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DELHI KABOUL ASHABAD TÉHÉRAN BAKOU DAMAS RIYAD BAGDAD LE CAIRE ANKARA ISTANBUL NAGPUR BYZANCE: Péloponnèse (XII e siècle); Asie Mineure (X-XI e siècle) PERSE? CENTRE DE L’INDE (1 ère moitié du 1er millénaire de notre ère) INTRODUCTION L’origine indienne des Roms est incon- testée. L’analyse du romani et sa compa- raison avec d’autres langues révèlent que les Roms ont d’abord migré de l’Inde centrale aux régions orientales de l’Inde du Nord et y sont probablement restés un certain temps. Ensuite, ils auraient pu tra- verser la Perse et l’Arménie pour gagner l’empire byzantin, puis l’Asie mineure et finalement la Grèce. Les découvertes linguistiques démontrent l’arrivée dans l’empire byzantin d’un groupe assez ho- mogène, car tous les groupes de Roms recensés aujourd’hui possèdent une base linguistique commune qui englobe aussi des éléments de vocabulaire et de gram- maire empruntées au grec. De même, selon les premières découvertes — plus récentes — de spé- cialistes de la génétique des populations, les ancêtres des Roms étaient indiens et faisaient probablement partie d’un petit groupe relativement homogène si l’on en juge par l’analyse des groupes sanguins. Les différenciations au sein de ce grou- pe ne sont probablement apparues qu’à l’époque de leur arrivée et des débuts de leur dissémination en Europe. De même que les linguistes et les généticiens, les anthropologues culturels supposent que les Roms pro- viennent à l’origine de l’Inde. Ils se fondent notamment, pour formuler cette conclusion, sur des institutions socioculturelles comme la forme tra- ditionnelle de juridiction ou certaines règles en vigueur dans les groupes (comme les préceptes de propreté). Ces deux caractéristiques — juridiction in- terne du groupe et préceptes de propre- Compilé par l’équipe éditoriale Inde | En marche vers l’Ouest | La migration vers Byzance ou quand la linguistique tient lieu de géographie | Doms, Luri, Roms : cousins mais pas frères | Les Roms dans l’empire byzantin | Les Athingani | Les Roms sur le Péloponnèse D’Inde en Europe PROJET ÉDUCATION DES ENFANTS ROMS EN EUROPE COUNCIL OF EUROPE CONSEIL DE L´EUROPE D’INDE EN EUROPE ROMS | HISTOIRE 1.0 En vertu des découvertes des linguistes, des anthropologues culturels, des historiens et, plus récemment, des généticiens spécialisés dans l’étude des populations, l’origine indienne des Roms est un fait établi. Par contre nombre de questions font encore l’objet d’hypothèses: « Comment et quand leurs ancêtres ont- ils gagné l’Europe depuis l’Inde?», «Quelles étaient leurs motivations et qui étaient-t-ils exactement ?». En raison du manque de preuves directes, l’histoire pré-européenne des Roms relève de la reconstitution. LA MIGRATION D’INDE EN EUROPE Ill. 1 Zones et dates probables du séjour NORD-OUEST DE L’INDE (fin de la 2 e moitié du 1ER millénaire de notre ère) ARMÉNIE?

DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

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Page 1: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

Delhi

Kaboul

ashabaD

Téhéran

baKou

Damas

riyaD

baGDaD

le Caire

anKara

isTanbul

naGPur

byzanCe: Péloponnèse (Xiie siècle); asie mineure (X-Xie siècle)

Perse?

CenTre De l’inDe (1ère moitié du 1er millénaire de notre ère)

inTroDuCTion

l’origine indienne des roms est incon-testée. l’analyse du romani et sa compa-raison avec d’autres langues révèlent que les roms ont d’abord migré de l’inde centrale aux régions orientales de l’inde du nord et y sont probablement restés un certain temps. ensuite, ils auraient pu tra-verser la Perse et l’arménie pour gagner l’empire byzantin, puis l’asie mineure et finalement la Grèce. Les découvertes linguistiques démontrent l’arrivée dans l’empire byzantin d’un groupe assez ho-

mogène, car tous les groupes de roms recensés aujourd’hui possèdent une base linguistique commune qui englobe aussi des éléments de vocabulaire et de gram-maire empruntées au grec.

De même, selon les premières découvertes — plus récentes — de spé-cialistes de la génétique des populations, les ancêtres des roms étaient indiens et faisaient probablement partie d’un petit groupe relativement homogène si l’on en juge par l’analyse des groupes sanguins. les différenciations au sein de ce grou-pe ne sont probablement apparues qu’à

l’époque de leur arrivée et des débuts de leur dissémination en europe.

