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DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017 À la présidence-direction générale À la présidence-direction générale adjointe À la direction des ressources humaines, communications et affaires juridiques À la direction des ressources financières Au cadre responsable des RI-RTF Au répondant des RI-RTF Au responsable de la qualité et de la gestion des risques intégrés Au responsable du dossier des assurances Objet : Les ressources visées et non visées par la Loi sur la représentation des ressources de type familial et de certaines ressources intermédiaires et sur le Régime de négociation d’une entente collective les concernant (LRR) Non-renouvellement, résiliation, procédure d’arbitrage ou tribunaux civils? Comment la DARSSS peut vous aider Madame, Monsieur, La DARSSS constate que plusieurs avis de mésentente reliés à des fermetures de ressources ne lui sont pas transmis dès réception pour analyse de la couverture d’assurance. Dans d’autres cas, les avis de mésentente ne lui sont tout simplement pas envoyés ou le sont tardivement. Afin de favoriser le développement d’une jurisprudence stable et pertinente pour l’ensemble du réseau, nous vous rappelons que la DARSSS met à votre disposition son soutien et son expertise pour ce type de dossier sous réserve de ce qui suit. Les ententes spécifiques et particulières entre les établissements et les ressources visées et non visées par la LRR (RTF et RI), lesquelles découlent des ententes collectives et nationales, constituent des ententes contractuelles. La protection d’assurance de responsabilité des établissements du réseau exclut généralement les réclamations découlant d’ententes contractuelles. Toutefois, sur une base d’exception, le conseil des gouverneurs de la DARSSS a accepté que la DARSSS s’implique dans les dossiers de réclamation en dommages compensatoires couverts découlant du non-renouvellement ou de la résiliation d’une entente contractuelle liant une ressource à un établissement (ci-après « fermeture de ressources »). À l’inverse, tous les autres recours et procédures visant notamment à empêcher le déménagement d’usagers, à demander leur réintégration ou à obtenir une lettre d’excuse continuent d’être exclus. Ainsi, tous les frais relatifs à ces derniers éléments demeurent sous la responsabilité des établissements impliqués. …2

DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

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Page 1: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

À la présidence-direction générale À la présidence-direction générale adjointe À la direction des ressources humaines, communications et affaires juridiques À la direction des ressources financières Au cadre responsable des RI-RTF Au répondant des RI-RTF Au responsable de la qualité et de la gestion des risques intégrés Au responsable du dossier des assurances

Objet : Les ressources visées et non visées par la Loi sur la représentation des ressources de type familial et de certaines ressources intermédiaires et sur le

Régime de négociation d’une entente collective les concernant (LRR) Non-renouvellement, résiliation, procédure d’arbitrage ou tribunaux civils?

Comment la DARSSS peut vous aider

Madame, Monsieur, La DARSSS constate que plusieurs avis de mésentente reliés à des fermetures de ressources ne lui sont pas transmis dès réception pour analyse de la couverture d’assurance. Dans d’autres cas, les avis de mésentente ne lui sont tout simplement pas envoyés ou le sont tardivement. Afin de favoriser le développement d’une jurisprudence stable et pertinente pour l’ensemble du réseau, nous vous rappelons que la DARSSS met à votre disposition son soutien et son expertise pour ce type de dossier sous réserve de ce qui suit. Les ententes spécifiques et particulières entre les établissements et les ressources visées et non visées par la LRR (RTF et RI), lesquelles découlent des ententes collectives et nationales, constituent des ententes contractuelles. La protection d’assurance de responsabilité des établissements du réseau exclut généralement les réclamations découlant d’ententes contractuelles. Toutefois, sur une base d’exception, le conseil des gouverneurs de la DARSSS a accepté que la DARSSS s’implique dans les dossiers de réclamation en dommages compensatoires couverts découlant du non-renouvellement ou de la résiliation d’une entente contractuelle liant une ressource à un établissement (ci-après « fermeture de ressources »). À l’inverse, tous les autres recours et procédures visant notamment à empêcher le déménagement d’usagers, à demander leur réintégration ou à obtenir une lettre d’excuse continuent d’être exclus. Ainsi, tous les frais relatifs à ces derniers éléments demeurent sous la responsabilité des établissements impliqués.

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DARSSS 2017-09/PAGE 2

LRR et procédure d’arbitrage – modulation de l’assistance offerte par la DARSSS La LRR prévoit en cas de différend à la suite d’une fermeture de ressource, des procédures de règlement des mésententes et une possibilité de soumettre ensuite le différend à une procédure d’arbitrage. Les modalités de la procédure applicable varient en fonction des ententes collectives et des ententes nationales signées entre le ministre de la Santé et des Services sociaux et les associations représentant les ressources visées par la LRR ainsi que les organismes représentant les ressources non visées par la LRR. Dans ce contexte, la DARSSS s’est ajustée en étendant à la procédure d’arbitrage l’assistance qu’elle offre aux établissements, dans la mesure où des dommages compensatoires couverts sont réclamés. Les délais à transmettre les avis de mésentente à la DARSSS exposent l’établissement à un refus de couverture d’assurance tant pour la défense que pour le paiement de l’indemnité. Ces délais peuvent causer un déséquilibre dans la jurisprudence nuisant à l’ensemble du réseau. Ultimement, cela pourrait avoir pour effet l’imposition aux établissements d’un fardeau plus lourd lors de la fermeture d’une ressource. C’est pourquoi afin de favoriser une jurisprudence stable, nous souhaitons attirer votre attention notamment sur les éléments suivants concernant le processus d’arbritrage : 1. Tout d’abord, il est fondamental pour l’établissement de toujours se référer à l’entente

collective ou nationale applicable et en vigueur au moment de la mésentente afin de déterminer si la procédure de règlement des mésententes et la procédure d’arbitrage s’appliquent. À défaut d’une clause claire à cet effet, les tribunaux civils (Cour supérieure et Cour du Québec) ont compétence. Il est à noter que dans cette analyse, il peut également être important de référer aux lettres d’entente annexées à l’entente collective ou nationale, et à l’entente spécifique ou particulière signée entre la ressource et l’établissement.

