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Du contact de langues en salle de classe aux pratiques d ...gerflint.fr/Base/Portugal1/Article6Andrade.pdf · Les résultats de la planification, de l’intervention et de la réflexion

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  • Du contact de langues en salle de classeaux pratiques dducation et de formation

    Ana Isabel AndradeUniversit dAveiro, Portugal

    [email protected]

    Synergies Portugal n1 - 2013 p. 117-130

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    Reu le 31-12-2012 / Accept le 01-02-2013

    Rsum

    Ce texte prsente la faon dont lauteure est partie de ltude sur les modes de gestion des langues en classe de franais langue trangre en contexte scolaire portugais vers des projets de recherche-action centrs sur le dveloppement des rpertoires des enseignants et des apprenants dans le cadre dune ducation et dune formation la diversit linguis-tique et culturelle. Les rsultats de la planification, de lintervention et de la rflexion sur les marques transcodiques, dans les activits des projets de recherche-action, mettent en vidence des possibilits dune ducation au plurilinguisme plus consciente, quil faut continuer chercher, dans le cadre dune thorie didactique des choix de langue, plus diversifie et plus adapte aux contextes scolaires.

    Mots-cls : communication bi/plurilingue, contact de langues, diversit linguistique et culturelle, ducation plurilingue

    Do contacto de lnguas em sala de aulas s prticas de educao e formao

    Resumo

    Este texto apresenta o modo como a autora partiu de um estudo sobre os modos de gesto das lnguas em aula de francs lngua estran-geira em contexto escolar portugus para projetos de investigao-ao centrados sobre o desenvolvimento de repertrios lingustico-comuni-cativos de professores/alunos no quadro de uma educao e formao para a diversidade lingustica e cultural. Os resultados da planificao, interveno e reflexo sobre as marcas transcdicas, nas atividades dos projetos de investigao-ao, evidenciam possibilidades de uma educao para o plurilinguismo mais consciente, educao que neces-srio continuar a investigar, no quadro da construo de uma teoria didtica sobre as escolhas de lngua, necessariamente diversificada e adaptada aos contextos escolares.

    Palavras-chave: comunicao bi/plurilingue, contacto de lnguas,

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    diversidade lingustica e cultural, educao plurilingue

    Of the contact of languages in classroom to the educational and the training practices

    Abstract

    This text presents the way how the author came from a study on the management modes of the languages in French class as foreign language in the Portuguese school context to research-action projects focused on the development of linguistic-communicative repertoires of teachers/students in the framework of an education and training for linguistic and cultural diversity. The results of planning, intervention and reflection about transcodic markers, in the activities of research-action projects, show possibilities of an education for plurilingualism more aware, education that is needed to investigate further, within the framework of the construction of a didactic theory about language choices, necessarily diverse and adapted to school contexts.

    Keywords: bi/plurlingual communication, language contact, linguistic and cultural diversity, plurilingual education

    Introduction

    Les dernires annes ont montr limportance dune ducation plurilingue et interculturelle (Coste, Moore, Zarate, 1997), ce qui met laccent sur le contact de langues. Dans ce texte, nous prsentons la faon dont nous sommes partie de la rflexion sur les modes de gestion des langues en classe de franais langue trangre (LE) en contexte scolaire portugais vers des projets de recherche-action centrs sur le dveloppement des rpertoires des sujets dans le cadre dune ducation/formation la diversit linguistique et culturelle. Notre objectif tait de comprendre les modes de contact de langues exploits dans les dynamiques communicatives et denseignement/apprentissage des acteurs ducatifs, pour construire de la connaissance capable de soutenir des activits didactiques qui enrichissent les rpertoires linguistico-communicatifs. Comme Matras crit, les bilingues ne sont pas capables de maintenir les langues spares, y compris dans leurs rves, ils associent certaines expressions certains vnements, dans une volont dutiliser librement leur rpertoire linguistique et communicatif tout entier (2011 : xiii).

