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Composite Trame par dØfaut

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Voici la monographie du CCA - Amplifon sur les Acouphènes.

Remercions tout d'abord Gérard Challier d'avoir fait confiance à l'équipe des auteurs.

Après la rédaction du rapport sur le même sujet à la Société Française d'ORL, ce texteest plus court, plus orienté vers la pratique.

Il est en 2 parties. La première traite des « fondamentaux » de l'acouphène pour assurerau sujet qui en souffre que la recherche dans le domaine existe, qu'il y a et qu'il y aura desremèdes.

L'acouphène est au centre d'un carré dont les coins représentent, pour chaque patient,son état auditif, la circonstance de survenue de son symptôme, son niveau de stress etd'anxiété, son environnement familial et professionnel.

L'acouphène est un symptôme simple mais non objectivable. Il contraste avec larichesse des circonstances de sa survenue. S'autorisant une comparaison triviale, il est unpeu comme un trou de serrure au travers duquel on découvre un riche décor : la sensation, laclassification et les phénomènes de perception, le stress, l'anxiété et la dépression,l'habituation ou la sensibilisation, le conditionnement… en bref toute la physiologiesensorielle et plus largement le somatique et le psychisme… Pour un acouphène mal toléré,ce sont ces éléments qu'on va retrouver en consultation et que nous tentons de vousprésenter dans la seconde partie. Leur présence enchante ou rebute...

Puisse cette monographie nous motiver à entrer dans cette complexité pour soulagersouvent facilement et recevoir beaucoup en retour de l'empathie témoignée.

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Auteurs et co-auteurs

Bruno FRACHETService ORL Hôpital Avicenne125, route de Stalingrad93009 Bobigny [email protected]

Bertrand GEOFFRAY18, rue Gounod06000 [email protected]

Sylviane CHERY CROZELaboratoire « Neurosciences et systèmes sensoriels »UMR CNRS 5020Université Claude Bernard50, avenue Tony Garnier69366 Lyon Cedex [email protected]

Jean-Luc PUELUnité INSERM U 583Hôpital Saint-Eloi80, rue Augustin-Fliche34295 Montpellier Cedex [email protected]

Christophe COULVIER10, avenue Jules-Ferry03100 Montluç[email protected]

Avec la participation de

Philippe PEIGNARD, Christine PONCET-WALLET, Christine TOFFIN, Caroline CUNY, Antonella VESTUTO

et de

Jean VASSEUR, Isaac SOUED, Nathalie SIBONY, Emilie VORMES

Nos remerciements vont aussi aux associations de patients et en particulier à France-Acouphènes.

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Chapitre 1

Acouphènes : aspects fondamentaux et cliniqueIntroduction et survol de la question

1.1 Introduction

L’acouphène correspond à la perception d’un son sans source extérieure.Il est habituellement associé à une surdité mais est parfois isolé, sans hypoacousie1…Nous sommes de plus en plus confrontés à cette symptomatologie. L’acouphène soit nous« rebute » car nous pensons qu’il met notre compétence en échec, soit, au contraire, constitue unede nos « sur-spécialités » dont la complexité et la qualité de la relation médecin-patient qu’ilengendre sont des aspects très motivants.Cette nouvelle monographie de CCA Amplifon qui paraît après le rapport à la Société Françaised’ORL se veut pratique. Elle présente, en 2 grandes parties :« Les fondamentaux de l’acouphène », de l’historique aux notions scientifiques de pointe.« La pratique clinique » avec les points utiles à la consultation.La « science » en matière d’acouphènes est en devenir. Pour ce symptôme qui siège entre somatiqueet psychisme, c’est bien normal : les progrès des sciences dures réduisent les hypothèses de l’esprit.Du traitement aux classifications, les propositions furent nombreuses.De multiples traitements ou prises en charge ont été ou sont proposés. On peut citer :◆ Le soutien psychologique (Scott et al – 1985) ;◆ La relaxation (Jakes – 1985) ;◆ Le biofeedback (Carmen et Svikover – 1984) ;◆ L’hypnothérapie (Marlowe – 1973) ;◆ La stimulation électrique (Chouard-Meyer-Maridat – 1981) ;◆ L’iontophorèse à la lidocaïne (Brussi et Loenndien – 1985) ;◆ Le masquage (Vernon – 1977) ;◆ De multiples drogues.

La multiplicité de ces propositions, ce « panel » thérapeutique suggèrent fortement que l’efficacitédu traitement ne peut être systématiquement prédit. C’est notre constat quotidien de praticien.Même si depuis quelques années, on sait que l’habituation est le phénomène évolutif attendu pourl’acouphène, cette imprédictibilité est en partie en rapport avec le manque de compréhension de sesmécanismes, manque de compréhension auquel on tente de suppléer par l’élaboration demodèles…Les classifications, démarche initiale d’un comportement scientifique, pour les acouphènes sontnombreuses :Les premières définitions / classifications de l’acouphène étaient fondées sur des dualités :◆ Les vrais / les pseudo acouphènes (1928 – Jones et Sandsen) ;◆ Les vibratoires / les non vibratoires (1939 – Fowler) ;◆ Les objectifs / les subjectifs ; les extrinsèques / les intrinsèques (1947 – Atkinson).

...

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1- Pour Reid (1960), dans une étude sur 200 sujets acouphéniques, 53% ne se plaignaient pas d’hypoacousie…, alorsque Fowler, en 1944, fixa à 88% (sur 2000 sourds) le pourcentage de sujets acouphéniques. Heller et Bergman, en1953, à 73%...

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Dans chacune de ces oppositions, la première qualification se référait à un signal mesurable avecune source physique, la seconde, au contraire, était sans phénomène physique clairement identifié,sans source définie.Ultérieurement, la découverte des oto-émissions par Kemp en 1978 a semblé tout résoudre.En 1978, Kemp a démontré que l’oreille interne, auparavant considérée comme un récepteur passif,pouvait générer un son.Dès lors on croyait la question du mécanisme de l’acouphène résolue.Des acouphènes étaient associés à la présence de ces émissions oto-acoustiques spontanées. En faitcette association est rare et leur absence ne constitue malheureusement pas un critère de définitionstricte de l’acouphène.Ainsi, dans l’état actuel de nos connaissances, la définition de l’acouphène reste extrêmementvague : elle recouvre les perceptions sonores sans base apparente, sans signal sonore mesurable, sansrapport avec une source précise.Cette définition peu précise témoigne encore bien de notre méconnaissance.Notre retard est stigmatisé par l’évolution parallèle de la connaissance médicale dans d’autresspécialités. En cardiologie, par exemple :L’angine de poitrine (symptôme) est rapportée à l’insuffisance coronarienne – au défaut deperfusion du myocarde (mécanisme) – lui-même en rapport avec l’athérome (cause)…L’acouphène en reste toujours au premier stade : la description du symptôme auditif…

Le lecteur pressé trouvera ci-après maintenant un survol des 2 grands chapitres de ce texte :

◆ Les fondamentaux ;◆ La pratique clinique de l’acouphène.

Le lecteur passionné retrouvera le développement des notions « survolées ».Cet ouvrage est le fruit des réflexions de plusieurs praticiens, ORL, chercheurs, audioprothésistes,psychologues…. Chacun aborde les acouphènes sous un angle spécifique.Le lecteur ne s’étonnera donc pas de retrouver dans des chapitres différents des notions identiquesqui constituent la base théorique commune.Des encarts résument des paragraphes, le logo "caducée" signale l’utilité pratique de la notion pourla consultation.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

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1.2 Survol : les « fondamentaux » de l’acouphène

◆ 1.2.1 Le statut de l’audition :L’audition normale est automatique, irrépressible : nous ne pouvons pas nous empêcher de

comprendre un interlocuteur qui parle notre langue maternelle. L’auditionpermet de comprendre la parole dans des conditions sonores plus ou moinsdifficiles, de localiser la source sonore…La fonction de l’audition est la communication avec des interlocuteurs et avecl’environnement. L’audition donne l’alerte qui participe à la survie del’individu en prévenant du danger. Elle donne aussi le plaisir de l’écoute,génératrice d’émotions.

L’alerte sonore est une fonction permanente, même dans l’obscurité… L’attente d’un signald’alerte connu permet sa détection rapide à des intensités très faibles, peut-être autrement nonperçues. L’audition est un système à gain variable et le réglage du gain est sous la dépendanced’éléments cognitifs, psychologiques et émotionnels.

Efficacité et limites du fonctionnement sensoriel :5 sens concourent à notre connaissance du monde extérieur et à notre survie. L’intégration detoutes ces informations, pour une bonne part permanentes et continues, est optimisée.L’intégration centrale se préoccupe en premier des informations considérées de façon innéeou par expérience essentielles à la survie et aux changements.Dans notre domaine, le bruit de fond mélangé aux paroles dignes d’intérêt n’est pas entendusauf si on décide d’y prêter attention ou s’il est trop intrusif. Mais un signal sonore témoind’un danger potentiel extérieur à la conversation sera au contraire « valorisé » jusqu’àempêcher la compréhension de l’interlocuteur. Ainsi, le mécanisme de la perceptioncatégorise le signal sonore, valorisant l’alerte qui va pouvoir « occuper la ligne » enpermanence, empêchant plus ou moins la perception d’un signal d’un autre ordre.

◆ 1.2.2 Le statut de l’acouphène :L’acouphène ressenti comme une menace va profiter de ce statut de danger potentiel : il est perçumême s’il est d’intensité faible. Il est reconnu même dans un environnement masquant, ildéclenche toutes les réactions de stress possibles. Il « occupe en permanence la ligne », entrave lacompréhension et sa caractéristique même de menace est facteur de pérennisation.L’acouphène a une composante culturelle :Désagréable en Occident, il est, en Inde, le signe que Dieu vous parle et ne génère aucune plainte,bien au contraire.

1.2.2.1 L’habituation :C’est un élément essentiel dans la physiologie sensorielle, au même titre que « l’oubli » quifait que les stimulations sensorielles peuvent se succéder les unes aux autres. L’habituationest l’évanouissement progressif de la réaction face à la répétition d’une stimulation.Dans une approche finaliste, tout se passe comme si le système sensoriel « comprenait » que lastimulation qui ne change pas n’apporte plus d’information sur l’environnement et qu’il peutlibérer ce canal pour une éventualité sensorielle qui serait plus utile. Le système sensorielfiltre cette information, l’empêche d’atteindre le conscient de la perception mais garde lapossibilité de son rappel volontaire.Mais si la stimulation porte en soi une information de menace vitale, aucun filtre, jusqu’àdémonstration du contraire, ne va s’instaurer.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

Communication,alerte et plaisir sontintriquées dans lafonction de relationde l'audition.

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L’habituation est la loi générale de l’acouphène :Par sa permanence, par la prise en compte involontaire et progressive de son statut de« non-information » l’acouphène doit profiter naturellement de l’habituation, sauf s’ilcontinue à être perçu comme une menace, sauf s’il déclenche une émotion : la craintetraduite par les réactions du système nerveux autonome.

1.2.2.2 Origine et mécanismes de l’acouphène :L’acouphène subjectif 1 est la perception d’un signal sonore, bruit ou signalplus simple, sans source sonore extérieure. C’est un bruit defonctionnement du système auditif. Il n’y a actuellement aucune méthodeparaclinique pour l’enregistrer. L’acouphène est un symptôme bien réel.Ses mécanismes de production sont au moins multiples, obscurs pour certains. Le« démontage » de ce symptôme est à un stade encore archaïque. L’acouphène en est encore àsa caractérisation du symptôme.Ce statut indémontrable impose de ne s’appuyer pour la démarche diagnostique que sur leseul discours du patient,discours forcément soumis à sa subjectivité personnelle.

1.2.2.3 Les différents types d’acouphènes :Les classifications d’acouphènes sont nombreuses et datent au moins d’Hippocrate. Dans unbut très pragmatique, nous distinguerons ici les acouphènes isolés ( environ 25%) de ceuxavec surdité (environ 75%). Il est plus aisé de prendre en charge un acouphène avec surditécar la prothèse auditive est alors d’un bon appoint.La sensation perçue est à prendre en compte : les acouphènes décrits comme un bruitorientent vers un générateur périphérique, l’acouphène à type de sifflement, plus fréquent,n’a pas grande valeur localisatrice. La typologie exacte de l’acouphène en terme de fréquence,c’est à dire de hauteur tonale2 n’a pas de valeur clinique nette. Sa caractérisation par« matching ou masking » 3 est délicate.Dans le domaine de la sonie, c’est à dire de « l’intensité de l’acouphène », il est fréquemmentdécrit comme assourdissant, contrastant avec sa mesure objective.4

1.2.2.4 Le substrat neurophysiologique :L’acouphène est la perception normale d’une hyperactivité neuronale à un endroitquelconque des voies auditives. Le sujet perçoit, ensuite, normalement un signal reçu auniveau de son cortex auditif. Il en a conscience. Ce signal est sans signification.

1.2.2.4.1 Présence d’un générateur :On émet donc l’hypothèse qu’en un point, entre la périphérie et les centres existe unphénomène électrique transmis normalement sur les voies auditives. Des générateurspériphériques ou des mécanismes de genèse périphérique sont recensés. Ils sont décritsobjectivement par expérimentation animale ou construits dans des modèles qui pallientle manque d’observation expérimentale.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

L'habituationest la loigénérale del'acouphène.

1- On distingue l’acouphène objectif audible et enregistrable de l’acouphène subjectif, celui qui nous occupe.L’acouphène objectif reconnaît 2 sources :- Le bruit du flux vasculaire, par exemple le bruit d’une fistule superficielle, ou le souffle d’un rétrécissementvasculaire ou valvulaire, à rapprocher de l’éréthisme de la carotide interne dans le canal carotidien du rocher en casd’hyperthyroïdie. L’examen clinique comporte toujours une auscultation locale.- Le bruit respiratoire d'une béance de la trompe d'Eustache. L'examen clinique fera la différence.

2- Hauteur tonale ou « note musicale de l’acouphène ».3- On demande au patient de comparer son acouphène à un son calibré.4- idem

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1.2.2.4.2 Défaut d’inhibition et synchronisation excessive :Les systèmes sensoriels possèdent des mécanismes d’inhibition. L’activitéélectrophysiologique d’une structure neuronale est modulée par celle de sa voisine. Desdéfaillances peuvent aboutir à un manque d’inhibition donc à un renforcement anormald’activité, à une synchronisation anormale des influx qui deviennent - parce qu’ils sontalors organisés - un message signifiant porteur d’une sensation.

◆ 1.2.3 Constats et modèles :Pragmatiquement, nous nous limiterons à la présentation d’informations utiles à la prise encharge clinique du patient, soit parce que leur compréhension permet d’entrer dans l’intimité duphénomène et de présenter une explication au patient, soit parce qu’ elles expliquent le recours àcertaines thérapeutiques.Dans ce chapitre, nous n’en présenterons que 2 :

1.2.3.1 Le modèle de Jastreboff (43-48) :Acceptant l’existence d’un générateur présenté plus haut, son activité est détectée, lasensation est perçue. On en déduit le fonctionnement du bloc fonctionnel qui représente lafonction de détection :Tout signal connu et menaçant est détecté rapidement à des niveaux trèsfaibles.La permanence du signal entraîne le système à le détecter de mieux enmieux. Ce système de détection est piloté par le système limbique, boîtenoire de l’émotion, en connexion avec le thalamus et les sensations,l’hippocampe et la mémoire.Ce signal menaçant est normalement perçu par le conscient,obscurcissant les autres perceptions et aux dires des patients gênantl’audition et la compréhension. Comme toute menace, il déclenchetoutes les réactions de stress gérées par le système nerveux autonome. Leconscient intervient en aggravant la situation : il ressasse les croyancesde non-guérison, il anticipe sur le futur. Le système risque de boucler sur lui-même surtoutsi la surdité focalise l’attention sur les tentatives de meilleure compréhension : le sujet « tendl’oreille pour mieux comprendre »… La prise en charge, en expliquant cette mécanique à lafois simple et complexe cherche à la démonter.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

L'information dupatient est lepoint centralactuel de la priseen charge desacouphènes.Les modèlesfacilitentl'explication.

D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

Perception & évaluationAires auditives et autres aires associées - cortex

Détection,subcorticale

Associations émotionnellesSystème limbique

Source del'acouphène

GêneSystème nerveux autonome

Hp Hr

Processusconscients

Processusinconscients

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1.2.3.2 Le modèle de l’épilepsie :Dans plusieurs situations cliniques, comme des traumatismes sonores ou des bouclesartérielles, on peut considérer que l’acouphène est un foyer épileptique sur la voie auditive.Une approche médicamenteuse reconnaît l’efficacité des produits antiépileptiques. D’autresmodèles existent, comme celui de la douleur, très contributif à la compréhension del’acouphène et à sa prise en charge.

◆ 1.2.4 Spécificité de la prise en charge :L’acouphène constitue habituellement un « épouvantail » pour le médecin, pour plusieursraisons :Il a pour tous, médecins et patients la mauvaise réputation de résistance à la prise en charge : « onn’y peut pas grand chose », « de toutes façons il ne disparaîtra pas ». Les phrases de défaitisme sontlégion. Or bien souvent, l’amélioration de la tolérance tient à peu de chose, à commencer par uneexplication claire et loyale du phénomène.L'acouphène, hors traumatisme sonore, considéré comme un signe clinique de la presbyacousie1

stigmatise le vieillissement et renforce ainsi le sentiment d’inéluctabilité… Le patient est plusque le praticien expert dans le domaine. Plus de 60% des sujets porteurs d’un acouphène ont vu3 médecins différents, ont subi tous les examens complémentaires, essayé tous les médicaments.Ce nomadisme, à la recherche de la prise en charge efficace est coûteux et la relation

médecin–malade devient, au fil des consultations, de plus enplus difficile à gérer.Le praticien répugne souvent à expliquer simplement l’opacitédu phénomène et la difficulté apparente de la prise en charge.L’acouphène est pour le praticien un véritable « défi », unegestion délicate des échecs antérieurs, dans lequel il vautmieux renoncer d’emblée si temps et compétences ne sont pasdisponibles. En effet, les erreurs de langage du médecin quithéoriquement détient le savoir, sont destructrices. Lemédecin « suivant », devra d’abord reconstruire une relation deconfiance avant d’envisager la phase positive de prise en

charge. Or, cette prise en charge repose sur des concepts simples.L’acouphène est une marque de la perte de la santé auditive : le fonctionnement n’est plussilencieux… dans la plupart des cas, l’acouphène est associé (ou l’inverse) à une surdité : lafonction auditive est dégradée dans 2 dimensions : la performance et son caractère agréable.Surtout après un traumatisme sonore chez un sujet jeune, on repérera facilement les phasesclassiques du deuil de l’audition normale : déni, révolte, dépression et finalement acceptationlorsque que le sujet constate que la vie peut générer encore des agréments même avec cettesurdité. Le discours du praticien devra être adapté au moment de l’évolution. Ainsi par exemple,une explication précoce de l’habituation, à la phase de révolte, détériore la qualité de la relation.L’acouphène bien toléré, l’acouphène mal toléré… :Schématiquement, sur 100 porteurs d’acouphènes, 75 % ne consultent jamais ou une seule fois,et 25 % consultent itérativement . La vraie question clinique est de savoir ce qui fait basculer d’ungroupe à l’autre. L’acouphène étant un symptôme tout à fait « monotone »2, il est clair que sonressenti intervient pour une part non négligeable dans sa tolérance. C’est cette enquête quidemande du temps. Le patient vient pour un désordre qu’il juge à juste titre somatique et se hâtervers un « démontage de sa vie psychique » est certainement contre-productif. C’est seulementaprès le bilan somatique (ou en même temps) qu’il faudra approcher cette facette de la pathologie.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

• La mauvaise réputation del'acouphène.

• Acouphène et vieillissement auditif.• L'expertise en matière

d'acouphène.• Acouphène et deuil de l'audition

normale.• L'acouphène bien toléré/mal

toléré.

1- Les altérations auditives dues au vieillissement naturel de notre système auditif sont, dans une acception large,aggravées par les expériences « oto-traumatiques » de la vie : traumatismes sonores, oto-toxicité de certainsantibiotiques ou de la chimiothérapie par cis-platine...

2- Monotone au sens de simple, identique, peu riche finalement dans sa présentation…

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◆ 1.2.5 La guérison :C’est l’exigence du sujet qui estime pouvoir bénéficier de la « pilule miracle » qui fera disparaîtrele symptôme. C’est aussi la quête des médecins et chercheurs du domaine. Mais à l’heure actuelle,elle n’existe pas et force est de « faire avec » l’insuffisance de notre pharmacopée. Il existe pourtantdes disparitions expliquées ou non d’acouphènes.

1.3 Survol : La clinique

La prise en charge va principalement exploiter le développement de l’habituation bien représentéepar le schéma de Jastreboff.A défaut de guérison, la tolérance est le contrat qu’il est permis de présenter au patient. De façonsimple et compréhensible on explique au patient1 que la prise en charge « va faire de la blessure dusystème auditif une cicatrice ». Toute cicatrice, après des soins et du temps, ne dérange plus et ne seremarque que si on la regarde. Ainsi, pour nous, la guérison- il vaudrait mieux parler de consolidation - est la toléranceau quotidien de cette cicatrice auditive.Certes, si « on écoute » l’acouphène, on l’entend.De même que la cicatrice démange parfois, la tolérance del’acouphène peut varier.Pour l’acouphène ancien, si le patient n’a plus l’espoir de sa disparition, il désire essentiellementqu’il ne s’aggrave pas, ce sur quoi il faudra le rassurer.

◆ 1.3.1 L’examen clinique :Comme pour tout symptôme subjectif, l’interrogatoire dit« poussé » est essentiel.Le succès de la prise en charge provient essentiellement del’échange lors de la consultation. Le patient peut expliquer« son » symptôme et être entendu. Le praticien peutexpliquer, au travers d’exemples et de paraboles, lephénomène, ses tenants et aboutissants, son devenir.

1.3.1.1 La typologie de l’acouphène :C’est un acouphène subjectif, il ne s’agit ni d’une hallucination, ni d’un acouphène objectif.L’ancienneté de l’acouphène est impérativement à préciser. On distingue :

1.3.1.1.1 l’acouphène aigu :Il est présent depuis moins de 6 mois. Le praticien doit savoir où en est le patient de sonparcours de deuil.L’acouphène récent fait espérer au patient une guérison vraie, c’est-à-dire la disparitiondu symptôme. Dans cette phase, la mise en route d’un traitement agressif peut sejustifier, cherchant à faire disparaître la cause et par-là le symptôme.

1.3.1.1.2 l’acouphène chronique :Il est présent depuis au moins 6 mois. Il demande une approche plus explicative : plusl’installation est ancienne, plus le patient est sceptique2, mais moins il est inquiet : « sic’était grave, je le saurais déjà ». Les consultations et examens complémentairesantérieurs rassurants permettent de se fixer plus sur le symptôme lui-même que sur sacause.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

L'interrogatoire est le tempsessentiel de l'examen clinique :- on définit l'acouphène,- on en précise la tolérance.

Quitter son habit de grand clercpour expliquer ... en ne sortantjamais de ce qu'on sait. C'est unevraie démarche de vulgarisation.

1- La consultation pour acouphènes doit être émaillée d’énonciation de paraboles ou de faits de la vie.2- Mais il consulte néanmoins. Il faut prendre garde à ce que sa démarche soit bien celle d’une recherche de guérison et

non de mise en défaut de la médecine.

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1.3.1.1.3 La localisation de l’acouphène :Un acouphène unilatéral doit faire rechercher une cause locale, même s’il fautrechercher par esprit de système une maladie métabolique vasculaire. Les causes localessont peu nombreuses : causes auditives, de type trauma sonore et trouble de l’ATM 1

.

1.3.1.1.4 La « cause » ou la « circonstance » de l’acouphène :Il faut distinguer cause et circonstance. Dans le cas d’un sujet âgé presbyacousique,hypertendu traité (HTA), la cause proximale au sens de la responsabilité immédiate duphénomène pathologique n’est pas facile à affirmer et il est plus exact de parlerd’acouphène dans le cadre d’une HTA. Quoiqu’il en soit, cet effort de définition rassurele sujet sur le désir du médecin de trouver un mécanisme somatique..2 ( cf. liste enannexe n°2 page : 131 )Il est utile de demander : « d’après vous, c’est dû à quoi ? ». Très fréquemment, le sujet a lanotion d’une circonstance précise ou a réattribué le symptôme, ce qui oriente la prise encharge.

1.3.1.1.5 État auditif :Une surdité recentre la problématique sur l’audition. La communication est altérée etl’acouphène rend l’organe gênant. En permanence, le sujet « tend » l’oreille pour mieuxcomprendre. Ce faisant, il perçoit puis écoute « son » acouphène. Petit à petit, larépétition quasi permanente du phénomène l’obsède. La correction de l’audition partous les moyens disponibles, dont l’aide auditive, est primordiale.

1.3.1.1.6 L’hyperacousie est un élément essentiel de la gêne :Le sujet, plus ou moins sourd qui perçoit mal les sons faibles mais normalement les sonsforts a un système auditif sans progressivité. À la limite, dès qu’il entend, c’est trop fort.L’inconfort auditif déclenche des comportements de fuite des ambiances bruyantes(transports en commun, rue, réunions). On peut décrire de véritables « phonophobies ».L’hyperacousie est fréquemment attribuée à l’acouphène alors que c’est elle qui gêne etdéclenche le trouble du comportement. Elle doit être impérativement prise en charge.

1.3.1.1.7 Existence de pathologies connues et traitées, d’antécédents particuliers :Le lien n’est pas toujours clair, mais un diabète, une vascularite, des manipulationscervicales, des chocs cervico-céphaliques seront systématiquement recherchés.3 Il estaussi essentiel de connaître les prises en charge antérieures et leurs résultats. Ceci évite leridicule de l’annonce d’un « nouveau » remède déjà pris depuis plusieurs mois sans aucunrésultat…

1.3.1.1.8 Les symptômes associés :Ils peuvent avoir une valeur localisatrice, ainsi de la triade caractéristique d’une maladiede Ménière. Le stress excessif, l’anxiété, la dépression, l’insomnie sont desco-symptômes à prendre en charge.

1.3.1.2 Evaluation du retentissement et de la tolérance de l’acouphène :La réponse à la question : « ça vous inquiète ou ça vous gêne ? » oriente grandement la prise encharge.

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ACOUPHÈNES : ASPECTS FONDAMENTAUX ET CLINIQUE

1- Articulation temporo-mandibulaire.2- L’idéal est d’avoir en tête la liste des situations possibles pour répondre à la demande somatique.3- Aux États-Unis, la question sur l’utilisation de la marijuana est systématique.

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1.3.1.2.1 L’inquiétude :Pour un acouphène chronique, on l’a vu, le patient témoigne d’une certaine sérénitésomatique étiologique. Son inquiétude résiduelle concerne l’évolution de l’acouphènelorsqu’il a reçu des informations alarmistes1.

1.3.1.2.2 La gêne est variable d’un sujet à l’autre :Du sujet porteur d’un acouphène ancien qui consulte pour savoir « s’il y a du neuf » enmatière de médicament, au patient hyperacousique dont l’acouphène obsédant induit destroubles du comportement, la majorité des patients qualifient l’acouphène « d’énervant ».Pour évaluer la tolérance, une question est utile : « finalement qu’est ce que cetacouphène vous empêche de faire ? ». Souvent, la réponse, après réflexion, est « rien ».C’est aussi sur cette base que va se construire le discours de la prise en charge.L’acouphène peut constituer une gêne quasi permanente, une véritable obsession. Plusfréquemment il ne constitue une gêne qu’à certains moments (endormissement, bruit,silence) qu’il faut faire préciser.« Considérez-vous que depuis sa survenue, l’acouphène est en aggravation, stable, endiminution » ? La réponse permet d’évaluer le début de l’habituation, les variations de latolérance en fonction de la vie psychique. Bien sûr, ce n’est pas en une seule et uniqueconsultation que le bilan exact de la tolérance est fait.

1.3.1.2.3 Le stress : L’acouphène peut être générateur de stress :On le comprend aisément si on accepte la définition du stress comme étant la mise enrapport d’une situation avec les moyens dont on dispose pour la contrecarrer.Le stress peut générer un acouphène. Cette assertion est sans doute vraie. La recherche enneuroendocrinologie met en valeur le rôle du stress au plan somatique.

1.3.1.2.4 L’acouphène et la vie psychique du sujet :Il peut s’agir d’un axe (parmi d’autres) de réflexion utile à la prise en charge.Au-delà de la définition du stress : La personne stressée craint de ne pas faire face auxdifficultés de son quotidien. L’acouphène peut apporter un bénéfice secondaire : s’il estmis en avant dans les relations sociales et autorise des conduites de fuites acceptées parl’entourage, s’il est donc « utile », s’il est un symptôme qui permet d’éviter conflits ettensions, sa disparition, inconsciemment, n’est pas mise à l’ordre du jour. À un stadeplus avancé, le stress permanent génère l’angoisse. La crainte de l’insomnie la renforce.La qualité de vie se dégrade. Plus avant encore, le sujet peut présenter une dépression.Mais la question reste ouverte de savoir si c’est la dépression qui crée l’acouphène oul’inverse.Dans cette évaluation du retentissement de l’acouphène et des mécanismes favorisant sapérennité, se profile la prise en charge. Des médicaments peuvent être nécessaires, unethérapie peut être mise en place, le recours au psychiatre peut s’imposer.

1.3.1.3 L’examen clinique physique :Même s’il est limité, il est indispensable et met en valeur la recherche d’une causesomatique. Il comporte :● Un examen du conduit auditif externe et du tympan, à la recherche d’un motif de douleur.● Une auscultation locale et cervicale à la recherche d’un souffle témoin d’une anomalie

vasculaire locale (acouphène objectif) ou propagé à partir du système valvulaire oucarotidien.

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1- L’acouphène rend fou, mène au suicide… ce genre d’informations se trouvent sur des sites Internet ou dans lediscours de certains confrères…

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● Un bilan de l’ATM. Des douleurs péri-auriculaires, un bruxisme, des soins dentairessuspects d’avoir modifié cet équilibre justifient un examen spécialisé. L’implication del’ATM, souvent évoquée, n’est pas totalement expliquée. Néanmoins des mesuresspécifiques ont permis de vraies améliorations du symptôme.

1.3.1.4 La mesure de l’audition :Elle est indispensable et fournit des éléments essentiels pour la prise en charge. Très souvent,la gêne mise au compte de l’acouphène est en fait due au défaut de compréhension. L’examencomprend l’audiométrie tonale et vocale et tous les tests nécessaires pour objectiverl’hyperacousie.

1.3.1.5 L’imagerie :Sa nécessité a déjà été évoquée en fonction des cas. Normale même ancienne, sonrenouvellement régulier n’est pas une nécessité.

1.3.1.6 Les autres bilans :Ils sont fonction des orientations étiologiques supposées.Une fois définis les conditions de survenue de l’acouphène, ses caractéristiques, sesco-morbidités, son retentissement et sa tolérance, son passé médical et qu’on aura approchéle fonctionnement psychologique du patient, on pourra fixer le profil de la prise en charge.

◆ 1.3.2 La prise en charge a plusieurs objectifs :● Traiter la cause de l’acouphène si on peut en espérer la disparition.● Améliorer la qualité de vie en allégeant les co-morbidités : prise en charge du stress, de

l’anxiété, de la dépression par tous moyens lourds ou légers. L’insomnie, symptôme associéà l’acouphène le plus fréquent, doit être prise en charge. Les hypnotiques, s’ils sont choisissuivront les règles habituelles de prescription.

● Favoriser l’habituation, par la thérapie auditive et les thérapies comportementales etcognitives.

1.3.2.1 Les moyens de traitement :Certains traitements reconnus comme efficaces sont inapplicables : citons la lidocaïne injectabledont l’action est fugace et le courant électrique continu qui peut bloquer la production anormaled’influx, mais provoque l’ossification.

1.3.2.1.1 Améliorer l’audition :C’est la mesure de base. L’absence de surdité associée rend la prise en charge plusdélicate. L’aide auditive est le recours majeur pour la prise en charge. On sait, en Franceles réticences à l’appareillage auditif, mais on constate que les sujets acceptent mieux uneaide auditive inscrite dans la prise en charge de l’acouphène. Certaines prothèsesauditives combinent une amplification et un générateur de bruit.

1.3.2.1.2 Développer l’habituation :La thérapie auditive conçue par Hazel et Jastreboff vise à l’habituation de la réaction :l’acouphène ne génère plus d’intolérance majeure, puis à l’habituation de la perceptionc’est-à-dire à la non-perception de l’acouphène.Elle comporte deux volets :

Le conseil directif :C’est l’explication du phénomène avec en appui tout document utile. Il cherche àfaire céder les croyances acquises sur « l’intraitabilité » de l’acouphène. Lesassociations de patients jouent dans certains cas un rôle très positif.

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La désensibilisation auditive :Il s’agit de la diminution de la sensibilité de la détection de l’acouphène. Cette actionest du domaine de l’inconscient, à la différence de la précédente. Elle est mise enœuvre d’abord en recommandant au patient d’éviter le silence. De façon plussophistiquée, un générateur de bruit hébergé dans une prothèse auditive permet desoumettre le sujet à un environnement sonore permanent. L’idée est de diminuer lecontraste entre l’acouphène et l’environnement sonore. Petit à petit, cettestimulation sonore prolongée (plus de 6 heures par jour) va déclencher une réactionnormale d’habituation : ce signal n’est pas menaçant, il est amovible. Et la théoriestipule que l’habituation est généralisable, c’est à dire que les stimulationsressemblant à la stimulation qui déclenche la réaction visée vont aussi profiter dufiltre de l’habituation. Ainsi l’acouphène est plus rapidement bloqué à l’étageinconscient. Le développement de l’habituation demande plusieurs mois. Cettedémarche n’est pas dangereuse car le niveau sonore nécessaire est faible.

1.3.2.1.3 Utiliser les méthodes de thérapie cognitive et comportementale :Elles ont pour objectif non pas tant de faire disparaître l’acouphène que d’en garantir latolérance. Les modalités sont parfaitement définies. Il s’agit d’établir avec le thérapeuteles objectifs à atteindre, de les modifier d’une séance à l’autre, d’évaluer la réussite… À ladifférence de la méthode précédente, elle fait appel uniquement au conscient.

1.3.2.1.4 Les vasculotropes ou assimilés :Ils sont prescrits par habitude. Seuls 2 médicaments ont une AMM pour l’indicationacouphène.

1.3.2.1.5 Les psychotropes :Ils ont leurs tenants et leurs détracteursdans cette indication..Ils sont indiqués spécifiquement pourtraiter la ou les co-morbidités. Pour lesymptôme acouphène, au-delà de leureffet général et de l’indication del’AMM, certains sont justifiés pour leureffet ou par les habitudes du thérapeute.

1.3.2.1.5.1 Les antiépileptiques :Ils ont, on l’a vu, leur justification demécanisme.Le plus utilisé est le clonazepam (Rivotril®) sans AMM pour cette indication.Aucune étude non critiquable n’est disponible. Comme toute benzodiazépine, saprescription en suit les règles habituelles : le moins possible, le moins longtempspossible. Sa forme goutte (de 5 à 8 gouttes le soir au coucher pour un sujet enl’absence antérieure de priserégulière de benzodiazépine) estparfaitement manipulable. Lecoût du traitement est faible. Onrecherchera la dose minimaleefficace. Le clonazepam a unejustification logique, il est sédatifet améliore la qualité de vie enfavorisant l’endormissement et lesommeil. On ne peut lui attribuerde disparition complète de

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Dans la prescription d'un psychotrope, il ya 3 acteurs :- l'acouphène : sévérité, retentissement...- le sujet : acceptation de la démarche(crainte de l'assuétude, fonctionnement deces drogues...)- le prescripteur : promotion desbenzodiazépines « facilement » ou aucontraire frein systématique.

La sacralisation de la prescription :Si ce moyen thérapeutique est choisi, il estindispensable d’en présenter la justification,les précautions d’emploi, la faible posologie,les rares effets secondaires. La découverte deces informations dans la notice, par le patient,le déstabilise et gâche à la fois cettepossibilité thérapeutique et la confiance dansle thérapeute… qui s’est sans doute trompéde médicament.

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l’acouphène, mais nombre de patients le considèrent comme un produit efficace.Certains auteurs s’opposent à l’usage des benzodiazépines pour éviter toute addictionmais aussi pour ne pas entraver le développement de l’habituation, car leur effet surles médiateurs peut interférer dans ce mécanisme réel de plasticité cérébrale.

1.3.2.1.5.2 Les anxiolytiques :Ils prennent en charge la co-morbidité anxieuse. La prescription est réfléchie, toutcomme celle des somnifères.

1.3.2.1.5.3 Les antidépresseurs :Ils peuvent être utiles, surtout si l’acouphène s’intègre dans une dépression masquée.Là encore, les formes en gouttes sont bien manipulables, là encore il faudra expliquerle recours à ce moyen thérapeutique et craindre la possibilité des effets secondaires.Dans l’ensemble, il ne faut pas céder à la tentation de prescrire trop facilement desmolécules, qui peuvent conduire le sujet à une addiction pénible, sans toutefoisnégliger un inconfort de vie parfois majeur.

1.3.2.1.6 Les autres méthodes sont nombreuses :Acupuncture, relaxation, hypnose, sophrologie… Certains patients sont soulagés.L’évaluation de leur efficacité est complexe. Elles sont à condamner quand elles sontdéveloppées dans un cadre non médical, pour des patients déçus de la médecineconventionnelle qui n’a pas su proposer le début de la prise en charge que constituel’empathie.L’approche des patients porteurs d’acouphènes élargit le champ de la pratique pourqui sait que, souvent, derrière ce symptôme épouvantail, se cache la richesse de lacomplexité du fonctionnement de chacun.

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Les acouphènes, un mal vieux comme la médecine…

Petite histoire de l’acouphène

La sensation auditive perçue sans stimulation extérieure à l'organisme accompagne l'humanitécertainement depuis son commencement. Aussi loin que l'on peut remonter dans l'histoire humaine dontnous gardons des traces, ce phénomène est mentionné.

De l'Antiquité au XVIe siècle

Les auteurs se consacrent essentiellement à la description du symptôme. Les théories explicatives sont rareset curieuses : la présence d’un petit animal protégeant l'oreille pour les Annamites, un conflit entre le froidqui entre dans l'organisme le long des vaisseaux et les humeurs de vie chaude présentes dans le corps pour lesChinois, les humeurs venant de l'estomac pour Gallien au IIe siècle après Jésus-Christ, qui neparviennent pas à s'écouler normalement pour un Alexandre de Tralles au VIe siècle, des vapeurs cérébralesà nouveau pour Fallope au XVIe siècle.

On voit par là l'absence de progression avec essentiellement des compilations redondantes de siècle en siècle.

Seul Hippocrate et les médecins arabes des Xe-XIe siècles émergent, ainsi que les écoles de Salerne en Italieet Montpellier au XIe-XIIe siècles. Leur contribution principale est une classification des acouphènesassociés ou non à une surdité, des mouvements anormaux et autres troubles neurologiques. Certains commeGuy de Chauliac au XIIe siècle constatent l'amélioration nette des patients situés dans unenvironnement sonore relativement important, une idée qui fera son chemin plusieurs siècles après.

Quant aux thérapeutiques proposées, elles varient peu durant ces 2000 ans, fondées essentiellement sur desdécoctions administrées localement, à base d’huiles, d’herbes, ou même d'opium, voire des incantations oudes scarifications des lobes de l'oreille.

Les deux siècles suivants représentent un palier dans l'acquisition des connaissances en matièred'acouphènes en particulier grâce à Du Verney qui publie en 1683 le premier traité des maladies de l’ouïe,exclusivement consacré aux pathologies de l'oreille ; il fait en particulier une analogie entre les sensationsvisuelles que l'on peut avoir dans le noir et, par exemple, les traumatismes acoustiques et les acouphènes quipeuvent en résulter. Ce qui est tout à fait passionnant est le fait qu'il ait émis l’hypothèse selon laquelle lenerf auditif transmet toutes les activités de l'oreille interne au cerveau, quelle que soit la source de cetteactivité.

La contribution du XVIIIe siècle est la découverte qu'il n'y a pas d'air dans le labyrinthe ce qui,naturellement, change complètement la perspective en matière de théories d'explication des acouphènes. Surle plan thérapeutique de grandes voies apparaissent, la première utilise les propriétés de l'électricité statiquedécouverte au milieu du siècle, la deuxième se fonde sur les bénéfices supposés de la mastoïdectomie quipermet la sortie de l'air emprisonné dans la boîte crânienne.

Le XIXe siècle est la deuxième marche qui conduit aux connaissances actuelles.

On remarque d'abord les applications des découvertes de Galvani et Volta en matière de courant continu,permettant certaines disparitions d'acouphènes. Itard publie en 1821 une série de 172 patientsacouphéniques qu’il classe selon la cause (acoustique, oreille interne, psychique). Il associe cetteclassification et l’existence ou non d'une surdité et suggère la technique du masquage d'acouphènes .

Les différentes écoles allemandes sont, durant ce siècle, les plus actives. Elles s’intéressent auxbourdonnements pulsatiles rapportés à des anomalies de vaisseaux de proximité ou à des atteintesvalvulaires.

- On fait le lien entre eux et la plupart des pathologies de l'oreille avec la possibilité d'apparition d'unacouphène dans le cadre de l'irritation du nerf auditif.

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- On commence à bien différencier des acouphènes objectifs et subjectifs.

- Des atteintes centrales (typhoïde, syphilis) des médicaments (quinine, acide salicylique, morphine) sontmis en cause dans l'apparition d'acouphènes.

De même, la description d'une inhibition résiduelle après exposition à un bruit extérieur est rapportée.

En terme d'épidémiologie, on constate l'augmentation de la fréquence des acouphènes avec le vieillissement,rapportés à un encombrement calcaire de la fenêtre ovale. Les troubles de ventilation de la caisse sontégalement considérés comme une cause possible d'acouphènes.

L'hyperacousie est décrite également au XIXe siècle par les écoles allemandes.

On voit ainsi se mettre en place des idées qui n’éveillent en leur temps que faiblement la curiosité despraticiens. En effet, les nombreux essais thérapeutiques médicamenteux (injection de vapeurs, glycérine,chloroforme, y compris dans les trompes d'Eustache, utilisation par voie générale, d'arsenic, d'atropine), nereposent sur aucun lien avec les théories avancées. Toynbee, fondateur de l’anatomie pathologique, meurten 1866 en traitant son propre acouphène par une inhalation de chloroforme et d’acide cyanhydrique.

La dernière marche de l'escalier se met en place après la seconde guerre mondiale, après une cinquantained'années productives sur le plan théorique mais peu de bénéfice pour les patients.

En effet les outils de mesure (audiométrie, test vestibulaire), d'imagerie (radiographie standard, incidencespécifique et coupes tomographiques), l’électro-encéphalographie voire l’imagerie vasculaire associés àl'accroissement des connaissances sur le fonctionnement de la cochlée (Barany) sont les soubassements quiont permis les avancées actuelles.

L’histoire de ces 50 dernières années se confond avec les chapitres de cette monographie et nous y renvoyonsdonc le lecteur.

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Chapitre 2

Les fondamentaux de l’acouphène

Les avancées dans la connaissance des acouphènes sont bien réelles même si le peu d’applicationscliniques à ce jour peut donner une impression contraire.

Pour la pratique, ces notions alimentent la consultation, permettent d’élaborer des paraboles pourexpliquer sans déformer, pour s’adapter au désir de compréhension de celui qui souffre d’acouphènes.

La relation médecin–malade, encore plus qu’ailleurs est ici un vrai moteur pour la prise en charge. Elleest de qualité si elle est abondée par la connaissance.

2.1 L’audition et les acouphènes

Nous reprenons ici certains paragraphes déjà présentés dans le survol.L’audition normale est automatique, irrépressible : on ne peut pas s'empêcher de comprendre uninterlocuteur qui parle sa langue maternelle. Elle permet de comprendre la parole dans desconditions sonores plus ou moins difficiles… Elle permet la localisation de la source sonore…L’audition normale est sans acouphène…Dès que la compréhension se fait en dehors de ces conditions, elle impose alors une démarchevolontaire de compréhension, un effort.La fonction de l’audition est la communication avec des interlocuteurs mais aussi et plusgénéralement avec l’environnement.En effet l’audition permet l’alerte et participe à la surviede l’individu en prévenant du danger. Elle permet aussile plaisir de l’écoute musicale par exemple, cette écoutepouvant générer une réelle émotion.Communication, alerte et plaisir s’intriquentforcément dans la machinerie générale de la fonctionde relation.Communiquer représente une activité principale auquotidien et il est reconnu qu’à chaque instant au moins 20% des humains communiquent. Toutempêchement à la communication retentit lourdement sur le comportement du sujet. Et cette gêneest pratiquement inéluctable avec le vieillissement de l’organisme .L’alerte sonore a, par rapport à l’alerte visuelle, l’avantage de fonctionner parfaitement la nuit… ;cette fonction est permanente… L’attente du signal d’alerte, sa pré-connaissance permet unedétection rapide et pour des intensités de stimulation faibles, peut être autrement non perçue. Ainsila responsabilité de la surveillance d’un enfant qui dort sensibilise l’audition de celui qui en a lacharge. Le moindre gémissement attendu le réveille… l’audition est un système à gain variable et leréglage du gain est sous la dépendance d’éléments cognitifs, psychologiques et émotionnels. Lasignature sonore d’un danger attendu rend l’audition en quelque sorte plus performante.Le plaisir de l’écoute musicale met encore en valeur les relations entre audition et émotion. Tellemusique tire des larmes d’émotion, tel danger déclenche des réactions de stress orchestrées par lesystème nerveux autonome : palpitations, sueurs…

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L’audition normale sans acouphène estautomatique, irrépressible, binaurale,permettant la localisation de la sourcesonore et le débruitage. Elle donne :- L’alerte.- La communication.- L’hédonisme de l’écoute.

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◆ 2.1.1 Efficacité et limites du fonctionnement sensoriel :Cinq sens concourent à notre connaissance du monde extérieur et à notre survie. L’intégration detoutes ces informations, pour une bonne part continues, est optimisée. Dans un soucid’économie de moyens, l’intégration centrale ne se préoccupe que des informations considéréesde façon innée ou par expérience essentielles à la survie et aux changements.Ainsi le port du vêtement et la sensation qu’il déclenche sur le tact est silencieux, laissantdisponible à d’autre modalités sensorielles la voie libre pour accéder à une réaction de survie.Mais si la sensation est silencieuse, elle reste bien présente : le rappel de la sensation est possiblevolontairement. Dans le domaine qui nous occupe, le bruit de fond mélangé aux paroles dignesd’intérêt n’est pas entendu sauf si on décide d’y prêter attention ou s’il est trop intrusif. Mais telsignal sonore témoin de danger potentiel sera au contraire valorisé allant jusqu’à empêcher lacompréhension de l’interlocuteur.Ainsi, le mécanisme de la perception catégorise le signal sonore, valorisant l’alerte qui va pouvoiroccuper la « ligne » en permanence, empêchant plus ou moins la perception d’un signal d’un autreordre.

2.1.1.1 La transition vers l’acouphène :L’acouphène ressenti comme une menace va profiter de ce statut de danger potentiel : il estperçu même s’il est d’intensité faible. Il est reconnu même dans un environnementmasquant, il déclenche toutes les réactions de stress possibles. Il « occupe en permanence laligne », entrave la compréhension et sa caractéristique même de menace est le facteur depérennisation.

