DP Les Caprices de Marianne

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  • Dossier Pdagogique 2014/2015

    LES CAPRICESDE MARIANNE

  • Vendredi 5 dcembre - 20hDimanche 7 dcembre - 16h

    Dure : 2h30

    OPRA-COMIQUE EN 2 ACTES Musique de Henri SauguetLivret de Jean-Pierre Grdy

    Cration au Festival dAix-en-Provence le 20 juillet 1954Prsent en franais, surtitr en franais

    Direction musicale Gwennol RufetMise en scne Oriol Tomas

    Dcors Patricia RuelCostumes Laurence Mongeau

    Lumires tienne Bouchertudes musicales Mathieu Pordoy

    AVECMarianne Aurlie Fargues

    Hermia Julie Robard-GendreOctave Marc ScoffoniCoelio Cyrille DuboisClaudio Thomas Dear

    Tibia Carl GhazarossianLAubergiste Xin Wang

    Le Chanteur de srnade Tiago MatosLa Dugne Jean-Vincent Blot

    ORCHESTRE DE LOPRA DE MASSY

    COPRODUCTION CENTRE FRANAIS DE PROMOTION LYRIQUE / OPRA DE MARSEILLE OPRA GRAND AVIGNON / OPRA NATIONAL DE BORDEAUX / OPRA-THTRE DE LIMOGES

    OPRA DE MASSY / OPRA-THTRE METZ-MTROPOLEOPRA ORCHESTRE NATIONAL DE MONTPELLIER LANGUEDOC-ROUSSILLON

    OPRA DE NICE / OPRA DE REIMS / OPRA DE RENNES / OPRA DE ROUEN HAUTE-NORMANDIEOPRA THTRE DE SAINT-TIENNE / THTRE DU CAPITOLE

    GRAND THTRE DE TOURS / OPRA DE VICHY / AVANT-SCNE OPRA (SUISSE)

  • SOMMAIRE

    4 _ Le compositeur

    6 _ En savoir plus

    20 _ Largument

    21- La production

    22 _ En savoir plus sur la voix...

    23 _ Les instruments dorchestre

    27 _ Laction culturelle

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  • 4Ses dates : 1901-1989Sa vie de compositeur : Ds l'ge de cinq ans, il reoit desa mre, lisabeth Sauguet, dont il adoptera le nom dejeune fille comme pseudonyme, et de Marie Bordier sespremires leons de piano. Puis, il suit les cours de Melle

    Loureau de la Pagesse, organiste de chur de l'gliseSainte-Eulalie de Bordeaux, sa paroisse. La musiqued'glise et plus spcialement l'orgue ont sans aucundoute marqu profondment sa jeunesse. En effet, il at lve d'orgue de Paul Combes et a occup le posted'organiste de l'glise Saint-Vincent de Floirac de 1916 1922. L'orgue ! Le rve de ma jeune existence crit-il dans son ouvrage autobiographique, La Musique, ma vie.Autre influence dcisive, celle de Claude Debussy dontl'uvre l'enthousiasme. L'anecdote souvent raconteveut que la seule lettre qu'il se dcida lui crire parvntau compositeur le jour de sa mort, le 23 mars 1918.La mobilisation de son pre en 1915 l'oblige s'occuperde la mercerie familiale ; il est l'an, son frre est tropjeune et sa mre trop inquite dlaisse la responsabilitde leur commerce. Une fois son pre revenu aprs avoirt bless, Henri devient employ la Prfecture deMontauban en 1919-1920. Il se lie d'amiti avec JosephCanteloube qui lui enseigne la composition (Canteloubeest clbre, par ailleurs, pour avoir recueilli - collect - etharmonis un certains nombre de chants traditionnelsauvergnats, qu'il a runis sous le titre de Chants d'Au-vergne).Revenu Bordeaux, Sauguet fonde le groupe des Trois avec Louis mi et Jean-Marcel Lizotte dans le but de

    HENRI SAUGUET (1901-1989)

    LE COMPOSITEUR

    GAETANO DONIZETTI

    faire entendre la musique la plus rcente et libre de touteinfluence. Leur premier concert a lieu le 12 dcembre1920 avec des partitions du groupe des Six (ArthurHonegger, Francis Poulenc, Darius Milhaud, GeorgesAuric, Louis Durey, Germaine Tailleferre), d'Erik Satie etdu groupe des Trois avec comme uvre de Sauguetsa Danse ngre et sa Pastorale pour piano.Ds octobre 1921, il se fixe Paris pour complter saformation musicale avec Charles Koechlin et travaillecomme secrtaire du Muse Guimet tout en reprsen-tant une maison d'huiles de graissage.En 1923, il fonde avec trois autres jeunes musiciens(Henri Cliquet-Pleyel, Roger Dsormire et MaximeJacob) l'cole d'Arcueil par amiti pour Erik Satie qui de-meurait dans cette commune et, le 25 octobre 1923,prsentent au Thtre des Champs-lyses leur premierconcert.La carrire parisienne individuelle de Sauguet dmarreen 1924 par le ballet Les Roses crit la demande ducomte tienne de Beaumont et continue avec un opra-bouffe en un acte intitul Le Plumet du colonel. Il intgreles cercles de la musique nouvelle et collabore, notam-ment, avec des hommes de thtre comme Charles Dul-lin (Irma en 1926) et Louis Jouvet (Ondine en 1939, LaFolle de Chaillot en 1945). Il s'impose avec des opras-bouffes (La Contrebasse en 1930), des opras et op-ras-comiques (La Chartreuse de Parme en 1939, LaGageure imprvue en 1942, Les Caprices de Marianned'aprs Musset en 1954), quatre symphonies dont laSymphonie expiatoire (1947) la mmoire des victimesde la Seconde Guerre mondiale, deux concertos pourpiano, deux concertos pour violon, une Mlodie concer-tante pour violoncelle et orchestre en 1964, de la musiquede chambre (Quatuor cordes pour deux violons, alto etvioloncelle, 1948), la suite symphonique Tableaux deParis (1950).Il travaille aussi activement entre 1933 et 1965 pour lecinma et la tlvision : L'pervier (1933) et L'HonorableCatherine (1942) de Marcel L'Herbier , Premier de corde(1944) de Louis Daquin, Les amoureux sont seuls aumonde (1948) d'Henri Decoin, Clochemerle de PierreChenal (1948), Don Juan (1956) de John Berry, Lorsquel'enfant parat (1956) de Michel Boisrond, etc.Enfin, il compose vingt-sept ballets entre 1924 et 1965,dont La Chatte (1927), La Nuit (1929), Mirages (1943),La Dame aux camlias (1957) et Pris (1964). Les Fo-rains, cr le 2 mars 1945 au Thtre des Champs-ly-ses sur un argument de Boris Kochno, connat un succsimmdiat et lance son jeune chorgraphe, Roland Petit.Henri Sauguet disait de son art : tre simple en usant

  • 5d'un langage complexe n'est pas facile. Il faut couter leconseil de Rameau qui prescrivait de cacher l'art par l'artmme et croire avec Stendhal que seules les mes vani-teuses et froides confondent le compliqu, le difficileavec le beau. Il a t lu l'Acadmie des beaux-arts en 1976, Officierde la Lgion d'honneur, officier dans l'ordre national duMrite et commandeur dans l'ordre des Arts et des Let-tres, il a prsid durant de nombreuses annes la So-cit des auteurs et compositeurs dramatiques etl'association Una Voce.Henri Sauguet a t le compagnon du peintre et scno-graphe Jacques Dupont jusqu' la mort de celui-ci. Ilssont inhums dans la mme spulture au cimetire deMontmartre.

    Ses dates :1927 : La chatte, ballet

    1939 : La chartreuse de Parme, opra

    1940-1945 : Symphonie n1

    1945 : Les forains, ballet

    1946 : Farrebique, film de Georges Rouquier

    1948 : Clochemerle, film de Pierre Chenal

    1953-1954 : Les caprices de Marianne, opra

    1971 : Symphonie n4

    Lorsque Sauguet compose les Caprices de Mariannedaprs luvre de Musset, il est dans sa pleine maturitcratrice, ayant peine dpass la cinquantaine. Son immense talent est reconnu et il peut se prvaloirdun catalogue trs vari qui aborde peu prs tous les genres, de lopra la symphonie, en passant par la mu-sique de chambre. Il sillustre galement avec bonheur dans le domaine dela mlodie, du ballet et de la musique de film. Sur un livret de Jean-Pierre Grdy, Sauguet fait preuvedune inventivit tonnante ; il excelle crer des climatsspcifiques, passant de lombre la lumire, de la trag-die la farce, parsemant sa partition de trouvailles inat-tendues qui sont autant dagrables surprises pour lespectateur. Cest un ouvrage de trs grande qualit, qui ne recherchepas linnovation tout prix, mais qui sinscrit dans lacontinuit de lhistoire de lopra-comique franais.Sauguet est, au dpart, un autodidacte dont la vocationfut contrarie par son entourage (son pre notamment)et par les circonstances (la premire guerre mondiale).Cest en 1921 - Sauguet est alors g de 21 ans - que lepetit provincial peut monter Paris pour y recevoirlenseignement de Charles Koechlin. Les modles de Sauguet sont principalement Debussy,dont il fut un admirateur inconditionnel, et Satie, qui eutune influence indiscutable sur son esthtique. Sans ja-mais plagier ses illustres prdcesseurs, il en retient les-prit et forge son propre langage, trs personnel, dontlapparente facilit cache un discours musical trs labor.Crateur fcond, inventif, personnalit lintelligencevive et exceptionnelle, son style se caractrise par unlangage harmonique chatoyant, fond sur une polyto-

