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Critique littéraire

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La recherche d'une d€finition de la litt€rature et, simultan€ment, de la critique postule en g€n€ral qu'ilexiste des propri€t€s des textes litt€raires qui les distinguent des autres textes. Par exemple, la • litt€rarit€ ƒd'un texte tient „ des €l€ments linguistiques particuliers, ou „ une organisation particuli…re de mat€riauxlinguistiques ordinaires, ou „ l'origine particuli…re du texte : son auteur est un €crivain. Toutes ces conditionssont r€futables : certains textes litt€raires ne s'€cartent pas du langage ordinaire, et les traits litt€raires serencontrent aussi dans le langage ordinaire : on a d€fini la licence po€tique, pas la litt€rature. De m‡me pourl'organisation particuli…re. Le troisi…me crit…re n'est pas plus satisfaisant : logiquement, c'est quand on ad€cid€ qu'un texte est litt€raire qu'on en conclut que son auteur est un €crivain. Ces trois crit…res incluent une€valuation implicite. On ne peut €viter la question de la valeur lorsqu'on veut d€finir la litt€rature et la critique.

Cherchant un crit…re de litt€rarit€, on tombe sur une aporie „ laquelle la philosophie du langage nous ahabitu€s. La d€finition d'un terme ‹ comme • litt€rature ƒ ‹ ne donnera jamais autre chose que l'ensemble desoccurrences dans lesquelles les usagers d'une langue acceptent d'employer ce terme : la litt€rature, c'est cequ'on appelle la litt€rature. Peut-on aller plus loin que cette formulation d'apparence circulaire ? Un peu, car lestextes litt€raires sont ceux qu'une soci€t€ utilise sans les rapporter n€cessairement „ leur contexte d'origine.C'est une soci€t€ qui d€cide que certains textes sont litt€raires par l'usage qu'elle en fait.

Si l'on veut d€finir ainsi la litt€rature, la critique ne saurait constituer tout discours sur ces textes, maisbien celui dont la finalit€ est d'attester, ou de contester, leur inclusion dans la litt€rature. Et si la litt€rature etla critique se d€finissent solidairement par la d€cision que, pour certains textes, le contexte d'origine n'a pas lam‡me pertinence que pour les autres, il en r€sulte que toute analyse qui a pour objet de reconstruire les

circonstances originales de la composition d'un texte litt€raire, la situation historique dans laquelle l'auteur a€crit ce texte et la r€ception du premier public peut ‡tre int€ressante mais n'appartient pas „ la critiquelitt€raire. Le contexte d'origine restitue le texte „ la non-litt€rature en renversant le proc…s qui en fait un textelitt€raire.

Tout ce qu'on peut dire d'un texte litt€raire n'appartient donc pas „ la critique litt€raire. Le contextepertinent pour la critique litt€raire d'un texte litt€raire, ce n'est pas le contexte d'origine de ce texte, mais lasoci€t€ qui en fait un usage litt€raire en le s€parant de son contexte d'origine. Selon cette position radicale, lacritique biographique ou sociologique, ou la critique qui explique l'Šuvre par la tradition litt€raire(Sainte-Beuve, Taine, Bruneti…re), toutes variantes de la critique historique, peuvent ‡tre tenues pourext€rieures „ la litt€rature.

Mais si la contextualisation historique n'est pas pertinente, la stylistique l'est-elle plus ? La notion de styleappartient au langage ordinaire et il faut d'abord l'affiner. Or la recherche d'une d€finition du style, commecelle de la litt€rature, est in€vitablement pol€mique. Elle repose toujours sur une variante de l'oppositionpopulaire de la norme et de l'€cart, ou de la forme et du contenu, c'est-„-dire encore des dichotomies quivisent „ d€truire l'adversaire, plutˆt que des concepts. Les variations stylistiques ne sont pas descriptiblesautrement que comme des diff€rences de signification : leur pertinence est linguistique, et non proprementlitt€raire.

Les deux grandes classes de d€finition de la critique ‹ • extrins…que ƒ et • intrins…que ƒ, comme lesappelaient Ren€ Wellek et Austin Warren ‹ ne sont pas satisfaisantes : la solution textuelle repose surl'opposition de la forme et du contenu, et la solution contextuelle sur l'opposition de l'origine historique et del'impression pr€sente. Historicisme et formalisme r€duisent la litt€rature „ la non-litt€rature : „ l'histoire ou au

langage. De proche en proche, il est facile de montrer que la critique litt€raire n'existe pas d…s lors qu'on aretir€ les discours historique, sociologique, id€ologique, psychanalytique, linguistique, etc., ou que sa nature etses buts sont impossibles „ d€finir analytiquement.

La critique, comme la litt€rature, suppose toujours un choix normatif : on porte un jugement sur l'€tatpr€sent de la critique, on r€agit „ une situation qui demande „ ‡tre corrig€e et on appelle cela d€finir lacritique. La critique est par nature oppositionnelle, jusqu'au moment ‹ cela semble son destin ‹ o‰ elles'institue en une p€dagogie : c'est pourquoi elle prend si souvent l'allure d'un manifeste. Mais si les d€finitionsde la critique sont des normes pour l'action, aucune ne s'impose logiquement ; elles rivalisent en cherchant „s'exclure l'une l'autre.

Tout est-il permis ?Les €tudes litt€raires ont cet avantage sur la recherche philosophique, historique ou linguistique, qu'on y

est d'autant plus libre que l'on ne sait d€finir ni la litt€rature ni la critique. Tout est-il donc permis sous lacondition de l'originalit€ et de la virtuosit€ ? Ou bien des crit…res permettent-ils de comparer et d'€valuer des

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approches diff€rentes ? Une appr€ciation raisonnable est-elle possible ? Y a-t-il une histoire, un progr…s de lacritique litt€raire ?

Quand l'analyse ne parvient pas „ ordonner, on en appelle „ l'histoire : de nombreux ouvrages racontentles aventures de la critique des origines „ nos jours, faute de pouvoir en faire la th€orie. Ils sont en g€n€ralillisibles, ne font qu'accentuer le d€sordre et donnent le sentiment d'un ressassement sans fin. Une histoire dela critique devrait montrer comment on passe d'un mod…le „ un autre au cours du temps. Dans les sciences, lemod…le ou paradigme est une th€orie apparue pour r€soudre un probl…me et appliqu€e ensuite „ d'autresprobl…mes. Il r€git l'activit€ scientifique puis c…de la place au paradigme suivant, lequel constitue un progr…s.