2. Il faut vérifier si les délais de prescription prévus, soit par la LRR (article 57), soit par

l’entente collective ou nationale, ont été respectés. En effet, il faut soulever tout défaut à cet égard avant ou dès le début de l’arbitrage, car cela pourrait faire en sorte que le recours soit irrecevable et rejeté.

3. Il s’agit ensuite d’évaluer adéquatement les candidatures des arbitres potentiels avant de faire un choix. Il est préférable, si possible, de retenir les services d’un arbitre ayant un parcours varié (par exemple : ayant pratiqué en droit civil au sein d’un établissement du réseau ou au sein d’un tribunal administratif). Un arbitre ayant travaillé exclusivement ou majoritairement en droit du travail ou en milieu syndical, pourrait avoir tendance à traiter les enjeux reliés à la fermeture d’une ressource à travers le prisme des relations employeur-employé. Nous sommes plutôt d’avis qu’il faut appliquer les règles de contrat de service (articles 2098 et suivants du Code civil du Québec).

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Il est donc pertinent de rappeler à l’arbitre que le litige relève du droit civil et que l’établissement n’est pas « l’employeur ». Consulter à ce titre le document en pièce jointe portant sur la récente sentence arbitrale intérimaire : CRDITED de la Montérégie-Est et Michel Houle et L’association démocratique des ressources à l’adulte (ADRAQ-CSD), Mésentente numéro : 3555-47, le 6 juillet 2017.

4. La jurisprudence rendue par les tribunaux de droit civil en matière de résiliation est celle qui sera pertinente pour notamment appuyer la position de l’établissement et déterminer le fardeau de la preuve. Les règles en matière de congédiement sont différentes et pourraient mener au développement d’une jurisprudence préjudiciable au réseau.

5. L’entente collective ou nationale applicable à la mésentente détermine les pouvoirs de l’arbitre (par exemple : infirmer la décision de l’établissement, octroyer des dommages, etc.). La compétence de ce dernier est souvent limitée à l’octroi de dommages. En conséquence, si la demande d’arbitrage réclame un nouveau contrat ou le rétablissement du contrat résilié ou non renouvelé, il faut alors faire les représentations nécessaires afin que la demande soit amendée pour retirer cette demande invalide, et ce, avant ou dès le début de l’audition.

6. En aucun cas, n’admettre que le fardeau de la preuve repose sur l’établissement. Contrairement aux règles applicables en droit du travail/congédiement, il faut plaider que le fardeau de la preuve repose sur la partie demanderesse, c’est-à-dire la ressource (article 2803 du Code civil du Québec), laquelle devra démontrer que la fermeture de la ressource a été faite sans droit ou de façon abusive. Notre position à cet égard a d’ailleurs été confirmée dans la même sentence arbitrale citée plus haut.

7. Il est important que les parties se communiquent leur preuve dans un délai suffisant avant le début de l’audition, afin d’éviter toute surprise et de permettre une préparation adéquate. Il faut aussi tenter d’éviter l’introduction d’une expertise tardive, en cours d’arbitrage.

8. Il faut chercher à rapprocher les dates d’audition le plus possible, afin d’éviter que

l’arbitrage ne s’étende sur plusieurs mois. Nous vous rappelons qu’afin d’éviter un refus de couverture d’assurance, vous êtes invités à nous rapporter avec diligence toutes les mésententes comprenant une réclamation de dommages-intérêts ou dans lesquelles les pouvoirs de l’arbitre incluent la possibilité d’en octroyer. Il arrive parfois que des conclusions de la nature de l’injonction (par exemple : empêcher le déménagement d’usagers ou obtenir leur réintégration) s’immiscent dans le débat. Les démarches nécessaires pour répondre à ces conclusions ne sont pas couvertes par la protection dont bénéficient les établissements du réseau. Une entente devra alors être conclue avec l’analyste à l’indemnisation de la DARSSS assigné à votre dossier pour établir une répartition juste et appropriée entre la partie couverte et celle non couverte menant à un partage de frais juridiques ou à un partage des tâches avec votre contentieux.

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DARSSS 2017-09/PAGE 4

En terminant, nous avons accès à un nombre limité de personnes à qui nous distribuons ce communiqué. Il serait très utile et très apprécié si vous pouviez le diffuser aux intervenants également concernés dans votre établissement qui pourraient être impliqués le plus tôt possible.

Le présent communiqué ne constitue pas un avis juridique. Nous vous remercions de votre bienveillante attention que vous porterez au présent communiqué.

***

Source : Direction des assurances du réseau de la santé et des services sociaux

Pour information :

Nathalie Hughes, PAA Conseillère à l’indemnisation et à la direction Téléphone : (514) 282-4257 [email protected]

André Lamarche, B. SC., LL. B. Directeur Téléphone : (514) 282-4204 [email protected]

p. j. Sentence arbitrale intérimaire : CRDITED de la Montérégie-Est et Michel Houle et

L’association démocratique des ressources à l’adulte (ADRAQ-CSD), Mésentente numéro : 3555-47, le 6 juillet 2017

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TRIBUNAL D’ARBITRAGE Conseil de résolution des mésententes

PROVINCE DE QUÉBEC

No de dépôt : Mésentente : 3555-47 Date : Le 6 juillet 2017 ______________________________________________________________________ SOUS LA PRÉSIDENCE DE : ME FRANÇOIS BLAIS, AVOCAT

Avec la participation de M. Richard Lachapelle et

M. Roland Meunier ______________________________________________________________________ CRDITED de la Montérégie-Est

« l’établissement »

ET Michel Houle

« la ressource» ET L’association démocratique des ressources à l’adulte (ADRAQ-CSD)

« l’association » ou « le regroupement » _____________________________________________________________________

SENTENCE ARBITRALE INTÉRIMAIRE

______________________________________________________________________

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PAGE : 2

LES PRÉLIMINAIRES

[1] Le soussigné a été nommé comme arbitre, par les parties, le 28 janvier 2016 et

constitué en conseil de résolution des mésententes, par ces mêmes parties, avec la

nomination de messieurs Richard Lachapelle et Roland Meunier, qui a remplacé

monsieur Éric Gagnon. Me Véronique Try représente l’établissement et Me Kaven

Bissonnette, l’association ou le regroupement et la ressource Michel Houle.

