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Compléments d’analyse : Théorie de la mesure et analyse spectrale Extrait d’un cours de M2 donné à l’automne 2014 à l’IMJ Paul Laurain 17 octobre 2014

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Compléments d’analyse : Théorie de la mesure

et analyse spectrale

Extrait d’un cours de M2 donné à l’automne 2014 à l’IMJ

Paul Laurain

17 octobre 2014

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Table des matières

1 Introduction 71.1 Théorie de la mesure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.2 Théorie spectrale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

2 Rappels de théorie de la mesure 112.1 Théorie élémentaire de l’intégrale de Lebesgue . . . . . . . . . 112.2 Prolongement et complétion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.3 Changement de variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 212.4 Intégration sur un espace produit . . . . . . . . . . . . . . . . 222.5 Mesure de Borel positive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

3 Mesure de Lebesgue 293.1 Construction de la mesure de Lebesgue . . . . . . . . . . . . . 293.2 Ensemble non-mesurable au sens de Lebesgue . . . . . . . . . 303.3 L’intégrale de Lebesgue généralise l’intégrale de Riemann . . . 31

4 Deux théorèmes fondamentaux 354.1 Théorème de Riesz . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4.1.1 Convergence et compacité faible des mesures de Radon 404.1.2 Mesure de Haar et analyse sur les groupes localement

compacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 434.1.3 Représentation des groupes localement compacts . . . . 48

4.2 Mesures complexes, théorème de Lebesgue-Radon-Nikodym etapplications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 494.2.1 Mesures complexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 494.2.2 Fonction maximale et points de Lebesgue . . . . . . . . 514.2.3 Théorème de Radon-Nikodym . . . . . . . . . . . . . . 554.2.4 Application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

3

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4 TABLE DES MATIÈRES

4.3 Théorème Fondamental de l’analyse . . . . . . . . . . . . . . . 604.4 Le théorème de Rademacher . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 644.5 Ensemble rectifiable et inégalité isopérimétrique . . . . . . . . 64

5 Intégration à valeurs vectorielles 655.1 Intégration dans un espace réflexif . . . . . . . . . . . . . . . . 655.2 Intégrale de Bochner . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 665.3 Formule de Cauchy généralisée . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

6 Généralités sur les algèbres de Banach 696.1 Rappel sur les espaces de Banach . . . . . . . . . . . . . . . . 696.2 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 706.3 Spectre d’un élément d’une algèbre de Banach . . . . . . . . . 726.4 Idéaux, caractères et transformé de Gelfand . . . . . . . . . . 756.5 Exemples d’applications de la théorie de Gelfand . . . . . . . . 786.6 Théorème de Levy-Wiener . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80

7 Opérateur sur un espace de Hilbert et Cú-algèbre 81

8 Théorèmes de Gelfand-Naimark 878.1 Théorème de Gelfand-Naimark(version commutative) . . . . . 878.2 Calcul fonctionnelle continue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 878.3 Etats, construction GNS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 898.4 Théorème de Gelfand-Naimark . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

9 Opérateurs bornés 979.1 Rappel sur les espaces de Hilbert complexes . . . . . . . . . . 999.2 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 999.3 Les opérateurs compacts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1029.4 Alternative de Fredholm et spectre d’un opérateur compact . 1039.5 Un exemple : le laplacien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

9.5.1 Harmoniques sphériques et représentation de SO(3) . . 1099.6 Operateur de Fredholm . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1129.7 Les opérateurs à trace, les opérateurs de Hilbert-Schmidt et

les opérateurs à noyau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1169.8 Théorème de décomposition spectrale . . . . . . . . . . . . . . 120

9.8.1 Mesures spectrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1209.8.2 Le théorème spectral . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121

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TABLE DES MATIÈRES 5

9.8.3 Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123

10 Opérateurs non-bornés 13310.1 Définitions et généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13310.2 Le calcul fonctionnel borélien . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13910.3 Théorème spectral . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

10.3.1 Première version . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14510.3.2 Deuxième version . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

10.4 Un exemple : l’équation de Schrödinger 1D . . . . . . . . . . 14910.4.1 L’opérateur ≠ d2

dx2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14910.4.2 L’opérateur ≠ d2

dx2 + q . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15010.5 Application au flot d’opérateur . . . . . . . . . . . . . . . . . 150

10.5.1 Equation de la chaleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15110.5.2 Equation de Schrödinger . . . . . . . . . . . . . . . . . 15410.5.3 L’equation des ondes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

10.6 Le laplacien suite et fin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15710.6.1 Deux exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15710.6.2 Fonction de Green et Noyau de la chaleur . . . . . . . 158

11 La physique quantique, une théorie d’opérateurs... 16111.1 Opérateurs position et moment . . . . . . . . . . . . . . . . . 16111.2 Les axiomes de base de la théorie quantique . . . . . . . . . . 16311.3 L’équation de Schrödinger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16511.4 L’interprétation d’Heisenberg . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16611.5 Solution de l’équation de Schrödinger libre sur IR . . . . . . . 16711.6 L’oscillateur harmonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16811.7 Le moment angulaire en mécanique quantique et la notion de

spin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17011.8 La Quantification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172

12 Problèmes 17312.1 Fonction maximale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17312.2 Principe du min-max . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17812.3 Peut-on entendre la forme un tambour ? . . . . . . . . . . . . 183

13 Solutions des exercices 185

Bibliographie 214

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6 TABLE DES MATIÈRES

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Chapitre 1

Introduction

1.1 Théorie de la mesureCe cours n’a en aucune manière la prétention d’être un cours complet

d’intégration. Il s’agit simplement de rappeler les bases de cette théorie eninsistant sur quelques points clefs afin de suivre sans di�culté la deuxièmepartie du cours consacrée à la théorie géométrique de la mesure. J’invitel’étudiant consciencieux à travailler ce document de base à l’aide des réfé-rences qui l’ont inspiré : [Vil10] et [Rud80]. Mais on pourra aussi consulter[Tao11b] qui a un point de vue di�érent mais peut-être plus intuitif. Enfindans l’optique du deuxième cours il peut être instructif de poursuitvre cetteintroduction à travers [EG92].

Une des applications que nous donnerons du théorème de Riesz est l’exis-tence de mesure de Haar sur un groupe localement compact. On définira alorsl’algèbre L1(G) et l’espace de Hilbert L2(G). Ces deux espaces nous permet-tront notamment de donner une courte introduction à l’analyse harmoniqueabstraite. Que ce soit à travers l’étude des caractères pour les groupes abé-liens ou celle des représentations pour les groupes compacts.

1.2 Théorie spectraleSoit E un espace hermitien et L : E æ E un opérateur hermitien, alors le

théorème spectral (classique) nous assure l’existence d’une base hermitienne(ei) de E et d’une suite de réels (⁄i) tels que

7

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8 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

L(ei) = ⁄iei.

Dés lors, pour toute fonction continue f : ‡(L) = {⁄1, . . . , ⁄n} æ C onpeut définir f(L) : E æ E comme suit

f(L)(ei) = f(⁄i)ei.

En particulier on peut définir e≠tL pour t > 0, eitL pour t œ IR, eitÔ

L pourt œ IR (si L est positif) et (L ≠ zId)≠1 pour z ”œ ‡(L) qui sont des solutionsdes équations di�érentielle ordinaires suivantes

ˆu

ˆt+ L(u) = 0 équation de la chaleur,

ˆu

ˆt+ +iL(u) = 0 équation de Schrödinger,

ˆ2u

ˆt2 + L(u) = 0 équation des ondes,

(L ≠ zId)(u) = f équation de Helmholtz.

Si on l’on souhaite passer des équations di�érentielles ordinaires aux équa-tions aux dérivées partielles, alors l’opérateurs L va devenir un opérateurdi�érentiel, par exemple ˆ

ˆx , et va donc agir sur un espace de fonctions quisera de dimension infinie. L’un des objectif de ce cours est de donner uneversion du théorème spectral pour des espaces de dimension infinie. Ce quinous permettra de résoudre les équations précédentes en toute généralité.Mais comme nous le verrons les applications de la théorie spectrale sont trèslarges, en particulier nous donnerons une preuve du théorème de Peter-Weylsur la représentation des groupes compacts.

Dans un premier temps, nous étudierons l’algèbre des opérateurs sur unespace de Hilbert et plus généralement le concept de Cú-algèbre. Nous enprofiterons pour donner une courte introduction à la théorie de Gelfand endémontrant notamment la version commutative du théorème de Gelfand-Naimark.Puis nous reviendrons aux opérateurs continus auto-adjoint d’un espace deHilbert et nous donnerons plusieurs versions du théorème spectral ainsi qu’unecourte introduction à la théorie de Fredholm.Cependant, les opérateurs di�érentiels auxquels on s’intéresse le plus souvent

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1.2. THÉORIE SPECTRALE 9

sont non-bornés et définis seulement sur un sous espace dense de l’espace deHilbert ambiant : typiquement le laplacien � défini sur CŒ

c (�) µ L2(�). Lebut de l’avant dernier chapitre sera donc de généraliser ce qu’on aura vu pourles opérateurs bornés à des opérateurs non-bornés.Enfin, nous donnons une très brève introduction à la mécanique quantiqued’un point vue mathématique et plus précisément du point vu de la théoriedes opérateurs.

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10 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

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Chapitre 2

Rappels de théorie de la mesure

2.1 Théorie élémentaire de l’intégrale de Le-besgue

Définition 2.1.1 Une famille M de sous-ensembles d’un ensemble X consti-tue une ‡-algèbre sur X si

i) X œ M,ii) M est stable par passage au complémentaire,

iii) M est stable par union dénombrable.

Un ensemble X muni d’une ‡-algèbre M est appelé un espace mesurable, onle note alors (X, M).

Exercise 2.1.1 Montrer que toute partie F µ P(X) admet une plus petite‡-algèbre qui la contient. On la notera ‡(F), c’est la ‡-algèbre engendrée parF .

Définition 2.1.2 Une fonction f : (X, M) æ (Y, N ) entre deux espacesmesurables est dite mesurable si l’image réciproque de tout ensemble mesu-rable est mesurable.

Cette définition n’est pas sans rappeler celle des fonctions continues. Oril semble nécessaire qu’une théorie de l’intégration contienne au moins lesfonctions continues. Nous allons donc introduire la ‡-algèbre engendrée par

11

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12 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

les ensembles ouvert d’un espace topologique.

Soit (X, ·) un espace topologique, alors il existe une plus petite ‡-algèbresur X qui contient les ouverts de X, c’est ‡(·), mais on préféra la noterB(X) lorsqu’il n’y a pas de confusion possible sur la topologie de X. Leséléments de B(X) sont appelés les boréliens de X. Dans la suite, on va toutparticulièrement s’intéresser à des fonctions à valeurs dans IR, [≠Œ, +Œ] etC. Dans ce cas on supposera ces espaces munis de leur topologie usuelle eton pourra parler sans ambiguité de fonctions mesurables à valeurs dans l’unde ces espaces .

Exercise 2.1.2 Montrer que les boréliens de IRk sont engendrés par les pavésouverts bornés. Plus précisément, montrer que tout ouvert s’écrit comme uneréunion dénombrable disjointe de pavés semi-ouverts.

Exercise 2.1.3 Montrer que [0, 1) n’est pas union d’intervalles fermés dis-joints.

Définition 2.1.3 Une mesure positive (resp. complexe) est une fonction µdéfinie sur une ‡-algèbre M, à valeur dans [0, Œ] (resp. C) telle que pourtoute famille (Ak) dénombrable d’éléments disjoints de M on ait :

µ

A Œ€

k=1Ak

B

=Œÿ

k=1µ (Ak) .

Un espace mesurable (X, M) muni d’une mesure positive (reps. complexe)est appelé un espace mesuré (resp. espace mesuré complexe), on le (X, M, µ)ou (X, µ) lorsqu’il n’y a pas d’ambiguité sur la ‡-algèbre considérée. Laconstruction d’une mesure intéressante, même sur IR n’est pas une trivia-lité, ça sera l’objet de la section 3. Toutefois on peut se donner un premierexemple simple, en considérant N, muni de la ‡-algèbre P(N) et de la mesurede comptage ”.

Exercise 2.1.4 Soit (X, M, µ) un espace mesuré. Montrer que si A et Bsont mesurables, on a

si A µ B alors µ(A) Æ µ(B),et

si µ(A fl B) < +Œ alors µ(A fi B) = µ(A) + µ(B) ≠ µ(A fl B).

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2.1. THÉORIE ÉLÉMENTAIRE DE L’INTÉGRALE DE LEBESGUE 13

Exercise 2.1.5 Soit (Ak) une famille croissante de parties mesurables d’unespace mesuré (X, M, µ), montrer que

µ

A€

k

Ak

B

= limkæŒ

µ(Ak).

Montrer que si on ne suppose pas que la famille est croissante on a tout demême

µ

A€

k

Ak

B

Æ ÿ

k

µ(Ak).

Dans la suite on fixe un espace mesuré (X, M, µ).

Définition 2.1.4 Soit s : X æ [0, Œ[ une fonction mesurable étagée, c’està dire

s =nÿ

i=1ai1Ai

,

où ai œ [0, Œ[ et 1Aiest la fonction indicatrice d’un ensemble mesurable Ai.

Nous définissons 1 pour tout élément E œ M⁄

Es dµ =

nÿ

i=1ai µ(E fl Ai).

Lorsque f : X æ [0, Œ] est une fonction mesurable et que E œ M, on définitson intégrale comme suit

Ef dµ = sup

Es dµ,

où le supremum est pris sur l’ensemble des fonctions mesurables étagées svérifiant 0 Æ s Æ f .

Exercise 2.1.6 Montrer que si f : IR æ C est intégrable par rapport à lamesure de comptage, alors {x | f(x) > 0} est dénombrable.

Même si la définition de l’intégrale est indépendante de l’existence d’unesuite de fonctions simples qui approche la fonction à intégrer. Ce fait estcrucial pour démontrer les propriétés de bases comme la linéarité.

1. Ici on utilise la convention 0 ◊ Œ = 0.

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14 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

Théorème 2.1.1 Soit (X, M) un espace mesurable et f : X æ [0, +Œ] unefonction mesurable. Alors il existe une suite croissante de fonctions simples(Ïn) qui converge simplement vers f .

L’intégrale ainsi définie vérifie les propriétés classiques d’additivité et po-sitivité 2, mais le grand intérêt de l’intégrale de Lebesgue est la facilité aveclaquelle on peut passer à la limite, notamment grâce au théorème suivant.Théorème 2.1.2 (théorème de convergence monotone) Soit (fn) unesuite de fonctions positives mesurables sur X telle que

i) 0 Æ f1 Æ · · · Æ fn Æ . . . ,ii) fn(x) æ f(x) pour tout x œ X,

alors la fonction f est mesurable et

limnæ+Œ

Xfn dµ =

Xf dµ.

Définition 2.1.5 Soit f : X æ C mesurable, on dit que f est intégrable si⁄

X|f | dµ < Œ.

On note alors L1(µ) l’ensemble des fonctions intégrables et on définit alorsson intégrale comme suit, si f = u + iv, on pose

Xf dµ =

⁄u+ dµ ≠

⁄u≠ dµ + i

⁄v+ dµ ≠ i

⁄v≠ dµ.

L’intégrale ainsi définie vérifie les propriétés classiques de linéarité et l’in-égalité triangulaire 3, mais conserve aussi un bon comportement vis à vis dupassage à la limite, notamment grâce au théorème suivant.Théorème 2.1.3 (théorème de convergence dominé) Soit (fn) une suitede fonctions complexes mesurables sur X telle que

fn(x) æ f(x) pour presque 4tout x œ X,

et telle qu’il existe g : X æ [0, Œ] intégrable telle que|fn(x)| Æ g(x),

alors la fonction f est intégrable et

limnæŒ

X|fn ≠ f | dµ = 0.

2. voir [Vil10] II-43 pour les détails.3. voir [Vil10] II-43 et II-47 pour les détails.4. c’est à dire sur un ensemble Y telle que µ(X \ Y ) = 0.

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2.2. PROLONGEMENT ET COMPLÉTION 15

2.2 Prolongement et complétionAfin de construire une mesure, nous aimerions définir sa valeur sur des

objets élémentaire comme les boules d’un espace métrique, mais rien ne nousgarantie que cela va bien définir une mesure sur la tribu borélienne. Pour celaon a besoin d’un théorème qui assure que le prolongement est possible, c’estl’objectif du théorème de Carathéodory. Mais avant on introduit le conceptde mesure extérieur qui prolonge le concept de mesure à P(X) quitte à perdrela ‡-additivité.

Définition 2.2.1 On appelle mesure extérieur sur X tout application µú :P(X) æ [0, Œ] telle que

i) µú(ÿ) = 0,ii) si A µ B alors µú(A) Æ µú(B),

iii) µú (fiŒk=1Ak) Æ qŒ

k=1 µú(Ak), ‡-sous-additivité.

Exercise 2.2.1 Soit (X, M, µ) un espace mesuré, on définit

µú(E) = infI Œÿ

k=1µ(Ak) | Ak œ M et E µ

Œ€

k=1Ak

J

,

montrer µú est une mesure extérieur. Plus généralement si F µ X et µ :F æ [0, +Œ] alors cela définit une mesure extérieur, on parlera de mesureextérieur associé à µ, mais attention µú ne prolonge pas nécessairement µ.

Il nous faut également introduire le concept de classe monotone, essentieldans la preuve dut théorème de Carathéodory.

Définition 2.2.2 On appelle classe monotone une famille C de parties d’unensemble X, telle que

i) si A, B œ C et A µ B alors B \A œ C, stabilité par di�érence croissante,ii) si Ak œ C et Ak µ Ak+1 alors fikAk œ C, stabilité par union croissante.

Exercice 2.2.1 (lemme des classes monotones) Soit F une famille departies d’un ensemble X, stable par intersection finie. Soit C la plus petiteclasse monotone contenant F ; on suppose que X œ C. Alors C coïncide avec‡(F).Indication : Montrer qu’il su�t d’avoir la stabilité par intersection. Puis soit

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16 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

A œ F , montrer que {B œ C | A fl B œ C} = C, puis de même avec A œ C, etconclure 5.

Enfin, avant d’énoncer le théorème, on définit la notion de complétionpour une mesure. E�et il peut être utile 6 de compléter une mesure en ajou-tant tous les ensembles qui sont contenus dans un ensemble négligeable.

Exercise 2.2.2 Soit (X, M, µ) un espace mesuré, et soit

M = {A fi B |A œ M et B µ N tel que µ(N) = 0} .

Montrer que M est une ‡-algèbre, et que µ admet un prolongement uniqueµ à M, de sorte que (X, M, µ) est un espace mesuré complet, c’est-à-dire telque tout sous-ensemble d’une partie négligeable est mesurable.

Théorème 2.2.1 (théorème de prolongement de Carathéodory) SoientX un ensemble et F une famille de parties de X stable par intersection finieet qui contient l’ensemble vide et X. Soit µ : F æ [0, +Œ] tel que µ(ÿ) = 0,on a

i) Si X est union dénombrable d’une famille croissante d’éléments Xk deF tels que µ(Xk) < +Œ, alors il existe au plus un prolongement de µen une mesure sur ‡(F) ;

ii) Soit µú la mesure extérieur associée à µ. On suppose que

’A, B œ F , µ(A fl B) + µú(A \ B) = µ(A). (2.1)

Alors µú définit sur ‡(F) une mesure qui prolonge µ. En outre, cettemesure est ‡-additive sur la ‡-algèbre M, contenant ‡(F), définie par

M = {A µ X | ’B µ X, µú(B fl A) + µú(B \ A) = µú(B)} .

Les éléments de M sont dits µ-mesurables ; la ‡-algèbre M, munie deµú, est automatiquement complète.

iii) Si on suppose de plus que la di�érence de deux éléments de F peuts’écrire comme une union finie disjointe d’éléments de F . Alors la condi-tion (2.1) est équivalente à la ‡-additivité 7 de µ sur F .En particulier il su�t que µ soit ‡-additive pour se prolonger en unemesure.

5. ce raisonnement classique sera d’une grande utilité pour la preuve du théorème deCarathéodory.

6. mais aussi dangereux, voir section 3.7. il est pas nécessaire de supposer que F est stable par union dénombrable.

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2.2. PROLONGEMENT ET COMPLÉTION 17

Preuve du théorème 2.2.1 :

Preuve de (i) :

Tout d’abord supposons que (i) soit vérifié lorsque µ(X) < Œ, alors sion avait deux prolongements possibles µ1 et µ2, on aurait µ1(Xk fl A) =µ2(Xk fl A) pour tout k et A œ ‡(F). Puis utilisant le fait que les µi sont ‡-additives et que la suite Xk est croissante, d’après l’exercice 2.1.5, on obtientque µ(A) = µ(A) pour tout A œ ‡(F), ce qui prouve l’unicité.

Reste à prouver (i) lorsque µ(X) < Œ. Tout d’abord on remarque que lelemme des classes monotones s’applique et que ‡(F) est simplement la pluspetite classe monotone contentant F . Soient deux prolongements possiblesµ1 et µ2, on pose

G = {A œ ‡(F) | µ1(A) = µ2(A)}.

On remarque que G est une classe monotone 8 contentant F et donc G =‡(F), ce qui achève la preuve. ⇤

Preuve de (ii) :

Etape 1 : M est une algèbre.Il est clair que ÿ œ M et que M est stable par passage au complémentaire. Ilreste à démontrer que M est stable par intersection. Pour cela on va procéderpar double inégalité. Soit A1, A2 œ M, on a, par sous-additivité de µú, que

µú(B) Æ µú(B fl (A1 fl A2)) + µú(B \ (A1 fl A2)) pour tout B µ X.

D’autre part, en remarquant que B \ (A1 fl A2) = ((B fl A1) \ A2) fi (B \ A1),on a donc pour sous-additivité

µú(B \ (A1 fl A2)) Æ µú(((B fl A1) \ A2)) + µú(B \ A1),

d’où

µú(B fl (A1 fl A2)) + µú(B \ (A1 fl A2)) Æ µú((B fl A1) fl A2) + µú(((B fl A1) \ A2)) + µú(B \ A1)= µú(B fl A1) + µú(B \ A1) = µú(B),

8. c’est ici qu’on utilise la finitude, pour donner du sens à µ(B \ A) = µ(B) ≠ µ(A).

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18 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

ce qui prouve que A1 fl A2 œ M.

Etape 2 : µú est additive sur MEn e�et soit A, B œ M deux éléments disjoints alors

µú(A fi B) = µú((A fi B) fl A) + µú((A fi B) \ A) = µú(A) + µú(B).

De plus si B µ X et A1, A2 œ M disjoints, on a

µú(Bfl(A1fiA2)) = µú((Bfl(A1fiA2))flA1)+µú((Bfl(A1fiA2))\A1) = µú(BflA1)+µú(BflA2),

ce qu’on généralise par récurrence à une union finie d’élément disjoints.

Etape 3 : M est une ‡-algèbre et µú est ‡-additive sur M .Pour montrer cela on va procéder comme précédemment par double inégalité,en fait il su�t de montrer que pour toute famille Ak d’éléments disjoints deM et toute partie B de X, on a

µú(B fl (fiAk)) + µú(B \ (fiAk)) Æ µú(B),

Etant donné que l’autre inégalité est une conséquence de la sous-additivité.Notons An = fin

k=1Ak, alors par additivité et croissance, grâce à l’étapeprécédente, on a

µú(B) = µú(B fl An) + µú(B \ An) Ønÿ

k=1µú(B fl Ak) + µú(B \ AŒ).

En passant à la limite et en utilisant la sous-additivité, on obtient le résultatsouhaité, plus précisément

µú(B) ØŒÿ

k=1µú(B fl Ak) + µú(B \ AŒ) Ø µú(B fl AŒ) + µú(B \ AŒ) Ø µú(B).

De plus en posant B = X, dans l’inégalité précédente, on obtient directementla ‡-additivité de µú sur M.

Etape 4 : µú est complète sur M.Soit A œ M telle que µú(A) = 0, AÕ µ A et B µ X alors µú(B fl AÕ) Ƶú(A) = 0 et µú(B) Ø µú(B \ AÕ) Ø µú(B \ A) = µú(B) d’ou µú(B \ AÕ) +µú(AÕ fl B) = µú(B), ce qui prouve bien que AÕ est mesurable.

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2.2. PROLONGEMENT ET COMPLÉTION 19

Il est a noter que jusqu’ici nous n’avons pas utilisé (2.1).

Enfin pour achever la preuve de (ii), il su�t de montrer que ‡(F) µ M,c’est à dire que F µ M, car en appliquant (2.1) avec B = ÿ, on auraµ(A) = µú(A) pour tout A œ F et donc µú prolongera bien µ. Soit A œ Fet B µ X. On choisit (Bk) une famille d’éléments de F recouvrant B. Onapplique alors la sous-additivité et (2.1), ce qui donne

µú(B fl A) + µú(B \ A) Æ ÿ

k

µ(Bk fl A) + µú(B \ A)

Æ ÿ

k

(µ(Bk fl A) + µú(Bk \ A)) =ÿ

k

µ(Bk),

en passant à la borne inférieur on obtient

µú(B fl A) + µú(B \ A) Æ µú(B)

l’autre inégalité étant toujours satisfaite, cela prouve bien que A œ M. ⇤

Preuve de (iii) : Dans le cas où (2.1) est satisfaite, d’après (ii), µú estbien un prolongement de µ et donc µ est ‡-additive sur F .

Supposons maintenant que µ est ‡-additive sur F et prouvons (2.1). Pourcela, il su�t de montrer que µ et µú coïncide sur F . En e�et, comme on l’avu au ii), µú est bien défini sans l’hypothèse (2.1) et dans ce cas elle estsous-additive. Donc si µ et µú coïncident, on a l’inégalité suivante

µ(A) Æ µ(A fl B) + µú(A \ B) pour tout A, B œ F .

Pour établir l’égalité inverse on remarque que par hypothèse A \ B estune union finie disjointe d’éléments de F , c’est-à-dire

A \ B =l€

i=1Ci avec Ci œ F

d’ou

µ(A fl B) + µú(A \ B) Æ µ(A fl B) +lÿ

i=1µú(Ci) = µ(A fl B) +

lÿ

i=1µ(Ci).

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20 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

Or A fl B et (Ck) forment une partition de A donc, µ étant additive , ona bien

µ(A fl B) + µú(A \ B) Æ µ(A fl B) +lÿ

i=1µ(Ci) = µ(A).

Reste à prouver que µ et µú coïncident sur F . On sait que par définitionon a µú(A) Æ µ(A) pour tout A œ F . D’autre part soit (Ak) un recouvrementde A œ F par des éléments de F , on pose AÕ

k = Ak \ (fii<kAi) qui forme unepartition du recouvrement.

On vérifie que chaque AÕk peut s’écrire comme union finie d’éléments dis-

joints de F .

En e�et chaque di�érence Ak \ Al est égale à fi1ÆiÆNlFi,l, où les Fi,l sont

des éléments disjoints de F . On a donc

AÕk = (Ak \ A1) fl · · · fl (Ak \ Ak≠1)

=Q

a€

1ÆiÆN1

Fi,1

R

b fl · · · flQ

a€

1ÆiÆNk≠1

Fi,k≠1

R

b

i1,...,ik≠1

Fi1,1 fl · · · fl Fik≠1,k≠1.

On vérifie que cela conduit à une partition des AÕk en éléments disjoints

de F , que l’on réécrit AÕk = fi1ÆiÆMk

Ck,i. En outre on a

Ak =€

1ÆlÆk,1ÆiÆMl

Cl,i,

d’ou par ‡-additivité de µ,

µ(Ak) =ÿ

1ÆlÆk,1ÆiÆMl

µ(Cl,i),

ce qui donne en conservant uniquement les termes tels que l = k,ÿ

1ÆiÆMk

µ(Ck,i) Æ µ(Ak),

d’ou ÿ

k,i

µ(Ck,i) Æ ÿ

k

µ(Ak),

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2.3. CHANGEMENT DE VARIABLES 21

puis par croissance 9 de µ, on aÿ

k,i

µ(Ck,i fl A) Æ ÿ

k

µ(Ak).

Or les (Ci,k fl A) forment une partitions de A, donc par ‡-additivité,µ(A) Æ ÿ

k

µ(Ak),

et ceci pour tout recouvrement, on a donc µ(A) Æ µú(A), ce qui achève lapreuve. ⌅

2.3 Changement de variablesExercise 2.3.1 Soit (X, M) un espace mesurable, Y un ensemble quel-conque, et f : X æ Y . Montrer que

f#M = {B µ Y | f≠1(B) œ M}est la plus grande ‡-algèbre qui rende f mesurable, elle est appelée ‡-algèbreimage de M par f .Définition 2.3.1 (Mesure image) Soit (X, M, µ) un espace mesuré, etf : X æ Y . Alors la formule

‹(B) := µ(f≠1(B))définit une mesure sur la ‡-algèbre image f#A, appelée mesure image de µpar f et notée f#µ.Si Y est déjà mesurable par B et f mesurable, alors f#µ est définie parrestriction sur B.Théorème 2.3.1 Soient (X, M, µ) un espace mesurable et (Y, N ) un espacemesurable, et „ : X æ Y une application mesurable. Alors,

i) Pour toute fonction f mesurable sur Y , à valeurs dans [0, +Œ], on a⁄

fd(„#µ) =⁄

(f ¶ „)dµ.

ii) Pour toute fonction f mesurable sur Y , à valeurs dans C, la fonctionf¶„ est µ-intégrable si et seulement si la fonction f est („#µ)-intégrable,et l’égalité ci-dessus est alors vérifiée.

9. C’est une conséquence

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22 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

2.4 Intégration sur un espace produitSi l’on veut définir une mesure sur IRk, il semble naturel de s’appuyer sur

la structure produit pour étendre les objets définis sur IR.

Définition 2.4.1 Soient (X, M) et (Y, N ) deux espaces mesurables, on ap-pelle ‡-algèbre produit sur X◊Y , et on la note M¢N , la ‡-algèbre engendréepar les pavés A ◊ B, où A œ M et B œ N .

Exercise 2.4.1 Montrer que B(IRn) ¢ B(IRm) = B(IRn+m).

Exercise 2.4.2 Soient F µ P(X) et G µ P(Y ), on suppose de plus queX(resp. Y ) est union dénombrable d’éléments de F(resp. G). Montrer que,‡(F) ¢ ‡(G) = ‡(F ¢ G).Indication : On remarquera que si A œ F et B œ G alors A ◊ Y et X ◊ Bsont dans ‡(F ¢ G), à partir de la on suivra l’idée de la démonstration dulemme des classes monotones.

Exercise 2.4.3 Montrer que M ¢ N est la plus petite classe monotonecontenant les pavés.

Définition 2.4.2 Soient (X, M) et (Y, N ) deux espaces mesurables. Si Q œM ¢ N et (x, y) œ X ◊ Y , on définit

Qx = {y œ Y | (x, y) œ Q} et Qy = {x œ X | (x, y) œ Q}.

On appelle Qx et Qy respectivement tranche selon x et tranche selon y.

Proposition 2.4.1 Soient (X, M) et (Y, N ) deux espaces mesurables. SoitQ œ M ¢ N , alors Qx et Qy sont mesurables.

Preuve :On pose

C = {Q µ X ◊ Y | Qx œ N }.

En fait C est la ‡-algèbre image de la projection y ‘æ (x, y), et clairement Ccontient tous les pavés P = A ◊ B, car Px est soit vide soit égale à B. DoncC contient la ‡-algèbre produit. On procède de même pour Qy. ⇤

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2.4. INTÉGRATION SUR UN ESPACE PRODUIT 23

Exercise 2.4.4 Soient (X, M) et (Y, N ) deux espaces mesurables. Soit f :X ◊ Y æ [≠Œ, Œ] une fonction mesurable pour la ‡-algèbre produit, alorsy ‘æ f(x, y) (resp. x ‘æ f(x, y) ) est mesurable pour tout x œ X (resp. pourtout y œ X).Indication : Utiliser la proposition précédente et l’approximation par des fonc-tions mesurables étagées.

Théorème 2.4.1 Soient (X, M, µ) et (Y, N , ‹) deux espaces mesurés ‡-finis, alors il existe une unique mesure, notée µ ¢ ‹, sur X ◊ Y telle que

’(A, B) œ M ◊ N µ ¢ ‹(A ◊ B) = µ(A) ◊ ‹(B),

c’est la mesure produit 10.

