Dom Antoine Joseph Pernety - Les Fables Égyptiennes Vol.1

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    LES FABLES GYPTIENNES

    E T

    GRECQUES

    Dvoiles & rduites au mme principe,

    AVEC

    UNE EXPLICATION DES

    HIROGLYPHES,

    ET DE

    LA GUERRE DE TROYE :

    Par DomANTOINE-JOSEPH PERNETY, Religieux Bndictin de la Congrgation deSaint-Maur.

    Populum Fabulis pascebant Sacerdotes gyptii ; ipsi autem sub nomimbus Deorum

    patriorum philosophabantur.Orig.l. i. contra Celsum.

    TOME PREMIER.

    Prix, 12 liv. les 2. Vol rel.

    A PARIS,

    Chez DELALAIN lan, Libraire, rue Saint-Jacques, N. 240.

    M. DCC. LXXXVI.

    AVEC APPROBATION, ET PRIVILEGE DU ROI.

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    TABLE DES LIVRES ET CHAPITRES DE LA PREMIERE PARTIE.

    Prface, p5. Discours Prliminaire, p 9. Principes Gnraux de Physique, suivant la Philosophie Hermtique, p31. De la premire matire, p 34. De la Nature, p37. De la lumire, & de ses effets, p 39. De lHomme, p 40. Des Elments, p 47. De la Terre, p 49. De lEau, p 50. De lair, p 52. Du Feu, p 53. Des oprations de la Nature, p 57. Des manires dtre gnrales des Mixtes, p 59. De la diffrence qui se trouve entre ces trois Rgnes, p 59. Le Minral, p 59. Le Vgtal, p 60. LAnimal, p 60. De lme des Mixtes, p 60. De la gnration & de la corruption des Mixtes, p 62. De la Lumire, p 64. De la conservation des Mixtes, p 68. De lhumide radical, p 69. De lharmonie de lUnivers, p 71. Du Mouvement, p 72. Trait de luvre Hermtique, p 73. Conseils Philosophiques, p 74. Aphorisme de la vrit des science, p 75. La clef des Sciences, p 75. Du Secret, p 76. Des moyens pour parvenir au Secret, p 76. Des clefs de la Nature, p 77. Des Principes mtalliques, p 77. De la matire du grand uvre en gnral, p 78. Des noms que les anciens Philosophes ont donn a la matire, p 80. La matire est une & toute chose, p 82.

    La clef de luvre, p 85.

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    PRFACE.

    A Philosophie considre en gnral a pris naissance avec le monde,parce que de tout temps les hommes ont pens, rflchi, mdit ; de touttemps le grand spectacle de lUnivers a du les frapper d admiration, &piquer leur curiosit naturelle. N pour la socit, lhomme a cherch lesmoyens dy vivre avec agrment & satisfaction ; le bon sens, lhumanit,

    la modestie, la politesse des murs, lamour de cette socit, ont donc d treles objets de son attention. Mais quelque admirable, quelque frappant quait tpour lui le spectacle de lUnivers, quelque avantage quil ait cru pouvoir tirerde la socit, toutes ces choses ntaient pas lui. Ne dut-il pas sentir, en serepliant sur lui-mme, que la conservation de son tre propre, ntait pas unobjet moins intressant ; & penserait-on quil se soit oubli, pour ne soccuperque de ce qui tait autour de lui ? Sujet tant de vicissitudes, en but tant demaux ; fait dailleurs pour jouir de tout ce qui lenvironne, il a sans doutecherch les moyens de prvenir ou de gurir ces maladies, pour conserver pluslongtemps une vie toujours prte lui chapper. Il ne lui a pas fallu mditerbeaucoup pour concevoir & se convaincre que le principe qui constitue soncorps & qui lentretient, tait aussi celui qui devait le conserver dans sa maniredtre. Lapptit naturel des aliments le lui indiquait assez : mais il saperutbientt que ces aliments, aussi prissables que lui, cause du mlange des

    parties htrognes qui les constituent, portaient dans son intrieur un principede mort avec le principe de vie. Il fallut donc raisonner sur les tres delUnivers, mditer longtemps pour dcouvrir ce fruit de vie, capable deconduire lhomme presque limmortalit.

    L

    Ce ntait pas assez davoir aperu ce trsor travers lenveloppe qui le couvre& le cache aux yeux du commun. Pour faire de ce fruit lusage quon seproposait, il tait indispensable de le dbarrasser de son corce, & de lavoirdans toute sa puret primitive. On suivit la Nature de prs ; on pia les

    procds quelle emploie dans la formation des individus, & dans leurdestruction. Non seulement on connut que ce fruit de vie tait la base de toutesses gnrations, mais que tout se rsolvait enfin eu ses propres principes.

    On Se mit donc en devoir dimiter la Nature ; & sous un tel guide pouvait-on nepas russir ? quelle tendue de connaissances cette dcouverte ne conduisit-elle pas ? Quels prodiges nerrait-on pas en tat dexcuter, quand on voyait laNature comme dans un miroir, & quon lavait ses ordres ?

    Peut-on douter que le dsir de trouver un remde cous les maux qui antignelhumanit, & dtendre, sil tait possible, les bornes prescrites la dure de la

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    vie, naie t le premier objet des ardentes recherches des hommes, & naieform les premiers Philosophes? Sa dcouverte dut flatter infiniment son

    inventeur, & lui faire rendre de grandes actions de grces la Divinit pour unefaveur si signale. Mais il duc penser en mme temps que Dieu nayant pasdonn cette connaissance tous les hommes, il ne voulait pas sans doucequelle ft divulgue. Il fallut donc nen faire participants que quelques amis ;aussi Herms Trimgiste, ou trois fois grand, le premier de tous les Philosophesconnus avec distinction, ne le communiqua-t-il qu des gens dlite, despersonnes dont il avait prouv la prudence & la discrtion. Ceux-ci en firentpart dautres de la mme trempe, & cette dcouverte se rpandit dans toutlUnivers. On vit les Druides chez les Gaulois, les Gymnosophistes dans lesIndes, les Mages en Perse, les Chaldens en Assyrie, Homre, Tals, Orphe,

    Pythagore, & plusieurs autres Philosophes de la Grce avoir une conformit deprincipes, & une connaissance presque gale des plus rares secrets de la Nature.Mais cette connaissance privilgie demeura toujours renferme dans un cercletrs troit de personnes, & lon ne communiqua au reste du monde que desrayons de cette source abondance de lumire.

    Cet agent, cette base de la Nature une fois connue, il ne fut pas difficile delemployer suivant les circonstances des temps & lexigence des cas. Lesmtaux, les pierres prcieuses entrrent dans les arrangements de la socit, les

    uns par le besoin quon en eut, les autres pour la commodit & lagrment. Maiscomme ces derniers acquirent un prix par leur beaut & leur clat, & devinrentprcieux par leur raret, on fit usage de ses connaissances Philosophiques pourles multiplier. On transmua les mtaux imparfaits en or & en argent, onfabriqua des pierres prcieuses, & lon garda le secret de ces transmutationsavec le mme scrupule que celui de la panace universelle, tant parce quon nepouvait dvoiler lun sans faire connatre lautre, que parce quon sentaitparfaitement quil rsulterait de sa divulgation, des inconvnients infinis pourla socit.

    Mais comment pouvoir se communiquer dges en ges ces secrets admirables,& les tenir en mme temps cachs au Public ? Le faire par tradition orale, cett risquer den abolir jusquau souvenir ; la mmoire est un meuble trop fragilepour quon puisse sy fier. Les traditions de cette espce sobscurcissent mesure quelles sloignent de leur source, au point quil est impossible dedbrouiller le chaos tnbreux, o lobjet & la matire de ces traditions setrouvent ensevelis. Confier ces secrets des tablettes en langues & en caractresfamiliers, ctait sexposer les voir publics par la ngligence de ceux quiauraient pu les perdre, ou par lindiscrtion de ceux qui auraient pu les voler.

    Bien plus, il fallait ter jusquau moindre soupon, sinon de lexistence, au

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    moins de la connaissance de ces secrets. Il ny avait donc dautre ressource quecelle des hiroglyphes, des symboles, des allgories, des fables, &c. qui tant

    susceptibles de plusieurs explications diffrentes, pouvaient servir donne lechange, & instruire les uns, pendant que les autres demeureraient danslignorance. Cest le parti que prit Herms, & aprs lui tous les PhilosophesHermtiques du monde. Ils amusaient le Peuple par des fables, dit Origne, &ces fables, avec les noms des Dieux du pays, servaient de voile leurPhilosophie.

    Ces hiroglyphes, ces fables prsentaient aux yeux des Philosophes, & de ceuxquils instruisaient pour tre initis dans leurs mystres, la thorie de leur Artsacerdotal, & aux autres diverses branches de la Philosophie, que les Grecs

    puisrent chez les Egyptiens.Les usages, les modes, les caractres, quelquefois mme la faon de penservarient suivant les pays. Les Philosophes des Indes, ceux de lEuropeinventrent des hiroglyphes & des fables leur fantaisie, toujours cependantpour le mme objet.On crivit sur cette matire dans la suite des temps, maisdans un systme nigmatique ; & ces ouvrages, quoique composs en languesconnues, devinrent aussi intelligibles que les hiroglyphes mmes. Laffectationdy rappeler les fables anciennes, en a fait dcouvrir lobjet ; & cest ce qui maengag les expliquer suivant leurs principes. On les trouve assez dvelopps

    dans leurs livres, quand on veut les tudier avec une attention opinitre, &quon a assez de courage pour vouloir se donner la peine de les combiner, deles rapprocher les uns des autres. Ils nindiquent la matire de leur Art que parses proprits, jamais par le nom propre sous lequel elle est connue. Quant auxoprations requises pour la mettre en uvre philosophiquement, ils ne les ontpas cach sous le sceau dun secret impntrable ; ils nont point fait de mystredes couleurs ou signes dmonstratifs qui se succdent dans tout le cours desoprations. Cest ce qui leur a fourni particulirement la matire imaginer, feindre les personnages des Dieux & des Hros de la Fable, & les actions quon

    leur attribue ; onen jugera par la lecture de cet Ouvrage. Chaque chapitre estune espce de dissertation, ce qui lui te beaucoup dagrments, & lempchedtre aussi amusant que la matire semblait le porter. Je ne me suis paspropos dcrire des fables, mais dexpliquer celles qui sont connues. On verradans le discours prliminaire les raisons oui mont dtermin mettre en ttedes principes gnraux de Physique, & un Trait de Philosophie Hermtique. Iltait indispensable de mettre par-l le Lecteur au fait de la marche, & dulangage des Philosophes, ds que je me proposais de le faire entrer dans leursides. Il y verra les nigmes, les allgories, les mtaphores donc leurs crits

    fourmillent. Sil en dsire une explication plus dtaille, il peut avoir recours au

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    La Philosophie Hermtique est encore en disgrce, & par-l mme en discrdit.Elle est pleine dnigmes, & probablement ne sera pas de longtemps

    dbarrasse de ces termes allgoriques & barbares dont si peu de personnesprennent le vrai sens. Ltude en est dautant plus difficile, que les mtaphoresperptuelles donnent le change ceux qui simaginent entendre les Auteurs quien traitent, la premire lecture quils en font. Ces

    Auteurs avertissent nanmoins quune science telle que celle-l ne veut pas tretraite aussi clairement que les autres, cause des consquences funestes quipourraient en rsulter pour la vie civile. Ils en font un mystre, & un mystrequils studient plus obscurcir qu dvelopper. Aussi recommandent-ils sanscesse de ne pas les prendre la lettre, dtudier les lois & les procds de la

    nature, de comparer les oprations donc ils parlent, avec les siennes, denadmettre que celles que le Lecteur y trouvera conformes.