[2] Aucune remarque n’a été formulée par les procureurs des parties concernant les

admissions d’usage, mais il appert du déroulement des audiences, qu’ils ont

implicitement reconnu que le conseil avait été régulièrement saisi du litige et avait

compétence pour disposer de la mésentente et rendre la présente sentence.

[3] Pour les fins de la rédaction de la présente sentence intérimaire, j’ai pris

connaissance des documents déposés par les procureurs des parties et leur

argumentation, et requis l’avis des arbitres en l’instance. Cependant, comme l’audience

formelle de cette affaire n’a pas encore eu lieu, nous rapportons seulement ce qui est

strictement nécessaire à la décision à rendre en l’espèce.

LA DEMANDE DES PARTIES

[4] Le 4 avril 2017, Me Try m’adressait la lettre suivante, par courriel, avec copie

conforme à Me Kaven Bissonnette et à messieurs Richard Lachapelle, Roland Meunier

et Claude Bouchard :

« Monsieur l’Arbitre,

Suite à nos échanges avec Me Bissonnette, nous souhaitons vous formuler la présente demande concernant le fardeau de preuve.

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Une mésentente persiste entre l’ADRAQ-CSD et l’établissement quant au fait que le fardeau de la preuve repose sur la partie qui formule une réclamation au conseil de résolution.

Nous rappelons que le présent arbitrage n’est pas en matière de relation de travail. Le contrat en litige est une entente de services et non un contrat d’emploi.

En effet, comme le précise l’article 2-2.01 de l’Entente collective applicable à cette affaire, la ressource est un prestataire de services. L’Entente spécifique le prévoit elle aussi dans son préambule (aux 1er et au 3ième « attendu »), tout comme les articles 301 et 302 de la LSSSS.

À ce titre, la ressource est demanderesse dans le présent litige, car c’est elle qui formule une réclamation basée sur sa prétention à l’effet que l’Entente spécifique n’a pas été respectée et que sa résiliation est non fondée en faits et en droit. Puisqu’il s’agit d’un dossier civil en matière de résiliation de contrat de services, les règles en matière civile doivent s’appliquer, notamment celles relatives au fardeau de la preuve, lesquelles prévoient que le fardeau de la preuve appartient à la partie demanderesse et c’est à elle à présenter sa preuve en premier.

L’article 4, paragraphe d), de la lettre d’entente II indique la question qui devra être tranchée par le conseil de résolution. Il ne traite aucunement du fardeau de la preuve.

Comme vous le savez certainement, lorsqu’il y a renversement du fardeau de la preuve, ce dernier est clairement et explicitement prévu par la Loi ou par les conventions.

En l’absence d’une telle indication claire et précise dans l’Entente collective applicable à notre dossier, c’est le régime général de la preuve (article 2803 C.c.Q.) qui s’applique. Le fardeau de la preuve appartient donc à la ressource et non à l’établissement.

Vu la mésentente entre les parties à ce sujet, nous vous demandons de trancher la question de façon préliminaire à l’audition du dossier afin d’assurer une équité procédurale dans ce dossier.

Dans l’attente de vos nouvelles, veuille agréer, Monsieur l’Arbitre, l’expression de nos meilleurs sentiments.

(s) Véronique Try, avocate Topalian & Associés Vé[email protected] c.c. : Me Kaven Bissonnette (par courriel) M. Richard Lachapelle (par courriel) M. Roland Meunier (par courriel) M. Claude Bouchard (par courriel) »

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[5] Les audiences ont été fixées pour décider de cette question préliminaire, selon la

disponibilité des membres du conseil de résolution des mésententes et des procureurs

des parties. Me Véronique Try a plaidé pour l’établissement le 10 avril 2017, assistée de

Me Virginie Simard, et Me Jean-Luc Dufour a plaidé pour l’association le 11 mai 2017,

assisté de Me Kaven Bissonnette. Aucun témoin n’a été entendu devant le conseil, et les

procureurs des parties ont présenté leur argumentation dans le même ordre que leur

plaidoirie.

LA PREUVE

[6] Le 10 avril 2017, les procureurs des parties ont déposé de consentement, au début

de l’audience, les documents suivants :

- L’entente collective datée du 13 juin 2013 (pièce R-1 en liasse) :

Entente collective/page 1 à 39;

Annexe 1 Liste des associations faisant partie du groupement d’associations formé par le regroupement (Annexes/page1, Annexes/pages 2 et Annexes/pages 3);

Annexe II Table d’ajustement fiscal (Annexes/page 4 et Annexes/page 5);

Annexe III Modalité de Maintien temporaire de la rétribution pour certaines ressources (Annexes/page 6);

Annexe IV Illustration des paramètres de l’article 34 de la Loi sur la représentation des ressources (Annexes/page 7);

Annexe V Liste des arbitres (Annexes/page 8);

Lettre d’entente no I (Annexes/page 9 et Annexes/page 10);

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PAGE : 5

Lettre d’entente no II (Annexes/page 11, Annexes/ page 12 et Annexes/page 13);

Canevas d’entente spécifique (Annexes/page 14 et Annexes/page15, Annexes page/16, Annexes/page17, Annexes/page18, Annexes/page19, Annexes/page 20, Annexes/page21);

