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Diagnostic des douleurs de l’appareil locomoteur chez l’enfant Richard Mouy * Unité d’immunohématorhumatologie pédiatrique, hôpital Necker–Enfants-Malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France Reçu et accepté le 5 février 2003 Mots clés : Enfant ; Douleur Keywords: Children; Pain La douleur est un motif fréquent de consultation en pédia- trie. Le plus souvent abdominale, plus rarement d’origine ostéo-articulaire. Dans la majorité des cas, il n’y a pas de support organique. Il ne faut toutefois pas négliger la possi- bilité d’une pathologie sous-jacente qu’elle soit organique ou pas. Les premières causes à détecter et les plus redoutées, représentant une urgence thérapeutique, sont les infections et les néoplasies. L’examen initial doit être complet et systématique à la recherche d’une infection débutante, commençant par un interrogatoire, minutieux, détaillé et précis. Il faut faire pré- ciser la date d’apparition, un éventuel facteur déclenchant, la localisation, les irradiations, l’horaire, l’intensité, la durée, la répétitivité. Le retentissement fonctionnel sera noté avec recherche d’une boiterie, une sous- utilisation d’un membre. Chez le petit enfant, on recherche un cri lors des changes, le refus du pot, une apathie. Chez le grand enfant, la localisation est plus simple, mais une minoration est possible par crainte d’une hospitalisation ou, au contraire, une majoration de type fonctionnelle. D’autres symptômes seront recherchés : fiè- vre, altération de l’état général, anorexie, etc. 1. Examen clinique 1.1. Inspection Recherche d’une attitude antalgique, examen de la marche et de la mobilisation spontanée des membres. Ne pas hésiter à faire jouer un petit enfant afin de le rassurer avant l’examen proprement dit. Sa mobilisation pendant le jeu peut être très instructrice. De même, faire déshabiller seul un enfant plus grand. L’examen clinique est bilatéral sur un enfant totale- ment dévêtu. Il est complet s’intéressant bien sûr à l’appareil ostéo-articulaire, mais aussi à l’ensemble des organes (voir article de Pierre Journeau). 1.2. Diagnostic de localisation 1.2.1. Douleurs d’origine articulaire Typiquement réveillées par la mobilisation douce de l’ar- ticulation concernée. On peut noter un gonflement local, une augmentation de la chaleur locale, une rougeur de la peau. La douleur peut se limiter parfois à une irradiation ou n’apparaî- tre qu’en fin d’amplitude : flexion ou extension avec perte des derniers degrés. On recherche un dérouillage matinal, une recrudescence nocturne, ou au contraire une douleur de type mécanique. La constatation d’autres atteintes articulaires (orteils, doigts, articulations temporomandibulaires) peut contribuer à orienter le diagnostic de manière définitive. 1.2.2. Douleurs d’origine osseuse Elles sont de diagnostic relativement simple lorsqu’elles siègent à distance d’une articulation. Volontiers bien locali- sées par le grand enfant, elles sont réveillées par la palpation. Si la douleur est para-articulaire, elle peut en imposer pour une arthrite, mais l’examen montre l’absence de douleur à la mobilisation articulaire douce et patiente qui n’est pas li- mitée. 1.3. Autres douleurs 1.3.1. Douleurs tendineuses Localisées à la zone d’insertion, survenant lors de mouve- ments précis, réveillées par les mouvements contrariés. * Auteur correspondant. Revue du rhumatisme 70 (2003) 467–474 www.elsevier.com/locate/revrhu © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 10.1016/S1169-8330(03)00184-4

Diagnostic des douleurs de l’appareil locomoteur chez l’enfant

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Diagnostic des douleurs de l’appareil locomoteur chez l’enfant

Richard Mouy *

Unité d’immunohématorhumatologie pédiatrique, hôpital Necker–Enfants-Malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France

Reçu et accepté le 5 février 2003

Mots clés : Enfant ; Douleur

Keywords: Children; Pain

La douleur est un motif fréquent de consultation en pédia-trie. Le plus souvent abdominale, plus rarement d’origineostéo-articulaire. Dans la majorité des cas, il n’y a pas desupport organique. Il ne faut toutefois pas négliger la possi-bilité d’une pathologie sous-jacente qu’elle soit organique oupas. Les premières causes à détecter et les plus redoutées,représentant une urgence thérapeutique, sont les infections etles néoplasies.

L’examen initial doit être complet et systématique à larecherche d’une infection débutante, commençant par uninterrogatoire, minutieux, détaillé et précis. Il faut faire pré-ciser la date d’apparition, un éventuel facteur déclenchant, lalocalisation, les irradiations, l’horaire, l’intensité, la durée, larépétitivité. Le retentissement fonctionnel sera noté avecrecherche d’une boiterie, une sous- utilisation d’un membre.Chez le petit enfant, on recherche un cri lors des changes, lerefus du pot, une apathie. Chez le grand enfant, la localisationest plus simple, mais une minoration est possible par crainted’une hospitalisation ou, au contraire, une majoration de typefonctionnelle. D’autres symptômes seront recherchés : fiè-vre, altération de l’état général, anorexie, etc.