De même que les linguistes et les généticiens, les anthropologues culturels supposent que les roms pro-viennent à l’origine de l’inde. ils se fondent notamment, pour formuler cette conclusion, sur des institutions socioculturelles comme la forme tra-ditionnelle de juridiction ou certaines règles en vigueur dans les groupes (comme les préceptes de propreté). Ces deux caractéristiques — juridiction in-terne du groupe et préceptes de propre-

Compilé par l’équipe éditoriale

Inde | En marche vers l’Ouest | La migration vers Byzance ou quand la linguistique tient lieu de géographie | Doms, Luri, Roms : cousins mais pas frères | Les Roms dans l’empire byzantin | Les Athingani | Les Roms sur le Péloponnèse

D’Inde en Europe

ProjeT éDuCaTion Des enfanTs roms en euroPe

COunCIL Of EuROPE

COnsEILDE L´EuROPE

d’IndE En EuropE

roms | hisToire

1.0

En vertu des découvertes des linguistes, des anthropologues culturels, des historiens et, plus récemment, des généticiens spécialisés dans l’étude des populations, l’origine indienne des Roms est un fait établi. Par contre nombre de questions font encore l’objet d’hypothèses: « Comment et quand leurs ancêtres ont-ils gagné l’Europe depuis l’Inde?», «Quelles étaient leurs motivations et qui étaient-t-ils exactement ?». En raison du manque de preuves directes, l’histoire pré-européenne des Roms relève de la reconstitution.

la miGraTion D’inDe en euroPeill. 1

Zones et dates probables du séjour

norD-ouesT De l’inDe (fin de la 2e moitié du 1er millénaire de notre ère)

arménie?

Page 2: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

IndE

les méthodes linguistiques permettent de déterminer dans le temps et dans l’espace l’apparition d’une langue indo-aryenne. en particulier, les changements affectant le système phonétique d’une langue permettent de tirer des conclusions sur ses premières origines. le romani, toutefois, ne peut pas être facilement classé. il possède de nombreuses caractéristiques de ce qu’il est convenu d’appeler « les langues indo-aryennes du Centre » (comme le hindi-ourdou, le pendjabi, le gujarati ou le radjashatni), mais partage aussi certaines caractéristiques communes avec des langues indo-aryennes du nord comme le kashmiri. sur la base de ces considérations et d’autres facteurs, on

a conclu que les ancêtres des roms vivaient à l’origine dans le centre de l’inde. Déjà, avant notre ère, ils auraient gagné le nord-ouest du sous-continent où ils seraient restés plus longtemps avant de quitter la région et de partir vers l’ouest. Cette théorie, formulée en 1927 par ralph Turner — un orientaliste britannique —, fait généralement autorité aujourd’hui. [ills. 1, 3]

En marchE vErs l’ouEst

la date précise à laquelle les roms ont quitté l’inde est inconnue. les don-nées linguistiques ne fournissent pas de repères chronologiques précis et il n’existe pas de documents contempo-rains sur la migration des roms à tra-vers le moyen-orient. seuls des auteurs

postérieurs à ces événements y font ré-férence, avec toujours plusieurs siècles d’écart. Dans son « shahnameh » (le livre des rois), écrit en 1011, le poète perse ferdowsi mentionne une légende selon laquelle le roi indien shangul au-rait offert à son homologue perse bahr-am V (420-438) 10 000 de ce qu’il était alors convenu d’appeler des « luri » afin que ceux-ci distraient son peuple avec de la musique. bahram donna aux luri des terres à cultiver ; ils mangèrent le maïs et en réclamèrent davantage. Par conséquent, le shah les envoya à travers le monde sur le dos de leurs bêtes. Des légendes analogues sont rapportées par d’autres historiens. [ill. 2]

il existe des preuves réelles de l’immigration de différents groupes d’inde du nord vers la Perse pendant le règne de bahram V. Certains cher-

té — se retrouvent aussi, de même que certaines notions religieuses d’une partie des groupes roms, dans le sous-continent indien. aucun lien socioculturel direct entre les groupes indien et rom n’a ce-pendant encore pu être établi.

les historiens disposent de sour-ces qui ne parlent pas des roms, mais de groupes évoquant ces derniers sous nombre d’aspects et qui ont pu leur être assimilés dans le passé. aucune de ces hypothèses n’a été vérifiée ; pourtant,

des documents de Perse et de la péninsu-le arabique nous permettent de forger une image de la population nomade de ces ré-gions que les roms ont traversées — se-lon toute probabilité — dans le cadre de leur migration d’inde en europe.

IndeEn marche vers l’OuestLa migration vers Byzance ou quand la linguistique tient lieu de géographie

ill. 2

Manuscrit persan du XVIe siècle: Shangul d’Inde diverti par Bahram Gur(extrait de fraser 1992, p. 34)

2 3

mer D’oman

KannaDa Golfe Du benGale

lanGues imPorTanTes Du sous-ConTinenT inDien

rajasTani

maraThi

PanDsChabi

ill. 3

nePali

GujaraTi

hinDi

Langues indo-aryennes du Centre

Langues iraniennes

Langues dravidiennes

Autres langues indo-aryennes

urDu

KasChmiri

sinDhi

bihari

oriya

assami

benGali

sinhala

PasChTu

beluTsChi

Langues indo-aryennes du Centre, ainsi que quelques autres langues indo-aryennes, iraniennes et dravidiennes avoisinantes

