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Ne pas utiliser, publier, citer ni reproduire sans l’accord préalable de l’auteur [email protected] 1 FACULTE DE DROIT DE NICE DROIT DE L’ENVIRONNEMENT Notes de Cours Pascale STEICHEN Professeur agrégé de droit privé UNS Année académique 2013 Ces notes de cours sont exclusivement réservées aux révisions et ne sauraient être utilisées à d’autres fins. INTRODUCTION

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FACULTE DE DROIT DE NICE

DROIT DE L’ENVIRONNEMENT

Notes de Cours

Pascale STEICHEN

Professeur agrégé de droit privé

UNS

Année académique 2013

Ces notes de cours sont exclusivement réservées aux révisions et ne sauraient

être utilisées à d’autres fins.

INTRODUCTION

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§ I - Quelques éléments d’histoire

Les problèmes environnementaux ne sont pas nés avec l’essor de la

civilisation industrielle. De tous temps les hommes se sont servis de la nature. .

Des travaux d’historiens ont montré que dès la plus haute antiquité, les

gouvernants ont édicté des normes en vue d’assurer la protection des milieux : la

première réserve naturelle aurait ainsi été créée par le pharaon Akhenaton en 1370

av JC.

A Athènes, au Vème siècle av JC, la loi de la cité interdisait le dépôt de

déchets à moins de 2 km de l’entrée de la ville. La Rome antique gérait déjà ses

déchets. Une collecte des déchets était organisée par le biais des vases en terre

cuite. Pour les riches, qui disposaient de fontaines et de salles de bains, les eaux

usées étaient évacuées par un réseau de canalisations vers le »cloaca maxima », le

grand égout.

Au Moyen Age, le contexte des guerres incessantes favorise un net recul de la

propreté. Les déchets urbains sont jetés dans les rues et ne sont pas ramassés. Les

animaux qui sont élevés dans les villes se nourrissent de ces déchets.

On va voir toutefois apparaître (1185) les prémices d’une police des pollutions

et nuisances pour l’épuration des eaux, l’enlèvement des déchets et la lutte contre

les odeurs pestilentielles. Ainsi, le roi Philippe Auguste (1154-1223) va ordonner que

les rues de Paris soient pavées et l’on interdit de jeter les déchets par les fenêtres.

Les riverains sont contraints d’assurer le nettoyage des chaussées et l’enlèvement

des immondices.

Les sanctions sont sévères. Les contrevenants sont passibles d’une peine de

prison, avec un régime alimentaire limité au pain et à l’eau, et à partir de 1395, les

contrevants sont punis de la peine de mort et du pilori.

Cela ne suffira pas à empêcher les épidémies, dont la peste noire, de 1346 à

1353, qui fit à elle seule 25 millions de morts, principalement chez les populations les

plus pauvres .

C’est Louis XII qui organisera, en 1506, le ramassage des immondices de la

capitale et leur évacuation, financée par un impôt spécial qui se heurta à l’hostilité de

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la population. En 1531, une ordonnance du Conseil des médecins imposa que les

maisons soient dotées d’une fosse pour y déposer les déchets.

Mais il faudra attendre 1884, sous la IIIème république française, pour voir

imposer, par le préfet Eugène Poubelle, la collecte des ordures ménagères dans le

fameux récipient qui prendra son nom.

Dans le même ordre d’idées, un décret-loi du 15 octobre 1810 jettera les

bases du droit de l’environnement industriel en encadrant les établissement

incommodes et insalubres1.

Mais le droit de l’environnement n’a véritablement pris son essor qu’en 1960

en réaction à un certain nombre de catastrophes.

§ II – Les catastrophes écologiques

Quant aux marées noires ou autres pollutions des mers

- Torrey Canyon 1967

- l’Amoco Cadiz mars 1978

- Exxon Valdez mars 1989

- Erika affrété par la Cie TOTAL décembre 1999

- chimiquier Iévoli-Sun Le 31 octobre 2000,

- le pétrolier le Prestige novembre 2002,

La production d’énergie nucléaire réserve aussi ses mauvaises surprises

- Le 28 mars 1979, à Three Miles Island

- Le 25 avril 1986 à Tchernobyl,

- 11 mars 2011, Fukushima,

Quant à l’industrie chimique, elle présente un triste palmarè

- En 1959, de Minamata

- En Italie, en 1976, Seveso,

- Le 21 mars 1980, Love Canal aux Etats-Unis (Etat de New York)

- Dans la nuit du 3 au 4 décembre 1984, à Bhopal en Inde,

1 En ce qui concerne les établissements à risque, le principe d’éloignement était déjà

particulièrement prisé (les boucheries feront l’objet d’une réglementation en ce sens, ordonnance

d’aout 1363 de Jean le Bon).

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- Le 31 octobre 1986, à Bâle,

- Le 21 septembre 2001, l’explosion de l’usine AZF

§ III - La spécificité du droit de l'environnement

Peut-être est-ce à cause de cela que l’on a pu dire que le droit de l’environnement

était un droit des catastrophes, un « droit contre » .

Le droit de l'environnement n’est pas que cela. C’est un droit original sur au moins 4

points : Il présente :

1°) Une dimension universaliste incontestable.

Le droit de l'environnement excède largement les cadres traditionnels de l’espace et

du temps et se trouve donc irrémédiablement marqué par le phénomène de

mondialisation et de globalisation.

L’urgence de préserver l’air, l’eau, le sol, la diversité biologique s’impose de la même

manière à tous les pays.

2°) Ce droit est également porteur de notions originales

Se développent de nouveaux concepts, de nouveaux principes, tels que :

- le concept d’irréversibilité2 qui vise les situations dans lesquelles

aucun retour en arrière n’est envisageable (on pense à Tchernobyl avec

une contamination des terres sur des siècles).

- le principe de précaution, qui vise l'éventualité d'un dommage

grave et irréversible et qui appelle, malgré l'absence de certitudes

scientifiques sur les risques encourus, la mise en oeuvre de procédures

d'évaluation des risques et l'adoption de mesures provisoires et

proportionnées au dommage envisagé.

3°) Mais c’est aussi un droit qui est porteur de nouvelles notions,

- la notion de patrimoine commun de l’humanité

2 Voir le numéro spécial de la RJE 1998 consacré à l’irréversibilité.

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La notion de « patrimoine commun » est née de l’idée qu’il fallait soustraire certains

espaces ou certaines ressources à l’accaparement ou à la revendication des Etats

(la lune et les autres corps célestes (accord du 5 dec 1979 , les grands fonds marins,

convention de Montego Bay du 10 dec 1982).

Puis la notion a évolué vers un contenu plus spécifiquement environnemental.

Ainsi, à Rio, en 1992, on a déclaré que « la terre est le patrimoine commun de

l’humanité ».

Au plan de l’Union européenne, la CJCE a affirmé que « « les habitats et espèces

menacés font partie du patrimoine naturel de la Communauté européenne et (…) les

menaces pesant sur ceux-ci sont souvent de nature transfrontalière, de telle sorte

que l’adoption de mesures de conservation incombe, à titre de responsabilité

commune, à tous les États membres(…)3.

En droit français, on estime que

- "l'eau fait partie du patrimoine commun de la Nation" (loi du 3 janvier

1992 sur l'eau);

- le territoire français est le patrimoine commun de la Nation (Code urb.,

art. L110).

- "les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et les paysages,

les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques

auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la Nation

(Code français de l’environnement, art. L110-1)4.

4°) Le droit de l’environnement est aussi un droit qui est porteur de

nouvelles valeurs

A cet égard on peut dire que le droit de l’environnement est un droit engagé.

- le développement durable .

3 CJCE, 20 oct. 2005, Com c/ Grande Bretagne et Irlande, n° C-6/04.

4 Le droit wallon y est aussi sensible : l’article 1er, § 1er, al. 1er, du Code wallon et de l’Aménagement

du territoire, de l’Urbanisme et du Patrimoine (CWATUP) indique que “le territoire de la Région wallonne est un patrimoine commun de ses habitants”

4. Le Livre Ier du Code wallon de

l’environnement va dans le même sens puisque l’article 1er

, al. 1er

, énonce que « L’environnement et notamment les espaces, paysages, ressources et milieux naturels, l’air, le sol, l’eau, la diversité et les équilibres biologiques font partie du patrimoine commun des habitants de la Région wallonne ». Le Livre II – le Code de l’eau – énonce que « L’eau fait partie du patrimoine commun de la Région wallonne » (C.Env., LII, art. D.1

er).

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Ainsi le développement durable prône l’équité trans-générationnelle. Nous

reviendrons sur le développement durable qui irrigue tout le droit de l’environnement

mais d’ores et déjà on peut en donner la définition : « Le développement durable est

un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité

des générations futures à répondre aux leurs ». (Rapport Brundtland, 1987).

Au-delà de l’équité trans-générationnelle, le droit de l’environnement prône

également l’équité intergénérationnelle qui est présente dans le développement

durable à travers le pilier social.

La doctrine européenne (sociologique surtout) commence à se pencher sur les

inégalités environnementales ou écologiques, (alors qu’aux Etats Unis, la question

est étudiée depuis les années 70 à travers la ségrégation environnementale

notamment).

Cette inégalité environnementale, c’est-à-dire la différenciation sociale dans

l’exposition aux nuisances et aux risques peut être lue à une échelle planétaire, à

une échelle locale et à tous les échelons intermédiaires.

A l’échelle nationale, il y a peu d’informations disponibles, mais l’observatoire des

zones urbaines sensibles5 a relevé que la moitié de ces zone (et 69 % en Ile de

France) est affectée par un point noir lié au bruit des grandes infrastructures.

A l’échelle mondiale, un Rapport d’octobre 2012 sur des points noirs de la pollution

dans le monde a été publié par le Blacksmith Institute (ONG) et La Croix Verte suisse

a calculé, pour la première fois, l'impact sanitaire de la pollution dans une

cinquantaine de pays.

Le rapport intitulé « The World's Worst Pollution Problems » montre que l'exploitation

minière, les fonderies de plomb, décharges industrielles et autres sites toxiques

affectent la santé de quelque 125 millions de personnes dans une cinquantaine de

pays à faible et moyen revenus.

Les polluants industriels les plus répandus sont le plomb, mercure, chrome, amiante

qui ont été répertoriés sur 2 600 sites répartis dans la plupart des régions du monde.

5°) La cinquième spécificité du droit de l’environnement réside dans son

objet.

5 Les zones urbaines sensibles (ZUS) sont des territoires infra-urbains définis par les pouvoirs publics

pour être la cible prioritaire de la politique de la ville, en fonction des considérations locales liées aux difficultés que connaissent les habitants de ces territoires.

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Le droit de l'environnement présente la particularité d’être à la fois préventif et

curatif :

- naturellement préventif, il est tourné vers l’avenir et mu par la

volonté d’anticiper les événements, de prévenir les pollutions, les

accidents ;

- mais il est également animé par la nécessité de réparer les

erreurs du passé (les sites contaminés par les déchets toxiques

par exemple)

C’est ce que traduit très bien la directive 2004/35 du 21 avril 2004, sur la

responsabilité environnementale « en ce qui concerne la prévention et la

réparation des dommages environnementaux » que nous étudierons.

6°) Droit assez dépendant de la science

Les nouvelles problématiques telles que

- les biotechnologies (ce sont les techniques qui permettent

notamment d’intervenir sur le patrimoine génétique, comme les OGM)

- le changement climatique

- et même la perte de la biodiversité

relèvent de données scientifiques complexes que le droit doit gérer, en y

intégrant si possible une nouvelle éthique de la responsabilité.

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TITRE 1 : La naissance identitaire du droit de l’environnement

Contrairement à d’autres disciplines juridiques bien définies, le droit de

l'environnement est un droit qui peut paraître assez insaisissable.

Faut-il pour autant nier l’existence d’une véritable branche du droit ?

Nous ne le pensons pas, parce que

D’une part, le droit de l'environnement peut se prévaloir d’une

finalité originale qui est la préservation de la santé et la

sauvegarde des équilibres écologiques .

La Cour internationale de justice constate elle –même « toute

l’importance que la protection de l’environnement revêt …

non seulement pour les Etats, mais aussi pour l’ensemble du

genre humain (CIJ, Projet Gabcikovo-Nagymaros, Recueil

1997, p. 41, § 43).

Et, d’autre part, parce qu’il peut se prévaloir de principes

généraux qui lui sont propres (ppe de prévention, de

précaution, principe polllueur payeur).

Pour bien comprendre le droit de l’environnement, il faut s’attarder sur les notions

fondamentales qui structurent la matière, au premier rang desquelles figure bien sur

celle d’environnement et celle de protection de l’environnement.

Chapitre 1 - Définitions du droit de l’environnement

Section 1 - La notion d’environnement

La majorité des auteurs s’accordent sur l’imprécision du terme « environnement » :

Il semble que la notion vacille entre :

- une conception étroite, restreinte au voisinage

- et une conception large qui se confond avec la biosphère

Dans le Larousse, l’environnement, c’est tout ce qui entoure. C’est évidemment

trop large.

Dans son traité de 1980, le juriste M. Despax proposait de bien distinguer la

notion de « nature » de celle « d’environnement ». En particulier, soulignait-il,

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l’environnement englobe des éléments qui sont étrangers à la nature, comme

l’environnement urbain.

A l’heure actuelle, l’environnement tend à recevoir une définition globalisante. Par

exemple, la Convention d’Aarhus, élaborée en 1998 par la Commission économique

pour l’Europe des Nations Unies6, sur l’accès à l’information et la participation du

public et l’accès à la justice en matière d’environnement, inclut dans la notion :

- « l’air et l’atmosphère

- l’eau, le sol, les terres, les paysages et les sites naturels

- la diversité biologique et ses composantes, y compris les OGM

- et l’interaction entre ces éléments ».

L’article L.110-1, I, du Code de l’environnement énonce de son côté que :

“Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, la qualité de l’air,

les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels

ils participent font partie du patrimoine commun de la nation”.7

Le fait d’avoir une définition précise de la notion d’environnement est important pour

deux raisons au moins :

- sur la répartition des compétences :

- Sur la responsabilité

Section 2 - L’importance des concepts écologiques en droit de

l’environnement

L’écologie a été un peu galvaudée du fait de son utilisation en politique avec le

mouvement écologiste. C’est Ernst Haeckel, disciple de Darwin qui a créé le mot

6 Commission économique pour l’Europe de l’ONU. 56 pays membres : Albanie, Allemagne, Andorre,

Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Bélarus, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Canada, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, États-Unis, ex-République yousgoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Israël, Italie, Kazakhstan, Kirghizistan, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte, Monaco, Monténégro, Norvège, Ouzbékistan, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République de Moldova, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Saint-Marin, Serbie, Slovaquie, Suède, Suisse, Tadjikistan, Turquie, Turkménistan et Ukraine. 7 L’avis du 12 avril 2009 vocabulaire de l'environnement (liste de termes, expressions et définitions

adoptés) (JO , 12 avril 2009) ne définit pas l’environnement

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« écologie » en 1866 et le définit comme « la science qui étudie les rapports entre les

organismes et les milieux où ils vivent ».

La réception des concepts écologiques par le droit de l’environnement constitue

encore une particularité de ce droit. En effet, toute une série de notions issues de

l’écologie émaillent les textes juridiques :

a) Notion d’équilibre biologique

On parle d’équilibre biologique avec le droit forestier en 1963. La « notion d’équilibre

biologique d’une région ou d’un territoire » devient un motif de refus d’autorisation de

défrichement (art. L. 311-3, 8°du C forestier) et sans autorisation de défrichement,

pas de permis de construire (voyez CAA Marseille, 18 nov. 2010, Ministre de

l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, n° 08MA02578).

b) notion d’écosystème

L’apport essentiel de l’écologie est sans doute d’avoir montré que les écosystèmes

demandaient une étude globale.

Un écosystème est une unité topographique d’une certaine superficie, peuplée par

un certain nombre d’êtres vivants, qui ont des liens bien définis, entre eux et avec le

biotope dans lequel ils vivent.

Certains écosystèmes sont relativement intacts, tels que les forêts naturelles (forêt

amazonienne par exemple), d’autres, comme les terres agricoles, ont été

considérablement modifiés par l’action de l’homme.

Le système juridique prend en compte ces écosystèmes. Le paragraphe 2 de la

déclaration de Stockholm de 1972 proclame la volonté d’assurer la protection des

écosystèmes dans l’intérêt des générations futures.

En droit français, la loi sur l’eau (art. L. 211-1-(I-1° du C.env.i) vise à protéger les

écosystèmes aquatiques.

Ces écosystèmes procurent des bénéfices aux hommes, leurs rendent des services :

on parle alors de services écosystémiques. Ces services ont été évalués par des

économistes à plusieurs milliards de dollars8. L’enjeu est alors de maintenir et de

8 Rapport de synthèse de l’Évaluation des Écosystèmes pour le Millénaire.

http://www.millenniumassessment.org/documents/document.447.aspx.pdf

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conserver non seulement la diversité du vivant actuelle, mais également ses

potentialités à venir et les services écologiques qu’elle rend.

c) La Notion de biotope

Le biotope se définit comme la composante d’un écosystème.

Afin de prévenir la disparition d’espèce, le préfet peut prendre, en application de l’art.

R. 411-15 du Code de l’environnement des arrêtés de protection des biotopes pour

des endroits peu exploités par l’homme tels que mares, marécages, marais, haies,

bosquets, landes, dunes.

d) La notion d’habitat

L'habitat est un concept utilisé dans le domaine de l'écologie pour décrire l'endroit —

ou plus précisément les caractéristiques du « milieu » — dans lequel une population

d'individus d'une espèce donnée peut normalement vivre et s'épanouir.

La notion d’habitat bénéficie d’un traitement juridique particulier avec la directive du

21 mars 1992 sur la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la

flore sauvage (dite « directive habitat »).

De même la convention internationale de Ramsar du 02 février 1971 qui protège au

niveau mondial les zones humides (comme La Camargue) vise ces zones en tant

qu’« habitats d’une flore et d’une faune caractéristiques ».

La réception des notions écologiques par le droit de l’environnement n’est pas

anodine. Certains y voient « une matrice essentielle du droit de l’environnement qui

irrigue ses principes et ses concepts » (E. Naim-Gisbert, La dimension scientifique

du droit de l'environnement, Bruyland, 1998).

Chapitre 2 : Du droit de la protection de l’environnement au droit de l’homme à

un environnement sain

Le droit de l’environnement s’est plutôt construit comme le droit de la protection de

l’environnement en tant que tel, indépendamment de l’intérêt humain que représente

cette protection.

Aujourd’hui, il évolue vers la recherche d’un équilibre entre les intérêts de la nature et

ceux de l’homme.

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Section 1 – Un droit né pour protéger l’environnement

Les biologistes soutiennent que l’homme n’est qu’une espèce animale parmi d’autres

et que l’environnement des autres espèces mérite d’être pris en compte au même

titre que celui de l’homme.

A l’inverse, pour les juristes, il est assez naturel de dire que l’homme est au centre

des intérêts à protéger car seul l’homme est sujet de droits et de prérogatives.

Hormis l’homme, il n’existe que des objets de droit.

Le juriste Jean Rivero soutenait qu’« il n’y a d’environnement qu’en fonction d’un

environné et l’environné, c’est l’homme. Les dégradations de l’air, de l’eau du

paysage ne sont nuisances que parce qu’elles affectent l’homme (…). Le droit de

l'environnement, parce qu’il est un droit, n’existe que par l’homme et pour l’homme ».

Est-ce à dire que la nature ne peut pas être reconnue comme un sujet de droit ?

§ 1 – La nature sujet de droit ?

Pourquoi ne pas donner la personnalité juridique à certains éléments naturels afin

qu’ils puissent défendre leurs intérêts en justice. Cette idée n’est pas nouvelle et Luc

Ferry ( Le nouvel ordre écologique) rappelle qu’entre le XIIIème et le XVIII siècle, des

procès furent intentés aux scarabés , sangsues et autres charançons.

L’idée a été développée, de manière célèbre, dans un article écrit par un

américain en 19729 (M. Chis Stone) à propos de l’affaire des Séquoias de la Mineral

King Valley en Californie.

Cette réflexion a inspiré certains auteurs comme JP Marguenaud (Prof. A Limoges).

Dans sa thèse de doctorat, celui-ci a proposé d’accorder aux animaux une

personnalité juridique d’ordre technique, comme pour les personnes morales.

L’animal serait assimilé à un sujet de droit limité car s’il peut être reconnu victime

d’atteintes illicites, il ne peut être déclaré responsable et faire l’objet de poursuites.

Au plan légal, un argument va dans le sens de la reconnaissance de la qualité de

sujet de droit à l’animal.

Notre code pénal ne sanctionne pas les actes de cruauté et les sévices graves

envers les animaux (art. 521-1 et 522-2 CP) dans les atteintes aux biens. Ceux-ci

9 « Should trees have standings. Toward legal rights for natural objects”

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occupent un livre à part (le livre V) : les « autres crimes et délits» . N’est ce pas le

signe que les animaux sont sortis juridiquement de la catégorie des biens ?

En jurisprudence, la thèse de « l’animal-personne » a même fait l’objet d’une

application par le TGI de Lille (TGI Lille, 23 mars 1999, D. 1999, p. 350) à propos de

l’atteinte causée à un chien guide aveugle lors d’un accident de la circulation.

D’autres auteurs, comme M.A. Hermitte, ont proposé d’attribuer un statut

juridique particulier à la nature, entre sujet et objet « Pour les juristes, il suffira de

dire qu’une zone est en même temps sujet et objet de droit, en ce sens qu’elle a, en

tant que zone, un certain droit à conserver son état biologique initial ou à retrouver

un état biologique supérieur, ce droit s’exerçant éventuellement à l’encontre des

activités humaines » (in : L’homme, la nature et le droit).:

Ces thèses traduisent bien le besoin de renouvellement des relations

homme/nature10.

Cela étant, c’est bien plutôt en considérant la nature comme un objet de droit,

nécessitant une protection, que le droit de l’environnement s’est constuit.

§ 2 – La nature, objet de droit

On peut dire qu’au départ, dans les années 70, le droit de l’environnement est né

de la prise de conscience des dégradations causées à la nature par les activités

humaines. Les premiers textes généraux relatifs à l’environnement ont donc eu pour

finalité d’organiser sa protection.

Le droit de l'environnement s’est donc d’abord développé autour de la notion de

« protection » entendue au sens large. Comme l’énonçait le Pr. Lamarque en 1973,

dans le premier ouvrage consacré au droit de l'environnement « protéger ce n’est

pas seulement préserver de la destruction. C’est aussi assurer l’utilisation la plus

rationnelle des ressources naturelles, voire « améliorer la qualité des éléments

naturels »11.

D’ailleurs, l'ancien article L.200-1 du Code rural (avant le Code de

l’environnement) français parlait uniquement de "protection", de "maintien" de

10

Sur ces questions, cf également F. OST « La nature hors la loi, l’écologie à l’épreuve du droit »,

Ed. la découverte, Paris, 1995.

11

« Droit de la protection de la nature et de l’environnement » (Paris LGDJ 1973, Lamarque).

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l’environnement. Aujourd’hui, l’article L.110-1, II, du Code de l’environnement

distingue les différentes facettes de la protection de l’environnement, à savoir :

- la protection

- la mise en valeur

- la restauration

- la remise en état

- la gestion

Il en est de même en droit de l’UE. L’article 191 du traité sur le fonctionnement de

l’UE définit la politique environnementale comme comprenant « la préservation, la

protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement’.

On retrouve ce critère de la protection chez la majorité les auteurs de la doctrine

environnementaliste de première génération12.

Dans ce contexte, c’est bien le souci de la conservation des éléments qui composent

l’environnement (air, eau, sol, faune, flore) qui confère son unité au droit de

l'environnement, qu’il s’agisse du droit de la protection de la nature ou du droit de la

lutte contre les pollutions.

