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Eur. J. Biochem. 15 (1970) 321-330 Conformation du DNA dam la nuclkoprotkine F. Xavier WILHELM, Madeleine H. CHAMPAQNE et Michel P. DAUNE Centre de Recherches sur les Mammolhcules du Centre National de la Recherche Scientifique, Strasbourg (Rep le 16 rnars/l3 mai 1970) The nucleoprotein of chicken erythrocytes was dissociated by NaCl. The free histone and the residual complex were separated by centrifugation or gel filtration in order to obtain a series of complexes with variable protein content. For each complex the viscosity, circular dichroism spectrum and thermal profile were determined and discussed in terms of the configuration and conformation of DNA inside the nucleoprotein. A very small amount of protein is able to provoke a folding of the DNA which then behaves as a rigid rod. Subsequent binding of histones (up to 20-30°/,) is accompanied by an increased flexibility and a coiled configuration. In the case of a protein/DNA ratio of 0.9, the intrinsic viscosity of the nucleoprotein is four times smaller than the viscosity of DNA in the same condition. Such a decrease could indicate an organization of the DNA in a supercoiled structure. The circular dichroism spectrum of the DNA inside the nucleoprotein is very peculiar and bears no resemblance to any known state of DNA (A form or denatured). It is only the positive band between 250 nm and 300 nm which is strongly reduced, the negative one being practically unaffected. Similar results were obtained with solutions of DNA of high salt content. During the progressive stripping of histones the intensity of the positive band remains un- changed with the release of Fl and begins to increase when F2 and F3 are simultaneously lib- erated. In contrast to this absence of any structural change of DNA with the binding of F1, it is remarkable that the same binding (or release) affects the stability of roughly 50°/, of the DNA molecule. Although FI represents about 200/, of the total histone, and owing to the cooperative nature of the melting, it seems clear that histones are unequally distributed along the DNA and that F1-type histones predominantly cover large sequences of nucleotides. Dans la cellule la nucleoprotkine passe alternative- ment de l’ktat de chromatine diffuse pendant l’interphase A l’ktat de chromatine condensee sous forme de chromosomes lors de la division cellulaire. Pendant l’interphase la chromatine a une activitk de synthPse intense et au changement de structure tertiaire observe lors de la division cellulaire corre- spond une inhibition de cette activite de synthese. Les fonctions biologiques de la chromatine dk- pendent donc fortement de sa conformation. Pour pouvoir comprendre les changements de structure A ce niveau, une premiere &ape peut &re 1’6tude in vitro de la structure de la nuclhoprotbine isol6e selon la methode decrite par Zubay et Doty [I]. La nucl6oprotkine se presente comme un complexe entre le DNA et des proteines dont la majeure partie cst basique (histones) et dont le reste est constitu6 par Symbols utilisda. m/l, mame par unitk de longueur; AA~, absorbance b la longueur d‘onde I, trajet optique de 1 cm; dAi, diffhrence d’absorbance b la longueur d‘onde I; AD = DL - DR, diffhrence entre les cdfficients d’absorption de la IumiPre polarishe circulairement b gauche (L) et zt droite (R); H, Difft5rence de temperature de fusion. des protkines ayant une forte proportion d‘acides amin& acides (prothines acides). Dans ce complexe, le DNA qui a un poids molkculaire compris entre 6 et 10 x 106 daltons est recouvert par les histones dont les groupements basiques (arginine et lysine) ne compensent pas totalement les charges nkgatives des groupements phosphate. Environ 20°],, de ces groupe- ments restent libres [2]. Les protkines acides sont encore ma1 definies car on ne sait pas encore les distinguer des proteines contaminantes qui pourraient Btre extraites avec la nuclkoproteine [3] ; on peut cependant d6jA les classer en deux categories : les proteines acides faible- ment likes au DNA qui pourraient &re des prothines contaminantes et des proteines ayant une interaction forte avec le DNA, non dissoci6es de la nuclko- proteine A des forces ioniques klevees. La proportion d’histones et de protbines acides likes au DNA varie suivant la source de la nucleoprotbine [4]. Au cours de la preparation le RNA a Bt6 &mink par des lavages successifs, cependant il reste encore un faible pourcentage de RNA fortement lie A la

Conformation du DNA dans la nucléoprotéoprotéine

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Eur. J. Biochem. 15 (1970) 321-330

Conformation du DNA dam la nuclkoprotkine

F. Xavier WILHELM, Madeleine H. CHAMPAQNE et Michel P. DAUNE

Centre de Recherches sur les Mammolhcules du Centre National de la Recherche Scientifique, Strasbourg

(Rep le 16 rnars/l3 mai 1970)

The nucleoprotein of chicken erythrocytes was dissociated by NaCl. The free histone and the residual complex were separated by centrifugation or gel filtration in order to obtain a series of complexes with variable protein content. For each complex the viscosity, circular dichroism spectrum and thermal profile were determined and discussed in terms of the configuration and conformation of DNA inside the nucleoprotein.

A very small amount of protein is able to provoke a folding of the DNA which then behaves as a rigid rod. Subsequent binding of histones (up to 20-30°/,) is accompanied by an increased flexibility and a coiled configuration.

I n the case of a protein/DNA ratio of 0.9, the intrinsic viscosity of the nucleoprotein is four times smaller than the viscosity of DNA in the same condition. Such a decrease could indicate an organization of the DNA in a supercoiled structure.

The circular dichroism spectrum of the DNA inside the nucleoprotein is very peculiar and bears no resemblance to any known state of DNA (A form or denatured). It is only the positive band between 250 nm and 300 nm which is strongly reduced, the negative one being practically unaffected. Similar results were obtained with solutions of DNA of high salt content.

During the progressive stripping of histones the intensity of the positive band remains un- changed with the release of F l and begins to increase when F2 and F3 are simultaneously lib- erated.

