposée et écrite, qui règle les œuvres
humaines extérieurement, prescrivant ce qu’on doit accomplir et indiquant par ses
prohibitions ce qu’on doit éviter (chap. 3, 27; leçon 4, n° 316).
Nom de Loi.
Parfois le nom de Loi est pris pour tout l’Ancien Testament, et non point pour les cinq livres
de Moïse seulement (chap. 3, 19; leçon 2, n° 292).
Œuvres de la Loi.
Il y a deux sortes d’œuvres de la Loi : les unes appartenant à la Loi de Moïse, comme
l’observance des préceptes cérémoniels; les autres appartenant à la loi de la nature, parce
qu’ils se rapportent à la loi naturelle (chap. 3, 20; leçon 2, n° 297).
Loi divine.
La Loi divine se réfère au jugement divin, qui a pour objet l’examen des mouvements
intérieurs du cœur. Sous le régime de la Loi divine les mauvaises convoitises, même
intérieures, sont imputées à péché, et elles abondent à cause de la Loi qui les interdit sans les
détruire (chap. 5, 20; leçon 6, n° 456).
Loi humaine.
La loi humaine se réfère au jugement humain, qui a pour objet les actes extérieurs. Elle atteint
sa fin, quand par sa défense et la menace du châtiment elle empêche la multiplication des
actes extérieurs du péché, bien que la convoitise intérieure augmente davantage (chap. 5, 20;
leçon 6, n° 456).
Loi naturelle.
Elle vit dans l’homme aussi longtemps que la raison naturelle exerce efficacement sa force en
lui, mais meurt dans l’homme quand la raison naturelle succombe aux passions (chap. 7, 1;
leçon 1, n° 520).
Macédonius.
Il prétendit que l’Esprit était une créature et qu’il était inférieur au Père et au Fils (chap. 8, 26;
leçon 5, n° 692).
Mal.
Le mal n’est rien si ce n’est la privation du bien (chap. 11, 36; leçon 5, n° 948).
Mal des pécheurs.
Même le mal des pécheurs tourne au bien des justes (chap. 8, 28; leçon 6, n° 697).
Mal de la peine.
Le mal de la peine est de deux espèces : le premier consiste dans l’acte d’infliger des maux, le
second dans l’acte de retirer des biens (chap. 8, 31; leçon 6, n° 711).
Malice.
Le mot "malice" indique une habitude vicieuse opposée à la vertu (chap. 1, 29; leçon 8, n°
158).
Malignité.
Mariage.
La malignité suppose un feu mauvais, c’est-à-dire une mauvaise affection dans le cœur (chap.
1, 29; leçon 8, n° 161).
Manichéens.
Ils affirment que le Dieu de l’Ancien Testament n’est pas le même que le Père de Notre
Seigneur Jésus-Christ (chap. 1, 3; leçon 2, n° 41).
Ils affirment que le Christ n’aurait pas eu une chair véritable, mais seulement la ressemblance
de la chair, une sorte <de chair> imaginaire (chap. 1, 3; leçon 2, n° 41.
— Chap. 8, 3; leçon 1, n° 608. — Chap. 9, 5; leçon 1, n° 747).
Ils condamnent les écrits de l’Ancien Testament. Il n’y eut pas d’autres saints écrits avant
l’Evangile (chap. 1, 3; leçon 2, n° 41).
Selon eux, la nature de la chair n’est pas l’œuvre de Dieu et ne peut lui être soumise (chap. 8,
7; leçon 2, n° 623).
Ils prétendent que la chair n’est naturellement pas bonne, et que par conséquent la créature de
Dieu ne l’est pas (chap. 7, 18; leçon 3, n 575).
Ils attribuent à la naissance la diversité des événements qui arrivent au cours de la vie des
hommes, de telle sorte que la vie et la mort de chacun seraient disposées d’après
l’emplacement de la constellation sous laquelle il est né (chap. 9, 11; leçon 2, n° 758).
Marie, bienheureuse Vierge.
Elle a reçu, à la suite du Christ, une très grande plénitude de grâces, elle qui a été choisie pour
être la mère du Christ (chap. 8, 23 leçon 5, n° 678).
Indissolubilité du mariage.
Elle est due principalement au fait qu’il est le sacrement de l’union indissoluble du Christ et
de l’Eglise, ou bien du Verbe dans la personne du Christ (chap. 7, 2; leçon 1, n° 522).
Martyre.
Selon saint Augustin, ce n’est pas la peine qui fait le martyre, mais la cause (chap. 8, 36 leçon
7, n° 724).
Maudire.
Maudire c’est dire du mal (chap. 12, 14 leçon 3, n° 1000).
Comme pour bénir, maudire se fait de trois manières : sous forme de déclaration, de
commandement et de souhait; et chacune de ces manières peut être bonne ou mauvaise (chap.
12, 14; leçon 3, nos 1000-1002).
Mérite.
Mérite des œuvres.
Si l’on considère nos œuvres dans leur nature et selon qu’elles procèdent du libre arbitre de
l’homme, elles ne méritent pas de plein droit (ex condigno), mais seulement en tant qu’elles
procèdent de la grâce de l’Esprit-Saint (chap. 6, 23; leçon 4, n° 517).
Ministre.
Il confère la grâce de plusieurs manières : soit par l’administration des sacrements de la grâce,
soit par l’exhortation de la parole (chap. 1, 11; leçon 5, n° 87).
Mission.
On est envoyé par le Seigneur de deux manières immédiatement par Dieu lui-même, par une
inspiration intérieure; médiatement, par l’autorité des chefs de I’Eglise, qui tiennent la place
de Dieu (chap. 10, 15; leçon 2, n° 838).
Signe de la mission immédiate.
Le signe de la mission immédiate est quelquefois l’autorité de la sainte Ecriture d’autres fois
la vérité des choses qu’on annonce; quelquefois encore l’opération des miracles (chap. 10, 15;
leçon 2, n° 838).
Elle est appelée solde du péché, c’est-à-dire la rétribution que le péché donne à ceux qui en
sont les esclaves (chap. 6, 23; leçon 4, n° 516).
Mort.
La mort est la preuve du péché originel (chap. 5, 15; leçon 5, n° 432).
Nestorius.
Il a soutenu que l’union du Verbe à cet homme s’est faite seulement selon l’inhabitation,
c’est-à dire selon que le Fils de Dieu a habité dans cet homme plus excellemment que dans les
autres (chap. 1, 3; leçon 2, n° 35).
Il a soutenu que la personne ou l’hypostase du Verbe était autre que celle de l’homme, en
sorte que le Fils de Dieu et le fils de l’homme différaient selon la personne (chap. 1, 3 leçon 2,
n° 35. — Chap. 9, 5; leçon 1, n° 747).
Obéissance.
L’obéissance a lieu dans tout ce que nous pouvons faire volontairement (chap. 1, 5; leçon 4,
n° 62).
Obsécration.
User de l’obsécration, c’est faire appel au témoignage des choses sacrées (chap. 12, 1; leçon
1, n° 955).
Observer.
Ce n’est pas autre chose que considérer avec attention, ce qui est pris parfois <dans le sens du
bien>, parfois <dans le sens du> mal. <Dans le sens du> mal, quand on considère avec
attention la condition et le progrès d’autrui afin de lui nuire; <dans le sens du> bien, soit
quand on considère les préceptes de Dieu en vue de les accomplir, soit quand on considère
attentivement les bons en vue de les imiter. Enfin on observe les méchants pour s’en garder
(chap. 16, 17; leçon 2, n° 1215).
Miséricorde.
Voir : DIEU.
Œuvre (s)
Œuvres divines. La paix parfaite aura lieu quand la volonté se reposera dans la plénitude
de tout bien, en obtenant l’immunité de tout mal (chap. 1, 7; leçon 4, n° 792).
La fin de toutes les œuvres divines est la manifestation de la divine bonté (chap. 9, 22; le on
4 n° 70
Œuvres humaines. Passion.
Elles peuvent être considérées de deux manières d’abord selon leur substance sous ce rapport
elles n’ont aucun mérite de stricte justice pour que le salaire de la gloire éternelle leur soit
attribué; ensuite selon leur principe, en tant que faites sous l’impulsion de Dieu, selon son
décret de prédestination, et sous ce rapport le salaire leur est destiné (chap. 1, 26; leçon 8, n°
147).
Patience.
La patience suppose la tolérance des ennemis comme un dû (chap. 4, 4; leçon 1, n 329).
On qualifie à proprement parler de passion accompagnée d’une égalité de cœur (chap. 2, 7;
leçon 2, n° 196).
Bonnes œuvres.
Une œuvre est qualifiée de bonne en raison de son orientation vers sa fin requise et sa
conformité à la règle requise, lesquelles sont la Loi de Dieu et la raison humaine (chap. 2, 7;
leçon 2, n° 196).
Principes des bonnes œuvres.
Les principes des bonnes œuvres sont au nombre de trois : le premier d’entre eux concerne la
rectitude de l’œuvre elle-même, et c’est la justice; le deuxième principe est le discernement de
la raison; le troisième principe est la rectitude de l’intention (chap. 3, 10-11; leçon 2, n° 277-
279).
Olivier.
