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Dangerous Perfection (&moi) - ekladata.comekladata.com/OS5Y1CER65Jq3SyiTO3X2cEHd48.pdf · bon et soient si beaux ? — Il va falloir me laisser passer, ma belle. Son haleine chaude

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Dumêmeauteur

SimplePerfection,&moi,2014.

Titredel’éditionoriginale:TWISTEDPERFECT ION

PubliéeparAtria,undépartementdeSimon&Schuster

Maquettedecouverture:EvelaineGuilbertPhoto:Fotosearch/GettyImages

ISBN:978-2-7096-4725-0

©2013byAbbiGlines.Tousdroitsréservés,ycomprisledroitdereproductiondetoutoupartiesousquelqueformequecesoit.Cetteéditionaétépubliéeavecl’accorddeAtria,undépartementdeSimon&Schuster,Inc.,NewYork.©2015,éditionsJean-ClaudeLattèspourlatraductionfrançaise.Premièreéditionjanvier2015.

ÀAutumnHull.M’écouteralorsquejesuisperduedansmonprocessuscréatifn’estpasfacile.Voireagaçant.J’ailachancedeconnaîtrequelqu’unquejepeuxappelerpourmeplaindretoutmonsoûl.

MerciAutumn.

Troisansplustôt

Della

Tuesmonrayondesoleil,monseulrayondesoleil.Tumerendsheureusequandlescieuxsontgris.Continueàchanter,maman.Net’arrêtepas.Jesuisdésoléed’êtrepartie.Jevoulaisvivreun

peu.Jen’aipaspeurcommetoi.J’aibesoinquetuchantes.S’ilteplaît,chantepourmoi.Nefaispasça.Nevapasaveclui.Iln’existepas.Tunevoisdoncpas?Iln’ajamaisexisté.Ilestmortdepuisseizeans.J’auraisdûparleràquelqu’un.Toutçac’estmafaute.Tuavaisbesoind’aideetjen’airien

fait.Aprèstout,j’avaispeut-êtrepeurmoiaussi…peurqu’ilsnet’emportent.

—Della,machérie,donne-moitesmains.Ilfautleslaver.Regarde-moi,Della.Écoute-moi.Ellen’estpluslà,maistuvast’ensortir.Onvatenettoyer.Ilsontemportésoncorpsetonvaquittercettemaison,pourdebon.Pourtoujours.Jet’enprie,Della,regarde-moi.Disquelquechose.D’un battement de paupières, je chassai ces souvenirs et levai les yeux versBraden,mameilleure

amie.Levisage inondéde larmes,elleessuyait lesangsurmesmainsavecungantde toilettehumide.J’auraisdûmereleveretlefairemoi-même,maisj’enétaisincapable.J’avaisbesoinqu’elles’enchargeàmaplace.

J’ai toujours su que ça arriverait un jour. Peut-être pas exactement comme ça. Jamais je n’avaisimaginélamortdemamère.Laplupartdutemps,jeculpabilisaisquandj’ypensais.Maisc’étaitplusfortquemoi.Masoifdelibertésurpassaitlaculpabilité.

J’avaistoujoursespéréquequelqu’unfinisseparserendrecomptequemamèren’avaitpastoutesatête.Quejen’étaispasuneenfantbizarrequivoulaittoutletempsresteràlamaisonetrefusaitdesortirdans le vraimonde. Je voulais qu’on s’en aperçoive… et enmême temps non. Parce que obtenirmalibertésignifiaitperdremamère.Etelleavaitbeauêtrefolle,elleavaitbesoindemoi.Jenepouvaispasleslaisserl’emmener.Elleavaittoujourseutellementpeur…detout.

Quatremoisplustôt

Della

LorsqueBradenm’avait donné sa vieille voiture pour que je parte découvrir lemonde, ni l’une nil’autren’avionsréaliséquejenesavaispasfaireleplein.J’avaismonpermisdepuistroismoisàpeine.Etjeconduisaisdepuiscinqheures.Jusque-là,jen’avaispaseubesoindelefaire.JecherchaimontéléphonedansmonsacpourappelerBraden.Maiselleétaitenvoyagedenocesetça

megênaitdeladéranger.Plustôtdanslajournée,quandellem’avaitcollésesclésdanslamainenmedisant:«Parsàl’aventure.Trouvetavoie,Della»,j’avaisététellementtouchéeparsagénérositéquejen’avaispaspenséàdemanderquoiquecesoit.Jem’étaiscontentéedelaserrerdansmesbraspuisdelaregarders’éclipseràl’arrièred’unelimousineavecsonmari,KentFredrick.Ilnem’étaitjamaisvenuàl’espritquejenesavaispasfaireleplein.Jusqu’àcetinstant.Leréservoir

était totalementàsec,sibienque j’avaisdû terminerenroue libredans lapetitestation-serviced’unevillecôtièreaumilieudenullepart.Riantdemoi-même,j’écoutailavoixdeBraden:«Jenesuispasdisponible.Sivousvoulezmejoindre,jevousconseillederaccrocheretdem’envoyeruntexto.»Sonrépondeur.Elleétaitsûrementdansl’avion.Surcecoup-là,j’allaisdevoirmedébrouillertouteseule.Je descendis de la petite Honda Civic rouge passé. Heureusement, je m’étais garée du côté du

réservoir.Jesavaisquelebecseglissaitdansunepetiteporte.J’avaisdéjàvufaireBraden.Jepouvaisyarriver.Peut-être.Premierproblème:commentouvrircettepetiteportemagique.Elleétaitlà,devantmesyeux,maiselle

n’avaitpasdepoignée.Jelafixaiunmoment,puisjetaiunœilalentouràl’affûtdequelqu’undepastroplouche dans les parages. J’avais besoin d’un coup de main. Il m’avait fallu deux bonnes années dethérapiepourpouvoiradresserlaparoleauxinconnus.Àprésent,çam’arrivaitfréquemment.Bradenyétait pour beaucoup plus que le psy que l’onm’avait forcée à consulter toutes les semaines. Bradenm’avaitpousséeau-dehorsetm’avaitapprisàvivre.« La seule chose dont nous devons avoir peur est la peur elle-même. » La citation de FranklinD.

Rooseveltétaitscotchéesurlemiroirdemasalledebains.Jelalisaischaquematin,ou,toutdumoins,jel’avaisluechaquejourcestroisdernièresannées.Jelarépétaiensilencedansmatêteetmoncorpssedécontracta.Jen’avaispaspeur.Jen’étaispasmamère.J’étaisDellaSloane,envoyageàladécouvertedemoi-même.—Toutvabien?Vousavezbesoind’aide?Lavoixtraînante,graveetdoucemefitsursauter.Jetournaibrusquementlatêteetdécouvrisungars

quimesouriaitdel’autrecôtédelapompe.Sesyeuxbrunfoncéposéssurmoisemblaientpétillerderire.Jen’avaispasbeaucoupd’expérienceenmatièred’hommes,maissuffisammentpoursavoirqu’unmeccanoncommeluin’étaitpasforcémentquelqu’underecommandable.J’avaisperdumavirginitéavecuncharmeurduSuddontlesourirefaisaittomberlespetitesculottes.Lapireexpériencedemavie.Maiscetypepourraitpeut-êtrem’aider.Ilnemeproposaitpasdecoucher.Ilmeproposaitdel’aide.Enfin,c’estcequejecroyais.—Jenesaispas…Je…Enfait,jen’aijamais…Seigneur,jen’arrivaismêmepasàledire.Commentexpliquerqu’unefillededix-neufansnesavait

pascommentutiliserunepompeàessence?Unriresemitàvibrerdansmapoitrineetjemecouvrislabouche.Ilallaitmeprendrepourunefolle.Jeréprimaimongloussementdumieuxpossibleetluisouris.—Jenesaispasfaireleplein.Sesélégantssourcilsbrunssedressèrentet ilm’étudiauninstant,sedemandantsansdoutesic’était

vrai. S’il savait ! Il y avait tant de choses que j’ignorais. Braden avait tenté de m’expliquer lefonctionnementdumonde,mais,maintenantqu’elleétaitmariée,ilétaittempsquejemedébrouillesanselle.—Vousavezquelâge?interrogea-t-ilenmereluquantdehautenbas.Jeneressemblaispasàuneado.Depuismesseizeans,j’avaiseuuncorpsparfaitementdéveloppé.Je

voyaisbienqu’ilessayaitdedevinermonâge.Carseullejeuneâgepouvaitexpliquerquejenesachepasfaireleplein.—J’ai dix-neuf ans,mais je ne conduis pas depuis longtemps et c’est la première fois que je dois

prendredel’essence.Jesoupiraipuislaissaiéchapperunpetitrire.Laréponseavaitquelquechosederidicule,mêmepour

moi.—C’estdifficileàcroire,jesais,masj’aibesoind’aide.Sivouspouviezjustememettresurlavoie,

j’yarriverais.Jejetaiunœilàsongrospick-up.Noiretrutilant.Ilconvenaitbienàsoncorpsélancéetmusclé,sa

peaumateetsescheveuxfoncés.C’étaitundecestypessexyetdangereux.Onledevinaitrienqu’àsonpetitsouriresatisfait.Lorsqu’ils’approcha,jem’aperçusqu’ilétaitbeaucoupplusgrandquecequejepensais.Celaétant,je

nemesurais qu’unmètre soixante-cinq.La coupebien ajustéede son jean et ses boots en cuirmarronfoncémettaient ses jambes envaleur. Jeme rendis compteunpeu trop tardque je le fixais et relevaiaussitôt lesyeuxpourcroisersonregardamusé.Ilavaitvraimentuntrèsbeausourire.Sonvisage,quisemblaitnepasavoirvude rasoirdepuisplusieurs jours, encadrait sesdentsblanchesetparfaitementdroites.Sonapparencenégligéenecollaitpasavecsonpick-updeluxe.—Fautd’abordouvrircettepetiteporte,dit-ilentoquantdessus.La façon dont ses lèvres enroulaient les mots me fascinait au point que j’avais peur de rater ses

instructions.J’allaisluiposerunequestionlorsqu’ilmecontournapourouvrirlaportièreconducteur.Ilsepenchaenavant,m’offrantunevuedégagéesursonjeanresserrésursonfessierdélicieusementferme.Trèsappréciable.En se débloquant d’un coup, la porte magique qui m’avait tant décontenancée me fit sursauter. Je

poussaiuncriaiguetmeretournai:elleétaitouverte.—Oh!m’exclamai-jeavecenthousiasme.Commentavez-vousfait?Soncorpssensuels’approchaderrièremoietjedécelaiunparfumd’herbeetdequelquechosedeplus

fort…Ducuir,peut-être?Ceseffluvesm’envoûtèrent.Pournepaslaisserpasserl’occasion(celam’étaitarrivétropsouventdansmavie),jereculailégèrement,justeassezpourquemondostouchesapoitrine.J’envahissaissonespacepersonnel,maisilnes’éloignapaspourautant.Aulieudequoi,ilinclinala

têtepourmeparleràl’oreille.Savoixgraveavaitunroulementdélicieux.—J’aiappuyésurleboutond’ouverturedelatrappeàessence,justeendessousdutableaudebord.—Oh.Jenetrouvairiend’autreàrépondre.Unrireprofondvibradanssapoitrinecontremesépaules.—Vousvoulezquejevousmontrecommentonversel’essence,maintenant?—Oui,ceseraitgentil.Maisjevoulaisrestertoutcontrelui.Jefisunsignedelatête,biencontentequ’ilnebougepasd’un

pouce.Peut-êtreaimait-illecontactphysiqueautantquemoi.Pourtant,çan’étaitpasunebonneidée.Lesgarsdanssongenreavaienttendanceàmalmenerlesfemmes.Pourquoifallait-ilqu’ilssententdivinement

bonetsoientsibeaux?—Ilvafalloirmelaisserpasser,mabelle.Sonhaleine chaude réchauffa le duvetdélicat qui recouvraitmonoreille. Je retinsun frémissement,

hochailatêteetplaquaimondoscontrelavoiture.Nospoitrinessefrôlèrent tandisqu’ilmecontournaitenmefixantdesonregardpénétrant.Sesyeux

couleurchocolattachetésd’ornesemblaientplusamusés.J’avalaimasaliveavecdifficultéetbaissailesyeux.Lorsqu’ilfutàdistanceraisonnable,jedécidai

qu’ilétaittempsdel’observerfaireleplein.Ilnefallaitpasperdredevuequ’ils’agissaitd’uneleçon.Dontj’avaisdésespérémentbesoin.—D’abordilfautpayer.Vousavezunecarteouvousréglezencash?Savoixavaitreprisuntimbrenormal.Finilesmurmuressexydanslecreuxdel’oreille.Payer. J’avaisoubliécedétail. Jehochai la tête,puismepenchaidans lavoiturepourextirpermon

sac.Jesortismacartedecréditetmeredressai.Cettefois,c’estluiquifixaitmonpostérieur.L’idéequ’ilmatemesfessesmefitsourire.Demanièreunpeutropflagrante.—Voilà,dis-jeentendantlacartetandisquesesyeuxremontaientlelongdemoncorps.Ilmegratifiad’unclind’œil.Ilsavaitquej’avaissurprissonregardets’enamusait.Cegarsétaitun

joueur, de ceux que les filles intelligentes fuyaient. Je n’étais pas assez maligne. J’avais donné mavirginitéàuntypeexactementcommelui.Ças’étaitpassédansl’appartementdesameilleureamie.Etj’étais loind’imaginer que l’amie enquestion était en réalité folle amoureusede lui.L’histoire s’étaitplutôtmalterminée.—Della,lut-ilsurmacartedecrédit.J’aimebienceprénom.Ilvousvabien.Sexyetmystérieux.—Merci,maisvousavezunelongueurd’avancesurmoi.Jeneconnaispaslevôtre.—Woods,répondit-ilavecunpetitsourireencoin.Woods.Quelprénométrange.Jenel’avaisencorejamaisentendu.—J’aimebien.Çavousvabien.Ilfitminederépondremaissonsourires’effaçaetilbranditlacarte.—Leçonnuméroun:lepaiement.J’écoutaiattentivementsesexplicationssurlefonctionnementd’unepompeàessence.J’avaisdumalà

nepasme laisserdistrairepar saprestance.Unevaguede tristessemesubmergea lorsqu’il replaça lepistoletetdétachalereçu.Jenevoulaispasqueças’arrête,pourtantmonroadtripm’attendait.Aprèstoutescesannées, jedevaismeconcentrer surmoi-même.Jenepouvaispasm’arrêterencheminsousprétextequ’ungarsm’avaittapédansl’œilàunestation-service.—Mercibeaucoup.Laprochainefois,çaseraplussimple,conclus-jeenrécupérantmaladroitementla

carteetlereçuquej’essayaideglisserdanslapochedemonshort.—Pasdequoi.Vousêtesenvacancesdanslecoin?—Non.Justedepassage.Jeparsàl’aventure.Fronçantlessourcils,Woodsmedévisageauninstant.—Vraiment?Intéressant.Vousconnaissezladestinationfinale?Jen’enavaispaslamoindreidée.—Non,avouai-jeenhaussantlesépaules.Jelesauraiunefoisquejel’auraitrouvée.Nousrestâmesunmomentsilencieux.JefisminedepartirlorsqueWoodsposalamainsurmonbras.—Voulez-vousdîneravecmoiavantde reprendre la route?Dansuneheure il feranuit.Vousallez

bienvousarrêterquelquepartpourdormir?Iln’avaitpastort.Aprèstout,cettepetitevillecôtièreétaitagréable.C’étaitsansdouteplussûr.Non

pasquejem’inquiètedemasécurité.J’étaisenfinenvie.Adieulaprudence.Jeregardailemystérieuxinconnudevantmoi.Iln’étaitpasrassurant.Paslemoinsdumonde.—Bonneidée.Etvouspourriezpeut-êtrem’indiquerlemeilleurendroitoùpasserlanuit.

Woods

Je surveillais la petite voiture rouge dansmon rétroviseur.Dellame suivait à la sortie de la villejusqu’à un restaurant mexicain où l’on servait de très bons plats. Ici, plus aucun risque de croiserquelqu’undemaconnaissance.Cesoir, lebutétaitd’oublier lestresspermanentqu’étaitdevenuemavie.Monpèremepoussaitde

plusenplusàfairemespreuves.Jen’avaisaucunefoutueidéedecequ’ilattendaitdemoi.Non,c’estfaux.Jeconnaissaissesprojets.Ilvoulaitquejememarie.Etilavaitdéjàsélectionnél’heureuseélue:AngelinaGreystone.Depuisma naissance,mon père avait toutmis enœuvre pour attacher le nomdeKerringtonàceluideGreystone.Ilneperdaitpasletrophéedesyeux.Chaqueannée,nouspassionsunesemaineàHawaïaveclesGreystoneetmonpèrem’avaitincitéàmerapprocherd’Angelina.Àpasserdutempsavecelle.Bonsang,ilnousavaittellementpoussésqu’onavaitfiniparcoucherensembleàquinzeans.Jecroyaisquej’étaissonpremierjusqu’àcequejecoucheavecunevraiepucelleetquejemerendecomptequ’Angelinaavaitmenti.Cetteannée-là,j’étaispeut-êtrevierge,maisellenel’étaitcertainementpas.Çam’avait dégoûté de cette jolie blonde.Au fil du temps, plus elle devenait glamour, plus je lafuyaiscommelapeste.Ellevoulaitmemettrelegrappindessus.Jesavaisquelejourviendraitdefaireplaisir à mon père, mais je le repoussais le plus possible. J’y étais arrivé jusqu’à ce qu’Angelinadéménageplus au sud, dans lamaisondeborddemerde sesparents.Monpère était deplus enplusinsistant.Ilfallaitquejeprennedureculparrapportàtoutçaetquejeprofitedecettenanaauvisaged’angeet

sacrémentbienfoutue.Timoréedeprimeabord,elle s’étaitvite révélée libéréeet insouciante,et jen’étaispasdugenreà

bouderunepartiedeplaisir.Soncorpsetsesgrandsyeuxbleusoffraientunbonaperçu.Mieuxencore:elle n’avait pas l’intention de rester dans les parages. J’allaism’autoriser une petite distraction sansavoiràmelacoltinerensuite,puisqu’ellereprendraitlaroute.Le souvenir de son cul bien en évidence dans son minishort m’émoustilla. Della Sloane était

exactementcedontj’avaisbesoincesoir.Je bifurquai sur le gravier du parking d’ElMexicano etme garai à l’arrière du bâtiment pour que

personnenerepèremonpick-up.Cesoir,onnemedérangeraitpas.J’allaistirermoncoup.Etçaresteraituncoupd’unsoir.JedescendisdemonvéhiculeetobservaiDella sortirde savoiture.Elleneportaitpasde soutien-

gorge sous son dos-nu noir. Sa paire de seins aguicheurs tendait le tissu.Bon sang, la nuit allait êtremémorable. Pas de doute, elle voulait lamême chose.Elle s’était carrément frottée contremoi quandj’avaisouvertleréservoirdelavoiture.Cettenana-làsavaitcequ’ellefaisaitets’yprenaitàmerveille.—Excellentchoix.J’adorelacuisinemexicaine,dit-elleenmesouriant.J’observaiseshanchesondulertandisqu’elles’approchaitdemoi.J’étaisàdeuxdoigtsderenoncerau

dîner pour foncer direct à la chambre d’hôtel.Les boucles naturelles de sa chevelure noire tombaientjusteendessousdesesépaules.J’étaissûretcertainqueseslongscilsnoirsétaientleproduitdebonsgènesetnonpasceluid’unemballage.J’avaiscroisémonlotdefemmesauxfauxcilspourdétecterquelessiensétaientauthentiques.—Tantmieux,répondis-jeenm’avançantversellepourlaguideràl’intérieurd’unemainsurlecreux

desesreins.

Unefoislacommandepassée,Dellabutunegorgéedemargaritaetmesourit.

—Alors,Woods,qu’est-cequetufaisdanslavie?Jen’avaispasl’intentiondedirelavérité.Jen’aimaispasdonnertropd’informationssurmavieàune

fillequin’allaitpasresterdanslepaysage.—Jetravailledanslagestion.Guèreperturbéeparmaréponseévasive,Dellacontinuadesourireensirotantsaboissonacidulée.—Detouteévidence,tun’espasprêtpourlesquestionssérieuses.Çameconvient.Situmedisaisce

quetuaimesfaire?—Joueraugolf,quandj’ailetemps,etinviterdesnanassupersexyàmangermexicain,répliquai-je

avecunsourireencoin.Dellarejetalatêteenarrièreenéclatantderire.Elleétaittotalementdésinhibéeetn’essayaitpasde

m’impressionner. C’était rafraîchissant. Lorsqu’elle posa de nouveau le regard sur moi, ses yeuxpétillaient.—Qu’est-cequitefaitlepluspeur?Quelledrôledequestion.—Jenepensepasavoirpeurdequoiquecesoit.—Biensûrquesi.Toutlemondeapeurdequelquechose,affirma-t-elleavantdelécherleselsurle

reborddesonverre.Quepouvait-ellebiencraindre?Ellenelaissaitrienparaître.—Devenircommemonpère,répondis-jesansréfléchir.J’enavaistropdit.Jenel’avaisjamaisavouéàpersonne.Uneexpressionlointaineglissasursonvisageetelleregardafixementau-dessusdemonépaule.—C’estétrange.Maplusgrandepeurestdedevenircommemamère.Elleclignarapidementdesesgrandsyeuxbleusetretrouvalesourire.Oùquesonespritsesoitévadé,

elleétaitdésormaisrevenue.Ellen’avaitpasenviedepenseràsamèreetjepouvaislecomprendre.—Ettoi,qu’est-cequetuaimesfaire?lançai-jepourdétournerlaconversationsurunsujetplusléger.—Danser sous la pluie, rencontrer des gens, rire, regarder des films des années 1980, et chanter,

énuméra-t-elleavantd’avalerunenouvellegorgée.Àcetrain-là,sijenefaisaispasattention,elleallaitseprendreunecuite.

Deuxmargaritasplustard,elleappuyaitsapoitrinecontremonbrasenriantàtoutesmesblagues.Jelacoupai dans son élan : elle était pompette juste comme il fallait. Je ne voulais pas qu’elle soitcomplètementsaoule.—Veux-tuquejet’accompagneàl’hôteletquejet’aideàchaufferlelit?proposai-jeavecunlarge

sourireenglissantunemainentresesjambes.Ellesefigead’abordpuislesécartalentementpourmelaissersentirlamoiteurdesaculotte.Elleen

avaitautantenviequemoi.J’enavaislapreuve.J’avançailapointedudoigtjusqu’auplimouillé.Ellesemitàtrembler.Ellecommençaàgigotercontremamainenfermantlesyeux.Sabouches’entrouvritd’unaircomblé.

Bonsang,elleétaitréceptive.—C’estçaquetuveux?luimurmurai-jeàl’oreille.Jeglissaiundoigtdanssaculotteetressentissondésirchaudethumide.—Oui,répondit-elledansunsoupir.Uniquementsituprometsdemefairejouir.NomdeDieu.J’arrachailamaindesaculotteetempoignaimonportefeuille.Jefisclaquerunbilletde

centdollarssurlatable.Pasletempsd’attendrel’addition.Je voulais exactement ce qu’elle faisaitmiroiter. Et pour ce qui était de la faire jouir, je ferais le

nécessairepourqu’elles’évanouissedeplaisiràforced’atteindrel’orgasme.NejamaislancercetypededéfiàunKerrington.Nosrésultatssurpassentlesattentes.

Ellen’étaitpasenétatdeconduire.Jem’occuperaisplustardderécupérersavoiture,carjen’avaispasletempsd’ypenserdansl’immédiat.J’ouvrislaportièredemonpick-upetlapoussaiàl’intérieuravec plus de force que prévu. Ses grands yeux bleus s’arrondirent de surprise et je m’arrêtai pourreprendre mon souffle et réfléchir à la situation. Je ne devrais peut-être pas continuer. Cet éclat denervositéquiavait traversésonregard,s’agissait-ild’innocence?Soncorpsdisaitunechosemaissesyeuxendisaientuneautre.Ellesemorditlalèvreinférieureetjeressentisunefolleenviedegoûtersabouche.Au lieude faire le tour jusqu’à laportièreconducteur, jemeglissaidans levéhiculeet refermai la

porte derrière moi, puis je pris son visage dans mes mains pour l’incliner parfaitement. Ma boucherecouvrit lasienneet je laissaisongoûtm’envahir lentement.Chacundesesgémissementsbattaitdansmesveines.Larondeurdesalèvreinférieurequifrémissaitd’undésirinexpérimentémerendaitfou.Jemeforçaiàreculerpourlaregarderdroitdanslesyeux.—Tuessûrequetuenasenvie?Sinon,ilfautarrêtertoutdesuite.Etonnesereverraitjamais.Jedevaism’assurerqu’ellen’étaitpaslajeuneinnocentequejeressentais

danssontoucher.Jen’avaisriencontrelesaventuresd’unsoirsilafillesavaitàquois’entenir.Ilfallaitqu’ellesoitclaire.—Je…,hésita-t-elleavantdes’interromprepourdéglutiravecdifficulté.Cen’estpaslaréponsequej’attendais.Jecommençaiàreculermaisellem’agrippaparlachemise.—Non,attends.J’enaienvie.J’enaibesoin.Jet’enprie,continue.Jen’étaispasconvaincu.Ellen’avaitpasl’airsûred’elle.— C’est ta première aventure d’un soir ? sondai-je, pensant que cela pourrait expliquer son

comportement.Ellesecoualatêteetunpetitsouriretristeflottasurseslèvres.—Non.Maisladernièrefoiss’estmalpassée.Vraimentmal.Jeveuxquetumelafassesoublier.Je

veuxsavoircequec’estdelefaireuniquementpourleplaisir.Riend’autre.Fais-moidubien.Elle n’était pas vierge.C’était une bonne chose.Unmauvais coupd’un soir pouvait dissuader plus

d’unepersonnederecommencer.Jepouvaisl’aideràoublier.—Jevaistefairedubien,mabelle,larassurai-je.Jeluipassaisonpetithautpar-dessuslatête.Elleneportaitpasdesoutien-gorge.Jelesavaisdéjà,

maislavoirdénudéemecoupalesouffle.Ellegémitenselaissantretombersurlescoudes,cequieutpoureffetdepropulsersapoitrinevers

moi.Unechoseétaitcertaine,j’adoraislesseins.Etlà,j’étaisauparadis.—Cesbébéssontuneputaindemerveille,m’exclamai-jeavantdebaisserlatêtepourprendreunde

sestétonsrebondisdansmabouche.—Ohoui,frémit-elle.Jesourisintérieurement.Engénéral,jen’aimaispaslesfillesbruyantes,mais,avecelle,çan’étaitpas

delapoudreauxyeux.C’étaitvrai.Lemoindresonsortantdesabouchesemblaitsincère.Lesdeuxmainssursesseins,jepassaiautantdetempsàlescaresserqu’àlessucer.J’auraispufaireçatoutelanuit.—S’ilteplaît,jeveuxtesentirenmoi.Jeveuxjouir,suppliaDella.Jevoulaislamêmechose,mais,siellen’arrêtaitpassesdemandessalaces,j’allaisperdrelespédales.Je tirai saceinturevers lebas,ôtantd’unmêmemouvementshortetculotte. Je les jetaipar terreet

écartai ses jambesdemesdeuxmains.Elleétait entièrementépilée.Tropbon.Leparfumsexyde sonexcitationmeparvintetjegrognaideplaisir.Jevoulaislagoûter.Jevoulaisd’abordressentirdansmabouchel’orgasmequ’ellemeréclamait.Jecaressailapeaufinepuisglissaiundoigtaucentre.Dellasecambrafurieusementcontrelesiègeen

cuir.— Je vais l’embrasser, annonçai-je avant d’appuyer mes lèvres contre le clitoris gonflé en quête

d’attention.—OhmonDieu,gémit-elleensaisissantl’arrièredematêtedesdeuxmains.Je commençai par la lécher doucement, puis de plus en plus profondément. Elle était délicieuse.

J’avais goûté à plusieurs femmes,mais celle-ci était divine. J’appuyaimon nez contre son clitoris etglissaimalangueàl’intérieur.Ellerefermasesmainssurmescheveuxetcriamonprénom.J’adoraisça.Probablementtroppourunsimplecoupd’unsoir.L’idéedenepaslarevoirmemitdanstousmesétats.J’envoulaisplus.Jelaléchaiplusintensément

jusqu’àcequ’unpremierorgasmeexplosesurmalangueetqu’ellenecessederépétermonnom.Pourlapremièrefoisdepuislelycée,jefailliséjaculertouthabillé.Je déposai un dernier baiser sur sa peau tendre avant deme rasseoir et de déboutonnermon jean.

J’auraisdûattendrelachambred’hôtel,maisilfallaitfreinermesardeurs.Sijen’avaisqu’uneseulenuitavec cette fille, j’allais en profiter jusqu’à l’épuisement. J’allais la baiser une première fois pourmecalmersuffisammentpourêtreenétatdeconduirejusqu’àl’hôtelleplusproche.Je sortis un préservatif de la boîte à gants et l’enfilai avant de relever les yeux sur elle. Elle

m’observaitdeprès.Puiselles’humectaleslèvres.Jepoussaiungrognementetrelevaisongenoupar-dessusmonépaulepourpouvoirbienmemouvoirentresesjambes.— Quelqu’un pourrait nous voir, murmura-t-elle, le souffle encore entrecoupé par l’effet de son

orgasme.Jememisàrire.Ellen’ypensaitquemaintenant.—Lesvitressontteintées,ilfaitnuitetiln’yapasdelampadairedehors.Sanscompterquelavoiture

estsurélevée.Personnenepeutnousvoir.Elle me gratifia d’un sourire aguicheur et leva les bras au-dessus de sa tête, faisant trembler sa

poitrine.Onn’allaitpass’éterniser.J’yétaispresque.J’entrepris de la pénétrer lentement. Elle était étroite, tellement étroite, putain. Pitié non, pourvu

qu’ellenesoitpasvierge!Lesfillesdesongenren’étaientplusviergesàcetâge.—Tuesétroite.Ellehochalatêteengémissantetécartalesjambesdavantage.—Jenesuispasvierge,insista-t-elle.O.K.Commentsefaisait-ilalorsquej’aieenviederalentirlacadenceetdeprendreletempsavecelle

?Elleétaitchaudbouillante.L’idéequ’ellepuisseêtreinexpérimentéemerendaitdingue.Jem’enfonçaienelle.Nouslâchâmestouslesdeuxuncri.Elleétaitincroyablementétroitemaisellen’avaitpasmenti.Ellen’étaitpasvierge,elleavaitjusteunechattedutonnerre.C’étaitdément.Jeme retirai et elle se prépara à un nouveau coup de reins en se cramponnant à la poignée de la

portière.—Fort…s’ilteplaît…encore,murmura-t-elleenhaletant.Jenemelelaissaipasdiredeuxfois.Jelapénétraiencoreplusprofondémentetsesseinsrebondirentàlaperfection.Jen’allaispasm’en

remettre.J’allaisjouir,c’enétaittrop.Jeglissaiunemainentrenousetcaressaisonclitorisjusqu’àcequ’ellesupplie,àboutdesouffle.—Tuaimesça?Quellecoquine,àmedemanderdetebaiserplusfort,luimurmurai-jeàl’oreille.—Oh,monDieu,Woods,jevaisjouir,s’écria-t-elle.J’aspiraileboutdesonseindansmaboucheetleléchaitoutenjouantavecsonclitoris.Elle explosa entre mes doigts et je m’accrochai au dossier du siège et au tableau de bord pour

m’enfoncerenelledeuxfoisencoreavantdelasuivredansl’extase.

Della

J’ouvris lentementlesyeuxetfixai leplafond.Lachambred’hôtelétaitsilencieuse.J’étaisseule.Etsoulagée.JenesavaispastropcommentaffronterWoodsaprèslanuitdernière.Unechoseétaitsûre,jen’étaispasunesalope.Pourtant,enrepensantàlaveille,j’avaiscarrémentl’impressiond’enêtreune.Jenesaispascequim’avaitpris…Àmoinsquecenesoitlatequila.Peut-êtrel’alcoolm’avait-ildonnélecouraged’obtenircequejedésirais,maisjen’avaispasétésaoule.J’avaisétéparfaitementconscientedecequejefaisais.Woodsavaitbeaucoupdecharisme;ilétaitsexy,terriblementsexy.Jeneconnaissaismêmepasson

nomdefamille.Jemecouvrislevisagedesdeuxmainsetpartisd’unfourire.J’avaiscouchéavecunhommequeje

venais de rencontrer. C’était complètement fou ! Aumoins, il avait utilisé un préservatif chaque foisqu’onl’avaitfait:danslepick-up,dansladouche,contrelatableetpourfinirdanslelit.Aprèsquoijem’étaisendormiesur-le-champ.Moiquivoulaisuneexpériencesexuelledignedecenom, j’avais toutbonnement prismonpied.Mission accomplie.Et une chose était sûre : jamais je n’oublieraisWoods.J’étaispartiepourvivredesexpérienceset,avecWoods,j’enavaisconnuunephénoménale.Jemelevaienm’étirantetmemisàlarecherchedemesvêtements.Minute…Mavoiture.Ilmefallait

mavoiture.Mesbagagesétaientdansma…Allonsbon,mesbagagesétaientaupieddulit.Quoi?J’avaistoutlaissédanslavoiture.Jetirailedrapdulitetm’enroulaidedans.Puisjem’approchaidelafenêtreetécartailerideau.LavoituredeBradenétaitgaréedevant.Woodsétaitallélachercheretavaitportémesbagagesàl’intérieur.Cetteprévenancemefitchaudaucœur.Quitteàm’envoyerenl’airaveclepremiervenu,autantchoisir

untypequifaisaitattentionàmoi.

Aujourd’hui

Assisedanssonbureau,j’attendaisJefferyOdom,monpatron.Ilm’avaitenvoyéuntextocematinmedemandantd’arriverautravailenavancepourqu’onparle.J’ignoraisdequoi.Quinzejoursauparavant,ilavaitcommencéàflirteretpuisc’étaitdevenuplussérieux.J’avaispeurquecelaneposeproblème.J’étaisserveusedanssonbar.Etjen’étaisquedepassage.Aucoursdemonvoyage,j’étaisobligéedefairedesétapespourtrouverdutravailetgagnerdequoi

repartirsurlaroutependantquelquessemaines.J’aimaisbienDallas.C’étaitsympa.Jefferyétaitsexyetplusâgéquemoi.Aveclui,jemesentaisspéciale.Toutdumoinsquandilétaitlà.Audébut,ilnepassaitqu’unefoisparsemainemais,aprèsplusieursépisodesdedragueentrenous,il

étaitvenudeplusenplusfréquemment.Leplussouventàlafermeture.Ilm’attendaitdanssavoitureetm’envoyaituntextopourquejeleretrouveàl’extérieur.L’idyllesecrètecommençaitpourtantàdevenirennuyeuse. Non pas que je prenne tout ça au sérieux. Il memanquait cinq cents dollars avant demeremettreenroute.DirectionLasVegas.Laportedubureaufinitpars’ouvriretsonfroncementdesourcilsnemelaissarienprésagerdebon.

J’allaispeut-êtrepasserlapremièrepourVegasplusvitequeprévu.—Jesuisdésolédet’avoirfaitvenirsitôt,Della,dit-ilensedirigeantversl’autrecôtédubureau.Ilsemontrait froidetdistant,alorsquej’avaisprisunedoucheaveclui troisnuitsplus tôtavantde

finirparcéderetdecoucheraveclui.

Jerestaisilencieuse,nesachanttropquoirépondre.Jefferypassaunemaindanssescheveux.— Je pense que ce serait mieux pour toi de te remettre en route bientôt. Cette histoire entre nous

devienttropsérieuseetonsaittouslesdeuxqu’ellenevapasdurer.O.K. Il avait eu ce qu’il voulait et il n’allaitmême pasme laisser gagnermes derniers cinq cents

dollarsavantdetirermarévérence.Ilsavaitquel’heuredemondépartétaitproche.Salopard.—Trèsbien,répliquai-jeenmelevant.Jepouvaistoutàfaitmepasserdecegenredesituation.J’allaism’arrêteravantVegasettrouverun

autreboulot.—Della,dit-ilenselevantenmêmetempsquemoi.Jesuisdésolé.Jemecontentaiderire.Ilétaitdésolé.Pasautantquemoi.Jecroyaisqu’onétaitdevenusamis.Enmedirigeantverslasortie,jecomprisqu’ils’agissaitd’undesmultiplesenseignementsquej’étais

venuecherchersurlaroute.Onm’avaitutilisée.Çafaisaitpartiedelavie.Souscetangle-là,c’étaitplusfacileàencaisser.Jen’étaispasarrivéeàlaportequ’elles’ouvritàtoutevoléesurunegranderousseéléganteauvisage

barréd’unrictusdecolère…quim’étaitadressé.—C’estelle?Tum’étonnes,ondiraitunesacréesalope.Tul’astrouvéedansundetesclubsdestrip-

teasepourris?Elleaunetouchedestrip-teaseuse.Nomd’unchien,Jeff,commentt’asputomberaussibas?J’écoutaisesmotssanstropcomprendre.Jerestaiperplexe.Uneseulechoseétaitsûre:cettefemme

medétestait.Etpasqu’unpeu.Jenesavaispaspourquoi,maisc’étaitflagrant.—Çasuffit,Frances.J’aifaitcequetum’asdemandé:jel’aivirée.Laisse-la.C’estentretoietmoi,

ripostaJefferyfaceàlaroussefuribonde.Ilmejetaunregarddésolé.Jeposaidenouveaulesyeuxsurelleetsurlacolèrebouillonnantequimenaçaitd’exploser.—Tul’asviréedonconoublietout?s’écria-t-elleensetournantversmoi.Çanevousdérangepasde

baiserlepèredemonfuturenfant?Çanevousfaitnichaudnifroiddesavoirqu’ilestnonseulementmariémaisqu’ilvaêtrebientôtpapa?Unepetiteminute…Quoi?Marié?Enladévisageant, jecomprisqu’ilnes’agissaitpasd’unemauvaiseblague.Puis jemetournaivers

Jeffery.Lavéritéétaitlà,enfacedemoi.Ilétaitmarié.Ilavaitfaitdemoiunemaîtresse.Ohmerde…—Tuesmarié?Maquestionétaitsortiecommeunvéritablerugissement.Ilhochalatêteetsesépauless’affaissèrentcommeunaveudedéfaite.Jefisunpasversluietm’immobilisai.Sijecontinuais,j’allaisletueràmainsnues.—Pauvreconnard!Commentt’aspu…comment…tuasunefemmeetelleestenceinte!Jen’arrive

pasàlecroire.Quelleidiote.Maisquelleabrutie!Touteslesprécautions,cen’étaitpaspouréviterquelesemployéssoientaucourant.C’étaitàcaused’elle,hurlai-jeenmontrantsafemmedudoigt.Vatefairefoutre,vociférai-jeavantdetournerlestalonspourprendrelaporte.Avantdeme tirer vite fait, jem’arrêtai. J’avaisunedernière chose àdire. Jeposai lesyeux sur la

rousse.Sacolèreétaitretombéeetsonvisagenoyédelarmes.—Jesuisdésolée.Sij’avaissu,jenel’auraispasapproché.Jelejure,affirmai-jeavantdesortiret

declaquerlaportederrièremoi.Lorsquejeretournaiaubar,monregardcroisaceluideTripp.Ilsecoualatêteenpoussantunsoupir.—J’avaispeurquetunetesoisacoquinéeaveclui,maisjen’étaispassûr.Jen’osaisriendirepour

nepastefroisser.J’imaginequetun’étaispasaucourantqu’ilétaitmarié.Jemesentaissaleetflouée.Jem’assissurletabouretàcôtédelui.

— Je n’en avais pas lamoindre idée. Jeme sens si mal. Ce voyageme faisait tellement plaisir ;maintenantj’aijusteenviederentrerchezmoi.Trippservaitaubardujeudiaudimanche.Ilétaitgrandetdégingandé,avecdescheveuxbrunscourts.

Il avait un peu une attitude de nanti. Je ne savais pas vraiment quoi,mais quelque chose chez lui necadraitpasavecle lieu.Ilavait l’airaussipeuàsaplacequemoi.Onavaitpasséplusieurssoiréesàdiscuter lorsde la fermeturedubar.Jeneconnaissaispasgrand-chosedeTripp,mais ilavait finipardevenirmonami.—Tudisaisvouloirvoirlemonde.Etvivre,observa-t-ilenmerépétantmespropresmots.—Plustropmaintenant,soufflai-jeenhaussantlesépaules.Trippjetaunœilàlaportepuissortitsontéléphonedesapoche.—Tusaisquoi?Ne rentrepaschez toi toutdesuite.Donne-toidu tempspour te remettre.Faisun

breakdansunepetiteville.L’idéeétaitsympathique,maisjen’étaispassûred’enêtrecapable.— Je vais appeler mon cousin. Il a le bras long sur la côte où j’ai grandi. La ville est vraiment

chouette.RienàvoiravecVegas.Moncousinpeuttedénicherunboulotjusqu’àcequetutesentesprêteàreprendrelaroute.Iladesamishautplacés,conclutTrippavecunclind’œil.Avantquejepuisseprotesteroutrouverunbonprétexte,ilcomposaitlenumérodesoncousin.—Salut Jace…Ouais, je sais, ça fait unbail.C’est unpeu la folie…Non, ramène-toi àDallas et

oubliecettenanaquiterenddingueaupointquemêmetamèreteledit.Tripp éclata de rire et la joie se peignit sur son visage.De toute évidence, il aimait beaucoup son

cousin,quiavaitl’airdeluimanquer.—Écoute,j’aiunserviceàtedemander.Pouruneamie.Elletraverseunesalephaseetelleabesoin

deseposerunpeu…Maisnon, jesaisbienquetuasunecopine.Jenetedemandepasdel’héberger,imbécile.Ellepeutlogerchezmoi,là-bas.Autantquequelqu’unprofitedel’endroit.Touches-enunmotàKerrington.Qu’il lui file un taf. Elle a besoin de souffler…Ouais. Tout à fait. Je suis sûr qu’il serasatisfait…Génial.Merci.Onserappelleplustard.Jeluidonnelesinfosetjetel’envoie.Trippsouritenremettantletéléphonedanssapoche.—Toutest réglé.Unboulotbien rémunéré t’attendet tupourras resterdansma résidence sans rien

payer.Ça faitunmomentque jeveuxyenvoyerquelqu’unpourvérifierque toutvabien.Une fois surplace,tupourrast’enoccuper.Çamerendservice.Etcerisesurlegâteau:tuvasvivreàcôtéd’unedesplusbellesplagesduSud.Tuvastrouvertavoiesouslesoleil,Della!

Woods

Jefaisaislescentpasdevantmonbureau.Detempsàautre,jejetaisunœilàlabagueendiamantquitrônaitenpleinmilieu.Jesavaiscequ’ellevoulaitdire.Jesavaisaussiquej’avaisenviedelabalanceraufinfonddecefoutuocéan.Cettebagueétaituneallusiontoutsaufsubtiledelapartdemonpère.J’étaisallé levoir laveillepour luidemanderquand j’allaisquittermesfonctionsdemanagerpour

prendre ma place de vice-président du Kerrington Country Club. Et voilà sa réponse. Il fallait quej’épouseAngelina.Merde.Jenevoulaispasl’épouser.Ellenemerendraitpasheureux.Lemoisdernier,j’avaisfiniparcéderet

j’avaisdenouveaucouchéavecelle.Elles’étaitpointéeàlamaisonenpetitenuisetteets’étaitmiseàgenouentremesjambes.Entrelapipeetlewhiskyquejem’étaisdescendu,jel’avaisbaiséeplusd’unefoisaucoursde lanuit.Leproblème,c’estque le seulmoyenpourprendremonpiedavait étédemereprésenterlesjolisyeuxbleusdeDellaSloaneposéssurmoi.Lescrisdeplaisird’Angelinaétaientuntue-l’amour.Ellemaîtrisaitl’artdelasimulation.Ellen’aimaitpaslesexe.Ellel’utilisait.Jeconnaissaisparfaitementcegenredefemme.Çanem’intéressaitpas.Jen’étaispascommemonpère.Jenepouvaispasmemarierpourl’argentetlesrelationsetavoirune

maîtressesouslamain.Çamemettaittoujoursenrognequemesparentssoientindifférentsàleurmariagefoireux.Moi,çam’avaitcomplètementbousillé.Sijedevaism’installeravecunefemmeetluiêtrefidèlejusqu’àlafindemesjourspourobtenir la

placequiétaitlamiennedanslebusinessfamilial,jen’étaispassûrdevouloirenêtre.Monpèrepassaitsontempsàmecontrôler.Qu’ilsaillentsefairefoutre.Mes allers et retours incessants etmes jurons silencieux furent interrompus par un coup à la porte.

J’attrapailabagueetlaplanquaidansmapoche.Inutilequeçasesache.Jepriaipourqu’ilnes’agissepasd’Angelina.—Entrez,répondis-jeenprenantplaceàmonbureau.Jace,monmeilleuramidepuisl’internat,pénétradanslapièce.—Salut!Onpensaittetrouversurleterraindegolfcematin,maistun’espasvenu.J’avaisbesoindeparleràquelqu’un,maisjen’étaispassûrd’êtreprêt.Jacemerecommanderaitde

quitterlavillepourqu’ilssedémerdenttoutseuls.Luiserebellaitcontrelavolontédesonpèredepuisdesannées.—J’étaisoccupé.—C’estcequejemesuisdit,réponditJaceenhochantlatête,puisilpritplaceenfacedemoi.J’aiun

serviceàtedemander.Laphraseretintmonattention.Jacemedemandaitrarementdesservices.Jem’adossaiàmonsiègeet

attendis.Qu’iln’essaiemêmepasdemedemanderqueBethy, sapetiteamieetunedes serveusesdesvoiturettes-bar,termineplustôt.Onétaitsurchargésensoiréeetj’avaisbesoind’elle.—J’aieuuncoupdefildeTripp.Tripp,soncousin,avaitdeuxansdeplusquenousetonavaitpasséuneannéegénialetousensembleà

l’internatavantqu’ils’enaille.Jenel’avaispasvudepuisqu’ilavaitmislesboutscinqansauparavant.—C’estvrai?Commentva-t-il?J’étaiscurieuxdesavoir.J’avaistoujoursadoréTripp.Ilavaitrefusédeseplierauxexigencesdeses

parents,luiaussi,etilétaitparti,toutsimplement.Sansjamaisseretourner.

—Çaal’aird’aller,réponditJaceavecunhaussementd’épaules.IlestàDallas,maintenant.Ilfautquej’aillelevoir.Iln’estpasvenuàBostonpourNoëlaveclerestedelafamille.Jenepensepasqu’ilrepassedanslecoindesitôt.OncleRobertluienveutàmort.J’imaginaissansproblèmequeRobertNewarkpuisseêtreenrognecontresonfilsunique.Ilétaitcensé

hériter de la prestigieuse étuded’avocatsNewark&Newarkdans la ville deDestin, enFloride.Songrand-pèreavaitfondélecabinetàpartirderien.MaisTrippn’avaitpasvouludeveniravocat.Ilvoulaitdécouvrirlemonde.— Bref, il m’a parlé d’une de ses amies qui a eu une histoire avec le patron de leur bar puis a

découvertqu’il étaitmarié.Elleabesoindequitter lavillepour se remettreet tout le tintouin. Ilm’ademandé s’il pouvait l’envoyer ici. Il dit que c’est une excellente serveuse, ponctuelle, quibossedur.Apparemment, elle est canon et les clients lui lâcheront des bons pourboires. Il lui laisse son appart,commeilestvidetoutletemps,maisilluifautduboulot.J’avaistoujoursbesoind’unebonneserveuse.—Biensûr.Envoie-la-moiquandellearrive.—Merci,ditJaced’unevoixsoulagée.Jen’aimepasdemander,maisilavaitl’airdesefairedusouci

pourelle.Ilm’aappelédeuxfoisaujourd’huipours’assurerquejepréparetoutpoursonarrivée.Jenevoulaispasluifairefauxbond.—Jecomprends.Pasdeproblème.EtdisàTrippdem’appelerlaprochainefoisqu’ilabesoind’un

service.Çameferaitsuperplaisird’avoirdesesnouvelles.

Jacevenait àpeinedepartir lorsque laporte s’ouvrit surAngelina.Elle rejeta sa longuechevelureblondepar-dessussonépauleetmegratifiad’unsourire.Decesourirecontrefaitquimegonflait.Ellepassasalanguesurlepourtourdeseslèvresensautillantjusqu’àmonbureau.—Tum’asmanqué.Jen’aiaucunenouvelledetoidepuislasemainedernière.Onapourtantpasséun

bonmomentauseizièmetrou.J’avais acceptédedisputer ladernièrepartiedegolfde la journéeavecAngelina.Commeça,mon

pèremelâcheraitunpeuetelleseraitcontente.Maisjenem’étaispasattenduàcequ’ellesefrottecontremoietmefassedesavancestoutdulong.Quandpourladernièrefoiselleavaitglisséunemaindansmonshortenmedisantqu’elleavaisenviedemoi, jel’avaispenchéeenavant, j’avaisprisappuidesdeuxmains contre un arbre et je l’avais baisée par-derrière. Comme ça, je n’avais pas à me tartiner sessimagréesdeplaisir.Ellefaisaitçapourquejel’épouse.Telétaitlesouhaitdesonpaterneletellefaisaittoutpourlui.Aussisimplequeça.Après,j’avaisterminélapartie.Depuis,jel’évitais.—J’aiététrèspris,répliquai-jefroidement.Ellefitsemblantdenepascomprendre,seplantaentremesjambesetsepenchaenavantpourm’offrir

unevuedégagéesursondécolleté.Onnepouvaitpasdirequ’elleavaitdesseins.Siondevaitsemarier,jeluienpaieraisdestoutneufs.—Toutepeinemérite salaire, susurra-t-elleense laissant tomberàgenoux toutenmecaressant. Je

peuxfaireredescendrelapression,proposa-t-elleencommençantàdéboutonnermonpantalon.La dernière fois que les choses étaient allées trop loin, je m’étais senti coupable. Je l’utilisais.

Évidemment,ellem’utilisaitelleaussi,maisjen’étaispasobligédetomberaussibas.C’étaitmal.Siunjourjel’épousais,ceseraituniquementparcequej’yétaiscontraintetforcé.Iln’yavaitaucuneraisondepoursuivrecettemascarade.J’avaisbesoindetempspourréfléchiràlasituation.—Angelina, arrête. J’ai du travail. Pasmaintenant, martelai-je en résistant à l’envie de l’envoyer

valdinguer.—Riennet’empêchedetravaillerpendantquejem’occupedetoi.Entedonnantunavant-goûtdece

quit’attendpourlerestantdetesjours.

Noussavionstoutlesdeuxqu’unefoislesvœuxdemariageprononcés,lesexedeviendraitunecorvée.Elletrouveraitdesexcusespoursedéfileretlesfellationsaubureauappartiendraientaupassé.—Nemeprendspaspouruncon,Angelina.Jesaiscequetufaisetpourquoi.Àlasecondeoùonsera

mariéstuferastomberlemasque.Unéclairderessentimenttraversasonregard.Jem’étaiscontentéd’êtrehonnête.Ilétaittempsqu’elle

s’ymetteaussi.—Cen’estpasjustepourfaireplaisiràmonpèrequej’aienviedet’épouser.Tumeplais.Commeà

touteslesfemmes,non?Ladifférenceentreellesetmoi,c’estquejesuisàlahauteur.Onsecomplète.Tupeuxlutterautantquetuveuxpourgardertaviedeplayboy,jenetelâcheraipas.Jeveuxlabaguequetonpèreaachetéeetjeveuxtonnomdefamille.Lesexeentrenousseraitincroyablesitulaissaisfaireleschoses.Jeneseraipastoujourslasalopequitefaitfantasmer.Profites-enpendantqueçadure.(Elleseredressa et lissa sa jupe.) Tu sais où me trouver quand tu seras prêt à admettre que la situation estparfaite.Toietmoi.