Ce que confirment les grandes lois sur l’environnement, telles que :

- Loi du 2 mai 1930 sur la protection des monuments naturels et des sites

- Loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature

- Loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées pour la protection de

l’environnement

- Loi du 9 janvier 1985 sur le développement et la protection de la montagne

- Loi du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages

- Loi du 2 février 1995 sur le renforcement de la protection de

l’environnement.

Il s’agit bien dans tous les cas d’empêcher les aggravations des atteintes à

l’environnement par les pollutions, l’urbanisation anarchique, le gaspillage des

ressources naturelles. L’homme apparaissant toujours impliqué, les liens vont se

12

M. Despax considère que le droit de l'environnement « a pour objet (…) de limiter l’impact des activités humaines sur (…) les milieux naturels » (droit de l'environnement, LITEC 1980). R. Hertzog (La fiscalité de l’environnement, Colloque Nice PUF 84) souligne que ce droit « a pour fonction de réaliser une politique de préservation et de gestion collective des milieux, des êtres vivants et des ressources ». De même A. Kiss écrit que « le droit international de l’environnement a pour objet de protéger la biosphère contre les détériorations majeures et des déséquilibres qui pourraient en perturber le fonctionnement normal ».

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resserrer petit à petit pour inclure la nécessaire prise en compte de sa santé et son

épanouissement.

Le droit va devoir alors répondre à une autre revendication, celle du droit à un

environnement sain.

Section 2- La montée de l’écologie humaniste

Cette revendication d’un droit fondamental de l’homme à l’environnement s’est

manifestée dès la première conférence des Nations Unies organisée en 1972 à

Stockholm en 1972 sur les questions environnementales.

La déclaration de Stockholm proclame que « l’homme (…) une des composants de

l’écosystème ».

Il est dit encore que « l’homme a un droit fondamental (…) à des conditions de vie

satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité leur permette de vivre dans la

dignité et le bien-être » (principe 1)

Cette affirmation du droit de chacun à un environnement qui ne soit ni pollué ni

défiguré se double de la définition d’une obligation corrélative : « le devoir solennel

(de l’homme) de protéger et d’améliorer l’environnement pour les générations

présentes et futures. »

Par la suite, la charte africaine des droits de l’homme et des peuples de

198113 fournira pour sa part la 1ère expression du droit de l’Homme à l’environnement

dans un traité international en ces termes : « Tous les peuples ont droit à un

environnement satisfaisant et global, propice à leur développement » (article 24).

La déclaration de Rio de 1992 s’y réfère également, proclamant que : « les

êtres humains (…) ont droit à une vie saine et productive en harmonie avec la

nature » tout en affirmant également que « la Terre, foyer de l’humanité, constitue un

tout marqué par l’interdépendance »

Mais c’est la convention d’Aahrus du 25 juin 1998 sur le droit à l’information

qui consacre ce droit d’une manière définitive. Son préambule proclame « le droit de

chacun de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être et

13

Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi, Kenya, lors de la 18e Conférence de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA). Entrée en vigueur le 21 octobre 1986, après ratification de la Charte par 25 Etats.

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16

le devoir, tant individuellement qu’en association avec d’autres, de protéger et

d’améliorer l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures ».

C’est ainsi que, depuis, le droit à l’environnement a été érigé au rang des

droits de l’homme de la troisième génération dans les constitutions d’une

cinquantaine de pays.

Chapitre 3 : Droit de l’environnement et droits voisins

Les droits voisins sont le droit de la santé, le droit de l’urbanisme et le droit rural.

Section 1 : La relation environnement-santé publique

Les considérations de santé n’ont jamais été très éloignées de la préoccupation liée

à la préservation de l’environnement.

On a beaucoup appliqué le principe d’éloignement, qui consiste tout simplement à

installer les sources éventuelles d’épidémies à l’écart des agglomérations.

Dans nos sociétés, le système de santé14 s’est organisé, entre le XIXème siècle et le

début du XXème siècle, autour du triptyque « hygiène, vaccination, lutte contre les

fléaux sociaux ». On a encore en mémoire les grandes épidémies de peste, de

choléra.

Mais à partir des années 1945, sous l’action conjuguée de la rénovation urbaine, du

développement de la sécurité sociale et des fulgurants progrès de la médecine, le

système s’est s’orienté vers une démarche résolument curative qui domine encore

aujourd’hui.

Cela n’est pas propre à la France, dans la plupart des pays européens, les services

curatifs consommaient, en 1999, près de 90 % des ressources dévolues aux

systèmes de santé15.

Aujourd’hui, sous l’impulsion du droit international et communautaire, une démarche

nouvelle a amené à rapprocher deux domaines jusqu’alors dissociés, santé d’un

côté et environnement de l’autre, en vue de favoriser la prise en compte d’une

nouvelle « santé environnementale ». Celle-ci est définie par l’Organisation Mondiale

14

La santé est définie par l’OMS comme « un état complet de bien-être physique, mental et social et (…) pas seulement en une absence de maladie et d’infirmité » (1948). 15

A. Rougemont, La santé en Europe, Acte Sud 1999, p. 23.

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17

de la santé (OMS) comme comprenant « les aspects de la santé humaine, y

compris la qualité de la vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques,

biologiques, sociaux et psychosociaux de notre environnement16.

Au plan de l’UE, il aura fallu attendre une communication de la Commission

européenne, du 11 juin 2003, pour voir apparaître une stratégie européenne en

matière d’environnement et de santé (COM 2003-338 final)17 une autre stratégie,

plus spécifique au milieu du travail18, adoptée en 2002-200619 et actualisée en

200720.

Section 2 - Droit de L’environnement et droit de l’urbanisme

Le droit de l’urbanisme peut être défini comme l’ensemble des études et des

conceptions ayant pour objet l’implantation et l’aménagement des villes.

16

OMS 1993, cité par B. Vergriette, « Santé Environnement : problèmes et méthodes », Document de Travail de Ministère de l’écologie et du développement durable, Direction des études économiques et de l’évaluation environnementale, Série Méthode n° 02-M02. 17

http://eur-lex.europa.eu/smartapi/cgi/sga_doc?smartapi!celexplus!prod!DocNumber&lg=fr&type_doc=COMfinal&an_doc=2003&nu_doc=338 18

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 21 février 2007 intitulée «Améliorer la qualité et la productivité au travail: stratégie communautaire 2007-2012 pour la santé et la sécurité au travail» [COM(2007) 62 final - Non publié au Journal officiel] 19

Cette stratégie visait à faciliter l'application de la législation existante en matière de santé et de sécurité au travail et à donner de nouvelles impulsions. Elle s'appuiyait sur un état des lieux à la suite duquel la Commission rappellait les trois exigences à remplir pour assurer un environnement de travail sûr et sain : - la consolidation de la culture de prévention des risques, - une meilleure application du droit existant - et une approche globale du « bien-être au travail ». Pour parvenir à satisfaire ces conditions, la stratégie communautaire proposait trois grandes directions: - l'adaptation du cadre juridique, - le soutien aux « démarches de progrès » (élaboration de meilleures pratiques, dialogue social, responsabilité sociale des entreprises) - et enfin l'intégration de la problématique de la sécurité et de la santé sur le lieu de travail dans d'autres politiques communautaires.

20 Un plan d'action 2004-2010 met en oeuvre cette stratégie européenne (Communication de la

Commission, du 9 juin 2004, « Plan d'action européen 2004-2010 en faveur de l'environnement et

de la santé » [COM(2004) 416 - Journal officiel C 49 du 28.02.2006].

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18

Fondamentalement, tout oppose les deux approches des défenseurs de

l’environnement et de l’urbaniste. Le premier défend un état des lieux que le second

veut transformer.

Si l’environnement a été confondu, dans ses débuts avec la nature qu’il fallait

protéger, et qui était située hors des villes, l’environnement comprend désormais la

lutte contre les pollutions et nuisances, y compris celles qui sont liées au

développement urbain21.

Celle-ci a trouvé sa traduction dans le principe de développement durable appliqué

aux villes à travers la notion de villes durables22 issue de la conférence d’Aalborg

de 199423.

A côté de cela, la Commission européenne a lancé, le 11 janvier 2006 une

« stratégie thématique pour l'environnement urbain »24 qui vise à aider les États

membres, ainsi que les autorités régionales et locales à améliorer la performance

environnementale des villes européennes.

En droit français, on assiste aussi à l’introduction croissante, dans le droit de

l’aménagement du territoire d’objets et d’outils relevant du droit de l’environnement.

21

Le numéro 12/2012 de la revue AJDA (2 avril 2012) consacre un dossier spécial à la réforme du droit de l’urbanisme en France : JEGOUZO, Yves. « De l’urbanisme de projet à l’urbanisme sommaire » (pp. 626-629) ; PRIET, François. « La réforme de la définition de la surface de plancher » (pp. 630-635) ; TREMEAU, Jérôme. « Le nouveau lotissement » (pp. 636-640) ; PLANCHET, Pascal. « Autorisations d’urbanisme : une réforme sans vague » (pp. 641-646) ;LEBRETON, Jean-Pierre. « La réforme des procédures d’élaboration et de gestion des documents d’urbanisme » (pp. 647-654) 22

Au plan communautaire, un Groupe d'experts sur l'environnement urbain a lancé en 1993, pour trois ans, un projet " Villes durables ». Un certain nombre de villes ont pris connaissance de l'existence des travaux du Groupe d'experts sur l'environnement urbain. Très intéressées par ce travail, elles ont proposé d'organiser une rencontre des villes durables européennes, la ville d'Aalborg au Danemark se portant volontaire pour l'accueillir.

23 La conférence d'Aalborg a débouché sur la rédaction par les collectivités locales présentes de la

« Charte d'Aalborg », qui est la charte des villes européennes pour un développement durable. Depuis lors, il y a eu plusieurs conférences en Europe sur ce thème. Ce temps de l'action et des réalisations se confirme à Lisbonne, lors de la deuxième conférence des villes durables européennes qui a lieu en octobre 1996. Depuis il y a eu Hanovre en 2000 (Allemagne) et Aalborg à nouveau en 2004 (Danemark), Séville en 2007 (Espagne). La prochaine Conférence européenne des villes durables entre dans sa phase de préparation pour 2010.

24 Communication de la Commission, du 11 janvier 2006, sur une stratégie thématique pour

l'environnement urbain [COM(2005) 718 final - Non publié au Journal officiel]. www.europa.eu.int/comm/environment/urban/home_en.htm

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19

On songe bien sur :

- à la loi du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise

en valeur du littoral, (art. L. 146-1 du C. urb.)

- ou encore à la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la

protection de la montagne (art. L. 145-3 et svts du C.urb.)

On assiste par ailleurs à l’intégration, dans les documents d’urbanisme, d’actes

réglementaires issus du droit de l’environnement. On songe ici par exemple :

- ou encore aux Plans de Prévention des Risques (PPR) 25 .

- aux Plans d’Exposition au Bruit 26

- aux Schémas de Mise en Valeur de la Mer27

Mais ce sont surtout les évolutions récentes du droit de l’urbanisme, résultant

notamment de la loi du 13 décembre 2000 sur la solidarité et le renouvellement

urbain, qui marquent la volonté de lier davantage les préoccupations

environnementales et la logique du développement durable.

Section 3 – Droit de l’environnement et droit rural

Le droit rural se définit comme l’ensemble des règles applicables aux exploitations

agricoles28.

Il y a bien longtemps que les deux droits obéissent à des logiques différentes. En

fait, la rupture s’est opérée lorsque l’agriculture s’est ouverte à la logique marchande,

après la seconde guerre mondiale. L’accroissement de la production agricole n’a été

possible que par le recours massif aux moyens de production industriels, incluant

bien sûr la mécanisation mais surtout le recours au produits de consommation

intermédiaires (engrais, produits phytosanitaires, aliments pour le bétail, semences

etc…).

25

(CE Section du contentieux, Avis n° 236910 3 déc.2001, SCI des 2 et 4 rue de la Poissonnerie et autres). 26

(CE, 7 juillet 12000, Secrétaire d’Etat au logement, Req. n° 200949), 27

(CE, 7 juillet 1997, Mme Madaule et autres, Req. n° 1700375), 28

c’est-à-dire aux biens et valeurs qui les composent et aux hommes qui y vivent, situés dans leur environnement professionnel (la profession agricole), économique (le secteur agro alimentaire) et géographique (l’espace rural).

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20

Le phénomène actuel qui consiste à insuffler le respect des ressources naturelles

dans le droit rural révèle que l’on tente aujourd’hui de réconcilier les deux droits.

Pour aller plus loin : Thèse d’Isabelle DOUSSAN « Activité agricole et droit de

l’environnement, l’impossible conciliation ? » Th. Nice. 1997.

Titre II- Droit de l’environnement et droits de l’homme

Le droit de l’environnement souffre d’un handicap sur le terrain idéologique29 : dans

l’opposition entre la protection de l’environnement et le développement économique,

la balance des intérêts est largement déséquilibrée.

Cela explique le formidable succès que va connaître la notion de développement

durable, habile synthèse entre les tenants de la croissance et ceux de la préservation

de l’environnement.

La notion d’environnement durable, parce qu’elle porte un projet de civilisation qui

remet l’homme au cœur du système, va favoriser l’émergence de l’écologie humaine.

La société est mûre pour reconnaitre l’environnement comme valeur et pour accéder

aux revendications du droit à un environnement sain.

Chapitre 1 – La reconnaissance du droit de l’homme à un environnement sain

Le Cour EDH a vu de développer ces dernière années un contentieux en relation

directe avec le risque environnemental au sens large.

Cela n’a rien d’évident car la Convention européenne de sauvegarde des droits de

l’homme et des libertés fondamentales ne reconnaît formellement aucun droit de

l’homme à l’environnement. L’élaboration d’un protocole additionnel à la Convention

européenne des droits de l’homme relatif au droit à un environnement sain n’a en

effet pas abouti à ce jour30.

29

Y. Jegouzo, La longue marche du droit de l’environnement,Droit et justice, n° 33, p8. 30

Une recommandation n° 1885(2009) de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe concernant l’élaboration d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à un environnement sain.

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21

Cette reconnaissance est le fruit d’une mutation qui a consisté, sans pour autant

reconnaitre expressément des droits nouveaux, à étendre la portée de droits déjà

existants31.

Une atteinte à l’environnement ne peut donc être directement causée par la violation

d’un droit à un environnement sain. Celui-ci n’est pas garanti par la Convention.

C’est par le contenu nouveau affecté à certains droits que les individus se sont vus

reconnaître le droit à un environnement sain.

A cette première mutation est venue s’ajouter une autre évolution. A l’origine,

l’objectif de la Convention était de protéger l’intégrité physique et morale de l’individu

contre les intrusions de l’Etat.

Par suite, la Cour européenne a fait évoluer ce que l’on a appelé des droits

d’abstention en conférant un contenu positif à certains droits civils et politiques, ce

qui a obligé les Etats à en assurer une application concrète et effective32.

Soulignons au passage que ces obligations, dites ‘positives’ doivent en principe être

assumées par les Etats mais il est certain que ces obligations ont des prolongements

sur les relations entre les personnes privées.

L'effet dit « horizontal »33 permet à la Cour de diffuser la Convention dans les

relations de droit privé en retenant la responsabilité internationale de l'Etat lorsque

les droits garantis ne sont pas respectés dans les relations interindividuelles34.

Section 1 – La protection de la vie privée et familiale et du domicile

Selon l’article 8 de la Convention : « toute personne a droit au respect de sa vie

privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».

31

F. SUDRE, Le droit à un environnement sain et le droit au respect de la vie privée, Annuaire international des droits de l’homme, Vol. I/2006, pp. 201-217. 32

F. SUDRE, Les obligations positives dans la jurisprudence européenne des droits de l’homme, Rev. Trim. Dr. H., 1995, p. 363. 33

D. SPEILMANN, Obligations positives et effet horizontal des dispositions de la Convention, in L’interprétation de la Convention européenne des droits de l’homme, Droit et Justice, Bruylant, Bruxelles, 1998, pp. 133-174. L’effet horizontal de la convention a suscité bien des controverses, mais c’est une réalité. (J.F. RENUCCI, Droit européen des droits de l’homme, LGDJ, 3ème éd., p. 53). 34

J.P. Marguénaud, La délimitation par la Cour de Strasbourg du domaine de « l'effet horizontal » de la CEDH, RTD Civ. 1999, p. 498.

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22

La Cour EDH rappelle régulièrement que « le domicile est – normalement le lieu,

l’espace physiquement déterminé où se développe la vie privée et familiale.

L’individu a droit au respect de son domicile, conçu non seulement comme le droit à

un simple espace physique mais aussi comme celui à la jouissance, en toute

tranquillité, dudit espace »35.

L’utilisation du fondement de la vie privée pour protéger l’environnement prend deux

formes.

Dans certaines affaires, c’est l’environnement, bien commun, qui envahit le lieu

privatif. Ce sont les nuisances extérieures qui, en pénétrant à l’intérieur du domicile,

deviennent une menace pour la sphère d’intimité de l’individu.

Dans d’autres affaires, plus rares, l’individu, atteint dans sa chair, transporte son mal-

être dans sa vie privée et familiale, sans pour autant que le domicile ne soit atteint.

a) La protection du domicile

Toute une série d’affaires entrent dans la première catégorie. La première affaire de

nuisance environnementale, analysée par le biais de l’article 8 a eu pour cadre

l’aéroport d’Heathrow, près de Londres, et concernait deux riverains, M. Powel et M.

Rayner, dont le domicile était particulièrement exposé aux nuisances sonores36.

En 1990, la Cour va énoncer que « l’article 8 entre en ligne de compte pour M.

Powell comme pour M. Rayner », dans la mesure où « le bruit des avions de

l’aéroport de Heathrow a diminué la qualité de la vie privée et les agréments du foyer

des deux requérants »37.

Une autre affaire (Hatton, 8 Juillet 2003) l’amènera à trancher la question des vols de

nuit à proximité de l’aéroport d’Heathrow, également sur le fondement de l’article 8.

Le lien entre les atteintes au domicile et les atteintes à la qualité de vie sera affiné

par la suite, notamment dans une affaire Lopez Ostra c/Espagne, du 9 décembre

199438 dans laquelle était en cause le dysfonctionnement d’une station d’épuration

35

CEDH, 16 nov. 2004, Moreno Gomez c/ Espagne, § 53. 36

CEDH, 21 fév. 1990, Powel et Rayner c/Royaume Uni, obs. J. FLAUSS, « Le droit à un recours effectif contre les nuisances d’un aéroport », Rev. trim. D.H., 1991, pp. 241 et s. 37

§ 40. 38

CEDH, 9 déc. 1994, Lopez-Ostra c/ Espagne, § 51. obs. J.P. MARGUENAUD, « Les troubles de voisinage combattus par le droit au respect du domicile et de la vie privée », Rev. trim. dr. civ. 1996, pp. 507.

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23

municipale non loin du domicile de la famille Lopez-Ostra. La Cour va énoncer

qu’ « il va (…) de soi que des atteintes graves à l’environnement peuvent affecter le

bien-être d’une personne et la priver de la jouissance de son domicile de manière à

nuire à sa vie privée et familiale »39.

La nature des agressions subies au domicile va être précisée dans une affaire

Moreno Gomez c/ Espagne, du 16 novembre 2004. En l’espèce, il s’agissait de la

contestation, par la requérante, de l’ouverture d’une nouvelle boîte de nuit dans son

immeuble, situé dans une zone résidentielle de Valence, par ailleurs déclarée zone

acoustique saturée.

La Cour va conclure à la violation de l’article 8 en soulignant que « des atteintes au

droit au respect du domicile ne visent pas seulement les atteintes matérielles ou

corporelles, telles que l’entrée dans le domicile d’une personne non autorisée, mais

aussi les atteintes immatérielles ou incorporelles, telles que les bruits, les émissions,

les odeurs et autres ingérences»40.

Le bruit devient donc une source d’incommodité qui peut priver de la jouissance de

son domicile.

L’Espagne sera ainsi condamnée le 18 octobre 2011 (Martinez Martinez, n° 21532)

dans une affaire similaire du fait de nuisances sonores excessives provenant de la

terrasse d’un bar musical dans la municipalité de Cartagena.

Dans une affaire Mileva et autres c. Bulgarie du 25 novembre 2010, (requêtes nos

43449/02 et 21475/04), les requérants se plaignaient également du bruit excessif

causé par un bureau, un club de jeux électroniques et un club informatique installés

dans des appartements adjacents aux leurs. La Bulgarie est condamnée.

C’est sur ce même fondement de la violation de la vie privée que sera condamnée

l’Espagne à propos des vibrations provoquées contre le mur du domicile de Mme

Ruano Morcuende, en Espagne, par un transformateur électrique le 6 décembre

200541.

Mais ce sont incontestablement les émanations de toute sorte provenant des usines

qui provoquent le plus de contentieux.

39

§ 40

CEDH, 16 nov. 2004, Moreno Gomez c/ Espagne, obs. J.A. TIETZMANN et E. SILVA, « L’étendue du verdissement de la jurisprudence de la CEDH par l’arrêt Moreno Gomez », R.E.D.E., 2006, pp. 319-321. 41

CEDH (déc.), 6 septembre 2005, Ruano Morcuende c/ Espagne.

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24

Dans une affaire Fadeyeva c/ Russie jugée le 9 juin 200542, la Cour constate que

l’appartement de Madame Fadeyeva se trouvait à l’intérieur d’une zone de sécurité

sanitaire située tout autour d’une importante usine sidérurgique dans laquelle –en

théorie- aucune construction n’aurait dû être autorisée. Eu égard aux fortes

pollutions, la Cour conclut que la qualité de vie « à son domicile » de Mme

Fadeyeva43 a été affectée.

Il en est de même dans une affaire Giacomelli c/ Italie du 2 novembre 200644 où la

requérante a subi une atteinte grave à son droit au respect de son domicile en raison

de l'activité dangereuse d’une usine de retraitement de déchets toxiques située tout

près de domicile.

L’affaire Tatar c/Roumanie, du 27 janvier 2009, peut encore illustrer les atteintes au

domicile causées par de graves affaires de pollution. Rejetant le fondement de la

violation du droit à la vie, c’est à la lumière de l’article 8 - le droit au respect de la vie

privée et du domicile - que la Cour examinera la requête.

C’est également sur le fondement de l’article 8 que la Cour sanctionner l’Ukraine en

raison des nuisances subies par les riverains d’une usine de Charbon qui se

plaignaient de problèmes de santé et de dommages causés à leurs maisons

(Dubetska and others c/Ukraine, du 10 février 2011).

L’invocation des atteintes à la vie privée peut même concerner la circulation. Dans

une autre affaire Deés c/ Hongrie, du 9 novembre 2010, M. Deés se plaignait de ce

que la mise en place d’un péage non loin de son domicile avait amené les camions à

passer devant chez lui précisément pour éviter ce péage.

Quelques fois la notion de domicile peut surprendre. Tel est le cas dans l’affaire

Brandûse c/ Roumanie du 7 avril 2009.

En l’espèce, un homme détenu successivement dans les prisons d’Arad et de

Timiºoara (Roumanie) alléguait que les conditions de sa détention étaient

contraires aux articles 3 (interdiction des traitements inhumains et dégradants) et 8

(droit au respect de la vie privée).

42

CEDH, 9 juin 2005, Fadeyeva c/Russie, § 88. 43

« Even assuming that the pollution did not cause any quantifiable harm to her health, it inevitably made the applicant more vulnerable to various illnesses. Moreover, there can be no doubt that it adversely affected her quality of life at home”, § 88. 44

CEDH, 2 nov. 2006, Giacomelli c/ Italie.

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25

Récemment, dans un arrêt du 10 janvier 2012 (Di Sarno et autres c/Italie), la Cour a

jugé que la « crise des déchets » en Campanie a nui au respect de la vie privée et au

domicile des requérant, ce qui entraîne la violation de l’’article 8.

b) L’atteinte à la vie privée

Parfois, le lien avec le domicile disparaît pour laisser la place à la vie privée. On en

veut pour exemple l’affaire Mac Ginley et Egan du 9 juin 199845. L’affaire concernait

deux militaires britanniques qui étaient en mission à proximité de l’île Christmas entre

1957 et 1958 au moment où le Royaume Uni y effectuait des essais nucléaires et

qui, quelques années plus tard, avaient été victimes de graves troubles de santé.

