34
1 Droit administratif Bibliographie - Droit administratif général, Tome I, René Chapus, Edition Monchrétien, 12ème édition (volumineux, difficile). - Droit administratif, Pierre-Laurence Frier-petit, Edition Précis, 5ème édition (complet, pédagogique, top). - Droit administratif, Truchet, PUF, collection Thémis. - Droit administratif général, Gilles Lebreton, Armand colin, collection compact. - Droit administratif, Tome I et II, Seiller, Flamarion, collection champs université, 3ème édition (poche, pratique). - Recueil de jurisprudence, GAJA, 18ème édition Dalloz. - Grandes décisions de la jurisprudence administrative, GDJ, PUF, Edition Thémis. Introduction La plupart des auteurs s’accordent à reconnaître au droit administratif un objet particulier comme un contenu particulier (règles applicables). Ces deux spécificités vont nous permettre de cerner cette matière. Du point de vue de son objet, le droit administratif est le droit applicable à une partie de l’administration. Du point de vue de son contenu, le droit administratif est composé d’un ensemble de règles et de principes spécifiques qui le distinguent du droit (en particulier du droit privé). I. L’administration Administrer, c’est gérer, organiser. On peut donc voir employer ce mot couramment, en dehors du domaine de l’administration publique (administration d’un patrimoine, d’une entreprise). Le terme d’administration peut être appréhendée de deux façons. Il y a d’abord une conception matérielle. L’administration est alors une activité, une fonction, une mission : c’est le fait de gérer, d’organiser. La deuxième acception du terme est organique. L’administration désigne alors les organes qui accomplissent la mission d’administration. Dans le vocabulaire juridique français, on trouve souvent le mot écrit avec un « a » majuscule, cela renvoie à l’administration publique. Cela désigne l’ensemble des autorités, des agents, des organismes chargés, sous l’impulsion des pouvoirs publics, d’assurer les multiples interventions de l’Etat et des collectivités territoriales. Il nous faut cependant exclure de la notion d’Administration les activités privées d’une part et un certain nombre d’activités publiques d’autre part. Exclusion des activités privées Il peut y avoir des points communs entre secteur public et privé. Leurs différences tiennent avant tout aux finalités de ces activités. Ainsi, l’administration publique poursuit des intérêts d’intérêt général alors que le secteur privé poursuit principalement la satisfaction d’intérêts privés (individuels ou catégoriques). Le droit administratif régit l’organisation et le fonctionnement de l’Administration, les relations entre l’Administration et les particuliers mais ne régit pas la vie des personnes privées, les relations entre personnes privées.

Droit Administratif

  • Upload
    yann958

  • View
    69

  • Download
    2

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Droit Administratif

1

Droit administratif

Bibliographie

- Droit administratif général, Tome I, René Chapus, Edition Monchrétien, 12ème édition (volumineux, difficile). - Droit administratif, Pierre-Laurence Frier-petit, Edition Précis, 5ème édition (complet, pédagogique, top). - Droit administratif, Truchet, PUF, collection Thémis. - Droit administratif général, Gilles Lebreton, Armand colin, collection compact. - Droit administratif, Tome I et II, Seiller, Flamarion, collection champs université, 3ème édition (poche, pratique). - Recueil de jurisprudence, GAJA, 18ème édition Dalloz. - Grandes décisions de la jurisprudence administrative, GDJ, PUF, Edition Thémis.

Introduction

La plupart des auteurs s’accordent à reconnaître au droit administratif un objet particulier comme un contenu particulier (règles applicables). Ces deux spécificités vont nous permettre de cerner cette matière. Du point de vue de son objet, le droit administratif est le droit applicable à une partie de l’administration. Du point de vue de son contenu, le droit administratif est composé d’un ensemble de règles et de principes spécifiques qui le distinguent du droit (en particulier du droit privé).

I. L’administration Administrer, c’est gérer, organiser. On peut donc voir employer ce mot couramment,

en dehors du domaine de l’administration publique (administration d’un patrimoine, d’une entreprise).

Le terme d’administration peut être appréhendée de deux façons.

Il y a d’abord une conception matérielle. L’administration est alors une activité, une fonction, une mission : c’est le fait de gérer, d’organiser. La deuxième acception du terme est organique. L’administration désigne alors les organes qui accomplissent la mission d’administration.

Dans le vocabulaire juridique français, on trouve souvent le mot écrit avec un « a » majuscule, cela renvoie à l’administration publique. Cela désigne l’ensemble des autorités, des agents, des organismes chargés, sous l’impulsion des pouvoirs publics, d’assurer les multiples interventions de l’Etat et des collectivités territoriales. Il nous faut cependant exclure de la notion d’Administration les activités privées d’une part et un certain nombre d’activités publiques d’autre part. Exclusion des activités privées

Il peut y avoir des points communs entre secteur public et privé. Leurs différences tiennent avant tout aux finalités de ces activités. Ainsi, l’administration publique poursuit des intérêts d’intérêt général alors que le secteur privé poursuit principalement la satisfaction d’intérêts privés (individuels ou catégoriques). Le droit administratif régit l’organisation et le fonctionnement de l’Administration, les relations entre l’Administration et les particuliers mais ne régit pas la vie des personnes privées, les relations entre personnes privées.

Page 2: Droit Administratif

2

Exclusion de certaines activités publiques Une partie des activités publiques se trouve, elle aussi, en dehors du domaine

administratif. Par exemple, il ne faut pas confondre l’administratif avec le politique. En France, la détermination des grandes orientations de la politique nationale est opérée par le Parlement, le Premier ministre et le Président de la République. Cela relève du droit constitutionnel.

De même, l’administratif doit être distingué du judiciaire. Le droit civil, pénal relèvent de l’organisation des tribunaux judiciaires et non du droit administratif.

Enfin, il ne faut pas assimiler l’Administration aux entreprises publiques dans la mesure où le fonctionnement de ces entreprises échappe en grande partie au régime de l’Administration.

La frontière entre ces différents domaines est cependant brouillée, pas toujours

étanches. Il y a des passerelles entre ces différentes activités publiques. Ainsi, il existe de nombreuses institutions qui sont mixtes, c’est-à-dire à la fois

politiques et administratives. C’est notamment le cas du Premier ministre. - Article 20 de la Constitution : « Le Gouvernement dispose de l’Administration ». - Article 21 : « Le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement. Il assure l’exécution des lois. - Sous réserve des dispositions de l’article 13, il « exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires ». Les ministres sont des chefs de services administratifs. De même, dans le milieu des hauts fonctionnaires, on observe qu’ils sont nombreux à mener une carrière à la fois politique et administrative. Les échanges de personnel entre les domaines sont très fréquents.

La séparation entre l’administratif et le judiciaire est également poreuse. Deux types de passerelles : - L’organisation des tribunaux relève du droit administratif de même que la nomination et le statut des magistrats - L’existence d‘une justice administrative, d’un système juridictionnel administratif (tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et Conseil d’Etat) qui a pour fonction de régler les litiges entre l’Administration et les usagers.

Enfin, l’Administration exerce un contrôle sur les entreprises publiques de même que leur organisation témoigne de la séparation poreuse entre Administration et entreprises publiques. A. Personnes morales de droit public et autorités administratives 1. La personnalité morale de droit public La personnalité est une abstraction mais pas pour autant une fiction juridique puisque cette abstraction produit des effets. Marcel Waline a définit la personne morale comme un centre d’intérêts juridiquement protégés. Pour caractériser la personnalité morale, on met habituellement en évidence un certain nombre d’éléments : - Une personne morale est d’abord un ensemble, un groupement de personnes (syndicats, associations) ou de biens (fondation). - C’est également un ensemble organisé en vue d’une finalité (objectif désintéressé ou non) et l’existence de cette finalité se traduit dans le principe de spécialité qui régit les personnes morales. La personne morale ne pourra agir qu’aux fins de réalisation de cet objectif. - La personne morale est dotée de moyens pour agir (patrimoine et personnel). - C’est un sujet de droit à part entière et peut donc contracter des droits et obligations ainsi que saisir la justice. La création des personnes morales de droit privé résulte de l’initiative de personnes privées, elle est libre. Cette liberté se retrouve dans la liberté de rejoindre cette personne

Page 3: Droit Administratif

3

morale de droit public. D’autre part, l’action de la la personne morale de droit privé est limitée à la sphère du droit privé : elles ne peuvent pas utiliser les prérogatives de puissance publique. Les personnes morales de droit public, quant à elle, se distinguent des précédentes par le fait que leur création n’est jamais d’initiative privée. De plus, il n’y a aucune liberté d’adhésion à ces personnes morales (rattachement automatique à la commune du lieu d’habitation). Leur but se distingue fondamentalement du précédent puisqu’elles poursuivent toujours des objectifs d’intérêt général. C’est ce qui justifie la création d’une personne morale de droit public : l’existence d’un intérêt général. Enfin, elles ont à leur disposition des moyens dont ne disposent pas le précédentes, qui leur sont propres, et en particulier les fameuses prérogatives de puissance publique. Les possibilités d’action sont extrêmement étendues. Liste des personnes morales de droit public

1) Les collectivités territoriales Les collectivités territoriales sont des entités de droit public correspondant à des groupements humains géographiquement localisés sur une portion déterminée du territoire national auxquels l’Etat a conféré la personnalité juridique et le pouvoir de s’administrer par des autorités élues. - L’État, qui intervient sur l'ensemble du territoire, avec une compétence non limité ; - Article 72 de la Constitution : la commune, le département, la région, les COM et les collectivités à statut particulier. Elles ont un domaine de compétence qui est géographiquement limité. 2) Les établissements publics Ils sont créés par la loi soit pour gérer un service public, soit pour regrouper plusieurs personnes morales. A la différence des CT, ils sont régit par le principe de spécialité. Ce qui veut dire que lorsqu'une loi créée une catégorie d'Ets public, elle précise par la même occasion la mission qui est confiée à l'Ets. Un Ets public peut être chargé des activités connexes à la principale. Un Ets public dispose d’une personnalité morale de droit public mais est rattaché à une autre personne publique (Etat ou collectivité territoriale). Ils sont soumis à une tutelle de l’Etat. Les Ets qui sont investis par une mission publique sont de deux sortes : les Ets publics administratifs (EPA) et Ets publics industriels et commerciaux (EPIC). Les EPIC exercent des activités que des entreprises privées pourraient exercer alors que les EPA exercent des activités qui ne peuvent l’être que par des personnes publiques. Exemple d’EPIC : la SNFC gère le service de transport ferroviaire et, éventuellement, quelques parkings de gares, réservations d’hôtels... Les Ets peuvent aussi être créés pour faciliter le regroupement entre plusieurs PM de droit public. On les appelle des Ets publics territoriaux ou des Ets publics de coopération intercommunale (EPCI). Exemple d'Ets publics territoriaux : syndicats de communes, les communautés de commune, les communautés urbaines, les communautés d'agglomération, les métropoles. 3) Les groupements d'intérêts publics (GIP) Il s'agit d'une formule d'apparition relativement récente (loi de 1982). L'idée est d'associer au sein d'une même personne morale, des PM de droit public et des PM de

Page 4: Droit Administratif

4

droit privé. Les GIP sont également soumis au principe de spécialité. La loi qui les institue précise leur champ d'intervention dans un domaine particulier. 4) Les autres PM de droit public « suis generis » - La banque de France (ce n'est plus une Sté anonyme, elle est une PM de droit public avec un statut particulier). La jurisprudence a précisé que « la banque de France est une PM de droit public gérant un service public pour l'essentiel de nature administrative et celle ci revêt une nature particulière et présente des caractéristiques propres ». - La Caisse des dépôts et conciliations, qui depuis la loi du 4 aout 2008, dite loi de modernisation de l'économie a été défini comme un « Ets spécial qui constitue, avec sa filiale, un groupe public au service de l'intérêt général et du développement économique ». 2. Les autorités administratives Nous trouvons en droit administratif de nombreuses personnes physiques qui agissent pour le compte des personnes morales. Ces personnes physiques sont très nombreuses et ont des statuts très variés. En effet, figurent notamment dans cette catégorie des agents administratifs (PDLR, 1er ministre, élus locaux, agents contractuels...). Ces agents ont des pouvoirs, des moyens d'intervention, des attributions plus ou moins importants. Parmi ces agents, certains disposent d'un véritable pouvoir de décision. Ils sont titulaires d'une compétence qui leur permet d'accomplir des actes qui vont créer des droits ou imposer des obligations. Ceux-ci sont ce que l'on appelle des autorités administratives. Une autorité administrative se définit comme une organe ou agent, qui a le pouvoir d'édicter des actes administratifs unilatéraux au nom de la personne morale à laquelle il appartient. Ajoutons que les AI peuvent être des autorités individuelles (une personne physique à elle seule, comme le préfet par exemple) ou des autorités collégiales, soit la réunion d'un groupe investit d'un pouvoir de décision (conseil municipal, conseil général...). Enfin, les AI, parce qu'elles agissent au nom de la PM qui les emploient, engagent la responsabilité de la personne morale. Il existe différents modes de relation entre personne morale et AI, et aussi au sein de chacune. Par exemple, il existe des liens de contrôles des PM sur d'autres PM (contrôle de l'État sur les CT, sur les Ets publics…). En matière de relations entre AI qui appartiennent à une même personne morale de droit public, elles sont régit par le principe hiérarchique qui fait que les autorités de rang inférieur doivent respecter les décisions d'une autorité supérieure, et régit par les règles de compétences, pour qu'il n y ait pas d'empiètement. 3. Les autorités administratives indépendantes Elles sont d’apparition récente. En effet, la formule a été employée pour la première fois en 1978 à propos de la CNIL.

Ce sont des organismes publics non dotés de la personnalité juridique (elles ne sont pas indépendantes d’une PM de droit public). Néanmoins, on s’est efforcé de leur donner une certaine garantie en terme d’indépendance. Elles doivent l’être car elles interviennent dans certains domaines qu’il est important de préserver de pressions (en particulier politique et économique). Ces domaines sont par exemple la protection des citoyens ou des usagers, l’amélioration des relations entre Administration et administrés ou encore la régulation et la surveillance des domaines financier, économique.

