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0 INSCRIPTION GRATUITE ET OBLIGATOIRE SUR LE SITE INTERNET DE L’E.E.H.U www.eehu-lille.fr Corps Esprit Que soignons-nous ? Qui soignons-nous ? Esprit Corps Journée thématique de l’espace éthique Mardi 18 novembre 2014 Amphi A de l’Institut Gernez Rieux – C.H.R.U de Lille

Corps – esprit ? Que soignons-nous

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INSCRIPTION GRATUITE ET OBLIGATOIRE SUR LE SITE INTERNET DE L’E.E.H.U

www.eehu-lille.fr

Corps Esprit

Que soignons-nous ?

Qui soignons-nous ?

Esprit

Corps

Journée thématique de l’espace éthique

Mardi 18 novembre 2014

Amphi A de l’Institut Gernez Rieux – C.H.R.U de Lille

Page 2: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Journée thématique de l’espace éthique hospitalier et universitaire de Lille

Mardi 18 novembre 2014 - Amphi A de l’Institut Gernez Rieux – C.H.R.U de Lille

Corps – esprit ? Que soignons-nous ? Qui soignons-nous ?

8h Ouverture. François-René PRUVOT, Coordonnateur de l’E.E.H.U de Lille et représentant de la C.M.E. Introduction. Jean-Olivier ARNAUD, Directeur général du C.H.R.U de Lille.

Didier GOSSET, Doyen, Faculté de médecine de Lille 2.

COMPRENDRE L’UNITE DU SUJET.

8h30 Comprendre le rapport au corps et à l’esprit dans les sociétés contemporaines. Laura LANGE, doctorante en philosophie, chargée de mission à l’espace éthique Rhône-Alpes. 8h50 Retrouver l’épaisseur de l’homme par le corps.

Catherine LE GRAND-SEBILLE, maître de conférences en socio-anthropologie de la santé, Université Lille 2. 9h10 La construction imaginaire de la santé.

Roberto POMA, professeur de philosophie et d’histoire de la médecine, Université Paris 12.

9h40 Echanges.

10h00 Pause.

MAINTENIR L’UNITE DU SUJET SOIGNE.

10h30 Variation corps et esprit en consultation conjointe de neuropédiatrie et de pédopsychiatrie. Louis VALLEE, Professeur de pédiatrie, C.H.R.U de Lille, Université Lille 2. Pierre DELION, Professeur de psychiatrie, C.H.R.U de Lille, Université Lille 2. 10h50 L’esprit de l’enfant et son expression en réanimation pédiatrique. Lucie BAILLEUL, interne de psychiatrie, C.H.R.U de Lille.

Anaïs SMAGGHE, assistante en pédopsychiatrie, C.H.R.U de Lille. 11h10 La réalité corporo-psychique à tous les âges en psychomotricité. Bernard MEURIN, psychomotricien, pédopsychiatrie, C.H.R.U de Lille.

Mélanie CHAMBON, psychomotricienne, rééducation gériatrique, C.H.R.U de Lille. 11h30 Qu’en est-il de la pensée et de l’être quand la pathologie empêche ou limite le langage ? Perrine GENTILLEAU-LAMBIN, orthophoniste, neuropédiatrie, C.H.R.U de Lille.

11h50 Echanges.

12h10 Pause déjeuner (repas libre).

DIVORCE(S) DU CORPS ET DE L’ESPRIT.

13h30 Quelles sont les traces d’un esprit pensant chez les personnes atteintes de maladie d’Alzheimer ? Véronique LEFEBVRE des NOETTES, psychiatrie, A.P.H.P, doctorante en philosophie. 13h50 Quelle humanité quand la conscience est murée dans un corps sans avenir ? Michaëla FABRE, médecin, soins palliatifs, C.H.U de Grenoble. 14h10 La fonction du corps dans le grand âge, dans et par la relation au soignant, et l’articulation avec le monde. Rosa CARON, maître de conférences en psychopathologie et psychologie clinique, Université Lille 3.

14h30 Echanges.

14h50 Pause.

CORPS ET ESPRIT DANS LA RELATION A SOI, A L’AUTRE.

15h10 La prescription d’un placebo contrevient-elle au contrat de confiance ? Martine TACHEAU, infirmière anesthésiste, C.H de Dreux.