En revanche, lorsque l’atteinte à l’environnement n’affecte pas ou affecte peu la vie

privée et familiale, la Cour refuse de faire jouer l’article 8.

Dans un arrêt Kyrtatos c/Grèce, du 22 mai 200346, les requérants se plaignaient de la

destruction d’un marais à proximité de leur maison par des aménagements urbains

qui avaient détruit la beauté des lieux.

La Cour précise que « l’élément crucial qui permet de déterminer si, dans les

circonstances d’une affaire, des atteintes à l’environnement ont emporté violation de

l’un des droits sauvegardés par le paragraphe 1 de l’article 8 est l’existence d’un effet

néfaste sur la sphère privée ou familiale d’une personne, et non simplement la

dégradation générale de l’environnement. Ni l’article 8 ni aucune autre disposition de

la Convention ne garantit spécifiquement une protection générale de l’environnement

en tant que tel ; d’autres instruments internationaux et législations internes sont plus

adaptés lorsqu’il s’agit de traiter cet aspect particulier ».

c) Les composantes de l’atteinte à la vie privée et au domicile

Dans l’affaire Tatar47 c/ Roumanie du 27 janvier 2009, la Cour énonce que les Etats

ont « le devoir primordial de mettre en place un cadre législatif et administratif visant

à une prévention efficace des dommages à l'environnement et à la santé humaine ».

45

Mac Ginley et Egan c/ Royaume Uni, 9 juin 1998. 46

CEDH, 22 mai 2003, Kyrtatos c/ Grèce, Obs. Y. WINIDOERFFER, R.J.E., 2004, pp. 176-179. 47

Le 30 janvier 2000, à la suite de la rupture des digues des bassins de décantation de l’exploitation d’une mine d’or et d’argent en Roumanie, ce sont plus de 100 000 m³ d’eau chargée de cyanure de sodium et de métaux lourds qui se sont déversés dans les rivières, pour atteindre la mer noire par le delta du Danube. M. Tatar et son fils résidaient, à l’époque des faits, dans la ville de Baia Mare, au sein d’un quartier d’habitations situé à proximité de l’usine d’extraction et des bassins de décantation. M. Tatar père alléguaient devant la Cour européenne des droits de l’homme que le procédé technique utilisé par la société S.C. Aurul Baia Mare SA représentait un danger pour sa vie et celle de son fis atteint

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26

Les Etats ont le devoir de contrôler correctement les activités polluantes « que la

pollution soit directement causée par l'Etat ou que la responsabilité de ce dernier

découle de l'absence de réglementation adéquate de l'activité du secteur privé » 48.

Peu importe, dans l’affaire Hatton49 par exemple « que les nuisances sonores

dénoncées ne sont pas causées par l'Etat ou ses émanations, mais qu'elles résultent

de l'activité de compagnies aériennes privées ».

Il en est de même dans l’affaire Di Sarno des déchets italiens, du 10 janvier 2012. Il

est reproché aux autorités publiques de n’avoir pas pris les mesures adéquates pour

assurer le fonctionnement régulier du service de collecte, de traitement et

d’élimination des déchets. Il pesait en effet sur l’Etat l’obligation positive d’adopter

des mesures raisonnables et adéquates capables de protéger les droits des

intéressés au respect de leur vie privée et de leur domicile.

Toutefois, la Cour requière un certain degré d’atteinte pour estimer que le droit à un

environnement sain a été violé 50.

Si la Cour a fondé ses premiers arrêts sur des atteintes matériellement constatées,

elle semble évoluer aujourd’hui vers la prise en compte du risque éventuel d’atteinte

au droit à un environnement sain.

Dans l’affaire Fadeïeva51, la preuve du lien de causalité entre la maladie de Mme

Fadeïeva n’était pas rapportée de manière incontestable. Dans l’affaire Tatar c/

Roumanie du 27 janvier 2009, elle n’hésite pas à affirmer que, « malgré l'absence

d'une probabilité causale en l'espèce, l'existence d'un risque sérieux et substantiel

pour la santé et pour le bien-être des requérants faisait peser sur l'État l'obligation

positive d'adopter des mesures raisonnables et adéquates capables à protéger les

droits des intéressés au respect de leur vie privée et leur domicile et, plus

généralement, à la jouissance d'un environnement sain et protégé »52.

d’asthme chronique. Il se plaignait en outre de la passivité des autorités face à la situation et aux nombreuses plaintes qu’il avait déposées. Rejetant le fondement de la violation du droit à la vie, c’est à la lumière de l’article 8 - le droit au respect de la vie privée et du domicile - que la Cour va examiner la requête. 48

CEDH, 2 nov. 2006, Giacomelli c/ Italie. 49

CEDH, 8 juil. 2003, Hatton c/Royaume Uni. 50

CEDH, 9 juin 2005, Fadeïeva c/ Russie, § 70. 51

CEDH, 9 juin 2005, Fadeïeva c/ Russie. 52

§ 107.

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27

C’est encore l’angoisse des intéressés qui est prise en compte dans l’affaire

Roche53, à défaut de lien de causalité clairement établi entre les expérimentations au

gaz moutarde et la détérioration de l’état de santé de M. Roche.

Dans l’affaire Taskin, c/ Turquie54, les requérants dénonçaient, les dangers de

l'utilisation du cyanure pour procéder à l'extraction du métal précieux, entraînant des

risques de pollution de la nappe phréatique et donc des risques pour la santé des

personnes.

Dans l’affaire Lemke55, relative à la mine d’or en Turquie, l’Etat turc a finalement été

condamné pour ne pas avoir respecté les procédures d’évaluation des risques

environnementaux indépendamment des répercussions éventuelles constatées sur

la santé des requérants.

Section 2 – La garantie des droits à un environnement sain

Une série de facteurs contribue, sur les fondements précités, à garantir aux victimes,

la prise en compte de leurs droits.

§ 1. L’élargissement de la qualité de victime des atteintes à l’environnement

Le progrès a consisté, dans le cadre de l’article 8, à reconnaître le statut de victime,

non seulement aux riverains proches mais également à des personnes très

éloignées géographiquement de la zone d’émanation des pollutions.

Dans certaines affaires, l’origine des pollutions est géographiquement distante.

- Ainsi, dans l’affaire Lemke c. Turquie56, les requérants contestaient l'octroi

d'autorisations d'exploiter une mine d’or située à 50 kilomètres du lieu de leur

résidence.

- Plus étonnant encore, dans l’affaire Okyay57 les requérants, tous avocats,

vivaient et travaillent à Izmir, ville située à 250 kilomètres environ des

centrales thermiques.

Dans ce dernier cas en particulier, le gouvernement turc contestait que l'exploitation

des centrales ait personnellement exposé les requérants à un risque grave,

spécifique et imminent.

53

CEDH, 19 octobre 2005, Roche c/ Royaume Uni. 54

CEDH, 10 nov. 2004, Taskin et crts c/ Turquie ; CEDH 12 juillet 2005, Okyay c/ Turquie; CEDH, 28 mars 2006, Öçkan et crts c/ Turquie : CEDH, 5 juin 2007, Lemke. 55

CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie. 56

CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie 57

CEDH 12 juillet 2005, Okyay c/ Turquie

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28

Pour accueillir la requête des requérants, la Cour énonce qu’« il ressort des constats

de la juridiction administrative que les gaz dangereux émis par les centrales peuvent

se répandre sur une zone mesurant 2 350 kilomètres de diamètre. Cette distance

comprend la région dans laquelle vivent les requérants ; leur droit à la protection de

leur intégrité physique est donc mis en jeu, bien que le risque qu'ils encourent ne soit

pas aussi grave, spécifique et imminent que celui auquel sont exposées les

personnes résidant dans le voisinage immédiat des centrales ».

Dans les deux affaires Lemke et Okyay58, la Cour a pris soin de relever que des

droits avaient été ouverts aux requérants par les juridictions internes qui leur ont

donné gain de cause.59 La reconnaissance de la qualité de victime reste liée aux

droits reconnus en interne, en particulier lorsque les juridictions ont sanctionné la

violation de ces droits.

§ 2 – Le renforcement des garanties procédurales

La consistance du droit à l’environnement est substantielle, mais elle est également

procédurale.

Dans l’arrêt Hatton du 8 juillet 2003, et dans l’arrêt Flamenbaum, rendu le 13

décembre 2012 à propos de l’aéroport de Deauville60, la Cour énonce, à propos de

l’application de l’article 8, « (…) l'examen auquel elle peut se livrer comporte deux

aspects

- le contenu matériel de la décision du gouvernement (…) qui donne une marge

d’appréciation assez large aux autorités ;

- et le processus décisionnel, afin de vérifier si les intérêts de l'individu ont été

dûment pris en compte »61.

L’examen du volet procédural implique, d’une part la réalisation d’enquêtes et

d’études appropriées et, d’autre part, le droit d’accès à l’information.

a) La réalisation d’enquêtes et d’études appropriées

58

CEDH 12 juillet 2005, Okyay c/ Turquie, § 66. 59

Ainsi, les griefs portaient sur « la défense d'un droit spécifique qui leur a été reconnu par le droit interne et sur lequel les juridictions nationales se sont prononcées » CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie, § 36 ; CEDH 12 juillet 2005, Okyay c/ Turquie, § 64. 6060

CEDH, 13 décembre 2012, Flamenbaum, F. Haumont-P. Steichen, Etudes foncières, n° 161, janv-fev. 2013 61

Hatton et autres précité, § 99.

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29

C’est dans l’affaire Hatton que la Cour va énoncer très clairement que, « lorsqu'il

s'agit pour un Etat de traiter (…) des questions complexes de politique

environnementale et économique, le processus décisionnel doit nécessairement

comporter la réalisation d'enquêtes et d'études appropriées, de manière à permettre

l'établissement d'un juste équilibre entre les divers intérêts concurrents en jeu »62.

Cette exigence sera reprise par la suite dans une série d’arrêts63. Dans l’affaire

Giacomelli64.

Dans l’affaire Lemke en Turquie, à propos de l’autorisation d’exploiter une mine d’or,

la Cour constate que « le Conseil des ministres a autorisé la poursuite des activités

de la mine d'or, ce sans procéder au préalable à la réalisation des enquêtes et

études appropriées de manière à prévenir et évaluer à l'avance les effets de l'activité

en cause »65.

Mais il n’en résulte pas pour autant, a précisé la Cour, que des décisions ne peuvent

être prises qu’en présence de données exhaustives et vérifiables sur tous les

aspects de la question à trancher.

En outre, depuis l’arrêt du 27 janvier 2009, Tatar c/ Roumanie , le principe de

précaution doit être appliqué tout au long du processus décisionnel66.

b) Le droit d’accès à l’information

Les garanties procédurales comprennent également le droit, pour le public, d’avoir

accès aux conclusions de ces études67. Le droit d’accès aux informations constitue

62

Hatton et autres précité, § 128. 63

CEDH, 10 nov. 2004, Taskin et crts c/ Turquie ; CEDH, 2 nov. 2006, Giacomelli c/ Italie, CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie. 64

CEDH, 2 nov. 2006, Giacomelli c/ Italie. 65

CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie, § 44. 66

Dans cette affaire, la Cour se livre à l’examen de l’attitude de l’Etat roumain. La Cour constate que la ville de Baia Mare était déjà une zone très polluée en raison d’une activité industrielle intense et que la technologie d’exploitation proposée était une technologie nouvelle « dont les conséquences pour l’environnement étaient inconnues ». D’une part, constate la Cour, le droit constitutionnel roumain reconnaît le droit à un environnement sain. D’autre part « le principe de précaution recommande aux États de ne pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement en l'absence de certitude scientifique où technique ». 67

L’importance de l’accès du public aux conclusions de ces études ne fait pas de doute, énonce la Cour dans l’affaire Mc Ginley (CEDH, 9 juin 1998, McGinley et Egan c. Royaume-Uni, § 97).

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30

un volet particulier de l’article 8 et est renforcé lorsque c’est l’Etat lui-même qui est à

l’origine de l’activité dangereuse. (aff. Mac Ginley et Egan68).

Tel était également le cas dans l’affaire Roche c/ Royaume Uni, du 19 octobre

200569, affaire à l’occasion de laquelle le Royaume Uni a été condamné sur le

fondement de l’article 8 pour avoir fait subir à M. Roche, alors qu’il était jeune

miliaire, dans les années 60, des expérimentations consistant à lui faire inhaler du

gaz moutarde et des gaz neurotoxiques70.

Parfois, c’est même l’absence d’information qui est érigée en violation de la vie

privée. Dans l’affaire Guerra c/ Italie, du 19 février 199871, la Cour EDH a déduit, sur

la base de l’article 8, que les individus devaient être informés des risques induits par

la proximité de leur domicile avec des établissements dangereux72.

L’affaire Guerra a réalisé une avancée remarquable en termes d’obligations positives

pesant sur les Etats en matière d’information sur les risques technologiques.

Dans l’affaire Tatar c/ Roumanie, la Cour a également souligné «l'importance de

l'accès du public aux conclusions des études environnementales préliminaires ainsi

qu'à des informations permettant d'évaluer le danger auquel il est exposé» 73.

La Cour rappelle à cette occasion l’importance de l’accès à l’information, tant au

regard de la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998, ratifiée par la Roumanie le 22 mai

2000 qu’au regard de la Résolution no 1430/2005 de l'Assemblée parlementaire du

Conseil de l'Europe sur les risques industriels qui renforce, entre autres, le devoir

pour les États membres d'améliorer la diffusion d'informations dans ce domaine.

La doctrine estime que cette obligation positive d’information doit être étendue aux

risques naturels.74.

68

CEDH, 9 juin 1998, McGinley et Egan c. Royaume-Uni. 69

CEDH, 19 octobre 2005, Roche c/ Royaume Uni. 70

La Cour considère qu'il pesait sur les autorités une obligation positive d'offrir au requérant une « procédure effective et accessible » qui lui eût permis d'avoir accès à « l'ensemble des informations pertinentes et appropriées » et d'évaluer ainsi tout risque auquel il avait pu être exposé lors de sa participation aux tests. 71

CEDH, 19 fév. 1998, Guerra et autres c/Italie, 72

En l’espèce, la Cour avait constaté que « les requérantes sont restées (…) dans l’attente d'informations essentielles qui leur auraient permis d'évaluer les risques pouvant résulter pour elles et leurs proches du fait de continuer à résider sur le territoire de Manfredonia, une commune aussi exposée au danger en cas d'accident dans l'enceinte de l'usine ». 73

§ 113.

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31

c) Le droit de recours

Le volet procédural inclut le droit d’obtenir la sanction des comportements

inappropriés75.. A propos de l’explosion de la décharge dans l’agglomération

d’Istambul76, la Cour EDH énonce que « lorsqu’il y a eu mort d’homme, l’Etat doit en

outre réagir adéquatement pour que les violations du droit en jeu soient réprimées et

sanctionnées ».

Examinant la réaction judiciaire de l’Etat turc – qui a condamné les maires à une

peine d’amende avec sursis de l’ordre de 10 euros -, elle conclut à la violation de

l’article 2, également sous son volet procédural.

d) Vers un suivi des décisions administratives

L’administration participe enfin de la bonne exécution de la justice. Dans l’affaire

Taskin77, la Cour tient à rappeler que « l’administration constitue un élément de l’Etat

de droit, dont l’intérêt s’identifie avec celui d’une bonne administration de la justice, et

que, si l’administration refuse ou omet de s’exécuter ou tarde à le faire, les garanties

dont a bénéficié le justiciable pendant la phase judiciaire de la procédure perdent

toute raison d’être »78.

Dans l’affaire de Baia Mare en Roumaine, jugée le 27 janvier 2009, pour ce qui

concerne les suites de l’accident, la Cour observe que l’activité n’a pas été arrêtée

74

« L’Etat devrait informer les citoyens et notamment les propriétaires des risques d’instabilité et d’éboulement d’une montagne pouvant mettre en danger leur vie et leurs biens. De même, les pouvoirs publics devraient communiquer toutes informations utiles en leur possession qui pourraient avoir des incidences sur la mise en danger d’activités économiques ou de biens, par exemple, du danger de crues subites d’un torrent le long duquel un camping a été installé, avec toutes les autorisations requises » . P. TAVERNIER, Le droit de l’homme à un environnement sain, le droit de propriété et les libertés économiques, A.I.D.H. 2006, p. 225. 75

Pour assurer la garantie des droits procéduraux, les individus concernés doivent aussi pouvoir former un recours contre toute décision, tout acte ou toute omission devant les tribunaux, s’ils considèrent que leurs intérêts ou leurs observations n’ont pas été suffisamment pris en compte dans le processus décisionnel Hatton et autres, précité, § 127. 76

CEDH (gr. ch.), 30 nov. 2004, Öneryidiz c/ Turquie. 77

CEDH, 10 nov. 2004, Taskin et crts. 78

Idem, § 124.

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32

par les autorités, qui ont continué à utiliser la même technologie. Et la Cour de

rappeler encore une fois l’importance du principe de précaution79 .

La Cour étend devoir d’information aux mesures de prévention devant être prises par

les autorités pour gérer, à l’avenir, la survenance d’un évènement similaire.

L’atteinte ne sera toutefois retenue que si elle est socialement injustifiée.

Chapitre 2 - Les limites de la reconnaissance du droit à un environnement sain

La reconnaissance progressive, par la Cour EDH, du droit à un environnement sain,

a été encadrée par deux séries de limites. La première est relative au degré de

l’atteinte portée à l’homme et est évaluée par rapport aux effets ressentis par la

victime elle-même. La seconde réside dans l’équilibre à rechercher entre les intérêts

individuels et ceux de la société toute entière.

Section 1 – L’exigence d’une dégradation illégale de l’environnement ?

La Cour a eu l’occasion, à maintes reprises de préciser que la Convention ne

permet pas de revendiquer le droit au maintien de ses biens dans un environnement

agréable.

Selon la cour, l’élément crucial qui permet de déterminer si des atteintes à

l’environnement ont emporté violation de l’un des droits sauvegardés par l’art. 8 § 1

est l’existence d’un effet néfaste sur la sphère privée ou familiale d’une personne, et

non simplement la dégradation générale de l’environnement.

Ni l’article 8 ni aucune autre disposition de la Convention ne garantit spécifiquement

une protection générale de l’environnement en tant que tel ; d’autres instruments

internationaux et législations internes sont plus adaptés lorsqu’il s’agit de traiter cet

aspect particulier (Kyrtatos c. Grèce, n° 41666/98, § 52, et CEDH 3 juillet 2012,

Martinez Martinez et Pino Manzano).

Il nous reste maintenant à examiner l’argument de l’équilibre à ménager entre les

intérêts économiques et les droits de l’homme.

79

qui « a vocation à s'appliquer en vue d'assurer un niveau de protection élevée de la santé, de la sécurité des consommateurs et de l'environnement, dans l'ensemble des activités de la Communauté ».

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33

On est frappé ensuite, à la lecture des arrêts de la Cour qui concluent à la violation

de l’article 8 suite à une nuisance environnementale par le fait que, dans la quasi-

totalité des cas, la situation soumise à l’appréciation de la Cour est, d’une manière

ou d’une autre, illégale, indépendamment de la violation de l’article 8 80.

Ainsi, dans l’affaire Lopez Ostra81, la station d’épuration était exploitée sans permis.

Dans l’affaire Moreno-Gomez82, la boite de nuit avait été autorisée dans une zone

urbaine résidentielle par ailleurs déclarée zone acoustique saturée par la mairie. Il en

est de même dans l’affaire Martinez Martinez83 ou le permis avait été accordé par la

municipalité en dépit de l’existence de deux rapports défavorables concernant

l’ouverture de la terrasse en raison des niveaux excessifs de bruit.

Dans les affaires Taskin84, Lemke85 et Öçkan86 concernant l’exploitation de mines

d’or en Turquie, c’est un véritable bras de fer qui s’était engagé entre le pouvoir

exécutif et judiciaire dans la mesure où le Conseil d’Etat avait annulé les

autorisations d’exploiter.

Dans l’affaire Öçkan par exemple, la Cour constate que la reprise des activités de la

mine d'or, fondée sur les autorisations ministérielles suscitées directement par le

premier ministre, n'avait aucune base légale et revenait à contourner une décision de

justice. «Une telle situation », s’insurge la Cour, « porte atteinte à l'Etat de droit,

fondé sur la prééminence du droit et la sécurité des rapports juridiques ».

A l’inverse, dans l’affaire Hatton c/ Royaume Uni87, les autorités étaient dans la

légalité. Il en est de même dans l’arrêt Flamenbaum .

Mais les choses là peuvent évoluer. Ainsi, dans l’arrêt Deés (CEDH c/Hongrie 9

novembre 2010) , les autorités n’ont commis aucune faute dans la mesure où, au

contraire, elles ont fait des efforts pour canaliser la circulation et la limiter. S’agit-il là

d’une nouvelle perception par la Cour des affaires d’environnement qui lui permettrait

80

F. HAUMONT, Le droit fondamental à la protection de l’environnement dans la CDH, in L’environnement, objet d’un droit fondamental, numéro spécial, Aménagement-Environnement, Kluwer, Bruxelles, 2008, pp. 9-56. 81

CEDH, 9 déc. 1994, Lopez Ostra c/ Espagne. 82

CEDH, 16 nov. 2004, Moreno Gomez c/ Espagne, 83

CEDH, 18 oct. 2011, Martinez Martinez c/ Espagne. 84

CEDH, 10 nov. 2004, Taskin et crts, § 124. 85

CEDH, 5 juin 2007, Lemke c/ Turquie. 86

CEDH, 28 mars 2006, Öçkan et crts c/ Turquie. 87

CEDH, 8 juil. 2003, Hatton c/Royaume Uni, obs. F. HAUMONT, « L’absence de statut spécial aux droits environnementaux de l’homme », D. 2003, pp. 2273-2274.

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34

de franchir un pas et de connaître de situations qui ne sont pas nécessairement

illégales au regard du droit national ?

Section 2 – L’acceptabilité économique prévue par la Convention

Si toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et

de sa correspondance, l’article 8, § 2, énonce qu’ « il ne peut y avoir ingérence d'une

autorité publique dans l'exercice du droit à la protection de la vie privée et familiale et

du domicile que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle

constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la

sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la

défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la

santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ».

La Cour estime qu’il convient de laisser aux autorités nationales une ample marge

d'appréciation pour décider des mesures qui leur paraissent nécessaires pour

atteindre les buts légitimes de l'article 8, § 2, car ces autorités sont mieux placées

pour évaluer les besoins et le contexte local.

La Cour se réserve toutefois la possibilité d’apprécier le caractère pertinent des

éléments avancés par l'Etat pour justifier l’atteinte. Celui-ci est apprécié au regard

notamment de sa légitimité et de sa proportionnalité, sachant que le critère tiré de la

légalité interne, déjà examiné, constitue l'un des nombreux éléments à prendre en

compte pour apprécier si l'Etat concerné a ménagé un « juste équilibre » au sens de

l'article 8 § 2 de la Convention.

L’ingérence doit viser un but légitime. Enfin, l’ingérence doit être nécessaire dans

une société démocratique. En particulier, la Cour doit s’assurer que les autorités ont

ménagé un juste équilibre entre les intérêts des individus et celui de la société dans

son ensemble.

Ce contrôle du juste équilibre l’a aménée à constater, dans l’affaire Fadeïeva, que

l’Etat n’avait proposé aucune solution pour éloigner les personnes de la zone à

risque, et donc qu’il n'avait pas su ménager un juste équilibre entre les intérêts de la

société et celui de la requérante.

De même, dans l’affaire Giacomelli, la Cour a estimé que l'Etat défendeur n'avait

« pas su ménager un juste équilibre entre l'intérêt de la collectivité à disposer d'une

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35

usine de traitement de déchets industriels toxiques et la jouissance effective par la

requérante du droit au respect de son domicile et de sa vie privée et familiale »88.