    Noublions pas que la rpression des modes de communication des apprenants peut tre cause dchec acadmique, ce qui oblige

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    chercher un modle dducation langagire capable de donner plus de pouvoir aux sujets.

    Ainsi, ce texte sorganise en trois grandes parties : dans un premier point, nous explicitons quelques prsupposs de base suivis dans ltude sur le contact de langues en contexte scolaire; dans un second point, nous prsentons ltude empirique, ainsi que ses principaux rsultats, tout en systmatisant ses caractristiques didactiques; et, finalement, dans un troisime moment, nous prsentons deux projets didactiques dvelopps dans le terrain pdagogique afin de comprendre comment construire dautres parcours dducation au plurilinguisme.

    1. Quelques prsupposs de base : la communication en classe de langues

    Le contact de langues, qui arrive dans nimporte quelle classe de langue seconde (L2) ou trangre (LE), souvent nomm recours la langue premire (L1) ou maternelle (LM), est un des aspects les plus polmiques en Didactique des Langues (DL) (Levine, 2011). Labsence dtudes, dans notre contexte ducatif, nous a fait tudier les fonctions et les modalits de recours la LM partir de donnes empiriques recueillies dans les interactions entre lenseignant et ses lves en classe de franais LE. Nous avons voulu identifier les formats dalternance codique dans les diffrents niveaux de fonctionnement de la commu-nication utiliss par les diffrents acteurs de la situation didactique fin darriver ce qui se passait dans le processus denseignement dune nouvelle langue en contexte scolaire.

    Nous avons postul que le dialogue entre lenseignant (locuteur qui matrise la langue cible) et les apprenants (locuteurs qui dveloppent leurs comptences linguistiques partir de langues sources) est une des formes de communication les plus importantes dans le processus dapprentissage, surtout, quand il sagit de lobjet-langue o linte-raction verbale constitue lespace conqurir. Comme crivent Dabne et al, linteraction est le centre nvralgique de la classe de langues, tout en dterminant lattitude des apprenants confronts un savoir nouveau et de nouveaux modes de relation face ceux qui lenseignent (1990). Dans cet effort dappropriation dun nouveau savoir, les sujets utilisent leurs ressources linguistiques, communica-tives et cognitives, ce qui fait de la LM une rfrence obligatoire dans les pratiques communicatives des sujets. Par les identits sociocul-turelles et par les comptences communicatives des locuteurs qui y participent, la classe de LE est un espace de contact de langues, dont le

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    matriel verbal est toujours un discours produit en alternance codique. Ainsi, il fallait tudier le dialogue ducatif pour comprendre les choix linguistiques des enseignants face leurs lves en fonction de leurs objectifs didactiques pour arriver une thorie du recours la LM ou de la communication bi/plurilingue de salle de classe. Nous avons pens que plusieurs codes se croisent en salle de classe mme sils ne sont pas explicites. Une approche thoriquement motive des change-ments de code peut aider les enseignants et les apprenants rpondre aux besoins de communication et regarder la salle de classe comme un environnement multilingue tout en faisant partie du monde rel (Levine, 2011 : XV).1

    La LM (ou nimporte quelle autre langue) pouvait, selon nous, faire partie du discours public de la classe de LE, mais il fallait construire une thorie des alternances codiques pour les exploiter en fonction du projet dapprentissage de lenseignant (Andrade, 1997 : 16-17). Il tait notre objectif de construire une thorie didactique sur lalternance codique pour aider les enseignants dvelopper les comptences bi/plurilingues de lapprenant, ce qui obligeait mieux comprendre deux situations qui se croisent dans le processus ducatif : la situation communicative de la classe de langues; et la situation dapprentissage quelle constitue.