On peut citer le médiateur de la République qui est l’une des plus connue. Cet

Page 5: Droit Administratif

5

exemple nous permet de noter qu’une autorité administrative indépendante peut être une autorité unique. Cependant, beaucoup sont collégiales. On peut citer la Commission de Déontologie de la Sécurité ou la Commission Nationale du Débat Public, l’HADOPI (Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet). C’est aussi le cas du CSA ou de l’autorité des marchés financiers.

On pourrait parfois penser que ce sont des autorités juridictionnelles du fait qu’elles sont parfois dotées d’un pouvoir de sanction. Ce n’est pas le cas. Ce sont bien des autorités administratives. Ainsi, le CSA a un pouvoir de sanction.

Leur particularité au sein de l’Administration est leur indépendance. Cela signifie que, dans l’exercice de leurs attributions, ces autorités ne sont soumises à aucune tutelle ni à aucun pouvoir hiérarchique. Toutefois, l’indépendance n’est pas totale dans la mesure où elles sont dépendantes financièrement. De plus, elles agissent au nom de l’Etat et, si elle créent un quelconque dommage, elles engagent la responsabilité de l’Etat.

Depuis quelques années, on assiste à une évolution qui se traduit, en

particulier, par l’attribution, à certaines de ces autorités, de la personnalité morale. Le législateur a indiqué, pour certaines, qu’elles ont la personnalité morale : l’autorité des marchés financiers, la Haute Autorité de Santé, l’Agence Française de Lutte contre le Dopage, l’HADOPI. Ces autorités sont désignées sous le nom d’autorités publiques indépendantes.

La deuxième évolution est issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cette dernière a donné naissance à une nouvelle autorité qui est le défenseur des droits. Il remplace aujourd’hui plusieurs autorités à savoir le médiateur de la République, le défenseur des enfants, la HALDE et la CNDS (Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité). Ce n’est pas la loi mais la Constitution qui donne naissance à cet organisme. La loi constitutionnelle a qualifiée le défenseur des droits d’ « autorité constitutionnelle indépendante ». Le Conseil constitutionnel a précisé dans une décision du 29 mars 2011 que le défenseur des droits constitue une autorité administrative dont l’indépendance trouve son fondement dans la Constitution. Dans la même décision, est aussi précisé que le défenseur des droits ne doit pas être compté au nombre des pouvoirs publics constitutionnels (ne se place pas parmi le Président, le PM, le Parlement…). B. Les finalités de l’action administrative : intérêt général, service public et ordre public L’intérêt général est le fondement de l’action administrative en même temps qu’il en constitue son motif. L’Administration ne peut pas agir pour un autre motif. Sinon, elle peut être sanctionnée par le juge pour un vice appelé le détournement de pouvoir. On peut dire que l’intérêt général correspond aux besoins de la population identifiés par les pouvoirs publics en un lieu donné à un moment donné. La notion est évolutive, tributaire de l’évolution des mœurs, des connaissances scientifiques et technologiques, des idéologies dominantes. On lui trouve divers synonymes : bien commun, utilité publique…

Parfois, le législateur lui-même identifie ce qui est d’intérêt général. Parfois encore, c’est le juge qui va qualifier une activité comme étant d’intérêt général. Ceci dit, certains domaines relèvent traditionnellement de l’intérêt général. Ce sont notamment les activités régaliennes de l’Etat (police, armée, fisc, justice…). Progressivement, l’Etat a pris en charge d’autres activités d’intérêt général qui pourraient aussi être assurées par des acteurs privés : l’éducation, la santé, la production et la distribution d’énergie, d’eau, la mise en place de réseaux de communication…

Page 6: Droit Administratif

6

L’intérêt général connaît un phénomène d’extension. Ainsi, l’intérêt public social, qui concerne la protection et l’amélioration des conditions de vie des individus, est reconnu comme d’intérêt général (création de crèches, colonies de vacances, protection des travailleurs…). Il en est de même pour les intérêts économiques. Le contrôle des prix, les politiques visant à développer l’exportation, le développement de villes ou de régions ont vu le jour en tant que missions d’intérêt général. S’est ajouté ensuite tout ce qui touche à l’utilisation du sol avec l’émergence de la politique d’aménagement du territoire (création de ports, politiques d’urbanisme). Viennent ensuite les préoccupations environnementales. Article 1er de la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature : « La protection des espaces naturels et des paysages, la préservation des espèces animales et végétales, le maintien des équilibres biologiques auquel ils participent et la protection des ressources naturelles contre toutes les causes de dégradation qui les menacent sont d’intérêt général. » La notion suscite de nombreuses critiques. En droit français, elle revêt un caractère volontariste avéré (Rousseau) de laquelle il résulte le fait que le législateur ait l’autorité la plus à même de dire ce qu’est l’intérêt général. Article 6 de la DDHC de 1789 : « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont le droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous soit qu’elle protège soit qu’elle punisse ». Cette conception demeure d’actualité du fait de sa grande adaptabilité. Parmi les mutations les plus remarquables de la notion, retenons en trois : - Elle s’observe par rapport à l’intérêt financier. A l’origine, on considérait que l’intérêt général excluait l’intérêt financier. L’Administration ne pouvait donc pas agir en vue d’un profit financier. Si elle recherchait un profit, elle s’exposait à la sanction pour détournement de pouvoir. A partir du moment où l’Administration a développé des activités dans les secteurs concurrentiels, elle dégage des profits et se préoccupe de la rentabilité de son activé. - D’autre part, il y a eu pendant longtemps une opposition majeure entre intérêt général et intérêt privé. Dans le domaine du droit de propriété privé, il existe une procédure d’expropriation qui permet, pour l’utilité publique, de déposséder un propriétaire privé de son bien. Il a été admis qu’une expropriation pouvait être menée dans des intérêts publics mais, en même temps, dans des intérêts privés. Ainsi, la déviation d’une route présentait un intérêt public comme un intérêt privé dans la mesure où la création de cette nouvelle route était utile au développement d’une usine Peugeot déjà présente dans le secteur. De même, des personnes privées peuvent être investies de missions de service public. Dans ce cas, elles contribuent à la réalisation de l’intérêt général. - La dernière mutation concerne l’idée selon laquelle l’intérêt général ne peut pas toujours être conçu comme un intérêt national unitaire. L’intérêt général national s’est, avec le temps, démultiplié avec le développement d’un intérêt général à l’échelon communal ou départemental. L’identification d’un intérêt général local permet la mise en place de services publics communaux par exemple. La satisfaction de l’intérêt général revêt des modalités principales : - Le maintien de l’ordre public - Le fonctionnement des services publics.

Ces deux notions désignent les activités essentielles de l’Administration. Ces activités sont la prescription de règles, de normes (édiction de réglementations pour organiser la vie sociale). Cette fonction normative s’illustre à la fois en matière de maintien de l’ordre public et dans le domaine des services publics. La première mission de l’Administration est donc l’édiction de ces règles tandis que la deuxième est de fournir à la population des biens et des services. C’est ce qu’on appelle la fonction de prestation. Toute l’activité de l’Administration tient en sa fonction normative ou sa fonction de prestation.

Page 7: Droit Administratif

7

C. Les moyens de l’action administrative : les prérogatives de puissance publique La notion de puissance publique est fondamentale et est souvent présentée comme la rivale de celle de service public.

Jean Rivero définit la puissance publique comme « la traduction, au plan administratif, de la réalité politique qu’est le pouvoir ». En effet, la puissance publique désigne couramment l’Etat, l’autorité gouvernementale et l’Administration au sens organique. Dans cette perspective, la notion évoque fortement l’idée de coercition, de contrainte légitime qui est le monopole de l’Etat.

L’affirmation de la puissance publique sur la société se traduit par le fait qu’elle

dispose de moyens particulièrement forts qui sont ces fameuses prérogatives de puissance publique. Ce sont des moyens d’action dont dispose l’Administration qui n’ont pas leur équivalent en droit privé. Cependant, l’Administration peut tout à fait utiliser des instruments du droit privé pour agir (contrats de nature privée). Elle a le choix contrairement aux personnes privées.

On distingue les prérogatives d’action d’abord. Celles-ci vont permettre à l’Administration d’agir. Pour cela, la première de ces prérogatives est la possibilité d’émettre des actes administratifs unilatéraux. Ce qui traduit ici la puissance publique, c’est l’unilatéralité de ces actes. Ils vont s’imposer aux administrés sans leur consentement (sans qu’il soit consulté). L’Administration a aussi un pouvoir de réquisition. Elle peut réquisitionner des biens et des services. On distingue ensuite des prérogatives de protection. Elles servent à faire obstacle à certaines mesures qui seraient défavorables à l’Administration. Parmi elles, on peut citer : - Le principe d’imprescriptibilité du domaine public - Le principe d’intangibilité de l’ouvrage public (un ouvrage public ne peut pas être détruit quand bien même il aurait été construit de manière irrégulière) - Le principe d’insaisissabilité des deniers publics - Le principe de prescription quadriennale (concerne les créances détenues à l’encontre de l’Administration qui s’éteignent au bout de quatre ans). On a l’impression d’un déséquilibre important entre les moyens de puissance publique et ceux des particuliers. Pourtant, l’Administration est aussi soumises à des contraintes très fortes. L’inégalité est donc à relativiser. II. Le droit administratif A. Les conditions historiques de l’émergence du droit administratif 1. L’œuvre fondatrice de la Révolution et du régime napoléonien Dès l’Ancien régime et même le Moyen Âge, un certain nombre de dispositions encadraient la puissance des dominants. Jusqu’à la Révolution, l’Etat distinguait ce qui relève des relations privées (règles coutumières). En revanche, s’agissant de la puissance publique, vont se dégager des règles dérogatoires visant à définir les conditions d’exercice du pouvoir. En effet, il existe un principe selon lequel le Roi n’est pas sujet aux lois communes. Sur ce fondement, vont être instituées grâce à des édits ou ordonnances royaux des règles dérogatoires qui constituent l’ébauche d’un droit étatique. C’est la naissance de ce qu’on appelle l’absolutisme royal. A partir de là, nous sommes déjà dans une forme d’Etat administratif c’est-à-dire un Etat investit du pouvoir de police. Il va présenter très vite certains traits de caractère que nous retrouvons encore aujourd’hui comme la centralisation (politique et géographique).

Page 8: Droit Administratif

8

Si on considère qu’un droit est un ensemble de règles organisé et cohérent, il n’y avait pas de droit administratif à proprement parlé. Néanmoins, il existait un certain nombre de réglementations qui sont les ancêtres de nos réglementations actuelles. Ainsi, la première réglementation en matière d’urbanisme a été posée par l’édit royal de 1607.

Au niveau des conflits mettant en cause l’Administration, ils étaient confiés pour l’essentiel aux juridictions civiles au sommet desquelles se trouvaient les parlements. Il n’y avait donc pas de différenciation du contentieux administratif. En même temps, dès cette époque, ont commencé à apparaître des juridictions spécialisées telles que les chambres des comptes, les cours des aides, les tables de marbre et le Conseil du Roi. Les parlements intervenaient dans les fonctions administratives en assurant une surveillance sur les agents royaux, sur les autorités municipales et pouvaient intervenir dans l’organisation administrative en édictant des arrêts de règlement. Avec la Révolution, tout ce système a été détruit. Les parlements ont été dissout de même que le Conseil du Roi, les chambre des comptes… Mais la Révolution a surtout bouleversé les grands principes. La Révolution a notamment introduit le principe d’unité nationale. Il n’y a alors plus de privilèges territoriaux. Surtout, la Révolution proclame un certain nombre de libertés individuelles. Parmi ceux-ci, se trouve le principe de séparation des pouvoirs. Cette rupture radicale va se traduire par l’instauration de l’Etat légale, qui repose sur le rôle de la loi. Ainsi, l’article 4 de la DDHC de 1789 confie à la loi le soin de définir les bornes de la liberté individuelle. L’article 5, quant à lui, ajoute « tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché et nul ne peut être contraint de faire ce qu’elle n’ordonne pas ». Tout cela entraine une conception particulière de l’Administration : elle ne peut avoir pour fonction que d’exécuter la loi ce qui veut dire qu’elle est subordonnée à la loi. Notre droit administratif actuel découle directement de cette conception révolutionnaire. En particulier, en découle la mise en place d’un contrôle pris par l’Administration. La période napoléonienne est également décisive pour le droit administratif. On voit la centralisation du territoire se renforcer avec, en même temps, un phénomène d’uniformisation des organes (chaque échelon territorial voit se mettre en place les mêmes organes). Le système est un peu de type militaire : très organisé, très hiérarchisé. Parmi les institutions qui se détachent de cette période figure le préfet.

