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DU MECANISME AU CONTACT MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS Laurent BAILLET [email protected] Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Solides (UMR CNRS/INSA LYON 5514), Institut Européen de Tribologie, INSA de Lyon, 69621 Villeurbanne Cedex. Résumé Si l'utilisation des calculs par éléments finis s'est banalisée pour le dimensionnement volumique des structures, elle demande une attention particulière lors de la résolution d'un problème de tribologie. La démarche suivie dans cet article vise à sensibiliser le modélisateur sur la qualité des outils numériques et les précautions de modélisation à mettre en œuvre pour obtenir des résultats aussi bien précis à l'échelle de la structure qu’à celle du contact afin de pouvoir les inclure dans une étude de l'usure. La première partie présente deux algorithmes de contact basés sur la méthode des multiplicateurs de Lagrange et compare leur efficacité à décrire correctement les phénomènes à l'échelle du contact. Dans la deuxième partie, plusieurs méthodes d'approximation de surfaces en trois dimensions sont présentées et testées dans le cas de l'impact d'un tube contre son support. Dans la dernière partie, une comparaison de différentes possibilités d’approcher la condition de non-interpénétration de deux solides en utilisant la méthode des multiplicateurs de Lagrange est effectuée au niveau de la répartition des forces de contact et de la géométrie de l’interface sur un exemple d’indentation.

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DU MECANISME AU CONTACT MODELISATION PAR ELEMENTS FINIS

Laurent BAILLET [email protected]

Laboratoire de Mécanique des Contacts et des Solides (UMR CNRS/INSA LYON 5514),

Institut Européen de Tribologie, INSA de Lyon, 69621 Villeurbanne Cedex.

Résumé

Si l'utilisation des calculs par éléments finis s'est banalisée pour le dimensionnement

volumique des structures, elle demande une attention particulière lors de la résolution d'un problème de tribologie. La démarche suivie dans cet article vise à sensibiliser le modélisateur sur la qualité des outils numériques et les précautions de modélisation à mettre en œuvre pour obtenir des résultats aussi bien précis à l'échelle de la structure qu’à celle du contact afin de pouvoir les inclure dans une étude de l'usure. La première partie présente deux algorithmes de contact basés sur la méthode des multiplicateurs de Lagrange et compare leur efficacité à décrire correctement les phénomènes à l'échelle du contact. Dans la deuxième partie, plusieurs méthodes d'approximation de surfaces en trois dimensions sont présentées et testées dans le cas de l'impact d'un tube contre son support. Dans la dernière partie, une comparaison de différentes possibilités d’approcher la condition de non-interpénétration de deux solides en utilisant la méthode des multiplicateurs de Lagrange est effectuée au niveau de la répartition des forces de contact et de la géométrie de l’interface sur un exemple d’indentation.

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1. INTRODUCTION Parmi les méthodes numériques permettant de résoudre le problème de contact avec frottement entre deux corps déformables, la méthode des éléments finis [ZIEN 71] est une des plus répandues dans les milieux industriels et scientifiques. Les algorithmes et les méthodes de gestion du contact entre corps déformables ont été développés dès les années 1970 [HUGH 76] par des numériciens et/ou des mécaniciens du solide. Par tradition, par méconnaissance, mais aussi à cause du coût de calcul réputé élevé par rapport aux méthodes analytiques ou semi-analytiques, les "tribologues" se sont peu intéressés à ces méthodes et c'est depuis une dizaine d'années seulement que des publications utilisant les éléments finis apparaissent dans des revues comme Wear ou Journal of Tribology [HAM 88]. Cependant, la plupart de ces articles sont consacrés à l'interprétation de résultats de calculs effectués avec des codes commerciaux sans présenter ni analyser deux points essentiels de la modélisation de problèmes de contact par éléments finis: les algorithmes de contact et la nature de l'approximation géométrique des surfaces des corps en contact. En résumé, les méthodes existent mais leur évaluation précise du point de vue tribologique est pratiquement inexistante. La démarche suivie dans cet article vise à sensibiliser le modélisateur sur les difficultés rencontrées lorsqu’il cherche à obtenir un résultat précis à l'échelle du contact afin de l'inclure dans une étude d'usure.

2. PRESENTATION ET COMPARAISON D'ALGORITHMES DE CONTACTS UTILISES DANS DES CODES DYNAMIQUES

2.1. Présentation La résolution dynamique du problème de contact entre deux corps déformables est plus complexe et plus coûteuse en temps de calcul que l’étude statique car les non- linéarités associées au contact avec frottement interviennent sur les déplacements, les vitesses et les accélérations des nœuds en contact. La résolution de problèmes de type « contact- impact » entre corps déformables par la méthode des éléments finis a été traitée de nombreuses façons depuis les années 1970. Les méthodes développées diffèrent par leur algorithme de contact et/ou leur schéma d’intégration temporelle. La solution du problème de contact est obtenue par différentes méthodes comme la pénalisation [HALL 85], les multiplicateurs de Lagrange [CHAU 86] mais aussi par des combinaisons de ces deux méthodes [ZHON 88] et [WRIG 96] ou enfin par des techniques de complémentarité [KLAR 86] et [VOLA 98]. Les schémas d’intégration temporelle utilisés sont implicites ou explicites. Les méthodes développées ont recours à des hypothèses sur la valeur et la modification des déplacements, vitesses et accélérations à l'instant d’entrée en contact des corps. Ces hypothèses sont intégrées dans la résolution, soit directement en traitant l’instant d'impact d’une manière spécifique, soit indirectement comme conséquence de la méthode utilisée pour le reste du calcul. Lorsque des résultats exploitables à l’échelle de la mécanique des contacts sont recherchés, il est très important de connaître en détail les algorithmes utilisés et leurs éventuelles conséquences sur les résultats obtenus.

