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Droit des libertés fondamentales Tout le monde est concerné. Quelque chose qui s’use si on ne s’en sert pas. « Les droits de l’homme ne seront jamais rien de consistant aussi longtemps qu’ils ne seront pas devenu, selon le vœu même de la déclaration de 1789 la pratique ordinaire et obstinée de chacun et de tous ». Voir poly. Idée de vigilance. Même dans les démocraties occidentales on n’est pas à l’abri de pratiques voir même de règles attentatoires aux libertés. Preuve = la JP de la CEDH. Ni jamais à l’abri de la résurgence de tentations autoritaires ou totalitaires. Ex = facilité du régime de Vichy. Cette pratique des droits de l’homme (cette vigilance) suppose une certaine connaissance, conscience de ses droits. C’est le sens de la phrase du préambule de la Déclaration de 1789 (voir poly). Cette citation vise avant tout, compte tenu du contexte de l’époque, la protection des libertés contre l’Etat. Ceci dit même si on n’y pense pas, garantir les libertés c’est aussi garantir les libertés contre les agissements éventuellement d’autres individus. 2 ème remarque = ce droit est aussi une discipline carrefour. Dimension citoyenne et aussi transversale. Le droit des LF touche à toutes les branches du droit. La distinction droit public/droit privé n’a quasiment aucun sens en droit des libertés fondamentales. Ex = un pan du droit des LF renvoie au droit pénal. Ex = la liberté syndicale relève du droit du travail. Le droit de propriété est appréhendé par le droit civil. Le droit constitutionnel garanti lui- même un certain nombre de liberté… Remarque = dimension aussi interne de ce droit. De + en + une dimension internationale malgré tout et européenne (à partir de la seconde moitié du XXème siècle). Cette dimension est venue enrichir de façon importante le régime juridique interne, notamment de protection des droits fondamentaux. Bibliographie = - Gilles Lebreton : « Libertés publiques et droit de l’homme » chez Sirey 2008. - Henry Oberdorf « droit de l’homme et liberté fondamentale » LGDJ 2008. - J. Robert « Droit de l’homme et libertés fondamentales » chez Montchrestien dans la collection précis Domat 2009. - Jean Rivero et Moutouh « Les libertés publiques » tome 1. Chapitre préliminaire = Notion/Définition/Classification

Droit des libertés fondamentales

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Droit des libertés fondamentales

Tout le monde est concerné. Quelque chose qui s’use si on ne s’en sert pas. « Les droits de l’homme ne seront jamais rien de consistant aussi longtemps qu’ils ne seront pas devenu, selon le vœu même de la déclaration de 1789 la pratique ordinaire et obstinée de chacun et de tous ». Voir poly.Idée de vigilance. Même dans les démocraties occidentales on n’est pas à l’abri de pratiques voir même de règles attentatoires aux libertés. Preuve = la JP de la CEDH. Ni jamais à l’abri de la résurgence de tentations autoritaires ou totalitaires. Ex = facilité du régime de Vichy. Cette pratique des droits de l’homme (cette vigilance) suppose une certaine connaissance, conscience de ses droits. C’est le sens de la phrase du préambule de la Déclaration de 1789 (voir poly). Cette citation vise avant tout, compte tenu du contexte de l’époque, la protection des libertés contre l’Etat. Ceci dit même si on n’y pense pas, garantir les libertés c’est aussi garantir les libertés contre les agissements éventuellement d’autres individus. 2 ème remarque = ce droit est aussi une discipline carrefour. Dimension citoyenne et aussi transversale. Le droit des LF touche à toutes les branches du droit. La distinction droit public/droit privé n’a quasiment aucun sens en droit des libertés fondamentales. Ex = un pan du droit des LF renvoie au droit pénal. Ex = la liberté syndicale relève du droit du travail. Le droit de propriété est appréhendé par le droit civil. Le droit constitutionnel garanti lui-même un certain nombre de liberté…Remarque = dimension aussi interne de ce droit. De + en + une dimension internationale malgré tout et européenne (à partir de la seconde moitié du XXème siècle). Cette dimension est venue enrichir de façon importante le régime juridique interne, notamment de protection des droits fondamentaux.

Bibliographie = - Gilles Lebreton : « Libertés publiques et droit de l’homme » chez Sirey 2008. - Henry Oberdorf « droit de l’homme et liberté fondamentale » LGDJ 2008.- J. Robert « Droit de l’homme et libertés fondamentales » chez Montchrestien

dans la collection précis Domat 2009.- Jean Rivero et Moutouh « Les libertés publiques » tome 1.

Chapitre préliminaire = Notion/Définition/Classification

Section 1 = Notions et définitions : Liberté / Droits de l’homme / Libertés publiques / Libertés fondamentales

I / La question de la liberté (liberté et libertés publiques)

Le terme « liberté » est un terme qui est polysémique (on peut recenser près de 100 significations de ce mot). Ce mot peut être employé dans des sens tellement différents que l’on va repartir des classiques. Définition classique de Lalande (philosophe) : « la liberté est l’état de celui qui fait ce qu’il veut et non ce que veut un autre que lui : elle est l’absence de contrainte étrangère ».

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Plus proche de nous, Hayek (prix Nobel d’économie XXème) développe la même définition dans la route de la servitude : la liberté c’est l’absence de contrainte qu’il s’agisse de la contrainte d’autrui ou d’une contrainte sociale.

1ère remarque = cette définition se situe dans un contexte politique et idéologique bien précis. Elle n’a de sens que par rapport à ce contexte et ce contexte est le libéralisme politique. Cette conception là de la liberté est inséparable des fondements historiques, idéologiques d’un régime politique bien précis qui est la démocratie libérale.

Dans d’autres contextes historiques ou idéologiques la liberté peut avoir un sens complètement différent. Par exemple au moment de la démocratie athénienne la liberté est une notion qui sert essentiellement à opposer deux états, l’état d’esclave à celui d’homme libre. La liberté n’a pas non plus le même sens dans la pensée marxiste. N’a pas le même sens d’une manière générale dans toutes les pensées qui privilégient le groupe sur l’individu (totalité sociale prédomine sur l’individu : société holiste). Dans ce type de société, la liberté individuelle n’a pas vraiment de sens. Le libéralisme politique classique au contraire est lui fondé sur l’individualisme.

2ème remarque = le caractère très général voir absolu de ces définitions est un peu trompeur. Cela laisse penser que la liberté elle-même pourrait être absolue. Il n’en est évidemment rien. L’homme vie en société et même si on ne se situe pas dans une conception holiste on doit bien tenir compte de ce paramètre (on n’est pas tout seul). Donc la liberté à forcément des limites. Deux grandes en tout cas =

- la liberté d’autrui d’un côté- et ce que l’on peut appeler le bien commun de l’autre

Se pose la question de la liberté dans la société et donc c’est posé la question de ces conditions d’exercice et de ses limites. Et c’est là que l’on trouve le droit dans les démocraties libérales en tout cas. D’un point de vue juridique la question de la liberté d’une certaine manière se résume à la question de ces limites ou du moins de ses conditions d’exercice. La notion même de liberté publique renvoi à l’idée que la liberté est une catégorie de la règle de droit et donc cela peut paraitre un peu contradictoire avec la définition initiale. Mais dans ce cadre de droit la liberté n’est justement pas l’absence de règle. Au contraire les libertés sont envisagées en tant qu’objet de la règlementation juridique. Le droit connait les libertés mais il ne connait pas la liberté.

Les libertés publiques juridiquement parlant, sont des libertés formulées, garanties grâce à l’existence d’un appareil de pouvoir et de contrainte qui en maintien et en assure l’existence. Cet appareil est l’appareil d’Etat. L’autorité n’est plus conçue comme le contraire de la liberté mais comme sa condition. Ce qui renvoi aussi à cette métaphore du renard libre dans le poulailler libre. On imagine mal une société dans laquelle l’exercice des libertés ne serait pas régulé par la puissance publique. Et ce d’autant + que dans les démocraties libérales cette régulation est justifiée et légitimée par la participation des citoyens au pouvoir. En même temps reste une question, 2ème enjeu fondamental, qui est de savoir jusqu’où doit aller cette régulation, jusqu’où peut intervenir l’Etat.

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Par exemple on peut s’interroger pour savoir quels sont les domaines qui peuvent faire l’objet d’une régulation étatique, juridique. On peut considérer qu’il y a tout un champ immense d’occupation humaine qui peut se passer du droit et de la contrainte. C’est notamment la position des penseurs classiques du libéralisme politique (John Stuart Mill poly). Il estime « souhaitable que l’individualité puisse s’affirmer dans tout ce qui ne touche pas directement les autres ». La liberté devrait se confondre avec la garantie d’une sphère privée où chacun serait maitre de lui-même. Les principes libéraux qui sont au cœur de notre démocratie libérale obligeraient les Etats à distinguer entre deux sphères : la sphère privée dans laquelle l’individu pourrait être entièrement libre et une sphère publique dans laquelle il relèverait de la règle de droit. Mais ce n’est pas aussi simple car notamment la frontière entre les deux est souvent difficile à déterminer. On sait bien que l’intervention étatique tente à règlementer, au nom de multiples impératifs, des domaines assez étendus et intrusifs de la sphère privée. Ex JP = pendant longtemps on a admis que la loi pouvait sanctionner pénalement des comportements privés car ils étaient considérés comme immoraux par une majorité de la population. Un certain nombre d’Etats européens ont admis jusqu’à une période récente (début des années 80) que l’on pouvait prohiber pénalement les actes homosexuels même s’ils étaient pratiqués en privé et entre adultes consentant. La législation anglaise relevait de ce type.

Cela a été contesté devant les organes de la CEDH. Dans un premier temps la commission européenne de DH (organe de filtrage à l’époque) a considéré que ces législations ne violaient pas la Convention EDH, que cette ingérence dans le droit au respect de la vie privée était justifiée par la protection de la morale. Dans un second temps elles arrivent devant la CEDH, et là la Cour rend une solution contraire. Elle estime elle que ces Etats violent la Convention, en particulier le droit au respect de la vie privée. Que cette incursion dans la sphère privée n’est pas justifiée.

La Cour européenne nous dit qu’il y a effectivement un domaine dans lequel l’Etat ne peut pas intervenir : le domaine qui est de la vie sexuelle des individus. L’Etat n’a pas à intervenir dans ce domaine fus au nom de la moralité publique. On assiste ici également à une espèce de conciliation entre ce que Benjamin Constant appelait la liberté des modernes et la liberté des anciens. En effet pour justifier sa solution le juge européen va se fonder sur ce que doit être une société démocratique. Pour le juge européen la démocratie renvoi certes à une forme de gouvernement (la participation au pouvoir des citoyens = liberté des anciens). Mais la démocratie pour le juge européen suppose aussi le respect d’un certain nombre de principes = liberté des modernes. Pour le juge européen la démocratie c’est aussi : « le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture ». C’est sur la base de ces principes que la Cour va condamner la GB comme elle condamnera aussi l’Irlande et Chypre estimant que pluraliste et tolérante la société démocratique européenne n’autorise plus de jugements moraux absolus en ce qui concerne la moralité publique. Arrêt Dudgeon CEDH 22 octobre 1981 « la protection de la vie privée englobe le droit au respect de la vie sexuelle ». La société démocratique européenne n’autorise plus « de jugements moraux absolus en ce qui concerne la moralité publique ». Les arrêts de la Cour sont accompagnés s’ils le souhaitent des opinions personnelles des juges concordantes ou dissidentes qui éclairent les jugements. L’un de ces juges, dans une opinion concordante, explique que ce jugement s’inspire d’une thèse qui remonte à John Stuart Mill qu’il cite expressément.

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Thèse selon laquelle il existe « une sphère de la morale qu’il vaut mieux laisser à la conscience individuelle, comme s’il s’agissait d’une liberté de pensée ou de croyance ». (Voir poly).

II / Les droits de l’homme

Cette expression droits de l’homme peut renvoyer à 2 choses = - soit à une philosophie politique- soit au droit international

A) La philosophie politique 

La philosophie des DH est celle qui s’exprime dans l’intitulé et dans le préambule de la DDHC de 1789 adopté par l’AN Française le 26 août 1789. Cette philosophie politique renvoi principalement au droit naturel moderne et particulièrement à un auteur anglo-saxon : John Locke. On distingue en général le droit naturel moderne, celui qui inspire la philosophie des droits de l’homme. Et le droit naturel classique d’inspiration antique ou religieuse. Le droit naturel antique connait essentiellement le groupe. Il procède d’une vision essentiellement holiste de la société et dans cette vision le droit n’est pas conçu ni pensé comme un instrument qui serait destiné à garantir à l’individu la possibilité de s’épanouir librement. Par exemple = pour les grecs de la cité antique, y compris quand on parle de démocratie athénienne, il n’y a pas vraiment de domaines réservés à l’individu. Il n’y a pas de droits qui seraient opposables au pouvoir. La liberté grecque se résume pour l’essentielle à l’exercice des droits civiques (liberté des anciens pour B. Constant) qui permettent de participer à l’organisation de la cité ou à la formation de la loi. Donc que des droits civiques et encore pas pour tous. Les esclaves sont exclus.

Le christianisme fait lui aussi partie de ce qu’on appelle l’école classique du droit naturel. Mais progressivement c’est aussi lui qui va participer à cette évolution consistant à prendre en compte l’individu. Prise en compte qui va s’avérer nécessaire à un certain moment de l’histoire compte tenu du contexte économique et social.

Un des points de basculement est la Renaissance. Il émerge à cette époque toute une série de figures qui exaltent à leurs manières l’individu. Il émerge l’entrepreneure capitaliste, l’aventurier conquérant, l’artiste qui commence à signer ses œuvres. L’individu commence à exister.

Le protestantisme fait de l’individu un sujet autonome. La fin de l’homogénéité confessionnelle contribue à saper la conception communautaire de la société. On a de + en + de mal à penser la société comme un tout. Cela alimente ce que certain philosophes considèrent comme la première des libertés à savoir la liberté de conscience. Cette promotion de l’individu va de pair avec une conception nouvelle du droit, qui progressivement va laïciser le droit naturel en le séparant de son fondement religieux en le rattachant à la raison humaine (on parle de droit naturel moderne = philosophie des Lumières). La théorie ne renvoi + à Dieu mais à la nature humaine. Le droit c’est un corps de règle que l’homme découvre grâce à sa raison qui lui permet de trouver les règles naturellement nécessaires, utiles pour lui et ses semblables. L’individu devient premier. Comment concilier vie en société et droit individuel ?

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Pour opérer cette conciliation les théoriciens de l’école moderne vont inventer une théorie : la théorie du contrat social. Idée d’un état de nature originel dans lequel les hommes auraient été soustraits à toute forme d’autorité (liberté). Mais dont ils vont sortir pour fonder une société politiquement organisée et ce par le biais d’un accord volontaire : le contrat social. Deux auteurs anglo-saxons : Hobbes et Locke.

Pour Hobbes, l’état de nature n’engendre que le désordre, ne profite qu’aux + forts (« l’homme est un loup pour l’homme »). Le remède est donc la création d’un commun accord, la création d’un pouvoir souverain qui instituera l’ordre et la paix. Mais pour se faire il faut que les individus se dessaisissent à son profit de l’ensemble de leur droit naturel. Cet Etat redistribuera selon son bon pouvoir des parcelles de liberté mais en tout état de cause ces droits seront inopposables au pouvoir. Justification de l’absolutisme. Pour Locke au contraire la doctrine du contrat social doit déboucher sur une limitation du pouvoir. L’état de nature n’est pas un enfer pour lui, dont il faudrait s’évader au prix d’une aliénation totale. Le problème pour Locke c’est que dans l’état de nature la jouissance des droits est trop précaire. Il faut donc des lois, des règles qui seraient clairement posées. Il faut un juge pour trancher les différents. Et il faut un pouvoir, une puissance pour faire respecter les règles. Mais par le contrat social, pour Locke, les hommes décident eux-mêmes des droits qu’ils vont garder et des droits qu’ils vont abandonner au pouvoir. On a donc nécessairement l’idée d’un pouvoir limité, ce qui fait de Locke l’un des principaux inspirateurs de la philosophie des Droits de l’Homme.

Au siècle suivant Rousseau reprendra l’idée de contrat social sous une forme un peu renouvelée. Il va essayer de dépasser l’opposition traditionnelle entre pouvoir et liberté en essayant au contraire de réaliser une synthèse qui réconcilierait le pouvoir et la liberté. Mais synthèse qui suppose parfois des raisonnements peu convaincants. Pour Rousseau le dépassement de l’antagoniste entre pouvoir et liberté suppose d’abord que l’homme par le contrat social abandonne tous ses droits à la communauté. Pour lui ce n’est qu’à cette condition que les hommes seront tous égaux et que donc aucun ne pourra prétendre imposer aux autres sa propre volonté. Pour Rousseau l’égalité fonde la liberté parce que l’égalité rend impossible la subordination de l’homme à un autre homme. Par le contrat social chacun se donne à tous c'est-à-dire en terme de pouvoir : chacun obéit à cette fameuse volonté générale. En obéissant à la volonté générale chacun n’obéit en fait qu’à lui-même.

- Comment se manifeste, se concrétise la volonté générale ? - Comment s’élabore cette volonté générale ? 1 ère question  : Concrètement l’idéal pour concilier pouvoir et liberté serait que la volonté générale reflète l’unanimité des volontés particulières. Mais dans un groupe cette unanimité est difficile à avoir. La volonté générale sera celle de la majorité. Le problème : quand est-il des droits de la minorité ? Si la minorité est en désaccord avec la majorité c’est qu’elle se trompe pour lui. La volonté générale révèle forcément ce qui est préférable pour le bien de tous, donc la minorité se trompe et doit obéir selon Rousseau.

Question de l’élaboration de la volonté générale : selon Rousseau pour qu’un individu puisse reconnaitre sa volonté dans la volonté générale encore faut-il qu’il ait personnellement participé à l’élaboration de cette volonté. Pour lui la décision ne peut pas être prise par une assemblée d’élue car cela fausse son

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raisonnement car on devrait obéir à un individu. Dans la démocratie représentative on cesse d’être libre. La liberté suppose la démocratie directe pour lui. Mais concrètement au quotidien elle est difficilement possible. Il admet le principe de la délégation et non de représentation assortie d’un mandat impératif. La pensée de Rousseau a marqué assez profondément les auteurs de la DDHC. En même temps, cette pensée est assez complexe pas forcément réalisable en pratique. Donc les auteurs de 1789 n’ont retenu qu’un schéma simplifié de la pensée de Rousseau.

Qu’ont-ils retenus de sa pensée ? Ils ont retenus le point de départ de sa pensée c'est-à-dire la nécessité d’assigner comme but à la société, comme but au pouvoir politique la protection de la liberté naturelle de l’homme. Article 2 de la DDHC : « le but de toute association politique (Etat) est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme ». L’Etat doit protéger les libertés des individus. Point d’arrivée de sa pensée c'est-à-dire que la loi expression de la volonté générale ne peut pas par nature être un instrument d’oppression. La loi ne peut pas être liberticide. Pour les révolutionnaires le danger pour les libertés ne peut venir que du pouvoir exécutif. On va vivre longtemps sur cette idée là. Le culte de la loi va dépasser largement la seule déclaration. Il va dominer pendant longtemps toute la pensée libérale et surtout il va trouver sa concrétisation dans le droit positif qui pendant longtemps réservera au seul législateur l’élaboration du statut des libertés publiques. Plus grave ce légicentrisme va pendant longtemps, en France en tout cas, empêcher tout contrôle de la loi, donc va empêcher de contrôler que le législateur respecte bien les libertés fondamentales jusqu’à ce que l’on se rende compte que la loi elle-même peut être oppressive et liberticide (après la seconde GM). Liaison entre point de départ et point d’arrivée : l’homme dans le contrat social abandonne tout ses droits.

Montesquieu, méfiance fondamentale du pouvoir d’où découle sa théorie de la séparation des pouvoirs. Il bâtie et défend sa théorie car il y voit la meilleure voir la seule garantie des libertés. Le respect des libertés est au cœur de la théorie de la séparation des pouvoirs. Les écrits et l’action de Voltaire contribueront également à forger, alimenter cette théorie des droits naturels et inaliénables de l’homme. Sa spécificité est peut être d’insister sur l’idée que le problème de la liberté n’est pas seulement théorique mais avant tout pratique. Pour lui être libre c’est peut être avant tout connaitre les droits de l’homme, les connaitre pour pouvoir les défendre. C’est pourquoi il insiste particulièrement sur la liberté de la pensée, sur la liberté d’expression qui sont pour lui les 1ères des libertés. Idée d’un socle de liberté sans lequel n’est rien possible, sans lequel les autres libertés ne sont pas possible. La conception du droit naturel = l’homme parce qu’il est un homme possède un ensemble de droit inhérent à sa nature. Droit qu’on ne peut méconnaitre, que le pouvoir ne peut méconnaitre sans porter atteinte à cette nature d’homme. Dans cette conception du droit naturel, les droits de l’homme existent indépendamment de leur reconnaissance par le droit positif et de fait il faudra un certain temps pour que les droits inscrits dans la DDHC se concrétisent dans le droit positif. C’est la que va se faire la jonction avec la notion de liberté publique.

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En effet le droit français en incorporant les droits de l’homme dans le droit positif va changer de terminologie, va abandonner cette notion de droits de l’homme pour lui préférer dans un premier temps la notion de liberté publique.

A partir du moment où le législateur va définir le régime juridique de ces droits alors le législateur Français préfère parler de libertés publiques. On tend à considérer en France, encore aujourd’hui, que la référence à l’expression droits de l’homme renvoie plutôt à une philosophie qui renvoie au nécessaire respect de la dignité humaine. Philosophie qui sert de soubassement à des règles juridiques.

En revanche le droit international lui à fait de la notion droit de l’homme une véritable catégorie juridique à laquelle un certain nombre de textes internationaux…

B) Le droit international

La référence aux droits de l’homme est reprise par la Charte des NU. Aussi la déclaration universelle des DH de 1948 par une résolution générale des NU. Elle n’a pas en elle-même de sens obligatoire. Cette déclaration a été reprise, et la référence aux DH a été reprise par les 2 pactes internationaux de 1966 qui traduisent en droit positif le contenu de la déclaration universelle.La référence aux DH est aussi explicite en droit européen. Dans la Convention européenne de sauvegarde des DH et des libertés fondamentales. Texte qui est contraignant pour les Etats qui l’ont ratifié, qui est en + d’effet direct. Plus récemment adoptée en 2000 la Charte européenne des droits fondamentaux.

La catégorie des DH, sa dénomination peut renvoyer à une catégorie juridique en droit international, moins vrai en droit français qui préfère s’en tenir à une conception positiviste des choses et qui utilise la catégorie libertés publiques. Ou encore + récemment la catégorie droits fondamentaux ou libertés fondamentales.

III / Droits fondamentaux et libertés publiques

Constat = en droit Français la notion de libertés publiques tend à être abandonné au profit de la notion de libertés fondamentales ou droits fondamentaux. C’est la reprise d’une terminologie étrangère, en particulier européenne, la notion de libertés fondamentales figure comme référence essentielle depuis longtemps dans un certain nombre de constitution européenne en particulier dans la Loi fondamentale allemande. La tradition juridique française a longtemps utilisé l’expression libertés publiques, voir l’article 34 de la Constitution : « la loi fixe les règles concernant (…) les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ». Compétence du législateur sur les libertés publiques. Cette expression de libertés publiques tend à être remplacer par une partie de la doctrine par libertés fondamentales mais aussi dans le droit positif. Pour preuve une loi du 30 juin 2000 sur la procédure du référé administratif et liberté en particulier : dispose qu’une atteinte grave à une liberté fondamentale peut justifier une mesure de suspension d’un acte administratif.

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Le CC utilise lui cette expression, pour la 1ère fois dans une décision du 22 janvier 1990. Il a utilisé cette expression comme équivalent à la notion de droits et libertés constitutionnellement garantis. En même temps cette question du sens et de la substitution d’une notion à une autre est délicate à établir. Quelle serait la différence entre les 2 ?

- 1ère raison, les auteurs divergents assez considérablement sur ce qui convient d’entendre sur libertés fondamentales.

- En droit positif on ne trouve pas de définition constitutionnelle ou légale notamment de ce que serait une liberté fondamentale. La loi du 30 juin 2000 est particulièrement révélatrice. Dans cette loi le législateur non seulement n’a pas défini ce qu’était une liberté fondamentale mais en + il n’a pas non plus fixé par avance de manière descriptive une liste de ces libertés fondamentales dont la violation serait susceptible d’ouvrir la voie au référé suspension… Problème de sécurité juridique. C’est la JP du CE qui défini au cas par cas la liste des libertés susceptibles d’ouvrir la voie à cette procédure d’urgence. La liste de ce que le CE considère étant comme des libertés fondamentales.

Voir la liste du CE sur le poly. Le CE dans une ordonnance de 2006 a refusé de considérer que le droit à la protection de la santé constituait un droit fondamental alors même que la protection de la santé est garantie par le préambule de la constitution de 1946 et que le CC en a fait lui-même un principe à valeur constitutionnelle. La JP constitutionnelle ne définie pas non plus la notion de droit fondamental mais comme le juge administratif au fil des affaires qualifie tel ou tel droit de fondamental. On s’aperçoit, en regardant ces listes et en les comparant avec ce qu’on nous dit des libertés publiques, qu’elles sont qualifiées de libertés publiques. Ex = la liberté d’aller et venir (libertés fondamentales pour le CC et le CE est depuis longtemps qualifiée de liberté publique). Du point de vue du contenu, globalement on a 2 notions pour un même contenu.

