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- 1 - Master de l’Ecole Polytechnique Mention Economie et Gestion Spécialité « Projet Innovation Conception » Du développement de composants à la conception d’offres système. Antoine Capeau Pierre Schneider Septembre 2006 août 2007 Entreprise partenaire : Sagem Défense Sécurité, groupe SAFRAN Responsables entreprise : Tuteurs de Master : Professeur responsable du Master PIC : Jérome Teisson Philippe Dejean Florence Charue-Duboc et Sihem Jouini Christophe Midler

Du développement de composants à la conception Sagem.pdf · ces produits (« Sagem, la technologie en action »). Désormais, lentreprise doit faire face à de ... et après examen

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Master de l’Ecole Polytechnique

Mention Economie et Gestion

Spécialité « Projet Innovation Conception »

Du développement de composants à la conception

d’offres système.

Antoine Capeau – Pierre Schneider

Septembre 2006 – août 2007

Entreprise partenaire : Sagem Défense Sécurité, groupe SAFRAN

Responsables entreprise :

Tuteurs de Master :

Professeur responsable du Master

PIC :

Jérome Teisson

Philippe Dejean

Florence Charue-Duboc et Sihem Jouini

Christophe Midler

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Sommaire

Introduction

Contexte du projet de Master

I) Monographie des projets

1) Le projet BOSCA

i) Description générale

ii) L‟historique du projet

iii) L‟étude de marché, un exercice nouveau

2) Le projet Félin

i) Description générale

ii) L‟historique du projet

iii) Les processus d‟expression du besoin

II) Les étapes amont de la construction d‟une offre système

1) Construire une offre système

i) Genèse et retour sur les notions de réactivité / proactivité

i.α) L‟intention stratégique, impulsion d‟une démarche proactive

i.β) Réceptionner les appels d‟offre dans un contexte réactif

ii) Réunir les partenaires et « faciliter » l‟émergence d‟une solution

2) Les difficultés de la mise en place

i) Les menaces qui pèsent sur l‟objectif « système »

ii) Une application de la théorie Bowling Alley ?

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III) Les scénarios « systèmes »

1) Introduction

2) Volonté d‟exhaustivité

1) La position de fournisseur

2) La position d‟architecte

1) Généralités sur la position d‟architecte

2) La position d‟architecte se rémunérant sur l‟architecture

3) La position d‟architecte adoptant un mode de rémunération mixte

4) La position d‟architecte se rémunérant sur les équipements vendus

3) La typologie

1) Présentation du schéma

2) Positionnement des cas BOSCA et FELIN

3) Critères

1) La grille d‟analyse

1) Lecture verticale

2) Lecture horizontale

2) Les critères

1) La structure du marché

2) Le choix des technologies

3) La taille des briques technologiques

4) Les scénarios les plus favorables aux systèmes et les compétences à acquérir en

phase d‟apprentissage

1) Quel(s) scénario(s) pour un apprentissage système ?

1) Le scénario 4

2) Le scénario 3

3) Le scénario 2

4) Le scénario 1

5) Les scénarios retenus

2) Quelles compétences développer en phase d‟apprentissage ?

5) Se rémunérer en tant qu‟architecte

1) Comment se rémunérer (forfait, %, mixte…) ?

1) La rémunération au forfait

2) La rémunération au pourcentage

3) La rémunération à la vacation

4) Discussion

2) Comment justifier sa rémunération

1) En rendant le travail palpable

2) Par la nature du rendu

Conclusions

Bibliographie

Annexes

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Introduction

Créée en 1925, Sagem (Société d‟Application Générale d‟Electricité et de Mécanique)

a vu son périmètre d‟activité plusieurs fois remodelé. De l‟électrotechnique (interrupteurs) et

la mécanique industrielle, son cœur de métier est passé par l‟armement (30‟s), les

téléimprimeurs (50‟s), les téléphones et les centrales inertielles (60‟s), l‟optronique de défense

(70‟s) jusqu‟aux drones dans les années 90. Aujourd'hui son champ d‟activité s'est stabilisé

autour de deux grands domaines, la sécurité et la défense, comme en témoigne la

réorganisation en deux nouvelles filiales, Sagem Défense et Sagem Sécurité, de ce début

d‟année. Au travers de ces 82 ans d‟existence, Sagem a bâti sa renommée sur la fiabilité de

ces produits (« Sagem, la technologie en action »). Désormais, l‟entreprise doit faire face à de

nouveaux challenges qui sont à l‟origine de notre sujet de réflexion.

Exemples de produits et technologies Sagem

Boule

Radars

Missile AASM

Dans la continuité des processus de rationalisation des dépenses publiques, le secteur

de la défense n‟échappe pas à la règle. La sous-traitance est une des mesures qui

accompagnent ce processus. C‟est ainsi que la Direction Générale de l‟Armement,

habituellement investie de missions de définition des besoins de l‟armée à l‟égard des

industriels du secteur, a récemment mandaté ces mêmes industriels pour assumer la définition

« capacitaire » des besoins de l‟armée de terre à horizon 2015. Par ailleurs, dans un paysage

concurrentiel désormais stabilisé, le marché public de la défense en France est aujourd‟hui

figé en terme de parts de marché. Les perspectives de croissance sont donc avant tout dans le

civil. Ces deux tendances combinées placent la question de la capacité à concevoir des offres

« système » au centre des préoccupations. La délégation de la définition du besoin des armées

en transférant des responsabilités de systémier aux industriels et la migration vers le marché

civil en tant qu‟il exige des solutions intégrées.

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Les besoins révélés autrefois selon des circuits bien rodés, les grands Plan d‟Etude

Amont, qui permettaient d‟ajuster l‟offre et les utilisations particulières que fait l‟armée de

ces équipements n‟ont pas favorisé le développement d‟une capacité de conception d‟offres

système. Que ce soit sur le plan organisationnel, sur le plan des compétences développées ou

encore au niveau du renouvellement des outils de gestion utilisés, l‟entreprise a été

profondément marquée par un marché qui a retardé ces évolutions.

C‟est à ce moment charnière que l‟on nous a proposé de participer à la réflexion engagée par

Sagem sur les enjeux du passage d‟un développement de composant à la conception d‟offres

système.

Pour mener à bien cette réflexion, et après avoir réalisé dans un premier temps les

monographies des projets qui ont étés nos points d‟observations, nous détaillons les étapes

amont de la construction d‟une offre système. Nous essayerons de faire apparaître les plus

critiques d‟entre elles, celles qui sans être nécessairement décrites comme « clés » deviennent

aujourd‟hui des points durs faute d‟avoir été parfois déconsidérées. La dernière partie propose

d‟envisager différents scénarii d‟accession à la position de systémier, selon le modèle

économique développé ou selon que l‟on possède ou non des technologies du système. De

cette typologie, et après examen des avantages et inconvénients de chacun des scénarii, nous

suggérons un scénario préférable pour le passage spécifique de la position de systémier à celle

d‟équipementier.

Exemples de produits et technologies Sagem

Drones

Viseurs

Caméras

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Contexte du projet de Master

Nous souhaiterions profiter de cette mise en contexte pour exposer l‟organisation dans

laquelle se sont déroulés les projets. Nous pourrons ainsi y faire plus facilement référence au

cours de l‟analyse.

Précisons tout d‟abord, à l‟échelle de l‟entreprise, notre position parmi les différentes entités

de Safran.

Dans le schéma ci-contre, la

DESEC, la DOSA et la

DNSA sont des divisions

elles-mêmes décomposées en

départements. Les

départements peuvent être

assimilés à des lignes de

produits. Les départements

« Combat terrestre » et

« Système de surveillance »

seront nos points

d‟observation privilégiés

durant ce projet de master.

Organigramme (fig.1):

SAFRANSAFRAN

Snecma

40000pers., CA: 7.2Mds€

Sagem

15000pers., CA: 3.5Mds€

Sagem

15000pers., CA: 3.5Mds€

Sagem Défense et Sécurité

CA: 1.2Mds€

Sagem Communication

CA: 2.3Mds€

DNSA (aéronautique)

CA: 0.45Mds€

DESEC (sécurité)

CA: 0.3Mds€

DOSA

(optronique et systèmes

aéroterrestres)

CA: 0.45Mds€

Autre :

Messier…

A l‟échelle d‟un projet la gestion de l‟affaire est assurée par plusieurs

entités. Nous nous focaliserons spécifiquement sur cette organisation

qui encadre les projets que nous avons observés. Chaque département

est relié à une Unité de Recherche et Développement (URD) et à une

Unité de Fabrication (UF). Ainsi, le département « combat terrestre » qui a accueilli le projet

Felin est relié 3 URD : l‟URD 28 à Massy dédié quasi-exclusivement au projet Felin, l‟URD

29 à Eragny qui travaille sur les sites terminaux d‟information et plus sporadiquement, l‟URD

d‟Argenteuil pour les jumelles diurne et nocturne. Les unités de fabrication sont

progressivement associées à la conception, notamment les sites de Poitiers et Dijon. Ces

liaisons, non hiérarchiques, sont le résultat de rapprochements selon la nature des produits.

Chacune de ces entités détient un domaine de compétence particulier. Leurs relations autour

du projet s‟apparentent donc à une coopération. Si un désaccord apparaît, il sera arbitré par le

directeur de division. L‟organisation autour d‟un projet est logiquement réglée par une

Caméras Thermiques

VAV (drones)

Viseurs terrestres et maritimes

Viseurs hélicoptères

Combat terrestre

Systèmes d’information et de

commandement aéroterrestres

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procédure, dite des « 3 partenaires », qui réunit ces trois entités représentées par trois niveaux

de responsabilités.

Cette coopération est décrite de manière plus formelle par les procédures internes de Sagem et

passe par trois types de responsables :

Le Chef de Projet (CP)

Le CP assure le développement commercial et la cohérence vis-à-vis du client, des affaires

rattachées au projet dont il a la responsabilité. Il pilote l'équipe 3P.

Le Responsable de Fabrication (RF)

Le RF est responsable de la réalisation d'un projet conformément aux besoins émis par le CP

et suivant un DD fourni par le RP. Il s'accorde, pour la fabrication, sur le plan de production

et les délais avec le Responsable de Ligne de Fabrication que nous présentons ultérieurement

(RLF). Il participe à l'ingénierie simultanée dès les phases amont des développements. Il est le

garant de la qualité, et se doit de tenir les objectifs de coût et de délai.

