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Université du Québec ESSAI PRÉSENTÉ À L’UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À TROIS-RIVIÈRES COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN LETTRES (AVEC ESSAI - COMMUNICATION SOCIALE) PAR NATACHA DESNOYERS (DESN27567207) COMMUNICATION DE CRISE ET GOUVERNANCE DU GOUVERNEMENT DU QUÉBEC: LE CAS DE L’OURAGAN KATRINA SUR LA CÔTE NORD JANVIER 2014

COMMUNICATION DE CRISE ET GOUVERNANCE … · de la communication et la gestion de crise et finalement, ... occupent une place non négligeable dans les médias et mettent, sans contredit

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Université du Québec

ESSAI PRÉSENTÉ À

L’UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À TROIS-RIVIÈRES

COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN LETTRES

(AVEC ESSAI - COMMUNICATION SOCIALE)

PAR

NATACHA DESNOYERS (DESN27567207)

COMMUNICATION DE CRISE ET GOUVERNANCE DU GOUVERNEMENT

DU QUÉBEC: LE CAS DE L’OURAGAN KATRINA SUR LA CÔTE NORD

JANVIER 2014

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II

« Le plus grand soin d’un bon gouvernement

devrait être d’habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. »

Alexis de Tocqueville

« Le changement du monde n'est pas seulement création, progrès,

il est d'abord et toujours décomposition, crise. »

Alain Touraine

« Les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité

et ils ne voient la nécessité que dans la crise. »

Jean Monnet

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III

SOMMAIRE

La présente étude prend en considération les concepts de gouvernance et de

communication de crise pour étudier le cas du passage de l’ouragan Katrina sur la

Côte-Nord québécoise à l’automne 2005. Dans un premier temps, nous exposerons

l’objet d’étude par la mise en contexte de la problématique et la problématisation de la

question elle-même. En clair, nous poserons un regard critique sur l’univers étatique

québécois actuel et la manière dont, a priori, les communicateurs du gouvernement

priorisent le service au citoyen, la démocratie, la participation véritable au sein de leurs

actions de communication en situation d’exception.

Nous présenterons ensuite notre cadre théorique qui se divise en trois volets principaux:

le volet de la gouvernance plus précisément à travers les concepts de l’État stratège et de

la participation citoyenne ; le volet de la communication de crise à travers les concepts

de la communication et la gestion de crise et finalement, celui de la communication

concomitante et le volet de la gouvernance et la communication de crise inter reliées.

Finalement, nous présenterons à l’intérieur du chapitre portant sur la structuration de la

recherche, l’approche méthodologique préconisée qui consiste principalement en une

étude de cas, la méthode de collecte de données qui se fera par triangulation (analyse de

contenu, entrevues semi-dirigées, groupes de discussion) et la méthode

d’échantillonnage (probabiliste).

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IV

TABLE DES MATIÈRES

SOMMAIRE ............................................................................................................................... III

LISTE DES TABLEAUX ............................................................................................................ 5

REMERCIEMENTS .................................................................................................................... 6

INTRODUCTION........................................................................................................................ 7

CHAPITRE 1 : OBJET D’ÉTUDE ............................................................................................ 9 Thème de la recherche ................................................................................................................. 10 Question générale de recherche ............................................................................................... 17 La problématique et sa mise en contexte .............................................................................. 18 Axe préliminaire ............................................................................................................................. 19

CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE .................................................................................. 21 Cadre théorique ou conceptuel ................................................................................................. 22 La gouvernance ............................................................................................................................... 22 La communication de crise ......................................................................................................... 32 La communication de crise et la gouvernance ..................................................................... 45 Concepts ............................................................................................................................................. 49 Question de recherche .................................................................................................................. 51

CHAPITRE 3 : STRUCTURATION DE LA RECHERCHE ................................................ 52 Stratégie de recherche .................................................................................................................. 53

Collecte et analyse de données .............................................................................................................. 55 Analyse de contenu .................................................................................................................................................. 55 Entrevues semi-dirigées ......................................................................................................................................... 56 Groupes de discussion ............................................................................................................................................. 57 Menace à la validité ................................................................................................................................................. 57

Indicateurs ........................................................................................................................................ 58 Validation de la grille ............................................................................................................................................. 62

Échantillonnage des corpus ........................................................................................................ 67

CONCLUSION .......................................................................................................................... 72

RÉFÉRENCES ........................................................................................................................... 74

ANNEXES .................................................................................................................................. 80 Annexe 1 ............................................................................................................................................ 81 Annexe 2 ............................................................................................................................................ 82

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Attribution Theory-based Crisis Communication Best Practices (Coombs,

2007, p.42) - La Théorie de l’attribution basée sur les bonnes pratiques en matière de

communication de crise (traduction libre) ....................................................................... 42

Tableau 2 : Synthèse des concepts spécifiques retenus ................................................... 50

Tableau 3 : Menaces à la validité ..................................................................................... 58

Tableau 4 : Principes et normes des concepts spécifiques – grille d’analyse et indicateurs

.......................................................................................................................................... 61

Tableau 5 Five ethical frameworks to inform crisis communication practices (Sellnow

et Seeger, 2013, p. 233) - Cinq cadres éthiques pour informer sur les pratiques de

communication de crise (traduction libre)……………………………………………………63

Tableau 6 : Population à l’étude – groupe de discussion et entrevues semi-dirigées…...68

Tableau 7 : Critères d’inclusion et d’exclusion de la population à l’étude………..……69

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REMERCIEMENTS

En préambule, je tiens à mentionner que la réalisation de cet essai s’est révélée pour moi

un défi colossal que je n’aurais jamais réussi à accomplir sans le support de précieux

collaborateurs.

Je tiens à remercier chaleureusement mon directeur de recherche, monsieur Raymond

Corriveau, pour sa patience, ses encouragements et sa recherche de l’excellence qui

motive à toujours avoir envie de franchir le kilomètre de plus. Je remercie également

madame France Aubin pour ses conseils justes et avisés.

Finalement, j’affirme sans hésitation que je n’y serais pas arrivée sans le soutien moral,

la compréhension et la collaboration au quotidien de mon complice de vie, Claude

Carrier. Je le remercie du fond du cœur. Un dernier merci tout spécial à Suzie, qui du

haut de ses six ans, me motive jour après jour à être un exemple de soif de savoir, de

persévérance et d’accomplissement de soi.

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INTRODUCTION

La gouvernance et la communication de crise sont des concepts qui ont définitivement la

cote dans notre société actuelle. La gouvernance est un concept qui existe depuis fort

longtemps, mais qui revêt de tout nouveaux atours depuis les dernières décennies. On le

redécouvre et on le galvaude. La communication de crise est un concept dont la mise à

l’étude est plus récente, mais pour lequel l’engouement est tout aussi grand.

À travers les pages qui suivent, nous avons voulu mettre en relation ces deux concepts,

ce qui, comme vous serez à même de le constater à travers la recension des écrits, a été

encore très peu fait par les scientifiques de toutes les époques. Pour ce faire, nous avons

choisi un cas d’envergure au Québec qui appartient aux catastrophes naturelles qui, par

leur ampleur, mobilisent plusieurs niveaux de parties prenantes, occupent une place non

négligeable dans les médias et mettent, sans contredit et à tout coup, nos deux concepts

en relation.

La démarche méthodologique que nous avons retenue est l’étude de cas. Le cas à

l’étude sera celui du passage de l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord du Québec à

l’automne 2005.

Notre cadre théorique est construit autour du modèle québécois de gouvernance incluant

quelques principes de la gouvernance participative, des bonnes pratiques en situation de

crise ainsi que les normes de gouvernance en situation de crise. La théorie de la

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communication concomitante (Mucchelli) qui propose une perspective plus large des

communications est également prise en considération dans notre analyse afin de lui

donner davantage de profondeur.

Notre grille d’analyse a été élaborée dans une approche holistique et vise à mesurer 14

principes ou normes avec des indicateurs issus de différentes sources. Elle a été

appliquée à une note de service provenant de Services Québec.

Dans le cadre de cet essai, nous ne sommes pas arrivées à une conclusion qui nous

permette de corroborer ou non, notre question de recherche. La poursuite de la

recherche est nécessaire pour parvenir à cette fin.

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CHAPITRE 1 : OBJET D’ÉTUDE

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Thème de la recherche

Actuellement, la fonction publique québécoise vit une restructuration qui préconise

l’allègement des structures et la révision des programmes dans le but de restreindre la

lourdeur de l’appareil gouvernemental. Ainsi, pour remplacer les 32 000 départs à la

retraite que connaitra la fonction publique d’ici 2014, le gouvernement compte

embaucher 16 000 personnes environ ce qui représente le remplacement de la moitié de

ses ressources humaines. Dans cette perspective, le gouvernement du Québec vise une

réduction de ses effectifs de 20 % d’ici 20141.

On peut constater une transformation du discours de l’État qui prône dorénavant l’entrée

en jeu de nouvelles ressources non gouvernementales pour gérer les préoccupations

sociales entre autres par l’établissement de partenariats, le partage des responsabilités

entre diverses organisations jusqu’à la participation citoyenne. Bref, en plus d’intégrer

dans son discours les termes à la mode de « bonne gouvernance publique » et de

multiplier les consultations publiques2, le système de gouvernement tel qu’on le

connaissait jusqu’à présent cède désormais sa place à de nouveaux systèmes de gestion

de l’État, tels que les partenariats public-privé. Le fait que des organisations naissent

afin de promouvoir et gérer ces phénomènes est, à notre avis, un indicateur que ceux-ci

sont l’expression d’un mouvement non éphémère. Par exemple, l’Institut pour le

partenariat public-privé (IPPP) est un organisme indépendant, sans but lucratif, qui

encourage le dialogue sur le partenariat public-privé (www.ippp.org). Le cabinet

1 http://www.tresor.gouv.qc.ca/fileadmin/PDF/publications/plan_modernisation.pdf

2 www.gouv.qc.ca/portail/quebec/pgs/commun/asurveiller/consultations/gouvernement/?lang=fr

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Intangible Gouvernance, quant à lui, prétend être le spécialiste dans le domaine de la

bonne gouvernance des administrations publiques au Québec et est spécialisé dans les

domaines de la bonne gouvernance, de l’éthique publique, des arrangements

institutionnels et de la conduite des politiques publiques

(www.intangiblegouvernance.ca).

Une question s’impose : de quelle façon la communication s’articule-t-elle en situation

d’exception dans cet État qui tend à redéfinir sa gouvernance ?

Comme nous l’avons abordé en partie précédemment, le rôle de l’État est en

mouvance et les pouvoirs tendent à se décentraliser, et ce depuis un certain temps déjà.

Pour n’en nommer que quelques-uns, certains projets de loi déposés au Québec ces

quinze dernières années démontrent une volonté de décentralisation :

Projet de loi 404 (1997) : Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les

services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives. « […] De façon

globale, le projet propose plutôt une toute nouvelle répartition d'importants

pouvoirs décisionnels, répartition essentiellement fondée sur une forte

décentralisation

(www.barreau.qc.ca/pdf/journal/vol30/no8/decentralisation.html)».

Projet de loi 34 (10 nov. 2011) : Loi pour assurer l’occupation et la vitalité des

territoires issue de la Stratégie pour assurer l’occupation et la vitalité des

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territoires 2011-2016. La stratégie est basée sur la mise en place d’une nouvelle

dynamique prenant appui sur trois pôles d’intervention : l’action des

collectivités, l’action gouvernementale et, au besoin, l’action conjointe

(www.mamrot.gouv.qc.ca/occupation-et-vitalite-des-territoires/strategie/).

Projet de loi 499 (29 nov. 2011) : Loi sur l’occupation dynamique du territoire et

décentralisation. Ce projet de loi a pour objet d’instaurer un nouveau cadre

relatif aux relations entre les municipalités et l’Administration afin que l’exercice

de leurs compétences s’inscrive dans la recherche d’une occupation dynamique

du territoire et d’une plus grande décentralisation (www.assnat.qc.ca/fr/travaux-

parlementaires/projets-loi/projet-loi-499-39-2.html).