1. Examen clinique

1.1. Inspection

Recherche d’une attitude antalgique, examen de la marcheet de la mobilisation spontanée des membres. Ne pas hésiterà faire jouer un petit enfant afin de le rassurer avant l’examenproprement dit. Sa mobilisation pendant le jeu peut être trèsinstructrice. De même, faire déshabiller seul un enfant plusgrand. L’examen clinique est bilatéral sur un enfant totale-

ment dévêtu. Il est complet s’intéressant bien sûr à l’appareilostéo-articulaire, mais aussi à l’ensemble des organes (voirarticle de Pierre Journeau).

1.2. Diagnostic de localisation

1.2.1. Douleurs d’origine articulaire

Typiquement réveillées par la mobilisation douce de l’ar-ticulation concernée. On peut noter un gonflement local, uneaugmentation de la chaleur locale, une rougeur de la peau. Ladouleur peut se limiter parfois à une irradiation ou n’apparaî-tre qu’en fin d’amplitude : flexion ou extension avec perte desderniers degrés. On recherche un dérouillage matinal, unerecrudescence nocturne, ou au contraire une douleur de typemécanique. La constatation d’autres atteintes articulaires(orteils, doigts, articulations temporomandibulaires) peutcontribuer à orienter le diagnostic de manière définitive.

1.2.2. Douleurs d’origine osseuse

Elles sont de diagnostic relativement simple lorsqu’ellessiègent à distance d’une articulation. Volontiers bien locali-sées par le grand enfant, elles sont réveillées par la palpation.Si la douleur est para-articulaire, elle peut en imposer pourune arthrite, mais l’examen montre l’absence de douleur à lamobilisation articulaire douce et patiente qui n’est pas li-mitée.

1.3. Autres douleurs

1.3.1. Douleurs tendineuses

Localisées à la zone d’insertion, survenant lors de mouve-ments précis, réveillées par les mouvements contrariés.* Auteur correspondant.

Revue du rhumatisme 70 (2003) 467–474

www.elsevier.com/locate/revrhu

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.DOI: 10.1016/S1169-8330(03)00184-4

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1.3.2. Douleurs musculairesSouvent situées au niveau des principaux groupes muscu-

laires, elles sont provoquées par la pression et la palpation.Rarement elles n’existent qu’à l’effort. Dans la majorité descas, l’examen met en évidence un déficit musculaire.

Au terme de ce bilan, il est nécessaire de différencier lesdouleurs articulaires et les douleurs péri-osseuses.

2. Examens complémentaires

2.1. Bilan de débrouillage

Numération formule sanguine et plaquettaire, vitesse desédimentation, radiographies comparatives. D’autres exa-mens peuvent être demandés en fonction des premiers résul-tats : scanner, imagerie par résonance magnétique, bilansanguin, auto-immun, etc.

3. Diagnostic d’une douleur d’origine articulaire

3.1. Douleur mono-articulaire

Voir article Pierre Journeau.

3.2. Douleur d’origine poly-articulaire

Des manifestations douloureuses poly-articulaires peu-vent être observées au cours de nombreuses maladies inflam-matoires et de maladies infectieuses, virales ou bactériennes.Lorsque le tableau clinique et biologique ne paraît pas homo-gène, il faut savoir évoquer une origine néoplasique.

3.2.1. Maladies inflammatoiresPratiquement toutes les maladies inflammatoires peuvent

s’accompagner de manifestations poly-articulaires, de fièvreplus ou moins marquée et d’une inflammation biologiqueplus ou moins nette.

3.2.1.1. L’arthrite juvénile idiopathique (AJI) est la causela plus fréquente. La définition et les caractéristiques des dif-férents groupes sont décrites dans un autre chapitre. Cesformes poly-articulaires s’accompagnent souvent d’une in-flammation biologique nette et parfois importante, d’uneatteinte de l’état général. L’atteinte articulaire est clinique-ment isolée, sauf lors des formes systémiques et au cours durhumatisme psoriasique.

3.2.1.2. Connectivite. Lupus érythémateux disséminé [1].Une atteinte poly-articulaire isolée peut inaugurer la mala-die. Les principaux éléments d’orientation diagnostiquesont : l’âge autour de 10 ans, le sexe féminin, une leucopénieet/ou une neutropénie, l’ inflammation biologique, un taux deplaquettes normal ou bas. Le diagnostic est confirmé par laprésence d’anticorps antinucléaires, avec leur spécificité

anti-ADN natif, anti-Sm et l’abaissement du complémenthémolytique (CH50, C3, C4), ainsi qu’une éventuelle at-teinte rénale.

Dermatomyosite [2]. L’atteinte articulaire, souvent transi-toire, est présente dans 25 % des cas. Intéressant aussi bienles petites que les grosses articulations, elle reste rarementisolée de manière prolongée. À l’examen clinique sont sou-vent présents des signes cutanés caractéristiques : une colo-ration violacée de paupières, une vascularite des faces d’ex-tension des articulations interphalangiennes proximales(nodules de Gottron). Une faiblesse musculaire s’accompa-gnant souvent au début de douleurs permet de faire rapide-ment le diagnostic dans les formes typiques.