Edouard CREPIN, médecin rééducateur, C.H de Dreux. 15h30 L'intrus qui venait de l'intérieur : le cancer, entre corps affecté et esprit divisé. Abir FAWAZ, médecin, hématologie, C.H de Roubaix.

Fabrice LEROY, psychanalyste, maître de conférences en psychopathologie, Universités Lille 3 et Paris 7. 15h50 Le corps des soignants en hypnothérapie. Henri BENSOUSSAN, anesthésiste, hypnothérapeute, Polyclinique de Riaumont à Liévin.

16h10 Echanges.

16h30 Reprise et Conclusion. Isabelle BLONDIAUX, psychiatre, psychanalyste, chercheur, Université Paris Est.

Corps - esprit ? : Corps ou esprit ? Corps et esprit ? Corps-esprit et quoi d’autre ? Un corps malade et un esprit sain ? Un esprit malade dans un corps sain ? Unité, dualité ? Que soignons-nous ? Qui soignons-nous ? Une conscience agissante dans un corps-objet ? Le corps n’est-il qu’un matériel caractérisé par des propriétés physico-chimiques ? N’est-il qu’une substance étendue animée par une substance pensante ? Qu'en est-il de la douleur, de la souffrance, des pulsions ? Qu'en est-il des pathologies à la frontière du corps et de l'esprit ? Quelles relations reconnaît-on aujourd'hui entre les états mentaux et les processus corporels ou entre les états corporels et les processus mentaux ? Comment nos conceptions et nos représentations du corps et de l’esprit influent-elles sur nos pratiques médicales et soignantes ? Quels sont les différents points de vue en la matière : points de vue des neurosciences, de la psychiatrie, des médecines dites somatiques, des médecines dites douces ... ?

Modérateurs :

Pierre VALETTE, médecin.

Annie DEVULDER, cadre supérieure

de santé.

Modérateurs :

Licia TOUZET, médecin.

Véronique B-DANEL, médecin.

Modérateurs :

Karin PARENT, médecin.

Jean-Pierre JOUET, médecin.

Modérateurs :

François-René PRUVOT, chirurgien.

Eve DANNA, cadre supérieure de santé.

Page 3: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Comprendre l’unité du sujet.

COMPRENDRE LE RAPPORT AU CORPS ET A L’ESPRIT DANS LES SOCIETES CONTEMPORAINES.

Laura LANGE, doctorante en philosophie, chargée de mission à l’espace éthique Rhône-Alpes.

Doctorante en quatrième année de philosophie, mon sujet de recherche porte sur les représentations du corps et

de l'esprit dans nos sociétés contemporaines, que l'on pourrait qualifier de néolibérales, à savoir des sociétés au

sein desquelles le libéralisme se met au service du capital. Chaque individu ayant « pour tâche d’améliorer sans

cesse son capital d’attitudes et de compétences en veillant [notamment] à son capital santé » précise Michel

Foucault dans Naissance de la biopolitique. Aussi, la rationalité néolibérale valorise la capacité de l'esprit ou encore

de la raison à s'autonomiser, à s'autogouverner. On assiste à une forme de glorification de l’esprit dans nos

sociétés au détriment du corps et de son vécu. « Le corps, ses fragments ou ses organes, ne doivent être qu’un

instrument de la volonté » soutient Marcela Lacub dans un entretien avec la philosophe Sylviane Agacinski.

S'inscrivant dans une tradition philosophique occidentale qui valorise l’esprit sur le corps, cette conception du

corps dont on pourrait attribuer l’origine à Platon et dont on trouve une célèbre formulation chez Descartes (le

« corps machine »), est aussi l’expression d’un système de pouvoir actuel qui soumet le corps au faire et à l’utile.

Dans L’anthropologie du corps, David Le Breton montre comment, dans cette lecture dualiste, le corps se conçoit «

comme un accessoire de la personne, [et] glisse dans le registre de l’avoir ». Il voit également apparaître dans ce

contexte « une version moderne du dualisme qui oppose [plus qu’il ne distingue] l’homme à son corps». Pour sa

part, la philosophe Michela Marzano constate qu’« il y a aujourd’hui un véritable projet de construction et de

manipulation du corps qui vise à le recréer selon les règles du marché ». Dans ce contexte, l’esprit étant libre

d’entreprendre à sa guise, le corps serait à ce jour un objet de calcul et de maîtrise dont on pourrait se servir et se

dissocier au gré des fluctuations de sa volonté.

