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Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines: Poupées d'enfants et jeux de poupées

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DESCRIPTION

Anthropologie socioculturelle, étude basée sur des recherches de terrain, des informations bibliographiques et muséographiques concernant les poupées-femmes, poupées-hommes et poupées-enfants; Aspects environnementaux et économiques, aspects socioculturels; Utiliser les cultures ludiques nord-africaines et sahariennes pour des actions pédagogiques et culturelles dans les pays en voie de développement et pour une éducation interculturelle et mondiale dans un contexte occidental, 2005.

Citation preview

2

Aux enfants sahariens et nord-africains

à mes enfants Tania, Ben, Ruben et Pia

à mes petits-enfants Linde, Camille, Ilona, Thilda, Oona et Alvin

Photo couverture :

Jeu de poupée des filles ghrib,

Sahara tunisien, 1975, photo de l'auteur.

Couverture : Johnny Friberg

Avec 163 photos et autres illustrations

ISBN 91-974811-9-X

Publié sur le CD inclus dans Rossie, J-P. (2005). Toys, play, culture and

society. An anthropological approach with reference to North Africa and

the Sahara.

© 2005 Jean-Pierre Rossie

Toute reproduction, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce

soit faite sans le consentement écrit de l'auteur ou de l'éditeur est illicite

sauf pour l'usage strictement privé du copiste ou les analyses et les

courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration

SITREC

KTH

SE–10044 Stockholm

Téléphone : +46 (0)8 790 64 98

Internet : http://www.sitrec.kth.se

E-mail : [email protected]

3

Contenu du CD

Les 144 photos couleurs et autres illustrations originales du livre Toys,

play, culture and society. An anthropological approach with reference

to North Africa and the Sahara

Les volumes de la collection :

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines

Poupées d‟enfants et jeux de poupées, 2005, 344 p., 163 ill.

L‟animal dans les jeux et jouets, 2005, 229 p., 107 ill.

Bibliographie commentée des jeux et jouets, 2005, 61 p.

Les volumes de la collection :

Saharan and North African Toy and Play Cultures

Children‟s dolls and doll play, 2005, 328 p., 163 ill.

The animal world in play, games and toys, 2005, 219 p., 107 ill.

Commented bibliography on play, games and toys, 2005, 61 p.

4

Jean-Pierre Rossie est né en 1940 à Gent (Gand), Belgique. Après des

études d'assistant social, puis d'africaniste à l'Université d'Etat de Gand,

il obtint en 1973 le diplôme de docteur en histoire et philologie africaine

à la même université. Sa thèse en néerlandais portait sur le thème

“Enfance et Société. Le processus de socialisation en Afrique centrale

patrilinéaire”.

Suite à un séjour de recherches auprès des semi-nomades Ghrib du

Sahara tunisien, il se consacra, depuis 1975, aux recherches sur les jeux

et jouets sahariens et nord-africains.

En 1967, il fut proclamé lauréat de la Belgische Stichting Roeping -

Fondation Belge de la Vocation. Entre 1968 et 1978 il travailla auprès du

Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek - Fonds National

pour la Recherche Scientifique, Bruxelles, qui a subventionné ses

recherches et publications jusqu'en 1992.

Entre 1980 et 1990, il était attaché comme assistant social et

anthropologue socioculturel aux services sociaux pour les immigrés,

spécialement les immigrés turcs et nord-africains, de la ville de Gand.

Un premier séjour de recherche dans le sud du Maroc en février 1992,

depuis lors suivi de séjours annuels dans ce pays, ont permis à l'auteur de

compléter, de vérifier et d'actualiser les données sur les jeux et jouets

marocains.

En 1993 il fut un des membres fondateurs de l'International Toy

Research Association (ITRA), de 1997 à 2001 il fut un membre du

Nordic Center for Research on Toys and Educational Media (NCFL), et

depuis sa création en mars 2002 il fait partie du Stockholm International

Toy Research Centre (SITREC).

Le 29 octobre 2004 la Lennart Ivarsson Scholarship Foundation lui a

attribué le BRIO Prize 2004.

5

Sommaire

Résumé 9

La collection : Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines 13

Préface de Dominique Champault 15

Introduction 17

Description des populations 23

Les Touaregs 23

Les Ghrib 24

Les Maures 25

Les Sahraouis 26

Les Regeybat 27

Les Chaamba 28

Les Teda 29

Les Belbala 30

Les Habitants de la Vallée de la Saoura 30

Les Mozabites 31

Les Kabyles 32

Les Chaouia 33

Les Populations des campagnes marocaines 34

Les Citadins de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie 36

Remerciements 41

Carte de l'Afrique du Nord et du Sahara 45

Carte du Maroc 47

6

Poupées d‟enfants et jeux de poupées sahariens et nord-africains 49

1 Les poupées-hommes 51

1.1 Résumé 51

1.2 Les poupées-méharistes 53

1.3 Les poupées-cavaliers 60

1.4 Les poupées-bergers 63

1.5 Les poupées-muletier 64

1.6 Les poupées-guerriers et poupées-notables 66

1.7 Les poupées-jeunes mariés 72

2 Les poupées femmes 79

2.1 Résumé 79

2.2 Les poupées-femmes touarègues 82

2.3 Les poupées-femmes ghrib 92

2.4 Les poupées-femmes maures 96

2.5 Les poupées-femmes sahraouies 102

2.6 Les poupées-femmes regeybat 102

2.7 Les poupées-femmes teda 103

2.8 Les poupées-femmes belbala 107

2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura 109

2.10 Les poupées-femmes mozabites 110

2.11 Les poupées-femmes kabyles 112

2.12 Les poupées femmes chaouia 112

2.13 Les poupées-femmes du Nord-ouest algérien 116

2.14 Les poupées femmes marocaines 117

2.15 Les poupées-femmes tunisiennes 205

3 Les poupées-enfants 209

3.1 Résumé 209

3.2 Les poupées-enfants touarègues 209

3.3 Les poupées-enfants maures 211

3.4 Les poupées-enfants kabyles 211

3.5 Les poupées-enfants chaouia 211

3.6 Les poupées-enfants marocaines 212

7

Conclusions 215

1 Synthèse 217

2 Aspects environnementaux et économiques 223

3 Aspects socioculturels 225

Utiliser la culture ludique nord-africaine et saharienne 233

1 Actions pédagogiques et culturelles

dans les pays en voie de développement 237

2 Éducation interculturelle et mondiale

dans un contexte occidental 255

Catalogue des poupées sahariennes et

nord-africaines du Musée de l‟Homme 261

1 Introduction 263

2 Les poupées-hommes 264

2.1 Les poupées-méharistes 264

2.2 Les poupées-cavaliers 267

2.3 Les poupées-guerriers et poupées-notables 269

2.4 Les poupées jeunes-mariés 274

3 Les poupées-femmes 275

3.1 Les poupées-femmes touarègues 275

3.2 Les poupées-femmes maures 278

3.3 Les poupées-femmes regeybat 280

3.4 Les poupées-femmes teda 280

3.5 Les poupées-femmes belbala 282

3.6 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura 283

3.7 Les poupées-femmes mozabites 284

3.8 Les poupées-femmes chaouia 284

3.9 Les poupées-femmes marocaines 286

3.10 Les poupées-femmes tunisiennes 287

8

4 Les poupées-enfants 288

4.1 Les poupées-enfants touarègues 288

4.2 Les poupées-enfants maures 289

4.3 Les poupées-enfants chaouia 290

Table des transcriptions 291

Table des illustrations 293

Bibliographie 303

Vidéos : poupées et jeux de poupées marocains 321

Annexe 1 : modèle de description des jeux et jouets 327

Annexe 2 : données autobiographiques 331

Index auteurs 337

Index géographique et ethnique 341

9

Résumé

Dans ce livre je propose au lecteur une analyse des poupées et jeux de

poupées des enfants sahariens et nord-africains. En premier lieu sont

traitées les poupées-hommes, puis les poupées-femmes et les poupées-

enfants. Chacune de ces trois parties commence par un résumé mettant

en lumière les caractéristiques du groupe de poupées. Dans les

Conclusions on trouve une synthèse et une discussion de certains aspects

environnementaux, économiques, sociaux et culturels en relation avec

les poupées et jeux de poupées. La section suivante propose des idées et

des actions pratiques pour rendre utile cette culture ludique enfantine. Le

catalogue offre une description systématique des poupées de la collection

du Musée de l'Homme est donnée. Une première annexe offre un

modèle de description des jeux et jouets. Dans une deuxième annexe le

lecteur intéressé trouvera des données autobiographiques.

En Afrique du Nord et au Sahara l‟on trouve aussi bien des poupées-

hommes que des poupées-femmes et des poupées-enfants. Cependant les

poupées-femmes sont de loin les plus nombreuses. Exception faite pour

le Maroc, je n‟ai noté l‟existence de poupées-hommes que chez les

enfants de populations vivant au Sahara. Ces poupées-hommes et ces

poupées-femmes sont d‟âge adulte, souvent l‟âge d‟un jeune marié ou

d‟une jeune mariée. Les poupées-enfants représentent des filles et des

garçons d‟un certain âge déjà. Les poupées-enfants et les poupées-bébés

restent rares.

Le plus souvent les enfants sahariens et nord-africains confectionnent

eux-mêmes leurs poupées, mais parfois ce sont des femmes adultes de la

famille ou des artisanes et artisans qui les fabriquent. Sauf quelques

exceptions les poupées sont de fabrication locale.

Comme un peu partout dans le monde, ce sont avant tout les filles qui

jouent avec des poupées, beaucoup plus rarement les garçons et dans ce

cas il s‟agit presque toujours de poupées-hommes.

Bien que trop rarement révélé dans les informations bibliographiques,

les poupées décrites ici n‟ont de sens que dans le contexte des jeux

d‟enfants. Le plus souvent il s‟agit de jeux collectifs rassemblant des

enfants, la plupart du temps des filles, de la même famille et/ou du

voisinage. Pour ces jeux de poupées collectifs les enfants utilisent bon

10

nombre d‟autres jouets ou instruments de jeu. En plus, ils accompagnent

leur jeu de chansons, danses, comptines, contes et autres jeux de langage.

Selon toutes les données à ma disposition, les poupées sont utilisées

dans des jeux où les enfants s‟adonnent à interpréter la vie des adultes.

Dans le domaine du monde masculin, les enfants font de leur poupée un

méhariste, cavalier, muletier, berger, guerrier ou notable. Dans le

domaine du monde féminin il s‟agit le plus souvent de jouer au ménage,

de représenter des réunions importantes et des fêtes, surtout des

mariages, de figurer une grossesse, un accouchement et même un

enterrement. Sauf dans la représentation des fêtes de noces où le monde

féminin et masculin se trouvent mêlés, la distinction entre les activités

féminines et masculines reste très ferme dans les jeux de poupées.

Pour la fabrication des poupées une grande variété de matériaux

d‟origine naturelle ou de récupération est utilisée. Dans la très grande

majorité des cas, ces matériaux sont d‟origine locale ou domestique : du

matériel d'origine minérale, animale et végétale, du textile, du plastique

et du métal. L‟apport de matériaux étrangers au milieu naturel ou

domestique est négligeable.

En ce qui concerne la forme et l‟élaboration des poupées, les enfants

de chaque population mentionnée semblent s‟être tenus à un ou parfois

quelques modèles clairement définis.

Comme les enfants jouent avec le même type de poupées, leur

similitude facilite l‟élaboration et la communication de significations

communes, ce qui est encore renforcé quand les enfants fabriquent leurs

poupées. Les poupées et jeux de poupées peuvent donc être vus comme

un moyen effectif de communication aidant au maintien du système

socioculturel.

Si cependant l‟on prend en vue toute l‟aire géographique en question

une intéressante variété se laisse entrevoir, aussi bien sur le plan des

matériaux utilisés, que de la forme, de la grandeur, du visage, de la

coiffure et de l‟élaboration vestimentaire. Sauf exception assez rare, les

poupées restent des représentations figuratives et réalistes du moins au

niveau de l‟aperçu global et de l‟aspect vestimentaire. Abstraction faite

de la classe aisée, le modèle de la femme idéale est une femme bien

nourrie, même corpulente, décemment vêtue comme le démontrent les

poupées-femmes de ces régions.

11

Chez beaucoup de populations nord-africaines et sahariennes, les traits

de visage ne sont pas indiqués sur les poupées locales ou bien ils le sont

de manière fantaisiste. Je n‟ai trouvé des poupées à visage que parmi les

poupées-femmes belbala, mozabites, marocaines et tunisiennes, ainsi

qu‟auprès des filles ghrib où il est question d‟une évolution récente

influencée par l‟école, une évolution qui se confirme aussi pour certaines

communautés marocaines.

Les informations que j‟ai pu obtenir depuis la première édition de ce

livre en 1993, confirment l‟utilisation de la poupée locale ou

traditionnelle, faite par les filles et très rarement des garçons, pour les

jeux de poupées dans les villages du centre et du sud du Maroc. En

même temps se trouve confirmés leur disparition et leur remplacement

par la poupée en plastique importée de Chine ou ailleurs, dans les villes

et les petits centres urbanisés, de temps en temps même dans un village.

Plusieurs informations démontrent que la poupée en plastique s‟est

infiltrée lentement et que pendant tout un temps les deux types de

poupées ont coexisté ou coexistent encore. Dans ce contexte l‟influence

des milieux aisés sur les citadins et ruraux des classes moyennes et

populaires peut être soulignée.

12

13

La collection :

Cultures Ludiques

Sahariennes et Nord-Africaines

Engagé depuis 1975 d'abord dans la recherche sur les jeux et jouets, puis

dans des essais de pédagogie interculturelle basée sur le ludique et dans

des organisations internationales s'intéressant au développement de

l'enfant, j'ai eu l'idée de créer une collection que je voudrais dénommer

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. Des cultures ludiques

qui devraient, à juste titre, faire partie intégrante du patrimoine culturel

de l'humanité, tout comme les chefs d'œuvres de l'art et de l'architecture.

Une première tentative pour créer une collection pareille pour

l'International Council for Children‟s Play fut soutenue par André

Michelet, à ce moment directeur du Centre d'Etudes Roland Houdon à

Saran, France, et résulta dans la publication par ce Centre de mon livre

Jeux et jouets sahariens et nord-africains : poupées - jeux de poupées en

1993. Comme le Centre d'Etudes Roland Houdon a arrêté ses activités de

publications peu de temps après, cette tentative s'est terminée

prématurément.

En 1999 le Nordic Center for Research on Toys and Educational

Media a publié sur son site web la première version HTML en français

et en anglais de Poupées d'enfants et jeux de poupées, et de la

Bibliographie commentée des jeux et jouets. Une version HTML

remaniée de ces livres ainsi que la première version HTML en français

et en anglais de L'animal dans les jeux et jouets furent publiées par le

Stockholm International Toy Research Centre sur son site web en 2003.

La rédaction du quatrième volume La vie domestique dans les jeux et

jouets est bien avancée. Deux autres volumes analysant les Jeux

d'adresse et Les techniques traditionnelles et modernes dans les jeux et

jouets sont prévus.

Une périodicité fixe n'est pas planifiée pour cette collection, mais afin

de rendre disponible l'information sur les jeux et jouets sahariens et

nord-africains aussi bien à ceux lisant le français qu'à ceux lisant

l'anglais, ainsi que pour stimuler l'échange d'informations et la

14

fécondation réciproque des idées et des actions entre le monde

anglophone et francophone, trop souvent séparés par des clivages

linguistiques, les ouvrages sont publiés en français et en anglais.

Pour des raisons financières les livres disponibles de la collection :

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines et de la collection :

Saharan and North African Toy and Play Cultures sont publiés sur le

CD inclus dans Rossie, J-P. (2005). Toys, play, culture and society. An

anthropological approach with reference to North Africa and the

Sahara.

Les volumes de la collection :

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines

Poupées d‟enfants et jeux de poupées, 2005, 344 p., 163 ill.

L‟animal dans les jeux et jouets, 2005, 229 p., 107 ill.

Bibliographie commentée des jeux et jouets, 2005, 61 p.

Les volumes de la collection :

Saharan and North African Toy and Play Cultures

Children‟s dolls and doll play, 2005, 328 p., 163 ill.

The animal world in play, games and toys, 2005, 219 p., 107 ill.

Commented bibliography on play, games and toys, 2005, 61 p.

15

Préface de Dominique Champault

Les jeux des enfants du Nord de l'Afrique n'ont jusqu'ici jamais fait

l'objet d'une étude globale. Il faut donc d'emblée remercier Jean-Pierre

Rossie de s'être attelé à une tâche minutieuse : retrouver les données

éparses dans des monographies plus ou moins anciennes, les confronter

d'une part à ses enquêtes personnelles puis à une importante série

muséographique pour nous livrer enfin un travail exhaustif qui vient

combler un vide.

En s'adonnant à l'étude des poupées, il ne craint pas de s'attaquer à un

jeu des plus éphémères dans ce secteur géographique. Les fillettes du

monde arabo-berbère jouent peu à la poupée, sans doute parce que le

loisir leur en est, plus qu'à d'autres, mesuré : dès l'âge le plus tendre, elles

doivent relayer leur mère dans les tâches domestiques et la charge de

leurs cadets est bien souvent écrasante. Néanmoins, en gardant les

troupeaux, surveillant la cuisine ou les bébés, elles ont toujours façonné

des poupées avec lesquelles elles se comportent comme toutes les petites

filles du monde ; pour cela elles utilisent les matériaux qui leur tombent

sous la main : bâtonnets, os, chiffons, poils de chèvre. L'os de mouton

transformé de manière comparable à l'époque romaine par une enfant

syrienne, aujourd'hui par une fillette vivant dans un oasis, témoigne du

même génie inventif, palliant la pauvreté des moyens. Une mère

attentive, une servante disponible dans les milieux les moins défavorisés,

peuvent confectionner les mêmes poupées, avec les mêmes éléments :

l'assemblage en est seulement mieux agencé et plus solide.

Un point commun : toutes les poupées-femmes sont désignées comme

'nouvelles mariées' par des vocables affectés selon les régions à la mariée

pendant une séquence du premier au septième jour de mariage. On ne

représente jamais un poupon au sexe plus ou moins défini, mais toujours

une femme au moment où, investie par la force sacrée de la baraka, au

plus fort de sa féminité, elle est potentiellement la plus féconde. Mais il

n'est pas anodin de créer une image à la ressemblance, même lointaine,

de l'humain. Sans reprendre les exégèses vouées aux interdictions plus

ou moins formelles édictées par le judaïsme puis l'islam, il faut bien

noter que les adultes et particulièrement les hommes, observent une

16

méfiance ambiguë envers les images. Une force opératoire est toujours

reconnue aux poupées ; l'une des plus évidente est celle d'amorcer la

pluie (sans doute par analogie avec d'anciennes poupées de rogations).

C'est pourquoi, dans certaines régions, les parents interdisent à leurs

enfants de manipuler des poupées aux moments où l'eau nuirait aux

cultures : récolte des grains, maturité des dattes, etc.

Il semble fondé de considérer qu'à l'origine, au Proche Orient comme

en Afrique du Nord, les premières figurines à ressemblance humaine ont

été liées aux rites agraires, comme si la femme féconde pouvait

communiquer sa vertu à la nature entière. En Egypte ancienne les

fillettes attendaient de leur poupée une promesse de fécondité alors que

les adultes jetaient au Nil des poupées pour amorcer sa crue, rite auquel

on sacrifiait encore il y a quelques lustres avec des poupées en sucrerie.

Récemment encore, dans certaines zones rurales du Maghreb, la dernière

gerbe moissonnée, désignée comme 'l'épouse du champ', pouvait être

affublée d'oripeaux féminins avant d'être dépiquée à part. Ses grains,

mêlés aux semences préservées, leur communiquaient un exceptionnel

pouvoir de germination.

Les rites s'estompent avec les techniques nouvelles. Ne reste dans

l'esprit populaire qu'une vague suspicion à l'égard des poupées 'fétiches'

dont certaines ont pu être utilisées pour l'envoûtement, l'identification du

mal ou du sortilège. Les poupées à l'occidentale, trop naturalistes, jugées,

il y a quelques décennies encore, comme innovation blâmable sont

aujourd'hui partout répandues.

Enfin, il convient ici de souligner combien l'étude de Jean-Pierre

Rossie illustre la complémentarité qui peut et doit s'instaurer entre les

chercheurs et les musées : les collections ne dorment pas à tout jamais

dans leurs réserves ; bien documentées, elles sont prêtes à s'animer sous

un regard attentif, à témoigner de temps plus ou moins lointain, de

cultures originales qui ne sombrent pas dans la monotonie de l'Occident :

“... il dépend de celui qui passe, que je sois tombe ou trésor...”.

Dominique Champault,

Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient,

Musée de l'Homme, Paris.

17

Introduction

18

19

Le livre que le lecteur a sous ses mains est le deuxième volume d'une

série de publications sur les cultures ludiques des enfants sahariens et

nord-africains. Des cultures ludiques qui, contrairement à ce qui a été fait

par Charles Béart (1955) pour l'Afrique occidentale, Fritz Klepzig (1972)

pour les populations bantoues de l'Afrique subsaharienne et Eliseo

Andreu Cabrera (2004) pour la région méditerranéenne, n'ont pas été

répertoriées et analysées systématiquement jusqu'à présent. L'unique

tentative dans l'aire géographique en question est à ma connaissance

celle de Paul Bellin dans “L'enfant saharien à travers ses jeux” (1963).

Je suis cependant convaincu que cette tâche est des plus urgentes vu

les transformations spectaculaires dans lesquelles les sociétés de cette

région se sont engagées. Suite à des changements politiques,

économiques, sociaux et culturels, cet héritage, qui a participé à part

entière au façonnage de l'identité des individus et des groupes humains

en question, risque fortement de se perdre. Ceci pourrait se révéler

vraiment néfaste parce que, d'une part, la population saharienne et nord-

africaine est dans sa majorité constituée d'enfants et de jeunes et que,

d'autre part, le domaine des jeux et jouets représente une réelle mine d'or

pour le développement et la socialisation de cette jeunesse ainsi que pour

une pédagogie et une didactique scolaire adaptées, particulièrement

propagées par des instances internationales comme l'Unesco (voir

bibliographie : Groupe Consultatif...) ou la International Federation for

Parent Education (voir bibliographie), et parfois aussi par les autorités

nationales.

A travers l'aperçu des poupées et des jeux de poupées sahariens et

nord-africains il sera, je l'espère, possible de relever aussi bien la

diversité des cultures, basée sur les spécificités géographiques,

historiques et sociologiques, que l'universalité de la culture humaine

suite à une réponse fondamentale à des problèmes de vie semblables.

Dans ce livre il n'est question que des poupées utilisées dans les jeux

d'enfants. Les poupées rituelles d'ordre curatif ou prophylactique, de

menace ou d'envoûtement, pour obtenir de la pluie ou promouvoir la

fertilité et la fécondité n'ont pas été mentionnées. Pour une première

approche de ces thèmes je renvoie le lecteur intéressé à une première

analyse publiée par J. Herber en 1918 dans “Poupées marocaines”, à

l'article de Dominique Champault “Du rituel agraire au jeu” dans le

catalogue de l'exposition sur les poupées, tenue en 1983 au Musée de

20

l'Homme, “Poupée-Jouet. Poupée-Reflet”, au livre de Jean Servier “Les

portes de l'année” édité en 1962 ainsi qu'au livre plus ancien de Edwarsd

Westermarck plublié en 1926 (volume 1 : 79, 330-335, 340-343, 596).

De même, ni les poupées-souvenirs ni les poupées en costume national

ou folklorique, ne sont retenues.

Exception faite pour les Ghrib et pour le Maroc, la période sur

laquelle s'étend l'analyse s'étale du début de ce siècle jusqu'à la fin des

années 1960. Plus précisément et dans le contexte de cette étude, la

référence bibliographique la plus ancienne remonte à 1905 et la poupée

la plus ancienne de la collection du Département d'Afrique Blanche et du

Proche Orient du Musée de l'Homme fut collectionnée en 1934. Les

données les plus récentes proviennent, d'une part, de mes recherches en

1975 et 1977 chez les Ghrib du Sahara tunisien, qui vivaient à ce

moment leurs dernières années de semi-nomadisme, complétées, jusqu'à

ce jour, par des informations sur l'évolution de la culture ludique de cette

population qui me sont transmises par mon ami et collègue Gilbert J.M.

Claus, et d'autre part de mes recherches au Maroc, en cours depuis 1992,

qui apportent de nouvelles données sur la seconde moitié du XXe siècle

et le tout début du XXIe siècle. Il existe aussi un livre sur les jeux et

jouets chez les Sahraouis publié en 1999. Le présent utilisé à travers le

texte se réfère donc toujours à l'époque d'où proviennent les données et

non pas nécessairement à celle d'aujourd'hui.

D'une manière générale on peut dire que les jeux et les jouets décrits

appartiennent ou appartenaient à des enfants vivant dans des

communautés qui, bien qu'influencés par la vie moderne et

occidentalisée, se référaient encore à la tradition ancestrale surtout dans

le domaine enfantin et féminin, ainsi que dans la sphère de la

socialisation et de la transmission intergénérationnelle des normes et

valeurs. Cela veut donc dire, si l'on fait abstraction des données

recueillies dans des grandes villes marocaines, qu'il ne sera pas question

des enfants vivant dans des centres urbanisés, industrialisés et/ou

occidentalisés. Si on prend l'Algérie comme exemple, les données se

réfèrent aux enfants peu ou pas scolarisés des communautés nomades,

semi-nomades ou agricoles mais on cherchera en vain, sauf exception

rarissime, des renseignements sur les enfants scolarisés d'Alger ou des

autres grandes villes algériennes. Exception faite des villes marocaines,

ce volume décrit donc les poupées et jeux de poupées des enfants et des

21

communautés faisant parties de sociétés plus ou moins traditionnelles

mais en voie de modernisation.

De plus, les informations rassemblées se réfèrent à des enfants entre

trois et treize ans, pour les garçons peut-être jusqu'à un âge un peu plus

avancé. Donc on cherchera en vain des données sur les tout petits. Les

raisons en sont multiples : il est difficile pour un chercheur masculin

d'entrer dans le monde intérieur et domestique des femmes dans lequel le

petit enfant grandit, jouer à l'extérieur est une activité des enfants déjà

plus grands, les petits qui ont besoin d'un jouet transforment souvent un

objet dans un jouet représentatif là où fabriquer soi-même un jouet ne se

fait qu'à un âge plus avancé. Dans le cas du jeu de poupée le

développement propre à l'enfant joue aussi un rôle. Comme le dit Gilles

Brougère (1993: 181) :

Il ne peut y avoir de réel jeu à la poupée avant la troisième année et

celui-ci reste encore très limité. En conséquence les premiers jeux

sont des jeux moteurs (manipulations, promenades) ou des 'jeux' de

relation affective, du type de l'objet transitionnel.

Quatre sources de données sont à la base de ce livre :

La collection de jouets sahariens et nord-africains conservée dans le

Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient du Musée de

l'Homme à Paris, complétée par les renseignements contenus dans les

fiches signalétiques et par une analyse personnelle des jouets. Comme

cette collection est en voie d'être transférée à un musée qui ouvrira en

2006 il faut contacter le nouveau Musée du Quai Branly à Paris

(http://www.quaibranly.fr).

La bibliographie ethnographique, linguistique et autre traitant de l'aire

géographique donnée, que j'ai analysée dans une bibliographie

commentée.

Mes recherches de 1975 à 1977 sur les jeux et jouets des enfants

ghrib, complétées depuis lors par quelques renseignements fournis par

Gilbert J.M. Claus.

Mes recherches en cours depuis février 1992 sur les jeux et jouets au

Maroc, plus spécifiquement dans les zones rurales et les quartiers

populaires des villes.

22

Bien que les données bibliographiques ne proviennent pas toujours

d'investigations détaillées ou scientifiques et qu'elles sont parfois

accompagnées de commentaires ethnocentriques, je crois pouvoir dire

que le soin qui a été mis à l'analyse et à la confrontation critique des

sources est garant d'un degré élevé d'authenticité des informations.

Toutes les populations sur lesquelles j'ai pu trouver des

renseignements ont été incorporées dans l'étude. Il s'agit de différents

groupes Touaregs, des Ghrib, des Chaamba, des Maures, des Sahraouis,

des Regeybat, des Teda, des Belbala et des Chaouia, des habitants de la

Vallée de la Saoura et de ceux du Mzab, des Kabyles ainsi que de

certaines communautés algériennes, marocaines et tunisiennes.

Jusqu'à présent j'ai utilisé le vocable Berbère pour désigner la culture

et la langue des populations nord-africaines et sahariennes qui vivaient

dans ces régions avant la venue des Arabes, y vivent encore et continuent

à parler leurs propres langues. Suite à la signification péjorative de ce

vocable, lié au mot barbare, les associations culturelles concernées

mettent en avant le vocable local Amazigh, un terme que j'utiliserai

dorénavant dans mes publications scientifiques. Néanmoins, je continue

à utiliser le vocable Arabo-Berbère pour les descendants de ces

populations ayant perdus leur langue d'origine et parlant arabe.

Dans le texte l'ordre de ces populations suit la séquence suivante :

d'abord sont présentées les données sur les populations nomades ou

semi-nomades du Sahara, suivies par les populations sédentaires du

Sahara et finalement les populations sédentaires de l'Afrique du Nord.

Les termes géographiques et ethniques mentionnés dans le texte

peuvent être localisés sur deux cartes, une carte de l'Afrique du Nord et

du Sahara et une carte du Maroc.

Afin de situer les cultures ludiques dans leur contexte géographique,

économique, social et culturel il m'a semblé nécessaire d'essayer de

donner une description, bien sur très limitée, des populations en

question. Cette description se réfère à la même période que celle d'où

proviennent les informations sur les jeux et jouets.

23

Description des populations

Les Touaregs

Si numériquement les Touaregs ne constituent nullement la population la

plus importante de la région en question, ils sont au moins la population

la mieux documentée et représentée dans la collection analysée.

Les Touaregs vivent sur un immense territoire saharien et sahélien

entre, au nord, Ghadames en Libye, au sud-est, Agadez au Niger, et au

sud-ouest, Mopti au Mali. Leur habitat présente un relief montagneux

variant entre 500 mètres et plus de 2000 mètres.

Les estimations, toujours approximatives, du nombre de Touaregs

varient de 250.000 à 300.000 (Camps, 1984: 8), environ 350.000 (La Vie

du Sahara, 1960), et environ 700.000 (Komorowski, 1975: 101), jusqu'à

moins d'un million (Bernus, 1983: 7). Dans l'exposition de 1994 sur les

Touaregs au Musée de l'Afrique Centrale à Tervuren en Belgique le

chiffre de 1.300.000 Touaregs est avancé, dont 750.000 au Niger,

400.000 au Mali et 60.000 en Algérie, en Libye et en Burkina Fasso. Les

Touaregs Kel Ahaggar ne seraient que 20.000, vivant sur un territoire

algérien presque aussi vaste que la France (Bernus, 1983: 7). En juillet

1999 la population du Mali a été estimée à 10.429.124 habitants, dont 47

% d'enfants de moins de quinze ans et 10 % de Touaregs (E-Conflict™

World Encyclopedia).

Toutes ces sources s'accordent pour dire que jusque pendant le

premier tiers du vingtième siècle les Touaregs menaient une vie nomade

ou semi-nomade, dans ce dernier cas se transformant momentanément en

sédentaires dans les oasis.

Les Touaregs furent avant tout des éleveurs de dromadaires mais qui,

vers 1960, “vivent essentiellement de l'élevage des moutons, des chèvres

et des bœufs au Sud” (La Vie du Sahara, 1960: 7). Depuis les années

1950, la vie traditionnelle des Touaregs se perd de plus en plus. Ceci

d'abord à cause de l'influence de la colonisation française, puis de

l'intégration dans cinq états indépendants différents et finalement suite à

l'extrême sécheresse au Sahel durant les années 1970 qui a eu des

conséquences dramatiques pour les Touaregs sahéliens (Leupen, 1978:

24

58. Claudot-Hawad, 1992: 222). Actuellement beaucoup de familles

vivent dans des maisons avec télévision et parabole.

Du point de vue ethnique et linguistique les Touaregs sont des

Amazighs amazighophones, bien qu'ils “ne constituent ni une 'race' ni

une 'nation'. Leur dénominateur commun se situe dans une culture, un

langage, des comportements semblables... ” (Bernus, 1983: 6).

Dans le cadre de l'analyse des jeux et jouets, il faut distinguer cinq

groupements de Touaregs :

Touaregs Kel Ahaggar : Massif de l'Ahaggar (Algérie);

Touaregs Kel Ajjer : Tassili N'Ajjer (Algérie), région de Ghât Libye);

Touaregs Kel Aïr : Massif de l'Aïr;

Touaregs Kel Iforas : Adrar des Iforas (Mali, Algérie);

Touaregs Ioullemeden : plaines sahéliennes de la Boucle du Niger

(Mali).

Les Ghrib

L'habitat des Ghrib s'étend de la limite méridionale du Chott l-Djerid, le

lac de sel du sud-tunisien, jusqu'à la frontière algérienne. Il s'agit d'un

territoire d'environ 6000 km² dans la frange septentrionale du Grand Erg

Oriental, un immense désert de sable. Le relief est assez plat, entrecoupé

ici et là de dunes de sable.

Les Ghrib sont évalués à environ 4400 en 1975. Entre-temps, cette

population s'est accrue et comporte actuellement environ 7000

personnes. Ces données sur les Ghrib et celles qui suivent proviennent

des publications de Gilbert Claus ou d'informations qu'il m'a transmises.

Bien qu'il y ait parmi ces Ghrib arabophones des fractions qui

prétendent avoir comme ancêtres des Amazighs du Sud du Maroc, il y en

a d'autres qui se disent originaires du sud de l'Arabie ou du nord du

Yémen.

L'économie était depuis l'entre guerre et jusqu'à récemment, basée sur

le semi-nomadisme avec d'un côté l'élevage de dromadaires, pour lequel

ils étaient réellement renommés, de chèvres, de moutons et d'ânes, et

d'autre côté l'agriculture d'oasis.

25

Depuis les années 1970, la sédentarisation dans les oasis en bordure

du Chott l-Djerid a pris de plus en plus d'ampleur. De nos jours, les

Ghrib se sont pour ainsi dire complètement sédentarisés dans les oasis de

Ghidma, Hezwa, Redjem Matoug et surtout dans l'oasis d'El Faouar qui

est devenue un centre urbain important, chef-lieu d'une délégation. De

cette manière ils ont perdu tout de leur ancienne renommée d'éleveur de

dromadaires, bien que l'intérêt pour cet élevage reprenne quelque peu,

suite à la promotion du tourisme saharien à El Faour où un hôtel de

transit fonctionne maintenant.

Les Maures

Dans le Sahara occidental vivent les Maures sur un territoire limité par

l'Atlantique à l'Ouest, l'actuelle frontière avec le Maroc au nord et une

frontière imaginaire allant du fleuve Sénégal par Néma à la boucle du

fleuve Niger au sud.

A partir de la côte le relief s'élève lentement pour atteindre les 350 m

au Plateau du Dhar où se situe Oualata. Une grande partie de la

Mauritanie est occupée par d'énormes dunes, depuis l'Atlantique en

direction du nord-est en passant juste au nord de Tidjikdja.

En 1960, les Maures étaient estimés à 600.000 dont 77 % de nomades

(La Vie du Sahara, p. XXIV; Belgisch Comité voor UNICEF, 1996: 57).

Il s'agit d'une population qui, contrairement au Touaregs fortement

éparpillés sur plusieurs états, a réussi à s'organiser en état : la République

Islamique de Mauritanie. En 1996 il y a 2.400.000 habitants en

Mauritanie dont 52 % vit dans les villes et seulement 12 % sont encore

des nomades ; un tiers de la population vit dans la capitale Nouakchott et

les bidonvilles avoisinants (informations de l'UNICEF). Avec 30 % les

Maures ne constituent qu'une partie de la population totale. 40 % sont

formés par des groupes mixtes d'origine maure ou provenant d'Afrique

Noire et les autres 30 % sont des descendants d'Africains noirs. De la

population mauritanienne estimée à 2.581.738 en juillet 1999, 47 % ont

moins de quinze ans (E-Conflict™ World Encyclopedia).

Du point de vue ethnique, “on appelle Maures les Arabes mêlés aux

Berbères, ainsi que les Berbères fortement arabisés du Sahara du Sud-

Ouest et du Sahara ex-espagnol” (Komorowski, 1975: 103). Mais eux-

26

mêmes se désignent comme les 'Beïdane', les 'Blancs'. Du point de vue

linguistique les Maures parlent un arabe maghrébin.

Ces Maures sont, certainement pendant la période à laquelle réfèrent

les jeux et jouets des enfants de ce peuple, des pasteurs chameliers, des

caravaniers, des commerçants et, dans la zone sahélienne, des éleveurs

de bœufs. Certains d'entre eux sont plutôt sédentarisés dans des petites

villes. Un de ces centres urbains est Oualata, dans les années 1970 une

agglomération de 800 à 1000 habitants. C'était “un centre spirituel et une

ville de commerce au carrefour du Maroc, du Mali et du Sénégal... (Son)

isolement lui a valu aussi le maintien de ses traditions de spiritualité,

d'enseignement traditionnel qui remontent au VIIIème siècle” (Gabus,

1976: 7), ainsi que de son organisation sociale et domestique.

Comme chez les Touaregs et les Ghrib, le mode de vie des Maures est

depuis une quarantaine d'années soumis à une pression croissante

d'adaptation à un état et une économie qui s'inscrivent dans le contexte

mondial. Actuellement, environ 60 % de la population vit de l'agriculture

et de l'élevage, et environ 40 % a trouvé une subsistance en ville dans le

secteur moderne ou informelle de l'économie (Belgisch Comité voor

UNICEF, 1996: 33).

Les Sahraouis

Les Sahraouis nomadisaient dans l'immense espace saharien qu'ils

appellent 'Trab el Bidan', la 'Terre des Blancs'. Cet espace s'étend du

fleuve Sénégal jusqu'au Oued Drâa qui longe les versants sud du Jbel

Bani et de l'Anti Atlas en passant près de la ville d'Assa dans le sud du

Maroc. Cette vaste région comprend la Mauritanie, le Sahara Occidental,

une partie du Nord-Ouest du Mali et du Sud-Ouest de l'Algérie. La

langue des Sahraouis est une forme locale d'arabe appelée 'hassaniya'

(Pinto Cebrián, 1999: 9).

Tout comme chez les Touaregs, les Ghrib et les Maures, un processus

de sédentarisation s'est développé chez les Sahraouis, dont l'ampleur

s'accentua à partir des années 1970.

Une partie du Trab el Bidan dénommée le Sahara Occidental fut une

colonie espagnole de 1904 à 1975. Actuellement et suivant la

terminologie employée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, le

27

gouvernement marocain est la “puissance administrante du Sahara

occidental” (Rapport du Secrétaire Général sur la situation concernant le

Sahara occidental, 25 octobre 2000, S/2000/ 1029, 6 pages, p. 6, § 30,

http://www.un.org/french/docs/sc/reports/2000/1029f.pdf, consulté le

11.01.2001). L'agence de presse Europe Medea mentionne comme

l'unique source valable sur la population du Sahara Occidental le dernier

recensement espagnol de 1974. Selon celui-ci, qui n'a pas pu prendre en

compte l'ensemble des populations nomades, il y avait à ce moment

73.497 Sahraouis dans le territoire et 21.522 Européens et ressortissants

d'autres pays. La population actuelle est sans doute de l'ordre de 200.000

à 300.000 personnes (http://www.medea.be/fr/index250.htm, consulté le

11.01.2001). Sous le contrôle du Polisario, le Frente Popular para la

Liberación de la Seguia el Hamra y el Rio de Oro, quelques 200.000

Sahraouis habiteraient les camps de réfugiés de la région de Tindouf

dans le sud-ouest de l'Algérie (http://www.sahara.net/people.html,

consulté le 12.01.2001).

L'ancien système économique entièrement basé sur le nomadisme et le

commerce caravanier a été remplacé en grande partie par une économie

basée sur l'industrie de la pêche et l'exploitation de gisements de

phosphates et de fer (http://www.medea.be/fr/index250.htm, consulté le

11.01.2001).

Les Regeybat

Les Regeybat, ou Regueibat, se déplacent sur un vaste territoire, dans le

Sahara Nord-occidental de l'Atlantique à l'Erg Iguidi et d'Assa à la

région de Tiris, niant les frontières entre l'Algérie, le Maroc, la

Mauritanie, et le Sahara ex-espagnol.

Il s'agit d'une région peu élevée et peu accidentée, et très faiblement

peuplée. Ainsi le Sahara Occidental, que les Regeybat dominaient

jusqu'au début du vingtième siècle, ne comptait que 60.000 habitants

vers 1970 (Grand Atlas du Continent Africain, 1973: 105). En juillet

1999 la population du Sahara Occidental était estimée à 239.333

habitants (E-Conflict™ World Encyclopedia).

28

Les Regeybat sont des Arabo-Berbères qui “sont les plus proches,

linguistiquement et culturellement, des tribus arabes bédouines” (Camps,

1984: 9), parlant l'arabe tout comme les Maures.

Ces nomades sont des éleveurs de dromadaires, de chèvres et, où cela

est possible, de moutons. En plus, et jusqu'à une époque assez récente, ils

s'occupaient du commerce transsaharien, qui a depuis lors perdu presque

toute signification économique.

La décolonisation au début des 1970 du Sahara Espagnol et les

revendications des pays limitrophes ont créé un mouvement

indépendantiste, le Front Polisario. Il a été dit que les Regeybat jouent un

rôle de fer de lance dans les activités militaire. Cependant, peu semble

être connu sur la situation actuelle des Regeybat.

Les Chaamba

Les Chaamba, eux aussi nomades dans leur majeure partie, transhument

sur tout le Sahara algérien septentrional depuis El Oued, Ouargla et le

Grand Erg Oriental, en passant par El Golea et le Grand Erg Occidental

jusqu'à l'Erg er Raoui et même au-delà. Cette immense région désertique,

aux puissants massifs de dunes, est entrecoupée de plaines arides peu

accidentées.

Tout comme les Regeybat, les Chaamba arabophones sont des Arabo-

berbères dont l'origine démontre l'interpénétration des populations

amazighs autochtones avec des tribus arabes venues de la Péninsule

Arabe.

Au début des années 1950, la population totale approchait les 20.000

(Cabot Briggs, 1958: 111).

Les Chaamba trouvaient leurs moyens de subsistance, et les trouvent

parfois encore, dans l'élevage de dromadaires et de moutons. Ils étaient

des méharistes renommés, qui se sont en partie intégrés dans l'armée

coloniale et celle de l'Algérie indépendante. Dans les oasis, ils s'occupent

aussi de jardinage et des palmeraies.

Aujourd'hui, ils descendent de leurs chameaux et montent dans les

poids-lourds qui circulent sur les pistes sahariennes (Komorowski, 1975:

107).

29

Les Teda

Les Teda, appelés Toubou par les Arabes et les Européens, vivent dans

un endroit aussi spécifique qu'isolé. Il s'agit du massif volcanique du

Tibesti au Nord-ouest du Tchad. Ce massif du Tibesti, qui a son point

culminant à 3350 mètres et une altitude moyenne entre 1000 et 1800

mètres, “s'élève tel un bastion au milieu d'une mer de sable”

(Lopatinsky, Les Teda du Tibesti: 9).

Contrairement aux autres populations qui sont des Amazighs ou

Arabo-berbères, les Teda forment ethniquement et linguistiquement un

groupe distinct qui s'apparente aux populations noires du Soudan.

Dans le massif du Tibesti les Teda étaient en 1960 estimés à 20.000

personnes (La Vie du Sahara, p. XXIV), et probablement moins encore

car cette source incorpore des groupes de cultivateurs apparentés au

Teda du Tibesti. De la population totale du Tchad estimé à 7.557.436

d'habitants en juillet 1999, 44 % ont moins de quinze ans (E-Conflict™

World Encyclopedia). Le recensement de la population du Chad de 1993

donne 28.501 Teda (Ethnologue: Languages of the World).

Ces Teda sont restés très longtemps attachés à leur mode de vie et

avaient encore en 1980 “conservés des particularismes culturels qui sont

en accord avec les impératifs de leurs conditions de vie” (Bradily, 1980:

141). D'ailleurs l'influence maghrébine d'abord et française ensuite, avec

une occupation effective à partir de 1930 seulement, est restée faible

jusqu'en 1940.

Le semi-nomadisme fut le système socio-économique rendant possible

la survie des Teda. Une partie du groupe familial reste dans l'oasis, par

exemple à Bardaï, et s'occupe des jardins - vu comme un travail de

serviteurs - et des palmeraies, tandis que l'autre partie s'en va à la

recherche des prairies pour les chèvres, moutons, ânes et dromadaires et

fait en même temps le petit commerce caravanier (Lopatinsky, Les Teda

du Tibesti: 10, 15, 285, 288; Le Cœur, 1950: 198; Kronenberg, 1958: 3-

5).

“Traditionnellement la base de la nourriture est constituée par les

dattes et quelques céréales, dont les unes sont cultivées, et les autres

sauvages” (Bradily, 1980: 141). L'importance des dattes pour les Teda se

révèle jusque dans la confection des poupées par les filles.

30

Les Belbala

Jusqu'à présent les populations décrites sont, ou du moins étaient, des

nomades ou semi-nomades. Par contre, les Belbala sont bien que vivant

dans le Sahara Nord-occidental, la première communauté sédentarisée à

l'oasis de Tabelbala, mais vivant en contact direct avec les Chaamba.

Tabelbala, située à une hauteur de 500 mètres, est une petite palmeraie

très isolée qui se trouve au pied de l'Erg er Raoui, entre cette zone de

dunes, et une petite chaîne montagneuse d'environ 700 mètres de

hauteur.

Les Belbala forment une population sédentaire d'environ 1600

personnes vers 1960, parlant une langue tout à fait particulière,

incomprise des autres sahariens sédentaires ou nomades. Une langue

d'origine négro-africaine avec des apports amazighs et arabes.

Dominique Champault, dont l'ouvrage Une oasis du Sahara nord-

occidental : Tabelbala est la source d'information primordiale en ce qui

concerne les Belbala, écrit que les habitants de Tabelbala ont survécu

grâce à une économie d'oasis avec palmeraies, jardinage et élevage de

chèvres, ânes, quelques moutons et quelques dromadaires

qu'entretiennent des Chaamba. De plus, et jusqu'au début du vingtième

siècle, Tabelbala était un lieu de séjour et d'approvisionnement du trafic

caravanier venant du Maroc.

Mais l'avenir de ce trafic caravanier et celui de l'oasis de Tabelbala

furent en 1969 décrits comme suit par cet auteur : “Que Tabelbala soit

peut-être né du transport chamelier, qu'il en ait vécu pendant de

nombreux siècles, c'est en même temps apercevoir qu'il ne peut

longuement lui survivre” (p. 447).

Les habitants de la Vallée de la Saoura

D'autres sédentaires sahariens sont les habitants des oasis de la Vallée de

la Saoura, une population sur laquelle je n'ai trouvé que très peu de

données.

La Saoura délimite le désert pierreux qui s'étend vers l'ouest, des

dunes de sables de l'Erg qui s'étendent à l'est et au sud. Cette rivière qui

prend source dans l'Atlas saharien, coule en direction nord-sud et s'enlise

31

après quelques centaines de kilomètres dans le désert. Elle transporte

parfois en hiver une quantité considérable d'eau.

La Vallée de la Saoura a toujours été une très importante route de

communication et de commerce trans-saharien. Dans le lit de l'Oued

Saoura se trouvent des jardins et des palmeraies, avec environ 8000

palmiers à Beni Abbes en 1944. A ce moment là, environ 5000

personnes vivaient dans cette agglomération (Naval Intelligence

Division, 1943: I 66-67, II 61).

Selon Dominique Champault la situation alimentaire était plus

tragique dans les petites oasis de la Vallée de la Saoura qu'à Tabelbala,

bien que, jusque dans les années 1950, il y ait eu des petites caravanes

assez régulières dans la Vallée de la Saoura (1969: 176, 269).

Les Mozabites

Les Mozabites, des musulmans appartenant à une secte puritaine non

orthodoxe, se sont réfugiés au cours du XIe siècle dans la région

saharienne de l'Oued Mzab. Là ils fondèrent cinq villes fortes, Ghardaïa

étant la plus importante, et au XVIIe siècle encore deux autres villes. Le

relief est celui d‟un haut plateau, situé à une altitude moyenne de 700

mètres, avec des vallées souvent larges et profondes (Naval Intelligence,

1943-1944: 69).

Le nombre de ces citadins d‟oasis fut évalué vers 1950 à environ

50.000 personnes. Actuellement il y en aurait environ 200.000 (Camps,

1984: 8). Leur langue appartient à la grande famille des parlers berbères.

Zygmunt Komorowski décrit ainsi l‟économie mozabite : “Depuis des

siècles ils s‟enrichissaient sur le commerce transsaharien. Aujourd‟hui,

ils tiennent une grande partie du petit commerce en Algérie et leur

diaspora atteint même l‟Amérique” (1975: 107).

Bien que la population mozabite s‟est, suite à son particularisme

religieux, volontairement isolée, elle a su tirer profit de l‟insertion dans

un état moderne et dans une économie coloniale et post-coloniale.

32

Les Kabyles

Les Kabyles vivent dans une région montagneuse au Nord-Est de

l‟Algérie et qui s‟étend d‟Alger à Annaba. Cet espace se divise en trois

régions. La Grande Kabylie ou la Kabylie de Djurdjura culmine à une

hauteur de 2.308 mètres. A l‟est de la Grande Kabylie se trouve la Petite

Kabylie avec une hauteur maximale de 1008 mètres à l‟ouest de l‟oued

Kebir. La troisième région est celle de Collo située à l'Est. La capitale de

la Kabylie est Tizi-Ouzou dans la Grande Kabylie. C‟est dans ces

régions montagneuses que les Kabyles se sont depuis toujours retirées

suite aux invasions successives.

La Kabylie est une région de peuplement de grande densité où

vivaient en 1987 2.537.000 personnes. En 1984, plus de 530.000

Kabyles vivaient en France (Ethnologue: Languages of the World).

Selon une autre source publiée en 1998 les Kabyles sont estimés à quatre

millions de personnes et l‟émigration vers la France et d‟autres pays

européens date déjà de la Première Guerre mondiale (Tamisier, p. 143).

La langue kabyle appartient à la grande famille des langues amazighs.

Le Larousse du 20e siècle décrit en 1931 certains aspects de

l‟économie de ces régions de la manière suivante :

On cultive les céréales sur les terres basses, et sur les pentes les

vergers et les vignes. La région, parfaitement arrosée, a de

magnifiques forêts de chênes-lièges, de chênes zéens, et plus haut de

cèdres. La Petite Kabylie et celle de Collo renferment des mines de

plomb, de cuivre et surtout de fer (volume I-M, p. 222).

Sur la côte abrupte se trouvent quand-même quelques ports comme

Djidjelli. En 2001 on peut lire dans Ethnologue: Languages of the World

que les Kabyles sont largement des agriculteurs cultivant olives, figues,

grenades, pèches, abricots, poires, prunes et légumes.

La structure socio-politique est marquée par une forte organisation

villageoise. L‟évolution depuis la seconde moitié du siècle dernier nous

montre l‟importance des “institutions politiques traditionnelles et (de) la

culture moderne acquise par les Kabyles au sein des mouvements

syndicaux et politiques auxquels ils ont tant donné, aussi bien dans

l‟immigration en France qu‟en Algérie (Mahe, compte rendu du livre).

33

Les Chaouia

L'Aurès, le territoire des Chaouia, est un massif montagneux

impressionnant d'environ 11.000 km2 situé entre les Hauts-plateaux du

nord-est algérien et le Sahara. Les Chaouia, 'bergers' en arabe, sont des

Amazighs parlant une langue amazighe. Ethnologue: Languages of the

World mentionne 1.400.000 Chaouia pour 1993.

Vers les années 1940, ils vivaient encore largement selon les modes de

vie ancestraux et restaient “des montagnards peu influencés par ce qu'ils

ont vu en ville. Ils gardent une ancienne organisation tribale” (Catalogue

des Collections de l'Aurès, 1943: 4).

En 1938 et selon Thérèse Rivière, les Chaouia du Nord de l'Aurès sont

sédentarisés dans des vallées fertiles où la culture intensive dans des

jardins et palmeraies est possible. Les Chaouia du Sud, au contraire, sont

“des semi-nomades pasteurs de chèvres et de moutons, cultivateurs de

blé et d'orge qui vivent à peu près en économie fermée”. Ces semi-

nomades hivernent au Sahara et estivent dans l'Aurès (p. 294, voir aussi

Ballais, 1989).

A ce moment, la densité de la population atteignit dans le nord de

l'Aurès 5 à 25 habitants par km², cinq fois plus que dans le sud de

l'Aurès, et la population Chaouia tout entière devait se chiffrer dans les

quelques dizaines de milliers.

La situation actuelle en Aurès est décrite par Danielle Jemma-Gouzon

(1989: 7-8) :

Puis vient le temps de rompre l'isolement et, avec lui, celui de la

tentation de l'ailleurs. Les temps présents. Au fond des vallées, les

terres se vident. Les hommes partent. Dans les villages, seuls

demeurent les vieillards, les femmes et les enfants. Les gestes

s'érodent, comme les maisons de terre, en perte de sens et de

symboles. Le Temps a pénétré les montagnes de l'Aurès et, avec lui,

l'Histoire. La famille s'ouvre aussi mais se fragmente, satisfaite d'une

économie moins précaire mais moins communautaire. Aspirations

nouvelles. Modèles nouveaux.

34

Les populations des campagnes marocaines

Mes recherches au Maroc en cours depuis février 1992 m'ont permis

d'obtenir de nouvelles données sur les poupées et les jeux de poupées de

certaines communautés arabo-berbères ou amazighs vivant dans des

villages ou petites villes des régions rurales du Maroc.

Il s'agit en ce qui concerne les information recueillies en 1992, d'une

part, de familles de la région de Hmar et de ceux du groupement Oulad

Yahya, dans la région de Taroudannt, parlant l'arabe maghrébin, et

d'autre part, de familles berbérophones du village Tizal dans la région

d'El Khemis, ainsi que du centre urbain rural d'Imi-n-Tanoute.

La petite ville de Taroudannt est située dans la vallée entre le Haut

Atlas et l'Anti-Atlas, à une altitude peu élevée d'environ 250 mètres, le

long de l'Oued Sous qui se jette dans l'Atlantique à Agadir. L'autre petite

ville, Imi-n-Tanoute, se trouve au pied du versant ouest du Haut Atlas, à

une altitude d'environ 900 mètres, sur la route reliant Marrakech à

Agadir. Ces deux centres urbains ont une population de 25 à 40.000

habitants. Là se mêlent berbérophones et arabophones et il arrive que

dans une même famille les deux langues soient utilisées selon les

besoins.

Depuis septembre 1992, j'ai recueilli des informations sur les régions

rurales suivantes :

Le village Ignern situé à 1600 m d'altitude sur la route de Taroudannt

à Tazenakht près de Taliouine et le village Aït Ighemour situé à 2600

m d'altitude près de la route de Tazenakht à Amerzgane, deux petits

villages amazighs au pied de la montagne Jbel Siroua.

La petite ville de Goulmima sur la route de Ouarzazate à Errachidia et

deux petits villages limitrophes, Magaman et Ighrem-n-Cherif, tous

amazighophones et situés près de l'Oued Gheris sur le versant est du

Haut Atlas.

Le village amazigh Ksar Hasni Biad près de Merzouga et au pied des

dunes de sables de l'Erg Chebbi.

35

La petite ville de Midelt située à 1500 m d'altitudes au pied de la

montagne Jbel Ayachi sur la route d'Errachidia à Meknès ainsi que

cinq petits villages limitrophes : Ksar Assaka, Tabenatout, Tataouine

et Aït Sidi Amar avec une population amazighophone ainsi que

She°ba avec une population arabophone.

Le village amazigh Zaïda à 40 km avant Midelt en venant du Moyen

Atlas.

Deux populations amazighes du Moyen Atlas : les habitants du

village d'Arhbalou-n-Serdane près de Boumia et les Aït Ouirra de la

région d'El Ksiba située à environ 1100 m d'altitude près de la ville de

Kasba Tadla.

Les trois villages amazighes Aït Hmed ou Yacoub près de Khemisset,

Tiddas et Oulmès sur la route de Khemisset à Khenifra.

La petite ville côtière de Sidi Ifni et les villages amazighs Ergoub,

Imou Ergen, Lahfart et Tafraoute dans l'Anti-Atlas.

Le village arabophone Aïn Toujdate sur la route d'El Hajeb à Fès.

Le village arabophone Oulad ben Sbaa près de Sidi Mokhtar sur la

route d'Essaouira à Marrakech.

Comme mentionné pour Taroudannt et Imi-n-Tanoute, des

amazighophones et arabophones se trouvent aussi mêlés à Khemisset,

Midelt, Goulmima et Sidi Ifni. Dans les villages la population est plus

homogène. On y vit de l'agriculture, souvent encore suivant les méthodes

séculaires, de la production des oliviers, arganiers, pommiers et autres

arbres fruitiers, de l'élevage du grand ou petit bétail, bétail d'ailleurs

souvent gardé par les filles ou les garçons. Dans les petites villes

l'artisanat, le commerce, le transport, le fonctionnariat créent des

ressources supplémentaires provoquant ainsi une plus ou moins forte

désertion des campagnes.

Il arrive que j'aie mentionné le groupe ethnique auquel appartiennent

les enfants, cependant l'importance du groupe ethnique est devenue

beaucoup moins évidente qu'avant.

36

Les citadins de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie

Des communautés non-ethniques ou multiethniques vivent dans les

grandes, petites et parfois très petites villes côtières ou non loin de la

côte du Maroc et de l'Algérie. Dans le cadre de l'analyse présentée dans

ce livre, se trouvent aussi mentionnées quelques agglomérations urbaines

à l'intérieur de ces pays et qui représentent une situation démographique

analogue. Ces agglomérations sont, sauf exceptions rarissimes, situées

dans les plaines côtières ou peu élevées de l'intérieur.

En juillet 1999, la population de l'Algérie fut estimée à 31.133.486

d'habitants dont 37 % d'enfants de moins de quinze ans, celle du Maroc à

29.661.636 d'habitants dont 36 % d'enfants de moins de quinze ans et

celle de la Tunisie à 9.513.603 d'habitants dont 31 % d'enfants de moins

de quinze ans (E-Conflict™ World Encyclopedia).

La population citadine vit, dans sa grande majorité et en ce qui

concerne la période couverte par ce livre, de l'artisanat, du commerce, du

fonctionnariat et de l'exécution d'autres services.

Fès, Marrakech et Rabat sont aujourd'hui des villes de plus de 500.000

habitants. Kénitra, à 40 km au nord de Rabat, est un centre régional avec

plus de 200.000 habitants et une ville satellite de la capitale. Ce sont des

villes aux visages multiples où l'on remarque aussi bien un

comportement très européen, un comportement vraiment traditionnel et

un comportement strictement islamique. Cela se voit plus

particulièrement au niveau de la population féminine : comme dans les

rues, le port du voile côtoie celui de la minijupe.

Les renseignements sur les poupées et le jeu de poupée obtenus dans

ces villes proviennent de couches sociales moyennes, populaires et

réellement pauvres comme dans le quartier de Douar Akioud où toute

infrastructure, sauf l'eau courante, manque en 1992 mais où on regarde

pourtant la télévision alimentée par des batteries.

La langue utilisée dans tous ces centres est une forme locale de l'arabe

maghrébin. Du point de vue ethnique, ces populations sont constituées

en majeure partie d'Amazighs arabisés de longue date ou depuis peu.

Gabriel Camps (1984: 9) écrit à ce sujet :

37

En fait, dans la société musulmane nord-africaine et saharienne, il

existe des maghrébins arabophones ou arabo-berbères et des

maghrébins berbérophones qui conservent le nom de Berbères que les

Arabes leur donnèrent. Parmi les Arabo-berbères, qui ne constituent

pas plus une entité sociologique que les Berbères, on distingue un

groupe ancien, citadin, aux origines souvent très mêlées, car il faut

tenir compte dans les villes des apports antérieurs à l'Islam, des

réfugiés musulmans d'Espagne (Andalous) et des nouveaux venus

généralement confondus sous le nom de Turcs, bien qu'ils fussent,

pour la plupart, des Balkaniques et des Grecs de l'Archipel.

Avant de clore cet aperçu des différentes populations dont les poupées et

jeux de poupées figurent plus loin, reprenons encore cette distinction

entre maghrébins amazighophones et maghrébins arabophones et

examinons ce qu'en dit Nefissa Zerdoumi dans son livre remarquable

Enfants d'hier. L'éducation de l'enfant en milieu traditionnel algérien

(1970, 2e édition 1982: 35-36)

Pendant des siècles, la famille algérienne musulmane, malgré une

histoire mouvementée, est demeurée immuable, non pas qu'elle ait

bénéficié d'une protection religieuse ou législative particulière, mais

parce que, ayant adopté une structure défensive, elle se trouvait à

l'écart des causes susceptibles de provoquer son évolution. Elle

portait en elle des éléments statiques, absorbant ou neutralisant les

influences successives et contradictoires du cadre politico-social. Ces

influences ont tracé des zones culturelles relativement dissemblables.

Dans les massifs montagneux (Kabylie, Aurès), les parlers et les traits

coutumiers berbères se sont maintenus dans leur originalité. On y

observe une certaine indépendance à l'égard de l'Islam, notamment

dans le système juridique, un amour jaloux de la terre et de ses fruits,

un goût prononcé pour le travail lucratif individuel, une structure

sociale à tendance démocratique. En face, le pays arabe, celui des

steppes aux larges dimensions ou des plaines allongées, a conservé,

dans ses campagnes comme dans ses centres urbains, les caractères

liés à la civilisation pastorale, plus ouverte, plus classiquement

islamique mais moins attachée à la parcelle de terre qu'à la solidarité

tribale ou familiale. Entre ces deux systèmes, qui hors des villes

38

apparaissent distincts, il y a des interpénétrations nombreuses qui en

font une société aux aspects variés mais au fond commun tissé du fil

semblable des cellules familiales.

Dans ce livre je propose au lecteur une analyse globale des poupées et

jeux de poupées des enfants sahariens et nord-africains. En premier lieu

sont traitées les poupées-hommes, puis les poupées-femmes et les

poupées-enfants. Ces deux dernières catégories se trouvent groupées

suivant la population dont elles proviennent. Par contre, j'ai groupé les

poupées-hommes selon ce qu'elles représentent, ceci pour rendre

l'analyse plus intelligible. Une description selon la provenance aurait

causé un éparpillement des données. Chacune de ces trois parties est

devancée par un résumé mettant en lumière les caractéristiques de ce

groupe de poupées.

Dans la section Conclusions une synthèse est proposée ainsi qu'une

discussion de certains aspects environnementaux, économiques, sociaux

et culturels. La section suivante propose des idées et des actions

pratiques pour rendre utile cette culture ludique enfantine.

Le Catalogue des Poupées Sahariennes et Nord-Africaines du Musée

de l'Homme donne une description détaillée et systématisée des poupées

provenant de la collection du Musée de l'Homme et utilisée pour

l'analyse. Ce catalogue est suivi d'une description des cinq vidéos sur les

poupées et jeux de poupées marocains réalisés en rapport avec mes

recherches. Une première annexe offre un modèle de description des

jeux et jouets.

Dans ce livre se trouve aussi le résumé des cinq vidéos sur les poupées et

le jeu de poupées d'enfants marocains réalisés dans le cadre de mes

recherches. Le premier annexe propose un modèle de description des

jeux et jouets.

La transcription des mots vernaculaires et des références

géographiques et ethniques est basée sur les sources que je crois être les

plus sûres ou les plus largement acceptées et qui se trouvaient à ma

disposition. La diversité des langages et des sources bibliographiques

rend à peu près impossible une uniformisation complète. Pour la

transcription de certaines lettres arabes des signes conventionnels sont

utilisés. La liste de ces signes conventionnels se trouve à la table des

transcriptions. Les mots arabes écrits en italique ont été transcrits de

39

cette manière. Les mots amazighs que j'ai notés au Maroc ont souvent

été transcrit en premier lieu en caractères arabes car les amazighophones

utilisent souvent des caractères arabes pour transcrire leur langue. Ces

mots amazighs sont aussi écrits en italique.

Les mesures sont mentionnées en centimètres : B = base, H = hauteur,

LO = longueur, LA = largeur, E = épaisseur, D = diamètre, + =

maximum, - = minimum.

Ce livre démontre clairement l'importance des poupées et jeux de

poupées des enfants sahariens et nord-africains réfutant ainsi le point de

vue négatif d'un ancien administrateur d'un commune mixte écrivant en

1921 dans un article sur les jeux et jouets des enfants algériens que “les

poupées de nos fillettes et les jouets ordinaires de nos petits garçons sont

très rares et n'existent pour ainsi dire pas, en pays arabe…” (Robert, p.

155). En tout cas, Paul Bellin a déjà prouvé le contraire dans sa

remarquable étude sur l'enfant saharien vu à travers ses jeux. En 1963 il

écrivit (p. 48) :

Eu égard à l'indigence que nous venons de rappeler, on pourrait donc

s'attendre à trouver une jeunesse désœuvrée et languissante. Or, il

n'en est rien : la jeunesse saharienne joue. Elle joue autant, et peut-

être plus, qu'aucune autre, avec spontanéité, avec entrain, avec ce

sérieux qui est le propre des activités puériles. Il faut donc admettre

qu'en dépit des conditions de vie précaires l'enfance saharienne est

une enfance saine.

Avant de décrire les poupées et jeux de poupées des enfants sahariens et

nord-africains il faut quand même attirer l'attention sur quelques limites

ou problèmes auxquels l'analyse des données s'est heurtée. Il y a d'abord

le problème des sources bibliographiques et muséographiques. Les

auteurs et les collectionneurs n'ont pas toujours procédé avec le même

esprit scientifique. Parfois il y a manque de précision sur le plan ethnique

ou géographique lorsque les informations sont attribuées à telle

population ou à telle région. Une autre restriction fort regrettable est que

trop souvent les jouets sont décrits comme des objets et non pas comme

des instruments de jeu. Ainsi l'activité ludique n'est pas analysée avec le

même soin que l'est le jouet lui-même. Enfin il y a ici et là imprécision

40

terminologique quant aux termes et expressions utilisés pour les jouets et

les jeux dans lesquels ils sont employés.