L’ inflammation biologique, modeste, peut manquer.L’élévation des enzymes musculaires confirme le diagnostic,l’ IRM musculaire est un outil très utile au diagnostic, mon-trant des plages musculaires prenant le contraste au gadoli-nium en cas d’ inflammation. Elle peut éviter de proposer unebiopsie et représente un examen non invasif.

Connectivites mixtes. Rares chez l’enfant, les connectivess’accompagnent d’une polyarthrite modérée à sévère quipeut rester isolée pendant plusieurs mois, voire plusieursannées. La constatation de doigts boudinés peut faire évoquerle diagnostic, de même que la présence d’anticorps antinu-cléaires et d’anticorps anti-RNP à un taux très élevé et cecibien avant l’apparition d’autres signes : syndrome de Ray-naud, myosite, lésions cutanées type lupus.

3.2.1.3. Vascularites [3]. Elles sont définies par l’ inflamma-tion de la paroi des vaisseaux sanguins. La vascularite s’ex-prime principalement au niveau des grands axes vasculaires,mais aussi des vaisseaux de petite taille : peau, reins, tubedigestif, poumons, etc. L’atteinte articulaire souvent au se-cond plan s’ inscrit dans un tableau clinique souvent riche. Ils’agit d’arthralgies plus que d’arthrites qui sont alors transi-toires, disparaissant en règle générale sans séquelle.

Purpura rhumatoïde. La plus fréquente des vascularites,le purpura rhumatoïde, affection typiquement pédiatrique,est dominée par le purpura vasculaire des membres inférieurset des fesses, macropapulaire, pétéchial ou ecchymotique,parfois nécrotique. La vascularite peut exister au niveaudigestif (douleurs abdominales, diarrhées parfois sanglantes,hématémèse) et surtout au niveau rénal : hématurie, protéi-nurie, syndrome néphrotique, voire insuffisance rénale. L’at-teinte articulaire se limite en règle à une oligo-arthrite tran-sitoire des membres inférieurs. Le pronostic dépend del’atteinte rénale.

Maladie de Kawasaki. Artérite nécrosante des vaisseauxde petit et moyen calibre, le diagnostic en est posé lorsquesont présents 5 des 6 critères suivants :

• fièvre durant plus de 5 j ;• conjonctivite ;• chéilite et mucite buccale ;• rash érythémateux polymorphe ;

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• adénopathie cervicale ;• lésions des extrémités.

Les arthrites inconstantes apparaissent après la deuxièmesemaine d’évolution. Elles affectent souvent les grosses arti-culations des membres inférieurs et disparaissent sans sé-quelle. L’échographie cardiaque est l’examen clé. Elle re-cherche à la phase initiale une myopéricardite, puis après ledixième jour, la survenue d’anévrisme des coronaires quisigne le diagnostic et domine le pronostic.

Péri-artérite noueuse. Le tableau clinique est dominé parune fièvre élevée, une altération de l’état général, des lésionscutanées : nouures, syndrome de Raynaud, livedo réticulé,ulcères nécrotiques des extrémités. L’atteinte articulaire estsecondaire et ne laisse pas de séquelle. L’élément douleur estsouvent particulièrement très important chez ces patients. Lediagnostic est porté par la biopsie cutanée et/ou musculaire.

Maladie de Beçhet. Rare chez l’enfant, cette vascularitepréférentiellement veineuse peut atteindre tous les vaisseaux.Elle s’accompagne d’arthralgies 2 fois sur 3 et d’arthritesauthentiques dans un 1/3 des cas. L’évolution se fait parpoussés affectant essentiellement les grosses articulations.Le tableau clinique associe : une aphtose bipolaire, uneuvéite antérieure et postérieure avec œdème papillaire etpapillite, thrombose veineuse profonde et superficielle peuemboligène, des lésions neurologiques diverses : méningite,encéphalomyélite.

Autres vascularites. Elles sont très rares chez l’enfantqu’ il s’agisse du syndrome de Cogan, de la granulomatoseallergique, du syndrome de Churg Strauss ou de la granulo-matose de Wegener, ou encore de la maladie Takayasu. Lesmanifestations articulaires, principalement à type d’arthral-gies, sont peu fréquentes et parfois absentes.

3.2.2. Douleurs articulaires associées à une fièvrerécurrente

Ce cadre nosologique est actuellement en pleine restruc-turation sur la base de données génétiques récentes [4].

3.2.2.1. Maladie périodique. Appelée aussi fièvre méditer-ranéenne familiale, la maladie périodique est transmise selonun mode autosomique récessif. Le gène a été localisé sur lechromosome 16, il code pour une protéine appelée marenos-trine. Arthrites et arthralgies sont très fréquentes, parfoisisolées et faisant errer le diagnostic. Elles sont présentes dans50–87 % des cas selon l’ethnie considérée. Parfois inaugura-les, elles débutent brutalement sur un mode mono- plus quepoly-articulaire. La guérison sans séquelle est la règle. Cesarthrites s’ intègrent dans le cadre de symptômes récidivanttoutes les 2 à 4 semaines : fièvre intense, crise péritonéaleet/ou pleurale, éruption cutanée « érysipélatoïde ». Le risqueest l’amylose rénale. Le test thérapeutique à la colchicinepeut aider au diagnostic lorsque l’enquête génétique est priseen défaut.

