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future health Endiguer la progression de la dengue dans le monde Contexte La dengue est la maladie à transmission vectorielle dont la croissance est la plus rapide au monde, [1] et la deuxième menace pour la santé publique transmise par les moustiques après le paludisme. [2] Près de la moitié de la population mondiale vit dans une région à risque — soit 30 fois plus qu’il y a 50 ans — et les enfants de moins de 10 ans sont les plus vulnérables. Le nombre d’infections symptomatiques par la dengue a plus que doublé tous les dix ans depuis 1990. [3] L’augmentation des voyages internationaux ainsi que l’essor du commerce et de l’urbanisation sont autant de facteurs qui contribuent à l’expansion de la maladie, car le nombre potentiel de personnes exposées et les conditions de reproduction du moustique Aedes augmentent à mesure que la population se densifie et que les bidonvilles se développent. Aujourd’hui, environ 390 millions de personnes contractent l’infection virale chaque année, dont près de 70 pour cent en Asie. [4] Sur les 500 000 personnes qui développent une dengue sévère, environ 25 000 en meurent. Comme le paludisme, la dengue est courante en milieu rural, mais elle est aussi commune en milieu urbain. Elle peut être causée par quatre sérotypes — ou souches — différents du virus, [5] et plusieurs de ces souches peuvent coexister dans une même localité ou région. L’infection entraîne une immunité à vie contre le sérotype responsable, mais une infection ultérieure par une autre souche augmente le risque de développer une dengue sévère. Si la dengue est asymptomatique dans la plupart des cas, elle se manifeste néanmoins souvent par des symptômes pseudo-grippaux, tels qu’une fièvre élevée, de violentes céphalées, des douleurs articulaires, musculaires et rétro-orbitaires, de la fatigue, des nausées, des vomissements et des éruptions cutanées. [2] En plus de son impact sur la santé, la maladie a également un coût économique considérable, les communautés ne pouvant pas prospérer lorsque les enfants malades ne peuvent pas aller à l’école et que leurs parents ne peuvent pas travailler.

Conter o crescimento da dengue a nível global

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future health

Endiguer la progression de la dengue dans le monde

ContexteLa dengue est la maladie à transmission vectorielle dont la croissance est la plus rapide au monde,[1] et la deuxième menace pour la santé publique transmise par les moustiques après le paludisme.[2] Près de la moitié de la population mondiale vit dans une région à risque — soit 30 fois plus qu’il y a 50 ans — et les enfants de moins de 10 ans sont les plus vulnérables. Le nombre d’infections symptomatiques par la dengue a plus que doublé tous les dix ans depuis 1990.[3] L’augmentation des voyages internationaux ainsi que l’essor du commerce et de l’urbanisation sont autant de facteurs qui contribuent à l’expansion de la maladie, car le nombre potentiel de personnes exposées et les conditions de reproduction du moustique Aedes augmentent à mesure que la population se densifie et que les bidonvilles se développent. Aujourd’hui, environ 390 millions de personnes contractent l’infection virale chaque année, dont près de 70 pour cent en Asie.[4] Sur les 500 000 personnes qui développent une dengue sévère, environ 25 000 en meurent.

Comme le paludisme, la dengue est courante en milieu rural, mais elle est aussi commune en milieu urbain. Elle peut être causée par quatre sérotypes — ou souches — différents du virus,[5] et plusieurs de ces souches peuvent coexister dans une même localité ou région. L’infection entraîne une immunité à vie contre le sérotype responsable, mais une infection ultérieure par une autre souche augmente le risque de développer une dengue sévère.

Si la dengue est asymptomatique dans la plupart des cas, elle se manifeste néanmoins souvent par des symptômes pseudo-grippaux, tels qu’une fièvre élevée, de violentes céphalées, des douleurs articulaires, musculaires et rétro-orbitaires, de la fatigue, des nausées, des vomissements et des éruptions cutanées.[2] En plus de son impact sur la santé, la maladie a également un coût économique considérable, les communautés ne pouvant pas prospérer lorsque les enfants malades ne peuvent pas aller à l’école et que leurs parents ne peuvent pas travailler.

