99
COMMUNIQUÉS DE BLACK BLOCS

COMMUNIQUÉS DE BLACK BLOCS - Lux Éditeur€¦ · Sun Tzu et De la guerre de Carl von Clausewitz. Les auteurs du ... manœuvres sophistiquées adaptées au combat de rue contre les

Embed Size (px)

Citation preview

  • COMMUNIQUS DE BLACK BLOCS

  • SOMMAIRE Communiqu au sujet des tactiques et de lorganisation .......................................................................... 3 Appel pour un black bloc au Sommet des Amriques .............. 46 Saccager ou construire un mouvement ........................................ 51 Communiqu du black bloc du 30 novembre ............................. 66 Communiqu dun groupe affinitaire actif au sein dun black bloc lors de la journe dactions et de la manifestation des 20 et 21 juillet 2001 Gnes ........................... 79 Manifeste du Carr noir ................................................................. 89 ANNEXE Conseils tactiques et pratiques ...................................................... 95

  • !!

    3

    COMMUNIQU AU SUJET DES TACTIQUES ET DE LORGANISATION

    Vritable petit manuel de combat publi une premire fois en dcembre 2000, ce Communiqu au sujet des tactiques et de lorganisation est au black bloc en plus modeste bien sr ce que sont une arme dtat les ouvrages Lart de la guerre de Sun Tzu et De la guerre de Carl von Clausewitz. Les auteurs du communiqu nhsitent pas voir grand, puisque leurs conseils organisationnels et tactiques sont penss en fonction de blacks blocs de plusieurs centaines, voire de mille ou mme deux milles participants. Le communiqu discute des oprations de reconnaissance du terrain o se droulera laction, des communications, de la mise sur pied et de lutilisation de forces de rserve, des rapports avec les mdias, de lentranement physique entre les actions, de limportance dune sorte dunit de commandement le noyau de facilitation tactique dont les membres sont lus et rvocables en tout temps, pour prserver lesprit anarchiste de lorganisation. Cette ide sera ouvertement critique par des membres du groupe anarchiste Black Star North, qui voient l une tentative de reproduire des structures hirarchiques et militaristes au sein des black blocs . Les auteurs du communiqu admettent adopter un ton militariste , mais ils prcisent quil ne faut pas voir l une invitation introduire des

  • !!

    4

    structures hirarchiques dautorit au sein dun black bloc. En juillet 2001, ils proposent dailleurs une nouvelle version lgrement modifie reproduite ici suite des discussions entre des membres du mouvement Anti-Racist Action (ARA) et dautres du Green Mountain Anarchist Collective qui signaient la premire version. Dans cette seconde mouture, ils tentent de prciser leurs propositions tactiques. Trs combatif, le texte fait la promotion de manuvres sophistiques adaptes au combat de rue contre les forces de ltat et justifie les frappes contre les symboles de ltat et du capitalisme. Toutefois, les expriences passes dinfiltration policire et certaines confusions quant larrimage des black blocs du Qubec et ceux de la cte Est des tats-Unis dans le cadre des manifestations contre le Sommet des Amriques laissent penser que cette rflexion tactique restera sans doute lettre morte : il est peu probable que des black blocs de plusieurs milliers de participants, sil sen forme, parviennent mettre en pratique de telles tactiques. Mais ce texte demeure tout de mme exemplaire dun esprit anarchiste cherchant sincarner dans des pratiques politiques et de modes daction qui, dfaut davoir lampleur voulue, restent nanmoins adoptes lors des manifestations contre la mondialisation du capitalisme des rcentes annes. La conclusion du communiqu, le style mme, devient presque apocalyptique et messianique : face un processus inluctable de rpression tatique toujours plus implacable, les militants devront passer la clandestinit do ils lanceront une attaque contre ltat. Cette offensive ne pourra aboutir, selon les auteurs, qu une vritable rvolution sociale .

    (FDD)

  • !!

    5

    COMMUNIQU AU SUJET DES TACTIQUES ET DE LORGANISATION1

    AU BLACK BLOC, DE LINTRIEUR DU BLACK BLOC

    Seconde version2

    Juillet 2001 de quelque part dans le Midwest

    Avertissement : les propos contenus dans ce document sappliquent spcifiquement aux particularits du mouvement anarchiste en Amrique du Nord. Lanalyse et les propositions tactiques contenues dans ce document ne sauraient conserver toute leur pertinence si elles sont appliques sans avoir t adaptes au pralable de faon substantielle des situations particulires de lutte en dautres rgions.

    Remarques prliminaires la seconde version

    La prsente version est le rsultat de trs longues discussions entre des membres dARA et du G-MAC3. la lumire de ces dbats, un consensus a t atteint au sujet de certains principes dorganisation rvolutionnaire. Des changements importants ont t apports aux sections portant sur lutilisation des groupes de rserve, les groupes daffinit, le noyau de facilitation tactique et

  • !!

    6

    dautres changements dordre mineur ont t effectus dans toutes les autres sections. Nous croyons que ces changements renforcent la teneur de nos propositions. Nous sommes prts, bien sr, poursuivre la discussion et apporter dautres modifications sil y a lieu.

    En guise dintroduction

    Le document qui suit est prsent dans lintention daccrotre lefficacit de base de notre mouvement en proposant diverses pratiques tactiques qui, nous lesprons, seront adoptes par le black bloc dans son ensemble. Ce travail est inspir par notre admiration sans faille envers la capacit et le potentiel cratifs de lhumanit et par notre dvouement sans rserve la rvolution sociale. Certains passages de ce texte sont empreints dun ton militariste qui ne devrait pas tre interprt comme justifiant par la bande des modles dorganisation arbitraires et hirarchiques. Cest plutt la ralit de notre lutte militante qui rend ncessaire le recours ce type de langage, afin de prsenter notre situation et les mthodes que nous devons utiliser pour nous approcher de la victoire de faon objective et le plus prcisment possible. Il faut souligner ici que nous ne dfendrons jamais la promotion de modles organisationnels dont lessence serait incompatible avec ceux adopts de faon dmocratique par les anarchistes et les travailleurs et travailleuses rvolutionnaires lors de la Commune de Paris (1871) et de la guerre civile espagnole (1936-1939). Pour mener bien la rdaction de ce texte, nous avons rflchi nos propres expriences collectives et nous avons tudi lhistoire

  • !!

    7

    pour apprendre ce qui peut fonctionner ou non lintrieur dun cadre anarchiste.

    Notre intention est de vous prsenter une analyse prcise, quoique brve, de ltat actuel du mouvement ainsi que les tapes que nous (le black bloc) devons franchir afin de faire avancer la cause. Il faut prciser que les propositions qui suivent sappliquent directement et uniquement au black bloc. Par consquent, toute adaptation de propositions plus militantes (telles celles que lon retrouve dans la section Prparations en vue dune rpression accrue de ltat ) lensemble du mouvement anarchiste entranerait un affaiblissement des efforts si importants accomplis pour structurer la communaut de base. Nous considrons ces efforts comme essentiels pour la cause en gnral, puisque cest grce eux que nous pouvons gagner consciemment la vaste population la gauche anarchiste. Notre lutte doit tre mene sur tous les fronts.

    Finalement, nous vous encourageons lire ce document et en discuter au sein de votre collectif et avec dautres personnes au sein de la communaut black bloc anarchiste. Nous esprons que de tels groupes et les personnes intresses qui sont lies au black bloc signeront leurs noms (pas ncessairement leurs vrais noms) au bas de ce document et mettront en pratique les propositions tactiques prsentes ci-dessous. Dans lventualit probable o ce document est en partie inacceptable pour votre groupe de lutte, nous esprons que ces lments de dsaccord seront discuts, dbattus et amends comme il se doit afin que le black bloc atteigne un consensus. Nous demandons ici que les divers

  • !!

    8

    journaux et priodiques anarchistes ouvrent leur section de courrier des lecteurs et lectrices cette fin.

    Lady, August Spies, Muffin, dAction anti-raciste

    et David O. (O Van), X, Natasha, du Collectif anarchiste de Green Mountain

    Notre mouvement grandit

    Au cours de la dernire anne et demie (depuis la bataille de Seattle)4, nous avons assist et nous avons particip la maturation dun vaste mouvement social de protestation ainsi que dun mouvement rvolutionnaire anarchiste, certes plus restreint, mais tout de mme en expansion.

    Huit raisons fondamentales expliquent ce phnomne : 1. La sensation de vide se dgageant dune pseudoralit

    transforme en marchandise par un nocapitalisme exacerb aux consquences inexorables : lalination de masse, lanxit et lennui.

    2. Lchec continu du systme actuel enrayer la dgradation matrielle (la pauvret) au sein de certains secteurs de la classe des travailleurs et des travailleuses et des pauvres.

    3. La riposte populaire et le rveil des syndicats gnralement assoupis face la tentative avre de la part des puissances dirigeantes du nocapitalisme dhomogniser lconomie et la culture mondiales par lentremise dorganisations litistes et centralises telles que la Banque mondiale, le Fonds montaire

  • !!

    9

    international (FMI) et lOrganisation mondiale du commerce OMC).

    4. La rconciliation de contre-cultures jusqualors divises (le punk urbain, le hippy rural, etc.) permet de sappuyer sur une base pour diffuser les changements qui surviennent dans la conscience sociale populaire.

    5. Laccroissement des moyens de communication au sein de la population a eu pour consquences de permettre des amliorations organisationnelles et une mobilisation plus efficace auprs des mouvements sociaux contestataires en gnral et anarchistes rvolutionnaires en particulier.

    6. Lexprience acquise par les organisations au cours de la dernire dcennie a grandement accru la capacit pratique du mouvement dans son ensemble.

    7. La gnration des enfants des annes 1960 et 1970 a maintenant atteint sa pleine maturit. Ceci est un facteur qui ne doit pas tre sous-estim alors que nous voulons construire et continuer dtruire depuis lendroit mme o nos mres et nos pres ont abandonn la partie.

    Et enfin : 8. La rpression policire subie aux tats-Unis et au Canada

    au cours de cette dernire anne a eu pour effet de radicaliser dun ocan lautre des dizaines de milliers de manifestants jusqualors sociaux-dmocrates.

  • !!

    10

    Lanarchisme et le mouvement dans son ensemble

    Alors que le mouvement dans son ensemble a russi a dvelopper la conscience politique et a obtenir quelques victoires concrtes importantes, tout reste encore trop indcis et mallable pour accorder une confiance aveugle ses factions les plus visibles (telles quelles sincarnent dans le Rseau daction directe [Direct Action Network]).

