47
Dossier de presse Inauguration 22 septembre 2012 Le département des Arts de l’Islam Ouverture des nouveaux espaces Mini-site http://www.louvre.fr/departement-arts-islam Direction de la communication Contacts presse Anne-Laure Béatrix Sophie Grange Marie-Cécile Lamoureux Adel Ziane sophie.grange@louvre.fr marie-cecile.lamoureux@louvre.fr Tél. 01 40 20 53 14 Tél. 01 40 20 53 22 Port. 06 72 54 74 53 Port. 06 88 42 52 62

DP Arts de l'Islam inauguration

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: DP Arts de l'Islam inauguration

Dossier de presse Inauguration 22 septembre 2012

Le département des Arts de l’Islam Ouverture des nouveaux espaces Mini-site http://www.louvre.fr/departement-arts-islam

Direction de la communication Contacts presse Anne-Laure Béatrix Sophie Grange Marie-Cécile Lamoureux Adel Ziane [email protected] [email protected] Tél. 01 40 20 53 14 Tél. 01 40 20 53 22 Port. 06 72 54 74 53 Port. 06 88 42 52 62

Page 2: DP Arts de l'Islam inauguration

2

Page 3: DP Arts de l'Islam inauguration

3

Sommaire

Préface par Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre Page 3

Introduction par Sophie Makariou, directeur du département des Arts de l’Islam Page 5 La collection des Arts de l’Islam Page 6

Histoire de la collection Page 7 Regard sur quelques œuvres Page 8 Le chantier des collections Page 13 La muséographie Page 16

Notice muséographique par Renaud Piérard, architecte muséographe Page 17 Panneaux didactiques Page 18 Repères chronologiques et géographiques Page 20 Un ambitieux projet de médiation culturelle Page 22 L’architecture Page 25

Le projet architectural Page 26 Notice architecturale par Mario Bellini et Rudy Ricciotti, architectes Page 28 Informations clés Page 29 Historique des grands chantiers du Louvre Page 31 Autour des collections Page 32

Une saison des arts de l’Islam au Louvre : septembre 2012 - juin 2013 Page 33 Publications Page 39 Les films du Louvre Page 41 Informations pratiques Page 44

Page 4: DP Arts de l'Islam inauguration

4

Préface Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre

Vingt ans après le grand chantier de la pyramide, la création du nouveau département des Arts de l’Islam au

sein du musée du Louvre représente une étape décisive dans l’histoire architecturale du palais et du musée, un

palais en constant devenir et qui porte dans ses gènes, depuis huit siècles, la volonté d’aller de l’avant sans

cesse.

Le projet de fonder ce huitième département patrimonial est né d’une constatation que j’avais faite dès mon

arrivée au Louvre, en 2001 : notre musée possédait l’une des plus belles collections au monde dans le domaine

des arts de l’Islam, mais un dixième seulement des œuvres étaient présentées et, faute de place, nous ne

pouvions ni remonter les grands éléments d’architecture, ni déployer notre exceptionnelle collection de tapis. Il

était indispensable qu’une civilisation si importante, si intimement liée à l’ensemble des domaines couverts par

le Louvre, touchant tant de siècles et de pays, ait enfin droit à des espaces dignes en qualité et en surface.

C’est en 2003 qu’a germé cette belle idée, ce rêve aujourd’hui devenu réalité. Ce rêve, il prend ses racines dans

la vocation même du Louvre, conçu dès son origine, au XVIIIe siècle, comme un musée universel, un lieu où, par

le truchement des œuvres d’art, les époques et les civilisations dialoguent entre elles. Après le Grand Louvre

cher à François Mitterrand, ce chantier est rapidement devenu un projet présidentiel voulu et soutenu par les

différents chefs de l’État qui lui ont succédé. Dès le 1er août 2003, le président de la République Jacques Chirac

a annoncé la création de ce huitième département patrimonial du Louvre. Le 16 juillet 2008, lors de la pose de

la première pierre, le président Nicolas Sarkozy a souligné l’importance de ce projet dans le cadre du dialogue

entre les cultures et les peuples. Et c’est sous les auspices du président François Hollande que ce grand projet, à

la fois artistique et politique dans le sens le plus noble du terme, voit le jour.

Les œuvres exposées dans ces nouveaux espaces réunissent deux collections : celle issue du Louvre, à laquelle

s’ajoute celle, substantielle, de la collection du musée des Arts décoratifs. Ces deux collections réunies couvrent

avec éclat l’ensemble du champ culturel de la civilisation islamique, de l’Espagne à l’Inde, et dans toute son

envergure chronologique, du VIIe au XIX

e siècle.

Une autre caractéristique de ce projet touche à son architecture. Dès le départ, notre parti pris a été de ne pas

remodeler des salles existantes, mais de construire de nouveaux espaces. Et de le faire à la fois dans l’esprit des

lieux et en nous efforçant de capter ce qui se faisait de plus beau et de plus novateur dans le domaine de

l’architecture, ce que le palais du Louvre s’est toujours attaché à faire, à chaque époque, tout au long de son

histoire presque millénaire.

La création et l’intégration de ces nouveaux espaces ont constitué un véritable défi architectural et même

technique, dans cette cour Visconti, lieu chargé d’histoire, situé au cœur même du palais du Louvre. Pour

répondre à ce défi, les architectes Mario Bellini et Rudy Ricciotti ont su trouver un subtil et élégant équilibre

entre le classicisme de la cour du XVIIIe siècle et l’évocation des arts de l’Islam à travers une verrière ondulante,

remarquablement novatrice, alliant le verre et le métal, qui prolonge l’aplomb des façades existantes de la cour

Visconti.

Ce chantier a été également l’occasion d’ajouter un nouveau chapitre au projet du Grand Louvre en

aménageant, au voisinage immédiat des Arts de l’Islam, les salles consacrées à l’Orient méditerranéen à

Page 5: DP Arts de l'Islam inauguration

5

l’époque romaine. Ces œuvres de l’Antiquité tardive proviennent du bassin oriental de la Méditerranée à partir

du IIIe siècle avant J.-C., de l’Égypte romaine et copte, de Phénicie et de Palestine. Ainsi, le nouveau

département des Arts de l’Islam et les salles alentour s’inscrivent désormais dans des ensembles et des espaces

architecturaux continus, cohérents et harmonieux.

Revêtant une dimension tout à la fois architecturale, culturelle et artistique, cette immense réalisation vient

rappeler avec éclat la mission qui incombe au Louvre depuis son érection en musée universel, au cœur de la

Révolution française ; une vocation sans cesse renouvelée et mise au goût du jour pour en faire un musée ouvert

sur le monde, un « musée-monde » pour reprendre l’heureuse expression de J-M. G. Le Clézio. Le Louvre est

aujourd’hui présent sur tous les continents à travers des expositions, des chantiers de fouilles, des expertises

scientifiques et muséographiques. Et ce nouveau département des Arts de l’Islam s’impose comme un espace et

un lieu à la fois témoin et carrefour d’une compréhension mutuelle ; une passerelle entre Orient et Occident, qui

parleront de leurs différences, mais aussi de leur histoire commune, de leurs interpénétrations mutuelles tout au

long des siècles.

Le choix même du nom que nous avons attribué à ces nouveaux espaces – département des Arts de l’Islam –

s’inscrit dans une démarche que le Louvre assume pleinement. Il s’agit en effet, pour nous, de présenter la face

lumineuse d’une civilisation qui engloba en son sein une humanité infiniment variée et riche. À travers ce geste

artistique, nous avons souhaité mettre en avant une approche large et inclusive qui rassemble des mondes très

divers (andalou, mamlouk, ottoman, persan…).

Ce grand dessein n’aurait pu se réaliser sans l’appui de généreux donateurs et de mécènes venus d’horizons très

divers : Son Altesse royale le prince Alwaleed bin Talal bin Abdulaziz Al Saud, qui a été le premier à nous

apporter son soutien ; Sa Majesté le roi du Maroc ; l’État du Koweït ; le Sultanat d’Oman et la République

d’Azerbaïdjan. De grandes entreprises françaises, la Fondation Total et Lafarge, ont souhaité soutenir

financièrement la construction de ces nouveaux espaces. Des donations individuelles ou d’entreprises ont

également contribué au financement du projet : Frédéric Jousset et la Fondation Orange.

Je rendrai enfin un hommage appuyé à toutes celles et tous ceux qui, par leur travail, leurs recherches ou leur

soutien actif, ont su créer les conditions rendant cette réalisation possible. Qu’il s’agisse du travail pionnier de

Marthe Bernus-Taylor, encouragée par mon prédécesseur Michel Laclotte, de l’appui précieux du musée des

Arts décoratifs ou encore, tout au long de ce grand chantier, de l’implication remarquable des équipes du

nouveau département des Arts de l’Islam, sous l’impulsion et la direction de Sophie Makariou.

En visitant le Louvre, Charles Péguy éprouvait un double sentiment : la promotion de l’être et la perception du

long et visible cheminement de l’humanité. Je forme le vœu que les publics éprouvent des sentiments

semblables en découvrant ces nouveaux espaces, ce joyau architectural et les trésors qu’il recèle.

Texte extrait de Les arts de l’Islam au musée du Louvre, sous la direction de Sophie Makariou, coéd. musée du Louvre éditions/Hazan.

Page 6: DP Arts de l'Islam inauguration

6

Introduction Sophie Makariou, directeur du département des Arts de l’Islam

Le département des Arts de l’Islam est l’aboutissement du plus grand chantier ouvert au musée du Louvre depuis les travaux du Grand Louvre. Dotée de plus de quinze mille objets et complétée par les trois mille cinq cent œuvres déposées par le musée des Arts décoratifs, cette collection témoigne de la diversité des créations artistiques issues de mille deux cent ans d’histoire et d’un territoire déployé sur trois continents. Les nouveaux espaces mettent ainsi en lumière l’une des collections les plus riches et les plus belles du monde dans le domaine des arts de l’Islam du VII

e au XIXe siècle.

En français, le mot « ISLAM » a deux sens : « islam » désigne la sphère religieuse et « Islam » évoque la civilisation. Pour parler de la religion, le terme « musulman » est également utilisé – c’est la formule employée à la genèse de cette collection, avec la création en 1893 d’une « section des arts musulmans ». L’importance prise par la notion d’« art islamique » à partir de 1946 élargit considérablement le champ d’étude : les appellations « Islam » et « art islamique » se sont alors imposées. Cette dénomination est aujourd’hui justifiée. En effet, l’« art musulman » désigne exclusivement l’art qui est destiné à la sphère religieuse. Cette définition est assez restrictive ; c’est l’art des mosquées, des copies coraniques, etc.. Mais le monde islamique dans son immensité, de l’Inde jusqu’à l’Espagne, sur plus de douze siècles d’histoire, se compose-t-il uniquement d’art religieux ? Bien sûr que non. Il a largement produit des objets pour des élites, dont il n’est d’ailleurs pas toujours assuré qu’elles aient été musulmanes. Et ces objets appartiennent au monde civil, au monde du pouvoir ; il est donc logique d’y appliquer le terme d’« islamique ». De même, le monde islamique comprend des peuples non-musulmans, à l’instar de la Syrie, dont la population, au XII

e siècle, demeurait majoritairement chrétienne. Faut-il pour autant faire de la Syrie au XIIe siècle une

province de l’art chrétien ? J’en doute.

L’« ISLAM » fait beaucoup débat aujourd’hui. Pourtant, il faut accepter ce terme – ce que nous avons fait. Redonner sa grandeur à l’Islam et ne pas le laisser au djihadistes et à ceux qui le salissent est fondamental. Bien évidemment, nous assumons ce mot, nous le portons, et nous avons fermement l’intention de le montrer dans l’immensité de ce qu’il recouvre, avec toutes les communautés qui ont constitué cette civilisation. Nous voulons dévoiler l’Islam de Qusta ibn Luqa, grand mathématicien chrétien et auteur d’œuvres essentielles de la science arabe à Bagdad au IXe siècle, ou encore celle de Recemundo (Rabbi ben Zaïd), évêque de Cordoue, un familier de la cour du calife de Cordoue qui écrivait en arabe, mais aussi l’Islam de Moïse Maïmonide, grand savant juif qui a écrit son œuvre en arabe, annotée en caractères hébraïques. C’est cette immensité de contributions, ce creuset de peuples que nous avons voulu présenter, dans un projet architectural ambitieux et intellectuel.

Je tiens d’ailleurs à saluer tout particulièrement le travail très remarquable de la maîtrise d’œuvre, Mario Bellini, Rudy Ricciotti et Renaud Piérard. Leur réponse architecturale est absolument extraordinaire d’intelligence, exauçant tous nos souhaits sur la transparence, la fluidité des espaces ou encore la lumière naturelle. Je suis donc aujourd’hui un conservateur comblé puisque la création des architectes n’a pas seulement le mérite d’être appropriée, elle est aussi d’une véritable qualité spatiale qui a, selon moi, dépassé nos espérances.

Je suis allée régulièrement sur le chantier, en particulier avec la direction de la maîtrise d’ouvrage et Cristina Haye, sa directrice, dont je salue, ainsi que toute l’équipe, le travail formidable. J’ai été à chaque fois éblouie par la beauté de ce qui avait été créé. Dans ce très bel espace, réparti sur deux niveaux, s’opère une transition magnifique, de la lumière à l’ombre, à laquelle pourraient correspondre des commentaires mystiques qui iraient si bien avec ce qu’ont produit les mouvements soufis dans l’Islam. Ces nouveaux espaces des Arts de l’Islam sont donc adaptés aux collections et leur font se révéler encore davantage. À l’espace s’ajoute, bien-sûr, la rigueur d’un développement chronologique et d’un exposé didactique, accompagnés d’une médiation culturelle de qualité et d’innovations en terme de signalétique et de cartographie en particulier. Là aussi, les réponses esthétiques produites par Renaud Piérard sont tout à fait admirables ; c’est la création de vrais objets muséographiques qui ont grande allure.

C’est tout cet enchantement que, j’espère, la découverte des nouveaux espaces du département des Arts de l’Islam amènera à ressentir.

Texte extrait de Les arts de l’Islam au musée du Louvre, sous la direction de Sophie Makariou, coéd. musée du Louvre éditions/Hazan.

Page 7: DP Arts de l'Islam inauguration

7

La collection des Arts de l’Islam

Page 8: DP Arts de l'Islam inauguration

8

La collection des Arts de l’Islam Histoire de la collection

Dès l’origine du Museum central des arts, nom donné au Louvre après la Révolution, quelques objets islamiques issus des collections royales forment le petit noyau de ce qui constitue aujourd’hui la collection du département des Arts de l’Islam. Mais c’est véritablement à la fin du XIX

e siècle et au début du XXe siècle, sous l’impulsion

conjointe d’amateurs éclairés et d’historiens, que les acquisitions s’accélèrent. En 1893, un conservateur chargé des « arts musulmans » est nommé au sein du département des Objets d’Art. Paris est alors le point névralgique du commerce d’art et la capitale des études consacrées à l’Orient. Au lendemain des premières expositions consacrées aux Arts de l’Islam à Paris, en 1893 et en 1903, la collection s’est considérablement enrichie dans un contexte d’émulation artistique entre amateurs. Dans la première moitié du XX

e siècle, le Louvre a ainsi acquis des œuvres importantes sur le plan historique, souvent inscrites au nom de souverains, tandis que se constituait à l’Union Centrale des Arts Décoratifs, un ensemble bien différent de pièces à l’esthétique brillante, à la technique et au graphisme novateurs qui servirent souvent de modèles durant cette période d’essor des « arts industriels ». Les deux collections sont ainsi étonnamment complémentaires : le Moyen Âge islamique brille surtout au Louvre, tandis que les arts des grands Empires modernes de l’Islam, du XVI

e au XVIIIe siècle, rayonnent au musée des Arts décoratifs. La collection de

ce musée compte, en particulier, de nombreux et très beaux textiles (tissus et tapis), si essentiels dans les cultures de l’Islam. Très réputée auprès des amateurs et des spécialistes, elle n’était malheureusement plus exposée depuis de nombreuses années et aucune place n’avait pu lui être dévolue dans le projet du musée rénové et inauguré en 2006.