En tenant compte de ces limites, ce que j'ai voulu faire en assemblant

de manière systématique et critique toutes les données à ma disposition,

c'est d'élaborer une analyse de base qui pourra stimuler et servir de

fondement, d'une part, à des recherches sur le terrain afin de relever la

spécificité d'un jeu ou jouet local et, d'autre part, à mettre cette culture

ludique saharienne et nord-africaine en relation avec les jeux et jouets

d'autres aires socioculturelles ainsi que dans une perspective mondiale.

Car si certains aspects des jouets et certains comportements dans les jeux

sont certainement particuliers à une aire socioculturelle, voire à une

communauté, une famille ou même un enfant, d'autres rôles et

comportements semblent bel et bien universels.

Dans “Three myths about children‟s folklore” June Factor lie à juste titre

ses recherches à son expérience personnelle (2001: 24-26). June Factor

commence sa description autobiographique en évoquant en anglais des

paroles de Paul Valéry que j‟ai traduit en français.

Paul Valérie écrivit dans un de ses essais : je m‟excuse de me révéler

ainsi à vous, mais à mon avis il est plus utile de parler de sa propre

expérience que de prétendre à une connaissance tout à fait

impersonnelle, une observation sans observateur ; en réalité il

n‟existe pas de théorie qui ne soit un fragment, soigneusement

préparé, d‟une autobiographie.

Etant convaincu que mes travaux sur les jeux et jouets des enfants

sahariens et nord-africains sont influencés par ma vie personnelle, je

pense qu‟il peut être utile à celui qui s‟y intéresse de disposer de

certaines informations lui permettant d‟établir des liens. J'ai donc mis

des données autobiographiques dans un second annexe.

Concernant mes contacts avec les enfants, les règles de l‟éthique de la

recherche scientifique proposée par le Conseil Européen de la Recherche

Scientifique ont été suivies. Ainsi l‟autorisation paternelle ou maternelle

a été demandée lors de la collecte de données ou des prises de photos

avec des enfants. Il aurait d‟ailleurs été difficile de faire autrement car le

41

travail de terrain se faisait dans les familles ou dans l‟espace public. Une

exception à cette règle existe néanmoins. Il s‟agit des observations et des

photos d‟enfants faites occasionnellement d‟une certaine distance dans

des rues ou autres espaces publics des centres urbains marocains mais

dans ce cas des adultes se trouvaient non loin et je n'ai pas rencontré de

réactions négatives en photographiant ces enfants.

Remerciements

Avant de proposer au lecteur ce trésor que sont les poupées et jeux de

poupées sahariens et nord-africains, il me reste à remercier tous ceux qui

d'une manière ou d'une autre m'ont permis de mener ce livre à son terme

et plus spécialement :

Les familles ghrib, particulièrement les enfants des années soixante-

dix, ainsi que Gilbert J.M. Claus du Département de Langues et

Cultures Africaines de l'Université d'Etat de Gand, pour l'accueil et le

soutient qu'ils m'ont offerts dans le cadre de mes recherches sur les

jeux et jouets ghrib.

Roquia El Mouloua et sa mère Fatima Bent Abdeslem, d'origine de

Marrakech mais vivant à Gand, pour leur amitié et leur aide dans ma

mise en rapport avec leur famille de Marrakech.

La famille Skouri de Kbour Chou, Eloula de Daoudiyât et Kader de

Douar Akioud à Marrakech ; le professeur Boughali, doyen, Youssef

Ait Ammou, maître-assistant, et Fatima Outizal, étudiante, de la

Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l'Université Cadi

Ayyad de Marrakech ; la famille Bamoussa, Khettou et Jalil d'Imi-n-

Tanoute ; la famille Ait Heda de Taroudannt et la fille Latifa de

Hmar, ainsi que nombre d'autres informatrices et informateurs sud-

marocains, qui tous ont rendu en février 1992 mon premier séjour

dans leur région d'une utilité réelle.

Souad Ouazzani d'Aïn Toujdate.

Mohamed Boutouil et sa famille de Khemisset, Malika et Thuriya

Bannour de Tiddas, Hesna Ourèra de Aït Hmed ou Yacoub.

42

Ali Hacherras, président, et d'autres membres de l'Association Tilelli

de Goulmima, les familles Hacherras, Lihi et Taous de Goulmima,

Omar Taous et ses élèves de Magaman, Hesna Midouan de Ighrem-n-

Cherif.

Aïcha Aït Mamou, Souad, Latifa, Najat, Sabah et Kamel Laabib et

quelques autres de Ksar Assaka, Mohamed Hammioui et ses élèves de

Tataouine, des enfants de Tabenatout, Taäkit et Midelt, Bouchra et

ses compagnons de jeu de She°ba, ainsi que Sfia Gharîb de Midelt.

L'instituteur Ali Boukrit, sa femme, leur fille Amal et sa copine Leila

de Zeïda.

Les filles de Ksar Hasni Biad.

Nour-Eddine Ikhbous d'Essaouira et ses élèves d'Aït Ighemour.

Ennèya, sa mère et les enfants d'Ignern.

Bari Saïd et ses élèves d'Imou Ergen et de Lahfart, Boubaker

Daoumani et ses élèves de Lahfart, des enfants de Lagzira et de Sidi

Ifni qui, avec d'autres encore, ont contribué à l'étude des poupées et

jeux de poupées marocains depuis octobre 1992.

Souad Laabib de Ksar Assaka pour son aide comme intermédiaire et

interprète pour le tamazight et l'arabe de 1995 à 2000.

Boubaker Daoumani de Sidi Ifni pour son aide comme intermédiaire,

interprète pour le tashelhit et l'arabe ainsi que pour sa collaboration à

la réalisation de vidéos sur les jeux et jouets des enfants, à partir de

2002.

Les enfants et leurs parents de Sidi Ifni et Lagzira qui ont accepté que

leur jeu de poupée soit filmé.

Le Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek (Fonds

National Belge pour la Recherche Scientifique), Bruxelles, qui a

soutenu mes recherches et mes publications de 1970 à 1992.

Dominique Champault, ancienne responsable, et Jean Lambert,

responsable du Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient

du Musée de l'Homme à Paris, et leurs collaborateurs, pour leur

bienveillance et leur aide.

Les photographes du Laboratoire de Photographie du même musée

qui ont réalisé toutes les photos des poupées de la collection de ce

musée, de même que les responsables du Service de la Photothèque.

Marie-Antoinette Fropo pour la correction du texte de 1993.

43

André Michelet, ancien président du Conseil International pour le Jeu

de l'Enfant et de l'Association Française pour l'Education par le Jeu,

pour avoir rendu possible une première édition de ce livre en 1993.

Ruben Rossie pour ses conseils et son aide dans l'utilisation de

l'ordinateur.

Krister Svensson, Eva Petersson, Anders Nelson et Mattias Nilsson

de l‟ancien Nordic Center for Research on Toys and Educational

Media (NCFL), et Krister Svensson, Anders Nelson, Mattias Nilsson

et Johnny Friberg du Stockholm International Toy Research Centre

(SITREC) pour leur amitié et leur aide.

44

45

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48

49

Poupées d'Enfants et Jeux de Poupées

Sahariens et Nord-Africains

50

51

1 Les poupées-hommes

1.1 Résumé

La collection de poupées sahariennes et nord-africaines du Musée de

l'Homme ne comporte que des poupées-hommes de populations

sahariennes. Cette situation n'est pas due aux collectionneurs, car les

différents auteurs consultés ne mentionnent pas de poupées-hommes en

dehors du Sahara. Toutefois une exception doit être faite pour le Maroc.

Ainsi un article paru en 1917 dans la revue France-Maroc parle d'une

poupée-homme marocaine représentant le marié. Laoust certifie en 1921

l'existence de cette poupée-jeune marié auprès des Amazighs du Haut et

de l'Anti-Atlas au Maroc, et la met en relation avec des rituels pour la

fête de l'°ashûra au début de l'année musulmane. Il s'agit donc plutôt

d'une poupée rituelle que d'une poupée pour jeu d'enfant. Un auteur

marocain Mohammad Ibn Azzuz Hakim, mentionne lui aussi, en 1959,

que les filles de Ghomara (Gumara el Haila), dans le nord du Maroc,

confectionnent à côté de leurs poupées-femmes des poupées qui sont

habillées en homme. Il en sera question lors de la description des

poupées-femmes marocaines. Néanmoins la rareté, ou selon Jeanne

Jouin l'inexistence, de la poupée-homme chez les filles marocaines fut

soulignée par cette dame qui, sur base de ses observations au Maroc

entre 1930 et 1940, m'a certifié lors d'un entretien au Musée de l'Homme

le 30 juillet 1980 qu'elle n'avait jamais vu de poupées-hommes au Maroc

et spécialement à Rabat et ses environs. En plus elle m'expliquait qu'elle

pensait que cela était du au fait que la femme était trop séparée de

l'homme et du monde masculin. Les informations obtenues lors de mes

recherches au Maroc, démontrent cependant que cette assertion doit être

relativisée car dans certaines régions une poupée-jeune marié est assez

fréquemment utilisée par les filles pour leur jeu de poupée représentant

le mariage. Mais il reste vrai que la poupée-jeune marié est beaucoup

moins élaborée que la poupée-jeune mariée. En plus on trouve bien que

rarement des garçons marocains jouant avec une poupée-homme qu'ils

ont confectionnée eux-mêmes.

52

Les poupées-hommes de la collection étudiée proviennent surtout

d'enfants touaregs, aussi bien des garçons que des filles. Les autres

furent faites par des enfants ou servantes maures, un enfant de la Vallée

de la Saoura, et des fillettes chaamba. Dans la bibliographie mention est

faite de poupées-hommes chez les garçons et filles touaregs, les enfants

regeybat, les garçons teda, les enfants de la ville de Mopti, les fillettes

belbala, les filles amazighes du Haut et de l'Anti-Atlas et les filles de la

région de Ghomara. Auprès des garçons et filles ghrib ainsi que dans

certaines communautés marocaines on trouve aussi des poupées-

hommes.

La poupée-homme la plus ancienne de la collection date de 1934 et fut

achetée à un jeune garçon touareg Kel Djanet (Touaregs Kel Ajjer), mais

dans la collection du Département d'Afrique Noire du Musée de

l'Homme, se trouvent deux poupées-cavaliers (ou poupées-méharistes)

récoltés en 1904 près de Rhergo sur le fleuve Niger. Dans la

bibliographie mention est faite en 1907 de poupées-hommes auprès des

enfants touaregs Kel Iforas.

Selon toutes les informations que j'ai pu trouver, ce ne sont que les

garçons touaregs, ghrib et teda, ainsi que ceux du village amazigh Aït

Ighemour, qui confectionnent et jouent avec les poupées-hommes. Des

poupées-hommes sont confectionnées par les filles chez les Touaregs, les

Ghrib, les Maures, les Regeybat, les Chaamba, les Teda, les Belbala et

dans certaines communautés marocaines. A l'exception des poupées-

hommes faites par les servantes noires des Maures de Oualata, les

poupées-hommes sont fabriquées par les enfants eux-mêmes.

Toutes ces poupées-hommes se rangent dans différentes catégories :

méharistes, cavaliers, muletiers, bergers, guerriers, notables et jeunes

mariés. Les poupées-hommes sont utilisées pour des jeux figurant des

scènes de la vie adulte. Des poupées-jeunes mariés existent chez les

Touaregs, les Ghrib, les Chaamba et probablement les Belbala, ainsi que

dans des communautés marocaines.

L'armature des poupées-hommes des enfants touaregs, ghrib, maures,

chaamba, belbala et d'Aït Ighemour est souvent en matière végétale et en

forme de croix, couverte d'étoffes. Les enfants touaregs jouent aussi avec

des méharistes et des cavaliers en argile, tout comme les enfants maures,

les enfants teda et les enfants noirs de Mopti. Les garçons d'Aït

53

Ighemour modèlent en argile un muletier et sa mule mais ils utilisent

aussi des courgettes et des morceaux de pomme de terre non pelée.

Bien que les poupées-hommes soient le plus souvent en matière

végétale et étoffes ou en terre crue ou cuite, il y a aussi des poupées-

hommes en pierre plate (Touaregs, Regeybat) ou en pierre cylindrique

(Ghrib), faites d'une touffe de cheveux de chèvre (Ghrib) ou de fils

électriques plastifiés (Vallée de la Saoura).

La forme des poupées-hommes varie de très schématique, comme

pour ceux taillés dans la pierre ou celles en touffe de poils de chèvre, à

une représentation détaillée des attributs typiques des hommes sahariens,

comme c'est le cas pour les méharistes, guerriers ou notables touaregs en

matière végétale et étoffes.

La poupée-homme la plus petite mesure 5 cm. C'est un cheval avec

son cavalier, modelée d'une pièce. La poupée-homme la plus grande est

une poupée-homme d'environ 100 cm faite par un garçon du village Aït

Ighemour au Maroc.

Du point de vue des vêtements et parures les poupées-hommes sont ou

bien peu colorées sinon monochromes ou bien très colorées comme dans

le cas de certaines poupées-hommes touarègues et des méharistes et

cavaliers miniaturisés en terre cuite des enfants maures de Oualata.

Si on laisse de coté les trois poupées-hommes faites par des garçons

d'Aït Ighemour, aucune de ces poupées-hommes n'a de visage et si elles

sont habillées, elles portent des vêtements d'hommes adultes.

1.2 Les poupées-méharistes

Les poupées-méharistes étaient sans aucun doute un des jouets préférés

des garçons sahariens. Il se peut néanmoins que les changements

économiques et sociaux survenus dans les dix ou vingt dernières années,

et spécialement la sédentarisation des nomades et semi-nomades

sahariens, portent les enfants de ces régions à délaisser les dromadaires

jouets et leurs poupées-méharistes en faveur des jouets imitant les

moyens de transport modernes, comme les voitures et les camions. Cette

évolution fut déjà discernable au moment de mes recherches chez les

enfants ghrib entre 1975 et 1977.

54

Des poupées-méharistes ont été révélées

chez différents groupes touaregs, chez les

Ghrib, les Maures, les Regeybat, les Teda et

les habitants de la Vallée de la Saoura.

J'ai vu en 1975 auprès d'un jeune garçon

ghrib du Sahara tunisien un méhariste réduit

à sa forme la plus simple. Ce méhariste,

assis sur une selle en brindilles portée par

un dromadaire jouet en mandibule de

chèvre, n'est qu'une touffe de poils de

chèvre (fig. 2).

Selon Charles de Foucauld il existe d'autres méharistes de forme

rudimentaire taillés dans la pierre par des enfants touaregs Kel Ahaggar

du Sahara algérien.

Bien que le capitaine Archier (1953: 39) déclare que chez les

Touaregs Kel Ahaggar le mot 'tifersîtîn (sing. téfersitt)' est le nom, donné

uniquement aux dromadaires en pierre taillée, Charles de Foucauld écrit

dans son Dictionnaire Touareg-Français (1951-1952: 358) que ce mot

désigne un animal ou un personnage en pierre taillée servant de jouet.

Charles de Foucauld est, à ma connaissance, le seul auteur qui ait déclaré

que “les enfants du Ahaggar taillent grossièrement des pierres plates en

forme de chameau, de cheval, d'homme, de femme etc.” Ce sont surtout

les jeunes garçons, spécialement les bergers qui taillent ces méharistes et

leurs dromadaires dans la pierre.

En ce qui concerne les Regeybat du Sahara algérien Denis note que les

enfants jouent avec des poupées-méharistes en pierre (1952: 32-33). En

plus, un informateur de la Vallée de la Saoura, aussi dans le Sahara

algérien, interprétait deux pièces de la collection, rassemblée par Denis,

comme représentant des méharistes et mettait l'un d'eux sur un

dromadaire de pierre.

Dans le livre Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines.

L'Animal dans les Jeux et Jouets le lecteur intéressé trouvera de plus

amples informations sur les jouets en pierre taillée (p. 54-59, 108, 179).

Chez les Touaregs Kel Ahaggar du Sahara algérien et les Touaregs

Kel Ajjer du Sahara algérien et libyen, les garçons et les filles font des

dromadaires, souvent sellés et montés d'un méhariste, avec une

2

55

mandibule de chèvre ou de mouton. La figure 3 nous montre un

magnifique exemplaire de 27 cm de haut avec un méhariste de 16 cm de

haut (catalogue 2.1, 41.19.113, p. 264). Un autre exemplaire est à voir à

la planche 28 de “La Vie du Sahara”.

3

56

Selon une information dans le fichier de la collection, on trouve les

mêmes dromadaires de mandibule sellés et montés à El Oued dans le

Sahara algérien près de la frontière tunisienne, et comme déjà mentionné

plus haut, les garçons ghrib jouent eux aussi avec des dromadaires de

mandibule sellés et montés.

L'armature de ces méharistes touaregs sur dromadaire de mandibule

est faite en bois de tamarix, en tiges de mrokba ou en roseau. Les

vêtements de dessus des poupées-méharistes touarègues à armature

végétale sont en étoffe de couleur uniforme, avec une préférence pour le

blanc et le bleu indigo. Le baudrier et la ceinture sont faits de fils de

coton mercerisés multicolores. Certains méharistes portent une culotte

longue blanche. Le cou et la tête sont parfois enveloppés de fils de laine

multicolores.

Avec ces dromadaires de mandibule et leurs méharistes, les enfants

touaregs s'amusent à figurer des carrousels de dromadaires ou d'autres

scènes de la vie nomade.

Les enfants touaregs Kel Aïr

(Sahara du Niger) font des

méharistes avec un corps en fibres

ou feuilles de palmier torsadées.

Les dromadaires portant ces

méharistes ont comme tronc un

coussin de chiffons dans lequel se

trouvent fixées quatre brindilles de

bois pour les pattes. Le cou et la

tête sont en fibres ou feuilles de

palmier torsadées.

Le méhariste de ce genre de 15,5

cm de haut, montrée à la figure 4,

porte une coiffure noire avec des

floches de laine rouge et verte

maintenues par une épingle double

(H totale = 48 cm; dromadaire : H =

35 cm, LO = 20 cm; catalogue 2.1,

74.107.6, p. 264).

4

57

Dans le document “Vie des Touaregs. Enfance et Jeux”, rédigé par un

auteur anonyme probablement dans les années cinquante, une excellente

description est donnée des dromadaires jouets en armature végétale ainsi

que du jeu dans lequel ils sont utilisés. Pour la confection de ces jouets

aussi bien que dans le jeu lui-même, garçons et filles collaborent. Vu

l'importance de ce témoignage je le copie en entier.

Le personnage principal, autour duquel tous les autres gravitent, est

le chameau, objet de convoitise de tous les jeunes nomades,

l'équivalent de l'automobile pour nos petits enfants de France. Son

armature en bois souple, de l'acacia ou 'mœrua crassifolia' de

préférence, est montée par les garçons, puis habillée de vieux chiffons

par les petites filles qui recouvrent ensuite le tout d'un beau morceau

de tissu blanc pour en faire une monture de chef. Parfois, lorsque la

couture de ce petit chef-d'œuvre s'avère trop délicate pour ces jeunes

doigts inexpérimentés, on va demander l'aide d'une femme de la

famille qui ne dédaigne pas d'aider à la confection du jouet. Tous les

détails de l'animal sont scrupuleusement respectés : la tête est bien

dessinée à l'aide de petits morceaux de bois minuscules, taillés et

retaillés par l'artiste de la bande : yeux, oreilles, bouche, rien n'y

manque, et la forme de la bosse est souvent très réussie ; par contre,

le chameau, vu de profil, n'a que deux pattes que l'on pique dans le

sable pour le faire tenir debout. C'est encore un garçon qui, dans un

morceau de bois tendre, tamaris de préférence, sculpte la selle, exacte

réplique de la 'rahla tamzak', décorée au feu à l'aide de pointes

d'aiguilles, puis fixée sur l'animal par une petite sangle, dont le

travail, pompom compris, est semblable à celui du harnachement

normal. Puis toute la petite troupe s'affaire à tailler dans des débris

de peau : la bride, les dabias, l'areg et jusqu'à la cravache et au tapis

de selle qui complètent l'équipement. La monture terminée, il faut

faire le méhariste : un squelette de bois, les filles posent les

gandouras de luxe tandis que les garçons montent les deux 'chechs' et

les cordons de noblesse et que l'artiste de la bande découpe dans une

boîte de conserve la 'takouba' de fer blanc sans laquelle un homme

appartenant à la noblesse ne saurait se déplacer. Puis, petit à petit,

autour de cette figure principale, se monte le reste de la famille : la

mère, enveloppée dans ses larges vêtements et dont les pieds de bois

58

sont curieusement piqués dans une grosse boule d'argile qui, posée

sur le sol permet de lui imprimer un curieux balancement censé

représenter la marche ; les enfants, de toutes tailles, puis les

serviteurs noirs. Aux personnages viennent s'ajouter animaux et objets

familiers du campement : chameaux de bât, chèvres, chiens, ânes,

tapis, marmites, outres et jusqu'à la tente taillée dans un morceau de

peau. Les santons terminés, tous les enfants jouent 'à la tribu'.

Pendant que les garçons, avec le chef de famille monté sur son méhari

blanc, les chameaux de bât chargés de sacs de sable, s'en vont au long

des pistes tracées sur le sol, tournent autour des montagnes de

cailloux et abreuvent leur convoi à des points d'eau imaginaires,

parcourant ainsi des milliers de kilomètres sur une curieuse carte en

relief où les proportions sont loin d'être respectées, les petites filles,

restées au campement, montent la tente, envoient les nègres d'étoffe

garder les chèvres d'argile, simulent une cuisine longue et savoureuse

et finissent par faire un repas succulent avec trois dattes. Lorsque les

garçons, après un long périple de cent mètres, reviennent au camp,

tout ce petit monde simule les fêtes joyeuses qui accueillent les

caravanes de retour du Soudan.

Les enfants sahariens des

Touaregs, Maures et Teda

modèlent des dromadaires

en terre crue ou cuite qui

sont montés par un

méhariste fait de la même

façon. Un des dromadaires

en argile séchée au soleil,

collectionnés auprès des

enfants touaregs Kel Ajjer

du Sahara algérien, est

monté par un méhariste lui

aussi modelé en argiIe et

séché au soleil (fig. 5, H

totale = 14,5 cm;

dromadaire : H = 9 cm, LO

= 9,5 cm; catalogue 2.1,

37.21.104.1/2, p. 264). Les bras de ce méhariste de 7,2 cm de haut

5

59

forment une croix avec le tronc et la tête qui n'est qu'une pointe. Deux

jambes courtes permettent de tenir le méhariste en selle.

Deux autres Touaregs en terre crue du même genre et d'environ 10 cm

de haut étaient destinés à être posés sur un dromadaire ou un cheval (voir

1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60). Ils furent eux aussi modelés en argile,

puis séchés au soleil, par un garçon hartani de onze ans, vivant auprès

des Touaregs Kel Ahaggar à Tamanrasset (Sahara algérien).

Les enfants des Touaregs Ioullemeden de la région sahélienne de

Tahoua au Niger, font eux aussi des méharistes en argiles qu'ils mettent

en selle sur des dromadaires en argile “souvent agrémentés de morceaux

de chiffons de couleur et de brins d'herbes représentant les impédimenta

(les bagages encombrants) ou le harnachement” (Nicolas, 1950: 186).

Les enfants maures du Sahara Nord-occidental (frontière algéro-

marocaine) jouent avec des dromadaires à quatre pattes sellés et montés

d'un méhariste. Le tout est fabriqué en terre cuite rougeâtre. Ce

méhariste est du même type que la poupée-cavalier des enfants maures

décrite plus loin et montrée à la figure 8 (p. 62).

Les enfants teda du Tibesti au Sahara tchadien, modèlent eux-mêmes

des dromadaires dans l'argile. Peter Fuchs (1961: 47) déclare que ces

figurines sont les jouets favoris des garçons teda, qu'ils mettent en selle

des méharistes en argile et s'engagent avec ces jouets dans des razzias

réciproques.

Dominique Champault a recueilli en 1956 auprès des enfants de la

Vallée de la Saoura dans le Sahara Nord-occidental en Algérie, un

dromadaire monté d'un méhariste de 6,5 cm de haut et avec une

envergure des bras de 11 cm, tous les deux en fils électriques plastifiés,

jaunes pour le dromadaire et rouge pour le méhariste (fig. 6, p. 60, H

totale = 15,5 cm; dromadaire : H = 11 cm; LO = 6,5 cm; catalogue 2.2,

62.60.29/30, p. 267). Le méhariste est tenu en selle par une lisière en fil

électrique plastifié rouge qui le relie à la tête du dromadaire.

Cet exemple démontre que si les matériaux s'adaptent aux temps

modernes, la représentation du dromadaire et du méhariste subsiste dans

les jeux des enfants sahariens, ce qui est confirmé par les dromadaires

jouets et les poupées-méharistes que j'ai trouvés auprès des enfants ghrib

en 1975 et 1977.

60

6

1.3 Les poupées-cavaliers

Chez les Touaregs et les Maures du Sahara Nord-occidental les chevaux

jouets portent une selle souvent montée d'un cavalier. Le cheval, la selle

et le cavalier ont été modelés dans l'argile et forment trois pièces

séparées contrairement aux chevaux sellés et montés des enfants maures

de Oualata qui sont modelés d'une pièce.

Trois chevaux sellés et montés d'un cavalier touareg ont été modélés

en argile, puis séchés au soleil. Deux de ces chevaux ont pu aussi bien

représenter des dromadaires (catalogue 2.2, 41.19.152-154, p. 267). Ces

jouets qui s'appellent 'aknar' furent faits par trois garçons hartani, les

serviteurs noirs des Touaregs Kel Ahaggar, entre huit et douze ans.

Malheureusement ces objets manquent au Musée de l'Homme. La

hauteur d'un des chevaux était 8 cm comme l'indique la fiche

signalétique de cet objet.

61

Un des cavaliers représente, selon son créateur, le fils de l'amenokal

ou 'roi' de l'Ahaggar.

Il s'agit de jouets de garçons. Monter à cheval était uniquement

réservé aux hommes et bien que certaines femmes de l'Ahaggar montent

à méhari, aucune ne montait à cheval (de Foucauld, 1951-1952: 1034).

En 1904 Desplagnes

a récolté des figurines

en terre cuite trouvée

en surface près de

Rhergo sur la boucle

du Niger au Mali, dans

une plaine sahélienne

où nomadisaient les

Touaregs Ioullemeden

(fig. 7). Selon Lebeuf et Pâques (1970: 53) il s'agit de :

Deux représentations de cavaliers, en position assise ; les jambes sont

allongées, le tronc, légèrement rejeté en arrière, est muni de deux

tenons latéraux constituant les bras, la tête est modelée à partir d'un

appendice vertical, aplati, portant sur un des deux spécimens un

cimier descendant sur la nuque ; deux points latéraux figurent les

yeux ; des traces de peintures brune et blanche sont encore visibles ;

la plus petite des deux figurines porte autour du cou un collier, simple

fil de coton vert ; hauteur : 57 mm et 86 mm.

Comme on trouve dans la collection Desplagnes un dromadaire et des

selles de dromadaires en terre cuite, ces poupées-hommes pourraient

aussi bien servir comme poupées-méharistes.

Les enfants maures du Sahara Nord-occidental jouent eux aussi avec

des chevaux sellés et montés, faites en terre cuite. Le jouet qu'on voit à la

figure 8 (p. 62) consiste en quatre pièces, le cheval (H = 16 cm, LO =

17,5 cm), la selle (LO = 6 cm), le cavalier (H = 12 cm) et son chapeau

(H = 3,5 cm), en terre cuite rougeâtre (H totale = 26 cm). Le tout à été

passé à l'ocre rouge à l'exception cependant du cheval (catalogue 2.2,

38.141.83, p. 267).

7

62

Le cou de ce cheval à quatre

pattes est incurvé en avant et

les oreilles sont modelées sur

une petite tête. La queue est

bien mise en relief. La selle

est du type à pommeau en

latte arrondie.

Le cavalier se tient en selle

par les deux jambes écartées.

Il a les bras étendus et porte

un chapeau. Comme chez

toutes les autres poupées-

hommes, sauf ceux du

village marocain Aït

Ighemour, il n'y a pas

d'indication de visage.

Les enfants noirs de Mopti, sur le Niger au Mali, modèlent en argile des

cavaliers et des chevaux qui ne ressemblent point aux cavaliers trouvés

près de Rhergo, mais au contraire très bien à ceux des enfants maures du

Sahara Nord-occidental. Ces figurines peuvent être en terre crue, séchée

au soleil, ou en terre cuite. J.J. Mandel et A. Brenier-Estrine nous

montrent dans leur article “Clay Toys of Mopti” deux chevaux sellés et

montés (1977: 11-12).

Des petits chevaux en terre crue, servant de jouets aux enfants maures

de Oualata (Sahara mauritanien), sont faits par les servantes noires

(catalogue 2.2, 38.48.81-83, p. 267). Le cheval, la selle et

éventuellement le cavalier ont été modélés d'une pièce. Ces jouets déjà

remarquables par leur coloration ont en plus les deux pattes antérieures

réunies en un seul tronc. Une de ces poupées-cavaliers de la collection

porte le casque colonial.

Le cavalier indigène maure de Oualata de la figure 9 (p. 62) monte sur

un cheval sellé. Le cou du cheval est incurvé en avant et la tête forme un

très faible relief. Les deux pattes antérieures sont réunies en un seul

tronc. La queue est faite d'un brin de coton. Le jouet fut recouvert d'un

enduit blanc. Les sabots et la selle sont peints en ocre.

8

63

La sangle est en

ocre ornée de dessins

jaunes et noirs. Le

cavalier est peint en

jaune. Des lignes ocres

et bleues dessinent le

harnachement. En

avant du poitrail une

protubérance semi-

cylindrique est ornée

d'une croix composée,

ocre et noire (H = 7

cm, LO = 6,7 cm, LA

3,3 cm; catalogue 2.2,

38.48.82, p. 267).

Le jouet le plus petit de cette série de cavaliers mesure 5 cm de haut

sur 4 cm de longueur, le plus grand mesure 8,3 cm sur 9,5 cm.

La manière dont les enfants utilisent tous ces chevaux jouets et

poupées-cavaliers dans leurs jeux n'a pas été révélée, mais il est clair

qu'ils les utilisent surtout pour interpréter la vie des adultes ou les

comportements des animaux eux-mêmes, tous comme ils le font avec

leurs dromadaires jouets et poupées-méharistes.

1.4 Les poupées-bergers

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, vu qu'il s'agit de populations

vivant dans une situation économique et sociale où le petit et/ou le gros

bétail jouent un rôle important, très peu de données existent sur

d'éventuelles poupées-bergers en Afrique du Nord et au Sahara.

Denis écrit que les enfants regeybat (Sahara algérien) figurent “le

berger noir en fichant en terre des pierres en forme d'Y que l'on

trouverait beaucoup en Mauritanie, et dont la fourche formerait les bras

de l'homme” (1952: 32-33).

Personnellement j'ai constaté que les garçons ghrib du Sahara tunisien

jouent pour leur jeu de troupeau avec une pierre cylindrique d'environ 10

cm de haut qui devient le berger, une pierre cylindrique plus petite

9

64

comme chien de berger et des crottes de chèvres pour les animaux (voir

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. L'Animal dans les

Jeux et Jouets, fig. 16, p. 62).

1.5 Les poupées-muletiers

Même si le mulet joue un rôle important dans toute la région et que des

jeunes s'occupent du mulet je n'ai jamais trouvé référence à une poupée-

muletier jusqu'au jour où deux garçons me l'ont montré au petit village

amazigh Aït Ighemour (province de Ouarzazate, sud-marocain) en

octobre 1992.

A Aït Ighemour dans le Haut Atlas les garçons entre six et environ dix

ans vont chercher de l'argile à flanc de montagne (fig. 10).

Avec cet argile ils modèlent bon nombre de jouets, entre autre un

muletier à casquette qui serre entre ses grosses jambes un mulet non

sellé (fig. 11, H = 11 cm). Dans la tête allongée du mulet, avec ses deux

oreilles bien prononcées, le garçon a mis des yeux. Si nécessaire on

mouille un peu l'argile avec de la salive pour que la tête, les oreilles, les

bras, les jambes ou les pattes s'adhèrent bien au corps du muletier ou du

mulet. Ces muletiers et mulets sont séchés au soleil. Avec ces jouets

assez frustes, les garçons miment des scènes de l'élevage ou du

transport.

10 11

65

Un autre type de muletier avec son mulet fut fait en octobre 1992 par

un garçon du même village et cela avec des branchettes et des courgettes

(fig. 12, muletier : H = 32 cm, mulet : H = 21 cm, LO = 20 cm). Pour le

muletier le garçon a mis aux deux extrémités d'une branchette une petite

courgette, l'une figurant la tête et l'autre le bassin. Les deux branchettes

qui ont été introduites dans le bassin et représentent les jambes, se

terminent par deux morceaux de pomme de terre servants de pieds. Dans

la courgette servant de tête des petits morceaux de pomme de terre, avec

la pelure tournée vers l'extérieur, font office de bouche et des yeux. Pour

le mulet une grosse courgette sert de tronc dans lequel cinq branchettes

sont enfoncées, quatre pour les pattes et une pour le cou. Une courgette

plus petite forme la tête et est enfoncée sur la branchette servant de cou.

12

66

1.6 Les poupées-guerriers et poupées-notables

Dans la collection du Musée de l'Homme l'on trouve des poupées

symbolisant des guerriers touaregs ou des Touaregs en grande tenue qui

proviennent des Touaregs Kel Ahaggar et Kel Ajjer (Sahara algérien),

des Touaregs Kel Aïr (Sahara du Niger) et des Touaregs Kel Iforas

(Sahara malien) (catalogue 2.3, p. 269).

L'exemple le plus ancien date d'avant 1935 mais Maurice Cortier

constate déjà leur existence auprès des Touaregs Kel Iforas en 1907

(1908: 310).

Selon cet auteur les poupées-hommes sont un des principaux jouets

des garçons Kel Iforas. Néanmoins les deux exemplaires de la collection,

qui représentent des Touaregs Kel Iforas en grande tenue, ont été faits

par une fille.

Aussi bien les filles que les garçons touaregs Kel Ahaggar

confectionnent et jouent avec des poupées-hommes avec lesquelles ils

figurent des scènes de vie, des 'ahâl' ou réunions galantes, des carrousels

de dromadaires etc. Bellin (1963: 100) affirme en ce qui concerne les

jeunes nobles Kel Ahaggar :

Dans le cas des jeunes garçons touaregs, ce qui les intéresse, c'est

moins de jouer avec les poupées que de les confectionner. Nous avons

affaire à une création, et - nous n'hésiterons pas à le dire - à une

création artistique... Le jeune Targui se fabrique des spectacles avec

une meule tournante ou avec une brindille incandescente ; il taille,

modèle des statuettes, hommes et chameaux. Dans le goût du

spectacle, dans la création artistique, le rêve a une bonne place.

Foley (1930: 47), pour les Touaregs Kel Ahaggar, et Cortier (1908: 310),

pour les Touaregs Kel Iforas, notent que les poupées-hommes construites

par les garçons sont mariées selon le cérémonial d'usage aux poupées-

femmes construites par les filles.

Une intéressante photo d'Henri Lhote (fig. 13, p. 67) nous montre une

jeune fille touarègue Kel Ahaggar jouant dans le sable avec des poupées-

hommes habillées en guerriers. Sur cette photo on voit aussi un

dromadaire sellé portant des sacs de selle (1944: 113, planche VIII).

67

13

14 15

68

Les figures 14 et 15 (p. 67) laissent voir une poupée de 20 cm et de 33

cm de hauteur qui représente un Touareg Kel Ahaggar (catalogue 2.3,

41.19.104-105, p. 270). Ces poupées-guerriers ou poupées-notables sont

à rapprocher de la poupée-méhariste assise sur un dromadaire fait d'une

mandibule de chèvre ou de mouton (fig. 3, p.55).

L'armature en forme de croix de la grande majorité des poupées-

hommes de la collection est en matière végétale : tiges de graminées,

morceaux de bois, roseaux, fibres de palmier torsadées ou feuilles de

palmier tressées. Deux poupées-hommes ont une armature faite d'un os.

Comme on peut le constater à la figure 16, différentes formes

d'armatures ont été utilisées pour la construction de ces guerriers ou

notables en miniature. Le premier type d'armature est fait d'un morceau

de bois ou d'os auquel est ligaturé en croix un petit morceau de bois pour

figurer les bras. Le second type d'armature est un roseau dont les deux

tiers ont été découpés pour représenter les jambes. Un bâtonnet est

introduit horizontalement dans le roseau pour figurer les bras. Le

troisième type d'armature se compose verticalement de deux, trois ou

cinq tiges de graminées. Deux ou trois tiges y sont ligaturées en croix

pour former les bras. La tige verticale du milieu ne va qu'à la hauteur de

la taille, les deux ou quatre tiges extérieures se prolongent pour former

les jambes. Les tiges sont reliées avec des fils de coton. Le quatrième

type d'armature est fait de trois ou quatre tiges de graminées, dont

celle(s) du milieu ne va (vont) qu'à la taille, sur lesquelles une tige à été

ligaturée en croix pour figurer les bras. La tige servant de bras est fendue

au milieu et glissée au-dessus des tiges verticales. Les tiges sont reliées

avec des fils de coton. Le dernier type d'armature est en feuilles de

palmier tressées ou en fibres de palmier torsadées, éventuellement

raffermi par un fil de fer.

La hauteur minimale des poupées-guerriers et poupées-notables

touarègues est 7,5 cm, la hauteur maximale 40 cm.

16

69

A côté des poupées-guerriers à armature d'origine végétale, les textes

font référence à des figurines de sexe masculin en terre cuite, habillées et

armées, chez les garçons touaregs Kel Iforas du Sahara malien (Cortier,

1908: 310) .

Les vêtements et les ornements des poupées-hommes imitent, parfois

très modestement mais le plus souvent très complètement, le costume et

les ornements des guerriers touaregs ou des Touaregs en grande tenue.

Ce costume se compose d'un pantalon blanc ou bleu indigo, serré à la

ceinture et rétréci à la cheville, et d'une ou de deux longues blouses,

même trois pour les gens riches. Au milieu de la couture de la blouse un

trou laisse le passage à la tête. Selon les coutumes touarègues la longue

blouse inférieure est blanche et celle du dessus bleue. Une description

détaillée des vêtements d'homme touareg est à lire dans Cortier, 1908:

317; Foley, 1930: 23-26; de Foucauld, 1951-1952: 73-74, 98, 439, 995;

Gabus, 1958: 282-289. Pour des photos et croquis d'homme touareg voir

Foley, 1930: pl. XVI-XVIII et Gabus, 1958: 282.

Dans la collection du Musée de l'Homme, les poupées touarègues de

sexe masculin portent assez souvent une culotte blanche (fig. 17, H= 17

cm), une fois une culotte beige, bleue indigo ou multicolore.

17 18

70

Leur costume se compose d'un, de deux ou de trois longues blouses,

parfois il y en a quatre ou même cinq. Normalement la blouse inférieure

est blanche et celle du dessus bleu indigo comme on peut le voir sur la

figure 18 (p. 69), l'armature de la figure 17 (p. 69) mais habillée

(catalogue 2.3, X.66.1.42, p. 269). Mais il arrive que les tissus aient une

autre couleur. Une poupée-homme porte un manteau beige avec

capuchon. Les enfants ont utilisé, comme tissu, des cotonnades, de la

soie mercerisée et de la gaze blanche.

A la manière des Touaregs nobles qui portent des cordons de noblesse,

la plupart des poupées-hommes sont ornée de fils de laine ou de coton se

croisant sur la poitrine en guise de baudrier. Ces fils de laine ou de coton

sont de couleur blanche, rouge, bleue, verte, jaune. Lorsque les poupées

portent une ceinture, elle se constitue des mêmes fils de laine ou de

coton (fig. 3, p. 55). Le baudrier et la ceinture sont rarement en gaze (fig.

19, H = 23 cm; catalogue 2.3, 34.52.43, p. 269).

Une poupée-homme, d'un enfant touareg Kel Iforas, porte une culotte

en tissu multicolore, une blouse bleu indigo, un baudrier et une ceinture

de fils de laine verte, rouge et blanche fig. 20).

19 20

71

Le cou est brodé de coton blanc, indigo, rouge, jaune et vert. Un petit

écheveau de coton indigo imite la chevelure (fig. 20, p. 70, H = 17 cm;

catalogue 2.3, 38.16.43, p. 269).

Cette manière de broder le cou de fils multicolores se retrouve chez

plusieurs poupées-hommes. D'autres poupées ont le cou et la tête

enveloppés de tissu monochrome. Certains Touaregs en miniature

portent un turban, d'autres ont la tête entourée de fils de coton ou de

laine de couleur variée comme le montrent les figures 3 (p. 55), 14 et 15

(p. 67). Par la manière typique dont les enfants entourent de fils la tête

des poupées-hommes, ils imitent la coiffure typique des hommes

touaregs avec les cheveux tressés et ramenés en arrière. Pour cette

coiffure voir Lhote, 1944: 289, pl. XIV.

Deux poupées-hommes touarègues Kel Ahaggar ont la tête entourée

de papier d'argent avec l'imitation de la coiffure au-dessus (catalogue

2.3, 41.19.106/107, p. 269)

Il est à remarquer qu'aucune de ces poupées-hommes porte des traits

de visage, ce qui s'accorde avec la règle générale pour les poupées-

hommes sahariennes et nord-africaines.

Quelques Touaregs d'imitation portent l'épée. L'importance de la

takouba - cette épée touarègue - dans l'esprit du garçon, qui a fabriqué la

poupée de la figure 14 (p. 67), se manifeste par sa taille. Pour une

description de la takouba voir Champault, 1980.

Il existe aussi des poupées-hommes qui figurent les guerriers maures.

Dans le catalogue “Poupées-jouets. Poupées-reflets” (1983: 74) sont

mentionnées deux poupées-hommes, de 7 cm de hauteur, offertes par G.

Duchemin à la collection de poupées du Musée de l'Homme. Il s'agit de

tiges de graminées revêtues par les enfants maures de Oualata, dans le

Sahara mauritanien, de la tunique et du turban des guerriers maures.

Jean Gabus parle lui aussi d'une poupée-homme lorsqu'il mentionne la

maison jouet de Oualata. Cet homme est fait d'un bâtonnet enveloppé

d'étoffe et “selon la taille du bâtonnet, l'homme est de plus ou moins

grande importance sociale” (1958: 163).

72

Vu que les deux poupées-hommes de Oualata offerte par G.

Duchemin au Musée de l'Homme n'ont pas été retrouvées, un dessin sur

échelle réduite des deux croquis figurant dans le livre de Gabus est

reproduit à la figure 21 (1958: 163, croquis: 134).

1.7 Les poupées-jeunes mariés

En parlant des poupées-guerriers, j'ai noté que selon certains auteurs, les

enfants des Touaregs Kel Ahaggar et Kel Iforas marient, suivant le

cérémonial d'usage, les poupées-hommes faites par les garçons avec les

poupées-femmes construites par les filles.

En plus Francis Nicolas (1950: 186) parle de poupées-hommes en

argile qui représentent et se nomment “ashlu, le marié”, ceci chez les

enfants des Touaregs Ioullemeden (Touaregs Kel Dinnik, Sahara/Sahel

du Niger).

Parfois, bien que cela soit assez exceptionnel dans la seconde moitié

des années soixante-dix, les filles Ghrib du Sahara tunisien

confectionnent à partir de l'âge d'environ sept ans, un jeune marié d'une

hauteur d'à peu près 15 centimètres avec une armature de deux bâtonnets

reliés en forme de croix (fig. 22, p. 73).

21

73

Cette poupée-jeune marié sans traits de visage est habillée par les filles

de chiffons blancs et coloriés servant de sous-vêtements et de vêtements

d'homme. Sur la tête elles lui mettent un petit bonnet fait d'étoffe rouge,

faisant figure de kabbûs, et éventuellement un morceau d'étoffe blanche

ou kaki comme turban. A la ceinture elles attachent souvent un bâtonnet

pointu représentant l'épée, cet objet distinctif que porte le nouveau marié

ghrib pendant les noces.

Les fillettes des nomades chaamba (Sahara Nord-occidental)

confectionnent, elles aussi, une poupée-homme figurant le jeune marié

(fig. 23, p. 74) et tout comme le jeune marié lui-même, cette poupée

s'appelle asri (catalogue, 2.4, p. 274). Sur une 'âme' d'os un bâtonnet est

ligaturé en croix pour figurer les bras. Comme vêtements, faits de

chiffons blancs, le jeune marié porte une longue blouse, un turban et un

manteau d'homme. La ceinture et le baudrier sont en fils de laine rouges

et verts. Le visage n'est pas indiqué.

Dominique Champault mentionne concernant les poupées des fillettes

belbala (Sahara algérien) que de “très rares poupées sont masculines et

portent burnous (manteau d'homme), turban et, au côté, un petit sabre de

bois” (1969: 345). Selon une communication personnelle que m'a

22

74

transmise Dominique Champault en novembre 1991, ces poupées-

hommes belbala sont faites d'un os simple et non en forme de croix.

Il n'est probablement pas trop hasardeux de mettre ces poupées-

hommes belbala en rapport avec les poupées-jeunes mariés des filles

ghrib et chaamba.

En ce qui concerne la période de l'année pendant laquelle les filles

belbala jouent avec leurs poupées, Dominique Champault écrit que

comme dans la croyance populaire belbala la manipulation des poupées

appelle la pluie, on ne joue en principe à la poupée qu'en automne au

moment où la pluie est désirée (1969: 140).

Au Maroc, où les filles arabophones et amazighophones jouent

volontiers au mariage, certaines filles et femmes disent qu'une poupée-

jeune marié est confectionnée, mais il est aussi bien souligné par d'autres

qu'une pareille poupée-homme n'est pas utilisée.

23

75

Dans les années soixante-dix et selon la famille Skouri, une famille

d'enseignantes, les filles du milieu populaire du quartier Kbour Chou à

Marrakech utilisaient une poupée homme, le °arîs ou fiancé,

confectionnée avec deux morceaux de roseau assemblés en forme de

croix et vêtus à la manière des hommes. La confection de cette poupée-

jeune marié se trouve confirmée par une femme née à Marrakech il y a

environ soixante ans. Cette femme affirme qu'elle-même et les filles de

sa génération, c'est-à-dire dans les années quarante, faisaient un fiancé en

roseau pour qu'il se marie avec leur poupée-jeune mariée. Ce jeune marié

était vêtu du erza, le turban, du jellaba et du selhâm, le manteau.

En contraste avec ces données, des jeunes femmes de Douar Akioud,

un quartier périphérique très pauvre de Marrakech, m'ont dit avec

insistance qu'elles-mêmes et leurs amies n'utilisaient pas de poupée-

homme pour le jeu du mariage. Le mari de leur poupée-jeune mariée

n'existait que dans leur imagination. Vers la même période, le début des

années quatre-vingt, et dans le milieu amazigh de la petite ville d'Imi-n-

Tanoute c'est la même situation qui se présente. Le jeu du mariage de la

poupée-jeune mariée, se joue sans poupée-homme servant de fiancé.

Mais dans la campagne aux alentours de Taroudannt, une autre petite

ville du sud du Maroc, les filles arabo-berbères semblent bel et bien

jouer au mariage de leur poupée-jeune mariée avec son fiancé, le °arîs,

figuré par une poupée habillée en homme. Cette affirmation se réfère aux

filles des Oulad Yahya dans les années 1940 et aux filles d'aujourd'hui de

la région rurale Hmar à environ dix kilomètres de Taroudannt. La

poupée-jeune marié est dans cette région rurale vêtue d'un pantalon long

et d'un jellaba blanc à capuchon cintré avec une ceinture. Les filles

arabophones de Aïn Toujdate entre Fès et Meknès se créaient aussi une

poupée-jeune marié vers 1987.

Une fille amazighe d'environ huit ans, habitant le petit village Aït

Hmed ou Yacoub à 4 km de Khemisset près de la route vers Sidi

Slimane, fait elle aussi en octobre 1996 une poupée-jeune marié ou isli

pour jouer au mariage avec une ou plusieurs de ses copines. Entre 1975

et 1985 des filles amazighes du village Ksar Assaka près de Midelt

utilisaient une poupée-jeune marié ou isli pour leur jeu de poupée

représentant les cérémonies de mariage tout comme les filles amazighes

du village Magaman près de Goulmima le font en 1996. Une des

poupées faites par les filles de ce village représente le jeune marié. Ce

76

n'est qu'une poupée vite faite avec une petite armature en forme de croix

de deux bâtonnets vêtue d'un chiffon transparent (fig. 101 en bas côté

droit, p. 153).

Une description détaillée de ces jeux de mariage de la poupée-jeune

marié avec la poupée-jeune mariée au Maroc se trouve dans les pages sur

les poupées-femmes marocaines.

Une dernière poupée-homme (fig. 24), qui me semble tout à fait

particulière, m'a été présentée en octobre 1992 par un garçon scolarisé de

dix ans du petit village amazigh Aït Ighemour situé à 8 km de la

montagne Jbel Siroua dans le Haut Atlas. Ce village se trouve à 2600 m

d'altitude et à la fin d'une piste de 36 km partant du village Anezal sur la

route d'Amerzgane à Tazenakht dans la province de Ouarzazate.

Les données sur cette poupée-homme, ainsi que toutes les autres

informations sur les enfants de ce village furent recueillies avec l'aide

d'un instituteur amazigh d'Essaouira, Ihbous Nour-Eddine né en 1967,

qui à ce moment là enseignait depuis deux ans dans l'école du village.

24

77

La poupée-homme en question n'est pas seulement remarquable pour

sa hauteur d'environ un mètre et sa tête en courgette mais aussi pour les

activités ludiques dans laquelle elle est utilisée. Selon le garçon qui a

confectionné cette poupée-homme, elle est utilisée par les garçons pour

représenter les jeunes hommes qui la nuit assistent avec les jeunes

femmes à la danse ahwash, la danse traditionnelle de la région de

Ouarzazate. Ils célébreraient aussi le mariage de cette poupée-homme,

qui d'ailleurs s'appelle isli ou jeune marié, avec une grande poupée-

femme qui porte le nom de tislit ou jeune mariée. Je mentionne ces

informations avec une certaine réserve car il faudrait encore les

confirmer et les compléter auprès d'autres garçons et filles de ce village.

L'armature de cette poupée-homme consiste en une branche d'environ

un mètre de long auquel est ligaturé en forme de croix un roseau

d'environ 40 cm de long. Une grande courgette takhsaït est enfoncée en

haut de la branche verticale. Dans cette courgette le garçon a fait des

incisions pour les sourcils, et des creux pour les yeux, le nez et la

bouche. Les incisions pour les sourcils et le creux pour la bouche sont

noircis avec le khol, un produit de beauté. Dans le creux des yeux se

trouve un morceau de pomme de terre avec la pelure rouge tournée vers

l'extérieur et dans celui du nez un morceau du fruit de l'arbre iqurran de

couleur jaune. Une rondelle de plastique rouge, utilisée à l'école pour

apprendre à compter, poussée dans la bouche sert de langue. Cette

poupée est vêtue d'un sous-vêtement rouge et un survêtement blanc à

capuchon qui normalement est porté par un garçon. Sur la tête et autour

du cou un foulard a été mis. Ainsi vêtue cette poupée-homme met en

scène un jeune marié ou un jeune homme qui va à la danse 'ahwash'.

Cette poupée est fabriquée pendant la période de la récolte des courgettes

et des pommes de terre, c'est-à-dire en automne.

L'existence à Guelmim de pareilles poupées-hommes à tête en

courgette faites par des garçons a été confirmée par un informateur

originaire de cette ville pour le début des années 1970. A Guelmim, qui

alors n'était qu'un village, cette poupée-homme servait cependant

d'épouvantail dans les champs.

78

79

2 Les poupées-femmes

2.1 Résumé

Les poupées-femmes sont beaucoup plus répandues en Afrique du Nord

et au Sahara que les poupées-hommes. Elles sont très importantes dans la

vie des enfants, surtout des filles, aussi bien chez les populations

nomades que sédentaires.

En provenance de populations nomades, la collection du Musée de

l'Homme possède des poupées-femmes recueillies auprès des Touaregs,

des Maures et des Regeybat, et moi-même j'en ai trouvé chez les Ghrib.

En ce qui concerne les populations sédentaires vivant au Sahara ou en

Afrique du Nord, la collection du Musée de l'Homme montre des

poupées-femmes provenant des Belbala, de la Vallée de la Saoura, des

Teda, des Chaouia, du Mzab, du Maroc et de la Tunisie.

La bibliographie confirme l'existence de poupées-femmes chez toutes

ces populations mais n'en mentionne pas chez d'autres populations

exception faite pour les Sahraouis, les Amazighs Beni Snous de la région

de Tlemcen et des habitants de cette ville algérienne (voir 2.13 Les

poupées-femmes du nord-ouest algérien, p. 116).

Mes recherches dans le centre et le sud du Maroc, de 1992 à

aujourd'hui, ont apporté des informations sur les poupées-femmes faites

par des filles arabophones et amazighophones et exceptionnellement

aussi par quelques garçons amazighophones.

La poupée-femme la plus ancienne de la collection est de 1934 et

appartenait à une fille touarègue Kel Ajjer. Les mentions les plus

anciennes dans la bibliographie consultée datent de 1905 pour les

Amazighs marocains, de 1906 pour les Amazighs chaouia et de 1908

pour les Touaregs.

Les poupées-femmes sont le plus souvent confectionnées par les filles

elles-mêmes, parfois par une mère, une sœur aînée, une servante ou une

cordonnière. Les garçons ne jouent avec ou ne confectionnent des

poupées-femmes que chez les Touaregs et chez les Chaouia, deux

populations amazighes. Des informations que j'ai obtenues en 1993 au

Maroc démontrent cependant que là aussi il peut y avoir des endroits où

des garçons font une poupée-femme.

80

La plupart de ces poupées représentent des jeunes mariées. Parfois il

s'agit de femmes mariées, de mères, de jeunes filles et

exceptionnellement d'une vieille femme ou d'une divorcée. Ces poupées-

femmes servent à des jeux qui représentent la vie des adultes. Il est

question de jouer au ménage, de représenter des fêtes et autres réunions

importantes, de figurer une grossesse, un accouchement, un enterrement

ou des noces, où parfois un jeune garçon sert de marié à la place d'une

poupée-jeune marié.

Dans la confection des poupées-femmes bon nombre de matériaux

sont utilisé. Pour l'armature il s'agit de pierres plates, d'os, d'argile crue

ou cuite, de sable, de matières végétales comme les bâtons, le roseau, les

fibres ou feuilles, la paille, la pâte de gomme et les dattes, l'épi de maïs,

les chiffons, le cuir et même les crottes de chèvre, de mouton, d'âne ou

de dromadaire. Pour les autres attributs l'on utilise les mêmes matières

végétales, des étoffes, des fils de laine ou de coton, du cuir, des cheveux

naturels, des poils de chèvre ou de mouton, des perles, des cauris, des

coquillages, du métal blanc, du cuivre, du papier argent, des pièces de

monnaies, de la peinture, du khol, de l'encre et du stylo. Il reste encore à

mentionner dans la collection du Musée de l'Homme des petites poupées

en vannerie servant de jouets aux enfants de la Vallée de la Saoura et de

la région de Ouargla mais dont nulle trace n'a été retrouvée, bien qu'elles

soient mentionnées dans le catalogue de l'exposition “La Vie du Sahara”

(1960: 74).

La forme de base des poupées-femmes sahariennes et nord-africaines

se limite à trois types comme on peut le voir à la figure 25. D'abord il y a

la poupée en position debout avec une armature verticale faite d'un os ou

d'un ou plusieurs bâtonnets, avec ou sans bâtonnet horizontal pour

figurer les bras et parfois avec deux jambes séparées.

25

81

Ce type de poupée se retrouve aussi bien chez les populations

nomades que sédentaires. Du même type est la poupée-cuillère qui bien

qu'elle soit d'ordre rituel sert aussi comme poupée d'enfants (voir 2.15

Les poupées-femmes tunisiennes (p. 205) ainsi que Rossie and

Daoumani, 2003, Video 1).

Ensuite il existe la poupée assise, trouvée uniquement chez les

populations nomades, qui est faite de la même manière mais l'armature

verticale est fixée dans un support représentant les fesses. L'on trouve

aussi des poupées montrant la même forme mais modelée en argile.

Finalement il y a un autre type de poupée en position debout, faite

d'étoffe bourrée de paille ou de chiffons, et qui n'est signalé qu'auprès de

populations sédentaires, le plus souvent citadines. Dans ce cas, la tête, le

corps, les bras et/ou les jambes sont des pièces séparées. La poupée en

plastique, parfois utilisée comme armature au Maroc, reproduit la même

forme. Chez les Mozabites la tête de poupée, importée, est en papier

cartonné.

Toutefois, Sigrid Paul (1970: 118, 208: fig. 96) nous montre une

poupée algérienne d'un tout autre type que ceux décrits plus haut. Cette

poupée très stylisée est découpée dans un morceau de bois, sauf les deux

jambes en forme de bâton qui y sont ajoutées. Malheureusement l'auteur

ne donne aucune précision ethnique ou géographique, mais il apparente

cette poupée aux poupées-femmes de l'Afrique du Nord-Est.

La poupée-femme la plus petite, dont j'ai trouvé trace, mesure 2 cm

(Maures de Oualata), la plus grande 58,5 cm (Mozabites).

Les vêtements et parures des poupées-femmes sahariennes et nord-

africaines imitent ceux des femmes adultes. Les cheveux revêtent

souvent une grande importance et parfois des cheveux naturels ont été

utilisés.

Bien que la forme des poupées-femmes reste assez simple, certains

détails peuvent être mis en relief, comme par exemple pour les seins, les

fesses et la tête. Le plus souvent il s'agit d'une représentation réaliste

d'une femme, mais ici et là une approche fantaisiste se remarque.

Contrairement à presque toutes les poupées-hommes, certaines

poupées-femmes ont des traits de visage et des tatouages faciaux. Les

poupées-femmes des enfants touaregs, ghrib, maures, regeybat, teda,

chaouia et de la Vallée de la Saoura n'ont pas de traits de visage. Chez

les Maures, les Regeybat et surtout les Teda de petites perles sont posées

82

de manière géométrique ou fantaisiste sur le visage. Chez les poupées-

femmes belbala et Mozabites et chez certaines poupées marocaines et

tunisiennes, les yeux, les sourcils, le nez, la bouche et/ou le tatouage

facial sont indiqués. Chez les Ghrib, où normalement les traits de visage

n'étaient pas indiqués, des frères dessinaient en 1975-1977 un visage sur

la poupée-mariée de leurs sœurs. Je me demande si cette rupture avec la

tradition, sous l'influence de l'école, est aussi l'explication pour

l'existence de poupées-femmes à visage dessiné signalées par Jean

Gabus en 1958 auprès des Maures de Boutilimit dans le sud-ouest de la

Mauritanie.

Les poupées-femmes sont certainement plus colorées que les poupées-

hommes. Les poupées-femmes monochromes sont rares. La plupart de

ces poupées-femmes sont assez colorées et certaines sont très colorées à

cause de leurs vêtements et parures multicolores.

2.2 Les poupées-femmes touarègues

Des poupées-femmes d'enfants touaregs Kel Ahaggar (Sahara algérien),

Kel Ajjer (Sahara libyen), Kel Aïr (Sahara du Niger) et Kel Iforas

(Sahara malien) figurent dans la collection du Musée de l'Homme. Selon

Nicolas (1950: 186) des poupées en argile qui représentent la fiancée ou

la jeune mariée se retrouvent aussi chez les Touaregs Ioullemeden

(Sahara du Niger).

La poupée-femme touarègue la plus ancienne de la collection date de

1934. Cependant Cortier mentionne déjà en 1908 que les petites filles

touarègues Kel Iforas confectionnent des figurines qu'elles habillent en

femme ou en enfant (p. 310).

Non seulement les filles touarègues mais aussi les garçons font des

poupées-femmes. Ceci n'est pas révélé uniquement dans le fichier de la

collection et dans la bibliographie mais prouvé par le fait qu'Henri Lhote

a collectionné une poupée-femme fabriquée par un garçon Kel Ahaggar

et que cet auteur décrit une pierre plate peinte vers 1960, suivant

l'exemple des peintres européens relevant des peintures rupestres au

Tassili n'Ajjer, par un garçon touareg de manière à représenter une

femme assise et en tenue de cérémonie.

83

Balout écrit qu'à côté des enfants, les femmes et les servantes

confectionnent-elles aussi des poupées (1959: pl. LXVI1).

Toutes ces poupées-femmes des enfants touaregs sont caractérisées

par une position assise. Dès lors elles sont dénuées de jambes comme le

note déjà Cortier en 1908 (p. 310). “La femme étant de tradition toujours

sous la tente, la poupée est toujours assise ; elle n'est jamais représentée

debout, alors que l'homme est toujours représenté debout et près de son

chameau” (Balout, 1959: pl. LXVII).

Les fesses des poupées sont très développées car ceci est une marque

de beauté et d'aisance (fig. 26, catalogue 3.1, 36.44.73, p. 275). Ainsi la

poupée est un moyen d'inculquer dans l'esprit de l'enfant touareg, l'idéal

de la beauté féminine. Un idéal qui était provoqué chez les filles Kel

Iforas riches en les faisant suivre vers l'âge de 12 ou 15 ans un régime

basé sur une nourriture et un repos abondants (Cortier, 1908: 310).

A part la mention de Charles de Foucauld que les enfants touaregs Kel

Ahaggar taillent grossièrement des pierres plates en forme de femme

pour leur servir de jouet (1951-1952: 350) et exception faite des

poupées-femmes en argile des enfants touaregs Kel Ajjer et Ioullemeden,

l'armature des poupées féminines se fait suivant un modèle assez

uniforme chez les différents groupes touaregs (fig. 27).

26 27

84

Selon les données bibliographiques et celles tirées de l'étude des

poupées, le corps est formé d'une base proéminente dans laquelle se

trouve fixée une épine, une tige sèche, un morceau de bois, un os de

mouton, de chèvre ou de gazelle. La base massive se constitue d'un petit

sac de sable ou d'un chiffon bourré de paille, de chiffons, de crottes de

dromadaire ou d'âne. Cette base peut aussi être faite d'une à cinq boules

d'argile entourée de tissu ou de gaze. La base la plus élaborée est

fabriquée de cinq boules d'argile, deux pour les fesses, deux pour les

seins et une pour la taille. Une ou deux branchettes forment les bras mais

parfois les bras manquent (fig. 28).

La hauteur minimale de ces poupées-femmes touarègues est 6,5 cm, la

hauteur maximale 16,5 cm.

Les vêtements des poupées imitent ceux des femmes touarègues

comme décrits par Henri Lhote (1944: 268-269).

Les femmes touarègues ne portent pas de pantalons, mais elles ont un

jupon de toile blanche enroulé autour des reins. Celles de l'Ahaggar

portent dessus une grande blouse en toile blanche, semblable, pour la

forme, à celle des hommes, mais fermée sur les côtés. Les femmes

aisées en portent une deuxième par-dessus, en toile indigotée... Elles

ne se voilent pas la figure comme les hommes et portent une petite

mantille faite d'un ou deux toukourdi avec lesquelles elles s'entourent

la tête et la figure dont elles dissimulent les traits devant l'étranger.

Pour une description détaillée des vêtements et des bijoux touaregs voir

Foley (1930: 23-29) et de Foucauld (1951-1952: 867 et 995). Cet auteur

28

85

décrit aussi la coiffure féminine (p. 1241-1242). Une belle photo d'une

femme touarègue est à voir dans La Vie du Sahara (1960: pl. 5).

Une ou plusieurs pièces de

tissu, de préférence de couleur

blanche ou bleue indigo

enveloppent l'armature des

poupées. Ainsi une poupée porte

quatre blouses longues en tissu

blanc, indigo, blanc, indigo

(catalogue 3.1, 41.19.128, p.

275). Quelques poupées portent

une mantille (fig. 29, H = 13,7

cm; catalogue 3.1, 41.19.123, p.

275) mais la tête des autres est

découverte (fig. 30, H = 15 cm;

catalogue 3.1, 41.19.122, p. 275).

Les cheveux de la poupée de la figure 30 sont en fils bleus tressés. Les

cheveux des autres poupées sont faits de fils de coton ou de laine ou avec

des rubans. Il arrive que

la fillette ait utilisé un

peu de ses cheveux.

Certaines poupées ont le

cou entouré de fils verts,

bleus, rouges, blancs ou

jaunes, comme pour la

poupée de la figure 30.

Comme dans le cas des

poupées-hommes des

enfants touaregs, leurs

poupées-femmes n'ont

jamais de traits de

visage.

Quelques poupées portent comme bijoux un collier de perles et une

chaînette. D'ailleurs Charles de Foucauld y fait mention dans son

Dictionnaire Touareg-Français au mot “loullou ... petit bijou, mot

enfantin, les très petits enfants qui commencent à parler appellent loullou

29

30

86

toutes les petites choses précieuses à leurs yeux, les petits colliers qu'on

leur met ou qu'ils mettent à leurs poupées” (1951-1952: 1067).

Une poupée touarègue Kel Ajjer, datant de 1934 et provenant de Ghât

en Libye, porte comme boucles d'oreilles deux médailles avec sur une

face le Sacré-

cœur et sur la

face opposée la

Sainte Vierge

(fig. 31, H = 10

cm; catalogue

3.1, 37.21.29, p.

277). Concernant

l'utilisation de ces

médailles il est à

remarquer qu'il

n'y avait pas de

Pères Blancs dans

cette région.

La description de Maurice Cortier des poupées-femmes des filles

touarègues Kel Iforas ressemble tout à fait à celle des poupées décrites

ci-dessus. Cet auteur écrit en 1908 (p. 310) :

On prend un os, propre et blanc, gros comme un crayon et long d'une

dizaine de centimètres. Un morceau de bois croisé à mi-longueur

représente les bras. Une sorte de sac bourré de chiffons figure le

corps dénué de jambes. La partie de l'os servant de tête est entourée

d'anneaux de fils de diverses couleurs entre lesquels apparaît la

surface blanche. Les vêtements consistent généralement en un ikerchei

ou un tameng'out (voile) placé sur la tête et une gandourah (blouse

longue) couvrant le corps.