    En tant quanarchistes rvolutionnaires, nous devons continuer dtourner le mouvement de ses tendances inconscientes vers labstraction spectaculaire et labdication sociale-dmocrate tout en y encourageant et en y appuyant les tendances en faveur dune dmocratie participative et directe. Nous devons continuer agir de la sorte par la diffusion de la thorie anarchiste rvolutionnaire et par lexemple DIRECT, la fois dans les rues, dans les efforts dorganisations communautaires et dans nos styles de vie. Ceci doit continuer tre la priorit dans les manifestations comme au sein de nos diffrentes communauts locales.

    Tout en procdant de la sorte, nous devons tre attentifs ne pas limiter nos liens dialectiques au mouvement lui-mme. En bref, nous devons continuer solliciter les masses qui ny sont pas encore intgres, puisque cest seulement par leur participation directe que le systme doppression actuel se dsintgrera tout jamais et disparatra dans la poubelle de lhistoire.

  • !!

    11

    Le dveloppement du mouvement

    Pour toutes les raisons mentionnes, lanne et demie qui vient de scouler peut tre considre comme une tape de transition vers la rsurgence progressive du mouvement anarchiste rvolutionnaire en dpit de certains revers douloureux, tels la disparition de lorganisation Love & Rage ainsi que celle du Fire Cracker Info Shop du Massachusetts. Nous avons pu avancer de deux pas chaque fois que nous reculions dun pas, grce la situation historique objective et nos capacits concrtes nouvellement acquises. Cela dit, avant de devenir prtentieux, il faut admettre que nous avons beaucoup, beaucoup dtapes prilleuses franchir avant den arriver au dnouement de cette pope.

    Nos communauts locales

    Cest dans nos communauts spcifiques que nous (black bloc et anarchistes en gnral) pouvons faire progresser le mouvement anarchiste rvolutionnaire par une organisation communautaire diligente et utile au sein des affranchis. Pour cela, nous devons fonder des coopratives de travailleurs et travailleuses, des centres communautaires et des journaux. Chaque fois que cest possible, nous devons galement favoriser des crations artistiques anarchistes et des actions politiques directes. Lors de vastes manifestations, cest par les actions de notre black bloc que nous aurons organis que nous pouvons faire avancer notre mouvement.

  • !!

    12

    Lors de manifestations

    Cest en vertu de lengagement inconditionnel du bloc que les manifestations sociales-dmocrates sont transformes en performances insurrectionnelles. En nous dfendant physiquement contre lattaque de ltat (la police), nous ajoutons un lment important un mouvement autrement plutt timide. En dfendant des manifestants non violents contre les assauts de la police (comme durant laction du 16 avril Washington, D.C.), nous dmontrons le pouvoir extrasymbolique des individus tout en augmentant lefficacit relative de laction densemble. En attaquant et en dtruisant la proprit prive capitaliste (comme lors de la bataille de Seattle), nous allons au-del de la rhtorique et nous infligeons dans les faits de vrais dommages matriels aux avant-postes urbains de lempire oppresseur indsirable et totalement mercantile des nouveaux capitalistes. Par notre mthode, nous transformons lindcision et la prudence en action VRITABLE.

    Des pacifistes de la classe moyenne aise dclarent que nous sommes dans le tort du fait mme de nos principes qui sincarnent dans laction. Or, ils devraient se souvenir que le seul but lgitime des manifestations de masse est de provoquer un changement social et rvolutionnaire ncessaire au bnfice de tous et de toutes. Le but nest pas, et ne devrait jamais tre, de se laisser arrter et brutaliser au nom de quelque purile affiliation Gandhi ou Martin Luther King Jr. De plus, nous devrions tous rflchir au fait que lInde daujourdhui est dvaste en raison de lexploitation capitaliste soutenue et que les Noirs amricains sont

  • !!

    13

    encore traits comme des citoyens de second rang aussi bien par lappareil dtat que par la ploutocratie. Ces simulacres de justice ne pourront tre totalement rectifis que par un mouvement anarchiste rvolutionnaire international authentique et victorieux ayant recours la fois des mthodes violentes et non violentes.

    Cest dans ce contexte particulier et trs concret que nous luttons. Nous ne devrions pas et nallons pas compromettre notre haine ou notre amour, car nous compromettrions alors notre objectif qui est datteindre lanarchie, cest--dire une rvolution sociale complte qui incarne le rve dune humanit entire libre des chanes visibles et invisibles.

    Nous noffrons aucune excuse.

    De la ncessit damliorer nos capacits tactiques

    Les forces de ltat (plus spcifiquement le Federal Bureau of Investigation [FBI] et la police) nous tudient depuis un certain temps. Il est donc absolument ncessaire que nous dveloppions plus avant notre comprhension tactique et nos capacits pratiques dans les rues si nous voulons maintenir et mme accrotre nos capacits militantes.

    Pour y arriver, quelques choix fondamentaux simposent : 1. amliorer lorganisation de la force de combat de rues ; 2. entranement physique rgulier entre les actions ; 3. faciliter les attaques prventives ;

  • !!

    14

    4. prparation pour une intensification ventuelle de loppression tatique et pour une transformation du mouvement social de protestation en vritable rvolution sociale ;

    5. dvelopper la rflexion thorique et lducation sociale et politique lintrieur du mouvement et entre les actions.

    Pour linstant, la mobilisation de nos forces se fait de faon si improvise que notre capacit combattre les forces de ltat bien entranes et disciplines reste limite. En fait, cest uniquement grce notre dvouement rvolutionnaire et nos constitutions de fer que nous avons t capables de combattre ces forces avec un succs relatif. Nous nous battons par amour, par haine de loppression et parce quil est juste dagir ainsi. Les membres des forces de ltat combattent par haine de la diversit et de la libre expression, ainsi que pour toucher leur chque de paie.

    Nanmoins, les agents de ltat vont modifier leurs tactiques actuelles en fonction de leurs expriences sur le terrain et des volumineux rapports danalyse produits notre sujet suite Seattle et Qubec. Il faut donc sattendre ce que les forces de ltat atteignent dans un proche avenir un nouveau palier de supriorit notre gard. Il est par consquent absolument ncessaire que nous commencions nous rorganiser de manire accrotre notre rapport de force.

  • !!

    15

    LA CAPACIT TACTIQUE ACCRUE DE LA FORCE DE COMBAT DE RUE

    La mise sur pied dun noyau lu de facilitation tactique

    Nos expriences au cours des 18 derniers mois nous ont beaucoup appris au sujet du vritable potentiel du black bloc durant les manifestations de masse. A165 a t la preuve de lefficacit dun grand black bloc alli des groupes menant des actions directes non violentes. ce moment critique de lhistoire, nous avons pu constater que les tactiques combines dautodfense du black block et de dsobissance civile de groupes non violents ont permis doccuper une grande partie du territoire urbain. J206 a montr comment un black bloc compact et entour de bannires dfensives peut inspirer confiance aux manifestants et dissuader de faon efficace les policiers de procder des arrestations cibles. A207 a montr pour sa part comment un black bloc de taille relativement modeste (comme celui du samedi 21) peut se transformer en une importante force de combat lorsque la volont physique et mentale est active. Cependant, nos expriences ont galement permis de rvler certaines faiblesses que nous sommes loin de pouvoir surmonter pour linstant. En particulier, labsence dune structure dmocratique de commandement tactique a mis en pril notre capacit dagir rapidement et de faon dcisive. Dans certains cas, ce manque nous a plongs dans lindcision, en particulier en ce qui a trait nos dplacements. Nous nous sommes retrouvs consquemment dans des situations dangereuses et certains des ntres ont ainsi t arrts (le lundi du A16). Cest pourquoi nous affirmons que nous

  • !!

    16

    devons mettre en place une vritable structure dmocratique de commandement tactique qui augmente notre mobilit sans mettre en cause nos principes anarchistes.

    Cest en ce sens que nous proposons que le rle de porte-parole lu des groupes daffinit soit tendu celui de conseiller tactique (a-tacs8). La fonction de cette personne consisterait faciliter les actions concertes de sa section tel que recommand par le noyau gnral de facilitation tactique (le n-tac, qui sera discut plus loin). De plus, chaque groupe daffinit devrait aussi lire un remplaant au cas o le premier a-tac serait dans lincapacit dagir en raison dune blessure ou de son arrestation.

    Tous les a-tacs lus devraient se runir huis clos aprs lassemble gnrale du black block o les plans daction gnraux pour la journe devraient avoir t discuts, dbattus et adopts par consensus (le secret est ici ncessaire pour des raisons de scurit). Au cours de cette runion des a-tacs, un noyau gnral de facilitation tactique (n-tac) devrait tre lu, nouveau par consensus. Les membres de ce n-tac devraient agir de faon faciliter les mouvements du black bloc en conformit au plan daction gnral tabli lassemble gnrale prcdente. Suite la runion huis clos, lidentit des membres du n-tac sera dvoile discrtement par les porte-parole lus (a-tacs) des groupes daffinit tous les membres de confiance. Tous les groupes daffinit dont la-tac a t lu au noyau gnral de facilitation tactique devrait lire un nouveau a-tac pour le remplacer.

    Dans les cas o il y a un grand bloc dans une manifestation de masse, les groupes daffinit devraient tre responsables de

  • !!

    17

    positions spcifiques au sein du bloc, en particulier lavant, larrire et sur les cts (ceci devrait tre dcid lassemble gnrale). Ceci amnera la formation de quatre brigades priphriques principales (voir plus loin pour la discussion sur lutilisation des brigades). Dans ce cas, il devrait y avoir 12 n-tacs lus. Ces personnes devraient provenir des brigades priphriques dont elles assumeraient la responsabilit (voir plus loin). Les 12 n-tacs devraient tre diviss en 4 groupes de 3 membres qui devraient se rpartir les positions suivantes :

    1. une personne dans la brigade priphrique dont elle est responsable ( lavant, larrire, gauche ou droite du bloc) ;

    2. une personne prs du centre du bloc, avec les reprsentants des autres brigades priphriques ;

    3. une personne qui servira dagent de liaison entre le n-tac du centre et la brigade priphrique.

    En gnral, toutes les dcisions importantes et en particulier celles concernant les dplacements devraient tre prises par consensus au sein du n-tac du milieu. Pour se faire, il devrait sappuyer sur les informations fournies par les brigades priphriques et par des informateurs fiables en provenance des units de reconnaissance.