In contrast to this absence of any structural change of DNA with the binding of F1, it is remarkable that the same binding (or release) affects the stability of roughly 50°/, of the DNA molecule. Although FI represents about 200/, of the total histone, and owing to the cooperative nature of the melting, it seems clear that histones are unequally distributed along the DNA and that F1-type histones predominantly cover large sequences of nucleotides.

Dans la cellule la nucleoprotkine passe alternative- ment de l’ktat de chromatine diffuse pendant l’interphase A l’ktat de chromatine condensee sous forme de chromosomes lors de la division cellulaire.

Pendant l’interphase la chromatine a une activitk de synthPse intense et au changement de structure tertiaire observe lors de la division cellulaire corre- spond une inhibition de cette activite de synthese.

Les fonctions biologiques de la chromatine dk- pendent donc fortement de sa conformation. Pour pouvoir comprendre les changements de structure A ce niveau, une premiere &ape peut &re 1’6tude in vitro de la structure de la nuclhoprotbine isol6e selon la methode decrite par Zubay et Doty [I]. La nucl6oprotkine se presente comme un complexe entre le DNA et des proteines dont la majeure partie cst basique (histones) et dont le reste est constitu6 par

Symbols utilisda. m/l, mame par unitk de longueur; A A ~ , absorbance b la longueur d‘onde I , trajet optique de 1 cm; dAi, diffhrence d’absorbance b la longueur d‘onde I ; A D = DL - DR, diffhrence entre les cdfficients d’absorption de la IumiPre polarishe circulairement b gauche (L) et zt droite (R); H , Difft5rence de temperature de fusion.

des protkines ayant une forte proportion d‘acides amin& acides (prothines acides). Dans ce complexe, le DNA qui a un poids molkculaire compris entre 6 et 10 x 106 daltons est recouvert par les histones dont les groupements basiques (arginine et lysine) ne compensent pas totalement les charges nkgatives des groupements phosphate. Environ 20°],, de ces groupe- ments restent libres [2].

Les protkines acides sont encore ma1 definies car on ne sait pas encore les distinguer des proteines contaminantes qui pourraient Btre extraites avec la nuclkoproteine [3] ; on peut cependant d6jA les classer en deux categories : les proteines acides faible- ment likes au DNA qui pourraient &re des prothines contaminantes et des proteines ayant une interaction forte avec le DNA, non dissoci6es de la nuclko- proteine A des forces ioniques klevees. La proportion d’histones et de protbines acides likes au DNA varie suivant la source de la nucleoprotbine [4]. Au cours de la preparation le RNA a Bt6 &mink par des lavages successifs, cependant il reste encore un faible pourcentage de RNA fortement lie A la

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322 Conformation du DNA dans la nuclboprothine Eur. J. Biochem.

nuclBoprotBine [5,6]. Ce RNA se distingue des autres RNA de la cellule par son faible poids mol6culaire et son taux BlevB de dihydrouracile [7].

Les nuclBoprotBines natives se presentent sous la forme de gels en milieu de faible force ionique (1 mM), cependant une petite quantit6 de nuclBoprot6ine est prBsente dans la phase soluble qui se &pare du gel par centrifugation. Mazen et Champagne ont montr6 que la dkgradation des nucl6oprotBines par action d‘enzymes DNasiques augmentait la quantitd de nucl6oprotBine dans la partie soluble [8]. On retrouve le m6me effet lorsque la nucl6oprotBine a 6tb soumise B des tensions de cisaillement [9]. Le pourcentage de DNA dans la fraction soluble est donc une autre mesure du taux de dkgradation de la nuclBoprotBine.

La nuclBoprot6ine native Btant ainsi bien dBfinie, des Btudes ont pu 6tre faites pour en dhterminer la structure. Les Btudes de diffraction des rayons X sur des fibres de nuclBoprotiine ont montrb qu’une organisation en superhelice peut expliquer les dia- grammes obtenus [lo, l l]. Cette organisationdisparait par elongation de la fibre de nuclBoprot6ine et r6- apparait lorsque la tension est supprim6e. Des Btudes au microscope Blectronique ont confirm6 ce modPle et ont montrb de mbme qu’il Btait possible de d6rouler la superhelice en Qtirant des fibres de nucl6oprotBines [12]. Par diffusion des rayons X aux petits angles Bram et Ris ont pu donner des indications sur le pas de la superhelice ainsi que sur sa masse par unit6 de longueur (m/Z) [12]. Les valeurs de 50 It 120 A pour le pas et de 1100 daltonslA pour le mll minimum qu’ils trouvent sont compatibles avec les resultats obtenus par d’autres auteurs [13].

Une maniPre diffdrente d’aborder 1’6tude de la structure de la nuclBoprotBine est de suivre les changements atructuraux ConsBcutifs B sa dissociation progressive soit par augmentation de la force ionique soit par diminution du pH. Les difTBrentes Btapes de la dissociation de la nuclBoprotBine de thymus et d’Qrythrocytes par abaissement du pH sont bien connues depuis les travaux de Murray et coll. [14a, 14bI. Ohlenbusch et coll. [15] ont BtudiB la dissocia- tion de la nuclBoprot6ine de thymus de veau par les sels, Fambrough et Bonner [16] celle de la nuclBo- prothine de petits pois et Wilhelm et Champagne [17] celle de la nuclkoproteine d‘Brythrocytes. Tous ces travaux ont montrb que la fraction F1 riche en lysine Btait dissociee la premiere pour des forces ioniques infirieures B 0,6M. Dans le cas des Brythrocytes la fraction sp6cifique est dissociBe dans un domaine de force ionique compris entre 0,6 M et 0,8 M. Pour des forces ioniques superieures B 0,8 M des quantitis de plus en plus grandes d’histones sont dissociBes d’une manihre peu sblective.