Au Louvre, s’expose depuis 1905, au pavillon de l’Horloge, une collection encore éparse où dominent les « cuivres arabes » dont le prestigieux bassin dit Baptistère de Saint Louis (Syrie ou Égypte, 1320-1340), mais aussi des objets de verre émaillé, de la céramique et des « bois arabes ». Bientôt, la salle du Dôme se trouve dominée de toute sa hauteur par un grand tapis persan, dit Tapis de la collégiale de Mantes, que le musée acquiert en 1912, et qui sera accroché au mur tel un grand tableau. Jusqu’en 1914, la salle changera au gré de l’ajout de nouvelles pièces, issues la plupart du temps de dons. Les collections dites « d’art musulman » bénéficient, à la veille de la guerre, d’une donation importante faite par la baronne Alphonse Delort de Gléon en mémoire de son mari. La Première Guerre mondiale diffère cependant la réalisation d’un projet de réaménagement pour sa présentation, et ce n’est qu’en 1922 que de

nouvelles salles, agrandies, sont ouvertes dans le pavillon de l’Horloge. Mais l’entre-deux-guerres et l’ère de la décolonisation éloignent peu à peu le regard de cette culture et de sa langue fondatrice, l’arabe. Les collections trouvent alors refuge dans la Chapelle. L’espace y est beaucoup plus petit et la sélection d’œuvres exposées plus limitée. En 1987, la collection n’est que très partiellement exposée dans le département des Antiquités orientales. En 1993, sont ouvertes de nouvelles salles dans le cadre du Grand Louvre, sur près de 800 m². Cet espace permet un premier déploiement important des collections, dans une présentation chronologique, mais reste exigu au regard de la richesse des collections. En 2001, Henri Loyrette, président-directeur du Louvre, animé d’une forte volonté d’offrir à ces collections la place qu’elles méritent, engage un ambitieux projet qui intègre la redécouverte d’une autre collection, voisine et oubliée, celle du musée des Arts Décoratifs. En 2003, suivant la volonté du Président de la République Jacques Chirac, un 8e département dédié aux Arts de l’Islam est créé au Louvre. Il s’appuie sur la collection du musée, riche de quelques 15 000 pièces, et complétée par l’important dépôt de 3 400 œuvres du musée des Arts Décoratifs. Ces ensembles exceptionnels comptent de véritables chefs-d’œuvre qui couvrent avec éclat le champ culturel du monde de l’Islam dans toute son ampleur géographique, de l’Espagne jusqu’à l’Inde, et chronologique, du VII

e au XIXe siècle. Le département continue, en

outre, à enrichir ses collections par achat ou par don. Le musée du Louvre possède aujourd’hui l’une des collections les plus riches et les plus belles du monde dans le domaine des Arts de l’Islam. Près de 3 000 œuvres de cette collection des Arts de l’Islam sont aujourd’hui présentées dans les nouveaux espaces de la cour Visconti.

Musée du Louvre, salle supérieure, Islam Pavillon de l’Horloge, musée du Louvre © 1923 Musée du Louvre / Arts de l'Islam

Page 9: DP Arts de l'Islam inauguration

9

La collection des Arts de l’Islam Regard sur quelques œuvres

Pyxide au nom d’al-Mughira Espagne, Cordoue, 968 Ivoire sculpté, H. 16 cm, D. 11,8 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, OA 4068. Acq. 1898 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Vantail de porte du palais du Dar al-Khalifa de Samarra Irak, IXe siècle Bois (teck), décor sculpté. H. 240,5 cm ; l. 56,8 cm ; ép. 7,5 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, AA 267, don de la Société des Amis du Louvre, 1938 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

De la fondation à l’Empire, 632-1000 Vantail de porte du Dar al-Khalifa de Samarra S’étendant sur plus de 50 kilomètres le long du Tigre, la ville de Samarra était composée d’un noyau central, le Dar al-Khalifa. Ce complexe palatial de 125 hectares était divisé en deux parties : l’une publique, appelée Dar al-‘Amma, l’autre privée, le Jawsaq al-Khaqani. Le vantail de porte en bois du Louvre proviendrait du Dar al-Khalifa ; sa hauteur souligne l’importance de l’accès qu’il commandait. Un vantail du musée Benaki, à Athènes, est le pendant de celui-ci. Tous deux présentent un décor organisé en trois panneaux rectangulaires, disposés verticalement. Chaque panneau est orné de motifs profondément biseautés et en très fort relief, spécificité décorative de la sculpture ornementale abbasside. Partant du haut, un motif en éventail ou en queue de paon, flanqué de deux puissantes bossettes, s’achève par une feuille à cinq lobes dont les deux derniers se retournent en volutes vers la tige. Cette dernière est courte et large, et souligne l’étroite continuité des deux corps qui composent le motif.

Pyxide d’al-Mughira C’est à la cour umayyade d’Espagne que fut sculptée cette boîte ronde en ivoire du prince al-Mughira, dernier-né des fils du calife de Cordoue ‘Abd al-Rahman III (929-961). Réalisé dans un matériau précieux et coûteux, ce chef-d’œuvre est rare par son cycle d’images, difficile à déchiffrer, et dont on trouve les clefs de compréhension dans la littérature umayyade andalouse. Elle représente également les symboles des Umayyades d’Espagne, tels que le faucon qui n’apparaît pas moins de dix-sept fois. La précieuse Pyxide d’al-Mughira forme un ensemble complexe d’images au propos très politique, illustrant la lutte autour des symboles du pouvoir légitime des Umayyades face aux Abbasides, un pouvoir – le califat universel – qui semble partout menacé ou à reconquérir. L’œuvre lève alors le voile sur une histoire longtemps occultée : al-Mughira faisait l’objet d’une procédure d’investiture inédite dans le système successoral de l’Islam et devait, après al-Hakam II, défendre les couleurs des Umayyades contre les Abbassides. Mais, à vingt-sept ans, il représenta une telle menace pour un parti qui lui était contraire qu’il fut exécuté au lendemain même de la mort d’al-Hakam II. Cet assassinat ouvrit la crise majeure (fitna, 1009-1031) dont devait mourir le califat umayyade.

Page 10: DP Arts de l'Islam inauguration

10

Tête princière (détail) Iran, Rayy (?), fin du XIIe - début du XIIIe siècle Stuc façonné, traces de polychromie H. max. 32,5 cm ; l max. 16,7 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, MAO 1237. Acq. 1999 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Aiguière du trésor de Saint-Denis Égypte, vers 1000-1015. Cristal de roche taillé, sculpté et poli Couvercle : Italie méridionale, fin du XIe - début du XIIe siècle. Or, filigrane a vermicelli H. 24 cm ; D. max. 13,5 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, MR 333. Don de Thibault le Grand, comte de Blois-Champagne, à l’abbaye de Saint-Denis (avant 1152) ; versé au musée du Louvre en 1793 © Musée du Louvre, dits. RMN / Hughes Dubois

Aiguière du trésor de Saint-Denis Cette œuvre de cristal provient de la cour des califes fatimides, connue pour accumuler des objets de luxe, aux premiers rangs desquels des cristaux de roche. Cette matière suscitait une très grande admiration : considérée comme une eau lentement congelée, le cristal est qualifié sous les Fatimides de « matière dynastique ». Sept aiguières monolithes de cristal, formant un groupe, sont aujourd’hui connues. Sur une base annulaire, leur panse est piriforme, cernée en haut et en bas d’arêtes aiguës en relief, et porte un décor animalier symétrique à un axe végétal ; elles ont une anse droite ajourée, surmontée d’un poucier, et s’achèvent par un bec pointu en forme de cuillère, au sommet d’une encolure étroite. L’identification de l’aiguière de Saint-Denis a suscité des hypothèses mais peut être assimilée à la lagena praeclara mentionnée par Suger, abbé de Saint-Denis, dans son œuvre De Administratione.  Selon Suger, Thibaud se serait procuré cette pièce en Sicile, à l’occasion du mariage de sa fille Élisabeth à Roger II, roi de Sicile (r. 1130-1154) – ce cheminement sicilien explique la présence d’un bouchon d’or filigrané, caractéristique de l’Italie du Sud. L’aiguière fut donnée à l’abbaye de Saint-Denis au plus tard en 1152.

Rupture et recomposition du monde islamique, 1000-1250 Tête princière Cette tête en stuc façonné est un des rares témoignages attestant l’existence en Iran, durant la période médiévale, de programmes de décors sculptés destinés à des ensembles palatiaux. Le personnage était grandeur nature, traité avec un naturalisme dont l’effet était accru par la polychromie. On perçoit encore des restes de couleur noire sur la chevelure et les sourcils, de couleur rouge sur le visage et de couleur bleu céleste à proximité de la boucle d’oreille. Incarnation de la beauté idéale, cette tête est la « pure beauté » du visage du Bouddha, qui est décrite dans la poésie persane dès son essor, au X

e siècle et, avant cela, dans la poésie arabe du califat abbasside : des yeux en amande sous des sourcils arqués, un nez court, une bouche menue, un visage encadré de tresses ondulantes et, parfois, de boucles. Il existe d’autres exemples de personnages en stuc, répondant en général à un modèle stéréotypé, avec des figures richement parées et identifiées comme des personnages princiers. La tête du Louvre arbore un sharbush, coiffe bordée de fourrure et de forme triangulaire sur le devant, qui distingue l’élite militaro-princière turque. Il pourrait s’agir plus précisément de la représentation d’un membre éminent de la garde rapprochée du souverain.

Page 11: DP Arts de l'Islam inauguration

11

Lion de Monzón Espagne, XIIe-XIIIe siècle Bronze moulé, décor gravé H. 31,5 cm ; L. 54,5 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, OA 7883. Anc. coll. M. Fortuny y Marsal, E. Piot puis L.Stern ; legs Mme Louis Stern, 1926 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Bassin dit « Baptistère de Saint Louis » Égypte ou Syrie, première moitié du XIVe siècle Alliage de cuivre, incrustations d’or, d’argent et de pâte noire. D. 50,5 cm ; H. 23,2 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, inv. LP 16. Anciennes collections royales, © Musée du Louvre, dist. RMN /Hughes Dubois

Lion de Monzón On peut voir cette pièce sur plusieurs photographies prises en 1874 dans l’atelier de Mariano Fortuny y Marsal, qui l’avait achetée, ainsi que sur un tableau du peintre espagnol. Une étude publiée en 1865 nous apprend que ce lion avait été trouvé peu de temps auparavant à Monzón de Campos, dans la province de Palencia en Espagne. Ce lion servait de bouche de fontaine. Fabriqué en bronze moulé, l’animal semble prêt à bondir et comme mû par le rugissement qu’un large courant d’eau s’échappant de sa gueule matérialisait sans doute. Sous le ventre, un creux large et béant était sans doute relié à une canalisation qui acheminait l’eau dans le corps de l’animal. Les flancs et la croupe du lion sont ornés d’une inscription gravée et d’un motif d’oiseau logé sous une arcade. Le pelage est figuré par des boucles que l’on retrouve associées à une épigraphie de même style sur deux pièces monumentales en bronze : le grand griffon, probablement placé, au début du XII

e siècle, au sommet du chevet de la cathédrale de Pise, et un lion passé en vente en 1993. Bien que le lieu de production de ces deux œuvres soit discuté, plusieurs chercheurs ont envisagé de façon très convaincante qu’elles proviennent d’al-Andalus. L’étude de leur épigraphie et de celle du Louvre contribue à dater leur fabrication du XII

e ou du XIIIe siècle.

Tout porte donc à croire que ce lion appartient à une production espagnole de grande qualité. Ses points communs avec d’autres bouches de fontaine en forme de lion, au sein du monde islamique, l’inscrivent par ailleurs dans un mouvement large de circulation des modèles et des techniques en Méditerranée médiévale.

Le deuxième souffle de l’Islam, 1250-1500 Baptistère de Saint Louis Ce baptistère est un objet de grand prestige dans lequel le futur Louis XIII et d’autres rois et princes avant lui reçurent le baptême. C’est au XVIII

e siècle que son nom fut associé à Louis IX, roi canonisé, incarnation des croisades qui se rendit en Orient longtemps avant la création du bassin, dont le galbe caréné de son profil est celui des objets exécutés à partir du règne du sultan al-Nasir ibn Qalawun (1309-1341). L’extérieur du baptistère est occupé par une file de personnages, encadrée par deux frises d’animaux. À l’intérieur, le fond présente une ronde de toutes sortes de créatures aquatiques. Au tiers supérieur des parois, un large bandeau encadré d’animaux est peuplé de combats sanglants. Les grands médaillons sont occupés par un souverain en trône. Le baptistère de Saint Louis est l’un des très rares bassins mamlouks présentant un programme figuratif aussi prégnant. Un « souverain » a pris la place de la calligraphie rayonnante qu’accueillent habituellement ces disques. L’organisation des plages à décorer est conforme à celle des bassins mamlouks classiques, mais elle en revisite tous les codes, en excluant l’écriture au profit de la figure. Des fleurs de lys exécutées dans un atelier mamlouk ont été superposées au premier jeu d’armoiries de l’œuvre, qui fut rapidement détournée de son destinataire originel.

Page 12: DP Arts de l'Islam inauguration

12

Bouteille au blason Syrie ou Égypte, milieu du XIVe siècle Verre soufflé, décor émaillé et doré H. 51,1 cm ; D. 24,4 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, OA 3365. Acquisition en 1893, ancienne collection Spitzer. © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Humay rencontre en rêve la princesse Humayun, page d’une anthologie poétique (?) Afghanistan, Herat, vers 1430 Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, AD 3727. Achat, 1887. Dépôt, musée des Arts Décoratifs, Paris, 2006 © Musée du Louvre, dist. RMN / Raphaël Chipault

Bouteille au blason Le verre à décor émaillé et doré, représenté par cette bouteille au long col, est l’une des techniques les plus spectaculaires mises au point dans le monde islamique. Elle se développe tout particulièrement à la fin du XII

e siècle, dans le nord de la Syrie probablement, et atteindra son apogée entre le début du XIII

e siècle et la fin du XIV

e, dans le domaine mamlouk. La création d’une telle œuvre est une prouesse technique d’autant plus remarquable qu’avec une hauteur excédant 50 centimètres, celle-ci est la plus grande des bouteilles connues de ce type. L’inscription du blason se révèle complexe. Si ce mot défie encore la lecture, le reste de l’inscription laisse bien entendre que le destinataire de cet objet prestigieux fut au service de deux sultans successifs, que la séquence qui correspond amènerait à identifier le premier comme le sultan al-Kamil Sha‘ban Ier (r. 1345-1346) et le second comme le sultan al-Nasir Hasan (r. 1347-1351 puis 1354-1361). L’œuvre du Louvre, dont les décors influencés par l’art chinois renvoient au milieu du XIV

e siècle, s’inscrit dans un ensemble d’une vingtaine de pièces de forme similaire. Celles-ci auraient servi à faire décanter le vin lors de cérémonies de l’élite mamlouk, alors qu’officiait l’échanson dont elles incarnent la charge.

Humay rencontre en rêve la princesse Humayun Au début du XIV

e siècle, la peinture dite « persane », au sens où elle s’est élaborée dans un milieu culturel et littéraire d’expression persane, atteint un premier stade de maturation. Les auteurs de l’époque safavide qui ont écrit sur les peintres du passé ont d’ailleurs eu conscience de l’importance de cette période pour l’évolution future de la peinture persane.

Cette magnifique œuvre peinte, exécutée probablement à Herat vers 1430, illustre ces changements. Dans un jardin clos, entre les représentations de deux ruisseaux, jaillissent des arbustes et des gerbes fleuries régulièrement juxtaposées. La scène est tirée d’un roman en vers du poète persan Khwaju Kermani (1280-1352), qui chante l’amour entre le prince de Syrie, Humay, et la princesse Humayun, fille de l’empereur de Chine. Humay s’est épris de Humayun, dont il a pu admirer un portrait. C’est là un vieux thème de la poésie arabe et persane. Un jour, le jeune homme fait un rêve où la princesse apparaît dans un jardin paradisiaque. Au seuil de ce jardin, les mains croisées sur son cœur, Humay lui déclare sa flamme. Dans l’illustration, les émotions sont contenues et les visages impassibles. Les mots prononcés par Humay, écrits en nasta‘liq, sont placés au-dessus de lui, dans deux colonnes d’inégale hauteur. Tout autour de la scène, plusieurs cartouches rectangulaires se rapportent à différents épisodes du roman de Khwaju Kermani et forment un rappel de la trame narrative. Cette sélection visuelle est appropriée à la destination de l’image, une anthologie composée à Herat vers 1430 pour le sultan timuride Baysunqur. Les anthologies de l’époque associaient fréquemment des extraits de textes à des images et des dessins annonçant la structure des albums.

