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\ , REPUBLIOUE FRANCAISE Ministère de la Coopération DETERMINATION DES CAUSES DES, ANOMALIES DE lA CRUE DU', NIGER ' RAPPORT INTERIMAIRE DE LA SECONDE PHASE D'ETUDE ( 1977 - ,1979 ) , ,,', OFFIU BE LA REtHÈRtHE StlE.NTlFIOllE, ET ntHNIOllE OUTRE· MER . , ;" ' Service· Hydrologique ';

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REPUBLIOUE FRANCAISE

Ministère de la Coopération

DETERMINATION DES CAUSESDES, ANOMALIES DE lA CRUE DU', NIGER '

RAPPORT INTERIMAIREDE LA SECONDE PHASE D'ETUDE

( 1977 - ,1979 )

, ,,', OFFIU BE LA REtHÈRtHE StlE.NTlFIOllE, ET ntHNIOllE OUTRE· MER ., ;" ' Service· Hydrologique ';

REPUBLIQUE FRANCAISE

MINISTERE DE LA COOPERATION

DETERMINATION DES CAUSES

OFFICE DE LA RECHERCHE SCIEtHIFIQUE

ET TECHIHQUE OUTRE-11ER

Service Hydrologique

DES ANOMALIES DE LA CRUE DU NIGER

Rapport intérimairede la seconde phase d'étude

(1977-1979)

par J.C. KLEINMaItre de recherches principal de l'ORSTOM

Paris, avril 1979

2.2.

SOI-1I1AIRE

Pages

INTRODUCTION............................................. 1

1 - DEROULE~1ENT DES TRAVAUX EN 1977-78 ••••••••••••••••••••••• 4

II - PRINCIPAUX RESULTATS HyDROMETRIQUES...................... 8

2.1. - Rappel sommaire des résultats antérieurs etcontraintes de l'étude•••••••••••••••••••••••••••• 8

L'hypothèse de l'activation du réseau défluentà l'est de DIRE n'est pas confirmée ••••••••••••••• 9

2.3. - Les anomalies ne sont pas localisées à laCuvette de DIRE••••••••••••••••••••••••••••••••••• 13

2.4. - L'étalonnage des stations est d'une stabilitérelative. Le détarage est net certaines années •••• 21

2.5. - La propagation de la crue n'est pas très, 1·'regu 1ere .•••••••••••••••••••••••••.••.•.••..•.•.. 29

2.6. - Un examen approfondi des hauteurs d'eau révèlequelques variations inexpliquées du plan d'eau •••• 30

III - ETUDE MORPHOLOGIQUE AU NIVEAU DU LAC DEBO •••••••••••••••• 38

3.1. - Evolution morphologique du lac DEBO et de sesémissaires •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 38

3.2. - L'évolution des bourgoutières dans les lacsDEBO et OUALLADO •••••••••••••••••••••••••••••••••• 42

3.3. - Conclusion ••••••••••••••••• : •••••• ~~ •••••••••••••• 45

IV - HYPOTHESE DE MOUVEMENTS DU SOCLE ET D'UNE TECTONIQUE

ACTUELLE ••••• ~~~ ••••••••••••••••••••••••••••••••••••• •••• 48

4.1. - Interférence des facteurs climatiques ettectoniques ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 49

4.2. - Indices de terrain à l'appui d'une tectoniqueactuelle •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 52

Pages

4.,. - Anomalies de nivellement possibles ••••••••••••••••••••• 64

4.4. - Photo-interprétation et esquisse d'un schéma struc-tural à partir de l'imagerie de satellite •••••••••••••• 67

4.5. - Conclusions ••••.•.••.••••••••.••••••••••••••••••.•••••• 75

v - ORIENTATION DE L'ETUDE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• 76

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".. ~

Une première étude de deux ans (1975-1977) confiée à l'OR5TOM,

à la demande de la Commission du Fleuve NIGER, par le Ministère de

la Coopération, avait pour but de déterminer les causes des anomalies

de la crue du NIGER.

Le rapport de s~nthèse de novembre 1977 a rendu compte des

opérations de terrain effectuées pour accroItre l'information sur le

régime de l'écoulement, a interprêté les données hydrologiques et mis

en relief l'évolution du régime du NIGER, a fourni une première interpré­

tation de l'imagerie LAND5AT dans le Delta Central en aval du lac DEBO

pour décrire le processus de mise en eau et de vidange au cours du

cycle annuel et déceler d'éventuelles modifications susceptibles d'expli­

quer tout ou partie des anomalies.

Les conclusions de cette première étude étaient les suivantes

- les modifications du régime hydrologique sont hors de doute et

leur ampleur a pu être quantifiée avec une relative précision ;

- les modifications de structure du réseau hydrographique dans

le Delta Central sont pratiquement inexistantes et ne suffisent pas en

tout cas à expliquer les anomalies

- l'analyse hydraulique détaillée, menée à partir des éléments

dont on disposait, a conduit à l'hypothèse d'une activation du réseau

défluent contournant la station de DIRE.

L'étude des causes des anomalies restant cependant peu concluante

à l'issue de ces deux années, une nouvelle étude de deux ans (1977-1979)

a confié à l'OR5TOM les études et travaux suivants:

- poursuite des études hydrologiques dans le Delta Central sur les

anomalies des crues du NIGER et l'évolution du régime du fleuve;

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1

1

1

1

1

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1

1

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- recherches des facteurs agro-géomorphologiques ayant provoqué

l'activation du réseau défluent, tenu pour responsable des anomalies.

L'objectif visé est de surveiller l'évolution du régime du

NIGER pour évaluer la distorsion grandissante qu'elle introduit dans

l'homogénéisation des données hydrologiques et prévoir si possible son

accentuation, ou son ralentissement, ou sa stabilisation.

Le présent rapport intérimairé rend compte des résultats obtenus

à l'issue de la première année d'études, et de l'orientation des travaux

actuels. Il est rédigé en fait tardivement, alors que certaines des

mesures (jaugeag~s) de la seconde année de terrain sont déjà en notre

possession, mesures sans lesquelles il n'était guère possible d'avancer

et d'orienter sérieusement les investigations puisque, comme va l'exposer

brièvement ce rapport, les conclusions précédentes (localisation des

anomalies à la région de DIRE) n'ont pu être confirmées et qu'il sera

nécessaire de revenir sur certaines des hypothèses (stabilité des

étalonnages) qui sous-tendaient l'analyse des écoulements.

Parallèlement les investigations morphologiques, si elles ont

permis d'écarter certaines des hypothèses au niveau du lac DEBO, n'ont

pu encore aborder qu'incomplètement les questions posées par l'évolution

du fleuve plus en aval.

Enfin malgré la bonne collaboration engagée avec l'IGN pour

le contrôle s)stématique du rattachement des échelles au nivellement

général, il n'a pas été possible de lever toutes les incertitudes qui

pesaient sur l'altitude de zéros d'échelles, ce qui risque de compliquer

l'interprétation et ne permet pas d'orienter nettement la recherche des

causes des anomalies. En effet la question pendante importante apparatt

actuellement être la suivante : y a-t-il ou n'y a-t-il pas modifications

altimétriques dans le nivellement au cours des deux dernières décen­

nies et ne doit-on pas envisager une certaine instabilité tecto~ique

de la zone d'étude?

Il semble en tout cas au niveau de l'ensemble des investigations

qu'il faille prendre en considération dans l'évolution hydro-géomorpho­

logique actuelle du fleuve non seulement les facteurs de géodynamique

externe surtout mis en cause jusqu'ici, mais également les facteurs

- J -

géodynamiques internes, c'est-à-dire envisager l'éventualité d'une

tectonique actuelle affectant le NIGER et ses marges.

les phénomènes en cause seront de toute façon discrets, n'intro­

duisant guère, en un point donné, de modification suffisamment rapide

pour être directement perceptible sur le terrain, dans une r~gion où

la crue, les épandages fluvio-lacustres et les recouvrements éoliens

introduisent une certaine mobilité. C'est d'ailleurs probablement pour­

quoi ils ne se manifesteraient le plus souvent que de manière indirecte,

par exemple par le biais d'anomalies dans les Ecoulements d'un grand

bassin aux pentes très faibles.

Nous soulignerons enfin que l'absence, dans l'étude actuelle,

de crues fortes ou moyennes complique l'analyse des données puisque les

récentes années déficitaires influent réellement sur le régime du fleuve,

ne serait-ce que par les modifications apportées aux réserves souter­

raines, mais également parce que les faibles crues engendrées sont

malaisément comparables aux crues anciennes et qu'il est alors plus

difficile de juger d'une évolution dans les vitesses de propagation

et la forme de la crue. Il n'est pas Inutile cependant de rappeler que

les anomalies ne peuvent être réduites aux facteurs climatiques-puisque

leur apparition est antérieure à l'épisode sec et que ce sont les fortes

crues de 1967 et 1969 qui ont révélé la modification de régime à NIAMEY.

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- 4 -

1 - DEROULEMENT DES TRAVAUX EN 1977-78

L'ORSTOM, sans attendre la signature de la convention (intervenue

en avril 1978) a affecté à MOPTI, en août 1977, M. GERMAIN, agronome

chargé de réaliser l'étude des unités de production agricole traditionnelles

(cultures pluviales et de décrue, riziculture). Procédant par enquêtes

dans les régions de DIAMBAKOUROU et SINDEGUE, en bordure du fleuve, et

installé au sein d'une unité agricole structurée (village de DIAMBAKOUROU),

il remettra un rapport de type monographique permettant de connaltre les com­

portements techniques et leurs conséquences sur la productivité du milieu.

M. GERMAIN a également assuré le contrôle de quelques observations clima­

tologiques et participé en février 1978 à une reconnaissance du réseau

d'alimentation des lacs de rive droite, en compagnie de G. DUBEE, hydrologue

ORSTOM, et de O. DJIGANDE, chef de la brigade hydrologique de MOPTI.

La contribution géomorphologique proprement dite a été apportée

par le Professeur J. GALLAIS qui a effectué une première mission sur le

terrain en novembre 1977, consacrée à la vérification d'un certain nombre

d'hypothèses de départ, relevant des domaines morphologique, botanique ou

agricole, explicatives des anomalies. Cette mission et une photo-interpré­

tation afférente, a concerné le lac DEBO, ses émissaires, la bourgoutière

au sud du lac. Une seconde mission de basses-eaux, en juillet 1978, était

consacrée à la région plus en aval, de NIAfUNKE à GOURMA-RHAROUS. Elle a

malheureusement été totalement compromise par un très grave accident de

circulation. Du rapport remis par le Professeur GALLAIS qui sera repris dans

le rapport final, ori' e~t~aira plus loin les résultats orientant le diagnos­

tic des anomalies.

Le travail de terrain des hydrologues ORSTOM et des brigades hydrolo­

giques de MOPTI et TOMBOUCTOU s'est effectué sous la direction de

J.P. LAMAGAT.

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.,

- 5 -

P. CHEVALLIER, de mars à octobre 1977, est intervenu sur l'ensem­

ble du réseau assurant des tournées de jaugeages, de contrôle et de remise

en état des stations. J.P. THIEBAUX, en mission de novembre 1977 à début

février 1978 et basé à DIRE, s'est consacré aux jaugeages du fleuve (DIRE,

TONKA), de la station de GUNDAM, et du défluent de rive droite contour­

nant DIRE (BINGA-GANYA ou KAREY-BOSSO). P. LE GOULVEij en janvier et début

février 197~a réétalonné la station de TOSSAYE, mais par suite de la

crue 1977-78 exceptionnellement précoce, il n'a pu intervenir qu'en décrue.

G. DUBHE, affecté au MALI de fin février à d~but mars 197& a jaugé le

NIGER et le BANI en amont du lac DEBO. Il a procédé à des tournées de

reconnaissance et d'enquête en aval sur le réseau défluent, de remise en

état de stations et de contrôles de rattachement deséehelles. Il a

pu retrouver des données limnimétriques éparses concernant des stations

secondaires du réseau défluent de rive droite plus ou moins bien observées

entre 1959 et 1966, et notamment des observations faites à BOUGOUBERI,

complétant partiellement celles disponibles à partir de 1969.

J.C. KLEIN, de mi-avril à mi-mai 1978, a procédé à une reconnaissance

du fleuve et de la zone lacustre, effectuant en compagnie de O. DJlGANDE

et K. TRAORE, chefs des brigades hydrologiques de MOPTI et TOMBOUCTOU,

des jaugeages d'étiage aux principales stations,de TONDIFARMA à ANSONGO.

D'assez nombreuses observations de détail, hydrologiques, morphologiques ou

géologiques ont été faites, limitées toutefois par la brièveté de la

mission. Chaque fois que possible une enquête rapide a été menée auprès

des lecteurs d'échelle, concernant leurs observations et assortie d'un

contrôle du calage des éléments de l'échelle. La question d'éventuelles

manifestations sismiques leur a été posée, et a été posée également à

quelques riverains des lacs, en nombre malheureusement trop réduit.

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: !

• ~I ~ ...M. BERTHELOT et J.P. MOBECHE ont été affectés au MALI en août

et octobre 1978 respectivement, pour participer à l'étude. G. DUBEE a

effectué en novembre et décembre une seconde mission d'hydrométrie •.

Les mesures de terrain prévues ont pu être effectuées pour

l'essentiel. Il est à noter toutefois que par suite des contraintes

sévères d'accès, des incidents mécaniques répétés et des difficultés de

dépannage inhérentes au secteur d'étude, le nombre et la répartition des

11

l'

- 6 -

jaugeages à effectuer n'ont pu être tout-à-fait ceux prévus. C'est d'ailleurs

pour une part la précocité et la briéveté répétées de la crue qui n'ont

pas permis de mieux répartir jaugeages de crue et de décrue. Cela serait

sans conséquence si les mesures confirmaient simplement l'étalonnage

antérieur. Malheureusement il semble bien se manifester parfois une

certaine instabilité de l'étalonnage d'une année à la suivante. Il faudra

en tenir compte dans l'interprétation des résultats.

Au Bureau Central Hydrologique J.C. KLEIN s'est consacré à l'étude

à partir d'octobre 1977. Au vu des premiers résultats de terrain montrant

la faible probabilité d'une activation récente du réseau défluent contour­

nant DIRE, un réexamen critique de l'ensemb~e des données a été entrepris et

des comparaisons systématiques ont été faites entre les hauteurs d'eau des

diverses stations.

En collaboration avec C. ROCHETTE~hargé d'actualiser les données

hydrométriques pour la mise à jour de la monographie du fleuve, un travail

critique des rattachements d'échelle au nivellement général a été effectué,

et des contacts ont été pris avec l'IGN.

L'examen des clichés aériens disponibles a été doublé d'investi­

gationsbibliographiques.L'hypothèse d'un conditionnement tectonique de

certains bourrelets de berge a été examinée avec J. GALLAIS et avec

M. BIED-CHARRETON, géographe de l'ORSTOM apportant son expérience en télé­

détection.

A l'issue de l'enquête sur le terrain en mai 1978,diverses véri­

fications ont confirmé la possibilité d'une certaine sismicité de la zone,.', .., "

d'études, ce qui a renforce l'hypothese de mouvements du socle.

Le Bureau de Télédétection de l 'ORSTOM a appocté son concours

par un essai de traitement numérique du "noeud" du réseau du BARA-ISSA

(boucle de GARAOUNDOU) qui avait retenu l'attention dans le précédent

rapport. Par ailleurs quelques essais de traitement numérique avec sortie

i.

r1 t1 ~

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. '

- 7 -

sur imprimante ont été faits, dans l'attente de l'unité de traitementdu Bureau de Télédétection qui va permettre une étude détaillée de lazone. A cet effet pourront être notamment utilisés les récents clichésLAND5AT C dont l'acquisition a été demandée à la NA5A.

,1, 'j

- 8 -

II - PRINCIPAUX RESULTATS HYDROMETRIQUES

2.1 - Rappel sommaires des résultats antérieurs et contraintes de l'étude

Les anomalies dans le régime du fleuve tiennent essentiellement,

au départ, en des crues plus importantes à NIAMEY, à la fois intrinséque­

ment par déformation de l'hydrogramme (nette augmentation du débit de

pointe par rapport au volume de la crue), et par comparaison avec la

station amo~de DIRE, proche de la sortie du Delta Central (augmenta­

tion des volumes et débits de pointe à NIAMEY par rapport à ceux de

DIRE).

Le rapport de novembre 1977, auquel il est prié de se reporter,

a fourni une interprétation détaillée mettant en relief l'évolution du

régime du NIGER. L'analyse a montré que l'anorr~lie pouvait s'expliquer

par l'activation, dans la région de DIRE, du réseau défluent à l'est du

fleuve, la station de DIRE cessant de représenter fidèlement les débits

à la sortie de la cuvette lacustre.

Cela ne suffisait pas à expliquer l'augmentation de la pointe de

crue à TOSSAYE et surtout à NIAMEY (augmentation qui, dans le second cas,

pouvait résulter éventuellement d'aménagements récents des terres irrigables

en amont de NIAMEY), mais avait l'avantage de fournir une explication

simple, qu'on avait l'espoir de pouvoir contrôler assez facilement sur

le terrain (par enquêtes, et mesures des écoulements du défluent). L'échec

de cette explication amènerait à revoir ce qui dans l'analyse hydrologique,1

avait pu fausser les résultats, et à vérifier en particulier les éléments

hypothétiques introduits, tenant surtout à la préciaion des mesures

(lectures d'échelle ou jaugeages) ainsi qu~aux périodes de validité

des étalonnages.

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- 9 -

Nous n'exposerons pas dans ce rapport intérimaire le détail des

mesures et investigations effectuées, mais dégagerons avant tout celles qui

ouvrent une voie permettant de progresser dans l'interprétation. L'analyse

hydrologique d'ensemble s'annonce délicate, et on peut prévoir dès à présent

qu'elle ne pourra être complète qu'avec de nouvelles vérifications hydro­

métriques soignées (lectures d'échelle et jaugeages) en quelques points

sensibles du réseau.

Nous insistons sur deux faits de poids dans cette étude

- l'analyse, outre les comparaisons de cotes entre stations, repose

sur des différences de termes mesurés indirectement (volumes écoulés et

débits de pointe). Ces différences sont peu précises dès qu'il y a incer­

titude, même faible, sur les hauteurs d'eau ou sur la stabilité du tarage

des stations

l'interférence des anomalies avec les années sèches récentes

complique l'interprétation dans la mesure où les cycles annuels déficitaires

sont malaisément comparables aux crues nettement plus fortes observées

avant 1967.

2.2 - L'hypothèse de l'activation du réseau défluent à l'est de DIRE n'est

pas confirmée.

Les enquêtes auprès des riverains nient pas,.permis de conclure àune activation récente des écoulements dans le BINCA-GANYA qui quitte le

BARA-ISSA, en rive droite, à BOUGOUBERI, et revient au cours principal.1

(ISSA-BER)~ GABONCO"- Aval, sous le nom de KAREY-BOSSO. Après enquête de

C. DUBEE, menée avec le concours du Docteur DUBOIS, basé à DIRE, il semble

également que rien de notable dans la répartition des écoulements ne se soit

manifesté dans les branches et mares du réseau situé plus à l'est (région

de SARE-YAHOU) et greffé sur le BINCA-GANYA. Ces bras occidentaux, au

cours des récentes années déficitaires, sont sans communication avec les

lacs de rive droite et ont reçu assez peu d'eau de l'amont (bras du

HALANGOL). Ils paraissent fonctionner en cul-de-sac, au rythme de la crue,

avec un mouvement d'aller-retour de l'eau.

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j

- 10 -

Il a été signalé à l'entrée du BINCA-GANYA la présence de seuils

exondés aux basses-eaux, là où le bras restait en eau auparavant. Cette

modification, concomitanlte: des très basses-eaux des années récentes, est

attribuée par les villageois d'AOUAKO ou SALAKOYRA à l'envahissement du

lit par le sable. Un tel colmatage sableux du lit était loin d'être net en

avril 1978, où le lit s'assèchait à la hauteur de SALAKOYRA, situation habi­

tuelle. Un examen détaillé de l'entrée du BINCA-GANYA sera effectivement

utile aux plus basses-eaux, mais la modification signalée ne confirmerait

pas l'aggravation de la défluence.

En aval l'assèchement du BINGA-CANYA commence chaque année de part

et d'autre du village de MINESSENGUE, où se situe donc un seuil du lit,

stable à première vue. Au moment de la coupure un mouvement en retour vidan­

ge le cours amont du défluent, ainsi que la branche orientale du BOUDYOU

et les mares de BANKORE, BOUBOUTOUSSEMBOU et KANCARA. Cet écoulement inverse

en fin de décrue, assez bref et peu visible (faibles vitesses> à SALAKOYRA,

n'avait pas été signalé lors d'une première enquête. Il a été mesuré au

cours de la crue 1977-78. Il retient peu l'attention, mais l'enquête

ultérieure indique qu'il serait habituel de mémoire de villageois.