L’olivier signifie la miséricorde (Prol., n° 6).
Patriarches.
Ils étaient supportés par Dieu, puisqu’ils étaient retenus dans les limbes, sans souffrir à la
vérité la peine du sens, mais attendant d’entrer dans la gloire par la passion du Christ (chap. 3,
26; leçon 3, n°311).
Orgueil.
C’est le commencement du péché sous le rapport de l’aversion (chap. 7, 7; leçon 2, n° 538).
Origène.
Est un remarquable amant du Christ (chap. 8, 38; leçon 7, n° 728).
Erreur d’Origène.
Il a soutenu que les âmes des hommes avaient été créées en même temps que les anges, et que
selon le mérite des œuvres bonnes ou mauvaises accomplies alors, elles obtiennent une
condition de vie différente (chap. 9, 11; leçon 2, n° 758).
Paix. (chap. 1, 5; leçon 4, n° 63).
Elle est causée par l’Esprit-Saint (chap. 8, 6; leçon 1, n° 618).
Paul.
Action de grâces de Paul.
Saint Paul rend grâces pour la foi, parce que c’est elle qui est le fondement de tous les biens
spirituels (chap. 1, 8; leçon 5, n° 77).
Apostolat ou mission de Paul.
Voir aussi : PRÉDICATEUR.
Il a reçu l’apostolat de toutes les nations Il a porté le Nom du Christ d’abord dans son corps,
en imitant sa vie et sa passion (Prol., n° 5); ensuite sur ses lèvres, car il est manifeste qu’il
nomme très souvent le Christ dans ses épîtres (Prol., n° 6).
Il a porté le Nom du Christ non seulement à ceux qui étaient présents, mais aussi aux absents
et à ceux qui devaient venir, en exposant le sens de l’Ecriture (Prol., n° 7).
Appellation de Paul.
Il est <l’évangile> du Fils de Dieu pour trois raisons : parce qu’il en est le sujet, parce qu’il l’a
prêché par lui-même, en vertu de son office propre, parce qu’il l’a enjoint lui-même (chap. 1,
9; leçon 5, n° 79).
Il est appelé vase d’élection (Prol., n° 1).
Il fut un vase d’élection utile, parce qu’il fut pur à l’égard du péché et de l’erreur (Prol., n° 9).
Il est un vase porteur du Nom divin (Prol., n° 4).
Excellence de Paul.
Elle est montrée sous trois aspects : par rapport à la grâce de son élection; par rapport à sa
fidélité; par rapport à son excellence singulière (Prol., n° 8).
Nom de Paul.
Sa signification en hébreu, en grec et en latin dans la langue hébraïque, <le nom de Paul>
aurait le même sens que <le mot> admirable ou "choisi"; dans la langue grecque il a le même
sens que "en repos", et dans la langue latine il a le même sens que "petit" (chap. 1, 1; leçon 1,
n° 17).
Moment de l’imposition de son nom (de Saul à Paul) : trois opinions sur ce point (chap. 1, 1;
leçon 1, n° 18).
Péché (s).
Est péché toute œuvre qui est contre la foi ou contre la conscience, bien que de par sa nature
elle semble bonne (chap. 14, 23 leçon 3, n° 1141).
Les péchés n’ont pas véritablement d’être, mais ils sont péchés par défaut d’être, étant donné
que le mal n’est rien si ce n’est la privation du bien (chap. 11, 36; leçon 5, n° 948).
Ce qu’il y a d’entité dans le péché, tout cela est de Dieu (chap. 11, 36; leçon 5, n°948).
On dit que le péché habite dans l’homme, non comme si le péché était un être réel, puisqu’il
n’est que la privation du bien, mais pour désigner la permanence de cette absence dans
l’homme (chap. 7, 17; leçon 3, n° 571).
Le premier péché de l’homme semble avoir été la désobéissance, non selon l’acte extérieur,
mais selon le mouvement intérieur de l’orgueil, par lequel< Adam> a voulu s’opposer au
précepte divin (chap. 5, 19 leçon 5, n° 446).
Il est une offense faite à Dieu (chap. 4, 8 leçon 1, n° 338).
Tous les péchés sont en quelque sorte des outrages envers Dieu (chap. 15, 3; leçon 1, n°
1147).
Il est une transgression de la Loi divine et la désobéissance aux préceptes célestes (chap. 5,
14; leçon 4, n° 427. — Chap. 6, 16; leçon 3, n° 501).
Tout péché est iniquité en tant qu’il est en désaccord avec l’équité de la Loi divine (chap. 6,
19; leçon 4, n° 506).
Il consiste en un éloignement de Dieu (chap. 1, 24; leçon 7, n° 139).
Tout péché est contre la nature de l’homme, en tant qu’il est contre la droite raison (chap. 1,
26; leçon 8, n° 149).
Sortes de péchés. — Contre l’Esprit-Saint.
Selon Athanase, Hilaire, Ambroise, Jérôme et Chrysostome, on appelle péché contre l’Esprit-
Saint le blasphème qui consiste à attribuer les œuvres de l’Esprit-Saint à l’esprit immonde
(chap. 2, 5; leçon 1, n° 187).
Selon Augustin, le péché contre l’Esprit-Saint est une parole ou un blasphème que l’on
profère contre l’Esprit-Saint, par qui s’opère la rémission des péchés (chap. 2, 5; leçon 1, n°
187).
Selon les maîtres qui ont suivi <Augustin>, le péché contre l’Esprit-Saint est celui que l’on
commet avec une malice déterminée, en opposition avec ce qui est attribué en propre à
l’Esprit-Saint, c’est-à-dire la bonté (chap. 2, 5; leçon 1, n° 187).
Ce péché est irrémissible (chap. 2, 5; leçon 1, n° 187). Six espèces lui Sont assignées : deux
du côté de Dieu, c’est-à-dire le désespoir et la présomption; deux du côté de l’homme, c’est-à-
dire l’endurcissement et l’impénitence; d’autres se prennent du côté des dons de Dieu, c’est-à-
dire contre la foi par l’attaque de la vérité reconnue, et contre la charité par l’envie de la grâce
<accordée> à nos frères (chap. 2, 5; leçon 1, n° 188).
— De commission.
Il y a trois grandes sortes de péchés de commission : de la bouche, par action et en pensée
(chap. 3, 13-15; leçon 2, OS 282-289).
— De la chair et contre nature.
Ils sont ordinairement plus blâmables, parce que par eux l’homme est ravalé à ce qui en lui est
animal (chap. 1, 26; leçon 8, n° 147).
Les vices contre nature sont les plus graves parmi les péchés de la chair (chap. 1, 27 leçon 8,
n° 151).
Par le péché contre nature l’homme déchoit même de sa nature animale (chap. 1, 26 leçon 8,
n° 147).
— D‘impitité.
On qualifie d’impiété le péché qui est commis contre le culte de Dieu (chap. 1, 18; leçon 6, n
111).
— D’omission.
Voir chap. 3, 10-12; leçon 2, nos 276-281.
— Mortel.
Aucun acte n’est péché mortel sans le consentement de la raison (chap. 5, 1; leçon 1, n° 598).
Quiconque pèche mortellement se détourne du bien immuable, et met sa fin dans un bien
périssable (chap. 2, 6; leçon 2, n° 193).
Celui qui pèche mortellement a la volonté de demeurer perpétuellement dans le péché, à
moins d’une cause accidentelle, par exemple lorsqu’il craint une peine ou quelque autre
empêchement (chap. 2, 6; leçon 2, n° 193).
La faute du péché mortel étant en quelque sorte infinie, il est nécessaire qu’une peine infinie y
corresponde (chap. 2, 6; leçon 2, n° 192).
— Originel.
C’est le péché de la nature, parce qu’il a été commis par la volonté du principe de la nature
humaine (chap. 5, 12; leçon 3, n° 409).
Il est appelé iniquité, parce qu’il est la privation de la justice originelle (chap. 4, 7; leçon 1, n°
335).
Il est indiqué au pluriel (iniquités) dans deux circonstances soit à cause de la pluralité des
hommes, dans lesquels le péché originel se multiplie, soit parce qu’il contient en quelque
sorte en puissance tous les autres péchés (chap. 4, 7; leçon 1, n° 335. — Chap. 5, 12; leçon 3,
n° 420. — Chap. 5, 13; leçon 4, n° 422).
Il est entré dans ce monde par Adam, non seulement par imitation, mais aussi par propagation
(chap. 5, 12; leçon 3, n° 407). Il se transmet à chaque homme par l’acte de la nature, qu’est la
génération. Par cette même génération se transmet aussi la déficience de la nature humaine,
déficience qui est la conséquence du péché de notre premier père. Elle consiste en la privation
de la justice originelle divinement donnée au premier homme, en tant que personne
individuelle et principe de la nature humaine (chap. 5, 12; leçon 3, n° 410).
Le péché originel est prouvé par la mort (chap. 5, 15; leçon 5, n° 432).
On dit que ce péché est remis, parce que sa tache disparaît avec la venue soudaine de la grâce;
mais il demeure en acte, car son foyer, ou concupiscence, n’est pas totalement détruit en cette
vie, mais <ce péché> est remis et adouci (chap. 4, 7; leçon 1, n° 335).