2.1.1.2 L’acouphène a une composante culturelle :Toujours désagréable en Occident, il est, en Inde, le signe que Dieu vous parle et ne génèreaucune plainte, bien au contraire.

2.1.1.3 L’habituation :C’est un élément essentiel dans la physiologie sensorielle, au même titre que « l’oubli » qui

fait que les stimulations sensorielles peuvent se succéder les unes aux autres.L’habituation est l’évanouissement progressif de la réaction face à la répétitiond’une stimulation. Dans une approche finaliste, tout se passe comme si lesystème sensoriel « comprenait » que la stimulation qui ne change pasn’apporte plus d’information sur l’environnement et qu’il peut libérer ce

canal pour une éventualité sensorielle qui serait plus utile. Le système sensoriel filtre cetteinformation, l’empêche d’atteindre le conscient de la perception mais garde la possibilité deson rappel volontaire. Mais si la stimulation porte en soi une information de menace vitale,aucun filtre, jusqu’à démonstration du contraire, ne va s’instaurer.Par sa permanence, par la prise en compte involontaire et progressive de son statut de« non-information » l’acouphène doit profiter naturellement de l’habituation, sauf s’ilcontinue à être perçu comme une menace, sauf s’il déclenche une émotion : la craintetraduite par les réactions du système nerveux autonome.Le devenir naturel de l’acouphène se caractérise bien par l’habituation. L’habituation est lephénomène spontané de réduction des réactions à la présence d’un stimulus répété et nonpertinent. S’il n’y a pas d’habituation, c’est peut-être que le stimulus demeure alarmant etgarde une signification émotionnelle.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

L’habituation est la loiévolutive générale del’acouphène.

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2.1.1.4 L’habituation décrite par Hallam, Rachman, Hinchcliffe en 1984 a 2 phases:● L’habituation à la réaction :

le signal est toujours perçumais ne provoque plus deréactions : c’est l’améliorationde la tolérance.

● L’habituation à la perceptionapporte la disparition de laconscience du signal. Le sujetfait abstraction des stimula-tions non pertinentes et nonutiles : un stimulus catégorisénon pertinent n’atteint pas laconscience - c’est la guérison.

Lorsque le stimulus est jugéimportant, il est traité de façon contrôlée. Le patient y prête une attention soutenue s’il estalarmant. Le système nerveux autonome (SNA) prépare le corps à la réaction ducomportement de “faire face ou fuir” (fight or flight).On observe un renforcement des traces mnésiques avec une identification de plus en plusrapide du stimulus d’alarme, même s’il est en compétition avec un autre stimulus.

L’acouphène : acouphène et acouphènes… DéfinitionsEn première approximation, il apparaît raisonnable de reprendre la fameuse définition de« sensations auditives perçues en l’absence de tout stimulus extérieur à l’organisme ».Malheureusement ceci ne recouvre pas l’expérience des patients ni celle des scientifiques.Chacun sait l’existence de bruits générés à l’intérieur du corps tant par l’appareil squelettiqueque vasculaire. Sont-ils des acouphènes ?Cette objection pousse d’une part, à limiter le champ de la définition aux atteintes du systèmeauditif et en particulier de la cochlée, d’autre part à individualiser acouphène objectif etsubjectif. Cependant les progrès techniques repoussent en permanence la frontière entre cesdeux entités.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

Perception & évaluationAires auditives et autres aires associées - cortex

Détection,subcorticale

Associations émotionnellesSystème limbique

Source del'acouphène

GêneSystème nerveux autonome

Hp Hr

Processusconscients

Processusinconscients

Si l’habituation ne se développe pas(les 25% de cas d’acouphènes mal tolérés ?)- l’acouphène reste une alarme,- hypothèse d’un mécanisme pathologique délétère,- anticipation de la gêne sur le restant de la vie,- dysfonctionnement du système limbique ?- dépression ?- bénéfice secondaire à la persistance de l’acouphène,- gestion du stress maladie,- gestion de la communication avec l’environnement,- renforcement de l’attention auditive du fait de lasurdité.

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En outre, cette définition n’intègre pas la composante de l’analyse centrale du signal qui est, àl’évidence, un élément déterminant dans la mise à la conscience, la persistance, le caractèreagressif de l’acouphène.À l’équipe thérapeutique de séparer acouphène symptôme et acouphène maladie.

2.1.1.5 Acouphène symptôme et acouphène maladie :Il s’agit, ici, d’une des questions qui sollicite le plus l’expérience clinique de l’équipethérapeutique. Le patient se présente avec un symptôme qu’il décrit souvent très richement.Avant de le considérer comme résumant à lui seul la maladie, une enquête est nécessaire. Ellene doit cependant épuiser ni l’équipe thérapeutique ni les finances de l’assurance-maladie.Il nous paraît indispensable de se fonder d’abord sur les dires du patient, seuls élémentscertains de départ.Nous suggérons une liste non limitative de circonstances de survenue en partant des plusvraisemblables étiologiquement jusqu’à celles dont le lien avec l’apparition de l’acouphènene sont actuellement pas établies.Ce tableau apparaît plus loin. (Cf tableau 1 page :73).Ces causes entrant dans le cadre d’un acouphène maladie, ne doivent pas être confonduesavec les circonstances déclenchantes (acouphène apparaissant ou s’aggravant en serrant lesdents, en déplaçant latéralement les yeux, en se penchant en avant, disparaissant pour delongues périodes dans le bruit ou en comprimant tels vaisseaux du cou, en altitude, ou aucontraire en redescendant d’un lieu élevé etc.).La recherche de ces étiologies et de ces circonstances déclenchantes a une valeur importante àla fois dans l’établissement de la relation avec le patient et dans la rationalisation de la prise encharge ultérieure. (Est-il par exemple indispensable de réaliser une IRM chez un patientporteur d’un acouphène unilatéral après le barotraumatisme ou un traumatisme sonorelatéralisé ?).Avant d’aller plus avant, il importe de distinguer acouphènes et hallucinations auditives.

Les hallucinations auditivesLes hallucinations peuvent se rencontrer lors d’épisodes dépressifs et maniaques sévères.Elles se manifestent chez 60 à 70% des patients atteints de schizophrénie, la modalité auditiveétant la modalité sensorielle la plus fréquemment affectée.Ces altérations de la perception concernent souvent le langage : le patient entend des voix quis’adressent à lui ou parlent de lui. De plus, lespatients atteints d’acouphène sont parfaitementconscients que ces bruits n’ont pas de réalité dansleur environnement bien que, souvent, laconscience d’une source de génération internen’aille pas de soi mais émerge comme conséquenced’un raisonnement logique passant par larecherche vaine d’une source externe, laconfrontation à des situations diversifiées etl’interrogation des personnes exposées au mêmeenvironnement ; de même, dans les hallucinationsmusicales, après une courte période d’adhésion, le patient est, le plus souvent, capable decritiquer la localisation de la perception et il n’existe pas d’idées délirantes associées.L’halluciné, au contraire, présente d’emblée une mauvaise attribution de sa perception, leplus souvent imputée à un agent extérieur qui tenterait de l’influencer.Acouphènes et hallucinations auditives peuvent présenter une caractéristique commune :leur lien avec la désafférentation. Certaines théories envisagent l’acouphène comme unehallucination auditive rudimentaire, premier signe de « l’hallucinose des otopathes » qui,chez des patients présentant des troubles auditifs, fait succéder dans le temps à une

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Si hallucinations et acouphènespartagent la nature involontaire del’expérience ainsi que le fait d’êtreperçus en l’absence toutestimulation, le caractère rudimentairede la perception et l’absence decontenu sémantique permettent dedistinguer les acouphènes deshallucinations auditives.

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manifestation hallucinatoire élémentaire comme l’acouphène, des manifestations de plusen plus complexes comme les hallucinations musicales puis acoustico-verbales, parenrichissement ou « habillage progressif » des acouphènes.Pour ces derniers phénomènes comme pour les acouphènes, des hypothèses périphériquesse sont historiquement affrontées à des hypothèses plus centralistes. Il est cependantprobable qu’ils sont, le plus souvent, dus à la conjonction de facteurs périphériques etcentraux. Il est à noter, qu’alors qu’aucune amélioration n’est rapportée sous traitementmédicamenteux, l’appareillage de la surdité, peut, quant à lui, réduire certaineshallucinations. Par ailleurs, en présence d’hallucinations musicales, il est indispensable derechercher un trouble psychiatrique associé (dépression, trouble obsessionnel compulsif) ;en effet, le cas échéant, la prise en charge de ce trouble peut exercer un effet favorable sur lesdites hallucinations.Ainsi, les phénomènes hallucinatoires auditifs pourraient s’envisager comme un continuumle long duquel se succéderaient divers états sous-tendus par un mécanisme dedésafférentation sensorielle. Cependant, si l’acouphène est relativement fréquent et trèssouvent associé à l’existence d’une perte auditive, il n’en est pas forcément de même pour leshallucinations : l’intervention de facteurs de personnalité et/ou d’environnement semblenécessaire pour qu’un acouphène se transforme en hallucinations acoustico-verbales.Toutefois, les résultats des études d’imagerie montrent que ces différentes manifestationsmettraient en jeu une voie finale commune du processus neurophysiologique deshallucinations impliquant le carrefour temporo-pariétal de l’hémisphère dominant. C’est surcette même voie qu’agirait la stimulation magnétique transcrânienne, nouvelle méthodethérapeutique non invasive qui semble être efficace dans le traitement d’hallucinationsrésistantes depuis des années à tout traitement comme dans celui d’acouphènes anciens.

◆ 2.1.2 Le phénomène acouphène analysé dans sa physiologie :Dans une première partie, nous constaterons l’existence de l’hyperactivité neuronale. Nousanalyserons ensuite ses conséquences au regard des connaissances en matière comportementale, àsavoir l’habituation et le conditionnement.

2.1.2.1 Généralités :L’origine précise d’une grande majorité d’acouphènes demeure obscure. La plupart d’entreeux sont considérés comme ayant une origine neurosensorielle. Dans la communautéscientifique, il existe maintenant un consensus selon lequel le substrat physiologiquepotentiel des acouphènes neurosensoriels serait associé à un signal nerveux aberrant car sanscorrélat sonore dans l’environnement. Généré à un niveau quelconque des voies auditives(Jastreboff, 1990), après avoir circulé dans les voies auditives, il atteindrait le cortex auditif oùil serait interprété comme un véritable son.Cette activité neurale particulière ou corrélat neuronal de l’acouphène a fait l’objet dediverses hypothèses et aussi de divers travaux destinés à lacaractériser, d’une part chez des sujets humains mais, aussi etsurtout, dans la majorité des cas, cette activité ne peut être reliée àaucune pathologie sur des modèles animaux d’acouphènes. Ellerésulterait de processus de compensation qui se développent dansles voies auditives en réponse à des dysfonctionnementspériphériques mineurs ou à une perte auditive.L’implication de structures cérébrales non auditives, en particulier du système limbiqueresponsable de nos émotions et du système nerveux autonome qui contrôle nos fonctionsvégétatives, serait déterminante dans le traitement central de l'activité neuronale liée àl'acouphène (Jastreboff, 1990, 1996, 1999) et pour le devenir du symptôme. Celui-ci met enjeu des phénomènes psychophysiologiques connus sous les termes d’habituation et deconditionnement. Selon les conditions environnementales et psychophysiologiques quico-existent avec l’apparition de l’acouphène, la présence continuelle du signal nerveux qui lui

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

L’acouphène : unehyperactiviténeuronale à un endroitdes voies auditives etnormalement perçue.

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est lié se traduirait par des modifications plastiques durables au sein du système auditifest lié se traduirait par des modifications plastiques durables au sein du système auditifcomme entre les diverses structures impliquées dans le traitement du signal responsable.

2.1.2.2 Le corrélat neuronal de l’acouphène :Son niveau de génération comme sa nature sont encore l’objet de controverses.

Où est-il généré ?Pour certains auteurs, la génération du signal de l’acouphène s’effectuerait en périphérie – àsavoir au niveau des cellules ciliées de la cochlée, de la première synapse ou du nerf auditif 1.Pour d’autres, en revanche, ce n’est que dans les centres que ce signal apparaîtrait2. Quoiqu’ilen soit, il est nécessaire de souligner que l’hypothèse d’une génération périphérique n’exclutpas pour autant l’intervention de mécanismes centraux, puisqu’en tant que perceptionconsciente, l’acouphène implique nécessairement des structures centrales; réciproquement,l’hypothèse d’une génération centrale n’élimine pas la participation du système auditifpériphérique : la plupart des modèles centraux de l’acouphène font en effet jouer auxperturbations périphériques (en particulier aux lésions) un rôle déterminant par le biais desmodifications centrales qu’elles entraînent, lesquelles sont, elles-mêmes, directement liées àla génération du signal.

Quel est-il ?Les recherches sur les corrélats neurophysiologiques de l’acouphène ont été essentiellementconduites chez l’animal. Si les études chez l’homme sont facilitées par le fait quel’expérimentateur peut rapidement savoir si l’acouphène est présent, absent ou s’il subit desmodifications, elles sont en revanche limitées pour des raisons éthiques car, seules lestechniques non invasives, peu précises d’un point de vue spatial (potentiels évoqués,magnétoencéphalographie) ou temporel (IRMf et TEP) peuvent être utilisées. Chezl’animal, au contraire, des techniques invasives peuvent être employées, qui bénéficientd’une excellente résolution temporelle et spatiale pour étudier l’activité nerveuse à partird’électrodes implantées directement dans le cerveau.Des paradigmes comportementaux ont été développés qui permettent de s’assurer de laprésence d’un acouphène chezl’animal3 ; cependant, à ce jour, lamajorité des travaux menés dans cedomaine, l’ont été sans contrôle dela présence concomitante de laperception fantôme. Tout commeles divers modèles développés,ces études reposent sur laprésomption qu’un traitementconnu pour induire desacouphènes chez l’humain,provoque aussi des acouphèneschez l’animal ou, au moins, lesmêmes modifications du système auditif (périphérique et/ou central) qui leur sontgénéralement associées.Les traitements les plus couramment utilisés pour déclencher un acouphène sont l’injectionde substances ototoxiques - en particulier aspirine ou quinine - et l’exposition des animaux àune surexposition sonore.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Démontrer chez l’animal le phénomène acouphène :

Générer l’acouphène Moyens connus chez l’homme

Enregistrer une réponseneuronale

A peu près non réalisable chezl’homme

Démontrer la perceptionde cette hyperactivité

Domaine clinique : mise enévidence objective difficile

Démontrer la mêmepossibilité chez l’animal

Habituation (anticipation,affectivité)…

1- Jastreboff, 1990; Eggermont, 1990; Martin et al, 1993; Cazals et al., 1998; Puel et al., 2002 ; Guitton et al., 2003.2- Au-delà du nerf auditif, Gerken et al., 1996; Salvi et al., 2000; Eggermont and Komiya, 2000; Kaltenbach et McCaslin,

1996; Kaltenbach et Afman, 2000; Zacharek et al., 2002; Brozoski et al., 2002; Noreña et al., 2000; 2002; Noreña etEggermont, 2003.

3- Jastreboff et al., 1988 ; Jastreboff et Sasaki, 1994 ; Guitton et al., 2003.

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La nature du signal neuronal de l’acouphène ne fait pas encore l’objet d’un consensus. Troishypothèses se partagent les faveurs des divers auteurs. Ainsi l’acouphène, dont l’intensitéperçue est relativement faible, pourrait être lié à une hyperactivité des fibres du nerf cochléaire,à une modification du pattern temporel des décharges ou bien à une augmentation desynchronie entre les décharges de différents neurones du nerf auditif. Le schéma emprunté àNorena (2003) illustre ces trois différentes possibilités de 'codage' de l’acouphène. (figure 2)Chacune de ces hypothèses est soutenue par des arguments expérimentaux.

Dans des conditions associées à l’acouphène, Evans et Borerwe (1982) ont, chez le chat, étéles premiers à rapporter une augmentation de l’activité spontanée dans le nerf auditif. Ceci aété retrouvé plus tard, en périphérie comme dans les structures auditives centrales1 dans desconditions similaires et aussi dans des modèles animaux d’acouphènes2.La modification du pattern temporel correspondrait à l’émergence d’une activité dite « enbouffées » (caractérisée par des intervalles courts entre les potentiels d’action). Une telleactivité a effectivement été observée dans divers travaux expérimentaux, et dans certains cas,de manière concomitante avec l’hyperactivité3. Ceci laisse à penser qu’elle pourrait peut-être,à elle seule, rendre compte de l’augmentation d’activité spontanée déjà mentionnée. Cettethéorie de modification du pattern temporel des décharges est aussi étayée par desobservations réalisées à l’aide d’un moyennage spectral de l’activité spontanée des neuroneschez l’animal 4 comme chez l’humain5 .Enfin, une augmentation de synchronie entre les décharges des neurones a été rapportée dansle nerf auditif 6 comme au niveau cortical7.L’observation d’une diminution de l’activité spontanée périphérique dans des conditions -administration de quinine (Mulheran and Evans, 1999) ou perte auditive installée - établiescomme fréquemment associées à l’acouphène, sème le doute sur la probabilité qu’uneaugmentation d’activité spontanée des neurones puisse correspondre au signal de

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Figure 2 - D'après A. Norena (2003) : Les différentes possibilités de codage de l'acouphène.

Décharges spontanées

Augmentation de l'activitéspontanée des neurones

Décharges selon un modeparticulier "en bouffées"

Décharges spontanées

Augmentation dela synchronie

1- Jastreboff, 1988; Jastreboff, 1990; Eggermont and Komiya, 2000; Kaltenbach and McCaslin, 1996; Cazals et al.1998 ; Kaltenbach and Afman, 2000; Brozoski et al., 2002; Zacharek et al., 2002.

2- Jastreboff and Sasaki, 1994 ; Kaltenbach and McCaslin, 1996.3- Evans et Borerwe, 1982 ; Martin et al., 1993.4- Schreiner and Snyder, 1987; Martin et al., 1994; Lenarz et al., 1995, Cazals et al. 1998.5- Martin, 1994.6- Eggermont, 1990b; Martin et al, 1993; Cazals et al., 1998).7- Ochi and Eggermont, 1996, 1997 ; Norena et Eggermont, 2003.

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l’acouphène. En revanche, l’amélioration de la synchronie a été retrouvée dans les modèlesd’acouphènes induits par l’aspirine ou par la quinine et, en périphérie1 comme dans lescentres2. On retrouve aussi cette amélioration de synchronie au niveau central aprèstraumatisme auditif (Norena et Eggermont, 2003). Bien que la question de la nature dusignal de l’acouphène ne soit pas encore définitivement tranchée, les arguments semultiplient donc en faveur de cette dernière hypothèse.

2.1.2.3 HabituationOn la définit comme une forme d’apprentissage non associatif correspondant à unediminution des réponses aux stimuli répétitifs (Reuchlin, 1993).Ce type d’apprentissage consiste à apprendre à ignorer un stimulus qui n’a pas de sensparticulier pour un individu donné. Chacun de nous est habitué à toute une série de stimulide l’environnement. Sur le plan de l’audition par exemple, nous sommes habitués aux bruitsrépétés et invariants de notre voisinage proche (les voitures qui passent dans la rue ne nousempêchent plus de dormir, la même musique qu’écoutent les voisins n’attire plus notreattention). On dit que l’on est ‘habitué’ à ces stimuli.Le contraire de l’habituation est la sensibilisation qui renforce la réponse de l’individu à tousles stimuli, y compris à ceux qui n’évoquaient pas ou peu de réponse auparavant. Ceci estparticulièrement vrai dans le cas de réponses qui produisent une émotion. Ainsi, un stimulusintense ou très fortement connoté sur le plan émotionnel peut entraîner une réponseexagérée à tous les stimuli qui suivent. Mais des stimuli incohérents, surprenants ou nonattendus peuvent aussi provoquer une sensibilisation : ils sont dits prosexigènes.Le caractère prosexigène d’un stimulus peut aussi correspondre au fait qu’il se rapporte à unbesoin, à une motivation de l’organisme (signaux de plaisir ou de danger par exemple). Laréaction d’orientation vers une stimulation nouvelle constitue la première réponse à unstimulus prosexigène. Elle comporte une fonction générale de facilitation sensorielle etmotrice : un stimulus auditif déclenchant cette réaction abaisse le seuil de perception visuelle.Si un stimulus nouveau ou incohérent se répète, on constate en général qu’il perd sa valeurprosexigène en même temps que son caractère imprévisible et il y a habituation. Ce processusd’habituation, au sens psychologique du terme, est aussi véritable sur le plan physiologique,dans le sens où les messages relatifs à un bruit répété ne sont plus admis dans le systèmenerveux central, stoppés par un mécanisme périphérique de filtrage (pour le système auditif,au niveau du noyau cochléaire).

2.1.2.4 ConditionnementIl existe deux sortes de conditionnement3 : le conditionnement classique pavlovien(découvert par Pavlov en 1927) et le conditionnement opérant ou instrumental (décrit parSkinner en 1935).

2.1.2.4.1 Conditionnement classique :On le définit comme un apprentissage permettant l’association entre deux stimuli, dontl’un provoque naturellement une réponse et l’autre pas. Il met en jeu le système nerveuxautonome et répond à une procédure d’apprentissage associatif en trois étapes(cf Figure 3) :– un stimulus inconditionnel (SI : exemple la nourriture) provoque une réponse

inconditionnelle (RI : la salivation) : SI ➔ RI ;– un stimulus neutre (une cloche) est présenté de manière répétitive précédant

l’apparition du SI : SN (cloche) + SI (nourriture) ➔ RI (salivation) ;

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

1- Eggermont (1984; 1990); Martin et al., (1993); Cazals et al., (1998).2- (Ochi & Eggermont, 1996, 1997).3- Bear, Connor et Paradiso, 1997.

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– au bout d’un certain nombre de couplages SN + SI, la réponse inconditionnelleapparaît dès la présentation du stimulus neutre (cloche ➔ salivation) : on dit que leSN est devenu un stimulus conditionnel - SC et la RI une réponse conditionnée - RC.Si l’on présente plusieurs fois le SC seul, la RC décroît puis disparaît : on parle alorsd’extinction de la réponse conditionnée.

2.1.2.4.2 Conditionnement opérant :Il est défini comme une forme d’apprentissage permettant d’associer une réponse à un

stimulus signifiant, c’est-à-dire possédant un sens pour l’individu. Il met en jeu lesystème nerveux central et reprend le cheminement du conditionnement classique entrois étapes. Cependant, dans le conditionnement opérant, le stimulus engendre uneréponse qui va elle-même avoir des conséquences ou même provoquer un stimulusrenforçateur de la réponse. Ce renforcement peut être positif s’il conduit à une répétitiondu comportement à l’origine de la réponse et négatif, si, au contraire, il conduit à unévitement du comportement. Par exemple, un enfant qui pleure la nuit reçoit unrenforcement positif de la part de sa mère si elle se lève pour venir le soulager et le câliner,mais négatif si elle vient le réprimander de l’avoir réveillée. Les conséquences de laréponse de la mère aux pleurs de l’enfant peuvent donc devenir des renforçateurs.De la même façon que dans le conditionnement classique, la réponse conditionnée peuts’éteindre si elle n’est plus renforcée.De plus, Skinner a montré que l’on peut établir et entretenir des conditionnements pardes renforcements partiels ou probabilistes : au lieu d’être renforcée chaque fois, laréponse l’est un certain pourcentage de fois seulement. Dans ce cas, la liaison entre SC etRC est plus lente à se mettre en place, mais elle est aussi plus difficile à éteindre.L’apprentissage associatif de type conditionnement est très fréquent chez les individus.Ainsi, certains stimuli peuvent acquérir une valeur prosexigène (cf § Habituation) aucours de l’ontogénèse par un conditionnement s’étant opéré pendant l’histoireindividuelle du sujet.

2.1.2.4.3 Application à l’acouphène :Les circonstances durant lesquelles l’acouphène est perçu pour la première fois jouentprobablement un rôle déterminant pour le devenir du symptôme. S’il survient dans une

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Figure 3 - Les différentes étapes de l'apprentissage par conditionnement classique.

ETAPE 1 : un stimulusinconditionnel entraîne uneréaction inconditionnelle.

ETAPE 2 : un stimulus neutre estprésenté de manière répétéeprécédant l'apparition dustimulus inconditionnel.

ETAPE 3 : dès l'apparition dustimulus neutre, la réaction seproduit : il est devenu un stimulusconditionnel provoquant uneréponse conditionnée.

SINourriture

RISalivation

SNCloche

SI RI

SCCloche

RCSalivation

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période d’équilibre familial, professionnel et social, il est probable que son caractèreprosexigène déclenchera quelques réactions physiologiques et psychologiques de stress.Cependant, son impact sera limité et l’habituation se développera rapidement. Enrevanche, si le sujet traverse une périodedifficile, a déjà beaucoup sollicité ses capacitésd’adaptation, la perception de l’acouphènepeut se trouver associée par un mécanisme deconditionnement simple aux réactionspsychologiques et physiologiques induites parla situation. De ce fait, la perception del’acouphène et les réactions qui l’accompagnent seront auto-entretenues. De plus,l’acouphène en lui-même peut représenter un stresseur supplémentaire qui, renforçantles réactions de l’organisme va pérenniser son caractère prosexigène et s’opposer auxmécanismes d’habituation.

Tous les acouphéniques ne consultent pas ou l'observation de base :sur 100 acouphènes, environ 25 sont mal tolérés ; pourquoi ?

Comme tout stimulus continu ou répété dans l'environnement, le signal de l'acouphènefait normalement l'objet d'une adaptation de la part de notre système nerveux central, ceque l'on appelle habituation. Celle-ci se traduit par le classement du signal del'acouphène comme stimulus non pertinent qui n'est donc plus interprété comme unson au niveau cortical. Cette habituation se produit dans 75 % des cas, mais pour les 25 %restant, l'acouphène devient un véritable handicap, perturbant la vie de tous les jours etpouvant parfois même conduire les acouphéniques au suicide (Lewis, Stephens, &McKenna, 1994). Maux de tête, insomnies, hyperacousie sont quelques-uns dessymptômes associés à l’acouphène invalidant dont les patients se plaignent le plussouvent (Erlandsson et al., 1992). Mais qu’est-ce qui différencie cette majorité depersonnes porteuses d’un acouphène et qui le supportent relativement bien (i.e. cellespour laquelle la qualité de vie n’est pas trop affectée par ce symptôme), de la minorité quile perçoit comme un véritable handicap ?La sévérité de l’acouphène correspond à une évaluation subjective du patient. Pour unobservateur extérieur, elle peut être définie et quantifiée de plusieurs manières : pendantcombien de temps (jours/mois) le patient est-il gêné par son acouphène, pendantcombien d’heures par jour ? de quelle(s) manière(s) l’acouphène détériore-t-il lesentiment de joie de vivre du patient, pendant combien d’heures par jour ? quelles sontles conséquences de la perception de l’acouphène sur ses activités quotidiennes ?Il est impératif de noter que la sévérité de l’acouphène, donc aussi la gêne ressentie par lespatients, est indépendante des caractéristiques physiques de celui-ci (comme lafréquence ou l’intensité du bruit entendu). En effet, plusieurs études ont montré que lesdimensions mesurables de l’acouphène n’expliquent pas de manière adéquate le niveaude gêne ressentie par les patients1.Un écueil important, quand on parle de l’impact de l’acouphène sur l’individu, résidedans le fait que l’acouphène n’est qu’un symptôme et que de nombreuses pathologies luisont associées. Ainsi, il est très difficile, mais pourtant fondamental, de savoir si laprésence seule de l’acouphène entraîne les souffrances de la vie quotidienne qui lui sontimputées ou bien si ce sont les problèmes associés qui en sont la cause. Zaugg, Schechter,Fausti et Henry (2002) suggèrent que les acouphéniques surestiment souvent l’impactde leur acouphène sur leur vie quotidienne par rapport à celui de leur perte auditive. Eneffet, d’après ces auteurs et surtout chez les acouphéniques possédant une auditionmoyenne à mauvaise, la plupart des plaintes des patients attribuées à leur acouphène

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

Repérer les circonstances desurvenue de l’acouphène.L’acouphène permanent remet lesujet dans ses circonstances de viedifficiles.

1- Baskill & Coles, 1999; Meickle, Vernon, & Johnson, 1984.

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(comme les difficultés de compréhension par exemple) résultent plus de la perte auditiveque de la présence de cette perception auditive fantôme.Les observations cliniques ont montré que les facteurs psychologiques sont étroitementliés à la présence d’un acouphène1. Il est par exemple souvent rapporté par les patientsque l’émergence de cette perception auditive fantôme est concomitante, ou suit dequelques mois, un événement de vie stressant, c’est-à-dire un trauma psychique. D’aprèsErlandsson & Hallberg (2000), la souffrance liée à la présence de l’acouphène pourraitmême être corrélée à la quantité de stress expérimentée par les patients dans leur vie detous les jours. Les acouphéniques eux-mêmes rapportent souvent que des périodes destress ou de fatigue intenses rendent leur acouphène plus difficile à gérer et plusinsupportable.Par ailleurs, l’acouphène co-existe parfois avec des psychopathologies, comme uneanxiété ou une dépression potentielle ou avérée2. Il est par conséquent possible qu’unepartie au moins des souffrances liées à cette perception fantôme soient en fait lesconséquences de ces problèmes psychologiques. Zöger, Svedlund et Holgers (2002b)rapportent, dans une étudeportant sur 70 acouphéniques,que le sous-groupe de patientsprésentant un risque élevé dedévelopper un acouphène sévèreet chronique est aussi celui quipossède une prévalence plusélevée de désordres dépressifset/ou anxieux.Enfin, l’étude de Meric et al. (1998) suggère que le retentissement de l’acouphène sur lavie quotidienne résulterait de l’association entre la perte auditive et un profilpsychopathologique particulier chez un acouphénique donné, plutôt que des propriétésdu seul acouphène. En effet, en étudiant les relations entre les scores de plusieurs traitspsychopathologiques obtenus dans une version courte (Mini-Mult) de l’inventairemultiphasique de personnalité du Minnesota (MMPI, Hathaway & McKinley, 1940) etles scores obtenus à partir de trois échelles relatives à l’acouphène (Questionnaire demesure du handicap lié à l’acouphène, Echelle subjective de mesure de la détresse del’acouphène et Echelle subjective de mesure de la sévérité de l’acouphène), les résultatsont montré de fortes corrélations entre les scores aux échelles évaluant les traits dedépression, paranoïa, psychasthénie, schizophrénie et hypochondrie, ainsi que l’indexd’anxiété et les évaluations de la détresse ou du handicap liés à la présence de cesacouphènes.Même s'il est important de souligner que l’acouphène correspond le plus souvent à undésordre physiologique plutôt qu'à un désordre psychiatrique, on ne peut pas nier que cesymptôme se situe au carrefour entre somatique (difficultés auditives réelles), psychologique(tenant autant à la personnalité du patient qu'à ses capacités d'adaptation), événementiel(selon la situation dans laquelle est apparu l'acouphène) et environnemental (facteursd'ambiance et d'influence au niveau familial, professionnel ou social). Son évolution versl'habituation ou la pérennisation s’explique par conséquent par une causalité circulairedans laquelle les différents facteurs se renforcent mutuellement.

2.1.3 Les explications et les modèlesLa complexité globale de l’acouphène impose l’établissement de modèles. Ils sont, pour la genèsede l’acouphène chez l’homme, périphériques et centraux. Les modèles animaux expliqués dansune seconde partie viennent , avec leurs insuffisances liées aux incertitudes cognitives, en appuides explications de certaines causes.

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LES FONDAMENTAUX DE L’ACOUPHÈNE

L'acouphène est au centre d'un carré dont lescoins pointent :

- vers les difficultés auditives,- vers la situation d'anxiété et de dépression,- vers les problèmes d'environnement familial,social, professionnel, générateurs de stress,- vers les conditions de survenue de l'acouphène.

1- Erlandsson & Hallberg, 2000; Jayarajan, 2002.2- Andersson, 2001 ; Erlandsson & Hallberg, 2000 ; Zöger, Svedlund et Holgers 2002.

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L’explication de phénomènes observés complexes est traitée en formulant des hypothèses dontl’ensemble constitue un modèle. Ils’agit de définir des concepts et leursinteractions mutuelles.Lorsque des observations nouvelles,fournies par la science, paraissent encontradiction avec le modèle, celui-ciest remplacé.

2.1.3.1 Les grandes hypothèses de la physiopathologieDiverses hypothèses ont été successivement envisagées au cours de l’histoire pour expliquerl’existence de l’acouphène. Parmi celles-ci, certaines sont soutenues par des arguments forts.Nous avons déjà souligné (cf § la physiopathologie) que l’opposition entre partisans demécanismes périphériques et tenants de mécanismescentraux était à l’heure actuelle plus apparente que réelle.En ce qui concerne les hypothèses physiopathologiquesenvisagées pour sous-tendre le phénomène de l’acouphène,on retrouve cette absence d’incompatibilité entre les diversmécanismes envisagés : compte tenu de la très grande hétérogénéité observée dans lapopulation des acouphéniques, il est fort probable que plusieurs puissent coexister chez unmême individu.

2.1.3.1.1 Modèles périphériques :La plupart des hypothèses de génération de l’acouphène font référence à une dysfonctioncochléaire. Elles ont fait l’objet de plusieurs revues1 auxquelles le lecteur peut se référer.Nous en présentons ci-dessous quelques-unes :

● On sait que les cellules ciliées externes (CCE), plus vulnérables, sont généralementaffectées par des processus délétères avant les cellules ciliées internes (CCI).La discordance entre les états de dommage affectant CCE et CCI serait à l’origine de

mouvements anormaux de la membrane basilaire et, notamment, de collapsus localisésde la membrane tectoriale sur les CCI, d’où une augmentation de l’activité de celle-ci.

● Le découplage d’avec la membrane tectoriale des stéréocils des CCE conduirait à uneaugmentation du bruit thermique qui, par unemise en contact plus fréquente avec les stéréocilsdes CCI, conduirait à la perception d’unacouphène. Des modifications de laconcentration périlymphatique de calciumpeuvent induire un tel découplage, de mêmequ’une modification du diamètre des CCE(induite par exemple par l’aspirine) ou desmodifications de l’activité spontanée ou évoquée(Figure 4).

● Un rôle du système efférent médian dans lagénération de l’acouphène a aussi été envisagé :en effet, ce système normalement inhibiteur dufonctionnement des CCE est, lui-même, l’objet d’une rétroaction s’exerçant à partir desentrées auditives.Quand un groupe de CCE et/ou CCI est lésé, l’influx auditif provenant de cette zone defréquences est affaibli ; il s’en suit une diminution locale d’activité dans les fibresefférentes et une levée de l’inhibition qu’elles exercent sur les CCI.

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Tornndorf explique ainsi la triadesymptomatique du Ménière. Ledécouplage des stéréocilsexplique les acouphènes. Ilexplique aussi la surdité auxfaibles intensité de stimulation etle recouplage aux fortesintensités : restauration d’unesensation auditive adéquate àl’intensité de la stimulation. D’oùl’absence de progressivité.

Coexistence vraisemblablede plusieurs mécanismes.

En raison même de leur construction, ces modèlessont « partiels » et « provisoires ». Personne ne croitqu’ils sont vrais ; le seul critère de leur valeur estleur capacité à rendre compte des observations et àpermettre des prévisions et au mieux à proposer desprocédures de prise en charge.

1- Jastreboff, 1990 ; Kaltenbach, 2000.

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Toutefois, comme l’innervation efférente est très diffuse, la levée d’inhibition netoucherait pas seulement les CCI de la zone lésée, mais ‘déborderait’ sur les zonesadjacentes non lésées.L’augmentation de l’activité spontanée des fibres auditives de ces zones bordant la lésion,pourrait constituer le signal de l’acouphène (Figure 5). Comme on le voit dans la figure,ce phénomène pourrait intervenir dans la perte auditive avérée comme dans les cas dedommages discordants.

En effet, le neurotransmetteur de cette synapse est le glutamate, qui, à haute dose, estconnu pour ses propriétés ototoxiques. Il est libéré massivement lors d’une exposition àun son intense, et entraîne une destruction des dendrites. Dans un premier temps, ladestruction est, au moins partiellement, réversible. Cette réversibilité semble due àl’augmentation de la synthèse des récepteurs NMDA, impliqués dans des phénomènestrophiques et dans le guidage des dendrites.Cependant, ces mêmes récepteurs, seraient par ailleurs, responsables d’activitésanormales ‘en bouffées’ semblables à celles qui ont été observées dans le nerf auditifaprès traumatisme sonore (Liberman et Kiang, 1978 ; Burgoyne et al., 1993 ; Puel et al.,1995) ou traitement répété à l’aspirine (Evans et Borerwe, 1982). C’est pourquoi,certains auteurs (Pujol, 1992 ; Puel, 1995 ; Guitton et al., 2003a) défendent l’idée que

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Figure 4 - Hypothèse du découplage des stéréocils des CCE d’avec la membrane tectoriale

Schéma du haut : Etat normal de couplage des CCE avec la membrane tectoriale (TM), les cils desCCI ne sont pas en contact avec la TM.Le découplage entraînerait (Tonndorf, 1980) une augmentation du bruit thermique du système et lamise en contact fréquente de la membrane tectoriale avec les stéréocils des CCI.

Schéma du bas : La diminution de la turgescence des CCE, sous l’effet des salicylates (altération ducytosquelette des CCE) entraîne le découplage des CCE d’avec la membrane tectoriale MT et sonrapprochement avec les stéréocils des CCI, entraînant une augmentation d’activité spontanée dans lenerf auditif.

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l’activation des récepteurs NMDA du glutamate serait un des mécanismes majeurs desacouphènes. Ils ont récemment obtenu un argument expérimental de poids enconstatant dans un modèle animal d’acouphènes, que le dépôt, à la fenêtre ronde, desubstances antagonistes des récepteurs NMDA, inhibe l’expression du comportementchoisi pour révéler la présence de l’acouphène (Guitton et al., 2003b).Certains acouphènes périphériques pourraient aussi résulter de la potentialisation de lafonction excitatrice du glutamate par la dynorphine endogène libérée sous l’effet defacteurs de stress au niveau de la première synapse (Sahley and Nodar, 2001).

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Figure 5 - Hypothèse de ‘l’effet de bord’ : schéma explicitant l’intervention possible du systèmeefférent dans la génération du signal de l’acouphène.Le caractère diffus de ce système est responsable du ‘débordement’ sur une zone intacte, de la levéede l’inhibition qu’il exerce sur les entrées en réponse à la diminution de l’influx afférent provenant dela zone où les cellules ciliées sont lésées.LePage (1991) a avancé la possibilité d’un rôle des CCE dans le contrôle de la sensibilité des CCI.Dans les conditions normales, les CCE fixeraient le seuil de fonctionnement des CCI à un niveaud’entrée du bruit de fond normalement interprété comme une absence de stimulation sonore. Undysfonctionnement des CCE perturberait cette fonction, les conduisant à fixer ce seuil à un niveauplus bas. Ainsi, des signaux du bruit de fond normalement non détectés, pourraient l’être ; aprèstraitement dans les voies auditives, ils seraient finalement perçus, ce qui expliquerait l’acouphène.L’observation fréquente de l’apparition d’un acouphène peu après un trauma auditif a suggéré àcertains auteurs qu’un dysfonctionnement de la première synapse pourrait être à l’origine del’acouphène. (cf. le chapitre sur les neurotransmetteurs )

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2.1.3.1.2 Modèles centrauxDifférentes observations conduisent à envisager des modèles centraux pour rendrecompte de l’acouphène. C’est ainsi qu’excluant la conception d’un déterminantpériphérique, la majorité des patients continuent à percevoir leur acouphène aprèssection ou décompression du nerf auditif (House et Brackman, 1981). Des donnéesexpérimentales ont révélé que 66% des acouphènes courants peuvent être modulés par lamise en jeu d’autres modalités sensorielles ou bien d’activités motrices (Levine, 1999).Par ailleurs, les études d’imagerie montrent un accroissement de l’activité métaboliquedans le cortex auditif mais aussi (dans les cas rares d’acouphènes "courant" étudiés ;Sigalowski et coll, 1998), dans le noyau du colliculus inférieur controlatéral à l’oreilleacouphénique. Considérés ensemble, les résultats de ces deux derniers types d’étudedésignent comme origine probable le noyau cochléaire dorsal, qui se projetteessentiellement sur le colliculus inférieur controlatéral après avoir reçu des influxconvergents auditifs et somatosensoriels (Levine et coll, 1999).

Acouphène et réorganisation centraleA plusieurs reprises, des auteurs ont été frappés par les analogies possibles entreacouphène et douleur de membre fantôme rapportée à une partie amputée du corps1.Cette hypothèse a reçu un soutien expérimental récent.En effet, Norena et coll. (2002) ont mis aupoint une procédure psychométriquepermettant de décrire plus précisément lesdiverses composantes spectrales participant àl’acouphène ainsi que leurs contributionsrespectives à la perception.La figure 6 montre des exemples de résultatsindividuels.L’observation des résultats conduit aux constatssuivants : le spectre de l’acouphène est plutôtlarge et comprend essentiellement descomposantes appartenant à la bande des fréquences atteintes par la perte auditive ; deplus, le spectre global de l’acouphène correspond grossièrement à l’inverse de lacourbe des seuils auditifs absolus. Ainsi, dans l’acouphène comme dans la douleur demembre fantôme, ce serait les informations manquantes qui seraient perçues.L’équipe de Flor (1998) a montré que la douleur de membre fantôme est corrélée à laréorganisation corticale du cortex somesthésique. A la lumière de cette observation,les résultats de Norena et coll. (2002) rapportés ci-dessus, suggèrent que l’acouphèneassocié à une perte auditive (soit environ 90% des cas), pourrait être corrélé auxphénomènes de réorganisation qui ont été décrits dans les centres auditifs, aprèsdommage cochléaire (Rajan et al., 1993) ou perte de fibres auditives (Snyder et al.,2000).Pour expliquer l’émergence de l’acouphène, une théorie a donc été développée(Norena et coll., 2002; Norena & Eggermont, 2003; Norena, 2003) dans laquelle cesymptôme résulterait de la réorganisation tonotopique centrale décrite après lésionpériphérique. Cette dernière se traduit par le fait que les neurones centraux (au-delàdu noyau cochléaire) dont la fréquence caractéristique (CF) est comprise dans labande des fréquences endommagées, modifient les propriétés de leur réponse enfréquence. Leur CF se déplace vers la fréquence de coupure de la perte auditive. Enconséquence, cette fréquence de coupure est sur-représentée dans les centres : plusde neurones y sont sensibles. Originellement observée chez l’animal, cette

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Ce modèle du membre fantômeest intriguant :

On connaît les douleursdéclenchées dans une tellesituation. La construction d’undispositif optique qui permet ausujet amputé de « voir » sonbras absent atténue cesdouleurs de désafférentation.

1- Goodhill, 1950 cité dans Baguley, 2002, Jastreboff, 1990.

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réorganisation a été mise en évidence chez l’homme à l’aide de la MEG (Mülnickel etcoll., 1998 ; Dietrich et coll., 2001). Ces changements centraux s’expliquent par le« démasquage » d’afférences préalablement inhibées, sous l’effet d’une diminution del’inhibition centrale.Si les origines des acouphènes sont bien similaires à celles des perceptions demembre fantôme, ce sont ces modifications induites par le relâchement del’inhibition centrale qui jouent un rôle dans l’émergence des acouphènes.Cependant, ces remaniements mettent du temps à se mettre en place ; s’ils peuventbien rendre compte des perceptions fantômes qui émergent plusieurs semaines àplusieurs mois après une désafférentation sensorielle, ils ne peuvent expliquerl’apparition immédiate des acouphènes survenant après un traumatisme auditif. Or,des changements plastiques centraux ont été mis en évidence immédiatement aprèsdésafférentation sensorielle dans le cas de la somesthésie (Calford et Tweedale, 1988)comme dans celui de l’audition (Calford et al., 1993 ; Snyder et al., 2000 ; Snyder etSinex, 2002). Norena et coll, (2003) ont pu décrire des changements des courbesd’accord des neurones, quelques heures déjà, après un traumatisme sonore : denouvelles réponses émergent vers des fréquences plus basses, à savoir en direction dela fréquence de coupure de la perte auditive (cf figure 7).L’induction d’une réorganisation centrale pourrait donc être le facteur critique del’émergence d’un acouphène, qu’elle résulte (acouphènes liés au vieillissement) ounon (acouphènes après traumatisme auditif) de remaniements à long terme dusystème nerveux central. Quoiqu’il en soit, de tels phénomènes de plasticité à longterme sont très certainement induits par la présence continue du signal del’acouphène et son traitement permanent dans les structures auditives commeextra-auditives. Ces remaniements sont probablement impliqués dans lapérennisation du symptôme et dans l’entretien de l’intolérance qu’il induit.

Le modèle neurophysiologique de JastreboffDans ce modèle intégratif présenté par ailleurs (cf. annexe1 page : 130), l’acouphènerésulte de l’interaction de nombreux sous-systèmes du système nerveux. Les voiesauditives jouent un rôle dans le développement du signal nerveux de l’acouphène etdans l’émergence de l’acouphène en tant que perception auditive tandis que les autressystèmes, entre autres les systèmes limbique et autonome, sont responsables de sapérennisation et de la gêne qu’il induit chez les patients.Ce modèle très global, qui intègre les grands concepts des neurosciences cognitives(dont la notion de « réseaux neuronaux » de traitement et celle de plasticité centrale), apour avantage essentiel de mettre à disposition du médecin, un modèle synthétiquedu phénomène de l’acouphène qui permette d’expliquer aux patients, lesmécanismes à l’œuvre sur lesquels il est d'ores et déjà possible d’agir, et qui puisseêtre aisément compris d’eux.

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Figure 6 - Spectre perçu de l’acouphène (ronds rouges, axe des ordonnées de gauche) et seuil absolu d’audition(ronds blancs, axe des ordonnées de droite) mesurés chez 5 sujets.Les composantes perçues de l’acouphène représentent une bande de fréquences relativement large et sont situéesdans la perte auditive. Noter la relation grossièrement inverse entre le “spectre” de l’acouphène et la perte auditive.

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Figure 7 - Représentation schématique des phénomènes de réorganisation centrale liés à la perte auditive :A gauche : état normal avec inhibition latérale et connexions masquées.A droite : activité des neurones centraux, levée de l’inhibition latérale sous l’influence de la diminution de l’activitéafférente et démasquage des connexions préexistantes non fonctionnelles. Les entrées sensorielles des régionsadjacentes à la perte peuvent stimuler les neurones dont la fréquence caractéristique correspond à celles de la perteauditive. Cette réorganisation sous-tendrait la perception de l’acouphène : l’activité afférente déviée circulant dans cesconnexions démasquées seraient à l’origine de la perception de l’acouphène.En bas : activité afférente en périphérieAu milieu : activité des neurones centrauxEn haut :champs récepteurs des neurones centraux.

L’inhibition centrale. Qu’est ce que c’est ?