Les applications présentées dans cet article étant des problèmes de mécanique des contacts, les méthodes présentées sont formulées à partir de multiplicateurs de Lagrange qui permettent d’imposer exactement une condition cinématique au niveau de la surface des corps en contact et qui, contrairement aux méthodes de pénalisations, ne nécessitent pas l'introduction de paramètres arbitraires de raideurs définis par l'utilisateur.

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Dans cette partie, deux méthodes de résolution du problème dynamique de contact avec frottement entre corps déformables sont présentées puis comparées sur un exemple d'impact normal sans frottement et puis sur un exemple d'impact oblique avec frottement. La première méthode est celle du code de calcul commercial ABAQUS/Standard, la seconde est programmée dans les codes PLAST2 et PLAST3, codes développés conjointement par le Laboratoire de Mécanique des Contacts (LMC) et le Laboratoire de Mécanique des Solides (LMSo) de l'INSA de LYON.

2.2. Méthode implicite : ABAQUS/Standard

2.2.1. Schéma d'intégration temporelle

Le schéma d’intégration temporelle utilisé par ABAQUS/Standard [HIBB 99] est un schéma de Newmark modifié proposé par Hilber et al. [HILB 77]. Cette méthode, appelée α-méthode exprime les paramètres de Newmark β et γ en fonction d’un seul paramètre α :

[ ]0,31−∈α ; ( ) 221 α−=γ ; ( ) 41 2α−=β (1)

Les déplacements ttu ∆+ et les vitesses ttu ∆+& au temps t+∆t s'expriment :

( )[ ][ ]

γ+γ−∆+=

×β+β−∆+∆+=

∆+∆+

∆+∆+

tttttt

ttttttt

uu)1(tuu

5.0u2u21tutuu 2

&&&&&&&&&& (2)

où ∆t est le pas de temps courant et ttu ∆+&& représente les accélérations au pas de temps t+∆t.

L’équation d’équilibre est écrite au temps t+∆t+α (α<0) en fonction des déplacements, vitesses et accélérations aux pas de temps t et t+∆t :

applitttttttttt FKuuK)1(uCuC)1(uM

α+∆+∆+∆+∆+ =α−α++α−α++ &&&& (3)

avec M la matrice de masse, C la matrice d’amortissement, K la matrice de raideur et Fappli les forces appliquées.

La résolution du système formé par les équations (2) et (3) conduit aux valeurs des déplacements au pas de temps t+∆t. Le domaine de variation du paramètre d’amortissement numérique α assure la stabilité et la précision au second ordre du schéma. L’opérateur de Newmark ( 0=α ) est très utilisé pour la résolution de problèmes de dynamique des structures. Cependant plusieurs auteurs ont rapporté les mauvaises performances de cet opérateur pour les calculs de contact, en particulier lorsque la règle trapézoïdale est utilisée [CHAUD 86], [WRON 95] et [CARP 91]. Ce mauvais comportement est relié à l’incapacité des schémas d’ordre élevé à représenter correctement les fortes discontinuités des vitesses et accélérations au moment de l’impact. Wronski et Jean [WRON 95] et récemment Vola et al. [VOLA 98] ont développé des opérateurs implicites du 1er ordre couplés à une résolution du contact basée sur les techniques de complémentarité. Dans le cas du schéma de Newmark, Chaudhary and Bathe [CHAUD 86] ont proposé d’utiliser 21=γ=β ce qui conduit à une valeur de l’accélération au temps t+∆t indépendante de la précédente. Wriggers et al. [WRIG 90] ont introduit de l’amortissement numérique )7,0 ,4,0( =γ=β pour compenser le saut de vitesse associé à l’impact.

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2.2.2. Algorithme de contact

Les palliatifs que nous venons de présenter ne permettent pas de traiter correctement un problème d’impact en utilisant un schéma du 2ième ordre. Les méthodes utilisées consistent donc à traiter l’instant de l’impact à partir d’un système d’équations spécifique. L’hypothèse de base de ces méthodes est de considérer l’entrée en contact et le décollement des corps comme étant d’une durée infinitésimale comparée à la durée totale de l’impact. A partir de là, des valeurs actualisées des déplacements, vitesses et accélérations des surfaces en contact sont calculées et ensuite utilisées comme conditions initiales pour le pas de calcul suivant. La méthode programmée dans ABAQUS/Standard utilise une contrainte cinématique formulée à partir de la compatibilité des vitesses. Les hypothèses et les principales étapes de cette méthode, présentée en détail dans [HIBB 99], sont les suivantes :

les forces internes sont supposées constantes pendant le temps d’entrée en contact,

les parties des surfaces des corps entrant en contact acquièrent une vitesse et une accélération identiques, orientées dans la direction de l’impact.

Cette méthode induit une perte d’énergie cinétique proportionnelle à la masse associée aux nœuds des surfaces entrant en contact et au carré de la différence de leur vitesse normale. Par conséquent, la taille du maillage doit être petite dans la zone de contact, afin de minimiser les pertes d’énergie associées aux entrées en contact des nœuds. La condition imposée grâce aux multiplicateurs de Lagrange dans l’algorithme de contact est exprimée en vitesse et non en déplacement. La condition de non-pénétration des corps en contact n’étant donc pas systématiquement satisfaite, une procédure spécifique est utilisée afin de palier ce manque. Le calcul du système au pas de temps suivant est tout d’abord réalisé sans prendre en compte les entrées en contact ou séparations. Ce calcul permet de déterminer un temps moyen d’impact et de résoudre à nouveau le système en utilisant ce pas de temps moyen. Cependant la géométrie de contact est ajustée pour éliminer la pénétration mais sans actualiser les forces appliquées aux nœuds en contact comme cela est fait lorsque la contrainte imposée est exprimée en déplacements. Par conséquent, la distribution des efforts qui s’ensuit sur la surface de contact est erronée et peut même se révéler complètement différente de la solution exacte si le modélisateur n’y prête pas attention.