Plusieurs auteurs [15,17-201 ont dejB BtudiB quelques propri6t6s physicochimiques (courbes de fusion, viscosit6, dispersion optique rotatoire) des complexes residuels aux WBrents stades de la disso-

ciation. Nous avons voulu compl6ter ces donndes en Btudiant sur la nuclBoprotBine rbsiduelle et en fonc- tion de la quantitb d’histone lMe, la viscosit6, le di- chroisme circulaire et les changements spectraux lors de la fusion. L’analyse et l’interpr6tation des rbsultats nous conduisent B proposer un modPle pouvant rendre compte de la structure de la nucl6oprot6ine.

MATERIEL ET MfiTHODES Prdparation de la nuclhprotkine

Nous utilisons la m6thode dejil decrite [17] avec les modifications suivantes : pour prBparer la nuclBo- prot6ine native dans la forme gel, le culot obtenu aprPs hBmolyse est lave trois fois dans le solvant standard (0,075 M NaC1, 0,024 M EDTA, pH 8) puis trois fois dans NaCl 0,15M. Le culot est ensuite repris par de l’wu bidistillbe, mis B agiter pendant deux heures B la chambre froide, puis dialyse contre trois fois dix litres d‘eau bidistillee. Dans la plupart des expbiences decrites nous n’avons pas eu besoin de nuclboprot6ine native dans l’eau, nous avons donc repris le culot directement par une solution de NaCl 0,7 M. A cette force ionique la nuclBoprot6ine est presque entiPrement soluble et le culot se remet bien en solution. On centrifuge pour &miner l’insoluble. La solution ainsi obtenue est dialys6e pendant six heures contre les solutions salines de force ionique croissante. La dialyse est faite B l’aide d’un agitateur oscillant permettant B 1’Qquilibre de s’6tablir rapide- ment. On vBrifie le force ionique des solutions apds dialyse en mesurant l’indice de rBfraction B l’aide d’un rBfractomPtre d’Abbe. AprPs dialyse les soh- tions de nuclBoprotBine aux differentes forces ioni- ques sont immbdiatement utilisBes pour skparer la prothine libre et la nuclBoprotbine rbsiduelle.

Skparation de la protdine libre et de la nucldoprotdine rhiduelle

La sdparation a 6th faite soit par centrifugation soit par chromatographie sur Sephadex 6-200.

Centrifugation. Les solutions de nuclBoprotBine aux diffBrentes forces ioniques B la concentration de 200 pglml sont centrifugees six heures B 105000 xg. AprPs centrifugation le culot est dissous dans une solution saline de mbme force ionique, on centrifuge une nouvelle fois six heures B 105000xg afin d’6li- miner les histones libres restant encore en solution. AprPs la deuxiPme centrifugation le culot repris par une solution de NaCl 0,7 M est utilisB directement pour faire les mesures de dichroisme circulaire. Pour les experiences de ViscositB ou les courbes de fusion la solution de nuclBoprotBine est dialysBe contre une solution de force ionique faible (1 mM NaCl dans laquelle on ajoute 0,l mM EDTA avant les experiences de dknaturation thermique).

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Vol.lB, No.&, 1970 F. X. WILHELI, Rf. H. CIIAMPAONE et M. P. DAWNE 323

Chromatographie. Nous avons montr6 [17] qu’on obtenait une bonne s6paration du complexe partielle- ment dissoci6 et de l’histone libre en utilisant la chromatographie sur Sephadex G-200. Dans cette s6rie d’exphriences nous avons utilis6 m e colonne de 80 om A 90 cm de hauteur et de 2,8 cm de diametre. 15ml d’une solution de nucl6oprot6ine dont la concentration eat comprise entre 300 pg/ 1 et 500 pg/ml sont charges sur cette colonne. L’6lution se fait par une solution de NaCl B la force ionique correspondante. Des fractions de 3ml B 5ml sont recueillies avec un debit variant entre 25ml/h et 50ml/h. La totalit6 du pic de nuclkoprot6ine est recueillie puis dialys6e contre NaCl 0,7 M ou contre une solution de force ionique faible.

Analyses La quantit6 de DNA eat 6valu6e A partir de la

valeur de l’absorbance a 260 nm (le coefficient d’ex- tinction pour une solution contenant 1 g de DNA pour 100 ml est de 203). Lea protbines sont dosees par la m6thode de Lowry [21]. Un Bchantillon d’histone totale est utilis6 pour faire la courbe d’btalonnage.

On peut ainsi mesurer la valeur du rapport Pro- tbine/DNA des diff6rents complexes r6siduels ; en portant la valeur de ce rapport en fonction du rapport des absorbance5 B 230 nm et 260 nm on peut 6tablir une courbe d’dtalonnage qui servira par la suite a mesurer directement la valeur du rapport ProtBine/ DNA zt partir du spectre du complexe.

Viscositd Les mesures de viscosite ont bt6 faites avec un

viscosimPtre B rotation de Zimm et Crothers (W. Kran- nich KB, Gottingen, Allemagne). La temp6rature des solutions est thermostatde B 20”. Nous avons utilis6 un rotor donnant un gradient de vitesse inf6rieur A 2 sec-1. Les mesures de viscosit6 ont 6th faites A quatre concentrations qui, suivant l’bchantillon, varient entre 10 pg/ml et 100 pglml. Le viscosimetre est equip6 d’un syst6me de mesure automatique du temps de rotation du rotor. La p6riode de rotation du rotor est mesur6e B 0,Ol sec pr6s par occultation d’un faisceau lumineux, grLce it une photodiode et un dispositif de comptage avec sortie sur imprimante. I1 est donc facile d‘enregistrer un grand nombre de valeurs du temps de rotation et de ne prendre la valeur du temps qu’aprb stabilisation thermique du systeme. Une fois le r6gime stable atteint, les p6riodes de rotation de I’ordre de 25 sec ne W6rent pas entre elles de plus de 0’02 sec.

Dichrokme circulaire Les mesures de dichro’isme circulaire ont 6t6

faites avec un dichrographe I1 de Roussel-Jouan. Nous avons toujours utilis6 une cuve de trajet

optique 1 cm et la sensibilit6 maximum de l’appareil soit AD = DL - DR = 1,5 x 10-4 par millimPtre sur le papier enregistreur.