Dans Au cœur du Hoggar mystérieux. Les Touaregs tels que je les ai vus,

E. Steinilber-Oberlin décrit en 1934 quelques jeux des enfants touaregs

entre autres le jeu de poupée. Cet auteur écrit à ce sujet (p. 83-84) :

Ils excellent à confectionner avec des bouts de bois, des os de chèvres

et des chiffons, des petits pantins qu'on appelle isounar. Les filles

31

87

fabriquent des isounar-femmes et les garçons des isounar-hommes.

Des lambeaux de cotonnade ont vite fait de simuler la takemmist

masculin ou l'ekerhei féminin. La figure de la poupée est toujours fort

négligée et ne se compose guère que d'un tampon d'étoffe. Comment

s'en étonner? Les hommes étant toujours voilés, leur représentation

s'en trouve simplifié, et un morceau d'étoffe fixé sur la tête du pantin

et tombant jusqu'à son extrémité suffira à caractériser le sexe féminin.

Réduits à ses lignes essentielles, le jouet n'en est que plus curieux… Il

est courant qu'un gamin et une fillette s'amusent à faire convoler en

justes noces leurs isounar respectifs. Désormais, légitimement unis, le

pantin-homme et le pantin-femme ne se quittent plus, dorment

ensemble sous des abris minuscules symbolisant la tente et se

querellent continuellement, ce qui prouve bien qu'ils sont mariés.

Une poupée collectionnée en 1938 auprès d'une fille touarègue Kel

Iforas mais dont ne subsiste qu'un croquis dans le fichier, est faite d'un

petit morceau de tissu bleu enroulé autour d'une crotte de dromadaire,

figurant le corps et surtout les seins d'une femme. Une épine de talha

piquée dans la crotte supporte deux mèches de coton bleu qui imitent les

cheveux (fig. 32).

Ekhya Ag-Sidiyene, un

chercheur touareg Kel Iforas né

en 1952 dans un campement à

environ 100 km du centre

urbain de Kidal au Sahara

malien et correspondant du

Muséum d'Histoire Naturelle de

Paris pour cette région, que j'ai

rencontré au Département

d'Afrique Blanche du Musée de

l'Homme le 7 juillet 1981, m'a

donné des renseignements

supplémentaires sur cette forme typique de poupées-femmes. Les

poupées 'tanet n-meshlân', c'est-à-dire femme-jouet, ont un corps de

crotte d'âne enveloppé d'une pièce de tissu. Cette crotte représente les

fesses obèses de la femme aisée. Deux épines, entourées de fils de coton

mercerisé multicolore, sont fixées dans la crotte. Cette poupée porte des

32

88

vêtements d'étoffe indigo, le voile ne couvrant pas le visage.

Anciennement on utilisait aussi des peaux et des feuilles larges comme

vêtements pour cette poupée. Les cheveux sont des mèches de coton

fixées comme ont le voit sur le croquis de la figure 32 (p. 87). Parfois

une ou plusieurs perles ornent le dessus de la tête. Les poupées bien

élaborées ont des dessins stylisés qui représentent la poitrine. Ces dessins

sont faits avec des fils de coton multicolores qui contournent des épines

fixées dans la crotte. Ekhya Ag-Sidiyene dessinait l'exemple montré à la

figure 33. Selon lui, les traits géométriques sur le croquis de la poupée de

la figure 32 (p. 87) auraient eux-aussi été faits pour représenter les seins.

Le modèle simple, avec une épine plantée dans une crotte mais sans

vêtements ni dessin géométrique pour représenter les seins, est une

fillette.

Sur la photo d'une poupée-femme touarègue de la collection montrée à

la figure 34, et qui fut faite par une fillette Kel Iforas, l'on voit aussi un

dessin géométrique marquant la poitrine (H = 13,5 cm).

Des poupées-femmes en argile se retrouvent auprès des enfants touaregs

Kel Ajjer et Kel Ioullemeden. Chez les Touaregs Kel Dinnik des

Touaregs Kel Ioullemeden (région sahélienne de Tahoua, Niger) les

enfants font aussi des poupées-femmes en argile appelée “tashlut, la

fiancée, mariée” (Nicolas, 1950: 186) .

33 34

89

René Pottier a recueilli, lors de sa

mission chez les Touaregs Kel Ajjer

en 1934, une poupée-mère de couleur

grisâtre (fig. 35, H = 13 cm, D base =

6,5 cm) et son enfant de couleur

brunâtre (H = 7 cm, D base = 3,5 cm)

en terre cuite (catalogue 3.1,

37.21.102.1/2, , p. 277).

La forme typique de ces poupées

est basée sur un corps massif sans

jambes et deux protubérances

coniques figurant les bras,

correspondent ainsi à la forme des

autres poupées-femmes touarègues.

Le cou et la tête s'allongent à partir du

corps sur environ un tiers de la

hauteur de la poupée. Sur la tête des

poupées, surtout la poupée-mère, il

me semble que ce sont des tresses de

cheveux qui sont modelées, bien que

la surélévation allongée au milieu de la face fasse penser à un nez.

Ces poupées-femmes touarègues, pour lesquelles ont été avancées les

noms de 'aknar' chez les Touaregs Kel Ahaggar, 'taknart' chez les

Touaregs Kel Ajjer et Kel Aïr ou 'tamet n-meshlân' chez les Touaregs

Kel Iforas, sont mariées aux poupées-hommes (Cortier, 1908: 310;

Foley, 1930: 47). Mais il se peut que, comme dans la région de

Tombouctou où nomadisent les Touaregs Ioullemeden Kel Tademekkat,

les poupées-femmes “font l'objet d'une cérémonie de mariage de la

poupée à un jeune garçon” (Gabus, 1967: 112).

Les poupées-femmes forment avec les poupées-hommes et les

animaux-jouets des enfants touaregs, tous plantés dans le sable, les

personnages d'un petit théâtre où les enfants s'initient à la vie des adultes.

Une poupée-femme peut aussi être mise sur un dromadaire-jouet

(Balout, 1959: pl. LXXI; Paul, 1970: 110, 207 - fig. 95).

35

90

Ces poupées-femmes représentent éventuellement des femmes assises

à l'ahâl auquel les garçons et les filles peuvent participer à partir de l'âge

de seize ans environ. Henri Lhote (1944: 238) décrit l'ahâl de la manière

suivante (voir aussi Claudot-Hawad, 1986) :

Le mot ahal signifie réunion, conversation, entretien... Ces réunions

musicales et littéraires ont un caractère plus ou moins particulier,

suivant qu'elles sont mêlées d'asri ou non. L'asri, littéralement courir

à bride relâchée, signifie la pratique de certaines mœurs très libres, et

vivre en état d'asri, c'est être dans des conditions permettant de

pratiquer la liberté de mœurs. Peuvent être en état d'asri, les jeunes

gens et jeunes filles pubères, les veufs et les divorcés des deux sexes

Comme déjà mentionné, Henri Lhote nous décrit une poupée-femme

peinte vers 1960 par un garçon touareg sur une pierre (fig. 36). Ce

garçon, comme d'autres, s'inspirait des techniques des peintres européens

qu'il voyait relever des peintures rupestres ornant les parois des abris

sous roche du Tassili N'Ajjer.

L'exemple de cette poupée, dont la description donnée par cet auteur

(Lhote, 1975: 407-408) se trouve ci-dessous in extenso, démontre

parfaitement la continuité et la transmission intergénérationnelle des

formes et des valeurs à travers les jeux et les jouets.

36

91

Un jour, notre guide Djébrine m'apporta trois pierres peintes et me

les offrit en m'expliquant que cela avait été fait par des enfants de son

campement, sans pouvoir, toutefois, me préciser lesquels, car ces

objets avaient été abandonnés dans un abri, comme la plupart des

jouets. L'une de ces pierres était un galet en grès, de forme

approximativement triangulaire, de 4,5 cm de haut, 4,3 cm. à la base

et d'une épaisseur de 8 à 10 mm environ. Les surfaces étaient bien

planes, les côtés avaient été régularisés et polis, sauf celui formant la

base, dont les angles avaient été arrondis. Avec un peu d'imagination,

le profil suggérait une femme assise, les jambes repliées sous elle, à la

manière des femmes touarègues installées sous leur tente ou lors des

fameuses réunions musicales et poétiques, connues sous le nom

d'ahal. C'est dans cette même position que sont fabriquées les poupées

figurant des femmes, l'assise réalisée à l'aide de deux crottes de

chameau, recouvertes d'un petit morceau de chiffon, évoquant ainsi

les rondeurs glutérales de la Targuia. Et, en effet, le jeune artiste,

brimé par la modestie de la surface à sa disposition, avait situé la tête

au sommet du triangle, qu'il avait matérialisée par deux points

représentant les yeux, surmontés de deux traits obliques, figurant les

sourcils, un troisième point pour le nez, un ovale pour la bouche, le

tout tracé avec de la gouache noire récupérée d'un de nos tubes

pratiquement vide. La tranche du triangle partant du sommet du crâne

avait également été peinte en noir pour simuler les cheveux. La

coiffure des femmes touarègues du Hoggar et du Tassili comportant

deux nattes latérales, une de chaque côté, celles-ci avaient été

figurées par deux larges traits noirs, marqués de points à l'ocre rouge

dans l'évidement interne, afin d'indiquer les chaînettes d'argent à

l'extrémité desquelles sont suspendus de petits pendentifs de

chevelure, ordinairement triangulaires, mais qui sont aussi semi-

ovalaires dans le modèle porté par les femmes de Rhat, assez souvent

adopté par celles du Tassili. Ici, ils sont grossièrement arrondis et

peints à l'ocre rouge. L'enfant-artiste a voulu représenter une femme

en tenue de fête, et c'est pourquoi il l'a pourvue de lourds anneaux

d'oreille en argent, qui ne passent pas dans le lobe, mais sont

maintenus en place par une lanière de peau placée sur le sommet de

la tête, qui les maintient à bonne hauteur : ils ont été tracés par un arc

de cercle noir, doublé d'un point au centre à l'ocre rouge et d'une

92

série de petits points noirs. Sur la poitrine, enfin, un pendentif

triangulaire, comme en portent toutes les femmes touarègues du

Hoggar et du Tassili, est peint en noir, avec doublure du trait à l'ocre

rouge et d'une série de points noirs, comme pour les anneaux

d'oreille. Un petit trait noir, en zigzag, encadré par trois points placés

en triangle, à l'ocre rouge, représente, sans doute, une amulette ou

une pendeloque de peau. Sur l'autre face du galet, pour que l'image

soit complète, un gros trait en noir figure la grosse natte qui tombe

dans le dos, à l'extrémité de laquelle est peint, à l'ocre rouge, un

pendentif de chevelure. L'ensemble s'il ne reflète pas un grand art,

n'en est pas moins très suggestif : cette figuration de femme, en tenue

de cérémonie, accroupie comme pour recevoir l'hommage des jeunes

gens, témoigne de la préoccupation des garçons, dont certains - et

nous en avons connu - sont déjà capables de faire des vers, soit pour

vanter certaines femmes, soit pour se moquer de celles qui ne leur

accordent pas encore assez de considération et les traitent en gamins.

2.3 Les poupées-femmes ghrib

Les filles ghrib du Sahara tunisien jouent à partir de l'âge d'environ trois

ans avec une poupée-femme faite par leur mère, une sœur aînée ou une

tante. Cette poupée s'appelle et représente el °arûs ou la jeune mariée.

Cependant, une fille de huit ans m'a montré une petite poupée qui, selon

elle, figure une vieille femme.

A partir de l'âge de six ans les filles commencent à confectionner

elles-mêmes leurs poupées, ce qui demeure une activité individuelle,

mais pour jouer aux poupées plusieurs filles se rassemblent

normalement.

Elles jouent avec ces poupées aussi bien dehors qu'à l'intérieur et les

utilisent le plus souvent dans le cadre des jeux de ménage. Pour ces jeux

les filles emploient, en plus des poupées, encore d'autres jouets de leur

fabrication propre comme une tente en miniature (fig. 1, photo

couverture), un métier à tisser miniaturisé, des modèles réduits

d'ustensiles de cuisine, du moulin à bras, des nattes, etc. (voir Cultures

Ludiques Sahariennes et Nord-Africains. La Vie Domestique dans les

93

Jeux et Jouets). Quand les filles ont une poupée-jeune mariée et une

poupée-jeune marié, elles peuvent fêter leur mariage.

Pour construire une poupée les fillettes utilisent un morceau de bâton

d'un diamètre d'à peu près deux centimètres et un bâtonnet, des chiffons

et des fils de couleurs variés, du poil de chèvre, des fils de fer, des

épingles, des morceaux de fer-blanc et d'aluminium...

Pour faire l'armature de la poupée, la partie supérieure du bâton est

fendue et une moitié en est découpée à la hauteur d'environ deux doigts.

Ainsi le haut du bâton obtient une face aplatie et une fois entourée

d'étoffe blanche, il servira de tête de poupée. En dessous de cette tête,

mais avant qu'elle ne soit enveloppée d'étoffe blanche, la fille fixe en

croix le bâtonnet au bâton avec un petit ruban, cela pour donner des

'épaules' à sa poupée.

Les épaules et le corps de la poupée sont entourés de morceaux

d'étoffes de couleurs différentes représentant les sous-vêtements et les

vêtements d'une femme mariée. Sur les figures 37 et 38 on voit une belle

poupée et la fille qui l'a confectionnée.

37 38

94

Les cheveux de la poupée-jeune mariée sont faits de poils de chèvre et

sont tressés comme le font les femmes mariées, c'est-à-dire avec deux

longues tresses devant les oreilles. Un ou plusieurs chiffons en guise de

fichu coiffent la poupée. Enfin elle est ornée de bijoux en imitation des

bijoux qu'une femme reçoit de son futur époux. Ces bijoux d'imitation

sont confectionnés par la fille avec des fils de fer, des morceaux de fer-

blanc ou d'aluminium, des boutons et autres objets de ce genre (fig. 39).

Comme beaucoup de poupées-femmes touarègues, la poupée-femme

ghrib a souvent le cou entouré de fils multicolores (fig. 40 p. 94, 42 p.

95). La hauteur de ces poupées varie entre 15 cm et 25 cm, la poupée-

homme étant normalement plus petite que la poupée-femme.

Traditionnellement les poupées n'avaient pas de visage dessiné (fig. 37 p.

93, 39, 40 côté droit). Mais dans la seconde moitié des années 1960 il

arrivait parfois que l'un ou l'autre frère en âge d'école primaire employât

un crayon ou un stylo pour donner des yeux, des sourcils, un nez et/ou

une bouche à la poupée de sa sœur (fig. 41-42, p. 95).

39 40

95

Sur une poupée de la figure 40 (p. 94) se voit comment une fille a

essayé maladroitement à donner

un visage à sa poupée comme ont

fait les garçons (fig. 41, 42).

Vers 1990 une innovation dans

la confection des poupées s'est

présentée. Pour cela les filles se

sont appropriées un des rebuts de

la société de consommation, une

société de consommation qui a

réussi à s'approprier la

communauté Ghrib. Il s'agit de

l'utilisation d'un flacon de produit

de lessive ou autre liquide

comme tête de poupée en

introduisant le bâton vertical de

l'armature de la poupée dans le

col du flacon. La fille a dessiné

un visage élaboré sur le flacon (fig. 43).

41

41

42 43

96

Gilbert J.M. Claus, qui a pris cette photo en août 1991, m'a fait savoir

que les filles Ghrib font actuellement aussi une tête de poupée découpée

dans un morceau de carton, ou une poupée d'étoffe bourrée.

Les filles ghrib peuvent fabriquer leurs poupées en tout temps

contrairement aux filles des sédentaires de Tabelbala au Sahara algérien,

qui ne peuvent faire des poupées que durant le printemps et l'automne,

parce que cela provoquerait de la pluie pendant les autres saisons

(Champault, 1969: 345). Chez les Ghrib le rapport entre la confection

des poupées et la tombée de la pluie n'est pas fait.

Bellin (1963: 99, jeu n° 70) a observé chez les Kel Rela ou nobles des

Touaregs Kel Ahaggar (Sahara algérien) que non seulement les filles

mais aussi les garçons confectionnent des poupées-femmes. Bien que les

Ghrib furent en contact régulier avec les Touaregs, mes informatrices et

informateurs m'ont affirmé que les garçons ghrib ne confectionnent pas

de poupées-femmes ni ne jouent avec elles.

2.4 Les poupées-femmes maures

Chez les Maures de

Tidjikdja au Sahara

mauritanien les filles et les

femmes font deux sortes de

poupées féminines. Un

premier modèle rappelle les

poupées-femmes touarègues

avec le corps fait d'un os de

pattes de mouton ou d'un

bâtonnet fixé dans un

coussin de chiffons.

Une poupée de la

collection du Musée de

l'Homme (fig. 44, H = 15

cm; catalogue 3.2, 69.70.7.5,

p. 278) dont la chevelure

abondante en fils de coton

noir coiffe l'os qui est 44

97

entouré de fils de coton disposé en bande rouge, jaune, rouge, jaune,

rouge, contraste avec les quatre autres poupées de la même série dont

deux ont une tête (fig. 45, H = 14,5 cm; catalogue 3.2, 69.70.7.1, p. 278)

et les deux autres une coiffure (fig. 46, H = 16 cm; catalogue 3.2,

69.70.7.4, p. 278) modelée en pâte de gomme et de charbon pulvérisé.

Si une tête de poupée est modelée, elle a une forme particulière. Dans

ce cas le visage est indiqué de manière fantaisiste avec des petites perles.

Les autres poupées n'ont pas de visage.

Ces poupées, excepté celle de la figure 44 (p. 96), ont de longues tresses

de coton ou de laine auxquelles des perles de couleurs variées se

trouvent enfilées. Elles portent normalement un survêtement indigo,

mais chez la poupée de la figure 44 il est en gaze blanche. La poupée de

la figure 45 porte en plus un voile blanc.

La belle poupée de la figure 46 concrétise parfaitement la description

de la coiffure et de la parure des femmes maures. Dans La Vie du Sahara

(1960: 38) il est du que le vêtement féminin :

45 46

98

Est un voile de cotonnade indigo, habilement enroulé et drapé autour

du corps et sur la tête mais laissant habituellement le visage

découvert... Le voile couvre une coiffure de nattes et de torsades

savantes, ornée de perles, de coquillages, de menus bijoux et de

talismans enfermés dans de petits sachets de cuir.

De ces cinq poupées trois représentent des femmes et deux des fillettes,

probablement les numéros 69.70.7.1 (fig. 45, p. 97) et 69.70.7.2, vu que

la coiffure et les bijoux des femmes (fig. 46, p. 97) leurs manquent.

On peut s'imaginer comment les filles maures jouent avec ces poupées

assises en regardant la figure 47 qui montre deux de ces poupées assises

sur une selle à baldaquin pour dromadaire. Ces poupées s'appellent

'amtsal' (La Vie du Sahara, 1960: 72).

47

99

Fernando Pinto Cebrián écrit en 1999 que les filles créent aussi bien

des poupées-femmes que des poupées-hommes appelées respectivement

'mint owzar' ou 'ould owzar'. Ils ont une forme schématique car, comme

le dit cet auteur, il est inacceptable pour l'Islam de représenter la figure

humaine. Cette forme schématique est alors rendue plus ou moins

réaliste en y joignant quelques objets. La poupée montrée sur la photo

couleur reproduite dans le livre a une structure faite d'un axe vertical qui

représente le torse de la poupée toujours figurée en position assise. Cet

axe consiste en un os de chèvre vêtue de chiffons noirs et blancs

représentant les vêtements de femme. La tête de la poupée est embellie

avec des bijoux comme cela se fait pour une jeune mariée ou 'aaris' (p.

113, photo n° 25).

Le second modèle montré à la figure 48 (H = 3,5/4 cm; catalogue 3.2,

38.48.50/51, p. 279) et 49 (H = 4/4 cm; catalogue 3.2, 983.52.1/2, p.

279) et que l'on trouve chez les enfants maures de Tidjikdja et chez ceux

de Oualata, représente une femme ou une jeune fille assise très

miniaturisée. Ces poupées, éventuellement habillées, sont en argile crue

peinte.

48 50

49

100

Selon Jean Gabus celle peinte en jaune est une femme noble ou une

femme maraboutique et celle peinte en rouge est la servante (1958: 163).

Charles Béart y ajoute qu'auprès des poupées-femmes de ce type se

trouvent “des enfants blancs (les Beïdanes) et ocrés (les Serviteurs)”. En

plus, il remarque que ces poupées “qui ressemblent si peu à des femmes

sont sexuées nettement” (1955: 96). Le dessin de la figure 50, qui

reproduit celui figurant dans l'étude de Charles Béart, nous montre la

base de ce type de poupées. La vérification des bases de ce genre de

poupées, conservées au Musée de l'Homme, démontre que cette pratique

d'indiquer les parties génitales n'est pas générale car ces poupées ne sont

pas sexuées.

A Oualata les filles jouent avec ces poupées miniaturisées dans la

maison de poupée, faite par des potières de cette ville, dont on voit un

magnifique exemple à la figure 51 (H = 9,5 cm, LO = 26 cm, LA = 22

cm). Jean Gabus propose plusieurs autres exemples (1958: 163-167)

ainsi que la description des maisons réelles de Oualata et l'explication

des motifs décoratifs qui les ornent (1958: 118-133; voir aussi Centre de

Recherches et d'Etudes sur les Sociétés Méditerranéennes, 1979: 143,

fig. 12).

51

101

En dehors de la région de Oualata, par exemple à Kaédi et

Nouakchott, une tente de

poupée avec tous les détails est

utilisée (Béart, 1955: 97)

comme c'est le cas chez les filles

ghrib.

Un troisième modèle de

poupée maure, appelée 'atme' et

confectionnée à Boutilimit dans

le sud-ouest de la Mauritanie,

est mentionné par Jean Gabus

(1958: 136, dessin n° 103a) .

Cette poupée se différencie

des poupées décrites ci-dessus

par sa tête en étoffe bourrée et

son visage dessiné avec bouche

triangulaire, nez, yeux et

sourcils. Ses cheveux sont de

longues mèches tressées avec ici

et là des perles enfilées. Comme

je n'ai pas retrouvé une pareille

poupée, le dessin dans le livre

de Jean Gabus est reproduit à la

figure 52.

Comme la poupée-femme touarègue, la poupée-femme maure est

représentée comme une femme noble engraissée. Jean Gabus écrit à ce

sujet “La fillette engraissée, prenant de l'ampleur, et devenant matrone

au type stéatopyge, est un symbole courant dans le Sahara, d'inspiration

amazighe sans doute, autant que d'inspiration nègre (captifs, éléments

résiduels de l'ancienne population noire)” (1958: 119).

Enfin il faut mentionner que Charles Béart parle de poupées de cuir

maures. Ces poupées sont confectionnées par les enfants eux-mêmes ou

par leurs mères mais le plus souvent par les cordonnières (1955: 95). En

Mauritanie l'on trouve, selon cet auteur, aussi “la poupée d'étoffe montée

sur boîte à conserves recouverte d'étoffe, commune au Sénégal, et des

poupées de cire” (1955: 97, 836). Je n'ai cependant pas trouvé trace de

pareilles poupées qui seraient utilisées par les enfants maures.

52

102

Avec leurs poupées, maisons ou tentes de poupées et des ustensiles de

ménage miniaturisés, dont une description détaillée sera donnée dans

Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africains. La Vie Domestique

dans les Jeux et Jouets, les filles jouent à la vie des femmes adultes.

2.5 Les poupées-femmes sahraouies

Fernando Pinto Cebrián montre dans son livre les poupées en position

assise que les filles sahraouies utilisent pour leurs jeux de poupées et

leurs jeux de ménage (1999: 103, 113). Ces poupées portent le nom

'owzar'. Pour ces jeux les filles utilisent aussi des tentes, des lits, des

nattes et des ustensiles en miniature (voir Cultures Ludiques Sahariennes

et Nord-Africaines. La Vie Domestique dans les Jeux et Jouets).

Cet auteur écrit que les filles dès qu'elles en sont capables jouent

durant toute l'année à imiter leur mère dans sa fonction d'épouse et de

maîtresse de la tente familiale. Les adultes trouvent ces jeux nécessaires

pour que les filles apprennent tout ce qui est en rapport avec la famille

traditionnelle vivant dans le désert. Les filles organisent aussi des fêtes et

des réunions comme elles les observent dans la réalité. A côté des

poupées traditionnelles qui ressemblent à celles des filles maures, on

trouve aussi des poupées en plastique importées comme les Indiens et les

Cow-boys qui sont donnés aux petits garçons (1999: 105, 109).

2.6 Les poupées-femmes regeybat

Chez les Regeybat qui nomadisent dans le Sahara Nord-occidental

(Algérie), existent des poupées, portant le nom de 'rendja', qui imitent la

femme. La poupée de la collection, une poupée en position assise, fut

construite par une fillette (H = 16 cm).

Il s'agit d'une âme d'os posée d'équerre sur un coussinet de chiffons

bleus, créant ainsi une poupée assise. Une cotonnade blanche représente

le voile et une cotonnade bleue représente la robe. Un ornement de

coquillages et de perles se trouve à la place de la tête. Cette poupée n'a

pas été retrouvée dans la collection, mais elle ressemble aux autres

poupées sahariennes en position assise.

103

2.7 Les poupées-femmes teda

Oleg Lopatinsky a recueilli en 1963 et a analysé une merveilleuse

collection d'une quarantaine de poupées provenant des Teda du Tibesti

au Sahara tchadien. Que cette forme de poupée-femme ne soit pas de

date récente est attestée par la poupée à tête surmodelée en gomme

recueillie par G. Moberg avant 1935 et celle à tête en datte recueillie par

la mission Le Cœur en 1934.

Ces poupées à deux jambes, dont la hauteur varie entre 17 et 38 cm, sont

construites par des filles de dix à seize ans et, selon Fuchs (1961: 46),

parfois aussi par une mère ou une sœur plus âgée. Quelques poupées de

la collection représentent des femmes de brousse en costume quotidien

ou parées pour la danse. Il y a aussi une femme de brousse aisée, avec

cheveux tressés, cauris et croix d'Agadez (fig. 53, H = 27 cm; cataloge

3.4, 65.3.14, p. 281) et une vieille femme de brousse (fig. 54, H = 26 cm;

53 54

104

catalogue 3.4, 65.3.15, p. 281). Les autres poupées sont des citadines

pauvres, sans cauris ni croix d'Agadez (fig. 55, H = 22,5 cm; catalogue

3.4, 65.3.46, p. 281), ou riches en costume de fête (fig. 56, H = 26 cm;

catalogue 3.4, 65.3.29, p. 281). Parfois elles représentent des citadines en

costume quotidien (fig. 57, p. 105, H = 33 cm; catalogue 3.4, 65.3.31, p.

281) et en costume d'intérieur. La poupée de la figure 58 (p. 105) est une

citadine parée pour la fête (H = 24 cm; catalogue 3.4, 65.3.32, p. 281).

Dans cette diversité de types de poupées-femmes, l'imagination

inventive des filles teda est à signaler. Ces poupées sont (en 1963) assez

rares en brousse, ainsi que dans les centres comme Aozou, Bardaï, Wour,

Zouar et Yebbi Bou. Elles sont devenues plus communes surtout à

Bardaï où les Européens en achètent beaucoup.

55 56

105

Le corps et les membres sont faits en branchettes d'acacia, deux pour le

corps et une posée en croix pour les bras, attachées entre elles avec un fil

végétal obtenu à partir de feuilles de palmier. Une fois les membres liés

les uns aux autres on passe par-dessus la sève d'acacia, appelée

'gourmay'. Les fesses sont modelées en gourmay recouverte de chiffons.

Les seins sont formés de dattes coupées en deux, dénoyautées, chauffées

puis modelées sur la branche faisant office de poitrine, fixées parfois

avec du fil ou de la ficelle. Pour la tête on utilise une datte, évidée au

préalable, mise sur la branche faisant corps et cou. La base de la date est

ensuite enduite de gourmay pour mieux la faire adhérer au cou.

57 58

106

Les dattes utilisées à cet effet sont toujours

fraîches. Le dessin de la figure 59 présente cette

armature de poupée.

Les traits du visage sont faits avec des petites

perles multicolores incrustées à chaud,

représentants yeux, bouche, nez, le tout disposé

d'une façon très fantaisiste. Parfois la face à un

aspect vernissé dû à une application de graisse

avant et après le modelage à chaud.

Les cheveux sont en poils de chèvre ou laine de mouton ou en charpie

de tissu noir, tressés au préalable en forme de petites nattes, caractérisant

la coiffure teda, puis introduits dans des petits trous faits avec une épine

ou pointe de couteau, fixés ensuite avec du gourmay. Plusieurs poupées

ont des cauris dans les cheveux.

Les bijoux sont représentés par des petites perles ou des minuscules

morceaux de métal. Assez souvent l'anneau nasal est représenté (fig. 57,

p. 105). Parfois les poupées portent des colliers de perles (fig. 53, p.

103). Les bracelets, les chevilliers et les croix d'Agadez sont fidèlement

reproduits et fixés sur ces poupées, éventuellement à l'aide d'épines.

Les vêtements sont variés suivant les tissus que les fillettes ont pu se

procurer. La mode et le drapé teda sont fidèlement respectés. Toutes les

poupées ont la culotte par pudeur. Aucune fillette n'a accepté de mettre

une culotte sur la poupée lors d'une présence masculine.

Une description détaillée des vêtements et de la parure des femmes

teda se trouve dans le mémoire de Oleg Lopatinsky Vêtements, parure,

parfums et coiffure chez les Teda. Des photos de femmes teda sont à voir

dans Kronenberg Die Teda von Tibesti (photos 15 et 19) et dans les

Carnets de Route de Charles Le Cœur (1969, pl. VII-2, XV et XVI ).

Dans La Vie du Sahara (1960: 72) le nom de 'davi-jidi' est donné à ces

poupées et, en ce qui concerne le jeu de poupée des filles teda, Peter

Fuchs note que les filles font des selles de femme en miniature pour leurs

poupées (1961: 47).

59

107

2.8 Les poupées-femmes belbala

Des poupées-femmes qui portent le nom de 'tamames', un mot qui

désigne la jeune mariée avant la consommation du mariage, sont

fabriquées par les fillettes belbala vivant à l'oasis de Tabelbala au Sahara

Nord-occidental en Algérie (fig. 60, 61 p. 108, H = 23 cm; catalogue 3.5,

54.74.7, p. 282).

Sur une âme d'os de mouton ou de chèvre, éventuellement un morceau

de roseau, un bâtonnet est ligaturé en croix au tiers de la hauteur pour

figurer les bras. Une des cinq poupées de la collection du Musée de

l'Homme a cependant des bras et des jambes d'argile. Des chiffons

enveloppent ces armatures pour donner du corps à la poupée.

60

108

Ces poupées se tiennent debout,

comme celle des filles ghrib et teda,

mais contrairement aux poupées-

femmes touarègues, maures et

regeybat qui sont en position assise.

Le visage et le tatouage facial de

trois poupées de la collection sont

peints sur l'os. Les poupées portent

un 'izar', une longue bande

rectangulaire de cotonnade drapée

de couleur bleue. Ces poupées sont

coiffées par un voile ou un 'mendil'.

Les cheveux des poupées sont en

poils de chèvre tressés en deux

longues nattes (fig. 61). Les poupées

ne portent pas toujours des bijoux

aussi élaborés que ceux que l'on voit

sur la poupée de la figure 60 (p. 107).

Parfois ce ne sont que des colliers d'herbes (Champault, 1969: 345;

pour une description des vêtements, bijoux, peintures faciales et

tatouages voir p. 178-181, 189-192 et 195-202).

Une cinquième poupée fut modelée par une fillette en kaolin cru.

Cette poupée, avec des bras et des jambes légèrement atrophiés, a le

visage orné de quelques points bruns et elle est enveloppée de chiffons

(H = 28,5 cm, catalogue 3.5, 54.74.51, p. 282). Mais cette poupée en

argile ne représente pas le modèle courant car il est spécifié sur sa fiche

signalétique que “ce type de poupée, aberrant, est jugé par les parents et

amis, ridicule et inconvenant”.

Selon Dominique Champault, qui a collectionné les cinq poupées, “on

ne joue pas à la poupée à n'importe quel moment de l'année : seulement

en automne et au printemps, du moins dans les familles traditionalistes”.

Et cet auteur déclare à ce sujet “j'ai vu des pères entrer en colère parce

que les filles confectionnaient ou embellissaient une poupée, en plein

été. Les poupées font pleuvoir, disent-ils, et la pluie d'été nuit à la

conservation des dattes plus encore qu'à leur maturation” (1969: 345).

Chez les Belbala ce ne sont que les filles qui jouent à la poupée et

jusqu'à l'âge de six ou sept ans environ. A partir de cet âge elles auront

61

109

plutôt à s'occuper d'un petit frère ou d'une petite sœur et le jeu de poupée

les y aura préparées car bien que “chaque fillette joue à la poupée selon

son tempérament propre, il s'agit toujours d'être la mère, de promener

son enfant dans le dos, de l'allaiter, de le faire danser sur ses genoux”

(Champault, 1969: 345).

Bien que le jeu de poupée représentant les cérémonies de mariage ne

soit pas explicitement mentionné par Dominique Champault, le nom de

'tamames' ou jeune mariée que portent ces poupées les mettent en rapport

avec beaucoup de poupées sahariennes et nord-africaines nommées-elles

aussi jeunes-mariées et avec lesquelles les filles jouent au mariage.

2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura

Une poupée-femme a été collectionnée chez les sédentaires d'El Ouata

dans la vallée de la Saoura au Sahara Nord-occidental en Algérie (fig.

62, B = 32,5 cm; catalogue 3.6, 62.51.1, p. 283).

Cette poupée a une

armature composée d'un

roseau vertical et d'un

roseau horizontal figurant

les bras. La partie

inférieure du roseau

vertical est enrobée de

tissu pour donner de

l'ampleur à la poupée.

Comme vêtements cette

poupée-femme porte une

robe rouge à dessins et au-

dessus une robe rouge

cintrée par une ceinture

verte. Les cheveux sont

deux longues tresses de

cheveux noirs naturel.

Comme souvent les traits

de visage ne sont pas

indiqués. 62

110

La description de cette poupée sur la fiche signalétique mentionne que

la tête était enveloppée de papier d'argent, d'un turban noir et d'un voile

multicolore. Cependant ces attributs n'ont pas été retrouvés et manquent

donc sur la photo.

2.10 Les poupées-femmes mozabites

Chez les filles mozabites du Sahara algérien se retrouvent trois genres de

poupées-femmes, celles à tête en papier cartonné, d'autres construites de

chiffons sur armature de bâtonnets ligaturés en forme de croix et celles

faites d'un os.

Une poupée à tête en

papier cartonné, tête

importée du Nord de

l'Algérie par un père

mozabite, mais habillée

à Ghardaïa au Mzab est

à voir à la figure 63 (H

= 58,5 cm; catalogue

3.7, 34.49.37, p. 284).

Depuis longtemps les

pères, presque tous des

commerçants dans le

Nord de l'Algérie,

apportent ce type de

têtes de poupées pour

leurs filles. D'ailleurs,

A.M. Goichon note déjà

en 1927 qu'au Mzab

“les poupées sont quel-

quefois européennes”

(p. 59).

63

111

La poupée de la collection, achetée en 1934 pour l'Exposition du Sahara

à Paris, porte le costume et les bijoux des femmes de Ghardaïa.

C'est une mère qui l'a habillée ainsi pour l'offrir à sa fille. Selon la fiche

signalétique les filles mozabites adorent les poupées. Elles portent le

nom de 'teslet' ou jeune mariée en langue mozabite.

Sur le visage de cette poupée sont peints le maquillage et les tatouages

des femmes mozabites. Les pièces de monnaie qui forment le collier

portent la date de 1870 écrite en caractères arabes. Sur le front, pend une

petite main de Fatima en métal. Cette main de Fatima, la fille du

prophète Mahomet, retourne le mauvais sort vers la personne qui le jette.

Sur la poupée on remarque des boucles d'oreilles et une longue chaîne

avec des fibules. Elle porte aussi des anneaux de chevilles et des souliers

de cuir.

Les filles qui sont moins favorisées se font faire par leurs mères ou

font elles-mêmes des poupées de chiffons avec les cheveux en poils de

chèvre. A.M. Goichon donne dans son livre de 1927 La vie féminine au

Mzab quelques informations sur les poupées (p. 58-59). Les petites filles

du Mzab jouent à la noce avec des poupées qu'elles fabriquent avec une

armature de deux baguettes en croix et qu'elles vêtent d'un chiffon, le

plus souvent en mariée. “La tête est un petit chiffon blanc, choisi très

propre, sur lequel l'enfant dessine un visage au charbon et fixe des

cheveux en poil de chèvre”.

Selon cet auteur, un autre type de poupée était fait quand les chiffons

manquaient. “Les chiffons sont rares et enviés ; quand on n'en a pas, on

se dédommage en faisant une poupée incassable : les yeux, le nez, la

bouche, sont dessinés sur un bel os raclé et lavé”.

Pour le jeu de poupée de leurs sœurs, il arrive que des frères fassent

une maisonnette mozabite.

Contrairement à ce qui se passait chez des populations amazighes, les

poupées ne jouaient “jamais de rôle religieux au Mzab, elles sont du

domaine exclusivement privé, sans être jamais employées dans les fêtes

populaires” (Goichon, 1927: 58-59).

63

112

2.11 Les poupées-femmes kabyles

Jusqu'à présent je n'ai trouvé qu'une seule information sur les poupées

chez les Kabyles, celle fournie par Germaine Laoust-Chantréaux qui en

parle par rapport à ses recherches dans la région de Aït Hichem entre

1937 et 1939. Elle mentionne la poupée représentant la jeune mariée et

une autre poupée représentant un bébé. Cette poupée-bébé est décrite

dans la section sur les poupées-enfants.

La poupée-femme est décrite de la manière suivante (1990: 167) :

La représentation anthropomorphique de la tislit gagne encore en

précision. Cette poupée est formée de deux bâtons disposés en croix et

recouverts d'étoffe : c'est la “mariée” avec laquelle les enfants jouent

de longues heures puis qu'ils perdent ou brisent sans regrets.

2.12 Les poupées-femmes chaouia

Dans la région montagneuse de l'Aurès en Algérie les enfants amazighs

chaouia possèdent des poupées-femmes. Non seulement les filles mais

aussi les garçons confectionnent ces poupées.

Les poupées de la collection du Musée de l'Homme datent toutes de

1936 et 1937 mais Huughe les mentionne sous le nom 'taslit' en 1906 (p.

519). Selon Tillion (1938: 54) les poupées-femmes chaouia s'appellent

'haslit' ce qui signifie fiancée, mariée. Le même mot désigne en plus “la

petite héroïne de la fête des labours et la cuiller à pot qu'on habille en

femme et qu'on promène solennellement pour faire pleuvoir”.

L'armature des poupées, d'une hauteur de 7 à 28 cm, est faite d'un

bâtonnet ou d'un os unique, ou bien de deux bâtonnets ou d'un os et d'un

bâtonnet ligaturés en croix (fig. 64).

Les bras de certaines poupées sont faits

d'un bâtonnet brisé au milieu (fig. 64-

65, H = 18 cm; catalogue 3.8,

36.2.279, p. 285).

64

113

Les vêtements sont ceux des femmes locales. Les poupées portent

souvent une ou plusieurs robes rougeâtres mais parfois la robe est

blanche, noire, verte ou orange. Beaucoup de poupées ont une cordelière

et une ceinture en fils de coton

ou de laine pour cintrer les

robes. Au-dessus elles portent

souvent une mante blanche ou

noire. La robe rouge est, selon

Mathéa Gaudry, typique pour

le sud des vallées ceci suite à

l'influence saharienne. Cet

auteur ajoute que la mante

blanche est principalement un

manteau d'hiver et la mante

noire un manteau d'été (1929:

34-35). Certaines poupées

portent un turban et/ou un

foulard et leurs cheveux sont

parfois naturels. Quelques

poupées sont ornées d'un

collier ou d'une chaînette (fig.

66, p. 114, H = 17,5 cm;

catalogue 3.8, 36.2.314, p.

285).

Une photo de femmes en tout apparat d'un village chaouia se trouve dans

le Catalogue des Collections de l'Aurès (1943: 1). Les vêtements de la

poupée peuvent indiquer la situation particulière dans laquelle le

personnage se trouve. Ainsi une poupée fut désignée comme une

divorcée.

Il est à remarquer que les poupées-femmes chaouia portent

parfois un bébé ou un petit enfant dans le dos (fig. 67, p. 115,

H = 21 cm; catalogue 3.8, 37.9.33, p. 285). Selon toutes les

informations à ma disposition, il est clair que ceci est une

vraie exception chez les poupées sahariennes et nord-

africaines. L'armature de la poupée-bébé est faite d'un

morceau de roseau (fig. 68, H = 6 cm).

65

68

114

Pour les filles comme pour les garçons ces poupées représentent des

personnages féminins auxquels ils donnent des noms propres : “chaque

poupée a un nom, parfois un nom arbitraire, qui a plu à l'enfant, mais,

plus souvent, le nom d'une fille qu'il connaît et admire”. Lorsqu'il est

question d'un nom réel, les enfants tiennent compte de la filiation. Ainsi

un garçon de six ans était furieux parce qu'un garçon de quatre ans

appartenant à une autre fraction avait donné à sa poupée le nom d'une

fille de la fraction du premier garçon : “Il peut bien prendre des noms de

sa fraction, disait-il, il a bien assez de filles chez lui” (Tillion, 1938: 54).

66

115

67

116

2.13 Les poupées-femmes du Nord-ouest algérien

Auprès d'un groupe amazigh, les Beni Snous de la région du village du

Kef en Algérie près de la frontière algéro-marocaine et pas loin de

Tlemcen, Edmond Destaign (p. 64) a noté en 1905 une autre manière de

faire une poupée-femme lors de la fête de l'ennayer, la fête du nouvel an

amazigh. Parfois les filles vont :

Quand le soleil est chaud, jusqu'à la grotte des Ath Moumen (grotte

creusée dans les dolomies près du village du Kef). Au moyen d'une

tige de férule, les petites filles font une poupée qu'elles revêtent

comme une mariée et jouent, en chantant, jusqu'au coucher du soleil.

Nefissa Zerdoumi (1982: 228) nous parle, sur la base de ses recherches

au début des années 1960, des poupées des filles de Tlemcen au Nord-

ouest de l'Algérie, sa ville natale :

Dans les campagnes comme dans les faubourgs, les seules poupées

que l'on voit occasionnellement sont bien modestes et de surcroît on

les appelle blisa (féminin de blis qui veut dire Satan). Elles sont

fabriquées tant bien que mal, en cachette, par leurs mères d'adoption;

deux roseaux assemblés en croix et recouverts de chiffons forment le

corps et les membres ; sur la tête, façonnée approximativement, sont

dessinés, à l'encre généralement, les yeux, le nez et la bouche ; de

vrais cheveux sont parfois ajoutés sous un morceau d'étoffe ajusté en

forme de foulard. Dans la fiction qui s'instaure, la poupée est, comme

pour la fillette européenne, le poupon que l'on dorlote, mais c'est

aussi parfois l'objet de jeux plus osés : on marie la poupée, on la

délivre d'un enfant en imitant les gestes de la qâbla (sage-femme). A

l'âge où l'on emmaillote les poupées, succède rapidement l'âge où l'on

emmaillote de vrais bébés et cette transition mérite d'être soulignée

car elle est sans doute la charnière de la condition sociale féminine.

117

2.14 Les poupées-femmes marocaines

Les renseignements recueillis sur les poupées-femmes marocaines se

réfèrent à des poupées des filles des villes de Fès, Moulay Idriss, Rabat,

Settat, Khouribga, Marrakech et Imi-n-Tanoute, à celles des région de

Ghomara, du Zerhoun, de Khemisset, de Midelt, de Goulmima, de

Merzouga, de Ouarzazate, de Taroudannt et de Sidi Ifni, de certains

villages du Moyen Atlas, du Haut Atlas et de l'Anti-Atlas, et des fillettes

juives des anciens mellahs sud-marocains.

La poupée la plus ancienne dans la collection du Musée de l'Homme

fut faite par une fillette de Fès et provient d'un don de 1931 (fig. 69). Ce

musée possède trois autres poupées-femmes marocaines ayant la même

armature avec un os vertical. La hauteur de ces poupées varie entre 21 et

28 cm. En 1915 la Mission scientifique du Maroc mentionne déjà une

poupée-femme de Settat faite d'un os entouré de chiffons.

Trois types d'armatures peuvent se distinguer en ce qui concerne les

poupées marocaines. Le type d'armature le plus commun est fait d'un os,

d'un roseau, d'une branchette, d'un morceau de bois ou même d'une

69 70

118

plante fibreuse auquel, le plus souvent, a été ligaturé, en forme de croix,

un morceau de roseau ou de bois afin de figurer les épaules et les bras,

comme c'est le cas pour la poupée de la figure 69 (p. 117, H = 28 cm,

catalogue 3.9, 31.45.59, p. 286). Le second type d'armature, jusqu'à

présent seulement trouvé dans la collection du Musée de l'Homme, a

comme tronc un carré de tissu bourré de chiffons auquel sont cousus une

tête et quatre membres eux aussi en tissu bourré de chiffons (fig. 70, p.

117, H = 29 cm, catalogue 3.9, 34.123.1, p. 287). Les yeux, le nez, la

bouche et les tatouages sont cousus. Le troisième type d'armature est

modelé en argile (fig. 149, p. 189).

Les poupées-femmes marocaines décrites dans la bibliographie, celles

de la collection du Musée de l'Homme et quelques-unes des poupées sur

lesquelles j'ai pu me renseigner sur place ont des traits de visage

élaborés. Ces traits sont dessinés au noir de fumée, avec du goudron, de

l'encre, un stylo, un crayon couleur, un fer rouge ou un couteau. Les

poupées marocaines du Musée de l'Homme ont les traits de visage

cousus. Moi-même j'ai trouvé une poupée-femme avec des yeux cousus.

Il s'agit de la poupée-femme refaite par une fille de seize ans du village

Aïn Toujdate en 1993 (fig. 72, p. 124).

Une manière particulière de donner une armature et un visage à une

poupée est mentionnée par J. Herber en 1918 (p. 66).

Une poupée de Sidi Kacem avait les traits représentés au moyen

d'entailles faite dans le roseau ; un ovale limitait le menton ; des

petits traits, un peu de couleur, du noir, du rouge achevaient le visage.

La croisée inférieure, qui est exceptionnelle, maintenait des chiffons et

formait l'évasement des hanches.

Je n'ai jusqu'à présent pas encore revu cette manière de créer le visage et

l'évasement des hanches. Vu la particularité de cette armature de poupée,

j'ai repris en dessin à la figure 71 la photo qui figure dans l'article de J.

Herber (p. 67).

119

Dans la région du Zerhoun près de Moulay Idriss (Herber, 1918: 66) et à

Fès (Soulé, 1933: 355) il arrivait qu'un grain d'orge soit glissé sous le

chiffon pour donner du relief au nez.

Les cheveux des poupées sont en soie effilée, en fils de coton ou de

laine, en chanvre, en feuilles de roseau, en barbe de maïs, en morceau de

datte entouré d'un chiffon, mais les filles utilisent aussi leurs propres

cheveux.

Les poupées portent le costume des citadines ou paysannes adultes

mais il est plus ou moins luxueux selon les moyens à la disposition des

filles. Une mantille et des bijoux complètent éventuellement ce costume

de poupée. Voici comment J. Herber (1918: 66-68) décrit la parure des

poupées marocaines :

La poupée a généralement des cheveux naturels qui sont maintenus

par le foulard de tête, ou le bandeau. Elle est vêtue d'une série de

chiffons de toutes couleurs qui représentent sans doute la

superposition des caftans polychromes que porte la femme arabe ; ils

sont percés d'un trou à leur centre, destiné au passage de la tête et

retombent, en avant, en arrière, à la manière d'une chasuble très

large, dont les bords sont ensuite repliés vers le dos, à l'alignement

des épaules. Une ceinture, des fichus, terminent cet habillement - ou

cet accoutrement - que parent quelquefois des sequins et des perles.

71

120

Différents noms ont été avancés pour désigner la poupée marocaine.

Doutté (1905: 328) a mentionné pour la langue amazighe 'tislit' et

Westermarck (1926: 269) 'taslit'. Selon Doutté (1905: 328), Herber

(1918: 68) et Soulé (1933: 355) le mot arabe 'arousa' est aussi utilisé.

Destaign (1920: LVI) mentionne dans son livre sur les Amazighs du

Moyen Atlas ces trois noms pour les poupées. Tous ces mots désignent

la fiancée ou jeune mariée. Madame Soulé note en plus le nom 'çouira' et

un article de la revue France-Maroc (1917: 39) s'intitule “la poupée

iblisa”. Destaign (1905: 64) et Zerdoumi (1982: 228) parlent des poupées

'blisa' des filles de Tlemcen près de la frontière marocaine en Algérie.

Un nom, plus récent est donné par Flamand qui a poursuivi ses

recherches au Maroc de 1948 à 1958. Il parle de “mounica, terme issu de

l'espagnol muñeca et désignant la poupée dans tous les milieux

marocains” (p. 182). Ce nom semble cependant être moins récent car J.

Herber le note déjà en 1918 pour Tanger, Larache et le mellah de Rabat

et ajoute qu'il s'agit d'une influence des commerçants espagnols (p. 81).

Mes informations, recueillies depuis 1992, mettent en avant le mot arabe

°arûsa et les mots amazighs taslit, tèslit ou tislit tous signifiant la jeune

mariée, pour désigner la poupée-femme traditionnelle. Le terme

'mounica' fait plutôt référence à la poupée en plastique, habillée par la

fille elle-même, ou encore à la poupée importée d'Europe. Comme dans

certains milieux, par exemple à Marrakech, la poupée en armature de

roseau est tombée dans l'oubli, le terme de mounica s'utilise pour toute

sorte de poupée. Actuellement on entend aussi les mots 'poupiya' et

'poupouya' dérivés de poupée. Là aussi il n'y a rien de neuf car comme le

dit J. Herber en 1918 “le nom de poupéia pénètre le Maroc avec les

poupées françaises” (p. 81).

Les jeux de poupées se cristallisent autour de différents thèmes : le

mariage, la grossesse et l'accouchement, la relation mère-enfant, la vie

de ménage et l'enterrement. Les deux premiers thèmes, le mariage et

l'accouchement, sont déjà mentionnés en 1918 par J. Herber (p. 68). Les

jeux de ménages pour lesquels des poupées sont utilisées seront décrits

dans Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. La Vie

Domestique dans les Jeux et Jouets.

Parmi les publications de la bibliographie, la description la plus

détaillée des cérémonies de mariage que les filles offrent à leurs poupées

est due à madame Soulé, date de 1933 et parle de la ville de Fès (p. 355-

121

357 et 360-361). Si possible, plusieurs filles apportent leur poupée et la

plus belle sera la mariée. En même temps les filles ont pris avec eux le

petit ménage de leur poupée :

Petit kanoun (fourneau en terre), plateau, verres, théière, boîtes à thé

et à sucre, etc., et même des provisions de fête : thé, sucre, menthe,

semoule". Une fois qu'une cuisine et une chambre de poupées sont

préparées la mariée est assise sur des coussins avec autour d'elle les

autres poupées qui lui servent de garde d'honneur. Deux grandes

filles dirigent le jeu comme des maîtresses des cérémonies. Une

troisième fille s'occupe de la toilette de la mariée et une jeune

négresse est la servante et s'occupe des menus ustensiles de ménage.

Les autres filles se mettent autour des poupées et représentent les

parentes et les amies de la mariée. Pendant que la toilette de la

mariée est faite derrière un rideau tendu sur une corde, les maîtresses

des cérémonies chantent :

“Ohé ! Madame la fiancée ! Sors pour qu'on te voie!

Si tu es vraiment belle ou seulement soupçonnée de l'étre ! Ô Roses

qui êtes dans le panier, appelez votre frère ! ”

Une partie des parentes et amies reprend la phrase chantée pendant

que les autres filles poussent des you-you d'impatience. Une fois la

toilette terminée on expose la mariée sur les coussins. Alors les

maîtresses des cérémonies entonnent en battant des mains le chant en

l'honneur de la mariée et les fillettes répètent ce chant phrase par

phrase :

“Que le salut soit sur l'Envoyé de Dieu!

Il n'y a point de gloire autre que celle de notre Seigneur Mohammed!

Dieu est avec la très grande intercession!

Il n'y a point de gloire autre que celle de notre Seigneur Mohammed!

Voici la beauté pure! (sans fards).

Voici la beauté de Fès! (Moulay Idriss).

La voici! Puisse Dieu te bénir, ô Madame!

Fasse que Sa protection soit sur toi, ô Madame!

Que la bénédiction divine soit sur toi, ô Madame!

Voici du miel sur la pointe de l'aiguille, le voici!

Que la bénédiction de Dieu soi sur toi, ô Madame!

Que sa sauvegarde soit sur toi, ô bannière des fiancés!

122

La voici! La fiancée qui tourne pareille à un bol de soupe (bis).

C'est, par Dieu! avec les réals (pièce d'argent) qu'on l'a emportée

(allusion au douaire nuptial).

Qu'elle soit la bienvenue, la belle fiancée, de même celles qui

l'accompagnent!

Il l'a emportée, il l'a enlevée, le seigneur des hommes!

Fasse Dieu que sa fortune lui soit durable!

Il l'a emportée! Il l'a emportée! Il l'a emportée!

Grâce à sa fortune! ”

Après l'exposition de la mariée vient le moment de la dînette pour

laquelle la petite négresse a préparé le thé, les gâteaux et le couscous

que maintenant les filles partagent avec leurs poupées.

A la fin de la fête la mariée est replacée dans sa chambre derrière le

rideau où le marié peut venir auprès d'elle. A ce moment les fillettes

chantent :

“Qu'elle soit bienheureuse, Madame, bienheureuse chez elle!

Nous louons Dieu pour ce moment, ô Madame!

C'est notre Seigneur seul qui dispense toute chose!

Nous adressons nos louanges à Dieu en ce moment!

Ohé Madame! Emmène-moi avec toi, emmène-moi, ne me laisse point

(car) les propos de femmes m'ont fatiguée.

Ohé Madame! Il est blessé par la pomme!

Ohé Madame! Soigne-le avec une catin!

Ohé Madame! El Glaoui ! El Glaoui!

Ohé Madame! Soigne-le avec les allusions!

Ohé Madame! Il est blessé et le sang coule!

Ohé Madame! Soigne-le, ô commissaire!

Ohé Madame! Il est blessé à la porte de la maison!

Ohé Madame! Soigne-le, ô commandant!

Ohé Madame! Il est blessé par l'orange!

Ohé Madame! Soigne-le, ô Bitina (vedette de cinéma)!

Ohé Madame! Il est blessé par le citron!

Ohé Madame! Soigne-le, ô Mimouna!

Ohé Madame! Il est blessé par le poignard!

Ohé Madame! Soigne-le, ô jeune fille!

Ohé Madame! Seigneur Abdelqader Jilali tu nous assisteras! ”

123

L'article “La poupée Iblisa” dans la revue France-Maroc de 1917 (p. 39)

parle aussi du jeu marocain dans lequel les filles représentent les

cérémonies de mariage. La chambre de la poupée est ici un trou dans le

mur tapissé de morceaux d'étoffe et fermé par une portière.

On prépare à la poupée un petit siège où on l'installe. Puis on amène

une seconde poupée. C'est le mari de la première. Les fillettes lui

crient : "sois le bienvenu, nous t'avons trouvé une épouse qui te plaira

et te donnera satisfaction". On assoit le mari à côté de l'épouse, au

milieu d'un joli tapage de youyous et d'applaudissements.

L'apparition d'une poupée-homme auprès des filles marocaines est aussi

attestée par l'auteur marocain Mohammad Ibn Azzuz Hakim et ceci chez

les filles de la région de Ghomara, plus précisément Gumara el Haila

selon le livre de cet auteur (1959: 32). Selon l'Encyclopédie Berbère le

pays ghomâra actuel correspond à la région occidentale du Rif central. Il

fut habité par un ensemble de neuf tribus (1998: 3110-3111).

Mohammad Ibn Azzuz Hakim mentionne que la poupée-homme est

souvent remplacée par un petit garçon. Il donne encore quelques

informations non rencontrées chez d'autres auteurs. Selon lui, la poupée

est parfois remplacée par un chaton nouveau-né, qu'on enveloppe d'une

loque, et pour leur jeu de poupée les filles se rendent visite l'une l'autre

avec leur poupée et tiennent des conversations comme si c'était les

poupées elles-mêmes qui parlent, ou bien, elles chantent pour leurs

poupées pour qu'elles ne pleurent pas. Cet auteur parle de l'imitation de

la fête de mariage mais en plus de celle de la circoncision et même du

baptême, bien que ce dernier terme, donnée sans aucune explication,

reste trop vague pour expliciter une réalité musulmane. Peut-être est-il

question de la cérémonie de l'imposition du nom le quarantième jour

après la naissance, comme me l'ont suggéré des gens de Marrakech. Un

autre jeu de poupée représentant la circoncision est mentionné à la fin du

chapitre sur les poupées-enfants marocaines (p. 213).

Excepté quelques informations sur les poupées et jeux de poupées des

filles Aït Ouirra, de Marrakech, de quelques autres villes et des anciens

mellahs juifs du sud-marocain provenant de la bibliographie, les données

sur les poupées et jeux de poupées marocains proviennent de mes

recherches au Maroc depuis 1992. Ces informations ont été présentés

124

suivant un ordre géographique en commençant par les données sur les

enfants des régions d'El Hajeb et de Khemisset dans le Nord du Maroc.

Puis viennent les données concernant les enfants du Moyen Atlas, des

régions de Midelt, Goulmima et Merzouga, ainsi que celles provenant

des enfants de la région du Jbel Siroua dans le Haut Atlas, des régions de

Marrakech, d'Imi-n-Tanoute et de Taroudannt, de la région de Sidi Ifni

dans l'Anti-Atlas et de la ville de Sidi Ifni. Finalement, les données en

rapport avec les anciens mellahs juifs du sud-marocain sont

mentionnées.

Souad Ouazzani, une fille de seize ans vivant à Aïn Toujdate un

village entre El Hajeb et Fès, a reproduit en août 1993 la poupée-jeune

mariée ou °arûsa comme

elle le faisait à l'âge

d'environ dix ans, c'est-à-

dire vers 1983. Elle et les

autres filles jouaient avec

cette °arûsa à la fête de

mariage, éventuellement

avec une poupée-jeune

marié ou °arîs. La poupée-

jeune mariée de la figure

72 (H = 23 cm, L = 12,5

cm) fut faite par Souad de la

manière suivante. A un

morceau d'une planche une

branchette est attachée en

forme de croix avec un

ruban. Cette structure est

enveloppée de trois couches

d'étoffes différentes. En

serrant ces étoffes par un

ruban qui passe derrière le

cou et par-devant en dessous

des bras, les seins de la poupée sont mis en relief. Un caftan rouge à

dessins noirs couvre le tout. Un foulard coiffe la tête et un izâr, grand

foulard ou drap, brun est drapé de la tête aux pieds et retenu à la taille

par un large ruban multicolore. La tête de la poupée est confectionnée

72

125

avec une étoffe blanchâtre, ressemblant à de la gaze, bourrée de petits

chiffons, le tout étant fermé par derrière en le cousant avec du fil de

coton. Sur cette tête figure un visage aux grands yeux, cousus avec du fil

de coton noir, des sourcils, un nez et une bouche ovale dessinés au stylo.

Un jour, lors de l'°Ashûra, Souad et sa sœur ont pu acheter de leur

grand frère un petit cadeau. Souad à choisi une poupée-femme et sa sœur

une poupée-homme, toutes les deux en plastique. Ensemble elles ont

joué au mariage de leur couple de poupées en couvrant leurs poupées

couchées avec un morceau d'étoffe et en dansant et chantant autour

d'elles.

Pour son jeu de poupée, une fille des Amazighs Khabliîn d'environ

huit ans, Hesna Ourèra, utilise des poupées-femmes et des poupées-

hommes rudimentaires. Avec une ou quelques copines, elle joue toujours

à la fête de mariage. Hesna habite le petit village Aït Hmed ou Yacoub

situé à 4 km de Khemisset près de la route vers Sidi Slimane. Quand j'ai

rencontré Hesna la première fois en octobre 1996, elle se trouvait près de

sa maison de poupée. Dans cette maison de poupée, plus ou moins

elliptique de 70 cm sur 50 cm et faite de deux rangées de pierres

superposées, trois poupées sont couchées par terre (fig. 73).

Cette maison de poupées se trouve adossée au mur de la maison

paternelle. Comme cela se voit sur la photo, une photo sur laquelle

Hesna ne voulait pas figurer, il y a au milieu de la maison de poupée un

morceau d'étoffe comme tapis, des morceaux de verre comme verres de

73

126

thé et une boîte de sardines comme plateau. Une touffe d'herbes est

devenue un bouquet de fleurs.

Les poupées elles-mêmes représentent, selon Hesna, deux tislit ou

jeunes mariées, et un isli ou jeune marié (fig. 74, voir aussi Rossie e.a,

1998, vidéo, p. 321). Les poupées de cette fille sont faites d'un morceau

de roseau coupé en deux qu'elle

entoure complètement d'une

cotonnade. Ce vêtement est fixé en

mettant l'extrémité de l'étoffe dans

le tour d'étoffe précédent ou bien

avec une petite ceinture faite de la

même étoffe. Ces poupées n'ont ni

bras, ni visage, ni cheveux, ni

bijoux. La distinction que Hesna

fait entre la poupée-femme et la

poupée-homme est surtout basée

sur la pose d'un petit caillou en haut

du roseau de la poupée-homme,

caillou qui est presque invisible car

entouré par l'étoffe. Des trois

poupées que Hesna m'a données, la

plus grande de 17 cm et la plus

petite de 13 cm sont des poupées-

femmes. La poupée-homme avec

caillou mesure 16 cm.

Ces poupées de Hesna démontrent que même si à la ville moyenne de

Khemisset, chef-lieu de la province de Khemisset, et selon toutes les

informations recueillies sur place les filles ne jouent aujourd'hui qu'avec

des poupées en plastique, la poupée locale fabriquée par les filles elles-

mêmes peut encore survivre dans des villages en bordure de la ville. La

même situation se présente à Midelt, une petite ville au pied du Jbel

Ayachi, à Taroudannt, une petite ville dans la vallée entre le Haut Atlas

et l'Anti-Atlas, et à Sidi Ifni, une autre petite ville à la côte atlantique au

sud d'Agadir.

A Tiddas, un village amazigh à 45 km de Khemisset sur la route

reliant cette ville à Khenifra, deux sœurs Malika et Thuriya Bannour,

respectivement dix-sept et vingt-deux ans en octobre 1996, m'ont raconté

74

127

qu'elles confectionnaient des poupées-jeunes mariées et des poupées-

jeunes mariés quand elles étaient des petites filles. Ces poupées 'tislit' et

'isli' avaient une armature de roseau en forme de croix, le morceau de

roseau servant de bras étant fixé avec une bandelette d'étoffe. L'armature

était vêtue de chiffons à la manière des femmes ou celle des hommes. Un

visage, avec bouche, nez, yeux et sourcils, était dessiné au stylo. Elles

jouaient avec d'autres filles à la fête de mariage en chantant les chansons

de circonstance. Malika et Thuriya attestent cependant que ces poupées

locales encore fabriquées par les filles elles-mêmes vers 1990 n'existent

plus dans leur village situé en bord de route. Elle y est remplacée par une

poupée en plastique, avec cheveux et vêtements, achetée dans les petits

magasins ou lors du marché.

Au pied du Moyen Atlas, sur la route de Khenifra à Khemisset, se

trouve Oulmès, bien connue pour sa source dont l'eau est commercialisée

sous ce nom. En 1996, des informations concordantes de Fatima

Boutouil de cinquante-sept ans, de deux

femmes de sa famille d'environ soixante-dix ans

et de deux garçons d'environ dix ans rencontrés

lors d'une visite à cette source, tous nés dans la

région, attestent l'utilisation d'une plante

fibreuse à longues feuilles minces appelée

bèrwèl comme armature de poupée. Cette

plante, qui pousse en période de pluie, était

aussi utilisée pour se faire un bracelet ou un

collier et même pour y verser, après l'avoir

gonflée, du lait de chèvre qui mis dans la

chaleur donne du beurre.

Pour faire une poupée une plante est coupée

à ras du sol et retournée pour que les feuilles

pendent en bas. En haut se montre alors une

tige blanchâtre dans laquelle une branchette est

introduite horizontalement pour donner des bras

à la poupée-femme (fig. 75). Selon les deux

garçons, les filles pendent des chiffons par-

dessus les bras de la poupée pour la vêtir.

Dans les années 1940 et selon Sfia Gharîb, une femme née en 1938

dans le village amazigh Arhbalou-n-Serdane sur la route de Khénifra à

75

128

Boumia mais vivant à Midelt, elle-même et les filles entre quatre et onze

ans se fabriquaient une poupée-jeune mariée ou tislit, pour jouer

ensemble avec un groupe d'environ quatre filles, des cousines ou

voisines, ou parfois même seule à la cérémonie de mariage, presque

toujours la cérémonie de mariage. Pour cela elles utilisaient une petite

maison de poupée bordée de pierres. Dans le cadre de la cérémonie de

mariage elles jouaient aussi à la dînette pour la préparation de laquelle

un petit moulin à bras ou takkerût est utilisé. Ce jeu de poupée pouvait se

pratiquer durant toute l'année et rien n'empêchait les filles de jouer avec

leurs poupées à la maison.

Sfia Gharîb a refait en janvier 1997 deux poupées presque identiques

et dont on voit une à la figure 76. Toujours sur un os de patte de mouton,

la moitié d'un morceau de roseau est ligaturé en forme de croix avec une

bandelette. Quatre ou cinq rectangles de tissu, au milieu desquelles une

fissure est faite pour

pouvoir le passer par-

dessus la tête, servent de

sous-vêtements et sur-

vêtements. La couleur

des étoffes est blanche

ou rose, une fois elle est

noire. Le survêtement ou

tfina est dans les deux

cas une cotonnade

blanche transparente tout

comme la large cape ou

ternest que portent ces

poupées. Une ceinture

de tissu rose tient les

vêtements en place. La

tête porte ou bien un

foulard noir ou bien un

foulard rose, tenu en

place par une bandelette

blanche. Des traits de

visage n'étaient pas

dessinés sur le haut de 76

129

l'os qui reste visible. Ces deux poupées mesurent 29 cm de hauteur et

l'envergure des bras est 9 cm.