Si le bref passage ci-dessus est en partie extrait d'un article que je viens de publier récemment dans le revue Etudes

sur le thème suivant : « La Gestation Pour Autrui, quelles représentations du corps et de la volonté ? », il me

semblerait intéressant de poursuivre cette réflexion (représentations-corps-esprit-volonté-contexte social)

relativement à une étude du soin en se demandant : Que soignons-nous dans notre culture

contemporaine (démocratique, néolibérale) ? Quelle est l'influence de nos conceptions et de nos représentations

du corps et de l'esprit sur la médicalisation et, inversement, quelle est l'influence de la médicalisation sur nos

représentations du corps et de l'esprit ? Du corps contrôlé, au corps capitalisé. Rôle et place de l'esprit, de

l'initiative et du geste soignant.

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Comprendre l’unité du sujet.

RETROUVER L’EPAISSEUR DE L’HOMME PAR LE CORPS.

Catherine LE GRAND-SEBILLE, maître de conférences en socio-anthropologie de la santé, Université Lille 2.

Lieu de l’identité, le corps concerné par la médecine est le creuset du désordre biologique et de l’expérience intime

de la maladie comme de la douleur. Il est aussi, dans une logique de l’instrumentalité, rendu transparent, de plus

en plus accessible par les machines l’explorant et le surveillant. Le corps est pourtant ce que l’on se représente le

plus mal, malgré son omniprésence.

De même, la vision des étudiants en médecine n’est pas aseptisée de toute souffrance et de tout affect devant les

expériences corporelles de fragilisation et de perte. Ce ressenti appelle une mise en perspective que les sciences

sociales et humaines, mais aussi la littérature, peuvent enrichir.

Sur le modèle narratif de la nouvelle, et à partir du livre "Journal d'un corps" (Daniel Pennac Gallimard 2012),

chaque étudiant, dans le cadre d'un enseignement optionnel, a écrit dans une autre langue que la langue médicale,

un texte prenant le corps comme prétexte. Matière sensible par excellence, il s'est agi par le corps de retrouver

"l'épaisseur de l'homme".

Nous proposons de présenter cette démarche et que trois étudiants viennent lire des extraits de leur production et

indiquer les bénéfices de cette expérience.

Page 5: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Comprendre l’unité du sujet.

LA CONSTRUCTION IMAGINAIRE DE LA SANTE.

Roberto POMA, professeur de philosophie et d’histoire de la médecine, Université Paris 12.

Le rôle joué par les représentations sociales de la santé et de la maladie dans les définitions du bien-être, d’une

part, dans les processus biologiques menant vers la guérison, d’autre part, a attiré depuis l’Antiquité gréco-romaine

l’attention de nombreux médecins et philosophes. L’imagination humaine, conçue comme une faculté corporelle

productrice et reproductrice d’image, a été considéré jusqu’au XIXe siècle comme un moyen pour lutter contre

certaines maladies et pour préserver la santé. Avant l’invention de l’hypnose, de la méthode Coué ou des effets

placebo/nocebo, il existe un discours médico-philosophique sur les pouvoirs thérapeutiques de l’imagination par

lequel l’on conceptualise l’unité plurielle du corps-esprit comme objet de soin.

Ma communication vise réactualiser ce paradigme oublié pour l’appliquer à quelques sujets problématiques dans la

médecine actuelle comme le récit des maladies ou l’expérience de la douleur.

Page 6: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Maintenir l’unité du sujet soigné.

VARIATION CORPS ET ESPRIT EN CONSULTATION CONJOINTE DE NEUROPEDIATRIE ET DE PEDOPSYCHIATRIE.

Louis VALLEE, Professeur de pédiatrie, C.H.R.U de Lille, Université Lille 2. Pierre DELION, Professeur de psychiatrie, C.H.R.U de Lille, Université Lille 2.