2.2.3. Frottement de Coulomb

De la même manière qu’en statique, la condition d’adhérence et de glissement est assurée par l’introduction d’un second multiplicateur de Lagrange agissant sur le déplacement relatif des surfaces en contact. Les détails de la formulation sont donnés dans [HIBB 99].

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2.3. Méthode explicite : PLAST2 et PLAST3

2.3.1. Schéma d'intégration temporelle

Les codes d'éléments finis explicite dynamique PLAST2 (2D) et PLAST3 (3D) [BAIL 99] sont basés sur une configuration Lagrangienne réactualisée. Les éléments utilisés pour la discrétisation spatiale en deux et en trois dimensions sont respectivement des quadrilatères et des briques à huit nœuds. Les équations de mouvement sont développées via le principe des travaux virtuels et conduisent au système d'équations différentielles suivant écrit au temps t :

applit

intttt FFuCuM =++ &&& (4)

avec M, C les matrices nodales de masse et d'amortissement, tu& , tu&& les vecteurs de vitesse et d'accélération nodales, int

tF les forces intérieures et applitF les forces appliquées.

L'intégration temporelle des équations différentielles est basée sur la méthode des différences finies centrées et l’ expression des vitesses et accélérations à l’instant t est :

( ) ( ) 2ttttttttttt tuu 2uuet t.2uuu ∆+−=∆−= ∆−∆+∆−∆+ &&& (5)

2.3.2. Algorithme de gestion du contact avec frottement entre des corps déformables par la méthode des multiplicateurs de Lagrange

Les algorithmes de gestion du contact et du frottement implantés dans les codes PLAST2 et PLAST3 sont basés sur la méthode des multiplicateurs de Lagrange avant proposée par Carpenter [CARP 91] en deux dimensions. Cette méthode permet une gestion précise du contact normal et tangentiel entre deux corps déformables en 2D et 3D [BAILL 99]. Dans la suite de l’article, le terme de surface désigne une succession de segments en 2D et un ensemble de surfaces quadrangles (généralement non plane) en 3D.

Pour deux corps Ω1 et Ω2 susceptibles d'entrer en contact, la définition d'une surface maître dans la zone de contact de Ω1 et d'un ensemble de nœuds frontières (appelés nœuds esclaves) dans la zone de contact de Ω2 est nécessaire à l'application de la méthode des multiplicateurs de Lagrange. Les contraintes en déplacement, appliquées aux nœuds esclaves pour les empêcher de pénétrer le domaine délimité par la surface maître à l'instant t+∆t conduisent à l'introduction de multiplicateurs de Lagrange homogènes à des forces de contact à l'instant t. Formulée ainsi, la méthode des multiplicateurs de Lagrange est compatible avec les opérateurs d'intégration explicites. Les équations de mouvement (éq. 4) augmentées par les contraintes en déplacement agissant sur les nœuds esclaves à l'instant t+∆t s'écrivent alors de la manière suivante :

0uuXG

FGFuCuM

tttttt

applitt

Ttt

intttt

≤−+

=λ+++

∆+∆+

∆+&&& (6)

avec λt les forces de contact agissant sur les nœuds esclaves, ttG ∆+ la matrice globale exprimant les contraintes en déplacement et Xt le vecteur des coordonnées des nœuds à l'instant t.

Le frottement et les conditions de contact adhérant, glissant ou "décollant" sont appliqués et gérés aux nœuds esclaves. La loi de frottement utilisée est un modèle de Coulomb sans régularisation de la force tangentielle de contact. D'autres modèles tels que ceux de Tresca, Coulomb-Orowan etc.… ont été intégrés dans cet algorithme, mais la contrainte normale

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d’interface restant faible dans les applications présentées dans cet article, le frottement de Coulomb a été choisi. Il est à noter que l'utilisation de cette loi de frottement simple dans des conditions de contraintes normales faibles avec un algorithme de contact et de frottement précis et fiable donne une très bonne description des phénomènes physiques se produisant au niveau de la zone de contact lors de la phase de genèse du 3ième corps.

A chaque incrément de calcul ∆t pendant la résolution du système (éq. 6), il faut vérifier les deux conditions suivantes en chacun des nœuds esclaves:

ntn LLL ; 0 rrr λ⋅µ≤λ≤λ (7)

La première condition traduit le fait que la force de contact est une force de compression. Pour la simulation de l’arrachement d’une fibre insérée dans une matrice, cette condition peut être changée pour prendre en compte des phénomènes d'adhésion, d’endommagement au niveau de l'interface [RAOU 97, BRUY 97, BAIL 97]. La deuxième condition est associée à l'utilisation de la loi de Coulomb et se décompose de la façon suivante :

-=u que tel0>et glissant est L nœud le alors sinon

0=uet adhérent est L nœud le alors si

tLL/SMtnLtL

L/SMtnLtL

rrr

rr

&

&

ξλξ∃λµ=λ

λµ<λ (8)

avec L/SMtu& la vitesse tangentielle relative du nœud esclave L par rapport à la surface maître.