Della

Jemegaraiàlastation-serviceoùj’avaisrencontréWoodsàpeinequatremoisplustôt.Lepointdedépartdemonvoyage.Quelleironiequel’itinérairedeTrippmeramènesurmespas.Jen’étaismêmepascertainequeWoodshabitedanslecoin.Ilm’avaitconduiteendehorsdelavillepourdînerettrouverunhôtel.Peut-êtren’était-illuiaussiquedepassagecejour-là.Oupeut-êtreallais-jelerevoir.Ets’ilétaitmarié?Non,ilnefallaitpaspenseràcela.Jen’allaispasjugertousleshommesàpartirdeJeffery.Cen’était

pasjuste.Tripp,parexemple,n’avaitrienàvoiravecJeffery.Ilmeprêtaitsonappartementgratuitementdumomentquejefaisaisunbrindeménage.Enplus,ilm’avaittrouvéunboulot.Jejetaiunœilaupapierentremesmains.Trippm’avaitdonnélenumérodetéléphonedeJacepour

quejelecontacteunefoisinstallée.Ilmedécrocheraitunrendez-vousavecM.Kerrington.Je repris la routeetnégociai lesdeuxderniersviragesavantdem’arrêter le longd’unecopropriété

situéefaceàl’océan.Jevérifiail’adressequem’avaitlaisséeTripp.Ildevaityavoiruneerreur.Lavilleétaithuppéeetcesrésidencesdevaientcoûterunefortune.Trippenpossédait-ilune?L’impression que j’avais eue que Tripp, qui conduisait uneHarley, n’était pas à sa place à bosser

commebarmanseconfirma.Ilétaitbienplusqu’ilnelaissaitparaîtreauxgensdeDallas.JesortismontéléphonedemonsacpourappelerTripp.Pasderéponse.JecomposaialorslenumérodeJace.Auboutdelatroisièmesonnerie,unefilledécrocha.—Euh,oui…Je…jem’appelleDellaSloane.Jesuisuneamiede…—DeTripp!hurla-t-elledanslecombiné.Ont’attendait.Jesuisraviequetuaiesfaitbonneroute.Tu

t’esinstalléechezTripp?J’étaissûrequeJaceétaitungarçon.— Euh, non, pas exactement. Je viens d’arriver. C’est splendide ici mais je crois que je me suis

trompée.—Non,m’assura la filleen riant.Non, tuesaubonendroit. J’enconclusque tunesaispasgrand-

chosesurTripp.Crois-moi,chérie,ilpeutselepayer.Oh,moic’estBethy,lacopinedeJace.Ilestsorti.Jel’aimaisbien,elleétaittrèschaleureuse.— Si tu me dis que c’est là, je vais trouver l’appart et défaire mes bagages. Il faudrait que Jace

contacteM.Kerringtonpourquejelerencontre.—Oh,inutile.IladitàJacequetupouvaisvenirquandtuvoulais.Ilcherchedenouvellesserveuses.

Tuasdequoinoter?Jevaist’expliquercommentyaller.

C’était sans doute le plus bel appartement que j’aie jamais vu. À en croire Tripp, l’endroit étaitdélabré, comme s’il avait grand besoin que j’y habite. Mais, de toute évidence, le ménage était faitrégulièrement.Toutétaitimpeccable.JedéfismesbagagespuissortissurlebalconsurplombantlegolfeduMexique.Lavueétaitmagnifique.Trippavaitvujuste.J’avaisbesoindecetteparenthèse.Jepourraistravailleretprofiterdecetendroit.Ceseraientlesvacancesàlaplagequejen’avaisjamaiseuesenfant.Jem’étaistoujoursdemandésilesableétaitaussiblancetl’eauaussibleuequ’àlatélévision.Laréponseétaitoui.Lesourireauxlèvres,jemelaissaiglisserdanslachaiselongueetétendislesjambesconfortablement.

J’appelaiBraden.—C’estpastroptôt!Tuesoù?ToujoursàDallas?LavoixjoyeusedeBradenmedonnaunpeulemaldupays.Àmoinsquecenesoitqu’elleseulequi

me manque. Après tout, je n’avais pas laissé grand-chose derrière moi. Si ce n’est des gens quimurmureraienttoujoursdansmondosd’unairsidéré.—Non.Dallas,c’estfini.Enfait,Jefferyestmarié.Elleeneutlesoufflecoupé.—Ohnon!C’esthorrible,Della!Jesuisdésolée.Etmaintenant,oùes-tu?Tuveuxquejeviennete

chercher?Rassure-moi,tuvasbien?Tun’aspasd’idéesnoires…Ellen’achevapassaphrase.Jesavaisqu’elledétestaitmeposercettequestion,maisfranchement,à

partBraden,quid’autreauraitpus’enassurer?Elleconnaissaittoutel’histoire,entoutcasl’essentiel.Personnenesavaittout.Jenepouvaispastoutpartager.Certaineschosesdevaientrestersecrètes.—Çava.JesuisderetourenFloride.JelogechezTripp,lebarmandontjet’aiparlé.Ilm’abranchée

surunboulotdanssavillenataleetm’aprêtésonappart.Avecvuesur leGolfe. Jesuisassisesur lebalcondevantuneplagedesableblanc.—Waouh!Çaa l’airmerveilleux.Veinarde!J’adorerais revoir leGolfe.EtTrippa l’airvraiment

sympa.Lejouroùtuasdenouveaulabougeotte,tupourraisretourneràDallaspourleremercier,lança-t-elled’untonmalicieux.—Trippestunami,c’esttout.Jeleremercierai,maisenluienvoyantunecarteetdel’argentouun

petitquelquechose.—Tuasraison.Jet’aiincitéeàfréquenterdeshommesetvoilàlerésultat.C’esttachancedevivreta

vie.Inutiledet’attacher.Lemondes’ouvreàtoi.—Toutàfait.Etj’aibienl’intentiondel’exploreraprèsavoirprofitédusoleiletdusablefinpendant

unpetitmoment.—C’estquoi,cenouveauboulot?—Jenesaispasexactement.Ilfautquejerencontrelepatron.Ilm’attend.C’estdansuncountryclub,

çadevraitêtreuneexpérienceintéressante.Rienàvoiraveclebar.—C’estlemoinsqu’onpuissedire.Rappelle-moiunefoisquetuasdécrochécetravail.J’aihâteque

tumeracontestout.Aprèss’êtreditaurevoir,nousraccrochâmes.Bradenm’avaittoujourspermisdegarderunlienavec

mesracines.Avecmonpassé.Toutcequej’avaistraverséetsurmonté.La nuit où j’avais rencontré Braden avait changé ma vie. Jusqu’alors, je ne connaissais personne

d’autre que ma mère. Elle m’interdisait de répondre à la porte pour réceptionner des colis ou deslivraisonsdecourse.Jedevaismecacherdansleplacardsansfairedebruitjusqu’àcequelapersonneàl’entrée soit partie. La fascination deBraden àmon égard était parfaitement réciproque. Ellem’avaitposé des questions auxquelles je n’avais pas pu répondre pendant longtemps. Je ne pouvais révéler àquiconqueleproblèmedemamère.Mêmeenfant,j’enavaisconscience.Je repoussai ces souvenirs auxquels je ne voulais pas penser pour l’instant et me dirigeai vers la

chambrequej’avaisinvestie.L’appartementencomptaitdeux,dontuneavecunlitàbaldaquinkingsizeetunJacuzzi;c’estcellequej’avaischoisie.Jesortismanouvellejupe(unejupecourteàimprimérosé)etundébardeurenmaillesquej’avaisachetépouralleravec.Aprèsm’êtrecoifféeetmaquillée,j’enfilaiunepairedemulesàtalons.Monboulotm’attendait.

Woods

Jedétestaislemanagement.Monpèreespéraitm’avoiràl’usure.Ilsavaitquejehaïssaiscetaspectdutravailetque jeméritaisunmeilleurposte.C’était son instrumentde torturepourmeforceràépouserAngelina.Etçamarchait,nomd’unchien.En poussant les portes de la cuisine pour gérer le dernier drame en cours, je tombai sur Jimmy, le

responsabledubar,lesmainssurleshanches,entraindefusillerduregardlanouvelleserveuse,JackieouFrankie–oujenemesouviensjamaisdesonnom.Lesbrascroiséssurlapoitrine,elleletoisaitd’unairfumasse.—C’estquoicebordel?Jevousentendsvousengueulerencuisinealorsquevousêtescensésservir

en salle. Quelqu’un m’explique ou je fous tout le monde à la porte ? sermonnai-je d’une voixsuffisammentmaîtriséepournepasêtreperçuedehors.—Voilàleproblème:c’estelle.Tuasembauchéunefeignasse.Elleprendunepauseclopetoutesles

dixminutes et s’il faut encore que je m’occupe d’une de ses tables parce qu’elle a laissé traîner sacommandeencuisinedepuisplusdecinqminutes,jevaispéterunplomb.Tum’entends?C’estelleoumoi.Jen’allaispasvirerJimmy.Ilfaisaittournerlacuisine.C’étaitlepréférédenotreclientèleféminine.

Mêmesiellesignoraientqueluipréféraitlaclientèlemasculine.Onprenaitsoindegarderlesecretpourqu’ilrécoltedebonspourboires.Jemetournaiverslanouvelle:—Jecroyaisavoirétéclairquandjet’aiembauchéesurlefaitqu’iln’yavaitpasdepausecigarette.

Jimmydécidedespauses.C’estluilebossencuisine.Lafillepoussaunsoupir,puisretirasontablierd’uncoupsecetlejetaparterre.—Jepeuxpasbosserdanscesconditionsd’esclavage. J’avaisbesoind’unepause,maiscomme je

suismoinsrapidequeluimonsieurs’énerve.Qu’ilaillesefairevoir.Moi,jemetire.Parfait.Jen’avaispasbesoindelavirernidegérerunecrisedelarmes.Leseulproblèmeestqu’ilme

fallaituneautreserveuse.Presto.—Jesuisraviqu’ellesoitpartie,maisilvafalloirdurenfort,soulignaJimmy.—Essaiedetenirlabarrejusqu’àcequejet’envoiequelqu’un.Jesortisdelacuisineetm’apprêtaiàregagnermonbureaulorsquej’entendisunclaquementdetalons

hautsderrièremoi.Bonsangnon,pasAngelina,pitié!Jen’étaispasd’humeur.Àmoinsqu’ellenemeured’enviedeservirlesclientsensalle,ilvalaitmieuxqu’ellemefoutelapaix.Jefisvolte-facepourluibalancersesquatrevéritésmaislesmotsrestèrentcoincésdansmagorge.Cen’étaitpasAngelina.C’étaitDella.Elleétaitencoreplusappétissantequedansmonsouvenir,et

j’avais bonne mémoire. Je me repassais le film pratiquement tous les jours. De préférence sous ladouche.Sacheveluresombre,quisemblaitpluslongue,retombaitd’uncôtésursonépaule.Elleportaitunhaut

blancserréqui laissaitpeudeplaceà l’imaginationétantdonné sapoitrine.Etune jupecourte et destalonsquirendaientseslonguesjambesbronzéesencoreplussexy.Qu’est-cequ’ellefaisaitici?—Woods?Jerelevailesyeuxdel’inspectionminutieusedesoncorpsjusqu’àsonregardperplexe.—Della.Était-ellevenuemechercher?Pourquoiavait-ellel’airsisurprise?

—Qu’est-cequetufaislà?demanda-t-elleenesquissantunsourireravi.Jeneluiavaisjamaisdonnémonnomdefamille.Volontairement.Notreaventuren’avaitaucunavenir.

Mêmesiaucoursdesquatrederniersmoisjem’enétaisvouludenepasluiavoirlaissémonnuméro.Jemedemandaisoùelleétaitetsielleallait revenirdans lesparages.Et lavoilàdevantmoi.Dansmoncountryclub.—Cetendroitappartientàmonpère,expliquai-jeenscrutantsonvisage.Sesyeuxs’arrondirentetellesemitàjeterdesregardsalentourcommesielledécouvraitlelieupour

lapremièrefois.—C’esttoi,M.Kerrington?—Çadépend.Monpèreaussis’appelleM.Kerrington.Normalement,onm’appelleWoods.Dellalaissaéchapperunrireléger.—Incroyable.Jesuiscenséetevoirpourunboulot.C’estTrippquim’envoie.Tripp.C’étaitelle, la fille?Àqui ildonnaituncoupdepouce?Paspossible !Qu’est-cequeJace

avaitditsurelle?Unproblèmeavecsonboss,untrucdanslegenre.Mince,j’avaisoublié.—C’estbienmoi,eneffet,répliquai-je.Pourtoutuntasderaisons,c’étaitunetrèsmauvaiseidée.Jen’avaisvraimentpasbesoindecegenre

de distraction. Je devais faire face à mon père et à Angelina. Croiser Della tous les jours allaitm’embrouillerlesidées.— J’espère que ça ne posera pas de problème. Il n’a jamais mentionné ton prénom. Il disait

systématiquementKerringtonpourparlerdetoi,précisa-t-elled’unevoixinquiètequim’arrachademoncombatintérieur.—Euh,ouais,ehbien,viensdansmonbureau.Onvaremplirlespapiersetvoiràquelpostetemettre.Unposteloindemoi.Leplusloindemoipossible.Jedevraisexpédiersesjoliesfessessurunautre

continent.Au lieudequoi j’allais luidonnerun travail. Ici,dansmonclub.Pourmieuxme torturerenrepensantànotrenuittotalementhallucinante.Etmerde…Jenelalaissaipasmerattraperpouréviterqu’ellenemarcheàmahauteur.Jerisquaisdesentirson

odeur et de la coller contre lemur pourmettremesmains partout sur elle. Je la précédai à grandesenjambéessansmeretourner.Aubruitdesestalons,jesavaisqu’ellemesuivait.Enfinarrivéàmonbureau,j’ouvrislaporteetreculaipourlalaisserentrer.Jeretinsmarespiration

jusqu’àmetenirsuffisammentéloignéd’elle.—Woods, la situation n’a vraiment pas l’air de te plaire. Je suis désolée. Je ne savais pas. Je ne

savaismêmepasoùTrippm’envoyait.Ilm’aexpliquél’itinérairejusqu’ici.Ilfallaitabsolumentquejeparte,alorsjemesuismiseenroute.Jepeuxtrouveruntravailailleurssitutrouvesçabizarre.Le petit froncement inquiet qui retroussait son nez me fit flancher. Je n’allais pas y arriver. Je ne

pouvaispasmemontrerduroufroidavecelle.J’allaisluidonnercefoutuboulot,celuiqu’ellevoulait,puisj’allaissoigneusementl’éviter.Jedevraispeut-êtrefairemademandeàAngelina.Çam’empêcheraitdecommettrel’erreurdecouriraprèsDellaàlapremièreoccasion.— Je suis désolé. Ça ne pose pas de problème. Je viens tout juste d’avoir des soucis avec des

employésetj’aidûgérerundrameencuisine.Tum’assurpris.Maistupeuxtravaillericisituveux.Dis-moicequetusaisfaire.Àpartbaisercommeunereine.Dellaselevasursachaiseetmesyeuxglissèrentsursesseins.Lecontourgranulédesestétonsfitse

redressertotalementmonsexe.Elleétaitexcitée.Elleaussisesouvenait.— J’ai été serveuse dans un bar à Dallas. J’ai enchaîné ce genre de boulots. C’est facile, les

pourboiressontbonsetjenesuispasobligéederesterdanslecointroplongtemps.Jehochailatête.C’estvrai,elleétaitenvoyage.Ellen’allaitpasprendreracineàRosemaryBeach.

Ellenevoulaitpasd’unerelation.Ellepartaitàl’aventure.

—Tuveuxêtreserveuseici?Laclientèleestmoinsdifficilequedansunbaretunedemesemployéesadémissionnéjusteavanttonarrivée.Jen’étaispasdutoutentraindel’éloigner.Aucontraire,j’étaisentraindemelacollerjustesousle

nez.Quelcon.—Merci.Ce serait idéal. Tu veux que je commence tout de suite, vu qu’il temanque quelqu’un ?

J’apprendsvite.Non,j’avaisbesoinqu’elleretournedansl’appartementdeTripppourquejepuissemecalmer.UncoupàlaportenemelaissapasletempsderépondreetJimmypassalatêtedansmonbureau.—C’estentraindepartirenvrille.(SesyeuxtombèrentsurDellaetilluisourit.)Salutmajolie.Pitié,

dis-moiquetuesicipourtravailler.Dellaluilançaunsourireéblouissantethochalatête.—Parfait.Jepeuxlaprendre?demandaJimmyenouvrantlaporteengrand.Je voulais lui rétorquer non, que je n’en avais pas encore fini avec elle. J’envisageais encore de

l’allongersurmonbureaupourremontersajupeetvoircequ’elleportaitendessous.—Bien sûr.Emmène-la.Elle ade l’expérience, çanedevrait pas être sorcierde lamettredans le

bain.Dellaselevaetmesouritunenouvellefois.—Merci.PuisellerejoignitJimmyquirefermalaportederrièreeux.J’appuyaimatêtecontrelesiègeencuirenpoussantunsoupir.JenedevaispasoublierqueDellaallaitbientôtrepartir.Ellen’allaitpass’attarder.Horsdequestion

deperdretoutcepourquoij’avaistravaillé.IlétaittempsdemeconcentrersurAngelina.Peut-êtrequecetobstacleentreDellaetmoim’éviteraitdefairedesbêtises.ParcequeDellaétaitsusceptibledetoutmefaireperdre.Aprèsquoielleprendraitlatangente.Aussiparfaiteetdélicieuseavait-elleété, jenepouvaispas laissermondésirpourellechangerma

vie.Angelinarendraitmonpèreheureux.Jeseraisvice-présidentetcettesaloperiedemanagementseraitdel’histoireancienne.Jen’avaispaslechoix.

Della

—Ne touche pas cette assiette,Della.C’est à ton frère.C’est son plat préféré. Tu le sais bien.Pourquoiessaies-tusystématiquementdejetersanourriture?Pourquoi,Della?Pourquoituluifaisça?Soisgentille,Della.Sageetgentille.—Maismaman,çasentmauvais.C’estlàdepuislongtempsetlesmouches…—TAIS-TOI ! TAIS-TOI !Va dans ta chambre.On ne veut pas de toi ici. Tu n’arrêtes pas de te

plaindre.Vadanstachambre.Danstachambre,file.—Maman,s’il teplaît…Onvaluipréparerunenouvelleassiette.Celle-ciestunpeuvieille.Ça

empestedanstoutelamaison.—Ilveutquetulalaissestranquille.Ilvavenirlamanger.Vadanstachambre,Della.Vachanter

unejoliechanson.Çaferaplaisiràtoutlemonde.Jen’avaispasenviedechanter.Jevoulaismedébarrasserdesalimentspourris.Jesecouailatête

etfisminedeprotesterlorsqu’ellem’agrippaparlecouetsemitàmesecouer.—Jet’aiditdechanter,Della!Netouchepasàlanourrituredetonfrère.C’estlasienne,maudite

fille.Espèced’égoïste,explosa-t-elledanslavoixhautperchéequej’avaisappriseàcraindre.Jetiraisursesmainsenmedébattantpourrespirer.J’étaisentraind’étouffer.Ellem’étranglait.

Unfilethumideglissasurmajoue.Enlevantlesyeux,jevisdusangmedégoulinerdessus.Sonsangàelle.Le sangdemamère. Je regardaimesmains ; elles étaient couvertesde sang. Jeme retournaipourappelerausecours,maisiln’yavaitpersonne.J’étaistouteseule.Toujourstouteseule.

Jemeredressaid’unbonddansmonlittandisquemonhurlementmedéchiraitlapoitrine.J’ouvrislesyeuxetinspectailelieuinconnudanslequeljemetrouvais.Àtraverslagrandebaievitréefaceàmoi,lesrayonsdusoleilmatinalscintillaientsurlasurfacedel’océan.Jeserrailacouettedansmesmainsetprisplusieursinspirationsprofondes.Jen’étaispasdanscettemaison-là.J’étaisensécurité.Toutallaitbien.Lecorpstremblant,jem’assisensilencepourobserverlabeautéquim’entourait.Jenesavaispassimessouvenirsfiniraientpardisparaîtreouparmedévorer.Enattendant,ilfallait

vivre.Chaquefoisquej’envisageaisderentreretd’abandonnercevoyageàladécouvertedemoi-même,mesrêvesmerappelaientpourquoijedevaispersévérer.Jen’avaispasbeaucoupdetemps.Rejetantlacouverture,jemedirigeaiverslasalledebainspourmedoucher.MonT-shirtmecollaitàlapeautantj’avaissuépendantmoncauchemar.Jemeréveillaisainsitouslesmatinsdepuistroisans.

Fin dema deuxième journée au travail. Je n’avais pas revuWoods depuis notre entrevue dans sonbureau.Àcroirequ’ilm’évitait.C’étaitpeut-êtreaussibien.C’étaitmonpatronetjesavaisdésormaisàquelpointune relationavecsonpatronpouvaitmal finir.Woods faisait sansdoute toutpour laisser lepasséderrièrenous.Étantdonnéqu’ilétaitàl’originedutoutpremierorgasmepourlequeljen’avaispaseuàfaired’efforts,j’avaisunpeudemalàpasseràautrechose,maisj’allaisyarriver.J’étais prête à profiter de la vie et sansme préoccuper ni désirer quoi que ce soit d’inaccessible.

C’était censé être un voyage agréable et sans prise de tête. Il était temps dem’ymettre. Jeffery avaitsérieusementperturbémesplans.Ilm’avaitaussiapprisqueleshommespouvaientêtredessalauds.Jedevaisretenirlaleçon.Une brunette séduisante au sourire sincère sortit de la belle voiture garée à côté de lamienne. Le

regardbraquésurmoi,ellemarchadansmadirection.Ellen’étaitpashabilléecommelesautresfillesdemon âge que je voyais au club. Elle portait bas sur les hanches un slim délavé tout usé et un T-shirt

Coronamoulantenguisedehaut.Ilnedevaitpasêtreévidentdemarcherdanssestalonsaiguillesrouges.—TudoisêtreDella.TuesexactementcommeTrippt’adécrite.Moi,c’estBethy,lança-t-elled’une

voixpétillanteenmetendantlamain.Jeluiserrailamain,soulagéequ’ils’agissed’uneamiedeTripp.—Oui,c’estbienmoi.Raviedeterencontrer.J’avaisenviedemefairedesamis.Jenevoulaispasrestericitouteseule.—Jesuisdésoléedenepast’avoiraccueillieplustôt.C’étaitunpeulafolie.Woodsestlemeilleur

amideJace.TuasrencontréWoods,non?Jemecontentaidehocherlatête.—EhbienWoodsestpasséchezmoipourdiscuteravecJacede…Oh,oublions.Jenesuissansdoute

pascenséem’étalersursavieprivée.Etjedoutequetuaiesenviedem’entendreradotersurlesujet.Jesuis venuepour tout autre chose. (Elle s’interrompit etme lança de nouveauun immense sourire.)Onorganise une petite fête chez Jace ce soir. La semaine prochaine, c’est le début des vacances deprintemps.Du1ermarsjusqu’à la find’avril.Lecoinestenvahidemonde.Çameferaitplaisirque tuviennes. J’insistemême pour que tu viennes. Il faut que tu rencontres des gens. Plus tu en connaîtras,mieuxcesera.DommagequeBlairenesoitpaslà.C’estmameilleureamie.Tul’adorerais.Sonfiancéetellesontpartisréglerdesaffairesdefamille.(Ellesoupiraetposalesmainssurseshanches.)Alors,tuviens?J’avaisprévuderetournerchezTripppourmepromenersurlaplageetpeut-êtrelireunpeu.Maiselle

avaitraison.Ilfallaitquejerencontredumonde.—Biensûr.Avecplaisir.C’estoùetàquelleheure?Bethypoussauncriaiguetsemitàapplaudir.—Génial,jesuisravie!O.K,vatechangersituveuxetvienschezJaceauxalentoursde20heures.

Oh,etl’adresse…tuasdequoinoter?Jedénichaidansmonsacàmainunticketdecaisseetunstyloquejeluitendis.Ellegriffonnal’itinéraireetmelesrendit.—Àplus!s’exclama-t-elleavantdes’enretournerverssavoiture.Jeregardais’éloignersonvéhiculeavantdeprendrelevolantàmontour.Jen’arrivaispasàmesortir

delatêtesoncommentairesurWoods.Elleavaitraison:ellen’auraitpasdûabordersavieprivée,maisj’étaiscurieuse.Cen’étaitpasunebonneidée.

J’étaisarrivéeàbonport.Ilyavaitdesvoituresgaréespartout.Jemesentaisunpeuintimidéemais,aprèstout,c’étaitunenouvelleexpérience.J’espéraism’êtrehabilléecorrectement.J’avaishésitéentreunensemblequicadraitaveclesmembresduclubquej’avaiseul’occasiondecôtoyercesdeuxderniersjoursetdesvêtementsdanslestyledeBethy.J’avaiscoupélapoireendeux.Avecunpeudechance,majupeenjean,mesbottesnoiresencuiretmonT-shirtvintageBobMarleyferaientl’affaire.Avantmêmequejefrappe,laportes’ouvritengrandetBethymetiraàl’intérieurparlamain.—Tevoilà!Jen’euspasletempsderépondre:elleétaitdéjàoccupéeàhurlersurquelqu’unquimangeaitdela

saucesalsaau-dessusdutapisblanc.Jelalaissaimeguideràtraverslamaisonbondéejusqu’auporcheàl’arrière.—Désolée,c’estlafolie.Ilyamoinsdemondeici.Deuxtypessirotaientdesbières,assisautourd’unfeu.—Lesgarçons,voiciDella.L’amiedeTripp.(Ellemesouritpuismemontradudoigtunhommequi

ressemblait tellement à Tripp que je ne fus pas surprise de l’entendre dire :) Voici Jace. (Puis elledésignaungarsavecdelongscheveuxblondsbouclésetunsourireespiègle:)EtvoiciThad.(Sonpetitairenjouémeplutd’emblée.)EtvoiciGrant,quinousafaitlasurprisedevenir.Onlecroyaitpartidans

leNord.Grantétaitdeloinleplusbeaudutrio.Sescheveuxnoirsétaientramenésderrièrelesoreillesetses

yeuxpétillaient.Lesourireencoinsexyqu’ilm’adressaitétaitterriblementtentant.—Salut,Della.Viensdoncpartagerma chaise, tu pourras boire unegorgéedemabière, lança-t-il

d’unevoixtraînante.Jepensairefuser,puismeravisaietlegratifiaid’unsourireavantdem’approcher.—Tu tepoussesou je suis censéem’asseoir sur tesgenoux? répliquai-jeenespérantquemon ton

taquinn’étaitpasridicule.LesourireencoindeGrants’épanouit.—Unpeuquetuvast’asseoirsurmesgenoux.J’essayaidedéterminersiBradenyverraitungesteaudacieuxetdécontractéousij’allaispasserpour

unesalope.Jen’étaisjamaissûre.Elleétaitmajaugepourmesurercequisefaisaitetnesefaisaitpas.Cequiétaitaussilaraisonpourlaquelleellem’avaitenvoyéemedébrouillertouteseule.Aupointoùj’enétais,autantcontinuer.Jepassaipar-dessussesjambesrelevéessurlerailenferqui

encerclaitlebraseroetm’installaisursesgenoux.— Il ne va pas s’attarder,ma belle. Tu feraismieux de venir chezmoi. Je ne bouge jamais d’ici,

intervintThaddel’autrecôtédufeu.Grantenroulasesbrasautourdematailleetm’attiracontresapoitrine.—T’ensaisrien,Thad.J’aipeut-êtretrouvéunebonneraisonderesterunpeu.J’étaisclairementdépasséeparlesévénements.—Grant,vas-ymollo.C’estuneamiedeTripp,leréprimandaBethy.Jemedemandaisiellemeconsidéraitdésormaiscommeunedévergondée.—Détends-toiunpeu,moncœur.Laisse-toialleretmets-toiàl’aise,murmuraGrantdanslecreuxde

monoreille.LadouceurdesonaccentduSudmeréchauffa.Cetypemeplaisait.Jeréussisàmedécontracteretà

m’appuyercontrelui.—Tiens,prendsmabière.J’enprendraiuneautrelaprochainefoisqu’undecescrétinsselèverapour

unenouvelletournée.Jen’aimaispasparticulièrementlabière.Maisjel’acceptaidepeurd’êtremalpolie.—Merci.—Maisjet’enprie.Je constatai avec surprise qu’il gardait une main autour de ma taille et l’autre sur l’accoudoir du

fauteuil, sans chercher à me peloter. Tant mieux. Il ne partait pas du principe que j’étais facile sousprétextequejem’étaisassisesursesgenoux.—Parle-nousdeTripp.Çafaituneéternitéqu’onl’apasvu,lançaThad.Jene savaispasgrand-chose surTripp.Lesquelquesnuitsoùnous avions travaillé ensemble, nous

avionsdiscutémaissansjamaisentrerdansledétaildenosvies.— Il va bien. Les femmes n’hésitent pas à faire des kilomètres pour venir le voir au bar. Il a des

admiratrices très dévouées. Il aime bien son boulotmais,maintenant que je sais d’où il vient, jemedemandepourquoiilresteàDallas.ThadlançaunregardàJace.Ilsprirentuneminesolennelle.Detouteévidence,ilssavaientpourquoi

Trippn’étaitpasparmieuxetcetteraisonlescontrariait.Trippleurmanquait.Jelescomprenais:c’étaitunmecsuper.—Etquenousvaut tonarrivéeprécipitéedepuisDallas?enchaînaGranten remontant samainsur

monventre.Sonpouces’approchaitdangereusementdemonseingauche.Jenesavaispastropcommentréagir.—Woods!Ilétaittemps.

L’exclamation de Jace me surprit. Je n’étais plus aussi à l’aise sur les genoux de Grant. Je nem’attendaispasàvoirWoods.Jelevailesyeuxsurluietmoncœurfitunbondlorsquesesyeuxsombresseposèrentsurmoi…ousur

Grant…oulesdeux.—Jenesavaispasquetuétaisrentré,observaWoodsàl’attentiondeGrant,tandisquesesyeuxse

fixaientdenouveausurmoi.—Jesuisrentréhiersoir.Jevaispeut-êtreresterunpeu.SesinflexionsnesemblaientpasamuserWoods,quis’approchademoipourmetendrelamain.—Della,tuveuxbienveniravecmoi,s’ilteplaît?Grant avaitbeauêtre séduisant, le tongraveet impérieuxdeWoodsétait irrésistible. Jeglissaiune

main dans la sienne et ilm’extirpa des genoux deGrant. Je voulus dire quelque chose àGrant,maisWoodsmetiraàl’intérieurdelamaisonsansunmotpourquiconque.—Onvaoù?demandai-jeenposantmabièresurunetabledepeurdelarenverser.Woods resta silencieux. Ilhochad’abord la têteà l’attentiondequelquespersonnesqui le saluèrent

puisignoratoutbonnementlesautres.Jedevaiscourirpourresteràsahauteur.Aprèsavoirtraverséuncouloir,Woodsouvritlaportedeladernièrepiècesurlagaucheetmepoussa

àl’intérieuravantderefermerderrièrelui.Jecommençaisàmedirequejel’avaismisencolèrelorsqu’ils’avançaversmoid’unpasdécidéet

mecollacontrelemur.Lesémotionsquisedessinaientdanssesyeuxsombresmedéboussolèrent.Jenelusaucunecolère.Ilsemblaittroublé,tiraillé,peut-êtremêmeexcité.—Jesuisdésolé, finit-ilpararticulerenposant lesmainsàplat sur lemurdechaquecôtédemon

visage.J’aiétéunpeubrusque.Jenem’attendaispasàdesexcuses.—O.K.,lâchai-jeenattendantplusd’explications.—J’aienviedetoi,Della.J’aienviedet’enlevercettepetitejupesexyetdem’enfoncerdanslachatte

laplusétroitequej’aiejamaisconnue.Ouah.Woodsbaissalatêteetsonsoufflechaudmecaressalesoreilles.—C’estunetrèsmauvaiseidée.Maisjen’arrivepasàpenseràautrechosequ’àtebaiser.Repousse-

moietquittecettepièce.C’estleseulmoyendem’empêcherdetetoucher.La nuit qu’on avait passée ensemble pimentait encore mes rêves, quand je ne faisais pas de

cauchemars.Commentpartiralorsqu’ilm’offraitdenouveaulamêmechose?Pourquoirefuser?Woodsme plaisait. Non seulement il était sexy et me donnait le sentiment d’être désirée, mais il était aussiattentionnéetappréciédetous.C’étaitunmecbien.J’avaisbesoind’affection.Lamajeurepartiedemavie,j’enavaiscruellementmanqué.Lesexemedonnaitlasensationd’êtreprochedequelqu’un,mêmesic’étaitpendantuncourtmoment.J’avaisperdumavirginitédanslesbrasd’unhommequim’avaittenueettouchée. J’avais tellement envie d’être touchée.Mais j’avais commis une erreur. Le type en questionn’avait pas été aussi prévenant que Woods. Dans les bras de Woods, c’était différent. Je désiraisardemmentlessensationsqu’ilmeprocurait.Je posai les mains sur son torse, les paumes contre les muscles durs dont j’avais léché chaque

merveilleuseinflexion.—Etsij’avaisenviederester?Etsij’avaisenviequeturetiresmajupe?l’interrogeai-jeenlefixant

àtraversmespaupièresàdemifermées.Mesquestionsétaientsimples.Ethonnêtes.—Oh,bébé,murmura-t-iljusteavantderecouvrirmabouchedelasienne.L’élan de désespoir de son baiser provoqua des palpitations dans mon entrejambe. Nos langues

insatiables se délectèrent de leur danse jusqu’à ce que nos corps se rapprochent et que nosmains se

disputentlesvêtementsquinousséparaient.JeparvinsàglisserlachemisedeWoodspar-dessussatêteavantdehapper lapeausombredeson tétondansmabouche.D’uncoupsec, il tiramaculotteque jedégageaisanstarder.—Gardelesbottes.Enlèvetoutsauflesbottes,ordonna-t-ilavantderetirermonT-shirtetd’expédier

lesoutien-gorge.Dèsqu’ileutfinidemedéshabiller,jerecommençaiàembrassersontorse.RienàvoiravecJeffery.Je

n’avaisjamaistouchéuntorsecommeceluideWoods.Meprenantpar la taille,Woodsmesoulevaetmecollacontre lemurenmepénétrantd’unpuissant

coupdereins.—WOODS!OUI!hurlai-jetandisqu’unedouleurvoluptueusemesubmergeaitetquej’arrimaismes

brasautourdesoncou.—Ohoui…!Della, jenerêvequedeçadepuisladernièrefoisquej’étaisentoi.Jeveuxyrester

pourtoujours.(Lesoufflecourt,ilsepenchasurmoietenfouitsatêtedansmoncou.)C’esttellementbon,murmura-t-il.—Fais-moijouirettupourrasrecommencer,promis-je,impatientequ’ilbougeenmoi.Jemouraisd’envied’atteindrel’orgasme.Cetinstantprécisoùjenesavaisplusoùjefinissaisetoùlui

commençait.J’étaisauseptièmeciel,etiln’yavaitplusaucuneplacepourlesmauvaissouvenirs.C’étaitunmomentdeplénitudeuniquequej’avaisbienl’intentionderéitérerdanslesbrasdeWoodscesoir.Leresten’avaitplusd’importance.Jevoulaisseulementressentirduplaisir.Woodspoussaungrognementintenseetcommençaàalleretvenirrégulièrement.Il léchalalignede

moncouetmemordit l’épaule, justeau-dessusdemonsein, àplusieurs reprises. Je le regardai faire,impatientedemeperdrelepluspossibleenlui.Salanguetraçauncheminjusqu’àmontétonetletitillaplusieursfoisavantdel’attirerdanssabouche.J’étaissiprochedel’orgasme.Jecommençaiàchanceler.Woodss’enaperçut.Ilmesoulevalesjambesetnousrapprochadumur.Il

levalesyeuxverslesmiensaumomentoùmonplaisirexplosaetjecriaisonnomjusqu’àcequ’ilnesoitplusqu’ungémissement.—Oh,Della!L’orgasmedeWoodsébranlaviolemmentsoncorpsetpropulsaunesecondevaguedeplaisirdansle

mien.Jeréussisàm’agripperàluietposaimatêtecontresapoitrine.Nousétionsàboutdesouffle,commeaprèsunecourse.J’avaisréellementl’impressiond’avoircouru

unmarathonetatteintleparadisenchemin.Woodsmecaressait sur toute la longueurdudos.Cegesteapaisant le rendaitencoreplusattachant.

AvantBraden,lanuitoùj’avaistrouvémamèremorte,personnenem’avaitserréedanssesbras.Woodsm’offraitquelquechosedespécial.J’étaisenquêted’affection.NonseulementWoodsm’endonnait,maisilfaisaitdisparaîtretoutlereste.Sijepassaismesnuitsaveclui,aurais-jemesperpétuelscauchemars?Pouvait-ilépuisermoncorpsaveccettecapacitéàmedonnerduplaisirjusqu’àtoutoubliersauflui?

Woods

J’étaisbiendécidéàlaramenerchezmoicettenuit.J’envoulaisencore.Lagoûterencoreetpasserdesheuresàenroulermalangueautourdesestétonsrosebonbon.Cettefilleétaitunedrogue.Ladernièrefoisqu’onavaitcouchéensemble,ilm’avaitfallutoutelavolontédumondepourmebarrer.Ilfallaitquejemelasortedelatête,mêmesijedevaisenmourir.Elle se blottit dans mes bras et son soupir satisfait m’excita de nouveau. Nom de Dieu, elle était

irrésistible.Jemeretirailentementavantd’êtrecomplètementenérection,sinonj’allaiscontinuersanstransitionet

ilfallaitquejechangemonpréservatif.—WoodsKerrington,si tuesen traindefairecequejepense, jevais tebotter lecul!Sorsde là.

Angelinavientd’arriver,grondafurieusementBethyentambourinantsurlaporte.Merde ! Je n’avais aucune envie d’avoir affaire à Angelina. Je voulais enfiler une autre capote et

plongerdenouveauenDella.Dellas’écartademonétreinteetmedévisagea,lessourcilsfroncés.—QuiestAngelina?Bonnequestion!Allais-je luimentir?Non.J’enétais incapable.Mais luidire lavéritéexcluaitde

remettrelecouvert.Ilfallaittrouverunmoyendeluiexpliquerlasituationsansmettreuntermeà…àcequ’ilyavaitentrenous.—S’ilteplaît,Woods,réponds-moi,plaida-t-elleenreposantlespiedsparterreetens’écartantd’un

pas.Sanselle, jememisàavoirfroid.J’enfilaimonpantalond’ungestesec.Ellecroisa lesbrassursa

poitrinedansuneattitudedéfensive.J’eusenviedelesécarterpournerienperdreduspectacle.—Woods?Elleattendaituneréponse.Jemevoyaismalluimentirjustepourqu’ellecontinueàcoucheravecmoi.

Pourquoifallait-ilquejesoisàcepointhonnête?—C’estmafuturefemme.Çamefitmaldeprononcercesmots.L’idéed’épouserAngelinaetdeneplusjamaisconnaîtreçame

donnaitenviedetoutbalancerpourqu’ilsaillenttoussefairefoutre.Maisc’étaitimpossible.MonavenirétaitenjeuetDellaallaitbientôtpartir.Jen’allaispastoutgâcherpourquelquessemainesdelabaiselaplustorridedemavie.—Tafuturefemme?répéta-t-elleenattrapantsonsoutien-gorge.J’auraisvoulul’aideràl’attacher,maisjesavaisbienqu’ellerefuserait.Pasaprèscettemiseaupoint.—JevaislademanderenmariagedemainsoiraucoursdudînerdecharitédesDelamarauclub.Dellaécarquillalesyeuxetentrepritmaladroitementd’agrafersonsoutien-gorgetoutenmettantdela

distanceentrenousdeux.—C’est pas vrai,murmura-t-elle enpassant précipitamment sonT-shirt avant deboutonner sa jupe

pourmonplusgranddésespoir.C’estpasvrai,encore lamêmehistoire,poursuivit-elleensecouant latêted’unairincrédule.Jesentisl’angoissem’envahirlorsqu’elles’approchadelaporte.Çanepouvaitpasfinircommeça.—Della,attends.Laisse-moit’expliquer,suppliai-je.Ellesecoualatête.—Non,arrête.J’aicompris.Jesuisuncoupfacile.Tut’apprêtesàtelieràunefillepourlerestantde

tes jourset tum’asutilisée.Pourunedernièrenuitde folies. (Elleémitunriresec.) Jesuisuneproiefacile.J’enaiconscience.Toutesmesfélicitationspourtonmariage.J’espèrequ’ellediraoui.Jene trouvaipas lesmotspoursauver lasituation.Lorsqu’elleouvrit laporte,elle tombanezànez

avecuneBethyparticulièrementfurax.—Çava?Non,çanevapas.Suis-moi,dit-elleàDellad’unevoixrassuranteavantdemefusillerdu

regard.Commentas-tupufaireça?Je les regardai partir. Je fermaima braguette et enfilai mon T-shirt. Lemorceau de tissu rose que

j’avaisarrachégisaitsurlesol.Ellesebaladaitenmini-jupesansculotte.Merdealors.Jeramassailederniersouvenirquej’auraisjamaisdelasaveurenivrantedeDellaSloaneetleglissaidansmapoche.

Grant me rejoignit dans le vestibule. Je lui devais mes excuses, à lui aussi. Non pas que je soisd’humeurà le faire. Il seraitprobablement leprochainàdécouvriràquelpointDellaétaitdélicieuse.MonsangsemitàbouillonnertandisquedesimagesdeGrantentraindetoucherDellajaillissaientdansmatête.—Qu’est-cequetufous,bordel?Jecroyaisquetuallaisdemanderlamaind’Angelinademainsoir.

D’aprèsJace,tuasdéjàlabague.—C’est vrai, lâchai-je aprèsun soupir frustré.C’est unpeuplus compliquéque ça en a l’air. J’ai

rencontréDellailyaquatremois.Elleétaitdepassageenville.Ellenes’oubliepasfacilement.Jen’allaispas luiexpliqueràquelpointelleétaitunboncoup,nedoutantpasunesecondequ’il le

vérifieraitparlui-mêmeetsachantquesoncœurétaittropesquintépourqu’ilaimeencoreunjour.—Et tuasvoulu remettreça?Elleétait aucourantpourAngelina?Parceque si c’est le cas, tout

baigne.Mais si elle ne savait rien, alors t’es vraiment un sacré salaud, proféra-t-il d’une voix douceentrelacéedemenacefurieuse.—Çafaitdemoiunsacrésalaud,répliquai-jeen lebousculant tandisqu’Angelinasedirigeaitvers

moi.—Jet’aicherchépartout.Tuétaispasséoù?interrogea-t-elle.Jepensaid’abordmentirpuisdécidaidenepaslabercerd’illusion.Illuifallaitlavérité.— J’étais en train de baiser comme une bête. Si je te demande en mariage demain à la soirée

caritative,autantprofiterd’undernierbonsouvenir.Laplupartdesfillesseseraientoffusquées,maisjesavaisqu’Angelinanebroncheraitpas.Ilnefallait

pasoublierqu’ils’agissaitàsesyeuxd’unetransactioncommerciale.—J’espèrequetuaspristonpiedparcequejenelepermettraiplusunefoisquej’aurailabagueau

doigt,siffla-t-elle.—C’étaitincroyable,répliquai-je,puis,m’acheminantverslaported’entrée:Allons-y.

Della

JenevoulaispasretournersousleporcheavecBethy.Grantarrivaitversnousetj’avaisjusteenviedepartir.Cette fois, c’enétait trop.Avec Jeffery, j’avaiseuun sentimentdedégoût.MaisavecWoods…c’étaitdouloureux.Ilétaitdifférent.Dumoins,c’estcequej’avaiscru.Samanièredemetoucheretdemedésirerm’avaitdonnédel’espoir.J’avaisétébêted’imaginerqu’unamantfougueuxétaitlaréponseàmes problèmes. Ce n’était que pur égoïsme.Woods n’agissait pas par pure affection. J’étais blessée.J’avaistellementeuenviedetoutça.Jesentaismonchampdevisionsebrouiller;ilfallaitquejem’isole.Inutilequequiconquemevoie

danscetétat.Jenevoulaispasquelesgensmeprennentpar-dessuslemarchépourunecinglée.—J’aimerais juste êtreunpeu seule, si çane t’ennuiepas, annonçai-je àBethyen lui adressantun

souriredésoléavantderegagnerl’airfroidextérieur.Jeneprislapeinenidemeretournernidetrouvermavoiture.Jen’étaispasenmesuredeconduire.Il

fallait que je trouve un endroit isolé et calme. À l’abri. J’en avais absolument besoin. Je me mis àscander«àl’abri»dansmatêtetandisquemavisiondevenaitdeplusenplusfloue.Jeparvinsàtrouverunemaisonquisemblaitvideetm’assisà l’arrière, tournant ledosà la route.Je repliai les jambesetcalaimatêteentrelesgenoux.J’allaism’ensortir.C’étaitsimplementunsymptômedemontraumatisme.Entoutcas,c’estcequelesmédecinsnecessaientdemerépéter.

Nesorspas,Della.C’estdangereux.Tonpèreestmortparcequetuessortie.Resteiciàl’abri.Avecmoi.Onseraàl’abriensemble.Toietmoi.

Mes yeux se remplirent de larmes tandis que les mots de ma mère se bousculaient dans ma tête.J’essayaiàtoutprixderefoulerlessouvenirs.Maislorsquej’étaisfatiguée,ilsresurgissaient.Ilsnesecontentaientpasdepeuplermesrêves.

Chut,Della,ma chérie. Tu as envie de faire du vélo, je sais,mais il peut t’arriver tellement devilaineschosesdehors.Iln’yaqu’iciquetuesensécurité.Nel’oubliejamais.Nousnepouvonspassortir, sinon ilvasepasserdeschoses terribles.Sionchantaitplutôtunechanson,d’accord?Unechansongaiequinousprotégera.

—Non,non,non,maman.Tun’yarriveraspas.Jesuisplusfortequetoi.Jevaisyarriver,affirmai-jeenrepoussantl’assautdessouvenirs.Jen’étaispasmamère.Jevoulaisvivre.Jevoulaisaffronterledangeretconnaîtretouteslesémotions

quiallaientavec.Jerestaiassiseunlongmomentàcontemplerlalune.Cettelunequej’avaistantdésirédécouvrir.Je

savaisque, lanuit, jepouvaiséchapperà la forteressede lamaisonpourvoirBraden. Jepouvaismepromenersursonvélodanslesruessombresethumerl’airfrais.Lecielnocturneétaitdevenumonami.Jem’essuyai levisagedudosde lamain et finisparme relever.Tout allait bien. J’avais surmonté

l’épreuvetouteseule.Bradenn’avaitpasétélàpourmedirederespireretmefaireriretoutenenroulantunbrasautourdemesépaules.Cettefois-ci,jem’enétaissortiesanselle.J’étaisfièredemoi.

Cettenuit-là,neparvenantpasàtrouverlesommeil,j’envisageaidefairemesvalisesetdepartir.Aufinal,jedécidaiquej’enavaisassezdefuir.Jenepouvaispasmedéfileràchaqueépreuve.Ilétaittemps

de réagircomme tout lemondeetde faire face.Enattendant, il faudrait certainementque je trouveunautre boulot.Mon patron n’avait peut-être pas très envie que je continue à travailler pour lui. Je luiposeraislaquestion.J’iraislevoir,demanièretrèsprofessionnelle,pourluidemandersij’avaistoujoursmonposteous’ilfallaitquejechercheailleurs.Çan’étaitpaslameràboire.Siseulementj’arrivaisàoublierl’expressiondesonvisageenpleinorgasme.Bonsang.Çaallaitme

poserunproblème.JedevaisarrêterdefantasmersurWoods.C’étaitmonpatron.Unpointc’esttout.

Lelendemain,jeprisl’entréedeserviceducountryclubetmedirigeaiverssonbureau.Autantm’enoccuper tout de suite.M’en débarrasser une bonne fois pour toutes et arrêter de perdre du temps à ypenser.Je frappai à laporte.Pasde réponse. Je tournai les talonset remontai le couloir endirectionde la

cuisinelorsqueWoodspénétradanslebâtiment.Sesyeuxseposèrentsurmoietjemefigeai.Leseulfaitde le voir était difficile. J’avais laissé nos rapports sexuels prendre une autre dimension. Jem’étaisconvaincuequej’avaisbesoindelui.Jechassaiaussitôtcetteidéedematête.— Bonjour, monsieur Kerrington. Je vous cherchais. Je voulais m’assurer que j’avais encore un

travail.Àmoinsquevousnepréfériezquejedémissionne.Monton,froidetprofessionnel,m’impressionna.UnelueurindéfinissabletraversaleregarddeWoods,

quifitunpasdansmadirection.—Tupeuxtravaillericiaussilongtempsquetulesouhaites.—Mercibeaucoup.Avantqu’ilpoursuive,jemedirigeaiverslacuisinesansmeretourner.Lorsquelesportesbattantesse

refermèrent derrière moi, je retrouvai enfin mon souffle. J’avais réussi. L’épisode était clos. Nousn’avionsplusbesoindenousparler.Nouspouvionsdésormaisnousignorer.—Ah,parfait,jebosseavectoietpasavecJimmyaujourd’hui.Lematin,ilmerenddingue.Affairéeànoueruntablierautourdesa taille,unefillequej’avaisvuelepremier jourmesouriten

entrantdanslacuisine.—Della,c’estça?demanda-t-elleenrassemblantseslongscheveuxbrunsenqueue-de-cheval.—Ouiettoi,c’est…(Jebaissailesyeuxsursonbadge:)Violet.—T’astriché!dit-elleenriant.Maisc’estpasgrave,onnes’estrencontréesqu’unefois.Jeprends

lestablesdedroitedeseptàquatorze.Ettoicellesdegauchedeunàsix.Laclientèledelarangéededroiteestplusdifficilelematin.Beaucoupd’habitués.Onnevapastejeterdanslagueuledulouptoutdesuite.—Merci.—Jet’enprie.J’aienviequeturestes.Onn’arrivepasàgarderlesserveusescompétentes.Jem’ensortisavecunseuloubli:lesiropdeLiègepourlestartinesdelatabletrois.Heureusement,

personnenem’entintrigueuretjerécoltaiunbonpourboire.ÀDallas,leshommesdeplusdesoixanteanssemontraientrarementaussigénéreux.J’allaisbouclermonservicelorsqueVioletarriva,lesourireauxlèvres.—Tuastirélegroslot.Troismembresdufameuxquatuorsontassisàleurtablehabituelle,ladeux.

CommeWoodsn’estpaslà,ilsvontenprofiterpourflirter.EnplusilyaGrant,doncfais-toiplaisir.Ilssonttropcraquants.Allez,jefile.MestablessontprêtesetJimmyvaarriverpourleservicedemidi.D’unbond,ellepassalaporteetjemeretrouvaiseule.Jen’étaispasprêteàfairefaceàGrantetaux

autres.Jen’avaispasencoredigérélanuitprécédente.J’eusdenouveauenviedefuir.Ilfallaitqueçacesse.J’attrapaimonplateauetmacarafed’eauglacée

et m’approchai d’eux. Thad, Grant et Jace, en grande discussion, ne me prêtèrent pas attention. Tantmieux.Grantlevalesyeuxsurmoietmegratifiadusourirelangoureuxdontilavaitlesecret.

—Çamefaitplaisirdetevoirparminouscematin.Ilsavait.Merde.Toutlemondeétait-ilaucourant?—Jefaismonboulot,répliquai-je.Qu’est-cequejevoussers?—Cetuniformetevacommeungant,observaThad,penchéenavant,lesyeuxrivéssurmapoitrine.—Laferme,lerabrouaGrantenluilançantunregarddedégoût.Uncafé,noir.—Cafépourmoiaussi,avecdelacrèmeetunsucre,enchaînaJace.—Ungrandverredelait,ditThad.—Apporte-luiplutôtunbiberon,ilal’aird’enavoirbesoin,lançaJaceenlevantlesyeuxauciel.—Jeveuxbienêtresonbébésiellemeledemande.Unbongrosbébé,répliquaThadavecunclin

d’œil.—Quelcrétin,lâchaJaceensecouantlatête.Je n’attendis pas la suite des commentaires. Je filai en cuisine pour préparer la commande.Mieux

valait nepas rentrerdans lepetit jeudeThad. Il étaitmignon,mais j’avais le sentimentqu’il pouvaitdevenirlourd.Lorsquejeretournaiàleurtable,Woodss’étaitjointàeux.Jemeparaid’unsourirepolietservisles

autres.—MonsieurKerrington,jevoussersquelquechose?JeréussisànepasdétournerlesyeuxdeWoodsmaisremarquailehaussementdesourcilsdeGrant.—Uncafé,noir,merci,répondit-ilenmeprêtantàpeineattentionavantderetourneràsaconversation

avecJace.—Etmessieurs,vousavezfaitvotrechoix?Grantsepenchaenavant.J’étaisbiencontentedepouvoirmeconcentrersurlui.Jemesentaisridicule

àéviterderegarderducôtédeWoods.—Jenesaispaspoureux,maismoijemeursdefaim,ditGrant.Jevaisprendreunhamburger,àpoint,

etdemandeàJuanderajoutersasaucespéciale.—Pareilpourmoi,enchaînaThad.Jem’obligeaiàtournerlatêteversJaceetWoods.—Bethym’apréparéunpetitdéjeunertardif,déclaraJace.Uncafé,çaira.L’idéedem’adresseràWoodsmenouaitl’estomac.Jedétestaismesentirmalàl’aiseensaprésence.