Preuve :

Il s’agit d’une application du théorème de Carathéodory. On prend Fl’ensemble de tous les pavés A ◊ B et on pose µ ¢ ‹(A ◊ B) = µ(A) ◊ ‹(B).Clairement F est stable par intersection. Par ‡-finitude, on a la conclusioni) du théorème de 2.2.1.De plus la di�érence de deux pavés est union finie de pavés, donc il restesimplement à vérifier la ‡-additivité pour avoir la conclusion ii) du théorèmede 2.2.1, ce qui achèvera la preuve.

Soit Pk = Ak ◊ Bk un ensemble de pavés disjoints dont l’union est encoreun pavé que l’on note P = A ◊ B. On démontre sans peine que, grâce à la‡-finitude, on peut supposer que µ(A) < +Œ et ‹(B) < +Œ. On pose alors

fk = ‹(Bk)1Ak,

qui est mesurable et dont l’intégrale vaut µ ¢ ‹(Ak ◊ Bk) = µ(Ak) ◊ ‹(Bk).On a alors, d’après le théorème de convergence monotone,

ÿ

k

fk(x) =ÿ

k

B1Bk

(y)1Ak(x) d‹(y)

=ÿ

k

B1(x,y)œPk

d‹(y) =⁄

B

ÿ

k

1(x,y)œPkd‹(y),

10. Comme pour l’intégrale on utilise la convention 0 ◊ +Œ = 0.

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24 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

la fonction 1(x,y)œPkest bien mesurable grâce à l’exercice ci-dessus. On re-

marque que la dernière somme n’est rien d’autre que la fonction indicatricede P par hypothèse. Ce qui donne

ÿ

k

fk(x) = ‹(B)1A.

On appliquant encore une fois le théorème de convergence monotone, on a

ÿ

k

µ ¢ ‹(Ak ◊ Bk) =ÿ

k

Xfk dµ(x) =

X

ÿ

k

fk dµ(x)

=⁄

X‹(B)1A dµ(x) = µ ¢ ‹(A ◊ B),

ce qui achève la preuve. ⌅

Théorème 2.4.2 (Fubini) Soient (X, M, µ) et (Y, N , ‹) deux espaces me-surés ‡-finis.

i) Soit f : X ◊ Y æ [0, +Œ] mesurable, on pose

„(x) =⁄

Yf(x, . ) d‹ et Â(y) =

Xf( . , y)dµ

alors „ et  sont mesurables et de plus⁄

X„ dµ =

X◊Yfd(µ ¢ ‹) =

YÂ d‹. (2.2)

ii) Soit f : X ◊ Y æ C mesurable, on pose

�(x) =⁄

Y|f(x, . )| d‹

et on suppose que ⁄

X� dµ < Œ,

alors f est intégrable.iii) Si f est intégrable alors, f(x, . ) et f( . , y) le sont presque partout et

(2.2) est satisfaite.

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2.4. INTÉGRATION SUR UN ESPACE PRODUIT 25

Le théorème de Fubini nous assure que si f est intégrable, on peut inté-grer par tranche dans un sens ou dans l’autre. Parfois on aimerait avoir destranches curvilignes, c’est possible grâce à la formule la co-aire, voir le coursde Thierry de Pauw.

Preuve :

Preuve de i) :

Grâce au théorème de convergence monotone et l’hypothèse de ‡-finitudeon peut supposer que µ et ‹ sont finies.

On va d’abord démontrer i) pour f = 1Q où Q œ M ¢ N . Soit

C = {Q œ M ¢ N | i) est vraie pour 1Q}alors, par constructions de la mesure produit, C contient tous les pavés. Grâceau théorème de convergence monotone, on montre que C est stable par unioncroissante. Enfin en écrivant la fonction caractéristique d’une di�érence crois-sante comme une di�érence de deux fonctions caractéristiques, on prouve queC est une classe monotone. Le lemme des classes monotones nous assure queC contient bien la ‡-algèbre produit.Enfin on établit i) en approchant une fonction mesurable par une suite defonction simple croissante et en appliquant le théorème de convergence mo-notone.

Preuve de ii)On applique i) à |f |.

Preuve de iii)On suppose f réel pour simplifier, le cas complexe se déroule exactement dela même manière. Soit „+ et „≠ les fonction associé à f+ et f≠ par le i).Alors „+ et „≠ sont intégrables et de plus on a

X„+ dµ =

X◊Yf+d(µ ¢ ‹)

et ⁄

X„≠ dµ =

X◊Yf≠d(µ ¢ ‹).

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26 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

En remarquant que

f(x, . ) = f+(x, . ) ≠ f≠(x, . ),

alors f(x, . ) est intégrable dés que „+(x) < Œ et „≠(x) < Œ. Or cettecondition est vraie presque partout, et dans ce cas on peut définir „(x) =„+(x) ≠ „≠(x) presque partout. En soustrayant les équations (2.2) vérifiéespar f+, „+ et f≠, „≠ on obtient la partie de gauche de (2.2) pour f et „. Lapartie de droite s’en déduit par symétrie, ce qui achève la preuve. ⌅

2.5 Mesure de Borel positiveDans cette section on suppose que X est un espace topologique muni

d’une ‡-algèbre M, contenant les boréliens, et d’une mesure µ.

Définition 2.5.1 Soit X un espace séparé localement compact, on dira queµ est une mesure de Borel si elle prend une valeur finie sur tout compact.On dit qu’une telle mesure est intérieurement régulière 11 si

µ(A) = sup{µ(K) | K µ A et K compact}.

On dit qu’une telle mesure est extérieurement régulière si

µ(A) = inf{µ(O) | A µ O et O ouvert }.

Si µ est intérieurement et extérieurement régulière alors on dira simplementqu’elle est régulière.

Exercise 2.5.1 Soit µ une mesure régulière sur X, alors, toute partie A œM de mesure finie, peut se décomposer sous la forme F fi N , où F est uneunion dénombrable de compact et N un ensemble négligeable ; elle peut aussise décomposer sous la forme G \ N , où G est une intersection dénombrabled’ouverts et N un ensemble négligeable.Si on suppose de plus que X est ‡-compact, alors pour tout ensemble mesu-rable E il existe un F‡ A et G” B tels que A µ E µ B et µ(B \ A) = 0.

Les mesures définies sur certains espaces topologiques sont automatique-ment régulières, c’est le cas des espaces polonais 12 et des espaces localementcompacts, comme le montrent les deux théorèmes suivant.

11. dans ce cas on parle aussi de Mesure de Radon.

12. une espace métrisable séparable et complet.

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2.5. MESURE DE BOREL POSITIVE 27

Théorème 2.5.1 Soit X un espace polonais muni d’une mesure de Borel µ,‡-finie. Alors µ est automatiquement régulière, et concentrée sur un ensemble‡-compact.

En particulier les mesures de Borel sur IRn finies sur les compacts sont régu-lières.

Théorème 2.5.2 Si X est un espace topologique séparé localement compactet tel que tout ouvert est ‡-compact alors toute mesure de Borel est régulière.

A l’image d’une fonction, on aimerait définir le support d’une mesure,mais comme pour les fonction continue, on a besoin d’un peu de régularité.

Exercise 2.5.2 Montrer que si X un espace topologique séparé et µ unemesure de Borel régulière sur X, alors l’union(quelconque) des ouvert demesure nulle est de mesure nulle.

Définition 2.5.2 Soit X un espace topologique séparé et µ une mesure deBorel régulière sur X. On définit le support de µ comme le complémentairedu plus grand ouvert sur lequel µ est identiquement nulle.

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28 CHAPITRE 2. RAPPELS DE THÉORIE DE LA MESURE

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Chapitre 3

Mesure de Lebesgue

3.1 Construction de la mesure de LebesgueA l’aide du théorème de Carathéodory nous sommes en mesure de construire

la mesure de Lebesgue sur IR.

Théorème 3.1.1 Il existe une unique mesure de Borel ⁄ sur IR telle quela mesure d’un intervalle [a, b] soit égale à sa longueur b ≠ a. On l’appellemesure de Lebesgue. La complétion de ⁄, que l’on note aussi ⁄, également ap-pelée mesure de Lebesgue, est définie sur la ‡-algèbre des ensembles Lebesgue-mesurables, qui est constituée de toutes les parties E de IR telles qu’il existedes ensembles boréliens A et B tels que A µ E µ B et ⁄(B \ A) = 0.

On notera L(IR) la ‡-algèbre des ensembles Lebesgue-mesurables. Puispar induction on définit la mesure de Lebesgue ⁄k (ou simplement ⁄) sur IRk

comme ¢k⁄.

La preuve de l’existence de la mesure de Lebesgue repose sur l’exercicesuivant.

Exercise 3.1.1 Soit (Ik) une famille d’intervalles disjoints dont la réunionest un intervalle I, montrer que

Œÿ

k=1|Ik| = |I|.

29

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30 CHAPITRE 3. MESURE DE LEBESGUE

Preuve du théorème 3.1.1 :

Bien sûr il s’agit d’appliquer le théorème de Carathéodory à une famillebien choisie qui se trouve être simplement les intervalles de IR, puisque cettefamille est stable par intersection finie, et que d’après l’exercice 3.1.1, lalongueur est ‡-additive sur cette famille. De plus IR est égale à l’union des[≠k, k], donc l’unicité est assurée par le (i) du théorème 2.2.1. Enfin l’exis-tence est assurée par le (iii) du théorème 2.2.1, puisque la di�érence de deuxintervalles est réunion d’un nombre finie d’intervalles, et dans ce cas on pourraappliquer (ii). ⌅

Exercise 3.1.2 Montrer que cette mesure est invariante par translation etque cette propriété la caractérise(à multiplication par un scalaire près).

Exercise 3.1.3 Montrer que pour tout T œ GL(IRk) on a T#⁄ = det(T ≠1)⁄.

Exercise 3.1.4 Soient E un ensemble de mesure nulle de IRk et Á > 0 et ÷ >0. Montrer qu’il existe un recouvrement de E par un nombre dénombrablede boules B(xi, ri) telles que xi œ E, 0 < ri < ÷ et q

i ⁄(B(xi, ri)) < Á.

3.2 Ensemble non-mesurable au sens de Le-besgue

Théorème 3.2.1 (Paradoxe de Viatli) L(IR) ”= P(IR).

Preuve :

Soit [0, 1] muni de la relation d’équivalence

xRy si et seulement si x ≠ y œ Q.

On choisit 1 un représentant dans chaque classe d’équivalence et on note El’ensemble des représentants. Comme [0, 1] µ Q + E, on voit que ⁄(E) nepeut être définit et donc E n’est pas mesurable. ⌅

1. Grâce à l’axiome du choix.

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3.3. L’INTÉGRALE DE LEBESGUE GÉNÉRALISE L’INTÉGRALE DE RIEMANN31

Exercise 3.2.1 En déduire que contrairement aux boréliens, les ensemblesLebesgue-mesurables ont un mauvais comportement vis à vis du produit, i.e.L(IRm+n) ”= L(IRm) ¢ L(IRn).

Pour plus de précision, notamment sur le paradoxe de Banach-Tarsky, onpourra consulter les références : [Vil10] chapitre IV et [CQ] chapitre VI.

3.3 L’intégrale de Lebesgue généralise l’inté-grale de Riemann

On rappelle la définition de l’intégrale de Riemann sur un intervalle com-pact, mais tout ce qui suit passe aux intégrales de Riemann généralisées,puisque tout intervalle de IR est limite croissante d’intervalles compacts, voir[Vil10] section IV.3.

Définition 3.3.1 Soient [a, b] un intervalle de IR et f : I æ IR+ une fonc-tion bornée. Pour une subdivision ‡ de [a, b], c’est à dire une partition ensous-intervalle J1, . . . , Jk, on définit

I≠(f, ‡) =kÿ

i=1|Jk|mk et I+(f, ‡) =

kÿ

i=1|Jk|Mk

où mk = infJkf et Mk = supJk

f . Puis on pose

R≠(f, [a, b]) = sup‡

I≠(f, ‡) et R+(f, [a, b]) = inf‡

I+(f, ‡),

où les extrema sont pris sur toutes les subdivisions. On dit que f est Riemann-intégrable sur [a, b] si R+(f, [a, b]) = R≠(f, [a, b]) et cette valeur est l’intégralede f sur [a, b].

Théorème 3.3.1 Soit f : [a, b] æ IR+ une fonction bornée. Alors f estRiemann-intégrable si et seulement si

i) elle est Lebesgue-mesurable,ii) l’ensemble de ses points de discontinuité est de mesure nulle.

Dans ce cas, l’intégrale de Riemann de f est égale à l’intégrale de Lebesguede f .

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32 CHAPITRE 3. MESURE DE LEBESGUE

Preuve :

Tout d’abord supposons que f soit Riemann intégrable sur [a, b], alorspour tout m il existe deux subdivisions (Im

k ) et (Jmk ) telles que

R(f, [a, b]) ≠ ÿ

k

|Imk |mk Æ 1

met R(f, [a, b]) ≠ ÿ

k

|Jmk |Mk Ø ≠ 1

m.

Et quitte à prendre une subdivision plus fine on peut supposer que Imk = Jm

k .Donc à m fixé on définit f≠

m et f+m de sorte que si x œ Im

k on ait

f≠m(x) = mk et f+

m(x) = Mk.

Enfin quitte à prendre chaque subdivision plus fine on peut supposer quellessont de plus en plus fines. Dans ce cas f≠

m est croissante et f+m est décroissante,

ont peut donc définir leurs limites f≠ et f+. De plus on a clairement f+ Ø f≠.D’autre part en appliquant le théorème de convergence monotone, on a

⁄f≠ d⁄ = lim

mæ+Œ

⁄f≠

m d⁄ et⁄

f+ d⁄ = limmæ+Œ

⁄f+

m d⁄

Or par hypothèse c’est limite sont égales, à R(f, [a, b]), donc⁄

(f+ ≠ f≠) d⁄ = 0,

ce qui implique que f+ = f≠ presque partout. Finalement ces deux fonctionscoïncident presque partout avec f sur [a, b], d’ou f est Lebesgue-intégrableet R(f, [a, b]) =

sf d⁄.

Enfin soit D l’ensemble des extrémités des Ik, D est dénombrable donc demesure nulle et sur [a, b] \ D, f+ = f≠ = f presque partout donc f est conti-nue en dehors d’un ensemble de mesure nulle.

Réciproquement soit f Lebesgue-mesurable borné et dont l’ensemble despoints de discontinuité est de mesure nulle. On définit la subdivision suivante

de [a, b] : Ink =

C

a + k(b ≠ a)2n

, a + (k + 1)(b ≠ a)2n

C

, et f≠n et f+

n comme ci-

dessus. Soit x un point de continuité de f qui n’appartient pas à une extrémitédes Ik. Pour tout n il existe k tel que x œ In

k , comme f est continue en x ona

supIn

k

f ≠ infIn

k

f æ 0,

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3.3. L’INTÉGRALE DE LEBESGUE GÉNÉRALISE L’INTÉGRALE DE RIEMANN33

c’est à dire f+n (x) ≠ f≠

n (x) æ 0. La suite f+n ≠ f≠

n est bornée et convergesimplement vers 0 presque partout, donc par convergence dominée

s(f+

n ≠f≠

n ) d⁄ æ 0, ce qui implique que f est Riemann-intégrable, et comme on l’adéjà vu dans ce cas les intégrales coïncident. ⌅

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34 CHAPITRE 3. MESURE DE LEBESGUE

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Chapitre 4

Deux théorèmes fondamentaux

4.1 Théorème de RieszGrâce à la propriété de linéarité de l’intégrale on vérifie aisément que

L1(µ) est un espace vectoriel et que l’application

f ‘æ⁄

Xf dµ

définie une forme linéaire. D’autre part si µ est une mesure de Borel, onpeut également vérifier que Cc(X) l’ensemble des applications continue àsupport compact de X dans C est un sous-espace de L1(µ). L’objet du théo-rème suivant est d’établir que toute forme linéaire positive sur Cc(X) peuts’interpréter comme une mesure sur X.

Théorème 4.1.1 (Théorème de Riesz) Soit X un espace séparé locale-ment compact et soit � une forme linéaire positive sur Cc(X), il existe une‡-algèbre M, contentant les boréliens, et une unique mesure de Borel presque-régulière 1, complète et positive µ sur M telle que

�(f) =⁄

Xf dµ,

pour tout f œ Cc(X).

Si X est compact, la positivité implique directement la continuité pour lanorme uniforme. On peut aussi prendre une topologie plus faible sur Cc(X)

1. la régularité intérieur n’a lieu que pour les ouverts (et les ensembles de mesure finie).

35

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36 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

qui rend � continue et dont l’espace des formes linéaires continues ne serarien d’autre l’espace des distributions.

On peut également définir la mesure de Lebesgue à l’aide du théorème deRiesz, en définissant l’intégrale des fonctions continues en les approchant pardes fonctions en escaliers, l’intégrale une fois définie le théorème nous donnela mesure, voir [Rud80] 2.20.

Avant de donner la preuve, on rappelle le lemme suivant

Lemme 4.1.1 (Lemme d’Urysohn) Soient X un espace séparé localementcompact, O un ouvert et K un compact contenu dans O. Alors il existe unefonction continue f à valeurs dans [0, 1] qui vaut 1 sur K et dont le supportest inclus dans O.

Preuve du théorème 4.1.1 :

Montrons tout d’abord l’unicité. Soit µ1 et µ2 deux mesures représentantla forme linéaire. Soit K un compact et Á > 0, il existe un ouvert O telque µ1(K) Ø µ1(O) ≠ Á. D’après le lemme d’Urysohn, il existe une fonctioncontinue f à valeurs dans [0, 1] qui vaut 1 sur K et dont le support est inclusdans O. On a donc

µ2(K) =⁄

1K dµ2 Æ⁄

f dµ2 =⁄

f dµ1 Æ⁄

1O dµ1 = µ1(O) Æ µ1(K) + Á.

En faisant tendre Á vers 0, on obtient µ2(K) Æ µ1(K) et l’autre inégalités’obtient par symétrie. On a donc égalité sur les compacts, donc sur les ou-verts par presque régularité" intérieur et sur tous les ensembles par régularitéextérieur.

On va démontrer l’existence à l’aide du théorème de Carathéodory 2.2.1,pour cela on va définit µ sur les ouvert de X. Là encore, on va approcher lesfonctions indicatrices par des fonctions continues. On pose, pour tout ouvertO,

µ(O) = sup{�(f) | f œ Cc(X) vérifiant 0 Æ f Æ 1O}.

Pour prolonger µ à l’ensemble des boréliens, il su�t de vérifier que lacondition (2.1) du théorème de Carathéodory est vérifiée. On décompose

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 37

cela en plusieurs étapes :

Etape 1 : µ est ‡-sous-additive sur les ouverts.

Soit O = fiOk et f une fonction continue à support compact K dansO. Alors il existe une partition de l’unité de K, c’est à dire des fonctionscontinues ‰ki

à support dans Okiet à valeurs dans [0, 1] telles que qN

i=1 ‰ki= 1

sur K. On a alorsf = f

ANÿ

i=1‰ki

B

=Nÿ

i=1gi,

où les gi sont des fonctions continues à support dans Okiet à valeurs dans

[0, 1]. Ce qui donne

�(f) =ÿ

i

�(gi) ÆNÿ

i=1µ(Oki

) Æ ÿ

k

µ(Ok),

on obtient l’inégalité souhaité en passant au supremum sur f .

Puis on remarque que l’ensemble des ouverts est également stable parunion dénombrable, ce qui simplifie la définition de la mesure extérieur,

µú(A) = inf{µ(O) | O ouvert tel que A µ O}.

Déslors µ et µú coïncident sur les ouverts. Soit A et B deux ouverts, parsous-additivité de µú, on a

µ(A) Æ µ(A fl B) + µú(A \ B).

Il su�t donc de prouver

µ(A) Ø µ(A fl B) + µú(A \ B). (4.1)Etape 2 : µ est additive.

D’après l’étape 1, il su�t de montrer qu’elle est sur-additive. Soit O1 etO2 deux ouverts disjoints et f1 et f2 deux fonctions continues à support dansO1 et O2 et à valeurs dans [0, 1], alors f1 + f2 est à support dans O1 fi O2 ettoujours à valeurs dans [0, 1], d’ou

�(f1) + �(f2) = �(f1 + f2) Æ µ(O1 fi O2),

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38 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

on obtient l’inégalité désirée en passant au supremum en f1 et f2.

Etape 3 : preuve de (4.1).

Soient A et B deux ouverts et f une fonction continue à support compactà valeur dans [0, 1] dont le support K est contenu dans A fl B. On sait qu’ilexiste K Õ compact et OÕ ouvert tels que

K µ OÕ µ K Õ µ A fl B,

en particulier�(f) Æ µ(OÕ).

D’autre partA \ B = A \ (A fl B) µ A \ K Õ,

et comme A \ K Õ est ouvert, on a

µú(A \ B) Æ µú(A \ K Õ) = µ(A \ K Õ).

Finalement�(f) + µú(A \ B) Æ µ(OÕ) + µ(A \ K Õ).

Or OÕ et A \ K Õ sont disjoints, donc on peu appliquer l’additivité, ce quidonne

�(f) + µú(A \ B) Æ µ(OÕ fi (A \ K Õ)) Æ µ(A).

On achève la démonstration du théorème en passant au supremum sur f . ⌅

On peut construire une mesure à partir d’une simple forme linéaire surles fonctions continues. Il est alors naturel de s’interroger sur la continuité del’objet construit, en particulier sur la di�érence entre les fonction mesurableset les fonctions continue, c’est l’objet du théorème suivant.

Théorème 4.1.2 (Théorème de Lusin) Soit (X, M, µ) un espace séparélocalement compact, mesuré tel que µ soit régulière et f une fonction mesu-rable telle µ({x | f(x) ”= 0}) < Œ. Alors, pour tout Á > 0, il existes g œ Cc(X)telle que

µ({x | f(x) ”= g(x)}) < Á.

En plus, on peut assurer que sup |g| Æ sup |f |.

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 39

L’idée de la démonstration consiste à approcher les supports de fonctions in-dicatrices inférieurement par des compacts et supérieurement par des ouvertset d’utiliser le lemme d’Urysohn. On passe au fonction mesurable à l’aide duthéorème d’approximation.

D’autre part, la convergence presque partout implique la convergenceuniforme en-dehors d’un ensemble de mesure arbitrairement petite.

Théorème 4.1.3 (Théorème d’Egoro�) Soient µ une mesure sur IRd etfk : IRd æ C une suite de fonction mesurables qui converge presque partoutsur A de mesure finie. Pour tout Á > 0 il existe B mesurable tel que µ(A\B) <Á et fk converge uniformément sur B.

Exercise 4.1.1 Montrer que l’hypothèse µ(A) < Œ est essentielle.

D’autre part, on remarque que la mesure produite par le théorème deRiesz bien que presque régulière, n’est pas ‡-finie. Or cette hypothèse estessentielle si on veut appliquer le théorème de Fubini. Ci-dessous on donneun énoncé qui nous permettra d’utiliser Fubini pour des mesures produitespar le théorème de Riesz mais a priori non ‡-finies.

Théorème 4.1.4 Soient (X, M, µ) et (Y, N , ‹) deux espaces mesurés loca-lement compacts et presque régulier, alors il existe une unique mesure, notéeµ ¢ ‹, sur X ◊ Y telle que

’(A, B) œ M ◊ N µ ¢ ‹(A ◊ B) = µ(A) ◊ ‹(B),

c’est la mesure produit. De plus, soit f : X ◊ Y æ [0, +Œ] µ ¢ ‹-intégrable,alors

sX f(x, y) dµ(x) et

sY f(x, y) d‹(y) sont bien définies et

X

3⁄

Yf(x, y) d‹(y)

4dµ(x) =

X◊Yfd(µ¢‹) =

Y

3⁄

Xf(x, y)dµ(x)

4d‹(y).

Exercice 4.1.1 Démontrer le théorème précédent.

Indication : démontrer d’abord le théorème pour des ouverts de mesurefini à l’aide du Fubini classique, puis passer au compact et au ‡-compact,enfin montrer le pour les ensembles négligeables et conclure.

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40 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

4.1.1 Convergence et compacité faible des mesures deRadon

On rappelle qu’une mesure de Radon est une de Borel intérieurementrégulière.

Exercise 4.1.2 Montrer que toute mesure de Radon sur IRd est automati-quement régulière.

Théorème 4.1.5 Soient µ et (µk) des mesures de Radon sur IRd, les asser-tions suivantes sont équivalentes :

i) limks

IRd f dµk =s

IRd f dµ pour tout f œ Cc(IRd),ii) lim supk µk(K) Æ µ(K) pour tout K compact et lim infk µk(O) Ø µ(O)

pour tout O ouvert.iii) limk µk(B) = µ(B) pour tout B borélien borné telle que µ(ˆB) = 0.

Preuve :

i) implique ii)

Soit U un ouvert et K µ U compact. Il existe f œ Cc(U) à valeurs dans[0, 1] telle que f © 1 sur K. On a alors

µ(K) =⁄

1K dµ Æ⁄

f dµ = limk

IRf dµk Æ lim inf

kµk(U).

Par régularité on aµ(U) Æ lim inf

kµk(U).

La deuxième inégalité s’obtient de manière similaire.

ii) implique iii)

Soit B un borélien borné dont le bord est de mesure nulle, on appliqueii) à B µ B µ B.

iii) implique i)

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 41

Soient f œ C+c (IRd) et Á > 0. Il existe R > 0 tel que supp(f) µ B(0, R)

et µ(ˆB(0, R)) = 0, on choisit alors une séquence 0 = t0 < . . . tN telle quetN = 2ÎfÎŒ, ti+1 ≠ ti < Á et µ(f≠1(ti)) = 0 . On pose Bi = f≠1((ti≠1, ti]), ona alors

Nÿ

i=2ti≠1µk(Bi) Æ

⁄f dµk Æ

Nÿ

i=2tiµk(Bi) + t1µk(B(0, R))

et

Nÿ

i=2ti≠1µ(Bi) Æ

⁄f dµ Æ

Nÿ

i=2tiµ(Bi) + t1µ(B(0, R)).

D’oulim sup

k

----⁄

f dµk ≠⁄

f dµ---- Æ 2Áµ(B(0, R)),

et ceci pour tout Á, ce qui achève la preuve. ⌅

Ce qui nous amène à la définition suivante.

Définition 4.1.1 Si l’une des assertions du théorème précédent est vérifiéealors on dit que (µk) converge faiblement vers µ.

Théorème 4.1.6 (Compacité faible) Soit (µk) une suite de mesure deRadon qui vérifie

supk

µk(K) < +Œ pour tout K compact.

Alors il existe une sous suite (µki) qui converge faiblement vers µ.

Preuve :

Tout d’abord on remarque qu’il su�t de démontrer le théorème lorsque

supk

µk(IRd) < +Œ,

le cas général s’en déduit en utilisant la ‡-compacité et une extraction dia-gonale.

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42 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Soit (fk) une suite dense de Cc(IRd). Commes

f1 dµk est borné, on peuttrouver une sous suite (µ1

k) et a1 œ IR tell que⁄

f1 dµ1k æ a1.

Puis en itérant le procédé d’extraction, on trouve une sous suite (µik) et

ai œ IR telle que⁄

fj dµik æ aj pour tout j Æ i.

On pose alors ‹l = µll, de sorte que

⁄fk d‹l æ ak pour tout k Ø 0.

On définit alors L : V ect{(fk)} æ IR, application linéaire, par L(fk) = ak.On remarque que

|L(fk)| Æ ÎfkÎŒM,

où M = supk µk(IRd). Donc L admet un unique prolongement, toujours notéL à Cc(IRd), il est clair que L est positive, donc il existe une mesure de Radonµ telle que

L(f) =⁄

f dµ, pour tout f œ Cc(IRd).

Soit f œ Cc(IRd), il existe une sous-suite de (fki) qui converge vers f . Soit

Á > 0, pour i assez grand on a

Îf ≠ fkiÎŒ Æ Á

4M.

D’autre part pour j assez grand----⁄

fkid‹j ≠

⁄fki

dµ---- Æ Á

2 ,

On a donc----⁄

f d‹j ≠⁄

f dµ---- Æ

----⁄

(f ≠ fki) d‹j

---- +----⁄

(f ≠ fki) dµ

----

+----⁄

fkid‹j ≠

⁄fki

dµ----

Æ Á,

ce qui achève la preuve. ⌅

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 43

4.1.2 Mesure de Haar et analyse sur les groupes loca-lement compacts

On rappel qu’un groupe topologique est un groupe muni d’une topologiequi rend l’inversion et la multiplication continue. Un groupe topologique estdit localement compact s’il est séparé et si tout point possède un voisinagecompact. Voici une propriété des groupes localement compacts qui nous serautile par la suite.

Proposition 4.1.1 Soit G un groupe localement compact. On a— G possède un sous groupe ouvert ‡-compact.— L’union dénombrable de sous-groupe ouvert ‡-compact, engendre ungroupe ouvert ‡-compact.

Preuve :Soit V un voisinage symétrique relativement compact de e. Pour tout n, on aV

n = V n µ V.V n = V n+1. On pose alors H = finV n = finVn. Or le produit

de deux compacts est compact par continuité de la multiplication. Donc Hest ‡-compact. On montre facilement que c’est un groupe. Enfin il est ouvertcar on peut facilement le réécrire comme union d’ouvert.

Soit Hn une suite de sous-groupes ‡-compact ouvert. Le groupe engendrépar les Hn est ouvert car il contient un sous-groupe ouvert, H1 par exemple.Et il est ‡-compact, car engendré par les Kk

n tels que Hn = fikKkn. ⇤

Théorème 4.1.7 Soit G un groupe localement compact, il existe une mesurede Borel presque régulière µ, non-triviale, invariante par action à gauche,i.e. µ(x.E) = µ(E) pour tout borélien E et x œ G. Si ‹ est une autre me-sure vérifiant cette propriété, alors il existe une constante positive c telle que‹(E) = cµ(E) pour tout borélien E.

Exercise 4.1.3 Le but de cette exercice est de démontrer le théorème pré-cédent.1) Soit f œ Cc(G) montrer que pour tout Á > 0, il existe un voisinage V de

e tel que pour tout y œ V et x œ G,

|f(x) ≠ f(y≠1x)| Æ Á.

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44 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Soit f et „ dans C+c (G) \ {0}, on pose

(f : „) = infnÿ

i=1ci,

où l’infimum est pris sur l’ensemble des ci œ IR+ tels qu’il existe xi œ Gde sorte que

f Ænÿ

i=1ciLxi

�,

où (Lxi�)(x) = „(x≠1

i x).2) Montrer que (f : „) < +Œ.3) Montrer que

i) (f : „) = (Lyf : „) pour tout y œ G,ii) (f1 + f2 : „) Æ (f1 : „) + (f2 : „),iii) (cf : „) = c(f : „) pour tout c > 0,iv) si f1 Æ f2 on a (f1 : „) Æ (f2 : „),v) (f : „) Æ (f : Â)( : „) pour tout  œ C+

c (G) \ {0}.On fixe f0 œ C+

c (G) \ {0} et on pose

I„(f) = (f : „)(f0 : „) .

Il est clair que I„ est invariante à gauche, sous-additive et homogène.4) Soit f1, f2 œ C+

c (G) \ {0} et Á > 0, montrer qu’il existe V voisinage de etel que

I„(f1) + I„(f2) Æ I„(f1 + f2) + Á pour tout „ œ C+c (G) \ {0},

dés que supp(„) µ V .5) Montrer que

1(f0 : f) Æ I„(f) Æ (f : f0),

en déduire que les I„ vivent dans un compact de (IR+)C+c (G).

6) Pour V voisinage de e, on pose

K(V ) = {I„ | supp(„) µ V },

Montrer que K(V ) est compact.

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 45

7) En déduire qu’il existe I telle que que pour tout voisinage V de e, Á > 0et f1, . . . , fn œ C+

c (G)., il existe „ œ C+c (G) telle que supp(„) µ V et

|I(fi) ≠ I„(fi)| Æ Á pour tout i.

En particulier montrer que I est invariante à gauche, additive et homo-gène.

8) Prolonger I à Cc(G) et en déduire l’existence de la mesure invariante.

Dans la suite on suppose que G est ‡-compact 2.

9) Soit µ et ‹ deux mesures de Haar, montrer que la dérivé de Radon-Nikodym de µ par rapport à µ + ‹ est constante.

10) En déduire l’unicité de la mesure de Haar.

Exercise 4.1.4 Montrer qu’un groupe localement localement compact estcompact si et seulement si il admet une mesure de Haar finie.

