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Construire un miroir liquide
Marc Heidmann
Table des matières :
Introduction ....................................................................................................................... 3
1. Construction du miroir liquide ............................................................................... 3 1.1. Principe du miroir liquide .................................................................................. 3
1.2. Montage expérimental........................................................................................ 3
1.3. Voir la courbe..................................................................................................... 4
2. Propriétés d'un miroir liquide ................................................................................ 4 2.1. Observation de la parabole................................................................................. 4
2.2. Tentative de détermination de la courbure......................................................... 4
2.3. Miroir et focalisation.......................................................................................... 5
2.4. Mesure précise de la focale ................................................................................ 5
3. Vers les vrais miroirs liquides ................................................................................. 5 3.1. Limites imposées par la stabilité du moteur....................................................... 5
3.2. Plus proche de la réalité : la résine..................................................................... 6
4. Micro-vagues à la surface ........................................................................................ 6
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Table des figures :
Figure 1 : Principe de la déformation de la surface d'un liquide en rotation ..................... 8
Figure 2 : Montage expérimental réalisé à partir d'une platine de tourne-disque .............. 8
Figure 3 : Observation de la déformation parabolique de la surface pour différentes vitesses de rotation ............................................................................................ 9
Figure 4 : Paraboles-test..................................................................................................... 9
Figure 5 : Résultats .......................................................................................................... 10
Figure 6 : focalisation ...................................................................................................... 10
Figure 7 : Principe de la mesure de la focale du miroir avec 2 lasers.............................. 11
Figure 8 : montage expérimental...................................................................................... 11
Figure 9 : Les faisceaux lasers focalisent en un point sur la règle graduée ..................... 12
Figure 10 : Résultat de la mesure de la focale en fonction de la vitesse de rotation........ 12
Figure 11 : Instabilité à long terme du moteur et variation correspondante de la focale. 13
Figure 12 : Micro-vagues sur un miroir liquide de la NASA de rayon 1.5 m ................. 13
Figure 13 : équation des micros vagues tracées à l'aide de Maple avec Ω = 1.28 rad/s .. 14
Figure 14 : Miroir liquide de 1.5 m de rayon du laboratoire de Borra avec les équations des micros vagues tracées à l'aide de Maple (Ω = 1.28 rad/s)......................... 14
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Introduction
Les miroirs primaires de télescope doivent être parfaitement stigmatiques ainsi ils ont la forme d'une parabole. Il s'agit de réaliser un miroir qui ait un grand diamètre afin d'obtenir des images lumineuses mais qui soit aussi le plus lisse possible pour optimiser la résolution. Un miroir en verre de 6 mètres de diamètre demande ainsi un investissement de 40 millions d'euros. Un miroir liquide de diamètre équivalent est 40 fois moins onéreux. Il consiste à profiter de l'effet de la pesanteur et des forces de pression pour former une parabole parfaite. A la place du verre, les astronomes utilise du mercure, un liquide très réfléchissant. L'inconvénient de ces miroirs est qu'ils ne peuvent pointer qu'au Zénith mais de nombreux projets visent à faire de ceux-ci les miroirs de demain. Dans le cadre de mon sujet de TIPE, j'ai construit mon propre miroir liquide dans l'optique de pouvoir vérifier dans un premier temps que la surface du liquide est parabolique et dans un second temps d'avoir accès à la distance focale et aux propriétés optiques de mon miroir.
1. Construction du miroir liquide
1.1. Principe du miroir liquide On considère un verre en rotation sur lui-même contenant un liquide. Sous les hypothèses
que:
-le référentiel terrestre est galiléen -le vecteur g est constant -le vecteur rotation ω
Οn applique le théorème de la résultante dynamique à une particule de fluide à l'équilibre :
0=++ gmFF pierrr
On obtient deux relations : la première nous donne la variation de la côte z en fonction de la distance radiale, la seconde, la variation de la distance focale avec la vitesse de rotation : (voir figure 1):
grz
.2
22ω= 2.2 ω
gF =
On constate donc que la théorie prévoit effectivement que la surface prenne une forme parabolique. On a en effet une équation du type r² = 2pz.
Afin d'obtenir une focale de l'ordre de 100 cm, on obtient une vitesse de rotation de 21 tour/min. Sachant qu'on souhaite un rapport focale sur diamètre d'environ 5, cela correspond à un diamètre de 20 cm.