    Pour quils soient en mesure dagir efficacement et en toute scurit, ces n-tacs devraient galement tre accompagns de personnes leur tant spcifiquement affectes. Cest ainsi que les n-tacs en position dans les brigades priphriques devraient tre assistes de deux personnes de leur groupe daffinit ou non. Lune sera charge de maintenir la liaison radio avec les quipes de reconnaissance ou les autres groupes. La deuxime personne

  • !!

    18

    sera responsable de la scurit du n-tacs. On doit tre conscient du fait que ces personnes seront facilement identifies par les forces de lordre et quelles sont susceptibles dtre cibles et arrtes. De mme, le noyau central des n-tacs doit tre assist dun certain nombre de personnes avec des radios et dautres qui assurent la scurit.

    galement, au fur et mesure que laction se droule, il faut interchanger le rle des membres du n-tac, quils agissent en tant quagents de liaison ou quils soient positionns en priphrie ou au milieu. Cette permutation des rles permet dviter le penchant psychologique lautoritarisme qui risque de se dvelopper au sein du noyau central des n-tacs. Il faut rappeler que le rle de ces personnes consiste principalement soccuper des dplacements du bloc (quelle route emprunter, de quel ct se diriger un carrefour). En aucun cas elles ne doivent jouer le rle de gnraux ou de leaders.

    Il est important ici dinsister sur plusieurs choses. Premirement, nous ne prconisons pas la cration dune clique permanente dofficiers. Ces postes lectifs ne doivent exister que le temps de laction. Si cette dernire dure plus dune journe, il serait alors souhaitable dlire chaque jour dautres a-tacs et n-tacs. De plus, tous les postes da-tac ou de n-tac doivent tre rvocables en tout temps par lensemble du bloc. Enfin, linfluence que les a-tacs et n-tacs exerceront ne devrait pas dpasser celle qui est lie la fonction de facilitateur du plan gnral adopt lassemble gnrale du black bloc. Toute tentative de dpasser ce mandat devrait tre une raison suffisante de rvocation. Et il est vident, bien sr, que nous ne prconisons

  • !!

    19

    pas la formalisation dun modle hirarchique militaire. Il doit tre parfaitement clair que lensemble de ceux et celles qui participent un bloc se rservent le droit de dsobir nimporte quel ordre des tacs et mme de dserter. Cest ainsi que ladoption dune telle structure restera conforme aux principes anarchistes dorganisation. Les milices anarchistes ont reconnu la ncessit de ce genre de structure durant la guerre civile dEspagne et nous devrions faire de mme.

    Les groupes daffinit individuels

    Les groupes daffinit (GA), gnralement composs de trois dix personnes, devraient sorganiser de telle faon quils puissent atteindre leurs objectifs lors de laction en cours. Dterminer lobjectif dun GA en fonction de lobjectif gnral permet de mettre sur pied des GA spcialiss.

    On suggre quil y ait, lintrieur de ces GA, une personne munie dune trousse de premiers soins, mme rudimentaire (de la solution saline, du vinaigre, des pelures de citron, de leau, des mdicaments de base). Il serait de plus utile que chaque membre du black bloc suive un cours lmentaire de premiers soins, ou quil ait une connaissance gnrale des pratiques daide mdicale lies aux manifestations. De la mme faon que lentranement physique, la connaissance des premiers soins augmentera notre capacit gnrale de combat.

    Il doit tre dcid si les GA devraient utiliser une radio ou un tlphone cellulaire durant laction. Lusage de ces outils de communication peut-tre utile pour certains GA, mais il est

  • !!

    20

    inutile de sencombrer dun tel matriel si cela nest pas ncessaire. La communication peut tre perdue, par ailleurs, lorsque loprateur manque dentranement ou par le brouillage des canaux. Une augmentation de postes de radio ne sera jamais la solution un manque dorganisation ou dinformation ; mais le positionnement et lutilisation stratgiques du matriel de communication nous permettront toujours dtre plus efficaces. Les rles des autres personnes dans le GA, en dehors de ceux dj mentionns dinfirmier et doprateur de radio ou de tlphone cellulaire, dpendent du genre et de la fonction du groupe. Les GA doivent en dcider eux-mmes.

    Les GA spcialiss comprennent entre autres les brigades de ligne de front (dfensives), les brigades offensives, les patrouilles de reconnaissance, les brigades antiproprit, les units de premiers soins, les brigades de soutien, les groupes danimation sonore, les brigades de frappes prventives.

    Un GA de ligne de front devrait avoir des boucliers ou dautres pices lourdes de protection pour tre en mesure de former et tenir la ligne de front. Ils pourront demander dautres porteurs de boucliers lintrieur du bloc en vue de former une solide ligne de dfense. Ce GA constituera un point de ralliement pour assurer la position au bloc. Il ne fera pas partie dune ligne dattaque, mais tiendra une position pouvant servir de lieu de repli si lattaque tourne mal. De plus, ce groupe est bien plac pour surveiller la construction des barricades.

    Un GA offensif doit tre trs mobile et enthousiaste. Les membres de ce type de GA doivent tre prpars la confrontation. Les GA offensifs doivent tre galement prts

  • !!

    21

    remplir des besoins tactiques particuliers et si notre prsentation de ce groupe sarrte l, cest que nous encourageons la crativit.

    Un GA de reconnaissance opre lextrieur du bloc, rcoltant de linformation. Il reste constamment en communication avec le bloc principal, le tenant inform des mouvements des forces policires et de leur nombre. Lorsque des faiblesses chez ladversaire sont dtectes, le GA doit en informer le bloc pour lui signaler les opportunits doffensive.

    Le bloc devrait avoir son GA dinfirmiers volontaires. Pour une protection idale, les units de soins devraient se positionner de faon couvrir tous les cts de lensemble du bloc. Quun black bloc ait sa propre unit dinfirmiers volontaires ne signifie pas quils ne porteront secours quaux membres du black bloc, mais quils se dplaceront avec lui.

    Les GA antiproprit existent galement dans notre mouvement. Les rles jous par ses membres ne doivent pas tre dvoils ceux qui nen font pas partie. De mme, les informations sur les GA se consacrant des frappes prventives doivent tre tenues secrtes. Toute fuite dinformation sur leurs plans ou lexistence mme de ces deux groupes ne fera que compromettre leur scurit.

    Il y a aussi plusieurs types de GA de soutien, dont lune des tches consiste intervenir dans les situations de panique. Il ne devrait pas y avoir plus de quelques GA de ce type pour chaque brigade priphriques (voir plus loin lutilisation des brigades).

    Il peut y avoir galement un GA de ravitaillement et de communication responsable de lapprovisionnement en nourriture et en eau et charg de distribuer des communiqus aux

  • !!

    22

    personnes dans le voisinage et aux manifestants ne faisant pas partie des black blocs. Leau pourra galement servir se nettoyer les yeux au besoin.

    Un GA danimation sonore permet de maintenir lenthousiasme et la volont dagir lorsque la situation lexige. La musique peut crer des pousses dnergie et des vagues denthousiasme dans le bloc, tout en envoyant un message de puissance lennemi. La crativit est encourage dans ce domaine : certains seront stimuls par le son de la cornemuse alors que dautres seront motivs par des slogans radicaux et entranants. On devrait continuer utiliser et toujours essayer damliorer cette approche humaniste par la musique et les slogans. Ceci joue en notre faveur, car le temps nest srement pas venu o ltat utilisera de telles tactiques charges dmotions.

    Brigades

    Un GA doit tenter de faire partie dune brigade regroupant cinq dix GA diffrents. Chaque brigade doit avoir son drapeau qui servira de point de ralliement. Ces drapeaux reconnaissables par leurs couleurs ou leurs motifs seront utiliss comme balises. Celles-ci peuvent indiquer une position de repli, ou simplement servir de point de repre si quelquun scarte de son GA. Chaque brigade doit pouvoir fonctionner de faon autonome. Pour tre en mesure de le faire, les GA doivent communiquer entre eux avant leur participation laction.

    Les brigades se forment naturellement par des relations de confiance entre les individus et les groupes et doivent continuer

  • !!

    23

    le faire ainsi. Cela tant dit, lassemble gnrale du black bloc devrait rester un lieu o il est possible dtablir des rseaux ; cest l quon dtermine quel genre de GA est ncessaire pour parachever les brigades offensives, dfensives et de soutien, de faon ce quelles soient fonctionnelles. Lorsque ncessaire et si elle est en mesure de le faire, une brigade tablie lavance doit sadjoindre certains GA spcialiss et incorporer un bon nombre de GA dans ses rangs. Plus les brigades seront quilibres et autonomes, le mieux ce sera. Plus nombreux seront les GA lis des brigades fonctionnelles, plus laction sera efficace et scuritaire.

    Chaque brigade doit prendre en charge certaines fonctions du black bloc considr dans son ensemble. Les principales options que peuvent choisir les brigades sont les suivantes : 1) brigades priphrique ; 2) brigades dappoint ; 3) brigades de rserve (voir plus loin dans la partie intitule rserves ). Lorganisation de ces brigades et lattribution de leurs fonctions doivent se faire lassemble gnrale du black bloc, avant la runion des porte-parole a-tac.

    Le black bloc comme entit en mouvement doit tre dlimit par quatre brigades priphriques. Lune lavant, lautre larrire et les deux autres droite et gauche. Comme nous lavons dj dit, chacune de ces brigades doit arborer un drapeau qui servira de point de ralliement.

    Ces brigades priphriques doivent sassurer de former un primtre de scurit couvrant tous les cts du bloc. Chacune doit se sentir directement responsable de la position quelle occupe (avant, arrire, gauche, droite).

  • !!

    24

    Il est galement souhaitable que les membres des diffrents GA dfensifs et offensifs de chaque brigade priphrique travaillent en troite collaboration lorsque le besoin sen fait sentir. Par exemple, si le bloc trouve quil est ncessaire de se replier, toutes les personnes qui font partie de la brigade priphrique concerne ainsi que toutes les autres qui disposent dquipement dfensif (comme des boucliers) doivent maintenir leur position larrire et faire face lennemi pour couvrir la retraite contre les balles de plastique, les sacs de pois, etc. De mme, durant des manuvres offensives, toutes les personnes munies dquipement offensif devraient se placer lavant, ainsi quun petit nombre de personnes quipes de boucliers de faon contrer leffet des matraques ennemies. Lorsque ncessaire, des renforts apports par les autres brigades priphriques doivent tre prts entrer dans la mle. Cependant, cela ne doit tre fait quen cas dabsolue ncessit, car il est souhaitable de maintenir en tout temps un primtre de scurit tout autour du bloc. Tout cela tombe sous le sens, bien sr.