Le Responsable de Projet (RP)

Le RP est responsable de la maîtrise du projet ou contrat client qui lui a été confié, et à ce

titre, il est responsable de la satisfaction du client. Il est responsable des développements liés

au projet, de la tenue des coûts, délais et performances du programme conformément à un

cahier des charges et des objectifs exprimés par le CP. Il anime l'équipe Projet en URD. Il

s'accorde, pour les produits qu'il intègre, sur la spécification, le plan de développement et les

délais avec les responsables de Ligne de Produit. Il est hiérarchiquement rattaché au Chef de

l‟URD dont il dépend.

En miroir de l‟équipe « projet » qui

construit le contrat avec le client, une

équipe « produit » est chargée du

développement des produits inclus dans le

contrat.

Organisation 3P (fig.2) :

Niveau « projet »

Niveau « produit »

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I) Monographie des projets

Comme nous le disions en début d‟introduction, cette recherche a été réalisée à partir

de projets existants, représentatifs des enjeux liés au passage de l‟équipement au système.

Deux d‟entre eux ont été particulièrement observés. Le projet Felin, équipement du futur

fantassin de l‟armée de terre française et le projet BOSCA, outils de gestion de sinistre.

Nous allons, dans cette première partie, détailler le contenu des projets mais souhaiterions

nous arrêter ici sur les raisons du choix de ces projets.

La première est qu‟ils sont tous deux considérés comme des projets systèmes.

Le mot « considérés » a ici une importance particulière et nous ouvrons une légère digression

pour expliquer notre choix de ne pas explorer plus avant le concept de « système » et de ne

pas tenter de le définir. Nous retenons, en effet, comme « système » les projets considérés

comme tels par la majorité du personnel de Sagem. Entre une simple caméra, considérée

comme un équipement, et un service de gestion de sinistre, considéré comme système ; la

différence est sensible. Derrière cette distinction, nous retrouvons des propriétés du système

collectivement admises bien qu‟imprécises. Il s‟agit des notions d‟ensemble, de complexité,

de pluridisciplinarité ou d‟autonomie au sens où le système assure seul la fonction à laquelle il

est destiné. Une étude exhaustive nous aurait emmenés beaucoup trop loin de l‟objectif

principal de notre rapport alors que cette distinction nous suffit à comprendre les enjeux du

passage entre système et composant sans avoir besoin de définir plus précisément la frontière

entre ces deux derniers.

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Comme nous le disions le premier enjeu de ces projets est donc de passer d‟une offre

« équipement » à une offre « système ». Le projet BOSCA présente un enjeu supplémentaire :

adopter une démarche proactive de proposition d‟offres là où l‟on avait autrefois l‟habitude de

répondre aux demandes clients. Félin, en tant que réponse à un appel d‟offre, reste bien dans

la catégorie « réactif ». Nous reviendrons ultérieurement sur l‟identification de cet enjeu et ses

conséquences.

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Les nouveaux enjeux de Felin et BOSCA (fig.3) :

Système

Equipement

ProactifRéactif

Système

Equipement

ProactifRéactifOffreDémarche

Offre Sagem

classique

Projet BOSCAProjet FELIN

Avant de plonger dans la monographie de ces projets, il convient de préciser les

conditions d‟observations dans lesquelles elles ont été réalisées. La description du projet Felin

est, en effet, issue d‟une étude a posteriori alors que nous avons pu observer le projet BOSCA

« de l‟intérieur » puisque nous avons été impliqués dans plusieurs phases de sa réalisation. A

la date de notre arrivée chez Sagem, le projet Felin était en cours d‟industrialisation ; BOSCA

était seulement un projet en cours de montage.

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1) Le projet BOSCA

i) Description générale

L‟une des caractéristiques de ce projet sera, nous le verrons, de changer de périmètre

et de contenu. Cette description correspond donc au périmètre initial du projet.

Champs d’application du projet :

Le projet BOSCA, acronyme de Bulle Opérationnelle pour la Sécurité du Citoyen

Aéroterrestre, a pour objectif de concevoir un système de gestion de sinistre à destination de

la sécurité civile. Il devra adresser un large panel de sinistres liés à trois catégories de risques.

Les risques naturels, qui représentent plus de 80% des coûts des catastrophes dans le monde et

tuent 88000 personnes par an. Parmi ce type de risque, les feux de forêt, les inondations et les

tempêtes sont les plus fréquents. Les risques industriels, les catastrophes les plus fréquentes, il

y en a 308 de ce type dans le monde chaque année. Il s‟agit d‟explosions, de pollutions et plus

rarement de pertes de confinement nucléaire. Enfin les risques urbains comprennent certains

accidents et les troubles sociaux.

Objectifs :

Les principales missions de ce système seront de produire une localisation du sinistre,

des personnes et des infrastructures en danger et d‟assurer un suivi, aussi régulier que

nécessaire, de l‟évolution du sinistre. Plus généralement, le système devra fournir les

évaluations nécessaires aux interventions et aux évacuations. Il pourra également aider à la

gestion des moyens humains et matériels mis en place. A l‟échelle du déroulement d‟un

sinistre, BOSCA a également un rôle à jouer en amont et en aval du sinistre. Comme le

montre le schéma ci-dessous, BOSCA intervient avant le sinistre par de la formation et une

évaluation des risques. A l‟opposé, dans la phase de post-sinistre, il permet une surveillance

de la zone sinistrée (pour prévenir des reprises de foyers dans le cadre de feux de forêt par

exemple) mais surtout il rend plus facile la capitalisation des connaissances en rejouant avec

beaucoup de précision des scénarii réels.

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Modélisation du rôle de BOSCA dans le déroulement d’un sinistre (fig.4)

Technologies :

Pour réaliser les objectifs décrits ci-dessus, BOSCA fait appel à trois ensembles de

technologies. Les capteurs tout d‟abord, de plusieurs natures et sur plusieurs supports. Cela

concerne à la fois des spectres visibles et thermiques mais aussi des caméras hyper spectrales

capables de détecter des fumées. Pour des applications plus spécifiques, le champ des capteurs

a été élargir aux détecteurs de gaz, aux compteurs Geiger, aux vélocimètres et aux lidars

bathymétriques dans le cas de crues ou encore aux vibromètres qui évaluent la résistance de la

structure d‟un bâtiment après un séisme. Les supports sont tout aussi variés. Parmi les

supports mobiles, les capteurs aéroportés sont au centre du projet et sont complétés par des

capteurs embarqués dans des 4x4, sur des plate-formes robotisées pour intervenir dans des

endroits difficiles d‟accès ou dangereux, ou simplement transportés par les intervenants. Les

capteurs fixes, principalement situés sur des postes de surveillance (mat, tour, vigie..) ont une

fonction de détection.

La transmission et la communication sont un autre ensemble de technologies mises en œuvre

sur le projet BOSCA. Elles assurent par différents moyens (radio, satellite, Internet…) le lien

entre le capteur et le destinataire de l‟information.

AIDE A LA DECISION

PRÉPARATION DES

CRISES APRÈS- CRISE

SYSTEMES D’INFORMATION

TECHNOLOGIES AERO-TERRESTRESEvaluation des Risques

Information

Formation

Évaluation de la Situation

Capitalisation de l’expérience

Inte

nsi

Espac

e

TempsSINISTRE

BOSCA

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Le schéma ci-dessous (fig.5) synthétise l‟ensemble des liaisons à effectuer autour d‟un sinistre

entre les sources d‟informations, les unités engagées, le centre de commandement de

l‟opération, les centres de commandements des différentes unités engagées, les autorités et,

parfois, les populations et les médias.

@

Autorités

Secours

Informations

Bulle 1 Bulle n

Théâtre d’activités

Théâtre d’activités

Presse

Public

@

Autorités

Secours

Informations

Bulle 1 Bulle n

Théâtre d’activités

Théâtre d’activités

Presse

Public

Enfin les technologies de traitement et de restitution de l‟information complètent le dispositif.

Comme tout système d‟information, les données transmises peuvent prendre la forme de

vidéo, de son ou de texte. D‟un point de vue logiciel, la restitution se traduit par des outils

d‟aide à la décision, de stockage et de restitution de données. La prise en compte du facteur

humain dans le cas de crises est aussi un des champs d‟exploration du projet.

Du point de vue des équipements, il

s‟agit, par exemple, de terminaux

consultables au contact du sinistre.

Ces technologies interviennent à

différents niveaux du système.

Contrairement à la distinction

précédente en trois familles d‟usages,

le schéma ci-contre délimite les

champs d‟innovation technologique

du projet selon leur nature, qu‟ils

soient logiciels ou hardware.

Axes d’innovations (fig.6)

Hardware +

- +-

Traitement de l’information - Software

Système

Sous-Système

Équipement

Composants

Senseurs

Intelligents

Logiciels de

restitution

Fusion de

données

Plateformes

Robotiques

Algorithmes

de traitement

Transmission

Communication

Drones

Hardware +

- +-

Traitement de l’information - Software

Système

Sous-Système

Équipement

Composants

Hardware +

- +-

Traitement de l’information - Software

Système

Sous-Système

Équipement

Composants

Senseurs

Intelligents

Logiciels de

restitution

Fusion de

données

Plateformes

Robotiques

Algorithmes

de traitement

Transmission

Communication

Drones

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ii) L’historique du projet

L‟objectif est ici de reconstituer la façon dont le projet a été construit. Nous

débuterons donc cette partie en examinant les origines du projet BOSCA.

Pourquoi ce projet ? - La genèse :

Les prémices du projet sont à chercher dans trois directions. Le plus ancien est une

collaboration, dès 2002, avec certains acteurs de la sécurité civile (les Services

Départementaux d‟Incendies et de Secours) sur un projet de géo-localisation de feux de forêt.