    UN MUSICIEN DANS SON SICLEPAR CLAUDE SCHNITZLER (DIRECTEUR MUSICAL DU PROJET)

    -nalit raffine, une rythmique complexe, avec des car-rures irrgulires souvent surprenantes, une connais-sance parfaite des voix solistes quil pousse leurs limitesextrmes sans jamais aller au-del du possible; par unescience de lorchestration aussi, faite dune alchimie destimbres absolument exemplaire.A la cration au Festival dAix-en-Provence, en 1954, LesCaprices de Marianne connut un accueil quelque peu r-serv. Cest sans doute que louvrage arrivait un mo-ment peu opportun, alors que survenait un changementdesthtique radical parmi la gnration des composi-teurs franais daprs-guerre. Pour un public tradition-nel, lopra de Sauguet a alors pu sembler tropmoderne, tout en tant jug acadmique parlavant-garde dalors.Mme si Les Caprices de Marianne ont t donns assezrgulirement (Tours, Compigne, Saint-Cr) louvrageest toujours considr comme une raret. A nen pasdouter, la prsente production sera une dcouverte pourbeaucoup, une redcouverte pour les autres. Puissent ces reprsentations inciter un vaste public ex-plorer davantage luvre de Henri Sauguet, compositeurpassionnant et incontournable du sicle prcdent.

  • 6LES PISTES DETUDES- Lorigine du livret : la pice dAlfred de Musset- Alfred de Musset- Henri Sauguet et la musique lyrique- Un air de musique franaise- Que sest-il pass en 1954?

    EN SAVOIR PLUS . . .

    Alfred de Musset appartient au courant romantique. Enlittrature, il concerne aussi bien la posie, que le romanou le thtre.Ce mouvement culturel est apparu la fin XVIIIe sicleet sest diffus jusquaux annes 1850. Il se caractrisepar une volont d'explorer toutes les possibilits de l'artafin d'exprimer ses tats d'me : il est ainsi une ractiondu sentiment contre la raison, exaltant le mystre et lefantastique et cherchant l'vasion et le ravissement dansle rve, le morbide et le sublime, l'exotisme et le pass.

    Luvre thtrale de Musset ne se base pas sur ce quifaisait la base du thtre classique, c'est--dire qu'il re-jette, entre autres, la rgle des trois units (lieu, mo-ment, action) et la distinction absolue entre tragdie etcomdie. Son uvre Les Caprices de Marianne est undrame romantique. Elle nest pas une pice en vers,comme la tragdie.

    Les personnages sont confronts l'amour malheureux, des ralits difficiles qui les poussent, pour certainsd'entre eux, l'ivresse ou au dsespoir.

    Le moi sexprime la premire personne. Cela donneune dimension plus personnelle au rcit, car on privilgieainsi lindividu. Ainsi, le pote fait part de ce quil ressent(espoirs dceptions) et de certaines de ses exp-riences passes, souvent malheureuses. Nous observonsainsi un lyrisme personnel qui est visible dans : les inter-rogations sur une identit perturbe, lvocation dutemps et lexpression dune perptuelle insatisfaction quitraduit en fait le mal de vivre ou mal du sicle

    LORIGINE DU LIVRET : LA PICE DALFRED DE MUSSETLe thme de la mort est prsent.

    Les actions sont nombreuses.

    On y trouve de la drision, des plaintes, des larmes. Lesregistres opposs du tragique, du pathtique et du co-mique, ainsi que le lyrique, sont ainsi troitement associs.

    C'est une pice qui montre jusqu'o peut aller l'amour,surtout quand il est contrari, Elle tend montrer la pas-sion l'uvre.

  • 7BIOGRAPHIE[source : www. eternels-eclairs.fr]

    Alfred de Musset est n le 11 dcembre 1810 Parisdans une famille trs cultive et aimante. Il entre au col-lge Henri IV 9 ans. Jusqu'en 1829, il tudie la mde-cine, le droit et la peinture, puis abandonne par amourpour la littrature. Il frquente alors le Cnacle et se lied'amiti avec Sainte-Beuve et Vigny, tout en gardant sesdistances avec Victor Hugo. Sulfureux, dou pour la lit-trature et au temprament de dandy, sa rputation sefait travers Paris. Mais dvast par le dcs de son preen 1832, il se rfugie dans le thtre, et aprs un checretentissant, partira en Italie en novembre 1833. Cevoyage lui inspire Lorenzaccio en 1834 et cette mmeanne, il crit et publie galement d'autres ouvrages. LesNuits, chef d'uvre lyrique du romantisme franais quifait suite sa rupture dfinitive avec George Sand, seraachev en 1837. Le reste de sa vie, de nombreusesfemmes se succderont. Le 24 avril 1845 Musset estnomm chevalier de la Lgion d'honneur aux cts deBalzac et sept ans plus tard il intgre l'Acadmie fran-aise. Devenu alcoolique, sa sant est de plus en plus fra-gile, et bout de forces, il dcde le 2 mai 1857.

    ALFRED DE MUSSET

    ALFRED DE MUSSET

    LE DRAME DE MUSSET[source : Lagarde et Michard, XIXe sicle]

    De 1832 1835, avant de se placer lui-mme, avec savie et ses souffrance, au cur de son uvre lyrique,Musset sest surtout exprim indirectement, par leshros de ses pomes et de son thtre. Nous le retrou-vons, fantaisie et tendresse, dans le personnage dHas-san (Namouna, 1832); puis, ddoubl sous les traits deCoelio, mlancolique et pur, et dOctave, spirituel et li-bertin, dans Les caprices de Marianne (1833); puis tour tour fantaissite et rveur sous le masque de Fantasio(1834). La confidence de Musset devient plus poignanteencore quand la dualit de sa nature aboutit au conflitaigu entre la dbauche et la puret. Ds la Coupe et Leslvres (1832), Franck, le hros du drame, garde la nos-talgie dune purte irrmdiablement perdue. Dans Na-mouna, lauteur trahit son propre dsarroi lorsquilinterprte linconstance de Don Juan comme la marquedun insatiable apptit didal et de perfection. En ralitle pote est tortur par le sentiment que la dbauchenest une maladie qui altre la fracheur de lme et laisselhomme dsempar.

  • PAR ALAIN SURRENS, DIRECTEUR DE LOPRA DE RENNES

    La cration, en juillet 1954, des Caprices de Marianne aufestival dAix-en-Provence, festival encore jeune puisquilavait t cr six ans plus tt, fut la dernire des cra-tions pour la scne lyrique dHenri Sauguet, alors g decinquante-trois ans. Achev vingt ans plus tard, son ul-time opra, Le pain dautrui, daprs une nouvelle deTourgueniev, nallait pas trouver preneur et ne fut jamaiscr. Jusqu sa mort en 1989, Henri Sauguet devait res-ter une personnalit minente de la vie musicale fran-aise. Il allait encore composer plusieurs musiques deballet, son genre de prdilection, quelques musiques defilms aussi car il appartenait la gnration de ces com-positeurs qui considraient que ce domaine de la mu-sique de fonction ne devait pas tre abandonn desspcialistes. Mais, pour le grand orchestre, il ne devaitplus signer que deux pages concertantes et en 1971 unequatrime et dernire symphonie, ironiquement sous-ti-tre Du troisime ge . Le temps dHenri Sauguettait pass. Avec le recul, Les Caprices de Marianne ap-partiennent, ct des trois premires symphonies et destonnantes Visions infernales, cycle de mlodies sur despomes de Max Jacob, ce quon peut considrer commelapoge de sa carrire et de son uvre, la grande florai-son de la dcennie 1945-1955. .

    Bientt ce provincial devenu parisien en diable, ce gour-mand de bons mots, ce personnage insincre et caus-tique par ncessit, deviendrait un artiste bless, meurtripar lincomprhension de ses cadets et dun public toutacquis de nouvelles modernits. A linstar dautrescrateurs de sa gnration, il joua malheureusement le

    LES CAPRICES DE MARIANNE DE SAUGUET, UNE UVRE ROMANTIQUE ET MODERNE

    HENRI SAUGUET

    jeu de ses agresseurs et ne se regarda plus lui-mme quecomme un homme du pass. trange syndrome deStockholm chez un artiste qui est ravi son statut de d-couvreur alors quil a t et reste un esprit vraiment mo-derne. Pourquoi fallait-il quil acceptt le point de vue deceux qui le jetaient vivant aux oubliettes de lhistoire mu-sicale ? Naurait-il pu, comme un Chostakovitch danslintolrante Russie communiste ou un Britten dans lAn-gleterre post-victorienne, revendiquer tranquillement sa modernit, loigne de tout dogme, de tout pros-lytisme ?