Ce qui est particulièrement important durant cette période est l’apparition d’une juridiction administrative différenciée. En effet, pendant la période révolutionnaire, les litiges administratifs restaient dans la sphère administrative (jugement appartenait aux autorités administratives elles-mêmes). Sous le régime napoléonien, avec la Constitution du 22 frimaire an 8, est créé le Conseil d’Etat qui n’est pas sans rappeler l’ancien Conseil du Roi. Il a un rôle de conseil du pouvoir mais a aussi des attributions en matière législative, administrative (sommet de l’Administration) mais surtout, il est doté d’attributions juridictionnelles. Il a une fonction de règlement du contentieux administratif. C’est l’article 62 de la Constitution ; « Le CE est chargé « de résoudre les difficultés qui s’élèvent en matière administrative ». Une loi de 1800 institue dans chaque département un conseil de préfecture. Ces conseils sont les ancêtres de nos actuels tribunaux administratifs. 2. Le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires Définition C’est la règle selon laquelle il est interdit aux tribunaux judiciaires, c’est-à-dire à l’ensemble des juridictions soumises à la Cour de cassation, de connaître des litiges administratifs. Histoire

Page 9: Droit Administratif

9

Ce principe est né avant la Révolution, sous l’Ancien régime. Dès cette époque, la puissance publique prend conscience du fait qu’elle doit empêcher les parlements, qui sont les tribunaux ordinaires, de s’immiscer dans les affaires administratives. Ainsi, dans l’édit de St Germains en Laye (février 1641), le Roi rappelle que le rôle des tribunaux est de juger les particuliers et non l’Etat ou l’Administration. Bien sûr, à l’époque, la volonté de soustraire les litiges administratifs aux tribunaux ordinaires ne repose pas sur l’idée de séparation des pouvoirs mais sur l’absolutisme royale soit l’idée de préserver le domaine d’intervention du Roi et sa toute puissance. L’idée de séparation des pouvoirs n’existe simplement pas puisqu’il n’y a même pas de séparation entre administration active et justice administrative c’est-à-dire que c’est ‘Administration elle-même qui règle les contentieux administratifs. Les révolutionnaires opèrent une sorte de retour en arrière dans le domaine avec un retour à l’administrateur/ juge même si certains litiges administratifs sont confiés aux tribunaux ordinaires. L’article 9 de la loi du 24 mai 1872 dispose : « Le CE (créé en 1799) statut souverainement (affirmation d’une justice indépendante) sur les recours en matière contentieuse ». Le Conseil d’Etat est le premier juge administratif. Valeur Malgré ce principe, on constate que les tribunaux judiciaires conservent de nombreuses attributions en matière administrative. Dans un certain nombre de cas, le juge judiciaire est en effet compétent pour juger les litiges administratifs. Cela est dû au fait qu’un certain nombre de principes tiennent en échec le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires : ce dernier n’est pas complètement prééminent. Les principes qui le tiennent en échec sont : - Le principe de plénitude de juridiction du juge judiciaire (il est compétent pour tout ce qu’il souhaite dans les conditions prévues par la loi) ; - Le principe de légalité des délits et des peines ; - Le juge judiciaire est le gardien du droit de propriété et des libertés individuelles. Décision du Conseil constitutionnel du 23 janvier 1987 dite du Conseil de la concurrence : Ce principe de séparation des autorités administrative et judiciaire n’a pas valeur constitutionnelle mais seulement législative puisque le législateur peut confier au juge judiciaire des compétences administratives et donc aller à l’encontre du principe. Néanmoins, le juge administratif dispose d’une compétence réservée en matière d’annulation et de réformation des actes de puissance publique. Le JA est, dans ce domaine, protégé par un principe fondamental reconnu par les lois de la République de valeur constitutionnelle. 3. L’émancipation du droit administratif Le droit administratif a du affirmer son existence en opposition au droit privé vu comme le droit commun pendant longtemps. Tribunal des conflits, 8 février 1875, arrêt Blanco : Il est considéré comme l’acte de naissance du droit administratif. Une petite fille, Agnès Blanco, a été renversée par un wagonnet de la manufacture de tabac de Gironde (service pubic). Les parents intentent une action en réparation du préjudice subit. Le problème est de savoir quel juge est compétent pour statuer sur cette affaire. Les parents d’Agnès Banco saisissent en premier lieu le juge judiciaire mais le préfet estime que ce dernier n’est pas compétent. L’affaire est alors menée devant le tribunal des conflits. Le tribunal des conflits se fonde sur deux textes : les lois du 16 et 24 août 1790 ainsi que le décret du 16 fructidor an 3.

Page 10: Droit Administratif

10

« Le tribunal des conflits décide que la responsabilité qui peut incomber à l’Etat pour préjudice causé aux particuliers par le fait de la personne qu’il emploie dans un service public ne peut être régit par les principes établis dans le Code civil pour les rapports de particuliers à particuliers », « cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue, elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins de concilier droit de l’Etat avec droit privé dès lois, au terme des lois ci-dessus visées, l’autorité administrative est seule compétente pour en connaître ». Cet arrêt est fondamental à plusieurs égards : - Un principe nouveau : l’engagement de la responsabilité de l’Etat pour le fait des personnes qu’il emploie dans ses services publics. En 1873, l’idée est nouvelle dans la mesure où le principe inverse prévalait : celui de l’irresponsabilité de l’Etat fondé sur la souveraineté. C’est une étape essentielle dans la construction de l’Etat de droit puisque l’Administration est alors obligée de réparer les dégâts qu’elle cause ; - Un régime de responsabilité publique : pour le tribunal des conflits, les articles 1382 et suivants du Code civil ne peuvent pas régir la responsabilité publique qui n’est « ni générale, ni absolue, elle a ses règles spéciales » ; - Le principe de répartition des litiges entre les deux ordres de juridictions : la compétence juridictionnelle est déterminée par le droit applicable au procès. L’arrêt Banco va servir de socle au développement d’une jurisprudence qui va permettre de reconnaitre l’application du droit administratif et la compétence du JA à toute une série de cas qui touchent les services publics. CE, 6 février 1903, arrêt Terrier (le bon page 93) : Le Conseil général de Saône et Loire avait institué une prime pour la destruction des animaux nuisibles. Mr Terrier était un chasseur de vipère et s’employait à les détruire mais n’avait pu obtenir la prime du fait de l’épuisement des crédits. Le CE a considéré que la destruction des animaux nuisibles était un service public et que le fait de ne pas verser la prime était une inexécution de service public. CE, 4 mars 1910, arrêt Therond (le bon page 193) : La ville de Montpellier avait conclu avec Mr Therond un contrat en vertu duquel il devait capturer et mettre à la fourrière les chiens errants sur la voie publique. Le CE a considéré que la ville de Montpellier agissait alors dans l’intérêt de l’hygiène et de la sécurité de la population et avait, dès lors, eu pour but d’assurer un service public. Dans la lignée de l’arrêt Blanco, les collectivités publiques autres que l’Etat voient également engagé leur responsabilité sur le fondement de règles de droit public et devant le JA lorsque c’est le fonctionnement des services publics qui est en cause. Tribunal des conflits, 29 février 1908, arrêt Feutry (le bon page 208) : Un individu dont les meules de pailles sont été incendiées par un malade mental échappé d’un asile départemental forme une action en responsabilité. Le tribunal des conflits décide que cette affaire met en cause « l’organisation et le fonctionnement d’un service à la charge du département et d’intérêt public ». Selon lui, les fautes commises dans l’exécution de ce service relèvent du juge administratif. Tribunal des conflits, 11 avril 1908, arrêt de Fond Colombre (le bon page 448) : La responsabilité de la ville de Marseille est mise en cause s’agissant des écluses. B. L’autonomie du droit administratif Le droit administratif est un droit autonome : - Autonomie des sources : le droit administratif a des moyens de créer des règles de droit différents du droit privé (le JA est l’auteur du droit) ; - Autonomie du fond : le contenu de la matière, les règles de droit sont différentes de celles qui s’appliquent au droit privé, notamment concernant un même objet. Cette autonomie est toutefois à relativiser : - Relativisation de l’autonomie des sources : Le JA se borne parfois à reprendre des articles

Page 11: Droit Administratif

11

du Code civil ou des règles de droit privé (droit pénal, droit de la consommation...). Le juge judiciaire peut, lui aussi, reprendre des règles de DA. - Relativisation de l’autonomie de fond : L’activité de l’Administration est en partie régit par le droit privé comme celle-ci se comporte comme un particulier. Ainsi, il y a des contrats privés de l’Administration. C’est ce qu’on appelle le phénomène de gestion privée. La gestion des autorités industrielles et commerciales publiques obéit essentiellement à des règles de droit privé par exemple. Le droit administratif peut être défini comme l’ensemble des notions et des règles applicables à ‘organisation et au fonctionnement des personnes publiques et des personnes privées qui agissent pour satisfaire des besoins d’intérêt général au moyen de prérogatives de puissance publique. C. Les principaux caractères du droit administratif 1. Un droit d’accès difficile Le DA est d’accès difficile pour deux raisons : - Une raison d’ordre pratique : Le DA est issu de sources multiples et, contrairement au droit privé, il ne donne pas lieu à une codification. On reprend seulement les textes qui existent et on les harmonise mais on ne créé pas de véritable code. - Une raison intellectuelle : Le DA est un droit compliqué, hermétique et va en se complexant. 2. Un droit prétorien Le droit administratif est un droit dégagé, élaboré par le juge, d’origine jurisprudentielle. Le droit administratif a été, pour la plus grande partie, élaboré par le Conseil d’Etat et le tribunal des conflits à partir de l’arrêt Blanco.

Ce caractère oppose ce droit au droit civil. La loi intervient aussi mais de façon marginale alors que c’est exactement l’inverse pour le droit civil : l’essentiel est codifié et la jurisprudence ne vient que marginalement compléter les normes du code.

Ceci dit, on observe actuellement une évolution quant aux sources du droit administratif. Cette évolution se traduit par le fait que le législateur intervient plus souvent que par le passé pour poser des règles. On a donc vu se multiplier les lois pour régir les rapports entre administration et administrés, pour créer de nouvelles structures... A cela il faut ajouter la montée en puissance de la jurisprudence constitutionnelle. La jurisprudence du Conseil constitutionnel influe de plus en plus sur les régimes administratifs. Même chose en ce qui concerne le droit communautaire ainsi que la jurisprudence de la CEDH. On observe donc une diversification des sources. Les grands arrêts de la jurisprudence administrative sont les arrêts qui traduisent les grandes règles administratives.

Page 12: Droit Administratif

12

Partie 1 : L’Administration et le droit

Nous vivons dans un Etat de droit. Cela signifie que l’Administration elle-même doit respecter le droit. Elle est donc soumise à ce qu’on appelle le principe de légalité (titre 1). Le corollaire de ce principe est le contrôle qui vérifie que l’Administration respecte bien les règles auxquelles elle est soumise (titre 2).

Titre 1 : Le principe de légalité

Dans la conception des juristes libéraux du XIXème, la notion de légalité désigne le respect par les actes de l’Administration de la loi (entendue au sens stricte). Mais la légalité désigne aujourd’hui plus largement le respect d’un ensemble de normes qui font partie de ce qu’on appelle le bloc de légalité. Certains auteurs, tels que le doyen Vedel, considèrent que dans ce bloc figure l’ensemble des normes juridiques dont le respect s’impose à l’Administration.

Il peut s’établir plusieurs types de rapports entre les normes que l’on va confronter. Il y a deux types de rapport : le rapport de compatibilité et le rapport de conformité.

La compatibilité est une forme assez minimaliste de la légalité alors que la conformité est la notion de la légalité la plus exigeante. Lorsqu’on exige entre la norme inférieure et la norme supérieure un rapport de compatibilité, cela signifie qu’il ne doit pas y avoir de contrariété entre les deux normes. La norme inférieure ne peut pas contredire la norme supérieure mais on tolère des adaptations. C’est la formule la plus fréquente en droit administratif.

Le rapport de conformité est beaucoup plus exigeant. Dans son article, Eizenmann montre que la conformité peut recouvrir deux formes :

Page 13: Droit Administratif

13

- La similitude totale, parfaite des normes. La norme inférieure constitue alors une reproduction de la norme supérieure. - La conformité logique ou rationnelle. Cela signifie que la norme inférieure constitue la concrétisation de la norme supérieure. Il s’agit de mettre en application la norme supérieure donc la norme inférieure découle d’elle. La conformité incluse nécessairement la compatibilité mais l’inverse n’est pas vrai. Le principe de constitutionnalité est d’apparition beaucoup plus récente que le principe de légalité puisque le Conseil constitutionnel n’existe que depuis 1958 et qu’il a fallu attendre que le Conseil constitutionnel produise une jurisprudence créative à partir de 1971. Il désigne l’obligation, pour les normes inférieures, de respect des normes constitutionnelles. La Constitutionnalité est un élément de la légalité puisque les normes de la Constitution s’imposent à l’Administration. De même, on parle aujourd’hui de principe de conventionalité c’est-à-dire qu’on vérifie le respect des conventions internationales par les normes inférieures. Il y a deux définitions de la légalité : - Une définition dynamique d’abord. Dans cet optique, la légalité désigne la situation d’un acte administratif dans sa relation (de compatibilité ou de conformité) avec les normes qui s’imposent à lui. Cela soulève l question de savoir s’il respecte ou non les normes supérieures donc s’il est légal. - Une définition purement statique ensuite. La légalité est alors la hiérarchie des normes soit un ensemble de normes qui est hiérarchisé. Nous allons étudier successivement tous les étages de la pyramide qu’est la hiérarchie des normes.

Chapitre 1 : Le contenu de la légalité : la hiérarchie des normes

Hans Kelsen est l’auteur de La théorie pure du droit. Dans cet ouvrage, il montre que les normes juridiques sont organisées selon un système pyramidal hiérarchisé. Cette hiérarchie dépend pour l’essentiel de la hiérarchie des organes qui produisent les normes. L’idée est que la différence de puissance des organes va entrainer une différence dans la force des normes. Ainsi, les actes du constituant vont s’imposer aux actes pris par le législateur et les actes de l’Administration sont tenus au respect des actes du législateur. On retrouve cette même hiérarchie au sein des actes administratifs : un acte pris par le Premier ministre s’impose à une décision prise au niveau préfectorale. Dans ce chapitre, nous allons examiner les normes des différents niveaux en commençant par les normes en haut de la pyramide.