    Les brigades dappoint devraient prendre position dans les espaces laisss libres par les quatre brigades priphriques. Elles doivent agir de leur propre initiative tout en tant prpares prter main-forte aux brigades priphriques si celles-ci sont attaques. Lune des tches principales des brigades dappoint devrait tre lattaque des lignes de dfense de larme et de la police, quand cela savre souhaitable ou ncessaire.

    Pour atteindre cet objectif, il peut tre souhaitable dutiliser des tactiques dj utilises par les black blocs allemands (entre autres). Le centre du bloc peut ainsi tre occup par des

  • !!

    25

    formations en ligne droite (de droite gauche), chaque ligne tant forme par un ou deux GA. Ainsi, des GA composant une brigade dappoint devraient prendre consciemment position en ranges successives. Cette disposition en lignes renforce la scurit intrieure et permet par ailleurs au bloc de mener des offensives rptes et soutenues contre lennemi au moment jug opportun.

    Les brigades priphriques doivent assurer une libert de mouvement aux brigades antiproprit indpendantes, ou celles rattaches une brigade dappoint, en les laissant sortir du bloc ou y revenir.

    Lorganisation ou tout simplement la capacit de lancer de telles manuvres devrait souvent venir des n-tacs en collaboration avec les GA, car ce sont les n-tacs qui ont, en gnral, la meilleure vue densemble du droulement des oprations et de la situation du bloc. Ce sont donc des manuvres tactiques que les n-tacs devraient tre prts faciliter de manire responsable.

    En tout et partout, lapplication du modle des brigades dcrit prcdemment devrait avoir pour rsultat de nous donner une plus grande ouverture tactique que nous navions auparavant. De plus, la mise en uvre de ces capacits tactiques devrait effrayer et dmoraliser lennemi.

    Reconnaissance et communication

    Il est ncessaire que le Bloc possde un systme sophistiqu de communication et de reconnaissance de combat. La reconnaissance devrait tre effectue par des individus en duo ou en groupes

  • !!

    26

    daffinit, vlo et dots dune radio ou dun tlphone cellulaire. Le noyau de facilitation tactique devrait galement disposer dune radio ou dun tlphone cellulaire. Lors de laction, les quipes de reconnaissance devraient explorer toutes les rues que le bloc pourrait emprunter et constamment se rapporter au noyau de facilitation tactique. De cette faon, la mobilisation du bloc pourra tre orchestre par des dcisions relativement claires et raisonnables.

    Dautres lments de reconnaissance devraient oprer dans des zones daction qui ne sont pas dans le voisinage immdiat du bloc, ceci de faon garder le bloc inform du droulement gnral de la manifestation et indiquer ventuellement aux membres du n-tac les points chauds o la prsence du bloc est requise.

    Les groupes daffinit individuels qui sont en possession de radios devraient tre eux aussi tenus informs du canal sur lequel transiteront les communications de faon ce que le bloc dans son ensemble soit tenu inform de la situation gnrale. De mme, les groupes daffinit qui ne participent pas au black bloc, mais qui pratiquent la dsobissance civile devraient savoir quel sera le canal radio utilis et ils devraient connatre les numros des tlphones cellulaires pour quils puissent appeler le bloc la rescousse lorsque ncessaire.

    Comme cela fut voqu plus haut, il est probable que les gens impliqus directement dans les oprations de reconnaissance proviennent de diverses brigades. Cela dit, il est prfrable quun groupe daffinit se prsente laction dj prpar pour agir en tant que cellule spcialise pour les oprations de reconnaissance.

  • !!

    27

    Il serait souhaitable que ce groupe soit compos de rsidants de la ville o se droule laction, puisque des individus sont plus efficaces lorsquils patrouillent dans une zone urbaine quils connaissent dj. De plus, ceux et celles qui veulent soccuper des communications doivent savoir se servir des radios. Les codes et les canaux qui seront utiliss ne doivent tre discuts quavec les membres du bloc qui ont une radio. On peut utiliser plusieurs tactiques diffrentes pour les communications. Chaque brigade doit arriver sur les lieux de laction en ayant dtermin son mode de communication interne.

    Rserves

    Au cours de lhistoire, plusieurs batailles ont t remportes par le dploiement de troupes de rserve utilises comme force tactique. Cette tactique sest avre efficace pour larme et la police amricaines. Lutilisation de forces de rserve nest pas une tactique couramment utilise par le black bloc en Amrique du Nord. Il est important que nous envisagions dutiliser cette tactique pour mieux combattre les fiers--bras de ltat.

    Ltat a toujours eu lavantage sur nous quand il sagit demployer la force brute. Sa capacit utiliser des forces de rserve en amenant des autobus pleins de troupes fraches et lourdement quipes constituera toujours une menace pour nous. De notre ct, nous nous battons pendant des heures et des jours avec le mme attirail, ne nous accordant aucun moment de rpit ou presque. Cest pourquoi il est pertinent que nous tudions les tactiques employes par les forces de ltat et que nous adoptions

  • !!

    28

    celles qui nous paraissent efficaces tout en respectant nos principes anarchistes.

    Lutilisation de forces de rserve peut inspirer le black bloc pour plusieurs raisons. Dabord, cette tactique a toujours port ses fruits au cours de lhistoire. De plus, imaginez leffet psychologique que lutilisation de tactiques sophistiques peut avoir sur les troupes de ltat. Cela tant dit, il ne faut pas en conclure que des forces de rserve doivent toujours tre utilises lorsquun black bloc participe laction, mais cette possibilit peut tre envisages lors de lassemble gnrale du bloc. La dcision dutiliser des forces de rserve devrait tre prise lavance, avant mme que laction nait lieu.

    Ls forces de rserve peuvent tre utilises lorsque le bloc est encercl par la police. Dans ce cas, les brigades de rserve sont appeles pour prendre revers les positions de la police, provoquant du mme coup lencerclement de cette dernire. De plus, les brigades de rserve peuvent tre utilises pour garder une position qui pourra servir de point de repli pour le bloc. Envoyer de petits groupes de rserve peut tre la solution idale pour ajouter des forces pour enfoncer un barrage de police ou semparer dune brigade.

    Larme amricaine garde le tiers de ses forces en rserve. Cest la proportion idale pour une troupe de combat qui veut oprer une perce un moment crucial dune bataille. En gardant cela lesprit, il serait souhaitable de garder 300 individus en rserve pour un black bloc de 1 000 individus. De mme, pour 2 000 individus, environ 600 devraient tre en rserve. Par contre, on ne devrait pas garder de groupes de rserve pour un black bloc

  • !!

    29

    de moins de 1 000 personnes. Avec un aussi petit nombre, les groupes mis en rserve ne feraient quaffaiblir le bloc alors quil a besoin de toutes les forces disponibles pour participer laction.

    Les avis divergent quant savoir quel est le meilleur moment pour utiliser des forces de rserve. Il est important dexaminer toutes les options possibles et den discuter. Il faut prendre en considration plusieurs facteurs, comme la configuration de la ville (les routes sont-elles larges ou troites ?), le rapport de force entre le bloc et la police et le droulement de laction (y a-t-il des grandes parties de la ville occupes par des manifestants non violents ou la police et la garde nationale ont-elles le champ totalement libre ?). Ces questions doivent tre dbattues lors des assembles gnrales du bloc. La faon de mettre sur pied un groupe de rserve et les moyens de communication employer devraient tre discuts aprs llection de n-tacs la runion des porte-parole lus (les a-tacs). Suite llection, ces informations peuvent tre prcises une runion des n-tacs o seules les personnes directement concernes sont prsentes.

    Au cours de cette runion, on devrait dcider de lemplacement des forces de rserves et des procdures de communication par radio ou tlphone cellulaire. Cette force de rserve doit maintenir le contact par radio ou tlphone cellulaire avec le bloc en restant en liaison avec les n-tacs. La dcision de faire appel aux rserves doit tre laisse aux n-tacs, qui reoivent les informations relatives la situation sur le terrain et au besoin de forces de rserve des cellules du bloc. La dcision du n-tac dappeler des rserves se prend lorsque des groupes lintrieur du grand bloc demandent des renforts. Pouvoir compter sur cet

  • !!

    30

    appui est important, considrant les nombreux besoins des membres du black bloc participant laction.

    Le dploiement des rserves (o et combien) doit tre laiss linitiative des n-tacs. Les dtails du dploiement, litinraire suivre, etc., doivent tre laisss aux groupes concerns. Quand il devient important de prendre une dcision rapidement, les a-tacs lus des groupes concerns doivent tre prts faire des propositions concrtes (que les personnes concernes sont libres daccepter ou de refuser). La position exacte des forces de rserve ne doit pas tre connue de tout le bloc. Les membres du n-tac sont les seuls qui doivent la connatre. On suggre galement de dcider de cet emplacement la dernire minute, lorsque les forces de rserve sont prtes se mettre en place. Cette faon de procder permet dviter que linformation vienne aux oreilles de la police par les voies habituelles dinfiltration. Si cette information tait connue, elle conduirait presque certainement des arrestations de groupes isoles par la police dtat.

    Toutes les forces de rserve doivent tre divises en brigades denviron 50 personnes et disposes stratgiquement autour de la zone o se droule laction. Des brigades de rserve de 50 individus sont souhaitables, car ce nombre est assez petit pour prserver une grande mobilit et ne pas trop se faire remarquer (par la police) tout en tant suffisant pour reprsenter une bonne force de combat. Cette brigade est assez forte pour se frayer un chemin travers les rangs de la police au besoin (une range de 24 de profondeur ou deux ranges de 12 de profondeur chacune), et de se regrouper par la suite au sein du bloc. Diviser ces forces de rserve en petites units plus mobiles leur permet de rpondre

  • !!

    31

    rapidement lappel. Cette faon de procder vite ltape de la division des rserves du bloc et procure une plus grande scurit dans lventualit o les emplacements occups sont dcouverts par les forces de lordre (alors quil est possible que la position dune brigade de rserve soit connue, il est peu probable que la police connaisse tous les emplacements).

    Comme on la mentionn auparavant, il nest pas ncessaire de rappeler toutes les brigades lorsquon a besoin de renfort. La division de ces forces de rserve en plus petites units permet de faire appel seulement celles qui sont les plus proches et celles dont la prsence est ncessaire, permettant ainsi une grande rapidit de manuvre.

    Quand un nombre relativement important de membres des forces de rserve est appel (3 brigades de 50 personnes, par exemple), elles peuvent converger vers le champ de bataille depuis des positions diffrentes. Cette tactique, quand elle est bien utilise, peut semer la confusion chez lennemi quant sa perception de la situation de combat. Il est galement possible que cette tactique, bien coordonne, permette de prendre lennemi par le flanc et lobliger battre en retraite, voire mme le mettre en droute.