    1.1. La situation communicative

    La situation communicative de la classe de langues a t vue comme tant dtermine par les caractristiques du projet ducatif de linsti-tution et de lenseignant (leurs reprsentations de lobjet langue et de ce quest enseigner/apprendre, ainsi que par leurs pratiques traduites dans le matriel didactique utilis, les objectifs dfinis, les contenus slectionns, les activits planifies et mises en action), ainsi que par le nombre et le type dapprenants que lenseignant reoit dans chaque groupe. Au-del de ces facteurs, la classe de langues est une situation de communication authentique et diffrente de celle qui arrive en dehors de lcole : elle est surtout construite par les comptences communi-catives des acteurs qui dcident sur le langage, les formes linguistiques ou les codes utiliser pour construire du sens : On peut reconnatre dans linteraction les marques de la comptence des interlocuteurs se servir de leurs ressources de faon adapte au contexte spatio-tem-porel priv, au public, celui de la relation entre les participants et au but anticip (Erpicum, Page, 1988 : 165).

    Ainsi, malgr la mthode suivie par lenseignant, les interlocuteurs ne peuvent pas sempcher de communiquer sur les rpertoires dj construits et nchappent pas aux caractristiques de la communication bi/plurilingue. la suite de Weinreich (19742), nous avons accept avec

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    dautres auteurs que le locuteur bi/plurilingue est le locus de contact de langues, car il utilise de faon alterne plus dune langue (Ldi, Py et al, 1995). Lapprenant de langues est un locuteur bi/plurilingue en devenir, tat quil ne pourra jamais acqurir sans lexprimentation du bi/plurilinguisme, ce que lenseignant doit assurer dans un processus de guidage intentionnel.

    Dans le sens de lethnographie de la communication, nous avons voulu comprendre de lintrieur lvnement communicatif/classe de LE. Tout en partant de la place de la LM dans son discours public, nous avons voulu identifier les finalits, intentions, normes qui rgissent les changes communicatifs de salle de classe.

    En mme temps que la classe tait vue comme une situation de communication quil fallait connatre par ses pratiques sociales, la langue apprendre tait envisage comme un systme de communi-cation intersubjective construit dans ces pratiques-l. Dans cette vision socioculturelle, la langue est un instrument de communication, diffrent des autres, qui constitue et construit la pense et la connaissance, ainsi que les relations sociales et identitaires : loption communicative ne consiste pas en une simple mise en uvre de comptences ou de struc-tures connues sparment et a priori, mais plutt en une intgration de ces comptences et de ces structures dans laction (Hymes, 1984 : 189).

    Cette vision de lapprentissage prsuppose que le langage produit la socit et lindividu, en mme temps quil est produit par eux. Les donnes linguistiques ne se dgagent pas de la vie, de la pense et des valeurs dune communaut qui les produits et est produite par eux. Mais les communauts ne sont pas homognes, elles sont faites de plusieurs communauts qui simbriquent les unes dans les autres. Chaque communaut, mme la moins complexe, possde des varits linguistiques utilises dans diffrentes situations de communication, et chaque varit est soumise aux modifications vcues par les sujets qui la parlent, tout en traduisant la diversit de leurs parcours. Ceci revient penser quavoir comme modle un locuteur idal au sein dune commu-naut linguistique homogne est avoir une fausse ide de la ralit.

    Apprendre une nouvelle langue est apprendre grer lingalit linguistico-communicative, apporte par les diffrences sociales et individuelles des sujets, des rles quils jouent dans la communication et des rpertoires quils transportent, mais aussi par la diversit des codes en prsence. Apprendre matriser une langue se traduit dans laction dapprendre grer limprvisibilit et la diversit, de plus en plus videntes dans les processus de mobilit, ce qui fait que les sujets

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    appartiennent de plus en plus plusieurs communauts. Noublions pas que la majorit de la population mondiale nest pas monolingue et que nous changeons de langue quand la situation de communication (interlocuteur, thmatique,) se modifie. Plus quun stade, le bi/pluri-linguisme est une activit caractrise par la varit de rpertoires, ce qui est dailleurs commun toute situation de communication (Ldi, Py et al, 1995).