    Il est vrai que la France, pays o lon sait si bien, commele disait joliment Henri Dutilleux, profiter du levain deltranger , est aussi un pays o lon a tent souventdimposer un modle tranger bouffon puis piccinisteau XVIIIe sicle, wagnrien au sicle suivant et srielaprs le second conflit mondial. Face la victoire de laseconde cole de Vienne, il ne restait plus Henri Sau-guet que la voie dun nationalisme un peu troit, celuiquil dfend et illustre en 1985, au soir de sa vie, dansune confrence prononce devant ses collgues de lIns-titut de France et intitule Difficult dtre de la mu-sique franaise . Pourtant le compositeur des Capricesde Marianne ne saurait se rduire sa gnalogie jalon-ne, depuis Josquin des Prs jusqu Debussy, de matresdans lesquels il se reconnaissait. Tout comme son ami etattentif an Darius Milhaud, auquel il avait succd dixans plus tt lAcadmie des Beaux-Arts, Henri Sauguetne fut ni lillustrateur dune tradition ni vraiment unchampion de la prtendue clart franaise.

    Ce quil avait appris de ses matres, Erik Satie et CharlesKoechlin, lentranait dailleurs dans le sens oppos. Lepremier lui donnait lexemple dun asctisme extrme,dune simplicit qui pouvait faire natre des partitions la fois provocantes et irrsistibles. Le second, ct deses excellents conseils dorchestration, lui apportait unethique de loriginalit, une traduction en musique du connais-toi toi-mme , qui allait permettre Henri Sau-guet de ntre jamais un autre, en effet, et de ne jamaisfuir la complexit si elle devait tre la meilleure inter-prte de son inspiration.

    Les Caprices de Marianne sont le fruit mature dun lan-gage musical bien plus divers et profus que le composi-teur ne lavouait lui-mme. Ce quHenri Sauguet aimedans le romantisme, ce sont les innombrables lignes defuite quouvrent les personnages et leur confrontation,et bien sr la relation quils entretiennent avec leur en-vironnement naturel et social. Toute la partition opposemais aussi juxtapose des sentiments, des dialogues, dessituations, des impressions, des caractres dont chacunest dpeint musicalement avec une grande acuit. Les

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  • quatre protagonistes principaux sont eux-mmescontradictoires, changeants ; ils voluent tout au longde luvre avec cette subtilit quAlfred de Musset avaitapprise de Marivaux et qui donne son thtre unesplendide unit.

    Car cette fois, Henri Sauguet na pas adapt un romancomme il lavait fait avec La Chartreuse de Parme deStendhal. Cest une pice de thtre quil a choisie Silest un homme de musique, Henri Sauguet est aussi,presque galit, un homme de la scne. Il aime la danseet cest Serge Diaghilev avec La Chatte, Serge Lifardans Mirages, Roland Petit avec Les Forains, quil devrases plus grands succs. Mais cet homme qui na nulle for-mation de comdien est surtout fou de thtre. Il com-pose des musiques pour Charles Dullin, Louis Jouvet,Jean-Louis Barrault, Jacques Charon, et se fait mettre enscne par Marcel Herrand en Madame Pernelle du Tar-tuffe. Car le travestissement lamuse : Aix-en-Provence,le compositeur de luvre en cration au soir du 27 juillet1954 ne sera pas dans la salle mais sur le plateau, jouant lerle muet dun mendiant qui accueille Marianne la portede lglise !

    La russite des Caprices de Marianne doit beaucoup aulibrettiste que sest choisi le compositeur pour adapterle texte de Musset. Ce librettiste, cest Jean-Pierre Grdy,qui associ Pierre Barillet durant prs de quarante ans,allait offrir Jacqueline Maillan et Sophie Desmaretsleurs plus grands succs (Folle Amanda, Potiche, Fleurde cactus, Peau de vache) sur les boulevards et dans lesthtres de la France entire. Il tait alors un jeune au-teur il a aujourdhui quatre-vingt-seize ans , enthou-siasm par la tche dlicate que reprsentait uneadaptation passant par le remplacement de certains per-sonnages secondaires au profit dautres, entirementnouveaux et plus en rapport avec les ncessits de lex-pression musicale. Il sagissait en outre de rduire letexte de certains monologues ou dialogues mais aussiden ajouter, par endroits, pour que puissent se dployerdes sous-entendus musicaux ou des superpositions delignes vocales. Ainsi tait constitu un livret sur mesure grce auquel lequel le compositeur allait pouvoir ren-dre perceptibles toutes les facettes de ses personnages,toute la complexit de leurs relations, et des atmo-sphres qui ntaient que fugitives dans la pice de Mus-set. Mais cette subtilit, cette profusion de dtails, sontadmirablement quilibres par lunit du propos, unitsurtout dans la dclamation, qui ralise une synthsehardie de lair et du rcitatif, fusionnant le plus souventdans un arioso souple et expressif qui rend le texte par-faitement comprhensible. Lorchestre, de taille trs rai-sonnable, est voulu lui aussi expressif et limpide. Il esttravers de motifs mlodiques et rythmiques qui rpon-dent ceux des lignes de chant, les accords sont le plussouvent ars afin de rendre le discours intelligible, et lestimbres conservent toujours une remarquable transpa-rence. Tout est fait pour fluidifier cette conversation mu-sicale nuance quavait recherche Henri Sauguet et quila parfaitement russie.

    Soixante ans aprs sa cration, la partition des Capricesde Marianne reste le pome dun jaillissement lyriqueininterrompu que saluait Marcel Schneider aprs la re-prise Paris de mai 1956. Cest trs sincrementquHenri Sauguet refusait de se comparer RichardStrauss dont il admirait le gnie. La comparaison nestpourtant pas hors de propos tant, chez Sauguet, le m-lange de naturel et de sophistication tient ses promessesdun dbut lautre de la partition. Mais il faut plutttendre loreille du ct de la langue franaise pour mieuxconstater combien est originale la solution trouve parHenri Sauguet au beau milieu de cette ligne qui part deClaude Debussy et se poursuit aujourdhui du ct des trois Philippe (Hersant, Fnelon, Manoury, auquel onpeut dsormais ajouter Hurel), aprs tre passe parMaurice Ravel, Francis Poulenc, Darius Milhaud, ArthurHonegger et Olivier Messiaen. Une solution qui est sur-tout louer dans sa relation avec ltrange et belle co-mdie dAlfred de Musset dont elle est une transpositionmusicale aussi imaginative que fidle, aussi moderne queromantique desprit.

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  • ARTICLE TIR DE HENRI SAUGUET, LHOMME ET LUVRE, 1983

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  • CLASSICA RPERTOIRE, JUILLET/AOT 2005

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  • 21 JANVIER : LANCEMENT DU PREMIER SOUS-MARINNUCLAIREL'USS "Nautilus" sort des chantiers navals de Crotondans le Connecticut. Long de 91 mtres et pesant plusde 3 000 tonnes, le "Nautilus" est le premier btiment propulsion nuclaire au monde. Il est baptis ainsi enhommage Jules Vernes et au sous-marin du CapitaineNemo dans "Vingt mille lieues sous les mers". Il entreraofficiellement en fonction partir du mois de septem-bre. Le "Nautilus" est capable de rester plusieurs se-maines immerg et de parcourir ainsi 140 000kilomtres. En aot 1958, il sera le premier btiment naviguer sous la calotte glacire du ple Nord.

    1ER FVRIER : HIVER 54, LAPPEL DE LABB PIERREHenri Grous, plus connu sous le nom de l'abb Pierre,lance un cri d'alarme contre la misre, sur Radio Luxem-bourg (RTL). Cet appel "linsurrection de bont" inter-vient juste aprs le dcs dune femme, morte de froiddans la rue. Cette anne-l, lhiver est particulirementrigoureux et sapprte faire dautres victimes. Le fon-dateur dEmmas incite tous les Franais recueillir lessans-logis chez eux, donner des couvertures, de lanourriture et du temps afin de sauver la vie de dizainede milliers de personnes. Lappel est entendu et la Franceassiste lun des plus grands lans de gnrosit de sonhistoire. Le mouvement aboutira au vote dune loi inter-disant lexpulsion des locataires en hiver. Quant Em-mas, lassociation prendra de plus en plus dampleur etstendra sur le monde entier.

    QUE SEST-IL PASS EN 1954?

    LABB PIERRE

    15 FVRIER : BORIS VIAN CRIT LA CHANSON LE D-SERTEUR, chante en mai par Mouloudji, elle est aussittinterdite la radio.

    15 MARS : PUBLICATION DE BONJOUR TRISTESSE DEFRANOISE SAGAN, .

    ELVIS PRESLEY

    6 JUIN : CRATION DE L'EUROVISIONL'Union europenne de radiodiffusion et de tlvision(UER), organisme groupant les pays de l'Europe occi-dentale, est fonde. Elle est charge de coordonner leschanges de programmes de radio et de tlvision entreles pays membres. Son centre administratif est situ Genve et son centre technique Bruxelles. L'expression"Eurovision" lance par un journaliste anglais ne tarderapas s'imposer.

    5 JUILLET : ELVIS ENREGISTRE SON PREMIER TUBEA 19 ans, Elvis Aaron Presley enregistre pour l'anniver-saire de sa mre la chanson "That's all right, Mama" dansle petit studio Sun de Memphis. Le titre est une reprisedu chanteur de Rhythm and Blues Arthur Crudup. Elvisqui exerce le mtier de camionneur et chante dans lachorale de l'glise que frquente ses parents, est remar-qu lors de l'enregistrement par le producteur et pro-pritaire du studio, Sam Phillips. Il lui fera chanterpendant un an le rpertoire rock'n roll, de "Blue moonof Kentucky" "Good rocking tonight". La carrire d'El-vis est lance.