TeluGu

malayalamTamil

Page 3: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

d’IndE En EuropE

roms | hisToire

1.0

COnsEIL DE L´EuROPE

ProjeT éDuCaTion Des enfanTs roms en euroPe

oriGine Des roms – léGenDes moDernes

Une rapide recherche sur Internet débouche sur les résultats suivants : « Les Sintés, les Roms et les groupes apparentés » sont venus à l’origine de « la zone indienne » et ont été « enle-vés » par les Arabes aux IXe et Xe siècles, avant d’être emmenés comme « captifs » au XIe siècle « par les Musulmans » dans leurs campagnes (on parle « d’environ 500 000 Tsiganes ») ou d’immigrer — « en plus petits groupes » — aux XIVe et XVe siè-cles « via l’Afrique du Nord et les Balkans vers l’Europe » où ils avaient également été « importés comme esclaves » 200 ans plus tôt, etc.

Plutôt que sur les « faits » qu’elles prétendent décri-re, les théories ou les hypothèses sur l’origine des Roms nous renseignent surtout sur les motifs qui les ont fait naître. On peut cependant noter que les Roms eux-mêmes n’ont pas de mythes ou de légendes sur les premières origines de leur peu-ple. Leur tradition est jusqu’à présent largement orale et la plupart des Roms considèrent la question de leur origine loin-taine comme mineure et politique en raison des divers proces-sus d’émancipation entamés seulement récemment.

le romani: une lanGue inDo-aryenne moDerne

Les mots indo-aryens originaux en romani ont une gran-de puissance morphosyntaxique : ils permettent de créer, à l’aide d’un certain nombre de suffixes spécifiques, plu-sieurs mots supplémentaires sur la base d’un mot source:

En dehors de ces constructions, une bonne partie de la gram-maire romani est indo-aryenne ; le romani d’aujourd’hui est donc considéré comme une langue indo-aryenne moderne.

français large, grand; puissant; aînétaille, distinction, fiertéprétention, agrandirse pomponner, s’habiller de manière ostentatoireélever des enfants se vantergrandirofficier (littéralement «le plus grand»)

romanibar-o bar-ipenbar-ikanipen bar-ikanarel pes bar-arel bar-arel avri bar-arel pes bar-uvel (barol) bar-eder

2 3

cheurs ont identifié les « luri » (appe-lés « zott » ou « jatt » dans les sources arabes) comme des roms et, par consé-quent, supposé qu’ils avaient déjà quitté l’inde au Ve siècle. ils expliquent égale-ment l’absence de mots arabes dans le lexique rom comme suit. au cours du Viie siècle, la Perse est passée sous le joug des arabes ; or, le romani inclut des mots perses mais pas de mots arabes ; on peut donc en conclure que les roms ont quitté la Perse avant la conquête arabe. la légende sur les luri pourrait donc bien porter sur les roms qui avaient déjà quitté la Perse au Ve siècle et l’inde encore plus tôt dans le cadre de leur pé-régrination vers l’ouest.

Ces conclusions, toutefois, ne sont pas forcément convaincantes. Pre-mièrement, il existe plusieurs versions de la légende des luri, lesquelles divergent sur des points essentiels et ont été consi-gnées plus de 500 ans après les faits allé-gués. la fiabilité de ces sources peut être évaluée en examinant les « légendes » relatives à l’origine des roms, telles qu’elles circulent aujourd’hui. Ce serait en vain que l’on chercherait à déduire de ces récits des faits historiques autres

que l’arrivée — il y a longtemps — d’un peuple alors inconnu en europe. [ill. 5]

De même, le deuxième argument, à savoir l’absence de mots arabes en ro-mani, n’est pas décisif. les arabes ne formaient qu’une très petite caste ré-gnante ; la langue parlée dans le pays, notamment parmi les personnes ne pos-sédant pas une très bonne éducation et les gens les moins influents, est toujours restée le persan, même sous le règne ara-be. les roms pourraient tout aussi bien avoir vécu en Perse sous ce règne sans pour autant adopter de mots arabes dans leur langue. [ill. 6]

il ne fait toutefois aucun doute que, dès l’époque allant du iiie au Ve

siècle, des groupes mobiles exerçant des métiers relevant du secteur des ser-vices sont partis d’inde en direction de l’ouest. les roms en faisaient partie ou pas, selon les hypothèses. Par con-séquent, la plupart des scientifiques supposent aujourd’hui que les roms ont quitté l’inde progressivement sur une longue période comprise entre le iiie et le Xe siècle (probablement entre le Viiie et le Xe).