Ce phénomène est suffisamment présent pour qu’il fasse l’objet d’études au Québec.

Côté et Lévesque (2009), qui comptent parmi les auteurs de l’hypothèse de l’État

stratège et la participation citoyenne que nous aborderons plus tard, constatent :

« [U]ne fois engagé dans la décentralisation de ce qui peut être mieux assumé par

des instances inférieures ou encore dans des partenariats qu’il a conclus avec

d’autres acteurs, l’État peut devenir, en raison des règles qu’il a lui-même posées,

un acteur comme les autres dans la réalisation d’activités, y compris celles relevant

de l’intérêt général » (page 52).

Cette volonté de décentralisation n’est pas qu’un phénomène québécois et date de

plusieurs décennies :

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« Par exemple, la décentralisation en France dès le début des années 1980 s’est

accompagnée de réformes qui ont impulsé de nouvelles formes de gestion,

notamment dans le domaine urbain ou dans la redéfinition des missions de services

publics » (Baron, 2003, p. 331).

Ceci dit, la gouvernance tend à se redéfinir tant dans l’univers social, économique que

public. Milot et Lepage (2011) proposent cette définition de la gouvernance :

« La gouvernance est un « construit » auquel nous faisons appel en de multiples

lieux pour discuter, mais aussi dans le but de régler en société des problèmes.

Comme théorie, la gouvernance renvoie à un nouveau modèle d’exercice du

pouvoir en société. Elle implique une visée de participation publique et une vision

décentrée du pouvoir, celui-ci n’étant plus la prérogative du seul État de droit.

C’est le pouvoir en réseau, distribué comme l’est l’information (p. 9)».

Nous reviendrons sur le concept de gouvernance en l’abordant plus en profondeur un

peu plus loin. Il est intéressant de constater que les dossiers d’actualité qui interpellent

les principes de la gouvernance sont en augmentation et traitent de sujets à grande

portée: la pandémie d’influenza aviaire, l’accord de Kyoto, les changements climatiques,

la gestion de la centrale nucléaire de Fukushima, etc.

Pour les acteurs impliqués dans la gouvernance, la communication joue un rôle

déterminant à tous les niveaux. La communication dans une telle perspective prend

aussi (et surtout) le visage de la gestion des interactions et se transforme en acte de

médiation entre les principaux acteurs concernés. Elle est d’une importance capitale

quant à l’atteinte de l’objectif visé, soit, en ce qui concerne la mission du gouvernement,

de servir les intérêts citoyens. Nous nous posons alors la question suivante : dans un

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contexte où les enjeux demandent une réaction de plus en plus rapide, où les ressources

publiques diminuent, où il n’est pas clairement démontré que le discours étatique soit

cohérent avec les actions en situation réelle, en fin de compte, est-ce que le point de mire

demeure le service aux citoyens ? En situation d’exception, comment la communication

est-elle employée et à quelles fins ?

Plus précisément, le discours politique actuel et les actions du gouvernement relèvent-ils

de la rhétorique, ou ne servent-ils que de prétexte participatif ? La situation d’exception

est lourde de désavantages et de conséquences néfastes, mais elle nous intéresse dans la

mesure où son examen pourrait nous donner accès à une réalité sans fard et sans artifice.

Nous nous sommes donc posé la question à savoir comment les communicateurs de nos

sociétés d’État utilisent-ils la communication en situation d’exception ? La

communication étant déterminante quant à la gestion d’une crise (Roux-Dufort, 2003), il

devient intéressant de se questionner à savoir si les paramètres de la gouvernance

actuelle, ont été mis à jour dans notre système étatique. D’autant plus que le concept de

risque monte en flèche dans les préoccupations contemporaines de nos sociétés

(Peretti-Watel, 2001) et que ces préoccupations autrefois territoriales sont maintenant

devenues des enjeux cosmopolites (Halpern, 2006). Quand une crise majeure éclate, où

qu’elle soit, le monde entier a les yeux rivés sur son déroulement.

Les changements climatiques anthropiques font partie des sujets de l’heure. On entend

par changement climatique anthropique l’évolution du climat et de ses variations « […]

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attribuée aux émissions de gaz à effet de serre engendrées par les activités humaines, et

altérant la composition de l'atmosphère de la planète (www.notre-planete.info) ». Ils ont

généré leur part de catastrophes. D’ailleurs, nous avons tous été témoins de la gestion de

crise pitoyable menée par les autorités américaines lors du passage de l’ouragan Katrina

en Louisiane en 2005. Ces dernières ont été pointées du doigt par le monde entier. Le

Québec a eu également ses crises majeures reliées au changement climatique dont les

plus importantes ont été le déluge du Saguenay en 1996 et la crise du verglas en 1998.

À la suite des deux rapports Nicolet qui ont suivi ces catastrophes exposant les faiblesses

de la préparation et de la réaction face à de telles situations, le gouvernement du Québec

s’est doté d’un Plan national de la sécurité civile (PNSC) qui a été suivi, en 2001, par

une loi sur la sécurité

civile (http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?ty

pe=2&file=/S_2_3/S2_3.htm). Selon Serge Ménard, ministre de la Sécurité publique du

29 octobre 2002 au 29 avril 2003, la loi établit de façon claire un partage de

responsabilités entre les divers intervenants – citoyens, entreprises, municipalités,

gouvernement – dans les principales dimensions de la sécurité civile que sont la

prévention, la préparation, des interventions lors de sinistres, réels ou imminents et le

rétablissement (http://www.securitepublique.gouv.qc.ca/fileadmin/Documents/securite_c

ivile/lois_reglements/presentation_synthese.pdf). Un peu modifiée par la suite, la loi

conserve toujours le même esprit, mais les règlements qui rendraient cette loi plus

opérante se font toujours attendre (Le Devoir, le mercredi 19 septembre 2012).

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Avec le développement du Plan national de sécurité civile (PNSC), le gouvernement du

Québec a voulu se doter d’un cadre général de gestion de la sécurité civile dans le but de

favoriser la concertation entre les intervenants en période calme et la coordination des

actions en période de crise. L’approche par mission prévoit un partage des

responsabilités au sein de l’appareil gouvernemental. Le plan comprend 16 missions

dont la mission « communication » qui est dirigée en situation d’exception par Services

Québec.

Très peu d’études, ici comme ailleurs, s’intéressent à la communication dans sa fonction

d’appui, ou au rôle qu’elle joue en situation d’urgence dans la gouvernance. Au Québec,

on n’en répertorie aucune. En considérant que les situations prises en charge par le

ministère de la Sécurité publique de concert avec les organisations (associations,

municipalités, entreprises, citoyens) sont de plus en plus nombreuses, il devient

intéressant d’observer de quelle façon la gouvernance s’articule afin d’identifier les

visées réelles des protagonistes impliqués, dont principalement, le gouvernement.

Finalement, le ministère de la Sécurité publique est responsable de veiller à offrir aux

citoyens, un milieu de vie sécuritaire. L’Organisation de la sécurité civile (OSC) est un

système de gouvernance qui a été mis en place afin d’agir entre autres, en cas de sinistre,

en offrant un service aux citoyens en période de vulnérabilité. Au sein d’une

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organisation d’État où le processus de gouvernance est la figure de proue, la

communication est utilisée dans le but de servir qui, quoi et de quelle façon ?

Ces questionnements que nous soulevons sont d’intérêt public et dans notre société

démocratique, ils nous concernent tous. La pertinence de notre questionnement est aussi

mise en relief par l’avis négatif que les Québécois ont formulé à l’égard de la gestion de

la dernière grande crise naturelle qui a frappé le Québec, celle des inondations en

Montérégie. Dans un sondage Léger Marketing, près de 60% d’entre eux se montrait

insatisfaits de la gestion gouvernementale. Le cas du Lac-Mégantic a connu un meilleur

sort, mais l’acteur principal n’était pas le gouvernement du Québec. C’est cet univers

fascinant que nous nous proposons d’explorer.

Question générale de recherche

Nous sillonnerons les champs intellectuels de la gouvernance et de la communication en

situation d’exception en analysant un cas particulier, le passage de l’ouragan Katrina sur

la Côte-Nord en 2005. Règle générale, la gouvernance et la communication de crise

sont deux concepts qui cohabitent assez bien ensemble puisqu’ils sont tous deux issus

des sciences sociales et qu’ils partagent quelques grands principes comme nous

tenterons de le démontrer plus loin. Nous voulons déterminer si, en pratique,

l’intégration des concepts de gouvernance et de communication adéquate en situation

d’exception a été réussie en explorant une situation de crise gérée par Services Québec,

un service du gouvernement du Québec.

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La problématique et sa mise en contexte

En septembre 2005, les restes de l’ouragan Katrina qui avait fait des ravages quelques

jours auparavant en Louisiane ont touché le Québec plaçant certaines régions en

situation de crise. Les régions de la Capitale-Nationale et du Saguenay-Lac-Saint-Jean

ont été touchées par des pluies diluviennes, mais c’est la région de la Côte-Nord qui a

été la plus durement atteinte. Une alerte météo émise la veille avait laissé présager la

crise. Des bris majeurs à son infrastructure routière principale, la route 138, ont

provoqué son isolement pendant plusieurs jours. Les pluies et les vents violents n’ont

pas causé d’accident et n’ont pas fait de victime ni de blessé. Les dommages n’ont été

que matériels. La population locale et les touristes présents dans cette région se sont

trouvés confinés au territoire et la Côte-Nord a connu l’isolement le plus grand de son

histoire3. On le comprend facilement, l’isolement d’une partie du territoire d’une nation

n’est pas un incident mineur et il renferme un potentiel élevé de dangerosité.

Pour gérer et rétablir la situation, plusieurs paliers gouvernementaux (Direction

régionale de Services Québec de la Côte-Nord, Organisation régionale de sécurité civile,

Direction de la sécurité civile, Transports Québec) se sont dirigés sur place et ont

déployé, sous l’égide du Centre de coordination stratégique des communications, trois

centres d’activités du Plan national de la sécurité civile: le Centre des renseignements

aux citoyens, le Centre de traitement des informations publiques, le Portail

gouvernemental de service (PGS) avec son volet Internet. Les entreprises, les citoyens

3 Note d’information, Services Québec, Direction de la coordination de l’information et des services d’urgence,

novembre 2005, http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Index/nouvelles/200509/01/004-ROUTECOTENORD.shtml

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de la région et les visiteurs présents durant la crise étaient également parties prenantes

du système de gouvernance entériné par le PNSC4.

À travers ce système de gouvernance en situation d’exception, comment ont été posées

les actions et dans quels buts ?

Axe préliminaire

On s’attend à ce que les actions de communication du gouvernement du Québec soient

planifiées et se réalisent selon les principes de gouvernance, tel qu’illustré dans la revue

de littérature. Cela dit, est-ce toujours le cas et, plus particulièrement, est-ce le cas en

situation d’exception ? À travers le cas du passage de l’ouragan Katrina sur la

Côte-Nord, nous postulons que les actions de communication du gouvernement du

Québec ne répondent pas toujours aux normes actuelles de la gouvernance.

Variable indépendante : actions de communication

Variable dépendante : normes actuelles de gouvernance

Variable attribut : situation d’exception (passage de l’ouragan Katrina sur la

Côte-Nord)

4 Note de service, Services Québec, Direction de la coordination de l’information et des services d’urgence, 15 sept.

2005

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Dans ce postulat, les normes de la gouvernance sont considérées comme variables

dépendantes, c’est-à-dire qu’elles demeurent les mêmes peu importe la situation. Selon

notre postulat, les actions de communication, considérées comme variables

indépendantes, sont influencées en situation d’exception. La situation d’exception qui

endosse le rôle de variable attribut devient donc déterminante.

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CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE

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Cadre théorique ou conceptuel

Le cadre théorique se décline en trois volets :

- Le volet de la gouvernance plus précisément à travers les principes de la

gouvernance publique, de l’État stratège et de la participation citoyenne.