— Véniel.
Les péchés véniels, bien qu’ils soient légers, séparent et éloignent cependant l’homme de
Dieu à force d’être multipliés (chap. 4, 8 leçon 1, n° 337).
Connaissance du péché.
Au paradis, l’homme avait eu pleine connaissance du péché, bien que sans en avoir
l’expérience (chap. 7, 9; leçon 2, n° 547).
Effet du péché.
Il prive de la grâce et s’étend de la chair à l’esprit (chap. 2, 6; leçon 2, n° 194. — Chap. 7, 18;
leçon 3, n° 575).
Le péché brise l’ordre légitime des affections (chap. 5, 6; leçon 2, n° 395).
Il entraîne la condition d’esclavage (chap. 1, 1; leçon 1, n° 20).
Un seul péché peut être la cause d’un autre indirectement et directement (chap. 1, 24; leçon 7,
n° 139).
Les hommes encourent la vengeance de la damnation éternelle pour leurs péchés (chap. 5, 9;
leçon 2, n° 400).
Foyer du péché.
Le foyer est en quelque sorte la peine du péché, et il a une double cause l’une est le péché lui-
même, qui dans le pécheur a pris la domination et lui a imposé une loi; la seconde c’est Dieu
qui a infligé à l’homme pécheur cette peine dans l’insoumission des passions inférieures à sa
raison (chap. 7, 23; leçon 4, n° 587).
Gravité du péché.
L’homme pèche plus gravement après la Loi de Moïse qu’auparavant (chap. 2, 12; leçon 2, n°
207. — Chap. 4, 15; leçon 2, n° 358. — Chap. 5, 20; leçon 6, n° 458, etc.).
On pèche d’autant plus gravement que la dignité de la personne contre laquelle on pèche est
élevée (chap. 2, 6; leçon 2, n° 192).
La faute du péché mortel est en quelque sorte infinie (chap. 2, 6; leçon 2, n° 9).
Libération du péché.
Nous sommes libérés par Dieu non du foyer du péché, mais du règne du péché, et nous
devons faire des efforts pour que le péché ne récupère pas la domination qu’il a déjà perdue
dans notre corps (chap. 6, 12 leçon 3, n° 493).
Loi du péché.
La loi du péché captive l’homme de deux manières : d’abord l’homme pécheur par le
consentement et par l’acte; ensuite l’homme en état de grâce quant au mouvement de la
concupiscence (chap. 7, 23; leçon 4, n° 588).
Œuvres du péché.
Les œuvres du péché sont infructueuses, parce qu’elles n’aident pas l’homme à acquérir la
béatitude (chap. 6, 21, leçon 4, n° 510).
Règne du péché.
Le péché règne dans l’homme de deux manières selon une première manière, par le
consentement intérieur de la raison; selon une seconde manière, par l’exécution de l’œuvre
(chap. 6, 12; leçon 3, n° 494).
Rémission des péchés.
Les péchés, non seulement présents mais aussi passés, n’ont pu être remis que par le sang du
Christ (chap. 3, 25; leçon 3, n° 310).
C’est par l’Esprit-Saint que le péché est remis (chap. 8, 2; leçon 1, n° 605).
Par la rémission des péchés la justice de Dieu est manifestée, soit qu’on l’interprète de la
justice par laquelle Dieu lui-même est juste, soit de celle par laquelle il justifie les hommes
(chap. 3, 26; leçon 3, n° 311).
Transmission du péché.
Seul le premier péché du premier père se transmet aux autres hommes, parce que c’est
uniquement par ce premier péché qu’a été détruit le bien de la nature transmissible par
l’origine naturelle. Par les autres péchés est ôté le bien de la grâce personnelle, qui ne passe
pas à la postérité (chap. 5, 12; leçon 3, n°411).
Vieillesse du péché.
Par vieillesse du péché on peut entendre soit la culpabilité elle-même, soit la tache des péchés
actuels, ou aussi l’habitude de pécher qui pousse nécessairement au péché, ou encore le foyer
même du péché provenant du péché du premier père (chap. 6, 6; leçon 2, n° 480).
Pécher.
Le pouvoir de pécher vient-il de Dieu ? La puissance même par laquelle on pèche vient de
Dieu. Car cette puissance par laquelle on pèche et on agit avec droiture est une même
puissance. Mais quand elle est ordonnée au bien, elle vient de Dieu, en revanche lorsqu’elle
est ordonnée au péché, elle vient de l’imperfection de la créature, en tant qu’elle est issue du
néant (chap. 13, 1 leçon 1, n° 1023).
Pécheur(s).
Tout pécheur peut être appelé prévaricateur, en tant qu’il a transgressé la loi naturelle (chap.
4, 15; leçon 2, n° 358).
Ils sont comparés au sable, parce qu’ils sont comprimés par les flots du monde comme il en
est du sable de la mer (chap. 4, 18 leçon 3, n° 369).
Le pécheur se vend lui-même comme esclave du péché, au prix de la satisfaction de sa propre
volonté (chap. 7, 14; leçon 3, n° 561).
Peine.
Voir chap. 2, 8; leçon 2, n° 199-202.
Des réprouvés.
Elle est subie d’abord et principalement dans leur âme et ensuite dans leur corps (chap. 2, 9;
leçon 2, n° 202).
Du péché.
Les chrétiens, pour le même péché, par exemple pour l’adultère ou le vol, seront punis d’une
peine plus sévère que les infidèles (chap. 2, 9; leçon 2, n° 203).
Considérée dans la totalité la peine des infidèles est plus sévère à cause du péché d’infidélité,
lequel est le plus grave (chap. 2, 9; leçon 2, n° 203).
Du sens.
Les saints patriarches étaient retenus dans les limbes, sans souffrir à la vérité la peine du sens
(chap. 3, 26; leçon 3, n° 311).
Pélagiens.
Ils prétendaient que l’homme pouvait observer tous les préceptes de la Loi par ses propres
forces naturelles (chap. 2, 14; leçon 3, n° 216).
Ils prétendaient que le commencement de la bonne œuvre vient de nous-mêmes, en tant que
nous voulons le bien (chap. 7, 18 leçon 3, n° 579).
Ils niaient l’existence du péché originel dans les enfants (chap. 5, 12; leçon 3, n° 407).
Ils prétendaient que la grâce est donnée d’après les mérites antécédents (chap. 9, 11; leçon 2,
n° 758. — Chap. 9, 15; leçon 3, n° 771).
Pénitence.
Il y a une double pénitence : l’une intérieure, qui consiste dans la contrition du cœur et par
laquelle on s’afflige de ses péchés passés. Cette pénitence est requise chez le baptisé. L’autre
pénitence est extérieure et elle consiste dans la satisfaction extérieure qui n’est pas requise
chez le baptisé (chap. 11, 29; leçon 4, n° 927).
Père.
Il est appelé Père du Christ selon sa propriété) mais notre Père par appropriation (chap. 1, 7;
leçon 4, n° 72).
Charité du Père.
La charité de Dieu le Père pour nous s’est manifestée en ce qu’il nous a donné son Esprit
(chap. 5, 8; leçon 2, n° 399).
Puissance du Père.
Elle est la même que celle du Fils (chap. 4, 24; leçon 3, n° 379).
Photin.
Il exposa que le Christ eut un commencement par <sa conception> de la Vierge Marie,
comme un homme ordinaire, et qu’il parvint par le mérite de sa vie à une élévation telle qu’il
fut appelé Fils de Dieu de préférence aux autres saints (chap. 1, 3; leçon 2, n° 30).
Piété.
On appelle piété le culte que l’on rend à Dieu, comme au Père souverain (chap. 1, 18 leçon 6,
n 111).
Platoniciens.
Ils prétendirent qu’un culte divin est dû à toutes les substances douées de raison, qui sont au-
dessus de nous, par exemple aux démons, aux âmes des corps célestes, aux intelligences,
c’est-à-dire aux substances séparées (chap. 1, 25; leçon 7, n° 143).
602
Préceptes.
Préceptes affirmatifs.
Les préceptes affirmatifs obligent toujours, mais non pas à toujours (chap. 10, 10; leçon 2, n°
832).
Préceptes cérémoniels.
Ils règlent les hommes dans leur rapport au culte divin (chap. 7, 12; leçon 2, n° 551).
Ils ne conféraient pas la grâce sanctifiante, mais la figuraient seulement (chap. 2, 13; leçon 3,
n° 212. — Chap. 3, 20; leçon 2, n° 297. — Chap. 3, 28; leçon 4, n° 317).
Préceptes judiciaires.
Ils règlent légitimement l’homme dans son rapport avec le prochain (chap. 7, 12 leçon 2, n°
551).
Préceptes moraux.
Ils ne permettent pas l’acquisition de l’habitus de la justice (chap. 2, 13; leçon 3, n° 212).
Prédestination.
Ce nom vient du <mot> <4 destination." Car on dit prédestiné ce qui est comme destiné à
l’avance (chap. 1, 4; leçon 3, n° 43).
La prédestination est éternelle (chap. 8, 29 leçon 6, n° 702).
Elle est la préparation à la gloire (chap. 9, 13; leçon 2, n° 764).
Elle a parfois le sens de mission. On appelle destinés ceux qui sont envoyés à quelque fin.