2.4. Comparaison des deux méthodes : cas de l'impact d'un tube contre une barre

2.4.1. Impact normal sans frottement

L'efficacité et la précision dans la gestion du contact des deux méthodes présentées précédemment sont illustrées sur des exemples d'impact. Le premier cas test présenté est un impact normal sans frottement entre un tube et une barre élastiques. Le tube est envoyé avec une vitesse initiale V0y=-1m/s (V0x=0m/s) sur la barre encastrée à son extrémité. La solution de la force globale de contact en fonction du temps a tout d'abord été calculée semi-analytiquement par Lekkerkerker [LEKK 78] puis par Jiang et Rogers [JIAN 89] dans le but de valider leur code de calcul par éléments finis. La géométrie et le comportement des matériaux des deux corps sont présentés sur la figure 1.a. La surface maître est définie sur la barre et les nœuds esclaves sont sur le tube. Le maillage est constitué de 2674 éléments quadrilatères et le calcul est fait en déformation plane. Le maillage dans la zone de contact a été choisi pour qu'au moins dix nœuds esclaves soient en contact lorsque la force globale de contact est maximum. La figure 1.b représente le maillage au niveau de la zone de contact. La discrétisation du reste du tube est suffisamment fine pour prendre en compte correctement sa déformation en flexion au cours de l'impact.

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E1=2. 1011 Paρ1=7200 Κg/m3

E2=9.52815 109 Paρ2=343,014Κg/m3

Matériau 2 BARRE

0,1m

V0x

Matériau 1 TUBE

V0y

0,95m1,05 m

V0

x

y

TUBE

BARRE0,1m

1 2 3 4 5 6

TUBE

BARRE

Plan de symétrie

3,05mm

a. Données b. Maillage

Figure 1. Modélisation du tube et de la barre.

Pour les simulations effectuées sur ABAQUS, le choix d’un pas de temps convenable, en tenant compte des hypothèses introduites dans l'algorithme d'impact et du calcul du pas de temps moyen (cf. 2.2.2.), est fonction des vitesses d'impact, du rayon de courbure des corps en contact et de la discrétisation spatiale. Dans l'exemple présenté, une valeur du pas de temps "critique" de 4,4µs fixée par le modélisateur assure des résultats précis à l’échelle du contact en termes de champs de contraintes et de déformations.

Le pas de temps utilisé pour les simulations avec le code explicite dynamique PLAST2 est de 0,2µs. Il est pris égal à 90% du pas de temps critique défini comme le temps nécessaire à une onde élastique pour traverser le plus petit élément du maillage. La méthode des multiplicateurs de Lagrange ne diminue pas ce pas de temps critique alors que l'utilisation d'une méthode de pénalisation le diminue fortement. La très faible valeur de ce pas de temps est avantageuse lors de la résolution de problèmes dynamiques de contact car elle garantit une bonne prise en compte des non- linéarités et de leurs brusques changements.

Les forces de contact globales obtenues avec les deux codes de calcul sont parfaitement identiques, même dans le cas où le pas de temps utilisé pour le calcul avec ABAQUS est supérieur au pas de temps "critique" (fig. 2).

Sur la figure 3, les pressions de contact issues d'une simulation sur ABAQUS réalisée avec ∆t=2µs sont comparées avec les forces de contact issues de PLAST2. Pour chaque nœud esclave (0 à 5) (fig. 1.b), les courbes obtenues par ABAQUS et PLAST2 coïncident exactement car le rapport des échelles des ordonnées est choisi égal à la taille des éléments dans la zone de contact.

L'obtention de résultats identiques à l'échelle du contact est donc possible à condition que les précautions associées aux formulations employées soient identifiées et respectées.

0.

2.4.6.

8.10.12.

14.16.

18.20.

0 2 4 6 8 10 12 14

Time x10-3

s

Nor

mal

For

ce x

105 N

PLAST2, ABAQUSLekkerkerker

Forc

e N

orm

ale

x105 N

Temps

0

0.5

1

1.5

2

0 2 4 6 8 10 12 14

Time x10-3

s

PLA

ST2

: Nor

mal

forc

e x1

05 N

0

15

30

45

60

7501

23

45

AB

AQ

US : N

ormal Pressure x10 6 Pa

*

PLA

ST2

: For

ce n

orm

ale

x10

5 N

Temps

AB

AQ

US : Pression de C

ontact x106Pa

Figure 2. Efforts normaux obtenus par les deux

codes à l'échelle de la structure. Figure 3. Force normale et pression de contact

obtenues par les deux codes à l'échelle du contact.

0 1 2 3 4 5

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2.4.2. Impact oblique avec frottement d'un tube sur une barre

La géométrie du tube et de la barre est identique à celle utilisée dans l'exemple précédent. Le tube est animé d'une vitesse normale initiale Voy=-1 m/s et d'une vitesse tangentielle de Vox=0,1m/s. Un coefficient de frottement de Coulomb de 0,3 est appliqué aux nœuds esclaves.

Le frottement introduit des non- linéarités supplémentaires pouvant causer des divergences dans les simulations implicites. Dans le cas présent, la convergence du calcul est assurée avec ABAQUS en fixant un pas de temps maximum égal à 2 µs. La simulation avec PLAST2 est réalisée avec un pas de temps identique au cas sans frottement.

Les forces de contact normales globales ainsi que la distribution des pressions et forces normales aux nœuds varient très peu par rapport au premier exemple car la très faible vitesse tangentielle initiale n'augmente que de 1% l'énergie cinétique du tube. La force tangentielle de contact globale obtenue par les deux codes de calcul est identique (fig. 4). Cette force, très lisse pendant la première phase de contact (0<t<5,8ms), devient, à cause du frottement, perturbée et de signe opposé dans la seconde partie de l'impact (7,4ms<t<11ms).