- Le volet de la communication de crise à travers les concepts de la

communication et de la gestion de crise et celui de la communication

concomitante.

- Les points communs et la relation entre les deux volets précédents.

Voyons maintenant ce que la recension des écrits nous a révélé sur ces concepts

polysémiques et remplis de nuances.

La gouvernance

La gouvernance est sans contredit, pour tous les auteurs qui tentent de la définir, un

concept polysémique qui a été largement galvaudé.

« La polysémie d’un terme peut susciter des ambigüités et des confusions ; c’est

d’ailleurs ainsi qu’est le plus souvent abordée la question de la gouvernance.

Cependant, cette notion est indéniablement source de richesses, notamment parce

qu’elle renvoie à une multitude de facettes et favorise la rencontre entre

disciplines » (Baron, 2003, page 330).

Nous tenterons ici de dresser l’évolution du concept et de dresser un tableau sommaire

des différentes orientations qu’il a pris au fil du temps.

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Bien que la gouvernance soit apparue sur la scène internationale dans les années 1990,

Lamy (2005) confère à ce paradigme d’anciennes origines qui remonteraient à l’époque

médiévale. Selon lui, ce mot provenant de la langue française semble être apparu dans

le discours au XIIe siècle avec comme signification, la direction des baillages. Au

Moyen Âge et sous l'Ancien Régime, le baillage était une circonscription administrative

et judiciaire de la France, placée sous l'autorité du bailli, agent du roi de France placé à

la tête d'un bailliage (Dictionnaire Larousse). Jessop (1998), quant à lui, découvre des

racines dans le latin classique ou le grec ancien. On l’aurait ensuite vu se pointer chez

les Anglais avec « governance » qui désignait alors le « pilotage » des bateaux.

Au départ, le terme « gouvernance » faisait surtout référence à l’action ou à la manière

de gouverner, guider ou diriger la conduite et était étroitement lié à celui de

gouvernement (Jessop, 1998) ou de « governing » (Halachmi, 2005). Dans cet ordre

d’idée, la gouvernance se définit par l’utilisation de l’autorité politique et l’exercice du

contrôle par l’État en relation avec la gestion des ressources de la société en vue du

développement économique et social (OCDE, 1993, dans Lequin 2001).

C’est alors qu’apparait le concept de « bonne gouvernance » qui se veut alors une

approche moderne du développement et plus particulièrement, du développement

international, axé sur la notion d’« accountability » qui vise la réduction de la corruption

et le respect des droits de la personne.

«Here the focus is to a lesser extent on the relations between state and society, but

on the state structures and institutional arrangements designed do ensure

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accountability and due processes of law-making and its application» (Doornbos,

2001, p. 96).»

«Ici, l'accent est moins mis sur les relations entre l'État et la société, mais plutôt

sur les structures de l'État et les arrangements institutionnels visant à assurer la

responsabilisation, les processus de reddition de comptes dans la législation et

leurs applications.» (traduction libre).

Selon Gaudin (2002), la bonne gouvernance s’exprime par la lisibilité accrue de l’action

publique, plus accessible pour tous les citoyens, une « accountability » réelle, passant

par des évaluations techniques et financière et la mobilisation de réelles compétences

gestionnaires dans l’exécution des programmes d’aide. Drechsler (2004) pousse un peu

plus loin en définissant les principes de la bonne gouvernance :

« […] « good » principles usually encompassed such concepts as

transparency, efficiency, participation, responsibility, and market

economy, state of law, democracy, and justice (p. 389)».

« les principes de « bonne » gouvernance englobent généralement des

concepts tels que la transparence, l'efficacité, la participation, la

responsabilité, l'économie de marché, l'État de droit, la démocratie et

la justice (traduction libre)».

Kooimans (1993) et Rhodes (1997) approfondissent le concept et présentent les

caractéristiques de la « bonne gouvernance publique », dont la qualité tant dans les

principes que dans les processus doit être évaluée par les parties prenantes elles-mêmes :

- citizen engagement

- transparency

- accountability

- the equalities agenda and social inclusion (gender, ethnicity, age, religion, etc.)

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- ethical and honest behaviour

- equity (fair procedures and du process)

- ability to compete in a global environment

- ability to work effectively in partnership

- sustainbility

- Engagement citoyen

- Transparence

- Imputabilité

- L'agenda des égalités et de l'inclusion sociale (sexe, origine ethnique, l'âge, la

religion, etc.)

- Étique et comportement honnête

- Équité (procédures et processus équitables)

- Capacité à soutenir la concurrence dans un environnement mondial

- Capacité à travailler efficacement en partenariat

- Durablilité (sustainability)

(traduction libre)

Dans un autre ordre d’idées, le concept de gouvernance continue de s’élargir et est

emprunté par différents secteurs d’activité notamment par celui de la gestion des

entreprises. Le concept de gouvernance n’est alors plus du tout associé à l’État.

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26

« Il [le concept de gouvernance] renvoie à l’existence présumée d’un consensus

sur les procédures de bonne gestion proposées comme universellement valables et

devant servir de modèle de référence. Or, dans le domaine plus circonscrit de la

gestion des entreprises, la ‘’gouvernance’’ corporative n’est pas un modèle, mais

plutôt un modus operandi, un équilibre entre les actionnaires, le conseil

d’administration, les vérificateurs externes et les dirigeants de l’entreprise »

(Campbell, 2001, p. 2).

La transition du concept de gouvernance vers celui de la bonne gouvernance ou encore

son application dans les entreprises ne sera pas retenue pour étayer l’analyse de notre cas

en situation d’exception. À première vue, le concept de « bonne gouvernance » pourrait

sembler adéquat et pertinent à retenir pour fins l’analyse. Cependant, étant donné sa

lourde connotation, nous préférons ne pas l’associer à notre recherche. Cependant, nous

n’aurions pas pu faire le tour du concept de la gouvernance sans aborder ses importantes

déclinaisons.

Dans les années 1990, ce concept fait son entrée en force dans les sciences sociales en se

prêtant à multiples usages et en revêtant de nombreuses significations (Lequin, 2001).

Par la suite, les auteurs ont défini clairement la distinction entre les deux termes -

gouvernance et gouvernement -, brisant ainsi l’association systématique du concept de

gouvernance et celui de gouvernement :

«Governance signifies a change in the meaning of government, referring to a new

process of governing ; or a changed condition or ordered rule ; or the new method

which society is governed » (Rhodes, 2000, p. 55).

« Par gouvernance, on entend un changement dans la signification de gouvernement,

référant à un nouveau processus de gouverner; ou un changement des conditions ou

règles de direction; ou une nouvelle méthode par laquelle une société est gouvernée

(traduction libre) ».

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Le terme « gouvernement » réfère aux institutions officielles de l’État et à ses chefs

chargés de gouverner, de même qu’au pouvoir coercitif légitime dont ils ont le

monopole. Si le gouvernement se caractérise par la capacité de prendre des décisions et

le pouvoir de les appliquer, la notion de gouvernance désigne davantage les modes de

gouvernement et la manière de gouverner (Jessop, 1998) soit une nouvelle organisation

du pouvoir ou une nouvelle façon de gouverner la société (Lequin, 2001).

Halachmi (2005), qui s’est penché sur la relation entre la communication des risques ou

la communication de crise et la gouvernance, porte notre attention sur ce qui différencie

« governance » de « governing » :

« The term « governance » […] refers to the results of the interactions within a

decentralized structure of governmental and non-governmental elements of civil

society under non-binding arrangements. The term « governing » refers to the

outcomes of activities within a centralized structure with sole government

control » (p. 302).

« Le terme «gouvernance», […] réfère aux résultats des interactions à l’intérieur

d’une structure décentralisée d’éléments gouvernementaux ou non-gouvernementaux

de la société civile, en vertu d’accords non contraignants. Le terme «gouverner»

réfère aux résultats des activités à l’intérieur d’une structure centralisée sous le

contrôle exclusif du gouvernement. (traduction libre)».

Pour De Senarclens (1998), « la gouvernance exprime l’idée que les gouvernements

n’ont pas le monopole de la puissance légitime, mais qu’il existe d’autres acteurs et

institutions qui peuvent contribuer au maintien de l’ordre et participer à la régulation

économique et sociale (p. 81 dans Lequin)». Cette tendance au libéralisme politique est

grandissante dans les années 1990 et la notion de gouvernance en tant que principe

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distinct prend une place de plus en plus solidement détachée de l’État. Tout d’abord,

son incarnation s’est faite rapidement dans le monde des affaires et ensuite, elle a pris

tout son sens dans les questions mondiales (Lamy, 2005). Par ailleurs, la Banque

Mondiale est l’une des premières institutions à avoir réintroduit le terme de la

gouvernance en lui attribuant la connotation suivante :

« […] pour l’essentiel, le concept de la gouvernance renvoie à l’élargissement de

la vision traditionnelle et technique de l’approche par la mise en place

d’infrastructures, dont l’envergure laisse place à la société civile ainsi qu’à sa

participation véritable » (Kooiman, 1996, p. 8).

La société civile est un concept tout aussi ambivalent que celui de la gouvernance. Parmi

toutes les utilisations et conceptions de ce terme, selon Thiriot (2002), il y aurait

aujourd’hui un consensus de base sur la notion :

« la société civile, c’est la vie économique, sociale et culturelle des individus, des

familles, des entreprises et des associations dans la mesure où elle se déroule en

dehors de l’État et sans visée politique, en ignorant la double logique, idéologique

et de souveraineté, de la vie politique, en recherchant, par contre, soit la

satisfaction des besoins ou des intérêts matériels, soit le soin des autres, la

convivialité, le bonheur privé, l’épanouissement intellectuel ou spirituel » (Berger,

1989-1990, p.136).

Selon Lequin (2001), les auteurs s’entendent tous pour dire que le processus de décision

dans la gouvernance doit refléter l’entente entre toutes les parties prenantes à propos des

conditions démocratiques de participation, d’engagement, de responsabilité et

d’honnêteté. Cependant, selon Milot et Lepage (2011), il serait simpliste d’associer

systématiquement le concept de gouvernance à celui des parties prenantes :

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« […] souvent la théorie de la gouvernance est liée ou fusionnée avec la théorie

des stakeholders ou parties prenantes. Encore là, il faut distinguer ce qui dans la

pratique des discours est souvent unifié, peut-être un peu rapidement. La théorie

des parties prenantes est développée d’abord par les théoriciens américains dans le

domaine assez vaste des sciences de l’organisation.

Comme théorie, la gouvernance renvoie à un nouveau modèle d’exercice du

pouvoir en société. Elle implique une visée de participation publique et une vision

décentrée du pouvoir, celui-ci n’étant plus la prérogative du seul État de droit.

C’est le pouvoir en réseau, distribué comme l’est l’information ».

Gaudin (2002) pousse la réflexion un peu plus loin en proposant trois caractéristiques au

concept. En effet, il s’agit des caractéristiques suivantes : de la décision collective soit la

coopération entre acteurs (publics et privés), le déploiement d’interaction continue dans

la définition et la conduite des politiques, l’adoption de règles du jeu négociées et

collectivement élaborées, sans se limiter aux rapports préétablis de dépendance ou de

hiérarchie. Paquet (2004) nous propose alors une définition plus générale qui a été

largement utilisée selon laquelle la gouvernance est « la coordination efficace dans un

monde où le pouvoir, les ressources et l’information sont répartis entre plusieurs mains

(page 19)».

En ce qui a trait à la gouvernance dans le secteur public, Vello et Eveli (2004)

prétendent qu’elle apporte davantage d’ouverture, de transparence, d’« imputabilité » et

une meilleure répartition des responsabilités. Cette distinction entre la notion de

gouvernance et celle gouvernement dans le sens de la gestion des affaires de l’État,

permet l’introduction d’un nouveau concept dans le secteur public. Un nouveau concept

qui débarque avec ses normes et ses pratiques.