3.2.2.2. CINCA : syndrome chronique infantile neurologi-que, cutané et articulaire [5]. Il s’agit d’un syndrome rare,d’ individualisation récente, lié àune mutation de l’exon 3 dugène CIAS1 situé sur le chromosome 1. Il associe différentssymptômes évoluant par poussées : rash urticarien souventprésent dès la naissance, méningite aseptique, surdité deperception progressive, uvéite antérieure chronique avecœdème papillaire. Plus inconstants sont le retard de crois-sance marqué et le QI bas. L’atteinte articulaire est parfoislimitée àde simples arthralgies. Plus souvent, il s’agit d’unearthropathie symétrique siégeant au niveau méta- et épiphy-saire, d’évolution d’autant plus sévère que la survenue estplus précoce. Une hypertrophie de la rotule apparaît rapide-ment, présentant parfois un caractère monstrueux. L’évolu-tion se fait par poussées peu influencées par la thérapeutiquequ’ il s’agisse de traitements de fond ou de traitements antal-giques.

3.2.2.3. Fièvre récurrente avec hyper-IgD. Cette affectionrare, transmise sur un mode autosomique récessif, touchesurtout les patients d’origine néerlandaise et française. Ellese manifeste par un déficit de l’activité mévalonate kinase.Des mutations sur le gène MVK situé sur le chromosome 12permettent de caractériser cette affection. La maladie évoluepar poussées récurrentes de courtes durées (inférieures àunesemaine) qui diminuent d’ intensité avec le temps. La symp-tomatologie est riche (Tableau 1). Les arthralgies sont trèsfréquentes. Dans 2/3 des cas, des arthrites transitoires locali-sées préférentiellement aux genoux, chevilles, poignets etcoudes sont présentes. Le diagnostic repose sur la recherchede mutation, orientée par l’hyper-IgD et l’hyper-IgA qui sonttoutefois inconstantes, l’élévation de l’acide mévaloniqueurinaire lors des poussées, et le dosage de la mévalonatekinase leucocytaire.

Tableau 1Critères pour le diagnostic de la fièvre récurrente avec hyper-IgD

Signes générauxÉlévation du taux des IgD (> 100 U/ml)Poussées récurrentesAugmentation du taux des IgA

Au cours des pousséesAugmentation de la VS, hyperleucocytoseDébut brutal de la fièvre (> 38,5 °C)Adénopathies (cervicales notamment)Signes digestifs

• Diarrhée• Vomissements• Douleurs abdominales

Signes cutanés (érythème maculeux et papuleux)Arthralgies / arthritesSplénomégalie

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3.2.2.4. Fièvre hibernienne familiale. Cette maladie, aussiappelée TRAPS (TNF-Receptor-Associated Periodic Syn-drome) est liée à une mutation du gène TNFRSFIA situé surle chromosome 12. Elle évolue par poussées récurrentes(Tableau 2).

3.2.2.5. Syndrome de Muckle et Wells. Affection autosoma-le dominante liée également à une mutation du gène CIAS1(chromosome 1) et caractérisée par des poussées fébrilesrécurrentes, une urticaire, une surdité de perception et uneamylose progressives. On note également soit des arthral-gies, soit des arthrites transitoires très douloureuses sanslésion radiologique décelable.

3.3. Autres étiologies

3.3.1. Sarcoïdose articulaire [6]

Il s’agit moins de la forme du grand enfant (après 9 ans)comportant surtout atteintes viscérales et polyarthrite, que dela forme débutant avant l’âge de 4 ans, où la triade éruption–arthrites–uvéite est très évocatrice (Tableau 3). Le débutsurvient avant un an dans 2/3 des cas. L’éruption érythéma-teuse de teinte chamoisée est étendue. L’atteinte oculaire estquasi-constante : iridocyclite granulomateuse détectée à lalampe à fente. La polyarthrite est diffuse, fixe, symétrique,très fluctionnaire, relativement peu douloureuse, souvent re-tardée par rapport aux signes initiaux. D’autres atteintes sontpossibles : pleuropneumopathie, péricardite, néphropathietubulo-interstitielle. Le diagnostic est histologique (peau etsynoviale) par la mise en évidence d’un granulome épithé-lioïde gigantocellulaire. Appelée syndrome de Blau dans sesformes familiales, une mutation sur le gène CARD15 apermis récemment de confirmer l’origine constitutionnellede ce syndrome.

3.3.2. Polychondrite atrophianteAffection très rare chez l’enfant, elle se caractérise par une

inflammation destructrice des cartilages. Cliniquement, onnote des poussées d’arthralgies (articulations chondrocosta-les) qui s’ intègrent dans un tableau riche : chondrite del’oreille, du cartilage nasal, et du cartilage laryngotrachéal.Biologiquement, la présence d’anticorps anticollagène estcaractéristique.