1.2. Montage expérimental J'ai récupéré un ancien tourne-disque que j'ai assisté par un moteur de voiture
télécommandée alimenté par une alimentation variable. J'ai alors placé un plat retourné sur le
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plateau tournant afin d'assurer le centrage du récipient posé au-dessus qui contiendrait le liquide. A l'aide d'un scotch réfléchissant collé sur ce dernier et d'un tachymètre optique, j'ai eu accès à la vitesse de rotation du récipient en tours par minute (voir figure 2). Les vitesses accessibles allaient de 60 à 120 tr/min.
1.3. Voir la courbe Le premier moyen de se rendre compte de la déformation de la surface du liquide lors de
la rotation du plateau a été de remplir le récipient en verre d'un liquide transparent et d'observer sa surface. En se plaçant de coté on voit nettement l'apparition d'un ménisque dont la profondeur augmente avec la vitesse comme on peut le voir sur la figure 3.
2. Propriétés d'un miroir liquide
2.1. Observation de la parabole Il s'agit d'aller plus loin et de vérifier que la courbe formée par la surface du liquide est
bel et bien une parabole comme le prévoit la théorie. Pour cela, j'ai pris des photos de profil du récipient et j'ai pointé à l'aide du logiciel regavi la courbe formée par la surface dans le plan parallèle à celui de l'objectif de l'appareil photo. J'ai ensuite transféré les données sur regressi, puis j'ai modélisé la courbe obtenu par une parabole. Les résultats pour des échantillons de 12 mesures équiréparties entre 60 et 120 tours par minutes m'ont donné un écart relatif avec la parabole de moins de 2%. On a donc une parabole. Soit z = ax²+bx+c l'équation de la parabole obtenue. Un calcul rapide permet de montrer que a = 1/4F avec F la focale du miroir. Ainsi j'ai souhaité vérifié que je pouvais remonter à la distance focale à partir de mon pointage régavi connaissant celle-ci à partir de la vitesse de rotation et de la formule théorique. Le résultat n'a pas été à la hauteur de mes attentes car j'ai obtenu un écart pouvant dépasser les 100% avec la focale théorique.
2.2. Tentative de détermination de la courbure Effectivement lors du pointage de la courbe, je choisissais une ligne tapissant la surface
du liquide qui me semblait être dans le plan de l'objectif. J'ai tout d'abord pensé que l'effet dioptre du récipient devait me faire pointer la mauvaise courbe. Pour cela j'ai tracé sur une feuille quatre paraboles-test dont je connaissais l'équation et par conséquent la focale associée (voir figures 4 et 5). J'ai mis cette feuille dans le récipient vide de façon à ce que les paraboles-test soient dans un plan parallèle à l'objectif de mon appareil photo. J'ai alors pris des photos, pointé via regavi les paraboles-test sur les photos, transféré sur regressi et modélisé par une parabole. J'ai donc eu accès à la focale et j'ai comparé avec la valeur réelle. Je n'obtiens qu'un écart relatif inférieur à 10% sur un échantillon de 4 photos et donc de 16 pointages. Cela ne suffit donc pas pour expliquer les 100% d'écart de tantôt.
J'ai alors entrepris de montrer que ce pouvait être du à l'effet dioptre de l'eau. Ainsi j'ai mis la feuille des paraboles-test dans une pochette plastique afin de la protéger du liquide, je l'ai placée dans le récipient et j'ai ajouté de l'eau dans celui-ci. J'ai alors effectué le même travail que plus haut. Cette fois-ci l'écart est plus important mais seulement de 15%. L'eau et le récipient ont donc bien un effet de dioptre qui rende la mesure du pointage moins précise mais cela ne suffit pas à expliquer l'écart observé avec le vrai focal du liquide dans le
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récipient tournant. J'ai alors cherché une autre manipulation qui me permettrait d'accéder réellement à la focale.
