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DOSSIER RENTRÉE DES CLUBS INNOVATION À quoi servent les ballons connectés Après avoir envahi les sports individuels, les objets connectés s’introduisent dans les sports collectifs avec de nouveaux ballons développés par de grandes marques ou des start-up. Focus sur ces technologies émergentes et leurs usages. L’engouement pour les ballons connectés ne se dément pas. Après avoir lancé un smartball de basket en 2015, la marque américaine Wilson a ainsi récidivé en septembre dernier avec la sortie d’un ballon connecté pour le football américain. Apparus récemment sur le marché, ces ballons « intelligents » sont capables de mesurer de nombreuses données utiles à la progression des joueurs. Ils s’inscrivent dans la tendance du « quantified self » dans le sport, autre- ment dit l’automesure des performances par l’athlète lui- même. Outre Wilson, Adidas en a développé un dans le football il y a deux ans et Unistade est en train de déve- lopper le sien pour le rugby. À côté de ces équipementiers, plusieurs start-up investissent ce marché émergent, telle Evo One, 94Fifty (basketball) ou Inside Coach, qui doit lan- cer son ballon de football à la fin de l’année. Contraintes dimensionnelles Si chaque fabricant possède ses technologies propres, ces objets connectés fonctionnent néanmoins avec des éléments communs. Les ballons sont généralement tous équipés d’un gyroscope mesurant les rotations lors d’un tir ou d’un lancer, d’un accéléromètre qui calcule la vitesse à laquelle il se déplace et de capteurs pouvant situer la posi- tion des mains ou le point d’impact sur l’objet. Les infor- mations collectées sont restituées, via une connexion Blue- tooth, vers un smartphone ou une tablette. Le concept n’est cependant pas adapté à tous les sports collectifs, principa- lement en raison de contraintes dimensionnelles (taille et poids des ballons). Ainsi, le handball ou le volleyball restent encore à l’écart de la tendance. GUILLAUME FORVEILLE, RESPONSABLE PRODUCTION CHEZ SPORTS ELITE JEUNES : « Le ballon ne remplacera pas le coach » Sports Elite Jeunes, entreprise spécialisée dans les camps sportifs, utilise dans des ballons connectés pour l’entraînement de ses stagiaires. Guillaume Forveille nous explique leur utilité. Pourquoi Sports Elite Jeunes a fait le choix de travailler avec des ballons connectés? Il s’agissait d’avoir un outil qui renforce le côté ludique du sport. De plus, ces ballons sont coûteux et difficilement accessibles. Nous souhaitions donc mettre à disposition des participants un outil dont ils ne peuvent pas disposer au quotidien. Quels modèles de ballons connectés utilisez-vous? La Smart Ball d’Adidas pour le football et le X Connected de chez Wilson pour le basketball, directement importé des États-Unis. Ces ballons apportent-ils aux jeunes une plus-value à l’expertise que possède un coach? Chez Sports Elite Jeunes, l’expertise vient à 98 % des coachs, ce sont eux qui sont à la base de la progression des participants. L’utilisation des ballons est un plus. Plus de 95 % des jeunes sont satisfaits de la façon de travailler avec ces ballons sur nos camps d’entraînements. Utilisez-vous des outils d’analyse des informations collectées par les ballons? Non, et j’insiste sur ce point : l’outil supplémentaire chez nous, c’est bien l’expertise de nos coachs ! Le coach peut donner une explication à un jeune, via sa tablette, sur une phase de jeu grâce aux informations récupérées par le ballon. Alors que si un particulier comme vous ou moi utilisait le ballon, l’absence d’une expertise pour analyser les données ne lui permettrait pas d’en tirer pleinement parti.. L’important pour nous est donc d’avoir des coachs qualifiés qui, en retour, bénéficient d’un outil de travail performant et original. Pensez-vous que ces smart ball puissent devenir la norme pour la formation des sportifs et le sport de haut niveau en France? Non, je pense qu’il ne faut pas perdre le côté ludique de ces ballons, ils doivent rester des outils de compléments. La plupart des jeunes avec un talent sportif exceptionnel sont en centre de formation, encadrés par des coachs de haut niveau. Les ballons ne peuvent pas remplacer cette expertise, ils doivent rester une alternative ou un complément de travail. Objectiver l’entraînement Selon Gérard Maître, président du groupe Unistade, les ballons connec- tés « ont vocation à éviter la subjectivité d’un coach qui n’aurait que son œil pour juger de la qualité d’une séance de tra- vail, sans éléments factuels pour appuyer ses impressions ». Déjà très friande en technologies (arbitrage vidéo, cap- teurs GPS portés par les joueurs…), l’ovalie présente « un fort potentiel en France mais aussi dans tous les pays que l’on peut qualifier de nations de rugby » pour les ballons connectés explique- t-il. On est cependant loin d’une démocratisation massive des ces équi- pements, dont le prix de vente avoisine le plus souvent 200 € et dont les appli- cations restent dépourvues d’outils d’analyse des mesures. Jérôme Pied filière sport n°43 NOVEMBRE 2016 25 24 filière sport n°43 NOVEMBRE 2016

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DOSSIER REntRéE DES clubS InnOVAtIOn

À quoi servent les ballons connectés

Après avoir envahi les sports individuels, les objets connectés s’introduisent dans les sports collectifs avec de nouveaux ballons développés par de grandes marques ou des start-up. Focus sur ces technologies émergentes et leurs usages.