Il faut savoir que, très souvent, c’est l’emploi qui est invoqué à l’appui du maintien

d’activités polluantes. Dans l’affaire Bàcilà c/ Roumanie du 30 mars 201089, à propos

d’une usine métallurgique installée en Roumanie. La cour reprend sa jurisprudence

précédente pour condamner l’Etat la cour énonce qu’elle « ne méconnaît pas

l'intérêt que peuvent avoir les autorités internes à maintenir l'activité économique du

plus grand employeur d'une ville déjà fragilisée par la fermeture d'autres industries.

Cependant, la Court estime que cet intérêt ne saurait l'emporter sur le droit des

personnes concernées à jouir d'un environnement équilibré et respectueux de la

santé. L'existence de conséquences graves et avérées pour la santé de la

requérante et des autres habitants de Copşa Mică, faisait peser sur l'Etat l'obligation

positive d'adopter et de mettre en oeuvre des mesures raisonnables et adéquates

capables de protéger leur bien être ».

TITRE III – L’organisation institutionnelle du droit de l’environnement

Nous allons examiner, dans un premier temps, la diversité des sources et, dans un

second temps, la diversité des acteurs.

Chapitre 1 – Le droit international de l’environnement

Il existe une abondante littérature dans ce domaine dont l'ouvrage de base d'A.

KISS, JP BEURIER, Droit international de l'environnement, Paris, PEDONE, 2011

Juris-Classeur Environnement, le fasc. 110 de L. LUCCHINI et D. GABRIEL,

"Sources de droit international"., P. LE PRESTRE, Protection de l’environnement et

relations internationale, Armand Colin 2005; J.A. ARBOUR et S. LAVALLEE, Droit

international de l’environnement, Yvon Blais, Québec, 2012 ; R. ROMI, Droit

international et européen de l’environnement, Montchrestien, Paris, 2005 ;

L’indifférence de la pollution aux frontières juridiques, l’indivisibilité du milieu rendent

indispensables le traitement international des problèmes environnementaux.

88

§ 97. 89

Des études d’impact avaient été réalisées et des plans de réduction des pollutions élaborés, toutefois les autorités locales avaient été dans l’incapacité de contraindre la société à respecter ces programmes et donc à réduire la pollution.

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36

Le droit international de l'environnement couvre un champ extrêmement divers et

complexe dont il est quasiment impossible de rendre compte de manière exhaustive.

Au niveau des traités internationaux, il existe :

- plusieurs centaines de traités multilatéraux (+/- 400)

- plus de 1.000 traités bilatéraux90.

Section 1 – Les grandes conférences internationales de l’environnement

En droit international, les ressources naturelles exploitables ont fait assez tôt l’objet

d’une protection directe.avec un objectif toutefois qui n’est pas celui de protéger la

nature pour elle-même.

Il s’agit tout au contraire de servir les intérêts humains, par exemple d’aider à la

production agricole ou de maîtriser les pratiques de chasse ou pêche.

On peut citer à cet égard :

- le traité de Washington du 7 février 1911 relatif à la protection des phoques à

fourrure

- la convention de Washington du 2 décembre 1946 sur la réglementation de la

chasse à la baleine

- ou encore la convention de Paris du 19 mars 1902.sur la protection des oiseaux

utiles à l’agriculture

Axé à l’origine sur le partage de la ressource entre différents Etats, le droit

international de l’environnement va évoluer, peu à peu, vers un partage de la

ressource dans le temps, entre les générations.

§ 1 – La conférence de Stockholm

Déjà au XIX siècle, des conférences internationales adoptaient des vœux, c’est-à-

dire des textes non obligatoires pour les Etats qui y ont participé. Cette procédure a

été remise à l’honneur notamment en droit de l’environnement. Les

recommandations et les déclarations de principe sont légion en la matière

(Stockholm, Rio) et revêtent une grande importance pour le droit de l’environnement.

On s’accorde à considérer que la Conférence des Nations Unies de Stockholm est

l’acte fondateur du droit international de l’environnement.

90

Un recueil des traités sur l'environnement paraîtra en 1998 aux éditions Bruylant, Bruxelles, sur support papier et C.D. Rom.

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37

A Stockholm, en 1972, les Nations Unies, sous la pression des pays nordiques, ont

lancé le signal de départ de l’environnement comme préoccupation majeure des

Etats et des citoyens.

L’autre point de repère majeur permettant d’encadrer la conférence de Stockholm,

c’est la grande crise pétrolière de 1973 (le 1er choc pétrolier) qui est survenue peu

de temps après Stockholm et qui a contribué à une prise de conscience quant à la

fragilité des ressources naturelles de notre planète.

A l’issue des travaux fut adoptée, par acclamation, la “Déclaration de la conférence

des Nations Unies sur l’environnement” ou déclaration de Stockholm qui contient 26

principes précédés d’un préambule en sept points.

Selon le préambule ,“l’homme est à la fois créature et créateur de son

environnement”. Il en est arrivé à un stade de progrès qui lui permet de modifier de

manière significative son environnement et les exemples de dommages qu’il a

provoqués se multiplient dans de nombreuses régions du globe. Il faut

responsabiliser les collectivités et les citoyens pour défendre et améliorer

l’environnement.

Ces idées sont clairement posées par le premier principe :

“L’homme a un droit fondamental à la liberté, à l’égalité et à des conditions de vie

satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permette de vivre dans

la dignité et le bien-être”, “il a le devoir solennel de protéger et d’améliorer

l’environnement pour les générations présentes et futures”.

Les principes mettent l’accent sur la protection de la nature :

Ainsi, selon le principe 2 : les ressources naturelles du globe -air, eau, terre, faune et

flore- doivent être préservés dans l’intérêt des générations présentes et à venir

En matière de pollution, « les rejets de matières toxiques doivent être interrompus

de manière à éviter les dommages irréversibles » ; « les Etats doivent empêcher la

pollution des mers »

Mais la déclaration de Stockholm contient aussi des revendications plus politiques

comme :

5 - le partage des ressources non renouvelables

11- la rémunération adéquate des produits de base des pays en voie de

développement

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38

12 -l ‘assistance technique aux pays en voie de développement pour l’intégration de

la protection de l’environnement dans la planification de leur développement

21 - le droit souverain des Etats d’exploiter leurs propres ressources.

§ 2 - Le rapport Brundland

Entre les années 1970 et 1980, la politique de l’environnement s’est progressivement

développée en se dotant de structures autonomes. Les années ‘80 sont marquées

par une prise de conscience de l’ampleur planétaire des problèmes écologiques et

de leurs implications socio-économiques.

Dans le milieu des années 80, en Europe, la politique de l’environnement est

également devenue un véritable enjeu de société avec notamment le mouvement

politique contestataire des verts en Allemagne.

Au plan international, c’est surtout la publication en 1987 du rapport Brundland, de la

Commission mondiale sur l’environnement et le développement qui a contribué à

l’émergence du concept de développement durable.

Jusqu’alors, ces deux notions -environnement et développement- étaient en effet

considérées comme antinomiques. Les PVD considéraient la protection de

l’environnement comme un “luxe” qui ne concernait que les pays riches du Nord.

En d’autres termes, pour les pays pauvres, le développement devait se concevoir

comme l’aide au développement tandis que pour les pays riches il s’agissait de

poursuivre leur croissance économique.

Il fallait donc trouver un terrain d’entente, ce que fit le rapport Brundtland en

proposant le concept fédérateur de développement durable. Celui-ci est d’autant plus

fédérateur que son contenu est imprécis. Le développement durable est défini

comme “un développement qui satisfait les besoins du présent sans compromettre

l’aptitude des générations futures à satisfaire leurs propres besoins”.

Un bon exemple de l’influence du rapport Brundland en droit international de

l’environnement réside dans la conclusion de la 4ème convention de Lomé, du 15

décembre 1989 entre la Communauté européenne et les Etats d’Afrique, Caraîbe et

Pacifique. (ACP).

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39

L’objectif premier de la coopération CEE/ACP reste le développement économique,

culturel et social des Etats ACP. Mais les parties contractantes reconnaissent qu’un

tel développement doit “reposer sur un équilibre durable entre ses objectifs

économiques, la gestion rationnelle de l’environnement et la valorisation des

ressources naturelles et humaines”.91

L’environnement est reconnu comme un objectif à part entière de la coopération.

91

Dans une disposition générale, elles souscrivent à la finalité du développement durable en

s’engageant à accorder “ la priorité(...) à la protection de l’environnement et à la conservation des

ressources naturelles, conditions essentielles pour un développement durable et équilibré, tant au

plan économique qu’au plan humain » (art. 6 § 2).

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40

§ 3 - La Conférence de Rio92

L’idée d’une conférence internationale était contenue dans le rapport Brundland,

conférence qui mêlerait les deux thèmes d’environnement et de développement.

Cette conférence n’a pas obtenu une adhésion immédiate.

C’est au fil des discussions que les PVD ont compris toutefois l’intérêt qu’ils

pourraient trouver dans la conférence et notamment l’opportunité d’obtenir des

financements en faveur d’objectifs environnementaux.

L’ordre du jour de la conférence comportait 4 points :

1 - l’élaboration d’une charte de la terre ;

2 - l’élaboration d’un plan d’action pour le XXIème siècle, appelé Agenda XXI

3 - la signature de deux conventions internationales sur le changement de climat et

la protection de la diversité biologique.

4 - l’élaboration d’une déclaration de principe sur les forêts.

A- La déclaration de Rio

L’objectif de Rio était bien plus ambitieux que l’élaboration d’une déclaration puisque

la Commission voulait faire adopter une Convention Universelle sur le modèle du

Pacte International relatif aux droits civils et politiques, fait à New York le 19

décembre 1976.

Au lieu de cela, la déclaration de Rio tente de concilier développement économique

et protection de l’environnement dans un texte dépourvu de portée contraignante

dont le style s’apparente plus à des voeux pieux qu’à de véritables engagements.

Le concept de droit au développement y reçoit une portée pour le moins ambiguë. Le

principe 4 énonce que :

“pour parvenir à un développement durable, la protection de l’environnement doit

faire partie intégrante du processus de développement économique et ne peut

être considérée isolément”.

92

« La déclaration de Stockholm adoptée par la Conférence des Nations-Unies sur l'environnement de

1972, la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement de 1992, la Charte mondiale de l'environnement et la Charte européenne de l'environnement et de la santé ne produisent pas d'effets en droit interne » (CE, 6 juin 2007, n° 292942, commune de Groslay)

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41

Cette disposition peut être lue tout aussi bien comme imposant la prise en compte

des contraintes écologiques dans la politique de développement que comme

condamnant toute politique de l’environnement incompatible avec les impératifs de

développement économiques.

Parmi les principes de la déclaration, on trouve notamment :

- le droit au développement (qui) doit être réalisé de façon à satisfaire

équitablement les besoins relatifs au développement et à l’environnement

des générations présentes et futures.( 3).

-

- le principe de la participation des citoyens aux questions environnementales

(10).

- le principe selon lequel les Etats doivent promulguer des mesures législatives

efficaces en matière d’environnement (11) et élaborer des lois nationales

concernant la responsabilité pour les dommages causés par la pollution et

d’autres dommages à l’environnement et pour l’indemnisation des victimes.

- le principe de précaution

- le principe pollueur-payeur : les autorités nationales doivent s’efforcer de

promouvoir l’internalisation des coûts de protection de l’environnement et

l’utilisation d’instruments économiques (ppe 16)

- la réalisation d’études d’impact sur l’environnement pour les activités qui

risquent d’avoir des effets nocifs importants sur l’environnement.

Il est enfin précisé les femmes ont un rôle vital dans la gestion et la mise en valeur

de l’environnement (ppe 20).

B - Les conventions

Plusieurs conventions à vocation universelle ont été adoptées à Rio.

a - L’élaboration d’une déclaration de principe sur les forêts

L’objectif des pays développés était de protéger la forêt tropicale contre la

déforestation et d’adopter dans ce sens une convention.

Il en est résulté “une déclaration de principes, non juridiquement contraignante mais

faisant autorité, pour un consensus mondial sur la gestion, la conservation et

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42

l’exploitation écologiquement viable de tous les types de forêts » (signée le 14 juin

1992).

Il est à noter que la protection des forêts a évolué avec le programme REDD :

Réduction des Emissions issues de la Déforestation et de la Dégradation des forêts

qui n’est pas encore en vigueur.

b - La Convention sur les changements climatiques et la Convention sur la

biodiversité

La convention cadre sur les changements climatiques (effet de serre) a été

adoptée le 9 mai 1992 et est entrée en vigueur le 21 mars 1994.

Cette convention constitue un enjeu majeur du droit de l’environnement. Elle sera

suivie notamment en 1997 du protocole de Kyoto sur le système international

d’échange de droits à polluer (93).

La seconde convention portant sur la diversité biologique94 et a été signée le

5 juin 1992(95).

Cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des

écosystèmes96.

Les objectifs de la Convention portent sur “la conservation de la diversité biologique,

l’utilisation durable de ses éléments et le partage juste et équilibré des avantages

découlant de l’exploitation des ressources génétiques (…97) »

Les obligations des Etats sont conformes aux objectifs annoncés : coopération

interétatique et échange d’information, puis pour chaque Etat, élaboration de plans et

programmes nationaux de conservation et d’utilisation durable, identification et

surveillance des éléments constitutifs de la biodiversité, conservation in situ.

93

Cf également la proposition de directive communautaire établissant un système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil. 94

La diversité biologique est définie comme étant la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres systèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie. 95

Elle est entrée en vigueur le 29 déc. 1993 et en France le 28 septembre 1994. 96

Les écosystèmes sont : « le complexe dynamique formé de communautés de plantes, d’animaux et de mico-organismes et de leur environnement non vivant, qui par leur interaction forment une unité fonctionnelle ». 97

notamment grâce à un accès satisfaisant aux ressources génétiques et à un transfert approprié des techniques pertinentes, compte tenu de tous les droits sur ces ressources et aux techniques, et grâce à un financement adéquat”’.

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43

C - L’agenda 21

L’Agenda 21 constitue en quelque sorte le guide à suivre par l’ensemble de la

Communauté internationale en matière d’environnement et de développement

durable pour le XXIème siècle. C’est un véritable projet de civilisation qui invite à

rechercher les solutions qui permettront de lier solidarité, justice et respect de la

nature.

Appelé également Plan d’Action pour le XXIème siècle, l’Agenda XXI contient près

de 40 thèmes différents et fait plus de 800 pages.

Il est structuré autour de 4 grandes parties :

- dimension économique et sociale

- conservation et gestion des ressources aux fins de développement

- renforcement du rôle des acteurs économiques et sociaux

- moyens de mise en œuvre 98.

Il ne s’agit pas d’un texte juridiquement contraignant mais d’un engagement politique

au plus haut niveau.

Pour autant il n’est pas dénué d’ambiguïté s’agissant notamment de son coût, évalué

à 600 milliards de dollars par an dont 125 devraient provenir de l’aide

internationale99.

Le suivi de l’agenda 21 est assuré par une Commission de développement durable,

qui dépend du Comité économique et social des Nations unies (ECOSOC).Cette

Commission100 (CDD), qui comprend 54 membres, a été créée pour assurer faire le

98

Chaque chapitre thématique de l’Agenda 21 fait l’objet d’une présentation identique comportant 4 parties : - base de l’action, - objectifs à atteindre - activités à engager - moyens de mise en oeuvre, y compris une estimation financière propre à chaque domaine. 99

RAPPORT DE LA CONFERENCE DES NATIONS UNIES SUR L'ENVIRONNEMENT ET LE DEVELOPPEMENT A/CONF.151/26 (Vol. III) 14 août 1992(Rio de Janeiro, 3-14 juin 1992) SECTION IV. MOYENS D'EXECUTION 100

La CDD est une commission technique dont l’objectif de la CDD est également de renforcer les relations entre les gouvernements et les ONG afin de promouvoir le développement durable tout autour du globe.

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44

suivi de la mise en œuvre des accords du Sommet de la Terre tant au niveau local,

national, régional qu'international101.

§ 4 – Le Sommet mondial sur le développement durable (Johannesburg, 26

août - 4 septembre 2002)

Discours Jacques Chirac – Sommet Mondial du développement – Johannesburg –

2 Septembre 2002

Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se

reconstituer et nous refusons de l’admettre. L’humanité souffre. Elle souffre de mal-développement,

au nord comme au sud, et nous sommes indifférents. La terre et l’humanité sont en péril et nous en

sommes tous responsables.

Le sommet de Johannesburg a été l’occasion de faire le point, dix ans après le

sommet de la Terre, sur le développement durable.

Une déclaration politique et un plan de mise en œuvre ainsi que plusieurs

initiatives de partenariat seront donc adoptés lors du sommet de Johannesburg.

Le plan de mise en œuvre contient des objectifs suivants:

réduire de moitié, au plus tard en 2015, les personnes n'ayant pas d'accès à

l'eau potable et aux conditions d'assainissement basiques ;

reconstituer, au plus tard en 2015, les stocks halieutiques épuisés et les

ramener à un niveau soutenable ;

réduire, au plus tard en 2020, les effets négatifs des produits chimiques pour

la santé et l'environnement ;

stopper la perte de diversité biologique avant 2010 et inverser la tendance de

dégradation des ressources naturelles;

mettre en œuvre, à partir de 2005, les stratégies nationales de

développement durable102.

101

Il a été reconnu qu'un examen quinquennal des avancées concernant le Sommet de la Terre aurait lieu en 1997 lors de l'Assemblée Générale des Nations réunie session extraordinaire. En juin 1997, l'Assemblée Générale des Nations Unies a adopté un programme de mise en oeuvre de l'Agenda 21 dont le suivi sera effectué par la CDD ainsi que le plan de travail de la Commission pour 1998 - 2002. 102

D'autres accords atteints lors du sommet visent à: • accroître la part globale des énergies renouvelables et augmenter l'accès des plus pauvres à l'énergie ; • élaborer un cadre décennal de programmes d'appui des modes de production et de consommation durables ; • faire en sorte que le protocole de Kyoto entre en vigueur le plus rapidement possible ;

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45

Des petits pas ont été accomplis à Johannesburg, en particulier sur le plan de la

mobilisation des acteurs. A Rio, les institutions internationales et les représentants

des gouvernements étaient les seuls acteurs alors qu’à Johannesburg, les

associations, la société civile sont devenus des partenaires à part entière.

Des collectivités se sont engagées dans des plans d’action qui prennent en

compte les objectifs économiques mais également l’équilibre social et la préservation

de l’environnement (agenda 21 locaux).

Du côté des entreprises également, le développement durable commence à

infléchir les modes de décisions et les entreprises n’hésitent pas à adhérer aux

objectifs de développement durable, à travers la notion de Responsabilité Sociale

des entreprises. Une Charte des entreprises pour le développement durable,

émanant de la chambre de commerce internationale a été élaborée d’ailleurs dès

1990.

Rapport du Sommet mondial pour le développement durable Johannesburg (Afrique du Sud),,26

août-4 septembre 2002 (A/CONF.199/20**) (http://daccess-dds-

ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/N02/636/94/PDF/N0263694.pdf?OpenElement

§ 5- La dernière conférence de Rio

Quel bilan dresser de Rio + 20 ?

Le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), avait dressé un

rapport "Geo-5" rendu public en juin 2012, à la veille de la conférence Rio+20 sur

l’état de l’environnement mondial qui faisait apparaitre un état des lieux alarmant.

Ainsi, sur les 90 objectifs internationalement reconnus en matière de gestion

durable de l’environnement et de développement humain, le PNUE établit un

état des lieux alarmant :

Seuls 4 objectifs ont enregistré "des progrès significatifs".

- Il s’agit de la disparition des molécules portant atteinte à la couche d’ozone (les

CFC notamment),

- de l’élimination du plomb dans les carburants,

- de l’amélioration de l’accès des populations à une eau potable (bien qu’une

importante marge de progression subsiste) et de la promotion de la recherche en

matière de lutte contre la pollution marine.

• encourager une réforme des subventions ayant des effets négatifs sur l'environnement ; • traiter les causes de la mauvaise santé et fournir des prestations de base accessibles à tous et efficaces.

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46

• 40 objectifs ont enregistré quelques progrès (le rythme de la déforestation a

régressé, les zones protégées se sont étendues, etc.).

• 24 objectifs n’ont pas connu de progrès ou très peu. A titre d’exemple, les

émissions de gaz à effet de serre devraient doubler d’ici 2050 et les ressources

halieutiques continuent de s’amoindrir.

• 8 objectifs ont enregistré une dégradation (qualité des eaux souterraines, protection

des récifs coralliens, etc.).

• Les 14 objectifs restants n’ont pu faire l’objet d’une évaluation, faute de données

disponibles.

De ce constat, le PNUE conclut que, 20 ans après le Sommet de la Terre tenu à Rio

en 1992, « la planète doit réorienter d’urgence son développement. »

A Rio, des thèmes majeurs ont émergé comme le fait de favoriser l’émergence d’une

"économie verte" et de en place une nouvelle gouvernance mondiale de

l’environnement.

Favoriser l’émergence d’une "économie verte"...

Lancé par les Nations unies, le thème d’économie verte traduit l’idée d’une transition

vers de nouveaux modes de production et de consommation.

La réalisation d’une économie verte doit avoir pour objectif, ainsi qu’il a été formulé à

Rio, de « contribuer à l’élimination de la pauvreté et à la croissance économique

durable, d’améliorer l’intégration sociale et le bien-être de l’humanité, et de créer des

possibilités d’emploi et de travail décent pour tous, tout en préservant le bon

fonctionnement des écosystèmes de la planète ».

Voyez aussi OCDE, outils pour la mise en place d’une croissance verte, Mai 2011.

Vers une nouvelle gouvernance mondiale de l’environnement ?

Partant du constat que les difficultés pour faire progresser le domaine

environnemental à l’échelle mondiale résultent pour partie d’une faiblesse

institutionnelle, la France milite, depuis le sommet de Johannesburg de 2002, pour la

création d’une Organisation mondiale de l’environnement (OME).

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47

Il s’agirait de doter les Nations unies d’une institution capable de faciliter la mise en

œuvre des normes internationales adoptées et de renforcer les synergies entre les

différents cadres d’action internationaux, comme la Convention climat qui gère le

Protocole de Kyoto ou les nombreux accords multilatéraux pour l’environnement qui

fonctionnent actuellement indépendamment les uns des autres.

Ainsi constituée, cette nouvelle agence onusienne serait à même de faire jeu égal

avec d’autres organismes comme la Banque mondiale et surtout l’Organisation

mondiale du commerce – (OMC).

A l’issue du Sommet, les représentants des 193 pays réunis ont adopté une

déclaration finale intitulée "L’avenir que nous voulons". Elle s’organise autour des

thèmes mis en avant lors des travaux préparatoires de Rio+20.

http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/declaration_finale_Rio_20_cle0c85b4.pdf

Section 2 – Les objectifs du droit international

Les deux premiers objectifs apparaissent plus traditionnels. Le troisième est plus

novateur.

A - La lutte contre les pollutions transfrontière

Historiquement, le droit international a envisagé la protection de l’environnement

comme un problème de conflit potentiel entre deux souverainetés. La question des

pollutions transfrontière (fonderie du Trail) est donc à l’origine du droit international

de l’environnement.

Mais progressivement, il est devenu évident que ce type de dommage ne constitue

qu’une partie du problème. Le droit de l’environnement doit couvrir aujourd’hui non

seulement l’environnement à l’intérieur des Etats mais aussi les espaces qui ne sont

soumis à aucune compétence territoriale comme la haute mer.

B - La réduction des distorsions de concurrence

Cet objectif s’inscrit dans la volonté d’égaliser les règles nationales à 2 titres : :

- d’une part éviter des attitudes protectionnistes se prévalant de la protection de

l’environnement ;

- et d’autre part lutter contre le “dumping environnemental” favorisant les pays

dépourvus de règles protectrices.

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48

C – Objectifs nouveaux

On peut comparer le droit de l’environnement au droit humanitaire.