Section 1 – Les normes constitutionnelles

I. Les articles de la Constitution du 4 octobre 1958 A. Les règles de compétence et de procédure Ces règles se rapportent d’abord à la répartition du pouvoir réglementaire et du pouvoir de nomination des fonctionnaires d’Etat entre les deux plus hautes autorités de l’exécutif qui sont le Président de la République et le Premier ministre (articles 13 et 21 de la Constitution). On peut aussi trouver des règles qui portent sur le contreseing ministériel qui figure sur les actes émanant de ces deux autorités (articles 19 et 22 de la Constitution). Les actes du Président sont contresignés par le PM et par les ministres responsables le cas échéant. Les ministres responsables sont ceux auxquels incombe à titre principal la préparation et l’application des décrets du Président. Pour certains actes du Président, il n’a

Page 14: Droit Administratif

14

pas d’exigence de contreseing (article 19 de la Constitution). C’est le cas pour la nomination du PM (article 8 de la Constitution), le recourt au référendum (article 11), la dissolution de l’AN (article 12), les actes pris en période de crise grave (article 16) ou encore les messages au Parlement (article 18), la nomination de trois membres du Conseil constitutionnel (article 56) et la saisine du Conseil constitutionnel par le Président (article 61). Les actes pris par le PM doivent être contresignés par les ministres chargés de leur exécution (article 22). Ces ministres sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte l’exécution d’un décret. La Constitution attribue également les rôles entre le Parlement et le Gouvernement (articles 34 et 37). B. Les principes de fond Il ya d’abord l’égalité devant la loi de tous les citoyens. On peut citer aussi le principe d’unité et d’égalité devant le suffrage (article 3). Il y a aussi le principe d’égalité de constitution des partis politiques (article 4). L’article 55 de la Constitution pose un principe de supériorité des traités internationaux sur la loi interne. Il faut mentionner encore le principe de libre administration des collectivités territoriales (article 72). Ces différentes dispositions se situent au sommet de la hiérarchie des normes et s’imposent à l’Administration. CE 12 Février 1960 SOCIETE EKY (le bon p.101) : Le Conseil d’Etat contrôle le décret qui établit une contravention au regard de la répartition des matières établit par la Constitution. Ce contrôle est un contrôle de constitutionnalité. II. Le préambule de la Constitution

Ce préambule renvoie à la DDHC de 1789, le préambule de la Constitution de 1946 et la charte de l’environnement de 2004. Le préambule de 1946 impose des principes surtout politiques, économiques et sociaux particulièrement importants mais renvoie aussi aux « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ».

A. La valeur juridique du préambule Le préambule a pleinement valeur constitutionnelle. Préambule de 1946. CE, 7 juillet 1950, Dehaene et autres (le bon page 426) : CE, 11 juillet 1956, Amicale des annamites de Paris (le bon page 317) : Dans cet arrêt, le CE a annulé un arrêté ministériel contraire à un principe fondamental reconnu par les lois de la République, en l’occurrence la liberté d’association. Préambule de 1958. CE, 12 février 1960, Société Eky (le bon page 101) : Il s’agit du contrôle d’un décret qui instituait une contravention. Le CE a accepté d’examiner pleinement un moyen (argument) tiré de la violation par le décret contesté de l’article 8 de la DDHC de 1789 concernant la non rétroactivité de la loi pénale. Ainsi, il reconnaît que la DDHC de 1789 fait partie des sources de légalité. Dans cette même décision, le CE est amené à concilier deux dispositions : l’article 8 de la DDHC de 1789 et l’article 34 de la Constitution de 1958 (domaine de la loi). La conciliation de ces normes permet de reconnaître facilement que, pour le juge, le préambule a valeur constitutionnelle. Le juge concilie des normes de même valeur.

Page 15: Droit Administratif

15

CC, 16 juillet 1971, liberté d’association : Le Conseil constitutionnel est saisie d’une loi portant sur la liberté d’association. Le Gouvernement souhaitait restreindre de façon sévère les possibilités de constitution des associations en mettant en place une procédure d’autorisation pour la création des associations. Le Conseil constitutionnel a déclaré que la loi n’est pas conforme à la Constitution « considérant qu’au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et solennellement réaffirmés par le préambule de la Constitution, il y a lieu de ranger le principe de la liberté d’association, que ce principe est à la base des dispositions générales de la loi de 1901 relative aux contrats d’association, qu’en vertu de ce principe, les associations se constituent librement et peuvent être rendues publiques sous la seule réserve du dépôt d’une déclaration préalable ». Le Conseil constitutionnel opère un contrôle de constitutionnalité des lois à partir d’un PFRLR qui a donc valeur constitutionnelle. Cette décision a été celle de l’émancipation du Conseil constitutionnel vis-à-vis du pouvoir politique. B. Le contenu du préambule 1. Les principes directement issus de la DDHC de 1789 et du préambule de 1946 L’identification de ces normes est le fait, pour l’essentiel, du Conseil constitutionnel dans ses décisions. Il n’invente pas les principes qu’il invoque mais va les chercher dans une source écrite : il ne fait que les identifier. Par exemple, il a reconnu valeur constitutionnelle à la liberté d’aller et venir, à la liberté de commerce et d’industrie, à la liberté d’entreprendre, à la liberté individuelle (englobe le mariage par exemple), l’égalité devant la loi, l’égalité devant la justice, l’égalité devant les charges publiques, l’égalité d’accès aux emplois publiques et un grand nombre de corollaires de l’égalité comme l’égalité de traitement des usagers devant le service public. D’autre part, le Conseil a dégagé des principes relatifs à l’organisation de l’Etat. C’est le cas de l’unité du peuple français, l’indivisibilité de la République et intégrité du territoire nationale, l’indépendance de la juridiction judiciaire, la séparation des pouvoirs. U n certain nombre de principes constitutionnels se rattache à la protection des biens comme le respect de la propriété privée (vaut aussi pour la propriété publique), une juste et préalable indemnisation e cas d’expropriation. Et puis, certains principes se rattachent à la protection des étrangers et ont valeur constitutionnelle : le droit d’asile, une vie familiale normale, la liberté individuelle au même titre que celle des ressortissants français. 2. La charte de l’environnement de 2004

Elle a été adoptée par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005. Plutôt que d’insérer dans le texte même de la Constitution des dispositions concernant l’environnement, le constituant a rattaché la charte par renvoi. Le préambule de 1958 y fait en effet référence. Dans ce texte, on trouve d’abord l’exposé des motifs que le constituant a eu d’ajouter dans le bloc de constitutionnalité la valeur qu’est l’environnement. Elle est composée de 10 articles après les considérants préliminaires. Ils fixent des droits et des principes mais aussi des devoirs en matière d’environnement. Par exemple, « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » (article 1). C’est l’affirmation d’un nouveau droit de l’Homme. Ce droit s’accompagne d’un devoir : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement » (article 2). Par ailleurs, la charte rappelle des principes généraux du droit de l’environnement qui sont le principe de réparation des dommages environnementaux par exemple. Elle affirme aussi le droit d’être informé en matière environnementale et le droit de participer à l’élaboration des

Page 16: Droit Administratif

16

décisions environnementales. Elle pose enfin un principe de conciliation pour arriver à un développement durable (conciliation de la protection de l’environnement, du développement économique et du progrès social). CC, 19 juin 2008, Loi relative aux OGMs : Le Conseil a été amené à examiner la loi sur les OGMs au regard du principe de précaution (article 5) et aussi au regard de l’information des citoyens (article 7). Les dispositions de l’article 5 « comme l’ensemble des droits et devoirs définis dans la charte de l’environnement ont valeur constitutionnelle, elles s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leur domaine de compétence respectif, dès lors, il incombe au CC saisie en application de l’article 61 de la Constitution de s’assurer que le législateur n’a pas méconnu le principe de précaution et a pris des mesures propres à garantir son respect par les autres autorités publiques ». CE, 3 octobre 2008, Commune d’Annecy (le bon page 322) (GAJA) : Dans cet arrêt, le CE reprend la formule du CC. Le juge administratif a donc suivi le juge constitutionnel sur le fait que la charte de l’environnement a bien valeur constitutionnelle. 3. Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République A la différence des textes précédents, quand on parle des PFRLR, on ne sait pas précisément de quels principes il s’agit. Il n’existe pas de liste dans un texte quelconque. Le préambule de 1946 renvoie à ces principes mais le constituant ne nous dit pas quels sont ces principes. Ce sont donc les juridictions qui vont se livrer à un travail dinterprétation voir de création. Le contenu des PFRLR suppose de répondre à trois questions selon Jean Rivero dans un article intitulé Les PFRLR, une nouvelle catégorie constitutionnelle ? et publié à la revue Dalloz : Quelle République ? Quelles lois ? Quels principes ? C’est sous la IIIème République qu’a été inventés la formule de PFRLR et qu’on a vu apparaître des grands principes libéraux. Ne sont visées que les lois qui vont consacrer des droits et libertés fondamentaux. Conseil constitutionnel, 23 janvier 1987, Conseil de la concurrence : Enfin, il y a des principes plus fondamentaux que d’autres. Dans l’article intitulé Doctrine et jurisprudence constitutionnelle et écrit par Georges Vedel, ce dernier explique comment le CC a procédé dans sa pour identifier un PFRLR (celui qui concerne le domaine de compétence constitutionnellement réservé au juge administratif). Georges Vedel était membre du CC lorsqu’a été prise cette décision. La liste des PFRLR est courte puisque le CC a identifié assez peu de ces principes. Il s’agit par exemple du principe de la liberté individuelle, de la liberté d’enseignement, de la liberté de conscience, de l’indépendance de la juridiction administrative, du domaine de compétence réservé au juge administratif, de l’indépendance des professeurs d’université, du respect des droits de la défense, d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi. Ces principes ne sont pas inventés mais ont été trouvés dans un texte. Le CC n’est pas la seule juridiction à identifier des PFRLR puisque le CE a compléter la liste dans un arrêt célèbre, CE, 3 juillet 1996, Koné (le bon page 255) (GAJA) : Un ressortissant malien réfugié en France a été l’objet d’une demande d’extradition par les autorités de son pays. Le PM a pris un décret d’extradition que le malien a contesté. Mr Koné plaide devant le juge administratif que le motif de l’extradition est faux. Il y a un accord bilatéral franco-malien qui stipule que l’extradition ne sera pas exécutée si l’infraction considérée est considéré par la partie requise comme une infraction politique. Le CE estime que ces stipulations doivent être interprété conformément à un PFRLR selon lequel l’Etat doit refuser l’extradition d’un étranger lorsqu’elle est demandée dans un but politique. Cette décision est importante à plusieurs égards. D’abord, au regard du droit de l’extradition puisqu’elle pose une nouvelle règle. Mais, dans ce domaine, le CE avait déjà fixé un certain nombre de principes mais sous l’appellation de PFRLR, sous l’appellation de principes généraux du droit qui n’ont pas la même valeur.

Page 17: Droit Administratif

17

CE ass., 26 septembre 1984 (arrêt Galdeano, le bon page 308) : Le CE avait affirmé un principe général du droit selon lequel on ne peut pas extrader un étranger lorsque le système judiciaire ne respecte pas les droits et libertés fondamentaux de la personne humaine. CE ass., 1er avril 1988 (Bereciartua-Echarri, le bon page 135) : Un nouveau principe général du droit est affirmé. Il est applicable aux réfugiés : un réfugié (au sens de la convention de Genève) ne peut pas être remis à son pays d’origine à l’occasion d’une extradition par un Etat qui reconnaît la qualité de réfugié. Lorsqu’il se prononce ainsi en 1996, sa position n’était pas imprévisible dans la mesure où le CE avait rendu un avis peu de temps avant (novembre 1995) qui se prononçait sur cette même question. Dans l’arrêt Koné, le CE reprend son raisonnement et assimile l’extradition dans un but politique à l’extradition demandée pour une infraction politique. Le fait est que la loi de 1927 les assimilait aussi. Cet arrêt a soulevé un certain nombre d’interrogations notamment sur le fait que JA identifie un PFRLR. Pourtant, le CE l’avait déjà fait avant 1958, en 1956. De plus, la Constitution de 1958 n’a pas privé les juridictions administratives et judiciaires de leur pouvoir d’interpréter la Constitution. Le Conseil constitutionnel n’a donc pas le monopole des PFRLR. Il ne faut pas oublier que les PFRLR ont toujours un support textuel, un fondement écrit. Donc, un juge ne va recherche ces principes que dans les textes. Il y a une différence fondamentale entre les PFRLR et les principes généraux du droit qui existent même sans texte. Cependant, de façon exceptionnelle, le CE a identifié un PFRLR pour lequel on a du mal à trouver un fondement textuel : c’est le principe de continuité du service public. III. Les limites du respect de la Constitution Les actes administratifs doivent respecter les normes constitutionnelles ce qui veut dire que le JA peut opérer un contrôle de constitutionnalité.

Lorsqu’entre la Constitution et l’acte administratif s’interpose une loi, que l’acte administratif a pour objet l’application de cette loi, la loi en question fait écran entre la Constitution et l’acte administratif donc le JA ne peut pas contrôler la constitutionnalité de l’acte administratif. On appelle cette théorie, la théorie de la loi écran. « Quand la légalité d’un acte administratif est contesté pour des motifs tirés de la violation de la Constitution, la position du JA est totalement différente selon qu’une loi s’interpose entre la Constitution et cet acte, auquel cas la loi constitue pour le juge un écran infranchissable et c’est en fonction de la loi seule qu’il apprécie la légalité de l’acte litigieux. Si, au contraire, aucune loi n’est intervenue en la matière, le JA apprécie directement par rapport à la Constitution la légalité de l’acte administratif » (Président Odent, conseiller d’Etat). Si le JA examine la constitutionnalité d’un acte pris en application d’une loi, cela reviendrait à contrôler la constitutionnalité de la loi. C’est un refus de principe qui est extrêmement ancien et qui es partagé par la Cour de cassation. Le CE affirme cette position très tôt. CE, 6 novembre 1936, arrêt Arrighi « En l’état actuel du droit public français, ce moyen n’est pas de nature à être discuté devant le CE statuant au contentieux ». C’est un principe qui a été réaffirmé de façon très régulière. CE ass., 20 octobre 1989, arrêt Roujansky Avec la création du Conseil constitutionnel, la position a été confortée puisqu’il existe une juridiction dont c’est le rôle que de contrôler la constitutionnalité des lois. CE, 19 juin 2006, arrêt Association eaux et rivières de Bretagne L’association contestait devant le JA un arrêté municipal qui posait des règles techniques en matière d’élevage destinées à protéger la qualité de l’eau. Elle le contestait au regard des articles 1, 2 et 6 de la charte de l’environnement. Le CE répond : « Lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en œuvre des principes énoncés aux articles 1, 2 et 6 de la charte de l’environnement, la légalité des décisions administratives s’apprécie par rapport à ces dispositions sous réserve, s’agissant des dispositions législatives antérieures à l’entrée en vigueur de la charte, qu’elles ne soient pas incompatibles avec les

Page 18: Droit Administratif

18

exigences qui découlent de cette charte ». Le raisonnement rappelle celui de l’écran législatif : si on peut trouver un texte de loi qui applique la charte, il n’y a pas de contrôle entre la charte et l’acte administratif. C’est une forme d’écran législatif étendue car on va faire jouer le rôle d’écran à la loi qui n’est pas celle en application de laquelle l’acte administratif a été pris.