Dans l'ensemble le réseau à l'est de DIRE ne paraIt pas avoir

évolué nettement. Certains riverains semblent considérer qu'il y a plutôt

assèchement, ce qui concorde avec la faible hydraulicité de la période

récente.

On remarque par ailleurs que l'importance du débit s'échappant par

le BINGA-GANYA a été pressentie assez tôt pui~qu'une· échelle de crue a été

installée à SALAKOYRA, et à FONGO-MANAKOY plus en aval, en 1959, en même

temps que celle de BOUGOUOERI. Les observations, archivées à MOPTI, ont

été interrompues quéiques· années plus tard. Nous n'avons pas retrouvé les

débits qui ont pu être mesurés avant 1960.

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- 11 -

La campagne de mesures sur le BINGA-GANYA a été la suivante

Le BINGA-GANYA à SALAKOYRA

( · · · )· · ·( N° · Date : Cote à : Cote à Débit à )·( · BOUGOUBERI(m): DIRE (m) · SALAKOYRA )· ·( · · · · (m3/s) )• · · ·(---- ------------ ------------ ------------ ------------)· . . .· . . .( 1 · 24.11.76 · 4,86 · (5,04) 231 )• · ·( 2 · 3.10.77 · 3,795 · 3,965 · 85,4 )• · · ·( 3 · 26.11.77 • (4,33) 4,50 · 125 )• · ·( 4 · 10.12.77 · 4,15 4,32 · 84,5 )· · ·( 5 : 3.01.78 · 3,435 · 3,605 9,1 )· ·( 6 18.01.78 · 2,75 (2,905) · -30,9 )· ·( 7 : 25.01.78 • 2,35 · (2,535) -19,3 )· ·( · : · : (inversion )· ·( · : · du sens) )· ·

Le KAREY-BOSSO à GABONGO-Aval

( · · . : )· ·( N° · Date : Cote à · Débit )· ·( · : DIRE (m) · (m3/s> )· ·(---- ----------- ----------- -----------)· . .· . .( 1 : 30.11.76 · 5,03 · 154 )· ·( 2 : 5.10.77 4,01 · 48,2 )·( 3 29.11.77 · 4,48 · 108 )· ·( 4 13.12.77 · 4,27 : 165 )·( 5 5.01.78 · 3,54 · 53,2 )· •( 6 19.01.78 · 2,855 · 30,1 )

"· ·( 7 · 26.01.78 · 2,48 · 24,0 )· · ·( : · : )·. ,1

,'1. ;,. "

Le renversement du courant a l'entrée du BINGA-GANYA s'effectue

vers 3,25 m à l'échelle de BOUCOUBERI, et vers 3,50 m à l'échelle de DIRE.

Les jaugeages précédents permettent (fig. 1) de tracer la courbe

d'étalonnage du BINGA-GANYA pour la crue 1977-78 (année faible). La même

courbe, grâce au jaugeage de 1976, peut être tracée avec une relative

certitude pour la crue 1976-77 (année moyenne). L'étalonnage de 1969 est

esquissé en s'appuyant sur les deux précédents ~t fo~rnit pour le soutirage1

du BINGA-GANYA en année forte un bon ordre de grandeur (avec la simple

::>...,:J)c

jJ11!1

t1•.'­,

,,~..j1j

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Fig_ 1

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Courbe de tarage

O Hauteur à l'échelle en m-+----~~-+_--7'~----__I_------'-~~--=--_=_=r=~--=.:.;~~~

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250

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du BINGA-GANYA à SALAKOYRA rap- :E

(/) portée à l'échelle de BOUGOUBERI J~ /fi~ ~ Il

300,+=0=-- -..-- -.- ---. "': / /

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150

100+- -+ -+-+-_#- --1

A Jaugeage crue VI Jaugeage de décrue

- 12 -

hypothèse qu'il n'y a pas de détarage trop important par rapport à l'échelle

de BOUGOUBERI entre 1969 et 1976).

Le tarage du KAREY-BOSSO à GABONGO-Aval peut être dressé de la

même façon par rapport à l'échelle de DIRE. La courbe est moins simple, et

ne peut guère être étendue à l'année 1969.

Les hydrogrammes d'entrée (SAlAKOYRA) et de sortie (GABONGO-Aval)

sont tracés sur un même graphique (fig. 2) pour les deux crues récentes.

L'hydrogramme 1976-77 s'appuie sur les jaugeages des 24 et 30 novembre, et

il est complété à partir des cotes de BOUGOUBERI et DIRE. La fin de la

décrue à SAlAKOYRA adopte la même f~e qu'en 1977-78, avec un volume de

vidange de 35 ou 40 millions de m3• L'hydtogramme d'entrée à SAlAKOYRA j

pour la forte crue 1969-70 est bâti entièrement à partir des cotes à BOUGOU-

BERl et de la courbe de la figure 1.

Les écoulements du BINGA-GANYA au cours de ces 3 crues faible,

moyenne et forte sont les suivants :

(:: :: )( :: Entrée (SAlAKOYRA) :: Sortie (GABONGO-Aval) )( .. .. )

A ' • fi' ••

( nnee .:--------------:-------------- •• --------------:---------------)·. . .. .( :: Débit ~e :Débit moy~n :: Débit d~ : Débit moy~n )( ::pointe (m /s) :annuel (m /s) :: pointe (m /s): annuel (m /s) )( :: : :: : )(--------------..--------------.--------------..--------------.---------------)·. . .. .( 1977-78 ·. 145 • 28,2 ·. 170 · 30,1 )·. · ·. ·( ·. · ·. · )·. • ·. ·( 1976-77 ·. 260 • 82 ·. (310) · (86) )·. • ·. ·( •• · ·. ,. • )·. • ·. ·( 1969-70 ·. 360 · (139) ·. • )·. · ·. ·( ·. • ·. · )·. · ·. ·( ·. · ·. · )·. · ·. ·•. ~I ~ •, ..

Il semble, au vu de ces valeurs relativement précises, que le

BINGA-GANYA restitue un peu plus d'eau au NIGER qu'il n'en a soutiré auBARA-ISSA à BOUGOUBERI. L'écart, augmenté des fortes pertes par évapora­tion et infiltration, représente l'écoulement relativement important reçu,

même en année faible, des émissaires sud, essentiellement le HAlANGOL.

La conclusion importante que l'on tire de ces valeurs est qu'aucours de la dernière décennie, le débit annuel soutiré en moyenne aufleuve à la hauteur de BOUGOUBERI est voisin de 100 m3/s, ou même simple­

ment de 80 m3/s.! .

~

Fig- 2

Hydrogrammes des écoulements soutirés au BARA-ISSA

(par le BINGA- GANYA à SALAKOYRA) et restitués à

r ISSA-BER (par le KAREY-BOSSO à GABONGO-aval)

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- 13 -

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Or l'analyse antérieure, conduite par comparaison de la crue àDIRE et à TOSSAYE, faisait ressortir un déficit annuel moyen à DIRE d'une ~

centaine de m3/s depuis 1965. Assimiler ce déficit à DIRE à un débit supplé­

mentaire échappant à la station par le BINGA-GANYA reviendrait à admettre

qu'avant 1965 le BINGA-GANYA était, sinon à sec, du moins sans écoulement..'

Il est de la même manière à peu près exclus de faire jouer au

MALANGOL, plus en amont, le rôle de défluent plus actif qu'autrefois, que

ne peut guère avoir le seul BINGA-GANYA. Les quelques riverains rencontrés.

confirment que les écoulements de ce second défluent ont pâti des années

sèches depuis 1970, et ne se sont donc pas renforcés.

L'analyse détaillée conduite en 1977 à partir des écoulements de

DIRE et TOSSAYE montrant indubitablement qu'il y a anomalie hydraulique

entre ces deux stations, il est nécessaire de réexaminer les hypoth~~'s

assurant la validité de l'analyse. Il faut vérifier que les tarages de

ces deux stations, tels que définis, sont les bons, ainsi que leurs

périodes de validité. Il est nécessaire de se demander également si au

sein des périodes de validité supputées, l'étalonnage reste vraiment stable,

et si par ailleurs les conditions de propagation sont également stables au

cours de la période d'observations.

2.3 - Les anomalies ne sont pas localisées à la cuvette de DIRE

Les comparaisons systématiques de cotes entre stations ne sont

pas terminées, mais il est dès à présent possible de dégager quelques

faits importants : ~

- une certaine instabilité se manifeste dans les correspondances

entre maximums de crue par la position un peu différente de certaines années

isolées. Lorsque cela résulte de la cote d'une unique station on peut

incriminer les lectures à cette station. Si les lectures paraissent bien,faites l'instabilité de l'échelle peut être invoquée (élément d'échelle

décalé ou incliné cette année-là). Cette interprétation simple n'est plus

possible si la même année se singularise, plus ou moins nettement, en plu­

sieurs stations ;

- il apparaIt surtout que la correspondance entre certaines

stations a évolué à un moment ou un autre et pendant plusieurs années, depuis

1

l,

- 14 -

l'entrée de la cuvette lacustre jusqu'à NIAMEY. La qualité des lectures

impose parfois d'éliminer des années entières, et il peut exister des

incertitudes sur la stabilité de certaines échelles. Mais dans l'ensemble

on peut mettre en évidence depuis 1955, l'existence d'une correspondance

ancienne et d'une correspondance plus récente, avec une période intermé­

diaire et quelques années isolées dispersées.

Ce n'est pas le cas lorsque l'on considère des couples de stations

rapprochées, comme les stat1hs de DIRE à NIAfUNKE, et à plus forte raison

des stations très voisines comme le couple d'échelles de TONDIFARMA-Amont

et TONDIFARMA-Aval, mais même là il n'est pas exclus que des écarts de plu­

sieurs centimètres doivent être pris en considération, compte-tenu des

pentes très faibles de cette portion du fleuve. La critique serrée de la

qualité des lectures et de la stabilité des éléments d'échelle sera là

l'élément d'appréciation déterminant.

Le rapport précédent a mis l'accent sur l'évolution de la

correspondance entre les cotes de DIRE et NIAMEY, TOSSAYE et NIAMEY.

Dans le premier cas l'anomalie limnimétrique persistait lorsque l'on

passait aux débits. Dans le second cas, par contre, la prise en compte

d'un tarage évolutif depuis 1971 à TOSSAYE fait disparaItre l'anomalie en

cotes et assure une correspondance unique des débits pour la période de

1954-76. Il persiste simplement, en ce cas, une évolution du rapport

entre le débit de pointe et le volume de crue, évolution d'ailleurs moins

nette à TOSSAYE qu'à NIAMEY.

Il est apparu cependant, après extension des investigations,

qu'il n'y a pas de raison déterminante de privilégier l'anomalie

DIRE-NIAMEY.1...

Deux exemples en sont fournis sur la figure 3. Le graphique du

haut reprend la comparaison des cotes maximales entre TOSSAYE et NIAMEY,

celui du bas entre TILLABERY et NIAMEY.

Dans le premier cas (période 1954-77) le graphique fait apparaItre

nettement une première relation moyenne de 1955 à 1969 (au sein de laquelle

se dessine déjà une légère évolution puisque l'on peut y regrouper les

années de manière à faire apparaItre une tendance chronologique de 1954

~ 1969). Une seconde relation semble caractériser les cinq dernières

années (1973-77). La période intermédiaire (1970-72) est caractérisée

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1973-1977

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TOSSAYE et NIAMEY (SOOkm) et à

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Hauteur à réchelle en m4,0 45 NIAMEY

- 15 -

par une instabilité frappante d'une année à l'autre (points fléchés du

graphique).

La situation est analogue entre TILLABERY et NIN1EY, toutes

proportions gardées (TOSSAYE est à 500 km de NIAMEY, TILLABERY à 110)

une première relation est étroite de 1953 à 1961 (1957 s'en écarte un peu)

une seconde relation prévaut de 1967 à 1976 (avec toutefois un écart modéré

en 1974 et peut-être en 1969). Les années intermédiaires "naviguent" quel­

que peu comme à TOSSAYE.

On voit donc dans ces deux cas que si l'on avait cherché à prévoir

la crue à NIAMEY, non plus à partir de DIRE mais à partir de TOSSAYE

ou de TILLABERY, la prévision basée sur les années anciennes serait prise

en défaut d'environ 30 cm en s'appuyant sur TOSSAYE, et de 15 cm en

s'appuyant sur TILLABERY (cette seconde valeur peut parattre minime mais

on notera qu'au sein des deux échantillons ancien et récent la dispersion

des points est faible et permettrait, si la correspondance était station­

naire, de prédire la cote à NIAMEY à quelques cm près).

La prévision du maximum à TOSSAYE à partir de DIRE, ou de

TILLABERY à partir de TOSSAYE, serait faussée de la même manière par

suite du contraste entre années récentes et années anciennes. La phase

transitoire, "évolutive", varie selon les couples de stations. Les stations

intermédiaires de la branche nora-sud du fleuve (GAO, ANSONGO) semblent. ,.

dénoter également une certaine instabilité, mais le début des années 70,

mal observé, gêne les comparaisons.

. 4\~ : ••

Il semble donc Qu'il n'y a pas une cause uniquement locale aux

anomalies mais que celles-ci peuvent affecter toute la boucle du fleuve.

Les périodes qui apparaIssent lœplus instabl~pour chaque couple de

stations, ne colncident pas parfaitement.

Cet aspect des anomalies permet d'écarter l'hypothèse qui a été

envisagée, d'une action nette des aménagements agrIcoles en amont de

NIAMEY sur le renforcement de la crue. Entre FIRCOUN et NIAMEY, 1500 hec­

tares environ ont été aménagés depuis 1952, dont 400 entre 1952 et 1956,

100 en 1967 et 1000 de 1970 à 1975. Il s'agit de cuvettes submersibles oude cultures en terrasse, qui peuvent accél~rpr 1~ ~------~.-

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III

- 16 -

au début de la montée mais sont pratiquemment sans effet dès les moyennes

eaux. Leur action pourrait se faire sentir dans le bief TILLABERY-NIAMEY,

mais ne peut expliquer les modifications intervenues plus en amont.

Les volumes écoulés aux stations hydrométriques permettent de

préciser l'extension des anomalies, en particulier vers le coeur du Delta

Central (MOPTI), par comparaison avec la station de KOULIKORO, où le

seul nlaximum annuel caractérise mal l'importance de la crue. Ils permettent

également de mieux les localiser dans le temps.

Nous présentons (figures 4 et 5) l'analyse provisoire conduite par

la méthode des doubles cumuls, appliquée aux écoulements des stations de

KOULIKORO, MOPTI, SOfARA (sur le BANI), DIRE, TOSSAYE, NIAMEY.

Les valeurs des écoulements sont celles d'un essai réalisé par

C. ROCHETTE pour la mise à jour de la Monographie du NIGER. La période

retenue ici pour chaque station est celle où aucune ambiguité n'existe

dans la définition du zéro d'échelle. Une seule courbe de tarage est

appliqu~à la totalité de la période. Cette courbe moyenne est définie sans

difficulté pour les stations dont le tarage est reconnu univoque (KOULIKORO,

NIAMEY). Pour les autres stations, qui possèdent une courbe de crue et une

courbe de décrue, on a appliqué la méthode du gradient limnigraphique.

Dans cette méthode, le débit fourni par une courbe de tarage moyen­

ne est corrigé par une fonction linéaire du gradient moyen de montée ou de

décrue calculé sur une période donnœ (ici 5 Jours):' Cette fonction de

correction est unique pour toute la période, c'est-à-dire que là aussi on

s'est imposé un seul tarage par station. L'adéquation parfaite de ce tarage

importe d'ailleurs assez peu, l'important ici étant que l'on soit certain

que ce n'est pas un détarage injustifié, ou introduit à une date inappropriée,

qui introduit l'anomalie.

On garde en conséquence présent à l'esprit que les anomalies appa­raissant à l'issue d'un tel traitement peuvent aussi bien recouvrir un

détarage effectif (qu'elles localiseront alors dans le temps), qu'unequelconque anomalie de régime.- ,-

- 17 -

Les valeurs cumulées à chaque station sont les débits moyens

annuels. Les graduations, en abscisses et ordonnées, de chaque courbe,

étant inutiles, ne sont pas reportées.

la figure 4 permet les constatations suivantes

la correspondance DIRE-MOPTI ne révèle pas de modification notable

au cours de la période 1945-76. C'est déjà ce que montrait la comparaison

des maximums annuels aux deux stations, avec une dispersion assez grande

des points mais guère de tendance évolutive. Ici, avec les réserves que

peut entrainer le découpage en tronçons d'une courbe de double cumul, on peut

distinguer une légère cassure vers 1962 ou 1963, les écoulements à DIRE

apparaissant un peu plus faibles (de l'ordre de 3 %) au cours de la période

la plus récente. C'est insuffisant pour conclure à une anomalie. DIRE et

MOPTI apparaissent au contraire solidaires depuis 1945.

la comparaison DIRE-KOULIKORO depuis 1924, permet au contraire de

distinguer plusieurs périodes, comme le fait le graphique. On relèvera que

la période 1950-61, au cours de laquelle ont été faites l'essentiel aes

mesures ayant permis l'élaboration de la Monographie du NIGER, est très

homogène, tout comme la période 1932-47. En négligeant les fluctuations

mineures on peut distinguer nettement trois périodes :

- 1924-1931

- 1932-1966

- 1967-1976

Comparés à ceux de la période 1932-66, les volumes à DIRE, au

cours de la première~t de la dernière périodes, apparaissent trop faiblest" ;..

de 15 à 20 % par rapport à ~ULIKORO, ce qui révèle cette fois une anomalie

très nette, de régime ou de tarage, vers 1930 et vers 1966.

C. AUVRAY, dans son étude de la Cuvette lacustre de 1960 (Monographie

du NIGER - 2ème partie), a dû résoudre, dans une optique opérationnelle de

définition du régime du fleuve, la difficulté posée par la première pério­

de, lors de la valorisation des données anciennes de DIRE. Son travail

critique expose avec précision le dilemme qui avait surgi. L'homogénéisation

de DIRE avec les écoulements en amont, soigneusement discuté, a exigé que

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(Stations de référence: KOULIKORO ou MOPTI)

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l'on relève les cotes à DIRE de 30 cm de 1924 à 1926, et de 25 cm

de 1927 à 1929.

la présence d'un cycle abondant 1951-55 analogue à celui

de 1924-29, et les conditions très comparables de composition des

crues du BANI et du NIGER pendant ces deux périodes, permettait d'éli­

miner l'hypothèse d'une modification du rôle régularisateur de la

cuvette lacustre sous l'influence des conditions climatiques. D'autre

part le relèvement des cotes à DIRE était nécessaire pour expliquer, au vu

en particulier de la correspondance entre les écoulements de DIRE

et GOUNDAM, le fait que le système des lacs TELE et FAGUIBINE s'était

au moins aussi bien rempli en 1930 qu'en 1956.

Il nous est dit, par ailleurs, pourquoi il est très peu

probable que l'échelle de DIRE ait vu son zéro modifié entre 1924 et

1949. les répertoires des stations du NIGER de 1954 et 1958, mention­

nent le procès-verbal de réinstallation de l'échelle, du 15 septembre

1949, qui confirme que "l'échelle nouvelle est rigoureusement alignée

sur l'ancienne". Nous sommes donc à peu près certains que, hormis

d'éventuelles variations d'ordre centimétrique lors d'un démontage

pour nettoyage, le zéro n'a pas varié. les supports de l'échelle sont

des piliers de béton implantés dans le bassin de l'ancienne station

de pompage de DIRE, et il serait très difficile d'abaisser les éléments.

Tout se passe donc comme si, vers 1930, la station de DIRE

avait subi un détarage assimilable, en première approximation, à un

relèvement de toutes les cotes de 25 ou.JO cm.~

la courbe du graphique 4 indique un mouvement de sens contraire

vers 1966, ramenant sensiblement à la correspondance qui existait 40 ansil. J •

auparavant.

Une différence importante existe toutefois avec le mouvement

antérieur. Ce dernier se manifestait aussi bien par rapport à

KOULIKORO que par rapport à MOPTI, ainsi que l'indiquent les relevés

d'une ancienne échelle de MOPTI. Cela inciterait plutôt à rechercher

: 11

- 19 -

une cause locale, à la hauteur ou en aval de DIRE. Les courbes

DIRE-MOPTI, DIRE-KOULIKORO et MOPTI-KOULIKORO montrent, par contre,

que l'anomalie récente s'exprime également à MOPTI, et qu'elle ne

peut donc recevoir d'explication localisée à la région de DIRE.

Une seconde différence entre la période de 1924-30 et la

période récente, réside dans leur contraste climatique, la première

étant très arrosée et la seconde, globalement très déficitaire.

Cela confirmerait que le déficit apparent à DIRE, manifesté dans les

deux cas par rapport à KOULIKORO, n'a pas une cause climatique directe.

Le déficit récent par rapport à KOULIKORO est d'ailleurs un

peu plus net pour MOPTI que pour DIRE, en particulier pour les

dernières années qui provoquent l'infléchissement du haut de la

courbe. Pour voir si ce n'est pas la conséquence de la diminution

considérable des apports du BANI ces dernières années, nous avons

soustrait aux apports de MOPTI ceux du BANI à SOfARA,depuis 1952,

cette différence reflétant bien mieux l'apport propre du NIGER.