Dans tout le système auditif, que ce soit dans les centres ou en périphérie, l’organisationtonotopique des neurones auditifs est responsable d’une relation entre la fréquencecaractéristique des neurones et leur position spatiale dans la structure auditive considérée. Mais ilexiste aussi deux autres types d’organisation. Une organisation de "convergence inter-niveaux"tout d’abord, par laquelle les neurones centraux reçoivent des entrées provenant des étagesinférieurs, entrées qui correspondent à une bande de fréquences relativement larges (Norena etEggermont, 2002). Ensuite, une ‘organisation intra-étage’ centrale, retrouvée principalement auniveau cortical, par laquelle les neurones d’un même niveau envoient et reçoivent des entréesinhibitrices ou excitatrices, par le biais de connexions horizontales qui peuvent s’exercer à distancesur des fréquences relativement éloignées de celles correspondant à la zone cochléaire lésée(Norena et al., 2003). Ces phénomènes d’inhibition centrale seraient responsables des propriétésde sélectivité fréquentielle des neurones centraux (Norena et Eggermont, 2002). Un typed’inhibition s’exercerait de manière tonique et dépendrait du niveau d’activité spontanée dans lesneurones afférents ; en conséquence, toute lésion cochléaire s’accompagne d’une diminution del’inhibition centrale (Mossop et al., 2000 ; Norena et al., 2003) (cf. figure 7).

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2.1.4 Les modèles animauxMalgré les enjeux majeurs que représentent les acouphènes en terme de santé publique, cesymptôme n’a jusqu’à présent généré que peu d’intérêt de la part de la communauté scientifique.Ainsi, les modèles animaux d’acouphènes sont très rares et le nombre de laboratoires travaillantsur ce sujet est étonnamment restreint. Ce désintéressement relatif s’explique en partie par leslacunes dans nos connaissances fondamentales et àl’absence de modèles expérimentaux.Le laboratoire Inserm de Montpellier utilise plusieursapproches expérimentales chez l'animal pour testerl’efficacité thérapeutique de certains médicamentsappliqués directement dans la cochlée.

2.1.4.1 Produire des acouphènesUne des premières difficultés expérimentales est detrouver un moyen efficace et sûr pour induire des acouphènes chez tous les animaux testés.C’est pour cette raison que la plupart des chercheurs utilisent le salicylate, composé actif del’aspirine, connu pour provoquer des acouphènes lorsqu’il est administré à fortes doses chezl’homme et chez l’animal1.

2.1.4.2 Mesurer des acouphènesL’autre difficulté est la mesure des acouphènes. Dans la mesure où on ne connaît ni le site degénération, ni les mécanismes à l’origine des acouphènes, les protocoles expérimentaux pourtester des stratégies thérapeutiques susceptibles de les traiter sont très difficiles à mettre enœuvre.

2.1.4.3 Evaluer avec des méthodes électrophysiologiquesPour tester l’efficacité thérapeutique de certains médicaments sur les acouphènes, lelaboratoire de l’Inserm à Montpellier développe des modèles électrophysiologiques in vitroet in vivo.Approche in vitro : L’approche in vitro consiste à enregistrer l’activité électrophysiologiquedes neurones auditifs sur des tranches de cochlée. Ce modèle, développé par Jérôme Ruel(Inserm U583, Montpellier) permet d’étudier les mécanismes moléculaires et cellulaires desacouphènes (Figure 8). Un des résultats majeurs est que le salicylate potentialise l’activité desneurones auditifs en réponse à l’application de glutamate (le neurotransmetteur des cellulessensorielles), en activant des récepteurs NMDA normalement silencieux.Modèle in vivo : Outre ces études in vitro, le salicylate permet de déterminer des corrélatsélectrophysiologiques in vivo2. Il est aujourd’hui bien établi chez l’animal que la prise desalicylate provoque une augmentation de l’activité spontanée de fibres unitaires du nerfauditif 3 et modifie le spectre moyen d’activité enregistrée au niveau de la fenêtre ronde,représentant une mesure globale de l’activité spontanée du nerf auditif 4 (Figure 9). Cesmodifications suivent les caractéristiques temporelles des acouphènes provoqués par lesalicylate (Cazals et al., 1998). Fort élégamment, Jérôme Ruel démontre que les antagonistesdes récepteurs du glutamate bloquent les activités parasites induites par le salicylate, sansaffecter l’activité basale des fibres du nerf auditif. L’ensemble de ces résultats suggère que lesacouphènes induits par le salicylate sont, au moins en partie, liés à un dysfonctionnement desrécepteurs NMDA présents au niveau de la synapse entre les cellules sensorielles et les fibresdu nerf auditif.

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Dans la mesure où les acouphènessont une perception subjective(perception d’un son en l’absencede stimulation acoustiqueextérieure), la mise au point deprotocoles expérimentaux chezl’animal est très difficile.

1- Macht et al., 1920 ; McCabe and Dey, 1965 ; Morgan et al., 1973.2- (voir notamment Evans et al., 1981 ; Evans and Borerwe, 1982 ; Puel et al., 1990 ; Stypulkoski, 1990 ; Cazals et al.,

1998).3- Evans et al., 1981 ; Evans and Borerwe, 1982 ; Stypulkoski, 1990.4- Schreiner and Snyder, 1987 ; Martin et al., 1993 ; Cazals et al., 1998.

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2.1.4.4 Evaluer avec une approche comportementaleFaire la démonstration que le salicylate provoque des activités anormales ne suffit pas àdémontrer qu’il induit des acouphènes. Un des rôles majeurs du cerveau étant de « filtrer » lesstimulus non pertinents, il nous fallait démontrer que les activités « parasites » du nerf auditifsont bien perçues par le cerveau comme un son, donc comme un acouphène. Contrairementaux patients, les animaux ne se plaignent pas de leurs acouphènes. Une façon de pallier cettedifficulté est d’observer les animaux pour voir s’ils se comportent « comme s’ils avaient desacouphènes ». Le seul test comportemental jusqu’à présent disponible était celui de Jastreboff(Jastreboff et al. 1988). Ce test est basé sur des aversions conditionnées, c’est-à-dire qu’ilutilise un paradigme de privation de nourriture ou de boisson. Ce paradigme de privation estcependant très stressant pour l’animal, les animaux perdant de 10 à 15 % de leur massecorporelle lors de l’apprentissage. Nous avons donc mis au point un modèle comportementald’acouphènes qui n’induit ni stress, ni anxiété chez l’animal(Guitton et al, 2003).L’animal est tout d’abord conditionné à exécuter une tâchemotrice en réponse à un son extérieur, généré par unhaut-parleur. Lorsque ces animaux sont traités avec defortes doses de salicylate, ils exécutent la tâche en l’absencede son extérieur. En fait, l’acouphène perçu par l’animal fait office de « son déclenchant »pour le comportement moteur. L’animal perçoit son acouphène comme un son extérieur etexécute la tâche.Nous avons ainsi deux moyens (électrophysiologique et comportemental) pour objectiver etquantifier la présence d’un acouphène chez l’animal.L’intérêt de ces modèles est de pouvoir étudier les mécanismes moléculaires impliqués dansla genèse des acouphènes. Ce modèle « salicylate » est maintenant étendu à d’autrespourvoyeurs d’acouphènes comme le bruit, la chimiothérapie ou le vieillissement de l’oreille(presbyacousie). La connaissance des mécanismes et du site d’origine des acouphènes permetde proposer des stratégies thérapeutiques ciblées. Par exemple, en appliquant au contact de lacochlée des molécules qui bloquent sélectivement les récepteurs NMDA du glutamate

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Ce modèle est d’autant plusexact qu’il évite demélanger plusieurs facteurs,comme le stress.

Figure 8 - Tranche de cochlée in vitro.Ce modèle a été mis au point par Jérôme Ruel lors de son stage post-doctoral dans le laboratoire du Pr. Robertson(University of Western Australia, Perth).Cette préparation est développée sur des cochlées post-natales de souris, âgées de 4 à 14 jours. Les compartimentsendo- et périlymphatique sont remplis du gel, et la cochlée est coupée à l’aide d’un vibratome. Les tranches obtenues(150-300 µm) autorisent des enregistrements électrophysiologiques (patch clamp ou intracellulaire) de toutes lescellules de l’organe de Corti [cellules internes (ihc), cellules externes (ohc), cellules de soutien] ainsi que celles duganglion spiral ou de la membrane de Reissner. Le même type d’approche peut être utilisé pour étudier le saccule etl’utricule. L’intérêt majeur de cette préparation est de pouvoir étudier la physiologie des cellules sensorielles tout enconservant leurs connectivités.

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Figure 9 - Enregistrement unitaire des fibres du nerf auditif.Cette technique permet l’enregistrement de l’activité base (en l’absence de son) des fibres du nerfauditif chez l’animal durant l’application de drogues susceptibles d’induire des acouphènes.A gauche, vue de la cochlée après exposition rétro-auriculaire. Cette approche permet la mise enplace d’une pipette de perfusion multicanaux pour l’application de périlymphe neutre ou contenantdivers agents pharmacologiques. Une macroélectrode d’argent est apposée sur la fenêtre ronde etpermet d’enregistrer simultanément le potentiel d’action composite du nerf auditif. A droite, vue del’abord du nerf auditif au niveau de la fosse postérieure. Après une cérébellectomie partielle, unemicroélectrode de verre est introduite dans le nerf auditif pour enregistrer l’activité unitaire desneurones auditifs primaires.

Figure 10 - Représentation schématique du protocole comportemental.

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(neurotransmetteur des cellules sensorielles) on stoppe les activités anormales du nerf auditifet les acouphènes induits par le salicylate ! (figure 10)Les animaux sont conditionnés à sauter à un mât en réponse à une stimulation sonore.Chaque série est constituée de 10 essais. Le conditionnement en lui-même nécessite de 4 à7 séries d’une durée comprise entre 15 et 20 minutes. Une fois conditionnés (critèred’apprentissage : 3 séries consécutives avec un score � 80%), les animaux étaient inclus dans lasuite des expériences. Le protocole de test consistait en une mesure du nombre de réponsescorrectes au son (score) et du nombre de sauts pendant les périodes de silence (faux positifs)au cours d’une session quotidienne de 10 minutes session. Les injections de sérumphysiologique, de salicylate ou de méfénamate étaient réalisées 2 heures avant la période detest (Guitton et al., 2003).Une fois conditionné, l’animal est testé quotidiennement pendant 9 jours. Deux types demesures sont réalisées : 1) les réponses correctes (le nombre de fois où l’animal exécute latâche en réponse au son) et 2) les faux positifs (le nombre de fois où l’animal exécute la tâchealors qu’aucun son ne lui est présenté). En absence de son, un animal normal n’exécute pas latâche et le nombre de faux positifs est quasi nul (contrôle). Si ce même animal reçoit uneinjection quotidienne de salicylate (300mg/kg, i.p.), il exécute la tâche alors qu’aucun son nelui est présenté. En fait, il se comporte comme s’il entendait un son parce qu’il a unacouphène. La mise en place d’un gelfoam (Gelita tampon) rempli de périlymphe artificielle(AP) sur la fenêtre ronde de chaque oreille n’affecte pas le nombre de faux positifs. Enrevanche, un gelfoam contenant 50 µM de 7-chlorokynurenate (7-CK), un antagonisteNMDA, bloque les faux positifs. En conclusion : les faux positifs traduisent la présence d’unacouphène et les acouphènes induits par le salicylate sont bloqués par l’application localed’anti-NMDA. (d’après Guitton et al., 2003)

2.1.5 Neurotransmetteurs et acouphènesDans la cochlée, l’onde de pression générée par un son se propage le long de la membranebasilaire de la base vers l’apex. Le maximum d’amplitude de la vibration est d’autant plus prochede l’apex que la fréquence de stimulation est grave. Cependant, la vibration passive de lamembrane basilaire ne suffit pas à elle seule à expliquer le haut degré de sélectivité fréquentiellede la cochlée. En fait, la cochlée doit sa sensibilité et sa sélectivité à la présence des cellules ciliéesexternes (CCE) (Figure 11). Ces CCE sont étroitement accordées sur la fréquence à détecter. Auseuil et aux faibles intensités de stimulation acoustique, les CCE se contractent en phase avec lesdéplacements de la membrane basilaire à un endroit précis de cette membrane qui dépend de lafréquence (feed-back positif), augmentant ainsi considérablement (d’un facteur 100 environ) lesdéplacements des structures et l’excitation des cellules ciliées internes (CCI). Les CCI sont lesvéritables cellules sensorielles sur lesquelles sont branchées les fibres du nerf auditif. Chacune deces fibres est reliée à une seule CCI, et chaque CCI est contactée par environ une dizaine defibres. Deux populations de fibres sont à distinguer. Les fibres les plus sensibles (seuils bas) ontune activité spontanée élevée, et celles à seuils moyens ou élevés (40 % des fibres) dont l’activitéspontanée est inférieure à 20 potentiels d’action par seconde. Le recrutement progressif de cesdeux populations de fibres permet d’expliquer l’étendue de la dynamique cochléaire du seuil de laperception au seuil de la douleur (de 0 à 110 dB à 1000 Hz).En retour, le système nerveux central contrôle l'activité via des systèmes distincts : le systèmeolivocochléaire médian et le système olivocochléaire latéral dont les noyaux d’origine se situentdans le tronc cérébral. Au niveau de l’olive supérieure, les fibres descendantes se séparent en deuxcontingents, formant ainsi deux systèmes efférents distincts. Les corps cellulaires des neuronesdu système olivocochléaire médian se situent dans la région du noyau ventro-médian du corpstrapézoïde (NVCT). Le système projette majoritairement vers la cochlée controlatérale etinnerve les CCE dans des régions codant pour des fréquences supérieures à 2 kHz (voir Warr,1992 pour revue). Les synapses qu’il établit avec les CCE utilisent l'acétylcholine commeneurotransmetteur.

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Le système olivocochléaire latéral représente de 50 à 70% du contingent des efférencesolivocochléaires. Les corps cellulaires des neurones du système olivocochléaire latéral se situentdans l’olive supérieure latérale. Leurs axones projettent vers la cochlée ipsilatérale et font dessynapses « en passant » avec les dendrites des neurones auditifs primaires sous la CCI (voir Warr,1992 pour revue). Liberman (1980) décrit une moyenne de 10 synapses efférentes pour chaquefibre du nerf auditif connectée aux CCI. Ce nombre varie en fonction des caractéristiquesintrinsèques de la fibre. Les fibres les plus richement innervées (jusqu'à 35 synapses) ontgénéralement une activité spontanée faible (< 20 spikes/sec). Le nombre important de synapsesefférentes et leur position stratégique au niveau du site d’initiation du potentiel d’action sous laCCI suggèrent que la régulation de la neurotransmission des fibres du nerf auditif par le systèmenerveux central constitue un élément essentiel de la physiologie cochléaire. Différentes études enimmunocytochimie (voir Eybalin, 1993 et Puel, 1995 pour revue) ont permis de mettre enévidence, dans l'innervation efférente latérale, un certain nombre de neurotransmetteurs"classiques" (acétylcholine, GABA, dopamine) ou de neuropeptides (enképhalines, dynorphines,CGRP).

CCE, efférences médianes et acouphènesNous avons vu que les CCE amplifient mécaniquement les mouvements de la membranebasilaire en un point précis dépendant de la fréquence. Cette propriété effectrice des CCE dans lamicromécanique cochléaire, résumée sous le terme générique de mécanismes actifs, permetd'affiner la sensibilité et la sélectivité fréquentielle de la cochlée. Une partie de l'énergie généréepar les mécanismes actifs (ou amplificateur cochléaire), non absorbée par la cochlée, peut êtrecaptée grâce à un microphone placé dans le conduit auditif externe; c'est le principed'enregistrement des otoémissions acoustiques. Ces otoémissions peuvent se regrouper en deuxgrandes catégories. Les otoémissions provoquées par un son et les otoémissions spontanées. Les

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Figure 11 - Représentation schématique de l’innervation afférente et efférente de l’organe de Corti.L’information sensorielle est envoyée au noyau cochléaire (NC) par les fibres afférentes connectées aux cellules ciliéesinternes (CCI). Après leur passage à travers la membrane basilaire (à l’habenula perforata), ces fibres et les corpscellulaires deviennent myélinisés. La cochlée est innervée par deux types d’efférences : les efférences projetant sous lesCCI et les efférences connectant directement les cellules ciliées externes (CCE). Ces efférences proviennent de différentsendroits du complexe olivaire supérieur dans le tronc cérébral et suivent le trajet du nerf vestibulaire. Les efférencesconnectant les CCI proviennent du noyau de l’olive supérieure latérale (OSL). Les neurones efférents des CCE sontlocalisés dans le noyau ventro-médian du corps trapézoïde (NVMCT). L’innervation efférente latérale pourrait utiliserplusieurs neurotransmetteurs tels que l’acétylcholine (ACh), le GABA, la dopamine (DA), des enképhalines, desdynorphines et le peptide lié au gène de la calcitonine (CGRP). Les efférences médianes utilisent l’acétylcholine etpeut-être le GABA et/ou le CGRP. Le système efférent latéral est représenté en rouge. Les flèches indiquent le sens depropagation de l’influx nerveux.

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otoémissions spontanées, comme leur nom l'indique, sont des sons enregistrés dans le conduitauditif externe en l'absence de toute stimulation sonore. Leur découverte a suscité un fabuleuxespoir pour tous ceux qui voyaient là un moyen objectif d'étudier les acouphènes. En effet, lesCCE pourraient se trouver à la limite d'un état oscillant (résonant) que certains facteurs, commele bruit par exemple, pourraient déclencher. Parmi les facteurs déclenchants, on a pensé à undéfaut dans la modulation cholinergique exercée par le système efférent médian. Ainsi, lesoscillations spontanées des CCE pourraient exciter les CCI qui transmettraient ce "sonintrinsèque" aux fibres du nerf auditif puis au cerveau.. Paradoxalement, les otoémissionsspontanées ne sont pas corrélées avec la présence d'un acouphène, et lorsque cette éventualité seprésente, la fréquence du son perçu est rarement compatible avec celle de l'otoémission (VoirRebillard et al., 1987). Loin de refléter un processus pathologique, les otoémissions spontanéessont plutôt le témoin de la bonne santé de la cochlée puisqu’on les enregistre chez 80% des sujetsnormaux-entendants, et dans l’immense majorité des cas, elles ne sont fort heureusement pasperçues. L’ensemble de ces données suggère donc que les CCE ne constituent probablement pasla source majeure des acouphènes.

CCI, dendrites afférentes, efférences latérales et acouphènesL’étude du complexe CCI - fibres du nerf auditif et sa modulation par les efférences latérales anécessité la mise au point d’une technique de perfusion intracochléaire, couplée àl'enregistrement de potentiels d’action unitaires des fibres du nerf auditif, sur une préparation invivo physiologiquement intacte. La maîtrise de cette technique nous a permis de préciser la naturedes récepteurs impliqués dans la neurotransmission synaptique et leur régulation par lesefférences latérales.

2.1.5.1 La piste du glutamateLes acouphènes pourraient aussi résulter d'un dysfonctionnement de la synapse entre lesCCI et les neurones auditifs primaires (Figure 12). En effet, cette synapse utilise le glutamatecomme neurotransmetteur. Si l’utilisation du glutamate comme transmetteur a des avantages

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Figure 12 - Acouphènes et traumatismes sonores.Une surstimulation acoustique provoque une libération excessive de glutamate dans la fente synaptique sous la celluleciliée interne. Le glutamate libéré provoque la dépolarisation des récepteurs glutamatergiques postsynaptiques, et doncune entrée massive de cations (Na+, Ca2+) et d'eau. Dans une phase aiguë, la suractivation des récepteursglutamatergiques est à la base d’un phénomène osmotique provoquant un gonflement, voire un éclatement desterminaisons nerveuses. Dans une phase tardive, ces dommages peuvent conduire à la mort du neurone. Les neuronessurvivants ont cependant la capacité de former de nouveaux prolongements et de contribuer à la restitution despotentialités de la cochlée en moins de 5 jours. Cette réparation synaptique fait intervenir des récepteurs NMDA.L’expression des récepteurs NMDA, responsable de réponses de type épileptique, pourrait se traduit au niveau ducerveau par l'arrivée de sons "spontanés" ou acouphènes.

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certains, comme celui d’être un neurotransmetteur rapide, donc très performant pour coderles informations sonores, l’utilisation du glutamate présente l’inconvénient d’être toxiquepour les neurones lorsqu’il est libéré en trop grande quantité. Nous avons démontré que lespathologies qui induisent des acouphènes (traumatisme acoustique, l'ischémie cochléaire,presbyacousie…), découlent en grande partie de la libération excessive de glutamate, (voirPuel, 1995 pour revue). A partir de ce constat, il est raisonnable de penser qu'un dérèglement,une hyperexcitabilité, voire un emballement des fibres du nerf auditif sont à l'origine decertains acouphènes. En particulier, on pense à tout ce qui est décrit à propos du rôle desrécepteurs glutamatergiques de type NMDA dans l'emballement des activités électriquescérébrales lors de l'épilepsie. Dans la cochlée, une surexpression des récepteurs NMDA estobservée expérimentalement chez l'animal après traumatisme acoustique, ischémietransitoire ou pertes de cellules sensorielles. La surexpression de ces récepteurs devraitentraîner des réponses de type épileptique pouvant se traduire au niveau du cerveau parl'arrivée de sons "spontanés" ou acouphènes (Figure 12). Cette piste de "l'épilepsie du nerfauditif" permet d'expliquer un certain nombre d'acouphènes et ouvre des perspectivesthérapeutiques autour de la pharmacologie de la synapse glutamatergique.

Nous avons d'ores et déjà montré que l'aspirine, médicament connu pour induire dessurdités et des acouphènes chez l'homme, provoque chez l'animal une augmentation del'activité spontanée des fibres du nerf auditif, suivant un mécanisme indépendant de lacyclooxygénase. Nous étendons nos investigations à d'autres modèles comme le traumatismesonore et l'ischémie cochléaire sur lesquels nous testons les substances susceptibles denormaliser l’activité des fibres du nerf auditif en situation pathologique. Des résultatsencourageants sont obtenus avec des bloqueurs des récepteurs NMDA, mais aussi avecd'autres molécules anti-glutamate actuellement utilisées dans les maladiesneurodégénératives (Sclérose latérale amyotrophique, Alzheimer, ...) ou l'épilepsie.

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Figure 13 - Lutter contre la libération excessive de glutamate.

La piste de la molécule anti-glutamate est enthousiasmante pour la thérapeutique. Mais ceneurotransmetteur est diffus et son administration par voie générale risquerait d’induire demultiples dysfonctionnements, d’où la nécessité de développer des modes locaux d’administration.

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2.1.5.2 La piste des efférences latéralesSi la fonction de l’innervation efférente médiane est bien connue, celle de l’innervationefférente latérale reste encore obscure. Notre connaissance du rôle des efférences latérales estlimitée car ce système ne peut être ni stimulé, ni détruit spécifiquement. Aussi, avons-nousdécidé d’étudier le rôle fonctionnel des efférences olivocochléaires latérales par une approchepharmacologique in vivo. Le système efférent latéral utilise plusieurs neurotransmetteurs ouneuromodulateurs. Alors que l’acétylcholine et le GABA sont localisés aussi dans les

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Figure 14 -Acouphènes et dopamine.a) - Sur cet exemple d'enregistrement unitaire, la fréquence caractéristique (le seuille plus bas) de la fibre auditive est 9 kHz et son activité spontanée de 41 spikes/sec. Une perfusion de périlympheartificielle contenant 1 mM de dopamine (DA) réduit de 60% l'activité spontanée de cette fibre.Cet effet est annulé parun rinçage avec de la périlymphe artificielle (Péri). b) - Le blocage de la dopamine endogène par l’antagonistedopaminergiques D2 (éticlopride) provoque une levée d’inhibition. La fibre présentée ici, code pour une fréquencecaractéristique (FC) de 12 kHz et son activité spontanée est de 12 spikes/sec. Noter que la perfusion intracochléaire de50 µM d’éticlopride augmente l’activité spontanée de 7 à 50 spikes/sec. Un rinçage avec de la périlymphe artificielleramène l’activité spontanée à des valeurs normales. Une défaillance de ce système d'inhibition tonique pourrait être àl'origine de certains acouphènes.

Figure 13bis - Système d'infusion de l'oreille interne.

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efférences médianes, la dopamine est uniquement présente dans les efférences latérales (voirEybalin, 1993 et Puel, 1995 pour revue). Notre étude s’est donc focalisée sur le rôle de ladopamine.Le blocage pharmacologique de la composante dopaminergique des efférences latéralesentraîne une augmentation de la décharge suivie d’une extinction de l'activité de la fibre(Figure 14). L'observation de ces cochlées en microscopie électronique montre qu'un certainnombre de terminaisons dendritiques ont éclaté. De tels dommages sont décrits aprèsapplication de glutamate dans la cochlée, après traumatisme sonore ou ischémie (voir Puel,1995 pour revue). Comme dans notre étude, ces dommages peuvent être prévenus par desanti-glutamates (Ruel et al., 1999, 2000). Ainsi, la réduction du taux de décharge des fibres àhaute activité spontanée résulte d’une excitotoxicité qui se développe durant la levéed’inhibition.Les efférences latérales exercent une inhibition tonique sur l’activité des fibres du nerfauditif. Cette action inhibitrice pourrait constituer un mécanisme de protection endogènecontre les pathologies cochléaires liées à la nature glutamatergique des CCI (traumatismesacoustiques, ischémie). D'un point de vue pathologique, une défaillance de ce systèmepourrait correspondre au développement de surdités neurales lors du vieillissement(presbyacousie) et/ou à l’apparition de sifflements ou de bourdonnements d’oreillepersistants (acouphènes). La compréhension des mécanismes moléculaires de la régulationdes neurones auditifs primaires par le système efférent latéral devrait donc, dans un avenirtrès proche, ouvrir des horizons prometteurs dans le traitement des acouphènes.

2.1.5.3 La plasticité synaptiqueNous venons de voir qu’un choc excitotoxique provoque l’éclatement des terminaisons desneurones auditifs primaires sous les CCI. Toutefois, ces neurones ont la capacité de formerde nouveaux prolongements pour rétablir des synapses fonctionnelles avec les CCI (Puel etal., 1995). Parallèlement à ces modifications structurales, ces neurones modulent l’expressionde certains récepteurs glutamatergiques, notamment les récepteurs NMDA (Puel etal.,1995 ; d’Aldin et al., 1997). A l'autre bout de la chaîne, les CCI désafférentées par la lésiondes terminaisons dendritiques afférentes, subissent des modifications moléculaires

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Figure 15 - Plasticité synaptique après un choc excitotoxique dans la cochlée.a. Innervation normale de la cellule ciliée interne (CCI). Les dendrites des neuronesauditifs primaires (de type I) qui sont connectés au pôle basal de la CCI, sont contactéspar les prolongements des neurones du système efférent latéral.b. Changement d’innervation au pôle basal de la cellule ciliée interne après un chocexcitotoxique. Les fibres efférentes latérales viennent contacter directement la CCI(d’après Puel, 1995 ; d’Aldin et al., 1997).

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susceptibles de favoriser de nouvelles connexions synaptiques (Ladrech, 2000). Lechangement d'innervation à la base de la CCI, en particulier la présence de synapsesefférentes, rencontrées au cours du développement (Pujol et al., 1978 ; Pujol et al., 1979),témoigne de nouveaux modes de communication intercellulaire. Ainsi, l'activation des CCIpar les efférences latérales pourrait participer à la reconnection des neurones afférents avecleur partenaire sensoriel. Ce nouveau mode d’innervation des CCI pourrait favoriser lalibération de neurotransmetteur (Figure 15). En plus d’une libération accrue, le glutamate vaagir sur une synapse qui n’est plus contrôlée par les efférences, et qui de plus sur-exprime desrécepteurs tels que les récepteurs NMDA (Puel et al., 1995 ; d’Aldin et al., 1997). Lastimulation de ces récepteurs génère non seulement des activités dans le nerf auditif - quipeuvent être interprétées comme des sons par le système nerveux central - mais aussi activeren retour les CCI via les efférences qui les contactent. Notons que le même typed'innervation sous la CCI - à la fois afférente et efférente - est également observé après uneintoxication par des antibiotiques ototoxiques (Lenoir et al., 1999). L’existence de cettedouble innervation à la base de la CCI (Figure 15) pourrait donc être à l’origine d’une bouclede rétroaction positive et permettre d’expliquer certains acouphènes périphériques. Desexpériences sur tranches d’organe de Corti prélevés après un choc excitotoxique montrerontsi les CCI répondent aux neurotransmetteurs efférents, comme cela a été démontré pendantle développement avec l’ACh (Glowatzki and Fuchs, 2000), et si ces réponses se traduisentpar une augmentation des courants postsynaptiques excitateurs. Si tel est le cas, les stratégies àvenir devront s'attacher à briser cette boucle auto-entretenue, en intervenant sur l'un oul'autre des partenaires impliqués : CCI - dendrites afférentes - efférences latérales.

2.1.6 La mise en évidence objective de l’acouphène• Imagerie de l’acouphène, techniques, difficultés

et résultatsL’application des techniques d’imagerie cérébralefonctionnelle à l’acouphène, techniques susceptiblesd’établir la réalité du signal nerveux sous-tendant cetteperception fantôme, comme d’identifier, à travers lesmodifications énergétiques dont elles sont le lieu, les diverses structures cérébrales impliquéesdans son traitement, a bien évidemment représenté une forte tentation pour les chercheurs.

2.1.6.1 Les techniques d’imagerie

2.1.6.1.1 PrincipesCes techniques sont fondées sur deux principes physiologiques. Le premier est quel’activation ou la désactivation des neurones dans un territoire cérébral donné, s’ytraduisent respectivement par une augmentation ou une diminution du débit sanguin,afin de répondre à un accroissement ou une décroissance de la demande énergétique parrapport à la condition de "repos cérébral". D’après le second, l’augmentation dumétabolisme des neurones et des cellules qui les environnent induit la création decourants ioniques. Après enregistrement à la surface du crâne, ces courants peuvent êtrevisualisés sous forme de variations de champ magnétique ou de potentiel électrique.

2.1.6.1.2 Méthodes utilisées et difficultésDeux méthodes différentes ont été employées : la tomographie à émission de positons(TEP), seule méthode atraumatique et silencieuse qui permet la mesure de paramètrestant physiologiques (débit sanguin cérébral, métabolisme du glucose, consommationd’oxygène…) que pharmacologiques (répartition de substances se liant spécifiquement àcertains récepteurs) chez le sujet vivant. Elle a donc de nombreuses applications, aussibien en physiologie qu’en pathologie. Elle permet de suivre l’évolution dans le temps etdans l’espace d’un traceur spécifique faiblement radioactif, injecté au sujet examiné. La

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Tout serait plus simple, dans ledomaine de la recherche et de laclinique si l’acouphène pouvaitêtre traduit objectivement.

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radioactivité émise est détectée et son origine repérée au moyen d’une caméra. Enfonction de l’origine de la radioactivité émise et de l’intensité du rayonnement, on peutreconstruire des images de l’organe étudié, dans notre cas le cerveau. On obtient alorsune carte cérébrale dans laquelle figurent les zones du cerveau activées ou désactivéespendant l’examen.L’autre méthode est l’imagerie cérébrale fonctionnelle (IRMf). Elle présentel’inconvénient majeur d’être très bruyante, ce qui est particulièrement préjudiciablepour les études touchant à l’audition. Les casques ou les bouchons protecteursn’atténuent que partiellement ces bruits susceptibles de parasiter les résultats. Desprotocoles particuliers, dans lesquels l’acquisition des données est décalée par rapportaux effets physiologiques du bruit de la machine, ont dû être mis au point qui permettentde s’affranchir des éventuelles interférences avec le traitement auditif. En revanche, cetteméthode ne nécessite pas l’injection de traceur, puisque grâce à ses propriétésmagnétiques, c’est l’hémoglobine du sang qui joue ce rôle : de ses deux formes, seule lacarboxyhémoglobine est attirée par le champ magnétique intense émis.La plupart des paradigmes employés pour étudier les systèmes sensoriels ou moteursreposent sur la capacité à réaliser des contrastes entre des séquences d’acquisitionpendant lesquelles le stimulus est présenté ou bien est réalisé le geste ou traitementspécifique étudié, et des séquences de repos sans stimulation, mouvement ou traitement.Or, l’acouphène étant perçu en continu et n’obéissant à aucun contrôle d’origineextérieure, il est a priori impossible de disposer, pour révéler l’activité nerveuse liée àl’acouphène, d’une condition de "repos" pendant laquelle le patient n’entende plus sonacouphène. Diverses approches ont donc été développées afin de contourner cettedifficulté. Certaines équipes ont pris le parti de comparer des groupes de sujetsprésentant ou non le symptôme tandis que d’autres ont tiré profit de cas d’acouphènesparticuliers, survenant le plus souvent après une chirurgie cérébrale, grâce auxquels lessujets explorés peuvent constituer leurs propres "contrôles".

2.1.6.1.3 Les résultatsLes données issues de la TEP

Avec l’objectif de révéler des modifications de la fonction des neurones liées à laprésence d’un acouphène, Arnold et coll. (1996) ont étudié le métabolisme duglucose et comparé les images obtenues chez des patients présentant une perteauditive associée à un acouphène chronique à celles obtenues chez des sujetscontrôles sans acouphène ni perte d’audition. Une hyperactivité dans le gyrus deHeschl gauche a été observée chez la plupart des patients, que leur symptôme soitperçu bilatéralement ou bien uniquement dans l’oreille gauche ou droite. Lacomparaison entre elles des données obtenues chez les différents sujets n’a paspermis de lier le degré d’hyperactivité des neurones à l’intensité subjective del’acouphène. Fait intéressant, la gêne d’un des patients ayant évolué au cours del’étude, trois examens successifs ont pu êtreréalisés dans des conditions distinctes : perceptionde l’acouphène très invalidante, perceptionatténuée et finalement retour au niveau de départ.L’hyperactivité métabolique observée dans le cortex auditif primaire gauche dans lesconditions invalidantes s’atténuait avec la perception de l’acouphène pour finalementretourner au niveau initial.En 1999, lors du congrès mondial de Cambridge consacré aux acouphènes, la mêmeéquipe (Oestreicher et al.) a présenté une étude utilisant la même technique. Etudiantun groupe de patients acouphéniques très hétérogène, ils n’ont pas retrouvé ladifférence significative entre les structures auditives du groupe de porteursd’acouphènes et celles du groupe contrôle. En revanche, ils ont observé unediminution du flux sanguin locorégional dans des structures non auditives qui, par

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Disposer de 2 états àcontraster par différence.

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ailleurs, sont impliquées dans la gestion de la douleur (cortex cingulaire antérieur,cortex pariétaux postérieurs, insula). Ces résultats apportent donc un certain soutienà l’hypothèse selon laquelle l’acouphène chronique pourrait être un analogue de ladouleur chronique, impliquant l’activité d’aires corticales communes : ainsil’acouphène lié à un stimulus interne serait traité dans d’autres structures cérébralesque celles activées par les stimuli sonores externes (Müller 1997).Afin de disposer de deux états à contraster par différence, d’autres auteurs ont tiréparti de l’existence de cas particuliers et rares de patients capables, après chirurgie, dedéclencher ou inhiber à volonté la perception transitoire d’un acouphène ou bien aumoins de la moduler en réalisant des manœuvres diverses.Ainsi, à Lyon, Giraud et al. (1999) ont pu identifier des structures cérébrales dontl’activité ou les modifications d’activité étaient corrélées à la perception d’unacouphène déclenché par le regard, apparu chez quatre patients droitiers opérés pourde gros neurinomes (stade 3) du nerf auditif, localisés à l’angle ponto-cérébelleux.Ces sujets étaient capables de déclencher l’acouphène apparu du côté de l’oreilleopérée en modifiant horizontalement l’orientation de leur regard, de sa positionprimaire vers la droite ou la gauche tandis qu’un déplacement vertical n’induisait pasd’effet. La direction grossièrement verticale qui n’induisait pas de sensation et celleplutôt horizontale qui entraînait une sensation maximale ont été repérées chezchacun des quatre sujets afin de constituer respectivement les conditions “off” et “on”des acquisitions d’images réalisées en TEP. L’étude révèle une activation bilatéraledes régions temporales et pariétales du cerveau, plus étendue dans l’hémisphèrecérébral gauche, mais plus intense dans l’hémisphère droit quelle que soit l’oreilleaffectée par l’acouphène (Giraud et al.,1999) (Figure 16). Les zones dont l’activationest liée à la perception de l’acouphène appartiennent toutes au cortex auditifsecondaire, territoire du cerveau impliqué dans l’analyse et la compréhension dessons entendus, ce qui confirme les données de Silbersweig acquises chez desschizophrènes chez lesquels l’activation des aires auditives primaires (celles quirecueillent les sons) ne semble pas nécessaire à la perception des hallucinationsauditives.

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Figure 16 - Aires montrant un accroissement du flux sanguin cérébral pendant la perception de l’acouphènedéclenché par le regard (4 sujets) (GIRAUD et al. 1999)Figures de gauche et de droite : activations observées respectivement dans la région temporo-pariétale droite (unpremier pic intéresse les aires 42, 22, 40 de Brodmann, un second, l’aire 21 de Brodmann) et gauche (aires 22, 40 et21 de Brodmann).Figure du milieu : activation dans le gyrus occipito-pariétal (aire 7 de Brodmann).Les zones temporo-pariétales activées appartiennent au cortex auditif secondaire exclusivement. L’activation de larégion occipito-pariétale impliquée dans l’analyse des traits visuels en vue de la réalisation d’un mouvement estimputable aux différences de localisation des cibles visuelles en condition de référence et en condition active.

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S’interrogeant sur les observations de quelques patients rapportant des modulationsde leurs acouphènes permanents en intensité et/ou en fréquence lors desmouvements du cou, de la tête ou lors de manœuvres particulières (fermeturebuccale avec pression molaire, pression de la langue sur le palais, constriction desmâchoires..), Levine (1999 ; 2003) a effectué une recherche systématique desinterférences entre acouphènes et activations d’autres modalités sensorielles. Il enconclut que cette caractéristique se retrouve chez 2/3 des patients environ et qu’ils’agit donc là d’une caractéristique fondamentale de ce symptôme. Certainschercheurs ont pensé à utiliser ces modulations pour réaliser la neuro-imagerie del’acouphène "courant".Ainsi l’équipe de Lockwood (1999) a exploré à l’aide de la TEP trois patientsprésentant une surdité sévère associée à des acouphènes unilatéraux de fréquenceaiguë (supérieure à 2 kHz), dont ils pouvaient délibérément modifier l’intensitéperçue à la hausse ou à la baisse en réalisant certains mouvements orofaciaux. Lespatients étaient comparés à un groupe de 6 témoins sans acouphène ni perte auditive.L’étude a été effectuée dans trois conditions : au repos, lors de stimulations sonoresunilatérales et pendant la réalisation de mouvements orofaciaux (striction desmâchoires). Les données obtenues chez les sujets contrôlés, révèlent les régionscorticales normalement activées par les mouvements orofaciaux (cortexsensorimoteur des deux côtés et aire motrice supplémentaire). - Chez les patientsdont l’acouphène augmentait en intensité lors des mouvements volontaires, lesauteurs ont observé une activation du cortex auditif primaire et d’une région situéeentre les corps genouillés médians. Chez les patients dont l’acouphène était aucontraire atténué par les mouvements orofaciaux, une réduction du flux sanguincérébral a été observée dans le lobe temporal (aires 21 et 41 de Brodmann) et

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Figure 17 - Activation nerveuse associée à la perception de l’acouphène.Haut : Activations liées à la perception de l’acouphène chez trois patients présentant unacouphène subjectif dans l’oreille droite. Le pic d’activité le plus important est observé dans legyrus temporal médian gauche.Bas : Trois plans transaxiaux montrant la même activation dans des plans situés 4, 8 et 12 mmau-dessus du plan défini par les commissures antérieure et postérieure. Le site de plus forteactivation est retrouvé dans le gyrus temporal médian, visible de la convexité au cortexoperculaire.Figure empruntée à Lockwood et al. (1999).

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l’hippocampe de l’hémisphère controlatéral. Les images correspondantes sontprésentées dans la figure 17. Ils ont aussi observé qu’une stimulation acoustique del’oreille droite chez les contrôles et chez les deux patients présentant un acouphènedroit produisait une activation bilatérale du gyrus temporal transverse et des portionsadjacentes du gyrus temporal supérieur. En revanche, contrairement aux contrôles,on note chez les patients une activation supplémentaire située dans l’hippocampegauche et ceci seulement pour le stimulus à 2000 Hz. La comparaison, contre lacondition de référence, des sites activés par la stimulation à 2000 Hz chez les patientset les contrôles, révèle que chez les patients, il existerait une activité nerveuseintrinsèque présente au repos qui se manifeste par une activation plus forte dans lecortex auditif primaire, la partie antérieure du lobe temporal gauche et l’insula.L’équipe de Mirz (1999) a utilisé les effets bénéfiques de l’administrationintraveineuse de lidocaïne et/ou du masquage sonore par un bruit en bande étroite(1/3 d’octave de largeur ; intensité au seuil de masquage minimum) sur l’acouphène,pour rechercher chez des patients atteints d’acouphènes invalidants les modificationsd’activité cérébrale liées à sa perception. Les structures cérébrales mises en évidencedans ce travail sont donc localisées de manière prédominante à l’hémisphère droit enparticulier à un réseau préfrontal-temporal (cortex pré-frontal médian et supérieurdroit, gyrus postérieurs droits), au cortex secondaire ainsi qu’à des structurescorticales associées aux processus attentionnels et de mémoire. Elles ont étéglobalement retrouvées dans une étude TEP réalisée par la même équipe sur desvolontaires sains soumis à des stimuli auditifs aversifs (Mirz, 2000).Ces deux dernières études sont intéressantes car elles ont été réalisées, non pas surdes curiosités neurochirurgicales, mais sur des patients présentant des acouphènes‘courants’ associés à une perte sur les fréquences aiguës. De plus, leurs résultats sonten faveur de l’implication de structures extra-auditives potentiellement liées à laperte auditive et/ou à l’acouphène. Ainsi, certains acouphènes pourraient trouver leurorigine et les causes de leur pérennisation au sein même des voies auditives centrales.

Les données issues de l’IRMfCette technique n’a été encore que peu utilisée pour explorer les acouphènes. Toutcomme la TEP, elle a été employée pour l’étude d’acouphènes particuliers bien quequelques approches d’acouphènes les plus communément répandus commencent àapparaître dans la littérature.C’est ainsi que Ballester et coll. (2001) se sont intéressés à des populations de patientscapables de supprimer ou renforcer leur acouphène volontairement via l’applicationde pressions cutanées mastoïdiennes ou pré-auriculaires, et ceci, pendant un tempssuffisant pour pouvoir être exploité en IRMf. Dans cette étude, des aires cérébrales sesont activées des deux côtés dans les lobes frontaux et temporaux. Durant certainespériodes de l’examen, les patients ont eu pour consigne de se concentrer fortementsur leurs acouphènes, indépendamment de toute stimulation extérieure. Pendant cesphases de concentration, les patients présentant de façon habituelle un acouphènepermanent ont montré des activations cérébrales frontales. Ces résultats (Figure 18)confirment l’implication probable du système nerveux central dans la genèse et/ou lamodulation de certains acouphènes. De plus, l’activation du lobe frontal (impliquéentre autres dans la pensée et l’intelligence…) laisse penser que, grâce auxconnexions de ces régions avec le système limbique (intervenant dans la gestion desémotions et leur mémorisation), il pourrait concourir à l’élaboration de la dimensionémotionnelle des acouphènes, dans son aspect conscient aussi bien qu’inconscient.Une autre approche a été développée à Boston par Melcher et coll. (2000). Lesdonnées obtenues sur un groupe d’adultes présentant une audition normale et unacouphène unilatéral, en absence et en présence d’une stimulation masquante bilatéralede 55 dB SL. En réponse au masque binaural, les acouphéniques manifestent uneactivation IRMf particulièrement faible dans le colliculus inférieur controlatéral à

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l’acouphène, alors que chez les contrôles, l’activation de cette structure estcomparable des deux côtés. Les auteurs expliquent ce résultat de la manière suivante :la perception de l’acouphène serait associée à une activité neurale particulièrementélevée qui se distribue, au niveau du colliculus inférieur, de la même manière que sielle était induite par un son externe à savoir essentiellement du côté controlatéral ;quand les porteurs d’acouphènes unilatéraux sont stimulés par un son, l’activationparticulièrement basse du colliculus inférieur controlatéral s’expliquerait soit par lalimitation de l’effet de la stimulation externe par la saturation d’une activité qui, àcause de l’acouphène est déjà forte soit par un petit changement d’activité résultantede deux effets opposés de la stimulation externe : la réduction de l’activité liée àl’acouphène (la stimulation externe masque sa perception) et, simultanément, uneaugmentation de l’activité normale ce qui se traduirait par le petit changementd’activité observé.

En conclusion :L’application difficile des techniques d’imagerie à l'acouphène a apporté des résultatsdont la variabilité est une des caractéristiques. Celle-ci est sans doute à mettre enrelation avec la grande diversité des étiologies des acouphènes étudiés ainsi quel’hétérogénéité des conditions d’expérimentation. En dépit de ces limitations, cesétudes ont permis d’asseoir un certainnombre de notions avancées dans le modèleneurophysiologique de l’acouphène présentéen 1990 par Jastreboff, en particulier en ce quiconcerne l’implication déterminante desstructures extra-auditives par conséquent celle des voies auditives secondaires. Leurplus importante conséquence est sans nul doute d’avoir établi sans conteste la réalitéd’une activité nerveuse corrélée à l’acouphène, apportant ainsi une certaine légitimitéaux plaintes des acouphéniques.

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Figure 18 - Cartographie obtenue en IRMf au moyen d’une acquisition Echo-Planar parméthode BOLD lors d’une étude consacrée aux acouphènes.Haut : Activations corticales bifrontales et bitemporales observées lors des phases dedéclenchement du stimulus.Bas : Activations dans des zones du cortex frontal observées en dehors de toute modulationvolontaire de l’acouphène, chez des patients auxquels on a demandé de se concentrer sur leursymptôme. (Figure empruntée à BALLESTER et al. 2001).

L'imagerie confirme objectivementl'implication des structuresextra-auditives.

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2.2 L’hyperacousie

C’est le symptôme le plus souvent associé à l’acouphène et souvent le plus gênant. Il commence àêtre connu, voire galvaudé au sein du grand public.

2.2.1 DéfinitionL’hyperacousie est une forme d’hypersensibilité auditive qui se manifeste par une perceptionanormalement forte, voire parfois douloureuse, déclenchée par des sons perçus par tout unchacun comme faibles ou confortables. Les patients qui en sont atteints réagissent souvent par unretrait social et s’interdisent tout loisir mettant en jeu la fonction auditive (conférences, concerts,représentations théâtrales, discothèques, pratique ou écoute de musique) et toute activités’effectuant dans un bruit de fond (restaurant, rue, métro, centre commercial, etc.). Ils se priventainsi de tout plaisir et créent eux-mêmes les conditionspropices au développement d’un véritable handicap.Ce phénomène peut ou non s’accompagner d’uneperturbation du seuil auditif. Il peut ou non être associé àun acouphène. Environ 40% des personnes quiprésentent un acouphène montrent à des degrés diversune diminution de la tolérance au bruit (Jastreboff, 1998 ; Pilgramm, 1999) ; compte tenu de laprévalence des acouphènes, l’hyperacousie concernerait donc un peu moins de 2 % de lapopulation générale (Lurquin et al., 2001). Inversement, 86% des personnes présentant unetolérance diminuée souffrent d’acouphènes (Jastreboff et Jastreboff, 2001).