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  • 1ER DCEMBRE : PRIX NOBEL DE LITTRATURE POURHEMINGWAYLe prix Nobel est attribu Ernest Hemingway et vientainsi rcompenser luvre la plus reprsentative de la Lost Generation de lentre-deux-guerres. Personnage la vie aventureuse, il est notamment lauteur de Pourqui sonne le glas qui voque son exprience lors de laguerre civile en Espagne.

    2 DCEMBRE : EDGAR VARSE PRSENTE DSERTSEdgar Varse prsente Paris son uvre intitule "D-serts". En plus des quinze instruments auxquels elle sedestine, sa composition sappuie sur les percussions etsur lutilisation de bande magntique. Les critiques et lesspectateurs sont littralement scandaliss.

    6 DCEMBRE : SIMONE DE BEAUVOIR REMPORTE LEPRIX GONCOURT POUR SON ROMAN LES MANDA-RINS. Elle y met en scne un groupe d'intellectuels pari-siens qui confrontent leurs rflexions sur une socitaffecte par la Seconde guerre mondiale et la guerrefroide.

    21 JUILLET : FIN DE LA GUERRE D'INDOCHINEOuverte le 26 avril, la Confrence de Genve rassembleles reprsentants de 19 puissances, dont la France, lesEtats-Unis, lAngleterre, lURSS, la Chine, la Core et leVit-Nam. Elle se clt avec la signature daccords met-tant un terme la guerre dIndochine. Outre le cessez-le-feu au Vit-Nam adopt sous limpulsion de MendsFrance, ces accords divisent le pays en deux tats, avecune frontire fixe au 17e parallle. Par ailleurs, ils re-connaissent lindpendance totale du Laos et du Cam-bodge. Les Franais doivent se retirer dIndochine.

    30 OCTOBRE : SORTIE AU CINMA DE CARMEN JONES,film dOtto Preminger, interprt uniquement par desnoirs.

    3 NOVEMBRE : SORTIE AU JAPON DU PREMIER FILM DEGODZILLA.

    DES CENTAINES DE MILLIERS DE RFUGIS FUIENT LE NORDVIT NAM, APRS LA VICTOIRE DU VIT MINH, COMME ICI HAPHONG EN AOT 1954

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  • LES PERSONNAGES

    __ Marianne, trs jeune femme / soprano__ Hermia, mre de Coelio / mezzo-soprano__ Octave / baryton__ Coelio, fils dHermia / tnor__ Claudio, mari de Marianne, juge / basse__ Tibia, valet de Claudio / tnor__ Laubergiste / tnor__ Le chanteur de srnade / baryton

    LES CAPRICES DE MARIANNE, SCNE APRS SCNE

    LARGUMENT PAR ALAIN SURRANS, DIRECTEUR DE LOPRA DE RENNES

    PROJET DE MAQUETTE

    LHISTOIRE

    Marianne, une jeune Napolitaine de dixneuf ans que samre a marie un vieux juge, na dautre distractionque de se rendre lglise plusieurs fois par jour. En che-min, elle rencontre son cousin Octave qui, auprs delle,plaide la cause de son ami Coelio, trop timide pour d-clarer son amour. Elle commence par le rabrouer puis,par un revirement qui est un caprice, accepte dentrou-vrir sa porte un amant. Mais lequel ?

    ACTE 1SCNE 1 - Pas douverture orchestrale cet opra dont lapremire scne est nanmoins une manire de prlude.Jean-Pierre Grdy et Henri Sauguet inventent un person-nage qui nexistait pas dans la comdie dAlfred de Mus-set. Ce chanteur de srnades joue un rle analogue celui du chur antique et nous conduit droit la ques-tion des caprices : Marianne souvrira-t-elle lamour ? Vous aurez vcu si vous avez aim. La vie est un som-meil, lamour en est le rve. Mais il y a du sarcasmedans son adresse la jeune femme. Les pizzicati descordes, la clarinette, la flte, quelques touches de cuivressoulignent cette ironie qui est un ressort essentiel delouvrage. Autre dimension importante dj prsentedans cette scne introductive : latmosphre, suggrepar la musique plus encore que par le texte, celle duneville du Sud sous le soleil dt. Nous sommes Napleset le dcor ne sera pas de simple fantaisie comme il peutltre dans la pice de Musset.

    SCNE 2 Un appel de cuivres annonce lentre de Clau-dio, lpoux de Marianne. La touche ironique de la scneprcdente bascule dans le comique. Un comique de r-ptition dans le dialogue entre le matre et son valetTibia, la basse et le tnor bouffe, conjuguant le mot personne sur toutes les nuances possibles de lexcla-matif et de linterrogatif. Mais lorchestre nous fait djentendre tout ce que peut avoir dinquitant la jalousiede Claudio, dans le registre de basse qui est le sien. Mal-gr lamusante vocation des grelots du muletier et decocasses pizzicatos, cuivres et cordes tissent sur sagrande tirade de sombres machinations que ne ferontpas oublier les nouvelles apostrophes entre les deux pro-tagonistes, cette fois sur le mot spadassin . Car Clau-dio ne peut se dfaire de cette odeur damants que Tibia,quant lui, narrive pas renifler.

    SCNE 3 Nous sortons dun coup du registre de la conver-sation en musique. Le premier air de Clio, prcd dunemlancolique introduction domine par le hautbois, se com-pose de cinq grandes phrases mlancoliques dont ll-giaque dsespoir sanime, peu peu, lvocation dessouffrances de lamour. Comment ne pas songer lmou-vante confession de Pellas juste avant son ultime scneavec Mlisande ? Clio nest pas un baryton comme Pellasmais cest un tnor qui doit avoir la mme souplesse et lemme lyrisme sans affectation ni emphase. Lamour quprouve Clio pour Marianne ne lempche pasdtre conscient de ce que la puissance dune femme,lorsquelle est aime, peut cacher de fragilit. Cette

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  • en venir aux aveux, et son exaltation rpond lexub-rance de son ami. Lorchestre contrepointe les lans deferveur, mais aussi les inspirations plus lgiaques dujeune homme, lorsquil dpeint son cabinet dtudes d-sert ou le chasseur lafft dune biche, la gorge serre.Octave promet son aide Clio au moment o rappa-rat le motif des cloches, annonciateur du retour de Ma-rianne.

    SCNE 5 La litanie est cette fois plus orthodoxe. Ma-rianne invoque la Vierge quelle vient de prier lglise.Pour la premire rencontre de lhrone avec Octave, lelibrettiste dHenri Sauguet a repris lessentiel du textede la mme scne dans la comdie de Musset, avec cettedouble rticence dOctave, quelque peu prcieuse etdj galante, nommer dabord le mal quinflige Ma-rianne son meilleur ami, puis le nom de la victime dece mal. Mais la mise en musique permet de faire conver-ger les deux voix vers cette phrase qui a de toute vi-dence branl la jeune femme : [il vous reste] cinqannes bien pleines pour que lon vous aime, huit dix peine pour aimer vous-mme, et le reste pour prier Dieu. Ici, la conversation sarrte : les deux jeunes gens re-gardent dans la mme direction, comme deux amou-reux. Mais il ne sagit que dun instant fugitif. Le reste dela scne nest quaffrontement, sauf dans la grande ti-rade dOctave sur le mal de Clio, porte par degrands panchements des cordes, et la chaleureuse vo-cation des vingt ans de Marianne. La scne se clt sur unpied de nez musical de la jeune femme, en forme dechanson populaire, et sur une remontrance la dugne.

    SCNE 6 Scne de transition : Octave salue rapidementson cousin Claudio, lpoux de Marianne et se prend aujeu des rptitions (sur bonjour ici) qui caractrisece mari jaloux et ridicule.

    SCNE 7 Aprs la scne des questions sans rponseentre Marianne et Octave, en voici une autre confron-tant cette fois les poux, et cest Marianne qui fait lamystrieuse. Elle dnonce Octave qui lui a fait la courpour le compte dun autre mais elle ne prtend pas r-vler ce quelle lui a rpondu. Deux thmes saffrontent,lun aux cordes, menaant, lautre plus grotesque et sau-tillant. Colre et galanterie ne cessent ainsi de sopposer,illustrant tour tour les propos des deux personnagesdont le rapport apparat bien diffrent de celui quonpouvait attendre. Cest Marianne qui a le dernier mot surson mari dont la jalousie traduit, nous en sommes ds-ormais certains, la faiblesse face son pouse. Mais ilfaut toujours se mfier des faibles.