A l‟origine ce projet devait permettre, via un capteur embarqué sur un aéronef, de visualiser

l‟évolution en temps réels d‟un feu de forêt et n‟avait pas pour objectif de proposer une

solution globale pour la gestion de sinistre. Cette ambition, deuxième origine du projet

BOSCA, est venue de l‟extrapolation d‟un principe développé dans un autre projet, à vocation

militaire. Le principe est celui de « Bulle Opérationnelle Aéroterrestre » et sa transposition à

la sécurité civile invitait à considérer un sinistre comme un théâtre d‟opérations à l‟intérieur

duquel Sagem pouvait apporter une valeur ajoutée à penser globalement les moyens à mettre

en œuvre pour garantir le succès de l‟intervention. Contrairement à son homologue militaire,

nous ne maîtrisions pas, dans la bulle « sécurité civile » les moyens d‟actions directs

(équipement des pompiers, camions citernes…). L‟intervention de Sagem dans la bulle

« sécurité civile » s‟est donc concentrée, comme nous l‟avons vu précédemment, sur les

moyens d‟information et de gestion des moyens d‟action. Enfin, les dernières prémices du

projet BOSCA résident dans la conviction que certaines technologies de l‟information

développées pour des usages militaires doivent être réutilisable dans des applications

« sécurité civile ». Parmi ces technologies se distinguent : un système de communication

radio, le RIF, un système de suivi du déploiement des équipes, le Sitel, et un véhicule de

surveillance de frontière, le BSV. En parallèle, la pertinence du concept de Bulle

Opérationnelle est renforcée par l‟analyse d‟un laboratoire du GET (Groupe des Ecoles des

Télécommunications) proche des problématiques de la sécurité civile.

Dans ce contexte encourageant, le projet est lancé début-2006 par le directeur de la division

DOSA. Il est confié au responsable de la ligne de produit « système de surveillance » qui lui

consacre entre 20 et 30% de son temps. Le projet n‟est adossé à aucun programme type ANR

(Agence nationale pour la Recherche) ou PCRD (Plan Commun de Recherche et

Développement) mais va pourtant être monté à l‟image de ces grands programmes nationaux

- 15 -

ou européens. Signe de cette tendance, la rapide pré-labellisation auprès des pôles de

compétitivité et la formation d‟un consortium comprenant des PME locales (le projet est

rattaché au pôle de compétitivité « risques » en PACA) et des laboratoires.

Comment? - l’utilisation des Work Breakdown Structure :

Très tôt dans le projet, une division du projet en « Work Package » permet également de

répartir les rôles entre les partenaires et d‟aboutir à un investissement prévisionnel en

hommes/mois, point de départ de toute demande de subvention. Les grands blocs de lots de

travail (cf. figure 7 en annexe) sont constitués sur l‟exemple d‟anciens projets (ex : n°10000

gestion, n°20000 analyse opérationnelle, n°30000 ingénierie globale système…). Le niveau

de détail suivant (ex : n°11000 gestion de projet, n°12000 outils de travail collaboratif…) est à

la fois issu des anciens projets et adaptés aux partenaires réunis jusqu‟à ce jour. Pendant cette

phase, Sagem « assure en tant qu‟industriel chef de fille le rôle moteur et l‟implication

financière, anime et coordonne le montage du dossier technico-financier avec les

partenaires »1. Ses efforts portent sur la réalisation d‟accords de confidentialité, d‟accords de

groupements, sur la définition des « work package », sur l‟établissement d‟un plan de travail.

Le contenu même de l‟offre est très peu évoqué.

Qui ? - le consortium :

L‟élargissement du groupe des partenaires est aussi une priorité. L‟objectif est d‟avoir un

représentant industriel de chaque domaine technologique évoqué dans la partie précédente.

Au-delà de son rôle de chef de file, plusieurs départements de Sagem sont associés au projet

en tant que responsable d‟une brique technologique. Le département « Drones » et le

département « Caméras thermiques » sont les plus impliqués. Les laboratoires sont en charge

des recherches plus fondamentales sur des sujets scientifiques associés (algorithme de

traitement de l‟image, fusion de données …). Enfin les utilisateurs finaux orientent ou

valident les propositions de solutions du groupement.

1 : Extrait du document de présentation de BOSCA

- 16 -

A fin 2006, le périmètre de partenaires est stabilisé et comprend 15 entreprises, associations

ou laboratoires.

Les partenaires du projet BOSCA (fig.8) :

• Les laboratoires Domaine de la communication et de la transmission de données Domaine du traitement de l‟image Domaine des capteurs

• Les PMEGestion du facteur humain Robots Traitement de l‟image Mini-drônes Télécommunications

• Les utilisateurs institutionnelsPôle technique des SDIS1 Ecôle des sapeurs pompiers SDIS 13 Entente interdépartementale

• Les utilisateurs privésOpérateur d‟autoroute

Le financement :

La question du financement vient rapidement se superposer à celle du montage du projet. Les

fonds publics ne sont pas acquis. Habituellement, dans un projet de type européen, le montage

et le financement ne font qu‟un. Chaque année, plusieurs thèmes de recherche sont choisis et

proposés aux industriels européens. Quelques consortiums se forment autour de grands chefs

de file et une sélection des meilleurs projets en rapport avec chaque thème est réalisée. Le

financement d‟une partie des investissements est directement obtenu par le biais de cette

sélection. Dans le cadre de BOSCA, Sagem se trouve face à une situation inédite puisque la

recherche d‟un financement fait intégralement partie du projet. Au moment du lancement de

BOSCA, le nom de l‟AII (Agence de l‟Innovation Industrielle) est évoqué. Créée en 2005,

elle a pour but la promotion et le soutien de grands programmes d‟innovation industrielle.

Sagem Communication a déjà participé à deux projets « AII » comme industriel de deuxième

rang mais la société n‟a pas d‟expérience en tant que chef de file. Pour monter le dossier de

demande de subvention, les responsables du projet vont s‟inspirer du travail effectué dans le

cadre de programmes européens et se concentrer sur les aspects administratifs. Au contraire,

les exigences de l‟AII se rapprochent beaucoup de celles des investisseurs privés et vont être à

l‟origine d‟une rupture dans le montage du projet.

___________________________________________________________________________

1 : SDIS, les Services Départementaux d‟Incendies et de Secours organisent le déploiement des services de

sécurité civile sur le territoire

- 17 -

La frise chronologique ci-dessous retrace les évènements marquants du projet BOSCA et

anticipe sur le planning prévisionnel initial.

La chronologie du projet BOSCA (fig.9) :

Début du

projet

Recherche de

partenaires

Pré-labellisation

Pôle de

compétitivité

Répartition des

lots de travail

Fiches

d’innovationEtude de

marché

En vue de l’obtention d’un

financement (AII)

2 0 0 6 2 0 0 7

Juin Sept. Dec. MarsJanv. AvrilMars Mi-2007 Deb. 2008 Deb. 2009 Deb. 2010

Planning prévisionnel

Présentation du

projet à l’AII

Début du

développement

Début de

l’intégration

Début de la

validation

Analyse des

besoins

&

Emergence

du projet

Montage du

consortium

Détailler le

contenu

du projet: une étape à laquelle

nous participons

Redéfinition

du projet

Début du

projet

Recherche de

partenaires

Pré-labellisation

Pôle de

compétitivité

Répartition des

lots de travail

Fiches

d’innovationEtude de

marché

En vue de l’obtention d’un

financement (AII)

2 0 0 6 2 0 0 7

Juin Sept. Dec. MarsJanv. AvrilMars Mi-2007 Deb. 2008 Deb. 2009 Deb. 2010

2 0 0 6 2 0 0 7

Juin Sept. Dec. MarsJanv. AvrilMars Mi-2007 Deb. 2008 Deb. 2009 Deb. 2010

Planning prévisionnel

Présentation du

projet à l’AII

Début du

développement

Début de

l’intégration

Début de la

validation

Planning prévisionnel

Présentation du

projet à l’AII

Début du

développement

Début de

l’intégration

Début de la

validation

Analyse des

besoins

&

Emergence

du projet

Montage du

consortium

Détailler le

contenu

du projet: une étape à laquelle

nous participons

Redéfinition

du projet

iii) L’étude de marché, un exercice nouveau

Notre première contribution au projet s‟est faite dans le cadre du montage du dossier

de candidature pour l‟AII. Le chef de projet nous demande de réaliser une étude de marché

dans le secteur de la sécurité civile. Toujours dans l‟esprit des programmes européens de

recherche et développement, l‟étude envisagée serait plutôt macro-économique et présenterait

les grands chiffres du secteur. En parallèle, des réunions régulières avec les partenaires

permettent d‟élaborer un autre pan du dossier, c'est-à-dire, les fiches d‟innovation

technologique. Chaque partenaire y présente son savoir-faire, détaille le rôle qu‟il aura dans le

projet et explique les champs d‟innovation qu‟il va devoir explorer pour mener le projet a

bien.

Notre travail nous amène à considérer d‟une part les sinistres, leurs origines, leurs

conséquences, et d‟autre part les moyens de lutte mis en œuvre. Nous recueillons l‟essentiel

de nos informations auprès de cabinet de réassurance (Swiss Re et la Caisse Centrale de

Réassurance en France) ainsi qu‟auprès des ministères de l‟environnement et de l‟équipement.

Toutes montrent une croissance accélérée du coût des sinistres (environ 8% par an sur les

deux dernières décennies). Pour comparaison, les inondations tristement célèbres de Vaison-

- 18 -

la-Romaine en 1992, avaient fait 47 morts et avaient causé 290M€ de dégâts matériels. Les

inondations de 2002 dans sud de la France ont coûté 738M€. Démontrer l‟efficacité de

BOSCA, c‟est proposer des solutions pour réduire ces statistiques.

Le chiffrage des moyens de lutte contre les catastrophes naturelles, industrielles et urbaines

demande de plonger dans les méandres de la comptabilité nationale et des lois de finance. En

effet, la mission de sécurité civile est assurée, en France, par plusieurs ministères ce qui rend

difficile l‟obtention d‟un chiffre global. Il ressort de cette analyse trois principales sources de

financement. Le financement direct des SDIS est le plus gros poste avec 4.5Mds€ par an, le

ministère de l‟intérieur gère des moyens complémentaires qu‟il met à disposition des SDIS

pour 470m€, enfin les autres ministères réunis, comme le ministère des transports avec les

affaires maritimes par exemple, contribuent au budget de la sécurité civile à hauteur de

480m€. D‟un point de vue dynamique, nous remarquons qu‟après une hausse continue de

9.5% par an depuis 2002, les ressources devraient rester stable pour les années à venir. Un

rapport de l‟assemblée nationale et la fin de certains grands programmes d‟investissement

nous confortent dans cette idée. A l‟international, un travail similaire semble très difficile à

réaliser. L‟accès à ces informations n‟est pas évident et la méconnaissance des structures

gouvernementales étrangères laisse beaucoup de place à de mauvaises interprétations. Nous

optons donc pour une extrapolation des dépenses françaises aux autres pays. Nous utilisons la

méthode en vigueur en France pour répartir les moyens de sécurité sur le territoire : le nombre

de personnes à protéger. Pour les pays à PIB/habitant comparable, nous calculons à partir de

ce coefficient les dépenses probables en sécurité civile à l‟étranger. Le total « monde » de

80Mds$ et ensuite comparé à d‟autre études. Ces recoupements valident la cohérence de la

méthode.