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En clair, la division des concepts permet au premier - le gouvernement - d’évoluer en se

décentralisant, et ce, en passant d’un État régulateur à un État « animateur » (Baron,

2003). Plus près de nous, au Québec, l’Observatoire de l’administration publique de

l’École nationale d’administration publique mène depuis de nombreuses années des

recherches sur le modèle québécois de gouvernance.

Dans son mémoire intitulé La gouvernance de la culture : le rôle des fonctionnaires

fédéraux et québécois dans l'élaboration et l'adoption de la Convention sur la protection

et la promotion de la diversité des expressions culturelles de l'UNESCO, Emmanuelle

Coutu (2012) nous ouvre une fenêtre sur la théorie de Graz selon laquelle « la nouvelle

relation qu’entretiennent à l’échelle internationale les acteurs non étatiques avec le

politique contribue à façonner une autorité hybride : « auparavant marginale et nourrie

par la confrontation [...]. Elle se trouve aujourd’hui centrale et fondée sur des principes

de complémentarité, de légalité et de subsidiarité » (Graz, 2010, p. 42). Bien que cette

théorie s’applique davantage à la gouvernance internationale, l’idée qui la sous-tend

pourrait être généralisée à tout système de gouvernance.

La dernière hypothèse formulée est celle de l’État stratège et la participation citoyenne5.

Nous nous attarderons davantage sur ce concept puisque nous l’utiliserons dans le cadre

5 Cette hypothèse a été formulée suite à une démarche de sept ans à travers laquelle les chercheurs ont réalisé les

étapes charnières suivantes:

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d’analyse de notre situation d’exception. Les auteurs qui souhaitent se distinguer de la

«corporate goverance» expliquent l’État stratège et la participation citoyenne de la façon

suivante :

« La notion d’État stratège remonte au début des années 1990. La compréhension

que nous en proposons se démarque sur deux points importants qui sont d’ailleurs

étroitement liés : d’abord le fait d’appréhender le concept de stratégie dans son

application, non pas tellement aux questions de management ou de gestions des

organisations, mais plutôt aux questions de nature plus institutionnelle touchant la

place de l’État et le rapport État/société ; ensuite, le fait de conjuguer État stratège

et participation citoyenne » (Côté, Lévesque, 2009, page 11).

Quant à l’ouverture à la participation citoyenne, elle s’exprime dans le désir de travailler

en partenariat avec les acteurs de la société civile.

Toujours selon Côté et Lévesque (2009) un État ne peut pas être vraiment stratège sans

respecter les droits et libertés,

- 2002 : tenue d’un séminaire sur les caractéristiques et l’évolution du modèle québécois de gouvernance

réunissant une vingtaine d’universitaires et de praticiens ;

- 2004 : Louis Côté, Benoît Lévesque et Guy Morneau entame une recherche sur les transformations passées

et les mutations prévisibles en matière de gouvernance et de gestion publique au Québec qui a permis de

produire le rapport L’Évolution du modèle québécois de gouvernance : le point de vue des acteurs et le texte

et La gouvernance du Québec : rôle de l’État et participation citoyenne. Vingt-huit acteurs-clés (personnes

ayant exercé des fonctions ministérielles, anciens hauts fonctionnaires, leaders du monde associatif, chefs

syndicaux, dirigeants du monde de l’entreprise coopérative ou privée) ont été questionnés pour cette étape.

La seconde étape a consisté à mener des groupes de discussion formés de cinquante-cinq individus –

universitaires et praticiens issus de différents domaines - qui ont échangé sur les thèmes suivants : la place

de l’État et la participation citoyenne, le développement économique et régional, et le rôle de l’État, les

services de santé et le rôle de l’État, l’éducation et la culture, et le rôle de l’État, la structure et le

fonctionnement de l’administration publique. À partir de ces groupes de discussion l’article Les conditions

gagnantes pour un changement en profondeur : une vision partagée, une gouvernance appropriée et un État

stratège, a été rédigé et destiné au grand public. - 2006 : tenue d’un colloque intitulé Pour un État stratège ouvert à la participation citoyenne, ayant pour but

d’enrichir la réflexion sur la transformation du modèle québécois de gouvernance. Ce colloque était destiné

à des leaders d’opinion, des chercheurs et des acteurs socioéconomiques, politiques ou administratifs. - 2009 : publication de L’État stratège et participation citoyenne, sous la direction de Louis Côté, Benoît

Lévesque et Guy Morneau, Presses de l’Université du Québec.

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« [et il] établit une distinction nette entre les fonctions stratégiques (steering) des

politiques publiques et les fonctions opérationnelles de mise en œuvre (rowing) de

ces dernières. L’État stratège s’applique à maintenir les fonctions stratégiques

(direction, coordination, régulation, partage des ressources, contrôle, évaluation),

tout en laissant la mise en œuvre à d’autres acteurs (du secteur public, du secteur

privé à but lucratif, du tiers secteur) (p. 239)».

La question générale de cette recherche a comme objectif d’évaluer les actions de

communication du gouvernement du Québec lors d’une situation d’exception précise.

Puisqu’elle ne vise pas à étudier les stratégies et lois, mais bien la nature des actions,

nous retiendrons donc le concept général de Lequin (2001) selon lequel les auteurs

s’entendent pour dire que le processus de décision dans la gouvernance doit refléter

l’entente entre toutes les parties prenantes à propos des normes démocratiques,

d’engagement, de responsabilités et d’honnêteté. Nous mettrons en relation ce concept

avec les principes de l’État stratège et la participation citoyenne ainsi que ceux retenus

en lien avec la communication de crise que nous abordons dès maintenant.

La communication de crise

Tout comme la gouvernance, la communication de crise est un concept à la mode dont

on peut reconnaître plusieurs courants de pensée, notamment dans ce cas-ci, un courant

européen qui se penche davantage sur les crises du point de vue de la gestion de celles-ci

(Pauchant, Mittroff4, Roux-Dufort, etc.) et un courant américain qui pour sa part aborde

les crises sous l’angle principal de la communication (Coombs, Covello, Palenchar,

4 Bien que Mitroff soit américain, sa pensée rejoint celle des auteurs du vieux continent.

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Farazmand, etc.). Le concept de la communication de crise revêt des significations

quelque peu différentes selon les courants ce qui laissent place à de costaux débats

politiques et de sémantique ce qui ne permet pas de tirer une ligne claire sur ce concept.

Nous observons également que les auteurs des deux courants ont multiplié les écrits et

les outils dédiés à l’opérationnalisation du concept et à son application. La littérature est

moins abondante en ce qui a trait au concept en lui-même. Nous ne pouvons néanmoins

l’aborder sans, de prime abord, préciser les notions qui le sous-tendent : la notion de

crise et celle de la gestion de crise.

Explorons quelques définitions du concept. En premier lieu, Pauchant et Mitroff (1995)

proposent une définition du concept de « crise » dans une dimension micro qui rejoint le

sens de ce que l’on retrouve globalement dans la revue de la littérature.

« Une crise est un évènement surprenant des individus, qui limite ainsi le temps

qu’il leur est accordé pour élaborer une réplique, et qui menace leurs objectifs

prioritaires » (p. 38).

Shrivastava (1993), quant à lui, propose à la même époque une vision macro du concept

en lui amenant l’idée de processus ce qui permet d’en délimiter davantage les

paramètres et de l’extraire de son attribution de « fourretout » :

« Une crise est un processus de transformation induit par une rupture majeure qui

force à la restructuration des systèmes sociaux, humains, technologiques et

naturels. »

Un peu plus récemment, Horsley et Barker (2002) amènent une définition qui propose

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l’intégration de la notion de parties prenantes, abordée précédemment dans la section

dédiée à la gouvernance.

« The term crisis event refers to a «low-probability, high impact situation that is

perceived by critical stakeholders to threaten the viability of the organization and

that subjectively experienced by these individuals as personnally and socially

threatening» (p. 408). »

« Les termes situation de crise réfèrent à «une situation avec impact majeur, mais

avec faible probabilité, qui est perçue, par les parties prenantes critiques, en une

menace à la viabilité d’une organisation et, également perçut subjectivement par ces

individus comme une menace personnelle et sociale » (traduction libre).»

Cette définition s’applique davantage à la gestion de crise dans une organisation. Nous

survolerons cette dimension un peu plus loin. Nous retiendrons pour l’étude en cours la

définition de Shrivastava (1993) qui est celle qui s’avère la plus appropriée dans le cas

de la gestion d’une situation d’exception.

Roux-Dufort (2004) ne propose pas de définition proprement dite du concept de crise,

mais fait un pas de plus en définissant le processus de gestion d’une crise qui s’applique

tant à la gestion de crises proprement dite qu’à celle d’une situation d’exception qui est

en soi une forme de crise. Selon lui, elle passe par quatre phases : la prévention des

évènements potentiellement porteurs de crises; la préparation à gérer des situations

menaçantes ou déstabilisantes; l’intervention lorsque les évènements critiques se

produisent; et le recouvrement qui consiste à capitaliser sur les évènements afin de

s’améliorer.

Le Centre canadien de gestion (CCG) dans son guide La gestion des crises et des

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situations d’urgences : Un guide pour les gestionnaires de la Fonction publique du

Canada, reconnaît pour sa part quatre phases qui sont à toutes fins semblables : l’étape

de l’atténuation qui correspond aux actions prises visant à réduire les conséquences

d'une urgence ou d'une crise, l’étape de la préparation qui englobe les actions prises

pour se préparer à intervenir efficacement lors d'une crise ou d'une situation d’exception,

l’étape de l’intervention qui comprend les actions prises pour s'occuper des

conséquences d'une crise ou d'une urgence ; et l’étape du rétablissement qui implique les

actions prises suite à une crise ou une urgence (www.csps-

efpc.gc.ca/pbp/pub/pdfs/P117_f.pdf).

Horley et Baker (2002) adaptent les étapes pour le secteur public et proposent un modèle

qui présente les étapes de la communication de crise dans ce secteur (p.417).

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Figure 1 : Synthesis Model of Crisis communication for the Public Sector –

Modèle Synthèse de la communication de crise dans le secteur public

(traduction libre)

Bien que ce dernier modèle soit adapté au secteur public, dans le cas qui nous concerne,

nous utiliserons les quatre phases de Roux-Dufort afin de sélectionner la ou les phases

que nous retiendrons pour l’étude puisqu’elles composent le plus populaire de tous les

modèles et qu’elles nous semblent les plus appropriées à nous permettre d’avoir une

meilleure distinction du corpus et ainsi, offrir une meilleure lecture de ce dernier.

1. Ongoing Public relations Relations publiques en cours

2. Identification of and Preparation for Potential

crisis L'identification et la préparation

de crises potentielles

5. Evaluation and Revision of Public Relations Efforts

L'évaluation et la révision des initiatives de relations publiques

3. Internal Training and Rehearsal

Formation interne et répétition

4. The Crisis Event La crise

6. Interagency and Political Coordination Analysis

Interactions et analyse politique de la coordination

The Internal and External Environnement of the

Organization L’environnement interne et externe de l’organisation

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La situation d’exception que nous allons étudier fait partie du champ des catastrophes

naturelles. Richard D. Knabb, Jamie R. Rhome, and Daniel P. Brown, spécialistes du

National Hurrican Center ont décrété dans leur rapport du 20 décembre 2005 que

l’ouragan Katrina s’est avéré être l’un des plus puissants de l’histoire des

États-Unis. Ce même rapport fait mention que parmi tous les ouragans de l’Atlantique,

il a été l’un des six ouragans les plus forts jamais enregistrés

(www.nhc.noaa.gov/pdf/TCR-AL122005_Katrina.pdf). Anderson et Sphitzberg (2009)

présentent les principes généraux communs à toutes les catastrophes naturelles qui

doivent orienter les actions de communication afin de répondre aux particularités de ce

genre de crise :

- All disasters are similar in important aspects.

- All disasters are «local» in character.

- Panic is not a common response to disaster.

- Ineffective responses to disasters are costly.

- Information is always incomplete in disaster situations.

- Slowly unfolding disasters demand more media consumption and confirmation

than sudden disasters.