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

4

6

8

0 5 10 15

Temps en ms

Forc

e ta

ngen

tiel

le g

loba

le x

104 N

-0,6

-0,45

-0,3

-0,15

0

0,15

0,3

0,45

0 2 4 6 8 10 12 14

Time x10-3

s

Tan

gent

ial f

orce

x 1

04 N

-18

-15

-12

-9

-6

-3

0

3

6

9

12

15

18

Tangential stress x10 6Pa

-1-PL2

0-PL2

1-PL2

-1-ABQ

0-ABQ

1-ABQ

Forc

e ta

ngen

tielle

x10

4N

Contrainte tangentielle x10

6Pa

Temps Figure 4. Force tangentielle de contact globale obtenue par les deux codes.

Figure 5. Comparaison des efforts tangentiels locaux obtenus avec les deux codes (PL2 : PLAST2, ABQ : ABAQUS).

La figure 5 représente les forces tangentielles de contact (PLAST2) et les contraintes

tangentielles (ABAQUS) locales enregistrées sur trois nœuds esclaves (-1,0,1) (fig. 1.b). Lors de la première phase de contact les résultats obtenus par les deux codes sont quasiment identiques. Par contre, pendant la seconde phase de contact où la force tangentielle globale oscille, les résultats ne coïncident plus. Ces différences au niveau du contact entre les deux codes de calcul s’expliquent par la non- linéarité importante due à l'ajout du frottement. Dans ce cas, le pas de temps utilisé avec une solution implicite n'est pas assez petit pour représenter précisément les phénomènes locaux associés à l'onde élastique traversant le contact et pouvant être assimilés à une forme de stick-slip.

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3. DISCRETISATION ET APPROXIMATION DES SURFACES DE CONTACT Pour mener cette comparaison, le logiciel PLAST3, dans lequel différentes discrétisations

et/ou approximations de surfaces sont implantées, est utilisé. La gestion du contact entre deux corps par la méthode des multiplicateurs de Lagrange se résumant à l’interaction de nœuds esclaves sur des surfaces maîtres, dans la suite de ce paragraphe, le terme de surface désignera donc par défaut une surface maître. Sachant que l'élément utilisé en 3D est la brique à huit nœuds, une surface maître est décrite par un ensemble de surfaces quadrangles définies par quatre sommets non-coplanaires.

3.1. Méthode I : surface maître approximée par des éléments plans L'approximation la plus simple au niveau numérique consiste à définir un plan moyen

pour chaque surface quadrangle (fig. 6.a). Cette approximation est à proscrire pour des simulations où la surface des corps à modéliser a un faible rayon de courbure dans la zone de contact car aucune continuité n’est assurée entre deux éléments plans voisins. Un raffinement du maillage au niveau du contact, utilisé dans le but de minimiser la discontinuité entre des facettes voisines n'est pas une condition suffisante pour l'obtention précise de champs de contraintes et de déformations nécessaires à l'analyse des phénomènes physiques mis en évidence dans la peau des 1er corps en contact.

Elément de contact plan créé

Surface quadrangle

Facettes triangulaires

Surface quadrangle a. b.

Surface bi-cubique

Surface quadrangle c.

Figure 6. Trois approximations possibles d'une surface quadrangle.

3.2. Méthode II : surface maître de classe C0 interpolée par des facettes triangulaires Dans le souci d’obtenir des résultats précis avec des géométries de contact quelconques,

une méthode de discrétisation de chaque surface quadrangle permettant d’assurer une continuité de classe C0 de la surface maître a été développée dans PLAST3 [BAIL99]. Chaque surface quadrangle est divisée en quatre facettes triangulaires possédant l’isobarycentre G du quadrangle comme sommet commun (fig. 6.b et 7). Deux vecteurs unitaires, l’un normal dirigé vers l’intérieur du corps et l’autre tangentiel, sont associés à chaque facette triangulaire. Chaque surface quadrangle est donc définie par quatre normales.

Considérons le cas du nœud esclave L ayant pénétré à l’instant t+∆t la facette définie par les nœuds maîtres (1,2,G) en ayant fait le calcul du déplacement (éq. 4, éq. 5) avec les forces de contact nulles à t. La pénétration est éliminée à l’instant t+∆t en imposant au nœud L d’appartenir à la surface triangulaire (1,2,G). La position du nœud esclave L à l'instant t est

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donnée par le couple de valeurs (ξL,ηL) sur la facette triangulaire de référence. La condition de non-pénétration de ce nœud esclave s’écrit de la façon suivante :

( ) ( ) ( ) ( )LL3GttLL22ttLL11ttLLLtt ,NX,NX,NX,X ηξ⋅+ηξ⋅+ηξ⋅=ηξ ∆+∆+∆+∆+ (9)

où les fonctions de forme Ni sont les suivantes: ( ) LLLL1 1,N η−ξ−=ηξ , ( ) LLL2 ,N ξ=ηξ et ( ) LLL3 ,N η=ηξ ;

ittX ∆+ est le vecteur des coordonnées du point i:

[ ]Ttttttttt iiii

zyxX ∆+∆+∆+∆+ = . G étant l'isobarycentre des nœuds 1, 2, 3 et 4, le but est donc d'exprimer les coordonnées du nœud esclave L ayant pénétré entre t et t+∆t en fonction de celles de ces nœuds définissant la surface quadrangle pour construire la matrice des contraintes en déplacement élémentaire ( ttG ∆+ )L associée à L :

( )

−−

=⋅

∆+

∆+

∆+

∆+

∆+

∆+∆+

L

4

3

2

1

tt

tt

tt

tt

tt

4

4

4

3

3

3

2

2

2

1

1

1

ttLtt

XXXXX

100010001

a000a000a

a000a000a

a000a000a

a000a000a

XG (10)

avec ( ) 3LL11 a,Na +ηξ= ; ( ) 3LL22 a,Na +ηξ= ; ( ) 4,Naa LL343 ηξ== .