Le CE nous dit qu’il y a une hypothèse dans laquelle il ne fera pas jouer l’écran législatif, c’est l’hypothèse où les dispositions de la loi sont incompatibles avec la charte en même temps qu’elles lui sont antérieures. C’est la théorie de l’abrogation implicite qui a été développée de façon plus solennelle : CE ass., 15 décembre 2005, arrêt Ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité et syndicat national des huissiers de justice (le bon page 570) Le CE décide qu’il n’y a pas d’écran législatif lorsque la loi est antérieure et contraire à la norme constitutionnelle invoquée par les requérants, en l’occurrence la liberté syndicale posée par le préambule de la Constitution. La disposition constitutionnelle est plus récente donc abroge la loi postérieure : le rapport n’est que chronologique et pas hiérarchique. Par ce raisonnement, le JA procède quand même à une sorte de contrôle de constitutionnalité de la loi sans le dire.

Cette théorie de l’écran législatif fonctionnait aussi dans le rapport entre AA et le droit international. Il se peut en effet que l’AA soit contrôlé au regard des conventions internationales (contrôle de conventionalité). Cette solution a été abandonnée en 1989. CE ass., 20 octobre 1989, arrêt Nicolo D’autre part, la théorie de l’écran transparent est venue remettre en cause celle de l’écran législatif. Cette théorie est apparue à propos du contrôle entre un AA et le droit communautaire. Si la loi est seulement une loi cadre qui attribue des compétences sans poser de règles de fond (pas de densité, de contenu), elle s’analyse comme un écran transparent puisqu’elle ne peut pas déterminer le contenu d’un acte administratif. Ce type de loi ne peut pas empêcher un contrôle de l’AA au regard d’une norme supérieure. CE, 17 mai 1991, arrêt Quintin (revue de droit public 1991 page 1429 avec les conclusions de Mr Abraham) Ce que révèle ces éléments de recul de cette théorie, c’est son archaïsme. Tenant compte de ces critiques, il y a une évolution majeure qui a été introduite par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008. Elle ajoute un article 61-1 à la Constitution qui dispose : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantie, le Conseil constitutionnel peut être saisit de cette question sur renvoi du Conseil d’Etat ou de la Cour de cassation qui se prononcent dans un délai déterminé ». Cet article introduit une nouvelle procédure précisée par la loi organique du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1. Par la suite, est intervenu un décret d’application du 16 février 2010. Ces textes mettent en place la procédure de la QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité). Une juridiction du fond peut être saisit par une des parties au litige d’un moyen qui est un moyen d’inconstitutionnalité de la loi. Lorsqu’il est saisit de ce moyen, le juge vérifie trois conditions : - Que la loi est bien applicable au litige dont il est saisit - Que la loi n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel (sauf changement de circonstances) - Que la question présente un caractère sérieux. Si ces conditions sont réunies, la juridiction transmet la QPC à la Cour de cassation ou au CE selon l’ordre dans un délai de huit jours. La décision de renvoi ne peut faire l’objet d’aucun recours. Une fois que la question a été renvoyée à la juridiction suprême, la juridiction de fond sursoit à statuer. Le CE et la Cour de cassation disposent d’un délai de

Page 19: Droit Administratif

19

trois mois pour décider de renvoyer ou non la QPC au Conseil constitutionnel. Si le Conseil constitutionnel est saisit, il dispose d’un délai de trois mois pour se prononcer sur la question. A l’heure actuelle, le Conseil constitutionnel est submergé par les QPCs donc ce délai est bref. Le Conseil peut donner une réponse négative (la loi ne méconnait pas un droit ou une liberté reconnu par la Constitution) ou une réponse positive (il y a bien une contrariété de la loi avec la Constitution). En cas de réponse positive, l’article 62 de la Constitution nous précise que « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produit sont susceptibles d’être remis en cause ». La loi est donc seulement abrogée et non annulée. Le juge peut moduler les effets de cette abrogation pour qu’il n’y ait pas d’atteinte excessive à la sécurité juridique. La juridiction du fond, saisie la première de la QPC, devra tirer la conséquence de la décision du Conseil constitutionnel sur l’affaire dont elle est saisie. Enfin, la QPC peut être soulevée pour la première fois devant le CE ou la Cour de cassation. Le juge ne peut pas soulever d’office une QPC. La réforme est importante pour notre système juridique. C’est une procédure qui introduit le contrôle de constitutionnalité a posteriori et vient donc compléter le contrôle a priori de l’article 61 (fait avant la promulgation des lois). C’est un contrôle concret puisque développé à l’occasion de l’application de la loi à un litige. L’intérêt est aussi de renforcer le respect de la Constitution par le législateur. Enfin, c’est une procédure qui ouvre aux citoyens un recours devant le Conseil constitutionnel même s’il est indirect. C’est donc un progrès de l’Etat de droit. Cette QPC est entrée en vigueur le 1er mars 2010. Conseil constitutionnel, 28 mai 2010 : Le Conseil avait été saisit par le CE de dispositions législatives relativement récentes qui concernaient la cristallisation des pensions versées aux ressortissants d’anciennes colonies françaises qui avaient servis dans l’armée française. C’était la première décision du Conseil concernant la QPC. Il a reconnu que ces dispositions étaient contraires au principe d’égalité puisque les anciens combattants n’étaient pas traités de façon égalitaire avec les anciens combattants de nationalité française. Il a abrogé ces dispositions législatives à compter du 1er janvier 2011. La date est différée afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité constatée. Depuis lors, sont intervenues de très nombreuses décisions.

Section 2 – Les normes internationales

La principale question qui va nous occuper est celle de la place qu’occupent les traités internationaux dans la hiérarchie des normes. Sur ce point, on peut dire que les traités et accords internationaux qui constituent le droit international originaire (tout comme les stipulations issues du droit dérivé soit les textes pris par les institutions mises en place par les traités) ont en droit interne une place qu’on appelle infra constitutionnelle et supra législative (sous la Constitution et au dessus de la loi). Mais l’autorité des stipulations conventionnelles suppose d’abord le respect de certaines conditions. I. L’introduction en droit interne des normes internationales Le droit international figure dans la Constitution de 1958, dans le titre 6 et des articles 52 à 55. Notre Constitution distingue les traités de tous les autres accords internationaux (art. 52). Les traités sont négociés et ratifiés par le Président de la République alors que les accords peuvent être négociés et approuvés par le Premier ministre ou les autres ministres, le Chef

Page 20: Droit Administratif

20

de l’Etat étant seulement informé de leur négociation. Les conditions d’introduction de ces textes dans notre droit interne sont d’abord la signature de l’acte et sa ratification. Cette dernière peut intervenir sous la forme du vote d’une loi par le Parlement (art. 53 al. 1), d’un vote des populations intéressées (cessession ou autonomie) (art. 53 al. 2) ou d’un référendum de l’article 11 (ensemble de la population). La dernière condition d’entrée en vigueur est la publication.

Sur ces aspects, le JA peut exercer un contrôle qui peut porter par exemple sur l’existence des actes de signature et sur leur régularité. CE, 18 décembre 1983, arrêt SARL du parc d’activités de Bozelle CE, 5 mars 2003, arrêt Aggoun CE, 8 juillet 2002, arrêt Commune de Porta (le bon) : Le JA considère qu’il ne peut pas contrôler la constitutionnalité d’un décret publiant un traité si la ratification de ce traité a été autorisée par une loi (application de la théorie de l’écran législatif).

En l’absence de ratification, le traité n’est pas introduit en droit français. CE, 18 avril 1951, arrêt Election de Nolay (le bon page 189) : Dans cette affaire, le CE relève que, bien qu’elle ait été publiée au journal officiel, la DDHC de 1948 n’a pas été introduite dans l’ordre juridique interne faute de ratification. CE ass., 21 décembre 1990, arrêt Confédération nationale des associations familiales catholiques (le bon page 369) : La réponse est toujours la même : la DDHC de 1948 n’a pas été ratifiée donc sa méconnaissance ne peut pas être soulevée devant un juge français. Il est possible de saisir le Conseil constitutionnel (art. 59 de la Constitution). En cas de doute sur la conformité d’un traité à la Constitution, les autorités compétentes peuvent le saisir. Si le Conseil constate qu’une ou plusieurs stipulations sont contraires à la Constitution, le traité en cause ne peut être ratifié ou approuvé qu’après modification de la Constitution. Conseil constitutionnel, 19 novembre 2004 : Le Conseil avait été saisit par le Président du traité établissant une Constitution pour l’Europe. Le Conseil décide que, pour que la ratification de ce traité soit possible, il faut une révision de la Constitution. La deuxième condition est la publication de l’acte international. Une fois ratifié et publié, l’acte entre en vigueur. Mais, une fois entrée en vigueur, un tel acte peut-il être appliqué aux particuliers ? Inversement, les particuliers peuvent ils invoquer un traité international devant le juge ? Ces questions renvoient au problème de l’effet direct de la norme internationale sachant que ces textes ne sont conçus que pour régir les relations réciproques des Etats entre eux. Néanmoins, on admet qu’un traité peut avoir des effets directs lorsqu’il créé des droits et obligations à destination des individus. Pour qu’il y ait effet direct, encore faut il que les stipulations en question soient à la fois complètes, inconditionnelles et suffisamment précises. CE, 23 avril 1979, arrêt GISTI (Groupement d’information et de soutien des travailleurs immigrés) (le bon page 142) : La clause de réciprocité apparaît à l’article 55 de la Constitution, article qui dispose que : « Les traités ont une autorité supérieure à celle des lois sous réserve de leur application par l’autre partie ». Il faut comprendre qu’un traité qui ne serait pas appliqué par l’autre partie est, de ce fait, inapplicable dans l’ordre interne. La question de l’appréciation de la réciprocité peut être posée au juge. Pendant longtemps, le CE a estimé qu’il n’était pas compétent pour apprécier l’application des stipulations d’un traité par l’autre partie. Le juge s’estimant incompétent, il renvoyait au ministre des affaires étrangères une question qu’on appelle une question préjudicielle. Il attend la réponse du ministre pour statuer sur le litige dont il est saisi. CE ass., 29 mai 1981, arrêt Rekhou (le bon page 220) sur la non-application de l’Algérie des accords d’Evian :

Page 21: Droit Administratif

21

Cette solution a été confirmée en 1999 alors que tout le monde attendait un revirement de jurisprudence puisqu’entre temps, était monté en puissance le droit au procès équitable qui implique l’indépendance du juge vis-à-vis des parties au litige comme au pouvoir exécutif. CE ass., 9 avril 1999, arrêt Mme Chevrol-Benkeddach (le bon page 115) : Le JA ne voulait pas s’immiscer dans des considérations politiques et diplomatiques et considérait que la clause de réciprocité est une notion ambiguë. Cette jurisprudence a fini par être abandonnée. Le revirement est intervenu. CE, 9 juillet 2010, arrêt Mme Cheriet-Benseghir (le bon) : « Considérant qu’au terme du quatorzième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 « La République française fidèle à ses traditions se conforme aux règles du droit public international », qu’au nombre de ces règles figure la règle pacta sunt servanda qui indique que tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi, qu’il appartient au JA lorsqu’est soulevé devant lui un moyen tiré de ce qu’une disposition administrative a, à tort, sur le fondement de la réserve énoncée à l’article 55, soit écarté l’application de stipulations d’un traité international, soit fait application de ces applications de vérifier si la condition de réciprocité est ou non remplie ». Il n’y a donc plus de questions préjudicielles renvoyées au ministre des affaires étrangères. II. La place des normes internationales dans la hiérarchie des normes A. La primauté des normes internationales sur les actes administratifs Cette solution n’a pas été admise d’emblée. Sous la IIIème République et pendant longtemps, on a considéré que le droit international n’engageait que l’Etat vis-à-vis des autres Etats et donc que ces questions étaient de nature purement diplomatique. Dès lors, le JA n’avait pas à connaître de rapport entre l’acte administratif et le droit international. En 1946, parce que l’article 26 de cette Constitution reconnaît aux traités force de lois et parce que l’article 28 dispose que : « Les traités et accords internationaux ont une valeur supérieure à celle des normes de droit interne », une évolution a eu lieu : le JA a accepté de vérifier par les actes administratifs du droit international. CE ass., 30 mai 1952, arrêt Mme Kirkwood (le bon page 291) : Mme Kirkwood avait épouse un américain dont elle avait ensuite divorcé. Son mari l’accusait d’avoir enlevé leurs enfants. Le Gouvernement des EU a demandé à la France d’extrader cette dame. Le Gouvernement français a fait droit à cette demande en prenant un décret d’extradition adopté en septembre 1951. Ce décret était un acte administratif. Mme Kirkwood demande au CE d’annuler ce décret d’extradition en invoquant notamment la convention franco-américaine qui date de 1909. Cela pose la question du respect du décret de la convention internationale. Le JA accepte d’examiner le moyen, de contrôler l’AA au regard de la convention internationale et annule le décret d’extradition comme pris en violation de cette convention. L’arrêt signe la primauté des normes internationales sur les actes administratifs.