C'est un cadre th€orique, une hypoth…se analogue „ la pr€compr€hension qui, dans le cercle herm€neutique,pr€c…de l'explicitation. L'€pist€mologie moderne reconna†t qu'il n'y a pas de faits observ€s sans hypoth…sepr€alable, et l'explication scientifique elle-m‡me se pense sur le mod…le de la compr€hension herm€neutique.La critique, comme toute activit€ explicative ou interpr€tative, construit son objet, qui ne lui pr€existe pas. Lechoix de ce qui est litt€raire, c'est-„-dire des faits pertinents „ €tudier, d€pend d'une hypoth…se th€orique. Et lacircularit€ des faits et de l'hypoth…se implique qu'un changement de paradigme modifie les faits pertinents :d'o‰ l'absence de communication entre paradigmes diff€rents, qui n'appellent pas • litt€rature ƒ la m‡mechose.

Dans la critique litt€raire, un paradigme ne c…de pas la place „ un autre parce que son programme s'est oune s'est pas r€alis€. Les nouveaux paradigmes paraissent d€pendre de remaniements des disciplines voisines :ph€nom€nologie, herm€neutique, marxisme, psychanalyse, structuralisme, poststructuralisme suscitent

chacun une critique litt€raire. Et un paradigme n'en €vacue pas n€cessairement un autre. Au contraire, chacuncontinue „ vivre sa vie en jetant des anath…mes sur les autres, dans le contexte d'une lutte de pouvoir.Innombrables sont les paradigmes disponibles aujourd'hui, et le choix de l'un d'eux est motiv€ moins par sonrendement que par d'autres choix, politiques, religieux, esth€tiques, existentiels.

Une histoire de la critique se heurte aux m‡mes obstacles qu'une th€orie de la critique. Divers mod…les onttour „ tour domin€ la sc…ne depuis le d€but du XIX e si…cle, mais leur succession ne repr€sente pas un progr…s.Elle prend place dans un €ternel retour, un va-et-vient ind€fini, un rythme alternatif : texte-contexte,dedans-dehors, interne-externe. Ainsi, en France, le mod…le philologique ou positiviste a suscit€ par r€action unmod…le intuitif d€nonŒant l'insuffisance de la m€thode historique et pr‡chant la sympathie. Ensuite, refusant „la fois le positivisme et l'intuition, des mod…les d'explication externe se sont appuy€s sur d'autres champsintellectuels, comme le marxisme ou la psychanalyse. Ces sollicitations contextuelles ont provoqu€ alors un

retour „ des mod…les immanents, cherchant les lois propres de la litt€rature dans une analyse de sesstructures. Et ainsi de suite. Les mod…les critiques ne meurent pas et le champ de la critique sembleaujourd'hui tr…s ouvert, en l'absence d'un paradigme dominant.

II-Les mod…les contextuels ou explicatifs

La philologie

Ce qu'on appelle une • €dition critique ƒ ‹ comprenant l'€tablissement du texte, c'est-„-dire le choix d'untexte de base, l'€tablissement des variantes par rapport „ ce texte de base, et toute l'information disponiblesur les diff€rents €tats du texte ‹ reste fid…le au sens premier du mot • critique ƒ, lorsqu'il s'est r€introduit enfranŒais au XVIe si…cle : • grammairien ƒ, • critique ƒ, • philologue ƒ d€signent alors l'€diteur des textesanciens. En anglais, la philologie se nomme encore textual criticism . Il s'agit du mod…le le plus ancien etincontestable de la critique litt€raire, perp€tu€ depuis la red€couverte des lettres „ la Renaissance, €tendu auxtextes du Moyen ge au XIX e si…cle, puis aux litt€ratures classique et moderne. Le principe de la philologie enFrance demeure le respect de la derni…re €dition revue par l'auteur, mais on s'int€resse aussi „ la version laplus ancienne d'un texte. Nouveau cas de binarisme : l'histoire de la philologie balance entre deux visionsfinalis€es : le respect de l'intention derni…re de l'auteur selon une id€e classique valorisant l'ach…vement, ou leprivil…ge romantique accord€ „ la premi…re inspiration.

Ž cˆt€ de la critique externe, qui €tablit le texte, la tradition philologique distingue la critique interne, quirestitue le contexte, car le sens du texte se d€duit „ ses yeux des circonstances de son apparition. Cet axiomea €t€ formalis€ par l'herm€neutique philologique, dont Schleiermacher fut le fondateur en Allemagne,expliquant le texte par son contexte d'origine, et postulant qu'on peut reconstruire ce contexte par la disciplinehistorique.

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La philologie n'est plus dominante, mais il y a toujours des philologues, m‡me si on ne pense plus „ eux enpremier quand on parle de critique litt€raire. En Italie, Gianfranco Contini, sous le nom de • critique desvariantes ƒ, entendue au sens large, a renouvel€ au XX e si…cle les rapports de la critique et de la philologie. EnFrance, la vieille discipline a €t€ r€habilit€e sous l'appellation de • critique g€n€tique ƒ, laquelle, marqu€e parl'approche synchronique et structuraliste, s'int€resse moins au produit qu'„ la production, „ l'€dition critiquequ'au processus des €tats du texte, refusant la vision t€l€ologique qui privil€gie l'inspiration premi…re oul'ach…vement parfait.

L'histoire litt€raireLe sixi…me livre de la Poƒtique de Jules C€sar Scaliger (1561), intitul€ Criticus , dresse un tableau

comparatif des po…tes grecs et latins : d…s le XVI e si…cle, le terme • critique ƒ n'est plus limit€ „ la philologie.Au cours du XVIIe si…cle, en France, la critique se s€pare de la grammaire et de la rh€torique, et remplace peu „peu la po€tique, sous laquelle on a parl€ de la litt€rature jusque-l„. Li€ au scepticisme, au refus de l'autorit€ etdes r…gles, „ la d€fense du go t et aux belles-lettres, la critique, au sens moderne, appara†t avec l'esprithistorique, lors de la querelle des Anciens et des Modernes, en r€action contre une th€orie rationnelle ouaristot€licienne de la litt€rature postulant des canons €ternels et universels du jugement esth€tique. La critiqueest ins€parable du criticisme : dans sa Critique de la facultƒ de juger , Kant €tablira la subjectivit€ du jugementde go t, qui fait cependant appel „ un jugement g€n€ral, au sens commun de l'humanit€. Ž la fin duXVIIIe si…cle, la critique se pr€sente comme une m€diation entre la subjectivit€ du jugement esth€tique etl'objectivit€ du sens commun, et elle est par d€finition historique. Herder et les fr…res Schlegel s'interrogent surle rapport qui existe entre le jugement personnel et l'objectivit€ scientifique, l'art et la science.