La courbe (MOPTI - SOFARA)/ KOULIKORO souligne la cassure de 1966,

et indique effective~ent une période récente plus homogène.

Dans la courbe TOSSAYE-KOULIKORO, le fléchissement de la

courbe pour les dernières années peut donc résulter, comme à DIRE, de

l'amoindrissement des apports du BANI sous l'effet de la sécheresse.

La figure 5 rapporte TOSSAYE, DIRE, KOLILIKORO à NIAMEY

La courbe TOSSAYE-NIAMEY (1954-76) indique une légère cassure

vers 1963, traduisant une petite diminution relative (3 ou 4 ') des

volumes de TOSSAYE en 1964-71, par rapport à 1954-63. Cet effet

semble s'accentuer à partir de 1973 ou 1974, après l'anomalie isolée

de TOSSAYE en 1972.

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Fig-5

Courbes des doubles cumuls des débitsmoyens annuels

(Station de référence: NIAMEY)

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- 20 -

Le double cumul DIRE-NIAMEY indique assez nettement trois

périodes de 1941 à 1976 :

- une période homogène longue de 1941 à 1962 ou 1963

- une période 1963-72 pendant laquelle.la décroissance rela­

tive des volumes à DIRE est assez importante (10 $) ;

- une courte p~riode récente (1973-76) pendant laquelle la

décroissance précédente s'accentue, tout comme le fait TOSSAYE, et

ce qui est l'effet déjà constaté dans les comparaisons avec KOULIKORO.

Cette diminution est du même ordre de grandeur, que l'on compare les

apports à ceux de NIAMEY ou à ceux de KOULIKORO, mais dans le cas

de la comparaison avec NIAMEY, elle ne peut plus s'interpréter com­

me une conséquence des apports réduits du BANI puisque les stations

de DIRE, TOSSAYE, NIAMEY sont toutes trois en aval du BANI.

La courbe KOULIKORO-NIAMEY permet d'isoler de 1941 à 1976

une période relativement homogène de 1950 à 1964 ou 1965, une période

récente 1966-76 sans cassure en 1973 ou 1974 et pendant laquelle

les débits à KOULIKORO apparaissent plus élevés d'environ 5 $.

La période de 1941 à 1949 présente la même bosse (années

1947, 1948, 1949) que sur la courbe DIRE-KOULIKORO ou MOPTI-KOULIKORO.

Il semble bien qu'il y ait là ou bien 3 années anormalement fortes

à KOULIKORO, ou bien 3 années sans anomalie à KOULIKORO mais très

déficitaires sur le BANI (les relevés sur le BANI font défaut àcette époque). ce que nous chercherons à préciser.

- 21 -

En résumé, il apparaIt que

1° Les anomalies de la crue, qu'il s'agisse de son maximum ou de son

volume, sont décelables aussi bien dans le Delta central qu'au sowmet

de la Boucle, et que dans la branche nord-sud du fleuve ;

2° L'examen des relevés anciens de DIRE, MOPTI, KOULIKORO, a fait

apparaItre vers 1930 une anomalie de même type qu'à DIRE vers 1966.

MOPTI ne paraIt toutefois pas affecté à l'époque;

3° Il ne paraIt pas y avoir d'explication climatique simple. Il sera

nécessaire d'examiner de près l'évolution qui se dessine en 1973-74,

au maximum d'intensité des années sèches. Les pertes, à ce moment-là,

un peu comme 10 ans plus tôt, semblent augmenter dans le Delta central

et la Boucle, mais cet effet n'apparaIt plus en aval, c'est-à-dire

qu·rà la différence de TOSSAYE et DIRE, NIAMEY, comparé à KOULIKORO,

paraIt stable depuis 1966 ;

4° Outre les modifications apparentes de régime, décelées sur des périodes

assez longues, des singularités affectent des années isolées.

2.4. - L'étalonnage des stations hYdrométriques est d'une stabilité

relative. Le détarage est net certaines années.

L'étalonnage des stations hydrométriques du fleuve a été

réalisé pour l'essentiel entre 1954 et 1959. A certaines stations

il a pu être mené à bien rapidement, grâce à des jaugeages régulière­

ment répartis au cours d'un cycle annuel, à d'autres, plusieurs années

ont été nécessaires à la définition de la courbe. On a noté parfois

une certaine dispersion des points de mesure,mise logiquement sur

le compte des aléas de mesure ou d'appareillage, mais dans l'ensemble

une courbe moyenne acceptable a été assez vite dégagée.

~x stations à tarage non univoque (pente hydraulique varia­

ble au cours de la crue), il a fallu préciser la courbe de crue et

celle de décrue, ainsi que la forme de leur raccordement au voisinage

du maximum. Ces courbes de tarage annuelles dessinent une famille

de courbes étroitement emboItées. Des jaugeages de contrôle ont été

faits par la suite, renforcés à partir de 1967 à certaines stations.

- 22 -

Il a été montré en 1970 qu'on pouvait définir correctement ces courbes

annuelles grâce aux deux méthodes simplifiées dites, l'une du gradient

limnigraphique, l'autre de l'écart au maximum, et ces deux méthodes ont

été appliquées au calcul automatique des débits journaliers.

les jaugeages destinés à contrôler l'étalonnage au cours de la

présente étude, ont conduit en 1977 à admettre un récent détarage des

stations de DIRE et TOSSAYE (cf rapport 1977). le réétalonnage, malheureu­

sement encore incomplet, des stations, au cours de cette seconde phase, ne

confirme que partiellement ce détarage perceptible à l'issue de la

campagne 1976-77. Il semble bien y avoir un certain détarage d'ensemble

des stations de la Cuvette lacuste et du Niger moyen, par rapport à la

courbe antérieure en vigueur, mais un effet tout aussi important décelé

nous parait consister en une instabilité de l'étalonnage d'une année à

l'autre, tout au moins à certains moments.

la confiance, c'est-à-dire la précision, à accorder aux jaugeages

_peut varier mais nous pensons toutefois que la plupart des jaugeages sont

de précision équivalente, et nous nous imposons simplement de ne pas

tenir a priori pour médiocres les points qui s'écarteront de la courbe

moyenne.

Nous avons regroupé les jaugeages chronologiquement, nous efforçant

d'individualiser chaque fois que possible, soit la totalité de la courbe

annuelle, soit une partie de cette courbe, en montée ou en décrue. la

règle adoptée ici est de s'appuyer le plus étroitement possible sur les

points de mesure, même si la courbe qui en résulte risque de présenter

une singularité sans existence réelle (par suite d'une mesure erronée, ou

simplement d'un nombre insuffisant de points). les jaugeages isolés dans

le temps sont, bien sûr, insuffisants pour esquisser le moindre tracé

significatif.

Nous présentons des exemples de cet examen détaillé du tarage des

stations, qui nécessitera encore quelques vérifications en archives.

- 1:.:> -

10 - Station de GOUNDAt·l

La figure 6 illustre le cas frappant de GOUNDAM, station contrôlant,

à l'exutoire des marigots de BOUREM et du TASSAKANT et de la zone d'inon­

dation du KESSOU, la totalité des apports au système des lacs de rive

gauche, TELE et FAGUIBINE.

Le dilemme qui peut se poser à cette station est le suivant : au

sein du nuage de points de jaugeage faut-il adopter une courbe de tarage

unique, ou doit-on distinguer plusieurs courbes? L'examen des éléments

en notre possession concernant les conditions d'exécution des mesures,

montre qu'il faut faire confiance aux résultats, c'est-~-dire admettre

l'instabilité de la station et distinguer plusieurs courbes.

P. DUBREUIL, dans son étude hydro-climatique de janvier 1961

concernant l'aménagement des lacs TELE et FAGUIBINE, a déjà abordé cette

question et y a répondu avec précision : les jaugeages réalisés pendant

les trois crues de 1957-58, 1958-59 et 1959-60, montraient qu'il fallait

admettre un détarage entre la première et la seconde année, et surtout

entre la seconde et la troisième année. Il était logique de penser

à l'époque que cette situation évolutive résultait d'une érosion

régressive du lit, se manifestant entre GOUNDAM et le lac TELE, d'autant

plus qu'un levé topographique venait de montrer l'importance de la

pente du lit à la sortie du KESSOU.

La courbe de tarage moyenne tracée pour la crue 1959-60 indiquait

des débits supérieurs de 50 t dans l'ensemble à ceux fournis par la

courbe de la crue 1957-58. Les jaugeages récents montrent le retour en

1976-77 à une courbe voisine de celle de 1958-59, un peu au-dessus

de celle de 1957-58. La faIble crue 1977-78, par contre, est en

position haute, intermédIaire entre celle de 1958-59 et celle de

1959-60. Un jaugeage isolé du 16.1.69 se place sur la courbe de décrue

supputée de 1957-58.

Si l'on confirme donc une instabIlIté nette de la statIon, Il est

diffIcile de rapporter actuellement cette InstabIlité à une érosIon

régressIve du lit.

Les cInq courbes de tarage présentées peuvent être nettement moàI­

fIées dans une partIe de leur tracé, si tel ou tel jaugeage comporte une

.-_.- - - - - - - - - - ..-

4

6. Crue 1957-58 0 Crue 1977-78

 " 1958-59 C : Crue-D. Decrue

• - 1959-60 E : Etale-0 " 1976-77-

Hauteur à l'échelle en m

2 3

EVOLUTION DE LA COURBE DE TARAGE

A GOUNDAM ENTRE 1957 et 1978

O+--L.A.lf:r.=----+-- -+_---=:..::-.:..::..:..:.-=-.:....:..:.~+_=_:..:.......:..:.:.....----_+_____o

100+- -+ -11- "tL--.1Wrr-------+----------i

200+-- -+ -+-__--j~--___j-------

0;c

CIJ=-t0.3:en" 300...<n

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'oC CIlCl. ~... E0

0 c:ca QI

.ë' -c: :ë"

.QI

0

:~,~

'.:~

'''"''0,,,­,11,,,,,,

- 24 -

erreur. Ces jaugeages sont cependant assez nombreux pour que la suppres­

sion de l'un ou l'autre d'entre eux ne suffise pas à modifier l'allure

d'ensemble des courbes. Ces dernières, complexes, ont manifestement un

air de famille, même si la décruer: 1958, s'appuyant sur un seul jaugeage,

est mal connue.

Il semble bien qu'il faille distinguer une courbe de crue et une

courbe de décrue, alors que la station, dans un resserrement du lit et

à l'amont immédiat du pont de GOUNDAM, paraIt a priori devoir être

univoque. On relèvera également le point d'inflexion qui semble caracté­

riser montée et décrue, à une cote variable comprise entre ~OO et \60 m.

Ces courbes révèlent une évolution complexe des pentes au cours de la

crue. La boucle de la courbe 1958-59 paraIt bien être décrite en sens

inverse.

Nous nous demandons si une telle instabilité, manifestée à la

fois entre des courbes annuelles successives, et au sein même de la

courbe annuelle, n'est pas ré~élatrice non denodificationsde la section

du lit (sauf peut-être en basses-eaux), mais plutôt d'une instabilité

_ de toute la zone environnante, amenant, par suite d'affaissements ou

de soulèvements localisés, ou bien un mouvement relatif de l'éehelle

dans le bief, ou bien une variation importante de la pente hydraulique.

On est même conduit à se demander si la crue elle-même, par suite de

conditions variables dans l'établissement de l'équilibre hydrostatique,

ne pourrait pas contribuer à ces déformations. Une telle instabilité

peut affecter l'ensemble de la région de DIRE (KESSOU et KILLI), puisque

d'autres stations hydrométriques temporaires, suivies de 1957 à 1959,

révèlent semblable évolution de l'étalonnage. Cette instabilité implique

en pratique des contraintes tectoniques régionales, la présence de

compartiments faillés, ainsi que des modifications altimétriques ayant

obligatoirement des répercussions plus ou moins grandes sur la stabilité

des repères de nivellement.

L'ensemble de ces faits et cette hypothèse doivent être rapprochés

de singularités relevées dans la propagation de la crue. C'est ainsi

qu'on a noté le temps de parcours exceptionnellement bref (1 ou 2 jours)

de la pointe de crue, entre DIRE et GOUNDAM, lors de la forte crue de

1957. Cette même crue 1957 montrait parallèlement, comme indiqué dans la

Monographie du NIGER, une anomalie du volume écoulé à GOUNDAM, par rapport

à celui de DIRE.

- 25 -

Une discussion plus approfondie de cette hypothèse tectonique

ne peut guère se faire à l'aide ses seuls éléments hydrologiques

actuels. Un dispositif de vérification simple sur le terrain, serait l'ins­

tallation de deux échelles de crue, respectivement à 2 ou 3 km en amont

et en aval de l'échelle actuelle, à suivre avec soin pendant 2 ou 3 ans.

2° - Station de DIRE

La figure 7 compare la courbe de tarage moyenne de DIRE aux

courbes 1976-77 et 1977-78 telles qu'on peut les tracer à l'aide des

jaugeauges récents. Le jaugeage 41 (1.3.77) sur lequel s'appuie la

courbe de décrue de 1976-77, a été exécuté dans une section de mesure

et dans des conditions opératoires paraissant exclure toute erreur

importante.

Le haut de la courbe 1976-77 indique bien le léger relèvement des

débits qui a amené l'adoption de la nouvelle courbe du rapport 1977. La

branche de décrue en-dessous de la cote 4 m, correspond très sensiblement

à la courbe ancienne.

Le tarage 1977-78, s'il semble bien indiquer (jaugeage 45 du 4.10.77)

une montée très voisine de celle de la courbe moyenne et de la courbe

1976-77, conduit en décrue à des débits nettement plus élevés (10 à20 ,). Le calcul des débits par les méthodes du gradient limnigraphique

ou de l'écart au maximum annuel, fera apparaItre de la même façon une

différence sensible entre débits mesurés et débits calculés. Le jaugeage

disponible pour la crue 1978-79 (7.12.78) semble confirmer un relèvement

actuel des débits.

Le graphique 7 met également en évidence les quelques jaugeages

isolés anciens (1954, 1956, 1957 et 1959) qui sont en dehors de la

courbe. L'écart dépasse la précision obtenue~ habituellement sur un

jaugeage qui est d'environ 5 ,. On relèvera en particulier l'écart

existant entre les jaugeages 14 et 15 de 1956 et 1957, qui s'il était

effectif, pourrait recouvrir un détarage.temporaire important.

~ : Crue

v : Décrue1

21 (58): Jaugeage NO 21(année 1958-1959)

Jaugeages antérieurs à 1962

1Hauteur à l'échelle el'! m

1

date des.Se r V i ce H y d ro logiq ue §. 7!1 O.J."..IJ.1.L..-..~.~?'!........ .

2 3 .4 5 6

If1

114(56) t!

11

/

\.O.R.S.T.O.M.

500 +--------4-----+--1--;.-

250

li!

M-Ec:~...0.~

0

200

Fig _7 11t1(54)3 (53) ~3(55)110(54)--

LE NIGER A DIRE ~12(55)

Courbes de tarage récentes et courbe 1.moyenne de la période 1951-1961 ~20(58) ~

7-12-78.E~1 11

38/~ ..,..--__-----r-_-_---r--__-+-_-_J C' tl.(54)~

l' 1%8 rI 1

22 (59)t J,' ,J_ , 1

1 /! YR 1

1 / ,,39 4(53) 11 1 il

8(54) 1°0~ J /40

18C58~~ '":: I~

0::46 , ....:~o 1. 100 *2

1500I-l--------.,I---"----+-------+------t--~: /47-10.. ~------I°do , ....7(54) li : ~

1/~ ,: : 1

c ~17(58) 145 9/0;) 1 1

/ I:~ , v2 (51).... i~;- 1

o /i\ 11 00.. 1

6(54) 1:.... V21(58)flO 1 1.24 (61) fi ~:H5n

16(~ :01000-+-------+------1-----+-=-=-~-~~!----+------j

- 26 -

3° - Station de TOSSAYE

La figure 8 esquisse les courbes annuelles qu'il est possible

de tracer à TOSSAYE, de 1954 à 1978. Elle présente également le tarage

réalisé à l'ancienne échelle de l'Office du NIGER au cours de l'année

1936-37, dont l'intérêt est de mettre en évidence l'importance de la

boucle qui peut exister au sommet de la courbe.

Le tarage établi vers 1960 lors de la Monographie du NIGER, s'appuyait

essentiellement sur les jaugeages de 1954-55 et 1955-56, exécutés àla crue, et ceux de 1957-58 relatifs surtout à la décrue. Il en est

résulté une courbe qui accentue peut être légèrement le caractère non

univoque de l'étalonnage (mais ce ne serait toutefois pas le cas en 1969

si l'on accorde toute confiance à l'unique jaugeage de crue). L'ensemble

des jaugeages dont on dispose actuellement conduit plutôt à admettre

que l'année 1957-58 présentait un détarage d'une dizaine de cm avec les

années 1954-55 ou 1955-56, correspondant à une diminution des débits

comprise entre 5 et 10 %.

Les jaugeages faits pendant la crue 1976-77 ont conduit à-admettre

une nouvelle courbe, renforçant un peu les débits à TOSSAYE. En fait, la

longue série de mesures réalisée lors de la décrue 1977-78, ramène àla courbe probable de 1954-55, et les jaugeages faits autour du maxi­

mum en 1978-79 semblent indiquer également une légère réduction des

débits par rapport à 1976.

Toutes ces mesures paraissent bien révéler une légère instabilité

d'ensemble de la station de TOSSAYE. Mais il est alors nécessaire de se

poser la question deV~volution possible de la courbe de tarage entre

1960 et 1975, période pour laquelle seule la crue 1968-69 a été jaugée. Il

est probable qu'une courbe de tarage moyenne, appliquée à la totalité

de la période fournit une estimation des débits réels avec une erreur

qui, le plus souvent, ne dépasse pas quelques $, ce qui est de l'ordre

de la précision des jaugeages eux-mêmes, et permet une très bonne défi­

nition des écoulements. Mais il est possible également que l'écart avec

les débits réels puisse être un peu plus grand (5 voire 10 $), pendant

quelques années, ce qui a son importance dans l'interprétation àdonner aux comparaisons entre stations.

~ Decrue

c Etale

~ Crue

Courbe de tarage 1936-37

C:Crue

D:DecrueE: Etale

1

5m

v 1954 -19559 1955 -1956o 1957 -1958• 1968 -1969c 1976 -1977• 1977 - 1978)( 1978 - 1979

Courbes de tarage 1954-79

4 Cote à l'echelle3

.....M

cDM

Fig_8

2

LE NIGER à TOSSAYE

Courbes de tarage de la période

1954 -1978 et courbe 1936 -1937

o

1

1 ~i j;,c--

III

~

2000 1

1 E~1 1

: f -I! --;---E 1 l'fI ~

IJ /, i •..... h •1 /1 ~ri

~ /~~~/ 1

~..."IlJ~~~1000 1 .0 /,~''- I.!';)'U

1 bllJ / ......0)

~1lJ/~~1lJ/

<1lJ"/~'~y/

~1lJ,,~,'b /

/~

500 1 //

I r "'-"JIy

~,,1 1 1

O. R. S.T.O. M. Service Hydrologique

•Il

•IlIlIlIl

•••

••••••••

1111

1

11

1

1

r

1

1

- 27 -

Le rapport précédent a montré la singularité de l'année 1972-73 à

TOSSAYE. Nous avons déterminé, par comparaison des débits mensuels (fournis

par la courbe moyenne de tarage) avec ceux de DIRE et NIAMEY, quelles cor­

rections il fallait apporter à la courbe pour faire disparattre toute

anomalie de régime à TOSSAYE. La courbe approximative ainsi obtenue est

reportée sur le graphique. Elle correspond à un détarage d'une bonne

trentaine de cm. C'est là un détarage important, mais qui est du même type

que celui décelable entre 1955 et 1957.

Le rapport 1977, en corrigeant toutes les cotes de 1972-73 de 24 cm,

avait retenu l'hypothèse d'un décalage de l'échelle du même ordre en

1972. Les vérifications faites ne confirment pas cette hypothèse. Hormis de

petits écarts d'ordre centimétrique entre les éléments de l'échelle,

résultant d'un calage imparfait des éléments ou de légers tassements de la

berge, l'échelle de crue, en 1972, était la même qu'en 1971 et 1973.

L'observateur était le même et l'examen de ses relevés confirme la

validité des lectures. L'absence d'élément et donc de lectures de

basses-eaux à cette époque, ne permet pas d'examiner s'il y a ou non

variation brutale des cotes avec les années voisines.

L'hypothèse d'une augmentation effective des débits à TOSSAYE

a été envisagée, qui n'impliquerait pas de détarage, et résulterait de

pertes latérales par infiltration nettement réduites, tout au long de la

Boucle du fleuve, lors de la faible crue 1972. C'est fort improbable

puisque les faibles crues 1973 et surtout 1977, ne révèlent rien d'ana­

logue. De plus un tel effet se manifesterait déjà aux stations en amont.