Tous deux sont porteurs d’intérêts vitaux et sont nécessaires au maintien des

ordres juridiques fondamentaux dans la société internationale.

Pour autant, le droit humanitaire ne se confond pas avec l’ensemble des droits

de l’homme, dont la matière est beaucoup plus vaste. Le droit humanitaire qui sert

les intérêts vitaux se matérialise par exemple par la condamnation des génocides

perpétrés à l’encontre d’une collectivité de personnes.

Il en est de même pour les intérêts vitaux de l’environnement. Ceux-ci ne se

confondent pas avec l’ensemble du droit de l’environnement.

Plusieurs textes ont été adoptés dont on peut penser qu’ils oeuvrent à de la

protection des intérêts vitaux de l’humanité des générations futures. C’est le cas de :

- la Convention de Vienne du 22 mars 1985, amendée par le protocole de

Montréal sur les matières qui détruisent la couche d’ozone du 16 septembre 1987

(CFC) 103

- la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique du 9

mai 1992, et son protocole de Kyoto

- la convention de Rio sur la diversité biologique du 5 juin 1992.

En fait, la question qui se pose aujourd’hui est celle de savoir si la

reconnaissance de ces intérêts vitaux de l’humanité, ne marque pas les limites du

principe de l’autonomie de la volonté des Etats.

La protection de certains aspects du droit humanitaire et du droit de

l’environnement est indispensable aux intérêts vitaux de l’humanité et elle devrait

être réalisée en dépit des accords ou des désaccords des Etats individuels104.

Pour l’heure, les Etats demeurent souverains et la coordination des intérêts

nationaux reste délicate. Néanmoins, la protection de l’environnement constitue une

103

Ce protocole impose la suppression de l'utilisation des CFC sauf pour des utilisations qualifiées de critiques ou essentielles, de halons, bromure de méthyle et autres substances appauvrissant la couche d'ozone (HCFC), tétrachlorométhane, bromochlorométhane, hydrobromofluorocarbone, méthylchloroforme). 104

Sur cette question, cf. not.P. Yoshio Otani “Essai sur le caractère juridique des normes internationales ...”, p. 45 et M. Kamto “Singularité du droit de l’environnement”, p. 315 in Les hommes et l’environnement, en hommage à A. Kiss, ed. Frison Roche 1998.

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49

illustration emblématique d’une coopération poussée dont les instruments deviennent

de plus en plus nombreux et de plus en plus élaborés.

C’est précisément cette coopération que nous allons maintenant examiner.

Section 3 – Les sources du droit international

On l’a vu, la sauvegarde de l’environnement constitue pour l’humanité une tâche

nouvelle. Le système juridique international doit relever ce défi en élaborant un

ensemble de règles visant à protéger l’environnement.

Il existe différentes sources du droit international.

A – le droit international coutumier

C’est en 1941, à propos d’un différend survenu entre les Etats Unis et le Canada au

sujet de dommages occasionnés par les émissions polluantes d’une fonderie de

métaux non ferreux située le long de la frontière canadienne (Fonderie du Trail),

qu’une sentence arbitrale a jugé :

“ qu’aucun Etat n’a le droit d’utiliser son territoire ou d’en permettre l’utilisation de

manière à causer, par l’émission de fumées, un préjudice au territoire d’un autre Etat,

ou à la propriété ou aux personnes qui s’y trouvent, s’il s’agit de conséquences

sérieuses et si le préjudice est établi par des preuves claires et convaincantes”.

Considéré comme l’expression d’une règle de droit international coutumier, cet

enseignement a été ensuite consacré dans divers textes internationaux de portée

contraignante (dont la convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à

longue distance, signée à Genève, le 13 novembre 1979 et la convention sur les

effets transfrontières des accidents industriels, faite à Helsinki le 17 mars 1992).

La coutume internationale est donc « la preuve d’une pratique générale acceptée

comme étant le droit », selon l’article 38 de la CIJ qui définit les sources du droit

international105.

105

Pour le droit international classique, les sources sont définies par l’article 38 alinéa 1 du Statut de la Cour internationale de justice, rédigé en 1920 et indiquant la provenance des règles que la Cour doit appliquer.

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50

B – Les résolutions

A côté des déclarations de principes, de type Stockholm et Rio, il existe d’autres

déclarations, comme par exemple la Charte mondiale de la nature (1982), ou de

manière plus spécifique la Charte européenne de l’eau Conseil de l’Europe 1968), la

charte européenne des sols (Conseil de l’Europe, 1972) qui n’ont pas de valeur

juridiques contraignantes mais qui contribuent à consacrer certains principes et

certaines règles.

Les résolutions se présentent sous deux formes : les programmes d’action de type

Agenda 21 et des recommandations qui sont adressées par les organisations à leurs

Etats (exemple, recommandation de l’OCDE sur les déchets dangereux)106.

C- Les conventions internationales

Il existe de nombreuses conventions internationales en matière d’environnement.

Certaines sont à vocation universelle, d’autres à vocation régionale. Les premières

sont conclues dans le cadre des Nations Unies (convention sur le climat, sur la

biodiversité), les autres le sont dans un cadre plus régional.

Les conventions peuvent être élaborées, soit dans le cadre d’une organisation

internationale ou régionale, soit d’une conférence interétatique réunie à cet effet

(convention sur le changement climatique adoptée lors de la Conférence des nations

unies sur l’environnement de 1992). Il n’est pas rare que l’accord commence par une

convention cadre qui fait l’objet par la suite de protocoles additionnels.

Les Etats peuvent aussi être amenés à désigner des organes chargés de certaines

fonctions : délivrer des autorisations pour des activités règlementées ou même

prendre des sanctions pénales à l’encontre des contrevenants107.

Contrôle de l’application des traités

En règle générale, en droit international, les parties contractantes à un traité en

surveillent elles-mêmes l’application. La technique généralement suivie est celle des

rapports périodiques inspirée des instruments internationaux de protection des droits

de l’homme.

106

Décision-Recommandation du Conseil sur les exportations de déchets dangereux à partir de la zone de l'OCDE (5 juin 1986 - C(86)64/FINAL). 107

Convention de Washington du 3 mars 1973 sur le commerce international des espèces sauvages de faune et de flore sauvage menacées de disparition, art. 9, art. 8.

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51

Par exemple, la convention cadre sur les changements climatiques de 1992 prévoit

que des rapports seront adressés à la Conférence des parties qui évalue alors

l’application de la Convention par les parties.

Dans les systèmes conventionnels les plus avancés, il peut exister une institution

spécialisée (comité d’application dans le Protocole de Montréal).

En ce qui concerne le règlement des différends, des mécanismes de coopération

peuvent intervenir. Par exemple la Convention de Berne du 19 septembre 1979

relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe prévoit

que le Comité Permanent facilite le règlement amiable des difficultés. En cas

d’échec, l’affaire doit être soumise à l’arbitrage.

Certaines conventions prévoient alternativement le recours à la Cour international de

justice.

C – Les décisions judiciaires

Les décisions judiciaires en droit international de l’environnement ne sont pas très

nombreuses à ce jour.

Le 9 avril 1989, la CIJ sera saisie d’un différend opposant l’Angleterre à l’Albanie

dans l’affaire du Détroit de Corfou et sera amenée à énoncer la règle selon laquelle

« aucun Etat ne peut utiliser son territoire aux fins d’actes contraires aux droits des

autres Etats ». La Cour a admis la mise en jeu de la responsabilité de l’’Albanie car il

lui appartenait de prévenir les navires étrangers de la présence des mines dans ses

eaux territoriales les navires britanniques avaient heurté les mines dans le détroit de

Corfou).

Dans l’affaire des essais nucléaires français (CIJ, 20 dec. 1974) l’Australie et la

Nouvelle Zélande craignant des retombées nocives, demandaient à la France de

renoncer à ses essais nucléaires dans l’atmosphère de la Polynésie française.. La

France envisageant de cesser les expériences, la Cour constata que le différend

avait disparu et donc qu’elle n’avait plus à statuer au fond.

La Cour internationale de Justice a rendu un arrêt le 25 septembre 1997

« Gabcikovo-Nagymaros » dans une affaire opposant la Hongrie à la Slovaquie.

En l’espèce, la Hongrie soulevait des risques écologiques à très long terme pour ne

pas respecter ses obligations concernant la construction de barrages hydrauliques

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52

sur le Danube prévue en vertu d’un traité entre la Hongrie et la Tchécoslovaquie. La

Cour ne lui donne pas raison mais reconnaît néanmoins que ses préoccupation

concernant l’environnement naturel dans la région affectée par le projet ont trait à un

intérêt essentiel de cet Etat.

La Cour internationale de justice a également eu à connaître d’un différend entre

l’Argentine et l’Uruguay qui a donné lieu à un arrêt du 20 avril 2010 108

D – Les principes généraux

On peut dire aujourd’hui que des principes tels que le principe de prévention des

dommages à l’environnement ou le principe de l’évaluation préalable des impacts sur

l’environnement sont devenus des principes généraux du droit de l’environnement

tandis que le principe pollueur lui a plus de difficulté à s’imposer.

Section 4 – Les acteurs du droit international

Les acteurs du droit international sont, on le sait, les Etats.

Quelques fois, ceux-ci peuvent se regrouper autour de problématiques ponctuelles,

comme la protection du Lac Léman (accord entre la France et la Suisse du 16

novembre 1962), du Danube ( convention sur la coopération pour la protection ou

l’utilisation durable du Danube), du lac Constance (accord du 27 octobre 1960 entre

certains landers allemands -Bade Wurtemberg, Bavière-, l’Autriche et la Suisse)

C’est ainsi par exemple que les Etats riverains de la Baltique ont, de leur propre

initiative, conclu le 22 mars 1974 la convention d’Helsinki pour la protection du milieu

marin de la zone de la mer baltique.

Mais c’est incontestablement le phénomène constitué par l’avènement des

organisations intergouvernementales sur la scène du droit international qui mérite

d’être souligné.

§ 1 – Les organisations intergouvernementales

Les organisations intergouvernementales sont des associations d’Etat qui

visent des objectifs communs. Elles supposent un accord permanent (un traité ou

108

CIJ, 20 avril 2010, Argentine c/Uruguay, comm. J. Sohnle, RJE 4/2010, p. 606.

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53

une résolution de l’assemblée générale des Nations Unies), des structures

décisionnelles régulières, un budget, une administration et un siège social.

Les OIG peuvent être universelles ou régionales. En principe, tout Etat peut

être membre d’une OIG109.

Les organisations intergouvernementales dans le domaine de l’environnement

sont aujourd’hui très nombreuses.

La multiplication des organisations intergouvernementales a considérablement

augmenté le nombre et la diversité des sources du droit international, qu’il s’agisse

de textes non obligatoires qui deviennent une véritable source de droit international

(recommandations-directives110, programmes d’action 111) ou de traités.

1- L’ONU L’organisation des Nations Unies

Au niveau mondial, l’ONU et ses institutions spécialisées jouent tout

naturellement un rôle central.

C’est par exemple l’assemblée générale de l’ONU qui a réuni la conférence de

Stokholm de 1972, la conférence de Rio de 1992 et le sommet de Johannesburg.

Sur recommandation de la conférence des Nations Unies, l’Assemblée

générale a créé, en 1972, un organe subsidiaire doté d’un conseil d’administration et

d’un secrétariat : le PNUE (programme des Nations Unies pour l’environnement).

Celui a son siège à Nairobi.

On citera, au nombre des réalisations du PNUE :

109

En 2003, on comptait 34 organisations universelles, toutes faisant partie du système onusien et 71 organisations régionales. Le système des Nations Unies comprend l’Organisation des Nations Unies proprement dite et les OIG qui lui sont directement affiliées. Ces dernières ont été créées soit par traité, indépendamment de l’ONU, avant ou après celle-ci (FAO, OMI, OMM, OMS), soit par simple résolution de l’Assemblée générale ((PNUD, PNUE, CDD, ONUDI). 110

Les recommandations-directives sont la forme la plus courante des actes par lesquels les organisations internationales s’adressent à leurs Etats membres. Elles ont en fait des directives adressées aux Etats membres pour leur indiquer la façon dont ils doivent accomplir les engagements pris en adhérant à l’organisation en cause. 111

Les programmes d’action sont au contraire des textes qui peuvent avoir comme destinataire l’organisation elle-même, soit s’adresser à la Communauté des Etats. Tel est le cas de l’Agenda 21 ou du plan d’application de Johannesburg de 2002.

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54

- la convention de Washington sur le commerce international des espèces

sauvages menacées d’extinction, signée le 3 mars 1973 112

-la convention sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets

dangereux et de leur élimination, signée à Bâle le 22 mars 1989 ;

2 - La Commisson économique pour l’Europe de l’Organisation des Nations

Unies

Emanation, depuis 1947, du Conseil économique et social des Nations Unies,

chargée à l’origine de la reconstruction de l’économie européenne dévastée par la

deuxième Guerre mondiale, la Commission économique pour l’Europe associe

actuellement 55 Etats (dont tous les Etats d’Europe, d’Asie Centrale et de

Transcaucasie, le Canada, les Etats Unies et Israel et la Suisse) est à l’origine de

nombreux instruments internationaux de droit de l’environnement 113, dont :

- la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus

décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, signée à Aahrus

(Danemark) le 25 juin 1998.

3 - L'UNESCO

Organisation des Nations unies pour l’Education, la science et la culture l’UNESCO

s’occupait d’environnement pendant une certaine période (avant le PNUE).

L’UNESCO continue à s’intéresser aux relations entre les populations déhéritées et

l’environnement et aux questions spécifiques qui en résultent, notamment le

surpâturage et le déboisement, à travers son programme MAB (man and

biosphere).(voyez Danilo COmba, le régime légal des réserves MAB en France, RJE

3/2011, p. 297)

L’UNESCO est à l’orgine de deux instruments remarquables

112

Voyez M.L. Lambert-Habib, Le commerce des espèces sauvages : entre droit international et gestion locale, L’harmattan, 2000, 604 p. 113

- la convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, signée à Genève le 13 novembre 1979 - la convention sur les effets transfrontières des accidents industriels et la convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux, faites à Helsinki le 17 mars 1992;

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55

- Convention de RAMSAR (2 févr. 1971) relative aux zones humides d'importance

internationale (ex. la Camargue, le Djoudj au Sénégal).

- Convention de PARIS (16 nov. 1972) concernant la protection du patrimoine

mondial, culturel et naturel

4 - L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA)

Dépendant organiquement de l’ONU, l’agence a été créée en 1957 et son siège est à

Vienne. Aux termes de l’article 2 de son statut, sa première mission est de “hâter et

d’accroître la contribution de l’énergie atomique à la paix , la santé et la prospérité

dans le monde entier”, par une mission de formation et d’assistance d’experts.

Elle dispose d’un pouvoir réglementaire pour adopter des normes de protection

contre les radiations ionisantes, y compris la gestion des déchets radioactfs.

L’accident de Tchernobyl a amené l’agence à soumettre deux conventions à la

signature de ses membres : la convention sur la notification rapide d’un accident

nucléaire et sur l’assistance en cas d’accident nucléaire, qui datent de septembre

1986.

L’agence est aussi à l’origine d’un code de bonne pratiques sur les mouvements

transfrontaliers de déchets radioactifs, adptée le 27 juin 1990 et d’une convention sur

la sureté nucléaire, signée à Vienne en septembre 1994.

5 - La F.A.O. (L’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et

l’agriculture).

Le but premier de la FAO est d’assurer la survie alimentaire d’une population en

constante augmentation. Elle doit pour se faire opérer une conciliation entre la

gestion des ressources alimentaires et l’amélioration du milieu, en promouvant

notamment les choix en faveur de la polyculture de subsistance au détriment de la

monoculture d’exportation. La FAO établit de nombreux rapports et études.

La FAO est à l’origine de certains textes pouvant avoir des répercussions positives

pour l’environnement, telles que la première résolution sur les manipulations

génétiques en agriculure (1983), un code international pour l’utilisation des pesticides

(1985) ou encore un accord réglementant la pêche en haute mer (1993) qui établit un

fichier international des chalutiers.

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56

6 - l’Organisation maritime internationale (O.M.I.) et l’Organisation

météorologique mondiale (O.M.M.)

Ces deux organisations méritent d’être citées, la première pour avoir pris l’initiative

d’élaborer les pricipales conventions concernant la lutte contre la pollution du milieu

marin, la seconde parce qu’elle est particulièrement bien outillée pour l’observation

de phénomènes pouvant avoir des conséquences importantes pour l’environnement,

tel le réchauffement de l’atmosphère lié à l’effet de serre, ou la détérioration de

l’ozone atmosphérique,

7 - L'O.C.D.E. (Organisation de coopération et de développement

économique).

L’OCDE, qui compte 30 membres est souvent qualifié de “club des pays riches” (elle

regroupe la plupart des pays européens, ainsi que le Canada, les USA et le japon).

Réalisant des prévisions économiques à long terme, cette organisation se devait de

prendre en compte les effets de la dégradation de l’environnement et le coût de sa

protection. Dès 1970, un comité de l’environnement est institué en son sein.

C’est dans une recommandation de cette organisation, en date du 14 novembre

1974, que l’on trouve la première définition juridique de la pollution. Les travaux de

l’OCDE sont incontestablement à l’origine du principe pollueur-payeur.

Son rôle est important dans la lutte contre la pollution atmosphérique et de l’eau, sur

les polllutions transfrontières et les mouvements de déchets dangereux.

L’OCDE vient de publier un rapport « perspectives de l'environnement de l'OCDE à

l'horizon 2050 : Les conséquences de l'inaction »(2012).

http://www.oecd.org/fr/environnement/perspectivesdelenvironnementdelocdealhorizo

n2050lesconsequencesdelinaction.htm

L’OMC est née le 1er janvier 1995 mais le système commercial qu’elle représente a

presque un demi siècle.

Succédant à l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de

1947 qui n’était pas doté d’une structure permanente, l’OMC comprend aujourd’hui

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57

un organe de règlement des différents auprès duquel les pays qui s’estiment lésés

peuvent porter plainte. Sur 378 affaires (fin 2008), 11 seulement concernaient

l’environnement.

Au sein de l’Organisation, il existe divers accords, mais l’accord sur les mesures

sanitaires et phytosanitaires de 1994, dit accord SPS, intéresse particulièrment

l’environnement.

Cet accord présente les règles découlant de l’article XX b) du GATT de 1994 se

rapportant aux « mesures nécessaires à la protection de la vie et de la santé des

personnes et des animaux et à la préservation des végétaux » qu’un membre peut

prendre au titre d’une exception générale à ses engagements en faveur d’un

commerce ouvert.

En bref, ce sont des règles qui concernent l’inocuité des produits alimentaire et des

normes sanitaires pour les animaux et les végétaux.

Voyez not. Droit de l’OMC et protection de l’environnement, Sous la direction de S.

Maljéans Dubois, travaux du CERIC, Bruyant 2003.

9 - Le Conseil de l'Europe114

Le Conseil de l’europe s’est intéressé depuis le début des années 60 à la

problématique de l'environnement. Au nombre de ses travaux, on citera115 :

- la charte de l'eau (1968)

- la charte des sols (1972),

- la convention de Berne du 19 septembre 1979 relative à la conservation de la

vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe

Plus récemment, trois conventions sont apparues :

- la convention de Lugano (21 juin 1993) sur la responsabilité civile des

dommages résultant d'activités dangereuses pour l'environnement. 114

Créé le 5 mai 1949, le Conseil de l’Europe est doté de compétences matérielles très étendues et concerne un territoire plus vaste que l’Union européenne. Outre les 23 membres fondateurs + les pays de l'Est, soit actuellement 47 membres dont la Russie et Monaco). Cinq Etats ont e statut d’observateurs : le Saint Siège, USA, Canado, Japon et Mexique.

115 On peut ajouter - la déclaration de principes sur la lutte contre la pollution de l'air (1968)

- la déclaration européenne en matière de conservation de la nature (1970) - la déclaration sur l'aménagement de l'environnement naturel en Europe (1970),

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58

- et la convention sur la protection de l’environnement par le droit pénal, qui

date du 4 novembre 1998.

- La Convention de Florence relative à la portection des paysages, entrée en

vigueur le 1er mars 2004

§ 2 – Les Organisations non gouvernementales

Il s’agit d’associations, de groupements sans but lucratif, créés par des particuliers

qui expriment une solidarité transnationale. Au point de vue juridique, les ONG ne

bénéficient pas de la personnalité juridique internationale. Une ONG relève donc du

droit national où se trouve son siège. Elles sont considérées comme des

associations de droit interne.

Parmi les ONG les plus connues, on peut citer l’Union Internationale pour la

Conservation de la Nature (UICN), le Fond mondial pour la nature (WWF pour world

wildlife fund) ou encore Greenpeace.

Certaines entretiennent des relations étroites avec certaines conventions. Par

exemple, l’IUCN avec la Convention Ramsar sur les zones humides.

De manière générale, le chapitre 27 de l’agenda 21 relatif au « renforcement du rôle

des ONG » montre aussi l’importance de la société civile internationale.

Chapitre 2 – Les sources de l’Union européenne

Il convient d’examiner de manière spécifique les compétences de l’Union

européenne dans le domaine de l’environnement.

Section 1 – Les fondements de la politique environnementale de l’UE

Voyons l’évolution de la prise en compte de l’environnement depuis les origines

jusqu’à Lisbonne.

1- Le Traité de Rome (25 mars 1957)

En 1957, l'environnement n'était pas d'actualité. Mais trois dispositions ont pu être

utilisées :

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59

o L'ancien article 100 relatif au rapprochement des législations des Etats

membres en vue du bon fonctionnement du marché commun116

o L'ancien article 235117 qui permettait d’agir pour le bon fonctionnement

du marché commun sans que le traité ait prévu pour autant des

pouvoirs d'action à cet effet.

C’est sur ces fondements que les instances européennes ont agi de manière

diversifiée. Parmi les réalisations marquantes, on trouve l’adoption :

¤ Du premier programme d'actions en matière d'environnement (22 novembre 1973),

programme renouvelé en 77, 83, 87, 92, 2002 (VIe programme).

¤ L’adoption de directives telles que la directive cadre de 1975 sur les déchets, la

directive de 1976 sur la qualité des eaux de baignade118, une directive de 1979 sur la

pollution des eaux souterraines119, etc.

La jurisprudence dégage les raisons de l’intervention communautaire :

(C.J.C.E., 18 mars 1980, Commission c. Italie, aff. 91/79 et 92/79).

La Cour de justice dégage l’idée selon laquelle "La protection de l'environnement est

un des objectifs essentiels de la Communauté" qui justifie des restrictions aux

principes fondamentaux du droit communautaire120.

2 - L'Acte unique européen

Adopté le 7 aout 1986 et entré en vigueur le 1er juillet 1987, l'Acte unique

européen fait de l'environnement une compétence formelle des autorités

européennes.

116

Le Conseil adopte à l'unanimité sur proposition de la Commission toute directive de rapprochement des législations nationales dont les divergences sont sources d'entraves techniques aux échanges et de distorsions de concurrence. 117

"Si une action de la Communauté apparaît nécessaire pour réaliser, dans le bon fonctionnement du marché commun, l'un des objets de la Communauté, sans que le présent traité ait prévu les pouvoirs d'action requis à cet effet, le Conseil statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission et après consultation de l'Assemblée peut prendre les dispositions appropriées." 118

Directive 76/160/CEE du Conseil, du 8 décembre 1975, concernant la qualité des eaux de baignade 119

Directive n° 80/68/CEE du 17 décembre 1979 concernant la protection des eaux souterraines contre la pollution causée par certaines substances dangereuses 120

C.J.C.E., 7 févr. 1985, Association de Défense de Brûleurs d'Huiles Usagées, aff. 240/83.

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60

L’Acte Unique européen confirme en effet la compétence de la communauté à un

triple titre :

- en tant qu’action communautaire autonome ; (Art. 130 R, S, T)

- en tant que composante obligée des autres politiques (art. 130 R, S, T)

- enfin, en tant que composante du marché intérieur. (Art. 100 A)

Cela impliquait que les questions de l’environnement soient aussi traitées dans le

cadre de règles relatives à l’établissement et au fonctionnement du marché commun.