Suivant la proportion d‘histone like au DNA In concentration des W6rents Bchantillons eat corn- prise entre 50 pg/ml et 150 pglml. Avant chaque enregistrement du spectre de dichroisme circulaire, le spectre d’absorption de la m6me solution est enregistre sur un Cary 15: la turbidit6 B 320 nm est toujours inferieure A l o l o de l’absorbance h. 260 nm.

Courbes de fusion

Les courbes ont 6t6 enregistrees au moyen d’un spectrophotom6tre Beckmann DBG. La cellule est chauffhe dans un four Blectrique dont le chauffage est control6 par un programmeur de temp6rature. La montee de temperature de 76” en 50 min est lin6aire. &pendant, pour connaitre exactement la temp6 rature 8. chaque instant dans la cellule, il est prdfb- rable d’y plonger une des soudures d’un thermocouple (BTE-CTE), I’autre soudure Btant maintenue a 0 f 0,Ol”. Sur les deux directions d’un enregistreur XY (Luxytrace Sefram) sont envoy6es respective- ment la tension du thermocouple et une tension rigoureusement proportionnelle B l’absorbance. Dans ces conditions la courbe enregistree correspond exactement B la variation d’absorbance avec la tempdrature.

La variation en fonction de la tempbrature du spectre des nucl6oprot6ines a 6tB ktudi6e sur un Cary 15 dans lequel la cellule de mesure est chauffkc par un thermostat b circulation (Haake); la cellule de r6f6rence contient une solution de nuclkoproteine de mhme concentration que cellc de la cellule de mesure; celle-ci est maintenue B la temp6rature de la pi6ce. L’blkvation de temp6rature se fait par palier et apres stabilisation on enregistre le spectre differentiel entre 220 nm et 320 nm.

It&SULTATS ET DISCUSSION

Viscositd La Fig.1 represente la variation de la viscositb

rkduite en fonction de la concentration pour une s6rie de complexes partiellement dissoci6s. Les droites obtenues pour les dif€6rents complexes permettent de d6terminer pour chaque valeur du rapport pro- tdine/DNA la viscosite intrinsPque [q] et le coefficient de Huggins k‘ d6finis par l’expression :

Sur la m6me figure la droite en pointill6 repr6sente la variation de qsp/c en fonction de c dans le m6me solvent (1 mM NaCl) pour du DNA prepare par une mbthode au detergent dont la teneur en proteine est infbrieure & O,lO/, [22]. Le Tableau donne lea valeurs

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324 Conformation du DNA dans la nucl6oprothine Eur. J. Biocheni.

3

I

3 - 2 E Y : b

1

2 4 6 8 10 12 lo5. [Nucl&~prot’eine] (glrnl)

Fig.1. Variation de la viscositb rdduite des m p l e x e s nuclb- protCques partiellement dissocib en fonction cle la concentra- tion. Les diffhrentes courbes correspondent aux complexes ayant les rapports Prothine/DNA suivants: V, 0,885; 0, 0,650; A, 0,378; A, 0,309; W, 0,133; 0, 0,060; 0, 0,010;

0, DNA

Tableau. Viscositk intrins2que et constante de Huggins des complexes nuclwprotdipues

ProWie/DNA [111 k’

0,885 0,650 0,378 0,309 0,133 0,061 0,010 DNA

wl3

4600 6 800

10200 11 400 15500 20 000 22 800 22 000

0,756 0,700 0,768 0,739 0,567 0,500 0,408 0,825

I I I I I I I I I

0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 Prot6inelDNA (g/g)

Fig. 2. Vctriation de la aiscosite‘ iatriiiulque deu cotqlrxes nuclbprottiquex en fonction du rapport ProtiinelDNA

de [q] et de k‘ pour les differents complexes ainsi que pour le DNA dans lea m6mes conditions de force ionique. La Fig.2 repr6sente la variation de [q] en fonction du rapport ProtBine/DNA. La courbe ainsi obtenue a la m6me allure que la courbe de variation de la viscosit6 intrinseque du DNA en fonction de la force ionique [23] avec toutefois une diminution beaucoup plus importante dans le cas des complexes nucl6oprotBiques. (Le rapport [q] du DNA en I mM/ [q] du DNA en 2,O M est de 2 pour le sel donnant le maximum de variation (LiCl) alors qu’on atteint une valeur 4 du rapport [q] du DNA en 1 mM/ [q] de la nucl6oprotBine en 1 mM dans le cas d’une nucMoprot6ine de rapport prot&ine/DNA egal B 0’9). Par contre, les variations de la constante de Hug- gins k’ sont nettement WBrentes en presence de sel et en presence d’histones. En presence de concent,ra- tions salines croissantes la valeur de k‘ augmente et passe par un maximum avant de d6croitre pour des forces ioniques BlevBes [23]. Dans le cas des nucl6o- proteines on assiste B une variation exactement oppos6e; pour une trPs faible teneur en protBine (environ IO/J on observe une brusque diminution de k’ (k‘ = 0,40), puis k‘ croft lorsque le rapport pro- thinelDNA augmente. Dans le cas d’un complexe ayant un rapport protBine/DNA de 0’9 la valeur de k‘ est voisine de 0,8.