Si la station de BAMBA ne permet aucune vérification (pas de relevés de

1972 à 1974), celle de GOURMA-RHAROUS, malgré la médiocrité de certains

relevés, ne traduit aucun relèvement des cotes en 1972. Enfin cet excé­

dent à TOSSAYE ne se retrouve pas en aval, même si la station limnimé­

trique de GAO, après correction des relevés, semble accuser également des

cotes un peu élevées (de l'ordre de 10 cm ?) en 1972.

Là encore l'anomalie constatée oriente plutôt vers la recherche

d'une cause locale à caractère temporaire, telle qu'une modification dans

le défilé de TOSSAYE ou ses abords, par exemple un remblayage du lit,

ou bien un mouvement relatif de la berge et du lit du fleuve.

- 28 -

L'hypothèse tectonique devra donc, là-aussi, être examinée de près,

aussi surprenante que la fasse apparaItre la brièveté et l'ampleur

de la modification impliquée.

On indiquera dès à présent que l'enquête sismique réalisée, bien

que très partielle, révèle une forte probabilité de très petits séismes

dans toute la Boucle du NIGER, et en particulier à proximité de

TOSSAYE où l'une de ces petites secousses se serait produite au début

de 1974.

4° Stations d'ANSONGO et de NIAMEY

Ces deux stations de la branche nord-sud du fleuve font l'objet

actuellement d'un examen approfondi afin de préciser la possible évolution

de leur courbe d'étalonnage, qu'on s'attendrait, a priori, à voir

parfaitement stable et univoque, par suite de la présence de fonds rocheux

et de pentes assez fortes.

La station d'ANSONGO, contrôlée par la zone de rapides qui s'étend-

sur quelques km en aval, a été étalonnée au départ à partir de 14 jau-

geages réalisés en 1957-58, et contrôlés par 2 jaugeages en 1958-59 et

1 lors de la crue 1959-60.

Cinq autres jaugeages de contrôle, réalisés en 1968-69 et 1969-70

semblaient indiquer un relèvement des débits. Cinq nouveaux jaugeages,

ces trois dernières années,confirffient un détarage probable d'une

vingtaine de cm par rapport à la courbe ancienne, amenant des débits

plus élevés de 20 à 30 % en moyennes-eaux, et de 10 à 20 $ en hautes­

eaux. Des compléments de mesure sont nécessaires. Plusieurs con­

trôles ont montré que l'~hell~de crue est restée stable- par rapport àla borne astronomique située à quelques centaines de mètres de la station.

A NIAMEY, la centaine de jaugeages disponibles permet de montrer

qu'une lègère instabilité de la courbe de tarage est probable. Nous avons

considéré ici qu'en dehors des basses-eaux, NIAMEY est une station

parfaitement stable, mais il n'est pas impossible que la courbe annuelle

s'écarte certaines années de la courbe moyenne de 5 $, voire un peu plus.

- 29 -

Ainsi par exemple la courbe de l'année 1974-75 semble indiquer

des débits inférieurs de 10 , à ceux des années 1972-73 et 1973-74. Un

léger relèvement de la courbe, à proximité du maximum, peut égalementexister, par rapport à la courbe moyenne.

C'est probablement ce net détarage.d'ANSONGO, et celui, plus réduit,possible certaines années à NIAMEY,q~iapparaissent sur la figure 9, par une

rupture dans la correspondance entre les écoulements annuels des deux

stations depuis 1953 (il manque les années 1961 et 1962, 1970 à 1973,

absentes ou mal observées à ANSONGO). les débits moyens annuels ont été

calculés à partir d'une courbe de tarage unique pour chaque station.

les apports intermédiaires de rive droite (GOROUOl, DARGOL, SIRBA)

représentent 2 à 5 , du volume du fleuve, et ne peuvent donc intervenir

que pour une faible part dans la dispersion des points.

On retrouve ici, pour deux stations relativement proches, le con­

traste entre une période ancienne et une période récente. la limite de

ces deux périodes est toutefois imprécise, et on a l'impression, autant que

.permet d'en juger la lacune d'ANSONGO, que si de 1953 à 1963 la correspon­

dance était étroite entre les deux stations, la période récente-estdavantage caractérisée par son instabilité que par une nouvelle corres­

pondance étroite (années "faibles" à ANSONGO en 1964, 67, 69, 74 et 75,

et "fortes" en 1965, 66, 68).

2.5. - la propagation de la crue n'est pas très régulière

Nous avons voulu préciser si le net renforcement de la pointe de

crue à NIAMEY, à partir de 1966, s'accompagnait d'une modification dans

la vitesse de propagation de la crue depuis DIRE.

Par suite de la forme très simple de l'hydrogramme à la sortiedu Delta Central, ainsi que de l'absence de tout affluent importanten aval, on s'attendrait à une propagation très régulière de DIRE àNIAMEY, aisée à préciser par le temps de parcours du maximum entre cesdeux stations. l'instant du maximum se définit à 1 ou 2 jours près,même lorsque ce maximum correspond à un palier, dont il suffit de prendrele milieu.

Fig-9

Correspondance entre les écoulements annuels

d'ANSONGO et NIAMEY (Essai avec une

courbe de tarage unique aux 2 stations)

o"zori) + Jusqu'en 1963 0 Après 1963 /Z 54+

140cf4-- ....,...... -:-r- ---r ----.r--__--.#--__----.

1 // 55

~ 57 / +53O\.,.,CI).------1I------+-------+-----=-:~----=-~--+-------I

EE ~y /~~ ~~o ~ M'

1200+----4-----+----~-

1000+----+-~---tr----~---+__---+__--__t

800~-..L----L-_ ___,._-__4_---....J.------+--_--..L.......;,N...;;.;I;.;..A=M..;.;;E;;..cY~~800 1000 1200 Débit moyen 1400

annuel en m}ts

\o.R.S .r.o.M. Service Hydrologique 1~~ _ttAL..~ !/~€~. . __

- 30 -

Les temps de parcours, de 1943 à 1977, sont reportés sur la

figure 10, en regard des cotes respectives de DIRE à NIAMEY, auxquelles

on a adjoint les maximums de TOSSAYE. Ces temps de parcours restent

inscrits le plus souvent entre 30 et 50 jours, avec une valeur moyenne

de 40 jours. Aucune tendance chronologique nette n'appara!t, et nous ne

pensons pas que l'on puisse affirmer que la propagation de la crue est

actuellement plus rapide qu'auparavant.

Nous chercherons à mieux préciser la liaison qui peut exister,

entre le temps de parcours et la taille de la crue. Cette liaison sera

de toute façon faible, et le graphique 10 montre surtout les forts écarts

qui peuvent exister pour des crues d'égale importance. La comparaison des

limnigrammes des deux stations montre que les valeurs extrêmes du temps

de parcours correspondent à des crues dont la régularité, au voisinage

du maximum, est altérée par de petites déformations, instables d'amont

en aval, et qu'il est impossible d'attribuer à des apports locaux.

La prévision de la date du maximum à NIAMEY ne peut être très

grande. Nous pensons, de manière plus générale que la précisien d'une

méthode classique de propagation sera parfois prise en défaut ici, et

qu'une raison pourrait en être l'instabilité de la liaison hauteurs­

débits au voisinage du maximum, certaines années.

2.6. - Un examen approfondi des hauteurs d'eau révèle quelques variations inex­

pliquées du plan d'eau.

Outre les petites déformations du sommet . du limnigramme, plus

ou moins n~rquées selon les années, et qui limitent la belle régularité

de la crue du fleuve à la sortie de la Cuvette lacustre, l'examen

attentif des cotes révèle d'assez fréquentes singularités mineures, dont

on s'est efforcé de comprendre les causes qui peuvent être fort diverses,

afin de voir si ces singularités ne pouvaient recouvrir des variations

anormales du plan d'eau.

On a donc écarté tout ce qui paraissait résulter de périodes

de lectures peu précises ou irrégulières, cas relativement fréquent

dans l'abondante masse de données, et qui se traduit sur les llmnigram­

mes par la présence de lignes brisées (variations journalières trop

_---B----NIAMEy

,00 T5,OO

~TOSSAyE

ï1_.ce

1

~

o

30

Comparaison des maximums de DIRE. rOSSAYE et NIAMEY

et temps de parcours DIRE -NIAMEY

(période 1943-1977)

1940 1950 1960 1970

S··0-G? 'i! l'1 1 (:)... ~. i \ --------• "'-te •• •

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-Q ­U) l'D...,.....--

;J:Q.

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""' (Il

- 31 -

régulières), de rattrapages de cotes au franchissement de deux mois •••

Les lectures ou transcriptions étourdies, les erreurs de recopie,

sont faciles à écarter, car elles sont isolées. Il est assez aisé

également, d'éliminer les singularités résultant du décalage entre

éléments d'échelle, lorsque certains de ceux-ci ont glissé, ou ont

été inclinés sous le choc d'une pirogu~ etc. Il est intéressant de

relever que une ou deux stations montrent que la présence de vent,et

de vagues, ne faussait guère la cote pendant la période agitée, mais

il n'est pas sûr que ce soit le cas partout.

Ne sont donc retenues comme anomalies que les variations inexpli-

______._ .._. quées réelles de la cote du plan d'e,au,après avoir donc écarté ce qui .... _pourrait résulter des pluies, des apports latéraux, de la propagation

de l'onde d'ouverture ou de fermeture du barrage de HARKAlA. Il

pourra s'agir soit d'une variation effective de l'altitud~ du pland'eau, soit d'un mouvement relatif plus complexe du plan d'eau et du

repère fixé à la berge. On notera que de telles variations, quand

elles existent, pe~vent facilement passer inaperçues à l'examen

des relevés, dès lors qu'il y a lectures intermittentes sur l~ terrain

et parfois lissage plus ou moinsinvolontalre des singularités lors destranscriptions ultérieures. La qualité de l'observateur et le recours

aux originaux sont ici déterminants.•

Une première constatation a été la présence de légères fluctuations

du plan d'eau, qui se retrouvent depuis DIRE jusqu'à NIAMEY. Leur

amplitude n'excède guère 5 cm, et est variable, semble-t-il, d'une

station à l'autre. Elles sont apériodiques et présentent la particula­

rité d'être en phase à des stations éloignées. Ce synchronisme est

un excellent critère de qualité des lectures aux stations où ces

fluctuations se manifestent. Elles peuvent être dues au vent, mais il

resterait à expliquer pourquoi elles sont aussi parfaitement en phase

compte-tenu de l'exposition variable des échelles. Il s'agit plusprobablement de variations dans le débit de restitution des nappes ou

dans l'évaporation, et il sera intéressant d'essayer de préciser s'il

y a ou non un rapport net avec un facteur climatique.

1

1

Le second type de fluctuations présente une amplitude nettement

plus grande, de l'ordre du décimètre ou même davantage, et consiste

en une modification brusque du plan d'eau, persistant pendant une pério­

de assez longue, une semaine à un mois ou plus, avec toutefois un

amortissement du décalage, soit régulier, soit plus brutal en fin

d'anomalie. Le retour à la situation initiale paraIt complet, et on est

tout naturellement enclin, sur le limnigramme, à lisser l'indentation

en incriminant la qualité des observations. Ce type net d'anomalies

n'est pas très fréquent, et il est évident que les quelques cas décelés

posent chacun un cas de conscience concernant la crédibilité des

lectures. Nous sommes conscients, par manque de références à d'autres

cas analogues connus, du caractère un peu avantureux des faits pré­

sentés. L'examen attentif des relevés et des conditions d'observa-

tions nous amène à faire confiance aux observateurs, et dans l'attente

d'une preuve matérielle, comme celle que pourra fournir un limnigraphe,

nous nous limitons à présenter ces anomalies comme une hypothèse de

travail. Un élément décisif d'appréciationparattbien être, toutefois,

le synchronisme parfait qui existe avec le mouvement analogue du plan

d'eau, qui peut exister, atténué, en d'autres stations, parfois

éloignées.

C'est ce que montrent les deux exemples suivants

1° Fluctuation du plan d'eau aux échelles de KORIOUME et TONDIBANGOU

du 3 au 28 décembre 1977

La figure Il compare, de février 1977 à janvier 1978, les obser­

vations à l'échelle de KORIOUME, sur le NIGER à l'entrée de la

N'DAYE, défluent du fleuve alimentant le canal de TONBOUCTOU, et

à celle de TONDIBANGOU, 3 km 1/2 plus en aval sur ce même défluent.

L'échelle de TONDIBANGOU est d'une pièce, fixée sur une pile

de pont. Celle de KORIOUME reprend 2 éléments de 1 m, en fonte, de

l'ancienne échelle de l'Office du NIGER, complétés en 1975 par 2

éléments hauts distincts, fixés sur un fer IPN battu, puis par un

élément de basses-eaux également sur IPN.

..

Anomalie de cotesà KORIOUME(et TONDIBANGOU)

1 f...............~

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AVRILMARS

• NIGER à KORIOUMEN'DAYE à TONDIBANGOU

• Différence des cotes

FEVRIER

Fig_ 11Comparaison des lectures d'échelle de KORIOUMEet TONDIBANGOU (Février 1977- Janvier 1978)

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- 33 -

La batterie d'éléments et sa borne ont posé des problèmes de

calage depuis leur mise en place, qui seront examinés en détail ulté­

rieurement, une fois en possession de tous les éléments de discussion.

Il existe également à cette station, un problème de rattachement du zéro

de l'échelle au nivellement général. Il semble bien que l'ensemble de

la batterie soit instable, mais nous ~e nous intéressons ici qu'à

l'anomalie fléchée sur le graphique.

Au-dessus de 2 m à KORIOUME, l'écart entre les cotes lues aux

deux échelles est d'environ 1,34 m. Pour la période d'un mois (octobre­

novembre) à écart rigoureusement constant, on peu avoir des doutes sur la

lecture simultanée effective des deux échelles, cet écart présentant

normalement des fluctuations aléatoires de l'ordre du cm. De fin novembre

à fin janvier les lectures paraissent effectives aux deux stations.

Du 4 au 5 décembre le plan d'eau baisse brusquement de 13 cm à

KORIO~'E, puis fluctue en position d'abord basse (tant que les cotes

dépassent 3,00 m), puis haute (pour les cotes inférieures à 3,00 m),

jusqu'au 26 décembre. La station de TONDIBANGOU dessine un mouvement

reflétant l'allure du premier, mais en plus discret. La courbe des

- écarts montre que l'écart tombe d'un jour à l'autre à ~3 m, se maintient

à cette valeur basse pendant une dizaine de jours, pour remonter progres­

sivement jusqu'à 1,41 m avant de reprendre sa valeur initiale en fin

de mois.

L'absence de lecture les 15, 16, 17 décembre à KORIOUME, correspon­

dant au franchissement de l'élément 3-4 m à l'élément 2-3 m, semble

bien indiquer que les deux éléments sont disjoints, alors même que

l'échelle de TONDIBANGOU marque un petit palier. Le 16 janvier 1978,

lors du passage à l'élément 1-2 m, on retrouve le chevauchement des

éléments 1-2 et 2-3, de l'ordre de 7 ou 8 cm, qui existait à la crue.Un nivellement de février 1976 indiquait que le zéro de l'échelle

de KORIOUME (zéro défini par rapport à l'élément supérieur 3-4 m) était

à 1,14 m sous celui de TONDIBANGOU. Le recalage des éléments interve­

nu le 10 juin 1977, rabaissait l'élément 2-3 m de Il cm et l'élément3-4 m de 12 cm, ramenant théoriquement le zéro (défini toujours par

rapport à l'élément 3-4 m) à 1,26 m sous celui de TONDIBANGOU. Si

cet écart est resté le même en décembre 1977, et si les cotes lues

traduisent un abaissement effectif du plan d'eau, l'écoulement aurait

- 34 -

dû s'inverser dans la N'DAYE pendant une dizaine de jours, situation

tout à fait inhabituelle, semble -t-il, et qui aurait eu peu de chances

de passer inaperçue.

Il semble plutôt que les variations de cote observées à KORIOUME

correspondent à un mouvement de l'échelle par rapport au plan d'eau, mouve­

ment variable selon les éléments.

Un contrôle du calage, le 7 mai 1978, quelques mois plus tard,

montrait que l'élément 3-4 m concordait sensiblement avec les deux

éléments inférieurs; l'élément 2-3 m, par contre, était descendu de

4 cm par rapport à ses voisins. Ce seul écart ne peut expliquer l'ano­

malie de décembre.

Le mouvement des cotes est retrouvé à TONDIBANGOU. C'est parfois

le même observateur, employé à l'aménagement de la plaine de KORIOUHE,

qui lit les deux échelles, mais l'écart variable qui existe du 3 au

28 décembre montre bien que les relevés de l'une ne sont pas déduits de

l'autre. Ce doubl~ aspect de l'anomalie conduit à écarter l'hypothèse

d'une succession rapprochée d'interventions involontaires (chocs ?)

ou non (plaisanterie ?) aux éléments de KORIOUME.

Peut-on au seul vu des fluctuations de cotes à KORIOUME et

TONDIBANGOU, envisager un mouvement du plan d'eau dû à l'action du

vent (agitation prolongée, ou transport en masse du type seiche) ?

Ce n'est pas compatible avec la soudaineté, puis la durée du mouvement.

L'anomalie enfin n'est pas limitée à ces deux stations. Un mouvement

plus ou moins net du plan d'eau paraIt lui correspondre en des stations

éloignées. GOURMA-RHAROUS, à 120 km en aval, indique en décembre un

fléchissement des cotes, comme à KORIOUME. Il commence et finit plus

progressivement. Mais son amplitude maximale, qu'on peut estimer à une

trentaine de centimètres entre les 10 et 15 décembre, est au moins aussi

importante qu'à KORIOUME. On ne peut, bien sûr, écarter a priori la

possibilité de lectures erronnées colncidant avec la singularité des

deux stations voisines.

1

1

- 35 -

2° Anomalie de cotes à DIRE du 26 janvier au 21 février 1976

La cote du plan d'eau à DIRE passe brusquement de 4,30 m le

31 janvier 1976 à 4,54 m le 1 février, pour retomber, trois semaines

plus tard à une valeur "normale" sur le limnigranrne (fig. 12). Le

mouvement dessiné est celui d'une petite intumescence double, alors qu'il

n'y a pas de précipitations et d'apports latéraux. Cette remontée

brutale de 24 cm a été précédée d'un léger fléchissement des cotes, fin

janvier. La coincidence de cette variation avec le début du mois fait penser,

à première vue, à des lectures mal assurées, con~e les trahissent assez

souvent les transitions de mois. Pourtant les relevés de février

paraissent correctement faits.

Nous conclurions néanmoins à des lectures fantaisistes si nous ne

trouvions, parmi les stations voisines, quelques indices confirmant les

fluctuations de cotes. C'est ainsi qu'à 50 km en amont, la station de

TONDIFARMA révèle un mouvement plus discret, mais de même allure, et au

même moment. Sur le graphique 12, les cassures A et B sont parfaitement

synchrones. A TOSSAYE, pourtant très éloignée, une petite bosse sur le

limnigranrne, de 5 cm environ pendant une vingtaine de jours, correspond

à l'anomalie de DIRE.

Ces fluctuations concomittantes n'ont rien de spectaculaire, mais

elles paraissent bien réelles, et donc singulières car difficiles à

rapporter inrnédiatement à une cause connue.

S '·agit-il d'ondes internes, amenant un relèvement effectlf du

plan d'eau? Ce n'est guère possible sur des durées aussi longues. Nous

pensons plutôt là aussi, à la possibilité d'un mouvement relatif et

réversible du fleuve et de sa berge, sous l'effet de contraintes

tectoniques.

Outre le limnigraphe, outil permettant de matérialiser les

mouvements supputés, un dispositif de vérification simple et précis

consisterait à niveler périodiquement les bornes existantes (ou à

installer) sur chacune des rives du fleuve, de préférence lors d'une

singularité en cote apparaissant à l'échelle de DIRE.

i;'.

1

pas

est

- Jb -

Un troisième type d'anomalie de cotes, que nous ne comprenons

bien et pour lequel nous n'avons pas encore d'explication assurée,

celui qui est décelé dans la liaison BOUGOUBERI-DIRE.

Ces deux stations, à 25 km de l'autre, présentent, comme indiqué

en 1977, une bonne corrélation de leurs maximu~sannuels. Par contre en

crue et en décrue, la liaison entre cotes est bien plus lâche. Un examen

détaillé en cours montre combien cette liaison peut varier d'une année

à l'autre. Le fait que BOUGOUBERI soit sur le BARA-ISSA, 7 km en amont

du confluent avec l'ISSA-BER, ne paratt pas suffisant à expliquer

cette instabilité, pas plus que l'incertitude qui existe quelquefois sur

la qualité des lectures de BOUGOUBERI. Le rattachement, en cours, de cette

échelle au nivellement général, et donc à celle de DIRE, fournira un

élément de discussion important.