    Aux mtaphores, les Philosophes Hermtiques ont ajout les Emblmes, lesHiroglyphes, les Fables, & les Allgories, & se sont rendus par ce moyenpresque inintelligibles ceux quune longue tude & un travail opinitre nontpas initis dans leurs mystres. Ceux qui nont pas voulu se donner la peine defaire les efforts ncessaires pour les dvelopper, ou qui en ont fait dinutiles, ontcru navoir rien de mieux faire que de cacher leur ignorance labri de langative de la ralit de cette science, ils ont affect de navoir pour elle que du

    mpris ; ils lont traite de chimre & dtre de raison.

    Lambition & lamour des richesses est le seul ressort qui met en mouvementpresque tous ceux qui travaillent sinstruire des procds de cette science ; elleleur prsente des monts dor en perpective, & une sant longue & solide pouren Jouir. Quels appas pour des curs attachs aux biens de ce monde ! onsempresse, on court pour parvenir ce but, & comme on craint de ny pasarriver assez lot, ou prend la premire voie qui parat y conduire pluspromptement, sans vouloir se donner la peine de sinstruire suffisamment du

    vrai chemin par lequel on y arrive. On marche donc, on avance, on se croie aubout ; mais comme on a march en aveugle, on y trouve un prcipice, on ytombe. On croie alors cacher la honte de sa chute, en disant que ce prtendu butnest quune ombre quon ne peut embrasser ; on traite ses guides de perfides ;on vient enfin nier jusqu la possibilit mme dun effet, parce quon enignore les causes. Quoi ! parce que les plus grands Naturalistes ont perdu leursveilles & leurs travaux vouloir dcouvrit quels procds la Nature emploiepour former & organiser le ftus dans le sein de sa mre, pour faire germer &crotre une plante, pour former les mtaux dans la terre, aurait-on bonne grce nier le fait ? regarderait-on comme sens un homme dont lignorance serait le

    fondement de sa ngative ? On ne daignerait mme pas faire les frais de la

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    de ses procds, mais aveugles dans la Chymie Hermtique, & entrans parlusage, ils ont lev des fourneaux sublimatoires (Novum lumen Chemicum.

    Tract. l.), calcinatoires, distillatoires ; ils ont employ une infinit de vases & decreusets inconnus la simple Nature; ils ont appel leur secours le fratricidedu feu naturel, comment avec des procds si violents auraient-ils runi ? Ilssont absolument loigns de ceux que suivent les Philosophes Hermtiques. Sinous en croyons le Prsident dEspagnet (Arcan. Herm, Philosophia; opus. Canone6. ), les Chimistes vulgaires se sont accourmes insensiblement sloigner dela voie simple de la Nature, par leurs sublimations, leurs distillations, leurssolutions, leurs conglations, leurs coagulations, par leurs diffrentesextractions desprits & de teintures, & par quantit dautres oprations plussubtiles quutiles. Ils sont tombs dans des erreurs, qui ont t une suite les

    unes des autres, ils sont devenus les bourreaux de cette Nature. Leur subtilittroplaborieuse, loin douvrir leurs yeux la lumire de la vrit, pour voir lesvoies de la Nature, y a t un obstacle, qui la empche de venir jusqu eux. Ilssen sont loigns de plus en plus. La seule esprance qui leur reste, est dans unguide fidle, qui dissipe les tnbres de leur esprit, & leur fasse voir le soleildans toute sa puret.

    Avec un gnie pntrant, un esprit ferme & patients, un ardent dsir de laPhilosophie, une grande connaissance de la vritable Physique, un cur pur,

    des murs intgres, un sincre amour de Dieu & du prochain, tout homme,quelque ignorant quil soit dans la pratique de la Chymie vulgaire, peut avecconfiance entreprendre de devenir Philosophe imitateur de la Nature.

    Si Herms, le vrai pre des Philosophes, dit le Cosmopolite (Nov. lum, Chem.Tract. I.), si le subtil Geber, le profond Raymond Lulle, & tant dautres vrais &clbres Chimistes revenaient sur la terre, nos Chimistes vulgaires nonseulement ne voudraient pas les regarder comme leurs matres, mais ilscroiraient leur faire beaucoup de grces & dhonneur de les avouer pour leursdisciples. Il est vrai quils ne sauraient pas faire toutes ces distillations, ces

    circulations, ces calcinations, ces sublimations, enfin toutes ces oprationsinnombrables que les Chimistes ont imagines pour avoir mal entendu leslivres des Philosophes.

    Tous les vrais Adeptes parlent sur le mme ton, & sils disent vrai, sans prendretant de peines, sans employer tant de vases, sans consumer tant de charbons,sans ruiner sa bourse & sa sant, on peur travailler de concert avec la Nature,qui, aide, se prtera aux dsirs de lArtiste, & lui ouvrira libralement sestrsors. Il apprendra delle, non pas dtruire les corps quelle produit, maiscomment, avec quoi elle les compose, & en quoi ils se rsolvent. Elle leur

    montrera cette matire, ce chaos que lEtre suprme a dvelopp, pour en

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    moyens de faire de lor, & les priver de ce secours pour soutenir la guerrecontre lui, il nous en reste encore un assez grand nombre dans toutes les

    langues du monde, pour justifier auprs des incrdules ce que je viensdavancer. La feule Bibliothque du Roi conserve un nombre prodigieux demanuscrits anciens & modernes, composs fur cette science dans diffrenceslangues. Michel Maer disait ce sujet, dans une Epigramme que lon trouve aucommencement de son Trait, qui a pour titre Symbola auree, mensae :

    Unum opus en prifcis haec ufque ad tempora feclis

    Confina diffusis gentibus ora dedit.

    Quon lise Herms Egyptien, Abraham, Isaac de Moiros Juifs, cits par

    Avicenne ;Dmocrite, Orphe, Aristote (De Secretis Secretorum.), Olympiodore,Hliodore (De rbus Chemicis ad Theodofium Imperatorem), Etienne (De magna &sacr scient, ad Heraclium Caesarem), & tant dautres Grecs ; Synesius,Thophile, Abugazal, &c. Africains ; Avicenne (De re rect. Tractatusad AssemPhilosophum anima arts.), Rhasis, Geber, Artphius, Alphidius, Hamuelsurnomm Senior, Rosinus, Arabes ; Albert le Grand (De Alchymi. ConcordantiaPhilofophorum. De compositione compositi, &c.) Bernard Trvisan, Basile Valentin,Allemands ; Alain (Liber Chemiae.) Isaac pre & fils, Pontanus, Flamands ouHollandais ; Arnaud de Villeneuve, Nicolas Flamel, Denis Zachaire, Christophe

    Parisien, Gui de Montanor, dEspagnet Franois ; Morien, Pierre Bon de Ferrare,lAuteur anonyme du mariage du Soleil & de la Lune, Italiens. Raymond LulleMajorquain ; Roger Bacon (Speculum Achemiae) Hortulain, Jean Dastin, Richard,George Riple, Thomas Norton, Philalthe & le Cosmopolite Anglais ouEcossais, enfin beaucoup dAuteurs anonymes (Turba Philofophorum, feu Codexveritdtis. Clangor Buccinae. Scala Philofophorum. Aurora confurgens. Ludus

    puerorum. Thefaurus Philosophiae, &c.) de tous les pays & de divers sicles : onnen trouvera pas un seul qui ait des principes diffrents des autres. Cetteconformit dides & de principes ne forme-t-elle pas au moins une

    prsomption, que ce quils enseignent quelque chose de rel &de vrai ? Sitoutes les Fables anciennes dHomre, dOrphe & des Egyptiens ne sont quedes allgories de cet Art, comme je prtends le prouver dans cet ouvrage, par lefond des Fables mmes, par leur origine, & par la conformit quelles ont avecles allgories de presque tous les Philosophes, pourra-t-on se persuader quelobjet de cette science nest quun vain fantme, qui neut jamais dexistenceparmi les productions relles de la Nature ?

    Mais si cette science a un objet rel, si cet Art a exist, & quil faille en croire lesPhilosophes sur les choses admirables quils en rapportent, pourquoi est-elle si

    mprise, pourquoi si dcrie, pourquoi si discrdite ? Le voici : la pratique de

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    poudre, il chassa ou fit mourir tous ceux qui avaient voulu le tromper.

    Les Philosophes disent donc avec raison que cette pierre est comme le centre &

    la source des vertus, puisque ceux qui la possdent, mprisent toutes les vanitsdu monde, la sotte gloire, lambition, quils ne font pas plus de cas de lor, quedu sable & de la vile poussire (Sapient. cap. 7.), & largent nest pour eux que dela boue.La sagesse seule fait impression sur eux, lenvie, la jalousie & les autrespassions tumultueuses nexcitent point de temptes dans leur cur ; ils nontdautres dsirs que de vivre selonDieu, dautre satisfaction que de se rendre ensecret utileau prochain, & de pntrer de plus en plus dans intrieur des secretsde la Nature.