En outre, la Commission, dans ses propositions sur ce fondement a l’obligation de

prendre pour base un niveau de protection élevé : 121

3 - Le Traité sur l'Union européenne

Adopté à Maastricht le 7 février 1992 et entré en vigueur le 1er novembre 1993,

le Traité sur l’Union européenne constitue une nouvelle étape dans le renforcement

des préoccupations relatives à la protection de l’environnement.

En vertu de l’article 2 du traité, la Communauté s’engage à « Promouvoir un

développement harmonieux et équilibré des activités économiques sur l'ensemble de

son territoire ainsi qu'une croissance durable et non inflationniste respectant

l'environnement ».

L’art. 3 du traité qui définit les actions de la Communauté, fait désormais

expressément référence à “une politique dans le domaine de l’environnement (art. 3,

k).

Pour ce qui est du degré de protection, on notera que, désormais, la politique de

l’environnement de la Communauté de l’art. 130 doit, elle aussi, viser un niveau de

protection élevé, ce qui n’était auparavant le cas que pour les propositions basées

sur l’article 100 A. Toutefois, cette nouvelle exigence est néanmoins tempérée par la

prise en compte de la “diversité des situations dans les différentes régions de la

Communauté »..

121

« La Commission, dans ses propositions en matière de santé, de sécurité, de protection de l’environnement et de protection des consommateurs prend pour base un niveau de protection élevé ».

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61

4 - Le Traité d’Amsterdam

Le Traité d’Amsterdam, adopté le 2 octobre 1997 et entré en vigueur le 1er

mai 1999, n’apporte que peu de modifications aux dispositions relatives à

l’environnement. Néanmoins, le Traité confirme très nettement la place qu’entendent

donner les Etats membres aux préoccupations environnementales122.

C’est ainsi qu’est inscrit, à l’article 2, parmi les missions de la Communauté, la

promotion d’‘un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de

l’environnement”.

De même, un des principes généraux de l’article 130 R fait dorénavant l’objet

d’un article spécifique placé dans les principes de base de l’Union européenne :

l’article 6 nouveau prône le principe d’intégration de l’environnement dans les autres

politiques123

Il faut aussi tenir compte, depuis l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam,

de la nouvelle numérotation du Traité instituant la Communauté européenne. Les

articles 130R et 130S deviennent respectivement les articles 174 et 175 tandis que

l’article 100A devient l’article 95. On sait que depuis le 1er décembre 2009, c’est

encore une autre numérotation qui est en vigueur.

5 - Le Traité de Nice

Ce Traité, adopté lors du sommet de Nice en décembre 2000 et signé le 26

février 2001, n’apporte pas de modifications majeures en ce qui concerne

l’environnement (encore que le changement procédural de l’article 175 n’est pas

sans conséquence).

Il faut toutefois noter la proclamation de la Charte des droits fondamentaux de

l’Union européenne (7 décembre 2000) qui précise, en son article 37, que :

“Un niveau élevé de protection de l’environnement et l’amélioration de sa

qualité doivent être intégrés dans les politiques de l’Union et assurés

conformément au principe de développement durable” .

122

Ph. RENAUDIERE, L’environnement dans le Traité d’Amsterdam, Amén.-Env., 1998, pp. 191 et s.

123 “Les exigences de la protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la

mise en œuvre des politiques et actions de la Communauté visées à l’article 3, en particulier afin de promouvoir le développement durable”.

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62

Il s’agit d’un libellé constituant un “mixte” des articles 2, 6 et 174 du Traité. La

Charte a aujourd’hui la même valeur que les Traités eux-mêmes.

6 - Le Traité de Lisbonne

Entré en vigueur le 1er décembre 2009, il ne modifie pas fondamentalement

les compétences qui nous intéressent, mais il modifie la numérotation des articles

puisque, dorénavant, ce sont les articles 191 à 193 qui règlent la compétence en

environnement.

Le droit dérivé européen (les règlements, les directives, …) est, pour l’essentiel,

tantôt pris sur la base de la compétence environnementale (art. 192), tantôt en tant

que mesure de rapprochement des législations des Etats membres (art. 114) bien

qu’il existe d’autres fondements possibles comme politique agricole par exemple124.

Le traité sur l’Union européenne fait référence à l’environnement à l’article 3 .

L’Union oeuvre pour le développement durable de l’Europe fondé sur une

124

ll existe plusieurs fondements possibles pour une intervention de la Communauté européenne dans le domaine de l’environnement :

- Les dispositions spécifiques relatives à l'environnement : les articles 191, 192 et 193 (anciens 174 à 176)

- La disposition permettant le rapprochement des législations des Etats membres qui ont pour objet le fonctionnement du marché intérieur: l'article 114 (ancien 95)

- L’article 352 (compétence subsidiaire) (ancien 308 lui-même ancien article 235) qui a servi à l’époque de fondement à la directive 79/409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. D'autres dispositions peuvent également fonder directement des actions en faveur de

l’environnement. C’est le cas, par exemple de la politique agricole (art. 43, ancien art. 37) qui fonde les

mesures agro-environnementales. D'autres dispositions du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne peuvent jouer un

rôle indirect important : c’est le cas notamment des limitations à l’importation, l’exportation ou le transit de marchandises pour des raisons tenant notamment à la protection de la santé et de la vie des personnes, des animaux ou de la préservation des végétaux, (article 36 - ancien 30) ou encore la politique commerciale commune (art. 207, ancien art. 133).

Il existe des contestations régulières sur le fondement d’une mesure législative relative à l’environnement (Effectivement, c’est ainsi, par exemple, la Commission a reproché au Parlement européen et au Conseil d’avoir fondé le Règlement (CE) n° 1013/2006 concernant les transferts des déchets uniquement sur l’ancien article 175 (192) et non sur le double fondement des anciens articles 133 (actuel 207) et 175 (actuel 192) (CJCE, 8 septembre 2009, C-411/06, Commission c. Parlement et Conseil qui rejette le recours). Dans une autre affaire, la Commission reprochait au Conseil de n’avoir indiqué aucun fondement à la décision du Conseil sur la position à adopter au nom de la Communauté européenne à la 14

ème session de la Conférence des Parties à la Convention CITES

(CJCE, 1er

octobre 2009, C-370/07, Commission c. Conseil).

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63

croissance économique équilibrée, une économie sociale de marché hautement

compétitive (…) et un niveau élevé de protection et d’amélioration de

l’environnement.

Le principe d’intégration lui figure à l’article 11 du TFUE : « Les exigences de la

protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en

œuvre des politiques et actions de l’Union, en particulier afin de promouvoir le

développement durable”.

a) Le contenu de la compétence environnementale

L'article 191, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union

européenne énumère les objectifs à poursuivre dans le cadre de la politique de

l'Union européenne dans le domaine de l'environnement.

- la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de

l’environnement ».

-la protection de la santé des personnes.

Il existe des directives (ou des actions à entreprendre) qui sont à la limite

entre la protection de l'environnement et celle des consommateurs ou de la santé

publique.

- l'utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles.

-Le quatrième objectif mentionné par l'article 191, est "la promotion sur le plan

international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou

planétaires de l'environnement". Le Traité de Lisbonne y a ajouté « « et en

particulier la lutte contre le changement climatique ».

L'Union européenne a la compétence pour agir au niveau international. L’article 191,

§ 4, mentionne d’ailleurs spécifiquement la coopération de l’Union et des Etats

membres avec les pays tiers et les organisations internationales.

L'Union européenne montre souvent l'exemple en étant co-signataire de conventions

internationales (ex. Bâle (déchets), Lugano (responsabilité environnementale),

Espoo (information en environnement), Aarhus (information, participation, accès à la

justice).

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64

b) Les critères et les conséquences du choix du fondement

* La compétence environnementale (art. 192) est surtout utilisée pour les dispositions

environnementales destinées aux installations industrielles et/ou lorsque les objectifs

des mesures doivent servir à titre principal la protection de l'environnement.

* Le rapprochement des législations pour l’établissement et le fonctionnement du

marché intérieur (art. 114) sert de fondement aux dispositions environnementales

relatives aux produits et lorsque les considérations économiques sont à l'avant-plan

(élimination des distorsions de la concurrence dans le marché intérieur).

Le règlement n° 1907/2006 du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement,

l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions

applicables à ces substances (REACH), a été adopté sur le fondement de l’article 95

devenu 114 (le marché intérieur)

Il est important de souligner que le choix du fondement n’est pas libre. Ainsi, le

fondement juridique peut aussi être un motif de contestation quant au partage des

compétences au sein même des instances européennes125.

Cela s’explique, comme nous allons le voir ci-après, par le fait que le fondement

n’est pas sans conséquences.

c. Conséquences du choix du fondement

Il existe deux conséquences au choix du fondement :

- des conséquences sur la marge de manœuvre des Etats membres et

- des conséquences dans le processus décisionnel.

Conséquences sur la marge de manœuvre des Etats membres

Les mesures adoptées sur la base de la politique environnementale

proprement dite (article 192) constituent des normes minimales. Cela signifie que les

125

Ceci fut illustré en son temps par la compétence exercée par le Conseil par l’adoption de sa décision-cadre 2005/667/JAI visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de la pollution causée par les navires, décision annulée par la Cour de justice (CJCE, 23 octobre 2007, C-440/05, Commission c. Conseil.)

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65

Etats membres peuvent adopter des normes nationales plus sévères ( Par exemple

l’interdiction d’implanter des éoliennes dans les zones Natura 2000126).

En revanche, les mesures adoptées sur la base du rapprochement des législations

(art. 114) sont des normes maximales (rapprochement des marchés ; élimination des

distorsions de la concurrence). Cela implique que les Etats ne peuvent en principe

adopter des normes internes plus sévères.

Ils peuvent néanmoins maintenir des normes plus sévères préexistantes pour autant

qu’ils notifient à la Commission les raisons de leur maintien (art. 114, § 4). Il

appartient à la Commission de décider d’autoriser ou non un Etat à maintenir des

dispositions nationales dérogeant à une mesure d’harmonisation (art. 114, § 6).

Mais un Etat peut aussi estimer nécessaire d’introduire des dispositions nationales

nouvelles qui contreviennent aux mesures d’harmonisation. Celles-ci doivent être

basées sur des preuves scientifiques nouvelles relatives notamment à la protection

de l’environnement en raison d’un problème spécifique de cet Etat membre qui surgit

après l’adoption de la mesure d’harmonisation.

L’Etat notifie à la Commission les mesures envisagées ainsi que les raisons de leur

adoption (art. 114, § 5). De nouveau, il appartient à la Commission d’autoriser ou non

l’Etat à adopter de telles mesures (§ 6).

La Cour de justice a rendu quelques arrêts intéressants dans ce contexte car l’Etat

membre peut toujours contester la position de la Commission127 .

Si la Commission autorise un Etat à maintenir ou à adopter des dispositions

dérogatoires, elle examine immédiatement s’il est opportun de proposer une

adaptation de la mesure d’harmonisation à laquelle il est dérogé (§ 7).

126

voyez CJUE, 21 juillet 2011, C-2/10, Azienda Agro-Zootecnica Franchini Sarl et Eolica di Altamura Srl c. la Région des Pouilles Obs. F. Haumont et P. Steichen).Etudes foncières, novembre-décembre 2011, n° 154, p. 58. Il s’agissait d’interdire les éoliennes –non destinées à l’autoconsommation- dans les zones Natura 2000. 127

La Cour annule la décision de la Commission refusant aux Pays-Bas le droit d’adopter une norme nationale plus sévère en ce qui concerne les limites d’émission de particules par des véhicules à moteur diesel (TPI, 27 juin 2007, Pays-Bas/Commission (T-182/06, Rec. p. II-1983) infirmé par CJCE, 6 novembre 2008, C-405/07, Pays-Bas c. Commission),

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66

d. Conséquences au niveau de la procédure d'adoption

Avant l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, le fondement juridique128

avait des conséquences importantes sur la procédure d’adoption car la procédure

d‘adoption n’était pas la même129.

Aujourd’hui, à quelques exceptions près, la procédure est désormais celle de

la co-décision tant pour le rapprochement des législations (art. 114) que pour la

politique environnementale (art. 192).

Pour les politiques environnementales, on notera tout de même l’obligation pour le

Conseil, dans certains cas particuliers, de statuer à l’unanimité. Ces cas sont

énumérés à l’article 192, § 2. Depuis le traité de Lisbonne, il est possible, dans

certaines conditions, de revenir à la procédure ordinaire pour ces domaines de

compétence (art 192, § 2, dernier alinéa).

Section 2 - Le droit dérivé

§ 1 – Les outils non contraignants

Il s’agit essentiellement des programmes d’action et des stratégies de

développement durable.

A – Les programmes d’action

Les programmes d’action déterminent les grandes orientations communautaires en

matière d’environnement. Par ces programmes, les institutions font part de leur

volonté d’atteindre des objectifs précis. Ils n’ont aucune force contraignante.

Le premier programme a été élaboré en 1976. Il convient d’examiner brièvement les

derniers programmes.

Le 5ème programme d’action a couvert la période de 1992 à

2000.

128

anciens articles 100A ou 130S 129

En effet, le fondement de l’article 100 A ancien impliquait une co-décision du Parlement et du Conseil (à la majorité qualifiée de ce dernier) tandis que le fondement de l’article 130S ancien (actuel 192) supposait une décision prise par le Conseil selon la procédure de coopération.

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67

L’objectif du 5ème programme d’action était de transformer le modèle de croissance

de la Communauté de façon à promouvoir un développement durable.

Le 6ème programme d’action intitulé “Environnement 2010 : notre

avenir notre choix » couvrait la période du 1er janvier 2001 au 31

décembre 2012.

Ce 6ème programme d’action a remplacé l’approche strictement législative par une

approche stratégique articulée autour de 5 axes prioritaires :

1- l’amélioration de la mise en oeuvre de la législation en vigueur130.

2- l’intégration de l’environnement dans d’autres politiques

3 - La collaboration avec le marché

4 - L’implication et la modification des comportements des citoyens

5 - La prise en compte de l’environnement dans les décisions relatives la gestion et à

l’aménagement du territoire

130

. préparation des comptes rendus de la mise en oeuvre du droit environnemental . la portée à connaissance des résultats de cette mise en oeuvre . l’amélioration des normes d’inspection environnementale . la lutte contre la criminalité environnementale . assurer la mise en oeuvre du droit en recourant à des actions auprès de la Cour européenne. En bref : connaître et faire connaître et permettre les actions en justice.

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68

Le sixième programme d’action s’est concentré sur certains domaines d’action

prioritaires . Parmi eux figure le changement climatique, la diversité biologique,

l’environnement et la santé, l’utilisation durable des ressources naturelles et la

gestion des déchets.

La proposition de la Commission pour le 7eme programme d’action de l’UE intitulé

« Bien vivre dans les limites de notre planète » a été publiée le 29 novembre

2012131

Il vise à :

- constituer un cadre global pour la politique environnementale pour les dix

prochaines années avec une vision à long terme.

- contenir des objectifs chiffrés pour tous les secteurs de l’environnement

- établir des liens clairs avec les autres stratégies européennes telles que le paquet

climat /énergie de l’Union132 par exemple.

Les objectifs du 7ème programme d’action sont les suivants :

1°) Protéger et améliorer le capital naturel de l’Union.

Il s’agit ici de protéger les écosystèmes fournissant des biens et des services

essentiels, en lien notamment avec la stratégie de l’UE en matière de biodiversité à

l’horizon 2020 du 8 sept. 2011133.

2°) Promouvoir une économie verte, compétitive, à faible émission de

carbone

Il s’agit de renforcer l’économie européenne dans le cadre de la stratégie Europe

2020134. Les grands axes de la stratégie sont la promotion des industries sobres en

carbone, l'investissement dans le développement de nouveaux produits, l'exploitation

des possibilités de l'économie numérique et la modernisation de l'éducation et de la

formation135.

131

(COM 2012/710 final). 132

Règlement n° 443/2009, directive 2009/28 et directive 2009/31, décision 406/2009 133

COM(2011) 244 du 8 septembre 2011 Stratégie de l’Union en faveur de la biodiversité à l’horizon 2020. 134

COM (2010) 2020 135

L'Union a également fixé 5 objectifs liés entre eux pour guider et orienter les progrès : ■remonter le taux d'emploi à au moins 75 % contre 69 % aujourd'hui ; ■consacrer 3 % du produit intérieur brut à la recherche et au développement, au lieu des 2 % actuels, qui laissent l'Union loin derrière les Etats-Unis et le Japon ;

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69

De même, la feuille de route vers une économie à faible intensité de carbone à

l’horizon 2050136, et la feuille de route pour une Europe efficace dans l’utilisation des

ressources137 sont des composantes essentielles de cette initiative.

3°) Protéger les citoyens de l’Union contre les pressions et les risques pour la

santé et le bien-être liés à l’environnement

L’eau, la pollution de l’air et les produits chimiques demeurent l’une des principales

préoccupations environnementale du public dans l’UE. D’après l’OCDE, la pollution

atmosphérique est appelée à devenir la première cause de mortalité d’ici 2050138.

4°) Tirer le meilleur profit de la législation de l’Union dans le domaine de

l’environnement

La Commission observe que les coûts liés à l’absence de mise en œuvre de la

législation sont élevés, de l’ordre de 50 milliards par an incluant notamment les frais

relatifs aux procédures d’infractions.

L’idée est donc de renforcer le respect de la législation environnementale par des

procédures de diffusion de l’information et de contrôle notamment.

5°) Améliorer la base de connaissance étayant la politique de l’environnement.

Il convient d’améliorer l’interface entre science et politique, de renforcer la collecte de

l’information et le partage aussi de l’information. Cela intègre des initiatives

telles« une Union de l’innovation »139.

6°) Garantir la réalisation d’investissements à l’appui dans les politiques

environnementales et de lutte contre le changement climatique

Il faut notamment encourager les entreprises et spécialement les PME à investir

dans l’économie verte.

7°) Améliorer l’intégration de la dimension environnementale et la cohérence

des politiques ■réaffirmer les objectifs de l'Union européenne en matière de lutte contre le changement climatique (dits "20/20/20"), qui sont déjà parmi les plus ambitieux du monde ; ■proposer de réduire le taux de pauvreté de 25 %, ce qui reviendrait à faire sortir 20 millions de personnes de la pauvreté ; ■améliorer les niveaux d'éducation en réduisant le taux d'abandon scolaire à 10 % et en portant à 40 % la proportion des personnes de 30 à 34 ans ayant obtenu un diplôme de l'enseignement supérieur ou atteint un niveau d'études équivalent. 136

COM(2011) 112 du 11 mai 2011 137

COM(2011) 571 138

OCDE Perspectives de l’OCDE à l’horizon 2050 139

COM(2010) 546

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70

8°) Renforcer le caractère durable des villes de l’UE

B - La stratégie du développement durable

A côté des programmes d’action, l'Union européenne a établi une stratégie de

développement durable afin d'améliorer à long terme le bien-être et les conditions de

vie des générations présentes et à venir.

Le développement durable conduit à envisager la croissance autrement, en ne

négligeant pas non plus la dimension sociale. Cela signifie qu’il ne faut pas léguer

un tissu social déchiré sous l’effet de politiques économiques qui auraient accentué

les inégalités.

C’est en 2001 que le Conseil européen réuni à Göteborg a adopté la première

stratégie de l'UE en faveur du développement durable (SDD)140.

Le 26 juin 2006, le Conseil européen141 a adopté une nouvelle SDD en s'appuyant

- d’une part sur la stratégie adoptée en 2001

- et, d’autre part, sur une Communication de la Commission «sur l'examen de

la stratégie en faveur du développement durable: une plate-forme d'action»

du 13 décembre 2005142.

140 Communication de la Commission, du 15 mai 2001, développement durable en Europe pour un

monde meilleur: stratégie de l'Union européenne en faveur du développement durable (Proposition de la Commission en vue du Conseil européen de Göteborg) [COM(2001) 264 - Non publié au Journal officiel].

Communication de la Commission, du 13 décembre 2005, sur la révision de la stratégie pour le développement durable - Une plate-forme pour l'action [COM(2005) 658 - Non publiée au Journal officiel].

141 (Stratégie de l'UE : DOC 10117/06)

142 Communication de la Commission, du 9 février 2005, intitulée « Examen de la stratégie de l'Union

européenne en faveur du développement durable pour 2005 : premier bilan et orientations futures » [COM(2005) 37 - Non publiée au Journal officiel].

La Commission dresse le bilan des progrès accomplis depuis 2001, même s'il n'y a pas de résultats à escompter dans l'immédiat. Elle affirme cependant que les efforts doivent être poursuivis, que ce soit au niveau de l'élaboration des politiques ou au niveau de la lutte contre les six tendances non durables identifiées par la stratégie. La Commission présente également les orientations futures qui devraient guider la révision de la stratégie :

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71

Le document définit la manière dont l'UE entend relever les défis du développement

durable. L'objectif général de la nouvelle SDD est notamment d'améliorer la qualité

de la vie des générations présentes et futures, de gérer les ressources de manière

efficace et de renforcer le potentiel d’innovation écologique et sociale143 .

§ 2 – Les actes juridiques contraignants

Il y a deux types d’actes juridiques pour la mise en œuvre du droit de l’UE, le

règlement et la directive.

Le règlement est directement applicable dans l’ordre juridique interne, c’est ce qui le

distingue de la directive. En matière environnementale, ce n’est pas l’instrument

privilégié.

On peut citer néanmoins le règlement 1221/2009 du 25 novembre 2009 concernant

la participation volontaire des organisations à un système communautaire de

management environnemental et d’audit (EMAS) ou encore le règlement 1013/2006

du 14 juin 2006 concernant les transferts de déchets.

On peut encore citer l’existence du règlement REACH qui renforce, depuis le 1er juin

2007, le cadre règlementaire de l’Union sur les produits chimiques144.

Toutefois, incontestablement, la directive est l’acte législatif privilégié dans l’action de

l’Union européenne. C’est elle aussi qui est à l’origine d’un contentieux important

réaffirmer les principes de base de la stratégie (stratégie basée sur trois piliers, action à la fois

interne et externe à l'UE) ;

réaffirmer la nouvelle approche en matière d'élaboration et de cohérence des politiques (évaluation d'impact, consultation des parties prenantes, simplification de la réglementation, instruments basés sur le marché) ;

poursuivre l'action sur les principales tendances non durables (évaluation de ces tendances et de leurs liens) ;

fixer de nouveaux objectifs prioritaires assortis d'échéances intermédiaires permettant d'en mesurer les progrès ;

renforcer le suivi de la stratégie ;

renforcer l'appropriation de la stratégie (sensibilisation et mobilisation) et améliorer la coopération avec les acteurs publics et privés.

143 L'objectif général de la nouvelle SDD est « de renforcer des actions permettant à l'UE d'améliorer

la qualité de la vie des générations présentes et futures, en créant des communautés durables, capables de gérer et d'utiliser les ressources de manière efficace et d'exploiter le potentiel d'innovation écologique et sociale de l'économie, en garantissant la prospérité, la protection de l'environnement et la cohésion sociale ». 144

Sa base juridique est celle de l’harmonisation des législations des Etats membres.

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72

porté devant la Cour de justice. En effet tout manquement dans la transposition

d’une directive peut entraîner la condamnation de l’Etat membre défaillant.

La directive, on le sait, est un mode de législation indirecte qui laisse aux Etats

membres une certaine marge de manœuvre

A - Les modalités de transposition

Il existe quelques règles simples qui ne doivent pas être perdues de vue :

La transposition doit se faire formellement :

o dans le délai imparti par la directive.

o pas par un simple recopiage, il faut réellement légiférer ou réglementer.

o si la législation ou la réglementation préexiste et donne pleinement

satisfaction - en d'autres termes, la transposition formelle n'ajouterait rien -,

l’Etat membre peut se dispenser d’adopter une législation de transposition.

o la pratique administrative ou même une circulaire ministérielle ne suffit pas

pour remplir cette obligation de transposition (notamment parce que la

pratique administrative peut être réversible).