Exercise 4.1.5 Montrer qu’un ouvert négligeable pour la mesure de Haarest nécessairement vide. En déduire que le support d’une fonction intégrableest nécessairement inclus dans un ensemble ‡-compact.

On remarquera que l’exercice précédent nous o�re une nouvelle preuvedu théorème de Fubini dans le cas particulier des mesure de Haar.

Exercise 4.1.6 [Exemples] Montrer que les mesures suivantes sont bien desmesures de Haar(invariante à gauche) :

i) La mesure de Lebesgue sur (IR, +),ii) dx

x sur (IRú+, ◊),

iii) dxdyx2 sur le sous-groupe de GL2(IR) formé des matrices de la formeA

x y0 1

B

.

2. Ce n’est pas nécessaire pour démontrer l’unicité, voir r [Fol95], car on dispose d’unthéorème de Fubini pour les mesures générées par le théorème de Riesz, mais ici on souhaiteappliquer le théorème de Radon-Nikodim qui requière cette hypothèse.

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46 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Soit g œ G et µ une mesure de Haar(invariante à gauche) alors µg définiepar

µg(E) = µ(Eg),est également une mesure de Haar(invariante à gauche). Par unicité il existe�(g) > 0 tel que µg = �(g)µ. � est la fonction modulaire. On dit qu’ungroupe est unimodulaire si � © 1, dans ce cas toute mesure de Haar estinvariante à gauche et à droite.

Exercise 4.1.7 Montrer que si f œ Cc(G) tel que c =s

G f dµ ”= 0 alors

�(y) = 1c

Gf(xy≠1) dµ(x).

En utilisant le 1) de l’exercice 4.1.3, montrer que � est un morphisme conti-nue de G dans Rú

+, et que tout groupe compact ou abélien est unimodulaire.Enfin montrer que l’exemple iii) du denier exercice n’est pas unimodulaire.

Exercise 4.1.8 Soit GLn(IR) le groupe linéaire de IRn. Montrer que soncomplémentaire est négligeable dans Mn(IR). (Indication : considérer cet en-semble comme les zéros d’un polynôme.) On pose µ(X) = dX

|det(X)|n , où dX

est la mesure de Lebesgue sur Mn(IR) = IRn2 . Montrer que cette mesure estbien définie et que c’est une mesure de Haar invariante à gauche. Montrerque c’est un groupe unimodulaire.

Définition 4.1.2 Soient G un groupe localement compact, µ une mesure deHaar et f, g œ L1(G, dµ), on définit la convolutions de f et g comme

f ú g(x) =⁄

f(y)g(y≠1x) dµ(y).

Exercice 4.1.2 Montrer que

Îf ú gÎ1 Æ ÎfÎ1 ÎgÎ1.

Pour clore cette section, on présente rapidement la transformé de Fouriersur les groupes abéliens localement compacts (ALC).

Définition 4.1.3 Soit G un groupe ALC. Un caractère sur G est un homo-morphisme continue de G dans U. Les caractères forment un groupe, noté‚G, appelé groupe dual.

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4.1. THÉORÈME DE RIESZ 47

Exercice 4.1.3 Montre que :i) les caractères de Z sont les applications k ‘æ eikx2fi où x œ IR/Z,

ii) les caractères de IR/Z sont les applications x ‘æ eikx2fi où k œ Z,iii) les caractères de IR sont les applications k ‘æ eiyx2fi où y œ IR.

On peut munir ‚G de la topologie de la convergence uniforme sur toutcompact, ce qui en fait un groupe topologique localement compact 3 .

Définition 4.1.4 Soit G un groupe ALC et f œ L1(G). On définit alorsf : ‚G æ C par

f(›) =⁄

Gf(x)›(x) dµ(x).

C’est la transformé de Fourrer de f .

Exercice 4.1.4 Montrer que [f ú g = f g.

On peut montrer que f ‘æ f est une application continue. Mais on abeaucoup mieux, c’est l’objet des deux théorèmes suivant dont on trouverades démonstrations dans [DS09] chapitre 3. Par contre elle repose en partiesur l’utilisation de Cú-algèbre dont nous parlerons dans les chapitres suivants.

Théorème 4.1.8 (Théorème de Plancherel) Soit G un groupe ALC et‚G son dual. On fixe une mesure de Haar sur G alors il existe une uniquemesure de Haar sur ‚G telle que pour tout f œ L1(G) fl L2(G) on ait

ÎfÎ2 = ÎfÎ2.

De plus la transformé de Fourier s’étend en une isométrie de L2(G) surL2( ‚G).

Soit G un groupe ALC, à tout élément x œ G on peut associer un élémentdu bi-dual ”x défini par

”x(›) = ›(x).

Théorème 4.1.9 (Dualité de Pontryagin) Soit G un groupe ALC. L’ap-plication ” : G æ ‚‚G est un isomorphisme de groupes ALC.

3. voir l’exercice 6.4.4

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48 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

4.1.3 Représentation des groupes localement compactsDéfinition 4.1.5 Soit G un groupe topologique. On appelle représentationréel (reps. complexe) de G, la donnée d’un espace Hilbert (reps. Hermitien)H et d’un morphisme de groupe fi : G æ GLc(H) telle que pour tout x œ H,g ‘æ fi(g)(x) soit continue. Une représentation est dite unitaire si fi(g) estunitaire pour tout g œ G.

Exercise 4.1.9 Montrer que pour tout groupe localement compact G, l’ap-plication

y ‘æ Ly

définit une représentation unitaire dans L2(G, dµ).

Définition 4.1.6 Une représentation (fi, Hfi) est une sous-représentation d’unereprésentation (÷, H÷) si Hfi est un sous-espace fermé de H÷ et fi = ÷|Hfi . Unereprésentation (fi, Hfi) est dite irréductible si elle n’a aucune sous-représentationpropre, c’est-à-dire les seuls sous-espaces fermés stable par fi son Hfi et {0}.

Exercise 4.1.10 La représentation naturel du groupe des matrices unitairesU(n) sur Cn est irréductible.

Lemme 4.1.2 (de Schur) Soit G un groupe topologique et soit (fi1, H1) et(fi2, H2) deux représentations irréductibles unitaires de G. Soit T une appli-cation linéaire continue de H1 dans H2 tel que fi2(g) ¶ T = T ¶ fi1(g) pourtout g œ G. Alors soit T = 0 soit T est un isomorphisme.De plus, si fi1 = fi2 est une représentation complexe de dimension finie, alorsT = ⁄Id.

Preuve :On remarque d’abord que le noyau de T est un sous-espace invariant de fi1,on a donc soit Ker(T ) = {0}, soit Ker(T ) = H1. Supposons que T est injec-tive, alors on remarque l’image de T est un sous-espace invariant de fi2, c’estdonc H2 et T est un isomorphisme.

Si la représentation est complexe de dimension finie, alors T admet unsous-espace propre V , on vérifie alors que ce sous-espace est un sous-espaceinvariant de la représentation, on donc V = H et T = ⁄Id. ⇤

Exercise 4.1.11 Montrer que les représentations irréductibles complexesd’un groupe abélien sont de dimension 1.

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 49

Dans le cas d’un groupe abélien, on peut identifier les représentationsirréductibles unitaires et les caractères. En e�et pour tout g œ G , fi(g) estun automorphisme unitaire de C, c’est à dire un élément de U.Considérons alors, la représentation de G dans L2(G), et supposons queL2(G) est séparable. On peut alors trouver une base hilbertienne de L2(G)de sorte que la restriction de la représentation à chaque espace engendré parun vecteur de base soit irréductible, donc corresponde à un caractère. Onpeut alors écrire pour tout f œ L2(G),

f(g) =ÿ

‰œG

Èf, ‰Í‰(g).

On trouve ici la formule d’inversion de Fourier, le but du théorème de Peter-Weyl est d’étendre cette construction au groupe compact non-abélien.

4.2 Mesures complexes, théorème de Lebesgue-Radon-Nikodym et applications

4.2.1 Mesures complexesOn a définit une mesure complexe comme une fonction ‡-additive à valeur

complexe, définition 2.1.3, c’est à dire pour toute famille (Ak) d’ensemblesdisjoints sur un espace mesurable (X, M), on a

µ

A Œ€

k=1Ak

B

=Œÿ

k=1µ(Ak).

Il est a noter que le membre de droite est supposé convergeant. On re-marque même qu’il est convergeant pour toute permutation d’indice étantdonné que le terme de gauche est invariant par une telle transformation. Doncle terme de droite est absolument convergeant.

Définition 4.2.1 Soit (X, M) un espace mesurable, muni d’une mesure com-plexe µ, on définit la variation total de µ, notée |µ|, comme suit

|µ|(A) = supŒÿ

k=1|µ(Ak)|,

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50 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

où le sup est pris sur toutes les partitions dénombrables (Ak) de A.Dans le cas d’une mesure réelle, on définit alors la variation positive et né-gative de µ, comme suit

µ+ = µ + |µ|2 et µ≠ = |µ| ≠ µ

2 .

Exercise 4.2.1 Montrer que la variation total d’une mesure complexe estune mesure finie.Indication : Montrer que si |µ|(X) = +Œ, on peut trouver A et B mesurablesdisjoints tels que |µ|(A) = +Œ et |µ(B)| Ø 1.

Le théorème suivant montre que l’on peut décomposer X en deux en-sembles disjoints supportant chacun une variation de la mesure.

Théorème 4.2.1 (Décomposition de Hahn) Soit (X, M) un ensemblemesurable muni d’une mesure réel µ. Il existe deux ensembles mesurableset disjoints A et B tels que les variations positive et négative vérifient

µ+(E) = µ(E fl A) et µ≠(E) = ≠µ(E fl B) pour tout E œ M.

Preuve du théorème 4.2.1 :

SoitM = sup

EµMµ(E),

M est finie vue l’exercice 4.2.1. On prend (Ak) une suite d’ensembles mesu-rables vérifiant

µ(Ak) Ø3

1 ≠ 12k

4M.

On poseA =

l

kØl

Ak.

Soit B un ensemble mesurable, on a

µ(Ak fi B) = µ(Ak) + µ(B) ≠ µ(Ak fl B) Ø µ(Ak) + µ(B) ≠ M Ø µ(B) ≠ M

2k,

puis en itérant, on obtient,

µ(Al fi · · · fi Ak) Ø µ(Al) ≠ M

2l≠1 .

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 51

Si, on passe à la limite en k , on a

µ (fikØlAk) Ø µ(Al) ≠ M

2l≠1 Ø3

1 ≠ 32l

4M,

et ensuite en l, on obtientµ(A) Ø M,

ce qui donne µ(A) = M .On pose alors B = X \ A. Montrons que pour tout ensemble mesurableC µ A, on a µ(C) Ø 0. En e�et sinon on aurait

µ(A \ C) = µ(A) ≠ µ(C) > M,

ce qui serait absurde. De même pour tout ensemble mesurable C µ B, on aµ(C) Æ 0. Enfin, soit E œ M, on a par définition de |µ|,

|µ|(E) = |µ|(E fl A) + |µ|(E fl B) = µ(E fl A) ≠ µ(E fl B),ce qui achève la preuve. ⌅

4.2.2 Fonction maximale et points de LebesgueDans cette section la seule mesure considérée est la mesure de Lebesgue,

notée ⁄ ou | . |.

Un problème classique d’intégration est de montrer que l’intégration etla di�érentiation sont des opérations "inverses" l’une de l’autre. Plus précisé-ment nous allons regarder dans cette section les questions suivantes, que l’onformule en dimension 1 par soucis de clarté.

— Soit f : [a, b] æ C intégrable et F (x) =s x

a f(t) dt, est ce que F estdérivable ? Et dans ce cas est ce que F Õ = f ?

— Et réciproquement, soit F dérivable presque partout 4, est ce que F Õ

est intégrable ? dans ce cas, a-t-on F (x) ≠ F (a) =s x

a F Õ(t) dt ?

Exercise 4.2.2 Construire une fonction F croissante telle que F (0) = 0 etF (1) = 1 et telle que F soit constante en dehors de l’ensemble de Cantor.En déduire que la réponse à la deuxième question est négative 5.

4. le théorème de Rademacher, nous assure que F Lipschitz est une condition su�sante.5. Toutefois si on suppose que F est absolument continue alors c’est vrai, voir la preuve

du théorème fondamental de l’analyse.

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52 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

En reprenant les notations de la première question, F est dérivable en xsi et seulement si

F (x + h) ≠ F (x)h

convergence quand h tend vers 0,

c’est-à-dire si

limhæ0

1h

⁄ x+h

xf(t) dt = lim

|I|æ0

1|I|

If(t) dt existe ,

où I = (x, x + h). Ce qui nous amène à formuler notre premier problème entoute dimension comme suit : Soit f : IRd æ C intégrable et x œ IRd :

est ce que l’on a limræ0

1|B(x, r)|

B(x,r)f(y) d⁄(y) = f(x) ?

Pour répondre à cette question, on introduit le concept de fonction maxi-male, introduit par Hardy et Littelwood.

Définition 4.2.2 Soient U un ouvert de IRd et f œ L1(U), on définit safonction maximale, notée M(f), par

M(f)(x) = supxœB

1|B|

B|f(y)| d⁄(y),

où le supremum est pris sur toutes les boules ouvertes de U qui contiennentx.

la fonction maximale vérifie les propriétés suivantes.

Théorème 4.2.2 Soient U un ouvert de IRd et f œ L1(U), alorsi) M(f) est mesurable,

ii) M(f)(x) < +Œ presque partout,iii) M(f) vérifie

⁄({x œ U | M(f)(x) > t}) Æ C

tÎfÎ1 pour tout t > 0,

où C est une constante qui ne dépend que de d.

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 53

La dernière assertion repose sur le théorème suivant 6.

Théorème 4.2.3 (Théorème de recouvrement de Vitali) Soit X un es-pace métrique séparable et B une famille de boules fermées de rayon non nulet majoré. Alors on peut extraire une famille dénombrable B de boules dis-jointes telle que €

BœBB µ €

BœB

5B.

Preuve du théorème 4.2.3 dans le cas fini :

On réordonne les boules par rayon décroissant : B1, . . . , BN . On garde B1et on élimine toutes les boules qui l’intersectent puisque qu’elles sont inclusdans 3B1. Puis on sélectionne la première boule dans l’ensemble restant : Bi2 .On élimine toutes les boules qui l’intersectent et on continue ainsi jusqu’àépuiser toutes les boules. Le sous ensemble ainsi formé, satisfait clairementles conditions du théorème. ⇤

Exercise 4.2.3 Démontrer le théorème 4.2.3 dans le cas général.Indication : Commencer par montrer qu’on peut extraire une famille disjointe"maximale", puis "ordonner" les boules.

Preuve du théorème 4.2.2 :

On vérifie facilement que Et = {x œ U | M(f)(x) > t} est ouvert etdonc mesurable. Ce qui prouve i). Comme ii) est une conséquence de iii), onprouve directement iii). Soit t > 0, pour tout x œ Et il existe rx > 0 tel que

1|B(x, rx)|

B(x,rx)|f(y)| d⁄(y) > t.

De plus, on a

|B(x, rx)| <

sB(x,rx) |f(y)| d⁄(y)

t.

Soit K un compact de Et, alors K est recouvert par un nombre fi-niede boules (B(xi, rxi

))Ni=1. On applique alors le théorème de recouvrement

6. En fait une version finie su�t.

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54 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

de Vitali aux (B(xi, rxi))N

i=1. On a donc une famille de boules disjointes(B(xij

, rxij))M

j=1, telle que

|K| Æ-----

N€

i=1B(xi, rxi

)----- Æ 3d

------

M€

j=1B(xij

, rxij)------

Æ 3dMÿ

j=1

---B1xij

, rxij

2---

Æ 3d

t

Mÿ

j=1

B1

xij,rxij

2 |f(y)| d⁄(y)

Æ 3d

tÎfÎ1,

(4.2)

ce qui achève la preuve, par régularité de la mesure de Lebesgue. ⌅

Exercise 4.2.4 Trouver une fonction dans L1 dont la fonction maximalen’est pas dans L1.

Définition 4.2.3 On appelle point de Lebesgue de f œ L1(IRd), tout pointx œ IRd telle que que

limræ0

1⁄(B(x, r))

B(x,r)|f(y) ≠ f(x)| d⁄(y) = 0.

Exercise 4.2.5 Quels sont les points de Lebesgue d’une fonction continue,d’une fonction caractéristique d’un intervalle ou encore de la fonction carac-téristique de l’ensemble de Cantor.

Théorème 4.2.4 Soit f œ L1(IRd) fixé alors presque tout x œ IRd est unpoint de Lebesgue.

Preuve du théorème 4.2.4 :

Il su�t de montrer que

Et =I

x œ IRd | lim supræ0

1⁄(B(x, r))

B(x,r)|f(y) ≠ f(x)| d⁄(y) > t

J

est de mesure nulle. On fixe Á > 0, d’après le théorème 4.1.2, il existes gcontinue telle qui Îf ≠ gÎ1 < Á. D’après l’exercice précédent, on voit que

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 55

lim supræ0

1⁄(B(x, r))

B(x,r)|f(y) ≠ f(x)| d⁄(y) Æ M(f ≠ g)(x) + |f(x) ≠ g(x)|.

Donc Et µ F t2

fi G t2

où Ft = {x œ IRd | M(f ≠ g)(x) > t} et Gt = {x œIRd | |f(x) ≠ g(x)| > t}. D’une part

|Gt| Æ Îf ≠ gÎ1t

= Á

t

et d’autre part, d’après le théorème 4.2.2,

|Ft| Æ CÎf ≠ gÎ1t

= CÁ

t,

où C ne dépend que de d. Ceci étant vrai pour tout Á, la preuve est achevée. ⌅

En particulier la réponse à la première partie de notre première questionest a�rmative. Nous développerons plus cette question au cours de la preuvedu théorème de de Rademacher.

4.2.3 Théorème de Radon-NikodymDéfinition 4.2.4 Soit (X, M, µ) un espace mesuré, et ‹ une mesure com-plexe sur (X, M). On dit que ‹ est mesurable par µ s’il existe une fonctionmesurable f : X æ C telle que ‹ = fµ. On dit que ‹ est étrangère à µ si ‹et µ sont concentrés 7 sur des ensembles mesurables disjoints ; dans ce cas onnote µ‹‹.

Théorème 4.2.5 (Décomposition de Lebesgue) Soient (X, M, µ) un es-pace mesuré ‡-fini, et ‹ une mesure complexe sur (X, M). Alors il existe unefonction intégrable f : X æ C et une mesure complexe ‹s, telle que

‹ = fµ + ‹s avec ‹s‹µ.

La mesure ‹s est unique, et la fonction f est unique à modification près surun ensemble de µ-mesure nulle ; en particulier, la mesure fµ est unique.

7. il existe deux ensembles mesurables et disjoints A et B telle que µ(X \ A) = 0 et‹(X \ B) = 0.

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56 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

La mesure ‹s est la partie singulière de µ par rapport à ‹. La fonction f estappelée densité (ou dérivée) de Radon–Nikodym de ‹ par rapport à µ, etnotée

f = d‹

dµ.

Preuve du théorème 4.2.5 :

Tout d’abord, on montre aisément qu’on peut se ramener au cas de me-sure positive. Puis on montre également qu’on peut se ramener au cas où Xest de mesure finie pour µ et ‹ à la l’aide d’une partition ‡-finie.

On pose

E = {f : X æ [0, +Œ] mesurable | fµ Æ ‹} .

Montrons que le maximum de deux éléments de E est dans E . Soir f, g œ E ,A = {f > g} et h = max(f, g), on a

hµ = f1Aµ + g1X\Aµ = 1A(fµ) + 1X\A(gµ) Æ 1A‹ + 1X\A‹ = ‹,

et donc h œ E . On généralise sans peine cet argument à un nombre finie defonctions.On pose alors

a = sup;⁄

Xf dµ | f œ E

<Æ ‹(X) < Œ,

et on prend une suite fn œ E telle ques

fn dµ æ a. Quitte à remplacer fn

par max{f1, . . . , fn} on peut supposer fn croissante et finalement on posef = sup fn. A l’aide du théorème de convergence monotone on montre que,pour tout A œ M, on a

Af dµ = lim

n

Afn dµ Æ ‹(A),

donc f œ E et de plus ⁄

Xf dµ = a.

On va montrer que f est la fonction cherchée, c’est à dire que ‹ = ‹ ≠ fµest étrangère à µ. D’après le théorème 4.2.1, il existe Ak tel que (‹ ≠ 1

k µ)+ estconcentré sur Ak et (‹ ≠ 1

k µ)≠ est concentré sur X \Ak. On pose A = fiŒk=1Ak

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 57

et B = X \ A. On a donc, pour tout k, (‹ ≠ 1k µ)+ est concentré sur A, d’ou

(‹ ≠ 1k µ)(B) Æ 0 pour tout k, ce qui implique ‹(B) = 0. Il su�t alors de

montrer que µ(A) = 0 pour prouver que ‹ = ‹ ≠ fµ et µ sont étrangères. Orsi µ(A) > 0, il existe k telle que µ(Ak) > 0, or ‹|Ak

Ø 1k µ|Ak

, ce qui impliqueque

‹|AkØ

3f + 1

k

4µ|Ak

d’ou‹ Ø

3f + 1

k1|Ak

4µ,

en particulier g = f + 1k 1|Ak

œ E mais⁄

g dµ >⁄

f dµ,

ce qui est une contradiction et achève la preuve du théorème. ⌅

Par exemple, si µ = ⁄[0,1] et ‹ = ⁄[0,1] + ”{1} alors

d‹

dµ= 1[0,1) et ‹s = ”{1}.

Au vu de la démonstration du théorème de Radon-Nykodim, il est clairque l’on peut remplacer la mesure complexe par une mesure (positive) ‡-finie, où encore une mesure signée ‡-finie. Une mesure signée est la di�érencede deux mesures dont l’une des deux au moins est finie.

Corollaire 4.2.1 (Théorème de Radon-Nikodym). Soient (X, M, µ) un es-pace mesuré ‡-fini, et ‹ une mesure complexe sur (X, M) . Alors les deuxénoncés suivants sont équivalents :

i) ‹ ne charge aucun ensemble µ-négligeableii) ‹ est mesurable par µ.

Exercise 4.2.6 Soit µ la mesure de comptage sur IR et ‹ la mesure deLebesgue. Montrer que ‹ ne charge aucun ensemble µ-négligeable et que ‹n’est pas µ-mesurable.

Exercise 4.2.7 On dit qu’une mesure est continue si elle ne charge aucunatome. On dit aune mesure est discrete si son support est discret, c’est alors

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58 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

une somme dénombrable de dirac. Soit µ une mesure ‡-fini sur IRk, Montrerqu’il existe une fonction mesurable f , une mesure µ1 continue et une mesureµ2 discrete tel que

µ = f⁄ + µ1 + µ2et µi sont étrangère à ⁄. Cosntuire une mesure continue étrangère à la mesureLebesgue.

4.2.4 ApplicationLe but cette section est d’aboutir à la formule de changement variable en

di�érentiant la mesure image à l’aide du théorème de Radon-Nikodym. Dansla suite on se place sur IRk muni de la mesure de Lebesgue ⁄.

Théorème 4.2.6 (Changement de variables) Soit U un ouvert de IRk

et „ : U æ IRk continue, injective, et di�érentielle sur X µ U mesurabletelle que ⁄(U \ X) = 0. Alors, en posant Y = „(X), pour toute fonctionf : IRk æ [0, Œ], on

Yf d⁄ =

X(f ¶ „) | det(d„)| d⁄.

Preuve :

D’après le théorème 2.3.1 il su�t de prouver que ‹ = „≠1#⁄ = | det(d„)| ⁄.Mais afin que ceci est un sens, il faut que „≠1 soit mesurable ce qui n’estpas évident puisque a priori elle n’est pas continue. Mais d’après l’exer-cice 2.5.1, comme IRk est ‡-compact, on a que tout ensemble mesurables’écrit comme union dénombrable de compacts et d’un ensemble négligeable.Comme l’image d’un compact par une application continue est compact, ilsu�t de vérifie que l’image d’un ensemble négligeable est mesurable. En faiton fait même mieux c’est l’objet de la première étape.

Etape 1 : ‹ est bien définie et ne charge aucun ensemble Lebesgue-négligeable

Soit E µ X tel que ⁄(E) = 0. On définit

Fn,p =I

x œ E | ’y œ B

A

x,1p

B

fl E on ait |„(x) ≠ „(y)| Æ n|x ≠ y|J

,

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4.2. MESURES COMPLEXES, THÉORÈME DE LEBESGUE-RADON-NIKODYM ET APPLICATIONS 59

par hypothèse E = fin,p>1Fn,p, donc il su�t de montrer que chaque „(Fn,p)est un inclus dans un ensemble de mesure nulle pour conclure grâce à lacomplétude de la mesure de Lebesgue. D’après l’exercice 3.1.4, pour toutÁ > 0, on peut recouvrir Fn,p par des boules B(xi, ri) telle que xi œ Fn,p,ri < 1

p et q⁄(B(xi, ri)) < Á . On vérifie alors facilement que

Œÿ

i=1⁄(„(B(xi, ri))) < nkÁ,

on alors ⁄(„(Fn,p)) = 0, ce qui prouve l’étape 1.

On peut donc appliquer le théorème de Radon-Nikodym : ‹ = f⁄. Grâceà l’étape suivante on détermine f .

Etape 2 : limræ0

⁄(„(B(x, r)))⁄(B(x, r)) = | det(d„x)|

Sans perte de généralité, on suppose que x = 0 et „(x) = 0 et on poseA = d„(0). Dans un premier temps on suppose que A est injectif. On poseF = A≠1 ¶ „ et on va montrer que

limræ0

⁄(F (B(0, r)))⁄(B(0, r)) = 1,

ce qui prouvera le résultat grâce à l’exercice 3.1.3.

Etant donné que dF = Id, pour tout Á > 0 il existe ” > 0 tel que si|x| < ” alors

|F (x) ≠ x| Æ Á|x|.On a alors pour tout r < ”, les inclusions

B(0, (1 ≠ Á)r) µ F (B(0, r)) µ B(0, (1 + Á)r),

d’ou pour tout r < ”,

(1 ≠ Á)k Æ ⁄(F (B(0, r)))⁄(B(0, r)) Æ (1 + Á)k,

ce qui donne le résultat souhaité.

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60 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Enfin si A n’est pas injectif, dans ce cas A(B(0, 1)) est borné et inclusdans un sous-espace strict donc pour tout Á > 0, il existe ÷ tel que ⁄({x œIRk | d(x, A(B(0, 1))) < ÷}) < Á. Or il existe ” > 0 tel que si |x| < ” alors

|„(x) ≠ Ax| Æ ÷|x|.

Donc pour r < ”, „(B(0, r)) µ {x œ IRk | d(x, A(B(0, r))) < r÷} or la mesuredu denier ensemble est inférieur à rkÁ d’après nos hypothèses, donc

⁄(„(B(0, r)) Æ rkÁ,

ce qui permet d’achever la preuve. ⌅

4.3 Théorème Fondamental de l’analyseUne condition intuitivement nécessaire pour que la dérivée d’une fonction

soit intégrable, est que la somme des "sauts" de la fonction soit finie. D’où ladéfinition suivante.

Définition 4.3.1 Soit f : [a, b] æ IR une fonction mesurable. On dit que fest à variation bornée si

supÿ

i

|f(ti) ≠ f(ti+1)| < +Œ,

où le supremum est pris sur toutes les partitions a = t0 < t1 < · · · < tn = b.Dans ce cas on note Tf (a, b) ce supremum, c’est la variation total de f sur[a, b]. On définit également la variation positive de f , comme suit

Pf (a, b) = supÿ

i

Ái(f(ti) ≠ f(ti≠1),

où Ái vaut 1 si f(ti) Ø f(ti≠1) et 0 sinon. Ainsi que la variation négative def , comme suit

Nf (a, b) = supÿ

i

Ái(f(ti) ≠ f(ti≠1),

où Ái vaut ≠1 si f(ti) Æ f(ti≠1) et 0 sinon.

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4.3. THÉORÈME FONDAMENTAL DE L’ANALYSE 61

Théorème 4.3.1 Soit f : [a, b] æ IR une fonction à variation bornée, alors

f(x) ≠ f(a) = Pf (a, x) ≠ Nf (a, x)

etTf (a, x) = Pf (a, x) + Nf (a, x).

En conséquence toute fonction à variation bornée peut s’écrire comme di�é-rence de deux fonctions croissantes bornées.

Exercise 4.3.1 Montrer que l’ensemble des points de discontinuité d’unefonction croissante est au plus dénombrable.Soit alors xn les points de discontinuité et sn = f(x+

n )≠f(x≠n ). On pose alors

Jf =ÿ

n

snhn(x),

où hn(x) = 0 si x < xn, f(xn)≠f(x≠n )

snsi x = xn et 1 sinon.

Montrer que f ≠ Jf est croissante et continue et que Jf est dérivable presquepartout.

Avant de démontrer que toute fonction continue et croissante est dérivablepresque partout, ce qui nous permettra, de prouver que tout fonction à va-riation bornée est dérivable presque partout, nous laissons à titre d’exercicele lemme classique suivant, connu sous le nom de rising sun lemma

Exercise 4.3.2 Soit f une fonction continue sur IR et

E = {x | f(x + h) > f(x) pour un certain h > 0}.

Si E est non vide alors il est ouvert et peux s’écrire comme union disjointed’intervalles ouverts (ak, bk) telle que si l’intervalle est fini alors f(ak) = f(bk).

Théorème 4.3.2 Soit f : [a, b] æ IR une fonction croissante, alors f estdérivable presque partout.

Preuve :

D’après l’exercice 4.3.1, on peut supposer que f est continue. Soit �h(f)(x) =f(x+h)≠f(x)

h .

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62 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Etape 1 : lim suphæ0+

�h(f)(x) < +Œ presque partout.

Soit ” > 0, on pose E” = {x | lim suphæ0 �h(f)(x) > ”}. On montresans di�culté que c’est un ensemble mesurable. Puis en appliquant l’exercice4.3.2 à g(x) = f(x) ≠ “x, on trouve une suite d’intervalles (ak, bk) disjointstelle que f(bk) ≠ f(ak) Ø ”(bk ≠ ak) qui recouvre E”. D’ou

|E”| Æ ÿ

k

|bk ≠ ak| Æ 1”

ÿ

k

(f(bk) ≠ f(ak)) Æ f(b) ≠ f(a)”

,

on conclut en laissant tendre ” vers l’infini.

Etape 2 : lim suphæ0+

�h(f)(x) Æ lim infhæ0,≠

�h(f)(x) presque partout.

Il su�t de montrer que pour tout R > r l’ensemble

E =I

x | lim suphæ0+

�h(f)(x) > R > r > lim infhæ0,≠

�h(f)(x)J

est de mesure nulle. Par l’absurde, il existe O ouvert tel que E µ O |O| <|E|R

r . Cette ouvert est union dénombrable d’intervalles disjoints In, en appli-quant l’exercice 4.3.2, on trouve dans chaque intervalle une union disjointe(ak, bk) telle que

F (bk) ≠ F (ak) Æ r(bk ≠ ak).En appliquant encore une fois l’exercice 4.3.2, on trouve dans chaque inter-valle (ak, bk) une union disjointe (ai

k, bik) telle que

F (bik) ≠ F (ai

k) Ø R(bik ≠ ai

k).

Notons On = fik,i(aik, bi

k), comme f est croissante, on a

|On| =ÿ

k,i

bik ≠ ai

k Æ ÿ

k,i

1R

F (bik) ≠ F (ai

k)

Æ ÿ

k

1R

F (bk) ≠ F (ak) Æ r

R

ÿ

k

(bk ≠ ak)

Æ r

R|In|

Enfin on remarque On µ In et On fl E µ In, d’ou

|E| Æ ÿ

n

|E fl In| Æ ÿ

n

|On| Æ ÿ

n

|In| Æ r

R|O| < |E|,

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4.3. THÉORÈME FONDAMENTAL DE L’ANALYSE 63

d’ou la contradiction souhaitée. ⌅

Bien qu’une fonction croissante continue soit dérivable presque partout,on n’a pas nécessairement f(b)≠f(a) =

s ba f Õ(t) dt comme on l’a vu avec l’es-

calier de Cantor, exercice 4.2.2. Toutefois on a toujours l’inégalité suivante.

Exercise 4.3.3 Soit f une fonction continue croissante. Montrer que f Õ estmesurable et que

⁄ b

af Õ(t) dt Æ f(b) ≠ f(a).