    La Philosophie Hermtique est donc lcole de la pit & de la Religion. Ceux qui Dieu en accorde la connaissance taient dj pieux, ou ils le deviennent(Flamel Hiroglyp.).Tous les Philosophes commencent leurs ouvrages par exigerde ceux qui les lisent, avec dessein de pntrer dans le sanctuaire de la Nature,un cur droit & un esprit craignant Dieu : Jnitium fapientiae, timor Dominii ;uncaractre compatissant, pour secourir les pauvres, une humilit profonde, & undessein formel de tout faire pour la gloire du Crateur, qui cache ses secrets auxsuperbes & aux faux sages du monde, pour les manifester aux humbles (Matth.c. II.).

    Lorsque notre premier Pre entendit prononcer larrt de mort pour punition desa dsobissance, il entendit en mme temps la promesse dun Librateur quidevait sauver tout le genre humain. Dieu tout misricordieux ne voulut paspermettre que le plus bel ouvrage de ses mains prt absolument. La mmesagesse qui avait dispos avec tant de bont le remde pour lme, noublia passans doute den indiquer un contre les maux qui devaient affliger le corps. Maiscomme tous les hommes ne mettent pas profit les moyens de salut que Jsus-Christ nous a mrits, & que Dieu offre tous, de mme tous les hommes nesavent pas user du remde propre gurir les maux du corps, quoique la

    matire dont ce remde se fait soit vile, commune, & prsente leurs yeux,quils la voient sans la connatre, & quils lemploient dautres usages qu,celui qui lui est vritablement propre (Basile Valentin, Azot des Phil. & leCosmopol.). Cest ce qui prouve bien que cest un don de Dieu, qui en favorisecelui quil lui plat. Vir insipiens non cognoscet, & sulltus non intelliget haec.Quoique Salomon, le plus sage des hommes, nous dise : Altissimus de terra,creavit medicinam : & posuit Deus super terram medicamentum quod sapiens non

    despiciet (Eccl.c. 38.).

    Cest cette matire que Dieu employa pour manifester sa sagesse dans la

    composition de tous les tres. Il lanima du souffle de cet esprit, qui tait port

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    poudre. Les Adeptes lappellent mme cadavre lorsquelle est dans cet tat, &disent quelle en a lodeur : non, dit Flamel (Flamel.), que lArtiste sente une

    odeur puante, puisquelle se fait dans un vase scell ; mais il juge quelle esttelle par lanalogie de sa corruption avec celle des corps morts. Cette poudre oucendre, que Morien dit quil ne faut pas mpriser, parce quelle doit revivre, &quelle renferme le diadme du Roi Philosophe, reprend en effet vigueur peu peu, mesure quelle sort des bras de la mort, cest--dire, de la noirceur : ellese revivifie & prend un clat plus brillant, un tat dincorruptibilit bien plusnoble que celui quelle avait avant sa putrfaction.

    Lorsque les Egyptiens observrent cette mtamorphose, ils en prirent occasionde feindre lexistence du Phnix, quils disaient tre un oiseau de couleur de

    pourpre, qui renaissait de ses propres cendres. Mais cet oiseau absolumentfabuleux, nest autre que la pierre des Philosophes parvenue la couleur depourpre aprs sa putrfaction.

    Plusieurs anciens Philosophes clairs par ces effets admirables de la Nature enont conclu avec Herms, dont ils avaient puis les principes en Egypte, quil yavait une nouvelle vie aprs que la mort nous avait ravi celle-ci. Cest ce quilsont voulu prouver i quand ils ont parl de la rsurrection des plantes de leurspropres cendres en dautres plantes de mme espce. On nen trouve point quiait parl de Dieu & de lhomme avec tant dlvation & de noblesse. Il explique

    mme comment on peut dire des hommes quils sont des Dieux, Ego dixi Diiestis, & filii excelsi omnes, dit David, & Herms (Pymand. c. II.) : Lme, o Tat,est de la propre essence de Dieu. Car Dieu a une essence, & telle quelle puissetre, lui seul se connat. Lme nest pas une partie spare de cette essencedivine, comme on spare une partie dun tout matriel, mais elle en est commeune effusion ; peu prs comme la clart du Soleil nest pas le Soleil mme.Cette me est un Dieu dans les hommes, cest pourquoi lon dit des hommesquils sont des Dieux, parce que ce qui constitue proprement lhumanit confineavec la Divinit.

    Quelles doivent donc tre les connaissances de lhomme ? est-il surprenantquclair par le Pre des lumires, il pntre jusque dans les replis les plussombres & les plus cachs de la Nature ? quil en connaisse les proprits, &quil sache les mettre en usage ? Mais Dieu est matre de distribuer ses donscomme il lui plat. Sil a t assez bon pour tablir un remde contre lesmaladies qui affligent lhumanit, il na pas jug propos de le faire connatre tout le monde. Morien dit en consquence (Entret, de Calid. & de Morien.), quele Magistre nest autre que le secret des secrets du Dieu trs-haut, grand, sage& crateur de tout ce qui existe, & que lui-mme a rvl ce secret ses saints

    Prophtes, dont il a plac les mes dans son saint Paradis.

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    plus dune fois en pareil cas de changer de nom, dhabit, de me faire raser lescheveux & la barbe, & de menfuir la faveur de la nuit . A quels dangers

    encore plus pressants ne sexposerait pas un

    Philosophe qui ferait latransmutation ? quoique son dessein ne ft que den faire usage pour une viefort simple, & pour en faire-part ceux qui sont dans le besoin. Cet or plus fin,& plus beau que lor vulgaire, suivant ce quils en disent, sera bientt reconnu.Sur cet indice seul on souponnera le porteur, & peut-tre de faire la faussemonnaie. Quelles affreuses consquences naurait pas craindre pour lui unPhilosophe charg dun tel soupon ?

    Je fais quun bon nombre de Mdecins nexercent pas leur profession, tant pardes vues dintrt, que par envie de rendre service au Public, mais tous ne sont

    pas dans ce cas l.Les uns se rjouiront de voir faire du bien leur prochain,dautres seront mortifis de ce quon les prive de loccasion de grossir leursrevenus. La jalousie ne manquerait pas de semparer de leur cur, & lavengeance tarderait-elle faire sertir ses effets ? La science Hermtique nesapprend pas dans les coles de Mdecine, quoiquon ne puisse gure douterquHippocrate ne lait sue, lorsquon pse bien les expressions parses dans sesouvrages, & lloge quil fit de Dmocrite aux Abdritains, qui regardaient cePhilosophe comme devenu insens, parce quau retour dEgypte, il leurdistribua presque tous les biens de patrimoine qui lui restaient, afin de vivre en

    Philosophe dans une petite maison de campagne loigne du tumulte. Cettepreuve serait cependant bien insuffisante pour lantiquit de la scienceHermtique, mais il y en a tant dautres, quil faut navoir pas lu les Auteursanciens pour la nier. Que veut dire (Olymp. 6.) Pindare, lorsquil dbite que leplus grand des Dieux fit tomber dans la ville de Rhode une neige dor, faite parlart de Vulcain ? Zosime Panopolite, Eusebe, & Synesius nous apprennent quecette science fut longtemps cultive Memphis en Egypte. Les uns & les autrescitent les ouvrages dHerms. Plutarque (Tholog. Phyfico Graecor.) dit quelancienne Thologie des Grecs & des Barbares ntait quun discours dePhysique cach sous le voile des Fables. Il essaye mme de lexpliquer, en

    disant que par Latone ils entendaient, la nuit ; par Junon, la terre ; par Apollon,le soleil ; & par Jupiter, la chaleur. Il ajoute peu aprs que les Egyptiens disaientquOsiris tait le Soleil, Isis la Lune, Jupiter lesprit universel rpandu danstoute la Nature, & Vulcain le feu, &c. Manthon stend beaucoup l-dessus.

    Origne (L. I. contre Celse) dit que les Egyptiens amusaient le peuple par desfables, & quils cachaient leur Philosophie sous le voile des noms desDieux dupays. Coringius, malgr tout ce quil a crit contre la Philosophie Hermtique,sest vu contraint par des preuves solides davouer que les Prtres dEgypte

    exeraient lart de faire de lor, & que la Chymie y a pris naissance. Saint

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    & dhabits de Nymphes rouges & blancs. Ce nectar, cette ambroisie & ces habitsde Nymphes seront expliqus dans le cours de cet ouvrage.

    Esdras, dans ton quatrime liv. chap. 8. sexprime ainsi. Quomodo interrogabisterram, & dicet tibit quoniam dabit terram multam magis, unde fiat fictile, parvum

    autem pulverem unde aurum sit.

    Etienne de Byzance tait si persuad quHerms tait lauteur de la Chymie, &en avait une si grande ide, quil na pas fait difficult de nommer lEgyptemme , &Vossius (de Idol. ) a cru devoir corriger ce mot par celui. Cest sans doute ce qui avait aussi engag Homre feindre queces plantes Moly & Nepenthes, qui avaient tant de vertus, venaient dEgypte.Pline (Lib.13.c : 2.) en rend tmoignage en ces termes ; Homerus quidem primusdodrinarum & antiquitatis parens, multus alias in admiratione Circes, gloriam

    herbarum AEgypto tribuit. Herbas cert AEgyptias Rgis uxore traditas suae Helenae

    plurimas narrat, ac nobile illud nepenthes, oblivionem tristitiae veniamque afferens, ab

    Helen nuque omnibus mortalibus propinandum.

    Il est donc hors de doute que lArt Chymique dHerms tait connu chez lesEgyptiens. Il nest gure moins constant que les Grecs qui voyagrent enEgypte, ly apprirent, au moins quelques-uns, & que layant appris sous deshiroglyphes, ils lenseignrent ensuite sous le voile des fables. Eustathius nous

    le donne assez entendre dans son commentaire sur lIliade.Lide de faire de lor par le secours de lArt nest donc pas nouvelle ; outre lespreuves que nous en avons donnes, Pline (Lib. 33. c. 4) le confirme par ce quilrapporte de Caligula. Lamour& lavidit que Caus Caligula avait pour lor,engagrent ce Prince travailler pour sen procurer. il fit donc cuire, dit cetAuteur, une grande quantit dorpiment, & russit en effet faire de lorexcellent, mais en petite quantit, quil y avait beaucoup plus de perte que deprofit . Caligula savait donc quon pouvait faire de lor artificiellement, laPhilosophie Hermtique tait donc connue.