la mIgratIon vErs ByzancE ou quand la lInguIstIquE tIEnt lIEu dE géographIE

selon les linguistes, le lexique du roma-ni se répartit entre deux corps de mots : l’un ancien d’origine pré-européenne et l’autre, plus récent, d’origine européen-ne. le lexique pré-européen comprend les mots indo-aryens, perses, armé-niens et grecs du romani et il est plus ou moins commun à tous les locuteurs de cette langue. le lexique européen s’est formé uniquement dans le cadre de la migration de groupes individuels vers l’europe pour devenir ce qu’il est aujourd’hui et a donc évolué de manière différente selon les groupes concernés. en revanche, le lexique primitif illustre l’histoire pré-européenne des roms et leurs pérégrinations d’abord de l’inde à l’Asie mineure byzantine ― via la Perse et l’Arménie ―, puis jusqu’à la partie grecque de l’empire byzantin. on peut raisonnablement tenter de re-tracer le parcours des roms sur la base des emprunts étrangers du romani. [iii.1, 9]

ill. 5ill. 4

Page 4: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

D

Doms, Luri, Roms: cousins mais pas frèresLes Roms dans l’empire byzantin

le fait que le romani contienne davantage de mots empruntés au persan qu’à l’arménien ne signifie pas néces-sairement que les roms ont vécu plus longtemps en Perse qu’en arménie. il est possible que leurs contacts avec la popu-lation majoritaire aient revêtu — ne se-rait-ce que pour des raisons économiques par exemple — un caractère plus intensif en Perse qu’en arménie. en fait, les lin-guistes supposent aujourd’hui qu’outre la durée de leur séjour, ce sont surtout leurs moyens de contact avec les diffé-rents groupes de la population qui aurai-ent façonné leur relation linguistique. il se pourrait même que les portions non indo-aryennes du lexique romani hérité reflètent diverses influences subies par les roms dans une seule et même région et ne soient donc pas représentatives de leur migration. récemment, le lingui-

ste yaron matras a mentionné dans ce contexte le sud de l’anatolie : dans la région d’antioche, les roms auraient pu entrer en contact avec des locuteurs de toutes les langues ayant influencé le romani en asie.

doms, lurI, roms: cousIns maIs pas frèrEs

une foule de groupes de population en-tretenant des contacts étroits avec l’inde ont vécu — et vivent toujours — au moyen-orient dans ce qui est de nos jours l’est de la Turquie, l’iraq, l’iran et l’afghanistan. ils ont tous tendance — comme une partie des roms contem-porains et la plupart des roms de l’ancien temps — à exercer une profession ou un travail ambulant dans le secteur des ser-

vices, notamment dans le traitement des métaux et le spectacle. ils sont exclus de la population majoritaire et leur contact avec celle-ci se résume généralement aux relations économiques. Certains de ces groupes parlent (encore) des langues indo-aryennes : les Doms, Karači ou Kurbati du moyen-orient (syrie, Pale-stine, jordanie et, jadis également, iraq, iran et azerbaïdjan) parlent le domari ; les Paryas du Tadjikistan utilisent une variété de radjashatni ; les inkus et les jats d’afghanistan utilisent une langue indo-aryenne du centre, tout comme les Domas de la vallée de hunza (nord du Pakistan).

D’autres groupes de population, du Caucase au soudan, connaissent des langues secrètes dont le lexique est tota-lement ou partiellement d’origine indo-aryenne ; c’est notamment le cas des

Le linguiste Yaron Matras croit à un lien entre les Roms et des castes de nomades commerciaux nommés les « Doms » et résidant en Inde même:

« L’hypothèse des Doms nous permet d’attribuer des profils socio-eth-niques — partagés par des groupes comme les Roms, Loms, Doms, Luti ou Kurbati d’une part et les Doms d’Inde d’autre part — à des traditions anciennes, au lieu de relever entre eux des similitudes dues au hasard ou des caractéristiques acquises par les groupes respectifs séparément en différents endroits et à différentes époques. Elle permet aussi d’expliquer les ethnonymes dérivés de noms de caste (et dont une partie, comme řom, dom, lom sont partagés) et les termes com-muns à plusieurs groupes désignant les étrangers ; elle offre en outre l’avantage d’expliquer les migrations vers l’Ouest assez facilement par

des initiatives successives émanant de groupes individuels désireux de rechercher des possibilités d’emploi dans des métiers spéciaux. […]

L’essentiel de l’attrait de l’hypothèse des Doms réside toute-fois précisément dans le fait qu’elle permet d’expliquer des similitu-des dans l’organisation sociale et l’identité l’ethnique tout en tenant compte de la diversité linguistique : l’origine de caste n’a nul besoin de coïncider avec l’origine géographique ou linguistique, en dehors du fait que tous les groupes concernés viennent de l’Inde et parlent des langues indo-aryennes. Ainsi, les ancêtres des Roms, Doms, Loms et autres groupes pourraient sans problème constituer une population géographiquement dispersée et linguistiquement diverse tout en par-tageant une même identité socio-ethnique. »

ill. 7 (extrait de matras, 2002, p. 16)

ill. 6

l’emPire romain D’orienT (byzanTin) eT les emPires sassaniDes Vers 550.

l’empire romain d’orient au moment de l’accession de justinien au trône en 527: a reconquête par justinien: b

empire sassanide: C Vassaux de l’empire sassanide: D

breTons

anGles

souabes

basques

WisiGoThs

franCs

saXons

juTes

osTroGoThs

VanDales

slaVes

lanGobarDs

l’emPire romain D’orienT

aVars

bulGares

sassaniDenreiCh

laChmiDes

hePhTaliTes

4 5

a

b CD

a

ab

b

Page 5: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

d’IndE En EuropE

roms | hisToire

1.0

CouChes Du leXique romani Pré-euroPéen

inDo-aryen

iranien

arménien

GreC

Mots provenant du lexique pré-euro-péen et communs à toutes les vari-antes du romani.