En résumé, un certain nombre de faits hydrologiques, les uns

solides, les autres plus ténus, conduisent à la discussion de l'éventua­

lité de déformations temporaires du sol affectant une région assez

étendue. Cette hypothèse devra être confrontée aux faits autres

qu'hydrologiques.

Dans cette hypothèse, le type de mouvement qui affecterai~ les

accidents nécessairement impliqués (failles) serait assez particulier,

ni extrêmement lent et continu, ni brutal et irréversible comme lors d'un

séisme•. Il constituerait plutôt un cas intermédiaire.

L'absence de références biU[ographiques précises rend circonspect,

mais par ailleurs la réversibilité apparente du mouvement, c'est-à-dire

le retour approximatif à l'état initial, n'exclurait pas formellement

sa possibilité, puisqu'il pourrait s'écouler ainsi un temps assez long

avant que ne se manifeste, par accumulation des résidus de chaque

épisode particulier, une déformation locale permanente de quelque

importance.

Ce ne sont évidemment pas de telles ~ingularités, affectant de

temps à autre certaines stations, qui peuvent expliquer directement

la déformation de la crue constatée entre le Delta Central et

NIAMEY, mais nous nous demandons si elles ne pourraient pas servir de

- 37 -

fil conducteur dans la recherche d'une cause plus générale faisant

sentir ses effets à une autre échelle, c'est-à-dire ayant amené un

ensemble de petites déformations ou modifications locales affectant

l'ensemble du cours moyen du NIGER pendant plusieurs années.

1- 38 -

III - ETUDE t10RPHOLOGIQUE AU NIVEAU DU LAC DEBO

l'étude morphologique réalisée par le Professeur GALlAIS, à la

suite de sa mission sur le terrain de nobembre 1977, concerne la partie

amont de la zone d'étude. Elle comporte une analyse de l'évolution

morphologique du lac DEBO et de ses émissaires, et de l'évolution des

formations végétales du lac (bourgoutières). Elle comporte également

une analyse des systèmes de cultures hydrauliques en cycle de crues

faibles sur l'ensemble de la zone lacustre, ainsi que l'orientation à

donner aux reconnaissances en aval du lac DEBO.

Nous présentons ici tous les éléments pouvant guider la recherche

des causes des anomalies.

Précisons qu'à la suite de J. GAlLAIS nous limitons l'application

du terme de Delta intérieur à la cuvette en amont de l'Erg de NlAFUNKE.

les hydrologues ayant pris l'habitude d'étendre le terme de Delta ou de

Cuvette à la zone d'inondation depuis KE-MACINA en amont jusqu'à son

extrémité aval, à la hauteur de TOMBOUCTOU, nous avons parlé indifférem­

ment de Cuvette lacustre ou de Delta central, réservant le terme de

Delta intérieur à la moitié sud de la Cuvette.

3.1. - Evolution morphologique du lac DEBO et de ses émissaires : ISSA-BER, BARA­

ISSAR, KOlI-KOlI

Au départ du lac Débo une reconnaissance a été faite en novembre

1977, sur chacun des émissaires. les photographies aériennes de 1952, 1969,

1974 (cette dernière campagne ne couvre pas malheureusement la partie

de l'Issa-Ber qui nous intéresse) ont été comparées.

l'évolution générale du lac Débo est la suivante. Il subit une

réduction progressive qui va dans le sens général de son évolution depuis

le Quaternaire ancien. Grâce aux systèmes de levées anciennes formant

les paléo-deltas Dialloubé et Dintaka datant respectivement de l'avant­

dernier et du dernier Pluvial on peut reconstituer les "Débo" anciens,

lacs plus étendus que l'actuel et dont les rivages étaient sensiblement

- 39 -

plus au Sud. le Débo actuel recouvre les premières dunes arasées de

l'erg, ce qui explique les caractères dunaires du matériel sableux

constituant la plus grande partie du plancher lacustre. la réduction

actuelle du Débo se fait selon les processus suivants.

la Aux débouchés des divers bras du Hlger et du Diaka les charriages

de fond sableux sont ralentis par suite de la réduction des pentes en 10A!,l

Sur ces éléments sablo-limoneuxdes levées plus fines s'édifient péné­

trant le lac en pointes ou en pattes d'oie. le déplacement des bouches

assure un certain étalement frontal de cet alluvionnement. la sédimenta­

tion est facilitée par la colonisation végétale en cycle de crues fortes

(voir supra).

20 Aux hautes eaux les émissaires du lac Débo font goulot d'étranglement

et la crue remonte d'aval en amont inondant à partir du lac les bour­

goutières de la rive méridionale. Ce mouvement des eaux s'accompagne

d'une sédimentation fine de ces bourgoutières et particulièrement de

leur front. la partie Sud du lac est ainsi en cours d'alluvionnement.

le lac Ouallado est en voie de colmatage blen observable par la coloni­

sation végétale réalisée entre 1952 et 1969. Au Sud des bouches du

Diaka des vasières étendues garnissent le cul de sac méridional.

Entre le Ouallado et le Débo le marigot lialdé traverse une bande

élargie de bourgou. Fragmentation et réduction des nappes d'eau libre

résultent de la sédimentation fine réalisée sur le rivage Sud du

Débo. Processus accéléré par la colonisation végétale lors des crues

fortes, mais indépendant de celle-ci dans ses causes premières.

)0 la partie Nord du lac est occupée par le haut-fond de Sambéri, cons­

titué par des sables en tout point semblables à ceux des dunes cons­

tituant le rivage Nord *. A ce haut fond s'accrochent des bancs de

sable qui transitent le long du chenal et qui réduisent celui-ci en

étiage à un étroit filet de vingt à trente mètres de largeur. le

matériel de ces bancs est comparable à celui observé dans les seuils

sableux du Niger pour la partie amont et moyenne du lac. les bancs

accumulés dans l'entonnoir d'embouchure de l'Issa-Ber, entre

Youwarou et Sobé, sont par contre plus grossiers et leur matériel

comporte une part de sable arraché au haut fond de Sambéri. Ceci prouve

une reprise érosive de fond et en bordure de chenal pour la partie

Nord-Est du lac.

* GAlLAIS (J) - 1967 - le Delta intérieur du Niger. Etude morphologique.Mémoires et documents du C.N.R.S., Etude granulométrique et morphosco-

- 40 -

Au total le lac Débo évolue sous trois processus principaux :

• colmatage par alluvionnement de la partie Sud,

• accumulations sableuses transitant lentement dans la partie centrale,

• érosion de fond et de rive de chenal dans la partie Nord-Ouest, à

proximité de l'embouchure de l'Issa-Ber.

Un chenal continu tend à s'organiser d'amont en aval, simple lit mineur

en travers des plaines faiblement submergées du plancher lacustre.

Les observations faites en crue aux embouchures des trois émissaires

ont été les suivantes :

ISSA-BER

Entre Akka, et Attara la coupe observable des hauts de berge atteste

généralement une érosion vigoureuse. Les affouillements sont très vigoureu~

tant dans le matériel sablo-limoneux des levées anciennes insubmersibles,

que dans celui limoneux des levées fonctionnelles. La comparaison entre

. les photos de 1952 et 1969 ne révèle aucun développement particulier des

systèmes de levée, ni rétrécissement du lit en étiage, ni accumulation

renforcée de seuils en aval du goulot Ombolloré-Akka. La berge de la

levée ancienne sur laquelle se trouve Imguem a subi de 1952 à 1975 une

certaine régularisation preuve d'efficacité érosive.

BARA-ISSAR

Un affouillement de rive vigoureux s'observe au niveau de Courao­

Marka dont les habitants renforcent la berge par des claies sommaires.

Un peu plus en aval jusqu'à Avoye des alluvions de crue sont en cours de

colonisation végétale. Sur la rive gauche de Quoro à Doma, la dune est

précédée d'une banquette en pente douce coloni~ée par des Cypéracées.

KOLI-KOLI

Le Koli-Koli a été remonté de Sendégué au lac de Korientzé. La

bourgoutière parcourue qui sépare les lacs Débo et Korientzé s'est

densifiée entre les photos de 1952 et celles de 1969. Un écran de bourgou

- 41 -

nous a empêché d'aborder à Bokoré, en 1977, alors que cela était

possible en 1960. Cependant plus à l'Est, de Kérétogo à Tiékouraré, la

bourgoutière s'est rétrécie dans les vingt dernières années. Au total

il ne semble pas y avoir de modifications importantes dans l'embouchure

du Koli-Koli.

les photographies aériennes de la campagne Mali, 1974-1975, permettent

une excellente observation de la situation aux basses eaux (prise de vue

en mars et avril) en particulier de l'état des lits mineurs.

PourlISSA-BER, les photos manquent d'Aoré à Attara. Mis à part cette

section dont on ne peut rien dire, l'écoulement n'est entravé par des

seuils importants qu'en un seul endroit (3 km en amont de Doua). Sur le

reste du chenal le lit mineur demeure bien calibré. Par contre le bras

d'Ambiri, défluent de l'Issa-Ber sur la rive d~oite, est colmaté par

de nombreux seuils.

le BARA-ISSAR est tronçonné en mouilles d'Awoye à Margou. Plus en

- aval la décrue des cuvettes parcourues par le Koli-Koli, le Mayo Doyo

et le Kundarawol soutient l'écoulement. A partir d'avril un seull

interrompt l'écoulement du Koli-Koli vers le Bara-Issar au niveau d'Oré

Aya.

le KOlI-KOlI n'a pas d'écoulement continu à partir de mars. le lac

Korientzé est réduit à une nappe d'eau résiduelle coupée du chenal encore

en eau qui ne commence qu'au niveau de Korientzé. Celui-ci est interrompu

d'Obom à Oré séno Dara, puis par plusieurs seuils jusqu'au confluent

avec le Bara-Issar.

_ En conclusion, observations de terrain et sur photographies aérien­

nes permettent d'estimer qu'une redistribution importante des débits entre

les trois émissaires du Débo au départ du lac est improbable. l'Issa-Ber

demeure le bras le plus puissant et rien n'indique entre le Débo et Issa­

Fay (confluent de l'Issa-Ber et du Bara-Issar) un glissement de l'écoule­

ment au profit des bras plus orientaux. Ceci infirme l'hypothèse de recher­

che avancée en début d'étude.

1

11•

- 42 -

3.2. - L'évolution des bourgoutières dans les lacs DEBO et OUALLADO

Celles-ci sont en continuelle évolution suivant les cycles

hydrologiques de crues fortes ou de crues faibles. Sur cet équilibre

biologique interfère l'exploitation des pâturages par le bétail qui,

au-delà d'une certaine limite, est un agent très actif de dégradation

ou de modification floristique. Une carte morpho-botanique à l'échelle

du 1/50 000 a été rédigée.

De 1952 à 1960, les bourgoutières du Débo s'étendent et se densi­

fient. La colonisation végétale colmate toute la partie méridionale du

lac Débo de deux manières : le long des affluents des lacs - sur tout le

front de la prairie au Sud du lac Débo.

la colonisation végétale le long des affluents est observable surtout

à l'entrée principale du lac entre Sendégué et Courao (Mayo SagoI -

AIré Kadié) au débouché du Diaka dans le Ouallado. A Mayo Sagoi la pointe

du bourgou a progressée de 250 mètres entre 1948 et 1960.

la barrière végétale qui limite la surface d'eau libre au:Sud du

Débo s'épaissit et se régularise. Nous expliquions (ouvrage précité) ce

phénomème par une sédimentation fine localisée sur la rive Sud du lac

du fait d'un mouvement de masse des eaux en crue qui, bloquées vers

l'aval par l'étroitesse des bouches des émissaires s'épandent vers le

Sud dans le Ouallado.

De 1960 à 1969, entre nos observations de 1960 et la couverture

aérienne de 1969-1970 de sensibles différences apparaissent. A l'entrée

du lac certains bourrelets de rive ont progressé (Mayo SagoI). Par

contre, le rocher d'AIré Kadied entouré de bourgou en 1960 est dégagé

en 1969. l'embouchure comprise entre Roundé Afal et Déo TuondoI a

progressé mais celle de Déo TuondoI a régressé. De Déo TuandoI à

Tialdé (débouché de marigot reliant le Ouallado au Débo) le front du

bourgou s'est densifié et régularisé.

- 43 -

La surface d'eau libre dans le lac Ouallado a subi une sensible ré­

duction sous une colonisation végétale considérable, tant au Sud qu'au

Nord du Débouché du Diaka.

Le bourgou des bourrelets de rive du Diaka qui avait progressé

d'environ 2 kilomètres entre 1904 et 1952, s'est étiré d'un kilomètre

supplémentaire entre 1960 et 1970. Au total la période enregistre :

• dans le détail des modifications en sens opposé dû à l'instabilité

du réseau hydrographique, caractéristique des deltas littoraux ou

intérieurs, en particulier certains chenaux affluents au lac disparais­

sent, d'autres prennent de l'importance•

• dans l'ensemble, le renforcement de la colonisation vététale sous

la forme bourgou, c'est-à-dire l'association Echinochloa stagina ­

Echinochloa pyramidalis - Polygonum lanigerum.

Sur la rive Nord du chenal le haut fond de Sambéri, matériel sableux

étalé horizontalement, provenant de l'arasement des dunes submergées qui

constituent le plancher lacustre, semble s'être renforcé par des accumu­

lations sableuses formant guirlande et qui sont des bancs de chenaux,

matériel provenant d'amont.

De 1969 à 1977, les observations ponctuelles réalisées en pirogue n'on'

pu être reliées par l'observation aérienne, le vol prévu a dû être annulé

pour vent de sable. Elles permettent cependant de penser à un recul sensi­

ble du bourgou.

• AIré Kadied est abordable directement côté Nord.

• La butte d'AIré Soroba permet d'observer une nette dégradation du

bourgou , au Nord-Ouest et à l'Est de vastes surfaces d'eau libre ou

de prairies discontinues s'étendent en place de la prairie aquatique

dense.

• Les levées alluviales anciennes situées au Sud de Soroba (Delta ancien

Dialloubé, Delta ancien Dintaka) constituées de bourrelets de rive

non submergés, ou très faiblement submergés, portent de vastes

surfaces dénudées au détriment de la savane à vétivert qui lesoccupait.

111

1

1

- 44. -

• Les bourrelets de rive actuels de Memaré, Mayo-SagoI à l'extré­

mité Est du lac Débo sont par plages dénudés.

Une des formes les plus spectaculaires et les plus néfastes au point

de vue agrostologique est la diffusion d'une mimosée. Celle-ci est

appelée GandiandjI par les Peul ce qui correspondrait à Acacia nilotica

variété tomentosa d'après la florule de Boudet. La terminologie ver­

naculaire étant approximative il n'est pas certain que l'identification

de Boudet s'applique aux mimosées observées. Une identification anté­

rieure donnait Mimosa asperata L *, et les agrostologues de l'ODEM

(Office de développement de l'élevage de la région de Mopti) le con­

firment sous l'équivalent Mimosa pigra. L. Cet arbuste est abondant

sur les rives du Bani et plus généralement sur la berge des bourrelets

de rive dans l'ensemble du Haut et Moyen Delta.

Dans le Delta aval il a été observé dans les années 1960 couvrant UI

partie du haut fond de Sambéri et sur l'Ile de Roundé Akka dans le

Débo, où il constitue un boisement affleurant aux hautes eaux, décou­

vert à partir de février et si dense qu'il est impénétrable. Sa

propagation récente semble rapide sur les bourrelets de rive dénudés

en particulier entre Sendégué et le lac Débo depuis une dizaine d'années

Une enquête auprès des éleveurs de Sendégué a révélé que sur 48 bour­

goutières 24 sont envahies par le GandiandjI.

Cette invasion de Mimosa asperata est incontestablement liée aux

conditions hydrologiques qui ont prévalues depuis 1970 (à Niamey

modules inférieurs à 1 000 m3/s de 1978 à 197~. La faible submersion

des bourrelets de rive et le surpaturage par les troupeaux contraints àune descente précoce dans le bourgou par la disparition des paturàges

sahéliens, se sont combinés pour dégrader le bourgou. Les "dalé"

bourrelets de -rive asséchés plus vite que les cuvettes, sont utilisés

par les troupeaux pour la pénétration et comme lieu de repos nocturne

dans le bourgou. Ils furent dénudés et sur le matériel de limons

* GALLAIS (J.) - 1967 - Le Delta intérieur du Niger. Etude de géographie'

régionale. Mémoires de l'I.F.A.N., p. 71.

1

- 45 -

grossiers qui constitue la sédimentation des sommets de rive, les

graines de Mimosa asperata transportées par le courant s'accrochent.

L'arrachage de l'arbuste est difficile et la coupe doit être faite

annuellement si on veut éviter une propagation. Le Gandiandji n'a

d'intérêt fourrager que pour le petit bétail et les dromadaires.

Sa propagation a donc des conséquences pastorales facheuses.

Il ressort de ces diverses observations que les bourgoutières du

lac Débo évoluent selon les cycles hydrologiques précis. Depuis 1969

la tendance est à la dégradation de la savané inondée. Cependant le

phénomène, s'il a une portée économique évidente pour l'élevage, ne

semble pas une ampleur suffisante pour avoir des conséquences hydrolo­

giques et contribuer aux anomalies dont la cause est recherchée.

3.3. - Conclusion

Dans l'état actuel de nos observations il s'agit moins de con­

clusion que d'un état de nos opinions, que le travail ultérieur peut

modifier et que la discussion avec les différents spécialistes pour­

ra infléchir.

1° Un premier groupe d'observations peut être centré sur la situation

résultant du cycle de crues faibles connu entre 1971 et 1977. Ce

cycle de crues faibles a incontestablement provoqué une dégradation

du milieu végétal si original du Delta intérieur.

Le bourgou est dégradé plus nettement que ne le laissait penser

la lecture de certains rapports d'agrostologues. Ceux-ci ayant fait

leurs observations près de Mopti, nous pensions que le désurpaturage

et la coupe d'herbe expliquaient localement la dégradation et que

1

11

1

- 46 -

les grandes bourgoutières du Débo pouvaient résister aux conditions

climatiques et hydrologiques de la grande sécheresse. En réalité,

ces bourgcutières sont nettement dégradées. Les observations plus

anciennes ont permi la mise en évidence de cycles de progression

ou de dégradation démarquant les cycles hydrologiques.

2° La recherche des causes des anomalies de la crue du Niger a engagé

un certain nombre d'observations sur le terrain. Celles-ci n'ont

pu couvrir l'ensemble des hypothèses de travail avancées dans le

programme.

Le rôle des aménagements agricoles? Si l'ano~~lie se situe

effectivement entre Niafounké et Tosaye ce sont les aménagements

de cette section qu'il convient d'observer. Cela sera un des objectifs

de la seconde mission. De Ké-Macina au Débo nous ne croyons pas

que les aménagements réalisés aient une incidence sur le régime du

Niger étant donné le rapport des surfaces en casiers aux surfaces

inondables hors-casiers, approximativement 30 000 ha sur 2 000 000 ha.

La dégradation de la végétation des plaines d'inondation? On

conçoit aisément qu'une plaine dénudée pondère moins le régime de

la crue qu'une savane dense inondée. Là encore les observations font

défaut pour la partie aval. Pour la section amont du Débo la dégra­

dation observée, bien que très notable, ne nous semble pas suffisante

pour modifier le rythme et les volumes de l'écoulement fluvial.

Les remaniements dunaires ? Certains ont été signalés tant sur

les zones d'anciens champs sur les dunes que sur les fonds lacustres

sous forme de remaniements éolien du matériel limono-sableux. Cependan1

le problème se pose surtout en aval de Tombouctou, là où les dunes

subvives constituent un des éléments de l'immédiat cadre morpholo­

gique de la crue. Les observations seront faites dans cette région.

Les observations réalisées dans le domaine morphologique au

niveau du lac Débo ne révèlent pas de modification sensible dans le

partage des eaux entre les trois principaux émissaires. L'Issa-ber

semble doué d'une force érosive sur les berges plus vigoureuse

- 47 -

aux hautes eaux que le Bara-Issar : observation qui doit être

complétée en étiage et qui, de toute façon, demeure qualitative.

les couvertures photographiques récentes 1969-1970 confirment

l'évolution du Débo que des observations en 1960 nous avaient permis

d'évoquer : remblaiement par colmatage du fond lacustre, érosion

régressive à partir du chenal de l'Issa-Ber dans la partie Nord­

Ouest du lac. là encore l'observation en étiage est indispensable.

Dans l'état actuel de nos observations morphologiques nous ne

disposons pas d'indice d'un glissement des débits vers les émissaires

orientaux au niveau du lac Débo. Dans ce cas et s'il y a effective­

ment court-circuitage de Diré par défluence vers l'Est, la prise de

défluence aurait lieu plus en aval et les modifications seraient

à rechercher dans le triangle Issa-Fay (confluence Bara-Issar,

Issa-Ber), Saré Yamou, Koryoumé. les photos aériennes d'avril 1975

montrent un incontestable "engorgement" des mares et marigots de

cette région.

les mesures de débit, et l'enquête faite depuis fin 197Lsur

le réseau défluent contournant DIRE, ne permettent pas de confirmer

(cf. 2.2) l'hypothèse d'un renforcement actuel du débit défluent.