Maisc’étaitmonpatron.Jemeparaidemonsouriredefaçadeettournailesyeuxverslui:—Etpourvous?Woodscroisabrièvementmonregardavantderépondre:—Rien,merci,j’airendez-vouspourledéjeuner.Avecsafiancée,àcoupsûr.Jehochailatêteetretournaiencuisine.—Jemel’enverraisbien,commentaThadtandisquejem’éloignais.—Tagueule,coupaGrant.JeparvinsàrapportersoncaféàWoodsenévitanttoutenouvelleinteraction.LorsqueJimmyarrivad’unpasnonchalant,jepoussaiunsoupirdesoulagement.—Jimmy,jetefilelamoitiédemespourboiresdelajournéesionéchangenostables.Jimmyhaussaundesessourcilsparfaitementépilésetmedévisageacommesij’avaisperdularaison.—Mapoulette,horsdequestionquejeprennelamoitiédetespourboires.C’estquoileproblème?Jen’avaispasenviedeluiparlerdeWoods.Jeréfléchisunesecondepuisrépondis:—Cestypesmestressentetjen’aimepasservirM.Kerrington.S’ilteplaît,suppliai-je.Illevalesyeuxaucieletnouasontablier.—D’accord.On échangemais je prends de un à sept. Tu prends de huit à quatorze.Comme tu es

encorenouvelle,ilfautquetuassuresplusdetables.—Biensûr,merci.

—Jecroisquetuvasmeplaire.IlétaittempsqueWoodsembaucheuneserveuseavecquij’aimebienbosser.Soncomplimentétaitagréable.J’avaisl’impressiond’êtreàmaplace.

Woods

Delafenêtredemonbureau,jeregardailavoiturerougedeDellas’éloigner.Jepouvaisdifficilementmementiretprétendrequemaprésenceàlafenêtreaumomentoùellepartaitétaitunecoïncidence.Jeconnaissais son emploi du temps. Je savais que son service était terminé et je m’étais posté làpiteusementpourl’observerpartir.J’avaistrèspeudormi,tracasséàl’idéequ’ellenes’enaillesansunmotaprèslanuitprécédente.Lorsqu’àmon arrivée au club elle était venueme voir enm’appelantM.Kerrington pour s’assurer

qu’elle avait toujours son poste, j’avais été sacrément soulagé ; je n’avais pas réussi à lui présentercorrectementmesexcuses.Etpuisj’avaisdécidéquec’étaitaussibienainsi.Soyonsréalistes,riend’autren’étaitpossibleentre

nous.Ellememettait sur la toucheet jedevais la laisserpartir.Pourellecommepourmoi.C’était lemeilleurmoyendem’empêcherd’imaginerquelquechosequejenepourraispasobtenir.Derrièremoi, la porte s’ouvrit sans un bruit et je n’eus pas àme retourner pour deviner de qui il

s’agissait.Uneseulepersonneentraitdansmonbureausansfrapper.—Bonjour,père.Gamin,jel’idolâtrais.Désormais,unepartiedemoilehaïssait.—Woods,jesuisvenum’assurerquetoutestenplacepourcesoir.HowardetSamanthaserontlà.Ils

attendentvotreannonce.Jen’aipasl’intentiondedécevoirHowardGreystone.Il savait que je le ferais à contrecœur ; et voilà qu’il se pointait pour souligner l’importance de

l’événement.—Rienn’achangé,répondis-je.Cetteaffirmationallaitbeaucoupplusloinquecequ’ilvoulaitbienentendre.Rienn’avaitchangé:il

contrôlait toujours tout, je ne supportais toujours pas l’idée dememarier àAngelina et il n’en avaittoujoursrienàfoutre.—Bien.Tamèreestd’oresetdéjàentraind’organiserlemariageavecSamantha.Ellesl’organisent

depuisquevousêtesenfants.Ilnes’agitpasuniquementd’assurernotreaveniretlapérennitédecequ’aconstruittongrand-père;ils’agitaussidefaireplaisiràtamère.ElleadoreAngelina.Toutvatrèsbiensepasser.Tuverras.Sansnous,tuneteseraisjamaismarié.Larailleriedanssavoixnem’échappaitpas.Pourtant,iln’yavaitriend’amusantàcequemonpèreet

mamères’attendentquejesacrifiemonbonheurpourleleur.—Aumoins,çafaituneheureuse,lâchai-jefroidement.—Unefoismariéetassisdanstonnouveaubureauavecvuesurledix-huitièmetrou,letitredevice-

présidentgravésurtaporte,tuserasheureux,toiaussi.Pourlemoment,tutecontentesdeboudercommeunenfantcapricieux.Jesaiscequ’iltefautpourréussiretAngelinaGreystoneenfaitpartie.J’étaisincapabledeleregarder.Laragequimedévoraitrisquaitdeseliredansmesyeux.Lebruitde

sespass’éloignaetlaporteserefermaderrièrelui.Jen’étaispassûrdepouvoirunjourluipardonnerça. À moins que je ne me le pardonne jamais à moi-même. Quel homme laissait quelqu’un d’autrecontrôlersavie?Sonavenir?

Angelinaavaitfaitletourdepratiquementtoutelasallepourexhiberl’alliancequej’avaisglisséeàson doigt devant tout le monde plus d’une heure auparavant. Elle était surexcitée et tous gobaient lemorceau. À croire qu’on était follement amoureux.Mes talents d’acteur étaient moindres. Je restai àproximitédubaràécluserdesshotsdewhisky.

—Elleestcanon.Quitteàtecaser,aumoinstuasprisl’optionbeautéetargent.C’estdéjàça.Maistuasl’airprêtàtruciderlepremiermalheureuxquis’approcheraitdetoi,remarquaJaceens’installantàcôtédemoiaubar.Angelinaétaitbelle,d’unebeautéfroideetclassique.Elleétaitélégante,raffinéeetmanipulatrice.—Jenemeréjouispasdesmassesd’être lanouvellemarionnettedemonpère,pestai-je, la langue

engourdieparl’alcool.—Jeveuxbientecroire,acquiesça-t-ilenfinissantmonverredewhisky.Tudevraisyallermollo.—Probablement,maisçavoudraitdireaffronterçasobre.Jacepoussaunsoupir.— Je n’avais pas l’intention demettre ça sur le tapis,mais il s’est passé quoi avecDella la nuit

dernière?Jesoulevaimonverreetl’agitaiàl’attentiondubarman.—Rien,mentis-je.Jaceeutunpetitsourireencoin.— Ce n’est pas ce que raconte Bethy. Apparemment tu n’avais pas de chemise et ton jean était

déboutonné.IlavaitfalluqueBethyluidonnedesdétails.—J’airencontréDellailyaquatremois.Onapasséunenuitensemble,unenuitvraiment,vraiment

géniale.Quandelleestdenouveauapparuehier,j’aiperdulatête.Voilàcequis’estpassé.—Merdealors,lâchaJaceavecunsifflementsourd.Ilnecroyaitpassibiendire.Toutça,c’étaitdelamerde: lemariage,monpère, leboulotquiétait

censémerevenirsansconditions.Mavieétaitmerdique.EtpuisilyavaitDella,douce,sexy,drôle,maisjenepouvaispaslatoucher.Désormais,ellem’étaitinterdite.—Impossibled’oublierlegoûtdesapeau.Malangueivresedéliait.Fortheureusement,Jaceétaitleseulàm’entendre.—Leboulotavectonpèreenvautlapeine?Jesavaisque,pourlui,j’étaisuntrouillard.Quejen’avaispaslestripespoursaisirmaliberté.—JenesuispascommeTripp.Jenepeuxpastoutplaquer.Contrairementàlui,jeveuxcettevie.Je

veuxceboulot.Ilmerevient,nomdeDieu.Jacehochalatêteetattrapalenouveauwhiskyquejem’apprêtaisàdescendre.— Je t’ai dit d’y allermollo. Sortons quelquesminutes.L’air frais de la nuit t’aidera à dessaouler

suffisamment pour parler aux invités et donner l’impression que tu veux réellement ce boulot quiconditionnetonexistence.Jeluiembrayailepas.C’étaituneexcellenteidée.—OùestBethy?demandai-jeencherchantdesyeuxsadoucemoitié.—EncuisineavecDella.Ellen’avaitpasenviedevenircesoiretm’ademandéde travaillerà la

place.Dellaétaitlà?Jem’arrêtaiàl’extérieurdelasallederéceptionetjetaiunœilverslacuisine.Della

étaittouteproche.Jevoulaisfairemesexcuses.M’expliquer.Direquelquechose.— Il faut que j’aille trouverDella. Je veux qu’elle comprenne, affirmai-je enme dirigeant vers la

cuisine.LamaindeJaceserefermasurmonépaule.—Non,monpote.C’estunetrèsmauvaiseidée.TuesfiancéetDellaesttonemployée.Tudoisposer

deslimites.—C’estceque j’ai faitenpassant labagueaudoigtàAngelina.Jeveux justem’expliquer.Ellene

comprendpas.Jel’avaisbaisée,aprèsquoijeluiavaisditquej’allaismemarieretelles’étaittirée.Jerevoyaissans

cessel’expressionsursonvisage.Çametuait.—Etàquoiçavaservir?Àrien.Laisse-latranquille.Ilnepouvaitpascomprendre.Jesecouailatêteetmedirigeaiverslacuisine.— Je crois qu’elle plaît à Tripp. Je crois qu’il rentrera pour elle. Il n’a sans doute pas vraiment

réfléchiquandill’aenvoyéeici,maisilavaitd’autresraisons.Iln’ajamaislaissépersonnevivredanssonappart.Dellaestdifférente.Jemefigeai,prisd’unedouleurdanslapoitrineetleventre.TrippetDella?Ilétaitlibredefairele

tourdumondeavecelle.Iln’avaitniresponsabilitésnibutdanslavie.Ilfaisaitcequ’ilvoulait.CommeDella.Jeprisappuicontrelemuretfixailaportedelacuisine.Àquoibonexpliquertoutescesconneries?

Çan’allaitrienchanger.Jen’étaispasceluiqu’illuifallait.Nousnevoulionspaslamêmechosedanslavieetlesexehallucinantnedureraitpasadvitamaeternam.Lesportesdelacuisines’ouvrirentàlavolée.MacyKemp,maresponsableenévénementiel,sortiten

tirantDellaparlepoignetets’avançaversmoid’unpasdécidé.J’ouvrislabouchepourluiordonnerdelâcherDella,maisMacyavaitdéjàprislaparole.—Lechanteurestallergiqueauxfruitsdemer.Personnenemel’adit,Woods.Personne.Sansquoion

ne luiauraitpas servi les sauceset les salades. (Elle secoua la têteetpoussaun juron.)Cet imbécilevientdepartirenambulance,maisilvas’ensortir.Jem’ensuisoccupée,toutvabiensepasser.ElleseremitenmarcheentirantDelladerrièreelle.L’expressionangoisséesurlevisagedeDellame

fit sortirdemonétatéméchéetpaumé. Jen’aimaispas lavoirbouleversée,etpuispourquoiMacy latraînait-ellecommeça?—TufaisquoiavecDella?m’enquis-je.MacyregardaDellapuismesourit.— Je cherche quelqu’un pour chanter. Le groupe ne peut pas jouer sans. J’étais enmode désastre

lorsque j’ai entenducettedemoisellepousser la chansonnettedans les toilettes en se lavant lesmains.Elleenadanslegosier.Macyn’auraitpasdûleformulerainsi.MonpantalondevintsoudaintropserréetlevisagedeDella

viraaucramoisi.Jen’arrivaispasàdétachermesyeuxd’elle.—Tuvaschanter?demandai-je.Ellehaussalesépaules.—Oui, ellevachanter, embrayaMacy.Quand jedisque je l’ai entenduechanter etque je cherche

quelqu’unpourchanter,c’estpourtantclair,non?D’abord,jevaislafringuerunpeumieuxqueça.Fautqu’onfile.Disàtonpèrequeleconcertcommenceradansdixminutes.Marcypoursuivitsonchemin,Dellaseprécipitantdanssonsillage.—Engros,ellevachanteràtasoiréedefiançailles,observaJacederrièremoi.—Cen’estpasmasoiréedefiançailles,grommelai-je.—Tuviensdetefiancerettoutelasalleparledetonmariage.Çayressembleunpeu,quandmême.—Tagueule,Jace.

Della

Sij’avaispumesortirdecettesituationsansdémissionner,jen’auraispashésité.Àlamaison,j’avaistoujourschanté.Danslebutd’échapperàmamèreetàlaréalité.Maisjamaisdevantdesgens.J’adoraischanter:lemiroiretlabrosseàcheveuxm’avaientaccompagnéelamajeurepartiedemavietandisquejemeproduisaisdevantunpublicimaginaire.Jen’étaismêmepassûredechanterjuste.Mamèreadoraitm’écouter,maisçan’étaitpasvraimentun

critère.J’avaiscommencéàexpliquer toutçaà la femmequi s’étaitprésentéesous lenomdeMacyKemp,

maisellenem’avaitpaslaisséleloisirdeparler.Aulieudecela,elleavaitinformémescollèguesencuisinequ’onavaitbesoindemoiailleursetm’avaittraînéederrièreelle.Jem’étaisattendueàcequeWoods,enmevoyant,metteuntermeàcetteabsurdité,maisnon.Ilavait

sembléaussidésorientéquemoi,maisn’avaitpaslevélepetitdoigt.Jedétaillai la robecourtemoulantede teinteargentéeque j’avaisenfilée.Dosnuavecundécolleté

plongeant.J’avaisl’impressiond’êtreànu.Danstouslessensduterme.—Ilsneferontpasvraimentgaffeàtoi.Ilssonttropabsorbésparleurpetitetroupeélitiste.Tuchantes

pour qu’ils aient un fond sonore et puissent danser s’ils en ont envie,m’expliquaMacy enme faisantmonterl’escaliermanumilitariverslesmusiciensquimedévisageaientd’unairdubitatif–jenepouvaispasleurenvouloir.—C’esttoilaremplaçante?demandal’und’euxdansunsifflementteintéd’agacement.—Aumoins, ilsseront tropoccupésà lamaterpourentendrenotresonpourri,grommela l’autreen

passantlabandoulièredesaguitarepar-dessussatête.—Tusaischanterquoi,chérie?s’enquituntroisièmeaucrânechauve.J’avaisenviedefuir.Jen’avaisriendemandé.Jeripostaiàchacundeleurscoupsd’œilfurieux.Jeles

avaisentendusplustôt.Ilsn’étaientpassibonsqueça.Pourquiseprenaient-ilsàmetraitercommesij’allaisfoutreenl’airleurexistence?Sileurchanteuravaitpenséàsesallergies,onn’enseraitpaslà.Je passai devant chacun d’eux avant de me planter devant celui qui m’avait demandé d’un ton

condescendantsijesavaischanter.—Jepeuxchantern’importequoi,lançai-jeavantdemontersurlascènetelleladivaquejen’étais

pas.LamélodiefamilièredeSomeoneLikeYoud’Adelecommença;j’étaisàlafoissoulagéedeconnaître

lesparolesetmortedetrouilleparcequelapopularitédelachansonattiraitl’attentiondesinvités.Moiquiespéraisqu’onallaitm’ignorer…J’accompagnailepianosurlespremièresparolesmélancoliques.Au lieu de fixer l’assemblée, je plongeaimon regard dans celui du pianiste. Ses yeux semirent à

brillerd’encouragement,d’excitationetdesoulagementàmesurequelachansonavançait.Commequand j’étais petite dansma chambre, je fis abstraction de tout ce quim’entourait pourme

perdre dans les paroles et lamusique.C’est ainsi que j’avais pu surmonter la folie dema vie.À cetinstant,jem’enservaispouraffronterlaréalité.

La soiréecontinuaavecAin’tNoOtherMan dans laversiondeChristinaAguilera.L’air entraînantchauffaunpeulasalle.Jusqu’ici,j’avaisréussiànepascroiserleregarddeWoods,bienquejesacheexactementoùilétait.Jesentaissesyeuxsurmoi.—Tusaisharmoniser?medemandaleguitariste.

Jehochailatêteetilfitsigneauxautresmusiciens.JustaKissdeLadyAntebellumcommença.Nousétionsarrivéssansencombreaupont lorsque j’aperçusWoodsdanseravecunegrandeblonde

élégante. Il fallait absolument que je détourne le regard. Le voir et imprimer une image d’eux deuxensemble allaitme rendre folle. Pourtant, je restai scotchée. Elle lui souriait tout en bavardant tandisqu’ilfixaitlevidepar-dessussonépaule.Ilavaitl’airfroid.Rienàvoiraveclemecquej’avaisconnu.Ildutsentirmesyeuxpesersurluicariltournalatêtedansmadirectionetnosregardssecroisèrent.

Chaquemotquejechantaisluisemblaitdestiné.Àlafindelachanson,j’arrachaimonregarddusienenmejurantdeneplusjamaisl’orienterdanssadirection.

Uneheureplustard,j’avaisréussiàenchaînertoutcequ’onm’avaitmissousladent.Mêmelestubesde BrunoMars. Le pianiste me gratifia d’une tape dans le dos et d’un sourire radieux tandis que jequittaislascène.—Tuasassurégrave,chérie,melançalebassistechauve.—Tuvienschanteravecnousquandtuveux.C’estpasavecJJquejevaisfaireunduo,renchéritle

guitariste.Jemeretournaietleursourispar-dessusl’épaule.Jen’avaispasl’intentiondetraîner.J’avaisbesoin

deme retrouver seule. Le spectacle deWoods tenant sa fiancée dans ses bras n’avait pas été de toutrepos. Elle était superbe. Parfaite. Protégée par son étreinte. Je connaissais ce sentiment. Woodsdégageaitcettesensationdesécurité.Jel’enviais.

LesvacancesdeprintempsbattaientleurpleinàRosemaryBeach.Bethyn’avaitpasexagéré.Lavilleétaitbondée.Jetravaillaiscinqjoursparsemaineetlaplupartdutempsj’assuraisdeuxservicesparjour.J’étais bien payée et je m’entendais bien avec mes collègues. Et croiser Woods était devenu moinsdifficile.Nous parvenions à nous comporter l’un envers l’autre avec une indifférence polie. Parfois, j’avais

l’impressionqu’ilmeregardaitmais,lorsquejemeretournai,jemerendaiscomptedemonerreur;çamefaisaitmal.Jenesavaispastroppourquoijemetorturaisautant.Iln’avaitaucuneraisondemeregarder.Ilétait fiancé.Maismoncorps,qui ignoraitàquelpointWoodsétaitun territoire interdit,désirait sonregard.Aujourd’hui,j’avaisenfinunejournéederepos.Bethyaussi.Nousavionsprojetéd’alleràlaplage.Je

me faisais une joie de passer la journée au soleil. La température avait augmenté depuismon arrivéequinzejoursplustôt.Bethyvoulaitquejepasseàsonappartquidonnaitsurlaplageprivéeduclub.Ilyauraitmoinsdemonde.J’avaisproposéàVioletdenousrejoindreaprèsleservicedemidietBethyavaitinvitéuneautreserveuse,Carmen,quifinissaitplustard.JejetaiunœilaudernierSMSreçuenm’arrêtantlelongdesappartementsoùhabitaitBethy:Àlaplage,jet’airéservéuneplace!J’attrapaimonsacdeplagesurlabanquettearrièreetsortisdelavoiture.Lebâtimentquisedressait

devantmoimelaissasansvoix.C’étaitlacrèmedelacrème:propriétéducountryclub,ildevaitcoûterunefortune.Cen’estpasavecsonsalairedeserveusequeBethypouvaitsepayerunendroitpareil.Soitelles’étaitarrangéeentantqu’employéeduclub,soitJacel’aidaitàassurerleloyer.Peut-êtreunpeudesdeux.Jem’approchaidelapromenadepuisdescendissurlesablechaud.Ilyavaitplusdemondequeceque

j’imaginais.JechaussaimeslunettesdesoleiletentreprisdetrouverBethy.Jel’aperçuslorsqu’elleselevapourmefaireungrandsignedelamain.Lesourireauxlèvres,jemedirigeaiverslesdeuxserviettesbarioléesétenduessurlesable.Lorsque

Bethy se rassit, j’aperçus Jace derrière elle, ainsi qu’une autre serviette, vide, bien qu’ayant de toute

évidenceétéutilisée.—Jesuissupercontentequetuaiespuvenir!s’exclamaBethyavecungrandsourire.Taservietteest

là.Celle-ciappartientàThad.Ilestallésebaigner.C’était doncThad. Je pouvais gérer. J’aurais préféréGrant,mais Thad ferait l’affaire. Tant que ce

n’étaitpasWoods.Maisjemedoutaisbienqu’ilnesedoraitpaslapiluleausoleilpendantletravail.—Mercidem’avoirinvitée,répondis-jeenposantmonsacdontjesortismonécransolaire.—Attendsunpeuavantdemeremercier.Jenem’attendaispasàcequeThadsejoigneànous.Tuvas

peut-êtreregretterd’êtrevenue.J’espèrequ’ilvatelaissertranquille.Jesouris.Thadn’avaitpasdûlaisserbeaucoupdefemmestranquillesdanssavie.Jeretiraimatunique

etm’installaisurlaservietteroseetjaunemoelleusequeBethyavaitinstalléepourmoi.— Je neme suis encore jamais baignée dans l’océan, avouai-je en faisant pénétrer la lotion et en

observant les gens dans l’eau. J’avais peur qu’elle ne soit encore trop froide,mais elle a plutôt l’airbonne.Bethyémitunpetitrire.—Elleestgelée.Jen’ymetspasunorteilavantlami-mai.Maispleindegensaimentl’océanàcette

période.Situnel’asjamaisfait,tudevraisessayer.J’en avais envie.Cela faisait partie des choses que je voulais expérimenter. J’avais aussi envie de

fairedusurf,maisj’étaisàpeuprèssûrequ’ilfallaitdesvaguesplushautesqueça.—Vas-y,jeneteretienspas!m’incitaBethy.Jeluisourisetmeredressaipourparcourirlesquelquesmètresquimeséparaientdel’eau.Lepremierclapotisquirecouvritmespiedsétaitglacial.Jeréprimaiuncrienm’efforçantdenepas

reculer.Mesorteilss’enfoncèrentlentementdanslesablehumideet,auboutd’uneminute,l’eaun’étaitplussifroide.Jem’avançaijusqu’àcequel’eaum’arriveauxchevilles.—C’estplusfaciledesurmonterlechocinitialsituyvasenuneseulefois,lançaunevoixfamilière

derrièremoi.CommequoiWoodsserendaitàlaplagedetempsàautre.Jeluijetaiunœilpar-dessusmonépaule.

J’étaisbiencontented’êtreretranchéederrièremeslunettesdesoleil.—Tucroisça?demandai-je.Ilsetenaitsurlerivage,enshortdebainblanc,torsenu.Lecontrasteentresapeaumatebaignéeparle

soleilet le tissublanc luidonnait l’airencoreplusbronzé.Unvraiscandale–pour lesfemmesquisetrouvaientàlaplage.Iln’avaitpasledroitdesepromenercommeça.—C’estleseulmoyen.Situavancespetitàpetit,tun’yarriverasjamais.Pourquoi avait-il décidé de m’adresser la parole aujourd’hui ? Il m’ignorait depuis le soir où il

m’avaitannoncéqu’ilallaitsemarier.Pourquoimaintenant?Jedétournaimonregardsurl’eauenévitantdepenser à ses abdos luisant sous l’effetde l’huile solaire. Il était fiancé.Toutepenséecoquineétaitinterdite.—Tuveuxquejet’accompagne?demanda-t-il,savoixplusproche.Je tournaidenouveau la têted’unmouvement secet levis faireplusieurspasdansmadirection.À

quoijouait-il?—Cen’estsansdoutepasunetrèsbonneidée.Jepréfèreyallerseule,répliquai-jelagorgeserrée.—Tunet’esjamaisbaignéedansl’océan?interrogea-t-iltandisquesonbraseffleuraitmonépaule.Voilàqu’ilétaitbeaucouptropprès.—Non,murmurai-jeenpriantpourqu’ils’enailletrès,trèsloin.Woodseneutlesoufflecoupé.Jelevailesyeuxsurlui.Sonregardétaitposésurmoncorps.Malgré

seslunettesdesoleil,jepouvaisenressentirl’intensité.Mauvaisplan.Trèsmauvaisplan.—Sérieusement,bébé,qu’est-cequetuasfaitdurestedetonmaillotdebain?Lerestedemonmaillotdebain?Jebaissailesyeuxpourm’assurerquej’étaiscouverte.Qu’est-ce

queçavoulaitdire?Jen’avaisrienoublié!—Toutestlà,répliquai-je.Woodsbaissalatête,seslèvress’approchantdangereusementdemonoreille.—Cehauttecouvreàpeine,murmura-t-il.—Siçaneteplaîtpas,tun’asqu’àregarderailleurs,rétorquai-jeenluilançantunregardnoiravant

dem’enfoncerdansl’eau.Ilm’importaitplusdem’éloignerdeluiquedem’acclimateràlatempératuredel’océan.—Jen’aijamaisditquejen’aimaispas.J’adore.C’estbienleproblème.Jemefigeaisurplace.Çal’amusaitvraiment?—Tunepeuxpasmediredeschosescommeça.C’estinjuste,dis-jesuruntonfuribond.Woodss’approchadenouveau.J’attendis.Puisqu’ilvoulaitlaconfrontation,j’allaislaluioffrir.—Tuasraison,jenedevraispas.Tupréféreraisquejetemente?Jamaisjenet’aimenti,Della.Jene

veuxpastementir.Jepourraistefairecroirequejemefichedetoiouquejen’aipasenviedetoi,maisce serait unmensonge.Tu veux la vérité ?La vérité c’est que je pense sans arrêt à toi. J’évite de teregarderparceque jenepensequ’àunechose, tecoincerauclubdans lepremierdébarrasvenupourt’embrasserpartout,lâcha-t-illesoufflecourt,lamâchoireserrée.Pourquoi?S’ilavaitàcepointenviedemoi,pourquoiétait-ilfiancéàquelqu’und’autre?—Jenetecomprendspas,concédai-jeensecouantlatête,lesbrascroiséssurmapoitrinedansune

attitudedéfensive.Ileutunpetitsourireencoin.—Personnenemecomprend.Maisj’aimeraism’expliquer.Jet’enprie.Viensprendreunverreavec

moi.J’aibesoinquetucomprennes.Latactiqueétaitdifférente,maislefondn’avaitpaschangé.Ilvoulaits’amuseravecmoi.S’offrirdu

bon temps avant de se mettre avec une autre nana. Je n’étais pas comme ça. Je secouai la tête etcommençaiàsortirdel’eau.Jepréféraislasécuritédelaplage.—Tunemelaissesmêmepasm’expliquer?cria-t-ildansmonsillage.—Labagueàsondoigtestlaseuleexplicationdontj’aibesoin,répliquai-jeenfaisantvolte-face.

Woods

IlfallaitquejepasselescommandesqueJuan,lechefcuisinier,avaitposéessurmonbureaulaveille.J’avais des coupsde fil à donner et une fiancéedéterminée à ceque je choisisseunedatepour notremariage.Est-cequejem’occupaisdetoutça?Non.Àlaplace,jemetorturaisl’esprit.LehautdebikinideDellaétaitminusculeetThadétaitsurlepointdeperdrel’usagedesesmains.La

mâchoireserrée,jedétournailesyeuxduspectacledeThadentraind’appliquerdelacrèmesolairesurledosetlesépaulesdeDella.Thadavaitréussiàlafaireentrerdansl’eauaveclui.J’étaisrestéassisàobserverchaquesecondeinsoutenabledelascène.Seséclatsderireetlebesoinincessantqu’avaitThadde la toucheravaient faitbouillirmonsangde jalousie. Jen’avaispas ledroitd’être jaloux.Onavaitbaisé,unpointc’esttout.Jenesavaisriend’autreàsonsujet.Maisj’enavaisenvie.Jemedemandaisd’oùellevenait.DetouteévidenceduSud.Jevoulaissavoirsielleavaitdesfrères

et sœurs.Dequi tenait-ellecesyeuxbleusque j’avaisvussevoilerdeplaisir?Est-cequ’elleaimaitdanser?Oùavait-elleapprisàchanter?Ellem’avaitcomplètementbluffépendantlasoiréecaritative.Ilyavaittantdechosesquejenesauraisjamais.—Tesépaulesvirentaurouge.J’étaispersuadéque,vutapeau,tunecraignaispaslesoleil,observa

Thad.Malgré mes efforts, je n’arrivais pas à m’empêcher de regarder les épaules de Della. Thad avait

raison,ellesrougissaient.J’allaiaustanddelocation.—Donne-moiunparasol,lançai-jeaujeunegarsquej’avaisembauchéàpeinedeuxsemainesplustôt,

avantl’invasiondesvacanciers.—Oui,monsieur.Voulez-vousquejel’installedanslesablepourvous,monsieur?—Jem’enoccupe,merci.J’empoignaileparasol.MesyeuxsebraquèrentsurceuxdeDellatandisquejemeretournaisdanssa

direction.Ellemeregardaitaveccuriosité.Thadluimurmuraitdesmotsàl’oreillemaiselleneluiprêtaitpasattention.Elleétaitentièrementfocaliséesurmoi.— Pousse-toi, ordonnai-je à Thad, lui laissant à peine le temps de s’exécuter avant de planter le

parasolprofondémentdanslesablepouréviterqu’ilnes’envole.—L’ombren’irajamaisjusqu’àtoi,observaBethyavecunsourireencoin.—Cen’estpaspourmoi.—Oh, c’est pour moi ? Comme c’est gentil, mais je suis en plein bronzage, répliqua Bethy avec

malice.—Danscecas,bouge.C’estpourprotégerlesépaulesdeDella.Voilà,c’étaitdit.Bethym’avaitforcéàcracherlemorceau.Dellaenpenseraitcequ’ellevoulait.—Tuesallélechercherpourmoi?s’enquit-elled’unevoixsurprise.Jerelevailesyeuxunefoisleparasolsolidementancré.—Ouais,lâchai-jeenguisederéponseavantderamassermaserviette.Ilétaittempsdepartir.Ellenevoulaitpasdemoietjen’avaisrienàfaireici.—Merci,dit-elletandisquejem’éloignaisenhochantlatêtesansmeretourner.—Tut’envas?interrogeaJace.—J’aiduboulot.—N’oubliepasvendredisoirauSunClub,conclutBethyenlançantunsourireàJacequigloussad’un

petitrire.C’étaitl’anniversairedeJaceetBethyavaitdécidédemarquerlecoupparunenuitdefiestadansla

seuleboîtedelaville.Elleavaitprivatisél’endroitavecl’aidedeGrantquiconnaissaitlepropriétaire.Lasoiréeétaitsurinvitation.—Jenerateraisçapourrienaumonde,répondis-je.

Unenuit de karaoké passée à boire et danser n’était pas du goût d’Angelina.Mais j’avais faitmondevoirenl’invitant.Elleavaitaussitôtdéclinéeninvoquantl’excusequ’elledevaitserendreàNewYorkpouressayersarobedemariée.Çaprendraitplusieursjours,cequim’arrangeaitparfaitement.Bethys’était totalement lâchéesur ladéco.Desverresà shotcollés surunegrandeplancheenbois

dessinaient le nombre « vingt-quatre ».Unepetite diode éclairait chaqueverre et le résultat était trèssympa.J’échangeaiquelquesmotsavecdesinvitésenpassant.Maisc’estDellaquejecherchais.Jevoulaisessayerunenouvellefoisdeluiparler.LavoirrireetbavarderavecThadetGrantcomme

devieuxpotesme tuait. Jevoulaispartager ça,moi aussi. Je savaisqu’ellene sortait avecaucundesdeux,mais ils apprenaient à la connaître. Lorsque Grant m’avait dit qu’elle voulait s’initier au golf,j’avaisétéjalouxqu’ilsachequelquechosedepersonnelsurelle.Quelquechosequemoij’ignorais.—Tusais,Woods,unefoisfiancé,onestcensésepointeravecsapromiseauxsoirées,raillaBethyen

seplantantdevantmoiavecunshotdecequiressemblaitàduwhisky.—ElledevaitalleràNewYork,répliquai-jeenprenantleverre.—Hum,intéressant,lâchaBethyavantdes’enaller.J’éclusaileshotetleposaisurlebar.Dellasortitdestoilettesetjeprisuneminutepourmedélecter

desonminishortenjeanetdesapairedebottesquejeconnaissaisdéjà.Jesavaisexactementàquoielleressemblaitsansrienàpart lesbottes.Sonbustiernoirendentelledévoilait lapeaudesonventredèsqu’ellelevaitunpeulesbras.Cettenanasavaitcomments’habillerpourfairetournerlatêtedeshommes.—Arrêtedemater,mec.Tonsortestscellé,s’esclaffaGrantens’approchantdemoi.—Jenesuispasencoremarié,marmonnai-jeenlefusillantduregardavantdereposerlesyeuxsur

Della.—Non,maisçanevapastarder.SituavaisplusenviedeDellaquedupostedevice-président,tute

seraisdéjàdécidé.Tuasfaittonchoixetjeteconnaisdepuisassezlongtempspoursavoirquetuvast’ytenir.—C’estpluscompliquéqueça.Grantcroisalesbrassursapoitrineetmetoisa.—Allonsbon.Commentça?Jen’avaispasenviede luidévoilermessentimentspourDella.Çane le regardaitpas. Ilétaitbien

placépoursavoiràquelpointc’étaitdifficiledanscertainescirconstancesdedésirerquelqu’un.Ilavaitvécu lamême chose et s’y était brûlé les ailes. Seulement, il ne savait pas que j’étais au courant. Ilpensait que le secret était biengardé.Mais, avecNannette, un secret ne le restait pas longtemps.Sonancienne demi-sœur était le diable incarné. Mon histoire avec Della était différente mais tout aussiimpossible.—Tusaisàquelpointleschosespeuventêtrecompliquées,Grant.Jelesais,affirmai-jeàvoixbasse

pourqueluiseulpuissem’entendre.Grantplissalesyeux,l’airécœuré.—Quit’aracontéça?Personnenem’avaitriendit.Ças’étaitdéroulésousmesyeux.Ilnesepassaitpasgrand-chosedans

monclubsansquejefinisseparl’apprendre.—Personned’autrenelesait.Jel’aivu.

Grantavaitl’airdépité.—C’estfini.—Jem’endoutais.Personnenepeutsupporterderesterdanssonentouragetrèslongtemps.NousrestâmesensilenceàobserverDella.Sesyeuxfinirentparseposersurlesmiensetjedécidaide

melancer.Lemomentétaitvenudeluiparler.Et,cettefois,ellenem’enverraitpaspromener.

Della

Jen’auraispasdûledévisageraussilongtemps,maisjenepouvaispasl’ignorer.Dansunmomentdefaiblesse, j’avais croisé son regard dans lequel j’avais lu de la tristesse. Un regard qui cachait dessecrets.Jeconnaissaiscesentiment.Bêtement,j’avaiseuenviedeluivenirenaide.Heureusement,laraisonrepritledessuset,merendantcomptequ’ils’approchaitdemoi,jesusqu’il

fallaitquejem’enaille.Ilallaitencoreessayerdes’expliquer.Jenevoulaispasl’entendresejustifier.Cesoir,j’avaisenviedem’amuseravecdeparfaitsinconnus.Ilétaithorsdequestiondemetapirdanslenoirpouraffronterunnouvelaccèsdefolie.Auboutdedeuxpasàpeine,sagrandemainserefermasurmonbras.—Jet’enprie,Della,neparspas,jeveuxjusteparler.Encore cette tristesse. Elle transparaissait jusque dans sa voix. Quelque chose le faisait souffrir.

J’avaissouffertpendanttellementlongtemps.Jen’avaisaucunmalàidentifierladouleurchezlesautres.Ellem’attiraitd’unemanièreétrangeetperverse.—Qu’est-cequetuveux,Woods?demandai-jesansleregarder.—Parler.Simplementparler.Trèsbien.Parlons, siçapouvait l’aideràclorecechapitreet fairedisparaître la tristessedansson

regardquimehantait.—O.K.Maisonparleici,insistai-je,voulantàtoutprixéviterdemeretrouverseuleaveclui.—Pasdeproblème.Jemeretournaienfinverslui.Ilétaitvraimentbeau.J’avaistendanceàl’oublier.Maisdeprès,quand

il était entièrement concentré surmoi, c’était plus difficile d’y rester insensible. J’avais vu ses yeuxbrillerdepassion.Jeconnaissaislegoûtdesaboucheetsescrisdeplaisir.C’étaitdupassé,maiscessouvenirsétaientinoubliables.—Allonsnousasseoir,proposa-t-ilenme tirantdoucementpar lebrasversune tablevidedansun

coindelasalle.Jem’assisenfacedelui,protégéeparlapetitetablequinousséparait.Ilavaitquelquechoseàdire,et

plusviteceseraitfait,plusvitejepourraismettredeladistanceentrenous.—Tuvoulaismeparlerdequoi?Woodsfitglissersonpoucesursalèvreinférieured’unairpensif.Jedétournaileregard;jenevoulais

pasmeremémorersabouche.—Del’autrenuit.J’aivouluêtrehonnêteenverstoi,maisj’aitoutfoiré.Jen’auraispasdûtelaisser

partirsanst’expliquertoutel’histoire.Enprenantplace faceà lui, je savaisqu’on reviendrait sur cet épisode.Çane le rendaitpasmoins

douloureux.J’avaisététellementfranche.Lui,non.—Si tuavaisétéhonnête, tun’auraispascouchéavecmoiavantdemedireque tu t’apprêtaisà te

fiancer.Jenesavaismêmepasquetuétaisdansunerelation.Sérieuse,enplus!Tuétaisdéjàavecellequand…lapremièrenuit…quandons’estrencontrés?—Non.Ce n’est pas une vraie relation,Della.Ce n’est pas ce que tu crois.C’est une transaction

commerciale.L’entreprisedesonpèrefusionneaveccelledemonpère.Nousnesommespasdansunerelationexclusive…Enfinonnel’étaitpasjusqu’àcequejelademandeenmariage.Unetransactioncommerciale?Qu’est-cequeçavoulaitdire?—Jenecomprendspas.

Woodsémitunpetitrireamer.—C’estnormal,c’esttellementfoireux.Mongrand-pèreafondéleKerringtonClub.Ilarencontréun

succèscertain,maisn’ajamaisjouédanslacourdesgrands.L’associationdunomdeGreystoneàceluideKerringtonouvriraitdenouvellesportesàmonpère…etàmoiaussi.Greystone?J’avaisdéjàentenducenom,maisoù?—TafiancéeestuneGreystone?—Oui,elleestlaseulehéritièredunom.Nospèresyvoientuneformulegagnantepourtoutlemonde.

Unjour,jeseraiàlatêtedesKerringtonetdel’empiredesGreystone.Donclesgenssemariaientvraimentpourdesraisonsaussisuperficiellesqueça.Est-cepourcelaqu’il

avaitl’airtriste?—Çaterendheureux?demandai-jeenscrutantsonvisage.—Non.Maiselleaussiveutcetarrangement.Leregretgravédanssestraitsmeserralecœur.Jen’étaispascontentequ’ilaitcouchéavecmoisans

meparlerdetoutça,maisjenevoulaispasqu’ilaitl’airàtelpointatterré.Aprèstout,onn’avaitqu’unevie. J’étais bien placée pour le savoir. Enfermée à double tour, j’avais perdu une bonne partie de lamienne. Il s’apprêtait àperdre le restede la sienned’une façon toutà fait semblable.Soncœurseraitferméàdoubletour.Ignoré.—C’estcequetuveux?Il ne répondit pas immédiatement mais me dévisagea avec intensité. Mon cœur se mit à battre la

chamade,commetoujoursenprésencedeWoods.Rienàfaire,jeneparvenaisjamaisàmecontrôler.—Oui et non. Je veux ce qu’onme faitmiroiter depuis que je suis petit. Je veux la place quime

revientdansl’entreprisefamiliale.J’aitravaillédur.Mais…jeneveuxpasd’Angelina.Sonexpressionendisaitplusquetouslesdiscours.Jebaissailesyeuxversmesmainsposéessurmes

genoux.Ilfallaitquejeprenneunedécision.JepouvaiscontinueràrepousserWoods,oujepouvaisluipardonner. Je pouvais être son amie. Rien de plus. Il m’avait donné un travail quand j’étais dans lebesoin. J’allais bientôt repartir. En attendant, pourquoi ne pas partager des moments avecWoods ettrouver lebonheurdelaviecôteàcôte?Vivredenouvellesexpériences.Pour lui,underniergoûtdeliberté;pourmoi,lepremier.Jerelevailesyeux.Ilattendaitquelquechosedemoi.—Est-cequ’onpeutêtreamis?Mêmeaprèstoutcequis’estpassé?Onpourrait toutreprendrede

zéro,suggérai-je.Lesmusclesdesoncousecontractèrentetildéglutit.Jemedemandaisijen’avaispasmalinterprété

sonattitude.Peut-êtrevoulait-ilpurementetsimplementmettreunpointfinalàl’histoire.Maissonregardsous-entendaitautrechose.—Çameferaitplaisir,répondit-il.Jesourisetluitendislamain.—Bonjour,jem’appelleDellaSloane.UnsourireencoinilluminalevisageparfaitdeWoodsquiglissasamaindanslamienne.—WoodsKerrington.Ravideterencontrer,Della.Soncontactchaleureuxmefitfrissonneretjeretiraimamainavantdemerelever.—Jevaisprendreunverre.Réserve-moiunedansecesoir.—Absolument,conclut-ilenhochantlatête.

Bethymerejoignitaubar.J’avaisprévudesoufflerungrandcoupaprèsm’êtresuffisammentéloignéedeWoodspourréfléchiràlasituation.Aulieudequoi,jeluisouriscommesiderienn’était.— Je peux te demander à quoi rime cette poignée demain ? interrogeaBethy en s’asseyant sur le

tabouretàcôtédemoipourcommanderdeuxshotsdetequila.

—Onreprenddezéro.Cettefois,jesaisqu’ilestfiancéetnousallonsêtreamis.(Bethyopinaduchefmaisjepouvaislirelescepticismedanssonregard.)C’estvrai!Riendeplus.Lebarmanfitglisserlesdeuxverresjusqu’ànous.—Jeveuxbiencroirequetuessincère.MaisWoodsneveutpasd’Angelina.J’aidebonnesraisons

depenserqu’ilneparviendrapasàresterpurementamiavectoi.MêmeBethy savait qu’il ne voulait pas épouserAngelina. Je ne comprenais pas.Qu’est-ce qu’il y

avaitdesimalàcetteunion?—Ildonnel’impressiondesacrifiersonbonheurpourl’argentetlegain.Àmonavis,çavamalfinir.

(Bethyrejeta la têteenarrièrepourboiresonshotetessuyadupouceunegoutted’alcoolsursa lèvreinférieure.)Çavaêtreundésastre.Ilseramalheureux.Maisilestpersuadéquec’estcequ’ilveutdanslavie. Personne ne parvient à lui faire changer d’avis. Dans leur monde d’argent et de pouvoir, ilsfonctionnentcommeça.C’estpourçaqueTrippaprissesjambesàsoncou.Ilnevoulaitpasjouerlejeu.Tripp?Luiaussiavaitdûaffronterunultimatum?Maisilétaitparti.Ilavaitprislatangente.Iln’avait

passacrifiésonbonheur.Ilavaitfaitlechoixdevivresansêtreemprisonnédansunecage.Àétouffer.Jedétestaisl’idéequeWoodssoitprisonnier.—Jesuisdepassage.Pendantmonséjourici,jepensequ’onpeutêtreamis.Jel’apprécie.Jesouhaite

mieux le connaître. Plus tard, quand je repenserai à lui, je ne veux pas que son souvenir m’évoqueuniquementlesexe.L’hommem’intéresse.C’estsimalqueça?—Non, réponditBethyenme tendantma tequila.Pasdu tout.Allez,cul sec. Il fautquelqu’unpour

lancerlekaraokéet,ploufplouf,c’esttoi.—Ohnon.Pasmoi!—Si,toi,insistaBethy.J’aientenduparlerdetontalent.Àmontourd’écouter.Allez,fais-lepourmoi.

S’ilteplaît.Jem’emparaidushotetengloutisl’alcoolacidulé.

Woods

GrantpritlaplacedeDellaaprèssondépart.—J’enconclusquevousavezfaitamendehonorable,observa-t-ilenposantsabièresurlatable.—Onestamis,répliquai-je,incertaindelamarcheàsuivre,maisbiendécidéàyparvenir.—Amis,répétaGrantenhochantlatêted’unairentendu.Ehbienjetesouhaitebonnechance.Son commentaire me gonflait, mais il avait raison. J’allais avoir besoin de chance. Garder la tête

froideenprésencedeDellan’allaitpasêtreuneminceaffaire.—Merci.—Tuasl’airdetrouverçaaussiimprobablequemoi,lâchaGrantengloussant.J’allaisluirépondrelorsqueBethymontasurscène.—Lemoment estvenupourunpetit karaoké.Maintenantquevousavez tousbuà l’œil, vousallez

payer en chansons.Maispasd’inquiétude. Il vous resteunpeude tempspourboire suffisamment afind’avoirlecouragedevouslancer.Dellaaacceptédepasserenpremiervuqu’ellen’apasbesoind’êtresaoulepourdéchirer.Della regardaitBethypar endessous commesi elle avait voulu seplanquer sousune table. J’avais

envied’allerlasauver,maispasdelààchanter.Jamaisjenem’enremettrais.—Jem’enoccupe,ditGrantenselevantd’unbond.Ils’avançad’unpasnonchalantjusqu’àDellaetluisoufflaunmotquiluivalutunlargesourire.Quel

connard.Àquoijouait-il?Dellaglissasamaindanslasienneetilsmontèrentsurscèneensemble.Ilallaitchanteravecelle.Il

n’avaitpaschantéenpublicdepuislelycée.Dellaavaitl’airsoulagéedenepasseretrouverseule.LesparolesdePicturedeSherylCrowetKidRocks’affichèrentàl’écran.IlavaitchoisiKid.Riende

surprenant:ilavaittoujoursétéfan.Lamélodie commença à se déverser des haut-parleurs.Grant l’accompagna et jeme laissai aller à

regarder Della. Elle était impressionnée par sa voix. Comme la plupart des gens. Jusqu’à ce qu’ilsécoutentRushFinlay.RushetGrantavaientétédemi-frères l’espacedequelquescourtesannées.Maiscelaavait suffiàcréerun lien fortentreeux.Jen’avais jamaiscomprispourquoiRushavaitarrêtédechanter, alors qu’il attirait les filles à des kilomètres à la ronde quand il était plus jeune. Peut-êtrevoulait-ilsedistinguerdesonpèreetévitertoutecomparaisonaveclui.LepèredeRushétaitlecélèbrebatteurdesSlackerDemon.Grant,quantàlui,n’avaitjamaishésitéàutilisersestalentsvocauxpouraguicherlesnanas.Dellaentamasapartieet la salle fit silence.Elleétait incroyable. J’avaisété totalementblufféà la

soirée caritative desDelamar. Cela faisait partie des choses quim’intriguaient chez elle. Elle devaitchanterdepuisunsacréboutdetemps.—Tusaisquoi?Jevaistentermachanceavecelle.Toi,mongars,tuesfiancé.Tupeuxtefoutreen

pétardautantquetuveux,jetenteraiquandmêmemachance.Elleesttropcanonetçavautcarrémentlaprisedetête,m’informaThad.Je le fusillai du regard ; il s’assit en face demoi et haussa les épaules avant de se tourner vers la

scène.Elleétaittropmalignepours’embarqueravecThad.Cen’étaitpassongenre.—SaufsielleterminedanslepieudeGrantcesoir.Ilm’al’airchaud,observai-je.

Àlafindelachanson,GrantpritDelladanssesbras.Jeserrailespoings.Qu’est-cequ’ilfoutait?—Monpote,tuesfiancé,nel’oubliepas,répliquaThadenselevant.LesmainsdeDella reposaient confortablement sur lesbrasdeGrantdepuisunpeu trop longtemps.

Lorsqu’ellequittaGrantdesyeux,sonregardseposasurmoi.Aussitôt,elleretirasesmainsetfitunpasenarrièreenlegratifiantd’underniersourire.Aprèsquoielletournalestalonsetsortitdescène.Jelaregardaisefaufileràtraverslepublic.Ellesedirigeaitverslecouloirquimenaitauxtoilettes.

Sansréfléchir,jemelevaietlasuivis.J’attendisdevantlestoilettesoùelles’étaitdéjàengouffrée.Jenesavaispastropcequej’allaisfaire.

Nousavions tout juste convenudedevenir amis ; laprendrecontre lemurdansunecabinede toiletten’étaitpasunetrèsbonneidée.J’étaissûrqu’ellen’enavaitplusenvie.Cettepenséemebrûlalagorgecommeunecouléed’acide.Jel’avaispossédée.J’auraispulaposséderdavantage.Lesyeuxfixéssurlaporte,jerenonçaiàallerplusloin.Encoreuneerreur.Jen’avaisrienàfaireici.

JevoulaisfairelaconnaissancedeDellaetcen’étaitpascommeçaquej’yparviendrais.Sijetentaisquoiquecesoit,ellemerepousserait.Jerebroussaichemindanslecouloir,loindetoutetentation.—Woods?LavoixdeDellamecoupadansmonélan. Jenepouvaispasy retourneret lui jetaiun regardpar-

dessusmonépaule.—Salut.Tut’essuperbiendébrouilléesurscène.SherylCrow,c’estpasfacile.—Merci,répondit-elleenrougissant.Jemesuisbienamusée.QuandBethym’ademandédechanter,

j’étaistendue,maisjesuiscontentedel’avoirfait.—Moiaussi,jesuiscontentquetul’aiesfait.Elles’approchademoi.—Etsions’offraitcettedanse?J’enavaisenvie.Jevoulaisd’untelsouvenir.D’unetelleexpérience.Jeluitendislamain.Elleyposa

samain toute fineetmapoitrine se serra.Cette sensationd’oppression s’accentua lorsque je refermaimesdoigtssurlessienspourl’accompagnerverslapistededanse.Je sentisdes regardspeser surmoi,maisdans l’immédiat jem’en foutais royalement. Ils pouvaient

jugerautantqu’ilslevoulaient.C’estcequejedésiraiset,tantquejen’auraispasdit«oui»auprêtre,j’allaisconsacrerchaqueinstantàmieuxconnaîtreDella.Sansquoi je leregretterais lerestantdemesjours.Jimmy,aumicro,avait entonnéWanted deHunterHayes.Le tempo lentmeconvenaitparfaitement ;

j’allaispouvoirlaserrercontremoi.Dellafitglissersesmainsenhautdemesbras.Ellenelescroisapasderrièremanuque.—Tusensbon,murmura-t-elle,tellementbasquejefaillisnepasentendre.— Pas autant que toi, crois-moi, répondis-je. (Elle se tendit lorsque mes mains resserrèrent leur

emprisesursataille.)C’estvrai,Della.Jet’aidéjàditquetusentaisdivinementbon.Netecrispepasalorsquejetedislavérité.Ellesedétenditunpeu.—D’accord, tu as raison. Il n’y a aucunmal à dire que ses amis sentent bon, observa-t-elle d’une

adorablevoixtaquine.—Commeonestamis,iln’yapasdeloit’interdisantdecroiserlesmainsderrièremanuque?Dellas’immobilisauninstant,puisremontasesmainssurmesépaules.—Jenesuispasassezgrandepourallerplusloin.Mêmeavecmesbottes.—C’estbiencommeça,larassurai-jeenl’attirantcontremoi.D’oùviens-tu,DellaSloane?—Tupourraisfacilementjeterunœilauformulairequetum’asfaitremplir,répondit-elleenriant.—Jeveuxl’entendredetabouche.Jeneveuxpasledécouvrirdanstondossier.

Dellainclinalatêtesurlecôtéetm’étudiaunmoment.—Macon,enGéorgie.J’auraisditAlabamaouGéorgie.Sonaccentétaitmarqué.—Tuasdesfrèresetsœurs?Uneexpressionmélancoliquesepeignitsursonvisageetellesecoualatête.—Non.Cesimple«non»semblaitendireplus.Ellemecachaitquelquechose.—Tunemedonnespasl’impressiond’êtrefilleunique.Tondésirinsouciantdeparcourirlemonde

ressembleplusàcequeferaitlapetitedernièredelafamille.Dellaeutunsourireénigmatique.Connaîtrais-jejamaissessecrets?—Jesuis très loind’être insouciante.Mais j’aimeraisbien.J’espèrepouvoir l’êtreunjour.Pourle

moment,j’essaiedemetrouver.Tusaiscequetuveuxdanslavie.Moinon.Jen’enaipaslamoindreidée.Savais-jevraimentcequejevoulaisdanslavie?Est-cequetoutçan’avaitpaschangé?—Jen’aipasautantdecertitudesquetulepenses.—Vraiment?interrogea-t-elleavecunpetitsourireencoin.J’avaisuneenvieirrésistibled’embrassersesfineslèvressensuelles.—Quelleesttadated’anniversaire?demandai-jeaulieuderépondreàsaremarque.Dellapoussaunsoupiretdétournaleregard.—Le6avril.Etletien?—Le10décembre.Tacouleurpréférée?—Bleu,répondit-elleenriant.Bleuclair.Ettoi?—Ilyaunmois,j’auraisditrouge.Maismaintenantj’aimebienlebleu,moiaussi.—Pourquoi?Ellehaussaunsourcilet leva lesyeuxsurmoi.Jen’allaispas luiavouerquec’étaitàcausedeses

yeuxbleus.Elleallaitencoresecrisper.—Seulslesimbécilesnechangentpasd’avis.(J’embrayaiprestosansluilaisserletempsderéfléchir

:)Comments’appelaittamaîtressedeCP?Dellas’immobilisapuissemitàreculer.Sesyeuxavaientuneteintevitreuse.J’avaisditquelquechose

qu’ilnefallaitpas?Avait-ellecomprispourquoij’avaischoisilebleucommecouleurpréférée?—Ilmefautunverre,bafouilla-t-elleavecunsourirenerveuxavantdepartirprécipitamment.Commentavais-jepulaperturberenl’interrogeantsursoninstitutrice?Sesyeuxcachaientunehistoire

sombrequejecraignaisdenejamaisdécouvrir.