Un professeur d'éducation physique marocain, Lahcen Oubahammou,

a obtenu en juin 1987 le grade de maître ès-sciences en sciences de

l'activité physique à l'Université Laval au Canada avec sa thèse

L'ethnographie des jeux traditionnels chez les Aït Ouirra du Maroc :

description et classification. Dans cette thèse, peut-être unique dans son

genre en ce qui concerne le Maroc, l'auteur décrit cinquante-trois jeux

avec plusieurs variantes. Ces jeux sont le plus souvent des jeux d'adresse

et des jeux sportifs. Cependant, il donne aussi quelques informations sur

le jeu de poupée des filles Aït Ouirra. Les Aït Ouirra sont une population

amazighe de 14.019 personnes selon le recensement de 1971, vivant au

Moyen Atlas dans la région montagneuse et boisée d'El-Ksiba à environ

1100 m d'altitude et à 27 km de la ville de Kasba-Tadla.

Le jeu de la jeune mariée, 'ilihane n'tislit', est décrit par Lahcen

Oubahammou de la manière suivante :

Les fillettes Aït Ouirra... prennent un morceau de roseau (aghanim)

sur lequel elles fixent un autre morceau en forme de croix pour

représenter les bras. 'Tislit' peut être aussi le tibia de mouton appelé

'taâjijt'. Le visage est dessiné avec le noir de fumée (ayffouss) et la

poupée est habillée de vieux linge. Les fillettes la promènent en

répétant le chant dit à l'occasion d'un mariage. Un groupe de fillettes

accompagne 'la fiancée' vers la demeure de son fiancé et, chemin

faisant, elles répètent le refrain suivant : “Doumt a thi hak zourkh a

rabbi” qui veut dire “allez-y que Dieu soit votre guide”. Un autre

groupe de fillettes accueille la fiancée. Lorsque le cortège s'approche

du groupe qui accueille, il répète le refrain suivant :

“Yim takhen a brid

A ikhamen makkourrine

A youchen ghedd tamlatt

A yifigher noubrid

A lamoun mech immouth”.

“Ouvrez-nous le chemin

Ô grandes familles

Ô chacal ou gazelle

130

Ô serpent du chemin

Surtout s'il est mort”.

Le groupe qui accueille répond :

“Nssayakhount ahrir

A ikhamen mekkourrine”.

“Nous vous présentons ahrir

Ô grandes familles”.

Traversant le Moyen Atlas et en se dirigeant vers Errachidia on arrive à

la petite ville de Midelt située à une altitude de 1500 m au pied du Jbel

Ayachi. Comme dans d'autres villes la poupée traditionnelle faite par les

filles elles-mêmes semble y avoir disparue mais à 3 km avant Midelt en

venant de Meknès des filles la font encore. Ce sont des filles Oulad

Khawa, Ikhawîn en amazigh, du village She°ba, un îlot arabophone en

milieu amazigh.

Bouchra, une fille d'environ huit

ans et allant à l'école, a montré en

novembre 1996 comment elle

procède pour faire une poupée-

jeune mariée ou °arûsa (fig. 77, H =

15 cm, envergure des bras = 6,5

cm). Pour cela elle relie en forme de

croix deux morceaux de bois avec

un lacet. Puis elle met un morceau

rectangulaire d'une vieille nappe en

plastique sur cette armature. Au-

dessus de cette longue robe un

survêtement ou 'caftan' d'étoffe

transparente à motifs brillants est

mis, une ceinture de la même étoffe

serrant la taille. Afin de pouvoir

passer la tête de la poupée à travers

les vêtements une fissure est faite en

leur centre avec les dents ou si

nécessaire en frappant avec une

pierre l'endroit voulu. Comme

foulard une bandelette de tissu noir

77

131

enveloppe la tête en ne laissant rien apparaître du visage où il n'y a

d'ailleurs pas de traits de visage. Ce foulard a été ajouté par une autre

fille à qui Bouchra a demandé de le faire. Comme d'autres filles

expliquent, ce foulard manque parfois surtout lorsque la fille en question

n'arrive pas à le faire elle-même.

Avec une poupée-jeune mariée plusieurs filles jouent ensemble aux

cérémonies de mariage après quoi la poupée est jetée pour en faire une

nouvelle le moment voulu. Il n'y a pas de période particulière de l'année

pour jouer à la poupée. Les filles disent qu'une fois elles jouent à la

poupée, une autre fois à la marelle, au jeu de ménage et ainsi de suite

selon leur bon plaisir.

Dans ce village il y a parfois des filles qui ont reçue une poupée en

plastique achetée dans un petit magasin ou au marché. Pareille poupée se

casse assez vite mais elle continue néanmoins à servir même sans bras ni

jambes. Le vêtement d'origine peut être remplacé par un vêtement de

poupée locale comme cela se voit à la figure 78.

78

132

A Ksar Assaka, un petit village à 4 km de Midelt en direction du Jbel

Ayachi, j'ai pu obtenir fin 1996 et début 1997 des informations précises

sur le jeu de poupée des filles. Ces informations proviennent de trois

sœurs - Souad, Najat et Sabah Laabib - qui jouaient à la poupée entre

1975 et 1985 ainsi que de leur mère Aïcha Aït Mamou qui en faisait

autant environ vingt-cinq années plus tôt. Cette famille appartient au

groupement amazigh des Aït Merghad. Actuellement cette poupée serait

devenue très rare dans ce village si elle n'y est pas tout à fait disparue, la

poupée locale étant remplacée par la poupée en plastique importée.

Souad Laabib, née à Ksar Assaka en 1968, m'a décrit en détail le jeu

de poupée de son enfance. Elle s'y adonnait entre ses six et douze ans

dans un groupe de jeu très stable composé d'elle-même, de deux cousines

et de deux copines du voisinage. L'endroit lui aussi était fixe, situé sur le

côté ensoleillé de la maison paternelle de Souad et où il n'y avait pas de

maison ni de champs. Le jeu de poupée se pratiquait à n'importe quel

moment de l'année, les filles alternant le jeu de la poupée avec la

marelle, les osselets, le cache-cache et même le football avec les

garçons. Le jeu de poupée, dans lequel à chaque fois il est question de la

tamgra, c'est-à-dire la fête de mariage, se jouait plus ou moins une fois

par semaine. Le moment propice de la journée est l'après-midi pendant la

sieste des parents.

Le groupe de jeu se divise en deux. Souad et deux filles seront les

parentes de la poupée-jeune mariée et Zhor, une copine du voisinage et

une autre fille seront les parentes de la poupée-jeune marié. Chaque fille

se choisit un vieux prénom comme Beha, Etto, Yemna, etc.

79

133

La première chose à faire est de contrôler l'état de la maison de

poupée de la jeune mariée et celle du jeune marié, de les réparer si

nécessaire et de les nettoyer avec un peu d'eau et une brosse. Les deux

maisons de poupées sont rectangulaires et d'environ la même grandeur,

les murs étant délimités par des pierres (fig. 79, p. 132). La maisonnette

à gauche du dessin s'appelle taddert n tislit, la maison de la jeune mariée.

Ce qui distingue la maison de poupée de la tislit est l'escalier à trois

marches, trois rectangles de pierres faits devant la porte de la maison, et

le heurtoir, une petite pierre sur une grande pierre placée devant

l'escalier. Dans chaque maison de poupée six morceaux de carton

remplacent les tapis, des morceaux de verre deviennent des verres à thé

et des herbes ou s'il y en a des fleurs de champs créent un bouquet de

fleurs. Pendant que les autres filles nettoient les maisons de poupées,

Souad fabrique une tislit et Zhor un isli, cette poupée-jeune marié étant

du même genre que celle de la figure 83 côté gauche (p. 137).

Une fois que tout cela est bien en ordre, Zhor, la mère du jeune marié,

et sa compagne s'amènent devant la maison de la tislit, elles frappent à la

porte et sont invitées d'entrer avec toutes les formules de politesse

nécessaires. Le thé est servi et après l'échange de quelques nouvelles, le

vrai but de la visite se révèle. Les femmes en visite proposent le mariage

de leur fils avec la fille de la maison, tout en louant les vertus de l'une et

de l'autre. Une discussion suivant les règles s'engage, l'accord de

principe est conclu et une nouvelle rencontre est fixée. Les femmes en

visite s'en vont mais reviennent bien vite. Pendant leur absence le

montant de la dot pour la fiancée et sa famille est fixé. Quand les

femmes reviennent une nouvelle discussion s'engage et une fois que les

deux familles tombent d'accord la date du mariage est choisie. A ce

moment, le jeu qui a déjà duré environ deux heures est interrompu pour

le continuer l'après-midi suivant ou même plus tard.

La deuxième partie du jeu de poupée commence avec l'inspection des

lieux et des poupées qui sont restées sur place parce que Souad et ces

compagnes de jeu n'amenaient pas ces poupées à la maison. Souad dit

dans ce contexte qu'elle n'a jamais pris une poupée à la maison mais elle

ne peut pas en donner la raison, seulement cela ne se faisait pas. Une fois

les réparations exécutées, la mère du jeune marié revient avec sa

compagne chez la jeune mariée avec les cadeaux de circonstance, des

vêtements, des souliers, de la farine, du sucre qui ne sont autres que des

134

chiffons, des vieux souliers, une grande pierre, un bidon vide. Alors tout

le monde chante et danse comme pour un vrai mariage en rythmant cela

avec un vrai petit bendir ou tambour à main. Quand les chants et la danse

s'arrêtent, les filles vont chercher le jeune marié et là les chants et la

danse reprennent. Alors la mère de l'isli prend sa poupée dans ses bras et

en cortège on regagne la maison où la tislit attend.

La poupée-jeune marié est placée à côté de la poupée-jeune mariée et

chaque fille se met autour de ce couple. A ce moment est mimée la

cérémonie de la pose du henné, remplacé par du sable mouillé, sur les

mains et les pieds du couple en chantant les chansons de circonstance.

Un vrai dîner composé de pain et de tomates est alors dégusté. Après le

dîner le couple est amené à la maison paternelle de l'isli. Quand la tislit

quitte sa maison, les filles chantent une chanson d'adieu triste mais

quand on arrive à la maison de l'isli la chanson est joyeuse. Dans cette

maison la mariée et le mari sont couchés l'un à côté de l'autre sur un lit

de carton. La nuit de noces bien courte se termine par le retour des

parentes qui viennent vérifier la

preuve de la virginité de la tislit, une

serviette blanche sur laquelle un peu

de safran rouge a fait des taches de

sang. Le jeu de poupée arrive à son

terme avec le chant qui honore la

virginité de la poupée-jeune mariée.

Le jeune couple est laissé dans la

maison de poupée et tout est

abandonné jusqu'au prochain jeu de

poupée.

Souad a refait cette poupée-jeune

mariée qui était confectionnée selon

un modèle immuable (fig. 80).

L'armature est faite d'un roseau à

l'arrière duquel un morceau de la

moitié d'un roseau est ligaturé en

forme de croix avec une bandelette.

Au-dessus des bras pendent en

avant et en arrière deux vêtements

faits de longs rectangles de tissu 80

135

avec au centre une petite fissure pour faire passer la tête de la poupée.

Cette fissure est faite en frappant l'étoffe placée sur une pierre plate avec

une autre pierre ou parfois avec un couteau. Le premier vêtement, qui

représente le tshamir est un morceau de tissu multicolore aux motifs

floraux. Pour le survêtement, le tfina, une étoffe à motifs brillant est

obligatoirement utilisée. Ces chiffons précieux étaient apportés de chez

un tailleur par la mère de Souad lorsqu'elle allait au marché du dimanche

à Midelt. La poupée montrée à la figure 80 (p. 134) porte comme

survêtement un morceau de tissu à fond noir transparent sur lequel sont

appliquées des feuilles et des fleurs rouges bordés d'un contour doré.

Une ceinture du même tissu sert la taille. Le morceau de roseau au-

dessus des bras est entièrement enveloppé avec un foulard ou tèh'nebusht

bleu avec au-dessus un autre foulard fait du tissu brillant utilisé pour le

survêtement. Ainsi rien n'apparaît de la tête de la poupée. Cette poupée

mesure 29 cm de haut avec une envergure des bras de 14 cm.

La sœur de Souad, Najat Laabib, née en 1971 à Midelt, vivait aussi à

Ksar Assaka où elle a joué à la poupée jusqu'à l'âge de douze ou treize

ans. Le groupe de jeu comportait en plus de Najat, une sœur cadette,

Sabah, et deux cousines habitant une maison voisine. Comme dans le cas

de Souad, c'est toujours et uniquement la fête de mariage, la tamgra, qui

était mise en scène. Selon Najat, elles aimaient beaucoup ce jeu de

poupée, c'était à chaque fois quelque chose de spécial. Elles le jouaient

souvent au début des années 1980 sauf s'il faisait trop froid.

Le jeu commence en construisant ou en réparant la maison de poupée

dans le jardin de la maison paternelle de Najat, toujours au même

endroit. C'est une maison de poupée rectangulaire assez grande,

d'environ 1 m sur 2 m, avec une chambre dans chaque coin où les quatre

filles peuvent s'asseoir à l'aise. La maison et les chambres sont délimitées

par une rangée de pierres bien propres et un peu brillantes de la grandeur

d'un poignet et complétées à certains endroits avec des morceaux de

verre blanc et vert provenant de bouteilles cassées. A la chambre du coin

supérieur droit un petit escalier, fait de deux roseaux auxquels des

morceaux d'une planche sont attachés par des rubans, mène à la terrasse

virtuelle. Une fois que la maison de poupée est en ordre elle est nettoyée

avec un peu d'eau et avec quelques herbes ou fleurs de champs un jardin

de fleurs est créé.

136

Maintenant chaque fille commence à confectionner sa tislit ou jeune

mariée. Elles rivalisent pour faire une belle tislit et si une poupée est

jugée ne pas assez belle elle est aussitôt refaite. Un isli ou jeune marié

est aussi fabriqué par chaque fille. Ainsi ce sont quatre couples pour qui

la fête de mariage est faite en dansant et en chantant comme s'il s'agissait

d'un vrai mariage. Deux filles s'accompagnent avec le tellunt, un

tambour à main ou bendir, les deux autres avec le tèbja, une flûte à corne

de mouton. Deux scènes sont mimées durant cette fête de mariage. La

première scène est celle de faire monter la poupée tislit sur une poupée-

mouton et dans la deuxième scène l'isli, portant un bâton tenu par la fille

qui manipule la poupée et signe distinctif de l'autorité du mari, accueille

sa tislit chez lui. Il y a aussi un dîner avec des tomates et du pain.

La poupée-mouton représente le mouton que la famille du jeune marié

apporte chez la jeune mariée et que cette dernière monte pour qu'elle ait

une bonne vie. Pour figurer cela, la poupée-tislit est couchée sur le dos

de la poupée-mouton et ainsi elles font une petite promenade (fig. 81).

Cette poupée-mouton est faite avec un vieux bidon d'huile autour duquel

un morceau de peau de mouton usé est cousu. Les pattes sont quatre

pilles usées et deux cornes de mouton sont fixées au bon endroit.

Ce jeu de poupée qui dure plusieurs heures peut être interrompu pour se

continuer plus tard. Dans ce cas Najat apportait ses poupées à la maison

sans que sa mère ne s'y soit opposée. Une fois la fête de mariage de leurs

81

137

poupées terminée, les filles s'amusent à tout casser, même les poupées,

en jetant des pierres et cela avec beaucoup d'hilarité.

Quand j'ai demandé à Najat en septembre 1996 si elle voulait recréer

le plus fidèlement possible la poupée-jeune mariée de son enfance elle

m'a offert lors d'une nouvelle visite trois poupées-jeunes mariées.

La première tislit (fig. 82) a une armature de deux roseaux ligaturés en

forme de croix avec un ruban d'étoffe. Au centre d'un morceau de tissu

bleu une ouverture est faite pour pouvoir draper le survêtement ou tfina

sur les bras et le corps de la poupée. Ce vêtement unique est cintré par un

ruban jaune. La jeune mariée a des cheveux, avec deux longues tresses

devant les bras, faits de fils de laine brune tirés d'un vieux tapis. Le

foulard est un chiffon rouge tenu en place par un ruban blanc. Deux

grandes boucles d'oreilles avec chacune trois perles passent à travers le

foulard. Cette poupée-jeune mariée sans traits de visage a 28 cm de

hauteur et une envergure de bras de 21 cm.

La deuxième tislit (fig. 83 côté droit) a la même armature que la

précédente, mais les bras sont faits avec un morceau de la moitié d'un

82 83

138

roseau. Cette poupée est vêtue d'un vêtement unique, un long morceau

de tissu rose à motifs brillants rectangulaire, serré à la taille par un ruban

du même tissu. Autour de la tête est noué un foulard lui aussi du même

tissu. Sous ce foulard sont fixés les cheveux qui pendent en deux tresses

devant les bras. Comme pour la poupée précédente les cheveux sont faits

avec des fils de laine brune tirés d'un vieux tapis. Cette poupée mesure

27 de haut et 13,5 cm pour l'envergure des bras. Elle non plus n'a pas de

traits de visage.

Pour la troisième tislit (fig. 84) le même type d'armature est utilisé

sauf que cette fois le morceau de la moitié d'un roseau traverse le roseau

vertical et est fixé par une bandelette.

Le survêtement unique est un

morceau rectangulaire de coton qui a

en son centre une fissure pour laisser

passer la tête de la poupée. Ce

vêtement blanc à motifs bleu est

serré à la taille par une ceinture de

fils de laine noire et rouge. Un

morceau de tissu blanc est utilisé

pour couvrir la tête. Contrairement à

toutes les autres poupées faites par

Najat et ses sœurs, cette poupée a un

visage dessiné au stylo noir pour les

yeux et sourcils et au stylo rouge

pour la bouche et le maquillage sur

les joues. Les cheveux qui pendent

sur le dos en une longue et large

tresse sont faits avec des fils de laine

beige tirés d'un vieux tapis. Un

foulard enveloppe la tête et est fixé à

la hauteur du cou par un ruban, tous

deux du même tissu que la robe.

Cette poupée mesure 22,5 cm de haut et l'envergure des bras 10 cm.

L'isli, la poupée-jeune marié que Najat a refait à ma demande un peu

plus tard, est bien plus simple (fig. 83 côté gauche, p. 137). L'armature

en forme de croix, avec un morceau de la moitié d'un roseau introduit

dans la fissure faite en haut du roseau vertical et fixé par un ruban pour

84

139

former les bras, n'est vêtue que d'un jellaba et d'un turban faits avec un

tissu mauve. Cette poupée mesure 19,5 cm de haut et 8,5 cm pour

l'envergure des bras.

La plus jeune des sœurs Laabib, Sabah, est née à Midelt en 1973. A

Ksar Assaka, elle jouait ensemble avec sa sœur Najat au mariage des

poupées. Sabah à refait fin 1996 des poupées de son enfance lorsqu'elle

avait environ dix ans, c'est-à-dire vers 1983. Elle a créé trois modèles

différents dont deux en armature de roseau et un autre à épis de maïs.

La poupée à épis de maïs, de 19 cm de haut avec une envergure des

bras de 11,5 cm, est confectionnée de la manière suivante (fig. 85). A

cinq centimètres du haut de

l'épis de maïs est introduit

la moitié d'un morceau de

roseau servant de bras. Les

cheveux longs roux-brun

noués avec un fil rouge-noir

ne sont autres que la barbe

de l'épi. Le vêtement unique

consiste en un morceau de

tissu molletonné provenant

d'un vêtement de bébé usé

de couleur verte à

l'extérieur et blanche à

l'intérieur. Une petite

fissure faite dans le tissu

permet de faire passer les

cheveux et la tête de la

poupée. Une partie blanche

du tissu enveloppe les bras.

Un petit ruban d'étoffe

bleue sert la taille. Le haut

de l'épi de maïs qui forme la

tête ne porte pas de traits de

visage. A l'arrière la robe est tenue en place avec la tige qui transperce le

tissu. L'utilisation d'un épi de maïs pour confectionner une poupée est

aussi attestée pour le village de Tizal près d'El Khemis.

85

140

Pour sa seconde poupée Sabah a utilisé deux moitiés d'un morceau de

roseau qu'elle a ligaturés en forme de croix avec un ruban (fig. 86, côté

gauche). Les cheveux blonds abondants de cette poupée de 23 cm de

haut avec une envergure des bras de 18,5 cm sont faits avec du chanvre.

Ces cheveux longs entourent complètement le haut du roseau vertical ne

laissant rien apparaître du visage de la poupée. Les cheveux qui pendent

par-devant les bras sont tressés vers le bas. Comme tout vêtement elle

porte un morceau d'étoffe rouge à points noirs découpé dans une vieille

jellaba. Au milieu de ce morceau de tissu rectangulaire un petit trou

permet de le draper au-dessus des bras et du corps, la taille étant

accentuée par une large ceinture mauve et noire. Le bas de la robe est

par-devant retenu en place par l'extrémité du roseau.

86

141

La plus grande des trois poupées utilise comme armature un roseau en

entier dans lequel Sabah a introduit à 6 cm du haut un demi-roseau (fig.

86 côté droit, p. 140). Elle mesure 35 cm de haut et l'envergure des bras

18 cm. Cette poupée porte drapée au-dessus des bras un joli vêtement

transparent blanchâtre à motifs carrés de fils dorés. Un ruban du même

tissu sert la taille. Un coquillage attaché avec une épingle de sécurité est

l'unique bijou de cette tislit. Le plus remarquable à cette poupée sont ses

cheveux verts tressés faits avec des feuilles de roseaux. Sur les côtés de

la tête ces tresses forment deux grandes boucles qui sont tenues en place

en haut du roseau par un grand foulard multicolore qui enveloppe toute

la tête ne laissant pas apparaître le visage. Cette coiffure imite l'ancienne

coiffure typique de la région, appelée ikherbèn, que portait encore la

grandmère de Sabah mais que sa mère ne portait déjà plus.

Aussi bien Souad que Najat et Sabah Laabib affirment qu'un prénom

n'est pas donné à la tislit ni à l'isli. Ce fait de ne pas donner de prénom à

la poupée fut confirmé en septembre 1999 par deux filles de huit et neuf

ans vivant dans le

village Zaïda sur la route

de Meknès à Midelt et à

30 km avant cette

dernière ville (voir le

chapitre "Toys, Play,

Signs, Meanings and

Communication" (p. 79)

dans Rossie, Toys, Play,

Culture and Society).

Aïcha Aït Mamou,

née à Ksar Assaka en

1941 où elle a passé sa

jeunesse et la mère des

trois sœurs sus-

mentionnées, jouait avec

pareilles poupées de

roseau vers 1950. Elle a

spontanément refait la

tislit de son enfance en

octobre 1998 (fig. 87).

87

142

L'armature de cette poupée consiste d'un roseau entier auquel la moitié

d'un roseau est ligaturé en forme de croix (H = 29 cm, envergure des

bras = 11 cm). Comme sous-vêtements elle porte trois chiffons et comme

survêtement un morceau d'étoffe multicolore à motif végétal et avec des

lignes dorées verticales parallèles. Au centre de ces pièces d'étoffe un

trou fut fait pour pouvoir les passer au-dessus de la tête. Le foulard est

un large chiffon dont les deux bouts sont fixés au survêtement avec une

épingle. Un chiffon noir représentant les cheveux entoure le haut du

roseau vertical où il est tenu en place par un ruban. Ce ruban et le foulard

sont de la même étoffe que le survêtement. Des yeux et des sourcils

noirs, un nez et une bouche rouge et des joues rouges forment les traits

de visage. Un miroir caché dans une boîte de fer blanc singularise la

poupée. Jusqu'au début des années 1990 un pareil miroir attaché à un

foulard rouge cachait le visage de la fiancée pendant la fête de mariage.

Bien que ces miroirs se trouvent encore au marché local en octobre 1998

on m'a certifié que cette partie du vêtement nuptial ne se voyait plus.

Aïcha Aït Mamou a expliqué qu'une croyance spécifique faisant

référence à la grossesse était liée à ce miroir. Cette croyance stipule que

la jeune mariée ne deviendrait pas enceinte si longtemps que la boîte

n'est pas ouverte mais qu'elle n'a qu'à se regarder dans le miroir si elle

voulait avoir un bébé.

Aïcha Merghad, une femme d'environ soixante ans en 1998 né dans le

village Aït Sidi Amar de la région El Ayachi productrice de pommes

située à environ 20 km avant Midelt en venant du Moyen Atlas, a elle

aussi refait sa poupée d'enfance. L'armature de la tislit ou jeune mariée

qu'elle a faite en octobre 1998 consiste d'un morceau de roseau et un

bâtonnet liés en forme de croix. Les traits de visage ressemblent celle de

la poupée précédente. Les seins de cette poupée sont obtenus en mettant

deux petites pierres sous les vêtements qui consistent d'un sous-

vêtement, un survêtement, une ceinture et un foulard provenant du même

tissu blanc à points multicolores (fig. 88, p. 143, H = 25 cm, envergure

des bras = 14 cm).

Déjà en novembre 1997 Aïcha Merghad avait refait deux exemples

des poupées avec lesquelles elle jouait vers la fin des années 1940 mais

cette fois-ci l'armature verticale est un os.

143

L'armature de la première poupée est un os de 11 cm de long auquel est

attaché avec un ruban un demi roseau en forme de croix (fig. 89 côté

droit, p. 144, H = 33 cm, envergure des bras = 12 cm). Le visage étant

caché par un voile l'os n'est pas visible. Cette armature est vêtue d'un

sous-vêtement vert à points blancs, un tshamir ou longue blouse bleue à

lignes blanches et d'un tfina ou survêtement blanc à points bleus, rouges

et bruns. Trois pièces du même tissu créent la ceinture, le grand foulard

et le ruban tenant le foulard en place sur la tête de la poupée. Comme j'ai

pu le constater en novembre 1997, la jeune mariée porte un grand foulard

de ce genre quand elle est conduite à la maison de son mari. La

deuxième poupée, qui ressemble de près la première, a le haut de l'os

88

144

entouré d'un foulard rouge qui tient en place de long cheveux. Elle porte

aussi un petit collier à perles blanches et un grand foulard jaune avec des

dessins géométriques gris et bruns couvrant totalement la poupée (fig. 89

côté gauche, H = 23 cm, envergure des bras = 8,5 cm).

Kemal Laabib, né à Ksar Assaka en 1971 et le dernier-né de Aïcha Aït

Mamou, m'a dit qu'il jouait avec des filles au mariage, mais avec une

petite fille comme jeune mariée et un petit garçon comme jeune marié.

Cela se passait entre ses quatre à six ans. Une fois l'âge de six ans passé

jouer ensemble avec les filles ne se faisait plus. Il se rappelle aussi

d'avoir fabriqué la poupée de roseau, mais cela restait certainement une

exception.

Mhamed Bellamine, un homme né à Ksar Assaka en 1968 m'a raconté

en mai 2000 que lorsqu'il était enfant les filles et les garçons entre six et

dix ans jouaient ensemble au mariage à Ksar Assaka. Une belle fille était

89

145

choisie comme jeune mariée et son maquillage se faisait avec du khol et

du rouge à lèvre. Un garçon était choisi à tour de rôle pour jouer le jeune

marié. Avec des pierres le plan d'une maisonnette était réalisé et du

matériel de récupération comme des boîtes de sardines ou de vieilles

batteries de radio représentaient les ustensiles de ménage. Alors les filles

font des youyous pendant que la jeune mariée et le jeune marié sont

amenés à la maison ou la cérémonie du henné est exécutée en utilisant de

la boue. Puis les enfants leur donnent la bise d'adieu et leur souhaitent

bonne chance. Ce jeu de mariage comporte aussi une dînette pour

laquelle les enfants recevaient parfois un peu d'huile et des légumes de

l'un ou l'autre adulte. Mhamed soulignait que ces légumes étaient

préparés mais pas mangés. La même chose se passait lorsque du thé était

préparé.

A Tataouine, situé sur la piste en direction du Jbel Ayachi à 11 km de

Midelt, et avec l'aide de Mohamed Hammioui, un instituteur local, j'ai

reçu en septembre 1999 huit poupées, quatre faites par des filles (fig. 90)

et quatre faites par une mère (fig. 91, p. 146). Avec pareille tislit ou

poupée-jeune mariée et parfois aussi avec un isli ou poupée-jeune marié

les filles jouent normalement au mariage dans des maisonnettes

délimitées par des pierres.

90

146

Avec pareille tislit ou poupée-jeune mariée et parfois aussi avec un isli

ou poupée-jeune marié les filles jouent normalement au mariage dans

des maisonnettes délimitées par des pierres. L'armature de ces poupées

se fait avec un roseau ou un os auquel un bâtonnet est attaché en forme

de croix. Certaines poupées ont des traits de visage éventuellement

incrusté dans le roseau au fer rouge. Les cheveux d'une de ces poupées

n'est autre que la barbe de l'épis de mais pour les autres un peu de

cheveux de fille furent utilisé. Une petite poupée est la copie de la

poupée telghenja utilisée pour implorer la pluie.

Dans le village Tabenatout à 4 km de Midelt sur la route vers

Tataouine j'ai vu comment les filles donnaient de très long cheveux à

leur tislit ou poupée-jeune mariée en novembre 1997. Afin de créer ces

cheveux très estimés et quatre fois la longueur de la poupée elle-même

les filles cherchent la partie supérieure d'un jeune roseau avec des

longues feuilles vertes. Avec ses ongles Imane Bâalil, la fille de treize

ans que l'on voit sur la photo, divise deux ou trois feuilles en fines

bandelettes (fig. 92, H = 16 cm, longueur des cheveux = 49 cm). Ces

bandelettes de feuille de roseau sont attachées en haut du roseau vertical

de l'armature de la poupée avec une autre bandelette de feuille ou avec

du fil. A environ 5 cm du haut de ce roseau une branchette et percée

horizontalement pour former les bras. Puis un ou plusieurs chiffons sont

91 92

147

mis au-dessus des bras et cintré au niveau de la taille par un ruban

servant de ceinture. Les traits de visage sont parfois dessinés sur le

roseau avec un feutre et les cheveux peuvent être tressés.

Une fille de huit ans vivant dans le village Zaïda situé le long de la

route de Meknès à Midelt et à 40 km de cette dernière ville, utilise en

septembre 1999 comme maison de poupée une maisonnette que je n‟ai

pas encore vue ailleurs au Maroc ou trouvée dans la bibliographie

concernée et qui me semble être une vraie nouveauté dans les campagnes

marocaines. Probablement à cause de l‟interdit de jouer dehors dans la

'saleté', cette fille a inventé une maison de poupée qui contourne les

objections de sa mère dont le mari est un instituteur. Il s'agit d'une

maison de poupées faite dans une boîte de carton. Cette fille a découpé

dans les quatre côtés de la boîte des fenêtres et une porte de telle manière

qu'elles peuvent s'ouvrir et se fermer (fig. 93). Les faces intérieures des

fenêtres et des portes sont garnies de rideaux et il y a aussi quelques

coussins cousus par la fille et des grands ou petits chiffons servant de

tapis et de couvertures.

93

148

Cette fille et une autre fille, qui est sa voisine et possède la même maison

de poupée, jouent souvent à la fête de mariage avec pareille maison de

poupée et un poupée-jeune mariée (fig. 94, H = 21 cm). La poupée-

jeune mariée est aussi particulière que la maison de poupée. C'est une

poupée importée en plastique du genre Barbie vendue dans les magasins

locaux mais ne servant normalement que comme objet de décoration

après que les grandes filles ou les femmes lui ont crocheté une robe

andalouse (fig. 95). Avec quelques chiffons ces filles confectionnent les

vêtements de leur poupée en plastique. Au centre d'un chiffon un trou est

fait pour pouvoir le mettre sur les épaules de la poupée après que sa tête

a été enlevée. Les côtés du vêtement sont alors cousus. Selon ces deux

filles un prénom n'est pas donnée à la poupée-jeune mariée. Il peut aussi

y avoir un jeune-marié représenté par une poupée Papa Noël comme

celle tenue en main par une fille de deux ans du village Ignern et que sa

mère a achetée au marché de Taliouine pour 5 dirham (0,5 Euro).

94 95

149

Quand j'ai photographié

cette fillette en novembre

1998 on m'a raconté que

le nom local de cette

poupée en plastique est

afkir ou vieil homme (fig.

96). Les cérémonies de

mariage le plus souvent

représentées sont le jour

de l'arrivée des vêtements

et des autres cadeaux à la

maison de la jeune

mariée et le jour où la

jeune mariée quitte sa

maison pour être

conduite à la maison de

son époux. Pendant leur

jeu de poupée ces filles

chantent et dansent

comme lors d'un vrai

mariage et un dîner

virtuel est dégusté bien

qu'il arrive que des noix

soient mangées. En jouant avec des poupées en plastique importées les

techniques traditionnelles de fabrication d'une poupée peuvent rester

utile. Regardant de près la poupée de la figure 94 (p. 148) j'ai remarqué

la manière originelle utilisée par la fille qui a remplacé les bras

manquant de sa poupée en plastique par un morceau de roseau selon la

manière utilisé pour faire les bras des poupées traditionnelles.

A Aït Slimane, un petit village près d'Amellago dans le Haut Atlas et à

environ 50 km au nord de Goulmima, j'ai trouvé en septembre 1999 un

groupe de cinq enfants de six ou sept ans en train de jouer dans leur

maison de poupée (fig. 97, p. 150). Deux filles ont accepté de se laisser

photographier avec leur tislit ou poupée-jeune mariée (fig. 98, p. 150).

Les enfants disaient qu'ils jouent toujours à la tamgra ou fête de mariage

pour laquelle un isli, la poupée-jeune marié, est aussi utillisé.

96

150

Là où à Goulmima, une petite ville amazighe des Aït Merghad sur la

route de Ouarzazate à Errachidia et à 58 km de cette dernière ville, la

poupée en plastique, la 'poupiya', semble avoir remplacée la poupée

locale à armature de roseau, la tislit, cela n'était pas le cas en 1980 ou

même en 1985. L'évolution fut graduelle comme dans la famille Lihi où

Aïcha jouait avec une tislit et Rachida, sa sœur cadette, avec une tislit

fabriquée par elle-même et avec une 'poupiya' que sa mère lui ait

donnée.

97

98

151

A Magaman, un village tout proche de Goulmima sur la route vers

Tadirhoust, des fillettes amazighes de la deuxième année de l'école

primaire confectionnent encore des poupées. Sur la figure 99 on voit ces

filles de sept ans avec leur poupée à la main. J'ai obtenu ces poupées et

les informations ci-dessous grâce à l'aide de l'instituteur de cette classe,

mon ami le poète Omar Taous de Goulmima, en novembre 1996.

Des huit poupées sept représentent une tislit ou jeune mariée et une

représente un isli ou jeune marié (fig. 100-101, p. 152-153, voir aussi

Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). L'armature en forme de croix est

pareille pour toutes les poupées. Quatre poupées ont une armature en

roseau, deux en branchettes, une en morceaux de bois, les bras étant

attachés aux corps par une bandelette de coton ou de plastique. Pour la

huitième poupée un morceau de tuyau en plastique rouge à été utilisé qui

est traversé par une branchette pour faire les bras. Aucune de ces

poupées ne porte de traits de visage. Elles sont assez rudimentairement

vêtues avec un ou maximum deux vêtements, des chiffons rectangulaires

au centre duquel un petit trou fut fait pour pouvoir passer la tête. Le

survêtement est blanc, blanc à motifs géométriques verts, rouge à lignes

noires, transparent noir, et multicolore.

99

152

La poupée avec corps en tuyau en plastique porte un survêtement

transparent avec motif floral doré et vert cintré à la taille avec une

ceinture de la même étoffe. Cette poupée porte un collier de perles vertes

en plastique. Les autres poupées ne portent aucun bijoux et ont, sauf une,

les vêtements cintrés à la taille par une bandelette de tissu. La poupée qui

fait exception quant au survêtement porte une longue bande d'étoffe

blanchâtre à motifs verts, plusieurs fois enroulée autour du corps en

dessous des bras. Bien qu'aucune poupée ne porte un foulard, les filles

disent que parfois elles en mettent un sur leur poupée. La poupée-jeune

marié ou isli est très sommairement habillée avec un chiffon transparent

mais normalement il devrait encore porter un survêtement. La hauteur

maximale des poupées est 18 cm et la hauteur minimale 13 cm.

100

153

Bien que ces poupées aient été apportées à la demande de leur

instituteur, les filles déclarent unanimement qu'elles jouent avec ces

poupées locales à la maison. Suite à ma question si elles ont aussi des

poupées en plastique, la réponse des filles est qu'elles préféreraient des

poupées en plastique si elles pouvaient en avoir. Mais quand un garçon

101

154

réagit en disant que la poupée locale est préférable parce qu'elle ne coûte

rien plusieurs filles changent d'avis. Ce revirement d'avis reflète

probablement la différence entre la réalité et les rêves de ces filles

villageoises.

Avec leurs poupées les filles jouent aux cérémonies de mariage. Pour

jouer à cela une fille déclare qu'elle fait la tislit et sa sœur l'isli. Une fois

que la poupée-jeune mariée et la poupée-jeune marié sont couchées sur

deux pierres plates les chants de circonstance commencent. Parfois les

filles jouent avec leurs poupées à la danse ahîdûs, la danse amazighe

typique, en utilisant un petit seau pour rythmer leurs chants et leur danse.

Toute la classe s'accorde pour dire que les garçons ne font pas de

poupées et les filles ajoutent que parfois une fille fait une poupée pour sa

petite sœur pour jouer ensemble en chantant.

Dans le petit village Ighrem-n-

Cherif, à proximité de Goulmima et

de l'autre côté de l'Oued Gheris, des

filles confectionnent aussi une

poupée-jeune mariée du même

genre. Hesna Midouan, une fille

amazighe non-scolarisée de six ans, à

fait en novembre 1994 la poupée

'tislit' de la figure 102. Cette poupée

de 21,5 cm de hauteur avec une

envergure des bras de 6,5 cm porte

sur une armature de roseau en forme

de croix un unique vêtement long de

cotonnade à fleurs multicolores

cintré par une bandelette du même

tissu. En haut du roseau un foulard

de la même étoffe coiffe la tête sans

traits de visage.

Bien au sud de Midelt, près de

Merzouga en bordure des dunes de

sable de l'Erg Chebbi, les filles

amazighes du petit village de Ksar

Hasni Biad offrent aux touristes des

poupées-femmes traditionnelles. 102

155

Ainsi une dizaine de filles m'ont proposé début février 1997 leurs

poupées. J'en ai acheté trois qui représentaient une certaine diversité à

dix dirhams (1 Euro) par poupée.

Les trois poupées ont une armature d'un roseau vertical assez gros

auquel a été ligaturé par-devant la moitié d'un roseau pour former les

bras. La première poupée faite par une fille d'environ cinq ans n'a que

des traits de visage très effacés avec yeux, sourcils, nez, bouche et

tatouages (fig. 103). La bouche est un trait droit. Les bras et le corps sont

enveloppés de trois morceaux d'étoffes donnant de l'ampleur à la poupée.

Au-dessus elle porte deux pièces de tissu rectangulaires, une de couleur

rose et l'autre bleue. Une bandelette jaune croisée devant les bras ainsi

qu'une ceinture de fils de laine orange serrent les vêtements. Un grand

foulard rouge tenu en place par un ruban rouge enveloppe le haut de la

tête. Un petit collier de perles plastiques blanches décore la poupée. Aux

deux extrémités de ce collier un ruban est noué et permet de porter la

poupée. Cette poupée mesure 23 cm de hauteur avec une envergure des

bras de 9,5 cm.

104 103

156

La deuxième poupée, achetée à une fille de sept ans, a des traits de

visage plus clairs mais en même temps sur un côté des traits effacés

comme si le roseau avait reçu un nouveau visage (fig. 104, p. 155). Au-

dessus des yeux et sourcils se trouve un tatouage en V retourné et les

joues portent deux points. La bouche en croissant est prolongée par une

ligne médiane avec trois points de chaque côté. Sur la tête se trouve un

large foulard rouge fixé par un ruban vert-gris. En dessous des bras un

morceau du même tissu que le ruban entoure plusieurs fois le roseau

pour donner du ventre à la poupée. Comme survêtement une cotonnade

blanche rectangulaire a été passée, par un trou au centre de l'étoffe, par-

dessus la tête. Un ruban vert-gris croisé sur la poitrine et deux fils verts

aux poignets tiennent les vêtements en place. Juste en dessous des bras

des paillettes sont cousues en forme d'ovale sur le vêtement blanc. Ce

vêtement blanc à l'intérieur mais déjà assez sale à l'extérieur ainsi que les

deux visages soutiennent l'information, donnée par un marchand de tapis

du même village, que les filles jouent avec leurs poupées avant de les

vendre à des touristes lorsque l'occasion se présente. La hauteur de cette

poupée est 22 cm et 9 cm pour l'envergure des bras.

La dernière poupée d'un aspect plus neuf est en même temps la plus

typique des trois poupées (fig. 105, p. 157). Elle appartenait à une fille

d'environ sept ans. Le visage se compose des yeux avec sourcils et deux

points pour le nez en noir, d'un trait droit pour la bouche et deux rondes

sur les joues en rouge. Sur le front se trouve un tatouage de quatre points

noirs en forme de losange. Tous ces traits sont faits avec une sorte de

goudron noir ou du vernis à ongles rouge. La coiffure, appelée ikherbèn,

consiste en deux grandes nattes faites d'un morceau de datte enveloppé

d'étoffe noire, le tout collé sur le côté du roseau. Un fil de laine rouge et

verte tient en place un grand foulard vert foncé. Un morceau de tissu

contourne plusieurs fois le roseau en dessous des bras de telle manière

qu'un ventre bien grand se profile (fig. 106, p. 157). Au-dessus, d'abord

un grand carré de tissu jaune plié en deux et puis un autre morceau

d'étoffe orange rectangulaire. Afin de pouvoir passer ces vêtements par-

dessus la tête de la poupée, une fissure est faite à l'endroit voulu. Deux

petites boules de tissus ont été glissées sous les vêtements pour figurer

les seins. Le tout est alors profilé par un ruban vert passé en croix par-

devant et en dessous des bras. C'est aussi la plus grande des trois

poupées avec ses 25 cm de hauteur, l'envergure des bras étant 11 cm.

157

En 2001 Luc Lauras a acheté une

quarantaine de poupées de jeunes

femmes nomades vivant dans

leurs tentes récemment plantées

près de la piste à Merzouga (fig.

107). L‟achat de ces poupées

faites pour les touristes mais

ressemblant les poupées faites par

les filles de Ksar Hasni Biad

cadrait dans l‟exposition du

Musée International des Arts

Modestes à Sète sur la côte

méditerranéenne (novembre 2001

– février 2002). Lorsque Luc

Lauras m‟a invité à participer à

l'exposition Modesties Exotiques,

j‟y ai exposé ma collection de 107

105 106

158

poupées des enfants amazighs de l‟Atlas et du Pré-Sahara marocains

(Rossie et Lauras, 2002, Vidéo). Comme le catalogue de cette exposition

ne fut pas imprimé j‟ai utilisé l‟article en question pour le numéro sur les

peuples amazighs de la revue interculturelle Passerelles (Rossie, 2002).

Dans le petit village amazigh d'Aït Ighemour, situé à 8 km du Jbel

Siroua à 2600 m d'altitude et à la fin d'une piste de 36 km partant du

village d'Anezal sur la route d'Amerzgane à Tazenakht dans la province

de Ouarzazate, j'ai pu obtenir en octobre 1992 une série de dix poupées

faites par des filles entre six et douze ans, ceci grâce à l'aide de Nour-

Eddine Ihbous un instituteur amazigh d'Essaouira qui y enseignait depuis

deux ans (fig. 108, 109 p. 159).

Pareilles poupées, qui sont déjà confectionnées par des filles de trois ans,

servent à jouer aux cérémonies de mariage, surtout celles qui devancent

l'entrée de la jeune mariée dans la maison de son époux. Pour cela les

filles sont assises derrière la tislit et chantent la chanson appropriée en

battant les mains.

L'armature de toutes ces poupées consiste en un roseau vertical auquel

on a fixé horizontalement une branchette avec une bandelette de tissu.

108

159

Cette armature porte trois à quatre vêtements que les filles mettent par-

dessus la tête de la poupée à travers une petite fissure au centre de

l'étoffe. Ces vêtements sont tenus en place par une ceinture d'étoffe. Le

tshamir ou survêtement est le plus

souvent un morceau de tissu à

dessins brillants. Une poupée porte

au-dessus du vêtement brillant

encore un autre de couleur blanche

mais par contre elle n'a pas de

foulard noir, signe distinctif des

femmes mariées et que portent les

autres poupées. Cette poupée

représente une jeune fille. La plupart

des poupées porte aussi le khèrraif,

un baudrier que la femme met sur

ses vêtements pour pouvoir attacher

les manches retroussées quand elle

travaille mais qui est aussi porté en

d'autres circonstances. Les baudriers des poupées sont faits avec des fils

de coton mais une poupée porte un baudrier en fil doré brillant ce qui

démontre qu'il s'agit d'un khèrraif de jour de fête lorsque les femmes

portent un baudrier brillant.

De sept des dix poupées l'on voit le roseau au niveau du visage mais

les traits de visage ne sont jamais dessinés. Un turban rouge, bleu ou

blanc coiffe la tête sans cheveux. Les poupées ne portent pas de bijoux et

selon les filles en question cela est toujours ainsi. La hauteur des poupées

varie entre 9,5 cm et 16 cm et l'envergure des bras entre 5,5 cm et 7 cm.

Dans ce même village où j'ai trouvé la poupée-homme à tête en

courgette faite par un garçon de dix ans (fig. 24, p. 76), un autre garçon

d'environ le même âge a fabriqué une poupée-femme d'environ 50 cm de

haut avec une grande pomme de terre comme tête et dont je n'ai

malheureusement pas pu faire une photo. Dans cette tête les yeux, le nez

et la bouche ont été incisés. Pour l'armature le garçon a introduit une

barre de fer, représentant les bras, dans le bâton vertical. Sur la tête se

trouve un mouchoir retenu en place par une bandelette ainsi qu'un

foulard rouge. Le survêtement rouge est cintré par une ceinture de la

même couleur et le khèrraif est fait avec des fils verts.

109

160

Ignern est un village amazigh d'environ soixante maisons situé à une

altitude de 1600 m et à 15 km du centre rural de Taliouine en venant de

Tazenakht. Une piste de 4 km partant de la route de Tazenakht à

Taroudannt y donne accès. Les filles de ce village confectionnent encore

en novembre 1996 des poupées tèslit ou jeune mariée. Pareille poupée-

jeune mariée faite par une jeune fille d'environ dix ans a une armature

composée d'un roseau vertical traversé horizontalement par une

branchette (fig. 110, voir aussi Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). A

travers une fissure trois vêtements ont été drapés sur cette armature : un

morceau de tricot à rayures variant du brun au beige, puis une pièce de

coton à rayures bleues et blanches et au-dessus un morceau de tricot

rouge qui ne vient qu'à la taille. Enfin un morceau de tissu blanc

transparent est replié sur la ceinture faite d'un fil de plastique rouge.

Cette poupée porte de jolis cheveux roux, faits avec la barbe d'un épis de

maïs, et tenus en place par un ruban de la même étoffe que le vêtement

de coton. Le morceau de roseau qui apparaît sous le ruban ne porte pas

de traits de visage. Cette poupée mesure 20 cm de haut avec une

envergure des bras de 12 cm.

110 111

161

Ennèya, une mère de trente-cinq ans, m'a fait cette poupée qui consiste

en un roseau dans lequel une branchette est introduite pour former les

bras (fig. 111, p. 160, voir aussi Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). Le

visage de la poupée - avec yeux, nez et bouche - est dessiné avec une

extraction d'herbes nommée èktran, une sorte de goudron utilisée pour la

préparation des peaux de moutons. Trois couches de vêtements, dont

deux de couleur blanchâtre et la troisième à fond rouge, sont mises au-

dessus de la tête à travers une fissure faite au centre de l'étoffe. Une

bandelette bleue à motifs blancs sert la taille. Le zîf, un grand foulard, est

tenu en place par un amelul, une bandelette d'étoffe rouge, et une

couverture blanchâtre enveloppe la poupée. Cette poupée mesure 16 cm

de haut et l'envergure des bras est 9,5 cm.

Selon Ennèya les garçons ne

font pas de poupée-jeune mariée

et ne participent pas directement

dans le jeu de poupée des filles.

Ce qui arrive c'est que les filles

vont acheter dans les petits

magasins que les garçons se

construisent avec des pierres tout

se dont elles ont besoin pour leur

jeu de poupée en payant avec des

cailloux.

A Ignern des poupées en

plastique côtoient maintenant les

poupées traditionnelles. Selon

une fille de huit ans, quelques

filles viennent avec leur poupée

de plastique à la maison d'une

d'elles pour coudre à la main un

pantalon et une longue blouse

pour cette poupée. La poupée de

ce genre, montrée à la figure 112,

mesure 43 cm de haut et

appartient à une fille de neuf ans.

112

162

Dans une autre région amazighe, au village de Tizal près d'El Khemis

situé à 60 km de Marrakech sur la route reliant cette ville à Ouarzazate,

les filles jouaient encore au début des années 1980 avec des poupées à

armature de roseau qu'elles habillaient en jeune mariée avec des

vêtements de dessus brillants. Il arrivait que la taslit soit faite avec un épi

de maïs à travers duquel la fille piquait un bâtonnet pour former les bras.

La barbe de maïs, oui ou non tressée, était utilisée comme cheveux pour

la poupée. Comme bijou la poupée portait un collier de perles. Un trou

dans le mur de la cour intérieure de la maison faisait office de maison de

poupée. Selon des informations, provenant d'une femme amazighe de

Tizal d'environ 50 ans, la poupée de roseau de sa jeunesse mesurait entre

10 et 15 cm et l'armature était faite en forme de croix. Vers 1950, son jeu

de poupée imitait la cérémonie du henné, en préparation du mariage,

ainsi que le mariage lui-même. Au moment de jouer à la cérémonie du

henné, les filles se réunissent autour de la poupée. Une des filles joue le

rôle de la mère de la fiancée et une autre prête sa voix à la poupée.

Quand la mère applique le henné sur les mains de sa fille, toutes les deux

'pleurent' pendant que les autres filles chantent en amazigh :

Au nom d'Allah, le Miséricordieux, le Compatissant,

Dieu nous nous soumettons à Vous, Soyez avec nous,

Dieu sera avec toi ma fille, et avec nous.

Plus tard on fête le mariage de la taslit et les filles chantent alors :

La taslit est comme la fleur d'amande de la région d'Ihîhî, quand la

fleur s'ouvre, elle attire les abeilles.

Le dr. Guichard parlant en 1921 des jouets de Marrakech dans la revue

France-Maroc (p. 162-163), décrit et montre une 'chapelle' et un 'trône'

en miniature servant pour le jeu de poupée. Assise dans une petite

chapelle ou 'ammaria' en bois découpés, la mariée reçoit le soir de ses

noces l'hommage des invités et de son fiancé. Celui-là a sa propre chaise

'chilia' où il s'assied “pour y être en butte aux plaisanteries et aux niches

des invités qui lui plaquent à tour de rôle avec un peu de salive des

pièces de monnaie sur la figure”.

163

Les deux dessins des figures 113 et 114 copient la chapelle jouet et la

chaise jouet comme ils figurent sur la photo publiée par Guichard. La

petite chapelle, aussi bien que le siège, sont peints de couleurs vives et

ornés d'arabesques multicolores. Ce sont les ouvriers en bois qui

fabriquent ces deux jouets. Les parents les achètent pour leurs petites

filles surtout lors des fêtes de l'°ashûra, le dixième jour de l'année

musulmane, et de l'aïd es-seghrir, la fête qui termine le jeun du mois de

ramadan. Aujourd'hui pareils attributs sont encore utilisés pour un vrai

mariage, mais toutes mes informatrices m'ont dit ne jamais avoir joué

avec cette chapelle et ce trône en miniature, et, selon elles, ceux-là ont

du être des jouets d'enfants de familles riches.

Au début des années 1940, les jeunes filles de cette ville se fabriquaient

des poupées avec une armature de deux roseaux assemblés en forme de

croix. Pour modeler une tête et un visage, elles utilisaient parfois le

levain. Les traits de visage y étaient appliqués avec des produits de

maquillage locaux. Cette °arûsa se mariait avec son °arîs, la poupée-

jeune marié, selon le cérémonial de l'époque.

Madame Skouri, directrice de l'école Kbour Chou Filles (Essmara) à

Marrakech, m'a offert l'°arûsa de la figure 115 (p. 164). Cette poupée-

jeune mariée fut faite en 1961 ou 1962 par une fille de cette école, née en

1954. Il s'agit d'une poupée de 24 cm de hauteur avec une armature faite

d'un roseau vertical entier, auquel a été fixé, en forme de croix, la moitié

113 114

164

d'un morceau de roseau de 10 cm environ. Pour donner du corps à la

poupée, le croisement des roseaux et une partie en dessous de ce

croisement ont été

enveloppés avec des

chiffons. Un morceau de

tissu rectangulaire de

couleur verte, qui pend à

l'arrière de l'armature et

se montre un petit peu au

col, est caché par un

caftan blanc, au-dessus

duquel une tunique a été

mise, une tunique ouverte

des deux côtés et faite

d'un chiffon de tissu très

brillant de couleur

argenté. Tous ces tissus

sont tenus en place par

une ceinture faite avec

une petite bande de tissu.

Une large mantille

transparente, à grands

motifs floraux jaunes et

fixée à l'aide d'une épingle, sert de vêtement de dessus. Cette poupée n'a

pas de visage, mais madame Skouri certifie que d'autres poupées en

avaient un.

Bien que des jeunes femmes du quartier de Daoudiyât et de Douar

Akioud croient que la poupée traditionnelle ne se fait plus, Youssef Aït

Ammou de l'Université de Marrakech, affirme que l'on peut encore, ici et

là, voir dans certains quartiers populaires de Marrakech des jeunes filles

qui jouent en 1992 avec une poupée-femme en roseau.

Néanmoins, l'évolution de la poupée traditionnelle, en armature de

roseau faite par la fille elle-même, vers la poupée importée, le plus

souvent en plastique (fig. 117, p. 166) qu'on pouvait début 1992 acheter

au souk pour environ trois dirhams (0,3 Euro), semble avoir commencée

il y a plusieurs dizaines d'années, probablement après la deuxième guerre

mondiale, tout au moins dans les grandes villes. Cette évolution pourrait

115

165

même déjà être commencée vers 1900 car j'ai trouvé dans l'article de F.

Castells “Note sur la fête de Achoura à Rabat”, publié en 1915 (p. 342)

le témoignage suivant :

Quelques boutiques assiégées par les enfants vendent des jouets

d'importation européenne : fusils, pelotes, poupées, tambours,

clairons, etc. Les objets les plus brillants sont ceux qui ont le plus de

succès. A côté de ces boutiques se tient, accroupi devant sa

marchandise, un vieux représentant de la tradition qui offre, sans

beaucoup de succès, d'humbles petits jouets de fabrication indigène.

En milieu plus ou moins aisé de Marrakech, par exemple dans la famille

de madame Skouri, la poupée traditionnelle n'était plus utilisée vers 1950

ni par elle-même ni par ses nièces ou copines. En plus, ses propres filles

jouaient, au début des années 1970, avec des grandes poupées-enfants

importées, auxquelles elles mettaient des vêtements de bambins ou bien

des vêtements qu'elles, ou leur mère, confectionnaient (fig. 116). Les

bijoux que portait la poupée étaient ceux que possédait la fille. Selon les

besoins du jeu, cette poupée, portant le nom de Sofia ou Yasmina, était

vêtue en bébé, en petite fille ou en jeune femme.

116

166

Dans les milieux populaires de Marrakech la poupée en armature de

roseau a du survivre plus longtemps, et n'aurait pas encore totalement

disparue. Dans le quartier pauvre de Douar Akioud la plupart des filles

jouaient encore avec cette poupée traditionnelle vers 1980. Pourtant,

Fatima Kader, une jeune femme de vingt et un ans du même quartier,

jouait alors déjà avec une poupée en plastique, qu'elle habillait et

maquillait de tout cœur. Fatima à bien voulu refaire une copie, aussi

exacte que possible, de cette poupée avec laquelle elle jouait quand elle

avait environ neuf ans. Avant de décrire cette poupée, il faut tirer

l'attention sur le fait qu'il s'agit d'une jeune femme qui avait dès son

jeune âge une disposition et une habilité marquées pour la décoration et

le maquillage. Cela est d'ailleurs prouvé par le fait qu'elle s'est

développée d'une petite fille créant des poupées remarquables à une

jeune femme excellent dans l'art d'appliquer des figures complexes avec

le henné sur les mains et les pieds.

La poupée en plastique produite en masse

à Hong Kong ou ailleurs (fig. 117) s'est

transformée sous mes yeux en une véritable

jeune mariée de Marrakech (fig. 118, p. 167).

Pour arriver à ce résultat, Fatima a d'abord

donné à cette poupée en plastique des seins

en introduisant deux petites boules d'étoffe

sous le vêtement qu'elle porte déjà. Puis du

même morceau de vieille robe, dont seront

faits la robe et le long voile, un slip est

cousu. Dans un morceau rectangulaire de

cette étoffe blanche plus ou moins

transparente, un trou est fait pour la tête et

deux autres petits trous pour les bras. Une

fois la robe mise en place, les côtés sont

cousus. Vient alors le moment de la pose de

la chevelure à base de laine de couleur naturelle foncée. Ces longs

cheveux sont fixés sur la tête avec de la colle, d'un tube de colle acheté

au magasin du coin, puis tressés en deux nattes au bout desquelles

Fatima a mis un élastique avec ornement en plastique, un élastique très

utilisé pour les cheveux des petites filles. Avec la même laine et la même

colle la poupée reçoit des sourcils et des mèches de cheveux sur le front.

117

167

Pour accentuer la bouche et les joues de la poupée une laque rouge est

utilisée, tout comme de l'eye-liner noir est utilisé pour marquer le

contour des yeux, les sourcils et les mèches sur le front. Cet eye-liner est

aussi employé pour appliquer les figures géométriques sur le menton et

au-dessus du nez et la tache de beauté sur la joue gauche. Les ongles des

mains et des pieds ont

été laqués en rouge.

Juste au-dessus des

mèches de cheveux se

trouve le kherîr, une

décoration en fils de

coton mercerisé rouge.

Cette décoration, qui

est aussi portée par les

jeunes mariées, se

caractérise par un

losange avec au milieu

du losange une tige

verticale en fils de

couleur dorée. Des

deux côtés de ce

losange pend un long

bout de fils tressés, fait

des mêmes fils de coton

mercerisé formant le

losange, et avec lequel

le losange est noué

autour de la tête. La

coiffe-voile, du même morceau de tissu que la robe, est tenue en place

avec un autre kherîr de couleur mauve. Deux ceintures de fils de coton

mercerisé tressés, une de couleur rouge et une de couleur verte et

blanche, contournent la taille. Le collier et les deux bracelets de la

poupée ont été faits à partir d'un collier d'enfant aux grosses perles vertes

et petites perles jaunes à traits verts. Comme dernier bijou Fatima a

introduit dans la tête de la poupée deux boucles d'oreilles, boucles

d'oreilles pour petite fille faites d'une pièce de métal jaune à laquelle sont

attachés trois petits pendentifs à perles vertes et oranges.

118

168

Les deux kherîr, les boucles d'oreilles, le collier d'enfant, les deux

élastiques à ornements, la laque et l'eye-liner utilisés pour embellir la

poupée, ont été achetés à la médina de Marrakech par Fatima et une amie

en vue de la confection de la poupée. Mais quand Fatima était petite, elle

utilisait pour cela ces propres bijoux ou ceux qu'elle arrivait à emprunter

à sa grand-mère, mère ou autre parente, ainsi que leurs produits de

maquillage.

Pour jouer au mariage de la poupée-jeune mariée - mais sans qu'il y ait

une poupée-jeune marié ou un petit garçon qui la remplace - les filles de

Douar Akioud, de la génération

de Fatima, se rassemblent en

petits groupes de quatre à six

filles, entre cinq et dix ans, et

s'en vont aux jardins potagers à

quelque distance des maisons.

Là une maison de poupée est

construite avec des petits murs

de cailloux couverts de sable

humide et la poupée est mise

dans un des coins de cette

maison (fig.119, copie du

dessin fait par Fatima).

Actuellement ce genre de maison de poupée se bâtit encore. Une fois que

tout est mis en place, les filles chantent et dansent comme il se fait pour

un mariage. Quand le mariage de l'°arûsa est terminé, les filles se

donnent la bise et retournent chez elles.

Une photo d'une maisonnette plus ou moins carrée, délimitée par des

pierres de différentes dimensions avec deux petites ouvertures pour une

porte d'entrée et une porte à l'arrière et dans l'espace ainsi marqué un

assortiment de boîtes vides et deux morceaux de tissus rectangulaires

représentant l'ameublement et les ustensiles, se trouve dans le livre

Enfants du Maghreb entre hier et aujourd'hui de Mohamed Sijelmassi

(1984: 94).

Dans le quartier Daoudiyât de Marrakech et selon les informations

limitées recueillies sur place, les filles, qui avaient entre 6 et 12 ans dans

les années 1970, jouaient-elles aussi au mariage. Cependant c'était des

enfants qui jouaient le rôle de la fiancée et du fiancé, non pas des

poupée

119

169

poupées. Le même genre de poupées en plastique que celui de Douar

Akioud, vêtues et maquillées par les filles, servait de bébé ou de petit

enfant que l'on porte dans le dos, qu'on nourrit ou qu'on dorlote. Pour

cette poupée une maison de poupée d'un autre type était construite. Trois

rangées de boîtes de sardines assez grandes, sont placées en trois étages

contre un mur formant ainsi les pièces d'une maison citadine. Une autre

boîte posée au sol sert de lit de poupée. Une petite boîte de conserve

ronde représente le plat de nourriture ou la cuve de lessive.

Une étudiante du Département de Français de l'Université Cadi Ayyad

de Marrakech déclare en novembre 1993 qu'elle jouait au mariage à

Ouarzazate ville vers 1980 et cela aussi bien avec des poupées de roseau

confectionnées par elle-même, comme le faisaient les filles plus âgées,

qu'avec des poupées d'origine européenne tout habillée. Cependant, la

poupée de roseau ne se trouve plus en début 1990 dans la ville mais

seulement encore dans les villages. Ces poupées servent aussi au jeu de

maman et bébé, la fille étant la maman.

Dans la petite ville d'Imi-n-Tanoute sur la route reliant Marrakech à

Agadir, les filles amazighes habillaient, vers 1992 encore, l'armature de

roseau pour leur servir de taslit. Là-bas, l'armature d'une poupée-jeune

mariée était faite de la manière suivante : un morceau de roseau

d'environ 15 cm est coupé en deux dans le sens de la longueur et sur une

des deux moitiés on ligature l'autre moitié, réduite à environ 8 cm, en

prenant soin que la partie concave du roseau vertical se présente de face.

En entourant le croisement et une partie en dessous avec des chiffons, de

l'ampleur est donnée à son corps. Des crottes de lapin sont souvent

introduites sous le tissu pour former les seins. Les cheveux, de la laine de

mouton, éventuellement teinte au henné, se fixent avec du chewing-gum

ou un petit ruban. Plusieurs morceaux rectangulaires de tissu, au milieu

duquel un trou est fait pour faire passer la tête de la poupée et non

cousue sur les côtés, se superposent sur son corps. Ils représentent deux

sous-vêtements ainsi que la traditionnelle longue et large jupe amazighe.

Les vêtements de dessous sont de couleur uniforme et elles sont tenues

en place avec une cordelière d'élastique se croisant sur la poitrine, tout

comme le font encore les femmes amazighes d'un certain âge déjà. Les

vêtements de dessus doivent se faire avec des chiffons brillants à motifs

surimprimés de couleur dorée ou argentée. Une bande de tissu imite la

grande cape de laine que les femmes se mettent par-dessus les épaules.

170

Finalement, une ceinture de tissu sert la taille et un foulard est noué

autour de la tête. Un petit collier de perles et éventuellement une broche

sont mis à la poupée en guise de bijoux.

En ce qui concerne le visage de la poupée, les informations recueillies

sur place sont plus ou moins ambiguës. En fin de compte, il semble que

chaque fille décide elle-même si elle fait un visage à sa poupée ou non.

Quand un visage, avec sourcils, yeux, nez et bouche, est indiqué cela se

fait, dans la seconde moitié des années 1970, avec un stylo. Une mère de

famille d'Imi-n-Tanoute, qui jouait à la poupée vers 1950, affirme que

dans son temps le visage fut dessiné avec du charbon de bois.

Mélika Bamoussa de Imi-n-Tanoute, une jeune mère de 21 ans en

1992, épouse de Smaïl Khettou et parlant l'amazigh avec son mari, à bien

voulu refaire la taslit de son enfance (fig. 120).

120 121

171

Cette poupée-jeune mariée se conforme de tout point de vue à la

description ci-dessus, sauf qu'elle mesure 25 cm de haut avec une

envergure des bras de 12,5 cm. Les cheveux sont en laine blanche tressée

en une très longe natte, tenus en place avec du chewing-gum (fig. 121, p.

170). Les robes de dessous sont de couleur kaki et blanche, celles du

dessus en tissu transparent avec surimpression de motifs floraux et

géométriques ou le blanc, le noir, le mauve et le vert s'alternent mais où

les contours sont marqués de lignes de couleur dorée. Comme cape de

laine figure un chiffon rouge transparent drapé sur les épaules et fixé à

l'avant par une épingle de sécurité à laquelle pend une grande perle

blanche. La taille est cintrée par une bande de tissu blanche avec au-

dessus une ceinture en torsade, faite de trois fils de fer plastifiés autour

desquels des ficelles dorées, utilisées pour faire des emballages cadeaux,

sont enveloppés. Une broche, une grande fleur à pétales dorées, est fixée

sur la poitrine et un mouchoir de tête rouge/mauve achève la parure de

cette taslit au visage dessiné au stylo.