3.3.3. Ostéolyse multifocaleElle débute dans l’enfance, prédominant de manière sy-

métrique au carpe et au tarse. Elle peut s’accompagner designes inflammatoires et de douleurs parfois intenses. Mala-die sporadique ou familiale, elle peut être isolée ou s’accom-pagner d’autres lésions osseuses et viscérales. Aucun traite-ment ne permet de contrôler cette affection.

3.4. Polyarthrites d’origine infectieuse (hors arthritespurulentes)

3.4.1. Rhumatisme articulaire aiguë (RAA)Lié à une infection non suppurée des voies aériennes

supérieures par un streptocoque b-hémolytique du groupe A,le RAA est devenu très rare en France métropolitaine. Sonexpression clinique s’est aussi modifiée. La polyarthrite estclassiquement aiguë, douloureuse, migratrice et fugace. Elletouche les grosses articulations des membres inférieurs, puisdes membres supérieurs. Elle peut se limiter à une seulearticulation. Les radiographies sont normales. Le diagnosticrepose sur la présence des critères de Jones et sur l’existencede critères cliniques et biologiques témoignant d’une infec-tion streptococcique récente (Tableau 4).

3.4.2. Arthrites poststreptococciques [7]Certains auteurs ont évoqué l’existence de ces arthrites

réactionnelles poststreptococciques, différentes du RAA, surla présence de critères particuliers :

• délais plus courts entre l’ infection pharyngée et l’arth-rite : 1 à 2 semaines, contre 3 à 4 pour le RAA ;

• arthrite volontiers symétrique, prolongée, non migra-trice ;

Tableau 2Critères diagnostiques pour la fièvre hibernienne familiale

Les critères suivants doivent être les suivants1. Accès fébrile récurrents sans cause évidente2. Douleurs abdominales récidivantes ou myalgies avec raideurfonctionnelle sévère pendant les accès fébrilesS’accompagnant d’au moins un des signes suivants1. Lésions cutanées érysipélatoïdes2. Atteinte oculaire (injection conjonctivale ou œdème péri-orbitaire)3. Histoire familiale de transmisions autosomale récessive4. Efficacitéde fortes doses de corticoïdes

Tableau 3Fréquence (%) des principales manifestations de la sarcoïdose chez l’enfanten fonction de l’âge de début

Avant 4 ans Après 4 ansÉruption 80 38Uvéite 60 40Arthrite 60 3Adénopathies 40 45Fièvre 40 25Atteinte pulmonaire 30 70

Tableau 4Critères de Jones. Deux critères majeurs ou un critère majeur et 2 critèresmineurs (modifié d’après Jones criteria update Guidelines for diagnosis ofrheumatic fever Jama, 1992, 268: 2069-2070)

Critères majeurs Critères mineursCardite FièvrePolyarthrite ArthralgiesChorée Antécédent de RAAÉrythème marginé ou atteinte cardiaque rhumatismaleNodules sous-cutanés Augmentation des protéines de

l’ inflammation (CRP, VS)Allongement de PR à l’ECG

Éléments témoignant d’une infection streptococcique récente.Élévation du taux des antistreptolysines O ou d’autres anticorps strepto-

cocciques.Présence d’un streptocoque hémolytique du groupe A au prélèvement de

gorge scarlatine récente.

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• arthrite moins sensible à l’aspirine ;• absence de cardite.

3.4.3. Borréliose de LymeLa borréliose de Lyme est liée à un spirochéte transmis à

l’homme après morsure de tique. Trois espèces sont connues :Bartonella burglorféri, Bartonella garinii, Bartonella afzelii.L’homme, hôte accidentel, se contamine en forêt. Le risqueinfectieux dépend de la densité en tiques, de leur degréd’ infestation, de la durée de la morsure. L’atteinte articulairecomporte 2 phases : arthralgies migratrices dans les jours,semaines suivant le contage, arthrites tardives (soit mono-arthrite du genou) plusieurs mois ou années plus tard. Cesformes articulaires paraissent rares chez l’enfant ; l’erythemamigrans et les formes neurologiques semblent largementprédominantes au sein de la population pédiatrique françaiseet européenne. Le diagnostic biologique, essentiellement sé-rologique, vient confirmer l’hypothèse clinique.

3.4.4. Arthrites réactionnellesIl s’agit d’arthrites inflammatoires non infectieuses, non

suppuratives, survenant au décours d’une affection sans quele germe soit apparemment présent dans l’articulation. Nom-bre de germes sont identifiés ou suspectés (Tableau 5). Lesarthrites réactionnelles sont rares chez l’enfant, avec unenette prédominance masculine (M/F = 4/1). L’âge moyen dedébut est de 10 ans. L’atteinte est surtout digo-articulaire(70 %), plus rarement poly-articulaire (25 %). On trouve uneenthésiopathie associée dans la moitiédes cas. Ces arthrites,asymétriques, prédominent aux membres inférieurs, déclen-chées par une infection digestive ou uréthrale (syndrome deFiessinger-Leroy-Reiter) dans les 4 semaines qui précèdent.Il existe une inflammation biologique plus ou moins mar-quée. L’antigène HLA B27 est présent dans 2/3 des cas. Lediagnostic repose sur l’ isolement du germe dans les selles,l’ intestin, ou l’urètre, ou sur l’élévation significative du taux

d’anticorps spécifiques ou sur la mise en évidence par PCRde l’antigène bactérien dans la synoviale et/ou dans le liquidearticulaire.