La comparaison des variations de [q] et de k‘ en fonction du rapport ProtBine/DNA donne une id6e des changements de configuration du DNA dans la nuclBoprot6ine :

a) En 1 mM et en absence de proteine la chaine de DNA est rigide et Btendue. On sait par exemple que le comportement asymptotique de la fonction de distribution angulaire de la lumiere diEus6e est celui d’un batonnet dont la valeur de m/l mesur6e est voisine de la valeur thborique (environ 200 daltons/A) calcul6e B partir du modele de Crick et Watson. La valeur k‘ = 0,8 mesur6e pour ce DNA correspond B celle trouv6c pour une chaine dans un bon solvant . Dans un tel solvant les dimensions r6elles de la molC- cule sont bien suphrieures aux dimensions non perturb6es ;

b) L’existence d’une faible qwntit6 de prot6ines r6siduelles sur le DNA provoque un repliement de la chaine. Le comportement asymptotique de la d i f i - sion de la lumiPre subsiste mais mll prend des valeurs dev6es alors que le rayon de giration diminue de moiti6 [24]. La forme approximative du complexe est celle d’une particule cylindrique A l’int6rieur dc laquelle se trouve repliBe la chaine de DNA. La valeur de k‘ est trPs petite et analogue B la valeur obtenue pour du DNA ultrasome en forme de batonnet rigide 1251. La viscosit6 intrinshquo est encore Plov6e car on a affaire iL un batonnet de poids mol6culaire et d’allongement 6lev6s ;

c) Au fur et iL mesure du recouvrement du DNA par les protbines basiques, la densit6 de charges nega-

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Vol.15, No.2, 1970 F. x. FVILHELX, H. CWPAGNE et a1. P. DAUNE 325

tives dhcroit et, m6me A faible force ionique, les r6pulsions Blectrostatiques ne sont plus suffisantes pour maintenir la chaine en configuration rigide. De plus, les histones organisent le DNA en superhelice, ce qui accentue le repliement de la chaine en pelote compacte. La viscosite intrinshque diminue et k‘ augmente pour atteindre la valeur de 0,8 de nouveau caracteristique d‘une molkcule en chaine dam un bon solvant.

30

20

10

0

-10

-20

-2 -30 - 5 a a -40

-50

- 60

-70

DichroLme circulaire

Le dichroisme circulaire est une m6thode parti- culihrement intkressante pour l’htude des change- ments de conformation intervenant au niveau du DNA dans les nuclboproGines. I1 n’y a en effet aucune contribution du dichroisme circulaire des proteines dans la region de 250-300 nm oh se trouve la bande positive du spectre de dichroi’sme circulaire du DNA. C’est ce que montre la Fig.3 oh nous avons represent6 le spectre de dichroisme circulaire du DNA dissous en NaCl 1 mM et de l’histone totale en solution dans l’eau. Toute variation d’intensitb ou de forme de la bande positive du DNA pourra donc

I I 230 240 250 ,260 270 280 290 300

Longueur d‘ onde (nm)

Fig. 4. Spectres de dichroisme dea wmplexea nuclkoprotkiques p r diftirenta rapports Prot6inelDNA. I, 0,010; 11, 0,378; III,0,650; IV, 0,885. Ad = deviation lue en mm sur le papier

enregistreur I I

E

2 0 - a

0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1.0 Prot%ne/DNA (g/g)

Fig.5. Variation de l’intemitk du maximum de dichroisme ic 280 nm en fonction du rapport ProtdinelDNA

Fig.3. Spectre de dichrofsme circulaire. I, DNA en solution dam NaCl 1 mM (c = 62,5 pg/ml); 11, Histone totale en solution dans l’eau (c = 10,35 pglml). Ad = deviation lue en

mm sur le papier enregistreur

courbes trouvees exphrimentalement et les courbes calculhes B partir des spectres du DNA et de l’histone totale ne coincident plus. Permogorov et coll. [26] ont montr6 qu’on pouvait calculer de cette manihre le pourcentage d’helice de l’histone dans la nuclko- prothine qui serait de 39O/,. Cependant ce calcul ne peut 6tre que trhs approximatif car on ne peut pas prhvoir la contribution exacte de chaque fraction d’histone au spectre de dichrokme. La modification de dispersion optique rotatoire correspondante est du m6me ordre que celle observ6e par Tunis et Heerst [27] sur des solutions de DNA de force ionique crois- sante. I1 Btait donc intbressant de voir si l’effet se retrouve dans les spectres de dichro‘isme circulaire et

Btre attribuee uniquement B un changement de pouvoir rotatoire clu DNA.

Dans la Fig.4 nous avons trace les spectres ob- tenus avec quelques complexes partiellement disso- ci6s. La bande positive diminue en intensit6 lorsque le rapport Prot&ine/DNA augmente. La Fig.5 reprksente la variation du maximum A D B 280 nm en fonction du rapport prot6ine/DNA. Nous n’obser- vons pas de d6placement du maximum.

En retranchant la contribution due aux histones clans la bande negative, on voit que la valeur du maximum ainsi que sa position ne sont pas affecthes. A des longueurs d’onde inf6rieures a 240nm les

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32G Conformation du DNA dans la nucl6oprotbine Pur. J. Biocheiii.

I A 30

- 20 E E v

-8 g 10 3

a

I I I I I I 1 1 1 1 230 240 250 260 270 280 290 300 310

Longueur d‘onde (nm)

I i

I I I I I I I I I 230 240 250 260 270 280 290 300 310

Longueur d‘onde (nm)

Fig.6. Spectres de dichroi‘eme du DNA. (A) En milieux de concentration croissante en NaCl: I, 1 mM; 11, 1,895 M; 111, 2,84 M; lV, 4,75 M. (B) En milieux de concentration croissante en LiCI: 1, 1 mM; 0,59 M; 111, 1,23 M; IV, 2,46 M;

V, 3,69 M; VI, 6,15 M

de comparer ainsi l’effet de la force ionique a celui de la complexation avec les histones.

Dam les Fig.6A et B nous avons represent6 les spectres de dichro’isme circulaire des solutions de DNA plac6es dans des milieux de force ionique croissante et dans le cas de deux sels dif€&ents (LiC1 et NaC1). Seule la bande positive du spectre diminue d’intensit6 lorsque la force ionique augmente. Dans le a s de LiCl cette diminution est beaucoup plus importante que dans le C&S des complexes nucleo- protbiques puisque la bande positive a entierement disparu en 6,O M. Dam la Fig. 7 nous avons represent6 la variation du maximum A D A 280 nm en fonction de la force ionique pour les deux sels 6tudi6s. Les

Fig.7. Variation du mazimUna de dichmisme du DNA Ci 280 nrn en fonction de la molaritd dam le cas de deux sels

courbes sont Merentes pour les deux sels et conime ils sont tous les deux de type 1-1 cette difT6rence ne peut Qtre attribuhe & un simple effet Blectrostatique.