2.3. Miroir et focalisation Alors que jusqu'à présent je n'avais pas utilisé directement les propriétés optiques de mon
montage, j'ai entrepris d'achever la mise en place du miroir. J'ai donc changé de liquide car l'eau étant transparente, elle a l'inconvénient d'entrainer la formation de réflexion parasite sur le récipient en verre. J'ai testé plusieurs liquides et le lait s'est avéré être un bon choix. J'avais donc un miroir parabolique liquide. J'ai alors voulu vérifier qu'une image à l'infini focaliserait en son foyer. Pour cela j'ai utilisé une lampe de poche que j'ai placée à 2 mètres du miroir, c'est-à-dire à plus de 35 fois la focale. A cette distance, j'ai pu considérer que les rayons lumineux issus de la lampe étaient quasiment parallèles. Effectivement comme on peut le voir sur la figure 6, les faisceaux focalisent et on observe l'image réelle de la lampe au foyer. Le foyer est donc visible mais aucune mesure n'est alors possible car c'est une image en 3 dimensions.
2.4. Mesure précise de la focale J'ai voulu projeter l'image dans un plan afin de pouvoir mesurer la distance entre l'image
au foyer et la surface du liquide et ainsi connaître la distance focale. Pour avoir un infini plus rigoureux j'ai donc changé de dispositif. J'ai utilisé 2 lasers que j'ai placés très minutieusement verticalement afin que tout se passe comme s'ils étaient à l'infini. J'ai alors placé un fil un plomb au-dessus du centre du récipient et donc le plomb frôlait la surface du liquide en rotation. Sur le fil à plomb j'ai collé une feuille graduée qui était donc dans un plan passant par le foyer. Les lasers devaient donc focaliser en un point sur cette feuille graduée et donc je pouvais avoir accès à la focale (voir figure 7, 8 et 9). Effectivement le résultat fut très bon car j'ai obtenu par cette méthode la focale 4% en moyenne sur un panel de vitesse allant de 60 à 120 tours/min. Comme on peut le voir sur la courbe de la figure 10, connaissant la vitesse je peux déterminer la focale à 0.5 millimètres près.
3. Vers les vrais miroirs liquides
3.1. Limites imposées par la stabilité du moteur Les moteurs des miroirs liquides de télescope sont en réalité asservis afin que leur régime
soit le plus stable possible et donc que la focale ne varie pas en fonction du temps. J'ai essayé de voir les limites de mon montage en considérant la variation de la focale en fonction du temps et en vérifiant que comme le prévoit la théorie une variation de puissance apportée par le moteur entraine une variation de la distance focale. Pour cela je me suis servi des lasers pour déterminer la focale et de la valeur de la vitesse donnée par mon tachymètre optique. J'ai donc tracé la courbe de la figure 11 qui permet de visualiser qu'il y a bien un lien entre les deux et une variation assez conséquente de la focale au cours du temps. Effectivement, la focale a varié de l'ordre de 1 cm en 4 minutes. J'ai donc atteint les premières limites de mon montage. Pour l'utiliser comme miroir primaire de télescope il me faudrait donc l'asservir en vitesse.
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3.2. Plus proche de la réalité : la résine Pour limiter les perturbations à la surface du liquide, les constructeurs de miroirs liquides
font en réalité un moule parabolique sur lequel il verse une fine couche de liquide réfléchissant. Mon contact à Liège, Monsieur Finet, qui travaille sur la fabrication d'un miroir de 2 mètres de diamètre m'a conseillé de synthétiser une résine de polyuréthane afin de me rapprocher des vrais miroirs liquide. Ainsi j'ai synthétisé du polyuréthane dans mon lycée à partir du glycérol, de polypropylène glycol de diéthyléthanol amine, d'huile et de toluène-2,4-diisocyanate et de l'eau. Les premiers essais ne furent pas concluants car la résine gonflait trop lors de sa solidification. Mais après avoir supprimé l'eau, j'ai pu envisager de laisser la réaction de polymérisation se dérouler sur le plateau tournant. Le moule est bien parabolique. Après ajout d'une fine couche de lait et la mise en place de l'expérience de focalisation des faisceaux lumineux de la lampe de poche, j'ai constaté qu'effectivement il y avait focalisation. J'avais bien un miroir liquide.