4. Douleurs d’origine osseuse

Derrière le diagnostic d’origine osseuse plane toujours lerisque de tumeur maligne. Aucun argument clinique n’estspécifique et au terme du bilan clinique, radiologique, etbiologique, c’est l’examen histologique qui permet de tran-cher.

4.1. Tumeurs bénignes

Elles peuvent être d’origine fibroblastique, cartilagineuse,osseuse ou vasculaire.

4.1.1. Tumeurs d’origine fibroblastiqueLe cortical defect est peu douloureux, souvent découvert

par une radiographie systématique qui montre une lacuneostéolytique à l’emporte-pièce. Il en va de même pour lefibrome ossifiant peu douloureux, mais parfois révélé parune fracture pathologique.

La dysplasie fibreuse qui affecte en général les grandsenfants et adolescents est souvent révélée par des douleurs,surtout lorsqu’elle siège sur des os longs des membres infé-rieurs. La radiographie montre volontiers des lésions lytiqueset diaphysaires, étendues, envahissant la médullaire, refou-lant la corticale sans la rompre. Sur les os plats, l’aspect estmixte, lytique et condensant.

4.1.2. Tumeurs d’origine cartilagineuseL’exostose ostéogénique est l’affection la plus fréquente.

Elle est plus gênante que douloureuse lorsqu’elle siège àproximité de tendons ou au sein d’une masse musculaire.

Les chondromes se développent en règle au sein de lacavité médullaire. Siégeant au niveau des phalanges, desdoigts ou des orteils, des métacarpiens ou des métatarsiens,parfois des os longs, ils se manifestent par des douleurs, destuméfactions palpables, ou par une fracture pathologique. Laradiographie est généralement typique, montrant une lacuneosseuse médullaire, polylobée, soufflant la corticale sansréaction périostée.

Beaucoup plus rares sont les chondroblastomes, réveilléspar des douleurs chroniques, siégeant sur les épiphyses, réa-lisant radiologiquement une lacune arrondie, et les fibromeschondromixoïdes exceptionnels.

4.1.3. Tumeurs ostéogéniques

4.1.3.1. Ostéome. Tumeur exceptionnelle chez l’enfant, sur-venant après un traumatisme ou une chirurgie osseuse, peuou pas douloureuse, siégeant sur les os plats, elle est révéléesurtout par une tuméfaction.

4.1.3.2. Ostéome ostéoïde. Assez fréquente (10 % des tu-meurs osseuses bénignes), avec une nette prédominance

Tableau 5Principaux germes impliqués dans les arthrites réactionnelles

Germes reconnus Germes suspectés• Chlamydia trachomatis • Chlamydia pneumoniae• Ureaplasma urealyticum • Mycoplasma hominis• Yersinia enterocolitica et et fermentanspseudotuberculosis • Neisseria gonorrhoeae• Shigella fexneri et sonnei • Borrelia burgdorferi• Salmonella typhimurium,enteriditis

• Clostridium diffıcile

et autres • b-Haemolytic streptococci• Campylobacter jejuni • Propionibacterium acnes

• Escherichia coli• Helicobacter pylori• Brucella abortus• Bacille de Calmette et Guérin• Leptospira• Bartonella• Trophyrema whippellii• Gardnerella vaginalis• Giardia lamblia

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masculine, elle est caractérisée par une douleur à prédomi-nance nocturne, réveillant l’enfant, remarquablement calméepar l’aspirine. L’ostéome ostéoïde peut siéger sur n’ importequel os. L’ image radiologique est évocatrice : lacune osseusede petite taille, parfois centrée par une calcification cernéepar une zone de sclérose condensante, importante. Le scan-ner, guidé par la scintigraphie, permet d’aider au diagnostic.

4.1.4. Tumeurs kystiques

4.1.4.1. Kyste osseux essentiel (ou solitaire). Lésion osseu-se la plus fréquente, survenant surtout chez le garçon, sié-geant principalement sur les os longs (fémur et humérus),elle est peu ou pas douloureuse, parfois diagnostiquée aprèsune fracture pathologique. L’aspect radiologique est caracté-ristique : lacune métaphysaire de taille variable, amincissantla corticale.

4.1.4.2. Kyste osseux anévrismal. Plus fréquent chez la fille,peu ou pas douloureux, il est parfois découvert devant unetuméfaction située en général au niveau de la métaphyse desos long et sur le rachis. L’aspect radiologique est celui d’unevaste lacune ostéolytique, expansive, qui souffle l’os. Lacorticale est amincie, voire érodée, avec des trabéculationsintrakystiques. Scanner et/ou IRM permettent de visualiser laclassique image de niveaux liquides au sein du kyste, mais labiopsie reste indispensable.

