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Med Pal 2006; 5: 103-107 © Masson, Paris, 2006, Tous droits réservés REPÉRÉ DANS LA PRESSE SPÉCIALISÉE Médecine palliative 103 N° 2 – Avril 2006 Sous la direction de Régis Aubry Notes de lecture, résumés et commentaires des « papiers » les plus notables de la presse nationale et internationale… pour ouvrir des perspectives : vos revues et analyses de la presse spécialisée peuvent être adressées au Secrétariat de la Rédaction, qui transmettra : [email protected] Le dispositif médical d’annonce H. Brocq et al. Douleurs 2005 ; 6 : 197- 225. L’auteur rappelle d’abord l’enjeu de ce temps d’annonce et d’information et les difficultés que cela représente. L’informa- tion doit permettre au patient de faire des choix, et d’anticiper. Le contexte peut être traumatisant, et tous les patients n’ont pas les mêmes facultés d’adaptation et de deuil. L’histoire du patient entre en jeu, de même que les aspects transférentiels de l’échange. L’information est un élément du soin et de respect du malade. Elle participe à la confiance, permet le consentement. L’auteur reprend les avantages de l’infor- mation orale, les rôles de l’information écrite. Les référentiels réglementaires sont cités, ainsi que le rôle de chaque professionnel. L’auteur présente et discute ensuite les ré- sultats d’une enquête réalisée en PACA dans 22 services, mettant en parallèle les avis des patients, d’un comité d’éthique et des professionnels. Les questions clés du dispositif d’annonce sont passées en re- vue : le cadre nécessaire aux entretiens, le temps et la disponibilité requis, le contenu de l’information, les procédures, l’orga- nisation des services et le circuit de l’in- formation, la place des psychologues. L’annonce devrait être précédée d’une re- cherche sur « le niveau d’éducation du malade, son vocabulaire, ses connaissan- ces, son histoire, son vécu »… L’auteur in- siste sur la nécessaire progressivité de l’annonce, sur le temps nécessaire pour y revenir, en plusieurs fois, sur la nécessité du suivi à la sortie de l’hôpital. Il précise les qualités que devraient posséder les ac- teurs qui animent les entretiens, mais aussi les équipes dans leur ensemble. L’ar- ticle se termine par un ensemble de pro- positions pour diminuer le niveau de souffrance morale des personnes malades : les formations à l’écoute, le temps à déga- ger, les lieux, le circuit des informations. Huntington : maladie et problématique. Comment aider les familles concernées ? L. Rapaille Ethica clinica 2005 ; 38 : 23-33. L’auteur apporte un éclairage nouveau sur la chorée de Huntington, méconnue du grand public et des professionnels. Il met en évidence les besoins tant des pa- tients que de l’entourage familial. Il met l’accent sur le caractère multidimension- nel de la maladie. Maladie neurodégénérative à évolution progressive elle peut apparaître entre 35 – 45 ans. La durée d’évolution est générale- ment longue entraînant une dépendance et des déficits sévères progressifs dans dif- férents domaines. Mais globalement l’évolution se fait par pallier et entraîne inévitablement un état de polyhandicap et de dépendance complète à plus ou moins long terme. Il n’existe à ce jour aucun trai- tement spécifique pour cette maladie et la mise en place de traitement à visée symp- tomatique implique la prise en compte du rapport bénéfices/risques pour le patient. S’agissant d’une maladie autosomique do- minante, le risque de transmission est de 50 % ce qui en fait une maladie familiale. Depuis 1993 un test prédictif d’une fiabilité de 100 % peut être proposé. Ce test place le sujet face à un choix impossible que l’auteur détaille avec finesse, s’appuyant sur les recommandations internationales. Face à la singularité de l’évolution, l’adaptation et le réajustement des soins sont réguliers et fonction de chaque patient et de son envi- ronnement. L’auteur constate que cette ma- ladie entraîne progressivement un isolement du patient voire de la famille, aucune struc- ture adaptée n’existant à ce jour. Cet article permet d’appréhender cette pa- thologie dans toutes ses dimensions et ré- percussions en renvoyant le lecteur à des questions aussi actuelles et diverses que celle de la possibilité d’une grossesse, du désir de savoir si l’on est porteur ou pas… comme on peut en rencontrer chez les couples séropositifs. Ainsi bien que traitant spécifiquement de chorée de Huntington, la réflexion suscitée par cet article va bien au-delà de cette seule pa- thologie et pose le problème plus général des pathologies qui touchent un système familial complet et de l’implication ou de l’absence d’implication de la société dans ce type de problématique. Les valeurs sous-tendues par la prise en charge d’une telle maladie renvoient au questionne- ment que l’on peut rencontrer dans la prise en charge de toutes pathologies dé- génératives touchant les sujets jeunes ou moins jeunes. Communication à propos des soins palliatifs chez les patients porteurs d’une bronchopneumopathie chronique obstructive J. Randall Curtis, R.A. Engelberg, M.D. Wenrich et al. Journal of Palliative Care 2005 ; 21 : 157-64. Les bronchopneumopathies obstructives chroniques sont une des principales cau- ses d’invalidité et de mortalité dans le monde. En dépit du traitement, la qualité de vie des malades est mauvaise et le pro- nostic sombre. Pourtant, les malades bé- néficient peu de soins palliatifs. Les auteurs pensent que ceci est lié à un dé- faut de communication entre médecins et malades concernant les soins palliatifs. Ils présentent le fruit d’une recherche des pu- blications permettant de comprendre les raisons de ce défaut de communication. 2 pistes principales sont ainsi dégagées : les patients présentent souvent une souffrance importante qui limiterait les possibilités de communication dans le champ des soins palliatifs ; les médecins n’anticipent pas assez le be- soin en soins palliatifs et accompagnement.