En rapport avec les chiffons utilisés pour faire les vêtements de la

poupée, il est à remarquer qu'on les récupérait dans les poubelles des

tailleurs, ce qui est devenu impossible maintenant car ces chiffons sont

utilisés pour faire des tapis. Dans cette recherche de chiffons chez les

tailleurs, chiffons brillants surtout, les petits frères étaient parfois mis à

contribution, comme se rappelle très bien Smaïl Khettou.

Les filles ne donnent pas de prénom à leur taslit car cela la rabaisserait

au rang des jeunes filles, elle qui représente la jeune mariée.

Mélika, et les filles de sa génération, jouaient entre autres au mariage

de leur poupée-jeune mariée, mais sans qu'une poupée-jeune marié soit

faite. Ce jeu de poupée était

surtout populaire en été, la

période des mariages après

les récoltes. Avec des pierres

les murs d'une maison de

poupée sont construits sur un

schéma assez uniforme mais

à l'intérieur duquel la

grandeur et l'alignement des

pièces varient (fig. 122,

copie du dessin de Zohra

122 122

172

Bamoussa, 19 ans en 1992). Cette maison de poupée comporte la cour

intérieure, la chambre des invités, dans laquelle des chiffons et une petite

boîte remplacent les coussins et la table, la chambre à coucher de la

taslit, avec son lit de grande boîte à sardines et de chiffons, et la cuisine,

avec ustensiles de cuisine d'imitation.

Le jeu de poupée se pratiquait parfois dans la cour de la maison ou

mieux encore sur la terrasse aménagée sur le toit de la maison.

Cependant la maison n'était pas le meilleur lieu pour ce genre de jeux car

les parents n'y étaient pas toujours favorables en argumentant qu'une

petite fille ne doit pas tellement s'occuper des choses en rapport avec la

sexualité et les relations hommes-femmes. Pour contrecarrer ces

objections, Mélika et ses cousines allaient jouer à la poupée chez leur

grand-mère lorsque leurs mères se retrouvaient dans la maison d'une

d'elles. Avant de retourner à la maison, ces filles cachaient tout leur

matériel pour jouer à la poupée.

En 1992 et dans ce même milieu d'Imi-n-Tanoute, où les petites filles

confectionnaient encore la taslit traditionnelle il y a dix ans, et où leurs

frères ou maris sont entre-temps devenus professeur de lycée ou

travaillent à un niveau semblable, Mélika et Smaïl me montraient avec

une certaine fierté les nounours et les poupées à la Française de leur

toute petite fille, reçus en cadeau de l'un ou l'autre membre de la famille

vivant en France.

En milieu arabo-berbère et vers 1945, des fillettes Oulad Yahya des

environs de Taroudannt avaient l'habitude de se fabriquer une °arûsa,

ainsi qu'un °arîs habillé en homme, avec deux morceaux de roseaux

entiers assemblés en forme de croix. L'os de mouton n'aurait pas été

utilisé. La hauteur de ces poupées fut de 50 cm environ et l'envergure des

bras d'à peu près 40 cm. De la laine s'utilisait pour les cheveux de la

poupée-jeune mariée, mais la barbe de maïs pouvait aussi bien faire

l'affaire. Son visage, avec sourcils, yeux, nez et bouche, se dessinait sur

le roseau avec du charbon de bois. Au moins un collier embellissait cette

poupée. Ainsi elle ressemblait avec perfection à une vraie fiancée le jour

de son mariage. Le jeu de poupée préféré fut celui du mariage de la

°arûsa avec son °arîs, et pour ce jeune ménage une maison de poupée,

aux murs en cailloux couverts de sable humide, était érigée.

173

Si certains parents Oulad Yahya acceptaient que leurs petites filles

rentraient à la maison avec leur poupée, d'autres le refusaient, parce que

selon eux les filles doivent s'occuper de choses plus sérieuses.

Vers 1992, les filles Oulad

Yahya de Taroudannt ne

jouent (presque) plus avec la

poupée en roseau. Elles

reçoivent une poupée en

plastique, du genre Barbie,

pour laquelle la fille elle-

même, ou sa mère,

confectionne des vêtements.

Ou bien, comme c'est le cas

fin 1996, on achète une petite

poupée made in China tout

habillée pour dix dirhams (1

Euro) (fig. 123). Selon le

propriétaire du petit magasin

de jouet dans la médina de

Taroudannt, les filles aiment

aussi beaucoup la petite

poupée-bébé avec son

biberon.

Contrairement à ce remplacement de la poupée en roseau par une

poupée en plastique, les filles arabophones d'aujourd'hui du centre rural

de Hmar, à environ 15 km de Taroudannt, jouent toujours avec la poupée

traditionnelle. Selon Latifa, la fille d'environ onze ans qui m'a transmis

ces informations dans la maison d'Abdellatif Aït Hedda en février 1992,

on utilise pour la partie verticale de l'armature de cette

poupée une tige creuse robuste de la plante bûsûsû que

l'on laisse d'abord sécher. La fille choisit une tige avec

une bifurcation, bifurcation qui servira de jambes. Pour

les bras un morceau de roseau, coupé en deux, est

ligaturé en forme de croix sur la tige (fig. 124). Ensuite

on enveloppe l'armature de chiffons pour donner de l'ampleur au corps

de la poupée. Les cheveux sont faits ou bien avec ceux de la fille elle-

même ou bien avec de la laine et on les fixe dans le creux de la tige à

123

124

174

l'aide d'une épine. Ces cheveux doivent être très bien peignés et, selon sa

propre volonté, la fille les tresses ou les laisse pendre. Avec un objet

pointu on fait deux petits trous dans la tige sèche pour marquer les yeux,

et une autre ouverture pour le nez et la bouche. Les yeux, le nez et la

bouche sont par après marqués avec du charbon de bois. La fille fait en

plus des vêtements de femme, pour sa poupée-jeune mariée, ou

d'homme, pour sa poupée-jeune marié, ceci avec des chiffons de

vêtements usés. Comme bijou la °arûsa reçoit un collier de coquillages

d'escargots de grandeur et de couleur variées.

Les filles jouent surtout pour fêter le mariage de leurs poupées. Pour

cela elles bâtissent, elles aussi, une maison de poupée délimitée par des

pierres. Dans un coin de cette maisonnette on place, sur le sol légèrement

relevé, la poupée-jeune mariée. Les filles de Hmar jouent à la poupée

lorsqu'elles ont l'âge de garder les moutons, c'est-à-dire à partir de cinq

ans jusqu'à dix ou douze ans, et ceci à n'importe quel moment de l'année.

Le soir, les bergères rentrent à la maison avec leur poupée dans le dos.

Cependant elles n'amènent pas la poupée dans le foyer. Elle est cachée

dans les environs et ressortit quand les bergères retournent avec les

moutons aux pâturages. Les jeux de poupées se terminent en tout cas

lorsque la fille doit aider dans le ménage. A ce moment elle donne sa

°arûsa unique, qu'elle a entourée de beaucoup de sollicitude et de

tendresse, à une sœur ou une cousine plus jeune. Latifa affirme que les

poupées en plastique, du genre Barbie et vêtue en Andalouse ou

autrement par les femmes, ne servent dans son village que comme

poupée de décoration (fig. 95, p. 148).

Lors d‟une troisième visite chez Abdellatif Aït Hedda en novembre

1998 il m‟a donné deux poupées créées par des filles et apportées par la

mère de Latifa du village Hmar. La première poupée est faite avec un

morceau de la plante bûsûsû. Une enflure de la tige sert de tête, une tête

sans cheveux, ni traits de visage ou foulard (fig. 125, p. 175, H = 17 cm,

envergure des bras = 11 cm). Cette poupée est habillée de quatre chiffons

entourés autour de la tige en dessous des bras et servant de sous-

vêtements. Le sous-vêtement supérieur est un morceau de gaze blanche.

Le survêtement est un morceau de tissu avec des motifs de couleur

rouge, verte et argentée serré autour de la taille par une ceinture du

même tissu.

175

La deuxième poupée est remarquable car elle propose une des très rares

poupées figurant une mère portant un bébé dans le dos. L‟armature est

faite d‟un morceau de roseau auquel un bâtonnet est ligaturé en forme de

croix (fig. 126, p. 176, H = 21 cm, envergure des bras = 8 cm). La

poupée-mère est vêtue d‟un sous-vêtement et d‟un survêtement en gaze

mauve décorée de fleurs dorées. La poupée-bébé est tenue en place par

un chiffon. Du cheveu de cheval a été utilisé pour les cheveux de la mère

et du bébé. Ces cheveux sont fixés en poussant une extrémité de la

chevelure, enroulée d‟un chiffon, dans le creux du roseau. Un chiffon

noir à motifs géométriques blancs sert de foulard. La fille a donné des

seins à la mère en poussant deux petites boules de tissu sous les

vêtements. Cette poupée-mère a comme traits de visage un petite trou

colorié en rouge pour la bouche et des yeux indiqués par deux petits

trous coloriés en noir. Les sourcils sont indiqués par deux lignes obliques

noires mais le nez manque.

125

176

L‟armature, les cheveux et les yeux de la poupée-bébé sont identique à

ceux de la poupée-mère mais le nez et la bouche ne sont pas indiqués

(fig. 126, H = 9,5 cm, envergure des bras = 5,5 cm). Des chiffons blancs

ont été utilisés pour le sous-vêtement et le survêtement du bébé. Cette

poupée-mère à bébé est complétée par un petit sac fait d‟un morceau de

tissu et contenant quelques chiffons figurant les vêtements et les produits

de soin du bébé.

126

177

Les exemples suivants de poupées et jeux de poupées liés à la mise en

scène des cérémonies de mariage viennent de quelques villages de

l‟Anti-Atlas dans la région de Sidi Ifni et de cette ville côtière du sud-

marocain elle-même.

Avec l‟aide de Said Bari, un instituteur de l‟école primaire d‟Imou

Ergen située à environ 10 km de Sidi Ifni, j‟ai reçu en novembre 1998

une série de onze poupées, neuf poupées créées par des filles de dix à

quatorze ans et deux poupées créées par un garçon de douze ans et un

garçon de treize ans (fig. 127). De ces onze poupées dix représentent la

tislit ou la jeune mariée et une l‟isli ou le jeune marié. Les garçons aussi

bien que les filles jouent avec ces poupées à mettre en scène la tamgra

ou la fête de mariage dans des maisonnettes délimitées par des pierres.

Les enfants ont spécifié que les garçons jouent aux poupées quand ils

gardent les animaux dans la montagne et séparément des filles.

127

178

La poupée la plus petite représentant le jeune marié est moins élaborée

que les poupées-jeunes mariées car elle n‟a

ni cheveux ni traits de visage (fig. 128, H =

6,5 cm, envergure des bras = 2,5 cm). Elle

ne porte qu‟un seul sous-vêtement découpé

dans une feuille de cahier d‟exercice et un

survêtement pour lequel l‟emballage orange

transparent d‟un bonbon a été utilisé. Ce

survêtement est cintré par une bandelette

d‟un sac de plastique noir. L‟armature se

compose de la moitié d‟un roseau auquel un

bâtonnet est attaché en forme de croix, le

côté bombé du roseau servant pour le

devant de la poupée.

Un morceau de roseau sert comme armature verticale des dix poupées-

jeunes mariées (fig. 129-138, p. 178-180). Dans neuf cas un bâtonnet a

été poussé à travers le roseau pour former les bras. Sauf une poupée,

elles ont des traits de visage avec yeux, sourcils, bouche et

éventuellement un nez dessinés sur le roseau avec un stylo noir, bleu ou

rouge. Deux poupées présentent une bouche souriante, les sept autres

ayant une ligne droite comme bouche.

128

129 130 131

179

Les traits de visage de trois poupées sont peu visibles. Les cheveux de

huit poupées-jeunes mariées sont des cheveux de chèvre. Les cheveux

d‟une fille servent pour la chevelure d‟une poupée mais des fils de coton

ou de laine peuvent aussi s‟utiliser. Une extrémité des cheveux est

poussée dans le creux du roseau et la chevelure est tenue en place par un

ruban. Les sous-vêtements consistent le plus souvent de deux chiffons.

Une poupée porte trois sous-vêtements, une autre un sous-vêtement et

une troisième n‟a pas de sous-

vêtement. Au centre des chiffons

une déchirure est faite pour passer la

tête. Le survêtement de huit poupées

est un morceau de tissu à motifs. Ils

sont cintrés à la taille avec une

bandelette de tissu mais une fois il

s‟agit de fils de coton. Une fille a

choisit comme survêtement de sa

poupée un morceau de plastique

rouge transparent découpé d‟un sac

de plastique (fig. 135). Cela est

aussi la poupée pour laquelle la fille

a utilisé comme chevelure un peu de

ses propres cheveux.

135

132 133 134

180

Les vêtements des poupées sont complétés par un grand foulard, une

fois même deux foulards, mais il arrive aussi qu‟une partie du

survêtement soit utilisée comme foulard. La hauteur de ces poupées varie

entre 7,5 cm et 20 cm et l‟envergure des bras entre 2,3 cm et 5 cm.

La poupée la plus grande n‟a pas de traits de visage ni de cheveux

mais une bandelette de tissu sert de foulard, un foulard qui entoure le

haut du roseau où il est tenu en place par un morceau de ruban adhésif

(fig. 136, H = 20 cm, envergure des bras = 4,5 cm). Un grand chiffon

contournant plusieurs fois le roseau forme le sous-vêtement tandis que le

survêtement est drapé sur les bras et le corps de la poupée et est cintré

par une bandelette de tissu. Le morceau de roseau servant de bras ne

traverse pas le roseau mais une fente fut faite dans le haut du roseau

vertical pour pouvoir mettre les bras à leur place.

Une des deux poupées les plus petites se singularise par les deux sous-

vêtements pour lesquels la fille a utilisé des emballages de bonbon (fig.

137, H = 7,5 cm, envergure des bras = 2,3 cm). Son survêtement est un

morceau de gaze verte cintré par un petit ruban, le même genre de gaze

étant utilisé pour le foulard. La deuxième poupée la plus petite n‟a qu‟un

vêtement, un morceau de tissu à fond blanc qui est cintré à la taille par

une bandelette rouge (fig. 129, p. 178, H = 7,5 cm, envergure des bras =

3 cm). Les cheveux noirs de ces deux poupées proviennent de cheveux

de chèvre et elles ont des traits de visage sans indication du nez.

136 137 138

181

A Ergoub, situé à 9 km de Sidi Ifni à la fin du goudron et avant Imou

Ergen, la jeune mariée Aïcha qui venait d‟épouser Mohamed ou

Hamouche expliquait en novembre 1998 que là les filles ne font plus de

poupées traditionnelles depuis environ dix ans mais utilisent des poupées

en plastique. Elle ajoutait qu‟aujourd‟hui les filles d‟Ergoub voient la

poupée faite par une fille elle-même comme de la „saleté‟.

Il arrive qu‟une poupée soit si représentative du milieu d‟où elle

provient qu‟il est possible de définir ce lieu à première vue. Cela est le

cas d‟une poupée créée par une fille de l‟école primaire de Imou Ergen

en novembre 1998, une fille venant de la région de Tafraoute dans

l‟Anti-Atlas. L‟armature de cette poupée se limite à un roseau vertical

(fig. 139). Le haut de ce roseau est entouré d‟un chiffon blanc fixé avec

un fil de coton. Sur ce support blanc des yeux ronds, des sourcils et un

nez sont dessinés en noir tandis que la bouche est rouge. Une pièce de

tissu bleu foncé est drapée sur la tête et le corps de la poupée. Au niveau

du menton les deux côtés de ce vêtement sont cousus ensemble avec du

fil blanc. Un deuxième morceau du même tissu enveloppe la partie

inférieure de la poupée. Il est cintré par un fil au-dessus duquel la partie

supérieure de ce tissu est repliée vers l‟avant.

139 140

182

Comme j‟ai pu le constater en visitant la petite ville de Tafraoute à la

fin de la même année, les vêtements de cette poupée ressemblent à ceux

portés par les femmes de cet endroit.

En février 2002 une des filles du village Lahfart qui ont créé la série

suivante de poupées a aussi fait une poupée qui ressemble aux femmes

de Tafraoute (fig. 140, p. 181, H = 18 cm). L‟armature de cette poupée

est un cône utilisé pour y enrouler du fil de coton mercerisé et elle n‟a

pas de bras. Les traits de visages ressemblent ceux de la poupée

précédente mais le nez est un V rouge. Elle est habillée d‟un morceau de

tissu noir drapé autour du cône et cachant la bouche. Un très grand

foulard noir du même tissu couvre la tête et tout le corps. A l‟avant de la

poupée ce foulard est cousu ensemble en un point.

Lorsque je me suis installé dans la petite ville côtière Sidi Ifni au Sud

du Maroc début 2002, l‟instituteur et co-fondateur de l‟Association Isni

pour la Culture et l‟Art, Boubaker Daoumani, m‟a contacté après avoir

vu mon livre sur les

poupées et jeux de poupées

des enfants sahariens et

nord-africains de 1993 que

je venais d‟offrir à son

collègue Said Bari.

Boubaker Daoumani

enseigne dans la première

et la deuxième classe de

l‟école primaire de Lahfart,

un petit village caché dans

les pentes côtières de

l‟Anti-Atlas. Pour arriver à

ce village on doit monter

une piste pendant une

vingtaine de minutes, une

piste qui débute de la route

de Tiznit à Sidi Ifni et à

environ 9 km avant cette

dernière ville. En février

2002 et avec l‟aide de ses

collègues cet instituteur a 141

183

collectionné plusieurs poupées et quelques animaux-jouets créés par les

élèves.

Plusieurs filles d‟environ dix ans ont créé douze tislit ou jeunes

mariées. Une de ces filles a fait trois poupées qui se ressemblent (fig.

141, p. 182, H = ± 25 cm, envergure des bras = ± 8 cm). L‟armature est

un morceau de roseau transpercé par un bâtonnet de roseau. La fille a

légèrement incrusté les trait de visage puis les a dessinés au stylo noir.

Les longs cheveux sont de la laine tressée et ils pendent le long du dos

où ils se fixent dans la ceinture. Pour fixer la chevelure en haut du roseau

la fille a poussé une extrémité dans une petite fissure. Le sous-vêtement

est un chiffon dont les côtés restent ouverts. La fille a donné à ses trois

poupées un survêtement et un foulard provenant du même tissu jaune

avec des motifs floraux brillants en vert, rose et blanc. A l‟arrière de la

poupée les bords du survêtement son cousus ensemble. Le grand foulard

couvre la tête et les épaules, il se croise par-devant et se fixe dans la

ceinture pour laquelle un élastique est utilisé.

Une petite poupée avec le même type d‟armature montre sur le roseau

des traits de visage effacé (fig. 142 côté droit, H = 12 cm, envergure des

bras = 5,5 cm). Elle porte deux vêtements multicolores mis au-dessus de

la tête par une déchirure et drapés au-dessus des bras. Sous les bras un fil

blanc cintre ces vêtements. Un morceau de gaze blanche sert de grand

foulard qui couvre la tête et tout le corps. Il est cintré par un fil mauve.

142

184

Sous les bras un fil blanc cintre ces vêtements. Un morceau de gaze

blanche sert de grand foulard qui couvre la tête et tout le corps. Il est

cintré par un fil mauve. Pour les sous-vêtements de cette poupée et la

poupée suivante les filles ont utilisé du tissu à motifs brillants, un genre

de tissu normalement utilisé pour les survêtements. Les cheveux de la

fille ont servi pour donner une chevelure à la poupée. Une extrémité des

cheveux est entourée d‟un chiffon puis poussée dans le creux en haut du

roseau où elle est tenue en place en y enfonçant un caillou de mesure

adéquate. Sauf les trois poupées faites par la même fille, les poupées-

jeunes mariées des filles de Lahfart portent un survêtement sans motifs

brillants.

L‟autre petite poupée à sous-vêtement brillant est particulière pour

deux raisons encore (fig. 142 côté gauche, p. 183, H = 10,5 cm,

envergure des bras = 4 cm). La partie verticale de l‟armature n‟est pas un

roseau mais un tube en carton autour duquel des fils de coton mercerisés

étaient enroulés. Pour donner des bras à la poupée un bâtonnet de roseau

fut percé à travers le tube. En haut du tube la fille a enlevé la couche

supérieure du carton, puis elle a blanchit cet endroit avec du vernis à

ongles et dessiné avec un stylo bleu des yeux ovales à pupille, des

sourcils, un nez et une bouche souriante. Une extrémité des cheveux est

enfoncée dans le creux du roseau et la chevelure est tenue en place avec

un ruban rougeâtre. Deux robes multicolores enveloppent le tube en

carton et elles sont fixées en dessous des bras par un ruban. La robe

supérieure a des motifs brillants. Un grand foulard rose couvre la tête et

les bras de cette poupée, un foulard tenue en place par le survêtement

vert à motifs floraux noirs. Ce survêtement est mis au-dessus de la tête

par une déchirure et les bords du tissu ont été cousus ensemble sous les

bras.

De six poupées-jeunes mariées les filles ont découpé la partie

inférieure du roseau vertical de telle manière à donner des jambes à leur

poupée, une manière de donner des jambes à une poupée que je n‟ai que

très rarement vue jusqu‟à présent.

185

Chez cinq poupées les jambes se

cachent sous leurs vêtements mais

elles restent visible chez une

poupée (fig. 143, H = 20 cm,

envergure des bras = 5 cm).

Les yeux et les sourcils sont des

traits droits dessinés avec un stylo

bleu. Une ligne rouge droite figure

la bouche.

Un chiffon multicolore sert de

sous-vêtement. Le survêtement,

avec une déchirure centrale pour

passer la tête, se drape au-dessus

des bras et les bords sont cousus

ensemble comme cela a été fait

pour quelques autres poupées.

Un foulard du même tissu que

celui du survêtement couvre les

cheveux qui sont des bandelettes

de plastique noir. Cette chevelure

est fixée dans le creux du roseau

avec une petite pierre. Un grand

foulard en gaze blanche couvre la

tête et tout le corps et il est cousu

en un point par-devant de la

poupée.

Pour les cheveux de deux poupées la fille a utilisé un peu de ses

propres cheveux, une chevelure fixée dans le creux du roseau avec une

petite pierre (fig. 144, p. 187, H = 16/19 cm, envergure des bras = 5/6

cm). Leurs traits de visage sont les mêmes mais une poupée a aussi un

nez rouge. Deux chiffons multicolores entourent ces poupées et

représentent les sous-vêtements. La poupée au nez rouge porte encore un

sous-vêtement découpé dans un sac de plastique transparent vert. Une

grande robe en gaze blanche tenue en place par un élastique sur lequel

elle est repliée par-devant figure le survêtement.

143

186

Les deux poupées portent un petit foulard qui tient la chevelure en

place ainsi qu‟un large foulard qui entoure la poupée totalement. La

poupée la plus petite porte aussi une ceinture de fils de coton blanc.

Deux autres poupées de la série de poupées aux jambes découpées

montrent les mêmes traits de visage dessinés avec un stylo bleu et rouge.

Ces deux poupées n‟ont pas de long cheveux mais des lignes courtes

dessiné sur le front avec un stylo bleu indiquent la chevelure (fig. 145, p.

187, H = 12 cm, envergure des bras = 6 cm). Comme d‟habitude deux

sous-vêtements, un survêtement et

un large foulard cintré par un ruban

forment les habits.

La dernière poupée de cette série

manque aussi la chevelure mais les

traits de visage sont différents avec

des yeux ronds à pupille, des

sourcils, un nez rond et une grande

bouche souriante tous dessinés au

stylo bleu (fig. 146, H = 12 cm,

envergure des bras = 7,5 cm). Cette

poupée porte trois sous-vêtements

multicolores, un survêtement à

motifs végétaux ainsi qu‟un grand

foulard à étoiles et points qui couvre

la tête, les bras et tout le corps.

La plus petite des douze poupées-jeunes

mariées de Lahfart présente une création

assez particulière (fig. 147, H = 10,5 cm,

envergure des bras = 4 cm). Son armature est

faite d‟un court morceau de roseau

transpercé par un bâtonnet pour former les

bras. Les traits de visage sont peu visibles,

deux lignes droites faites avec un stylo bleu

pour les yeux et une ligne droite rouge pour

la bouche. Dans un morceau d‟emballage

aluminium d‟un biscuit un trou est fait pour

passer la tête de la poupée et ce survêtement

pend au-dessus des bras. Une extrémité de la

146

147

187

chevelure est poussée dans le creux du roseau et un ruban noir tient cette

chevelure en place sur le front. Un élastique décoré de petites perles

bleues et blanches, comme l‟élastique que l‟on met dans les cheveux des

fillettes, orne le front. Trois tresses de cheveux pendent le long du corps,

deux à l‟avant et une à l‟arrière de la poupée. Un autre élastique à perles

forme la ceinture qui cintre à la taille le survêtement et les tresses.

144

145

188

Une poupée créée par Mina, une élève de treize ans de la classe de

Said Bari qui enseignait dans l‟école primaire de Lahfart en février 2002,

a une armature que je n‟avais pas encore vue. Cette armature a été

découpée dans un morceau d‟Isomo protégeant un appareil électronique

ou ménager (fig. 148, H = 17 cm, envergure des bras 10,5 cm). Le corps,

avec la tête, les bras et

les jambes, de cette tislit

ou jeune mariée est

découpé dans une pièce

d‟Isomo. Les yeux, les

sourcils, le nez et les

cheveux sont dessinés

avec un stylo bleu mais

la bouche avec un stylo

rouge. Avec le stylo bleu

la fille a encore dessiné

des orteils ainsi que trois

points sur le front et les

joues pour représenter

les taches coloriées

traditionnelles. A travers

une déchirure centrale le

vêtement est passé par-

dessus de la tête. D‟un

côté les bords du vêtement sont cousus ensemble tandis qu‟un ruban bleu

le cintre sous les bras. Un ruban d‟environ 3 cm de largeur provenant du

même tissu bleu contourne la poupée en dessous de la ceinture, le bord

supérieur de ce ruban étant cousu au vêtement. Un grand foulard en gaze

blanche couvre la tête et les bras de la poupée.

Une des deux poupées-mères portant un bébé dans le dos que j‟ai

trouvées jusqu‟à présent fut modelée en argile par une fille de quatorze

ans. Boubaker Daoumani a collectionné cette poupée-mère et la poupée-

bébé dans le village Lahfart en janvier 2002 (fig. 149, p. 189, H = 12,5

cm, envergure des bras = 10 cm; le bébé H = 6 cm, envergure des bras =

3 cm). A travers le corps massif en argile, avec une grande tête sans cou,

des jambes courtes et des petits pieds, la fille a percé un bâtonnet pour

créer des épaules et des bras.

148

189

Les traits de visage légèrement incrustés dans l‟argile montrent deux

lignes droites pour les sourcils et une ligne droite pour la bouche ainsi

que des petits trous

pour les yeux et le nez.

Des lignes fines

suggèrent les cheveux

et la chevelure se

termine dans un

chignon. Le bébé porté

dans le dos est une

copie miniaturisée de la

poupée-mère la seule

différence étant qu‟il

n‟y a pas de lignes pour

indiquer les cheveux.

La poupée-mère est

vêtue d‟un vêtement

multicolore dont les

bords sont cousus

ensemble d‟un côté. Ce

vêtement pend sur les

bras et descend

jusqu‟au chevilles. Un

large foulard provenant

du même tissu tient en

place la poupée-bébé et

est noué à l‟avant de la poupée-mère.

Dès élèves de Said Bari ont fait les deux poupées suivantes qui

doivent cependant être vues non pas comme des poupées à jouer mais

comme des poupées de décor. Néanmoins je tiens à les décrire car une

d‟elles offre un exemple vraiment rare de poupées-femmes créées par un

garçon et qu‟elles témoignent de la créativité enfantine.

149

190

La poupée-jeune mariée faite par Lahoucein Idouhna, un garçon de

douze ans, a comme armature un roseau vertical percé par un long

morceau de fil de fer formant les épaules et les bras courbés vers le bas

(fig. 150, H = 24 cm). La partie supérieure du roseau est enveloppée de

coton blanc sur lequel de grands yeux à pupille sont dessinés avec un

stylo noir ainsi qu‟un nez, une bouche et des joues dessinés avec un stylo

rouge. La tête sans cheveux et les épaules sont couvertes d‟un large voile

transparent comme pour une mariée européenne. La poupée porte une

robe blanche inspirée par les robes des jeunes-mariées européennes, une

robe qui fait éventuellement partie des robes portées par une jeune-

mariée marocaine lors des cérémonies de mariage. Le garçon qui a créé

cette poupée disait que sa mère l‟a aidé à mettre le voile.

L‟autre poupée, réalisée par un garçon de dix-sept ans qui a commencé

l‟école primaire tardivement, représente un homme (fig. 151, H = 22

cm). La tête et le cou furent découpés dans un morceau d‟Isomo. Le cou

s‟incruste dans le creux d‟un roseau de 3,5 cm de diamètre.

150 151

191

En bas du roseau deux morceaux de roseau d‟un centimètre de

diamètre sont enfoncés dans le creux pour former les jambes. Les pieds

sont deux morceaux d‟un demi-roseau collés aux jambes. Pour faire les

bras le garçon a percé un fil de fer à travers le roseau vertical puis les

deux extrémités ont été pliées vers le bas. Le cou, les bras et le corps

sont enveloppés de rubans et une large cape pend sur les épaules, une

cape cousue en un point à la hauteur de la gorge. Les cheveux sont faits

avec un morceau de peau de mouton collé sur la tête. Les traits de visage

avec yeux ronds à pupille, sourcils, nez triangulaire, oreilles et bouche

souriante sont dessinés au stylo bleu.

Peu après avoir reçu les deux poupées avec une armature complète ou

partielle en Isomo, l‟utilisation de morceaux d‟Isomo fut confirmée

lorsque j‟ai vu un jeune garçon assis devant la porte de sa maison dans

un quartier populaire de Sidi Ifni. Il était en train de gratter avec un

morceau de fer aplati, une pièce d‟Isomo pour lui donner la forme

voulue.

La vidéo filmée dans la région de Sidi Ifni le 4 mars 2002, montre le

jeu de construction de maisonnette et le jeu de poupée de Halima, une

fille de six ans, et de Fadil, son frère de neuf ans (fig. 152).

152

192

Ces enfants vivent dans une maison isolée construite de manière

traditionnelle dans la région de Lagzira près de la route goudronnée à 10

km avant Sidi Ifni en venant de Tiznit. Le genre de poupées utilisé par

ces enfants parlant amazigh est unique pour autant que j‟aie pu le vérifier

au Maroc bien que les sources bibliographiques y fassent référence une

ou deux fois. La jeune-mariée aussi bien que le jeune-marié, les

membres de la famille et les visiteurs sont représentés par des

coquillages d‟escargot. Quand il s‟agit de la jeune mariée ou du jeune

marié le coquillage

est enveloppé dans

un morceau de gaze

blanche. Le jeu de

mariage commence

par promener en

voiture la mariée, le

marié et quelques

membres de la

famille en utilisant

une boîte de

sardines (fig. 153).

Après une bien longue promenade à travers le terrain de jeu en face de la

maison, la procession arrive au village avec ses maisonnettes. Dès que

Halima arrive avec sa voiture de mariage près d‟une des maisonnettes

elle commence a mettre les poupées dans la position correcte avec

l‟ouverture du coquillage représentant la tête en haut (fig. 154, p. 193)).

Quand Fadil termine la promenade en voiture, les deux joueurs

commencent à construire chacun une nouvelle maisonnette avec de la

boue et des pierres.

Un détail montre comment Halima et Fadil, qui vivent dans une

famille pauvre plutôt traditionnelle, intègrent dans leur jeu le dernier

produit de la haute technologie seulement disponible à Sidi Ifni depuis

environ l‟an 2000, c‟est-à-dire le téléphone portable figuré par un

morceau d‟une vieille télécommande. Le protocole avec la description

détaillée de cette vidéo est disponible sur le site Internet de SITREC

(Rossie and Daoumani, 2003, Video 4).

153

193

Lors de ma première visite à Sidi Ifni, une ville d‟environ 25.000

habitants sur la côte atlantique au sud d‟Agadir, en novembre 1998

Malika, une femme de vingt-trois ans et membre de la famille qui dirige

l‟hôtel restaurant Suerte Loca, m‟a raconté qu‟on pouvait trouver à Sidi

Ifni la poupée faite par la fille elle-même jusqu‟au début des années

1980 mais que de nos jours les filles jouent avec des poupées en

plastique importées. Cette utilisation de poupées en plastique importées

se confirmait alors par l‟observation d‟une fille de six ans qui jouait avec

une poupée en plastique bon marché devant sa maison. Bien que la

poupée en plastique avait remplacé la poupée traditionnelle les autres

objets utilisés par la fille pour son jeu se trouvaient localement. Ainsi la

fille avait mis sa poupée dans une maison de poupée, les carreaux en

haut du petit escalier menant à la porte d‟entrée, et comme ustensiles elle

154

194

employait une petite table en bois et quelques bouchons de bidons à

huile remplis d‟eau servant de verres de thé.

Comme d‟autres informations recueillies à Sidi Ifni confirmaient que

la poupée faite par les filles avait disparu de cette ville, j‟étais vraiment

surpris en filmant la première vidéo réalisée en collaboration avec

Boubaker Daoumani le 31 janvier 2002, de voir qu‟on pouvait encore y

trouver la poupée traditionnelle. Je suis entré en contact avec une famille

arabophone de classe populaire par le biais d'adolescentes se trouvant

devant la porte de leur maison située en face de la barandilla, l'escalier

en bordure de la plage. Puis après avoir obtenu l‟accord des parents il a

été possible de filmer Fatiha et Yasin, une fille de six ans et son cousin

de quatre ans qui jouent souvent ensemble. L‟unique indication donnée à

Fatiha le jour avant le tournage est qu‟on aimerait filmer son jeu de

poupée. Lors de la prise de vue la première chose que Fatiha a fait est de

créer une poupée avec une louche en bois comme armature verticale, une

louche reliant d‟une certaine manière cette poupée à la poupée faite pour

implorer la pluie. A cette louche la fille a attaché en forme de croix un

bâtonnet pour faire les épaules et les bras. Après avoir dessiné les traits

de visage sur le côté creux de la louche, Fatiha a mis un vêtement à sa

poupée en le serrant à la taille avec une ceinture. Plus tard elle a encore

fabriqué plusieurs autres poupées du même genre mais avec un bâtonnet

comme armature verticale. Parfois Yasin commençait à faire une poupée

mais cela plutôt sous la pression de sa nièce. En tout cas, il ne semblait

pas avoir envie de faire des poupées car il ne finissait jamais l‟armature

en forme de croix. Pendant tout le jeu le comportement de ce garçon d‟à

peine quatre ans exprimait son refus de faire du travail de femme et cela

non seulement quand il s‟agissait de créer une poupée mais aussi

lorsqu‟il était question de préparer un repas. Yasin a clairement exprimé

son refus en criant à Fatiha qui l‟ordonnait de préparer à manger : “Vas-y

toi-même, je suis un homme et pas une femme! Moi, je suis un homme

non pas une femme! ”. Exaspéré par ce refus Fatiha a décidé à préparer

le repas elle-même.

Après environ huit minutes de fabrication de poupées le jeu

commence vraiment avec la préparation du petit déjeuner des enfants,

enfants représentés aussi bien par les poupées faites par Fatiha que par

deux poupées du genre Barbie que la fille a placées contre le mur de la

maison et restant disponible tout le temps. La mise en scène de cette

195

préparation du petit déjeuner est suivie par le réveil des enfants, le petit

déjeuner et la conduite des enfants à l‟école. Bien que référence est faite

pendant le jeu à l‟école et la classe, la mise en scène d‟une situation liée

à cet environnement n‟est pas réalisée. Yasin collabore à cette séquence

du jeu de poupée en délimitant un espace rectangulaire représentant

l‟école avec quatre bâtonnets, bâtonnets qu‟il aurait du utiliser pour faire

des poupées. A la fin du jeu de poupée les enfants doivent être ramenés

de l‟école mais Fatiha change d‟idée et propose d‟apporter le repas à

l‟école. Une description détaillée de cette vidéo se trouve dans le

protocole disponible sur le site Internet de SITREC (Rossie and

Daoumani, 2003, Video 1).

Un autre exemple de jeu de poupée, filmé sur le toit plat servant de

terrasse du Suerte Loca à Sidi Ifni le 10 février 2002, montre deux filles

d‟une famille de classe moyenne dont les grands-parents maternels sont

les propriétaires de cet hôtel restaurant. Le troisième joueur est Malika,

une fille de neuf ans d‟une famille de classe populaire vivant tout près.

Une année auparavant Malika avait demandé aux deux sœurs si elle

pouvait jouer avec elles et de cette manière elle était devenue leur amie.

Malika parle l‟arabe marocain lorsqu‟elle joue avec Jalila âgée de neuf

ans et sa sœur Awatif âgée de sept ans mais à la maison elle parle la

langue amazighe locale. Ces filles jouent avec de véritables poupées

Barbie dont une porte une petite robe hawaïenne et danse sur de la

musique algérienne raï ou de la musique arabe moderne. Elles utilisent

aussi une poupée-bébé et plusieurs peluches anthropomorphes et

zoomorphes ainsi que des figurines miniaturisées, tous des jouets

appartenant aux deux sœurs. Le jeu de poupée qui dure trente-neuf

minutes met en scène plusieurs thèmes le plus souvent liés à la relation

mère-enfants, un rôle maternel joué par Malika. Jalila et Awatif jouent à

aider la mère ou s‟engagent dans des rôles complémentaires comme

téléphoner avec des portables-jouets, faire des courses ou conduire les

enfants à l‟école, des rôles que Malika joue aussi. Un moment donné les

deux sœurs prétendent faire un voyage au Maroc et à l‟étranger mais il

arrive aussi qu‟elles jouent seul un instant. En plus des poupées les

joueurs disposent encore de téléphones-jouets, de produits de beauté-

jouets, de boucles d‟oreilles pour enfants, d‟une boîte à musique, de faux

billets Euro, de différents types de sacs, d‟une valise et de matériel de

l‟hôtel comme des tabourets et des bancs, des sièges et des tables en

196

plastique. Tous ces objets démontrent clairement le niveau de vie et la

situation multiculturelle dans lesquels Awatif et Jalila grandissent, une

situation à laquelle Malika, jouant le rôle plus traditionnel de la mère,

s‟adapte facilement. Le protocole détaillé de la vidéo sera disponible sur

le site Internet de SITREC (Rossie and Daoumani, à paraître, Video 3).

Un exemple de jeu avec la poupée Little Miss fabriquée en Chine (fig.

123, p. 173) m‟a été raconté en septembre 2003. Une jeune mère

amazighe, Fatima Moutawakil vivant à Tiznit dans la province d‟Agadir

depuis ses trois ans, jouait à la poupée de ses sept à ses douze ans. Elle

faisait partie d‟un groupe de jeu comportant encore deux voisines un peu

plus âgées et son frère cadet. Au début des années 1980, Fatima

confectionnait des vêtements pour sa poupée, l‟unique de ce genre dans

le groupe de jeu. Cette poupée était vêtue comme une femme adulte et

un des jeux favoris consistait à mettre du maquillage à la poupée avec du

safran artificiel et un chewing-gum rouge qui après être mouillé avec de

la salive servait comme du rouge à lèvres.

Les mêmes filles et trois garçons dont deux cousins aimaient à jouer

au mariage, au ménage ou à papa et maman. Dans ces cas ils jouaient

sans utiliser des poupées. Les différents personnages comme la tislit ou

jeune mariée, l‟isli ou le jeune marié, la mère et le père des deux familles

et parfois une servante ou un domestique étaient joués par les joueurs.

Des petits coussins figuraient des enfants. Ce jeu se passait dans la

maison d‟un des joueurs mais seulement en l‟absence des parents. Des

ustensiles et d‟autres objets trouvés dans la maison servent comme

matériel de jeu et les chambres comme terrain de jeu. Quand ils jouaient

au ménage un d‟entre eux devait aller faire les courses. En parlant des

gens comme le font les adultes dans pareilles circonstances les joueurs

parlaient toujours de personnes imaginaires. Les autres thèmes ludiques

sont la visite au docteur ou au marché. Parfois le jeu était plus

fantastique comme jouer à tarzent, les monstres des contes locaux.

Eventuellement une plage était créée en laissant couler de l‟eau sur les

carreaux pour que les joueurs puissent glisser. Selon Fatima la richesse

des thèmes de jeux était souvent due aux garçons un peu plus âgés qui

inventaient quelque chose de nouveau. Naturellement il fallait remettre

tout en ordre avant que la mère revienne sinon les joueurs seraient battus,

ce qui est arrivé.

197

Dans le jeu de poupée des filles juives du sud-marocain, la poupée

représentant le marié est remplacée par un jeune garçon qui s'assoit

auprès de la poupée figurant la mariée. Flamand (recherches de 1948 à

1958, p. 183) décrit ce jeu de la mariée de la manière suivante :

Ce jeu consiste à revêtir la poupée des accessoires traditionnels et à

lui faire prendre les attitudes de la mariée juive. Les enfants cherchent

à reproduire l'apparat et les gestes rituels des fêtes nuptiales : elles

invitent leurs compagnes en grand nombre ; la poupée revêtue d'une

robe blanche, un voile en tulle encadrant son visage, se place au

milieu de la salle à manger, dans un fauteuil entouré de fleurs

blanches ; le marié - quelque garçonnet amené par une sœur ou une

amie - s'assoit auprès d'elle ; chaque invité, à son arrivée, embrasse

les mariés et félicite leurs parents supposés ; ceux-ci font passer du

vin, des liqueurs et des plats de friandises aussi réels que le

permettent les ressources familiales et les apports des invités. Ces

festivités ont lieu généralement les samedis après-midi.

Un second thème pour le jeu de poupée est la grossesse et

l'accouchement dont deux auteurs nous parlent et que des données

récentes confirment. L'article “la poupée Iblisa” de 1917 (p. 39),

mentionné plus haut, décrit ce simulacre de l'accouchement.

Mais bientôt on annonce que la maman va accoucher. En un tour de

main une fillette confectionne une poupée semblable à la première,

mais plus petite. La sage-femme (une autre fillette) arrive bientôt et

vient s'accroupir devant la poupée-maman pendant que tout le chœur

des petites filles dit : “O Sidi Bou Serrhine (marabout enterré aux

environs de Sefrou), ô l'oiseau aux pattes teintes de henné, délivre vite

cette femme du mal d'enfant. Ne la laisse pas dans les douleurs”. A ce

moment l'apprenti sage-femme passe la main sous les vêtements et en

tire la petite poupée en annonçant : “Elle a enfanté”. Danses,

youyous, battements de mains reprennent de plus belle. Tout ce petit

monde crie : “Louange à Dieu et au grand dispensateur qui est notre

maître”.

198

Maurice Cortier décrit déjà en 1908 ce jeu marocain de l'accouchement

(p. 310). Une fois de plus, une fillette joue le rôle de sage-femme

pendant que ses compagnes chantent en chœur : “Ô père des petits,

oiseau aux pattes de henné, fais que l'enfant naisse de suite ; épargne les

douleurs à la mère, etc.”

Des renseignements que j'ai obtenus au Maroc réfèrent eux aussi au

simulacre de l'enfantement par la poupée-femme, mais premièrement je

décris la représentation de la grossesse.

Latifa, une jeune fille d'environ 11 ans en 1992 du centre rural de

Hmar près de Taroudannt, a le mieux explicité la relation entre les

différents jeux de poupées qui, au début des années 1990, existe chez les

filles de sa région. Après le jeu de mariage de la °arûsa et du °arîs,

décrit plus haut, et une fois que le jeune couple vit ensemble un certain

temps déjà, la °arûsa voit se modeler un gros ventre. Elle est enceinte!

Avec tout que cela comporte de coutumes et de gestes protecteurs. Plus

tard la poupée-femme accouchera d'une fille ou d'un garçon, une copie

de taille réduite de la poupée-femme ou de la poupée-homme. Le

moment venu du jeu de la naissance, on invite toutes les poupées pour

fêter cet heureux événement, en chantant et en se réjouissant autour

d'une dînette.

Dans les années 1940, la même série de jeux de poupées se jouait par

les filles des Oulad Yahya des régions rurales aux environs de

Taroudannt. Ce triple jeu de poupée se retrouve aussi dans le milieu

amazigh d'Imi-n-Tanoute, du moins vers 1980. Le gros ventre de la taslit

enceinte s'obtenait en mettant un petit coussin de chiffons sous ses

vêtements. La poupée-bébé est une fois de plus construite suivant le

modèle de la poupée adulte, seulement sa taille est plus réduite et ses

vêtements sont plus simples. Suivant la volonté des filles, la poupée-

mère donnera la vie à une poupée-garçon, iwis, ou une poupée-fille, illis.

Selon Sfia Ghârib, une femme amazighe née en 1938 à Arhbalou-n-

Serdane au Moyen Atlas, la poupée-jeune mariée décrite plus haut (fig.

76, p. 128) pouvait aussi jouer son rôle dans l'enfantement d'un bébé

figuré par une toute petite poupée du même genre.

199

La collection du Musée de l'Homme possède un berceau-jouet de Sfax

collectionné vers 1933 (33.70.10), un berceau-jouet déjà mentionné par

Castells en 1915.

Jusqu'à ce que j'aie filmé en collaboration avec Boubaker Daoumani les

vidéos sur le jeu de poupée dans la région de Sidi Ifni début 2002, je

n'avais reçu que trois informations sur des jeux de poupée dans lesquels

les filles utilisent des poupées représentant des petits ou des jeunes

enfants. Ces informations se réfèrent aux filles de Ouarzazate, les filles

des Oulad ben Sbaa ainsi que les filles juives des anciens mellahs du

sud-marocain.

Comme mentionné à la fin des données sur les poupées-femmes de

Marrakech la relation entra la fille ayant le rôle de mère et son bébé,

représenté par une petite poupée, fut jouée à Ouarzazate vers 1980.

Au village Ouled ben Sbaa, près de Sidi Mokhtar sur la route

d'Essaouira à Marrakech, les filles arabophones de six à douze ans

utilisent leurs poupées surtout comme des bébés. Ce jeu se pratique seule

ou avec une ou plusieurs filles de la famille ou du voisinage dans la cour

de la maison. Selon Abdelhalek Naseh, dont proviennent ces

informations, c'est un jeu très courant qui se pratique toute l'année. Cette

poupée qui s'appelle néanmoins °arûsa ou jeune mariée, a une armature

de roseau ou de bâtonnets en forme de croix vêtue avec des chiffons.

“Bien que la forme de base reste assez simple, certains détails sont mis

en relief comme les seins, les fesses, la tête” (1993: 30-31).

Flamand (recherches de 1948 à 1958, p. 183) parlant des fillettes

juives du sud-marocain écrit :

Deux enfants placent une poupée entre eux ou bien dans un véhicule à

sa taille : landau, poussette ou simple boîte de carton tirée par une

ficelle. Dans cet équipage, ils simulent diverses occupations de

parents : préparer le repas de leur "enfant", s'entretenir de son

avenir, emmener l'enfant à l'école, faire des visites ou bien recevoir en

sa compagnie... etc.

200

Dès lors je pensais qu‟utiliser des poupées pour jouer des rôles de mère

ou d‟enfant était exceptionnel au Maroc. J‟étais donc étonné de voir que

les deux premiers groupes de jeu jouant à la poupée et filmés à Sidi Ifni

ont librement choisit de s‟engager partiellement ou complètement dans

un jeu figurant des relations entre mère et enfants et entre enfants et

l‟école. Dans le premier cas les poupées représentant des enfants sont

des poupées faites par une fille de six ans d‟une famille populaire ou

bien des poupées en plastique du genre Barbie qui lui appartiennent.

Dans le deuxième cas il s‟agit de vraies poupées Barbie et de peluches

appartenant à deux sœurs d‟une famille de classe moyenne (Rossie and

Daoumani, 2003, Video 1, Video 3). La description de ces poupées se

trouve p. 194-196.

L'enterrement de la poupée est un quatrième thème des jeux de poupées

des filles marocaines. La première mention de ce jeu dans la

bibliographie consultée date de 1915. Le dixième jour de l'année

musulmane, c'est-à-dire lors de la fête de l'°ashûra, les enfants de Settat

et d'ailleurs “font des simulacres d'enterrement en creusant une fosse

pour enterrer avec le cérémonial habituel une poupée faite d'un os

entouré de chiffons” (Mission Scientifique du Maroc, p. 302).

Une jeune femme, Naïma Tadili, de la ville de Khouribga, que j'ai

rencontrée au Centre d'Etudes des Problèmes du Monde Musulman

Contemporain à Bruxelles en 1981, m'a parlé spontanément de ces

enterrements de poupées. Ses souvenirs, et ceux de sa belle-mère en

visite en Belgique, ont donné les renseignements ci-dessous.

Un os de patte de mouton égorgé à l'aïd el-kebir, c'est à dire le

dixième jour du mois dhu el-hijjah (le dernier mois du calendrier

musulman et le mois du pèlerinage), est utilisé par des filles de la région

de Khouribga, près de Settat et non loin de Casablanca, pour

confectionner une poupée qui s'appelle °ashûra. Un bâtonnet est ligaturé

en croix à cet os pour figurer les bras et l'armature est alors habillée en

femme. Sur la tête de la poupée les filles mettent du henné. Le visage

n'est pas indiqué. Pendant tout un mois lunaire ces poupées sont au

centre des activités ludiques des fillettes. Avec leur poupée elles se

promènent dans le voisinage et font la quête de dons chez la famille et

les voisins. Ceux-ci leur donnent un peu d'argent ou des denrées. Vient

alors le jour de l'°ashûra, le dixième jour du premier mois de l'année

201

musulmane. En Afrique du Nord en général et dans la région en question

en particulier, la fête de l'°ashûra donne lieu à des rites et usages qui sont

en rapport avec la naissance de la nouvelle année et la mort de l'année

passée. Une description récente de la fête de l'°ashûra dans la ville de

Marrakech a été publiée en 1976 par Jemma-Gouzon. Lors de l'°ashûra

on commémore aussi les morts. En plus cette fête est une journée où l'on

gâte les enfants qui reçoivent des bonbons et des jouets. Dans ce

contexte les filles vivent la mort et l'enterrement de leur poupée. Comme

il est dit dans la citation ci-dessus datant de 1915 et comme il était

encore d'usage dans plusieurs familles de Khouribga pendant la seconde

moitié des années 1960, la poupée meurt à l'°ashûra et est enterrée par la

fille elle-même. Les filles de la même famille et leurs amies enterrent

ensemble leurs poupées et font les rites d'enterrement pour la poupée qui

à été pour eux durant tout un mois un être bien-aimé qu'elles perdent en

ce jour de l'°ashûra. Le septième jour après l'enterrement les filles

reviennent au cimetière de leurs poupées pour y accomplir les devoirs

envers les morts comme on le fait pour les humains. Selon mon

informatrice, Naïma Tadili, ce jeu traditionnel n'était pas toléré par tous

les parents. Ainsi elle n'a pas participé personnellement à ce jeu mais elle

l'a vu faire par ses amies et voisines. Dans certaines familles ce jeu serait

encore pratiqué début 1980, surtout à la campagne mais de moins en

moins en ville. Une autre femme marocaine Rhimo Bijat Laraïchi, née en

1942 à Larache mais vivant à Gand en Belgique, m'a affirmé en juillet

1982 qu'elle a vu ce jeu d'enterrement de la poupée à Settat, sur la route

de Casablanca à Marrakech, mais que cette coutume n'existe pas à

Tanger, Tetouan ou Larache.

Dans son “Noms et cérémonies des feux de joie chez les Berbères du

Haut et de l'Anti-Atlas”, Laoust parle lui aussi et en 1921 de

l'enterrement par des fillettes de la poupée nommée 'ashur' ou 'isli n-

ashur', c'est-à-dire le fiancé de l'ashur, encore appelé “mon Frère

Achour” ou “mon Oncle Achour” (p. 31), ce qui ne laisse aucun doute au

sujet du sexe de cette poupée. Il est donc question ici d'une poupée-

homme provenant d'une région non-saharienne. D'autres exemples de

poupée-hommes marocaines que j'ai pu trouver depuis 1992 sont décrits

chez les poupées-hommes. Selon cet auteur cette poupée masculine est à

Tanannt, près des Cascades d'Ouzoud dans la région de Marrakech, un

roseau recouvert de blouses et d'un burnous, mais un os peut aussi bien

202

être utilisé. Laoust (1921: 30-31) nous raconte ce jeu rituel de la manière

suivante :

Quelques jours avant l'apparition de la lune de l'Achoura, les fillettes

la promènent sur le sentier qui mène au marché des Aït Majjen et au

mausolée de Sidi Sâïd. Elles la posent debout au pied du gros

térébinthe dont l'ombre protège le tombeau de l'agourram, et arrêtent

au passage tous ceux que le hasard du chemin mène dans ces parages.

en disant : “donnez-nous l'obole d'Achour, aqarid n-'asur !” Quand

naît la lune de moharrem, elles recueillent des dattes, des noix, des

raisins secs dont toutes les familles font grande provision à l'Achoura.

Puis, le soir de la fête, elles vont avec leur poupée de maison en

maison, demander les menus cadeaux : œufs et morceaux de viande

qu'il est d'usage de leur remettre. Après le souper, elles se réunissent

sous un figuier et groupées autour de la poupée étendue à terre, elles

simulent une grande douleur : elles dénouent leurs tresses,

s'égratignent le visage, pleurent bruyamment et chantent de ces

lamentations funèbres qu'on entend dans les familles qu'un deuil vient

de frapper. Cette nuit-là, en effet, est celle de la mort d'Achour, du

personnage énigmatique que personnifie la poupée. Ce rite accompli,

les fillettes se séparent pour se retrouver au même lieu aux premières

lueurs de l'aurore : c'est à cette heure précise que meurt Achour et

que l'on procède à ses funérailles. Dans la petite tombe où on le

dépose, on jette des dattes et des œufs. Puis les petites filles s'étant

retirées, les garçons arrivent à leur tour ; ils se précipitent sur la

tombe, s'emparent des dattes et des œufs, déterrent la poupée, la

dépouillent de ses vêtements et la jettent nue sur le sol pour qu'elle

appelle la pluie ... Peut-être croient-ils que la pluie vivifiante et

fécondante préside à la résurrection de l'esprit affaibli ou mourant de

la végétation que personnifie sans doute ce mannequin.

En février 1992, ces données, datant de 1921, ont été confirmées, pour la

seconde moitié des années 1970, par une jeune femme amazighe de 24

ans qui a vécu toute sa jeunesse dans la région de Beni Mellal dans le

Moyen Atlas. Elle y a ajouté que les jeunes filles considèrent que la fête

de °ashûra est leur propre fête et quand elles font le tour des maisons

elles chantent à chaque fois :

203

Maintenant c'est °ashûr, nous sommes libres!

C'est à l'aïd el-mouloud (la fête de la naissance du Prophète) que les

hommes gouvernent!

J'ai trouvé confirmation de l'enterrement au cimetière d'une petite

poupée, la 'fiancée d'°ashûr', par les fillettes amazighes des Aït Ouirra de

la région d'El Ksiba, près de Kasba-Tadla au Moyen Atlas. Ce jeu rituel

marque la fin de la fête de l'°ashûra (Oubahammou, 1987: 88). Dans

Enfances Maghrébines M. Dernouny parle aussi de l'enterrement d'une

poupée, une poupée-homme nommée 'Sidi Achour'. Cette poupée est

faite avec soin à partir d'un os par des jeunes filles un mois à l'avance

pour être prêtes le jour de l'°ashûra'(1987: 26-27). Dans un article publié

en 1971 il est dit que le soir avant l'°ashûra des filles villageoises font

des poupées qu'elles appellent 'Achour' et qu'elles les enterrent dans de

vieilles tombes, poupées que les garçons recherchent le lendemain pour

les détruires (Belghiti, p. 102).

Il est clair que ce jeu de poupée simulant l'enterrement est lié aux

rituels en relation avec l'agriculture tout comme le jeu de poupée pour

demander la pluie. Bien que les poupées rituelles aient été éliminées de

l'analyse, il faut néanmoins souligner que la distinction entre poupée

rituelle et poupée pour jeu d'enfant s'estompe parfois comme c'est le cas

pour le jeu de poupée simulant l'enterrement ou pour la poupée en cuiller

de bois utilisée pour faire tomber la pluie dont ont trouve un exemple

marocain ci-dessous et un exemple tunisien chez les poupées-femmes

tunisiennes.

Souad Laabib du village amazigh de Ksar Assaka près de Midelt se

rappelle que jusqu'à l'âge de quatorze ans, c'est-à-dire vers 1982, elles et

les autres filles du village ont fait en période de sécheresse la poupée à

cuiller de bois, appelée telghenja, habillée comme une femme plus ou

moins âgée et nullement comme une jeune mariée. Pour cela un bâtonnet

est ligaturé en croix au cuiller de bois d'environ 50 cm de haut pour

donner des bras à la poupée. Des chiffons sont mis sur cette armature en

guise de vêtements après qu'une ouverture a été faite dans leur centre

pour pouvoir passer la tête. Cette tête est alors entourée de morceaux de

tissu, servant de foulards, de telle manière que le bois n'apparaît pas. Une

ceinture sert la taille de la telghenja qui ainsi a toujours la forme d'une

204

femme maigre au point que quand on veut dire d'une femme qu'elle est

vraiment maigre on dit qu'elle est comme une telghenja.

Une fois que telghenja est prête et dans l'après-midi, un groupe

d'environ dix filles de plus ou moins le même âge va avec elle en

procession, en chantant et en s'accompagnant sur un bendir ou tambour à

main, au 'er-rûd' ou tombeau couvert de Sidi Bounouar au cimetière du

village. Arrivé au tombeau les filles chantent :

Sîdî Bûnwâr jînâ, er-Rabbî t°afû °alînâ.

Sidi Bounouar on vient, que Dieu nous guérit.

Alors les filles enlèvent les souliers et entrent l'une après l'autre en

emportant telghenja dans le tombeau couvert. Elles donnent une bise sur

le cadre de la porte et contournent trois fois le tombeau sur lequel des

bises sont aussi données. Tout le groupe reste autour du tombeau

pendant qu'une tah'rért ou soupe est préparée avec de l'eau froide et de la

farine. Les filles sortent du tombeau, une d'elles monte sur le toit et verse

cette soupe dans l'écoulement pour qu'elle coule le long du mur. Pendant

la procession et durant tous ces rituels des filles tiennent, à tour de rôle,

telghenja droit au-dessus de leur tête mais une fois que la dînette

commence, elle est couchée par terre. Pour cette dînette à côté du

tombeau couvert, les filles ont apporté du pain, des tomates, des

morceaux de sucre et du thé préparé à la maison. Après la dînette les

filles chantent à nouveau. Cependant, les chants sont maintenant des

chants chantés pendant des sessions de possession par les esprits et la

danse des cheveux qui y est liée est exécutée. Après cela la procession se

remet en marche en chantant et avec telghenja bien en vue pour faire un

tour entre les maisons du village, mais sans que l'on fasse la quête ou que

l'on entre dans les maisons. Pendant que telghenja est promenée dans le

village, les filles chantent :

A telghenja asî ûrâwûnnem sîginnâ, gher er-Rabbi enzâr atkertûga.

Oh telghenja lève tes mains vers le ciel, pris Dieu pour que la pluie

fasse pousser l'herbe.

205

Ou bien elles chantent :

A telghenja marja wunna wurdifighen, isi°mâ ghed isîmût.

Oh telghenja marja ceux qui ne sont pas sortie de la maison pour te

voir, ils sont aveugles ou morts.

Quand les filles sont fatiguées de se promener avec telghenja elles vont

s'asseoir, se parlent de la pluie qui doit venir ainsi que d'autres choses et

rigolent entre eux. Après quelque temps telghenja est déshabillée, ces

vêtements sont jetés et le cuiller à bois est repris à la maison par la fille

qui l'a empruntée à sa mère. Une fois c'est la mère de Souad, ayant

trouvé un grand vieux cuiller à bois dans la maison, qui a fait la telghenja

que Souad et ses copines ont utilisée pour ce jeu rituel.

2.15 Les poupées-femmes tunisiennes

La collection du Musée de l'Homme possède deux poupées-femmes

tunisiennes provenant de deux villes et fabriquées avant 1931.

155

206

Ces poupées d'une hauteur d'environ 30 cm ont le corps, la tête et les

membres faits de pièces de tissu bourrées de paille et de chiffons. Leur

visage, à bouche, nez, sourcils et yeux, est dessiné et brodé. Afin de

donner un peu de relief au nez un grain est à cet endroit glissé sous

l'étoffe, comme cela est fait pour certaines poupées marocaines. Une

poupée est en costume de femme arabe (fig. 155, p. 205, H = 36 cm;

catalogue 3.10, 30.54.891, p. 287) et l'autre en costume de juive (fig.

156, H = 33 cm; catalogue 3.10, 30.54.888, p. 287). Elles portent

plusieurs robes. La poupée en costume arabe porte de nombreux bijoux.

Sigrid Paul décrit et montre dans son livre Afrikanische Puppen une

poupée tunisienne de 28 cm de hauteur, collectionnée par Moberg en

1950 (1970: 118, 208 - Abb. 97). Contrairement aux poupées-femmes

tunisiennes du Musée de l'Homme, cette poupée a une tête rectangulaire

en bois revêtue de tissu blanc. Néanmoins, les traits de visage de cette

156

207

poupée - avec sa bouche brodée avec du fil rouge et ses sourcils, ses

yeux et son nez dessinés - se rapprochent des traits de visage des deux

poupées tunisiennes du Musée de l'Homme.

Aimé Dupuy nous parle en 1933 (p. 309) des poupées tunisiennes :

Bien entendu, la poupée figure au nombre des jouets féminins ;

toutefois, remarque un élève mouderrès d'Agareb (caïdat de Sfax), "la

femme arabe, dans les villages, se tient encore à l'écart du luxe. Elle

n'achète pas la poupée de sa fille chez un marchand de jouets, elle la

fabrique elle-même ... Elle (la fille) continue ce jeu qui montre son

attachement à la vie intérieure, jusqu'à l'âge de huit ou dix ans.

Aimé Dupuy (1933: 309) décrit aussi le jeu de poupée et bien en ces

termes :

La fille considère sa poupée comme une compagne vivante. Elle l'aime

passionnément, lui prépare des mets qui ne sont qu'un peu de terre et

d'herbe hachée, la prend en promenade, la fait souvent coucher avec

elle et fait tout son possible pour qu'elle soit mieux parée et plus jolie

que celle de ses voisines.

En Tunisie la poupée en cuiller de bois, mais habillée en mariée, utilisée

pour des rites de pluie au début de l'année est mentionnée par Jean

Servier (1962 294). D'ailleurs cette poupée-cuiller, dont une photo figure

dans le livre de Servier (photo 12), ressemble, dans sa forme générale

mais plus spécialement encore dans ses traits de visage, aux deux

poupées tunisiennes montrées à la figure 155 et 156 (p. 205-206).

Dans son Mots et choses berbères, E. Laoust présente en 1920 (p.

225-226) la poupée-cuiller des enfants tunisiens de la manière suivante :

Umm Tangi ou Tango, la “mère Tangui” est, à Tunis, la petite poupée

que les enfants promènent, en temps de sécheresse, en l'accompagnant

de leurs chants :

“Votre mère Tango ô femmes,

Demande à Dieu, la Pluie!

Votre mère Tango, avec son collier,

Implore Dieu, qu'il ne la repousse pas!... ”

208

Dans l'île de Djerba, on donne le nom de Tongo à la petite cuiller que

l'on distribue aux enfants en guise de jouet à l'occasion des grandes

fêtes religieuses et plus particulièrement à l'approche du Ramadan.

Cette cuiller a reçu des marchands une décoration vraiment curieuse.

La partie bombée de l'instrument figure, en effet, la tête d'une jeune

fille dont les traits : yeux, nez et bouche ont été tracés à la peinture

noire ; des cheveux à la “chien”, également peints, ornent le front à la

manière des fiancées. A Tunis, où s'observe une coutume identique,

l'ornementation de la cuiller se fait dans chaque famille ; elle n'est

plus, comme à Djerba, l'œuvre du revendeur. Les enfants mangent en

se servant de cette cuiller pendant toute la durée du Carême, puis les

petites filles s'en amusent comme d'une poupée. L'usage s'observe

dans les familles d'un certain rang et non, comme on le supposerait,

dans les classes populaires. Ce qui est tout à fait curieux, c'est que

cette cuiller spéciale ne porte point le nom habituel de mgerfa, qui est

arabe, mais celui de gonjaia qui est berbère.

Ainsi donc, dans des régions les plus anciennement islamisées du

Maghreb, le nom à peine modifié de la grande divinité africaine

Tlghenja, est resté appliqué à son image symbolique : la cuiller

devenue petite poupée d'enfant, poupée néanmoins différentes des

autres par son caractère rituel puisqu'on ne s'en amuse qu'à

l'occasion des grandes solennités musulmanes.

Dans la région de Sousse, une poupée était aussi portée de porte en porte

par les enfants pour appeler la pluie. Cette poupée n'était pas faite d'un

cuiller mais de deux planches clouées en forme de croix, recouvertes

d'étoffes coloriées. A chaque maison on versait de l'eau sur la poupée

(Dupuy, 1933: 316).

Pour un aperçu des données sur la personnalisation de la pluie au

Maghreb voir le commentaire de Gabriel Camps dans l'Encyclopédie

Berbère au mot “anzar” (1989: 795-797).

209

3 Les poupées-enfants

3.1 Résumé

Les poupées-enfants semblent être bien rares au Sahara et en l'Afrique

du Nord et elles ne diffèrent que peu des poupées-adultes. Dans la

collection du Musée de l'Homme j'ai trouvé trace de poupées-enfants

chez les Touaregs Kel Ahaggar et Kel Ajjer. Une référence

bibliographique et une information personnelle attestent l'existence de

poupées-enfants chez les Touaregs Kel Iforas. Auprès des Maures de

Tidjikdja, ont été recueillies deux poupées-fillettes.

A l'exception d'une poupée habillée en costume d'enfant nègre,

recueillie quelque part en Algérie et offerte au Musée de l'Homme par le

Gouvernement Général de l'Algérie en 1889 mais qui a

malheureusement disparu (fichier signalétique: 89.79.127), la collection

ne comporte - provenant en dehors du Sahara - que des poupées-enfants

que portent, dans le dos, certaines poupées-femmes chaouia.