Si ce n’est pas une différence de contenu, qu’elle est la différence ? Que signifie la substitution de LF à LP ? En France cette substitution tardive de la notion de liberté fondamentale à celle de liberté publique tend à traduire et à mettre en lumière l’évolution qu’a connue la garantie juridique des libertés en France. Ce sur quoi on veut insister est l’idée que les libertés publiques dans leur acception classique dépendaient du parlement, du législateur. Les DF s’imposent eux désormais même à la loi. La conception traditionnelle des libertés publiques en France renvoyait à l’idée de liberté protégée par le législateur parce que reconnue et organisée par lui et protégée essentiellement contre le pouvoir exécutif. Le légicentrisme issu de la Révolution française va prévaloir en France jusqu’à la seconde GM. Ce légicentrisme interdisait que l’on puisse se méfier du pouvoir législatif. Conception de Rousseau, le législateur ne peut mal faire car il est l’expression de la volonté générale. Puis il y eu une évolution qui prend sa source dans la seconde GM et ses suites. Evolution où l’on assiste au développement des sources internationales des protections de libertés, en particulier les sources européennes qui s’imposent au législateur. Parallèlement l’essor en France d’un droit constitutionnel des libertés. Donc des sources et une garantie qui deviennent supralégislative et qui s’impose au Parlement avec cette idée que la protection des droits fondamentaux ne relève plus seulement du juge ordinaire mais aussi du CC et du juge européen.

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Du point de vue constitutionnel, le tournant décisif c’est la décision du 16 juillet 1971 pour la 1ère fois en France une loi ne peut pas être promulgué en raison de l’atteinte qu’elle porte à une liberté constitutionnellement garantie. La notion de liberté fondamentale répond à cette préoccupation de signifier et de souligner une évolution qui protège les libertés non plus seulement contre le pouvoir exécutif mais aussi contre les autres pouvoirs qu’il s’agisse du pouvoir législatif ou aussi du pouvoir judiciaire voir tout ce qui concerne les règles du procès équitable. La JP du CE permet peut être de préciser un peu et d’aller un peu + loin que cette définition. Ex = ordonnance de 2006 sur la protection du droit à la santé. La protection de la santé est garantie par le préambule de 1946 donc par un texte qui a valeur constitutionnelle. Le CC en a fait un principe à valeur constitutionnelle. On aurait pu penser que le juge administratif considérerait qu’il s’agirait d’un droit fondamental et donc susceptible d’ouvrir la voie au référé liberté. Le juge de 1ère instance a bel et bien suivit ce raisonnement, mais pas le CE. Pour lui il n’y a pas là de droit fondamental tout simplement car il n’y a pas de droit à la protection de la santé. Ce n’est pas pour le CE un droit subjectif, il n’est donc pas opposable. Certes le CE reconnait qu’il s’agit là d’un principe constitutionnel mais qui en tant que principe oblige les pouvoirs publiques à une simple obligation de moyen. Oblige le législateur à tenir compte mais ce n’est pas un droit dont le justiciable peut se prévaloir. Il y aurait donc une exigence supplémentaire : il faut qu’il s’agisse d’un véritable droit subjectif.

Section 2 = Classification(s) des droits et libertés   : Droits civils et politiques/droits économiques et sociaux/libertés individuelles/libertés collectives/droits de/droits à …

En droit des libertés il y a diverses classifications qui existent et coexistent voir s’entrecroisent. Toute classification est toujours réductrice. Les frontières entre les différentes catégories ne sont pas forcément étanches. Classer peut être utile, cela à une vertu pédagogique, cela permet de mieux comprendre et d’apporter des repères.On va partir d’une classification qui repose à la fois sur l’objet des droits des libertés et sur le moment historique de leur reconnaissance. Comme le montre l’histoire du droit public en France ce sont d’abord ce qu’on appelle les droits civils et politiques qui ont été consacrés c’est pour cela que l’on parle de première génération de droit. Il s’agit essentiellement de libertés individuelles même s’il faut nuancer le propos. Très tôt certaines libertés collectives son également reconnues. Historiquement, la liberté individuelle prend d’abord la forme de ce qu’on appelle la sureté. Les deux termes sont quasiment synonymes. Notion qui renvoie à une idée de protection générale. La sureté protégeant indifféremment les différents aspects de la liberté humaine. Cette notion de sureté qui est expressément visée à l’article 5 de la DDHC : « nul ne peut être contraint à faire ce que (la loi) n’ordonne pas » a globalement comme signification : l’homme libre est celui qui sait qu’il n’a rien à redouter aussi longtemps qu’il respecte les lois. Cette notion de sureté est précisée de diverses manières dans la déclaration. Voir article 5 et article 7 sur le poly. La non rétroactivité de la loi pénale : article 8… ne sont que les développements logiques de la notion juridique de sureté. Cette notion renvoie donc à la condamnation de toute forme d’arbitraire et notamment

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de toute forme arbitraire de répression. L’objet de la sureté est la sécurité juridique de l’individu face au pouvoir et ce dans tous les aspects de ces activités humaines. Toujours au titre de la liberté individuelle on retrouve le droit à la vie reconnue explicitement de manière + tardive par les textes. Le droit à la vie n’est pas expressément énoncé dans la DDHC mais il parait assez évident. La JP du CC a intégré le droit à la vie dans le cadre du principe + général de sauvegarde de la dignité de la personne humaine = décision du 27 juillet 1994.

On pourrait sans doute ajouter aujourd’hui au titre de cette protection générale de la personne le droit au respect de la vie privée. Au vue des développements JP extrêmement importante auquel a pu donner lieu cette notion. On peut quasiment parler d’une protection qui devient quasi générale. Est protégé au titre de la vie privée, le droit à l’intimité et la liberté de la vie sexuelle, le droit de vivre dans un environnement sain, le droit à la santé que le juge européen à déduit ; le droit à connaitre ses origines. Pour certains auteurs le juge européen a ouvert la boite de Pandore. La liberté individuelle renvoie à ces différentes notions. En même temps elle peut se décliner de façon particulière. Elle se concrétise également dans les protections particulières.

On passe au pluriel. La DDHC consacre au titre de ces protections particulières (libertés individuelles) la liberté religieuse et plus généralement la liberté d’opinion. Elle consacre aussi dans son article 11 la liberté d’expression. Et enfin le droit de propriété. C’est sur ce droit de la propriété là que les controversent ont été les + vives y compris au moment de la Déclaration elle-même. Dès le XVIIIème siècle il n’y a pas unanimité pour considérer que le droit de propriété serait inhérent à la nature humaine. Certains auteurs comme Rousseau considèrent par exemple que ce droit relève non pas de l’ordre naturel mais de l’ordre social. Voir phrase sur poly. C’est le seul quasiment à bénéficier dans la déclaration elle-même de dispositions protectrices relativement précises. Voir l’article 17. Il en fait un droit sacré. C’est aussi un droit qui illustre bien les difficultés de la classification. C’est un droit qui est reconnu dans la DDHC en tant que liberté individuelle et donc en tant que droit civil. Droit que l’on peut classer aussi parmi les droits économiques. L’extension des libertés civiles ne s’est pas limitée aux libertés individuelles. On a des libertés collectives. Comme la liberté d’association, de manifestation…Les libertés collectives se distinguent des libertés individuelles en ce sens qu’elles ne peuvent s’exercer que si plusieurs personnes s’accordent sur leurs mises en œuvre. Il ne peut pas y avoir de véritable liberté d’expression sans les libertés collectives de réunion, d’association ou même de manifestation. Historiquement sont reconnus quasiment en même temps des droits politiques. La 1ère génération des droits et libertés comportent aussi des droits politiques (droits des citoyens) c'est-à-dire le droit de participer aux affaires de la cité. Plutôt restreint au début avec le suffrage censitaire. C’est un droit qui finira par imposer le principe du SU. La nature juridique de ces droits civils et politiques qu’ils soient individuels ou collectifs c’est d’être des droits de. Des droits de faire, des droits d’agir. Et la reconnaissance de ces droits là s’appuie en même temps sur une certaine idée de l’Etat, du pouvoir politique. Etat qui n’est censé intervenir que dans les cas et selon les formes prévues par la loi et uniquement pour réprimer les abus qui

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pourraient avoir lieu dans l’exercice ou la jouissance de ces droits et libertés. Ce qui sous tend la reconnaissance de ces droits là, c’est l’idée que l’Etat a un devoir d’abstention, il n’a pas à se mêler à l’exercice normal des libertés. L’évolution politique et surtout sociale va engendrer une critique de ces droits dits de 1ère génération pour amener à la reconnaissance d’une catégorie dite de 2ème génération : la catégorie des droits économiques, sociaux et culturels. L’évolution politique et sociale va aboutir à mettre en cause cette 1ère génération de droits. La reconnaissance de ces droits là est insuffisante. C’est une critique sociale. Voir citation dans le poly.

Cette critique là va amener la revendication de droits économiques et sociaux sous la forme notamment de droits créance (2ème génération). Du point de vue du droit positif la date charnière est la constitution de 1848 de la IIème République qui réaffirme les droits civils et politiques mais proclament aussi pour la 1ère fois un certain nombre de droits économiques et sociaux. Par exemple l’article 13 de cette constitution prévoit la gratuité de l’enseignement primaire, l’assistance aux enfants abandonnés, aux infirmes, il prévoit également la mise en place d’institutions de prévoyance. Les principes ne se réaliseront que très progressivement. 1848 est une date capitale car c’est à ce moment là que le pouvoir politique enregistre l’insuffisance de la conception libérale classique en admettant la nécessité de la reconnaissance d’un certain nombre de droits économiques et sociaux.La constitution de 1946 constitue une autre date importante. Le préambule établie une nouvelle rubrique, celle des principes politiques, économiques et sociaux particulièrement nécessaire à notre temps. Principes au titre desquels sont reconnus un certain nombre de droits créance comme le droit à la protection de la santé ou encore le droit à l’instruction. Un certain nombre de droit du travailleur comme le droit de grève ou la liberté syndicale. La distinction classique entre d’une part les civils et politiques et les droits économiques et sociaux d’autre part s’appuie sur leurs objets. Elle reflète aussi un moment historique différent dans leur reconnaissance. Mais ce qui alimente profondément cette distinction est leur régime juridique.

- Les droits civils et politiques sont censés renvoyer à un devoir d’abstention de l’Etat.

- Au contraire les droits économiques et sociaux impliquent eux un devoir d’intervention de l’Etat. Ce sont des droits à l’obtention d’une prestation. D’où l’idée de droits créance ou de droit à.

Leur technique de satisfaction est différente. Les droits civils et politiques sont garantis par des mécanismes qui relèvent essentiellement de la technique juridique (protection juridictionnelle). La satisfaction des droits créance repose avant tout sur la mobilisation de moyens matériels, par la mise en place de service publique.

En même temps on ne peut pas pousser la distinction à l’extrême pour une série de raisons.

- une partie des droits reconnus dans la sphère sociale comme par exemple le droit de grève ne sont pas des droits créances. Ils sont garantis et mis en œuvre par les mêmes procédés juridiques que les droits civils et politiques. Ce sont de véritables droits subjectifs invocables devant le juge en tant que tels. Tous les droits sociaux ne sont pas des droits créance.

- les droits créances eux-mêmes peuvent à un certain moment se traduire en véritable droit subjectif dont le juge pourra sanctionner la violation. Le droit à l’instruction (droit créance) implique le droit de fréquenter l’école.

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- Inversement, on peut dire que toute liberté contient en germe un droit créance dans la mesure où la proclamation de cette liberté implique l’obligation pour l’Etat de la garantir y compris le cas échéant en fournissant les moyens y compris matériels pour que cette liberté ne reste pas lettre morte.

Arrêt AIREY qui met en cause le droit d’accès à un tribunal reconnu au titre des droits civils dans la convention EDH. Dans cet arrêt le juge européen va considérer que pour être effectif (pour avoir une réalité) ce droit d’accès à un tribunal peut emporter des obligations positives à la charge de l’Etat afin de faciliter l’accès à la justice. Le juge européen reconnait un droit à l’assistance judiciaire et il le reconnait dans un contentieux civil. Il fait dire à la convention quelque chose qu’elle ne prévoit pas dans le souci de rendre effectif ce droit.

Raisonnement de la Cour : la Cour considère que si la Convention « énonce pour l’essentiel des droits civils et politiques, nombre d’entre eux ont des prolongements d’ordre économique et social » et qu’elle « n’estime pas devoir écarter telle ou telle interprétation (au simple motif) qu’on risquerait d’empiéter sur la sphère des droits économiques et sociaux ; nulle cloison étanche ne sépare celle-ci du domaine de la Convention ». Ce qui guide le raisonnement du juge est le souci de l’effectivité des droits et libertés. A quoi sert de reconnaitre le droit à un procès équitable si les justiciables n’ont pas les moyens matériels d’accéder à la justice ? La distinction droits civils et politiques/ droits sociaux et économiques doit être relativisée. Les seconds complètent les premiers, ils s’y ajoutent. Les seconds peuvent permettre aux premiers de se concrétiser.

Il y aurait de ce point de vue historique une 3ème génération de DH. Car on se situe dans la sphère internationale. Mais elle est discutée et controversée. Cette notion de 3ème génération des DH a été proposée pour rendre compte d’un certain nombre de revendications qui sont progressivement apparues sur la scène internationale. Avec toujours la même idée, que cette 3ème génération viendrait compléter les 2 premières générations et viendrait les compléter notamment du point de vue de cette idée de solidarité. Ces droits de solidarité seraient le droit à la paix et à la sécurité, le droit au développement, le droit à un environnement satisfaisant (préoccupation écologiste). De la même façon que les droits économiques et sociaux sont apparus pour rendre effectifs les droits politiques et civils, les droits de 3ème génération seraient la condition même d’existence des deux premières générations. Ces droits de solidarité découleraient de l’article 28 de la déclaration universelle des DH « toute personne a droit à ce que règne, sur le plan social et sur le plan international, un ordre tel que les droits et libertés énoncés dans la présente déclaration puissent y trouver un plein effet ». Ce lien entre les différentes générations de droits est également expressément fait dans un texte fondateur de Stockholm, 1972 la 1ère conférence des NU sur l’environnement. Citation poly.Ce qui pose problème à une partie de la doctrine juridique c’est la transformation de ces exigences politiques légitimes en une nouvelle catégorie de DH. 1 er argument  : qui est le titulaire de ces droits ? La doctrine hostile à cette catégorisation DH, elle fait valoir que le titulaire ne serait pas l’homme mais une collectivité qui serait en outre difficile à déterminer. Autre argument : + convaincant. Le débiteur de ces droits serait aussi difficile à déterminer. Compte tenu des enjeux ont serait tenté de dire que la satisfaction de ces droits suppose une action concertée de la communauté internationale.

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Or on sait que cette communauté internationale a du mal à exister. Donc le débiteur on a du mal à le trouver. Critique + sérieuse.3 ème critique  : il est difficile de circonscrire l’objet de ces droits en ce sens où se sont des exigences qui ne sont pas vraiment susceptible de faire l’objet d’une protection juridique. Difficile d’invoquer le droit à la paix devant le juge. La tendance contemporaine à vouloir convertir systématiquement des revendications politiques ou des exigences éthiques dans le langage du droit n’est pas sans risque. On a un risque de désintégration de la catégorie DH à force de vouloir y rassembler des revendications hétéroclites mais aussi parfois même contradictoires (droit à la vie et droit de mourir). Et donc le risque au final c’est celui du risque d’une perte de crédibilité qui par contagion affecterait l’ensemble des DH à force d’y inclure des aspirations dont la réalisation est hors de portée ou dont la violation ne peut pas être sanctionnée.

La traduction en droit de principes politiques ou éthiques peut ainsi créer des effets productifs. Un droit peut entrainer une certaine dynamique. Ex = la protection de l’environnement inscrit dans la Charte. C’est ce que montre aussi le droit à la protection de l’environnement qui est inscrit dans des textes à portée contraignante. On cherche ensuite à délimiter les contours, on le décompose en une série de droit subjectif concret opposable aux Etats ou mêmes à des personnes privées. C’est ainsi que les entreprises doivent désormais répondre des dommages qu’elles peuvent causer à l’environnement. C’est un exemple qui montre qu’à partir d’une exigence au départ qu’on considérait comme vague, on peut parfois arriver à la formulation d’un droit dont on peut sanctionner la violation et garantir la réalisation. Volonté politique. Les droits et les libertés ne sont ni éternels ni immuables, il y a au contraire une dynamique des droits. En France le statut des libertés c’est ainsi formé par sédimentation successive et cette formation historique des libertés, explique qu’il n’y ait pas une définition théorique de ce que serait les libertés fondamentales ou publiques. De la même manière qu’il n’y a pas en droit français un texte constitutif, mais des textes successifs qui correspondent à des conceptions diverses, voir même parfois opposées sur certains aspects des libertés voir même de la liberté. Ce qui est certain est que l’émergence des droits de l’homme est liée à un certains nombres de conditions et à un certain contexte. Les droits de l’homme apparaissent à partir du moment où apparaissent elles mêmes les notions d’individus, les notions de sujets de droit en tant que notion centrale de la pensée juridique et politique.L’abandon de la conception holiste de la société va amener lui même à penser l’Etat d’une façon renouvelée. En France historiquement c’est la fin de l’absolutisme au profit de cette idée selon laquelle (article 2 de la DDHC) le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme.

Titre 1 = Contexte socio-historique d’affirmation des libertés   : l’Etat libéral

Chapitre 1 = Les caractéristiques du libéralisme classique : l’individualisme et la nécessaire abstention

de l’Etat

L’apparition des droits et libertés est liée à la réalisation d’un certain nombre de condition. La 1ère de ces conditions c’est que l’homme soit pensé comme un

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individu autonome et premier par rapport au tout social (le groupe). Ce postulat au départ philosophique va déboucher sur des réformes politiques et ça c’est l’œuvre, selon des modalités différentes, des révolutions anglaise, américaine et française que l’on peut considérer comme l’aboutissement des revendications individualistes même si ces trois révolutions diffèrent assez sensiblement aussi bien dans leur modalité que dans leur traduction juridique.

La révolution de 1688 en Grande-Bretagne

Tradition + ancienne de proclamation des droits et libertés qu’en France. Le moment charnière est la révolution de 1688 qui aboutit à un texte, une déclaration des droits le Bill of Rights du 13 février 1689. Il est surtout une codification de droits et libertés qui avaient déjà été proclamés dans un certain nombre de documents + anciens. Sur la codification de ces documents + anciens ont peut citer la Magna Carta de 1215 qui fait partie de ces documents où l’on trouve d’autres exemples. Document par lequel le monarque est amené à admettre des limitations à son pouvoir en reconnaissant un certain nombre de prérogatives à d’autres institutions en particulier l’Eglise, les seigneurs féodaux ou encore un certain nombre de cité ou communauté. De ce point de vue là, c’est un texte (la magna Carta) qui marque surtout le renforcement de la féodalité en GB. Mais si ce texte est devenu une référence mythique en matière de DH c’est parce qu’il prévoit aussi des garanties concernant la liberté individuelle des sujets, essentiellement en terme de sûreté, et on trouve cette phrase « aucun homme libre ne sera arrêté ou emprisonné ou dépouillé ou mis hors la loi ou exilé et il ne lui sera fait aucun dommage, si ce n’est en vertu du jugement légal de ses pairs ou en vertu de la loi du pays ». Toujours dans la déclaration de 1689 on trouve aussi la Petition of Rights de 1628. Elle prévoit que sont interdites les arrestations arbitraires, elle prévoit le droit de se défendre dans une procédure régulière. Dernier texte qui fait partie de la déclaration de 1689, l’acte d’Habeas Corpus de 1679 qui réaffirme l’interdiction des arrestations arbitraires et qui entend garantir le respect des droits de l’inculpé et du détenu. Au cœur de la procédure d’Habeas Corpus figure l’obligation de présenter corporellement toute personne détenue à un juge dans des délais très court pour que ce juge puisse statuer sur la légalité de la détention. Le Bill of Rights reprend tous ces textes, les codifie en y ajoutant qu’on ne doit pas pouvoir affliger de peines cruelles et excessives. Toujours cette idée qui s’affirme progressivement que les pouvoirs du monarque doivent être limités, il ne pourra pas suspendre les lois votées par le Parlement. Ces textes sont caractéristiques de la conception britannique des droits et libertés, qui ce distingue assez nettement de la conception qui au XVIIIème siècle sera à l’œuvre notamment dans la révolution française. Les textes anglais n’ont pas pour ambition de proclamer des principes abstraits qui seraient universellement valables (contrairement aux textes français). Ils visent à remédier à des abus précis en donnant des garanties précises, concrètes et détaillées sur un certain nombre de sujets. On a un souci du pragmatisme qui conduit à donner un certain nombre de garanties très précises et détaillées.

Les déclarations des droits américains

On retrouve ce souci de pragmatisme dans les déclarations américaines, mais elles se rapprochent par d’autres côtés des déclarations françaises notamment par leur ambition de proclamer des principes fondamentaux qui sont censés

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inspirés la conduite des gouvernants et qui ont vocation à être traduit en loi positive. Les 1ères déclarations américaines sont adoptées par les Etats qu’on appellerait les Etats fédérés, à l’époque par les 13 colonies d’Amérique qui sont en train de se séparer de la couronne britannique. La déclaration des droits de l’Etat de Virginie proclamée en 1776 occupe une place particulière parce que c’est cette déclaration là qui servira de référence pour rédiger la déclaration d’indépendance des Etats-Unis et qui servira de référence pour rédiger plus tard les 10ers amendements de la Constitution américaine. La Déclaration d’indépendance du 4 juillet, elle s’attache à justifier la rupture avec la GB en faisant appelle à des valeurs universelles (loi de la nature et du Dieu de la nature). Elle s’attache à des principes politiques directement inspirés par la théorie des droits naturels et la philosophie des Lumières. Contrairement à la déclaration de Virginie, la déclaration d’indépendance ne comporte pas d’énoncées de droits fondamentaux, se sera l’objet des 10ers amendements de la constitution fédérale de 1787 qui achève la formation des EU. Donc ce sont ces amendements ratifiés en 1791 qui constituent le Bill of Rights américain.

Dès 1803 l’arrêt Marbury contre Madison de la Cour suprême américaine investira toute juridiction du pouvoir de faire primer la constitution américaine sur toutes autres normes (faire primer les 10 amendements) en laissent donc inappliqué toutes normes qui seraient contraire à la constitution ou à ses amendements. Ces 10 premiers amendements et cette déclaration de droits y seront ajoutés d’autres amendements notamment au lendemain de la guerre de Sécession. Sera proclamé la prohibition de l’esclavage…

Les membres de l’AN Française qui en 1789 vont rédiger la DDHC auront ce souci constant d’imiter et même de surpasser le modèle américain. Ce qui explique donc que les ressemblances entre les textes américains et la DDHC sont frappantes à la fois dans la forme et dans le fond. Globalement les hommes sont par nature libres et égaux en droits, qu’ils possèdent des droits inaliénables limitant le pouvoir de l’Etat et enfin que ce pouvoir n’est légitime que s’il émane du peuple. A partir de là les points de vue commencent à diverger et on a une attitude différente face au pouvoir politique et donc aussi une représentation différente de la révolution. Dans les déclarations américaines ont peut lire la méfiance envers tout pouvoir et parallèlement la conviction que le fonctionnement naturel de la société tendra à réaliser spontanément la protection des droits de l’homme. La déclaration de 1789 traduit au contraire une autre croyance, la croyance en la possibilité de bâtir un pouvoir parfait capable de réaliser les objectifs de la révolution. Pouvoir parfait qui serait incarné par la loi expression de la volonté générale. Cela entraine une différence dans la garantie des droits. Il suffit dans la déclaration de 1789 de comptabiliser la fréquence des renvois à la loi qui traduisent bien cette confiance mise dans le législateur notamment pour transcrire en droit positif les principes de la déclaration.

Tout cela explique que l’idée même en France d’un contrôle de constitutionnalité des lois sera une idée qui mettra longtemps à s’imposer dans les esprits, que tout les essaies échoueront jusqu’à la constitution de 1958 et la décision de 1971. Cela marque le triomphe de l’individu qui a en 1789 des caractéristiques bien précises, bien marquées. En effet les droits qui sont proclamés sont conférés à un

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homme abstrait c'est-à-dire sont conférés à un homme qui est envisagé indépendamment de ces conditions d’existence autrement dit de ses déterminations sociales, économiques, indépendamment de ses caractéristiques concrètes. Les révolutionnaires de 1789 considèrent la liberté comme établie à partir du moment où le droit met à la disposition de quiconque sans distinction la faculté de faire telle ou telle chose. C’est le sens de l’article 1er de la DDHC que souvent on tronque (« les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits »). La question de savoir de ce qu’il en advient réellement, la question de savoir si un usage effectif de la liberté est possible, cette question là est considérée comme sans pertinence juridique. C’est une question de pur fait, qui n’est pas de la compétence des pouvoirs publics. Cette conception abstraite de l’individu et de ses droits va immédiatement se heurter à de vives contestations, ces contestations théoriques serviront de fondement, politiquement cette fois, au retour d’un certain nombre de forme de l’Etat autoritaire et la fin de l’Etat libéral.

Chapitre 2 = La contestation du libéralisme classique et le retour de l’Etat autoritaire

Immédiatement la révolution française fait l’objet de critique et avec elle le libéralisme individualiste dont elle est l’incarnation. Ces contestations sont de deux ordres =

- elles sont d’une part le fait des partisans de l’ordre ancien c'est-à-dire de l’Ancien régime qui continue d’être la règle sur la majeure partie du continent européen.

- on a à l’opposé des contestations de ceux qui estiment au contraire que les progrès réalisés sont insuffisants. C’est l’objet de la critique marxiste des DH.

Section 1 = Les contestations théoriques du libéralisme classique

La critique contre-révolutionnaire des idées de 1789

Critique de Burke, de Joseph de Maistre ou de Bonald. Ces auteurs sont les figures classiques d’un courant dit traditionnaliste parce qu’il reste attaché à une représentation holiste de la société, hiérarchisée. Conception qui s’oppose à la conception individualiste et égalitaire qui sous-tend la proclamation des DH. Ce type d’écrit inspirera des régimes comme le régime de Vichy ou le régime de Franco ou Salazar au Portugal.Ces auteurs, en particulier Burke, opposent aux droits de l’homme abstraits (qui sont revendiqués au nom d’une raison universelle) la conception anglaise de droits progressivement acquis au fil de l’histoire et surtout de droits qui valent pour une société donnée à une époque donnée. Il rejette donc le projet révolutionnaire d’une reconstruction radicale de l’ordre social. Et selon lui il faut au contraire faire confiance à l’évolution spontanée de la société. Donc ces auteurs ne conçoivent l’homme que dans une perspective holiste, il est impossible d’envisager l’homme autrement que prit dans le groupe et c’est le groupe qui détermine l’identité de l’individu. Découle de ce postulat une dénonciation des effets destructeurs de l’individualisme parce que susceptible de détruire l’ordre social. Voir phrase de Maistre et de Bonald. Cet attachement à la tradition est surtout à l’ordre communautaire débouche sur la critique de l’universalisme qui fonde la théorie des droits de l’homme. Il n’y a pas pour ces auteurs de nature humaine qui transcenderait la diversité des

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sociétés. Il est donc inutile de prétendre dégager des principes politiques qui seraient universellement valables.