Elles infirment donc également à ce niveau l'hypothèse d'un glissement

très récent du réseau vers l'Est.

- 48 -

IV - HYPOTHESE DE f.10UVHIENTS DU SOCLE ET

D'UNE TECTONIQUE ACTUELLE

Ce chapitre aborde les divers aspects susceptibles d'éclairer

les faits et interprétations hydrologiques et morphologiques précé­

dents. Les spécialistes des disciplines concernées ie trouveront obli­

gatoirement disparate, incomplet ou trop laconique. Il s'agit ici

essentiellement de regrouper les données qui permettent d'entrevoir

une explication rapide et cohérente au problème hydrologique posé.

Les hypothèses formulées ne seront pas di~cutées en détail.

Nous sommes cependant dès à présent reconnaissant à chacun des

critiques et observations que ces hypothèses peuvent entra!ner, car

nous sommes loin d'être en possession de tous les éléments permettant

une synthèse assurée. La thèse qui semble se dégager a diverses impli­

cations de nature à mobiliser, à un moment ou un autre, un pius

large concours de spécialistes.

Précisons que l'auteur, hydrologue de formation géologique, rédige

ce chapitre après .avoir consulté, principalement et peut-être trop

hâtivement parfois, les travaux des auteurs suivants

- pour la géologie: R. Chudeau, H. Hubert, Th. Monod, R. Dars,

C. Palausi, H. Radier, M. Desfossez, M. Zimmermann, C. Bense,

R. Reichelt

- pour la géomorphologie: Y. Urvoy, J. Tricart, J. Callais,

S. Daveau ;

- pour la géophysique: Y. Crenn et J. Rechenmann (fossé de CAO et

plaine du CONDO) et J. Rechenmann (région de NARA et bordures de

la Cuvette lacustre).

Nous bénéficions aussi de l'apport des pédologues de l'ORSTOM, des

spécialistes s'étant intéressé au tracé ancien du fleuve (S. Christoforof

C. Auvray) ou à son histoire (R. Mauny, J. Daget).

1

- 4~ -

4.1. - Interférence des facteurs climatiques et tectoniques

Nous ferons d'abord une remarque d'ordre général.

L'histoire géomorphologique d'une région s'analyse grâce à trois

types de facteurs, d'importance moyenne variable selon l'échelle tempo­

relle ou spatiale considérée :

- des facteurs bio-climatiques (variations de la pluviosité

surtout) ;

un facteur eustatique (variations du niveau marin)

- des facteurs tectoniques (mouvements isostasiques ou épeiro­

géniques).

Leurs rôles respectifs sont souvent difficiles à distinguer.

L'analyse introduit habituellement une hiérarchisation qui paraIt

résulter, pour une part, de la latitude plus ou moins grande laissée

à chacun de privilégier tel ou tel facteur.

De fait on retrouve pour le NICER l'ordre analytique habituel

fluctuations climatiques, variations du niveau de base (ici il s'agit

du niveau des quelques seuils du fleuve, surtout celui de TOSSAYE),

mouvements tectoniques. Cette hiérarchisation n'est pas exempte de

risques dans une région deltalque que l'on sait a priori pouvoir être

mobile, comme d'autres dans le monde, et où les cotes dont on dispose

montrent que de faibles modifications altimétriques peuvent introduire

la création ou la disparition de bras importants du fleuve, indépendam­

ment des colmatages alluviaux ou éoliens.

Il est tout-à-fait possible que ce soit par suite de simples

fluctuations climatiques que le bras de T~1BOUCTOU n'aille plus à

ARAOUNE comme il y a quelques siècles, ou que l'ancienne province

du MEMA, à l'ouest du lac DEBO, soit totalement asséchée, alors qu'elle

était inondable et peuplée sous l'Empire du HALl (notre Moyen-Age).

Mais il est possible aussi que des déformations de modeste amplitude

du Delta intérieur, qu'a pcri~s J. CAlLAIS, aient suffi à provoquer

les coupures actuelles.

1

- 50 -

Il n'est donc pas sûr que ce soit un dessèchement récent qui

explique que certaines régions éloignées du fleuve, irriguées naturel­

lement à l'époque historique, ne le soient plus aujourd'hui.

La discussion concernant l'évolution précise du niveau du seuil

de TOSSAYE dans un passé récent, est tout aussi difficile. Enfin la

branche nord-sud du NIGER emprunte le fossé tectonique crétacé de

GAO, et une évolution récente de cette portion du fleuve ne pourrait

surprendre.

Dans la reconstitution de l'histoire récente du bassin du

NIGER, les modifications climatiques et une possible évolution tectoni­

que doivent donc être examinées avec la même attention.

Il semble par ailleurs qu'une évolution en apparence typiquement

morpho-climatique puisse refléter une évolution structurale. Et nous

avons été amenés à examiner deux hypothèses qui, si elles étaient

confirmées, expliqueraient certains traits majeurs du paysage de la

- Cuvette et de ses bordures.

Bourrelets de berge

Certains bourrelets de berge pourraient avoir une origine mi­

sédimentaire, mi-tectonique.

Ils paraissent, sur photos aériennes, souligner un contact

faillé, et constitueraient donc des structures rectilignes relative­

ment stables, servant d'ancrage à des levées en éventail plus mobiles.

Ils paraissent également former la berge de certaines parties rectili­

gnes dufteuve, qu'ils séparent parfois (région de TONKA, ou de TINDIRMA)

de longues cuvettes parallèles au lit.

Dunes anciennes

Les grandes dunes longitudinales fixées, orientées E-W à ENE-WSW,

seraient pour la plupart, induites par un réseau de fractures du socle,

aussi bien dans la Cuvette (erg de NIAFUNKE et cuvette de rIRE) que

sur ses marges (nord du MACINA et monts de NIAFOUNKE-GOUNDAM à l'ouest,

GOURMA à l'est). Elles seraient donc à distinguer des dunes de rive

fixées par le fleuve ou les lacs. Toutefois les dunes rectilignes de la

1

1

1

t

- 51 -

Boucle du fleuve et celles longeant les lacs triangulaires effilés

(TANDA, FAGUIBINE, NIANGAYE, GAROU, HARIBONGO) pourraient être à la

fois dunes de rive et dunes "tectoniques".

En serait-il de même plus au nord, où ces grands cordons dunaires

sont vifs? ou plus à l'ouest, dans le HODH et au SENEGAL ? A priori

nous n'en savons rien, mais l'hypothèse nous paratt devoir y être

examinée, de même qu'au NIGER et au-delà. Ces dunes soulignent des

directions structurales, et leurs changements de direction s'explique­

raient mieux par un,conditionnement tectonique, que par des changements

de la direction dominante du vent.

Nous connaissons ces grandes dunes rectilignes dans le nord de

la Haute-Volta, où elles sont est-ouest. Plus à l'est, elles s'incurvent

progressivement vers le sud-est, soulignant à proximité du NIGER, la

fracturation tectonique qui semble affecter le cours du fleuve.

Nous connaissons également ces dunes, consolidées en grès et

d'âge stampien, dans le Bassin Parisien, essentiellement en Seine-et­

Marne, où elles recouvrent le Calcaire de Brie à l'est de la-Seine et

surtoutà l'ouest, dans le Massif de FONTAINEBLEAU. Elles ont été

magnifiquement étudiées avant-guerre par H. Alimen, et nous verrions

également là, pour expliquer leur disposition, une fracturation du

substratum sensiblement contemporaine de leur mise en place.

La double hypothèse ci-dessus conduit donc à envisager comme

spatialement stables, certains bourrelets ou levées alluviales d'une

part, les grands cordons dunaires d'autre part, ce qui ne signifierait

pas que ces formations ne puissent subir des remaniements importants

lors d'épisodes climatiques successifs. Elle expliquerait par là-

même que les accidents tectoniques supputés soient peu visibles sur

le terrain, puisque toujours largement oblitérés par les formations

meubles induites, fluvio-sédimentaires ou éoliennes.

Des formations d'origine essentiellement climatique pourraient

donc masquer et révéler tout-à-Ia fois des accidents sous-jaccent~,

f~illes ou aéocochements, ou simples fractures.

'",

1

- S2

Nous sommes conscient d'inverser ici la démarche habituelle

expliquant la mise en place du réseau hydrographique actuel, essentiel

lement par des facteurs climatiques, et par la désorganisation intro­

duite par les formations dunaires. Nous ne minimisons pas l'importance

déterminante de ces éléments dans la dynamique du fleuve, mais nous

sommes enclin à rechercher si un conditionnement structural plus

étroit que celui décrit jusqu'ici, ne pourrait pas éclairer l'histoire

du bassin, et expliquer directement les modifications importantes de

tracé, modifications que nous rencontrons ailleurs, sous climat diffé­

rent et en l'absence de toute formation dunaire.

Les grandes dunes longitudinales souligneraient en somme le tracé

du réseau hydrogra~n~4ue, mais ne l'expliquerai~ntpas. Elles nousparaissent simplement subordonnées comme lui aux conditions litholo­

giques ou topographiques préexistantes, régies par des facteurs

structuraux.

4.2. - Indices de terrain à l'appui d'une tectonique actuelle

L'histoire complexe du bassin du NIGER, esquissée,voir~ large­

ment reconstitué~,par les divers auteurs, s'appuie sur des observations

de terrain et sur des éléments historiques qui ont été interprétés

de manière parfois divergente, et autorisent donc un réexamen, mais,a condition de ~isposer d'un nombre suffisant de faits nouveaux.

Nous livrons les quelques observations de terrain constituant

un faisceau d'iridices appuyant l'hypothèse d'une certaine évolution

tectonique actuelle de la zone d'étude. Il s'agit bien ici de

simples indices, car les observations, relatives à des domaines variés,

n'ont été ni systématiques, ni approfondies. L'interprétation qui en

est proposée soulèvera inévitablement des objections, que seules

des investigations complémentaires pourront lever. Nous fournissons

en annexe quelques clichés, regroupés en trois planches.

- 53 -

1° Effondrements et fentes

A nos questions concernant d'éventuelles manifestations

récente~ pouvant traduire des contraintes tectoniques dans la Cuvette

ou ses marges, H. HOYERSON, pastoraliste de l'ODEM, a pu répondre en

nous signalant l'information recueillie dans la région de NAMPALA

(ancienne province du MEMA), faisant état de l'ouverture très récente

d'une large fente remplie d'eau salée.

Nous la localisons à 6 km environ au sud du village-campement

peul de DJENGENA, quelques km à l'est de TOLAGIE et une trentaine

de km à l'est-sud-est de NAMPALA. Elle s'est ouverte discrètement

lors de l'hivernage 1977, dans un sol sablo-argileux horizontal. Elle

est orientée 60° E, atteint 150 m de long, plusieurs mètres de

large, 1 à 5 m de profondeur et est encore partiellement remplie d'eau

salée (photos du haut de la planche 1). Elle comporte au sud-ouest un

large diverticule à 160° E terminé par un effondrement circulaire

r'doline") asséché de 10 m de diamètre et 2,5 à ) m de profondeur.

Le phénomène est analogue à ceux connus dans l'Arizona-ou en

Californie, et peut résulter d'une compaction, dans des sables argileux

salifères, provoquée par les fluctuations de la nappe (donc d'ori-. .gine uniquement climatique). Hais il peut aussi s'agir d'une figure

de distension révélant en surface la proximité d'une faille.

Les effondrements ne sont pas rares dans la région, surtout vers

le sud. Ils sont en général moins allongés et sont désignés par le

vocable peul de "bidi". Les mares au sud et à l'est de NAMPALA

pourraient constituer, en grand, des formes du même type, colmatées

par l'érosion. L'ensemble correspond à une direction structurale

WSW-ENE. Il est à noter aussi dans le triangle NAMPALA-BOULEL-DIABATA

l'intrication singulière de puits profonds, les uns salés, les autres

d'eau douce.

- 54 -

Une autre doline du même type que la précédente, de 7 à 8 m

de diamètre, et ouverte au cours de la saison sèche 1977-78, a pu

être localisée dans le sol argileux qui borde au sud la longue

dune de BANGUITA, environ 60 km à l'ouest uu ide ~L30.

Le Professeur DAGET nous a appris l'apparition dans les années

50, d'un effondrement analogue, rempli d'eau salée, non loin de

la route de SEGOU à BAMAKO.

La Cuvette lacustre, elle-même, peut présenter des affaisse­

ments de ce type, dont l'apparition, masquée par la crue, est peu

perceptible.

Enfin, à l'est du fleuve, dans le SENO (plaine du GONDO) qui

s'étend au pied de la falaise de BANDIAGARA, nous connaissons les

effondrements de type karstique, parfois spectaculaires (cratère

d'IRMA, puits de GASSAN), qui peuvent révéler une évolution tecto­

nique actuelle.

Le cas énigmatique des fentes du lac FAGUIBINE à sec mérite

une mention particulière. Le chef du village d'ARIEY nous a con­

firmé les phénomènes de combustion signalés depuis le début du

siècle, et relatés par Th. MONOD et G. PALAUSI dans leur description,

en 1961, de manifestations fissurales très récentes, de laves à

néphéline dans les DAOUNAS, au sud du lac. Le Professeur MONOD a

bien voulu nous indiquer que la présence de néphéline était remise

en ëause, ce qui peut modifier fortement la présomption de lave et

donc de volcanisme. Nous ne souscrivons cependant que difficilement

à l'hypothèse avancée par ailleurs, de feux de tourbes, ne serait-

ce qu'en raison des conditions particulières de gisement, minutieu­

sement étudiées. Ne faut-il pas rechercher une solution originale

au problème, conciDant l'aspect intrusif du phénomène et la nature

combustible du matériau injecté ? Outre son intérêt intrinsèque, le

problème requiert l'attention car il peut recouvrir un mécanisme

tectonique.

- 55 -

,

2° Fracturation récente

La mauvaise tenue des berges du fleuve, entratnant des affais­

sements et la fissuration de certains ouvrages (quais, bâtiments)

n'est pas un indice très décisif, car les formations alluviales

meubles proches du fleuve peuvent subir en permanence de petits

tassements.

Un cas de déformation nette a cependant été observé : une

trentaine de km en amont de DIRE et 2 km à l'est de TINDIRMA, un

affleurement de quartzites rouges, au fond de la cuvette allongée

bordant le fleuve, présente une fracturation manifestement récente.

Une diaclase sub-verticale, paraissant très fratche (absence de

toute patine d'altération météorique, et de tout dépôt limoneux), est

orientée 75° E. Elle montre un écartement de 3 à 6 cm, et un rejet

vertical de 15 cm (compartiment nord abaissé).

3° Evolution de bourrelets de berge

Nous présentons le cas net qui a été relevé, celui du bourrelet

de rive gauche, à la hauteur de la fracture précédente et de l'échel­

le de crue de TINDIRMA.

Il semble que sur plusieurs kilomètres le fleuve, depuis une

vingtaine d'années peut-être, a érodé activement sa rive. Le rideau

de végétation (rtpetit doum"), autrefois continu, est pratiquement

démantelé, et il subsiste trois petits chicots à quelques centaines

de mètres d'intervalle, qui semblent indiquer un abaissement de la

crête du bourrelet d'un bon mètre en moyenne.

C'est cette érosion qui a probablement amené la perte de la

borne-repère de l'échelle de crue, installée en 1955 au sommet du

bourrelet, et remise en place en 1973, à une altitude plus basse

de 62 cm.

La photo du bas de la planche l, prise en direction du nord­

est, montre nettement le lambeau présent à proximité de l'échelle.

- 56 -

La crête indurée et décapée du bourrelet présente des fissures, type

fentes de retrait, nettes au premier plan. Le ressaut ,bien visi­

ble sur une trentaine de mètres, semble indiquer la poursuite du

sapement par les plus fortes crues récentes.

Il nous parait que le cours du fleuve, à la hauteur de

TINDIRHA, peut souligner le tracé d'une faille importante, mais nous

réservons l'interprétation précise à donner à la modification

morphologique constatée.

4° Evolution de certaines buttes d'habitat ancien

Les buttes, souvent entièrement artificielles, qui supportent

de nombreux villages actuels ou les vestiges de villages anciens,

paraissent offir un intérêt particulier pour une étude détaillée de

l'histoire du fleuve. Hais c'est un travail d'une grande ampleur,

qui semble-t-il, n'a été esquissé jusqu'ici qu'à des fins archéolo­

giques. Ces buttes, qu'en suivant J. CALLAI5 on peut appeler .

"togguéré" d'après leur nom dans la région de DJENNE, sont présentés.

un peu partout dans la zone d'inondatio~actuelle ou ancienne.

Certaines des buttes anciennes sont spectaculaires par leurs

dimensions ou leur hauteur. Le ravinement qui les affecte est le

plus souvent très modéré, compte-tenu de leur fort relief, par suite

de la grande porosité des débris qui les composent. Parfois des

fouilles, grattages ou travaux plus importants, induisent l'amorce

d'un démantèlement, mais le plas souvent leur ossature est intacte.

C'est dans ces conditions que l'érosion intense, et apparem­

ment naturelle, de quelques unes d' entre e11e~oivent retenir l'atten­tion.

Nous présentons, avec les deux photos de la planche 2, le cas

remarquable de la butte qui domine au nord-est le lac de KABARA, à

l km 1/2 du village de KOKONTO. Une étude minutieuse est nécessaire,

mais il semble à première vue que cette butte subisse actuellement

- 57 -

un démantèlement actif, qui pourrait être dû à un soulèvement ou un

basculement, indiquant qu'elle jalonnerait un accident. Il est

curieux de noter l'importance des couches d'apparence fluviatiles ou

lacustres qui constituent la butte et qu'il est difficile de con­

sidérer comme le reliquat des habitats anciens.

Les clichés aériens.- permettentite déceler des fractures affectant

la bordure nord des lacs KABARA et TANDA. Ce réseau de fractures ferait

partie du grand accident cisaillant complexe, orienté ENE-WSW, qui,

cow~e nous le verrons ci-dessous, paraIt constituer la retombée sud

des Monts de NIAFL/NKE-GOLlNDAM. Un examen détaillé, sur le terrain

et par photointerprétation, devrait alors permettre de préciser la

possibilité ou non de mouvements récents, même de faible ampleur.

5° Reprises d'érosioŒlocalisées

Comme dans l'exemple précédent certains reliefs des bordures

du fleuve accrochent l'oeil par le contraste des teintes et le

ravinement intense qui les affecte. C'est le cas de la bordure

ouest de la branche nord-sud du NIGER, le long de la piste BOL/REM­

ANSONGO.

Lorsqu'ils présentent une certaine extension, c'est-à-dire

lorsqu'on a éliminé les poches de ravinement ou les rebords de

cuirasses rafra!chis par un petit éboulement récent, on peut se

demander s'ils ne peuvent pas traduire une reprise d'érosion récente,

résultant de légers mouvements du socle. Nous avons, lors d'une

tournée de mai 1978, relevé les deux cas suivants, illustrés par

les deux clichés de la planche 3.

Sur le cliché du haut, pris en direction du sud-est, à TIDIRIT,

14 km au Sud-sud-est de BOL/REM, appara!t un vaste affleurement de

grès rose-violacé, friables et à vermiculations blanches (Quater­

naire ou Continental terminal ?). Ces grès sont indurés en surface,

sous un épandage de galets et de vestiges de poteries, et sont

coiffés à l'arrière-plan de lambeaux de cuirasse. Ils subissent une

érosion intense et sont largement disséqués par une petite ravine

(visible sur la droite à l'arrière-plan).

- 58 -

Autant que permet d'en juger la rapidité de la visite, il

semble que ces grès aient subi un léger soulèvement récent, ou du

moins des déformations, incitant à rechercher une possible faille

proche.

Le cliché du bas est pris 80 km plus au sud, à proximité du

campement nomade de TACHARAN, une vingtaine de km au Sud-est de GAO.

De direction WNW, il montre le rebord sud d'une butte cuirassée,

dominant la "doumeraie" de TACHARAN installée dans un creux, sur un

épais placage dunaire. Le sable vient s'accumuler au pied de l'ébou­

lis de cuirasse, qu'il escalade sur quelques mètres. La fr~nge

sableuse recouvre en biseau, avec une pente assez forte (15 ou 20 %),

un pavage très grossier de blocs latéritiques.

A flanc d'éboulis, un ressaut très net, que l'on suit sur plu­

sieurs centaines de mètres (et qui dessine l'arc de cercle esquissé

sur la photo), fait apparattre, soit la roche (argile claire indurée,

kaolinique?) à nu entre les blocs, soit la roche totalement ~écapée.

La marche provoquée par ce ressaut au centre du cliché est d'un mètre

environ. Ailleurs l'aspect est plutôt celui d'une flexure.