Cette solution est absolument constante qui vaut pour les traités et accords internationaux généraux et aussi pour les normes communautaires. Le juge exige quand même, pour procéder à ce type de contrôle, que le requérant développe sur ce point un moyen suffisamment précis (stipulation utile). Les AA doivent aussi respecter les principes du droit international. CE, 23 octobre 1987, arrêt Société Nachfolger (le bon page 319) : Il s’agissait de la destruction en haute mer par la marine nationale d’une épave bourrée d’explosifs. La question était de savoir si le Gouvernement français pouvait décidé de détruire cette épave sachant que la haute mer est régit par le droit international public. Le CE a décidé que cette destruction ne portait atteinte à aucun principe général du droit international. Le droit communautaire s’impose aux AA comme le droit international général. De la

Page 22: Droit Administratif

22

même façon, le droit communautaire dérivé s’impose à l’Administration. En droit communautaire dérivé, il faut distinguer les règlements des directives communautaires. Les règlements communautaires (art. 288 al. 2 du TFUE) sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans les Etats membres. Les directives communautaires (art. 288 l. 2 du TFUE) « lient les Etats membres quant aux résultats à atteindre tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ». Le règlement s’impose beaucoup plus facilement aux AA que la directive qui demande une transposition. En revanche, la primauté de la directive a pu apparaître plus aléatoire c’est pourquoi il a fallu davantage de temps pour imposer aux AA le respect des directives. La primauté de la directive sera apprécié différemment à l’égard des actes réglementaires et à l’égard des actes individuels (dans les deux cas, ce sont des AA). Le règlement est un acte général et impersonnel alors que l’acte individuel s’applique à quelques personnes identifiées. - La directive s’impose aux actes réglementaires. CE, 28 septembre 1984, arrêt Confédération des sociétés de protection des animaux de France (tables du le bon page 512) : Le CE a admis qu’un particulier (ou une confédération) peut attaquer le règlement pris pour la transposition d’une directive en se fondant sur la non-conformité du règlement avec le texte communautaire. CE ass., 3 février 1989, arrêt Compagnie Alitalia (le bon page 44) : Un particulier peut demander aux autorités détentrices du pouvoir réglementaire de modifier un règlement qui ne serait plus compatible avec les objectifs d’une directive et, en cas de refus, il est possible de déférer ce refus au juge administratif en invoquant son incompatibilité avec une directive communautaire. CJCE, 17 décembre 1970, arrêt Société Sacé contre ministre des finances de la République italienne (recueil page 1213) : La CJCE considère que les directives exprimant une obligation claire, précise et inconditionnelle sont susceptibles de produire des effets directs dans les relations entre les Etats et les particuliers en l’absence de transposition dans les délais impartis. Le Conseil d’Etat français ne voit pas les choses de la même façon. CE, Ass. 22 décembre 1978, arrêt Cohn-Bendit (le bon page 524): Daniel Cohn-Bendit avait fait l’objet d’une mesure d’expulsion et il a contesté cet acte administratif individuel. Pour lui, la décision en cause viole une directive communautaire qui date de 1964 et qui concerne les mesures applicables aux étrangers. Pour que le raisonnement fonctionne, il faudrait admettre l’effet direct de la directive. ‘Quelque soit d’ailleurs les précisions qu’elles contiennent, les directives ne peuvent être invoquées par les ressortissants d’un Etat membre à l’appui d’un recours contre un acte administratif individuel » répond le Conseil d’Etat. Le CE répond par la négative. Il s’oppose à la jurisprudence Société Sacé. Cette position a été progressivement contournée avant qu’un arrêt de 2009 n’abandonne définitivement la solution. Les moyens de contourner cette position est d’abord la possibilité de se prévaloir d’une directive communautaire par le biais de ce qu’on appelle une exception d’illégalité. CE, 8 juillet 1991, arrêt Palazzi (le bon page 267) : En l’occurrence, il s’agissait d’un recours contre un refus de renouvellement d’un titre de séjour donc un acte individuel qui vise un étranger. Ce refus avait été pris en application d’un règlement administratif (acte général) lui-même intervenu pour assurer la transposition d’une directive communautaire. L’exception d’illégalité, à l’occasion du recours, à dire que cet acte individuel est nécessairement illégal parce qu’il est pris en application d’un règlement lui-même illégal parce qu’il transpose de façon imparfaite et seulement partielle la directive communautaire en cause. Ce raisonnement est admissible devant le JA puisqu’il accepte de vérifier le respect de la directive par un règlement. Parmi les arrêts qui ont contribué à contourner la jurisprudence Cohn-Bendit :

Page 23: Droit Administratif

23

CE, Ass. 6 février 1998, arrêt Tête (le bon page 30) : Même un régime jurisprudentiel doit être conforme avec une directive communautaire lorsque celle-ci n’a pas été transposée par d’autres dispositions telles qu’une loi ou un règlement. La jurisprudence permet au justiciable de faire écarter une norme nationale incompatible avec une directive. C’est ce qu’on appelle l’invocabilité d’exclusion. Mais ce qui manquait encore c’est ce qu’on appelle l’invocabilité de substitution qui revient à faré bénéficier le justiciable de la norme communautaire directement en l’absence d’une disposition nationale. CE, Ass. 30 octobre 2009, arrêt Mme Perreux (GAJA) : Cet arrêt opère un revirement de jurisprudence en abandonnant expressément la solution Cohn-Bendit. En l’espèce, Mme Perreux était une magistrate de l’ordre judiciaire qui contestait un refus de l’Administration de la nommer sur un poste qu’elle convoitait : chargée de mission à l’ENM. C’était le troisième qui lui était refusé alors qu’elle remplissait les conditions requises. Mme Perreux pense que le refus est lié à son engagement syndical. Elle invoque à l’occasion du recours contre un acte individuel une directive de mai 2000, directive qui comporte des aménagements s’agissant des règes concernant la charge de la preuve. Cette directive devait donner lieu à une loi de transposition, loi qui, au moment du recours, n’a pas encore été adoptée ou n’est pas entrée en vigueur sachant que le délai de transposition est depuis longtemps écoulé. Le CE se trouve de nouveau confronté à la question de savoir s’il peut appliquer directement les dispositions d’une directive communautaire en l’absence de transposition de cette directive à l’occasion d’un recours contre un acte administratif individuel. Le CE va d’abord rappeler que le traité de l’UE impose la transposition des directives en droit interne. En outre, en application de l’article 88-1 de la Constitution, il s’agit d’une obligation constitutionnelle. A partir de là, le CE juge que « il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit communautaire, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques ». Il en découle que « tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non règlementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ». B. La primauté de la Constitution sur les normes internationales La Constitution est au-dessus des normes internationales dans la hiérarchie des normes. C’est une affirmation qui peut se prévaloir de deux séries d’arguments : - Les dispositions de la Constitution elle-même ; - La jurisprudence des juridictions de l’ordre interne.

S’agissant des relations entre droit international et droit interne, il existe deux écoles : une école dualiste et une école dite moniste. Pour les dualistes, le droit international n’a de valeur dans l’ordre interne que dans la mesure où il y a été introduit par un acte juridique de réception. De cette façon, la norme internationale perd sa spécificité et est complètement assimilée à l’ordre interne. Pour les monistes, le droit international est directement applicable de la même façon que les normes internes. Il n’y a pas besoin de formalités particulières. Au sein de cette école, il y a également un mouvement qui prône la primauté du droit international : celui-ci aurait la plus haute valeur. CJCE, 15 juillet 1964, arrêt Costa contre Enel Dans le droit interne de chaque Etat, la <constitution est la norme suprême parce qu’elle est l’expression du pouvoir originaire. C’est la Constitution qui va déterminer la place du droit international dans l’ordre juridique national. En effet, la Constitution peut opter pour l’un ou l’autre des systèmes et l’inscrire expressément dans ses dispositions. Dans la Constitution de 58, ces dispositions sont au nombre de deux. Il s’agit de l’article 54 qui subordonne la ratification d’un traité international contraire à la Constitution à une révision constitutionnelle et l’article 55 qui prévoit que les traités et accords internationaux

Page 24: Droit Administratif

24

régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois. Mais la lecture de la Constitution ne permet pas d’affirmer des certitudes si le traité

régulièrement ratifié doit ou non prévaloir sur la Constitution en cas de contrariété. En cas de contrariété, il faut modifier la Constitution. Au bout du compte, la norme qui doit subir une modification est la Constitution. Cependant, le constituant garde le dernier mot dans cette procédure puisque, s’il n’y a pas révision de la Constitution, le traité n’entrera pas en vigueur dans l’ordre interne. D’autre part, à partir du moment où on considère que la Constitution est à même d’assigner la place des traités dans l’ordre interne, cela signifie que la Constitution a nécessairement une autorité supérieure. 1. Le Conseil constitutionnel Conseil constitutionnel, 19 novembre 2004, Traité établissant une Constitution pour l’Europe : Le Conseil constitutionnel se réfère à l’article 88-1 de la Constitution. Cet article dispose : « La République participe à l’Union Européenne constituée d’Etats qui ont choisi librement d’exercer en commun certaines de leurs compétences ». De cet article, le Conseil constitutionnel déduit que « le constituant a ainsi consacré l’existence d’un ordre juridique communautaire intégré à l’ordre juridique interne et distinct de l’ordre juridique international ». Il affirme donc la spécificité de l’ordre juridique communautaire au sein de l’ordre juridique international et confirme l’existence d’un fondement qui lui est spécifique : l’article 88-1 de la Constitution. Conseil constitutionnel, 10 juin 2004, Loi sur la confiance dans l’économie numérique : Le Conseil constitutionnel avait déjà précisé que l’article 88-1, bien que ne portant pas sur la hiérarchie des normes à proprement parlé, constitue le fondement du principe de la primauté du droit communautaire. Mais ce principe ne modifie pas la hiérarchie des normes telle que fixée dans l’ordre juridique interne par la Constitution. En effet, le Conseil constitutionnel affirme la primauté de la Constitution sur le droit international, y compris le droit communautaire.

Le Conseil constitutionnel tire de l’article 88-1 l’idée selon laquelle « la transposition en droit interne d’une directive communautaire résulte d’une exigence constitutionnelle » et qu’il lui appartient donc d’en garantir le respect.

En l’espèce, il était saisi d’une loi de transposition d’une directive communautaire et il va préciser le contrôle qu’il peut exercer sur ce type de loi. Il refuse de contrôler la constitutionnalité de cette loi lorsqu’elle ne fait que reprendre la directive et applique ainsi le raisonnement de la directive écran.

Le Conseil d’Etat précise que l’existence d’une disposition expresse contraire à la Constitution peut faire obstacle à cette obligation de transposition.

Le Conseil constitutionnel précise par ailleurs dans une décision ultérieure qu’il ne

peut censurer une loi transposant fidèlement une directive que dans le cas où la directive va à l’encontre d’une règle ou d’un principe inhérent à l’identité constitutionnelle française. Conseil constitutionnel, 27 juillet 2006, Loi sur le droit d’auteur. Le raisonnement consiste à poser une sorte de présomption de constitutionnalité des lois de transposition. Dans toutes ces décisions, le Conseil constitutionnel cherche à trouver un équilibre entre sa mission qui consiste à contrôler la constitutionnalité des lois et le respect des engagements européens de la France. Cette jurisprudence assure la primauté de la Constitution sur le droit communautaire pour plusieurs raisons. D’abord, c’est sur le fondement de la Constitution qu’est effectué le contrôle. D’autre part, la transposition d’une directive qui serait contraire aux principes

Page 25: Droit Administratif

25

fondamentaux de la Constitution serait inconstitutionnelle et donc ne pourrait pas être. 2. Le Conseil d’Etat Le CE s’est prononcé avant le Conseil constitutionnel pour la primauté de la Constitution. CE, ass. 3 juillet 1996, arrêt Koné : L’arrêt dit que les stipulations de l’accord franco-malien doivent être interprétées conformément à un PFRLR (valeur constitutionnelle). D’autre part, l’accord était silencieux sur la question de l’extradition demandée dans un but politique alors que la loi interne se prononçait. Le principe constitutionnel et l’accord disaient donc deux choses différentes. Au bout du compte, c’est la version constitutionnelle qui prévaut. C’est donc dès 1996 que le juge administratif a pris position en faveur de la primauté de la Constitution. De plus, le Conseil d’Etat accepte de soumettre les traités internationaux au contrôle de constitutionnalité. CE, ass. 30 octobre 1998, arrêt Sarran-Levacher et autres (le bon page 369) : Sarran-Levacher et autres forment un recours contre un décret organisant la consultation populaire en Nouvelle Calédonie prévue par l’article 76 de la Constitution. A l’appui du recours, ils invoquent les stipulations du Pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques ainsi que celles de la CEDH. Cela revient à confronter la Constitution avec la CEDH puisque le décret en cause ne faisait que reprendre l’article 76 de la Constitution. Le Conseil d’Etat nous dit que « si l’article 55 de la Constitution dispose que les traités ont une autorité supérieure à celle des lois, la suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne s’applique pas dans l’ordre juridique interne aux dispositions de nature constitutionnelle ». Cela signifie que les dispositions constitutionnelles sont, par nature, supérieures au droit international et que le JA fera prévaloir les dispositions constitutionnelles, même sur les traités postérieures. CE, 3 décembre 2001, arrêt Syndicat national de l’industrie pharmaceutique : Le principe de la primauté du droit communautaire ne saurait remettre en cause dans l’ordre juridique interne celui de primauté de la Constitution. Le juge administratif dédouble donc l’ordre juridique interne et l’ordre juridique international. CE, ass. 8 février 2007, arrêt Société Atlantique et Lorraine et autres (GAJA) : Etait en cause une directive de 2003 qui venait instituer un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Pour sa transposition, est intervenue une ordonnance du 15 avril 2004 ratifiée par la loi du 9 décembre 2004. Sur la base de cette directive, est intervenu un décret du 19 août 2004 transposant l’annexe 1 de la directive (établissait une liste des activités relevant de ce système d’échange). La société Arcelor attaquait ce décret aux motifs qu’il ne prenait pas en compte certaines activités et en particulier l’industrie du plastique. La société invoquait que le décret était contraire au principe d’égalité. La question qui se posait au CE était alors celle de la constitutionnalité d’un règlement pris pour la transposition d’une directive communautaire. C’était une question nouvelle. La solution dégagée combinait celle de la jurisprudence Sarran-Levacher qui affirme la primauté de la Constitution et celle du Conseil constitutionnel sur l’obligation constitutionnelle de transposer les directives qui repose sur l’article 88-1. Le CE a estimé que la validité d’une directive communautaire devait être appréciée par rapport au droit communautaire toutes les fois que les principes constitutionnels invoqués ont un équivalent en droit communautaire. A partir de là, il s’agit de rechercher la coïncidence entre les deux droits. Si le même principe existe dans les deux droits, cela permet de confier la résolution de la question à un seul juge. « Il appartient au JA saisit d’un