Mais parfois "destiner" a le même sens que "se décider à" (chap. 1, 4; leçon 3, n° 43).
La prédestination suppose une préordination dans la disposition de ce qu’on doit accomplir,
ou une sorte de causalité par rapport aux choses futures (chap. 8, 29 leçon 6, n° 702).
Prédicateur, prédication.
Il est le témoin de la vérité (chap. 9, 1; leçon 1, n° 736).
Il annonce la parole de Dieu sans intention d’obtenir de la louange ou du profit, mais en vue
du salut de l’homme et de la gloire de Dieu (chap. 10, 15; leçon 2, n° 840).
Matière de la prédication.
Il prêche ce qui est utile à la vie présente en annonçant une triple paix : la paix que le Christ a
établie entre les hommes et Dieu, la paix qu’il faut garder avec tous les hommes, ce qui peut
donner la paix à l’homme en lui-même. Il prêche aussi ce que nous espérons posséder dans
l’autre vie (chap. 10, 15 leçon 2, n° 841).
Prescience.
Elle suppose seulement la connaissance des choses futures (chap. 8, 29; leçon 6, n° 702).
La prescience des mérites ne peut être un motif
de prédestination, car ces mérites connus à l’avance tombent sous la prédestination tandis que
la prescience des péchés peut être un motif de réprobation, sous le point de vue de la peine qui
est préparée aux réprouvés, à savoir en tant que Dieu se propose de punir les méchants à cause
des péchés qui viennent d’eux-mêmes et non de Dieu; tandis qu’il se propose de récompenser
les justes pour des mérites qui ne sont point d’eux-mêmes (chap. 9, 13; leçon 2, n° 764).
Prière.
Voir aussi : HOMME (Prière de l’homme).
Elle est l’élévation de notre intelligence vers Dieu (chap. 1, 10; leçon 5, n° 84).
C’est dans le secret que l’affaire de la prière se traite en présence de Dieu (chap. 1, 9 leçon 5,
n° 78).
Il faut prier pour les infidèles, afin qu’ils soient sauvés (chap. 10, 1; leçon 1, n° 814).
Par la prière s’éveille en nous la sollicitude, la ferveur s’enflamme, nous sommes stimulés au
service de Dieu, la joie de l’espérance augmente en nous, et nous obtenons le secours dans la
tribulation (chap. 12, 12 leçon 2, n° 992).
Princes.
Ils sont sous le gouvernement de Dieu, comme sous celui du Prince suprême, en tant que
ministres constitués (chap. 13, 4; leçon 1, n° 1034).
Les mauvais princes sont ministres de Dieu pour infliger selon l’ordre divin des peines, bien
que ce soit sans intention de leur part (chap. 13, 4; leçon 1, n° 1034).
Principautés.
Elles sont <les esprits> députés à la garde des nations (chap. 8, 38; leçon 7, n° 728).
Prochain.
Les saints anges et tous les hommes sont notre prochain, soit parce qu’ils possèdent déjà la
béatitude vers laquelle nous tendons, soit parce qu’ils y tendent avec nous (chap. 13, 9 leçon
2, n° 1056).
Prophète (s).
On appelle prophètes de Dieu ceux qui sont inspirés par l’Esprit divin (chap. 1, 2 leçon 2, n°
26).
Les prophètes interpellent contre un peuple de trois manières : premièrement, en conformant
sa volonté à la volonté divine qui lui est révélée; deuxièmement, en interpellant contre le
règne du péché, c’est-à-dire afin de détruire non les hommes mais les péchés des hommes;
troisièmement, en interpellant ou en priant sous forme d’avertissement (chap. 11, 2; leçon 1,
n° 866).
Les prophètes ont attesté la justice du Christ par leurs prédictions (chap. 3, 21; leçon 3, n°
301).
Prophétie.
On appelle prophétie une sorte d’apparition, par révélation divine, de choses qui sont
éloignées (chap. 12, 7; leçon 2, n° 978).
Prophétie de menace.
Ce qui est promis ou annoncé selon une prophétie de menace n’est pas prédit comme devant
s’accomplir quoi qu’il arrive, mais selon que l’exigent les mérites humains qui peuvent être
modifiés (chap. 3, 4; leçon 1, n° 258).
Prophétie de prédestination.
Ce qui est promis selon la prophétie de prédestination doit de toute manière s’accomplir
(chap. 3, 4; leçon 1, n° 258).
Prudence.
Elle est, selon Aristote, la rectitude de la raison dans les actes (chap. 8, 6; leçon 1, n° 617).
Prudence de la chair.
Elle est cause de mort (chap. 8, 7; leçon 2, n° 620).
Prudence de l’esprit.
On parle de prudence de l’esprit lorsque, présupposant la fin d’un bien spirituel, on conseille,
on juge et on prescrit ce qui est convenablement ordonné à cette fin. Voilà pourquoi une telle
prudence est vie, c’est-à-dire cause de la vie de la grâce et de la gloire. Elle est aussi paix,
c’est-à-dire cause de la paix, car la paix est causée par l’Esprit-Saint (chap. 8, 6; leçon 1, n°
618).
Psaumes.
Ils contiennent la quasi-totalité de la doctrine théologique (Prol., n° 6).
Puissance.
Puissance divine.
C’est le propre de la puissance divine de sanctifier les hommes par la communication de
l’Esprit-Saint (chap. 1, 4; leçon 3, n° 58).
L’expression "puissance de Dieu" peut se comprendre de deux manières : ou bien, parce que
la puissance de Dieu est manifestée dans l’Evangile; ou bien, parce que l’Evangile lui-même
contient la puissance de Dieu (chap. 1, 16b; leçon 6, n° 98).
Puissances.
Elles sont l’ordre suprême des ministres célestes (chap. 8, 38; leçon 7, n° 728).
Récompense.
Voir aussi : BÉATITUDE.
La récompense essentielle consiste dans la joie qu’on éprouve de la possession de Dieu (chap.
8, 23; leçon 5, n° 677).
Réprobation.
Voir aussi : PEINE (Peine des réprouvés).
La fin de la réprobation ou de l’endurcissement des méchants est la manifestation de la justice
divine et de sa puissance (chap. 9, 22; leçon 4, n° 793), la manifestation et l’exaltation de la
gloire des saints, qui sont libérés d’une semblable misère (chap. 9, 23; leçon 4, n° 794).
Rétribution, salaire.
Rétribution divine et éternelle.
Elle ne se fait pas selon un dû, mais selon la grâce (chap. 4, 5; leçon 1, n° 329).
Elle est en rapport avec la foi (chap. 4, 5 leçon 1, n° 330).
Ruse.
La ruse consiste à simuler une chose, tandis qu’on en fait une autre (chap. 1, 29; leçon 8, n°
161).
Sabellius.
Il soutint que le Père lui-même s’était incarné et qu’ainsi il était appelé Fils, en sorte que
c’était la même personne, mais qu’ils différaient seulement par leurs noms (chap. 1, 3; leçon
2, n° 31).
Sacrement (s).
Voir aussi : BAPTÊME, CHRÊME (SAINT), CIRCONNCISION, CONFESSION,
MARIAGE, PÉNITENCE.
Le sacrement de la Loi nouvelle rend efficace ce qu’il signifie (chap. 6, 4; leçon 1, n° 475).
Caractère des sacrements.
Le caractère qu’impriment certains sacrements est une sorte de consécration de l’âme
immortelle (chap. 7, 2; leçon 1, n° 524).
Sacrifice.
Selon Augustin, le sacrifice visible, que l’on offre extérieurement à Dieu, est le signe du
sacricrifice invisible, par lequel on s’offre soi-même et ce que l’on possède pour honorer Dieu
(chap. 12, 1; leçon 1, n° 956).
Sagesse.
Elle est tout simplement, selon saint Augustin, la connaissance des choses divines (chap. 8, 7;
leçon 2, n° 621).
Le propre de la sagesse est de disposer toutes choses avec ordre (chap. 13; leçon 1, n° 1024).
Saints.
Les saints ont dès à présent la gloire, mais elle est cachée dans leur conscience (chap. 8, 18;
leçon 4, n° 654).
Salut.
Obtention du salut.
Quant à la fin du salut à obtenir, il n’y a aucune distinction entre Juifs et Gentils, les uns et les
autres obtiendront une récompense égale, de même qu’à raison du travail de la vigne les
premiers et les derniers< ouvriers> reçurent le même denier (chap. 1, 16b leçon 6, n° 101).
Opération du salut.
Le salut du croyant s’opère de trois manières par la parole de l’Evangile qui remet les péchés,
par la parole de l’Evangile qui obtient la grâce sanctifiante, par la parole de l’Evangile qui
conduit à la vie éternelle (chap. 1, 16b; leçon 6, n° 99).
Ordre du salut.
Dans l’ordre du salut, les Juifs sont les premiers, parce que c’est à eux que les promesses ont
été faites (chap. 1, 16b; leçon 6, n° 101).
Scandale.
C’est une action ou une parole d’une moindre rectitude, fournissant à autrui une occasion de
chute, semblable à une pierre placée sur le chemin, contre laquelle l’homme se heurte et
tombe (chap. 14, 13b; leçon 2, n° 116).