COnsEIL DE L´EuROPE

ProjeT éDuCaTion Des enfanTs roms en euroPe

Karači et des Luti en Iran, des Nawars en égypte, des bahlawans au soudan et des bošas ou loms en arménie (lesquels parlent une langue appelée lomavren).

Par ailleurs, en inde même, des groupes de nomades de diverses régions sont spécialisés dans certains services et exercent par exemple le métier de forge-ron, de vannier, de démolisseur, de mu-sicien et de danseur. au sein du système des castes, ces nomades sont appelés « Doms » : un terme lié à l’autonyme « Dom » au Moyen-Orient, « Doma » au Pakistan, « lom » en arménie et « Řom » (« Rom ») en Europe. Nombre de ces nomades mènent cette vie pour des raisons économiques et, résidant en inde ou ailleurs, emploient des mots si-milaires pour désigner les gens ne fai-sant pas partie de leur groupe : « gadžo » (« non-Rom ») en romani, « kažža » en

domari, « kača » en lomavren, « kājwā » en dom indien, « kājarō » en kanjari, « kajjā » en sasi et « kājā » en nati. Ce mot revêt en outre souvent — notam-ment en romani — la signification de « sédentaire » ou de « fermier » : une acception qui prouve que cette populati-on s’identifiait dès le début comme non sédentaire.

les similitudes frappantes de ces groupes de population indiens ou anciennement indiens, sous l’angle so-cial et linguistique, ont incité certains chercheurs à supposer l’existence d’une souche commune. en fait, malgré toutes les similitudes linguistiques, les travaux récents penchent plutôt vers la thèse de langues source diverses et, certainement, de différentes périodes de migration pour les roms, les Doms et les loms. quel que soit l’argument retenu, il n’en de-

meure pas moins qu’il existe au moyen-orient des groupes de population dont les racines sociales et ethniques remontent probablement à une caste spécifique : les « Doms ». Une caste ne se définit ni en fonction de critères linguistiques, ni en fonction de critères ethniques plus stricts ; même si cette caste a réuni — à une certaine époque — les roms et tous les autres groupes ethniques mentionnés ci-dessus (ce qui est bien possible), ce fait ne présuppose pas nécessairement une origine génétique ou linguistico-gé-nétique commune. [ill. 7]

lEs roms dansl’EmpIrE ByzantIn

les plus gros emprunts du lexique commun (celui partagé par toutes les variantes du romani) concernent,

TraCes Du séjour Des roms à byzanCe releVées Dans la lanGue romani

Le séjour des Roms à Byzance se reflète dans leur langue. Toutes les variantes du ro-mani contiennent un grand nombre de mots empruntés au grec.

eXemPles De moTs D’oriGine GreCque

Sous l’empire byzantin, les Roms entraient aussi en contact avec d’autres groupes ethniques. Des mots empruntés à d’autres langues — notamment l’arménien — péné-traient le romani en territoire byzantin. La minorité arménienne de Byzance était très importante. Les spécialistes expliquent notamment que le mot alani verdan (charret-te) a été importé en romani. L’Alanie (l’Ossétie d’aujourd’hui) était un royaume as-sez petit du Nord-Caucase. Les Roms ne sont probablement jamais arrivés jusque-là pendant leur séjour au Moyen-Orient. Des Alani, de même que des membres d’autres groupes ethniques, avaient été recrutés dans les armées byzantines et leur mot verdan aurait facilement pu entrer dans la langue romani soit directement, soit par le biais d’une autre langue parlée à Byzance.

jekh, duj, trindaj, dejbokh, bokthud, thut, thundvast, vas, va

un, deux, troismèrefaimlaitmain

ambrol, brol baxt, bax, bastphurtangušto, anguš

poirechancepontdoigt

dudumčekat, čikat grast, gra, graj

citrouille l’avantcheval

efta, oxto, enjapapin, papniora zumi, zumin

sept, huit, neuf oie, canardheurepotage

amoni, amoji, lamoni, amunidrom, drumoforos, forokarfin, krafin, karfi, krafniangalin, angali, jangali, ganicipa, cipo, cepaxolin, xoli, xoj, holikurko, kurkesviri, sivri, svirind, sfiriskamin, skami, štamin

enclumerouteville, villeongleétreintepeaucolère, grief, passiondimanchemarteauchaise, banc

romani français

4 5

ill. 8 ill. 9

Page 6: DE L´EuROPE 1.0 En EuropE D’Inde en Europe

Le pèlerin Arnold von Harf a noté en 1497:

« Nous sommes partis pour les faubourgs. De nombreuses personnes pauvres, noires et nues y vivent. Leurs habitations consistent en petites maisons au toit couvert de roseaux ; une centaine de familles en tout habitent dans ces logis. Les gens les appellent Tsiganes [sujginer] et ils sont connus dans notre pays comme des païens d’égypte [heiden] voyageant sur nos terres. Ils exercent de nombreux métiers tels que la cordonnerie, le vrillage et la maréchalerie.