    Quant aux Arabes, personne ne doute que la Chymie Hermtique & la vulgairenaient t toujours en vigueur parmi eux. Outre quAlbusaraius nous apprend(Dynasti non.) que les Arabes nous ont conserv un grand nombre douvragesdes Chaldens, des Egyptiens & des Grecs par les traductions quils en avaientfaites en leur langue, nous avons encore les crits de Geber, dAvicenne,dAbudali, dAlphidius, dAlchindis &de beaucoup dautres sur ces matires.On peut mme dire que la Chymie sest rpandue dans toute lEurope par leurmoyen. Albert le Grand, Archevque de Ratisbonne, est un des premiersconnus depuis les Arabes. Entre les autres ouvrages pleins de science &

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    connatre les principes que la Nature emploie dans la composition & laformation des individus des trois rgnes animal, vgtal & minral. Sans cette

    connaissance on travaillerait laveugle, & lon prendrait pour former un corps,ce qui ne serait propre qu en former un dun genre ou dune espce tout--faitdiffrente de celui quon se propose. Car lhomme vient de lhomme, le bufdu buf, la plante de sa propre semence, & le mtal de la sienne. Celui quichercherait donc, hors de la nature mtallique, lart & le moyen de multiplier oude perfectionner les mtaux, serait certainement dans lerreur. Il faut cependantavouer que la Nature ne saurait par elle seule multiplier les mtaux, comme lefait lart Hermtique. Il est vrai que les mtaux renferment dans leur centre cetteproprit multiplicative, mais ce sont des pommes cueillies avant leur maturit,suivant ce quen dit Flamel. Les corps ou mtaux parfaits ( Philosophiques )

    contiennent cette semence plus parfaite & plus abondance ; mais elle y est siopinitrement attache, quil ny a que la solution Hermtique qui puisse lentirer. Celui qui en a le secret, a celui du grand uvre, si lon en croit tous lesPhilosophes. Il faut, pour y parvenir, connatre les agents que la Nature emploiepour rduire les mixtes leurs principes ; parce que chaque corps est composde ce en quoi il se rsout naturellement. Les principes de Physique dtaills ci-aprs sont trs propres servir de flambeau pour clairer les pas de celui quivoudra pntrer dans le puits de Dmocrite, & y dcouvrir la vrit cache dansles tnbres les plus paisses. Car ce puits nest autre que les nigmes, les

    allgories, & les obscurits rpandues dans les ouvrages des Philosophes, quiont appris des Egyptiens, comme Dmocrite, ne point dvoiler les secrets dela sagesse, dont il avait t instruit par les successeurs du pre de la vraiePhilosophie.

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    PRINCIPES GNRAUX DE PHYSIQUE,

    Suivant la Philosophie Hermtique.Ilnest pas donn tous de pntrer jusquau facturier des ferrets de la Nature :trs peu de gens savent le chemin qui y conduit. Les uns impatiens sgarent enprenant des sentiers qui semblent en abrger la route ; les autres trouventpresque chaque pas des carrefours qui les embarrassent, prennent gauche, &vont au Tartare, au lieu de tenir la droite qui mne aux champs Elyses, parcequils nont pas, comme Ene (Eneid. L 6.), une Sibylle pour guide. Dautresenfin ne pensent pas se tromper en suivant le chemin le plus battu & le plusfrquent. Tous saperoivent nanmoins, aprs de longues fatigues, que, loin

    dtre arrivs au but, ils ont ou pass ct, ou lui ont tourn le dos.

    Les erreurs ont leur source dans le prjug, comme dans le dfaut de lumires& de solides instructions. La vritable route ne peut tre que trs simple,puisquil ny a rien de plus simple que les oprations de la Nature. Maisquoique trace par cette mme Nature, elle est peu frquente, & ceux mmesqui y passent se font un devoir jaloux de cacher leurs traces avec des ronces &des pines. On ny marche qu travers lobscurit des fables & des nigmes, ilest trs difficile de ne pas sgarer, si un Ange tutlaire ne porte le flambeaudevant nous.

    Il faut donc connatre la Nature avant que de se mettre en devoir de limiter, &dentreprendre de perfectionner ce quelle a laiss dans le chemin de laperfection. Ltude de la Physique nous donne cette connaissance, non de cettePhysique des Ecoles, qui napprend que la spculation, & qui ne meuble lammoire que de termes plus obscurs, & moins intelligibles que la chose mmeque lon veut expliquer. Physique, qui prtendant nous dfinir clairement uncorps, nous dit que cest un compos de points ou de parties, de points quimens dun endroit un autre formeront des lignes, ces lignes rapproches, une

    surface ; de-l ltendue & les autres dimensions. De la runion des partiesrsultera un corps, & de leur dsunion, la divisibilit linfini, ou, si lon veut, lindfini. Enfin, tant dautres raisonnements de cette espce, peu capables desatisfaire un esprit curieux de parvenir une connaissance palpable & pratiquedes individus qui composent ce vaste Univers. Cest la Physique Chymiquequil faut avoir recours. Elle est une science pratique, fonde sur une thorie,dont lexprience prouve la vrit. Mais. cette exprience est malheureusementsi rare, que bien des gens en prennent occasion de douter de son existence.

    En vain des Auteurs, gens desprit, de gnie, & trs savants dans dautres

    parties, ont-ils voulu inventer des systmes, pour nous reprsenter, par une

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    Tract. I.). Celui-l actif & masculin, celui-ci passif & fminin. Du premier vientle mouvement pour la gnration dans notre monde lmentaire, & de la part

    du second procde laltration, do la mort a pris commencement.

    Tout mouvement se fait par rarfaction &condensation (Beccher. Phys. subt.). Lachaleur, effet de la lumire sensible ou insensible, est la cause de la rarfaction,& le froid produit le resserrement ou la condensation. Toutes les gnrations,vgtations & accrtions ne se font que par ces deux moyens ; parce que ce sontles deux premires dispositions dont les corps aient t affects. La lumire nesest rpandue que par la rarfaction ; & la condensation, qui produit la densitdes corps, a feule arrt le progrs de la lumire, & conserv les tnbres.

    Lorsque Moise dit que Dieu cra le ciel & la terre, il semble avoir voulu parlerdes deux principes formel & matriel, ou actif & passif que nous avonsexpliqu, & il ne parat pas avoir entendu par la terre, cette masse aride quiparut aprs que les eaux sen furent spares. Celle dont parle Moise est leprincipe matriel de tout ce qui existe, & comprend le globe terra-aque-arien.Lautre na pris proprement son nom que de sa scheresse ; & pour la distinguerde lamas des eaux, & vocavit Deus aridam terrant, congrigationesque aquarummaris (Gen. C. I.).

    Lair, leau & la terre ne sont quune mme matire plus ou moins tnue &subtilise, selon quelle est plus ou moins rarfie. Lair, comme le plus prochedu principe de rarfaction, est le plus subtil ; leau vient ensuite, & puis la terre.

    Comme lobjet que je me propose en donnant ces principes abrgs dePhysique, est seulement dinstruire sur ce qui peut clairer les amateurs de laPhilosophie Hermtique, je nentrerai point dans le dtail de la formation desastres & de leurs mouvements.

    De la lumire, & de ses effets.

    La lumire, aprs avoir agi sur les parties de la masse tnbreuse, qui lui taientplus voisines, & les avoir rarfies plus ou moins proportion de leurloignement, pntra enfin Jusquau centre, pour lanimer dans son tout, lafconder, & lui faire produire tout ce que lUnivers prsente nos yeux. Il plutalors Dieu den fixer la source naturelle dans le Soleil, sans cependant lyramasser toute entire. Il semble que Dieu len ait voulu tablir comme luniquedispensateur, afin que la lumire cre de Dieu unique, lumire incre, elle ftcommunique aux cratures par un seul, comme pour nous indiquer sapremire origine.

    De ce flambeau lumineux cous les autres empruntent leur lumire & lclat

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    certain g, & dans les uns plutt que dans les autres ; pourquoi, mesure queles organes saffaiblissent, la raison parat aussi saffaiblir. Corpus quodcorrumpitur aggravat animan, & terrena inhabitatio deprimit sensum multa,cogitantem (Sap.9.). Il faut un certain temps aux organes pour se fortifier & seperfectionner. Ils susent enfin ; ils tombent en dcadence & se dtruisent. LEtatft-il au plus haut degr de gloire, sil commence dcliner, si sa perce estinvitable, le Roi & son Ministre avec toute lattention & toute la capacitpossible, ne pourront tout au plus que faire de temps en temps quelques efforts,qui manifesteront leurs talents, mais faiblement, de manire ne pouvoirarrter la ruine de lEtat.

    Si peu quun homme tent se replie sur lui-mme, & quil fasse lanatomie deson compos, il y reconnatra bientt ces trois principes de son humanitrellement distincts, mais runis dans un seul individu (Nicolas Flamel. Explic.des figures, chap. 7.).

    Que les prtendus esprits forts, que les Matrialistes ignorants, & peuaccoutums rflchir srieusement, rentrent de bonne foi en eux-mmes, &suivent pas pas ce petit dtail de lhomme, ils reconnatrons bientt leurgarement & la faiblesse de leurs principes. Ils y verront que leur ignoranceleur fait confondre le Roi avec le Ministre & les Sujets, lme avec lesprit & le

    corps. Enfin quun Prince est responsable & de ses propres actions, & celles deson Ministre, lorsque celui-ci les fait par son ordre, ou de son consentement &avec son approbation.