B - L'effet direct d'une directive145

La question de la possibilité de donner directement effet à des dispositions

d’une directive se pose lorsque l'Etat membre concerné n'a pas encore formellement

transposé la directive. Il peut s’agir de dispositions qui interdisent de manière

absolue de chasser telle espèce d'oiseau sauvage, de rejeter dans les eaux telles

substances ou qui imposent telle ou telle obligation.

A certaines conditions, une directive peut avoir un effet direct et s’assimiler à une

disposition du droit national.

Ces conditions sont les suivantes :

La disposition de la directive doit être claire, précise et inconditionnelle (ex. La

protection de telle espèce menacée),

A cette condition, l’effet direct peut être invoqué :

145

Sur cette question, voy. B. Jadot, “L’effet direct des directives en matière de protection de l’environnement”, in Droit de l’environnement. Développements récents, Ière partie, Ed. Story-Scientia, Bruxelles, 1989, pp. 245 et s.

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73

- par un particulier

- à l'encontre d'une disposition ou une décision de droit interne,

- comme moyen de défense

- contre un pouvoir public

Cet effet direct est reconnu aussi bien par la Cour de justice de l’Union européenne

que par les juridictions nationales. A titre d’exemples, l’on peut citer un arrêt de la

Cour de justice qui a dit que certaines dispositions de la directive 96/62/CE sur la

qualité de l’air ambiant avait un effet direct : les citoyens ont le droit de demander,

sur cette base, un plan d’action pour réduire la pollution atmosphérique (CJCE, 25

juillet 2008, C-237/07, Janecek c. Freistaat Bayern ; voyez également CJUE, 26 mai

2011, C-165/09 à 167/09, Stichting Natuur en Milieu et a.).

Si une directive répond aux conditions de l’effet direct, elle peut être invoquée à des

fins de substitution. L’”invocabilité de substitution” désigne la faculté pour une partie

de se prévaloir d’une directive, devant le juge national, en lieu et place d’un texte

national inexistant ou non conforme à la directive, afin d’obtenir le bénéfice d’un droit

institué par cette dernière.

C - L’effet d’une directive non transposée qui n’a pas d’effet direct146

La Cour de Justice de l’Union européenne a dégagé quelques principes pour

donner malgré tout un effet à la directive:

o “l’invocabilité d’interprétation conforme” : (C.J.C.E., 10 avril 1984, Von Colson

et Kamann);

o “l’invocabilité de réparation” : (C.J.C.E., 19 nov. 1991, C-6/90 et C-9/90,

Francovich et consorts);

o “l’invocabilité d’exclusion” : (C.J.C.E., 19 sept. 2000, C-287/98, Linster et crts

à propos de la directive 85/337 relative à l’évaluation des incidences sur

l’environnement).

146

J. SAMBON, “L’invocabilité des directives communautaires dans le contentieux objectif : l’exemple de la directive 85/337/CEE concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l’environnement”, obs. sous C.J.C.E., 19 septembre 2000, C-287-98, Linster et crts, Amén.-Env. 2001, pp. 43 et s. et les larges extraits reproduits des conclusions de l’avocat général Ph. LEGER.

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74

§ 4 - Les obligations au-delà de la transposition formelle

La question qui peut se poser à la lecture d’une directive est celle de savoir si

le seul fait d’avoir transposé correctement une directive en droit interne suffit à

dégager toute responsabilité d’un Etat membre.

La réponse à cette question est fonction de la nature des obligations inscrites

dans une directive. S’il s’agit d’obligations de résultats et pas seulement d’obligations

de moyens, un Etat ne pourra pas se contenter de transposer dans une

réglementation interne ces obligations, il devra veiller à ce que, sur le terrain, les

résultats soient atteints ou, en tout cas, devra prendre toutes les mesures

nécessaires pour obtenir ce résultat.

Lorsque, comme c’est le cas, par exemple, en matière de qualité des eaux de

baignade (directive 76/160/CEE du 8 décembre 1975), des valeurs limites devaient

être respectées dans les 10 ans de l’entrée en vigueur de la directive, si elles ne sont

pas atteintes, il y a manquement dans le chef de l’Etat membre sauf s’il prouve

l’impossibilité de respecter cette obligation (CJCE, 13 nov. 2001, Commission c/

Royaume Uni).

C’est le cas également et par exemple en matière de rejet dans l’atmosphère

en provenance d’incinérateurs de déchets ménagers (CJCE, 18 juin 2002, C-60/01,

Commission c/France; CJCE, 11 juillet 2002, C-139/00, Commission c/ Espagne) ou

dans le domaine de la protection des habitats et des espèces (CJCE, 30 janvier

2002, C-103/00, Commission c/ Grèce à propos de la tortue Caretta caretta ; CJCE,

27 octobre 2005, C-166/04, Commission c. Grèce à propos de la protection de la

lagune de Messolongi).

La Commission a annoncé qu’elle examinera, à partir de 2010, l’effectivité des

mesures de protection adoptées par les Etats membres dans les sites Natura 2000.

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75

Chapitre 3 : LES SOURCES DE DROIT INTERNE

Section 1 – La stratégie nationale de développement durable

En France, un décret n° 2003-145 du 21 février 2003 a créé un « Comité

interministériel de développement durable »147 avec notamment pour mission

d’élaborer notre stratégie nationale de développement durable.

Pour l’aider dans cette mission, un « Conseil National de développement durable » a

également été créé en janvier 2003148.

.Le CIDD (comité interministériel), avec l’aide du CNDD (Conseil national), a

finalement défini, le 3 juin 2003, une première « Stratégie Nationale de

développement durable » 149.

Cette première stratégie nationale de 2003 s’articulait initialement autour de 7 axes

stratégiques et de 10 programmes d’action. Cette stratégie a été révisée en 2006

afin de s’intégrer pleinement dans le projet européen150

.

147 Le CIDD a été créé par un décret n° 2003-145 du 21 février 2003. Le comité interministériel pour le

développement durable (CIDD) se substitue à trois instances existantes : le comité interministériel de l’environnement (CIEN), la commission interministérielle de lutte contre l’effet de serre (CIES) et le comité interministériel de prévention des risques naturels majeurs (CIPRNM).

148 Le CNDD a notamment une fonction de consultation et de proposition tout au long du processus

d’élaboration de la stratégie nationale de développement durable 149

http://www.ecologie.gouv.fr/IMG/pdf/sndd-2.pdf 150

Cela s’est traduit par une nouvelle présentation de la SNDD 2003-2008, conforme au plan de la Stratégie européenne visant à faciliter une lecture comparée des réponses apportées par les différents gouvernements à chacun des 7 enjeux européens. Pour conforter la cohérence de la Stratégie nationale de développement durable (SNDD) avec la Stratégie européenne de Développement Durable (SEDD), les indicateurs de développement durable seront ceux retenus au niveau européen, à savoir : 1 Taux de croissance du PIB par habitant 2 Émissions totales de gaz à effet de serre 3 Part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie primaire 4 Consommation d'énergie des transports et PIB 5 Productivité des ressources 6 Indice d’abondance des populations d’oiseaux communs 7 Part des captures en fonction de l’état des stocks halieutiques 8 Espérance de vie et espérance de vie en bonne santé à la naissance 9 Taux de risque de pauvreté après transferts sociaux 10 Taux d'emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans 11 Aide publique au développement

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76

La dernière stratégie nationale151 de développement durable, adoptée le 27 juillet

2010, porte sur la période 2010-2013152.

La stratégie se veut plus accessible, un effort de communication est fait.

Celle-ci est articulée en 8 défis qui recouvrent les préoccupations de la stratégie

communautaire. Chaque défi est scindé en trois parties

- contextes et enjeux

- nos choix stratégiques

- nos leviers d’action

Le défi n° 1 concerne la consommation et la production durable.

Contexte et enjeux

Le constat est que notre société se caractérise par une consommation de plus en

plus intense de biens et de services, alliée à des durées de vie des produits de plus

en plus courte. Dans ce contexte, l’enjeu est d’orienter les modes de production vers

une économie plus durable qui limite ses impacts sur l’environnement.

Les choix stratégiques

- développer l’information sur les qualités écologiques et sociales des

produits

- rendre accessible au plus grand nombre les produits et services plus

durables (coups de pouce fiscaux…)

- soutenir l’économie verte et l’innovation des entreprises

- développer une production agroalimentaire durable

Ces choix s’accompagnent d’objectifs chiffrés.

Le défi n° 2 concerne la société de la connaissance

Il s’agit notamment de promouvoir la formation et l’éducation au développement

durable, dans les écoles, les universités mais aussi de promouvoir la recherche en

matière de technologies propres.

Le défi n° 3 concerne la gouvernance

151

conformément à l'article 1 de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement dite « Grenelle 1 », une Stratégie nationale de développement durable (SNDD) en vertu duquel une stratégie doit être « élaborée par l'Etat en cohérence avec la Stratégie européenne de développement durable (SEDD) et en concertation avec les représentants des élus nationaux et locaux, des employeurs, des salariés et de la société civile, notamment des associations et fondations ».Cette stratégie a donné lieu a un avis du Conseil économique et social en janvier 2010 http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000065/0000.pdf 152

http://www.developpement-durable.gouv.fr/Strategie-nationale-de,17803.html

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77

La gouvernance, dit la SNDD, c’est avant tout « une façon différente de prendre des

décisions, avec une multiplication des lieux de décision et des acteurs associés ».

Dans les objectifs de la gouvernance, on trouve notamment la réalisation des

agendas 21 locaux.

Le défi n° 4 concerne les changements climatiques et énergies.

La France reprend les objectifs européens du paquet climat énergie (réduction de 20

% des émissions de GES, accroitre de 20 % l’efficacité énergétique et porter à 20 %

la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique).

Cela passe par l’exemplarité des acteurs publics, tel que la mise en place du

télétravail ou la fourniture de services en ligne pour éviter les déplacements.

Le défi n° 5 concerne les transports et la mobilité durables

Cela passe notamment par la maitrise de l’étalement urbain, le maintien des services

de proximité.

Cela passe aussi par un renforcement de l’intermodalité, c’est à dire la

complémentarité entre le rail, la route , le transport fluvial et maritime, etc

Le coût des transports devrait mieux refléter le cout des impacts environnementaux

et sociaux.

Volonté d’améliorer l’efficacité énergétique des véhicules.

Le défi n° 6 concerne la conservation et la gestion durables de la biodiversité

et des ressources naturelles

Dépositaire d’un patrimoine exceptionnel, la France a une responsabilité particulière

en matière de biodiversité.

Le défi n° 7 concerne la santé publique, prévention et gestion des risques

La stratégie examine plusieurs actions.

.

AU plan national, les préoccupations sanitaires se déclinent dans le plan national

Santé /Environnement 2009-2013153 et dans le plan Santé au travail qui couvre la

période 2010-2014154.

153

http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/PNSE2.pdf 154

http://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/PST_2010-2014.pdf Ce nouveau plan doit s’inscrire dans un contexte plus général qui suppose :

de traduire la stratégie européenne de santé au travail 2007-2012, qui pose notamment le principe d’une réduction de 25 % du taux d’incidence global des accidents du travail ;

de contribuer à la stratégie européenne pour l’emploi pour renforcer les taux d’activité des seniors (…)

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78

Le défi n° 8 concerne la Démographie, immigration, inclusion sociale

Il s’agit ici de lutter contre la pauvreté et d’améliorer l’accès au logement.

Le défi n° 9 concerne les défis internationaux en matière de développement

durable et de pauvreté dans le monde

Il s’agit de promouvoir le renforcement de la gouvernance mondiale, de contribuer à

la sécurité alimentaire.

Section 2 – la charte de l’environnement

Depuis la conférence de Stockholm, de nombreuses constitutions ont consacré le

droit à l’environnement, comme les constitutions :

- espagnole (1978) : art. 45 et 46

- grecque (1975) : art. 24

- portugaise (1976) : art. 66

- Pays-Bas : art. 1-20

- belge (1994) : art. 23, al. 3 : "Le droit à la protection d'un environnement sain".

- allemagne (1994)

En France, le président de la République a annoncé en 2001 qu’il souhaitait

proposer aux français une charte de l’environnement adossée à la constitution.

En juin 2003,Le gouvernement adoptait, en conseil des Ministres, le texte de la

charte, inspiré de la Commission Coppens155.

Le texte de la Charte a été adopté le 28 février 2005 par le Parlement et promulgué

le 1er mars 2005 (Loi constitutionnelle n° 2005/204 du 1er mars 2005).

de renforcer notre réactivité face au développement de certains risques, comme les risques

psychosociaux ou à la menace de risques émergents, notamment les risques chimiques ;

de prendre en compte l’impact sur les salariés des nouvelles formes d’organisation des processus productifs et d’accentuer fortement l’amélioration des conditions de travail (…)

155

Cf Rapport de la Commission Coppens de préparation de la Charge de l’environnement (sur le site du Ministère de l’écologie ; Revue droit de l’environnement : l’environnement entre dans la constitution, M. Prieur n° 106, mars 2003 et R. Romi, la constitutionnalisation des principes du droit de l’environnement, les contours du rapport Coppens, n° 109 juin 2003).

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79

Sa place dans le préambule de la Constitution confère à la Charte valeur

constitutionnelle, dans la continuité des droits civils et politiques de 1789 et des

principes économiques et sociaux de 1946.

Le premier alinéa de la constitution se lit donc ainsi :

« Le peuple français proclame solennellement son attachement aux droits de

l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la

déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la constitution

de1946, ainsi qu’aux droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement de

2003 ».

Ainsi, toutes les lois devront respecter les principes et objectifs énoncés dans le

texte. La Charte devra inspirer l’action de tous.

Le texte de la charte comprend 7 considérants et dix articles développant les droits

et les devoirs de chacun.

1) Les considérants

« Le peuple français,

« Considérant

« que les ressources et les équilibres naturels ont conditionné l’émergence de

l’humanité »,

« que l’avenir et l’existence même de l’humanité sont indissociables de son milieu

naturel, »

« que l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains ; »

« que l’homme exerce une influence croissante sur les conditions de la vie et sur sa

propre évolution, »

« que la diversité biologique, l’épanouissement de la personne et le progrès des

sociétés humaines sont affectés par certains modes de consommation ou de

production et par l’exploitation excessive des ressources naturelles ; »

« que la préservation de l’environnement doit être recherchée au même titre que les

autres intérêts fondamentaux de la nation »

« que, afin d’assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux

besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures

et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins ; »

Par exemple, si nous ne modifions pas nos comportements, les générations futures

auront à souffrir pendant longtemps de l’effet de serre, compte tenu de l’inertie des

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80

phénomènes climatiques. Notre responsabilité est de chercher aujourd’hui à

maîtriser la consommation énergétique et à recourir à des énergies qui n’émettent

pas de gaz à effet de serre, pour préserver l’avenir. Cela cela implique à court terme

des innovations technologiques qui se traduisent par un développement économique

et un progrès social.

La Charte est présentée comme un modèle « d’écologie humaniste » dans la mesure

où 6 considérants sur 7 se réfèrent à l’homme ou à l’humanité156.

Cette écologie humaniste est présentée comme scellant l’alliance de

l’environnement, de la science et du progrès économique au service de l’homme.

2) Le corps du texte

Art. 1

Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et favorable à sa santé.

Art.2

Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de

l’environnement.

Art. 3

Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir ou, à défaut,

limiter les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ;

Art. 4

Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à

l’environnement, dans les conditions définies par la loi.

Art. 5

Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances

scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les

autorités publiques veillent , par application du principe de précaution, à l’adoption de

mesures provisoires et proportionnées afin d’éviter la réalisation du dommage ainsi

qu’à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques encourus.

Art. 6

Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet,

elles prennent en compte la protection et la mise en valeur de l’environnement et les

concilient avec le développement économique et social .

Art. 7

Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi,

d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités

156

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81

publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence

sur l’environnement.

Art. 8

L’éducation et la formation à l’environnement doivent contribuer à l’exercice des

droits et devoirs définis par la présente Charte.

Art. 9

La recherche et l’innovation doivent apporter leurs concours à la préservation et la

mise en valeur de l’environnement.

Art. 10

La présente Charte de l’environnement inspire l’action européenne et internationale

de la France.

Il a été énoncé, lors des travaux préparatoires que, si l’article 5 consacre un principe

constitutionnel d’applicabilité directe, les autres articles de la charte énoncent des

objectifs de valeur constitutionnelle, dont la mise en œuvre requiert l’intervention du

législateur.

Quels sont dès lors les effets d’une disposition constitutionnelle ?

- En premier lieu, le législateur, en ce compris le pouvoir réglementaire, est obligé de

garantir le respect de ce droit.

- En deuxième lieu, la consécration du droit à l’environnement devrait entraîner la

reconnaissance de droits concrets, garantissant l’accès de tous à un minimum de

jouissance des ressources naturelles

- En troisième lieu, la disposition constitutionnelle constitue une directive

interprétative dans le sens où, si la loi permet plusieurs interprétations, cela permet

de faire valoir le point de vue de la conservation de l'environnement (in dubio, pro

natura).

Cela permet évidemment de rétablir l’équilibre dans l'examen de balance des

intérêts. L'appréciation de l'intérêt à agir en justice peut être plus large.

- En 4ème lieu, cela confère une certaine stabilité car on ne modifie pas une

Constitution comme une loi.

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82

Cette stabilité peut-elle s’analyser en une obligation de standstill ? lL'obligation dite

de "standstill"157 ou l’effet cliquet ou la théorie du non retour sont trois expressions

qui désignent l’impossibilité pour les autorités publiques de légiférer à rebours des

droits garantis, et donc de diminuer le niveau de protection acquis.

Cet effet de standstill est de plus en plus reconnu comme un principe dont le non-

respect peut être sanctionné158. Pour qu’il y ait violation du principe de standstill, il

faut qu’il y ait un écart significatif entre la norme nouvelle et la norme ancienne. C’est

ce que confirme la jurisprudence de la Cour d’arbitrage en Belgique dans d’autres

domaines, économiques et sociaux.

(A propos de l’aide sociale, voyez Cour Arbitrage Belge n° 169/2002, 27 nov 2002).

La cour énonce que :« Cette obligation de standstill ne peut toutefois s’entendre

comme imposant à chaque législateur, dans le cadre de ses compétences, de ne

pas toucher aux modalités de l’aide sociale prévue par la loi. Elle leur interdit

d’adopter des mesures qui marqueraient un recul significatif du droit garanti par

l’article 23 al 1 et alinéa 3, 20 de la constitution mais elle ne les prive pas du pouvoir

d’apprécier de quelle manière ce droit sera le plus adéquatement assuré. »

En tout état de cause, lorsqu'une constitution consacre le droit à un environnement

sain ou un environnement respectueux de la santé humaine, cela implique-t-il qu'il

s'agisse d'un droit directement et immédiatement exigible par ceux à qui il est

reconnu ?159.

157

M. PRIEUR, G. SOZZO, (sous la direction de), La non régression en droit de l’environnement, Bruylant, Bruxelles, 2012, 547 p. I. Hachez et B. Jadot, « Environnement, développement durable et standstill : vrai ou faux amis ? » Amén. 2009, p. 5. 158

omme l’indiquent par exemple plusieurs avis de la section de législation du Conseil d’Etat de Belgique : C.E., Belg., n° 80.018, 29 avril 1999, Jacobs).

159 sur cette question, voy. B. JADOT, "Le droit à l'environnement in "Les droits économiques,

sociaux et culturels dans la Constitution", Bruylant, Bruxelles, 1995, pp. 257-271

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83

Section 3 – La valeur juridique de la Charte de l’environnement160

Tout au long du processus d'élaboration de la Charte de l’environnement, comme

d'ailleurs après son adoption, la question de la portée juridique de ce texte a fait l'objet

d'un débat doctrinal intense.

Il apparaissait évident pour de nombreux auteurs qu’en plaçant la Charte de

l’environnement sur le même plan que la Déclaration des droits de l'homme et du

citoyen de 1789 et que le Préambule de la Constitution de 1946, le constituant avait

nécessairement entendu lui conférer une valeur constitutionnelle. Mais laquelle ?

En fait la question s’est posée immédiatement de savoir si les justiciables pouvaient-ils

invoquer les dispositions de la Charte devant le juge ordinaire ?

Le premier à s’être prononcé a été le Tribunal Administratif de Châlons-en-Champagne

29 avril 2005161, dans une affaire Conservatoire du patrimoine naturel et autres,162 où

était en cause l’organisation d’une Rave Partie dans un site à haute valeur écologique.

160

Cf. Numéro spécial de la Revue Juridique de l’environnement, dec. 2005 « la charte constitutionnelle de l’environnement en vigueur ». Bibliographie Y. Aguila Charte de l'environnement (décret du 1er août 2006 relatif aux lacs de montagne), concl. sous CE, 3 oct. 2008, no 297931 RJE 1/2009, mars 2009. A. Boyer Dialogue des juges et promotion de la Charte de l'environnement, note sous CE, 3 oct. 2008 RJE 4/2009, déc. 2009. F. Brenet Précisions sur la portée juridique de la charte de l'environnement, note sous CE, 3 oct. 2008, no 297931 Petites affiches, no 98, 18 mai 2009. V. Champeil-Desplats La Charte de l'environnement prend son envol aux deux ailes du Palais-Royal, note sous Cons. const. 19 juin 2008 et CE, 3 oct. 2008 RJE 2/2009, juin 2009. E. Geffray L'abrogation implicite de la loi par la Charte de l'environnement, concl. sous CE, 24 juill. 2009, nos 305314 et 305315, RFDA no 5 sept.-oct. 2009. D. Hedary Les surprises de la charte de l'environnement : analyse de quatre années de jurisprudence Dr. envir., no 171, sept. 2009. N. Huten, M.-A. Cohendet La charte cinq ans après : chronique d'un réveil en fanfare RJE 1/2010, mars 2010. S.-J. Lieber, D. Botteghi Chronique générale de jurisprudence administrative française, Le Conseil d'État et la Charte de l'environnement : de prudentes avancées, note sous CE, 24 juill. 2009, no 305314 AJDA no 33/2009, 12 oct. 2009. I. Shveda Vers une reconnaissance de la Charte de l'environnement par le juge administratif, note sous CE, 3 oct. 2008, no 297931 Dr. envir., no 168, mai 2009. 161

TA Châlons-en-Champagne 29 avril 2005, Conservatoire du patrimoine naturel et autres, AJDA 2005, p. 1357, note H. Groud et S. Pugeault; RD imm. 2005, p. 265, note L. Fonbaustier. 162

AJDA 2005, p. 1357, note H. Groud et S. Pugeault.

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84

Dans une deuxième affaire, le Tribunal administratif d’Amiens163 va être saisi d’une

requête dans laquelle des personnes, en invoquant le droit de vivre dans un

environnement équilibré et respectueux de leur santé (art. 1er de la Charte),

demandaient la suspension d’une délibération du Conseil Municipal mettant en vente

des lots de terrains inclus dans un parc régional et classés en espaces boisés.

Dans son ordonnance du 8 décembre 2005, le juge des référés ne fait pas droit à leur

requête mais énonce que « si toute personne peut se prévaloir du droit de vivre dans un

environnement équilibré et respectueux de la santé, qui lui est conféré par l’article 1er

de la Charte de l’environnement, c’est à la condition qu’elle apporte devant le juge des

éléments de nature à faire regarder la décision attaquée comme portant atteinte à sa

situation personnelle protégée par ce droit ».

Le juge a rejeté leur requête pour irrecevabilité.