4. Micro-vagues à la surface
A la surface des véritables miroirs liquides de la NASA, bien qu'ils soient remarquablement bien asservis en vitesse, il se forme des vagues de hauteur micrométrique qui sont les prochaines limites auxquelles j'aurais été confronté si mon moteur avait été plus stable (cf figure 12). Elles sont dues au contact entre deux liquides de viscosité et de vitesses différentes. En effet, le mercure a une vitesse de 1.0 rad/s, dans le cas du miroir liquide de 6 mètres de diamètre de la Nasa, tandis que l'air juste au dessus est quasiment immobile. Ces micro-vagues ont la particularité de former des spirales à la surface du miroir. J'ai entrepris d'établir un modèle théorique qui permettrait d'obtenir l'équation d'une ride en forme de spirale. Pour cela, j'ai adopté un modèle de type Saint-Venant. Je me suis placé dans le référentiel entrainé à la vitesse Ω. En se plaçant en coordonnées cylindriques (r,θ,z) et en notant h la hauteur de la couche de liquide, v1 la vitesse relative du liquide, et ω la vitesse angulaire relative du liquide, on peut supposer que ω << Ω. Ce qui permet de se placer alors en régime quasi-stationnaire. J'obtiens les équations suivantes :
(1) 0)( 1 =vdiv r
(2) 0)(..2 11 =−−∧Ω− hgradgvfv rrr
Les rides sont décrites par les lignes h(r,θ) = constante, ce qui donne :
0=∂∂
+∂∂
= θθ
dhdrrhdh
En utilisant (2) et la condition au limite 0.1 =ruv rr à l'interface mercure-air, un calcul de dérivés partielles m'a permis d'obtenir :
θdfrdr
Ω+=
2
En intégrant cette équation aux variables séparables, on obtient l'équation d'une spirale logarithmique :
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)2
.exp(.0 Ω=
θfrr
De plus, en déterminant le coefficient f à l'aide de la viscosité du mercure, de sa masse volumique et de l'épaisseur de la couche de liquide, on trouve f = 0.12 s-1. Enfin, j'ai tracé avec Maple les spirales décrites par cette équation, en les superposant à une photo du miroir liquide du laboratoire de Borra ayant à sa surface des micro-vagues. On constate qu'elles coïncident et que le modèle est donc satisfaisant.
Bibliographie:
- Science et Vie n°1079, p. 18 (août 2007) - Site de l'Université de Laval, Groupe Miroirs Liquide et Optique Adaptative : http://wood.phy.ulaval.ca - "Liquid mirror telescopes: history", Gibson, Journal of the Royal Astronomical Society of Canada, vol. 85, n°4, p. 158 (1991) - "Liquid Mirrors : A Review", E. Borra, Canadian Journal of Physics 73, 109 (1995) - The Large Zenith Telescope : A 6m Liquid Mirror Telescope", Astronomical Society of Pacific, 119, 444 (2007)
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Figure 1 : Principe de la déformation de la surface d'un liquide en rotation
récipient contenant de l'eau
plateau tournant
(ancien tourne- disque)
support
moteur
tachymètre optique
Alimentation
plat retourné pour assurer le centrage
Figure 2 : Montage expérimental réalisé à partir d'une platine de tourne-disque
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70 tr/min 80 tr/min 95 tr/min
105 tr/min 110 tr/min
Figure 3 : Observation de la déformation parabolique de la surface pour différentes vitesses de rotation
Figure 4 : Paraboles-test
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focale mesurée en cm
focale réelle en cm Figure 5 : Résultats
foyer
ω=86 tr/min
Figure 6 : focalisation
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moteur
plateau tournant
alimentation
fil à plomb
lasers placés verticalement
feuille graduée
Figure 7 : Principe de la mesure de la focale du miroir avec 2 lasers
fil à plomb
pointeurs lasers placés verticalement
feuille graduée
Figure 8 : montage expérimental
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Figure 9 : Les faisceaux lasers focalisent en un point sur la règle graduée
Figure 10 : Résultat de la mesure de la focale en fonction de la vitesse de rotation
ω(tr/min)
F (cm)
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F (cm)
Temps (s)
Focale sur 4 min ω autour de 80 tr/min Ecart |F-F|< 0,5mm Variations de F < 1,5 cm
F mesurée F calculée
à partir de la mesure de la vitesse
Figure 11 : Instabilité à long terme du moteur et variation correspondante de la focale
vagues en spirale
Figure 12 : Micro-vagues sur un miroir liquide de la NASA de rayon 1.5 m
− 13 −
>
Figure 13 : équation des micros vagues tracées à l'aide de Maple avec Ω = 1.28 rad/s
Figure 14 : Miroir liquide de 1.5 m de rayon du laboratoire de Borra avec les équations des micros vagues tracées à l'aide de Maple (Ω = 1.28 rad/s)
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