La résolution du système d’équations (éq. 6) s’effectue à partir d’un algorithme itératif de Gauss-Seidel évitant d’une part l’assemblage de toutes les matrices élémentaires ( ttG ∆+ )L dans la matrice globale ttG ∆+ et d’autre part de pouvoir vérifier et corriger les deux conditions de contact et de frottement durant les itérations (éq. 7). A la fin des itérations de Gauss-Seidel, c’est à dire à t+∆t, les nœuds esclaves adhérants ont la même position (ξL,ηL) sur la facette triangulaire de référence qu’à l’instant t et les nœuds glissants ont une force tangentielle de norme exactement égale à celle de la force normale multipliée par le coefficient de frottement.

Pour des simulations où le nombre de nœuds esclaves en contact est de l’ordre de 500 pour un nombre d'éléments d'environ 6000, la résolution globale du contact (recherche + convergence) occupe 7% du temps CPU total. L'utilisation d'une méthode de pénalisation pour la gestion du contact avec frottement, (méthode couramment utilisée dans les codes de calcul commerciaux en formulation dynamique explicite) n'apporte qu'une très faible diminution de ce temps CPU mais affecte la précision des résultats à l'échelle du contact.

1

2

34

G λL

LL(ξL,ηL)

1 2

G

ξ

η

η=1

ξ=1

surfaceextérieure

surfaceintérieure

1nr

2nr3n

r

4nr

nLrλ

tLrλ

Figure 7. Décomposition d'une surface quadrangle en quatre facettes triangulaires.

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3.3. Méthode III : surface maître de classe C1 interpolée par des splines bi-cubiques Toujours dans le souci d’obtenir des champs de contraintes et de déformations les plus

précis possibles au niveau des zones de contact, sans avoir recours à un maillage très fin, une nouvelle interpolation des surfaces a été développée [BAIL 99]. Des surfaces bi-cubiques de Coons de classe C1 passant par tous les nœuds maîtres du maillage (sommets des éléments briques utilisés en 3D) sont utilisées pour interpoler la surface maître (fig. 6.c). Si l’on exprime la surface bi-cubique à partir d’un vecteur à deux paramètres u et w [QIUL 87]:

( ) ( ) ( ) ( )kw,uzjw,uyiw,uxw,urrrr

++= (12) et si l’on connaît pour les quatre nœuds d’une surface quadrangle, leurs coordonnées, les directions et normes des vecteurs tangents, l’écriture de la surface bi-cubique de Coons est la suivante :

( ) TTcc W.M.B.M.Uw,ur = avec ]uuu1[U 32= , ]www1[W 32= ,

=

)1,1(r)0,1(r)1,1(r)0,1(r)1,0(r)0,0(r)1,0(r)0,0(r)1,1(r)0,1(r)1,1(r)0,1(r)1,0(r)0,0(r)1,0(r)0,0(r

B

uwuwuu

uwuwuu

ww

ww

,

−−−−

=

11221233

01000001

M c (13)

où ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) wuw,urw,ur ,ww,urw,ur ,uw,urw,ur 2

uwwu ∂∂∂=∂∂=∂∂= .

u

w

uj0

wj

1

10

x

z

y

r(ui,wj)

r(0,0)

r(1,1)

r(0,1)

r(1,0)ru(0,0)

ru(1,0)

rw(1,0)

rw(0,0)

ru(0,1)

ru(1,1)

rw(0,1)rw(1,1)

u

w

Figure 8. Construction d'une surface élémentaire bi-cubique.

L’utilisation des surfaces bi-cubiques élémentaires de Ferguson (version simplifiée des

surfaces bi-cubiques de Coons) évite la définition des vecteurs "twist" ruw pris égaux à zéro aux quatre sommets.

La surface maître étant un assemblage de surfaces quadrangles, la construction de la surface bi-cubique de Coons nécessite de définir la direction et la norme de chaque vecteur tangent aux nœuds maîtres. La direction des vecteurs tangents est déduite de celle des vecteurs normaux calculés en chaque nœud. La norme de ces vecteurs tangents ne peut pas être choisie arbitrairement. A partir de la relation entre les formes bi-cubiques de Bézier et de Fergusson, il est raisonnable de prendre comme norme des vecteurs tangents la plus petite longueur des segments entre le nœud considéré et ces voisins [FAUX 85].

La condition de non-pénétration des nœuds esclaves dans le domaine délimité cette fois-ci par une surface bi-cubique permet la construction élémentaire de la matrice de contrainte en déplacement et son intégration sans grande modification dans l’algorithme existant (§ 3.2).

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La construction des surfaces bi-cubiques ne nécessitant qu’un faible nombre d’informations, elles sont continuellement remises à jour pendant les itérations de Gauss-Seidel pour qu’au temps t+∆t les deux conditions de contact et de frottement (éq. 7) soient exactement vérifiées.

3.4. Illustration des méthodes d'approximation des surfaces maîtres Sur la figure 9, le maillage d’une surface maître constitué d’un assemblage de surfaces

quadrangles permet de visualiser les problèmes de discontinuités des directions des normales entre des surfaces quadrangles voisines. Si ce problème n’affecte en rien la convergence rapide de l’algorithme de contact développé avec une interpolation de classe C0 des surfaces, les champs de contraintes et de déformations obtenus en sont affectés. La figure 10 représente la même surface maître de type C1 obtenue après l’application de l’algorithme de Fergusson décrit ci-dessus (cf. 3.3.). Au contraire de l'utilisation d'une interpolation de Bézier, la surface bi-cubique passe par tous les nœuds maîtres définis comme les sommets des éléments briques utilisés en 3D.