- The more complex or technical the risk or disaster, the more media messages will

be accepted by the public.

- Toutes les catastrophes sont similaires dans des aspects importants.

- Toutes les catastrophes ont un caractère «local».

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- Paniquer n'est pas une réponse adéquate lors de catastrophes.

- Les réponses inefficaces en cas de catastrophes sont coûteuses.

- L'information est toujours incomplète en cas de catastrophe.

- Les catastrophes à évolution lente exigent un plus grand apport médiatique que

les catastrophes soudaines.

- Plus le risque ou la catastrophe est complexe ou technique, plus les messages

médiatiques sont bien accueillis par le public.

(traduction libre)

Ces principes généraux s’appliquent en tous points au passage de l’ouragan Katrina sur

la Côte-Nord.

Parallèlement à la gestion de situation d’exception dans le cas de catastrophes naturelles,

le concept de la gestion de crise, tout comme celui de la gouvernance a connu une

application large dans le secteur des entreprises. Roux-Dufort (2003) est un des auteurs

qui s’est sans doute le plus consacré à cette application de la gestion de crise. Son

ouvrage Gérer et décider en situation de crise en traite largement avec sa proposition sur

la typologie des crises, la formation de cellules de crise, les rôles des membres de la

cellule dans une gestion de crise et les bonnes pratiques de communication lors d’une

crise. Ce même auteur a également dédié un ouvrage entier à la gestion de crise en

entreprise : La gestion de crise, Un enjeu stratégique pour les organisations (2004),

dans lequel il fait entre autres la genèse de quatre crises majeures dans le but d’en tirer

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des leçons. Ces ouvrages s’avèrent des outils concrets de diagnostic, de prévention et

d’aide à la prise de décision dans le domaine de la gestion de crise. Bien que la plupart

des concepts s’appliquent lorsqu’il s’agit d’une situation d’exception et plus

particulièrement d’une catastrophe naturelle, nous ne retiendrons pas les notions

exclusivement relatives à la gestion de crise en entreprise.

En ce qui concerne le champ de la communication, le postulat de la communication

concomitante nous permettra dans notre étude de délimiter ce qui constitue une action de

communication, tel qu’énoncé dans notre question spécifique de recherche. Selon ce

postulat élaboré par Muchielli (2005), un échange ne peut venir « tout seul » dans le vide

communicationnel. Le sens de la communication est trouvé lors de la mise en relation

de cette communication avec l’ensemble des autres communications commentant, à leur

manière, le problème situationnel.

Voici les « a priori » de cette théorie:

- Une situation contient toujours une (ou plusieurs) problématique(s) interne(s).

- On peut repérer des échanges des acteurs qui concernent cette problématique.

- Les échanges concernant la problématique participent à sa définition et/ou sa

résolution.

La communication concomitante s’inscrit dans la théorie de la communication

généralisée qui postule qu’une action (une conduite, une décision suivie d’une séquence

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d’attitudes et de conduites) et une verbalisation (de l’exclamation à un discours) sont des

formes spécifiques de l’expressivité humaine en situation.

« Il n’y a pas à considérer d’une part l’action et d’autre part, la communication. Si

on considère que l’acteur social en situation est aux prises avec un problème qu’il

doit résoudre, toutes ses formes d’expressivité concourent alors à cette résolution.

La communication est une activité qui n’est pas restreinte aux paroles, aux écrits et

aux paralangages. Les actions et les conduites des acteurs sociaux y sont intégrées

ainsi que les non-communications (ce qui aurait pu se faire, se dire, s’écrire).

Une « communication généralisée » c’est donc toute expression d’un acteur social

qui peut être « lue », c’est-à-dire, qui peut prendre du sens du point de vue de cet

acteur (ou d’un autre acteur), en rapport avec le problème de la situation tel qu’il

apparaît à l’acteur (dont on veut privilégier l’interprétation) » (Muchielli, 2005,

page 132 - 133 ).

Dans le cas qui nous concerne, cette théorie nous permet de considérer tous les éléments

de la gestion de la crise comme des actions de communication. En clair, les décisions de

gestion sont tout autant des actions de communication que les actions de communication

traditionnelles (ex. communiqués de presse, portail, etc.).

La communication concomitante, la communication généralisée ainsi que la

communication de crise appartiennent au champ d’études de la communication sociale.

Nous tenons à le préciser afin de permettre de bien situer les concepts dans toutes leurs

dimensions. Collet (2004) définit la communication sociale comme suit :

« La communication sociale, à nos yeux, peut être d’abord définie comme un

système de pensée et d’action qui cherche à promouvoir la personne humaine

prise individuellement ou collectivement, en tant que sujet, autant qu’objet de

communication. […] Plus concrètement, la communication sociale nous semble

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41

être l’occasion que la société civile donne à ses diverses composantes de mieux se

connaître et de dialoguer entre elles » (page 102).

La notion de société civile est utilisée tant par le postulat de gouvernance que celui de la

communication ce qui démontre une fois de plus que les deux concepts gravitent dans un

univers commun.

Abordons à présent le champ d’études de la communication de crise. Selon la

perspective américaine, la communication de crise, à l’origine, servait surtout aux

communications politiques (Palenchar, 2009). Au début des années 1960, les

Américains avaient développé une stratégie de communication de crise issue des

bénéfices et des pertes générées lors de la crise des missiles de Cuba. Le concept a

ensuite été récupéré dans la communication de crises des organisations que nous avons

effleurée précédemment. Entre autres, la communication de crise a été largement

documentée lorsque du cyanure avait été retrouvé dans des capsules de Tylenol (1982).

Les auteurs s’entendent tous pour dire que la communication est le cœur même de la

gestion des crises. C’est encore plus vrai en ce a trait aux situations d’exception

générées par des catastrophes naturelles.

« During any natural disaster, the open flow of communication is essential. Those

in harm’s way need information on how and when to prepare for the impending

crisis. Poor communication can lead to unnecessary harm or even death. For

renewal to take place in a flood situation, organizational leaders must offer ethical

communication. By ethical, we mean that residents are deserving of open, honest

and truthful communication » (Ulmer, Sellnow, Seeger, 2009, p. 315).

« Lors d’une catastrophe naturelle, il est primordial de conserver un canal de

communication ouvert. Ceux qui sont dans la ligne de tir ont besoin d’information

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sur la façon et le moment de se préparer à la crise imminente. Une

communication déficiente peut causer des blessures inutiles, ou même, des décès.

Pour que le renouvellement prenne place dans une situation d’inondation, les

dirigeants d’organisations doivent offrir une communication éthique. Par

éthique, nous entendons que les résidents sont dignes de communications

ouvertes, honnêtes et sincères. (traduction libre)».

Coombs, à l’instar de Roux-Dufort, a développé une théorie qui vise à

l’accompagnement des organisations dans la communication en temps de crise : la

Situational crisis communication theory (SCCT). En contrepartie, Coombs a une

approche plus globale et moins axée sur les entreprises. Sa théorie expose, entre autres,

les lignes directrices de la réponse à une crise, une typologie par groupes de crises, les

stratégies de réponse à une crise, et toute une série de meilleures pratiques qui couvrent

l’ensemble des volets de la communication et de la gestion de crise. Nous ferons appel

au concept de bonnes pratiques de cet auteur en matière de communication de crise afin

d’étayer notre analyse.

Tableau 1 : Attribution Theory-based Crisis Communication Best Practices (Coombs,

2007, p.42) - La Théorie de l’attribution basée sur les bonnes pratiques en matière de

communication de crise (traduction libre)

1. All victims or potential victims should receive instructing information, including

recall information. This is one-half of the base response to a crisis.

Toutes les victimes ou victimes potentielles devraient recevoir des informations et des

instructions, y compris les informations de rappel. Ceci constitue la moitié de la réponse de base

à une crise.

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2. All victims should be provided an expression of sympathy, any information

about corrective actions and trauma counseling when needed. This can be called

the “care response.” This is the second-half of the base response to a crisis.

Toutes les victimes devraient recevoir des expressions de sympathie, être tenues au courant de

toutes les mesures correctives et avoir accès à de l’aide psychologique en cas de besoin. Cela

peut être appelé la «réponse d’attention." Il s'agit de la deuxième moitié de la réponse de base à

une crise.

3. For crises with minimal attributions of crisis responsibility and no intensifying

factors, instructing information and care response is sufficient.

Pour les crises avec attributions minimales de responsabilité sans facteurs d'intensification,

fournir l’information, les instructions et offrir la «réponse d’attention» est suffisant.

4. For crises with minimal attributions of crisis responsibility and an intensifying

factor, add excuse and/or justification strategies to the instructing information

and care response.

Pour les crises avec attributions minimales de responsabilité avec facteur intensifiant, ajouter les

stratégies d’excuses et / ou de justification à l'information, aux instructions et à la «réponse

d’attention».

5. For crises with low attributions of crisis responsibility and no intensifying

factors, add excuse and/or justification strategies to the instructing information

and care response.

Pour les crises avec faibles attributions de responsabilité sans facteurs d'intensification, ajouter

les stratégies d’excuses et / ou de justification à l'information, aux instructions et à la «réponse

d’attention».

6. For crises with low attributions of crisis responsibility and an intensifying factor,

add compensation and/or apology strategies to the instructing information and

care response.

Pour les crises avec faibles attributions de responsabilité et facteur intensifiant, ajouter des

stratégies de compensation et / ou d’excuses à l'information, aux instructions et à la «réponse

d’attention».

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7. For crises with strong attributions of crisis responsibility, add compensation

and/or apology strategies to the instructing information and care response.

Pour les crises avec fortes attributions de responsabilité, ajouter des stratégies de compensation

et / ou d’excuses à l'information, aux instructions et à la «réponse d’attention».

8. The compensation strategy is used anytime victims suffer serious harm.

La stratégie de compensation doit être utilisée dans tous les cas où il y a des victimes avec

préjudices graves.

9. The reminder and ingratiation strategies can be used to supplement any response.

Les stratégies de rappel et de flatterie peuvent être utilisées pour compléter toute réponse.

10. Denial and attack the accuser strategies are best used only for rumor and

challenge crises.

Le déni, les stratégies d’attaque et l’accusation peuvent être utilisés seulement dans les crises de

rumeurs.

Considérant que selon l’auteur les catastrophes naturelles ont la classification

« attribution minimale », mais que les victimes de ces catastrophes subissent la plupart

du temps des préjudices graves, les étapes pertinentes à considérer lors d’une situation

d’exception dans un tel cas sont celles-ci : 1, 2, 3, 8, 9. Ces étapes sont les plus

appropriées pour les catastrophes naturelles, dont notre cas à l’étude.

En guise de conclusion en ce qui a trait au concept de communication de crise, Wester

(2009) a identifié une réponse partagée par plusieurs auteurs sur la nature des

communications en temps de crise outre celle de fournir des instructions :

« Some evidence suggests that comprehension, compassion and attribution are

issues that are important when planning and implementing crisis communication

(Coombs, 1999, 2004; Coombs & Holladay, 1996; Keselman, Slaughter & Patel,

2005; Seeger, 2006 dans Wester, 2009, p.119). »

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« Certaines données suggèrent que la compréhension, la compassion et l'attribution

sont des points importants à considérer lors de la planification et la mise en place

d’une communication de crise. (traduction libre).»

Passons maintenant à ce que les auteurs nous révèlent à propos de la relation entre ces

deux concepts, la communication de crise et la gouvernance.

La communication de crise et la gouvernance

Après avoir traité des deux concepts séparément, nous nous permettrons ici de les mettre

en relation. Nous avons déjà vu précédemment que les deux champs de recherche

appartiennent aux sciences sociales et qu’ils partagent également certaines notions à

l’intérieur de leurs concepts respectifs. Plus précisément, nous avons pu constater que la

notion de parties prenantes est utilisée en gouvernance (p.21). L’auteur américain,

Coombs (2009) donne lui aussi une place de choix à la notion de parties prenantes dans

ses théories. Selon lui, la communication de crise est composée de deux processus de

communication qui sont étroitement liés : 1) la gestion de ce que l’on connaît sur la

crise; 2) la gestion de la réaction des parties prenantes.