Il s’agit d’aborder une réflexion sur les bases conceptuelles qui nous ont amenés à structurer une consultation

commune neuropédiatrique et pédopsychiatrique, d’en préciser l’impact sur l’éthique du soin. Une analyse de

l’évolution de la démarche diagnostique dans le domaine des maladies pédopsychiatriques et neuropédiatriques

dans le contexte d’évolution exponentielle des connaissances dans le domaine des neurosciences a transformé la

place du sujet dans la relation médecin malade. L’intrusion d’une technologie omniprésente au sein de cette

relation a aussi impacté la relation « médecin - maladie du sujet » avec l’émergence croissante voire envahissante

de la maladie-objet de science, maladie-objet économique, maladie économiquement rentable. La consultation

commune procède d’un autre référentiel que de la seule « evidence base medicine » (EBM) comme seule réponse

scientifique en replaçant l’EBM comme un instrument et non une finalité du raisonnement aboutissant à un

appauvrissement de la relation du médecin au « sujet malade » par son instrumentalisation. Cette consultation

dans une approche philosophique « corps et esprit » permet aussi aux parents de l’enfant malade de s’associer à la

démarche médicale dans un processus de conscientisation de l’expression du symptôme de leur enfant dans ses

deux composantes neurologique et psychique.

Page 7: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Maintenir l’unité du sujet soigné.

L’ESPRIT DE L’ENFANT ET SON EXPRESSION EN REANIMATION PEDIATRIQUE.

Lucie BAILLEUL, interne de psychiatrie, C.H.R.U de Lille. Anaïs SMAGGHE, assistante en pédopsychiatrie, C.H.R.U de Lille.

Au cours de notre formation en tant qu’interne de psychiatrie, nous avons, sur des périodes différentes, réalisé un

semestre en tant qu’interne de pédospychiatrie dans le service de réanimation pédiatrique de l’hôpital Jeanne de

Flandre, au CHRU de Lille.

Ce service accueille en urgence et prend en charge des pathologies somatiques graves de l’enfant, où le pronostic

vital est parfois engagé.

Dans ce service, qui par définition soigne et technique le corps en souffrance, nous avons pu, au cours de

rencontres singulières, observer l’importance de l’expression de l’esprit de l’enfant et de sa souffrance psychique,

qui peut y être associée.

Si le corps est en souffrance, il semble important de pouvoir offrir à l’enfant, ses parents et les soignants un espace

de verbalisation de leur souffrance psychique, dans la perspective où le corps et l’esprit sont indissociables. Le rôle

du pédopsychiatre, dans un tel service, pourrait être d’essayer de proposer un décalage tant spatial que temporel

et ainsi offrir un espace d’écoute différent.

A travers quelques situations cliniques, nous voulons proposer une réflexion sur l’intrication du corps et de l’esprit,

dans un service de réanimation pédiatrique.

Page 8: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Maintenir l’unité du sujet soigné.

LA REALITE CORPORO-PSYCHIQUE A TOUS LES AGES EN PSYCHOMOTRICITE.

Bernard MEURIN, psychomotricien, pédopsychiatrie, C.H.R.U de Lille. Mélanie CHAMBON, psychomotricienne, rééducation gériatrique, C.H.R.U de Lille.

Récemment introduite dans le paysage médical puisque son inscription au livre IV du code de la santé publique

date de 1985, la psychomotricité se définit comme une discipline de soins prenant en compte la globalité du sujet.

Aussi dans les prises en charge psychomotrices, le corps n’est pas soigné en tant que réalité somatique mais en

tant qu’il produit des actes dont l’esprit se saisit pour former des idées. Ici, les dimensions psychique et corporelle

sont considérées comme deux modes d’expression et le clivage entre le corps et l’esprit tente à être dépassé pour

penser l’homme comme unité « corporopsychique ».

En clinique psychomotrice, l’organisation des mouvements ainsi que leur ajustement sont considérés comme le

soubassement de notre capacité à penser. Le corps est perçu comme puissance d’action en lien permanent avec

l’esprit qui est considéré comme puissance à former des idées. En ce sens, le travail thérapeutique vise à soutenir

tout autant les capacités à agir que les capacités à penser. Avec les bébés, il s’agira pour l’essentiel d’être vigilent

aux points d’appuis posturaux nécessaires à un développement sensori-moteur puis psychomoteur harmonieux

tout en étant également attentif aux points d’appuis psychiques que proposera le milieu humain. Avec les enfants

plus âgés, c’est souvent à partir de la motricité spontanée et au travers de situations ludiques que le

psychomotricien favorisera les expériences corporelles dans lesquelles les jeunes patients pourront s’éprouver et

ainsi augmenter de façon adaptée à la fois leur potentiel psychomoteur mais aussi leur processus de pensée. Avec

les adolescents et les adultes, le psychomotricien utilisera plus volontiers des médiateurs comme la relaxation,

l’eutonie ou de toute autre technique dont l’objectif reste la mobilisation corporelle pour un mieux-être et une

meilleure perception de ses propres ressentis en lien avec les aspects émotionnels de notre vie. Enfin, avec les

personnes âgées dont certaines peuvent souffrir d’affections graves comme la maladie d’Alzheimer, un travail plus

centré sur la sensorialité elle-même permettra de maintenir l’ancrage de la personne dans sa corporalité. Penser le

lien permanent entre le corps et l’esprit, constitue donc l’un des enjeux de la thérapie psychomotrice.