Della

Laquestionétaitsimple.C’étaitmêmemignonqu’ils’intéresseàça.Est-cequequelqu’uns’étaitdéjàpenché sur des choses aussi triviales me concernant ? On ne m’avait jamais posé de questionspersonnellesaussiinnocentes.Quandilm’avaitinterrogéesurmoninstitutrice,laseuleimagequim’étaitvenueétaitcelledemamère.

Assieds-toi ici, Della. Ne regarde pas par la fenêtre. Il faut que tu fasses tes devoirs. Pour êtreintelligente, il faut que tu lises Shakespeare. Il te rappellera à quel point le monde peut êtredangereux.Jesecouailatêtepouréchapperauxsouvenirs.Çanepeutpasm’arrivermaintenant.Pasici.Ilfaitnuitdehors,Della.Toutessortesdedangersrôdentlanuit.Fermelesportesetlesfenêtreset

restebienàl’abridanstonlit.Situtelèves,lemonstresoustonlitvat’entendre.Non,maman.Va-t’en.Della, ne sors pas une fois encore ce soir. Lemal t’attend dehors.Reste avecmoi. Ton frère est

inquietpourtoi.Ilneveutpasquetusouffres.Resteàl’abridanstonlit.—Della,çanevapas?Des bras puissantsme retenaient. Jeme laissai aller. Il fallait la fuir.Oublier cette nuit-là. Si elle

restaittroplongtempsdansmatête,jen’yparviendraisjamais.—Jelatiens.Poussez-vous.La voix deWoodsme réconforta. Ilme libérait demes souvenirs. Ils n’allaient pasm’emprisonner

cettefois-ci.L’airfraiscaressamonvisageetjemerendiscomptequ’onmeportait.Jeprisuneprofondeinspiration

etlatensiondansmapoitrines’envola.Woodsm’avaitsortiedelà.Ilnem’avaitpasabandonnéeàmessouvenirs.Jeclignaidesyeuxàplusieursreprisesetrecouvrailentementlavue.L’obscuritéavaitdisparu.Woodss’assitsurunbanclelongdelapromenadeetmemaintintfermementinstalléesursesgenoux.—Tureviensàtoi,dit-ilsimplement.Jehochailatête.Jenesavaispastropquoidire.Jenevoulaispasluiexpliquercequivenaitdese

passer.—Bien,ajouta-t-ilenécartantlesmèchesquitombaientsurmonvisagedesamainlibre,tandisquede

l’autreilmetenaitserréecontresontorse.—Merci.Leslèvrespincées,Woodssemblaitpréoccupé.Jeluiavaisfaitpeur.Jefisminedemerelevermaisil

resserrasonétreinte.—Tun’irasnullepartavantd’avoirréponduàunequestion.Monventresenoua.Jen’aijamaisrienditàpersonne,àpartBraden,etelleconnaissaitl’histoire.Je

nepouvaispaslaraconteràWoods.—Tun’espasobligéedemedirecequis’estpassé.Maisest-cequeçaseproduitsouvent?Laquestionétaitvicieuse.Si je luidisais lavérité sans luidévoilermonpassé, il allait croireque

j’étais folle.C’était peut-être le cas.Personnene savait trop.Elle était folle. Je l’étais peut-être,moiaussi.C’étaitmaplusgrandeangoisse:qu’unjour,moiaussi, jecraque.Commeçaluiétaitarrivé.Jevoulaisprofiterdelavie,parcequesicejourseprésentait,jevoulaisavoirvécuavant.— C’est déclenché par certaines choses, expliquai-je en essayant à nouveau de m’extirper de son

étreinte.Cette fois-ci, ilme laissapartir. Je luien fus reconnaissante,mêmesi j’auraispréféréqu’ilbataille

pourmegarderpluslongtemps.Aprèscetyped’incident,j’avaisbesoind’affectionpourrécupérerplusvite.—C’estmoiquil’aidéclenché?Jehaussai lesépaulesetdétournaimonregardvers leGolfe.Saquestionavaitprovoqué l’épisode.

Maisjenepouvaispasluidireça.Nousrestâmesassisensilencependantquelquesminutes.Jesavaisqu’ilpassaitenrevuetoutessortes

d’éventualités,toutesàcôtédelaplaque.—J’aienviedeteconnaître,Della.Jenevaispasm’interdiredeteposerdesquestions.Laprochaine

fois,peut-êtrequetupeuxmeposerdesquestionsquejepourraiteretourner.Commeçajeneferaipasdefaux-pas.Ilvoulaitapprendreàmeconnaître.Mapoitrineétaitsurlepointd’exploser.Jesentislepicotement

deslarmesmonteretclignaidesyeuxpourlesravaler.Jen’allaispasmemettreàpleurerdevantlui.—D’accord,concédai-jed’unevoixrauque.Woodsposaunemainsurlamienneetlaserrafermement,sansmeregarder.Ilfixaitlesvaguesquise

brisaient sur le rivage. Lorsque ses doigts s’entrelacèrent avec les miens, je les laissai faire. Lasimplicité de ce contact était tout ce dont j’avais besoin. Rester ainsi avec lui m’aidait à repousserl’obscurité.Ladouleuretlechagrins’estompaient.J’allaisbien.Jemesentaisbien.—Woods?Commentva-t-elle?LavoixdeBethynousfitnousretourner;ellevenaitdesortirduclubetmarchaitdansnotredirection.—Ellepensequetuastropbu,m’expliquaWoodsàvoixbasse.Jen’avaispasenvisagécequelesautrespouvaientpenserdecetincident.—Toutvabien,luilançai-jetandisqu’ellearrivaitànotrehauteur.—Oh,Dieumerci. J’étaispersuadéede t’avoir renduemaladeavec touscesshots. Ilspeuventêtre

fatalssionn’apasl’habitude.— Elle a eu un coup de chaud. Mélangé à l’alcool. L’air frais l’a aidée à reprendre ses esprits,

expliquaWoodsàmaplace.LesoulagementselisaitsurlevisagedeBethy.—Merci,Woods.Jepeuxresteravecellesituveuxretourneràl’intérieur.LamaindeWoodsseresserrasurlamienne.—Non,jesuisbiendehors.J’avaisbesoindefaireunepause,moiaussi.Bethyeutl’airpréoccupéemaisfinitparhocherlatêteetregagnerlebâtiment.Aprèssondépart,jelevailesyeuxsurWoods.Ilmeregardait.—Mercipourtonaide,cesoir.Situn’étaispasintervenu,çaauraitpudevenirproblématique.—Jesuiscontentd’avoirétélà.Cequim’inquiète,c’estquetuvoyagestouteseule.Qu’est-cequise

passequandtuesseuleetque…etqueçaseproduit?Quit’aide?Personne.Jemedébrouillais.—J’arrivenormalementàm’isoleravantqueçametombedessusetjegère.Woodsrapprochamamaincontreluiet,aulieuderépondreoudemecontredire,retournasonattention

surleseauxsombres.

Woods

—IlfautqueturetournesàlasoiréedeJace.Jevaisrentreràl’appartement.Jesuisfatiguée.LavoixdoucedeDellafitirruptiondansmespensées.Je voulais la garder près demoi pour pouvoir veiller sur elle. Tout en sachant que ça n’était pas

envisageable.—Jetedépose.Grantetmoi,onramèneratavoitureenbasdecheztoiunpeuplustard.Horsdequestionqu’elleconduiseseulecesoir.Pourmapropresérénité,jepréféraislaraccompagner.—Cen’estpaslapeine.Jevaisbien.Vraiment,protesta-t-elleenlâchantmamainpourserelever.Ellesesentaitpeut-êtremieux,maismoipas.—Jetedépose,répétai-jeenmerelevantpourlasurplomberdetoutemahauteur.Jet’enprie.Sinonje

vaism’inquiétertoutelanuit.Seslèvresrosesesquissèrentunsourireetellehochalatête.—D’accord.Merci.Je posai mamain sur le creux de ses reins. J’avais besoin de la toucher. Le contact me rappelait

qu’elle allait bien. Je l’accompagnai jusqu’à mon pick-up et l’aidai à s’installer côté passager. Ausouvenirdeladernièrefoisoùelleavaitétédansl’habitacle,j’eusplusquejamaisenviedelaprotéger.Ellen’étaitpasmienneetneleseraitjamais,maisçanechangeaitenrienmonémotion.J’étaisdevenu

possessifàsonégard.Jevoulaisqu’ellesoitensécuritéetheureuse.Cesoir,j’avaiseulatrouilledemavie.Quelque chosene tournait pas rond chezDella. Impossibled’ignorermondésir de la rabibocher.Qu’avait-ilbienpu luiarriverpourqu’ellese repliecommeça?Elleétait restéeamorphe.Commesielleavaitquittésoncorps.Unefoisauvolant,jem’assuraiqu’elleavaitattachésaceinture.Jen’étaispasprèsd’oublierl’étrange

épisodedelasoirée.Jenevoyaispastropcommentj’étaiscenséenchaîneraprèsça.—Mercipourtonaide.J’espèrequejenet’aipastropfaitflipper.Ilfallaitquejerépondequelquechose,maisquoi?Pasdeproblème,tumefaiscomplètementpéterles

plombs?Jenepouvaispasluibalancerça,maisjedevaisdirequelquechose.—Jeseraitoujourslàpourtoi,maisjenevaispastementir.Aprèscettesoirée,jesuisinquiet.Jene

peuxpastelaissertouteseule.Jeveuxteramenerchezmoipourm’occuperdetoi.Jeluilançaiunregardencoinavantdefixerdenouveaularoute.Ellemordillaitsalèvreinférieure

d’unairanxieux.Elleneparlapastoutdesuite.J’attendaisqu’elledisequelquechose.N’importequoi.Mais elle resta silencieuse. J’essayai de ne pas y penser. En vain. Je ne parviendrais jamais à sortirl’imagedesonvisagedemonesprit.— Il faut que j’apprenne à vivre seule. Àme débrouiller sans aide. C’est pour ça que je fais ce

voyage.Pourmedécouvriretconstruiremavie…Elleneterminapassaphrase.Quiluiavaitditqu’elledevaittrouverlemoyendegérerçatouteseule?

Qu’est-cequiluiétaitarrivé?Jetendislamainetagrippailasienne.—Tum’appelles.Quandtuveux.Situasbesoindequelqu’un,appelle-moi.Ellehochalatêteetmeserralamain.—Merci.Jemegaraidevant l’appartementdeTrippen regrettantdenepas avoir empruntéun itinéraireplus

long.Dellaretirasamainetouvritlaportière.

— J’ai bien aimé danser avec toi, ajouta-t-elle avant de sortir du pick-up et de refermer la portederrièreelle.J’attendisqu’ellesoitbienàl’abriàl’intérieuravantderedémarrer.

Mamèrem’avaitdéjàappelétroisfoisaucoursdelamatinée.J’avaispromisdelesrejoindreàleurmaisonduborddemerpourledéjeunerdominicalaveclesGreystoneetapparemmentellenemefaisaitpasconfiancepourêtreaurendez-vous.Lorsquemontéléphoneseremitàsonnerdansmapoche,j’avaisl’intentiondel’ignorer.J’étaisenroute,bordel.Ilfallaitvraimentqu’ellemelâche.Mais l’idée que l’appel puisse venir deDellame força à extirpermon téléphone. Le nom de Jace

illuminaitl’écran.—Salut,Jace.—Tuesoù?—Enrouteverschezmesparentspourledéjeuner.Pourquoi?—J’aifaituncrochetpartonbureauettun’yétaispas.Jemesuisditquetujouaispeut-êtreaugolf.—Non.Pasaujourd’hui.Jaceseraclalagorgeet jesusqu’ilvoulaitajouterautrechose.Ilnem’appelaitpaspourparlerde

golf.—Euh…JeviensdeparleràTripp.Ilétaitentrainderentrer.Àcaused’elle,jepense.Par«elle»,ilvoulaitdireDella.Merde.—O.K.,répliquai-je,nesachanttropcequ’ilattendaitdemoi.—Ilscrècheronttouslesdeuxchezlui.Jen’yavaispaspensé.DellapartageantunappartementavecTripp.Benvoyons!—Çanemeplaîtpasdesmasses,déclarai-je,lamâchoireserrée.Jacepoussaunprofondsoupir.—Arrête,sérieusement.Tuesfiancé.Tunepeuxpasl’avoir.SiTrippaenviedetenterlecoup,tusais

trèsbienqu’ilprendrasoind’elle.Alorsbaslespattesetlaisse-luisachance.Çapourraitluidonneruneraisonderevenir.LavisionducorpsparfaitdeDellaétendunusurunlitàl’attentiondeTrippmedonnaitenviedele

flanquercontreunmur.Elleétaitàmoi.Pourtantc’étaitfaux,nomdeDieu!— Il faut que j’y aille, grommelai-je avant de raccrocher et de balancer mon téléphone contre la

portièreenpoussantungrondementfrustré.

Della

Le dimanche, le service était impitoyable. Moi qui étais persuadée que, en dehors de Macon, enGéorgie,personneneseprécipitaitàl’églisecejour-là,j’avaistoutfaux.C’étaitunecoutumedanstoutleSud.Àprécisément12h05,lesportess’ouvraientetlestablesétaientprisesd’assauttandisqu’unefiled’attentesedéployaitàlaporte.Jem’étaisdemandépourquoijusque-làonnem’avaitjamaisconfiéleservicedudimanchemidi.Ceci

expliquaitcela.C’étaituneaffairedeproexclusivement.Jem’adossaiaumurdelacuisineetrepoussailesmèchesquitombaientsurmonvisage.Nousavionssurvécu.Ladernièretableétaitentraindefiniretdepayerl’addition.—Leseulavantagedudimanche,c’estlepourboire.Chaquesemaine,jejuremesgrandsdieuxqueje

vaisdémissionneràlafindelajournée.Etpuisjecomptemonpognon,plaisantaJimmyenmegratifiantd’unclind’œilavantdesortirunrouleaudebilletsdesapoche.—C’étaitlafolie.—Ouais, poursuivit Jimmyen rigolant.Labonnenouvelle, c’est que c’est terminé.Tupeux rentrer

cheztoi.Chezmoi.L’appartementdeTrippn’étaitpasmonchez-moi.Et,aujourd’hui,jen’étaisplusaussisûre

d’yrester.Jepriaipourquemespourboiressoientvraimentélevés,parcequej’allaispeut-êtredevoirbouclermonsacetmeremettreenroute.Trippm’avaitappeléelaveilleausoirpourm’informerqu’ilallaitpasserchezlui.Jenesavaispassicelasignifiaitmondépartimmédiat.Ousionallaitpartagerleslieux.J’avais eu plusieurs cauchemars etm’étais réveillée en hurlant.L’idée d’une colocation avecTripp

n’étaitpasidéale.MaiscelledequitterRosemaryn’étaitpasbeaucoupplusréjouissante.Jemeplaisaisbienici.J’aimaisbienBethyetJimmyetpuis…Woods.—Poulette, arrête de froncer les sourcils.C’est l’heure de la récré,me rappela Jimmyd’une voix

taquineenpassantdevantmoipourjetersontablierdanslepanierdelingesale.Jemeforçaiàsourire.—Jecroisquej’aibesoind’unebonnesieste,répliquai-jeenretirantmontablier.Maisjen’iraispasmereposer.IlyavaitdeforteschancespourqueTrippsoitlààmonretour.Ouun

peuplustard.—J’aiunrencarddément.Pasletempsdepioncer.Àdemainmatin,lançaJimmyenquittantlacuisine.Jelesuivis.Unefoisàl’extérieurducountryclub,jedéfislanattedemescheveux.Ellemedonnait

malàlatête.Jen’avaispasl’habituded’avoirlescheveuxtirésenarrière.Lebruitd’uneportièreattiramonattention.Enmeretournant,jedécouvrirlepick-updeWoodsgaré

surl’emplacementquiluiétaitréservé.Safiancéefaisaitletourduvéhiculed’unairindigné,leregardfuribond.—Unrepas,Woods,sérieusement?Tunepeuxpasêtreaimableletempsd’unsimplerepas?Merde,

c’estquoitonproblème?Est-cequejesuisabjecteàtelpointquetunepuissesmêmepasêtrecourtoisavecmoidevanttesparents?Savoixforteetsuraiguëportaitdans tout leparking.Lasituationnemeregardaitpas :mieuxvalait

m’enaller.Maisj’enétaisincapable.MesyeuxétaientrivéssurWoods.Ilsortaitdesonpick-up,l’airagacé.—Tuaseucequetuvoulais.Toi,tonpèreetlemien,vousavezgagné.Jemesuisinclinéetj’aidonné

monaccord.Maisjen’enaipasenvie.Jen’enauraijamaisenvie.LavoixdeWoodsétaitpresquetropfaiblepourquejelaperçoive.—C’estvrai?Ehbienpersonnenet’oblige.Parcequemêmesij’aienviequeçamarcheentrenouset

quejesouhaiteunmariquisoitunpluspourlenomdesGreystone,jeneveuxpasvivreavecunhommequimedéteste.Jeméritemieuxqueça.Jesuisuneperlerare,WoodsKerrington.Jen’aipasbesoindetoi.Soncorpstremblaitdecolère.J’étaisdésoléepourelle.Elleavaitraison.Aucunefemmeneméritait

ça.L’expressionimpassibledansleregarddeWoodsétaitsigned’agacement,riendeplus.— Tu as raison. Je suis désolé. J’ai trop de choses en tête, aujourd’hui. Je n’aurais pas dû me

comporterdecettemanièreaudéjeuner.Seulmonpèresaitmepousseràboutcommeça.Cen’estpastoiquiesencause,c’estlui.Moncœurse serra.Unéclairde tristesseavaitbrièvement traversé son regard. Jevoulais le serrer

dansmesbrasetchassersatristesse,maisjenepouvaispas.Cen’étaitpasàmoideleréconforter.Uneélégantemainmanucuréeseposasursonbras.Laragequil’avaitfaittremblerquelquessecondes

plustôts’étaitévaporée.Lesépaulesrelâchées,AngelinasepenchaitversWoods.Ellabaissalavoixetje n’entendis pas sa réponse. Je perçus seulement l’acceptation sur le visage deWoods tandis qu’ilhochaitlatête.Sonbrass’enroulaautourdusienetilspénétrèrentensembledanslecountryclub.J’ouvrisma portière enm’efforçant de ne pas les imaginer en train de s’envoyer en l’air dans son

bureau pour se rabibocher. Je ne pouvais pas y réfléchir sans perdremon calme.Mon attirance pourWoodsétaitunepageque jedevais tourner.C’était seulementunami.Tandisque je faisais routeversl’appartement,legoûtamerdansmabouchenefitques’accentuer.Jesavaisexactementcequeçafaisaitd’êtretouchéeparWoods.

JereconnuslaHarleyDavidsongaréedevantlarésidence.Trippétaitarrivé.Ilfallaitquejedécidedelasuite,etvite.Ilallaitpeut-êtremedemanderdepartirsansmelaisserlechoix.Jem’apprêtaisàtournerlaclédanslaserrurelorsquejejugeaiqu’ilétaitsansdoutemieuxdefrapper.

Jen’étaisplusseuledésormais.Jetoquaiàlaporteetattendis.Trippouvritquasiimmédiatementetsonsourireamicalsetransformaenfroncementdesourcils.—Tuaslaclé.Pourquoitufrappes?interrogea-t-ilenreculantpourmelaisserentrer.—Commetuesderetour,jetrouvaisçabizarred’entrercheztoisansfrapper.Lasituationdevenaitembarrassante.Ilfallaitquejeparte.—Lefaitquejesoisdepassagepourunepetitevisitenechangeriendutout.Tuaslaclé,tesaffaires

sontici,tuvasettuvienscommetulesens.Maprésencenedoitpastedéranger.Ilvoulaitquejereste?Jenem’étaispasattendueàça.Pasvraiment.—Jepensais fairemavaliseet reprendre la route. J’aigagnéassezd’argentpourdépasserDallas,

cettefois-ci.Trippinclinalatêtesurlecôté.—Tut’envasàcausedemoi?Oui.—Non,mentis-je.—C’estbizarre,jenetecroispas.Jehaussailesépaules.Tripppoussaunsoupiretfermalaported’entrée.—Allez viens,ma jolie. Toi etmoi, faut qu’on parle, et pour ça, on va s’installer avec une bière

devantleGolfe.Je le suivis jusqu’à lacuisine. Ilpritdeuxbièresdans le frigoetm’en lançaune.Parchance, je la

rattrapai.Tripphochalatêteendirectiondesportesvitréesdonnantsurlebalcon.Jesortisenpremier.—Assieds-toi,ditTrippderrièremoi.Lachaleurdesoncorpsétaitsurprenanteetjeprisrapidementplacesurunedeschaisesautourdela

tabledupatio.Commes’il lisaitdansmespensées,Trippmegratifiad’unpetit sourireencoin. Ilpritplacesur la

chaiselongue,s’adossaetétiralesjambes.—Cetendroitm’adrôlementmanqué.Paslesgens,maislelieuenlui-même.C’étaitétrange.Trippmanquaitàtouslesgensquej’avaisrencontrés.Faisait-ilallusionàsesparents

seulementouréellementàtoutlemonde?—Tuteplaisici?demanda-t-ilentournantlatêteversmoi.—Oui,c’estunbelendroit,répliquai-jeentoutesincérité.—Ça,c’estsûr,approuva-t-ilensouriant.—Danscecas,pourquoies-tuàDallas?Onm’avaitracontépourquoiTrippétaitparti,maisjeneconnaissaispaslefinmotdel’histoire.—Mesparentsvoulaientquejedeviennequelqu’unquejen’étaispas.J’avaissoifdeliberté.Doncje

suis parti. Je ne pouvais pas être libre par ici. (Pourtant, il était revenu.)Mais je ne vais pas traînerlongtemps.Lebesoindevoirdupaysvabienvitemerattraper.J’aidémissionnéaubar.JesuissûretcertainqueJeff se tape lanouvelleserveuse. Jenepeuxpascontinueràbosserpourcemec.Enplus,Dallascommençaitàmegonfler.Était-cesamanièredemedirequejepouvaisrester?Jen’étaispassûred’enavoirenvie.Onnese

connaissaitpasvraiment.Ilallaitbientôtensavoirprobablementplusqu’ilnelesouhaitaitsurmoi.—Moiaussi,jedevraismeremettreenroutedetoutefaçon.Çam’afaitplaisirdelogercheztoi.C’est

chouette.—Jecroyaisque lesujetétaitclos ! Jenesuispasvenu icipour techasser. Jeneveuxpasque tu

partes.Entoutcaspastoutdesuite.Tuesarrivéeilyaquelquessemainesàpeine.Profiteencoreunpeudelacôte.Jeteprometsquejesuisunboncoloc.Jeneronflepas,jeneboispaslelaitdirectementàlabouteille,saufs’iln’enrestepresqueplusetquejelefinis.Letontaquinmefitsourire.Lemomentétaitvenud’êtrehonnête.Cettefois-ci,jenem’ensortiraispas

avecunmensonge.Ilallaitpenserquejenel’aimaispas,etjenepouvaispasluifaireça.Pasaprèsqu’ileutétéaussigentilavecmoi.—Jeneparspasparcequej’aipeurquetusoisunmauvaiscoloc…Jem’interrompis.Qu’est-cequej’avaisdit?Commentm’expliquersanspasserpourunefolle?—Bien,alorsc’estréglé,conclut-ilàmaplace.—Non,justement.C’estmoileproblème.Jenesuispasvraimentfacileàvivre.Je…jeneronflepas

mais je fais des cauchemars.Ça risque de te réveiller. Enfin, c’estmême certain. J’ai des problèmesd’anxiété.Jepeuxlescacher,maissionvitensemble,tuvasfinirparmevoirdanslespiresmoments.Jenesuispas…Jenesouhaiteàpersonnedevivreavecmoi.Crois-moi.Ilvautmieuxquejemeremetteenroute.Voilà,c’étaitdit.Iln’avaitplusqu’àlireentreleslignes.Trippseredressaetposalespiedsparterre.Ilsepenchaenavant,posalescoudessursesgenouxet

medévisagea.Jedéglutisavecdifficulté.Jenevoulaispasrépondreàuninterrogatoire.S’ilmeforçaitàme remémorer trop de choses, je finirais par luimontrer à quel point j’étais dingue. Je commençai àcompterlesmoutonsdansmatête.Celam’aidaitàrepousserd’autrespensées.— Raison de plus pour ne pas vivre toute seule. Comment veux-tu faire face à tout ça ? C’est

impossible. (Il s’interrompit, les lèvrespincées,choisissant sesmotsavecprécaution.)Moiaussi, j’aimesdémons.Jelesgardeàdistance.Toietmoi,onfaitlapaire.Onn’estpasprêtsàseposeretonveutdécouvrir lemonde.Jepensequ’onpourraitdevenirdebonsamis.C’estpourçaqueje t’aidonnéles

clésdechezmoietquejet’aienvoyéeici.Quiaditqu’ondevaitvoyagerseuls?J’enaiassezd’êtreseultout le temps. Si on faisait un essai ?On reste ici une quinzaine de jours pour voir si on arrive à sesupporter.Jedigéraisesparoles.Difficiledetrouveruneréponseàtoutça.Jenem’yattendaispasetjenesavais

pas tropquoi enpenser. Il voulait qu’onvoyageensemble ?Çame semblait plutôt intime.Mais si onpartageait un logement pendant quelque temps, on finirait par mieux se connaître et il finirait pardéchanteràmonsujet.—O.K.,çamarche,répondis-je.Unsouriresedessinalentementsursonvisage.Çan’allaitpastenirlongtemps.Aprèscesoir,rienne

seraitpluspareil.—Attention,jepréfèreteprévenir:Jaceestcontentquejesoisrentré.Ilpassecesoiravecdesamis.

J’espèrequeçanetedérangepas.Leschosesallaientprendreunetournurebeaucoupplusmondaine.Ilfallaitquejem’yhabitue.

Woods

Onnepeutpasdirequejetrépignaisd’impatiencedemerendreàunefêteorganiséepourleretourdeTripp.Queldommage.Trippétaitmonamietjel’appréciais.Maismonamertumeàl’idéequ’ilpartagesonappartementavecDellacourt-circuitaittoutlereste.J’y allais pour prendreDella à part et lui en toucher deuxmots. Je ne voulais pas qu’elle se sente

obligéederestersiçalamettaitmalàl’aise.Siellelesouhaitait,jepouvaisluitrouverunappartementmeublé.Jefrappaiuncoupàlaporteetentrai.Aveclebruitambiant,personnen’allaitm’entendre.L’endroitétaitpleinàcraquer.JescrutailafouleàlarecherchedeDella.—Woods ! Il était tempsque tu tepointes, s’exclamaTripppar-dessus lamusiquequi sedéversait

dansdesenceinteshi-fi.IlétaitassisaubaravecJace,Bethy,Thadetunefillequejeneconnaissaispas,assisesurlesgenoux

deThad.Dellan’étaitpaslà.Merde.—Tevoilàrentré,lançai-jeavecunsourireforcé.—Depassage. Jenepeuxpas rester longtemps.Sinonmonpèrevam’obligeràenfileruncostard-

cravate,plaisanta-t-il.Sesmots faisaientmouche. J’étais bienplacépour connaître la douleur de l’emprise profonded’un

pèresursonfils.— J’essaie de le convaincre de rester. Mais il s’est mis en tête de repartir bientôt à l’aventure,

renchéritJace.Au son de sa voix, je compris qu’il cherchait à me détendre en présence de Tripp. Mais dans

l’immédiat,jen’avaisqu’uneidéeentête:trouverDella.—OùestDella?demandai-je,incapabledecacherquej’étaisvenupourelle.Trippeutunemineétonnée.J’ignoraisaréactionetfixaiJace.Cedernierlevalesyeuxaucielensecouantlatête.—Elleestdanssachambre.Pourquoitudemandes?réponditTripp.—Danssachambre?Ellevabien?Jejetaiunœilaucouloirquidesservaitlesdeuxchambres.Lesdeuxportesétaientfermées.Laquelle

étaitlasienne?—Elleaeuuncoupdefil.Elleestalléedanssachambreàcausedubruit.Encoreunefois:pourquoi

tudemandes?insistaTripp.Jen’avaispasl’intentionderépondre;çaneleregardaitpas.Selonsespropresdires,iln’étaitquede

passage.—WoodsetDellasesontrencontrésilyaquelquesmois,alorsqu’ellepassaitdanslecoin.Eteuh…

ilssesontfréquentés.Maintenant,ilssontamis.Woodsestunpeuprotecteur,expliquaJace.—Tuesfiancé,précisaTripp,commesij’avaisbesoind’unepiqûrederappel.Jeplantaimesyeuxdanslessiens.—Cequin’étaitpas le casà l’époque.Et çanem’empêchepasde tenir à elle. Jeveuxm’assurer

qu’ellevabien,affirmai-jeavantdetraverserlapièceendirectionducouloir.J’ouvris la première porte. Les lumières étaient éteintes. Je tentai la seconde.Della était assise en

tailleursurlelit,letéléphoneàl’oreille.Ellerelevalesyeuxsurmoietlesécarquilladesurprise.Elleallaitbien.J’auraisdûrefermer laporteetm’enaller.Mais jepénétraidans lapièceet fermai

derrièremoi.— Euh, oui. Il faut que j’y aille. Je te rappelle plus tard, conclut Della en me regardant avec

circonspection.Toutvabien,quelqu’unvientd’entrerdansmachambreet jeneveuxpasêtre impolie.D’accord.Oui.Moiaussijet’embrasse,bye.Elleraccrochaetreposaletéléphonesursesgenoux.—Woods…?Lerestedesaquestionrestaensuspens.—Tun’étaispasaveclesautres.Jevoulaisvoircommenttuallais.Ellecompritdequoiilretournaitetmegratifiad’unfinsourirequimeserralecœur.—Merci,maistusais,c’estinutiledet’inquiéterpourmoi.Jevaisbien.Sincèrement.Ellen’allaitpasbien.Jenesavaismêmepassielles’étaitsentiebienunjour.Jem’assissurlelità

côtéd’elle.—Jemedemandecommenttuvasdepuisvendredisoir.Tusaisquetupeuxm’appelersijamaistuas

besoindemoi.—Tuétaisoccupéavectafiancéeceweek-end.Tun’aspasletempsdetepréoccuperdemoi.J’avaisvuAngelinaseulementaujourd’huipourledéjeuner.—Jen’aiquasimentpasvuAngelina.JedétestaisprononcercenomdevantDella.Ellebaissalesyeuxsursesmains.—Jevousaivustouslesdeuxensortantdutravailaujourd’hui.Ellen’eutpasbesoind’enrajouter.Jerepensaiaudésastrequ’avaitétéledéjeuneravecnosparentset

l’engueulade que nous avions eue sur le chemin du country club. Puis je m’étais excusé parce queAngelinaavaitraison.Jenoustorturaistouslesdeuxenmecomportantcommeuncon.—Nousavonsdéjeunéensemble,expliquai-jesansvraimentcomprendrecebesoindemejustifier.—Vousvousêtesdisputéspuisréconciliés.Jenecomprendspascommenttupourrasêtreheureuxun

jour,Woods.Lafranchisedesaréponsemeserracruellementlapoitrine.—Moinonplus.—Jenepeuxplusmepermettredem’attacheràtoi.J’aipeurdemessentimentspourtoietjeneveux

passouffrir.Sesmotsmecoupaientlesouffle.Leurimplorationdouceallaitfinirparmebriser.—Jamaisjeneteferaidemal.Jamais.Toutcequejevoulais,c’étaitlaprotéger.—Maistulefaisquandmême.Chaquefoisquejetevoisavecelle,çamefaitdumal.Cen’estpasta

faute.Nilamienne.Jemesuisimpliquéetropvite.Etvendredisoirn’apasaidé.Nousavionsàpeineeulapossibilitédedeveniramisqu’elleremettaitdéjàdeladistanceentrenous.

Jenepouvaispaslalaisserfaire.J’avaisbesoind’elle.Elleétaitleseulpointlumineuxdansmavie.—Onnevoulaitpasêtreamis?Ellehaussalesépaulesetserralesmainssursesgenoux.— Je ne sais pas. Je ne suis pas sûre d’en être capable.Quand…quand tu es gentil et attentionné

commel’autresoir…Personnenem’ajamaistraitéecommeça.Entoutcas,pasunhomme.Jen’arrivepasàcontrôlermesémotions.Merde.Toutrisquaitdes’effondrer…cettechoseentrenous.Maisjenevoulaispasqu’ellesouffre.Je

feraisl’impossiblepourlaprotégercontreladouleur.—Jeveuxêtrelàpourtoiquandtuasbesoindequelqu’un.Jet’enprie,nemerepoussepas.Dellaémitunriretriste.—C’est bien là le problème.Tunepeuxpas être là pourmoi.Çamebrise le cœurunpeuplus à

chaquefois.Jevaisbientôtpartir.Gardonsnosdistancesjusqu’àmondépart.Jamaisdelavie.J’allaisrépliquerlorsquelaportes’ouvritsurTripp.—Çava?demanda-t-ilàDellaenm’ignorant.Jen’aimaispassamanièredelaregarder.Soninquiétudem’exaspérait.—Ondiscutaitdemondépart,dit-ellesansreleverlesyeux.—Tunepartiraspas,affirmai-je.Siellevoulaitqu’onaitcetteconversationdevantTripp,ellen’avaitqu’àsefaireplaisir.—Jenepeuxpasrester.—Biensûrquesi.—Ellen’enapasenvie,Woods.Pourquoitucherchesàlaforcer?intervintTrippens’avançantvers

elle.—Resteendehorsdeça,Tripp.Tusaisquedallesurelle.Dellaselevaetlevalesmainspourm’intimerlesilence.—Arrête.Latristessedesesyeuxmedéchira.J’aimaistantlesvoirbrillerderire.—Reprends-toietréfléchisàlaconneriequetuesentraindefaire.LeWoodsquej’aiconnun’était

pasunabrutiinsensible.Dellan’apasméritéça.Tuesfiancé.QuelsquesoienttessentimentspourDella,ilfautqueçacesse.Ellepartavecmoidansunequinzainedejours.Onvavoyagerensemble.Pourquoitunelâchespasl’affaire,hein?Elle partait avec lui ? Cette perspective me tortura et je refusais d’y croire. Et pourtant, elle ne

démentaitrien.Elleavaitsimplementl’airabattueetcrevée.Jenepouvaispascontinueràm’infligerça.Elle ne voulait pas rester. Je n’avais aucun avenir avec Della. Et si je n’épousais pas Angelina, jen’auraisaucunavenirdansl’entreprisedemonpère.LamaindeTrippglissasurl’épauledeDellaetlaserra.C’enétaittroppourmoi.Jemelevaietsortisdelapièce.Sansmeretourner.Sansdireaurevoiràpersonne.

Della

—Tun’auraispasdûluidireça,dis-jeàTrippsansleregarder.Jerepoussaisamaind’unhaussementd’épauleetm’approchaidelafenêtre.Woodsavaiteul’airsi

tourmenté. L’indécision se peignait sur son visage. Je voulais qu’ilme choisisse.Mais qu’est-ce quej’avaisàoffrir?Jenepouvaisêtrelechoixdepersonne.— Il est fiancé. Il n’apas le droit devenir ici et de jouer avec tes émotions commeça. J’ai vu la

douleurdanstesyeux.Cequis’estpasséentrevousdeuxn’estpasfinietilnelâchepas.Cen’estpasjusteenverstoi.Cen’étaitpeut-êtrepasjusteenversmoi,maisçan’étaitpasjusteenversluinonplus.Onavaitdécidé

àsaplace.Ilétaitmalheureux.Jedétestaisça.Jevoulaispartirenlesachantheureux.—C’estmonami,répliquai-je.Laseulevéritéaumilieudetoutça.—Ouais,moiaussic’estmonami,soupiraTripp.Oudumoinsill’était.Jepensequ’ilenvisagedeme

trucideràlapremièreoccasion.Maisilpourraitlaissertoutçaderrièrelui.Ilauraitputechoisirtoi.—Jenesuispasuneoption.Le silence suivit mes derniers mots. Je contemplai l’océan, sentant le regard de Tripp sur moi. Il

réfléchissaitàmaremarque.Jen’allaispasl’expliquer.Ilcomprendraitbienassezvite.—Onseperçoittoujoursdifféremment.Parfois,nosdéfautssontnospointsforts.Jenedisrien.Parcequ’ilavaitraison–celas’appliquaitàbeaucoupdepersonnes.Maispasàmoi.

Cen’étaientpasmesimperfectionsquim’inquiétaient,maisplutôtlaterreurquicorrompaittoutdansmavieetquimemaintenaitàl’écartdumonde.J’entendis la porte se refermer doucement derrièremoi. Ilme laissait seule.Tantmieux, j’en avais

envie.—Tusaispourquoijet’aienvoyéeici?LavoixdeTrippmefitsursauteretjemeretournaid’unbond.Ilétaitassisauborddulit.Iln’étaitpas

parti.Jesecouailatête.Jel’ignorais.Àcemoment-là,onseconnaissaitàpeine.—Parcequetuavaisl’airaussiperduequemoi.Jet’observaisdepuisdessemaines.C’estdifficilede

nepasteregarder.(Ileutunpetitsourireencoin.)Tun’avaispasl’airdetrouvertaplace.Etmoinonplus.Depuisquej’aiquittétoutça,jen’aifaitquepartiràladérive.J’enaiassezd’êtreseul.J’aivuuneâmesœurentoietjet’aienvoyéeicijusqu’àcequej’aielecrandereveniraffrontercetendroit.(Ilfitune pause et passa une main dans ses cheveux.) J’avais l’intention de passer du temps avec toi etd’apprendreàteconnaître.Maisjen’étaispasvraimentpréparéàça.Woods.(Ilsecoualatête.)Ilafalluquetut’embarquesavecWoods.Quelleironiedusort.Untypeaussipauméquemoiavant.Leproblème,c’estqu’ilnevapasprendrelatangente.Ilenveut,decetteviedemerdequenosparentsnousimposent.Ilestentraindedeveniruneputaindemarionnette.Tuméritesmieuxqueça,Della.J’avalailaboulelogéedansmagorge.JenesavaispassiTrippavaitterminé,maisjenevoulaispas

en entendre plus. Il avait raison. Il ne fallait pas que je perdemon temps à vouloir quelqu’un commeWoods.Maisl’oublieretallerdel’avant?Plusfacileàdirequ’àfaire.—Cesoir,j’aijustebesoindedormir.Jen’aipasjetémondévolusurWoods,sic’estcequetuveux

dire.Onacouchéensemble.C’esttoutcequ’ilyaentrenous.—Désolépourcesoir,ditTrippenselevant.

Moiaussij’étaisdésolée.Désoléepourtantdechoses.—Çan’estpasgrave.Jesuisfatiguée,c’esttout.Trippinclinalatêteetquittalapièce.Jemelaissairetombersurlelitetcachaimonvisagedansmesmains.J’étaisencoreplusperdueque

troissemainesauparavant.

—Tuessortie,Della?Commentas-tupufaireça?Qu’est-cequejedoisfairepourtemettredanslecrânequetunepeuxpasallerdehors?C’estdangereux!Lavoixstridentedemamèren’étaitrienàcôtédeladouleurfulgurantedelaceintureencuiravec

laquelleelleme fouettait les jambes.Jenehurlaipas.Ça lamettraitencoreplusencolère.Ellesemettaittoujoursdanstoussesétatsquandjefaisaislemur.Mesjambessedérobèrentsousmoitandisquelapeautendrederrièremesgenouxsedéchiraitsous

lesassautsrépétésducuir.—Desmaladies.Tupourraisramenerdesmaladiesàlamaison.Nonseulementtuesimprudente,

maisenplustueségoïste,s’écria-t-elle.Parchance,savoixrecouvritmoncri.Jenepouvaisplusleréprimer.Ladouleurétaitinsoutenable.

Parfois,jemedemandaispourquoijerentraisàlamaison.Pourquoinepasm’enfuir?Courirjusqu’àmelibérerdetoutça.D’elle.Mais c’était impossible. Elle avait besoin de moi. Jamais je ne serais libre. Je ne pouvais pas

l’abandonner.C’étaitmamère.Jen’avaispersonned’autre.—Est-cequetupensesàmoi?NON!Est-cequetupensesàtonfrère?NON!Çalebouleverse,

quand tu quittes la maison. Comment peux-tu faire ça ? vociféra-t-elle tandis qu’un autre coupdéchiraitl’arrièredemesjambes.Dans cesmoments-là, quand la violencedépassait lesbornes, je voulais être cet enfantmort.La

souffranceallaittroploin.Ledécorchangea.Mamèrenemesurplombaitplusaveclevisagedémentquiétait lesienquand

elleme tabassait.Àprésent, iln’yavaitplus lamoindreviedanssonregardetellegisaitdansunemaredesang.Jepoussaiuncri.

—Chuuut,Della,c’estfini.Jesuislà.Chuut.Lavoixétait lointainemaisperceptible.Les imagesdemamèremortes’effacèrent tandisque jeme

concentraissurlavoix.Jemerendiscomptequelessanglotsétaientlesmiens.—Çayest.C’estfini.Jesuislà.J’ouvris les yeux et discernaiTripp.C’est sa voix que j’avais entendue.La peur sur son visage en

disait long. Il me tenait dans ses bras et me berçait d’avant en arrière en prononçant des parolesapaisantes.Iln’étaitpaspréparéàcequ’ilvenaitdevoir.Jepouvaislirelaperplexitédanssonregard.—Jesuisdésolée,articulai-jed’unevoixrauque.J’avais la gorge sèche à force d’avoir crié. Comme toujours dans ces cas-là. Braden avait été la

premièreàêtretémoindetoutça.Monpsychologueavaitparlédeterreursnocturnes.Montraumatismes’exprimaitlorsquejedormaisetquejebaissaislagarde.Malheureusement,rienn’avaitpuyremédier.Lanuit,mamèremerendaittoujoursvisite.Etavecelle,lessouvenirs.—Chut, dit-il en posant l’index surmes lèvres et en secouant la tête. Non. Je ne te laisserai pas

t’excuser.Jemetus.Jequittaisesgenouxpourmerallongerdansmonlit.Trippnebougeapas.—Çat’arrivesouvent?finit-ilpardemander.—Oui.Normalement jemeréveillais seule lorsquemerevenaient les imagesdecettenuit-là,quand j’avais

retrouvémamère.—Et tu fais faceàça touteseule,chaquenuit? (J’acquiesçai.)Merde,murmura-t-ilense relevant.

Della, pourquoi tu restes toute seule ?Tunedevraispas !Comment tu as fait pour t’en sortir jusqu’àmaintenant?(Ilsefrottalesyeuxavantdesepasserlesmainsdanslescheveuxd’ungestedefrustration.)C’était sévère.Tu te rends compte àquelpoint c’est flippant ?Merde,Della, tupeuxpas rester touteseule.Jeramenailacouverturesousmonmentonetm’appuyaicontrelatêtedelit.C’estlemomentoùTripp

allait se rendrecomptequevoyageravecmoin’étaitpasexactementcequ’ilavait imaginé.Cen’étaitqu’unequestiondetemps.—Jevaisbien.Laprésencedequelqu’unnechangerien.Jepartiraidanslamatinée.Trippsecoualatêteets’assitfaceàmoi.—Tun’irasnullepart.Quoiquetusoisentraindepenser,tuastoutfaux.Çanechangerienpourmoi,

Della. C’est juste que je n’étais pas préparé. (Je n’étais pas certaine de le croire, mais je hochainéanmoinslatête.)Demainmatin,jet’emmènejoueraugolf.Puisondéjeuneraensemble.Lemomentestvenudefaireconnaissance.

Woods

Jen’avaispasréussiàtrouverlesommeil.J’avaispassélanuitsurmonbalconàregarderlesvaguesetàtirerplusieursconclusions.Lapremièreétaitquejeneseraisjamaisheureuxsij’épousaisAngelinaetqu’ellenonplus.Laseconde,quej’allaisdevoirrenonceràmonrêvededirigerleKerringtonClub.Monpèren’allaitpasmepardonnerdedésobéiràl’injonctiond’épouseruneGreystone.MaisDellaavaittoutchamboulé.Jen’enavaisplusrienàfoutre.C’estellequejevoulais.Peuimportepourcombiendetemps,c’estelleque jevoulais. Jen’arrêtaispasdepenseràelleetdeme torturerà l’idéeque jenepourraisjamaisl’avoir.Monavenirallaitcomplètementbasculerparcequej’avaisDellaSloanedanslapeau.Jeladésirais.Il

m’étaitdevenuimpossibledelenier.Cen’étaitpasunebanalehistoiredesexe.Audébutoui,maisplusmaintenant. Je m’étais suffisamment rapproché d’elle pour sonder son âme. Je savais qu’elle étaitgénéreuse et attentionnée.Elle n’attendait rien demoi et était simplement contente de vivre.Elle étaitblesséemaisbataillaitdurpourpasseroutre.Pasd’histoireàfairepleurerdansleschaumières.Toutçadansunemagnifiquepersonne.Avais-jedéjàrencontréunefillecommeça?Le soulagement que j’éprouvais à l’idée de ne pas devoir abandonner ce qui pourrait bien être la

meilleurechosequimesoitjamaisarrivéejustepourobéirauxordresdemonpèreétaitincroyable.Jepouvaisdenouveaurespirernormalement.JedécrochaimontéléphoneetdemandaiàAngelinademeretrouverdansmonbureauà11heures.Ce

quiluilaisseraitletempsdedormiretdes’habiller.Unefoisqueceseraitfait,j’iraisvoirDellaetlasupplieraisàgenouxs’illefallait.La laisseravecTripp laveilleavaitété laclaquedont j’avaisbesoin.Lamascaradedemarelation

avecAngelinaétaitgrotesque.Elle lesavait trèsbien.Nousétionstouslesdeuxtellementassoiffésdepouvoirdanslesentreprisespaternellesquenousétionsprêtsàrenonceràl’amour.MêmesiDellan’étaitpasarrivéedansmavieenmeforçantàprendremesdistancesparrapportauxexigencesdemonpère,jen’auraispasétécapabledemarcherjusqu’àl’auteletdedire«oui».

Uncoupfurtifàlaportedemonbureauprécédal’arrivéed’Angelina.Salonguechevelureblondeétaitnouéeenunchignonlâched’oùs’échappaitunecascadedeboucles.Sarobecourteenlinmauven’avaitpasunplietj’étaisprêtàparierquesapairedetalonshautsassortiecoûtaitplusdesixmoisdesalairemoyen.Lediamantàsamaingauchemenarguaitetreflétaitlesrayonsdusoleilquis’engouffraientparlafenêtre.Ilétaitpolietsertiaussiparfaitementquelamainqu’ilornait.Angelinaavaittoujoursétéd’unerareélégance.Élevéepourêtrelepiondesonpère.Lajeunefilleàlaquellej’avaistenuparlepassésetrouvaitquelquepartsouscettefaçade.—Nefaispasça,ordonna-t-elleenraidissantsacolonneetensesaisissantdudossierdelachaiseà

côtéd’elle.Jen’avaispasprononcéunseulmotmaisellesavaitdéjà.L’évidenceauraitdûnoussuffireàtousles

deux.—Onnepeutpasleurobéir.Jel’ailaissémeforcerlamainjusqu’ici,maisc’estfini.Jenepeuxplus.Lesyeuxd’Angelinabrillaientdecolèreetdedégoût.Ellenecomprenaitpas.Jepensaisqu’elleallait

peut-êtremeremerciermaisjemerendiscomptequeçan’arriveraitjamais.Elles’étaitpréparéeàallerjusqu’aubout.Pourquoi?Sonpèretrouveraitquelqu’und’autre.Potentiellementquelqu’unquipourraitl’aimer.Quinel’épouseraitpasuniquementpourlenometlafortunedesonpaternel.—Tucommetslaplusgrosseerreurdetavie,lâcha-t-elleenserrantlesdents.

Jecontournaimonbureauetm’assis.—T’épouserauraitétélaplusgrosseerreurdemavie.Onseseraithaïs.Jenepeuxpaslaissermon

pèremecontrôler.S’ilneveutpasque jedirige l’entreprise,alors tantpis.Aumoins j’auraiprismespropresdécisions.Angelinalevalesyeuxaucielcommesimesparolesétaientridicules.—Maisécoute-toi!Tun’asjamaisconnuautrechosequecemonde-là.L’existencequetut’apprêtesà

bousillerparcequeturefusesqu’ontedictetaconduiteestlaseulequetuconnaisses.Turéagiscommesinotremariageétait lapirechosequipuisse t’arriver.Nousétionsproches,àunmoment,Woods.Nousétionsamis.Nouspourrionsretrouverçasituacceptaislasituationetsituarrêtaisdeterenfermer.Lorsquenousétionsenfants,nosparentsnousavaienttoujourslaissésseuls.Nouspartagionsunevie

ratée.Elleavaitraison;nousétionsamis.Maisjen’avaisjamaisdésiréplus.—Cen’estpasparcequenousétionsamisqu’onpeutnousforcercontrenotrevolonté.Depuisqu’on

estgamins,tesparentsmefourguentdanstespattes.Quelqu’unsaurat’aimer.Tedésirerapourcequetues.Netecontentepasdemoinsqueça.Lavieestcourteetj’enaiassezdelagâcher.Ellelevalesmainsaucieletpoussaungrognementexcédé.—Parfait.Commetuveux.Jenevaispast’implorer.Cen’estpascommesijenepouvaispasfaire

mieux.Jem’étaisditquet’épouserétaitdansmonintérêt.Tumeconnaisetonaunehistoirecommune.Maisjenem’acharneraipas.J’aimafiertéetjeneresteraipasiciàtesupplier.(Elleretiralediamantdesamainetlefitclaquersurleborddubureau.)Prends-le.Onsaittouslesdeuxquejen’enaipasbesoin.Jevoulusajouterquelquechose.Desexcusesouaumoinsquelquesmotspourl’apaiser,maisrienne

mevintàl’esprit.Jepouvaism’estimerheureuxqu’ellenem’aitrienbalancéàlafigure.—Aurevoir,Woods.J’espèrequelejeuenvaudralachandelle,proféra-t-elleavantdesortir.Jeluilaissailetempsdequitterlebâtimentavantdepartir.IlfallaitquejevoieDella.

Della

J’étaisnulleaugolf.Lorsquelaballes’envolaunefoisencoredanslesarbres,jemetournaiversTrippquiriaitsouscape.