Les auteurs traitant d’une relation directe entre ces deux concepts - la communication de

crise et la gouvernance - sont encore peu nombreux, mais on peut constater un intérêt

grandissant pour ce sujet. Selon Rochet et Keramidas (2007) :

« Le principe même d’une organisation publique est d’être capable de résister aux

changements brutaux et aux crises. Mais, dans une perspective évolutionniste, elle

doit être aussi capable de coévolution, c’est-à-dire d’intégrer un élément nouveau

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de complexité de l’environnement tout en ayant, en retour, une action structurante

sur cet environnement. Nous nous approchons ici du concept de résilience qui, en

gestion, est extrêmement récent (p. 15).

(…) Notre souci est de comprendre comment la crise peut être une opportunité

pour traiter les blocages que l’innovation au quotidien n’a pu résoudre. La gestion

de crise est donc une opportunité d’innovation dans le secteur public (p.16) ».

Des éléments normatifs de la gouvernance en situation de gestion de crise dans un

contexte de développement durable et de réduction des catastrophes ont été développés

par Arhen et Rudolph (2006) : participation, primauté du droit, transparence, réactivité,

orientation vers le consensus, équité, efficacité, efficience, imputabilité et vision

stratégique. Nous utiliserons ces éléments dans notre cadre conceptuel afin de guider

notre analyse.

De récentes recherches à propos de la gouvernance en situation de crise considèrent le

partage des responsabilités, que nous avons vu antérieurement à travers le phénomène de

décentralisation, comme un élément intrinsèque à la gestion de crise. Farazmand, par

exemple, prétend qu’au-delà des considérations administratives, le leadership et les

compétences managériales sont des facteurs clés dans la gestion des crises.

« The key purpose of emergency government is to first arrest the evolving

emergency situation into a chaotic one with unfolding dynamics. Steps following

this stage may vary from response strategies to recovery and normalcy plans that

would help reduce the extraordinary situation, making it possible to pass through

the transient stage of emergency governance, and learn from the experience. It is

also important to note that very often – and it has been proven over and over in the

history of civilizations and administrative systems – it is the mothership

« bureaucratic » institutions that still serve as a big reservoir of expertise,

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knowledge, experience, and know for action; it provides the fundamentals and the

base for administrative action. However, it is the nonbureaucratic, robust

managerial and professional expertise, and dynamic leadership and managerial

command systems that must act outside the bureaucratic box to be effective in

governing emergencies and managing crises; both are intricately connected and

interdependent » (Farazmand, 2009, p.405).»

« L’objectif principal d’une gouvernance en situation d’urgence est d’abord

d’arrêter l’évolution de la situation qui se déroule de façon chaotique dans une

dynamique d’éparpillement. Les étapes suivantes peuvent varier entre les

stratégies de réponse et le plan de redressement et le retour à la normale qui

aidera à diminuer les impacts de la situation extraordinaire, rendant possible le

passage au stade transitoire de la gouvernance d’urgence, et l’apprentissage de

l’expérience vécue. Il est aussi important de noter, et cela a été prouvé à

plusieurs reprises dans l’histoire des civilisations et des systèmes administratifs,

que très souvent ce sont les sociétés-mères – bureaucratiques - qui servent de

réservoir d’expertise, de connaissances, d’expérience et, comme elles sont

reconnues pour l’action; elles procurent les fondements et les bases de l’action

administrative. Cependant, c’est la non-bureaucratie, la robustesse de la gestion

et de l’expertise professionnelle, le leadership dynamique et le système de

commande de gestion qui doit agir en dehors du système bureaucratique afin

d’être efficace pour gouverner les situations d’urgence et gérer les crises; les

deux sont intrinsèquement liés et interdépendants. (traduction libre)».

Dans le contexte du passage de l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord, l’État québécois a

plein pouvoir d’autorité avec la Loi sur la sécurité civile et conserve le leadership de la

planification de la stratégie de communication. Celle-ci a été élaborée par l’équipe de

Services Québec et mise en œuvre par les équipes du Centre des renseignements aux

citoyens, du Centre des informations publiques et du Portail gouvernemental de services.

Nous n’avons trouvé nulle part dans nos recherches des indications nous permettant de

croire qu’il y a eu une implication des intervenants de première ligne ou toute autre

partie prenante dans l’établissement de la stratégie de communication élaborée par le

gouvernement. Par ailleurs, la mission « communication » du Plan national de sécurité

civile québécois ne prévoit aucun partage des responsabilités en ce qui a trait aux

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opérations relatives à la communication en situation d’exception (Centre de coordination

stratégique des communications, 2004).

Puisque nous avons affaire à une communication dont la stratégie et les opérations sont

centralisées et issues de l’appareil gouvernemental, cela rend légitime notre

questionnement à savoir si les actions de communication du gouvernement, à travers ce

système centralisé, répondent aux normes de la gouvernance selon les concepts retenus

que nous vous présentons dès maintenant.

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Concepts

Cette section vise à démontrer la progression logique du cadre conceptuel et de faire état

des concepts spécifiques retenus.

Rappelons que dans l’axe préliminaire, nous nous questionnions à savoir si les actions

de communications sont planifiées et réalisées selon les principes de la gouvernance, et

cela, particulièrement en situation d’exception. En ce qui concerne le cas du passage de

l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord, nous postulions que les actions de communication

du gouvernement du Québec ne répondent pas toujours aux normes actuelles de la

gouvernance. Le cadre théorique ci-dessus constitue un élément clé dans la construction

de notre grille d’analyse et dans la précision de notre question de recherche.

Effectivement, de ce cadre théorique complet, nous avons retenu certains concepts qui

nous permettront non seulement de préciser notre question de recherche, mais également

d’identifier les indicateurs pour répondre à cette même question. Voici donc le

regroupement des concepts spécifiques retenus.

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Tableau 2 : Synthèse des concepts spécifiques retenus

Auteurs Concepts Dimensions

Concepts de délimitation du cas

Milot, N., Lepage, L. Gouvernance et démocratie Définition gouvernance

Shrivastava, P. Gestion de crise et

développement durable

Définition crise

Concepts d’analyse

Lequin, M. Gouvernance participative Normes de la gouvernance

Côté, L., Lévesque B. Modèle québécois de

gouvernance

État stratège et participation

citoyenne

Coombs, T. La communication de crise Les bonnes pratiques de la

communication de crise

Arhens J., Rudolph

P.M.

Gouvernance et crise Normes de la gouvernance

en situation de crise

Les concepts de délimitation du cas permettent de légitimer le cas à l’étude, soit le

passage de l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord en 2005, tant au niveau de la

gouvernance que de la communication et gestion de crise.

Les concepts d’analyse ont été sélectionnés pour leur pertinence et leur

complémentarité. Chaque concept présente des éléments normatifs qui nous permettront

de consolider notre grille d’analyse.

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Question de recherche

Quoique très prolifiques sur les concepts de la gouvernance et de la communication de

crise, force est de constater que les auteurs ne sont pas encore beaucoup penchés sur la

relation entre les deux concepts. En outre, en ce qui a trait à l’analyse de la gouvernance

et des communications en temps de situation d’exception du gouvernement du Québec,

nous n’avons trouvé aucune publication traitant de ces sujets à ce jour.

Comme nous le démontre Farazmand (2009), la gouvernance est un élément

fondamental à la gestion de crise. En tant que chercheure, nous sommes alors

intéressées à savoir si le gouvernement du Québec respecte les principes de la

gouvernance dans ses actions de communication avec les autres protagonistes en

situation d’exception.

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CHAPITRE 3 : STRUCTURATION DE LA RECHERCHE

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Stratégie de recherche

Comme stratégie de recherche, nous privilégions la recherche synthétique qui « pour

expliquer et prévoir des phénomènes complexes, examine l’ensemble des relations qui

font intervenir simultanément plusieurs variables dépendantes et interdépendantes dans

un modèle de relations interdépendantes » (Contandriopoulos et al., 2005). Nous

favoriserons plus particulièrement l’étude de cas et plus spécifiquement, l’étude de cas

individuel.

« L’étude de cas est une approche de recherche empirique qui consiste à enquêter

sur un phénomène, un groupe ou un ensemble d’individus, sélectionnés de façon

non aléatoire, afin d’en tirer une interprétation qui dépasse ses bornes » (Gauthier,

2004, p.166).

Nous étudierons le cas du passage de l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord en 2005. Le

contexte de la situation d’urgence est le suivant : au cours de la première semaine du

mois de septembre, les régions de la Capitale-Nationale, du Saguenay-Lac Saint-Jean et

de la Côte-Nord ont été touchées par des pluies diluviennes occasionnées par les restes

de l’ouragan Katrina. La région de la Côte-Nord a été la plus touchée. Des bris majeurs

à son infrastructure routière (entre autres, la route 138) ont provoqué son isolement

durant 9 jours.

Comme nous l’avons vu précédemment, Roux-Dufort (2003) a décomposé une crise en

quatre phases comme suit : la prévention des évènements potentiellement porteurs de

crises, la préparation à gérer des situations menaçantes ou déstabilisantes, l’intervention

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lorsque les évènements critiques se produisent et le recouvrement qui consiste à

capitaliser sur les évènements afin de s’améliorer. Pour l’analyse de notre cas, nous

retiendrons les phases suivantes :

La phase de l’intervention :

L’État de veille a été donné par une alerte météo le 31 août 2005. La crise s’est

déroulée durant tout le temps où la région a été isolée sans accès possible par la

route, soit du 1er au 8 septembre 2005.

La phase du recouvrement (partielle) :

Nous avons choisi de considérer la première semaine après la fin la phase de

l’intervention (du 8 au 15 septembre 2005) dans notre analyse puisque le flux de

communication est encore très important en fin de crise.

Les actions de communication lors des deux phases retenues favorisent une meilleure

prévention et surtout, une meilleure préparation. D’autre part, il n’existe pas

suffisamment d’informations sur les actions de communications en ce qui a trait à la

dernière phase - celle du recouvrement - pour en faire une couverture complète. Cela

laisse émerger une autre question sur laquelle il pourrait être intéressant de se pencher

dans une recherche subséquente : est-ce que le peu d’importance accordée aux

communications durant la phase de recouvrement dans la gestion des crises du

gouvernement du Québec influence le traitement de celles-ci à travers le temps?

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Collecte et analyse de données

Gauthier (2004) suggère aux chercheurs deux stratégies clés dans la collecte de données

afin de réduire les biais personnels et d’approfondir l’analyse du cas à l’étude : la

triangulation des données et le journal de bord. Nous nous proposons d’employer ces

deux stratégies. En ce qui a à la triangulation des données, nous souhaitons ainsi placer

l’objet d’étude sous le « feu d’éclairages différents dans l’espoir de lui donner tout son

relief » (Hamel, 1997). Nous effectuerons donc la triangulation des données issues des

méthodes suivantes : l’analyse de contenu, les entrevues semi-dirigées et le groupe de

discussion. Le carnet de bord, quant à lui, nous aidera à tisser des liens et à mettre en

relation nos observations.

Analyse de contenu

Les écrits relatifs à la crise du passage de l’ouragan Katrina sur la Côte-Nord sont

nombreux et parviennent de sources hétéroclites. Nous souhaitons les rassembler et en

faire l’analyse du contenu. Cette méthode se définit de la façon suivante :

« […] il s'agit d'une méthode d'observation et de traitement des communications.

Qui dit méthode sous-entend, ici, un savoir-faire riche d'un ensemble de

techniques éprouvées et variées, constitué à partir de milliers d'études empiriques,

publiées ou non. Cette méthode a pour intérêt d'accroître la compréhension du

matériel analysé à un niveau différent de celui d'une simple lecture de sens

commun. Ceci en prenant toutes les précautions nécessaires relatives à la rigueur

scientifique afin de favoriser une plus grande fiabilité des résultats. » (L. Bardin

dans Moscovici & Buschini, 2003, p.243).