A partir d’exemples tirés de notre pratique clinique (en gériatrie avec des personnes souffrant de traumatisme

post-chutes et en pédopsychiatrie avec des enfants présentant des troubles du comportement) nous souhaitons au

cours de cette journée consacrée au thème du corps et de l’esprit, montrer en quoi s’intéresser au corps en tant

qu’il produit des actes soutient les processus de penser et permet de dépasser les clivages pernicieux amenant à

considérer le corps et l’esprit comme deux entités séparées voire autonomes.

Page 9: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Maintenir l’unité du sujet soigné.

QU’EN EST-IL DE LA PENSEE ET DE L’ETRE QUAND LA PATHOLOGIE EMPECHE OU LIMITE LE LANGAGE ?

Perrine GENTILLEAU-LAMBIN, orthophoniste, neuropédiatrie, C.H.R.U de Lille.

Dans le contexte actuel de mutation en orthophonie, liée entre autres à l’évolution des neurosciences, il y a

une demande accrue d’évaluation du langage et de la pratique orthophonique.

Or la matière du travail orthophonique, qu’il soit langage, communication ou alimentation, se situe au carrefour du

corps et de l’esprit dans l’expression de soi, dans la participation à la construction psychique de l’individu.

Cette matière-là est-elle quantifiable ? norma(b)le ? Question éthique des enjeux du travail orthophonique :

rééducation, normalisation, individualité. Et réintroduction du sujet parlant et pensant.

Quel être pensant est-on, alors, lorsqu’il y a pathologie du langage ? Comment avoir accès à l’être pensant lorsqu’il

y a pathologie du langage ?

Travail du sens (signification et direction) de la part de l’orthophoniste, en funambule « entre art et sciences ».

Le langage peut être défini par différentes approches, certaines dont se réclame l’orthophonie. Chaque thérapeute

doit pouvoir expliquer son cadre de référence théorique.

Exemple de Maxime, 11 ans, avec trouble sévère du langage oral :

- Où / comment s’illustre le lien laborieux entre pensée et langage

- Où / comment le contournement du symptôme langagier peut aider à réinvestir le langage

- Où / comment sentir « cette part qui revient au langage dans la construction psychique d’un enfant »

Exemple d’Anthony, 9 ans, avec infirmité motrice cérébrale sévère, sans langage oralisé :

- réflexion sur l’impact des troubles de la sphère oro-faciale sur le développement psychomoteur, cognitif,

langagier, psychique

- langage et stade sensori-moteur : comment les enfants comme Antoine interrogent les théories du

développement

- langage et communication : comment savoir ce que pensent et comment pensent les enfants comme Antoine,

lorsque le langage doit bénéficier d’un autre média que lui-même

- questionnement éthique dans la prise en charge d’Antoine : choix linguistiques, choix thérapeutiques, une

vertigineuse responsabilité.

L’oscillation se révèle comme la notion-clé d’un cheminement professionnel où se croisent éclectisme et

distanciation pour mieux penser ce travail du langage.

Page 10: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Divorce(s) du corps et de l’’esprit.

QUELLES SONT LES TRACES D’UN ESPRIT PENSANT CHEZ LES PERSONNES ATTEINTES DE MALADIE

D’ALZHEIMER ?

Véronique LEFEBVRE des NOETTES, psychiatrie, A.P.H.P, doctorante en philosophie.

La maladie d’Alzheimer touche aujourd’hui en France plus de 870 000 personnes et plonge la personne atteinte,

son entourage dans une lourde solitude et une sourde exclusion. Comment ne plus comptabiliser, les fardeaux

affectifs, familiaux, sociétaux et hospitaliers, comment ne pas réifier cette personne qu’on ne reconnaît plus qui ne

se reconnaît plus et qu’on ne sait ni diagnostiquer de façon certaine ni guérir ? Est-elle encore une personne, a-t-

elle un esprit, une pensée, une âme ou n’est-elle qu’une « plante verte », un « boulet » ? Un être « entre-deux »,

un mort psychique vivant dans un corps qui persévère dans son être fragile ? Comment dans la rencontre à l’autre,

dans un geste, un regard, une temporalité saisir le Kairos et permettre les conditions de possibilité d’une parole qui

est du sens et de l’esprit ?