La critique marxiste des droits de l’homme

Marx critique la distinction qui est opérée dans la DDHC notamment entre les droits de l’homme (droits civils) d’un côté et les droits du citoyen de l’autre notamment car pour lui les droits de l’homme seraient ceux de l’homme égoïste. Pour Marx les DH proclamés dans la DDHC consacrent un individu séparé de la communauté qui serait uniquement préoccupé de son intérêt personnel. Et Marx voit la preuve de cela dans la définition de la liberté donnée par la déclaration c'est-à-dire le pouvoir qui appartient à l’homme de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Selon lui la DDHC fonde le droit à la liberté non pas sur la relation de l’homme avec l’homme mais au contraire sur la séparation de l’homme avec l’homme. C’est donc l’homme égoïste avec un paradoxe : un peuple qui est en train de s’affranchir et qui prétend fonder une nouvelle communauté politique fait de cette communauté politique un simple moyen, un simple instrument devant servir les seuls intérêts de l’homme égoïste. Ce paradoxe fait que cela ne peut pas fonctionner. Le 2ème aspect de sa critique = pour lui la proclamation des DH telle qu’énoncée dans la DDH est une mystification idéologique en ce qu’elle laisse croire que les individus sont des sujets de droits libres et égaux alors que les rapports économiques engendrent des inégalités concrètes et fondamentales. Pour lui l’égalité juridique n’est pas la véritable égalité. La critique marxiste oppose l’homme abstrait de la DDHC à l’homme concret en reprochant à la DDHC de ne pas prendre en compte cet aspect là des choses. Piste de réflexion = on peut suivre Marx quand le propos est de dire qu’un certain nombre de droits et libertés contenus dans la DDHC n’ont pas de contenu réel. On peut se poser la question de réalité du droit de propriété pour ceux qui ne possèdent rien. Ce qui est + contestable notamment avec le recul historique : c’est l’extension de cette critique du droit de propriété à l’ensemble des droits civils et politique. On ne peut sans doute pas mettre dans le même sac la sûreté et le droit de propriété ou on peut se demander en quoi la présomption d’innocence serait une présomption bourgeoise. Ce qu’on peut peut-être reprocher c’est de ne pas avoir suffisamment mesuré la portée pratique et l’ampleur de la libération qui malgré tout est fait en 1789 par rapport à l’état de l’Ancien régime. Marx esquive un certain nombre de question et notamment celle au cœur de la théorie des DH qui est le refus de l’arbitraire (changement entre avant et après 1789).

Toutes ces critiques vont servir de fondement théorique, de façon + ou – directe, au rétablissement de régimes peu soucieux des libertés individuelles.

Section 2 = Résurgences historiques du totalitarisme

I / Totalitarisme/ détournement des valeurs libérales/ rejet des valeurs libérales

Le totalitarisme

Le mot totalitaire est inventé par Mussolini pour caractériser un Etat dont les fondements sont à l’exact opposé des fondements de l’Etat libéral. On a une supériorité du tout, du groupe = vision holiste. Supériorité de l’Etat sur l’individu. La conception d’un pouvoir qui contrôle la totalité des sphères de

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l’activité humaine. Il va par la suite servir à désigner des régimes qui présentent un certain nombre de points communs : parti unique, idéologie officielle, suppression des libertés individuelles et politiques. Il va + particulièrement servir à qualifier et caractériser des régimes comme le nazisme ou le stalinisme qui sont tous les deux des régimes totalitaires. Le régime de Vichy peut aussi entrer dans cette catégorie. La résurgence de ce type de régime peut être le produit de 2 attitudes =

- un régime totalitaire peut résulter soit du détournement des valeurs libérales

- soit purement et simplement du rejet affirmé des valeurs libérales

Le rejet des valeurs libérales

C’est ce qui caractérise comme le fascisme italien, comme le nazisme ou encore le régime Vichy. Ce rejet on le trouve de façon explicite dans cette phrase de Mussolini : « la liberté individuelle n’est pas un droit inné, supérieur à l’Etat, susceptible de s’affirmer contre les intérêts mêmes de l’Etat : c’est seulement une concession de l’Etat, faite dans l’intérêt de l’Etat ». On a le postulat inverse de celui du libéralisme politique.Le détournement des valeurs libérales

Le but affiché de ce type de régime est l’établissement d’une société fondée sur la liberté et l’égalité. L’objectif est différent que celui des régimes nazis. Le problème ce n’est pas l’objectif mais ce sont les moyens qui sont utilisés pour atteindre cet objectif qui pose problème. L’idée c’est qu’on va mettre entre parenthèses les libertés temporairement à cause d’un certain nombre de nécessité et notamment la nécessité de lutter contre ceux qui ne veulent pas de cette société de liberté et d’égalité. C’est donc l’idée très dangereuse que la fin peut justifier les moyens. On va mettre de côté provisoirement la liberté au nom de l’établissement de la liberté. Ex historique français = la phase de la Terreur peut illustrer la dérive d’un régime qui prétend faire triompher la liberté. Cette période est aussi intéressante car elle inaugure d’une certaine manière les instruments dont s’inspireront les régimes totalitaires du XXème siècle et notamment la révolution russe de 1917. Voir les deux citations sur le poly. Phrase de St Just « pas de liberté, pour les ennemis de la liberté » et de Mme Roland « liberté, que de crimes on commet en ton nom ». D’un point de vue juridique, au nom d’un certain nombre de danger (danger extérieur des autres monarchies, et interne avec les contre révolutions) on va justifier et adopter des lois qui officialisent l’arbitraire par exemple la « loi des suspects » du 17 décembre 1793 qui supprime la présomption d’innocence en identifiant certaine catégorie de personne comme étant d’office suspect. Cette logique culmine dans le discours de Robespierre qui prononce en 1794 « je dis que quiconque tremble en ce moment est coupable, car jamais l’innocence ne redoute la surveillance publique ». Il ne faut pas occulter cette période liberticide.Cela n’enlève rien au fait que la révolution globalement a permis l’établissement d’une société au final + respectueuse des libertés que l’AR.

II / L’essence du totalitarisme

L’entreprise totalitaire repose d’abord sur un projet utopique. Ex = la pureté raciale. La subordination inconditionnelle des individus au groupe, au pouvoir et donc en retour une emprise totale du pouvoir sur les individus qui ne sont + envisagés comme des individualités mais comme une masse homogène, indifférenciée. Une masse au service du projet collectif tel qu’il est défini de

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façon autoritaire par le pouvoir qui fonctionne sur la base du culte du chef. Illustration avec le régime de Vichy, le projet c’est celui de la révolution nationale qui vise à créer un ordre nouveau. Projet qui suppose l’appui total des masses ouvrières et paysannes encadrées par un certain nombre d’organisations et notamment les organisations de jeunesse qui y sont très encadrées. Cette journée de l’alliance qui existait dans l’Italie de Mussolini où les femmes étaient invitées à remettre à l’Etat leur alliance pour financer la patrie en difficulté, représentait un second mariage avec la patrie. Cela change tous les repères.

III / Le droit dans les régimes totalitaires

Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer le droit est présent dans les systèmes totalitaires y compris le droit constitutionnel sauf que ce droit n’a aucune valeur protectrice c’est juste, lui aussi, un instrument de la réalisation des objectifs du régime. C’est donc du point de vue de son contenu, un droit qui légitime et organise l’arbitraire. Le meilleur exemple est les lois antisémites du régime de Vichy qui privent les juifs d’exercer des fonctions électives, puis les privent d’exercer des fonctions d’enseignement, les excluent de la plupart des corps de la fonction publique, puis permet de les interner dans des camps spéciaux de façon discrétionnaire. Dans ce type de régime la caractéristique de ces règles de droit est qu’elles vont tisser un réseau très dense de prescription et d’interdiction qui régissent la vie des individus dans les moindres détails. Il y a du droit et même beaucoup de droit.L’idéal totalitaire c’est d’imposer des modèles de comportement voir des modèles de pensées et donc dans ce type de régime il y a beaucoup de règles, beaucoup de normes, ce qui participe aussi du mécanisme d’intimidation et d’oppression sur lequel ils reposent. Plus il y a de règles, plus on risque d’être en infraction.

Autre caractéristique = le respect de ces normes est contrôlé en permanence par un dispositif policier très charpenté, il repose toujours sur l’encouragement à la délation. Soit le droit concourt à la réalisation du projet collectif, soit il est écarté s’il entre en contradiction avec ce projet. Le droit n’a donc aucune valeur en soi. Ex du régime hitlérien, où les juges sont invités par le pouvoir à écarter le droit s’il est en contradiction avec le führer.

IV / La négation des droits subjectifs

Négation des droits subjectifs, la notion de droits individuels disparait. Seul l’Etat a des droits. Le totalitarisme est incompatible avec une référence aux DH. Citation d’Albert Cohen voir poly.

Conclusion = on pourrait se demander qu’est-ce qu’un Etat libéral ? Churchill le définissait comme étant « celui dans lequel les citoyens sont surs en entendant un coup de sonnette au petit matin qu’il s’agit du laitier ». Il ne s’agit pas de la police politique ou judiciaire. Bernard-Henry Levy : « Un Etat libéral est un Etat qui se censure ». Elle met l’accent sur l’idée qui se situe au cœur du libéralisme politique classique c'est-à-dire la méfiance à l’égard du pouvoir. Cette idée indique en même temps que le libéralisme politique, c'est-à-dire la protection des droits fondamentaux, n’est jamais donné ni acquis. Quand le pouvoir politique est confronté à de nouvelles menaces (attentats terroristes), des troubles sociaux, notamment dans les cités

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(état d’urgence en 2005), il a tendance à y répondre par des mesures spectaculaires (pour montrer qu’il riposte). Le problème c’est que ces mesures sont le + souvent attentatoires aux libertés. Ce que cela nous montre c’est que la peur et les libertés ne font pas bon ménage. Benjamin Franklin : « ceux qui sont prêt à abandonner une liberté essentielle pour obtenir une sécurité temporaire minime ne méritent ni la liberté, ni la sécurité ». D’où l’importance de cette idée fondamentale, qui se trouve au cœur du libéralisme, qui est celle qui convient de donner aux citoyens le + de garantie possible contre l’arbitraire du gouvernement. Traduction juridique = l’Etat libéral est alors forcément un Etat de droit c'est-à-dire un Etat dans lequel les pouvoirs publiques sont assujettis au respect du droit. C’est-à-dire un régime où le pouvoir de l’Etat s’arrête effectivement aux limites fixées par le droit. Il faut que le droit garantisse, et au + haut niveau de la hiérarchie des normes, les droits objectifs, les droits de la personne. Dans les Etats libéraux la garantie des libertés passe par le droit, c’est même ce que signifie le terme liberté publique. C’est l’idée que les libertés sont envisagées en tant qu’objet de la règlementation juridique. L’effondrement des régimes totalitaires va provoquer historiquement un retour aux valeurs de la démocratie libérale, de l’Etat libéral. Mais l’expérience aidant, le renouveau contemporain du libéralisme politique s’accompagne d’une réflexion critique.

Chapitre 3 = Le libéralisme contemporain et ses interrogations

Ces interrogations portent en fait sur 3 points =- sur les fondements du libéralisme politique. Comment justifier ce choix ?- elle porte sur les implications, les conséquences de ce choix. Conséquence

notamment sur la question de l’intervention de l’Etat. - c’est la question des limites du libéralisme, des limites des droits

fondamentaux eux-mêmes.

Section 1 = Le problème des fondements du libéralisme

Qu’est ce qui fonde, qu’est ce qui légitime l’existence des droits de l’Homme ? Et donc qu’est-ce qui légitime leur protection juridique. Une partie de la doctrine va aller chercher ce fondement dans une espèce de transcendance et notamment une certaine conception de l’homme va fonder, va justifier les droits de l’homme. Dans la philosophie du droit naturel (notamment chez les philosophes des Lumières) c’est une transcendance laïque ou une transcendance religieuse. Pour ceux, notamment qui refusent les religions ou l’idée même d’une transcendance, l’attachement ou le choix du libéralisme politique peut procéder aussi d’une démarche qualifiée de pragmatique c'est-à-dire de la conviction qu’il s’agit du seul choix possible ou acceptable. Historiquement cela s’inscrit comme une réaction aux régimes totalitaires, c’est le sens du préambule de la constitution de 1946. En tant que choix pragmatique le ralliement aux valeurs libérales procède donc assez largement d’une désillusion ou même d’une série de désillusion.

1 ère désillusion = c’est sans doute le renoncement à l’idée d’un Etat tout puissant et surtout au renoncement qu’un Etat puissant va pouvoir bâtir la société idéale. Renoncement à ce projet utopique qui est à l’origine de tous les totalitarismes.

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C’est donc en même temps aussi le renoncement à cette idée de la Révolution porteuse de libération. L’expérience soviétique en particulier aura discréditée le mythe du grand soir en montrant les risques inhérents au processus révolutionnaire. Phrase de Lacan : « l’aspiration révolutionnaire, ça n’a qu’une chance d’aboutir, toujours, au discours du maitre. C’est ce dont l’expérience a fait la preuve. Ce à quoi vous aspirez comme révolutionnaires, c’est à un maître » : 3 décembre 1969. « Je ne suis libéral, comme tout le monde, que dans la mesure où je suis anti-progressiste ». Il ne s’agit pas de confondre sans doute toutes les révolutions. Certaines peuvent être au final délibératrice mais il s’agit de souligner qu’en elle-même et indépendamment de leur résultat elles sont porteuses de risques et ces risques sont ceux qui sont liés à la suppression de toute contrainte, de toute limite parce que supprimer les limites c’est aussi supprimer les limites qui encadrent le pouvoir étatique lui-même. Et le risque est là. 1ère désillusion qui va nourrir un ralliement pragmatique au libéralisme politique.

2 ème désillusion = idée d’un progrès continu de l’histoire et de l’espèce humaine. Les camps anéantissent cette vision. Donc méfiance envers la révolution, méfiance envers un idéal qui serait mis en œuvre par un Etat surpuissant, scepticisme face à l’idée de progrès. Tout cela conduit à renouer avec la pensée classique et avec la méfiance envers le politique. Méfiance qui est au cœur du libéralisme politique. A fortiori ce ralliement pragmatique conduit à refuser à l’Etat la responsabilité d’assurer à lui seul en tout cas, le bonheur des peuples sans doute doit il y contribuer. Mais l’idée est que l’on ne peut pas se décharger complètement sur l’Etat de cette responsabilité parce qu’à partir de là cela permet au pouvoir de renforcer sa légitimité d’une manière qui peut être dangereuse pour les libertés. De ce point de vue, il faut toujours se méfier de l’utilisation des droits de l’homme par le pouvoir lui-même. L’Etat qui s’érige lui-même en défenseur des droits de l’Homme n’est sans doute qu’une forme nouvelle de l’Etat porteur d’idéal. C’est l’histoire qui nous montre qu’il s’agit là d’une vision dangereuse. Les droits de l’homme ne peuvent pas être le thème d’une croisade dont le pouvoir étatique assurerait la direction. Les droits de l’Homme doivent au contraire être une exigence sans cesse opposée à l’Etat. Cette façon de voir les choses peut donc amener à renouer avec le libéralisme politique classique qui postule donc l’abstention de l’Etat. En même temps l’histoire des droits de l’Homme montre que l’effectivité des libertés suppose de la part de l’Etat au moins une action correctrice des irrégularités en particulier des inégalités sociales. D’un côté on cherche à réduire l’action de l’Etat. Et de l’autre on compte sur lui pour réduire les inégalités et pour faire en sorte que le + grand nombre puisse effectivement bénéficier des libertés consacrées ce qui ne peut conduire qu’à un certain interventionnisme de l’Etat.

C’est une contradiction qui a été difficile à gérer pour certains libéraux, qui a donc suscité un certain nombre de débat mais on a fini par admettre un certain interventionnisme de l’Etat.

Section 2 = Les implications du libéralisme   : la question de l’interventionnisme étatique dans le domaine économique et social

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D’un côté des auteurs persistent sur cette ligne du non interventionnisme absolu de l’Etat = auteurs ultra-libéraux comme Hayek ou de Jouvenel. Pour eux si on tolère que l’Etat prenne en charge le devenir économique et social du pays cela reviendrait à une abdication de la liberté devant les exigences de l’égalité. Cela serait même échanger ses droits individuels contre des droits économiques et sociaux. Cette façon très négative d’envisager l’interventionnisme étatique est relativement marginale. Elle a été récusé par un grand nombre de libéraux y compris par des libéraux de droite. Raymond Aron par exemple considère comme pleinement légitime la lutte de l’Etat contre les inégalités relevant en particulier qu’à partir d’un certain seuil la pauvreté équivaut à la servitude. De ce point de vue là, la position ultra-libérale est discutable en ce que la liberté ne souffre pas forcément d’une intervention étatique qui au contraire va permettre son effectivité. Mais la position ultra-libérale est aussi discutable d’un autre point de vue. Cette position met l’accent sur les seules menaces que l’Etat, que l’interventionnisme étatique ferait peser sur les libertés. Ce qu’elle oubli c’est qu’il y a d’autres menaces possibles pour la liberté. La société civile peut aussi faire peser certaines menaces sur la liberté des individus. Il existe aussi des menaces privées. L’école, l’entreprise, la famille sont aussi des lieux de pouvoir avec une domination possible. Il est donc possible aussi que l’Etat ou la règle de droit puisse protéger les libertés contre ces menaces privées. Par exemple, c’est tout le travail de l’inspection du travail qui protège les travailleurs contre certaines menaces privées qui sont celles du monde du travail et particulièrement des employeurs.

L’Etat libéral contemporain repose donc sur un compromis entre l’abstention et l’intervention de l’Etat. Les termes de ce compromis ont été renouvelés avec la revendication des droits économiques et sociaux mais la nécessité de ce compromis elle est déjà posée, en germe dans le libéralisme classique. Elle montre déjà que l’abstention de l’Etat ne peut être que relative tout simplement car la vie en société suppose que les individus n’agissent pas toujours en fonction de leur seul libre arbitre. L’Etat doit donc faire en sorte d’aménager l’exercice des libertés car la liberté de l’un à pour limite la liberté de l’autre ou l’intérêt général. L’Etat doit donc intervenir pour poser les limites. C’est le sens des articles 4 et 5 de la DDHC. Article 4 « la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». Article 5 « la loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société ». Cette question des limites est toute la question de l’exercice des libertés.

Titre 2 = Le problème des limites du libéralisme

L’existence même du lien social implique qu’il n’y a pas de liberté absolue c'est-à-dire des libertés qui seraient placées hors de toute atteinte du pouvoir quelque soit les circonstances. Dans la plupart des cas on se trouve face à des libertés susceptibles de connaitre des limitations + ou – importantes, notamment selon les circonstances. Il n’y a pas de liberté absolue du point de vue juridique du moins. En période de crise exceptionnelle elles peuvent même être supprimées. A partir de là 3 questions =

- au nom de quoi peut-on établir et surtout peut-on justifier ces limites aux libertés ?

- et dans quelles mesures peut-on limiter les libertés ? jusqu’où peut aller cette limitation ?

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- qui est habilité à établir cette limitation ? dans une démocratie il ne peut s’agir que du peuple ou en tout cas il ne peut s’agir que des représentants du peuple. C’est donc dans un régime démocratique, la majorité qui va fixer les limites des libertés d’où les risques d’atteintes aux droits des minorités, d’où le risque de contradiction entre libéralisme et démocratie.

Chapitre 1 = « Libertés absolues » ( ?) et libertés limitées

Le + souvent, notamment à partir d’une analyse des textes internationaux de protection des droits de l’Homme (convention EDH ou des pactes de 1966), les auteurs distinguent entre ce qu’ils appellent les droits intangibles et les droits qui seraient affectés d’un certain coefficient de relativité. Cette présentation tendrait à suggérer qu’il existerait des libertés limitées mais qu’il existerait aussi par opposition des libertés absolues que seraient les droits intangibles. Juridiquement l’idée de droits intangibles ne renvoie absolument pas à l’idée qu’il existerait des droits ou des libertés absolues. L’idée d’intangibilité, dans la Convention EDH comme dans les autres textes internationale, renvoie juridiquement et très précisément à l’idée que les droits intangibles sont des droits qui ne peuvent pas faire l’objet d’une suspension, qui ne peuvent pas être écarter en cas de guerre, en cas de danger qui menacerait la vie de la Nation (article 15). Ça ne veut pas dire qu’on ne puisse pas limiter. On peut les limiter y compris en période dite normale.

Section 1 = Les droits insusceptibles de dérogation en cas de circonstances exceptionnelles

I / Les droits intangibles

Si on prend comme point départ le texte de la convention EDH, les droits intangibles sont les suivants : droit à la vie, le droit à ne pas être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, du droit de ne pas être tenu en esclavage ni en servitude, du principe de légalité des délits et des peines, principe de non rétroactivité de la loi pénale + sévère et de la règle non bis in idem. Liste extrêmement restreinte. Le pacte international relatif aux droits civils et politiques comprend une liste comparable sauf qu’on ne trouve pas la règle non bis in idem. On y trouve en revanche des droits qui ne sont pas dans la convention : le droit de chacun à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique, le droit de ne pas être emprisonné pour la seule raison qu’on n’est pas en mesure d’exécuter une obligation contractuelle et la liberté de conscience (3). Les droits considérés comme intangibles sont finalement peu nombreux. En même temps il s’agit de textes internationaux donc qui sont censés ne représenter qu’un standard minimum. Rien n’empêche les Etats d’être + protecteur. La liste des droits intangibles n’est pas étendue par les droits internes.

L’expression droit intangible n’est pas équivalente à celle de droit absolu. Ce pour au moins 2 raisons. Certains droits intangibles peuvent l’objet de limitation et ce en vertu des textes eux-mêmes. Illustration = le droit à la vie. Il est considéré comme un droit intangible par les deux textes. Tel qu’il est formulé dans la Convention il est garanti par le 1er paragraphe de l’article 2. Mais on a un second paragraphe qui précise lui les cas

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où l’interdiction de donner la mort peut être levée ou limitée. Et le texte énumère une série d’hypothèses où le fait de donner la mort peut être justifié. Voir poly.

- pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale- pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l’évasion d’une

personne régulièrement détenue- pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection

On ne peut pas suspendre l’application du droit à la vie en cas de circonstances exceptionnelles. Mais ce droit peut faire l’objet de limitation dans les cas énumérés par le texte lui-même. Donc droit intangible mais pas absolu.

La 2ème raison pour ne pas confondre absolu et intangible = en toute hypothèse tous les droits déclarés intangibles comme tous les droits d’une manière générale pose des problèmes de définition qui vont conditionner le champ d’application de ces droits, qui vont conditionner l’étendu de ces droits notamment lorsqu’il s’agit pour le juge de les appliquer au cas d’espèce. Pour tomber sous le coup de l’interdiction posée par l’article 4 de la Convention (esclavage et servitude) encore faut-il que la situation dénoncée par les requérants soit qualifiée par le juge d’esclavage et de servitude. L’esclavage suppose une appropriation totale de la personne d’autrui. Si cette appropriation totale n’est pas établie par le juge le comportement dénoncé ne sera pas déclaré comme de l’esclavage et échappera à la condamnation. Idem pour la torture. Evolution de la définition juridique de la torture dans un sens de + en + strict. Ces libertés sont susceptibles de limitations ne serait ce que par l’interprétation du juge. Il existe donc un certain nombre de droit intangible que l’on ne peut pas écarter en cas de circonstances exceptionnelles. Cela signifie a contrario que tous les droits qui ne figurent pas dans cette liste ne sont pas donc des droits intangibles et peuvent eux faire l’objet d’une dérogation en cas de circonstances exceptionnelles.

II / La prise en compte des circonstances exceptionnelles

La plupart des droits et libertés qui sont garantis par les textes peuvent faire l’objet d’une dérogation, d’une suspension en cas de circonstances exceptionnelles selon les modalités et dans les conditions prévues par les textes pertinents. Du point de vue philosophique ou politique la justification de cela est l’idée de légitime défense de la société, un Etat doit être autorisé à déroger aux obligations qu’il a souscrites, à suspendre la jouissance des droits proclamés, si la sécurité de la société l’exige. D’un point de vue interne, ces régimes d’exception naissent souvent dans des périodes troublées notamment dans des périodes de guerre. A l’origine ils ont donc quasiment des fins conjoncturelles sauf qu’en général une fois le trouble passé on ne les abroge pas et ils restent de façon permanente à la disposition du pouvoir. Ces textes peuvent avoir une origine constitutionnelle, législative, ou même d’origine jurisprudentielle. Les conventions internationales ont admit le principe mais elles ont cet intérêt qu’elles ont cherché aussi à l’encadrer davantage.

A) L’article 15 de la CEDH

Les exigences de la convention EDH en matière de circonstances exceptionnelles se manifestent à deux niveaux =

- celui de la définition des circonstances qui autorisent une dérogation aux droits garantis.