    Lorsquelles sont inactives, les forces de rserve doivent rester lcart pour viter les attaques clair, mais sans trop sloigner de faon ce que la police ne puisse pas les isoler avant quelles rejoignent le bloc. Elles peuvent se trouver une distance de quelques pts de maisons, mais de toute faon ceci doit tre dcid par les brigades de rserve elles-mmes, la lumire des suggestions des n-tacs.

  • !!

    32

    Identifier chaque brigade de rserve par une lettre peut tre utile aux n-tacs pour mieux grer les manuvres des forces de rserves. Par exemple, les n-tacs savent que la brigade B se trouve sur le flanc droit du bloc. Ces derniers peuvent alors faire appel cette brigade (simplement en disant brigade B ) sans avoir faire de longues interventions la radio ou au tlphone cellulaire, donnant ainsi le moins dinformation possible susceptible dtre utilise par les forces de lordre. On peut galement toujours craindre la prsence dinformateurs parmi nous et le mot rserve ne doit jamais tre utilis lorsque lon communique en public.

    Avant de rejoindre le bloc, ces brigades doivent viter de se battre, si ce nest pour se dfendre ou si cest invitable. La discrtion est vitale. Il est souhaitable que les membres des brigades de rserve puissent se mtamorphoser rapidement en membres rguliers du bloc. Laccoutrement du black bloc doit tre port sous les habits ordinaires . Ceci permettra aux membres de la rserve de se fondre dans le bloc et dviter dtre reprs par les hlicoptres de la police et les mouchards de ltat. Quand ils sont appels en renfort par les n-tacs, les brigades de rserve doivent enlever leurs habits ordinaires pour laisser voir leurs vraies couleurs. Les habits ordinaires peuvent tre abandonns et jets. Garder des habits de rechange pour plus tard relve dune dcision personnelle. Cependant vous ne devriez apporter que le strict ncessaire.

    Pour que la force de rserve soit efficace, il faut absolument quelle puisse se dplacer rapidement. Sans cela, elle pourrait chouer dans sa tentative datteindre la scne de laction ou de

  • !!

    33

    joindre le reste du bloc au moment o son arrive pourrait faire basculer le rapport de forces en notre faveur. Les forces de rserve devraient ainsi tre organises la manire de linfanterie lgre. Elles ne devraient porter quun quipement de combat lger et rduit au minimum de manire ne pas tre ralenties. Ceci signifie quelles ne devraient pas avoir de sacs dos, de masques gaz, de casques, de boucliers, darmures lourdes (gilets de sauvetage, protecteurs de pectoraux, plastrons de receveur de base-ball, etc.). Elles ne devraient avoir que des foulards imbibs de vinaigre et un minimum dquipement offensif (aux individus et aux groupes daffinit de juger de ce qui est ncessaire). Les infirmiers constituent la seule exception cette rgle : ils devraient transporter tout le matriel ncessaire. Pour des raisons videntes de mobilit, ce serait bien que les membres affects la rserve soient quips de bicyclettes. Celles-ci peuvent servir pour lattaque et la dfense et on doit pouvoir les abandonner. Quand on ne peut avoir de bicyclettes, il est impratif que les membres des GA composant les brigades de rserve soient en bonne condition physique. En effet, ils doivent tre capables de courir sur une distance de deux kilomtres puis sengager dans la bataille. Il faut garder cela lesprit lorsque lon forme les brigades de rserve.

    Lorsque ces forces de rserve sauront utiliser correctement leur rapidit et leur force, il est prvoir quelles parviendront surprendre lennemi et le dmoraliser. Le simple fait deffectuer ces manuvres relativement sophistiques devrait mener les troupes ennemies mettre en doute leur scurit personnelle et leur apparente supriorit tactique. De tels dveloppements sur la

  • !!

    34

    scne de laffrontement, de tels revirements concrets et psychologiques ne peuvent que produire par eux-mmes un changement en notre faveur. Bien sr, ce dveloppement positif ne peut tre maintenu et ne le sera que si le bloc assure rapidement sa cohsion face une frocit et une brutalit policires croissantes dans le conflit o nous sommes engags. Mais attention : la frocit et la brutalit policires seront dautant plus intenses que les forces de ltat auront le sentiment dtre en danger rel en raison mme de notre utilisation de tactiques sophistiques. Chacun doit donc se rappeler que les animaux sont le plus dangereux lorsquils sont acculs dans un coin et quils sentent que leur fin est proche.

    Conseils de scurit supplmentaires : cartes, radios, pices didentit, noms, etc.

    Bien quil soit important que chaque groupe daffinit (voire chaque individu) possde une carte dtaille de la zone dopration, il est absolument ncessaire que de telles cartes soient marques uniquement laide de codes. Lors de laction R2K Philadelphie, au moins 2 membres du black bloc ont t arrts lors dun raid prventif de la police men environ 45 minutes aprs la runion du black bloc ( laquelle ils taient prsents) et 90 minutes avant la manifestation elle-mme. Les policiers ont trouv sur eux des cartes du centre-ville sur lesquelles taient indiqus au stylo des lieux de replis durgence pour le black bloc ainsi que des endroits o le bloc prvoyait

  • !!

    35

    concentrer ses actions, rcuprer du matriel en vue de construire des barricades, etc.

    Ces cartes ntant pas codes, la police sest trouve dans une position avantageuse puisquelle connaissait les dplacements prvus par le bloc avant mme quils ne surviennent. Il est impossible de savoir avec exactitude limpact de cette fuite dinformation sur le droulement des vnements des journes daction (tout comme il est impossible de savoir si la police possdait dj ces informations grce des informateurs ayant infiltr la runion, comme certains lont prtendu). Il nen reste pas moins que cet vnement reprsente une erreur importante en matire de scurit. Il est donc absolument ncessaire que toutes les indications sur les cartes soient codes de faon viter que ne se reproduise une telle catastrophe.

    De plus, toutes les communications radio devraient seffectuer sur des frquences dcides lavance. Les frquences de communication devraient changer continuellement selon des intervalles prvus de faon limiter la capacit des forces de ltat despionner nos communications. Toute linformation concernant ces frquences et ces changements de frquence devrait tre connue de tous les groupes qui ont un intrt lgitime maintenir une communication radio avec nous.

    Il est galement essentiel dviter davoir avec soi toute pice didentit, et ce, tout moment, y compris son adresse domiciliaire ou son numro de tlphone. Si vous tes arrt en possession de telles informations, cela servira uniquement vous crer des ennuis.

  • !!

    36

    Enfin, lorsque vous tes dans la zone de laction, vous ne devez pas parler de vous-mme ni de ceux que vous connaissez en utilisant vos vrais noms. Le moins nous rendons public nos identits relles, le mieux nous nous porterons en ce qui a trait aux actions lgales ventuelles et au harclement de ltat.

    Communiqus

    Il est important que toutes les actions dun black bloc soient suivies dun communiqu explicatif qui sera rdig, dans la mesure du possible, par un large comit reprsentatif compos de volontaires des divers groupes daffinit. Ce communiqu devrait parler des actions en expliquant pourquoi elles ont eu lieu, pourquoi des tactiques et des modes de combat spcifiques ont t utiliss, et en quoi cette lutte particulire est lie la marche du mouvement anarchiste dans son ensemble vers un monde libre et crateur.

    Pour organiser ceci, une runion suivant laction devrait se tenir dans un lieu scuritaire. Le lieu et le moment dune telle runion devraient tre prvus avant laction lors de la runion des officiers lus-porte-parole (aprs que toutes les autres questions aient t dbattues) ou encore lors de lassemble gnrale de tout le black bloc (une fois encore aprs que toutes les questions aient t dbattues).

    De tels communiqus sont importants pour rejoindre le grand public, mais aussi pour contrer la tentative de diabolisation de nos actions de la part de la presse capitaliste (et bien souvent

  • !!

    37

    aussi de la part de la presse sociale-dmocrate et communiste orthodoxe).

    Il est galement important de prvoir, en plus de ce communiqu mis aprs laction, un communiqu rdig au pralable et distribu durant laction. L encore, on devrait prciser la raison pour laquelle nous prenons les (nos) rues et les problmes qui nous poussent agir. La responsabilit de la production et de la distribution de ce communiqu devrait tre prise en charge par les diffrents groupes daffinit. De mme, les GA ou le personnel de soutien devraient prendre la responsabilit de distribuer ces communiqus au public et aux mdias indpendants de gauche durant laction. Tous ces communiqus devraient tre signs du nom du groupe daffinit ou de lindividu qui en est lauteur de faon revendiquer leur responsabilit. Toute dclaration anonyme devrait tre considre comme manant de ltat dans le but de nous discrditer.

    Principes anarchistes de commandement tactique

    Lide de mettre sur pied une chane de commandement dmocratique ne vise pas diminuer la spontanit du bloc, mais simplement en accrotre la mobilit gnrale et la capacit de combat lorsque la situation lexige.

    Les fonctions principales du noyau de facilitation tactique (n-tac) consisteront uniquement guider les mouvements du bloc et appeler les forces de rserve se dployer. En ce qui concerne la premire fonction, elle devrait limiter les dbats qui entranent des pertes de temps regrettables lorsquil sagit de

  • !!

    38

    dcider chaque intersection de la direction prendre. Nous nous porterons dautant mieux que nous parviendrons viter toute hsitation qui nous fait perdre un temps prcieux et qui risque de mettre tout le bloc en danger dtre encercl et immobilis par la police. Considrant la supriorit des forces de ltat en terme darmement, tre immobilis signifie tre vaincu. Cest ce qui est survenu le lundi lors de la manifestation du 16 avril (Washington, D.C.), lorsque la queue du bloc, alors plus ou moins dissoute dans une masse de manifestants qui ntaient pas du bloc, a t coupe du corps du bloc par la police et arrte.

    Quant la fonction relative au dploiement des troupes de rserve, elle peut faire la diffrence entre une victoire immdiate ou une dfaite. Il est donc important que cette fonction soit attribue au noyau lu de facilitation tactique pour se prmunir contre des agents provocateurs qui pourraient manipuler les forces de rserve, mais aussi pour viter de perdre du temps en dbats tactiques rendus inutiles par le choc dun conflit direct.