Il est très étrange de voir une enclume posée à même le sol. Un maréchal-ferrant est assis devant comme un tailleur serait as-sis devant son établi dans notre pays. Près de lui, également assise par terre, se trouvait son épouse en train de filer ; elle lui fait face, de sorte que le feu les sépare. Deux paires de soufflets en cuir, à moitié enterrés dans le sol par l’effet du feu, reposent à proximité. De temps en temps, la fileuse ramasse une paire de soufflets sur le sol et l’active. Un jet d’air se déplace alors le long du sol jusqu’au feu, ce qui permet au maréchal-ferrant de travailler.

Les AthinganiLes Roms sur le Péloponnèse

dans l’ordre, l’hindi et le grec. mi-eux encore : le romani a adopté des parties essentielles, complètement nouvelles, de sa grammaire au grec [iii. 8, 9].

on suppose que les roms ont passé une période plus longue ― et en tout cas plus formatrice ― dans l’empire byzantin. au Xe siècle, cet empire s’étendait de l’arménie et du Caucase à l’est, à la Grèce à l’ouest, en passant par toute l’asie mineure. mais jusqu’au Xiie siècle, époque où l’on peut sans grand risque de se tromper supposer la présence de roms dans le Péloponnèse, nous manquons de documents explicites d’origine byzantine. la premier preuve incontestable de la présence de roms à byzance remonte aux années 1280 et fi-gure dans une lettre mentionnant la coll-ecte des impôts auprès d’« égyptiens ». [iii, 10]

lEs athInganI

Par ailleurs, il existait dans l’empire by-zantin des groupes de population assi-milés aux Roms par les scientifiques. Tout d’abord, les athinganois ou athingani, les aigupti et les mando-Polini, les Ka-tsibeli et les lori. Comme cela est le cas avec les groupes du moyen-orient, des parallèles sociaux ont été tracés entre ces groupes de population et les roms, sur la base du système indien des castes. les termes « athingani » et « aiguptos » ont été forgés plus tard — comme on le sup-pose le plus souvent — dans le cadre du mot communément utilisé par les autres peuples pour désigner les roms : selon certains chercheurs, en effet, cet exo-nyme dans les langues slaves (« Cikán » en tchèque, « Cigán » en slovaque, etc.) — ainsi que le mot allemand « zigeu-

ner », le mot italien « zingaro » ou le mot français « Tsigane » — dérive d’« athin-gani » ; le terme « aiguptos », quant à lui, est supposé avoir servi de base au mot anglais « Gypsy », au mot espagnol « Gitano » et au mot français « Gitan ».

le mot grec « athingani » signi-fie « gens qui ne veulent pas que d’autres les touchent, qui sont intouchables ». la regrettée milena hübschmannová — une indologiste praguoise spécialiste des roms — a suggéré que l’origine du mot « athingani » pourrait se trouver dans les préceptes de propreté, dans la mesure où ils sont courants en inde et respectés dans certains groupes roms ; de sorte que les athingani, comme certains groupes roms d’aujourd’hui, ont pris leurs distances avec le reste de la population à certains égards ou, tout du moins, ont été identi-fiés comme différents. Mais ces conclusi-ons ne sont pas généralement acceptées.

ColleCTe Des imPôTs

La correspondance suivante est importante à deux titres pour l’histoire des Roms à Byzance. Premièrement, elle constitue la première preuve claire de la présence de Roms dans l’empire byzantin, dans la mesure où les deux textes utilisent le nom grec de ce groupe ethnique contemporain. Deuxièmement, il s’agit de la plus ancienne mention de l’imposition des « Egyptani et Athin-gani » : une pratique qui, à l’époque, devait déjà être devenue courante ; de sorte que l’on peut conclure que les Roms étaient intégrés à la société byzantine dès cette époque (c’est-à-dire la fin du XIIIe siècle).