Ž son €mergence, la critique historique et positiviste, marqu€e par le romantisme, est relativiste etdescriptive. Elle s'oppose „ la tradition absolutiste et prescriptive, classique ou n€o-classique, jugeant touteŠuvre par rapport „ des normes intemporelles. Au XIX e si…cle, le relativisme est li€ „ l'affirmation de valeursnationales et historiques, comme dans De l'Allemagne de Mme de Sta l. Sainte-Beuve, dans ses Critiques et

portraits littƒraires , explique les Šuvres par la vie des auteurs. Taine, ensuite, explique les individus par troisfacteurs : la race, le milieu et le moment ; ce sont les d€buts de la critique sociologique, qui se d€velopperaplus tard dans une perspective marxiste. Enfin, Ferdinand Bruneti…re ajoute aux d€terminations biographiqueet sociale celle de la tradition litt€raire elle-m‡me, repr€sent€e par le genre, qui agit sur une Šuvre, ou auquelelle r€agit. Bruneti…re calque l'histoire des genres sur celle des esp…ces selon Darwin.

La philologie et la critique d€terministe partagent l'id€e que l'€crivain et son Šuvre doivent ‡tre comprisdans leur situation historique. Au tournant du si…cle, marqu€ par l'histoire positiviste mais aussi par lasociologie de Durkheim, Gustave Lanson formula l'id€al d'une critique objective, r€agissant „ l'impressionnismede ses contemporains. Sa position est plus souple que celle de Sainte-Beuve, Taine et Bruneti…re : l'histoirepositiviste accumule les faits relatifs „ l'Šuvre, „ son auteur et „ leur temps. Loin des grandes lois de Taine etde Bruneti…re, les sources et les influences deviennent les ma†tres mots de l'histoire litt€raire, qui multiplie lesmonographies et renvoie „ plus tard le programme g€n€ral d'une • histoire de la vie litt€raire en France ƒ.Dans l'esprit de Lanson, l'histoire litt€raire n'est qu'une premi…re €tape, qui n'exclut pas le plaisir de lire ni lecontact subjectif avec les textes. Il s'agit de contrˆler les impressions, pas de les €liminer. L'histoire litt€rairelansonienne s'est pourtant r€tr€cie „ mesure qu'elle fournissait le cadre de l'approche scolaire de la litt€rature.Ce qui reste d€terminant, c'est une conception rationaliste du sujet-auteur pr€sidant „ l'Šuvre, et une visionstrictement r€f€rentielle du langage.

Comme le mod…le philologique, l'histoire litt€raire s'est maintenue. Au milieu des ann€es 1960, lapol€mique, „ propos de Racine, entre Raymond Picard, repr€sentant la Sorbonne, et Roland Barthes,promoteur de la • nouvelle critique ƒ, montra que l'histoire litt€raire restait un enjeu vivace. Elle demeure tr…spr€sente, notamment dans l'enseignement de la litt€rature.

Sociologie et psychanalyse de la litt€rature

Taine rapportait l'individu „ ses conditions sociales. Ce sera le principe du tout-venant de la critique

marxiste, faisant de la litt€rature et de l'art un reflet de la situation €conomique, de la superstructure und€calque de l'infrastructure. De Gy‘rgy Luk’cs „ Lucien Goldmann, cette doctrine est devenue plus complexe,d…s lors qu'elle a vu les sujets de la cr€ation dans les groupes et non plus les individus, mais elle restefonci…rement d€terministe. Moins simplistes, et postulant une autonomie relative des formes esth€tiques parrapport aux d€terminations socio-€conomiques, les sociocritiques contemporaines s'inspirent, en Allemagne de

Theodor W. Adorno et de l'€cole de Francfort, en Grande-Bretagne de Raymond Williams et du mat€rialisme

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Le mod…le existentialiste

La critique existentialiste a pr€serv€ les notions d'individu et de subjectivit€ promues par les €crivainseux-m‡mes. Les grandes monographies de Sartre sur Baudelaire, Genet et Flaubert, empruntant au marxismeet „ la psychanalyse, maintiennent la primaut€ de l'homme „ travers une s€rie de m€diations, comme lafamille et les groupes, qui font passer de la totalit€ „ l'unicit€. La relation de l'individu „ la totalit€ est pens€ed'une faŒon singuli…re et dynamique qui n'est pas si €loign€e de Thibaudet, moins l'intuition, ou de Du Bos,moins la phras€ologie spiritualiste. Mais les pr€suppos€s sur le sujet et le langage restent les m‡mes.

Malgr€ les assauts r€p€t€s contre l'auteur, l'homme et le sujet conduits par le structuralisme et lepoststructuralisme, au nom de Nietzsche et de Heidegger, de Saussure ou de Lacan, l'hypoth…se d'uneconscience cr€atrice, f t-ce sur le mod…le d'une intentionnalit€ transcendantale, demeure l'id€ologie la pluscommune de la critique litt€raire. On la partage spontan€ment d…s qu'on imagine une unit€ de l'Šuvre d'un€crivain, une unit€ du livre. L'auteur et le livre restent les croyances les plus r€pandues lorsqu'on parle delitt€rature. C'est pourquoi la critique interpr€tative entre moins dans la pol€mique que la critique historique oula critique textuelle.

IV-Les mod…les textuels ou analytiques

Contre l'histoire litt€raire et la critique interpr€tative se sont violemment dress€es, en France, „ partir des

ann€es 1960, des critiques contestant tout empire du sujet, sous sa forme rationnelle ou transcendantale,cart€sienne ou ph€nom€nologique, et lui substituant le primat du langage. Une nouvelle conception dulangage, venue de Saussure, qui mettait l'accent sur l'arbitraire de la langue et sur son absence der€f€rentialit€, a favoris€ une nouvelle conception du sujet, d€sormais pens€ comme assujetti au langage ou „la structure, et de la critique, d€nonŒant l'intention ou l'intentionnalit€, refusant de consid€rer l'auteur commeune instance pr€sidant au sens. Tout cela, en fait, n'€tait pas si nouveau. D'une part, la parent€ est €videnteavec les anciennes rh€torique et po€tique ; d'autre part, ce retour au texte avait d€j„ eu lieu partout ailleurs,depuis plusieurs d€cennies, mais on l'ignorait dans l'hexagone, en particulier „ la Sorbonne.