Figure 9. Visualisation des surfaces

quadrangles maîtres. Figure 10. Visualisation des surfaces

interpolées par des splines bi-cubiques.

3.5. Comparaison des méthodes II et III : cas de l'impact d'un tube contre son support Les problèmes d'usure associés aux impacts entre un tube et son support (alésage

cylindrique) sont couramment rencontrés en milieu industriel, notamment dans les réacteurs de centrales nucléaires [ZBIN 89]. Cet exemple est choisi afin d'illustrer les erreurs liées à la discrétisation géométrique et plus particulièrement à la méthode d'approximation des surfaces de contact. La figure 11 représente la géométrie des corps et les conditions aux limites appliquées. Le cas de calcul présenté correspond à un impact avec des conditions de déplacements imposés en haut et en bas du tube reproduisant les conditions d'essais rencontrées sur une machine d'étude de l'usure de ces composants. Le support est encastré sur sa surface extérieure. Le tube et le support sont en acier inoxydable de module d'Young E=1,8 105 MPa et de coefficient de Poisson ν=0,3. La taille du maillage dans la zone de contact est relativement grossière par rapport à la surface de contact totale de manière à bien illustrer les problèmes de continuité évoqués précédemment.

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8,72

mm

9,68

mm

10,6

mm

20 m

m y

x

Tube

Support

Déplacementsimposés

Déplacementsimposés

10 m

m

33 m

m

x

z

x

y

Figure 11. Maillage et conditions aux limites.

La figure 12 représente les déplacements imposés ains i que les forces globales de contact obtenues avec les deux méthodes d'approximation des surfaces maîtres qui évoluent de manières identiques au cours de l'impact. De même, à l'échelle de la structure (fig. 13), les répartitions de la contrainte équivalente de Von-Mises semblent identiques dans les deux cas.

0

50

100

150

200

250

0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 1.2

Temps en ms

Forc

e gl

obal

e de

con

tact

/x (

N)

-2.0E-02

-1.5E-02

-1.0E-02

-5.0E-03

0.0E+00

5.0E-03

1.0E-02

1.5E-02

2.0E-02

2.5E-02

Dép

lace

men

t im

posé

en

mm

Approximation de la surfacepar des facettes triangulaires

Approximation de la surfacepar une spline bi-cubique

Figure 12. Déplacement imposé et force normale de contact globale obtenue

avec les méthodes II et III d'approximation des surfaces maîtres.

a. Surface maître C0 Surface maître C1

Figure 13. Répartition de la contrainte équivalente de Von-Mises dans les corps en contact.

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Une observation plus précise à l'échelle du contact montre que les répartitions des forces de contacts sont très différentes dans les deux cas et induisent par conséquent des champs de contraintes différents au niveau de la zone de contact des deux corps (fig. 14). La comparaison de ces résultats avec des modélisations réalisées en deux dimensions avec une discrétisation beaucoup plus fine de la zone de contact [CLAI 00] permet de conclure à la validité des résultats obtenus par la méthode d'interpolation au moyen de surfaces bi-cubiques alors que la répartition des forces de contact obtenue avec la méthode II reflète les problèmes de continuité des surfaces entre éléments voisins. La méthode du plan moyen (méthode I), qui n'est pas présentée ici, conduit à des résultats encore plus erronés que la méthode II.

a. Surface maître C0

b. Surface maître C1

Figure 14. Répartition des forces de contacts et de la contrainte équivalente de Von-Mises dans la partie supérieure du support

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4. RACCORD PONCTUEL ET INTEGRAL DANS LA METHODE DES MULTIPLICATEURS DE LAGRANGE

Pour la résolution d’un problème de contact sans frottement en utilisant la méthode des multiplicateurs de Lagrange, la construction des matrices globales ttG ∆+ (éq. 6) obtenues à partir de l’écrire de la condition de non- interpénétration et servant au calcul des forces de contacts n’est pas unique. Dans les paragraphes précédents, c’est le raccord ponctuel qui est utilisé (éq. 14). Le raccord intégral, issu d’une formulation mathématique différente de l’écriture de la condition de non pénétration des nœuds esclaves sur l’interface (éq. 15), conduit à l’obtention d’une nouvelle matrice ttG ∆+ . Ces méthodes de raccord sont présentées dans Hild et al. [HILD 98] et validées dans le cas d’un contact en deux dimensions sans frottement. Des développements mathématiques s’appuyant sur le taux de convergence en fonction de la taille du maillage montrent que le raccord intégral est plus précis que le raccord ponctuel en termes de contraintes et déformations calculées. C’est sur un exemple d’indentation de deux corps déformables sans frottement que ces méthodes de raccord sont comparées. La précision d’une méthode par rapport à l’autre à l’échelle du contact est présentée simplement à l’aide de la visualisation de la répartition des forces de contact et de la géométrie de l’interface. La méthode couramment programmée dans les codes de calculs par éléments finis commerciaux est celle du raccord ponctuel, appelée aussi condition de contact nœud-segment. Dans le cas d’un contact unilatéral sans frottement, les termes de la matrice ttG ∆+ sont obtenus à partir de :

( ) 0n.un.u 22h

1h

11h ≤ℑ+ (14)

où 1hℑ désigne l’opérateur d’interpolation de Lagrange aux nœuds esclaves du maillage de 1Ω

sur cΓ zone de contact entre les deux solides, ihu le champ des déplacements discrétisés de

iΩ , ni le vecteur normal unitaire sortant de iΩ . Pour le raccord de type intégral, les termes de la matrice ttG ∆+ sont issus de la condition

suivante de contact traduisant le contact unilatéral sans frottement :

( ) 0qn.un.uc

h22

h11

h ≤+∫Γ (15)

pour tout qh continu, affine par morceaux et négatif sur le maillage de 1Ω . Les simulations suivantes en deux dimensions et en déformations planes sont effectuées

avec le code PLAST2.