Une lettre du patriarche de Constantinople Grégoire II de Chypre (1283-1289) au Megas Logothètes Théodore Muzalon, un officier impérial de haut rang (lettre 117, publiée pendant les Eustratiades), concernait sa médiation dans une requête émanant d’un certain Monembasan :« […] Un certain Monembasan — qui se prépare à collecter les impôts auprès des soi-disant Egyptani et Athingani, m’a imploré en ces termes : ‘Dites un mot pour moi, mon Seigneur, d’une

manière ou d’une autre et amenez rapidement le cœur impérial à considérer mon existence détruite et à m’accorder la faveur du pardon dans sa grande bonté et à me débarrasser des angoisses, de manière à ce que je ne m’expose plus en danger alors que j’ai déjà enduré des épreuves allant bien au-delà de ce que la justice peut tolérer […]’ »

Le patriarche demande au Megas Logothètes d’accorder une au-dience au requérant et de l’aider. L’intéressé lui répond en ces termes (lettre 118, publiée pendant les Eustratiades) :« […] Concernant cette requête adressée au très miséricordieux Empereur concernant le collecteur des impôts ayant souffert d’une injustice : Si une injustice est commise à l’encontre d’un collecteur d’impôts et si on lui dérobe ce qu’il a déjà collecté, la personne qui conserve la plus grande partie de la somme collectée n’est pas toujours l’auteur d’une injustice et il vaut mieux, parfois, qu’une personne lui fasse du tort, de manière à ce qu’il ne puisse pas lui-même perpétrer une injustice […] ».

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ProjeT éDuCaTion Des enfanTs roms en euroPe

Par exemple, yaron matras fait dériver « Cigán », etc. du haut-turc « Cighan » (pauvre) et souligne à juste titre la fai-blesse des sources corroborant les hy-pothèses relatives aux « athingani ». en fait, nous ignorons qui étaient réellement les athingani, lesquels sont mentionnés, dans des textes religieux, pour la pre-mière fois vers l’an 800. lesdits textes évoquent des gens qui prédisent l’avenir, organisent des cérémonies et tentent d’influencer les tiers avec leur enseigne-ment « répréhensible » (c’est-à-dire non chrétien). une source du mont athos, da-tant de 1068, mentionne les « adsincani » (la version géorgienne du nom) comme des « magiciens et des charlatans » ; au Xiie siècle et au début du XiVe siècle, des textes d’inspiration religieuse met-tent en garde contre les diseurs de bon-ne aventure athingani. au Xiiie siècle, les athingani sont pour la première fois

assimilés aux « egyptani » dans une correspondance à caractère fiscal dans la ville de monemvasia (l’ancienne malvasia) dans le Péloponnèse ; ce ter-me est toujours utilisé en Grèce comme exonyme désignant les roms. [ill.10]

les exonymes, à savoir les termes utilisés par d’autres peuples que les roms pour désigner ces derniers, ne sauraient servir à formuler directement des hypothèses sur les peuples qu’ils décrivent. Dans le cas des athingani, il semble au moins plausible que le terme désignait les roms et peut-être aussi d’autres groupes. si nous acceptons ce postulat, les roms auraient pu vivre dans l’empire byzantin dès le Xiiie ou le Xe siècle. la seule chose dont nous soyons certains, toutefois, c’est qu’à compter du Xiiie siècle des roms vivaient sur la côte occidentale de ce qui est aujourd’hui le Péloponnèse grec.

lEs roms sur lE péloponnèsE

nous sommes redevables de beaucoup d’indications à des voyageurs italiens et allemands, lesquels ont fait une halte dans la cité de methoni (modon), Pélo-ponnèse, pendant leur pèlerinage en Ter-re sainte. methoni était située à mi-che-min entre Venise et jaffa et constituait un mouillage apprécié des marins en raison de son port naturel et sûr. [ill. 11] en 1381, le vénitien leonar-do di niccolo frescobaldi écrit avoir vu plusieurs « romnites » à l’extérieur des villes de la cité de methoni. Cent ans plus tard, bernhard von breydenbach, le doyen de la cathédrale de mainz, pen-dant son voyage de retour d’un pèleri-nage en Palestine, écrit que 300 huttes sont bâties autour de la cité et abritent des « égyptiens noirs et laids ». il ajou-

ill. 11

Un peintre d’Utrecht, Erhard Reuwich, a accompagné Bernhard von Breydenbach pendant son pèlerinage en Palestine en 1483-1484. Il a réalisé des dessins de plusieurs villes dont Methoni et les a imprimés — sous forme de gravures sur bois — pour la première fois en 1486.(1486, modoni, par erhard reuwich, graveur ; extrait du livre de bernhard von breydenbach « Peregrinatio in Terram sanctam » publié en 1486 et numérisé par la bibli-

othèque universitaire nationale juive de l’université hébraïque de jérusalem)

Ces gens viennent d’une ville nommée Gyppe et située à quelque 65 kilomètres de Methoni. Les Turcs l’ont occupée il y a 60 ans, mais nombre des nobles et des notables ont refusé de se soumettre et sont venus se réfugier chez nous, à Rome, auprès du Saint-Père, à la recherche d’un havre de sécurité et d’un réconfort. À leur demande, le pape a envoyé des lettres à l’empereur de Rome et à tous les princes de l’empire en leur recommandant de garantir la liberté de mouvement et le soutien de ces gens, dans la mesure où ils ont été expulsés de leur terre à cause de leur foi chrétienne.