    Salomon confond lerreur des Matrialistes de son temps, & nous apprend enmme temps quils raisonnaient aussi follement que ceux de nos jours. Ils ont,dit-il (Sap. c. a.),parl en insenss, qui pensent mal, & ont dit : Le temps de lavie est court & ennuyeux ; nous navons ni biens ni plaisirs esprer aprsnotre mort; personne nest revenu de lautre monde pour nous apprendre cequon dit qui sy passe, parce que nous Sommes ns de rien, & quaprs notre

    mort nous serons commesi nous navions pas exist ; cest une fume que nousrespirons, & une tincelle qui donne le mouvement noire cur : cette tincelleune fois teinte, notre esprit se dissipera dans les airs, & notre corps ne seraplus quune cendre & une poussire..... Venez donc, mes amis ; profitons desbiens prsents ; jouissons des cratures, divertissons-nous pendant que noussommes jeunes...... Cest ainsi quils ont pens, & quils sont tombs danslerreur, parce que leurs passions & la malice de leur cur les ont aveugls. Ilsont ignor les promesses fermes & stables de Dieu ; ils nont point espr larcompense promise la justice, & nont pas eu assez de bon sens & de

    jugement pour reconnatre lhonneur & la gloire qui est rserve aux mes

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    penser quil, na pas t fait pour vivre seulement suivant son animalit, maissuivant son humanit proprement dite. Quil boive, quil mange ; mais quil

    prie, quil modre ses passions, quil travaille pour la vie ternelle, cest en quoiil diffrera des animaux, & sera proprement homme.

    Le corps de lhomme est Sujet laltration & la dissolution entire, commeles autres mixtes. Laction de la chaleur produit ce changement dans la maniredtre de tous les individus sublunaires, parce que leur masse tant uncompose de parties plus grossires, moins pures, moins lies, & plushtrognes entre elles que celles des Astres ou des Plantes, elle est plussusceptible des effets de la rarfaction.

    Cette altration est dans son progrs une vraie corruption qui se faitsuccessivement, & qui par degrs dispose une nouvelle gnration, ounouvelle manire dtre ; car lharmonie de lUnivers consiste dans une diverse& gradue information de la matire qui le constitue.

    Ce changement de formes narrive quaux corps de ce bas monde. La causenest pas, comme plusieurs lont pens, la contrarit ou lopposition desqualits de la matire, mais sa propre essence tnbreuse, & purement passive,qui nayant pas delle-mme de quoi se donner une forme permanente, estoblige de recevoir ces formes diffrentes & passagres du principe qui lanime,toujours selon la dtermination quil a plu Dieu de donner aux genres & auxespces.

    Pour suppler ce dfaut originel de la matire, dont le corps mme delhomme a t form, Dieu mit Adam dans le Paradis terrestre, afin quil ptcombattre & vaincre cette caducit par lusage du fruit de larbre de vie, dont ilfut priv en punition de sa dsobissance, & condamn subir le sort des autresindividus que Dieu navoir pas favoriss de ce Secours.

    La premire matire dont tout a t fait, celle qui sert de base tous les mixtessemble avoir t tellement fondue & identifie dans eux, aprs quelle eut reusa forme de la lumire, quon ne saurait len sparer sans les dtruire. La Naturenous a laisse un chantillon de cette masse confuse & informe, dans cette eausche, qui ne mouille point, que lon voie sortir des montagnes, ou qui sexhalede quelques lacs, imprgne de la semence des choses, & qui svapore lamoindre chaleur. Cette eau sche est celle qui fait la base du grand uvre,suivant tous les Philosophes. Qui saurait marier cette matire toute volatile avecson mle, en extraire les lments, & les sparer philosophiquement, pourrait seflatter, dit dEspagnet (Enchirid. Phys restit. can. 49.), davoir en sa possession le

    plus prcieux secret de la Nature, & mme labrg de lessence des cieux.

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    De lair.

    Lair est lger, & nest point visible, mais il contient une matire qui secorporifie, qui devient fixe. Il est dune nature moyenne entre ce qui est au-dessus & au-dessous de lui ; cest pourquoi il prend facilement les qualits deses voisins. De l viennent les changements que nous prouvons dans la bassergion, tant du froid que de la chaleur.

    Lair est le rceptacledes semences de tout, le crible de la Nature, par lequel lesvertus & les influences des autres corps nous sont transmises. Il pntre tout.Cest une fume trs subtile, le sujet propre de la lumire & des tnbres, du

    jour & de la nuit ; un corps toujours plein, diaphane, & le plus susceptible des

    qualits trangres, comme le plus facile les abandonner. Les Philosopheslappellent esprit, quand ils traitent du grand uvre. Il contient les espritsvitaux de tous les corps ; il est laliment du feu, des vgtaux & des animaux,qui meurent quand on le leur soustrait. Rien ne natrait dans le monde sans saforce pntrante & altrante, & rien ne peut rsister sa rarfaction.

    La rgion Suprieure de lair, voisine de la Lune, est pure sans tre igne,comme on la longtemps enseign dans les coles, sur lopinion de quelquesAnciens. Sa puret nest souille par aucune des vapeurs qui slvent de labasse.

    La moyenne reoit les exhalaisons Sulfureuses les plus subtiles, dbarrassesdes vapeurs grossires. Elles y errent, & sy allument de temps en temps parleurs mouvements & les diffrents chocs quelles subissent entre elles. Ce sontles divers mtores que nous y apercevons.

    Dans la basse rgion slvent & se ramassent les vapeurs de la terre. Elles sycondensent par le froid, & retombent par leur propre poids. La Nature rectifieainsi, leau, & la purifie, pour la rendre propre ses gnrations. Cest pourquoion distingue les eaux en suprieures & en infrieures. Celles-ci sont contigus la terre, y sont appuyes comme sur leur base, & ne forment quun mme globeavec elle. Les suprieures occupent la basse rgion de lair o elles se sontleves en forme de vapeurs & de nuages, & o elles errent au gr des vents.Lair en est rempli en tout temps ; mais elles ne se manifestent notre vue quenpartie, lorsquelles se condensent en nues. Cest une suite de la cration. Dieurpara les eaux du firmament, de celles qui taient au-dessous. Il ne doit pastre surprenant que toutes ces eaux rassembles aient pu couvrir toute lasurface de la terre, & former un dluge universel, puisquelles la couvraientavant que Dieu les en et spares (Gen. . 5.). Ces masses humides qui volent

    sur nos ttes, sont comme des voyageurs qui vont recueillir les richesses de tous

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    globe, destin leur servir de matrice. Il dveloppe le feu particulier ; il mle leslments, & donne la forme la matire.

    Le feu particulier est inn, & implant dans chaque mixte avec sa semence. Ilnagit gure que lorsquil est excit ; il fait alors dans la partie de lUnivers, ceque le Soleil son pre fait dans le tout.

    Partout o il y a gnration, il y a ncessairement du feu, comme causeefficiente. Les Anciens le pensaient comme nous (Virg. AEneid. 1. 6.). Mais il estsurprenant quils aient admis une contrarit & une opposition entre le feu &leau, puisquil ny a point deau sans feu, & quils agissent toujours de concertdans les gnrations des individus.

    Tout il un peu clairvoyant doit au contraire remarquer un amour, unesympathie qui fait la conservation de lUnivers, le cube de l Nature, & le lien leplus solide pour unir les lments, & les choses suprieures avec les infrieures.Cet amour mme est, pour ainsi dire, ce que lon devrait appeler la Nature, leministre du Crateur, qui emploie les lments pour excuter ses volonts,selon les lois quil lui a imposes. Tout se fait dans le monde en paix & enunion, ce qui ne peut tre un effet de la haine & de la contrarit. La Nature neserait pas si semblable elle-mme dans la formation des individus de mmeespce, si tout chez elle ne se faisait pas de concert. Nous ne verrions que desmonstres sortir de la semence htrogne de pres perptuellement ennemis, &qui se combattraient sans cesse. Voyons-nous les animaux travailler par haine &par contrarit la propagation de leurs espces ? Jugeons des autresoprations de la Nature par celle-l : ses lois sont simples & uniformes.

    Que la Philosophie cesse donc dattribuer laltration, la corruption, la caducit,la dcadence des mixtes la contrarit prtendue entre les lments : elle setrouve dans la pnurie & la faiblesse propre la matire premire ; car dans lechaos, Frigida non pugnabant calidis, humentia siccis. Tout y tait froid & humide,

    qualits qui conviennent la matire, comme femelle. Le chaud & le sec,qualits masculines & formelles, lui sont venus de la lumire, dont elle a reu laforme. Aussi nest-ce quaprs la retraite des eaux que la terre fut appele arideou Sche.

    Nous voyons sans cesse que le chaud & le sec donnent la forme tout. UnPotier ne russirait jamais faire un vase, si la scheresse ne donne sa terre uncertain degr de liaison & de solidit. La terre est-elle trop mouille, trop molle,cest de la boue, cest un limon qui na aucune forme dtermine.

    Tel tait le chaos, avant que la chaleur de la lumire let rarfi, & fait vaporer

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    proprement terrestres. Cest une matire qui appartient llment grossier deleau : une humeur grasse, visqueuse, renferme dans les nuages comme dans

    un fourneau, o elle se condense en se mlant avec des exhalaisons sulfureuses,par consquent chaudes & trs aises senflammer. Lair qui sy trouverenferm & trop resserr par la condensation, sy rarfie par la chaleur, & y faitle mme effet que la poudre canon dans une bombe : le vaisseau clate, le feurpandu dans lair, dbarrasse de ses liens par le mouvement, produit cettelumire & ce bruit qui tonne souvent les plus intrpides.

    Notre feu artificiel & commun a des proprits tout--fait contraires au feu de laNature, quoiquil lait pour pre. Il est ennemi de toute gnration ; il ne

    sentretient que de la ruine des corps ; il ne se nourrit que de rapine; il rduittout en cendres, & dtruit tout ce que lautre compose. Cest un parricide, leplus grand ennemi de la Nature ; & si lon ne savait opposer des digues safureur, il ravagerait tout. Est-il surprenant que les souffleurs voient prir toutentre ses mains, leurs biens & leur sant svanouir en fume, & une cendreinutile pour toute ressource ?