    SCNE 8 Claudio et Tibia restent seuls. Le climat est net-tement plus sombre que lors de leur premire scne. Etla musique sonne clairement atonale, inquitante, avecdes emportements de cordes et des crasements de cui-vres dferlant par vagues jusqu la mention de la prisonet de la peine de mort. Le ton bouffe revient lorsqueTibia voque le greffier, sa femme et lamant de ce der-nier, le spadassin dont le nom, une nouvelle fois, est r-

    conscience de la complexit de lme fminine nest pasdans le texte de Musset, homme du XIXe sicle persuadde limpossibilit de comprhension et de communi-cation entre les deux sexes. Elle est une ide du com-positeur et de son librettiste, hommes du XXe sicle,soucieux denrichir ainsi le portrait psychologique dunpersonnage dont lorchestre contrepointe les proposavec chaleur.Linterlude orchestral qui suit introduit le motif de tiercessuccessives voquant les cloches de lglise qui appellentMarianne la prire. La premire apparition de la jeunefemme est ainsi place sous le double signe de la pitet dune joie toute juvnile. Lcriture vocale de ce so-prano lyrique exige une grande agilit et des aigusrayonnants. Marianne est suivie dune dugne qui narien voir avec Ciuta, la vieille dame qui chez Musset fai-sait plutt office dentremetteuse. Ici, officiellement, ladugne est l pour aider sa matresse chapper auxtentations; elle sera aussi sa complice. Sous la plumedHenri Sauguet, elle a surtout une fonction franche-ment comique, ce dont tmoigne la parodie de litaniedes saints que Marianne rcite avec elle. Selon les indi-cations du compositeur, ce rle doit tre un rle travestipour mieux renforcer leffet burlesque de sa prsence. Ilsagit aussi pour lui dviter une csure trop francheentre personnages comiques et dramatiques. De mmeque Claudio est tout la fois inquitant et ridicule, sonpouse Marianne, dans ses pratiques dvotes, susciteautant lironie que le respect. En dpit de sa vocalit in-solente et fire, la jeune femme ne peut sempcher, aumilieu de la litanie, davouer cette fragilit quvoquaitClio dans la scne prcdente. Elle se sait vulnrableface la tentation. Le ressort de lintrigue est ouverte-ment nou. la fin de la scne apparat pour la premire fois lauber-giste, personnage lui aussi invent par Jean-Pierre Grdyet Henri Sauguet, apportant une nouvelle touche de co-casserie par son vocation de Naples, ville des lazza-roni o sont ns le macaroni et la musique ! , mais aussiune atmosphre de sensualit contemplative dont lesinstruments de lorchestre se font les complices.

    SCNE 4 Le cortge qui accompagne lentre dOctaveest aussi un cortge de musiques triviales voquant lafoire. On pense au thme du Petrouchka de Stravinsky.Le rythme est bien entendu celui de la tarentelle, dansedu Sud de lItalie que lon dit descendre des rites diony-siaques et dont la pratique rpte des journes entirespermettait, selon la lgende, de gurir des morsures dela tarentule. Cest donc dessein que le compositeur uti-lise cet endroit le caractristique tambourin cym-bales. La danse se dsintgre par effacement progressifdes instruments pour faire place la conversation entreClio et Octave. Ce dernier, baryton dans la pure tradi-tion franaise, se livre un autoportrait des plus lo-quents. La musique ici est presque atonale, comme poursouligner lquilibre instable dun personnage qui se d-finit lui-mme comme un danseur de corde. La conver-sation reprend et les fleurets mouchets font place plusde sincrit et daffection rciproque. Clio peut en

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  • SCNE 3 - Lorchestre prolonge ses points dinterrogationavant le retour dOctave, accompagn de son cortge derythmes sautillants. Cette humeur lgre sinterromptlorsque Clio avoue le sujet du livre quil tient la main. lvocation de la mort, les phrases musicales sallon-gent et se cantonnent dans le registre grave. Lamouret la mort se tiennent la main et vont ensemble le mmechemin . Octave rpte avec Clio cette phrase mlo-dieuse un procd quon avait dj vu la scne 5 delacte I, entre Octave et Marianne. lorchestre, la belleligne des cordes souligne la profondeur de cette phraseen mme temps quelle exprime lamiti qui lie les deuxjeunes gens. Les rythmes insouciants associs Octavereprennent ensuite, mais ils sont nouveau briss, cettefois par de courtes phrases exprimant le trouble du jeunehomme face aux rticences de Clio qui sloigne rapi-dement.

    SCNE 4 - Laffection dOctave pour son ami est commeexaspre : les rythmes associs au personnage devien-nent rageurs. Voici Marianne qui se rend vpres ,accompagne de la dugne mais non pas cette fois dumotif de tierces imitant les cloches. Le violon solo risqueune roulade pour rappeler le rossignol qui, tout lheure,chantait dans le cur de la jeune femme. Octave prendsur lui de mentir Marianne il sait parfaitement queClio na nullement renonc son amour mais il veut latester. Ce mensonge, comme la mission dambassadeurquil a accepte, fait verser le jeune homme dans la ga-lanterie. Marianne commence par railler lamour deClio, cet amour qui tait quelque chose comme duchinois ou de larabe puisquil lui fallait un interprte .Sur un ton grave, Octave lui fait reproche de son indiff-rence. Vous tes une rose du Bengale, sans pine etsans parfum . Puis il risque une pique quon qualifieraitaujourdhui de machiste : Une fleur sans parfum nenest pas moins belle . Marianne ragit avec dignit ensoulignant lgosme du dsir masculin : Quest-ceaprs tout quune femme ? Cest une distraction . Elledlivre sa leon avec simplicit mais les grands inter-valles de la belle mlodie tisse pour elle par le compo-siteur trahissent son indignation et son motion. Ellesattendrit pour finir sur le rve du bonheur dune vie. Mais la dugne, la trompette et la flte terminentcette scne intense sur un joli pied de nez.

    SCNE 5 Sans doute pour se cacher lui-mme lmo-tion quil a ressentie en coutant Marianne, Octave fre-donne sa dsinvolture et demande laubergiste deporter un billet une belle rousse nomme Rosalinde. Lenonchalant aubergiste entonne la lascive mlodie espa-gnole qui ouvrait ce second acte. Et Octave, reprenantle dernier vers de ce pote amateur, Toute femme ensoupirant voudra quon laime , savoue gagn par latristesse.

    pt lenvi par les deux personnages. Claudio, dans sonmonologue, recourra au mme effet grotesque avec sa machine assassine . Mais, porte par de nouveauxemballements de lorchestre, cette tirade est plus inqui-tante encore que les prcdentes.

    SCNE 9 Seule son tour, Marianne spanche. Le ds-ordre de son cur est soulign par ceux de la tonalitdans ce cette grande page quouvre le violon solo, sym-bolisant le jeune rossignol qui chante au fond de [s]oncur . Entre les reprises successives de son invocation, Amour, mystrieux amour , les sentiments de Ma-rianne sont nu. La jeune femme ne peut dire encorequi elle aime mais dj elle savoue quelle aime. Cest unaveu que ne lui autorisait pas Musset dans sa pice. Jean-Pierre Grdy et Henri Sauguet nont pas voulu se conten-ter du portrait dune femme fire et ils ont eu bien raisondoffrir leur hrone un air digne de ce nom. Cest ensexposant ainsi que sa vulnrabilit devient lgale decelle de Clio. Le plaidoyer fministe avant la lettre dudeuxime acte nen sera que plus mouvant.

    ACTE 2SCNE 1 - LAubergiste reparat pour une scne de pureatmosphre voquant la fin de la sieste. lorchestre,le hautbois mne le jeu, la voix du chanteur lui rpon-dant sur le mme ton de nonchalance un peu affecte.Les petits gruppetti quils partagent avec la flte et lescordes voquent lEspagne plus que lItalie, mais Naplesnest-elle pas la plus hispanique des villes du sud de la p-ninsule ?

    SCNE 2 - Comme chez Musset, Hermia, la mre deClio, napparat que dans une scne et sans Malvolio,lintendant que lui assigne Musset. Jean-Pierre Grdy aeu lexcellente ide de dplacer cette scne du premierau second acte. Ainsi la confidence dHermia Cliofait-elle natre plus directement le soupon dans lespritdu jeune homme (au lieu de lui tre inspire par uneconfidence de lentremetteuse CIuta). Tout comme sonpre avait gagn le cur dHermia aprs stre prsent elle en ambassadeur dun autre, Octave nest-il pas entrain de faire natre lamour en Marianne ?Hermia est chante par une mezzo-soprano. Elle estveuve mais jeune encore. Elle rpond calmement sonfils en de longues phrases qui expriment son amour ma-ternel. Celui-ci, sur un ton plus beaucoup plus anim,rythm par lcho des srnades et des ftes, linterrogesur ses amours passes. La gravit dHermia fait place lmotion contenue quand elle narre le destin du jeunehomme qui laima. Saisi, Clio va rpter par trois fois : Il stait cru tromp par son ami. Hermia devine letourment de son fils et son ton change une nouvelle fois.Son inquitude semble se transmettre un orchestre in-terrogatif lorsquelle lexhorte : Tchons de vivre et deregarder ensemble, moi le pass, vous lavenir . Clionest pas sorti de sa sidration; il rpte : Le pass,lavenir

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  • -jours montant vers les aigus. Les grandes phrasescalmes et dignes vont faire place dsormais des s-quences plus courtes. Les vocalises sur une syllabe sontaussi plus frquentes. Une autre Marianne fend la cui-rasse, plus fminine, plus conqurante, dtermine vivre pleinement et exprimer avec sa voix tous les tatsde son me.