    Le modle dorganisation propos ici devrait permettre un black bloc relativement petit (sans rserve) denviron 200 participants dtre deux fois plus efficace quil ne le serait considrant nos capacits actuelles. De mme, un Bloc plus important denviron 700 participants, disposant dune force de rserve de 300 individus, verra sa capacit tactique accrue de faon importante.

  • !!

    39

    Entranement physique entre les actions

    Il est de la plus haute importance que nous augmentions nos capacits physiques entre les actions grce des entranements rguliers, des exercices de musculation et dautodfense. Pour linstant, le black bloc est particulirement faible ces diffrents niveaux. Cest problmatique au point o des individus muscls sont parfois souponns dtre des agents infiltrateurs de la police. En fait, puisque nous serons amens nous dfendre contre les forces de ltat, nous devrions prendre notre conditionnement physique tout le moins aussi au srieux que notre ennemi, et encore plus srieusement que lui si possible. Les forces ractionnaires de la police et de larme sont conscientes de limportance de la force physique pour leur propre efficacit. Nous devrions ltre tout autant.

    Actions prventives

    Les forces de ltat sont bien connues pour mener des actions prventives contre des manifestants avant leurs actions. Ils nous infiltrent rgulirement et procdent des arrestations avant mme que les manifestations et les actions de dsobissance civile ne dbutent9. Les jours de manifestation, leur mobilisation tactique commence bien avant le lever du soleil. De faon contrer cet avantage, des groupes restreints de participants aux actions du black bloc devraient lancer des actions autonomes, laction la plus efficace tant le sabotage dquipement de la police ou de larme si ncessaire. Si lun des principaux avantages des forces de ltat rside dans leur mobilit mcanise, nous

  • !!

    40

    devrions consquemment frapper leurs moyens de transport par des actions clandestines.

    De telles actions devraient tre coordonnes volontairement par des groupes daffinit spars. Ces groupes devraient tre en petit nombre par rapport lensemble du bloc, et ne devraient pas prendre part aux actions du bloc dans les vnements des jours suivants. De plus, lidentit et lobjectif de ces groupes devraient rester absolument secrets pour le bloc dans son ensemble. Il ne peut y avoir de chane de commandement entre ces groupes et le reste du bloc. Ils doivent agir totalement seuls, de faon volontaire, et selon des modles dorganisation quils choisiront pourvu quils respectent les principes anarchistes.

    Une telle action clandestine, effectue de faon efficace, a la possibilit de perturber considrablement les capacits de lennemi et peut donc donner un avantage apprciable au black bloc.

    Prparations en vue dune intensification de la rpression de ltat

    Plus notre mouvement sera fort, plus grands seront les risques que ltat criminalise lanarchisme en gnral et le black bloc en particulier. En ce moment mme, nous devons tenir pour acquis que le FBI a dj constitu des dossiers pour nombre dentre nous. Nous devons galement tenir pour acquis que plusieurs de nos organisations et collectifs anarchistes locaux sont dj sous surveillance et que des infiltrateurs travaillent prsentement

  • !!

    41

    simmiscer dans nos rangs. Dans certains cas, nous navons aucun doute quils y sont dj parvenus10.

    De plus, nous devons nous attendre une raction de plus en plus violente de ltat notre gard au fur et mesure que notre mouvement passera des tapes plus srieuses. Cest ce qui est arriv trs clairement vers la fin des annes 1960 et nous devons bien comprendre que cest ce qui arrivera nouveau. Cette tendance se manifeste dj clairement. Le tir sur trois manifestants Gteborg et le meurtre de Carlo Gnes en constituent des preuves irrfutables.

    En tant que rvolutionnaires dvous et dots dun sens pratique, nous devons nous prparer toutes ces ventualits. Ceci nest pas un jeu. Nous devons donc former des rseaux clandestins qui devraient nous permettre de continuer exister en tant que force de combat clandestine lorsque les circonstances lexigeront. Une telle force clandestine doit disposer, entre autres, didentits demprunt, de lieux de retraite de confiance, damis placs dans des positions stratgiques, daccs du matriel de premire ncessit (ex. nourriture, mdicaments, etc.). Enfin, cette force doit savoir comment continuer nos activits militantes de faon clandestine.

    La ralit est simple : nous devrons tre prts faire face au dfi de ltat par dautres moyens militants, concrets, mais cette fois clandestins lorsque les actions que nous menons au grand jour sattireront pour seule rponse les coups de fusil de la police, la dtention massive et long terme de nos militants, ou encore lorsque nos actions ne seront rien de plus quune comdie socialement acceptable intgre au spectacle universel.

  • !!

    42

    De plus, le temps manque pour organiser les ressources ncessaires lorsque surgissent des situations de crise extrme du type de celle qui nous forcerait passer dans la clandestinit. De mme, il sera impensable dorganiser une force de combat populaire denvergure lorsque surviendra le grand effondrement du systme dominant prsent. Nous devons donc nous prparer maintenant pour ce que nous reconnaissons comme une consquence inluctable de nos actions rvolutionnaires. Alors, nous devrons attaquer la tte du Leviathan et nous lattaquerons dans lombre, puis nouveau au grand jour et face face : la rvolution sociale est la seule consquence possible.

    Ici, nous aimerions vous rappeler que les armes feu sont encore lgales du selon la loi et quil est facile de sen procurer aux tats-Unis.

    Le dveloppement de notre comprhension sociale et politique

    Entre deux actions, nous devons pratiquer une autodiscipline en ce qui a trait nos tudes soutenues des ides sociales et politiques, tant dun point de vue pratique que thorique. Le mouvement anarchiste est pouss par linstinct de se rebeller , comme le disait Bakounine, mais galement par lmergence consciente dun peuple rvolutionnaire. Les individus qui forment le black bloc devraient tre des exemples non pas seulement du courage anarchiste dans la lutte, mais aussi de lveil de la conscience anarchiste. Nous devrions tudier lhistoire de la Commune de Paris, de lUkraine rvolutionnaire, de Cronstadt,

  • !!

    43

    de lEspagne ainsi que de la rvolte de mai 1968 Paris. De plus, nous devrions lire les crits de Bakounine, Kropotkine, Makhno, Emma Goldman, Meltzer, Guy Debord et Bookchin, pour nen nommer que quelques-uns.

    Bref, nous devons largir nos connaissances de faon transcender compltement lendoctrinement oppressif que ltat perptue notre endroit depuis le jour de notre naissance. Nous devons exercer notre capacit comprendre, de manire dvelopper notre conscience cratrice. Enfin, nous devons tendre dvelopper plus fond une thorie anarchiste qui soit directement utile pour analyser et ragir aux modalits du nocapitalisme contemporain, cest--dire la marchandisation radicale et le consumrisme.

    Conclusion

    En conclusion, ce communiqu est propos avec lintention dencourager le dveloppement constructif de nos capacits rvolutionnaires. Il nest pas pens comme une rgle suivre, mais bien comme une proposition qui devrait faciliter un dialogue positif lintrieur du mouvement. Ceci dit, nous esprons quau moins quelques suggestions prsentes seront srieusement discutes puis adoptes par nos camarades anarchistes du black bloc.

    Nous vous encourageons reproduire et distribuer ce communiqu, pourvu que vous ne le fassiez pas dans le but den tirer un profit capitaliste.

    En toute solidarit.

  • !!

    44

    NOTES DE FRANCIS DUPUIS-DRI

    1. David et X (du Green Mountain Anarchist Collective), The Black Blocs Papers, Baltimore, Black Clover Press, 2002. (Contact : [email protected]) Traduction de Francis Dupuis-Dri et Thomas Dri. Ce texte est libre de droits.

    2. La premire version date de dcembre 2000. Elle est signe par le Green Mountain Anarchiste Collective, David O. (O Van), X, J.M, Natasha quelque part dans les Green Mountains . Elle circulait sous forme de brochure, sans mention dditeur. On pouvait notamment lobtenir en septembre 2001 chez Bound Together BookstoreAn Anarchist Collective : 1369 Haight Street, San Francisco).

    3. ARA : Anti-Racist Action ; G-MAC : Green Mountains Anarchist Collective.

    4. Le texte a t crit en dcembre 2000.

    5. Le 16 avril 2000, manifestation Washington (D.C.) contre le FMI et la Banque mondiale.

    6. Manifestations de Gnes contre le G8 en juillet 2002.

    7. Manifestations Qubec contre le Sommet des Amriques en avril 2001.

    8. Abrviation dacute tactical facilitator.

    9. Dans le cas du Sommet de Qubec en avril 2001, le groupe Germinal avait t infiltr plusieurs mois lavance par deux agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Des membres du groupes en route pour Qubec en provenance de Montral ont t arrts au volant de leur voiture deux jour avant le dbut du Sommet. Les agents provocateurs avaient fournis aux militants du matriel de larme canadienne grenades assourdissantes et grenades fumignes que les policiers ont saisies dans la voiture apprhende.

    10. Au Canada, la GRC, le Service canadien de renseignement de scurit (SCRS) et lunit de surveillance de larme gardent lil les organisations associes de prs ou de loin au mouvement dopposition la mondialisation du libralisme. La GRC a ainsi mis sur pied en mai 2001 un Programme dordre public qui a pour fonction dchanger des renseignements avec dautres corps policiers (et de tester des armes non mortelles , tel le poivre de Cayenne, les gaz lacrymognes, les balles de plastique, etc.). Parmi les groupes sous observation, on retrouve : Amnistie internationale, Greenpeace, lglise

    !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

  • !!

    45

    !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!anglicane et les Raging Grannies, une chorale de vieilles dames qui se joignent aux manifestations pour scander des chansons dnonant les injustices sociales (Le Devoir, 20 et 21 aot 2001). On ne stonnera donc pas si dventuels participants aux black blocs sont sous surveillance... Dailleurs, lors du procs des membres du groupe Germinal pingls avant le Sommet de Qubec en avril 2001, le procureur de la Couronne a fait tmoigner deux agents de la GRC qui avaient infiltr le groupe. En Europe, au dbut de 2002, le groupe de travail terrorisme du Conseil de lUnion europenne a associ au terrorisme certains actes commis lors des manifestations dopposition la mondialisation du libralisme, sous prtexte quelles terrorisent la population (no. doc. 5712/1/02-Enfopol 18).

  • !!

    46

    APPEL POUR UN BLACK BLOC AU SOMMET DES AMRIQUES

    Lors dune runion du G20 Montral lautomne 2000, quelques centaines de citoyens se runissent dans le centre-ville pour dnoncer la mondialisation capitaliste. Un petit black bloc intervient alors de faon un peu malhabile : ses membres lancent en direction des policiers des projectiles dont certains tombent sur dautres manifestants... Le black bloc se dissout aussitt, laissant des manifestants seuls aux prises avec les policiers qui chargent alors cheval...