Rh€torique et po€tique

Aristote est l'auteur d'une Rhƒtorique , ou art du discours public, et d'une Poƒtique , ou art de l'imitation, quisont les trait€s fondamentaux pour toute grammaire du discours ou du texte. Rh€torique et po€tique €taientdes grammaires prescriptives d€crivant tous les discours acceptables dans un genre donn€ et les offrantcomme des mod…les „ suivre pour produire d'autres discours. La Poƒtique est une th€orie normative desformes de la trag€die et de l'€pop€e. Cette tradition €minente a €t€ peu „ peu d€mantel€e. La rh€toriquem€di€vale, situ€e entre la grammaire et la dialectique dans le trivium des arts lib€raux, €tait encore un artcomplet du texte. Mais, au cours de la Renaissance et de l'“ge classique, peu „ peu r€duite „ une seule de sescinq parties, elle est devenue un trait€ des figures et des tropes. Ž la fin du XIX e si…cle, elle a €t€ €cart€e del'enseignement au profit de la discipline historique.

Le projet d'une science du texte apparu dans les ann€es 1960 renoue avec la tradition aristot€licienne,moins son aspect prescriptif, par la volont€ d'atteindre des invariants ou des universaux de la litt€rature, par lesouci g€n€raliste et th€orique oppos€ au relativisme historique et herm€neutique dominant depuis Kant ets'attachant aux Šuvres et aux €crivains dans leur particularit€. Non seulement la nouvelle critique a remis envigueur le terme • po€tique ƒ pour d€signer autre chose que la stylistique et prosodie d'un €crivain ‹ la• po€tique de Ch€nier ƒ ‹, mais Roland Barthes a m‡me contribu€, deux ou trois g€n€rations apr…s la mort dela rh€torique, „ sa r€habilitation en lui consacrant un vade-mecum.

La linguistique saussurienne, le formalisme russe, le New Criticism

Pour le nouveau textualisme franŒais, il y a deux ou trois r€f€rences plus proches que l'aristot€lisme : lalinguistique saussurienne, le formalisme russe et le New Criticism anglo-am€ricain, tardivement d€couverts par

une culture litt€raire et philosophique parisienne relativement isol€e du reste du monde.

Quelques principes, extraits du Cours de linguistique gƒnƒrale de Saussure, sont devenus les articles de foidu structuralisme : l'opposition langue-parole, la conception de la langue comme syst…me de signes, le signecomme opposition de l'image acoustique et du concept (signifiant et signifi€), l'arbitraire du signe, la d€finition

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du signe comme valeur (comme diff€rence avec les autres signes d€coupant le monde ph€nom€nal), enfinl'opposition de la synchronie et de la diachronie. Saussure ins€rait la linguistique dans une s€miologie futurequi traiterait des autres syst…mes de signes : les principes du saussurianisme vont ‡tre ainsi transpos€s „l'analyse de la litt€rature et de la culture.

Plus de quarante ans avant le structuralisme franŒais, les formalistes russes ‹ deux groupes de linguistes etde po€ticiens form€s en 1915 et 1916 ‹, puis les membres du Cercle linguistique de Prague (1926-1939)‹ Roman Jakobson fut la cheville ouvri…re de tous ces c€nacles ‹ avaient entrepris l'€tude syst€matique de lalitt€rature. Un article de 1917 de Viktor B. Chklovski, • L'Art comme proc€d€ ƒ, leur servait de manifeste. Sous

l'influence du futurisme et contre la po€sie symboliste, le formalisme proclame l'autonomie de l'Šuvre litt€raireet de la science de la litt€rature. Il s'agit, en mettant l'accent sur la litt€rature comme ensemble de proc€d€sformels, de fonder son €tude scientifique en niant sa dimension repr€sentative ou expressive, en d€nonŒantl'humanisme li€ „ la croyance en l'unit€ essentielle du texte et de sa signification. Ce sont les formalistes quiont substitu€, comme objet de la critique, la litt€rarit€ „ la litt€rature, c'est-„-dire ce qui fait qu'un texte est untexte litt€raire, ou encore le syst…me de proc€d€s formels qui rend la litt€rature possible. La d€familiarisationou la d€sautomatisation du langage ordinaire caract€riserait la litt€rature, un ensemble de proc€d€s quibloquent la perception automatique et provoquent une perception po€tique du langage. Mais les proc€d€slitt€raires ne restent pas toujours €tranges, ils s'automatisent eux-m‡mes. La tradition litt€raire n'est donc pasimmobile ni continue, mais faite de ruptures formelles qui renouvellent le syst…me. Malgr€ son scientisme, leformalisme ne voit pas la litt€rarit€ en termes absolus, mais la conŒoit comme un syst…me relationnelchangeant dans l'histoire. Au-del„ de l'€tude intrins…que du texte individuel et de ses contenus, la vis€e est

bien le syst…me synchronique et ses transformations.

En Angleterre ‹ sous l'influence du po…te Thomas Stearns Eliot et du critique Ivor Armstrong Richards ‹mais surtout aux ”tats-Unis ‹ John Crowe Ransom, Allen Tate, Cleanth Brooks, le po…te Robert Penn Warren ‹,sans passer par l'€tape de l'herm€neutique ph€nom€nologique, le New Criticism a €galement remis en causel'h€g€monie de l'histoire litt€raire biographique et sociale d…s les ann€es 1930. N€gativement, le New Criticismse d€finit par le rejet de l'illusion g€n€tique ( genetic fallacy ), expliquant l'Šuvre par des causes externes, del'illusion intentionnelle ( intentional fallacy ), la r€f€rant „ son auteur, et de l'illusion affective ( affective fallacy ),l'abordant „ partir des €motions qu'elle €veille. Positivement, les new critics prˆnent le retour au texte et salecture microscopique ( close reading ), l'analyse des propri€t€s structurales du po…me isol€ et consid€r€comme objet verbal et syst…me clos.