Cette étude correspondait aux attentes de la direction mais un retour sur une exigence

particulière de l‟AII, celle qui nous faisait dire que l‟AII avait un fonctionnement proche de

celui d‟investisseurs privés, pointe quelques carences. Il s‟agit du besoin de démontrer le

succès commercial futur de l‟offre. Notre étude généraliste avait peut-être justifié la

pertinence de l‟opportunité, mais nous insistons sur le fait que Sagem n‟était pas capable

d‟affirmer, sur ces bases, le succès de l‟offre. Or, une analyse plus approfondie des

conditions de l‟AII, lève tous doutes : les taux prévisionnels de crédits sont conditionnés aux

niveaux de ventes attendus. Une macro-étude de marché ne suffira pas. Pour établir des

prévisions de vente, il faut un prix. Pour fixer un prix, il faut un produit. Jusqu‟à présent nous

avions défini l‟offre BOSCA en compréhension, il fallait passer à une définition en extension.

- 19 -

De quels produits est composé BOSCA ? Répondre à cette question consisterait à réaliser un

pan du projet qui avait été estimé à 250 hommes/mois soit à peu près 3M€. Sagem va-t-elle

autofinancer cette partie du projet ?

Pour éclairer le choix à faire nous réalisons une étude de marché complète, jusqu‟aux

prévisions de ventes, à partir d‟une brique particulière de BOSCA. Contrairement aux autres

fonctions de BOSCA, l‟outil « suivi de feux de forêt » bénéficiait d‟un travail antérieur mené

avec la sécurité civile pour le définir. L‟outil consiste en un capteur thermique aéroporté qui

transmet à intervalle régulier une cartographie d‟un feu de forêt. Après avoir décomposé le

produit « suivi de feux de forêts » en sous-parties technologiques nous faisons le tour des

partenaires pour obtenir une évaluation du coût de l‟ensemble. Parallèlement, nous réunissons

des informations sur les équipements de la sécurité civile. Nous consultons les comptes-

rendus des conseils d‟administration des SDIS. Les renseignements du département des

moyens aériens du ministère de l‟intérieur contribuent également à dresser le paysage de leurs

investissements. Ponctuellement, nous complétons ces informations en contactant directement

les fournisseurs de la sécurité civile. L‟objectif est de resituer l‟offre « suivi de feux de forêt »

dans le spectre des équipements des pompiers. Le raisonnement des SDIS est l‟illustration

parfaite de la théorie néoclassique et de la fonction d‟utilité. L‟expérience menée avec un

véhicule de surveillance de frontière (BSV) pouvant être adaptée à la surveillance des feux

fait même apparaître la notion de taux marginal de substitution. Le lieutenant interrogé se

pose la question suivante : Est-ce que j‟échangerais un BSV contre deux véhicules légers

d‟intervention ? Nous proposons donc de placer BOSCA sur une échelle d‟utilité, le prix en

découlerait automatiquement. A partir de l‟évaluation des coûts de production du produit

« Suivi de feux de forêt » et de sa valeur d‟usage, nous stabilisons un prix.

- 20 -

Coût et valeur d’usage de certains équipements de sécurité civile (fig.10) :

Échelle pivotante

Quantité : 1031

Valeur/U : 253k€

Camion citerne

Quantité : 5026

Valeur/U : 150k€

Simulateur de vol

Quantité : 1

Valeur/U : 2M€

Antenne relais

Valeur : 100k€

Estimation du coût

du programme par

SDIS : 4 à 20M€

Participation de

l’État en 2007

13,7M

Hélicoptère

bombardier

Loc : 4M€/an

Hélicoptère

EC 145, Qté : 30

Valeur/U : 7,5M€

Canadair CL 21M€

Maintenance :

16K€/h de vol

Avion de

reconnaissance :

entre 30-300k€

par saison

ANTARESCoût de l’équipement

Valeur d’usage

+

+

--

Reste la question du volume de vente. Nous devons comprendre comment va être utilisé le

produit et par qui. L‟étude des plans de sauvegarde, le plan Orsec notamment, nous donne une

première réponse. Mais pour être certain du mode d‟utilisation il faut déterminer quel sera le

support du capteur. Drone ? Mini-drone ? Avion ? Hélicoptère… ? La question n‟avait pas été

tranchée. Suite à plusieurs échanges, sur lesquels nous reviendrons, avec les ingénieurs du

département et notre partenaire industriel « mini-drones », la solution « hélicoptère » est

retenue. D‟après l‟implantation des bases hélicoptères, l‟utilisation prévisionnelle du produit

et les statistiques de sinistres, nous formulons 3 hypothèses (basse, médiane, haute) de volume

de vente à l‟échelle de la France. Les perspectives financières et la valeur actuelle nette de

cette sous-partie du projet B.O.S.C.A découlent immédiatement. La démonstration qu‟exige

l‟AII est faite.

Lors de l‟exposé de nos recherches auprès du management de la division DOSA le chef de

projet et nous concluons notre présentation par la question initiale : Sagem doit-elle engager

seule la première phase de construction de l‟offre ? L‟alternative est claire, soit Sagem

explore à ses frais les besoins de la sécurité civile et propose une solution globale ; soit elle se

concentre sur quelques besoins déjà identifiés et propose des solutions ponctuelles.

Réponse page 42.

- 21 -

2) Le projet Felin

i) Description générale

Felin est l‟un des premiers contrats « système » de Sagem. Felin est l‟acronyme de

Fantassin à Equipement de Liaison Intégré. C‟est un équipement complet du fantassin destiné

à l‟armée de terre française soit 22 600 soldats de l‟infanterie, 3600 du génie, 2800 de la

cavalerie et 2500 de l‟artillerie. Au total le contrat s‟élève à 796M€ pour équiper 31 500

soldats. A l‟origine de ce projet il y a une volonté de l‟armée de terre d‟adresser les carences

constatées sur les équipements des combattants débarqués de l‟infanterie (notamment

l‟observation et l‟emploi des armes de jour comme de nuit, les aides au tir, les moyens de

communication et de protection). Alors que de multiples révolutions technologiques avaient

amélioré les systèmes d‟armes, les véhicules, l‟aviation…l‟homme était paradoxalement resté

en dehors de toute progression technologique.

Selon l‟armée de terre, c‟est l‟absence de

cohérence et d‟intégration sur le

combattant qui pénalisait son efficacité au

combat. Le soldat était équipé d‟un

ensemble d‟équipements conçus

indépendamment les uns des autres. L‟idée

d‟un système combattant intégré est donc

née de cette constatation. L‟ensemble

devait être conçu comme un système

d‟arme intégré, organisé autour de

l‟homme et destiné à optimiser ses

capacités naturelles.

Le système comprend des équipements individuels destinés à chaque fantassin, des

équipements spécifiques qui répondent à des besoins particuliers dans l'accomplissement de

certaines missions ou d'actes liés à la responsabilité de certains fantassins (c‟est le cas des

chefs de sections, de groupes, ou des grenadiers voltigeurs par exemple), et des équipements

collectifs qui sont utilisés par tous les fantassins comme le chargeur de batteries. Les missions

- 22 -

de Felin telles que définies par l‟armée de terre sont : l‟agression, la protection, la

communication, l‟observation et la mobilité.

Pour mener à bien ces missions le Felin possède 10 sous-systèmes

La fonction « agression » est assurée par les lunettes d’armes infrarouges et visibles ainsi

que les modifications apportées au Famas (arme d‟assaut en dotation actuelle de l‟armée

française). La protection provient de la tenue de base complète et de ses variantes NBC

(nucléaire, biologique, chimique) et protection de foule. L’équipement de tête est

multifonction mais contribue particulièrement à la fonction observation avec les jumelles

infrarouges. La communication se fait via le réseau d’information Felin (RIF), sorte de

réseau radio amélioré et le système d’information terminal. La dernière fonction, mobilité,

provient avant tout du design des vêtements et de la relative légèreté de l‟ensemble mais

également de la fourniture d‟énergie par batteries et du kit d’intégration au véhicule. Enfin,

la plate-forme électronique portable relie les sous-ensembles et constitue une sorte

d‟ordinateur du système.

Un autre challenge de Felin était de garantir l‟adaptation du système aux autres systèmes

environnants. En effet, sur le champ de bataille, le fantassin n‟est pas seul et doit interagir

avec d‟autres entités. C‟est le cas des véhicules, des moyens aériens (epc, puma…), des autres

systèmes d‟armes, des autres réseaux de communications (PR4G) et des centres de simulation

et d‟entraînements.

ii) L’historique du projet

Le gouvernement français, avec un certain retard par rapport à ses homologues

américains et anglais, a lancé un programme concret de modernisation des armées débuté par

une loi du 2 Juillet 1996 et devant conduire à un modèle d‟armées 2015. Ce programme se

décompose en trois étapes : professionnalisation (1997-2002), modernisation des équipements

(2003-2008) et ajustement du matériel et des hommes. Toutefois nous observerons seulement

dans cet historique le déroulement du projet pour Sagem. Nous reviendrons dans un deuxième

temps sur le processus d‟émergence et de formalisation du besoin au sein de l‟armée.

- 23 -

L‟arrivée de Sagem sur le projet se fait en 2001 pour l‟appel à candidature rédigée par la

DGA (Direction Générale de l‟Armement). Cet appel à candidature est identifié tardivement,

après sa publication officielle. Le premier examen collectif de la proposition par le

management de la division DOSA semble écarter une réponse de Sagem.