Par suite, par trois, le Conseil d'Etat va sembler hésiter sur la portée de la Charte. Dans

un premier temps, il va se montrer plutôt rétif à l'invocation de la Charte devant son

prétoire, exigeant à cette fin que ses dispositions aient été concrétisées par le

législateur ou le pouvoir réglementaire et ne les appliquant alors qu'à travers le prisme

de la loi ou du règlement

Dans un arrêt du 19 juin 2006, ( CE, 19 Juin 2006, Association Eaux et Rivières de

Bretagne, Req. n° 282456) le CE va vérifier la légalité de l’arrêté attaqué au regard des

dispositions du Code de l’environnement qui imposent aux ICPE des sujétions

destinées notamment à la protection de l’eau.

Par suite, les juges vont sembler vouloir écarter la charte dans une série de décisions

en 2007164. Quelque temps plus tard, néanmoins, le Conseil d'État semble vouloir

s'orienter vers une application plus directe du nouveau texte constitutionnel suite à la la

décision du Conseil Constitutionnel du 19 juin 2008 relative à la loi sur les OGM (dec.

163

Valérie Boré Eveno, La Charte de l'environnement ne donne pas en soi intérêt pour agir AJDA 2006 p. 1053 164

Le Conseil d’Etat , dans un arrêt du 7 mai 2007, à propos d’un décret du 10 août 2005 modifiant la nomenclature des installations classées pour certains élevages, va considérer que « moyen tiré de ce que les dispositions attaquées seraient contraires aux articles 2 et 7 de la Charte de l'environnement de 2004 n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé » (CE 7 mai 2007, assoc. Nat. Pour la protection des eaux et rivières-Tos, 286103). Dans la même veine, à propos de l’articulation des dispositions d’urbanisme et du Plan d’exposition au bruit autour de l’aéroport Charles de Gaulle, le Conseil d’Etat va balayer la Charte en énonçant que « : (…) le moyen tiré de ce que les dispositions attaquées seraient contraires aux articles 1 et 7 de la Charte de l'environnement de 2004 n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé » (CE, 6 juin 2007, n° 292942, commune de Groslay).

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85

2008-564 DC) suivie de l’arrêt du Conseil d’Etat du 3 octobre 2008, commune

d’Annecy.

C’est le Conseil constitutionnel qui, le 19 juin 2008, le premier, va affirmer que

l'ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement, ont valeur

constitutionnelle.

A propos de l’article 7 sur le droit à l’information et à la participation, il précise qu'il

n'appartient qu'au législateur de préciser les conditions et les limites dans lesquelles

doit s'exercer ce droit. Ne relèvent du pouvoir réglementaire que les mesures

d'application des conditions et limites fixées par le législateur. Cela ne sera pas sans

incidences par la suite.

Quelques mois plus tard, c’est le Conseil d’Etat qui va emboiter le pas au Conseil

Constitutionnel en reprenant presque mot pour mot la formulation du Conseil

Constitutionnel. Il s’agissait en l’espèce de se prononcer sur la légalité d’un décret

d’application de la loi Montagne au regard de l’article 7 de la Charte qui réserve au

législateur le soin de préciser les conditions et limites du principe de participation (CE

3 octobre 2008, commune d’Annecy).

L’année suivante, le Conseil d'État annulera un décret fixant les modalités

d'information du public sur les effets de la dissémination des OGM, estimant que ce

texte n'était pas compatible avec la Charte qui réserve cette compétence au

législateur (CE, 24 juill. 2009, no 305314, Comité de Recherche et d'Information

Indépendantes sur le Génie Génétique (CRII Gen).

Ainsi, depuis la Charte, une disposition règlementaire ne peut intervenir dans le

champ d’application du droit à l’information que pour l’application de dispositions

législatives dans la mesure où ce domaine relève du pouvoir législatif.

C’est ensuite à la participation que le Conseil constitutionnel va être confronté. Le

Conseil constitutionnel va énoncer (dans ses décisions n° 2011-183/184 QPC du 14

octobre 2011 et n° 2012-262 QPC du 13 juillet 2012, rendues en matière de police

des installations classées), qu'une disposition générale qui se borne à prévoir une

publication du projet avant sa transmission - en l’occurrence au Conseil supérieur de

la prévention des risques technologiques - n'assurait pas la mise en œuvre du

principe constitutionnel de participation.

C’est ainsi que le législateur va se trouver contraint de revenir sur le principe de

participation par la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 « relative à la mise en

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86

œuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de

l'environnement ».

En particulier, le nouvel article L. 120-1 du Code de l’environnement détermine la

procédure générale de participation qui vise toutes les décisions165 – autres que les

décisions individuelles - des autorités de l’Etat166 et de ses établissements publics

ayant une incidence sur l’environnement. Désormais, les projets de décisions seront

mis en ligne et les autorités devront faire la synthèse des observations du public

indiquant la façon dont il en a été tenu compte.

On signalera enfin la décision du 8 avril 2011167 dans laquelle le Conseil

constitutionnel a encore précisé la portée de la Charte. On se souvient que le

Conseil avait, dans sa décision OGM du 19 juin 2008168, affirmé la pleine valeur

constitutionnelle de la Charte en énonçant, à propos de l’article 5 de la Charte « que

(…) l'ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement (…)

s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leur domaine

de compétence respectif».

Franchissant un pas supplémentaire, le Conseil constitutionnel affirme, à propos du

droit de vivre dans un environnement sain et du devoir de préserver l’environnement

(art. 1er et 2 de la Charte), que « le respect des droits et devoirs énoncés en termes

généraux par ces articles s’impose non seulement aux pouvoirs publics et aux

autorités administratives dans leur domaine de compétence respectif mais

également à l’ensemble des personnes » (…) qui sont tenues « d’une obligation de

vigilance à l’égard des atteintes à l’environnement qui pourraient résulter de leur

activité ».

165

Il ressort de l’exposé des motifs que texte la participation inclut notamment les décisions dites «d'espèce» telles que celles, relatives à la délimitation des aires d'alimentation des captages d'eau potable, visées par la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-270 QPC du 27 juillet 2012. 166

Y compris les autorités administratives indépendantes (AAI). 167

Conseil constitutionnel, Décision n° 2011-116 QPC du 8 avril 2011, Michel Z et autres 168

Décision n° 2008-564 DC, loi relative aux organismes génétiquement modifiés.

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87

Section 3 - Le Code de l’environnement169

Le droit de l’environnement est, par son histoire et ses fondements un droit épars qui

a puisé à des sources diverses et s’est édifié au coup par coup, selon les aléas et les

enjeux sociaux.

Tous les observateurs rivalisaient de critiques pour dénoncer “cet édifice baroque” (J.

Untermaier), cette “jungle de normes”, ce “harcèlement textuel”170 ou cette “pollution

normative” atteinte d’un “expansionnisme désordonné”.

Or, d’un point de vue technique, le droit requiert précision et certitude : il doit être

connu de ses utilisateurs.

C’est la raison pour laquelle la nécessité de réaliser le Code de l’environnement s’est

imposée :

- compte tenu de l’importance prise par cette matière en tant qu’enjeu social,

- mais compte tenu également de la complexité des sources juridiques existantes

- et donc de la nécessité de doter nos sociétés d’un instrument rationnel et moderne.

Un projet de Code a donc été lancé en 1992. Un code doit réunir un ensemble

cohérent de dispositions juridiques traitant la matière, mais qu’est-ce qu’un ensemble

cohérent ? Quand commence et où s’arrête la matière “environnement” dans une

logique par nature transversale ? Le recours à la notion de “branche du droit”, n’est

pas d’un grand secours. Autant dire que ce que l’on met dans un code doit faire

l’objet de réflexions approfondies.

En France, le débat a été vif sur ce point, tant la conception “organique” du Code

était forte.

En tout état de cause, ces discussions, qui s’apparentent parfois à de véritables

marchandages démontrent que la codification, même lorsqu’elle ne veut être que la

présentation du droit existant, est perçue comme une manifestation de pouvoir par

les acteurs concernés. Il n’est pas étonnant dès lors que l’on assiste à de véritables

“guerres de territoires”.

169

G.J. Martin, “Principes pour une codification de l’environnement”, in Quel avenir pour le droit de l’environnement ?, PUB Presses Saint Louis, 1996, p. 287. Numéro spécial de la revue “Droit de l’environnement”, Janvier-février 2001 et N° Spécial 2005.

170A. Guillot, Droit de l’environnement, Ellipses, 1998, p. 10.

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88

On soulignera enfin que la codification fait fi du droit communautaire, ce qui est

paradoxal lorsque l’on sait que les règlements communautaires sont directement

applicables dans les ordres juridiques internes.

Finalement, le plan du Code défini par la Commission supérieure de Codification en

1993 a abouti à l’ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 (publiée au JO du

22 septembre).

Le code est divisé en livres, en titres, en chapitres et en sections avec une partie

législative et une partie réglementaire. Le Code commence avec les principes

généraux puis l’information et la participation des citoyens. Ensuite on a la

codification par milieux physiques : eau, air, espaces naturels, patrimoine naturel,

pollutions et nuisances.

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89

Section 4 : Les acteurs du droit de l’environnement

Contrairement à l’urbanisme qui a été largement décentralisé en 1982 et 1983,

l’environnement est un domaine qui relève toujours, pour l’essentiel des

compétences étatiques.

La prise en charge administrative de l’environnement se décline en trois points :

- une administration étatique en voie de restructuration ;

- une compétence locale diffuse entre la région, le département et la

commune

- une présence pléthorique d’organismes consultatifs.

§ 1 L’administration étatique

A - Le ministère de l’écologie

Avant 1971, les questions touchant à l’environnement étaient éparpillées entre

différents ministères : industrie, santé, intérieur (compétent en matière de sécurité),

agriculture, équipement, affaires culturelles (pour les monuments historiques, les

sites et paysages).

Le premier ministère, qualifié de ministère de la Protection de la nature et de

l’environnement, a été crée en janvier 1971. Il fut confié à R. Poujade qui occupa le

poste durant 3 ans.

Il faut reconnaître que l’idée d’un super ministère de l’environnement disparut très vite du paysage

politique français. L’environnement devint un satellite des affaires culturelles (en 1974), puis de

l’équipement (1981) quand le portefeuille n’est pas confié à un simple secrétaire d’Etat (1988) (Mme

Bouchardeau ou Brice Lalonde).

A partir de 1991, on observe le retour d’un ministère de l’environnement de plein exercice à la tête

duquel se succèdent Ségolène Royal, Michel Barnier, Corinne Lepage, Dominique Voynet et Yves

Cochet et Roselyne Bachelot. Chacun des titulaires s’attachera à réformer le ministère pour lui donner

la structure qu’il présente approximativement aujourd’hui.

Un ministère de l'écologie de l'aménagement du territoire (MEEDAT), aux pouvoirs élargis a été créé

en mai 2007. Il a rapidement perdu ses attributions en matière d’aménagement du territoire mai il a

gagné des compétences en matière de technologies vertes et les négociations sur le climat et la mer

(à l’exception de la pêche)171

.

Le précédent ministère était le Ministère de l'Écologie, du Développement durable,

des Transports et du Logement (MEDDTL) dirigé par Mme Nathalie KOSCIUSKO-

MORIZET.

171

D. 2007-995, 31 mai 2007, mod. par D. 2009-895, 24 juill. 2009 :( JO, 25 juill., p. 12413) Arr. 9 juill. 2008, (NOR : DEVK0815910A,) mod. par Arr. 28 juill. 2009,( NOR : DEVK0910630A : JO, 5 août, texte no 8)

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90

Aujourd’hui, le Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l’énergie est

dirigé par Delphine BATHO.

Les attributions du ministère sont fixées par un décret n° 2010-1443 du 25 novembre

2010 modifié relatif aux attributions du ministre de l'écologie, du développement

durable, des transports et du logement (JO , 26 novembre 2010).

B – L’administration déconcentrée

1° – Au niveau régional

Les services déconcentrés de l’Etat ont été restructurés ces dernières années

(décret n° 2009-235 du 27 février 2009).

Dans chaque région, une direction régionale de l'environnement, de l'aménagement

et du logement (DREAL) est créée par fusion :

- de la direction régionale de l'équipement (DRE)

- de la direction régionale de l'environnement (DIREN)

- et de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement

(DRIRE) (à l'exclusion de ses missions de développement industriel et de

métrologie).

La DREAL exerce ses missions sous l'autorité du préfet de région (et sous l'autorité

fonctionnelle du préfet de département pour les missions relevant de sa

compétence).

La DREAL a pour objectif d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques de l'État en

matière d'environnement, de développement durable et de logement172.

Les missions des DREAL sont déterminées dans le décret n° 2009-235 du 27

février 2009 modifié relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales

de l'environnement, de l'aménagement et du logement.

2° – Au niveau départemental

Au niveau départemental, on a :

- Les DDT (directions départementales des territoires) ou

- Les DDTM (directions départementales des territoires et de la mer)

172

Décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (mod. par ), décret no 2010-130 du 11 février 2010 relatif à l'organisation et aux missions des directions interrégionales de la mer (JO, 12 févr.) (JO , 28 février 2009) et décret n°2012-1053 du 14 septembre 2012.

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91

qui sont placées sous l’autorité du préfet de département et dont les attributions sont

fixées par le décret n° 2009-1484 du 3 décembre 2009 relatif aux directions

départementales interministérielles modifié173.

Les DDT mettent en œuvre les politiques publiques relatives à la promotion du

développement durable au sens large 174.

§ 2 - Les pouvoirs décentralisés de collectivités territoriales

Si jusqu’en 1983, l’Etat était seul responsable de la politique de l’environnement,

depuis la loi du 7 janvier 1983 sur la répartition des compétences, il existe une

responsabilité partagée puisque l’Etat concourt, avec les communes, les

départements et les régions à l’aménagement du territoire ainsi “qu’à la protection de

l’environnement, à la lutte contre l’effet de serre (…) et à l’amélioration du cadre de

vie”. (art. L. 1111-2 du CGCT).

Il y a de ce fait une co-responsabilité entre l’Etat et les collectivités, avec soit une

compétence exclusive de l’Etat soit une compétence partagée.

Les différentes lois successives de décentralisation ont contribué à renforcer les

pouvoirs des collectivités locales

173

Notamment par le décret n°2011-184 du 15 février 2011. 174

1° A la promotion du développement durable ;

2° Au développement et à l'équilibre des territoires tant urbains que ruraux grâce aux politiques

agricole, d'urbanisme, de logement, de construction et de transports ;

3° A la prévention des risques naturels ;

4° Au logement, à l'habitat et à la construction ;

5° A la gestion et au contrôle des aides publiques pour la construction de logements sociaux ;

6° A l'aménagement et à l'urbanisme ;

7° Aux déplacements et aux transports ;

8° A la protection et à la gestion durable des eaux, des espaces naturels, forestiers, ruraux et de leurs

ressources ainsi qu'à l'amélioration de la qualité de l'environnement, y compris par la mise en œuvre

des mesures de police y afférentes ;

9° A l'agriculture et à la forêt ainsi qu'à la promotion de leurs fonctions économique, sociale et

environnementale ;

10° Au développement de filières alimentaires de qualité ;

11° A la prévention des incendies de forêt ;

12° A la protection et à la gestion de la faune et de la flore sauvages ainsi qu'à la chasse et à la

pêche.

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92

A. Les communes

Elles disposent d'un certain nombre de compétences en matière d'environnement.

1. Pouvoirs de police générale

Au titre de ses pouvoirs de police générale, l’autorité municipale a pour objet

d’assurer “le bon ordre, la sécurité et la salubrité publique”, trois piliers bien connus

de la police municipale (article L. 2212-1 et 2 du CGCT ).

Le maire a une compétence d’intervention pour « prévenir et faire cesser les

pollutions de toute nature » (art. 2212-2, 5°).

Ce pouvoir est exercé à titre subsidiaire, par le préfet, en cas de carence de l’autorité

municipale après mise en demeure (art.2215-1 du CGCT) .

2. Le maire exerce aussi les pouvoirs de polices spéciales

- Au titre de la loi du 15 juillet 1975 sur les déchets, certaines compétences sont

attribuées exclusivement à l’autorité municipale.

L’article L. 541-3 du Code de l’environnement énonce par exemple que, “ I.-Lorsque

des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions du

présent chapitre et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du

pouvoir de police compétente (…) peut le mettre en demeure d'effectuer les

opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai

déterminé ».

- Au titre de la lutte contre le bruit, les maires sont compétents pour lutter contre le

bruit et assurer la tranquillité publique175, sauf dans les grandes villes où la police est

étatisée (art.L.2214-4 CGCT) Le maire peut limiter l'utilisation de tondeuses à gazon

les dimanches et jours fériés (C.E., 2 juill. 1997, M. Bricq, n°161 369 ).

Il peut interdire le passage des poids lourds ou le passage des matières

dangereuses dans la commune (L. 2213-4 et 2213-5 CGCT).

- Au titre de l’affichage et de la publicité

Les communes sont devenues responsables de la police de l’affichage. (art. L 581-1

et svts C. env),

- Au titre de la loi Littoral

Depuis la loi sur le littoral du 3 janvier 1986, la police municipale s’exerce sur le

rivage de la mer jusqu’à la limite des eaux (art. L 2212-3 CGCT) et le maire exerce la

police des baignades et des activités nautiques jusqu’à une limite fixée à 300 mètres

à compter de la limite des eaux (2213-23 CGCT).

175

Sauf en ce qui concerne les troubles de voisinage.

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3. Autres compétences

Outre la collecte et le traitement des déchets des ménages qu’elles assurent,

éventuellement en liaison avec les départements et les régions (L 2224-13 CGCT),

les communes sont compétentes en matière de distribution d’eau potable (art. L

2224-7-1 CGCT).

Elles ont également l’obligation de prendre en charge les dépenses relatives aux

systèmes d’assainissement collectif, aux stations d’épuration des eaux usées et à

l’élimination des boues qu’elles produisent (art. L 2224-8 CGCT).

Plusieurs instruments permettent également aux communes de protéger

ponctuellement des espaces naturels. Elles peuvent notamment être gestionnaires

de terrains acquis par le conservatoire du littoral.

Les communes peuvent également gérer des terrains acquis par le département au

titre des espaces naturels sensibles176 ou se substituer au conservatoire ou au

département pour l’exercice du droit de préemption.

La création des ports de plaisance est également une compétence octroyée aux

communes depuis 1983.

On notera que les communes se regroupent aujourd’hui en établissements publics

de coopération intercommunale (EPCI) et que la compétence en matière

d’environnement diffère selon la nature de l’EPCI177.

176

Voyez S. Deliancourt, l’exercice du droit de préemption par le département dans les espaces naturels sensibles, Dr.env. n° 192, Juil-aout 2011, p. 225 177

a) les communautés de communes (art. 5214-1 CGCT) d’un seul tenant et sans enclave avec: .des blocs de compétence obligatoires : aménagement de l’espace et développement économique (art 5214-16 CGCT) . et des compétentes optionnelles : dont la protection et la mise en valeur de l’environnement et l’assainissement (art. 5214-16 CGCT). b) -les communautés urbaines (art. L. 5215-1 CGCT) qui est la forme la plus intégrée de coopération intercommunale (ex Lille, Lyon) . Plusieurs communes d’un seul tenant et sans enclave formant un ensemble de plus de 500 000 habitants s’associent au sein d’un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet commun. Les compétences obligatoires sont beaucoup plus nombreuses (art. 5215-20 CGCT). En matière de protection et mise en valeur de l'environnement et de politique du cadre de vie : - Elimination et valorisation des déchets des ménages et déchets assimilés ; - Lutte contre la pollution de l'air ; - Lutte contre les nuisances sonores ; - Soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie. c) -Les communautés d’agglomérations (art. 5216-1 CGCT) constituent une forme intermédiaire entre les deux précédentes. Nice qui était une communauté d’agglomérations est devenue une communauté urbaine au 1er janvier 2009. Les compétences environnementale sont optionnelles (art. L. 5216-5 CGCT).

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La Métropole est la forme la plus intégrée de l’intercommunalité (…) (art. L 5217-4

CGCT). Les métropoles doivent regrouper plus de 500 000 habitants. La métropole

de Nice Cote d’azur regroupe 46 communes pour 550 000 habitants.

La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, des

compétences en matière de développement et d'aménagement économique, social

et culturel.

Dans le domaine de l’environnement, elle exerce les compétences suivantes :

- assainissement de l’eau :

- protection et de mise en valeur de l'environnement et de politique du cadre de

vie :

- collecte, élimination et valorisation des déchets des ménages et déchets

assimilés ;

- lutte contre la pollution de l'air ;

- lutte contre les nuisances sonores ;

- soutien aux actions de maîtrise de la demande d'énergie.

B. Les départements

Les départements exercent également des missions de plus en plus nombreuses.

Les départements sont par exemple compétents :

1°) en matière de politique d'espaces naturels sensibles 178.

Selon les termes de l’art. L. 142-1 à 13 du Code de l’urbanisme, le

département qui décide « d’élaborer et de mettre en œuvre une politique de

protection, de gestion et d’ouverture au public des espaces naturels sensibles,

boisés ou non », dispose de deux prérogatives pour réaliser son objectif :

il peut instituer, par délibération du Conseil général, une taxe

départementale des espaces naturels sensibles (TDENS) (art. L. 142-2

du C.u) qui est perçue sur tout le département et qui est assise sur les

constructions (L. 142-2).

Cette taxe permet d’acquérir des terrains dans des zones à fort intérêt

biologique et paysager, éventuellement en soutien d’autres partenaires

public (le conservatoire du littoral par exemple). Les terrains acquis sont

en principe ouverts au public, sauf exception justifiée par la fragilité du

milieu (art. L 142-10).

Elle finance aussi, après acquisition, l’entretien de ces espaces et ou les

espaces verts des collectivités locales ainsi que l’entretien et

l’aménagement des sentiers de promenade et de randonnée.

178

M. PRIEUR, Les espaces naturels sensibles du département, RJE, 1997/2, p. 171.

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il peut exercer un droit de préemption dans certaines zones délimitées

par le Conseil général avec l’accord des communes concernées.(L.

142-3). A l’intérieur de ces zones, le département dispose d’un droit de

préemption.

2°) en matière de plans d'élimination des déchets ménagers, (art L. 541-14 C.env).

3°) en matière de plans départementaux des itinéraires de promenade et de

randonnée

4°) de conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement (CAUE)179,

-5°) de services départementaux d’incendie et de secours (SDIS)180.

6°) de la réglementation des boisements

C - La région

Elle est compétente en matière de parcs naturels régionaux181. Les régions

disposent d’un droit d’initiative en matière de création de parcs naturels régionaux:

«les régions peuvent classer en parc naturel régional un territoire à l’équilibre fragile,

au patrimoine naturel ou culturel riche ou menacé (…) » (art. L. 333-1 du C.e. et R

244-1 du Code de l’env. » .

La région est également compétente en matière de financement de projets

environnementaux avec les contrats de plan Etat-Région182.

179

Instruments de conseil aux communes et aux élus départementaux, ils jouent un rôle essentiel d’impulsion et d’information. 180

Etablissement public départemental, il s’agit d’un instrument de lutte contre l’incendie mais aussi contre toutes les catastrophes, en application de la loi de 1987 sur les risques majeurs. Le service participe à la prévention des risques et à la “protection des personnes, des biens et de l’environnement”. 181

Les régions disposent d’un droit d’initiative en matière de création de parcs naturels régionaux (art. L. 333-1 du C.e. et R 244-1 du Code de l’env. : « Les régions peuvent classer en parc naturel régional un territoire à l’équilibre fragile, au patrimoine naturel ou culturel riche ou menacé (…) »; Depuis la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, les conseils régionaux peuvent, de leur propre initiative ou à la demande des propriétaires concernés, classer comme réserve naturelle régionale les propriétés présentant un intérêt pour la protection des milieux naturels. (Art. L. 332-2 II). 182

Avec les contrats de plan Etat-Région. Les limites matérielles des régions sont évidentes et les obligent à trouver des financements complémentaires. L’union européenne offre des possibilités : à travers le FEDER notamment (Fonds européen de développement régional). Celui-ci a pour mission de “contribuer à la correction des principaux déséquilibres régionaux dans la Communauté par une participation au développement et à l’ajustement structurel des régions en retard de développement et à la reconversion des régions industrielles en déclin”.

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