Indication : utiliser le lemme de Fatou sur une suite adéquate.

On va donc considérer une classe de fonctions plus régulières pour dé-montrer le théorème fondamentale de l’analyse.

Définition 4.3.2 Soit f : [a, b] æ IR une fonction, on dit que f est absolu-ment continue si pour tout Á > 0 il existe ” > 0 telle que

Nÿ

k=1bk ≠ ak < ” ∆

Nÿ

k=1f |(bk) ≠ f(ak)| < Á,

pour toute famille (ak, bk) d’intervalles disjoints.

Avant dénoncer le théorème centrale, nous avons besoin d’une versionaméliorée du théorème de recouvrement de Vitali, dont on laisse la démons-tration en exercice.

Exercise 4.3.4 On appelle recouvrement de Vitali d’un ensemble E µ IRd,un ensemble de boules B tel que pour tout x œ E et ÷ > 0 il existe une boulede rayon inférieur à ÷ et contenant x dans B. Montrer que, pour tout ” > 0,on peut extraire de tout recouvrement de Vitali, un ensemble fini de boulesdisjointes Bi tel que

Nÿ

i=1|Bi| Ø |E| ≠ ”.

Théorème 4.3.3 Si f est absolument continue sur [a, b] alors f est dérivablepresque partout. De plus si f Õ = 0 presque partout alors f est constante.

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64 CHAPITRE 4. DEUX THÉORÈMES FONDAMENTAUX

Preuve :

La première partie du théorème est une simple conséquence du fait quef est continue et à variation borné et du théorème 4.3.2 et de l’exercie 4.3.1.Supponsosn que f Õ = 0 presque partout, il su�t alors de montrer que f(b) =f(a) et dans le cas général il su�ra de remplacer [a, b] par n’importe quelsous intervalle. Soit Á > et E = {x | f Õ(x) existe et f Õ(x) = 0}, pour toutpoint x œ E, il existe (ax, bx) tel que bx ≠ax Æ ÷ et f(bx)≠f(ax) Æ Á(bx ≠ax),où ÷ est donné par l’absolue continuité. D’après l’exercice précédent on peutextraire de ce recouvrement, une famille finie (ai, bi) d’éléments disjoints telleque ÿ

i

bi ≠ ai Ø (b ≠ a) ≠ ”,

où ” est associé Á vis-à-vis de l’absolue continuité.De plus on a

ÿ

i

|f(bi) ≠ f(ai)| Æ Á(b ≠ a).

Comme les (ai, bi) sont disjoints, leur complémentaire est également uneunion disjointe d’intervalle que l’on notera (ck, dk). En appliquant l’absoluecontinuité on obtient ÿ

k

|f(dk) ≠ f(ck)| Æ Á.

Finalement en sommant et en faisant tendre Á vers 0, on obtient le résultatsouhaité. ⌅Corollaire 4.3.1 (Théorème fondamental de l’analyse) Soit f une fonc-tion absolument continue sur [a, b], alors f Õ existe presque partout et

f(b) ≠ f(a) =⁄ b

af Õ(t) dt.

Exercise 4.3.5 Démontrer ce théorème.

4.4 Le théorème de Rademacher

4.5 Ensemble rectifiable et inégalité isopéri-métrique

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Chapitre 5

Intégration à valeursvectorielles

5.1 Intégration dans un espace réflexifThéorème 5.1.1 Soient (X, M, µ) un espace mesuré et E un espace vec-toriel normé réflexif. Soit f : X æ E mesurable quand E est muni de latopologie faible, telle que

s Îf(x)Î dµ(x) < Œ. Alors il existe un unique élé-ment I de E tel que

È›, IÍ =⁄

XÈ›, f(x)Í dµ(x) pour tout › œ Eú.

On dit que I est l’intégrale faible de f et on note

I =⁄

Xf(x) dµ(x).

Preuve :On remarque d’abord que ÎfÎ est mesurable, puisque la norme est semi-inférieurement continue pour la topologie faible. Pour tout › œ Eú, on a

|È›, f(x)Í| Æ Î›Î Îf(x)Îdonc x ‘æ È›, f(x)Í œ L1(µ) pour tout › œ Eú. On pose alors pour tout › œ E,

l(›) =⁄

È›, f(x)Í dµ(x),

on vérifie que l définit bien une forme linéaire continue sur Eú. Donc l œEúú © E par réflexivité, ce qui achève la preuve. ⌅

65

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66 CHAPITRE 5. INTÉGRATION À VALEURS VECTORIELLES

Exercice 5.1.1 Soient (X, M, µ) et (Y, N , ‹) deux espace mesuré, définirune intégrale pour les fonctions de X dans Lp(Y, ‹), avec 1 < p < Œ. Demême pour p = 1, en supposant que X et Y sont ‡-finis.

5.2 Intégrale de BochnerLe but de cette section est définir une intégrale de Lebesgue à valeur dans

un Banach. Par contre il n’aura pas de preuve, on renvoie à [Lan93] pour lesdétails. Dans toute cette section, on fixe E un espace de Banach que l’onmunit des boréliens et un espace mesuré (X, M, µ).

Théorème 5.2.1 Soit (fn) une suite de fonctions mesurables sur X à va-leurs dans E. Si fn æ f simplement, alors f est mesurable.

Comme dans le cas complexe on définit les fonctions simple comme unecombinaison linéaire de fonctions caractéristiques d’ensembles de mesure fini,c’est-à-dire

Nÿ

i=1ai1Ai

,

où ai œ E et µ(Ai) < Œ.

Définition 5.2.1 (µ-mesurabilité) Soient (X, M, µ) un espace mesuré etf : X æ E. On dit que f est µ-mesurable, s’il existe une suite de fonctionssimples qui converge µ-presque partout vers f .

Exercice 5.2.1 Montrer que si l’espace mesuré est complet alors la µ-mesurabilitéimplique la mesurabilité.

A partir de maintenant on ne considère que des espaces mesurés complets.

Théorème 5.2.2 Soit (fn) une suite de fonctions µ-mesurables sur X àvaleurs dans E. Si fn æ f presque partout, alors f est µ-mesurable.

Corollaire 5.2.1 Si X est ‡-fini et E est séparable alors la µ-mesurabilitéet la mesurabilité sont deux notions équivalentes.

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5.2. INTÉGRALE DE BOCHNER 67

Les théorèmes précédents nous ont permis de définir une notion de me-surabilité stable par passage à la limite. Ce qui est essentielle pour définirune intégrale d’une fonction par approximation par des fonctions "simples".De plus sous des hypothèses raisonnables, cette notion est équivalente à lanotion classique de mesurabilité.

Lorsque s = qNi=1 ai1Ai

est une fonction simple, on définit l’intégrale des comme suit ⁄

Xs dµ =

Nÿ

i=1µ(Ai)ai,

avec la convention µ(A) ◊ 0 = 0. On vérifie sans peine que cette définitionest indépendante de la décomposition de s. De plus cette intégrale définitune forme linéaire sur les fonctions simples et vérifie l’inégalité triangulaire,c’est-à-dire

....⁄

Xs dµ

.... Æ⁄

XÎsÎ dµ.

Définition 5.2.2 Une fonction f : X æ E est dite intégrable s’il existe unesuite de fonctions simples (sn) telle que

i) sn æ f µ-presque partout,ii)

sX Îsn ≠ fÎ dµ æ 0.

On dit que sn est une suite approximante de f .

Théorème 5.2.3 (Critère d’intégrabilité) Une fonction f : X æ E estintégrable si et seulement si f est µ-mesurable et

sX ÎfÎ dµ < Œ.

Définition 5.2.3 Soit f : X æ E intégrable, on définit l’intégrale de fcomme suit ⁄

Xf dµ = lim

n

Xsn dµ,

où sn est une suite approximante. 1

Proposition 5.2.1 (linéarité) Soit F un espace de Banach et T : E æ Fune application linéaire continue. Si f : X æ E est intégrable alors T (f) estintégrable et ⁄

XT (f) dµ = T

3⁄

Xf dµ

4.

1. On vérifie sans peine que cette définition ne dépend pas de la suite choisie.

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68 CHAPITRE 5. INTÉGRATION À VALEURS VECTORIELLES

Exercice 5.2.2 Vérifier que le théorème de convergence dominé et le théo-rème de Fubini sont encore vrais pour des intégrales à valeurs dans un Ba-nach.

Exercice 5.2.3 Soit G un groupe localement compact et f œ Cc(G) et g œL1(G). Vérifier que la convolution f ú g n’est rien d’autre que l’intégrale deBochner de l’application x ‘æ f(x)Lxg.

5.3 Formule de Cauchy généraliséeLe théorème suivant généralise la formule de Cauchy pour les fonctions

holomorphe à des fonctions à valeurs vectorielles.

Théorème 5.3.1 Soit U un ouvert de C, E un espace de Banach et f : U æE holomorphe 2. Pour tout disque D(x, r) tel que D(z0, r) µ U et z œ D(z0, r)on a

f(z) = 12fii

ˆD(x,r)

f(›)› ≠ z

d›.

Preuve :Soit l : E æ C une forme linéaire continue, alors

l

A1

2fii

ˆD(x,r)

f(›)› ≠ z

d›

B

= 12fii

ˆD(x,r)

l(f(›))› ≠ z

d› = l(f(z)),

d’après la formules de Cauchy classique. D’après le théorème de Hahn-Banach,on a l’égalité désirée. ⌅

2. c’est à dire C-dérivable.

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Chapitre 6

Généralités sur les algèbres deBanach

6.1 Rappel sur les espaces de BanachTout d’abord une conséquence remarquable du théorème de Baire est le

théorème suivant qui nous assure, entre autre chose, qu’une suite est bornéesi et seulement si elle est bornée contre toute forme linéaire continue, voir[Rud80] 5.10. En particulier toute suite qui converge faiblement est bornée.

Théorème 6.1.1 (Banach-Steinhaus) Soient X un espace de Banach, Yun espace vectoriel de normé et une suite d’opérateurs linéaires bornés (T–)entre X et Y , alors si pour tout x œ X on a

sup–

ÎT–(x)Î < +Œ,

il existe M > 0 tel quesup

–ÎT–(x)Î Æ M.

Nous rappelons également une des conséquences du théorème de Hahn-Banach, pour plus de précision voir [Rud80] 5.16 à 5.21.

Théorème 6.1.2 (Hahn-Banach) Soit E un espace vectoriel (réel ou com-plexe) normé et x œ E \ {0}, il existe une forme linéaire continue f œ E Õ, denorme 1, telle que f(x) = ÎxÎ.

69

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70 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

6.2 DéfinitionsDéfinition 6.2.1 Une algèbre A sur C est un espace vectoriel muni d’unemultiplication qui vérifie

i) Bilinéarité : pour tout –, — œ C et x, y, z œ A on a

(–x + —y)z = –(xz) + —(yz),

x(–y + —z) = –(xy) + —(xz),

ii) Associativité : x(yz)=(xy)z .

Lorsque A possède une unité, on la notera 1A (ou simplement 1) et onparlera d’algèbre unitaire.

Définition 6.2.2 Une algèbre normée A est une algèbre munie d’une normeÎ . Î qui vérifie

ÎxyÎ Æ ÎxÎ ÎyÎ pour tout x, y œ A.

Une algèbre de Banach est une algèbre normée complète.

Exemples :

i) L’ensemble des matrices Mn(C) est une algèbre de Banach pour la mul-tiplication et

Î(aij)Î =ÿ

ij

|aij|.

ii) Soit E un Banach, B(E) l’ensemble des endomorphismes continues deE muni de la composition et de la norme d’opérateur est une algèbre deBanach.

iii) Soit X un espace compact, C(X), l’ensemble des fonctions continuesmuni de la multiplication et de la norme uniforme est une algèbre deBanach.

iv) L’algèbre du disque des fonctions continues de D dans C et holomorphesur D est une sous-algèbre de Banach de C(D).

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6.2. DÉFINITIONS 71

v) L’algèbre de Weiner des fonctions continues de T dans C telles que

ÎfÎ =ÿ

nœZ|f(n)| < Œ,

où f(n) = 12fi

⁄ 2fi

0f(ei◊)e≠in◊ d◊,

munie de la multiplication et de Î . Î est une algèbre de Banach.vi) L’algèbre de Convolution L1(IR,C) munie de Î Î1 est une algèbre de

Banach.Le dernier exemple se généralise à tout groupe localement compact muni

de µ, une mesure de Haar. En e�et, l’ensemble des fonctions f : G æ Cintégrables par rapport à µ, muni de la norme

ÎfÎ =⁄

G|f | dµ,

et de la multiplication

f ú g(x) =⁄

Gf(y)g(y≠1x) dµ(y),

est une algèbre de Banach. De plus elle est commutative si et seulement si Gl’est.

Exercice 6.2.1 Vérifier la dernière assertion.

Par contre ce n’est pas une algèbre unitaire, mais on peut définir uneapproximation de l’unité comme suit. Soit U un voisinage symétrique etcompact de e, par le lemme d’Urysohn, il existe une f œ Cc(G, [0, 1]), quel’on peut supposer également symétrique, telle que f|U © 1 sur U , quitte ànormaliser f , on a fU œ Cc(G, [0, +Œ[) telle que f|U > 0 sur U et

sG fU dµ =

1. Soit (Ui)iœIune base de voisinage voisinage symétrique compact de e alors(fUi

)iœI forment une approximation de unité, dans le sens ou pour tout g œL1(G) on a (f úfUi

) et (fUiúf) converge f dans L1(G). De plus si f œ Cc(G)

alors la convergence est ponctuelle.

Exercice 6.2.2 Démontrer les deux dernières assertions.

La multiplication à gauche, Lx(y) = xy, est un élément de B(A), en faiton peut considérer A comme une sous-algèbre de B(A) grâce au théorèmesuivant.

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72 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

Théorème 6.2.1 Soit une algèbre de Banach A unitaire, alors l’applicationx ‘æ Lx définit un isomorphisme d’algèbre de A sur une sous-algèbre ferméede B(A) tel que

i) L1 = Id,ii) pour tout x œ A on a

ÎxÎÎ1Î Æ ÎLxÎ Æ ÎxÎ.

En particulier pour la norme (équivalente) ÎxÎ1 = ÎLxÎ on a Î1Î1 = 1.

Dés lors, en présence d’une algèbre de Banach unitaire on supposera toujoursque Î1Î = 1. L’application x ‘æ Lx est appelée représentation régulièrede A.

6.3 Spectre d’un élément d’une algèbre deBanach

Dans cette section A désigne une algèbre de Banach unitaire.

Définition 6.3.1 Soit x œ A, on appelle spectre de x, que l’on note ‡(x),l’ensemble des ⁄ œ C tel que x ≠ ⁄1 n’est pas inversible.

Exercise 6.3.1 Soit a, b œ A, si ⁄ ”= 0 alors ⁄ œ ‡(ab) … ⁄ œ ‡(ba).

Exercice 6.3.1 Soit x œ A tel que ÎxÎ < 1, montrer que 1≠x est inversibleet que 1

(1 ≠ x)≠1 =Œÿ

n=0xn.

En déduire que l’ensemble des éléments inversibles de A, noté A≠1, est unouvert. Enfin montrer que x ‘æ x≠1 est di�érentiable et de di�érentielle h ‘æ≠x≠1hx≠1.

On remarque alors que le spectre est fermé, étant donné que son complé-mentaire est ouvert.

Exercise 6.3.2 Soit B une sous-algèbre fermée de A, montrer que ‡A(x) µ‡B(x) et que ˆ‡B(x) µ ‡A(x).

1. Cette formule est connue sous le nom de série de Neumann.

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6.3. SPECTRE D’UN ÉLÉMENT D’UNE ALGÈBRE DE BANACH 73

Théorème 6.3.1 Pour tout x œ A, ‡(x) est un compact non vide de {z œC | |z| Æ ÎxÎ}.

Preuve du théorème 6.3.1 :

Soit ⁄ œ C tel que |⁄| > ÎxÎ. On a

x ≠ ⁄1 = ≠⁄(1 ≠ ⁄≠1x),

et vu que Î⁄≠1xÎ < 1, d’après l’exercice 6.3.1, x ≠ ⁄1 est inversible. D’autrepart vu que ⁄ ‘æ x ≠ ⁄1 est continue et que A≠1 est ouvert, toujours d’aprèsl’exercice 6.3.1, on déduit que le spectre est fermé et borné, donc compact.

Enfin si ‡(x) était vide, alors, pour toute forme linéaire continue l œ AÕ,l’application définit par

f(⁄) = l((x ≠ ⁄1)≠1)

serait holomorphe sur C. En e�et, par hypothèse elle est définie sur C, et sion utilise le fait que l’application x ‘æ x≠1 est di�érentiable sur A≠1 et quesa di�érentielle est égale à l’application de A dans lui-même définie par

h ‘æ ≠x≠1hx≠1.

Alors f est di�érentiable et sa di�érentielle est égale à

df = ≠l((x ≠ ⁄1)≠2)Id,

qui est conforme, donc f est holomorphe. De plus, on vérifie aisément quef(⁄) æ 0 lorsque |⁄| æ +Œ. D’après le théorème de Liouville f est identi-quement nulle. Ceci étant vraie pour toute forme linéaire, d’après le théorème6.1.2 de Hahn-Banach, (x ≠ ⁄1)≠1 = 0 pour tout ⁄, ce qui est absurde. ⌅

Exercice 6.3.2 (Théorème de Gelfand-Mazur) Montrer que si A estun corps alors A est isométrique à C.

Définition 6.3.2 Soit x œ A, le rayon spectral de x, noté fl(x), est définicomme

fl(x) = sup{|⁄| | ⁄ œ ‡(x)}.

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74 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

Théorème 6.3.2 (Formule du rayon spectrale de Beurling-Gelfand)Soit x œ A, alors

fl(x) = limnæ+Œ

ÎxnÎ 1n .

Preuve :

Soit ⁄ œ ‡(x) alors ⁄n œ ‡(xn). En e�et

xn ≠ ⁄n1 = (x ≠ ⁄1)n≠1ÿ

k=0⁄n≠1≠kxk.

D’ou ⁄ Æ ÎxnÎ 1n , ce qui donne

fl(x) Æ lim infnæ+Œ

ÎxnÎ 1n .

D’autre part, soit l œ AÕ, et comme pour le théorème 6.3.1 posons

f(⁄) = l((x ≠ ⁄1)≠1).

Par définissions f est holomorphe sur C \ B(0, fl(x)), on peut même la déve-lopper en série de Laurent à l’aide de la série de Neumann 2, ce qui donne

f(⁄) = ≠⁄≠1l((1 ≠ ⁄≠1x)≠1) = ≠ 1⁄

Œÿ

k=0

l(xn)⁄n

.

En particulier la suite1l

1xn

⁄n

22est bornée. La dernière assertion étant

vraie pour toute forme linéaire, le théorème 6.1.1 de Banach-Steinhaus nousassure que

1xn

⁄n

2est bornée, ce qui implique lim supnæ+Œ ÎxnÎ 1

n Æ ⁄. D’ou

lim supnæ+Œ

ÎxnÎ 1n Æ fl(x),

ce qui achève la preuve. ⌅

Exercise 6.3.3 Montrer que si ÎxÎ = Îx2Î 12 pour tout x œ A, on a alors

fl(x) = ÎxÎ.

2. Le fait que la série converge sur C \ B(0, fl(x)) alors qu’elle est définiea priori surC \ B(0, ÎxÎ) est conséquence de la formule de Cauchy.

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6.4. IDÉAUX, CARACTÈRES ET TRANSFORMÉ DE GELFAND 75

6.4 Idéaux, caractères et transformé de Gel-fand

Dans cette section A désigne une algèbre de Banach unitaire.

Définition 6.4.1 Un idéal de A est un sous-espace vectoriel I invariant àdroite et à gauche, i.e. AI+IA µ I. Un idéal est dit maximal s’il est di�érentde A et si le seul autre idéal le contenant est l’algèbre A tout entière.

Proposition 6.4.1 Tout idéal maximal est fermé.

Preuve : Si I est un idéal on vérifie sans peine que I est encore un idéal.Donc si M est un idéal maximal comme il est di�érent de A il est disjoint del’ouvert A≠1 et donc son adhérence également, d’où M = M . ⇤

Un exemple d’idéal est donné par le noyau d’une forme linéaire continuecompatible avec la multiplication, ce qui nous amène à la définition suivante.

Définition 6.4.2 On appelle caractère de A, tout homomorphisme 3 de C-algèbre de A vers C. On notera M l’ensemble des caractères de A.

Exercice 6.4.1 L’ensemble des caractères peut être vide, puisque „(1) = 1exclu le caractère trivial. Démontrer ce fait en considérant l’algèbre Mn(C).

Exemples :i) Soit A = C(X) où X est compact. Alors l’évaluation mx(f) = f(x)

défini un caractère de A.ii) Soir G un groupe ALC et A = L1(G, µ) où µ est une mesure de Haar.

Alors à tout élément ‰ œ ‚G, on peut associer

m‰(f) = f(›) =⁄

Gf(x)‰(x) dx,

qui est un caractère de A.

Exercise 6.4.1 Montrer qu’un caractère est automatiquement continue, enparticulier que M est un sous ensemble de la sphère unité de AÕ.

3. Si A n’était pas unitaire on peut utiliser cette définition si on ajoute l’hypothèsecontinue et non nul. C’est d’ailleurs comme cela que l’on concevra les caractères de L

1(G).

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76 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

Comme on l’a déjà remarqué le noyau d’un caractère est un idéal, en faitc’est même un hyperplan, ce qui laisse à penser qu’il est maximal, ce queconfirme le théorème suivant.

Théorème 6.4.1 Soit A une algèbre de Banach unitaire et commutative,L’application „ ‘æ Ker(„) est une bijection de MA sur l’ensemble des idéauxmaximaux.

Preuve :Comme l’algèbre A est commutative, I est un idéal maximal si et seulementsi A/I est un corps. Donc clairement le noyau d’un caractère est un idéalmaximal. D’autre part si deux caractères ont le même noyau alors il sontproportionnels en tant que forme linéaire et comme ils prennent la mêmevaleur sur 1, ils sont égaux. Enfin soit M un idéal maximal alors A/M estun corps. On munit ce corps d’une norme, en posant

Î[x]Î = infuœ[x]

ÎuÎ.

On vérifie sans peine qu’il s’agit bien d’une norme qui fait de A/M une al-gèbre de Banach, elle est donc isomorphe à C d’après le théorème de Gelfand-Mazur, on obtient le caractère cherché en relevant l’isomorphisme, ce quiachève la preuve. ⌅

Exercise 6.4.2 Soit A une algèbre de Banach unitaire et commutative,montrer 4 que MA ”= ÿ. En déduire que x œ A est inversible si et seulementsi pour tout „ œ MA on a „(x) ”= 0.

Dans la suite A désignera une algèbre de Banach unitaire et commuta-tive.

Définition 6.4.3 Pour a œ A on définit a : MA æ C par

a(„) = „(a),

c’est-à-dire l’évaluation en a d’un caractère. a est la transformé de Gelfandde a et l’application a ‘æ a est la transformation de Gelfand.

4. Il faut probablement utiliser Zorn.

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6.4. IDÉAUX, CARACTÈRES ET TRANSFORMÉ DE GELFAND 77

Théorème 6.4.2 Pour tout a œ A, Im(a) = ‡(a). En particulier,

sup„œM

|„(a)| = fl(a).

Preuve :

⁄ œ ‡(a) équivaut à a ≠ ⁄1 n’est pas inversible, c’est à dire il existe„ œ MA tel que „(a) = ⁄, i.e. ⁄ œ Im(a). ⌅

On va maintenant munir MA d’une topologie qui rende continue la trans-formé de Gelfand. Il s’agit de la topologie faible* qui est la topologie la moinsfine rendant les évaluations continues. Une base de cette topologie est donnéepar

n‹

i=1ai

≠1(Ui),

où les Ui sont des ouverts de C. Dés lors le théorème de Banach-Alaoglu etl’exercice 6.4.1 nous assure que MA est relativement compact. En fait on amieux.

Proposition 6.4.2 MA est compact pour la topologie faible*. Si A est uni-taire, alors MA est compact .

Par contre en générale cette application n’est pas surjective, voir l’exercice6.5.2.

Preuve :

Il su�t de montrer que MA est fermé. Or il s’agit de l’ensemble desapplications linéaire continue f de la boules unités qui vérifie f(1) = 1 etf(xy) = f(x)f(y) or c’est conditions sont clairement fermées vis-à-vis à latopologie faible*. ⇤

Dans le cas d’une algèbre on unitaire comme L1(G) on peut seulementdire que MA est relativement compact, car apriori non-fermé. A priori onpeut trouver une suite de caractère qui converge vers 0, comme f ‘æ f(n).

Théorème 6.4.3 La transformation de Gelfand � : A æ C(M,C) est unhomomorphisme d’algèbre continue.

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78 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

Preuve :Le caractère marphisme est évident. Pour la continuité, il su�t de remarquerque

ÎaÎ = sup„œM

|„(a)| = fl(a) Æ ÎaÎ,

ici on a utiliser le théorème 6.4.2. ⌅On rappelle que la topologie compact-ouvert sur C(X,C), où X est un

espace localement compact, est engendrée voisinage suivante

V (K, U) = {f | f(K) µ U},

où K est un compact de X et U un ouvert de C. On vérifie facilement quecette topologie est séparée et qu’en fait la converge d’une suite de fonctionest équivalente à la convergence uniforme sur tout compact.

Exercise 6.4.3 Soit G un groupe ALC et on munit G de la topologie dela convergence uniforme sur tout compact. Montrer que G est un groupetopologique.

Exercise 6.4.4 Soit G un groupe ALC et on munit G de la topologie de laconvergence uniforme sur tout compact. Montrer que l’application ‰ ‘æ m‰

de ‚G dans ML1(G) défini par m‰(f) = f(›) est un homéomorphisme. Endéduire que ‚G est localement compact. On peut en déduire également unéquivalent du théorème de Riemann-Lebesgue : f s’annule à l’infini.

6.5 Exemples d’applications de la théorie deGelfand

Théorème 6.5.1 Les caractères de l’algèbre de Wiener sont exactement lesez : W æ C définis par

ez(f) = f(z),avec z œ T.

Preuve :Soit „ un caractère, I : T æ T définie par

I(ei◊) = ei◊,

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6.5. EXEMPLES D’APPLICATIONS DE LA THÉORIE DE GELFAND79

et on pose u = „(I). Alors u œ T car |u| = |„(I)| Æ ÎIÎ = 1 et de même|u≠1| = |„≠1(I)| Æ ÎIÎ = 1. D’autre part on vérifie que chaque élément deW est limite uniforme de sa série de Fourier, en e�et

Îf ≠ SNÎ Æ ÿ

|n|>N

|f(n)|,

où SN =ÿ

|n|ÆN

f(n)In. D’ou

„(f) = f(u),

ce qui achève la preuve. ⌅

Exercice 6.5.1 En utilisant le fait que les applications polynomiales sontdenses dans l’algèbre du disque, en déduire que les caractères de cette algèbresont exactement les ez : A æ C définis par

ez(f) = f(z),

avec z œ D.

On obtient comme conséquence immédiate du théorème précédent le ré-sultat non-trivial suivant.

Corollaire 6.5.1 (Lemme de Wiener) Si f œ W ne s’annule pas sur T,alors 1

f œ W .

On pourra se convaincre de la puissance de la théorie de Gelfand, enconsultant une preuve du lemme de Wiener basée uniquement sur l’utilisa-tion de série de Neumann, voir [CQ] 3.8 chapitre II.

Attention, les caractères de toutes les algèbres de fonctions ne sont pasforcément réduit au évaluation, comme le montre l’exercice suivant.

Exercice 6.5.2 Soit HŒ l’ensemble des fonction holomorphe borné sur D.i) Montrer que c’est une algèbre de Banach pour la norme sup.

On note I l’application l’identité sur D et N l’ensemble des applicationsde HŒ telles que

f3

1 ≠ 1n

4æ 0 quand n æ +Œ.

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80 CHAPITRE 6. GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGÈBRES DE BANACH

ii) Montrer qu’il existe „ œ MHŒ tel que „(f) = 0 pour tout f œ N et„(I) = 1.

iii) Montrer que „ n’est pas une évaluation.

Par contre le théorème de la couronne de Carleson a�rme que les éva-luations sont denses dans MHŒ voir [CQ].

6.6 Théorème de Levy-WienerSoient A une algèbre de Banach commutative unitaire. A l’aide du cha-

pitre précédent, on a la formule de Cauchy suivante :

Soit x œ A, � un ouvert de C contentant ‡(x), “ µ � un contour fermécontenu dans � tel que tout élément de ‡(x) soit d’indice 1 par rapport à “,alors pour tout f holomorphe sur � on pose

f(x) = 12ifi

“f(’)(’e ≠ x)≠1 d’.

Théorème 6.6.1 Soient A une algèbre de Banach commutative unitaire ,x œ A et f une fonction holomorphe sur un voisinage de ‡(x) alors f ¶ x =‰f(x).

Dans le cas de l’algèbre de Wiener où chaque élément de W peut s’iden-tifier à sa transformée de Gelfand on a que f(x) œ W pour toute fonctionholomorphe définie sur un voisinage du spectre de x. On parle de calculfonctionnel holomorphe.

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Chapitre 7

Opérateur sur un espace deHilbert et Cú-algèbre

Dans cette section H désignera un espace de Hilbert et È , Í son produitscalaire, linéaire en la première variable et antilinéaire en la seconde, on parlede forme sesquilinéaire.

Un outil fondamental pour l’étude des espaces de Hilbert est le lemme deRiesz, voir [Rud80] 4.12.

Lemme 7.0.1 (Riesz) Soit l une forme continue sesquilinéaire sur H alorsil existe un unique opérateur A œ B(H) tel que

l(x, y) = ÈA(x), yÍ pour tout x, y œ H.

Définition 7.0.1 Soit A œ B(H), il existe un unique opérateur Aú œ B(H)tel que

ÈAú(x), yÍ = Èx, A(y)Í pour tout x, y œ H.

Aú est appelé l’adjoint de A.

Dorénavant, on notera aussi ⁄ú pour le conjugué d’un nombre complexe⁄.

Exercise 7.0.1 Montrer quei) Aúú = A,ii) (–A + —B)ú = –úAú + —úBú,

81

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82CHAPITRE 7. OPÉRATEUR SUR UN ESPACE DE HILBERT ET Cú-ALGÈBRE

iii) (AB)ú = BúAú,iv) ÎAAúÎ = ÎAÎ2.Indication : pour le iv) montrer que si A = Aú alors ÎAÎ = supÎxÎÆ1 |ÈAx, xÍ|.Définition 7.0.2 On dit que A œ B(H) est auto-adjoint si A = Aú, normalsi AAú = AúA et unitaire si AAú = AúA = Id. On dit que A œ B(H) estpositif si pour tout x œ H on a ÈAx, xÍ Ø 0.

Exercise 7.0.2 Montrer que, si H est complexe, tout opérateur positif A œB(H) est nécessairement auto-adjoint 1. Montrer que tout opérateur positifA œ B(H), tel que ÎAÎ Æ 1, vérifie ÎId ≠ AÎ Æ 1 . Conclure qu’il existe ununique opérateur positif B œ B(H) tel que B2 = A.

Théorème 7.0.2 (Décomposition polaire) Soit A œ B(H), il existe uneune isométrie partielle 2 U œ B(H) telle que A = UR, où R est l’uniqueopérateur positif tel que R2 = AúA. De plus U est complètement déterminépar la condition KerU = KerA.

Preuve :

Soit B positif tel que B2 = AúA, on définit U œ B(ImB, ImA) parU(B(x)) = A(x). Vu qu’on a

ÎB(x)Î2 = Èx, AúA(x)Í = ÎA(x)Î2,

U est bien défini et c’est une isométrie. On peut donc l’étendre à ImB parcontinuité, puis à H tout entier en posant U|(Im(B))‹ = 0. Enfin on a KerA =KerB = (ImB)‹ = KerU . L’unicité suit facilement. ⇤

Définition 7.0.3 (Cú-algèbre) Soit A une algèbre de Banach munie d’uneapplication ú : A æ A, si

i) ú vérifie i),ii) et iii) de l’exercice 7.0.1, on dit que A est une ú-algèbre.ii) Si de plus ú vérifie iv) de l’exercice 7.0.1, on dit que A est une Cú-algèbre.

iii) Enfin si c’est une sous-algèbre fermée A µ B(H) telle que Aú = A, alorson dit que A est une Cú-algèbre d’opérateurs.