Options pour lutter contre la dengue Comme il n’existe à l’heure actuelle aucun vaccin pour prévenir la maladie ni aucun médicament pour la traiter, la meilleure façon de lutter contre la dengue est de cibler ses vecteurs : les moustiques A. aegypti et A. albopictus.[6,7] Les moustiquaires imprégnées d’insecticide ne peuvent pas jouer un rôle significatif dans la prévention, car ces moustiques piquent pendant la journée.[8] Des niveaux élevés de résistance aux insecticides couramment utilisés — tels que les pyréthrinoïdes et les organophosphorés — rendent par ailleurs les efforts de lutte chimique problématiques et nécessitent une surveillance régulière de la sensibilité,[9] bien que la rentabilité et l’acceptation sociale d’autres bio-insecticides devraient être évaluées.

Les options biologiques et génétiques sont très prometteuses, bien que leur accessibilité et leur durabilité puissent varier. Par exemple, alors que les poissons larvivores et certains crustacés prédateurs semblent offrir une solution économiquement viable et parfois durable (voir encadré),[10,11] la technique de l’insecte stérile — lorsque des moustiques mâles irradiés sont lâchés en masse et font concurrence à leurs homologues sauvages fertiles pour l’accès aux femelles sauvages — ou d’autres techniques de moustiques manipulés en laboratoire sont coûteuses et nécessitent l’intervention d’experts sur de longues périodes.

Les méthodes qui ciblent les sites de reproduction de choix pour les moustiques porteurs de la dengue — c’est-à-dire de petites quantités d’eau comme on en trouve dans les récipients destinés au stockage de l’eau ou les boîtes de conserve, bouteilles, noix de coco ou autres pneus abandonnés où de l’eau de pluie s’est accumulée — sont particulièrement efficaces. [6] Quant aux pièges à moustiques, ils restent inabordables pour la plupart des populations rurales, même si leur efficacité est avérée. Il est donc crucial d’encourager et de former les communautés à stocker l’eau en toute sécurité, à nettoyer régulièrement les récipients de stockage pour éliminer les œufs et/ou les larves, à entretenir les pompes et les canalisations d’eau courante pour éviter les fuites, à éliminer les points d’eau stagnante et à gérer les déchets solides de manière appropriée.

Lutte antivectorielle communautaire au CambodgeEn 2018–2020, Malaria Consortium a conçu et livré un ensemble d’activités de lutte antivectorielle communautaire sur mesure à 30 regroupements de villages au Cambodge. Nous avons lancé des campagnes d’information sur les causes et les moyens de prévenir la dengue (p. ex. en éliminant les sites de reproduction potentiels tels que les boîtes de conserve inusitées), appris aux groupes communautaires à fabriquer des pièges à moustiques faits maison à partir de bouteilles en plastique recyclées et encouragé les membres de la communauté à se fournir gratuitement en poissons guppy larvivores (Poecilia reticulata) dans des fermes que nous avions établies dans des écoles et des centres communautaires, afin de les placer dans leurs récipients d’eau à usage domestique.

Non seulement ces activités étaient culturellement acceptables pour les quelque 5 000 foyers qui y ont participé, mais elles se sont également avérées peu coûteuses et ont considérablement réduit le nombre de vecteurs de la dengue dans la zone du projet. Cette étude corrobore les conclusions d’autres recherches montrant que les communautés peuvent s’engager elles-mêmes dans des initiatives de lutte antivectorielle présentant un fort potentiel de durabilité à long terme.[10]

Références1. OMS. Better environmental management for control of dengue. Health and Environment Linkages Policy Series. [sans date ; cité le 01 mars 2020]. Disponible à

l’adresse : www.who.int/heli/risks/vectors/denguecontrol/en/.2. Gubler DJ. Dengue and dengue hemorrhagic fever. Clinical Microbiology Reviews, 1998 ; 11(3): 480–96.3. Stanaway JD, Shepard DS, Undurraga EA, Halasa YA, Coffeng LE, Brady OJ et al. The global burden of dengue: An analysis from the Global Burden of Disease Study

2013. The Lancet Infectious Diseases, 2016 ; 16(6): 712–23.4. Bhatt S, Gething PW, Brady OJ, Messina JP, Farlow AW, Moyes CL. The global distribution and burden of dengue. Nature, 2013 ; 496.5. Brady O, Gething P, Bhatt S, Messina J, Brownstein J, Hoen AG et al. Refining the global spatial limits of dengue virus transmission by evidence. PLoS Neglected