Cependant la revue France-Maroc de 1917 mentionne l'existence

d'une poupée-bébé marocaine lors de la description du jeu de

l'accouchement de la poupée-maman. La pratique de ce jeu a déjà été

confirmée pour le sud du Maroc lors de ma première mission de

recherche dans cette région en février 1992. Depuis lors, l'utilisation de

poupées-bébés dans les jeux des filles marocaines du village Arhbalou-n-

Serdane au Moyen Atlas m'a été signalée. A Taroudannt, et

probablement ailleurs, une poupée-bébé avec son biberon, fabriquée en

Chine, est devenue vraiment populaire parmi les filles.

3.2 Les poupées-enfants touarègues

Trois poupées recueillies chez les Touaregs Kel Ahaggar (Sahara

algérien) représentent des enfants. Deux figurent des garçons (catalogue

4.1, 41.19.133/157, p. 289) et une est une fillette assise de 5,5 cm de

hauteur (catalogue 4.1, 41.19.129, p. 289). Cette poupée-fille est du

même genre que la poupée-femme touarègue Kel Ahaggar décrite au

chapitre 2.2 (p. 85). Elle fut construite par un garçon.

210

Un jeune garçon touareg Kel Ahaggar en tenue de cérémonie est figuré

par une poupée qui ne diffère

des poupées-guerriers et

poupées-notables touaregs

que par une taille plus petite

de 11 cm (fig. 157, voir

catalogue 4.1, 41.19.157, p.

289). L'armature est en tiges

de graminées et formée de

deux bâtonnets verticaux

auxquels sont ligaturés en

croix deux autres bâtonnets.

Cette poupée est vêtue d'un

sous-vêtement kaki et d'un

survêtement noir. Elle porte

le baudrier et la ceinture faits

de fils de coton jaune, rouge

et vert. La tête est entourée

de tissu noir avec, au-dessus,

des fils de coton de la même

couleur jaune, rouge et verte

ainsi que de couleur blanche.

Maurice Cortier parle en 1908 (p. 310) de figurines représentant des

petits enfants et confectionnées par les fillettes touarègues Kel Iforas

(Sahara malien). Selon Ekhya Ag-Sidiyene qui m'a renseigné sur les

poupées-femmes touarègues Kel Iforas, il existe des poupées-fillettes

faites d'une crotte d'âne dans laquelle une épine est fixée. Cette poupée-

fillette ne porte ni habits ni dessins géométriques représentant les seins

comme cela se voit sur les poupées-femmes (fig. 32 p. 87, 34 p. 88).

Auprès des Touaregs Kel Ajjer (Sahara libyen) furent recueillis en

1934 une poupée-mère et son enfant en terre cuite. On peut voir la

poupée-mère à la figure 35 (p. 89). La poupée-enfant à corps massif sans

jambes ressemble tout à fait à la poupée-mère. Elle mesure 7 cm de

hauteur et le diamètre de la base est 3,5 cm.

157

211

3.3 Les poupées-enfants maures

Deux poupées provenant des Maures de Tidjikdja au Sahara mauritanien

représentent des fillettes (catalogue 4.2, 9.70.7.1/2, p. 289). Elles furent

confectionnées par des filles selon le modèle des poupées-femmes de

cette région. Charles Béart mentionne lui aussi des poupées-enfants peint

en ocre comme les poupées-servantes (voir 2.4 Les poupées-femmes

maures, p. 96).

3.4 Les poupées-enfants kabyles

Un des deux types de poupées mentionnés par Germaine Laoust-

Chantréaux représente le bébé. Cet auteur écrit :

Il est facile aux fillettes de reconstituer, à leur mesure, l'univers où

elles vivent ; ainsi à l'aide de quelques menues brindilles elles font de

petits berceaux, recouverts de quelques morceaux d'étoffe. Là, à l'abri

du voile, dort la tigsett, la poupée des petites filles d'Aït Hichem : ce

n'est rien moins, ainsi que son nom l'indique (petit os) qu'un os de

gigot, soigneusement revêtu de chiffons ; la partie renflée forme la

tête où des traits de suie dessinent la figure que l'on farde tandis qu'un

minuscule foulard masque la nudité du crâne. Ainsi enveloppée, la

tigsett satisfait les plus difficiles.

3.5 Les poupées-enfants chaouia

Comme on peut le voir à la figure 67 (p. 115) certaines poupées-femmes

chaouia portent un petit enfant dans le dos (voir 2.12 Les poupées-

femmes chaouia, p. 112).

212

3.6 Les poupées-enfants marocaines

Comme déjà mentionné dans la synthèse, une information

bibliographique de 1917 décrit l'accouchement de la poupée-femme et

bien en ces termes : “en un tour de main une fillette confectionne une

poupée semblable à la première (la poupée-femme) mais plus petite”

(“La poupée Iblisa”, p. 39). C'est l'unique référence à des poupées-

enfants marocaines que j'ai trouvée dans la bibliographie. Mais les

informations que j'ai pu recueillir au Maroc confirment la pratique de ce

jeu aussi bien chez des filles amazighophones qu'arabophones.

Dans la campagne de Taroudannt, des filles Oulad Yahya dans les

années 1940, et celles d'aujourd'hui du centre rural de Hmar jouent à la

grossesse de leur °arûsa et à la naissance de son bébé, une poupée-

femme ou une poupée-homme en miniature selon la volonté des filles.

Chez les filles amazighes d'Imi-n-Tanoute on jouait, dans les années

1970, également à la taslit enceinte et à la naissance de la poupée-bébé,

une copie en miniature de la poupée-mère, tout comme cela se faisait

chez les filles amazighes d'Arhbalou-n-Serdane vers 1950.

Jusqu'à présent j'ai obtenu deux poupées-mères portant un bébé dans

le dos, une faite avec une armature de bâtonnets en forme de croix par

une fille du village Hmar près de Taroudannt en 1997 (fig. 126, p. 176)

et une autre modelée en argile par une fille du village Lahfart près de

Sidi Ifni en 2002 (fig. 149, p. 189). Ces poupées-bébés à traits de visage

ont été décrites ensemble avec leur poupée-mère (voir 2.14 Les poupées-

femmes marocaines, p. 117).

En milieu populaire arabophone de Marrakech, dans le quartier de

Daoudiyât, une petite poupée en plastique servait, vers 1975, de petit

enfant ou de bébé que les filles portaient dans le dos, qu'elles

nourrissaient ou dorlotaient. Pareille poupée-bébé avec biberon, en

plastique, est vers 1996 un des jouets favoris des filles de Taroudannt.

Il faut aussi mentionner qu'une des poupées qui me furent données par

les filles amazighes du village Aït Ighemour est à interpréter comme une

fillette.

Pour une analyse du jeu de la poupée enceinte et de celle qui enfante,

ainsi que du jeu avec la poupée-petit enfant, je renvoie le lecteur au

chapitre 2.14 sur les poupées-femmes marocaines (p. 197-199).

213

A la fin de cette analyse des poupées sahariennes et nord-africaines et

bien que basée sur une source unique, il faut que je mentionne le jeu de

poupée dans lequel des filles amazighes du village de Tizal, près d'El

Khemis, jouent à la circoncision. Cette information me fut transmise par

Fatima Outizal, née à Tizal, qui la tient d'une femme de cinquante-cinq

ans et qui a vécu toute sa jeunesse à Tizal. Cette femme raconte que dans

les années 1950 un des jeux de poupées était celui de la cérémonie de

circoncision. Une petite poupée d'environ 7 cm de hauteur, faite de deux

roseaux assemblés en forme de croix, est fabriquée par les filles. Ce sera

le garçon à circoncire. Au moment de la circoncision une fille, jouant le

rôle de la mère du garçon, se tient debout un bâton à la main. Elle se

regarde dans un miroir pendant que les filles chantent en amazigh :

Où est-ce que le garçon pleure ?

C'est à la circoncision qu'il pleure !

L'on peut trouver confirmation de l'existence au Maroc de ce jeu de

poupée représentant la circoncision en se référant à la très brève mention

de ce jeu dans le livre de Mohammad Ibn Azzuz Hakim (1959: 32, voir

2.14 Les poupées-femmes marocaines, p. 123).

214

215

Conclusions

216

217

Dans cette section je présente d'abord une synthèse de l'analyse des

poupées et jeux de poupées sahariens et nord-africains, suivie par des

conclusions basées sur cette analyse et se rapportant à des aspects

environnementaux, spatio-temporels, économiques, sociaux et culturels,

ainsi qu'à l'évolution des sociétés.

1 Synthèse

En Afrique du Nord et au Sahara, on trouve aussi bien des poupées-

hommes que des poupées-femmes et des poupées-enfants. Cependant les

poupées-femmes sont de loin les plus nombreuses. Exception faite pour

le Maroc, je n'ai noté l'existence de poupées-hommes que chez les

enfants de populations vivant au Sahara. Ces poupées-hommes et ces

poupées-femmes sont d'âge adulte, souvent l'âge d'un jeune-marié ou

d'une jeune-mariée. Les poupées-enfants représentent des filles et des

garçons d'un certain âge déjà. Les poupées-enfants et les poupées-bébés

semblent être rares, ceci contrairement à la situation en Europe

occidentale et méditerranéenne où, jusqu'à une époque récente et depuis

le début du vingtième siècle, les enfants jouaient surtout avec des

poupées-enfants et des poupées-bébés.

Le plus souvent les enfants sahariens et nord-africains confectionnent

eux-mêmes leurs poupées, mais parfois ce sont des femmes adultes de la

famille ou des artisanes et artisans qui les fabriquent. Ainsi, toutes les

poupées sont de fabrication locale, bien que la tête d'un type de poupée

mozabite soit d'origine européenne, qu'au Maroc une poupée importée en

plastique peut servir d'armature de poupée et que selon F. Castells (1915:

342) et Sigrid Paul (1970: 113) des poupées européennes furent déjà

acceptées dans la culture nord-africaine vers 1914.

Comme un peu partout dans le monde, ce sont avant tout les filles qui

jouent avec des poupées, beaucoup plus rarement les garçons et dans ce

cas il s'agit presque toujours de poupées-hommes.

Bien que trop rarement révélé dans les informations bibliographiques,

les poupées décrites ici n'ont de sens que dans le contexte des jeux

d'enfants. Le plus souvent il s'agit de jeux collectifs rassemblant des

enfants, la plupart du temps des filles, de la même famille et/ou du

218

voisinage. Pour ces jeux de poupées collectifs les enfants utilisent bon

nombre d'autres jouets ou instruments de jeu. En plus, ils accompagnent

leur jeu de chansons, danses, comptines, contes et autres jeux de langage.

Selon toutes les données à ma disposition, les poupées sont utilisées

dans des jeux où les enfants s'adonnent à l'interprétation de la vie des

adultes. Dans le domaine du monde masculin, les enfants font de leur

poupée un méhariste, cavalier, muletier, berger, guerrier ou notable.

Dans le domaine du monde féminin il s'agit le plus souvent de jouer au

ménage, de représenter des fêtes - surtout des mariages - et autres

réunions importantes, de figurer une grossesse, un accouchement et

même un enterrement. Sauf dans la représentation des fêtes de noces où

le monde féminin et masculin se trouvent mêlés, la distinction entre les

activités féminines et masculines reste très ferme dans les jeux de

poupées.

Pour la fabrication des poupées une grande variété de matériaux

d'origine naturelle ou de récupération est utilisée. Dans la très grande

majorité des cas, ces matériaux sont d'origine locale ou domestique : du

matériel minéral comme des pierres ou de l'argile ; du matériel animal

comme de la bouse sèche, des os, des cheveux, du cuir et de la laine ; du

matériel végétal comme des feuilles, du roseau, des branchettes, des

dattes, des épis de maïs ; du matériel textile comme des chiffons et des

fils ; du matériel métallique comme des fils de fer et de la tôle ; du

matériel plastique comme des flacons, des fils et des bijoux. L'apport de

matériaux étrangers au milieu naturel ou domestique est négligeable, les

seuls cas remarquables étant la tête en papier cartonné des poupées

mozabites, l'utilisation de fils électriques plastifiés par les enfants de la

vallée de la Saoura, la tête en flacon des récentes poupées des filles ghrib

et la poupée en plastique importée au Maroc et certainement aussi dans

les autres pays de la région.

En ce qui concerne la forme et l'élaboration des poupées des enfants

sahariens et nord-africains, les enfants de chaque population mentionnée

semblent s'être tenus à un ou parfois quelques modèles clairement

définis.

Comme dans chaque communauté les enfants jouent avec le même

type de poupées, leur similitude facilite l'élaboration et la

communication de significations communes. Ceci se trouve renforcé par

le fait que les enfants fabriquent eux-mêmes leurs poupées. Dès lors, les

219

poupées et jeux de poupées peuvent être vus comme un moyen effectif

de communication aidant au maintien du système socioculturel. Mais

cela ne signifie nullement que la créativité individuelle est absente.

Si cependant l'on prend en vue toute l'aire géographique en question

une intéressante variété se laisse entrevoir, aussi bien sur le plan des

matériaux utilisés, que de la forme, de la grandeur, du visage, de la

coiffure et de l'élaboration vestimentaire. Sauf exception assez rare, les

poupées restent des représentations figuratives et réalistes du moins au

niveau de l'aperçu global et de l'aspect vestimentaire. Abstraction faite

de la classe aisée, le modèle de la femme idéale est une femme bien

nourrie, même corpulente, décemment vêtue comme le démontrent les

poupées-femmes de ces régions.

Chez beaucoup de populations nord-africaines et sahariennes, les traits

de visage ne sont pas indiqués sur les poupées locales ou bien ils le sont

de manière fantaisiste. Je n'ai trouvé des poupées à visage que parmi les

poupées-femmes belbala, mozabites, marocaines et tunisiennes, ainsi

qu'auprès des filles ghrib où il est question d'une évolution récente

influencée par l'école, une évolution qui se confirme aussi pour certaines

communautés marocaines. Cependant plusieurs poupées que j'ai vues

chez des enfants marocains depuis 1998 ont des traits de visage et il

arrive qu'une poupée refaite par une mère a des traits de visage et que

celle faite par sa fille n'en a pas. L'idée que des poupées sans traits de

visage sont plus anciennes, originelles ou authentiques que celles avec

des traits de visage semble fausse pour le moment.

Les informations que j'ai pu obtenir depuis la première édition de ce

livre en 1993, confirment l'utilisation de la poupée locale ou

traditionnelle, faite par les filles et très rarement des garçons, pour les

jeux de poupées dans les villages du centre et du sud du Maroc. En

même temps se trouve confirmés leur disparition et leur remplacement

par la poupée en plastique importée de Chine ou ailleurs, dans les villes

et les petits centres urbanisés, de temps en temps même dans un village.

Plusieurs informations démontrent que la poupée en plastique s'est

infiltrée lentement et que pendant tout un temps les deux types de

poupées ont coexisté ou coexistent encore. Dans ce contexte l'influence

des milieux aisés sur les citadins et ruraux des classes moyennes et

populaires peut être soulignée. Que dans ces milieux aisés, suite à la

stimulation par les médias audio-visuels, l'on est branché sur ce qui est à

220

la mode en Europe est souligné dans un numéro spécial, “le Marché du

Jouet”, de la revue marocaine Enjeux (1993: 35-36) :

Une contagion qui s'apparente à un véritable 'transfert culturel' dont

le meilleur exemple est sans doute la célèbre poupée Barbie. De nos

jours une 'petite marocaine de bonne famille' se doit d'avoir la

panoplie complète : la maison Barbie avec son mobilier, la garde

robe Barbie, la Ferrari de Barbie, son fiancé... De quoi bâtir un

univers conforme aux stéréotypes culturels occidentaux. Même

phénomène chez les garçons, mais les modes sont différents. En ce

moment les robots genre Terminator ont une côte d'enfer!

Le premier “salon de l'enfant” qui s'est tenu du 16 au 26 décembre 1993

s'adressait aussi aux parents et enfants des milieux favorisés citadins.

L'intrusion de la poupée Barbie dans les activités ludiques des filles de

la classe aisée indique un changement fondamental dans les attitudes

traditionnelles envers le modèle de femme idéale en Afrique du Nord, un

modèle idéal décrit plus haut comme une jeune femme corpulente

décemment vêtue. Une femme du type Barbie est dans la réalité décrite

au Maroc comme un 'squelette vivant'. Une femme dont l'aspect

physique est attribué à l'une des conditions misérables suivantes : la

pauvreté, la maladie ou les problèmes, sinon à une interaction entre ces

facteurs. Dès lors, il n'est pas surprenant que certaines femmes

marocaines prennent des pilules pour grossir tout comme d'autres

femmes en Occident le font pour maigrir.

Pourtant, une poupée svelte avec une robe andalouse flamenco,

localement crochetée, s'infiltre dans les maisons marocaines (fig. 95, p.

148). Mais suivant plusieurs informatrices ces poupées ne servent

nullement comme jouets d'enfants. Elles sont des objets de décoration

que l'on retrouve surtout sur les postes de télévision. Néanmoins, il est

possible que dans un avenir plus ou moins proche le modèle Barbie

dépasse le modèle traditionnel de poupée comme cela se fait dans la

classe aisée. Un exemple de la progression de poupées en plastique du

genre Barbie au Maroc durant ces dernières années se remarque dans le

jeu de poupée de deux filles du village Zaïda au Maroc Central (fig. 94,

p. 148) et d'une fille de Sidi Ifni dans le sud-marocain (Rossie and

Daoumani, 2003, Video 1). Des informations obtenues lors de la foire du

221

moussem annuel de Sidi Ifni en juillet 2003 démontrent que ce genre de

poupées en plastique se vend bien même si les vendeurs de jouets disent

que la poupée Little Miss, importée de Chine et avec des formes plus

arrondies, est la plus populaire parmi les filles de cette ville (fig. 123, p.

173).

Il faut, avant de conclure cette synthèse générale, tout de même attirer

l'attention sur le fait que la portée de cette analyse des poupées et jeux de

poupées sahariens et nord-africains se trouve limitée par les sources

d'informations qui ont été utilisées. Ainsi les poupées et jeux de poupées

mentionnés n'excluent nullement l'existence d'autres types de poupées et

d'autres jeux de poupées au Sahara et en Afrique du Nord. Je ne peux

donc qu'espérer que d'autres compléteront, et si nécessaire corrigeront,

les données rassemblées dans ce livre. Ce complément ou cette

correction est d'autant plus nécessaire que les données bibliographiques

ne soient pas toujours basées sur des analyses approfondies et que mes

recherches sur le terrain se limitent quand même à un nombre restreint

d'enfants.

222

223

2 Aspects environnementaux et économiques

Au Sahara et en Afrique du Nord et dans les limites de cette analyse, la

poupée est un objet confectionné auquel chacun - enfant, adulte et

société - donne le statut de jouet. Il ne s'agit nullement d'un quelconque

objet pris dans l'environnement qui, par hasard et par l'imagination et la

volonté de l'enfant, serait devenu une poupée.

Dans l'aire géographique en question, il existe une relation très étroite

entre l'environnement physique et les poupées. Ceci est du en premier

lieu à l'utilisation de matériaux locaux d'origine minérale et végétale,

ainsi que de matériaux utilisés dans les ménages. Je n'ai trouvé que deux

exceptions, l'emploi d'une tête de poupée de fabrication européenne pour

un type de poupée-femme mozabite et celle de la poupée en plastique

servant d'armature à habiller ou à utiliser comme poupée finie dans

certaines communautés marocaines.

Les poupées et les objets comme la tente, la maison et les ustensiles

qui entrent dans les jeux de poupées, reflètent directement la réalité. Ils

sont “une simulation des objets du monde réel” comme le dit Brian

Sutton-Smith des objets-jeu du 19e siècle en Europe (1987: 20).

En ce qui concerne l'aspect spatial des jeux de poupées, il est évident

que, dans la plupart des cas, ces jeux de poupées se déroulent à

l'extérieur et non pas dans une chambre d'enfant qui d'ailleurs n'existait

pas dans les habitations des communautés dont parle ce livre.

Sur l'aspect temporel peu d'informations ont été révélées. La seule

mention faite à ce sujet se réfère à la société belbala où le jeu de poupée

n'était autorisé ou du moins n'était stimulé que pendant l'automne et le

printemps au moment où la pluie est désirée. Jean Servier, qui a bien

étudié la relation entre les jeux d'enfants et le symbolisme de l'année

agraire en Algérie, parle du jeu de la toupie, de la balançoire, du saut-de-

mouton et du combat de pierres, mais ne mentionne pas le jeu de poupée

(1962: 277-280). En ce qui concerne les Ghrib, on m'a certifié qu'il

n'existait pas un temps de l'année où le jeu de la poupée était déconseillé

ou au contraire stimulé. La même réponse me fut donnée chaque fois que

j'ai reçu une réaction à ce sujet d'un marocain ou d'une marocaine.

224

Pour ce qu'il en est de l'aspect économique l'on peut affirmer que la

poupée n'est jamais un objet du circuit commercial. Bien au contraire,

c'est une poupée faite par les enfants eux-mêmes, éventuellement par

quelqu'un de sa famille et plus rare encore par l'artisane ou l'artisan

locaux. Cependant, des filles du village marocain Ksar Hasni Biad près

des dunes de sable de Merzouga vendent pour quelques dirhams les

poupées qu'elles ont faites aux touristes de passage. Mais cela est bien le

seul exemple d'une commercialisation débutante que je connais. Dans ce

contexte je peux mentionner des sites Internet qui vendent des poupées

africaines probablement faites par des adultes (sites consultés le 7

septembre 2004: http://www.over2u.com/shop/african_dolls.html ou

http://www.africaguide.com/shop/dolls.htm).

Les vêtements et les parures des poupées sont faits de matériaux de

récupération, vieux chiffons, vieilles perles, fils de fer, morceaux

d'aluminium... Comme l'armature des poupées reste simple, la

technologie utilisée demeure rudimentaire. En plus, le modèle de la

poupée reste stable dans chaque population, même s'il y a parfois plus

d'un genre de poupée.

La poupée en plastique, au contraire, fait partie du marché du jouet.

Cette poupée est, pour autant que je sois bien informée, toujours

importée, pour la poupée moins chère de Chine ou d'un pays du sud-est

de l'Asie et pour la poupée de luxe d'Europe. Il y a pourtant une petite

production de jouets en plastique bon marché au Maroc mais “les jouets

fabriqués au Maroc ne marchent pas. Trop bas de gamme pour une

clientèle d'employés et de fonctionnaires” (“le Marché du Jouet”, 1993:

34, 38).

225

3 Aspects socioculturels

Dans les milieux plus ou moins traditionnels dont il est question dans ce

livre, les poupées et jeux de poupées reflètent la réalité sociale et

culturelle de la communauté dans laquelle grandit l'enfant. Laissant de

côté de rares exceptions et pour autant que j'aie pu le vérifier, les

poupées et les jeux de poupées se réfèrent uniquement à la vie adulte.

Les poupées des filles comme celles des garçons ne sont pas des objets

isolés mais servent le plus souvent pour des jeux d'interprétation de la

vie féminine et masculine. La poupée-femme est une jeune mariée, une

épouse, une mère, même une fois une divorcée ou une femme âgée. La

poupée-homme est un jeune marié, un berger, un muletier, un cavalier,

un dromedariste, un guerrier, un notable. Dans la collection du Musée de

l'Homme ne se trouve qu'une poupée touarègue représentant un garçon.

Dans son jeu de poupée l'enfant anticipe très souvent la vie qu'il

mènera comme adulte, du moins dans la communauté traditionnelle où le

mode de vie ne changeait que peu d'une génération à l'autre ; une

stabilité qui n'existe d'ailleurs plus nulle part en Afrique du Nord et au

Sahara depuis deux ou trois décennies. Cependant, on peut se demander

si aujourd'hui les jeux de poupées proposent encore une figuration de la

réalité familiale selon les valeurs et les rôles dictés par la collectivité et si

elles ne deviennent pas un moyen de se libérer des contraintes sociales

comme en Occident où le jeu de “poupée n'est pas l'imitation du

comportement des adultes mais un moyen d'échapper à leur emprise”,

comme le dit Michel Manson (1984: 54).

Néanmoins, l'on peut aisément affirmer que dans les régions et pour la

période couverte par ce livre, la poupée et le jeu de poupée sont un

miroir du monde adulte, plus spécifiquement d'une vie d'adulte idéalisée.

Sauf très rares exceptions, les poupées et les jeux de poupées

représentent des personnages et des activités qui socialement sont

valorisés. Quand on analyse ces poupées et jeux de poupées, il devient

clair qu'aussi bien les poupées-hommes que les poupées-femmes

symbolisent presque exclusivement des statuts idéalisés d'hommes et de

femmes, un homme ou une femme dans une situation localement

enviable. Référence est constamment faite à un modèle positif et valorisé

auquel l'enfant peut s'identifier.

226

Cela contraste avec la poupée occidentale à partir du début du

vingtième siècle, une poupée que Gilles Brougère (1985: 134-135) décrit

de la manière suivante :

Le païdomorphisme strict ne peut rendre compte de tout ce qui se fait,

se vend sous l'appellation poupée aujourd'hui. Au-delà des formes

purement enfantines, il s'agit d'un monde pour et par l'enfant, qui

n'existe qu'en fonction des représentations et désirs prêtés à l'enfant.

C'est la trace de l'interprétation que font les adultes de l'imaginaire et

des aspirations des enfants... La poupée est alors le miroir d'une

enfance idéale, idéalisée, mais destiné à l'enfant, et cela selon

plusieurs voies possibles qu'il s'agisse de la figuration directe de

l'enfant, de celle des aspirations qu'on lui prête, du repli dans un

monde imaginaire sécurisant parce que purement enfantin ou

considéré tel (Kiki, les personnages de Walt Disney).

Une autre distinction importante est celle entre une approche collective

et plus ou moins uniformisée du jeu de poupée et une approche

individuelle et singulière. En général on a tendance à souligner l'aspect

collectif et uniforme des jeux de poupées dans les communautés

enfantines sahariennes et nord-africaines, un point de vue que je

partageais volontiers. Mais le plus que j'arrive à observer et à m'informer

sur les jeux de poupées au Maroc, le plus que je me rends compte qu'il

est bien possible que sous l'uniformité apparente des modèles de poupées

et des thèmes des jeux de poupées propre à chaque communauté, région,

sous-ethnie ou ethnie se cachent des variantes individuelles propres à

chaque enfant ou petit groupe de jeu. Un exemple frappant est présenté

par l'analyse des poupées et jeux de poupées des trois sœurs Laabib de

Ksar Assaka qui ont joué avec leur propre petit groupe de jeu et avec

quelques années de différence entre 1975 et 1985 autour de la même

maison paternelle. Je parle de cet aspect singulier et individuel dans les

jeux et jouets d'enfants marocains dans le chapitre "Toys, Play and

Creativity" (p. 93) de mon livre Toys, Play, Culture and Society.

En ce qui concerne la relation adulte-enfant à travers le don d'une

poupée, si général dans d'autres sociétés plus tournées vers les biens de

consommation, ce don semblait être très rare dans les sociétés dont j'ai

parlé, les enfants faisant eux-mêmes leur poupée dans bon nombre de

227

cas. Si ce n'est pas l'enfant lui-même qui la fait, c'est une sœur ou un

frère, une cousine ou un cousin qui la fait. Et même si la poupée est faite

par une mère, une tante, une servante ou toute autre personne, cette

poupée ne semble pas s'insérer, sauf très rares exceptions, dans un

système de récompenses ou de gages d'affection. Ce n'est

qu'exceptionnellement que la poupée sert d'objet cadeau. Cette situation

contraste clairement avec celle des sociétés occidentales décrites par

Brian Sutton-Smith (1992: 7) :

Les jouets sont donnés comme un gage des relations familiales. Le

parent dit 'je te donne ce cadeau pour te lier à moi, maintenant vas

jouer seul'. Afin de remplir cette impression de solitude, certains

jouets sont de jouets doux, animaux et poupées que l'enfant traitera

comme des compagnons imaginaires.

J'ai pu démontrer dans un article “Children's play, generations and

gender with special reference to the Ghrib” (1993) que les relations

ludiques entre générations d'adultes et d'enfants ne sont pas

exceptionnelles chez les Ghrib du Sahara tunisien et il en est

probablement de même dans d'autres régions sahariennes et nord-

africaines (voir le chapitre "Toys, Play and Generations" dans mon livre

Toys, Play, Culture and Society, p. 117). Cependant dans les jeux de

poupées cette relation ludique entre adulte et enfant semble être bien rare

mais elle est certainement plus courante entre enfants de générations

successives.

Dès lors, les jeux de poupées jouent un rôle important dans les

relations enfants-enfants. Il s'agit pour ainsi dire toujours de jeux

collectifs où des petites et des jeunes filles jouent ensemble. Ces enfants

appartiennent à la même famille étendue ou sont des voisins. A l'écart du

contrôle direct des adultes, ils se livrent à leur interprétation de la vie de

ménage, des occupations féminines ou masculines, des festivités. Gilles

Brougère (1996: 7) souligne pour la France l'importance majeure du

groupe de jeu pour le déroulement du jeu dans une analyse des jeux avec

les Power Rangers issus d'une série de télévision :

228

C'est bien dans une relation complexe avec les autres que le jeu se

construit dans le cadre d'une référence qui fonctionne comme une

règle, ce qui s'impose pour que le jeu existe et soit partagé. Mais pour

cela il faut organiser le fonctionnement collectif ce qui suppose

encore résoudre des problèmes pour adapter la situation matérielle et

sociale à l'objectif ludique.

Ce constat me semble s'appliquer tout à fait aux groupes de jeu jouant à

la poupée dans des communautés où l'individualisme est moins

développé. Dans cet ordre d'idées on pourrait avancer que la créativité se

manifeste non seulement dans le contenu du jeu mais aussi dans

l'organisation du jeu.

Les poupées sahariennes et nord-africaines ne sont pas destinées à des

tout petits. Ce ne sont point des poupées qui puissent servir de support

affectif pour un bébé ou un bambin. D'ailleurs, ils n'en avaient pas

tellement besoin puisqu'ils vivaient en symbiose avec leur mère, et si elle

ne pouvait pas s'en occuper momentanément il y avait toujours une sœur

ou cousine aînée, une grand-mère ou une tante pour le faire.

Je viens d'écrire qu'il s'agit de l'interprétation du monde adulte par les

enfants à travers leurs jeux de poupées et non pas une imitation pure et

simple. A ce sujet Jürgen Jensen souligne dans son article sur les jeux et

jouets d'imitation dans l'île Buvuma en Ouganda que les jeux d'imitation

ne servent pas en premier lieu à l'apprentissage d'habilités, de techniques,

de comportements et de rôles car les enfants ont dans ces milieux la

possibilité et même le devoir de les pratiquer dans la vie de tous les jours

en s'intégrant progressivement aux tâches de leur mère, de leur père et

des autres membres de leur famille (1971: 208-209).

Il n'y a aucun doute que les jeux de poupées dont il a été question dans

l'analyse, jouent un rôle important dans le développement de la

personnalité de la fille, et parfois du garçon, ainsi que dans

l'apprentissage du milieu naturel, social et culturel. Ceci est d'autant plus

vrai que dans le milieu rural, d'où proviennent la majorité des poupées

décrites, l'éducation scolaire de type moderne n'était pas une réalité

journalière surtout pour les filles.

A travers les jeux de poupées, dans lesquels se trouvent parfois

mélangés des petits enfants et des enfants plus âgés, bons nombres

d'informations sur l'environnement physique et social, de

229

comportements, de savoir-faire, de connaissances, de symboles, de

significations, d'idées, de valeurs et de normes esthétiques, sociaux et

moraux sont transmis de génération en génération et intériorisés de

manière ludique par les enfants. Ceci nous amène à considérer certains

aspects culturels en relation avec les jeux. “Culture comme matière de

jeu et culture comme élément qui conditionne les choix ludiques et la

direction du développement de l'expérience” (Ferrarotti, 1987: 31).

Les poupées mettent l'enfant en rapport avec un fonds culturel, avec

des significations plastiques, propres à la communauté dans laquelle il

grandit. Comme les poupées sont intimement liées aux réalités

socioculturelles dans lesquelles elles fonctionnent, elles participent

directement au système de communication visuelle de chaque

communauté et par lequel, à travers des signes conventionnels, un

échange s'élabore entre l'enfant et son environnement. Cependant, il ne

s'agit pas d'un rapport passif avec cette culture, mais d'une appropriation

active. “La valeur ludique renforce l'efficacité symbolique du jouet. C'est

ce qui fait la spécificité du jouet par rapport à d'autres supports culturels:

la relation active qu'y greffe l'enfant” (Brougère, 1987: 56). Dans le cas

des jeux de poupées sahariens et nord-africains l'imprégnation culturelle

doit être d'autant plus forte que les enfants confectionnent normalement

eux-mêmes leurs poupées.

Le jeu de poupée n'est pas limité à la communication visuelle à travers

les poupées car d'autres formes de communication non-verbales, par les

gestes et la danse, y trouvent leur place. La communication verbale à

travers les dialogues et les chansons ne manquent nullement puisque les

jeux de poupées comportent un support linguistique comme le

démontrent clairement les jeux de poupées décrits dans le chapitre sur les

poupées-femmes marocaines (p. 117), un support linguistique d'une très

grande importance dans des cultures orales.

Bien que les jeux de poupées offrent bon nombre d'aspects positifs

pour une socialisation efficace des enfants, l'attitude envers les poupées

n'est pas toujours bienveillante dans les régions en question. Plus d'une

fois il existe une attitude ambivalente envers les poupées auprès des

adultes, du moins autrefois. Cette attitude ambivalente semble basée sur

la relation qui est faite entre la poupée d'enfant, d'une part, et la poupée

rituelle ou magique, d'autre part.

230

Comme l'on peut s'en rendre compte dans la description du jeu de

poupée marocain où un enterrement est imité par les filles ou du jeu

rituel pour provoquer la pluie, la distinction entre jeu d'enfant et jeu

rituel est très floue. Dans le catalogue de la mémorable exposition sur les

poupées, tenue au Musée de l'Homme en 1983-1984, Dominique

Champault a consacré un article à ce thème avec le titre révélateur “du

rituel agraire au jeu” (1983: 79-81). Le lecteur intéressé trouvera un

aperçu des données sur les poupées rituelles nord-africaines dans Sigrid

Paul, Afrikanische Puppen (1970: 110-118), ou bien il peut se référer

directement aux sources elles-mêmes dont les plus importantes sont :

Doutté (1905: 328-329), Herber (1918: 70-72), Hardy et Brunot (1925:

48) et Flamand (p. 182-183). Voir aussi le chapitre "Toys, Play, Rituals

and Festivities" dans mon livre Toys, Play, Culture and Society (p. 139).

Que cette méfiance envers les poupées n'ait pas totalement disparu à la

fin des années soixante nous explique Nefissa Zerdoumi (1982: 225) en

parlant de la région de Tlemcen en Algérie :

L'Islam, en prohibant formellement les représentations portant ombre,

c'est-à-dire les statues, a créé une méfiance dans l'esprit de certaines

familles à l'égard de la présence de poupées au foyer. Lorsqu'elles

sont tolérées, celles-ci sont souvent suspectes car les djnoun (c'est-à-

dire les esprits) viennent volontiers les habiter ; il est alors imprudent

de les laisser près d'un bébé pendant son sommeil, la nuit surtout.

Cette méfiance existait aussi dans le sud du Maroc et pour les mêmes

raisons. Selon Fatima Outizal, on disait encore dans son enfance que si la

taslit ou la °arûsa reste la nuit avec l'enfant ses cheveux ne poussent pas.

Et elle précise que si cette croyance s'affaiblit à chaque nouvelle

génération, elle était encore toute vivante dans la génération de ses

grands-mères.

Selon Juliette Grange, tout jeu et toute coutume enfantine obéissent “à

une loi de rétention..., possédant une inertie face au changement et

conservant des coutumes séculaires” (1979: 234). Cela semble vrai pour

les poupées et jeux de poupées sahariens et nord-africains, du moins

jusqu'à un certain point, car il n'en reste pas moins vrai que l'évolution

technologique, économique et socioculturelle de ces sociétés ont

231

influencé ce patrimoine ludique. Un bel exemple nous donne Jean Gabus

qui écrit, déjà en 1967 (p. 118) :

Les bouleversements que subit la société mauritanienne, pourtant

atténués (mais jusqu'à quand ?) à Oualata, s'inscrivent dans ces

objets destinés aux jeux d'enfants. Dans un avenir plus proche qu'on

l'imagine, les maisons de poupées de Oualata deviendront 'souvenirs

destinés aux touristes'. Il y a deux ans, elles étaient déjà l'un des

fleurons de l'artisanat national faisant l'objet d'une exposition à

Nouakchott. Il ne s'agissait déjà plus des petites maisons

traditionnelles comportant deux ou trois pièces. Les dimensions

avaient été doublées. Par ailleurs, on constate à Oualata qu'elles sont

peut-être plus 'clinquantes' que par le passé, mais souvent plus

fragiles. Aussi, dans la perspective d'un transport (si l'on veut

proposer aux touristes un objet, encore faut-il qu'ils puissent

l'emporter) sont apparues des maisons de poupées en métal... Elles

sont laides, les enfants ne les utilisent pas, leur destination et leur

fonction ont radicalement changé.

Cette influence de la modernité dans le domaine du ludique n'est pas

d'aujourd'hui en Afrique du Nord et au Sahara. Mention est déjà faite de

poupées européennes dans les villes marocaines par Herber en 1918 (p.

80) et Dupuy écrit en 1933 qu'en Tunisie des jouets allemands sont

vendus pour la fête de l'°ashûra.

Beaucoup plus récemment, c'est-à-dire en 1975, l'influence de l'école

sur les garçons ghrib leur faisait dessiner des visages sur les poupées de

leurs sœurs qui par tradition n'en mettaient pas. Et que dire de

l'innovation toute récente de la tête de poupée faite d'un flacon, produit

de la société de consommation, innovation utilisée en juillet 1991 par

une jeune fille ghrib pour confectionner sa poupée, par ailleurs du genre

traditionnel (fig. 43, p. 95).

Dans ce contexte, il est à remarquer que l'univers ludique des filles

reste bien plus longtemps dans la sphère de la tradition que celui des

garçons qui s'inspire volontiers des innovations technologiques et des

changements socioculturels. Un exemple en est donné par mes propres

observations au Maroc et ceux de mon ami et collègue Gilbert J.M.

Claus chez les Ghrib du Sahara tunisien. Dans ces deux cas on peut

232

affirmer que le football règne en maître auprès des garçons là où les

filles restent attachées à leurs jeux de poupées. Mais on peut se

demander quelle sera l'influence à court et à moyen terme sur les filles

de la télévision qui a conquis les communautés les plus isolées, comme

c'est le cas chez les Ghrib et dans presque tous les villages marocains, et

pénètre directement dans l'intimité familiale, le domaine féminin par

excellence dans ces régions. Comme j'ai pu le remarquer à Imi-n-

Tanoute et d'autres endroits du Maroc, une autre influence, aussi directe

et pénétrante, s'exerce à travers les poupées, nounours et autres jouets

sophistiqués qu'offrent aux enfants les membres émigrés de la famille de

retour au pays ou qui sont ramenés par ceux restés au pays suite à une

visite auprès de leur famille immigrée en Europe.

Pour une analyse du thème signes, significations et communication

ainsi que de l'influence de l'évolution des communautés nord-africaines

et sahariennes en ce qui concerne les poupées d'enfants et les jeux de

poupées voir les chapitres en question dans mon livre Toys, Play,

Culture and Society (p. 43, 149).

233

Utiliser la Culture Ludique

Nord-Africaine et Saharienne

234

235

Il ne faut pas, et j‟en suis tout à fait convaincu, que cette recherche sur le

patrimoine ludique enfantin du passé et du présent ne reste qu‟une œuvre

académique ou folklorique, si méritoire qu'elle soit. Bien au contraire,

cette recherche devrait aboutir à des résultats tout à fait concrets. Je

pense ici au domaine du bien-être de l'enfant et de l‟éducation formelle

et informelle, de l‟adaptation de l‟école aux conditions locales, des

relations parents-enfants et parents-enseignants, au développement

communautaire et à la promotion de l‟entente interculturelle. Dans mon

livre Games and Toys: Anthropological Research on their Practical

Contribution to Child Development. Aids to Programming Unicef

Assistance to Education, publié en 1984 par le „Unit for Co-opération

with Unicef and the World Food Programme‟ de l‟UNESCO, j‟ai eu

l‟occasion de parler de l‟utilisation du patrimoine ludique local pour une

meilleure connaissance de l‟enfant et de sa société (p. 19-24), pour lier

l‟éducation scolaire avec la vie réelle et l‟environnement des enfants,

pour stimuler l‟intérêt et la participation des parents, pour l‟élaboration

de matériaux pédagogiques ancrés dans la culture locale, pour la

formation du personnel para-professionnel et professionnel des crèches,

jardins d‟enfants et écoles primaires ainsi que pour les activités des

mouvements de jeunesse (p. 24-32).

Mes idées sur l‟utilisation éventuelle de la culture ludique des enfants

sahariens et nord-africaines pour des actions pédagogiques et culturelles

se limitent au niveau théorique et des souhaits car l‟élaboration de

pareilles actions appartient aux professionnels et autres acteurs culturels

de ces régions. Dans ce contexte on peut mentionner la création

d‟associations culturelles amazighes dans les villes marocaines avec une

importante population amazighophone. Ainsi, lorsque j‟étais invité par

l‟Association de l‟Université d‟Eté Agadir à faire une communication

lors de la septième session annuelle du 25 qu 27 juillet 2003 consacrée à

“la culture amazighe et les problèmes de développement” une attitude

nouvelle concernant la culture ludique des enfants pouvait se remarquer.

Comme thème de mon intervention j‟ai choisit “la culture ludique des

enfants amazighs marocains et les questions de développement” pour

mettre en avant les possibilités d‟utiliser les activités de jeux et de

création de jouets des enfants amazighs eux-mêmes dans le préscolaire et

l‟école primaire, dans la formation des professionnels pour ces écoles et

des volontaires pour les maisons de jeunes et les colonies de vacances,

236

pour des actions socioculturelles, pour des programmes concernant la

langue amazighe, pour le développement d‟une littérature enfantine

basée sur les réalités locales, etc. Comme je fus contacté après cette

communication par plusieurs personnes voulant en savoir plus ou même

tester certaines possibilités dans la pratique, j‟ai l‟impression qu‟un

intérêt grandissant se manifeste pour la culture ludique locale et son

utilisation pédagogique et culturelle. Les années à venir démontreront si

cela fut plus qu‟un enthousiasme passager.

La proposition pour utiliser mes données dans le cadre de l‟éducation

interculturelle ou l‟éducation pour la paix dans un contexte occidental au

contraire est basée sur des expériences personnelles. Ici les paroles de

Claude Lévi-Strauss sont plus que pertinentes : la découverte des autres

est la découverte d‟une relation, nullement la découverte d‟une barrière

(citation non-littéraire).

237

1 Actions pédagogiques et culturelles

dans les pays en voie de développement

Comme il est prouvé qu‟il existe “un lien étroit entre la qualité de la

stimulation au foyer au cours des premières années et les résultats

scolaires en primaire” (Groupe Consultatif, 1991: 10-11), il y a tout

intérêt à porter une attention particulière aux jeux et jouets dans ces

foyers et à l‟attitude des adultes envers eux. Dans cette même

publication Préparer les enfants à l‟école et adapter l‟école aux enfants

on peut lire encore : “il convient d‟endosser la responsabilité que les

écoles s‟adaptent aux besoins des enfants et non plus demander aux

enfants de s‟adapter au système”. Halpern et Meyers (Groupe

Consultatif, 1991: 22) concluent ainsi :

Un programme intégré jeune enfant-enseignement primaire

permettrait d‟établir un lien entre les intérêts de la famille et ceux de

la communauté et de renforcer le système scolaire formel ; il serait

possible, par exemple, d‟intégrer les valeurs et les contenus de la

culture locale au programma d‟enseignement, en premier lieu au

niveau pré-primaire puis au niveau primaire.

Un des contenus de la culture locale qui se prête à merveille pour

s‟intégrer au programma de l‟enseignement formel est celui des jeux et

jouets. De ce point de vue, il serait donc tout à fait dommage que les

responsables de la formation et de l‟éducation en Afrique du Nord et au

Sahara négligent l‟héritage ludique de leurs sociétés pour se laisser

immerger par la culture ludique de la société de consommation et des

médias occidentaux, les jeux standardisés des écoles européennes ou

américaines, ou encore les jouets en plastique fabriqués massivement

assez souvent de mauvais goût et parfois même dangereux. Dans son

livre sur l'enfance Kpelle au Liberia David F. Lancy discute le problème

d'utiliser dans l'éducation la culture locale et les jeux (1996: 197-198).

Quand on repasse en vue toutes ces poupées pour lesquelles les

enfants ont utilisé des matériaux naturels et de récupération on ne peut

que s‟étonner de l'utilisation créative de ces matériaux, une utilisation

qui renferme un vrai apprentissage. Dans une notice Bernadette Luwaile

238

Mwamba, du Salvation Army Pre-school à Lusaka en Zambie, souligne

aussi cet aspect. Elle écrit que pendant des générations les enfants ont

joué avec le sable, l‟eau, la boue, l‟argile, les pierres, les bâtons, les

tiges, les balles de blé, les noix, les fruits, les feuilles et les fleurs. Mais

aujourd‟hui, les jouets achetés dans les magasins prédominent.

Cependant, il est plus important que jamais que nos enfants valorisent les

ressources de la terre. Si nous pouvons promouvoir leur sensibilité dès le

plus jeune âge, leur avenir deviendra plus sûre. Pour occuper, amuser et

éduquer de jeunes enfants il n‟est pas nécessaire d‟acheter des jouets

coûteux, une considération importante en ces temps difficiles. Des

grandes quantités de matériaux pour jouer sont facilement disponibles si

l‟on a un peu d'imagination, beaucoup de patience et l‟empressement à

laisser les enfants jouer de manière salissante (Bernard van Leer

Foundation, 1996: 21).

On pourrait aussi penser à promouvoir une interaction fertile entre les

jeux traditionnels et les jeux pédagogiques modernes d'origine

occidentale pour développer une pédagogie ludique adaptée. Un exemple

de cette interaction se trouve dans l'étude de Chantal Lombard, Les

jouets des enfants baoulé. Essais sur la créativité enfantine dans une

société rurale africaine. Cette recherche s'inscrivait dans un programme

de développement de l‟éducation mis sur pied par le gouvernement de la

Côte d'Ivoire et fut basée sur une redéfinition des valeurs éducatives. A

ce sujet, Chantal Lombard (1978: 209) écrit :

Nos réflexions, sans pouvoir prétendre suffire à proposer une

pédagogie adaptée à la Côte d'Ivoire, insisteront sur deux points : 1.

Pour que la créativité traditionnelle puisse être intégrée à l‟école,

comme un ferment du développement des enfants, il s‟agit d‟ouvrir

l‟école afin que celle-ci soit le lieu de rencontre entre la culture

traditionnelle et le savoir scientifique moderne, et non le lieu de la

rupture, comme elle l‟est encore actuellement. 2. Pour que la

créativité traditionnelle acquière une dimension nouvelle et féconde la

pensée moderne, il s‟agit que l‟école fasse accéder les enfants à un

autre niveau de maîtrise de l‟environnement matériel, qu‟elle

réconcilie la technologie et l‟imagination créatrice.

239

Pour autant que je sache, c‟est en Algérie et au Maroc que semble se

dessiner une tentative d‟intégration de la culture ludique locale dans

l‟enseignement, bien qu‟à un niveau et dans un réseau d‟enseignement

différents.

En Algérie il s‟agit de l‟intégration de certains jeux traditionnels dans

le domaine de l‟éducation physique. Youssef Fates (1987:18), qui a

préparé une thèse de doctorat d‟état à l‟Université Paris 1 sur le thème du

sport en Algérie, décrit ainsi cette tentative :

La Direction des Etudes, de la Recherche et de la Coordination du

Ministère de la Jeunesse et des Sports d'Algérie, a organisé une

enquête nationale par questionnaire, dans les quarante-huit

„wilayates‟ (départements) du pays afin de recueillir des informations

sur les caractéristiques historiques des jeux (les moments, les

occasions de leur pratique, les infrastructures nécessaires, le

matériel, les règles) et sur leurs pratiquants (l'âge, le sexe, le

nombre). Outre le fait que l'enquête visait “la production d‟un

document fiable et en rapport avec la réalité concrète du secteur

géographique”, l'enquête du Ministère de la Jeunesse et des Sports

recherchait la mise en place d'un projet d'animation de quartiers,

basée sur l'utilisation des jeux et des sports traditionnels. “En outre,

placés entre la modernité et la tradition, les jeux traditionnels,

organisés sur des bases pédagogiques et éducatives enrichissantes,

devront constituer un moyen de mobilisation des masses populaires en

général, et des jeunes, en particulier”. Malheureusement, jusqu'à ce

jour les résultats de cette enquête n'ont pas encore été dépouillés.

On peut donc supposer que cette tentative d‟intégration des jeux dans

l‟éducation physique et dans l‟animation des quartiers en Algérie n‟a pas

dépassé le stade des bonnes intentions.

Au Maroc, une autre tentative structurée de valorisation du patrimoine

ludique pourrait se réaliser à travers la collaboration de deux projets

soutenus financièrement et professionnellement par la Bernard van Leer

Foundation, une fondation internationale qui concentre ses efforts sur le

développement d'initiatives non-onéreuses et basées sur la participation

des communautés locales, dirigées vers le bien-être de la petite enfance

et vers l'éducation des enfants socialement et culturellement

240

désavantagés de 0 à 8 ans. Il s'agit, d'un côté, de l'organisation Alliance

de Travail dans la Formation et de l'Action pour l'Enfance, ATFALE ou

'enfant' en arabe, basée à l'Université Mohammed V à Rabat. L'autre

projet, du Ministère de l'Education, concerne les 36.117 kouttab ou

institutions coraniques préscolaires avec environ 800.000 enfants de

deux à six ans en 1994-95 (Bouzoubaâ, 1998: 5).

Ces deux projets collaborent pour former les instituteurs des kouttab,

non formés pour s'occuper de cette classe d'âge et pour qui n'existait

aucune formation au travail. Dans cette formation l‟attention est portée

sur bon nombre de thèmes comme celui du langage, de la santé, de

l'arithmétique, des méthodes et de l'organisation scolaire, mais aussi sur

le thème ludique. Pour cela Brigitte El Andaloussi a rédigé une brochure

a été rédigée sur le jeu dans le préscolaire, une première version fut

publiée par ATFALE en 1990 et réédité en 1992 (ATFALE, 1992) ainsi

qu'une version remaniée publiée par Gaëtan Morin éditeur – Maghreb en

1997 (El Andaloussi, 1997). Dans la première version de cette brochure

se trouvait une référence directe aux jeux traditionnels marocains. Sous

la rubrique Les jeux traditionnels il était dit (ATFALE, 1992: 10) :

Il est important que l'éducatrice connaisse les jeux traditionnels de la

région dans laquelle elle travaille, et qu'elle en favorise l'expression

dans son institution car ils présentent un intérêt réel à différents

niveaux. Plus les enfants seront scolarisés et moins les jeux

traditionnellement appris dans la famille, dans la rue ou dans les

champs par les enfants, auront tendance a être retransmis malgré leur

richesse indéniable pour le développement du jeune enfant. En effet,

ils véhiculent la mémoire de son pays, ils favorisent sa créativité et

son initiative et ils permettent d'entretenir des liens entre les enfants

de classes d'âge différentes.

Bien que je regrette que ce paragraphe important et l'unique référence

aux jeux traditionnels ne se trouve plus dans la version de 1997 – même

si les autres conseils donnés dans le petit chapitre "Jeux traditionnels" de

la version 1992 se retrouvent dans le nouveau chapitre "Quelques

conseils pratiques" (El Andaloussi, 1997: 10) – je dois mentionner que

l'intérêt de l'éducatrice au préscolaire pour la culture ludique enfantine

locale est maintenant stimulé en relation avec les comptines (El

241

Andaloussi, 1997: 9). Parlant de ce que l'éducatrice peut faire pour

développer la pratique des comptines et des chansons Brigitte El

Andaloussi écrit qu'elle doit chercher ce qu'il existe dans l'héritage

culturel. Dans ce contexte l'éducatrice doit créer une collection, l'enrichir

par l'échange avec des collègues et en demandant aux mères les petites

chansons qu'elles chantent à leurs enfants (1997: 9).

Un entretien, en février 1992 au Centre de Rééducation du Save the

Children Fund à Marrakech, avec Amina Drissi, qui a participé à un

séminaire d'information de ce projet préscolaire, semble indiquer que

l'héritage ludique marocain s'y trouve intégré. Une indication plus

précise m'est apparue lors de ma visite au Centre de Ressources pour le

Préscolaire à Kénitra. Ce centre, qui en novembre 1993 se trouvait à

l'école primaire Shuhada de cette ville, présentait dans un local comment

une classe du préscolaire pouvait être organisée afin de mieux s'adapter à

la pédagogie moderne. Dans le coin des poupées ne se trouvaient pas

seulement des poupées en plastique importées mais aussi des poupées en

armature de roseau habillées à la manière locale et confectionnées par

des participantes à la formation du groupe ATFALE (fig. 158).

158

242

Dans le cadre des innovations pédagogiques l'élaboration de coins

d'activités dans les kouttab, pour lesquels les enfants, les enseignants et

les parents apportent du matériel recyclable, est d‟une grande

importance. Le coin du „magasin de nourriture‟, de la „santé‟ et des

„poupées‟ sont les coins d‟activités les plus populaires et les plus

trouvés. Ainsi, un but majeur des rencontres au Centre de Ressources est

de stimuler la création par les enseignants et enseignantes de jeux et

jouets bon marché (Bouzoubaâ, 1998: 10, 12). Bien que la référence

directe à l'utilisation de la culture ludique des enfants marocains ne se

trouve plus dans la brochure de 1997 sur le jeu au préscolaire il est à

espérer que l'utilisation de ce patrimoine ludique local est toujours

stimulée lors des formations.

Il ne fait donc aucun doute que la culture ludique locale des enfants

devrait jouer un rôle important dans le préscolaire. Un rôle d‟autant plus

important que la participation des parents à la vie de l'école fait partie

intégrante des projets. Ces parents qui sont les dépositaires des traditions

ludiques locales peuvent entre autre être intéressés à cette participation

par le biais de la confection et l‟entretien des jouets, comme cela s‟est

réalisé dans d'autres pays en voie de développement (Bernard van Leer

Foundation, 1991: 14). Le guide d'activité pour le préscolaire de 1997,

mentionné ci-dessus, répond à cette préoccupation. Parlant de

promouvoir la fabrication de jouets traditionnels il est proposé de mettre

à profit la coopération des parents pour qu'ils transmettent ces jouets à

leurs enfants car l'industrie du jouet a détrôné toutes les techniques

traditionnelles de productions de jouets. Dès lors le préscolaire doit

utiliser le savoir-faire des mères pour créer des poupées et celui des

pères pour créer des véhicules avec du matériel naturel et de

récupération. Référence est aussi faite au coût minimal des jouets créés

sur place. Etant parfaitement d‟accord avec ce point de vue je voudrais

quand même souligner que cette domination des jouets fabriqués par

l'industrie doit être plus ou moins relativisée et cela non seulement dans

les villages et les centres ruraux mais aussi dans les quartiers populaires

des grandes villes marocaines. Premièrement, beaucoup d'enfants

marocains vivent encore dans des régions rurales où la création de jouets

par des enfants même d‟age préscolaire reste une activité courante et où

faire des poupées et des animaux-jouets traditionnels se fait parfois

encore dans le premier village à côté des centres ruraux. Deuxièmement,

243

mes recherches dans des petites villes comme Goulmima, Khemisset,

Midelt et Sidi Ifni montrent que même si certains modèles de jouets

fabriqués sur place et surtout les poupées traditionnelles semblent avoir

disparues, d'autres jouets et surtout des véhicules sont encore fabriqués

par les enfants. Concernant la poupée créée par les filles j'ai constaté un

jour qu'une fille de six ans vivant dans la ville rurale Sidi Ifni utilisait

spontanément l'armature traditionnelle faite d'un morceau de roseau et

d'un bâtonnet liés en forme de croix, une armature qu'elle habillait de

chiffons (Rossie and Daoumani, 2003, Video 1). Néanmoins, une

procédure courante est de remplacer l'armature traditionnelle par une

poupée en plastique peu chère que les filles habillent de morceaux

d‟étoffe. Troisièmement, même dans les quartiers populaires des

grandes villes comme Agadir, Kénitra et Marrakech j‟ai trouvé des

enfants, plus souvent des garçons que des filles, qui fabriquaient certains

jouets personnellement.

Ayant constaté l'adresse des enfants qui créent leurs propres jouets il

serait très utile que l'éducatrice au préscolaire cherche à savoir ce que les

enfants savent et peuvent faire. Ainsi une règle pédagogique importante

pourrait s'appliquer, c'est-à-dire de démarrer l'enseignement par

l'expérience personnelle de l'enfant dans son propre milieu. A côté des

parents on peut aussi utiliser l'expérience et l'intérêt pour la fabrication

de jouets des enfants plus âgés. Une éducatrice du préscolaire pourrait

éventuellement trouver de l'aide pour créer des jouets en joignant à ces

efforts des enfants plus âgés, eux qui sont les vrais experts.

En lisant quelques observations sur les kouttab faites par les membres

du groupe ATFALE on peut se rendre compte du chemin qui reste à

parcourir pour que ces institutions préscolaires puissent prendre profit de

la créativité que les enfants marocains déploient dans leurs activités

ludiques. En ce qui concerne le jeu et les jouets dans les kouttab, il est dit

qu'à l'étroit sur des bancs derrière des pupitres les enfants ne peuvent

bouger ni satisfaire leur besoin de jouer. En plus, il n'y a pas de terrain

de jeu (Bouzoubaâ, 1998: 6). L'introduction d'une pédagogie qui tient

compte de l'enfant lui-même et de sa créativité ludique est rendue plus

difficile encore par l'attitude des parents qui n'aiment pas payer pour voir

jouer leurs enfants dans un kouttab (Bouzoubaâ, 1998: 12).

244

Regardant à nouveau le guide d'activité sur le jeu au préscolaire et en

particulier les exemples des jeux joués à l'intérieur ou à l'extérieur, les

jeux de langage et les jeux d'équipe décrits dans les fiches techniques (El

Andaloussi, 1997: 53-78) il me semble que ces exemples peuvent bien

servir à trouver parmi les jeux des enfants amazighophones et

arabophones d'aujourd'hui des jeux qui s'accordent avec les objectifs

pédagogiques mentionnés pour les jeux proposés dans ce guide. Les jeux

qui y figurent ne semblent pas se référer aux expériences ludiques de la

plupart des enfants marocains et croire que beaucoup de ceux qui

travaillent au préscolaire pourront d'eux-mêmes utiliser les jeux locaux

des enfants de leurs classes est plutôt illusoire. Dès lors, faire un guide

supplémentaire offrant des exemples pris dans le patrimoine ludique

marocain serait d'une réelle utilité pour les éducatrices et éducateurs du

préscolaire et des premières années du primaire, ainsi que pour les

volontaires des colonies de vacances et des maisons de jeunes. Bien que

plus difficile à faire, on pourrait aussi essayer de trouver parmi les jeux

du patrimoine ludique marocain ou inspirés par ceux-ci des activités et

des thèmes pour développer des jeux pédagogiques comme ceux

présentés par Brigitte Elle Andaloussi (1997: 13-51). La même remarque

peut se faire en rapport à un autre guide d'activité pour le préscolaire,

celui sur l'activité ludique du jeune enfant. Alain Léonetti qui a écrit ce

guide intéressant souligne dans le contexte d'une éducation physique

centrée sur les besoins de l'enfant que pour être capable de réaliser cela il

est nécessaire de favoriser l'activité ludique spontanée de l'enfant (1997:

3). Cependant les exemples proposés reflètent plutôt des expériences

d'enfants européens. Ces exemples ont certainement leur utilité mais en y

ajoutant des exemples provenant du patrimoine ludique marocain

l'intégration du jeu spontané de l'enfant au préscolaire marocain serait

favorisée, une intégration vue par Alain Léonetti comme indispensable.

Selon Harinder Kohli, directeur de la Banque Mondiale pour le

Maghreb, les besoins les plus pressants dans le domaine social se

“trouvent chez les populations rurales et tout particulièrement les enfants

et les femmes”. (l‟Economiste, 1993: 30). Je crois que toute politique

sociale envers les enfants et leurs mères ne peut aboutir que si l'on tient

compte de la réalité socioculturelle dans laquelle ils vivent. Tenir compte

des expériences ludiques des enfants ruraux et leur utilisation sociale et

pédagogique peut y contribuer modestement mais efficacement. Au

245

niveau scolaire cela pourrait aider l'école à la campagne d'être moins un

lieu de déracinement, comme des auteurs marocains, dont El Mostafa

Haddiya (1988), l'ont décrite, pour devenir un lien entre la communauté

rurale et son développement.

Dans l'étude Child Survival and Development in Africa, Ibinabo

Agiobu-Kemmer se demande s'il n‟est pas possible d'incorporer des

traditions et des expériences culturellement valables dans le curriculum à

côté des sujets conventionnels et ceci à tous les niveaux de l'école. Cet

auteur écrit que les mères du projet Ntataise en Afrique du Sud ont peut-

être trouvé le préscolaire moins difficile à comprendre parce qu'elles ont

vu des collaborateurs ou collaboratrices du projet aider leurs enfants à

construire des petites maisons, des voitures et des animaux familiers, ou

même à faire des poteries d'argile. Beaucoup de compétences pratiques

peuvent être apprises aux enfants dans le contexte du jeu. Des objets et

matériaux naturels comme le sable, l'argile, l'eau, les branches, la paille,

les grains, les bouchons, les boîtes vides sont facilement à trouver dans

la plupart des communautés. Les enfants ont besoin de jouer avec des

jouets et des objets qu'ils peuvent facilement détruire et refaire pendant

leur jeu. Quand nous donnons des jouets onéreux à des centres

préscolaires communautaires pour encourager la stimulation cognitive

des enfants, les mères et ceux travaillant pour le projet ont peur de laisser

les enfants jouer avec ces jouets parce qu'elles ne les veulent pas voir se

détériorer. Les enfants profitent beaucoup de fabriquer eux-mêmes leurs

jouets en utilisant des cartons, des boîtes, pneus et autres matériaux.

Nombreux sont ceux qui ont été impressionnés par les camions, voitures

et avions que font des enfants africains, spécialement dans les zones

rurales, sans conseil ou presque d'un adulte (1992: 7-8). Dans un autre

continent et pays, en Inde par exemple, un projet subventionné par la

Fondation Aga Khan enseigne à des monitrices comment utiliser des

matériaux peu cher mais aux possibilités créatives pour stimuler le

besoin naturel de découverte chez l'enfant (Bernard van Leer

Foundation, 1993: 3).

Le travail d'analyse des jouets traditionnels de l'Inde et les efforts

d'adaptation de ces jouets dans le cadre thérapeutique pour des enfants

handicapés livrés par Sudarshan Khanna du National Institute of Design

à Paldi Ahmedabad ont suscité mon admiration et montrent clairement

une voie de plus pour l'utilisation des jouets et des jeux locaux. Dans

246

deux livres, Dynamic Folk Toys (1983) and Joy of Making Indian Toys

(1993), Sudarshan Khanna présente beaucoup de jouets faits par des

enfants ou d'autres confectionneurs de jouets. Comme dans le cas des

jouets sahariens et nord-africains, certains jouets de l'Inde sont

particuliers à leur région d'origine et d'autres sont des variantes de types

de jouets universels. Etant professeur à la Faculty of Industrial Design,

ce chercheur souligne l'importance des aspects technologiques et des

principes scientifiques qui sont à l'œuvre dans l'élaboration de ces jouets.

Un autre chercheur de l'Inde, Arvind Gupta, a écrit plusieurs brochures

remarquables sur l'utilisation de jouets locaux décrivant la manière de les

fabriquer et comment ils peuvent promouvoir des expériences novatrices

pour enseigner les sciences et les mathématiques.

Sur la situation actuelle et future de ces jouets traditionnels de l'Inde,

Sudarshan Khanna écrit : les revenus de la plupart des fabricants de

jouets locaux sont très bas. Leurs clients viennent de communautés

pauvres pour lesquels ils doivent maintenir un prix minimal. Le

rendement économique faible est une des raisons pour l'abandon massif

dans la profession. L'autre raison est l'intrusion des jouets en plastique

produit en masse. Malgré le faible rendement et l'absence de n'importe

quel support institutionnel, la fabrication locale de jouets populaires est

toujours vivante mais vacillante. Actuellement, il n'y a pour ainsi dire

plus de développement de „design‟ mais beaucoup de créateurs de jouets

sont conscients de l'importance de la créativité et de l'innovation dans

leur métier. Les jouets populaires dynamiques sont d'une telle

importance qu'il est attristant de constater que la société les a négligés.

Mais récemment, une certaine prise de conscience s'est manifestée chez

des pédagogues et des experts en développement de l'enfant lorsqu'ils

soulignent le fait que les jouets produits dans les usines ne puissent

remplacer les jouets faits par les artisans et qui expriment nos racines

culturelles. Notre société devra accepter que les créateurs de jouets aient

un rôle beaucoup plus large que celui de fabricants d'objets pour jouer.

Maintenant il est plus que temps que l'artisan soit reconnu comme un

professionnel. Beaucoup doit être fait pour réparer le dommage qui a été

causé aux jouets fabriqués par des artisans locaux. Il y a quelques an-

nées, le Commissaire pour le Développement de l'Artisanat, en

collaboration avec l'Institut National du Design, a formulé des

propositions pour revitaliser le secteur. Il est nécessaire de construire des

247

musées de jouets, des centres de formation et des liens de

commercialisation aussi bien au niveau des états que de la nation. Il est

essentiel de créer des voies et des moyens par lesquels des créateurs de

jouets talentueux, des pédagogues innovateurs et des designers dévoués

travaillent en équipe pour sauver cet héritage (1987: 13-14). Depuis lors

Sudarshan Khanna a créé dans le cadre du National Institute of Design

un centre de recherche sur les jouets et pour le développement de

l'artisanat local dans ce domaine.