    SCNE 11 - Cette nouvelle Marianne se confronte et aus-sitt Octave. Elle se livre sur un rythme de valse unjeu de sduction qui surprend le jeune homme. Voicidonc lpouse sage et dvote prte sabandonner sescaprices. Octave en profite pour se faire nouveau lin-terprte des sentiments de Clio. Les belles phrasesmlodiques de son arioso sont amoureusement accom-pagnes par les cordes, et lon comprend la remarque deMarianne : En vrit, ne croirait-on pas que cest pourvous que vous parlez ? La jeune femme sest laiss ga-gner par la gravit dOctave. Ses rpliques retrouvent unton plus mesur, des lignes mlodiques moins excen-triques. Cependant, sa dtermination est claire. Elle neveut pas entendre parler de Clio. Octave rpte avecelle nimporte qui puis qui vous voudrez/qui je vou-drai , sidr par la dtermination de la jeune femme soffrir au premier venu plutt que douvrir son cur un homme qui laime. Lorchestre accompagne parvagues de crescendos le dialogue passionn des jeunesgens. La scne sachve sur une note presque sensuelledes cordes et du cor anglais, lorsque Marianne donne Octave son charpe en guise doriflamme.

    SCNE 12 - En fait, Octave a bien compris que les proposde la jeune femme sadressaient lui et non au premiervenu . Ici, Jean-Pierre Grdy a voulu tre plus expliciteencore que Musset. Il fait dire Octave : Souffler unematresse une ami est un jeu qui ne mamuse plus. Quoi quait pu faire croire le ton passionn du jeunehomme dans la scne prcdente, le doute ne doit pastre permis. Cest Marianne, et elle seule, qui nest passincre. Pourtant le violon solo est toujours l pour figu-rer le rossignol qui chante en son cur, mais la flte etle cor le font presque aussitt taire.

    SCNE 13 - Cest sur un ton solennel, soutenu par une son-nerie des instruments vent, quOctave remet Cliolcharpe de Marianne. Puis lorchestre et le jeunehomme se font plus mystrieux pour dcrire lattente dela jeune femme. Enfin reviennent les dhanchementscarnavalesques: tambourin, clarinette et trompette avecsourdine saniment nouveau lorsque Octave conseille son ami de se masquer et de revtir un manteau long.Lexaltation de Clio, soutenue par les cordes,dbouchesur un duo des deux jeunes gens sur les paroles dcrivantune Marianne prte se donner. Octave peut retourner ses plaisirs. Son apostrophe laubergiste est joyeuse-ment soutenue par lorchestre, sur un rythme de dansesautillant.

    SCNE 6 - Malgr les traits dironie que se dcochent Oc-tave et Claudio, malgr les nouveaux effets de rptitioncomique (sur si vite puis absolument tout ! ), laconversation des deux cousins est domine par la me-nace que lpoux de Marianne veut faire planer sur soninterlocuteur. Les assauts dironie ( cousin plein descience, cousin plein de factie, cousin plein de causticit) se transforment presque en insultes. Coups de se-monce de la trompette avec sourdine, gammes descen-dantes rompues, acclrations, silences brutaux : lapartition de lorchestre contrepointe avec loquencecette joute agressive.

    SCNE 7- Le hautbois et laubergiste dpit narrachent Octave quun sarcasme en imitation. Les cuivres graves etle tambourin cymbales rapparaissent pour accompa-gner la chanson boire dans laquelle se lance le jeunehomme. Mais le cur ny est pas : Le peste soit de luni-vers. Essayons densevelir ma tristesse dans ce vin. Ou cevin dans ma tristesse . Le La la la la manque dentrain.

    SCNE 8 - Marianne revient des vpres sur une sonneriedes vents de lorchestre qui ne ressemble dsormais quede loin, comme en cho, une vole de cloches. Laciditde sa conversation avec Octave est rvlatrice de lter-nelle incommunicabilit entre homme et femme qui estau centre de la pice et de toute linspiration dAlfred deMusset. Marianne souligne la contradiction dOctave,amateur de vins raffins mais aussi damours vulgaires : Vos lvres sont dlicates mais votre cur senivre bon march. Le jeune homme emprunte son tour leton de la raillerie. Lopra courte la scne de Mussetdont la suite ne faisait que remcher ce dialogue desourds empreint de colre rentre. Car Sauguet prfresen tenir lillustration plus chaleureuse dune conver-sation sincre par un orchestre attentif pouser les in-flexions de chaque phrase. Dans sa conception, lespersonnages des Caprices de Marianne sont dabord lesvictimes et non les instruments de leur impossibilit communiquer.

    SCNE 9 - Si Claudio devient plus prcis dans la menace,cest la surprise de Marianne qui dcouvre soudain ladtermination de son mari. Les cuivres haletants qui ac-compagnent les propos obsessionnels du jaloux soppo-sent aux cordes soulignant ceux de Marianne. Lediscours est hach mais sous-tendu par une progressionharmonique qui se rsout une premire fois sur le mot couvent puis se transforme en proraison laquelleparticipent aussi la dugne et Tibia. On peut noter que,chez Musset, la menace, dans la scne correspondante,tait plus voile; il ny tait pas question de couvent.

    SCNE 10 - Mais cest ainsi cette menace mme qui pro-voque lexplosion de Marianne. La vocalit du person-nage, caractrise par des grands intervalles quilentranent souvent vers le registre le plus lev, est iciexalte par la surprise, la colre, puis lesprit de ven-geance et la dtermination. La jeune femme envoie ladugne chercher Octave et reprend son discours tou-

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  • SCNE 18 - Leffroi de Marianne pouse une courbe as-cendante qui culmine sur le mot cri , basculant dansla douleur. Un nouvel accs de dsespoir monte jusqulapostrophe Octave, un troisime bute sur le mot caprice .

    SCNE 19 - Lexplosion de douleur de Marianne et le dbutde la dernire constituent lultime ajout de Jean-PierreGrdy au texte de Musset. Le librettiste dHenri Saugueta eu lexcellente intuition dramaturgique quil serait plusfrappant dachever lopra aussitt aprs le meurtre plu-tt que de convoquer Marianne et Octave, quelques se-maines ou mois plus tard, sur la tombe de Clio. Lajeune femme exprime ainsi un amour qui na plus rien ducaprice et se rachte ainsi ses propres yeux, sinon auxyeux dOctave. Cest encore frmissante quelle saban-donne et demande celui quelle aime de lemmener loinde son poux. Mais, pour la dernire fois, les deux jeunesgens vont se parler sans pouvoir scouter. Ils chantentun moment ensemble, mais sans regarder dans la mmedirection comme lors de leur premire rencontre. Ma-rianne est tout entire son amour, Octave est tout en-tier lamiti et lami perdus. Les cordes palpitantessont le seul lien entre eux. Le jeune homme chante unelgie qui est aussi une dploration, un adieu. Marianneaura beau imiter sa ligne de chant, mler sa voix lasienne sur le mot existe , Octave achve sa dplora-tion par la phrase que Musset avait choisie p o u rconclure sa pice : Je ne vous aime pas Marianne. CestClio qui vous aimait . Lorchestre conclut son touren reprenant plusieurs fois, morendo, une successiondaccords funbres.

    SCNE 14 - Le court prlude, sombre, lgrement disso-nant, annonciateur dorage, se dissipe lorsque parat Ma-rianne. Faisant cho celui de laubergiste tout lheure,son chant sensuel, ponctu par le tambourin, associe leslangueurs de la nuit napolitaine lattente du plaisir qui fait frissonner [s]on sein nu .

    SCNE 15 - Cette scne, comme la prcdente, a t ajou-te par le compositeur et son librettiste la pice origi-nale dAlfred de Musset. Elle nous fait assister ladcouverte par Marianne du projet meurtrier de sonmari. Lorchestre accompagne avec vhmence le sinis-tre dialogue avec Tibia, culminant sur Je veux du sang! La lchet de Claudio lempche daccomplir lui-mme sa vengeance mais elle ne le rend pas moins ef-frayant. Cest le spadassin dpch par Tibia,personnage muet comme le sont les excuteurs dans lapice de Musset, qui frappera Clio. Marianne cherchecomment avertir Octave ; mais il ny aura pas, commechez Musset, de message crit envoy par la jeunefemme. Les propos de Claudio sont contrepoints parses ah ! dpouvante. La fureur de lpoux atteint sonstade ultime, symbolis par une explosion de lorchestre.Mais il poursuit encore sa proraison, voquant le hibou,lesturgeon, la sorcire, la desse Hcate aux trois vi-sages, le tout sur un tapis sombre et frmissant decordes et de cuivres. Le mari jaloux, lche et mchantde Musset se transforme, sous la plume de Grdy et Sau-guet, en crature malfique.

    SCNE 16 - Le contraste est frappant avec les mesures quiont prcd. Lapparition de Clio est accompagne parla musique primesautire du prlude quentonnait autout dbut du premier acte le chanteur de srnades.Rien que de trs naturel puisque le jeune homme se metlui-mme, cette fois, dans la posture du donneur de s-rnades. Le tambourin dOctave se joint aux instrumentsdans sa ritournelle circulaire. Et prcisment, cest lenom dOctave que Clio entend dans la bouche de Ma-rianne. La jeune femme est affole, les roulements detimbales viennent signifier le basculement de la scne.Marianne se retire aprs avoir exhort son soupirant sloigner. Clio reprend la mlodie douce-amre de sontout premier air, la scne 3 du premier acte, avec lacomplicit cette fois de la clarinette. Il chante gravementle double mensonge de lamour et de lamiti, lorchestrefigurant par ses accords funbres un glas annonciateurde la mort laquelle dsormais le jeune homme aspire.