Aumoins,monmanquedebolauswinglefaisaitmarrer.Lorsqu’ilm’avait réveillée à7heures cematinpour arriver à temps ànotre réservationdegolf, je

n’avaispasétédesplusravies.Maisaprèslafaçondontilm’avaitaidéeàtraverserl’épisodedelanuit,jeluidevaisbiença.Jem’étaistraînéehorsdulitpourm’habiller.Etlà,dix-septtrousetdouzeballesperduesplustard,jemedisaisquej’auraismieuxfaitderesteraulit.Oui,jevoulaisapprendreàjoueraugolf,maispasauxaurores,etmaintenantquejeconstataisàquelpointj’étaismauvaise,jenevoulaisplusjamaisréessayer.—J’abandonne,concédai-jeenluitendantmonclub.—Tufaisdesprogrès.Tuasjusteviséunpeutrophaut,répliquaTrippengloussantderire.—Laissetomber.Onsaittouslesdeuxquejesuisirrécupérable.Jepeuxteregarderterminerlapartie

?Trippglissaleclubdanslesac.—Onpeuts’arrêterlà.Tut’esappliquée.Ondevraitpeut-êtrepasserunpeudetempssurlepractice

ettravaillertonswingavantderevenirsurlegreen.Àl’entendre,onallaitretenterl’expérience.Pourtant,jen’avaisaucuneintentionderejouerunjourau

golf.Maisjenevoulaispasêtredésagréableetnedisrien.JegrimpaidanslavoituretteetTrippnousconduisitauclub.Sansréfléchir,jememisàchercherdesyeuxlepick-updeWoods.Jepouvaistoujoursessayerdeme

convaincrequec’étaitpourm’assurerqu’iln’étaitpas làetque jen’allaispas lecroiser.Maisc’étaitfaux.J’étaismaso.—Etmerde,grognaTrippavantdegarerlavoiturette.Jetournailatêteversluipourvoircequin’allaitpaslorsquemonregardtombasurceluideWoods.Il

sedirigeaitversnous.—Onlecroiraitinvestid’unemission,bougonnaTripp.Woodshochalatêteàl’attentiondeTrippavantdeledépasseretdes’arrêterdevantmoi.—Fautqu’onparle.—Çan’apassuffi,lanuitdernière?intervintTrippsuruntonmenaçant.Woodsl’ignoraetpoursuivit:— J’ai rompu les fiançailles.Angelina vient de partir, c’est fini.Totalement fini. (Ilmeprit par la

main.)Jet’enprie,parlons.Ilavaitrompusesfiançailles?J’avaisl’impressionderêver.Maispourquoi?Ildésiraittoutcequ’un

mariageavecAngelinapouvaitluioffrir.Pourquoiymettreunterme?—Jenecomprendspas,répliquai-jedansunmurmureàpeineaudible.UnsouriresexysedessinasurleslèvresdeWoods.—C’estbienpourçaqu’ilfautqu’onparle.JejetaiunregardàTripp,quisecontentadehausserlesépaules.J’étaiscenséedéjeuneraveclui.Je

nepouvaispasleplanter.J’auraisvouluqu’ildisequelquechoseaulieudecehaussementd’épaules.—Nous…Trippetmoiavionsprévudedéjeunerensemble,répondis-je,leregardtoujoursposésur

Tripp.

Celui-cidétournalesyeuxetlesposasurWoodsavantdesecouerlatêteensouriantlégèrement.—Jenememêlepasdeça.Vaaveclui.S’ilvientderompreavecAngelina,cequ’ilaàtedireest

plusimportantquecequejepensais.(Puis,tournanttoutesonattentionversWoods:)Finilamarionnette.Ilétaittemps,bordel,lâcha-t-ilavantdes’éloigner.LorsquejeregardaidenouveauWoods,ilsouriaitdetoutessesdents.—Tudéjeunesavecmoi?Jeregardailerestaurantduclubderrièrelui.Jenevoulaispasdéjeunerlà-basaveclepatron.Horsde

questionquemescollèguesdetravailmeservent.MaisjevoulaisparleràWoods.Iln’étaitplusfiancé.Moncœursemitàbattrelachamade.Woodsétaitlibre.—Jenevaispasêtretrèsàl’aiseauclub.Est-cequ’onpeutdiscuterd’abord,puistrouverunautre

endroitpourdéjeuner?—Commetuveux.(Ilm’attiraversluietdésignasonpick-updumenton.)Allonsfaireuntour.Unefoisauvolant,Woodsnedémarrapas.Ilsetournaversmoi.Sesyeuxbrunfoncé,sérieux,étaient

exemptsdetristesse.— Je suis désolé pour mon attitude la nuit dernière. Je n’aurais pas dû te parler comme ça. Je

paniquaisetj’aiperdumesmoyens.Jeglissaisurmonsiègedemanièreàluifaireface.—Pourquoipaniquais-tu?Woodshaussaunsourcilcommes’ilconsidéraitquelaréponsetombaitsouslesens.—ParcequeTrippparlait de t’emmenervoyager avec lui. (Oh.) Il fautque tu comprennesquelque

chose. Que ce soit bien clair. Je n’ai jamais aimé Angelina. Je n’ai jamais voulu l’épouser. Je l’aidemandée enmariageparce que c’était essentiel pour obtenir ce que je pensais avoir toujours désiré.Maistuastoutchangé.Jemesuisrenducomptequejevoulaisautrechose.Jenevoulaispasqu’onmecontrôle.Etjevoulaisavoirunechanceavectoi.Mêmesitun’aspasl’intentionderester.Mêmesitun’aimespast’engager,jeveuxpassercetemps-làavectoi.Laperspectivedeperdresalibertén’avaitpasétéuneraisonsuffisantepourrefuserd’obéir?Ilavait

falluquejedébarquedanssaviepourqu’iltiennetêteàsonpère?Pourquoimoi?Jenecomprenaispas.—Etsienfaisantmaconnaissancetuterendscomptequecelan’envautpaslapeine?Tuserasquand

mêmecontentd’avoirtoutenvoyépromener?—Oui, dit-il en hochant la tête, le sourire aux lèvres. Tripp l’a bien dit en partant. Je ne suis la

marionnettedepersonne.Ilétaittempsquejetapedupoingsurlatable.Ilavaitraison.Êtresouslecontrôledequelqu’und’autren’étaitpasunevie.Jelesavaismieuxque

quiconque.Maisjenevoulaispasêtrelaseuleraisonpourlaquelleilabandonnaitcequiluirevenaitdedroit.Lapressionseraittropforte.— Je suis d’accord. Ce n’est pas juste de ne pas être maître de ses propres décisions. Je veux

seulementm’assurerquetun’aspasfaitçaàcausedemoi.Parcequehonnêtementtuvasviteterendrecomptequejesuisencorepluspauméequecequetuaspuentrevoirl’autrenuit.Woodsfronça lessourcils. Iln’aimaitpasque jediseça,mais ilneconnaissaitpas lavéritéàmon

sujet.Etcen’estpasmoiquiallaislaluiraconter.—Jen’aimepasquetuparlesdetoicommeça,commenta-t-ild’unevoixrauque.Jepivotaidenouveaudansmonsiège.—Parlons-enuneautrefois.Jemeursdefaim.J’avaisdestasdequestionsàluiposer(allait-ilperdresonboulot,sonpèreallait-illelicencier,avait-

ild’autresprojets?),mais,étantdonnéquejerefusaisdecontinueràparlerdemoietdemonavenir,jenepouvaispasluidemanderdes’épanchersurlesujet.Onpouvaitdéjeunerquelquepartenattendantlasuite.Ilallaitpeut-êtrecomprendresonerreuravant

la fin de la journée et se précipiter dans les bras d’Angelina pour implorer sonpardon. Il n’était pas

nécessaired’avoiruneconversationsérieusetoutdesuite.Jevoulaisapprécierl’instantavecluisanslaculpabilitédedésirerunhommedéjàpris.

Woods

Dellaavaitmangésonsandwichensilence.Elleétaitrestéeconcentréesursondéjeunerdepuisqu’onl’avait servie. J’avais eu dumal àmanger ; l’observer était beaucoupplus divertissant.Elle s’essuyadélicatement laboucheavecuneservietteet leva lesyeuxsurmoi.Ses jouessemirentàrougiretsonregardbrilla.—Jemouraisdefaim.Legolfm’aépuisée.Jenesaispastroppourquoivumonniveau,expliqua-t-

elleenreposantlaserviettesursesgenoux.—C’est lapremière foisque tu jouaisaugolf?enchaînai-jeenessayantderéprimerma jalousieà

l’idéequeTrippl’avaitaccompagnée.—Oui,jevoulaisapprendreetTrippm’aproposéd’yalleraveclui.Étantdonnélenombredeballes

quej’aiperdues,ildoitleregretter,maintenant.Jememisàrire.ConnaissantTripp,ilnedevaitpasregretteruneseconde.J’espéraissimplementqu’il

enavaitbienprofité,parcequec’estleseultête-à-têtequ’ilauraitavecelle.—Iltefautunbonprof,c’esttout.Dellapinçaleslèvresetfronçalessourcilsd’unairabsorbé.Puisellesecoualatête.—Non,c’estsansespoir.Jen’aipasl’intentiondetefaireperdretontemps.L’opportunitéd’enroulermesbrasautourd’ellepourluiapprendreàmanierunclubdegolfavantde

reculerpourcontemplersesfessesenpleinswingn’étaitpascequej’appelleraisunepertedetemps.Jem’abstinspourtantdetoutcommentaire.—Onverra,mecontentai-jededire.Laserveuseapportal’addition.Jelaissaisuffisammentd’argentpourcouvrirlerepasetungénéreux

pourboireavantdemeleveretdetendrelamainàDella.J’enavaisassezd’êtreenpublicavecelle.Jelavoulaispourmoiseul.J’avaisbeaucoupàdiremais,avanttoutechose,jevoulaislaserrerdansmesbras.Çafaisaittroplongtemps.—Onvaoù?interrogea-t-elleenseredressantàcôtédemoi.—Chezmoi.Jeveuxtemontreràquoiçaressemble.Notammentlavue.Çateva?Dellahocha la tête. J’essayaisdeme tenir, cequin’était pasunemince affaire. Jen’arrivaispas à

chasserl’imaged’ellenuedansmesdraps.J’enavaisenvie.—J’adoreraisvoirtamaison.Nousregagnâmeslepick-up.Dellagrimpaducôtépassageretjenemegênaipaspourreluquersoncul

moulédanssonpetitshortblanc.Iln’yavaitaucunemarqueetl’idéequ’elleneportaitpasdeculottemedonnaitdesboufféesdechaleur.Ilfallaitquejepenseàautrechose,n’importequoi,sinonj’allaisbanderetêtreparticulièrementmalàl’aise.—Trippal’intentionderesterenvillecombiendetemps?Voilàquidevraitfairel’affaire.Sesouvenirqu’ellepartageaitunappartavecunautregars.Quienplus

avaitenvied’elle.—Iln’apasprécisé.Jepensequ’ilenavaitassezdeDallasetqu’ilvoulaitrepasserpariciavantde

s’arrêterailleurs.Samanière de décrire la vie de Tripp comme si elle était parfaitement banaleme rappela qu’elle

menaitlemêmegenred’existence.Quejenecomprenaispas.Etenmêmetemps,simonpèremevirait,jefinirais aussi paumé que lui. Et l’idée de quitter la ville en compagnie deDella n’était pas pourmedéplaire.

Lasonneriedemonportableretentitdansmapocheetjesusaussitôtqu’ils’agissaitdemonpère.Ilavait fallu àAngelina plus de temps que je ne l’aurais pensé pour lui faire savoir que les fiançaillesétaientrompues.Sonplanmagistralvenaitdetomberàl’eau.Jeplongeailamaindansmapochepouréteindreletéléphone.Jem’occuperaisdeluiplustard.Pour

l’instant,jevoulaismeconcentrersurDella.Leface-à-faceavecmonpèreallaitmeporterunsacrécoupaumoral.Jen’enavaispasenvieaujourd’hui.—Tutravailles,cesoir?demandai-je.Sic’étaitlecas,j’appelleraispourmodifierlesemploisdutemps.—C’estmonjourderepos,dit-elleaveclesourire.Cen’estpastoiquigèresleplanning?Si,maiscettesemaineavaitétéuncauchemar.Jenemesouvenaispasquellerécupjeluiavaisdonnée.—C’étaitpourvérifier,répondis-jeavantdem’engagerdansl’alléeenbriquesmenantchezmoi.Çaavaitété lapremièremaisondemesparents.Mongrand-père la leuravaitprêtée jusqu’àceque

monpèregagnesuffisammentd’argentpouracheterlavillarêvéedemamère.Àlamortdemongrand-père,jereçuslamaisonenhéritage.Cequiavaitexcédémonpèreauplushautpoint.Ilvoulaitexerceruncontrôlecompletsurmoi.Etmoij’auraisvraimenteubesoinquemongrand-pèremelaisseunepartducountryclub.Cequ’iln’avaitpasfait.—Woods!C’estmagnifique!s’exclamaDella.Comparée à celle demes parents ou aux constructionsmodernes deRosemary, elle n’avait rien de

faramineux.Maiselleavaitducharme.—Merci.Dellasortitdelavoitured’unbondavantquej’aieeuletempsdel’aider.—Ondirait unemaison en borddemer commedans les films.Avec les volets anti-ouragans et la

grandevéranda.C’estdivin.Àl’entendres’épanchersurlamaison,j’eusencoreplusenviedelaporteràl’étagejusquedansma

chambre.J’adoraiscetendroit.C’estlaseulechosequim’appartenait.—J’aihâtedevoirl’intérieur.Jepourraisvivresoustonporche.Lavuedoitêtresublime.Cen’estpasmoiquil’empêcheraisdes’installersousmonporche.Nid’entrerdormirdansmonlit.Je

préférai ne rien dire. Ça faisait trop. Trop tôt. Jusqu’ici nous avions partagé quelques instants et desépisodesdesexetorride.Ilfallaitconstruireàpartirdeça.J’enavaisenvie.—Monte!Tuvasvoir,lavueestgéniale.Dellam’emboîtalepasdansl’escalier.J’ouvrislaported’entréeetm’effaçaipourlalaisserentreren

premier.Jusqu’ici,jenem’étaisjamaispréoccupédel’agencement,maismaintenantqueDellainspectaitchaquerecoindelamaison,jeregrettaidenepasavoirchangégrand-chosedepuisquemongrand-pèrem’avaitléguél’endroit.C’estsafemmequil’avaitaménagé.Ilsavaientpassélesdernièresannéesdelaviedemagrand-mère

entre ces murs. Lorsqu’on avait diagnostiqué son cancer en phase terminale, ils avaient vendu leurimmense résidenceàSeasidepouremménager ici.Après sondécès,mongrand-père avait habité chezmesparentspendanttroismoisavantdesuccomberàunecrisecardiaque.Cettemaison était chaleureuse. Je n’avais pas passé beaucoup de temps à repenser la déco. Je ne

recevaispersonne.Jetravaillaistroppourcetypedeviemondaine.Dellafitcourirsesdoigtssurledivanencuirfatiguéetseretournalentement,examinantchaquedétail

quemagrand-mèreavaitprislesoindelaisserderrièreelle.Elleadoraitpeindre.Larevoirpeindredestoilesdehorssousleporcheàlafindesaviem’emplissaittoujoursd’unsentimentdepaix.—Cestableauxsontmagnifiques.Silumineuxetjoyeux,commentaDellaens’arrêtantdevantl’undes

préférésdemongrand-père.Lorsquej’avaisvoululeluirendre,ilavaitrefusé.Ellevoulaitquelestableauxrestentdanslamaison.—C’estundestroussurleparcoursdegolf,affirma-t-elle.

J’étaisimpressionnéqu’ellelereconnaisse.—Lepréférédemongrand-père.C’estlàqu’ilaréussisonuniquetrouenun.Auquinzième.—Etilestaccrochéàtonmur,observaDellaensouriant.—Ilestdemagrand-mère.Elleapeinttouscestableaux.Dellaouvritlesyeuxgrandscommedessoucoupesetsemitàcontemplertouteslesautrestoiles.—Elleavaitunréeltalent.Jepartageais cet avis.Elle était effectivement trèsdouée, etpourtant elle avait renoncéà ses rêves

pourceuxdemongrand-père.J’avais toujoursentendumamèreaffirmeravecvirulencequ’ellen’étaitpasunecarpettecommesabelle-mère.Jen’aijamaisperçumagrand-mèrecommeça.Elleétaitdiscrèteetréservée,maisellecontrôlaitbienplusquequiconquepouvaitsel’imaginer.Ellepossédaitlecœurdemongrand-père.Aussifroidetinsensiblequ’ilpûtêtre,ellelepossédait.Etl’avaitchéri…—Jenem’attendaispasàça…Paschezuncélibataire,dit-elledansunmurmure.J’adore.—Viensvoirlavue,l’invitai-jeenouvrantlesportesdonnantsurleporche.Dellas’appuyaaussitôtcontre larambarde.Labrisedularge,mêléeàsescheveux,dansauninstant

autour de ses épaules. J’aimais beaucoup la voir ainsi. Je retournai à l’intérieur pour dégoter unebouteilledevinetdeuxverres.

Della

—Tiens,lançaWoodsens’approchantderrièremoi.Jemeretournai;ilmetendaitunverrederouge.Jebusunegorgéeenespérantquemonignoranceen

matièredevinneselisepassurmonvisage.J’étaissûrequ’ilétaithorsdeprix,maisj’étaisincapabledefaireladifférenceentreungrandcruetdelapiquette.Jen’enavaispratiquementjamaisbu.—Merci,répondis-jed’unevoixaussiassuréequepossible.—Viens t’asseoir.On apprécie tout aussi bien la vue d’ici, proposa-t-il en désignant deux chaises

longuesentek.Jemelaissaitomberdansl’épaiscoussinmatelasséetétendislesjambes.Woods rapprocha l’autre chaise et s’y installa. Il abaissa les accoudoirs qui nous séparaient. Si je

bougeaisd’unpouce,jemefrottaisàlui.Latentationétaitgrande.—Jenet’aimêmepasdemandésituaimaislevinrouge.Ilavaitdûremarquermesminusculesgorgées.J’avaisdécrétéquej’aimaisbiença.Maisjenesavais

pastropqueleffetçaauraitsurmoi.—Jenesavaispastropsij’aimaisoupas.Jusqu’àprésent,jen’enaipasbusouvent.Maisilestbon.Ilsouritetavalaunegorgée.Jen’auraispasdûledévisager,maislemouvementdesmusclesdeson

cou lorsqu’il déglutissait était hypnotisant.Woods reposa son verre sur la table de l’autre côté de sachaisesanscesserdesoutenirmonregard.—J’avaisprévud’êtresagecesoir.Maisjenepeuxpas.Pasquandtumeregardescommeça,décréta

Woodsenprenantleverredemamainpourleposeràcôtédusien.Jecroisqueçairamieuxsijepeuxenavoirjusteunpeu.Justepourgoûter.Çafaittroplongtempsetjen’arrivepasàpenseràautrechosequ’àt’embrasser.(Ilmecaressaleslèvresduboutdesdoigts.)Etàtoutescespartiesdetoncorpsquejeveuxtoucher.(Ilglissaunemainautourdemataille,puisjusqu’àmesfesses.)NomdeDieu,bébé,tun’aspasdeculottesoustonshort.L’idéeque le tissu findemonshort soit la seulematièreabsorbant lamoiteursuscitéeparsesmots

m’inquiétait.Jenevoulaispasd’unetacheentrelesjambes.Quellehumiliation.—Vienslà,ordonna-t-ilenmesoulevantparlataillepourmeposersursesgenoux.Jenevoulaispaslechevaucher.Sij’étaisdéjàhumide?Samainserefermasurmacuisseetjememis

àtrembler.J’étaisincapabledel’arrêter.Ilécartamajambepar-dessuslessiennesjusqu’àcequemonentrecuissesoitau-dessusdelui.J’allaisravagermonshort.Woodsglissaunemaindansmescheveuxet inclinamatête jusqu’àcequeses lèvresrecouvrent les

miennes.Sa langueseglissadansmaboucheetcaressa lamienne. J’enoubliaiaussitôt lacatastrophepotentiellequej’auraisàréglerrayonshort.J’avaisenviedelui.Ilpritmonvisagedanssamainetfrôlamon palais de sa langue experte, ce qui me fit chavirer contre lui. La saillie tendue de son érectionappuyaitfermementcontremondésirbrûlant.JeconnaissaislasensationdeWoodsenmoietmoncorpsleréclamait.—Tuestellementdouce,murmura-t-iltoutcontremabouche.Seslèvresempresséessuivirentlacourbedemamâchoirejusqu’àmoncou.Lachaleurdesonsouffle

fitpalpitermestétons.Woodsglissaunemainentremesjambesjusqu’àatteindrelapreuveformelledemonexcitation.—Déjàmouillée,souffla-t-ildansmoncouavantdesucerdoucementmapeau.Tonshortesttrempé;

tusaisàquelpointc’estsexy?(Marespirationétaitbloquée,j’étaisincapablederépondre.)Jecroisque

tunet’enrendspasvraimentcompte,ajouta-t-ilencontinuantàm’embrasserdanslecou.Illevalesyeuxsurmoietmescrutaàtraverssespaupièresplissées.Saboucheétaittellementproche

demondécolletéquej’avaisenviedepressersonvisagecontremapoitrineenlesuppliant.—Della,cesoir,iln’étaitpasquestiondesexe.Jevoulaisjustegoûter.Leproblème,c’estquej’avais

oubliéàquelpointtonparfumestenivrant.J’aienviedetepénétrer,moncœur.Toutdesuite.J’aienvied’arrachertonshortetdemeglisserauplusprofonddetoi.J’étaisprêteàtoutpourqu’ilmetouchedavantage.Jelaissaiéchapperungémissementsansmesoucier

deluimontreràquelpointj’étaisvulnérableetéperdue.—Tuasmal?dit-il enbaissantmonhaut,puismonsoutien-gorge, jusqu’àcequemesseins soient

entièrementdécouverts.J’adorelesseinsetcesdeux-làsontlesplusbeauxdumonde.Parfaitementrondset si doux. (Il pressa ses lèvres contreundemes tétonsdressésdont il lécha le sommetde sa languetendue.)Devraiespetitescerises.Faitespourêtresucées,susurra-t-ilavantdeprendreunseindanssabouche.Jenepusm’empêcherdesaisirsatêteàdeuxmainspourlemaintenirenplace.Jenevoulaispasqu’il

s’arrête.Jeressentais l’effetdesa languejusqu’entremes jambes.Chaquefoisqu’il tiraitsuruntéton,desvaguesdélicieusesdeplaisirserépercutaientdanstoutmoncorps.LorsqueWoodsglissaunemaindansmonshort,jesoulevaileshanchespourluifaciliterl’accès.Illaissasamainrecouvrirmonpubisimberbeetpoussaungrognement lorsquesondoigt rencontramamoiteurchaude.J’étais trempée.J’envoulaisplus.Deuxdesesdoigtsatteignirentmonclitorisgonfléetentreprirentdelecaresseraurythmedesabouche

occupéeàléchermonsein.Ilreculalatêteetpritl’autretétonentreseslèvres.LasensationmagiquequeseulWoodssemblaitcapabled’engendrercommençaàmonterenpuissance

etj’écartailescuisseslepluspossible.Ilpinçamonclitorisenmêmetempsqu’ilmemordaituntétonetl’extasequej’attendaisexplosaautourdemoi.Jeluitirailescheveuxethurlaisonnomtandisquemoncorpstremblaitsousl’effetd’unviolentorgasme.—MonDieu,souffla-t-ild’unevoixhaletanteenmeserrantdanssesbrascontresontorse.Jem’effondraicontrelui.Sonsouffleétaitaussisaccadéquelemienetjelâchailapoignéedecheveux

entremêlésdansmesdoigts.—Pardon,lâchai-jed’unevoixrauque.—Pourquoi?demandaWoods,leslèvrescontremoncou.—Pourt’avoirtirélescheveux.Undouxrirefitvibrersoncorpsetilléchalapeautendrequ’ilavaitmorduequelquesinstantsplustôt.—Pasdequoi.J’aiadoré.C’étaitsexy.Situasencoreenviedemetirerlescheveuxenhurlantmon

nom,netegênesurtoutpas.Jesentissonérectiontressaillircontremoietmoncorpsfrémissantetcomblésursautaenretour.Nous

n’avions pas terminé. C’était tout juste l’apéritif. Je balançai mes hanches contre lui, savourant lesélancements délicieux que je ressentais. Les mains de Woods se refermèrent sur mes hanches etm’immobilisèrent.—Arrête.Jemefigeai.Est-cequejeluiavaisfaitmal?Ilpritsoninspiration,puismesoulevapourmedégagerdesesjambes.J’avaispeut-êtrecriétropfort

etilpréféraitcontinueràl’intérieur.—Ilfautquejetravaille.Jeferaismieuxdeteraccompagner.Quoi?Meraccompagner?Jerestaiassisetandisqu’ilserelevaitetarrangeaitsesvêtements.Jene

bougeaipas.J’étaisentraindedigérercequisepassait.Ilbaissalesyeuxsurmoietunesortedegrimacetraversasonvisage.Avantquej’aiepul’interroger,il

remitmonsoutien-gorgeetmonhautenplace,puismetiraparlamain.

—Ilfautquejeteramène,insista-t-ilavantdes’emparerdesverresàvinetderentrer.Jelesuiviscommeunautomate.Ilposalesverressurlebaretattrapasesclés.Ilseretournaetme

sourit,puismontralaported’unsignedelatête.Onétaitvraimententraindepartir.Trèsbien.Monestomacsenoua.J’avaisfaituneconnerie.Avait-il

vucombienj’avaisenviedelui?Çaluiavaitfaitpeur?Ledésireràcepointmeterrifiait.Safacultéàmefaire sentir sibienme terrifiait. J’étaisprêteà toutpourqu’ilait enviede resterprèsdemoipluslongtemps. Retourner à l’appart me laissait seule face à une nouvelle nuit de cauchemars. À messouvenirs.JedésiraiscequeWoodsétaitcapabledem’offrir.Maisc’étaitimpossible.Ilétaitentraindesedébarrasserdemoi.

Woods

UnefoisDelladansmonpick-up,j’avaisl’intentiondetoutexpliquer.J’avaisremarquélaconfusiondanssesgrandsyeuxbleus.Maischaquefoisquej’essayaisdemelancer,jenetrouvaispaslemoyendeleluidiresansl’effrayer.Deplus,j’avaispeurqu’ellemecontredise,sachantqu’unsimpleregardsuppliantsuffiraitàmefaire

flancher.Monpénispalpitaitdouloureusementetlefaitdesavoirqu’elleneportaitpasdepetiteculotteetqu’elleétaittrempéeaprèsl’orgasmequejeluiavaisdonnémefaisaitbanderencoreplusfort.Pendant que je la touchais, je n’avais pensé à rien d’autre qu’à la jeter surmon lit pour la baiser

jusqu’àcequ’ellehurlemonnometmedisequ’ellem’appartenait.Aprèsqu’elleavaitjouisurmesgenoux,jesavaisquelemomentétaitvenudeprouver,àmoicommeà

elle,quejepouvaisêtrealtruiste.Cettesoiréeavaitétépourelle.Iln’avaitpasétéquestiondecequ’ellepouvaitfairepourmoi,maisuniquementdesonplaisir.Jenevoulaispasquecetterelationreposesurlesexe.IlyavaitplusqueçaavecDella.J’aimaissacompagnie.Jevoulaislaprotéger.J’étaistellementsubjuguéparsaprésencequej’enperdaistoutelucidité.Lareconduirejusqu’àl’appartdeTrippallaitmetuer.Jenevoulaispasqu’elledormelà-basdansune

chambreàcôtédelasienne,maisjenepouvaispasvraimentl’installerchezmoi.Çairaitbeaucouptropvite,etunefillecommeDellaprendraitlafuite.Jevoulaiséviterça.J’iraislacherchern’importeoùs’illefallait,maisautantnepasenarriverlà.Jevoulaisqu’ellerestepardésird’êtreavecmoi.Et être le genre demec pour lequel une nana nemet pas les voiles était plus difficile que je ne le

pensais.—J’aifaitquelquechosedetravers?La question deDellame tira demes pensées.On était déjà arrivés devant l’appartement deTripp.

J’avais tellement réfléchi à ce que je voulais lui dire que je n’avais pas pipémot.Mince. Elle étaitinquiète. Jegarai lepick-upetme tournaiverselle.Lepliquibarrait son frontme fitde lapeine. Jen’avaispasl’intentiondelatracasser.Jetendislamainetlissailapeaufroncéeaveclepouce.—Pasdutout.Tuétaisparfaite.Leplissementnebougeapas.Ellenemecroyaitpas.J’auraisdûluiexpliquer.Maisjen’arrivaispasà

trouverlesmotsjustes.—O.K.,situenescertain,dit-ellelentementavantdeposerlamainsurlapoignéedeporte.—Attends,jevaist’ouvrir.Jeteraccompagneàl’entrée.Ellem’observait,levisagetoujoursbarréd’incertitude.Sonexpressionétaitadorable.Jeluitendisles

mainset l’aidaiàdescendre.Mesyeux tombèrentsur la tacheparfaitementvisiblesursonentrejambe.Jetantunregardalentour,j’aperçuslaHarleydeTrippgaréeàcôtédelavoituredeDella.Jamaisdelavie.Ilétaithorsdequestionqu’ilvoieça.Jeplongeaisurlabanquettearrièreetenressortisunsweateràcapuche.—Enfileça,lançai-jeenlepassantsursatêteavantqu’elleaitletempsdeprotester.Elle m’obéit et glissa ses mains dans les manches. Le pull tombait à mi-cuisses, recouvrant

parfaitementsonshort.Jepoussaiunsoupirdesoulagement.—Pourquoijeporteça?Ellemedévisageaitcommesij’avaisperdularaison.Jeglissaiunemainautourdesatailleetl’attirai

contremoiavantdebaisserlatêtejusqu’àcequemeslèvresarriventàhauteurdesonoreille.

—Trippestlàetcettejoliepetitetachesurtonshortnes’adresseàpersonned’autrequ’àmoi.Unefoisàl’intérieur,enfileunvêtementample.Etpourl’amourdeDieu,metsuneculotte.Dellahochalatêteetjelalaissaipartirenreculantd’unpas.Ellesentaittropbon.Lavoirtoutepetite

dansmonsweatshirtn’arrangeaitrien.Mavergeraidesegonflaitdavantage.—Allez,file.Jevaisresterici.Sijet’accompagneàlaporte,jenepourraijamaisrepartir.Elleplantalesmainsdanslespochesavantdemonsweater.—O.K.Euh,jetevoisdemain,alors,balbutia-t-elleavantdetournerlestalons.J’attendis qu’elle soit rentrée avant de reprendre le volant. J’aurais dû la raccompagner jusqu’à

l’entrée,mais la voir chezTripp aurait fait surgir l’hommedes cavernes enmoi ; je l’aurais suivie àl’intérieuretnousauraisenfermésdanssachambre.C’étaitleseulmoyendelalaisserpartir.Lemomentétaitvenudegérerlasituationavecmonpère.Le froncement de sourcils demamèrem’attendait à la porte d’entrée. Elle alla droit au but, sans

prendrelapeinedemedemandercommentj’allais.—Tonpèreestdanssonbureau,dit-elleendésignantlecouloiravantdetournerlestalons.Laplupartdutemps,sijefaisaisexactementcequ’ellevoulait,mamèreétaitaffectueuseenversmoi.

Maissij’échouaisoulacontrariais,ellenesegênaitpaspourmefairepartdesonopinion.J’auraisdûêtrebienau-dessusdetoutça.Aprèstout,j’avaisvingt-quatreansetl’approbationdemamèreétaitunvestigedupassé.Pourtant,sonamourconditionneln’étaitpastoujoursfacileàdigérer.Jefrappaiàlaportedubureauetentraisansattendre.Detoutefaçon,ilétaitdéjàenrognecontremoi.

Jeletrouvaiassisautéléphone.Ilmefusillaaussitôtduregardpar-dessusseslunettes.—Biensûr.C’estaussimonavis.Woodsvientdepasserlaporte.Jevaisluiparleretvousrappelle

pourenvisagerlasuite,conclut-ilavantderaccrocheretdes’adosseràsonfauteuilenmegratifiantd’unregardméprisant.L’amertume de savoir que mon grand-père lui avait attribué le titre de vice-président et ce grand

bureauàlafindesesétudesnemequittaitpas.Ilsecomportaitcommesij’avaistantàprouveralorsquej’avais plus bossé que lui pour ce club. Il ne s’était jamais sali les mains. Il n’avait jamais géré lepersonnel.Etpourtantilvoulaitquejepaiemontribut.— J’espère que tu es venum’expliquer pourquoi tu fiches par terre tout ce pour quoi nous avons

travaillésousprétextequetupensesque«tuserasmalheureux».Foutaises!AucunhommedignedecenomneseraitmalheureuxavecunefemmecommeAngelinaGreystone.Il n’avait pas eu à travailler à l’œil. On ne lui avait pas imposé sa femme. Je serrai les dents en

réprimantunflotd’injures.Çaneserviraitàrien.—Jenel’aimepas.Ellenem’appréciepasbeaucoup.Jen’aipaspucontinuer.Jesuisdésolé,mais

mêmesijedésireardemmentlepostequ’onm’afaitmiroitercommeétantlemien,jenegâcheraipasmavienilasienne.Monpèresepenchaenavantetplantalescoudessursonbureau.—L’amourn’estpas laconditiond’unmariageréussi.L’amournedurepas.Ils’enva.Laréalité te

rattrapeet,encasdecoupdur,l’amourdisparaîtetilneteresteplusrien.Ilfautépouserquelqu’unquiveut la même chose que toi. Qui n’attend pas une bluette mais du succès. Angelina le comprendparfaitement.Toinon.Quandmagrand-mèreétaitmalade, jerendaisvisiteàmesgrands-parentsdèsqueje lepouvais.Un

jour, j’étais assis sur leporcheavecmongrand-pèrequiobservaitmagrand-mèreen traindepeindrel’une de ses nombreuses toiles. L’amour et l’affection sur son visage étaient sans ambiguïté. Il s’étaitalorsretournéversmoietm’avaitdit:—Ne passe pas à côté de l’amour d’une honnête femme, fiston.Quoi que te raconte ton paternel,

l’amourexiste.Jen’auraisjamaiseuautantdesuccèsdansmaviesanscettefemmequetuvoislà.Monépinedorsale.Laraisondetoutcequej’aientrepris.Unjour,ledésirdetefaireunnomcommenceraà

s’émousser.Toutcelaauramoinsd’importance.Maissitul’accomplispourquelqu’und’autre,quelqu’unpourquitupourraisdéplacerdesmontagnes,alorstuneperdrasjamaisledésirderéussir.Jenepeuxpasimaginerunmondesanselle.J’enseraisincapable.Je n’avais jamais repensé à ces mots jusqu’à aujourd’hui. L’homme qui avait élevé mon père lui

ressemblaitbeaucoupàbiendeségards.Àunedifférenceprès.Monpèrefaisaittoutpourlui-même.Sasoifdesuccèsétaitégoïste.Iln’étaitpasmotivéparl’amour.Mongrand-pèreavaitconstruitsonempireparamourpourlafemmequ’ilavaitépousée.Jel’avaisvudemespropresyeux.Jenevoulaispasêtrecommemonpère.Jevoulaisêtremongrand-père.—Nousneseronsjamaisd’accord,restons-enlà,conclus-je.Jesavaisquelamentiondesesparentslemettraitdansunecolèrenoire.Ilavait toujourspenséque

mongrand-pèreavaitprisdemauvaisesdécisions,bienqu’ilaitconstruitcetteentreprise.Monpèreeutunpetitsourirenarquoisetsecoualatête.—Non,nousn’enresteronspaslà,parcequec’estmoiquicommandeici.Situchoisisdenepasfaire

cequiestlemieuxpourleclubettonavenir,alorstun’espasprèsdeprendrelasuitedequoiquecesoit.Jenevaispastepromouvoirsijenepeuxpastefaireconfiancepourprendredesdécisionsavisées.Tonposteactuelestassurépourlemoment,maiscelaneveutpasdirequequelqu’undeplusfiableneteremplacerapasunjour.Non seulement il me retirait le boulot pour lequel j’avais travaillé dur, mais il menaçait aussi ma

situation.J’avaisenviedeluihurlerd’allersefairefoutreetdemetirer.Jefiniraispeut-êtreparlefaireun jour. En attendant, par respect pour l’homme qui avait bâti cette entreprise avec le désir de latransmettre auxKerrington de génération en génération, je décidai de rester. Cet homme-là avaitmonrespect.Enrevanche,letypeenfacedemoinem’eninspiraitaucun.Ets’ilmepoussaittropfort,j’allaisfinirparmecasser.Auquelcasjen’étaismêmepassûrdeluimanquer.

Della

J’enfilaiunjoggingetunT-shirtavantderejoindreTrippdanslesalon.Jepréféraisd’abordréfléchir.J’essayaisencoredecomprendrecequis’étaitpasséetcequiavaitdépluàWoods.Ilm’envoyaittoutessortesdesignauxcontradictoires.Soitjeledégoûtaisetilnevoulaitpluscoucheravecmoi,soitilétaitdéjàprêtàsedébarrasserdemoi.Jenesavaispastrop.Pourtant,ilm’avaitpassésonsweateretditdemettredesvêtementslarges.Quepenserdeça?Toutdesuiteaprèsmonorgasme,ilavaitvouluenfiniravecmoi.Surlarouteduretour,j’avaisréussi

àmeconvaincrequej’avaiscriétropfortetquejeluiavaisfaitmalenluitirantlescheveuxcommeunemalade.Etpuis,ilavaitpeut-êtreétéaussigênéquemoiparlatachesurmonshort;c’estpourcelaqu’ilm’avaitcouverte.IlnevoulaitpasqueTrippmevoieetcomprennequienétaitàl’origine.Jeramassaison sweater à capuche et l’enfilai. Il avait l’odeur deWoods.Çameplaisait. J’aurais voulu le sentirdavantagecesoir.Lesentimentderejetquej’avaisespérééviterétaitentraindeprendreracine.JepouvaisenparleràTripp.Sansrentrerdansledétail,jepouvaisdemanderunpointdevuemasculin

surlaquestion.Tripplevalesyeuxdesonlivreetmesourit.—TuportesdéjàlesfringuesdeKerrington.Lavache,ilneperdpasuneminute,celui-là.Jepoussaiunsoupiretmelaissaitomberdanslecanapéenfacedesonfauteuil.—Fautpassefierauxapparences,crois-moi,lâchai-jed’unevoixunpeuplusabattuequeprévu.—Ohoh.Qu’est-cequinevapas?demandaTrippen reposant son livresur la tableàcôtéde lui

avantdeseredresser.Jepesaimesmots;jevoulaissonopinionsanstropendire.—WoodsarompuavecAngelinaetnousnoussommesretrouvéspourenparler.(Trippopinaduchef:

illesavaitdéjàmaisjem’emmêlaisunpeu.)Onadéjeunéensembleetilm’aexpliquéqu’iln’étaitpasheureux avec elle. Il ne veut pas qu’on le force à épouser quelqu’un. Et puis on est allés chez lui. Ilvoulaitmemontrersamaison.J’aiadoré.Jem’interrompisetmemordislalèvreinférieureenréfléchissantàlasuitedemonrécit.—Iln’amènejamaisdefilledanscettemaison.Elleétaitàsesgrands-parents,c’estunlieusacré.Je

n’ysuisalléqu’àdetrèsraresoccasions.LaremarquedeTrippretintmonattention.—Lespeinturesdesagrand-mèresontencoreaccrochéesauxmurs.Ellessontmagnifiques.Tripphaussalessourcils.— Il t’a parlé d’elle ? (Je hochai la tête et Tripp croisa les bras sur sa poitrine en souriant.)

Sérieusement,mabelle,tuluiasfaitquoi,àKerrington?Jemeposailamêmequestion.—Jecroisqu’ils’estrenducomptequem’amenerchezluiétaituneerreur.Je…nous…ças’estun

peuéchauffésurleporcheetpuisils’estarrêtéetilm’areconduiteici.Enmedisantqu’ilavaitdestrucsàfaire.Commeça.Sansexplication.C’étaitbizarre.Trippfronçalessourcilsetrestaassisquelquesinstantsensilenceavantdem’interroger:—Vousavezdéjà…couchéensemble,non?C’estcequej’avaiscrucomprendre.(Jehochailatête.)

Maispasaujourd’hui.—Non,ilétaitprêtàsedébarrasserdemoi.Trippsefrottalementonetsecoualatête.

—Jenesaispascequisetrame.Çaneressemblepasaumecquejeconnais.(Ilsepenchaenavant,lescoudessurlesgenoux.)Çava?Çat’achamboulée?J’étaisunpeuperdueetblessée,maistoutallaitbien.Jesouris.—Çava.Jenesuispassûredecomprendrecequis’estpassé.Jen’arrêtepasdemedirequej’aidû

faireunebêtise.TripptenditlamainettirasurlamanchedusweaterappartenantàWoods.—Tul’asdepuisquand?ImpossibledeluiexpliquerpourquoiWoodsm’avaitfaitporterça.C’étaittropindiscret.—Euh,quandilm’aramenéeici.Ilmel’amisavantdemerenvoyerici.UnlégersourireplanaitsurleslèvresdeTripp.—Ilavaitvumabécane?(Jehochailatête.)Qu’est-cequ’ilt’aditquandilt’amislepull?—Ilm’aditderentreretd’enfilerdesvêtementsamples.Trippéclataderireenselaissantretomberdanssonfauteuil.Unefoissonfourirepassé,ilconsidéra

monjoggingpuisrelevalesyeuxsurmoi.—Ettuasfaitcequ’ont’ademandé.(Jehochailatêtedeplusbelle.)Tuluiplais.Ildoitflipperun

peuetçaluifaitfairedestrucsbizarres,maistuluiplais.Lesfringueslarges,c’estpouréviterqu’ilnemeviennedes idées en te regardant.Kerrington est enmode possessif.C’est une première, et c’est àmourirderire.JecroisquejevaisluienvoyerunSMSpourluidirequ’onvasebaignerpourvoirencombiendetempsilramènesafacedejaloux.—Non,nefaispasça!Jecroisqu’ilallaitvoirsonpère.—Jeplaisantais,merassuraTrippensouriant.C’estmarrant,c’esttout.Ilsetut.Jedétestaicesilencepesant.J’étaisnéanmoinssoulagéequ’ilpensequeWoodssecomportait

bizarrementparcequ’ilétaitpossessif.Jen’auraispeut-êtrepasdû,maisjemesentaistoutémoustillée.—J’imagineque,lemomentvenu,jeprendrailarouteensolo,conclutTripp.Jen’étaispasencoresûre.—ÇadépenddequandtuparsetsiWoodsveutquelquechosedesérieuxavecmoi.Sic’estjusteune

passade,jefileraiassezvite,moiaussi.

Cettenuit-là,jemeréveillaidenouveauenhurlantdanslesbrasdeTripp.Lescrisesfoutaientenl’airmon sommeil et le sien. Je ne lui en voudrais pas de lever le camp rapidement pour pouvoir dormirtranquille.Mes yeux étaient gonflés d’avoir tant pleuré. Parfois les cris semélangeaient aux sanglots.C’estcequis’étaitpassélanuitdernièreet,cematin, j’avaispasséuneheuredanslasalledebainsàcamouflermestraitsbouffissouslemaquillage.Jenesuispassûrequeçachangequoiquecesoit.—Poulette, lesclientesdelahuitm’ontdemandédelesservir,sinonj’auraispris lasixà taplace,

m’expliquaJimmyenentrantdanslacuisine,lesyeuxécarquillés.—Qu’est-cequisepasseàlasix?demandai-jeennouantmontablier.—Jenesaispassi tuesaucourant,maisWoodsacasséavecl’héritièrecoincéedesGreystone.À

monavis,papaestfurax.Bref,l’héritière,mamanculpincéetMmeKerringtonsontassisesàlasix.Cettepetitecliquenemeditrienquivaille.Oh non. Je ne voulais pasme farcir ces trois-là,mais je n’avais pas le choix.Au service du petit

déjeuner,iln’yavaitqueJimmyetmoi.Lerenfortallaitarriverpourledéjeuner.—Jet’aifaitflipper.Jesuisdésolé.Çavaaller.C’estpastoiquilesasmisesenrogne,c’estWoods.

Tuleursersleursplatsettoutvabiensepasser.Ilavaitraison.Ellesnemeconnaissaientmêmepas.Enplus,jenesavaispasvraimentoùj’enétais

avecWoods,vulesévénementsdelaveille.—Jevaism’ensortir,lerassurai-jeenemportantmonplateaudeverresd’eauverslatablequatre.Une fois la quatre servie et les commandes prises, je me dirigeai vers la six. Les trois femmes

semblaientengrandeconversation.Jefustentéedeleurlaisserunlapsdetempssupplémentaireavantdelesinterrompre,maisautantéviterdelesénerverdavantageetdejeterdel’huilesurlefeu.—Bonjour,lançai-jed’unevoixressemblantàuncouinement.MmeKerringtonmejetaunregardexcédé.Jenel’avaisjamaisrencontrée,maisjereconnuscesyeux

d’unmarronsombre.Onnepouvaitpassetromper:c’étaitbienlamèredeWoods.—Uneeaupétillante.—UneÉvianavecunverredeglaçons,enchaînaAngelina.—Lamêmechose,m’informalatroisièmedame,quidevaitêtresamère,sansprendrelapeinedeme

regarder.Je fonçai dans la cuisine et pris une profonde inspiration. C’étaient des clientes comme les autres.

Inutiledepaniquer.Jepréparaileursboissonsetlesleurapportai.—Ilabesoindetemps.Iln’ajamaisappréciéqu’onluidictesaconduite.Cen’estpastoi,machérie.

C’est un homme, et il a le sang chaud comme pas deux. Il a envie de faire les quatre cents coups,expliquaitlamèredeWoodsentapotantlamaind’Angelina.—Jenecroispasquecesoitleproblème.Ilnem’aimepas.Ilditqu’onseraitmalheureuxensemble.Il

apeut-êtreraison.Detouteévidence,onneveutpaslamêmechose.—Oui, eh bien, poursuivit Mme Kerrington avec un soupir, son père est terriblement déçu. Nous

espérionsqu’ilpenseàautrechosequ’à lui-même,pourune fois.Maisc’estungarçongâté. Iln’enatoujoursfaitqu’àsatête.C’estmafaute,bienévidemment.J’auraisdûluidirenonplussouvent.Jedéposailesverresd’eausurlatableenessayantdemefaireaussidiscrètequepossible.—Apportez-nousunplateaudefruitsetassurez-vousqu’ilcontiennedukiwi.Jehochailatêteavantderepartir.Jevoulaisécouterdavantage,maisilvalaitsansdoutemieuxéviter.

Jevoulaislesprendreàparti.Woodsn’étaitpaségoïste.Cen’étaitpasungossequifaisaituncaprice.C’était un adulte qui en avait assez d’être manipulé. Et pour qui se prenait Angelina ? « De touteévidence,onneveutpaslamêmechose.»Avecsesgrandsairs.Quelleconnasse.Jeclaquailaportederrièremoietpoussaiungrognementexcédé.—Ouhlàlàmapuce.Tum’asl’airprêteàendécoudre,observaJimmyendisposantunecommande

sursonplateau.—LamèredeWoodsestexaspérante.Etcette…cetteespècede…Lavache,cequejesuiscontente

qu’iln’épousepascettefemme.Elleesttellement…j’aienviedelabaffer.Jimmy semit à ricaner. Tout à coup, la porte derrièremoi se referma et il ouvrit les yeux grands

commedessoucoupes.J’euspeurdemeretourner.—Jedoisreconnaîtrequejepartagetonavis,commentaWoodsd’unevoixamuséeetsexy.Jemeretournaiet l’embrassaiduregard.Sescheveuxnoirsétaientendésordreetson jeanépousait

parfaitementseshanches.Plusquejamais,sonélégantechemiseblanchefaisaitressortirsonteintmat.—Jesuisdésolée,balbutiai-jetandisquemoncœurbattaitlachamade.Jeregardaisamainenrepensantàlasensationqu’ellem’avaitprocuréesousmonshortlaveille.—Nesoispasdésolée.Jesuisdumêmeavisquetoi.Jelevailesyeuxpourcroisersonregard.Iltrouvaitamusantquejen’appréciepassamèreetsonex-

fiancée.Çaselisaitdanssesyeux.— Bonjour, enchaîna-t-il en jetant un œil derrière moi au personnel de cuisine absorbé par notre

conversation.—Bonjour,répondis-je.—Jevaisleurapporterlesfruits.—Ça ne peut pas être pour elles, je n’ai pas encore passé la commande, objectai-je tandis qu’il

s’éloignaitaveclesfruits,dontlekiwi.—C’est bienpour elles.Mamère commande rarement autre chosepour sonpetit déjeuner.Tout le

mondelesaitencuisine.Surce,ilfranchitlaporte.—Lacommandeestprêtepourlaquatre,criaHarolddepuislafriteuse.J’évitaide regarder la tableà laquellese trouvaientWoodsetAngelina. Je l’entendaisparleret,du

coindel’œil,jevisqu’ils’étaitassisparmielles.Monestomacsenoua.Jeparvinsànepasraterleservicedelaquatre.Ilmefallutensuitetoutelavolontédumondepourne

pasfoncermecacherencuisineafindem’épargnertoutça.MaismêmesiWoodsleuravaitapportéleursplats, je restais laserveuse.Jedevaism’assurerqu’ellesn’avaientbesoinderien.SurtoutsachantqueWoodss’étaitattabléavecelles.—Désirez-vousautrechose?demandai-jedirectementàsamère.Ils’étaitassisàcôtéd’Angelinamaisj’étaisincapablederegarderdansleurdirection.—Encoredel’eaupétillante.Maiscettefoismettezmoinsdeglaçonsetajoutezquelquesframboises,

exigea-t-elle d’une voix agacée provoquée soit par la présence deWoods soit par la qualité demonservice.Jehochailatêteetretournaiencuisine.Jimmym’attendait,lesmainssurleshanches.—C’estquoicebordel?—Quoidonc?demandai-je,perplexe.Jimmyagitalamainverslaportepuisdenouveauversmoi.—C’estquoicecinémaentretoietnotrepatron?Nemedispasquec’estàcausedetoiqueWoodsse

lajouerebelleavecsesparents.Çavamalfinir,siffla-t-ilenprenantsonplateau.—Jenecroispas,répondis-jeensecouantlatêted’unairincertain.—Tunecroispas?répéta-t-il.Sansrire,mapoulette,sic’étaitàcausedetoi,tulesaurais.Jenesais

pastropquoipenserdetoutça,maisjetemetsengarde:c’estunKerrington.Faisgaffe.Jimmy sortit de la cuisine d’un pas nonchalant. À l’entendre, être un Kerrington était un crime. Je

n’avaisjamaisrienperçudemauvaischezWoods.Jepréparail’eaugazeuseavecmoinsdeglaçonsetdesframboisesfraîchesquej’apportaiàlamèrede

Woodsenévitantsoigneusementdeleregarder.Àmonapproche, ladiscussions’interrompit, laissantplaceàunsilencepesant. Jenedemandaipas

monreste.Jem’éclipsaiprendrelacommandedelaune,quivenaitdes’installer,etmeconcentraisurlesautresclients.Lorsquejeretournaiensalledixminutesplustard,Woodsraccompagnait les troisfemmes.Lesvoir

tous lesquatre ensemblemecontrariait.C’est çaque Jimmyvoulait dire ?Qu’il finirait par retourneravecelle?Jeréussisàbouclermonserviceet,unefoismontablierdanslepanieràlinge,j’avaishâtedem’en

aller.—Della,M.Kerringtonademandéquetupasseslevoirdanssonbureauavantdepartir,m’informa

Juandepuisl’arrière-cuisine.Ohmerde.—Merci,lançai-jeenm’acheminantverssonbureau.Peut-êtren’avais-jepasservisamèrecorrectement?Jedétestaiscesentiment.J’avaisenvied’êtreà

lahauteuretjen’étaisjamaissûred’yarrivervraiment.Jedétestaisl’idéequ’ilsoitrepartiavecelles.Pouralleroù?L’avait-ilembrassée?Luiavait-ildemandépardon?Était-ildenouveaufiancé?Allait-ilm’annoncer que sa décision prise hier était une erreur ? Peut-être quema réaction sous le porche etl’impossibilitédemecontrôleravaientfiniparlerebuter.Je frappai à la porte et attendis. Je priai pourqu’il ne soit pas là et que je puisse filer…Laporte

s’ouvritetWoodsmetiraàl’intérieuravantdelaverrouillerderrièreluid’unclaquementsec.