Les principales raisons invoquées sont l‟éloignement du projet des compétences Sagem et

l‟avance estimée du principal concurrent, Thales, qui avait participé à des phases de test en

amont de l „appel à candidature. La décision finale de répondre à l‟appel à candidature ne tient

qu‟à l‟engagement d‟une personne qui prend en charge la rédaction de la réponse à l‟appel

d‟offre. Le poste de cette personne dans l‟entreprise correspond à un rôle de prospection de

nouvelles affaires. Au total, ce sera une petite équipe de trois personnes qui sera en charge de

la rédaction de la réponse. La DGA accorde un budget aux deux candidats retenus (Thales et

Sagem). Ces 400.000€ sont quasiment les seuls moyens dont dispose l‟équipe. Le déficit

initial de crédibilité du projet le pénalise tout au long de cette phase. Les URD sont d‟autant

plus difficiles à mobiliser que personne ne croit au succès de Felin. Les demandes de devis ou

les quelques développements à réaliser ne sont pas traités en priorité. Pour pallier son manque

d‟expérience sur certains sous-ensembles, Sagem s‟entoure de 5 industriels : Oerlikon

(structure des équipements) - Paul Boyé (vêtements) - MSA/Gallet (casques) – Sema

(protections) – LAA (ergonomie). La collaboration avec ces industriels est souvent plus facile

qu‟avec les URD en interne. Le partenariat avec l‟entreprise Boyer est un premier succès pour

Sagem. Fournisseur historique des vêtements de l‟armée (depuis la guerre de 1914-1918) et

des pompiers, il faisait initialement parti du consortium GIATT-Thales. Trop pressurisé sur

ses marges, Boyer préfère voir ses chances de remporter le contrat réduites mais sa marge

potentielle par équipement augmentée.

Malgré la présence historique de Thales sur ce secteur de l‟équipement de l‟armée de terre, la

proposition de Sagem présente plusieurs points forts. Sur le fond, l‟architecture du système

basée sur des standards autorise une grande évolutivité. Sur la forme, la réalisation d‟une

maquette de démonstration participe également au succès du projet. De Mars à Juin 2003,

l‟analyse des propositions techniques retient SAGEM comme meilleure solution. De Juillet à

Octobre 2003, la DGA analyse la proposition financière. Puis débutent la négociation avec

SAGEM et la rédaction du marché. Le Jeudi 4 mars 2004 la DGA attribue finalement et

officiellement le contrat à Sagem.

- 24 -

Après l‟attribution du contrat,

Sagem crée un nouveau

département pour réaliser

l‟industrialisation en trois

phases des équipements. La

personne qui avait initié le

projet et avait répondu à

l‟appel d‟offre passe le relais

au directeur de ce nouveau

département « Combat

terrestre ».

La réalisation du contrat Felin en trois phases

2005 2006 2007 2008

Phase 1

Optimisation de la définition du système

levée des points durs, études et réalisations

de prototypes, évaluation.

Phase 1

Optimisation de la définition du système

levée des points durs, études et réalisations

de prototypes, évaluation.

Phase 2 Développement et fabrication d ’une

présérie de 358 systèmes pour équiper

2 compagnies.

Phase 2 Développement et fabrication d ’une

présérie de 358 systèmes pour équiper

2 compagnies.

Phase 3 :

Indus, Prod & Support

Livraison

séries

Depuis les Fiches Caractéristiques Militaires, jusqu‟à la future livraison complète des séries

mi-2008, cette frise rappelle toutes les grandes étapes du projet Félin.

Historique du projet Felin

FCME

FCMP

98 00 01

FCMR

Etude de

faisabilité

Cahier des

charges

fonctionnel

Dec. 01 Mars 04Fév. 0395

Début de

l’étude de

définition

Obtention du

contratDéveloppement

et pré-séries

Remise de la

réponse

99

Appel à

candidature

Intervention de

Sagem dans le

projet

Optimisation de

la définition du

système

Mi-2005 Deb. 07 Mi. 2008

Industrialisation

Livraisons

séries

- 25 -

iii) Les processus d’expression du besoin

Nous souhaitons détailler ici le processus qui a fait émerger le besoin de nouveaux

équipements de fantassins et apporter des éléments de comparaison au processus suivi dans le

cadre du projet BOSCA.

Dans le cas du militaire, deux acteurs contribuent à formuler l'expression de besoins

nouveaux: L'armée de terre à partir des équipements dont elle est dotée, des limites identifiées

et des pistes d'amélioration imaginées par les opérationnels; la DGA à partir des

fonctionnalités et des performances nouvelles que permettent d'envisager les évolutions

technologiques. Au sein de l‟armée de terre, l‟expression du besoin prend la forme de Fiches

Caractéristiques Militaires (FCM). Elles émanent de la direction des études prospectives pour

la partie « Ecôle d‟armes » et du bureau des systèmes d‟armes pour la partie inspection. Les

inspecteurs et les instructeurs font remonter via ces fiches les disfonctionnements, les

carences ou les trouvailles observées sur le terrain.

L’expression d’un besoin au sein de l’EMAT

Le besoin est

ensuite transmis aux

services techniques,

et plus précisément

au bureau des armes

de mêlée qui vont

réviser la rédaction

du besoin.

Etat Major de

l’Armée de Terre

Services

techniquesForces Écoles d’Armes Inspecteurs

Direction des

Études Prospectives

Bureau des

Systèmes d’Armes

DGA

Bureau des Armes

de Mêlée

Rédaction du besoin de

l’Infanterie

Approbation du CEMAT

E

FCM P

R

Révision du besoin

Le Chef d‟Etat Major de l‟Armée de Terre (CEMAT) est chargé de vérifier la concordance du

besoin avec la programmation des ressources financières. Après approbation, le besoin est

alors transmis à la DGA qui joue un rôle de maître d‟ouvrage dans la réalisation des

programmes d‟armement.

Au-delà de son rôle de maître d‟ouvrage, la DGA peut aussi engager des études prospectives,

le deuxième circuit d‟innovation. L‟action prospective de la DGA vise à identifier les

menaces auxquelles la France risque d‟être confronté dans les trente prochaines années et à

détecter les technologies qui pourraient être mises en oeuvre afin d‟y répondre. Cette analyse

- 26 -

prospective fournit des orientations pour la recherche de défense et permet de préparer les

plans d‟équipement des forces. Elle débouche ainsi sur l‟identification des capacités

technologiques nécessaires à la construction du système de défense de demain. Le résultat de

ces différentes approches est synthétisé dans un « plan prospectif à 30 ans » (PP30).

La DGA est un organe essentiel dans la structuration du secteur de la défense français. Aussi

ouvrons-nous une légère digression pour préciser, ici, son fonctionnement. Les travaux de la

DGA couvrent tout le spectre de maturité des technologies (démonstrateurs technologiques,

études technologiques, recherche et technologie de base) et visent à construire une base

technologique européenne de défense et de sécurité par des coopérations ciblées. L‟effort de

R&T se concrétise par un soutien à la science et à l‟innovation : environ 15% du budget est

consacré aux technologies émergentes porteuses d‟innovation et susceptibles d‟engendrer des

ruptures dans les performances des matériels, leurs coûts ou leur utilisation. Par ailleurs, la

DGA entretient des relations privilégiées avec les organismes de recherche civile pour

développer la recherche technologique duale. La recherche de Défense occupe une place

importante dans le dispositif de recherche français. Aujourd'hui, l'effort national de 1,4

milliard d'euros représente près de 15 % de l'effort national en matière de recherche. Les

activités de recherche et technologies de la DGA sont financées sous la forme de contrats

d'études, regroupés en programmes d'études amont pluriannuels, qui concourent à l'atteinte du

modèle de capacités technologiques. Les études amont sont réalisées par le biais de

commandes à l'industrie, à la recherche publique ou aux partenaires civils du ministère de la

Défense. Une partie est menée en coopération internationale.

On recense quatre types d‟études amonts : les études prospectives de défense à caractère

politico-militaire, économique et social (EPMES), les études amont (EA), les études

opérationnelles (EO) et les études technico-opérationnelles (ETO et PTO). Les EPMES

alimentent la réflexion stratégique au sein du ministère, apportant une analyse externe (elles

sont réalisées par des instituts de recherche, des centres universitaires, des consultants,...) tout

en répondant parfois à des besoins d‟expertise plus ponctuelle. Les PTO apportent des

éléments d‟appréciation pour l‟expression des besoins militaires futurs, les ETO servent à

optimiser, pour les systèmes futurs ou dans le cadre des évolutions des systèmes existants, les

caractéristiques opérationnelles, les spécifications techniques ainsi que les coûts associés ;

elles peuvent notamment s‟appuyer sur des simulations, les EO concernent principalement

l‟emploi, sans remettre en cause les caractéristiques techniques. Entre d‟un coté, le bilan des

besoins de l‟armée et de l‟état de l‟art des technologies de défense ; et de l‟autre les études

amonts, voire les cahiers de charges, confiées aux industriels ; la DGA est un véritable

- 27 -

régulateur de l‟innovation entre plusieurs acteurs puisque sa mission commence à l‟analyse du

besoin, se poursuit par la sélection de certains d‟entre eux et termine par l‟organisation de

groupements technologiques auxquels elle demande d‟apporter des solutions innovantes.

Dans le cas de Félin, les premières FCM ont été rédigées en 1995 par le bureau des systèmes

d‟armes. Jusqu‟en 1998, s‟enchaînent des revues successives, de la FCM élémentaire à la

FCM révisée, en passant par la principale. La phase de démonstration du programme

d‟équipement du fantassin est conduite de 1997 à 2000. C‟est à ce niveau du projet que Thales

est intervenu aux cotés de la DGA. L‟entreprise participe à la réalisation d‟un démonstrateur

(ECAD : Équipement du CombAttant Débarqué) constitué de onze systèmes individuels, de

moyens spécifiques pour le chef de groupe, et d‟un aménagement intérieur d‟un VAB

(véhicule blindé). Ils font l‟objet de plusieurs expérimentations opérationnelles dans le

premier semestre 2000, réalisées au sein des 110e et 35e régiments d‟infanterie. Les

efficacités comparées de deux groupes de combat (un groupe "standard" et un groupe

"ECAD") lors de multiples exercices, ont mis largement en évidence un gain de capacité

opérationnelle apporté par le système, alors même que le démonstrateur n‟avait pas été

optimisé en masse ni en volume. Cette expérimentation a été suivie de la rédaction, par la

DGA, du cahier des charges fonctionnel du futur équipement du fantassin mi-2000. Six ans

après la première Fiche Caractéristique Militaire, le besoin d‟équipement du fantassin été

soumis aux industriels du secteur, dont Sagem, début 2001. Aujourd‟hui, la prochaine version

de Felin est également incluse dans un Plan d‟étude amont, la Bulle Opérationnelle

Aéroterrestre.

- 28 -

II) Les étapes amont de la construction d‟une offre

système

De l‟observation, voire de la participation aux projets systèmes décrits ci-dessus, nous

avons voulu dégager les étapes critiques de la construction d‟une offre système.