Ainsi, la critique textuelle et analytique moderne retrouve d'anciennes notions de la litt€rature, comme leg€n€ralisme ou m‡me l'universalisme de l'Antiquit€ et du classicisme ‹ c'est pour ainsi dire un retour auxAnciens contre les Modernes ‹, mais aussi des mod…les formalistes d€j„ r€pandus ailleurs en Europe et enAm€rique du Nord. En France m‡me, on peut songer „ la poiƒtique de Val€ry et aux efforts confus de JeanPaulhan tendant „ l'analyse d'une rh€toricit€ non normative de la litt€rature, „ leur insistance sur le langagepar opposition „ tout autre param…tre constitutif de la litt€rature.

Structuralisme, s€miotique, po€tique, narratologie

Entre Saussure, Jakobson et la critique structurale franŒaise, L€vi-Strauss a jou€ un rˆle essentiel dem€diateur, appliquant le mod…le linguistique „ d'autres syst…mes culturels, d'abord la parent€ puis les mythes.L'analyse du r€cit pouvait suivre (Roland Barthes, Algirdas-Julien Greimas, Umberto Eco, Tzvetan Todorov,G€rard Genette, Julia Kristeva). Le programme d'une s€miologie figurait chez Saussure, et sa th€orie dulangage a servi de mod…le pour l'€tude de tous les ph€nom…nes culturels conŒus comme syst…mes dediff€rences, o‰ la signification d€pend des relations entre les €l€ments. Structuralisme et s€miologie, po€tiqueet narratologie ‹ toutes ces appellations recouvrent plus ou moins la m‡me approche analytique ‹ ont d…s lorscherch€ „ d€crire les conditions de la signification litt€raire sur le patron de la signification linguistique, „savoir un code sous-jacent aux r€alisations individuelles, comme la langue s'oppose „ la parole.

La po€tique et la narratologie visent l'€tablissement d'une grammaire g€n€rale, descriptive et nonnormative, „ la diff€rence d'Aristote et du classicisme, de la litt€rature dans son immanence, l'€quivalent de lalangue dont les Šuvres seraient la parole ; elles mettent „ jour les • cat€gories qui permettent de saisir „ lafois l'unit€ et la vari€t€ de toutes les Šuvres litt€raires ƒ, selon Todorov. L'intention est de d€couvrir lesprincipes g€n€raux dans les Šuvres individuelles plutˆt que d'interpr€ter des Šuvres individuelles „ partir desprincipes g€n€raux. En ce sens, les exp€riences les plus r€ussies paraissent le syst…me du r€cit €tabli parBarthes „ partir d'une nouvelle de Balzac ( S/Z , 1970), ou le petit trait€ de narratologie d€gag€ par Genette del'Šuvre de Proust (• Discours du r€cit ƒ, in Figures III, 1972). Barthes, avec ses €lƒments de sƒmiologie (1964)et son Syst†me de la mode (1967), a €tendu ce type d'analyse „ d'autres ph€nom…nes culturels.

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Pour une telle critique, les textes ne sont pas „ expliquer ni „ interpr€ter („ la diff€rence des buts que sedonnent l'histoire et l'herm€neutique), ils sont des moyens pour d€finir la litt€rature ou, mieux, la litt€rarit€,comme cat€gorie universelle. Le structuralisme, institu€ en p€dagogie, n'a-t-il pas cependant oscill€ entre deuxtentations : celle de fournir une m€thode et un outil pour interpr€ter les textes, s€par€s de leur contextehistorique et social, comme des fonctions du syst…me, et, „ l'autre extr‡me, celle de constituer une€pist€mologie g€n€rale permettant de comprendre le mode d'existence de la litt€rature ?

Stylistique et tropologie

Apparue au XIX e si…cle, la stylistique s'est oppos€e „ la rh€torique comme une discipline historique „ uneth€orie g€n€rale. Stylistique de la parole plutˆt que de la langue, elle a occup€ le vide laiss€ par la rh€toriqueet la po€tique. Parall…lement, la stylistique d'inspiration ph€nom€nologique de Leo Spitzer remontait des faitsde style „ la compr€hension d'une conscience. Tr…s tˆt, avant le structuralisme, la stylistique saussurienne deCharles Bally s'est pr€sent€e comme une stylistique de la langue par opposition „ la stylistique de la parole. Ence sens, la stylistique a disparu avec le retour de la po€tique et de la narratologie. Mais une approche de laproductivit€ textuelle comme celle de Michael Riffaterre, s'opposant „ la ligne Jakobson - L€vi-Strauss, montrequ'apr…s l'essoufflement du structuralisme c'est dans le domaine de la stylistique que le formalisme reste leplus vivant.

Quant „ la tropologie, elle remonte „ un g€n€ralisme lui aussi ind€pendant des mod…les textuels et serattache „ la Weltliteratur de Goethe, posant l'unit€ de toutes les litt€ratures occidentales par-del„ lesdiff€rences nationales. Erich Auerbach, €tudiant l'imitation du r€el (la mimƒsis ) depuis Hom…re jusqu'„ Joyce, etErnst Robert Curtius, d€montrant la survivance de topoi grecs, romains ou bibliques dans la litt€raturemoderne, avaient montr€, chacun „ sa mani…re, que la litt€rature d€pendait de syst…mes internessous-jacents. Dans l'€clectisme contemporain, on ne cesse pas de revenir „ ces grands travaux.

V-Les mod…les • gnostiques ƒ ou ind€termin€s

Faut-il ajouter un quatri…me paradigme pour r€unir certaines mani…res de la critique litt€rairecontemporaine ? Les trois pr€c€dents ‹ explicatif, interpr€tatif, analytique ‹ rel…vent de conceptions du sujet etdu langage ‹ positiviste, ph€nom€nologique, structurale ‹ apr…s lesquelles on n'a rien invent€. Toutefois, lemod…le textuel ne se situe pas sur le m‡me plan que les autres : il s'int€resse moins aux textes r€els qu'ausyst…me des textes possibles. La textualit€, refusant l'histoire et l'herm€neutique, a voulu se garder d'expliqueret d'interpr€ter : mais on ne peut pas s'en emp‡cher. Or la textualit€ entra†ne un ind€terminisme absolu del'explication et de l'interpr€tation. Cet ind€terminisme r€agit contre le paradigme textuel comme lepost-structuralisme („ la fois n€o-structuralisme et antistructuralisme) contre le structuralisme : il le porte „ seslimites et, ce faisant, le renverse.