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- celui des conditions auxquelles cette dérogation est subordonnée. S’agissant de la définition des circonstances l’article 15 envisage seulement le cas de guerre et le cas d’un danger public qui menacerait la vie de la Nation (idée de gravité extrême). Outre la guerre, les violences terroristes liées au problème de l’Irlande du Nord. Au total on peut dire qu’on a une définition assez stricte des circonstances exceptionnelles et le respect de cette définition fait bien sur l’objet d’un contrôle par le juge européen s’il y a des recours à ce sujet. S’agissant des conditions de mise en œuvre de l’article 15 excepté les droits intangibles, les dérogations aux autres droits ne seront considérées comme licites que dans la stricte mesure où la situation l’exige. L’article 15 invite donc le juge européen à un contrôle de proportionnalité rigoureux, cela signifie en particulier que le sacrifice de certains des droits reconnus par la Convention ne sera pas considéré comme justifié si les troubles pouvaient être conjurés par des moyens moins rigoureux, moins liberticide. Le juge européen va aussi veiller à vérifier qu’une situation de trouble sur une partie du territoire de l’Etat ne soit pas utilisée abusivement par ce même Etat pour justifier des restrictions, des dérogations sur l’ensemble du territoire. L’idée de proportionnalité joue aussi de façon territoriale. L’article 15 précise également que les mesures prises ne doivent pas être en contradiction avec les autres obligations du DI. La France par exemple est partie à la fois à la convention EDH et au pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans la mesure où la liste des droits intangibles est + étendue par le pacte, la France est donc tenue par cette liste là. Enfin, l’article 15 met à la charge de l’Etat exerçant son droit de dérogation des obligations d’information. Les autorités étatiques doivent informer le secrétaire général du conseil de l’Europe des mesures prises en vertu de l’article 15. Quels sont les droits suspendus par exemple et sur quelle partie du territoire ? L’Etat doit aussi informer le secrétaire général des motifs qui justifie cette mesure. L’Etat doit aussi l’informer d’une date possible de fin d’application de l’article 15. La France s’est conformée à chaque fois à ces exigences. Le droit français à lui-même toute une série texte à sa disposition en cas de circonstances exceptionnelles.

B) Le droit français en matière de circonstances exceptionnelles

La France comme la quasi-totalité des autres Etats, connait des règles qui dérogent au statut normal des libertés dans un sens aggravant et liberticide. En France ces régimes sont prévus soient par la Constitution et on va donc reparler brièvement de l’article 16 de la Constitution, des régimes prévus par la loi (loi sur l’état de siège non appliquée et la loi sur l’état d’urgence qui est réactivée régulièrement : décembre 2005). Ce type de régime peut être prévu aussi par la JP qui a élaboré une théorie JP des circonstances exceptionnelles. La mise en œuvre de ces régimes est attentatoire aux libertés de 2 manières =

- d’abord directement car ces régimes permettent de déroger aux droits et libertés garantis, de restreindre voir de supprimer l’exercice de certains droits et libertés.

- et de façon indirecte aussi. Elle est attentatoire indirectement aux libertés en ce que ces régimes permettent aussi de déroger aux règles traditionnelles d’organisations des pouvoirs publics. Ces régimes en particulier ne permettent plus le jeu protecteur de la séparation des pouvoirs, ne permettent donc + le jeu protecteur des contre pouvoirs. L’article 16 de la Constitution par exemple permet la confusion entre

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pouvoir exécutif et pouvoir législatif. La loi sur l’état de siège permet elle la confusion ente les pouvoirs civils et militaires. D’une manière générale ces régimes permettent d’amoindrir la compétence des juridictions ordinaires.

1°. L’article 16 de la Constitution

C’est un régime qui à l’origine a été présenté par le Général De Gaulle comme un moyen d’éviter en cas de guerre notamment la reproduction des événements de juin-juillet 1940, notamment la vacance du pouvoir. La mise en oeuvre de ce régime doit obéir à des conditions de fonds et de formes. Au fond 2 conditions cumulatives =

- l’article 16 ne peut être déclenché que si « les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacés d’une manière grave et immédiate ».

- il faut en outre que cette menace aboutisse à interrompre le fonctionnement régulier des PP.

Du point de vue de la forme, la décision de mettre en œuvre l’article 16 est prise par le seul Président mais après consultation officielle du 1er ministre, des présidents des 2 assemblées et du CC. Le CC se prononce donc sur la réunion de ces conditions dans un avis qui est rendu public. Du point de vue juridique, le fait de consulter ces autorités est obligatoire mais elles ne lient pas le Président de la République. La situation serait malgré tout politiquement délicate. Autre condition de forme = la Nation doit être informée par un message du Président de recourir à l’utilisation de l’article 16. L’effet essentiel de l’entrée en vigueur de cet article c’est donc l’extension des compétences du président à toutes les mesures exigées par les circonstances. Le texte précise que ces mesures doivent avoir pour objet de donner aux pouvoirs publics les moyens de poursuivre leur mission. Toutes les compétences, non seulement règlementaires, gouvernementales et législatives sont à la disposition du Président de la République. Jusqu’à récemment un seul garde fou et très symbolique était que le Parlement se réunissait de pleins droits en période d’application de l’article 16 et il ne peut pas être dissout. La révision du 23 juillet 2008 apporte un garde fou supplémentaire : réside dans l’intervention possible du CC au bout de 30 jours, s’il est saisi par les présidents des 2 assemblées, ou 60 députés ou 60 sénateurs (opposition) alors le CC peut donner un nouvel avis toujours public sur la persistance de cette application. Et au bout de 60 jours de plein droit donc de sa propre initiative il procède à cet examen de savoir si les conditions sont toujours réunies. Il s’agit toujours d’un avis, juridiquement la portée est donc à nuancer, le président n’est toujours pas tenu, mais politiquement cela pourrait être délicat de passer outre. C’est un ajout qui s’explique historiquement. La persistance de l’article 16 c’est ce qu’on a reproché au Général de Gaulle en 1961 c'est-à-dire la seule fois où il a été mis en application. Au final la mise en oeuvre de l’article 16 peut avoir des répercutions particulièrement grave sur le terrain des libertés. Elle suspend la compétence du législateur, elle est susceptible d’aboutir à une extension illimitée des pouvoirs règlementaires et des pouvoirs de police, elle peut autoriser des mesures individuelles dérogatoires à la loi, elle permet de limiter les compétences des juridictions ordinaires au profit de juridiction d’exception. Le droit commun des libertés peut se trouver entièrement suspendu. La seule limite est que l’on ne peut pas suspendre l’application des droits intangibles = limite qui nous vient des contraintes internationales.

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C’est d’autant + problématique que le contrôle des mesures sont limitées. Arrêt du CE 2 mars 1962 Rubin de Servens qui repose sur la décision de mettre en œuvre l’article 16 qui est considéré comme un acte de gouvernement et donc échappe à tout contrôle juridictionnel. Mesure adoptée, il faut distinguer si ces mesures appartiennent au domaine de la loi : article 34. Ces mesures là échappent aussi à tous contrôle et au contrôle du juge administratif car prise dans le domaine de la loi. Le CC n’est pas non + habilité à contrôler ces mesures, mais peut donner un avis avant. En revanche le CE accepte de contrôler les mesures d’ordre règlementaires (article 37). Contrôle finalement restreint.

Les régimes exceptionnelles d’origine législatif =- l’état de siège- l’état d’urgence

2°. L’état de siège

Adaptée initialement par une loi du 9 août 1849, modifié par une loi du 3 avril 1875, ancien mais toujours en vigueur. Origine conjoncturelle aussi. C’est le + ancien des régimes législatifs. L’idée étant de pouvoir réagir essentiellement dans des situations de types militaires (villes investies par l’ennemi). Ce texte est très marqué par ces préoccupations militaires. Au fond il doit exister un péril imminent qui résulterait soit d’une guerre étrangère, guerre civile ou insurrection à main armée. Sur la forme, la décision est prise par décret en conseil des ministres, qui peut être appliqué pendant 12 jours, au-delà il faut l’intervention du Parlement pour voter une loi de prorogation. Selon l’étendu de la menace il peut porter sur tout ou partie du territoire. Implications de ce régime sur les libertés   :

- l’autorité militaire peut remplacer l’autorité civile dans l’exercice des pouvoirs de police du maintien de l’ordre (c’est le seul qui le prévoit).

- ces pouvoirs de police ont une portée supérieure à la normale. Extension qui porte notamment sur 4 points : perquisitions possibles de jour et de nuit, remise des armes et munitions appartenant aux particuliers (réquisition), l’autorité de police peut interdire les publications, les réunions susceptibles d’entrainer des désordres, enfin les personnes qui ne seraient pas domiciliés dans la zone de l’état de siège ou qui auraient déjà eu affaire avec la justice peuvent être interdit de séjour dans la zone.

- des tribunaux d’exception peuvent être mit en place et notamment les tribunaux militaires peuvent se voir investies de compétence qui seraient celles des juridictions répressives notamment pénales en temps ordinaire.

Pas appliqué depuis longtemps car il y a d’autres textes, qui sont semblables et dont le recours et + aisé.

3°. L’état d’urgence

Historiquement la guerre d’Algérie va conduire à l’adoption d’un nouveau régime législatif d’exception. L’état d’urgence qui est aménagé par une loi du 3 avril 1955. Ce texte a été conçu, adopté pour faire face à une situation déterminée qui est la guerre d’Algérie. En même temps comme toute loi, ce texte a une portée générale et permanente tant qu’il n’a pas été abrogé. Et il donc susceptible d’être réactivé, de recevoir à nouveau application si on estime que les circonstances l’exigent notamment le gouvernement. C’est comme cela que ce

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texte après la guerre d’Algérie a reçu deux nouvelles applications. L’une en 1985 dans le contexte d’une situation troublée en Nouvelle-Calédonie et puis en métropole en 2005. Sur les conditions de mise en œuvre de ce régime d’exception. Ce régime peut être utilisé dans des hypothèses plus vagues que dans celle de la loi de l’état de siège. Il doit s’agir d’un péril imminent résultant d’atteinte grave à l’ordre public. Plus flou que dans la loi de l’état de siège. La déclaration d’état d’urgence été initialement réservée au législateur qui était habilité également à en fixer la durée prévue et également l’étendu dans l’espace (zone géographique a laquelle il s’applique). Rapidement ce régime a été changé, une ordonnance de 1960 fait que la déclaration d’état d’urgence relève de la même procédure que celle de l’état de siège. Le gouvernement c’est donné lui-même par cette ordonnance le droit de déclarer lui-même l’état d’urgence. Et donc la décision est prise par décret en conseil des ministres et c’est donc ce décret qui détermine la zone géographique concernée par l’état d’urgence. Néanmoins comme l’état de siège, la prorogation de l’état d’urgence au-delà de 12 jours nécessite une autorisation du Parlement. Les effets de cette déclaration de circonstances exceptionnelles. Comme dans l’état de siège il est possible de mettre en place toujours par décret des tribunaux exceptionnels, des tribunaux militaires auxquels on va transférer des compétences qui appartiennent en temps normal aux juridictions répressives. L’essentiel des effets de l’état d’urgence réside dans l’extension des pouvoirs de police. Cette extension des pouvoirs de police peut comporter deux degrés qui permettent de distinguer un état d’urgence simple et un état d’urgence aggravé.

L’état d’urgence simple se défini par des extensions du pouvoir de police qui vont se réaliser de plein droit du seul fait de la déclaration d’état d’urgence. A la différence de l’état de siège ces pouvoirs de police restent dans les mains de l’autorité civile normale.

Ex = Ça peut être des interdictions de circulation, la création de zone de sécurité dans lesquelles le séjour est réglementé. Ça peut être aussi la fermeture des salles de spectacles, ou en général de tous les lieux de réunion. Ou l’interdiction de tous les rassemblements.

L’état d’urgence aggravé. Le décret qui met en place l’état d’urgence peut ajouter deux effets supplémentaires. Mais là il faut que le décret le prévoie expressément. Pas de plein droit.

Il donne aux autorités de police le pouvoir d’effectuer des perquisitions de jour et de nuit et pouvoir exorbitant : une possibilité de censure de tous les moyens d’expression. Sur le contrôle des mesures en état d’urgence. Il y a d’abord des garanties particulières sur les mesures qui touchent à la liberté d’aller et de venir car on considère qu’il s’agit d’atteintes particulièrement grave aux libertés individuelles. La victime dispose d’un recours gracieux auprès de l’autorité de police qui a pris la décision et une commission composée de conseillers généraux est appelée à donner un avis sur ce recours gracieux. Si ce recours gracieux échoue ; la juridiction administrative peut être saisi d’un REP et dans ce cas elle dispose de délai très bref pour statuer. En 1er ressort il a 1 mois pour se prononcer. S’ils ne sont pas respectés la mesure cesse. Le juge administratif se livre à un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation = arrêt Dame Dagostini de 1985. Toutes les autres mesures relèvent des règles ordinaires du contrôle du juge administratif.

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La loi confère des compétences très étendues aux autorités de police. Et défini de façon relativement vague. Enfin la JP relative aux circonstances exceptionnelles voit encore réduire l’efficacité du contrôle juridictionnel qui peut être exercé. Le gouvernement français déclare à nouveau l’état d’urgence en novembre 2005 suite à des violences qui s’étaient déclarées dans certains quartiers. Conformément à la procédure on a d’abord deux décrets adoptés le 8 novembre 2005. Un décret qui déclare l’état d’urgence simple sur l’ensemble du territoire français et un autre qui lui met en place l’état d’urgence aggravé dans certaines zones qui sont précisées. Suite à ces décrets, 12 jours ne suffisaient pas, une loi du 18 novembre 2005 proroge l’état d’urgence pour une durée de 3 mois tout en habilitant le chef de l’Etat à mettre fin par décret à l’état d’urgence avant l’expiration de ce délai de 3 mois. Ce que d’ailleurs il a fait début janvier 2006 (le 3 janvier). Ce recours à l’état d’urgence pour ce genre de circonstances a été vivement critiqué par une partie de la classe politique qui n’a pas été au bout de cette critique et critiqué aussi par une partie importante de la doctrine juridique au point que le juge des référés du CE a été saisi d’un référé liberté par 75 professeurs de droit. Mais il a été rejeté, ordonnance de rejet du 9 décembre 2005, Madame Allouache et autres. 1ère condition du référé liberté est l’urgence qui a été établi par le CE sans difficulté. Donc première condition remplisse. 2ème = une atteinte aux libertés fondamentales. Aussi une condition remplie. Mais il faut aussi que cette atteinte soit manifestement illégale (3ème condition) c’est donc là que tout ce jouait. Et c’est ce que le CE n’a pas admit. On peut quand même s’interroger sur toute une série de point par rapport à cette mise en application. Interrogation centrale sur le respect du principe de proportionnalité en la matière (central en matière de LF). Est-ce que cette déclaration était en rapport réel avec la gravité de la situation ? Est-ce que l’article 15 de la convention EDH était vraiment respecté ? Y avait-il vraiment un danger public menaçant la vie de la Nation ? Même en admettant que ces violences puissent justifier le recours à l’état d’urgence, était il nécessaire de le mettre en application sur l’ensemble du territoire. On s’aperçoit que cette loi sur l’état d’urgence n’a finalement pas adopté dans un but répressif en 2005. Les possibilités de la loi de 1955 avaient été très peu utilisées même s’il y a eu une augmentation des mesures répressives notamment une augmentation spectaculaire de mineurs incarcérés. Ces mesures là ont été adoptées sur la base de procédure ordinaire. L’arsenal classique des mesures de police le permettait. Donc pourquoi si le droit commun des libertés le permettait pourquoi l’avoir mis en œuvre. C’est sans doute de l’ordre simplement du discours. Manière démagogique de répondre à des craintes réelles de la population. Cette loi n’a même pas été déférée au CC, l’opposition n’a même pas utilisé ce pouvoir là. Ce qui a relancé le débat sur l’instauration d’un contrôle par voie d’exception. Ces régimes législatifs et les potentialités liberticides sont encore aggravés par la théorie JP élaborée par le juge administratif : la théorie des circonstances exceptionnelles.

4°. La théorie des circonstances exceptionnelles

Théorie purement JP qui trouve ses origines lors de la 1ère GM. Ce sont en effet les nécessités de la guerre qui vont conduire le CE a admettre que le caractère exceptionnel des circonstances de la guerre permet à l’autorité administrative, et notamment à l’autorité de police, de prendre des décisions contraires à la loi sans pour autant commettre une illégalité. On a déjà des lois d’exception très permissives, attentatoires aux libertés et l’autorité de police peut en + s’affranchir de ces droits. Néanmoins cette théorie ne va pas jusqu’à affranchir

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l’autorité administrative du respect de toute légalité. Le juge va quand même exercer un contrôle de proportionnalité entre les mesures prises et la gravité des circonstances. Les mesures qui excéderaient les nécessités du moment seront considérés comme illégales. Affaire Canal de 1962 : le CE annule une ordonnance qui instituait une cour militaire de justice en l’espèce. Au motif que les atteintes apportées par ce texte liberté dépassent ce qui était nécessaires dans les circonstances de l’époque.

Théorie qui a pris une tournure + générale et comme le montre l’affaire de 1962 a été appliqué à d’autres crises. Le principal effet de cette théorie est d’étendre les compétences des autorités de police. Et cette extension se manifeste d’abord sur le terrain de la légalité. Pour illustrer l’origine de cette théorie : affaire Dame Dol Laurent, histoire du préfet de Toulon qui limite les activités en l’occurrence de prostituées alors même que sa décision excède les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi sur l’état de siège. Le juge administratif dit que les circonstances de l’époque le permettent. Cette JP des circonstances exceptionnelles a aussi des conséquences sur ce qu’on appelle la théorie de la voie de fait. En principe la réparation des dommages qui sont causés à un particulier du fait des agissements de l’administration relève normalement de la juridiction administrative. Par dérogation à ce principe, le juge judiciaire va être compétent en cas de voie de fait. Deux conditions pour qu’elle soit constituée =

- L’acte dommageable doit être vicié par une irrégularité d’une gravité exceptionnelle. L’acte dommageable doit être « insusceptible de se rattacher à un pouvoir légal de l’administration ».

- L’acte en question doit avoir porté atteinte soit à la propriété ou + largement à une liberté fondamentale.

Si ces deux conditions sont réunies la compétence de réparation passe du juge administratif au juge judiciaire. Classiquement ce passage était considéré comme + protecteur étant donné les pouvoirs dont disposait le juge judiciaire et dont justement ne disposait pas le juge administratif notamment en matière de pouvoir d’urgence, en matière d’injonction, en matière d’astreinte. Analyse à nuancer contenu des évolutions législatives sur le pouvoir du juge administratif notamment avec le référé liberté. Mais en cas d’application de la théorie des circonstances exceptionnelles, un acte qui en temps normal serait qualifié de voie de fait ne le sera + forcément puisque l’administration peut s’affranchir du respect de la liberté. Cet acte pourra être considéré par le juge comme une simple faute de service et donc la compétence du juge administratif sera maintenue. Conclusion sur ces différents régimes = même si le danger pour les libertés est atténué par notamment le contrôle de proportionnalité (suppose un recours) mais reste néanmoins réel. Car c’est précisément quand les temps sont difficiles que l’autorité de police notamment est le + tenté de recourir aux solutions les + expéditives et dans ce contexte là, l’intervention du juge nécessairement tardive, a posteriori, ne peut pas toujours porter remède aux éventuels abus. 2ème raison : ces régimes qui peuvent éventuellement être compris ou justifiés au moment où ils sont adoptés, dans les circonstances du moment, se maintiennent au-delà des circonstances et peuvent donc être réactivées à tous moment. Illustration de cela : pendant la guerre d’Algérie c'est-à-dire la succession et aussi la superposition pendant 8 ans de régimes d’exception. Huit années pendant lesquelles les autorités publiques ont disposé en Algérie comme en métropole, de pouvoir de police renforcée. Une période aussi longue créée des habitudes, des mentalités dont il n’est pas facile de se défaire. Et à l’issu de

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ces 8 années le retour à l’application d’un régime normal des libertés n’a pas été facile. C’est aussi ça qui est dangereux du point de vue de la protection des droits et libertés fondamentales.

Application de l’article 16 pendant cette période, seule hypothèse de l’application de ce régime suite au coup militaire d’Alger en 1961. Doctrine a beaucoup discuté si les conditions définies par l’article 16 étaient remplies surtout sur le point de savoir si on avait à faire à une interruption régulière des pouvoirs publics. Appliqué pendant encore 5 mois, ce qui explique la réforme constitutionnelle de 2008 qui institue un contrôle périodique du CC pour savoir si les conditions de l’article 16 sont toujours valables suite aux controverses de 1961. Des droits qui en période exceptionnelle peuvent être suspendus sauf les droits intangibles auxquels ont ne peut pas toucher. Autre hypothèse = les droits que l’ont ne peut pas limiter en période normal.

Section 2 = Les droits insusceptibles de limitations en période normale

Les autorités publiques peuvent y déroger en cas de circonstances exceptionnelles mais qui en dehors de ces circonstances sont en dehors de toute atteinte des pouvoirs publics. Ce ne sont pas des droits intangibles mais on ne peut pas les limiter en temps normal. Liste donné par la convention EDH entre dans cette catégorie les droits suivants : d’abord des droits de la personne.

I / Les droits de la personne

Le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion garanti par l’article 9 de la CEDSDH en tant qu’il concerne le fort interne, l’Etat ne peut pas imposer une religion aux personnes qui sont soumises à sa juridiction ni leur interdire d’en changer. Le droit à l’instruction : l’Etat ne doit pas opposer d’obstacle injustifié à l’accès aux différents degrés d’enseignement, l’enseignement ne doit pas contrecarrer les choix religieux et philosophiques des parents. Le droit de ne pas être emprisonné pour inexécution d’une obligation contractuelle, article 1er du 4ème protocole de la Convention. Le pacte en fait un droit intangible la convention non mais le place dans cette catégorie là. Le droit de se trouver sur le territoire de l’Etat ne peut être limité en temps normal, garanti par l’article 3 du 4ème protocole de la Convention. Surtout le droit des nationaux d’entrer et de demeurer sur le territoire de l’Etat dont ils ont la nationalité.

II / Les droits liés à l’intervention de la justice

Aussi une partie des droits liés à l’intervention de la justice. La convention EDH se montre ici particulièrement rigoureuse. La construction d’un Etat de droit repose essentiellement sur l’intervention d’un juge qui doit bénéficier de certaines qualités juridiques comme notamment en termes d’indépendance et d’impartialité. Sont mis hors d’atteinte en période normale toute une série de droit le 1er étant le droit au recours.

A) Le droit au recours

Il se décline de différente manière dans la convention =

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- 1ère déclinaison possible : article 13. C’est un droit au recours qui ne concerne que les droits garantis par la convention. C’est un article qui n’implique pas obligatoirement l’intervention d’une juridiction. L’article 13 parle d’une instance qui doit avoir bien sur certaines qualités.

- 2ème déclinaison : article 6-1 aussi en matière pénale. Champ d’application du droit au recours plus vaste ici.

- 3ème déclinaison possible : article 5 aux paragraphes 3 et 4 qui garantit à toute personne détenue l’intervention rapide d’un juge… (voir poly). Le comité onusien a émie des réserves sur les lois françaises en matière de garde à vue en particulier sur la loi du 23 janvier 2006. Intervention tardive de l’avocat.

B) Le droit à une justice de qualité

Article 6 de la CEDSDH, cette idée de qualité renvoie à plusieurs exigences. Les autorités publiques ne peuvent porter atteinte à l’indépendance et impartialité des tribunaux en période normale. En principe le droit à ce que la procédure n’excède pas un délai raisonnable ne peut pas faire non plus l’objet d’atteinte en période normale. Cela touche à la crédibilité et l’efficacité de la justice. Le droit à la publicité de jugement ne peut faire l’objet de limitation en temps normal. Il faut distinguer la publicité du jugement et celle des débats. Et enfin tout ce qui concerne l’équité ou le droit à un procès équitable qui renvoie lui-même à différente exigences. Egalité des armes, suppose aussi le respect du principe contradictoire (implique une participation active des parties au processus juridictionnel). Ils ont conduit le juge européen à remettre en cause la participation du commissaire du gouvernement au délibéré. Un dernier corolaire au procès équitable est la motivation des décisions de justice. On a ensuite toute une série de droits qui sont spécifiques au procès pénal. Ex = le droit à la présomption d’innocence, le respect des droits de la défense.

III / Les droits politiques

Article 3 du 1er protocole. Notamment droit de vote et de se porter candidat pour les élections au corps législatif dans le respect de l’égalité de traitement.

Section 3 = Les droits susceptibles de faire l’objet de limitations en période normale

Ce sont les + nombreux. Si on se réfère à la Convention EDH mais aussi valable pour le pacte, ce sont des droits que les auteurs de ces textes (Etats) ont garantis en envisageant immédiatement dans le texte lui-même les limitations qui pouvaient être apportées à ces droits. On a 2 techniques juridiques qui sont envisagées dans ces textes pour limiter les droits garanties =

- La 1ère technique est celle qui ressort notamment des articles 8 à 11 de la convention EDH. Ce que l’on a coutume d’appeler la clause d’ordre public et qui renvoi à cette formule : des limitations sont garanties dans la mesure où elles sont nécessaires dans une société démocratique, à la sauvegarde de certaines valeurs qui sont précisément énumérées par le texte il peut s’agir de la protection de l’ordre public.

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- Dans d’autres hypothèses moins nombreuses. 2ème technique = l’article en cause indique les restrictions que l’on peut apporter au droit qui est garanti en tenant compte des particularités du droit en cause.

I / L’admission de limitations nécessaires dans une société démocratique à la sauvegarde de certaines valeurs

La convention EDH accepte de prendre en compte les contraintes du lien social. Accepte des limitations possibles au droit garanti par elle. Mais à condition que ces limitations n’aille pas jusqu’à mettre en cause la substance même du droit. On peut les limiter mais pas les supprimer. Le droit lui-même est proclamé dans un 1er paragraphe et immédiatement le 2nd précise que ce droit peut être limité mais à certaines conditions au nombre de 3 et invariables. Elles doivent être prévues par la loi = condition de légalité. 2ème condition : Ces limitations doivent avoir pour objet la protection de certaines valeurs (condition de légitimité du but). Une condition de nécessité, la mesure attentatoire aux libertés doit être nécessaire dans une société démocratique ce qui renvoie à une exigence de proportionnalité.Comme le juge européen l’a souligné à plusieurs reprises, on se trouve donc en présence d’un principe : la liberté assortie d’exception (paragraphe 2) mais qui justement en tant qu’exception doit être interprétée strictement.

A) Les droits concernés

1°. Le droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance

Article 8. Voir tous les moyens de surveillance actuels.

2°. Le droit de manifester sa religion ou ses convictions

Garanti par l’article 9. Fort externe car c’est une manifestation donc limitation possible.

3°. Le droit à la liberté d’expressionChamp très vaste, tous les moyens d’expression possible. Article 10.