Page 13: DP Arts de l'Islam inauguration

13

Poignard à manche en tête de cheval (détail) Inde, XVIIe siècle Jade, rubis, émeraudes et or kundan ; acier damassé et damasquiné d’or L. 50,5 cm ; l. 9,1 cm ; ép. 2,4 cm ; poids 0,468 kg Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, R 890. Legs baronne Salomon de Rothschild, 1922. © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Textes extraits de Les arts de l’Islam au musée du Louvre, sous la direction de Sophie Makariou, coéd. musée du Louvre éditions/Hazan.

Plat au paon Turquie, Iznik, vers 1550 Céramique siliceuse, décor peint sous glaçure. H. 8 cm ; D. 37,4 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam, K 3449. Legs de M. et Mme Raymond Koechlin, 1932. © Musée du Louvre, dist. RMN / Hughes Dubois

Les trois empires modernes de l’Islam, 1500-1800

Plat au paon C’est l’un des chefs-d’œuvre de la céramique ottomane. Le paon indique la démesure de cette végétation colorée qui investit toute la surface du plat. Les couleurs variées procurent une impression d’opulence, les multiples frôlements et superpositions un sens de la profondeur. Le décor est peint dans une palette subtile dont la gamme particulière permet de dater le plat, puisqu’elle fut employée dans la céramique ottomane autour des années 1530-1555. L’univers végétal habité par le paon se compose de longues feuilles courbes et dentelées, de fleurs simples, imaginaires ou composites. Ces différents éléments caractérisent le répertoire ornemental qualifié de saz dans l’art ottoman. Ce mot désigne en turc ancien une forêt dense et enchantée, peuplée d’animaux et de créatures fabuleuses ; sur le Plat au paon, l’enchevêtrement des végétaux et leur disproportion résonnent de cette signification première. Les ornements saz furent employés dans l’art ottoman sur tout type de support et leurs possibilités graphiques sont pleinement exploitées. Sur les céramiques, les contrastes colorés sont mis en valeur alors que les effets de texture sont simplifiés et les êtres vivants souvent absents. Sur le plat du Louvre, la présence d’un paon, symbole de beauté, est à ce titre exceptionnelle.

Poignard à manche en tête de cheval Le manche de ce poignard en forme de tête de cheval témoigne de l’attention soutenue que portent les Moghols au monde vivant. Ici, le modelé de la tête fine et nerveuse du cheval dénote un pur-sang piaffant d’impatience ; aucun détail n’a échappé à l’artiste. Il est légitime de parler de portrait, genre développé notamment sous le règne d’Akbar (1556-1605) et dont le peintre Mansur, « portraitiste » animalier, a laissé d’éloquents exemples. Le jade a été choisi pour le manche car il est réputé favoriser la victoire. Dans l’Inde moghole, c’est surtout à partir du règne de Jahangir (1605-1627) que les manches de poignard commencent à être faits dans de luxueuses matières au toucher parfaitement lisse : jade, cristal de roche, ivoire. Les lapidaires travaillant le jade, pierre particulièrement difficile à sculpter, atteignent en Inde un niveau d’excellence au XVII

e siècle et, dans une moindre mesure, au XVIIIe.

Ce poignard a de grandes qualités esthétiques, techniques et ergonomiques. De discrets spinelles et émeraudes apparaissent en nombre restreint, sans altérer la beauté intrinsèque de la sculpture. La lame semble d’origine et, pour être somptueux, ce khanjar n’en était pas moins d’une terrible efficacité. Superbe et techniquement parfait, il n’a pu être offert qu’à un personnage très haut placé à la cour : si ce n’est à un membre de la famille royale, dont le nom aurait probablement été inscrit, du moins à un grand officier ou à un membre d’une grande famille alliée.

Page 14: DP Arts de l'Islam inauguration

14

La collection des Arts de l’Islam Le chantier des collections

Depuis l’annonce, en juillet 2005, du choix des architectes pour les nouveaux espaces des Arts de l’Islam, un vaste travail de documentation scientifique, de recherche et de restauration, a été entrepris sur la collection. Garantir la meilleure conservation et lisibilité des œuvres de cet ensemble unique au monde est l’objectif de ce chantier des collections. Débuté en 2006, il s’attache, par ailleurs, à répondre à des enjeux liés à l’actualité du département : l’accueil de la remarquable collection du musée des Arts décoratifs, jusqu’alors peu étudiée, et la nécessité d’adapter les outils informatiques afin d’améliorer la traçabilité et le suivi sanitaire des œuvres.

Inventaire exhaustif et documentation La totalité des œuvres du Louvre a été inventoriée et les inventaires ont été numérisés. Les œuvres du Louvre ou issues du dépôt du musée des Arts Décoratifs ont été photographiées, mesurées, pesées et ont bénéficié d’un diagnostic de conservation. L’ensemble de ces données a été intégré dans une base spécifique créée à cette occasion. Par son ampleur et son exhaustivité, ce référencement est un outil indispensable à la définition des campagnes de restauration ou de prises de vue complémentaires. Ce travail préparatoire dit « chantier des collections », a nécessité de nombreuses interventions techniques : déplacement des objets pour leur étude, constat d'état, traitement minimal de nettoyage, consolidation pour les œuvres fragiles, photographie, conditionnement de transport – pour les prêts hors du musée ou pour les mouvements internes – et redéploiement dans les réserves.

Premier chantier d’une telle ampleur jamais réalisé au Louvre, ce travail a permis le traitement documentaire de 18 000 œuvres (avec autant de photographies) et a nécessité le recours à de nombreux professionnels extérieurs au Louvre, tels des restaurateurs, des documentalistes, des photographes et des manutentionnaires spécialisés, venus travailler aux côtés de l’équipe scientifique du département des Arts de l’Islam.

De nouvelles méthodes pour de grandes restaurations A l’issue de ce travail préparatoire, a été entrepris un chantier de restauration des œuvres qui nécessitaient des opérations plus complexes. La campagne s’est déroulée de fin 2007 à fin 2011. Elle a couvert tous les matériaux (céramique, métal, bois, tapis et textiles, pierre, verre, stucs, arts graphiques, etc.) et a permis la restauration de plus de 3 500 pièces. Au cours de ce chantier et parallèlement à des traitements de conservation et de restauration classiques, il s’est avéré nécessaire de mettre au point de nouveaux procédés de restauration en raison, par exemple, de la présence de montages anciens, contraignants et dangereux pour les œuvres. C’est ainsi que l’intégralité de la collection de près de 2 000 carreaux de céramique ottomane a été démontée de ses anciens supports, avant de faire l’objet d’une campagne intégrale de restauration (voir ci-dessous). De la même manière, toute la collection de vitraux égyptiens, en grand état de fragilité, fit l’objet d’une étude technique et scientifique approfondie, préalable indispensable à leur restauration. La reconstitution d’un porche de pierre d’époque mamlouke a, elle aussi, constitué un défi de grande ampleur (voir ci-dessous). Les dernières acquisitions du musée, tel un magnifique tapis de prière iranien du XVI

e siècle, ne furent pas oubliées et bénéficièrent toutes d’un examen approfondi, suivi, si nécessaire, d’un traitement permettant leur intégration dans les futurs espaces. Dans le cadre du programme muséographique, le chantier des collections et le chantier de restauration ont été suivis, au printemps et à l’été 2012, du chantier d'installation, dernière phase du vaste programme d’étude et de mise en valeur d’une collection. Les œuvres destinées à être présentées aux visiteurs ont alors rejoint les nouveaux espaces d’exposition des Arts de l’Islam dans l’espace créé par Mario Bellini et Rudy Ricciotti, pour rejoindre leur emplacement définitif, selon la muséographie imaginée par Renaud Piérard. Trois exemples de restaurations

Le porche d’époque mamlouke Un porche égyptien du XV

e siècle, a été remonté et retrouve pour la première fois sa vocation initiale de voûte de vestibule. Le porche, dont les 300 pierres démontées furent transportées par bateau de Port Saïd au Havre, parvint à Paris dans le cadre de la reconstitution d’une « rue du Caire » pour l’Exposition universelle de 1889. Il ne fut finalement jamais remonté et les pierres restèrent en caisses. Suite au dépôt au musée du Louvre par le musée des Arts décoratifs, la reconstitution de ce porche a nécessité une étude préalable de deux années, suivie d’une seconde étude technique. Enfin, la restauration du porche et

Page 15: DP Arts de l'Islam inauguration

15

son installation ont nécessité une logistique toute particulière, en raison de la taille de l’œuvre, de son poids et de son insertion dans le futur espace d’exposition. Pour se substituer à la structure architecturale d’origine, les ingénieurs d’un bureau d’études ont imaginé une coque en résine démontable, fabriquée à partir d’une coque en plâtre moulée lors d’un premier montage, elle-même reprise par une structure métallique. Chaque pierre y a été fixée par une cheville inoxydable, sans colle ni résine. Faute de place, les 10 tonnes du porche et de sa nouvelle structure ont été assemblées à 2,60 m du sol. L’ensemble a ensuite été « poussé » à sa place, permettant à la phase de restauration de démarrer. Une méthodologie a été mise en place pour définir jusqu’où aller dans la restauration et faire en sorte que chaque intervention soit réversible. Il a été décidé d’ôter le badigeon ocre-rouge, posé en 1869, et de consolider les pierres fragiles dont la surface était pulvérulente. Une partie sensible du travail consistait à sculpter certains décors disparus à partir des dessins faits par l’architecte Jules Bourgoin, au Caire, avant la destruction de l’édifice. Enfin, il fallait remplacer les pièces manquantes. Alors que la restauration de la voûte et des façades intérieures du porche mamlouk touchait à sa fin, la découverte inespérée de dessins d’archives du XIX

e siècle apporte un rebondissement au projet : une quarantaine de blocs qui n’avaient pas encore livré leur secret dans cet immense puzzle de pierres trouvent leur place définitive dans le projet et permettent de reconstituer une façade extérieure du monument, que l’on croyait perdue. Les tapis La totalité de la collection de quelques 200 tapis – dont plus de 150 provenant du dépôt du musée des Arts Décoratifs – a été restaurée : les pièces ont d’abord été soumises à un dépoussiérage approfondi puis, selon les besoins, ont été orientées vers des opérations de restauration plus poussées. Le nettoyage d’un tapis ancien est délicat et nécessite de tester

Porche d'époque mamlouke (détail) Égypte, Le Caire, seconde moitié du XVe siècle Vue du mur qui fait face à l’entrée et partie du mur latéral avec fenêtre Calcaires jaune et blanc sculptés ; grilles modernes en fer forgé et cadre en châtaignier, H. 250 cm, L. 300 cm, l. 250 cm (dimensions totales du porche) Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam Acheté au Caire par G. de Saint-Maurice avant 1887 ; Dépôt, musée des Arts décoratifs, Paris, 2006, AD RI 2003/26-1 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hervé Lewandowski

Porche d'époque mamlouke(détail) Égypte, Le Caire, seconde moitié du XVe siècle Vue de la voûte « en éventail » Calcaires jaune et blanc sculptés, grilles modernes en fer forgé et cadre en châtaignier, H. 250 cm, L. 300 cm, l. 250 cm (dimensions totales du porche) Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam Acheté au Caire par G. de Saint-Maurice avant 1887 ; Dépôt, musée des Arts décoratifs, Paris, 2006, AD RI 2003/26-1 © Musée du Louvre, dist. RMN / Hervé Lewandowski

Tapis de prière à décor de niche

Iran (?), 1ère moitié XVIe siècle

Trame et chaîne : soie ; poil : laine ; Nœuds asymétriques ; fils de métal brochés

H. 160 cm ; l. 110 cm Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam

MAO 2234. Acq. 2011 © Musée du Louvre, dist. RMN / Raphaël Chipault

Page 16: DP Arts de l'Islam inauguration

16

préalablement la solidité des fibres et des colorants qui le composent. Si ceux-ci s’avèrent stables et en bon état, on procède alors au nettoyage aqueux : une « table aspirante » permet de circonscrire les risques encourus lors du nettoyage. Suit un traitement de couture : les lacunes et les cassures éventuelles sont consolidées par des pièces de tissu unies, teintes selon les besoins et maintenues par un point de couture spécifique, le « point de Boulogne ». Le choix des couleurs de teinture est une étape importante puisqu’il est nécessaire que ces pièces de tissu redonnent une unité visuelle au tapis. Les restaurations ont permis de redonner de l’éclat à de nombreux tapis, parfois de redécouvrir l’emploi de couleurs oubliées et ont été l’occasion de tester de nouvelles techniques. Désormais, cette collection majeure peut être exposée. Les règles de conservation imposent toutefois une durée réduite de présentation de chaque tapis d’environ six mois, sous une lumière tamisée, impliquant une rotation des pièces. Les carreaux ottomans En mauvais état et mal numérotés, les 2 000 carreaux ottomans étaient difficilement identifiables. Il a donc fallu réaliser une nomenclature chiffrée, permettant de les recenser par famille. Le travail a ensuite pris la forme d’un puzzle à reconstituer : à partir des 506 familles identifiées, un mur a été créé, déroulant sur plusieurs mètres l’effet d’un intérieur d’édifice ottoman. Les carreaux et les bordures devaient être coordonnés stylistiquement de façon cohérente entre eux. Ainsi, les restaurateurs ont dû mettre au point une maquette précise de cette « installation ». C’est ensuite qu’a véritablement commencé le puzzle : toutes les photos ont été mises à la même échelle, découpées et regroupées par familles. Un grand support de toile enduite blanche a été monté pour y coller les photos ˗ les essais de collage ont duré plus d’une année. Puis, l’ensemble a été monté : les carreaux ont été assemblés sur le sol protégé d’un atelier. Chacun des 572 carreaux qui composent « le mur » a ensuite été pourvu d’un montage individuel et les 572 montages de sécurité positionnés pour créer le mur dans son état actuel. L’espace réservé pour « le mur ottoman » dans le département des Arts de l’Islam s’étend aujourd’hui sur 12 m de long. Il aura fallu des années pour faire naître ce mur de fleurs.