Nous avons appliqué les travaux de P.Ekmann de la reconnaissance des émotions à nos patients qui tous malgré

des stades sévères de MA discriminent parfaitement celle-ci et qui est une valeur ontologique universelle. Nous

avons été un infatigable scribe des mots des déments , ces perles dont nous avons tissé dans l’ici et le maintenant

des histoires pleines de sagesse et d’esprit et enfin nous nous sommes interrogés sur l’incarnation de cet esprit

dans ce corps et les capacités à la fois réflexives donc a priori impensables à mobiliser chez des déments en leur

demandant de se dessiner eux même et en notant leurs commentaires souvent très riches et signifiant..

Conclusion : partant d’une présomption de compétence chez les patients Alzheimer, nous avons tenté de lever le

voile d’ignorance de ce que nous savons de ces « démens » dont l’identité narrative reste toujours signifiante pour

peu qu’un autre vienne la révéler.

Page 11: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Divorce(s) du corps et de l’’esprit.

QUELLE HUMANITE QUAND LA CONSCIENCE EST MUREE DANS UN CORPS SANS AVENIR ?

Michaëla FABRE, médecin, soins palliatifs, C.H.U de Grenoble.

Au fil des progrès scientifiques, le fonctionnement du corps humain a été décrypté et cartographié de plus en

plus, et nous assistons actuellement à la révolution NBIC - nanotechnologies, biotechnologies, informatique et

cognitique (les sciences du cerveau et de l’intelligence artificielle). Ainsi, les techniques de « réparation »

interviendront de plus en plus efficacement dans le domaine des maladies génétiques, du vieillissement, des

greffes, des maladies neurologiques et dégénératives telle la démence d’Alzheimer. Mais ce qui fait que

l’homme est autre chose qu’un engrainage chimique et biologique, aussi complexe soit-il, est son intellect lui

permettant d’acquérir une conscience morale, de l’exprimer par la parole et de se penser soi-même dans le

temps. Cette capacité dépasse l’intelligence pratique d’intégration au milieu, dont d’autres animaux sont

capables aussi, devenant ce que l’on appelle « l’esprit », et les sciences ne peuvent toujours pas faire la

distinction entre « une idée vraie et une idée fausse ». Il semble donc prudent de ne pas réduire l’humain à une

de ces deux catégories (corps-esprit), mais le définir plutôt par ce qu’ « il n’est pas que ». Les technologies NBIC

amèneront à l’avenir à la récupération structurelle et fonctionnelle du cerveau, ainsi le sujet pourra ré

exprimer sa conscience morale, et par cela il a une potentialité permanente et absolue d’être humain. Ensuite,

il faut considérer que le sujet laisse constamment une empreinte sur le monde, car il participe, de par son

existence même, à la construction de la mémoire de ceux qu’il croise. In fine, l’être ne peut pas se réduire à un

seul instant de sa vie, car sa conscience se construit dans le temps et une telle réduction serait juste un « arrêt

sur l’image » dans le film de sa vie. L’aptitude du sujet de s’exprimer lui permet d’être, par le savoir (sa

conscience) et le faire (ses actes). La suspension (temporaire ou définitive) de cette aptitude risque de le

réduire, au regard d’un tiers non avisé, à un être-objet dont il peut disposer en décision. S’il est vrai que nous

avons besoin du regard d’un autre pour nous sentir reconnus et justifiés, nous avons besoin tout autant de

réapprendre à voir l’être au-delà du simple regard. Par cela, la conscience de l’humanité se retrouverait

actualisée dans la conscience du sujet regardant, d’où la primauté du sujet regardant sur le sujet regardé. Ainsi,

nous pouvons affirmer que la vielle maman qui « ne reconnait plus, ne parle plus » est toujours un être dans

l’humanité, de par sa potentialité permanente, son irréductibilité à un instant de sa vie, et par l’empreinte

singulière qu’elle a marqué sur le monde, à travers la conscience morale des êtres croisés à chaque moment de

sa vie.

Page 12: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Divorce(s) du corps et de l’’esprit.