1) Construire une offre système

Ce chapitre est une synthèse. Celle d‟un travail de recensement, dans lequel nous

avons, à partir de projets existants ou passés, dénombré et reporté les étapes amont d‟un projet

système. Et celle d‟une recherche de solutions théoriques ou empiriques pour améliorer le

déroulement de ces phases préliminaires. Cette focalisation sur la naissance du projet système

correspond aux phases qu‟il nous a été donné d‟observer dans le cadre de BOSCA. Avec le

projet Felin, nous avons eu la chance de couvrir les deux types de démarches que nous avions

identifiées : la proactivité et la réactivité. Compte tenu des marchés auxquels s‟adresse Sagem

(notamment la dualité civil - militaire), il est probable que ces deux démarches perdurent dans

l‟entreprise. Dans « The importance of the early phase : the case of construction and building

projects », B.J Kolltveit et K Gronhaug montrent que ces phases amont de construction de la

solution ont une influence énorme sur le déroulement et les chances de succès du projet. A ce

stade, les coûts de changement de solution sont encore faible mais deviendront par la suite

très handicapant, voire rendront irréversible l‟adoption d‟une solution particulière. Il est donc

primordial de maîtriser ces étapes. Notre analyse se concentrera sur les phases d‟émergence

d‟un projet système, sur la constitution d‟un groupement d‟entreprise et sur la construction

des grands sous-ensembles fonctionnels, avant l‟intégration architecturale.

Nous dépasserons le cadre strict d‟une offre « système » pour réintégrer des taches que l‟on

retrouve dans des projets « classiques ». L‟objet de cet exercice n‟est cependant pas d‟arbitrer

entre les tâches « système » et les tâches « classiques ». Cet examen a pour but de proposer

une définition en extension des premières phases d‟un projet système : puisqu‟il est difficile

de cerner la notion de système, nous suggérons d‟examiner l‟ensemble des taches qui vont

permettre la construction d‟un système.

Ceci est un socle indispensable pour que chaque membre se situe dans le projet global et soit

capable d‟échanger dans un langage commun avec d‟autres membres. Nous adressons ainsi en

- 29 -

partie les contraintes très caractéristiques des projets système que sont le « travail en

collaboration » et la « gestion de la complexité ». C‟est également un socle indispensable à la

capitalisation de compétences « systèmes ». Ce n‟est qu‟en identifiant d‟abord chaque tache

d‟un projet système que l‟on pourra ensuite proposer une organisation et des méthodes pour

les adresser. Ces deux derniers éléments seront les réceptacles de la compétence système au

même titre qu‟un brevet ou un manuel technique sont les réceptacles des savoir-faire

technologiques de l‟entreprise.

C‟est en apportant des améliorations successives à ces organisations et méthodes que l‟on fera

progresser la capacité système. Encore faut-il avoir une base de départ. Depuis 1994, Thales

construit sa compétence système au travers de versions successives de leur méthode MIST.

Plusieurs interviews avec le département qualité nous ont montrés que ce socle n‟était

aujourd'hui pas en place. Nous espérons par notre démarche apporter les premières pierres de

cet édifice.

Nous débutons ce passage en revu dès les prémices d‟une offre système en examinant la façon

dont l‟entreprise crée ou gère ces opportunités.

i) Genèse et retour sur les notions de réactivité /

proactivité

Nous avons eu, avec les projets Felin et BOSCA, deux exemples d‟émergence d‟une

offre système. Le projet BOSCA est le résultat d‟une démarche interne, motivée par la

transposition de technologies existantes à de nouveaux usages. A l‟inverse Félin a été

déclanché par une demande client et a nécessité le développement de nouvelles technologies.

Pour décrire cette opposition, la théorie distingue souvent le « technology push » du « market

pull ». La première suggérant que l‟avancée des technologies, ou de la science en général, est

le moteur de l‟innovation, la seconde, que le marché « tire » l‟innovation par l‟expression de

ses attentes. Cette dichotomie ne nous semble pourtant pas correspondre à nos observations

ou du moins ne décrit pas l‟essentiel dans l‟émergence d‟une nouvelle offre.

La partie market pull, se retrouve assez aisément dans l‟exemple Félin. Le marché, ici la

DGA, exprime explicitement une demande qui va diriger l‟ensemble du processus

d‟innovation. Dans le cas de BOSCA, le marché joue également un rôle mais il n‟est plus

moteur. Il n‟y a pas de demande explicite de la part de la sécurité civile. C‟est Sagem qui va

- 30 -

faire l‟effort d‟étudier les besoins non exprimés. Les technologies militaires apparaissent

effectivement comme des arguments en faveur d‟une transposition vers le civil mais ce

mouvement « push » ne semble pas de même nature que le « pull » de l‟appel d‟offre Félin.

Nous nous apercevons d‟ailleurs au fil du temps que ces technologies jouent un rôle de plus

en plus mince dans le projet jusqu‟à s‟effacer pour laisser la place à des technologies

nouvelles, à développer pour répondre précisément aux besoins de la sécurité civile. Les

technologies militaires n‟ont donc pas réussi, à l‟instar du « market pull » Félin, à guider le

processus d‟innovation. Est-il possible alors de parler de « technology push » ?

La technologie n‟aura été qu‟un prétexte à l‟innovation. Le mouvement durable que l‟on

pourrait opposer à la force « pull » de l‟appel d‟offre Félin est l‟effort consenti par l‟entreprise

pour explorer une nouvelle voie : le company push. Que les origines de cet effort soient liées

à l‟apparition d‟une nouvelle technologie, à la montée en puissance d‟un concurrent, à une

nouvelle réglementation ou à la hausse du coût de la main d‟œuvre, relève d‟un autre niveau

de lecture qui n‟est pas opposable au principe de market pull. En revanche, par symétrie avec

l‟effet market pull, il est intéressant de noter que certaines innovations, qu‟elles soient issue

de la technologie ou non, sont poussées par une volonté d‟entreprise.

Dans un cas l‟entreprise est à l‟initiative et définit elle-même sa nouvelle offre, dans l‟autre

elle répond à une demande, l‟initiative vient du client. Au-delà de l‟opposition technologie /

marché, nous avons donc préféré retenir la distinction réactif / proactif.

α – Démarche pro-active : une exploration volontariste

β – Démarche ré-active : la réponse à une demande client

Cette différenciation réactif/proactif est d‟autant plus significative pour notre étude que

chaque contexte suppose des compétences différentes. Dans le cadre de l‟exploration

proactive, il s‟agit donc d‟une capacité à générer une direction d‟exploration, à la valider et à

la transformer en une offre nouvelle, à savoir, comment Sagem découvre l‟opportunité

« gestion de sinistre » et la transforme en un objectif de développement d‟une offre pour une

équipe projet. Dans un contexte réactif, l‟enjeu est de réussir à capter efficacement les

demandes client pour mettre en œuvre les méthodes de réponse aux appels d‟offre dans la

lignée des competitive bidding strategies (Friedman, 1956).

- 31 -

i.α) L’intention stratégique, impulsion d’une démarche

proactive

Dans « le marketing de projet : de la réaction à l‟anticipation », B.Cova, D.Bansard et

J-P.Flipo établissent cette distinction et ventent les mérites de ce qu‟ils appellent « l‟offre

créatrice de projet ». L‟offre créatrice de projet consiste à proposer un projet à un client qui

n‟en a pas encore formulé clairement la demande ou le besoin. Selon eux, l‟entreprise se

donne, en faisant ainsi, « la capacité d‟influer en amont sur l‟expression de la demande, et

donc de disposer dès le départ du projet d‟une réserve de pouvoir face aux clients et aux

concurrents ». Ils opposent cette situation à celle de l‟appel d‟offre classique. Ce processus

d‟achat traduit le fait que le client est l‟unique force proposition dans l‟interaction initiale.

Le projet BOSCA, en revanche, respecte bien les critères de l‟offre créatrice de projet en tant

qu‟il va à la rencontre d‟un besoin non clairement formulé. Il sera donc intéressant de

s‟arrêter sur les propriétés de l‟offre créatrice de projet et d‟approfondir les conditions de sa

mise en œuvre.

La propriété principale de l‟offre créatrice de projet est l‟atout qu‟elle confère au répondant

par la création d‟un contre-pouvoir. Cova, Bansard et Flipo, parlent même de contre-projet

opposable au projet potentiel du client. La maîtrise du pouvoir dans la relation client-

fournisseur est un élément essentiel de leur analyse. Dans un mix marketing classique, à

l‟image des célèbres 4P (Product, Price, Place, Promotion), le fournisseur a clairement le

pouvoir. Il décide du mix qui maximisera ses revenus puis l‟impose à un ensemble de client.

Par opposition, les auteurs décrivent le pouvoir du client autour d‟un appel d‟offre comme un

phénomène de « reverse marketing mix » dans lequel il limite au maximum les négociations

de gré à gré.

Pour adopter cette démarche, l‟une des premières missions de l‟entreprise passera

logiquement par une réflexion sur le marketing mix, en l‟occurrence ici celui de BOSCA.

Dans « Nouvelles approches du marketing de la grande industrie », Cova précise ce travail

préalable à l‟offre créatrice : « L‟entreprise crée le concept du projet, fait l‟étude de faisabilité

et développe une offre tant technique que juridico-financière, politique et environnementale

[…] elle crée le projet comme on crée un produit de grande consommation ». La question

première est donc de créer le concept du projet. Un passage par les processus de

- 32 -

développement de produit grand public nous donne une idée du type d‟organisation et de

tâches mis en jeu dans la construction du marketing mix. En grande consommation, le

développement d‟un nouveau produit passe par un circuit plus ou moins commun à tous les

producteurs. L‟entité marketing stratégique ou busines développement sélectionne des voies à

prospecter, le marketing développement construit un concept dans unes des voies

sélectionnées et enfin le marketing opérationnel met en œuvre la commercialisation et la

promotion du nouveau produit.