    Scne 17 - Cette scne ne doit Musset que lexclama-tion dOctave : O Marianne, si je tavais aime, tu mau-rais dtest. Auparavant, nous lavons retrouvinsouciant, en compagnie de laubergiste, de nouveauaccompagn des rythmes de foire des cuivres et descordes. Cest le cri de Clio qui fait pressentir Octave ledrame qui vient de se nouer. Il croise Claudio qui, son forfaitaccompli, a retrouv toute on calme. Lvolution de ce per-sonnage est dcidment trs impressionnante. Sur ses pa-roles impavides, les cordes dessinent de sinistres volutes,alternant avec les coups de boutoir du destin.

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  • LA PRODUCTION

    Ce jeune metteur en scne canadien vient de remporterun grand succs pour son retour au Pacific Opera de Vic-toria dans Ariadne auf Naxos aprs des dbuts russis enFrance pour la production de Don Giovanni lOpra deTours et lOpra de Reims et sa victoire au Concours or-ganis par le Centre Franais de Production Lyrique pourune production des Caprices de Marianne de Sauguet.

    Ces six dernires annes, il a mis en scne plusieurs pro-ductions de lAtelier lyrique de lOpra de Montral : TheConsul de Menotti avec lEcole nationale de Thtre duCanada, Nol lOpra avec lOrchestre Mtropolitain,apro lOpra - srie tlvise de lARTV -, The Tele-phone de Menotti et une de ses crations intitule Alea-canto, programme dans la srie Pda junior de la Placedes Arts de Montral et nomine aux Prix Opus 2010-11 dans la catgorie meilleur spectacle jeune public.

    Il a galement dirig Rodelinda de Handel au PacificOpera Victoria (British Columbia), la cantate Apollo etDaphn de Handel, prsente au Festival Internationalde Musique Baroque de Lamque (Nouveau Brunswick),La Prichole dOffenbach et Solitudes, un collage dex-traits dopra ralis avec les lves en chant lyrique duConservatoire de musique de Montral.

    A lOpra de Montral, il a mis en scne Il Trovatore deVerdi et La Chauve-souris ; il sest galement fait remar-quer pour lune de dss crations, Le Quatrime Enfant-Lune compose par Gabriel Thibaudeau, avec OpraVmana. Dans le cadre de son Master en mise en scnedopra lcole suprieure de thtre de lUniversit duQubec Montral (2008), il prsente Pellas et Mli-

    MISE EN SCNE

    ORIOL TOMAS

    -sande de Debussy. Il est galement diplm en interpr-tation thtrale lUQM (2003), en plus davoir tudila mise en scne et la recherche thtrale lUniversitLaval Qubec (1996).

    En plus de siger sur plusieurs jurys, depuis six ans, il en-seigne les techniques de jeu aux chanteurs de lAtelierlyrique de lOpra de Montral, de lAcadmie de mu-sique et de danse du Domaine Forget, du Pacific OperaVictorias Young Artist Program et du Folyestivale.

    A lautomne 2013, il fait ses dbuts en France avec unenouvelle production de Don Giovanni lOpra de Tourset lOpra Reims; par la suite il retourne au PacificOpera Victoria pour Ariadne auf Naxos puis met enscne DonPasquale avec Les Jeunesses Musicales avantun retour en France pour des Caprices de MariannedHenri Sauguet, tourne dans 16 compagnies doprafranaises en 2014-2016 suite sa victoire au Concourslanc par la Centre Franais de Promotion Lyrique.

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    NOTE DINTENTION :Les Caprices de Marianne de Sauguet, opra parsem detouches de comdie et de satire malgr son dnouement tra-gique, se caractrise par sa posie et par les qualits voca-trices de sa musique. Au centre du drame, on trouve lamourimpossible, causant tristesse, mort, nostalgie, vide, destruc-tion et deuil sujets universels et particulirement roman-tiques. Marianne est au cur du triangle amoureux composde Clio, Claudio et Octave. Clio, qui voque l'amour fouet la passion, la laisse indiffrente. Claudio, le mari, qui repr-sente lautorit, le pouvoir, la force de l'ordre et du droit, lop-prime. Finalement, Octave qui incarne lamour, la libert, lavie, la jeunesse et la fidlit en amiti, envote Marianne. Fa-talit et vertige surplombent la scne, car lamour et la mort font chavirer lme initiatique dont les consquencessavreront tragiques. Musset, en prcurseur, conduit Ma-rianne sur la voie des revendications fminines, alors quilancre ses personnages masculins dans un carcan tradition-nel.Les personnages, figurines de papier extrmement fra-giles, voluent dans le dcor esquiss, la perspectivetrompeuse de la Galleria Umberto 1er lisolement et la vul-nrabilit des personnages. Son dme, tel une cage de verre,les enferme dans ce lieu, mtaphore de leur inluctable des-tine : Marianne, captive de Claudio, lui-mme prisonnier desa propre jalousie ; Clio, esclave de son amour fou et Octave,doublement enchan et par lamour pour Marianne et par lafidlit envers Clio. Ainsi, cette Galleria la fois esquisse,maquette, place publique, lieu de passage, allgorie de la vie,attire-telle les personnages, les convie-telle partager, aimer, en un mot, tre. Rpondront-ils cet appel ?

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    EN SAVOIR PLUS . . . SUR LA VOIX

    Selon que lon soit un homme, une femme ou un enfant,le chant lyrique connat une classification spcifique partessiture. savoir la partie de ltendue vocale ou de sonchelle sonore qui convient le mieux au chanteur, et aveclaquelle il volue avec le plus daisance.Les tessitures sont associes des caractres : en gn-ral, les mchants ou les reprsentants du destin (mainsvengeresses) comme Mphistophls dans Faust, LeCommandeur dans Don Giovanni ou Zarastro dans LaFlte Enchante sont basses.

    Le hros est tnor ou baryton. Le baryton est plus undouble vocal du hros, lami, un protagoniste, un intri-gant.

    Les hrones, mes pures bafoues, victimes du destin,sont sopranos comme Gilda dans Rigoletto ou concer-nent les rles travestis : Chrubin dans Les Noces de Fi-garo, Romo dans Les Capulets et les Montaigus ouOctavian dans Le Chevalier la Rose. Il existe des sopra-nos lyriques, lgers, coloratures selon la maturit vocaledu personnage.On associe galement des compositeurs des caractresvocaux (soprano wagnrienne, verdienne). Ils ont com-pos spcifiquement pour valoriser ces tessitures.Les matrones, servantes, nourrices, confidentes, pendantngatif ou positif de lhrone sont souvent des mezzo-sopranos mais elles peuvent endosser le rle principal,comme Carmen de Bizet ou Marguerite du Faust deGounod.

    LES CHANTEURS LYRIQUES [ CANTOR / CANTATRICE ]

    ILLUSTRATION : SOPHIE CHAUSSADE

    Une voix plus rare, la contralto ou alto est la voix la plusgrave qui possde une sonorit chaude et enveloppante,par exemple : Jezibaba, la sorcire de Rusalka.Enfin, les enfants sont assimils des sopranes, ils inter-viennent frquemment en chorale, comme dans leChur des Gamins de Carmen.Et quand tout ce beau monde se met chanter ensem-ble : duos damour, trio, quatuor, quintette (Rossini estle spcialiste des disputes et autres rglements decompte familiaux), cest loccasion dentendre les com-plmentarits entre tessitures masculines et fminines.Il nest pas exagr de comparer la vie professionnelledun chanteur dopra celle dun sportif de haut niveau.Acqurir une voix lyrique, cest--dire une voix cultive,prend plusieurs annes. Il faut commencer jeune, aprsla mue pour les garons et vers 17 ou 18 ans pour lesfilles. La voix lyrique se distingue par la tessiture et lapuissance. Le corps est linstrument de la voix car il faitoffice de rsonateur.Le secret de la voix lyrique rside dans le souffle. Il fautapprendre stocker mthodiquement lair, puis chantersans que lon sente lair sur la voix. Cela ncessite douvrirla cage thoracique comme si lon gonflait un ballon, cestune respiration basse, par le ventre, maintenue grce audiaphragme. Cette base permet ensuite de monter dansles aigus et de descendre dans les graves, sans que la voixne soit ni nasale ni gutturale.Les vocalises, bases sur la prononciation de voyelles,consonnes, onomatopes servent chauffer la voix endouceuret la placer justement.Vous pouvez tre surpris de voir lexpression du visagedes chanteurs lorsquils sont plongs dans linterprta-tion dune uvre. Les mimiques, la gestuelle des chan-teurs que lon peut trouver caricaturales, sont souventdes aides techniques. Il faut dgager le voile du palaiscomme un billement, carquiller les yeux dtonnement.