Mur ottoman ou mur du temps (détail) « Mur de céramique ottomane » reconstitué dans les salles du Louvre Turquie, XVIe-XIXe siècles Vue de la cimaise centrale Céramique peinte sous glaçure, Dimension totale du mur : H. 3.50 m, L. 12 m (environ) Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam © Musée du Louvre, dist. RMN / Raphaël Chipault

Page 17: DP Arts de l'Islam inauguration

17

La muséographie

Page 18: DP Arts de l'Islam inauguration

18

La muséographie

La muséographie a été conçue par Renaud Piérard et Mario Bellini Les mobiliers muséographiques ont été réalisés par la société Goppion

Le plan du département des Arts de l’Islam est disponible à la demande auprès de Sophie Grange, [email protected]

En venant de la Pyramide, le visiteur du nouveau département des Arts de l’Islam entre soudainement dans un lieu insoupçonné installé au cœur du vieux palais. Face à lui un jeté de vitrines semble sorti d’un immense jeu de mikado à l’échelle de la cour : en réalité chaque implantation est étudiée avec minutie pour suggérer en douceur le parcours tel qu’il est écrit par les conservateurs ; au cours de cette déambulation sans contrainte, les œuvres semblent venir amicalement à sa rencontre, le plaçant au cœur d’un partage de délicatesse et de raffinement. C’est que le projet muséographique refuse le morcellement spatial de la collection pour privilégier la continuité sensorielle des regards autant que la fluidité des parcours. Libérées de toute partition structurelle, de larges étendues se prêtent à l’organisation libre des temps de l’exposition en donnant évidence à la continuité autant qu’à l’articulation stylistique des arts de l’Islam. Le parcours de la visite forme ainsi une boucle n’induisant aucune circulation superflue. Les œuvres datant du VII

e au XIe siècle sont au rez-de-cour tandis que le sous-sol, dit « parterre », contient les œuvres du XI

e à la fin du XVIII

e siècle et notamment la prestigieuse collection de tapis. Au rez-de-cour la lumière naturelle est largement diffusée par le voile de verre, de laiton et d’acier dont la peau multicouche en maîtrise l’intensité. Au parterre, l’ombre et la lumière, au cœur de l’enceinte de béton noir, dessinent un lieu plus mystérieux où la vision du voile de couverture reste cependant présente, conférant à ce dernier le rôle unificateur de la collection. En écho, le sol se couvre de copeaux de cuivre formant une mosaïque discrète dans laquelle la lumière ajoute profondeur et préciosité. Les vitrines, les cimaises et les podiums sont toujours placés au centre des espaces, détachés de l’architecture du palais qui les abrite, et c’est bien là une évidence quand la collection est faite en très large majorité d’objets qui doivent être vus sous toutes leurs faces. Au cœur de ce territoire, les objets semblent détachés des contraintes de monstration. La présentation est ordonnée, tour à tour dense pour jouer la répétition des formes, ou aérée pour mettre les œuvres majeures en exergue. Pas de design superflu pour les supports de présentation quand la collection se caractérise par son extrême raffinement. Des formes classiques en revanche, façonnées dans un matériau à l’aspect lithique, en contraste affirmé avec la délicatesse apparente des pièces de la collection. Ce matériau fait de mortier silico-calcaire, de fibres minérales et de pigments est, selon les cas, adouci par sablage ou velouté par microbillage pour offrir l’aspect le plus approprié à la mise en valeur des objets de la collection. Les vitrines sont conçues de façon à s’immiscer sans rupture dans le dialogue entre la collection et l’architecture qui la contient : de grands volumes de verre semblent le plus souvent émerger du sol, libérés de toute structure d’encadrement. Tout cela n’est rendu possible que par la technologie de mécanique de précision qui en constitue la base. Les grands volumes de verre assemblés entre eux par collage s’ouvrent largement par coulissement pour offrir aux conservateurs des espaces de travail généreux. L’étanchéité est également exceptionnelle, dimensionnée au double des exigences internationales habituelles. La muséographie n’est jamais un projet en soi : elle est au plus près de l’architecture dans laquelle elle se glisse ou qu’elle prolonge, toute entière au service de la collection.

Page 19: DP Arts de l'Islam inauguration

19

La muséographie Panneaux didactiques

632-1000 De la fondation à l’Empire L’Islam, à la fois religion et civilisation, naît de la révélation au prophète Muhammad d’un nouveau monothéisme et, conjointement, de la fondation d’un premier État en Arabie. En 622, l’exil (l’« Hégire » en arabe) du Prophète, de la Mecque à Médine, marque le début du calendrier musulman. En 632, à la mort du prophète, l’Arabie est unifiée et la nouvelle religion s’est imposée. De 632 à 660, quatre successeurs (« califes » en arabe), élus, engagent la conquête de vastes territoires pris aux vieux empires perse et byzantin. Dans la seconde moitié du VII

e siècle, l’unité des Arabes est mise à mal par deux guerres civiles ; elles ouvrent la fracture entre shiites et sunnites qui sera définitive au IXe siècle. La grande famille mecquoise des Umayyades l’emporte et établit une dynastie héréditaire (661-750). Les Umayyades installent leur capitale hors d’Arabie, à Damas, et mettent en place les outils d’un pouvoir impérial : normalisation de l’écriture arabe, arabisation de l'administration, réforme monétaire, unification des poids et mesures, etc... Le califat umayyade achève la première vague des conquêtes islamiques. En 750, l’empire atteint pour trois siècles son expansion maximale, de Narbonne en France jusqu’à Samarkand en Asie centrale et à Multan au Pakistan. En 762, les Abbassides déplacent le centre de gravité du califat vers l’est et fondent, sur les terres de l’ancien empire perse, une nouvelle capitale : Bagdad. La ville atteint dès le IX

e siècle les dimensions de Rome ou de Constantinople à leur apogée. Les Iraniens prennent une place décisive dans l’administration et dans la culture de l’empire. Dans les trois siècles qui suivent, les conversions à l’islam se multiplient, surtout en Iran ; mais l’autorité centrale se désagrège aux marges de l’empire : en Espagne où un califat rival apparaît en 929, au Maghreb, en Asie centrale, etc. La menace principale pour les Abbassides vient de la montée du shiisme. Un califat shiite (les Fatimides), parti d’une base tunisienne, s’empare de l'Égypte, de la Syrie et de l’Arabie (La Mecque et Médine) et fonde Le Caire en 969. Vers l’an mil, le triomphe du shiisme semble imminent.

1000-1250 Rupture et recomposition du monde islamique Au cours du XI

e siècle, un nouveau modèle de pouvoir succède au califat. Durant cette période, le rôle des Turcs, à l’est, et des Berbères, à l’ouest, est essentiel. À l’ouest, si l’Islam s’étend en Afrique noire sous l’impulsion des dynasties berbères, il perd ailleurs du terrain. En Espagne, les « Francs » (Occidentaux) entament la Reconquête après l’effondrement en 1031 du califat à Cordoue. Tolède tombe et l’Islam recule alors de façon irréversible dans la péninsule ibérique. La Sicile est reprise par les Francs. Enfin, les Croisés, lancés vers l’Orient, s’emparent de Jérusalem (1099). À l’est, à partir de 1055, une tribu turque venue d’Asie centrale, à peine convertie à l’islam, fait la conquête de Bagdad. Elle met sous tutelle le calife. Un nouvel homme fort issu de ses rangs s’impose : le sultan, il exerce les fonctions militaires et le pouvoir de fait ; son autorité s’étend de l’Asie centrale jusqu’à la Syrie. Il combat le shiisme et promeut le sunnisme. Installés à Bagdad, les Turcs lancent la conquête de l’Anatolie. D’autres Trucs consolident et étendent la présence islamique en Inde, le sultanat de Delhi naît. Par ailleurs, le XI

e siècle est marqué par l’émergence d’une nouvelle langue littéraire écrite : le persan. On doit au poète Ferdowsi son premier chef-d’œuvre, Le Livre des rois (Shahnameh). Vers 1150, à l’est, l’autorité centrale du sultanat disparaît. Mais des souverains militaires recommencent le combat contre le shiisme. En 1171, l’un des leurs, Saladin, met fin au califat shiite établi au Caire puis reprend Jérusalem (1187). Sa famille règne sur l’Égypte et la Syrie à sa succession. La capitale politique est Le Caire. À l’ouest, après 1085, des dynasties berbères successives unissent pour la première fois l’Espagne arabe et la plus grande partie du Maghreb. Marrakech est leur capitale. Le XII

e siècle achève ainsi la séparation politique entre la partie orientale et la partie occidentale de l’Islam, entre l’arabe et le persan. Vers 1200, à l’est, une nouvelle invasion se prépare. À l’ouest, la Reconquête se poursuit : Séville et Cordoue sont perdues.

Page 20: DP Arts de l'Islam inauguration

20

1250-1500 Le deuxième souffle de l’Islam À l’est de l’empire, au début du XIII

e siècle, une gigantesque vague d’invasion initiée par les Mongols de Gengis Khan déferle sur la Chine, le monde islamique et l’Europe orientale. Dans les terres centrales de l’Islam (Irak, Iran, Asie centrale), les ravages sont immenses. En 1258, Bagdad est prise ; sa population et la famille des califes abbassides sont exterminées au terme de quatorze jours de massacre. Les Mamlouks (1250-1517) dominent l’Égypte et la Syrie ; ce sont des esclaves soldats, recrutés enfants dans les steppes d’Asie centrale ou dans le Caucase ; ils forment un régime singulier et pourtant durable qui fait du Caire la plus grande ville de tout le monde islamique. Les dynasties berbères du Maghreb ne résistent guère à la poussée de la reconquête hispano-portugaise. En 1492, la chute de Grenade marque la fin de l’Espagne arabe. La période est dominée par les conséquences de l’invasion mongole dont l’élan se brise en 1260 face au régime militaire des Mamlouks. Ce coup d’arrêt consacre la séparation entre un monde parlant persan à l’est et un monde plus réduit, de langue arabe, à l’ouest (Égypte, Syrie, Maghreb et Espagne arabe). À partir de 1347, la peste dévaste l’ensemble du monde islamique, plus durablement que l’Europe. La mort est partout. C’est l’âge du plein essor d’un mouvement mystique et missionnaire connu sous le nom de soufisme ; entre le XIII

e et le XVe siècle, il convertit tant les majorités rurales que les élites du pouvoir, turco-mongoles en

particulier. À l’est, en Iran, le pouvoir mongol disparaît vers 1330. Son principal héritier est Timur le boiteux (Tamerlan, 1370-1405). Il soumet à nouveau la part orientale du monde islamique aux massacres et aux ravages ; en revanche, ses successeurs sont des mécènes éclairés des arts et des sciences. Ils dominent le monde iranien du XV

e siècle sans pouvoir maintenir leur empire. Les vieilles terres centrales de l’Islam sont exsangues. Mais des États neufs s’édifient sur des terres de conquête récente ; les sultans de Delhi étendent leur domination aux deux tiers de l’Inde au milieu du XIV

e siècle ; les Ottomans s’emparent des Balkans et prennent Constantinople en 1453. Ils écriront une nouvelle page de l’histoire islamique du XVI

e au XVIIIe siècle.

1500-1800 Les trois empires modernes de l’Islam Le XVI

e siècle marque un apogée pour le monde islamique qui comprend alors environ 30% de la population mondiale. Au morcellement politique qui avait prévalu pendant des siècles succède une carte dominée par trois empires. À l’ouest, les Ottomans ajoutent aux Balkans et à la Turquie, déjà conquis, le monde arabe – à l’exception du Maroc – et une bonne part de l’Europe orientale et centrale. À l’est, en Inde, la dynastie des Moghols unit à partir de 1526 les États islamiques indiens et finit par étendre sa domination à la quasi-totalité du sous-continent au XVII

e siècle. Entre ces deux puissances, l’Iran est conquis par les Safavides (1501-1722) qui imposent, pour la première fois dans ce pays, le shiisme comme religion d’État. L’immensité des territoires contrôlés suppose une rigoureuse organisation administrative. Le persan est devenu partout la langue dominante de culture. Le faste est le maître mot des XVI

e et XVIIe siècles. L’admiration des Européens s’exprime sans réserve à propos

de la grande place royale d’Ispahan, contemporaine de la place des Vosges à Paris, mais bien plus vaste. En Inde, les voyageurs occidentaux considèrent d’emblée le Taj Mahal (Agra) comme une merveille sans égale. Partout, la présence occidentale se fait plus forte avec le développement de compagnies marchandes qui assurent peu à peu à l’Europe la maîtrise du commerce mondial. Au temps des succès militaires, éclatants au XVI

e siècle, va succéder une période de difficultés dès la fin du XVIIe

siècle. En 1683, l’échec des Ottomans devant Vienne révèle à l’Europe la faiblesse de l’Orient islamique ; il est distancé techniquement et scientifiquement. L’Empire ottoman tente de se réformer dès le XVIII

e siècle. Mais l’expansion européenne se poursuit. En 1798, Bonaparte lance l’« expédition d’Égypte », qui est militaire mais aussi scientifique ; elle fonde l’égyptologie et les premières connaissances sur les monuments arabes du Caire ; elle donne aussi le coup d’envoi d’un ordre nouveau sous l’impulsion des élites ottomanes. Enfin, le 4 mai 1799, les Anglais affirment leur suprématie sur l’Inde par la victoire de Seringapatam.

Page 21: DP Arts de l'Islam inauguration

21

La collection des Arts de l’Islam Repères chronologiques et géographiques

622 « Hégire », 1ère année du calendrier musulman 632-750 Conquêtes arabes 636 Chute de la dynastie perse sassanide 638 Jérusalem est prise par les Arabes 661-750 Damas capitale des Umayyades 670 Fondation de Kairouan 711 Les musulmans franchissent le détroit de Gibraltar et conquièrent l’Espagne 750-1258 Califat abbasside de Bagdad 762 Fondation de Bagdad, capitale des Abbassides

909-1171 Califat fatimide en Tunisie puis en Egypte 926-1031 Califat umayyade d’Espagne à Cordoue 969 Fondation du Caire, capitale des Fatimides 1055 Les Turcs s’emparent de Bagdad 1187 Saladin reprend Jérusalem aux Francs

Les cartes ont été conçues dans le cadre d’un partenariat avec l’Atelier de cartographie de Sciences Po Paris. Extrait du Livre Jeunesse, L’Islam au Louvre, Presse Actes-Sud (voir p. 39)

Page 22: DP Arts de l'Islam inauguration

22

1206-1555 Sultanat de Delhi ; le nord de l’Inde est un royaume islamique 1212 Victoire décisive des chrétiens pour la « Reconquête » de l’Espagne 1258 Les Mongols prennent Bagdad ; fin du califat 1258-1405 Invasions turco-mongoles 1370-1449 Samarkand est la capitale des Timurides 1453 Les Ottomans prennent Constantinople 1501-1514 Apogée de la dynastie safavide 1520-1566 Règne de Soliman le Magnifique

1555-1707 Les Grands Moghols règnent sur l’Inde 1598-1722 Ispahan est la capitale des Safavides 1722 Ispahan est prise par les Afghans 1739 Conquête de Delhi par les Afghans 1798 Bonaparte conduit l’expédition d'Égypte ; expansion européenne au Moyen-Orient Les cartes ont été conçues dans le cadre d’un partenariat avec l’Atelier de cartographie de Sciences Po Paris.  Extrait du Livre Jeunesse, L’Islam au Louvre, Presse Actes-Sud (voir p. 39)

Page 23: DP Arts de l'Islam inauguration

23

Un voyage accompagné au cœur de la civilisation islamique Le visiteur des espaces des Arts de l’Islam n’est pas convié à un simple parcours au cœur des œuvres mais à un véritable voyage sensible au sein de la civilisation de l’Islam.

À l’entrée des nouveaux espaces, le visiteur découvre une animation multimédia, partie intégrante d’un « cabinet des clés » qui s’articule en deux parties placées en début et en fin de parcours ; leur rôle est de démonter un certain nombre d’idées reçues associées à la civilisation islamique, par un jeu d’écrans présentant des objets des collections : une première animation démontre combien l’art islamique fait largement appel à la figuration et pas

seulement à la géométrie ; une seconde explique combien la notion de religieux/profane est parfois complexe à définir et qu’un même

objet peut parfois être utilisé dans différents contextes.

Le parcours du visiteur est ensuite scandé par quatre panneaux chronologiques illustrés de cartes animées qui servent d’introduction à chacune des quatre sections au sein desquelles sont réparties les collections. A chaque fois, un texte et deux chronologies permettent de se situer sur une période d’environ deux siècles alors qu’une carte animée permet de suivre les évolutions des terres de l’Islam. Pour lui permettre de comprendre ce qu’il découvre et approfondir certains aspects fondamentaux des arts et de la culture de l’Islam, le visiteur dispose de nombreux outils multimédia : un archéologue et un historien expliquent

l’apport des sciences à la connaissance de l’Islam ;

d’autres dispositifs multimédia développent des innovations techniques comme celles du verre émaillé, de la céramique lustrée ou des métaux incrustés ;

des points d’écoute des langues permettent de se familiariser avec l’arabe, le persan ou le turc afin d’appréhender la diversité d’une civilisation qui couvre un immense territoire ;

des thèmes plus spécifiques comme l’écriture ou la calligraphie sont développés par l’image et par le texte. Projetés sur un mur, les premiers mots de la Bismillah sont déclinés sous près de cinquante formes différentes afin d’illustrer l’immense variété de possibilités offerte par l’art de l’écriture ;

plusieurs programmes expliquent le contexte de création de certaines œuvres majeures comme les relevés des mosaïques de la mosquée des Umayyades de Damas ou le porche mamlouk exposé pour la première fois dans les salles.