On peut aussi rendre compte de l'€mergence de mod…les critiques ind€terministes „ partir del'herm€neutique. La philologie jugeait possible (et n€cessaire et suffisante) la reconstruction du contextehistorique de l'Šuvre ; la ph€nom€nologie supposait que le trajet de la pr€compr€hension „ l'explicitationpouvait ‡tre reparcouru en sens inverse par l'interpr…te sympathique. Le cercle herm€neutique, deSchleiermacher „ Dilthey et Husserl, permettait de passer du pr€sent au pass€, ou de l'Šuvre „ la conscience.Mais, avec la philosophie de Heidegger, le cercle herm€neutique est devenu vicieux : l'interpr…te est enferm€dans son propre horizon de pr€compr€hension, sans espoir d'en sortir. Aucune communication n'a plus lieuentre des contextes historiques s€par€s. Le cercle herm€neutique s'est transform€ par €tapes en une prison• gnostique ƒ o‰ chaque existence historique est r€duite „ elle-m‡me sans jamais rencontrer l'autre.

La critique ind€terministe doit enfin beaucoup „ Nietzsche, qui r€duisait le langage „ la rh€torique, ouplutˆt „ sa rh€toricit€ inintentionnelle, et la v€rit€ au jeu des figures et des tropes. Dans la lign€enietzsch€enne revivifi€e par le poststructuralisme franŒais, le langage n'a plus de relation avec la r€alit€, lesigne avec le r€f€rent : le monde est un texte. Le point d'application de la critique se d€place de la production„ la r€ception des textes, car leur sens est tenu pour ind€termin€ : nous leur en imposons, qu'ils ne poss…dentpas par eux-m‡mes. Aucune signification n'est ni fixe ni stable ; il n'existe pas de sens unique, final et vrai.Aussi l'interpr€tation devient-elle totalement libre. L'ind€terminisme poststructuraliste et l'herm€neutiquepost-heidegg€rienne se rejoignent dans un nihilisme critique adopt€ par quelques professeurs am€ricains, pourlesquels toute interpr€tation est misinterpretation , contresens ou malentendu. Du coup, il n'y a plus dediff€rence non plus entre critique et litt€rature ; pour Harold Bloom, toute critique est litt€rature.

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L'esth€tique de la r€ception

L'esth€tique de la r€ception appara†t comme un compromis entre l'histoire litt€raire et la philosophieherm€neutique. Ž la question • comment faire encore de l'histoire litt€raire apr…s Heidegger ? ƒ, elle r€pond enmettant l'accent sur le lecteur, sur la relation du texte et du lecteur, sur le proc…s de la lecture.

Son point de d€part remonte „ Husserl et „ l'id€e d'une conscience dans la lecture. Le critique allemandWolfgang Iser s'appuie sur l'esth€tique ph€nom€nologique de Roman Ingarden, faisant du texte une structurepotentielle que le lecteur concr€tise : celui-ci met le texte en rapport avec des normes ou des valeurs

extralitt€raires, par l'interm€diaire desquelles il donne sens „ son exp€rience textuelle. Iser ne pr€cise pasquelle libert€ a le lecteur pour remplir les structures textuelles „ partir de ses propres normes, ni quel contrˆlea le texte sur la faŒon dont il est lu. Quoi qu'il en soit, les normes du lecteur sont modifi€es par l'exp€rience dela lecture. Lorsque nous lisons, notre attente est fonction de ce que nous avons d€j„ lu, mais les €v€nementsinattendus nous contraignent „ reformuler nos attentes et „ r€interpr€ter ce que nous avons d€j„ lu. La lectureproc…de ainsi vers l'avant et vers l'arri…re „ la fois, un crit…re de coh€rence guidant la recherche du sens, etdes r€visions continuelles garantissent qu'un sens totalisant se d€gage du texte.

Sur la base de la ph€nom€nologie d'Ingarden, Hans Robert Jauss a cherch€ „ historiciser, ou „contextualiser, le proc…s de la lecture. La concr€tisation du texte par la lecture est „ ses yeux historique, carelle d€pend des • horizons d'attente ƒ selon lesquels on lit et €value les textes „ une date donn€e. Mais leshorizons d'attente originaux ne constituent pas des significations absolues et universelles, contrairement „ ce

que voulait Schleiermacher. Jauss prend appui sur l'herm€neutique de Hans Georg Gadamer, pour qui le sensdu texte d€pend d'un dialogue sans fin entre pass€ et pr€sent, la position relative de l'interpr…te influenŒant lar€ception et la compr€hension du pass€. Nous ne connaissons jamais le pass€ qu'„ la lumi…re du pr€sent, dansce que Jauss appelle une • fusion d'horizons ƒ. La signification et la valeur d'un texte sont donc ins€parables del'histoire de sa r€ception. Comment passer cependant d'une concr€tisation individuelle „ un proc…s g€n€ral dela r€ception, ou „ un horizon d'attente historique ? Cette tentative pour sauver, apr…s Nietzsche et Heidegger,la philologie et l'histoire litt€raire en les transformant en une histoire de la r€ception reste probl€matique.

La Reader-Response Theory am€ricaine, sans avoir de th€orie unique, a fait virer l'esth€tique de lar€ception vers l'ind€termination du sens. Alors que la s€miotique de Riffaterre insiste sur les contraintes que letexte impose au lecteur, Stanley Fish emprunte la voie oppos€e. Tenant d'abord d'une stylistique affective, ilanalysait la lecture comme proc…s temporel et exp€rience „ la mani…re d'Iser. Il en vint pourtant „ reconna†tre

que ce proc…s n'est pas celui de la lecture, mais seulement d' une lecture, et posa ainsi la notion de• communaut€s interpr€tatives ƒ, des groupes de lecteurs aux comp€tences partag€es. Selon Fish, c'est lacommunaut€ interpr€tative qui d€termine le sens plutˆt que les propri€t€s du texte lui-m‡me, qui se dissoutdans la lecture.