Les courbes de variation de A D en fonction de l’activit6 de l’eau ne se superposent pas et nous trouvons donc, en accord avec Tunis et Hearst, que le changement d‘activit6 de l’eau ne peut pas non plus rendre compte de la variation de dichroisme circulaire.

Les spectres de dichroisme circulaire obtenus ne sont comparables ni 8. celui du DNA denature ni 8. celui du DNA dans la forme A. Par consequent l’action des histones ou des sels ne provoque pas une des- hydratation du DNA ou m e d6sorganisation des plateaux de bases. La variation observ6e de la bande positive doit donc Qtre attribu6e soit L un changement de conformation different des deux pr6c6dents) soit b une modification de la polarisabilit6 du milieu modifiant le champ interne au niveau des bases. I1 est difficile de distinguer entre ces deux perturba- tions. Nous avons mesur6 pour deux forces ioniques (1 mM NaCl et 2,5 M NaC1) le dichroisme circulaire du CMP. La variation relative d‘intensit6 L 280 nm est inf6rieure 8. 5 O / , c’est-&-dire bien plus faible que celle observ6e dans le cas du DNA pour le m6me h a r t de force ionique. De mgrne, Brahms et coll. [28] n’observent aucun changement de dichroisme circu- laire lorsqu’h 25” le poly (C) se trouve en 0,l M KF ou en 4’5 M KF. Par ailleurs, une etude r6cente de complexes entre le DNA et le cytochrome c [29] montre qu’il n’y a aucun changement du spectre de dichroisme circulaire m6me dans le cas d’un recouvrement complet de la chaine de DNA par le cytochrome c. Ainsi, sans vouloir pour le moment discuter plus complPtement ces r6sultats, allons-nous dans la suite faire l’hypothese que les changements de dichroisme observes sont dus uniquement A des changements de

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~01.15. KO.?, 1970 I?. X. WILHELM, M. H. CHAMPAGNE et M. P. DAUNE 327

conformation du DNA, c’est-B-dire une petite modi- fication des parametres de la double h6liee caract6- ristique de la forme B.

Nous pouvons rapprocher cette hypothese de celle faite par Wang [30] pour rendre compte de la forma- tion de twist dans un DNA circulaire place dans des milieux de force ionique variable. Le changement du nombre de plateaux de bases par tour #helice va provoquer une variation de dichroisme circulaire et de dispersion optique rotatoire en m6me temps qu’une hyperchromicitb d6jB observ6e par Emanuel[31]. Cette hyperchromicitk a Ct6 Bgalement trouvBe par Tuan et Bonner dans le cas des nucl6oprotBines. On peut donc admettre que les histones provoquent le m6me effet que les sels lorsqu’elles sont complexBes avec le DNA puisqu’on a observe les mbmes change- ments du spectre ultraviolet et du spectre de di- chroi’sme circulaire. On peut pousser un peu plus loin la comparaison entre l’action des histones et celle des sels en cherchant la molarit6 de NaCl qui serait nbcessaire pour r6duire le signal de dichroisme circulaire du DNA B 280 nm de la m6me quantitB que le fait l’ensemble des histones encore li6es au DNA en 0,7M NaC1. Compte tenu du milieu de mesure (0’7 M NaCl), on trouve une molarit6 (( Bquivalente o de 2,9 M.

D’autre part, 8. cause de la molarit6 du milieu, la nucl6oprotBine native est dBbarrassBe de la fraction F1. Pour pouvoir 6tudier la liaison Fl-DNA, il est donc n6cessaire d’op6rer b une force ionique suffi- samment faible pour que la nucl6oprot6ine native soit soluble sans qu’aucune prot6ine ne soit dissoci6e.

La mesure eat faite en 1 mM NaCl et la faible turbidit6 de la solution n’a aucun effet sur les rCsultats. En comparant le spectre obtenu pour la nucl6oprot6ine native 8. celui de la nuclhprot6ine dissoci6e par NaCl 0’7 M replacBe par dialyse en 1 mM NaC1, on ne dec6le aucune diff6rence. Ce rBsultat est en accord avec celui de h n et Bon- ner [20] qui n’avaient observe aucun effet de l’histone F1 sur le spectre de dispersion optique rotatoire de la nucl6oprot6ine.

Lors du depart de Fl, la fraction en poids de l’histone li6e au DNA passe de 1’1 i 0,9. En admet- tant la relation d’Bquivalence entre force ionique et histone Btablie prbcedemment, le passage de la nuclBoprot6ine dissoci6e par NaClO,7 M B la nucl6o- protBine native correspondrait B une augmentation de force ionique d’environ 0,65 M, c’est-b-dire b une diminution de dichroisme tout iL fait observable. L’absence de toute variation ne peut se comprendre que si le mode de liaison entre F1 et le DNA est nettement diE6rent de celui existant pour les autres fractions.