Sudarshan Khanna a participé dans les UNESCO-Workshops

organisés par l'association sans but lucratif Fördern durch Spielmittel -

Spielzeug für behinderte Kinder, en traduction 'Stimulation par les jouets

- Jouets pour des enfants handicapés' (website consulté le 13.10.2004:

http://www.spielmittel.de). Le but de ce projet est de développer des

jouets pour la rééducation des enfants. De la lettre d'invitation pour le

quatrième Unesco Symposium, Workshop and Exhibition en automne

1996, je traduis ce qui suit concernant l'origine et le but de ce projet : il y

a tellement d'enfants handicapés sur la planète que nous avons le

sentiment qu'il est nécessaire de créer une structure par lesquelles les

conditions de vie de ces enfants peuvent être améliorées continuellement

et plus efficacement. Il est particulièrement important que les handicaps

soient détectés très tôt et pris en considération. De cette manière, le

développement mental et physique des enfants peuvent être encouragés

dès le début et leur intégration peut être soutenue. Les jouets et outils

pédagogiques jouent un rôle important dans la petite enfance. Il n'est

besoin que de jouets bons et adéquats, qui stimulent le jeu et en même

temps satisfont aux plus hautes exigences fonctionnelles et structurelles

liées à cette tâche. En prenant ces idées comme point de départ, le projet

'Toys for Children's Rehabilitation' fut proposé en 1989 comme

contribution à la Décennie Mondiale du Développement Culturel et

reconnu comme une 'Activité de la Décennie Mondiale' par l'UNESCO

(numéro de registration 079). Dans le cadre de ce projet, trois ateliers ont

déjà eu lieu. Les participants à ces ateliers ont développé plusieurs

designs de jouets et créé des prototypes. Ces dessins et modèles furent

exposés à plusieurs occasions en Allemagne et à l'étranger. Les résultats

de ces ateliers ont été publiés en 1992 et 1995 dans un manuel à deux

volumes, Toy Workshop - Toys you can make yourself for handicapped

and non-handicapped children. Le quatrième atelier continuera cette

248

expérience interdisciplinaire. De nouvelles idées et des prototypes

nouveaux de jouets et d‟outils pédagogiques seront développés. Cet

atelier mettra aussi ses résultats à la disposition des parents d'enfants

handicapés et des enseignants et membres du staff des institutions où

travaillent des handicapés. Après qu'ils sont soigneusement testés, ces

designs de jouets seront publiés dans un ou plusieurs manuels avec les

instructions pour leur construction. Aussi, il sera fait très attention à ce

que les designs peuvent se transformer en jouets sans que cela nécessite

l'utilisation d'un nombre excessif de matériaux ou de techniques

compliquées. Nous voudrions que cet atelier offre une aide pratique et

théorique, mais aussi une aide morale pour soutenir les spécialistes des

pays qui n'ont que peu de ressources disponibles pour le développement

de jouets.

Ce projet démontre la possibilité de développer des manières

nouvelles et intéressantes pour mettre à profit certains jouets

traditionnels et faits par les enfants ou les adultes eux-mêmes. J'espère

qu'un jour quelques jouets sahariens et nord-africains pourraient servir à

créer des jouets, culturellement et socialement adaptés, pouvant être

utilisés pour la rééducation d'enfants handicapés mais aussi pour le

développement des autres enfants.

Finalement, je ne puis omettre de mentionner une initiative du monde

scientifique tunisien. Lors d'une visite en Tunisie en mai 1987, j'ai eu des

entretiens avec des responsables du Musée des Arts et Traditions

Populaires à Tunis et du Musée du Bardo à Carthage, ceci après avoir

constaté que dans ces musées et celui de Sousse on ne voyait pour ainsi

dire rien qui référait à l'enfance tunisienne et au patrimoine ludique du

pays. A cette occasion un intérêt grandissant pour ces thèmes s'est révélé

résultant dans la création d'un 'Groupe de Recherches Approfondies sur

les Jeux et Jouets Tunisiens des Origines à nos Jours'. Bien que je n'aie

plus eu de nouvelles de ce groupe de recherches depuis l'organisation

d'un congrès à Carthage en 1989 et la publication des résultats de ce

congrès (Jeu et Sports en Méditerranée, 1991), il est à espérer qu'il

pourra réaliser ses ambitions.

Dans un document nommé “La Révolution de l'Education” publié par

l'UNICEF en 1999, il est dit qu'une approche globale de l'apprentissage

pour la vie “doit permettre aux élèves d'exprimer leurs idées, leurs

pensées et leurs opinions, favoriser les moments joyeux et les occasions

249

de jeu, mettre les enfants à l'aise avec eux-mêmes et avec les autres.

Enfin, il doit les traiter avec respect” (p. 22). Cet apprentissage pour la

vie est décrit comme suite (p. 19) :

Toute une série d'approches novatrices de l'enseignement et de

l'apprentissage visent à faire de la vie en classe une expérience plus

enrichissante et utile... Il faudra reformuler les politiques et les

processus éducatifs si l'on veut insuffler un amour de l'apprentissage

qui dure toute la vie et permettre à l'individu de compléter, voire de

remplacer, les compétences acquises dans l'enfance au fur et à mesure

que surgissent des besoins nouveaux.

Comment pourrait-on formuler un meilleur plaidoyer pour la mise à

profit de la créativité des enfants qui s'exprime si bien en créant des

jouets et en jouant ou même en inventant des jeux. Bien de compétences

essentielles acquises pendant l'enfance sont apprises et exercées dans des

activités ludiques qui impliquent les pairs, des enfants plus âgés et

parfois même des adultes. Si les adultes veulent rendre l'expérience de la

vie en classe plus enrichissante et utile, la prise en considération des

expériences de jeu et de création de jouets n'est-elle pas une des

meilleures possibilités d'y parvenir? Du moins si ces adultes ne

contrôlent pas trop les activités ludiques spontanées des enfants ou ne les

transforment pas dans des vrais exercices didactiques.

Dans le site de l'UNICEF Teachers Talking about Learning

(www.unicef.org/teachers, consulté en décembre 2004) on lit dans la

section 'Learning games from around the world' basée sur le Vietnamese

Multigrade Teacher's Handbook, que les enfants adorent jouer. S'ils en

ont l'occasion ils créent des règles pour de nouveaux jeux, utilisant des

ballons, des bouchons et tout ce qu'ils trouvent comme matières

premières. Des jeux impliquant le jeu de rôle, la résolution de problèmes

simulés ou l'utilisation de compétences et connaissances spécifiques. Les

jeux peuvent être structurés pour qu'ils mènent à un apprentissage actif.

Un apprentissage qui développera la communication, l'analyse, la prise

de décision et autres aptitudes cognitives (www.unicef.org/teachers, voir

la section 'Explore Ideas', puis la section 'Games from around the

World'). Dans une section suivante 'Journal activity: Games for learning'

250

les enseignants sont stimulés à créer des situations pédagogiques basées

sur les jeux des enfants.

Trois exemples provenant de l'Afrique subsaharienne démontrent qu'il

est possible d'utiliser les jeux et jouets pour un développement mieux

adapté aux besoins des enfants et aux contextes dans lesquels ils

grandissent. Le premier exemple concerne un programme utilisant les

jeux et la création de jouets afin de sensibiliser les enfants pour leurs

droits et leurs devoirs au Zimbabwe (“We are also human beings…”,

2001). Elisa K. Lwakatare du Tanzanian Ministry of Education and

Culture a présenté le deuxième exemple lors du Second International

Toy Research Conference organisé par le Nordic Center for Research on

Toys and Educational Media en juin 1999. Ce coordinateur de

l'éducation préscolaire parlait entre autre de la nécessité de fabriquer sur

place des jouets pédagogiques. Cette nécessité fut aussi soulignée par

Arvind Kumar Gupta en ce qui concerne l'Inde. Dans son texte de

conférence Elisa K. Lwakatare écrit : les jouets jouent un rôle important

dans le processus de socialisation. Dès lors, l'utilisation de jouets

importés encourage le développement de normes culturelles et de valeurs

étrangères à la Tanzanie. Bien que certains jouets soient appropriés et

peuvent être adoptés par la culture tanzanienne, ils restent peu

accessibles à cause du pouvoir d'achat limité de beaucoup de familles

tanzaniennes. La politique d'éducation et de formation en Tanzanie

comme définit par la réforme pédagogique actuelle stipule l'accès

équitable à une éducation et formation de qualité. Cela signifie un accès

équitable aux jouets comme matériel pédagogique. En d'autres mots, il

faut faire que l'utilisation de jouets devient un aspect intégré du

processus communicatif en éducation. Cela ne peut se produire qu'en

stimulant le design et la fabrication sur place de jouets, de préférence

réalisée avec du matériel local. Le besoin en matériel pédagogique pour

l'éducation est énorme à cause de la promotion de l'éducation préscolaire

dans cette réforme. Le nombre d'écoles préscolaires dans le pays croit

rapidement. En 1993 il n'y avait que 247 établissements préscolaires

mais en 1999 il y en avait déjà 3667. L'augmentation de la demande

exige une augmentation semblable des approvisionnements en matériel

de jeu du moins si ce niveau d'éducation doit être adéquatement soutenu.

Cette fourniture de matériel pédagogique (jouets) doit se baser sur une

251

recherche approfondie afin de trouver les designs les plus adéquats et

une utilisation économique des matériaux (1999: 7-8).

Même si cette politique tanzanienne pour créer sur place des jouets

pédagogiques adaptés aux conditions socioculturelles et matérielles

locales n'est qu'à ces débuts, cela s'avère être déjà d'une grande

importance car le problème est ainsi posé et des moyens pour le résoudre

sont développés.

Le troisième et jusqu'à présent le meilleur exemple que je connais de

l'utilisation de la culture ludique locale se trouve dans Early Childhood

Matters (Bouma, 2000). Ce programme d'éducation de la petite enfance

est initié, contrôlé et dirigé par les parents Samburu du Samburu District

au Nord du Kenya suite à des changements sociaux liés à leur mode de

vie semi-pastoral. Traditionnellement les enfants étaient gardés par les

grands-mères quand les parents étaient absents. Ces grands-mères

s'occupaient des enfants mais en même temps elles jouaient avec eux et

les enseignaient des poèmes, des contes et des chansons. Ce système

s'appelle lmwate, lmwate signifiant la clôture. Bien que ce système a

bien fonctionné pour des générations innombrables il était tombé en

désuétude jusqu‟au moment où les parents se sont rendus compte qu'il

fallait faire quelque chose pour leurs petits enfants qui restaient

seulement sous la garde d'une sœur ou d'un frère un peu plus âgés ou

étaient laissés tout seul. Après discussion dans la communauté et avec

les grands-mères qui se rappelaient bien le lmwate, il fut décidé de créer

un lmwate moderne. Les parents construisirent une clôture avec une

grande maison pour les petits pouvant servir de lieu de repos et de

refuge. Se basant sur les conseils des personnes âgés des jouets furent

fabriqués, des chansons, des contes, des proverbes et des poèmes

collectionnés et des appareils de jeu construits. Les jouets comprennent

des poupées et des ballons en bois et en cuir, des animaux en argile ou en

rotin, des lances-pierres, des hochets, des catapultes. Les appareils de jeu

sont des structures à grimper, des plate-formes surélevés, des

maisonnettes, des balançoires, des bascules, des cerceaux, des tunnels à

ramper, etc. Cette facilité est ouverte chaque matin et ne peut fonctionner

sans la participation des parents. Toutes les mères y travaillent à tour de

rôle (p. 32-34). Bien vite ce lmwate moderne fut soutenu par le Samburu

Early Childhood Development Project, un projet commun du Kenya

Institute of Education et le Christian Children's Fund. A côté de la

252

formation concernant les activités de développement pour la petite

enfance, ce projet a donné aussi une formation concernant la santé, la

nutrition et l'hygiène. Il a en plus aidé le lmwate comité à obtenir des

médicaments de base et de la bouillie de flocons d'avoine pour le

déjeuner des enfants, de la bouillie de flocons d‟avoine enrichie pour

ceux souffrant de malnutrition. Une fois que tout cela fonctionnait, le

projet s'est retiré. Son action se limite maintenant à être disponible quand

le lmwate comité le demande bien que ce comité tient le projet au

courant de tout ce qui se passe dans le lmwate (p. 34).

Il n'y a aucun doute que des jouets pédagogiques sont nécessaires en

Afrique du Nord et au Sahara et quand je vois la multitude de jouets

créés par les enfants marocains encore aujourd'hui il ne devrait pas être

tellement difficile de trouver des modèles pour des jouets pédagogiques

adaptés qui sont bon marché à fabriquer et utile pour le préscolaire et

l'école primaire. Le développement remarquable de classes préscolaires

par exemple au Maroc rendra cela inévitable dès que la pratique scolaire

prendra en compte la valeur des jeux et jouets et cela simplement parce

que l'achat de jouets pédagogiques occidentaux est au-dessus des

moyens de la plupart des écoles des régions en question.

N'importe quel programme qui tient à promouvoir le bien être, le

développement ou l'éducation des enfants pourrait améliorer son

efficacité en utilisant des stratégies qui mettent les adultes à l'écoute des

enfants visés et stimulent la participation de ces enfants à l'élaboration

du programme. Dans un numéro de Early Childhood Matters, publié en

février 1999 par la Bernard van Leer Foundation, cette fondation

souligne que suivant leur âge, leur milieu culturel et leurs opportunités

de développement, les enfants ont prouvé être des partenaires valables et

plein de ressources (n° 91, p. 4). Dans un article publié dans le même

numéro, David Tolfree et Martin Woodhead plaident avec conviction

pour que les praticiens, les chercheurs et les décideurs dans le domaine

du développement de la petite enfance se mettent à l'écoute des enfants

(n° 91, p. 19). La prise en compte des jeux des enfants et de leur création

de jouets me semble offrir une excellente manière pour se mettre à

l'écoute des enfants.

253

L'importance de la recherche sur les jeux et jouets des enfants est

clairement mis en avant dans le document Child Culture - Play Culture

de Flemming Mouritsen du Danish Odense University. Cet auteur

souligne la nécessité de remplacer la perspective adulte par la

perspective enfantine lorsqu'il écrit que la pédagogie, aussi bien au

niveau théorique que pratique, s'est basée sur ce que les enfants doivent

devenir avant que l'on s'intéresse à connaître les enfants et leur vécu. Je

suis convaincu que pareille perspective enfantine peut être facilitée par

l'observation et l'analyse des jeux et jouets des enfants avec le moins de

présuppositions adultes possible.

Finalement et en ce qui concerne les chercheurs et les instituts de

recherche s'intéressant au Tiers-Monde, je voudrais attirer leur attention

sur l'enfant et sa culture dans le monde rural et les quartiers populaires

des grandes villes car j'ai l'impression que peu de moyens sont investis

dans ce domaine. Pourtant si la situation des enfants doit s'améliorer en

ces lieux et si la désertion des campagnes doit être réduite, une meilleure

connaissance de l'enfant, de son milieu de vie et de sa culture ainsi que

des changements qui les affectent sera indispensable.

254

255

2 Éducation interculturelle et mondiale

dans un contexte occidental

L'utilité de la culture ludique saharienne et nord-africaine ne se limite

pas à l'Afrique du Nord et au Sahara ni au Tiers Monde car il est bien

possible de l'intégrer dans ce qu‟on appelle l'éducation interculturelle ou

l'éducation pour la paix afin de l'utiliser dans les pays d'Europe

occidentale où des immigrés provenant de ces régions se sont installés en

grand nombre depuis des décennies.

Comme volontaire du Comité de Gand pour l'UNICEF en Belgique,

j'ai élaboré un petit projet que j'aimerais appeler „monde-enjeu :

l'éducation interculturelle par le jeu‟. Dans le cadre de ce projet j'ai

d'abord travaillé en 1989 avec des enfants d'environ cinq ans allant au

jardin d'enfants. Je leur ai montré une courte série de diapositives basée

sur les jeux d'imitation des filles et garçons ghrib du Sahara tunisien.

Dans cette série de diapositives les petits voient et la réalité et

l'interprétation de cette réalité dans l'activité ludique. Les thèmes sont la

vie dans le désert, l‟oasis, les animaux, le ménage, le filage, le tissage et

la modernisation de la vie nomade.

Après que les enfants ont vu et commenté les diapositives, je leur ai

demandé de chercher des avantages de la vie dans le désert et des

désavantages de la vie chez eux ainsi que des inconvénients de la vie

159

256

dans le désert et des plaisirs de la vie chez eux. Par exemple, il a été

question du beau temps, de l'espace libre, de la disponibilité des frères et

sœurs, cousins et cousines comme camarades de jeu dans le désert versus

le temps pluvieux, le danger de jouer dehors, la solitude de plusieurs

enfants en Belgique ou encore de la rareté de l'eau, de la nourriture, des

jouets ou produits de luxe dans le désert versus l'abondance de ces

choses en Belgique.

Après la récréation les filles et garçons se sont divisés en plusieurs

petits groupes. Chaque groupe doit fabriquer quelque chose pour

construire un village d'oasis, comme on peut le voir à la figure 159 (p.

255). Quelques-uns uns des enfants ont fait des maisons comme ils en

ont vu, d'autres fabriquent des palmiers, un puits d'eau, un dromadaire,

etc. Les matériaux à leur disposition sont du matériel de récupération,

des cures pipes vertes, des tubes en carton de rouleaux de papier essuie-

tout, de la plasticine et des

éléments de boîtes de

construction. Comme j'ai

introduit au début la relation

entre la transhumance des

nomades du Sahara et celle

des nomades modernes des

cirques et des foires, des

enfants ont construit une

roulotte en pièces lego (fig. 160). Une autre tâche était de rechercher

d'entre des animaux en plastique ceux qui peuvent vivre dans le désert et

les oasis. Enfin, les enfants ont appris à chanter une petite chanson sur

une mélodie simple et répétitive assez connue mais avec des paroles

adaptées. Puis, ils ont contourné leur village d'oasis en imitant la marche

des dromadaires (fig. 161, p. 257).

Depuis cette expérience, j'ai utilisé la même approche ludique de

l'interculturel de la première à la sixième classe de l'école primaire,

chaque fois pendant une heure. Dans ces classes j'ai utilisé une vidéo de

vingt minutes sur la manière dont vivent et jouent les enfants du Kenya

en Afrique de l'Est, une vidéo réalisé pour le Comité Néerlandais pour

l'UNICEF. Ainsi les enfants gantois sont confrontés avec une situation

matérielle et familiale bien différente mais ils voient aussi que les

enfants du Kenya sont très créatifs dans la construction de leurs jouets.

160

257

Ceci a amené des écoliers gantois à exprimer très spontanément leur

admiration pour cette créativité et ce savoir-faire des enfants africains.

Après la vidéo, je reprends le même genre de comparaison entre ce que

les enfants trouvent agréables ou désagréables dans leur propre vie et

dans celle des enfants africains. Comme je donne ce programme inter-

culturel dans le cours de religion ou de morale laïque, l'instituteur ou

l'institutrice continue souvent ce travail de réflexion dans une leçon

ultérieure et/ou offre aux enfants la possibilité de fabriquer des jouets

avec du matériel de récupération qu‟ils amènent de la maison. Ainsi un

mini-projet pédagogique est élaboré ce qui par la suite peut donner lieu à

une exposition des jouets, dessins et textes faits par les enfants. Il arrivait

aussi qu'on me demande de participer à un projet pédagogique en rapport

avec des thèmes spécifiques comme l'eau, les déchets et le recyclage, la

protection de l‟environnement ou la créativité enfantine. Dans ces cas je

sélectionnais une série de diapositives sur les jeux et jouets des enfants

marocains et du Sahara tunisien pour illustrer certains aspects liés à ces

thèmes.

Une autre expérience, que j'ai vécue au mois d'avril 1992, m'a mis en

contact avec deux groupes d'enfants complètement ou partiellement

sourds. L'activité durait une demi-journée. Comme les possibilités

d'expression verbale sont assez limitées, j'ai mis l'accent sur le visuel

161

258

avec d'abord la vidéo en question et puis une série de cinquante

diapositives sur les jeux et la vie des enfants ghrib. Puis les élèves de

l'école primaire spécialisée ont construit des jouets, des instruments de

musique etc. tout comme ils l'ont vu sur la vidéo et les diapositives. Ce

premier essai a clairement démontré l'utilité d'une pareille approche.

Mais pour être plus efficace il me semble tout à fait nécessaire

d'introduire dans le processus pédagogique au moins une heure

d'introduction pour pouvoir transmettre à ces enfants sourds les

informations verbales qui rendent plus compréhensible l'apport visuel.

Lors d'une journée UNICEF organisée par le Comité de Gand pour

l'UNICEF le 10 mai 1998, il s'est démontré que les enfants se laissent

volontiers stimuler par des exemples de jouets fabriqués par des enfants

marocains pour créer eux-mêmes des jouets avec du matériel de

récupération (fig. 162, 163 p. 259).

Ce qui me semble très utile et stimulant dans ces approches ludiques

d'une pédagogie interculturelle, c‟est, à côte de la stimulation de la

créativité et de l'effort personnel des enfants gantois, l'apport d'une

image plus positive des enfants africains, une image qui jusque là était

unilatéralement négative et basée sur des images d'enfants malades,

162

259

mourant de faim, misérables, images qu'on voit régulièrement à la

télévision comme si cela était l'unique vécu des enfants africains.

Les résultats de ces actions m'ont convaincu qu'une possibilité, certes

limitée mais créative parce que ludique, peut être trouvée dans

l'utilisation des jeux et jouets à des fins interculturelles. Ainsi on pourra

préparer des jeunes enfants à devenir des adolescents et des adultes avec

moins de préjudices envers les minorités ou majorités sociales,

culturelles et ethniques vivant chez eux d'une part, et envers les gens et

les sociétés des pays étrangers d'autre part.

Ce sentiment se trouve partagé par Lazarine Bergeret de la Fédération

Internationale pour l'Education des Parents. Dans son article “Des

poupées à la ludothèque?” (1985: 164, 166) elle écrit :

La curiosité des ludothécaires, part des jeux et s'étend à toutes les

cultures, à toutes les latitudes, à toutes les périodes, à toutes les

civilisations mais l'enrichissement de leur information les conduit peu

à peu à rechercher quelque message commun de l'humanité dont le

jeu pourrait bien être une langue véhiculaire... Peut-être alors des

poupées pourraient-elles être sinon prêtées du moins exposées à la

ludothèque, comme à l'école d'ailleurs, afin qu'elles participent à cette

163

260

recherche possible d'un message commun à l'humanité? Souvent ces

jours derniers, les enseignants que j'avais pu informer ou décider à

venir profiter des ateliers organisés ici-même (en 1983 au Musée de

l'Homme dans le cadre de l'exposition „Poupée-jouet. Poupée-reflet‟),

me téléphonaient leur constatation non seulement d'un enrichissement

des improvisations enfantines mais d'une meilleure entente entre

enfants d'ethnies différentes. Ce n'était pas les choix anticipatifs des

parents qui déterminaient le style des poupées mais un premier pas

vers l'empathie possible par la seule connaissance des poupées des

autres... Je ne saurais affirmer ou nier qu'il faille des poupées en

ludothèque. A chaque équipe de ludothécaires de réfléchir ses choix

mais je sais que l'enfant écrit sa propre histoire par la succession

changeante de ses choix. Peut-être cette histoire serait-elle moins

violente si, dès l'enfance étaient connues et reconnues les poupées

d'autrui.

Lazarine Bergeret et moi-même nous nous trouvons en bonne

compagnie dans ce domaine, puisque le Groupe de travail pour la

rencontre des cultures de la Division de l'Enseignement Scolaire du

Conseil de la Coopération Culturelle, un organe du Conseil de l'Europe,

inclut dans son étude Pistes pour activités pédagogiques interculturelles

les jeux dans les thèmes à traiter (1989: 9-10).

Il faudrait donc lier une approche interculturelle du ludique, dans

laquelle s'inscrit ce livre, à une approche ludique de l'interculturel. Ceci

est tout à fait indispensable car l'individu d'aujourd'hui, et certainement

celui de demain, ne pourra que difficilement survivre dans un

environnement local et mondial de plus en plus multiculturel et

interdépendant, s'il n'a pu développer une personnalité qui puisse

comprendre et l'universalité et la spécificité des conditions de vie de son

propre groupe et des autres sociétés partout dans le monde. De cette

manière, les jeunes et les adultes pourront, je l'espère, fonctionner d'une

manière plus adéquate dans les sociétés multiculturelles qui se sont

créées récemment dans les grandes villes d‟aujourd‟hui.

261

Catalogue des Poupées

Sahariennes et Nord-Africaines

du Musée de l'Homme

262

263

1 Introduction

Sans l'existence du fichier signalétique de la collection des poupées

sahariennes et nord-africaines du Département d'Afrique Blanche et du

Proche Orient du Musée de l'Homme, l'étude de cette collection aurait

été impossible.

La grande majorité des renseignements mentionnés dans ce catalogue

a dès lors été puisée dans ce fichier.

Les jouets dont la provenance est mentionnée dans la liste des objets

déposés au Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient mais

pour lesquels une fiche signalétique n'a pas été rédigée sont décrits par

l'auteur de ce livre, qui a aussi complété les renseignements du fichier si

nécessaire.

Les jouets décrits dans ce catalogue sont, à l'intérieur de chaque

section, classés suivant la population dont ils proviennent.

En ce qui concerne la poupée elle-même, d'abord son origine est

indiquée - provenance géographique, provenance ethnique plus

spécifique, collectionneur et/ou donateur - suivie par la description et si

possible le constructeur du jouet.

Après ces données ont été mentionnés des renseignements sur les

joueurs et sur d'éventuels dessins ou photos retrouvés dans la

bibliographie. S'il existe dans le Service de la Photothèque du Musée de

l'Homme des photos de poupées, non reproduites dans ce livre, cela est

indiqué.

Les mesures sont mentionnées en centimètres : B = base, H = hauteur,

LO = longueur, LA = largeur, E = épaisseur, D = diamètre, + =

maximum, - = minimum.

Les deux premiers chiffres du numéro d'objet indiquent l'année de

l'entrée de ce jouet dans la collection du Département d'Afrique Blanche

et du Proche Orient du Musée de l'Homme.

264

2 Les poupées-hommes

2.1 Les poupées-méharistes

Touareg Kel Ahaggar :

41.19.110/112/113/115/137 (fig. 3 - 41.19.113, p. 55)

Origine : Idèles, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela (110-115),

nomades. Mission Henri Lhote, 28 septembre 1938 et les jours suivants.

Description :

41.19.110 : dromadaire de mandibule de chèvre, méhariste en armature

de roseau, tissu bleu indigo comme vêtement, baudrier en fils de coton

blancs ; la selle est figurée par des tiges de mrokba entourées de coton

mercerisé, et une étoffe bariolée, ficelée, représente la couverture que les

Touaregs accrochent généralement sur la croupe du dromadaire. H = 27.

41.19.112 et 113 : dromadaire de mandibule de chèvre, selle en tiges de

mrokba couvertes de coton mercerisé ; des morceaux de peau brodée

figurent les sacs de selle. Méhariste en armature de tiges de mrokba,

tissu blanc et bleu indigo comme vêtements, baudrier et ceinture en fils

de coton mercerisé multicolores ; ces fils entourent aussi le cou et la tête.

H = 28 et 29.

41.19.115 : dromadaire de mandibule de chèvre, selle en tiges entourées

de fils rouges, bleus et blancs. Méhariste en armature de bois de tamarix,

tissu bleu indigo comme vêtement, baudrier en fils de coton blancs, verts

et rouges ; la tête est enveloppée des mêmes fils figurant la coiffure des

hommes. Le cou est entouré de fils blancs, verts et jaunes. H = 27.

41.19.137 : dromadaire de mandibule de mouton, la selle - entourée

d'étoffe bleue indigo et le méhariste ont une armature en tiges. Le

méhariste, aux jambes entourées d'étoffe bleue indigo, porte comme

vêtements cinq gandouras de couleur kaki, multicolore, blanche, indigo

et rouge. La tête est entourée de fils de laine bleus et jaunes et fils de

coton blancs et rouges. H = 28.

265

Constructeurs : garçons et filles, ces jouets ont été faits par un garçon de

12 ans (112-113), un autre garçon (137) et une fille de 12 ans (110/115).

Touareg Kel Ajjer : 37.21.28

Origine : Ghât, Sahara, Libye. Touareg Kel Djanet, nomades.

Acheté par René Pottier le 14 décembre 1934 à un jeune garçon

d'environ dix ans.

Description : le dromadaire est une mandibule de mouton ; pour le

méhariste ont été utilisées quatre brindilles, deux pour le corps et deux,

ligaturées en forme de croix, pour les bras. Ces brindilles sont

enveloppées de chiffons faisant figure de vêtements. H = 27,5. Ce jouet

n'a pas été retrouvé dans la collection du Musée de l'Homme, mais une

photo figure dans le fichier signalétique, ainsi que dans La Vie du

Sahara.

Figures dans la bibliographie :

la planche 28 du catalogue "La vie du Sahara" montre ce méhariste-jouet

touareg et sa monture faite d'une mandibule de chèvre. La planche 4 de

ce livre présente une belle photo d'un dromadaire sellé des Touaregs,

dont ces jouets donnent une représentation fidèle.

Touareg Kel Air : 69.108.1, 74.107.6/7 (fig. 4 - 74.107.6, p. 56)

69.108.1

Origine : Alarsès, région d'Agadez, Sahara, Niger. Touareg Kel Air,

nomades. Reçu par M. J. Decellas du constructeur du jouet en 1960.

Description : l'armature du dromadaire et du méhariste est en feuilles de

latanier torsadées, enroulées autour d'un fil de fer. Cette structure est

enveloppée de tissu. La selle à pommeau en forme de croix est du type

dit d'Agadez. Le tapis de selle a été découpé dans un galon. Les sacs de

selle en cotonnade à rayures jaunes et blanches sont ornés de floches en

266

tissu et de lanières de cuir auxquelles sont attachées des perles jaunes.

Des fils de laine rouges ornent le cou du dromadaire et sa queue est en

lanières de cotonnade. Le méhariste est vêtu du costume habituel,

vêtements de dessous blancs et vêtements de dessus en couleur bleue

indigo, la taille serrée par une courroie fermée par une boucle de fer. Le

voile de tête est fixé à l'aide d'une épine. Les vêtements du méhariste ont

été réalisés avec les tissus utilisés pour les vêtements d'hommes. H totale

= 46, LO = 34. Méhariste : H = 24.

74.107.6/7

Origine : Talat, Air, Sahara, Niger. Touareg Kel Owey et Touareg Kel

Timili, nomades.

Recueilli par A. Bourgeot en mars 1974.

Description :

74.107.6 (fig. 4, p. 56) : le dromadaire est fait de quatre brindilles de bois

pour les pattes, fixées dans un coussin de chiffons servant de tronc. Le

cou et la tête sont en fibres de palmier torsadées. La selle en bois

pyrogravé fut ornée de floches en cuir et en laine rouge. Le méhariste a

un corps en fibres de palmier torsadées recouvert d'un vêtement en étoffe

blanche. Il a une coiffure noire avec floches de laine rouge et verte

maintenues par une épingle double. Dromadaire : H = 35 ; LO = 20.

Méhariste : H = 15,5. H totale = 48.

74.107.7 : le dromadaire a le tronc en chiffons, les pattes en brindilles de

bois, la tête et le cou en fibres de palmier torsadées. Sauf les pattes, le

dromadaire est enveloppé d'un tissu noir. On a découpé la selle dans un

morceau de fer blanc et des deux côtés pendent un sac de selle en cuir et

de longues floches de laine rouge. Le méhariste en corps de fibres de

palmier torsadées porte un vêtement de dessus noir. H totale = 32, LO =

17.

Touareg Kel Ajjer : 37.21.104.1/2 (fig. 5, p. 58)

Origine : Djanet, Tassili n'Ajjer, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ajjer,

nomades. Mission René Pottier, 1934-1935.

267

Description : voir 1.2 Les poupées-méharistes, p. 53.

Maures : 38.141.82

Origine : Sahara nord-occidental, frontière algéro-marocaine. Maures,

nomades.

Recueilli par le commandement militaire des confins algéro-marocains,

1936.

Description : le dromadaire à quatre pattes, la selle et le méhariste sont

en terre cuite rougeâtre. La selle est ornée d'un décor incisé en lignes et

pointes. Dromadaire : H = 13 ; LO = 16,2. Méhariste : H = 11,5. Selle :

H = 5,2 ; LO = 7 ; LA = 4,7. H totale = 23.

Vallée de la Saoura : 62.60.29/30 (fig. 6, p. 60)

Origine : Vallée de la Saoura, Sahara nord-occidental, Algérie. Nomades

et sédentaires.

Recueilli par Dominique Champault, 1955.

Description : voir 1.2 Les poupées-méharistes, p. 53.

2.2 Les poupées-cavaliers

Touareg Kel Ahaggar : 41.19.152-154

Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,

nomades.

Mission Henri Lhote, 10.10.1938.

Description et constructeur : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.

268

Maures : 38.141.83/84, 38.48.81-83 (fig. 8 - 38.141.83, fig. 9 - 38.48.82)

Origine :

38.141.83/84 : Sahara nord-occidental, frontière algéro-marocaine.

Maures, nomades.

Recueilli par le commandement militaire des confins algéro-marocains

en 1938.

38.48.81-83 : Oualata, Hodh oriental, Sahara, Mauritanie. Maures,

sédentaires. Recueilli par la Mission Puigaudeau-Sénones.

Description :

38.141.83 (fig. 8, p. 62) : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.

38.141.84 : même genre de cheval sellé et monté que le numéro

précédant mais avec un cavalier sans chapeau. Cheval : H = 12,4.

Cavalier : H = 16,5. Selle : H = 5. H totale = 20.

38.48.81 : figurine en terre crue représentant grossièrement un cheval

harnaché et son cavalier indigène. Le cou est incurvé en avant et la tête

forme un relief à peine sensible. Les pattes antérieures sont réunies en un

seul tronc. La queue est en ficelles. L'avant-train était peint en blanc.

L'arrière-train est peint en ocre rouge, ainsi que la selle et le sabot

antérieur. Le poitrail porte une protubérance demi-cylindrique décorée

d'un ornement cruciforme ocre. La sangle est ornée de lignes noires,

jaunes et ocres. Sur le côté droit du cou, des lignes noires dessinent la

crinière. Les brides sont marquées par des lignes ocres. Le cavalier est

peint en jaune. H = 6,5. LO = 7. LA = 3,6.

38.48.82 (fig. 9, p. 63) : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.

36.48.83 : figurine en terre crue représentant grossièrement un cheval et

un cavalier portant la casque colonial (le cavalier manque). Les deux

pattes antérieures sont réunies en un seul tronc. Une plume représente la

queue du cheval. L'objet est recouvert d'un enduit blanc orné de lignes et

de points bleus, ocres et jaunes. Le sabot antérieur est de couleur ocre,

l'un des postérieurs de couleur jaune et l'autre de couleur bleue. Sur le

poitrail une protubérance est ornée de lignes coloriées. Une petite gourde

peinte en bleu indigo complète ce jouet. Un fil de coton bleu de 4 cm

permet de le pendre à l'épaule du cavalier. H = 5. LO = 4. LA = 2. La

gourde : H = 1,8 ; LO = 1,5.

269

Constructeurs des nos. 38.48.81-83 : les servantes noires des Maures de

Oualata.

2.3 Les poupées-guerriers et poupées-notables

Touareg : X.66.1.42 et 44-55 (fig. 17 et 18 - X.66.1.42, p. 69)

Origine : Touareg sans spécification plus précise, nomades.

Description :

X.66.1.47/48 et 54 : ces Touaregs ont une armature en roseau dont les

deux tiers ont été découpés pour représenter les jambes. Un bâtonnet est

introduit horizontalement dans le roseau pour figurer les bras. Le

Touareg n°. 47 est vêtu d'une longue blouse bleue, une blouse blanche

bariolée et une blouse indigo au-dessus. Le baudrier et la ceinture sont en

fils jaunes, verts et rouges. La tête et le cou sont ornés de fils verts et

blancs. H = 15. Le Touareg n°. 48 est habillé de trois blouses, indigo-

kaki-indigo. Son baudrier et sa ceinture sont en fils de coton vert et

blanc. Le cou est entouré de fils blancs et verts et la tête est entourée des

mêmes fils ainsi que de fils jaunes. H = 14.

Le Touareg n°. 54 porte deux blouses bleues et un turban en gaze

blanche. Ces trois poupées-hommes ne portent pas de culotte.

X.65.1.44/46/49/53/55 : l'armature consiste en un morceau de bois

(44/46/53) ou d'os (49/55) auquel est ligaturé en croix un petit morceau

de bois pour figurer les bras. Le dessous de l'armature des nos. 46, 53 et

55 est entouré de tissu ou de gaze, mais aucune de ces cinq poupées

porte une culotte.

Les blouses que portent ces Touaregs sont une blouse blanche et indigo

(44), une blouse blanche, rouge bariolée et indigo (45), une blouse en

gaze blanche et en indigo (49/55), une blouse en gaze blanche (53).

Deux poupées portent leurs blouses non cintrées (53/55), les trois autres

sont ornées du baudrier et de la ceinture en fils de coton vert (44/49) ou

jaune, vert, rouge et blanc (46).

Parfois le cou est entouré de fils rouges (46) ou verts et bleus (53).

La tête du n°. 46 est coiffée de fils blancs, jaunes et rouges. Un turban

blanc coiffe les n°. 44 et 49.

270

La hauteur de ces poupées est successivement 16, 13, 9, 14,5 et 7,5 cm.

X.66.1.52 : avec quatre branchettes, reliées deux par deux, une croix est

confectionnée, servant d'armature pour un Touareg vêtu d'une blouse

indigo. Il ne porte ni ceinture, ni baudrier, ni culotte. Le cou et la tête

sont entourés de tissu blanc et indigo. H = 15.

X.66.1.42/51 : l'armature se compose verticalement de cinq tiges de

graminées dont la tige du milieu ne va qua la taille. Ces tiges sont reliées

entre elles, deux par deux, avec du fil de coton. Deux tiges de graminées

y ont été ligaturées en croix.

Ces Touaregs portent une culotte longue en tissu blanc et deux blouses,

une blanche et une indigo. Le n°. 42 porte ses blouses non cintrées, mais

le n°. 51 a une ceinture en fils de laine vert et rouge. Le cou de ces

poupées-hommes est entouré de fils de blanc, rouge et vert (42) ou blanc

(51). H = 17 et 15,5.

X.66.1.50 : le type d'armature est le même que pour les Touaregs

précédents, sauf que les bras sont formés par trois tiges. Les vêtements

se composent d'une culotte blanche et de deux blouses non cintrées, une

blanche et une indigo. H = 18,5.

X.66.1.45 : ce Touareg a une armature en feuilles de palmier tressées, les

bras et les jambes sont représentés. Les vêtements se composent d'une

culotte longue, en tissu indigo, et de deux blouses, une en kaki et une en

indigo. Le baudrier et le turban sont en tissu indigo. H = 16.

Constructeurs et joueurs : les enfants touaregs.

Touareg Kel Ahaggar : 41.19.103-106/125/125 ; 41.19.130/132/133 (fig.

14 - 41.19.104, fig. 15 - 41.19.105, p. 67)

41.19.103-108/125/126

Origine : In Amedgel, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela,

Touareg Kel Ahaggar, nomades.

Mission Henri Lhote, 28.9.1938 (103-108) et 3.10.1938 (125/126).

Description : l'armature des n°. 105, 107 et 108 consiste en deux tiges

verticales auxquelles ont été ligaturées en croix deux autres tiges

271

figurants les bras. L'armature des n°. 103, 104, 106, 125 et 126 comporte

verticalement trois tiges dont celle du milieu ne va qu'à la hauteur de la

taille, les deux tiges extérieures se prolongeant pour former les jambes.

Deux tiges y sont ligaturées en croix.

Les vêtements du n°. 104 sont formés de deux blouses longues, une

blanche et une violacée à bandes blanches et noires. La ceinture et le

baudrier sont en fils blancs et violets. Le cou est enveloppé de tissu noir.

La tête est enveloppée de tissu vert entouré de fils blancs et rougeâtres.

Ce Touareg porte une épée en forme de croix, faite de deux bouts de

roseau et entourée d'étoffe rougeâtre.

Les jambes du n°. 105 sont entourées de tissu indigo. Ce Touareg porte

deux gandoura ou blouses longues, une verte et une rouge à rayures au-

dessus. La tête et le cou sont entourés de fils blancs, jaunes, verts, bleus

et rouges. La ceinture et le baudrier sont faits de fils aux mêmes

couleurs. Une tige verticale entourée de fils jaunes et rouges, à laquelle

se trouve ligaturée une petite tige entourée de fils verts, est l'épée.

Le n°. 106 porte trois gandoura, en tissu multicolore, blanc et indigo. La

ceinture et le baudrier sont en fils blancs, rouges et violets. La tête est

enveloppée de papier d'argent et de fils bleus, jaunes et rouges.

Les jambes du n°. 107 sont entourées de tissu. Le baudrier et la ceinture

sont en fils blancs, verts et rouges. La tête est, comme chez la poupée

précédente, enveloppée de papier d'argent. La tête et le cou sont entourés

de fils blancs et rouges.

Le n°. 108 porte une culotte blanche et cinq gandouras, en tissu rouge,

blanc, indigo, blanc, indigo. La ceinture et le baudrier sont en fils jaunes,

verts, oranges, rouges et bleus. Le cou et la tête sont enveloppés de tissu

indigo et de fils jaunes pour le cou, fils jaunes et blancs pour la tête.

Les jambes du n°. 125 sont enveloppées de tissu kaki. Il porte une

gandoura blanche et une indigo au-dessus. Le baudrier et la ceinture sont

en fils blancs et rouges. Le cou et la tête sont enveloppés de tissu indigo

et la tête est, en plus, entourée de fils blancs et rouges.

Les jambes du n°. 126 sont aussi entourées de tissu kaki. Ce Touareg

porte quatre gandoura, en tissu indigo, blanc, blanc et indigo. La ceinture

et le baudrier sont en fils blancs et rouges. La tête et le cou sont

enveloppés de tissu indigo et entourés de fils blancs et rouges.

H- = 18,5 (126). H+ = 40 (125).

272

Constructeurs et joueurs : les n°. 103-106 et 125/126 furent

confectionnés par un garçon, un jeune akli du campement de Bilbil ag

Aganguéroubou des Kel Rela, le n°. 106 fut fait par une fille Kel Rela

d'environ treize ans. Avec ces poupées-hommes jouent aussi bien les

filles que les garçons Kel Rela.

Figures dans la bibliographie : dans l'Album du Musée du Bardo sur les

Touaregs Kel Ahaggar l'on peut voir une très belle photo d'une poupée-

homme, du même genre que ceux décrits ci-dessus (Balout, Bovis et

Gast, 1959: planche LXVI). Lhote nous montre une jeune fille Kel

Ahaggar jouant dans le sable avec des poupées-hommes (1944: 113,

planche VIII) (fig. 13, p. 67).

Photothèque du Musée de l'Homme : photo du n°. 41.19.107.

41.19.130/132/133

Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,

nomades.

Mission Henri Lhote, 5.10.1938.

Description : l'armature des n°. 132 et 133 est faite d'un morceau de

roseau dont la partie inférieure a été découpée afin de représenter deux

jambes. Une tige traversant le roseau figure les bras. L'armature du n°.

130 comporte verticalement trois tiges dont celle du milieu ne va qu'à la

hauteur de la taille. Deux tiges y sont ligaturées en croix.

Ces poupées-hommes sont vêtues comme des guerriers touaregs en

grande tenue, avec deux longues blouses, une blanche ou jaunâtre et une

indigo au-dessus. Le n°. 130 porte en plus une culotte longue.

Le n°. 133 n'a qu'une ceinture en fils bleus, mais les deux autres portent

un baudrier et une ceinture, en fils de laine bleue, verte, rouge et jaune

(130) ou en fils blancs (132). La tête et le cou sont enveloppés de tissu

indigo. En plus la tête du n°. 130 est entourée de fils blancs.

H- = 10,3 (133). H+ = 20 (130).

Constructeur et joueurs : ces trois poupées-hommes ont été faites par un

garçon touareg de Tamanrasset. Tous les enfants de Tamanrasset jouent

avec ce genre de poupées.

273

Touareg Kel Ajjer : 34.52.43 (fig. 19, p. 70)

Origine : Djanet, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ajjer, nomades.

Recueilli par le capitaine Duprez avant 1935.

Description : ce Touareg, en tenue de guerrier, a une armature en fibres

de palmier torsadées entourée d'étoffe bleue. Il porte quatre gandouras

ou blouses longues, une blanche, bleue, noire et bleue ; une ceinture et

un baudrier en gaze. H = 23.

Constructeur et joueurs : le fils du cheikh de Djanet a réalisé cette

poupée mais les enfants touaregs Kel Ajjer jouent tous avec des poupées-

hommes du même genre.

Touareg Kel Air : 36.44.82/83

Origine : Agadez, Aïr, Sahara, Niger. Touareg Kel Aïr, nomades.

Recueilli par Henri Lhote, don de 1936.

Description : l'armature est en feuilles ou fibres torsadées, avec bras et

jambes. Le n°. 82 n'est qu'une armature (H = 12,5) mais la poupée n°. 83

(H = 22) porte des vêtements d'homme touareg avec une longue culotte

beige, deux blouses longues, beige et indigo, une ceinture en fils de

coton bleu et un manteau beige avec capuchon.

Constructeur et joueurs : avec pareille poupée-homme, fabriquée par un

enfant d'Agadez, jouent tous les enfants touaregs Kel Aïr.

Touareg Kel Iforas : 38.16.43/44 (fig. 20 - 38.16.43, p. 70)

Origine : Kidal, Adrar des Iforas, Sahara, Mali. Touareg Kel Iforas,

nomades. Recueilli par O. Schultz, juillet 1938.

Description : la description du n°. 38.16.43 se trouve au chapitre 1.6 Les

poupées-guerriers et les poupées-notables (p. 71). L'armature du n°.

274

38.16.44 est faite de trois tiges de graminées, dont celle du milieu ne va

qu'à la taille, sur lesquelles une tige de graminée a été ligaturée en croix

pour figurer les bras. La tige servant de bras est fendue au milieu et

glissée au-dessus des tiges verticales.

Le cou et la tête sont brodés de coton blanc, vert, rouge et indigo. Un

petit écheveau de coton indigo imite la chevelure.

Ce Touareg en miniature porte une longue blouse blanche et un baudrier

d'écheveaux de coton blanc, rouge et indigo. H = 15.

Constructeur : une fille des Touaregs Kel Iforas de Kidal.

2.4 Les poupées-jeunes mariés

54.74.10 (fig. 23, p. 74)

Origine : les Chaamba nomadisant à l'Ouest de l'Erg er-Raoui, Sahara

nord-occidental, Algérie. Nomades.

Mission Dominique Champault, 1954.

Description : voir 1.7 Les poupées-jeunes mariés, p. 72.

Constructeur : une fillette chaamba.

275

3 Les poupées-femmes

3.1 Les poupées-femmes touarègues

Touareg Kel Ahaggar :

41.19.122/123/129/1964/1965/1967, 41.19.128/164-166 (fig. 29 -

41.19.123, fig. 30 - 41.19.122, p. 85)

41.19.122/123/129/1964/1965/1967

Origine : In Amedgel, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela,

Touareg Kel Ahaggar, nomades.

Mission Henri Lhote, 3.10.1938.

Description : dans un chiffon bourré de paille (122/123/1967) au d'une

(129) ou de deux (1964/1965) crottes de dromadaire ou boules de terre,

un morceau d'os de mouton (122/123/129/1965/1967) ou de bois (1964)

est fixé pour servir d'âme à la poupée. Une tige (122/129/1965) ou deux

tiges (123/1964) ou bien un morceau d'os (1967) y sont ligaturés en croix

afin de figurer les bras. Les jambes ne sont pas indiquées comme il s'agit

de femmes assises. La partie supérieure du morceau de bois ou d'os de

mouton est enroulée de fils de coton mercerisé mais le visage n'est pas

indiqué.

41.19.122 : cou entouré de fils jaunes, verts et rouges ; cheveux tressés

en fils bleus ; vêtement indigo. H = 15.

41.19.123 : cou et tête entourés de fils verts et rouges ; cheveux en

bandelettes d'étoffe indigo ; grandes blouses kaki-blanche-multicolore. H

= 13,7.

41.19.129/1964 : cou entouré de fils verts, jaunes et rouges ; cheveux en

fils indigo ; vêtement indigo. H = 6,5 et 10,7.

41.19.1965 : cou entouré de fils rouges et bleus ; cheveux en fils bleus ;

un vêtement beige et un vêtement rouge au-dessus. H = 12,2.

41.19.1967 : cou enroulé de fils rouges, jaunes, verts et blancs ; tête

entourée de tissu indigo ; cheveux en fils bleus tressés avec un morceau

de tissu rouge fixé à l'extrémité ; pas de vêtements. H = 11,2.

276

Ces poupées portent souvent une mantille mais parfois la tête est

découverte comme chez les n°. 122 et 1967.

Constructeurs et joueurs : ces poupées ont été faites par les filles Kel

Rela d'In Amedgel, les n°. 122 et 123 par une fille de douze ans. Les

filles et les garçons Kel Rela jouent avec ces poupées-femmes.

41.19.128/164-166

Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,

nomades.

Mission Henri Lhote, 5.10.1938 (128) et 11.10.1938 (164-166)

Description : dans une boule d'argile recouverte d'étoffe ou dans une

pelote de chiffons, un os est fixé auquel sont ligaturées en croix deux

branchettes servant de bras.

41.19.128 : cette poupée porte quatre blouses longues en tissu blanc,

indigo, blanc, indigo et des fils de laine imitent les cheveux. H = 11,5.

41.19.164 : ce jouet représente une femme dans le costume d'In Salah.

Elle porte un collier en perles et chaînette. H = 15,3.

41.19.165 : cette poupée porte le costume des femmes d'In Salah, ainsi

que leurs bijoux figurés par une chaînette et des perles. Des mèches de

laine figurent les cheveux.

41.19.166 : ce jouet représente une femme en costume arabe. Elle a des

cheveux véritables appartenant à la fillette qui a confectionné la poupée.

H = 10.

Les poupées 41.19.164-166 n'ont pas été retrouvées.

Constructeurs et joueurs : le n° 128 fut fabriqué par un garçon, le n°. 165

par une fille hartania de dix ans, les n°. 164 et 166 par deux autres filles.

Garçons et filles jouent avec ces poupées.

Figures dans la bibliographie : Foley montre deux poupées-femmes

touarègues Kel Ahaggar (1930: 46, fig. 44) et Gabus en montre une autre

(1958: 135). Une photo de cinq poupées-femmes du méme genre est

reproduite dans l'Album du Musée du Bardo concernant les Kel Ahaggar

(Balout, 1959: planche LXVII). Le même type de poupée est à voir dans

277

"Afrikanische Puppen" de Sigrid Paul (1970: Abb. 94).

Touareg Kel Ajjer : 37.21.29 (fig. 31, p. 86), 37.21.102.1/2

(fig. 35, p. 89)

Origine : Ghât, Sahara, Libye (37.21.29) ; Djanet, Sahara, Algérie

(37.21.102.1/2). Touareg Kel Djanet, Touareg Kel Ajjer, nomades.

Mission René Pottier, 16.12.1934 (37.21.29).

Description :

37.21.29 : l'armature de la poupée est constituée par une baguette de bois

enfoncée dans une crotte d'âne enveloppée d'un morceau de tissu. Le

vêtement de dessus enveloppant la poupée est de couleur blanche. Les

cheveux sont des écheveaux de coton mercerisé rouge et brun. Les

boucles d'oreilles sont des médailles avec d'une face le Sacré-Cœur et à

la face opposée la Vierge. H = 10.

37.21.102.1/2 : voir 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89.

Touareg Kel Aïr : 36.44.72-77 (fig. 26 - 36.44.73, p. 83)

Origine : Agadez, Aïr, Sahara, Niger. Touareg Kel Aïr, nomades.

Recueilli par Henri Lhote, avant 1937.

Description : dans le corps de la poupée un morceau d'os (77) ou un

bâtonnet (72-75) est enfoncé pour servir de cou et de tête.

Eventuellement un (75) ou deux (72) bâtonnets sont ligaturés en croix

pour figurer les bras.

36.44.72 : corps fait de deux boules de terre pour les fesses, une boule de

terre pour la taille et deux boules d'étoffe pour les seins ; cheveux en

bandelettes de tissu indigo tressées ; vêtement indigo. H = 12,5.

36.44.73 : corps fait de cinq boules de terre, deux pour les fesses, une

pour la taille et deux pour les seins ; cheveux en ruban indigo noués par

une lanière de cuir ; vêtement indigo. H = 16,5.

36.44.74 : corps fait de quatre crottes et de chiffons ; cheveux en

écheveaux de fils de coton indigo ; vêtement indigo. On a utilisé des

278

épines pour fixer le vêtement. H = 8,3.

36.44.75 : corps fait de quatre boules de terre et de chiffons ; cheveux en

écheveaux de fils de coton indigo ; vêtement indigo. H = 12.

36.44.76 : corps fait de quatre boules de terre pour les fesses et de deux

crottes pour les seins ; cheveux en écheveaux de fils de coton indigo ;

vêtement indigo. H = 11.

36.44.77 : corps fait de deux boules de terre pour les fesses ; vêtement

indigo. H = 11,6.

Touareg Kel Iforas : 38.16.45 (fig. 32, p. 87)

Origine : Kidal, Adrar des Iforas, Sahara, Mali. Touareg Kel Iforas,

nomades.

Recueilli par 0. Schultz, juillet 1938.

Description : 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89.

Constructeur : une fille Kel Iforas de Kidal, probablement la fille qui a

confectionné les poupées-guerriers ou poupées-notables n°. 38.16.43/44.

3.2 Les poupées-femmes maures

38.180.77 (fig. 47, p. 98)

Deux poupées-femmes maures en armature d'os se trouvent sous le

baldaquin de la selle portant le même numéro (voir 2.4 Les poupées-

femmes maures, p. 98).

69.70.7.1-5 (fig. 44 - 69.70.7.5, fig. 45 - 69.70.7.1, fig. 46 - 69.70.7.4,

p. 96-97).

Origine : Tidjikdja, Tagant, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et

sédentaires.

Mission Prohusa, 0. du Puigaudeau, janvier-mars 1960.

279

Description : voir 2.4 Les poupées-femmes maures, p. 96-97, H = 14,5

(1), 19,5 (2), 22 (3), 16 (4), 15 (5).

Constructeurs : pareilles poupées-femmes sont faites par les filles et les

femmes de Tidjikdja.

Figure dans la bibliographie : une photo de la poupée 69.70.7.4 se trouve

dans "Poupée-jouet. Poupée-reflet", 1983: 96.

38.48.50/51 (fig. 48, p. 99)

Origine : Tidjikdja, Tagant, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et

sédentaires. Mission Puigaudeau-Sénones, 1936-1938.

Description : ces petites poupées en terre crue reproduisent une jeune

fille (50) ou une femme (51) bien grosse en position assise. Des petites

perles ornent le dessus de la tête du n°. 51. La chevelure des poupées est

en nattes noires. Le corps de la poupée n°. 50 est peinte en ocre et celui

du n°. 51 en couleur bleuâtre. Des dessins géométriques ornent les

poupées. 50 : H = 3,5 ; B = 2. 51 : H = 4 ; B = 2,3.

Figure dans la bibliographie : un croquis de pareille poupée nous montre

Gabus, 1956: 134.

983.52.1-3 (fig. 49 - 983.52.1/2, p. 99)

Origine : Oualata, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et sédentaires.

Don de G. Duchemin.

Constructeurs : les servantes.

Description : ces trois poupées en argile représentent des femmes maures

assises.

983.52.1 : corps de couleur grise, sans marques ni traits, enrobé de gaze

blanche. Dans la coiffure à multiples nattes noires en cire sont incrustées

trois petites perles jaunes et une rouge. La poupée porte un collier en

280

petites perles jaunes, rouges et noires. H = 4. B = 2,4.

983.52.2 : corps de couleur brune avec au milieu du devant trois rayures

horizontales parallèles et un petit trou (le nombril ?). Coiffure à nattes

noires dans laquelle furent incrustées à quelques endroits des petites

perles bleues, jaunes, rouges et noires. La poupée est vêtue de gaze

noire. H = 4. B = 2,5.

983.52.3 : corps blanc avec au milieu du devant deux rayures

horizontales parallèles et un petit trou (le nombril ?) et trois rayures

obliques parallèles se dirigeants des côtés vers le milieu de la base. H =

2. B = 1,4.

3.3 Les poupées-femmes regeybat

54.74.9

Origine : Regeybat nomadisant à l'ouest de Tabelbala, Sahara nord-

occidental, Algérie. Nomades.

Dominique Champault, 1954.

Description : voir 2.6 Les poupées-femmes regeybat, p. 102.

3.4 Les poupées-femmes teda

54.51.75

Origine : Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.

Recueilli par G. Moberg, avant 1935.

Description : à une branchette fourchue, dont les deux éléments figurent

les jambes, un bâtonnet est ligaturé en croix pour former les bras. La tête

est surmodelée en gomme avec, comme visage, des petites perles rouges

incrustées. La coiffure est faite de deux enfilades de petites perles

281

rouges. Comme vêtements la poupée porte des chiffons de cotonnade

bleue, usagés et souillés, ceinturés d'une ficelle. H = 25.

35.50.174/175

Origine : Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.

Mission Le Cœur, 1934.

La fiche signalétique du Musée de l'Homme indique que la poupée n°.

175 fut recueillie chez les Touaregs. Probablement s'agit-il d'une erreur

car pareilles poupées ne nous sont connues que chez les Teda et parce

que la Mission Le Cœur avait pour but des recherches chez les Teda. En

plus la poupée n°. 174, recueillie en même temps que le n°. 175, est

attribuée au Teda dans le catalogue "Poupée-jouet. Poupée-reflet" (1983:

92). Finalement je n'ai retrouvé trace de poupées à tête en datte dans la

bibliographie concernant les Touaregs.

Description :

35.50.175 : l'âme de la poupée est un bâton fourchu auquel est ligaturé

en croix un bâtonnet. Des tresses ornent la tête en datte. H = 22.5.

35.50.174 : armature comme la poupée précédente mais sans tête en

datte. Cette poupée porte deux cauris autour du cou. H = 27.

65.3.9-49 (fig. 53 - 65.3.14, fig. 54 - 65.3.15, fig. 55 - 65.3.46, fig. 56 -

65.3.29, fig. 57 - 65.3.31, fig. 58 - 65.3.32, p. 103-105)

Origine : Bardaï, Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.

Recueilli par Oleg Lopatinsky, 1963.

Description : voir 2.7 Les poupées-femmes teda, p. 103-106.

Ces poupées représentent : des femmes de brousse en costume quotidien

(10/27/28/40/47), une femme de brousse aisée (14), des femmes de

brousse parées pour la danse (9/11/25/34/44), une vieille femme de

brousse (15), des citadines pauvres (12/45), des citadines en costume

quotidien (23/26/31/33/35), des citadines en costume de citadine (17-

19/21/22/24/30/36), des citadines en costume d'intérieur (43/48), des

citadines riches (20/37/41/45), des citadines parées pour la fête (42/49),

282

des riches citadines en costume de fête (16/29/32/38) et une femme parée

pour la fête (39).

Constructeurs et joueurs : les filles teda de dix à seize ans.

Photothèque du Musée de l'Homme : photo des poupées

65.3.21/22/24/43.

3.5 Les poupées-femmes belbala

54.74.7/8/11 (fig. 60 et 61 - 54.74.7, p. 107-108)

Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,

sédentaires.

Recueilli par Dominique Champault en 1954.

Données spatio-temporelles : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p.

107.

Description : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p. 107.

La face de la poupée n°. 7 est peinte en kohl délayé à l'huile. Avec cette

peinture la fillette a indiqué les yeux, les sourcils, la bouche et le

tatouage de danse dit 'sérafin'. La face de la poupée n°. 8 est aussi peinte

en khol délayé à l'huile mais le tatouage est fait au safran. Les traits du

visage de la poupée n°. 11 sont esquissés à l'encre.

Un voile rouge, maintenu par un bandeau de fils de laine, et un grand

voile blanc coiffent la poupée n°. 8. Les poupées n°. 7 et 11 portent un

mendil de tête rouge.

Comme bijoux elles portent un collier de perles de Briare (8) ou une

chaînette terminée par un penditif et deux penditifs dans les cheveux (7).

La poupée n°. 11 ne porte pas de bijoux. H = 23 (7), 22 (8), 21 (11).

Constructeurs et joueurs : les fillettes belbala.

283

52.27.35

Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,

sédentaires.

Collectionné par Dominique Champault en mars 1951.

Données spatio-temporelles : poupées faites au printemps et en automne.

Description : cette poupée, représentant la jeune mariée et appelée

'tamames' est construite à partir d'un tibia de chèvre emmailloté de

chiffons rouges figurant l'izar. La tête, qui est figurée par la partie distale

de l'os, fut recouverte de cheveux de femme disposés en deux tresses

latérales et une tresse arrière, tout comme une coiffure simplifiée de

femmes mariées. Les bras sont faits de chiffons mais la poupée n'a ni

mains ni pieds. H = 18.

Constructeurs et joueurs : les fillettes belbala.

54.74.51

Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,

sédentaires.

Mission Dominique Champault, 1954.

Description : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p. 107.

3.6 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura

62.51.1 (fig. 62, p. 109)

Origine : El Ouata, Vallée de la Saoura, Sahara nord-occidental, Algérie.

Sédentaires.

Don de Corneille Jest, avant 1963.

Description : voir 2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura, p.

109.

284

3.7 Les poupées-femmes mozabites

34.49.37 (fig. 63, p. 110)

Origine : Ghardaïa, Mzab, Algérie. Mozabites, sédentaires.

Achat du lt. d'Armagnac pour l'exposition du Sahara, 1934.

Description : le corps est en chiffons bourrés de son et la tête est en

papier cartonné. Les cheveux naturels sont faits en tresses et en chignon.

Sur le visage on a peint les tatouages typiques.

Les vêtements se composent d'un sous-vêtement jaune et d'un

survêtement rougeâtre cintré par une ceinture rouge. La poupée ne porte

pas le voile en laine que les femmes mozabites utilisent pour se voiler

dans la rue. Aux pieds elle porte deux petits souliers de cuir bordés d'un

gallon vert et embellis d'un pompon.

Beaucoup de bijoux ornent la poupée. A ses pieds elle a un chevillier en

métal et à ses bras un bracelet avec fermeture de bâtonnet. Deux fibules

de type traditionnel ferment la robe de dessus. Celles-ci sont reliées par

une chaînette. La poupée porte aussi des boucles d'oreilles à croissant de

lune et une broche à perle rouge dans les cheveux. Sur le front pend une

petite main de Fatima en métal. Enfin, elle est ornée d'un collier en

pièces de monnaie portant la date de 1870 en caractères arabes. H = 58,5.

Constructeur et joueurs : voir 2.10 Les poupées-femmes mozabites, p.

110.

3.8 Les poupées-femmes chaouia

36.2.182-184/189/274-321/322bis-329 (fig. 65 - 36.2.279, p. 113,

fig. 66 - 36.2.314, p. 114)

Origine : Djebel Tadjmout, Aurès, Algérie. Ouled Abderrahman,

Chaouia, sédentaires.

Mission Thérèse Rivière, 1936.

285

Description : voir 2.12 Les poupées-femmes chaouia, p. 112-114.

36.2.183 : le corps est un bâtonnet unique entouré de tissu. Les

vêtements comportent une robe rouge maintenue par une cordelière

croisée, une mante blanche attachée avec une épine et une mante noire

par-dessus, un turban rose et un foulard rouge. H = 19.

36.2.184 : un bâtonnet unique représente le corps. La poupée porte deux

robes rouges, deux mantes superposées, une blanche et une noire,

attachées avec une épine, un turban noir et un foulard orange. H = 17.

36.2.279 : l'âme de la poupée est un morceau de roseau fendu, auquel est

ligaturé un bâtonnet brisé en son milieu. Les vêtements sont une robe

verte, une mante blanche et un turban vert. Cette poupée porte une

poupée-enfant dans le dos. Cet enfant est fait d'un morceau de roseau

fendu, avec le haut et le bas découpés en pointe, entouré de tissu noir et

avec une ceinture rouge. H = 17,5. H de l'enfant = 6. La poupée n°. 277

porte aussi un petit dans le dos.

36.2.283 : corps fait d'un os. Des mèches de cheveux encadrent la figure.

Cette poupée porte deux robes en cotonnade, une mante blanche, un

turban blanc bien fait et un foulard orange. H = 21.

36.2.314 : sur une âme d'os un bâtonnet est ligaturé en croix. La poupée

porte une robe de cotonnade grenat imprimée et une mante blanche au-

dessus, ainsi qu'un foulard jaune et un turban noir. Elle est ornée d'un

collier de perles rouges et de piécettes dorées. H = 18. La poupée n° 318

porte une chaînette terminée par un bouton rouge.

Constructeurs et joueurs : les filles et garçons chaouia.

37.9.8bis/17-52 (fig. 67 - 37.9.33, p. 115, fig. 68 - armature bébé, p. 113)

Origine : Aurès, Algérie. Chaouia, sédentaires.

Mission Germaine Tillion, 1935-1937.

Description : voir 2.12 Les poupées-femmes chaouia, p. 114-115.

L'armature des poupées consiste en un bâtonnet ou un os unique

(8bis/18-51) ou en un os auquel est ligaturé en croix un bâtonnet (17/52).

Certaines poupées portent un petit dans le dos (23/30/32/33/37). La

poupée n°. 35 avec son manteau noir est une divorcée. H- = 7 (45). H+ =

28 (17).

286

Constructeurs et joueurs : les fillettes chaouia.

Figure dans la bibliographie : Gaudry (1961: pl. XXXIX) nous montre

une petite fille chaouia du Djebel Amour en Algérie qui tient tendrement

une poupée de chiffons dans ses bras.

3.9 Les poupées-femmes marocaines

31.45.59 (fig. 69, p. 117)

Origine : Fès, Maroc. Sédentaires.

Don de Jeanne Jouin, avant 1932.