Y

X

1

2

Déplacements imposés

X=0.6Y=1.

X=-0.6Y=1.

Figure 15. Maillage initial des deux corps et conditions aux limites.

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La figure 15 représente le maillage initial et les conditions aux limites des deux corps

déformables. La surface esclave est définie sur le corps 1 et la surface maître sur le corps 2. Les deux corps ont un module d'Young E=70000 MPa et un coefficient de Poisson ν=0,3.

Figure 16. Isovaleurs σyy dans les deux corps

après un enfoncement de 0.14mm.

Figure 17. Répartition des forces de contact à l’interface aux nœuds esclaves.

La figure 16 donne une représentation des isovaleurs des contraintes σyy (enfoncement

vertical de 0.14mm des nœuds supérieurs du corps 1) pour les deux algorithmes de raccord. A cette échelle « globale » du contact, aucune différence sur la répartition des contraintes entre ces deux algorithmes n’est perceptible. Pourtant, si l’on trace les forces de contact aux nœuds esclaves pour ces deux méthodes (fig. 17), on observe alors dans la partie centrale du contact une répartition quasiment uniforme avec le raccord intégral (partie gauche), alors que la distribution de ces forces est perturbée avec le raccord ponctuel (partie droite).

9.50E-01

9.60E-01

9.70E-01

9.80E-01

9.90E-01

1.00E+00

0.00E+00 2.00E-01 4.00E-01 6.00E-01 8.00E-01

9.50E-01

9.60E-01

9.70E-01

9.80E-01

9.90E-01

1.00E+00

-8.00E-01 -6.00E-01 -4.00E-01 -2.00E-01 0.00E+00

X

Y

Figure 18. Surfaces maîtres et esclaves pour trois enfoncements différents et deux raccords.

A l’échelle du contact, le tracé des coordonnées des nœuds appartenant aux surfaces

maîtres et esclaves pour trois valeurs d’enfoncement différentes du corps 1 (fig. 18) met clairement en évidence les oscillations qui perturbent les forces de contact à l’interface dans le cas de l’utilisation du raccord ponctuel (partie droite). Un agrandissement de l’interface des deux corps pour l’enfoncement maximum (fig. 19) montre les problèmes « d’oscillations numériques » rencontrés au niveau des surfaces maîtres et esclaves. Ces problèmes sont liés à la construction de la matrice ttG ∆+ .

Une meilleure précision des contraintes et des déformations à l’interface est donc obtenue en utilisant la formulation du raccord intégral plutôt que celle du raccord ponctuel. Dans l’exemple d’indentation étudié ci-dessus, la longueur des éléments des surfaces maîtres est très légèrement supérieure à celle des segments esclaves. De plus avec le raccord ponctuel, des simulations où la longueur des segments maîtres est environ trop fois plus importante que celle des segments esclaves font apparaître un autre type de problème d’oscillations numériques («en vagues ») au niveau des surfaces. Ces oscillations sont bien évidemment

Raccord intégral Raccord ponctuel

0.

Raccord intégral Raccord ponctuel

2&

1&

Raccord intégral Raccord ponctuel

2&

1&

Page 17: Conf Cetim 2000

reproduites sur les forces de contact et ne sont pas rencontrées avec la formulation du raccord intégral.

9.55E-01

9.65E-01

0.00E+00 2.00E-01 4.00E-01 6.00E-01 8.00E-01

9.55E-01

9.65E-01

-8.00E-01 -6.00E-01 -4.00E-01 -2.00E-01 0.00E+00

X

Y

Figure 19. Surfaces maîtres et esclaves pour deux raccords.

5. CONCLUSION Les exemples présentés dans les paragraphes 2, 3 et 4 illustrent les précautions à prendre afin d'obtenir des résultats précis à l'échelle de la mécanique des contacts. Ces précautions portent à la fois sur l'algorithme de contact utilisé (pénalisation, multiplicateurs de Lagrange…), sur le type d'approximation de la surface de contact maître (plan, spline…) ainsi que sur la formulation mathématique de l’écriture du problème de contact (différents types de raccord pour la méthode des multiplicateurs de Lagrange). Si les informations recherchées par le modélisateur ne concernent que des grandeurs se rapportant à l'échelle de la structure, comme le temps total d'impact et l'évolution de la force globale d'impact au cours du temps, la plupart des formulations disponibles dans les codes commerciaux donnent entièrement satisfaction.

En revanche, si les modélisations sont réalisées dans la perspective d'une étude des phénomènes d'usure et particulièrement du détachement de particules, un modèle très précis doit être mis en place. En effet la précision des champs de contraintes et déformations élastiques conditionne largement les résultats obtenus dans les modélisations des phénomènes d'usure réalisées à partir de ces données comme par exemple des calculs de fatigue ou des calculs d'énergie locale dissipée dans le contact [CLAI 00]. Cette affirmation est également valable dans le cas de contacts fortement chargés pour lesquels des modélisations élasto-plastiques sont nécessaires, et ceci d'autant plus que la non- linéarité du comportement du matériau vient s'ajouter aux non- linéarités associées au contact.

Surface maître Surface esclave

Raccord intégral Raccord ponctuel

0.

Page 18: Conf Cetim 2000

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