1. le reste de l’exercice est vrai dans le cas réel lorsque l’opérateur est supposé auto-adjoint.

2. U|(KerU)‹ est une isométrie.

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83

Dans cette définition on ne suppose pas que A possède une unité. Maisen regardant A comme une sous algèbre de B(A), comme au théorème 6.2.1,on peut la munir d’une unité sans modifier sa structure de Cú-algèbre. Voirparagraphe 2.9 [Arv02] pour une preuve du résultat suivant.

Théorème 7.0.3 Soit A une Cú algèbre et Ae = {La + ⁄1 | a œ A et ⁄ œC} µ B(A) alors c’est une Cú-algèbre pour l’involution (La + ⁄Id)ú = Laú +⁄úId et la norme d’opérateur. De plus la représentation a ‘æ La est uneisométrie et un ú-isomorphisme de A sur un idéal maximale de Ae.

Exercise 7.0.3 Montrer que dans une Cú-algèbre on a nécessairement 1ú =1 et ÎaÎ = ÎaúÎ.

Exemples :i) C(X,C) avec X compact est une Cú-algèbre avec la conjugaison com-

plexe comme involution.ii) Par contre l’algèbre du disque n’est pas une Cú-algèbre pour l’involution

f ú(z) = f(z), car si on considère f(z) = z + i, on a Îf úfÎ = 2 ”= 4.

Exercice 7.0.1 Soit G un groupe localement compact et A = L1(G) quel’on munit de l’involution f ú(x) = �G(x≠1)f(x≠1), où �G est la fonctionmodulaire de G. Montrer que G est une Cú-algèbre si et seulement si G esttrivial.

Définition 7.0.4 Soit a œ A on dit que a est auto-adjoint si aú = a, normalsi aaú = aúa et unitaire si aaú = aúa = 1.

Exercise 7.0.4 Vérifier que si a est auto-adjoint alors ÎaÎ = ÎaúÎ = fl(a).Montrer également que pour tout a œ A on an ‡(aú) = ‡(a)ú.

Proposition 7.0.1 Soit a œ A auto-adjoint et „ œ MA alors „(a) œ IR.

Preuve : On pose „(a) = x + iy, comme Î„Î Æ 1, on a d’une part, pour toutt œ IR,

x2 + (y + t)2 = |„(a + it1)|2 Æ Îa + it1Î2.

D’autre part

Îa + it1Î2 = Î(a + it1)ú(a + it1)Î = Îa2 + t21Î Æ Îa2Î + t2.

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84CHAPITRE 7. OPÉRATEUR SUR UN ESPACE DE HILBERT ET Cú-ALGÈBRE

D’oux2 + y2 + 2ty Æ Îa2Î pour tout t œ IR,

ce qui donne y = 0 et prouve la proposition. ⇤

Corollaire 7.0.1 Soit a œ A auto-adjoint alors ‡(a) µ IR.Soit a œ A et „ œ MA alors „(aú) = „(a).

Attention, ici A n’est pas commutative donc on peut utiliser directement quel’image de a est égale au spectre. Par contre on l’applique sur la sous-Cú-algèbre engendrée par a qui elle est commutative.

Preuve :Soit B la sous-Cú-algèbre engendrée par a. Elle est commutative puisque a estauto-adjoint. D’après le théorème 6.4.2 et la proposition7.0.1 on a ‡B(a) µ IRet on conclut en utilisant l’exercice 6.3.2.

Soit a = b + ic, avec b = a+aú

2 et c = a≠aú

2i . En remarquant que aú = b ≠ icet en tulisant la proposition 7.0.1, on prouve la deuxième assertion. ⇤

Enfin pour conclure ce chapitre, on montre que tout morphisme de Cú-algèbre est automatiquement continue.

Théorème 7.0.4 Soit A et B deux Cú-algèbre et f : A æ B un morphismede Cú-algèbre alors ÎfÎ Æ 1, en particulier f est automatiquement continue.

Corollaire 7.0.2 Soit A et B deux Cú-algèbre et f : A æ B un isomor-phisme de Cú-algèbre alors f est une isomérie.

Preuve du théorème 7.0.4

Tout d’abord on remarque que si x est inversible alors f(x) l’est. Dés lorson a ‡B(f(x)) µ ‡A(x), d’où, d’après l’exercice 7.0.1,

Îf(x)Î = flB(f(x)) Æ flA(x) = ÎxÎ pour tout x œ A auto-adjoint.

On en déduit que

Îf(a)Î2 = Îf(aaú)Î2 Æ ÎaúaÎ pour tout a œ A.

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85

Ce qui donneÎf(x)Î Æ ÎxÎ pour tout x œ A,

et prouve le théorème. ⌅

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86CHAPITRE 7. OPÉRATEUR SUR UN ESPACE DE HILBERT ET Cú-ALGÈBRE

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Chapitre 8

Théorèmes de Gelfand-Naimark

8.1 Théorème de Gelfand-Naimark(version com-mutative)

Théorème 8.1.1 Soit A une Cú-algèbre commutative et M son ensemblede caractères. La transformation de Gelfand réalise un isomorphisme isomé-trique de Cú-algèbre de A sur C(M,C).

Preuve du théorème 8.1.1 :

D’après l’exercice 6.4.3, on sait que � est un morphisme continue d’al-gèbre. D’autre part, en utilisant le théorème 6.4.2, on a

ÎaÎ2Œ = sup

„œM|„(a)|2 = sup

„œM„(a)„(a) = sup

„œM„(aúa) = fl(aúa),

de plus comme aúa est auto-adjoint on a fl(aúa) = ÎaÎ2 d’après l’exercice7.0.1. On a donc bien montré que � était une isométrie, en particulier �(A)est une sous algèbre fermé de C(M,C). Il ne reste plus qu’à montrer qu’elleest dense, ce qui est une conséquence du théorème de Stone-Weierstrass,puisque 1 œ A, �(A) est stable par conjugaison et sépare les points. ⇤

8.2 Calcul fonctionnelle continueSoient A une Cú-algèbre commutative et a œ A. Si f est une fonction

continue sur le spectre de a alors f ¶ a est un élément de C(M,C) ≥= A,

87

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88 CHAPITRE 8. THÉORÈMES DE GELFAND-NAIMARK

d’après le théorème 8.1.1. Donc on peut associé à f un élément f(a) œ A.L’application f ‘æ f(a) est appelée calcul fonctionnelle. Le but du théorèmesuivant est de généraliser ceux-ci à toute Cú-algèbre, non nécessairementcommutative.

Théorème 8.2.1 Soit A une Cú-algèbre et a œ A un élément normal. Alorsil existe un unique morphisme de Cú-algèbre �a : C(‡(a)) æ A tel que�a(Id) = a. On pose alors f(a) = �a(f). De plus pour tout série f(z) =q

n cnzn uniformément convergente sur ‡(a) on a

f(a) =Œÿ

n=0cnan dans A.

La preuve de ce théorème repose sur la proposition suivante, dite d’invariancedu spectre.

Proposition 8.2.1 Soit A une Cú-algèbre et B une sous-Cú-algèbre ferméealors ‡B(a) = ‡A(a) pour tout a œ A.

Preuve :

D’une part, on a déjà, d’après l’exercice 6.3.2, que ‡A(a) µ ‡B(a).D’autre part, soit a œ B , comme aúa est auto-adjoint, on a ‡B(aúa) µ IR,donc l’intérieur de ‡B(aúa) est vide dans C et toujours d’après l’exercice6.3.2 on a donc ‡B(aúa) = ‡A(aúa). Enfin si a est inversible, aúa aussi et0 ”œ ‡A(aúa) = ‡B(aúa), donc aúa est inversible dans B et donc a aussi. Cequi prouve bien que tout élément de B inversible dans A est inversible dansB, ce qui achève la preuve. ⇤

Preuve du théorème 8.2.1 :

Tout d’abord, on remarque l’on a nécessairement �a(f) = qNi,j=0 cijai(aú)j

pour tout polynôme de la forme f(z) = qNi,j=0 cijzi(zú)j. Or l’ensemble des

polynômes étant dense dans C(‡(a)), il su�t de montrer que �a est conti-nue pour avoir le théorème, puisque �a admettra un prolongement unique àC(‡(a)).

Soit B la sous-Cú-algèbre engendrée par a. Comme a est normal cettealgèbre est commutative, on a identifier ‡B(a) = a(MB). Donc le diagrammesuivant

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8.3. ETATS, CONSTRUCTION GNS 89

C(‡B(a)) æ C(MB)√�a ¿ �≠1

Bmontre que si �≠1 est continue alors �a. La continuité de „a est donc une

conséquence du théorème (commutatif) de Gelfand-Naimark.Enfin, la proposition précédente, nous permet de remplacer de ‡B(a) par

‡B(a). ⌅

8.3 Etats, construction GNSTout au long de cette section, A est une ú-algèbre unitaire normalisée,

i.e. Î1Î = 1.

Définition 8.3.1 Une forme linéaire fl : A æ C est dite positive si fl(xúx) Ø0 pour tout x œ A. Un état est une forme linéaire positive vérifiant fl(1) = 1.

Attention on n’a pas supposer que fl était continue mais ça va devenirautomatiquement le cas grâce à la proposition 8.3.1. Mais avant on a besoindu résultat préparatoire suivante.

Exercice 8.3.1 Soit a œ A auto-adjoint tel que ÎaÎ Æ 1. Montrer que 1 ≠ aadmet une racine carré, plus précisément, il existe y œ A, également auto-adjoint tel que y2 = 1 ≠ a.

Indication : Pour cela penser à utiliser une série.

Proposition 8.3.1 Toute forme linéaire positive fl vérifie l’inégalité de Schwarzsuivante

|fl(yúx)|2 Æ fl(xúx)fl(yúy)de plus ÎflÎ = fl(1) et donc tout état est de norme 1.

Preuve :En posant s(x, y) = fl(yúx) on définieune forme sesquilinéaire positive. Lapreuve classique de l’inégalité de Schwarz s’applique et donne l’inégalité sou-haitée. Soit x œ A tel que ÎxÎ Æ 1, alors d’après l’exercice précédent il existey œ A auto-adjoint tel que y2 = 1 ≠ xúx, d’ou

fl(xúx) Æ fl(1),

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90 CHAPITRE 8. THÉORÈMES DE GELFAND-NAIMARK

ce qui donne|fl(x)|2 Æ fl(1)fl(xúx) Æ fl(1)2.

L’autre inégalité étant immédiate, ceci achève la preuve. ⇤

Exercice 8.3.2 Montrer qu’une forme linéaire f qui vérifie ÎfÎ = f(1) = 1est un état.

Définition 8.3.2 Une représentations dune ú-algèbre A est la donné d’unespace de Hilbert H et d’un homomorphisme d’ú-algèbre fi : A æ B(H).

Définition 8.3.3 Soient fl une forme linéaire positive sur A, fi une repré-sentation de A dans un espace de Hilbert H et › œ H. On dit que (fi, ›) estune paire GNS 1 si

i) fi(A)› = H,ii) fl(x) = Èfi(x)›, ›Í pour tout x œ A.

De plus on dit que deux paires GNS (fi, ›) et (fiÕ, ›Õ) sont équivalentes s’ilexiste un opérateur unitaire W : H æ H Õ tel que ›Õ = W (›) et W ¶ fi(x) =fiÕ(x) ¶ W pour tout x œ A.

Beaucoup de ú-algèbre n’ont pas d’unité comme L1(G) où G est un groupelocalement compact. Par contre elle possède une approximation de l’unitépour laquelle la construction de GNS se généralise, voir [Arv76].

Théorème 8.3.1 (Construction GNS) Toute forme linéaire positive fl surA une ú-algèbre unitaire admet une unique paire GNS, à équivalence près.

Au cours de la preuve on utilisera l’exercice suivant.

Exercice 8.3.3 Soit a œ A, tel que ÎaÎ Æ 1, montrer que

fl(xúaúax) Æ fl(xúx) pour toutx œ A.

1. Gelfand, Naimark et Segal : noms des auteurs de la construction qui suit.

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8.3. ETATS, CONSTRUCTION GNS 91

Indication : Utiliser le fait que 1 ≠ aúa admette une racine carré.

Preuve du théorème 8.3.1 :

On poseN = {a œ A | fl(aúa) = 0}.

D’après la proposition 8.3.1, on voit que a œ N est équivalent à fl(xúa) =fl(aúx) = 0 pour tout x œ A. En particulier on voit que N est un idéal àgauche, on pose alors G = A/N et on définit la forme sesquilinéaire suivante

Èx + N, y + NÍ = fl(yúx) pour tout x, y œ A.

On définit alors H comme la complétion de G pour la norme définiepar leproduit sesquilinéaire. Un candidat naturel pour être le vecteur cyclique est

› = 1 + N.

On définit la représentation, comme suit

fi(a)(x + N) = ax + N.

On remarque que pour tout ÷, ’ œ G et a œ A on a

Èfi(a)÷, ’Í = È÷, fi(aú)’Í. (8.1)

Soit a œ A, alors

Èfi(a)(x + N), fi(a)(x + N)Í = Èax + N, ax + NÍ = fl((ax)úax) = fl(xúaúax).

Or d’après l’exercice 8.3.3, on a

fl(xúaúax) Æ fl(xúx),

ce qui prouve que Îfi(a)Î Æ ÎaÎ et donc on peut étendre fi à H tout entier.Enfin, (8.1) implique fi(a)ú = fi(aú) et on a clairement fi(ab) = fi(a)fi(b) doncon a bien une représentation.

D’autre partfi(A)› = {a + N | a œ A},

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92 CHAPITRE 8. THÉORÈMES DE GELFAND-NAIMARK

est dense dans H par définition.

Enfin on a bienÈfi(a)›, ›Í = Èa + N, 1 + NÍ = fl(a).

Soit une autre pair GNS (fiÕ, ›Õ) alors on peut définir l’application W0 :fi(A)› æ fiÕ(A)›Õ sur un sous-espace dense par

W0 : fi(a)› ‘æ fiÕ(a)›Õ.

On vérifie sans peine qu’il s’agit d’une application unitaire qui s’étend enW : H æ H Õ de sorte que les deux paires soient équivalente via W . ⌅

8.4 Théorème de Gelfand-NaimarkTout au long de cette section, A est une Cú-algèbre unitaire. On note A+

l’ensemble des éléments auto-adjoints de A dont le spectre est dans [0, +Œ[.

Le point clef de la preuve du théorème de Gelfand-Naimark est l’existenced’un état. Auparavant, nous donnons des lemmes que nous utiliserons pourla preuve de l’existence d’un état.

Lemme 8.4.1 Soit a œ A un élément auto-adjoint tel que Î1 ≠ aÎ Æ 1 alorsa œ A+. Réciproquement si a œ A+ et ÎaÎ Æ 1 alors Î1 ≠ aÎ Æ 1.

Preuve :

Soit a œ A un élément auto-adjoint tel que Î1 ≠ aÎ Æ 1. On considèrela sous-algèbre B engendrée par a. Comme Î1 ≠ aÎ Æ 1 et que la transfor-mation de Gelfand est une isométrie sur B, on a |1 ≠ a(„)| Æ 1 pour tout„ œ MB. Comme B est commutative, on peut conclure que le spectre de aqui est l’image de a est dans [0, +Œ[.

Soit a œ A+ et ÎaÎ Æ 1 alors ÎaÎ Æ 1 et donc0 Æ a(„) Æ 1 pour tout „ œ MB,

où B est la sous-algèbre engendrée par a. Ce qui donne,0 Æ 1 ≠ a(„) Æ 1 pour tout „ œ MB,

d’ou Î1 ≠ aÎ = Î1 ≠ aÎ Æ 1, ce qui achève la preuve. ⇤

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8.4. THÉORÈME DE GELFAND-NAIMARK 93

Lemme 8.4.2 Soit a œ A un élément auto-adjoint tel que ‡(a) = {0}, alorsa = 0.

Preuve :

D’après l’exercice 7.0.4, on a fl(x) = ÎxÎ = 0. ⇤

On remarquera que c’est faux si on ne suppose pas x auto-adjoint.

Lemme 8.4.3 A+ est un cône convexe.

Preuve :

Si a œ A+ il est clair que ⁄a œ A+ pour ⁄ œ IR+. Soit a, b œ A+ et⁄, µ œ IR+ tels que ⁄ + µ = 1. Soit a = b = 0 et il n’y a rien à démontrersinon on a

.....1 ≠ ⁄a + µb

ÎaÎ + ÎbÎ

..... Æ.....⁄

A

1 ≠ a

ÎaÎ + ÎbÎB..... +

.....µ

A

1 ≠ b

ÎaÎ + ÎbÎB.....

Æ ⁄ + µ = 1.

Ici on a utiliser la deuxième partie du lemme 8.4.1. Enfin, toujours d’aprèsle lemme 8.4.1, on a ⁄a+µb

ÎaÎ+ÎbÎ œ A+, ce qui achève la preuve. ⇤

Théorème 8.4.1 Dans une Cú-algèbre unitaire tout élément de la forme aúaest dans A+. Pour tout a œ A, il existe alors un état fa telle que fa(aúa) =ÎaÎ2.

Preuve :Soient a œ A, x = aúa, B la sous-algèbre unitaire engendrée par x et MBl’ensemble des caractères de B. Puisque le spectre d’un élément auto-adjointest réel, d’après l’exercice 7.0.1, on peut alors définir les deux fonctions f etg de C(MB,C) comme suit

f(„) = max(x(„), 0) et g(„) = ≠ min(x(„), 0).

On a alorsx = f ≠ g et fg = gf = 0.

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94 CHAPITRE 8. THÉORÈMES DE GELFAND-NAIMARK

D’après le théorème de Gelfand-Naimark(commutatif), il existe y, z œ B telsque y = f et z = g. On a alors

x = aúa = y ≠ z et yz = zy = 0,

de plus y et z sont dans A+ 2. D’autre part

zaú(zaú)ú = zaúaz = zyz ≠ z3 = ≠z3 œ ≠A+.

Soit u et v la partie réel et imaginaire de zaú, c’est-à-dire

u = zaú + azú

2 et v = zaú ≠ azú

2i.

On a(zaú)ú(zaú) + zaú(zaú)ú = 2(u2 + v2)

d’ou(zaú)ú(zaú) = 2(u2 + v2) + z3 œ A+

comme z œ A+. D’après l’exercice 6.3.1, on en déduit que le spectre de(zaú)ú(zaú) est nulle. Le lemme 8.4.2, nous assure que (zaú)ú(zaú) = 0, cequi implique que le spectre de ≠z3 est également nulle, or z est auto-adjointdonc finalement on a bien z = 0 et donc aúa = y2 et le spectre de aúa œ A+,ce qui achève la preuve de la première partie du théorème.

Soient a œ A \ {0} et B la sous-algèbre engendrée par a. D’après ce quiprécède et le lemme 8.4.2, on a fl(aúa) œ IRú

+. Et comme B est commutative,il existe „ œ MB tel que „(aúa) = fl(aúa) = ÎaÎ2, une simple applicationdu théorème de Hahn-Banach, nous donne une extension f de „ telle queÎfÎ = ΄Π= 1, et il suit de l’exercice 8.3.2 que f est un état. ⌅

Théorème 8.4.2 (Gelfand-Naimark-1943) Toute Cú-algèbre unitaire ad-met une représentation isométrique et ú-isomorphique dans la Cú-algèbre desopérateurs bornés d’un espace de Hilbert.

Preuve :

2. Ils sont auto-adjoint comme tout élément de B et leur spectre est inclus dans [0, +Œ[.

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8.4. THÉORÈME DE GELFAND-NAIMARK 95

Soit x œ A, d’après le théorème précédent il existe un état fx tel quefx(xúx) ”= 0. On peut alors, d’après le théorème 8.3.1, lui associer une re-présentation fix de A sur un espace Hilbert Hx. On pose alors H = üxœAHx

et

fi(a) =n

xœA{fix(a) | x œ A}.

Il est clair qu’il s’agit d’une représentation injective, puisque Èfia(aúa)›a, ›aÍ =fia(aúa) ”= 0. Le fait que cette représentation est en fait une isométrie est uneconséquence du corollaire 7.0.2. ⌅

Bien sûr, l’espace Hilbert ainsi construit n’a aucune raison d’être sépa-rable. Un des aspect de la théorie des Cú-algèbre est de décrire ces repré-sentations. Bien sûr, il faut supposer un peu plus de structure, ce qui donnenaissance au concept d’algèbre de Von Neumann. On pourra consulter [?]pour un exposé détaillé de cette théorie.

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96 CHAPITRE 8. THÉORÈMES DE GELFAND-NAIMARK

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Chapitre 9

Opérateurs bornés

Dans le chapitre précédent, on a vu que toute Cú-algèbre peut être re-présentée de manière fidèle comme une sous-algèbre d’opérateur d’un espacede Hilbert. A partir de maintenant nous allons nous intéresser uniquementau spectre d’opérateur soit d’un espace de Hilbert dans lui même soit plusgénéralement d’un espace de Banach dans lui même.

Le but de ce chapitre est de généraliser le théorème spectral en dimensioninfinie. Toutefois, il est clair qu’il va falloir revoir nos ambitions à la baissedans le cas général. En e�et nous allons démontrer que pour un opérateurcompact comme en dimension finie il existe une base hilbertienne de vecteurspropres. Par contre, dans le cas général, la notion même de vecteur proprecomme on la connait en dimension finie n’a plus vraiment lieu d’être. Parexemple, si on considère l’opérateur position 1 sur L2([0, 1]) défini par

X(Â)(x) = xÂ(x).Alors il n’existe aucun vecteur dans L2([0, 1]) telle que X(Â) = ⁄Â. En faiton peut trouver une telle fonction, plus précisément, une distribution, c’est”(x ≠ ⁄) mais il est clair qu’elle n’est pas dans L2([0, 1]).

Même s’il est manifeste que l’on ne peut pas trouver de base hilbertiennede vecteurs propres, on peut peut tout de même espérer conserver quelquesconséquences de l’existence d’une telle base. En particulier, soit A un opé-rateur qui admet une base hilbertienne de vecteurs propres (ei) associée auxvaleurs propres (⁄i), alors on peut définir

1. voir le chapitre 11 pour des explications sur cette dénomination.

97

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98 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

1. Le calcul fonctionnelle. Pour tout f œ C(IR), on peut définir f(A)comme

f(A)ei = f(⁄i)ei.

2. Une mesure spectrale. Soit E µ IR, on note VE l’espace vectorielengendré par les vecteurs propres dont les valeurs propres sont dans Eet PE le projecteur orthogonal sur VE. Alors pour tout vecteur unitaireÂ, on définit

ProbÂ(A œ E) = ÈÂ, PEÂÍ.

Plus précisément notre objectif est, étant donné un opérateur A œ B(H)auto-adjoint, de définir une mesure µA sur IR à valeurs dans les projectionsorthogonales sur les sous-espaces de H ayant les même propriétés que E ‘æPE définie plus haut, c’est-à-dire

1. P (ÿ) = 0 et P (IR) = Id,

2. Si les (En) sont disjoints alors pour tout x œ H, on a

µ

A Œ€

n=1En

B

x =Œÿ

n=1µ(En)x,

3. Pour tout borélien E1 et E2, µ(E1 fl E2) = µ(E1) ¶ µ(E2).

On peut alors définir une intégrale à valeurs dans B(H) pour laquelle onaura ⁄

IR⁄ dµA(⁄) = A.

Exercice 9.0.1 Montrer que cela coïncide avec la décomposition spectraleusuelle en dimension finie.

Déslors on pourra définir le calcul fonctionnelle très naturellement par

f(A) =⁄

IRf(⁄) dµA(⁄).

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9.1. RAPPEL SUR LES ESPACES DE HILBERT COMPLEXES 99

9.1 Rappel sur les espaces de Hilbert com-plexes

Dans cette section on rappel quelques propriétés des espaces de Hilbert.On renvoie au chapitre 4 de [Rud80] pour les détails.

Théorème 9.1.1 (Projection orthogonal) Soit H un espace Hilbert et Fun sous-espace fermé. Alors pour tout x œ H il existe un unique y œ F telque

Îx ≠ yÎ = infzœF

Îx ≠ zÎ.

De plus x ≠ y est orthogonal à F .

Corollaire 9.1.1 Soit H un espace de Hilbert et F un sous-espace, on a

F = (F ‹)‹.

Théorème 9.1.2 Soit H un espace de Hilbert et T œ B(H). Alors

Ker T = (Im T ú)‹

etIm T ú = (Ker T )‹.

Corollaire 9.1.2 Soit H un espace de Hilbert et T œ B(H). Alors

Ker (T ≠ ⁄Id) ”= 0 si et seulement si Im (T ú ≠ ⁄ú) n’est pas dense dans H.

Théorème 9.1.3 Soit H un espace de Hilbert séparable, alors il existe unefamille orthonormale (en) dont l’espace engendré est dense dans H. On ditque (en) est une base Hilbertienne.

9.2 GénéralitésTout au long de cette section, E désignera un espace de Banach complexe.

Un opérateur sera une application linéaire continue de E dans lui-même.

Définition 9.2.1 Soit T œ B(E).

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100 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

i) Le spectre ‡(T ) de T est l’ensemble des nombres complexe ⁄ tels queT ≠ ⁄1 n’est pas inversible.

ii) La résolvante fl(T ) de T est C \ ‡(T ).

Exercice 9.2.1 Soit ⁄ œ C et x œ E tels que T (x) = ⁄x, montrer que ⁄ estun élément du spectre. Prouver que la réciproque est fausse en exhibant uncontre-exemple.

Comme cas particulier de la proposition 6.3.1, on rappel que

Proposition 9.2.1 Le spectre d’un élément de B(E) est un compact nonvide de C.

En fait contrairement à la dimension finie, il peut y a avoir plusieursraisons pour qu’un opérateur ne soit pas inversible.

i) Ker(T ≠ ⁄1) ”= {0}, dans ce cas on définit

‡p(T ) = {⁄ œ C | Ker(T ≠ ⁄1) ”= {0}},

c’est le spectre ponctuel de T .ii) Ker(T ≠ ⁄1) = {0} mais Im(T ≠ ⁄1) n’est pas dense dans E, dans ce

cas on définit

‡p(T ) = {⁄ œ C | Ker(T ≠ ⁄1) = {0} et Im(T ≠ ⁄1) ”= E},

c’est le spectre résiduel de T .iii) Enfin si Ker(T ≠ ⁄1) = {0} mais Im(T ≠ ⁄1) est dense dans E mais

di�érent de E , dans ce cas on définit

‡c(T ) = {⁄ œ C | Ker(T≠⁄1) = {0} et Im(T≠⁄1) ”= Im(T ≠ ⁄1) = E},

c’est le spectre continue de T .

Exercice 9.2.2 Soit H un espace de Hilbert complexe, montrer 2 que Sp(A) =Sp(Aú) pour tout A œ H, en déduire que le spectre d’un opérateur auto-adjointest réel.

2. Bien sûr c’est un cas particulier de ce qu’on vu pour les C

ú-algèbres, mais on peutle redémontrer plus directement.

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9.2. GÉNÉRALITÉS 101

Exercise 9.2.1 [Le shift] Soit l1 l’ensemble des suites complexes sommables.On définit T œ B(l1) par

T (a1, a2, . . . ) = (a2, a3, . . . ).

On rappel que le dual de l1 est lŒ l’ensemble des suites bornées. 3 Montrerque l’adjoint de T est T Õ œ B(lŒ) défini par

T (a1, a2, . . . ) = (0, a1, a2, . . . ).

Montrer quespectre spectre ponctuel spectre résiduel spectre continus

T B(0, 1) B(0, 1) ÿ ˆB(0, 1)T Õ B(0, 1) ÿ B(0, 1) ÿ

Exercise 9.2.2 Soit H un espace de Hilbert, montrer que Spr(A) = ÿ pourtout opérateur normal de H.Indication : Montrer que si T est normal alors KerT = KerT ú.

Donc le spectre d’un opérateur normal est composé de son spectre ponc-tuel et de son spectre continue.

Exercice 9.2.3 Soit l2 l’ensemble des suites de carrés sommables muni de sabase hilbertienne canonique (en). On définit l’opérateur T par T (en) = 1

nen.Vérifier que le spectre de T est { 1

n | n œ Nú}, on a donc Specc = {0}.

Théorème 9.2.1 (Spectre d’un Opérateur auto-adjoint) Soit H un es-pace de Hilbert complexe et T œ B(H) auto-adjoint, alors

i) sp(T ) µ IRii) Si ⁄, µ œ Spp(T ) et u, v œ H tels que T (u) = ⁄u et T (v) = µv alors si

⁄ ”= µ on a Èu, vÍ = 0.

Preuve :Le i) est une conséquence du corolaire 7.0.1. Si ⁄, µ œ Spp(T ) et u, v œ Htels que T (u) = ⁄u et T (v) = µv alors si ⁄ ”= µ, alors

⁄Èu, vÍ = ÈT (u), vÍ = Èu, T (v)Í = µÈu, vÍ,d’ou le résultat. ⌅

3. Par contre le dual de l

Πest plus grand que l

1.

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102 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

9.3 Les opérateurs compactsOn peut facilement démontrer le théorème spectral pour des opérateurs

dont l’image est de dimension finie. En e�et, quitte à quotienter par le noyau,on se ramène à la dimension finie. Les opérateurs compacts viennent généra-liser les opérateurs de rang fini comme limite de tels opérateurs.

Définition 9.3.1 Soit H un espace de Hilbert et T œ B(H), T est dit com-pact (resp. de rang fini) si T (B(0, 1)) est relativement compact (resp. inclusdans sous espace de dimension finie). On note K(H) l’ensemble des opéra-teurs compacts.

On remarque que tout opérateur de rang fini est compact.

Exercise 9.3.1 Montrer que si H est de dimension infinie alors 0 œ Sp(T )pour tout T œ K(H).

Exercise 9.3.2 Montrer que si T est compact alors T ú l’est aussi.

Théorème 9.3.1 K(H) est un sous-espace fermé de B(H).

Preuve :

Soit (Tn) une suite d’opérateurs compacts qui converge vers T dans B(H).Soit Á > 0. Pour n assez grand ÎT ≠ TnÎ Æ Á

2 , or il existe x1, . . . , xN tels queTn(B(0, 1)) est inclus dans fiN

i=1B1xi,

Á2

2, donc T (B(0, 1)) est inclus dans

fiNi=1B (xi, Á), ce qui prouve le théorème. ⌅

Tout opérateur qui est limite d’opérateur de rang fini est donc compact.Comme nous allons le voir la réciproque est également vraie dans le cas d’unespace de Hilbert séparable.

Exercise 9.3.3 Soit H un espace de Hilbert et (xn) une suite d’éléments deH convergeant faiblement et T œ K(H), alors T (xn) converge fortement.

Théorème 9.3.2 Soit H un espace de Hilbert séparable, alors l’ensemble desopérateurs de rang fini est dense dans K(H).

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9.4. ALTERNATIVE DE FREDHOLM ET SPECTRE D’UN OPÉRATEUR COMPACT 103

Preuve :

Soient (en) une base hilbertienne de H et En l’espace engendré par {e1, . . . , en}.Pour T œ K(H), on pose Tn = T ¶ Pn, où Pn : H æ En est la projectionorthogonale. Clairement Tn est de rang fini et

ÎT ≠ TnÎ = supÎxÎÆ1

ÎT (x) ≠ Tn(x)Î = supxœE‹

n ,ÎxÎÆ1ÎT (x)Î.

Donc ÎT ≠ TnÎ est décroissante et minoré, notons ⁄ sa limite. Si ⁄ ”= 0 alorsil existe xn œ E‹

n tel que ÎxnÎ = 1 et ÎT (xn)Î Ø ⁄2 . Quitte à extraire une

sous-suite, on peut supposer que xn converge faiblement, notons x sa limite.En fait pour tout y œ H, on a Èy, xnÍ = ÈP ‹

n (y), xnÍ Æ ÎP ‹n (y)Î, or on montre

facilement à l’aide de Parseval que la limite du dernier terme est nulle et doncx = 0. D’après l’exercice 9.3.3, on a ÎT (xn)Î æ 0 ce qui contredit le fait que⁄ ”= 0 et achève la preuve du théorème. ⌅

9.4 Alternative de Fredholm et spectre d’unopérateur compact

Comme on l’a vu plus haut un élément du spectre ne correspond pasforcément à une valeur propre. Toutefois pour les opérateurs compacts, c’estle cas pour tout élément non-nul du spectre, comme nous l’assure le théorèmesuivant.