Enunclind’œil,ilétaitsurmoi.Sesmainss’agrippèrentàmeshanchesetilmordillagoulumentmalèvreinférieure.Salangueenvahitmabouchesansaucunedouceur.Ilsoulevamajambeetl’enveloppaautourdesatailleavantdeprendremesfessesdanslecreuxdeses

mainstoutencontinuantàassaillirmabouchedesesdélicieuxmouvementsdelangue.J’enroulaimesbrasautourdesoncou.Jenem’attendaispasdutoutàcetaccueil,maispeuimporte,je

meperdisdansleplaisir.— Tu as mis un pantalon large hier à la place de ton short ? demanda-t-il tandis que sa bouche

caressaitlecreuxdemoncou.—Oui,soufflai-je.—Trippn’arienvudetatachehumide?Sesquestionsoséesmefirentgémiretjemelovaicontrelui.—Non,j’aiportétonsweateretunjogginglerestedelajournée.—Bien,grogna-t-ilavantdemeporterjusqu’àsonbureau.Jeveuxygoûter.Maintenant.Avant que j’aie pu comprendre de quoi il parlait, il remonta ma jupe, saisit ma culotte qu’il tira

tellementfortquelebruitdutissudéchirémefitsursauter.Ilécartalesous-vêtementetlelaissatomberparterre.Puisilagrippamespieds,pliamesgenouxetposamestalonsauborddubureau,melaissanttotalementouverte.Jehaletaid’impatiencetandisque,àgenoux,ilentrepritdemordillerlehautdemescuisses.Jenepusm’empêcherdemetortillerenretenantmarespirationentremesdentsserrées.Salangueglissaenfinsurmonentrejambehumide.J’auraisdécollédubureaus’ilnem’avaitpastenu

fermement les hanches. Il commença à aller et venir avec sa langue et je me contractai avidement àchaquepénétrationpourleretenirunpeupluslongtemps.—J’avaisoubliétongoûtmerveilleux,murmura-t-ilcontremonclitoris.—OhWoods,ohoui!Mes hanches se mirent à trembler de manière incontrôlable. Je ne maîtrisais plus rien. Sa bouche

caressa l’intérieurdemacuisseet je reposai la têteenarrièrede frustration.Lespulsationsentremesjambesétaientpresquedouloureuses.—Woods,jet’enprie,implorai-je.Il releva la tête et l’expression de son regardme révéla qu’il était aussi excité quemoi. J’adorais

l’idéequ’ilaimeautantmegoûter.—Tuvasjouirdansmabouche?demanda-t-ilenpassantsalanguesurmafente.—J’enaibesoin,haletai-je.—Cette joliepetite chatte abesoinde jouir ?poursuivit-il enme léchant longuement tandisque je

gémissaisdeplaisir.Jenepeuxpasluidirenon,c’esttropbon.Ilposaunemainsurmaboucheavantdesucermonclitorisetdeplongerdeuxdoigtsdansmonorifice

trempé.Ses doigtsmepénétrèrent d’avant en arrière tandis que sa langueme chatouillait.Mon cri futétoufféparsamain.Ilnelaretiraquelorsquemoncorpstremblantnesupportaplusl’attentionportéeàmachair fine. Je le repoussai justeassezpour l’attirerversmoietenroulermes jambesautourde lui.Cette fois-ci, j’avais réussi ànepas lui tirer lescheveuxmais j’avaishurléet léché samain.Étais-jealléetroploin?—Jevoulaisquetouttourneautourdetoi.Jevoulaisteprouverquetuétaisspéciale,maisputaince

quej’aienvied’êtreentoi.Jecroisquejevaisexploser,murmuraWoodscontremonépaule.Quoi?C’étaitun traitementde faveur?C’estpourcelaqu’ilm’avait laisséeenplan laveille? Je

préféraisnepastropypenser.J’envoulaisplus.Jecommençaidoucementàredescendre.Jedéboutonnaisonjeanquejefisglisserenmêmetempsquesoncaleçon.—Jet’enprie,maintenant,jeteveuxenmoi,suppliai-je,désireusedecetteproximitéentrenous.Ilpoussaungrognementetextirpaunpréservatifdesapoche.Sonregardcroisalemienetilsourit.—Jel’aimislàavantdeteconvoquerdansmonbureau.Jen’avaispasl’intentiond’enavoirbesoin,

maisjen’étaispassûrdepouvoirm’enempêcher.J’étaistellementsoulagéequ’ilseprotègequejenerelevaipas.Ilm’écartalesjambesetmecontempla.J’étaisfrémissante.—C’esttellementbeau,murmura-t-ilavantdemecaresserduboutdesdoigts.Jel’observai,totalementfascinée,jusqu’àcequ’ilempoignesonsexeépaisetappuieleglandcontre

machairtendre.Sarespirationsemuaensifflementtandisqu’ilmepénétraitlentement.—Tuestellementétroite,susurra-t-il.Je soulevaimeshanches pour l’accueillir plus profondément et il glissa enmoi jusqu’àme remplir

entièrement. Je commençai à aller et venir sous lui. Il était tellement doux et délicat. Je n’avais pasl’habitudedeçaaveclui.Jedécidaidel’encourager.Ilavaitdécrétéquejedésiraisça,maisjenesavaispastroppourquoi.Je

n’avaisjamaisétécalmeoumesuréedansmesréactions.Jeretiraimachemiseetdégrafaimonsoutien-gorge tandis qu’il se figeait et me regardait me dénuder. Je connaissais son point faible. Ses yeuxs’arrondirentd’excitation.Jeposaimesmainssurmesseinsetcommençaiàfaireroulermestétonsentremesdoigts tandisqu’il restait immobileà l’intérieurdemoi. Jesentais sonpénisse tendre,cequimedonnaencoreplusdepouvoir.—Çateplaît?demandai-jeenarquantlesreinsetentirantfortsurmestétons.—Ohoui, putain, j’adore ça, répliqua-t-il avant que sa bouche se referme surmon sein et que ses

hanchessemettentenbranle.J’écartaidavantagelesjambesetmelaissairetombersurlesmains,lapoitrinetendueverslui.—Plusfort,Woods,j’enaibesoin,plusfort.Danssonregard,unelueursauvageremplaçaleplaisircontrôlé.Sesmainsagrippèrentmeshancheset

ilsemitàaccélérerlemouvement,lesyeuxrivéssurchaquetressautementdemesseins.—C’estassezfortcommeça?demanda-t-ildansunmurmureétranglé.—Plusfort,répliquai-je.Ilseretira,mesoulevaetmeretourna.—Accroche-toiaubureau,ordonna-t-iltandisqu’ilmetiraitleshanchesenarrièreetmeremplissait

denouveaud’unviolentcoup.C’estassezfortpourtoi,machérie?Ilmechevauchaparderrière.Jem’agrippaiaubureauetrejetaimatêteverslehaut.J’approchaid’un

nouvelorgasme,quipromettaitd’êtreencoreplus intense.Lesentirà l’intérieurdemoidécuplaitmonplaisir.Uneclaquesonoremesurprit,suivied’unedouleurcinglante,puissamaincaressalapeauqu’ilvenait

defesser.Oh.Çam’avaitplu.—Ceculesttellementbeauaveclamarquedemamain,grogna-t-il.Jemepressaicontre luiet il fitdemêmesur l’autre fesse.Jegémisetcontractai lesparoisdemon

vaginpourleserreràl’intérieur.—Putain,bébé!s’écria-t-il.—Jevaisjouir,hurlai-jetandisquel’euphoriefusaitdansmesveines.LamaindeWoodsse refermasurmescris tandisqu’il tremblaitderrièremoienscandantmonnom

sansrelâche.Soncorpstressautaplusieursfoisàl’intérieurdumien.Nous restâmes immobiles quelques instants, puis nos corps se relâchèrent, nous laissant atterrir. Il

libéramaboucheetjesentisunfiletdebaiserslelongdemondos.—Délicieux.C’esttoujoursdémentielavectoi,Della.Ma poitrine se gonfla d’émotion. C’était tout aussi bon pour moi, mais, vu que je n’avais couché

qu’avectroistypesentout,j’avaispeudematièreàcomparaison.Ilseretiralentement,provoquantchezmoiunultimesoubresaut.Puisseslèvresseposèrentsurmes

fesses,embrassantlapeauqu’ilavaitfrappéequelquesinstantsplustôt.S’ilcontinuaitàêtreaussidoux,

jen’allaisplusjamaislelaisserpartir.—Siparfaite,murmura-t-ilcontremapeaubrûlante.Je jetaiunœilpar-dessusmonépauleetsourisen ledécouvrantàgenouxen traind’embrassermon

cul.—Çam’aplu.Tun’espasobligédelecouvrirdebaisers.Ilmefitunlargesourireetléchavivementmapeau.—J’aimebienvoirl’empreintedemamain.Tuportesmamarque.Jegloussaiderireet ilserelevaenmecaressant tout lecorps.Sesdeuxmainss’arrêtèrentsurmes

seinsqu’ilsoupesa.—Ceux-làaussi, il fautque je lesmarque. Jenesaispasencorecomment faire,memurmura-t-il à

l’oreille.(J’adoraissescaresseset laissaimatêteretombersursonépaule.)Jenepeuxpaslesfesser.Peut-êtrelesmordre,dit-ild’unmurmurerauquequimefittrembler.Çateplaît.Tuveuxquejelesmorde? Tu es tellement sexy, Della. Tume fais perdre la tête. Làmaintenant, j’ai simplement envie demeglisserentoietd’yrester.Tuvasmetuer,bébé.Jesourisenmonforintérieuretmeretournaidanssesbras.—Situcontinuesàparlercommeça,jenevaispastarderàtesupplierderecommencer.—Déjà?(Jehochailatête.)Jen’aiqu’unseulpréservatif,ici,dit-ilenlâchantunjuron.C’étaitmon

préservatifdesecours.Uncoupàlaportenousempêchadecontinuer.—Woods?Trippsetenaitdel’autrecôtédelaporte.Woods attrapa mon soutien-gorge et entreprit de me rhabiller. Je voulus l’aider mais il était plus

rapide.Unefoismachemiseenfilée,ilrajustamajupeetpassasonjean.—Ouais,répondit-ilensepassantunemaindanslescheveuxetenmegratifiantd’unclind’œil.Il ouvrit la porte. Tripp pénétra dans le bureau. Ses yeux tombèrent sur moi puis se posèrent sur

Woods.—J’allaispartir,annonçai-jeavecunsourireforcé.JelusdansleregarddeTrippqu’ilsavaitexactementcequivenaitdesepasser.—Jet’appelleplustard,enchaînaWoods.Jelefrôlaienpassantethochailatête,lesyeuxrivéssurlasortie.

Woods

EnregardantDellas’éclipser,jemedemandaisij’avaisbienfaitdelaisserTrippnousvoirainsi.Elleavaitlescheveuxtoutébouriffés,leslèvresenfléesetelletranspiraitl’attitudedelafemellecomblée.JevoulaismontreràTrippqu’ellem’appartenait.Qu’ellevoulaitm’appartenir.Jen’auraispeut-êtrepasdû.Jen’avaispasréfléchiàlaréactiondeDella.—J’imaginequeçadissipelaconfusiond’hier,observaTrippenrefermantlaporte.Commentça?—Quelleconfusion?Trippeutunhaussementd’épaulesetselaissatomberdansundesfauteuilsencuirdel’autrecôtéde

monbureau.Puisilarquaunsourcil.—Rassure-moi,vousn’avezrienfaitsurcettechaise?Jelevailesyeuxaucieletm’assisauborddemonbureau.—Tuveuxdirequoiquandtuparlesdeconfusion?—Je parlais d’hier quand tu l’as laissée en plan, totalement paumée.Et,malgré ça, elle est restée

docilementassisedanssonjoggingettonputaindesweatertoutelajournéeaprèsavoirdormiavec.Elleavaitdormiavecmonpull?J’esquissaiunsourirelorsqu’undétailmemontaaucerveau.—Jepeuxsavoircommenttusaisdansquoielledort?répliquai-jed’unairrenfrogné.Trippinclinalatêtesurlecôtéetmedévisagea.Iln’essayamêmepasdesedéfendre.—Est-cequetu laconnaisvraiment?Outu tecontentesde labaiser?Parcequ’elles’estdéjàfait

entuberdanslesgrandeslargeursunefoisdepuisquejelaconnaisetjepensequeturisquesdel’anéantir.Lesangbouillonnaitdansmesveines.J’étaisàdeuxdoigtsdelecogner.Etquil’avaitmaltraitée?—Faisgaffeàcequetudis.Jemecontrefousdesavoirquituesouquijesuiscenséêtre.Etçaveut

direquoi,«elles’estdéjàfaitentuber»?Soudain, le souvenir de Jace dansmon bureaume racontant qu’elle avait eu une histoire avec son

patronmerevintàl’esprit.Ilavaitditquoi,déjà?Tripplevalesdeuxmains.—Calme-toietécoute-moi.Merde,depuisquandtuescolériquecommeça?—Dis-moicequis’estpasséavecsonancienboss.CeluiàDallas.—Cesalauds’estfoutudesagueule,commençaTrippenserenfrognant.Ilestmariéetsafemmeest

enceinte.Dellal’ignoraitparcequ’ilneportepasd’allianceetilnevajamaisaubar.Elleétaitnouvelleetluisepointait tardlesoiretflirtaitunpeu.Puisilacommencéàpasserlachercherdeplusenplussouvent.Lebarestgrand.Personneneposedequestions.Jel’avaisdéjàvufricoteravecdesserveusesmaisjen’étaispassûrquecesoitvraimentlecasavecDella.Jusqu’àcequesafemmedébarque.Dellaétaitplusfurieusequetriste.C’estpourçaquejel’aienvoyéeici.Iln’avaitpaslepouvoirdel’anéantir.Pascommetoi.Sonancienpatronétaitmarié.Pasétonnantqu’ellesesoittenuesoigneusementàl’écartquandj’étais

fiancé.Elleavaitpeurquel’histoireneserépète.J’étaisuneordure.—Jeneluiferaipasdemal,promis-je.—Iln’enfaudraitpasbeaucoup.Samaniederemettreçasurletapiscommençaitàmetapersurlesnerfs.—Qu’est-cequetuveuxdire?L’avait-ilvuependantunedesescrises?

—La nuit, elle hurle. Toutes les nuits elle crie comme si quelqu’un la tabassait. C’est carrémentflippant.Enplus,elleneseréveillepas.Riendecequejefaisneparvientàlacalmer.Parfois,elleserallongeetresteendormie.Etmoi,jel’observeavechorreur.J’essaiedelaprendredansmesbrasetdel’apaiser lorsqu’elle se réveille,mais ça ne sert jamais à rien. Elle tremble, çame fend le cœur. Jen’arrivepasàarrangerleschoses.Toutcequejesais,c’estqu’elleaunsacrémerdieràgérer.Jenesaispascequec’estnid’oùçavient,maisçalahante.Situesjustelàpourtel’envoyer,jeserairavidemebattreavectoi.Parcequec’estpaslegenredenanaqu’onpeutmenerenbateau.Ellen’estpasassezfortepourça.J’avaisenviedevomir.Monestomacétaittellementserréquejen’arrivaisplusàbouger.Ellehurlait

lanuit.Laterreurglacéequej’avaisvueàlasoiréeétaitdéjàbienflippante.Elles’étaitdésespérémentagrippéeàmoi.J’avaiseupeurqu’ellen’affronteça touteseule.Jesavaisqu’elleétaitenproieàdescauchemars.Mapoitrineetmesyeuxmebrûlaient.C’étaithorrible.Jedétestaislasavoirtourmentée.Jevoulaisyremédierettoutarrangerpourelle.Je tournai les talons et m’approchai de la porte. J’allais la retrouver. Il fallait qu’on parle. La

prochainefoisqu’elleseréveilleraitenhurlant,jeseraisàsescôtés.Trippn’arrivaitpeut-êtrepasàlaréconforter, mais moi j’y parviendrais. Je ferais fuir ses cauchemars. C’était la seule solution. Je nepouvaispasvivreensachantqu’ellesouffraitautant.—Oùvas-tu?interrogeaTripp.—Lachercher.—Tuessûrquec’estlabonnefaçondet’yprendre?Décidémenttunelaconnaisvraimentpas:situ

luifaispeur,ellepartira.Prendsunmomentpourréfléchir.Tuveuxl’aider?Trèsbien.J’ensuisravi.Elle a besoin de quelqu’un.Elle ne souhaite pas que ce soitmoi et, honnêtement, je ne sais pas si jeserais capable de gérer la situation. J’aimes propres démons.C’est toi qu’elle veut.Elle a serré tonsweatertellementfortlanuitdernièrequandelles’estréveillée,levisageenfouidedanspourtrouvertonodeur,queçam’ainquiété.Jenet’imaginaispasl’aimerassezpourfairefaceàtoutecettefolie.Elleestsacrément sexy. Jepensaisquec’était çaqui t’attirait.Mais si tu tiens suffisammentà ellepour restersachantqu’elleadessoucis,alorstrèsbien.Mevoilàsoulagé.—Jeferaicequ’elleattenddemoi.Jenepeuxpasvivresanselle;j’aiessayé.Jesuismordu.Età

deuxdoigtsdeperdrelatêteparcequejenesaispascommentl’aider.J’aibesoindelaretrouveretdelaserrerdansmesbraslerestedelajournée,c’esttout.J’aibesoindelasavoirensécurité.—Jenesaispassielleestprêteàcequetusachestoutça,intervintTripp.Elleapeurquetun’aies

plusenvied’ellesitudécouvressesproblèmes.Quisontdesproblèmesémotionnelsdetaille.Ilfautyallermollo.Nevapas luibalancer toutceque tusaisen t’attendantqu’elle leprennebien.Ellem’envoudraàmortdetel’avoirditetseraterrifiéeàl’idéequetut’enailles.Etelleprendralesdevants.Elleprendrasesjambesàsoncou.C’estcommeçaqu’ellefonctionne.Jedétestaiscettesituation.Etpourtant,ilavaitraison.—Qu’est-cequejedoisfaire?demandai-je.Ilfallaitquequelqu’unmemontrelechemin.Jenepouvaispaslaperdre.— Quand elle ira se coucher ce soir, je t’appellerai. Viens dormir sur le canapé. Quand elle

commenceraàhurler,tuserassurplace.Elleverraquetun’aspaspeuretqueturestesàsescôtés.Trèsbien.C’étaitfaisable.Jepouvaisattendrejusqu’àcesoir.Maisj’allaisquandmêmelaretrouver.

Ne serait-ce que pour la serrer dans mes bras. Sans lui dire pourquoi. J’avais besoin de m’assurerqu’elleallaitbien.

Tripp ouvrit la porte et me laissa entrer. J’attendais sur le parking lorsqu’il m’avait appelé deuxminutesplus tôtpourm’informerqu’elle s’était endormie. Jene savaispascombiende temps les crismettaientàveniretjenevoulaispasqu’elleseretrouvedanslesbrasdeTrippcettefois-ci.Plusjamais.

—Tuétaisdéjàici?—Ouais.—C’estpastoiquil’asramenéeduboulotilyadeuxheures?—Si.—T’esjamaisreparti?dit-ilenriant.—Non.Trippavaitl’airamusé.—Ilyauncoussinetunecouverturesurlecanapé.Jevaismecoucher.Ilest tardet j’aibesoinde

sommeil.Lanuitdernièreaétédure.Inutiledeluidemanderpourquoi.Çamerendaitfoudemedirequejen’avaispasétélà.Qu’elleavait

souffertsansquejesoisaucourant.—Merci.—Paslapeinedemeremercier.Tun’asencorerienvu.Tuvaspeut-êtremedétesteraprèscoup.Tripp ne savait pas de quoi il parlait. Je l’avais tenue dans mes bras quand elle avait totalement

décrochéàlasoirée.Sonregardvided’expressionm’avaitfaitpeur,maisjen’avaispasdutouteuenviedefuir.Plutôtdelaprotéger.Lasituationfaisaitplusquejamaisressortircetinstinctchezmoi.Je m’allongeai dans le canapé, les yeux rivés au plafond. J’allais avoir du mal à m’endormir, ne

sachantpasàquelmomentsasouffrancesemanifesterait.Rienqued’ypenser,mapoitrineseserraetjedusrespirerprofondémentpouratténuerlapression.Queluiétait-ilarrivé?Jeremontaiaujouroùjel’avaisvuepourlapremièrefois.Elleétaittellement

sexy, et à la fois adorable, à essayer de faire le plein d’essence. Je m’étais dit qu’elle offrirait uneagréablediversion.Jenem’étaispaspréparéàsongoût,àsonodeur.NomdeDieu,ellesentaittellementbon.Jem’étaisunpeuemballécettenuit-là.Chaquefoisquejel’avaisamenéeàl’orgasme,j’avaiseuenviederemettrelecouvert.Jemerépétaissanscessequec’était l’histoired’unenuitetqu’elleallaitpartir. Alors j’en avais profité. Je ne me lassais pas d’elle. Quand elle avait fini par s’endormird’épuisement,jem’étaisforcéàpartir.Je fermai lesyeuxet ladouleurme transperça.S’était-elle réveilléeenhurlant cettenuit-là ?Toute

seule?Jel’avaissautéepuislaisséeenplanavecsestourments?Jenepouvaispasrestersurcecanapé.Jemeredressaietenfouislatêteentremesmains.Depuisledébut,j’enchaînaisleserreurs.J’analysaistoutde travers.Ellen’avait jamais eu l’air faibleouvulnérable jusqu’à la soirée, lorsque sa crisedepaniquel’avaittotalementrenferméesurelle-même.Unaperçudecequ’ellegardaitsibiencaché.Je nepouvais pas rester ici un instant deplus. Je voulais être près d’elle aupremier hurlement. Je

m’approchaidesachambreetouvrislentementlaporte.J’attendisquemesyeuxsesoienthabituésàl’obscuritéavantdepénétrerdanslapièceetderefermer

laportederrièremoi.Elle dormait en boule dans le lit. Comme si elle cherchait à se protéger elle-même.Mon sweater

l’engloutissait,maiselleleserraitfortcontreelle,exactementcommel’avaitdécritTripp.Lavoirainsirecroquevilléedansmonpullfitbondirmoncœurd’hommedescavernes.Elleétaitàmoi.Ellelesavait.Jevoulaismeglissersouslesdrapsetlaprendredansmesbras.Siellevoulaitdemoiaupointd’enfouirsonvisagedansmesvêtements,jepourraisluivenirenaide.J’étaisicipourunebonneraison.Impossibledetenirenplace.Dansuncoin, lesbrascroiséssurla

poitrine, je la regardaidormir.Elleétait tellementpaisible. J’avaisdumalàcroirequ’elle faisaitdescauchemars.Elle laissa échapper un petit gémissement et jeme redressai. Sans bruit, j’étudiai les traits de son

visage.Ellesemitàtordrelesweaterentresesmains,puisunsonétrangesortitdesagorge.Enunbond,jetraversailapièce.Jem’assisauborddulitaumomentoùuncriàglacerlesangs’échappaitdeseslèvrestandisquesoncorpstressautaitdanstouslessens.Jeposailesmainssurelle;ellesedébattit.Les

yeuxtoujoursfermés,ellehurlaetmerepoussaavecuneforceimpressionnante.Chacundesescrismedéchirait lapoitrine.Jedétestaislasavoirplongéedansuneterreurinconnuedontjenepouvaispaslasauver. Je la serrai fort contre ma poitrine et entrepris de lui chuchoter des paroles réconfortantes àl’oreille.Jeluipromisderesterauprèsd’elleetlasuppliaiderevenirversmoi.Jeluidisqu’elleétaitbelle,quej’allaisprendresoind’elle,qu’ilfallaitqu’elleouvrelesyeuxetmeregarde.D’autresmotss’épanchèrent tandis quemes yeux brûlaient et quemon cœur battait à tout rompre. Elle continuait àhurler,maiselleavaitcessédemerepousseretsesmainsfendaientl’airpourserapprocherdemoi.Elleenfouitsatêtecontremonépauleetinspiraprofondémentpuissemitàpleurerdesoulagement.Sesbrass’agrippèrent àmon cou tandis qu’elle grimpait surmes genoux. Ses hurlements se transformèrent enpetitscris,puiscessèrentcomplètement.Jesentisl’humiditédemeslarmessurmesjoues.Jelesessuyaiviteavantqu’elles’enaperçoiveetlui

caressaidoucementlatêteenluirépétantquej’étaislà,quejelatenaisetqu’elleétaitensécurité.—Woods?murmura-t-elledansunsanglottoutenmeserrantaussifortquejelatenaiscontremoi.—Oui,bébé,jesuislà.Toutvabien.Soncorpssedétenditetelleselaissaallercontremoiavecunprofondsoupir.—Jecroisquemoncauchemarestterminé,bredouilla-t-elleenposantlatêtecontremapoitrine.Jenebougeaipasd’unpouce,attendantqu’ellem’endiseplus,maisellegardalesilence.Elleresta

dansmesbraset,auboutdequelquessecondes,sarespirationprofondeetrégulièrem’indiquaqu’elledormaitàpoingsfermés.Jeladéposaidélicatementdanslelit.Ellerestaagrippéeàmoncou.Jelalâchailetempsderemonter

lacouverture,puisl’enveloppaidansmesbrasetfermailesyeux.Toutallaitbien.Elleétaitensécurité.

Della

LachaleuretleparfumdivindusweaterdeWoodsétaientplusfortsquelorsquejem’étaisassoupie.Jemepelotonnais toutcontre lorsquejesentisuncorpsfermeetdesbrasquim’enveloppaient.Jeprisuneprofondeinspirationetmerendiscomptequecen’étaitpassonpullquejehumais.J’ouvrislesyeuxetdécouvrislabarbenaissantesurlementondeWoods.Ilétaitaulitavecmoi.Entièrementvêtu.Toutcommejel’étais.Jerepensaiàlanuitprécédente,persuadéedem’êtreglisséedanslesdrapstouteseule.—Bonjour,lança-t-illesyeuxfermés,desavoixsexyquimefitsursauter.—Hum…bonjour.Unsourireplanaitsurseslèvres.Ilouvritlesyeuxetreculalatêtepourmeregarder.—Tuestoutedoucelematin,murmura-t-ilenglissantunemainautourdemataille.Maisd’oùsortait-il?—Euh,merci…Qu’est-cequetufaisici?Danssonregard,l’humourcédalaplaceàautrechose.Jemedemandaisijel’avaisfroissé.J’avais

oubliéquelquechose?J’étaisdenouveauentraindeflancher?Ohnon…—Jesuisvenulanuitdernièreunefoisquetut’esendormie.Unevaguedesoulagementmesubmergea.Jenem’étaispasévanouieet jen’avais rienoublié.Tout

allaitbien.Maispourquoiétait-ilrevenu?—Pourquoi?—Parceque jevoulaisêtre iciquand tu feraisunmauvais rêve.C’estàmoide te serrerdansmes

bras,pasàTripp.Jecommençaiàcomprendreetm’éloignailentementdelui.Ilresserrasonétreinte.—Attends,laisse-moiterminer.Jem’immobilisaidans sesbras.Moncorps s’était raidi. Il étaitvenupourêtre témoind’undemes

accèsdefolie.Ques’était-ilpassé?Jenem’étaispasréveillée.Est-cequ’ilallaitmequitter?Avait-ilvutoutel’étenduedudésastre?SatanéTripp.Illuiavaitraconté.Ilnousavaitvusensemblelaveilleetl’avaitmisengardecontremonétat.—Tripps’inquiétaitdemesintentionsenverstoi.Ilestpasséàmonbureauhierpourm’enparleret

nous a surpris ensemble. Il voulait savoir si j’étais sérieux en ce qui te concerne. Il était venu meprévenir.Jel’aiconvaincuquej’étaisplussérieuxàtonsujetquejenel’avaisjamaisétépouraucuneautrefilleetilm’aracontéquetufaisaisdescauchemars.Jevoulaisêtreici.Jenesupportaispasl’idéequ’iltetiennedanssesbras.Quetutraversesçasansquejesoisauprèsdetoi.Nem’enveuxpas,monange.Jet’enprie,jeneveuxplusjamaisquetut’endormessansquejesoisàtoncôté.Jenetoléreraipasquetuaffrontesçatouteseule.Les larmes baignaient mes yeux et je cachai mon visage contre sa poitrine. Ses paroles étaient si

douceset sincères. Il était resté auprèsdemoi. Ilm’avaitvuedans tousmesétats et il nevoulaitpaspartir.Pourquoi?Çaneluifaisaitpaspeur?—Nepleurepas.Jeneveuxpastevoirpleurer.Jeveuxterendreheureuse.Sesmots enveloppèrentmon cœur et je sus à cet instant que j’étais tombée amoureuse deWoods.

C’était peut-être stupide de ma part d’aimer quiconque, mais c’était le cas. Je l’aimais. Mais je nepouvais pas le lui dire. Il ne savait pas tout àmon sujet et lui confessermon amour était injuste. Et,pourtant,jel’aimaistellement.J’essuyaileslarmesdemonvisageavantdeleverlesyeuxsurlui.

—Pourquoiveux-turesterauprèsdemoi?Tuasbienvudansquelétatj’étais.Pourquoiçanetefaitpasfuir?Woodspritmonvisagedanssamainetdéposaunbaisersurleboutdemonnez.—Parcequetuposescegenredequestion.Tunecomprendspaspourquoiquelqu’unpourraitavoir

envie de toi. Tu n’as pas idée du nombre d’Angelina que j’ai connues. Elles exigeaient attention etdévotion.Ellesutilisaientleurbeautépourexercerleurcontrôle.Maistoi…tunesaisabsolumentpasàquel point tu es incroyablement belle et désirable. Tu n’es ni calculatrice ni égoïste. Et tume donnesenvied’êtremeilleur.J’étais sidérée. Cet homme avait le pouvoir de me détruire. Je m’approchai de lui et me mis à

califourchon sur ses jambes. J’attrapai lebasde sa chemiseque jepassai par-dessus sa tête avantderetirersonsweater.Jevoulaissentirsapeaucontrelamienne.J’appuyaimesseinsnuscontresontorseetpoussaiungémissementdeplaisir.Sapoitrinesebaissaitet

sesoulevaitvigoureusementetsesmainsserefermèrentsurmataille.Maisilrestaimmobile.Melaissantfaire.Jereculaisuffisammentpourquemestétonseffleurentsespectorauxmusclés.Jeregardainospeauxenflamméessetoucher.—Bébé,grogna-t-iltandisquesesmainspressaientmeshanches.—C’estbon,non?J’étaisincapabled’arrachermesyeuxdenospoitrines.Jemecambraietglissaimestétonscontreles

siens.L’inspirationrapidequ’ilpritentresesdentsmefitsourire.—C’estincroyable.Jel’aimais.Jeprisletempsd’assimilercetteidéetandisquemesmainscaressaientseslargesépaules.

Jevoulaisl’embrasserpartout.Jevoulaisconnaîtresoncorpsmieuxquelemien.—Jepeuxt’embrasser?demandai-jeenlevantlesyeuxsurlui.—Jet’enprie.Je déposai un baiser sur son téton droit et ses mains remontèrent pour empoigner ma tête. Il ne

s’attendaitpasàcela.Ilcroyaitquej’allaisl’embrassersurlabouche.Iln’avaitpascomprismarequête.Jecontinuaià l’embrasser toutendescendant le longdesoncorpset léchaichaqueondulationsursonventre.Arrivéeà son jean, jedescendis la fermetureÉclair.Lorsque je tirai sonpantalonvers lebas,Woodssoulevaleshanchespourpasserlesfesses.Jecontinuaiàlefairedescendrelelongdesesjambesjusqu’à ce qu’il finisse par terre. Je souris toute seule et entrepris de remonter le longde ses jambesmuscléesàgrandrenfortdebaisers,jouissantdechaquetressaillementdesoncorpstandisquejeléchaisl’intérieurdesescuisses.Puisj’empoignail’érectionquim’attendait.—Della,soufflaWoodsd’unevoixmalassurée.Sansreleverlesyeuxsurlui,jeleprisdansmabouchejusqu’àcequesonglandeffleurelefonddema

gorge.—NomdeDieu!s’écria-t-iltandisqued’unemainilmetiraitlégèrementlescheveux,cequim’incita

plusquejamaisàlerendrefou.Jepassailentementmalanguesursapeausensible.J’adoraislafaçondonttoutsoncorpstremblaità

montoucher.Jerefermaidenouveaules lèvressur lehautdesavergeet leprisprofondément,puis lelaissaientièrementressortiravantderemplirencoreunefoismabouchedesachairdureetpalpitante.—Della,bébé,viensici.Jevaisjouir.Je voulais qu’il jouisse. Je voulais partager ça avec lui. Je pris ses testicules dans mes mains et

entreprisdelesmalaxerdoucementtoutenaspirantvigoureusementsonglandavantdeleprendreauplusprofond,jusqu’àm’étouffer.—Oh,merde,lâchaWoodsdansunrâle.M’entendresuffoquer l’excitait. Je recommençaiet samainse resserrasurmescheveux tandisqu’il

rejetaitlatêteenarrière.

—Jevaisjouirdanstabouche.Jelelaissaimepénétrerencoreplusprofondémentetlegardaiencorepluslongtemps.Dansunrâle, il immobilisamatêteentresesmains tandisqu’iléjaculaitdansmabouche.Jamais je

n’avaislaisséungarçonfaireça.Maisj’adorai.J’adoraisentirletremblementdesoncorps.Aprèsavoirtoutavalé,jepassailalanguesurleglandrougedesonsexealangui.Ilm’agrippaetm’éloignadeluienriant.—Tuvasmetuer,maisceseralamortlaplusdoucequ’unhommeaitjamaisconnue.Jemeglissaidanssesbrasetilm’enveloppadesonétreinte.Ilposalatêteàlanaissancedemoncouetpoussaunsoupirtremblant.—Nemequittepas,Della.Ilnesavaitpasàquelpointcesmotscomptaientpourmoi.

Woods

Je n’étais pas en état de travailler aujourd’hui.Mon esprit étaitmonopolisé à trouver lemoyen deconvaincreDella d’emménager chezmoi. Aujourd’huimême. Je ne supportais plus qu’elle vive chezTripp.Et lesouvenirdemaqueueenfoncéedanssagorgeaupointde l’étouffermerendait fou.Onnem’avaitjamaisfaitunepipecommeça.Jen’avaisjamaisrienconnudetel.Della n’avait pas eu envie d’en finir vite fait ni de s’inquiéter de la suite. Ellem’avait sucé dans

l’abandonleplustotal.Lapremièrefoisqu’elleavaitsuffoqué,j’avaistentédel’arrêter,maiselleavaitcontinuéetj’avaiscraqué.Enjouissantdanssabouche,j’avaiseupeurdel’avoirpousséetroploinmaiselles’yétaitmisedeplusbelle.NomdeDieu. Jebandais commeun taureau.Avec ce souvenir, j’allais resterdur le restantdemes

jours.Ilfallaitquejelavoie.Ellebossaitaudéjeuneretj’étaisrestéplanquédansmonbureau.J’avaispeurdeperdrelecontrôlesiquelqu’unluiparlaitmalouluireluquaitlesfesses.Jem’avançaisversmonpick-uplorsquej’aperçusDellaàcôtédesavoitureengrandeconversation

avec Bethy, qui sortait elle aussi du travail. J’aimais Jace comme un frère, mais je n’avais aucuneconfianceenBethy.Elleétaitunpeutropfantasqueetjen’étaispassûrd’apprécierqu’elletraîneavecDella. Je n’aurais pas été étonné qu’elle essaie de brancher Della avec un mec. Il fallait que BethycomprennequeDellaétaitàmoi.Jem’approchaid’elleset tiraiDelladansmesbras,quisursauta.Ellerejeta la têteenarrièreetme

sourit.—Salut,toi.Jenet’aipasvuaudéjeuner.Sonregardtaquinfitaussitôtpalpitermaqueuetendue.—J’avaisduboulotencours.J’aitoutbouclé.—Oh,dit-ellesanssedégagerdemonétreinte.Jemecollaicontreellepourqu’ellesentemonexcitationcontresondos.—C’estdoncellelaraisonpourlaquelletun’espasalléauboutdel’affaireGreystone,affirmaBethy.—Ouais,c’estelle.Bethyhochalatêteensouriant.—Bien. Tu l’admets. (Puis, regardant Della :) Je pense que personne ne t’en voudra d’amener le

patron.Ilseraparfaitementdistraitàcausedetoiettoutsepasserabien.Vousêtestouslesdeuxinvités.DellahochalatêteetBethyagitalesdoigtsens’éloignant.—Elleparlaitdequoi?demandai-je.Dellaseretournadansmesbras,desortequemonérectioncaressaitsonventre.Quelleallumeuse!—Lepersonnelducluborganiseungrand feu samedi soir.À l’occasionde la findesvacancesde

printemps,avantlasaisond’été.Tuveuxyaller?Je connaissais ces feux.Par le passé, j’avais été contraint de payer la caution de plusieurs anciens

employésquiavaientétéaccusésd’attentatà lapudeursur laplage. Ilétaithorsdequestionqu’elleyaillesansmoi.—Situveuxyaller,jet’accompagne.—Tucroisquec’estunproblèmedemontrerqu’onsortensemble?demanda-t-elleen fronçant les

sourcils.Étantdonnéquetuesleboss?Sondécolletéplongeantmedéconcentrait.—Tout ira bien.Commeça ils sauront que tu es àmoi. (Elle s’approchademoi, les yeuxbrillant

d’espièglerie.)Della,àmoinsquetun’aiesenviedetefairebaiserdansledébarrasleplusproche,tudevraisarrêter.—J’aimebienlesdébarras,répondit-elleeninclinantlatêtesurlecôté.Nomd’unchien.Alorsqu’ellepouffaitderire,jelatiraiparlamainàl’arrièreduhangaràvoiturettes

etsortismontrousseaupourouvrirlaréserve.Commeonystockaitlesbières,ilyfaisaitbienfrais.Onparleraitplustarddesondéménagement.Ensuite,onaborderait laquestiondudépistageetdela

contraception.JevoulaissentirDellasansaucunebarrière.

Toutes les affaires de Della tenaient dans deux valises. Tripp m’avait informé qu’il partait sousenvironseptjoursetqueDellaallaitbientôtseretrouverseule,maisçanesuffisaitpasàmetranquilliser.Plusjamaisjenelalaisseraisdormirseule.Elleavaitfiniparaccepterd’emménagerchezmoitoutenmerépétantquej’allaisleregretter.Nousavionstouslesdeuxfaituntestlaveilleetlesrésultatsétaientnickel.Dellaavaituneordonnance

pourlapilulemaisilétaitrecommandéd’attendreseptjoursavantd’avoirdesrapportsnonprotégés.L’idéedepouvoirmeglisserenellesansinquiétudem’empêchaitdemeconcentrer.Jem’assissousleporcheenattendantqueDellarentredutravail.Jenelaprogrammaisplussurles

servicesdenuit.Jedétestaisqu’ellesoitloindemoi.Jenegéraispasmieuxlefaitdel’observerdanslesalonduclub.Toutlemondemefoutaitenrogne.Lemieux,pourellecommepourmoi,étaitquejegardemesdistances.Ilnefallaitsurtoutpasquemon

pèredécouvrel’existencedeDellaetl’accused’avoirmisuntermeàmesfiançaillesavecAngelina.Mespenséesfurentinterrompuesparlasonneriedemontéléphoneportable,quejerepêchaidansma

poche.LenomdeJimmys’affichaità l’écran.Merde.Ilbossaitcesoir. Ilnem’auraitpasappelésansraisonvalable.Jemeredressai,prêtàfilerauclub.—Allô?—Woods,salut,c’estJimmy.Onaunsouci.C’estDella.Enentendantsonprénom,jefonçaiverslaporte.—Quesepasse-t-il?demandai-jeenmeglissantderrièrelevolantdupick-up.—J’ensaisrien.Ondiraitqu’elles’estmiseàflipper.J’arrivepasàl’expliquer.Elleétaitentrainde

travaillerettoutallaitbien.Puisungrouped’adosestentré.DrewMorganetsespotes.Ilsparticipaientàuntournoidetennis.Jecroisquel’und’euxl’aacculéeenallantauxtoilettes.J’ail’impressionqu’elleneréagitplus.Elleestrestéedanslecoinverslestoilettesdesfemmes.Impossibledelafaireparler.Parmoments,ellegémit,maisc’esttout.Moncœurbattaitàtoutrompre.—Reste avec elle.Ne laisse personne l’approcher. J’arrive dansmoins de cinqminutes.Tu restes

avecelle,Jimmy,tum’entends,etdis-luiquejesuisenroute.Jebalançai le téléphonesur le siègeet fonçaiendirectionduclub.Elleavaitpeur. J’allais faire la

peauaugaminqui l’avaiteffrayée.Lespneuscrissèrentdans leparkinget je laissai tourner lemoteuravantdecourirjusqu’àl’entréearrière.J’aperçusledosdeJimmyquicamouflaitDella.Jel’écartaietm’agenouillaidevantellepourlaserrerdansmesbras.—Toutvabien,machérie, jesuis là.Reviens, l’incitai-jed’unevoixdouceenlaramenantàl’abri

danslavoiture.(JemeretournaipourouvrirlaportièreavecledosetaperçusJimmynousobserver.)Pasunmot,àpersonne,ordonnai-je.Ilhocha la tête.JedéposaiDelladans lepick-upavantdeprendreplacesur lesiègepassagerpour

appuyersatêtecontremapoitrine.—Reviens,bébé.Personnenevatefairedemal.Jesuislà,larassurai-jeenlaserrantcontremoi.Je

n’auraispasdûtelaisser,jesuisdésolé.Maisjesuislà,maintenant.Toutvabien.Sesgrandsyeuxvidescillèrentlentementpuisseranimèrent,tandisqu’elleseconcentraitsurmoi.Elle

enroulalesbrasautourdemoncouetserratrèsfort.—Jesuisdésolée.Çam’areprise.Jesuisvraimentdésolée.Jevaism’enaller.C’estpromis.Sesmotsconfusétaientrestésincompréhensiblesjusqu’àcequ’elleannoncesondépart.—Tun’irasnullepart.Sinonjeviendraitechercherparlapeaudesfesses.C’estmoiquisuisdésolé.

Jen’étaispaslàalorsquetuavaisbesoindemoi.J’auraisdûêtreauprèsdetoi.Raconte-moicequis’estpassé.Jamaisplusjenetequitterai.Jetelejure.Ellereniflaetappuyasonvisagecontremoncou.— Ça se reproduira. Ça arrivera tout le temps. Je ne peux rien y faire. J’ai essayé, mais c’est

impossible.Jenedevraispastravaillerici.C’estuntropbelendroitpourunefolle.—Arrête,lacoupai-jeenlarepoussantpourqu’ellemeregarde.Tun’espasfolle.Tuesmagnifiqueet

drôle.Tuesaltruisteavecuncœurgrandcommeça.Tutravaillesdurettun’attendsriendepersonne.Tun’espasfolle,articulai-jeenprenantsonvisagedansmesmains.Jeneveuxplusjamaist’entendreparlerdetoicommeça.C’estcompris?Tupeuxêtretoutcequejeviensdedire,maisfolle,jamais.Jelaserraidenouveaudansmesbras.Jen’osaipaspoursuivre.Monémotionétaittropforte.— Il y avait un gars. Environ deux ans de moins que moi. (Elle s’interrompit pour prendre une

profonde inspiration.) Il disait qu’il voulaitm’enfermer etme fairedes trucs.Ce…(Elle coupanet etdéglutitavecdifficulté.)Cen’estpasquej’aieupeur.C’estquandilm’amenacéedem’enfermer.Mon…monangoisseaprisledessus.J’aipaniqué.Elle avait peur de l’enfermement. Pourquoi ? Quelqu’un lui avait fait subir une telle chose ? Je

dégageailesmèchesdecheveuxdesonvisageetdéposaiunbaisersursonfront.—Rentrons.Tum’endirasplusaprès?Tum’aiderasàcomprendrepourquejepuisset’aider?S’ilte

plaît?Ellemeréponditauboutd’uninstantavecunhochementdetête:—Situveux.

Della

Sijel’avaislaisséfaire,Woodsm’auraitportéeàl’intérieur.Ilmeprêtaittantd’attention.Sijen’avaispasétéamoureusedelui,soncomportementm’auraitagacée.Maisils’inquiétaitpourmoietméritaitdecomprendre.Peut-êtrepastout,maisilfallaitqu’ilconnaisseunepartiedel’histoire.—Avant,j’avaisungrandfrère.Deluietdemonpère,jen’aivuquedesphotos.Jenemesouviens

pasd’eux.J’étaistropjeunequandc’estarrivé.Jen’étaispassûredenepasrepartirenvrilleenluiracontanttoutça,maisilfallaitquej’essaie.Il

s’assitàcôtédemoi,enroulaunbrasautourdemesépaulesetm’attiracontresapoitrine.Commes’ilsavaitquej’avaisbesoindeluipourtraversercetteépreuve.Sesdoigtssemêlèrentauxmiensetilpressamamain.Toutallaitbiensepasser.Ilétaitavecmoi.—Unjour,ilssontsortisfairedescourses.J’étaisencorebébéetmamèrem’allaitait.Ellenelesa

pas accompagnés. Ils ne sont jamais rentrés. Ils ont été abattus, avec d’autres personnes, dans uneépicerie.Untypeencolèreavaittuédixpersonnesavantd’êtreblesséetdemouriràsontour.Monpèreetmonfrèreétaientàlacaissequandilétaitentré;lesdeuxpremièresvictimes.J’avaisentenducerécitdemamèrequantitédefoislorsqu’ellem’expliquaitqueledangervenaitde

l’extérieur. Je le connaissais bien. Je me terrai dans les bras de Woods pour empêcher le flot dessouvenirsdemefaireperdrelefil.—Jesuislà.Toutvabien,merassura-t-il.—Magrand-mèrematernellesouffraitdemaladiementale.Jenel’aijamaisconnue.Elleétaitdansun

établissementspécialisé.Onn’avaitpasd’autrefamille.Monpèreavaitgrandidansdesfoyersd’accueil.Aucundemesparentsn’avaitdefrèresetsœurs.Magrand-mèreaperdulesensdesréalitéspeuaprèslanaissance de ma mère. Quand son père a fichu le camp, ma mère a été élevée par sa grand-mèrepaternelle, qui est morte lorsqu’elle avait seize ans. Mes parents se sont rencontrés dans un foyerd’accueilàl’âgededix-septans.Surdesphotosquej’avais,onvoyaitunefemmeenbonnesantéetunebonnemère.Monfrèresemblaitl’adorer.Elleavaitl’airheureuse.Maisjenel’aijamaisconnueainsi.Aprèslamortdemonpèreetdemonfrère,onadéménagé.OnaquittéunepetitevilleduNebraskapournous installer dansuneville encorepluspetite enGéorgie.Mespremiers souvenirs remontent à notremaisonàMacon.Jeneconnaissaisriend’autreàlaviequeleregardvidedemamèreetsescrisesdehurlements.Parmoments,ellepouvaitsemontrergentille,maissinon,elleétaiteffrayante.Elleparlaitbeaucoupàmonfrère.Pendantdesannées,jen’aipascomprisàquielles’adressait.Iln’yavaitqu’elleetmoi.Maisjepensequ’ellelevoyait.Jefermailesyeuxenrepensantàmamèreengrandeconversationavecmonfrèremortcommes’ilétait

danslamêmepièce.L’assiettequ’elleluipréparait,etsesen-casfavorisentraindepourrirsurlatable.Unjour,ilsavaienttellementmoisiquejen’avaispaspupénétrerdanslacuisinesansavoirlanausée.Ellefinissaitpartoutjeteretluipréparerunnouveauplat.—Personneneserendaitcomptequ’ellen’allaitpasbien?interrogeaWoodsdontlespoucestraçaient

descerclessurmamain.—Non.Personnenenousrendaitvisite.Personnenesavaitquej’existais.Onnequittaitpaslamaison.

Jamais.Mamèreétaitpersuadéequelemondeextérieurétaitdangereux.Ellenousgardaitàl’abri.Woodsretintsarespiration.J’attendaissesquestions.Cellesauxquellesj’avaisrépondudesmillions

defoisdepuissonsuicide.—Vousfaisiezcommentpourlescourses?

—L’épicerieducoinnouslivraitàdomicile.Elleappelaitpourpassercommande.—Etpourl’argent?—Monpèreavaitunetrèsbonneassurance-vie.MamèreavendulamaisonduNebraskaet,avecla

plus-value,elleaachetéunemaisonpluspetitedansunendroitmoinscherpourpouvoirlaréglerargentcomptant.—Etl’école?—Àlamaison.—Tun’esjamaissortiedecheztoi?Absolumentjamais?Lesgensavaienttellementdemalàl’accepter.Mavied’alorsleurétaitimpossibleàimaginer.—Mamèresouffraitd’uneformegraved’agoraphobie.Etlesantécédentsdetroublesmentauxdansla

famille n’ont fait qu’aggraver la situation. La mort de mon père et de mon frère a été l’élémentdéclencheur.Ellecherchaitdésespérémentànousprotéger.Jusqu’àenvolermavie.Jenesavaisriendel’existencejusqu’àcequejesoisassezgrandepourfairelemur,lanuit.Braden,mameilleureamieetlaraisonpourlaquellejesuispartieà ladécouvertedemoi-même,étaitnotrevoisine.Elleseposaitdesquestionssurnousparcequ’elleetsesparentss’étaientrenducomptequ’onnequittaitjamaislamaison.»Lorsquejemesuisglisséedehorslapremièrefois,ellem’aaperçueparcequ’ellenoussurveillaitde

sonlitpourvoirs’ilnousarrivaitdesortirlanuit.Persuadéequenousétionsdesvampires,elleétaitbiendécidéeàledémontreràsesparents.Jenesuispasalléebienloin.Jemesuismisedanslejardinpourregarderlaluneettoucherlegazon.Deschosessimplesquej’avaistoujourseuenviedefaire.Cettenuit-là,Bradenestvenuemeparler,toujoursconvaincuequej’étaisunvampire.Notreamitiéagrandiaufildesannéesetj’aifaitlemurdeplusenplusfréquemment.Bradenensavaitplussurmoiquequiconque.C’étaitlaseulepersonneàréellementmeconnaître.Ellesavaitaussiquej’avaispeurdeperdremamèresiquelqu’und’autredécouvraitmasituation.C’estpourçaqu’ellegardaitmonsecret.Jenepouvaispluscontinuer.C’enétaitassez.J’avaisbesoind’unepause.Leresteétaittropangoissant

etdouloureux.—Oùsetrouvetamère,maintenant?—Elleestmorte.Ilneditplusrienetresserrasonétreinte.—Jenepeuxpluscontinuerpourcesoir,dis-je.Iln’insistapas.Ilsecontentademetenircontrelui.Nousrestâmesassisensilencejusqu’àcequemes

paupièress’alourdissentetquejesombrelentementdanslesommeil.