La d€construction

On appelle d€construction les lectures de textes litt€raires qui s'inspirent de la r€flexion philosophique de Jacques Derrida sur la ph€nom€nologie et le structuralisme, en jouant l'un contre l'autre et vice versa. Lepassage au poststructuralisme a lieu par la critique et la radicalisation du saussurianisme, l'insistance sur latextualit€ et la diff€rence au d€triment du pr€texte et de la r€f€rence. Le point de d€part consiste dans lacritique du phonocentrisme et du logocentrisme de la tradition linguistique et philosophique occidentale.Derrida lui reproche de reposer sur la primaut€ de la parole dans une m€taphysique id€aliste de la pr€sence,qui se trouverait derri…re ou sous le langage et le texte : l'id€e, l'intention, la v€rit€, le sens, la r€f€rence que lelangage exprimerait. Pour cette tradition, les mots seraient transparents, la communication possible. Derridaveut montrer que la voix n'est pas premi…re mais suppose • toujours d€j„ ƒ une €criture, une institution ou unsyst…me de diff€rences : la langue de Saussure est une €criture sans laquelle il n'y a pas de parole. Toutlangage n'est que diff€rences de diff€rences et traces de traces, sans origine ni pr€sence. L'€criture, ladiff€rence, est partout : cela veut dire qu'il n'y a jamais d'origine assignable. L'€criture et la textualit€ d€fontles volont€s logocentriques „ travers les figures et les tropes, la rh€toricit€ ou figuralit€ de tout fait de langage.Saussure avanŒait de quoi miner toute m€taphysique de la pr€sence, mais il r€sista „ cette cons€quence ettomba lui aussi dans le logocentrisme en privil€giant la parole contre l'€criture, imaginant qu'il existe un

moment authentique o‰ le sens s'identifie „ l'intention. Or la parole est pour Derrida une forme d'€criture,soumise comme toute €criture „ l'instabilit€ du signe et „ l'ind€cidabilit€ du sens. De signe en signe ou designifiant en signifiant, le glissement du sens ne s'arr‡te jamais.

Cette r€flexion avait €t€ annonc€e par la m€taphysique litt€raire de Blanchot, l'un des premierspromoteurs de Heidegger en France. En s'appuyant sur Mallarm€ en particulier, Blanchot critiquait l'id€e du

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livre comme totalit€ pr€supposant un cr€ateur garant de l'unit€ du sens, c'est-„-dire l'axiome m‡me de lacritique de la conscience. Derrida rencontre €galement la d€construction am€ricaine (l'€cole dite de Yale : Paulde Man, Jay Hillis Miller, Geoffrey Hartman), dans l'id€e d'ind€termination du sens : le langage et le texte ne• marchent ƒ jamais comme on le voudrait, l'€criture et la textualit€ font toujours d€railler le • vouloir-dire ƒcomme signifi€, comme pr€sence „ repr€senter.

En pratique, la d€construction engage deux strat€gies critiques compl€mentaires : d€noncer la volont€logocentrique suppos€e partout „ l'Šuvre dans le langage et pr‡ter attention „ la rh€toricit€ du texte, auglissement ind€fini des signifiants sans signifi€ dernier, qui minent toute intentionnalit€. La signification €tant

instable et ind€cidable, et l'interpr€tation compromise, on ne peut que r€p€ter l'acte de d€construction et le jeu de la diff€rence „ l'Šuvre dans le texte, sans atteindre de compr€hension ni d'explication. Lad€construction n'est pas une analyse syst€matique, une m€thode ou un m€talangage de plus, qui impliqueraitencore une signification derni…re, mais une performance proche du texte qu'on d€fait, dans lequel se d€plie leparadoxe du logocentrisme et de l'€criture. Selon Derrida, le logocentrisme est in€vitable : on peut tout juste lepousser „ ses limites, jouer sur ses marges. La d€construction n'a donc pas plus de fin que l'€criture et latextualit€.

Apr…s le livre, depuis Mallarm€, on est pass€ „ la textualit€, au travail du texte comme production designifiants sans origine et sans auteur. La d€construction rejoint ainsi les positions de Barthes „ partir de sonrejet du scientisme structuraliste (• La Mort de l'auteur ƒ, 1968 ; • De l'Šuvre au texte ƒ, 1971 ; Le Plaisir dutexte , 1973), dans une sorte de comble du structuralisme se d€vorant lui-m‡me. Mais Barthes, moins absolu

que les d€constructeurs, ne d€cide pas si la pluralit€ du sens d€pend du texte ou de la lecture, et tend „distinguer deux sortes de textes : ceux de simple plaisir, en somme les vieux livres, et ceux de jouissance, quiminent la production du sens.

Dialogisme et intertextualit€

L'Šuvre de Mikha l Bakhtine est contemporaine du formalisme russe mais son influence s'est fait sentirplus tard, apr…s le structuralisme. Bakhtine se d€marquait des formalistes en d€crivant le fait linguistiquecomme proc…s social et situation communicationnelle. Cette insistance sur l'€nonciation a pour cons€quencede faire appara†tre la pluralit€ de sens des €nonc€s, que Bakhtine appelle • h€t€roglossie ƒ. Par les notions de• dialogisme ƒ et de • carnaval ƒ, qui rep…rent la polys€mie inh€rente au langage en action, Bakhtine anticipaitle mouvement de la linguistique vers la parole, par exemple chez ”mile Benveniste, apr…s qu'on avait privil€gi€la langue depuis Saussure.

Bakhtine continue „ envisager le texte par le biais de sa production et d€crit le roman comme juxtapositionde syst…mes de signification, ou encore actualisation dialogique de l'h€t€roglossie sociale : il s'agit de rendreune place au r€alisme dans le formalisme, au monde dans le texte. Mais les th…ses de Bakhtine serontr€interpr€t€es du cˆt€ de la r€ception, confirmant les th€ories de l'ind€termination du sens, notamment „travers Julia Kristeva, qui r€pandit en France le dialogisme bakhtinien sous le nom d'• intertextualit€ ƒ. L'id€edevient que tout texte est le produit d'autres textes. Comme le langage n'a pas d'autre r€f€rent que lui-m‡me,la litt€rature ne parle jamais que de la litt€rature, et la po€sie est po€sie de la po€sie. Le dialogisme etl'intertextualit€ aboutissent ainsi „ la notion d'• autor€f€rentialit€ ƒ, analysant tout texte comme texte dutexte.

Le f€minisme

Sur le mod…le propos€ par Simone de Beauvoir dans Le Deuxi†me Sexe (1949), on a analys€ le sexe(gender ) comme construction sociale distincte du sexe biologique ( sex ). Aux ”tats-Unis, o‰ le mouvementf€ministe a pris son essor dans les ann€es 1960, on a d€nonc€ les st€r€otypes f€minins et l'oppression desfemmes dans une soci€t€ jug€e patriarcale. Cela a donn€ lieu „ une critique id€ologique, au sens marxiste, del'image des femmes dans la litt€rature, de la repr€sentation et de la construction des rˆles sexuels par laculture. Mais la cat€gorie de la litt€rature n'€tait pas mise en cause, ni l'esth€tique repr€sentative etexpressive comme forme m‡me de l'oppression. La critique id€ologique ‹ sa variante f€ministe comme les

autres ‹ n'a pas touch€ aux rapports du pouvoir et de la repr€sentation.