4°. Le droit à la liberté de réunion pacifique, à la liberté d’association et à la liberté syndicale

Article 11.

5°. Le droit de circuler librement

Article 2 du 4ème protocole. Droit qui concerne les personnes ayant la nationalité de l’Etat en cause mais qui concerne également les étrangers en situations régulière.

B) Les exigences liées à la limitation des droits garantis

1°. L’exigence de la légalité des restrictions

Cette obligation de légalité part d’un principe libéral classique suivant lequel l’individu doit pouvoir agir en toute connaissance de cause quant à l’étendu

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exact de sa liberté. Précision s’agissant du droit européen, la notion de loi est entendue largement par la CEDH car le juge européen doit aussi tenir compte des systèmes de Common law, il considère comme satisfaisant à l’exigence de légalité tout acte de portée générale et aussi une limitation d’origine JP à condition de satisfaire à certaines exigences. Une JP peut être l’origine de limitation aux droits à condition de satisfaire à une exigence de qualité. La limitation doit être, pour le juge européen, suffisamment accessible et précise pour permettre aux citoyens de prévoir les conséquences de ses actes.

2°. Les motifs légitimes de limitation

Il s’agit là des valeurs au nom desquelles les autorités publiques vont pouvoir apporter des limitations aux droits garantis. Il s’agit des valeurs dont la sauvegarde apparait essentielle pour la préservation du lien social. La liste est assez longue, elle peut varier d’un droit à l’autre. Dans tous les cas on retrouve notamment dans les articles 8 à 11, la sureté publique, la défense de l’ordre… (Voir poly). S’y ajoute selon le droit en cause d’autres valeurs. Toutes ces rubriques sont assez nombreuses et suffisamment larges pour que toutes atteintes aux libertés puissent y être facilement rattachées. Et donc ce qui va être déterminant dans le contrôle exercé par le juge sur ces limitations, c’est le contrôle sur la nécessité des limitations.

3°. L’appréciation de la nécessité des restrictions dans une société démocratique

L’atteinte aux droits garantis, la limitation posée par l’Etat doit être nécessaire dans une nécessité démocratique. C’est ici que la convention européenne et le juge européen s’avèrent les protecteurs des libertés garanties. Il ne suffit pas que l’ingérence étatique puisse être justifiée par l’une des valeurs (motif légitime). Mais cela ne suffit pas encore faut-il que la limitation, par hypothèse contestée devant le juge européen, s’avère nécessaire et ce dans un cadre bien précis, celui d’une société démocratique. Cela signifie notamment que des restrictions qui pourrait éventuellement être considérées comme nécessaire dans un Etat autoritaire ne seront pas admises par le juge européen si elle porte atteinte à ce que le juge considère comme étant les valeurs fondamentales d’une société démocratique. Ces valeurs sont le pluralisme, la tolérance et l’esprit d’ouverture. Ex qui concerne la liberté d’expression « vaut non seulement pour les informations et idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’Etat ou fraction quelconque de la population ». Arrêt de principe : arrêt Handyside contre RU du 7 décembre 1976. C’est donc à l’aube de ces valeurs que le juge européen va apprécier la nécessité de la limitation. Sur l’appréciation de la nécessité, cette nécessité implique selon la Cour une première chose « l’existence d’un besoin social impérieux ». C’est la 1ère condition au titre de nécessité qui pourra justifier la limitation. Cette nécessité implique un contrôle de proportionnalité de la mesure restrictive par rapport au motif légitime, au but légitime qui est visé. De nombreux articles de la convention européenne admettent donc des limitations possible aux droits garantis sous réserve que l’Etat puisse justifier ces limitations au regard des 3 critères (clause de nécessité dans une société démocratique). D’autres articles procèdent de manière différente, ils permettent aussi des limitations aux droits garantis mais cette fois selon une technique un

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peu différente c'est-à-dire en définissant avec + ou – de précision ces possibilités de limitations.

II / L’admission de restrictions particulières

2 techniques possibles = - la 1ère consiste à énumérer les hypothèses dans lesquelles sera admise une restriction, une limitation aux droits proclamés - l’autre consiste à subordonner la restriction du droit à des justifications d’intérêt général sauf que dans cette hypothèse, la condition de nécessité n’est plus exigée.

A) Les restrictions faisant l’objet d’une énumération limitative

Cette technique là est toujours une technique très protectrice des libertés puisqu’elle donne tous son sens à l’idée que le droit à la liberté est le principe, la limitation l’exception. Concrètement toute limitation à la liberté qui ne rentrera pas dans le cadre des limitations limitativement énumérées par la Convention sera considérer contraire à la convention. Sont protégés selon cette technique article 2 (droit à la vie), le droit de ne pas être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire (article 4).

1°. Le droit de ne pas être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire

La convention indique un certain nombre d’hypothèses dans lesquelles un travail ou un service ne sera pas considéré comme forcé ou obligatoire. A contrario cela signifie donc que l’Etat dans ces hypothèses là et uniquement pourra porter atteinte aux droits garantis. 4 hypothèses où il ne sera pas considéré comme forcé ou obligatoire. Voir poly. L’Etat ne peut pas sortir de ces hypothèses. Tout travail forcé ou obligatoire en dehors de ces hypothèses là sera considéré comme contraire à la convention.

2°. Le droit à la liberté et à la sureté

Article 5.

B) Les restrictions subordonnées simplement à des justifications d’intérêt général

A priori cette façon de procéder est moins exigeante, moins protectrice que l’exigence d’une nécessité. Le droit de circuler librement sur le territoire de l’Etat. La convention précise que ces droits peuvent faire l’objet de limitation qui prévues par la loi sont justifiées par l’intérêt public (motif légitime) dans une société démocratique. L’intérêt public pertinent n’est pas spécifié, assez large. Et surtout le texte n’exige qu’une simple justification il n’y a pas la d’exigence de nécessité.

Conclusion = les bornes légitimes des droits et libertésPour apprécier la validité des restrictions apportées aux droits fondamentaux ont (législateur et juge) se réfère nécessairement à des valeurs. Le législateur en particulier, mais le juge à sa suite, est amené à décider de ce que l’on veut protéger au prix de quelques contraintes pour l’individu. Ils seront amenés également à décider du poids respectif que l’on accorde à telle ou telle liberté

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(surtout quand elles sont susceptibles d’entrer en conflit), du poids respectif que l’on va apparaitre à l’ordre d’un côté et à la liberté de l’autre. Du point de vue juridique, en tout état de cause si des bornes, des limites peuvent être légitimement posées à l’exercice des libertés cela ne peut être que dans la stricte mesure où ses bornes sont nécessaire pour préserver les fondements de la vie en société. On a donc ici une notion autour de laquelle on tourne depuis le début qui est une notion d’équilibre qui doit guider l’arbitrage entre des exigences opposées. Notion fondamentale et très incertaine dans la mesure où il va falloir décider de ce que l’on va placer dans chacun des plateaux de la balance mais il va falloir décider, aussi par une évaluation forcément un peu arbitraire, en fonction de choix idéologique ou politique, du poids respectifs de ce que l’on a placé dans cette balance. Qu’est ce qui est le + important le droit de grève ou la continuité du SP ? Qu’est ce qui est le + important la libre expression des fonctionnaires ou la neutralité de la fonction publique ?

Cela montre l’importance du juge car c’est lui au bout du compte qui va apprécier ce poids respectif et notamment à travers la mise en œuvre du contrôle de proportionnalité. Toute la JP du Conseil d’Etat sur les pouvoirs de police illustre bien la mise en œuvre de ce principe de proportionnalité (arrêt Benjamin). La mesure de police n’est légale que si les limitations qu’elle apporte à la liberté sont nécessaires et donc strictement proportionnées à la menace qui pèse sur l’ordre public. Le CC de son côté va s’assurer de la même façon que le législateur a correctement opéré « la conciliation nécessaire entre le respect des libertés et la sauvegarde de l’ordre public sans lequel l’exercice des libertés ne saurait être assuré ».

Qui est habilité à ces limitations ? Dans une démocratie il ne peut s’agit que du peuple ou ses représentants. C’est donc l’expression de la majorité qui va fixer les limites mais avec ce risque d’atteintes aux droits de la minorité. Avec ce risque de contradiction entre le libéralisme d’un côté et la démocratie de l’autre.

Chapitre 2 = Libéralisme et démocratie

L’expression démocratie libérale est si courante qu’il peut paraitre incongrus de dissocier les 2 termes. A priori le libéralisme et la démocratie sont 2 notions qui semblent concordantes. Et il y a effectivement des éléments de concordance. Pourtant cette concordance de certains points de vue de va pas forcément de soi.

Section 1 = La concordance entre les 2 notions

1er élément de concordance = l’existence même de la démocratie, l’existence même d’un régime démocratique suppose la reconnaissance de certains droits, suppose le libéralisme politique, suppose les droits politique (droit de vote). La démocratie en tant qu’elle implique la participation des citoyens au pouvoir est par elle-même l’expression d’une forme de liberté, la liberté politique (liberté des anciens pour Benjamin Constant).

I / Les droits du citoyen, corollaire des droits de l’homme

2ème élément de concordance = il est historique. La revendication de la liberté politique est presque toujours allée de pair avec celle des libertés civiles. Il suffit de lire la DDHC pour s’en convaincre. Ces déclarations ont proclamés simultanément des droits politiques et des droits civils. Pour les révolutionnaires

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les droits du citoyen et donc la démocratie sont envisagés à la fois comme le corollaire et aussi comme la garantie des DH.

II / L’interdépendance de la démocratie et des DH

Cette idée de garantie nous amène à une autre articulation entre libéralisme et démocratie, idée d’une interdépendance entre la démocratie et les DH (le libéralisme). Cette interdépendance vient de l’idée que seul un régime démocratique peut garantir de façon satisfaisante les droits et libertés. C’est aujourd’hui une sorte d’évidence constamment rappelé par les textes internationaux. Préambule : le maintien des LF repose « essentiellement sur un régime politique véritablement démocratique ».

La démocratie comme condition de l’existence de LF. De cette idée de garantie on glisse parfois de l’idée d’assimilation pure et simple entre démocratie et DH. Voir même à un renversement de la présomption qui constituerait à dire que se sont les LF qui sont la condition d’existence d’une démocratie. Très perceptible dans la JP européenne, qui fait du respect de certains droits et libertés un critère de la démocratie. C’est ce que le juge dit dans l’arrêt Handyside quand il dit que la liberté est un critère de l’existence d’une démocratie.

Même idée dans la JP du CC, exemple de la liberté d’expression, de communication ici c’est « l’une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale » : décision des 10 et 11 octobre 1984.

L’idée de concordance c’est l’idée que les DH ne peuvent exister que dans une démocratie et aussi que l’on n’est pas dans une démocratie si les droits fondamentaux ne sont pas respectés. La démocratie est + que le simple droit de vote, elle ne se limite pas au régime démocratique. Pourtant on ne peut pas forcément postuler que la démocratie et les droits fondamentaux s’engendrent mutuellement de façon quasi automatique, il n’y a pas de liens absolus et nécessaires entre les 2.

Section 2 = Discordances entre les 2 notions

I / La démocratie contre les libertés

1er aspect de cette discordance = La philosophie dès le XVIII et XIXème siècle a pu penser le libéralisme indépendamment de la démocratie et certains auteurs libéraux exprimaient même une méfiance assez forte à l’égard de la démocratie dont ils pensaient qu’elle pouvait potentiellement constituer une menace pour les libertés. On a un certain nombre de mises en garde de certains auteurs libéraux contre les dangers potentiels d’un régime démocratique. Cette mise en garde on peut la trouver chez Benjamin Constant « la souveraineté du peuple n’est pas illimité ; elle est circonscrite dans les bornes que lui tracent la justice et les droits des individus. La volonté de tout un peuple ne peut rendre juste ce qui est injuste (…). Le peuple n’a pas le droit de frapper un seul innocent, ni de traiter comme coupable un seul accusé, sans preuves légales. Il ne peut donc déléguer un droit pareil à personne (…) ». Un régime démocratique peut dans certains circonstances opprimer les individus tout comme un régime dictatorial et surtout ce qu’il dit est que cette oppression ne sera pas + légitime parce qu’il s’agit d’un régime démocratique. C’est l’idée que le consentement aux pouvoirs (les élections) ne change rien à la réalité de l’oppression et donc le risque pour

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Constant c’est qu’un régime puisse se prévaloir (et cela c’est vérifier) de son caractère ou origine démocratique pour légitimer des atteintes injustifiées aux libertés. Cas extrême.De façon + ordinaire, un autre risque pointé par Tocqueville c’est le risque de la tyrannie de la majorité ou de l’opinion dominante. Cette idée que la démocratie repose sur le principe de la majorité. Contradiction potentielle entre ce que veut la majorité et les droits de la minorité. La majorité s’imposant à la minorité, elle n’est donc + libre. La réponse serait peut être dans une définition de la démocratie qui dépasserait la seule question de la dévolution du pouvoir pour se pencher également sur la question de l’exercice du pouvoir. C’est le sens de la JP européenne qui est assez claire à ce sujet et qui affirme que « bien qu’il faille parfois subordonner les intérêts d’individus à ceux d’un groupe, la démocratie ne se ramène pas à la suprématie constante de l’opinion d’une majorité ; elle commande un équilibre qui assure aux minorités un juste traitement et qui évite tout abus d’une position dominante ». D’une certaine manière il s’agit là pour le juge européen d’inclure le libéralisme, d’inclure la protection de la liberté dans la définition de la démocratie pour essayer d’éviter une éventuelle contradiction (ce que cherchait aussi Rousseau). Cette façon de voir les choses s’imposent dans les démocraties libérales depuis la 2nd moitié du XXème siècle ce qui explique la promotion du rôle du juge depuis cette date et en particulier la promotion des juges internationaux et constitutionnels, c'est-à-dire des juges habilités à dresser un rempart contre les emportements éventuels du législateur au nom du respect des droits fondamentaux en général, et au nom du droit des minorités en particulier.

Cette conception de la démocratie des DF s’appuie elle-même sur une conception renouvelée de l’Etat de droit qui ne renvoie + seulement au respect de la hiérarchie des normes mais qui consiste aussi à introduire au sommet de cette hiérarchie des normes le respect des DF en instaurant un contrôle qui permettent leur garanties effectives. L’Etat de droit envisagé de cette manière devient un instrument de protection des libertés.

Risque est celui du gouvernement des juges. Rengaine à propos du CC. Apparait une autre contradiction potentielle, entre l’Etat de droit et les démocraties. Il y a donc toujours des conciliations à trouver, des équilibres qu’il faut préserver. La démocratie comme l’Etat de droit sont susceptibles de dérives nuisibles aux libertés.

II / Le Libéralisme contre la démocratie ? Le risque du libéralisme n’est pas compliqué à comprendre, c’est de donner une trop grande importance à ce qui peut être considéré comme sa principale caractéristique à savoir l’individualisme. Risque déjà perçu par Tocqueville à partir simplement d’une observation de la société américaine, il pointait ce risque d’un désengagement des citoyens uniquement préoccupés de la défense de leurs intérêts particuliers.

On a un raisonnement un peu circulaire consistant à dire qu’il faut protéger les libertés des atteintes que pourraient leur porter la démocratie, mais que la démocratie doit aussi être protégée des excès du libéralisme si on veut qu’au final elle puisse continuer à garantir les libertés.

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Titre 3 = Les techniques juridiques de protection des libertés

Ces techniques sont aujourd’hui placées sous le signe de l’Etat de droit (apparait au milieu du XIXème siècle dans la doctrine juridique allemande). L’Etat de droit renvoie à l’idée que les techniques juridiques vont permettre de réaliser le projet du libéralisme politique, vont permettre de garantir et protéger les LF. Manière de le dire de Foucault (voir poly). 2 points essentiellement : les ressources que la hiérarchie des normes offre à la protection des libertés, en quoi la hiérarchie des normes est-elle un instrument de protection des libertés, mais on verra aussi que cette hiérarchie des normes à elle seule est insuffisante pour protéger efficacement les libertés, elle n’est pas grand-chose s’il n’y a pas aussi des procédures de contrôle pour faire en sorte qu’elle soit respectée et en particulier des procédures juridictionnelles.

Chapitre 1 = La hiérarchie des normes, instrument de protection des droits et libertés

Le projet libéral (dès le XVIII) c’est de faire en sorte d’interdire aux gouvernants d’être despotique ou liberticide si tel venait à être leur bon plaisir. Les juristes vont progressivement tenter de réaliser ce projet en imposant certaines formes à la volonté du souverain. L’aboutissement de cette recherche va être systématisé par un juriste Autrichien : Kelsen, sous le nom de hiérarchie des normes. C’est donc l’idée que les normes appartenant à un même ordre juridique n’ont pas toutes la même valeur et qu’il est donc interdit à l’auteur d’un acte de méconnaitre le contenu des normes de valeurs supérieures. Donc la notion de hiérarchie des normes est au cœur de la notion d’Etat de droit, c’est la 1ère dimension de l’Etat de droit, mais il y en a une autre, la 2ème dimension est qu’il faut aussi introduire au sommet de cette hiérarchie la protection des droits fondamentaux. Définition de Carré de Malberg sur le poly. Historiquement il y a eu différentes étapes qui ont mené à la réalisation de l’Etat de droit notamment en France. On part de Carré de Malberg. La 1ère étape est celle qu’il appelle l’Etat légal. Cette Etat légal correspond à une période particulière de l’histoire politique française = III et IVème République. 3 caractéristiques majeures marquent le système de l’Etat légal =

- la loi constitue la limite de l’action administrative- la loi est aussi la condition de l’action administrative au sens où administrer

revient à assurer l’exécution des lois- la loi est souveraine parce qu’insusceptible d’être contrôlée notamment par

une autorité juridictionnelle

Pour lui il y a une différence fondamentale entre l’Etat légal et l’Etat de droit, notamment du point de vue des libertés. L’Etat de droit est institué dans l’intérêt et pour la sauvegarde des citoyens ou des droits des individus. L’Etat légal lui ne vise qu’à assurer l’organisation des pouvoirs étant purement et simplement à assurer la suprématie du corps législatif. L’idéologie qui sous-tend cette conception est héritée de Rousseau est repose toujours sur cette même idée que la loi étant l’expression de la volonté générale elle ne peut être que libératrice, pas de loi liberticide.

Le 2ème niveau est selon lui l’Etat de droit proprement dit, Etat constitutionnel. L’avènement en France de l’Etat de droit est assez directement

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lié politique à la crise du parlementarisme notamment sous la IVème République, et donc amène cette idée que pour être achevé l’Etat de droit suppose nécessairement la suprématie de la constitution qui elle-même suppose nécessairement la sanction de toute violation de cette constitution par un juge indépendant. 3ème dimension de l’Etat de droit. Instauration d’une juge qui contrôlera la conformité de la loi à la constitution. On voit bien que les postulats de l’Etat légal sont en complète opposition avec ceux de l’Etat de droit. Contradiction fondamentale étant le contrôle de la loi. Dans l’ordre interne c’est simple, la constitution domine. Les choses se compliquent quand on veut prendre en compte l’ordre juridique international. Et c’est important du point de vue liberté car on a des textes internationaux de protection des libertés. Il faut pouvoir déterminer comment la norme internationale va s’articuler avec la norme interne.

La réponse n’est pas la même selon qu’on l’envisage du point de vue interne ou international. Du point de vue international, des organes et des juridictions internationales, les normes de droit interne et toutes, y compris les normes constitutionnelles sont subordonnées au droit international. C’est une opposition que la CPIJ a adopté dès 1932 dans un avis dit avis sur le traitement des nationaux polonais à Dantzig.

La CJCE a adopté la même position sur des fondements un peu différents, sur le fondement de la spécificité du droit communautaire. Idem CEDH arrêt de principe, arrêt de 1998, parti communiste unifié de Turquie et autres contre Turquie.

Du point de vue du droit interne, les traités (article 55) sont certes supérieurs à la loi (pas de soucis) mais le droit international reste inférieur à la constitution ce qui d’une certaine manière est logique car c’est elle qui détermine le statut et la valeur de ce même droit international. Cette position, malgré les acrobaties du juge administratif pour tenir compte de + en + de la spécificité du droit communautaire. Le principe reste le même, le droit international est inférieur à la constitution. Dans ce sens arrêt Sarran CE et arrêt Fraisse Cour de cass. Arrêt PY contre France CEDH du 11 janvier 2005. Était en jeu matériellement un problème de … du corps électoral en Nouvelle Calédonie. Le requérant n’avait pas été admis à s’inscrire sur les listes électorales et donc avait saisi le TGI de Nouméa puis la Cour de cassation en invoquant une violation de l’article 3 (droit à des élections libres) du 1er protocole de la convention. Dans la droite ligne de sa JP Fraisse, la Cour de cassation commence par constater que les restrictions qui sont dénoncées par le requérant sont prévues dans un texte l’accord de Nouméa, accord qui a une valeur constitutionnelle en vertu de l’article 77 de la constitution. Conclusion pour la Cour il ne lui appartient pas d’examiner la conformité de ces accords à la convention européenne car ils ont valeur constitutionnelle. A l’opposé quand l’affaire arrive devant le juge européen, même s’il rejette au final la requête le juge européen lui accepte de contrôler la compatibilité des règles constitutionnelles avec la convention. Divergence de principe.

En même temps cette divergence de vue est à relativiser. Les conflits en matière de liberté entre normes internationales et normes constitutionnelles sont peu fréquents car le CC s’arrange souvent pour interpréter les dispositions constitutionnelles à la lumière des engagements internationaux de la France. Particulièrement vrai quand il s’agit de la convention européenne des DH.

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Quoi qu’il en soit et compte tenu de l’efficacité des instruments internationaux et en particulier européen en matière des DH.

Section 1 = Les exigences de l’ordre juridique international à l’égard de l’ordre juridique français

Rappel historique = pendant très longtemps le DI ne s’est pas préoccupé de la cause des individus. Le DI étant un droit qui régit les rapports entre Etats. La coutume internationale impose néanmoins des obligations minimums aux Etats et uniquement à l’égard des étrangers qui se trouve sur leur territoire. Ces obligations minima sont globalement l’inviolabilité de la personne et du domicile, la liberté religieuse, le droit de s’adresser aux tribunaux (droit de recours), le droit de ne pas être dépossédé de ces biens. A remettre dans le contexte, ces droits minima ont pour finalité de permettre aux entrepreneurs, aux commerçants d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord essentiellement, (XIXème siècle) d’exercer leurs activités partout dans le monde en étant dotés d’’un minimum de garanties.

Le droit humanitaire est le 1e à rompre avec la logique classique des rapports interétatiques. Tous ce qui va se faire autour des conventions de Genève sous l’impulsion d’Henri Dunant fondateur de la Croix Rouge. Elles visent à garantir le sort des blessés pendant la guerre et qui visent aussi le traitement des prisonniers de guerre et qui établissent quelques règles quand à la protection des civiles en temps de guerre. C’est seulement à la fin de la 1ère GM qu’on voit apparaitre les 1ères obligations contractées par des Etats à l’égard de leurs propres ressortissants. Obligations imposées. Rapport de force vainqueur/vaincu qui l’impose. Le traité de Versailles impose à la Pologne et la Tchécoslovaquie de respecter le droit des minorités qui vivent sur leur territoire. Idée que protection de la paix et DH vont de pair. Le traité de Versailles par ailleurs crée également l’OIT (acquis du traité de Versailles) avec la même idée cette fois ci des droits sociaux, cette idée que la misère induite par les conditions de travail constitue elle aussi une menace pour la paix. Rupture au lendemain de la 1ère GM, mais ponctuelle. Le véritable tournant est la Charte des NU qui marque véritablement les débuts de l’intégration plénière des DH au DI. La charte elle-même lie créée étroitement le maintien de la paix et la protection et la promotion des DH. Et l’action des NU en faveur des DH se concrétise rapidement par l’adoption le 10 décembre 1948 de la déclaration universelle des DH. Cette déclaration universelle contient un catalogue très complet des droits et libertés puisque contrairement à la convention EDH on y trouve aussi bien des droits civils et politiques que des droits économiques et sociaux (culturels aussi). En même temps (aussi une différence avec la convention) elle n’a en elle-même aucune valeur obligatoire pour les Etats. Formellement ce n’est qu’une résolution de l’AG des NU. Donc pas un véritable traité. Pour relativiser le propos, il faut intégrer dans l’analyse que cette déclaration universelle a été incorporé par un certain nombre d’Etats dans leur constitution et surtout les dispositions de cette déclaration ont été presque intégralement reprises par 2 textes qui eux sont des traités : les 2 pactes de 1966, un sur les droits civils et politiques et un autre sur les droits économiques, sociaux et culturels.