Communication à propos des soins palliatifs chez les patients porteurs d’une bronchopneumopathie chronique obstructive

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Page 1: Communication à propos des soins palliatifs chez les patients porteurs d’une bronchopneumopathie chronique obstructive

Med Pal 2006; 5: 103-107

© Masson, Paris, 2006, Tous droits réservés

REPÉRÉ DANS LA PRESSE SPÉCIALISÉE

Médecine palliative

103

N° 2 – Avril 2006

Sous la direction de Régis Aubry

Notes de lecture, résumés et commentaires des « papiers » les plus notables de la presse nationale et internationale… pour ouvrir des perspectives : vos revues et analyses de la presse spécialisée peuvent être adressées au Secrétariat de la Rédaction, qui transmettra : [email protected]

Le dispositif médical d’annonce

H. Brocq et al.

Douleurs 2005 ; 6 : 197- 225.

L’auteur rappelle d’abord l’enjeu de ce temps d’annonce et d’information et les difficultés que cela représente. L’informa-tion doit permettre au patient de faire des choix, et d’anticiper. Le contexte peut être traumatisant, et tous les patients n’ont pas les mêmes facultés d’adaptation et de deuil. L’histoire du patient entre en jeu, de même que les aspects transférentiels de l’échange. L’information est un élément du soin et de respect du malade. Elle participe à la confiance, permet le consentement. L’auteur reprend les avantages de l’infor-mation orale, les rôles de l’information écrite.Les référentiels réglementaires sont cités, ainsi que le rôle de chaque professionnel.L’auteur présente et discute ensuite les ré-sultats d’une enquête réalisée en PACA dans 22 services, mettant en parallèle les avis des patients, d’un comité d’éthique et des professionnels. Les questions clés du dispositif d’annonce sont passées en re-vue : le cadre nécessaire aux entretiens, le temps et la disponibilité requis, le contenu de l’information, les procédures, l’orga-nisation des services et le circuit de l’in-formation, la place des psychologues. L’annonce devrait être précédée d’une re-cherche sur « le niveau d’éducation du malade, son vocabulaire, ses connaissan-ces, son histoire, son vécu »… L’auteur in-siste sur la nécessaire progressivité de l’annonce, sur le temps nécessaire pour y revenir, en plusieurs fois, sur la nécessité du suivi à la sortie de l’hôpital. Il précise les qualités que devraient posséder les ac-teurs qui animent les entretiens, mais aussi les équipes dans leur ensemble. L’ar-ticle se termine par un ensemble de pro-positions pour diminuer le niveau de souffrance morale des personnes malades :

les formations à l’écoute, le temps à déga-ger, les lieux, le circuit des informations.

Huntington : maladie et problématique. Comment aider les familles concernées ?

L. Rapaille

Ethica clinica 2005 ; 38 : 23-33.