Lettre d’entente no III (Annexes/page 22 et Annexes/page 23);

SECTION INFORMATIVE

Les lettres d’entente de cette section ne font pas partie intégrante de l’entente collective (Annexes/page 24);

Lettre d’entente no 1 (Section informative/page1, Section informative/page 2, Section informative/page3);

Lettre d’entente no 2 (section informative/page 4 et Section informative page 5);

Lettre d’entente no 3 (Section informative/page 6 et Section informative/page 7);

Lettre d’entente no 4 (Section informative/page 8 et Section informative/page 9);

Lettre d’entente no 5 (Section informative/page 10 et Section informative/page 11);

Lettre d’entente no 6 (section informative/page 12);

Lettre d’entente no 7 (Section informative/page 13 et Section informative/page 14);

Lettre d’entente no 8 (Section informative/page 15);

Lettre d’entente no 9 (Section informative/page16 et Section informative/page 17);

- L’entente spécifique RESSAQ signée par un représentant de l’établissement et la ressource (pièce R-2);

- La lettre de résiliation du contrat de la ressource en date du 17 avril 2015, pour un motif sérieux (pièce R-3);

- Le formulaire de mésentente 3555-47, alléguant la résiliation de l’entente spécifique comme étant non fondée en faits et en droit (pièce R-4), dont la description de la réclamation a été amendée par l’association pour répondre à une demande de précisions de l’établissement, au début de l’audience du 10 avril 2017, transmise par courriel le 12 avril 2017 (pièce R-4 A);

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- Le Cadre de référence du Ministère de la Santé et des Services Sociaux concernant les ressources intermédiaires et les ressources de type familial, Avril 2014 (pièce R-5).

LA MÉSENTENTE

[7] La mésentente soumise à l’arbitrage par l’association et la ressource Michel Houle

conteste la résiliation de l’entente spécifique (pièce R-2) par l’établissement, le 17 avril

2015 (pièce R-3). Elle est exposée dans le formulaire de mésentente N/Réf : 3555-47,

signé par la ressource en date du 30 avril 2015, et par un représentant de l’association

le 1er mai 2015 (pièce R-4).

[8] R-4 extrait :

« Description de la mésentente :

Résiliation de l’entente spécifique ou du contrat en vigueur non fondée en faits et en droit.

Description de la réclamation :

Annulation de la résiliation de l’entente spécifique ou du contrat en vigueur;

Retrait de la lettre avisant de la résiliation;

Paiement de la rétribution perdue jusqu’à ce que le nombre de placements redeviennent (sic) à la hauteur de ce qu’ils étaient (sic);

Rétablissement de tous les droits perdus;

[…]

Subsidiairement, des dommages-intérêts se détaillant comme suit :

Paiement de la rétribution à la hauteur de ce qu’elle était au moment de la résiliation ou du retrait des usagers selon la première occurrence et ce, pour la durée résiduelle de l’entente spécifique ou du contrat, incluant le nombre de renouvellements prévu à l’entente collective (incluant les lettres d’ententes No III et 9 si applicable (sic)), le tout tenant compte des maintiens, majorations et augmentations applicables;

Dommages moraux pour les préjudices subis;

Le tout avec intérêt (sic) au taux légal à compter de la date du dépôt de l’avis d’arbitrage. »

Page 11: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

PAGE : 7

[9] Le formulaire de mésentente a été amendé par l’association le 10 avril 2017, et

transmis par courriel à l’établissement et aux intéressés le 12 avril 2017, pour répondre

à une demande de précisions de la procureure de l’établissement au début de l’audience

(pièce R-4 A).

[10] R-4 A extrait :

« Monsieur l’Arbitre,

Voici, tel que convenu lors de la journée d’audition du 10 avril 2014 dans le dossier cité en rubrique, le libellé de la mésentente amendée (PIÈCE R4 A) :

« Paiement de l’ensemble des composantes de la rétribution pour la durée résiduelle de l’entente spécifique en vigueur entre les parties au moment de la résiliation, ainsi que pour la durée du renouvellement prévu à l’entente spécifique, renouvellement qui a été empêché par la résiliation contestée dans le présent litige relatif à l’entente spécifique;

Le tout avec intérêts, à compter du dépôt de l’avis d’arbitrage. »

LE LITIGE

[11] En l’espèce les parties m’ont demandé, d’un commun accord, une décision

préliminaire à l’audience pour déterminer s’il revient à la ressource de présenter sa

preuve en premier, parce qu’elle est demanderesse en l’instance.

[12] Selon la procureure de l’établissement, la ressource formule une réclamation, dont

la prétention est à l’effet que la résiliation de l’entente spécifique qui la liait avec

l’établissement est non fondée. La procureure de l’établissement est d’avis que la

résiliation d’un contrat de services est un dossier civil, et que ce sont les règles en matière

civile qui doivent s’appliquer, lesquelles prévoient que le fardeau de la preuve appartient

à la partie demanderesse, donc à l’association, et que c’est à elle de présenter sa preuve

en premier.

Page 12: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

PAGE : 8

[13] Selon le procureur de l’association il faut nuancer les propos de la procureure de

l’établissement, et tenir compte du contexte créé par la Loi avant de répondre à la

question soumise par la procureure de l’établissement.

LE CONTEXTE

[14] En l’espèce, le procureur de l’association souligne que les parties sont régies par la

Loi sur la représentation des ressources de type familial et de certaines ressources

intermédiaires et sur le régime de négociation d’une entente collective les concernant,

R.L.R.Q., c. R-24.02. Il s’agit d’un régime unique en soi, selon lui, qui se gouverne de

manière indépendante à tout autre régime, tel qu’il est mentionné à l’article 61.