De nombreux blocs de l'éboulis ont été remis en mouvement et

viennent s'accumuler en contrebas, certains d'entre eux poursuivant

sur plusieurs mètres leur course sur le sable, sur lequel ils sont

actuellement posés, sans le moindre enfouissement. L'impression est

que la descente de l'éboulis date d'"hier", et nous nous demandons

si nous ne sommes pas là en présence d'une faille ayant rejoué à

une époque très récente dans une roche relativement meuble.

Le mouvement serait alors un soulèvement relatif de la butte,

et le rejet pourrait atteindre 30 ou 40 cm au minimum, ce qui est

déjà considérable.

- 59 -

6° Hétérogénéités de la nappe alluviale

Les indices précédents sont ceux d'une évolution récente

dont nous avons envisagé qu'elle puisse traduire à la fois la présence

d'accidents tectoniques et leur rejeu actuel.

Certaines restitutions localisées de bas de berge peuvent

révéler, en saison sèche, des hétérogénéités de la nappe alluviale,

indices possibles de zones fracturées et donc d'accidents, sans

présomption cette fois d'un quelconque rejeu récent. Ces indices

paraissent néanmoins importants dans la mesure où, en l'absence de

critères lithologiques nets, ils pourraient permettre de localiser

le trajet d'une faille sur le terrain.

Le cliché inférieur de la planche 2 montre ainsi un aspect des

résurgences occupant l'entrée du défluent de TOMBOUCTOU. Ce sont

en effet de petites sources occupant le thalweg de la N'DAYE qui

maintiennent un très léger débit de saison sèche, s'écoulant à la

fois vers l'aval et vers l'amont.

l'examen sur photo suggère par la disposition des mares et chenaux

de hautes-eaux compris entre la N'DAYE et le lit principal, un tracé

possible de faille W-E entre KORIOUME et HOUNDOU, 7 km plus à l'est,

laquelle expliquerait les émergences à l'entrée de la N'DAYE.

7° Petites manifestations séismiques

Aucun tremblement de terre important n'est connu dans la zone

étudiée. Pourtant il a existé dans le passé de petites secousses

ayant pu occasionner quelques dégâts très localisés. les investigations

de terrain récentes en apportent, dans une certaine mesure, la

confirmation et révèlent, semble-t-il, la présence d'une séismicité

originale paraissant s'exprimer surtout par l'apparition assez

fréquente de bruits aériens. Ces phénomènes sonores, relativement

discrets, sont connus depuis très longtemps par les habitants, et

r

r

1

1

1

- 60 -

pourraient s'interpréter comme une preuve indirecte de l'évolution

tectonique de la Cuvette et de ses marges.

- Petits séismes caractérisés

De petites secousses séismiques sont rapportées en 1961

par Th. MONOD et G. PAlAUSI dans leur description de manifestations

fissurales dans les DAOUNAS : secousse du 18 février 1618 relatée

dans le Tarikh es-Sudan, secousse du 9 novembre 1905, toutes deux

ressenties à TOMBOUCTOU ou aux environs. G. PAlAUSI rapporte également

dans sa thèse le tremblement de terre survenu en 1942 à TONIAN, près

de BANDIAGARA. Le retour à la lettre du père COURTEILLE, qui décrit

la secousse de 1905, montre qu'un phénomène analogue serait survenu

à TOMBOUCTOU une quarantaine d'années plus tôt.

Nous avons eu recours à l'enquête faite au début du siècle par

H. HUBERT *. Nous reproduisons ici (figure 13) l'essai de carte

séismologique dressé à l'époque, qui fait apparaitre les épicentres

recensés autour de la Cuvette lacustre et sur ses marges est et

sud (Massif de BANDIAGARA et Nord-Ouest de la HAUTE-VOLTAi,

On peut y ajouter TONIAN en 1942. Notre rapide enquête de

terrain montre que les petits séismes caractérisés récents ne sont

pas très nombreux. Ils doivent exister néanmoins puisque, parmi les

stations visitées, celle de TOSSAYE a permis de recueillir une

réponse positive, dont nous voudrions cependant, par suite de son

importance, obtenir parallèlement une confirmation : début 1974, le

sol a bougé vers 5 H 30 ("au moment de la prière"). "Les pêcheurs

de rive gauche, très inquiets, ont voulu partir, ceux de rive droite

sont restés". A l'issue de cette petite secousse, un pan de dune,

accroché au défilé en rive droite, avait disparu.

Une secousse analogue se serait produite vers 1940, et la

tradition rapporte que peu avant l'''arrivée des Européens" (donc

vers 1890 ?), un éboulement du même type que le précédent, survenu de

nuit, aurait causé la perte d'un petit campement de nomades et de

leurs chevaux.

* HUBERT (H) - 1914-15- Les séismes en Afrique occidentale française.

La géographie, T. XXX, pp. 359-364.

• Localisation récente

. ~., "C'.

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Localisation des séismes recencés en Afrique de l'Ouest par H. Hubert

( 1914 -1915 )

:n(Q1-CN

- 61 -

l'examen des lectures de TOSSAYE en 1974, montre une inter­

ruption des relevés le 16 février à la cote 2,00 m, par suite de la

chute de l'élément d'échelle 1-2 m. Il peut très bien s'agir là d'une

simple coincidence. Toutefois un examen attentif des relevés, qui

paraissent très bien faits, révèle, quelques jours auparavant

(9 au 10 février), une variation légère mais brusque de la baisse

journalière du plan d'eau. l'observation est ténue, mais pourrait

éventuellement localiser la secousse dans le temps.

- Bruits séismiques

la note d'He HUBERT, que nous n'avions pas au moment de notre

enquête, indique que lors des séismes recensés les bruits'~eraient

assez fréquents et ont été comparés soit au bruit produit par un

coup de vent de grain, soit au grondement lointain du tonnere".

l'enquête faite en 1978 en bordure de la Cuvette a rapidement

fait surgir de tels phénomènes sonores, survenant de loin en loin,

sans secousse ressentie.

Nous ne pouvons mieux les décrire qu'en empruntant le passage

-les concernant, dans les relations anciennes qui les associaient à

une secousse caractérisée.

le "Tarikh es-Sudan" précise que "les habitants de Tombouctou

entendirent, dans la direction de l'Orient, un bruit dans les airs

pareil au grondement lointain du tonnerre."

le père COURTEIllE précise qu'en 1905 les "personnes, alors

éveillées, ont perçu un bruit lointain d'abord semblable au roule­

ment du tonnerre; rapidement le bruit s'est rapproché, paraissant

aller dans la direction du nord au sud, et en même temps, le sol a

été vivement et plusieurs fois secoué; puis le bruit s'est éloigné

aussi rapidement. le phénomène complet, que les narrateurs essayent

d'imiter de la voix et du geste, n'aurai~ pas duré plus de quatre

ou cinq secondes".

a

1

1

J

,- 62 -

Nous sommes ici, à l'évidence, en présence des manifestations

annexes, connues lors de séismes caractérisés, et dont nous empruntons

l'explication du mécanisme- à J.P. ROTHE * : liOn pense aujourd'hui

que les ondes sonores entendues avant la secousse sont engendrées

par le couplage sol-atmosphère d'ondes P trop faibles pour avoir été

perceptibles alors que le choc ressenti dans la zone épicentrale cor­

respond à l'arrivée des ondes S quelques secondes ou fractions de

seconde plus tard".

L'originalité de la Cuvette, ou tout au moins de sa bordure,

est de présenter de nombreux cas dans le passé, du seul phénomène

sonore, cas que nous pouvons interpréter comme de petits "séismes

sans secousses", c'est-à-dire de séismes suffisamment forts pour être

audibles, et trop faibles pour être ressentis (peut-être par suite

des conditions d'imbibition permanente dans la zone deltaique). La

littérature séismique, du XIXème siècle en particulier, permet de

déceler quelques cas analogues en France même. Et il est probable que le

phénomène, par essence discret et sujet à confusion, a une réparti-

tion géographique et une fréquence plus grandes qu'il n'y parait.

Au MALI, nous avons localisé le phénomène au nord du MACINA,

dans le MEMA, le FARlMAKE, à proximité des lacs de rive gauche (ORO,

FATI, TELE), au sommet de la Boucle. Son extension est possible plus

à l'est.

Lorsque le bruit est connu, que les témoins sachent lui donner

un nom ou pas, la distinction est toujours bien faite avec l'orage,

ne serait-ce que parce qu'il survient fréquemment en saison sèche.

L'interprétation est soit vague ("les forces divines"), soit celle

d'un mauvais présage ("l 'annonce prochaine de la mort d'une per­

sonnalité"). Une confusion est faite parfois avec les quelques cas qui

correspondent probablement à l'onde de choc accompagnant la chute

des grosses météorites, d'où l'association possible du bruit avec

une "étoile filante" (ce serait le cas du 2 mai 1978 au matin dans la

région des lacs ORO et FATI !). Quelques cas avec phénomène lumineux

diffus sont d'interprétation très incertaine.

* ROTHE (J.-P.) - Séismes et volcans. Collection "Que sais-je ?". 7èmeed. 1977, p. 38

l

1

- 63 -

Pour toute la bordure ouest de la Cuvette, le bruit, fort

ou lointain, est localisé surtout dans le secteur est ou nord-est,

faisant penser à l'effet cardinal des météorites, mais l'effet diurne

de ces dernières (fréquence maximale nette en fin de nuit) ne se

retrouve pas. Il semble en outre que le phénomène ait été per~u, en un

cas au moins (en fin d'années 1977 au début 1978), à l'échelle de

toute la bouCle du fleuve à des dates voisines (il n'est guère pos­

sible de préciser a posteriori), mais à des heures différentes de la

journée, ce qui excluerait presqu'à coup sûr unemétéorite.

Nous versons au dossier ouvert, les termes vernaculaires

recensés, dont certains pourront être corrigés

- les Peuls du MEMA, désignent le phénomène sous le nom de

"iuré", terme qui serait d'après la tradition, celui des "anciens

hOlTllles" ;

- les Songhaïs de l'Ouest l'appellent "Huré", terme proche

du fulfuldé, ce qui fait penser à un vieux fond possible préexistant,

mandingue ou soninké ;

- les Songhaïs de l'Est retiennent "béri" ou "bérey", bruit

annonciateur de décès ;

- les Touaregs du Nord-Est (Kel-Tamachek de Bourem et Gao)

l'appeleraient "éguédal", tandis que ceux de l'Ouest (Kel-Antassar)

retiendraient "téchériet", mais la confusion est ici probable avec

la "chute de l'étoile filante".

Précisons enfin que le phénomène décrit, sans être rare,

n'est cependant pas courant ; de nombreux habitants ne le connaissent

que par ouI-dire. Relaté cependant avec précision et concordance

par des témoins différents, il a une existence objective et parait

mériter, par sa valeur explicative possible, une investigation plusdétaillée.

L'appareillage sismique moderne de terrain devrait permettred'éclairer rapidement l'interrogation posée.

- 64 -

Peut-on envisager une interprétation d'ensemble, même hypothétique,

de telles manifestations sismiques?

En conclusion à son article H. HUBERT, après avoir signalé

que "malgré la stabilité apparente de l'Afrique occidentale, les

tremblements de terre sont loin d'y êtreexceptionnel~', relevait que

"bien que les résultats aient été négatifs pour des colonies entières

(Sénégal, Guinée, Dahomey), et que par suite toute généralisation soit

hasardée, il parait, cependant, établi qu'il y a des régions plus

facilement affectées par les séismes. Parmi celles-ci, il faudrait mettre

en premier rang celle comprise entre le 4° et le 6° de Long. O."

L'auteur insistait sur la polarité Nord-Sud qui semble caractériser la

répartition des séismes, et voyait un lien direct entre la sismicité

discrète autour de la Cuvette lacustre, et les secousses parfois violente

de la région cotière du Golfe de Guinée.

Nous nous demandons s'il ne serait pas préférable de relier ces

séismes essentiellement aux accidents tectoniques transversaux, orientés

WSW-ENE, qui paraissent affecter la Cuvette et peut-être l'Ouest·

africain (cf. 4.4). Le lien ne serait qu'indirect avec la sismicité

affectant la côte du Golfe de Guinée.

4.3. - Anomalies de nivellement possibles

L'hypothèse d'une tectonique vivante, amenant une mobilité de

certaines zones du bassin, soit sous forme de mouvements réversibles,

soit sous forme de petites déformations durables, implique en pratique

la présence de compartiments faillés, blocs à l'échelle du kilomètre

ou bien davantage, jouant légèrement les uns par rapport aux autres.

Plusieurs types de vérifications directes sont possibles : reprise

du nivellement de premier ordre existant, mise en place dans une des

zones supputées actives d'un réseau de contrôle nivelé périodiquement,

mise en place de stations permettant la mesure des déformations (extenso­

mètres) ou bien la mesure de la marée clinométrique et de ses anomalies

(inclinomètres ou sismographes horizontaux). Leur mise en oeuvre estlongue.

- 65 -

Les méthodes indirectes utilisant un dispositif simplifié ren­

forçant en quelques points le réseau hydrométrique actuel (limnigraphes,

échelles de crue dédoublées, contrôle fréquent de la stabilité de bornes

voisines situées de préférence de part et d'autre du fleuve ou d'un de

ses bras) ne peuvent pas non plus apporter de réponse sûre avant

quelques années.

Les données de nivellement actuelles montrent-elles la possibilité

de déformations récentes? N'ayant qu'une faible partie de ces données,

il est difficile de conclure fermement. Nous avons toutefois bénéficié

du concours de l'IGN, et les travaux de nivellement projetés devraient

déjà permettre de procéder à quelques vérifications importantes.

Dans l'immédiat, nous pensons qu'il existe suffisamment de

points d'interrogation pour ne pas rejeter l'hypothèse avancée.

Nous avons signalé les petits mouvements de certains éléments

d'échelle, entre eux et par rapport à la borne voisine, pas totalement

explicables par leur seule vétusté ou par les diverses causes acciden­

telles possibles. Cela peut traduire une instabilité de la berge très

localisée, et n'est donc pas retenu ici comme indice important.

Il existe quelques cas où l'altitude d'un zéro d'échelle ou d'un

repère de nivellement est modifiée par des nivellements successifs, alors

que cette échelle ou ce repère n'ont apparemment pas bougé. Un exemple

caractéristique du dilemme posé est le suivant :

En 1956 ou en 1957, deux entreprises de topographie rattachent

l'échelle de TlNDIRMA au nivellement général. L'une (SOGETEC), effectuant

le nivellement NIAfUNKE-DIRE, trouve, pour la borne de l'échelle, une

cote supérieure de 24 cm à la valeur obtenue par l'autre (SAPT) lors de

son lever hydrographique du lac FATI. La première s'est appuyée sur

la borne de NlAfLINKE (50 km à l'ouest), l'autre sur la borne du terrain

d'aviation de GOUNDAM (25 km au nord). Ces deux repères du nivellement

général ont été mis en place et nivelés 2 ans plus tôt environ.

- 66 -

Nous ignorons l'importance de l'écart de fermeture des nivelle-,ments SOGETEC et SAPT, et l'erreur de mesure, en terrain difficile,

est a priori l'explication la plus probable. Il existe cependant une

autre possibilité: c'est qu'à l'époque des levers, ou du moins de l'un

d'eux, il ait existé dans le triangle NIAfUNKE-TINDIRMA- terrain de

GOUNDAM, et plus simplement entre NIAfUNKE et GOUNDAM, une déformation

de l'ordre de grandeur de l'écart constaté.

Une difficulté du même type existe actuellement pour l'échelle de

KORIOUME : le rattachement effectué en février 1976, par une brigade du

Service Hydraulique, au repère IGN posé en 1975 sur le quai de KABARA, à

7 km de là, montre un écart important avec le zéro obtenu en 1959 par

rattachement à la borne de l'aérodrome de TOMBOUCTOU. Une confusion entre

les éléments d'échelle est possible à l'époque. Mais quelle que soit

l'hypothèse retenue, il existe un écart non négligeable, de 70 cm au

moins. le nivellement de 1976 ne peut être d'une grande précision,

mais il est difficile de lui attribuer l'importance de l'écart obtenu.

Des vérifications et un rattachement de contrôle apparaissent indispensa­

bles.

la question n'est d'ailleurs, semble-t-il, pas nouvelle puisque

nous relevons la mention suivante dans un ancien rapport de la SOGETIM

(Etude économique préliminaire des lacs de la Rive Gauche) : "Des

opérations de nivellement plus récentes, rattachées au nivellement

général de l'A.O.F., réalisé par le Service Géographique Fédéral,

ont révélé des discordances entre certaines bornes nivelées dans le

système Office du Niger". C'est peut-être ce qui explique que la

"constante" qui permet de passer de l'ancien nivellement de l'Office

du Niger (Plan de Comparaison de SANSANDING) au nivellement général,

soit actuellement assez variable selon les stations. Doit-on simplement

considérer que le nivellement de l'Office était au départ, une simple

mosaIque de nivellements locaux, mal raccordés entre eux ?

Il parait exister par ailleurs un problème de fond au niveau de

l'ensemble de la Boucle du NIGER: le polygone de 1er ordre, qui défi­

nit la maille S du nivellement général, a été nivelé par tronçons

successifs de 1951 à 1955. les travaux de 1960, dans la section de

second ordre KONA-NIAFUNKE, ont, semble-t-il, imposé de modifier

l'ensemble des cotes au nord de la maille (section SU BOUREM-SOKOLO

et travaux s'y rattachant dans la Cuvette de DIRE).

- 67 -

Cette correction, qui n'est pas une compensation, mais une trans­

lation de 69 cm, doit poser un problème de raccordement aux deux extré­

mités de la section SU, sauf si des erreurs de nivellement, sensiblement

demême importance, avaient été commises en sens inverse aux extrémités

de la maille (sections SEGOU-SOKOLO à l'ouest, et GAO-BOUREM à l'est).

Dans l'attente des éléments qui permettront de trancher on ne peut

cependant exclure une autre hypothèse: celle d'une déformation inter­

venue entre 1955 et 1960 dans la Cuvette, et désolidarisant les bornes

de KONA et NIAfUNKE, ou encore par exemple une déformation entre 1951

et 1955, survenue entre KONA et BOUREH.

4.4. - Photo-interprétation et esquisse d'un schéma structural àpartir de l'imagerie de satellite

Les nombreux travaux des auteurs cités en début de chapitre

permettent u~e large compréhension de l'évolution du bassin du NIGER,

ainsi que des questions qui demeurent en suspens. Leurs idées, confron­

tées aux faits hydrologiques et à la vision nouvelle permise par les

clichés de satellite, font naître telle ou telle idée nouvel~ et

permettent donc d'avancer.

Faits et hypothèses sont présentés de manière très libres, sans

souci, nous le répétons, d'être complets dans l'interprétation. Il

s'agit avant tout de mieux dégager certains éléments structuraux

pressenti~ et de montrer qu'il en existe probablement d'autres, pou­

vant fournir un cadre cohérent à l'hypothèse d'une tectonique active,

et aux anomalies hydrologiques qui en découleraient.

La conclusion de ce paragraphe s'exprime par une esquisse de la

tectonique cassante de la zone d'étude et de ses abords (fig. 14).

C'est un document de travail, qui, nous l'espérons, pourra être

critiqué et affiné.

Les photos aériennes, consultées en quelques points de la zone

d'étude, révèlent la possibilité de nombreuses failles empruntées par

des tronçons du fleuve et de ses principaux bras, recoupant des

formations dunaires, ou encore soulignant des levées alluviales (bour-

,re-

- 68 -

relets de berge ou cuvettes parallèles au fleuve). Nous avons l'impres­

sion que ~ême dans des zones d'épandage typiquement deltaiqu~, le

tracé du fleuve est étroitement conditionné par la tectonique. Les

méandres développés en dehors du tracé en baionnette paraissent

dirigés, même le beau méandre de DIRE. Ce point parait primordial dans

l'étude en cours.

La région du KESSOU offre de même, comme l'avait très bien vu

J. TRICART, des exemples de compartiments faillés et légèrement

basculés. Cet auteur, dans son étude de l'évolution de la moyenne vallée

du NIGER*, a mis en évidence l'important problème des gauchissements

récents.

Les déformations qu'il met en évidence dans certaines parties

de la Cuvette "semblent avoir fonctionné surtout au Quaternaire ancien".

En fait la netteté de certains accidents est parfois telle qu'on a tout

aussi bien l'impression de mouvements actuels.

le cours du fleuve, examiné rapidement entre GOURMA RHAROUS et

TOSSAYE, présente de curieuses structures amygdalaires, et on a là

également l'impression de compartiments faillés se relayant, orientant

les chenaux , et plus ou moins oblitérés par les dépots alluviaux.

Par ailleurs on vérifie aisément sur photos la présence de

tronçons remarquablement préservés de l'ancien tracé historique du

seau hydrographique (nord de TOMBOUCTOU, ouest et sud du FAGUIBINE,

région de NAMPALA).

l'examen des cliché satellite élaborés par le Bureau de Télédétec­

tion (tirage papier du canal 7 ou montages diazochromes) a concerné

~sentiellement les deux scènes ERTS centrées, l'une légèrement au sud

du lac NIANGAYE (scène 211/49), l'autre sur les lacs KABARA et TAGADJI

bcène 212/49). Un assemblage d'une douzaine de vues a été utilisé pour

obtenir un cliché d'ensemble du bassin, de BAMAKO au coude de BOUREM,

qui recouvre le Delta mort à l'ouest et une partie du COURMA à l'est.