L’engouement pour les ballons connectés ne se dément pas. Après avoir lancé un smartball de basket en 2015, la marque américaine Wilson a ainsi récidivé en septembre dernier avec la sortie d’un ballon connecté pour le football américain. Apparus récemment sur le marché, ces ballons « intelligents » sont capables de mesurer de nombreuses données utiles à la progression des joueurs. Ils s’inscrivent dans la tendance du « quantified self » dans le sport, autre-ment dit l’automesure des performances par l’athlète lui-même. Outre Wilson, Adidas en a développé un dans le

football il y a deux ans et Unistade est en train de déve-lopper le sien pour le rugby. À côté de ces équipementiers, plusieurs start-up investissent ce marché émergent, telle Evo One, 94Fifty (basketball) ou Inside Coach, qui doit lan-cer son ballon de football à la fin de l’année.

Contraintes dimensionnellesSi chaque fabricant possède ses technologies propres, ces objets connectés fonctionnent néanmoins avec des éléments communs. Les ballons sont généralement tous équipés d’un gyroscope mesurant les rotations lors d’un tir ou d’un lancer, d’un accéléromètre qui calcule la vitesse à laquelle il se déplace et de capteurs pouvant situer la posi-tion des mains ou le point d’impact sur l’objet. Les infor-mations collectées sont restituées, via une connexion Blue-tooth, vers un smartphone ou une tablette. Le concept n’est cependant pas adapté à tous les sports collectifs, principa-lement en raison de contraintes dimensionnelles (taille et poids des ballons). Ainsi, le handball ou le volleyball restent encore à l’écart de la tendance.

Guillaume Forveille, responsable production chez sports elite Jeunes :

« Le ballon ne remplacera pas le coach » Sports Elite Jeunes, entreprise spécialisée dans les camps sportifs, utilise dans des ballons connectés pour l’entraînement de ses stagiaires. Guillaume Forveille nous explique leur utilité.

Pourquoi Sports elite Jeunes a fait le choix de travailler avec des ballons connectés?Il s’agissait d’avoir un outil qui renforce le côté ludique du sport. De plus, ces ballons sont coûteux et difficilement accessibles. Nous souhaitions donc mettre à disposition des participants un outil dont ils ne peuvent pas disposer au quotidien.

Quels modèles de ballons connectés utilisez-vous?La Smart Ball d’Adidas pour le football et le X Connected de chez Wilson pour le basketball, directement importé des États-Unis.

Ces ballons apportent-ils aux jeunes une plus-value à l’expertise que possède un coach?Chez Sports Elite Jeunes, l’expertise vient à 98 % des coachs, ce sont eux qui sont à la base de la progression des participants. L’utilisation des ballons est un plus. Plus de 95 % des jeunes sont satisfaits de la façon de travailler avec ces ballons sur nos camps d’entraînements.

utilisez-vous des outils d’analyse des informations collectées par les ballons? Non, et j’insiste sur ce point : l’outil supplémentaire chez nous, c’est bien l’expertise de nos coachs ! Le coach peut donner une explication à un jeune, via sa tablette, sur une phase de jeu grâce aux informations récupérées par le ballon. Alors que si un particulier comme vous ou moi utilisait le ballon, l’absence d’une expertise pour analyser les données ne lui permettrait pas d’en tirer pleinement parti.. L’important pour nous est donc d’avoir des coachs qualifiés qui, en retour, bénéficient d’un outil de travail performant et original.

Pensez-vous que ces smart ball puissent devenir la norme pour la formation des sportifs et le sport de haut niveau en France? Non, je pense qu’il ne faut pas perdre le côté ludique de ces ballons, ils doivent rester des outils de compléments. La plupart des jeunes avec un talent sportif exceptionnel sont en centre de formation, encadrés par des coachs de haut niveau. Les ballons ne peuvent pas remplacer cette expertise, ils doivent rester une alternative ou un complément de travail.

Objectiver l’entraînementSelon Gérard Maître, président du groupe Unistade, les ballons connec-tés « ont vocation à éviter la subjectivité d’un coach qui n’aurait que son œil pour juger de la qualité d’une séance de tra-vail, sans éléments factuels pour appuyer ses impressions ». Déjà très friande en technologies (arbitrage vidéo, cap-teurs GPS portés par les joueurs…), l’ovalie présente « un fort potentiel en France mais aussi dans tous les pays que l’on peut qualifier de nations de rugby » pour les ballons connectés explique-t-il. On est cependant loin d’une démocratisation massive des ces équi-pements, dont le prix de vente avoisine le plus souvent 200 € et dont les appli-cations restent dépourvues d’outils d’analyse des mesures. ■ Jérôme Pied

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