Woods

Iln’yavaitaucunmotpourdécrirecequeDellaavaitenduré.Jepassaicettenuit-lààlaserrerdansmes bras. Elle ne se réveilla pas une seule fois en criant.Maintenant que je connaissais les horreursqu’elleavaittraversées,jemedemandaisquellessortesderêveslafaisaienthurler.Jesavaisqu’ilyétaitquestiondesamère.L’histoireallaitbienau-delàdecequ’ellem’avait racontémais,pour lemoment,ellenevoulaitpasm’endireplus.C’étaitsuffisant.Je la regardai dormir paisiblement à côté demoi tandis que le soleil se levait et que les premiers

rayonscommençaientàdanseràlasurfacedel’eau.Elleétaitavecmoi,dansmonlit;toutétaitparfait.Jen’avaisjamaisrienvécud’aussiparfait.Maisj’avaislapoitrineserréeetlecœurlourd.Dellaavaitsubitantdedouleursetdechocsémotionnelsquejenesavaispastropcommentl’aideràcicatriser.Elle remuadansmes bras et j’embrassai le bout de son nez.Elle était àmoi. J’allais prendre soin

d’elle.Jevoulaisl’aideràoubliertoutecettesouffranceetcetteangoissequivoilaientsonregard.Seslongscilsfrémirentpuiselleouvritlesyeuxetmeregarda.—Bonjour,saluai-jeenétirantlesbrasavecunsouriresomnolent.— Je n’ai pas dormi aussi profondément depuis très longtemps, constata-t-elle en étouffant un

bâillement.—C’estparcequejesuissuperconfortable.—Jesuisbiend’accord.Toutecettedouceurestconfortable,dit-elleenmesouriantd’unairespiègle.— Cette douceur ? Je t’en foutrais de la douceur, m’exclamai-je en la retournant sur le dos pour

appuyermonérectionmatinalecontresaculotte.Iln’yariendedouxlà-dedans.Elleémitunpetitronronnementetécartalesjambespourquejemecaleconfortablement.—Non,riendedouxdutout,dit-elleensoulevantleshanchespoursefrottercontremoi.Jesentislasoiehumidedesessous-vêtementsàtraversmoncaleçonetgrognaideplaisir.Elleétait

déjàmouillée.—J’allaismeleverpourtepréparerlepetitdéjeuner…—Hum,c’estadorable.Maissitumefaisaisl’amour,d’abord,proposa-t-elleenattrapantlebasde

monT-shirt,dontjel’avaisrevêtuelanuitprécédenteavantdelamettreaulit.Jeluiavaiségalementretirésonsoutien-gorgepourqu’ellesoitàl’aise.Désormais,lesdeuxglobes

rebondissaientlibrementsousmesyeuxetj’enoubliaislepetitdéjeuneretmesbonnesintentions.Mêmel’expression«mefairel’amour»,quim’avaittoutd’abordfaitsursauter,n’avaitplusaucuneimportance.Dellaétaitdansmon lit, en trainde sedéshabiller.Elleavait commencéà se tortillerpourenlever saculottelorsquejedécidaidesuivrelemouvementenretirantmachemiseetmoncaleçonquejebalançaisurlecôté.Dellaécartalesjambesetmelançaunsourirecoquin:—Vas-ysansrien.Tupourrasteretirer,ordonna-t-elleensoulevantleshanchesenguised’invitation.Seretirern’étaitpasinfailliblemais,dansl’immédiat,çam’étaitbienégal.Jevoulaislapénétrersans

barrière et le nectar capiteux qui sortait de sa fente était plus fort que tout. J’écartai ses jambes etplongeaienelle.Nouspoussâmestouslesdeuxuncrideplaisirtandisquejem’enfonçaiauplusprofondd’uneseule

poussée.Lachaleurdesonsexeétroitm’enveloppadedouceur.Jenel’avaisjamaisressentidelasorte.J’étaistellementprochedelajouissancequejedusmetenirimmobile.—C’est tellement bon,Woods. J’ai besoin de te sentir, tout près demoi,murmura-t-elle à bout de

souffletandisquesapoitrinesesoulevaitpuisretombaitsousmoi.Jetendislamainpourcaressersonclitorisdudoigtquej’humectaidesamoiteurpourlestimuler.Elle

se cambra aussitôt et je la chevauchai lentement. Elle perdit le contrôle et les parois de son vagincommencèrentàenserrermonsexe.J’allaisdevoirmeretireravantd’exploser.Lasensationétaitentraindemetuer.—Continue.Oh,Woods…Sescrisetsupplicationss’interrompirentjusteavantqu’ellenesemetteàtremblersousmoienhurlant

monnom.Jebougeaienelleunedernièrefoisavantdemeretireretdejouirsursonventre.J’aperçuslesnappes

de sperme et sentis ma poitrine se serrer. Elle était à moi. Je l’avais de nouveau marquée. Ellem’appartenait.Jemerelevailentementpourallerchercherungantdetoiletteafindelanettoyer.Àmonretour,elle

était absorbée dans la contemplation du bazar que j’avais laissé derrièremoi, un sourire au coin deslèvres.J’entreprisdel’essuyeretellesemitàrigoler.—Qu’est-cequitefaitrire?—C’estlapremièrefoisqu’onjouitsurmoicommeça.Jecroisqueçam’aplu.L’idéequ’unautretypepuissel’approcherm’exaspérait.JenevoulaispasavoircetteimagedeDella

avec un autre mec. Combien y en avait-il eu ? Enfermée par sa mère, elle était passée à côté de lamajeurepartiedesonexistence.—Tuasl’airencolère.J’aiditunebêtise?Jeterminaidelanettoyerpuislaregardai.—Cen’estpasunebêtise,c’estjuste…Jen’aimepaspenseràtoiavecquelqu’und’autre.Ellepritappuisursescoudesetrépliqua:—Iln’yenaeuquetrois,toicompris.Çafaisaitdeuxdetrop.Maisçan’étaitpasjustedesemettreenrogne,vulenombreincalculablede

fillesaveclesquellesj’avaiscouché.—Ettuétaismondeuxième,siçapeutt’aider.Ledeuxième?Qu’est-cequeçasignifiait,bordel?Etpuisnon,jen’avaispasenvied’ypenser.Elle

avait couché avec quelqu’un d’autre après notre première fois ensemble. Etmoi j’avais couché avecAngelina.Maisnomd’unchien,c’étaitduràavaler.ElleétaitpartieàDallaset s’étaitmiseavecsonboss, celui qui étaitmarié. Pourquoi l’avais-je laissée en plan après cette première fois ? Parce que,justement,c’étaituncoupd’unsoir.Uncoupquim’avaitcomplètementbluffé.Onsavaittouslesdeuxcequ’onfaisait.Àmoinsqu’ellen’aitvouluautrechose?Jenepouvaispasrevenirlà-dessus.Jeretournaidanslasalledebainspourmecalmer.Ellen’yétait

pourrien.J’étaisentraindedevenirunconnardpossessifetelleméritaitmieuxqueça.Unemainfineseposasurmonépaule.—Çava?Jemeretournai;ellesetenaitdevantmoi,nuecommeaupremierjour,lefrontbarréd’inquiétude.Elle

s’était réveillée de bonne humeur et j’avais tout gâché avecmon envie de la posséder.Qu’est-ce quin’allaitpaschezmoi?Jel’attiraicontremoijusqu’àcequesesseinstouchentmapoitrine.—Jesuisdésolé.Jesuisunabruti.J’aicarrémentprislamoucheenpensantàquelqu’und’autre…un

autre…merde.Jen’arrivemêmepasàledire.Dellafitglisserlesmainssurmontorseetlesnouaderrièremanuque.—Personnenem’ajamaispénétréesanspréservatif.Personneàparttoi.L’hommedescavernesenmoitambourinaitsapoitrineàl’idéedejouirauplusprofondd’elleetde

laissermasemenceremplircettecavitéétroitequim’obsédaittant.

J’écartai les mèches de cheveux de son visage et soulevai son menton pour appuyer mes lèvresfermementcontrelessiennes.Cettefilleallaitmeconsumer.

Della

Woods m’accompagna au club le reste de la semaine, s’asseyant seul à une table pendant que jetravaillais.Monserviceterminé,jedevaisluiciterquelquechosequej’avaistoujoursrêvédefairesansjamais en avoir l’occasion. Et, chaque jour, il exauçait mes souhaits. C’est ainsi que nous fîmes dubateau, un tour en hélicoptère, du parapente et que nous dégustâmes des huîtres. Il neme quittait querarement.Entrenous,lesexeétaitincroyableetsemblaitgagnerenintensité.Lanuit,jenefaisaisplusdecauchemars.Jedormaisprofondémentetmeréveillaisfraîcheetdispose.Cesoiravait lieu legrandfeudupersonnel,auquel j’étaisattendue.Jen’étaispascertainequem’y

rendreavecWoodsfûtunebonneidée.ÀpartBethyetJimmy,personnenesavaitqu’onsortaitensemble.Jen’avaiscroisépersonned’autrequandnousétionsentêteàtête.J’enfilaiunbikinietunerobed’étéassortie.Jen’étaispassûred’êtreassezcourageusepourmebaigner,maisBethym’avaitditquetoutlemondesetrempaitaumoinslespieds.Woodsgarasonpick-upetlecontournapourm’ouvrir,parcequ’ilavaitdécrétéquejenedevaispas

ouvriruneportièretouteseule.C’étaittellementadorable.Samain glissa dans lamienne et la serra.Nous y voilà. Si certainsmembres du personnel avaient

encoredesdoutesànotresujet,Woodsétaitpartipourmettrelespointssurlesi.—Tuessûrdenepasvouloirprendrelafuite?demandai-jeenluisouriant.—Sûr.—Ilsrisquentdemetraiterdifféremment,répliquai-jeenpensantquecertainspouvaientm’envouloir.—Jelesvirerai.Jemefigeaisurplaceetledévisageai.Ilavaitunpetitsourireencoin.Jeluiassénaiuneclaquesurle

bras.—C’estpasdrôle!—Si,c’estdrôle.Etenplusc’estvrai,s’ilst’embêtent,jelesvire.Notabene:nejamaisluidiresiquelqu’unm’embête.Nous rejoignîmes le rassemblementd’invités au sonde lamusiquedans l’airparfumépar le feude

bois. Certains dansaient. D’autres faisaient rôtir quelques mets au-dessus des flammes tandis qu’unepoignéejouaitauvolleyàlalueurdelalune.—Tuassoif?s’enquitWoodsenmeconduisantversuntonneletposésurdesbillots.—Jen’aimepastroplabière.J’enaibuunefoisetj’aiétémalade.—Tuavaisbeaucoupbu?—C’étaitculsecàl’entonnoir.Àvraidire,jenesaispastrop.—Tuasbudelabièreàl’entonnoir?Celafaisaitpartiedemalistedechosesàfaire:alleràunesoiréeetboiredeslitresdebière.Jene

connaissais pas la technique de l’entonnoir,mais ça n’avait pas été très difficile deme faire essayer.Bradenm’avaitprévenuequeçamerendraitmalade,maisj’avaisquandmêmetentélecoup.—Ouais.Mauvaiseidée.C’étaitunesoiréeétudiante.Lasoiréeoù j’avais rencontré legarsàqui j’allaisdonnermavirginité.Trois rencardsplus tard, il

m’avaitconvaincuedecoucheraveclui.J’avaisététellementnaïveetstupide.—Vousvoilà,lançaBethyaveclesourireetungrandverreenplastique.Culsec!Bièreàvolonté.Jesecouailatête.—Dellaneboitpasdebière.Iln’yariend’autre?

Bethy opina du chef et rebroussa chemin jusqu’à une glacière dont elle sortit une bouteille d’eauqu’ellemelança.Parfait.—Merci.Ellemesaluaavantderetournerverslesgensquidansaient.Jacevintàsarencontreetlapritdansses

bras.—Tuvoisuninconvénientàcequejeboivedelabière?medemandaWoods.Jesecouailatêteetavalaiunegorgéed’eau.—Tantmieux.Jeboiraisbienuncoup.Jeleregardais’éloigner.Jenepouvaispaslesuivrepartout.J’étaistropendemandeparrapportàlui.

Jenevoulaispasdevenirdépendante.Mapsychiatrem’enavaitparlé.Ellem’avaitconseillédegagnerenautonomie,cequipourraitêtredifficileaprèscequej’avaistraversé.—Salut!Della,c’estça?m’interpellauntypeinconnud’unevoixlégèrementéméchée.(Jehochaila

tête,sanstropsavoirquiilétaitnid’oùilconnaissaitmonnom.)Nelton,jesuistennismanprofessionnelauclub,poursuivit-ilclind’œilàl’appui.JehochaidenouveaulatêteetjetaiunœilverslebaroùHaroldetWoodsétaientenpleinediscussion.—Raviedeterencontrer.—Çafaitunmomentquejeteregarde.Jenesavaispassituétaislibreounon.Il fitunnouveaupasversmoiet je réussisàmedéplacersursadroitesansdonner l’impressionde

l’éviter.Jen’étaispassûredevouloirannoncerquej’étaisencoupleavecWoods.—TuesuneamiedeM.Kerrington?Jet’aivuearriveraveclui.—Jepeuxt’aider,Nelton?interrompitWoodsavantdeseglisserderrièremoi.Jepoussaiunsoupirdesoulagement.Jen’avaispasvraimentenviederépondreàcettequestion.—Non,monsieur,jefaisaissimplementlaconnaissancedeDella.Woodsplaquasamainsurmonventre,d’ungestepossessif.Neltons’enaperçut.Ilouvritgrandsles

yeuxethochalatête.—Ravidet’avoirrencontrée,Della.Àplustard,monsieurKerrington,salua-t-ilavantdes’éloigner

nonchalamment.—Jenepeuxpastelaisserseuletroisminutes,observaWoodsavantdememordillerl’oreille.—Tontennismanprofessionnelestflippant.—Onest biend’accord, concédaWoods en riant,mais les cougars l’adorent. Je saispertinemment

qu’ilcoucheavecplusieursd’entreelles,maiscommeillesrendheureuses,onévitedelevirer.Çaneseraitpasbonpourlesaffaires.Jenesavaispastropcequ’ilentendaitpas«cougars»,maisjenedisrien.J’avaisenviedefairepipi.

Jejetaiunœilalentour:iln’yavaitpasdetoilettes.JevisBethyetdécidaideluidemander.—JevoudraisposerunequestionàBethy,jereviens.Enmevoyantarriverseule,ellesedégageadel’étreintedeJaceetvintàmarencontre.—Toutvabien?—Oui,j’aijusteenviedefairepipi.Çasepassecommentici?Bethy eut un petit sourire et pointa lementon en direction de l’eau, où les invités s’aspergeaient et

nageaientdanslesvagues.—DansleGolfe?demandai-jed’unairperplexe.Elleacquiesça.Mince.J’étaisdansdesalesdraps.JeretournaiauprèsdeWoodsquinemequittaitpasdesyeux.J’allaisdevoirleluidire,aussifrustrant

etembarrassantquecesoit. Jepourraispeut-êtremarcherunpeu le longde laplageet fairepipiplusloin.Personnenemeverrait.Une fille s’écria qu’elle mourait d’envie de pisser et se précipita dans l’eau. C’était vraiment

dégueulasse.JemeplantaidevantWoods,levisageenfeu.Jen’avaisjamaisétédouéepourcauserfonctionnement

ducorpsaveclesmecs.—Qu’est-cequinevapas?Jebaissailatêteetprisuneprofondeinspiration.—J’aienviedefairepipi.Ilrestasilencieuxpuissemitàrire.—C’estpourçaquetuasfoncéretrouverBethy?Pourquoitunem’asriendit?—Parceque,répliquai-jesansreleverlatête.Ilritdeplusbelleetentrelaçasesdoigtsauxmiens.—Elle t’a expliqué où aller ? (J’acquiesçai.) Tu veux que je te conduise à lamaison pour que tu

puissesallerauxtoilettes?demanda-t-ilenm’attirantcontrelui.Jen’avaispasenviedemesoulagerdansl’océan.Maisjenevoulaispasnonplusqu’ons’enaille.—Jepeuxpeut-êtreallerunpeuplusloinsurlaplagepourquepersonnenemevoie.—Jepeuxveniravectoi?(Jesecouailatête.Jamaisdelavie.)Alorslaisse-moiteraccompagneràla

maison.—Maisj’enaipouruneminute.—Jen’aimepastropquetuaillesdansl’eautouteseuledanslenoir,affirmaWoodsenmeserrantla

mainplusfort.—Jepourraisentrerdansl’eauicietm’éloignerunpeudesgens.—Çanemeplaîtpas,insista-t-ilsanslâchermamain.—Maisilfautquej’yaille,protestai-jeenfronçantlessourcils.—Jevais t’accompagnerautrepart.Soit jedescendssur laplageavec toi, soit je teconduisàdes

toilettes.Aprèsréflexion,jedécidaiquejen’arriveraispasàallerdansl’eau.Jecapitulaiensoupirant:—Conduis-moiàdestoilettes.—Lesplusprochessontàlamaison,conclut-ilensouriant.—Alorsconduis-moiàlamaison.

Woods

Della m’avait demandé de l’attendre dans le pick-up pendant qu’elle allait aux toilettes. J’avaisaccepté.Enrevanche,pourrienaumondejenel’auraislaisséeentrerdansleseauxsombresdel’océan.Pourtant,auboutdeplusieursminutes,jedécidaid’entrerpourvérifierquetoutallaitbien.Elleavaiteuamplementletempsdepasserauxtoilettes.Dèsquej’eusposélepiedsurleperron,j’entendislavoixhautperchéed’Angelina.Merde.Savoiture

n’étaitpasgaréedehors.Qu’est-cequ’ellefaisaitchezmoi?Je ralliai le salonàgrandspas.Della se tenaitcontre lemur, lesbrascroisés sur lapoitrine tandis

qu’Angelinacontinuaitàlaharcelerdequestions.—Qu’est-cequetufouschezmoi?hurlai-jeenpassantdevantellepouragripperDellaetlaprotéger.C’étaitunmiraclequ’Angelinan’aitpasdéclenchéunecrisedepaniquechezDella.Jecaressaison

dospourlarassurertoutenlançantunregardnoiràAngelina,quimetoisait.—C’est pour ça ?Tu as gâché ton avenir pour elle ?Elle est serveuse au club,Woods.Àquoi tu

penses,nomdeDieu?Regarde-la.Elleest…elle…elleneressembleàrien.Absolumentrienchezellenetecorrespond.Tulabaisespourexprimeruneformederébellion?JesentisDellatressailliretj’étaisàdeuxdoigtsdepasseroutrelefaitqu’Angelinaétaitunefemme.

J’étaisprêtàluifairedumal.—Faisbienattentionàceque tudis.Tuesentréepareffractionchezmoi.Jevais tecolleren tôle

jusqu’àcequetonpèret’enfassesortir.SentantDellaseraidir,jeglissaiundoigtsoussonmentonpourobserversesyeux.Elleétaitavecmoi.

Bien.JeregardaidenouveauAngelina.—Tun’asrienàfaireici.Neremetsjamaisunpieddanscettemaison.Etrestebienàl’écartdeDella.

Situluiparlesouluifaisdumal,tuvasleregretter.Angelinasifflaetfittournoyersachevelurepar-dessussonépaule.—Nememenacepas,WoodsKerrington.Tunemefaispaspeur.Cetteespècedefarceavecelle(elle

pointasonlongonglemanucurésurDella)estridicule.Jet’auraisquandmêmeépousé.Ilsuffisaitdemeprévenirquetuavaisbesoindetempspourtesortircelle-làdelatête.Denouveau,Dellasursautadansmesbras.J’enavaisassez.—Sorsd’icitoutdesuite,hurlai-je.— Il faut que j’appelle quelqu’un pour qu’on vienne me chercher. Mon père m’a déposée ici. Je

pensaist’attendrepourteparler.Maisc’estellequiestentréeàlaplace.—Tuasuntéléphone.Sorsdechezmoietappellequelqu’un.Dehors!Angelinatournalestalonsquiclaquèrentsurleplancherenbois.Lorsquelaporteserefermaderrière

elle,jesoulevaiDellapourl’emmenerdansmachambreetm’assissurlelitàcôtéd’elle.—Regarde-moi,intimai-je,ressentantlebesoindevoirsonvisage.Ellelevalesyeuxsurmoi.Laconfusionetladouleurquejem’attendaisàytrouvern’yétaientpas.Au

lieudecelajelus…delacolère.—Tuallaisépousercette salope?Sérieusement?Àquoipensaient tesparents?Elleesthorrible,

Woods.Tuvauxtellementmieuxqueça.Jenepeuxpas…Jerecouvrissabouchedelamienneavantqu’ellenepuisseajouterunmot.J’étaistellementsoulagé

d’entendredelacolèreetnonpasdeladouleurdanssavoix.Dellamerenditmonbaiseraveclamêmevigueurpuismerepoussa.

—Jen’aitoujourspasfaitpipi.Jesouristandisqu’ellefilaitauxtoilettes.Soudain, lapenséequemonpèreallaitêtreaucourantpourDellamevintà l’esprit.Lasituation le

mettraithorsdeluietilallaitmépriserDella.S’ilyavaitlemoindremoyendefairetaireAngelina,jen’hésiteraispas.Maiscommentm’yprendre?Riendeplusredoutablequ’unefemmerejetée.Elleavaitétédédaignéeauprofitdequelqu’und’autreetétaitfurieuse.Jeprissoind’éteindremontéléphone.S’ilavaitenvied’appelercesoir,jeneseraispasdisponible.Je

voulaism’assurerqueDellan’étaitpasdanslesparagesquandj’auraiscetteconversationaveclui.S’ilmepoussaittrop,j’étaisprêtàfairemesvalisesetàmettrelesbouts.Dellaavaitfaitlalistedesendroitsqu’ellevoulaitvoiretoniraittouslesvisiter.Laportedes toilettess’ouvritetDellaensortitdansunbikini jaunequicontenaitàpeinesesseins.

Comme celui qu’elle avait porté ce jour-là à la plage, à en faire baver tous lesmecs. Je la regardais’avancerversmoi.—Tusaisqueljouronest?demanda-t-elle.J’avaislesyeuxrivésàsapoitrine.Sesseinsrebondissaientaurythmedesespas.—Samedi.D’ungesteelledénoua lehautdesonbikiniqu’elle laissa tomberpar terre,dévoilantsesseins.On

n’avaitpasl’airdes’orienterversunretouraufeusurlaplage.—Çafaitseptjoursquej’aicommencélapilule,énonça-t-elleenglissantlespoucessurlescôtésde

saculottequ’ellefitcoulisserlelongdesesjambes.Sept jours. Comment j’avais pu oublier ? Je retirai précipitamment ma chemise, me redressai et

soulevaiDellapourlajetersurlelit.—J’avaispeurquetunesoisbouleverséeparmonexetvoilàquetusorsdelasalledebainsenme

faisantunstrip-tease.NomdeDieu,tuesl’incarnationdetousmesfantasmes.Ellerejetalesbrasau-dessusdesatêteetempoignalatêtedelit.—Jeveuxque tu jouissesenmoi.Encoreetencore,affirma-t-elleenécartant les jambes toutense

cambrantmalicieusement.Jeretiraimonshortdebainetmontaisurelle.—La première fois va être rapide, parce que je ne peux pas attendre. J’en ai besoin.On ira plus

lentementlafoisd’après,jetelejure.Ellepassalentementsalanguesurseslèvres.—Baise-moiviolemment.J’allaisexploseravantd’êtreenellesiellecontinuaitsonpetitmanège.Jesoulevaiseshanchesetm’enfonçaienelled’unepousséevigoureuse.—Ohoui!hurla-t-elle.J’enoubliaitouteconsidérationdedouceur.Elleavaitenvied’unbadboyetj’étaisprêtàlelaisserse

déchaîner.L’idéedejouirenellefaisaitdurcirmescouilles.Cesoir,riennepourraitm’arrêter.J’allaislabaiserdanstoutelamaison.Jem’abîmai en elle, sansm’arrêter, d’avant en arrière, jusqu’à ce qu’elle se torde sousmoi. Elle

suppliaenhurlantmonnom.Sesonglesgriffèrentmondos.Lesmarquesyseraientencorelelendemain.Cette idée me rendit encore plus fou. Je voulais qu’elle me marque sur tout le corps. Tout aussiprofondémentquejem’apprêtaisàmarquersachatte.Dellasoulevalesgenouxetenserrameshanchesdesesjambesenhaletant:—Jevaisjouir…,gémit-elletandisquesesonglesseplantaientdansmachair.Je la laissai me serrer jusqu’à ce que j’explose en elle. Mon corps trembla encore tandis que je

rentraisenelleunedernière foisetquemasemence l’emplissait. J’eusenviedecrier triomphalement,sachantqueceterritoirem’appartenait.Riendecequemafamilleexigeaitnepourraitm’éloignerdecela.

Nid’elle.

Della

AssisesousleporchedeWoods,jeregardaislesvaguessebrisersurlesableenbuvantmoncafé.Jen’avaispasétéautoriséeàaller travailler.Woodsdevaitvoirsonpèreetmesavoirsurplaceallait lestresser.Ils’inquiétaitpourmoi.Aprèslanuitqu’onvenaitdepasser,j’étaistropfaiblepourfairequoiquecesoit.J’avaisdoncacceptéderesteràlamaison.Simon jobauclubdevenaitproblématique, j’allaisdevoir en trouverunautre.Mais jen’avaispas

enviedepenseràçaaujourd’hui.L’euphoriedelanuitdernièrenem’avaitpasquittée.J’avaisperdulefil du décompte d’orgasmes que j’avais eus, mais je savais queWoods avait joui cinq fois en moi.Chaquefoisavaitétémémorable.J’avaisprismapiluledès le réveil avantdemebrosser lesdents.Sinotreactivité sexuelleprenait

cettetournure,jenepouvaispasmepermettredel’oublier.Jen’envisageaispasd’avoirdesenfants.Quelledestinéeterribleàdonneràungamin.Unemèrevouée

àperdrelatêteàunmomentdonné.Aucungosseneméritaitça.Jem’étaisjuréedenejamaisfaireàunenfantcequemamèrem’avait infligé,mais rienn’étaitmoinssûr.Passi jecraquaismentalement.Mamèren’avaitpasétéunemauvaisepersonne.Elleétaitmalade.Jerepoussaicettepensée.J’étaisprudente.Jen’allaispastomberenceinte.Lasonneriedemontéléphoneretentit.LenomdeBradens’affichaitàl’écran.Jeneluiavaispasparlé

depuisplusd’unesemaine.J’avaisététellementobnubiléeparWoodsquejen’avaispasprisletempsdel’appeler.—Bonjour!—Salut,belleinconnuequin’appelleplusjamaissameilleureamie.Commentvas-tu?—Jevaisbien.Cetteréponsesimpleendisaitlong.—Bien?répétaBradenenéclatantderire.Biencomment?Biencommeilestchaudbouillantette

donne plein d’orgasmes, ou bien comme tu n’avais jamais connu ça au pieu, ou bien comme tu vasl’épouseretluifairedesenfants?Monsourires’évaporaàcettedernièrephrase.Moncœursemitàbattreàtoutrompre.L’épouseretlui

fairedesenfants…Jenepourraisjamaisl’épouser.Illesavait.Jeluiavaisditquej’étaisfolleetquejepouvaiscraqueràtoutmoment.M’aimait-ilseulement?Jenepensepas.Ilnemel’avaitpasdit.Moijel’aimais.Jel’aimaisplusquetout.Maisjenepouvaispasl’épouser.Cettehistoireétaitvouéeàl’échec.Ilallaitvouloirdesenfants.Pasd’unefemmequiallaitinéluctablementperdrelaraison.MonDieu,qu’avais-jefait?—Della,toutvabien?demandaBradend’unevoixinquiète.Mince.Della,jen’aipasréfléchiavant

de dire ça. Je suis désolée,ma puce. Pense au plan cul. Pense à tout ce que tu veuxme dire. Resteconcentrée.Resteavecmoi.Elle déployait des efforts monstres pour me ramener à elle. Mais je n’avais pas déraillé. J’étais

absolumentlucide,quantàlavérité,quantauxfaits.Jem’étaislaisséeemporteretlesavaisoubliés.—Jel’aime.Maisjenepeuxpasl’aimer,murmurai-jedanslecombiné.Derrièremoilaportes’ouvritetjedécouvrisunhommequejen’avaisvuqu’uneseulefoisàcejour.Il

étaitprésentàlasoiréecaritativeoùj’avaischanté.C’étaitlepèredeWoods.—Ne dis pas ça, Della. Tu peux tout à fait l’aimer. Tu lemérites. Tu n’es pas ta mère. Tu peux

prétendreaubonheur.C’estcequejetesouhaitedepuissilongtemps.Est-cequ’ilt’aime,luiaussi?

Jevis lepèredeWoodss’avanceretprendreplacesurunechaisefaceàmoi.Quefaisait-il ici?IlétaitcenséêtreavecWoods.—Jenepeuxpas.Jenesaispas,répondis-jesansréussiràm’arracherduregardfroidetsévèreposé

surmoi.—Si, tupeux.Tupeuxavoirdesenfants.Ilsserontmagnifiquesetuniques,commetoi.Çan’estpas

impossible.Ilfallaitquejel’interrompe.Jesentaisl’obscuritéserefermersurmoi.Desvisionsdemamèrequime

transperçaitdesesyeuxfous.Letéléphoneglissademamain.—Faisonssimple,énonçal’hommed’unevoixempreintededégoût.Combiend’argentfaut-ilpourque

vouspartiezetneremettiezjamaislespiedsdanscetteville?Votreprixseralemien.

Della, Della, chantons une chanson. Della, Della, viens manger avec ton frère. Son assietterefroidit.Ilt’attend.Della,as-tuvulachemisepréféréedetonfrèredanslabuanderie?Ilditquetul’aspriseetilesttrèscontrarié.Ilrefusedemanger,Della.Ilneveutriensavoir.Ilfautqu’ilavalequelquechose.Es-tusortie,Della?Tonfrèreditqueoui.Ilditquetut’esglisséedehorspendantquejedormais.Il

tevoit.Ilveutteprotéger.Jen’aipasréussiàleprotéger,maisilm’aideàlefairepourtoi.Tuneveuxpastesentirensécurité,Della?Tunepeuxpassortir.Della,ilm’aditqu’ilm’attendait.Ilm’aime,Della.Toi,tunem’aimespas.Tuveuxmedésobéiret

filerdehorsenpleinenuit.Luinemedésobéitpas. Ilauraitpréféréresteravecmoi.Maintenant, ilm’attend. Il dit qu’il mangera si je vais le voir. Della, comment je peux faire pour aller le voir ?Commentfaire?«Maman!NON!»Mescrisn’atténuentpasladouleur.Ilyadusangpartout.Uneflaquedesang

toutautourde soncorps. Je l’ai laisséeet elle estpartie le retrouver. Jen’auraispasdû sortir. Jen’auraispasdûlalaisser.

Jeclignaidesyeuxàplusieursreprises.J’étaisparterre.Jetouchaileboistièdesousmoncorpsetmeredressailentement.J’étaisallongéesousleporche.Déboussolée, jeregardaitoutautourdemoi:montéléphonereposaitsurlachaiselongueetmatassedecafésurlatableàcôté.M.Kerringtonétaitpassé. J’étaisau téléphoneavecBraden.Merde,Braden. Jevisque j’avais raté

plusieursappelsd’elleetdeuxdeWoods.Jen’avaispasperduconnaissancetrèslongtemps.Uneheuretoutauplus.Bien.Je jetai unœil vers la porte enmedemandant comment faire pourM.Kerrington.Avais-je rêvé sa

visiteouétait-il réellementvenu?M’aurait-il laisséecommeça?Aurait-ilappeléWoods?J’étaisentraindemereleverlorsquelaported’entrées’ouvritetqueWoodsseprécipitasurmoi.Jemeredressaijusteàtempslorsqu’ildéboulasouslavérandaetmepritdanssesbras.—Tuvasbien.Tunerépondaispas.J’aiappeléettunerépondaispas.Pourquoiétais-tuparterre?

C’estencorearrivé?Tuaseuunecrisedepanique?Pourquoi?Viensici,bredouilla-t-ilens’asseyantsurlachaiselongueetenmeprenantsursesgenoux.Ilrepoussalesmèchesdecheveuxquitombaientsurmonvisageetdéposaunbaiservigoureuxsurmes

lèvres.—Tum’asfaitunedecespeurs,Della.Pourquoitunerépondaispas,bébé,toutvabien?Jenevoulaispasluidirelavéritémais,enmêmetemps,jenevoulaispasluimentir.Maiscommeje

n’étaispassûrequesonpèresoitvenu,jepréféraisnepasl’évoquer.—J’étais en traindediscuter avecBraden.Elleaditquelquechosequi a réveilléun souvenir.Ce

n’étaitpasvolontaire,celaarriveparfois.Jecroisquejemesuisévanouie.Jemesuisréveilléeparterre.Ellem’aappeléeencoreplusdefoisquetoi.Ilfautquejelarappelle,elledoitêtreentraindeflipper.

Woodsm’attiradanssesbras.—NomdeDieu,jedétestel’idéequetutraversesçatouteseule.C’estinsupportable.Ilnepouvaitpascontinuercommeça.Mesproblèmes lebouleversaientbeaucoup trop. J’étaisdéjà

malenpointetçan’allaitpass’arranger.C’étaitinévitable.Pourrait-ilgérer?Non.C’étaitimpossible.Sanscompterqu’ilallaitvouloirdesenfantsàunmomentdonné.—Tunepeuxpasêtreavecmoitoutletemps,Woods.Ilfautaccepterqueçavaseproduirequandtu

n’espaslà.—Jenepeuxpas,lâcha-t-ildansunsoupir.Jeneveuxpasquetusoisseulequandçaarrive.Jevais

trouverun remède. Jevais trouver lesmeilleursmédecinspour te soigner.Tupeux t’ensortir. Je te lepromets.Ilavaitl’airtellementdéterminé.Jen’avaispasétésincère.Jen’avaispasexpliquéquec’étaitàpeine

ledébutdemafolie.L’intensitédesonregardsemblaitreflétermessentiments.Est-cequecelavoulaitdirequ’ilm’aimait?

L’avais-jelaissétomberamoureuxdemoi,totalementaveugleàcellequ’ilaimait?

Woods

DellarappelaBradenpourlarassurerpuisallafaireunesieste.Elleavaitl’airabsente.Quelquechosenetournaitpasrond.Jenel’avaisjamaisvuedormirenpleinejournée.Ellenem’avaitpastoutracontésursacrise,jelevoyaisdanssesyeux.Commeunehésitation.Je restai à laportede la chambrepour la regarderdormir.Elle était repliée enboule, commebien

souvent.Lavoirallongéeparterrem’avaitfoutuuncoup.Envenant,j’avaiseupeurdelatrouvercommeça.En

la voyant batailler pour se redresser, j’en avais eu le cœur net. Je haïssais cette idée. L’idée mêmequ’ellesoitmalade.J’allaisluitrouverdel’aide.Sansplusattendre.Fortheureusement,monpèreavaitétéabsentpendantlajournée.Jen’avaispasréussiàletrouverpour

luiparler.Cen’étaitpasjustedelaisserDellaseuleàlamaisonalorsqu’elleauraitpuêtreaubarprèsdemoi.Jamaisplusjeneluiimposeraisça.C’estsansdoutepourçaqu’elleavaiteucettefoutuecrise.Elleavaitdûcroirequejelacachaisàmonpèrecarelleposaitunproblème.J’auraisdûypenser.Uncoupàl’entréemetirademespensées,etjerefermailaportedelachambrepournepasréveiller

Della.Trippsetenaitdel’autrecôtédelaportemoustiquaire,lesmainsdanslespoches.—Tripp,dis-jeenguisedebonjour.—Jesuisvenudireaurevoir.Ilesttempsquejeparte.Monpèreestvenumevoirhieretçanes’est

pasbienpassé.Jecomprenais.Partirétaitpeut-êtrelaseulesolutionpourmoiaussi.Çal’étaitpourlui.—Tuvasoù?—Jenesaispasencore.Jesauraiquandj’auraitrouvé.Jehochailatêteetjetaiunœildanslecouloir.—Jet’auraisbieninvitéàboireunverre,maisDellaestentraindedormir.Ellen’apaspasséune

bonnematinéeetjeneveuxpasladéranger.—Jecomprends.Jevoulaisluidireaurevoiràelleaussi.Tuleferaspourmoi.Jen’aimaispasl’idéequ’ilaitquoiquecesoitàluidiremaisj’opinaiduchef.Inutiledejoueraucon.—Jen’ymanqueraipas.—Alorscommeça,ellerestedanslecoin?—Ouais.—Ettonpèreestd’accord?J’aiapprisqu’Angelinaétaitaucourant.Lanouvelles’estébruitée.Merde.—Jen’aipasencoreparléàmonpère.—Ilfautquetulefasses.Avantqu’ilneluiparleenpremier.Ilavaitraison,évidemment.Jedevaism’assurerquemonpèrerestaitàdistancedeDella.—Jevaislefaire.—C’estlabonne,Woods?Pourtoujours?Elleméritedetoutfoutreenl’air?Jesavaisqu’ilmeposaitcesquestionsentantqu’amiquiavaitfaitunchoixdumêmeacabit.—Oui.C’estelle.Jen’envoudraijamaisuneautre.Trippsourit.—J’arrivepasàcroirequeWoodsKerringtonsoitréellementtombéamoureux.L’expression « tombé amoureux »me surprit, mais uniquement parce que je ne l’avais pas encore

formulée.Ellem’était étrangère. Je n’avais pas encorepensé à prononcer le verbe« aimer»,mais ilavaitvujuste,j’étaisamoureux.JejetaidenouveauunœilendirectiondelachambreetmereprésentaiDellapaisiblementendormiesurmonlit.Jel’aimais.J’aimaissavoirqu’elleétaitici.Qu’elleétaitàmoi.Quejepouvaisprendresoind’elle.—Jel’aime,énonçai-jesimplement.Trippmegratifiad’uneclaquedansledos.—Parfait.Elleenabesoin.Sur ce, il sortit. Jeneme retournai paspour le regarderpartir ni lui faire au revoir de lamain. Je

m’approchaidelaportedelachambre.Jeposailesmainsdechaquecôtéduchambranleetappuyaimonfrontcontrelaporte.Jel’aimais.Jel’aimaisavecunsentimentd’unetelleférocitéquejen’arrivaispasàle définir. Je ferais tout ce qu’il fallait pour l’aider. Elle allait être heureuse. J’allais passer chaqueseconde de mon existence à lui donner le sourire. Il fallait que je lui déniche un docteur. C’était lapremièreétape:luitrouverdessoins.Lapoignéetournaetlaportes’ouvrit lentement.Mesmainsretombèrentlelongdemoncorpstandis

queDellaplantaitsonregarddanslemien.Sescheveuxétaienttoutébouriffésetelleavaitencorel’airfatigué.—Tum’aimes?L’entendreprononcercesmotsfitchavirermoncœur.Ellesavait.—Oui.Plusquemavie.Aulieudesejeterdansmesbraspourmedirequ’ellem’aimaitelleaussi,ellecachasonvisagedans

sesmains et semit à sangloter. Je restai unmoment interdit, totalement dérouté par sa réaction. Je nem’attendaispasdutoutàcela.—Della?murmurai-jetandisquel’angoisses’installaitdansmapoitrine.—Tunepeuxpasm’aimer.Tuméritesmieux.Pasmoi,dit-elleenlevantsurmoisonregardpleinde

larmes.—Personnen’estmieuxquetoi,Della.—Non, non, non, protesta-t-elle en secouant la tête. Tu ne vois pas ? Je suis instable. Sur le long

terme…plustard…danslavie,jepourraisdevenircommemamère.Tunepeuxpasm’aimer.Samère?Ellen’allaitpasdevenircommesamère.Pourquois’était-ellemisçadanslecrâne?—Tuestoutcequejepeuxdésirer,bébé.Toi.Tuneseraspascommetamère.Tuesexceptionnelleet

uniqueetonvatetrouverdel’aide.Etjeseraiàtescôtéstoutdulong.Jenetequitteraijamais.Jetelejure.Dellameregardait,levisagebaignédelarmes.Jetendislamainpourluiessuyerlesjouesetl’attirai

versmoipourl’embrasser.—Jeneveuxpastedétruire,murmura-t-elle.—Teperdreseraitlaseulechosequipourraitmedétruire.Ellefermalesyeuxetsoupira.—Maissijeperdslaraison?Ilfallaitquejeréussisseàluifairecomprendrequeçan’allaitpasseproduire.Merde,ellen’étaitpas

samère!—Çan’arriverapas.Jet’enempêcherai.Dellareniflaetsecoualatête.—Tunepeuxpaslecontrôler.Si,j’allaistrouverunmoyendecontrôlercettesaloperie.—Tum’appartiens.Tum’entends?Tuesàmoi,DellaSloane.Jevaisprendresoinde toi.Rienne

pourrat’éloignerdemoi.Rien.

Della

J’avaispassé le restede la journéesous leporche,enboulesur lesgenouxdeWoodsàcontemplerl’océan.Nousavionséchangéàpeinequelquesmots.Nousétionsrestésserrésl’uncontrel’autre.J’avaisfaittoutmonpossiblepourcroiresesparoles.Detempsàautre,ilavaittentédemerassurer.Le soir venu, j’avais réglé mon réveil, sachant que je travaillais aujourd’hui au service du petit

déjeuneretqu’ilétaithorsdequestionquejerateunautrejoursousprétextequeWoodsavaitdécidédeme dorloter. J’étais une grande fille et je pouvais faire face à la situation. Ilm’avait accompagnée etembrassée à plusieurs reprises avant deme laisser me préparer en cuisine. Il était en retard sur sesdossiersaubureauetm’avaitpromisqu’ilypasseraitlajournéesansmetournerautour.Ilavaitfallulesuppliersansrelâche,maisilavaitfiniparaccepter.J’entraidans la cuisineet aperçusune superbeblondeavecunventre très ronden traindeparler à

Jimmy.Ellesefrottaitl’abdomenetroucoulaitàl’attentiondesonbébé.Ellelevalesyeuxetcroisamonregard.Unsouriresincèreéclairasonvisage.Ellem’intriguaaussitôt.—Bonjour,lança-t-elled’unaccenttraînantduSuddouxcommedumiel.Je ne parvins pas à déceler de quel coin exactement elle venait. Mes yeux tombèrent sur un gros

diamantàsondoigt.Àtous lescoups,elleétaitmembreducountryclub.Maisquefaisait-elledans lacuisineavecJimmy?—Bonjour,répondis-je.Jimmymelançaunregardenjoué.—Ravique tusoisderetour,mapoulette.Hier,c’était lamerdesans toi. (Je luisouriset retournai

aussitôt mon attention sur la blonde.) Della, je te présente Blaire. C’est mameilleure amie, qui m’aabandonnépourunautre.Etjeneluienveuxpasvuquelemecestunebombe.Blaire,voiciDella,quis’envoie–oupas–lepatron.—Jimmy!Blaireetmoinousétionsexclaméesenmême temps. Jen’arrivaispasàcroirequ’il aitpudireça.

Aprèstout,jeneconnaissaispassacopine.—Woods,tuveuxdire?Ceboss-là?interrogeaBlaireavecunsouriremalicieux.Ellemeplutaussitôt.—Évidemment,c’estWoods.Mademoiselleadugoût.Ellevapassetaperlevieux.—Maisarrêtedeparlercommeça!protestai-je,rougecommeunetomate.—Jimmyn’auraitpasdûm’enparler,maismaintenantquec’estfait, jepeuxledire :Woodsestun

typebien.Si,euh…tutel’envoieseffectivement,tuasfaitlebonchoix.Cetteconversationétaitsurréaliste.Jelaremerciaiavecunsourireforcé.Elleme renvoya un sourire rayonnant comme si elle était sincèrement heureuse que je couche avec

Woods.Jemedemandaiss’ilsétaientamis.Jefailliscéderàlajalousiepuismesouvinsdelatailledesonventreetdesondiamant.Elleétaitprise.Totalementprise.—Sijen’accouchepasdanslasemaine,onpeutpeut-êtredéjeunerensemble?Jeregardaisonventre,puissonvisage.Onauraitditqu’elleallaitaccoucherd’uninstantàl’autre.À

partleballondebasketquiluifaisaitofficedebidon,elleétaittoutemince.—Oui,c’estunebonneidée,répondis-je.—DellaSloane,interpellasoudainunevoixsévère.Jemeretournaietdécouvrisunagentdepolicequisetenaitdansl’encadrementdelaporte.

—Monsieur?Ladernière fois qu’un représentant de la loi était venume chercher, ça ne s’était pas bien terminé.

L’angoissequiaccompagnaitcesouvenirmefigeasurplace.Jen’aimaispaslesagentsdepolice.—Vousallezdevoirm’accompagner,mademoiselle,ordonna-t-ilentenantlaporteouverte.Touslesyeuxétaientrivéssurmoi.J’avaisenviededisparaître,maisj’étaisincapabledebouger.—MademoiselleSloane,sivousnemesuivezpasdevotrepleingré,jevaisdevoiralleràl’encontre

dessouhaitsdeM.Kerringtonetvousarrêterdanslecountryclub.M’arrêter?Ausouvenirdesmenottescliquetantàmespoignetstandisquel’agentmelisaitmesdroits,

moncœursemitàbattreàtoutrompre.Ilfallaitquejememaîtrise.Cen’étaitpaslemomentdetomberdanslesvapes.Impossibled’avoirunecrise.Ilfallaitquej’aietoutematête.—Pourquoi l’arrêtez-vous ? Je ne crois pas uneminute queWoods soit au courant de ça, vociféra

Jimmyens’interposantentreluietmoi.—M.Kerringtonestparfaitementaucourant.C’estluiquim’aenvoyéicipourescorterDellaSloane

horsdubâtimentafindeprocéderàsonarrestationdansleparking.Cependant,siellen’obtempèrepas,jel’arrêteraiainsiquequiconquesedressesurmonchemin.IlallaitarrêterJimmyparcequ’ilessayaitdemevenirenaide.Ilfallaitquejesuivel’agent.Jenele

croyaispasquand il disait queWoods était au courant.Quelque chosene tournait pas rond, etWoodsfiniraitparmeretrouver.Jen’allaispasenfaireunecrisedepanique.Horsdequestion.—Toutvabien,Jimmy,affirmai-jeenlecontournantpourrejoindrelaporte.Jesortissansmeretourneretmeconcentraisurlasortiedubâtiment.J’avaisenviedecrierlenomde

Woods,maismeretins.Maboucheétaitparalysée.J’étaislentemententraindemepétrifier.Une fois près de la voiture de police, l’agent me poussa en avant, ce qui me fit trébucher. Je me

rattrapaienm’agrippantàl’avantduvéhicule.Ilcommençaàm’énoncerquej’avaisledroitdegarderlesilenceet je fisabstractionde lui. J’essayaidenepaspenseraumétalquise resserraitautourdemespoignets.Sansquoij’allaissombrer.L’agent ouvrit la portière arrière, posa la main sur mon épaule et me poussa dans l’habitacle. Je

voulaisluidemanderd’arrêterdemefairemal,soulignerquejelesuivaissansesclandre,maisj’enétaisincapable.Lesmotsnevenaientpas.Laterreurétaitentraindes’emparerdemoi.Je voulais Woods. J’étais effrayée. Des larmes coulaient sur mon visage, et je me concentrai sur

Woods.Sursonvisagequandilm’avaitembrasséecematinpourmeréveiller.Jel’aimais.Jeneluiavaisjamaisditquejel’aimais.Ilfallaitquejeleluidise.Lavoitures’immobilisadevantlamaisondeWoods.J’étaissoulagée.Jen’allaispasenprison.Jene

savaispascequejefaisaislà,maislesoulagementfitfuirtouteslesautrespensées.DeuxMercedesnoiresétaientgaréesdansl’allée.Laportièreconducteurdelapremières’ouvritetle

pèredeWoodsensortit.Çanemedisaitrienquivaille.Qu’est-cequ’ilfaisaitici,etpourquoiavait-ilexigémonarrestation?L’agentdepoliceouvritmaportièreet,commejerestaiimmobile,m’extirpadeforcedelavoiture.Je

trébuchaisurlesdallesetmerattrapaidejustesse,évitantqueleflicquienserraitmonbrasneledéboîte.—Merci,Josiah,dem’avoiraidéàtraiterlaquestionavecdélicatesse,ditM.Kerringtonàl’agent.Lepolicierme lâcha lebras enhochant la tête, puis lançaun jeude clés àM.Kerringtonavantde

reprendrelevolantdesonvéhicule.Nousrestâmesainsiensilence.J’étaistoujoursmenottée.—Bonjour,mademoiselle Sloane. J’espère cette fois-ci que vous parviendrez à garder vos esprits

suffisamment longtemps pour que je vous explique précisément ce qui va se passer, commença-t-il ens’avançant vers moi. Suite à notre dernière rencontre, lorsque vous avez trouvé le moyen de vousévanouir, j’ai effectué des recherches vous concernant. J’ai découvert quemon fils gâchait son avenirpourunemaladementale.Ouenpassedeledevenir.Apparemment,c’estdefamille.Vousmontrezd’ores

etdéjàdessignesd’instabilité.Vousêtescenséeconsulterunepsychiatretroisfoisparsemainemaisvousêtespartiesansunmotvoilàsixmois.Vousavezfaitde laprisonpour lemeurtredevotremère,dontvousavezétéinnocentéegrâceàvotrealibi.Néanmoins,lesantécédentsdefoliesontbeletbienlà.Jenepeuxpaslaisserl’héritierdesKerringtonsabotersonexistencepourquelqu’uncommevous.Vousn’êtespasassezbienpourmonfils.(Ilexhibaunbraceletendiamant.)Etpourm’assurerquevousneremettrezjamaislespiedsàRosemaryBeach,j’ailapreuvequevousavezvolécebraceletàunecliente.Ellel’afaittomberalorsqu’elledînaitdansnotreétablissement,etvousl’avezprisetcachédansvotrevalise.Cettedameestprêteàvouspardonneretànepasdonnersuitesivousquittezlaville.L’agentquivousaamenéeàmoidisposedecerapportetprocéderaàvotrearrestationsivousnequittezpaslavillesur-le-champ.(Ilmontradudoigtl’autreMercedesgaréedansl’allée.)Vosbagagessontàl’intérieur.J’espèreque vous prendrez place dans ce véhicule de votre plein gré afin qu’il vous emmène loin d’ici. Peuimporteoù.Maisloin.Jeconsidéraimesoptions. Jen’avaispasmon téléphone. Jene savaispas tropoù il se trouvait. Je

l’avaislaisséàlamaisoncematin.J’étaistoujoursmenottéeetj’allaisselontoutevraisemblancefinirenprisonpourundélitmontédetoutespièces.OùétaitWoods?—Sivousaimezmonfils,etjecroisquevotreespritinstablearéussiàs’enconvaincre,vousallezle

laisser tranquille.Oubliez-le. Il n’a pas besoin de vous. Il a besoin de quelqu’un qui lui donnera desenfantsenbonnesanté.Quelqu’undontiln’apasàs’occuper.N’est-cepascequevousluisouhaitez?C’étaitvrai.C’esttoutcequejedésiraispourlui.Jehochailatête.—Bien.Alorsmontezdanscettevoitureetpartez,mademoiselleSloane.Jelevailesyeuxsurlamaisonquiincarnaitl’hommequej’aimaisetunelarmeroulasurmajoue.Il

avaitpourtantraison.Lemomentétaitvenudepartir.—Jepeuxvousdemanderquelquechose?Jevousenprie,dites-luiquejesuispartieparcequec’était

mieuxpourlui.Pasparcequejenel’aimepas.Jel’aimevraiment.Jeneveuxquesonbonheuretqu’ilaittoutcequ’ilyademieuxdanslavie.Jesaisquejenesuispaslameilleurecandidate.M.Kerringtongarda lesilence. Il restadebout, lamainsur laportièrearrièreouvertede lavoiture,

attendantquejeprenneplaceàl’intérieur.—S’ilvousplaît,jeneveuxpasqu’ilcroiequejenel’aipasaimé.Ilneméritepasça.—Woodssemoqueraéperdumentdevotredépart.Arrêtezdevousbercerd’illusions,mapetite.Pour

lui,vousn’êtesqu’unesimpledistraction.Enmonforintérieur,jesavaisquec’étaitunmensonge,maisjenepouvaispasencaisserunautrechoc.

J’étaissurlepointderefaireunecrise.Jetentaidedéglutir,malgrélabouledansmagorge.—Trèsbien,etmavoiture?demandai-jeenm’approchantdelaberline,lesmainsattachéesdansle

dos.—Elleparviendrajusqu’àvous.Pourlemoment,vousla laissezici.Nousdevonsnousassurerque

vousn’avezrienvoléd’autreavantdevouslarestituer.JeconfielesclésdevosmenottesàLeo,votrechauffeur.Une fois que vous serez arrivée à bon port, il vous détachera. C’est pour sa sécurité, bienentendu.Jenerépondispas.Jemeglissaidanslavoiture.Laportièreserefermaderrièremoietjeposailatête

contrelavitre,dansl’incapacitédem’adosseràcausedesmenottes.JeregardaiRosemarydisparaîtreaulointandisquenousquittionslapetiteville.—Oùallons-nous,mademoiselle?interrogeaLeo.—ÀMacon,enGéorgie.Lemomentétaitvenuderentreràlamaison.

Woods

Mamèrem’avaitappelépourmesignifierquemonpèrevoulaitmeparler.Jem’étaispréparéàcetteconfrontation et j’allai le voir pendant que Della était au travail. Sauf qu’il n’était pas là.Mamèrem’invita àm’asseoir etmepréparaunpetit déjeuner en l’attendant.Aprèsdeuxheures à l’écoutermeserinersurmonaveniretmerappelerlessouhaitsdemongrand-père,jemelevai.Jeneresteraispasuneminute de plus.Della allait bientôt terminer son deuxième service et je comptais bien l’attendre à lasortie.J’avaisassezperdudetemps.Mon téléphone semit à vibrer pour la cinquième fois d’affilée et j’aperçus le numéro deBlaire à

l’écran.Jeneluiavaispasparlédepuisqu’elleavaitquittéRosemaryavecsonfiancé,maissonappeltombaitmal.J’avaisd’autreschatsàfouetter.Jelarappelleraisplustard.J’éteignismontéléphoneetlerangeaidansmapoche.—Ilsera làdansquelquesminutes,monchéri.Laisse-lui le temps.C’estunhommetrèsoccupé.Je

vaisvoirsij’arriveàlejoindre.Elles’apprêtaitàluipasseruncoupdefillorsquej’entendisl’unedesdeuxlourdesportesdel’entrée

s’ouvriretserefermer,puislecliquetisdeschaussuresdevilledemonpèresurlesolenmarbre.—Levoici!s’exclama-t-elle,rayonnante.Lesoulagementselisaitsursonvisage.Elleenavaitmarredemetenircompagnie.Lesentimentétait

partagé.— Désolé, je suis en retard. J’avais une affaire à régler. Des problèmes de personnel que tu as

négligés,maisdontjemesuisoccupé.Ilfautmaintenantparlerdetonaveniretdéciderdecequetuveuxfairedetavie.J’aicrucomprendrequ’Angelinan’enferaitpaspartie.Jesuisprêtàl’accepter.Maisilfautqu’onparle.J’avaisdumalàcroireàlafacilitéaveclaquelleilserésignaitàmonrefusd’épouserAngelina.Ilme

l’imposaitdepuismesdixans. Je jetaiunœilàmamère,quimegratifiad’unsourire forcé toutensetordantlesmainsd’inquiétude.Ilsetramaitquelquechose.Ilsavaientdûmedégoterunenouvellefuturefemme.C’estlaseuleraisonpourlaquelleilspouvaientenvisageruneautresolution.—Peut-on parler affaires dansmonbureau et laisser tamère profiter tranquillement du reste de la

journée?Jeluiemboîtailepasdanslecouloirquimenaitàsonbureau.Jedisposaid’exactementtrenteminutes

avantqueDellasortedutravail.Jepouvaisluienaccordervingt.Ilavaitintérêtàcauservite.—Cigare?proposa-t-ilens’arrêtantdevantlacaveàcigaresquemamèreluiavaitofferteencadeau

demariage.Depuis,ils’étaitfaitconstruireunepiècepoursonimposantecollection,maisilengardaitquelques-

unsdanssonbureaupourdesraisonspratiques.—Non,déclinai-jeenm’approchantdelafenêtreaulieudem’asseoirdel’autrecôtédesonbureau

commeungaminenattentededirectives.—Trèsbien.Jen’enaipasnonplusenvie.J’attendraicesoirpourensavourerun.DouglasMortimar

vientdîner.Jecomptesurtoipourtejoindreànous.DouglasMortimar était l’undes plus gros investisseurs du club.Un troudu terrain de golf lui était

dédié.Jamaisjen’étaisinvitéàdetellesréunions.—Pourquoi?demandai-je,méfiant.Jen’avaispaslesouvenirqueMortimaraitunefille.Sauferreurdemapart,sonfils,beaucoupplus

âgéquemoi,rendaitvisiteàsafamillechaqueété.—Tuveuxuneplusgrossepartdubusinessetjesuisprêtàteladonner.Mauvaiseréponse.—Viens-enaufait.Qu’est-cequetuexigerasdemoi?Jesaisqu’Angelinat’aparlédeDella.Jene

suispasstupideaupointdecroirequ’ellen’apasébruitél’information.Cettesalopeestrancunière,unedesraisonspourlesquellesjeneveuxpasêtrecoincéavecellelerestantdemesjours.Donc,tuesaucourantpourDella.Parlonsdeçaenpremier,puisquec’estlavéritableraisondecetterencontre.Monpèreserralamâchoire,etjesusquej’avaisfoutuenl’airsonjolitraquenard.Cetteentrevueavait

eupourobjectifdemeleurrerenmefaisantmiroitertoutcequejepouvaisavoir;suiteàquoiilporteraitle coup de grâce avec un ultimatum concernantDella. Il allait devoir comprendre que rien ne passaitavantelle.Ques’il refusaitde l’accepter, jem’en irais.LeKerringtonClubpourrait échoir àquelqueparentéloigné,voireaufilsdeMortimar,puisquemonpèrel’aimaittant.— Je suis au courant de ta passade. Je l’ai rencontrée. Elle n’est pas exactement ce que l’on peut

qualifierdestablementalement.Commentçaill’avaitrencontrée?Quand?Etcomment?Jetraversailapièceàgrandspas,posailes

deuxmainsàplatsurlebureauetplantaimesyeuxdanssonregardcalculateur.—Qu’est-cequeçaveutdire?grondai-je.Monpèrenebronchapas.Ilsecontentademefusillerduregard.—Exactementcequejeviensdedire.Ellen’estpasenformementalement,commetulesaisfortbien.