2.2.2 DegréLa diminution de la tolérance au bruit recouvre plusieurs phénomènes (Jastreboff et Jastreboff,2001).L’hyperacousie proprement dite se caractérise par une réponse anormalement forte (par rapport àl’individu moyen) du système auditif à des sons dont les caractéristiques physiques (spectre etintensité) sont contrôlées.Le terme de misophonie est utilisé pour les patients qui redoutent certains sons voire même tous lessons parce qu’ils les trouvent désagréables.La phonophobie correspond à un type particulier de misophonie dans lequel l’émotion dominante estla peur du bruit ou des sons générant l’intolérance. Les patients qui en sont atteints redoutent que dessons normaux de l’environnement puissent endommager leur oreille ou aggraver leurssymptômes et passent leur temps à élaborer des stratégies destinées à les éviter.Mais certains auteurs utilisent le terme de phonophobie d’une manière plus générale (Katzenell etSegal., 2001), pour décrire l’intolérance au bruit qui se manifeste en association avec certainespathologies (voir plus bas).Dans la pratique courante, l’intolérance aux bruits observée chez la majorité des patientscorrespond à une combinaison d’hyperacousie et de misophonie et il sera important, dans chaquecas, de démêler ce qui revient à l’une ou l’autre de ces composantes qui relèvent de mécanismes etde prises en charge distinctes.

2.2.3 Recrutement ou hyperacousie ?Aucune des trois manifestations d’une diminution de la tolérance au(x) son(s) définies ci-dessus,n’admet de relation systématique avec les seuils auditifs mesurés : les patients qui en sont atteintspeuvent ou non présenter une perte auditive associée. En revanche, le recrutement correspondtoujours à une augmentation anormale de la sonie liée à la perte auditive. A la différence del’hyperacousie, les sons de faible intensité sont, dans ce cas, tolérés normalement. On assiste à unpincement de la gamme dynamique de l’oreille avec ou sans diminution du seuil d’inconfort.

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Avec ou sans atteinte du seuilauditif, le sujet hyperacoustiquemanifeste gène et modification ducomportement.

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2.2.4 Etiologie et physiopathologieLes causes de l’hypersensibilité auditive sont variées. Elles ont fait l’objet d’une revue exhaustiverécente (Katzenell et Segal, 2001). D’après ces auteurs, les cas d’hyperacousie se répartiraient enquatre groupes : ceux impliquant le système auditif périphérique, ceux qui mettent en jeu lesystème nerveux, ceux liés à des troubles hormonaux ou infectieux et… ceux de cause inconnue.Les conditions cliniques pour lesquelles une origine périphérique de l’hyperacousie est probablesont diverses. Une source cochléaire est logiquement envisagée quand acouphène et perteauditive coexistent avec l’hyperacousie. Pour Jastreboff et Jastreboff (2000), l’hyperacousieproprement dite correspondrait à un dysfonctionnement de l’amplificateur cochléaireobjectivable, dans certains cas au moins, par l’exploration des produits de distorsion acoustique.Bien que de mécanismes différents, une origine cochléaire serait aussi impliquée dans lesparalysies faciales, après stapédectomie, dans le syndrome de Ramsay Hunt, mais aussi enprésence de fistule périlymphatique, ou dans le stade précoce de la maladie de Menière (Katzenellet Segal, 2001).Dans l’hyperacousie centrale les neurones auditifs centraux seraient le siège d’une augmentationde gain (Jastreboff et Hazell, 1993) ; celle-ci permettrait la détection, par le système auditif, designaux non pertinents appartenant au bruit de fond neuronal, ce qui expliquerait l’associationfréquente de l’acouphène avec l’hyperacousie. Si pour Jastreboff (1999) comme pour Hazell etcoll, (2002), une réponse auditive anormale est bien à l’origine de l’hyperacousie, c’est uneréponse anormale des systèmes limbique et autonome qui serait responsable des phénomènes demisophonie et de phonophobie. Niemeyer (1971) explique la concomitance, observée lors desexpositions professionnelles au bruit, entre l’abaissement du seuil d’inconfort et la stabilitéconstatée du seuil du réflexe stapédien, par une adaptation centrale sans modification de lasensibilité périphérique. De nombreux changements plastiques sont d’ailleurs rapportés aprèsexposition au bruit. Ce sont ces changements plastiques qui surviennent dans les centres aprèsexposition au bruit qui, pour Szcsepaniak et Müller (1996), seraient le support de l’hyperacousie.Une origine centrale serait aussi impliquée dans la phonophobie associée aux attaques demigraine et aux maux de tête d’origine cervicale, dans l’hyperacousie de la dépression, lesyndrome de William, les modifications de la pression du liquide cérébrospinal (Katzenell etSegal, 2001).Une des hypothèses physiopathologiques avancée consiste en un trouble du métabolisme de lasérotonine (Marriage et Barnes, 1995). En effet, ce neurotransmetteur limiterait les entréesauditives dans le cerveau antérieur et l’on sait qu’un dysfonctionnement sérotoninergiquesous-tendrait migraine et dépression. Une autre hypothèse (Katzenell et Segal, 2001) envisage lerôle des opioïdes endogènes présents, avec l’acétylcholine, dans les efférences latérales dont lerôle n’est pas encore bien précisé. Chez l’animal, ces neuropeptides augmentent la sensibilitéauditive. A noter que cette action pourrait impliquer non seulement des mécanismes centraux paraction sur le tronc cérébral mais aussi des mécanismes cochléaires par action directe sur lesneurones primaires (Sahley, Musiek et Nodar, 1996).L’hyperacousie est aussi observée dans des troubles hormonaux tels que la maladie d’Addison,l’hypopituitarisme et l’hyperthyroidie et dans des maladies infectieuses comme la maladie deLyme et la syphilis.

ConclusionBien que le symptôme d’hyperacousie admette de nombreuses étiologies possibles et puisse êtreassocié à des troubles d’origines variées, la majorité des cas rencontrés en clinique concernent bienévidemment les expositions au bruit, aiguës ou chroniques. Nous avons cependant tenu à évoquerla plupart des causes possibles, afin que la grande diversité des étiologies possibles soit claire danstous les esprits.

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2.3 Mise au point d’un système d’évaluation des acouphènes

Les échelles multidimensionnelles - les questionnaires

2.3.1 Règles d’établissementDes outils d'évaluation ont été construits pour une évaluation multidimensionnelle del'acouphène, qu'il s'agisse de retentissement ou de facteurs.Il existe des questionnaires ouverts, des questionnaires fermés, des listes d'adjectifs.Les questionnaires fermés sont les plus utilisés car le dépouillement et leur exploitation sont plusaisés...La difficulté de la fabrication des questionnaires réside plus dans leur validation que dans lacréation des questions. Un questionnaire doit réunir des qualités métrologiques :

● cohérence,● validité,● fidélité au test-retest,● sensibilité au changement.Schématiquement un questionnaire doit donner une information identique même si elle estobtenue en posant des questions différentes. Il doit donner des informations recoupables pard'autres moyens, d'autres questionnaires validésailleurs. Il doit donner les mêmes informations s'ilest présenté à deux dates différentes. Enfin il doitêtre capable de différencier des sujets différents.

La question de la longueur du questionnaire est unautre point clé: un nombre limité de questions assureune bonne compliance de la part du patient pour se soumettre au questionnaire. À l'inverse unquestionnaire long fournit peut être plus d'informations mais fait plus intervenir le facteur temps.

Il peut s'agir d'un auto - questionnaire, rempli par le patient, à domicile ou dans la salle d'attente,récupéré sans intermédiaire ou au contraire par voie postale. Le questionnaire peut êtretotalement auto - administré ou aidé par le médecin.En auto - évaluation les questionnaires proposés doivent au préalable avoir été expliqués par oralou par des consignes écrites précises et sans ambiguïté.La cohérence traduit le fait que le questionnaire ou le sous groupe de questions traite bien d'unmême problème. Pour l'estimer, on examine la corrélation entre les réponses à chaque questionet un score total calculé à partir des réponses aux autres questions. Sans entrer plus avant, cettemesure de cohérence interne est appréciée par le coefficient alpha de Cronbach, utilisé pourdonner une appréciation chiffrée du questionnaire. Une valeur de 0 montre que chaque questionest complètement indépendante des autres; un coefficient de 1 montre une parfaite cohérence duquestionnaire : les différentes questions sont bien rattachées à la même dimension sous jacente.Les questionnaires établis pour les enquêtes d'opinion, destinés au monde commercial, ne sontpas toujours validés. Ils recherchent et ne tiennent compte que des corrélations fortes. Lalongueur des questionnaires est considérée comme moins critique, à tel point que les "bonnesréponses" semblent être faites que quand la personne sondée est "fatiguée".L'exploitation des questionnaires comporte une phase descriptive et une phase explicative quicherche à mettre en évidence des facteurs explicatifs du phénomène étudié. Là encore, on analysele poids de la variabilité de chaque réponse dans la variabilité totale.L'utilisation d'un questionnaire rédigé dans une langue étrangère pose le problème de satraduction. Théoriquement, pour "récupérer" sa validation, la traduction puis la retraductiondans la langue initiale doivent redonner les mêmes libellés de questions.

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Connaître les difficultés del'évaluation par l'outil questionnaires,replace à leur juste valeur les étudescliniques.

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2.3.1.1 PrécautionsLa validation d'une version longue d'un questionnaire n'est pas systématiquement extensibleà une version courte, tronquée, du même questionnaire. S'il n'existe pas d'instrument validé,dans sa propre langue, pour étudier un point particulier, chaque question doit être cotéecomme une information séparée. Il n'est pas légitime d'additionner les scores pour donner unscore global.

2.3.1.2 Les grands thèmes des questionnairesCes enquêtes multi - dimensionnelles traitent des grands thèmes de l'acouphène: évaluationde la composante anxieuse et/ou dépressive, évaluation du retentissement de l'acouphène surle comportement quotidien diurne et nocturne…importante en pratique quotidienne.

2.3.1.3 Les différents types de questionnaires :Nous avons relevé, dans la littérature, 3 questionnaires validés. Il en existe d'autres, etbeaucoup d'autres non validés. L'emploi d'un questionnaire non validé ne supprime pas saqualité descriptive. Il permet de définir un profil moyen, de faire des comparaisons avant /après traitement par exemple.

Tinnitus Handicap Questionnaire (THQ)Mis au point par Kuk, Tyler, Russell et Jordan, en 1990 (57), ce questionnaire est conçu pourmesurer le degré perçu par le patient du handicap de son acouphène.Le THQ est un questionnaire de 27 questions. L'indice alpha de Cronbach est de 0,93. Ilcontient 4 échelles: satisfaction de vie, dépression, état de santé physique, insertion sociale.L'analyse en facteurs cherche à mettre en évidence la corrélation qui peut exister entre desréponses aux questions et une dimension ou un facteur sous jacent. L'analyse en composantesprincipales est un bon outil statistique.Pour ce questionnaire, 3 facteurs ont été identifiés:Le facteur 1 traduit les effets de l'acouphène sur le comportement social, émotionnel etphysique du sujet.Le facteur 2 reflète les capacités auditives du sujet.Le facteur 3 représente d'une part la vision que le sujet a de son acouphène, s'il va s'aggraver, siune aide va être trouvée, et d'autre part l'appréciation qu'a l'entourage de l'acouphène.Le premier facteur explique 42,6% de la variance totale, le second 9,4% et le troisième 5,6%.Parallèlement à cette enquête par questions dans l'étude, le sujet subit des tests auditifs.

Une faible corrélation a été trouvée entre le score du THQ et le niveau "d'intensité" del'acouphène, le MML, le statut de santé.Une corrélation est modérée (entre 0, 52 et 0,63) entre le score total du THQ etjugement de l'intensité de l'acouphène, la satisfaction de vie, le seuil auditif moyen, ladépression et le jugement sur l'état général de sa santé.

Le THQ reflète le statut auditif, émotionnel, physique et le comportement social des sujetsporteurs d'acouphène.La corrélation entre les jugements subjectifs de l'intensité de l'acouphène et le handicapsuggère que l'intensité de l'acouphène pourrait être un facteur affectant le handicap perçu.Cependant, la faible corrélation entre l'intensité de l'acouphène déterminée subjectivementet objectivement suggère que les mesures subjectives et objectives ne s'adressent pas aumême mécanisme d'évaluation.Enfin manifestement, le handicap perçu vis-à-vis de l'audition n'est peut être pas dû àl'acouphène en soi, mais résulte en partie de la déficience auditive.

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Subjective Tinnitus Séverity Scale STSS ( SEV en français)Mis au point par Halford, Stewart et Andersson, en 1991 (5), il cherche à estimer la sévéritéde l'acouphène en termes d'intrusion, de dominance et de détresse.Il groupe 16 questions. Le score total est calculé pour refléter à la fois l'intensité del'acouphène, la réaction émotionnelle et le degré du handicap. Un indice global de sévérité estconsidéré comme ne pouvant pas être défini qu'au seul regard de l'impact de l'acouphène surla vie du sujet. Le coefficient de Cronbach est de 0,84.Le STSS est corrélé différemment avec le masquage à 1 kHz et le masquage à la fréquence del'acouphène. Ceci nous ramène à la discussion sur la méthodologie de la mesure en matièrede masquage, mais aussi sur l'hypothèse suivante: l'expérience subjective de l'acouphèneserait plus difficile à vivre avec un environnement moins perçu du fait de la surdité et doncmoins capable de masquer l'acouphène du sujet sourd.Le STSS est une approximation utile en clinique pour apprécier la sévérité.

Tinnitus Reaction Questionnaire (TRQ)(souvent dénommé DET comme détresse en français)Mis au point par Wilson (129) en 1991, il cherche à évaluer la détresse psychologique due àl'acouphène. Il comporte 26 questions. L'échelle est en 5 points. Il s'agit de réponsesobligatoires. La procédure de calcul est une simple addition.Le coefficient de Cronbach est de 0,96. Il semble que le TRQ soit un instrument fiable avecune bonne cohérence interne et une stabilité dans le temps.4 facteurs expliquent 66,4% de la variance. Le facteur 1, dans une première série de questions,reflète la détresse générale et explique 50% de la variance. Le facteur 2 mesure l' interférencede l'acouphène sur le travail et les loisirs. Le facteur 3 est celui de la sévérité. Il recouvre lefacteur 2 mais avec des signes de détresse plus lourds. Le facteur 4 traduit les comportementsd'évitement.(3 questionnaires validés THQ, DET et SEV sont présentés en Annexe n°3 page : 132)

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CLINIQUE ET PRATIQUE

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Chapitre 3

Clinique et pratique

Pour traiter de ce chapitre, nous avons choisi de suivre grossièrement la démarche clinique de laconsultation :

◆ Identifier et évaluer l’acouphène◆ Découvrir les circonstances de survenue◆ Rechercher une cause◆ Apprécier la tolérance◆ Evaluer la personnalité du sujet◆ Traiter des cas particuliers◆ Proposer une conduite thérapeutique

En fait, il existe schématiquement 2 situations cliniques :◆ Celle de l’acouphène récent pour laquelle le thérapeute n’est pas confronté aux échecs

antérieurs. Il ne faudrait pourtant pas croire que la situation est simple, tant est vrai le fait que ladiffusion de l’information, à propos par exemple de la mauvaise réputation de l’acouphène, parInternet est importante. Le sujet vient souvent en consultation avec son savoir.

◆ Celle de l’acouphène chronique, de plus de 6 mois d’évolution où l’information joue un rôleencore plus grand.

Dans cette situation où l’expertise est plutôt du côté du patientqui souffre que de celui du thérapeute qui ne souffre pas et quin’a accès au phénomène qu’au travers des dires du sujet, larelation de confiance est délicate à établir. Il faut bien connaîtrele phénomène, anticiper et répondre à toutes les questions.

Nous débuterons ce chapitre en exposant l’acouphène-maladieet son profil, grâce aux résultats d’une enquête, certes un peuancienne, mais dont les résultats restent valides.

3.1 Connaître l’acouphène

Au travers d'une étude collective après un recrutement particulier, par le biais d'une annonce télévisée,370 questionnaires ont été recueillis et ont fait l'objet d'une étude clinique. "Connaître l'acouphène"permet d'anticiper sur les réponses aux questions...

Il ressort de cette étude que l'acouphène, finalement, neretentit pas systématiquement de façon dramatique sur lapersonnalité. En particulier, il ne génère pas d'état dépressiflourd. Ces données contrastent avec l'impression obtenueau travers des consultations. Plusieurs déductions peuventêtre faites, en particulier que l'acouphène profite bien dutemps : C’est l'habituation.

3.1.1 Description des acouphènesL’acouphène est une sensation sonore.Elle peut être caractérisée comme telle :- une fois sur 3 lors de contrariétés et d'angoisse,- une fois sur 3 à la fatigue.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

-Transformer le praticien en expert

- Eviter les hésitations

- Eviter les phrases généralistestelles que « on ne sait pas à quoic’est dû » ou « on n’y peut rien »

- mais accepter lacomplexité clinique del’individu qui consulte…

La relation entre les circonstances devie, d’apparition, de renforcement, dediminution, voire de disparitioncertains jours de l’acouphène etl’acouphène lui-même sont rarement

claires. C’est une donnée àexposer au patient. Lacapacité de diversion, lecomportement vis-à-vis dubruit sont des

caractéristiques à noter pour le planthérapeutique.

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3.1.2 Facteurs et circonstances le diminuantUne fois sur 5 (22%), il y a une circonstance qui le diminue toujours. C’est le bruit ou aucontraire le repos. Une fois sur 3, il existe des circonstances qui peuvent le diminuer. C’ est alorsle repos, le travail manuel ou intellectuel qui sont cités.

3.1.3 Facteurs et circonstances l'augmentantIl est augmenté presque une fois sur 2 (43%) par le bruit.

3.1.4 Autres facteurs et circonstances le modifiantPeu de circonstances physiques modifient l'acouphène. Les plus souvent cités sont la positionallongée, l'exposition à un son fort, le changement d'altitude, la consommation d'alcool.

3.1.5 Retentissement de l'acouphèneCette rubrique a précisé la gêne que constitue l'acouphène

3.1.5.1 Le sommeil37% des sujets interrogés répondent que l'acouphène gêne le sommeil. Mais ailleurs, 75%répondent que l'acouphène ne constitue pas un vrai problème vis-à-vis du sommeil.

3.1.5.2 IrritabilitéIl rend nerveux et irritable (31% des sujets interrogés) et est gênant pour la concentration et lacommunication.

3.1.5.3 Retentissement sur les activitésIl ne semble pas très gênant pour le travail et la vie sociale puisque 88% répondent non ou nerépondent pas à la question. 5% seulement font état d'un retentissement sur ces activités.

3.1.5.4 AnxiétéL’acouphène cause rarement une angoisse considérable (14%) ou constitue toujours unproblème insurmontable (6%).

3.1.5.5 En résumé :Il est considéré comme gênant (60%) ou énervant (37%). Les autres adjectifs cités dansl'ordre décroissant sont les suivants :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Au travers de cette enquête, et malgré la multiplicité apparente desdescriptions, il apparaît possible de définir un profil moyen de l’acouphène.Il s’agit d’un sifflement situé dans l’oreille, nettement perceptible, évoluantdepuis plusieurs mois, sans changement. Il est pourtant assez nettementvariable en intensité et en tonalité, de façon plutôt imprévisible ou au contrairesystématique lors de contrariétés, d’angoisse ou de fatigue. Il est plus variablechez le sujet actif. S’il diminue, c’est par les activités de diversion ou par lerepos. S’il augmente, c’est le bruit ou qui déclenche cette augmentation ou lerepos qui le fait plus percevoir. Il gêne le sommeil dans plus d’un tiers des cas,mais la prise de sédatifs n’est pas corrélée.Il rend nerveux et irritable une fois sur 3 mais ne gêne ni le travail ni la viesociale.Il est surtout considéré comme gênant ou énervant mais très rarementinsupportable ou suicidaire. Le soulagement est plus fréquent chez lenon-retraité.Les bruits forts sont souvent gênants.L’hypertension artérielle et le cholestérol sont bien identifiés comme élémentsassociés, souvent affectés d’un caractère causal.

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Adjectifs par ordre décroissant Pourcentages

obsédant 29%

déprimant 20%

harcelant 19%

angoissant 16%

inquiétant 15%

exaspérant 15%

insupportable 9%

pouvant conduire au suicide 5%

L’adjectif le plus souvent cité lors des consultations est « énervant »

3.1.6 Les causes et les facteurs favorisant des acouphènes

3.1.6.1 Les problèmes auditifsDans 54% des réponses, il y a une atteinte de l'audition.

3.1.6.2 Les autres problèmesParmi les autres problèmes par ordre décroissant sont cités le plus souvent :● les vertiges,● l'hypertension artérielle,● le cholestérol.On retiendra de ces évaluations la variabilité de l'acouphène, la tolérance relativement bonne,l'absence d'angoisse majeure permanente, le caractère peu invalidant sur les activités, lanotion parfaitement définie de gêne qui ne fait que très rarement oublier.On pourrait isoler, pour les patients souffrant d'acouphènes, une sorte de comportementpermanent avec :irritabilité, besoin de remuer les jambes, mal au dos, sensation de fatigue, absence detranquillité intérieure ...Dans l'ensemble, la population avec acouphènes ayant répondu aux questionnaires présentedes valeurs de vie et des aspirations très positives : sociable, s'intéressant aux autres, bon,volontaire. Les valeurs négatives sont toujours les mêmes :lassitude, agitation, tension, inquiétude ...

3.1.7 Evaluation du trait anxieuxCompte tenu du rôle manifeste de l'anxiété sur le retentissement de l’acouphène, il est utile depréciser les relations entre trait anxieux et symptôme.Schématiquement, pour ce type de questionnaire, les notes obtenues ne sont pas différentes decelles d'un groupe de sujets sans acouphène. Entre la population de retraités et de non retraités, iln'y a pas de différence sauf pour les questions ayant trait au calme (je suis calme, tranquille et enpaix), à la stabilité (je suis une personne stable). Les non retraités sont 34% à répondre qu'ils nesont jamais ni calmes, ni tranquilles, ni en paix contre 22% de retraités. Par contre ces derniers sesentent moins en sécurité (je me sens en sécurité) que les non retraités.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

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3.2 Identifier et évaluer les acouphènes

Nous redétaillerons les tests plus loin.

3.2.1 Evaluation de la tonie : évaluation de la hauteur de l’acouphèneL’évaluation de la tonie de l’acouphène est réalisée par une méthode d’ajustement : la fréquenced’un son pur, unilatéral ou bilatéral, est ajustée jusqu’à ce que ce signal sonore soit considérécomme équivalent en hauteur à la raie spectrale prédominante de l’acouphène.En pratique, la réalisation de cette évaluation en acouphénométrie est simple. On adapte ungénérateur de son pur à l’entrée externe d’un audiomètre. Le sujet ajuste lui-même la fréquencedu son généré jusqu’à ce qu’il retrouve une ressemblance avec « son » acouphène. Souvent, aprèsun temps bref d’exposition, il déclare que ce n’est pas lemême, vraisemblablement parce qu’il démasque lesautres composants spectraux de son acouphène quin’est finalement pas pur. De plus, le masquage d’unacouphène peut démasquer un acouphène de faibleintensité, en controlatéral.Cette évaluation de la tonie a-t-elle une réelle utilitéclinique ?

• Oui si on considère que l’acouphène est relié par safréquence à la zone tonale qui lui donne naissance.Ainsi, pour un traumatisme sonore, la fréquencemasquante est dans la zone de l’encoche, plutôt enamont du V vers les fréquences graves. L’explication est rattachée à la sur-représentation (MacDermott) des zones fréquentielles limitrophes du V, au niveau central.(cf .la physiologie del’acouphène)

• Non si on considère que l’adaptation du générateur de bruit, en fréquence, ne recherche pas unmasquage exact de l’acouphène – même si le masquage est d’autant plus efficace qu’il se situe prèsde la perte fréquentielle.

3.2.2 Evaluation de la sonie : évaluation de « l’intensité » de l’acouphèneCette évaluation est analogue à la précédente.Mais techniquement il faut choisir un signal sonore de fréquence adéquate.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Même si les caractéristiquespsychoacoustiques (ce que le sujetressent) ne sont pas déterminantespour la prise en charge, l’attentionque porte le thérapeute à ladéfinition des caractéristiquesphysiques du signal perçu apparaîtimportante pour le patient qui se voitainsi bien considéré comme un« patient somatique ».

L'intensité de l'acouphène peut être appréciée simplement, grâce à :- une échelle visuelle analogique,- une échelle numérique,- une échelle verbale.

Les scores ont une valeur descriptive pour un individu donné et permettent un suivi. Il estsouhaitable d'utiliser l'échelle visuelle analogique (EVA), bien qu’elle ne donne pas d'informationsur la nature exacte de la plainte. Elle ne peut pas servir à comparer les sujets entre eux. Elle aide àidentifier les sujets nécessitant une prise en charge active, sans qu'il existe un lien direct entre lescore obtenu et le type de traitement.Les échelles numériques, généralement graduées de 0 à 10 ou de 0 à 100 permettent d'obtenir unemesure de l'acouphène au moment de la consultation, mais également aussi théoriquement defaçon rétrospective. Les échelles numériques peuvent être utiles en cas de difficultés decompréhension des consignes de l'échelle visuelle analogique.Les échelles verbales simples sont fondées sur le choix d'un adjectif pour définir l'intensité del'acouphène. La mesure se limite à 5 ou 6 niveaux. Elles sont généralement réservées auxpersonnes ayant des difficultés à utiliser les 2 types d'échelles précédents.La sensibilité au changement de l'échelle visuelle analogique, après traitement, est considéréecomme plus grande que celle des 2 autres échelles.La consommation médicamenteuse n'est pas un bon indicateur pour évaluer "l'intensité del'acouphène", mais sur la gêne qu’il induit.

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Paradoxalement on peut constater (Reid 1960) un son de fréquence plus basse que le signalsonore externe dont la fréquence est égale à celle de l’acouphène.Ce comportement paradoxal, s’il existe, est mis sur le compte de la présence d’un recrutement etdonc sur le compte de cette sur-représentation centrale.En terme d’utilité, l’évaluation de la sonie permet d’expliquer au sujet la différence entresensation et tolérance. L’acouphène est dans la plupart des cas un signal de sonie faible dequelques décibels par rapport au seuil auditif à la fréquence de l’acouphène.Les courbes de Feldmann orientent vers l’étiologie ou le contexte de l’acouphène (voir plus loin).

3.2.3 Le masquage de l’acouphène.Dès 1924, Wegel et Lane montrèrent qu’un son pur était le plus efficacement masqué par un autreson pur de fréquence identique.On peut donc facilementdéterminer le niveau en fréquenceet en intensité d’un son méconnuen utilisant des sons masquantssuccessifs variant en fréquence etintensité, en recherchant lesniveaux de masque.C’est la courbe d’isomasquage. Ilse fait plus souvent avec des bruitsà bande étroite.En matière d’acouphène, lecomportement mutuel acouphène– bruit à bande étroite - n’est pas aussi systématique.

3.2.4 Recherche d'une inhibition résiduelleL’acouphène peut disparaître pendant un délai allant de quelques secondes à quelques minutesaprès exposition à un son masquant. Ce résultat n’intervient pas dans l’indication du générateurde bruit. Il a le grand avantage de montrer le caractère non permanent de l’acouphène – même s’ilest ancien.Au total, il faut retenir que, en matière d’acouphènes, les phénomènes de masquage sonore fontappel à des mécanismes centraux. Ils ne sont pas superposables aux phénomènes périphériques demasque d’un son pur par un autre son pur ou par un bruit.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Sans entrer dans les détails, ces constatationsconduisent à dire :• Que l’activité électrophysiologique supportant

l’acouphène n’est pas identique à celle générée par unsignal sonore extérieur.

• Que le masque est plus prédictible si on tient comptedu niveau de pression du signal masquant.

• Que le masquage de l’acouphène ne dépend pas quede la physiologie cochléaire. En complément, on peutaussi présenter le fait que pour un acouphèneunilatéral, le niveau du son masquant homolatéral peutêtre plus élevé que celui de l’homologue controlatéral.

Figure 19 - « réglette EVA ». La réglette comporte 2 faces : le « recto » montre une barre bleue de 10 centimètres avec leslégendes aux 2 extrémités. Le sujet place le curseur au niveau de la sonie de l’acouphène, ou de la gêne si c’est la questionposée. Au verso, on peut chiffrer le positionnement du curseur et comparer d’une consultation à l’autre le ressenti.

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3.2.5 L'examen audiométrique et les tests psychoacoustiques.Lorsqu'un patient se plaint d'acouphène, il est légitime et indispensable de faire un examenaudiométrique complet, sachant qu'une majorité des patients ont une baisse d'audition, qu'ils ontparfois du mal à reconnaître.Il faut leur montrer que ce n'est pas l'acouphène qui empêche d'entendre mais que c'est la perteauditive qui retentit sur leur communication.Faut-il réaliser d'autres explorations, et dans quels buts ?

3.2.5.1 L'audiométrie classiqueL'audiométrie est réalisée classiquement en cabine insonorisée, elle comprend unerecherche des seuils aériens et osseux, avec masquage de l'oreille controlatérale, en tonale,avec notamment les seuils sur le 3000 Hz et le 6000 Hz, ce qui permettra de visualiser uneéventuelle encoche (Figure 19b).L'audiométrie vocale avec détermination du seuil d'intelligibilité, complète et corrobore lesrésultats de l'audiométrie tonale liminaire, et éventuellement objective une discordance avecles seuils en tonale, ce qui peut faire suspecter une atteinte rétrocochléaire et nécessitera alorsd'autres explorations. De même, elle revêt un intérêt particulier pour le suivi d'une surdité,les indications et résultats prothétiques.L'impédancemétrie et l'étude des réflexes stapédiens font partie du bilan étiologique etpermettent de repérer, puis de distinguer les patients hyperacousiques avec recrutement desphonophobiques.L'ORL se doit de commenter les résultats de l'audiométrie, en pointant par exemple que labaisse des fréquences aiguës entraîne systématiquement une altération de la compréhensionnotamment dans les ambiances bruyantes ( repas familiaux, cocktail party).

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 19b - L' audiogramme tonal, vocal et impédancemétrie, la recherche des seuils auditifs sur le3000 Hz et le 6000 Hz permettent parfois de retrouver un scotome, attestant d'un traumatisme sonore.

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3.2.5.2 L'audiométrie hautes fréquencesC'est l'étude des seuils auditifs aériens pour les fréquences de 8 000 à 20 000 Hz.Elle est rarement utilisée et d'intérêt limité après 40 ans, puisqu'il n'y a pas de normes bienétablies en fonction de l'âge. Les seules indications sont la surveillance des patients à risque :traumatisme sonore chronique, traitements ototoxiques, le patient étant son propre témoin.

3.2.5.3 L'audiométrie automatique et l'Audioscan®Décrite en 1947 par Bekesy, le principe a été repris par Meyer-Bisch qui a créé l'Audioscan®.Cet appareil permet une méthode subjective de détermination des seuils auditifs avec unbalayage fréquentiel (de 125 à 16 000 Hz) se faisant à niveau constant (64 valeurs par octave).En pratique, le sujet presse sur un bouton tant qu'il entend et relâche dès qu'il n'entend plus.Si les frontières d'une encoche sont détectées, la fréquence centrale est calculée par lemicroprocesseur qui débute alors un nouveau balayage autour de cette fréquence.Il permet donc de détecter des anomalies discrètes, telles que des encoches étroites situéesentre les fréquences normalement testées. L'interprétation est facilitée par une représentationgraphique conviviale (Figure 20).La qualité de l'examen dépend des conditions de l'examen (bruit ambiant, habitude de laméthode, fatigue auditive), du sujet et de son état de vigilance. L'examen est court pour unnormo-entendant (moins de 5 mn), par contre, il se prolonge avec la nécessité d'affiner lesseuils auditifs dès qu'il y a des anomalies (20 mn environ).Les limites de la méthode sont aussi l'absence de masquage controlatéral et l'impossibilitéd'obtenir une courbe en conduction osseuse.

3.2.5.4 Les oto-émissions acoustiquesDécouvertes par Kemp, elles sont le reflet du fonctionnement des cellules ciliées externes dela cochlée.Les oto-émissions acoustiques spontanées sont émises en l'absence de stimulation; elles nesont retrouvées que chez 50% des normo-entendants et leur recueil n'a pas permis decaractériser les patients normo-entendants avec acouphènes.Les oto-émissions acoustiques provoquées sont émises en réponse à une stimulation brèvepar des clicks ou des tone bursts. Ce sont celles qui sont le plus souvent étudiées en pratiquequotidienne. Elles ne sont présentes qu'en cas de bon fonctionnement cochléaire.De nombreux travaux scientifiques sur des animaux de laboratoire qui ont été soumis à defortes doses de produits ototoxiques, ont prouvé que la disparition des oto-émissions

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 20 - L'Audioscan®, il permet un balayage fréquentiel, fin, jusque 16 000 Hz.

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permettait d'affirmer l'atteinte cochléaire, et qu'elle pouvait être transitoire en cas d'arrêtimmédiat de l'intoxication. Ces travaux justifient donc un suivi grâce aux oto-émissions despersonnes à risque (travail dans le bruit,…), ou recevant des substances oto-toxiques. Ellespermettraient de dépister très précocement une toxicité cochléaire encore réversible évitantune éventuelle perte auditive.Les produits de distorsion (PD) correspondent à des sons émis par la cochlée en réponse àdeux stimuli qui sont des sons purs continus appelés F1 et F2. L'étude des PDA est l'analysedu recueil du son "2F1-F2". Leur étude permettrait d'objectiver pour Jastreboff quel'hyperacousie périphérique dont souffre certains patients avec acouphènes, soit liée à undysfonctionnement des cellules ciliées externes.

3.2.5.5 Les PEAIls n'ont d'intérêt que dans le bilan étiologique pour confirmer les seuils auditifs subjectifs etsurtout pour éliminer une pathologie rétrocochléaire, ou une pathologie neurologiqueévolutive.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 21 - Les différentes courbes de Feldmann.

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3.2.5.6 Les tests psychoacoustiquesAvant de se lancer dans des tests longs, il est important de faire décrire aussi précisément quepossible les acouphènes : dans l'oreille (uni, bilatéralité), dans la tête, permanents ouintermittents, caractère variable ou non, grave ou aigu, plusieurs composantes sonores...Certains patients évoquent un bruit familier : cigales, papier de soie, eau qui coule, cocotteminute, grésillements, ligne haute tension, cliquetis… C'est un indicateur important quipermettra de corroborer les résultats des différents tests psychoacoustiques.La localisation fréquentielle se recherche en demandant au sujet d'ajuster sur une descomposantes ou sur la composante dominante de son acouphène, un son présenté en homo-ou controlatéral. Ce son peut être un son pur, un bruit à bande étroite lorsqu'il est délivré parun audiomètre, ou un son complexe nécessitant l'utilisation d'un générateur de bruit (simpleou informatisé). Du fait de fréquentes erreurs d'octave, il est nécessaire de faire au moins troismesures, ou d'avoir recours à des procédures de choix forcé.Dans la majorité des cas, l'acouphène est situé dans la zone de la plus grande perte auditive,mais pas au point le plus bas, plutôt sur la pente descendante, parfois même à l'endroit de larupture de pente sur l'audiogramme, comme dit plus haut.La détermination de l'intensité se fait par comparaison en utilisant soit le son déterminéauparavant, soit en utilisant un son de fréquence grave. Il est préférable de tester l'oreillehomolatérale pour s'affranchir des problèmes de recrutement, et en utilisant une méthodeascendante pour diminuer les effets d'une inhibition résiduelle.Pour la majorité des auteurs, l'intensité de l'acouphèneest toujours comprise entre 5 à 15 dB au-dessus duseuil auditif.La masquabilité de l'acouphène doit être recherchéesur l'oreille homolatérale et sur celle controlatérale, grâce à un bruit blanc ou à un bruit àbande étroite.En utilisant des bruits à bande étroite centrée sur les fréquences testées en audiométrieclassique et en rapportant les points de masquage sur les tracés audiométriques, Feldmann adécrit six types de courbes (Figure 21). Si sa description ne s'est pas révélée exacte pourrapprocher l'étiologie de l'acouphène, elle nous paraît utile pour prévoir l'efficacité d'uneprothèse auditive ou un générateur de bruit.Le test d'inhibition résiduelle peut être utilisé dans le même but. Il se recherche en masquantl'acouphène à une intensité supérieure à 10 dB par rapport au seuil déterminé auparavant,avec un bruit blanc, laissé pendant une minute, puis arrêt brusque. On note alors, sil'acouphène a augmenté, diminué ou disparu et au bout de quel délai il réapparaît et dansquelles conditions.Ces mesures sont encore fréquemment demandées par les patientsafin d'objectiver et d'identifier leur symptôme.Elles sont de moins en moins pratiquées par les médecins car ellessont d'une utilité très relative, et surtout très « chronophages ».Néanmoins elles permettent d'évaluer l'intensité de l'acouphène qui ne dépasse jamais plusde quelques dB au-dessus du seuil auditif, ce qui étonne puis rassure certains patients, et ellespermettent aussi de faire enfin entendre à leur entourage présent lors des examens, ce "qu'ilsont en permanence dans les oreilles ou la tête".Pour suivre un patient avec acouphène, on peut aussi évaluer l'intensité de l'acouphène et lagêne ressentie par le patient grâce à une échelle visuelle analogique (EVA) (comme cellesutilisées pour quantifier la douleur) ou grâce à des questionnaires d'évaluation validés(mesure du handicap ou THQ de Kuk, mesure de détresse psychologique ou TRQ deWilson, questionnaire de sévérité, traduits en français par Méric, et aussi questionnaire desensibilité auditive pour l'hyperacousie par Khalfa).

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CLINIQUE ET PRATIQUE

L'intensité retrouvée n'est pascorrélée à la gêne ressentie par lepatient.

La pratique des testsrassure...

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Chacun saura pratiquer ces explorations dans le but de préciser le diagnostic, d'éliminer unemaladie grave et d'orienter la thérapeutique. Mais au-delà de ces examens, une grandedisponibilité avec empathie pour un patient souffrant d'une pathologie sans menace vitale,mais qui retentit de façon importante sur sa qualité de vie, est nécessaire.

3.3 Circonstances de survenue de l’acouphène et étiologie

• Conserver une démarche logiqueDans une approche rapide, on confond volontiers circonstance et étiologie.Certes, les causes de l’acouphène sont, de notoriété,multiples. Certaines signent un mécanisme évident,d’autres, par un raisonnement statistique deprévalence, sont plutôt liées à une circonstance desurvenue, une association.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

L'acouphénométrie est-elle essentielle, indispensable ?

Jusqu'aux années 70, l'évaluation d'un acouphène était tout à fait imprécise. Grâceà de grandes séries de patients analysées de façon rigoureuse, cette évaluation abeaucoup progressé. Théoriquement elle devait permettre, d'une part deconstituer des groupes homogènes de malades en particulier sur le planpronostique, d'autre part, de favoriser une évaluation rigoureuse des traitementsproposés. Malgré la très grande quantité de patients étudiés, et les effortsprodigués, il ne semble pas que cette acouphénométrie soit un élémentdéterminant de l'évaluation du patient avant et après traitement. En effet aucundes paramètres que nous avons étudiés ne ressort comme significatif.

Il va de soi néanmoins que le temps de l'évaluation est arrivé également pour lesthérapeutiques en matière d'acouphènes. Simplement, elle ne repose pas sur cettetechnique acouphénométrique mais plus globalement sur la représentation duphénomène et la mesure de la tolérance.

Faut-il donc continuer à réaliser ces tests ?

De façon systématique, la réponse est très vraisemblablement non, pour deuxraisons :

- la première est qu’ils ne sont pas très fiables (en particulier pour ce quiconcerne l'évaluation de la hauteur, les patients faisant fréquemment deserreurs d'octave ; il existe également un effet d'apprentissage important),- la seconde est qu'ils prennent beaucoup de temps.

Par contre il nous semble utile dans certains cas particuliers, et à but souvent« pédagogique », d'effectuer ces tests qui apparaissent au patient et à sonentourage comme une mesure objective.

Enfin, l’acouphène est souvent un bruit à bande plus ou moins large, avec des raiesspectrales. Les masquages de la raie énergétiquement la plus importantedémasquent les autres.

La demande du sujet acouphénique(porteur d’acouphènes) quand il vientvoir le médecin somaticien ORL est,au début du bilan, une définition del’étiologie.

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Ainsi le schéma ci-dessous fait comprendre la démarche globale du bilan.● Circonstances de survenue et associations pathologiques

● Causes

● Mécanismes

● Symptôme

− Le symptôme est unique, monomorphe, même s’il est décrit avec un polymorphisme apparent.− Les mécanismes sont sans doute finalement assez peu nombreux.− Les causes, c’est à dire les circonstances pathologiques qui donnent lieu à un mécanisme, bien

définies, sont plus nombreuses.− Enfin les circonstances de survenue et les associations pathologiques le sont encore plus.Prenons 3 exemples :

● Le traumatisme sonore.Il représente la grande majorité identifiée des circonstances de survenue :La circonstance se confond avec la cause : Le mécanisme lésionnel, même s’il est potentiellementau moins double, -ciliaire ou au niveau des neurotransmetteurs- est identifié.

● L’hypertension artérielle (HTA)Elle représente une association pathologique fréquente en matière d’acouphènes. Mais lemécanisme est mal défini.C’est par supputation que l’HTA accède au niveau de cause. L’HTA est une constatationfréquente chez les sujets dans la seconde moitié de leur vie, tout comme l’acouphène. Aussi, parun raisonnement statistique, dans ces situations, l’acouphène est relié à l’HTA.Certes, des preuves sont observables : la mise en route d’un traitement puissant ou trop puissantpeut aller de pair avec l’apparition d’un acouphène.Certes une HTA peut s’associer avec un acouphène, et la prise en charge de la maladie peutpermettre d’observer une diminution ou une disparition de l’acouphène.• Une autre preuve est encore plus éclatante : l’hyperthyroïdie, avec son « erethisme »vasculaire

peut s’associer à un acouphène battant. Le mécanisme explicatif est le battement carotidiendans son canal, près de la cochlée.

Cette démarche de corrélation entre circonstances de survenue – association et étiologie - doitscientifiquement s’appuyer sur le théorème de Bayes1 qui fait comparer :• La présence du symptôme avec la maladie et la situation où la maladie est absente.• L’absence du symptôme dans les mêmes observations.

On doit dresser le tableau suivant :Symptôme = présence du symptômeSymptôme = absence du symptômeMaladie = présence de la maladieMaladie = absence de la maladie

Maladie Maladie

Symptôme

Symptôme

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CLINIQUE ET PRATIQUE

1- Calculer la probabilité qu’un événement A survienne sachant qu’un autre événement B s’est produit. On parle deprobabilité conditionnelle de A sachant B.

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2 exemples intuitifs font comprendre la relation de cause à effet.Pour un échantillon suffisant de cas observés :

Maladie Maladie

Symptôme 90% 10%

Symptôme 10% 90%

Dans cette situation, le symptôme est à la fois spécifique et sensible de la maladie : quand lesymptôme est absent, la maladie est absente. Quand le symptôme est présent, la maladie estprésente.A l’opposé, la situation suivante ne permet pas de conclure :

Maladie Maladie

Symptôme 50% ③ 50% ②

Symptôme 50% ④ 50% ①

Pour établir un tel tableau pour le symptôme acouphène, le travail est extrêmement difficile.S’il est facile de remplir la case ① et la case ②, les 2 autres (③ et ④) sont méconnues, car les sujetsréférents à la case ③ ne consultent pas, car pour la case ④ les circonstances – causes du symptôme -sont nombreuses.

En pratique1 - Il n’y a pas lieu de se laisser guider par l’habitude. L’acouphène de la 2ème moitié de la vie n’est

pas systématiquement en rapport avec un mécanisme vasculaire qui n’a pas été démontré. Lechaînon est manquant. C’est pour ce manque de preuve que le service médical rendu est jugéfaible pour les médicaments vasculotropes dans les médications d’acouphène. Lesmédicaments sont faiblement remboursés.

2 - Il n’y a pas lieu de considérer que tous les acouphènes unilatéraux sont le fait d’un neurinomede l’acoustique et par voie de conséquence d’imposer une imagerie systématique de l’angleponto-cérébelleux.

3 - L’IRM « facile » reste un recours qui n’est pas à proscrire, si cela est vraiment le seul moyen derassurer le patient...

3.4 En clinique, utiliser les modèles, pour démontrer et expliquer

◆ Le modèle neurophysiologique de Jastreboff.

Reprenons ce qui est dit plus haut : dans ce modèle intégratif, l’acouphènerésulte de l’interaction de nombreux sous-systèmes du système nerveux.Les voies auditives jouent un rôle dans le « développement » du signalélectrophysiologique de l’acouphène et dans l’émergence de l’acouphène entant que perception auditive tandis que les autres systèmes, entre autres lessystèmes limbique et autonome, sont responsables de sa « pérennisation » et de « gêne » qu’il induitchez les patients.Ce modèle très global, qui intègre les grands concepts des neurosciences cognitives (dont la notionde « réseaux neuronaux » de traitement et celle de plasticité centrale), a pour avantage essentiel demettre à disposition du médecin, un modèle synthétique du phénomène de l’acouphène qui

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Le schéma est enannexe,page : 130.

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permette d’expliquer aux patients, les mécanismes à l’œuvre sur lesquels il est d’ores et déjàpossible d’agir, et qui puisse être aisément compris d’eux.Acceptant l’existence d’un générateur présenté plus haut, son activité est détectée, la sensation estperçue. On en déduit le fonctionnement du bloc fonctionnel qui représente la fonction dedétection :

Tout signal connu et menaçant est détecté rapidement à des niveaux très faibles. La permanencedu signal entraîne le système à le détecter de mieux en mieux. Ce système de détection est pilotépar le système limbique, boîte noire de l’émotion, en connexion avec le thalamus et les sensations,l’hippocampe et la mémoire. Ce signal menaçant est normalement perçu par le conscient,obscurcissant les autres perceptions et aux dires des patients gênant l’audition et lacompréhension. Comme toute menace, il déclenche toutes les réactions de stress gérées par lesystème nerveux autonome. Le conscient intervient en aggravant la situation : il ressasse lescroyances de non-guérison, il anticipe sur le futur. Le système risque de boucler sur lui-mêmesurtout si la surdité focalise l’attention sur les tentatives de meilleure compréhension del'interlocuteur : le sujet « tend l’oreille pour mieux comprendre »…

◆ Le modèle de l’épilepsieDans plusieurs situations cliniques, comme des traumatismes sonores ou des bouclesartérielles, on peut considérer que l’acouphène est un foyer épileptique sur la voie auditive.Une approche médicamenteuse reconnaît l’efficacité des produits antiépileptiques…

◆ Le modèle de la douleurLe modèle de la douleur a beaucoup été utilisé :-Sa définition même peut être adaptée pour l’acouphène : c’est une expérience désagréablesensorielle et émotionnelle, associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel.-La douleur, comme l’acouphène, comporte 4 composantes :

Sensorielle : la tonie, la sonie…Affective : l’émotion qu’il déclencheCognitive : le déclenchement, l’anticipation…Comportementale : le « fight or flight ».

- Il existe des douleurs-symptômes et des douleurs-maladies qui surviennent en dehors detoute stimulation nociceptive ou pour des stimulations infra-liminaires.- Elles sont dues à une hyperstimulation, à une atteinte du contrôle, à une désafférentation ouà une cause d’ordre psychogène.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 22 - Schéma de la douleur.