4.1.5. Histiocytoses langerhansiennesL’atteinte osseuse peut être isolée. Tous les os peuvent être

atteints avec une fréquence particulière pour le crâne, lesclavicules, les vertèbres (vertebra plana). Cliniquement, onnote douleurs ou tuméfactions. La scintigraphie permet defaire le bilan d’extension, surtout quand existent d’autresatteintes : cutanées, pulmonaires, hépatiques, ORL. La biop-sie, discutée par certains, montre des proliférations réticulo-histiocytaires et éosinophiles. En cas de localisation osseuseunique, aucun traitement particulier n’est nécessaire. En casd’atteinte osseuse multifocale et/ou si d’autres organes sontatteints, le traitement repose sur la chimiothérapie.

4.1.6. Tumeur à cellules géantesLa symptomatologie clinique est banale : douleurs modé-

rées, tuméfactions, parfois fractures pathologiques. La radio-graphie montre une tumeur épiphysaire et/ou métaphysaireavec une ostéolyse massive qui souffle ou rompt la corticale,sans apposition périostée, ni aspect en feu d’herbe, ni enva-hissement des parties molles. La biopsie confirme le diagnos-tic et précise le degré d’agressivité de cette tumeur qui peutrécidiver sur un mode malin.

4.2. Étiologie maligne

La douleur, initialement peu intense, devient vite impor-tante, voire insomniante et insupportable. Le premier dia-gnostic à évoquer en cas de douleurs osseuses erratiques, malsystématisées, souvent intenses est celui de leucémie aiguë

conduisant sans délai à la pratique d’un myélogramme. Lanumération formule sanguine, souvent effectuée par auto-mate, peut paraître normale [8]. Dans d’autres cas, les dou-leurs osseuses peuvent être le premier symptôme de métas-tases comme un neuroblastome qu’ il conviendra derechercher. Les tumeurs proprement osseuses sont souventassociées àun syndrome tumoral, une atteinte de l’état géné-ral, voire de la fièvre. Le diagnostic repose sur une biopsiechirurgicale urgente et impose un bilan soigneux qui appré-cie l’extension locorégionale et la recherche de métastase.

4.2.1. OstéosarcomeIl se développe presque toujours dans la région métaphy-

saire des os longs (fémur, tibia, humérus). L’ image radiolo-gique est celle d’une lyse métaphysaire avec rupture corti-cale, apposition périostée, aspect en feu d’herbe etossification des parties molles adjacentes. La biopsie chirur-gicale est une urgence, de même que le bilan d’extension.

4.2.2. ChondrosarcomeRare chez l’enfant, survenant surtout chez le garçon, le

chondrosarcome siège essentiellement sur les os plats et letronc. Les douleurs sont souvent peu intenses. Il existe par-fois un terrain favorisant : maladie des exostoses malignes,maladie de Ollier (endochondromatoses multiples) et surtoutsyndrome de Mafucci (endochondromatose + angiomessous-cutanés).

4.2.3. FibrosarcomeTumeur d’évolution lente, les fibrosarcomes se dévelop-

pent sur les os longs, principalement au niveau métaphysaire(genoux). La douleur est quasi-constante, les fractures révé-latrices fréquentes. L’aspect radiologique est peu spécifique,le potentiel métastatique paraît important.

4.2.4. Sarcome d’EwingCette tumeur fréquente de l’enfant atteint plus les os plats

et courts que les os longs. La douleur, peu intense, peutévoluer pendant des semaines ou des mois. L’aspect radiolo-gique, parfois trompeur, montre classiquement une ostéolyseplus ou moins étendue, mal limitée, détruisant la corticale,avec une réaction périostée lamellaire (aspect en bulbed’oignon). L’envahissement des parties molles et la survenuede métastases sont fréquents. Le sarcome d’Ewing est trèsagressif avec un risque important de récidive, même tardive-ment.

5. Autres syndromes douloureux

5.1. Algoneurodystrophie [9]

L’algoneurodystrophie est un syndrome complexe asso-ciant une douleur et des troubles vasomoteurs de la microcir-culation et/ou de sa commande neurovégétative, de localisa-tion distale. La majorité des patients est de sexe féminin.L’âge de début est en règle compris entre 8 et 14 ans. Deux à

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6 mois après un traumatisme physicopsychologique, appa-raissent, souvent brutalement, des douleurs superficielles àtype de brûlures, constrictives, pénétrantes, parfois insom-niantes, avec hyperesthésie cutanée, exacerbées par le tou-cher même léger et le contact avec les vêtements, ainsi queles mouvements. Le niveau de brûlure monte jusqu’à mi-avant-bras ou mi-jambe. L’ impotence fonctionnelle est sou-vent quasi-complète, touchant la main, le poignet ou le piedet la cheville. La forme chaude avec rougeur et chaleur estplus rare chez l’enfant que la forme froide qui associe œdè-mes et hypothermie cutanée. Avec le temps, apparaissent destroubles moteurs : une hypertonie souvent irréductible(mains d’accoucheur, pied équin), une dystonie, des rétrac-tions musculaires et tendineuses. On note également desanomalies des phanères : desquamation irrégulière, dispari-tion de la pilosité. Il existe souvent un terrain psychologiqueparticulier : anxiété, conflits familiaux, problèmes scolaires(perfectionnisme), ainsi que des difficultés d’adaptation et desituations nouvelles : déménagement, séparation parentale,deuil.