Théorème 9.4.1 Soient H un espace de Hilbert et T œ K(H). Alorsi) Ker(Id ≠ T ) est de dimension finie,

ii) Im(Id ≠ T ) est fermée.

Corollaire 9.4.1 (Alternative de Fredholm) Soient H un espace de Hil-bert et T œ K(H). Alors Id ≠ T est injective si et seulement si Id ≠ T estsurjective.

Preuve :Supposons que Id≠T est injective et considérons la suite de sous-espace Mn =(Id ≠ T )nH. D’après le théorème précédent Mn est une suite décroissante desous-espace fermé invariant par T . Si M1 ”= H alors Mn+1 ”= Mn pour tout n.En e�et, soit x0 œ H tel que x0 ”œ M1, si (Id ≠ T )n(x0) œ Mn+1 alors il existe

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104 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

y0 tel que (Id ≠ T )n(x0) = (Id ≠ T )n+1(y0) ce qui implique, par injectivitéde Id ≠ T , que x0 = (Id ≠ T )(y0), ce qui est une contradiction. Il existe doncune suite de vecteurs unitaires en œ Mn telle que d(en, Mn+1) Ø 1

2 pour toutn. On a alors

ÎT (en) ≠ T (en+k)Î = Îen ≠ ((Id ≠ T )(en) + T (en+k))Î Ø 12 pour tout k Ø 1,

puisque T (en+k) œ Mn+k µ Mn+1. Ce qui contredit la compacité de T etprouve la première implication du corollaire.

Réciproquement si Id ≠ T est surjective, alors Ker(Id ≠ T ú) = {0},comme T ú est compact, on a d’après ce qui précède et le théorème 9.4.1 queIm(Id ≠ T ú) = H, d’ou Ker(Id ≠ T ) = 0 ce qui achève la preuve du corol-laire. ⇤

Preuve du théorème 9.4.1 :

Pour montrer que Ker(Id ≠ T ) est de dimension finie il su�t de montrerque sa boule unité est relativement compact. Or comme T (x) = x pour toutx œ Ker(Id ≠ T ). On a

B(0, 1) fl Ker(Id ≠ T ) µ T (B(0, 1) fl Ker(Id ≠ T )) µ T (B(0, 1)),

ce prouve i).

La preuve de ii) s’e�ectue en plusieurs étapes. Soit (yn) une suite depoints de Im(Id ≠ T ) qui converge vers y dans H.

Etape 1 : "bonnes" préimages de (yn).

Soit En = {xn | xn ≠ T (xn) = yn}, alors d’après i), c’est un espace a�nede dimension finie, on peut donc choisir un élément qui minimise la norme,que l’on note un. C’est la projection de 0 sur En donc en plus d’avoir

un ≠ T (un) = yn,

on aun œ Ker(Id ≠ T )‹.

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9.4. ALTERNATIVE DE FREDHOLM ET SPECTRE D’UN OPÉRATEUR COMPACT 105

Etape 2 : (un) est bornée.

Supposons que (un) ne soit pas bornée, on pose alors vn = un

ÎunÎ . Quitteà extraire une sous-suite on peut supposer que vn Ô v, à l’aide de l’exercice9.3.3, on en déduit que

vn = T (vn) + yn

ÎunÎ æ v

et que doncv ≠ T (v) = 0,

or v œ Ker(Id ≠ t)‹ puisque cette espace est fermé d’après i). Donc v = 0,mais par convergence forte on doit avoir ÎvÎ = 1, ce qui donne la contradic-tion cherchée.

Etape 3 : Conclusion.

On peut extraite de (un) une sous-suite convergeant faiblement vers u,puis grâce à l’exercice 9.3.3, on a u ≠ T (u) = y, ce qui achève la preuve. ⌅

Exercise 9.4.1 Montrer que si T œ K(H) est auto-adjoint alors Sp(T ) \{0} = Spp(T ) \ {0} et que le seul point d’accumulation de ‡(T ) \ {0} est 0.

Théorème 9.4.2 Soit T œ K(H) alors dimKer(Id ≠ T ) = dimH/(Id ≠T )(H).

Preuve :Soit e1, . . . , en une base de Ker(Id ≠ T ) et f1, . . . , fm une base de H/(Id ≠T )(H).Supposons que n Æ m, on considère alors F œ B(H) l’application définiepar F © 0 sur un complémentaire de Ker(Id ≠ T ) et F (ek) = fk. AlorsT = T + F est une perturbation de T par un opérateur de rang fini doncil est compact. On a�rme que Id ≠ T est injectif. Car sinon il existe xtel que x ≠ T (x) = F (x) œ (Id ≠ T )(H) fl V ect{f1, . . . , fm} = {0}, alorsx œ Ker(Id ≠ T ) fl KerF = {0}, ce qui prouve l’a�rmation. On a donc, parl’alternative de Fredholm, que Id ≠ T est surjectif et donc n = m.

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106 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Supposons que n Ø m, on considère alors G œ B(H) l’application définiepar G © 0 sur un complémentaire de V ect{e1, . . . , em} et G(ek) = ekfk. AlorsT = T + G est une perturbation de T par un opérateur de rang fini donc ilest compact. Il est clair que T est surjectif. On a donc, par l’alternative deFredholm, que Id ≠ T est injectif et ce qui impose n = m. ⌅

Remarque importante : L’alternative de Fredholm nous o�re uneméthode pour résoudre les équations de la forme

⁄x ≠ T (x) = y,

lorsque T est compact et ⁄ ”= 0. Soit ⁄Id ≠ T est inversible et alors il y aune unique solution. Sinon, notre équation a une solution si et seulement siy œ Im(⁄Id ≠ T ). Or Im(⁄Id ≠ T ) = Ker(⁄úId ≠ T ú)‹. On considère alorsf1, . . . , fn une base de Ker(⁄úId ≠ T ú). Notre équation a une solution si etseulement si

Èfi, yÍ = 0 pour tout i.

Théorème 9.4.3 Soient H un espace de Hilbert de dimension infinie et T œK(H). Alors

i) soit Sp(T ) = {0},ii) soit Sp(T ) \ {0} est fini,

iii) soit Sp(T ) \ {0} est une séquence de nombres réels qui tend vers 0.

Preuve :

Utiliser l’exercice 9.4.1. ⌅

Théorème 9.4.4 (Décomposition spectral d’un opérateur compact)Soient H un espace de Hilbert séparable et T œ K(H) auto-adjoint. Alors ilexiste une base hilbertienne de H composée de vecteurs propres de T .

En fait séparable n’est pas essentiel dans le sens où le théorème reste vraisi on se restreint aux sous espace-fermés Im T = (Ker T )‹.

Preuve :

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9.5. UN EXEMPLE : LE LAPLACIEN 107

Soit (⁄n) les valeurs propres non nulles de T et En = Ker(⁄nId ≠ T ).Chaque En étant de dimension finie, il admet une base orthogonal, puisen remarquant, grâce au théorème 9.2.1, que les En sont deux à deux or-thogonaux, on obtient finalement (en) une base hilbertienne de F , où F =V ect{E1, E2, . . .}.On pose alors E = F

‹ et remarque que si S = T|E alors Sp(E) = {0}. Enparticulier fl(S) = 0, mais S est auto-adjoint donc S = 0, et donc E µ KerT .finalement on peut adjoindre une base hilbertienne de KerT à (en), puisqueKerT µ H est séparable. Ce qui achève la preuve. ⌅

9.5 Un exemple : le laplacienSoit � un ouvert de IRn, on note W 1,2(�) l’espace de Sobolev des dis-

tributions admettant des dérivées partielles dans L2(�). On notera W 1,20 (�)

l’adhérence de CŒc (�) dans W 1,2(�).

On définit le laplacien positif comme suit

� = ≠ ˆ2

ˆx21

≠ · · · ≠ ˆ2

ˆx2n

.

On rappel l’existence de solutions au problème de Dirichlet, voir chapitre6 de [Eva10].

Théorème 9.5.1 Pour tout f œ L2(�), il existe un unique u œ W 1,20 (�) tel

que u vérifie�u + u = f (au sens faible).

Exercice 9.5.1 Vérifier que R(f) = u défini un opérateur linéaire bornéde L2(�) auto-adjoint. A l’aide du théorème de Rellich-Kondrakov, montrerqu’il est même compact.

Nous sommes donc en mesure d’appliquer la décomposition spectral : ilexiste une base hilbertienne („n) de L2(�) composée de vecteurs propres de(� + Id)≠1. On admettra que les „n sont CŒ jusqu’au bord, voir chapitre 6de [Eva10] ou encore [HL97] pour les détails sur la régularité des solutionsd’équations elliptiques.

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108 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Exercice 9.5.2 Montrer que les valeurs propres ⁄n, associées aux en, sontdans (0, 1).

En fait (en) est aussi une base hilbertienne de vecteurs propres pour lelaplacien, puisque

(� + Id)≠1en = ⁄nen, ,

ce qui donne�en = µnen,

avec µn = 1µn

≠ 1.

Exercice 9.5.3 à l’aide de cette base donnée une solution de l’équation desondes I

ˆ2uˆt2 + �u = 0 sur IR ◊ �

u = 0 sur IR ◊ ˆ� .

Plus généralement on peut étudier les opérateurs de Schrödinger P =� + V sur IRd où V œ CŒ(IRd,C) à laide de la même méthode. On supposeque V est borné par en dessous 4, c’est à dire qu’il existe C telle que V +C Ø 0.On pose alors

HP = {u œ H1(IRd) | (V + C) 12 u œ L2(IRd)},

Exercice 9.5.4 Montrer que si V (x) æ +Œ quand |x| æ +Œ alors l’injec-tion de HP dans L2(IR) est compacte.

Si l’injection de HP dans L2(IR) est compacte, alors on montre sans pro-blème que la résolvante de P , i.e. (Id ≠ P )≠1, est compacte. En particulieron peut appliquer ceci à l’oscillateur harmonique,

P = ≠ d2

dx2 + x2,

et déduire l’existence d’une base hilbertienne de vecteurs propres pour P .

On pourra consulter [Tes09], pour une étude plus systématique.

4. C’est une hypothèse raisonnable d’un point de vue physique, voir XXX

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9.5. UN EXEMPLE : LE LAPLACIEN 109

9.5.1 Harmoniques sphériques et représentation de SO(3)On désigne par S2 la sphère unité de IR3, i.e.

S2 = {(x, y, z) | x2 + y2 + z2 = 1}.

Tout d’abord, on remarque que SO(3) admet une représentation dansl’espace des fonctions définies sur IR3 par

fi(g)(f)(x) = f(g≠1(x)) pour tout g œ SO(3).

Définition 9.5.1 Une fonction f de IR3 est dite harmonique si elle est C2 etvérifie �f = 0. On note H l l’espace des polynômes homogènes harmoniquesde degré égale à l.

Exercise 9.5.1 Montrer que H l est un espace vectoriel de dimension 2l + 1.Indication : Montrer que � : P l æ P l≠2 est surjective, où P l est l’ensembledes polynômes homogènes de degré l.

On rappelle l’identité d’Euler,

xˆP

ˆx+ y

ˆP

ˆy+ z

ˆP

ˆz= lP pour tout P œ P l.

Proposition 9.5.1 Pour tout l Ø 2, on a

P l = H l ü r2P l≠2.

Preuve :

D’après l’exercice précédent la somme des dimensions de H l et P l≠2 estégale à P l. Il su�t alors de montrer que l’intersection est nulle. Or à l’aidel’identité d’Euler, on obtient

�(r2kP ) = 2k(l + 2k + 1)r2k≠2P + r2k�P.

Alors, soit P œ H l et k le plus grand entier tel que r≠2kP œ P l≠2k. Si k ”= 0,l’identité précédente donne une contradiction, ce qui prouve la proposition.⌅

En particulier on aP l =

n

2kÆl

r2kH l≠2k. (9.1)

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110 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Théorème 9.5.2 H l est invariant par SO(3).

Preuve :

Soit P un polynôme homogène de degré l et g œ SO(3), alors

ˆP ¶ g

ˆxi=

3ÿ

j=1

ˆP

ˆxjgij,

d’ou�(P ¶ g) =

3ÿ

i=1

3ÿ

j=1

A 3ÿ

k=1

ˆ2P

ˆxkˆxkgik

B

gij,

enfin en réordonnant la somme et en utilisant le fait que tgg = Id, on prouvele résultat. ⌅

En restreignant fi à H l on obtient une représentation de SO(3) de dimen-sion 2l + 1.

En fait un polynôme homogène de IR3 est entièrement déterminé par sarestriction à S2. Ce qui nous amène à la définition suivante.

Définition 9.5.2 La restriction d’un polynôme harmonique à S2 s’appelleune harmonique sphérique. On note Hl la restriction des polynôme harmo-nique de degré l.

On munit L2(S2) du produit scalaire : Èf, gÍ =s

S2 fg d‡S2 . fi restreintà Hl est une représentation de SO(3) de dimension finie. De plus elle estunitaire par invariance de la mesure de S2 par action de SO(3).

Exercice 9.5.5 Montrer que Hl est orthogonal à Hk dés que k ”= l.

Indication : Utiliser l’identité d’Euler et une intégration par partie

D’après (9.1), la restriction des polynômes homogènes sur S2 est égaleaux harmoniques sphérique donc par Stone-Weirstrass, les harmoniques sphé-riques sont denses dans L2(S2). Finalement on a

L2(S2) =Œn

l=0Hl.

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9.5. UN EXEMPLE : LE LAPLACIEN 111

On note N le pole nord et GN son stabilisateur dans SO(3). Si H est unsous-espace invariant de L2(S2), alors on note HN l’ensemble des élémentsde H fixé par GN . On a alors le lemme suivant

Lemme 9.5.1 Soit H un sous-espace invariant de L2(S2) de dimension fi-nie, alors HN ”= {Id} et si dim(HN) = 1 alors H est irréductible.

Preuve :

Soit f1, . . . , fn une base hilbertienne de H, on pose alors

G(x, y) =nÿ

i=1fi(x)fi(y).

On a alors pour f œ H,

f(y) =⁄

S2G(x, y)f(x) d‡S2 . (9.2)

On vérifie aisément que la définition de G est indépendante de la base choisie,en particulier on a

G(g.x, g.y) = G(x, y) pour tout g œ SO(3).

Alors l’application x ‘æ G(x, N) est dans HN et est clairement non nulle.

D’autre part si dim(HN) = 1 alors si on a un sous-espace invariant K, onpeut également lui associé un noyau GÕ. Par hypothèse il sera proportionnelleà G . Soit il est nulle et alors c’est que K l’est aussi, sinon on peut décomposertout élément de H en somme de fonction de K à l’aide de (9.2) et doncH = K. Ce qui achève la preuve. ⌅

Exercise 9.5.2 Si P est un polynôme homogène de degré l invariant parGN alors il s’écrit

P =ÿ

2kÆl

akr2kzl≠2k.

Théorème 9.5.3 Les représentations de SO(3) dans Hl sont irréductibles.

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112 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Preuve :

Pour cela il su�t de prouver que dim(HlN) = 1. D’après ce qui précède

on a P = qkÆl akzk. On orthonormalise les zk à l’aide de Gramm-Schmidt,

et on obtient une nouvelle base pk telle que

P =ÿ

kÆl

bkpk.

Mais chaque pk est dans Hk or Hk et Hl sont orthogonaux, donc

P = blpl,

ce qui prouve le théorème. ⌅

Au final on a "cassé" la représentation de SO(3) dans L2(S2) en unesomme de représentations de dimension finie, unitaires et irréductibles. Enfait cette décomposition n’est rien d’autre que la décomposition spectraledu Laplacien de Beltrami sur S2. En e�et en écrivant le laplacien de IR3 encoordonnées sphériques, on a

�f = ≠ˆ2f

ˆr2 ≠ 2r

ˆf

ˆr≠ 1

r2ˆ2f

ˆ◊2 ≠ 1r2 tan ◊

ˆf

ˆ◊≠ 1

r2 sin2 ◊

ˆ2f

ˆÏ2 ,

on remarque alors, que pour tout P œ Hl, on a

�S2P = l(l + 1)P.

Pour plus de détail sur les harmoniques sphériques et faire le lien avec lesreprésentation de SU(2) on pourra consulter [KS10].

9.6 Operateur de FredholmTout d’abord on peut remarquer que l’ensemble des opérateurs compacts

forment un idéal de B(H). On peut donc considérer l’espace quotient, parfoisappelé algèbre de Calkin. On va s’intéresser notamment au rôle particulierjoué par les opérateurs inversibles de ce quotient.

Définition 9.6.1 Soient H un espace de Hilbert et T œ B(H). On dit que Test un opérateur de Fredholm si Ker(T ) est de dimension finie et si Im(T )

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9.6. OPERATEUR DE FREDHOLM 113

est fermé et de codimension finie. On note F(H) l’ensemble des opérateursde Fredholm. On définit l’indice d’un opérateur de Fredholm comme suit,

Ind(T ) = dim Ker T ≠ dim coKer T,

où coKer T = H/T (H).

On remarque que l’alternative de Fredholm nous assure que toute pertur-bation de l’identité par un opérateur compact est d’indice 0.

Exercise 9.6.1 Vérifier que l’hypothèse que l’image soit fermée est en faitsuperflue.

Exercice 9.6.1 Montrer qu’un opérateur de Fredholm auto-adjoint est d’in-dice 0.

Théorème 9.6.1 T œ F(H) si et seulement si T est inversible dans B(H)/K(H).

Preuve :

Soit T œ B(H) tel que T soit inversible, d’inverse S. Alors il existeK1, K2 œ K(H) tels que

Id ≠ ST = K1 et Id ≠ TS = K2.

On a alors Ker(T ) µ Ker(Id ≠ K1) et Im(Id ≠ K2) µ Im(T ), ce qui prouveque T est un opérateur de Fredholm.

Réciproquement soit T œ F(H), P la projection orthogonale sur le noyauet Q la projection orthogonale sur l’image. Alors P et Id ≠ Q sont compacts.Soit C un complémentaire du noyau alors S = T|C est un opérateur inversiblesur l’image de T par le graphe fermé. On pose alors R = S≠1 ¶ Q, et onremarque que

RT = Id ≠ P et TR = Id ≠ (Id ≠ Q).

Ce qui achève la preuve. ⌅

Remarque : Si T œ F(H) et S œ B(H) tel que ST ≠ Id œ K(H) ouTS ≠ Id œ K(H) alors S œ F(H).

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114 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Définition 9.6.2 le spectre essentiel d’un opérateur T œ B(H) est le spectrede T dans B(H)/K(H), on le note ‡e(T ).

Exercise 9.6.2 Montrer que ‡e(T ) est un compact non vide de ‡(T ).

Exercise 9.6.3 Quelle est le spectre essentiel du shift dans l2.

Exercice 9.6.2 Soient p, q, f œ C0([0, 1]) et a, b œ IR.i) Montrer que l’équation

IuÕÕ + puÕ + qu = f

u(0) = a et u(0) = b,

est équivalente àu ≠ K(u) = g

où T : L2([0, 1]) æ L2([0, 1]) est un opérateur intégrale définie par

T (u)(x) = u(x) +⁄ 1

0G(x, y)u(x) dy.

et G œ L2([0, 1] ◊ [0, 1]) vérifie

G(x, y) =I

y(q(x)(1 ≠ x) ≠ p(x)) si y Æ x(1 ≠ y)(q(x)x + p(x)) sinon ,

etg = phÕ + qh ≠ f,

où h(x) = a(1 ≠ x) + bx.

Indication : Montrer que si u est une solution du premier problème alorsuÕÕ est une solution du second. Et montrer que si v est une solution dusecond problème alors

u(x) =⁄ 1

0k(x, y)v(y) dy

est une solution du premier problème pour

k(x, y) =I

x(1 ≠ y) si x Æ yy(1 ≠ x) sinon .

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9.6. OPERATEUR DE FREDHOLM 115

ii) A l’aide l’alternative de Fredholm, en déduire que soit

u ≠ K(u) = g

a une unique solution dans C0([0, 1]) pour tout g œ C0([0, 1]), soit

u ≠ K(u) = 0

a une solution non-triviale.Cette exercice est une initiation à la théorie de Sturm-Liouville, voir [Zet05]pour un exposé plus détaillé.

On remarque que le produit de deux opérateurs de Fredholm est un opé-rateur de Fredholm, mais alors quel est l’indice du nouvel opérateur ?

Théorème 9.6.2 Soit T, S œ F(H), alors TS œ F(H) et

Ind(TS) = Ind(T ) + Ind(S).

Preuve :

La preuve repose sur les deux formules suivantes

dimKerT + dimKerS = dimKerTS + dim(KerT/(ImS fl KerT ))

et

dim coKerT + dim coKerS = dim coKerTS + dim((ImS + KerT )/(ImS)).

En e�et, on alors

dimKerTS Æ dimKerT + dimKerS

etdimcoKerTS Æ dimcoKerT + dimcoKerS.

Enfin on obtient la formule en remarquant que

KerT/(ImS fl KerT ) ≥= (KerT + ImS)/(ImS).

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116 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Exercise 9.6.4 Montre que si T œ F(H) et K œ K(H) alors Ind(T + K) =Ind(T ).

Théorème 9.6.3 (Continuité de l’indice) Soit (Tn) une suite d’opéra-teur de B(H) qui converge vers T œ F(H), alors à partir d’un certain rangTn œ F(H) et Ind(Tn) = Ind(T ).

Preuve :

D’après le théorème 9.6.1, F(H) est ouvert donc Tn œ F(H) pour n assezgrand. De plus, il existe S œ B(H) tel que TS ≠ Id = K œ K(H). Enfin onécrit Tn = T + Rn avec ÎRnÎ æ 0. On a donc que Id + RnS est inversiblepour n assez grand, ce qui donne

Ind(Tn) + ind(S) = Ind((T + Rn)S) = Ind(Id + RnS + K) = 0

d’autre partInd(T ) + ind(S) = 0,

ce qui achève la preuve. ⌅

9.7 Les opérateurs à trace, les opérateurs deHilbert-Schmidt et les opérateurs à noyau

Tout d’abord on généralise la notion de trace au opérateur positif.

Théorème 9.7.1 Soit H un espace de Hilbert muni d’une base hilbertienne(en), pour tout opérateur positif T œ B(H), on définit

Tr(T ) =Œÿ

n=0Èen, T (en)Í. (9.3)

C’est la trace de T et on ai) Tr(T1 + T2) = Tr(T1) + Tr(T2),

ii) Tr(⁄T ) = ⁄Tr(T ) pour tout ⁄ Ø 0,iii) Tr(U≠1TU) = Tr(T ) pour tout opérateur unitaire U œ B(H),iv) Si 0 Æ T1 Æ T2 alors Tr(T1) Æ Tr(T2).

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9.7. LES OPÉRATEURS À TRACE, LES OPÉRATEURS DE HILBERT-SCHMIDT ET LES OPÉRATEURS À NOYAU117

Preuve :Il su�t simplement de vérifier que la définition ne dépend pas de la basechoisie et le iii), le reste est évident. Soit (fn) une autre base hilbertienne.Or on sait qu’il existe S également positif, tel que S2 = T , ce qui donne

Tr(T ) =Œÿ

n=1Èen, T (en)Í =

Œÿ

n=1ÎS(en)Î2

=Œÿ

n=1

Œÿ

m=1ÈS(en), fmÍ2

=Œÿ

n=1

Œÿ

m=1ÈS(fm), enÍ2

=Œÿ

m=1

Œÿ

n=1ÈS(fm), enÍ2

=Œÿ

m=1ÎS(fm)Î2

=Œÿ

m=1Èfm, T (fm)Í.

On montre le iii) en remarquant que (U(en)) est une nouvelle base hilber-tienne. ⌅

Soit T œ B(H), on peut lui associé une "valeur absolue" en prenant laracine carré de T úT , plus précisément on définit |T | comme l’unique opérateurpositif tel que |T |2 = T úT , d’ou la définition suivante.

Définition 9.7.1 Un opérateur T œ B(H) est dit à trace si Tr(|T |) < Œ.On note I1(H) l’ensemble des opérateurs à trace.

Lemme 9.7.1 Tout opérateur est combinaison d’opérateur unitaire.

Preuve :Soit A œ B(H), on commence par écrire A comme somme d’opérateur auto-adjoint :

A = Aú + A

2 + 12i

A ≠ Aú

2i.

Soit B œ B(H) auto adjoint, quite à multiplier par un scalaire, on peutsupposer que ÎBÎ Æ 1 on verifie que B = B+i

ÔId≠B2

2 + B≠iÔ

Id≠B2

2 fourni ladécomposition cherchée. ⇤

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118 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Exercise 9.7.1 Montrer que I1(H) est un ú-idéal 5, et que Tr(AB) = Tr(BA)pour tout A, B œ I1(H).Indication : Utiliser la décomposition polaire et le lemme précédent.

On munit I1(H) de la norme Tr(|T |). On remarquera que la série (9.3)converge absolument pour tout élément T œ I1(H), et que la limite ne dépendpas du choix de la base, on note cette limite également Tr(T ). On peutégalement définit le déterminant d’un opérateur, mais pour cela il faut définirle produit tensorielle d’opérateur, on préfère renvoyer le lecteur intéressé à[Sim05] chapitre 1 à 3.

Exercice 9.7.1 Soit K œ C0([0, 1] ◊ [0, 1]), et H = L2([0, 1]), on pose alors

TK(f)(x) =⁄ 1

0f(y)K(x, y) dy,

montrer que

Tr(TK) =⁄ 1

0K(x, x) dx.

Définition 9.7.2 Un opérateur T œ B(H) est dit de Hilbert-Schmidt siTr(T úT ) < Œ. On notera I2(H) l’ensemble des opérateurs de Hilbert-Schmidt.

Exercice 9.7.2 Montrer que I2(H) est un ú-idéal.

On munit alors I2(H) de la forme sesquilinéaire ÈS, T Í = Tr(T úS). Onvérifie facilement à l’aide de Cauchy-Schwarz que cela à bien un sens.

Théorème 9.7.2 I2(H) est un espace de Hilbert.

Preuve :

5. Un idéal bilatère stable par ú.

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9.7. LES OPÉRATEURS À TRACE, LES OPÉRATEURS DE HILBERT-SCHMIDT ET LES OPÉRATEURS À NOYAU119

Montrons tout d’abord que c’est un espace vectoriel. Soit T, S œ I2(H),⁄ œ C et une base hilbertienne (en), alors

Œÿ

n=1Èen, (T + ⁄S)ú(T + ⁄S)(en)Í =

Œÿ

n=1Î(T + ⁄S)(en)Î2

=Œÿ

n=1

Œÿ

m=1Èem, (T + ⁄S)(en)Í2

=Œÿ

n=1

Œÿ

m=1Èem, (T + ⁄S)(en)Í2

Æ 2Œÿ

n=1

Œÿ

m=1Èem, T (en)Í2 + |⁄|2Èem, S(en)Í2

Æ 2(Tr(T úT ) + |⁄|2Tr(SúS)).

Reste à vérifier la complétude. Pour cela on considère une suite de Cauchy(Tn). On remarque Tn(em) est de Cauchy pour tout m. Un procédé d’extrac-tion diagonale permet alors de conclure. ⌅

Dans ce qui suit (X, µ) désigne un espace mesuré et H = L2(X, µ). Pourtout K œ L2(X ◊ X, µ ¢ µ) on définit TK : H æ H par

TK(f)(x) =⁄

XK(x, y)f(y) dµ(y) pour presque tout x œ X.

Exercice 9.7.3 A l’aide de Fubini et Cauchy-Schwarz, montrer que TK œB(H).

Dans ce cas on dit que K est le noyau de TK .

Théorème 9.7.3 Tout opérateur de la forme TK est un opérateur de Hilbert-Schmidt. Et réciproquement tout opérateur T de Hilbert-Schmidt sur H peuts’écrire comme un opérateur à noyau, c’est-à-dire il existe K œ L2(X◊X, µ¢µ) tel que

T (f)(x) =⁄

XK(x, y)f(y) dµ(y) pour presque tout x œ X.

De plusTr(T úT ) =

⁄|K(x, y)|2 dµ(x)dµ(y).

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120 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Preuve :

Soit TK un opérateur à noyau. Comme L2 est séparable, on peut le munir,à l’aide du procédé de Gram-Schmidt, d’une base hilbertienne que l’on note(en). On a alors

Èen, TK(em)Í =⁄

Xen

XK(x, y)em(y) dµ(y) dµ(x)

=⁄

X◊Xen(x)K(x, y)em(y)dµ ¢ µ(x, y)

= Èem ¢ em, KÍ.D’ou Œÿ

n=1ÎTK(en)Î2 =

Œÿ

n=1

Œÿ

m=1Èem ¢ en, KÍ2 = ÎKÎ2

2.

Ici on a utiliser le fait que (em ¢ en) forme une base hilbertienne de L2(X ◊X, µ ¢ µ). Ce qui prouve la première et la dernière assertion. En fait on aprécisément que l’application

L2(X ◊ X, µ ¢ µ) æ I2(H)K ‘æ TK

est une isométrie sur son image. Pour conclure, il su�t de montrer que l’imageest dense. Pour cela on vérifier que si T œ I2(H), alors Tn définie par

Tn(f) =nÿ

k=1Èek, T (f)Íek,

converge bien vers T dans I2(H). Ce qui achèvera la preuve. ⌅

9.8 Théorème de décomposition spectrale9.8.1 Mesures spectrales

On rappel le théorème suivant comme conséquence du calcul fonctionnelcontinue pour les opérateurs normaux.

Théorème 9.8.1 Soient H un espace de Hilbert et T œ B(H) auto-adjoint.Alors il existe un unique morphisme de Cú-algèbre

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 121

�T : C(‡(T ),C) æ B(H)f ‘æ �T (f) ,

tel que �T (X) = T . De plus, �T est une isométrie sur son image et si f Ø 0alors �T (f) est un opérateur positif.

On peut alors associé une mesure à un opérateur auto-adjoint, puisqu’enprojetant son calcul fonctionnelle on obtient une forme linéaire positive,d’après le théorème précédent.

Définition 9.8.1 Soient H un espace de Hilbert et T œ B(H) auto-adjoint.A tout vecteur x œ H on associe la forme linéaire positive lx : C0(‡(T ),C) æC définiepar

lx(f) = Èx, f(T )xÍ.Le théorème 4.1.1 nous donne alors une mesure de Radon 6 µT

x sur ‡(T ). Ondit que µx est la mesure spectrale associée à x.

9.8.2 Le théorème spectralOn démontre d’abord le théorème dans le cas où il existe un vecteur

cyclique, c’est-à-dire x œ H tel que {P (T )(x) | P œ C[X]} soit dense dans H.

Théorème 9.8.2 Soient H un espace de Hilbert et T œ B(H) auto-adjoint.On suppose de plus qu’il existe un vecteur cyclique pour T . Alors il existe unemesure de Radon finie sur ‡(T ) et une application unitaire

U : H æ L2(‡(T ), µ),

tel queUTU≠1 = MX ,

où MX(f)(x) = xf(x) pour tout f œ L2(‡(T ), µ).

Plus généralement pour toute fonction g œ LŒ(‡(T )) on peut définirl’opérateur Mg : L2(‡(T ), µ) æ L2(‡(T ), µ) par Mg(f) = gf . Ces opérateursvont jouer le rôle des matrices diagonales.

6. En fait une mesure régulière puisque le spectre est un espace polonais.

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122 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Preuve :

Soient x œ H un vecteur cyclique et µTx sa mesure spectrale. On définit

alors V : C[X] æ H comme suit

V (p) = p(T )(x).

On remarque V est une isométrie de (C[X], Î . Î2) dans {P (T )(x) | P œC[X]} µ H , puisque

ÎV (p)Î2 = Îp(T )(x)Î2 = Èx, p(T )ú(p(T )(x))Í = Èx, p(T )(p(T )(x))Í= Èx, |p|2(T )(x)Í =

‡(T )|p|2 dµT

x = ÎpÎ22.

De plus, par hypothèse, l’image de V est dense dans H. Par densité de C[X]dans C0(‡(T ),C), qui lui même est dense dans L2(‡(T ), µT

x ), on étend V enune isométrie V de L2(‡(T ), µT

x ) sur H, et on notera alors U son inverse.Finalement, pour tout p œ C[X], on a

U≠1(p) = p(T )x,

ce qui donne,TU≠1(p) = (Tp(T ))x,

et donc,UTU≠1(p) = Xp(X),

puis par densité on vérifie qu’on a le résultat voulu. ⌅

La preuve dans le cas général nécessite le lemme suivant.