Description : sur un morceau de roseau entier, servant d'âme, est ligaturé

un morceau de roseau fendu pour servir de bras. A la hauteur de la tête,

un morceau de tissu blanc entoure le roseau. Sur ce fond blanc a été

dessiné un visage sans nez mais avec une bouche et des yeux noirs et

avec le tatouage typique en noir sur le front et le menton. Les cheveux

sont en soie noire effilée. Le vêtement figure celui de la citadine

marocaine. La poupée porte une chemise blanche, un caftan orange et un

caftan jaune à manches, une tunique transparente blanche, une ceinture

blanche à rayures bleues et jaunes, une cordelière, pour retrousser les

manches, en fils de coton bleus et noirs et un foulard blanc à dessins

roses. Elle porte un collier de perles jaunes et grises et avec une grosse

perle blanche au milieu. La plaque frontale est représentée par un bouton

avec une étoile et un croissant de lune. H = 28.

Constructeur et joueurs : cette poupée fut faite par une fillette de Fès.

Toutes les fillettes de Fès jouaient avec ces poupées.

42.28.1

Origine : Moulay Idris, Zerhoun, Maroc. Uled Nceir (Ouled Nacer),

sédentaires. Recueilli par J. Herber, avant 1943.

287

Description : le corps de la poupée est constitué par deux bâtonnets de

roseau disposés en croix ; un morceau de tissu blanc, enveloppant le

sommet de la croix, forme le visage. Les yeux et la bouche sont dessinés

à l'encre rouge, le tatouage est en encre noire.

La poupée est vêtue d'une chemise blanche, d'un caftan rougeâtre, d'un

autre caftan bleu à rayures blanches et d'un survêtement transparant serré

à la taille par une ceinture verte. Sur la tête un chiffon blanc représente le

mouchoir de soie porté par les femmes. Cette mariée porte un collier et

des pendeloques en verroterie. H = 21.

34.123.1/2 (fig. 70 - 34.123.1, p. 117)

Origine : Rabat, Maroc. Sédentaires.

Don de J. Herber, avant 1935.

Description : les corps, têtes et membres de ces poupées sont faits de

chiffons bourrés.

34.123.1 : les yeux carrés, le nez, la bouche et les tatouages ont été

cousus en fil noir. Sur les côtés de la tête chauve pendent quelques fils

noirs en guise de cheveux. Comme vêtements la poupée porte une

culotte en écru, un sous-vêtement violet et un survêtement blanc

transparent avec broderie. H = 29.

34.123.2 : les yeux, le nez et la bouche sont noirs, les tatouages rouges.

Les cheveux sont des écheveaux de coton noir. H = 18,5.

3.10 Les poupées-femmes tunisiennes

30.54.888/891 (fig. 155 - 30.54.891, p. 205, fig. 156 - 30.54.888, p. 206)

Origine : une ville tunisienne (888) et la ville de Hammamet (891),

Tunisie. Sédentaires.

Collection Delaporte, dépôt du Musée de St. Germain et du Musée de la

Marine, avant 1931.

Description : le corps, la tête et les membres furent confectionnés de

pièces de tissu bourrées de paille et de chiffons.

288

30.54.888 : les pupilles des yeux, les sourcils et la bouche sont indiqués.

Le nez est mis un peu en relief en posant une graine au bon endroit

comme cela pouvait être le cas pour une poupée marocaine de Fès. Cette

poupée est en costume juive. Elle porte une robe longue bicolore, verte

et rouge, avec au-dessus une robe rouge brodée à manches en dentelle.

Un grand voile rouge coiffe la tête et des souliers en tissu bleu ornent les

pieds. H = 36.

30.54.891 : le nez, lui aussi en relief, et la bouche de cette poupée sont

brodés mais les yeux et les sourcils ont été dessinés. Les cheveux, en

tissu noir tressé, sont cousus sur la tête. La poupée porte une robe

blanche avec, à l'ouverture. six galons de couleur rouge-ocre-rouge-

rouge-ocre-rouge. Les manches de cette robe sont multicolores. Au-

dessus de cette robe, elle en porte une autre, sans manches, de couleur

bleue et avec un galon rose des deux côtés de l'ouverture. Les bijoux

comportent deux boucles d'oreilles à perles, un collier de perles et un

autre de perles et de piécettes de cuivre jaune, deux fibules liées par une

chaînette à perles et un anneau en métal jaune au bras droit. H = 33.

289

4 Les poupées-enfants

4.1 Les poupées-enfants touarègues

Touareg Kel Ahaggar : 41.19.129/133/157 (fig. 157 - 41.19.157, p. 210)

41.19.129

Voir catalogue 3.1 Les poupées-femmes touarègues, p. 275.

41.19.133

Voir catalogue 2.3 Les poupées-guerriers et les poupées-notables, p. 272.

41.19.157

Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,

nomades.

Mission Henri Lhote, 5.10.1938.

Description : voir 3.2 Les poupées-enfants touarègues, p. 209.

Touareg Kel Ajjer : 37.21.102.2

Voir 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89 et catalogue 3.1 Les

poupées-femmes touarègues, p. 277.

4.2 Les poupées-enfants maures

69.70.7.1/2 (fig. 45 - 69.70.7.1, p. 97)

Voir 2.4 Les poupées-femmes maures, p. 96 et catalogue 3.2 Les

poupées-femmes maures, p. 278.

290

4.3 Les poupées-enfants chaouia

37.9.23/30/32/33/37 (fig. 67- 37.9.33, p. 115, fig. 68 - armature du bébé,

p. 113)

Voir 2.12 Les poupées-enfants chaouia, p. 115 et catalogue 3.8 Les

poupées-femmes chaouia, p. 284.

291

Table des transcriptions

Certaines lettres arabes sont indiquées par des signes conventionnels :

th =

j =

h' =

kh =

dh =

sh =

ç =

d' =

t' =

z' =

º =

gh =

q =

^ = indique une voyelle longue

292

293

Table des illustrations

Tous les clichés des poupées de la collection du Département d‟Afrique

Blanche et du Proche Orient du Musée de l‟Homme ont été réalisés par

M. Delaplanche, D. Destable, Ch. Lemzaouda ou D. Ponsard du

Laboratoire de Photographie du Musée de l‟Homme.

1. Jeu de poupée, 1975, photo couverture, Ghrib, photo de l'auteur.

2. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, 1975, p. 54, Ghrib, photo de

l'auteur.

3. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 55, Touaregs, Collection du

Musée de l'Homme n° 41.19.113, cliché D. Ponsard.

4. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 56, Touaregs, Collection du

Musée de l'Homme n° 74.107.6, cliché M. Delapanche.

5. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 58, Touaregs, Collection du

Musée de l'Homme n° 37.21.104.1/2, cliché M. Delaplanche.

6. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 60, Vallée de la Saoura,

Collection du Musée de l'Homme n° 62.60.29/30, cliché M.

Delaplanche.

7. Poupée-cavalier, p. 61, Touaregs, reproduction du dessin dans le livre

de Lebeuf et Pâques, 1970: 53.

8. Cheval-jouet et poupée-cavalier, p. 62, Maures, Collection du Musée

de l'Homme n° 38.141.83, cliché M. Delaplanche.

9. Cheval-jouet et poupée-cavalier, p. 63, Maures, Collection du Musée

de l'Homme n° 38.48.82, cliché M. Delaplanche.

10. Garçons cherchant de l'argile à flanc de montagne, 1992, p. 64, Aït

Ighemour photo de l'auteur.

11. Poupée-muletier et son mulet, 1992, p. 64, Aït Ighemour, photo de

l'auteur.

12. Poupée-muletier et son mulet, 1992, p. 65, Aït Ighemour, photo de

l'auteur.

13. Fille touarègue jouant avec des poupées-hommes, p. 67, photo Henri

Lhote, 1944: 113, planche VIII.

14. Poupée-homme à épée, p. 67, Touaregs, Collection du Musée de

l'Homme n° 41.19.104, cliché M. Delaplanche.

294

15. Poupée-homme, p. 67, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 41.19.105, cliché D. Destable.

16. Les différents types d'armatures des poupées-guerriers et poupées-

notables touaregs, p. 68, dessin de l'auteur.

17. Armature de poupée-homme, p. 69, Touaregs, Collection du Musée

de l'Homme n° X.66.1.42, cliché M. Delaplanche.

18. La même poupée-homme que la précédente mais habillée, p. 69,

cliché M. Delaplanche.

19. Poupée-homme, p. 70, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 34.52.43, cliché D. Destable.

20. Poupée-homme, p. 70, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 38.16.43, cliché D. Destable.

21. Poupées-hommes, p. 72, Maures, dessin sur échelle réduite de deux

croquis figurant dans le livre de Jean Gabus, 1958: 134.

22. Poupées-hommes, 1977, p. 73, Ghrib, photo de l'auteur.

23. Poupée-homme, p. 74, Chaamba, Collection du Musée de l'Homme

n° 54.74.10, cliché D. Destable.

24. Poupée-homme, 1992, p. 76, Aït Ighemour, photo de l'auteur.

25. Types de base des armatures des poupées-femmes, p. 80, dessin de

l'auteur.

26. Poupée-femme, p. 83, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 36.44.73, cliché D. Destable.

27. Armature de poupée-femme, p. 83, Touaregs, Collection du Musée

de l'Homme n° X.73.90.14, cliché D. Destable.

28. Les différents types d'armatures des poupées-femmes touarègues, p.

84, dessin de l'auteur.

29. Poupée-femme, p. 85, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 49.19.123, cliché D. Destable.

30. Poupée-femme, p. 85, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 49.19.122, cliché D. Destable.

31. Poupée-femme, p. 86, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 37.21.29, cliché M. Delaplanche.

32. Poupée-femme, p. 87, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme,

dessin de l'auteur.

33. Figuration géométrique de la poitrine d'une poupée-femme

touarègue, p. 88, dessin de l'auteur.

295

34. Poupée-femme, p. 88, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme

n° 38.16.45, cliché photo M. Delaplanche.

35. Poupée-mère, p. 89, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme n°

37.21.102.1, cliché D. Destable.

36. Poupée-femme, p. 90, Touaregs, reproduction du dessin dans Henri

Lhote, 1975: 408, fig. 1.

37-38. Fille Ghrib avec sa poupée-femme et la poupée elle-même, 1975,

p. 93, photos de l'auteur.

39. Détail des bijoux d'une poupée-femme, 1975, p. 93, Ghrib, photo de

l'auteur.

40. Deux filles ghrib tenant leurs poupées, 1975, p. 94, photo de l'auteur.

41-42. Deux poupées-femmes avec traits de visage faits par des garçons,

1975, p. 95, Ghrib, photos de l'auteur.

43. Poupée-femme à tête de flacon, 1991, p. 95, Ghrib, photo de Gilbert

J.M. Claus.

44. Poupée-femme, p. 96, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°

69.70.7.5, cliché D. Destable.

45. Poupée-femme, p. 97, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°

69.70.7.1, cliché D. Destable.

46. Poupée-femme, p. 97, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°

69.70.7.4, cliché M. Lemzaouda.

47. Poupées-femmes sur selle à baldaquin, p. 98, Maures, Collection du

Musée de l'Homme n° 38.180.77, cliché M. Delaplanche.

48. Poupées-femmes, p. 99, Maures, Collection du Musée de l'Homme

n° 38.48.50/51, cliché M. Delaplanche.

49. Poupées-femmes, p. 99, Maures, Collection du Musée de l'Homme

n° 983.52.1/2, cliché M. Delaplanche.

50. Base de poupée-femme, p. 99, Maures, dessin de l'auteur basé sur

celui de Béart, 1955: 96.

51. Maison de poupée, p. 100, Maures, Collection du Musée de

l'Homme n° 38.48.98, cliché M. Delaplanche.

52. Poupée-femme, p. 101, Maures, reproduction du dessin dans le livre

de Jean Gabus, 1958: 119.

53. Poupée-femme, p. 103, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.14, cliché M. Delaplanche.

54. Poupée-femme, p. 103, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.15, cliché D. Destable.

296

55. Poupée-femme, p. 104 Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.46, cliché, D. Destable.

56. Poupée-femme, p. 104, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.29, cliché M. Delaplanche.

57. Poupée-femme, p. 105, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.31, cliché M. Delaplanche.

58. Poupée-femme, p. 105, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°

65.3.32, cliché M. Delaplanche.

59. Armature de poupée-femme teda, p. 106, dessin de l'auteur.

60. Poupée-femme, p. 107, Belbala, Collection du Musée de l'Homme n°

54.74.7, cliché Ch. Lemzaouda.

61. Vue de dos de la poupée-femme précédente, p. 108, cliché D.

Destable.

62. Poupée-femme, p. 109, Vallée de la Saoura, Collection du Musée de

l'Homme n° 62.51.1, cliché M. Delaplanche.

63. Poupée-femme, p. 110, Mozabites, Collection du Musée de l'Homme

n° 34.49.37, cliché M. Delaplanche.

64. Types d'armatures des poupées-femmes chaouia, p. 112, dessin de

l'auteur.

65. Poupée-femme, p. 113, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme

n° 36.2.279, cliché D. Destable.

66. Poupée-femme, p. 114, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme

n° 36.2.314, cliché D. Destable.

67. Poupée-femme portant un bébé ou un petit enfant dans le dos, p.

115, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme n° 37.9.33, cliché

D. Destable.

68. Armature de la poupée-bébé ou petit enfant chaouia précédente, p.

113, dessin de l'auteur.

69. Poupée-femme, p. 117, Maroc, Collection du Musée de l'Homme n°

31.45.59, cliché D. Ponsard.

70. Poupée-femme, p. 117, Maroc, Collection du Musée de l'Homme n°

34.123.1, cliché M. Delaplanche.

71. Armature de poupée-femme, p. 119, Maroc, dessin de l'auteur basé

sur J. Herber, 1918: 67.

72. Poupée-femme, 1993, p. 124, Aïn Toujdate, Maroc, photo de

l'auteur.

297

73. Maison de poupée avec deux poupées-femmes et une poupée-

homme, 1996, p. 125, Aït Hmed ou Yacoub, Maroc, photo de

l'auteur.

74. Poupée-femme et poupée-homme, 1996, p. 126, Aït Hmed ou

Yacoub, Maroc, photo de l'auteur.

75. Armature de poupée-femme, 1997, p. 127, Oulmès, Maroc, photo de

l'auteur.

76. Poupée-femme, 1997, p. 128, Arhbalou-n-Serdane, Maroc, photo de

l'auteur.

77. Poupée-femme, 1996, p. 130, She°ba, Maroc, photo de l'auteur.

78. Poupée-femme en plastique, 1996, p. 131, She°ba, Maroc, photo de

l'auteur.

79. Maisons de poupées, p. 132, Ksar Assaka, Maroc, dessin de l'auteur.

80. Poupée-femme, 1997, p. 134, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.

81. Poupée-femme couchée sur une poupée-mouton, 1997, p. 136, Ksar

Assaka, Maroc, photo de l'auteur.

82. Poupée-femme, 1997, p. 137, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.

83. Poupée-femme et poupée-homme, 1997, p. 137, Ksar Assaka,

Maroc, photo de l'auteur.

84. Poupée-femme, 1997, p. 138, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.

85. Poupée-femme, 1997, p. 139, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.

86. Poupées-femmes, 1997, p. 140, Ksar Assaka, Maroc, photo de

l'auteur.

87. Poupée-femme, 1998, p. 141, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur

88. Poupée-femme à armature de roseau, 1998, p. 143, Aït Sidi Amar,

Maroc, photo Johan De Gussem.

89. Poupées-femmes à armature d'os, 1999, p. 144, Aït Sidi Amar,

Maroc, photo Johan De Gussem.

90. Filles avec leurs poupées-femmes, 1999, p. 145, Tataouine, Maroc,

photo de l'auteur.

91. Fille avec deux poupées-femmes, 1999, p. 146, Tataouine, Maroc,

photo de l'auteur.

92. Poupée-femme avec cheveux faits de feuilles de roseau, 1997, p.

146, Tabenatout, Maroc, photo de l'auteur.

93. Fille avec sa maisonnette de boîte de carton et sa poupée, 1999, p.

147, Zaïda, Maroc, photo de l'auteur.

298

94. Poupée en plastique genre Barbie avec un morceau de roseau servant

de bras, 1999, p. 148, Zaïda, Maroc, photo de l'auteur.

95. Poupée avec une robe andalouse flamenco localement crochetée,

1992, p. 148, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.

96. Une fille de deux ans avec le Vieil Homme, 1998, p. 149, Ignern,

Maroc, photo de l'auteur.

97. Des enfants dans leur maison de poupée, 1999, p. 150, Aït Slimane,

Maroc, photo de l'auteur.

98. Filles tenant leur poupée-femme, 1999, p. 150, Aït Slimane, Maroc,

photo de l'auteur.

99. Filles tenant leur poupée, 1996, p. 151, Magaman, Maroc, photo de

l'auteur.

100. Poupées-femmes, 1996, p. 152, Magaman, Maroc, photo de

l'auteur.

101. Trois poupées-femmes et une poupée-homme, 1996, p. 153,

Magaman, Maroc, photo de l'auteur.

102. Poupée-femme, 1994, p. 154, Ighrem-n-Cherif, Maroc, photo de

l'auteur.

103. Poupée-femme, 1997, p. 155, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo de

l'auteur.

104. Poupée-femme, 1997, p. 155, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo de

l'auteur.

105-106. Poupée-femme, 1997, p. 157, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo

de l'auteur.

107. Poupée-femme, 1999, p. 157, Merzouga, Maroc, photo de Luc

Lauras.

108. Poupées-femmes, 1992, p. 158, Aït Ighemour, Maroc, photo de

l'auteur.

109. Poupées-femmes, 1992, p. 159, Aït Ighemour, Maroc, photo de

l'auteur.

110. Poupée-femme, 1996, p. 160, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.

111. Poupée-femme, 1996, p. 160, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.

112. Poupée-femme en plastique avec robe faite par la fille, 1996, p.

161, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.

113. Chapelle-jouet, p. 163, Maroc, dessin de l'auteur basé sur une photo

de Guichard, 1921: 163.

299

114. Chaise-jouet, p. 163, Maroc, dessin de l'auteur basé sur une photo

de Guichard, 1921: 163.

115. Poupée-femme, 1961, p. 164, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.

116. Poupée importée utilisée à Marrakech dans les années 1970, 1992,

p. 165, photo de l'auteur.

117. Poupée en plastique, utilisée comme armature pour une poupée-

jeune mariée, 1992, p. 166, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.

118. Poupée en plastique transformée en poupée-jeune mariée, 1992, p.

167, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.

119. Maison de poupée, p. 168, Marrakech, Maroc, dessin de l'auteur

basé sur le croquis de Fatima Kader.

120-121. Poupée-femme, vue de devant et de dos, 1992, p. 170, Imi-n-

Tanoute, Maroc, photo de l'auteur.

122. Maison de poupée, p. 171, Imi-n-Tanoute, Maroc, dessin de

l'auteur.

123. Poupée en plastique 'Little Miss', 1996, p. 173, Taroudannt, Maroc,

photo de l'auteur.

124. Armature de poupée-femme, p. 173, Hmar, Maroc, dessin de

l'auteur.

125. Poupée-femme avec la partie plus épaisse de la plante bûsûsû

utilisée comme tête, 1998, p. 175, Hmar, Maroc, photo de l'auteur.

126. Poupée-mère portant un bébé dans le dos, 1998, p. 176, Hmar,

Maroc, photo de l'auteur.

127. Dix poupées-femmes et une poupée-homme, 1998, p. 177, Imou

Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

128. Poupée-homme avec un emballage de bonbon comme vêtement,

1998, p. 178, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

129. Poupée-femme à visage souriant, 1998, p. 178, Imou Ergen, Maroc,

photo de l'auteur.

130. Poupée-femme avec vêtement bleu à motif floral, 1998, p. 178,

Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

131. Poupée-femme avec vêtement blanc à motif floral vert, 1998, p.

178, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

132. Poupée-femme avec vêtement rouge et ceinture de fils blanc, 1998,

p. 179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

133. Poupée-femme avec vêtement, foulard et ceinture rouge, 1998, p.

179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

300

134. Poupée-femme avec vêtement rouge et blouse blanche, 1998, p.

179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

135. Poupée-femme avec vêtement de plastique rouge transparent, 1998,

p. 179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

136. Poupée-femme avec vêtement à motif floral et foulard de la même

étoffe tenu en place par un morceau de scotch, 1998, p. 180, Imou

Ergen, Maroc, photo de l'auteur.

137. Poupée-femme avec un emballage de bonbon comme vêtement et

un grand foulard de gaze, 1998, p. 180, Imou Ergen, Maroc, photo

de l'auteur.

138. Poupée-femme avec vêtement rouge cintré par une ceinture de fils

blanc et foulard de la même étoffe, 1998, p. 180, Imou Ergen,

Maroc, photo de l'auteur.

139. Poupée-femme, région de Tafraoute, 1998, p. 181, Imou Ergen,

Maroc, photo de l'auteur.

140. Poupée-femme, 2002, p. 181, région de Tafraoute, Lahfart, Maroc,

photo de l'auteur.

141. Poupée-femme, 2002, p. 182, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

142. Poupées-femmes, 2002, p. 183, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

143. Poupée-femme montrant des jambes découpées, 2002, p. 185,

Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

144. Poupées-femmes, 2002, p. 187, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

145. Poupées-femmes, 2002, p. 187, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

146. Poupée-femme, 2002, p. 186, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

147. Poupée-femme vêtue d'une robe faite avec l'emballage aluminium

d'un petit gâteau, 2002, p. 186, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.

148. Poupée-femme avec armature en Isomo, 2002, p. 188, Lahfart,

Maroc, photo de l'auteur.

149. Poupée-mère portant un bébé dans le dos, 2002, p. 189, Lahfart,

Maroc, photo de l'auteur.

150. Poupée-femme en robe de mariage blanche, 2002, p. 190, Lahfart,

Maroc, photo de l'auteur.

151. Poupée-homme avec tête en Isomo, 2002, p. 190, Lahfart, Maroc,

photo de l'auteur.

301

152. Coquillages d'escargots représentant la jeune mariée, le jeune

marié, leur famille et les visiteurs dans une maisonnette avec

voiture de mariage dans le garage, 2002, p. 191, Lagzira, Maroc,

photo de l'auteur.

153. Les coquillages d'escargots menés en voiture faite d'une boîte de

sardines, 2002, p. 192, Lagzira, Maroc, photo de l'auteur.

154. Fille avec sa maison de poupée, 2002, p. 193, Lagzira, Maroc,

photo de l'auteur.

155. Poupée-femme, p. 205, Tunisie, Collection du Musée de l'Homme

n° 30.54.891, cliché D. Destable.

156. Poupée-femme, p. 206, Tunisie, Collection du Musée de l'Homme

n° 30.54.888, cliché M. Delaplanche.

157. Poupée-enfant, p. 210, Touaregs, Collection du Musée de

l'Homme n° 41.19.157, cliché D. Destable.

158. Coin de poupée dans un Centre de Ressources pour le Préscolaire,

1993, p. 241, Kénitra, Maroc, photo de l'auteur.

159. Village d'oasis fait par des enfants d'une classe préscolaire, 1989, p.

255, Gand, Belgique, photo de l'auteur.

160. Caravane de nomade fait par un enfant d'une classe préscolaire,

1989, p. 256, Gand, Belgique, photo de l'auteur.

161. Les enfants d'une classe préscolaire marchent autour de leur village

d'oasis, 1989, p. 257, Gand, Belgique, photo de l'auteur.

162-163. Exemple de jouets fabriqués par des enfants marocains

stimulant des enfants flamands à créer eux-mêmes des jouets,

1998, p. 258-259, Journée UNICEF organisée par le Comité de

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320

321

Vidéos :

Poupées et jeux de poupées marocaines

Video: homemade dolls from Morocco

Rossie, Jean-Pierre, Laabib, Souad & Sterner, Björn (1998). Video:

Homemade Dolls from Morocco. Filmé par Björn Sterner, Halmstad:

Nordic Center for Research on Toys and Educational Media, University

of Halmstad, 18 minutes. - Vidéo disponible dans la vidéothèque de

SITREC.

Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14

Poupées-femmes marocaines (p. 117).

Dans la première partie de la vidéo, Souad Laabib montre comment

différentes poupées ont été faites avec des matériaux naturels et de

récupération. Ces poupées sont :

1. Poupée-jeune mariée (1'-5'30"), confection en janvier 1997 de la

poupée faite dans les années 1940 par Sfia Gharîb, née dans le village

d'Arhbalou-n-Serdane sur la route de Khenifra à Boumia, Moyen

Atlas (fig. 76, p. 128).

2. Poupée-jeune mariée (5'30"-7'30"), confection en 1996 de la poupée

faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en

1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka

Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 85, p. 139).

3. Poupée-jeune marié (7'30"-10'), confection en 1996 de la poupée très

simple faite au début des années 1980 par Najat Laabib, née à Midelt

en 1971 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar

Assaka, Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 83 à gauche, p. 137).

4. Poupée-jeune mariée (11'30"-12'), confection en 1996 de la poupée

faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en

1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka,

Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 86 à droite, p. 140).

322

Dans la deuxième partie de cette vidéo Jean-Pierre Rossie montre

quelques poupées et donne des informations supplémentaires :

5. Poupée-jeune mariée (12'-12'15"), confection en 1996 de la poupée

faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en

1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka,

Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 86 à gauche, p. 140).

6. Poupée-jeune mariée (12'15"-12'55"), confection en 1996 de la poupée

faite vers la fin des années 1970 par Souad Laabib, née à Ksar Assaka

en 1968 et ayant vécu la plupart du temps de son enfance dans ce

village, Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig.80, p. 134).

7. Poupée-jeune mariée (12'55"-13'25"), confection en 1996 de la poupée

faite au début des années 1980 par Najat Laabib, née à Midelt en 1971

mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka, Jbel

Ayachi, Haut Atlas (fig. 84, p. 138).

8. Poupée-jeune mariée (13'28"-13'50"), confection en 1996 de la poupée

faite dans les années 1970 par Ennèya, une mère de trente-cinq ans

vivant dans le petit village de Ignern près du centre rural de Taliouine,

Jbel Siroua, Haut Atlas (fig. 111, p. 160).

9. Poupée-jeune mariée (13'50"-14'40"), faite en novembre 1996 par une

fille d'environ dix ans vivant à Ignern près de Taliouine, Jbel Siroua,

Haut Atlas (fig. 110, p. 160).

10. Sept poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (14'40"-

16'40") faites en novembre 1996 par des filles de la deuxième année

de l'école primaire du village Magaman près de Goulmima (fig. 101-

102, p. 153-154).

11. Poupée-jeune mariée et poupée-jeune marié (16'40"-18') faites en

octobre 1996 par Hesna Ourèra, une fille d'environ huit ans du petit

village Aït Hmed ou Yacoub près de Khemisset (fig. 73-74, p. 125-

126).

323

Vidéo :

Poupées de l'Atlas et du Pré-Sahara marocains

Rossie, Jean-Pierre & Lauras, Luc (2001). Vidéo : Poupées de l'Atlas et

du Pré-Sahara Marocains. Filmé par Luc Lauras, 19.10.2001, Musée

International des Arts Modestes, Sète, 60 minutes, version décrite ci-

après. Il existe aussi une version de 30 minutes utilisée pendant

l'exposition dans ce musée (novembre 2001 - février 2002) - Vidéos

disponibles dans la vidéothèque de SITREC.

Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14

Poupées-femmes marocaines (p. 117).

La vidéo avec commentaire de Jean-Pierre Rossie débute par un aperçu

de toutes les poupées, suivi par :

1. Les armatures des poupées (1'30''-3'40).

2. Sept poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (3'40''-6') :

poupées créées par des filles d'environ sept ans du village Magaman

(Goulmima), Pré-Sahara, en 1996 (fig. 99-101, p. 151-153), et le

modèle d'une maison de poupée.

3. Une poupée-jeune mariée (6'-7') : faite en 1994 par une fillette six ans

du village Ighrem-n-Cherif (Goulmima), Pré-Sahara (fig. 102, p.

154).

4. Dix poupées-jeunes mariées (7'-11') : confectionnées par des filles de

six à douze ans du village Aît Ighemour, Jbel Siroua, Haut Atlas, et

des ustensiles-jouets fabriqués par des garçons de ce village, 1992

(fig. 108-109, p. 158-159).

5. Quatre poupées-jeunes mariées (11'-14'50'') : trois poupées-jeunes

mariées faites par des jeunes filles et un faite par une mère d'environ

quarante ans du village Ignern, Jbel Siroua, Haut Atlas, ainsi qu'une

série d'ustensiles-jouets faite par les mêmes filles, 1996 (fig. 110-111,

p. 160).

6. Sept poupées-jeunes mariées, une poupée-jeune marié et une poupée-

mouton (14'50''-24'30'') : refaite en 1997 par trois sœurs entre vingt et

vingt-six ans ainsi que par leur mère de cinquante-cinq ans du village

324

Ksar Assaka (Midelt), Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 80-86, p. 134-

140), et le modèle d'une maison de poupée (fig. 79, p. 132).

7. Poupée-jeune mariée (24'30''-26') : refaite par une jeune mère

d'environ vingt ans, Imi-n-Tanoute, Haut Atlas, en 1992 (fig. 122, p.

171).

8. Poupée-jeune mariée (26'-27'50'') : poupée créée par une fille

d'environ neuf ans de la région de Tafraoute, Anti-Atlas, en 1998 (fig.

131, p. 178).

9. Dix poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (27'50''-31') :

huit poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié faites en 1998

par des filles de dix à quatorze ans ainsi qu'une poupée-jeune mariée

faite par un garçon de douze ans, tous des élèves de l'école d'Imou

Ergen près d'Ergoub (Sidi Ifni), Anti-Atlas (fig. 127-138, p. 177-180).

10. Trois poupées-jeunes mariées (31'-37'40'') :faites par des filles du

village Ksar Hasni Biad (Merzouga), Pré-Sahara, en 1997 (fig. 103-

106, p. 155-157).

11. Trois poupées-jeunes mariées et une poupée mère portant un bébé

dans son dos (37'40''-42'40'') : créées par des filles du village Hmar

(Taroudannt), Anti Atlas, en 1998 (fig. 124-126, p. 173-176).

12. Osselets d'os (42'40''-43'35'') : utilisés pour des jeux d'adresse mais

souvent remplacés par des pierres.

13. Deux poupées-jeunes mariées (43'35''-47'30'') : une poupée

traditionnelle confectionnée en 1961 par une élève et une poupée en

plastique importée utilisée comme armature pour une poupée-jeune

mariée refaite par une jeune femme en 1992, Marrakech (fig. 115-

117, p. 164-166), et un modèle de maisonnette (fig. 119, p. 168).

14. Planchette à laver servant de jouet, Rabat, 1993 (47'30-48'10'').

15. Deux poupées importées (48'10''-52') : une avec un survêtement

cousu par une fille du village Ignern, Jbel Siroua, Haut Atlas, en

1996 (fig.112, p. 161) et la poupée Little Miss achetée dans un petit

magasin de Taroudannt en 1996 (fig. 123, p. 173).

16. Maison de poupée d'une boîte de carton et poupée jeune mariée en

plastique avec les bras réparés de manière traditionnelle (52'-55') :

créées par une fille de neuf ans du village Zaïda (Midelt) en 1999

(fig. 93-94, p. 147-148).

325

Video: doll and construction play in Sidi Ifni

Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 1: Doll Play

and Construction Play in Sidi Ifni, Morocco, 31.1.2002. Filmé par Jean-

Pierre Rossie, Stockholm International Toy Research Centre, Stockholm:

Royal Institute of Technology - Vidéo disponible dans la vidéothèque de

SITREC.

Description détaillée des 19 minutes de jeu de poupée d'une fille de sept

ans et d'un garçon de quatre ans avec des poupées faites par la fille ou

achetées, ainsi que des 26 minutes d'interview par Boubaker Daoumani

avec les joueurs et la mère du garçon. Les poupées représentent des

enfants. Autorisation paternelle donnée sur la vidéo.

Le protocole détaillé de cette vidéo est disponible sur l'Internet :

http://www.sitrec.kth.se

Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14

Poupées-femmes marocaines (p. 194-195).

Video: doll play in Sidi Ifni

Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 3: Doll Play

in Sidi Ifni, Morocco, 10.2.2002. Filmé par Jean-Pierre Rossie,

Stockholm International Toy Research Centre, Stockholm: Royal

Institute of Technology. Vidéo, audiocassette et autorisation paternelle

écrite déposées à la vidéothèque de SITREC.

Description détaillée des 39 minutes de jeu de poupée de deux filles de

neuf ans et une fille de six ans avec des poupées Barbie, d'autres poupées

et des objets de jeu. Les poupées représentent des enfants. L'interview de

Boubaker Daoumani avec les joueurs est enregistrée sur audiocassette.

Vidéo et audiocassette déposées à la vidéothèque de SITREC.

326

Le protocole détaillé de cette vidéo deviendra disponible sur l'Internet :

http://www.sitrec.kth.se

Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14

Poupées-femmes marocaines (p. 195-196).

Video: doll and construction play in Lagzira

Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 4: Doll Play

and Construction Play in Lagzira (Sidi Ifni), Morocco, 4.3.2002. Filmé

par Jean-Pierre Rossie, Stockholm International Toy Research Centre,

Stockholm: Royal Institute of Technology. Vidéo et audiocassette

disponibles dans la vidéothèque de SITREC.

Description détaillée des 43 minutes de jeu de poupée et de construction

de maison de poupées d'une fille de six ans et de son frère de neuf ans

avec des poupées représentées par des coquillages. Les poupées

représentent une jeune-mariée ou un jeune marié quand ils sont entourés

d'un chiffon de gaze blanc, sinon elles représentent la famille et les

invités. L'interview de Boubaker Daoumani avec les joueurs et le père,

comprenant l'autorisation paternelle, est enregistré sur audiocassette.

Le protocole détaillé de cette vidéo est disponible sur l'Internet :

http://www.sitrec.kth.se

Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14

Poupées-femmes marocaines (p. 191-193).

327

Annexe 1 :

Schéma de description des jeux et jouets

Ce schéma pour une description détaillée des jeux et jouets a été élaboré

pour faciliter la recherche, non pas comme une analyse exhaustive de

tous leurs aspects. Des remarques et suggestions éventuelles sont les

bienvenues.

1 Nom du jeu (1)

1.1 Nom en langue locale dans l'écriture originale

1.2 Transcription

1.3 Traduction

2 Origine du jeu (2)

2.1 Local, étranger

2.2 Ancien, récent

2.3 Forme récente d'un jeu ancien

3 Joueur(s)

3.1 Nombre de joueurs

3.2 Sexe (3)

3.3 Age (4)

3.4 Education formelle reçue

3.5 Facteur(s) de cooptation (5)

3.6 Structure du groupe de jeu (5)

4 Données spatio-temporelles

4.1 Lieu(x) (à l'intérieur, à l'extérieur; à la campagne, en ville; le relief;

en forêt, en bordure d'une rivière, dans la rue, au terrain de jeu)

4.2 Moments de la journée et/ou de l'année

4.3 Durée de l'activité (6)

4.4 Fréquence (jeu exceptionnel, rare, courant, très populaire)

328

5 Idiomes (7)

5.1 Jeux sans contexte narratif

5.2 Jeux avec contexte narratif (expression corporelle, musicale,

verbale; e.a. gestes spécifiques, terminologie, littérature orale,

chansons)

6 Matériel et jouet(s) utilisés (8)

6.1 Nom des objets (matériel, outil, jouet) (1)

6.2 Origine (9)

6.3 Description du matériel et des outils employés (10)

6.4 Description et fabrication éventuelle du/des jouet/s (10)

6.5 Constructeur(s) (11)

6.6 Utilisateur(s) du/des jouet/s (11)

7 Description de l'activité ludique (12)

7.1 Début de l'activité ludique

7.2 Règles

7.3 Enjeu

7.4 Cours du jeu

7.5 Récompense(s) et/ou pénalité(s)

7.6 Réaction du/des joueur/s et/ou spectateur/s

8 Remarques (13)

9 Données audio-visuelles

Dessin, photo, dia, film, vidéo, son

Remarques

1 Comme la transcription en caractères latins n'est qu'approximative de

la prononciation locale, il est recommandable d'enregistrer les noms

et autres données linguistiques liés à l'activité ludique. A côté d'une

traduction littérale une traduction libre peut être donnée. Cette

traduction libre est basée sur le jeu lui-même ou sur sa ressemblance à

un jeu (européen).

329

2 Il ne s'agit pas de trouver l'origine de l'activité ludique (et du jouet) en

question, une origine qui souvent se perd dans des temps très

lointains mais de savoir si oui on non il s'agit d'une pratique ancienne

(grands-parents ou antérieur) ou récente, locale ou importée.

3 Jeu (jouet) de filles ou de garçons veut seulement dire que le jeu

(jouet) est considéré par la plupart des enfants ou adultes comme

spécifique à l'un ou l'autre sexe mais cela n'exclut pas qu'un enfant de

l'autre sexe se l'approprie occasionnellement. D'autres jeux (jouets)

appartiennent aux deux sexes.

4 Les indications concernant l'âge des joueurs ne sont

qu'approximatives.

5 Les facteurs déterminant la cooptation de joueurs et la structure du

groupe de jeu sont en Afrique du Nord et le Sahara basés sur la

structure résidentielle et familiale. Dès lors, se sont souvent les

enfants de la même famille paternelle ou des voisins qui jouent

ensemble, surtout en milieu rural. Dans les villages urbanisés, les

petites et grandes villes l'importance du lien familial diminue et

l'importance du voisinage, des amitiés et des relations créées à l'école

augmente. L'âge et le sexe comme facteurs de cooptation et de

structure du groupe de jeu devient plus important vers six ans. Pour

analyser la structure du groupe on peut tenir compte de certains

aspects comme un groupe de jeu avec ou sans leader(s) et suiveur(s),

la manière de prendre les décisions (concertation entre les membres,

imposition par un meneur de jeu), comment un joueur est inclus ou

exclus.

6 La durée d'un jeu est difficile à établir car il y a parfois des versions

simplifiées et plus élaborées du même jeu. Cette information ne

donne qu'une idée relative de la durée moyenne d'un jeu car la durée

du même jeu joué à des moments différents ou par des enfants

différents est assez variable.

7 Terminologie, expressions, devinette, proverbes, contes, chansons

utilisés dans le jeu. Si possible les enregistrer car ces données peuvent

aussi être utiles à d'autres chercheurs.

8 Les objets et les jouets font partie de l'activité ludique dans laquelle

ils sont utilisés et ce ne sont donc pas des objets distincts. Même si la

recherche se concentre sur les jouets et le processus de fabrication de

330

jouets une (brève) description du jeu en question ne devrait pas

manquer.

9 En ce qui concerne l'origine d'un jouet une différence peut être faite

entre l'origine du jouet lui-même (créé sur place, fabriqué par une

industrie nationale, importé) et l'origine locale ou étrangère du

modèle qui a inspiré la fabrication du jouet.

10 La description, l'utilisation et le rôle des objets et des jouets utilisés

dans un jeu sont normalement mentionnés dans la description de

l'activité ludique.

11 Quand un enfant ou un adulte (hors du circuit commercial) fabrique

un jouet on mentionnera le sexe, l'âge et la situation sociale du

constructeur, et éventuellement la relation qui existe entre le

constructeur et l'utilisateur.

12 Signaler si la version complète d'un jeu est décrite ou une version

simple. Par exemple il arrive que le même jeu soit joué par des

enfants plus jeunes et des enfants plus âgés mais suivant des versions

différentes.

13 Ici on peut mentionner le rapport éventuel entre le jeu/jouet et

l'environnement physique, économique, social, culturel dans lequel

vivent les joueurs (e.a. le lien avec le lieu de résidence, le mode de

subsistance, les activités économiques, l'organisation familiale, les

coutumes, les rites, les fêtes).

Jean-Pierre Rossie

[email protected]

331

Annexe 2 :

Données autobiographiques

Né le 16 août 1940 dans la ville historique de Gand en Flandre,

Belgique, j‟ai été élevé avec quatre frères plus âgés dans une famille de

classe moyenne. Il est possible que mon intérêt pour les enfants et les

jeunes, déjà présent pendant mes études d‟assistant social, soit en rapport

avec le mouvement scout auquel j‟ai participé d‟abord comme enfant et

adolescent et puis comme chef scout. Un autre centre d‟intérêt déjà

décelable vers mes quinze ans fut l‟Afrique, plus précisément l‟Afrique

Noire. Ainsi je voyais ces études commencées en 1958 comme une

préparation à un engagement dans les services sociaux de ce que l‟on

appelait à ce moment le Congo Belge. L‟indépendance de la République

Démocratique du Congo en 1961, l‟année où j‟ai obtenu mon diplôme, à

mis tout de suite fin à ce projet. Comme je voulais de toute manière

partir en Afrique, j‟écrivis à l‟ambassade de plusieurs pays africains et à

quelques instances internationales. Une des rares réponses fut celle de

l‟UNESCO stipulant cependant qu‟un diplôme universitaire était

indispensable. C‟est cette lettre qui m‟a poussée à commencer des études

à la section d‟ethnologie du département d‟études africaines de

l‟Université d‟Etat de Gand en 1963, l‟année même où le premier de mes

quatre enfants est né. Bien que le professeur supervisant ma dissertation

de fin d‟études m‟a averti d‟un manque d‟informations ethnographiques

sur l‟enfance, j‟étais convaincu du contraire et j‟écrivis en 1986 un

mémoire sur l‟enfance traditionnelle en République Démocratique du

Congo. Néanmoins, ces études culturelles n‟offraient-elles aussi que peu

de possibilités d‟aller en Afrique et ainsi je me suis décidé à essayer

d‟entrer dans la recherche scientifique. J‟ai eu la chance d‟être accepté

par le Fonds National Belge pour la Recherche Scientifique sur base

d‟un projet de recherche sur l‟Islamisation des Royaumes Wolof au

Sénégal. Cependant des problèmes financiers ont mis prématurément fin

en 1969 à mon séjour dans ce pays.

De retour à Gand, j‟ai travaillé comme éducateur de jeunes en

situation problématique pendant deux ans. Pendant cette période j‟ai

commencé à penser continuer mes recherches précédentes sur l‟enfance

332

africaine. Accepté de nouveau comme chercheur par le Fonds National

Belge pour la Recherche Scientifique j‟ai terminé en 1973 la rédaction

de ma thèse de doctorat en néerlandais sur "L‟enfant et la Société. Le

processus de socialisation en Afrique Centrale patrilinéaire". Comme

cette thèse fut basée sur une utilisation extensive de documents, je

ressentais fortement le besoin de faire des recherches sur le terrain. Pour

des raisons d‟ordre familial, financier et politique des recherches en

Afrique Centrale ne me semblaient pas réalisables, dès lors j‟ai demandé

à mon ami et collègue Gilbert JM Claus qui préparait sa thèse de

doctorat sur les semi-nomades Ghrib du Sahara tunisien si je pouvais le

rejoindre. Ayant obtenu son consentement j‟ai proposé à la même

fondation une recherche sur la socialisation de l‟enfant ghrib. Ma

première période de recherche sur le terrain de trois mois a débuté en

mars 1975 et fut suivie par deux autres périodes de trois mois en

automne de la même année et au printemps 1977. C‟est lors de mon

premier séjour chez les Ghrib que j‟ai pris conscience de l‟importance du

jeu d‟enfant et du groupe de jeu non seulement pour obtenir des

informations mais aussi pour faciliter d‟être accepté par les enfants et

leurs familles. Dès cet instant je me suis concentré sur cet aspect de la

culture des enfants ghrib en élaborant une description détaillée de leurs

activités ludiques et de leurs jouets en les illustrant par beaucoup de

diapositives et un peu de tournage de film.

Après ces huit années comme chercheur (1970-1978) il me fallait

orienter ma vie professionnelle. En 1980 j‟ai eu la chance de trouver un

nouveau terrain d‟activités qui me convenait en créant en collaboration

avec un collègue turque le premier service municipal de la Ville de Gand

pour les immigrés turcs et nord-africains. En réponse à ce changement

professionnel le corpus de jeux et jouets des enfants ghrib risquait de

rester inutilisé. C‟est alors que j‟ai commencé à rechercher des données

sur les jeux et jouets d‟enfants dans la bibliographie sur l‟Afrique du

Nord et le Sahara. Cette analyse bibliographique m‟a permis de rédiger

une bibliographie commentée. Visitant le Musée de l‟Homme à Paris en

1982 mon attention fut attirée par quelques jouets d‟enfants touaregs et

nord-africains exposés dans les vitrines. Sachant que dans des musées

anciens les réserves renferment beaucoup plus d‟objets que ce qui est

exposé, j‟ai contacté le département concerné et trouvé dans les réserves

une importante collection de jouets d‟Afrique du Nord et du Sahara

333

s‟étendant sur une période débutant à la fin du dix-neuvième siècle et

allant jusqu‟environ 1960. Avec la permission de Dominique Champault,

responsable du Département d‟Afrique Blanche et du Proche Orient, j‟ai

analyse en détail cette collection pendant mes périodes de vacances.

Au milieu des années 1970 un changement important dans mes

attaches scientifiques s‟est progressivement mis en place. Au début de

mes recherches sur l‟enfance africaine j‟étais lié au domaine des études

africaines et orientales parlant en quelques rares occasions de l‟enfance

en Afrique centrale puis des activités ludiques des enfants ghrib. Me

sentant isolé en raison de mon sujet d‟étude je recherchais d‟autres

contacts. Mon premier essai à surmonter cette isolation était ma

participation au congrès mondial de l‟0MEP, l‟Organisation Mondiale de

l‟Education Préscolaire, à Copenhague en 1975 où j‟ai présenté un

exposé sur "Children in Exceptional Situation in Africa" (Rossie, 1982).

Dans la même année j‟ai donné deux conférences à la Faculté de

Psychologie et des Sciences de l‟Education de l‟Université de Genève,

une sur le même sujet et l‟autre sur la socialisation de l‟enfant en Afrique

centrale. Puis, je suis allé chez Irenäus Eibl-Eibesfeldt de l‟Arbeitsstelle

fur Humanethologie du Max Planck Institut fur Verhaltenswissenschaft à

Percha bei Starnberg près de Munich. Ce professeur m‟a initié à filmer

selon la méthode d‟éthologie humaine ce qui a produit en 1977 un film

inédit d‟environ une heure sur les relations entre enfants et entre enfants

et adultes chez les Ghrib du Sahara tunisien (film déposé à la

vidéothèque de SITREC).

La rencontre avec André Michelet en 1987, à ce moment président de

l‟International Council for Children‟s Play (ICCP), m‟a introduit dans le

monde des jeux et jouets. C‟est au sein de cette association que j‟ai

réellement commencé à discuter de mes résultats de recherches et qu‟il

m‟a été possible de publier en français mon premier livre sur les poupées

et jeux de poupées des enfants sahariens et nord-africains. C‟est aussi

dans le cadre de cette association que j‟ai rencontré Brian Sutton-Smith

qui en 1993 m‟a proposé de devenir un membre fondateur de

l‟International Toy Research Association (ITRA). Lorsque j‟ai rencontré

Krister Svensson en 1996 à l‟occasion du premier International Toy

Research Conference à Halmstad en Suède, j‟ai trouvé enfin un havre

scientifique d‟abord dans le Nordic Center for Research on Toys and

Educational Media (NCFL) de l‟Université de Halmstad et depuis 2002

334

dans le Stockholm International Toy Research Centre (SITREC) du

Royal Institute of Technology à Stockholm. Ce n‟est qu‟avec le soutien

de ces deux centres que j‟ai pu rendre disponible mes données sur

l‟héritage ludique des enfants sahariens et nord-africains. Il n‟y a aucun

doute que ce changement de références scientifiques et de contacts avec

des associations et des chercheurs du domaine des études africaines et de

l‟ethnologie au domaine des études sur l‟enfant et le jeu se reflète

clairement dans mes travaux. Cela a en plus stimulé mes tentatives à lies

héritages ludiques des enfants sahariens et nord-africains aux approches

théoriques et pragmatiques de chercheurs occidentaux et non-

occidentaux s‟intéressant aux jeux et jouets. Par exemple j‟ai prêté

attention à plus d‟un aspect que j‟ai éventuellement développé par après

dans mes publications suite à ma participation à des congrès

thématiques.

En 1990 j‟ai quitté le service social pour les immigrés avec l‟intention

de consacrer mon temps plus directement à la rédaction d‟une série de

livres sur les héritages ludiques des enfants sahariens et nord-africains et

de recommencer des recherches sur le terrain. Cherchant un nouveau

terrain de recherches je choisis le Maroc entre autres parce que je

pouvais à travers mes relations amicales avec une famille marocaine

vivant à Gand entrer en contact avec une parente de cette famille qui

était directrice d‟école primaire à Marrakech. Utilisant l‟argent restant

d‟une deuxième bourse de recherches du Fond National Belge pour la

Recherche Scientifique je fis un séjour de recherches de trois semaines à

Marrakech en février 1992. Les informations obtenues et les contacts

créés aussi bien avec des familles de Marrakech et d‟Imi-n-Tanoute

qu‟avec la Faculté de Lettres et Sciences Humaines de l‟Université Cadi

Ayyad de Marrakech semblaient prometteurs. Dès lors j‟ai décidé de

faire des recherches au Maroc pendant des périodes de plus ou moins

deux mois deux ou trois fois par ans. Sauf pendant l‟année 2001 c‟est ce

qui fut fait. A mon retour à Marrakech en octobre 1992 on m‟a proposé

un rôle de figurant dans un film qui allait se tourner dans les hautes

dunes près de Kénitra. Saisissant cette occasion pour me rapprocher de

Rabat, je me suis installé après cette expérience dans la Medina de

Kénitra pour environ trois ans. Puis, je suis allé à Khemisset et par après

à Midelt. Retournant après une année d‟absence au Maroc en début

2002, je suis allé pour trois mois à Sidi Ifni, une petite ville côtière au

335

sud d‟Agadir, où j‟avais noué quelques contacts superficiels avec des

instituteurs. Visitant un de ces instituteurs dans son école de montagne,

je fus contacté par un instituteur du premier degré, Boubaker Daoumani,

qui m‟exprimait son intérêt pour mes recherches et proposait d‟y

collaborer. De retour à Sidi Ifni pour une nouvelle période de trois mois

à partir d‟octobre de la même année, je me suis installé dans un quartier

populaire situé en flanc de la colline faisant face à l‟Océan Atlantique.

Avançant en âge à toute allure je vois approcher trop vite la fin de mes

activités de recherches et de publication des résultats, une fin que

j‟espère néanmoins encore assez lointaine. Poussé par ce sentiment et en

commentant le livre de Shlomo Ariel (2003) ou en étudiant le livre de

Julie Delalande (2001) et les articles dans le volume édité par Julia

Bishop et Mavis Curtis (2001), tous analysants différents aspects

linguistiques, culturels et sociaux des activités ludiques enfantines, je

regrette parfois devoir constater le peu qu‟offrent mes travaux en

comparaison à tout ce qu‟il est à faire. Néanmoins, je me sens conforté

par l‟idée que tout vient en son temps et qu‟un jour l‟héritage ludique

passé et contemporain des enfants sahariens et nord-africains sera

reconnu d‟importance majeure par les instances scientifiques, culturelles

et éducatives de leurs pays. Si j‟aurais pu y contribuer d‟une manière ou

d‟une autre je me sentirais comblé. Entre-temps je me sens soutenu par

l‟intérêt dont témoignent certains collègues. Pourtant j‟espère qu‟en plus

des savants du domaine des jeux et jouets intègreront dans leurs analyses

et leurs élaborations théoriques l‟information disponible sur les jeux et

jouets des enfants sahariens et nord-africains.

Comme je suis quand même resté un peu assistant social et étant

depuis longtemps un volontaire du Comité de Gand pour l‟UNICEF, j‟ai

voulu trouver des moyens pour rendre mes données, mes photos et ma

collection de jouets provenant de mes recherches sur les enfants

sahariens et nord-africains utile au niveau de l‟action sociale et

pédagogique. Cela m‟a conduit à essayer d‟élaborer ce que j‟aime

appeler une approche ludique de l‟interculturel. Cette préoccupation m‟a

aussi stimulée à monter deux expositions temporaires, une dans le cadre

des écoles communales de Gand (décembre 1982) et une autre dans le

Musée International des Arts Modestes à Sète (novembre 2001 – janvier

2002), ainsi qu‟une exposition permanente de ma collection de jouets des

enfants ghrib au Musée du Jouet à Mechelen en Belgique (1983- ).

336

Pendant la session 2003 de l'Université d'Eté Agadir sur le thème de

l'amazighité et les questions de développement on m'a invité à donner

une conférence sur la culture ludique de l'enfant amazigh marocain et

les questions de développement. Les quelques contactes établies lors de

cette session semblent créer des nouvelles occasions pour une recherche

action au Maroc mais il est certainement beaucoup trop tôt pour savoir si

quelque chose se concrétisera.

337

Index Auteurs

Agiobu-Kemmer, I. S., 245

Archier, L., 54

Ariel, S., 335

ATFALE, 240-243

Ballais, J. L., 33

Balout, L., 83, 89, 272, 276

Béart, Ch., 19, 100-101, 211,

295

Belghiti, M., 203

Belgisch Comité voor Unicef,

25-26

Bellin, P., 19, 39, 66, 96

Bergeret, L., 259-260

Bernard van Leer Foundation,

238-239, 242, 245, 252

Bishop, J. C., 335

Bouma, J., 251

Bouzoubaâ, K., 240, 242-243

Brenier-Estrine, A., 62

Brougère, G., 21, 226-227, 229

Brunot, L., 230

Cabot Briggs, L., 28

Cabrera E. A., 19

Camps, G., 23, 28, 31, 36, 208

Castells, F., 165, 199, 217

Catalogue des collections de

l'Aurès, 33, 113

Centre de Recherches et

d'Etudes sur les Sociétés

Méditerranéennes, 100

Champault, F. D., 15, 19, 30-31,

42, 59, 71, 73-74, 96, 108-

109, 230, 267, 274, 280,

282-283, 333

Claudot-Hawad, H., 24, 90

Claus, G. J. M., 20-21, 24, 41, 96,

231, 295, 332

Cortier, M., 66, 69, 82-83, 86,

89, 198, 210

Curtis, M., 335

Daoumani, B., 42, 81, 182, 188,

192, 194-196, 199-200, 220,

243, 325-326, 335

de Foucauld, Ch., 54, 61, 69,

83-85

Delalande, J., 335

Denis, 54, 63

Dernouny, A., 203

Destaign, E., 116, 120

Doutté, E., 120, 230

Dupuy, A., 207-208, 231

Early Childhood Matters, 251-

252

E-Conflict™ World

Encyclopedia, 25, 27, 29, 36

Eibl-Eibesfeldt, I., 333

El Andaloussi, B., 240-241, 243

El Mostafa, H., 244

Ethnologue: Languages of the

World, 29, 32-33

338

Encyclopédie Berbère, 123, 208

Factor, J., 40

Fates, Y., 239

Ferrarotti, W., 229

Flamand, P., 120, 197, 199, 230

Foley, H., 66, 69, 84, 89, 276

Fuchs, P., 59, 103, 106

Gabus, J., 26, 69, 71-72, 82, 89,

100-101, 231, 276, 279, 294-

295

Gaudry, M., 113, 286

Goichon, A. M., 110-111

Grand Atlas du Continent

Africain, 27

Grange, J., 230

Guichard, 162-163, 298-299

Gupta, A., 246, 250

Hardy, G., 230

Herber, J., 19, 118-120, 230-

231, 286-287, 296

Huughe, G., 112

Ibn Azzuz Hakim, M., 51, 123,

213

International Federation for

Parent Education, 19

Jemma-Gouzon, D., 33, 201

Jensen, J., 228

Jeu et Sports en Méditerranée,

248

Khanna, S., 245-247

Klepzig, F., 19

Komorowski, Z., 23, 25, 28, 31

Kronenberg, A., 29, 106

Laabib, S., 42, 132, 135, 141,

203, 226, 321-322

Lancy, D. F., 237

Laoust, E., 51, 201, 307,

Laoust-Chantréaux, G., 112,

211

Lauras, L., 107, 158, 298

Lebeuf, A. M. D., 61, 293

Le Cœur, Ch., 29, 103, 106, 281

Léonetti, A., 244

Leupen, A., 23

Lhote, H., 66, 71, 82, 84, 90,

264, 270, 272-273, 275-277,

289, 293, 295

Lombard, Ch., 238

Lopatinsky, O., 29, 103, 106,

181

Luwaile Mwamba, B., 238

Lwakatare, E. K., 250

Mahe, A., 32

Mandel, J-J., 62

Manson, M., 225

Mission Scientifique du Maroc,

117, 200

Mouritsen, F., 253

Naseh, A., 199

Nicolas, F., 59, 72, 82, 88

339

Oubahammou, L., 129, 203

Paul, S., 81, 206, 217, 277

Pâques, V., 61, 293

Pinto Cebrián, F., 26, 99, 102

Poupée-Jouet. Poupée-Reflet,

20, 260, 281

Robert, A., 39

Servier, J., 20, 207, 223

Sijelmassi, M., 168

Soulé, 119-120

Steinilber-Oberlin, E., 86

Sterner, B., 321

Sutton-Smith, B., 223, 227, 333

Tillion, G., 112, 114, 285

Tolfree, D., 252

UNICEF, 25-26, 235, 248-249,

255-256, 258, 301, 335

La Vie du Sahara, 23, 25, 29,

55, 80, 85, 97-98, 106, 265

Westermarck, E., 20, 120

Woodhead, M., 252

Zerdoumi, N., 37, 116, 120, 230

341

Index Géographique et Ethnique

Adrar des Iforas, 24, 273, 278

Agadez, 23, 103-104, 106, 265,

273, 277

Agadir, 34, 126, 169, 193, 196,

235, 243, 335-336

Ahaggar, 23-24, 54, 59, 61, 66-

68, 71, 72, 82-84, 89, 96,

209-210, 264, 267, 270-272,

275-276, 289

Aïn Toujdate, 35, 75, 118, 124,

296

Aïr, 24, 56, 66, 82, 89, 273, 277

Aït Hmed ou Yacoub, 35, 41,

75,125, 297, 322

Aït Ighemour, 34, 41, 52-53, 62,

64, 76, 158, 212, 293-294,

298

Aït Merghad, 132, 150

Aït Ouirra, 35, 123, 129, 203

Aït Slimane, 149, 298

Alarsès, 265

Algérie, 20, 22-24, 26-28, 31-33,

36-38, 54, 56, 58-59, 63, 69,

73, 79, 81-82, 96, 102, 109-

112, 116, 120, 195, 209, 223,

230, 239, 264, 266-267, 270,

272-277, 280, 282-286, 289

Amazigh, 15, 22, 24-25, 28-38,

42, 51, 64, 74-76, 79, 101,

111-112, 116, 120, 125-127,

129-130, 132, 150-151, 154,

158, 160, 162, 169-170, 192,

195-196, 198, 202-203, 212-

213, 235-236, 244, 336

Anti-Atlas, 34-34, 51-52, 117,

124, 126, 177, 181-189, 201,

324

Arabe, 15, 22, 24-26, 28-30, 33-

38, 42, 111, 119-120, 163,

195, 206-208, 240, 276, 284,

291

Arabo-Berbère, 22, 28-29, 34,

36, 75, 132

Assa, 26-27

Aurès, 33, 37, 112-113, 284-285

Bardaï, 29, 104, 281

Belbala, 10, 22, 30-31, 52, 73-

74, 79, 82, 96, 107, 219, 223,

280, 282-283, 296

Beni Snous, 79, 116

Berbère, voir Amazigh

Boutilimit, 82, 101

Casablanca, 200-201

Chaamba, 22, 28, 30, 52, 73-74,

274, 294

Chaouia, 22, 33, 79, 81, 112-

113, 209, 211, 284-286, 290,

296

Chott l-Djerid, 24-25

Djanet, 52, 265-266, 273, 277

Djerba, 208

El Faouar, 25

El Khemis, 34, 139, 162, 213

El Ksiba, 35, 203

El Ouata, 109, 283

Erg er Raoui, 28, 30

Erg Iguidi, 27

Ergoub, 35, 181, 324

Errachidia, 34-35, 130, 150

Essaouira, 41, 76, 158, 199

342

Fès, 35-36, 117, 119-121, 124,

286, 288

Gand, 41, 201, 255, 258, 301,

331-332, 334-335

Ghadames, 23

Ghardaïa, 31, 110-111, 284

Ghât, 24, 86, 265, 277

Ghomara, 51-52, 117, 123

Ghrib, 4, 10, 20-22, 24-26, 41,

52-54, 56, 59, 63, 72-74, 79,

81-82, 92, 94-96, 101, 108,

218-219, 223, 227, 231-232,

255, 258, 293-295, 316, 332-

333, 335

Guelmim, 77

Goulmima, 34-35, 41, 75, 117,

124, 149-151, 154, 243, 322-

323

Haut Atlas, 34, 64, 76, 117, 124,

126, 149, 321-324

Hmar, 34, 41, 75, 173-174, 198,

212, 299, 324

Ighrem-n-Cherif, 34, 42, 154,

298, 323

Ignern, 34, 42, 148, 160-161,

298, 322-324

Imi-n-Tanoute, 34-35, 41, 75,

117, 124, 169-170, 198, 212,

232, 299, 324, 334

Imou Ergen, 35, 42, 177, 181,

299-300, 324

In Amedgel, 270, 275-276

Jbel Ayachi, 35, 126, 130, 132,

145, 321-322, 324

Jbel Siroua, 34, 76, 124, 158,

322-324

Juifs du Sud du Maroc, 117, 123-

124, 197, 199

Kénitra, 241, 243, 301, 334

Khemisset, 35, 41, 75, 111, 124-

127, 2243, 322, 334

Khouribga, 36, 117, 200

Kidal, 87, 273-274, 278

Ksar Assaka, 35, 42, 75, 132,

135, 139, 141, 144, 203, 226,

297, 321-322, 324

Ksar Hasni Biad, 34, 42, 154,

224, 298, 324

Lagzira, 42, 192, 301, 317, 326

Lahfart, 35, 42, 182-184, 186-

188, 212, 300

Libye, 23-24, 54, 82, 86, 210,

265, 277

Magaman, 34, 42, 75, 151, 289,

322

Mali, 23-24, 61-62, 66, 69, 82,

87, 210, 273, 278

Maroc, 4, 9, 11, 20-27, 30, 34,

36, 38, 41-42, 51-53, 59, 74-

76, 79, 81-82, 116-206, 209,

212-213, 217-220, 223, 226,

229-232, 235, 239-245, 252,

257-258, 267-268, 286-288,

296-301, 321-336, 334, 336

Marrakech, 34-36, 41, 75, 117,

120, 123-124, 162-166, 168-

169, 199, 201, 212, 241, 243,

298-299, 334

Maures, 22, 25-26, 52-54, 58-62,

71, 79, 81-82, , 96-100, 101-

102, 108, 209, 211, 267-269,

278-279, 289, 293-295

343

Mauritanie, 25-27, 62-63, 71, 82,

96, 101, 211, 231, 268, 278

Merzouga, 34, 117, 124, 154,

157, 224, 298,

Midelt, 35, 41, 75, 117, 124,

126, 128, 130, 132-147, 154,

203, 243, 321-322, 324, 334

Mopti, 23, 52, 62

Moulay Idriss, 117, 119, 121

Moyen Atlas, 35, 117, 120, 124,

127, 129-130, 142, 198, 202-

203, 209, 321

Mozabites, Mzab, 11, 22, 31, 79,

81-82, 110-111, 217-219,

223, 284, 296

Niger, 23-25, 52, 56, 56, 59, 61-

62, 66, 72, 82, 88, 265-266,

273, 277

Nouakchott, 25, 101, 231

Oualata, 25-26, 52-53, , 60, 62,

71-72, 81, 99-101, 231, 268-

269, 279

Ouargla, 28, 80

Ouarzazate, 34, 64, 76-77, 117,

150, 158, 162, 169, 199

Oulad ben Sbaa, 35, 199

Oulad Yahya, 34, 75, 172-173,

198, 212

Oulmès, 35, 127, 297

Pré-Sahara marocain, 158, 323

Rabat, 36, 51, 117, 120, 165,

240, 287, 324, 334

Regeybat, 22, 27-28, 52-54, 63,

79, 81, 102, 108, 280

Rhergo, 52, 61-62

Sahara Nord-occidental, 27, 30,

59-62, 73, 102, 107, 109, 267-

268, 274, 280, 282-283

Sahara Occidental, 25-27

Sahraoui, 20, 22, 26-27, 79, 102

Saoura (Vallée de la), 22, 30-31,

52-54, 59, 79-81, 109, 218,

267, 283, 293, 296

Sénégal, 25-26, 101, 331

Settat, 117, 200-201

She°ba, 35, 42, 130, 297

Sidi Ifni, 35, 42, 117, 124-126,

177, 181-182, 191-195, 199-

200, 212, 220-221, 243, 325-

326, 334-335

Tabenatout, 35, 42, 146, 297

Tafraoute, 35, 181-182, 200, 324

Tagant, 278-279

Tahoua, 59, 88

Taliouine, 34, 148, 160, 322

Talat (Aïr), 266

Tamanrasset, 56, 287, 292, 296,

309

Tanger, 120, 201

Taroudannt, 34-35, 41, 75, 117,

124, 126, 160, 172-173, 198,

209, 212, 299, 324

Tassili n'Ajjer, 24, 82, 90, 266

Tataouine, 35, 42, 145-146, 297

Tazenakht, 34, 76, 158-160

Tchad, 29, 59, 103, 280

Teda, 22, 29, 52-54, 58-59, 79,

81, 103-106, 108, 280-282,

295-296

Tibesti, 29, 59, 103, 106, 280-

281

Tidjikdja, 25, 96, 99, 209-211,

278-279

Tombouctou, 89

344

Tiris (région de), 27

Tizal, 34, 139, 162, 213

Tlemcen, 79, 116, 120, 2

Touareg, 22-26, 52-56, 61, 66-

68, 72, 79, 81-90, 96, 209-

210, 264-267, 269-278, 281,

289, 293-295, 301, 332

Tunisie, 4, 10, 20, 22, 24-25, 36,

54, 56, 63, 72-79, 81-82, 92,

203, 205-207, 219, 227, 231,

248, 255, 257, 287, 301, 332-

333

Zaïda, 35, 141, 147, 220, 297-

298, 324