    Devenir comptent dans une langue est se placer dans un continuum qui va de la capacit de reconnatre la langue jusqu la capacit de produire des discours plus ou moins labors, tout en passant par la capacit dutiliser un mot ou une phrase simple, qui va de la matrise exclusive dun registre familial jusqu la matrise de plusieurs registres, de la capacit parler dun thme spcifique jusqu la capacit de faire rfrence une diversit de thmatiques. Plus important que faire rfrence des descriptions exhaustives des niveaux de fonction-nement verbal, il fallait prendre la langue comme un objet constamment rinvent dans des processus de communication qui sont aussi des processus dapprentissage.

    1.2. La situation dapprentissage

    La salle de classe est un espace de communication conu en fonction de la capacit dapprendre des lves. Dans cette intention, les tches sorientent vers la construction verbale que lapprenant peut raliser avec la mdiation de lautre (par exemple, lenseignant). Cette mdiation se traduit dans un langage partag construit de faon bi/plurilingue et exolingue, car il sagit dun espace-temps de ngociation de nouveaux savoirs avec des divergences significatives entre les rper-toires linguistiques des participants.

    La salle de classe est un contexte intress par lacquisition de connaissances des apprenants, par le dveloppement dune comp-tence linguistico-communicative. Si linteraction est la manifes-tation du langage verbal, elle est aussi lespace dapprentissage o lapprenant doit la fois interagir pour apprendre et apprendre pour pouvoir interagir (Vasseur, 1993 : 26). La langue sacquiert travers dinnombrables discours et situations o lapprenant se dveloppe par le processus de ngociation de la tche verbale qui devient une situation de collaboration entre un locuteur plus comptent, qui enseigne, et un autre moins comptent, qui apprend, o le premier doit aider le second, tout en lui fournissant une exprience en quelque sorte un pas en avant de son tat actuel de dveloppement (Byram, 1992 : 142). Dans dautres mots, en collaboration, sous la direction et avec laide de quelquun, lenfant peut toujours faire plus et rsoudre des problmes

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    plus difficiles que lorsquil agit tout seul [] Le seul apprentissage [] est celui qui anticipe sur le dveloppement et le fait progresser (Vygotsky, 1985 : 270-27).3

    Si linteraction didactique est dtermine par la plus grande matrise du code de la part de lenseignant, elle est renforce par la diffrence de droits et de devoirs des participants qui se fondent dans un rapport de dominance entre les participants, traduite dans lobligation de la part du locuteur le plus comptent de conduire les locuteurs moins comptents sengager dans le processus de communication. Ce type de communication se caractrise par toute une srie de stratgies daide la comprhension (reformulations, simplifications, explicitations) et daide la production (Vasseur, 1993) qui peuvent jouer avec les changements de langue comme ressources la disposition des partici-pants dans le processus denseignement/apprentissage, tel quil arrive dans les autres situations de contact de langues.

    Enseigner/apprendre tre bi/plurilingue revient prparer lalternance codique, tout en sachant que les locuteurs dune commu-naut linguistique disposent dune panoplie de styles contextuels, quils font en permanence commuter (style-switching) en fonction de stratgies communicatives spcifiques, le bilinguisme et le pluri-linguisme ntant tout compte fait que la manifestation extrme (et dailleurs beaucoup plus frquente quon le considre habituellement) de cette pluralit de registres fonctionnels (Kerbrat-Orecchioni, 1990 : 34).

    Comprendre lalternance codique dans le contexte dapprentissage dune LE nous paraissait fondamental pour accder aux comptences professionnelles des enseignants et aux modes de les dvelopper. La situation de contact de langues, en tant que phnomne social, a t trs tudie, mais pas suffisamment en salle de classe, espace de travail conjoint en fonction dune finalit prcise, apprendre communiquer.