La vérité de la doctrine ne doit pas être délaissée à cause du scandale, à l’exemple du Christ
qui n’a pas délaissé la vérité de sa doctrine à cause du scandale des pharisiens (chap. 14, 22;
leçon 3, n° 1137).
Scandale des petits.
Pour l’éviter, on est tenu de différer l’usage des choses licites jusqu’à ce que l’on puisse,
après avoir donné une explication, l’écarter (chap. 14, 21; leçon 3, n° 1135).
Sceau.
Le mot "sceau" est employé dans deux sens ou bien en tant qu’il exprime et porte la similitude
de ce qu’il désigne, ou bien on appelle sceau un signe qui cache une chose qu’on ne révèle
qu’à des amis (chap. 4, 11; leçon 2, n° 343).
Seigneur.
Le Nom du Seigneur.
Il est loin de nous à cause du péché et à cause de l’obscurité de l’intelligence (Prol., n° 4).
Sel.
Le sel signifie la discrétion de la sagesse (chap. 12, 1; leçon 1, n° 963).
Sens.
Sens réprouvé.
On appelle sens réprouvé celui par lequel l’homme a un jugement blâmable à l’égard de ce
qu’il doit faire (chap. 1, 28; leçon 8, n° 154).
Séraphins.
Nom des séraphins.
Il veut dire "ardent" et comme "embrasé" par le feu de l’Esprit-Saint (chap. 8, 15; leçon 3, n°
644).
Serment, jurer.
C’est une sorte de confirmation par le témoignage de la vérité infaillible (chap. 9, 1; leçon 1,
n° 736).
Il est parfois utilisé dans les paroles de Dieu, pour montrer que ce qu’on appelle ferme est
l’immutabilité du conseil divin, et non pas ce qui est sujet au changement (chap. 14, 11; leçon
1, n° 1109).
Est-il permis de faire un serment ?
L’homme doit s’efforcer, autant qu’il dépend de lui, de ne pas employer de serment, bien
qu’il soit un acte bon et désirable en soi; soit parce que le serment fréquent expose l’homme
au danger prochain de verser dans le parjure; soit parce qu’il semble irrespectueux à l’égard
de Dieu de l’invoquer comme témoin sans motif nécessaire (chap. 1, 9 leçon 5, n° 80).
Nécessité du serment.
Il est quelquefois nécessaire pour qu’on ajoute foi à la parole de celui qui parle (chap. 1, 9;
leçon 5, n° 81).
Manières de jurer.
Il y a deux manières de jurer : l’une par la simple attestation, l’autre par exécration (chap. 1,
9; leçon 5, n° 82).
Servitude.
Trinité.
Sortes de servitudes.
Il y a deux sortes de servitudes : l’une de crainte, l’autre d’humilité et d’amour (chap. 1, 1;
leçon 1, n° 21).
Société.
La société s’établit entre Dieu et les hommes par la charité (chap. 2, 6; leçon 2, n° 191).
Stoïciens.
Ils bannissaient absolument la tristesse de l’âme du sage (chap. 9, 2; leçon 1, n° 738).
Elle peut être essentiellement incluse sous le mot "Père", parce que les noms qui impliquent
une relation à la créature sont communs à toute la Trinité, comme <ceux> de "Créateur)> et
de "Seigneur" (chap. 1, 7 leçon 4, n° 72).
Union.
De l’homme à Dieu.
Cette union se fait de trois manières : par la grâce de l’union, par la grâce de l’adoption, par la
gloire de la jouissance (chap. 1, 1; leçon 1, n° 24).
Testament.
Ancien Testament.
Par Ancien Testament on e parfois la Loi, parfois la Loi, les Psaumes et les Prophètes, parfois
la Loi et les Prophètes (chap. 3, 19; leçon 2, n° 292).
Transgression.
Voir aussi : PÉCHÉ.
Il est plus grave de transgresser en même temps la loi naturelle et la Loi écrite, que la loi natu
relle seulement (chap. 4, 15; leçon 2, n° 358).
Tribulation.
Le mot "tribulation" vient de tribulus (tribule) et signifie une plante piquante; aussi dit-on de
quelqu’un qu’il est dans la tribulation lorsqu’il est blessé extérieurement (chap. 8, 35; leçon 7,
n° 723).
Elle est la matière et l’occasion d’exercer l’acte de patience (chap. 5, 3; leçon 1, n° 387).
Valentin.
Il prétendit que le Christ n’a pas pris un corps de la masse du genre humain, mais qu’il l’a
apporté du ciel (chap. 9, 5; leçon 1, n° 747).
Varron.
Il prétendit que tout l’univers est Dieu à cause de son âme, affirmant qu’on peut rendre â tout
cet univers et à chacune de ses parties un culte divin (chap. 1, 25; leçon 7, n° 143).
Vengeance.
Voir : DIEU (Colère de Dieu), LOI, PÉCHÉ (Effet du péché).
Vérité.
Elle implique une adéquation entre la chose et l’intelligence (chap. 3, 4; leçon 1, n° 255).
Vertus.
Les vertus sont appelées armes en tant qu’elles nous défendent. On les appelle armes de la
lumière, soit parce qu’elles sont embellies et perfectionnées par la lumière de la raison; soit
parce qu’elles requièrent le contrôle de la lumière; soit parce que les œuvres des vertus
brillent sur les autres (chap. 13, 12; leçon 3, n° 1072).
Vocation.
Sortes de vocations.
Il y a deux sortes de vocations l’une exténeure, selon laquelle< Jésus> a appelé Pierre et
André, mais l’autre est une vocation intérieure, laquelle se fait selon une inspiration intérieure
(chap. 1, 7; leçon 4, n° 68).
Table des références aux auteurs et aux ouvrages cités
Tous les nombres donnés à droite renvoient à la numérotation des paragraphes et non aux
pages, mais seuls les nombres en caractères italiques indiquent une référence textuelle
explicite. Les indications (1) et (2) signalent qu’il y a deux occurrences dans un même
paragraphe.
Albert le Grand (saint) : 120, 500.
Ambroise (saint) : 187.
Summa de creaturis. De paradiso.
Q. 71 — 1120. VIII, 39 —501.
De Spiritua Sancto.
Super Dionysium De divinis nominibus : 1024. ,, 53. — 187.
Super Ethica commentum et quaestiones. Expositio evangelii secundum Lucam.
L. VII, 93. — 557.
II, 4 — 617.
Ambrosiaster.
Alcuin.
Commentarza zn Epistolam ad Romanos.
I, 8 — 77.
Gommentarium in S. bannis Evangelium II, 15 — 220.
[ V, 13 — 426.
V, 15 — 434.
III, 19. — 6. VIII, 1 — 520.
VIII, 22. — 672.
IX, 17. — 780.
XII, 11 —989.
Alexandre de Halès : 120. XIII, 13. — 1078.
Summa theologica. Andia (Y. de).
ja : 73.
Henosis : 182.
Anselme de Cantorbéry (saint).
De concordia praescientiae et praedestinationis et gratiae Dei cum libero arbitrio.
III, 7 — 597.
Apoffinaire le Jeune : 38.
Aristote.
Catégories.
V, 4b9-11. — 255.
De l’âme : 408.
I, 10. — 571. III, 6 — 564.
De la génération des animaux.
II, 3 — 408, 408.
Éthique à Eudème.
VIII, 2 — 773.
Métaphysique.
I, 2 — 21; 569.
VIII, 3 — 773.
VIII, 8 — 773.
XI, 5 — 945.
Physique.
II, 3 — 10.
III : 266.
V-VIII : 266.
VIII, 1 — 668.
VIII, 4 — 21.
VIII, 5 — 773.
Premiers analytiques.
II, c. 23. — 1051.
Réfutations sophistiques : 53.
Rhétorique.
II, 4 — 67.
Anus : 32, 692.
Éthique à Nicomaque.
I, 8 — 1128.
II, 1 — 325, 456, 602, 819.
III, 5 — 124, 409, 616.
III, 10. — 138, 1074.
IV, 5 — 1077.
V, 2 — 447.
V, 3 447.
V, 6 — 1039.
V, 10. — 428.
VI, 4 — 617.
VI, 5 — 615.
VII, 5 — 1077.
VIII, 2 — 67.
VIII, 3 — 67.
VIII, 14. — 1046.
IX, 4 — 21, 67.
IX, 9 — 559.
X, 9, 12. — 217.
X, 10. — 457.
Athanase (saint).
Lettres à Sérapion.
III, 7 — 187.
IV, 8 — 187.
IV, 18. — 187.
IV, 23. — 187.
Augustin (saint) : 30, 216.
Confessionum libri.
I, 12, 19. — 140.
IV, 3, 4-6 — 758.
V, 3, 6 — 758.
VII, 19, 25. — 30.
VIII, 4, 9 19.
Contra Academicos. X, XXI : 143.
I, 6, 16. — 621. XI, XXI : 767.
XI, xxii : 767.
XI, XXIII, 1-2 767.
Contra duas Epistolas Pelagianorum. XI, xxv : 45.
XVIII, XXVII : 26.
I, 10, 17-22; 11, 23-24; 12, 25. — 558. xx, xlv :222.