On peut faire deux hypotheses pour expliquer la dSBrence entre F1 et les autres histones. Cette diff6rence se retrouve dans leur ordre de dissociation, car F1 est dissocike avant les autres fractions alors

qu’on s’attendrait au contraire puisqu’elle est la plus basique.

a) Les rBcentes determinations de la sequence des acides amin& dans les fractions d’histones indiquent une repartition non uniforme de groupes basiques le long de la mol6cule [32,33]. Dans les histones riches en lysine il y a une concentration de groupes basiques dans la moiti6 de la prot6ine se terminant par le groupement -COO- alors que dans les histones de type F3 cette concentration se retrouve dans la moiti6 se terminant par -NHz. On ignore cependant quel le configuration tertiaire prennent lea histones au voisinage du DNA et si par exemple des sequences non contigugs d’acides aminb basiques ne se retrouvent pas adjacentes lorsque la prothine est fixbe au DNA ce qui expliquerait la diffbrence des eonstantes #association.

b) Une autre diffdrence entre les deux groupes d’histones reside dans leur contenu en arginine. On pourrait attribuer l‘action des histones riches en arginine sup la structure du DNA au r61e du groupe guanidine. A une Bnergie d’attraction purement Blectrostatique pourrait se superposer une Bnergie de cou plage London-Van der Waals avec les bases en raison de la polarisabilit6 plus Blev6e des groupes guanidines par rapport au -N& terminal de la lysine. 11 est B noter qu’avec des anions fortement polarisables (Clod-, CC1,COO-), en solution de force ionique BlevBe, peuvent se produire des couplages avec les bases conduisant 8. une modifkation du dichroisme circulaire, de l’absorption et de la stabi- lit6 de l’hblice [34].

Courbes de fusion Plusieurs auteurs [15,17,18] ont montr6 que les

courbes de fusion de nuclBoprotBines partiellement dissoci6es prdsentaient deux transitions successives pour des rapports ProtbinePNA superieurs B 0’3. Ce comportement traduit une hBterog6n6it6 des sites de fixation des histones le long de la chaine de DNA. C’est vrai en particulier dans le c&8 de la nucl6o- prot6ine dissoci6e par NaCl0’7 M o~ seule la fraction d’histone Fl eat enlevhe. Nous avons fait une courbe de fusion de cette nucl6oprotBine en 1 mM NaCl en pr6sence et en absence d’EDTA. La pdsence d’EDTA fait diminuer les deux tempdratures de transition mais 1’6cart est beaucoup plus grand pour la premiere (AT, = 12”) que pour la deux3me (AT, = 4”). Pratiquement il en rBsulte une meilleure separation des deux transitions. Cette M6rence s’explique si on admet que la premiere transition correspond B des regions de DNA pour lesquelles l’aetion stabili- satrice des ions divalents est la plus grande. Les ions divalents jouent done un r6le important dam la stabilit6 thermique de la nucl6oprotbine et ils agissent B des concentrations trPs faibles. On ne sait cepen- dant pas s’ils ont Bt6 introduits au cours de la pr6para-

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328 Conformation du DNA dans la nucleoprothine Eur. J. Biochem.

tion ou s’ils sont presents dans la nucleoproteine native. Si on chauffe cette solution de nucleoproteine dissociee par NaCl 0’7 M jusqu’d une temperature correspondent au premier palier et qu’on la laisse refroidir lentement, on observe une renaturation totale du DNA (Fig.8). X i le refroidiasement est fait brutalement en plongeant la cuve chauffke dans un bain de glace, on observe une renaturation instantanhe et totale. Lorsqu’un complexe ayant subi un tel cycle de chauffage et de refroidissement est B nouveau chauff6 jusqu’au premier palier, on remarque que la temperature de la premiitere transition est inf6rieure zt la temperature de fusion du complexe natif. Si on laisse refroidir la solution, le complexe se

chaines complkmentaires du DNA l’une en face de l’autre. Les mol6cules qui possedent ces regions se renaturent entihement d’une fapon cooperative puisque la courbe de renaturation a encore l’allure sigmoidale caractbristique. On est donc en presence d‘une population de molecules qui ne sont pas toutes recouvertes par la m6me proportion des differentes fractions d’histones.

Pour faire 1’6tude de la fusion des paires A - T e t G - C dans la nucleoproteine dissociee par NaCl 0,7 M nous avons utilis6 la methode decrite par Pelsenfeld et Sandeen [35]. La variation A A d’absor- bance en fonction de la temperature et de la longueur d’onde varie lineairement avec le pourcentage des paires A T et G - C fondues. On peut h i r e :

I 1 I I I 1 30 40 50 60 70 80 90

Temperature (‘C)

Fig.8. Courbes de fusion et de renaturation d’un complexe nddopzotdique disaocid par NaCl 0’7 M et dialysk wntre NuCl I mM, EDTA 0,l mM. L’ordre des cycles de chauffage et de refroidissement correspond B I’ordre dea chiffres sur la

figure

renature 8. nouveau enti6rement et on peut recom- mencer un nouveau cycle de chauffage et de refroi- dissement; dans ces conditions, la temperature de la premi6re transition ne change plus (Fig. 8). Ohlen- busch et coll. [15] donnent une interprktation simple de ce ph6nomPne en supposant que lors du premier chauffage les prot6ines qui se trouvent encore sur les parties fondues sont d6tachees et se distribuent en d’autres points de la chaine de DNA. Le depart de ces p ro thes laisse des portions de DNA compl6te- ment libres et la fusion s’eEectue alors A une temp& rature plus basse lors du deuxiPme chauffage. Une fois la nouvelle repartition faite et si la nucleo- proteine n’est pas chauffee A une temperature sup& rieure B celle du premier palier, il n’y a plus de raison pour que d‘autres prot6ines se detachent et le systiteme est complPtement reversible. Si la solution de nncleoproteine est chauffee zt une temperature plus BlevBe, on observe encore une renaturation coopBative, cependant celle-ci n’est plus totale. A cette temperature on a donc denature certaines mol6cules de nucleoprothines d’une faqon irrher- sible. Ces molecules n’ont plus de regions fortement stabilisees par des proteines maintenant les deux

f A . T et ~ G . C &ant les fractions des paires A * T et G * C fondues B chaque temperature, et PA.T et PG. c &ant des fractions numeriques dependant de la longueur d’onde et du pourcentage des paires A - T e t G - C (XA.ToU&.C)dansleDNA.

Felsenfeld et Sandeen ont fait le calcul de /?A.T et &.c pour un DNA de thymus de veau. Comme le DNA d‘erythrocytes de poulet a une composition en bases tres peu differente de celle du DNA de thymus [36] nous avons repris les valeurs calcult5es par FelsenfeId et Sandeen pour faire notre etude. L’absorption propre des proteines dans la region 280 nm n’introduit pas de correction appre- ciable. Par contre, l’analyse ne peut 6tre pouss6e au deb de 230 nm en raison de la forte absorbance des histones dans cette region.