[15] L’article 61 stipule ce qui suit :

« 61. Le régime collectif de représentation et de négociation institué par la présente loi est complet et s’applique à l’exclusion de tout autre régime. »

[16] Selon le procureur de l’association, la Loi prévoit une structure complète de

reconnaissance des droits à la représentation et à la négociation mais, au lieu d’être un

processus d’accréditation, c’est un processus de reconnaissance devant une instance

dont les dénominations, sans être identiques, s’apparentent à celles qu’on retrouve en

relations de travail. Par exemple, au lieu d’être une convention collective, c’est une

entente collective; au lieu d’être une grève, c’est un moyen de pression. Il s’agit d’un

régime de représentation collective, où on permet aux ressources de se regrouper pour

négocier avec les établissements, avec le ministère, une entente collective, c’est l’objectif

de la Loi.

Page 13: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

PAGE : 9

[17] Selon le procureur de l’association, les parties ne sont pas tout à fait dans un régime

de droit civil et pas nécessairement, non plus, dans un contrat d’entreprise tout à fait

conforme à la réalité qu’on entend normalement par un « contrat d’entreprise ». Il a donné

plusieurs exemples du caractère « apparenté » au statut de salarié de la ressource dans

les dispositions de la Loi. Par exemple, l’article 34, paragraphe 4, de la Loi prévoit la

rétribution quotidienne : c’est l’expression utilisée pour dire salaire ou rémunération, selon

le procureur de l’association. Or, il y a compensation monétaire pour des congés

équivalents à ceux payés en vertu de la Loi sur les normes du travail (paragraphe 4 a) de

l’article 34), aux régimes visées par la Loi sur l’assurance parentale (paragraphe 4 b) de

l’article 34), et par la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

[18] De plus, l’article 3-5.00 de l’entente collective (pièce R-1) contient la reproduction

conventionnée de l’article 34 de la Loi, et l’article 3-6.00 de l’entente collective (pièce R-

1) stipule les compensations financières, auxquelles s’ajoutent à ce que nous avons vu

précédemment, le RRQ, le RQAP et la fête nationale, à l’article 3-4.01 de la même

entente collective (pièce R-1). Il souligne que certaines de ces compensations financières

sont versées pour que la ressource puisse bénéficier d’avantages à valeur monétaire qui

sont habituellement accordés aux gens qui sont des salariés.

[19] Par conséquent, ce n’est pas un régime de relations de travail au sens pur, le régime

n’est pas tout à fait « collé sur le droit civil et pas nécessairement collé sur le droit du

travail ». Le procureur de l’association en a fait un point majeur de son argumentation. Il

soutient que l’entente de service a un caractère hybride qui relève à la fois du droit civil

et du droit du travail, dont il faut tenir compte dans l’interprétation des concepts

applicables en l’espèce.

Page 14: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

PAGE : 10

L’ENTENTE COLLECTIVE

[20] Rappelons que l’entente de service est au centre du régime créé par la Loi sur la

représentation des ressources de type familial et de certaines ressources intermédiaires

et sur le régime de négociation d’une entente collective les concernant. C’est par l’effet

de l’article 56 de cette Loi que les mésententes se règlent selon l’arbitrage prévu au Code

de procédure civile (L.R.Q., c. C-25).

[21] En l’espèce, il n’était pas exclu que le règlement des mésententes soit soumis à

l’arbitrage de grief, à défaut de dispositions dans l’entente collective ou si l’entente

collective prévoit l’intervention de l’arbitre, selon l’article 56 de la Loi. Cependant, comme

l’entente collective (pièce R-1 entente collective/page 1 à 39) prévoit une procédure pour

le règlement de toute mésentente relative à l’interprétation ou à l’application de l’entente

collective, c’est la procédure de l’article 6-3.00 qui doit s’appliquer (pièce R-1 entente

collective/page 30 et page 31). En l’occurrence, il s’agit des dispositions des articles 940

et suivants du Code de procédure civile.

LE RÈGLEMENT DES MÉSENTENTES

[22] L’article 56 de la Loi stipule ce qui suit :

« 56. Toute mésentente relative à l’interprétation ou à l’application d’une entente collective est réglée suivant la procédure prévue à cet effet dans l’entente.

À défaut de dispositions dans l’entente collective ou si l’entente prévoit son intervention, la mésentente est soumise à un arbitre. Les articles 100 à 100.9 et 100.11, les paragraphes a, c, d, e et g de l’article 100.12 et les articles 100.16 à 101.9 et 139 à 140 du Code du travail (chapitre C-27) s’appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires.

Page 15: DARSSS 2017-09 Émis le 25 août 2017

PAGE : 11

[23] La mésentente est donc réglée suivant la procédure prévue à cette fin dans l’entente

collective (pièce R-1 entente collective/page 3). Il est écrit, à l’article 1-7.02 de l’entente

collective (pièce R-1 entente collective/page 8), que la lettre d’entente numéro II, relative

à l’entente spécifique, s’applique. La lettre d’entente spécifique numéro II (pièce R-1

Annexes/page 11 et 12) mentionne ce qui suit :

« Les parties conviennent de ce qui suit:

[…]

2. Puisque la procédure d’arbitrage prévue dans l’entente collective ne s’applique qu’à une difficulté relative à l’interprétation ou l’application de l’entente collective, cette procédure d’arbitrage ne s’applique donc pas automatiquement dans le cas d’une difficulté liée à l’interprétation ou à l’application de l’entente spécifique.

3. Cependant, en contrepartie des dispositions convenues dans le cadre de l’article 6-3.00, le ministre et le Regroupement s’engagent à ce que le règlement de certaines difficultés liées à l’entente spécifique soit soumis aux mêmes mécanismes ou procédures que ceux prévus à l’entente collective, pour les difficultés liées à l’interprétation ou l’application de cette entente.

[…] » [références omises]

[24] La question du fardeau de la preuve n’est pas abordée dans l’entente, mais on peut

constater que le règlement des mésententes est un litige soumis à l’arbitrage du Code de

procédure civile qui a été rendu applicable au litige découlant de l’entente spécifique,

comme nous l’avons vu précédemment. Il en ressort que la procédure de règlement d’une

mésentente est celle qui est prévue dans l’entente collective (pièce R-1).