La multiplication des sources d’information permet à chaque visiteur d’aborder les collections de manière variée et avec un approfondissement plus ou moins grand, en fonction de ses connaissances, de ses centres d’intérêt ou, plus simplement, du temps dont il dispose. En fin de parcours, la seconde partie du « cabinet des clés » développe trois thèmes centraux de la culture de l’Islam : le phénomène urbain et l’importance des

villes ; la diversité des langues et des cultures, par

La muséographie Un ambitieux projet de médiation culturelle

Dispositif multimédia Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam

Conte de Soliman le Magnifique © 2012 Musée du Louvre / réalisation : Opixido / illustration : Arnaud Cremet

Page 24: DP Arts de l'Islam inauguration

24

l’intermédiaire de quinze petites histoires qui mettent en scène des personnages réels ou imaginaires ; le phénomène religieux, par une introduction aux principales caractéristiques de l’islam et par l’évocation

d’une diversité de tendances plus grande que ce que l’on imagine en général. Des offres dédiées à tous les publics Avec un esprit de partage et d’égalité d’accès, aux savoirs et aux collections, les nouveaux espaces des Arts de l’Islam accueilleront les visiteurs du musée du Louvre dans toute leur diversité. Les efforts accrus du musée pour accompagner au mieux ses publics seront déployés en ce sens. Le public individuel et touristique bénéficiera d’un ensemble de supports : commentaires écrits adaptés et placés au plus près des œuvres ; outils multimédias proposant un décryptage technique ou stylistique des collections et expliquant leur contexte de création. Une graduation fine des contenus permettra de satisfaire les visiteurs qui ne disposent que d’un instant limité autant que ceux qui peuvent consacrer plus de temps aux œuvres. Une partie importante des outils sera traduite en anglais et en espagnol. Des commentaires en sept langues sur quarante-cinq objets sélectionnés pour leur importance ou leur représentativité seront accessibles sur l’audioguide Louvre - Nintendo 3DS.

Les publics scolaires et, plus largement, tous ceux qui souhaitent bénéficier d’une éducation artistique et culturelle, se verront proposer des activités animées, des rencontres, des événements et des ressources en ligne. Dans cet esprit, le département des Arts de l’Islam s’affirmera comme un lieu d’éducation et de partage. Un programme renouvelé de visites-conférences sera proposé aux enfants, familles, mais aussi aux adultes ; il offrira une approche des collections sous des angles aussi différents que le conte ou l’apprentissage des techniques. Des événements spécifiques (concerts, nocturnes, lectures) permettront une découverte des espaces et des œuvres qui y sont exposées.

Par ailleurs, afin de préparer ceux qui sont des intermédiaires incontournables entre le Louvre et ses publics, le musée prépare des formations spécifiquement créées et destinées aux enseignants, aux relais du champ social et du handicap, aux éducateurs… Elles proposeront aux encadrants de ces publics considérés comme prioritaires de se doter d’un certain nombre d’outils qui les aideront vers une approche mieux ciblée des collections. Le public atteint de handicap visuel pourra évoluer dans les espaces autour de neuf stations tactiles, réalisées grâce au mécénat de la Fondation Orange, illustrant les grands principes décoratifs (la figure, la calligraphie, l’entrelacs végétal, la géométrie…) qui caractérisent les œuvres exposées. Chaque station propose une reproduction de l’œuvre sélectionnée et un cartel explicatif en gros caractères, traduits en braille. Le principe choisi est d’articuler le parcours tactile autour d’un discours cohérent, axé sur le décor dans les arts de l’Islam. Ce discours sera le fil directeur reliant l’ensemble des stations du parcours. Il sera enrichi de contenus permettant de garantir une cohérence du dispositif du début à la fin. Chaque station présentera donc un objet de la collection et en proposera une étude sous l’angle du décor.

Station tactile Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam

© 2012 Musée du Louvre / Antoine Mongodin

Conte de Nasir al-Din Tusi © 2012 Musée du Louvre / réalisation : Opixido / illustration : Arnaud Cremet

Page 25: DP Arts de l'Islam inauguration

25

Accessible à tous, ce parcours pourra également être utilisé par un large public et servir de base à une découverte des espaces en famille, puisqu’il délivrera des informations et un contenu pédagogique particulièrement soignés. Les stations peuvent être explorées indépendamment les unes des autres, et leur exploration visuelle et tactile sera complétée par des textes audiodescriptifs, au moyen de l’audioguide du musée.

Plan du parcours tactile en braille et en français Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam

Page 26: DP Arts de l'Islam inauguration

26

Page 27: DP Arts de l'Islam inauguration

27

L’architecture

Page 28: DP Arts de l'Islam inauguration

28

L’architecture Le projet architectural

Les espaces architecturaux La cour Visconti, l’un des derniers espaces du palais du Louvre encore disponibles mais qui demeurait inaccessible au public, fut choisie pour abriter le nouveau département. Le projet des architectes lauréats, Mario Bellini et Rudy Ricciotti, relève le défi de construire un bâtiment d’avant-garde dans un lieu ancien et classé. Éclatant et subtil à la fois, c’est par l’oxymore qu’il répond à la commande publique. Il crée des espaces muséographiques déployés sur 2 800 m² et répartis en deux niveaux, au-dessus d’une zone d’espaces techniques. Point d’orgue du projet architectural, la cour Visconti est recouverte d’un ouvrage extraordinaire qui respecte les façades historiques tout en l’ornant d'un élément d'une grande originalité. Après la restauration, de janvier à décembre 2006, des façades et de la statuaire de la cour Visconti, sous l’égide de l’Architecte en chef des Monuments Historiques du palais, Michel Goutal, une excavation de 12 mètres de profondeur a été réalisée dans la cour Visconti. Les quelques milliers de mètres cubes de terre furent évacués par la porte Visconti, un unique accès de 2,7 mètres de large qui donne sur le quai du Louvre. Les fondations des façades existantes ont été reprises, consolidées et prolongées jusqu’au fond de la fouille, grâce à la technique du « Jet Grouting » : il s’agit de mettre en œuvre un jet de fluide à très haute pression (400 bars) pour déstructurer le terrain et le mélanger à un coulis liquide. Ce procédé de mélange hydrodynamique terrain-coulis forme un « béton de sol » in situ dans la masse du terrain qui permet de prolonger les fondations historiques jusqu’à la couche calcaire afin de procéder au terrassement. La cavité ainsi créée a permis la réalisation de deux niveaux enterrés : un niveau technique constitué d’un radier, où sont disposés tous les équipements techniques gérant les

espaces muséographiques (dont centrales d’air, contrôles de la température, de l’hygrométrie et de la ventilation, alimentations électriques),

un niveau parterre constitué d’une dalle en béton armé. Le plancher du niveau rez-de-cour est constitué d’une structure mixte acier/béton permettant de limiter l’emprise de poteaux dans les futurs espaces du musée. Un escalier en béton coulé en une seule fois relie le sous-sol au rez-de-cour sur les 6 mètres qui les séparent. Au rez-de-cour des nouveaux espaces, les parois verticales en verre transparent donnent sur les façades de la cour. Le simple vitrage sans ajout de profil métallique ne fait aucun obstacle au regard. Les volumes de verre sont larges d’environ 2,40 m de manière à correspondre avec la trame de joints de la résille métallique de la verrière. Ils sont de hauteur variable, entre 0,5 m et 6 m. Tous les produits verriers de base sont du type « low iron » ou « extra clair » purifiés des oxydes de fer pour éviter les reflets verts. Les sols en dalles noires incrustées de copeaux de laiton créent un écho chromatique entre le doré de la verrière et la couleur noire du béton autoplaçant des murs. Cette dominante sombre laisse la part belle aux objets précieux ou aux motifs colorés de la collection des Arts de l’Islam que ces espaces accueillent. Au parterre, la vision de la couverture reste présente grâce aux ouvertures dans le plancher du rez-de-cour, conservant à la verrière son rôle unificateur de la collection. Depuis les salles environnantes (galerie Daru, galerie des mosaïques au rez-de-chaussée haut du musée ; salle des États au 1er étage), le regard du visiteur est interpellé par le jeu des ondulations de l’ouvrage original qui donne à l’ensemble toute sa poésie. La verrière Avec la cour Lefuel, la cour Visconti est la plus ornée des cours intérieures du palais du Louvre. Architecturalement complexe, car de construction hétérogène, elle n’offre pas de ligne de corniche continue sur laquelle aurait pu venir se poser aisément une verrière. Une telle structure aurait culminée, en outre, à plus d’une trentaine de mètres au-dessus de collections qu’elle aurait écrasées visuellement. La solution retenue par le projet lauréat a donc consisté à proposer la création d’un écrin de verre et de métal qui se détache des façades historiques (distance entre 2,5 et 4 mètres). Véritable prouesse architecturale, la couverture forme un nuage doré flottant au-dessus de la muséographie, une « aile de libellule » comme la nomme Mario Bellini. La structure qui la supporte est constituée d’une résille double nappe, de forme libre, réalisée avec des tubes

Page 29: DP Arts de l'Islam inauguration

29

d'acier de diamètre constant et d'épaisseur variable entre 4 mm et 13 mm, selon les efforts dans ces tubes. Le voile de toiture se compose de trois couches : un ensemble de panneaux de verre, permettant d’assurer l’imperméabilité du complexe, et deux mailles de métal déployé entourant la verrière, de couleur or anodisé, clair et brillant. La maille extérieure sert de brise-soleil et la maille intérieure de plafond. La maille intérieure est complétée par un panneau en nid d'abeille métallique qui, sans réduire le passage de la lumière naturelle, permet de limiter les vues latérales et de révéler des vues directes vers l'extérieur ; ceci donne à la couverture son aspect oxymorique.

La géométrie tridimensionnelle de la peau de verre et de métal a nécessité un important travail de modélisation informatique, et cela, afin de déterminer les relations et les angles d’inclinaisons des triangles qui la composent. L’épaisseur de la nappe est variable, déterminée par les exigences d’épaisseur structurelle ; plus haute au droit des appuis sur les colonnes support, plus mince sur les bords, soulignant l’effet ondulé. La surface est composée de 2 350 triangles métalliques dont la projection sur un plan horizontal forme des triangles isocèles rectangles d’environ 1,20 m x 1,20 m. Ils peuvent être ouverts pour en assurer l’entretien. Ce ne sont pas moins de 135 tonnes qui reposent sur huit points d’appui circulaires inclinés ; quatre d’entre eux vont de l’aile de verre jusqu’au sous-sol, sur une hauteur qui peut aller jusqu’à 9 m. Effilé, leur diamètre n’excède pas 30 cm.

Pour monter ce gigantesque jeu d’emboîtement, les quelques 8 000 éléments de la tubulure se sont vus attribuer un numéro, dès leur découpe par un robot en Slovénie, afin de leur assurer une place exacte dans l’ensemble de la construction. Quarante-cinq éléments pré-assemblés ont été acheminés sur le chantier. Une grue de 350 tonnes et de 57,4 m (hauteur sous crochet) a été montée dans la cour Visconti. Elle a permis d’acheminer près de 130 tonnes de tubulures nécessaires à la construction de la verrière, depuis le quai jusqu’à la cour, en les faisant passer au-dessus du bâtiment. Cette grue a été utilisée majoritairement par le lot « Gros œuvre » pour la phase d’élévation de la cour Visconti, consistant à couler le béton (dalles, radiers, voiles), placer les éléments préfabriqués et poutres métalliques, etc., et occasionnellement à l’évacuation des engins de chantier. À Cracovie, dans l’atelier de fabrication de la charpente, puis à Paris, lors de la phase finale, l’excellence de l’assemblage a été vérifiée par les moyens de mesures les plus précis. Pour faire face à l’innovation, sur ce chantier hors normes, la structure a été homologuée par une procédure spécifique, un ATEX (Appréciation Technique d’Expérimentation), visant à tester la résistance à la charge de neige, à l’échauffement et à la dilatation entre verres et joints pour s’assurer de leur étanchéité et, également, la tenue dans le temps de l’ensemble du complexe. Il était enfin crucial de vérifier l’absence de point de stagnation des eaux de pluies, alors que certaines pentes sont inférieures à 10%. Mario Bellini et Rudy Ricciotti, architectes du projet, sont associés au bureau d’études techniques et économiques BERIM et à H.D.A (Hugh Dutton Associés) pour ce qui concerne la conception de la verrière et des façades ; à 8’18 en qualité de concepteur lumière ; à Peutz pour l'acoustique. Retrouvez les images du chantier en vidéo sur www.louvre.fr/departement-arts-islam

Verrière de la cour Visconti Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam Architectes : Mario Bellini et Rudy Ricciotti © M. Bellini - R. Ricciotti / Musée du Louvre © 2012 Musée du Louvre / Antoine Mongodin

Page 30: DP Arts de l'Islam inauguration

30

Couvrir la cour Visconti par une verrière est une conviction dix-neuvièmiste très nationale pour un espace qui, jusqu’à aujourd’hui, résistait en levant les yeux au ciel. Altérer cette cour par un encombrement architectural culpabilisé impose de façon irréversible aux façades déjà peu lumineuses, une pénombre malheureuse. Éclater les Arts de l’Islam sur plusieurs niveaux, c’est donner au discours muséographique toutes les malchances utiles à la rupture identitaire de sa narration. Créer des mezzanines dans la cour relèverait maladroitement de la culture consumériste de l’histoire spatiale des grands magasins. Imposer aux trésors de l’Orient l’absence d’échappée définitive d’une cour fermée, témoin des épopées stylistiques françaises, forcera entre quatre murs une covisibilité bien maladroite, rappelant au contenu, par un désastreux cognitif, l’omniprésence conceptuelle du contenant auquel l’Orient ne saurait échapper. L’Occident a toujours raison, mais le Louvre ne le pensait pas. Peut-on rêver une autre attitude qui, avec moins de pesanteur et d’avantage de tendresse, accueillerait amicalement l’Islam à l’image de la main tendue de Montesquieu au Persan en visite à Paris. La cour Visconti ne sera pas couverte et demeurera

visible. Considérant que les sous-sols sont les dernières réserves foncières disponibles et qu’il existe déjà une tradition au Louvre d’exploitation des sous-sols, il s’agira, une fois encore, de ne pas gâcher cette

opportunité. Par ailleurs, les deux façades de la galerie Daru ont le privilège, par de belles fenêtres, d’être au contact de l’extérieur et d’offrir au visiteur un repère naturel : voir la pluie, le ciel, le soleil, la lumière belle à Paris, surtout en hiver lorsqu’il neige, tout cela est un privilège rare au Louvre. Couvrir la cour, c’est irréversiblement déséquilibrer la galerie de Samothrace et créer une proximité sémantique désacralisante entre art gréco-romain et arts de l’Islam. Ce projet propose de lutter contre une malédiction qui semblerait vouloir martyriser toute l’aventure, le patrimoine architectural et les arts de l’Islam dans un seul élan auquel il manquerait le doute comme intuition conceptuelle. Le projet proposera d’organiser sur deux niveaux cohérents les chefs-d’œuvre des Arts de l’Islam en un rez-de-chaussée et un parterre dessous. Le visiteur des galeries périphériques en rez-de-chaussée pourra apprécier la présence féerique, l’intégration sans violence, et la singularité positiviste de cette nouvelle aile muséale respectueuse d’un grand musée de la République. Le rez-de-chaussée sera couvert par une verrière tissée de maille discrètement diffusante, flottant délicatement sur la muséographie. Le parterre dessous sera visuellement largement relié au rez-de-chaussée par diverses ouvertures hiérarchisées et cadrées. En tout point du rez-de-chaussée comme en certains points de ce niveau, l’on apercevra les façades de la cour et le mouvement sensuel de la couverture. Le lieu des collections de l’Orient méditerranéen dans l’Empire romain – comme le montre une coupe – est par ailleurs généreusement relié au dispositif des Arts de l’Islam. Les plis et replis de la couverture forment un drapé soyeux aux reflets facétieux. Le soir, c’est tout un jeu de séduction qui se déploie ainsi entre les fenêtres de la cour Visconti et la lumière s’échappant du département des Arts de l’Islam. Et c’est bien là que réside l’un des choix essentiels du projet : la cour Visconti n’est pas couverte et demeure visible. Moins de pesanteur, davantage de tendresse, ainsi avons-nous voulu tendre à l’Islam une main amicale, à l’image donc de Montesquieu accueillant le Persan en visite a Paris.