Tropical Diseases, 2012 ; 6(8) : e1760.6. Seng CM, Setha T, Nealon J, Socheat D. Pupal sampling for Aedes aegypti (L.) surveillance and potential stratification of dengue high‐risk areas in Cambodia. Tropical

Medicine & International Health, 2009 ; 14(10) : 1233–40.7. Braack L, de Almeida APG, Cornel AJ, Swanepoel R, De Jager C. Mosquito-borne arboviruses of African origin: Review of key viruses and vectors. Parasites & Vectors

2018 ; 11(1) : 29.8. Heymann DL. Control of communicable diseases manual. Washington, DC : American Public Health Association ; 2008.9. Boyer S, Lopes S, Prasetyo D, Hustedt J, Sarady AS, Doum D et al. Resistance of Aedes aegypti (Diptera: Culicidae) populations to deltamethrin, permethrin and

temephos in Cambodia. Asia Pacific Journal of Public Health, 2018 ; 30(2) : 158–66.10. Seng CM, Setha T, Nealon J, Socheat D, Chantha N, Nathan MB. Community-based use of the larvivorous fish Poecilia reticulata to control the dengue vector Aedes

aegypti in domestic water storage containers in rural Cambodia. Journal of Vector Ecology, 2008 ; 33(1) : 139–45.11. Nam VS, Yen NT, Phong TV, Ninh TU, Mai LQ, Lo LV et al. Elimination of dengue by community programs using Mesocyclops (Copepoda) against Aedes aegypti in

central Vietnam. The American Journal of Tropical Medicine and Hygiene, 2005 ; 72(1) : 67–73.

Notre position Sur la base de notre expertise technique et de notre expérience dans les activités communautaires de lutte antivectorielle, nous pensons que les éléments suivants sont requis de toute urgence.

• Un meilleur financement du développement de vaccins : il est nécessaire d’augmenter le financement et les efforts visant à développer des vaccins efficaces contre les quatre sérotypes, mais cela prendra probablement de nombreuses années, comme en témoignent les défis qui ont limité les précédentes tentatives.

• L’amélioration des systèmes de surveillance des cas en temps réel : savoir où se trouvent les principales poches d’infection de la dengue permettrait un meilleur ciblage des interventions de lutte. Celles-ci sont toutefois difficiles à identifier, car la plupart des personnes infectées ne présentent pas de symptômes significatifs et ne se rendent pas à l’hôpital. Les données de surveillance basées sur les cas diagnostiqués dans les structures médicales sous-estiment donc largement l’étendue réelle de la prévalence. Nous avons besoin d’enquêtes aléatoires au sein des communautés pendant la saison haute de transmission (la saison des pluies) pour comprendre où la dengue

est la plus répandue et cibler les interventions dans ces zones.

• Le renforcement des outils de lutte antivectorielle : notre réserve actuelle de pièges à moustiques et autres outils qui ciblent les moustiques Aedes piquant en journée et à l’extérieur n’est pas adéquate et nous avons besoin de nouvelles approches et technologies.

• L’engagement accru des communautés, en particulier pendant les épidémies : malgré son effet débilitant, la dengue n’est pas prioritaire pour les gouvernements ou au sein des communautés, car elle n’est pas aussi meurtrière que le paludisme, par exemple. Les autres défis de la

pauvreté sont plus importants, de sorte que la dengue est négligée. La sensibilisation des communautés à des stratégies d’auto-assistance simples et peu coûteuses en matière de réduction des vecteurs — telles que l’ajout de petits poissons larvivores dans les récipients d’eau à usage domestique — peut avoir un impact extrêmement positif. Les écoles devraient être l’une des principales cibles pour de telles interventions, car c’est au cours des premières années de la vie que la dengue est la plus grave. Lors des épidémies, une lutte antivectorielle renforcée à tous les niveaux de la société est essentielle.

• Le renforcement de l’engagement et de la collaboration au niveau mondial : la dengue progresse rapidement et largement à travers le monde, et dépassera à terme le paludisme en tant que première menace mondiale pour la santé publique transmise par les moustiques. Son taux de progression annuel est alarmant et nous devons élaborer des stratégies mondiales coordonnées. À cet effet, nous soutenons l’appel international pour une Journée mondiale de la dengue chaque année. Un tel événement renforcerait la collaboration intersectorielle internationale pour cibler cette menace croissante pour la santé publique.

FightingMalaria MalariaConsortiumwww.malariaconsortium.org

© Malaria Consortium / Mars 2020

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