Page 26: Droit Administratif

26

principe de valeur constitutionnel de rechercher s’il existe une règle ou un principe général du droit communautaire qui, eu égard à sa nature et à sa portée tel qu’il est interprété en l’état actuel de la jurisprudence du juge communautaire, garantit par son application l’effectivité du respect de la disposition ou du principe constitutionnel invoqué ». Il y a donc deux possibilités : - S’il existe une règle ou un principe général en droit communautaire qui coïncide avec la règle ou le principe constitutionnel invoqué, il faut vérifier la conformité de la directive à ce principe communautaire. Si le respect ne présente pas de difficulté, le JA peut statuer alors que s’il ne présente pas de difficulté, il doit saisir la CJUE d’une question préjudicielle. - Dans le cas contraire, « s’il n’existe pas de règle ou de principe général de droit communautaire garantissant le respect du principe constitutionnel invoqué, il revient au JA d’examiner directement la constitutionnalité des dispositions règlementaires contestées ». Dans ce cas, on retrouve la primauté de la Constitution sur le droit communautaire. Le JA se reconnaît également la compétence pour apprécier la légalité externe des règlements de transposition lorsqu’il ne s’agit pas de dispositions précises et inconditionnelles de la directive. En l’espèce, il existe un équivalent en droit communautaire du principe constitutionnel invoqué et une difficulté sérieuse donc le JA a envoyé une question préjudicielle à la CJCE. CJCE, 16 décembre 2008 : Selon la Cour, la directive en cause ne méconnait pas le principe communautaire d’égalité. CE, 3 juin 2009 : De ce fait, le CE rejette le recours de la société Arcelor. Cette jurisprudence Arcelor a été étendue au contrôle de conventionalité de la loi. CE, 10 avril 2008, Conseil national des barreaux et autres (le bon page 130) : Le CE applique le même raisonnement pour déterminer si une directive transposée par une loi et un décret (attaqué devant le CE) est compatible avec les droits fondamentaux garantis par la CEDH. La Constitution n’est donc pas en cause. Le CE accepte de procéder au contrôle en le justifiant : « dans l’ordre juridique communautaire, les droits fondamentaux garantis par la CEDH sont protégés en tant que principes généraux du droit communautaire ». Le JA peut contrôler une directive au regard des principes fondamentaux de l’ordre communautaire. 3. La Cour de cassation Cour de cassation, Ass. Plen., 2 juin 2000, Melle Fraisse : La Cour de cassation reprend pratiquement mot à mot la formule utilisée par le CE dans l’arrêt Sarran-Levacher. C. La primauté des normes internationales sur la loi L’article 55 de la Constitution affirme la primauté des traités sur la loi et pose une réserve de réciprocité. Il vise uniquement les traités et accords internationaux et exclue donc la coutume internationale. CE, ass. 6 juillet 1997, arrêt Aquarone : De même, le Conseil d’Etat a précisé que l’article 55 ne concerne pas les principes généraux du droit international. CE, 28 avril 2000, arrêt Paulin : « Ni l’article 55 de la Constitution, ni aucune dispositions de valeur constitutionnelle ne prescrivent ni n’impliquent que le JA fasse prévaloir la coutume international ou même un principe général de droit international sur la loi en cas de conflit entre ces normes internationales et la norme législative interne ». Cependant, d’autres juridictions ont apporté des solutions différentes. 1. L’absence de contrôle par le Conseil constitutionnel de la conformité des lois

Page 27: Droit Administratif

27

aux traités Le Conseil constitutionnel refuse de procéder au contrôle de conformité des lois par rapport aux traités sur le fondement de l’article 61 de la Constitution.

Conseil constitutionnel, 15 janvier 1975, Loi sur l’IVG : Le Conseil constitutionnel est saisit par 60 députés invoquant la violation de l’article 2 de la CEDH qui proclame le droit à la vie. Le Conseil rappelle les termes de l’article 55 de la Constitution et décide que le respect du principe posé par l’article 55 ne peut pas être assuré dans le cadre du contrôle de constitutionnalité de l’article 61. Il donne pour motivation le fait que « les décisions prises en application de l’article 61 de la Constitution revêtent un caractère absolu et définitif. Au contraire, la supériorité des traités sur les lois présente un caractère relatif et contingent ». Le Conseil déduit donc qu’une loi contraire à un traité ne serait pas pour autant contraire à la Constitution donc la loi de l’IVG n’est pas contraire à la Constitution.

Cette solution est toujours en vigueur mais connaît deux exceptions : - S’agissant des lois destinées à mettre en œuvre l’article 88-2 et 88-3 de la Constitution (habilité par la Constitution elle-même) : Conseil constitutionnel, 2 septembre 1992. - Dans le cas où le Conseil intervient en tant que juge électoral, que sa mission n’est pas différente de celle des autres juridictions et qu’il doit alors assurer la primauté des traités sur la loi : Conseil constitutionnel, 21 octobre 1988, Elections législatives du Val d’Oise. 2. L’admission de la primauté du traité sur la loi par le juge judiciaire Le juge judiciaire admet également la primauté du traité sur la loi. Cour de cassation, 24 mai 1975, arrêt Administration des douanes contre société des cafés Jacques Vabre : La Cour de cassation fait prévaloir le traité de Rome (1957) sur les dispositions de la loi douanière française pourtant plus récente sur le fondement de l’article 55 de la Constitution. On peut faire un parallèle entre cette décision et celle du Conseil constitutionnel relative à la loi sur l’IVG puisque la Cour de cassation accepte de contrôler la loi française au regard du traité étant donné qu’il ne s’agit pas d’un contrôle de constitutionnalité de la loi. 3. La reconnaissance tardive par le JA de la primauté du traité sur la loi nationale Pendant longtemps, le JA a opéré une distinction entre les lois confrontées aux traités alors qu’elles leur étaient antérieures ou postérieures. Si la loi était antérieure au traité, le traité prévalait automatiquement sur la loi nationale. Au contraire, si la loi était postérieure au traité, le JA faisait prévaloir cette loi. En effet, le JA considérait que, faire prévaloir le traité sur la loi, c’était abroger la loi du fait de sa non conformité à l’article 55 de la Constitution et donc opérer un contrôle de constitutionnalité de la loi. Pendant longtemps, s’il existe une loi postérieure et non conforme à un traité, on va considérer qu’elle fait écran. CE, sect., 1ER mars 1968, arrêt Syndicat général des fabriquants des semoules de France (le bon page 149). CE, ass., 22 octobre 1979, arrêt Union démocratique du travail (le bon page 284). Désormais, que les lois soient antérieures ou postérieures aux traités, le traité prévaut. CE, ass., 20 octobre 1989, arrêt Nicolo : Le Conseil d’Etat constate que les règles définies par la loi du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants à l’assemblée de la Communauté Européenne ne sont pas incompatibles avec les stipulations claires de l’article 227-1 du traité de Rome et rejette donc la demande de Mr. Nicolo.

Page 28: Droit Administratif

28

L’arrêt est important car le CE vérifie la compatibilité de la loi de 1977 avec les stipulations du traité de Rome et accepte donc de contrôler la compatibilité de la loi au regard du traité pour la première fois. C’est un revirement de jurisprudence. La théorie de la loi écran subsiste uniquement dans le rapport entre actes administratifs et Constitution. CE, 24 septembre 1990, arrêt Boisdet : Etaient confrontés une loi française de 1980 et un règlement communautaire. Le CE décide que la loi française, même postérieure, s’incline devant le règlement communautaire. La solution Nicolo est confirmée. CE, ass., 28 février 1992, arrêt Société anonyme Rothmans International France (le bon page 80). CE, sect., 3 décembre 1999, arrêt Association ornithologique et mammologique de Saône et Loire (GAJA) : Le CE constate que la loi française dont il est question est contraire à la directive Loiseau et donc que cette loi est inapplicable puisque la directive prévaut.

III. L’interprétation des normes internationales Pendant longtemps, le juge a considéré qu’il n’était pas capable de dégager lui-même l’interprétation et renvoyait donc au ministre des affaires étrangères une question préjudicielle. C’était le même système que concernant la condition de réciprocité. Désormais, c’est la mission du juge d’interpréter ces textes. CE, ass., 29 juin 1990, arrêt GISTI (le bon page 171) : Le CE abandonne la pratique du renvoi d’une question préjudicielle au ministre sur les problèmes d’interprétation du traité. Lorsqu’un acte est clair, il n’y a pas d’obligation de renvoi d’une question préjudicielle à la CJUE (anciennement CJCE). Par contre, il y a une limite qui réside dans le monopole d’interprétation réservé à la CJUE. La seule juridiction compétente pour l’interprétation des textes communautaires est la CJUE afin que l’interprétation soit unifiée sur l’ensemble du territoire de l’Europe. Lorsqu’un acte n’est pas suffisamment clair, le JA doit donc renvoyer une question préjudicielle à la CJUE. De même, il doit le faire lorsque se pose une question de validité d’un acte au regard du droit communautaire originel. CE, ass., 19 juin 1964, arrêt Société des pétroles Shell Berre (le bon page 344) : L’acte était suffisamment clair pour que ne soit pas nécessaire le renvoi d’une question préjudicielle au juge communautaire. CJCE, 6 octobre 1982, arrêt Société Cilfit contre ministre de la santé : La CJCE admet la théorie de l’acte clair seulement si l’application correcte du droit communautaire s’impose avec une évidence telle qu’elle ne laisse aucun doute raisonnable sur la manière de résoudre la question posée.

Section 3 – Les lois

I. La diversité des normes législatives Sous la Vème République, les textes législatifs sont divers. A. La loi parlementaire Il y a d’abord la loi parlementaire. C’est l’acte voté par le Parlement selon la procédure fixée par la Constitution. Au sein de cet ensemble, on distingue plusieurs sous-catégories : - Les lois organiques prises en application de l’article 46 de la Constitution ; - Les lois de finances ; - Les lois de financements de la sécurité sociale ; - Les lois de programme ;

Page 29: Droit Administratif

29

- Les lois d’orientation. B. La loi référendaire A côté de la loi parlementaire, il y a la loi référendaire. Ce sont les lois adoptées par le peuple lui-même au terme d’un référendum. Il peut d’agir d’un référendum de l’article 11 comme d’un référendum de l’article 89 de la Constitution. Il peut aussi porter sur la ratification d’un traité. C. Les textes assimilés à la loi : les ordonnances ratifiées de l’article 38 Il y a ensuite des textes assimilés à la loi. L’article 38 de la Constitution met en place une procédure selon laquelle le Parlement habilite (par une loi) le Gouvernement à adopter des mesures dans le domaine législatif. Sous les IIIème et IVème républiques, on appelait ces mesures des décrets-lois. Dans un délai et dans un cadre (un objet) fixés par la loi d’habilitation, le Gouvernement va pouvoir adopter des textes dans le domaine de l’article 37 de la Constitution (matières réglementaires). D’un point de vue organique, ces textes sont de nature administrative. En effet, ils sont délibérés en Conseil des ministres et sont signés par le Président de la République. Pour qu’ils deviennent de nature législative, il faut que le Premier ministre dépose un projet de loi de ratification des ordonnances et qu’ils soient ratifiés par le législateur. Depuis la révision constitutionnelle de 2008, la ratification d’une ordonnance doit être expresse. Pour modifier une telle ordonnance, il faut une loi. D. Les décisions prises en application de l’article 16 dans le domaine législatif La question se pose enfin de savoir quelle est la nature des actes pris par le Président de la République dans le cadre de l’article 16 de la Constitution. Ces actes sont-ils de nature législative ? CE, ass., 2 mars 1962, arrêt Rubin de Servens (le bon page 143) : Le CE considère que la décision de mettre en œuvre l’article 16 de la Constitution n’est pas un acte administratif mais un acte de gouvernement et le JA ne peut pas en connaître. Par contre, le JA peut contrôler les mesures prises pendant la période de crise. Les mesures prises dans le domaine de la loi sont des actes législatifs alors que si elles appartiennent au domaine de l’article 37 de la Constitution, ce sont des actes administratifs. Le JA ne peut contrôler que les actes administratifs. II. Le domaine de la loi La Constitution assigne au législateur un domaine de compétence définit à l’article 34. Les matières réservées à la loi y sont identifiées. A. Les matières réservées à la loi par la Constitution Les matières réservées à la loi sont donc énumérées par l’article 34. Cet article distingue les matières pour lesquelles la loi fixe des règles et celles pour lesquelles la loi détermine des principes fondamentaux. Dans le préambule de la Constitution comme dans les textes auxquels il renvoi, un certain nombre d’articles indique que la question qu’ils soulèvent relève du domaine du législateur. De façon générale, la définition des limites qui peuvent être apportées aux libertés appartient au législateur. Le Conseil constitutionnel a apporté une précision. CC, 10 et 11 octobre 1984, décision dite « Loi des entreprises de presse » : Le CC a précisé que c’est au législateur d’organiser les libertés constitutionnellement