DOULEUR

FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX PASSÉS/PRÉSENTS

FAMILIAUX - SOCIAUX - CULTURELS

SENSATION

COGNITION

ÉMOTION

SENSATION

COGNITION

ÉMOTION

TRANSMISSION

CONTRÔLE

EXCÈS DE STIMULATIONS

NOCICEPTIVES

PSYCHOGÈNE

DÉSAFFÉRENTATION

MÉCANISMESGÉNÉRATEURS

INTÉGRATIONEXPÉRIENCESUBJECTIVE

COMPORTEMENTSOBSERVABLES

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-Enfin le schéma de Melzack et Wall (Figure 23) peut aussi justifier l’emploi de la thérapiesonore.

◆ La lidocaïneBarany, en 1935, remarqua

fortuitement que l’injectionendonasale de procaïne donnait unesuppression momentanée del’acouphène.La lidocaïne est un anesthésique localqui est aussi utilisé pour régulariserles troubles du rythme par effetstabilisateur de la membrane. Il enrésulte un ralentissement deséchanges ioniques, ce qui diminue la vitesse de dépolarisation. La lidocaïne augmente la durée de lapériode réfractaire et réduit la fréquence de décharge sur les fibres.Si, à partir de 1978, elle a fait l’objet de plusieurs travaux prometteurs, l’impossibilité d’utiliser unsubstitut oral « condamne » l’emploi chronique de la méthode. Pourquoi alors parler de ce produit ?

Au plan général, l’efficacité fréquente de la lidocaïne prouve la possibilité d’action rapide d’unedrogue sur l’acouphène..Au plan individuel, elle est utilisée comme traitement parentéral. Si le résultat est bénéfique, ellecontribue à restaurer la confiance dans la thérapeutique.La lidocaïne aurait pu servir de base à un système de tri des patients pour la mise en route d’untraitement à effets secondaires dangereux (carbamazépine et risque hématologique).Enfin, parce que le produit a une action locale qui peut être étudiée, parce qu’il existe desmodèles animaux,… la bonne connaissance du produit contraste avec la méconnaissance desautres dont l’action est centrale.

Après administration IV, la lidocaïne est immédiatement active. Sa demi-vie est de 10 minutes.

◆ Les radicaux libresLa minceur de ce paragraphe est sans doute inversement proportionnelle à la largeur del’implication des radicaux libres dans le processus pathologique ou dans le vieillissement. Bienévidemment, les molécules anti-oxydantes pourraient avoir un rôle -de prévention- à conditiond’être administrées « au bon moment ». Nous renvoyons le lecteur à des lectures spécifiques.

◆ Le modèle de Tonndorf a été présenté précédemment

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 23 - Schéma de Melzack et Wall.

Les similitudes…• 2 voies nerveuses (CCE, CCI...)• Désafférentation (cochose

et acouphènes)• Masquage (Thérapie sonore)• Verbalisation• Membre fantôme• Voie extra-lemniscale,

système pluri-sensoriel• ...

La maman qui console et le recrutement :"L'enfant tomba sur les genoux. Sa mère s'empressa defrotter largement les 2 zones douloureuses..."Les voies amyélimiques de la douleur sont activées parle choc - en activant les fibres myélimisées - plusrapides - du tact (frottement - recrutement parfrottement d'une large surface), s'exerce une inhibitionsur les voies de la douleur par l'interneurone...

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3.5 Les situations de désafférentation :

3.5.1 la section du VIII cochléaire - La neurotomie cochléaire et vestibulaireCette intervention n’est plus et ne doit plus être pratiquée, il est pourtant utile au plan théoriquede se pencher sur les résultats qu’elle apportait.Le résultat immédiat sur les acouphènes était bon mais se dégradait progressivement au fil desmois. L’existence d’une disparition puis d’une réapparition des acouphènes fait évoquerl’existence de système de filtres placés à différents niveaux des voies auditives.

Cette méthode avait, en tous cas, la "vertu" malheureuse d’interdire ensuite le masquagesonore ou électrique de l’acouphène.

3.5.2 Le neurinome de l’acoustique et les boucles artériellesSi la grande majorité des patients porteurs de neurinomes de l’acoustique (Figure 24a) présententdes acouphènes au moment de leur diagnostic, tous les acouphènes ne sont pas en rapport avec unneurinome. Ceci nous renvoie à la discussion probabiliste.Le mécanisme pourrait être double :La surdité et aussi un mécanisme de fausses synapses : les ephapses (Figure 24b). Tout se passeraitcomme un « court-circuit » interaxonal lors de l’atteinte de la myéline. "L'usure" pourrait êtredéclenchée par la proximité vasculaire (boucles artérielles).

71

CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 24a -P. M. Bonfils et J.M. Chevalier "Anatomie ORL"Médecine-SciencesFlammarion, Paris 1998.

Figure 24b - A propos du spasme de l'hémiface, leséphapsesR. Charachon et coll. "Le spasme hémifacial"Rapport à la Société Française d'ORL, 1997.

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Recherche de causes générales de l’acouphène.Quelles recherches faut-il faire dans le cadre de ces acouphènes(HTA, diabète, cholestérol etc.) ?

Nous avons vu dans le chapitre consacré à « acouphène symptôme et acouphène maladie »l'importance de l'attention àaccorder à la rechercheétiologique. Une fois encorel'interrogatoire du patient esttout à fait fondamental ycompris pour ce qui concerneses pathologies nonotologiques et ses antécédentslointains (traumatisme cervicalou acoustique remontant àplusieurs années, péridurale,chirurgie squelettique, etc.).On évaluera alors le caractèrevraisemblable ou non du lienentre ces antécédents et laprésence de l'acouphène.Il faut naturellement avoirconstamment à l'esprit legroupe témoin des personnes qui ont le même antécédent que notre patient sans présenterd'acouphènes, la discussion probaliste est toujours de mise...

3.7 La recherche, en pratique, d’une cause à l’acouphène

C’est un temps essentiel du bilan : le sujet porteur d’un acouphène vient consulter pour êtresoulagé, mais aussi pour faire un « bilan de santé ». La réponse du « somaticien » ORL ne doit jamaisêtre celle du psychothérapeute qu’il n’est pas, même lorsque la plainte psychologique sous-jacentelui apparaît clairement.Les causes / circonstances / associations (voir plus haut) en matière d’acouphènes sont nombreuses.Cette phase du bilan est exigeante pour le praticien qui doit observer quelques règles :◆ Eviter les phrases qui génèrent un défaut de confiance telles que :

– « vous savez, on ne sait pas à quoi c’est dû… »,– « qu’importe l’étiologie, car l’acouphène au bout d’un temps d’évolution (6 mois

correspondant au passage de l’acouphène aigu à l’acouphène chronique …) s’est centralisé ».Même si cette assertion n’est pas à rejeter, nous avons tous constaté des acouphèneschroniques qui disparaissent, et les sujets qui ne consultent plus peuvent être des sujets dontl’acouphène a disparu.

◆ Chercher une cause locale quand l’acouphène est unilatéral.◆ S’appuyer sur les caractéristiques sonores de l’acouphène pour orienter sa cible de recherche :

– l’acouphène aigu (sifflement) n’a sans doute aucune valeur localisatrice. La définition exactede sa tonie, c’est à dire de sa hauteur, a peu d’intérêt diagnostique même s’il est utile, pour unéventuel masquage, d’évaluer son domaine fréquentiel.

– l’acouphène battant n’est pas à relier systématiquement à une anomalie vasculaire« grossière » type fistule artério-veineuse. Il peut s’agir d’un dysfonctionnement de l’oreilleinterne : témoin l’acouphène de l’otospongiose. Quoiqu’il en soit l’examen d’un sujetacouphénique doit comporter un examen stéthacoustique, ne serait-ce que pour éliminer unsouffle vasculaire transmis, diagnostiqué avec ou sans examen Doppler.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Inversement, il n’apparaît pas raisonnable de rechercher cheztout patient se présentant pour un acouphène unehypertension labile, une atteinte endocrinienne, rénale, unsyndrome d'apnée du sommeil, un refluxgastro-oesophagien ou une hypertension intracrânienne.Ainsi, dans la pratique quotidienne, en dehors decirconstances particulières à la fois historiques et cliniquesfaisant penser à une étiologie otologique, seule l’expériencepermet de limiter les investigations à ce qui sera utile.En particulier, il apparaît clairement que, en dehors de l'effetplacebo, la découverte et la correction d'unehypercholestérolémie, d'un diabète, d’ un refluxgastro-oesophagien, n’ont pas une incidence notable surl'évolution d'un acouphène concomitant. La question estdonc de savoir où s'arrête le rôle de l'ORL et où commence(ou continue) celui du médecin traitant garant de la bonnesanté de son patient sur le plan général.

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– l’acouphène de tonalité grave (bourdonnement) oriente vers une cible périphérique, c’est àdire oreille moyenne ou oreille interne.● Pour l’oreille moyenne, le sujet ajoutera souvent des compléments de définition comme

grésillements, froissement, voire comme un bruit déclenché par un insecte ! Il y a lieualors de rechercher les manœuvres qui amplifient ou limitent l’acouphène, comme lesmouvements du cou ou de la tête1, de la mâchoire, reliant l’acouphène aux muscles del’oreilles moyenne et à tout l’équipement musculaire digastrique de la région.Malheureusement, la section du muscle du marteau, qui a pu être pratiquée par certains,n’ a pas abouti à leur disparition.

● Pour l’oreille interne, on parle de Maladie de Ménière ou d’otospongiose par exemple.● Les deux localisations ont un point commun : le dysfonctionnement de l’analyseur

fréquentiel qu'est la membrane basilaire, et dans ces conditions, il est logique deretrouver un bruit de tonalité grave compte tenu des répartitions fréquentielles sur lamembrane basilaire : il y a autant de cellules sensorielles dans la partie dédiée de 16Hz à1000 Hz, que de cellules dans la partie 1000 à 16000 Hz et la sonie (sensation) des sonsgraves est plus importante que celle des sons aigus.Enfin les bourdonnements peuvent être le fait d’une audition distordue avec une perteimportante de sensibilité sur les aigus. Dans cette situation, il s’agit de pseudoacouphènes : le sujet perçoit beaucoup mieux tous les sons graves que les sons aigus.– l’acouphène variable dans le temps.

Au delà de pointer sur une cause précise comme sur un dysfonctionnement variable dans le tempsde la périphérie (maladie de Ménière), la variabilité de l’acouphène le teinte d’une composante trèsgênante : celle de la non prédiction de la gêne d’un jour à l’autre. Le sujet s’interroge sans relâche surles corrélations possibles entre son mode de vie et l’acouphène. Pour ces cas, on peut sans doutepenser que l’habituation spontanée est plus délicate à obtenir :

– d’une part parce que le bruit est variable,– d’autre part parce que ces interrogations focalisent l’attention du sujet sur son

symptôme.Il y a lieu, après un bref tour d’horizon souvent improductif, l’aidant à établir des corrections (prised’excitants, comportements alimentaires…) de le dissuader dans cette recherche pour au moinséviter d’apporter autant d’introspection à son symptôme.Il est essentiel de garder en mémoire les causes / associations / circonstances de survenue,d’occurrence statistiquement faible. Les grandes causes ou mécanismes d’acouphène sontrapidement focalisées par la question suivante : « d’après vous, à quoi cet acouphène est dû ? » Elleéconomise un temps précieux ; Ainsi seront servis sur un « plateau » :

Les mécanismes « environnementaux » :● Le traumatisme sonore● L’ototoxicitéLes pathologies identifiées de l’oreille :● Maladies ou chirurgie

– voire les relations avec la vie psychiqueEn l’absence de cette aide précieuse, c’est au praticien de relancer les étiologies ou mécanismes ditssecondaires : sa réactivité, c’est-à-dire sa capacité à évoquer d’autres causes / circonstances /mécanismes, le place dans une position d’expert qui pèse lourd dans la relation médecin-malade.

Le tableau de la page suivante résume l’observation plus ou moins courante d’acouphènesdans différentes circonstances. Même si la preuve de la relation ne peut pas être apportée,même si l’action thérapeutique est limitée, il n’empêche, redisons-le, que cette enquêterassure le sujet, écartant par exemple le spectre de la tumeur ou de la maladie vasculairegénéralisée.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

1- Mais ceci nous renvoie aussi à l'étude de Lockwood présentée en page 49.

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Classification clinique relation acouphènes/ clinique mécanisme

Traumatismes sonores certaine mécanisme ciliaire, ototoxicité duneurotransmetteur

Otospongiose certaine au moins double: membranaire, cellulaire

Catarrhe tubaire, otite séreuse, labyrinthite probable modifications de la statique caténaire,passage transplatinaire

Suspicion de dysfonctionnement de l’ATM possible implication ligamentaire - spasmemusculaire

Traumatisme crânien certaine commotion labyrinthique, fuitepérilymphatique

Surdité brusque certaine non établi

Anomalies relevant de la médecine interne possible mécanisme inflammatoire, de surcharge,troubles de la coagulation

Mauvaise nouvelle, deuils possible non établi

Hypo- ou hypertension artérielle possible non établi

Oreille interne certaine découplage des cils de la membranetectoriale

Etiologie cervicale possible non établi

Acouphène postopératoire otologique fréquent non établi

Audition normale fréquente atteinte de sites post-synaptiques

Dépression possible non établi

Suspicion de fuite périlymphatique certaine non établi

Ototoxicité certaine non établi

Pathologie identifiée de l’oreille moyenne probable non établi

Acouphène en position couchée (sieste) probable non établi

Boucles V/VIII hypothétique non établi

Neurinome du VIII certaine non établi

Problèmes psychologiques en dehors de ladépression possible non établi

Syndrome d’apnée du sommeil SAS hypothétique non établi

Sténose du conduit externe, exostoses fréquente synalgies ?

Implication des muscles de l’oreille moyenne certaine myoclonies

Problèmes neurologiques complexes probable variés

Migraine probable vasoconstriction de l’oreille interne

En rapport avec le cycle hormonal possible non établi

Souffle carotidien perçu certain, acouphèneobjectif mécanique

Reflux gastro-oesophagien possible non établi

Hypertension intracrânienne possible non établi

Parmi ces causes dites mineures, arrêtons nous sur :- l’acouphène dit « de la sieste » : c’est l’acouphène parfaitement identifié par le sujet,survenant ou se renforçant après une sieste post-prandiale. Quel mécanisme imaginer dansce cas ? :

-un trouble vasculaire d’hypo ou hypertension,-un trouble cervico-céphalique,

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Tableau 1 : Classification des étiologies générales de l’acouphène.Dans ce tableau, les cases remplies sont moins nombreuses que les cases vides… Il faut aborder la classification par"groupe homogène d'acouphènes"...

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-une anomalie de la pression du liquide céphalo-rachidien,-un rôle de la digestion,…

Le débat reste ouvert avec des moyens d’analyse limités.- l’acouphène en relation avec une dysfonction de l’articulation temporo-mandibulaire(ATM).Pour certains auteurs, c’est LA cause principale (ou au moins fréquente) des acouphènes. Parraisonnement statistique, le dysfonctionnement de l’ATM après un certain âge étantfréquent, tout comme l’est l’acouphène, la relation de cause à effet s’établit spontanément.Sur le plan explicatif, on évoque les relations anatomiques musculo ligamentaires entrel’ATM et l’oreille moyenne.Au plan clinique, on constate :

- un acouphène plutôt unilatéral, plutôt de tonalité grave,- un syndrome qui nous focalise sur l’ATM avec :– douleurs, craquements, ressaut, sensibilité à la pression (doigts introduits dans le

conduit),– douleurs à la palpation des muscles régionaux péri-auriculaires,– trouble de l’articulé dentaire avec un plan d’occlusion anormal.

On rapporte des soins dentaires responsables potentiels d’une surélévation à un endroitquelconque des arcades dentaires.

– un bruxismeLa suspicion de cette cause doit orienter le sujet vers un occluso-dontiste qui prendra encharge le trouble par un réalignement des réparations, la mise en place d’une gouttière, lanuit.Malheureusement, les traitements classiques de « l’arthrose » (anti-inflammatoires etmyorelaxants) sont peu efficaces.

3.8 Apprécier la tolérance :

- en posant la bonne question,- en évaluant la relation entre stress et acouphènes.

3.8.1 Poser la bonne question : gêne ou inquiétude ?La réponse à la question : « ça vous inquiète ou ça vous gêne ? » oriente grandement la prise encharge.L’inquiétude : Pour un acouphène chronique, on l’a vu, le patient témoigne d’une certaine« sérénité somatique étiologique ». Son inquiétude résiduelle concerne l’évolution del’acouphène lorsqu’il a reçu des informations alarmistes1.La gêne est variable d’un sujet à l’autre : du sujet porteur d’un acouphène ancien qui consultepour savoir « s’il y a du neuf » en matière de médicament au patient hyperacousique dontl’acouphène obsédant induit des troubles du comportement, la majorité des patients qualifientl’acouphène « d’énervant ».Pour évaluer la tolérance, une question est utile : « finalement qu’est ce que cet acouphène vousempêche de faire ? ». Souvent, la réponse, après réflexion, est « rien ». C’est aussi sur cette base queva se construire le discours de la prise en charge.L’acouphène peut constituer une gêne quasi permanente, une véritable obsession, on l’a vu. Plusfréquemment il ne constitue une gêne qu’à certains moments (endormissement, bruit, silence)qu’il faut faire préciser.

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1- "L'acouphène rend fou", "mène au suicide"… ce genre d’informations se trouvent sur des sites Internet ou dans lediscours de certains confrères…

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« Considérez-vous que depuis sa survenue, l’acouphène est en aggravation, stable, en diminution » ?La réponse permet d’évaluer le début de l’habituation, les variations de la tolérance en fonction dela vie psychique. Bien sûr, ce n’est pas en une seule et unique consultation que le bilan exact de latolérance est fait.

L’évaluation du trait anxieux : Compte tenu du rôle manifeste de l’anxiété sur le retentissementde l’acouphène, il est utile de préciser les relations entre trait anxieux et acouphène.

3.8.2 Le stress, l’anxiété, l’acouphène et plus généralement les troublescochléo-vestibulaires

En pratique courante, l’ORL est plutôt intéressé par la pathologie de l’oreille et sa réparation quepar les maladies dites fonctionnelles, qui font souvent figure d’épouvantail.Pourtant ces pathologies renvoient le praticien à quelques questions centrales :L’environnement psychosocial, les événements de la vie, le stress interviennent-ils sur notresanté, en particulier sur « nos » symptômes cochléo-vestibulaires ?Au-delà d’une impression clinique, avec parfois (souvent ?) une personnalité particulière despatients atteints de maladie de Ménière, d’acouphènes… existe-t-il des données scientifiques ?Quels sont les mécanismes sous-jacents permettant de comprendre comment certaines situationsde la vie peuvent être un facteur de pathologie ou au moins de symptômes ?Quelles conclusions en tirer pour la prise en charge ?L’opinion publique et encore trop de médecins associent psychosomatique à simulation ou àpathologie psychiatrique. Alors que le symptôme est souvent le seul moyen qu’a trouvé unindividu pour s’exprimer.En simplifiant, on peut dire qu’à une structure mentale donnée correspondra un symptômedonné lors de l’émergence de la maladie :Un individu équilibré, face à une problématique difficile réagit par la recherche d’une solutionlogique et adaptée. Selon sa structure mentale, acquise au cours de son développement, le patientdans une même situation (angoisse, souci, deuil, conflit) réagit par un signe de la lignéenévrotique (anxiété, dépression réactionnelle) ou par un signe de la lignée psychotique(hallucination, délire).

3.8.2.1 Le statut particulier des symptômes cochléo-vestibulairesLes symptômes cochléo-vestibulaires relèvent des fonctions de relation.Surdité et hyperacousie, acouphènes, vertiges et instabilité sont des symptômes qui affectentle mode sensoriel de connaissance du monde extérieur.Le patient est à la fois le sujet, le seul observateur, la victime, et parfois, lorsque la pathologie luiapporte un bénéfice secondaire, le seul bénéficiaire.

3.8.2.2 Statut des symptômes : le handicap induitLes éléments fonctionnels de ces symptômes sont invalidants lorsqu’ils affectent l’aptitude àun mouvement harmonieux ou à une audition automatique, irrépressible et sans acouphène.Les éléments cognitifs de ces symptômes sont parfois difficilement objectivables, ainsi lesentiment de pénalisation qu’apporte le diagnostic. Le patient, surtout s’il est jeune, se sentatteint dans la perception de sa propre santé, dans son image de soi. Ces vertiges, cette surditéont mauvaise presse, ils sont associés au vieillissement et engendrent un sentiment d’injustice.Surtout lorsqu’ils sont inexpliqués, ils provoquent l’anxiété, la revendication, l’anticipationde leur apparition. Le patient entre dans un processus de deuil de sa santé. Très souvent, ils’isole et peut entrer en dépression.

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3.8.2.3 Exemple concret du statut des symptômes : la surditéDifférentes caractéristiques sont à prendre en compte dans « l’échelle » du handicap auditif :- L’atténuation ou diminution de l’audibilité des sons ;- Les distorsions non décrites par l’audiogramme tonal et mal par l’audiométrie vocaleclassique.

– Les distorsions dans le domaine temporel, les distorsions d’intensité qui induisentrecrutement et hyperacousie.

– Les distorsions de fréquence qui perturbent la compréhension de la parole dans dessituations plus ou moins bonnes au plan phonique.

La surdité, lorsqu’elle constitue un obstacle à la communication ou à l’hédonisme de l’audition, entraîne destroubles du comportement.L’imprévisibilité de la surdité fluctuante donne un sentiment d’impuissance vis-à-vis des actions deprévention.La mauvaise opinion qu’ont les patients des possibilités de réparation et en particulier des prothèsesauditives accentue encore le stigmate de vieillissement que représente la surdité.

3.8.2.4 Statut des symptômes: les acouphènesL’évaluation de la sévérité de l’acouphène ne peut être faite que par le patient, elle ne peut êtreque subjective. Elle est indépendante de ses caractéristiques physiques (psycho-acoustiques).Il n’y a pas de corrélation entre l’intensité de l’acouphène et sa sonie.Bien que la gêne résulte plus de la perte auditive, des difficultés à entendre et à écouter, les patientssurestiment très souvent l’impact de l’acouphène sur leur vie quotidienne. Et il est manifeste que lescirconstances dans lesquelles l’acouphène est apparu influent sur sa tolérance.

3.8.2.5 Statut des symptômes : les vertigesLes vertiges sont un phénomène conscient, la perte d’équilibre évoque l’ébriété.(Figure 25).La situation est le résultat d'un conflit. L'imprévisibilité de la survenue du vertige déclenche l'anxiétéau quotidien.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 25 - Schéma des vertiges.

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3.8.2.6 Les syndromes cochléo-vetibulairesIls conjuguent les conséquences et le retentissement des 3 symptômes : surdité, acouphènes,vertiges.

3.8.3 Qu’est-ce que le stress ?● Le stress en théorie :

Le stress (du latin "stringere" : mettre en tension ) est une réponse physiologique de l'organisme,face à une situation non programmée.L’ensemble des réactions ou syndrome d'adaptation est commun à tout facteur de sollicitation eten même temps propre à chaque individu. Chacun évalue la situation en fonction de laperception qu'il a d’un événement et de sa capacité à y faire face.

● Le stress n’est pas une notion récente :En 1884, Stiller observe des ulcères gastriques chez des financiers ruinés et, dès 1929 Cannondémontre la libération d'adrénaline par les médullosurrénales dans le stress. Il propose la mesureet la quantification des modifications hormonales, créant ainsi la biologie de laneuroendocrinologie.En 1936, Seyle décrit le « syndrome général d’adaptation » qui se déroule en 3 phases :

● La phase d'alarme,● La phase de résistance «fight or flight »,● La phase de détente et de fatigue avant le retour au métabolisme habituel

3.8.4 Mécanismes physiologiques du stressIl y a deux systèmes à la base de la réaction biologique du stress : un système neuronal câblé surlequel la transmission des informations est très rapide, et un système neuroendocrinienhormonal plus lent.A la phase d’alarme, le sujet mis en contact avec la situation stressante développe rapidement uneréaction de stress destinée à permettre une adaptation rapide à la demande soudaine del’environnement et une mobilisation rapide de ses ressources. La réaction biologique du stressfacilite l’action rapide, augmente la résistance physique.Si la situation de stress se prolonge, les réactions aiguës de la phase d’alarme deviennent inutiles.C’est la phase de résistance. Pour « se battre » ou pour « fuir », il faut « tenir la distance » enfonctionnant à l’économie. Les substances libérées pour l’endurance facilitent l’action musculaireet la vigilance (augmentation de la tension artérielle et redistribution sanguine).Dans la plupart des situations modernes le « fight or flight » est impossible.Pour le citadin par exemple les réactions musculaires sont normalement inutiles pour répondreau stress.Si la phase de détente ne survient pas, le stress prolongé a des effets toxiques qui vont de la fatiguechronique aux lésions de l’hippocampe, siège de la mémoire et de la régulation des émotions(stress post-traumatique, cellule de déchoquage).

3.8.5 La dénomination du stress est ambiguëLe mot stress qu’on utilise au quotidien dénomme en fait le stress chronique, mais aussi :

- les causes de stress ou stresseurs,- les réactions au stress,- les conséquences du stress.

3.8.5.1 Le stress chroniqueC’est le stress chronique qui est essentiellement pathogène. Tous les mécanismes du stress(stimulation et hormones) peuvent avoir des actions somatiques.La liste des affections autres que cochléo-vestibulaires pour lesquelles la relation au stress aété établie est longue :

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● Accélération du vieillissement, déficit nutritionnel, déficit immunitaire, ulcèresd'estomac, problèmes gynécologiques, problèmes de santé mentale.

● Asthme, psoriasis, arthrite rhumatoïde, syndrome de fatigue chronique, maladie deCrohn, fibromyalgie, migraine, colite ulcéreuse.

● Aggravation de l’hypertension, des maladies cardiovasculaires, du diabète de type II.Comment imaginer que l’oreille interne n’y soit pas également sensible alors que :

● Les patients décrivent des acouphènes qui augmentent avec le stress.● L’augmentation du tonus sympathique dans la maladie de Ménière a été évoquée dès

le début des années 1950.Les données montrent que l’oreille interne est exposée et très sensible au tonus sympathiqueet à l’activité neuro-endocrine.La relation entre stress et immunité pourrait expliquer certaines surdités brusques.

3.8.5.2 Action - RéactionLes sites d’action des médiateurs :Des signaux émotionnels activent des sites, un peu à l’image de l’antigène (le signal) et del’anticorps (la réponse émotionnelle).L’amygdale constitue une interface importante entre les stimuli émotionnels visuels etauditifs et le déclenchement des émotions.Les stimuli émotionnellement compétents se détectent très vite avant même l’attentionsélective. Les voies sont parallèles.L’ORL s’intéressera surtout aux connexions entre le thalamus et l’amygdale.

3.8.5.3 Retour sur quelques définitions

3.8.5.4 Le bon et le mauvais stress :L’anxiété nous pousse en avant, nouspermet de faire plus, multiplie noscapacités par la mobilisation de nosressources. Elle nous donne l’énergienécessaire à la vie, de même queressentir des émotions est normal et nécessaire.Mais c’est une énergie à maîtriser.Lorsque les stresseurs sont importants et répétés, leur succession entraîne l’anxiété puis ladépression. (le burn-out anglo-saxon).

3.8.5.5 Les stresseursLes évènements de la vie, gais ou tristes, importants ou apparemment minimes et leschangements matériels ou affectifs qu’ils entraînent sont des stresseurs.Le décès d’un proche, un divorce, la perte d’emploi, mais aussi une naissance, undéménagement sont des stresseurs connus. A titre d’exemple, sur l’échelle de mesure dustress de Holmes et Rahe la mort d’un conjoint est cotée 100, un mariage 50 et le fait d’avoirune amende ou une contravention est côté 11.La frustration est un puissant stresseur :L’environnement pénible, les « tracas »quotidiens prennent de plus en plusd’importance.

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Le stress n’est pas une maladie, alors que l’anxiétéet la dépression sont des pathologies.Si les signes dont on se plaint n’existent qu’enprésence du stresseur, il s’agit de stress.Si les symptômes persistent au-delà de la présencedu stresseur, il s’agit d’anxiété.Le stressé et l’anxieux sont réactifs, le déprimé estmoins capable d’action.

Cet effet cumulatif mène parfois àl’embrasement : on développe alors desréactions de plus en plus violentes auxstresseurs de moins en moins importants.

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3.8.5.6 Conséquences psychologiques et comportementales de la réaction de stressLe stress provoque des réactions biologiques du stress mais aussi bien sûr des réactionspsychologiques. Le sujet stressé va sélectionner les signaux de menace contrairement auxsignaux de sécurité auxquels il ne va pas s’attarder.Il développe une sensibilité accrue à la menace : on devient plus sensible à tout ce qui peutêtre une menace potentielle. Plus le niveau de stress est élevé plus on est sensible aux signauxde danger.

3.8.6 Le stress déclenche le symptôme :

◆ Relation 1 : Le stress est responsable du symptôme acouphène :Le symptôme n’est idiopathique qu’en apparence.

Hypothèses neurophysiologiques :L’oreille interne normale est soumise et très réceptive au niveau d’activité du systèmesympathique et de l’activité neuro-endocrine.Une communication bidirectionnelle existe entre le système neuroendocrinien et le systèmeimmunitaire (comme l’a montré K.C. Horner), ce qui fournit une explication aux surditésbrusques.

◆ Relation 2 : Le symptôme acouphène est responsable du stress…L’acouphène et le stress

3.8.6.1 Anticipation

Ainsi, un patient qui craint la reprise de vertiges adopte souvent une manière de marcherelle-même génératrice d’instabilité.La peur d’un renforcement de l’acouphène augmente l’attention portée à son apparition.La peur des circonstances favorisantes conduit à des conduites d’évitement, et parfois àl’installation d’une névrose d’angoisse. Les accidents névrotiques sont constitués par lesmanifestations d’une angoisse permanente où le sujet est dans l’attente d’un danger.Pour certains patients, la peur du retour de l’acouphène est accompagnée d’une peur de pertede contrôle de la raison, d’être conduits au suicide.

3.8.6.2 Acouphènes et conditionnementLa détection de l’acouphène implique l’extraction du signal hors du bruit de fond.Il est ensuite évalué et catégorisé : à ce signal sont associées des traces mnésiques, des aspectspsychoacoustiques et des caractéristiques contextuelles d’apparition.Si le signal est nouveau et/ou permanent et/ou alarmant (déclenchant une émotion), il estresponsable de remaniements plastiques et de modifications dans le traitement du signalauditif : augmentation du gain, augmentation de la probabilité de sa détection.Le défaut d’habituation et la non-tolérance amènent au conditionnement :

– Initialement, le signal acouphène est neutre, non pertinent. Mais il est conditionnépar des réactions aversives (anxiété, peur, incompréhension, croyances…)

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Le phénomène de l’anticipation du symptôme est bien illustré par la parabole de lanuit passée dans une vieille maison inconnue. Si la maison vous a été décrite commeun havre de paix, vous apprécierez même les petits craquements du parquet et vousirez sans hésitation refermer le volet qui bat. Si la maison est réputée hantée, vousresterez en alerte, à guetter le moindre bruit. Lorsqu’il se produira, qui sait si vousne paniquerez pas ?

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– Le conditionnement associé à la présentation d’un signal neutre conduit àl’intolérance.

3.9 La pratique des relations médecin/malade

Devant une pathologie fonctionnelle, il est important de ne pas passer à côté d’une pathologiesomatique rare ou atypique. Mais il ne faut pas non plus accroître l’anxiété du patient en multipliantles examens.

Il faut garder à l’idée que les symptômes cochléovestibulaires peuvent signer un troublepsychiatrique.Quoiqu’il en soit, il est important d’écouter le patient, d’entendre sa vérité.

◆ La double évaluation :Afin de pouvoir mettre une thérapeutique en route, il importe de faire un bilan avec le patient. Ilfaut :

– Évaluer le stresseur, décrire et mesurer la menace qu’il représente.– Évaluer ses capacités à faire face, répertorier de quels moyens dispose l’individu pour

affronter correctement le stresseur.A aucun moment, le thérapeute ne peut « lâcher » le patient en lui conseillant de « vivre avec » !Dans cette évaluation, si le stresseur du symptôme cochléo-vestibulaire est facile à évaluer, lacapacité et les moyens d’y faire face sont plus limités.

◆ Psychopathologie et symptômes somatiques :La somatisation peut être un mode de défense psychologique, pour celui qui ne peut exprimer pardes mots.La somatisation peut être une amplification de la détresse pour un appel (inconscient) à l’aide.La somatisation peut être une demande (inconsciente) de soin, de maternage.La somatisation peut être une conséquence du recours au système de santé. Pour rendre sademande d’aide acceptable, le sujet la « médicalise ».

3.10 Evaluer la personnalité du sujet

Pourquoi certains patients arrivent-ils en quelques mois à gérer leur acouphène sans trop dedifficulté tandis que d’autres n’y arrivent pas en dépit des années qui passent? Les professionnels del’acouphène s’interrogent depuis longtemps sur ce point. Si l’on pouvait y répondre avec certitude,les sujets réfractaires à l’habituation pourraient être identifiés précocement et soumis à unprotocole adapté.

◆ L’acouphène survient-il sur une personnalité particulière ?

Une hypothèse testée est celle d’un profil de personnalité particulier prédisposant à l’acouphène.Cependant, rares sont les études qui ont utilisé des outils adaptés pour aboutir à un réel diagnosticpsychiatrique. La plupart sont fondées sur des questionnaires ou des impressions cliniques plus quesur des interviews psychiatriques structurées ou des outils adoptant les critères du DSM (AmericanPsychiatric Association). Ainsi, peu de travaux apportent vraiment des arguments sérieux quant àl’existence de désordres psychiatriques chez les acouphéniques. De plus, ceux qui sont disponiblesne concernent que de petites populations de patients dont la sélection non randomisée est biaisée.Selon ces études, toutes réalisées à l’étranger, 60 à 78% des sujets ont présenté des troublesdépressifs au cours de leur vie et 40% à 60% traversent un épisode dépressif au moment del’examen. La prévalence des troubles anxieux est aussi importante, voisine de 45%, mais il est ànoter que la majorité (69%) de ces sujets anxieux présentent une comorbidité de dépression. Lesfigures ci-jointes dues à Goebel (1998) illustrent bien ces différentes observations.

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Quoique les troubles psychiatriques comme la dépression et l’anxiété soient fréquemment trouvéschez les acouphéniques, d’autres affections peuvent aussi être observées : trouble obsessionnelcompulsif, addictions diverses…

Le fait que beaucoup de sujets porteurs d’acouphènes présentent des perturbations psychiatriquesconstitue une observation importante ; cependant, il reste à préciser le lien temporel entrel’apparition de l’acouphène et celle de ces troubles : préexistent-ils ou non à l’acouphène ?

◆ L’acouphène, peut-il modifier la personnalité ?Une étude réalisée dans une clinique spécialisée des environs de Munich montre que les patientshospitalisés pour troubles psychiatriques associés à leurs acouphènes avaient le plus souvent déjàmanifesté des désordres psychiatriques avant l’hospitalisation et que, dans ce cas, il s’agissaitsouvent d’un trouble dépressif sérieux en association avec d’autres psychopathologies.

La personnalité des patients pourrait donc influer sur leur comportement face à l’acouphène. Lesrésultats d’autres études concordent avec cette vue. Ainsi, les patients qui présentent un risque élevéde développer un acouphène sévère et chronique sont aussi ceux pour lesquels existe un plus fort

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Figure 26 - (d’après G. Goebel, 1998) : Schéma illustrant la prévalence des affections psychiatriques(DSMIII-R, selon le Munich Diagnostic CheckLists) chez les patients présentant un acouphène chroniqueinvalidant.

Figure 27 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la comorbidité de troubles psychologiques chezles patients présentant un acouphène chronique invalidant.

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danger de désordres dépressifs et/ou anxieux ; de même, les patients présentant des acouphènessans éprouver le besoin de consulter, présentent des profils de personnalité moins pathologiquesque ceux qui ont consulté.

Un travail récent concerne un échantillon de patients vus et suivis en TCC à Paris en consultationlibérale et hospitalière en 2002 dont le recrutement « tout-venant » échappe à la sélectionrencontrée dans les pays où la prise en charge est plus développée. La majorité de ces sujets neprésentait pas de symptomatologie dépressive (54%) mais manifestait cependant un niveau avéré desymptomatologie anxieuse (62,1%).

L'intervalle des notes possibles s'étend pour chaque échelle HAD (Anxiété et Dépression) de 0 à 21,les scores les plus élevés correspondant à la présence d'une symptomatologie plus sévère.

Pour chaque sous-échelle, des notes seuils ont été déterminées avec les valeurs suivantes :- score =11 = trouble avéré.

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Figure 28 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la comorbidité de troubles psychologiques chezles patients présentant un acouphène chronique invalidant.

Figure 29 - (d’après G. Goebel, 1998): Schéma illustrant la différenciation entre les désordrespsychiatriques pré-existants et subséquents chez les patients présentant un acouphène chroniqueinvalidant.

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- 8 < score > 10 = situation douteuse.- score < 8 = situation normale.

Par ailleurs, plus le score de sévérité de l’acouphène était élevé et plus la symptomatologiedépressive (cf. Figure 30) était marquée. Le même lien avec la sévérité de l’acouphène est observépour les symptômes anxieux, mais de manière encore plus évidente (cf. Figure 31).

De plus, la sévérité de l’acouphène est sans effet sur le score de dépression chez les sujets présentantun niveau normal ou modéré d’anxiété ; en revanche, chez les patients au profil "anxieux avéré", lecaractère sévère de l’acouphène aggrave les symptômes dépressifs (cf. Figure 32).

Ainsi, la symptomatologie anxieuse pourrait agir en médiateur entre la sévérité de l’acouphène et lasymptomatologie dépressive. La dépression s’amorceraitdès qu’un certain niveau d’anxiété (et non pas de sévéritéde l’acouphène) est atteint. En définitive, les patientspour lesquels l’impact psychologique de l’acouphène estimportant seraient donc des "anxieux" qui "dépriment" sila sévérité de l’acouphène augmente.

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Figure 30 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelle deDépression (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène (note sur 16).

Figure 31 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelled'Anxiété (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène (note sur 16).

La sévérité de l’acouphène seraitresponsable de troubles anxieux,lesquels, à leur tour, induiraient dessymptômes dépressifs. La dépressionapparaît alors comme « consécutive »au développement de l’anxiété.

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Cette observation montre tout l’intérêt d’intégrer la dimension anxieuse dans la prise en chargethérapeutique.

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Figure 32 - (D’après Peignard et Chevrolat, 2003) : Evolution des moyennes des scores à l'échelle dedépression (note sur 21) en fonction du degré de sévérité de l’acouphène et du profil anxieux selonl'échelle d'anxiété.

Quand adresser un patient à un psychiatre ?

Compte tenu de la fréquence des troubles anxieux ou dépressifs chez lespatients porteurs d'acouphène, il faut adopter une stratégie de dépistage et deprise en charge de ces situations.

Lors de la première consultation il est déjà indispensable d'avoir une démarcheadaptée : c'est ici que l'intérêt des questionnaires semi-quantitatifs et spécialisésest particulièrement évident. En effet la probabilité de sous-évaluer la présenced'un trouble psychologique est très élevée, le spécialiste ORL n’ayant pas, dansla très grande majorité des cas, une formation suffisante sur le plan technique.

Il faut donc, après l'évaluation organicienne initiale, rechercher des facteurs derisque de présence ou de développement d’une pathologie psychologique :L’histoire naturelle de l’acouphène (accident du travail, traumatisme physique oupsychique).Son caractère invalidant ou pas.Un score élevé aux questionnaires spécialisés.L’expression de pensées particulièrement négatives en ce qui concerne lescauses, l’évolution, le pronostic de l’acouphène.La situation sociale et/ou personnelle du patient (isolement, décès, divorce,chômage).L’incompréhension de l’entourage, une hyperacousie.Une prise en charge psychologique antérieure.De nombreuses tentatives thérapeutiques inefficaces.

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3.11 Cas particuliers

◆ Acouphènes chez les enfants.◆ Acouphènes récents, de moins de 6 mois.

3.11.1 Une forme particulière : l’acouphène chez les enfantsOutre le fait maintenant bien établi de la sous-évaluation de cette pathologie chez l'enfant, ilsemble indispensable d'individualiser plusieurs problèmes :

– la plupart des enfants ne signalent pas spontanément l'existence d'un acouphène,– la perception d'un tel symptôme est tout à fait différente de celle que l'on retrouve

chez les adultes,– la prévention tient ici une place prédominante,– la prise en charge thérapeutique n'inclut qu'exceptionnellement des médicaments et

se fonde essentiellement sur des techniques de relaxation et/ou instrumentales.Un acouphène est un symptôme fréquent chez les enfants soit dans le cadre de pathologiesinflammatoires dont l'exemple le plus banal est l'otite séro muqueuse, soit de façon spontanée. Ilsemble ainsi que l'on puisse retrouver plus de 10 % d'une population d'enfants scolarisés porteursd'acouphène.Lorsqu'il existe une atteinte neuro sensorielle, le pourcentage peut atteindre 60 %.Parmi l'ensemble de ces enfants, un très petit nombre, évaluable à moins de 5 %, se plaintspontanément. De nombreuses explications ont été avancées afin de comprendre cettesous-évaluation. Outre la plasticité propre à cet âge, il semble que la non prise en compte de laplainte de l'enfant soit un élément important. Enfin il est bien classique de retenir lecomportement de l'enfant qui tente de faire plaisir aux adultes de son environnement. Lequestionnement devrait donc être indirect. On peut également tenter de sélectionner lesréponses en demandant aux enfants de répondre à des questionnements très pratiques et de neretenir que ceux qui répondent correctement. Avec cette technique, on retrouve environ 10 %d'enfants ayant expérimenté la perception d'un acouphène alors que leur audition est strictementnormale.Il faut noter que chez les enfants, contrairement aux adultes, autant de garçons que de filles sontatteints.La présence d'un acouphène peut entraîner des difficultés de concentration, des problèmes decomportement et éventuellement des troubles d'acquisitions scolaires.La difficulté est actuellement d'établir des facteurs pronostiques de sévérité dans cette populationpédiatrique, les questionnaires étant d’une aide inconstante.Les traumatismes crâniens semblent jouer également un rôle important dans la genèse de cesacouphènes ; les enfants étant particulièrement exposés à ces accidents, ces acouphènespost-traumatiques étant susceptibles d'une rapide évolution favorable, on comprend toutel'attention qui doit être portée à ces traumatismes.Compte tenu de la fréquence de ce symptôme, il apparaît indispensable de le rechercher lorsqueles circonstances s'y prêtent : antécédents de pathologie otologique, de traumatismes crâniens,troubles comportementaux, difficultés scolaires.Il peut être demandé à l'enfant de décrire son bruit s’il le peut (et alors, le vocabulaire utilisé estbien différent de celui des adultes, faisant appel à son expérience sonore : monstre hurlant,voiture vrombissante) ; un examen otologique avec test d'audition doit être réalisé. L'utilisationdes questionnaires standardisés employés chez l'adulte est ici impossible dans de bonnesconditions de fiabilité. Il n'en reste pas moins qu'une appréciation du degré de gêne est possible ententant de ne pas suggérer les réponses à l'enfant.Comme chez l'adulte, les enfants peuvent signaler l'existence d'instabilité, de céphalées, dedifficultés d'endormissement, de concentration, de stress ou de fatigue.

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Certains soulignent la gêne à l'audition en particulier dans le bruit, (écoute en classe, télévision),et ceci, contrairement à ce qui se passe chez les adultes, essentiellement parmi les enfants àaudition normale.L'évaluation faite, il est indispensable de rassurer les parents qui pourraient, par leur anxiété,aggraver la situation de l'enfant. Ce point doit être souligné tout particulièrement compte tenu ducaractère extrêmement agressif de la boucle anxiété des parents-réponses des enfants.Du point de vue thérapeutique, il faut clairement différencier les enfants à audition normale, lesenfants atteints de pathologie inflammatoire transitoire, les enfants atteints de surdité neurosensorielle moyenne ou profonde.Dans le premier cas, l'information est essentielle pour éviter la spirale traditionnelle aboutissant àune augmentation continuelle du caractère agressif du signal à la fois en raison de l’ anxiété desparents et de la gêne de l'enfant. La place des médicaments est pratiquement nulle ; certainsenfants nécessiteront l'emploi de techniques de relaxation voire de techniques instrumentalescomme les oreillers sonores lorsqu'ils ont des difficultés à s'endormir.Il faut insister tout particulièrement sur les troubles comportementaux en classe : certains enfantsvont avoir un comportement agressif, d'autres ne pas supporter le silence d'une classe lors d'unexamen, d'autres enfin fuir les cours de récréation très bruyantes. Bien faire préciser tous ceséléments par les parents et le relayer auprès des enseignants est un élément très important de laprise en charge de ces acouphènes avec ou sans hyperacousie.Enfin nombre d'enfants dans ce groupe a déjà largement mis en place sa propre stratégied'habituation. Il est du plus haut intérêt de le faire préciser afin de l’orienter dans la bonnedirection.La situation des enfants porteurs de pathologie inflammatoire est bien différente puisque, endehors de ceux qui développent une labyrinthite séreuse non réversible, ils voient leur acouphènedisparaître lorsque l'oreille moyenne redevient normale.Le traitement de l'acouphène est donc celui de l’inflammation.En ce qui concerne les enfants porteurs de surdité neuro sensorielle, le traitement reposeessentiellement sur l'appareillage. Cependant, comme chez l’adulte, il faudra être très prudentlorsqu'il existe une hyperacousie.Celle-ci doit être traitée dans les mêmes conditions avant d'envisager la prise en charge de labaisse d'audition.A part la situation des cophoses avec implant cochléaire ; on connaît la réponse en généralfavorable sur l’acouphène lorsqu’il est présent (environ 75% des cas).En conclusion, il semble que la présence d'un acouphène dans la population pédiatrique estfréquente et qu'il est indispensable de prendre en compte avec beaucoup d'attention la plaintespontanée et/ou indirectement provoquée. Les causes des symptômes et l'environnement généralauditif, sont peu différents de ce que l'on observe chez l'adulte. L’expression, le contexte et la priseen charge sont cependant sensiblement différents.

3.11.2 Une indication particulière : L’acouphène récentSon caractère récent, on l’a dit, ne le soumet pas à la lutte contre les préjugés d’inactivitéthérapeutique.S’il est de survenue brusque, la correction peut être simple en cas d’otite, de bouchon decérumen…le diagnostic est simple aussi en cas de surdité brusque.L’acouphène après la récupération auditive peut constituer la séquelle. L’acouphène peut aussiaggraver la situation si la surdité ne récupère pas. Le tableau est celui d’une oreille à la foisinefficace et gênante. Les surdités sévères ou profondes peuvent empêcher un masquage sonoreconventionnel.En cas de traumatisme sonore récent, le traitement est urgent. On respecte l’étape initiale deparcours de deuil de l’audition normale. Ce n’est pas le temps de l’explication de l’habituation.

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3.12 La prise en charge

- Nous ne traiterons que du cas majoritaire : l’acouphène chronique, maladie.Après les généralités seront abordés :

◆ Panorama de la prise en charge de l’acouphène◆ La thérapie cognitive et comportementale◆ La prise en charge audioprothétiqueNous terminerons sur le rôle central que joue l’information.