L’architecture Notice architecturale par Mario Bellini et Rudy Ricciotti, architectes

Détail de la couverture de la cour Visconti Musée du Louvre, département des Arts de l’Islam Architectes : Mario Bellini et Rudy Ricciotti © M. Bellini - R. Ricciotti / Musée du Louvre © 2012 Musée du Louvre / Antoine Mongodin

Le projet architectural du département des Arts de l'Islam Musée du Louvre Architectes : Mario Bellini et Rudy Ricciotti © M. Bellini – R. Ricciotti / Musée du Louvre

Page 31: DP Arts de l'Islam inauguration

31

L’architecture Informations clés

Les acteurs du projet Maîtrise d’ouvrage Cristina Haye (Direction de la maîtrise d’ouvrage du musée du Louvre) et son équipe

Maîtrise d’œuvre Mario Bellini (Mario Bellini Architect(s)), architecte et muséographe Rudy Ricciotti (Agence Rudy Ricciotti), architecte Renaud Piérard, muséographe

Mario Bellini Architecte et designer, Mario Bellini a gagné plusieurs prestigieuses récompenses dont huit Compasso d’Oro et en 2004, il reçu la médaille d’or du président de la République pour la diffusion du design et de l’architecture dans le monde. Le MoMA à New-York, qui lui a dédié une exposition monographique, présente également 25 de ses œuvres dans ses collections permanentes. Depuis les années 80, Mario Bellini a conçu des projets d’importance internationale tels que la zone Portello de la Foire de Milan, le centre de congrès de Villa Erba, le Tokyo Design Center, le siège américain de Natuzzi, le Parc des expositions d’Essen en Allemagne, la National Gallery of Victoria à Melbourne, le siège de la Deutsche Bank à Francfort, le complexe Verona Forum et le Musée de la ville de Bologne. Il travaille actuellement sur le parc scientifique et technologique « Erzelli » à Genêve, sur la bibliothèque public de Turin, et vient de commencer la rénovation de la pinacothèque de Brera à Milan.

Rudy Ricciotti Architecte et ingénieur, Grand Prix National d'Architecture en 2006, Rudy Ricciotti est représentatif de cette génération d'architectes qui allient puissance de création et véritable culture constructive. Auteur de réalisations marquantes en France, avec notamment le Zénith Stadium de Vitrolles, le Centre Chorégraphique National d'Aix-en-Provence d’Angelin Preljocaj, la restructuration des Grands Moulins de Paris pour l’Université Denis Diderot Paris VII, le Musée des Civilisations d’Europe et de Méditerranée à Marseille ou l’aile des Arts de l’Islam pour le Louvre à Paris. Il construit également à l’étranger : la passerelle pour la Paix sur le fleuve Han à Séoul, le Philharmonie de Postdam à Berlin, le Palais des Festivals de Venise, le Musée d’Art Contemporain de Liège ou encore le Philharmonie de Gstaad pour le festival créé par Yehudi Menuhin.

Renaud Piérard Renaud Piérard est architecte et ingénieur. Son activité principale depuis plus de 30 ans s’exerce dans le monde des musées. Hier Orsay, puis le Quai Branly. Récemment l’extension du musée de Lille Villeneuve d’Ascq avec Manuelle Gautrand, les musées de Da Nang et de Saigon, le nouveau musée national de Monaco ; aujourd’hui les Arts de l’Islam au Louvre avec Mario Bellini et Rudy Ricciotti ; demain le musée Dobrée à Nantes avec Dominique Perrault, le musée national du Qatar et le musée du Louvre Abou Dhabi avec Jean Nouvel. Tout au long durant, une cinquantaine d’expositions temporaires dans les domaines les plus variés : beaux-arts, littérature, musique, histoire, société, sciences naturelles, archéologie, ethnographie, industrie, architecture, design, …

Rudy Ricciotti © Agence Rudy Ricciotti

Mario Bellini © Marie Letz, 2004

Renaud Piérard

Page 32: DP Arts de l'Islam inauguration

32

Principales entreprises Altempo : lot 0 installation de chantier - hors maîtrise d'œuvre DAI Laine Delau et Soletanche Bachy : lot 1 gros œuvre, reprise en sous œuvre, assainissement Waagner - Biro : lot 2 charpente, couverture, façades Forclum et Spie : lot 3 électricité courants forts et faibles Cegelec : lot 4 CVCD / plomberie Otis : lot 5 appareils élévateurs électriques Chapelec S.A.S. : lot 6 étanchéité Desmoinaux : lot 7 serrurerie, métallerie Bredy : lot 9 menuiserie Flipo : lot 11 peinture DBS : lot 12 plafonds suspendus, cloisons, doublage Monotile : lot 13 faux planchers, revêtements de sol Goppion : lot 14 vitrines, socles, podiums Goppion : lot 15 mobilier muséographique Axians : lot 16 équipements muséographiques Assistants maître d’ouvrage OPC et synthèse : EGIS Coordinateur SPS : BECS Bureau de contrôle : SOCOTEC Acoustique et surveillance acoustique et vibratoire du chantier : Jean Paul Lamoureux Technique : NERCO Géotechnique : ARCADIS Surfaces créées Espaces muséographiques : 2 800 m2 Calendrier 14 oct. 2002 Discours de Jacques Chirac, Président de la République française, annonçant son souhait d’ouvrir un département des Arts de l’Islam au musée du Louvre

2003 Réalisation du programme scientifique et culturel 01 août 2003 Décret d’application entérinant la création d’un 8ème département au Louvre 2004 Lancement du concours international d’architecture et d’ingénierie pour la création des espaces muséographiques et techniques

02 nov. 2004 Jury de sélection des candidats 26 juil. 2005 Annonce des lauréats du concours par le Président Jacques Chirac au Palais de l’Elysée Oct. 2005 Démarrage des études de conception Janv.- déc. 2006 Restauration des façades de la cour Visconti Déc. 2006 Validation des études d’avant-projet Oct. 2007 Lancement des premiers appels d’offres Nov.07 - juil.08 Travaux préliminaires, mise en place des installations de chantier 16 juil. 2008 Pose de la première pierre en présence du Président de la République Nicolas Sarkozy, du Prince Alwaleed Bin Talal Bin Abdulaziz Al Saud, de M. Desmarest, président du C.A. de Total et de M. Laffont, P.D.G. de Lafarge

Début 2009 Démarrage des travaux, reprise des fondations Mi 09 - mi 10 Dévoiement de l’ancienne galerie technique / Reprise des fondations et terrassement 2esem. 2010 Elévation des parois enterrées 1ersem. 2011 Pose de la couverture et des équipements techniques 2e sem. 2011 Travaux de second œuvre / Travaux des corps d’états architecturaux Déc. 2011 Achèvement de l’enveloppe architecturale Mai 2012 Livraison du bâtiment Juin - sept. 2012 Installation des collections 18 sept. 2012 Inauguration du département par le Président de la République française, François Hollande 22 sept. 2012 Ouverture des nouveaux espaces au public

Page 33: DP Arts de l'Islam inauguration

33

L’architecture Historique des grands chantiers du Louvre

Du château médiéval au musée du Louvre Sous Philippe Auguste (1180 à 1223), Paris est doté d'une nouvelle et puissante enceinte, fortifiée à partir de 1190, que le roi décide de consolider, à l'ouest ; le château du Louvre naît alors, aux portes d'une cité qu'il est censé protéger du danger anglo-normand. Le château renaissant de François Ier sera complété par Henri II et ses fils jusqu'à ce que la construction du palais des Tuileries, situé à environ 500 mètres du Louvre, modifie sensiblement la donne. Jusqu’à Louis XIV, les rois n'auront de cesse de relier les deux édifices l'un à l'autre par un passage direct : le « Grand Dessein » d’Henri IV concrétisera ce souhait par l'aménagement de la Grande galerie. Le prolongement sous Louis XIII de l'aile ouest de la Cour Carrée marque le point de départ d'un projet ambitieux qui sera mené à son terme par Louis XIV et complété sous Louis XV, transformant ainsi profondément les structures du Louvre et des Tuileries. Le cœur du monument prend alors l'aspect que nous lui connaissons de nos jours. Après la Révolution, en 1793, le Museum central ouvre au public dans la Grande Galerie et le Salon Carré. D'année en année, le musée s'étend : les appartements d'été d'Anne d'Autriche accueillent les sculptures antiques, puis naissent les salles du musée Charles X et l’aile rue de Rivoli sous Napoléon III. Les collections envahissent peu à peu l'édifice. Lors de la Commune, en 1871, un incendie détruit les Tuileries : la décision est prise de ne pas reconstruire le château, qui est démoli en 1882. La disparition des Tuileries marque l'acte de naissance du Louvre moderne : à l’exception du Ministère des Finances, le pouvoir quitte le Louvre qui peut se vouer essentiellement à la culture.

Le projet du Grand Louvre L'amélioration des installations du musée et une meilleure présentation des collections sont une évidente nécessité, lorsque, le 26 septembre 1981, le président de la République, François Mitterrand, annonce que le Louvre sera entièrement dévolu à la culture. Le Ministère des Finances est transféré dans de nouveaux locaux et le projet « Grand Louvre », entraînant un remodelage complet du musée, est lancé. En 1983, l'architecte américain d'origine chinoise, Ieoh Ming Peï, est désigné pour mener à bien l'agrandissement et la modernisation du Louvre. La pyramide de verre, déterminant les grands axes de circulation du palais et conduisant en sous-sol à un vaste hall d'accueil, est inaugurée en 1989. Des fouilles archéologiques précèdent l'aménagement du sous-sol de la cour Napoléon et la construction de la pyramide. L’année 1993 voit l'ouverture au public de l'aile Richelieu qui constitue son plus important agrandissement de surface muséographique depuis sa fondation deux siècles plus tôt. La couverture des trois cours intérieures, les cours Marly et Puget (sculptures françaises) et la cour Khorsabad (antiquités orientales), permet l'aménagement d'espaces monumentaux adaptés à la présentation de pièces de grandes dimensions, les départements des Peintures et des Objets d'art augmentent considérablement leur superficie alors que les Arts d'Islam disposent enfin de salles permanentes. Le musée connaît en 1997 de nouveaux aménagements importants autour de la cour Carrée avec l'inauguration des salles de l'aile Sackler (antiquités orientales) et surtout l'ouverture des deux étages totalement réaménagés du département des Antiquités égyptiennes qui double sa superficie d'exposition. Le projet de réaménagement de la salle des États est alors lancé, comme celui de la création de nouvelles salles dites « des trois antiques » creusées sous la cour Visconti. C’est la fin du projet du « Grand Louvre ».

Les nouveaux projets du Louvre En 1996, le Président de la République, Jacques Chirac, décide que soit créé un musée des Arts des civilisations et qu'une sélection de chefs-d'œuvre soit présentée au Louvre ; le rez-de-chaussée de l'ancien pavillon des Sessions est choisi pour montrer ces œuvres provenant d'Afrique, d'Asie, d'Océanie et des Amériques. Les salles aménagées par J. M. Wilmotte, antenne du futur musée du quai Branly, sont inaugurées en avril 2000.. Après le « Grand Louvre », la mise en valeur des monuments et des collections du Louvre se poursuit, tout comme la restauration et le réaménagement de la Galerie d’Apollon en 2004, de la salle des États généraux en 2005 et des nouvelles salles d’art grec classique et hellénistique en 2010. S’inscrivent aujourd’hui dans ce dessein l’achèvement du projet « des trois antiques », désormais appelé l’Orient méditerranéen dans l’Empire romain, et le réaménagement en cours des salles des Objets d’art du XVIII

e siècle. Le point culminant de cette nouvelle stratégie est sans conteste l'aménagement du 8ème département du Louvre, selon le projet architectural lauréat des architectes Mario Bellini et Rudy Ricciotti. Le département des Arts de l'Islam, inauguré le 18 septembre 2012, s'installe alors dans les nouveaux espaces de la cour Visconti. Plus grand chantier architectural entrepris au musée depuis vingt ans, l’architecture du département des Arts de l’Islam représente le Louvre du XXI

e siècle.

Page 34: DP Arts de l'Islam inauguration

34

Page 35: DP Arts de l'Islam inauguration

35

Autour des collections

Page 36: DP Arts de l'Islam inauguration

36

Autour des collections Une saison des arts de l’Islam au Louvre : septembre 2012 - juin 2013

Pour accompagner l’ouverture du département consacré aux arts de l’Islam, un ensemble d’événements et de manifestations au musée et à l’auditorium compose un parcours dans plusieurs disciplines - danse, musique, littérature, cinéma, arts visuels - tout au long de la saison. Trois cartes blanches à des personnalités choisies sont ainsi associées à d’autres moments forts, naturellement consacrés aux œuvres et à l’architecture du département, mais aussi à l’expression d’autres artistes selon des formats et thématiques variés.

Les trois invités seront Abbas Kiarostami, Orhan Pamuk et Walid Raad. Le dialogue avec ces personnalités a permis de définir librement un contenu de programmation qui illustre la diversité de l’Islam et sa pluralité historique, géographique et culturelle, à partir des références personnelles et culturelles de chacun. Des points de convergence émergent : un fort penchant vers le multiculturalisme et l’illustration des liens entre Orient et Occident, la question du positionnement de l’art et de l’artiste dans les pays de culture islamique, un intérêt marqué pour les questions patrimoniale et muséale… Autour des œuvres et du département Journée découverte : « Arts de l’Islam, regards sur les collections du Louvre » Vendredi 21 septembre 2012

Respectant les quatre grands temps du parcours des collections, cette journée propose une série de présentations portant sur plusieurs œuvres majeures conservées au musée du Louvre. Plus que des conférences académiques ou destinées à des spécialistes, l’idée est de fournir des clés de lectures, pertinentes et accessibles, pour décrypter la complexité de la production artistique en terres d’Islam.

Réécrire le passé : la réponse umayyade à l’héritage classique et byzantin, 690-750 (autour des relevés des mosaïques de Damas) À 10h, par Robert Hillenbrand, professeur honoraire, université d’Edimbourg

Le Suaire de Saint-Josse, une étoffe de luxe, Iran oriental, Xe siècle À 10h45, par Jochem Sokoly, Virginia Commonwealth University School of the Arts, Qatar

De quelques anses et de l’aiguière en cristal du trésor de Saint Denis en particulier À 11h 30, par Avinoam Shalem, université de Munich

Une porte de bois iranienne ou irakienne datée de 1126 À 12h15, par Abdullah Ghouchani, Téhéran

Parures de céramique, saints et sûfis : décors lustrés du tombeau de Natanz (Iran) À 15h, par Sheila Blair, Boston College

Le porche du Qasr Rumi (Le Caire) et la passion pour l'art mamlouk À 15h45, par Annie-Christine Daskalakis-Mathews, Agence France-Museum, Paris

Peintures et dessins de la collection du Shâh 'Abbâs Ier À 16h30, par Ada Adamova, musée de l’Ermitage, Saint-Petersburg

Le prince et l’ermite : la Visite de l’empereur moghol Jahângîr à l’ascète Jadrûp À 17h15, par Amina Taha Hussein-Okada, musée Guimet, Paris

Table ronde « Musée-musées » « Les arts de l’Islam dans la cour Visconti » Samedi 6 octobre 2012 de 14h30 à 17h

Présentation du projet architectural et muséographique des nouveaux espaces du département des Arts de l’Islam. Ouverture par Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre. Avec la participation de Mario Bellini, architecte, Milan, Sophie Makariou, directeur du département des Arts de l’Islam, musée du Louvre, et, Renaud Piérard, architecte-muséographe, Paris.