    2. Ltude empirique sur le contact de langues

    Pour tudier le contact de langues, nous avons enregistr en vido 74 cours de franais LE, destins des lves de 7me anne de scolarit ayant dj appris langlais comme premire LE en contexte ducatif portugais. Ces cours se sont drouls pendant une anne scolaire (1988/1990) dans les classes de 4 enseignantes de 3 coles de la rgion dAveiro. Nous avons transcrit entirement les cours, recueilli tout le matriel didactique et analys les marques transcodiques du discours public de linteraction pdagogique, ainsi que confront

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    les enseignantes avec des pisodes afin de comprendre leur pense didactique, tout en identifiant les objectifs du recours aux diffrents codes (Andrade, 1997). Nous avons dfini lespace de la LM en classe de franais LE, tout en calculant les missions (le discours produit entre deux pauses considres comme les frontires dune conscience mtalinguistique vis--vis les limites de la matrise de chaque langue en prsence; Weinreich, 1974) o il tait possible de reprer le portugais (LM de la presque totalit des lves et langue de scolarisation).

    Pour comprendre les fonctions des marques transcodiques nous avons analys la communication didactique en deux niveaux discursifs : le niveau communicatif et le niveau mtacommunicatif. Le niveau commu-nicatif est constitu par toutes les formes rgulatrices des relations institutionnelles entre les acteurs (distribution de tches, rsolution de problmes administratifs ou disciplinaires), ainsi que par les stratgies de communication utilises lorsque les sujets sefforcent dutiliser la langue cible dans la recherche ditinraires dlargissement de leur rpertoire linguistique. Le niveau mtacommunicatif est lespace dexplicitation du processus denseignement/apprentissage.

    Les marques transcodiques sont prsentes dans 21% du discours public de la classe, surtout au niveau mtacommunicatif, 13%, et dans des missions en LM sur lobjet LE, 12,7%. Au niveau communicatif, les marques transcodiques occupent 9% du discours public, avec 7,4% dans le discours pdagogico-didactique et 0.6% dans les stratgies de communication. Ce sont les enseignantes qui produisent plus de discours mettant en vidence la situation de contact de langues vcue en salle de classe, 17,7% contre 3,3% dus discours des lves. Ces rsultats nous amnent deux ides : la centralit du professeur dans la construction de linteraction didactique qui laisse peu despace lautonomie communicative des apprenants; le poids du mta (surtout, linguistique), renvoyant une conception normative et ferme de la langue comme objet expliciter dans ses dimensions de fonctionnement et par rapport laquelle les enseignantes prennent les dcisions.

    Par les marques transcodiques, comme nous pouvons regarder dans les transcriptions des cours4, les enseignantes donnent des informations sur les apprentissages raliser, tout en caractrisant les systmes linguistiques en contact comme des objets part,

    A1/153 ALS femme [f-]A1/154 P pas femme [f-]/ femme/ cest la femme de;B9/205 PA et du [du] fromageB9/206 P et DU/ et DU fromage/ regarde/ DU/ DU/ fromage,

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    mais aussi proches,

    B10/206 ALS um conselhoB10/207 P un conseil v-se bem o que .

    Ces informations sur les langues sont communiques dans des comportements discursifs parfois contradictoires, o il sagit dinterdire lalternance codique,

    D3/191 A [] mas caneta no masculinoD3/192 P tu no podes pensar em portugus/ em francs masculino t bem,

    de laccepter,

    B2/142 A o que chimieB2/143 P excuse-moi/ chimie+ regarde le dessin/ tu vois la physique/ et aprs la chimie// ils font des expriencesB2/144 S qumicaB2/145 P qumica/ como est a dizer a Sofia [],

    ou de la solliciter,

    D10/190 P ora digam uma palavra em portugus que tenha o som [o];B15/256 M em francsB15/257 P no/ vamos falar portugus/ e depois falamos em francs;D5/254 P []/ elle va essayer dexpliquer en portugais/ tu peux expliquer en portugaisD5/255 A eu acho que aquele tem e porque masculino e aquele porque femininoD5/256 P claro,

    tout en ralisant cette mme alternance,

    B3/021 P gteaux/ gteaux au chocolat/ bolos de chocolate/ gteaux au chocolat// flte/ alors/ les gteaux sont os bolos/ les gteaux (Q: les gteaux (bolos).