Toutefois, pas un seul des princes sollicités n’est intervenu. De sor-te qu’ils sont morts dans la pauvreté en léguant les lettres papales à leurs domestiques et à leurs descendants, lesquels errent encore dans le pays et s’appellent eux-mêmes Petits égyptiens. Naturelle-ment, cette appellation ne repose sur aucune vérité géographique, leurs parents étant nés dans la région de Gyppe, appelée Tzinga-nia, laquelle s’étend à mi-chemin de la route reliant Cologne sur le Rhin à l’égypte. » ill. 12 (extrait de Gilsenbach 1994, p. 114)

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Bibliographie

Fraser, Angus (1992) The Gypsies. Oxford / Cambridge: Blackwell | Gilsenbach, Reimar (1994) Weltchronik der Zigeuner, Teil 1. Frankfurt am Main: Peter Lang | Hübschmannová, Milena (1972) What can Sociology suggest about the Origin of Roms. In: Archiv orientální 40/1, pp. 51-64 | Kenrick, Donald (2004) Gypsies: from the Ganges to the Thames. Hatfield: University of Hertfordshire Press | Kenrick, Donald / Taylor, Gillian (1998) Historical Dictionary of the Gypsies (Romanies). Lanham: The Scarecrow Press | Matras, Yaron (2002) Romani. A Linguistic Introduction. Cambridge: Cambridge University Press

ConClusion

Depuis la première apparition des roms en europe, la question de leur origine a été posée à maintes reprises et a parfois provoqué des réponses stupéfiantes. Les scientifiques modernes n’arrivent absolument pas à se mettre d’accord. mais le fait que, jusqu’à présent, nous ne disposons d’aucune source claire sur l’histoire pré-européenne des roms nous encourage à continuer à formuler des suppositions et des

hypothèses. les maigres faits connus favorisent l’influence des prédilections, des motivations et des objectifs des chercheurs sur leurs travaux. Par exemple, les ancêtres indiens des roms étaient des guerriers ou des lettrés, des brahmans ou des Pariahs selon les historiens contemporains. D’aucuns avancent que « les roms » n’ont jamais existé, qu’ils sont une pure construction des non-Roms ; certains affirment que les Roms ont quitté l’Inde à la fin du Xiie siècle et aussi qu’ils ont fait la

même chose au iiie siècle. aucune de ces hypothèses n’est « vérifiée », de sorte que leur valeur ne peut être au mieux que plus ou moins probante. Pourtant, même si la reconstitution scientifique de l’histoire pré-européenne des roms n’a débouché que sur de rares résultats réfutables, elle a généré des discussions scientifiques sur la force probante des différentes hypothèses possibles. la linguistique et l’anthropologie culturelle ont joué le rôle principal dans cette évolution.

te que les « saracènes » en allemagne — un groupe qui aurait prétendu être originaire d’égypte — viennent en fait de « Gyppe » près de methoni et sont des espions et des traîtres (le terme « saracènes » désignait indifféremment les Turcs et les arabes en europe). en 1491, un certain Dietrich von schach-ten signale la présence de nombreuses huttes misérables à l’extérieur des murs de la cité de methoni, sur une colline ; ces huttes abritent des « zigeuner » (« Tsiganes ») selon le terme dont on

les affuble en allemagne. D’après von schachten, nombre d’entre eux sont des forgerons accomplis.

le voyageur arnold von harf mentionne, lui aussi, dans ses notes rédigées en 1497, les « sujginer » (« Tsiganes ») de methoni. D’après lui, ces personnes s’appellent entre elles « Petits égyptiens » ; toutefois, elles ne viennent pas d’égypte, mais d’une région proche de « Gyppe », appelée « Tzingania », à environ 65 kilomètres de methoni. les intéressés auraient fui

vers 1440 devant la conquête turque. Cependant, les preuves relatives aux roms de cette époque ne proviennent pas toutes des pèlerins. on trouve aus-si, dans les poèmes du folklore byzan-tin du Xiiie siècle, des allusions qui se réfèrent très probablement aux roms. l’une de ces œuvres mentionne les « égyptiens » du Péloponnèse d’une manière si naturelle que l’on peut légi-timement supposer que ces personnes étaient bien connues dans l’empire by-zantin. [ills.12, 13]

séjour Des mazaris à haDes

Dans une œuvre rédigée sous forme de lettre fictive datée du 21 août 1415 et adressée à Holobol aux enfers, Mazaris décrit les conditions de vie sur la péninsule: « Sur le Péloponnèse, comme tu ne l’ignores pas toi-même, oh mon ami, vivent toute une série de nations ; il n’est ni simple, ni trop nécessaire de tracer les frontières les séparant, mais on peut facilement distinguer leurs langues respectives à l’oreille. Voici

les plus importantes : Lakedaimons, Italiens, Péloponnésiens, Slaves, Illyriens, égyptiens et Juifs (et parmi eux on compte plus d’un sang-mêlé). »

Sur la base de la mention par Mazaris des « Roms » comme l’une des principales nations du Péloponnèse à l’époque et de gens parlant leur propre langue en public, nous pouvons supposer qu’ils étaient nombreux sur la péninsule.ill. 13

http://romani.uni-graz.at/romani

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