Dans la Fig.9 nous avons trace les spectres diffkrentiels obtenus A chaque temptkature pour la nucleoproteine dissociee par NaCl 0,7 M; il n’y a aucune augmentation de I’absorbance B 320 nm indiquant l’apparition de turbidit&

La Fig.10 represente les courbes de fusion ob- tenues pour les paires A * T et G - C du complexe nucleoproteique diwoci6 par NaCl 0,7M; la dif€& rence de temperature de fusion entre A - T et G * C est la, m6me pour les deux transitions et elle est identique Q celle observee pour un DNA natif. I1 n’y a donc aucune stabilisation prbferentielle des paires A - T ou G - C par les histones encore prdsentes sur le DNA. Les experiences de fusion de la nucl6o- protbine native ne peuvent pas 6tre faites d cause de l’appartion de turbidit6 au cours du chaffauge. On ne peut donc rien dire sur la sp6cificitk de Fl pour certaines regions du DNA. Cependant on peut constater que lorsque P1 est dissociee, la premiPre transition represente 5001, de l’hyperchromicit6 totale. Le depart de Fl affecte donc la stabilit6 de 500/, du DNA. I1 n’y a cependant aucune sphcificitt5

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Vol. 11, No. 2, 1970 F. X. WILHELM, M. H. CHAMPAGNE e t M. P. DauNE 329

0.4 L 0.3

A 2 0.2

0.1

220 230 240 250 260 270 280 290 300 310 320 Longueur d’ onde (nm)

Fig.9. Spedres diiitrentiels obtenw, par chaufiage de la nuclw- protkine dissocih par NaCl 0,7M. La solution de nuel&-

protbine utiliebe a une absorbance de 0,965 B 260 nm

y 0.6

c

0.3

0.2

0.1

50 60 70 00 Terngrature (‘C)

Fig. 10. Caurbes de fusion dea paires A - T et G - C dans la nuelbproltine dissocite par NaClO,7 111

de recouvrement des paires A - T ou G * C puisque 1’6cart entre les courbes de fusion respectives de ces deux paires de nucleotides est le m6me dans les deux transitions successives et identique L celui trouv6 dans le DNA seul. Ces resultats sont en contradiction avec les experiences de Ohba [37] qui avait montr6 que les paires A * T Btaient stabilisees par les histones. I1 faut remarquer qu’il n’observe pas non plus les deux paliers caractbristiques des nucleoprot6ines partiellement d6proteneis6es.

Les courbes de fusion it deux paliers ont 6 th egalement obtenues par Olins [38] pour des com- plexes artificiels entre le DNA et F1. I1 montre que la temperature de la premiere transition depend du rapport Histone/DNA et qu’il n’y a aucune stabilisa- tion preferentielle des paires A - T ou G - C dans ces complexes: comme c’est le cas pour les complexes que nous avons Btudies.

CONCLUSION Dc cet ensemble de r6sultats il apparait (a) que

la repartition des histones sup le DNA est in6gale et (b) que le mode d’association des fractions d’histones n’est pas le m6me pour les histones du type F1 et pour celles du type F2 ou F3.

L’histone F1 participe au recouvrement de regions relativement longues de DNA puisque la premiere transition de la courbe de fusion, apres le depart de FI, conserve une allure cooperative. Par ailleurs 500/, du DNA se trouve perturb6 par le dBpart de F1 alors que cette histone ne represente que 20°/, en poids de l’histone totale. On peut alors formuler deux hypotheses sur la r6partition de l’hiatone F1 le long du DNA:

a) la moitie du DNA est recouverte par cette fraction en association sans doute avec d‘autres histones. L’autre moiti6 du DNA serait alors recou- verte uniquement par les fractions d’histones autres que F1 ;

b) on peut trouver F1 tout le long de la chafne de DNA mais la proportion de cette fraction est beaucoup plus grande sur 50°/, environ de la molecule d’acide nucl6ique.

On comprend dans les deux cas que lors de la fusion du complexe dissocie par NaC1 0’7 M la temperature caractBristique de la prem2re transition soit plus Blevke que celle du DNA seul.

Dans la nucl6oprotBine, seules lea fractions F2 et F3 perturbent la. structure du DNA. Une Btude plus approfondie de la relation entre la structure et le dichro‘isme circulaire du DNA serait necessaire pour pouvoir caracteriser quantitativement les modifica- tions de structure impos6es par ces histones. Du fait de la repartition inkgale des histones l’effet produit par F2 et F3 sur la structure du DNA doit dtre en fait beaucoup plus grand, puisque le spectre de dichroi‘sme circulaire observe est la somme de deux spectres difT6rents. L’un provient de regions non perturb6es (oh se trouve F1 en totalit6 ou en majorit6 et oh le DNA conserverait la forme B habituelle), l’autre des regions oh se trouvent essentiellement F2 et F3. Dans ces dernieres regions le changement local de la conformation, qui qualitativement s’apparente it l’effet de forces ioniques BlevBes, provoquerait une torsion g6n6rale de l’hklice pour l’organiser en super- helice. I1 p a en m6me temps un rharrangement de la molecule de prothine qui se traduit par une aug- mentation du pourcentage d’helice a. Cette double modification de structure permettrait une meilleure adaptation des deux molecules et pourrait constituer une certaine specificit6 de reconnaissance caracthis- tique des fractions F2 et F3. Comme nous avons montrb que cette spbcificitk ne peut pas &re reli6e L un contenu global de paires A - T et G - C on est amen6 L rechercher des m6canismes sp6cifiques de reconnaissance de sequences de nucleotides.

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330 F. X. WILEELM, M. H. CHA~~PAQNE et AT. P. DAUNE: Conformation du DNA dam la nuclbproGine Eur. J. Biochem.

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