[25] Or, il ne fait aucun doute que la procédure prévue dans l’entente collective, pour

régler une mésentente, est prévue à l’article 6-3.00 et suivants (pièce R-1 Entente

collective/page 30 et page 31), et instaure la procédure d’arbitrage civil. De plus, selon

l’article 6-3.04 (pièce R-1 entente collective/page 31), ce sont les dispositions des articles

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940 et suivants du Code de procédure civile qui s’appliquent, à moins qu’elles ne soient

incompatibles avec les dispositions de cet article (pièce R-1 Entente collective/page 31).

[26] Les parties auraient pu faire autrement en référant au deuxième paragraphe de

l’article 56 de la Loi, et ainsi importer les articles du Code du travail, L.R.Q., c. C-27, qui

y sont mentionnés, car « À défaut de dispositions dans l’entente collective ou si l’entente

prévoit son intervention, la mésentente est soumise à un arbitre. Les articles 100 à 100.9

et 100.11, les paragraphes a, c, d, e et g de l’article 100.12 et les articles 100.16 à 101.9

et 139 à 140 du Code du travail (chapitre C-27) s’appliquent, compte tenu des

adaptations nécessaires ». Le choix de régler les mésententes suivant la procédure

prévue à cet effet dans l’entente collective exclut l’application des dispositions du Code

du travail.

[27] L’article 944.1 du Code de procédure civile prévoit que « […] les arbitres procèdent

à l’arbitrage suivant la procédure qu’ils déterminent […] ». Or, la détermination du fardeau

de la preuve n’est pas une question de procédure, mais une question de droit, dont les

modalités se retrouvent aux articles 2803 et suivants du Code civil du Québec, L.Q., 1991,

c. 64.

[28] À titre subsidiaire, mentionnons que l’article 100.2 du Code du travail, invoqué par

le procureur de l’association, prévoit ce qui suit :

« 100.2. L’arbitre doit procéder en toute diligence à l’instruction du grief et, sauf disposition contraire de la convention collective, selon la procédure et le mode de preuve qu’il juge appropriés.

À cette fin, il peut, d’office, convoquer les parties pour procéder à l’audition du grief.

Aux fins prévues à l’article 27 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail (chapitre T-15.1), il peut aussi tenir avec elles une conférence préparatoire à l’audition du grief. »

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[29] Dans cette disposition, il est question des modes de preuve, qui réfèrent aux

moyens de faire la preuve des éléments dont chaque partie a le fardeau de démontrer,

ces modes étant prévus aux articles 2811 et suivants du Code civil du Québec. Il s’agit

de l’écrit, du témoignage, de la présomption, de l’aveu et de l’élément matériel de preuve.

[30] Par conséquent, les articles 944.1 du Code de procédure civile et 100.2 du Code

du travail ne réfèrent d’aucune façon au fardeau ou à la charge de la preuve qui incombe

aux parties, prévu aux articles 2803 et suivants du Code civil du Québec.

[31] En outre il convient, à mon avis, d’interpréter les dispositions de la Loi en fonction

du régime de règlement des mésententes et ce, quelle que soit la qualification donnée

au régime, que ce soit plutôt civil ou plutôt travail, ou même entre les deux, à caractère

hybride ou unique en soi, et qui se gouverne de manière indépendante à tout régime. La

procédure applicable de règlement des mésententes ne devrait pas influencer de manière

significative la qualification de la mésentente pour en faire un litige civil, uniquement parce

la procédure applicable est un arbitrage civil. À mon avis, cela pourrait conduire à une

différence de traitement en fonction de la procédure de détermination du fardeau de la

preuve, alors que dans les deux cas il s’agit du même fardeau de preuve.

LE FARDEAU DE LA PREUVE

[32] En l’espèce, la ressource est désignée comme étant est un prestataire de services,

au sens des dispositions du Code civil du Québec régissant le contrat de service, soit les

articles 2098 et suivants. On retrouve cette désignation dans l’entente, à l’article 2-2.01

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(pièce R-1 Entente collective/page 10 note de bas de page numéro 2), et au préambule

de l’entente spécifique (pièce R-2 aux 1er et 3ième « attendu »).

[33] La ressource est le prestataire de services et l’établissement est le client, dont les

obligations, de part et d’autre, sont modulées par les services à rendre aux usagers.

L’entente n’a pas les caractéristiques d’un contrat d’emploi (voir les affaires Caisse c.

Centre de réadaptation Lisette Dupras, 2006 QCCS 1351 et Daniel Lainesse c. Centre

de services en déficience (CSDI) de la Mauricie/Centre du Québec, 2004 CanLII 192246

(QC CS)).

[34] En l’espèce, je suis d’accord avec la procureure de l’établissement à l’effet que la

ressource agit comme demanderesse dans le présent litige. Elle formule une réclamation

à l’effet que l’entente spécifique (pièce R-2) n’a pas été respectée, et que sa résiliation

n’est pas fondée en faits et en droit (pièce R-3). Je suis aussi d’accord avec elle

lorsqu’elle ajoute qu’il s’agit de la résiliation de son contrat de services, lequel obéit aux

règles en matière civile, notamment quant au fardeau de la preuve, lesquelles prévoient

que le fardeau de la preuve appartient à la partie demanderesse. En conséquence, il

appartient à la ressource à présenter sa preuve en premier.

[35] Par ailleurs, l’article 4 alinéa d) de la lettre d’entente no II (pièce R-1 annexes/ page

12) indique la question devant être tranchée par le conseil, mais ne traite pas du fardeau

de la preuve. Il y est mentionné, à l’alinéa c) « que la procédure d’arbitrage prévue à

l’entente collective s’applique, en faisant les adaptations nécessaires, dans les cas

suivants : […] dans le cas d’un litige concernant la résiliation par l’établissement de

l’entente spécifique avant l’arrivée du terme; […] » L’alinéa d) se lit comme suit : « Que,

dans les cas mentionnés à l’alinéa c) précédent, le conseil de résolution prévu à la

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procédure d’arbitrage doit vérifier si la décision prise par l’établissement l’a été pour un

motif sérieux et avec l’autorisation de l’agence concernée ».