LA FONCTION DU CORPS DANS LE GRAND AGE, DANS ET PAR LA RELATION AU SOIGNANT, ET L’ARTICULATION

AVEC LE MONDE.

Rosa CARON, maître de conférences en psychopathologie et psychologie clinique, Université Lille 3.

Ceux qui souffrent dans leur corps, qu’ils soient jeunes ou vieillissants montrent que l’expérience corporelle ne

peut s’inscrire que dans une articulation permanente avec le monde, articulation qui est rendue impossible par la

seule appréhension objective du corps. Certaines personnes âgées présentent des plaintes somatiques insistantes

voire exagérées ; les douleurs, souvent justifiées par une plus grande vulnérabilité organique, peuvent fluctuer

selon la qualité de l’environnement relationnel dans lequel les personnes âgées évoluent. L'auteur tente

d’approcher les plaintes somatiques dans leur fonction d’appel vers l’Autre. L'enjeu est alors de redonner à la

personne vieillissante sa place de sujet, capable d'expression, qui, à travers son corps parlé et parlant, son corps

subjectivé, son corps comme lieu possible de rencontre et d'interrogation, comme lieu du regard de l'Autre,

cherche un destinataire qui l'aide à mettre au travail son sens existentiel en ne le réduisant pas à son corps

physiologique ou à sa maladie.

Page 13: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Corps et esprit dans la relation à soi, à l’autre.

LA PRESCRIPTION D’UN PLACEBO CONTREVIENT-ELLE AU CONTRAT DE CONFIANCE ?

Martine TACHEAU, infirmière anesthésiste, C.H de Dreux. Edouard CREPIN, médecin rééducateur, C.H de Dreux.

Si le placebo est une substance pharmacologiquement inerte, l’effet qu’il engendre est incontestable et incontesté.

Aussi, tous les hôpitaux y ont recours. Pour autant, le Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur,

comme l’American Pain Society, recommandent depuis 2005 d’éviter l’utilisation de placebo dans le traitement de

la douleur. Plus largement, il a été mis en évidence certains risques d’utilisation de placebo en général, notamment

au niveau de la relation de confiance entre patient et soignant :

- La relation de confiance entre le patient et l’équipe peut en effet être profondément altérée, car le patient finit

souvent par apprendre (par mégarde, ou grâce à un membre de l’équipe « excédé » par les plaintes du malade)

que le produit administré est un placebo. La plainte est disqualifiée car pour beaucoup, un effet placebo signe (à

tort) l’absence de valeur de sa plainte : « c’est dans la tête ! ». Cette suspicion ruine la confiance indispensable à

toute relation de soin. Une réponse bénéfique à une injection de sérum physiologique ne signifie pas pour autant

qu’un patient simule.

- D’autre part, la reproductibilité de l’effet placebo est très rarement observée ; un patient placebo-répondeur ne

le sera probablement plus le lendemain et encore moins dans une autre circonstance.

La prescription d’un placebo peut-elle donc toujours être considérée comme bienveillante ?

Dans ce contexte, le Comité d'éthique et l'Unité de recherche clinique du Centre Hospitalier de Dreux développent

une étude ayant pour objectif d’évaluer la place du placébo dans le cadre des pratiques professionnelles de

l’hôpital où près de 10 000 placebos sont donnés en moyenne chaque année. Cette étude s’adresse à l’ensemble

des acteurs de soins de l’hôpital (médecins, infirmières, aides-soignants, sages-femmes…), soit 1000 personnes. Sur

la base d’un questionnaire en 15 items sont évalués : la forme des différents placebos prescrits, les circonstances

de leur délivrance, le sens associé à la thérapeutique par placebo dans l’esprit des soignants qui le donnent, ainsi

que leur opinion sur ce qui est nécessaire pour établir une relation de confiance soignant/soigné.

Sur la base de l’analyse de ces pratiques, nous espérons pouvoir proposer un guide de prescription des placebos

qui n’entachera en rien l’éthique des soignants ainsi que le contrat de confiance à la base de la relation

thérapeutique avec les patients.

Page 14: Corps – esprit ? Que soignons-nous

Corps et esprit dans la relation à soi, à l’autre.

L’INTRUS QUI VENAIT DE L’INTERIEUR : LE CANCER, ENTRE CORPS AFFECTE ET ESPRIT DIVISE.

Abir FAWAZ, médecin, hématologie, C.H de Roubaix. Fabrice LEROY, psychanalyste, maître de conférences en psychopathologie, Universités Lille 3 et Paris 7.