Néanmoins,j’aimenéquelquesrechercheslaconcernantetlasituationestbeaucoupplusgravequetunepeuxl’imaginer.Ilétaittropmesuré.Ilmecachaitquelquechose.—Quandl’as-turencontrée?—Jemesuisarrêtécheztoihiermatin.Elleétaitseuleetj’aiàpeineeuletempsdeprononcerunmot

qu’elle est devenue complètement catatonique. Elle ne réagissait plus. Elle restait immobile, les yeuxdanslevide.Tuesunhommeintelligent,fiston.Tunepensestoutdemêmepasavoirunaveniraveccettefille?Hier.Elleétaitparterrelorsquej’étaisarrivéàlamaison.—Tul’aslaisséesurlesolsansrienfaire?Tun’aspaspenséàm’appeler?Monpèrehaussalesépaules.—Jenevoulaispasl’approcher.Elleauraittrèsbienpum’agresser,commeelleaagressésamère.Je

suisparti.Etj’aifaitdesrecherches.Ill’avaitlaissée.Jememisàbouillirintérieurementencontemplantcethommequim’étaitétranger.Il

m’avaitélevé,maisjeneleconnaissaispas.—T’a-t-elleracontéquelapolicel’avaittrouvéelesmainscouvertesdesang?Elleétaitassiseàcôté

ducadavredesamèreetsebalançaitd’avantenarrière,totalementléthargique.Seulunalibil’asauvéedel’emprisonnement.Apparemment,c’étaitellequiavaitappelélesurgences.Monestomacsenoua.Dellaavaittrouvélecorpssansviedesamère.NomdeDieu.Ellenem’avait

pasracontéça.Pasplusqu’ellenem’avaitconfiéqu’elleavaitétésuspectéedelamortdesamèreoudescirconstancesentourantsondécès.J’ignoraistantdechoses.—Jenesavaispasqu’ellel’avaittrouvée.Je titubai jusqu’à lachaisederrièremoietme laissai tomberdessus.Pasétonnantqu’ellesoitaussi

désemparée. Elle avait vécu avec une folle, enfermée, à l’écart dumonde. Puis, quand elle avait étésuffisammentcourageusepours’enfuir,elleavait trouvésamèresansvieàsonretour.Dusangsur lesmains.MonDieu.Jedevais larejoindre. Il fallaitque je laprennedansmesbras.Elleallaitpeut-êtrebien,maismoinon.Toutcequ’elleavaiteuàencaisserensipeudetemps…—Ilfautquej’yaille,affirmai-jeenmerelevant.

—Monrôledepèreconsisteàprendrelesmeilleuresdécisions.Souviens-toidecelachaquefoisquetupensesquejecontrôletonexistence.Jet’aideàdevenirleKerringtonauqueltonéducationtedestine.Jenemeretournaipas.Jemefoutaisdecequ’ilvoulaitoudecequej’étaiscenséêtre.L’imagede

mon grand-père enveloppant ma grand-mère d’un regard plein d’amour me revint à l’esprit. Il avaitaffirméqu’iln’imaginaitpaslemondesanselle.Désormaisjecomprenais.Jen’étaispaslefilsdemonpère.J’étaislefilsdesonpèreàlui.Lepointdevuesordide,infectetimpitoyablequemonpèreavaitdelavieneluivenaitpasdesesparents.C’estgrâceàeuxquej’allaistrouverlebonheur.Mongrand-pèrem’avaitapprisàchercher.

Della

LorsqueLeo s’engageadans l’alléequimenait à lamaisondeBraden,mespoignets étaient àvif etj’avaistellementenvied’allerauxtoilettesquej’enavaismalauventre.—C’estici,grommelai-jeentremesdentsserréesparladouleur.Il sortitde lavoitureetouvritmaportière. Jem’extirpaiavantqu’ilnem’agrippeetneme tireau-

dehors.Jesouffraisdéjàassez.Sansunmot, ildéverrouilla lesmenottesdansmondos. Je faillispleurerdesoulagementensentant

mesmainsretomberlelongdemoncorps.Ilsortitmesvalisesducoffreet lesposadans l’allée. Ilmegratifiad’unlégerhochementde la tête

puismontaenvoitureetdémarra.Jetentaidesoulevermesvalisesmaisuneviolentedouleurirradiamesbras.Mesbagagesattendraient.Jemarchaijusqu’àlaported’entréeetlevailesyeuxsurlamaisonquej’avaisaidéBradenàdécorer

avant sonmariage. Sonmari l’avait achetée quatremois avant leurs noces afin que Braden puisse laretaper pour emménager après leur lune demiel. C’était terriblement romantique. Dans cette maison,j’avaissouventespéréque,unjour,unhommem’aimeaussifort.Maisjen’étaispasdestinéeàêtreaiméedelasorte,c’étaitimpossible.Cedésirétaitégoïste.J’appuyaisurlasonnetteetattendis.Laportes’ouvrit,nonpassurBraden,commejel’avaisespérépourmejeterdanssesbras,maissur

Kent,sonmari.—Della?s’exclama-t-ilenécarquillantlesyeuxdesurprise.—BonjourKent,énonçai-jed’unevoixfatiguée.(Mavessiemenaçaitd’exploser.)Jepeuxutiliserles

toilettes?Ils’effaçapourmelaisserentrer.—Euh,biensûr,tusaisoùc’est.Jepassaidevantluietprisletempsdemeressaisiraprèsm’êtresoulagée.Après coup, jeme regardaidans lemiroirde la salledebains.Mesyeuxétaientgonflés et rouges.

J’avaisl’airpitoyable.Jenettoyaimespoignetsausavonetàl’eau.Lapeauàvifpiquait,maisaumoinslaplaieétaitpropre.Jeretournaidansl’entrée.Kentrevenaitdel’alléeavecmesdeuxvalises.Sonregardcroisalemienet

l’empathieetl’inquiétudequej’ylusmedonnèrentlesentimentd’êtreencoreplusminable.—Merci.J’aibienpeurdenepasavoirlavoiture.Jen’aipaseul’occasiondelarapporter.Maisje

vaistrouverunmoyendel’acheminerjusqu’ici.Kentposamesvalisesparterreethochalatêteendirectiondelacuisine.—Entre.Tuveuxboireoumangerquelquechose?J’aiappeléBraden.Elleestenroute.Je jetai unœil à l’horloge. Il n’était pas encore 15 heures.Braden devait être à l’école. Elle était

institutriceenCE2.Jeprisplacesurl’undeshautstabouretsqueBradenetmoiavionsdégotésdansuneboutiqueàunprixahurissant.Elleavaitflashé,etKentneluidisaitjamaisnon.—JenesuispasBraden,mais tupeuxmeparler, si tuveux,proposaKent toutenpréparantdu thé

glacé.Iln’avaitpasprislapeinedemedemandercequejevoulais.Ilconnaissaitlaréponse.Bradenetmoi

avionsforméuntout.Kentl’aimaitetacceptaitqu’ellemeconsacreautantd’énergie.Unjour,ilm’avaitexpliquéquec’étaitl’unedesraisonspourlesquellesill’aimait.

—Jepréfèretoutraconteruneseulefois.Jenesuispassûredepouvoirmerépéter,expliquai-jetandisqu’ilposaitunverredevantmoi.Jesavaisqu’ilcomprenait.Ilm’avaitvueencriseplusd’unefois.JenesaispassiBradenétaitjamais

rentréedanslesdétailsàcepropos.Àuneépoque,jepensaisqu’ellenerépétaitçaàpersonne,maisjesavaisdésormaiscequesignifiaitaimerquelqu’unetvouloir toutpartageraveccettepersonne…Monopinionavaitchangé.Celanemedérangeaitpas.ElleseconfiaitàKentparcequeçafaisaitaussipartiedesonhistoireàelle.Elleenavaitparfaitementledroit.—Situveuxquej’aillecasserlagueuleàquelqu’un,n’hésitepasàmeledire.L’inquiétudedeKentfinitparm’apaiser.Jenesavaispastropquelleserait lasuitedesévénements,

maisj’auraisaumoinsbesoind’unesemainepourreprendremavieenmain.Jen’étaispasprêteàmeretrouverseule.Pastoutdesuite.Laported’entrées’ouvritd’uncoupetj’entendislecliquetisdestalonsdeBradenquiseprécipitait

versnous.—Della!s’écria-t-elletandisquejemerelevais.Mesyeuxs’emplirentdelarmes,j’avaistellementbesoindelavoir.—Danslacuisine,Bray,réponditKent.Bradendébouladanslacuisineetunsanglotm’échappadèsquejel’aperçuscourirdroitsurmoi.Ses

brasm’enveloppèrentetjem’accrochaiàelle.Ellem’avaitencouragéeàpartirpourtrouvermavoieetj’avaistrouvétellementplus.Jevoulaisluifairecomprendrequ’ilnes’agissaitpasd’unesimplepeinede cœur. J’avais engrangé des souvenirs pour toute une vie et pour rien au monde je n’aurais vouluchangerquoiquecesoit.Mais,pourl’instant,j’avaissurtoutbesoinqu’ellemesoutiennependantqu’onpleuraittouteslesdeux.Elle-même ne savait pas pourquoi elle sanglotait ; elle se contentait deme serrer dans ses bras en

versantdeslarmes.Ellem’avaittellementmanqué.J’étaisaubonendroit.J’étaisàlamaison.Malgrélessouvenirsquimehantaientdanscelieu,c’étaitchezmoi.Bradenétaitmonchez-moi.Elleétaittoutcequej’avais.—Etsions’installaitdanslesalon,oùvouspourrezpleurertoutvotresoûlsurlecanapé?proposa

Kentavecdouceur.Braden acquiesça, sans pour autant me lâcher. Après quelques sanglots et reniflements

supplémentaires,nousrelâchâmeslentementnotreétreintepournousregarder.—Çava?demanda-t-elle.Jehochai,puissecouailatête.—Jenesaispas,jesuisperdue.—Allonsnousinstallerconfortablementdanslesalon,poursuivitBradenenmeprenantlamain.Jen’étaispasprêteàparler,maisilsméritaienttousdeuxuneexplication.Ilfallaitquejeleurraconte

dansledétailcequis’étaitpasséàRosemary.Aprèsça,ilspourraientpeut-êtrem’aideràenvisagerlasuite.Finilesvoyages.Lemomentétaitvenudevivremavieici;l’environnementm’étaitfamilieretjenepourraisfairedemalàpersonne.

Jecommençaimonrécitparl’épisodedelastation-serviceetmonretourlà-bassuiteàl’interventiondeTripp.Puisjeleurracontaicommentj’avaisdonnémoncœuràWoodsetàquelpointjeneregrettaisrien.Àlafindemonhistoire,Bradensanglotaitdenouveau.— Je déteste cet homme. J’ai envie de l’étrangler. Comment a-t-il pu t’infliger ça ?Woods est au

courant?Jesecouailatêtepuismeravisai.JenesavaisplussiWoodsétaitounonaucourant.Pensait-ilqueje

l’avaistoutsimplementquitté?Est-cequeçaavaitencorelamoindreimportance?

—Peuimporte.Jenepeuxpasresteraveclui.Tusaismieuxquequiconquecequim’arrivequandjecraqueetperdslatête.JeneveuxpasqueWoodsm’aimeetseretrouveavecuncorpsvide,commej’aipulevivreavecmamère.Ilatoutelaviedevantlui,pourlaquelleilatravaillédur.Jenesuispaslafemmedont il a besoin. J’essaie d’être celle dont j’ai besoin. Je ne serai jamais cedont unhommeabesoin,Braden.Tulesais.

Woods

Leservicedemidiétaitterminédepuisdixminutes.Jen’étaispasencoreenretard.Jegarailepick-upetmedirigeaiàl’intérieur.Jen’avaispasvuDellaaucoursdessixdernièresheures.Diablementtroplong.Plusjamaisjen’accepteraisqu’elleenchaînedeuxservices.Mêmesiellemesuppliait.Jepoussailaportedelacuisineettoutlemondesefigeasurplace.Habituellement,monarrivéeneprovoquaitpascegenrederéaction.Lesemployésavaientl’habitudedemevoirpasser.Jimmyétaitentraindepointerlafindesonservice.Ilmefusilladuregard.— C’est maintenant que tu t’inquiètes du manque de personnel ? Tu orchestres l’arrestation de la

meilleureserveusequej’aieeuedepuisBlaire.Sansunmotd’explication.L’arrestationd’uneserveuse?Qu’est-cequ’ilracontait?—Maisdequoituparles?m’exclamai-jeencherchantDelladesyeux.Ellepourraitpeut-êtrem’expliqueràquoirimaittoutcecinéma.—Oh,voyonsvoir,Woods.Peut-êtredufaitquepapadébarquepourarrêterlagentillepetiteDellaen

luifoutantunepeurbleueetquetunelèvespaslepetitdoigt.Tuleslaisseslacoffrersanscilleralorsqu’elleétaitcenséeassurerdeuxservices.J’agrippai la première chose quime tomba sous lamain. En l’occurrence le col de la chemise de

Jimmy.—RépètecequetuasditsurDellaetlapolice?Arrêtedebaragouineretexplique-toi.Lesangbattaitdansmestemps.Jesavaisquequelquechoseclochait,maisjenecomprenaisrienàce

queJimmyracontait.—LapoliceestvenuearrêterDelladèssonarrivéecematin.Tunelesavaispas?M.Kerringtona

demandéqu’on l’escorte jusqu’à la sortie dubâtiment puis qu’on lui passe lesmenottes.Elle avait latrouille,mec,vraiment.Je lâchai lachemisedeJimmyqui titubaenarrière.Cetteordureégoïsteavait faitarrêtermaDella.

Elleavaiteupeur.Elleavaiteubesoindemoietjen’étaispaslà.—MERDE!vociférai-je.Jequittailacuisineàfonddetrain.—C’estJosiahBurtonquil’acoffrée!précisaJimmyderrièremoi.Enpremierlieu,j’allaismettrelamainsurBurton.J’étaisalléàl’écoleavecluietceneseraitpasla

premièrefoisque je luipéterais lagueule.Enrevanche,agresserunagentdepolice,çaallaitêtreunepremière.—S’ilyadunouveau,appelle-moi!répondis-jeenouvrantlaporte,directionlecommissariatetce

connarddeflic.Pourfinir,j’iraisvoirmonpaternel.L’affronterallaitêtreunetoutautrepairedemanches.

Jeneprispasletempsdemeprésenteràl’accueildupostedepolice.—Vousdevezsigner,interpellaMargaretFritztandisquejepassaisdevantellesansunmot.Le sheriff adjoint Josiah Burton était dans son bureau lorsque je fis irruption et claquai la porte

derrièremoi.Jelaverrouillai,aucasoùj’auraisbesoindetemps.Jefusillaiduregardl’hommequiavaitétésoudoyépourexécuterlesordresdemonpaternel.—T’asintérêtàparler,saleenfoiré,ouladernièrechosequejeferaiavantdepartirentauleserade

t’exploserlacervelle.Josiahserelevad’unbonddesachaise,lesyeuxrondsd’étonnement.

—J’aifaitexactementcequetonpèrem’ademandé.Toutestréglé.J’airemplilapaperasse;ellenepourrapasremettrelespiedsenville.J’aifaitlenécessaire.Relax.C’estbouclé.Inutiledemontersurtesgrandschevaux.Ilétaitpersuadéquej’étaisaucourant.Jeréprimail’enviedeluiarracherlatêteetledévisageaien

réfléchissantàlamanièredegérerlasituation.Ilmemanquaitdesinfos.—Àquelleheuretul’asarrêtée?—Jenel’aipasarrêtée.Commetonpèremel’ademandé,jel’aimenottéeetembarquéeàl’arrièredu

véhiculedeservice.Jel’aiunpeuintimidée.Puisjel’aiconduitechezlui.Ma poitrine était sur le point d’exploser. Ils l’avaient volontairement effrayée. Mon père allait le

payer.Pourchaqueminutequ’elleavaitpasséàavoirpeur,ilpaieraitleprixfort.—Oùestmonpère?Oùl’as-tuemmenée?—Cheztoi,réponditJosiahenfronçantlessourcils.—Elleyestencore?—Non.Jet’aiditquej’airéglétoutelapaperasse.Ellesaitquesiellerevientjel’arrêterai.Ensuite

onl’aexpédiéelàoùLeoavaitpourordredel’emmener.—Pourquoiellenepeutpasrevenir?demandai-jeenserrantlespoings.Josiahfitminederépondrepuisseravisa.Ilmedévisageauninstantetseraidit.—Tun’espasaucourant? Il l’a fait sans teprévenir ?Putaindemerde, souffla-t-il en se laissant

retomberdanssachaise.OhWoods, jecroyaisquetu lesavais.Jecroyaisqu’elleétait taréeetquetuavaispeurdecequ’ellepouvaitfaire.C’estpourtoiquejemesuisdébarrasséd’elle.Tonpèrem’aditqu’elleétaitdangereuse.Maladementale.Pourlecoup,jel’aibrutaliséeunpeu.J’ensavaisrien…Pitié,dis-moiquecettefilleestdérangéeetquej’aifaitcequ’ilfallait.Jefermailesyeuxtrèsfortenessayantd’oublierlemomentoùilavaitavouél’avoirunpeubrutalisée.

Ilfallaitquejecognequelqu’un.—Tul’asrudoyéecomment?demandai-jed’unevoixlenteetposée.—Jel’aiunpeusecouéesansraisonetj’aitropserrésesmenottes.Jel’empoignaiparsonuniformeetlesoulevaidesonsiège.—Mêmesielleavaitétéfolle,çaresteunefemme.Aucunefemmenemérited’êtretraitéecommeça.

Aucune. (Jeprisuneprofonde inspiration.)Cette femme, je l’aime.Cette femme,monconnarddepèrerefusequejepuissel’aimer.Jelebalançaisursachaisequireculaetpercutalemur.Jetournailestalonssansprésenterd’excuses

niattendred’êtreinculpéàmontour.J’ouvrislaporteetretournaijusqu’àmonpick-up.Leo.IlfallaitquejetrouvecesalauddeLeo.

Leon’étaitpasenville.MesparentsavaientprisunavionpourNewYorkdèsquejelesavaisquittéscematin.CettehistoirededîneravecMortimaravaitétéuneentourloupe.Unpiège.Personnen’enavaitentenduparler.Jem’assissousleporchedevantl’océanetcomposailenumérodeDellapourlacentièmefoispourécoutersamessagerie.« C’est Della. Je ne peux pas répondre pour l’instant, mais laissez-moi un message et je vous

rappellerai.»Bip.C’estencoremoi.Tuespartie.Jen’étaispaslàalorsquetuallaismal.NomdeDieu,bébé,rienquede

penseràquelpoint tuasdûavoirpeur.Etmoiquin’étaispas làpour toi. Il fautabsolumentque je teretrouve.Oùquetusois.Appelle-moi,Della.Pourmedirequetuvasbien.Bip.Jelaissaitombermontéléphonesurlatableetagrippailarambardedevantmoi.Cesoir,elleallaitêtre

obligéededormirsansmoi.Sescauchemarsallaientreveniretjeneseraispaslà.Yaurait-ilquelqu’un

d’autreavecelle?Est-cequ’elleallaitseretrouvertouteseule?

Della

Montéléphoneavaitdisparu.J’avaisdéfait toutesmesaffaireset iln’yétaitpas.Woodsnepourraitpasmejoindre.C’étaitpeut-êtreaussibienainsi.Chaquefoisquejeluiavaisexpliquéquejen’étaispassuffisammentbienpourlui,çan’avaitriendonné.Enmeforçantlamain,sonpèreluidémontraitlavérité.Lejeun’envalaitpaslachandelle.L’idéequesonpèreaitfaitcroireàWoodsquej’étaispartiedemonpleingréouquej’avaiscommis

unvolme tourmentait. Jenevoulaispasqu’ilmepensecapabledecegenredechoses.Aprèsm’êtreréveillée (etBraden etKent par lamêmeoccasion) en criant la nuit dernière, je n’avais pas réussi àretrouverlesommeil.J’étaisrestéeassiseàréfléchiràlasuite.Oùaller?Oùfairemavie?Reverrais-jeWoodsunjour?Aumoinscesquestionsm’avaient-ellesempêchéedemerendormiretd’êtreenproieàunnouveaucauchemar.Lesévénementsétaientencoretropfrais.Unpetitcoupàlaportemetirademespensées,etBradenouvrit,unetassedecafédanslamain.—Jemesuisditquetudevaisêtreréveillée.Ellemesouritetmetenditlatasse.—Merci.(Aprèsunegorgée,jelevailesyeuxsurelle.)Jesuisdésoléepourlanuitdernière.—Tun’asaucuneraisondel’être,protesta-t-elleenfronçantlessourcils.C’estmoiquisuisdésolée

quetuaiescesfichusrêves.J’aimeraistantlesfairepartir.Etjesuisdésoléequetuaiestrouvél’amouretqueçan’aitpas fonctionné.Jesuisdésoléede toutecettemerdeque tudoisgérer.Mais toi, tun’asjamaiseuaucuneraisond’êtredésolée,DellaSloane.Bradenm’avaitsauvélavie.Avantelle,personnenesepréoccupaitdemoi.D’unemanièreoud’une

autre,j’avaisgagnélaloyautédecettepersonneaugrandcœuretjamaisjenepourraissuffisammentlaremercier.—Tucroisquejevaisfinircommemamère?—Non.Jenelepensepas.Tamèreasubiuntraumatismelorsqu’elleavaitunnouveau-néquis’est

mélangéàladépressionpost-partumdontellesouffraitàl’époque.Souviens-toi,c’étaitmentionnédanssondossier;elleavaitdesproblèmes.Etpuiselleaperdusonmarietsonfilsdansdescirconstancestragiques.Personnen’étaitlàpourelle.Ellen’avaitpasdefamille.Rien.Elleavaitjusteunpetitbébé,etoui,elleacraqué.Danscescirconstances,laplupartdesgensauraientfaitlamêmechose.Sielleavaiteudelafamillepoursesoucierd’elle,jepensequ’elleauraitpuallermieux.Maisçanes’estpaspassécommeça.Elleétaitseuleetelles’estégarée.Çanet’arriverapas.Parcequejesuislàetquejenetelaisseraijamaisseule.Jevoulaislacroire.Jevoulaisqu’ilexisteuneraisonexpliquantpourquoimamèren’étaitpasrestée

avecmoi.Quelesfaitsétaientinévitables.—Etmagrand-mère?Elleétaitenhôpitalpsychiatrique,soulignai-je,toujourshantéeparcefait.—Est-cequ’aumoinstuenconnaislaraison?As-tufaitdesrecherches?Tunesaispaspourquoini

mêmesic’estvrai.Tamèretel’araconté,etelleétaitdéjàfragilementalement,Della.Jusqu’ici,ont’araconté beaucoup de choses qui ne sont pas forcément vraies. Et qui te terrifient.Mais, honnêtement,Della,situdevaiscraquer,tul’auraisfaitquandonadécouverttamèreaveclerasoirentrelesmainsetles poignets tranchés. Or tu as tenu bon. Tu as passé l’épreuve avec suffisamment de courage pourapprendreàvivre.Tupeuxyarriver,Della.Tuescapabledevivreunevieheureuseetbienremplie.Laviequeméritaittamèremaisqu’onluiavolée.Nelaissepastapeurt’enempêcher.Jet’ensupplie.C’étaitcequejedésirais:vivre.Pourlepèreetlefrèrequejen’avaisjamaisconnusetpourmamère,

flouéeparlavie.C’estpoureuxquejevoulaisvivre.Etpourmoiaussi.—Pourquoinel’appelles-tupas?Jenedemandaipasdequielleparlait.Jeconnaissaislaréponse.Ellevoulaitquej’appelleWoods.Je

voulaisvivreaveclui.Jel’aimais.Maiscommentm’interposerentreluietsonpère?Sonpèrequimehaïssait ! J’allais faire obstacle à sa famille. SiWoodsme désirait plus que la vie à laquelle il étaitdestiné, alors il me retrouverait. Je n’allais pas le perturber en l’appelant. Il lui fallait le temps dedécidersij’envalaislapeine.—Jevaisattendre.Ilsaitd’oùjeviensetilconnaîttonnom.S’ilveutvraimentmeretrouver,çanelui

poseraaucunproblème.L’enjeuesténormepourWoods.Jenesuispassûred’envaloirlapeine.Bradenenroulaunbrasautourdemesépaulesetposasatêtecontrelamienne.—Combiendefoisfaudra-t-iltedirequetuesexceptionnelle?Lesgensquiterencontrentetquin’ont

pasenviedemieuxteconnaîtreetdefairepartiedetaviesontdesimbéciles.Jem’ensuisrenducomptealorsquejen’étaisqu’unegamine.—Non,objectai-jeensouriant.Tucroyaisquej’étaisunvampireettuvoulaisêtremonamiepourque

jenetemangepas.—C’estvraiaussi,admitBradenengloussantderire.Maisj’aivitecomprisquetun’étaispasune

suceusedesangetjet’aibienaiméemalgrétout.Nousrestâmesassisesquelquesminutesensilence,perduesdansnospensées.—Jenetravaillepasaujourd’hui,lançaBraden.Sionallaitfairelesmagasins?—D’accord,bonneidée.Tout était bon pourme sortir de cettemaison etm’empêcher de penser àRosemaryBeach… et à

Woods.

Woods

Jen’aipasfermél’œildelanuit.Maisj’aitiréauclaircertaineschoses.SiDellaaétécontraintedepartir aupied levé, le seulendroitoù jepouvais l’imaginer se rendreétait enGéorgie, chez sonamieBraden.Àmaconnaissance,c’étaitlaseulepersonnedontelleétaitproche.J’appelai Josiahà6heuresdumatinpourqu’il fassedes recherches surune femmed’environvingt

ans,prénomBraden,danslavilledeMacondansl’ÉtatdeGéorgie–touslesélémentsdontjedisposais.Enmoinsdedixminutes,ilavaitunnomdefamille,unnumérodetéléphoneetuneadresse.UneBradenFredrickhabitantMaconenGéorgieavecsonmariKent.JecomposailenuméroqueJosiahm’avaitcommuniquéettombaideuxfoissurlaboîtevocale.JerappelaiJosiah.—Trouve-moilenumérodeKentFredrick.Ildoitbienbosserquelquepart.Ilaforcémentunnuméroà

sontravail.—O.K., unepetite seconde, répondit Josiah sansposerdequestion. (Je l’entendispianoter sur son

clavier.)Ah,levoilà.Ilestavocat.CabinetFredrick&Fredrick.Visiblement,l’autreFredrick,c’estsonpère.Téléphone:478-555-5515.—Merci.Jeraccrochaietcomposaiaussitôtlenuméroquejevenaisdenoter.—Fredrick&Fredrick,cabinetd’avocats.—JesouhaiteparleràKentFredrick.— Un instant, je vous prie. Je crois que la ligne est occupée. Oh, attendez, elle s’est libérée. Je

transfèrevotreappel.J’attendispendantqueletéléphoneégrenaitquelquesnotesdemusiqueclassique.Jenetenaisplusen

place.J’étaissiprèsdubut.—KentFredrick,réponditunevoixmasculine.—Kent.WoodsKerringtonàl’appareil…— Il était temps,monsieurKerrington. Je n’aime pas voirmon épouse inquiète, et quandDella est

bouleversée,mafemmel’estaussi.Ilsavaitoùellesetrouvait.Jemefigeai,submergéparl’espoir.—VoussavezoùestDella?—Ouais,elleestcheznous.Arrivéehierdansunétatpaspossible.Votrepèremériteunboncoupde

piedaucul.Quantàvous,onn’apasencoretranché.Elleétaitlà-bas.Jemeremisàmarcher,faisantlescentpassousleporcheavantdepiquerunsprint

pourdescendrel’escalierjusqu’àmonpick-up.—Ellevabien?Elleestblessée?Josiahavaitbeaum’avoirdégotécenuméro,s’il l’avaitmaltraitée, ilallaitpasserunmauvaisquart

d’heure.—Sespoignetssontàvifàcausedesmenottesqu’elleaportéespendantlescinqheuresderoute.À

partça,c’estjustelecœurquiestbrisé.Maiselleal’habitude,Della,d’êtreenmillemorceaux.Lesmots«Della»et«cœurbrisé»danslamêmephrasem’inquiétaient.Ilfallaitquejelavoie.—Jesuisenroute.Nelalaissezpasrepartir.—Tuvienslachercherici?—Oui.

—Jenesuispassûrd’accepterquetularamènesprèsdetonabrutidepaternel.Quimeditqu’ilnevapasdenouveauluifairedumal?Dellan’apasdefamille.C’estBraden,safamille.Etquandj’aiépouséBraden, j’aiacceptéDella.Je lesavaisenm’engageant.Cesdeux-làsontextrêmement liées.Etmoi jeprotègelesmiens.—Della est àmoi,quece soit bien clair, répliquai-je enagrippant levolant. Je serai làdans cinq

heures.Jeraccrochailetéléphoneetentrail’adressedesFredrickdansleGPS.

Auboutdetroisheuresderoute,lasonneriedemonportableretentitetlenomdemonpères’affichaàl’écran. J’eus envie de rejeter l’appelmaisme ravisai. Il était temps de faire face au bonhomme. Jen’allaispasramenerDellalà-bas.C’étaitinenvisageable.Ilnel’accepteraitjamaisetjerefusaisdevivresanselle.Iln’yavaitdoncaucunavenirpourmoiauKerringtonClub.—Quoi?répondis-jesanslegratifierdessalutationsd’usage.J’allaislelaisserdéblatérer,etpuisjeluiferaispartdemadécision.—Où es-tu ? J’ai eu un appel du country clubme disant que tu étais absent cematin. Ils ont des

problèmesdesous-effectifausalonetdeuxcharriotssontenpanne.—Tu n’as qu’à les réparer.Après tout, c’est ton country club. Jeme fous de ce qui s’y passe.En

renvoyantDella, tuasfaitexactementcequ’il fallaitpourmemettreàdos.Ils luiontfaitdumal,saleordure.Et toi, tum’asperdu.Jeneveuxplus rienavoirà faireavec toi,avecmamère,qui t’aaidéàmanigancertessaloperies,outonbusiness.Tunemecontrôleraspas.Je t’enempêcherai.Jemecasse.C’estlesangdemongrand-pèrequicouledansmesveines,etjepeuxmefaireunnomtoutseul.Jen’aipasbesoindetoi.Jen’aijamaiseubesoindetoi.Je raccrochai sansprendre lapeined’attendre sa réponse. Je souris faceà la routequi sedéroulait

sousmesyeux.J’allaisretrouverlaseulepersonnequimedonnaitsoifdevivreetenviedeconstruireunevieàdeux.Ceneseraitpas l’existencecombléeet favoriséequim’avaitvugrandir.Ceseraituneviepleined’amour.Car,jusqu’àDella,j’étaispasséàcôtédequelquechose.Mon téléphone sonna ànouveau, affichant cette fois l’indicatif régional deMaconenGéorgie,mais

suivid’unautrenuméro.Pasceluiquej’avaisenregistrédansmonrépertoire.—Allô?—WoodsKerrington?s’enquitunevoixdefemme.—Oui.—IciBradenFredrick.J’aiquelquesquestionsàvousposeravantdevouslaisserdéboulerdansla

viedeDella.Jenesuispasaussiconvaincuequemonmariquevotrevenuesoitunebonnechose.Jesourisendécelantletonprotecteurdecettefemme.Dellaavaitunebienfaitriceet,pourcetteraison-

là,j’aimaisdéjàcetteinconnue.QuiconqueveillaitsurDellaavaitmonplusprofondrespect.—Trèsbien.Demandezcequevousvoulez.—Pourquoivenez-vousici?—ParcequejenepeuxpasvivresansDella.C’esthorsdequestion.C’estpourellequejemelève

chaquejour.Silence.Jemedemandaisielleallaitpoursuivresesquestions.J’attendis.—O.K.Bonneréponse.Vousremontezdansmonestime.Pensez-vousqueDellasoitfolleouqu’elle

puisseledevenir?—Non.Elleestexceptionnelleetpleinedevie.Elledoitsurmontercertainsproblèmes,maiselleva

allermieux.J’ail’intentiondel’aideretjesuispersuadéqu’unjourprochainellen’auraplusaffaireàtoutcequilatourmente.J’entendisunsoupirdesoulagementàl’autreboutdelaligne.—Dernièrequestion:pourquoiaimez-vousDella?

Inutiled’yréfléchiràdeuxfois.—AvantqueDellaentredansmavie,jenecomprenaispasleconceptdel’amour.Jen’avaisjamais

étéamoureuxetconnuquetrèspeud’affection.Maisj’avaisvul’amouràl’œuvre.Mesgrands-parentssesontaimésjusqu’àleurmort.J’ai toujourspenséquejeneconnaîtraisjamaisça.Etpuisj’airencontréDella.Elleafaitnaîtreenmoidesémotionsdontj’ignoraisl’existence.Jel’aidanslapeau.Avecelle,iln’yapasdefaux-semblant.Ellen’apasconsciencedesabeauté.Elleesttotalementaltruiste.Et,mêmesans ça, son rire et son regardquand elle est réellement heureuse sont la seule chosequime tienne àcœur.Unlégerreniflementàl’autreboutdufilmepritdecourt.—O.K.Vienslachercher.Jevalide.Sonpetithoquetmefitsourire.—Jesuispresquearrivé.

Della

Bradenavaitdûs’absenterpouruneréunionàl’école.Ellen’enavaitparléqu’aprèsledéjeuner.Elleétaitpartieàtoutevitesseaprèsavoirreçuuncoupdefill’eninformant.J’envisageaidefaireunesieste,outoutdumoinsd’essayer.Jen’étaispassûredemieuxdormircesoir.Jedétestaisl’idéederéveillerBradenetKentavecmescris. Je jetaiunœil à l’horloge.Cela faisaitmaintenantprèsdevingt-quatreheures que j’étais rentrée. Et pas de signe deWoods. C’était un type intelligent ; s’il avait voulumetrouver,ill’auraitdéjàfait.Quelledéception.Alorsquejevoulaisqu’ilsepréoccupedemoi.Qu’ilm’aimevraiment.Lorsquelasonnettedel’entréeretentit,jerestaiimmobiledanslacuisine.Jenesavaispastropsije

devaisouvrir.BradenetKentnem’avaientlaisséaucuneconsigne.Enplus,onétaitenpleinmilieudejournée, à un moment où tous les deux se trouvaient habituellement au travail. Certains jours, Kenttravaillait de chez lui, comme hier lorsque j’étais arrivée, mais pas aujourd’hui. Il n’y avait aucunevoituredehors.Nouveaucoupdesonnette.Lapersonneétaitobstinée.Jetraversailecouloirjusqu’àl’entrée.Delà,je

pourrais voir de qui il s’agissait au travers des deux vitres qui flanquaient la porte. Je m’approchaidiscrètementetjetaiunœildehors.Woods fixait la porte d’entrée d’un air inquiet, lesmains enfoncées dans ses poches. Il était arrivé

jusqu’ici.Commentavait-ilfait?—Allez,Della,jesaisquetueslà.Ouvre,bébé,s’ilteplaît,supplia-t-ilentoquantdenouveau.C’estpourmoiqu’ilétaitlà.Jemeredressaietagrippailapoignée.C’étaitlui.Ilvoulaitmevoir.Il

n’avaitpasappelé ; ilétait toutsimplementvenumechercher. J’ouvris lentement laporteetWoods lapoussaengrandpourseprécipiterdanslamaison.Sonregardseplantadanslemienetilmetiracontreluipourmeserrerdanssesbras.—Jedevenaisfou,murmura-t-ildansmescheveux.Impossiblededormir.Demanger.Jesuistellement

désolé.Jetejurequejeneleluipardonneraijamais.Jamaisdelavie.Ilcontinuaàmefairedespromessesenmetenantdanssesbras.Jeglissaimesmainspourenlacersa

tailleetposailatêtecontresontorse.Ilétaitvenu.C’esttoutcequicomptait.—Jet’aime,Della.Jeneveuxpasteperdre.C’esttoi,Della.Toutcequejeveux.Toi.Riend’autre.

Onvaconstruirenotrevieensemble.Unetoutenouvellevie.Lanôtre.Unequinousressemble.Ilabandonnaitsafamilleetleclub.Fallait-illelaisserfaireça?—Jeneveuxpasqueturenoncesàtoutcepourquoituastravaillé,soupirai-jecontresapoitrine.—Jeperdaismontemps.Jenepeuxpasmeneruneexistencedirigéeparlavolontéd’unautre.Ilt’a

faitdumal,Della.Ilt’afaitpeur,bébé,jenepourraipasl’oublier.Jenepasseraijamaisoutre.Pourmoi,ilestmort.Cettepartiedemavieestmorte.Jeveuxjusteêtreavectoi.Etmoiêtreaveclui.Jelevailamainpourcaressersescheveuxetsabarbenaissante.—Tum’asmanqué.—Depuisquejesuisentréencuisineetqu’onm’aditquetuétaispartie,j’aivécuunvéritableenfer.

Plusjamais.Jetelejure.Ilfallaitqu’ilsache.Ilétaitvenujusqu’ici,prêtàtoutlaisserderrièreluietàcommencerunenouvelle

vieavecmoi.Ilfallaitqu’ilsacheàquois’entenir.Jen’avaispasétéentièrementhonnêteaveclui.Jedevais lui raconter l’histoiredemamèreetcomment je l’avais trouvée.Etdemagrand-mèreetde la

possibilitéquej’aiehéritédelafoliedemamère.—Maisd’abord, il fautque je tedise tout.Commentmamèreestmorte.Lerisqueque jedevienne

folle,moiaussi.Jenepeuxpastelaisserprendrecettedécisionsansquetusachestoutsurmoi.Toutcequejegardaispourmoi,jedoismaintenantlepartageravectoi.Après,tupourrasdécidersiçaenvautlapeine.Woodseffleurameslèvresdessiennes.—Bébé, je suis tellement vannéque tu pourraisme raconter n’importe quoi, ça ne changerait rien.

Maissiçapeutt’aider,alorsvas-y.Jeveuxtoutsavoir.Quetucomprennesquetupeuxtoutmedireenétantassuréequejen’irainullepart.Sijevoulaisqueçafonctionne,j’allaisdevoirluifaireconfiance.Ilfallaitqu’ilconnaissecettepartie

demoi.Ilétaittempsquejem’enouvreàlui.—Ilyavaitune fête.C’estdes lycéensqui l’avaientorganisée.Ça faisaitune semainequeBraden

mettaitaupointunstratagèmepourm’yamenerendouce.J’étaiscenséeêtresacousineduMississippi.Elleavaitpenséàtout.J’étaissurexcitée.Jen’avaisjamaisétéenprésenced’autantdepersonnes.Je fermai les yeux, sachant pertinemment que ce récit pouvait provoquer une crise. Je voulais être

suffisammentfortepourracontercettehistoire,aumoinsàWoods.—Prendstontemps,dit-ilenmeserrantcontrelui.—J’étaisnerveuse.Mamèrem’avaitsurpriseàfaire lemuràplusieursreprisesaucoursdesmois

précédents.Chaquefois,çaavaitmalfini.Laplupartdutemps,ellemefrappaitavecuneceintureencuir.Elleétait terrifiéeà l’idéeque jeparte.Etelleparlaitdeplusenplussouventàmonfrère.À luidirequ’illuimanquaitetqu’ellevoulaitlerejoindre.Çameterrorisait.Jesavaisqueleseulmoyenpourelledelerejoindreétait…lamort.(Jem’interrompispourprendreuneprofondeinspiration.)Cettenuit-là,ons’est éclipsées sans problème. Je suis allée à ma première soirée. J’ai été pour la première foisconfrontéeausexe.Pasmoi,maisunautrecouple.Ilsbaisaientdanslasalledebainsetjecherchaislestoilettes.J’étaiscommehypnotisée.Ilsse tenaientserréssi fort l’uncontre l’autre.Jevoulais lamêmechose.Jevoulaiscetteproximité.Aprèsça,lesexem’aintriguée.(C’étaitlaportiondel’histoirefacileàretenir.Leseulpointpositifdelasoirée.Jedétestaismeremémorerlasuite.)Onestpartiestard.Vers3heures du matin. Je planais de bonheur. Un garçon m’avait embrassée et j’avais adoré. C’était réel.J’avaisvécuquelquechose…Etpuisonestarrivéesàlamaison.Bradennevenaitjamaisàl’intérieuravecmoi.Elleattendaittoujoursàdehorsquejesoisbienrentrée.Leslumièresétaientpartoutallumées.On apercevait celle de ma chambre depuis le jardin. C’était le premier signe que quelque chose netournaitpasrond.Habituellement,quandellemesurprenaitàfairelemur,mamèrem’attendaitdanslapénombre,aveclaceintureàportéedemain.Mon corps fut traversé d’un tremblement. Je respirais difficilement.Mais je n’allais pas laisser la

terreurl’emporter.J’allaisêtrevictorieuse.JerassemblaitoutesmesforcesetlevailesyeuxsurWoods.—Bradenn’estpaspartiequandj’aiouvert laporte.Ellem’asuivieà l’intérieuretestrestéedans

l’entrée.Onavaitcompristouteslesdeux.Lesilenceétaittellementéloquent.Jenesuispasalléeloin.Lamaisonn’étaitpasgrandeetjesuisarrivéedanslevestibuledepuislesalon.Lesang…sonsang.(Jeprisunenouvelleinspiration.)Ilcoulaitsurlamoquettedelaportedelasalledebains.Dèsquej’aivu,j’aisu.C’étaitàquelquespasdemoimaisj’avaisl’impressionqu’ilyavaitdeskilomètresentrelevestibuleetlaportedelasalledebains.Elleétaitimmobilesurlecarrelage.Sesdeuxpoignetsétaientouvertsetilyavaitunrasoirdanslamaredesangautourd’elle.C’estàcemoment-làquemesnerfsontlâché.J’aicommencéàhurlerenluitenantlamain.J’essayaisdelaramener.Maisellevoulaitretrouvermonfrère,etelleavaitréussi.Woodsmeserrafortcontresapoitrine.—Oh,machérie,jesuisdésolé.Pourtout.Jesuistellementdésolé.Jen’avaispas terminé.J’auraisbienaimé,maiscen’étaitpastout.J’étaisarrivéejusqu’iciet ilme

fallaitpoursuivre.—Enentendantmescris,Bradenestarrivée immédiatement.Je l’ai regardéeet je luiaiditquema

mère était morte. C’est là que j’ai perdu connaissance. Je neme souviens pas qu’elle ait appelé lesurgencesnidel’arrivéedessecours.J’étaisperduedansunmondedanslequelmamèreétaitenviesansquejepuissel’atteindre.Quandj’ensuisenfinsortie,Bradenétaitàcôtédemoi,ellemenettoyait.Ellelavaitlesangsurmesmains.Puisellem’afaitenfilerdesvêtementspropresetm’atenulamainpendantque je répondais aux questions. Il y en avait tant. Braden refusait de me laisser. Lorsque tout a ététerminé, j’ai déménagé chez elle et ses parents dans lamaison voisine pendant deux ans.Elle voulaitabsolumentquej’habiteaveceux.Jevoyaisbienqueçalesinquiétait.Elleneleuravaitrienditdemoipendant toutescesannéeset je leurfaisaispeur.Jeneleurenvoulaispas.Ilsnesesont jamaisfaitsàmoi.Çasevoitdansleursyeux.Ilsattendentquejecraque.Jelescomprendsparcequejefaislamêmechose.J’attends…—N’essaiemêmepasdeprononcercesmots,tum’entends?Tunevaspascraquer.Tueslapersonne

laplussolidequej’aiejamaisrencontrée.Jesuiseffaréqu’aprèstoutcequetuastraverséturéussissesàilluminerunepiècede tasimpleprésence.Je te regardeet jevois lavie. Jevois la joie. Jevoismonavenir.J’étais son avenir. Il était lemien. Si j’avais commeperspective d’avenir une existence au côté de

Woods,jepourraiscombattrelesténèbresquiessayaientdemeterrasser.AvantWoods,jenesavaispaspourquoi jevivais.Dansmaquêtede sens, j’avais trouvébienplus.Désormais, je savaispourquoi jevoulaisvivre.Jecomprenaisl’amour.Jel’avaistrouvé.

Bradennousproposaderester.Woodsdéclinal’invitation.Ellen’insistapas,cequimesurprit.Woodsmedemandadeprendremesdeuxvalises.Nous restâmesàproximité,parceque jen’étaispasencoreprêteàquitterBraden.WoodstrouvaunhôtelcinqétoilesàAtlanta.Lorsquelaportedelachambreserefermaderrièrenous,illaissatombermesvalises,s’approchademoiàgrandspasetmesoulevadusol.Ilmeportajusqu’aulitkingsizequitrônaitaumilieudelapièce.—J’aiquelquechoseàtedemander,annonçaWoodsenretirantsachemisequ’iljetaparterreavantde

déboutonnersonjean.—D’accord,répondis-jeenfixantsesmainsplutôtquesonvisage.J’adoraisleregarderbaissersonpantalonetlibérersonsexetendu.—Lorsquejeseraiprofondémententoi,j’aibesoinquetumedisesquetum’aimes.La vulnérabilité de sa requête me fit prendre conscience que je ne le lui avais jamais dit. Je me

redressaietposailesdeuxmainssursapoitrinetandisqu’ilsepenchaitsurmoi.—Tusaisquejet’ai…—Pasmaintenant.Quandjeseraientoi.Tumeledirasàcemoment-là,insista-t-il,undoigtsurmes

lèvres.Jeretiraimonhautetilsechargeaduresteenunéclair.D’unemain,ilsaisitmongenouetm’écartales

jambespourm’avoirouvertedevantlui.—Jeveuxl’embrasser.Jecroisquejeluiaimanqué,murmura-t-ilenbaissantlatêtepours’installer

entremesjambes.Jeme cambrai sous lui et empoignai ses cheveux en hurlant son nom tandis que sa langue, léchant

d’abordmafente,effectuaitdescerclessurmonclitorisgonflé.—Oui, jeluiaimanqué,chuchota-t-ilenmesouriantavantdeglisserdeuxdoigtsàl’intérieuretde

laperlefluidequicoulaitlibrementduplaisirintensequ’ilprovoquait.— Énormément, confirmai-je en immobilisant sa tête pendant qu’il aspirait mon clitoris dans sa

bouche.J’étaistellementprochedel’orgasme.Maisjevoulaisqu’ilmepénètre.

—Jeteveuxenmoi,haletai-jeenletirantpourqu’ilremontelelongdemoncorps.Woodsdessinaunchemindebaiserslelongdemonventre,demapoitrineetdemoncoujusqu’àce

queseshanchessedressentau-dessusdesmiennes. Ildéposaplusieursbaiserschastessurmabouche.J’écartailesjambespourqu’ilseglisseàl’intérieur.L’extrémitédesonérectioneffleuraitmonsexeetmerendaitfolle.Woodsbaissa leshanchesetmepénétra lentement.Lesentimentdesymbiosemebouleversa.Woods

mecomplétait.Ilavaitlacapacitédeguérirtoutcequin’allaitpaschezmoi.L’avoirauprèsdemoiétaittoutcedontj’auraisjamaisbesoin.—Jet’aime,affirmai-jesansaucuneréserve.Jamaisiln’yeutdemotsplusvrais.Woodss’immobilisaetsagorgesemitenmouvementtandisqu’il

avalaitavecdifficulté.Jecaressaidoucementsoncouduboutdemesongles.Chaquemillimètredesoncorpsmefascinait.—Jet’aime.Jamaisjenet’abandonnerai,etjetejure,machérie,quetuneserasjamaisseule.Sesmotsétaientchargésd’émotion.Jedétournaimonregarddelalignedesanuquepourleposersur

sesyeuxquibrillaientdelarmes.Je levai les jambes par-dessus ses hanches et les enroulai fermement autour de son corps, puis je

glissailesbrasautourdesoncouetl’attiraiversmoi.Jen’avaispasbesoindeluiexpliquercequejevoulais.Illesavait.Àcetinstant,j’euslaconvictionqu’ilvoulaitlamêmechose.Noscorpssemirentàbouger de concert. Nous ne formions réellement plus qu’un. Je n’avais jamais connu de lien aussiprofond.—C’estça,fairel’amour?demandai-jetandisquemonorgasmemontaitenmoi.—Chaquefoisquejesuisentoi,c’estfairel’amour,bébé.Chaquefois.Jesourisetembrassaisonépauleavantdem’agrippertandisquedesvaguesdeplaisirsubmergeaient

moncorps.LecorpsdeWoodssetenditpuistremblaetilpoussaungrognementenjouissant.Latensionretombée,

ilroulasurledosenm’emportantaveclui.Ilmefixaavecunetelledévotionquemagorgesenoua.Jevoulaisquecetinstantduretoujours.Sijepouvaisconstammentêtreaussiprèsdelui,mavieserait

parfaite.Woodscommençaitàm’embrasserlorsquesontéléphonesemitàsonner.Ilfronçalessourcilsetjetaunœilàsonportableàcôtédenoussurlelit.JeluslenomdeJaceàl’écran.Jeregardail’heuresurletéléphone:1heuredumatin.—Pourquoiappelle-t-ilsitard?Réponds.Woodsdécrocha.—Allô?Jevistouteémotionrefluerdesonvisage.Ilneprononçapasunmot.Àl’évidence,Jaceparlait,parce

queWoodsl’écoutaitsansriendire.Sonvisageimpassiblem’empêchaitdedevinerdequoiilretournait.—Jesuistoujourslà,confirmaWoodsautéléphone.Ilneditriend’autre.Quelquessecondesplustard,ilraccrochait.Ilrestaassis,lesyeuxrivéssurletéléphonedanslecreux

desamain.Sonvisageétaitindéchiffrable.Maisquelquechosen’allaitpas.—Qu’est-cequ’ilvoulait?Woodssecoualatête.—Rien.Ilnevoulait rien.Ilvoulaitsimplementmedirequ’ilya trenteminutes,monpèreestmort

d’unarrêtcardiaque.

Remerciements

Keith, mon mari, qui a toléré la maison mal entretenue, la pénurie de linge propre et mes sautesd’humeurpendantquejerédigeaiscelivre(ettousmesautreslivres).Mes trois précieux bambins, qui ont mangé quantité de pogos, pizzas et Frosties parce que je

m’enfermaispourécrire.Promis,jeleuraicuisinédebonsplatschaudsàlafin.ColleenHoover,TinaReber,AutumnHull,LizReinhardtpourleurlectureet leurscommentairessur

DangerousPerfection.Mercipourvotreaide,mesdames!Àl’agent lapluscooldumonde littéraire,JaneDystel,que j’adore,c’estaussisimplequecela.Un

grand remerciement à Lauren Abramo, mon agent pour les droits étrangers, qui fournit un travailfantastiqueafinquemeslivressoientpubliésdanslemondeentier.Elleassure.Etsurtout,Dieu,quim’adonnélacréativitéetlacapacitéd’écrire.Lefaitquejepuissem’adonnerà

cequej’aimechaquejourestuncadeauqueLuiseulpeutoffrir.