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Suite à une recherche préliminaire, nous avons identifié les écrits suivants desquels nous

analyserons le contenu : communiqués de presse (une dizaine émis par l’ORSC de la

Côte-Nord), le Portail gouvernemental de services (PGS), le Portail régional de la Côte-

Nord, la réponse aux 1200 demandes de renseignements, les interventions médiatiques

tenues lors de la période ciblée précédemment, les placements médias (radio régionale),

les notes de service de Services Québec, les rapports de retour à chaud, à froid de

Services Québec. Il est à noter que nous avons effectué des démarches auprès de

Services Québec et qu’elles ont été concluantes quant à la possibilité d’avoir accès à ces

documents.

Entrevues semi-dirigées

Tout chercheur qui souhaiterait poursuivre cette recherche devra en réaliser

l’opérationnalisation, tel que décrit ci-dessous.

Il faudra effectuer des entrevues semi-dirigées jusqu’à saturation des données. Les

sujets interviewés seront sélectionnés parmi la population à l’étude dont nous faisons

mention un peu plus loin (tableau 5). Des questionnaires seront élaborés en fonction du

groupe d’appartenance du sujet : l’émetteur ou le récepteur. L’entrevue semi-dirigée se

définit comme suit :

« L’entrevue semi-dirigée consiste en une interaction verbale animée de façon

souple par le chercheur. Celui-ci se laissera guider par le rythme et le contenu

unique de l’échange dans le but d’aborder, sur un mode qui ressemble à celui de la

conversation, les thèmes généraux qu’il souhaite explorer avec le participant à la

recherche. Grâce à cette interaction, une compréhension riche du phénomène à

l’étude sera construite conjointement avec l’interviewé » (Gauthier, 2004, p. 295).

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Groupes de discussion

Nous tiendrons un minimum de trois groupes de discussion composés de dix sujets

chacun provenant de la population à l’étude. Nous prendrons bien soin de nous assurer

d’avoir une représentation équilibrée des sujets issus de la catégorie des émetteurs et de

celle des récepteurs. La méthode du groupe de discussion se définit comme suit :

« Le groupe de discussion est une technique d’entrevue qui réunit de six à douze

participants et un animateur, dans le cadre d’une discussion structurée, sur un sujet

particulier » (Gauthier, 2004, p. 333).

Menace à la validité

De par la nature scientifique de notre étude, nous sommes sensibles à sa validité.

L’étude de cas a ses considérations propres en ce qui a trait aux menaces à la validité.

« L’étude de cas unique, qu’elle s’appuie sur un ou plusieurs niveaux d’analyse,

offre un ou plusieurs niveaux d’analyse, offre un potentiel élevé de validité

interne. L’observation d’une seule situation (unité) limite toutefois la validité

externe de ce devis (Yin, 1984). La réalisation d’études de cas multiples permet,

en opérant selon une logique de reproduction, de généraliser avec plus de

confiance les conclusions. En effet, l’analyse de plusieurs cas vise à juger s’il y a

reproduction des processus étudiés dans différents milieux » (Contandriopoulos et

al., 2005, p.38).

Le tableau 3 fait état des pistes de solution que nous avons élaborées afin de contrer les

menaces à la validité, tant interne, qu’externe.

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Tableau 3 : Menaces à la validité

Menaces Solutions

Interne

Informations partielles qui ne représentent

pas toute la réalité

Pré-enquête pour vérifier l’accessibilité de

l’information

Passage du temps (août, sept. 2005) Analyse de contenu (intact dans le temps)

Effets liés au changement dans la situation

(crise terminée)

Analyse de contenu (intact dans le temps)

Externe

Sélection des sujets (non représentatifs) Multiplier les sujets et les méthodes de

collecte de données

Désir de plaire (entrevues semi-dirigées) Techniques scientifiques d’entrevue

Le cas est représentatif. Il a été pris en charge selon le Plan national de la sécurité civile.

Avec ces mesures, nous pensons avoir circonscrit toute menace à la validité.

Indicateurs

À ce stade-ci de la recherche, nous allons identifier les indicateurs les plus appropriés

afin de réaliser notre analyse. Selon Gauthier (2004), l’indicateur parfait n’existe pas,

« il s’agit de choisir celui qui représente les moins grandes lacunes par rapport aux

divers critères d’appréciation et de vérifier autant que possible que ces critères soient

respectés ».

Nous tenons à préciser que les concepts de la gouvernance et de la communication de

crise sont des concepts dont les dimensions de nature subjective sont très difficiles à

mesurer. C’est pourquoi nous ferons appel à une équipe d’évaluateurs qui nous

permettront de pondérer ces dimensions en mesurant et dosant les perceptions. Il est

prévu que cette équipe d’évaluateurs soit composée de deux autres étudiants chercheurs

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à la maîtrise en lettres et communication sociale. Rappelons que ces critères seront

vécus à travers trois types de corpus différents (analyse de contenu, entrevues semi-

dirigées, groupe de discussion). Nous marierons le tout lors de notre analyse finale.

La méthode que nous préconisons dans l’analyse de nos données se veut axée sur la

sémantique et la logique (analyse de contenu et analyse de discours – entrevues semi-

dirigées et groupe de discussion). En premier lieu, les concepts présentés dans la grille

d’analyse sont les principes et normes communs aux concepts spécifiques relatifs à la

gouvernance retenus aux fins d’analyse suite à la revue de la littérature (tableau 2.

Synthèse des concepts spécifiques retenus, p. 27). Ils sont présentés dans la colonne de

gauche dans le tableau 4 (Tableau 4. Principes et normes des concepts spécifiques –

indicateurs) à titre d’éléments qui sous-tendront les indicateurs à la base de la grille

d’analyse de la présente recherche.

Puisque par notre question de recherche nous cherchons à savoir si les actions de

communication du gouvernement du Québec s’inscrivent dans les principes de la

gouvernance, ces principes doivent être traduits par les comportements ou pratiques

tangibles qui constituent les actions de communication qui seront par la suite analysées à

travers les indicateurs de notre grille.

Nous nous sommes inspirées de Gauthier (2004) afin de déterminer les indicateurs les

plus appropriés pour notre recherche. Selon lui, « le processus par lequel on passe des

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concepts abstraits à des indicateurs concrets, c’est la mesure. La mesure est définie

comme l’ensemble des opérations empiriques, effectuées à l’aide d’un ou plusieurs

instruments de mise en forme de l’information, qui permet de classer un objet dans une

catégorie pour une caractéristique donnée » (p. 206).

Les indicateurs proposés pour cet essai sont tirés l’« Attribution Theory-based Crisis

Communication Best Practices » de Coombs, (2007) issus de la revue de littérature ; de

la déclaration du gouvernement du Québec (DGQ) en matière d’engagement et de

participation citoyenne (http://www.donnees.gouv.qc.ca/?node=/declaration), de la Loi

sur la sécurité civile (LSC), de la mission « communication » du Plan national de la

sécurité civile (PNSC), de la charte des droits et libertés (CDDL), de la proposition de

Roux-Dufort (2003) en matière de réactivité (Étapes de réaction – ÉDR) et de la

proposition d’application de l’agir communicationnel (AC) d’Habermas à l’intérieur de

l’ouvrage Le plan de communication de Raymond Corriveau (2004). Ceux-ci sont

présentés dans le tableau ci-dessous dans la colonne de droite.

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61

Tableau 4 : Principes et normes des concepts spécifiques – grille d’analyse et indicateurs

Principes et normes des concepts

spécifiques

Indicateurs

1. Participation (citoyenne)

Lequin (2001), Côté, Lévesque

(2009), Arhens Rudolph (2006)

a) DGC – Participation, 2e énoncé

2. Engagement

Lequin (2001)

a) DGC – Ensemble de la déclaration

3. Honnêteté

Lequin (2001)

a) ATCCBP - Bonne pratique #1 et #2

4. Responsabilité

Lequin (2001)

a) ATCCBP - Bonne pratique #3

5. Primauté du droit

Arhens Rudolph (2006)

a) LSC – Ensemble de la loi

b) PNSC – Mission communication, Centre

de renseignements aux citoyens, Centre

de traitement des informations publiques,

Portail gouvernemental de services

c) CDDL – Ensemble de la charte

6. Équité

Arhens Rudolph (2006)

a) CDDL – Chapitre 1

b) ATCCBP - Bonne pratique #1 et #2

c) DGC – Participation, 2e énoncé

7. Imputabilité

Arhens Rudolph (2006)

a) ATCCBP - Bonne pratique #3

8. Vision – fonctions stratégiques

Arhens Rudolph (2006), Côté et

Lévesque (2009)

a) ATCCBP - Bonne pratique #8 et #9

9. Transparence

Arhens Rudolph (2006)

a) ATCCBP - Bonne pratique #1 et #2

b) DGC – Transparence, 1er

énoncé

c) PNSC – Mission communication, Centre

de renseignements aux citoyens, Centre

de traitement des informations publiques,

Portail gouvernemental de services

10. Réactivité

Arhens Rudolph (2006)

a) ÉDR - p.157

b) LSC – Section II

11. Orientation vers le consensus

Arhens Rudolph (2006)

a) Agir communicationnel (Habermas dans

R. Corriveau, 2003, p.157)

12. Respect des droits et liberté

Côté et Lévesque (2009)

a) CDDL – Chapitre 1

13. Efficacité – efficience

Arhens Rudolph (2006)

a) Réponse à l’ensemble des indicateurs ci-

dessus

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Validation de la grille

Nos données proviendront de différentes sources afin d’analyser, d’une part, le contenu

des messages (revue de presse, messages diffusés sur le Portail gouvernemental de

services, les communiqués internes, etc.) et d’autre part, le processus mis en place pour

la gestion de la crise et le plan de communication. Rappelons que selon le principe de la

communication concomitante de Muchielli (2005), les décisions de gestion sont tout

autant des actions de communication que les actions de communication traditionnelles

(ex. communiqués de presse, portail web, etc.). De ce fait, nous avons conçu notre grille

afin qu’elle propose une approche la plus holistique possible. Dans une telle structure

d’analyse, seule la triangulation des données nous permettra de répondre à l’ensemble

des indicateurs soulevés dans la grille, et ainsi, de procéder à une analyse complète.

Avant de mettre notre grille à l’épreuve, nous avons voulu effectuer une vérification de

sa « compétence éthique » en utilisant les derniers travaux de Sellnow et Seeger (2013).

Les auteurs effectuent une réflexion rarement rencontrée dans la littérature traitant de la

gestion des situations d’urgence, ils abordent la question éthique. Ils retiennent cinq

cadres éthiques qui doivent orienter nos actions. Nous ne pouvons faire l’économie de

reprendre le tableau synthèse produit par Sellnow et Seeger.

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63

Tableau 5 Five ethical frameworks to inform crisis communication practices (Sellnow et Seeger,

2013, p. 233) - Cinq cadres éthiques pour informer sur les pratiques de communication de crise

(traduction libre)

(1982)

Simola

(2001)

Ulmer (2001)

Rawls (1971)

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64

Grâce à cette superbe rétrospective, nous pouvons valider notre grille et affirmer qu’elle

répond à l’ensemble des points de chute dans la communication d’urgence. Le tableau

suivant en fait la démonstration.

Cadre éthique Grille d’analyse

Éthique de la communication responsable #7, #4, #8

Étique des choix significatifs # 11 #1

Éthique de la prise en charge #2, #13, #10

Éthique de la vertu #3, #9, # 6

Éthique de la justice #5 #12

Confortée par cet examen théorique de nos critères, nous pouvons envisager

entreprendre une validation pratique.

Afin de pré-valider notre grille d’analyse, nous avons utilisé la note de service envoyée

par monsieur Christian Therrien de Services Québec le 15 septembre 2005 (Annexe 2).

Cette dernière fait état du processus de prise en charge de la situation par Services

Québec. Elle nous semble donc un bon choix pour la validation de notre grille dans la

mesure où elle constitue un élément d’analyse de choix en ce qui a trait à la gestion des

communications lors de la crise.