Lemme 9.8.1 Soit H un espace de Hilbert et T œ B(H) auto-adjoint. Alorsil existe un ensemble de vecteurs (xi)iœI tel que si i ”= j on a {P (T )(xi) | P œC[X]}‹{P (T )(xj) | P œ C[X]} et

H = üiœI{P (T )(xi) | P œ C[X]}.

Preuve :

On pose pour x œ H,

Hx = {P (T )(x) | P œ C[X]}.

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 123

Tout d’abord on remarque, puisque T est auto-adjoint, que si y‹Hx alorsHy‹Hx. Puis, on pose S = {x | ÎxÎ = 1} et

D := {D µ S | ’x, y œ D, x ”= y ∆ Hx‹Hy}.

On remarque que (D, µ) est partiellement ordonné et inductif, donc lelemme de Zorn, nous donne un élément maximal D. On a alors

H = üxœDHx.

Sinon il existerait x0 œ S tel que x0‹Hx pour tout x œ D et alors D fi{x0} œD, ce qui serait une contradiction avec le fait que D est maximal . ⇤

Ce qui nous donne dans le cas séparable le théorème suivant.

Théorème 9.8.3 Soient H un espace de Hilbert séparable et T œ B(H)auto-adjoint. Alors il existe une suite de mesures de Radon finie(µn) (finieou dénombrable) sur ‡(T ) et une application unitaire

U : H æ n

n

L2(‡(T ), µn),

tels que si on note (fn) la décomposition de f œ n

n

L2(‡(T ), µn) alors

(UTU≠1f)n = MX(fn) pour tout n.

9.8.3 ApplicationsLe calcul fonctionnel borélien

Dans le paragraphe précédent, on a défini une mesure spectrale commeune forme linéaire positive sur les fonctions continues du spectre, en s’ap-puyant sur le calcul fonctionnelle continue que l’on a défini à l’aide du théo-rème de Gelfand-Naimark. Ici on va étendre le calcul fonctionnelle aux fonc-tions boréliennes. Soient T œ B(H) auto-adjoint et f une fonction mesurablebornée sur ‡(T ), on définit

Qf (x) =⁄

‡(A)f(⁄) dµT

x (⁄).

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124 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Proposition 9.8.1 Qf est une forme quadratique continue.

Preuve :

Soit F l’ensemble des fonctions boréliennes bornées sur ‡(T ) telle queQf soit continue. D’une part, F contient les fonctions continues, d’autrepart, à l’aide du théorème de Lusin 7, on peut approcher toute fonction bo-rélienne bornée par une suite de fonctions continues uniformément bornéesqui converge presque partout. Une application du théorème de convergencedominée nous assure que F contient toutes les fonctions borélienne bornées,ce qui achève la preuve. ⇤

Le lemme de Riesz 7.0.1 nous assure qu’il existe un unique opérateurS œ B(H) tel que

ÈS(x), xÍ = Qf (x),

bien sûr, on pose S = f(T ). De plus on remarque f(T ) est auto-adjoint désque f est réel, puisque dans ce cas Qf œ IR et donc Lf est bine une formesesquilinéaire.

Proposition 9.8.2 Soient f, g deux fonctions boréliennes bornées et T œB(H) auto-adjoint, alors

(fg)(T ) = f(T )g(T ).

Preuve :

Soit F l’ensemble des fonctions boréliennes bornées sur ‡(T ) telles que(fg)(T ) = f(T )g(T ) pour tout g œ C0(‡(T )). D’une part, F contient lesfonction continue, d’autre part, comme on l’a vu plus haut, Qf est continue,par rapport à f , pour la convergence ponctuelle des suites de fonctions uni-formément bornées, donc il en est de même, par polarisation, de la formesesquilinéaire Lf à laquelle elle est associée. En particulier, si (fn) œ F ,

7. On peut appliquer Lusin, car la mesure est régulière par les théorème de régularité2.5.1 et 2.5.2.

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 125

fn æ f et ÎfnÎŒ < +Œ, alors

Èx, (fg)(T )(x)Í = limnæ+Œ

Èx, (fng)(T )(x)Í= lim

næ+ŒÈx, fn(T )g(T )(x)Í

= limnæ+Œ

Lfn(x, g(T )(x))

= Lf (x, g(T )(x)) = Èx, f(T )g(T )(x)Í pour tout x œ H.

Ce qui prouve que F est fermé pour la convergence ponctuelle de suite defonctions uniformément bornée. En appliquant le théorème de Lusin commedans la preuve de la proposition précédente, on conclut que F contient toutesles fonctions boréliennes bornées. Enfin en considérant, F Õ l’ensemble desfonctions boréliennes bornées sur ‡(T ) telles que (fg)(T ) = f(T )g(T ) pourtout g fonction borélienne bornée sur ‡(T ). Alors d’après ce qui précède F Õ

contient C0(‡(T )) et est fermé pour la convergence ponctuelle des suite sdefonctions uniformément bornées. On conclut comme précédemment que F Õ

contient toutes les fonctions boréliennes bornées, ce qui achève la preuve. ⇤

Nous somme en mesure de définir une mesure spectrale à valeurs dans lesprojections.

Théorème 9.8.4 Soit T œ B(H) auto-adjoint, pour tout borélien E de ‡(T ),on pose

µT (E) = 1E(T ).

Alors µT vérifie

i) µT (E) est une projection orthogonale,ii) µT (ÿ) = 0 et µT (‡(T )) = Id,

iii) Si les (En) sont des boréliens disjoints alors pour tout x œ H, on a

µT

A Œ€

n=1En

B

x =Œÿ

n=1µT (En)x,

iv) Pour tous boréliens E1 et E2, µT (E1 fl E2) = µT (E1) ¶ µT (E2).v) Enfin,

T =⁄

IR⁄ dµT (⁄).

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126 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Preuve :Comme 1E est réel et vérifie 1E1E = 1E, on vérifie sans peine que µT (E)est une projection orthogonale. Le ii) est évident et iii) et iv) sont des consé-quences de la proposition précédente. Pour le v) on remarque

Èx, T (x)Í =⁄

‡(T )⁄ dµT

x =⁄

‡(T )⁄ Èx, dµT xÍ,

et on conclut en utilisant la linéarité de l’intégrale de bochner. ⌅

Corollaire 9.8.1 ⁄ œ ‡(T ) si et seulement si 1V (T ) ”= 0 pour tout voisinagede ⁄.

preuve :Supposons qu’il existe Á > 0 tel que 1]⁄ ≠ Á, ⁄ + Á[(T ) = 0 ; On pose VÁ =]⁄ ≠ Á, ⁄ + Á[ et gÁ(t) = 1

t≠⁄ si t ”œ VÁ et 0 sinon. On a alors

(T ≠ ⁄Id)gÁ(T ) =⁄

‡(T )\VÁ

1 dµT =⁄

‡(T )1 dµT = Id,

de même pour (T ≠ ⁄Id)gÁ(T ). La réciproque est immédiate. ⇤

Exercise 9.8.1 Soit S, T œ B(H), si S et T commutent et T est auto-adjointalors montrer que S commute avec f(T ) pour toute fonction borélienne bor-née.

Exercise 9.8.2 [lemme de Schur] Soit T œ B(H) auto-adjoint, on peut aussiassocier à T des espaces spectraux, VE = µT (E)(H).

1. Montrer que VE est invariant par T .

On dit qu’un sous-ensemble A µ B(H) est irréductible si il est stablepar adjoint et que ces seuls sous-espaces invariants sont {0} et H.

2. Montrer que si T commute avec un ensemble irréductible alors T œ CId.Indication : Utiliser le corollaire 9.8.1.

Exercise 9.8.3 Montrer que si T œ B(H) auto-adjoint et f œ S(IR), on a

f(T ) =⁄

IRf(y)e2fiiyT dy.

Indication : Utiliser les propriétés de l’intégrale de Bochner.

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 127

On va donner une second version du théorème 81 où l’on "concaténe" lesL2(‡(T ), µn), mais avant on besoin du lemme suivant

Lemme 9.8.2 Soit H un espace Hilbert séparable et T œ B(H) auto-adjointet µT la mesure spectrale définie plus haut. Il existe µ une mesure positive sur‡(T ) telle que pour tout borélien E µ ‡(T ) on a µT (E) = 0 si et seulementsi µ(E) = 0.

Preuve :

Soit (en) une base hilbertienne et µn la mesure spectrale associée à en, ona en particulier µn(E) = Èen, µT (E)(en)Í . On pose

µ =Œÿ

n=1

1n2 µn.

Soit E un borélien de ‡(T ) tel que µT (E) = 0 alors µn(E) = 0 pour tout net µ(E) = 0. Réciproquement si µ(E) = 0, alors alors µn(E) = 0 pour toutn, en particulier

Èen, µT (E)enÍ = ȵT (E)(en), µT (E)(en)Í pour tout n,

et donc µT (E)en = 0 pour tout n, donc µT (E) = 0, ce qui achève la preuve. ⇤

Théorème 9.8.5 Soient H un espace de Hilbert séparable et T œ B(H)auto-adjoint. Alors il existe un espace mesuré (X, µ) fini et une applicationunitaire

U : H æ L2(X, µ),et une fonction borélienne bornée g de (X, µ), telles que

UTU≠1(f) = Mg(f).

Preuve :On prend Hn une décomposition de H en sous-espace cyclique. On choisitxn œ Hn un vecteur cyclique et on note µn sa mesure spectrale et on l’étendpar 0 en dehors de ‡(T|Hn). Enfin on prend la mesure µ donnée par le lemmeprécédent. Alors µn ne charge aucun ensemble de mesure nulle pour µ doncd’après le théorème de Radon-Nykodim, il existe une fonction mesurablepositive hn telle que µn = hnµ. Alors

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128 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Un : L2(‡(T|Hn), µn) æ L2(‡(T|Hn), µ)f ‘æ Ô

hnf

définie une suite d’applications unitaires. On pose X l’union disjointe des‡(T|Hn) alors L2(X, µ) est égale à la somme direct orthogonale des L2(‡(T|Hn), µ|‡(T|Hn )).Si on définit U comme la concaténation des Un et g comme égale à ⁄ ‘æ ⁄sur chaque ‡(T|Hn) on a le résultat cherché. ⌅

Afin de conclure ce paragraphe, on donne une version du théorème spec-tral pour les opérateurs normaux. Comme on l’a déjà remarqué, tout opéra-teur peut se décomposer sous la forme

T = A + iB,

où A et B sont auto-adjoints. De plus comme T est normal, un simple calculmontre que A et B commutent. Alors la Cú-algèbre engendrée par A et Best commutative et on peut appliquer Gelfand-Naimark et on obtient uncalcul fonctionnelle continue sur cette algèbre et donc une mesure spectral.On peut alors appliquer le théorème précédent pour obtenir un théorèmespectrale pour les opérateurs normaux.

Théorème 9.8.6 Soit H un espace de Hilbert séparable et T œ B(H) unopérateur normal. Alors il existe un espace mesure de masse finie(X, µ), unefonction mesurable bornée f : X æ C et une isométrie U : H æ L2(X, µ)tels que UTU≠1 = Mf .

Le théorème de Peter-Weyl

On a vu à la section 9.5.1 que SO(3) admet une représentation unitairedans L2(S2) qui se décompose en sous-représentations irréductibles de di-mension finie deux à deux orthogonales. Le théorème de Peter-Weyl vientgénéraliser ceci à tout groupe compact.

Soit G un groupe compact muni de sa mesure de Haar µ, comme on l’avu à la section 4.1.3, l’application

fi : G æ GLc (L2(G))g ‘æ Lg

est une représentation unitaire de G. Nous allons décomposer H = L2(G) ensous-espace invariant à l’aide du théorème spectrale.

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 129

Un outil fondamentale dans l’étude des représentation est le lemme Schurdont voici une des nombreuse versions.

Lemme 9.8.3 (Lemme de Schur) Soient fiV : G æ U(V ) et fiW : G æU(W ) deux représentations unitaires irréductibles. Si T : V æ W est équi-variante, c’est-à-dire telle que T ¶ fiV (g) = fiW (g) ¶ T pour tout g œ G, alorsT est soit nulle soit un multiple d’une isométrie. Plus particulièrement, siV = W alors T œ CId.

Preuve :

Soit T ú l’adjoint de T , alors on a aussi T ú ¶ fiW (g) = fiV (g) ¶ T ú pourtout g œ G. Comme T úT est un opérateur auto-adjoint sur V , on peut luiappliquer le théorème spectral et plus particulièrement l’exercice 9.8.2. Maiscomme la représentation est irréductible ses seuls sous-espaces invariants sontV et {0}, donc T úT œ CId. De même pour TT ú, donc T est bien le multipled’une isométrie. ⇤

Si G est abélien, alors en posant T = fi(x) on voit que fi(x) = ⁄(x)Idet que ⁄ œ G. Donc toute représentation irréductible unitaire d’un groupeabélien est de dimension 1. De plus il y a une correspondances entre les ca-ractères et les représentations irréductibles. Comme nous allons le voir dansle cas non-abélien le rôle des caractères est joué par les représentations irré-ductibles unitaires de dimension finie. Notons G les classes d’équivalence deces représentations, on l’appelle le dual unitaire. On choisit une énumérationde G par des indices notés › et les élément de G sont notés fl› : G æ U(V›).

En appliquant le lemme de Schur à la projection orthogonal fi : W æ Ventre deux sous-espaces de H, on obtient le corolaire suivant.

Corollaire 9.8.2 Soient fiV : G æ U(V ) et fiW : G æ U(W ) deux sous-représentations irréductibles d’une représentation fi : G æ U(H). Alors soitfiV et fiW sont équivalentes ou V et W sont orthogonaux.

Une autre conséquence du lemme de Schur, est donnée par le corollairesuivant

Corollaire 9.8.3 Soit fiV : G æ U(V ) une représentation irréductible uni-taire de dimension finie, alors pour tout T œ End(V ) on a

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130 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Tr(T )dim(V )Id =

GfiV (g)TfiV (g)ú dµ(g).

Soit fl› : G æ U(V›) un élément de G, on définie H› le sous-espace de Hengendré par les f›,v,w(g) = Èv, fl›(g)(w)ÍV›

où v, w œ V›. C’est clairement unsous-espace invariant de L2(G). On a alors la conséquence suivante du lemmede Schur.

Proposition 9.8.3 Toute sous-représentation irréductible fi : G æ U(V ) defi : G æ U(H) qui est isomorphe à un fl› est une sous représentation de H›.De plus H› est isomorphe à üdim(V›)V›. En particulier dim(H›) = (dim(V›))2.

Preuve :Soit une sous-représentation irréductible fiV : G æ U(V ) de fi : G æ U(H)qui est isomorphe à un fl›. Il existe alors une application équivariante T :V› æ V . Soit v œ V› et K œ L2(G), alors on a

(T (v) ú K)(g) =⁄

GT (v)(h)K(h≠1g) dµ(h)

=⁄

GLg≠1T (v)(h)K(h≠1) dµ(h)

= ÈLg≠1T (v), KÍ= ÈT (fl›(g≠1)(v)), KÍ= Èfl›(g≠1)(v), T ú(K)Í= Èv, fl›(g)(T ú(K))Í,

où K(h) = K(h≠1). Donc T (v)úK œ H› pour tout K œ L2(G). A l’aide d’uneapproximation de l’unité on a T (v) œ H› et donc V µ H›, ce qui prouve lapremière assertion.

D’autre part, soit (ei)ni=1 une base hilbertienne de V› alors

H› = üni=1Hi

avec Hi = V ect{f›,v,ei| v œ V›}, ce qui prouve la deuxième assertion. ⇤

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9.8. THÉORÈME DE DÉCOMPOSITION SPECTRALE 131

Comme deux représentations non-isomorphes sont orthogonales, d’aprèsle corollaire 9.8.2, alors ü›œGH› est un sous espace invariant qui contienttoute les sous-représentations irréductibles de dimension finie. Reste à mon-trer qu’il s’agit de L2(G), ce que nous donne la proposition suivante.Proposition 9.8.4 L2(G) = ü›œGH›

Preuve :Si ce n’est pas le cas alors il existe f ”© 0 orthogonal à chaque H›, en particu-lier il sera dans l’orthogonal de toute sous-représentation finie de G :æ U(H).

Soit alors K œ L2(G) telle que K(g≠1) = K(g). Comme le noyau estsymétrique et G est compact, alors l’opérateur de convolution

T : L2(G) æ L2(G)f ‘æ f ú K

est un opérateur auto-adjoint compact. D’après le théorème spectrale l’or-thogonal du noyau de cet opérateur se décompose en sous-espace propre dedimension finie. Comme T est équivariante, par invariance de la mesure deHaar, chaque sous espace propre est est une représentation de dimension fi-nie, f est donc orthogonal à chaque sous-espace propre et donc dans le noyaude T . D’ou f ú K © 0 pour tout noyau symétrique, à l’aide d’une approxi-mation de l’unité, on conclut que f © 0, ce qui donne une contradiction etprouve la proposition. ⇤

Théorème 9.8.7 (Théorème de Peter-Weyl) La représentationfi : G æ GLc (L2(G))

g ‘æ Lg,

est isomorphe à une somme direct de représentation irréductible de di-mension finie. En fait

fi =n

›œG

fl›.

Preuve du théorème :Il s’agit d’une conséquence des propositions 9.8.3 et 9.8.4. ⌅

Le théorème de Peter Weyl est la première étape dans l’analyse de Fourriersur les groupes non-abélien, voir [Tao] ou encore [DS09] chapitre 7 et 8, pourplus de détails.

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132 CHAPITRE 9. OPÉRATEURS BORNÉS

Le théorème min-max

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Chapitre 10

Opérateurs non-bornés

Soit H = L2(IR3,C) des opérateurs comme

(xif)(x) = xif(x) pour tout x œ IR3,

(pif)(x) = iˆf

ˆxi(x) pour tout x œ IR3,

jouent un rôle fondamental en physique quantique, mais on ne peut les définirque sur des sous-espace de L2(IR3,C) comme CŒ

c (IR3,C). De plus il ne sontpas continues sur ces sous-espaces, donc il n’y a aucune chance de pourvoirles prolonger à l’espace tout entier. On est donc contraint d’étudier ces opé-rateurs sur leur domaine de définition. Le but de ce chapitre est de donnerune version du théorème spectral pour de tels opérateurs.

10.1 Définitions et généralitésDéfinition 10.1.1 Soit H un espace de Hilbert. Un opérateur non-borné estla donné d’une paire (D, T ) où D est un sous-espace de H et T un opérateurlinéaire de D dans H.

On notera souvent T pour (D, T ) et le domaine d’un opérateur T fixésera noté D(T ).

Définition 10.1.2 On dit que T est une extension de S et on le note S µ Tsi D(S) µ D(T ) et T = S sur D(S).

133

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134 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

Exercise 10.1.1 Soit (X, µ) un espace mesuré et g : X æ C une fonctionmesurable. On considère l’opérateur de multiplication par g sur L2(X, µ).Quel est son domaine de définition ? Montrer qu’il est dense.

Définition 10.1.3 Un opérateur est dit fermé si son graphe est fermé. Ondit qu’un opérateur est fermable s’il admet une extension fermée.

Exercise 10.1.2 Montrer que tout opérateur fermable admet une (unique)plus petite extension fermée, on la notera T .

Exercise 10.1.3 Montrer que la fermeture de1i d

dx , CŒc (IR)

2dans L2(IR) est

1i d

dx , H1(IR)2( ici la dérivée est au sens des distribution).

Exercise 10.1.4 Soit L2(IR) on définit pour tout f œ L1 fl L2 l’opérateurde Frourier

U(f)(›) =⁄

IRf(x)e≠i2fixt dt.

Montrer que si f œ D( ddx) = CŒ

c (IR) alors U(f) œ D(Mx) et que l’on a

d

dxµ U≠1M2ifixU.

Définition 10.1.4 Soit T un opérateur non-borné sur H un espace de Hil-bert. Le domaine adjoint D(T )ú est l’ensemble des vecteur x œ H tel que laforme linéaire

lx : D(T ) æ Cy ‘æ Èx, T (y)Í

soit continue. Un adjoint de T est un opérateur T ú défini sur D(T )ú tel que

Èx, T (y)Í = ÈT ú(x), yÍ pour tout x œ D(T )ú et y œ D(T ).

Exercise 10.1.5 Montrer qu’il existe toujours un adjoint et qu’il est uniquesi D(T ) est dense dans H.

Exercise 10.1.6 Construire un opérateur non-borné de domaine dense dontle domaine de l’adjoint est réduit à {0}.Indication : On pourra commencer par construire un opérateur non fermable.

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10.1. DÉFINITIONS ET GÉNÉRALITÉS 135

A la vu de ces eux exercices, on s’intéressera dans la suite essentiellementaux opérateurs de domaine dense et fermables.

Proposition 10.1.1 Soit deux opérateurs non-bornés T et S sur H, on ai) T µ S ∆ Sú µ T ú,

de plus si D(T ) est dense,ii) T ú est fermé,

iii) T est fermable si et seulement si D(T )ú est dense et dans ce cas T = T úú,iv) si T est fermable alors T

ú = T ú.

Preuve :

En fait l’ensemble des proposition sont une conséquence du fait que legraphe de T ú est l’orthogonal de {(T (x), ≠x) | x œ D(T )} dans H ◊ H. Ene�et soit (a, b) œ H ◊ H, on a alors

È(a, b), (T (x), ≠x)Í = 0 pour tout x œ D(T )…Èa, T (x)Í = Èb, xÍ pour tout x œ D(T )…x ‘æ Èa, T (x)Í est continue sur D(T ) et coïncide avec x ‘æ Èb, xÍ…a œ D(T ú) et b = T ú(a).

La proposition est alors une conséquence des relations d’orthogonalité dansun Hilbert. En e�et le fait que E µ F ∆ F ‹ µ E‹ donne i).

Maintenant supposons que D(T ) est dense, alors T ú est bien défini.

Le fait que E‹ soit toujours fermé assure que le graphe de T ú est ferméet donc ii).

Supposons que T est fermable et soit v œ (D(T )ú)‹ alors d’après le re-marque ci-dessus (v, 0) œ {(T (x), ≠x) | x œ D(T )} mais comme T est unopérateur ceci implique que v = 0 et donc D(T )ú est dense.Réciproquement si D(T )ú est dense alors T úú est bien défini et son grapheest clairement l’adhérence de celui de T puisque (E‹)‹ = E, ce qui prouveiii).

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136 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

Enfin si T est fermable alors D(T )ú est dense, donc on peut définir T úú,on peut également définir T úúú puisque T ú est fermé donc D(T ú)ú est dense,puis en appliquant ii) et iii) on a T ú = T

ú. ⇤

Définition 10.1.5 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéde domaine dense dans H, on dit que T est symétrique si T µ T ú et auto-adjoint si T = T ú

Exercice 10.1.1 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-borné.On a

i) si T est symétrique alors T est fermable,ii) si T est symétrique alors T µ T úú µ T ú,

iii) si T est fermé et symétrique T = T úú µ T ú,iv) si T est auto-adjoint T = T úú = T ú.

Une remarque importante est que tout opérateur symétrique et défini surH est automatiquement continue, c’est le théorème de Hellinger-toeplitz, quel’on peut obtenir ici comme une simple conséquence du graphe fermé.

Exercise 10.1.7 Montrer que Mx est auto-adjoint dans L2(IR).

Définition 10.1.6 Un opérateur est dit essentiellement auto-adjoint si il estsymétrique et si sa fermeture est auto-adjointe.

Exercice 10.1.2 Montrer que (i ddx , CŒ

c (IR)) est essentiellement auto-dajoint.Indication : On pourra soit le montrer à "la main" ou utiliser la définition desespace deSoboloev par l’analyse de Fourrier et simplement remarquer en raf-finant l’exercice 10.1.4 que cet opérateur est unitairement équivalent à M2fix.

Dans ce qui suit on s’intéresse au opérateur auto-adjoint mais tout peutse transposer au opérateur essentiellement auto-adjoint en passant à la fer-meture.

Afin de mieux comprendre le comportement d’un opérateur symétriqueT , nous allons étudier sa résolvante (T ≠ zId)≠1, que l’on note R(z). Onremarque tout d’abord que si T est symétrique et fermé, alors pour toutx œ D(T ) on a Èx, T (x)Í = ÈT (x), xÍ œ IR, en particulier

⁄(È(T ≠ zId)(x), xÍ) = ≠⁄(z)ÎxÎ2,

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10.1. DÉFINITIONS ET GÉNÉRALITÉS 137

d’ou d’après Cauchy-Schwarz,

Î(T ≠ zId)(x)Î Ø |⁄(z)|ÎxÎ. (10.1)

En particulier T ≠zId est injectif dés que ⁄(z) ”= 0. De plus on remarquesi xn œ D(T ) est telle que (T ≠zId)(xn) est convergente , alors d’après (10.1),xn est convergente. On en déduit que Im(T ≠zId) est fermé car T est fermé.On peut alors définir R(z) sur Im(T ≠ zId) et toujours grâce à (10.1) onremarque que R(z) est borné et que ÎR(z)Î Æ 1

|⁄(z)| . Tout ceci nous amèneau théorème suivant qui caractérise le fait d’être auto-adjoint en fonction ducomportement de la résolvante.

Théorème 10.1.1 Soit H un espace de Hillbert et T un opérateur non-bornésymétrique, fermé et T ú son adjoint. Alors, si z œ C \ IR, on a

1. R(z) est défini sur H si et seulement si T ú ≠ zúId est injectif,2. si T est auto-adjoint alors R(z) est défini sur H,3. et réciproquement si R(z) et R(zú) sont définis sur H alors T est auto-

adjoint.

La preuve de ce théorème utilise l’exercice suivant

Exercise 10.1.8 Montrer que si T est symétrique, fermé et z œ C \ IR etque R(z) et R(zú) sont définis sur H alors R(zú) = R(z)ú.

Preuve du théorème 10.1.1 :

En utilisant le fait que l’image de T ≠ zId est fermée, on a

Im(T ≠ zId) ”= H

…Im(T ≠ zId) n’est pas dense… il existe y œ (Im(T ≠ zId))‹ \ {0},

… il existe y ”= 0 tel que |Èy, T (x)Í| = |z|Èy, xÍ| Æ |z|ÎxÎÎyÎ pour tout x œ D(T ),… y œ D(T )ú \ {0} et Èx, (T ú ≠ zúId)(y)Í = È(T ≠ zId)(x), yÍ = 0 pour tout x œ D(T ),… y œ D(T )ú \ {0} et (T ú ≠ zúId)(y) = 0.

Dans la dernière équivalence on utilise le fait que D(T ) soit dense.

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138 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

Pour le ii) on remarque que si T est auto-adjoint alors, d’après (10.1),T ≠ zúId = (T ≠ zId)ú est injectif et donc d’après i) R(z) est défini sur H.

Enfin, si R(z) et R(zú) sont définis sur H alors pour tout x œ D(T )

Èx, R(zú)(T ú ≠ zúId)(y)Í = Èx, R(z)ú(T ú ≠ zúId)(y)Í =ÈR(z)(x), (T ú ≠ zúId)(y)Í = È(T ≠ zId)R(z)(x), (y)Í = Èx, yÍ,

on alors R(zú)(T ú ≠ zúId)(y) = y pour tout y œ D(T )ú, or l’image de R(zú)est inclus dans D(T ), donc T est auto-adjoint.

Exercise 10.1.9 [Caractérisation des opérateurs essentiellement auto-adjoints]Soit T un opérateur non-borné symétrique. Montrer que T est essentiellementauto-adjoint si et seulement si Im(T + iId) et Im(T ≠ iId) sont denses.

Définition 10.1.7 Soit T un opérateur non-borné fermé 1 de domaine dense,le spectre de T ,noté ‡(T ), est constitué des ⁄ œ C tels que T ≠⁄Id : D(T ) æH est inversible et d’inverse borné 2.

Exercise 10.1.10 [Identité de la résolvante] Soit z, w œ C\ IR tels que R(z)et R(w) soient définis sur H alors

(z ≠ w)R(z)R(w) = R(z) ≠ R(w).

En particulier les résolvantes commutent.Indication : Multiplier l’équation par (T ≠ zId)(T ≠ wId).

Théorème 10.1.2 (Caractérisation du spectre d’un opérateur auto-adjoint)Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-borné auto-adjoint de Halors ⁄ œ ‡(T ) si et seulement si il existe une suite xn œ D(T ) telle que

1. ÎxnÎ = 1,2. limnæ+Œ Î(T ≠ ⁄)(xn)Î = 0.

1. On pourrait définir le spectre pour des opérateur simplement fermable, en rempla-çant T par T .

2. Cette condition est superflue par le graphe fermé.

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10.2. LE CALCUL FONCTIONNEL BORÉLIEN 139

Preuve :Supposons tout d’abord qu’une telle suite existe et que ⁄ ”œ ‡(T ), on a alors

1 = ÎxnÎ = ÎR(⁄)(T ≠ ⁄Id)xnÎ Æ ÎR(⁄)Î Î(T ≠ ⁄Id)xnÎ,

ce qui aboutit à une contradiction.

Réciproquement, supposons qu’une telle suite n’existe pas. Alors il existeC > 0 tel que

ÎxÎ Æ CÎ(T ≠ ⁄Id)(x)Î pour tout x œ D(T ). (10.2)

En e�et, sinon il existe xn œ D(T ) tel que

ÎxnÎÎ(T ≠ ⁄Id)(xn)Î æ Œ,

alors la suite xn

ÎxnÎ donne la contradiction souhaitée. En particulier, T ≠ ⁄Idest injective, donc son adjoint qui n’est rien d’autre qu’elle même, car ⁄ œ IR,l’est aussi, donc, d’après le théorème 10.1.1 3, T ≠ ⁄Id est surjective, ce quiachève la preuve par contraposé. ⌅

Exercise 10.1.11 Montrer que T (f) = i dfdx de domaine CŒ

c ((0, 1)) est sy-métrique mais n’est pas essentiellement auto-adjoint dans L2([0, 1]). Décrireles extensions auto-adjointes de T dans T ú.

10.2 Le calcul fonctionnel borélienNous allons définir le calcul fonctionnel à l’aide du théorème suivant que

l’on peut voir comme le pendant holomorphe du théorème de Riesz.

Théorème 10.2.1 (Théorème de représentation de Herglotz) Soit F :H æ H une fonction holomorphe du demi-plan supérieur dans son adhérencetelle que

|F (z)| Æ C

⁄(z) ,

3. Dans le théorème on suppose que z ”œ IR mais ici on a déjà (10.2), donc le résultatest valable.

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140 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

pour C > 0. Alors il existe une unique mesure de Radon positive finie µ surIR telle que

F (z) =⁄

IR

1x ≠ z

dµ(x).

De plus, on a ≠iyF (iy) æ µ(IR) quand y æ +Œ.

Preuve :

Soit FÁ(x) = F (x + iÁ). On va montrer que FÁ+t = FÁ ú Pt où Pt est lenoyau de Poisson Pt(x) = t

fi(t2+x2) . Pour cela on remarque que FÁ+t ≠ FÁ ú Pt

est harmonique en (x, t) et vaut sur 0 sur IR ◊ {0} puis en prenant le symé-trique et en appliquant le théorème de Liouville à l’aide de nos hypothèses,on conclut que FÁ+t = FÁ ú Pt.

Donc, en utilisant les propriétés de la convolution, on remarque que lamasse de la mesure ImFÁ(x)dx est indépendante de Á. En particulier, si onregarde l’ensemble des mesures de Radon sur IR comme le dual de C0(IR)à l’aide du théorème de Riesz, alors, à extraction près, µÁ = ImFÁ(x)dxconverge faiblement * vers une mesure de Radon finie µ.

On trouve alors la formule de représentation à l’aide de la formule de Cau-chy et un contour bien adapté. L’unicité est une conséquence du théorèmede Stone-Weierstrass qui nous a�rme l’algèbre engendrée par les t ‘æ 1

t≠z , oùz œ H est dense dans C0(K) pour tout compact K de IR.

Enfin, on remarque que

≠iyF (iy) =⁄

IR

iy

t ≠ iydµ,

et dans ce cas le théorème de convergence dominée permet de conclure. ⌅

Soit T : D(T ) æ H un opérateur auto-adjoint de domaine dense etx œ H, on définit F : H æ H par

F (z) = ÈR(z)x, xÍ.