    M. Stahl nest pas le premier, comme le veut M. Pott, qui ait donn des idesraisonnables & lies sur la substance du feu qui se trouve dans les corps ; mais ilest le premier qui en a raisonn sous le nom de Phlogistique.On a vu ci-devant

    le sentiment des Philosophes Hermtiques ce sujet. Il ne faut quouvrir leurslivres pour tre convaincu quils connaissaient parfaitement cet agent de laNature ; & que M. Pott avance mal propos que les Auteurs antrieurs M.Stahl se perdaient dans des obscurits continuelles & des contradictionsinnombrables. Peut-tre ne parle-t-il que des Chymistes & des Physiciensvulgaires ; mais dans ce cas il aurait d faire une exception des ChymistesHermtiques, quil a sans doute lus, & avec lesquels il sest du moins siheureusement rencontr, dans son Trait du feu & de la lumire, imprim avecla Traduction Franaise de sa Lithogognosie. M. Stahl les avait tudis avec

    beaucoup dattention. Il en fournit une grande preuve, non seulement pouravoir raisonn comme eux sur cette matire, mais par le grand nombre decitations quil en fait dans son Trait qui a pour titre : Fundamenta Chemiaedogmaticae& experimentalis. Il y donne au mercure le nom deau sche, nom queles Philosophes Hermtiques donnent au leur. Basile Valentin, Philalthe &plusieurs autres sont cits cet gard. Il distingue mme les Chymistesvulgaires des Chymistes Hermtiques, (part. i. P.114 ) en nommant les premiersPhysici communes, & les Seconds Chymici alii. Dans la mme partie du mmeouvrage, pag. 2. il dit quIsaac Hollandais, Arnaud de Villeneuve, RaymondLulle, Basile Valentin, Trithme, Paracelse, &c. se sont rendus recommandables

    dans lArt Chymique.

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    Loin de mpriser, comme tant dautres, & de rejeter comme faux ce que cesAuteurs disent, cet habile homme se contente de parler comme eux, & dit, p.

    183. quils se sont exprims par nigmes, allgories, &c. pour cacher leur secretau Peuple, & semblent navoir affect des contradictions, que pour donner lechange aux Lecteurs ignorants. Il stend encore davantage sur cette matire,pag. 219. & suiv. o il appelle les Chymistes Hermtiques du nom dePhilosophes. On peut aprs un si grand homme employer cette dnomination.Nous aurons occasion de parler encore de M. Pott, en traitant de la lumire &de ses effets.

    La proximit de leau & de la terre fait quils sont presque toujours mls. Leau

    dlaye la terre ; celle-ci paissit leau ; il sen forme du limon. Si lon expose cemlange une chaleur vive, chaque lment visible retourne sa sphre, & laforme du corps se dtruit.

    Place entre la terre & lair, leau est proprement la cause des rvolutions, dudsordre, du trouble, de lagitation, & du renversement que lon remarque danslair & la terre. Elle obscurcit lair par de noires & dangereuses vapeurs, elleinonde la terre : elle porte la corruption dans lun & dans lautre, & par sonabondance ou sa disette, elle trouble lordre des saisons & de la Nature. Elle faitenfin autant de maux que de biens.

    Quelques Anciens disaient que le Soleil prsidait particulirement au feu, & laLune leau, parce quils regardaient le Soleil comme la source du feu de laNature, & la Lune comme le principe de lhumide. Ce qui a fait dire Hippocrate (Lib. I. de Dioet.) que les lments du feu & de leau pouvaienttout, parce quils renfermaient tout.

    Des oprations de la Nature.

    La sublimation, la descension & la coction sont trois instruments ou maniresdoprer que la Nature emploie pour parfaire ses ouvrages. Par la premire, ellevacue lhumidit superflue, qui suffoquerait le feu, & empcherait son actiondans la terre sa matrice.

    Par la descension, elle rend la terre lhumidit dont les vgtaux ou la chaleurlont prive. La sublimation se fait par llvation des vapeurs dans lair, oelles se condensent en nuages.La seconde se fait par la pluie & la rose. Le beautemps succde la pluie, & la pluie au beau temps lalternative; une pluiecontinuelle inonderait tout, un beau temps perptu desscherait tout. La pluietombe gouttes gouttes, parce que verse trop abondamment, elle perdrait

    tout, comme un Jardinier qui arroserait ses graines pleins seaux. Cest ainsi

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    Dmocrite a dit que tous les mixtes taient composs darmes, ce sentiment neparat point loign de la vrit, quand on fait attention ce que la raison nous

    dicte, & ce que lexprience nous dmontre. Ce Philosophe a voil comme lesautres, sous cette manire obscure de sexpliquer, le vrai mlange des lments,qui, pour tre conforme aux oprations de la Nature, doit se faire intimement,ou, comme on dit,per minima, &actu indivisibilia corpuscula. Sans cela les partiesne feraient pas un tour continu. Les mixtes se rsolvent en une vapeur trsSubtile par la distillation, artificielle ; & la Nature nest-elle pas une ouvrirebien plus adroite que lhomme le plus expriment ? Cest tout ce queDmocrite a voulu dire.

    Des manires dtre gnrales des Mixtes.On remarque trois faons dtre (Cosmop. Nov. lum. Chem. Tr. 7.), qui constituentcrois genres, ou trois classes appeles rgnes, lanimal, le vgtal, & le minral.Les minraux sengendrent dans la terre seulement, les vgtaux ont leursracines dans la terre, & slvent dans leau & lair ; les animaux prennentnaissance dans lair, leau & la terre; & lair test pour tous un principe de vie.

    Quelque diffrence que les mixtes paraissent avoir quant leurs formesextrieures, ils ne diffrent point de principes (Cosmop. Travt. 2.) ; la terre &leau leur servent de base tous, & lair nentre presque dans leur compositionque comme instrument, de mme que le feu. La lumire agit sur lair, lair surleau, leau sur la terre. Leau devient souvent linstrument du mlange dans lesouvrages de lart, mais ce mlange nest que superficiel, comme nous le voyonsdans le pain, la brique, &c. Il y a une autre mixtion intime que Beccher appellecentrale (Phys. sub. sect. i. c. 4.). Cest celle par laquelle leau est tellement mleavec la terre, quon ne peut les sparer sans dtruire la forme du mixte. Nousnencrerons point dans le dtail des diffrents degrs de cette cohsion, afindtre plus court. On peut voir tout cela dans louvrage que nous venons deciter.

    De la diffrence qui se trouve entre ces trois Rgnes.

    Le Minral.

    On dit communment des minraux quils existent, & non pas quils vivent,comme on le dit des animaux & des vgtaux ; quoiquon puisse dire que lesmtaux tirent en quelque faon leur vie des minraux, soit parce que dans leurgnration il y a comme une jonction du mle & de la femelle sous les noms desoufre & de mercure, qui par une fermentation, une circulation, & une cuisson

    continue, se purifient avec le secours de sel de nature, se cuisent & se forment

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    Les formes spcifiques des mixtes, ou, si lon veut, leur me, conserve une je nesais quelle connaissance de leur origine. Lme de lhomme se rflchie souvent

    sur la lumire divine par la contemplation. Elle semble vouloir pntrer dans cesanctuaire accessible Dieu Seul : elle y tend sans cesse, & y retourne enfin. Lesmes des animaux, sorties du secret des Cieux, & des trsors du Soleil, semblentavoir une sympathie avec cet Astre, par les diffrents prsages de son lever, deson coucher, du mouvement mme des cieux, & des changements detemprature de lair, que les mouvements des animaux nous annoncent.

    Fournies par lair, & presque entirement ariennes, les mes des vgtauxpoussent tant quelles peuvent la tte de leur tige en haut, comme empresses

    de retourner leur patrie.Les rochers, les pierres, forms deau & de terre, se cuisent dans la terre commeun ouvrage de poterie, cest pourquoi ils rendent la terre, comme en faisantpartie. Mais les pierres prcieuses & les mtaux sont plus favoriss desinfluences clestes ; les premires sont comme des larmes du Ciel, & une rosecleste congele, cest pourquoi les Anciens leur attribuaient tant de vertus. LeSoleil & les Astres semblent avoir aussi une attention particulire pour lesmtaux, & lon dirait que la Nature leur laisse le soin de leur imprimer la forme.Lme des mtaux est comme emprisonne dans leur matire ; le feu des

    Philosophes sait len tirer pour lui faire produire un fils digne du Soleil, & unequintessence admirable, qui rapproche le Ciel de nous.

    La lumire est le principe de la vie, & les tnbres sont celui de la mort. Lesmes des mixtes font des rayons de lumire, & leurs corps font des abmes detnbres. Tout vit par la lumire, & tout ce qui meurt en est priv. Cest de ceprincipe auquel on fait si peu dattention, quon dit communment dunhomme mort, quil a perdu le jour, la lumire; & que Saint Jean dit (Evang. c. l.),la lumire est la vie des hommes.

    Chaque mixte a des connaissances qui lui sont propres. Quant aux animaux, ilSuffit de rflchir sur leurs actions pour en tre convaincu. Le temps desaccoupler qui leur est si bien connu ; la juste distribution des parties dans lespetits qui en viennent ; lusage quils font de chaque membre ; lattention & lesoin quils se donnent, tant pour la nourriture de leurs petits, que pour leurdfense ; leurs diffrences affections de plaisir, de crainte, de bienveillanceenvers leurs matres, leurs dispositions en recevoir les instructions ; leuradresse se procurer les besoins de la vie ; leur prudence viter ce qui peutleur nuire, & tant dautres choses quun observateur peut remarquer, prouvent

    que leur me est doue dune espce de raisonnement.

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    influences clestes qui runissant les lments pars & errants, les rendrapropres une nouvelle gnration.

    Cet esprit vivifiant ne se spare pas de la matire pendant la putrfactiongnrative, parce quelle nest pas une corruption entire & parfaite, commecelle qui produit la destruction du mixte. Cest une corruption combine, &cause par cet esprit mme, pour donner la matire la forme qui convient lindividu quil doit animer. Il y est quelquefois dans linaction, tel quon le voitdans les semences ; mais il nattend que dtre excit. Sitt quil lest, il met lamatire en mouvement, & plus il agit, plus il acquire de nouvelles forces

    jusqu ce quil ait achev de perfectionner le mixte.

    Que les Matrialistes, les partisans ridicules du hasard dans la formation desmixtes & leur conservation, examinent & rflchissent un peu srieusement &sans prjugs sur tout ce que nous avons dit, & quils me disent ensuitecomment un tre imaginaire peut tre la cause efficiente de quelque chose derel & de si bien combin. Quils suivent cette Nature pas pas. Ses procds,les moyens quelle emploie, & ce qui en rsulte. Ils verront, sils ne veulent pasfermer les yeux la lumire, que la gnration des mixtes a un temps dtermin; que tout se fait dans lUnivers par poids & mesure, & quil ny a quunesagesse infinie qui puisse y prsider.