Cette dualité s’explique assez facilement. Elle s’explique par la différence entre les 2 catégories de droit qui étaient proclamés par la DUDH, d’un côté les droits civils et politiques qui sont donc en tant que tel énoncés sous la forme de droits

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subjectifs et donc en tant que tels opposables aux Etats qui ont encore une fois ratifié le pacte. A l’inverse beaucoup de droits économiques, sociaux et culturels ne peuvent être mis en œuvre que progressivement et donc ne peuvent être mis en œuvre qu’en fonction du niveau de développement de chaque Etat. Le pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ne comporte à la charge des Etats qu’une simple obligation de moyen. Ils s’engagent à assurer progressivement le plein exercice des droits qui sont proclamés. Autre explication à cette dualité liée au contexte de l’époque. Elle s’explique aussi par le clivage de la société internationale de l’époque, l’URSS et d’une manière générale le camp soviétique privilégier plutôt les droits économiques et sociaux tandis que le camp occidental lui insistait davantage sur les droits civils et politiques. Ce sont des textes généralistes. On a beaucoup d’autres conventions toujours élaborées sous l’égide des NU mais qui sont + spécifiques. On a d’autres traités qui visent soit des atteintes particulières aux DH soit qui visent à protéger des catégories particulières de personnes. Ex la convention pour la répression au génocide, convention contre la torture. Convention onusienne relative aux droits de l’enfant. Ces textes sont toujours + ou – liés au contexte de l’époque. Ce qui nous explique que l’évolution de la société, l’apparition de nouveaux dangers pour les libertés motivent sans arrêt l’adoption de nouveaux textes. Toutes les avancées technologiques s’agissant en particulier des technologies du vivant, dans le domaine de la technologie du génétique, entrainent à leur tour l’adoption de nouveaux textes en matière des DH. Au niveau international, car il faut fixer des principes commun à l’ensemble des Etats si on veut éviter ce qu’on appelle des phénomènes d’évasion vers des Etats où la législation serait moins contraignante en matière par exemple de recherche sur les embryons, en matière de clonage ou d’une manière générale en matière de manipulation génétique. On assiste à la construction d’un droit international de la bioéthique. Donc on a de nouvelles préoccupations au niveau international…On assiste également à l’apparition de nouveaux instruments. Ça concerne en particulier le développement du droit pénal international. On peut faire remonter l’émergence d’un droit pénal international au procès de Nuremberg mais en même temps du point de vue historique il s’agit là d’une expérience ponctuelle et par la suite la mise en œuvre d’un droit pénal international va se heurter à un certains nombres d’obstacles, obstacles qui rendent compte de la réticence des Etats à accepter une quelconque atteinte au monopole étatique en matière de justice pénale en particulier. On peut considérer que la répression internationale de certains crimes se justifie parfaitement et se justifie par au moins 2 types de considérations. 1 er élément de justification = c’est qu’on peut considérer que certains types de crimes en raison de leur nature (ex = le génocide ou crime contre l’humanité) concernent la communauté internationale toute entière car ils touchent à l’essence de l’humain.2 ème élément de justification = c’est le constat que si cette répression internationale n’existe pas ces crimes peuvent demeurer impunis.

Il y a différents moyens de faire en sorte que ces crimes ne restent pas impunis. Autre solution = solution des conventions de Genève ou solution qui est mis en place par la convention contre la torture. Ces textes posent le principe de ce qu’on appelle la compétence universelle des Etats. Cela signifie que sur la base de ces textes, les victimes peuvent poursuivre les auteurs de ces crimes interdits par ces textes devant n’importe quel tribunal de n’importe quel pays sous réserve évidente que cet Etat ait ratifié la convention et qui ait mis sa

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législation nationale en conformité avec les obligations internationales qu’il a souscrit. La répression de ce type d’infraction peut être aussi confiée à des juridictions internationales sur le modèle du tribunal de Nuremberg. Sauf qu’il a fallu attendre 50 ans pour que l’expérience soit renouvelée. Deux juridictions ad’hoc ont été créée sur décision du Conseil de sécurité. En 1993 le CS crée le tribunal international pour l’Ex-Yougoslavie (TPIY). Et en 1994, le CS crée le tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Pression des événements. Un pas supplémentaire est franchi avec l’adoption de la convention de Rome qui créée une Cour pénale internationale permanente, en 1998. Entre en vigueur le 1er juillet 2002 (60 ratifications). On dépasse le ad’hoc. Elle est compétente pour tous ce qui sera qualifié de génocide, de crimes de guerre ou crime contre l’humanité quelque soit le lieu du crime. Ceci étant la juridiction de la Cour ne s’applique qu’à certaines conditions, il y a des règles de compétences.

Pour qu’un individu puisse être jugé par la CPI il faut soit =- que l’Etat sur le territoire duquel le crime a été commis soit parti au traité- ou alors il faut que le criminel présumé ait lui-même la nationalité d’un Etat

parti au Traité

Ce sont les règles qui gouvernent la compétence de la CPI. Il y a une exception à ces règles de compétence (déjà appliqué). Le CS de l’ONU en vertu du chapitre VII de la Charte peut s’affranchir dans des circonstances exceptionnelles de ces règles de compétence et il va pouvoir utiliser la CPI comme d’une certaine manière un tribunal ad’hoc et lui déférer certaine situations. C’est ce qu’il a fait en 2005 en déférant à la CPI la situation au Darfour (province du nord-ouest du Soudan) guerre civile depuis longtemps avant même 2000. D’autres affaires sont en cours devant la CPI. Comme en Ouganda, en République démocratique du Congo…

C’est après la 2nde GM que se met en place véritablement un droit international des DH au niveau mondial. Néanmoins c’est dans le cadre régional que la protection des DH va véritablement prendre son essor.

Le conseil de l’Europe décide de faire de la protection des DH une priorité et qui va très rapidement arriver à l’adoption d’une convention que la diversité de l’ONU et ses blocages interdisaient d’espérer au niveau universel à aussi court terme. C’est la convention EDH signée à Rome en 1950. Son originalité c’est la mise en place d’un mécanisme de protection supranationale, supranationalité renforcée avec l’entrée en vigueur du protocole n°11 en 1998 qui permet donc l’accès direct et de plein droit des individus à la Cour. Adoption et entrée en vigueur d’un protocole 14 bis (récemment) qui vise à contourner l’obstacle Russe, reprend l’idée d’un juge unique et qui va s’appliquer aux Etats qui auront ratifié ce protocole 14 bis (environ 7 Etats qui l’on ratifié pour l’instant). L’originalité fondamentale est la conjonction de ces 2 éléments : une requête individuelle qui peut être adressée à une véritable juridiction supranationale. C’est une rupture radicale par rapport justement aux systèmes internationaux de protection des DH qui ne sont pas des systèmes juridictionnels. Il peut y avoir des plaintes individuelles mais elles ne s’adressent pas à des organes juridictionnels. Juste un exemple qui est le modèle : ça peut être le comité des DH des NU, exemple de mécanisme de protection des droits, lui est chargé de contrôler l’application du pacte relatif aux droits civils et politiques. Ce comité des DH est un organe indépendant, les personnalités qui le composent sont censés être des experts avec un statut qui leur garantie une relative indépendance par rapport aux Etats. Mais en état de cause ce n’est pas un organe juridictionnel. Par

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définition il ne peut donc pas rendre d’arrêts, arrêts eux-mêmes par définition obligatoires. Tous ce que le comité peut faire c’est adresser ce qu’on appelle des constatations aux Etats concernés. Il peut éventuellement leur adresser des propositions pour se conformer au pacte. C’est aussi de ces pouvoirs, il fait un rapport annuel à l’AG des NU. Dans ce genre de système on compte sur la dénonciation publique, sur la publicité qui est faite aux constatations de ces comités. Et on compte in fine sur la pression politique voir morale de ce type de système. Ce n’est pas inutile ça peut fonctionner. Mais cela n’a pas l’efficacité d’une obligation juridictionnelle.

Sur le Conseil de l’Europe, il est bien évident que la convention EDH n’est pas le seul instrument de protection, il y a d’autres convention + spécifiques soit en raison de leur objet soit en raison des personnes protégés. Ex = charte sociale européenne de Turin. La convention sur la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel lié aux progrès de l’informatique et des possibilités de fichage. Se développe au niveau national mais aussi européen. Convention spécifique pour la prévention de la torture, des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Convention sur les DH et la biomédecine.

L’apport du droit européen en matière de protection des droits et libertés ne se limite pas aux conventions adoptées dans le cadre du conseil de l’Europe, ne se limite pas non plus aux conventions qui ont pour objet spécifique la protection des droits et libertés. D’autres textes éventuellement dans un autre cadre peuvent avoir un impact considérable sur les libertés, c’est particulièrement le cas des traités instituant la Communauté européenne et l’UE. Le droit dérivé communautaire pouvant avoir aussi un impact sur les libertés. Il est bien évident que la création dans le cadre notamment de la Communauté européenne, la création d’un espace économique intégré a entrainé sur le territoire communautaire la consécration d’un certain nombre de libertés : libertés essentielles du marché commun au nombre de 4, essentiellement libertés économiques, libre circulation des marchandises, services et capitaux ; mais aussi et surtout libre circulation des personnes. Libre circulation des personnes d’abord historiquement réservé aux travailleurs dans le contexte d’un marché commun. Mais ensuite au fil du temps et des traités qui s’est étendu à tous les ressortissants communautaires, à leur famille même s’il ne s’agit pas de ressortissants communautaires. Et aujourd’hui elle est attachée à la qualité juridique de citoyen européen. La citoyenneté européenne emporte le libre droit de circulation et de séjour. La JP européenne, notamment de la CJCE, a prolongé et enrichie ces libertés par le biais du principe d’égalité. Principe de base du droit communautaire qui est l’égalité de traitement entre tous les ressortissants communautaires. Autre point de rencontre : c’est que l’ampleur prise par la construction communautaire, les compétences de + en + nombreuses transférées aux institutions communautaires, l’importance du pouvoir normatif qui découle de ce transfert de compétence, tout cela a posé le problème du respect des libertés par les institutions de l’union dans le cadre justement de l’exercice de leur pouvoir normatif. Historiquement en l’absence d’un catalogue de droits et libertés propres à la Communauté ou à l’Union, c’est donc le juge de Luxembourg (CJCE) qui dans un 1er temps a assuré le respect des libertés par les institutions communautaires en assujettissant à ces institutions au respect des PGD communautaire (construction donc prétorienne pour combler un manque). Le juge comble ce manque en ayant recours (ce que fait le JA Français) au PGD

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communautaire qu’il va chercher dans la Convention EDH ou encore dans les traditions constitutionnelles des différents Etats membres. En même temps le juge communautaire ne se contente pas d’imposer le respect des PGD aux institutions communautaires, il y soumet aussi les Etats membres dans la mesure où ils agissent dans le champ du droit communautaire. Dans un premier temps c’est donc le juge qui va assurer le respect notamment des institutions communautaires aux libertés.2 ème étape = proclamation à Nice en 2000 de la Charte des DF de l’UE. Cette étape supplémentaire se concrétise dans la codification de droits et libertés qui jusqu’alors résultaient de textes multiples. Les droits civils et politiques par exemple sont repris de la convention EDH. Les droits sociaux garantis par la charte sont repris soit des dispositions des traités soit de la Charte sociale de Turin, soit encore de la Charte communautaire des droits sociaux. En terme de contenu pas une grande originalité. Mais c’est néanmoins une avancée en termes de visibilité pour le citoyen européen, en termes d’accessibilité. C’est aussi sans doute un apport en termes de sécurité juridique par rapport aux PGD. Le problème jusqu’à maintenant n’avait pas été incorporé dans les traités et n’avait donc pas de valeur obligatoire. Le traité de Lisbonne met fin à cette situation un peu ambiguë et donc donne valeur obligatoire à la Charte des DF de l’Union. La prochaine étape c’est ce qui est prévu dans le traité de Lisbonne mais ce n’est qu’un objectif, nécessité des aménagements techniques, c’est celle de l’adhésion de l’UE à la Convention EDH. Ce qui pourrait avoir comme effet une intervention du juge de Strasbourg (de la CEDH) en matière de droit communautaire.

Le continent Américain comme le continent Africain ont également mis en place des systèmes régionaux de protection des droits et libertés. L’OEA (organisation des Etats américains) a adopté en 1969 une convention américaine des DH entrée en vigueur en 1978. Cette convention a vocation à réunir les Etats du continent américain sachant que les Etats-Unis et le Canada n’en font pas partie. C’est un système proche du système européen mais dans sa version antérieure à 1998 et au protocole n°11. Système juridictionnel aussi qui admet également les recours individuel mais l’accès des individus à la Cour américaine des DH n’est pas direct (organe de filtrage) et il n’est pas de plein droit.

S’agissant du système africain, une Charte africaine des DH et des peuples a été adoptée en 1981 sous l’égide de l’OUA (organisation pour l’unité africaine). Cette charte notamment du point de vue de son contenu présente plusieurs particularités par rapport aux systèmes européens et américains. Ces particularités doivent être éclairées par la façon d’envisager les relations sociales en Afrique, particularités éclairées aussi par l’histoire de ce continent (par l’époque de la colonisation). Ces particularités culturelles ou historiques font que cette Charte proclame bien sur un ensemble de droits individuels mais on y insiste + sur les droits collectifs que dans les autres chartes. Le droit notamment des peuples à l’auto-détermination, le droit des peuples à la libre disposition de leur richesse, le droit au développement. A l’origine c’était un système très classique du point de vue du DI. Plus classique de ce point de vue là que les systèmes européens ou américains. Autrement dit il n’y avait pas d’organe juridictionnel. Et puis un protocole a été adopté en 1998, entré en vigueur en 2004. Ce protocole institue une Cour africaine des DH et des peuples. Cour qui peut être saisit par les individus ou les ONG en cas de violation des droits garantis par la Charte. On a donc là très proche du système européen en particulier. Cette Cour fonctionne à partir de juillet 2006.

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Existe une Charte Arabe des DH adoptée en 1994. Charte particulière car elle met en avant le particularisme de l’islam en se référant notamment aux « principes éternels définis par le droit musulman » (dans le préambule). Sa particularité = elle se situe délibérément en rupture avec la prétention universaliste de la théorie des DH, du moins théorie occidentale. En rupture de la vision universaliste de la DUDH.

Une des questions les + difficile et délicate = question de l’universalité des DH.Constat = la mondialisation ou l’internationalisation des DH depuis la 2nde moitié du XXème siècle. Elle n’est pas a elle seule un gage d’universalité. Pour que l’on puisse parler d’universalité encore faudrait-il que ces textes internationaux résultent véritablement d’une adhésion partagée aux droits et libertés proclamées par ces textes et aux valeurs qu’ils véhiculent. Et que ces textes ne résultent pas de ce qui serait l’imposition à l’ensemble du monde d’une conception qui serait en réalité une conception purement occidentale. Les DH ont été parfois dénoncés comme une invention de l’Occident ou à tout le moins reflétant l’ethnocentrisme occidental qui consiste à penser les autres cultures à partir de ses propres valeurs sans tenir compte de la spécificité des autres civilisations. Dénonciation d’un certain néo-colonialiste. Critique vient surtout du courant tiers mondiste, repris par un certains nombres de pays asiatiques. Culture essentiellement holiste, primauté de la famille et des groupes pas assez pris en compte par eux. Et la Charte arabe est aussi une forme de dénonciation d’un respect insuffisant des particularités.En même temps ces différentes contestations d’ordre politique n’ont pas débouché juridiquement sur la dénonciation massive des grands instruments internationaux de protection des DH.A la conférence de Vienne sur les DH début des années 90 se forme une sorte de consensus autour de l’acte final (voir poly). Consensus formel sur cette conception de l’universalité avec une nuance et une exception qui perdure, il demeure une opposition assez radicale de certains pays musulmans ou de certains courants islamistes. Mais qui n’élimine pas les questions que l’on peut se poser du point de vue de l’universalité.1 ère question = comment justifier la prétention de droits universels qui vaudraient donc pour tous, tout en reconnaissant qu’ils trouvent leur origine dans la philosophie politique occidentale (notamment les droits individuels). Ce n’est pas la question la + difficile car sur ce point on peut considérer que les faits répondent d’eux-mêmes. C’est au nom des DH, c’est au nom en particulier des droits proclamés dans la DUDH, ou même dans la DDHC que dans le monde entier des opposants ont lutté contre les régimes totalitaires ou dictatoriaux.

Plus compliqué et + fondamentale : c’est comment concilier l’universalité des DH avec la diversité des cultures d’autant + que le droit à la préservation des identités culturelles et lui même consacré par divers instruments internationaux. Il n’y a pas de réponse toute faite. Si on va trop loin du côté du respect de la diversité le risque c’est de verser dans une sorte de relativisme qui conduirait à accepter que les DH soit conçus, interpréter de façon différentes selon les traditions culturelles, ethniques ou religieuses. Cela remettrait en cause tout le système international de protection mis en place depuis 1945. Et de ce point de vue là, on ne peut pas sortir de l’idée que les DH valent pour tous et donc valent pour tous les peuples, ou toutes les cultures, toutes les religions…

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En même temps on doit sans doute aussi admettre que la perception des DH est conditionnée par un certain nombre d’éléments, par l’histoire, par des facteurs sociaux, politiques et culturels. Et il faut donc tenir compte de ces paramètres quand on s’adresse à l’autre. Il y a une question d’équilibre. Il faut savoir penser la complexité, il faut essayer d’éviter les solutions simplistes. Il faut arriver à penser une articulation entre l’universel et le particulier sans transiger sur l’existence d’un socle de principes fondamentaux. On ne peut pas penser la dignité humaine autrement qu’en globalement tous les hommes. Mais aussi sans exclure que certains principes universels puissent être mis en œuvre, appliqués de façon variable dans le respect justement des identités culturelles.

Aujourd’hui le DI notamment européen est un élément majeur de la détermination des libertés. L’article 54 de la Constitution permet un contrôle de la conformité des traités à la constitution. Le contrôle a lieu avant la ratification ou l’approbation du traité. Une fois que le traité est ratifié ou approuvé (et sauf à dénoncer le traité) l’Etat qui a ratifié est lié par ce traité, et l’Etat ne peut plus s’en affranchir unilatéralement même en révisant sa constitution. Cette pression du DI des DH exercée sur l’Etat est encore accentuée, renforcée par l’efficacité d’un certain nombre de mécanisme internationaux de contrôle, en particulier le mécanisme juridictionnel (cours européennes). Les conventions internationales relatives aux DH sont donc contraignantes pour les Etats partis mais en principe, elles ont seulement pour ambition de constituer un standard minimum en matière de protection des libertés. C’est en principe au droit interne qu’il appartient d’aller plus loin. En effet on s’aperçoit aussi que sur certaines questions ou dans certains Etats c’est sous la pression du DI que le droit interne s’améliore sur la protection. En droit interne, 3 autorités ont le pouvoir de poser des règles générales : le constituant, le législateur et le pouvoir exécutif en tant qu’il exerce la compétence règlementaire. À partir de là la question est : à laquelle de ces autorités va-t-on confier l’élaboration du statut des libertés ? En vertu du principe de hiérarchie des normes, la norme la + élevée s’impose à toutes les autorités qui se situent au niveau inférieur. Donc + on place haut les règles relatives aux libertés, + on peut considérer que celles-ci ont des chances d’être protégées. Au moins en principe. C’est donc pour cette raison que d’une manière générale les démocraties libérales tentent à ne reconnaitre au pouvoir règlementaire qu’une compétence réduite qu’en à l’élaboration du statut des libertés. Le débat essentiel se situe donc entre la constitution et la loi.

Section 2 = Les exigences liées au bloc de constitutionnalité

Des droits proclamés dans le corps même de la constitution. Donc inutile de s’interroger sur la force juridique, sur la valeur juridique des déclarations de droit ou sur la valeur juridique des préambules. Puisque la garantie des droits et libertés dans le corps même de la constitution suffisaient à leur conférer une valeur juridique constitutionnelle indiscutable. L’attribution change avec l’avènement de la IIIème République, car les lois constitutionnelles de 1875 sont muettes à l’égard des libertés. Certains à l’époque, juristes notamment, sont effrayés des dangers qui pouvaient découler de la souveraineté illimitée conférée au législateur, car rien ne l’arrêtait. Tout un courant de juriste a envisagé de reconnaitre à la DDHC une autorité juridique propre à freiner ou à arrêter le législateur si celui-ci menaçait les libertés.

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Donc dans la doctrine 2 tendances s’opposent =- certains essayent donc de démontrer que la DDHC de 1789 a une autorité

juridique supérieure à la loi. Courant de Duguit et Hauriou. - Une autre partie de la doctrine refuse au contraire à la DDHC toute valeur

juridique même s’ils peuvent lui concéder une valeur politique et morale importante.

Le débat restera essentiellement doctrinal. En droit positif c’est cette seconde tendance qui a prévalue. Aucune décision juridictionnelle ne viendra faire écho, reprendre l’idée d’une valeur supra-législative de la DDHC. Nuance néanmoins sur le terrain du droit positif, dès cette époque le Conseil d’Etat sans se référer expressément à la DDHC va néanmoins dégager de ce texte un certain nombre de PGD, dont il va imposer le respect à l’administration.

Le préambule de 1946 va modifier un peu les données du problème. En effet, contrairement aux lois constitutionnelles de 1875, la constitution de 1946 est précédée d’un préambule qui proclame et qui fait référence à un certain nombre de droits et libertés. Le problème c’est que le pouvoir constituant en 1946 n’affirme pas expressément la valeur constitutionnelle de ce préambule. On peut même pratiquement déduire l’inverse d’un article de la Constitution, puisque l’article 91 de la Constitution de 1946 exclut expressément le préambule du contrôle de constitutionnalité qui est mis en place à l’époque. Rappel = la constitution de 1946 a mis en place un contrôle de constitutionnalité très encadrée et limitée certes. Mais l’article 91 spécifie que ce contrôle pourra se faire par rapport aux textes de la Constitution et pas par rapport au Préambule.

Malgré tout la JP judiciaire va se prononcer en faveur de la valeur juridique du Préambule. On a à partir de ce moment là un certain nombre d’arrêts qui visent expressément certaines dispositions du Préambule.

La JP administrative est + nuancée mais elle va évoluer. Dans un premier temps, le JA préfère continuer à faire référence aux PGD même s’ils sont tirés du Préambule. Et puis évolution de la JP administrative, arrêt du 11 juillet 1956 Amicales des Anamites de Paris, le CE vise expressément une disposition du préambule de 1946 (c’est un principe fondamental reconnu par les lois de la république = PFLR). En 1959 toute ambigüité est levée, arrêt Syndicat général des ingénieurs conseils du 26 juin 1959. Le CE adopte une attitude clairement favorable à la valeur constitutionnelle du préambule. Donc à partir des années 50, la tendance de la JP est donc à la reconnaissance de la valeur constitutionnelle des dispositions du préambule. Mais la limite c’est que la méconnaissance de ce préambule par le législateur n’est toujours pas sanctionnée (article 91). Les constituants de 1958 sont tout aussi ambigus que ceux de 1946. Le préambule de la constitution de 1958 fait référence à la DDHC et au Préambule de 1946 mais il ne dit rien et rien n’est dit dans la constitution non plus de la valeur juridique de ce préambule.C’est la JP du CC qui va trancher en faveur de la valeur constitutionnelle du préambule. Une 1ère décision du CC de 1970 vise le préambule. Mais juste dans les visas, le dispositif ne le reprend pas. Toute ambigüité est levée dans la décision du 16 juillet 1971. Elle met fin définitivement aux controverses de la valeur du préambule. Le CC déclare contraire au bloc de constitutionnalité une loi qui méconnaissait un principe fondamental reconnu par les Lois de la république.

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Le législateur (tournant décisif pour la protection des libertés) est donc désormais tenu au respect des droits et libertés contenus dans le Préambule. Même si l’essentiel des droits et libertés figure effectivement dans le Préambule on a quand même des dispositions qui les proclament dans le corps même aussi de la constitution. Désormais le contrôle de constitutionnalité des lois va s’opérer par rapport à ce que le CC appelle le Bloc de constitutionnalité. On y trouve = le texte même de la Constitution, le préambule de la constitution de 1958, qui fait lui-même référence à deux textes =

- la DDHC, elle acquiert par renvoie du préambule une valeur constitutionnelle

- et au préambule de la constitution de 1946, idem.

Le préambule de 1946 fait référence lui-même à 2 choses =- on a une liste de principes et de droits : principes politiques, économiques

et sociaux particulièrement nécessaire à notre temps- et les PFRLR

Il faut ajouter au bloc de constitutionnalité la Charte de l’environnement, issue de la révision de 2005.

Le CC a néanmoins tiré du texte constitutionnel lui-même le principe d’égalité devant la loi, (que l’on trouve également dans la DDHC). Est issu du texte constitutionnel également le principe de libre détermination des peuples, le principe de l’autonomie judiciaire, le principe de sûreté personnelle découle de l’article 66, la liberté d’administration des collectivités territoriales.

Sur le préambule de 1946, sur ces principes économiques et sociaux le + connu est le droit de grève, le droit syndical, le droit d’asile. Les PFRLR : contrairement à la catégorie d’avant on n’a pas de liste des PFRLR. C’est donc la JP du CC qui va progressivement dégager le contenu de ces principes. Voir poly.

Enfin la Charte de l’environnement qui apparait dans le bloc suite à la révision constitutionnelle du 1er mars 2005. C’est le préambule de 1958 qui renvoie à cette charte. Contient 10 articles, texte relativement court, mais il est surtout précédé d’un assez long considérant qui pose 1 principe essentiel avec 2 applications différentes = c’est le principe d’une solidarité environnementale des générations et des peuples. Ce qui est assez original dans ce texte, assez rare voir exceptionnel, c’est que les droits énoncés dans la charte sont contrebalancés d’une certaine manière par toute une série de devoirs qui sont destinés à permettre la réalisation des droits. C’est un texte qui crée des obligations non seulement à la charge des autorités publiques mais aussi à la charge des personnes privées (physiques ou morales) avec cette seconde idée qui sous tend aussi ce texte, que la question de l’environnement est l’affaire de tous. Un texte qui énonce des droits et des devoirs mais aussi des principes, ce qui veut dire qu’il reste au législateur et au juge à préciser la portée exacte des dispositions de la charte. En tout état de cause c’est un texte promis à un bel avenir. La JP du CC englobe l’ensemble de ces textes dans une même catégorie qui est celle des principes à valeur constitutionnelle.

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Le + souvent la JP du CC se fonde sur des dispositions formelles notamment sur le texte de la DDHC. Mais il arrive aussi au CC de dégager des principes ou des objectifs à valeur constitutionnelle qui ne sont pas expressément mentionnés dans ces différents textes. L’objectif à valeur constitutionnelle qu’est la continuité du SP on ne le trouve nulle part dans un texte. La sauvegarde de l’ordre public idem, c’est le CC qui de façon prétorienne l’a posé comme objectif à valeur constitutionnelle.

Le fait aussi que quand il y a des textes, et que le CC s’appuie sur eux, ils sont soit relativement ancien, soit relativement vague, tout cela est venu alimenter une critique récurrente. Critique du comportement du juge, il aurait un pouvoir trop important. Un problème est posé par ce qu’entend le préambule de 1946 par les PFRLR. Quelles sont les lois qu’il faut prendre en compte dans les PFRLR ?Dans les lois retenues quelles sont les dispositions qui constituent des principes fondamentaux ? Tant que le CC ne s’est pas prononcé, l’incertitude demeure sur la valeur constitutionnelle ou simplement législative de la disposition en cause. Et par conséquent l’incertitude demeure sur la possibilité pour le Parlement de modifier, voir même de ne pas tenir compte, de cette disposition.Sur les lois à prendre en considération, question résolue sans trop de difficulté. Doivent être considérées au titre de ces fameuses lois de la république, les lois des 2 premières Républiques mais surtout les lois de la IIIème république, de même que celles adoptées entre novembre 1945 et décembre 1946. Liste indicative sur le poly.