IV, 4-7 — 418. xx, XXVI, 3 — 220.
V, III : 758. XXI, xI : 191.
XXI, xv : 932.
Contra Faustum.
IV, 2 — 1085. De consensu evangelistarum.
VI, 2 — 1085. ii, xx 85. — 557.
VI, 7 — 1085.
De correptione et gratia.
Contra Julianum opus imperfectum.
XIII, 39. — 705.
II, 148. — 434.
II, 177. — 418.
De diversis quaestionibus ad Simplicianum.
Contra lulianum Pelagianum. I, Q. I, 7 — 558.
II, III, 5-7 — 558.
VI, XXIII, 70-74. — 558. De diversis quaestionibus LXXXIII.
Q. LXVI : 548, 558.
Contra Maximinum haereticum arianorum epis
copum. De doctrina christiana.
II, XII, 2 — 668.
I, IV, 4 — 45.
II, XIII, 1 — 1228. I, V, 5 — 1182.
II, XIII, 2 — 1229. I, XXII, 20-21. — 1182.
I, XXX, 33. — 1056.
De catechizandis rudibus. I, XXXIII, 36-37. — 1182.
IV, 7 — 1014.
De Genesi ad litteram.
De Civitate Dei. III, xx, 30-32. — 419.
X, XIX, 34; XX, 35-36. — 419.
IV, X : 143. X, XXV, 41-43. — 585.
IV, XI : 143.
IV, XXVII : 145.
V, I-IX : 758. De gratia Christi et de peccato originali. VI, V, 1—3; VI, 1—3; VII, 1—3; VIII,
1—2
I, XXXII, 35, 36. — 407.
IX, 1-4; X, 1-3; XII : 145. I, XXXIX, 44. — 558.
VII, VI : 143.
VII, XXI : 143.
VIII, X, 11. — 13. De gratia et libero arbitrio.
VIII, XIII; XIV, 1—2; XVI : 143.
XXI, 43. — 781.
VIII, XXIII, 1-3 — 143.
X, V : 957.
De haeresibus.
XI : 747.
XLVI : 575, 608, 747.
XUX : 38, 692, 747.
LII : 692.
LV : 38.
LXXXVIII : 407, 579, 758, 771.
De libero arbitrio.
III, iii, 6-8 — 578. III, XXI, 59-62. — 1137.
De mendacio.
XV, 26. — 80.
XV, 26-27. — 1011.
XV, 28. — 80.
De moribus catholicae Ecclesiae.
XXVII, 52. — 585.
De nuptiis et concupiscentia.
I, X, 11 —523.
I, XXVIII, 31. — 570.
II, XI, 24. — 238.
II, XXVII, 44-47. — 421.
II, XXVIII, 47. — 415.
De peccatorum mentis et remissione.
I, Ix, 9-10; X, 11-12. — 407.
I, X, 11-12. — 418.
I, xI, 14. — 434.
De praedestinatione sanctonum.
III, 7 — 700.
VI, 11. — 700.
XVII, 34. — 700.
De sermone Domini in monte.
I, XVII, 51. — 80.
I, XXII, 75. — 187.
II, xv 61. — 175, 1093.
II, xix, 64. — 177.
De spinitu et littera.
I, Iv, 6 — 537.
I, VII, 12. — 19.
De Tninitate.
VI, Iv, 6 — 1228.
VI, V, 7 — 73.
X, X, 13. — 45.
XIV, i, 3 — 621.
XV, XVII, 30. — 292.
De vera religione.
XIV, 27-28. — 140.
Enarrationes in Psalmos.
IX, 9, 9 — 220.
XXXIV, 23, 13. — 724.
LVII, 1, 1 — 1120.
LXXII, 1, 4 — 19.
LXXX, 3, 4 — 1185.
CXXIII, 5, 9 — 698, 948.
Enchiridion.
III, 11. — 696, 879.
VIII, 26-27. — 424.
Epistulae.
XXXVI, I, 2 — 1098.
LXXVIII, VI : 253.
LXXXII, II, 9 — 1120.
LXXXII, ii, 14-15. — 1087, 1120.
LXXXIX, II : 724.
CVIII, V, 14. — 724.
CXXXVIII, n, 11 et 14. — 1011.
CLXVI : 1137.
CXCIX, XII, 46. — 848.
CXCIX, xi 49. — 848.
CXCIX, xii, 50. — 848.
CCIV, IV : 724.
Epistulae ad Romanos inchoata expositio : 187.
Expositio quarundam propositionum ex epistola ad Romanos.
Prop. III : 13.
Prop. XXVII : 421.
Prop. XXVIII : 421.
Prop. XLI : 558.
Prop. XLII : 558.
Prop. XLIX : 623.
Prop. LIII : 674.
Prop. LXXII : 1017.
Quaestiones in Heptateuchum.
I, Q. XXXV : 372.
Quaestiones Evangeliorum.
II, 11. — 1127.
Retractationes.
I, ix, 3 — 578.
I, XIII, 5 — 140.
I, XXIII, 1-3 — 558.
I, XXIV, 1-2 — 558.
I, XXVI, 2 — 558.
II, I, 1-2 — 558.
II, XXXIII : 407.
Sermones (PL).
LXXI, XII, 20. — 187.
CXLIV, II, 2 — 327.
CLIII, VIII, 10. — 548.
CLV, I, 1 — 537.
CLVI, XIII, 14. — 557.
CLXXX, vI, 6 — 80.
CLXXX, VIII, 9 — 81.
CCCLI, ii, 2 — 927.
Sermones (Dolbeau).
XIX, 2-6 (Mayence LI) : 327.
Tractatus in Evangelium bannis.
I, 13. — 698, 948.
VII, 12. — 100.
XXVI, 2 — 62, 105, 831.
XXIX, 6 — 327.
XXXVI, 9 — 33. XLVIII, 9 — 292.
Augustin (Pseudo-).
Sermon.
CIV, 2 — 1075.
Bardy (G.) : 14.
Barnabé : 100.
Basile (saint) : 36.
Septante.
Ex 33, 19. — 769.
Lv 18, 5 — 821.
Dt 32, 21. — 850.
Dt 32, 43. — 1159.
Jb 41, 2 — 938.
Pr 24, 21. — 1043.
Eccli (Si) : 812.
Os 2, 24. — 799.
Ha 2, 4b : 104.
Ha 3, 1 —711.
Is 10, 22. — 805.
Is 11, 10. — 1161.
Is 28, 16. — 833.
Lettres.
CCVII : 31.
Bède le Vénérable (saint).
Homélie pour la circoncision.
I, XI : 349.
Bibles.
1. Bible grecque.
Is 40, 13. — 938.
Is 59, 20. — 918.
Is 65, 1 — 853.
Is 65, 2 — 855.
2. Bible hébraïque. Biblia hebraica stuttgartensia.
Is 52, 7 — 839. Ha 2, 4b : 104.
3. Bibles latines.
— Editio princeps Adolph Rusch.
Vol. IV.
— Prime Ad Corin.
14, 40. — 963, 1073.
— J7etus latina.
• Bibliorum sacrorum latinae versiones antiquae, seu Vetus Italica (éd. Dom Sabatier).
Ex 20,
Lv 19,
Dt 32,
1R(1
Ps 67, 7 — 1149.
Jr 9, 1 — 738.
Ez 33, 11. — 208.
Mi 6, 8 — 987.
Ha 2, 4 — 1101.
Ml 3, 6 — 37, 129.
Mt 8, 22. — 474.
Mt 15, 11. — 1132.
Mt 16, 23. — 615.
Mt 22, 30. — 663.
Rm 2, 15. — 220.
Rm 4, 17. — 363.
Rm 7, 23. — 588.
Rm 9, 17. — 780.
Rm 12, 11. — 989.
1 Co 1, 23. — 844.
1 Corinthiens 7, 7 — 814, 869.
1 Corinthiens 14, 40. — 963, 1073.
1 Corinthiens 15, 50. — 625.
2 Corinthiens 13, 4 — 719, 829.
Vetus latina (éd. Beuron).
Sg 1, 15. — 416.
Sg 17, 10. — 269.
Si 2, 8 — 812.
Si 12, 4 — 1184.
Is 5, 6 — 91.
Is 45, 24. — 1108.
Ph 1, 20. — 1102.
Ph 2, 11. — 1111.
Col 1, 20. — 60.
He 3, 1 — 61.
2 P 3, 15. — 182.
1 Jn 2, 27. — 603.
— Vulgate.
• luxta vulgatam versionem.
Prologus Sancti Hieronymi in libro Regum :
865.
Prologus Sancti Hieronymi in Epistulis Pauli
Apostoli : 13.
Bonaventure (saint) : 120.
Borella (J.).
La Charité profanée : 559, 1056.
La Crise du symbolisme religieux : 672, 758.
Le Mystère du signe : 56.
Bouillard (H.).
Conversion et grâce chez saint Thomas d’Aquin
517, 773.
Boi
Dic
3
Br
Bri
Br
Les
17. — 538.
18. — 1055.
35. — 1014.
S) 16, 7 — 245, 324, 456, 539.
Ca
Ca
Bloch (O.) et Wartburg (W. von).
Dictionnaire étymologique de la langue française
Bouyer (L.). Cenchrées : 12.