    Le black bloc avait auparavant distribu un appel former des black blocs lors du Sommet des Amriques, qui se tiendra Qubec en avril 2001, et o 34 chefs dtat des Amriques (le Cubain Fidel Castro tant le seul exclu) devaient discuter huis clos dune ventuelle zone de libre-change conomique. Cet appel, qui sera galement diffus sur internet, est rvlateur plus dun gard. Premirement, il montre bien quil ny a pas un black bloc, mais plusieurs black blocs qui se forment loccasion dvnements spcifiques et qui restent tous indpendants les uns des autres. Deuximement, ce texte au style brouillon met en relief le jugement que les membres de ce black bloc portent sur le monde conomique et politique qui les entoure. Le ton, trs critique, dpeint un monde o la lutte est la seule issue. Au Sommet de Qubec, il y aura

  • !!

    47

    effectivement des black blocs, mais aussi une grande diversit de groupes daffinit qui sen prendront au primtre de scurit, aux policiers et quelques succursales de banque.

    (FDD) !

  • !!

    48

    APPEL POUR UN BLACK BLOC POUR LE SOMMET DES AMRIQUES1

    Les grands de ce monde ont encore dcid de se partager les richesses, notre travail et dimposer des nouvelles conditions de vie, celles-ci encore plus minables quelles ne ltaient. Les coupures dans les programmes sociaux des dernires annes ntaient que la pointe de liceberg ; louverture des marchs sera la seconde phase de ce qui se nomme aujourdhui nolibralisme, de ce quon appelle quelques fois mondialisation.

    Lappel du black bloc est un appel la rsistance, la rvolte. Tenons-nous debout face la menace capitaliste. Agissons, rpliquons. Le temps o nous subissions sans pouvoir agir est rvolu. Le Sommet des Amriques voudra vendre au plus offrant la population entire dun continent, la solder rabais pour les capitalistes de ce monde. Nous serons l, dans la rue, nous battre pour ce que nous considrons comme nos droits. Nous sommes le black bloc, nous serons le black bloc Qubec.

    Contre le fonctionnement autoritaire et litiste des sommets bourgeois, nous sommes la base qui rsiste. Formons nos groupes daffinit, prparons-nous, il ny a pas une minute perdre. Rsister, cest exister de nouveau, ailleurs, dans une nouvelle vie,

  • !!

    49

    celle que nous avons choisi de crer, pas celle impose par dautres, par le haut, par les exploiteurs et les affameurs de ce monde.

    LAmrique est grande, diversifie, pleine de belles choses et de gens. Le capitalisme veut en faire un vulgaire terrain de chasse au profit, largent. Partout, au Nord comme au Sud, nous savons que mondialisation rime avec destruction. Quil sinstalle dans notre voisinage une nouvelle usine, et voil quapparat la pollution, que toute la rgion devient dpendante de cette grande entreprise, du capitalisme triomphant, dune seule personne : le patron. Il y a des milliers dexemples de destruction dune conomie locale, lorsque les grandes corporations viennent sy installer ; cest ce quon appelle le nolibralisme.

    Mais nous ne voulons pas revenir en arrire. Il est trop tard. La vieille conomie, locale et marchande, nest pas meilleure que la nouvelle conomie mondialise ; elle est simplement dune autre chelle. Ce qui diffre, cest que le capitalisme des annes 2000 nest plus rformable. Le retour ltat providence est impossible. Nous navons que deux choix : laccepter et se rsigner, ou le combattre, dune lutte acharne, mais qui ne pourra qutre victorieuse si seulement elle stend dans la population.

    Pour y arriver, nous jouons un rle important. En tant que black bloc, nous incarnons une prsence rvolutionnaire, nous prsentons une alternative pour lutter. Lexemple rpt de la rsistance et du combat ne peut tre que bnfique. Nous montrons ainsi quil nest pas impossible de vouloir autre chose

  • !!

    50

    et que le capitalisme nest pas ternel, pas plus que ltat ou le patriarcat, que nous combattons de toutes parts.

    Voil pourquoi nous nous organisons aujourdhui. Nous avons dcid dappeler la formation dun black bloc lors de la confrence qui signera2 les accords de la Zone de libre-change des Amriques (ZLA), accords que nous savons tre nfastes. La confrence des Amriques de Qubec 2001 sera notre prochain terrain de lutte. Nous nous plaons dans la mme perspective que certaines actions rcentes telles que Seattle, Washington, Prague pour nen nommer que quelques-unes. Nous ne nous considrons pas comme les dirigeants du mouvement, nous ne faisons que vous proposer de vous organiser aussi. Il ne tient qu chacun et chacune de nous de se regrouper de faon autonome, affinitaire, tout en restant unis sur le terrain. Cest lessence mme du black bloc.

    Formons nos groupes daffinit. Oui lorganisation autonome. Formons nos black blocs.

    NOTES DE FRANCIS DUPUIS-DRI

    1. Le black bloc, Appel pour un black bloc pour le Sommet des Amriques , A-Infos, 29 octobre 2000, www.ainfos.ca/00/oct/ainfos00408.html.

    2. Il sagissait plutt de ngociations en vue dune signature en 2005.

    !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

    www.ainfos.ca/00/oct/ainfos00408.html

  • !!

    51

    SACCAGER OU CONSTRUIRE UN MOUVEMENT Les black blocs et leurs allis se sont attir des attaques souvent virulentes de toutes les parties du spectre politique. Plusieurs condamnent les black blocs sans piti, jugeant leurs actions criminelles, amorales ou totalement inefficaces. Le texte repris ici, sign par Michael Albert, critique les black blocs de faon nuance. Il encourage les militants rflchir aux leons de lhistoire du mouvement de contestation de la fin des annes 1960. Michael Albert est lui-mme un militant influent de la gauche amricaine depuis les annes 1960, alors quil luttait contre la guerre du Vietnam. Il anime notamment limportant site internet Z Magazine (https://zcomm.org/zmag). Il a dvelopp une proposition dconomie dinspiration libertaire, connue sous le nom dconomie participative (copar)1.

    Albert considre les black blocs avec sympathie, mais il ne peut sempcher dtre critique de leurs actions. Son texte, crit aprs Seattle, reste encore aujourdhui lune des prises de position critique la plus srieuse lgard du black bloc. Sans nier que la violence des black blocs soit infiniment moins destructrice que celle du capitalisme, et sans nier quil puisse parfois tre ncessaire davoir recours la force pour contester lordre tabli, Albert nen critique pas moins les black blocs pour avoir manqu de jugement Seattle : leur saccage a sali limage du mouvement et en a dtourn certains

    https://zcomm.org/zmag/

  • !!

    52

    citoyens qui taient peut tre prts sy joindre. Comme Susan George dATTAC, Michael Albert reproche aussi aux black blocs dagir en marge du mouvement et de dtourner le message des manifestations par leurs actions violentes. Du coup, les black blocs seraient antidmocrates, car insensibles aux vux de la majorit des manifestants2.

    Ce texte qui doit tre lu en parallle au Communiqu du black bloc du 30 novembre du collectif ACME est emblmatique des critiques adresses du ct de la gauche modre aux radicaux des black blocs et permet de se faire une bonne ide des dbats entourant ce phnomne. Il est intressant de noter que certains reproches lancs par Albert, concernant, par exemple, le manque de solidarit des black blocs avec les autres manifestants, ne pourraient sappliquer aux manifestations de Washington (D.C.) ou de Qubec, l o prcisment les black blocs se sont ports la dfense des autres manifestants.

    (FDD) !

  • !!

    53

    SACCAGER OU CONSTRUIRE UN MOUVEMENT3 Voici une contribution au dbat post-Seattle qui laisse plusieurs personnes perplexes au sujet des tactiques dun mouvement social ou politique. En guise dentre en matire, il va de soi, je lespre, quen ce qui a trait la violence, tout le monde sentend pour dire que la faction violente Seattle tait compose dabord et avant tout par le prsident des tats-Unis, son entourage, les autres chefs dtat, les dirigeants de lOMC, etc. La violence dclenche par un trait de plume qui provoque la pauvret surpasse toujours largement celle de la brique lance dans une vitrine sans compter que la premire entrane et maintient linjustice alors que la seconde la combat. De fait, dans un vaste dbat public, en ce qui concerne la morale et les faits statistiques, il ressort de cela que la seule violence physique dans les rues de Seattle, mis part la couverture des mdias de masse, tait celle perptre par la police et la garde nationale et ordonne par ltat. Sur une chelle de mesure de la violence, le niveau de violence des saccages de vitrines sera toujours largement dpass par le niveau de violence du poivre de Cayenne, des balles de caoutchouc et des matraques ciblant les citoyens qui voulaient se dissocier des infmes ordres du jour conomiques. Mais lcart est beaucoup moins marqu sur une chelle de mesure des motivations. Le dbat public au sujet des tactiques du mouvement prendra une ampleur

  • !!

    54

    dmesure en raison de la dsinformation des mdias de masse manipulateurs. La question des tactiques adopter telle quelle se pose au sein des mouvements sociaux et politiques retient cependant lattention en raison de ses consquences ventuelles sur les attitudes des militants envers le vandalisme, lattaque contre la proprit, la dsobissance civile et dautres tactiques possibles lors de manifestations aussi bien que sur la participation mme des manifestations. Cela tant dit...

    Toute discussion valable au sujet des tactiques adopter par un mouvement doit porter sur leur efficacit en termes dlargissement du mouvement et sur leur capacit permettre de remporter des gains court terme tout en posant des jalons pour atteindre des objectifs plus long terme. valuer des tactiques consiste juger de leur capacit faire prendre de lampleur au mouvement ou le faire dcliner et augmenter ou diminuer la possibilit datteindre immdiatement certains buts.

    Jai dj particip des manifestations dans lesquelles le recours au vandalisme dcoulait naturellement de la logique et des buts de la manifestation elle-mme par exemple, les attaques prpares contre les bureaux de recrutement ou les btiments du ROTC4. Jai aussi particip des manifestations o le vandalisme tait contre-productif et irresponsable par exemple, parce quil mettait en danger des innocents et parce quil attnuait le message et lesprit de solidarit que voulait vhiculer la manifestation. Quen tait-il Seattle ?

    Seattle fut la scne dune trs grande manifestation et ceux qui avaient travaill sans relche lorganiser taient partisans de dfils et de rassemblements lgaux ainsi que dactes de

  • !!