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Simone de Beauvoir

La FranŒaise Simone de Beauvoir (1908-1986), romanci…re existentialiste (L'Invit€e),prix Goncourt (Les Mandarins), et f€ministe (Le Deuxi…me Sexe).(Hulton Getty)

Le second d€part du f€minisme critique a €t€ linguistique, structuraliste et surtout poststructuraliste, liantla tradition occidentale au • phallocentrisme ƒ, compl€ment ins€parable, selon Derrida, de son phonocentrismeet de son logocentrisme. Luce Irigaray, H€l…ne Cixous, Julia Kristeva, les championnes de ce second f€minismeen France, €taient des linguistes de formation. L'attention s'est alors port€e sur la place du f€minin dans lalangue, et sur les textes des femmes. Les questions de l'€criture et de l'exp€rience f€minine ont €t€ mises aupremier plan dans l'analyse litt€raire et la d€finition d'une critique f€ministe, critique non seulement del'id€ologie mais de la litt€rature. Le f€minisme s'est ainsi r€v€l€ solidaire des herm€neutiques de la lecture, enajoutant que le lecteur mod…le avait €t€ jusque-l„ un homme, alors que les femmes apportent une autreexp€rience „ leur attente litt€raire, en questionnant la cat€gorie d'humaine nature comme principe du sens.Aux ”tats-Unis, l'alliance des minorit€s ethniques et sexuelles ( feminist , ethnic , gay and lesbian studies ) adonn€ une vocation de plus en plus politique „ la critique, devenue une sorte de militantisme focalis€ sur lesexclusions et les transgressions sociales.

Le mat€rialisme culturel

La th€orie de l'histoire a chang€, et l'effet s'en est aussi fait sentir dans la lecture des textes, y comprislitt€raires. Contrairement au r‡ve positiviste, le pass€ ne nous est accessible que sous la forme de textes,eux-m‡mes ins€parables de ceux qui constituent notre pr€sent. L'histoire n'est pas une, elle se compose d'unemultiplicit€ d'histoires ou de r€cits contradictoires, et elle n'a pas le sens unique que les philosophiestotalisantes lui voyaient depuis Hegel. L'histoire est un r€cit, qui met en sc…ne le pr€sent aussi bien que lepass€, et elle est analys€e elle-m‡me comme du texte, de la litt€rature, par les th€oriciens de l'histoire. Poureux, l'objectivit€ ou la transcendance de l'historien est un mirage, car il est engag€ dans les discours parlesquels il construit l'objet historique. Sans conscience de cet engagement, l'histoire est seulement uneprojection id€ologique.

Comme l'herm€neutique de la r€ception et la d€construction, la nouvelle histoire abolit la barri…re du texte

et du contexte, qui €tait au principe de toute la critique litt€raire, car les contextes ne sont eux-m‡mes que desconstructions narratives, ou encore des textes. Il n'y a que des textes . Inspir€ de Foucault, insistant sur lesrelations de pouvoir dont toute histoire, comme formation discursive, est le produit, le New Historicism(Stephen Greenblatt, Louis Adrian Montrose, Arthur F. Kinney) am€ricain s'int€resse aux exclus du discours etdu pouvoir. Marqu€ €galement par la d€finition de l'id€ologie par Althusser et les cultural studies du critiquebritannique Raymond Williams, le mat€rialisme culturel am€ricain ne s'occupe quasi plus de la litt€rature,soupŒonn€e d'€litisme par son caract…re canonique, mais lui pr€f…re toutes les formes de la culture,notamment populaires. On v€rifie a contrario que tout parti critique est bien une d€finition de la litt€rature, etaussi que jusqu'ici la critique, quelque radicale qu'elle se soit voulue, avait continu€ „ parler „ peu pr…s desm‡mes textes, de la m‡me litt€rature, la d€finissant autrement mais confirmant du coup sa l€gitimit€ quelleque soit l'hypoth…se faite „ son propos. L'€tat pr€sent de la critique est la destruction de la litt€rature.

Il y a deux faŒons de traiter de la critique litt€raire dans une encyclop€die : la th€orie et la vue d'ensemble.Les deux sont insatisfaisantes. La th€orie de la critique aboutit „ la confusion parce que toute critique est uneid€ologie de la litt€rature. Et le panorama laisse d'immenses trous : on a fait comme si, par exemple, la critiquelitt€raire, li€e au criticisme, appartenait „ l'Occident moderne. C'est faux s'il est impossible de d€finir la critiqueautrement que comme tout discours sur la litt€rature, et la litt€rature comme tout texte, et, petit „ petit, toutcontexte comme texte. Dans la tradition occidentale elle-m‡me, on n'a pas parl€ de tout non plus, ce quin'aurait fait qu'ajouter au chaos.

La critique litt€raire, telle qu'elle a €t€ analys€e ici, est ins€parable de l'enseignement de la litt€rature. Ellesert „ l€gitimer cet enseignement et elle fournit des p€dagogies. Elle permet de parler de la litt€ratureautrement que par jugements de valeur. Elle est d€pendante de la litt€rature comme institution scolaire. Si,dans le pass€, des paradigmes critiques ont domin€ „ tour de rˆle et si ce n'est plus le cas, un des motifs de ce

changement, et du d€sordre ou de l'absence de norme critique qui en r€sulte, tient „ la transformation de lanature et des buts de l'€cole depuis sa d€mocratisation statistique, ou depuis que la scolarisation n'est plussynonyme de promotion sociale. Le nombre de critiques, c'est-„-dire de professeurs de lettres, a augment€consid€rablement depuis la Seconde Guerre mondiale, et avec lui les mod…les critiques, cultivant de plus enplus ouvertement l'originalit€ et la virtuosit€. La critique n'est plus une corporation mais une profession qui, au

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fur et „ mesure que son statut social se d€gradait, a proclam€ de plus en plus fort que rien ne la s€parait plusde la litt€rature et que tout €tait texte.

Antoine COMPAGNON

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8/12/2019 Critique littéraire

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