    Les lments commencent la gnration par la putrfaction, comme les alimentsla nutrition. Ils se rsolvent en nature humide ou premire matire ; le chaos sefait alors, & de ce chaos la gnration. Cest donc avec raison que les Physiciensdisent que la conservation est une cration continue, puisque la gnration dechaque individu rpond analogiquement la cration & la conservation dumacrocosme. La Nature est toujours semblable elle-mme ; elle na quunevoie droite, donc elle ne scarte que par des obstacles insurmontables, alors ellefait des monstres.

    La vie est le rsultat harmonique de lunion de la matire avec la forme, ce quiconstitue la perfection de lindividu. La mort est le terme prfixe o se fait ladsunion, & la sparation de la forme & de la matire. On commence mourirds que cette dsunion commence, & la dissolution du mixte en est lecomplment.

    Tout ce qui vie soit vgtal, soit animal, a besoins de nourriture pour saconservation, & ces aliments sont de deux sortes. Les vgtaux ne se nourrissentpas moins dair que deau & de terre. Les mamelles mmes de celle-ci tariraientbientt, si elles ntaient continuellement abreuves du lait thren. Cest ce

    que Moise nous exprime parfaitement par les termes de la bndiction quil

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    donna aux fils de Joseph : De benedictione Domini terra ejus ; de pomis cli & roreatque abysso subjacente ; de pomis fructuum Solis & Lun ; de pomis collium

    ternorum ; de vertice antiquorum montium ; & de frugibus terr , & de plenitudineejus, &c. (Deuter. 33.)

    Serait-ce seulement pour rafrachir le cur, que la Nature aurait pris soin deplacer auprs de lui les poumons, ces admirables & infatigables soufflets ? Non,ils ont un usage plus essentiel : cest pour aspirer & lui transmettrecontinuellement cet esprit thren qui vient au secours des esprits vitaux, &rpare leur perte & les multiplie quelquefois. Cest pourquoi lon respire plussouvent quand on se donne beaucoup dagitation, parce quil se fait alors une

    plus grande dperdition esprits, que la Nature cherche remplacer.Les Philosophes donnent le nom desprits, ou natures spirituelles, nonseulement aux tres crs sans tre matire, & qui ne peuvent tre connues quepar lintellect, telles que les Anges, les Dmons ; mais celles-l mmes qui,quoique matrielles, ne peuvent tre aperues des sens, cause de leur grandetnuit. Lair pur ou Ether est de cette nature, les influences des corps clestes,le feu inn, les esprits sminaux, vitaux, vgtaux, &c. Ils sont les ministres delNature, qui semble nagir sur la matire que par leur moyen.

    Le feu de la Nature ne se manifeste dans les animaux que par la chaleur quilexcite. Lorsquil se retire, la mort prend sa place, le corps lmentaire ou lecadavre reste entier jusqu ce quil commence se rsoudre. Ce feu est tropfaible dans les vgtaux, pour y devenir sensible au sens mme du coucher.

    On ne sait pas quelle est la nature du feu commun ; sa matire est si tnue,quelle ne se manifeste que par les autres corps auxquels elle sattache. Lecharbon nest pas feu, ni le bois qui brle, ni la flamme, qui nest quune fumeenflamme. Il parat steindre & svanouir quand laliment lui manque. Il fautquil soit un effet de la lumire sur les corps combustibles.

    De la Lumire.

    Lorigine de la lumire nous prouve Sa nature Spirituelle. Avant que la matirecomment recevoir sa forme, Dieu forma la lumire; elle se rpandit aussittdans la matire, qui lui servie comme de mche pour son entretien. Lamanifestation de la lumire fut donc comme le premier acte que Dieu exera surla matire ; le premier mariage du crateur avec la crature, & celui de lespritavec le corps.

    Rpandue dabord partout, la lumire sembla se runir dans le Soleil, commeplusieurs rayons se runissent dans un point. La lumire du Soleil est par

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    consquent un esprit lumineux, attach insparablement cet Astre, donc lesrayons se revtent des parties de lEther pour devenir sensibles nos yeux. Ce

    sont des ruisseaux qui coulent sans cesse dune source inpuisable, & qui serpandent dans la vaste tendue de tout lUnivers.

    Ilne faut cependant pas en conclure que ces rayons sont purement spirituels. Ilsse corporifient avec lEther comme la flamme avec la fume. Fournissons dansnos foyers un aliment perptuellement fumeux, nous aurons une flammeperptuelle.

    La nature de la lumire est de fluet sans cesse ; & nous sommes convenusdappeler rayons ces fluxions du Soleil mles avec lEther. Il ne faut donc pas

    confondre la lumire avec le rayon, ou la lumire avec la splendeur & la clart. La lumire est la cause, la clart est leffet.

    Quand une bougie allume steint, lesprit ign & lumineux qui enflamme lamche, ne se perd pas, comme on le croit communment. Son action seuledisparat quand laliment lui manque, ou quon len retire. Il se rpand danslair, qui est le rceptacle de la lumire, & des natures spirituelles du mondematriel.

    De mme que les corps retournent, par la rsolution, la matire do ils tirent

    leur origine ; de mme aussi les formes naturelles des individus retournent laforme universelle, ou la lumire, qui est lesprit vivifiant de lUnivers. On nedoit pas confondre cet esprit avec les rayons du Soleil, puisquils nen sont quele vhicule. Il pntre jusquau centre mme de la terre, lorsque le Soleil nestpas sur notre horizon.

    La lumire est pour nous une vive image de la Divinit. Lamour Divin nepouvant, pour ainsi dire, se contenir dans lui-mme, sest comme rpandu horsde lui, & multipli dans la cration. La lumire ne se renferme pas non plusdans le corps lumineux : elle se rpand, elle se multiplie, elle est commeDieuune source inpuisable de biens. Elle se communique sans cesse sans aucunediminution ; elle semble mme prendre de nouvelles forces par cettecommunication, comme un matre qui enseigne ses disciples les connaissancesquil a, sans les perdre, & mme en les imprimant davantage dans son esprit.

    Cet esprit ign port dans les corps par les rayons, sen distingue fort aisment.Ceux-ci ne se communiquent quautant quils ne trouvent dans leur cheminpoint de corps opaques qui en arrtent le cours. Celui-l pntre mme les corpsles plus denses,puisquon sent la chaleur au ct dun mur oppos au ct o

    tombent les rayons, quoiquils ny aient pu pntrer. Cette chaleur subsiste

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    mme encore aprs que les rayons sont disparus avec le corps lumineux.

    Tout corps diaphane, le verre particulirement, transmet cet esprit ign &lumineux sans transmettre les rayons : cest pourquoi lair qui est derrire, enfournissant un nouveau corps cet esprit, devient illumin & forme des rayonsnouveaux, qui se rpandent comme les premiers. Dailleurs tout corpsdiaphane, en servant de milieu pour transmettre cet esprit, se trouve nonseulement clair, mais devient lumineux ; & cette augmentation de clart semanifeste aisment ceux qui y font un peu dattention. Cette augmentation desplendeur narriverait pas si le corps diaphane transmettait les rayons tels quilles a reus.

    M. Pott parat avoir adopt ces ides des Philosophes Hermtiques sur lalumire, dans son Essai dobservations Chymiques & Physiques sur lesproprits & les effets de la lumire & du feu. Il sest parfaitement rencontravec dEspagnet, dont janalyse ici les sentiments, & qui vivait il y a prs dunsicle & demi. Les observations que ce savant Professeur de Berlin rapporte,concourent toutes prouver la vrit de ce que nous avons dit jusquici. Ilappelle la lumire le grand & merveilleux agent de la Nature. Il dit que sasubstance, cause de la tnuit de ses parties, ne peut tre examine par lenombre, par la mesure ni par le poids, que la Chymie ne peut exposer sa forme

    extrieure, parce que dans aucune substance elle ne peut tre conue, encoremoins exprime ; que sa dignit &son excellence sont annonces dans lEcritureSainte, o Dieu se fait appeler du nom de lumire & de feu : puisquil y est dit,queDieuest une lumire, quil demeure dans la lumire ; que la lumire est sonhabit ; que la vie est dans la lumire, quil fait ses Anges flammes de feu, &c. &enfin que plusieurs personnes regardent la lumire plutt comme un trespirituel que comme une substance corporelle.

    En rflchissant sur la lumire, la premire chose, dit cet Auteur, qui seprsente mes yeux & mon esprit, cest la lumire du Soleil ; & je prsume

    que le Soleil est la source de toute la lumire qui se trouve dans la Nature ; quetoute la lumire y rentre comme dans son cercle de rvolution, & que de l elleest de nouveau renvoye sur notre globe.

    Je ne pense pas, ajoute-t-il, que le Soleil contienne un feu brlant, destructif,mais il renferme une substance lumineuse, pure, simple & concentre, quiclaire tout. Je regarde la lumire comme une substance qui rjouit, qui anime,& qui produit la clart ; en un mot, je la regarde comme le premier instrumentque Dieu mit & met encore en uvre dans la Nature. De l vient le culte que

    quelques Paens ont rendu au Soleil ; de l la fable de Promthe qui droba le

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    feu dans le Ciel, pour le communiquer la terre.

    M. Pott napprouve cependant pas en apparence, mais il le fait en ralit, lesentiment de ceux qui font de lEther un vhicule de la matire de la lumire,parce quils multiplient, dit-il, les tres sans ncessit. Mais si la lumire est untre si simple quil lavoue, pourra-t-elle le manifester autrement que parquelque substance sensible ? Elle a la proprit de pntrer trs subtilement lescorps par sa tnuit suprieure celle de lair, & par son mouvement progressif,le plus rapide quon puisse imaginera mais il nose dterminer sil est d unesubstance spirituelle, quoiquil soit certain que le principe moteur est aussiancien que cette substance mme.

    Le mouvement, comme mouvement, ne produit pas la lumire, mais il lamanifeste dans les matires convenables. Elle ne se montre que dans les corpsmobiles, cest--dire, dans une matire extrmement subtile, fine & propre aumouvement prcipit, soit que cette matire scoule immdiatement du Soleil,ou de son atmosphre, & quelle pntre jusqu nous ; soit, ce qui parait, dit-il,plus vraisemblable, que le Soleil mette en mouvement ces matiresextrmement subtiles, dont notre atmosphre est remplie.