    Les enseignantes sollicitent la fois labandon des marques trans-codiques et produisent elles-mmes un discours bilingue, ce qui prouve limpossibilit du monolinguisme quand il y a plus dune langue en prsence. Il y a une contradiction entre le discours dclaratif et le discours processuel des enseignantes, car malgr la prsence des marques transcodiques dans tous les contextes, seulement une des enseignantes en est consciente, bien quelle narrive pas expliciter lensemble des fonctions du choix de langue dans la construction de linteraction didactique (Andrade, 1997 : 387).

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    Malgr les diffrences observes, dues aux styles communicatifs, lhistoire personnelle et professionnelle des enseignantes, au choix de langue dfini lintrieur de lhistoire des groupes, les quatre ensei-gnantes mettent en vidence une comptence de communication didac-tique qui est contradictoire avec le discours mta quelles construisent avec les apprenants. Elles annoncent un modle de communication verbale presque sans marques transcodiques et o lhistoire interactive des sujets est absente (Andrade, 1997). Les enseignantes poursuivent une langue de locuteur natif, un bilinguisme parfait ou quilibr, cet idal inaccessible et insidieux qui consiste imiter le locuteur natif et valuer la performance communicative par rapport au locuteur et au scripteur autochtones (Byram, 1992 : 291), sans prendre en compte les conditions dapprentissage et sans prter attention au fait quap-prendre une langue prend du temps.

    Ltude empirique a montr que la comptence de communication bi/plurilingue des enseignants de langues fait partie de leur comptence didactique, mais quils en ont trs peu conscience. Cette constatation nous a conduite des projets de recherche sur des pratiques ddu-cation et de formation dont la finalit tait de continuer poursuivre une thorie didactique des choix de langue. La construction de cette thorie exigeait, notre avis, la planification, lexprimentation, la confrontation et linterprtation des moments dalternance codique, par limportance que ces moments gagnent dans le dveloppement dune comptence plurilingue, ainsi que de la comptence didactique dans un monde o la diversit linguistique et culturelle nous entoure de plus en plus.

    3. Des projets didactiques dvelopps sur le terrain pdagogique

    Pour continuer construire de la connaissance sur les potentialits ducatives des situations de contact de langues en contexte scolaire, nous avons dvelopp en collaboration avec dautres chercheurs, aprs ltude empirique en classe de franais LE, des projets de recherche-action, o des activits didactiques de dveloppement communicatif plurilingue ont t conues partir de lide de contact de langues. Ce travail a t aussi dvelopp grce aux travaux du Conseil de lEurope (Coste, Moore, Zarate, 1997), ainsi qu la participation des projets sur lintercomprhension5 et lveil aux langues6 o le transfert langagier a t travaill.

    Nous prsentons ici deux projets que nous avons dirigs : lun sur le dveloppement plurilingue dlves de lenseignement secondaire

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    en classe de latin; et lautre sur le dveloppement de la connaissance didactique denseignantes en formation initiale.

    Le projet Intercomprhension, apprentissage de langues et didac-tique du plurilinguisme (Santos, 2007) a analys un projet dintervention didactique qui a eu comme objectifs : i) comprendre comment travailler le plurilinguisme travers des activits dintercomprhension, dans le contexte dune classe de latin dans le curriculum scolaire portugais; ii) discuter les diffrentes conceptions dintercomprhension par la mise en lumire des processus de traitement de donnes linguistiques inconnues par un groupe dhuit lves de lenseignement secondaire. Ce groupe dlves (des filles ges de 16 20 ans) a t confront, dans des activits de comprhension crite, des textes sur Rome en diffrentes langues (basque, roumain, catalan, sudois, afrikaans, breton, nerlandais). Lanalyse des donnes recueillies montre quil est possible, en contexte scolaire monolingue, dduquer au pluri-linguisme, tout en contribuant une meilleure comprhension du monde des langues et la mobilisation de ressources linguistico-com-municatives dans des situations de communication multilingues, par des processus de construction du sens et de rflexion sur les passages dune langue une autre.