Ne font pas partie du bloc de constitutionnalité : les traités internationaux, la convention EDH. Mais le CC lui-même a constitutionnalisé un certain nombre de principes consacrés par le DI. Le CC comme d’ailleurs aussi le CE ou la Cour de cassation interprètent en général les dispositions constitutionnelles à la lumière de nos engagements internationaux et donc en particulier à la lumière des traités relatifs aux LF.

Section 3 = La répartition des compétences entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif

L’attraction du droit positif français confi l’essentiel des compétences pour élaborer le statut des libertés au législateur. L’article 34 de la constitution précise la portée actuelle de ce principe et la JP du CC quand à elle a fixé les limites de ce même principe.

I / Le principe de la compétence législative

A) Origine

On rattache traditionnellement l’origine du principe de la compétence législative à la DDHC. La DDHC fait confiance à la loi et uniquement à elle, notamment pour déterminer les bornes de la liberté, pour déterminer donc les exigences de l’ordre public, pour déterminer les cas et les formes dans lesquels il est possible de porter atteinte aux libertés. Sous la IIIème République la compétence exclusive du législateur, pour poser le régime des libertés, a été érigée en règle coutumière confirmé par un avis du CE du 6 février 1953. À l’origine le fait de

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confier cette compétence au législateur (lors de la DDHC) renvoie au souci d’exclure l’exécutif de cette compétence et surtout l’objectif c’est que l’exécutif ne puisse pas se mêler de fixer les limitations possibles aux libertés. Et donc toutes les tâches, toutes les missions que la DDHC confie au législateur concernent ses limitations possibles. C’est au législateur qu’il appartient de fixer les limitations possibles aux libertés. En revanche l’essentiel des garanties, l’aspect protection lui relève pour l’essentiel de la Constitution et non de la loi. La IIIème république modifie les données du problème puisque le silence des lois constitutionnelles aboutie par la force des choses à confier au législateur une compétence totale en matière de liberté, aussi bien vis-à-vis de l’exécutif que du constituant. Ça nous explique que ces fameuses grandes lois de la IIIème république définissent l’ensemble du statut des libertés reconnues.

B) Actualité du principe

Le principe de la compétence législative est réaffirmé à l’article 34 de la Constitution. Voir poly. La compétence législative se trouve donc à la fois confirmée dans son principe mais aussi limitée par rapport à ce qui se passait sous la IIIème République. Limitée de 2 points de vue =

- limitée par l’intervention du CC- limitée aussi par le texte, par le jeu notamment des articles 34 et 37 en ce

sens où la compétence législative ne concerne que les garanties fondamentales

Autrement dit si on s’en tient à une lecture stricte du texte la compétence législative n’excéderait pas cet article et le pouvoir règlementaire autonome serait donc compétent. D’un point de vue matériel (le contenu), la compétence législative peut s’exercer à 2 niveaux =

- Tout d’abord la loi peut poser le principe d’une liberté non encore consacrée par le texte. Ça a été le cas sous la IIIème république notamment pour ces libertés connectives que la DDHC avait oublié : comme la liberté d’association (loi de 1901), liberté syndicale (1884). C’est le législateur qui dans le silence reconnait ces libertés. Plus récemment autre exemple, la loi du 17 juillet 1970 consacre une liberté qui jusque là n’avait pas été reconnue par les textes : le droit au respect de la vie privée.

- Plus souvent la loi va venir pour établir le statut d’une liberté déjà consacrée dans son principe au niveau constitutionnel.

II / Les conséquences du principe

Il faut distinguer plusieurs hypothèses, en particulier 2 situations doivent être envisagées =

- le législateur a exercé sa compétence  : dans ce cas là ce statut demeure évidemment à la discrétion du législateur qui pourra toujours modifier les règles qui a fixées mais dans le respect des principes constitutionnels. 2ème conséquence = l’intervention du législateur, conformément au principe de légalité, lie les organes du pouvoir exécutif. Le pouvoir règlementaire ne peut pas aller contre les dispositions de la loi. Il ne peut pas non plus s’affranchir de la loi lorsqu’il prend des décisions individuelles.

- le législateur n’a pas exercé sa compétence  : il faut distinguer deux

circonstances =

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S’il s’agit d’une liberté dont le principe a été reconnu par un texte constitutionnel il appartient donc en principe au législateur d’en déterminer les conditions générales d’exercice, soit en vertu de sa compétence générale qu’il tire de l’article 34 soit même en vertu d’une disposition constitutionnelle qui prévoit expressément son intervention. Si le législateur n’est pas encore intervenu cette carence ne prive évidemment pas le citoyen de l’exercice de la liberté en cause. Mais cette carence du législateur aura pour effet d’autoriser le pouvoir règlementaire à intervenir. Si le législateur n’intervient pas le pouvoir règlementaire pourra lui même édicter les conditions d’exercice de la liberté. Arrêt Dehaene CE du 7 juillet 1950. Il s’agit d’une activité qui n’a pas été érigé en liberté par la constitution. Une activité qui n’a pas non plus fait l’objet d’une intervention législative. Le silence des textes n’a pas non plus pour effet de paralyser l’exercice de cette activité. S’applique ici un principe fondamental de l’ordre libéral, du libéralisme politique, c’est celui que l’on trouve à l’article 5 de la DDHC « tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché ». L’enjeu est important car il renvoi à l’idée que la liberté est par essence créatrice, autrement dit évidemment des comportements nouveaux sont perpétuellement inventés et on ne peut pas les subordonner à une reconnaissance expresse ou à un aménagement législatif. Cela irait à l’encontre des postulats même du libéralisme. Mais il y a quand même un effet juridique à l’absence du législateur, dans ce cas là le pouvoir règlementaire hérite de la compétence pour limiter l’exercice des libertés non définies en fonction notamment des exigences de l’ordre public.

III / Les limites de la compétence législative

A) Du côté du pouvoir règlementaire, la formule de l’art 34 paraît restreindre le domaine de la loi aux seules « garanties fondamentales »

La formulation de l’article 34 parait restreindre le domaine de la loi en matière de liberté aux seules « garanties fondamentales ». En pratique, la JP du CC maintient en fait au législateur l’essentiel de ces compétences traditionnelles en matière de liberté. Et donc concrètement il n’a jamais censuré le législateur pour être intervenu en détail, pour être intervenu dans ce qui ne serait pas fondamental. Au contraire même le législateur c’est déjà fait censurer par le CC pour n’avoir pas fixé lui-même des éléments que le CC jugeait importants du point de vue de la garantie d’une liberté. JP plusieurs fois confirmés notamment en 1986 dans la décision Liberté de communication, dans laquelle le CC déclare inconstitutionnel certains articles de la loi en raison de l’insuffisance des règles énoncées.

B) Les limitations que la JP du CC impose à la compétence législative

La 1ère limite à la compétence législative vient précisément de la constitutionnalisation d’un certain nombre de PFRLR. Constitutionnalisation qui a pour effet d’interdire au législateur d’apporter à ces lois des modifications qui justement mettraient en cause ces principes.

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Le législateur conserve l’intégralité de ces compétences à l’égard des libertés qui ne font pas l’objet de ces fameuses lois de la République. Par contre à l’égard des libertés concernées par ces lois, sa compétence exclue l’atteinte à leurs principes fondamentaux, le législateur peut seulement adapter leur mise en œuvre. La mise en cause des PFRLR relève de la procédure de révision constitutionnelle. L’idée générale. Dans un premier temps le CC a affirmé que le législateur ne pouvait règlementer l’exercice d’une liberté fondamentale qu’en vue de la rendre + effectif ou en vue de le concilier avec l’exercice d’autres règles ou principes de valeur constitutionnelle = décision de 1984 JP du cliquet anti retour. Depuis le CC semble avoir renoncé à cette formule ambitieuse pour un énoncé + réaliste, + pragmatique. Le législateur peut toujours modifier ou abroger des textes législatifs antérieurs mais sous réserve de ne pas priver de garantie légale des exigences constitutionnelles. La compétence législative peut être limitée ou au moins déterminée par l’existence d’objectifs de valeur constitutionnelle. Le législateur doit tenir compte quand il légifère de cet objectif à valeur constitutionnelle.

C) Une dernière limitation indirecte à la compétence législative tient à la supériorité reconnue aux traités sur la loi par l’art 55 de la Constitution

Limitation indirecte à la compétence législative. En matière de liberté c’est essentiellement à propos de la convention EDH que le problème se pose. De ce point de vue là le CC c’est reconnu incompétent pour exercer un contrôle préventif de la loi par rapport aux traités et donc notamment par rapport à la convention EDH. C’est au juge ordinaire à l’occasion d’un litige (a posteriori) et si le moyen est soulevé de contrôler ou au moins de faire prévaloir la convention sur la loi. C’est une limite mais qu’au niveau d’un contentieux.Petite nuance à cette déclaration d’incompétence du CC. Le principe est maintenu, le CC n’est pas revenu sur le principe de son incompétence en la matière. Il refuse d’examiner la conformité des lois par rapports aux conventions internationales mais il accepte désormais (décision de 2004 et 2006) de contrôler la conformité des lois de transposition de directives par rapport à la directive elle-même. Ne joue donc que sur un point précis, sur le droit communautaire est encore le droit communautaire dérivé. Et encore sous une double limite = - directive ne doit pas être contraire à un principe inhérent de l’identité constitutionnelle - contrôle minimal (voir poly) Quelles sont les modalités qui sont utilisées par le législateur pour aménager le statut des libertés ? Distinction entre régime répressif et préventif. IV / Les choix du législateur   : les techniques d’aménagement des libertés   : régime répressif et régime préventif

Dans sa mission d’aménagement et …des libertés le législateur va être amené à opérer un choix entre deux techniques juridiques différentes : la « répression » et la prévention. Il ne faut pas se laisser abuser par le sens ordinaire de ces 2 termes. Contrairement à ce qu’on pourrait penser (sens ordinaire), le régime répressif est a priori le régime le + favorable à l’exercice de libertés, c’est le régime juridique le + conforme au postulat du libéralisme politique même s’il faut nuancer un peu cette affirmation. On va parler de régime répressif quand le législateur laisse le citoyen libre d’agir, exercer sa liberté sans contrainte

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particulière quitte à l’obliger ensuite à répondre de ses actes s’il dépasse les limites, s’il abuse de sa liberté. L’individu n’a pas besoin de demander à quiconque l’autorisation d’exercer sa liberté, il n’a pas même à en prévenir quiconque, mais s’il commet des abus de sa liberté, il s’expose à des sanctions et/ou à répondre des dommages causés et à les réparer. A contrario on va parler de régime préventif quand l’autorité publique impose préventivement des obligations aux individus. L’individu ne pourra exercer sa liberté qu’après avoir accompli un certain nombre de formalité préalable.

A) Le régime répressif

Il présente un double avantage =- l’individu sait qu’il est entièrement libre d’exercer sa liberté à condition de

rester dans les limites du droit. Donc dans son principe le régime répressif constitue l’application d’un principe général selon lequel la liberté est la règle et la restriction l’exception. Tout ce que la loi n’interdit pas est en principe licite.

- c’est la protection du juge. En admettant que dans l’exercice de sa liberté de citoyen l’individu dépasse les bornes, en admettant aussi qu’il soit poursuivi pour cela, il ne répondra de son acte que devant une juridiction et il bénéficiera à ce titre des garanties du droit au procès équitable.

Néanmoins on peut quand même nuancer. Nuance du 1 er avantage = encore faut-il que l’individu soit au courant des interdits qui pèse sur lui. « Nul n’est censé ignorer la loi ». Notamment compte tenu de la prolifération des textes législatifs, le droit et ses interdits ne constituent évidemment pas une réalité accessible pour tous. 2 ème nuance = multiplication aussi des délits. Et qui tient enfin aussi à l’incertitude des incriminations. Pas toujours très claires. Comme tout ce qui n’est pas interdit est licite le législateur va être assez naturellement amené à multiplier les incriminations, les délits de manière a canaliser les citoyens dans l’exercice de leur liberté. Par ailleurs l’incrimination elle même est énoncée dans des termes relativement vagues dont le juge à du mal à préciser la détermination concrète. On sait la difficulté pour le juge qu’il y a à définir la diffamation. On a une liberté qui est la liberté d’expression, elle fait l’objet d’un régime répressif, on peut s’exprimer tant que l’on ne franchi pas la limite de la diffamation. Mais la diffamation ne se saisie pas facilement. Technique la + protectrice a priori des LF. Mais peut présenter des inconvénients tenant à la prolifération des textes législatifs, à la multiplication des délits et à l’incertitude des délits. La diffamation vient la borner. Cette incrimination peut prêter à discussion.Ex = affaire Lindon, Otchakovsky-Laurens July contre France arrive au niveau de la CEDH qui a rendu un arrêt du 22 octobre 2007 très controversé. Etait en cause un roman intitulé le procès de Jean-Marie Le Pen. Il s’inspire de fait réel mais y ajoute des éléments fictifs, ça raconte le procès d’un militant du FN qui avait tué de sang froid un jeune magrébin, il revendiquait lors du procès le caractère raciste de ce crime. Le roman pose la question de la responsabilité du FN et de son président dans le développement du racisme en France. L’auteur et l’éditeur sont poursuivis et condamnés pour diffamation par les tribunaux français. Libération est également (July) poursuivi et condamné pour avoir publié une pétition qui dénonçait la condamnation de l’écrivain et de l’éditeur. Cette pétition par provocation reprenait des propos justement jugés diffamatoire. Ça arrive devant la CEDH on va beaucoup discuter de savoir s’il y a ou pas diffamation. Et

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si les tribunaux français ont violé ou pas la liberté d’expression en les condamnant.

On s’attendait à une décision de condamnation de la France (car le juge européen est très protecteur de la liberté d’expression). Contre toute attente la CEDH valide la décision des tribunaux français. Raisonnement sur le roman, et raisonnement également sur la liberté d’expression de la presse et aboutit à la même décision.Le juge européen ne renonce pas à son discours traditionnel sur l’importance de la liberté d’expression dans une société démocratique. Il ne se départit pas non plus d’une solution de principe. Sur le roman il rappelle que la critique a l’égard d’un homme politique ou la critique qui renvoie à des questions d’intérêt général (débat de société) que les limites admissibles y sont + larges que s’il s’agissait d’un simple particulier. La liberté d’expression peut aller plus loin dans ces cas là.

Le juge européen juge qu’il ne peut pas y avoir d’exonération de la responsabilité de l’auteur et de l’éditeur fondée sur la bonne foi parce qu’il estime qu’il n’y a pas eu d’enquêtes sérieuses sur la responsabilité du FN dans la montée du racisme en France, qu’il n’y a pas eu de vérifications minimales à ce propos et que l’auteur en particulier ne c’est pas exprimé avec suffisamment de mesure. Le juge européen remarque qu’ils ont été condamnés à une amende (sanction pénale) mais que le montant de cette amende était mesurée donc pas atteinte au principe de responsabilité. Libération fait l’objet aussi de tout un dispositif. Le juge européen rappelle aussi sa position de principe : il considère la presse comme « le chien de garde de la démocratie ». Et puis le juge européen s’étend beaucoup aussi sur les devoirs des journalistes et donc il rappelle que le droit d’information des journalistes, leur liberté d’expression est protégé à condition qu’il agisse de bonne foi et qu’il vérifie un minimum les déclarations diffamatoires à l’encontre des particuliers. Cela n’a pas été fait de l’avis du juge européen. Opinions dissidentes (au nombre de 4) jointes à l’arrêt intéressantes, elles font un paragraphe sur la notion de diffamation. Leur idée est de dire que c’est une notion imprécise et ils en veulent pour preuve le nombre de passage qui a été au fil des procès considéré comme diffamatoire. Pour eux il y avait dans le bouquin 6 passages diffamatoires. Le jugement du tribunal correctionnel (en France) condamne 4 passages. En appel on considère que 3 passages sont diffamatoires. La CEDH en retient 2 qui représentent 3 lignes sur un total de 138 pages. Effectivement ça peut amener à s’interroger sur la précision de certaines incriminations.

B) Le régime préventif

On peut y trouver quelques avantages en termes de protection des libertés mais il a surtout des inconvénients importants. Avantage = pour le coup l’individu jouit d’une certaine sécurité juridique en ce sens qu’a priori il ne craint plus rien dès lors qu’il a rempli les formalités requises pour exercer sa liberté.

Cela dit le régime préventif présente des inconvénients graves = - l’autorité qui intervient dans ce type de régime c’est l’autorité qui classiquement est considérée comme la plus dangereuse pour les libertés à savoir l’autorité administrative. Suivant les cas l’autorité administrative va pouvoir utiliser 3 techniques d’intervention : l’autorisation, la déclaration ou enfin l’interdiction.

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1°. L’autorisation

Elle peut prendre différente forme =- elle peut être discrétionnaire : potentiellement la technique la +

attentatoire aux libertés car l’administration a une liberté complète d’accorder ou pas l’autorisation demandée.

- elle peut être conditionnée : un peu + protecteur. C’est l’idée que l’administration est obligée de nous délivrer l’autorisation demandée à partir du moment où l’on remplit les conditions requises dans la réglementation pour exercer nos libertés. C’est l’exemple le + typique du permis de construire, que l’on doit obtenir pour construire mais qui doit nous être délivré à partir du moment où notre projet de construction correspond aux normes du code de l’urbanisme.

- et elle peut être réputée acquise en cas de silence de l’administration. On peut revoir ici aussi le permis de construire, en cas de silence d’un certain délai il est réputé acquis.

2°. La déclaration préalable

Dans ces grandes lignes, c’est l’idée que l’administration joue un rôle assez passif en ce sens où elle doit simplement enregistrer la déclaration qui lui est faite. C’est l’idée que l’individu avant d’exercer sa liberté est tenu d’avertir l’administration (c’est le cas des fondateurs d’une association, c’est le cas des organisateurs d’une manifestation et aussi pour l’exercice du droit de grève notamment dans les SP). Dans ces différentes hypothèses l’administration doit délivrée un récépissé attestant qu’elle a bien reçu la déclaration, elle a donc en la matière une compétence liée, ce qu’a confirmé à plusieurs reprises le juge administratif. A priori ce n’est pas en soit très contraignant, sauf qu’en pratique le problème de la déclaration préalable c’est qu’elle peut faciliter l’exercice de la 3ème technique possible, qui elle est beaucoup + dangereuse, + attentatoire aux libertés = l’interdiction. Le décret-loi de 1935 qui régit encore aujourd’hui les manifestations sur la voie publique, prévoit en même temps la déclaration obligatoire de ces manifestations et la possibilité de les interdire.

3°. L’interdiction

En pratique cette modalité d’intervention de l’administration peut s’exercer à la fois sur des libertés qui sont plutôt régies par un régime préventif mais aussi concerné des libertés qui relèvent du régime répressif. L’idée dans cette hypothèse là, c’est que l’administration peut interdire l’exercice d’une liberté si elle estime que cet exercice risque d’entrainer des troubles notamment à l’ordre public. Ce pouvoir d’interdiction peut donc être prévu par les textes qui régissent telle ou telle liberté. Cette interdiction peut également s’exercer en l’absence de textes. Le juge administratif estimant qu’en toute hypothèse ce pouvoir d’interdiction existe sur la base des pouvoirs de police reconnus aux autorités responsables du maintien de l’ordre. Autrement dit il peut s’exercer potentiellement à l’égard de n’importe quelle liberté. Il est donc évident que cette technique là de l’interdiction est sans doute la + dangereuse pour les libertés car elle l’empêche de s’exercer. Et même si cette interdiction est censurée à posteriori par le juge administratif elle a quand même eu pour conséquence que la liberté ne s’est pas exercée. La censure du juge ne peut rien y changer. D’où l’intérêt fondamental des procédures d’urgence et en particulier du référé liberté.

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Il est bien évident que compte tenu du caractère anti-libéral des techniques du régime préventif et en particulier de l’autorisation préalable, c’est un régime qui ne s’applique que marginalement à tous ce qui concerne notamment les libertés de la pensée, qui ne s’applique que marginalement également aux libertés qui permettent d’exprimer cette pensée.

Il y a néanmoins des exceptions : le régime du cinéma continu de relever du régime préventif en ce sens où l’exploitation des films reste soumise à ce qui est un véritable visa de censure (véritable autorisation préalable). Il est vrai que le visa est accordé assez libéralement depuis une quarantaine d’années. Toujours une exception = les radios privées font l’objet d’une autorisation d’émettre délivrer par le CSA.

Donc l’idée générale que ces libertés sont plutôt régies par des techniques de régime répressif mais il y a des exceptions.Situation inverse pour ce qu’on peut ranger dans les libertés économiques. Elles sont beaucoup plus soumises à ce régime préventif. Comme le droit de la propriété. La seule chose étant que c’est le législateur qui peut décider de soumettre une activité à une autorisation préalable. Ça ne peut pas venir du pouvoir règlementaire. Une seule exception au principe de la compétence législative elle concerne l’exercice d’activité qui s’exercerait sur la voie publique mais en dehors d’un usage normal de cette voie publique. L’autorisation préalable ne fait pas obstacle, ne fait jamais obstacle à une éventuelle interdiction par une autorité locale notamment. Ex = même si un visa d’exploitation est donné à un film, un maire peut malgré tout l’interdire dans sa commune s’il estime que cette interdiction est exigée par les circonstances locales. Voir l’arrêt Société les films Lutétia 18 décembre 1959.

Cette tendance est vérifiée et d’abord avec les arrêtés municipaux anti-mendicité. Puis un peu + tardivement les arrêtés édictant les couvres feu des mineurs (début années 2000). La JP administrative reprend ici les composantes classiques de son contrôle. Quelles sont les composantes classiques ce contrôle ?

- le juge administratif n’admet que les mesures rattachables à un but de protection de l’ordre public ce qui veut dire notamment qu’il refuse de considérer que la mendicité ou l’errance soit en eux-mêmes constitutifs d’une atteinte à l’ordre public. Une ordonnance du juge des référés du CE du 11 juillet 2001 : Ville d’Estampe.

- le juge administratif sanctionne les mesures qui pourraient s’assimiler à des interdictions générales et absolues.

- il vérifie la proportionnalité de la mesure par rapport aux circonstances de l’espèce, par rapport aux troubles à l’ordre public en application de la JP Benjamin.

V / La compétence règlementaire

Dans la conception classique du libéralisme politique l’intervention du pouvoir règlementaire doit être réduite au maximum dans le domaine des libertés car il y a une déviance historique à l’égard de ce pouvoir là.

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En même temps on s’aperçoit que le droit français, ne s’est conformé à cette conception que de façon relativement atténuée. L’exécutif responsable du maintien de l’ordre et détenteur des pouvoirs de police administrative a toujours plus ou moins disposé de compétences en matière de règlementation des libertés et la Constitution de 1958 a même donné un nouveau fondement à ces compétences. On va distinguer les 2 échelons =

- échelon national- échelon local

À l’échelon national, on distingue avant et après 1958. - Avant 1958 la compétence règlementaire du chef de l’exécutif trouve son fondement dans son pouvoir d’exécution des lois. Le CE a toujours eu une appréciation assez large de ce fondement et donc de la compétence règlementaire en matière de libertés en ce sens où en fait le CE rattache à cette idée le pouvoir de règlementer même en l’absence de lois spécifiques. Il estime que l’exécution des lois en générale n’est possible que si l’ordre est assuré et il faut parfois limiter les libertés.

- Dans la constitution de 1958 la compétence règlementaire trouve un fondement nouveau et supplémentaire dans le jeu des articles 34 et 37 de la Constitution puisque l’article 34 semble limiter dans son énonciation la compétence législative à ce qui serait les seules garanties fondamentales en matière de libertés. Le CC et sa JP dans ses grandes lignes est plutôt favorable à la compétence législative et donc globalement la constitution de 1958 n’a pas fondamentalement modifiée les choses. Néanmoins il y a des exceptions. Arrêt du 12 février 1960 Société Eky, dans lequel le juge administratif estime que l’autorité règlementaire peut fixer elle mêmes les peines de simple police qui viendrait sanctionner les interdictions qu’elle a elle-même édictée.

A coté de ce pouvoir règlementaire il faut aussi signaler dans certaines hypothèses l’existence d’un pouvoir règlementaire dont dispose certaines AAI. Certaines d’entres elles intervenant en matière de libertés. Evidemment ce pouvoir de certaines AAI est encadré notamment par la JP du CC. C’est le cas du CSA. Il peut restreindre l’exercice de la liberté d’expression avec même un pouvoir de sanction en cas de violation des normes édictées par lui.

Au niveau local, certaines autorités de police principalement le préfet et le maire sont compétentes pour compléter le cas échéant les règlements posés à l’échelon national au vue des données propres à leur circonscription. Donc compléter ou adapter ces données aux spécificités locales. Dès 1902 arrêt de principe Nèris-les Bains en la matière, le CE autorise les maires à aggraver les limitations aux libertés édictées par les règlements nationaux afin de tenir compte des spécificités locales.

Transition = La question qui se pose est donc de savoir dans quelle mesure ce pouvoir de police, qu’il s’exprime par des règlements ou par des décisions individuelles, est-il limité par l’existence de libertés, libertés consacrées par une norme législative voir même supra-législative ?Autrement dit, dans quelle mesure la hiérarchie des normes peut-elle limiter l’exercice des pouvoirs de police ? La réponse notamment du CE est très claire et elle peut même s’énoncer avec une certaine brutalité. Elle ressort de l’arrêt Benjamin. Aucune liberté, qu’elle soit consacrée par la loi, la constitution ou le droit international, ne peut paralyser

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l’action de l’autorité de police. La hiérarchie des normes ne peut pas empêcher le pouvoir de police de limiter l’exercice d’une liberté. Voir poly.Les faits = Le maire de Nevers qui interdit une conférence d’un écrivain très engagé à droite en raison de menace, de manifestations énoncées par l’extrême-gauche. Or une loi du 30 juin 1881 proclame de façon non équivoque « les réunions publiques sont libres ». Ce qui aurait pu être considéré comme de nature à désarmer l’autorité de police locale ici. Ce n’est pas l’analyse du CE qui affirme que la liberté de réunion doit se concilier avec les exigences du maintien de l’ordre. Cet arrêt est malgré tout important pour les libertés, car c’est à cette occasion que le juge administratif pose malgré tout l’exigence de la proportionnalité de la mesure attentatoire aux libertés avec les exigences de l’ordre public. Il n’empêche qu’à cet occasion le JA aborde la question non pas sous l’angle de la liberté mais sous l’angle de l’ordre public dont est garante l’autorité de police. Ce qui a pour conséquence de relativiser les garanties qui semblaient résulter de la hiérarchie des normes.