Le projet architectural du département des Arts de l'Islam Musée du Louvre Architectes : Mario Bellini et Rudy Ricciotti © M. Bellini – R. Ricciotti / Musée du Louvre

Page 37: DP Arts de l'Islam inauguration

37

Les cartes blanches

Abbas Kiarostami - Emerveillements « Sans rien renier de son héritage culturel, c’est au nom de l’« Universalité de l’art » que le cinéaste, poète et photographe iranien Abbas Kiarostami a accepté l’invitation du Louvre. En témoigne le choix du thème de sa carte blanche, l’émerveillement, qui lui offre l’occasion de revenir sur des questions qui traversent tout son œuvre : l’innocence de l’enfance, la beauté du monde, et surtout, la vérité de l’art. Ainsi, dans Five, cinq haïkus visuels, l’artiste nous communique-t-il sa propre fascination devant l’œuvre de la Nature. Ou, dans Shirin, nous incite-t-il à nous comporter au contraire en créateurs en imaginant, confrontés aux seuls visages des spectateurs, le film qui leur est projeté hors-champ. La question du rapport de l’art au réel, authentique ou trompeur, est profondément liée à la manière dont le cinéaste conçoit et figure

l’existence : une quête sur le chemin vers la vérité. »

Cinéma/Rencontre : Shirin Dimanche 14 octobre 2012 à 15h D’Abbas Kiarostami, Iran, 2008, 92 min, coul., vostf Dans une salle de cinéma iranienne, des spectateurs assistent à la représentation filmée d’une adaptation théâtrale de Shirin, un poème d’amour persan du XIIe siècle. Projection suivie d’un échange entre Abbas Kiarostami et Alain Bergala, critique, enseignant et cinéaste.

Dimanche 14 octobre 2012 à 17h45 Une signature d’Abbas Kiarostami aura lieu à la librairie du musée.

Cinéma : Frontière (Border, Sahman) Dimanche 14 octobre 2012 à 18h30 De Harutyun Khachatryan Arménie, 2009, 82 min, coul. Récit singulier, à travers le regard d’une bufflonne, de la vie quotidienne de fermiers dans un village isolé du no man’s land constitué par la zone de conflit entre Arméniens et Azéris après la fin de la domination soviétique. Film présenté par Abbas Kiarostami

Cinéma/Lecture Lundi 15 octobre 2012 à 20h30 Lecture de poèmes d’Abbas Kiarostami par Jean-Claude Carrière, scénariste, écrivain et comédien.

Suivie de la projection de Five (5 Long Takes Dedicated to Yasujiro Ozu) D’Abbas Kiarostami, Iran-Japon-France, 2003, 74 min, coul., sans dialogues. L’œuvre est constituée de cinq plans-séquences poétiques tournés en caméra numérique dédiés au cinéaste japonais Yasujiro Ozu.

Salle audiovisuelle : Du 5 septembre au 31 décembre 2012 En septembre de 10h à 17h (mercredi et vendredi jusqu’à 21h) En octobre, novembre et décembre, de 10h à 14h

Lundi : Alhambra Fr., 1926, 4 min, nb colorisé, muet, vostf L’Alhambra de Grenade De Frédéric Compain, Fr., 2006, 26 min, coul. Série « Architectures ».

Shirin d’Abbas Kiarostami Iran, 2008, 92 min, coul © Mk2 Distribution

Page 38: DP Arts de l'Islam inauguration

38

Jeudi et samedi en alternance Les Jardins du Paradis : Khâmseh de Nezâmi, miniature persane D’Alain Jaubert, Fr., 1997, 30 min, coul. Série « Palettes ». La Mosquée d’Ispahan De Richard Copans, Fr., 2007, 26 min, coul. Série « Architectures ».

Dimanche Une minute au musée - Les arts de l’Islam De Franck Guillou, Fr., 2008, 65 min, coul.

Du 3 octobre au 31 décembre 2012 Tous les jours à partir de 14h en continu Roads of Kiarostami (Les Routes de Kiarostami) D’Abbas Kiarostami, Iran, 2005, 32 min, nb et coul., vostf

Cinéma : Yalda (nuit du solstice d’hiver)

Vendredi 21 décembre 2012 à 20h30 Courts métrages d’Abbas Kiarostami Dans le cadre de la deuxième édition du « Jour le plus Court » organisée par le ministère de la Culture. Cette séance propose une sélection de ses courts-métrages choisis et présentés par Abbas Kiarostami. « Yalda », nuit du solstice d’hiver, célèbre en Iran la naissance de Mithra, dieu du soleil, et la renaissance de la lumière. Orhan Pamuk Lauréat du prix Nobel de littérature en 2006, l’écrivain turc Orhan Pamuk nourrit son écriture de l’histoire de son pays et de l’atmosphère de sa ville natale, Istanbul, reliant l’Europe et l’Asie. Dans ses romans publiés en France chez Gallimard, comme La Maison du silence, Le Livre noir, Le Château blanc, La Vie nouvelle, Mon nom est Rouge, Neige et Le Musée de l'innocence, il interroge les rapports entre Orient et Occident et rend hommage à « l’entrelacement des cultures ». Peintres, écrivains, architectes et artisans sont pour Pamuk des passeurs qui participent à cet « entrelacement des cultures » en se nourrissant de rencontres, de voyages, de découvertes, mais aussi de leur vécu, avec tout ce qu’il peut avoir d’ordinaire. C’est en conférant une grandeur et parfois même une dimension universelle aux objets, aux sensations, aux détails et anecdotes du quotidien que l’artiste relie la sphère de l’intime et l’espace public. Cette conception de la création artistique ouvre à une réflexion particulièrement pertinente pour l’institution muséale à l’heure où le Louvre inaugure ses nouveaux espaces du département des Arts de l’Islam. L’œuvre d’art présentée dans un musée relie le présent au passé et ouvre une voie vers d’autres lieux, d’autres cultures. Elle rend aussi l’autre rive, celle des artistes et des créateurs, accessible à ceux qui veulent la découvrir et qui sont touchés par sa poésie, sa beauté, sa complexité technique. De même que dans le Musée de l’innocence, réel et fictif, qu’a créé Orhan Pamuk, où chaque objet, bijou, photo, mégot de cigarette, fait revivre l’être aimé et le souvenir du bonheur évanoui, les œuvres du département des Arts de l’Islam sont des talismans conservés pour leur pouvoir d'évocation ou leur valeur historiographique, des objets d’amour et de nostalgie. Pour Pamuk, « les musées sont faits non pas pour visiter mais pour sentir et vivre ». Conférence : « L’innocence des œuvres » Samedi 27 octobre 2012 à 17h Par Orhan Pamuk, écrivain en conversation avec Sophie Basch, professeur de littérature française, université Paris-Sorbonne

Orhan Pamuk entre la vitrine-balustrade (exposant salières et poivrières, cuillers, et autres ustensiles de cuisine et les

boîtes n° 14, 15, 16 et 17, 1er étage), Musée de l’Innocence, Istanbul, photo Refik Anadol

© Musée de l’Innocence

Page 39: DP Arts de l'Islam inauguration

39

Lecture : « D’autres couleurs » Dimanche 28 octobre 2012 à 17h Lecture mise en espace d’un choix de textes d’Orhan Pamuk. Lecteur : Jérôme Deschamps, comédien, metteur en scène et directeur du théâtre national de l'Opéra-Comique Décor : Richard Peduzzi Walid Raad

Avec la création de « The Atlas Group », à la fin des années 80, Walid Raad a placé son œuvre sous le signe d’une réflexion critique - passant par le brouillage des repères de l’archive et de la fiction – sur le visible et l’invisible de l’histoire. Depuis quelques années, son projet intitulé « Scratching on things I could disavow : A History of Art in the Arab World » s’intéresse aux modes récents d’émergence du patrimoine artistique des pays arabes et islamiques dans le contexte d’un monde culturel globalisé. La démarche artistique y est concernée au premier chef par la manière dont les conflits et mutations géopolitiques affectent ou déplacent le rapport à l’histoire et notamment aux objets en tant que matérialisations d’une pensée artistique. C’est avec cette perspective que Walid Raad porte un regard contemporain sur le département des Arts de l'Islam du Louvre : ses collections et l'histoire de leur documentation scientifique et muséale, le projet architectural et muséographique qui est amené à servir de nouvel écrin et espace de visibilité à ces collections, enfin la dimension institutionnelle du projet. Avec cette exposition, Walid Raad entreprend un projet à long terme au musée du Louvre.

Exposition, salle de la Maquette Du 16 janvier au 8 avril 2013 Mêlant construction, images, projections, l’œuvre de Walid Raad produit des expériences de déplacement. L’artiste conçoit pour le Louvre une installation inédite, où résonne la mémoire elliptique et fragmentée d’un possible « musée universel ».

Édition d’artiste Partie intégrante du projet artistique, la publication élaborée par Walid Raad développe une méditation visuelle à partir des archives du département des Arts de l’Islam et des photographies les plus récentes documentant les collections. Walid Raad, Préface à la Troisième Edition, édition d’artiste, Musée du Louvre et Bernard Chauveau éditeur, Paris, à paraître en janvier 2013.

Programmation Le 22 mars 2013 de 14h à 22h Autour de son projet, Walid Raad invite des philosophes, écrivains, historiens de l’art et sociologues. Autre programmation autour des œuvres et du département Concert « Superstructures » d’Hassan Khan 20 octobre 2012 à 21h Dans le cadre de « Ouvertures/Openings » Un programme de performances en collaboration avec la FIAC 2012 Basé au Caire, Hassan Khan développe depuis les années 1990 une œuvre plastique, musicale et littéraire. Dans Superstructure, il procède à une hybridation vertigineuse de

Hassan Khan jouant The Big One au 100LIVE, Le Caire © 2009 Magdi Mostafa

© Walid Raad Remerciements : Hughes Dubois

Page 40: DP Arts de l'Islam inauguration

40

genres musicaux, du minimalisme à la New Wave Shabi, musique électronique urbaine, très populaire en Egypte. A la manière de grands complexes vivants, ses concerts répondent à l’énergie composite du paysage acoustique globalisé. Accès libre sur réservation. Réservations à partir du 19 septembre jusqu’ au 18 octobre inclus, à l’adresse suivante : http://www.louvre.fr/cycles/ouvertures-openings-2012

« Faces à faces » : soirée d’art contemporain Yto Barrada : l’histoire dans les histoires Vendredi 7 décembre 2012 à 18h30 Yto Barrada, artiste, en conversation avec Nadia Tazi, philosophe et Marie Muracciole critique d’art et commissaire d’exposition.

Dans ses photographies, ses films, ses sculptures et ses livres, Yto Barrada interroge l’histoire culturelle multiple qui est celle du Maroc. Le regard de l’artiste sur la ville de Tanger donne notamment lieu à deux œuvres significatives : le film Beau Geste (2009), récit d’un geste activiste dans l’espace public et le livre A Guide to Tree (2011), fable satirique en mots et en images sur les enjeux du décor urbain. En conversation avec Nadia Tazi, qui travaille sur les représentations du pouvoir en Islam et de Marie Muracciole, commissaire de sa dernière exposition monographique, Yto

Barrada évoquera ici son approche de questions telles que l’orientalisme, la mémoire collective et le déplacement des valeurs et des mythes.

« Électrons libres » : Les Aventures du Prince Ahmed / Khalil Chahine 30 novembre à 14h30 (public scolaire) 2 décembre à 16h (tout public à partir de 8 ans) Dans le cadre du programme « Électrons libres », qui confronte les matières sonores et visuelles pour générer des énergies nouvelles, le musée du Louvre a passé commande au compositeur et guitariste Khalil Chahine pour l’accompagnement du film Les Aventures du Prince Ahmed de Lotte Reiniger. All., 1926, 66 min, teinté, muet, copie 35mm Musique de Khalil Chahine pour électronique et ensemble instrumental

Nocturnes du vendredi (entrée libre pour les moins de 26 ans) Soirées exceptionnelles dans les salles du musée autour des Arts de l’Islam Les 8, 15 et 22 février 2013 de 19h à 21h En décalage avec l’image traditionnelle du musée, ces nocturnes, ouvertes à tous, consistent à créer un événement artistique inspiré des œuvres et des lieux. D’autres formes d’art sont ainsi invitées à revisiter le musée, ses espaces et ses collections, pour en proposer une nouvelle interprétation. Lors de trois vendredis soirs successifs, le

Les Aventures du Prince Ahmed de Lotte Reiniger, All., 1926, 66 min, teinté, muet, copie 35 mm © Carlotta Films

Capture d’écran du film Beau geste (2009, film 16mm numérisé, couleur et son, 3’) © Yto Barrada

Technology-Babal_Jalet et Cherkaoui © Olivier Hoffschir

Page 41: DP Arts de l'Islam inauguration

41

Louvre célébrera l’ouverture des Arts de l’Islam en créant des échos formels et esthétiques aux œuvres du nouveau département. Les artistes invités créeront une dynamique entre les corps en mouvement et les œuvres du musée, convoquant tour à tour l’écriture et la musicalité des langues afin d’embrasser la diversité des Arts de l’Islam. Duos éphémères : carte blanche à Ibrahim Maalouf Vendredi 1er février à 20h30

Trompettiste virtuose, Ibrahim Maalouf aime par-dessus tout les rencontres, comme le prouvent ses multiples collaborations et ses choix artistiques, qui l’ont mené des rivages de la Méditerranée à ceux du Nouveau Monde, des so-norités orientales au jazz occidental. Aux com-mandes de la programmation musicale des cinq projections-concerts « Duos éphémères » de cette saison (après Laurent Garnier, Arthur H, Camille, M ou Oxmo Puccino), il a imaginé des rencontres étonnantes autour de films rares, comme celle réu-nissant, le vendredi 26 avril à 20h30, trois personnalités marquantes du jazz : Nguyên Lê, Baptiste Trotignon et Nils Petter Mol-vaer. Ou encore celle du musicien canadien atypique Socalled avec l’unique film de Jean Genet, Un chant d’amour, vendredi 1er février à 20h30. Autres séances : Vendredi 29 mars à 20h30 Smadj et Zeid | Vendredi 24 mai à 20h30 : concert surprise | Vendredi 7 juin à 20h30 Eol Trio. Week-end rencontres et projections à l’auditorium du Louvre Samedi 2 février, 15h « Majida Khattari, voilé-dévoilé » Rencontre avec Majida Khattari : présentation des modèles vivants, des costumes de la plasticienne ; diffusion d’extraits de films.

Dimanche 3 février, 15h, « Shirin Neshat, portraits de femmes ». Rencontre avec Shirin Neshat : Diffusion d’extraits de films et photographies de l’artiste.

Au cœur de l’actualité et des débats politiques, les rencontres entre mondes de l’Islam et Occident font l’objet de multiples analyses et commentaires. Mais les artistes proposent d’autres modes d’expression, complémentaires, qui mettent en jeu non pas la parole seule, mais le corps, au moyen du film, de la photographie et de la performance. Lors d’un weekend, samedi 2 et dimanche 3 février, le Louvre accueillera deux artistes dont les œuvres illustrent, chacune avec une démarche singulière, l’image de la femme dans les cultures de l’Islam. Samedi 2 février, Majida Khattari, peintre, photographe et plasticienne marocaine vivant à Paris, présentera son travail et proposera une performance mettant en scène ses fameuses robes/sculptures autour d’une réflexion sur le voile et le dévoilement du corps. Le lendemain, le Louvre accueillera Shirin Neshat, photographe et vidéaste iranienne qui vit à New York. A travers ses nombreuses réalisations, elle s’efforce de montrer une image de femmes orientales refusant toute forme de victimisation, et s’emploie, au contraire, à révéler l’obstination qui se cache derrière leur voile. Les créations tracent frontières et limites qui unissent et séparent deux mondes. Concerts de musique du monde de l’Islam Chants et danses du djem alévi 13 avril 2013 Par les communautés de Turhal et de Kayabelen (Turquie) Le chant du semah alévi 14 avril 2013 Par Armağan Elçi La tradition soufie alévie est née dans le nord de la Syrie, s’est répandue en Anatolie puis en Asie centrale. Un quart de la population turque revendique une ascendance et une culture alévies, mais seules quelques régions rurales ont préservé les assemblées mystiques djem. Hommes et femmes y célèbrent ensemble l’ascension du prophète, l’assemblée cosmique des Quarante, les douze imams, le martyre de Hussein à travers des litanies a cappella, des hymnes accompagnés au luth et des Semah, ces chants mystiques sur lesquels des couples dansent en tournoyant.