    Le projet Intercomprhension, identit et connaissance profes-sionnelle dans la formation des enseignants de langues (Pinho, 2008) voulait comprendre les possibilits de travailler lintercomprhension dans la connaissance didactique de futurs enseignants de langues, tout en dfinissant comme objectifs : (i) identifier les images dune langue comme objet du curriculum dans le discours de futurs ensei-gnants; (ii) comprendre les dynamiques entre ces images de la langue, la connaissance didactique et lidentit professionnelle; (iii) identifier des moments de transformation des futurs enseignants, tout en comprenant le potentiel formatif de projets de recherche-action centrs sur lintercomprhension. La recherche a accompagn un groupe de quatre futures enseignantes de langues dans leur parcours de formation en DL et en stage pdagogique dans une cole (4me et 5me annes universitaires). Lanalyse des donnes nous montre une image grammaticale, instrumentale et monolithique de la langue en conflit avec une image plurielle et multidimensionnelle de la langue exige par une thorie didactique du plurilinguisme. Malgr la dure limite des projets dvelopps par les enseignantes, les rsultats montrent quil est possible, partir dactivits dveil aux langues, lenrichissement de la culture linguistique des enseignants, la rflexion sur la spcificit de la communication plurilingue et interculturelle, ainsi que sur la ncessit dautres mesures de politique linguistique, tout en dveloppant un

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    rpertoire didactique qui prpare au plurilinguisme.

    Ces projets contiennent lide que le modle de langue proposer dans les situations dapprentissage verbal ne peut pas tre seulement celui du locuteur natif, car apprendre une autre langue implique le passage dune culture monolingue une culture plurilingue et inter-culturelle quil faut exprimenter. Dans ce sens, les sujets-participants ont compris quil ne faut pas pnaliser linfluence des langues dj acquises sur les productions verbales des apprenants pour les rendre plus disponibles participer dans des interactions bi/plurilingues et que les interactions russies peuvent agir sur la motivation et la progression de lapprentissage.

    Dans les deux projets, il a t question :

    de travailler diffrents systmes linguistiques, tout en multipliant les langues contacter dans des processus de mobilisation des langues sources comme des aides la reconstruction du savoir, dans un parcours de dcouverte des diffrences et des ressemblances entre langues. La LM a gagn son droit dexistence, tout en fournissant des cadres de rfrence sur dautres systmes linguistiques et dautres situations de communication, car le sujet qui parle utilise les ressources linguisti-co-communicatives sa porte, dans un processus de bricolage avec les langues connues et/ou contactes;

    de travailler les attitudes face aux langues/cultures. La question du statut, des fonctions et des caractristiques des langues dans les reprsentations des sujets a t aborde, ainsi que les biographies langagires des participants. Les activits dintercomprhension montrent que la distance subjective ou perue est parfois plus impor-tante que la distance typologique (Billiez, 1996). Lhistoire langagire des apprenants et des enseignants a t prise en compte et largie par de nouvelles expriences, tout en donnant du sens lapprentissage et tout en modifiant les reprsentations du facile/difficile;

    dobserver la communication bi/plurilingue en contexte, tout en rflchissant sur les situations de diversit, comme des espaces de convergence (linternet, les aroports, la publicit, les grandes villes, la salle de classe) (Calvet, 1994 : 178, sur Dakar).

    Les sujets ont rflchi sur le choix de langue, tout en prenant conscience que la communication bi/plurilingue joue avec la capacit utiliser les langues en prsence dans la construction du sens et de la relation. Nous avons vu quil est possible dentraner lapprenant mobiliser son potentiel cognitif, en lui fournissant doutils permettant le passage dune langue lautre, dans une vision cologique de lappren-

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    tissage (processus non linaire, complexe et dynamique, Levine, 2011 : 8).

    Les rsultats des projets renforcent limportance de travailler les zones de transfert dans le respect du profil des apprenants et des ensei-gnants et que les situations de contact de langues ont du potentiel didactique, tout en attirant lattention sur le besoin de prendre en compte les parcours dapprentissage afin de former des apprenants plus interactifs et responsables face des communauts linguistiques et socioculturelles de plus en plus mixtes.