Page 30: Droit Administratif

30

protégées. Dans ce domaine, le législateur peut définir des règles plus rigoureuses pour l’avenir mais il ne peut en aucun cas revenir sur une situation existante concernant une liberté. En matière de liberté, le législateur ne peut régresser : « Dans le cas où sont en cause les libertés fondamentales (liberté de la presse en l’espèce), la loi ne peut en règlementer l’exercice qu’en vue de les rendre plus effectifs ou de les concilier avec ceux des autres règles ou principes de valeur constitutionnelle ». Toutes les matières qui ne sont pas mentionnées par l’article 34 sont du domaine du règlement (article 37) c’est-à-dire relèvent de l’exécutif. B. Le respect des domaines de la loi et du règlement On constate aisément que la frontière entre les domaines de la loi et du règlement n’est pas étanche. La Constitution prévoit des modalités de contrôle pour permettre au Gouvernement d’assurer la protection de son domaine. Elle permet cependant au Parlement d’intervenir en matière réglementaire. L’article 41 prévoit une procédure en vertu de laquelle lorsqu’une proposition de loi ou un amendement ne relève pas du domaine de la loi, le Gouvernement a la faculté de s’opposer à l’adoption du texte en invoquant l’irrecevabilité. Mais c’est une faculté et non une obligation. Le Gouvernement peut donc tolérer certain débordement du législateur dans le domaine réglementaire. Si le Gouvernement décide d’user de sa faculté, c’est au Conseil constitutionnel de trancher. La procédure mise en place par l‘article 37 alinéa 2 permet au Gouvernement de modifier ou abroger ces dispositions. Il est prévu que le Gouvernement doit saisir le Conseil constitutionnel. Si celui-ci confirme que les dispositions contenues dans la loi relèvent bien du domaine règlementaire, elles sont reléguées au rang de texte à forme législative. C’est la procédure de légalisation qui permet au Gouvernement de réinvestir les matières qui lui sont réservées. Loi du 23 février 2005 : Elle mettait en avant l’enseignement d’aspects positifs de la colonisation. Le CC a estimé que le contenu des programmes scolaires relevait bien du règlement. Au vu des réactions suscitées, le Gouvernement a décidé d’utiliser l’article 37. CC, 31 janvier 2006 : Le Gouvernement a pu abroger le texte car il revêtait une nature réglementaire par le décret du 15 février 2006. Mais le Gouvernement peut aussi tolérer l’abus du Parlement dans son utilisation de l’article 34. CC, 31 juillet 1982, décision dite « Blocage des prix et des revenus » : Le CC a effectivement décidé que les lois votées en matière réglementaire ne sont pas pour autant inconstitutionnelles. CC, 21 avril 2005, décision dite « Lois d’orientation et programme pour l’avenir de l’école » : Cette décision témoigne de la volonté du CC de reprendre en main la production législative, de se montrer rigoureuse à l’égard du législateur. Pour cela, il se reconnaît le pouvoir de déclarer des dispositions législatives comme étant de nature réglementaire s’il est saisit sur le fondement de l’article 61.

Si le pouvoir réglementaire empiète sur la matière législative, la sanction appartient au JA. Si le JA est saisi d’un texte relevant de la matière législative, il peut constater qu’il y a vice d’incompétence et annuler le texte. C’est le JA qui est le gardien du domaine législatif.

Section 4 – La jurisprudence administrative et les principes généraux du droit

Le JA peut créer des normes qui s’intègrent à la hiérarchie des normes. Il a une

fonction normative. I. Présentation des PGD

Page 31: Droit Administratif

31

A. L’origine des PGD CE, ass., 20 octobre 1945, arrêt Aramu (le bon page 213) :

C’est l’arrêt qui inaugure les PDG. Vont suivre l’arrêt Champion et l’arrêt Bidoire. Il s’agissait de recours formés par plusieurs personnes qui avaient été en Algérie et qui, au moment de la libération, ont fait l’objet de révocations au titre de l’épuration administrative. Ces personnes ont saisi le CE aux fins d’annulation en invoquant la méconnaissance des droits de la défense. Ces affaires vont permettre au JA d’identifier le principe du respect des droits de la défense. « Il résulte des PGD applicables même en l’absence de texte qu’une sanction ne peut à ce titre être prononcé légalement sans que l’intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense ». Cette solution avait été annoncée par : CE, sect., 5 mai 1944, arrêt Dameneuve Trompier-Gravier(le bon page 133) (GAJA) : On lui avait retiré l’autorisation d’exploiter un kiosque sur le domaine public. Elle n’avait pas pu poser sa défense. Le JA a annulé sa sanction sans se fonder sur le principe des droits du respect de la défense. C’est donc le CE qui a inauguré cette catégorie nouvelle : les PGD. Ces PGD sont indépendants du droit écrit, ils existent en l’absence de texte. Le JA les tire d’une philosophie libérale s’inspirant de l’idéologie de 1789 tout en s’inspirant du contexte dans lequel il intervient (économique, sociale notamment). Il s’agit donc de suivre l’évolution du droit, des mœurs pour dégager de nouveaux principes indépendamment des textes écrits. B. Panorama des PGD Il existe un grand nombre de PGD issue de la jurisprudence administrative. Un certain nombre d’entre eux se rattachent à la philosophie des droits de l’Homme (notamment l’égalité et la liberté). A propos du principe d’égalité : CE, 25 juin 1948, arrêt Société du journal l’Aurore (le bon page 289) (GAJA) : PGD = principe d’égalité des usagers du service public. CE, 28 mai 1954, arrêt Barel et autres (le bon page 308) : PGD = principe d’égalité d’accès des nationaux aux emplois publics. CE, ass., 7 février 1950, arrêt Syndicats des propriétaires de forêts de chênes lièges d’Algérie (le bon page 74) : PGD = principe d’égalité devant la loi.

A propos de la sécurité juridique : CE, ass., 17 février 1950, arrêt Dame Lamotte (le bon page 110) : Le juge affirme ici qu’il existe toujours, même en l’absence de texte, la possibilité de former un recours pour excès de pouvoir contre les décisions administratives. PGD = droit d’exercer un recours hiérarchique contre un acte administratif. PGD = principe selon lequel il existe toujours un recours en cassation à l’égard des décisions du JA même si elles ont été prises en dernier ressort. PGD = principe du respect des droits de la défense. PGD = principe de la non rétroactivité des actes administratifs, ils ne disposent que pour l’avenir et ne peuvent régir le passé. CE, ass., 3 février 1989, arrêt Compagnie Alitalia (le bon page 44) (GAJA) : PGD = l’autorité compétente saisie d’une demande tendant à l’abrogation d’un règlement illégal est tenu d’y déférer. CE, ass., 8 juillet 2005, arrêt Société Alusuisse Lonza France : PGD = première application de la prescription trentenaire (à la remise en état de sols pollués). CE, ass., 24 mars 2006, Société KPMG et autres :

Page 32: Droit Administratif

32

PGD = le JA consacre pour la première fois le principe de sécurité juridique à proprement parlé ce qu’il avait refusé de faire jusque là. A côté de ces premiers principes, on peut également identifier des PGD dégagés par le juge pour s’appliquer dans des matières particulières (extradition, réfugiés, travailleurs immigrés...). A propos des immigrés : CE, ass., 8 décembre 1998, GISTI et autres (GAJA) : PGD = droit de mener une vie familiale normale s’applique aux travailleurs immigrés. Dans le domaine social : CE, ass., 8 juin 1973, arrêt Mme Peynet : PGD = interdiction de licencier une femme enceinte pour le motif de sa grossesse. CE, sect.., 23 avril 1982, arrêt Ville de Toulouse contre Mme Aragmou (le bon page 151) : PGD = l’Administration doit verser à ses agents non titulaires une rémunération au moins égae au SMIC. Les PGD viennent combler certaines lacunes du droit. En présence d’un vide juridique, le JA créé un PGD. II. La valeur juridique des PGD A. Valeur infra législative et supra décrétale des PGD La thèse majoritaire consiste à dire que les PGD ont une valeur infra législative et supra décrétale. Cette thèse a été développée par le professeur Chapu dans les années 60 dans son article « De la soumission au droit des règlements autonomes ». En 1966, le même auteur publie également un autre article intitulé « De la valeur juridique des PGD et des autres règles jurisprudentielles du droit administratif ». Chapu raisonne à partir de la place qu’occupe l’auteur des PGD c’est-à-dire le JA. Le JA a pour mission d’interpréter la loi mais il est soumis puisqu’il ne peut apprécier sa validité. En revanche, le JA peut censurer les actes administratifs et en particulier ceux qui ont la place la plus élevée dans la hiérarchie des normes, les décrets. A partir le là, on constate que le JA est serviteur de la loi et censeur des décrets ce qui permet d’identifier les PGD comme étant d’une valeur intermédiaire entre le domaine administratif et le domaine gouvernemental (décrets). Certains auteurs considèrent que les PGD ont une place législative et non infra législative. Leur donner une place infra législative revient à dire que le législateur peut les méconnaitre et aller à leur encontre.

CE, 7 février 1958, arrêt Syndicat des propriétaires de chênes et forêts d’Algérie : Le CE censure un décret en invoquant un PGD donc confère à ce dernier une valeur supérieure par rapport au décret. CE, sect., 26 juin 1959, arrêt Syndicat général des ingénieurs conseil (le bon page 394) (GAJA) : Les PGD s’imposent aux règlements autonomes c’est-à-dire à ceux qui sont pris en dehors de l’application de l’article 34 de la Constitution. En l’espèce, les PGD s’imposaient à des mesures prises par le Gouvernement en tant que législateur colonial. Le gouvernement se comportant comme un législateur d'où la possibilité de transposer cela au règlement autonome. Le CE précise que le gouvernement était tenu de respecter le PGD qui résultant notamment du préambule de la constitution s'impose à toutes autorités réglementaires même en l'absence de dispositions législatives. Les conclusions Fournier publié à la RDP 1960 p.461. Il développe l'idée que certains PDG les plus fondamentaux ceux qui sont à la base de notre régime politique ont une valeur

Page 33: Droit Administratif

33

constitutionnelle. L'affaire en question en est une illustration. Le gouvernement ici s'est comporté comme un Législateur il intervient à la place du législateur. C'est un législateur colonial, il intervient dans un domaine ou il n'y a pas de loi. Son action se situe au rang de la loi. Les P qui viennent limités cette action du gouvernement, doivent être situés au dessus de la loi pour pouvoir apporté un cadre à l'action du gouvernement dans cette hypothèse. Ils ont donc une valeur constitutionnelle. Article publié au étude et document du CE 1961 p. 76. Pour le professeur CHAPU cette thèse est inutile car il considère que les règlements et décrets exercés dans le cadre du domaine autonomes en dehors des lois, ont la même valeur que tous les autres décrets. Es décrets ont toujours la même place dans la hiérarchie des normes. Le conseil constitutionnel a dégagé certains principes constitutionnels ayant donc une valeur constitutionnel. Pour certains d'entre eux, ils ont le même objet que les PGD du JA: le principe d'égalité devant la loi... On retrouve dans les 2 jurisprudences des principes identiques. Les PGD ont ils acquis une valeur constitutionnels du fait que le conseil constitutionnel utilise les même principes ? D'après CHAPU, on assiste à un phénomène de dédoublement de l'ordre juridique il n'y a pas d'attraction des PGD à l'ordre constitutionnel. Les PGD se distingue des principes de valeurs constitutionnels quand bien même ils ont le même objet. La technique de création n'est pas la même. Les principes de valeurs constitutionnels ont toujours une source écrite sauf exceptions rarissime (continuité du service public). CE, ass., 5 mars 1999 arrêt Rouquette Lipietz (le bon p.37). À propos il y a un moyen tiré du principe constitutionnel d'égalité devant les charges publics. Le CE déclare qu'il ne peut pas contrôler la loi au regard du principe constitutionnel d'égalité devant les charge publique. En revanche il contrôle les disposition d'un décret au regard du principe général d'égalité devant les charges publics. Il distingue le principe constitutionnel devant les charges publics et celui d'égalité devant les charges publics. B. Les PGD du droit communautaire CJCE 16 JUIN 1993 AFFAIRE REPUBLIQUE FRANCAISE : a propos du principe de sécurité juridique la CJCE exige que la législation communautaire soit claire et son application prévisible pour ceux qui sont concernés. À propos du principe de confiance légitime, principe qui impose un clarté de la et prévisibilité de la réglementation afin de sauvegarder la confiance légitime (refus d'en faire un PDG) des agents dans la stabilité de la situation juridique. Ce principe vaut surtout en matière économique. CE ASS. 11 JUILLET 2001 ARRET FNSEA publié à la RFDA 2002 p.33 : Le JA applique le principe de confiance légitime et de non rétroactivité s'agissant d'un décret qui était relatif à la modulation des paiement accorder aux agriculteurs dans le cadre de la PAC. Application des PGD communautaire dans des matières régies par le droit communautaire. Mais un tel principe ne sera pas applicable en dehors de ce cadre précis du droit communautaire. CE 3 DECEMBRE 2001 ARRET SYNDICAT NATIONALE DES INDUSTRIES PHARMACEUTIQUES : « les PG de l'ordre juridique communautaire déduit du traité instituant la communauté européenne et ayant la même valeur juridique que ce dernier , qu'il s'agisse du principe de confiance légitime et du principe de la sécurité juridique applicable aux situations régit par le droit communautaire, du principe de loyauté ou encore du principe de primauté lequel au demeurant ne saurait conduire dans l'ordre interne a remettre en cause la suprématie de la constitution ». Le champs de l'application de l'article C55 ne vaut que pour les traité et accords internationaux. La supériorité des traités et accords internationaux ne s'étend pas au PDG. Il y a un décalage entre la hiérarchie de normes internes et communautaire.

Page 34: Droit Administratif

34