3.12.1 Généralités

3.12.1.1 Qui a des acouphènes ? Approche épidémiologiqueIl apparaît très naturel de tenter de définir dans un premier temps la population des patientsporteurs d'acouphènes par une simple réponse positive à la question « avez-vous un acouphène » ?Or depuis une fameuse expérience réalisée par Heller et Bergman en 1953, on serait tenté derépondre plutôt à la question « quand ne perçoit-on pas d'acouphènes » ?Ces auteurs, bénéficiant des avancées technologiques de leur époque (construction d'unechambre anéchoïque), on pu constater que plus de 90 % d'adultes jeunes sans aucun antécédentORL personnel ou familial perçoivent un acouphène en général aigu lorsqu'ils sont mis dans unetelle cabine.La question se complique encore un peu si l’on fait intervenir un autre paramètre qui est celui dela représentation de l'acouphène dans une population donnée. En effet, collectivement, l'impactde la perception d'un acouphène n'est pas le même selon les pays et à l'intérieur des pays selon lesstrates sociales, et les moments historiques. (Un acouphène n'a probablement pas la même valeurpour un soldat de la Grande guerre, un chanteur d'opéra contemporain ou un paysan irakien).Il est donc difficile de comparer les études publiées sur ce sujet.En se rapportant aux différentes enquêtes réalisées en Europe occidentale, on peut considérer que10 % de la population adulte perçoivent un acouphène considéré comme non agressif. Environ5 % ont un acouphène gênant tandis que dans 0,5 % des cas, il ne permet pas une vie normale..En rapportant ces pourcentages à la population française on peut considérer que 2,4 millions depersonnes se considèrent comme handicapées, 300 000 très perturbées dans leur vie et qu'il y aenviron 170 000 nouveaux cas chaque année.Les connaissances en matière épidémiologique sont faibles en France et en particulier en ce quiconcerne le lien entre mode d'existence, environnement sonore, prévalence de l'acouphène. Uneenquête anglaise montre cependant l'augmentation du facteur de risque de présence d'unacouphène chez des sujets de plus de 40 ans vivant dans un environnement sonore.À côté de ces données chiffrées, concernant la prévalence de ce symptôme, il semble queglobalement toutes les enquêtes menées sur ce sujet donnent les mêmes résultats : la prévalenceaugmente chez les patients âgés de plus de 50 ans avec une décroissance au-delà de 70,globalement une absence de prépondérance chez les hommes (on pouvait cependant s'y attendrecompte tenu de l'exposition plus fréquente aux bruits intenses), la surreprésentation de l’atteintegauche, la très forte prédominance de perception de bruits aigus (plus de 80 % au-dessus de1000 Hz), la faible intensité subjectivement mesurée (plus de 80 % en dessous de 5 dB au-dessusdu seuil à l'équivalence de fréquence mesurée), l'absence de lien entre cette intensité subjective etle caractère agressif du signal, la présence dans plus de 90 % d'une surdité neuro sensorielleassociée. Inversement, on montre une forte corrélation entre la présence d'un acouphène et leniveau d'audition (dans une série de patients de 60 ans en moyenne, ayant une courbe typique desujets ayant été exposés aux bruits forts, 50 % d'entre eux présentent un acouphène).Contrairement à une idée reçue, le profil psychologique des patients atteints d’acouphène est toutà fait comparable à celui de la population témoin. Néanmoins la souffrance induite par laprésence d’un acouphène induit fréquemment des troubles comportementaux (céphalées, stress,absence d'humour, irritabilité).

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3.12.1.2 Richesse épidémiologique - Rareté des consultantsLes grandes enquêtes internationales montrent toutes, à la fois la grande fréquence del'acouphène comme symptôme et, finalement, la rareté (entre 5 et 10 % des sujetsexpérimentant un acouphène), des patients qui consultent pour cette pathologie.On peut donc se poser la question de savoir pourquoi ces patients perçoivent leur acouphènecomme agressif et ne parviennent pas à induire l’habituation, ce phénomène del'automatisation de perception de signal.Il est en effet évident à la fois dans la pratique médicale quotidienne et simplement dans la viecourante que le cerveau multiplie ses automatisations de perception de signal qui peuventd'ailleurs s'intégrer dans le cadre plus général de l'apprentissage ou de la déconstruction. Onpeut donc, dans la mesure où ces modes opératoires sont naturellement automatiques (il n'y apas de pilule magique pour apprendre l'anglais ou le violon), penser que ces patients fontquelque chose qui bloque le processus d’automatisation. Inversement, la grande masse dessujets ayant une surdité neuro-sensorielle, même importante, ou ceux qui, un jour ou l'autre,expérimentent un acouphène, précisément ne font rien qui pourrait entraver le processus.Il en résulte un certain nombre d'objectifs qui doivent être clairement précisés au patient.Lorsqu'il est vu pour la première fois, son objectif unique est de voir son acouphènedisparaître. Il n'a naturellement pas la notion du fait qu’un groupe beaucoup plus importantque le sien perçoit également un acouphène mais qu'il ne lui viendrait pas à l'esprit deconsulter pour le traiter. L'objectif de rentrer dans ce vaste groupe de sujets « acouphéniquessans le savoir » ne peut être présenté en général d'emblée. C'est pourtant ce vers quoi il faudras'efforcer d'aller.

3.12.1.3 En pratique comment structurer la prise en charge des patients et organiser enparticulier la première consultation ?

Très concrètement, il faut d'abord que le praticien décide, au niveau de son secrétariat, defiltrer ou non les appels ; en effet, cette première consultation peut être très difficilementmenée en 10 minutes ou 15 minutes faute de quoi la crédibilité du médecin est fortementécornée. Il n'y a donc que trois solutions :

– réserver des plages horaires pour ce type de première consultation,– prévoir systématiquement 30 à 40 minutes au moment de la prise de rendez-vous,– accepter de prendre 15 à 20 minutes de retard à chaque fois que ce type de patient se

présente.L'accueil du patient passe nécessairement par l’ écoute de sa plainte qui doit cependant rester« productive ». Il n’est, en effet, pas rentable de laisser le patient parler sans retenue nicontrôle. On ne perd pas de vue que l'objectif est la prise en charge d'un symptôme le plussouvent isolé et qui induit essentiellement un problème de tolérance.Lors de cette première consultation il est indispensable d'obtenir deux résultats :

– le patient est écouté dans sa souffrance,– le patient réalise la compétence du médecin.

L'évaluation du système auditif et la recherche d'une étiologie vraisemblable ne doit pasoccuper l'essentiel de cette première consultation, ce d'autant que fréquemment, les patientsarrivent avec un dossier déjà fort complet.Il est d'ailleurs frappant de constater que nombre d'entre eux ont bénéficié de nombreuxexamens audiométriques mais qu'aucune démarche n'a été effectuée pour évaluerl'acouphène et son retentissement.Il faudra donc se focaliser sur celui-ci.Il nous paraît peu productif de laisser trop longtemps le patient décrire « son bruit » sans êtreguidé. À ce sujet de nombreux questionnaires ont été validés en français, qui permettent uneévaluation satisfaisante de l'impact de l'acouphène dans la vie des gens, à la fois sur le plan

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général et dans des domaines plus spécialisés. Un certain nombre d'entre eux sont présentésen annexe.Globalement, la justification de l'utilisation de ces questionnaires ne pose pas de difficultésmajeures dans la relation que le médecin O.R.L. a avec son patient. Celui-ci, d'ailleurs,apprécie le plus souvent la démarche qui consiste enfin à s'intéresser à son acouphène. Il va desoi que ces questionnaires doivent être expliqués et non distribués sans un mot par lasecrétaire.Le praticien doit organiser sa consultation autour d'une routine (ces questionnaires doiventêtre remplis toujours dans les mêmes conditions opératoires (à domicile, dans la salle deconsultation, devant le médecin etc.).Cette procédure permet de rendre raisonnable cette première consultation et, en particulier,de ne rien dire des mécanismes en jeu. Il est en effet indispensable que le patient ne répondepas aux questions au travers du filtre d'un mini-cours délivré lors de cette premièreconsultation.

Dès lors, apparaissent plusieurs groupes qui s'agrègent selon l'état auditif, la réalité del'acouphène et de sa tolérance.Schématiquement on peut retrouver les patients à audition « normale », ceux dont l'atteinteauditive est objectivement évidente mais qui ne nécessiteront pas de traitement spécifique decette hypoacousie, enfin ceux qui, plus ou moins spontanément, disent combien leurhypoacousie est gênante.Deux groupes très importants sont formés : des patients porteurs ou non d’hyperacousie. Iln'y a pas de recouvrement entre les groupes selon le niveau d'audition et la présence ou nond'hyperacousie.Pour ce qui concerne l'acouphène, on discriminera les patients selon le mode de survenue eninsistant particulièrement sur les modes agressifs (accident, explosion, chirurgie, traitementdivers ou anesthésie, que le patient à tort ou à raison incrimine dans la genèse de sonacouphène).Les questionnaires ont un rôle majeur, permettant d'obtenir une évaluation assez précise etfidèle du retentissement de l'acouphène dans la vie réelle des patients. Il faut particulièrementpasser du temps pour expliquer l'importance de ceux-ci et surtout éviter le piège de laphotographie décalée ; fréquemment les patients se focalisent sur une période évolutive deleur acouphène qui n'est pas forcément celle qui nous intéresse. Il faut donc bien fairecomprendre au patient que l'objectif est d'avoir une vision dynamique de sa situation.L'analyse comparée de ces différents questionnaires permet d'ailleurs assez souvent de faireapparaître des contradictions, souvent liées précisément au fait que le patient n'applique pas lamême grille de lecture temporelle pour répondre à chaque questionnaire ; pour lequestionnaire hyperacousie, il répondra sur une situation actuelle alors que le questionnaired'agressivité de l'acouphène sera « daté » de six mois.Enfin un élément tout à fait majeur est le dépistage d'une situation psychologique difficile, àla fois pour le patient et pour l'O.R.L. a priori peu familier de ces problèmes. Une étude déjàancienne a montré qu’une équipe d'O.R.L. seniors rompus à la prise en charge de patientsporteurs d'acouphène « ratent » 25 % des diagnostics d'anomalie psychiatrique et, qui plus est,chez des patients systématiquement revus ensuite par un psychiatre. Ceci pose naturellementla question de la compétence immédiate et médiate. Inversement faut-il que tout patientporteur d'acouphène réputé invalidant soit vu par un psychiatre préalablement à toute priseen charge thérapeutique ? Heureusement la réponse est négative ; il faut se rappeler que leprofil psychiatrique des patients porteurs d'acouphène est en gros le même que celui de lapopulation générale. Par ailleurs l’utilisation de ces questionnaires précis permet la plupartdu temps de repérer les patients pour lesquels un tel questionnement sera indispensable.

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Il en résulte ainsi, d'une façon à peine schématique, 2 grands groupes de patients : ceux quipourront être pris en charge entièrement par l'O.R.L. consultant etceux qui nécessiteront une approche multidisciplinaire, nécessitantla constitution d'un réseau. Ce réseau doit comprendre auminimum un audio-prothésiste « motivé», un neurologue, unpsychiatre et/ou un comportementaliste, un cardiologue et un neuro-radiologue. Commedans n'importe quel réseau il est indispensable de connaître la motivation de chacun et unminimum de ce que les autres intervenants peuvent apporter à l'O.R.L..Pourront être exclus de ce réseau les patients essentiellement motivés par une réassurance etqui représentent entre 15 et 20 % des consultants ; de même un certain nombre de patientsqui consultent en urgence ou semi urgence après la survenue de leur acouphène, pourrontêtre, quel que soit leur niveau auditif, pris en charge individuellement par l'O.R.L.Les autres patients devront d'une façon ou d'une autre être adressés à l'un ou l'autre desmembres de ce réseau, d'où l'importance de la constitution de ce réseau.On voit bien qu'un certain nombre de patients seront d'emblée inclus dans le réseau (dans lecadre d'une recherche étiologique (acouphènes pulsatiles, signes neurologiques associés,antécédents pathologiques connus, troubles cardio-vasculaires ou métaboliques non traités),ou dans le cadre thérapeutique). Il est en effet illusoire de vouloir gérer seul un patientmanifestement dépressif, qui présente une importante baisse d'audition, ou qui a déjà« bénéficié » de très nombreux traitements médicamenteux sans résultat appréciable.Il n'en reste pas moins que le degré de liberté de l'O.R.L. est naturellement, comme danstoute pathologie, très lié à son niveau de compétence et un certain nombre d'O.R.L.expérimentés n’hésitent pas, par exemple, à utiliser des antidépresseurs.Quelle que soit la situation des patients (traités exclusivement par l'O.R.L. ou intégrés dans lecadre d'un réseau) il est absolument indispensable que ceux-ci adhèrent au projetthérapeutique. Contrairement à beaucoup d'autres pathologies de notre spécialité pourlesquelles l'environnement social du patient n'intervient pas (en général les familles, lesvoisins, n'ont pas beaucoup d'opinion sur la décision d'opérer ou d'irradier une amygdale) , laprésence d'un acouphène génère fréquemment une logorrhée environnementale. Si celle-ciétait adaptée et pertinente, elle serait une aide ; malheureusement, il s'agit le plus souventd'un flou, voire d’un tissu de contrevérités contre lesquelles il faudra lutter patiemment ; àchaque étape, il faut s'assurer de la bonne compréhension de l'objectif. En effet, outre cesfausses données, un deuxième obstacle se présente fréquemment : l'objectif thérapeutiquen'est pas un effet direct du traitement (quel qu'il soit), mais une levée d’obstacle àl'automatisation de la perception d'un signal. C'est une situation rarement rencontrée par lespatients plus habitués à prendre des comprimés pour faire baisser leur tension ou leurglycémie.Enfin un dernier obstacle se présente : la synchronisation du message dans le cadre de la priseen charge groupée d'un patient porteur d'acouphène : l'explication prenant ici uneimportance majeure, le vocabulaire n'étant pas le même dans les différentes spécialités, il enrésulte parfois une difficulté pour le patient qui croit avoir entendu des discours fortdifférents. Ceci nécessite un rodage important du réseau.On peut, à ce niveau de l'explication, proposer quelques tableaux ou des petits arbresdécisionnels à propos de quelques situations bien typées qui feront comprendre dans leconcret ce que l'on entend par réseau en matière d'acouphène (acouphène pulsatile,acouphène du sujet âgé hypoacousique, patients normaux entendants hyperacousiques).À l'évidence, une des difficultés est de ne pas faire exploser le compteur du financeur et lapatience du patient en multipliant les connexions dans le réseau.Dans un certain nombre de cas, l'entrée dans le réseau se fait progressivement. Prenonsl'exemple d'une consultation psychiatrique : son acceptation est directement proportionnelleà la compétence de l'O.R.L. qui la prescrit. Il n'en reste pas moins que, dans un certain

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L'importance d'unréseau.

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nombre de cas, son indication est différée. Il peut en être de même pour un certain nombred'examens techniques en particulier de neuro-radiologie.Le cas particulier des patients « marathoniens » de l'acouphène doit être individualisé carrelativement fréquent et d'abord difficile : il s'agit de sujets consultant pour la 20ème fois unO.R.L. (éventuellement différent à chaque fois) qui arrivent avec 15 cm linéaires dedocuments, 18 médicaments pris, 4 appareils auditifs, mais, la plupart du temps, aucuneévaluation de leur acouphène et, dans la grande majorité des cas, un discours très négatif surles prises en charge précédentes. Il est alors indispensable de pouvoir séquencer l'abord de cetype de patients. Le moyen le plus efficace est de se centrer sur le symptôme acouphène et detenter, indépendamment du volumineux dossier, d'en évaluer le retentissement. En effet,compte tenu de l'investissement temps/argent du patient, un énorme biais est apparu. Il fauttenter, dans la mesure du possible, de faire la part entre ce surinvestissement et la réalité del'acouphène. Nous ne sommes, dans notre spécialité, que rarement confrontés à ce type depatients porteurs de valises. Un des pièges évidents, en dehors de l'absence d'évaluation del'acouphène qui est plus ou moins la règle, est de ne pas avoir, aussi paradoxal que cela puisseparaître, les éléments nécessaires au diagnostic et à la prise en charge. Encore plus que dans lecas des patients traditionnels, un contrat de bonne conduite doit être tacite entre l'O.R.L. etson patient.Il faut en effet pouvoir le suivre régulièrement.Dans un certain nombre de situations, nous sommes manifestement face à un échec tant dupoint de vue du patient que du point de vue de l'O.R.L. Il faut pouvoir le repérer rapidementsoit pour changer de stratégie soit pour proposer, comme dans n'importe quelle pathologie,un transfert du patient vers un confrère sinon plus compétent du moins plus neuf.Plusieurs écueils vont se présenter qui rendent compte d'une grande partie de ces échecs :nous avons déjà insisté sur l'un d'entre eux, le fait de mésestimer une situation psychiatriquedégradée. Le résultat thérapeutique ne pourra être que mauvais quelle que soit la compétencede l'O.R.L.. Il est donc indispensable de reposer la question d'une consultation spécialiséedans le cadre du réseau, devant tout échec thérapeutique, ce d'autant qu'il peut s'agirégalement d'un bénéfice secondaire lui-même mésestimé. Dans la mesure où le symptômeest invisible, la verbalisation devient un élément majeur du chantage dans la famille.Ailleurs une cause initiale a été manquée (traumatisme, traitement, chirurgie) ousous-évaluée à la fois par le patient et l'O.R.L. Il en résulte un conflit qui pourra, ici aussi, êtreau mieux débrouillé dans le cadre d'une consultation psychiatrique (comportementale).On doit mettre à part les acouphènes survenus au décours d'une thérapeutique, quelle qu'ellesoit .Le ressentiment vis-à-vis de l'ensemble des médecins, après une intervention iatrogénique,doit bien être explicité par le patient de telle façon que la prise en charge puisse êtreopérationnelle. Il est particulièrement difficile pour l'opérateur d'être efficace sur cetacouphène. Tout le problème va donc résider dans la capacité de l'O.R.L. à transférer sonpatient à un confrère neutre. Ceci n'est pas simple et nécessite une grande transparence de lapart du chirurgien. Il est en effet pris dans un dilemme : « abandonner » son patient ou leprendre en charge dans les plus mauvaises conditions. Il faut donc arriver à faire comprendreau patient qu'il est impossible, compte tenu du ressentiment, d'obtenir un résultat satisfaisantsur l'acouphène sans changer de thérapeute.En marge de ce problème, on peut décrire la situation très délicate des patients qui engagentune action légale contre un chirurgien. Il est indispensable que l'O.R.L. qui s'occupe de cespatients en ce qui concerne leur acouphène soit particulièrement clair sur le caractèrefréquemment dévastateur de ces actions précisément du point de vue de l'acouphène. Lepatient investit énormément de temps, d'argent et d'énergie dans son combat légal, certain deson bon droit. Il en résulte une survalorisation de l'acouphène et dans beaucoup de cas uneaggravation de celui-ci. La situation est à son comble si le patient est débouté.

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3.12.2 Spécificité de la prise en charge :L’acouphène est une marque de la perte de la santé auditive : le fonctionnement n’est plussilencieux… dans la plupart des cas, l’acouphène est associé (ou l’inverse) à une surdité : la fonctionauditive est dégradée dans 2 dimensions : la performance et son caractère agréable. Surtout après untraumatisme sonore chez un sujet jeune, on repèrera facilement les phases classiques du deuil del’audition normale : déni, révolte, dépression et finalement acceptation lorsque que le sujet constateque la vie peut générer encore des agréments même avec cette surdité. Le discours du praticien devraêtre adapté au moment de l’évolution. Ainsi par exemple, une explication précoce de l’habituation, à laphase de révolte, détériore la qualité de la relation.

3.12.2.1 Les objectifs techniquesLa prise en charge a trois objectifs :

● Traiter la cause de l’acouphène si on peut en espérer la disparition● Améliorer la qualité de vie en allégeant les co-morbidités : prise en charge du stress,

de l’anxiété, de la dépression par tous moyens lourds ou légers. L’insomnie,symptôme associé à l’acouphène le plus fréquent, doit être prise en charge. Leshypnotiques, s’ils sont choisis suivront les règles habituelles de prescription.

● Favoriser l’habituation, par la thérapie auditive et les thérapies comportementales etcognitives.

3.12.2.2 Les objectifs du traitement pour le patientEn matière d’acouphène, l’objectif du traitement mérite d’être défini : les mots de laconsultation tournent autour de ce point crucial pour l’intéressé:

● « l’acouphène va-t-il disparaître ? »● « je peux vivre avec tel qu’il est mais ne je supporterais pas qu’il augmente »● « je ne peux pas continuer à vivre avec »…

3.12.2.2.1 Disparition, habituation et toléranceLa disparition de l’acouphène est l’objectif idéalisé, exigé au plus vite, dès la premièreconsultation, par le patient. Il est obtenu parfois rapidement quand une causechirurgicale est corrigée (otospongiose, otite séreuse). La disparition, à distance del’installation, de l’acouphène est difficile à apprécier dans sa fréquence. En effet, à terme,autant que la diminution du bruit, ce sont la tolérance et la redécouverte d’uncomportement normal qui contribuent à l’amélioration.La disparition de l’acouphène renvoie à la question non résolue suivante : l’acouphène,du fait d’hypothétiques mécanismes de réverbération et de traces mnésiques, peut-ilréellement disparaître, alors que la cause initiale a disparu ? Mais cette disparition est sansdoute très fréquente, spontanément, naturellement, tant est habituel l’acouphènepassager.L’habituation est plutôt une consolidation qu’une guérison. A l’état normal, on constateque, par un système de filtrage, les bruits extérieurs permanents, « affectivementneutres », voient leur perception progressivement diminuée. Un des mécanismes del’acouphène réside vraisemblablement dans l’impossibilité d’établir un filtre pour lesbruits de fonctionnement théoriquement neutres. L’habituation, c’est le rétablissementde ce filtre. Comme pour les troubles vestibulaires, des freins à l’habituation, de typemédicamenteux, existent-ils ?Si répondre à la question de la disparition est toujours délicat, répondre à la question de latolérance est plus facile : l’acouphène va être de mieux en mieux toléré. Le délai seravariable en fonction d’éléments qui tiennent à l’acouphène, au patient, à sa prise encharge. C’est un phénomène naturel. La pathologie de l’acouphène c’est l’obstacle à latolérance, c’est la construction et le développement de schémas mentaux défavorablesqui concernent les conséquences probables de l’acouphène, sa signification et la façond’y faire face.

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Pas d’augmentationLe « pas d’augmentation » : telle est la demande émise après le constat de l’échecvis-à-vis de la disparition du symptôme.Dans certains cas bien identifiés, dans la maladie de Menière en particulier,l’acouphène, au plan psychoacoustique, présente des variations d’intensité. Mais cesont des variations à court terme. L’acouphène est variable dans la journée ou d’unjour à l’autre. L’augmentation est à prendre en compte sur des délais plus longs. Ilfaut alors rechercher un arrêt ou une moins bonne tolérance psychologique maisaussi une aggravation de la pathologie causale.

La guérisonElle serait la coïncidence de 3 discours:Celui du médecin prescripteur : « Vous ne vous plaignez plus autant de ce symptôme et j’avaisavec mon médicament l’ambition d’atténuer ou de faire disparaître ce symptôme, pour moi vousêtes guéri… ».Celui du patient : «je me sens guéri ou en tous cas je ne suis plus obsédé par ce symptôme ».Enfin, celui de l’entourage, qui peut dire «après tout ce qu’on a vécu en spectateurs et aussi enacteurs de sa souffrance, il apparaît bien guéri ou il va beaucoup mieux ».Il y a lieu finalement de replacer le patient dans le cursus du deuil de son auditionnormale.

Le phénomène de deuil de l’audition (ou d’acceptation de l’acouphène)Il comporte classiquement plusieurs étapes.La prise de conscience de la perte en est la première. C’est la prise de conscience de laprésence durable de l’acouphène. Comme nous l’avons déjà dit, chez le sujet jeune, lesmots lors de la première consultation chez le spécialiste sont : « je ne peux pas croire quece bruit va exister toute ma vie… »Dans les atteintes sévères de l’audition avec acouphène, la souffrance engendrée parl’acouphène peut retarder la prise de conscience de la perte de l’audition. Tant quel’acouphène est le sujet de la souffrance, le travail de deuil de l’audition ne peut pasêtre entamé.La deuxième étape est le refus, avec parfois une série d’interrogations : « pourquoi cetacouphène, qu’ai-je fait, qu’est ce qui le modifie ?… ». Ces questions montrent bienque l’acouphène a bel et bien été intégré. Parallèlement, il y a maintenant volontéd’annulation avec retour à l’état antérieur avec une révolte qui dans le cas particulierdes acouphènes ne trouve pas individuellement d’exutoire, mais peut le trouver auplan collectif : la médecine est impuissante !!La phase suivante est la phase de dépression. On dit que le déclenchement des larmesest un « bon » signe dans le deuil. Le patient modifie son comportement conformistevis-à-vis du regard des autres. Le retour à un comportement moins adulte permet larégression. Il exprime par les larmes sa détresse qui doit être exploitée pour tenterd’entamer le dialogue. C’est sans doute à ce stade que toute l’explication del’acouphène doit démarrer. Sur le plan somatique, on prendra en charge les troublesdu sommeil. L’asthénie peut être patente. Sur le plan intellectuel le patient présenteou dit présenter un affaiblissement des capacités d’attention et de concentration.L’impression d’être moins performant qu’avant dégrade l’estime de soi.Sur le plan affectif, l’humeur est triste. Une forte anxiété se développe chez le patientqui devient hypersensible à toute stimulation sonore. Cette hyperacousie provoquedes réactions d’évitement ou de rupture avec son milieu habituel.Mais, petit à petit l’acceptation du deuil de l’audition normale va se faire.Le deuil pathologique c’est la prolongation anormale de l’une ou l’autre de ces phases,avant l’acceptation. Le sujet se complaît inconsciemment dans la réminiscence

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heureuse, étrangère à la réalité. Finalement le patient acouphénique peut être victimede cette dépression «normale », réactionnelle à la perte de l’audition normale.

Relation médecin-maladeDans l’enquête évoquée plus haut, dans la presque totalité des cas (97%), lespersonnes ayant répondu au questionnaire ont parlé de leur acouphène à unmédecin, 60% à au moins trois médecins.2 fois sur 3 environ (61 %), la demande de soulagement a été bien prise enconsidération par le praticien, 1 fois sur 3 peu ou pas du tout.

La prise en charge81% ont essayé des traitements.Il est à noter que l’hypnose ou l’acupuncture ont été tout aussi essayées que lesthérapeutiques médicamenteuses.

EfficacitéA la question : avez-vous obtenu un soulagement à la suite de ce ou ces traitements ?,19% n’ont pas répondu, mais 24% ont répondu oui et 57% non.Mais aucun traitement n’est cité quand il s’agit de savoir quel est le traitement qui aété particulièrement efficace.Cette prise en charge requiert de la part du praticien une bonne dose de « plasticité». Ilfaut en permanence pondérer les deux dimensions, psychologique et somatique,pour choisir alors le type de prise en charge. Il faut aussi une bonne dosed’ « humilité» du fait de la pauvreté des actions chirurgicales, de la longueur destraitements, du caractère indigent des explications sur les mécanismes, du flou descauses…L’acouphène est complexe et rappelle la situation du vertige avant la mise au point,grâce aux épreuves cliniques et paracliniques, d’une nosologie précise.

L’acouphène est complexe :Les causes et les mécanismes sont multiples et incertains. Le temps modèle lesymptôme avec les deux facteurs contraires: la trace mnésique et l’habituation.

Les patients sont atteints de façon très diverses :De l’acouphène symptôme à l’acouphène maladie, consultant pour certains sansrelâche.

L’inconfort du médecin est évident :♦ La situation d’échec est fréquente :La réussite thérapeutique rapide et fulgurante est exceptionnelle. Pour cettecomplexité réelle, le nombre de cas donnés à traiter n’est souvent pas assez grandpour adopter une prise en charge réfléchie et cohérente, personnelle.♦ Les conduites thérapeutiques sont sans consensus vrai.Les essais cliniques sont difficilement reproductibles, rarement crédibles.Il n’y a pas de modèle animal "facile", pas d’évaluation objective.Médecins et malades sont d’accord sur la mauvaise réputation de l'acouphène, sontd’accord sur le caractère théoriquement léger de la pathologie, habituellement dudomaine du confort et quelques fois avec un lourd retentissement psychique.Certains patients peuvent avoir des avis bien arrêtés quant à la méthodologie de priseen charge. C’est une des conséquences du développement des associations depatients, véritable pouvoir de santé.

Pour la dimension somatique, la démarche du médecin peut être de 3 ordres :

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♦ « Tout d’abord, éliminons une étiologie grave. Comme la cause n’est querarement définie, comme le mécanismeest obscur et comme les thérapeutiquesétiologiques n’apportent pas les succèsescomptés : faisons tout pour accélérerl’habituation ».

♦ « Attachons-nous à la cause, à l’origine del’acouphène. Essayons de la découvrir,supprimons-la et nous pouvons espérerque le symptôme disparaîtra : c’est l’acouphène symptôme ».

♦ « La cause ayant disparu, on peut observer la persistance de l’acouphène du fait dela mémorisation du phénomène. Il faut alors soigner l’acouphène en tant que tel:c’est l’acouphène-maladie »

Ces 3 démarches peuvent constituer des guides rigides ou au contraire être choisiestour à tour au gré des patients, au gré de l’évolution des symptômes d’un sujetconsidéré.Quel que soit le choix, des erreurs sont à éviter dans cette relation entre le médecin etle patient qui ne comprend pas l’incompétence de «la science médicale moderne »vis-à- vis de ce « pauvre petit symptôme » qui pourtant est déclaré comme lui gâchantla vie.Parallèlement au choix d’une de ces démarches, il y lieu aussi d’évaluer et de corrigerla psychopathologie, lourde ou légère, par lui même ou en adressant aux « psy- ».Enfin il faut éviter les erreurs.

3.12.3 Panorama des méthodesÀ titre de guide, on peut dégager pour cette prise en charge 4 volets. Des thèmes seront repris plusavant dans le texte.

3.12.3.1 Le premier volet thérapeutique vise la disparition de l’acouphène :Trois méthodes sont proposées:● le traitement de la cause : il est réalisé par des moyens médicaux ou chirurgicaux adaptés à

l’étiologie quand elle est découverte,● la correction du mécanisme de l’acouphène, en s’appuyant sur différentes explications ou

différentes analogies physiopathologiques,● la prise en charge de la déafférentation par des techniques de masque sonore, par analogie

avec ce qui a été développé en matière de douleurs chroniques.

3.12.3.2 Le deuxième volet est la prise en charge des co-morbiditéset autres phénomènes satellites, conséquences de l’acouphène : Insomnie, anxiété, dépression.

Sans égard à la relation mutuelle entre l’acouphène et ces situations cliniques, il fautaméliorer le confort de vie.Ces propositions thérapeutiques relèvent d’une démarche médicale classique. Les deuxderniers volets sont plus spécifiques du symptôme qui nous occupe.

3.12.3.3 Favoriser l’habituation:C’est donc un phénomène naturel, utile. Elle se traduit par la baisse progressive de l’intensitéd’une réponse à mesure que se répète une stimulation dans le temps, sans que cettestimulation soit attribuable à la fatigue. Ce phénomène existe à deux échelles, pour unrécepteur ou pour l’organisme.Grâce à ce phénomène, le port d’un vêtement est possible sans perception consciente,permanente de l’étoffe sur la peau. Mais le système est en veille : une interrogation du capteurrenvoie l’information. On perçoit le vêtement si on y fait attention…

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Finalement, dans cette pathologie,entre ce patient souvent averti parl’entourage et aussi par le médecin,lui sans acouphène, démuni del’efficacité rapide de son Vidal®, lepatient est l’expert.

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Pour l’organisme, au niveau cognitif conscient ou inconscient, l’habituation existe aussi. Faceà un environnement familier et régulier, il ne se fatigue pas inutilement. Par ailleurs, enréagissant moins à des stimulations connues et reconnues comme étant sans importance pourl’organisme, le sujet est prêt à répondre à d’éventuels événements nouveaux qui pourraientintervenir dans le milieu.Après cette brève présentation générale du phénomène d’habituation et pour revenir à notresujet, on peut redire que la physiopathologie de l’acouphène est, soit une pathologie del’habituation soit une habituation qui ne se fait pas parce que l’acouphène a valeurd’information. L’acouphène a une signification : menace quand on dit que l’acouphène estvasculaire, stress quand il s’agit d’un traumatisme sonore, rappel affectif d’une circonstanceémotionnelle…Favoriser l’habituation suppose d’analyser le statut de l’acouphène et mettre à profit les loisde l’habituation comme celle de la généralisation qui permet de répondre moinspuissamment à des stimulations présentant des caractéristiques proches de celle d’unstimulus familier.

3.12.3.4 Ne pas inhiber l’habituationLa démarche préalable à l’habituation est de vérifier l’absence de mécanisme d’inhibition del’habituation. C’est en fait la première démarche psychologique.Il faut contrôler ou faire contrôler par le psychothérapeute que le sujet n’a pas « besoin de sonacouphène », en d’autres termes qu’il n’y trouve pas un bénéfice secondaire inconscient1.Cette situation soit garantirait l’inefficacité de la prise en charge, soit détériorerait l’étatclinique après disparition du symptôme.Finalement, c’est cette dernière remarque qui atteste du caractère cognitivo-comportementaliste de la prise en charge globale des acouphènes. C’est ce qui fait la difficultéd’établir un schéma rigide de prise en charge : faut-il réellement le faire disparaître sil’acouphène permet à l’intéressé de ne pas penser et/ou d’utiliser ce mode de communicationavec son entourage2 ?On entre de plein pied dans la psychopathologie, domaine qui n’est pas celui du somaticiende l’audition. Son rôle est de proposer le bilan pour une telle hypothèse de fonctionnementdu sujet.

3.12.4 MoyensCertains traitements reconnus comme efficaces sont inapplicables : citons la lidocaïne injectabledont l’action est fugace et le courant électrique continu qui peut bloquer la production anormaled’influx, mais provoque l’ossification.

3.12.4.1 Améliorer l’audition :(cf. chapitre spécifique)C’est la mesure de base. L’absence de surdité (27% des cas) rend la prise en charge plusdélicate. L’aide auditive est le recours majeur pour la prise en charge. On sait, en France, lesréticences à l’appareillage auditif, mais on constate que les sujets acceptent mieux une aideauditive inscrite dans la prise en charge de l’acouphène. Certaines prothèses auditivescombinent une amplification et un générateur de bruit dont la justification est présentée plusloin.

3.12.4.2 Développer l’habituation : La thérapie sonore (ou auditive)Conçue par Hazell et Jastreboff, elle vise à l’habituation de la réaction : l’acouphène ne génèreplus d’intolérance majeure, puis à l’habituation de la perception c’est à dire à la non-perception del’acouphène.

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1- Nous ne sommes pas dans la relation de simulation.2- Des maux pour le dire…

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Inspirée de concepts cognitivo-comportementaux, la TRT (Tinnitus Retraining Therapy) sefixe pour objectif de neutraliser la réaction autonome à l’hyperacousie et/ou à l’acouphène.Elle fait appel au conseil directif et à la thérapie sonore. Le "counselling" est un procédé deconseil bref et directif, tant au plan de l’interprétation symptomatique qu’au plan del’adaptation aux situations, sonores notamment, vécues comme menaçantes. La thérapiesonore fait classiquement appel aux générateurs de bruits, mais elle inclut autant la correctionauditive que des stimulations auditives d’autre nature ; le principe de base étant que le silenceest à proscrire.Elle comporte deux volets :● Le conseil directif, (ou counselling),c’est à dire l’explication du phénomène avec en appui tout document utile. Il cherche à fairecéder les croyances acquises sur « l’intraitabilité » de l’acouphène. Les associations de patientsjouent dans certains cas un rôle très positif.● La « désensibilisation auditive »,à savoir la diminution de la sensibilité de la détection de l’acouphène. Cette action est dudomaine de l’inconscient, à la différence de la précédente. Elle est mise en œuvre d’abord enrecommandant au patient d’éviter le silence. De façon plus sophistiquée, un générateur debruit hébergé dans une prothèse auditive permet de soumettre le sujet à un environnementsonore permanent. L’idée est de diminuer le contraste entre l’acouphène et l’environnementsonore. Petit à petit, cette stimulation sonore prolongée (plus de 6 heures par jour) vadéclencher une réaction normale d’habituation : ce signal n’est pas menaçant, il est amovible.Et la théorie stipule que l’habituation est généralisable, c’est à dire que les stimulationsressemblant à la stimulation qui déclenche la réaction visée vont aussi profiter du filtre del’habituation. Ainsi l’acouphène est plus rapidement bloqué à l’étage inconscient. Ledéveloppement de l’habituation demande plusieurs mois. Cette démarche n’est pasdangereuse car le niveau sonore nécessaire est faible.

3.12.4.3 La thérapie cognitive et comportementale est développée dans unchapitre spécifique.

3.12.4.4 Les moyens médicamenteuxLes thérapeutiques de l’acouphène : Utilisation des médicaments.Les spécialités avec l’autorisation de mise sur le marché (AMM) « acouphène » sont peunombreuses. Des produits hors AMM sont efficaces, ce qui peut engendrer des difficultésadministratives. L’emploi de placebos peut s’avérer utile.Plutôt que d’en faire une longue liste, essayons de fixer leur logique d’emploi.

3.12.4.4.1 La logique des produitsOn peut établir 3 grandes classes de médicaments :● Les traitements prouvés mais inutilisables de façon prolongée :Leurs résultats sont reproductibles lors d’études contrôlées. Le courant électrique continu, lalidocaïne en font partie.Leur statut les rassemble : pour efficaces qu’ils soient, ils sont d’un emploi permanentimpossible et pour le premier délétère, à long terme : un courant continu de quelquesmilliampères appliqués sur le promontoire provoque une inhibition des acouphènes pendantle temps de la stimulation. Mais la technique est dangereuse : le milieu se comporte commeun bac à électrolytes et le passage prolongé du courant continu aboutit à un déplacementionique irréversible, dont le témoin est la calcification.● Les traitements logiquesIls s’appuient sur une logique de prescription, c’est à dire sur la notion de modèle. Les deuxmodèles bien explicatifs vis-à-vis de l’acouphène sont le modèle de la douleur et le modèle del’épilepsie.

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Le modèle de la souffrance anoxique qui justifie la prescription de produitsvasodilatateurs est ancien. Largement prescrits, les produits vasculotropes ouoxygénateurs retrouvent un certain intérêt par l’explication de leur(s) mécanisme(s)correcteur(s) intime(s) tels que l’action anti-radical libre, anti excito-toxique. Enl’absence d’hypothèse de fonctionnement, ils sont à classer au niveau des recettes ou destraitements communs, parce que d’une part on conçoit mal le chaînon manquant entre lalésion et le symptôme et d’autre part l’adjectif « vasculaire » fait craindre au patient lasurvenue d’une manifestation plus grave, plus dangereuse.

● Les recettes et les traitements communsIl s’agit des traitements qui n’ont pas fait l’objet d’études cliniques contrôlées. Elles sontplus ou moins convaincantes et les spécialités proposées ne font pas l’objet de consensus.Leur prescription est grandement régie par les habitudes individuelles.

3.12.4.4.2 Les grandes classes pharmacologiquesL’utilisation de modèle, aussi brillante qu’elle soit, est là pour pallier notre mauvaiseconnaissance. Le mécanisme exact d’action est, pour la plupart des molécules, imprécis etles sites et modes d’action sans doute multiples.Considérant que l’acouphène est très vraisemblablement lié aux modifications du tauxde décharge sur les voies du système auditif, les produits qui ont des effets directs sur cephénomène sont de bons candidats. Le circuit réverbérant ou oscillateur est un circuitdu système nerveux. Ce type de circuit fonctionne par rétro-action positive à l’intérieurdu groupe neuronal. Le circuit est réexcité par la réintroduction du même signal efférent.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Les divers médicaments à visée vasculaire

Plusieurs notions doivent être très précisées lorsqu'on aborde les médicaments à viséevasculaire.

1- Il ne faut pas confondre les anti ischémiques (extrait de gingko biloba ou Trimétazidine),les vaso dilatateurs à type de dérivés de l'ergot de seigle ou les antihistaminiques, lessubstances à visée hémorrhéologique (à effet anti sludge, type Naftidrofuryl,Pentoxifylline, EGB 761), enfin les produits antioxydants.

2- Il est indispensable d'avoir à l'esprit que l'effet placebo de médicaments prescrits à unpatient porteur d'acouphènes est d’environ 40 %.

3- Les médicaments ayant actuellement en France une AMM pour l'acouphène sont trèspeu nombreux :

- sans précision d'étiologie : Trimétazidine

- acouphène présumé d'origine vasculaire : Raubasine et EGB 761

4- De très nombreux produits sont actuellement utilisés sur le modèle de la recette ou dutraitement commun c'est-à-dire qu’ils n'ont bénéficié d'aucune étude contrôlée positive.

Dans ces conditions, la prescription de ces thérapeutiques ne peut répondre qu’à deuxlogiques : soit on suit le résultat d'études contrôlées permettant de maintenir unecohérence à la prise en charge des patients, soit, en toute honnêteté vis-à-vis du patient,on lui prescrit un produit pour lequel on n’a que des présomptions d'efficacité, qui peuventd'ailleurs être renforcées par sa pratique personnelle.

Il n'en reste pas moins que l'hypothèse « vasculaire » apparaît comme vraisemblable danstrès peu de cas. Par ailleurs ces études contrôlées sont particulièrement rares en ce quiconcerne la durée d'analyse et les patients porteurs d'acouphènes depuis plus de six mois.

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Une fois stimulé, le circuit décharge à répétition pour une longue période de temps.Dans un tel système réverbérant, le signal efférent peut durer plusieurs millisecondesvoire plusieurs minutes pour un signal afférent qui n’excède pas la milliseconde. Un desfacteurs qui détermine la durée du phénomène est la rapidité avec laquelle les synapsesdu circuit s’épuisent.Comme nous l’avons dit, le modèle de la douleur et celui de l’épilepsie justifient laprescription de produits antalgiques ou anticonvulsivants.Il y a quelques années l’anoxie était le grand mécanisme létal. Les produits capablesd’augmenter le flux vasculaire étaient indiqués pour les acouphènes engendrés par lesdégâts de l’anoxie.Comme dans la thérapeutique antivertigineuse, l’utilisation des drogues varie d’un pays àl’autre, certain produit « leader » ici n’est que peu ou pas utilisé ailleurs.

Les anesthésiants : La lidocaïneLa lidocaïne est un anesthésique local qui est aussi utilisé pour régulariser les troublesdu rythme par effet stabilisateur de la membrane. Il en résulte un ralentissement deséchanges ioniques, ce qui diminue la vitesse de dépolarisation. La lidocaïne augmentela durée de la période réfractaire et réduit la fréquence de décharge sur les fibres.Si depuis 1978, elle a fait l’objet de plusieurs travaux prometteurs, l’impossibilitéd’utiliser un substitut oral condamne l’emploi chronique de la méthode. Pourquoialors parler de ce produit ?♦ Au plan général, l’efficacité fréquente de la lidocaïne prouve la possibilité d’action

rapide d’une drogue sur l’acouphène.♦ Au plan individuel, elle est utilisée comme traitement parentéral. Si le résultat est

bénéfique, elle contribue à restaurer la confiance dans la thérapeutique.♦ Enfin la lidocaïne aurait pu servir de base à un système de tri des patients pour la

mise en route d’un traitement à effets secondaires dangereux (carbamazépine etrisque hématologique).

♦ Parce que le produit a une action locale qui peut être étudiée, parce qu’il existe desmodèles animaux,… la bonne connaissance du produit contraste avec laméconnaissance des autres dont l’action est centrale.

Après administration IV, la lidocaïne est immédiatement active. Sa demi-vie est de 10minutes.

➤ Utilisation :Perfusion de 1 à 2mg /kg de lidocaïne à 2%, sans adrénaline, perfusé rapidement.Précautions d'emploi, effets secondaires et contre-indications :Les effets secondaires ne sont pas anodins et empêchent la banalisation de l’emploi.En fait c’est bien plus l’organisation matérielle de l’administration qui est un facteurlimitant : hospitalisation, surveillance électrocardiographique permanente pourdépister un éventuel trouble de la conduction, mise à disposition d’undéfibrillateur…Les complications cardio-vasculaires sont en fait relativement rares et fonction del’état cardiovasculaire : bradycardie, BAV, hypotension.Les complications neurologiques sont liées à la dose administrée. Les premiers signessont du type confusion, puis agitation et enfin crise convulsive. Ces troubles sontplus fréquents chez les séniles. La dose toxique est de l’ordre de 300 mg.

➤ Résultats et effet attendu :Différentes études (rassemblées par Murai 1992) contrôlées ou non rapportent uneaction bénéfique assez régulièrement constante : le résultat immédiat est comprisentre 65 et 80% d’amélioration mais après environ 20 mn le bénéfice disparaît et il n’ya pas d’effet résiduel vrai.

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Les substituts oraux de la lidocaïneIls ne sont pas efficaces (Tocaïnide hydrochloride) aux doses utilisables. Sa demi-vieest comprise entre 11 et 23 heures, à peu près 10 fois plus longue que la lidocaïne IV.Les études ne sont pas convaincantes. L’emploi de doses importantes (jusqu’à1800 mg par jour) s'est soldé par une intolérance cutanée, des vertiges, une sudationprofuse.

Les anticonvulsivantsL’idée d’utiliser des anticonvulsivants en matière d’acouphènes provient de leuremploi dans les douleurs rebelles. Comme les autres anticonvulsivants, l’effetprincipal est lié à la diminution de la transmission synaptique. Le site d’actionvraisemblable est au niveau des voies centrales.Les études cliniques ont initialement porté sur la Carbamazépine (Tégrétol®) maisle risque hématologique et d’autres effets secondaires lui font préférer leClonazepam (Rivotril®) qui est une benzodiazépine.

➤ Posologie et mode d’emploiLe Rivotril® est d’un maniement assez aisé avec des avantages nets :♦ Facilité d’emploi,♦ Bonne tolérance,♦ Maniabilité,♦ Effet sédatif limité en l’absence de surdosage.La dose à utiliser est la dose minimale efficace qui dépend largement de l’emploiantérieur de sédatifs.La prescription du Rivotril® doit s’entourer d’une sorte de « sacralisation ». L’usageprolongé d’une benzodiazépine peut inquiéter patient et thérapeute. De même leterme de convulsion alarme le patient. Il faut expliquer l’analogie avec l’épilepsie, lamaniabilité du produit, l’absence d’effet secondaire aux doses habituellementutilisées.Le Rivotril® peut suffire comme hypnotique nocturne. La qualité de l’éveil estbonne. La forme goutte se prête bien à une adaptation précise au cas du patient.En l’absence d’utilisation antérieure de produit de ce type, la dose à prendre le soir aucoucher est située entre 8 et 12 gouttes, réduite goutte par goutte dès que possible.Un comprimé équivaut à 20 gouttes et contient 2 mg de principe actif. En casd’acouphène très invalidant, on peut ajouter facilement 2 fois 5 gouttes dans lajournée, sans altérer la vigilance. Si le traitement d’entretien chez un épileptique estde 0,1mg par kg la posologie préconisée dans cette indication peut être présentéecomme « filée ».La durée du traitement doit être d’au moins 2 mois et demi.Le Rivotril® est contre indiqué chez la femme enceinte.