[36] Ces dispositions ne traitent pas du fardeau de la preuve, mais de la juridiction du

conseil de procéder à la vérification de l’existence d’un motif sérieux. Rappelons que dans

l’affaire Faucher c. Dominique Turcotte Inc., 2016 QCCA 571, la Cour d’appel avait

apporté la précision suivante :

« [6] Cela dit, il n’existe pas de différence fondamentale entre un motif de congédiement sans cause juste et suffisante au sens de CCT et un motif sérieux de congédiement au sens de l’article 2094 C.c.Q. Les nuances d’ordre sémantique proposées par l’appelant sont nettement vouées à l’échec et l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès. »

[37] Par ailleurs, dans l’affaire Plomberie et chauffage West Island Ltée c. Entreprises

Bon Conseil Ltée, J.E. 2004-472, la Cour d’appel mentionne que « même si elle est

fondamentale et archi-connue, il n’est pas inutile de rappeler que celui qui veut la

reconnaissance d’un droit a le fardeau de prouver les faits qui soutiennent sa prétention

(art. 2803 C.c.Q.) » (par. 8).

[38] Comme le dit bien le professeur Léo Ducharme, dans son Précis de la preuve, 6e

édition, Montréal, Les Éditions Wilson & Lafleur, 2005, les règles concernant la charge

de la preuve sont énoncées à l’article 2803 du Code civil du Québec. Ainsi, « celui qui

veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention », ce qui

implique, en principe, qu’il doit prouver tous les faits qui conditionnent l’existence d’un

droit. « En pratique, toutefois, des présomptions légales ou quasi légales viennent

presque toujours alléger le fardeau de la preuve du demandeur et, notamment, les deux

présomptions quasi légales suivantes, à savoir que les faits conformes à l’état normal et

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habituel des choses doivent être présumées et que la conservation d’un droit doit toujours

être présumée » (par. 120 de l’ouvrage).

[39] Ces deux présomptions étant tirées du régime général de la preuve en droit civil,

elles s’appliquent nécessairement au prestataire de service, dont le statut est également

prévu par le régime de droit civil, et pour lequel le Code civil du Québec ne prévoit aucune

disposition particulière quant au fardeau de preuve qui lui est applicable.

[40] Ces présomptions relatives à l’état normal et habituel des choses et à la

conservation des droits sont par ailleurs conformes au régime de la preuve prévu à

l’article 2803 du Code civil du Québec. En effet, cette disposition prévoit premièrement

que « celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention

». Il appartiendra donc à celui dont l’état normal et habituel des choses a changé, de faire

la preuve de tous les éléments relatifs à ce changement.

[41] Dans un deuxième temps, toujours en fonction du régime général de preuve prévu

à l’article 2803, il appartiendra à « celui qui prétend qu’un droit est nul, a été modifié ou

est éteint, [de] prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée ». Il appartiendra

donc à la partie qui fait face à la réclamation initiale, d’établir les raisons pour lesquelles

la présomption de conservation des droits, ou de l’état normal et habituel des choses,

doit être repoussée.

[42] Appliqué aux faits de l’espèce, cela revient à dire qu’il appartiendra à la ressource

d’établir une modification quant à l’état habituel des choses, soit la résiliation de son

contrat de services. Il appartiendra par la suite à l’établissement de démontrer les raisons

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pour lesquelles cette résiliation était justifiée, et donc pourquoi le droit invoqué par la

ressource « est nul, a été modifié ou est éteint ».

[43] Une telle interprétation du fardeau de la preuve prend en considération le fait qu’il

serait pratiquement impossible pour la ressource de faire la preuve des éléments

constitutifs de la décision de l’établissement de procéder à la résiliation de son contrat de

service. L’administration et la gestion des ressources incombant à l’établissement, il

revient en effet à celui-ci de prendre les décisions relatives à ces matières, de son propre

chef.

[44] Dans un tel contexte, la ressource est, la plupart du temps, placée devant une

situation de faits et ne peut qu’acquiescer ou contester la décision de l’établissement, en

procédant à sa propre évaluation de la situation, puis en utilisant la procédure de

mésentente prévue à l’entente collective, le cas échéant.

[45] En raison de la présente situation, dans laquelle les parties n’assument pas les

mêmes fonctions, le conseil de résolution des mésententes doit tenir compte de la réalité

à l’effet qu’il serait impossible pour une ressource d’établir de façon directe la preuve des

véritables motifs qui ont amené l’établissement à prendre une décision, à l’issue de sa

seule analyse des faits.

[46] Imposer l’entier fardeau de la preuve à la ressource pourrait faire en sorte qu’il

existera de multiples cas où elle ne sera pas en mesure de fournir une preuve complète

et entière sur tous les éléments nécessaires au soutien de sa demande de règlement

d’une mésentente.

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[47] Par conséquent, dans les cas où le régime de règlement des mésententes choisi

par les parties en vertu de l’article 56 de la Loi est celui de l’arbitrage civil, et pour les

situations comme celle du présent dossier où la décision contestée découle de la seule

analyse de la situation par l’établissement, le présentation de la preuve devra respecter

l’ordre suivant : premièrement, la ressource aura le fardeau préliminaire d’établir les

éléments de base servant d’assise à sa demande de règlement de la mésentente. Dans

un deuxième temps, il appartiendra à l’établissement d’établir les éléments au soutien de

la justesse de sa décision, cette étape pouvant être suivie, le cas échéant, d’une nouvelle

preuve de la part de la ressource, en réponse à celle produite par l’établissement.