Dans le cadre du marketing industriel, celui de BOSCA, l‟absence de processus réglé rend

extrêmement difficile l‟aboutissement d‟une démarche de création. La première difficulté

apparaît au niveau du marketing stratégique. Dans le contexte du projet BOSCA, les

personnes qui initient le projet (l‟équivalent du marketing stratégique en grande distribution)

délèguent une partie de leur tâche à ce qui s‟apparente au marketing développement

(ici, le chef de projet) dont la mission devient à la fois de valider la pertinence d‟une voie

d‟exploration et de construire une offre dans cette même voie d‟exploration. L‟intention

d‟explorer la gestion de sinistre est née à un haut niveau de la hiérarchie et nous avons décrit

dans la partie précédente les associations d‟idées qui en sont la source. Cette intuition n‟est

cependant pas appuyée par une analyse suffisamment étayée pour pouvoir imposer une

obligation de résultat à une équipe. Il y a une grande différence entre, « Il faut être présent sur

le marché de la sécurité civile, concevez une offre commercialisable dans le domaine de la

gestion de sinistre » et « Quelles opportunités pour Sagem dans la gestion de sinistre ? ». Le

projet BOSCA doit-il avant tout examiner le marché de la sécurité civile pour permettre à

Sagem de se positionner ou s‟agit-il déjà de construire une offre en prenant comme acquis le

fait que Sagem veuille être présent sur ce marché ? L‟énoncé des objectifs initiaux ne tranche

pas : « le projet BOSCA est une occasion de concevoir une architecture de système et la

démarche marketing associée. Ce projet pourra éventuellement donner lieu à une réalisation

industrielle ou, au moins, à la définition et au marketing de sous-systèmes ou d‟équipements

spécifiques de la sécurité ». Entre étude et réalisation industrielle, l‟indétermination est

grande.

Une deuxième difficulté apparaît dans le rôle de marketing développement. En passant d‟une

offre réactive à une offre proactive, les équipes de Sagem ont perdu le point de mire que

constituait le client. L‟équipe travaillait autrefois dans une seule direction : la satisfaction du

cahier des charges client. Aujourd'hui, dans un contexte proactif, le client n‟est plus directif.

Il s‟agit donc de trouver un substitut au client qui constituerait un nouveau point de

convergence pour le projet dans un contexte proactif. C‟est précisément le rôle du marketing

- 33 -

développement qui définit un concept et un positionnement. A savoir, qu‟est ce qu‟on fait et

pourquoi ça va marcher. Le marketing développement devient ainsi le client virtuel de

l‟équipe en charge de la réalisation et fixe les objectifs. Contrairement à ces homologues de la

grande distribution, l‟équipe de développement de produit n‟a pas soumis le produit BOSCA

à des objectifs de performance. La où les ingénieurs de Hewlett-Packard s‟unissaient derrière

le concept de « plus petit disque dur du monde » (The flight of the Kittyhak, C.Rogers), les

offres proactives d‟une entreprise réactive semblent se conformer à des standards. On réalise

une offre de gestion de sinistre et non pas l‟offre de gestion de sinistre la plus efficace ou la

plus fiable, bon marché… Avec la disparition d‟une compétition sensible autour d‟un appel

d‟offre, entre les différents répondants, la notion d‟avantage concurrentiel tend à disparaître

de la démarche proactive. Le substitut au client doit donc également servir de substitut aux

anciens concurrents pour donner de l‟ambition au projet. L‟indétermination que nous avons

relevée au sujet de BOSCA correspond à un substitut inopérant. Dans le cas d‟une offre

système, cette indétermination est très handicapante. Au-delà de la qualité du concept, c‟est la

réalisation de la phase de développement elle-même qui est mis en péril. Une offre système

implique de rassembler une multitude d‟intervenants, d‟origines diverses, aux intérêts

différents si ce n‟est divergents et dont la disponibilité est parfois infime. Pour réussir ce tour

de force il est important de formaliser un objectif commun simple qui fait converger le travail

de toutes les parties prenantes. La « voiture à 5000€ » de Renault en est un exemple. Autour

de BOSCA, nous avons observé parfois une démotivation des laboratoires partenaires et des

utilisateurs finaux qui faisaient peu à peu descendre le projet dans la hiérarchie de leurs

priorités.

Qu‟est ce qu‟un substitut opérant ? En se penchant sur cette question nous ne pouvions écarter

la notion d‟intention stratégique développée par Hamel et Prahalad. Dans leur article

« Strategic Intent » publié en 1989, ils définissent l‟intention stratégique comme « an

ambitious and compelling dream that energizes ». Pour être tout à fait fidèle à la théorie de

Hamel et Prahalad, il faut compléter l‟intention stratégique par le concept « d‟enjeu

stratégique ». L‟exemple de la division « Impression » de Canon est fréquemment utilisé pour

les différencier. L‟intention stratégique de Canon aurait alors été : « Battre Xérox », un enjeu

stratégique étant : « Faire un photocopieur personnel à moins de 1000$ ». L‟enjeu stratégique

est en quelque sorte l‟énoncé du challenge que l‟on donne à l‟équipe en charge de la

conception d‟une offre.

Si Hamel et Prahalad lui prêtent plus de propriétés que nous n‟en utiliserons, nous

considérerons que l‟enjeu stratégique est un objectif intermédiaire nécessaire de la démarche

- 34 -

proactive. Il délimite ainsi le passage du marketing développement à une équipe projet

chargée de la réalisation. Ce passage n‟existe pas dans le cadre de BOSCA puisque l‟équipe

pressentie à la réalisation de l‟offre était la même que celle qui avait identifié les opportunités.

Là encore, Hamel et Prahalad insistent sur l‟importance de consolider dans l‟enjeu stratégique

tout le travail effectué en amont par le développement. Derrière l‟enjeu « faire un

photocopieur personnel à moins de 1000€ », il y a certainement des doutes : pourquoi 1000€

et pas 900€ ? La compacité était une donnée importante, est-ce judicieux de tout miser sur le

prix ?... Mais en faisant table rase des nombreuses et légitimes hésitations qui jalonnent la

phase d‟identification des opportunités et en ne présentant que la meilleure voie de

développement, on contribue encore une fois à focaliser les efforts vers un but précis. En

n‟organisant pas ce passage de relais entre les équipes développement et réalisation, cette

dernière hérite des doutes de la première et avance à tâtons. A cela s‟ajoute bien sûr la nature

profondément différente des taches à effectuer dans les deux phases et qui devrait imposer des

équipes distinctes.

i.β) Réceptionner les appels d’offre dans un contexte

réactif

Avant de répondre à un appel d‟offre, il faut le capter. Les témoignages que nous

avons recueillis concordent à dire que plus tôt l‟appel d‟offre est capté, plus de chances il y a

de le gagner. Les raisons sont simples, plus de temps pour préparer la réponse mais aussi plus

d‟opportunités de lobbying pour influencer les spécifications de l‟appel d‟offre lui même.

Dans le cas d‟offres système ce pouvoir d‟influence sur les spécifications est d‟autant plus

essentiel que les solutions possibles sont nombreuses et divergentes. Nous pensons que les

acteurs par lesquels les appels d‟offres arrivent à l‟entreprise ont un rôle particulièrement

important. De leur présence régulière chez différents clients et de leur manière de présenter

les produits de l‟entreprise vont dépendre les appels d‟offres qui arrivent à l‟entreprise, la

rapidité avec laquelle l‟entreprise en est informée … Aujourd‟hui, dans l‟organisation héritée

des offres « équipement », les services de veille des appels d‟offres sont localisés dans les

départements. Ils sont le moyen le plus courant de recueillir un appel d‟offre : la veille des

publications officielles des grands clients de Sagem. Pour les marchés publics, les annonces

paraissent aux journaux officiels. Certains sites Internet proposent une synthèse des appels

d‟offre parus par secteur. Ce système, bien que très fiable, ne permet pas de gagner du temps

- 35 -

sur la concurrence et ne s‟applique pas à tous types d‟appels d‟offre. Sur le projet Félin,

rappelons-nous que Thales avait eu connaissance du projet Felin avant la parution de l‟appel à

candidature. L‟issue de l‟appel d‟offre semble ne pas confirmer l‟importance de ce paramètre,

mais, de l‟avis même de l‟équipe Felin, c‟est un contre-exemple exceptionnel. Les actions de

lobbying, souvent organisées au niveau du département, sont une autre occasion de déceler un

appel d‟offre à venir. La DDI Sagem (Direction du Développement International) complète le

dispositif par son implantation géographique et noue des relations avec les prospects

étrangers. Un des circuits « bis » le plus utilisé reste les relations commerciales

multidisciplinaires. Les cas d‟école est celui d‟une visite du commercial du département A de

Sagem à son client de la compagnie C qui lui apprend que C compte se doter d‟un système

qui concerne le département B. Le commercial A contacte alors le commercial du

département B pour l‟informer de l‟appel d‟offre à venir.

Le point commun de ces processus est que la personne qui perçoit l‟appel d‟offre (que nous

appellerons « receveur ») est celle qui va l‟orienter. Cette pratique est source d‟erreurs,

notamment sur la juste évaluation du département concerné par l‟appel d‟offre, et empêche

une bonne traçabilité des affaires traitées. Sagem ne peut pourtant pas se passer de ce précieux

réseau d‟écoute des besoins clients. Une équipe spécialisée dans la détection des appels

d‟offre, quel que soit son dimensionnement, ne pourrait remplacer les efforts de tout un

personnel. L‟ambition « système » ajoute une composante supplémentaire au problème. Un

appel d‟offre « système » fait, en effet, appel à plusieurs domaines de compétences et pourrait

être traité par plusieurs départements. Une offre de surveillance de frontière, par exemple,

pourrait être traitée à un niveau « système » par le département Systèmes de surveillance, ou à

un niveau composant par le département Caméra ou Optronique. Un mauvais choix du

receveur de l‟appel d‟offre pourrait éliminer des opportunités. Dans le passé, il est déjà arrivé

qu‟un département « Système » retrouve dans une offre concurrente des équipements Sagem.

Notre suggestion est donc de centraliser le traitement des appels d‟offres à un niveau supra-

divisionnel dans un service qui aurait les fonctions suivantes :

Définir les champs de veille :

Pour trouver, il faut définir ce que l‟on cherche. C‟est la première leçon que tire B.Cova,

R.Salle et R.Vincent de leur analyse de la gestion des appels d‟offre d‟un chantier naval (« To

bid or not to bid », European Management Journal, Oct.00). Ce que l‟on cherche, c‟est se

positionner dans des réseaux de personnes porteuses d‟information sur un appel d‟offre à

venir. Les auteurs distinguent plusieurs niveaux de positionnement autour de l‟appel d‟offre.

- 36 -

Ils les décrivent comme des réseaux concentriques qui diminuent à mesure que l‟on se

rapproche du cœur de l‟appel d‟offre et de ces parties prenantes.

Le « milieu positioning », premier niveau,

correspond au réseau large développé dans le

périmètre d‟un secteur d‟activité tout entier.