➤ Les résultats :Dans une étude utilisant en contrôle un antihistaminique pour son action sédative,Lechtenberg et Shulman (1984) montre que le clonazepam avait un effet supérieur àl’antihistaminique. La réponse favorable était de 69%.L’exercice quotidien montre l’efficacité fréquente du Rivotril®. L’expériencemontre que si le sujet souhaite arrêter le plus tôt possible l’usage du Rivotril®, unarrêt trop précoce semble faire remonter l’intensité de l’acouphène.Les questions d’effets secondaires et d’assuétude seront traitées au chapitre desanxiolytiques.

Les anxiolytiquesIl s’agit là encore de benzodiazépines déjà utilisées on l’a vu, commeanticonvulsivants. Elles ont d’autres propriétés, anxiolytiques, sédatives,

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hypnotiques, myorelaxantes, qui motivent encore la prescription. Lesbenzodiazépines peuvent donc être choisies pour leur « micromécanisme » neuronalou pour leur « macromécanisme » anxiolytique. Le site exact et le mode d’action desbenzodiazépines sont inconnus. Les benzodiazépines semblent agir au niveau dusystème limbique, thalamique et hypothalamique.Elles ne sont pas toutes équivalentes. Certaines sont utiles parce que bien supportéeset d’usage facile comme le bromazepam (Lexomil®). Les myorelaxants(Tétrazépam-Myolastan®) peuvent être utiles pour préparer l’effet hypnotique duRivotril® dans les cas sévères d’insomnie. Enfin l’alprazolam (Xanax®) est trèsutilisé outre-Atlantique.Là encore, les doses seront les plus faibles possibles. Plus que les effets secondaires àla fois connus et rares aux doses filées, il faut évoquer leproblème de la dépendance. Plusieurs facteurs enfavorisent la survenue, comme la dose, la durée dutraitement… La prescription au long cours de ce typede produit est toujours inquiétante et peut à juste titremotiver certains médecins à ne pas entamer ce type detraitement. Certes il vaut mieux chaque fois quepossible éviter toute prise médicamenteuse. Mais qui peut affirmer que l’insomniemal supportée sans médicament est moins dangereuse qu’un sommeil avechypnotique. En fait, en matière d’acouphène, le patient, dans la grande majorité descas établit assez vite, « à la goutte près » la dose efficace. L’augmentation croissante desdoses, l’adjonction d’autres produits sédatifs doivent faire envisager un problèmeplus complexe de personnalité.Les conducteurs d'automobiles seront prévenus.La règle générale est, rappelons-le : le moins possible, le moins longtemps possible.La décroissance de la posologie sera annoncée dès le début du traitement.

Les antidépresseursLes antidépresseurs peuvent être utiles dans le traitement de l’acouphène. Lesantidépresseurs tricycliques ont aussi une action anticonvulsive. Ils semblentcapables de bloquer le phénomène «d’uptake » de divers neurotransmetteurs auniveau de la synapse. Dans une étude réalisée par Goodey, les cas qui profitaientd’une réduction de l’acouphène par un agent tricyclique étaient aussi ceux quipouvait bénéficier de l’efficacité de la lidocaïne. Tout comme pour lesbenzodiazépines, les antidépresseurs peuvent être choisis pour leur « micro oumacromécanisme ». Entre les deux, la différence sera faite par la dose.Là encore, la prescription, si elle n’est pas motivée par une dépression identifiée, doitêtre expliquée. Le terme d’antidépresseur inquiète.Les effets secondaires, s’ils sont connus (essentiellement hypotension orthostatiqueet surtout impuissance) seront annoncés. Leur existence est, avec la réticencegénérale à ce type de produit, un facteur limitant de leur utilisation en matièred’acouphène. En effet nous sommes dans la plupart des cas dans une correction del’inconfort et la hiérarchie des symptômes est rapidement faite par l’homme porteurd’acouphène. De plus l’acouphène reste un symptôme invisible que le patient peutvouloir ne pas partager avec sa conjointe.Le produit le plus maniable reste la clomipramine (Anafranil®), à utiliser à dose trèsfilée de 20 à 30 mg par jour en 2 ou 3 prises. D’autres produits peuvent être choisispour leur spécificité. Les qualités essentielles pour les utiliser dans cette indicationsont la maniabilité, l’absence d’effet secondaire et surtout l’existence de formefaiblement dosées.

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Tout traitement par lesbenzodiazépines peutentraîner un état depharmacodépendancephysique et psychique.

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En cas de composante dépressive évidente les produits antidépresseurs plus récentssont à proposer. Ils seront choisis en fonction de leur composante anxiolytique,sthénique…On rappellera les 2 contre-indications : le glaucome et l’hypertrophie prostatique.La question de l’assuétude et des effets à long terme des produits psychotropes est lamême que celle soulevée au chapitre des benzodiazépines..

Les inhibiteurs calciquesLa flunarizine (Sibélium®) est un bloqueur calcique qui évite la vasoconstriction etaugmente le débit artériel cérébral. Elle est indiquée en cas de vertiges périphériqueset comme traitement de fond de la migraine. L’étude en double aveugle de Hulshofet Vermeij (1986) n’est pas convaincante mais l’expérience montre que certainspatients témoignent d’amélioration. La durée de la prescription dans la ficheposologie est limitée à 60 jours ce qui apparaît peu par rapport à la dynamiquehabituelle du symptôme.

Les vasodilatateurs et vasculotropes.Ce sont les traitements les plus fréquemment proposés. Un seul dispose de l’AMM1

(Trimétazidine - Vastarel®). Ces substances initialement étaient justifiées par lesouci de réparer une situation anoxique génératrice de l’acouphène. Actuellement lesmodes d’action intimes se situeraient près de la synapse influençant l’uptake localaprès toxicité du neuromédiateur après un traumatisme sonore.

Les autres produits :Les produits homéopathiques ou à base de plantes ont leurs partisans. Ils s’accordentsouvent très bien au motif de leur prescription : symptôme léger, excitabilité discrète,traitement au long cours, absence d’effet secondaire.

Le placebo :L'effet placebo :Dans la pratique quotidienne, nous sommes confrontés à l'obligation de plus en pluspressante d'utiliser des thérapeutiques validées de façon scientifique, selon desprotocoles précis.Au-delà de ce que l'on observe dans d'autres situations pathologiques, lathérapeutique de l'acouphène donne lieu à un effet placebo très important. Celui-ciest évaluable à environ 40 % quelles que soient les techniques utilisées.Dans ces conditions, on observe un épuisement relativement rapide de l'effet.Cependant, dans la mesure où l'élément déterminant est le blocage de l'habituationneuro sensorielle, on comprend l'importance éventuelle de cet effet. (S'il s'agissaitd'une hypertension, l'intérêt du placebo serait nettement moins important).Comme dans toutes les situations, la relation médecin-patient est essentielle ; il estnoté d'ailleurs que même les médicaments développant un effet significativementsupérieur à un placebo ont également un effet placebo (l'indication négative d'untraitement modifie globalement son effet par rapport à une indication très favorable).Il est donc tout à fait important de ne pas proposer des techniques thérapeutiquesavec légèreté.Nous sommes quotidiennement confrontés à des patients en situation d'échecthérapeutique non pas tant en raison d'un déficit technique mais à cause d’uneapproche du patient et de son symptôme déficitaire.La réalisation d'essais contrôlés en matière d'acouphène est extrêmement difficilepour plusieurs raisons : difficultés de constituer des groupes homogènes de maladeset des groupes témoins, difficultés de réaliser la thérapeutique placebo. L'exempletype est l'utilisation de générateurs de bruit, mais l'on peut étendre cette difficulté à

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1- Pour acouphène sans autre précision.

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l'acupuncture, l'hypnose, les stimulations électriques voire la thérapiecomportementale. Enfin, la plupart de ces essais ont une durée extrêmement limitéedans le temps alors que l'on sait que l'évolution de ces acouphènes s'étale sur plusd'une année.En pratique donc, nous devons à la fois ne pas négliger le traitement placebo, tout encomprenant que les essais randomisés contre placebo ne sont pas nécessairement le"gold standard" en matière de recherche thérapeutique sur les acouphènes.

On rappelle qu’il y a des placebos actifs et des placebos neutres.Il apparaît utile de disposer de placebos ne serait ce que pour vérifier l’absence ou laprésence d’effets secondaires avec ce placebo. L’effet nocebo peut en effet êtreobservé indiquant plutôt une prise en charge non médicamenteuse.Le placebo sera d’autant plus efficace que le prescripteur est persuadé de l’efficacitéde sa prescription. Immédiatement, le pourcentage d’effets bénéfiques va être del’ordre de 35%. L’effet va habituellement s’épuiser au bout de quelques jours.La liste des produits utilisés est encore longue. Nous en avons présentéquelques uns, par identité ou par classe. D’autres psychotropes sont candidats.Dans l’ensemble, les médicaments sont choisis en fonction :♦ de leur maniabilité,♦ des effets secondaires,♦ du déclenchement de l’assuétude,♦ de l’acceptation par le sujet.

Et pour conclure, l’efficacité du traitement médicamenteux suppose une confiancedu sujet vis-à-vis du médecin (transfert positif) qui est révélé totalement lors del’usage du placebo. A contrario, un traitement médicamenteux vrai, peut fonctionnercomme nocebo (effets secondaires exacerbés) en cas de mauvais transfert.

3.12.5 Thérapies cognitives et comportementales : TCC et TRT®

L’apparition de la gêne qui résulte de l’acouphène et de l’hyperacousie dépend du développementde phénomènes centraux pour l’essentiel constitués d’attributions péjoratives au symptôme etd’un état d’hypervigilance à la fois diffus et porté prioritairement vers les perceptions auditives(18). Ainsi se développe un réflexe conditionné obsessionnel d’attention à l’acouphène et/ou auxbruits (en cas de phonophobie) ou à certains bruits (en cas d’hyperacousie).Ce phénomène implique plusieurs systèmes neuraux autres qu’auditif, comme le systèmelimbique, les aires associatives ou le système nerveux autonome, qui sont les principales cibles destechniques d’habituation largement utilisées dans les thérapies cognitives et comportementalesou dans la « Tinnitus Retraining Therapy » (TRT�) (50). C’est, en effet, la réactionémotionnelle, tant dans son versant cognitif que dans sa dimension somatique, qui joue le rôleprimordial dans la mobilisation attentionnelle accordée au symptôme et dans les réactions qui lessuivent. L’aspect cognitif de la réaction désigne l’acte de connaissance qui préside à sa mise enœuvre.Sont ainsi concernés les mécanismes d’acquisition, d’organisation et d’utilisation du savoir sur soiet le monde extérieur. L’intrication des perceptions somato-sensorielles dans l’élaboration descognitions, et l’inverse par la suite, apparaît dès l’énoncé des définitions.Inspirée de concepts cognitivo-comportementaux (35-36-46), la TRT® se fixe pour objectif deneutraliser la réaction autonome à l’hyperacousie et/ou à l’acouphène. Elle fait appel aucounselling et à la thérapie sonore. Le counselling est un procédé de conseil bref et directif, tant auplan de l’interprétation symptomatique qu’au plan de l’adaptation aux situations, sonores

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notamment, vécues comme menaçantes. La thérapie sonore fait classiquement appel auxgénérateurs de bruits, mais elle inclut autant la correction auditive que des stimulations auditivesd’autre nature ; le principe de base étant que le silence est à proscrire. Le fondement théorique deréférence pour la TRT� est que le processus attentionnel est sous-cortical et inconscient, régulépar des patterns neuraux accessibles à des stimulations sensorielles.Les thérapies cognitives et comportementales (TCC) ont pour vocation de modifier lescomportements et les pensées corollaires à travers l'application de techniques de« déconditionnement ». La thérapie sonore est associée par le biais de l’aide auditive dès quepossible et par l’enrichissement phonique sans que le recours aux générateurs de bruit soitindispensable. Cette thérapie sonore s’intègre au volet comportemental de la TCC quelles quesoient ses modalités. La dimension cognitive est ici beaucoup plus importante que dans la TRT�.Ce type d’intervention thérapeutique repose sur un modèle du fonctionnement cérébral humainoù les interactions perpétuelles des processus conscients et automatiques (de l’organisme engénéral et du cerveau dans ce cadre général) imposent la combinaison d’une approche cognitive etd’un volet comportemental.La TCC est au mieux réalisée après des entretiens motivationnels, assurés par les ORL, quiempruntent les principes du counselling et préparent les patients à s’engager dans une démarchestructurée à court ou moyen terme.La stratégie thérapeutique dont relève le patient est élaborée à partir de l’analyse sémiologique dutrouble ; "somatoforme" ou dissociatif, il peut nécessiter une prise en charge plus ou moins lourdeau plan psychiatrique. Des outils psychométriques spécifiques et non spécifiques permettent uneévaluation du retentissement de l'acouphène. Trois mesures spécifiques (la mesure de la détressepsychologique liée à l'acouphène (129), la mesure du handicap lié à l'acouphène (77) et l’échellesubjective de sévérité de l'acouphène (57)), et une mesure de l’état anxieux et dépressif à traversl’échelle hospitalière HAD, indépendante de la nature acouphénique de la plainte, constituent lesprincipales explorations couramment utilisées. Un journal de suivi de l'acouphène peut êtreproposé pour réaliser un inventaire des situations rencontrées, l'intensité de l'acouphène ressenti,la gêne que cela engendre et les commentaires que fait le patient par rapport à ce qu'il ressent,pense, fait ou ne fait pas.La TCC va consister à réduire l’état de tension physique et émotionnelle qui accompagnel’acouphène et l’hyperacousie. En rapport ou non avec ces symptômes, cette tension fait le lit de lafocalisation attentionnelle à l’origine de la gêne ressentie. La technique de relaxation progressivede type Jacobson va autoriser des modifications comportementales d’adaptation en permettantdes expositions aux situations redoutées. La connaissance des processus automatiques de penséeset de croyances va permettre une maîtrise des interprétations et des réactions apprises inadaptées.La relaxation de type Jacobson fait appel à des contractions étagées préalables à unrelâchement musculaire concernant de proche en proche la totalité du corps. L’évocation d’unescène imaginaire favorisant la sensation d’apaisement physique et mental constitue la phase finaledu procédé. Une injonction paradoxale d’inattention au contexte sonore ambiant favorise ladistraction à l’égard du signal acouphénique.Au plan cognitif, la notion de base en matière d'acouphène est que sa négligence (et, parconséquent, sa tolérance) devrait être la réponse normale au phénomène. Les mécanismes quis'opposent au développement de ce processus sont la crainte d’une pathologie sous-jacente(comme une tumeur ou une surdité) ou l’existence de comportements (actes ou pensées) ayantpour conséquence de perturber l’activité du patient (écouter une conversation, s'endormir...).Le but des TCC est de réadapter le sujet face à son acouphène ; sa capacité de détection du signaln’est pas modifiée. Le « déconditionnement » repose sur trois piliers : information, analysecritique des croyances, élaboration et confrontation aux alternatives. Une information aussiactualisée et exhaustive que possible quant aux connaissances en physiopathologie et leursimplications thérapeutiques est le premier temps de la restructuration cognitive : la convergenceet la cohérence des discours du thérapeute et de l’ORL est un aspect déterminant de l’adhésion dupatient à la suite de la démarche.

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C’est ensuite par une analyse détaillée et méthodique de l’argumentaire fondant les convictionsnuisibles des patients que l’on parvient à mettre en lumière leurs insuffisances ou leursinadaptations. Cette démarche critique conduit à l’élaboration d’alternatives des interprétationset des conséquences concrètes qui en découlent. Enfin, grâce à une exposition graduée, planifiéeet encadrée, des activités redoutées sans justification objective sont réinvesties progressivement :les anticipations néfastes sont remises en cause.Après une première phase thérapeutique en rapport avec les préoccupations actuelles des patients,c’est la mise en évidence de modes de pensée délétères, au quotidien, hors du champ auditif,entretenant un climat émotionnel négatif, qui va permettre de généraliser les méthodescognitives utilisées à propos de l’acouphène et de l’hyperacousie. D’autre part, cette extension duchamp d’analyse cognitive conduit le sujet à dévier son attention vers d’autres préoccupationsconcrètes.La restructuration cognitive procède de la modification de certaines pensées (des "croyancesabsolutistes") qui accompagnent l'acouphène et conditionnent des réactions délétères. Cespensées sont caractérisées par des excès, des approximationspéjoratives, des erreurs ou des conclusions inappropriées. Quelquescroyances absolutistes concernant l'acouphène sont souventrencontrées : "ça va obligatoirement devenir épouvantable si cesperceptions sonores ne disparaissent jamais", "ce type de bruit est réellement des plus déplaisants", "ilest injuste que j'aie à souffrir de mes acouphènes", "je suis certain que mon état va s'aggraver si je doissupporter cela tout le temps", "l'immense majorité de mes problèmes est causée par ces manifestationsauditives", "si ces acouphènes continuent, la vie ne vaut absolument plus la peine d'être vécue".L'ensemble de ces propositions thérapeutiques va permettre d'élaborer une stratégie d'adaptationà l'acouphène et aux situations de déclenchement ou d'aggravation. Le patient va apprendre à"gérer" son acouphène et à rendre cette manifestation aussi neutre que possible.L’analyse des circonstances de manifestation de la gêne va permettre de faire prendre consciencede l’influence des facteurs émotionnels, de l'intensité relative de l'acouphène par rapport àl’intensité sonore de l'environnement, signifiant le pouvoir masquant d’un son naturel comme lamodification de la focalisation attentionnelle selon les activités dupatient. Les réactions sensorielles et la capacité de distraction,indépendamment de l’acouphène et des circonstances sonores, serontexplorées dans la perspective d’une généralisation des apprentissagesen TCC conditionnant pour partie leur efficacité et leur pérennité.L'analyse comportementale conduit à reconnaître ce qui, par évitement ou inadéquation,maintient ou aggrave la perception de l'acouphène. La réadaptation comportementale consiste àmodifier les attitudes qui aggravent le trouble : évitements de certains lieux ou situations, pertesd'activité, environnement trop bruyant ou trop silencieux, stratégies de coucher et de sommeilanxiogènes ... Par exemple, en cas de trouble du sommeil associé à l’acouphène, le patient repèrece qui s'oppose au réflexe d'endormissement, par perte notamment de la fonction symboliqueinductrice du lit : il ne fera rien d'autre au lit que de dormir ou s'adonner au plaisir sexuel, au lieubien souvent d'y regarder la télévision ou de lire, voire de manger. Il apprend à modifier lesconditions concrètes du coucher et du sommeil (se coucher fatigué, ne pas rester au lit éveillé, selever à la même heure tous les jours avec un nombre d'heures desommeil nécessaire et suffisant). Il aménage ou corrige lesanticipations catastrophiques qui précèdent le coucher. De lamême manière, une personne qui fuit les magasins perçoit lebrouhaha comme stimulant l’acouphène.Une réexposition à cette situation, après plusieurs étapes si nécessaire, en prévenant la réponseanxieuse par un procédé de relaxation va objectiver l’inconstance de la réaction attendue ou deson intensité : l’anticipation perd son caractère obligatoire (ceci participe de la restructurationcognitive). Le sujet réinvestit progressivement, de manière hiérarchisée, des plus faciles aux plusdifficiles, des lieux et des activités, en utilisant préalablement des procédés de relaxation et uneréévaluation des anticipations faisant obstacle.

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Restructuration descroyances.

Analyse des descirconstances desurvenue de la gêne.

Analyse et réadaptationdes comportements.

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En pratique, dans le cadre de certaines consultations, hospitalières en particulier, dédiées àl’acouphène, la TCC consiste en trois premiers entretiens individuels de 60 minutes, poursuivieen travail de groupe (2 à 8 patients) d’une durée d’une heure et demi chacune, à raison d’uneréunion hebdomadaire durant huit semaines.Ainsi, dans ce protocole, la TCC comprend onze entretiens de 90 minutes chacun (soit 16 heures30 au total) sur une période d’environ trois mois. De façon complémentaire, il estsystématiquement proposé d’enrichir son atmosphère sonore au moyen de diffuseurs de sons(bruits d’ambiance, musique).Les résultats obtenus par les TCC intéressent et le symptôme et le contexte personnel quiexplique et pérennise l’intolérance au symptôme. Les évaluations chiffrées ont retrouvé desaméliorations, dépassant dans 1/3 des cas 70% des scores de gêne (détresse et handicap), pour prèsde 80% des patients dans les populations étudiées. Selon les promoteurs des TTC, il existerait unedifférence1 notable entre TRT� et TCC : il faut 11 entretiens hebdomadaires pour mettre enœuvre le protocole de TCC, soit environ 3 mois, alors qu’il est nécessaire de prévoir 18 à 24 moispour escompter des résultats avec la TRT�.

3.12.6 La prise en charge audioprothétique

• Justifications.• Les générateurs de bruit.• Une étude clinique.

3.12.6.1 Pourquoi redonner de l’audition ?Parce que dans le cadre d'acouphènes considérés comme gênants, voire invalidants, ladéficience auditive passe au second plan pour le patient; elle est peu sujet de plainte, ou alorsen tant que conséquence de l'acouphène. Le patient est souvent persuadé que la "guérison" deson acouphène soldera ipso facto son problème d'audition, qu'il ignore parfois, qu’il dénie ouqu’il néglige le plus souvent.Or il s'avère essentiel de réduire le plus possible la durée de cette privation sensorielle, afin depréserver le capital de plasticité.Par ailleurs, cette privation sensorielle participe de façon extrêmement négative au vécu del'acouphène, quelle que soit l'origine de celui-ci. Imposer au patient un appareillage seraitaller au devant d'un échec, puisque n'apportant pas une réponse à sa souffrance émergente.L'appareillage doit être proposé comme moteur d'une amélioration, pédagogiquementjustifié, pour créer une vraie motivation ; c'est à cette seule condition que l'appareillage serad'abord accepté, puis intégré et enfin efficace à la fois en terme de correction auditive et dansle cadre d'une thérapie. L'audition pourra cesser alors d'être une piqûre de rappel permanentepour retrouver son rôle de vecteur de communication, et permettre au patient de se tournervers l'extérieur, en se défocalisant de sa souffrance.Cette correction doit s'appuyer sur un interrogatoire et des tests pré-prothétiques encore plusapprofondis que dans le cadre d'une correction auditive classique. D'abord pour mieuxmettre en évidence et cerner une éventuelle gêne sociale, en l'isolant de celle consécutive auvécu de l'acouphène.Ensuite parce que le risque d'altération de la dynamique résiduelle est important(recrutement, hyper-recrutement, phonophobie, …), et qu'une sur-correction entraîneraitun inconfort ressenti comme une agression surajoutée à l'acouphène.De même, le confort doit primer dans l'adaptation initiale, tant au niveau physique qu'auniveau acoustique, et ce d'autant plus que le déni du déficit auditif est important, ou qu'il estsitué en retrait par rapport à l'acouphène. Dans ce cas en effet, tout paramètre d'inconfortprendra un relief considérable, et deviendra prétexte à un rejet de l'appareillage.

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1- Elle mériterait d'être mieux explorée.

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Une adaptation prothétique confortable et efficace peut participer à une prise en chargeglobale.

3.12.6.2 Le rapport Signal/BruitComment voulez-vous que je comprenne correctement avec le bruit que j'entends enpermanence ?"est certainement la phrase que nous entendons le plus.Si l'amélioration du rapport signal/bruit est un but constant en matière d'appareillage auditif,elle l'est plus encore pour un acouphènique.En effet, meilleure est la qualité de la perception, plus vite s'estompera le retour desassociations émotionnelles (système limbique) consécutif à la gêne, qui augmente le pouvoir dedétection au niveau subcortical.

Par ailleurs, l'amélioration du rapport S/B est primordiale pour les sujets acouphèniquesassociant une surdité endo-cochléaire (81% des cas C. Puel 2003): à ces surdités, les plusmarquées sur les fréquences aiguës, se cumule une détérioration souvent discriminative de ladiscrimination fréquentielle. D'après McDermott et coll. (1998).

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Perception et évaluation bonne qualité

Audition et autres aires corticales mauvaise qualité

CONSCIENCE

SUBCONSCIENCE

Détection Associations émotionnelles

Subcorticale système limbique

Source Contrariété, gêne

Acouphène SNA

Figure 33 - D'après Jastreboff.

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Les aides auditives actuelles étant techniquement incapables de corriger ce type dedysfonction, il importe d'optimiser le rapport S/B pour restaurer la qualité de la perception desonie, et minimiser les conséquences négatives de cette dysfonction sur l'intégration.Si la privation neuro-sensorielle génère une réduction de l'intégration temporelle et de lasensibilité aux sons faibles, la plasticité cérébrale permet, suite à l'appareillage, d'obtenir dansle temps une amélioration significative des capacités d'intégration intrinsèques dans le bruit,pour des niveaux conversationnels.

3.12.6.3 Appareillage auditif et plasticité cérébraleLes performances d’identification de mots dans le bruit chez des sujets malentendantsappareillés monauralement ont été testées :

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 34 - Chez 5 sujets ayant une chute auditive et des acouphènes, on peut constater lacoïncidence entre la tonie de l'acouphène et l'amélioration des capacités de discriminationfréquentielle dans la zone de l'acouphène. (D'après Mc Dermott, 1998).

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Taux du S/B pour 50% de performance (dB)(déviation standard)

Intensité signal Oreille aidée Oreille non aidée

65 dB SPL 13.2 1.5 10.0 1.4

70 dB SPL 9.8 1.8 8.9 1.2

75 dB SPL 7.9 1.8 7.1 1.8

80 dB SPL 6.4 1.4 7.9 1.7

85 dB SPL 4.2 1.3 6.8 1.9

90 dB SPL 2.8 1.4 6.5 1.3

Plus récemment, Hurley a comparé les scores de reconnaissance de mots lors des testsinitiaux et des deux années suivantes pour les oreilles aidées et non-aidées de sujetsappareillés monoralement .

L'amélioration pour les oreilles aidées est significative dès la deuxième année (supérieureà 30% pour certains mots), alors qu' "a contrario" une tendance à la diminution des scorespour les oreilles non aidées est notable.La plasticité cérébrale participe activement à la réhabilitation aussi bien qu'àl'habituation, et doit être évoquée dans la prise en charge prothétique de l'acouphènique;elle est d'abord extrêmement positive, même si elle doit être relativisée pour ne pasgénérer de déception à contretemps. Elle permet également de positionner l'appareillagedans la durée, de façon pédagogiquement motivée.La réorganisation neuro-physiologique (plasticité) consécutive à une lésion laisse lesneurones associés à la perception initiale: suite à une perte auditive, les neurones dont lafréquence caractéristique est concernée par la perte deviennent sensibles aux fréquencesproches de la fréquence de coupure. Ceci vient apporter un complément d'explicationaux travaux de McDermott sur la discrimination fréquentielle: c'est la désafférentationqui est responsable de cette diminution.Dans ce cadre, par extension à l'acouphène, le spectre de celui ci se situe dans la zone de laperte auditive (réorganisée), au même titre que la stimulation du visage peut évoquer dessensations dans un membre manquant (zones corticales voisines).Ce modèle est corroboré par différentes mesures mises en perspectives, effectuée parNorena en 2002 et 2003.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 36 - Scores aux tests diachroniques de reconnaissance de mots, oreilles appareillées ou non.

Figure 35 - Performances d'identification de mots dans le bruit, chez des sujets malentendantsappareillés en monoural. Gatehouse (1989).

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3.12.6.4 Restaurer un confort de communicationL'acouphénique sera appareillé dans un premier temps avec le même soin qu'unmalentendant "ordinaire", en portant une attention toute particulière à :

– l'anamnèse : survenue de la surdité, dates et/ou circonstances, antécédents médicauxet chirurgicaux, habitudes de vie, passées et présentes, gêne sociale ressentie,indépendamment de l'acouphène, etc.;

– la ou les plaintes (à hiérarchiser clairement);– aux explications, pédagogiquement adaptées à la fois au niveau socioculturel, et au

désir de savoir du patient;– aux attentes du patient, particulières, compte tenu de sa plainte;– à ses freins psychologiques, avoués ou non;– aux tests audiométriques pré-prothétiques: sans redondance, mais complets et

prudents, surtout concernant l'inconfort, même s'il n'a pas été évoquéprécédemment;

– aux objectifs prothétiques (en liaison avec l'équipe pluridisciplinaire de prise encharge le cas échéant): ils doivent être précis, pour intégrer la prise en charge dans letemps, positifs et réalistes, pour ne engendrer de déception,

– aux capacités du patient, et adaptatifs.Le choix prothétique devra s’inscrire dans le possible cadre d'une T.R.T., même si ce n'est pasle cas initialement, et donc éventuellement prévoir l'adjonction d'un générateur de bruitthérapeutique.Particularités concernant l'acouphène:

– anamnèse spécifique: date de survenue de l'acouphène, circonstances, type,localisation, questionnaires complets (toujours sans redondance) portant sur lasévérité et la gêne sociale ressentie. Ces questionnaires SEV et THQ (voir en annexepage : 132) validés présentent un double intérêt en terme de prise en charge: ilspermettent après interprétation de dresser un profil relativement précis du patient etdu vécu de son acouphène, et de suivre l'évolution de ce vécu au fil de la prise encharge.

La difficulté réside dans la complexité de certaines questions, pas toujours évidentes pour lepatient. Le problème est de savoir si le patient doit les remplir seul, sans faire intervenir lasubjectivité d'une tierce personne, ou s'il doit les remplir avec l'audioprothésiste.

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Figure 37 - Spectre de la perte auditive. Spectre de l'acouphène.

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Le questionnaire de détresse doit être réservé à l'équipe médicale le cas échéant (médecinORL ou psychothérapeute): le contenu de certaines questions obligeant l'interlocuteur à sesubstituer à un rôle de psychologue, qu'il n'est pas forcément, ou qu'il n'est pas suffisamment,ou pour lequel il n'est pas formé. Un questionnaire d'hypersensibilité auditive est égalementdisponible: il permet d'établir une classification en cas de diminution de la tolérance au bruit.A l'inverse du recrutement pur, ni l'hyperacousie, ni la misophonie, ni la phonophobie n'ontde relation directe avec les seuils auditifs mesurés; les patients atteints de l'une de cesmanifestations peuvent ou non présenter une perte auditive associée.Une écoute attentionnée est là encore plus importante que pour une prise en charge"classique". D'un point de vue psychologique (hors prise en charge pluridisciplinaire), le sujetacouphènique ne demande qu'à verbaliser sa souffrance à quelqu'un qui l'écoute et lecomprenne. Attention toutefois de ne pas verser dans l'excès et se laisser « embarquer » dansun rôle qui n'est pas le sien et pour lequel on n'est pas armé, au risque d'y laisser des plumes,et/ou de commettre des impairs pouvant remettre en cause la qualité de la prise en chargeprothétique de façon irrémédiable.Tests psycho-acoustiques : profil de l'acouphène (encadrement fréquentiel par comparaisonipsi- ou controlatérale), intensité (recherche du niveau de masquage énergétique(narrow-band, bruit blanc, ou rose), et/ou informationnel (cocktail party).Les objectifs doivent s'intégrer dans le cadre d'une prise en charge globale, incluant lesobjectifs qui concernent la correction de l'audition. Ils doivent là aussi être positifs, maisréalistes, et se porter dans la durée. L'objectif principal de la prise en charge prothétique auniveau de l'acouphène doit rester l'amélioration de la qualité de vie, souvent dans la régularitéet dans le temps (d'où l'intérêt de la réitération de questionnaires de loin en loin), trèsrarement de façon immédiate.L'adaptation d'aides auditives dans le cadre d’acouphènes associés au déficit auditif et enl’absence de prise en charge pluridisciplinaire, n'est pas un remède miracle; si l'améliorationsur le plan de la communication est dans la majorité des cas très significative, la disparition del’acouphène immédiate, totale et permanente reste rarissime. Il convient donc de fixerconjointement avec le patient des objectifs possibles, bien perçus et acceptés. C'est la clé devoûte de la prise en charge.L'adaptation prothétique doit être progressive, et les réglages motivés par les différents testspratiqués. La notion de confort passe d'essentielle à primordiale, tant au point de vuephysique, qu'acoustique ou émotionnel, quitte à sous-corriger l'audition et revoirrapidement son patient. Le suivi doit être fréquent, pour toujours coller à une correctionoptimale et stimuler les zones lésées pour appuyer la réorganisation tonotopique. Laréhabituation mérite d'être surveillée de près. Mais pour qu'il y ait réhabituation, il faut qu'il yait port régulier, et pour qu'il y ait port régulier, il faut que l'appareillage soitCONFORTABLE. CQFD… Ce qui est d'autant plus vrai que la plainte due à l'acouphèneest importante.

la question de l’emboutDans le cadre de surdités présentant une perte auditive en pente des graves vers les aigus (ycompris les surdités traumatiques), soit environ 80% des cas, la sensation d'occlusion duconduit auditif est une plainte qui revient de façon itérative, si l'embout n'est pas aéré defaçon suffisante. Le diamètre de l'évent nécessaire pour éviter cette sensation estproportionnel à la fréquence du point d'inflexion de la perte auditive. En première intention,et à titre indicatif, un diamètre de 2mm de diamètre correspond à des graves conservés jusqu'à500Hz, 2,5mm une baisse à 1kHz, 3mm et plus au-delà.Dans le cadre de la correction de surdité associée aux acouphènes additionnée d'unedétérioration importante de la perception de sonie, l'évent peut accueillir un filtre mécaniquehabituellement utilisé dans les protections anti-bruit: l'appareillage cumule alors uneamplification contrôlée par l'utilisation de facteurs de compression importants et d'écrêteurs

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puissants, et une protection aux fortes intensités par le filtre, ce que ne permet pas un éventclassique.Mais avec l'aération se pose le problème du larsen, réultat de la saturation dans la boucleamplificatrice; l'aide auditive siffle, seule, ou dès que cette boucle est facilitée (passage de lamain dans les cheveux, chapeau, mur frôlé, etc). Ce phénomène est d'autant plus importantque l'amplification nécessaire sur les fréquences aiguës est importante; la fréquence derésonance se situe en effet autour de 3kHz.Même si les aides auditives numériques possèdent des dispositifs électroniques anti-larsen, laréduction chronique de gain (en particulier pour les sons de faible intensité) rend lacorrection peu attractive au niveau prothétique, et l'adaptation problématique en raison de ladifficulté à trouver le bon équilibre entre confort et efficacité.Mais devant l'émergence de la nouvelle génération de surdités légères prêtes à êtreappareillées (presbyacousies naissantes pour le papy-boom, et traumatismes sonores "légers"à répétition pour les amateurs de musique forte), les fabricants ont mis au point des stratégies"oreille ouverte" permettant entre autres de reculer les limites de l'apparition du larsen, etainsi de corriger des pertes auditives jusque là difficiles (Canta Open, Triano TA, Air 60).Ces aides auditives peuvent être utilisées pour corriger des pertes auditives associées auxacouphènes, avec un excellent compromis confort/efficacité.La possibilité nouvelle de corriger ce type de surdité va sans doute aider à faire prendreconscience aux acouphèniques pour qui la baisse d'audition est tout à fait secondaire qu'unappareillage précoce favorise une réhabituation rapide et de qualité, et aux médecins ORLque ce type de surdité, jugé il y a peu inappareillable, peut être actuellement corrigé dans detrès bonnes conditions, en utilisant au mieux le capital de plasticité cérébrale de leurs patientsle plus précocement possible.

3.12.6.5 Le générateur de bruit blanc (GBB)Plusieurs types de générateurs différents sont proposés, ces derniers peuvent être associés àdes prothèses auditives. Le point important est que le générateur doit répondre à descaractéristiques électroacoustiques précises. Les qualités du son demandées sont :● Couverture d’une large bande de fréquence laquelle doit inclure celle des acouphènes.● Etre le plus neutre et stable possible.● Etre privé d’associations émotionnelles.● Avoir la puissance sonore capable d’atteindre le « mixing-point ».Par rapport au masqueur d’acouphène classique utilisé dans le but de « couvrir »complètement l’acouphène et d’exploiter le phénomène d’inhibition résiduelle, le GBB dansla TRT sert à réduire le rapport signal/bruit pour faciliter les procédures de désensibilisation.

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Figure 38 - « Mixing point »En abscisse : l’intensité du sonmasquant, en ordonnée : ledéveloppement de l’habitua-tion. On constate que le sondoit être entendu pour déve-lopper une habituation. L’in-tensité du bruit ne doit pasdépasser l’intensité du« mixing point », point où lesujet ne sait plus si ce qu’il en-tend est « son acouphène » oule générateur de bruit.Au-delà, pour une intensitéplus forte, c’est un masquage,peu propice au développe-ment de l’habituation.D'après P. Jastreboff.

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Les avantages portés au crédit du GBB par rapport aux techniques d’enrichissement sonoreambiant consistent à pouvoir disposer d’un stimulus à large bande bien contrôlable en tempsd’exposition et d’intensité. Ces paramètres de stimulation sont personnalisés pour chaquepatient.

Application du GBB à la TRT● L’application du GBB doit être effectuée de façon différente en fonction du vrai traitement

(fitting1, counselling2) ou dans la phase successive de suivi du patient (follow-upcounselling).

Le premier rendez-vous dure approximativement 45 minutes et consiste en une explicationclaire et détaillée sur la façon d’appliquer l’appareil, son usage, l’utilisation correcte duvolume et le temps d’utilisation.Les rendez-vous suivants permettent de contrôler, par le biais de questionnaires, l’utilisationcorrecte de l’appareil et d’évaluer les éventuels changements à apporter au volume et autemps d’utilisation sur la base de critères d’évaluation psycho-acoustiques.Initialement, le patient doit être ré-examiné après trois semaines, ensuite après trois mois etenfin tous les six mois. Le protocole de traitement doit durer au maximum deux ans.

● Quelle oreille ?Les générateurs de bruit doivent être si possible appliqués dans les deux oreilles, même dansles cas d’un acouphène mono latéral. Il faut toujours régler les générateurs de bruit une foispositionnés dans les oreilles et procéder au réglage l’un après l’autre.

● Quel volume ?Il faut appliquer le GBB, vérifier sa position, le confort et le caractère non occlusif del’embout. Une fois cette première phase achevée, on peut activer le GBB et augmenter levolume jusqu’à ce que le son soit clairement audible par le patient.Il faut demander au patient si :

– Le son est agréable et pas gênant.– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.– Si la réponse à l’une ou à l’autre demande est « oui », lire les points A et B.

♦ A. Si le son n’est pas confortable voire désagréable, diminuez le volume du GBBjusqu’à trouver le niveau de confort.

♦ B. Si le bruit modifie l’acouphène, diminuez le volume du GBB jusqu’à ce quel’acouphène ne soit plus perçu comme normal et le bruit du GBB soit audible.

Si le son du GBB est confortable, il n’a pas modifié l’acouphène, il faut alors augmentergraduellement le volume. Demander au patient de signaler à quel moment le bruit du GBB etl’acouphène sont mélangés. Laisser le GBB réglé sur ce niveau pendant quelques minutes.Après quelques minutes, demander au patient si :

– Le son est agréable et pas gênant.– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.

Si la réponse à l’une ou à l’autre demande est « oui », lire les points A et B précédents, sinonlire le point C.

♦ C. Si le bruit n’est pas gênant et l’acouphène n’est pas modifié, le « mixing-point »est atteint et il correspond au niveau d’utilisation correct du GBB.

Eteindre le premier GBB. Appliquer le même mode opératoire pour l’autre oreille.Allumer successivement les deux GBB.

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1- * appareillage.2- **conseil.

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Demander au patient si :– Le son est agréable et pas gênant.– L’acouphène est modifié d’une façon ou d’une autre par le biais du bruit.– Le bruit des deux GBB est équilibré.

Si le son n’est pas confortable voire gênant, lire les points A et B.Si le son n’est pas équilibré, augmenter le volume du GBB le plus faible pour atteindre leniveau de l’autre GBB et réduire successivement le volume des deux GBB vers le« mixingpoint » le plus bas.Poursuivre la consultation sans modifier les réglages des GBB.Montrer au patient la modalité de réglage et le positionnement des piles sur un GBB dumême modèle. Montrer la mise en fonction et la manipulation au moins 3 fois par oreille.

Vérifiez si :– Le bruit du GBB est confortable, de cette façon, il sera toléré sur de longues périodes.– Le volume du bruit du GBB est au « mixing-point » ou légèrement en dessous.– L’acouphène ne doit être altéré en aucune façon.– Le patient réussit à placer les GBB sans difficultés.

● Protocole type

Suggestions du protocole à discuter et adapter à chaque cas.

Premier mois :Le GBB doit être réglé à l’intensité minimale audible en conditions de silence et l’intensité nedoit pas être modifiée pendant le premier mois.

– Première semaine : Le GBB doit être porté 2 heures par jour en conditions de silence.– Deuxième semaine : Le GBB doit être porté 3 heures par jour en conditions de

silence.– Troisième semaine : Le GBB doit être porté 4 heures par jour en conditions de

silence.– Quatrième semaine : Le GBB doit être porté 5 heures par jour en conditions de

silence.

Deuxième mois :Au début du deuxième mois, l’intensité du bruit du GBB sera légèrement augmentée maissans interférer avec la compréhension de la parole et sans masquer l’acouphène.Le GBB sera porté pendant 6 heures par jour, parfois en continu et d’autres fois de façonintermittente, en choisissant de préférence les périodes les plus silencieuses de la journée.Protocole alternatif :

– 1er mois : 1 heure– 2ème mois : 2 heures– 3ème mois : 3 heures– 4ème mois : 4 heures– 5ème mois : 5 heures– 6ème mois : 6 heures– 7ème mois : la majeure partie du temps.

Cette thérapie doit être appliquée pendant plusieurs mois.

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● Instructions pour le patient :

– Les GBB devront être portés au moins 6 heures par jour sans interruption ; si lepatient réussit à les garder sur des périodes plus longues, c’est encore mieux.

– Les GBB devront être portés dans les périodes les plus silencieuses de la journée.– Le réglage doit être effectué en conditions de silence.– Une fois le bon réglage effectué, le volume ne doit plus être modifié.– Si le bruit du GBB n’est plus perçu (par exemple, dans une ambiance bruyante), ne

plus augmenter le volume du GBB car cela serait sans incidence sur l’efficacité dusystème.

Adaptation au GBB :Le patient aura besoin de quelques semaines pour s’habituer au GBB. Si l’acouphène sembleplus invasif (plus gênant) pendant les premières semaines d’adaptation, les causes possiblessont :

– L’application des GBB rappelle au patient l’existence de l’acouphène.– Les GBB sont une nouveauté et nécessitent une période d’adaptation pour s’habituer

à leur présence.– Le patient est anxieux et surveille les effets du GBB sur l’acouphène.

Il ne faut pas oublier de conseiller au patient d’utiliser les GBB surtout à la maison pour sefamiliariser avec l’utilisation de ces appareils.

Quelques précisions :– Si l’acouphène est fluctuant, le GBB peut être porté soit pendant les jours « négatifs »

soit pendant les jours « positifs ». Pendant les jours positifs, on peut baisser le volumedu GBB.

– Les GBB devront être portés pendant au moins 6 mois. Le but est d’arriver au pointoù l’acouphène ne représente plus un problème pour le patient, même dans lespériodes où il ne porte pas le GBB. A partir de ce moment, il faudra diminuerprogressivement l’utilisation du GBB jusqu’à son arrêt complet.

– Le but n’est pas de masquer l’acouphène. Si cela arrive, cela signifie que le volumeétait réglé de manière trop élevée. Le bruit du GBB et l’acouphène doiventimpérativement se mélanger tout en restant reconnaissables.

– De nuit, le GBB ne doit pas être porté, le patient doit utiliser une radio, posée à cotéde son lit, à volume très bas et syntonisé entre deux stations radiophoniques.

3.12.6.6 Une étude cliniqueApport d’une prothèse acoustique et d’un bruiteur conjoint (Contour d’oreille TCI-COMBI®de Siemens®) dans le traitement des acouphènes chez des sujets hypoacousiquesLa prise en charge thérapeutique des sujets porteurs d’acouphènes invalidants comporte unaxe important : la mise en œuvre des processus d’habituation. La prise en charge des sujetsacouphéniques ET déficients auditifs est complexe, mais bénéficie d’un atout majeur : lacompensation de la surdité. On propose donc classiquement :

– un appareillage prothétique qui comprend toujours une prothèse amplificatrice, àlaquelle on adjoint parfois un bruiteur.

– un soutien psychologique axé sur l’acceptation du symptôme grâce à sacompréhension.

La conjonction de ces éléments aboutit à l’habituation, phénomène classique de lapsychologie sensorielle : Le sujet, soit par une perception amoindrie, soit par des réactionsaversives diminuées, soit par la conjonction de ces deux processus supporte mieux sonacouphène.

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L’apport d’une prothèse auditive amplificatrice à faible bruit de fond qui peut aussi générerun bruit blanc à bande large modulable en intensité et réglable en tonalité a été étudié chez 30sujets pendant le temps habituellement imparti à l’habituation.

Principes de l’étude :Évaluer l’apport d’un bruit non masquant (déterminé au point de confusion entreacouphène et bruit ajouté) au processus d’habituation à l’acouphène. Evaluer l’efficacité de laprothèse auditive TCI-Combi® capable de fournir ce bruit, simultanément à l’amplificationauditive classique, par la mesure de la doléance des sujets par auto-questionnaires.Les 30 sujets sont appareillés avec le TCI-Combi® (27 sujets en binaural, 3 en monaural)en 2 phases successives :

Phase A : de 10 à 12 semaines en amplification seule.Phase B : de 10 à 12 semaines en amplification+bruit. L’ordre des phases est aléatoire.Le sujet est son propre témoin.Les sujets se sont engagés à porter la prothèse au moins 6 heures par jour. La complianceà la consigne est déclarative.A la fin de l’étude, les sujets pouvaient restituer la prothèse ou l’acquérir.Pendant les 24 semaines les sujets ont répondu chaque semaine à 3 questionnaires validésTHQ, DET, SEV (76-77).Sauf réglage inconfortable nécessitant un retour au service, les patients n’ont été revusqu’au changement de phase (12ème semaine) et à la fin de l’étude ( 24ème semaine)

Résultats cliniques pour les 24 sujets qui ont effectué les 2 phases de test :5 sujets ont restitué les prothèses en fin d’étude.1 sujet a restitué les prothèses pour les remplacer par leur version intra. Il a été comptabilisé parmi les« satisfaits ».Parmi les 18 sujets qui ont souhaité conserver le TCI-Combi® en fin d’étude, nousavons distingué le réglage choisi.6 sujets ont gardé les prothèses en amplification seule :12 sujets ont choisi de garder l’appareil en position amplification ET bruiteur. Parmiceux-ci 2 patients qui avaient déjà essayé des masqueurs d’acouphènes.Après 24 semaines d’appareillage 60% des sujets gardent le TCI-Combi® dont 67% enposition amplification+bruit.En résumé :– 20 % (6/30) des patients sont sortis de l’étude– 20% (6/30)des sujets ont restitué l’appareil– 60% (18 /30) des sujets ont gardé le TCI-Combi®.Parmi ces 60% (18/30) de satisfaits,– 33% (6 /18) des sujets ont gardé une amplification seule et– 67% (12 /18) une amplification avec bruit.