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10.2. LE CALCUL FONCTIONNEL BORÉLIEN 141

On remarque tout d’abord que F est holomorphe. En e�et, soit z œ Hfixé et w œ H tel que |w ≠ z| < Im(z), comme ÎR(z)Î Æ 1

⁄(z) , on a

R(w) = (T ≠ wId)≠1 = ((T ≠ zId) ≠ (w ≠ z)Id)≠1 = R(z)(Id ≠ (w ≠ z)R(z))≠1

= R(z)+Œÿ

k=0(R(z)(w ≠ z))k =

+Œÿ

k=0(R(z))k+1(w ≠ z)k,

donc F est C-analytique autour de chaque point de H donc holomorphe. Deplus, d’après (10.1), on a

|F (z)| Æ ÎxÎ2

⁄(z) .

Exercise 10.2.1 En reprenant l’argument qui a servi à montrer que la ré-sultante est holomorphe sur H, montrer qu’elle est analytique sur le complé-mentaire du spectre et en déduire que le spectre d’un opérateur symétriqueet fermé est fermé.

Reste à montrer que ⁄(F (z)) Ø 0 pour appliquer le théorème de Herglotz.Ceci repose sur le fait que comme T est auto-adjoint R(z)ú = R(zú) et laformule de la résolvante. En e�et, on a

⁄(F (z)) = ÈR(z)(x), xÍ ≠ Èx, R(z)(x)Í2i

= ÈR(z)(x), xÍ ≠ ÈR(zú)(x), xÍ2i

= È(R(z) ≠ R(zú))(x), xÍ2i

= Im(z)ÈR(zú)(R(z)(x)), xÍ = Im(z)ÎR(z)(x)Î2.

Il existe donc une mesure de Radon finie µTx telle que

ÈR(z)x, xÍ =⁄

IR

1t ≠ z

dµTx (t).

On peut alors, pour tout f œ Bb(IR), l’ensemble des fonctions boréliennesbornées, définir la forme quadratique suivante sur H

Qf : x ‘æ⁄

IRf(t) dµT

x (t).

Reste à montrer qu’elle est continue pour définir le calcul fonctionnel àl’aide du lemme de Riesz. Pour cela il su�t dévaluer la masse de µT

x , c’est-à-dire la limite de iyF (iy) lorsque y æ +Œ. On va supposer que x œ Im(R(i))

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142 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

dans un premier temps, alors il existe xÕ œ H tel que

≠iyF (iy) = ≠iyÈR(iy)R(i)xÕ, R(i)xÕÍ = ≠iyÈR(iy) ≠ R(i)(y ≠ 1)i xÕ, R(i)xÕÍ,

ce qui donnelim

yæ+Œ≠iyF (iy) = ÎxÎ2.

Dés lors, la densité du domaine de T achève la preuve de la continuité de Qf .

Enfin en appliquant le lemme de Riesz, on trouve que pour tout f œBb(IR), il existe f(T ) tel que

Èf(T )x, xÍ = Qf (x).

On a alors le théorème suivant

Théorème 10.2.2 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint de domaine dense. Alors l’application

�T : Bb(IR) æ B(H)f ‘æ f(T )

vérifiei) �T est un ú-morphisme,

ii) pour tout f œ Bb(IR) on a Îf(T )Î Æ ÎfÎŒ,iii) si f Ø 0 alors f(T ) Ø 0,iv) pour tout borelien borné E, 1E(T )(H) µ D(T ) et 1E(T )T = T1E(T ),v) D(T ) = {x œ H | s |t|2dµx(t) < +Œ}, en particulier pour tout f œ

Bb(IR) on a f(T )(D(T )) µ D(T ).vi) pour tout f, g œ Bb(IR) telle que g(x) = xf(x) on a g(T ) = f(T )T sur

D(T ) et g(T ) = Tf(T ) sur H,

Preuve :

i)Tout d’abord on vérifie que f(T ) est borné par définition puisque lelemme de Riez produit un opérateur borné. D’autre part, l’application estclairement linéaire et pour tout x œ H on a

Èf(T )(x), xÍ =⁄

IRf dµT

x =⁄

IRf dµT

x = Èf(T )(x), xÍ = Èf(T )ú(x), xÍ,

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10.2. LE CALCUL FONCTIONNEL BORÉLIEN 143

d’ou f(T ) = f(T )ú. Reste à prouver la multiplicativité, pour cela notons µTx,y

la mesure obtenue par polarisation de µTx , on a alors

Èf(T )x, yÍ =⁄

IRf(t) dµT

x,y(t),

De plus c’est l’unique mesure telle que pour tout z œ H, on ait

ÈR(z)x, yÍ =⁄

IR

1t ≠ z

dµTx,y(t). (10.3)

Il su�t donc de démontrer que

f(t)dµTx,y(t) = dµT

f(T )x,y(t). (10.4)

Or, on a, pour tout z œ H,⁄

IR

1t ≠ z

dµf(T )x,y = ÈR(z)f(T )(x), yÍ = Èx, f(T )úR(zú)(y)Í

= Èf(T )R(zú)(y), xÍ =⁄

IRf(t)dµR(zú)(y),x.

(10.5)

Donc notre problème se ramène à démontrer que

dµR(zú)(y),x = dµx,R(zú)(y) = dµR(z)(x),y = 1t ≠ z

dµx,y. (10.6)

Plus généralement, en appliquant l’identité de la résolvante, on a, pour w œC \ IR fixé et tout z œ H \ {w},

IR

1t ≠ z

dµR(w)(x),y(t) = ÈR(z)R(w)(x), yÍ = ÈR(z) ≠ R(w)z ≠ w

(x), yÍ

=⁄

IR

1t ≠ z

1t ≠ w

dµx,y(t).(10.7)

Ce qui prouve le résultat souhaité, par unicité de la mesure polarisée.

ii) est simplement une conséquence du fait que |µx| = ÎxÎ2 et du fait queÎTT úÎ = ÎTÎ pour un opérateur continue.

iii) est immédiat.

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144 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

iv) Soit z œ H on pose SE(z) = ((t ≠ z)1E)(T ), on montre à laide de 10.4que

1E(T )(x) = R(z)SE(z)(x) pour tout x œ H, (10.8)

ce qui prouve la première partie. Puis on remarque que la second partie estéquivalente à

R(z)1E(T ) = 1E(T )R(z),

que l’on peut prouver simplement à l’aide de (10.4), (10.3) et (10.6).

v) Tout d’abord on va montrer que si x œ H et y œ D(T ) alors

dµT (x),y(t) = tdµx,y(t). (10.9)

Pour cela on considère un borélien E borné, d’après (10.8) et iv), on a

1E(T )T = T1E(T ) = (t1E)(T ).

Soit alors xœ H et y œ D(T ) alors⁄

Etdµx,y = È(t1E)(T )(x), yÍ = È1E(T )T (x), yÍ =

EdµT (x),y.

Ceci étant vrai quelque soit E, on l’égalité cherchée.

Soit alors x œ D , et E = [≠R, R], on a

ÎT (x)Î2 Ø Î1E(T )T (x)Î2 =⁄

Et2dµT

x (t),

On a donc D(T ) µ {x œ H | s |t|2dµx(t) < +Œ}. Réciproquement si x œ{x œ H | s |t|2dµx(t) < +Œ} et n > 0 on a, d’après (10.8),

1[≠n,n](T )(x) = R(z)S[≠n,n](z)(x),

où SE(z) = ((t ≠ z)1E)(T ). On vérifie que par hypothèse S[≠n,n](z)(x) est deCauchy et donc converge, on obtient le résultat par passage à la limite.

vi) est une simple conséquence de (10.9). ⌅

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10.3. THÉORÈME SPECTRAL 145

10.3 Théorème spectral10.3.1 Première version

Muni d’un calcul fonctionnelle borélien on peut définir une mesure spec-trale. Toutefois, à ce stade, le calcul borélien est défini pour des fonctionsboréliennes de IR. Mais comme on sait que le spectre est fermé on peut pro-longer toute fonction borélienne du spectre par 0 sur le complémentaire, lafonction ainsi obtenue est toujours une fonction borélienne bornée. Par contreil faut vérifier que les identités obtenues précédemment restent vraies, autre-ment dit que le support des mesures spectrales construites précédemment estbien inclus dans le spectre.

Exercise 10.3.1 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint. Montrer que fixœD(T )suppµT

x µ ‡(T ).

Théorème 10.3.1 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint. On définit pour tout borélien E de ‡(T ) la mesure spectrale

µT (E) = 1E(T ).

Alorsi) µT (E) est une projection orthogonale,

ii) Si les (En) sont des boréliens disjoints alors pour tout x œ H, on a

µT

A Œ€

n=1En

B

x =Œÿ

n=1µT (En)x,

iii) µT (ÿ) = 0 et µT (‡(T )) = Id.

Soit Dc l’union des images des µT (1[≠N,N ]) où N œ N.iv) Dc est dense dans H et T (Dc) µ Dc.

Preuve :

i), ii) et iii) se montrent exactement de la même manière que dans le casborné.

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146 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

iv) Soit x œ H alors, d’après ii), x = limn

1[≠n,n](T )(x), ce qui prouve ladensité. Soit x œ Dc alors il existe n œ N et y œ H tel que x = µT (1[≠n,n])(y)alors

T (x) = T (µT (1[≠n,n])(y)) = µT (1[≠n,n])(T (y)) œ Dc

d’après iv) du théorème 10.2.2.

Exercise 10.3.2 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint . Montrer que Ker(T ≠ ⁄Id) = µT (1{⁄})(H).

Le spectre n’étant pas borné, a priori on ne peut pas intégrer la fonctionidentité contre la mesure spectrale pour retrouver l’opérateur. Pour cela onva étendre le calcul borélien à Bloc(‡(T )) l’ensemble des fonctions boréliennesbornées sur tout borélien borné. On pose pour tout f œ Bloc(‡(T ))

f(T ) : Dc(T ) æ Dc(T )x ‘æ lim

Næ+Œ(f1[≠N,N ])(T )(x)

On remarque, à l’aide du théorème de convergence dominée, que si f estbornée alors cette définitions est compatible avec la précédente sur Dc. On ale théorème suivant

Théorème 10.3.2 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint de domaine dense. Alors l’application

�T : Bloc(IR) æ L(Dc)f ‘æ f(T )

vérifie est un ú-morphisme vérifiant T = �T (t ‘æ t).

Preuve :

Montrons tout d’abord que la définition est cohérente avec le calcul fonc-tionnel borné. Soit f une fonction borélienne bornée et x, y œ Dc alors

Èf(T )x, yÍ = limNæ+Œ

È(1[≠N,N ]f)(T )x, yÍ

= limNæ+Œ

⁄ N

≠Nf(t) dµT

x,y =⁄ +Œ

≠Œf(t) dµT

x,y = Èf(T )x, yÍ,

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10.3. THÉORÈME SPECTRAL 147

le passage à la limite est justifié par le théorème de convergence dominée puisque tous les µT

x,y sont de mesure finie.

D’autre part, Soit f une fonction borélienne localement bornée pour x, y œDc on a

Èf(T )x, yÍ = limNæ+Œ

È(1[≠N,N ]f)(T )x, yÍ= lim

Næ+ŒÈ(1[≠N,N ]f)(T )úx, yÍ

= limNæ+Œ

Èx, (1[≠N,N ]f)(T )yÍ = Èx, f(T )yÍ,

donc �T est compatible avec l’adjoint. Soit f, g deux fonction boréliennelocalement bornées et x œ Dc, on a

(fg)(T )(x) = limNæ+Œ

(fg1[≠N,N ])(T )(x)

= limNæ+Œ

((f1[≠N,N ])(g1[≠N,N ]))(T )(x)

= limNæ+Œ

((f1[≠N,N ])(T )(g1[≠N,N ]))(T )(x)

f(T )(g(T )(x)),

on peux bien passer à la limite car la suite est constante à partir d’un certainrang. Ce qui prouve que �T est un ú-morphisme.

Enfin

�T (t ‘æ t)(x) = limNæ+Œ

(t1[≠N,N ])(T )(x) = limNæ+Œ

(1[≠N,N ](T ))(T (x)) = T (x),

ici on a utilisé le fait que T (x) œ Dc pour passer à la limite. ⌅

Exercise 10.3.3 Donner un sens à la formule

T =⁄

‡(T )⁄ dµT (⁄).

Exercise 10.3.4 A l’aide de la mesure spectral démontrer qu’il existe unemesure µ sur IR telle que T est équivalent à la f ‘æ gf de {f œ L2(IR, µ) | gf œL2(IR, µ)} dans L2(IR, µ), c’est-à-dire le théorème 10.3.3.

Exercise 10.3.5 Montrer qu’un opérateur T auto-adjoint est borné si etseulement si son spectre est borné.

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148 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

10.3.2 Deuxième versionOn conclut ce chapitre en donnant une deuxième approche du théorème

spectral qui s’appuie sur le théorème spectrale pour les opérateurs normauxbornés. Ici la mesure spectrale est construite a posteriori.

On démontre déjà un résultat préliminaire sur la résolvante d’un opéra-teur auto-adjoint.

Proposition 10.3.1 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-borné auto-adjoint. On a

i) (T + i)≠1 et (T ≠ i)≠1 commutent,ii) (T ≠ i)≠1 est l’adjoint de (T + i)≠1 et réciproquement.

Preuve :

i) C’est une conséquence immédiate de la formule de la résolvante.

ii)C’est une simple conséquence de l’exercice 10.1.8. ⇤

On vient donc de démontrer que R(i) est un opérateur normal. D’après lethéorème 9.8.6, il existe un espace mesuré fini (X, µ), une application unitaireU : H æ L2(X, µ) et g œ B(X, µ) bornée tels que

UR(i)U≠1 = Mg

On remarque que {x | g(x) = 0} est µ-négligeable car R(i) est injective. Onpeut donc définir f œ B(X, µ) par

f = 1g

+ i.

Ce qui nous donne l’opérateur (non-borné )Mh de domaine {f œ L2(X, µ) | gf œL2(X, µ)}, tel que

U≠1TU = Mf .

On a alors le théorème suivant.

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10.4. UN EXEMPLE : L’ÉQUATION DE SCHRÖDINGER 1D 149

Théorème 10.3.3 (Théorème spectral) Soit H un espace de Hilbert et Tun opérateur non-borné auto-adjoint de H. Alors il existe un espace mesuréfini (X, µ), une fonction mesurable f : X æ IR et une isométrie U : H æL2(X, µ) tels que UTU≠1 = Mf .

Exercice 10.3.1 Ecrire les détails de la preuve du théorème 10.3.3.

Exercice 10.3.2 Définir un calcul fonctionnelle borélien à l’aide du théo-rème 10.3.3 de manière à retrouver le théorème 10.2.2 .

10.4 Un exemple : l’équation de Schrödinger1D

10.4.1 L’opérateur ≠ d

2

dx

2

Théorème 10.4.1 L’opérateur ≠ d2

dx2 avec le domaine H2(IR) est un opéra-teur auto-adjoint de L2(IR).

Preuve :En fait on peut ramener l’étude de cet opérateur à celle de i d

dx . Or d’aprèsl’exercice 10.1.2 on sait que cet opérateur avec le domaine H1(IR) est auto-adjoint. On a le résultat en passant au carré. ⌅

Théorème 10.4.2 L’opérateur ≠ d2

dx2 avec le domaine H2(IR) a pour spectre[0, Œ[ et n’a pas de valeur propre.

Preuve :On montre facilement en résolvant l’équation ≠f ÕÕ = ⁄f que cet opérateurn’a pas de valeur propre. D’autre part comme il est de la forme TT ú, il estclair qu’il est positif et que son spectre est inclus dans [0, Œ[. Maintenanton va utiliser le théorème 10.1.2 pour montrer que le spectre est exactement[0, +Œ[. Il faut donc construire pour tout ⁄ une suite de fonction fn telle queÎfnÎ2 = 1 et tel que Îf ÕÕ

n + ⁄fnÎ æ 0. On vérifie facilement que

fn(x) =Û

2fin

e≠ ≠x2n2 +i

Ô⁄x,

convient. ⌅

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150 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

10.4.2 L’opérateur ≠ d

2

dx

2 + q

Soit q une fonction définiesur IR, on pose D(Q) = {f œ L2(IR) | qf œL2(IR)}, on définit l’opérateur

Q : D(Q) æ L2(IR)f ‘æ qf

Exercice 10.4.1 L’opérateur Q de domaine D(Q) est auto-adjoint.

Théorème 10.4.3 Si q œ L2(IR) alors H2(IR) µ D(Q) et le spectre essen-tielle de ≠ d2

dx2 + q est [0, Œ[.

Preuve :On remarque que d’après les injection de Sobolev on H2(IR) µ LŒ(IR) d’oul’inclusion des domaine. D’autre part Rellich-Kondrakov nous assure que l’onpeut extraire de toute suite bornée dans H2(IR) une suite qui converge dansLŒ(IR), d’où la compacité de Q, le spectre essentiel est donc égal au spectrede ≠ d2

dx2 , c’est à dire [0, Œ). ⌅

Exercise 10.4.1 Soit V : IR æ IR dans LŒloc telle que lim

|x|æ+ŒV (x) = +Œ,

Montrer que �+V est essentiellement auto-adjoint et son spectre est discret.En particulier il existe une base hilbertienne de H formée de vecteurs propresde � + H.

10.5 Application au flot d’opérateurOn peut alors comme pour les opérateurs bornés définir une mesure spec-

trale à valeurs dans les projections orthogonales en posant

µT (E) = 1E(T ).

Mais on peut aussi définir l’exponentiation eiT pour un opérateur non-bornéauto-adjoint alors que la méthode standard en passant par les séries ne peutavoir de sens étant donné qu’on ne peut même pas définir la norme de l’opé-rateur. Si on suppose de plus que T est positif, on peut également définire≠tT et eit

ÔT pour t. Les paragraphes suivants proposent une études de ces

opérateurs.

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10.5. APPLICATION AU FLOT D’OPÉRATEUR 151

10.5.1 Equation de la chaleurThéorème 10.5.1 Soit T un opérateur auto-adjoint positif alors pour toutt Ø 0 on pose C(t) = e≠tT . On a alors

i) C(t) est un opérateur borné auto-adjoint de norme au plus 1,ii) C(0) = Id et C(t + s) = C(t)C(s) pour tout t, s Ø 0,

iii) t ‘æ C(t) est continue pour la norme d’opérateur,

iv) Pour tout x œ D(T ) on a limtæ0

C(t)x ≠ x

t= ≠T (x).

Preuve :

i) est une simple conséquence du faite que le spectre de T est dans IR+

et que la norme sup de l’exponentielle vaut 1 sur IR+.

ii) est une conséquence du fait le calcul fonctionnelle soit un morphismed’algèbre.

iii) Il su�t de démontrer la continuité en 0 d’après la propriété de semigroupe. Or c’est une conséquence du théorème de convergence dominé.

iv) Soit x œ D(T ) et y œ D(T ), on aK

y,C(t)x ≠ x

t

L

=⁄

IR+

e≠t⁄ ≠ 1t

dµy,x(⁄).

C’est donc également une conséquence du théorème de convergence do-miné mais il faut utiliser le v) du théorème 10.2.2 pour s’assurer la conditionde domination. ⌅

On va maintenant établir la réciproque.

Théorème 10.5.2 Soit H un espace de Hilbert et t ‘æ C(t) une familled’opérateur vérifiant i)-iii) du théorème précédent. Alors il existe un uniqueopérateur auto-adjoint et positif T tel que C(t) = e≠tT .

Preuve :

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152 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

L’unicité est une conséquence du iv) du théorème précédent.

En s’inspirant de l’identité1

1 + x=

IR+e≠txe≠t dt,

on poseR =

IR+C(t)e≠t dt.

Alors on vérifie que R est un opérateur borné, positif, auto-adjoint de normeau plus 1 qui commute avec tous les C(t). On remarque facilement que Rest injectif, et donc puisqu’il est auto-adjoint, son image est nécessairementdense. Alors T = R≠1 ≠ Id définit un opérateur non-borné auto-adjoint quicommute avec les C(t). Soit x œ D(T ) = ImR, x = R(y), on a alors

ÈT (x), xÍ = Èy, R(y)Í ≠ ÈR(y), R(y)Í = ÈR(y) ≠ R2(y), yÍ.Comme le spectre de R est inclus dans [0, 1], R(Id ≠ R) = (t(1 ≠ t))(R) estpositif puisque la fonction t(1≠t) est positive sur le spectre de R. FinalementT est bien positif. On peut donc définir D(t) = e≠tT .

Enfin, pour tout x œ H, on a

d

dtC(t)R(x) = d

dt

3⁄ Œ

0C(t + s)e≠s ds

4(x) = d

dt

3et

⁄ Œ

tC(s)e≠s ds

4(x)

= (C(t)R ≠ C(t))(x) = ≠TC(t)R(x).

Donc D et C vérifient les même équations sur D(T ), on conclut queD = C sur D(T ) en calculant simplement d

dtÎC(t)x≠D(t)xÎ2, puis on conclutque C = D par continuité et densité de D(T ). ⌅

Le théorème précédent nous fournit un critère, très utile en pratique, poursavoir quand un opérateur est auto-adjoint.

Théorème 10.5.3 Soit T un opérateur symétrique positif et défini. Si l’équa-tion I

dudt = ≠Tu sur IR+

u(0) = x,

admet une solution C1 à valeurs dans D(T ) pour tout x œ D(T ), alors T estessentiellement auto-adjoint.

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10.5. APPLICATION AU FLOT D’OPÉRATEUR 153

Preuve :

Tout d’abord on remarque que chaque u est unique. En e�et si u1 et u2vérifient la même équation alors v = u1 ≠ u2 vérifie

Idvdt = ≠Tv sur IR+

v(0) = 0 .

Or comme T est positif on ad

dtÎv(t)Î2 Æ 0 (10.10)

et donc v = 0.

On peut alors définir S(t)x = u(t) sur D(T ). Tout d’abord on remarqueÎS(t)Î Æ 1 d’après (10.10). On peut donc étendre S(t) en un opérateur borné.Reste à vérifier qu’il est auto-adjoint pour appliquer le théorème précédent,or pour tout x, y œ D(T ) on

d

dt(ÈS(t)x, yÍ ≠ Èx, S(t)yÍ) = 0,

car T est symétrique. Donc par continuité de S(t) et densité de D(T ), on ale résultat attendu. Il existe donc T Õ auto-adjoint positif tel que S(t) = e≠tT Õ

et de plus T µ T ’. Reste à montrer que T Õ = T . Il su�t de montrer que D(T )est dense dans D(T Õ) pour le produit scalaire Èx, yÍ + ÈT Õx, T ÕyÍ. Dans le cascontraire soit y un vecteur orthogonal à D(T ) non trivial, on a pour toutx œ D(T ),

Èx, yÍ + ÈTx, T ÕyÍ = 0donc on a pour tout t Ø 0,

Èx, S(t)yÍ = ≠ÈTx, T ÕS(t)yÍ = ≠Èx, (T Õ)2S(t)yÍ,c’est à dire y(t) = Èx, S(t)yÍ vérifie

d2y

dt2 = ≠y(t).

Or on a limtæ+Œ

y(t) = 0, d’où

Èx, yÍ = 0 pour tout x œ D(T ),ce qui est une contradiction avec la densité de D(T ) et achève la preuve duthéorème. ⌅

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154 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

10.5.2 Equation de SchrödingerEn fait l’exponentielle définit même un semi-groupe comme dans le cas

borné, c’est l’objet du théorème suivant.

Théorème 10.5.4 Soit H un espace de Hilbert et T un opérateur non-bornéauto-adjoint. On pose U(t) = eitT , alors on a

i) U(t) est unitaire pout tout t.ii) t ‘æ U(t) est continue pour la norme d’opérateur.

iii) U(0) = Id et pour tout t, s œ IR on a U(t + s) = U(t)U(s),

iv) pour tout x œ D(T ) on a limtæ0

U(t)(x) ≠ x

t= iT (x),

Preuve :

Reprendre la preuve pour le flot de la chaleur . ⌅

Ce théorème admet également une réciproque. La preuve de la réciproquerepose sur le théorème suivant, dont on trouvera une preuve dans [Tao11a]

Théorème 10.5.5 (Théorème de Bochner) Soit f : IR æ C positive etsemi-définie, c’est-à-dire f(x) = f(≠x) et

IR

IRf(x ≠ y)d‹(x)d‹(y) Ø 0,

pour toute mesure complexe ‹. Alors il existe une mesure finie µ sur IR telleque

f(x) =⁄

IRei2fi› dµ(›) pour x œ IR.

Théorème 10.5.6 (théorème de Stone) Soit (U(t))tœIR une famille d’opé-rateurs vérifiant les assertions i)-iii) du théorème 10.5.4, alors il existe ununique opérateur non-borné auto-adjoint T tel que U(t) = eitT .

Idée de la preuve :

On remarque tout d’abord que le iv) du théorème 10.5.4 donne l’unicité.

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10.5. APPLICATION AU FLOT D’OPÉRATEUR 155

On pose pour tout x œ H,

F (t) = ÈU(t)x, xÍ,d’après le théorème de Bochner il existe une mesure finie telle que

F (t) =⁄

IReixtdµx(t).

On note alors µx,y la mesure dépolarisée. On définit une mesure spectralecomme suit : soit E un borélien de IR on définit µ(E) l’application de H telque

Èx, µ(E)(y)Í =⁄

Edµx,y.

On vérifie que c’est une mesure à valeur dans les projections orthogonales.On pose alors D = {x œ H | s

t2dµx < Œ} et on définit T : D æ H par

T =⁄

IRt dµ(t),

et on vérifie que T est bien l’opérateur auto-adjoint cherché. ⌅

Exercice 10.5.1 Soit H = L2(IRn) et Ux(t) l’opérateur de translation définipar

Ux(t)(„)(y) = „(y + tx).Vérifier que cette famille d’opérateurs vérifie les hypothèses du théorème deStone. Montrer que Ua(t) = eitA avec

A(„) = ≠inÿ

k=1ak

ˆ„

ˆxkpour tout „ œ CŒ

c (IRn).

10.5.3 L’equation des ondesOn considère un opérateur non-borné T : D æ H auto-adjoint positif.

On cherche à résoudre l’équation suivante

d2u

dt2 = ≠T (u).

En fait on peut réécrire l’équation

d2u

dt2 = ≠�2(u),

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156 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

où � =Ô

T . Alors les solution sont données par u(t) = eit� et v(t) = e≠it�,plus précisément on a :

Théorème 10.5.7 Soit T un opérateur auto-adjoint positif. Pour tout x œD(T ) et y œ D(

ÔT ) µ D(T ), alors

u(t) = cos1tÔ

T2

x +sin

1tÔ

T2

ÔT

y

est l’unique solution C2 de l’équation suivanteY_]

_[

d2udt2 = Tuu(0) = xuÕ(0) = y

.

Preuve :On commence par prouver l’unicité. Pour cela on pose E(t) = 1

2

1ÎuÕ(t)Î2 + ÎÔ

Tu(t)Î22.

et on remarque E Õ(t) = 0 si ddt

ÔTu(t) existe.

Soit R > 0 alors on pose PR = 1[≠R,R](T ) alors pour tout x œ D(T )PR(x) œ D(

ÔT ). On pose alors UR(t) = PRu(t) où u est une solution de

l’équation avec les conditions initiales nulles. Alors uR est C2, pour tout t ona uR(t) œ D(

ÔT ) et d

dt

ÔTuR(t) existe. Enfin uR vérifie

d2uR

dt2 = PRd2u

dt2 = TuR.

Donc on peut appliquer la conservation de l’énergie et donc duR

dt = 0 d’ouuR © 0, en passant à la limit quand R tend vers l’infinie on a le résultatsouhaité.

Pour l’existence, il faut calculer les dérivées à l’aide du taux d’accroisse-ment et des formules classiques de trigonométrie. Les passage à la limite sontassuré par le théorème de convergence dominée. ⌅

Comme dans le cas classique on peut ramener cette équation à une équa-tion d’ordre 1 quitte à complexifier un peu l’espace ambiant. Pour simplifier,on suppose que Null(�) = {0}. Pour cela on pose

X(t) =A

u(t)dudt (t)

B

.

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10.6. LE LAPLACIEN SUITE ET FIN 157

Alors X doit verifier dXdt = SX, où

S =A

0 Id�2 0

B

.

Formellement on obtient

etS =A

cos(�t) sin(�t)�≠�sin(�t) cos(�t)

B

.

On pose alors K = D(�) ü H muni du produit scalaire È(x1, y1), (x2, y2)Í =È�x1, �x2Í + Èy1, y2Í. Alors on obtient un espace de Hilbert et etS est unetransformation unitaire. Dés lors d

dtetS(x, y) existe si et seulement si x œ

D(�2) = D(T ) et y œ D(�). On pose alors D(S) = D(T ) ü D(�) et

S =A

0 IdT 0

B

est alors le générateur du semi groupe unitaire etS il est donc anti-adjoint :S = iR avec R auto-adjoint d’après le théorème de Stone, et on a bien

dX

dt= iRX pour tout t.

10.6 Le laplacien suite et finSoit � un domaine borné de IRn, H = L2(�) et le laplacien

�f = ≠ ÿ

i

ˆ2f

ˆx2i

,

avec CŒc (�) comme domaine.

10.6.1 Deux exemplesOn va s’intéresser à deux cas particulier � = IRn et � : (0, 1)n. Dans le

premier cas on a la description suivante.

Théorème 10.6.1 la fermeture du Laplacien sur IRn est unitairement équi-valente à M(2fi)2ÎxÎ2. En particulier il est essentiellement auto-adjoint, sonspectre est continu et égal à [0, Œ[.

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158 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS

Dans le cas du cube la situation est tout autre puisque le spectre estdiscret. En fait il y a plusieurs extension possible de � en un opérateuressentiellement auto-adjoint, ici on présente l’extension de Dirichlet.

Théorème 10.6.2 Soit Dd = {f|(0,1)n | f œ CŒ([0, 1]n) et f = 0 sur ˆ(0, 1)n},alors (Dd, �) est essentiellement auto-adjoint, son spectre est ponctuel et égalà

{4fi2(k21 + · · · + k2

n | ki œ Z}.

De plus la multiplicité de ⁄ = 4fi2(k21+· · ·+k2

n est égale à #{(k1, . . . , kn) | 4fi2(k21+

· · · + k2n = ⁄}.

Exercice 10.6.1 Déduire de ce qui précède, l’estimé suivante pour n-ièmevaleur propre du laplacien sur le cube avec la condition de Dirichlet,

1C

Ck2n Æ ⁄k Æ Ck

2n , (10.11)

pour C > 0.

Exercice 10.6.2 A l’aide de l’exercice précédent et du principe du min-maxen déduire une estimé semblable pour tout ouvert borné �.

10.6.2 Fonction de Green et Noyau de la chaleurDans cette section on suppose que H = L2(�,C) où � est un domaine de

IRd. Soit L un opérateur di�érentiel de domaine D(L) µ H. On cherche unopérateur K œ B(H) tel que

L ¶ K = K ¶ L = Id.

On va chercher K sous la forme d’un opérateur à noyau TG. Alors G doitnécessairement vérifier

LxG(x, y) = ”(x ≠ y)Id,

LúyG(x, y) = ”(x ≠ y)Id.

Une telle fonction s’appellera fonction de Green de L. On pourra trouverdes exemples de détermination explicite de G pour des opérateurs définis

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10.6. LE LAPLACIEN SUITE ET FIN 159

sur IR, [Sim05]. Ici nous donnons une expression de la fonction de Green dulaplacien et de l’équation de la chaleur en fonction des fonctions propres etdes valeurs propres du laplacien.

Le laplacien étant auto-adjoint, il su�t de trouver G œ L20(� ◊ �), symé-

trique, telle que

�xG(x, y) = ”(x ≠ y)Or d’après la section 9.5, le laplacien possède une base hilbertienne de

vecteur propre („k). On notera ⁄k les valeurs propres associées. On a alorsnécessairement

ÈG(x, y), „k(x)Í = „k(y)⁄k

Ce qui nous amène à poser (formellement)

G(x, y) =Œÿ

k=1

„k(x)„k(y)⁄k

.

Malheureusement au vu de (10.11), il n’est pas possible d’obtenir une conver-gence forte de cette série dés que d > 1.

Exercice 10.6.3 Montrer que pour le noyau de la chaleur on a formellement

P (x, y, t) =Œÿ

k=1e≠t⁄k„k(x)„k(y).

On a dans le cas du noyau de la chaleur convergence forte de la série.

Théorème 10.6.3

p(x, y, t) =Œÿ

k=0e≠t⁄k„k(x)„k(y),

où la convergence est uniforme sur � ◊ � ◊ [Á, +Œ[ pour tout Á > 0.

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160 CHAPITRE 10. OPÉRATEURS NON-BORNÉS