[48] Par ailleurs, j’ouvre ici une parenthèse pour souligner qu’en arbitrage de grief, la

réponse à la question posée par les parties en l’espèce ne pose pas de sérieuse difficulté,

et n’est pas toujours tranchée uniquement en fonction du fardeau de la preuve.

[49] Les auteurs Fernand Morin et Rodrigue Blouin, avec la collaboration de Jean-Yves

Brière et Jean-Pierre Villaggi, dans l’ouvrage Droit de l’arbitrage de grief, 6e édition,

Cowansville, Les Éditions Yvon Blais Inc., aux pages 423 et 424, sous le titre 3.1 – La

charge de la preuve, écrivent ce qui suit :

« VII.38 – En arbitrage de grief, il n’existe pas de règles générales, précises et exclusives qui situent bien la position de départ des parties au sujet de l’administration de la preuve. Pour mieux tenir compte de la nature particulière de la convention collective et du milieu concerné, on peut distinguer la question concernant l’ordre de présentation des éléments de preuve des parties de la stricte question juridique à la charge de la preuve. Ainsi, une partie peut devoir assumer l’initiative de la preuve sans pour autant se voir imposer le devoir de convaincre, au premier chef, l’arbitre du bien-fondé de sa position. En somme, il n’y aura pas une quelconque présomption favorable ou défavorable envers l’une ou l’autre partie. Il revient à l’arbitre d’établir l’ordre de la présentation de la preuve respective des parties (VII.44) et à cette fin, la logique et aussi la pratique s’imposent. Ainsi, il va de soi que le grief déposé à la suite de l’imposition d’une mesure disciplinaire demande qu’il soit d’abord établi qu’il y a eu imposition d’une mesure disciplinaire :

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le salarié visé, le moment de son imposition, les éléments de la sanction, etc. Puis, l’auteur de la sanction doit établir les faits retenus pour sévir et l’appréciation qui fut faite susceptible de justifier la décision de l’employeur. Ce n’est qu’après ce dernier volet qui ne peut être présenté que par l’employeur que le syndicat peut logiquement tenter d’en contester la justesse. La pratique constante retient d’ailleurs cette séquence de la présentation de la preuve, laquelle n’est guère remise en cause par les praticiens professionnels de l’arbitrage. Certes, des règles de droit civil sont retenues bien qu’elles ne soient pas toujours applicables. Il convient néanmoins de tenir compte du sens et de la portée des articles du Code civil du Québec traitant de la preuve :

2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

Celui qui prétend qu’un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.

2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.

2805. La bonne foi se présume toujours, à moins que la loi n’exige expressément de la prouver.

2806. Nul n’est tenu de prouver ce dont le tribunal est tenu de prendre connaissance d’office.

2807. Le tribunal doit prendre connaissance d’office du droit en vigueur au Québec.

Doivent cependant être allégués les textes d’application des lois en vigueur au Québec, qui ne sont pas publiés à la Gazette officielle du Québec ou d’une autre manière prévue par la loi, les traités et accords internationaux s’appliquant au Québec qui ne sont pas intégrés dans un texte de loi, ainsi que le droit international coutumier.

2808. Le tribunal doit prendre connaissance d’office de tout fait dont la notoriété rend l’existence raisonnablement incontestable. »

[50] Les auteurs Bernier, Blanchet, Granosik et Séguin, dans Les mesures disciplinaires

et non disciplinaires dans les rapports collectifs du travail 2e Édition volume II (mise à jour

2017-1), Cowansville, Les Éditions Yvon Blais Inc., soulignent ce qui suit à la page IV/1-

341:

« (i) L’ordre de présentations des témoins

1.515. Il n’existe aucune règle dans le Code du travail ou dans le Code de procédure civile concernant l’ordre de présentation des témoins. Les procureurs

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patronaux et syndicaux sont donc maîtres de l’ordre de présentation de leurs témoins.

Dans les affaires de congédiement, il n’est pas rare que la partie patronale assigne le salarié congédié à titre de premier témoin lors de la présentation de sa preuve. […]

[…] Aucun motif ne permettait à l’arbitre de déroger aux règles habituelles voulant que l’employeur puisse assigner le salarié en qualité de premier témoin. »

[51] J’ajoute que peu importe que l’on soit assujetti à une procédure de règlement des

mésententes ou à l’autre, la question du fardeau de la preuve se pose de la même

manière aux parties. Dans cette perspective, il n’est que logique qu’elles s’en inspirent

pour trouver des solutions aux questions soulevées dans l’administration de la preuve.

De plus, il faut souligner que les parties peuvent toujours convenir d’admissions entre

elles afin d’alléger et faciliter l’administration de la preuve.

PAR CONSÉQUENT, À DÉFAUT D’ACCORD ENTRE LES PARTIES, L’ARBITRE :

FIXE le fardeau de la preuve des parties et l’ordre de présentation des témoins comme suit :

Premièrement, la ressource aura le fardeau préliminaire d’établir les éléments de base servant d’assise à sa demande de règlement de la mésentente;

Deuxièmement, il appartiendra à l’établissement d’établir les éléments au soutien de la justesse de sa décision, cette étape pouvant être suivie, le cas échéant, d’une nouvelle preuve de la part de la ressource, en réponse à celle produite par l’établissement.

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CONVOQUE les parties à une date à être fixée selon la disponibilité des parties de leurs procureurs et des arbitres, afin de terminer cette affaire, le cas échéant.

Montréal, ce 6 juillet 2017

__________________________________ Me François Blais, avocat et arbitre

__________________________________M. Richard Lachapelle, arbitre

__________________________________ M. Roland Meunier, arbitre

Pour l’établissement :

Mes Véronique Try et Virginie Simard

Pour l’association et la ressource :

Mes Jean-Luc Dufour et Kaven Bissonnette

Dates d’audience :

10 avril et 11 mai 2017