Si l'intrus est celui qui s'introduit de force dans un lieu sans y être invité et sans en avoir le droit (l'indésirable et

l'illégitime), le cancer semble agir de même, à ceci près : l'intrus était déjà là, à l'intérieur, et on ne le savait pas.

D'où un paradoxe : comment ce qui était déjà là peut-il faire intrusion ? Qu'est-ce qui fait intrusion : être malade,

ou se savoir malade ? Et quel lieu se trouve ainsi « intrusé » : le corps, ou l'esprit ?

Comment ce qui a toujours été en soi, au plus intime d'une réalité biologique et psychique, peut-il se retrouver du

jour au lendemain transformé en figure de l'étrange et de l'étranger en soi ? En vérité, l'intrus divise. Il divise le

corps, mais aussi l'esprit du malade. Les autres, autour de lui, diront qu'il faut accepter pour pouvoir lutter. Paroles

de bien-portants.... Mais comment l'esprit pourrait-il accepter ce que le corps refuse ? Et pourquoi ? Pour soulager

l'angoisse des autres ? Pour être conforme à l'image socialement valorisée du vaillant petit soldat ? Il y a mille

raisons d'accepter de mouler son désir dans la volonté de l'autre, mais le malade, parfois, n'est pas raisonnable. Et

le prix à payer, dans ces cas, est lourd, même s'il achète la paix autour de lui. Car la déraison du corps éveille et

réveille la déraison de l'esprit, ce dont on ne se remet jamais tout à fait : il y a de l'inoubliable.

Et si l'intrus, l'étrange, l'étranger, au fond, finissait par être le malade lui-même ? Après tout, ne lui demande-t-on

pas d'abandonner sa langue et de se comporter comme l'exige le code de l'autre, de traiter son corps comme un

livre d'anatomie et non plus comme le lieu de ses passions et de sa nostalgie ? Voilà le fond de l'affaire : le malade

est en exil, exilé de son propre corps et des gestes que l'autre dessinait sur lui, exilé de sa langue, de son origine, de

son dialecte, celui dans lequel il pouvait dire son corps comme bon lui semble. Alors, oui, l'intrus divise, disions-

nous. Il divise le corps, comme l'esprit du malade. Mais il nous divise, comme à chaque fois que l'étranger nous

regarde et nous demande ce que nous lui voulons.

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Corps et esprit dans la relation à soi, à l’autre.

LE CORPS DES SOIGNANTS EN HYPNOTHERAPIE.

Henri BENSOUSSAN, anesthésiste, hypnothérapeute, Polyclinique de Riaumont à Liévin.

La relation corps/esprit varie selon les lieux, les époques, les religions, les philosophies et dans le domaine du soin

selon le type de thérapie envisagée. Après un rappel des deux modèles principaux utilisés dans notre culture

philosophique et religieuse : le modèle duel issu de la philosophie gréco-latine, reprst dans la tradition chrétienne

et le modèle issu du judaïsme de la chair insufflée, nous envisagerons quel est le rôle du corps du thérapeute dans

différentes sortes de thérapie et en particulier dans l’hypno-thérapie.

Mais avant encore est-il nécessaire de faire un autre rappel : celui de quelques notions de communication issues

des travaux de l’école de Palo Alto et particulièrement de ceux de Gregory Bateson.

De plus en plus l’hypnose médicale est considérée comme une relation privilégiée entre le patient et le thérapeute.

Un des objectifs de la thérapie est très souvent la réassociation du corps et de l’esprit du patient et cela se fait,

croit-on, grâce au savoir et au savoir-faire du thérapeute. Quelques vignettes cliniques nous rappellent que le corps

du thérapeute est également actif dans la thérapie hypnotique dont une caractéristique essentielle est que le

thérapeute est lui aussi en état de transe , en état de suspension : son vouloir , sa pensée , son sentir sont en état

d’indétermination ,ce qui ouvre le domaine des possibles ; la pensée tourne à vide , le corps s’inscrit dans « le flux

de la vie ».Et par un effet de « mirroring » , le patient est invité à en faire autant et ainsi retrouver une mobilité plus

libre.

La transe du thérapeute est liée à « son écoute » flottante qui va accorder plus d’importance à la communication

non verbale et para verbale du patient qu’aux mots de son récit ; de même le patient reçoit les messages venus de

la communication non verbale et para verbale du thérapeute.