* TRICART (J.), CUERRA de MACEDO (N.) - 1965 - Rapport de la mission de

reconnaissance géomorphologique de la vallée moyenne du Niger,

mémoires de l'IFAN, nO 72, 196 p.

- 69 -

Ces documents confirment les accidents visibles sur photos

aériennes, et révèlent avec netteté des structures de plus grande

taille.

On y lit par exemple de manière évidente, les limites de l'ancien

lac qui occupait les DAOUI~AS et s'est rempli pour la dernière fois

il y a 80 ans, mais on décèle également fort bien le tracé du lit qui

a fait communiquer les DAOUNAS avec le lac TAGADJI au sud.

Le réseau hydrographique de la Cuvette révèle un réseau faillé

constitué essentiellement d'accidents orientés 70° E et d'accidents

méridiens ainsi que d'accidents dans le secteur 20-50 °E.

Au sein de ce réseau s'individualisent nettement des structures

de grande taille, les unes en "parallélogrammes", les autres d'''éclat".

Les premières, aux bords orientés N-S et 700 E, occupent l'ensemble

dU,Delta central. Les sommets de leur petite diagonale sont arrondi5.

Ces structures sont emboîtées et recouvrent presque parfaitement les

zones d'épandage du fleuve. Elles se retrouvent, pour cette raison,

bien marquées sur la carte au 111 000 000. La plus nette correspond

au KESSOU et au KILLI (Cuvette de DIRE). Elle donne l'impression d'un

fossé d'effondrement, mai5 ce n'est guère compatible avec le fait qu'une

large portion de sa bordure occidentale correspond à une rupture de

pente (seuil de DJIN-DJIN) et domine très faiblement la région plus

basse de GOUNDAM.

Elle est bordée au sud, et jusqu'au lac DEBO, par un parallèlogram­

me plus large, recouvrant le BARA (Erg de NIAFUNKE). Juste à l'ouest

du BARA, la partie orientale du FARIMAKE constitue, en un peu moins

net, une réplique exacte du parallélogramme KESSOU-KILLI. De plus

l'ensemble du Delta intérieur (au sud de l'Erg de NIAFUNKE) possède

une forme homothétique des précédentes. Enfin, en débordant de la

Cuvette, l'ensemble s'insère dans une vaste structure de même forme,

limitée à l'ouest et au nord par un grand arc de cercle allant de

TOMBOUCTOU à SEGOU, en passant par les DAOUNAS et NN1PALA, arc

souligné par des tronçons du réseau hydrographique ancien.

1

1

1

1

- 70 -

Les structures d"'éclat" correspondent, elles, aux lacs

triangulaires effilés de rive droite et de rive gauche (lacs FAGUIBINE

et TANDA, lac HARIBONGO, GAROU et NIANGAYE). Elles englobent en fait

également, séparés des premiers par des compartiments faillés N-S

qui ont valeur de horsts, les lacs GOUBER et KAMANGO (dans le prolon­

gement du FAGUIBINE), KABARA (à l'est du lac TANDA), TITOLAOUINE,et

KABONGO (à l'est du lac GAROU), DO et GAKOREY (à l'est du NIANGAYE).

Le lac AOUGOUNDOU appartient à une structure analogue, de même que

la DAOUNA du nord associée an nord du lac TELE, ainsi que la DAOUNA

du sud et l~ sud du TELE. Le bord septentrional de la dépression du

kESSOU, entre le contact dunaire au nord et le Marigot de TASSAKANT

au sud, reflète cette même allure.

Si l'on excepte les lacs TAGADJI, HORO et FATl, enserrés par des

synclinaux perchés, les lacs apparaissent comme des panneaux légèrement

effondrés sous l'effet d'une tectonique cassante particulière, laquelle

a pu résulter de contraintes tangentielles importantes.

A une échelle différente, quelques mares triangulaires, dont la

pointe, profonde, est orientée à l'ouest, attestent une structure

analogue dans la Cuvette au nord du lac DEBO.

Cette vision résolument tectonique de la formation des lacs,

suggérée par les photos de satellite, est parfaitement conciliable

avec l'hypothèse antérieure d'une origine dunaire ou éolienne, si

l'on admet, comme nous l'avons fait au paragraphe 4.1, que les grands

cordons dunaires ne pré-existent pas et sont eux-mêmes induits.

Cette explication vaudrait également pour de vastes tronçons

du fleuve et de ses bras. C'est en particulier le cas du sommet

rectiligne de la Boucle, parallèle aux dunes, et qui possède la grande

direction structurale précédente (70 °E). On est alors enclin àenvisager cette portion du fleuve comme une vallée de ligne de faille,

par analogie avec d'autres cas connus. De même peuvent être envisagées

comme un grand accident transversal complexe les portions rectilignes

du fleuve qui, de EL OUALADJl en amont de DIRE, à NIAFUNKE, s'ordon­

nent selon cette même direction et se prolongent àl'WSW, au pied

des collines de NIAFUNKE-GOUNDAM, par les lacs KABARA et TANDA endirection de FOITA et NARA.

- 71 -

Le parallélogramme constitué par le KILLI et le KESSOU peut être

interprété alors comme un relais entre deux échelons d'un grand

accident tectonique unique. On retrouve là une figure très voisine par

exemple, de celle du fossé de la Mer MORTE, étudiée par FREUND, ZAK

et GARFUNKEL (1968), rapportée dans l'ouvrage de M. MATTAUER *,

et interprétée comme une figure de distension dans un grand décochement

sénestre. A la différence toutefois de l'exemple de référence, il n'y

a pas ici à proprement parler un graben, mais un compartiment à peine

déprimé, sub-horizontalet donc légèrement redressé par rapport à la

pente d'ensemble de la région qui est NW.

Avec ce schéma il faut interpréter de la même façon le bord méri­

dional de l'Erg de NIAFUNK~ et envisager un décrochement parallèle au

précédent, souligné lui aussi par le réseau hydrographique. Il passe

par le KCRADOU au sud du lac AOUGOUNDOU, marque la bordure nord des

lacs KORIENTZE et DEBO, passe entre NAMPALA et SOKOLO, en direction

de MOURDIAH. C'est en fait cet accident WSW-ENE, compliqué de failles

obliques, plutôt qu'une ride anticlinale WNW-ESE, qui commanderait

l'évolution du lac DEBO et qu'ont très bien pressenti GALLAIS et

TRICART grâce à l'étude détaillée de la morphologie du lac.

Enfin en se limitant à la cuvette elle-même, on est conduit à

envisager un accident de même type à la hauteur de DJENNE-SOFARA,

souligné par le coude du BANI et plus à l'est par la large échancrure

dans la falaise de IfANIll'AG'ARA. Il s'agirait là typiquement d'un accident

du socle, peu visible dans le réseau de diaclases des grès de couverture.

C'est donc tout un faisceau d'accidents transversaux WSW-ENE

que révèlent les documents disponibles. Ils s'ordonneraient autour

de l'accident principal induisant la Boucle du fleuve.

Il est important, par ailleurs, de préciser si le découpage en

longues bandes parallèles, qui apparatt sur les clichés, n'est pas

simplement une fracturation parallèle aux accidents principaux, pro­

longeant en particulier les structures d'''éclat'' des lacs.

Ces fractures n'auraient guère de jeu horizontal, préservantainsi la belle forme des plis érodés de la région de HOMBORI ou

* "Les déformations des matériaux de l'écorce terrestre" - HERMANN,Paris 1973, pp. 116-117.

- 72 -

GOUNDA~~ Par contre ce compartimentage par dislocation pourrait

s'accompagner de mouvements verticaux parfois importants, expliquant

par exemple la topographie tourmentée de la régIon à l'ouest du lacTELE. Le fossé d'effondrement de OUARTEMACHET-NARA, mis en évidence

par la géophysique, et rempli de sédiments tertiaires et quaternaires,

atteste l'instabilité de la zone.

C'est par un tel réseau de dislocations que pourraient s'expliquer la

formation et la pérennité des grande~ dunes longitudinales anciennes :

les longues fractures. caractérisées ou par un rejet de faille et donc

un ressaut topographique plus ou moins net, ou simplement par une zone

humide occupant les contacts broyés des compartiments, auraient fixé

le sable à une époque reculée dont on ne cherche pas ici à préciser

l'âge (dans l'hypothèse avancée les phases d'accumulation et de

pédogénèse fixant les dunes peuvent alterner avec des phases de déman­

tèlement, selon l'action conjointe du jeu tectonique et des fluctuations

climatiques, et l'âge d'une dune est alors celui du dernier remaniementi.

L'esquisse tectonique de la figure 14 montre les principaux

accidents décelés sur les clichés de satellite.

Quelques unes des grandes fractures WSW-ENE nous paraissent

pouvoir être interprétées comme des décrochements, affectés de faibles

mouvements de coulissage. Certaines pourraient avoir un rejet vertical

notable, expliquant les verrous du réseau hydrographique (Monts de

NIAFUNKE, Collines de BOULEL), dont l'évolution à l'époque historique

et au Quaternaire récent a pu être assez rapide. L'interprétation

précise du spécialiste est indispensable.

A l'ouest du Delta, les clichés paraissent confirmer et amplifier

les accidents mis en évidence par R. DARS, dans la région de MOURDIAH

et NARA, et corroborés par les travaux géophysiques (J. RECHENMANN).

Le lien para!t évident avec les singularités ayant affecté le réseau

hydrographique (Boucle et "capture" du BAOULE, tronçonnement duréseau affluent nord-sud).

Au nord-ouest, le couloir très probablement tectonique du

TILEMSI de GOUNDAM, à l'WSW du fAGUIBINE, emprunte le grand fossé

d'effondrement de OUARTEMACHET-NARA (dans le prolongement de la

boucle du fleuve). Il correspond au Bras de BASSIKOUNOU, mis en

,., l' J. I1IU_ St:Z'T

.,."..."•

"­.++-­.,.

6'00

Faille supputée(sur clichés ou photos)

(d'après loro-hydrographie)

Compartiment relais àstructure de graben

?_-------

?._---,.."..l '-~-,

•... " r ~ \E'UAGADOUGOU b- ':,.+.t4' \ .... .or++-

_ A U T E 'C; V~ 0 TA·,,"=-."

Faille connue etcartographiée

(Interprétation partielle des clichés de satellite)

_-=-==- Décrochement--

ESOUISSE D'UN SCHEMA DE LA TECTONIQUE CASSANTE POU­VA~T AFFECTER LA BOUCLE DU NIGER

IS'OO,

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l .":'" {=j 6 ----ra- 100 150 200 2!0 km

évidence très tôt par R. FURON et qu'avait réfuté J. URVOY.

l'ont indiqué C. AUVRAY et G. PALAUSI, ce bras fonctionnait

une époque récente comme défluent du FAGUIBINE.

- 73 -

Comme .encore a

Le site de TOSSAYE marque, selon R. REICHELT, l'intersection

du fleuve avec la très ancienne "Ride de Guemri", parallèle à la

branche nord-sud du fleuve. A cet endroit, le lit n'est pas dans le

prolongement du grand accident transversal qui nous semble avoir induit

la Boucle. Le site lui-même, et son lambeau cuirassé, attestent bien

un déversement ancien du fleuve, avec surimposition puis probablement

antécédence. Mais on peut se demander si le phénomène ultérieur

d'antécédence n'aurait pas été facilité par une fracturation liée au

rejeu de l'accident précédent, ce dernier constituant une structure

permanente (quelques dizaines de millions d'années ?) qui précèderait

largement la phase de capture par déversement mise en évidence par

J. TRICART.

A l'est les clichés semblent révéler une spectaculaire tectonique

tangentiell~déjà nettement pressentie par H. ROQUES et G. PALAUSI, ayant

affecté le nord du Massif de BANDIAGARA, et à laquelle serait imputable

la mise en place des Monts du GOURMA (Monts de BONI, Monts de-HOMBORI,

Massif du GANDAMIA). Les contacts anormaux, masqués par les dépôts sableux,

occuperaient les dépressions longeant les principaux reliefs gréseux.

La fracturation qui nous paraIt souligner, dans le GOURMA occidental

et central, les très grandes dunes anciennes, coïnciderait, dans

l'interprétation tectonique donné en 1972, dans sa thèse, par R. REICHELT,

avec un léger plissement WSW-ENE, perpendiculaire aux grands plis érodés

NNW-SSE et sensiblement contemporains (600 Ad'années). S'agit-il bien

d'une même phase tectonique, et le plissement transversal ne pourrait-il

être postérieur? S'agit-il d'ailleurs de véritables plis et ne pour­

rait-on pas y voir un style cassant un peu différent? Une réponse à

ces questions permettrait probablement de progresser dans la compré­

hension de l'évolution actuelle du fleuve.

L'esquisse tectonique a été limitée à la douzaine de clichés

dont nous disposons. Il sera utile également d'examiner de manière

détaillée les clichés recouvrant la branche nord-sud du fleuve. La

figure 14 reproduit les accidents qui, dans des publications antérieures,

- 74 -

délimitent le fossé de GAO. Dans la logique de notre interprétation

nous avons fait figurer, assorties d'un poiflt d'interrogation, les

hypothétiques fractures transversales que suggèrent, sur la carte

topographique, les grandes bordures dunaires rectilignes.

Nous figurons de la même façon, et à titre de discussion, les éven­

tuelles dislocations que peuvent révéler les longs tronçons rectilignes

organisés du réseau hydrographique, au nord du fleuve, dans l'AKLE,

ainsi que plus au sud, dans la partie septentrionale de HAUTE-VOLTA.

Enfin il est singulier de constater que, sur les confins occidentaux

de la zone d'étude, les cartes géologiques publiées révèlent des

accidents orientés selon la grande direction structurale WSW-ENE.

C'est en particulier le cas de la grande faille de KAYES, dont on

peut se demander si elle ne constituerait pas un accident du socle

prolongeant en direction de l'ouest le faisceau d'accidents du Delta

central. Les études de terrain, et sur photos, ont montré que son

tracé occidental s'incurve en direction de l'WNW jusqu'à BADA. Nous

nous demandons si on ne peut pas envisager son prolongement à partir

de KOFOULABE par une branche WSW, à rejet moins important, qui passerait

au sud de MARENA en direction de GOUKA et DJINGJE, et correspondrait

sensiblement dans la topographie à la retombée des grès de la

TAMBAOURA, peu avant leur contact avec la série de KAYES au nord.

Il s'agit là d'une simple hypothèse, mais l'interprétation

structurale avancée, conduit logiquement à examiner si les accidents

affectant le bassin du NIGER ne pourraient pas se relayer en direction

de l'WSW, et concerner successivement le bassin du SENEGAL, puis les

bassins de la GAMBIE et de la CASAMANCE en orientant partiellement le

cours de ces fleuves côtiers.

Il semble en effet que le bouclier africain dans son ensemble,

puisse présenter une fracturation, révélée en particulier par le

tracé du réseau hydrographique, discrète et d'origine probablement

très ancienne, en rapport avec la tectonique globale et les mécanismesde la dérive continentale.

- 75 -

Une unité de structure pourrait exister avec d'autres provinces

de la façade atlantique. Les accidents qui nous paraissent affecter le

cours moyen du NIGER pourraient, par exemple, présenter une analogie

avec le grand linéament sud-atlasien, ou la faille du Guadalquivir

en Espagne. En France même, l'examen du réseau hydrographique du

Bassin Parisien et ses confins, paraIt révéler, à une échelle plus

~ste, une évolution structurale ancienne analogue à celle du NIGER.

4.5. - Conclusion

Les faits et indices dégagés, ponctuellement ou à l'échelle régiona­

le, alimentent un certain nombre d'hypothèses convergeant vers la

vision d'un bassin du NIGER qui, outre son évolution morphoclimatique,

est soumis à une évolution tectonique lente mais permanente. Il semble

que cette dernière soit perceptible à l'échelle humaine, car, procédant

probablement par à-coups, elle livrerait, ça et là et de temps en

temps, ses manifestations nettes au travers du réseau de surveillance

que constituent les observations hydrologiques.

Il semble en particulier que le Delta central nigérien puisse

permettre de mieux comprendre la formation et le fonctionnement complexe

d'un véritable Bassin sédimentaire. Il est possible par ailleurs que le

bassin du NIGER, illustrant la notion maintenant classique de "néotec­

tonique", soit sujet à une évolution récente particulièrement rapide,

nécessitant un soin particulier dans les études d'aménagement de

certaines zones.

Nous pensons cependant que ce qui constituerait la particularité

de ce bassin, serait surtout qu'il permet, par sa taille, ses faibles

pentes, son réseau de mesures, de lire peut-être mieux qu'ailleurs

l'évolution générale affectant nombre de bassins.

Il est probable aussi que ce sont des observations hydrométriques de

qualité qui permettront, même si leur interprétation est plus difficile,

de suivre le mieux, et peut-être de prévoir, l'évolution des diverses

parties du fleuve et de sa cuvette.

...

-•

- 76 -

v - ORIENTATION DE L'ETUDE

L'interprétation, dans le rapport définitif, incorporera le

mieux possible les observations de terrain, mesures hydrologiques et

contrôles topographiques actuellement en cours, ainsi que les complé­

ments géomorphologiques et géologiques qui seront disponibles.

L'interprétation des clichés de satellite sera poursuivie, et

un traitement de détail appliqué à diverses parties du réseau.

On s'efforcera également, après vérification de certains jaugeages,

de mieux préciser l'évolution qu'ont pu subir les courbes de tarage de

quelques stations importantes.

Ces diverses investigations permettront peut-être de proposer un

mécanisme précis de la déformation de la crue à partir de 1967 entre

DIRE et NIAMEY.

Il est cependant prévisible dès maintenant que la compréhension

globale du phénomène et de son évolution à l'issue des faibles crues

récentes, nécessite la poursuite et le renforcement des mesures

pendant quelques années.

Il serait en particulier nécessaire :

10 de poursuivre l'étalonnage des stations de la Cuvette et de la

Boucle du fleuve, en renforçant les jaugeages au voisinage du maxi­

mum de la crue, et en mettant ces jaugeages à profit pour contrôler

le niveau des fonds du lit ;

20 d'étendre ce renforcement des mesures aux stations principales de la

branche nord-sud du fleuve, pour chiffrer l'importance exacte du

détarage de l'une (ANSONGO), et la légère instabilité apparente de

l'autre (NIAMEY) ;

- 77 -

)0 de renforcer les observations et les contrôles à l'ouest du fleuve,

sur les lacs de rive gauche, et en particulier sur le système des

lacs TELE et FAGUIBINE, où une évolution est possible et où pour­

raient se manifester des singularités dans les niveaux du plan

d'eau;

4° de mettre en place, en deux ou trois stations importantes (DIRE,

GOUNDAH, KORIOUME ou TOSSAYE), les limnigraphes permettant la con­

naissance rigoureuse des fluctuations du plan d'eau

secondaires, installées

et de procéder à des

{à partir de quelques

5° de suivre à ces stations une ou deux échelles

à quelques kilomètres de l'échelle principale

contrôles répétés de stabilité en cours de crue

bornes situées sur les deux rives) ;

6° d'étendre l'enquête visant à localiser les petites manifestations

antérieures éventuelles de caractère sismique ;

7° d'installer et exploiter l'appareillage de terrain (sismographes

portatifs), permettant de mettre en évidence et de localiser les

petits séismes pouvant affecter le Delta central ou le cours aval

du fleuve.

Planche: 1

Fente ouverte en 1977, 25km

i l'ESE de NAMPALA.

(30·4 '1978 )

trera.te ou.t d. IlnI. ,ree.dent., avec

1411'" lII'lIl1 III.. a droite

Bourrelet de berge i la hauteur

de l'échelle de TINDIRMA rive

gauche, avec démantèlement

récent sur 0,5 i l,5m d'tlpaisseur.

(4·5'1978 )

Planche: 2

- Butte d'ancien village sur la rive

nord-est du lac IABARA,avecindices de soulèvement et

basculement. (1'5 '1978)

• Ill. Ilut •• Il butte

IC' .... t.· 1. rUII"",,nt

t&dl. 'U C'"C"" IIblo-(d .. , t .'11(1 III",br ~ri • •• ,.leritl.

Entrée de la N'DAYE li IORIOUMEen fin de saison lèche _ Mare

dans le fond du lit, alimenteepar de petites lOurces.

(7'5'78)

Planche: 3

desd'érosion dans

rous faiblement consolidés.gris

TlDIRIT sur la piste BOUREM-GAO. Ravinement et reprise(11-5-71 )

C",plment d. TlCHARU sur la piste GAO -AMSOMGO. Reprise d'énsiOll (trisretenti P ) dans un éboulis d. cuirasse. (13 - 5 - 71 )