L’auteur apporte un éclairage nouveau sur la chorée de Huntington, méconnue du grand public et des professionnels. Il met en évidence les besoins tant des pa-tients que de l’entourage familial. Il met l’accent sur le caractère multidimension-nel de la maladie.

Maladie neurodégénérative à évolution progressive elle peut apparaître entre 35 – 45 ans. La durée d’évolution est générale-ment longue entraînant une dépendance et des déficits sévères progressifs dans dif-férents domaines. Mais globalement l’évolution se fait par pallier et entraîne inévitablement un état de polyhandicap et de dépendance complète à plus ou moins long terme. Il n’existe à ce jour aucun trai-tement spécifique pour cette maladie et la mise en place de traitement à visée symp-tomatique implique la prise en compte du rapport bénéfices/risques pour le patient. S’agissant d’une maladie autosomique do-minante, le risque de transmission est de 50 % ce qui en fait une maladie familiale. Depuis 1993 un test prédictif d’une fiabilité de 100 % peut être proposé. Ce test place le sujet face à un choix impossible que l’auteur détaille avec finesse, s’appuyant sur les recommandations internationales. Face à la singularité de l’évolution, l’adaptation et le réajustement des soins sont réguliers et fonction de chaque patient et de son envi-ronnement. L’auteur constate que cette ma-ladie entraîne progressivement un isolement du patient voire de la famille, aucune struc-ture adaptée n’existant à ce jour.

Cet article permet d’appréhender cette pa-thologie dans toutes ses dimensions et ré-percussions en renvoyant le lecteur à des questions aussi actuelles et diverses que celle de la possibilité d’une grossesse, du désir de savoir si l’on est porteur ou pas… comme on peut en rencontrer chez les couples séropositifs. Ainsi bien que traitant spécifiquement de chorée de Huntington, la réflexion suscitée par cet article va bien au-delà de cette seule pa-thologie et pose le problème plus général des pathologies qui touchent un système familial complet et de l’implication ou de l’absence d’implication de la société dans ce type de problématique. Les valeurs sous-tendues par la prise en charge d’une telle maladie renvoient au questionne-ment que l’on peut rencontrer dans la prise en charge de toutes pathologies dé-génératives touchant les sujets jeunes ou moins jeunes.

Communication à propos des soins palliatifs chez les patients porteurs d’une bronchopneumopathie chronique obstructive

J. Randall Curtis, R.A. Engelberg, M.D. Wenrich et al.

Journal of Palliative Care 2005 ; 21 : 157-64.

Les bronchopneumopathies obstructives chroniques sont une des principales cau-ses d’invalidité et de mortalité dans le monde. En dépit du traitement, la qualité de vie des malades est mauvaise et le pro-nostic sombre. Pourtant, les malades bé-néficient peu de soins palliatifs. Les auteurs pensent que ceci est lié à un dé-faut de communication entre médecins et malades concernant les soins palliatifs. Ils présentent le fruit d’une recherche des pu-blications permettant de comprendre les raisons de ce défaut de communication. 2 pistes principales sont ainsi dégagées :

– les patients présentent souvent une souffrance importante qui limiterait les possibilités de communication dans le champ des soins palliatifs ;

– les médecins n’anticipent pas assez le be-soin en soins palliatifs et accompagnement.

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REPÉRÉ DANS LA PRESSE SPÉCIALISÉE

Médecine palliative

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N° 2 – Avril 2006

Cette étude a le mérite d’attirer l’attention sur un aspect peu connu relevant des soins palliatifs et de l’accompagnement.

Statut psychosocial et physique : une comparaison entre les patients atteints d’une maladie du motoneurone et les patients atteints de cancer

D.M. Clarke, J.E. Mc Leod, G.C. Smith et al.

Journal of Palliative Care 2005 ; 21 : 172-9.

Les auteurs de cette étude australiens ont comparé 125 patients atteints d’une mala-die du motoneurone avec 126 patients atteints d’un cancer métastatique. Les pa-tients avec MMN ont un handicap physi-que plus important mais ils présentent moins de douleur ; ils ont plus de rela-tions sociales. Leur souffrance est plutôt marquée par une démoralisation avec perte d’espoir, idées suicidaires. Les pa-tients atteints d’un cancer métastatique ont plus de douleurs. Leur souffrance est plutôt marquée par une anhédonie. Les auteurs analysent cette différence d’ex-pression de la dépression comme une réaction psychique propre à une situation différente. Ils formulent l’hypothèse que cette différence pourrait renvoyer à un substrat biologique différent de la dépres-sion et donc à une approche thérapeuti-que spécifique.