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    LES INSTRUMENTS DE LORCHESTRE

    LES INSTRUMENTS VENT : LES BOIS

    LA FLTE TRAVERSIRE

    Dans la premire moiti du XIXe sicle, Thobald Boehm dveloppe et amliore considrablementla flte qui est un instrument trs ancien. Elle na pas volu depuis. Il positionna tous les trousncessaires leur emplacement idal pour jouer dans toutes les tonalits. Il ne tient pas comptede la "jouabilit" : il y a bien plus de trous que le joueur ne possde de doigts. Ils sont, de plus,placs parfois hors de porte. Ensuite, il mit au point le mcanisme qui permet de boucher et d-boucher les trous.

    LE HAUTBOIS

    Le hautbois dorchestre actuel est dorigine franaise. Il tient sa facture moderne dun perfection-nement du dbut du XXe sicle. Employ davantage dans lorchestre lpoque romantique, il re-vient actuellement comme instrument soliste. Le hautboste donne le LA lorchestre lorsquilsaccorde.

    LA CLARINETTE

    Son nom vient du latin clarus qui signifie clair. Elle a t invente en Allemagne la fin du XVIIe-

    sicle partir dun instrument prexistant : le chalumeau dont-on a augment ltendue. Elle estmodifie au XIXe sicle. pour atteindre le perfectionnement que nous lui connaissons aujourdhui.Il en existe une multitude de types, plus ou moins graves. Il sagit de linstrument vent possdantla plus grande tendue : 45 notes.

    LE BASSON

    Le basson est de la famille du hautbois. La sonorit du basson est mordante dans le grave et touf-fe dans laigu. Le dulcian est lanctre du basson qui permet un jeu plus ais. Au XIXe sicle. lebasson allemand se diffrencie du basson franais, si bien quil faut un grand travail pour passerde lun lautre. Le basson allemand est le plus jou.

    LE SAXOPHONE

    Le saxophone est de la famille des bois mais na jamais t fabriqu en bois.Le saxophone a t invent par le belge Adolphe Sax en 1846. Il souhaitait crer un nouvel instru-ment pour lorchestre et en fit la publicit auprs des compositeurs de son poque comme Berlioz.Mais cest plus la musique militaire et le jazz qui le rendirent clbre.

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    LES INSTRUMENTS VENT : LES CUIVRES

    LE COR

    Aux XVIe et XVIIe sicle, le cor, ou trompe de chasse, est limit comme le clairon qui peuple nosfanfares. Il a t plusieurs fois amlior, en y ajoutant des pistons, pour pouvoir figurer dans lor-chestre. Il devient cor dharmonie avant de devenir cor chromatique et enfin double cor en acqurant de nouvelles sonorits au milieu du XIXe sicle.

    LA TROMPETTE

    La trompette est un trs ancien instrument de musique. Fabrique en os, en bois, en cornes ouutilisant des coquillages, elle servait communiquer, donner l'alarme ou effrayer des ennemis, desanimaux dangereux. Dans son volution, elle garde un ct guerrier et militaire. Les crmoniesromaines sont ponctues de sonneries la trompette. Les casernes aujourd'hui sont encore ryth-mes par le clairon. Les chasseurs sonnent le cor lors des battues. La trompette reste longtempsun instrument limit avant linvention du piston qui lui donne son allure actuelle.

    LE TROMBONE

    Lorigine du trombone est trs ancienne. Il descend de la saqueboute utilise au Moyen-Age. Son succsconnat des hauts et des bas. Il disparat et revient plusieurs fois au got du jour. Cest au XVIIIe sicle quilrevient dfinitivement. Sa coulisse est apparue au IXe sicle, cette originalit donne des possibilits uniquesqui attireront de nombreux compositeurs.

    LE TUBA

    Le tuba a une histoire complexe. Tuba signifie trompette en latin et na pas toujours dsignlinstrument que nous connaissons aujourdhui. Cest au XIXe sicle quAdolphe Sax et linventiondes pistons lui donnent la forme que nous pouvons voir dans les orchestres symphoniques:

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    LES INSTRUMENTS CORDES : LES CORDES FROTTES

    LE VIOLON

    Il se situe au terme de lvolution des cordes archet. Ses anctres datent du IXe sicle au moinsauxquels furent ajoutes petit petit des caisses de rsonance. Au XVIIIe sicle il remplace les violesde gambe dans la musique de chambre comme dans les orchestres symphoniques. Pour tous lesluthiers, le modle de rfrence est celui du clbre Antonio Stradivari (1644-1737).

    LALTO

    Il est plus grand que le violon sans que sa taille soit clairement dfinie : elle peut varier de 10 cen-timtres. En fait, la forme de l'alto n'est pas la forme idale qu'il devrait avoir. Pour sa tonalit, ildevrait tre plus gros, plus grand. Mais il doit garder une taille jouable ; peu pais pour pouvoir seloger sur l'paule de l'altiste, ne pas avoir un manche trop grand... Bref, l'alto est un compromis.Seul son timbre est clairement reconnaissable, trs chaud dans les graves. Il a longtemps t leparent pauvre des orchestres. Quelques uvres pour alto ont t crites par des compositeursromantiques tel Carl Ditters von Dittersdorf.

    LE VIOLONCELLE

    Les premiers violoncelles apparaissent au milieu du XVIe sicle. Ils viennent concurrencer fortementlinstrument roi de lpoque : la viole. Le rejet a t trs fort en France et il devient populaire parlAllemagne o J.S. Bach lui consacre ses trs clbres Suites pour violoncelle seul. Longtempscontenu des rles daccompagnement, cest avec les orchestres symphoniques modernes quilsinstalle dfinitivement.

    LA CONTREBASSE

    La contrebasse est le plus grand (entre 1,60m et 2m) et le plus grave des instruments cordesfrottes. Elle est apparue plus tardivement que les violons, altos et violoncelles. Les partitions dor-chestre pour contrebasse se contentent souvent de doubler les violoncelles loctave infrieure.Mais la richesse de son jeu a incit les compositeurs lui consacrer plus de place.Les jazzmen laffectionnent particulirement et ont invent de nombreux modes de jeux avec ousans archet, voire mme avec larchet lenvers, ct bois.

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    LES INSTRUMENTS CORDES : LES CORDES PINCES

    LA HARPE

    La harpe fait partie des instruments les plus vieux qui existent : sa premire forme remonte lpoque gyptienne (vers 2000-3000 av. J.C.). Elle a t trs prise au Moyen-Age. Cest en 1697quun allemand invente un mcanisme pdales qui lui redonne du succs.

    LE CLAVECIN

    Le clavecin peut tre muni de un, deux ou trois claviers. Il apparat au dbut du XVIe sicle, drivdu psaltrion. Tout dabord simple remplaant du luth comme instrument daccompagnement duchant, il prend une importance croissante jusquau XVIIIe sicle. Puis il est abandonn pour le pia-noforte avant de rapparatre au XXe sicle avec la grande claveciniste Wanda Landowska.

    LE PIANO (CORDES FRAPPES)

    Le piano que nous connaissons aujourdhui est le fruit dune trs longue volution. Lantique tym-panon ft le premier des instruments cordes frappes. Mais cest le clavicorde qui est le prcur-seur de notre piano. Toutefois, entre le clavicorde et le piano, tous deux cordes frappes, deuxsicles scoulent o le clavecin, cordes pinces, fait son apparition. Il faut attendre la secondemoiti du XVIIIe sicle pour que la technique des cordes frappes satisfasse enfin les compositeurs.

    LES PERCUSSIONSLa famille des percussions se rpartie en deux catgories : les membranophones et les idiophones.Les membranophones sont construits autour d'une membrane ou de cordes qui vibrent au-dessusd'une caisse de rsonance lorsqu'on les frappe. Le son est amplifi par cette caisse. On peut citerles tambours (membrane), les cymbalums (cordes).Les idiophones sont les instruments dont le corps est lui-mme l'lment sonore. Citons les cas-tagnettes, les carillons ou le triangle.

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    LACTION CULTURELLE

    DCOUVRIR LENVERS DU DCOR

    VISITES GUIDES tout public Samedi 29 novembre 2014 - 10h / 11h30

    Deux visites organises en petit comit permettent aupublic de dcouvrir le spectacle au plus prs du plateau.

    VISITES GUIDES scolaires Il est possible dorganiser toute lanne des visites delOpra pour les scolaires (en fonction du planning deproduction).De lentre des artistes la grande salle le public est in-vit se plonger dans lunivers fascinant du spectacle.La fosse dorchestre, les dessous de scne, la machineriedvoilent quelques-uns de leurs secrets.

    SCNE ORCHESTRE DE MADAME BUTTERFLY (2012/2013).

    CONFRENCE

    "1954 : Caprices et Serment (ou la victoire des marisjaloux)" - Les Caprices de Marianne par Franois-Gil-das TualMardi 25 octobre 2014 - 19h lauditorium delOpra de Massy. En partenariat avec UTL Palaiseau.

    LOPERA ACCESSIBLELOpra de Massy est quip dun matrieldamplification (casques et boucles magn-tiques) destination des publics sourds etmalentendants.

    Disponible sur tous les spectacles de la saison sur simpledemande. Renseignements au 01 60 13 13 13.

    Pour toutes ces activits, renseignements au 01 69 53 62 26 (inscriptions par lintermdiaire de la fiche projet, dansla limite des places disponibles).

    ATELIER AVEC LES JEUNES DE LULIS DU COLLGE CHARLESPGUY DE PALAISEAU.

  • SERVICE DACTION CULTURELLEOPRA DE MASSY

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