Les examens biologiques sont normaux. Les radiogra-phies standard initialement normales, montrent une déminé-ralisation diffuse progressive. La scintigraphie osseuse autechnetium 99 montre dans les formes froides, les plus fré-quentes chez l’enfant, un retard de fixation du côté atteintavec une hypofixation précoce et tardive. Scanner et IRMn’ont d’ intérêt qu’en cas de doute diagnostique, ils montrentune déminéralisation et un éventuel épanchement intra-articulaire réactionnel.

5.2. Fibromyalgie [10]

Cette affection non inflammatoire, caractérisée par desdouleurs diffuses de localisation spécifique, paraît fréquente(2–7 % de la population), surtout au sein de la populationféminine. L’examen clinique est normal, en dehors des sitesde sensibilité caractéristiques (Tableau 6). D’autres symptô-mes peuvent être associés : asthénie, fatigue au réveil, troubledu sommeil, dépression, céphalées, paresthésies, troubles del’activité intestinale. On retrouve souvent un terrain psycho-logique particulier personnel et/ou familial. Les examensbiologiques et radiologiques sont tous normaux.

5.3. Syndrome de fatigue chronique [11]

Rare chez l’enfant, il survient chez l’adolescent ou lepré-adolescent. Il est caractérisé par une fatigue intense,persistante, invalidante, résistante au repos. On trouve par-fois une infection virale ou un stress psychologique impor-tant au cours des mois précédents. Le diagnostic repose sur lafatigue persistante depuis au moins 6 mois, l’absence d’ano-malie clinique et biologique, et la présence de 4 des 6 symp-tômes suivants : manque de concentration et perte de mé-moire, douleur pharyngée, douleurs articulaires, céphalées,sommeil non réparateur, malaise après les efforts. Commedans la fibromyalgie, il semble exister un terrain psychologi-que particulier.

5.4. Syndrome d’hypermobilité articulaire

Les douleurs articulaires essentiellement à l’effort, peu-vent survenir chez les patients atteints de genu recurvatum,de genu valgum, d’ instabilité rotulienne ou porteur de piedsplats. Il peut aussi s’agir du syndrome d’hypermobilité arti-culaire généralisé qui touche surtout les filles. Il est caracté-risé par l’exagération des secteurs de mobilité. Les douleursarticulaires sont fréquentes, parfois associées à un discretépanchement articulaire, transitoire et répété. Le diagnosticrepose sur les caractères cliniques (Tableau 7).

6. Douleurs anorganiques

Elles sont loin d’être exceptionnelles. Mais elles ne peu-vent être affirmées qu’après avoir fermement éliminé uneétiologie organique. L’examen clinique est dans ce cas rigou-reusement normal, de même que les examens complémentai-res. L’attention peut être attirée par un comportement illogi-que dans la traduction des douleurs et un examen attentif dumoindre des gestes lors de la consultation peut orienter. Encas de doute, il faut avec tact trouver le moyen de discuter entête à tête avec le ou les parents. Il ne faut pas hésiter àdemander un autre avis et àconfier l’enfant àun psychologueou un pédopsychiatre. Parfois, il peut s’agir de prémicesd’une pathologie psychiatrique future grave à type de psy-chose surtout chez l’adolescente. Mais le plus souvent, cesmanifestations de conversion pouvant traduire une certaineangoisse, finissent par s’estomper.

Tableau 6Critères pour le diagnostic de fibromyalgie

1. Histoire de douleurs diffuses des membres, du tronc, du rachis2. Douleur à la pression de 11 au moins des 18 sites suivants :

• région occipitale, bilatérale, au niveau des apophyses transversesC5–C7 ;

• au niveau des trapèzes, bilatérales, à la partie moyenne du bordsupérieur du muscle ;

• le long du rachis àhauteur de l’omoplate, bilatérale ;• àhauteur de la jonction chondrocostale de la deuxième côte,

bilatérale ;• au niveau des épicondyles ;• au niveau du quadrant supéro-externe de la fesse, de chaque côté ;• au niveau des grands trochanters ;• à la face interne des genoux.

Tableau 7Échelle pour le diagnostic d’hyperlaxité ligamentaire (score maximal = 9)

• 1 point pour chaque côtépour un mouvement supérieur à :– 90° pour la dorsiflexion de la cinquième articulation

métacarpophalangienne ;– 10° pour l’hyperextension du coude ;– 10° pour l’hyperextension du genou ;

• 1 point pour chaque côtépour la flexion complète du pouce surl’avant-bras• 1 point pour la flexion du tronc vers l’avant avec possibilitéde mettre lesmains àplat sur le sol sans fléchir les genoux

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Références

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