    Voil donc un vhicule de la lumire, & un vhicule qui ne diffre point delEther ; puisque ce Savant ajoute plus bas : cest donc aussi l la cause dumouvement de la lumire qui agit sur notre Ether,& qui nous vient principalement, &

    plus efficacement du Soleil. Ce vhicule nest donc pas, mme selon lui, un tremultiplie sans ncessit.

    Il distingue trs bien le feu de la lumire, &marque la diffrence de lun & delautre ; mais aprs avoir dit que la lumire produit la clart, il confond ici cettedernire avec le principe lumineux, comme ou peut le conclure des expriencesquil rapporte. Jen aurais conclu quil y a un feu & une lumire qui ne brlentpas, cest--dire, qui ne dtruisent pas les corps auxquels ils sont adhrants ;

    mais non pas quil y a une lumire sans feu. Le dfaut de distinction entre leprincipe ou la cause de la splendeur & de la clart, & leffet de cette cause est lasource dune infinit derreurs sur cette matire.

    Peut-tre nest-ce que la faute du Traducteur qui aura employ indiffremmentles termes de lumire & clart comme synonymes. Je serais assez port lecroire, puisque M. Pott, immdiatement aprs avoir rapport diversphnomnes des matires phosphoriques, le bois pourri, les vers lumineux,largile calcine & frotte, &c. dit, que la matire de la lumire dans sa puret,ou spare de tout autre corps, ne se laisse pas apercevoir, que nous ne la

    traitons quentoure dune enveloppe, & que nous ne connaissons sa prsence

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    que par induction. Cest distinguer proprement la lumire de la clart qui en estleffet. Avec cette distinction il est ais de rendre raison dune infinit de

    phnomnes trs difficiles expliquer sans cela.

    La chaleur, quoique effet du mouvement, est comme identifie avec lui. Lalumire tant le principe du feu, lest du mouvement & de la chaleur. Celle-cintant quun moindre degr de feu, ou le mouvement produit par un feu plusmodr, ou plus loign du corps affect. Cest ce mouvement que leau doitsafluidit, puisque sans cette cause elle devient glace.

    On ne doit donc pas confondre le feu lmentaire avec le feu des cuisines ; &observer que le premier ne devient un feu actuel brlant que lorsquil est

    combin avec des substances combustibles ; il ne donne par lui-mme niflamme, ni lumire. Ainsi le phlogistique ou substance huileuse, sulfureuse,rsineuse nest pas le principe du feu, mais la matire propre lentretenir, lenourrir & le manifester.

    Les raisonnements de M. Pott prouvent que le sentiment de dEspagnet & desautres Philosophes Hermtiques sur le feu & la lumire, est un sentimentraisonn, & trs conformes aux observations Physico-Chymiques les plusexactes, puisquils sont daccord avec ce Savant Professeur de Chymie danslAcadmie des Sciences & Belles Lettres de Berlin. Ces Philosophesconnaissaient donc la Nature : & sils la connaissaient, pourquoi ne pas pluttessayer de lever le voile obscur sous lequel ils ont cach ses procds par leursdiscours nigmatiques, allgoriques, fabuleux, que de mpriser leursraisonnements, parce quils paraissent intelligibles ; ou de les accuserdignorance & de mensonge ?

    De la conservation des Mixtes.

    Lesprit ign, le principe vivifiant donne la vie & la vigueur aux mixtes ; mais cefeu les consumerait bientt, si son activit ntait modre par lhumeuraqueuse qui les lie. Cet humide circule perptuellement dans tous. Il sen faitune rvolution dans lUnivers, au moyen de laquelle les uns se forment, senourrissent, augmentent mme de volume pendant que son vaporation & sonabsence font desscher & prir les autres.

    Toute la machine du monde ne compose quun corps, dont toutes les partiessont lies par des milieux qui participent des extrmes. Ce lien est cach, cenud est secret ; mais il nen est pas moins rel, & cest par son moyen quetoutes ces parties se prtent un secours mutuel, puisquil y a un rapport, & un

    vrai commerce entre elles.Les esprits missaires des natures suprieures sont &

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    Il semble que la lumire na encore opr que sur lui, & quelle a laisse le restedans les tnbres ; aussi en conservent-il toujours une tincelle, qui na besoin

    que dtre excite.

    Mais le feu inn est bien diffrent de lhumide. Il tient de la spiritualit de lalumire, & lhumide radical est dune nature moyenne entre la matireextrmement subtile & spirituelle de la lumire, & la matire grossire,lmentaire, corporelle. Il participe des deux, & lie ces deux extrmes. Cest lesceau du trait visible & palpable de la lumire & des tnbres & le point derunion & de commerce encre le Ciel & la Terre.

    On ne peut donc confondre sans erreur cet humide radical avec le feu inn.

    Celui-ci est lhabitant, celui-l lhabitation, la demeure. Il est dans tous lesmixtes le laboratoire de Vulcain ; le foyer o se conserve ce feu immortel,premier moteur cr de toutes les facults des individus ; le baume universel,llixir le plus prcieux de la Nature, le mercure de vie parfaitement sublim &travaill, que la Nature distribue par poids & par mesure tous les mixtes. Quisaura extraire ce trsor du cur, & du centre cach des productions de ce basmonde, le dpouiller de lcorce paisse, lmentaire, qui le cache nos yeux, &le tirer de la prison tnbreuse o il est renferm, & dans linaction, pourra seglorifier de savoir-faire la plus prcieuse mdecine pour soulager le corps

    humain.De lharmonie de lUnivers.

    Les corps suprieurs & les infrieurs du monde ayant une mme source, & unemme matire pour principe, ont conserv entre eux une sympathie qui fait queles plus purs, les plus nobles, les plus forts, communiquent ceux qui le sontmoins toute la perfection dont ils sont susceptibles. Mais lorsque les organesdes mixtes se trouvent mal disposs naturellement ou par accident, cettecommunication est trouble ou empche, lordre tabli pour ce commerce se

    drange ; le faible moins secouru saffaiblit, succombe, & devient le principe desa propre mine, mole ruit su.

    (Cosmop. Tract. 2.) Les quatre qualits des lments, le froid, le chaud, le sec &lhumide, sont comme les tons harmoniques de la Nature. Ils ne sont pas pluscontraires entre eux, que le ton grave dans la musique lest laigu; mais ils sontdiffrents, & comme spars par des intervalles, ou tous moyens, quirapprochent les deux extrmes.De mme que par ces tons moyens on composeune trs belle harmonie, la Nature sait aussi combiner les qualits des lments,de manire quil en rsulte un temprament qui constitue celui des mixtes.

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    Du Mouvement.

    Il ny a point de repos rel & proprement dit dans la Nature (Ibid.Tr. 4.). Elle nepeut rester oisive ; & si elle laissait succder le repos rel au mouvementpendant un seul instant, toute la machine de lUnivers tomberait en ruine.Lemouvement la comme tir du nant ; le repos ly replongerait. Ce quoi nousdonnons le nom de repos, nest quun mouvement moins acclr, moinssensible. Le mouvement est donc continuel dans chaque partie comme dans letout. La Nature agit toujours dans lintrieur des mixtes : les cadavres mmesne sont point en repos, puisquils se corrompent, & que la corruption ne peur sefaire sans mouvement.

    Lordre & luniformit rgnent dans la manire de mouvoir la machine dumonde ; mais il y a divers degrs dans ce mouvement, qui est ingal, &diffrent dans les choses diffrentes & ingales. La Gomtrie exige mme cetteloi dingalit, & lon peut dire que les corps clestes ont un mouvement gal enraison gomtrique ; savoir, eu gard la diffrence de leur grandeur, de leurdistance & de leur nature.

    Nous apercevons aisment dans le cours des saisons, que les voies que laNature emploie ne diffrent entre elles quen apparence. Pendant lhiver elleparat sans mouvement, morte, ou du moins engourdie. Cest cependant durantcette morte saison quelle prpare, digre, couve les semences, & les dispose lagnration. Elle accouche pour ainsi dire au printemps ; elle nourrit & lve ent, elle mrit mme certains fruits, elle en rserve dautres pour lautomne,quand ils ont besoin dune plus longue digestion. A la fin de cette saison, toutdevient caduque, pour se disposer une nouvelle gnration.

    Lhomme prouve dans cette vie les changements de ces quatre saisons. Sonhiver nest pas le temps de la vieillesse, comme on le dit communment, cestcelui quil passe dans le ventre de sa mre sans action, & comme dans les

    tnbres, parce quil na pas encore joui des bienfaits de la lumire Solaire. Apeine a-t-il vu le jour, quil commence crotre : il entre dans son printemps, quidure jusqu ce quil soit capable de mrir ses fruits. Son t succde alors ; il sefortifie, il digre, il cuit le principe de vie qui doit la donner dautres. Son fruitest-il mr lautomne sen empare, il devient sec, il fltrit, il penche vers leprincipe o sa nature lentrane ; il y tombe, il meurt, il nest plus.

    De la distance ingale & varie du Soleil procde particulirement la varit dessaisons. Le Philosophe qui veut sappliquer imiter les procds de la Naturedans les oprations du grand uvre, doit les mditer trs srieusement.

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    Je nentrerai point ici dans le dtail des diffrents mouvements des corpsclestes. Moise na presque expliqu que ce qui regarde le globe que nous

    habitons. Il na presque rien dit des autres cratures. Sans doute afin que lacuriosit humaine trouvt plutt matire ladmiration, qu former desarguments pour la dispute. Lenvie dsordonne de tout savoir tyrannisecependant encore le faible esprit de lhomme. Il ne sait pas se conduire, & il estassez fou pour prescrire au Crateur des rgles pour conduire lUnivers. Il forgedes systmes, & parle avec un ton si dcisif, quon dirait queDieu la consultpour tirer le monde du nant, & quil a suggr au Crateur les lois quiconservent lharmonie de son mouvement gnral & particulier. heureusementles raisonnements de ces prtendus Philosophes ninfluent en rien sur cette

    harmonie. Nous aurions lieu den craindre des consquences aussi fcheusespour nous, que celles quon tire de leurs principes sont ridicules.Tranquillisons-nous : le monde ira son train autant d