Dictionnaire théologique : 35, 36, 41, 198, 216, Césaire d’Arles (saint).
311.
Sermones.
Bréhier (É.) : 758. 179, 2 — 1075.
Broglie (G. de) : 418. César-Auguste : 136.
Brun (J.). Chantraine (P.).
Les Stoïciens, textes choisis : 738. Dictionnaire étymologique de la langue grecque
200.
Calliste (pape) : 31. Chevalier (J.).
Camelot (Th.). Histoire de la pensée.
T. II : 1021.
"Credere Deo, credere Deum, credere in Deum."
Pour l’histoire d’une formule traditionnelle
327. Cicéron : 151, 738.
Clément (saint).
Carthage.
Voir : CONCILE. Lettre aux Corinthiens.
V, 7 — 1186.
Cassiodore.
Clément (Pseudo-).
Expositio psalmorum.
II, 2 — 230. Recognitionum liber.
I, 7 — 14.
Cathares : 623.
Concile.
Catholicisme. De Carthage : 216.
D’Orange : 216.
Voir : ENCYCLOPÉDIE. De Trente
— Session V : 418.
Vatican II :
Célestin ier (pape) : 216. — La liberté religieuse : 1120.
Cornelius a Lapide.
Epistula ad Romanos.
I, 1 — 19.
XVI, 27. — 1229.
Crouzel (H.).
Origàne : 776.
Cyrille d’Alexandrie (saint) : 35.
Epistulae.
XVII, 70. — 747.
Explanatio in epistulam ad Romanos.
V, 14. — 424.
Daniélou (J.).
Les Figures du Christ dans l’Ancien Testament. "Sacramentum futuri." Etudes sur les origines
de la typologie biblique : 429, 1117.
Les Origines du christianisme latin : 426.
Deman (Th.).
"Le Liber de Bona Fortuna dans la théologie de saint Thomas d’Aquin " : 773.
Denys IaAréopagite (Pseudo-).
Des noms divins.
IV, 1 — 408, 182.
VII, 3 — 115.
638
La Hiérarchie céleste.
III : 99.
XII, 2 — 408.
Denzingen-Schônmetzer (H.) :
Enchiridion symbolorum, definitionum et declara tionum : 106.
Descartes.
Correspondance.
CCLXII : 219.
Dictionnaires de la Bible.
Voir : GERARD (ANDRÉ-MARIE), SUPPLÉMENT
AU DICTIONNAIRE DE LA BIBLE, Vigouroux
(F.) ET COLLABORATEURS.
Dictionnaire de théologie catholique : 14,
37, 209, 238, 771, 1137.
Dolbeau (F.) : 327.
Dominique (saint) : 623.
Dorival (G.) : 739.
Dubois 0. -M.) : 418.
Dutripon (F. P.).
Vulgatae editionis Bibliorum sacrorum concor dantiae : 6.
Encyclopédie du catholicisme : 14, 30, 32, 37, 38, 143, 216.
Énée : 136.
Épiphane : 30.
Érasme.
Diatribe sur le libre arbitre : 508.
Eusèbe de Césarée.
Histoire ecclésiastique.
II, 14. — 14.
III, 1 — 14.
Eutychès : 37.
Gandhi : 1015.
Ganduiphe de Bologne.
Sententiarum libri quatuor.
IV, 10. — 349.
Gardeil (H. -D.) : 564.
Initiation à la philosophie de saint Thomas d’Aquin.
I. Introduction-logique : 1051.
II. Cosmologie : 945.
Gélase (Pseudo-).
Décrets.
II, cause 22, Q. 2, can. 5 — 1186.
Gerard (A. -M.).
Dictionnaire de la Bible : 11, 225, 764, 1097.
Gilson (É.).
L ‘Esprit de la philosophie médiévale : 1087.
Les Métamorphoses de la Cité de Dieu : 1021.
Le Thomisme : 115, 763, 772.
Gloses sur la Bible.
Glosa ordinaria (éd. "princeps "1480-148 1).
• Glosa interlinearis.
— In epistolam ad Romanos.
III, 30. — 320.
V, 20. — 450.
VIII, 23. — 676.
IX, 13. — 762.
— In Isaiam
IV, 1 — 1079.
• Glosa marginalis.
Argumentum in epistolam ad Romanos : 13, 14.
Gauthier (R. -A.).
Saint Thomas d’Aquin. Introduction à la "Somme contre les Gentils" : 585, 773, 1024.
Saint Thomas et l’ Éthique à Nicomaque" : 617.
Ernout (A.) et Meillet (A.).
Dictionnaire étymologique de la langue latine : 43,
147, 158, 200, 230.
Festugière (A. -J.).
La Révélation d’Hermès Trismégiste : 143.
I, 23. — 136.
II, 4 — 185 (1).
II, 12. — 208.
V, 12. — 413.
VII, 7 — 537.
XIV, 23. — 1140, 1141 (1).
XV, 30. — 1190.
— In lob
XXXVII, lib :91, 1179.
— In Isaiam
IV, 1 — 1079.
Glosa Petri Lombardi.
— In epistolam ad Romanos :
Prol. : 13, 14.
I, 1 — 16, 18, 19.
I, 2 — 26, 28.
I, 3 — 39, 40.
I, 4 — 50, 50, 53, 53, 54,
I, 8 — 77.
I, 17. — 102.
I, 20. — 120, 122.
I, 23. — 136.
I, 26. — 149.
I, 29. — 160.
II, 4 — 185 (1), 185 (2).
II, 5 — 187.
II, 12. — 208.
II, 14. — 216.
II, 15. — 220, 221, 222.
II, 17. — 225.
II, 24. — 236.
III, 3 — 253.
III, 4 — 256, 259.
III, 5 — 262.
III, 9 — 273.
III, 19. — 292.
III, 30. — 320.
IV, 4 — 328.
IV, 5 — 331.
IV, 7-8 — 338.
IV, 11. — 343, 347.
IV, 12. — 348, 349.
IV, 15. — 358.
IV, 17. — 365.
IV, 18. — 369.
V, 9 — 397.
V, 12
V, 14 —
V, 20 —
VI, 6 —
VI, 10
VI, 19
VI, 23
VII, 1 —
VII, 7
VII, 8
VII, 13
VII, 14
VII, 20
VIII, 3
VIII, 7
VIII, 11
VIII, 17
VIII, 19
VIII, 22
VIII, 23
VIII, 27
VIII, 28
VIII, 29
VIII, 30
VIII, 34
VIII, 38
IX, 4 — 742, 744.
IX, 12. — 760.
IX, 13. — 762.
IX, 15. — 770, 772.
IX, 17. — 781.
IX, 18. — 784.
IX, 19. — 787.
IX, 26. — 800.
IX, 31. — 809.
X, 7 — 825.
X, 8 — 828.
X, 21. — 856.
XI, 9 — 876.
XI, 11. — 882.
XI, 12. — 884.
XI, 17. — 896.
XI, 23. — 896.
XI, 25. — 916.
XI, 29. — 927.
XI, 36. — 949.
XII, 1 — 956.
XII, 2 — 967.
659.
(1), 674 (2).
(1), 698 (2).
413, 418.
425, 426.
450, 452, 459, 460, 462, 463, 822.
480.
489.
506.
516.
520.
537, 538.
541, 543.
555.
557.
570, 571.
608, 609.
623.
630.
648.
657, 658,
672, 674
676.
694.
697, 698
702.
707.
720.
728.
55, 56, 57, 59.
XII, 3 — 971.
XII, 19. — 1012.
XII, 20. — 1014.
XIII, 1 — 1019.
XIII, 11. — 1062.
XIII, 12. — 1066.
XIII, 13. — 1078.
XIV, 2 — 1088.
XIV, 4 — 1095 (1), 1095 (2), 1096.
XIV, 6 —1100.
XIV, 7 — 1101.
XIV, 17. — 1127 (1), 1127 (2).
XIV, 23. — 1140, 1140, 1141 (1), 1141 (2).
XV, 9 — 1157, 1158.
XV, 13. — 1162.
XV, 14. — 1164.
XV, 15. — 1166.
XV, 16. — 1167.
XV, 17. — 1169.
XV, 20. — 1174.
XV, 30. — 1190.
XVI, 2 — 1195.
XVI, 7 — 1202.
XVI, 10. — 1205.
XVI, 11. — 1206.
XVI, 22. — 1221.
XVI, 25. — 1224.
XVI, 27. — 1227, 1228, 1229.
Gratien.
Décret.
I, dist. XXX, can. XVII : 1098.
II, causa XXII, Q. II, can. V : 1186.
III, dist. V, cari. XXIV : 964.
Grégoire de Nazianze (saint) : 36.
Grégoire de Nysse (saint) : 36.
Grégoire le Grand (saint).
Moralium seu Expositio in librum Job.
VI, 16. — 120.
VI, 37. — 690.
XXXVI, 6 — 209 (1), 209 (2).
Grimai (P.).
Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine
136, 143.
Guillaume d’Auxerre.
Summa aurea.
II, Tractatus XIV, c. 1-2 — 187. IV, Tractatus II, c. V, Q. 2 — 349.
Guillaume Breton.