Page 42: DP Arts de l'Islam inauguration

42

Autour des collections Publications

Beau livre Les arts de l’Islam au musée du Louvre Sous la direction de Sophie Makariou Coédition musée du Louvre éditions/Hazan

Une sélection de plus de 400 œuvres installées dans les nouveaux espaces du département des Arts de l’Islam sont regroupées, suivant un fil chronologique et des thématiques que l'on retrouve d'un chapitre à l'autre : ornement, calligraphie, technique, villes, objets et architecture, commandes souveraines,… sans oublier un chapitre entier consacré à l'art du livre et aux miniatures. Chaque chapitre met également en valeur un florilège d’œuvres choisies parmi les plus somptueuses du musée. Une riche partie d'annexes conclut utilement cet ouvrage : un ensemble complet de cartes, un glossaire, un index, une bibliographie... Les auteurs attachés au département, sous la conduite de Sophie Makariou, directeur du département, font partager leurs connaissances avec le plus grand nombre, tandis que de magnifiques photographies illustrent ce livre de référence et de délectation.

Auteurs Sous la direction de Sophie Makariou Annabelle Collinet, Annie-Christine Daskalakis Mathews, Claire Déléry, Gwenaëlle Fellinger, Carine Juvin, Sophie Makariou, Charlotte Maury, Delphine Miroudot, Annick Neveux-Leclerc, Rocco Rante. Les architectes : Mario Bellini, Renaud Piérard, Rudy Ricciotti.

Cette publication bénéficie du soutien du Fonds Elahé Omidyar Mir-Djalali et du Cercle International du Louvre, avec la collaboration des American Friends of the Louvre. Avec le soutien d’Arjowiggins Graphic Livre Jeunesse L’Islam au Louvre De Rosène Declémenti, avec des illustrations de Louise Heugel Coédition musée du Louvre éditions/Actes Sud jeunesse

Qu’est-ce que l’Islam ? Le jeune lecteur peut se sentir perdu dans une vaste étendue, en terre aride, presque inconnue. Il voit quelques mirages se dessiner : les contes des Mille et Une Nuits, les croisades, l’Alhambra de Grenade, Tamerlan… Mais dans le désert, tout se mélange et se confond. Les chefs-d'œuvre du musée du Louvre disséminés dans cet ouvrage vont le guider sur les routes qui parcourent trois continents et onze siècles d’histoire. Avant nous, ces trésors ont fasciné voyageurs et collectionneurs. Ils font aujourd’hui partie de l’une des plus importantes collections au monde. Des doubles pages réservées à chaque époque marquante de l’Islam dévoilent les grandes étapes historiques et les symboles artistiques de l’Islam. Des chapitres transversaux consacrés, par exemple, à l’architecture ou à la peinture dans les manuscrits permettent d’établir des filiations artistiques entre des influences très diverses.

Communication et Presse Actes Sud Nathalie Giquel [email protected] / 01 55 42 63 05

48 pages, 22 x 28 cm, 100 illustrations Prix public : 8 € Dès 9 ans

576 pages, 440 illustrations, format 24,5 x 28,5 cm, relié cartonné Prix public : 39 € Versions en français et en anglais Versions numériques disponibles (en français et en anglais) sur l’Apple Store. Prix : 4,99 €

Page 43: DP Arts de l'Islam inauguration

43

Collection « Solo » Coédition musée du Louvre éditions/Somogy

La pyxide d’al-Mughira De Sophie Makariou En 1898, le musée du Louvre faisait entrer dans ses collections la magnifique boîte au nom d’al-Mughira. Ce joyau de l’art de l’ivoire du X

e siècle, chef-d’œuvre de la petite sculpture, fascine non seulement par sa beauté et son éblouissante virtuosité technique, mais aussi par la multiplicité des lectures qu’il suscite. Sophie Makariou nous livre ici la sienne, longuement méditée et imprégnée de sa patiente fréquentation des sources de la culture arabe d’Espagne, chroniques historiques et poèmes.

Le baptistère de Saint Louis De Sophie Makariou Le Baptistère de Saint Louis, probablement l’objet islamique le plus célèbre, est conservé depuis 1793 au musée du Louvre. Somptueux témoin de l’art du métal incrusté islamique, ce bassin est attribuable au domaine syro-égyptien, dominé par les sultans de la dynastie des Mamlouks (1250-1517).

Le porche mamlouk De Annie-Christine Daskalakis Mathews Au début du 3e millénaire, la redécouverte et le remontage titanesque de ce puzzle de cinq tonnes de pierres est un événement fondateur de l’ouverture du nouveau département des Arts de l’Islam. La passionnante enquête à laquelle nous convie Annie-Christine Daskalakis Mathews, historienne de l’art, fait également émerger des moments cruciaux de l’histoire du Caire au XIX

e siècle qui, sous un vent de travaux urbains et d’éventrements d’axes anciens, se transforme en un Paris oriental.

Les relevés de la mosquée de Damas De Loreline Simonis Depuis sa construction, la mosquée de Damas a subi de nombreuses destructions, laissant présager la disparition du magnifique décor de mosaïque qui ornait la totalité de ses murs. En 1893, lors d’un incendie, l’enduit qui couvrait les murs se fissura, faisant apparaître quelques tesselles de verre… Durant l’été 1928, huit cent soixante quinze mètres carrés de mosaïques furent ainsi mis au jour. Neuf relevés tombés dans l’oubli après la Seconde Guerre mondiale ont été retrouvés et restaurés. Ils sont pour la première fois présentés au Louvre. Album Sous la direction de Sophie Makariou, avec la collaboration de Marie Fradet et Frédéric Viaux Coédition musée du Louvre éditions/Hazan

L’ouvrage présente les arts de l’Islam à travers les œuvres majeures présentées dans les nouveaux espaces du Louvre. De nombreuses thématiques y sont abordées, des techniques aux ornements en passant par l’architecture et les miniatures. Les auteurs de ce digest du beau livre vous font partager leurs connaissances sur l’Islam et ses arts dans ce livre accessible à tous.

Prix public : 9,70 € 64 pages, 40 illustrations, 14 x 21 cm

64 pages, 50 illustrations, Broché Prix public : 10 € environ Versions en français et en anglais Versions numériques disponibles (en français et en anglais) sur l’Apple Store. Prix : 4,99 €

Page 44: DP Arts de l'Islam inauguration

44

« Eclats d’Islam : Le tapis de Cracovie » Une collection de Valéry Gaillard, direction artistique Eve Ramboz, 26 min, coproduction Arte / Les Films d’Ici / musée du Louvre

La bordure d’un tapis mal coupée ? Un alphabet qui ne veut rien dire ? Des lettres qui remplacent les images ? A chaque fois une œuvre ; une énigme ; un pan de civilisation. L’idée de cette série de films est venue d’une constatation toute simple : plus que n’importe quelle collection du musée, celle des Arts de l’Islam révèle une civilisation vaste, profonde et très largement méconnue. Et plus que n’importe quelle autre, elle est constituée en grande partie d’objets usuels, c'est-à-dire d’œuvres qui sont à la frontière du religieux et du profane, de l’histoire de l’art et de celle des civilisations, des peuples et de leurs mentalités. Chaque épisode aura pour principe la découverte d’un objet. Une thématique surgira d’une œuvre que l’épisode, à l’aide d’autres œuvres du musée, se chargera de questionner. Episode 1 « Le Tapis de Cracovie ou comment les chrétiens et les musulmans se sont partagés le paradis » « La main tendue » Réal. : Richard Copans, 52 min, coproduction Les Films d’Ici / musée du Louvre / Arte

Il y a comme un rêve de « jamais fini » qui s’attache à l’histoire du bâtiment du Louvre. Pas seulement dans les volontés d’agrandissement mais dans les fonctions elles-mêmes et la répartition des espaces. Le château est devenu un palais, le palais est devenu pour moitié un ministère et un musée, puis un musée, et le musée ne cesse de dévorer ses cours pour en faire des salles. C’est seulement dans cette grande histoire que l’on peut inscrire le projet de transformation de la cour Visconti en département des Arts de l’Islam.

« Les lumières de l’Islam » Réal. : Patrick Ladoucette, 52 min, coproduction Les Films d’Ici / musée du Louvre / France Télévision (France 5) « La part lumineuse de l’Islam » : c’est par cette formule qu’un ancien Président de la République avait défini l’enjeu du dernier grand chantier du musée du Louvre : la création d’un huitième département, celui des Arts de l’Islam. Autant dire que le rassemblement de deux collections majeures et le redéploiement des œuvres dans de nouveaux espaces se sont annoncés d’emblée comme un projet muséographique, esthétique, certes, mais avant tout comme un projet politique. La plupart des grandes collections du monde a fait peau neuve, se sont agrandies ou rénovées. Que nous montrent ces collections ? Elles nous montrent une civilisation audacieuse, principalement profane, tournée, sans aucun doute sur les plaisirs esthétiques. On y voit des enluminures représentant le

Autour des collections Les films du Louvre

Le Tapis de Cracovie, détail. Dépôt, musée des Arts Décoratifs, Paris © 2007 Musée du Louvre, dist. RMN / Etienne Revault

© 2011 Musée du Louvre, dist. RMN / Valérie Coudin

© 2011 Musée du Louvre, dist. RMN / Valérie Coudin

Diffusion mercredi 26 septembre 2012 à 22h20 sur Arte

Diffusion du premier épisode un dimanche de décembre 2012 sur Arte

Page 45: DP Arts de l'Islam inauguration

45

prophète Muhammad au XVIe siècle ; on y voit un respect infini porté

à la science et aux choses de l’esprit ; on y comprend, plus que tout, la circulation ininterrompue des hommes et des idées à travers le monde. Le film prendra donc appui sur cette aventure muséale pour voyager à travers une civilisation majeure et terriblement méconnue. Une civilisation profonde et raffinée, tolérante, curieuse et érudite. Lumineuse. DVD Coffret : Les arts de l’Islam au Louvre Coédition musée du Louvre / Arte Développement La mosquée d’Ispahan, collection Architectures (Réal. : Richard

Copans) La main tendue (Réal. : Richard Copans) Bonus : 10 programmes courts sur les moments forts de la création

du département. Sortie en exclusivité le mercredi 26 septembre dans les boutiques du musée du Louvre et sur arteboutique.com. Une minute au musée : les Arts de l'Islam Dessin animé de 40 épisodes de Franck Guillou Troisième saison de la série initiée par le musée du Louvre Nous retrouvons nos trois personnages à la langue bien pendue, Nabi, petit garçon espiègle, Mona pétillante et observatrice, et Raphaël jeune homme avide de connaissance, commentant et découvrant 40 œuvres du nouveau département des Arts de l'Islam du musée du Louvre. Une coproduction France 3, Les films de l'arlequin, Ma planète TV, Musée du Louvre Liste des épisodes :

Affrontement entre deux armées, Iran, Qazvin ou Ispahan, fin XVIe s.

Aiguière à tête de coq, Iran, 1er quart du XIIIe s.

Bassin dit « Baptistère de Saint Louis », Syrie, vers 1340. Corne à poudre, Inde, XVII

e s. Poignard à tête de cheval, Inde, XVII

e s. Faucon brûle parfum, Iran, Khurasan, XI

e / XIIe s.

Lion à queue articulée, Espagne, XIIe / XIII

e s. Lampe à huile zoomorphe, Iran, Khurasan, XII

e s. Coupe au cavalier fauconnier, Iran, XIII

e s. Plat à décor épigraphique, Iran, Khurasan ou Asie centrale

Transoxiane, XIe / XII

e s. Carreaux de revêtement représentant les merveilles du monde,

Iran, 2e moitié du XIXe s.

Panneau aux carreaux de revêtement, Turquie Iznik, 2e quart du XVI

e s. Livre des rois (Shahnâmeh) de Firdawsî : le roi Ardashir reconnaît

son fils Shâpur parmi les enfants jouant à la balle, Iran, Chiraz, 3e quart du XVI

e s. Aiguière signée Ibn Mawaliya, Iraq, Jezireh, Mossoul, fin XII

e /

Porche d’époque mamlouke en cours de remontage © Musée du Louvre/Valérie Coudin

Diffusion sur France 5 le dimanche 7 octobre à 8h25

Page 46: DP Arts de l'Islam inauguration

46

© Musée du Louvre/Les films de l’Arlequin

début XIIIe s.

Feuillet d'un livre des rois (Shahnameh) : réception princière, Iran, 2e moitié du XVI

e s. Sphère céleste, Iran, 1ère moitié du XIV

e s. Livre des présages (Fâhnâmeh) : L'imam Reza pourfend un

démon, Iran, Tabriz ou Qazvin, milieu XVIe s.

Bouclier, Inde, fin XVIIIe ou début XIX

e s. Panneau en moucharabieh, Égypte, XVI

e / XVIIe s.

Rondeau de revêtement au combat d'animaux, Iran, fin XVIe /

début XVIIe s.

Chandelier aux canards, Iran occidental ou Khurasan, XIIe / XIII

e s. Miroir à manche, Inde, XVIII

e s. Plat à la touffe de tulipes et d’œillets, Turquie "Iznik", 3e / 4e quart

du XVIe s.

Portrait du souverain Nasir al din Shâh, Iran, 3e quart du XIXe s.

Bague d’archer, Turquie, 2e moitié du XVIe s.

Bracelet, Iran (Khurasan ?), Inde (Sultanat) Pyxide au nom du prince al-Mughira, Espagne, Cordoue, Madinat

al-Zahra, 3e quart du Xe s. Hache de selle, Inde, XVIII

e s. Albarello à décor de palmettes, Égypte ou Syrie, XIV

e / XVe s.

Homme trayant une bufflesse, Syrie, Raqqa, fin XIIe / début XIII

e s. Tympan à décor végétal et épigraphique, Anatolie, XIII

e s. Sabre et son fourreau, Inde du Nord, XVII

e / XVIIIe s.

Suaire de Saint Josse, Iran, 2e moitié du IXe s. Prisonnier turkmène, Iran, 2e moitié du XVI

e s. Vantail de porte provenant de la Mosquée al-Maridani, Égypte,

XIVe s.

Gobelet aux sphinx et aux musiciens, Iran, fin XIIe / début XIII

e s. Deux plats de reliure, Iran, XVI

e s. Plateau à décor astrologique, Iran, Khurasan, fin XII

e / début XIIIe s.

Chope, Turquie, fin XVe s.

Paon aquamanile, Espagne, XIIe s.

DVD : Une minute au musée : les arts de l’Islam. Réal. : Franck Guillou Coproduction France 3, Les films de l’arlequin, Ma planète TV, le musée du Louvre. Coédition Doriane Films / musée du Louvre. En vente en librairie

Disponible à l’ouverture du département des Arts de l’Islam

Page 47: DP Arts de l'Islam inauguration

47

Informations pratiques

Tarifs d’entrée au musée du Louvre Billet collections permanentes : 11 euros Gratuit pour les moins de 18 ans, les moins de 26 ans résidents de l’U.E., les enseignants titulaires du pass éducation, les demandeurs d’emploi, les titulaires de cartes adhérents, ainsi que le premier dimanche du mois pour tous. Billet valable le jour même pour le musée du Louvre (excepté les expositions du hall Napoléon) et le musée Eugène-Delacroix.

Horaires du musée du Louvre Ouvert tous les jours de 9h à 18h, sauf le mardi et le 1er janvier (fermeture des salles à partir de 17h30). Nocturnes jusqu'à 21h45 les mercredi et vendredi (fermeture des salles à partir de 21h30). Accès Pyramide et galerie du Carrousel : ouvert tous les jours sauf le mardi, de 9h à 19h30 et jusqu'à 22h le mercredi et le vendredi. Passage Richelieu : ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9h à 17h30 et jusqu’à 18h30 le mercredi et le vendredi.

Les adhérents du musée du Louvre bénéficient d’un accès prioritaire et illimité aux collections permanentes. Les visiteurs handicapés ou à mobilité réduite bénéficient d'un accès prioritaire à l'entrée de la Pyramide. Visiteurs munis de billets et de Paris Museum Pass : accès par une file réservée à l'entrée de la pyramide. Comment venir? En métro : lignes 1 et 7, station Palais-Royal/musée du Louvre En bus : bus n° 21, 24, 27, 39, 48, 68, 69, 72, 81, 95 Stations Velib’ à proximité du musée : n°1023 (165 rue Saint-Honoré), n°1014 (5 rue de l’Echelle), n°1013 (186 rue Saint-Honoré). En voiture : un parc de stationnement souterrain est accessible par l'avenue du général Lemonier, tous les jours de 7h00 à 23h00. Renseignements Tél. 01 40 20 53 17 - www.louvre.fr