Formation des patients et des proches pour le contrôle des symptômes. Une étude contrôlée, randomisée pour évaluer les effets sur la symptomatologie dépressive

M.E. Kurtz, C. Kurtz

Journal of pain and symptom management 2005 ; 30 : 112-22.

La question que se sont posée les auteurs est la suivante : en quoi les actions de formation effectuées par les infirmières pour les proches et les patients, pour mieux gérer les symptômes, réduisent leur symptomatologie dépressive ? 237 situa-tions ont ainsi été étudiées. Le groupe ex-périmental (n = 118) a bénéficié de soins

centrés sur la formation des proches à la gestion des symptômes. Le groupe contrôle (n = 119) a bénéficié de soins conventionnels. La dépression a été mesu-rée avec une échelle validée.

Il n’y a pas eu de réduction significative de la dépression des proches et des pa-tients entre le groupe expérimental et le groupe contrôle à l’issue des 20 semaines de suivi.

Ce résultat peut apparaître surprenant ; il est intéressant de le prendre en compte tout en analysant les biais d’une telle étude. Les auteurs recommandent d’ailleurs d’approfondir la recherche au-delà de ce temps de 20 semaines. De même une réflexion sur les modalités de la for-mation et une meilleure connaissance des personnes formées permettraient certaine-ment de moduler ce résultat.

Quand et comment initier une discussion au sujet du pronostic et de la fin de vie chez des patients en phase avancée ou terminale d’une maladie

J.M. Clayton, P.N. Butow, M.H.N. Tattersall

Journal of pain and symptom management 2005 ; 30 : 132-44.

Le but de ce travail est d’explorer par qui, comment et quand les discussions à pro-pos du pronostic et la fin de vie doivent être initiées avec les patients en fin de vie, ainsi que le contexte dans lequel ces su-jets peuvent être discutés de façon opti-male. Des entretiens avec 19 patients, 24 aidants et 22 professionnels ont servi à fonder la position développée par les auteurs dans ce texte. Quatre types d’ap-proches ont été identifiés :

– il faut attendre que les patients et les proches abordent le sujet ;

– aux professionnels d’offrir aux patients et à leur proche l’opportunité d’aborder le futur ;

– aux professionnels d’initier la discus-sion quand les patients et leurs proches expriment le besoin de savoir ;

– aux professionnels d’initier la discussion quand les patients et leurs proches sem-blent prêts à entendre.

Les déterminants du choix sont le degré de relation soignant/soigné, les capacités et les possibilités de compréhension des patients et des proches, les personnes pré-sentes lors de la discussion, et la connais-sance préalable de qui doit donner l’infor-mation.

Compte tenu de la délicatesse et de la sen-sibilité du sujet, les auteurs concluent fort justement à la nécessité de former les soi-gnants à la communication.

Traitement symptomatique des infections chez des patients porteurs d’un cancer avancé et recevant des soins palliatifs

R.E. Reinbolt, A.M. Shenk, P.H. White

Journal of pain and symptom management 2005 ; 30 : 175-82.

Le contrôle des symptômes est un des ob-jectifs prioritaires en soins palliatifs.

L’objet de l’étude prospective présentée est de déterminer si l’utilisation des an-tibiotiques pour une infection suspectée cliniquement chez des patients ayant un cancer avancé a une efficacité sympto-matique. 623 des 1 598 patients étudiés (89 % avaient un index de Karnofsky inférieur à 60 %) ont présenté un total de 685 infections. 683 des infections ont été traités par antibiotiques pour une infection suspectée cliniquement. Une réponse symptomatique partielle ou complète a été obtenue chez : 79 % des 265 patients avec infection urinaire, 43 % des 221 patients ayant une infec-tion broncho-pulmonaire, 46 % des 63 patients avec infection ORL, 41 % des 59 patients avec infection cutanée ou sous-cutanée, 9 des 25 patients avec bactériémie

La survie n’a pas été affectée dans cette étude. Hormis pour les infections urinai-res, l’effet symptomatique très relatif des antibiotiques utilisés pour les infections broncho-pulmonaires, ORL, cutanées et sanguines doit faire réfléchir à la limita-tion de l’utilisation des antibiotiques chez les patients ayant un cancer en phase avancée.