Summa sive Expositiones vocabulorum : 161.
Haymon d’Auxerre.
Expositio in divi Pauli epistolas Ad Romanos.
I, 4 — 51.
III, 3 — 253.
IV, 17. — 363.
V, 5 — 392.
VI, 23. — 516.
XIII, 1 — 1017.
XVI, 2 — 1195.
Hercule : 136.
Hermann l’Allemand : 67.
Hermès : 143.
Hilaire (saint) : 187.
De Trinitate.
III, 11 —33.
III, 24. — 844.
X : 844.
In Matthaeum.
XII, 17. — 187.
Tractatus super Psalmos.
LIII, 5 — 829.
LXVII, 8 — 474.
Hippolyte (saint).
Réfutation de toutes les hérésies.
IX, 12. — 31.
Huby (J.).
Saint Paul. Épître aux Romains : 418, 520, 1069, 1154.
Hugues de Saint-Victor. De amore sponsi ad sponsam : 187.
De sacramentis christianae fidei.
I, 2, 8 — 187.
Hugues de Saint-Victor (Pseudo-).
Quaestiones et decisiones in epistolas Pauli ad Philippenses.
2, 9, Q. IX : 50.
Hugutio (Ugutio, Huguccio).
Derivationes : 161.
Humbert de Romans. Prototype liturgique : 100.
Isidore de Séville (saint).
Étymologies.
X : 230.
Jamblique : 585.
Jason : 18.
Jean Chrysostome (saint).
Ad Demetrium de compunctione. Liber 1 — 728, 732, 733, 740.
In epistulam ad Romanos. Homilia 1 — 18.
In Matthaeum homiliae.
XU, 3 — 187.
LXXV, 2 — 848.
Trois catéchèses baptismales.
II, 2 — 81.
II, 8 — 81.
Jean Chrysostome (Pseudo-).
Opus imperfectum in Matthaeum.
32, 8 — 526.
Jean Damascène (saint).
De la foi orthodoxe.
II, 4 — 149.
II, 29. — 705.
III, 15. — 380.
III, 24. — 84.
IV, 22. — 1120.
Jeanne d’Arc (sœur). Évangile selon Marc : 1117.
Jérôme (saint) : 30, 187.
Commentarii in epistulam ad Galatas.
L. II, c. III : 77.
Commentarii in epistulam ad Philemonem : 18.
Commentarii in Evangelium Matthaei.
II, 12. — 187.
XV, 11. — 1117.
XV, 12. — 1116.
Gommentariorum in Hiezechielem libri XIV.
I, c. VII : 1120.
V, c. XVI : 220.
Divina Bibliotheca. Praefatio in libros Samuel et Malachim : 865.
Epistolae.
XV, 4 — 255.
Liber de nominibus hebraicis : 17.
Liber de vins illustribus : 18, 30.
Prologus in Epistolas Pauli Apostoli : 13.
Prologus in libro Regum : 865.
Jérôme (Pseudo-).
Commentanii in epistulam ad Romanos : 18.
Joachim de Flore : 1069.
Lanza del Vasto : 1015.
Leblanc (M.).
"Aspects du péché originel dans la pensée de saint Thomas d’Aquin" : 418.
Légasse (S.). Paul apôtre : 19.
Leibniz : 795.
Journet (C.).
L’Église du Verbe incarné.
T. I : 1021.
Jugie (M.) : 37.
Julien d’Éclane : 216.
Junon : 143.
Jupiter : 136.
Labourdette (M. -M.) : 418. Lagrange (M. -J.).. Épître aux Romains : 59, 500.
Laneau (L.).
De la déification des justes : 706.
Léon-Dufour (X.).
Dictionnaire du Nouveau Testament : 800.
Léon le Grand (saint).
Sermones.
Tin Nativ. : 52.
Liber de bona fortuna : 773.
Lubac (H. de).
Corpus mysticum : 972.
Exégàne médiévale : 803.
Luther : 103, 318, 335, 567. Traité du serf arbitre : 508.
Lyaeus : 143.
Lyonnet (S.) : 418.
Macrobe.
Commentaire du songe de Scipion. I, xIv : 122.
Maïmonide (M.).
Le Guide des égarés.
III, XVII : 110.
Ménélas : 18.
Mani (manichéens) : 41, 575, 758.
Marcel : 30.
Meillet (A.).
Voir : ERNOUT (A.).
Meyendorff (J.).
Le Mariage dans la perspective orthodoxe : 526.
Muratori.
Fragment.
L. 39. — 1186.
Nau (F.) : 14.
Némésius d’Émèse.
De natura hominis : 585.
Nestorius : 35.
Liber de causis : 408.
Litt (T.).
Les Corps célestes dans l’univers de saint Thomas 758.
Macédonius : 692. 644
Pierre Lombard.
Voir aussi : GLOSES.
Sententiae in IV libris distinctae.
I, dist. 41, c. 2 — 703.
II, dist. 20, c. 5 — 419.
II, dist. 43, c. 1 — 187.
IV, dist. 1, c. 9 — 349.
IV, dist. 47, c. 3 — 209.
Pinckaers (S.) : 778.
"L’instinct et l’Esprit au cœur de l’éthique chré tienne" : 613, 707.
Platon (platoniciens) : 143, 585.
Alcibiade.
I, 25. — 585.
La République.
II : 1069. IV : 1078.
Plotin.
Ennéades.
II, 3, 7 — 758.
Porphyre.
Isagoge.
II, 36. — 410.
Prat (F.).
La Théologie de saint Paul.
T. I : 418.
Orange.
Voir : CONCILE.
Origène.
Peri Archon.
II, 9, 6 — 758, 767.
II, 9, 8 — 771.
Super Epistolam ad Romanos.
I, 4 — 50.
II, 14s. : 214.
II, 16. — 222.
III, 3 — 253.
V, 5 — 392.
VI, 13. — 495.
VII, 13. — 555.
VIII, 22. — 674.
Osty (É.).
La Bible : 546.
Paul de Samosate : 30.
Pélage (pélagiens) : 216, 407, 579, 758.
Philippe (M. -D.) : 223.
Photin : 30.
Pierre de Poitiers.
Sententiarum libri quin que.
IV, 2 — 349.
Seckier (M.).
Le Salut et l’Histoire. La pensée de saint Thomas d’Aquin sur la théologie de l’histoire : 99,
1069, 1087.
Sénè que.
De Remediis fortuitorum.
II, 1 — 416.
Septante.
Voir : BIBLES (Bible grecque).
Sergius Paulus : 18.
Sertillanges (A. -D.) : 944.
Spicq (C.).
Lexique théologique du Nouveau Testament : 927.
Stroobant de Saint-Éloy (j. -É.) : 6, 157, 262, 280, 379, 531, 647.
Supplément au Dictionnaire de la Bible
100.
Symbole.
Quicumque : 106.
Tertullien : 1137.
Adoersus Marcionem.
I, 28. — 596.
Prouvost (G.).
Thomas d’Aquin et les thomismes : 72.
Psautier luxta Hebraeos : 952.
Psautier romain.
33, 10. — 714.
67, 7 — 1149.
94, 7 799.
Quasten (J.) : 14.
Rahifs (A.).
Voir : SEPTANTE.
Richard de Saint-Victor.
Tractatus de spiritus blasphemiae : 187.
Rousseau (J. -J.) : 1021, 1041. Sabellius : 31, 32.
Sainte-Marie (H. de).
Voir : PSAUTIER IUXTA HEBRAEOS.
Sartre (J. -P.) : 513.
Schuermans (M. -Ph.).
Parole de Dieu et rite sacramentel : 1207.
Scipion : 18, 122. 646
De anima.
I, 4 — 596.
V : 585.
XLIII, 10. — 429.
De baptismo.
XIII, 1 — 596.
De pudicitia.
XVIII, 16. — 596.
Thomas d’Aquin (Pseudo-).
De fallaciis.
VI : 53.
Tixeront.
Histoire des dogmes : 209.
Torreli (J. -P.).
"La causalité salvifique de la résurrection du Christ selon saint Thomas" : 380, 382.
Initiation à saint Thomas d’Aquin : 1021.
Saint Thomas d’Aquin, maître spirituel : 490, 613, 707, 1120.
Trente.
Voir : CONCILE.
Ugutio.
Voir : HUGUTIO.
Ulpien : 151.
Varron : 143.
Vatican II.
Voir : CONCILE.
Verbraken (P.).
Études critiques sur les sermons de saint Augustin.
Vetus latina.
Voir : BIBLES (Bibles latines).
Veysset (Ph.).
Situation de la politique dans la pensée de saint Thomas d’Aquin : 1041.
Vidal-Naquet (P.).
L ‘impossible Antisémitisme : 882.
Vigile de Thapse (Pseudo-) : 363.
Vigouroux (F.) et collaborateurs.
Dictionnaire de la Bible : 200.
Vulgate.
Voir : BIBLES (Bibles latines).
Valentin : 747.
Wartburg (W. von.).
Voir : BLocil (O.).
Wéber (E. -H.).
La Personne humaine au XIII° siècle : 120, 1137.
Weber (R.).
Voir : PSAUTIER ROMAIN.
Zénon de Cittium : 738. Zéphyrin (pape) : 31.