La hiérarchie des normes est donc à elle seule à offrir aux libertés une protection absolue, ou un asile inviolable. Ce qui revient à vérifier au niveau juridique une constatation que l’on a déjà faite, selon laquelle il n’y a pas de liberté absolue en raison des contraintes du lien social. Il en résulte que le sort concret des libertés se trouve au final dans les mains des organes qui sont chargés d’en assurer les garanties. C’est le CC qui dira par exemple si l’arbitrage effectué par le législateur entre la liberté de communication et la sauvegarde de l’ordre public est conforme ou pas à la constitution. C’est le JA qui décidera si l’atteinte portée par l’autorité de police à la liberté de réunion est ou non justifiée par la gravité de la menace qui pesait sur l’ordre public.

Chapitre 2 = Les procédures de garantie des droits et libertés

Dans les démocraties libérales c’est essentiellement le juge qui est chargé de la mission de protéger les droits et libertés. Le juge judiciaire qui est présenté comme le gardien par excellence de la liberté individuelle. Le juge administratif aussi dont on va célébrer de + en + la JP protectrice. Cette protection juridictionnelle des libertés n’a été longtemps envisagée qu’à l’égard du pouvoir exécutif. L’idée même que l’on pouvait aussi se prémunir des dangers de la loi ne c’est traduite que très récemment en France par l’émergence dans la constitution de 1958 du CC. Donc évidemment un processus juridictionnel qui s’améliore au fil du temps.Néanmoins la protection des libertés par le juge présentait malgré tout certaines insuffisances ; la principale étant que le juge peut être amené à intervenir assez longtemps après les faits. Mais ces insuffisances ont conduit aussi à une réflexion sur les ressources qu’étaient susceptibles d’apporter la protection non-juridictionnelles des libertés qui peut revêtir différentes formes. Historiquement et depuis un certain nombre d’années, la création des AAI, le médiateur, le défenseur des enfants, le contrôleur général des prisons… Se développe donc des procédures alternatives de protection, non-juridictionnelle.

Section 1 = La protection juridictionnelle

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La confiance accordée au juge pour protéger les libertés tient essentiellement à 2 facteurs =

- elle tient d’abord à l’indépendance dont le juge dispose ou est censé disposer même s’il est intégré à l’appareil d’état, le juge dispose d’un statut qui doit lui permettre d’apparaitre comme un tiers impartial quand bien même le litige opposerait l’Etat à un particulier.

- cette confiance tient aussi aux garanties qui sont apportées par les règles qui s’imposent au juge. Règles qui gouvernement la procédure conduisant au jugement, règles qui concernent le jugement lui-même, c’est donc tout ce qui concerne les règles du procès équitable (article 6-1) et au-delà de la convention européenne un grand nombre d’instruments internationaux de protection des libertés, notamment au pacte international relatif aux droits civils et politiques, fixent tous les standards auxquels doivent satisfaire la protection des juridictions.

I / La protection juridictionnelle des droits et libertés en droit français

Ce système Français est quand même marqué par une certaine complexité. D’abord ce système ce caractérise par la dualité des juridictions ordinaires. Toutes les deux interviennent dans la protection des libertés. Elle se caractérise aussi par la superposition d’un organe institutionnel qui est arrivé assez tard mais à jouer rapidement un rôle relativement important et ce malgré une compétence relativement mesurée.

A) L’émergence du CC

On le sait la création en 1958 du CC n’est absolument pas lié à la volonté de protéger les droits fondamentaux, il ne s’agit pas de transposer en France l’expérience ou le modèle de la justice constitutionnelle Allemande ou Autrichienne par exemple. Il s’agit d’imposer au parlement le respect de la répartition des compétences qui découle des articles 34 et 37. Effectivement dans les 1ers temps il va se borner à vérifier que le législateur n’empiète pas sur les prérogatives du gouvernement. Il faut attendre la décision de 1971 pour que le CC s’affirme comme protecteur des libertés constitutionnellement garanties face au législateur. Et il faut attendre la révision constitutionnelle de 1974 pour que le CC ait davantage occasion d’exercer ce contrôle. Suite à l’ouverture de la saisine du Conseil à l’opposition. Malgré cette évolution, on peut considérer que les compétences du CC restent relativement faibles en particulier si on compare le CC français aux autres Cours constitutionnelles européennes, en particulier parce que le CC reste totalement inaccessible au justiciable (jusqu’en 2008) et aussi parce qu’il reste étranger à l’activité des juridictions ordinaires. Le CC n’est pas une véritable juridiction même s’il s’en rapproche, ce que montre sa composition.

1°. La composition du Conseil et la procédure applicable devant lui

De façon récurrente on voit apparaitre un débat qui vise à mettre en question la légitimité du CC. Pris entre deux écueils, ce ne sont pas de vrais juges (procédure de nomination) et ne peut pas non plus se réclamer de la légitimité démocratique car il ne procède pas de l’élection contrairement à ceux qui s’agit de contrôler à savoir les parlementaires. Vieille tradition légicentriste française.

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Les membres du CC sont quand mêmes nommés par des personnalités qui elles ont toutes une légitimité démocratique, elles procèdent toutes du SU. Nommés par le président de la république, le président du sénat et de l’AN.

Ce qui est + ennuyeux =- en période fait majoritaire (quand le parlement et l’exécutif sont de la

même couleur politique) on arrive avec un CC qui est issu de la même majorité politique. Composition monochrome du CC. Insatisfaisant en termes de pluralité.

- ce qui était assez contestable c’était la procédure même de nomination jusqu’à la révision de 2008. Absence de toutes discutions collégiales à quelque stade que ce soit de la procédure de nomination. La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 améliore la procédure, désormais on aura une procédure de contrôle parlementaire (combinaison article 56 et 13), la nomination nécessitera un avis public d’une commission parlementaire (ne lie pas mais il est public).

- la présence des anciens présidents de la république qui sont membres de droit du CC. Pas un problème dans un régime parlementaire classique, or la Vème république ne l’est pas. Présidentialisation très forte. Du coup, cela laisse planer un doute sur l’impartialité du CC, en tout cas des anciens présidents.

La commission Balladur chargée de réfléchir sur la révision constitutionnelle, avait préconisée la suppression de la présence des anciens présidents de la république mais le constituant n’a pas repris cette proposition. Le statut des membres du CC après leur nomination est de nature à permettre l’indépendance de cet organe. La durée du mandat est suffisamment longue (9 ans) et surtout non renouvelable (évite de vouloir faire plaisir aux nominants). Les incompatibilités sont assez rigoureuses (pas de cumul avec un mandat électif local…). Les membres du CC s’engagent à ne prendre aucune position publique sur des questions ayant fait ou étant susceptible de faire part d’une décision de la part du CC. En terme de procédure, on peut considérer que globalement, et compte tenu de la spécificité du CC, les règles du procès équitable sont respectées, en particulier le principe essentiel du contradictoire et depuis 1994 le CC publie de façon systématique, outre la lettre de saisine, également les observations en réponse du gouvernement. L’analyse de ces différents éléments permet de montrer que le CC ne présente aucun trait radicalement incompatible avec la reconnaissance de sa nature juridictionnelle.

2°. Les compétences du CC

Ces compétences sont multiples, autrement dit, elles ne se limitent pas au contrôle de constitutionnalité. Compétence consultative (article 16). Il a des attributions électorales. Cela dit ce qui nous intéresse ici ce sont ces attributions relatives au contrôle de constitutionnalité. Ce contrôle de constitutionnalité peut porter sur différentes normes. Il porte sur les lois organiques, sur les lois ordinaires, sur les règlements des assemblées, sur les conventions internationales, le contrôle sur certaines délibérations adoptées par certaines collectivités à statut spécial (Nouvelle-Calédonie).Seules les lois organiques sont obligatoirement et automatiquement contrôlées par le CC. Contrariété du point de vue des LF. A l’opposé il y a une catégorie de lois qui au contraire va échapper automatiquement au contrôle de

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constitutionnalité. Les lois référendaires ne sont jamais contrôlées par le CC, c’est une auto-censure du CC. Il s’est déclaré incompétent dans sa décision du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République au SUD. Problème pour le Conseil de légitimité, car expression directe de la souveraineté nationale. C’est politiquement prudent.

Dernier type de contrôle : le contrôle facultatif (enjeux les + importants) qui concerne donc les lois ordinaires et les lois autorisant la ratification ou l’approbation d’un engagement international. Pourquoi facultatif ? Car ce contrôle dépend d’une saisine. On avait là un élément important de limitation de la compétence du Conseil et donc de freins dans sa mission autoproclamée des protections des libertés. Car s’il n’est pas saisit le Conseil ne pouvait pas les contrôler. C’était une limitation d’autant + importante que les autorités habilitées à saisir le CC sont peu nombreuses malgré les révisions constitutionnelles de 1974 (ouverture de la saisine à 60 députés ou 60 sénateurs : opposition parlementaire) et de 1992 (étend cette solution au contrôle de la constitutionnalité des traités). La possibilité pour l’opposition de saisir le CC a été à l’origine d’un développement considérable de son rôle. Contrôle + fréquent des lois et traités à la constitution notamment du point de vue des DF. Néanmoins ce contrôle a toujours malgré tout permit aux textes qui faisaient l’objet d’un consensus politique d’échapper au contrôle de constitutionnalité. C’est comme ça que des textes qui concernaient directement les libertés, dont les enjeux étaient importants en termes de liberté, sont passés à travers les mailles du filet, promulgués sans aucun contrôle de constitutionnalité. Ex = loi sur la prorogation d’état d’urgence en 2005 sans aucun contrôle du CC. Loi du 15 novembre 2001 sur la sécurité quotidienne suite aux attentats. Attentatoire à pas mal de libertés.

Le fait qu’une loi puisse échapper au contrôle du CC était d’autant plus gênant et problématique qu’une fois la loi promulguée, ou une fois le traité ratifié c’était terminé. Par deux fois le Conseil des ministres avait adopté un projet de loi constitutionnelle dans l’objectif de permettre et d’instaurer un contrôle par voie d’exception lorsqu’était invoqué une atteinte aux droits fondamentaux. Projet de loi de 1990 et 1993. Réformes jugées un peu compliquées, donc elles ont été rejeté à chaque fois par le Sénat. Et puis suite aux travaux de la commission Balladur cette idée s’impose, prévu dorénavant à l’article 61-1. Cela permet d’ouvrir l’accès de la justice constitutionnelle aux citoyens même si indirecte.

Nuance qui résulte d’une décision du 25 janvier 1985 qui avait pour objet le contrôle d’une loi en Nouvelle-Calédonie qui était une loi de prorogation de l’état d’urgence. Dans sa décision le CC admet l’hypothèse d’un contrôle de constitutionnalité dans la mesure où on aurait une nouvelle loi qui ferait référence à une loi déjà promulguée, nouvelle loi qui viendrait par exemple modifier ou compléter la loi déjà promulguée. Il dit que via l’examen de cette nouvelle loi, il accepterait d’englober dans son contrôle cette loi déjà promulguée. Les auteurs de la saisine essayaient de faire contrôler par le CC la conformité de la loi de 1955 (loi sur l’état d’urgence). En l’espèce le CC refuse en disant que la loi de 1985 (soumise à son contrôle) ne vient ni modifier ni compléter la loi de 1955, la loi de 1985 n’étant qu’une simple mise en application de la loi de 1955. C’est une hypothèse qu’il recevra dans une décision du 15 mars 1999 toujours d’ailleurs à propos de la Nouvelle-Calédonie. En l’espèce il s’agissait d’apprécier

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la constitutionnalité d’une loi organique qui venait étendre l’application d’une disposition législative antérieure (déjà promulguée). Elle édictait l’incapacité d’exercer une fonction politique élective suite au prononcé d’une faillite personnelle. Cette disposition était en vigueur mais avait échappé au contrôle. La loi organique prévoyait d’étendre cette incapacité aux élections des assemblées de provinces de Nouvelle-Calédonie. A cette occasion le CC estime que le caractère automatique du prononcé de cette incapacité électorale est contraire au principe de la nécessité des peines posé à l’article 8 de la DDHC. Il existe toujours cette possibilité de mettre en cause une disposition législative déjà promulguée par l’intermédiaire d’un contrôle incident, sur une loi qui elle va être promulguée. Mais la décision de 1985 le montre, cette possibilité est envisagée de manière restrictive et très prudente. Elle pose des conditions très strictes à l’exercice de ce contrôle.

Dernière limite à la compétence du CC. C’est encore une hypothèse d’auto-limitation. Le CC c’est déclaré incompétent pour examiner la conformité d’une loi aux conventions internationales (décision du 15 janvier 1975 relative à l’IVG). Ce qui est certain en revanche c’est que la décision de 1975 contenait un renvoi de balle, un message assez clair aux juridictions ordinaires. Message les invitant à opérer elles mêmes ce contrôle de conventionalité. Décision qui vient limiter la compétence du CC mais qui a considérablement accru le rôle de protecteur des libertés traditionnellement dévolu aux juges ordinaires. La convention EDH est très fréquemment invoquée devant ces juridictions ordinaires.

B) Le rôle des juges administratif et judiciaire

Sur les différentes formes d’intervention du juge. 1 ère remarque = le principe de légalité. Ce principe qui impose la conformité au droit de toutes les activités publiques ou privées sous contrôle du juge, ce principe là bénéficie nécessairement au droit des libertés. Il faut avoir conscience que le rôle du juge est ambivalent. En effet le rôle du juge à l’égard des libertés se manifeste d’abord comme un rôle de protecteur de l’ordre. Le juge pénal, en particulier, et ce dans la logique même du système répressif, intervient plus souvent pour sanctionner l’abus dans l’exercice des libertés que pour condamner une attente aux libertés. Même le juge civil est appelé dans certains cas à censurer ces abus, c’est le juge civil par exemple qui va prononcer la dissolution d’un syndicat ou la dissolution d’une association. C’est aussi au juge, y compris pénal, que le particulier va s’adresser lorsqu’il s’estime victime d’une atteinte à sa liberté, que cette atteinte vienne de l’administration ou d’un autre particulier. En effet on peut considérer que même lorsque le juge intervient pour sanctionner les abus commis dans l’exercice de nos libertés, dans certaines hypothèses on peut considérer que malgré tout il protège aussi la liberté.

- il protège la liberté en ce sens que la répression lorsqu’elle est confiée au juge, elle comporte un ensemble de garantie de fond et de procédure.

- lorsque le juge intervient pour sanctionner l’abus il peut en même temps selon le contexte protéger la liberté d’autrui si l’abus en question a été commis à l’encontre de la liberté de ce dernier.

En pratique les atteintes d’un particulier aux droits et libertés d’un autre particulier sont fréquentes. Selon qu’il s’agit de protéger les libertés contre les pouvoirs publics ou contre les particuliers 2 solutions sont envisageables =

- soit on va confier ces 2 missions à un seul et même juge.

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- soit on va les répartir entre 2 ordres de juridictions (un qui sera compétent pour régler les litiges entre particuliers et l’autre qui règlera les litiges entre particuliers et l’administration).

Discussion qui dépasse largement la seule question des libertés, mais en même temps c’est sur ce terrain là que la question a été le + discuté. Car c’est là que les enjeux sont le plus importants.

C’est historiquement la solution qui a eu la faveur des libéraux, c’est elle qui a été adoptée par le droit anglo-saxon en particulier. Solution qui est par ailleurs en train d’évoluer, qui n’a pas que des avantages. L’évolution fait qu’il s’oriente vers une certaine spécialisation. Cas de la Haute Cour de Londres. Le choix de la dualité de juridiction a un peu connu l’évolution inverse. L’origine Napoléonienne de la juridiction administrative laissé penser que cette juridiction avait été instituée non pas pour limiter le pouvoir administratif mais au contraire pour le renforcer. Pour les libéraux classiques il ne pouvait s’agir que de donner aux actes administratifs un juge partial et complaisant. Et puis au fil du temps le CE français a donné des gages de son indépendance, a donné des gages d’une relative efficacité au service des libertés notamment en développant une JP qui a progressivement réduit le champ du pouvoir discrétionnaire de l’administration. JP relative à l’ouverture du REP. JP relative aux PGD. Et cette idée que le juge administratif en tant que juge spécialisé dans le contrôle de l’administration est le plus efficace pour identifier, éventuellement pour sanctionner, les atteintes aux libertés commises par les agents de l’administration. Reste que la dualité de juridiction pose en elle-même un certain nombre de problèmes et notamment celui de la complexité lié à la répartition des compétences entre les 2 ordres de juridictions.

1°. La répartition des compétences

Même pour le juge cette répartition n’est pas toujours limpide au point que le Tribunal des Conflits a été amené à intervenir à de nombreuses reprises pour résoudre les conflits de compétences.

1èr principe = le juge judiciaire possède une compétence exclusive dans le domaine répressif. Autrement dit qu’il s’agisse d’abus de libertés ou d’atteintes à une liberté, chaque fois qu’une sanction pénale est prévue quelle que soit la qualité du prévenu, particulier ou agent public, dans tous les actes c’est le juge pénal qui est compétent. Il y a unité juridictionnelle dans le domaine répressif.2ème principe = le juge civil est exclusivement compétent en cas d’atteinte, non pénalement sanctionnée à la liberté d’un particulier imputable à un autre particulier. Ex = un employeur congédie un salarié en raison de son appartenance syndicale. Un journaliste sans aller jusqu’à la diffamation (sinon compétence du jugé pénal), s’immisce abusivement dans la vie privée d’autrui, compétence du juge civil.

Pour le reste chacun des 2 ordres de juridictions a ses propres compétences en vertu du principe de séparation des autorités judiciaire et administrative. Principe qui à signifier que le juge judiciaire ne peut pas connaitre des actes de l’administration. Décision du 22 juillet 1980 qui constitutionnalise l’indépendance du juge administratif. Et surtout la décision du 23 janvier 1987 qui fonde et constitutionnalise la réserve de compétence du juge administratif.

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Par dérogation au principe de séparation des juridictions judiciaire et administrative, la compétence du juge judiciaire n’est pas totalement écartée en ce qui concerne la protection des particuliers contre l’administration. Cette solution là se rattache au principe historique qui fait de l’autorité judiciaire la gardienne par excellence d’une part de la propriété privée, d’autre part de la liberté individuelle. Article 66 de la constitution la protection de la liberté individuelle par le juge judiciaire a même été érigée en règle constitutionnelle par la constitution de 1958. C’est le juge judiciaire qui va être compétent pour prononcer l’expropriation alors que cela est requis par l’administration.En ce qui concerne la protection de la liberté individuelle on a de multiples illustrations de la compétence judiciaire. Il intervient par exemple dans le contentieux de l’hospitalisation d’office, alors même qu’il s’agit là d’une décision administrative. On a donc des actes administratifs mais par dérogation au principe de séparation et en vertu de textes qui trouvent leur fondement dans l’article 66 de la constitution c’est le juge judiciaire qui sera compétent. Ajouter à cela l’article 136 du Cpp qui prévoit que les tribunaux judiciaires sont toujours exclusivement compétents pour statuer dans les instances civiles fondées sur des faits constitutifs d’atteinte à la liberté individuelle, si ces faits sont réprimés par le Code pénal. Quand il s’agit par exemple de demander réparation, d’une arrestation arbitraire ou d’une violation caractérisée de domicile, le prononcé de la sanction appartient au juge pénal. Mais la réparation appartient au juge civil même si ces instances sont dirigées contre l’administration ou ses agents. La JP est venue compliquer un peu les choses. Le tribunal des Conflits ayant en la matière réintroduit un espace de compétence administrative en réservant au juge administratif en dehors de la voie de fait l’appréciation et l’interprétation de la légalité des décisions administratives individuelles qui peuvent être en cause dans l’instance qui résulte d’une JP du tribunal des Conflits de 1964, Clément. Pour un même litige on va avoir éventuellement l’intervention de plusieurs ordres de juridictions.

Autre dérogation = en l’absence de texte et toujours sur le fondement de l’article 66 la JP admet également la compétence du juge judiciaire dans 2 hypothèses =

- la voie de fait- l’emprise irrégulière : c’est une prise de possession par l’administration, à

titre provisoire ou définitif, d’une propriété immobilière privée. Elle est considérée comme irrégulière lorsque la prise de possession en question ne se fonde sur aucun titre légal. Dans cette hypothèse là et même en l’absence de texte c’est le juge judiciaire qui se trouve compétent pour indemniser les victimes. Il va certes pouvoir indemniser les victimes mais il ne peut pas apprécier lui-même l’irrégularité de l’emprise. Intervention préalable du juge administratif. Et le juge judiciaire ne peut pas condamner l’administration à autre chose qu’à des réparations pécuniaires. Cour de cassation 28 juillet 2003.

Sous réserve des exceptions mentionnées la compétence du juge administratif s’étend à l’ensemble des actes et agissements de l’administration sous la double forme du contentieux de l’annulation et de la réparation.

2°. L’efficacité des garanties juridictionnelles

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Mise à part l’action pénale (qui peut être déclenchée par le ministère public) l’intervention du juge quelqu’il soit suppose une démarche de la victime. Le juge ne peut statuer que s’il est saisit. Or on sait que la victime dans un certain nombre de cas va hésiter à recourir à la protection juridictionnelle pour des raisons multiples (ignorance des voies à suivre quand ce n’est pas ignorance de ses droits tout court, la crainte aussi des frais à supporter, crainte d’être engagé dans une procédure qui peut emmener le justiciable loin, dans une procédure très longue. De + il est aussi relativement fréquent que la victime se trouve dans une situation de dépendance ou d’infériorité (réelle ou fantasmée) par rapport à celui qui a porté atteinte à sa la liberté. Cas lorsque l’on a contentieux salarié/employeur. Peut être vécu aussi comme ça dans un contentieux administré/administration. Les administrés se sentent souvent démunis, à tort ou à raison, par rapport au pouvoir de l’administration avec ce sentiment que le combat est perdu d’avance. L’information est capitale dans ce domaine d’où en particulier l’importance du tissu associatif.

Sur la dualité elle-même et la complexité qu’elle peut générer. Le problème est relativement clair, c’est que l’imbrication des compétences peut entrainer l’incertitude des plaideurs ou de leurs conseils (avocats) quand aux voies de droit qu’il convient d’emprunter et peut donc du même coup allonger encore des délais qui sont déjà relativement longs. La proclamation constitutionnelle de la compétence judiciaire en matière de liberté individuelle s’avère source de quelques difficultés.

Cas des hospitalisations d’office dans les établissements psychiatriques (privation de liberté). Mesure privative de liberté qui selon une loi de 1990 relève de l’autorité administrative (du préfet). Si la personne internée veut contester cette décision administrative la personne ira malgré tout devant le TGI. Compétence judiciaire car la liberté individuelle est mis en cause. Mais le juge judiciaire ne peut apprécier que la nécessité de la mesure. En revanche la régularité formelle et procédurale de la mesure on devra le faire devant le tribunal administratif. En revanche le juge judiciaire retrouvera une compétence exclusive pour connaitre des actions en responsabilité, sur la question de l’indemnisation notamment, qui découlerait des irrégularités entachant la mesure prise et là quelque soit l’origine de l’irrégularité. Sur le contentieux de la responsabilité c’est la compétence du juge judiciaire que l’irrégularité provienne du fond ou qu’elle soit formelle. Mais dans le dernier cas c'est-à-dire si l’action en responsabilité se base sur une irrégularité formelle avant de pouvoir obtenir réparation devant le juge judiciaire il faudra obtenir une décision du juge administratif constatant l’irrégularité formelle. Le juge judiciaire a toujours été considéré comme le + efficace notamment car il dispose depuis longtemps de moyens qui lui permette notamment d’intervenir rapidement (référé) et dispose d’instruments comme les astreintes, les voies d’exécution qui font qu’on est relativement assuré que les jugements ne seront pas lettre morte. Un juge administratif qui lui pendant longtemps a été privé de ces procédures, qui assuraient l’efficacité du juge judiciaire. Pendant longtemps le JA a refusé de prononcer des injonctions à l’égard de l’administration. L’administration condamnée ne pouvait être forcée à l’exécution. Le JA estimait que la question de l’exécution était étrangère à sa compétence. Et enfin les procédures d’urgence étaient relativement faibles ou en tout cas étaient envisagées de manière très restrictive. En particulier le sursis à exécution, ce qui en matière de liberté peut s’avérer problématique. Le comparatif s’effectuait en faveur du juge judiciaire.

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Le législateur a progressivement à partir du début des années 80 remédié à ces défauts. Loi de 1980 qui permet au JA de prononcer des astreintes pour contraindre l’administration à exécuter ces décisions juridictionnelles. Loi de 1995 qui permet au JA d’assortir son annulation d’une injonction. Loi du 30 juin 2000, qui vient réformer en profondeur les procédures d’urgence, qui donc créer un juge des référés administratifs, qui emprunte beaucoup à son homologue civil. Elle créée une procédure entièrement nouvelle, le « référé liberté » appelé aussi référé injonction et qui permet dans le cas où l’administration ou un organisme privé mais chargé de la gestion d’un SP porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures nécessaires à sa sauvegarde. C’est une différence avec le référé suspension, qu’il n’y a pas besoin d’un recours au fond. Capital en matière de protection des libertés. Les membres du TA d’Amiens disaient que le référé liberté est rarement admis, depuis la loi de 2000 on a eu moins de 10 cas, ce qui coince c’est le « manifestement illégal ». Donc en pratique cela est à nuancer.

II / La protection juridictionnelle en droit européen

Voir poly.

Section 2 = La protection non juridictionnelle

Voir poly.