    55

    dsobissance civile illgaux, mais non violents. Plus de 70 000 personnes prirent part cette manifestation. Le succs des premiers jours fut extraordinaire et des liens de respect mutuel se tissrent dans un ensemble de groupes gnralement fragments (les Tortues et les Teamsters, les Lesbian Avengers et les Travailleurs de lacier). Lide que la dsobissance civile irait en grandissant rjouissait les esprits et loptimisme tait contagieux. Il y avait de plus en plus de participants la manifestation et la surprise gnrale, la runion officielle de lOMC tait dj srieusement compromise. La police commena utiliser des gaz lacrymognes, des matraques et des balles de caoutchouc. Cest ce moment que les vandales trs bien organiss commencrent saccager des vitrines. Aprs coup, ils se vantrent quaucun dentre eux navait t arrt ou bless grce leur mobilit et leur organisation.

    Je ne me souviens que trop bien de certaines manifestations des annes 1960 au cours desquelles des dissidents surexcits injuraient et provoquaient la police puis sclipsaient, laissant les autres manifestants, souvent des familles nullement prpares, faire les frais de la rpression policire. Jai toujours t beaucoup plus impressionn par le courage de ceux qui pouvaient facilement prvoir ce qui allait se passer et qui, au lieu de se dfiler, utilisaient leurs talents pour protger les manifestants moins bien prpars, que par linstinct de prservation de ceux qui entranaient la rpression puis quittaient la scne. Au cours des annes 1960, cette dernire attitude de la part des vandales tait le rsultat dun ensemble dattentes et despoirs errons. Je suppose quil en est de mme aujourdhui.

  • !!

    56

    Imaginons qu Seattle, les diffrents groupes qui apportrent leur nergie, leurs chants, leur crativit et leur militantisme lors des rassemblements, tout spcialement en participant la dsobissance civile, ne saccagrent pas des vitrines pour couronner le tout, mais quils restrent avec les autres pour les protger, portant secours aux blesss et ceux qui souffraient des manations de gaz5. Ceci aurait couronn leur participation la manifestation, sinon plutt positive, par un comportement exemplaire en faveur de leurs camarades, au lieu de ces attaques de vitrines contre-productives. Lanarchisme associ cette action aurait alors voqu un militantisme cratif teint dhumanisme et de solidarit, au diapason avec lensemble de limplication anarchiste dans les manifestations de Seattle.

    Est-ce que ceci veut cependant dire quil ny a jamais de place pour la confrontation et la destruction de la proprit ? Bien sr que non, du moins pas de mon point de vue. Ce genre de comportement est appropri en temps et lieu, cest--dire quand il est approuv par la majorit et quil augmente la puissance de la protestation plutt que de servir de prtexte pour sen dsolidariser ou pour devenir hostile la manifestation. Jusquau moment o le vandalisme dbuta, les anarchistes Seattle apportrent de lnergie, de la crativit, de lart, de la musique et un militantisme souvent ncessaire, du courage et de la dtermination plusieurs lieux de rassemblement. Ils relevrent le moral des manifestants et jourent un rle trs positif en accord avec la ligne de conduite dfinie par les organisateurs de la manifestation. Le problme ne survint quau moment o quelques-uns dentre eux commencrent saccager des vitrines,

  • !!

    57

    transgressant ainsi les normes de la manifestation. Et il y a lieu de noter que ce nest pas seulement le vandalisme qui peut tre ou non justifi. Il en va de mme de la dsobissance civile, parfois tout aussi malvenue. Elle aussi peut ne pas respecter lesprit de ceux qui ont organis une manifestation, de telle sorte que sengager spontanment dans la dsobissance civile viole la logique de lvnement et contredit ce qui avait t annonc, ce qui a pour effet de miner la solidarit plutt que de lencourager et deffaroucher les gens qui dveloppaient une attitude de dissident. En dautres occasions, cependant, la dsobissance civile est ncessaire et elle est mme un gage de succs, comme Seattle, par exemple. De la mme faon, une simple marche de protestation peut parfois tre risque, alors quil sagit de la tactique idale adopter dans dautres cas.

    En dautres termes, cest rarement une question de principes stricts que de savoir quelles tactiques sont justifies ou non au cours dune manifestation et vont aider ou non un mouvement grandir et se renforcer plutt que de nuire au mouvement ainsi qu sa cause. Tout cela dpend presque toujours de la faon dont la manifestation en question a t organise et annonce, qui y participe, quels sont les espoirs et les craintes qui y sont associs, quelles sont les possibilits davoir une influence sur les changements sociaux et comment la manifestation et les tactiques employes peuvent tre perues et exercer un effet sur les citoyens qui ne sont pas impliqus. Malheureusement, partir du moment o des militants adoptent une attitude de vandales, ils ne tiennent pas compte de tous ces facteurs. Vandaliser est bien, pensent-ils

  • !!

    58

    tout leur exubrance, puisque les cibles sont aprs tout des corporations criminelles.

    Leur causer des dommages serait donc un pas vers leur dmystification et leur destruction. Nimporte qui sopposant de telles actions ne peut tre quun alli des corporations, clament-ils. Lesprit militant ne doit plus chercher dpartager la consquence de diverses tactiques, mais seulement identifier les cibles attaquer. Or lacm6 de la sagesse ne consiste pas dduire que McDonalds et Nike constituent de meilleures cibles que les passants ou une picerie familiale. En ce qui concerne Seattle, et en dpit dautres contributions infiniment valables la manifestation, le nombre relativement minuscule de participants qui sont parvenus imposer leurs tactiques une dmonstration de masse ont agi de faon antidmocratique. Cela ne devrait pas se reproduire.

    Avant mme que le saccage ne se produise, les actions de Seattle avaient dj compltement coup llan de lOMC. Elles avaient dj mis en vidence lesprit cratif des militants, leur sens de lorganisation et leur connaissance. Elles avaient dj permis de crer des liens et de nouvelles alliances entre diffrents groupes. Elles avaient dj russi combiner plusieurs types de tactiques cratrices et militantes en un mlange de support mutuel. Les discours aux rassemblements avaient dj, plusieurs reprises, dmontr les liens vidents entre lopposition au libre-change et lopposition aux libres marchs ainsi quentre lopposition au profit et lopposition au capitalisme en soi. La table tait mise pour que chacun se mette la tche que nous devons accomplir. Le vandalisme qui vint sajouter tout cela na

  • !!

    59

    eu aucun effet positif. Il na pas permis dobtenir plus de visibilit utile. Il na pas largi le nombre de personnes participant la manifestation ni des sympathisants sa cause. Il na pas permis de diffuser plus dinformation substantielle ni au centre ni gauche. Il na pas respect la vaste dmocratie. Ce quil a fait, par contre, cest de (a) dtourner lattention des problmes fondamentaux ; de (b) servir de prtexte la rpression qui autrement aurait t perue comme frappant une opposition lgitime ; et (c) peut-tre plus important encore, provoqu le sentiment que la dissidence nest pas constitue dacteurs se respectant mutuellement, mais plutt dacteurs ou tout le moins quelques-uns peu sympathiques et sarrogeant le droit de violer antidmocratiquement les intentions et les choix de la majorit.

    Comprenons-nous bien, au risque de nous rpter encore une fois : il ne sagit pas de dcider si le saccage en soi est bon ou mauvais. Supposons que les saccageurs, au lieu de briser des vitrines, aient provoqu un esprit de corps et protg des individus en aidant les manifestants victimes des assauts de la police. Supposons que des centaines et des milliers dtudiants et de travailleurs de plus aient rejoint les rangs de la dsobissance civile. Supposons que ltat ait utilis des gaz lacrymognes et des charges de policiers rptition pour annihiler ces efforts. Et supposons, dans ce contexte, quune bonne partie des habitants de Seattle et de l auditoire du pays se soient sentis solidaires des manifestants qui enfreignent la loi. Maintenant imaginons, toujours dans ce contexte, que la police charge et que les manifestants, au lieu de fuir, dcident de dfendre leurs positions.

  • !!

    60

    Encore mieux, supposons quils dcident quil est temps de repousser les policiers. Imaginons que cela ait entran des batailles, que des voitures soient renverses, que des barrires soient dresses, etc. Les dommages la proprit, dans ce genre de mles, dpasseraient largement ceux commis Seattle et les manifestants se seraient sans doute attaqus dautres cibles que les entreprises, causant mme des dommages la proprit dinnocents. On peut dire que tout cela napporterait rien de bon, mais je dirai que cela produirait une raction compltement diffrente et procderait dune autre logique que le saccage commis Seattle. Au lieu de le diminuer, cela augmenterait le nombre de mouvements et de groupes qui simpliqueraient dans la contestation. Par consquent, il y a un jugement de valeur faire lorsquon dcide dadopter une tactique en particulier.

    Une tactique est parfois sage, dautres fois la mme tactique est inapproprie. Ce qui est mauvais en ce qui concerne les militants qui ont eu dlibrment recours au vandalisme Seattle tait que (1) en dpit de leurs contributions valables et constructives la manifestation, leur recours au vandalisme constituait une grave erreur de jugement. De plus, (2) ils ont cru de faon gocentrique que leur seul jugement suffisait justifier leur transgression spectaculaire des normes acceptes par les dizaines de milliers dautres manifestants.

    Saccager des vitrines ne suffit pas pour changer la socit. Il sagit plutt de sengager dans un processus qui consiste veiller les consciences et former des mouvements pour ensuite obtenir, au profit des diffrents groupes, des gains qui permettront leur tour de crer des conditions favorables pour dautres victoires qui

  • !!

    61

    mneront des changements permanents des institutions en place. Cultiver la confiance et la solidarit dun mouvement densemble et pas uniquement dun petit groupe daffinit, mais bien dun vaste mouvement densemble est une partie importante de ce programme. La cohrence, la confiance et la solidarit ne sont pas renforces quand de petits groupes vont lencontre du programme dimmense manifestation de faon antidmocratique pour suivre leurs inclinaisons personnelles, mme quand ils invoquent des raisons qui semblent valables pour agir de la sorte, ce qui nest pas le cas en ce qui concerne Seattle.

    Le fait que les entreprises soient si mprisables que les attaquer soit justifi si cela a des effets positifs ne veut pas dire que les attaquer soit justifi si cela a des effets nfastes. Quand jtais tudiant au collge et que je militais contre la guerre du Vietnam, je prononais de longues confrences devant de vastes auditoires trs anims puis je rpondais aux questions. Ctait une poque agite et lon me demandait souvent, par exemple : Est-ce que vous brleriez la bibliothque de lcole si cela