Pour les 28 sujets dont les questionnaires étaient analysables:– Au questionnaire DET, on note une baisse statistiquement significative des scores,

entre le questionnaire à J0 et les questionnaires hebdomadaires● ConclusionCette étude met en évidence un bénéfice potentiel du TCI-combi® pour des sujets quiprésentent des acouphènes invalidants, relativement récents, ajoutés à une surdité

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moyenne à sévère. Le modèle est celui d’une thérapie auditive efficace aux moyensmoins lourds que ceux d’une thérapie sonore par l’habituation (TRT) puisque lesentretiens de suivi ont été remplacés par un lien épistolaire et que la période de suivi n’aété que de 24 semaines.

3.12.7 Le rôle central de l’informationL’information joue un rôle central dans la prise en charge de l’acouphène. Toutes lesthérapeutiques psychologiques s’y attachent. En général, la quantité d’information est plusgrande dans un signal inconnu. Un tel signal mobilise largement le système cognitif du sujet afinde savoir si le signal est dangereux pour sa survie. L’acouphénique va pendant longtemps tenter dedépister les raisons de la variabilité de l’acouphène. Il y mobilise son attention, la polarisant surl’acouphène. Comme l’ont affirmé nos anciens, il y a peu de relation logique entre le symptôme etla plainte :

« la douleur est toujours moins forte que la plainte » ( Jean de la Fontaine)

« la plainte surfait toujours un peu les afflictions » (D. Diderot)De cela aussi il faudra informer le patient pour éviter le cercle vicieux : la polarisation surl’acouphène augmente sa détection, qui augmente sa plainte.La plainte a pour but de manifester « la douleur » pour la diffuser et la répandre…Elle force la demande d’attention et de soins…Elle peut aussi protéger la douleur pour que rien ne change. L’acouphène peut apporter desbénéfices secondaires.L’information peut être donnée individuellement ou collectivement. C’est ce que nousaborderons maintenant : les réunions de patients.Le jeu des questions et des réponses, les paraboles, constituent l’exercice de la consultation.Enfin le ressenti souvent lourd est à connaître pour estimer à son juste titre la souffrance del’acouphénique.

3.12.7.1 Les réunions de patientsLes patients porteurs d'acouphènes se sentent souvent incompris; ils ont l'impression desouffrir d'une pathologie chronique pour laquelle ils se demandent s’ils ont bénéficié d'unbilan médical complet et si leur médecin leur a proposé tout ce qui pourrait les soulager. Ilsvont alors consulter de nouveau des ORL "spécialisés"sans relâche et essayer de se renseignerpar eux-même, en ayant recours aux informations collectées par le bouche à oreille, la presseet plus récemment Internet. Mais il n'est pas facile, pour un novice, de faire le tri de cesdonnées, les plus sérieuses côtoyant les plus fantaisistes….Tout médecin a le devoir d'informer mais la pratique en consultation rend difficile de faire àla fois la consultation médicale "classique" avec approche étiologique, thérapeutique, et ausside donner les explications sur les mécanismes physiologiques de l'audition et sur lesmécanismes d'apparition des acouphènes.

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3.12.7.1.1 Pourquoi des réunions regroupant une équipe médicale et des patients ?Face à une forte demande de consultations, dès 1991, une consultation acouphèneregroupant ORL, psychologue puis orthophoniste, a vu le jour. Cette consultationn'accueille que des patients porteurs d'acouphènes, dirigés vers cette consultation par desinfirmières formées à cette pathologie. Informés par les médias et séduits par cet accueilspécialisé, les patients ont afflué; les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous sontdevenus importants, aggravant l'anxiété des patients.Très rapidement, il est apparu que la majorité des patients qui venaient consulter avaientvu le plus souvent plusieurs confrères et que s'ils avaient bénéficié de bilan étiologiquecomplet, ils étaient déçus par ces consultations et réticents aux traitements. Ils venaientdonc re-consulter soit pour être rassurés sur ce qui leur avait été dit et proposé, soit pourobtenir des explications sur leur maladie et savoir si autre chose pouvait leur être prescrit.L'idée a germé de faire une information à un groupe de patients, qui ont déjà vu au moinsun ORL, afin de diminuer l'attente anxieuse du premier rendez-vous, et de répondre à cebesoin légitime d'information.Cette information se doit d'être accessible à tous, tout en respectant les règlesdéontologiques, les principes éthiques de la relation médecin-malade : bienfaisance, nonmalfaisance….Ces colloques sur les acouphènes ont lieu tous les trois mois, au sein de l'hôpital, endébut d'après-midi, ils sont gratuits. Ils réunissent en moyenne 50 auditeurs, certainssont accompagnés et parfois même certains sont délégués (ils assistent à la place de lapersonne concernée qui n'a pas pu se libérer). Des brochures d'information réaliséesdans le service leur sont remises, qu'ils pourront conserver et relire tranquillement.

3.12.7.1.2 Comment se déroule le colloque?La séance se déroule en deux parties : la première est un exposé théorique par lesmembres de l'équipe, et la deuxième est consacrée aux questions des participants à lacondition qu'elles soient d'intérêt général. Il s'agit de faire une information collective etnon une consultation de groupe.La présentation s'apparente à un cours magistral avec support visuel, chaque membre del'équipe prenant la parole successivement : une infirmière pour l'accueil et l'organisationde la consultation, l'orthophoniste pour l'audiométrie et l'impact d'une surditééventuelle sur la communication, la psychologue, et principalement les médecins ORL.Classiquement l'exposé se déroule en une première partie pédagogique : présentationphysiologique, anatomique, pour très vite aborder le patient dans sa globalité et dans sasouffrance. La psychologue explique que son rôle est d'entendre la souffrance d'un sujet,qui a un passé et qui actuellement centre sa souffrance sur ses acouphènes. Et c'est à cetitre qu'elle recevra le patient à sa demande et celle de l'ORL.Le bilan audiométrique est incontournable, il sert de témoin pour annoncer dans laplupart des cas une déficience auditive qui est la vraie cause de gêne auditive, replaçantainsi l'acouphène à la place de symptôme.Les notions acouphène symptôme / acouphène maladie sont identifiées et il est alors plusfacile d'expliquer la prise en charge de l'un ou de l'autre. Le patient comprend que c'est luique nous soignons et non pas son acouphène.

La deuxième partie laisse place aux questions des patients, bien que ces questions soientindividuelles, chacun y trouve un intérêt. Certaines questions nous paraissentredondantes, c'est alors le moment de reprendre ce qui n'a pas été compris ou admis. Iln'est pas toujours facile de satisfaire tout un auditoire non sélectionné, de tout âge, detous niveaux socio-culturels, venu là de son plein gré pour recueillir des informations endirect d'une équipe spécialisée.

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Le fait de se retrouver ainsi en groupe permet aussi de rompre l'isolement de certains.A l’équipe soignante, ces colloques donnent l'occasion d'échanger avec un groupe depatients. La transmission de notre pratique à un public diversement informé est riched'enseignements : savoir être clair et didactique, adapter son discours à un publicespérant repartir avec la solution miracle (la baguette magique), ne pas les décevoir, leurfixer des objectifs réalistes. Des simples petits conseils pratiques peuvent les apaiser etaméliorer leur vie quotidienne jusqu'à leur rendez-vous de consultation dont, parfois, ilsn'ont plus besoin.

3.12.7.1.3 Quel est le bénéfice de ces réunions?De 1999 à 2002, nous avons demandé aux personnes assistant à ces colloques de remplirdes questionnaires anonymes, avant et après les colloques pour apprécier leursatisfaction, et un éventuel bénéfice sur leurs acouphènes.Nous avons utilisé deux types de questionnaires :– le premier (THQ) est un questionnaire un peu difficile à remplir, traduit de l'anglais,

il comprend 27 questions pour lesquelles les réponses sont une cotation entre 0 et100%. Il a l'intérêt d'être utilisé par de nombreuses équipes qui peuvent donccomparer leur population. Un premier THQ, avec numéro d'anonymat, était donc àcompléter en tout début de séance.

– un deuxième THQ, même numéro d'anonymat, six semaines après le colloque et ildevait être ré-adressé par courrier.

– Nous avons proposé un autre questionnaire, beaucoup plus simple à remplir, pourapprécier l'intérêt que la personne a eu pour le colloque, il était rempli dès la fin ducolloque et un deuxième était rempli six semaines plus tard.

Nous avons collecté 258 questionnaires les jours des colloques, et 113 ont été reçus aprèssix semaines, soit 43,8 % de retour.

Le dépouillement montre pour le questionnaire plus simple à remplir :– une satisfaction immédiate de 88 % (figure 40)

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CLINIQUE ET PRATIQUE

THQ bénéfice bénéfice THQ

Colloque + 6semaines

Figure 39 - Chronologie des évaluations du bénéfices des réunions de patients.

Figure 40 - Indice de satisfaction. Figure 41 - Indice de satisfaction.

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– après six semaines, 87 % des patients (figure 41) qui ont retourné leur questionnaire,estimaient avoir un bénéfice global avec dans 42 % des cas une améliorationsubjective de leur acouphène.

Pour le questionnaire THQ, sur 258 questionnaires rendus en fin de colloque, seuls 189étaient exploitables (les autres étant incomplets, illisibles,…), et, après six semaines, 87étaient exploitables, avec seulement 73 patients ayant rempli correctement les deux . Ona donc pu voir l'évolution globale (figure 42) et, pour 73 patients, une évolutionindividualisée en comparant les variations de réponses pour chacun (figure 43).

Ce questionnaire s'interprète en regroupant les différentes réponses pour avoir plusieursscores : F1= retentissement psycho-social,

F2= handicap auditif,F3= retentissement subjectif,SG= score global.

L'analyse statistique a permis de voir une amélioration après le colloque, avec unedifférence significative entre le questionnaire de départ et celui six semaines plus tard,pour deux facteurs : le retentissement psycho-social F1 qui est passé de 49,61% à 43,9%,et le score global SG qui est passé de 52% à 49,2%.

Le facteur témoignant du retentissement auditif, F2, est resté relativement stable, ce quiest logique. Il n'y a pas de raison que l'audition change grâce à une simple information.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 42 - Evolution globale du THQ. Figure 43 - Evolution individuelle au THQ.

Figure 44 - Evolution du retentissement psycho-social et duscore global.

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L'analyse de ces résultats doit tenircompte :– De notre population, sur

laquelle nous n'avons pas dedonnées démographiques.Mais en la comparant à d'autresséries grâce au questionnaireTHQ de départ (figure 45),nous pouvons constater que lesdifférents scores sont élevés, cequi témoigne d'unretentissement plus importantdes acouphènes. La populationqui assiste à ces colloques a déjàconsulté au moins un ORLpour les acouphènes, voire dans60% des cas plus de 3. Ce type de patient avec une symptomatologie bien ancrée, estprobablement plus demandeur d'explications, et/ou séduit par notre type defonctionnement en équipe hospitalière.

– De la difficulté à remplir pour bon nombre de patients des questionnaires. Nousavons choisi d'en élaborer un très simple qu'ils ont "envie" de compléter, associé à unautre plus complet, mais plus ardu. Nous leur expliquions en tout début de séance, lafaçon de remplir le THQ, tout en insistant sur l'intérêt que nous portons à leursréponses immédiates et tardives. Malheureusement, le taux de THQ exploitables(73,25% immédiats, 76,99% à six semaines) est limité. Il permet néanmoins uneanalyse statistique fiable.

– Du nombre limité de retour à six semaines, avec un taux de 44%. Ce chiffre est àcomparer aux valeurs usuellement rencontrées par les instituts de sondage; unmailing commercial avec enveloppe T enregistre un taux de retour de 5 %, et il seraitau maximum de 20%, si le questionnaire est « facile », centrée sur la personne, et si lapopulation ciblée est convaincue de contribuer à une cause utile.Ce taux de 44 % indiquerait donc une bonne adhésion des patients.

Grâce à ces résultats, l'intérêt et la satisfaction des patients pour ce type de réunion estmontrée. Pour l'équipe soignante, les consultations ultérieures sont différentes : lepatient arrive moins anxieux, il sait qui il va rencontrer lors de la consultation spécialisée,comment va se dérouler cette consultation, quelles sont les différentes explorations, aviset orientations thérapeutiques que le médecin pourra lui proposer. Il sait aussi mieuxformuler sa demande : inquiétude sur une pathologie grave, une éventuelle évolution,soins adaptés,…. .D'autres équipes médicales pratiquent également des réunions de patients: le diabète ennutrition, les troubles du sommeil, les troubles bipolaires ou les conduites addictives enpsychiatrie, …; elles ont montré l'intérêt soulevé par l'apport de connaissances médicalesciblées, par la réflexion et la discussion sur la pathologie dont souffre le patient et quialtère sa qualité de vie. Lors de ce type de réunion, les actions éducatives sontindiscutables, il y a une excellente réceptivité des patients, avec prise de conscience de lanécessaire modification de comportements inappropriés et modification des conditionsde vie visant à un effet bénéfique à long terme sur la pathologie.

ConclusionCes réunions de groupe ne se substituent pas aux réunions de patients proposées par lesassociations qui ont un rôle fédérateur, où ils peuvent s'exprimer librement.

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Figure 45 - Comparaison des scores de nos patients àceux d’études antérieures.

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Les réunions avec l'équipe médicale apportent aux patients la possibilité d'avoir uneinformation médicale simple, accessible, intelligible et loyale, ciblée sur leur pathologiepar une équipe multidisciplinaire.Tout comme les autres équipes soignantes qui organisent des réunions de patients, notredémarche s'inscrit dans un but éducatif et éthique.Par ce type de réunion, le patient éclairé participe à sa prise en charge; il devient alorsacteur de son projet thérapeutique, et gère ainsi mieux son acouphène.

3.12.7.2 Le jeu des questions-réponses : les 3 "ritournelles"...

3.12.7.2.1 "C’est vasculaire" :De très nombreux patients, encouragés par avis de leur médecin traitant, proposentspontanément comme cause vraisemblable de leur perception sonore fantôme, une atteintevasculaire. Il est particulièrement frappant de constater que dans l'immense majorité des cas,ces explications spontanées surviennent en absence de tout contexte de pathologie vasculaireconnue et /ou traitée. Il apparaît vraisemblable que cette hypothèse est liée aux possibilités deprescription de produits vasculo-protecteurs, oxygénateurs, vaso-dilatateurs. Il est encoreplus surprenant de voir de nombreux patients utiliser quotidiennement depuis de trèsnombreux mois ces produits sans aucun effet mais sans remettre en question l'hypothèse et àfortiori le traitement.C'est donc fréquemment dans ce contexte que nous sommes amenés à intervenir pour tenterde déloger cette affirmation de l'esprit des patients. Les explications techniques sont engénéral parfaitement inefficaces et la solution de loin préférable consiste à réorienter lediscours vers les hypothèses neuro-physiologiques maintenant bien admises.Il est également tout à fait surprenant d'observer que la majorité des patients porteurs depathologie cardio-vasculaire grave n’ont pas particulièrement d’acouphène.En ce qui concerne l'hypertension artérielle, il semble que seule une montée brutale depression est susceptible d’entraîner la perception d'un bruit, fréquemment non pulsatile.Insistons sur le rôle de l'aspirine dans la survenue au moins temporaire d'acouphène.Néanmoins les doses habituellement employées en cardiologie sont nettement en dessous duseuil déclenchant les effets secondaires.Dans de rares cas pourtant, une interruption brutale de la microcirculation labyrinthiquepeut aboutir à un acouphène. L'exemple type de cette situation est la cardiopathie emboligèneavec ou sans surdité ou vertige brusques.

3.12.7.2.2 "De toute façon, il n’y a pas de traitement" :De très nombreux patients commencent l'entretien avec leur médecin O.R.L. par ce typed'affirmation, probablement à la fois parce qu'ils en sont convaincus et par provocation pourentendre naturellement une autre réponse que celle qui leur a été apportée par leurentourage. Celui-ci exerce un pouvoir de nuisance facile à reconnaître et contre lequel ilfaudra réagir.Cette attitude est très surprenante quand on connaît le pronostic des cancers du pancréas oudes dégénérescences maculaires, pathologies qui ne soulèvent pas ce genre d’assertion.Il semble donc nécessaire d'avoir une réponse à la fois ferme et précise pour faire comprendreaux patients que leurs pathologies laissent place à de nombreuses solutions thérapeutiquesainsi qu'à des améliorations importantes.

– A- un acouphène est un symptôme pour lequel il va falloir faire une évaluationpermettant d'adapter la thérapeutique. Il n'y a pas plus de traitement standard del'acouphène que de la fièvre ou de la diarrhée.

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– B- les techniques thérapeutiques sont nombreuses et doivent être présentéesrapidement éventuellement avec un support papier. Celui-ci peut être trouvé sur ledernier rapport de la société française d'O.R.L. consacré aux acouphènes.

– C- il est également important de bien préciser que cette thérapeutique s'étale surplusieurs mois compte-tenu des objectifs recherchés (obtention d'uneautomatisation de la perception d'un signal qui s'intègre dans le cadre d'unapprentissage).

– D- le patient et son médecin traitant se retrouvent alors dans la situation ordinaired'un malade face à sa maladie pour lequel un rationnel thérapeutique est proposé.

3.12.7.2.3 "Je vais devenir sourd" :Le lien acouphène/surdité est une évidence statistique pour tout O.R.L.. Cependantprobablement environ 5 à 10 % des patients acouphèniques ont des tests audiométriquesstandards normaux. Inversement un nombre très important bien que non précisable de sujetsatteints de surdité en particulier neuro sensorielles ne se plaignent pas d'acouphène.Il est donc très important que l'O.R.L. puisse faire partager l'idée d'un découplage évolutifentre l'acouphène et la surdité. Il faut que le patient soit convaincu du fait que l'on peutaméliorer son acouphène sans que l'audition ne change et que d'autre part, si l’audition sedégrade avec le temps en lien avec un vieillissement physiologique, l’acouphène n'a aucuneraison particulière de s'aggraver bien au contraire.Ce point est absolument fondamental à la fois sur le plan théorique pour l'O.R.L. (il validebien le fait que le caractère agressif du signal n'est pas en lien avec l'intensité de la baisseauditive mais avec le processus d'intégration centrale), et sur le plan pratique pour le patient :s'il faut améliorer l'audition pour diminuer le caractère agressif de l'acouphène, aucunesolution n'est en vue pour de nombreuses années.Le contre-exemple naturellement est la surdité brusque qui récupère en apparencecomplètement laissant en place un acouphène parfois invalidant et qui nécessitera une priseen charge spécifique.

3.12.7.2.4 Les FAQ de l’association France-Acouphènes

– Y a-t-il un traitement contre les acouphènes et/ou contre l’hyperacousie ? (90% à 95%)– Les acouphènes ou maladie de Ménière ou hyperacousie, à quoi c’est dû ? (80% à 90%)– Comment peut-on "détecter" la provenance des acouphènes ?– C’est parce que je suis « vieux » ? Est-ce une fatalité due à l’âge ?– Pourquoi certains ORL prescrivent systématiquement des médicaments ayant des effets secondaires

lourds, sans même essayer de trouver la provenance des acouphènes ?– Qui faut-il consulter quand on a un acouphène ? Et où ? Existe-t-il des centres spécialisés ?– J'ai vu un ORL, mais son diagnostic ne me satisfait pas, pouvez-vous me donner des adresses

d'autres ORL qui puissent me donner une solution ? (60 à 70%)– Quels sont les examens à faire dans le bilan sanguin ? Que doit-on rechercher ?– Quelle thérapie pourrais-je entreprendre ? Qu’est-ce que je peux faire ? (60% à 70%)– L'ORL m'a prescrit différents examens et on ne trouve rien mon audition est normale pour mon

âge, alors pourquoi j’ai un acouphène ? Est-ce qu’on m’a bien fait passer tout ce qu’il fallait ?(60%)

– En plus de mes acouphènes, je souffre d'une perte auditive. Que faut-il que je fasse? (50%)– Quels sont les médicaments actuellement prescrits ?– Quelles thérapies sont utilisées actuellement ?– Que penser de l'homéopathie, de la phytothérapie ?

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Une permanence téléphonique relève les questions les plus fréquemment posées enmatière d’acouphènes. On devrait pouvoir y répondre…

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– Que penser de l'oxygénothérapie hyperbare ?– Peut-on guérir ? Y a-t-il des personnes auxquelles cela arrive ? (30 à 40%)– On m’a dit que certains se suicident à cause des acouphènes. C’est vrai ?– On m’a dit que les acouphènes pouvaient venir de problèmes de dents ou de mâchoires.

Est-ce vrai ?– Quand va-t-on nous proposer un traitement médicamenteux efficace ?– Où en est-on de l'évaluation des autres traitements envisagés ?– L’acouphène s’aggrave-t-il avec l’âge ?– Est-ce que l’arthrose cervicale peut entraîner des acouphènes ?– Les saisons ou les climats jouent-ils un rôle ?– Est-ce que c’est normal que l’acouphène soit plus important le soir ? mais aussi– Comment se fait-il qu’ils soient perçus plus forts le matin au réveil ?– J’ai du cholestérol et/ou de la tension. On m’a dit que cela pouvait expliquer mes acouphènes. Si je

les soigne, mes acouphènes vont-ils disparaître ?– Je suis depuis plusieurs années un traitement de vasodilatateurs qui ne me fait rien, dois-je

absolument continuer à le prendre ?(30%)– Comment se fait-il qu’avec tous les progrès de la science, en 2000 on ne puisse encore pas guérir un

acouphène ? Pour quand un traitement efficace ?– Est-ce que mon acouphène va me rendre sourd (brutalement ou progressivement et

prématurément) ?– On m’a recommandé une prothèse. Pourquoi ? Qu’est-ce que vous en pensez ?– Qu’est-ce qu’un GBB ? A quoi ça peut me servir ?– J’ai entendu parler de la TRT. C’est quoi ? Où peut-on se faire traiter par la TRT ?– Est-ce que ça va empirer ?– J’ai vu mon acouphène diminuer suite à une prise de corticoïdes. Est-ce un hasard ?– Depuis l'installation de mon acouphène et/ou mon hyperacousie, j'ai une baisse de mon acuité

auditive, est-ce normal ? (10 à 20%)– Je ne supporte plus mes acouphènes, je suis très déprimé depuis plusieurs mois, je ne peux plus

dormir ni me concentrer, ce bruit m’obsède, je suis en train de couler. Ca ne peut plus durer commeça. Je n’en vois pas le bout et je pense que si cela continue, je vais en finir avec la vie. Qu’est-ce queje peux faire ?

– On me propose un voyage en Asie, mais il faudrait que je prenne l’avion. Déjà j’ai mal aux oreillesquand je prends le TGV. Je crois que je vais refuser. J’ai trop peur d’aggraver mon acouphène et/oumon hyperacousie. Qu’est ce que vous en pensez ?

– Les acouphènes peuvent-ils apparaître suite à un stress ? Un choc psychologique, etc…? (20%)– On m’a prescrit un antidépresseur, un anxiolytique, un hypnotique. Est-ce que ça va vraiment

traiter mon acouphène ? Quel rapport entre dépression et acouphènes ? On me dit que mesacouphènes sont d’ordre psychologique. C’est possible ?

– Le médecin m’a prescrit du Rivotril. J’ai vu dans la notice que c’est contre les épilepsies. Quelrapport avec l’acouphène ?

– Que peut-on attendre des médecines parallèles (beaucoup souhaitent se tourner vers homéopathie,acupuncture en se disant que même si cela ne leur fait pas de bien, au moins cela sera moinsdangereux qu’avec des médicaments à action centrale)

– J’ai une bonne audition et des acouphènes : que faire ?– J'ai une prothèse et je la supporte difficilement. Que faire ? (10%)– Je ne supporte plus les bruits. Mon oreille est hypersensible. Est-ce que je peux aggraver mon

acouphène/ mon hyperacousie si je m’expose aux bruits forts ?– On m’a conseillé de suivre une psychothérapie. Qu’en pensez-vous ?– Mon acouphène me sert à prédire le temps. A chaque fois qu’il augmente, le vent se met à souffler et

la pluie suit derrière. Cela s’explique comment ?– J’ai un acouphène. Est-ce que je peux faire de la plongée sans danger ?– Que penser des yoyos ?

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– Les Antennes relais (ou les téléphones portables) peuvent elles favoriser l'installationd'acouphènes ? (10%)

– Je suis une thérapie qui ne m'apporte pas grand chose et qui coûte cher, dois-je la continuer ? (5%)– N'existe-t-il pas des centres spécialisés pluridisciplinaires ? (5%)– J'ai des problèmes de thyroïde, pensez-vous qu'il y ait un rapport avec les acouphènes ? (3%)

3.12.7.2.5 Quelques parabolesAu cours de la prise en charge du patient, il peut être utile d’employer quelques parabolesqui permettent de bien faire comprendre un élément éventuellement technique quiéchapperait si le discours n’est pas adapté.● La maison hantéeVous avez un petit chalet à la montagne. Un soir arrive un premier ami que vous logezdans une première chambre en lui disant qu’il s’agit d’une vieille maison et qu’il entendravraisemblablement de nombreux craquements pendant la nuit mais qu’il ne doit pas s’eninquiéter. Un peu plus tard arrive un second ami que vous logez dans une deuxièmechambre en lui disant qu’il y a des rôdeurs dans les parages, que le chalet a déjà été visitéet qu’il faut bien faire attention en particulier pendant la nuit. Il va de soi que lelendemain matin le premier arrivant a particulièrement bien dormi mais que le secondn’a pas fermé l’oeil.● Le marigotNous sommes en Afrique, il fait très chaud et autour d’un marigot de nombreuxanimaux se désaltèrent. Vous êtes dans une montgolfière et vous regardez la scène dehaut. Vous avez vu qu’une lionne tente de s’approcher du groupe d’animaux contre levent. D’un coup, les animaux s’enfuient. Ils ont entendu le bruit du félin. Le signal a unevalorisation extrêmement élevée pour toutes les espèces en question.Dans un parc animalier, on recrée, autour d’un bassin, les mêmes conditions acoustiquesqu’autour de ce marigot. Lorsque les animaux en semi-liberté entendent le bruit de lalionne, ils partent en courant. Mais si l’on répète l’événement de nombreuses fois, ilsfinissent par ne plus changer leurs habitudes. Ils ont automatisé la perception de ce signalpourtant extrêmement agressif.● L’autoradioVous êtes sur l’autoroute à grande vitesse et vous écoutez la radio. Brutalement unbouchon vous fait ralentir puis vous arrêter. Immédiatement vous réalisez combien levolume de la radio est beaucoup trop élevé. Naturellement lorsque que vous rouliezquelques minutes auparavant vous considériez que la situation était satisfaisante. Votresystème cérébral a bien ajusté la perception du signal émis par la radio en fonction del’environnement sonore. C’est ce que l’on fait quotidiennement sans s’en rendrecompte. Certains patients ne parviennent pas à intégrer la perception de certains signauxau niveau du seuil réel.● Le garde-barrièreM. Durand, employé de la SNCF, a passé 15 ans dans un dépôt dans la banlieue Nord deParis. Il habitait près de l’autoroute et n’a jamais vraiment réussi à s’habituer auxconditions environnementales sonores à la fois sur le plan professionnel et personnel.Un jour il apprend que le poste de garde-barrière dans son village natal est disponible, letitulaire ayant pris sa retraite. Malgré l’absence de perspectives de carrière, il se précipitepour poser sa candidature. Par bonheur il n’y a pas d’autres candidats et il emménagedans sa nouvelle maison près de la voie ferrée. Trois fois par nuit un train passe à grandevitesse dans un bruit infernal. M. Durand et sa famille ont quelques difficultésd’adaptation mais, en quelques semaines, il n’y paraît plus rien. L’été suivant son cousinAlbert qui habitait près de son ancien domicile en région parisienne, vient passerquelques jours de vacances dans le sud. Il doit malheureusement écourter ce séjour car ilne peut trouver le sommeil à cause de ces trains qui passent la nuit.

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M. Durand n’entend pas moins bien que son cousin Albert ; il est simplement beaucoupplus motivé pour adapter le plus rapidement possible son cerveau à la nouvelle donneenvironnementale sonore. Le cousin Albert est venu passer quelques jours au calme à lacampagne ce qui n’est pas exactement la même perspective.D’ailleurs, quelques semaines plus tard, M. Durand se réveille en sursaut une nuit, seprécipite sur son téléphone et apprend que le train de 3 h 24 n’est en effet pas passé, car ily a eu un incident sur la voie. Il a complètement intégré la stimulation auditive trèsintense à heures fixes. On retrouve la même chose en ce qui concerne la cloche du villagequi tape les heures la nuit. Les villageois sont parfaitement adaptés, les touristes ont plusde difficultés.● La cicatricePar définition, la cicatrice normale se fait oublier, sauf si on la regarde…Avant, lablessure est passée par les phases de cicatrisation. Prendre en charge l’acouphène, c’estobtenir d’une blessure le statut de cicatrice…il n’est audible que si on l’écoute.● Le petit bruitVous êtes en auto, seul, la nuit, dans un endroit assez désertique… avec un rendez – vousimportant le lendemain, à destination. Il pleut… bref un certain niveau de stress… unbruit de fonctionnement survient. Vous n’êtes pas mécanicien, vous ne pouvez estimer lagravité du symptôme moteur. Il est pourtant très faible ce petit bruit… mais vousn’entendez que lui, même plus la radio de bord. Vous guettez ses modifications, vousanticipez sur la panne… sur la conséquence de ce rendez – vous manqué, si jamais…Même bruit, en été, en vacances, avec une voiture qui n’est pas la vôtre….

3.12.7.2.6 Un témoignage choisi dans une longue liste…"Hé bien pour moi, j'ai des acouphènes depuis une infiltration lombaire qui s'est mal passée en 2001.En juin 2001 j'ai eu des crises importantes de sciatique et des douleurs lombaires au point de meparalyser car j'ai des hernies discales à 2 endroits : modérée en L3-L4 et plus importante en L4-L5.Après plusieurs traitements médicaux, souffrant toujours autant, je décide d'aller voir le rhumato.Celui-ci décide de passer à l'acte c'est à dire de faire des infiltrations là où j'ai mal. Il ne me prévient pasdes complications possibles, ne m'informe pas, agit, point final.Donc la première infiltration s'est très bien passée et 15 jours après, la seconde a eu lieu : catastrophe, lerhumato a malheureusement piqué dans la dure-mère et a injecté le produit de la seringue(Hydrocortancyl®)Mais naturellement ce produit est monté au cerveau, sur le coup je ne l'ai pas senti, mon rhumato nem'a rien dit non plus, mais les réactions méningées sont intervenues 24 h/48 h après : énormescéphalées à la limite du supportable, 20 de tension artérielle, le cou qui enflait, le visage écarlate,obligation de mettre la tête à l'arrière position couchée. UNE HORREUR on croit que notre crâne vaexploser, on se sent mourir.Les médecins généralistes ne trouvant pas naturellement ce que j'avais, j'ai demandé d'aller au CHUde ma ville et là, dès mon arrivée, le corps médical de l'hôpital a trouvé immédiatement ce qui sepassait : réaction méningée due à l'infiltration mal orientée, et disent que c'est un accident malheureuxqui arrive rarement mais hélas !!!! ce sont les inconvénients de la pratique d'infiltration près de lacolonne vertébrale, qu'il existe des risques.Depuis, des acouphènes très importants se sont installés, des vertiges, dépression ...J'ai consulté aussitôt des oto-rhinos. Résultat des examens : impeccables, pas de souci de surdité.J'ai sombré dans la dépression rapidement, ne supportant pas du tout ces terribles sifflements étrangers.Naturellement, depuis je ne peux pas dormir sans somnifères (depuis 3 ans) et sans traitements pour"accepter mieux" mes "ac".J'ai fait un travail important sur moi pour "comprendre et accepter ", mais cela a ressurgi rapidement,j'étais vulnérable.

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Enfin ma vie est détruite depuis ce jour, actuellement je suis soigné pour dépression nerveuse installéedepuis juillet dernier, j'ai été obligé de démissionner de mon poste de travail. Actuellement je commenceà avoir des difficultés pour entendre car les "ac " ont pris de l’importance dans ma tête et m'empêchent debien comprendre les mots, de me concentrer, ils me fatiguent énormément, m'épuisent.

Pour les avis médicaux, ha là !!! j'en ferais un livre !!!« mais monsieur ! c'est rien, on vit avec ! « me répond mon rhumato.« mais monsieur! la médecine est impuissante pour les "ac" » me disent tous les médecins et spécialistes.avis général médical : « acceptez, monsieur, de vivre toujours avec maintenant »mon médecin généraliste m'a expliqué que ce qui m'est arrivé est comparable à un traumatisme crânienlors d'une chute.L'autre jour, j'ai vu un jeune médecin remplaçant, et sa réaction en lisant mon dossier : « hé bien !!votre dossier, j'en ai rarement vu comme cela, vous avez eu la totale, vous n’avez pas eu de chance ! »Lorsque je parle de mes "ac " c'est un mur qui se met devant moi, plus encore, lorsque j'explique laraison, comment ils sont arrivés, quelle cause, alors là ! les relations s'arrêtent immédiatement. Je trouvecela indigne du corps médical de pareilles réactions !Sauront-ils un jour à leur tour ce que c'est que des acs ? ils sont main dans la main, ne voulant pasdonner de jugement sur la situation vis-à-vis de leur confrère rhumato.Donc en résumé : souffrance physique, morale, médicaments, déstabilisation professionnelle, viefamiliale plus difficile à vivre, difficultés à se faire comprendre et à comprendre les "autres", on pourraitdire en un seul mot : ENFER !J'ai une famille autour de moi (trois grandes filles de 34, 29, 25 ans et mon épouse) quiessaient généralement de me comprendre, pas toujours, mais ce tourment n'est pas facile à vivre.Voilà, en quelques phrases, mon calvaire journalier depuis 3 années."

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CLINIQUE ET PRATIQUE

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CLINIQUE ET PRATIQUE

Pour un travail collectif

La recherche en matière d’acouphène relève d’un véritable travail d’équipe - clinique etfondamentale.

Pour revenir sur les modèles ; les hypothèses de la recherche doivent être confrontées auxobservations cliniques.

La complexité des situations impose de regrouper les cas observés en groupes homogènes.C’est l’objectif d’un travail collaboratif en réseau

Pour les acouphènes chroniques :

www.orl-france.org

rubrique acouphènes

Pour les acouphènes aigus :

www.resuno.com

« Place d’un réseau de santé dans la prise en charge d’un acouphène récent »

La conduite à tenir devant un acouphène de survenue récente comporte deux démarches essentielles.Outre la réalisation du bilan causal à la recherche d’une pathologie objective, le praticien doitobserver, dans toute son attitude, le plus profond respect de la plainte du patient. En effet, seul cecomportement permet l’adhésion de celui-ci et sa participation dynamique au protocolethérapeutique. L’écoute attentive du patient et sa préparation à une prise en charge globale, parfoislongue, sont primordiales. Par ailleurs, la recherche d’une étiologie s’impose d’emblée, surtout en casd’acouphène unilatéral. L’ensemble requiert du temps et une organisation optimale.

Pour assurer au mieux cette démarche de qualité et, en particulier, articuler entre eux les moyenstechniques et humains requis, le modèle du réseau de santé s’impose. Son but est de soutenir lemalade par le biais d’une écoute patiente et de conseils appropriés tout en aidant chaque praticiendans l’organisation de son exercice quotidien. Comme pour de nombreuses pathologies complexes àprise en charge délicate (asthme, cancer, diabète, etc…), une coordination des professionnelsimpliqués associée à un centre de dialogue et de ressources (pour les patients comme pour lesprofessionnels) constitue l’ossature du projet. Elle ne remplace pas les intervenants habituels dupatient mais agit en complément et en soutien, pour un meilleur suivi.

RESUNO est un réseau de santé dédié aux urgences neurosensorielles en ORL, dont l’acouphène desurvenue récente (moins de 3 semaines). Développé initialement en Ile-de-France, il rassemble plus de200 médecins qui ont signé sa charte et s’engagent à respecter les patients dans leur diversité, tout ensuivant les protocoles établis par les groupes d’expert du réseau. Il bénéficie d’un financement etd’une évaluation spécifiques, selon les lois de 2002 et 2003 en faveur des réseaux. Il est ouvert à tous,essentiellement par l’intermédiaire de son site Internet : www.resuno.com

Praticiens et victimes d’acouphènes récents sont invités à rejoindre cette structure innovante etdynamique qui ne se substitue pas aux filières et modalités de prise en charge existantes mais peutcoordonner voire compléter les soins classiques.

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Annexes

5.1.1 Annexe n°1 : Le schéma de Jastreboff

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D'après Jastreboff. Hp = habituation de la perception - Hr = habituation de la réaction.

Perception & évaluationAires auditives et autres aires associées - cortex

Détection,subcorticale

Associations émotionnellesSystème limbique

Source del'acouphène

GêneSystème nerveux autonome

Hp Hr

Processusconscients

Processusinconscients

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5.1.2 Annexe n°2 : Le tableau des causes et circonstances

Classification pragmatique des causes et circonstances de survenuedes acouphènes

1 traumatismes sonores2 otospongiose3 catarrhe tubaire, otite séreuse, labyrinthite3 bis baro-traumatisme4 suspicion de dysfonctionnement de l'ATM5 traumatisme crânien6 surdité brusque7 anomalies relevant de la médecine interne7 bis anomalies biologiques8 mauvaise nouvelle, deuils9 hypo ou hypertension artérielle9 bis vasculaire SAP

10 oreille interne11 étiologies cervicales12 acouphène post-opératoire otologique13 audition normale14 dépression15 suspicion de fuite péri-lymphatique15 bis problème LCR16 ototoxicité17 pathologie identifiée de l'oreille moyenne18 acouphène en position couchée (sieste)19 boucles V/VIII20 neurinome du VIII21 problèmes psychologiques en dehors de la dépression22 SAS23 sténose du conduit externe, exostoses24 implication des muscles de l'oreille moyenne25 problèmes neurologiques complexes26 migraine27 implication de l'aspirine28 en rapport avec le cycle hormonal29 souffle carotidien perçu30 RGO31 rétraction tympanique32 anesthésie générale32 bis péri-durale33 thyroïde34 stress50 ???….100 La presbyacousie

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5.1.3 Questionnaires 1

SEV

Nom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .

Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Cochez la case OUI ou NON aux questions suivantes :

(Vous devez répondre à toutes les questions même si votre accord ou votre désaccord n’est que partiel).

OUI NON

1. Vous arrive-t-il d’avoir des difficultés à vous concentrer à cause de votre acouphène ?

2. Etes-vous presque constamment conscient(e) de la présence de votre acouphène ?

3. Votre acouphène vous gêne-t-il dans des activités physiques telles que vous habiller oujardiner ?

4. Votre acouphène vous gêne-t-il pour vous endormir ?

5. Pourriez-vous dire que généralement votre acouphène ne vous dérange pas ?

6. Vous arrive-t-il de passer quelques heures sans prendre garde à votre acouphène ?

7. Votre acouphène est-il très bruyant ?

8. Vous arrive-t-il d’en avoir assez de votre acouphène ?

9. Vous arrive-t-il de passer un jour ou plus sans acouphène ?

10. Oubliez-vous souvent votre acouphène quand vous êtes occupé(e) ?

11. Votre acouphène est-il présent au moins une partie chaque jour ?

12. Votre acouphène vous empêche-t-il de vous relaxer ?

13. Bien que votre acouphène soit très agaçant, pourriez-vous dire qu’il ne vous abat pas ?

14. Parlez-vous souvent aux autres des problèmes que votre acouphène occasionne ?

15. Est-il habituel que votre acouphène vous gène quand vous essayez de lire ou de regarder latélévision ?

16. Pourriez-vous dire que la vie serait plus agréable si vous n’aviez pas d’acouphène ?

TOTAL

ANNEXES

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5.1.3 Questionnaires 2

THQNom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .

Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Instructions : donner une note à chacune des phrases ci-dessous.

Cette note, comprise entre 0 et 100, doit représenter combien vous êtes d’accord avec la phrase proposée :

0 : si vous n’êtes pas d’accord du tout

100 : si vous êtes entièrement d’accord

Toutes les notes intermédiaires sont autorisées.

Répondre dans les cases encadrées en gras

1 Mon acouphène m’empêche d’apprécier la vie.

2 Mon acouphène empire avec les années.

3 Mon acouphène me gêne pour dire d’où viennent les sons.

4 Pendant les réunions, mon acouphène m’empêche de suivre la conversation.

5 J’évite les endroits bruyants à cause de mon acouphène.

6 Quand je discute avec quelqu’un dans un endroit bruyant mon acouphèneme gêne pour comprendre ce qu’on me dit.

7 Je suis mal à l’aise dans mes relations sociales à cause de mon acouphène.

8 Le grand public ignore le caractère dévastateur des acouphènes.

9 Mon acouphène m’empêche de me concentrer.

10 Les acouphènes entraînent des problèmes familiaux.

11 Mon acouphène me rend dépressif(ve).

12 Je trouve difficile d’expliquer aux autres ce qu’est un acouphène.

13 L’acouphène provoque le stress.

14 Mon acouphène m’empêche de me relaxer.

15 Je me plains plus à cause de mon acouphène.

16 Mon acouphène me gêne pour m’endormir.

17 Mon acouphène me donne une sensation de fatigue.

18 Mon acouphène me donne un sentiment d’insécurité.

19 Mon acouphène contribue à une sensation de mauvaise santé.

20 Mon acouphène retentit sur la qualité de mes relations avec les autres.

21 Mon acouphène a diminué ma capacité à comprendre ce qui est dit.

22 Mon acouphène me donne un sentiment de contrariété.

23 Quand je regarde la télévision, mon acouphène me gêne pour comprendrece qui est dit.

24 Mon acouphène me rend anxieux(se).

25 Ma façon de voir concernant les acouphènes est saine.

26 En ce qui concerne mon acouphène, mes amis me soutiennent moralement.

27 Je me sens souvent frustré(e) à cause de mon acouphène.

TOTAL

S S Ph Em Au Sub

ANNEXES

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5.1.3 Questionnaires 3

DETNom :. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Semaine n° . . . . . . . . . . . . . . . .

Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Date : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Parmi la liste présentée ci-dessous, certaines phrases peuvent s’appliquer à vous, d’autres non.

Pour répondre à chaque question, entourez le nombre qui reflète le mieux combien cette phrase s’estappliquée à vous au cours de la semaine qui vient de s’écouler.

● 0 : pas du tout● 1 : rarement● 2 : une petite partie du temps● 3 : une bonne partie du temps● 4 : la plupart du temps

1 Je me suis senti(e) torturé(e) par mon acouphène 0 1 2 3 4

2 J’étais moins intéressé(e) par les sorties 0 1 2 3 4

3 J’étais tendu(e) à cause de mon acouphène 0 1 2 3 4

4 Mon acouphène a perturbé mon sommeil 0 1 2 3 4

5 Mon acouphène m’a conduit(e) au désespoir 0 1 2 3 4

6 Mon acouphène m’a contrarié(e) 0 1 2 3 4

7 Mon acouphène m’a donné un sentiment de colère 0 1 2 3 4

8 Mon acouphène m’a donné un sentiment de détresse 0 1 2 3 4

9 Mon acouphène m’a donné un sentiment d’impuissance 0 1 2 3 4

10 Mon acouphène m’a donné un sentiment de frustration 0 1 2 3 4

11 Mon acouphène m’a embrouillé l’esprit 0 1 2 3 4

12 Mon acouphène m’a empêché d’apprécier la vie 0 1 2 3 4

13 Mon acouphène m’a fait désespérer de l’avenir 0 1 2 3 4

14 Mon acouphène m’a fait éprouver un sentiment de panique 0 1 2 3 4

15 Mon acouphène m’a fait éviter les endroits bruyants 0 1 2 3 4

16 Mon acouphène m’a fait éviter les endroits calmes 0 1 2 3 4

17 Mon acouphène m’a fait pleurer 0 1 2 3 4

18 Mon acouphène m’a fait songer au suicide 0 1 2 3 4

19 Mon acouphène m’a gêné(e) pour me concentrer 0 1 2 3 4

20 Mon acouphène m’a gêné(e) pour me relaxer 0 1 2 3 4

21 Mon acouphène m’a gêné(e) pour travailler 0 1 2 3 4

22 Mon acouphène m’a incité(e) à éviter les relations sociales 0 1 2 3 4

23 Mon acouphène m’a rendu(e) dépressif(ve) 0 1 2 3 4

24 Mon acouphène m’a rendu(e) « fou(folle) » 0 1 2 3 4

25 Mon acouphène m’a rendu(e) irritable 0 1 2 3 4

26 Mon acouphène m’a rendu(e) malheureux 0 1 2 3 4

TOTAL GÉNÉRAL

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ANNEXES

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Monographies du CCA Groupe

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P. CandauLa chirurgie des tumeurs du trou déchiré postérieur . P. Tran Ba Huy, J. Achouche, O. Laccourreye,

B. George, D. BastianLe laser en O.R.L. . . . . . . C. PeytralNez - Sinus . . . . . . . P. Lerault, C. FrecheRepères et balisesLes otoémissions dans la pratique . . . . P. Elbaz, D.T. Kemp, Ph. Betsch, J.M. Fiaux, F. Leca,

P. Miller, G. ChallierLa prothèse auditive . . . . . . M. Bonnevialle, G. ChallierL’ostéo intégration en otologie . . . . P. Roulleau, Y. Manach, C. HamannLa chirurgie partielle des épithéliomas du pharyngo-larynx H. LaccourreyeLa rhonchopathie chronique . . . . . F. Chabolle, B. FleuryAnatomie du voile . . . . . . P. Lerault, M. Jakobowicz, H. Chevallier, E. AttiasPratique des tests d’audition en consultation . . F. Legent, P. Bordure, M.L. Ferri-Launay, J.J. ValenzaTroubles de la déglutition de l’adulte . . . J. Lacau St Guily, S. ChaussadeChirurgie du nerf facial . . . . . . O. SterkersLes surdités génétiques . . . . . G. Lina-Granade, H. Plauchu, A. MorgonPathologies Temporo-mandibulaires . . . C. Levy, B. Meyer, G. Vincent, K. Marsot-DupuchSinusites : du diagnostic au traitement . . . J.P. Fombeur, D. EbboLe neurinome de l’acoustique : la neurofibromatose de type II J.M. Sterkers, O. SterkersPoches de rétraction et états pré-cholestéatomateux . P. Roulleau, C. MartinVidéonystagmoscopie, vidéonystagmographie . . Ph. Courtat, A. Sémont, J.-P. Deroubaix, E. HrebicekRegard et paupières . . . . . . E. Mahe, S. Poignonec, J. Soudant, G. LamasL’otospongiose . . . . . . . P. Elbaz, D. AyacheCorde vocale . . . . . . . S. de Corbière, E. FresnelLa dacryocystorhinostomie . . . . . P. Klap, J.-A. BernardRhinoplasties . . . . . . . Y. Saban, F. BracciniLes surdités, de la prothèse à l'implant . . . A. Casenave, B. Frachet, C. Hamann, M. Mondain,

O. SterkersLes tumeurs de la parotide . . . . . P. Gehanno, B. Guerrier, J.J. Pessey, M. ZanaretSurdité de l'enfant . . . . . . Erea-Noël Garabédian, Françoise Denoyelle,

René Dauman, Jean-Michel Triglia, Eric Truy,Natalie Loundon, Patrick Bouaziz, Jean de Lorenzi

Nouvelles données en audiologie et appareillagestéréophonique . . . . . . .

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