Cette note de service révèle que trois centres d’activités de la mission

« communication » ont été mis en place par Services Québec : le Centre de

renseignements aux citoyens, le Centre de traitement des informations publiques et le

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Portail gouvernemental de services et elle nous dresse la liste de actions de

communication qui ont été effectuées. Il est possible d’appliquer l’ensemble des

principes de la grille d’analyse à la théorie de ces centres d’activités circonscrite dans le

Plan national de la sécurité civile, à l’exception des trois suivants : Orientation vers le

consensus (no. 11 - indicateur : agir communicationnel – Habermas dans Corriveau,

2003), Vision et fonctions stratégiques (no. 8 - indicateur : ATCCBP – Bonne pratique

#8 et #9) et efficacité et efficience (no. 13) pour lequel nous ne pourrons répondre qu’à

la fin de l’exercice puisque pour y répondre, il nous faut avoir complété l’analyse de

toutes nos données.

En effet, ces centres d’activités font état de la prise en charge du processus de

communication par l’État (DGC, ensemble de la déclaration), et permettent la diffusion

de l’état de la situation et l’échange de l’information en continu, avec rappel (ATCCP –

bonne pratique no.1), et ce de façon honnête, équitable et sans discrimination (DGC –

participation, 2e énoncé, ATCCBP, bonne pratique no.1, CDDL) à l’ensemble de la

population touchée par la crise. Ceci répond donc aux principes de participation (no. 1),

d’engagement (no. 2), de responsabilité (no. 4), d’équité (no. 6), d’imputabilité (no. 7) et

de transparence (no. 9). L’information fournie quant aux actions de communication

présentées dans cette note de service nous permet de croire que les droits et libertés des

personnes ont été respectés (no. 12 - CDDL). Le tout a été fait dans le respect et

l’application des lois en vigueur (LSC, CDDL) ce qui répond au principe de primauté

du droit (no. 5).

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La note de service mentionne également que la direction régionale de la Côte-Nord

appuyée par le personnel du national a coordonné les communications gouvernementales

dès le début de l’opération. L’Organisation régionale de la sécurité civile a décrété l’état

d’urgence (détection et évaluation de la crise) et Services Québec a déployé la mission

« communication » (activation de la cellule de crise) et a coordonné les communications

jusqu’à la fin de l’état d’urgence (gestion et suivi de la crise). Cela nous permet

d’affirmer que la réactivité (no. 10) a été bonne dans la prise en charge des

communications par Services Québec (ÉDR).

Cependant, nous ne pouvons valider si les principes d’honnêteté (no. 3) et de vision –

fonctions stratégiques (no. 8) ont été respectés en entier puisque nous ne connaissons pas

la nature des messages véhiculés dans le cadre du processus de communication énoncé

dans cette offre de service et ne pouvons affirmer que l’expression d’empathie (« care

response ») a bien été présente dans le contenu des messages (ATCCBP, bonne pratique

#2), tout comme nous ne pouvons vérifier si une stratégie de compensation pour les

victimes a été offerte (ATCCBP – bonne pratique #8 et #9). Nous ne pouvons pas non

plus affirmer que l’élaboration du plan de communication, la gestion de la crise, ni

même la mise en place des actions ont été réalisées selon un processus orienté vers le

consensus (no. 11 - Habermas dans R. Corriveau). Néanmoins, ces éléments pourront

être facilement validés par tout chercheur poursuivant la recherche en réalisant les

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entrevues semi-dirigées ou les groupes de discussion, tel que prévu dans notre cadre

méthodologique.

Malgré les remarques que nous venons de faire, cet exercice de validation de notre grille

nous permet donc d’affirmer que celle-ci renferme tout le potentiel pour nous permettre

l’analyse de nos données et que nous pouvons répondre aux exigences du programme

méthodologique à la condition que la méthode de la triangulation des données soit

respectée. Rappelons que la triangulation des données comprend des exercices de focus

group, des entrevues semi-dirigées et de l’analyse de contenu. Ainsi, nous pourrons

utiliser la grille avec toutes les possibilités qu’elle offre et analyser tant la forme que la

nature même des messages ainsi que la gestion de la crise elle-même.

Échantillonnage des corpus

Les échantillons pour les groupes de discussions et les entrevues semi-dirigées devront

être sélectionnés selon une méthode probabiliste. On entend par techniques

d’échantillonnages probabilistes, « toutes celles qui impliquent un véritable tirage au

hasard, c’est-à-dire qui donnent à chaque élément de la population une chance connue et

non nulle d’être choisi » (Gauthier, 2004, p. 230). Ceci signifie que nous

sélectionnerons au hasard, parmi les catégories de sujets suivants, les individus qui

seront invités aux entrevues semi-dirigées et aux groupes de discussion.

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Notre population à l’étude est composée des acteurs de la situation d’exception à l’étude.

Rappelons-nous qu’en ce qui a trait à la gouvernance, le concept de l’État stratège

attribue les fonctions stratégiques (direction, coordination, régulation, partage des

ressources, contrôle, évaluation) à l’État, tout en laissant la mise en œuvre à d’autres

acteurs (du secteur public, du secteur privé à but lucratif, du tiers secteur).

L’organisation de notre population à l’étude s’inspire de ce concept en présentant les

protagonistes de l’État en tant qu’acteurs – fonctions stratégiques et les autres parties

prenantes en qu’acteurs – mise en œuvre.

Tableau 6 : Population à l’étude – groupe de discussion et entrevues semi-dirigées

DESTINATEUR

ACTEURS – FONCTIONS

STRATÉGIQUES

ÉTAT

DESTINATAIRE

ACTEURS – MISE EN ŒUVRE

L’Organisation de la sécurité civile :

Organisation régionale de la sécurité civile

de la Côte-Nord (ORSC 09)

Directeur régional

Services Québec

Coordonnateur ministériel et

Responsable de mission

Direction régionale de Services Québec

(membre de l’ORSC 09)

Directeur régional

Ministère des Transports (MT)

Responsable des communications

Les protagonistes publics :

Municipalités de la Côte-Nord qui ont été

isolées

Tous les maires

Les protagonistes privés :

Entreprises – chefs d’entreprises

Sélection aléatoire dans le bottin des

entreprises de la Côte-Nord de 5

entreprises situées sur le territoire touché.

Intervenants de 1ère ligne :

Policiers

Sélection aléatoire de 3 policiers qui ont

été

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DESTINATEUR

ACTEURS – FONCTIONS

STRATÉGIQUES

ÉTAT

DESTINATAIRE

ACTEURS – MISE EN ŒUVRE

Ministère de l’agriculture, des pêcheries et

de l’alimentation du Québec (MAPAQ)

Responsable des communications

Ministère de la sécurité publique (MSP)

Responsable des communications

Autre, s’il y a lieu

mobilisés lors de l’affaissement de la

Route 138.

Pompiers

Citoyens :

Sélection aléatoire dans le bottin

téléphonique de la Côte-Nord de 30

citoyens (3 groupes de 10) qui demeurent

sur le territoire touché.

Afin de bien cibler la population qui sera sélectionnée pour l’étude, nous allons

appliquer les critères d’inclusion et d’exclusion du tableau 6.

Tableau 7 : Critères d’inclusion et d’exclusion de la population à l’étude6

Critères d’inclusion Critères d’exclusion

Les chefs d’entreprises localisées sur le

territoire isolé.

Les policiers qui ont été mobilisés en tant

qu’intervenants de première ligne lors de

l’affaissement de la route 138.

Les citoyens dont la résidence est située

sur le territoire isolé et qui étaient présents

sur ce même territoire dans la période du

31 août 2005 au 15 septembre 2005.

Les chefs d’entreprises localisées à

l’extérieur du territoire isolé.

Les policiers qui n’ont pas été mobilisés en

tant qu’intervenants de première ligne lors

de l’affaissement de la route 138.

Les citoyens dont la résidence n’est pas

située sur le territoire isolé et/ou qui

n’étaient pas présents sur ce même

territoire dans la période du 31 août 2005

au 15 septembre 2005.

6 Barabé (2006), séminaire de recherche préparatoire au mémoire et à l’essai, notes de cours

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70

Quant à l’analyse de contenu, nous analyserons l’ensemble des documents écrits internes

(notes de service, rapports, etc.) et des communiqués de presse parus durant la période

sélectionnée.

Considérations éthiques

Les chercheurs qui mèneront des entrevues semi-dirigées et des groupes de discussion

s’engagent à prendre toutes les mesures nécessaires afin de s’assurer que les droits et

libertés des sujets participants à la recherche seront respectés. Voici la forme que

prendront ces mesures :

Prise de décision éclairée :

Nous fournirons aux sujets qui participent aux diverses collectes de données toutes les

informations nécessaires afin qu’ils puissent prendre une décision éclairée.

Consentement libre :

Nous ne mettrons aucune pression sur les sujets, une période de réflexion leur sera

accordée et ils seront informés qu’ils peuvent se retirer à leur gré.

Consentement clairement exprimé :

Nous ferons remplir un formulaire de consentement à tous les sujets.

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71

Confidentialité et anonymat :

Nous respecterons la confidentialité et l’anonymat entre autres, en utilisant des

pseudonymes et en conservant les résultats des collectes de données sous clé.

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72

CONCLUSION

Cette recherche s’inscrit dans une démarche analytique ayant comme finalité la

production d’un essai.

« L'essai doit démontrer que l'étudiant a acquis la maîtrise de certaines techniques

et méthodes de recherche. De plus, il doit apporter une certaine contribution à

l'avancement des connaissances, soit par l'étude approfondie d'une question

communicationnelle particulière, soit par l'application des connaissances pratiques

dans un domaine communicationnel, mais dans la perspective des théories récentes

de la communication sociale »

(https://oraprdnt.uqtr.uquebec.ca/pls/public/pgmw001?owa_cd_pgm=3175).

Nous avons donc répondu dans les pages précédentes aux exigences commandées par la

démarche de production d’un essai qui n’incluent pas l’analyse des données.

Cette question de recherche : « est-ce que le gouvernement du Québec respecte les

principes de la gouvernance dans ses actions de communication avec les autres

protagonistes en situation d’exception ? », quoique légitime et pertinente comporte

certains défis en ce qui a trait à son opérationnalisation. Tout d’abord, l’accès à

l’information pour une collecte de données satisfaisante et représentative peut s’avérer

complexe et limité. Il dépend grandement de la bonne volonté des acteurs concernés au

sein de l’appareil gouvernemental et de la mémoire des personnes questionnées dans les

groupes de discussion et les entrevues semi-dirigées. De plus, puisque cette recherche

est une étude de cas, elle n’est pas représentative de tous les cas semblables alors il est

difficile d’en tirer des généralités.

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73

Sans avoir réalisé l’ensemble de l’analyse, nous souhaitons tout de même que ce travail

constitue une contribution méthodologique aux chercheurs qui désireront emprunter un

chemin semblable. Chemin qui fait foi de la tendance qu’on sent émerger avec de plus

en plus de force tant dans la sphère publique qu’à travers les intérêts scientifiques ; cette

tendance qui réclame une transparence accrue en ce qui a trait aux actions des instances

publiques afin d’établir naturellement la cohérence entre le discours et l’action réelle.

En mettant en relation les deux concepts que sont la gouvernance et la communication

de crise et en y confrontant un cas bien de chez nous, nous souhaitons bien humblement

que cette recherche nourrisse et stimule l’intérêt scientifique à l’égard de cette

problématique afin que la tendance mentionnée ci-dessus ait la place qui lui revient dans

la sphère publique et ses composantes.

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ANNEXES

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Annexe 1

Structure officielle des communications – interventions lors de la crise Katrina7

7 Tiré du Plan national de la sécurité civile – Mission « communication », Plan régional de mission (PRM) déployé

pour l’événement.

Centre de coordination stratégique des communications

Centre de renseignements aux citoyens

Centre de traitement des informations publiques

Centre de production (Portail gouvernemental de

services PGS)

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Annexe 2

Note de service

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