    Rflexion finale

    Notre travail, dans les dernires annes, sest focalis sur les pratiques dducation au plurilinguisme, dans des processus de recherche de ces pratiques-l, avec la finalit danalyser la faon dont les enseignants ngocient les choix de langue et quelles sont leurs finalits. Le travail ralis en est encore son dbut, car nous sommes loin davoir des coles inclusives et plurielles et de savoir comment elles peuvent le devenir. Comme Levine, mon leitmotif dans la formation a t de reconnatre et dencourager les formateurs trouver leur propre chemin dans toutes les questions pdagogiques, y compris dans lapproche la L2 et au recours la L1 (2011 : xiv).7

    Il faut continuer la recherche dune DL plus centre sur le sujet et sa relation avec les langues, tout en sachant que lalternance codique est un signe de dynamisme des processus de communication, car elle ouvre des possibilits de prise de distance par rapport lexp-rience immdiate et conduit dautres voies de dveloppement. Si la communication scolaire peut tre gre de multiples formes, il faut continuer tudier comment les dynamiques linguistiques et didac-tiques permettent le dveloppement plurilingue, non seulement pour apprendre une langue/culture, mais aussi pour tablir des connexions critiques sur les langues, les discours et la vie (Levine, 2011 : 4).

    BibliographieAndrade, A. I. 1997. Processos de interao verbal em aula de francs lngua estrangeira. Funes e modalidades de recurso lngua materna. Aveiro : Universidade de Aveiro (Thse de doctorat non publie).

    Billiez, J. 1996. Langues de soi, langues voisines : reprsentations entre-croises . tudes de linguistique applique, n 104, pp. 401-409.

    Byram, M. 1992. Culture et ducation en langue trangre. Paris : CREDIF-Hatier/Didier.

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  • Synergies Portugal n1 - 2013 p. 117-130

    Calvet, L. J. 1994. Les voix de la ville. Paris : ditions Payot & Rivages.

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    Notes1 multiple codes are always at work in any language classroom regardless of explicit interventions, a theoret-ically motivated, principle approach to code choice can help teachers and students have what they need to regard the language classroom as a multilingual environment as a part of the real world (Levine, 2011 : XV).2 Weinreich, U. 1974. Languages in contact. Findings and problems. Paris: Mouton.3 Vygotsky, L. S. 1985. Pense et langage. Paris: Editions Sociales. 4 Rgles utilises dans la transcription:

    A = lve non identifi; ALS = plusieurs lves; P = enseignante

    A1, A8, B2, B3, B9, B10, B15, B16, D3, D5, D10 = diffrents cours de diffrentes enseignantes)

    PA, S, C, M = letters des prnoms des lves identifs

    / = pause brve; // = pause longue; [] = texte non transcript

    Les numros (154, 205, ) correspondent aux numros des interventions dans le cours en question.

    Les majuscules sont utilises pour marquer le relief donn certains mots ou expressions.5 Galatea Apprentissage de la Comprhension en Langues Voisines (domaine roman) (1994-1998, Socrates-Lingua Action D - TM-LD-1995-1-Fr-89 (1/1)) ; ILTE (Intercomprehension in Language Teaching Education) (1998-2002, Socrates Lingua Action A - 56290-CP-1-2000-PT- LINGUA-LA) ; Galanet - Plate-forme Internet pour le Dvelop-pement de lIntercomprhension en Langues Romanes (2001-2004, Socrates-Lingua 2 - CE-90235-CP-1-2001-1-FR-LINGUA-L2).6 Projet Janua Liguarum Ja-Ling (2001-2004, Comenius - 89540-CP-1-2001-DE-Comenius-C21).7 my leitmotif in language teacher training has become an acknowledgement and encouragement of instructors to find their own groove in all pedagogical matters, including in their approach to L2 and [L1] use (2011: XIV).

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