Le « project network positioning » se fait en

amont de l‟appel d‟offre. Il concerne

l‟ensemble des partenaires impliqués dans le

projet : utilisateurs finaux, prescripteurs,

acheteurs, décideurs, financiers…

C‟est principalement à ce niveau que se situe l‟effort de veille puisque c‟est parmi ces

personnes que l‟information sera la plus pertinente. Le « Buying network positioning » se

joue à l‟intérieur du projet et se traduit par une proximité avantageuse avec l‟équipe de

gestion de l‟appel d‟offre. Une des forces de Felin a été de réussir à passer rapidement d‟une

absence de positionnement dans ce réseau à une présence légitime. Ce changement s‟était

opéré grâce à une grande opiniâtreté du chef de projet qui s‟était notamment présenté à des

réunions de suivi où il n‟était pas convié. On se situe ici légèrement après le travail de veille

mais le receveur de l‟appel d‟offre, s‟il est bien inséré dans ce réseau peut être une liaison

essentielle pour introduire l‟équipe de réponse à l‟appel d‟offre. Dans le cas du chantier naval

observé par les auteurs, c‟est en contournant les acheteurs commis au projet (le « buying

network) pour réintégrer dans la négociation les utilisateurs finaux (du « positionning

network ») que la solution de l‟entreprise qu‟ils étudiaient a été retenue. Au-delà (pré-bid,

bidding…), le receveur n‟a en principe plus à intervenir et laisse complètement la gestion de

l‟affaire au département concerné.

A mesure que l‟on veut intervenir dans les réseaux proches des appels d‟offres, il va

également falloir décider un positionnement en terme de domaines d‟activités. L‟enjeu est de

pouvoir donner à chaque membre du réseau Sagem de receveur d‟appels d‟offre un objectif de

positionnement dans un réseau.

Redistribuer dans les départements :

Quel est le département approprié pour répondre à tel appel d‟offre ? La redistribution des

appels d‟offres vers les départements est, comme nous l‟avons montré, une étape sensible.

Une connaissance précise des périmètres d‟intervention de chaque département est

indispensable et ne peut être assumée par tout le personnel d‟où la nécessité d‟un service

- 37 -

dédié. En cas d‟hésitation, entre un traitement « système » ou « composant » d‟un appel

d‟offre, le service dédié pourra au besoin organiser le dialogue entre plusieurs départements.

Suivi et indicateurs de performance :

Une plate-forme Internet de gestion des appels d‟offre semble adaptée et faciliterait le suivi et

l‟utilisation d‟indicateurs de performance. Des indicateurs en amont de la découverte de

l‟appel d‟offre à venir pour inciter tout le personnel à participer à cet effort commun, en

notant particulièrement la contribution individuelle quantitative (nombre d‟appels d‟offre

anticipés) et qualitatif (délai d‟anticipation sur la sortie officielle).

En aval, le département adresse au service de gestion des appels d‟offre, un retour sur les

décisions prises, poursuite ou abandon de l‟appel d‟offre, et les principales raisons. Là encore

Cova, Salle et Vincent, nous éclairent sur les dimensions à prendre en compte dans le choix

de répondre ou pas à un appel d‟offre. Ils répertorient deux classes de critères : l‟attractivité

de l‟AO et la position concurrentielle par rapport au projet.

L‟attractivité comprend les éléments suivants : la conformité avec les objectifs de l‟entreprise,

les ressources et les compétences à mobiliser, l‟appréciation des risques par rapport à

l‟espérance de gain et la probabilité de gagner, via ce projet, d‟autres appels d‟offres.

La position concurrentielle demande d‟observer : la crédibilité de l‟entreprise et ses

expériences passées, son niveau d‟influence dans les différents niveaux de positionnement, sa

capacité à satisfaire les besoins client ou à proposer des solutions innovantes, la possibilité de

partenariats forts et la possibilité de réagir rapidement.

Avec ces informations le service de gestion des appels d‟offre pourra réaliser un reporting

régulier ; d‟une part sur la contribution de chacun en terme d‟apport d‟affaires pertinentes (ie

correspondant aux champs de veille prédéfini) ; d‟autre part sur le volume d‟AO étudié,

répondu et gagné par les départements mais surtout sur celles qui n‟ont pas été traitées afin

d‟identifier les goulets d‟étranglement capacitaires, de déterminer si le département se

disperse ou ne tente pas assez, ou encore de mesurer les coûts d‟opportunité. Ce dispositif

permettra de calibrer le dimensionnement des équipes, d‟élargir ou de rétrécir le champ de

veille et bien sûr de créer une forte incitation.

- 38 -

ii) Réunir les partenaires et « faciliter » l’émergence

d’une solution

Après avoir capté l‟appel d‟offre ou, dans une démarche proactive, après avoir formulé

l‟intention stratégique du projet, le temps est venu de rassembler les partenaires autour de la

construction de l‟offre système. C‟est un passage obligé pour les projets systèmes qui font

nécessairement appel à de multiples intervenants. Nous remarquons à cette occasion que les

projets systèmes, qu‟ils soient issus d‟une démarche proactive ou réactive, se rejoignent dans

leur déroulement à différents stades selon le type d‟appel d‟offre.

Certains appels d‟offre très détaillés ne demandent qu‟un travail de conception. Les appels

d‟offre spécifiés fonctionnellement incluent également la phase de conception architecturale.

Les appels d‟offres prospectifs sont très semblables à la démarche proactive. Dans « A Twin-

track Networking Approach to Project Marketing », B.Cova et S.Hoskins remarquent que

dans ce type d‟appel d‟offre, même si un travail d‟expression des besoins a été conduit par le

client, il est souvent nécessaire de revenir dessus. Cette approche, dite constructiviste, est à

l‟initiative des industriels répondants à l‟appel d‟offre, d‟où le rapprochement avec la

démarche proactive.

Tests de

validation

Tests

d’intégration

Tests

unitaires

Analyse des

besoins

Conception

architecturale

Réalisation

Conception

détaillée

Spécifications

par lots

Spécifications

transverses

Validation

besoins

Appel d’offre

prospectif

Appel d’offre

détaillé

Appel d’offre

spécifié

fonctionnellement

Démarche proactive

- 39 -

Réunir des partenaires

La phase de montage d‟un consortium ou d‟un groupement concerne donc aussi bien les

situations proactives que réactives. Toute la difficulté de cette phase consiste à statuer sur la

pertinence d‟un partenaire dont on ne maîtrise pas les compétences et dont on ne connaît pas

les apports futurs. L‟enjeu est pourtant fondamental puisque la composition du groupement va

fortement conditionner les solutions retenues. Le processus de constitution que nous avons

observé dans le cadre du projet BOSCA a montré une superposition de deux tendances. Il

s‟agit à la fois d‟un élargissement de proche en proche, un partenaire en amenant un autre,

mais aussi de l‟échafaudage progressif de l‟offre finale. A l‟origine le projet est porté par le

Groupement des Ecoles de Télécommunications (GET) et Sagem. Les relations du GET avec

d‟autres laboratoires et d‟anciens collaborateurs industriels ont permis d‟élargir le

groupement. Sagem a inclus certains de ses départements dans le projet et a réactivé des

contacts noués sur d‟autres projets avec l‟ONERA. Certaines propositions de solutions,

comme la prise en compte du « facteur humain » dans la gestion de sinistre ont d‟elles-mêmes

mêmes induit de nouveaux partenaires, ici Apsys. Enfin certains partenaires sont devenus

moins pertinents au fil de la conception de l‟offre. C‟est en partie le cas de Survey Copter

avec les problèmes liés à la faible charge utile des mini-drones.

Facteurs d’évolution de la composition d’un consortium

Sagem

Nouveaux

Partenaires

Nouveaux

Partenaires

Nouveaux

Partenaires

Proposition

de solution

Proposition

de solution

Choix d’une

solution

dimensionnante

Choix d’une

solution

dimensionnanteRestriction des

partenaires

Restriction des

partenaires

Stabilisation

du

groupement

Taille du consortium

Temps

-

+

Ce processus se déroule en parallèle de la construction de l‟offre système. L‟évolution

du groupement suit celle des solutions proposées ou retenues. Nous nous sommes donc

- 40 -

intéressés à ce processus de création et aux relations qu‟entretiennent les principaux

participants, à savoir, le chef de file, les partenaires et les utilisateurs.

Faciliter l’émergence d’une solution

Au-delà de la gestion administrative du projet, le rôle du chef de file est clairement de mener

la réflexion autour des besoins clients et de faire avancer les solutions. Comment mène-t-il

cette mission ? C‟est essentiellement un rôle d‟animation que tient le chef de file. Il organise

des rencontres entre les participants, propose des ordres du jour, oriente les discussions,

synthétise les propositions, pour essayer de converger vers un optimum. Même si les

techniques utilisées ne sont pas aussi sophistiquées, ce rôle est très proche de celui de

« faciliteur » apparu aux Etats-Unis pour améliorer l‟efficacité des réunions de management

(en anglais « Facilitator »).

“A facilitator is someone who uses knowledge of group processes to formulate and deliver the

needed structure for meeting interactions to be effective. The facilitator focuses on effective

processes (meeting dynamics) allowing the participants to focus on the content or the

substance of their work together”, International Association of Facilitators. Le représentant du

chef de file ne possède pas de compétences techniques particulières. Dans le cas de BOSCA,

les questions techniques étaient prises en charge par d‟autres départements. Cependant, à la

différence du faciliteur qui n‟a pas de vision claire des enjeux sur lesquels il intervient, le chef

de projet a une très bonne compréhension d‟ensemble et apporte du contenu aux échanges. Il

a donc le double rôle de faciliteur (faire émerger la solution) et de participant aux discussions

(construire la solution). Ce que nous voulons souligner par cette analogie, c‟est la compétence

nouvelle que doit acquérir le responsable de projet système. Lors du projet BOSCA, nous

avons, sur les conseils du chef de projet, réalisé un support destiné à favoriser l‟émergence de

la solution en utilisant les compétences de tous les partenaires. Ce tableau, plus

spécifiquement destiné aux équipements « capteurs », robots et drones, à pour but de préciser

les scénarii dans lesquels ils pourraient être utilisés. Pour chaque condition d‟utilisation que

les partenaires valident, ils doivent préciser le scénario d‟application prévu. Notamment

anticiper et décrire aussi précisément que possible l‟utilisation que vont pouvoir faire les

clients finaux de l‟équipement ainsi que les contraintes d‟utilisation dans le contexte choisi.

- 41 -

Support à la « facilitation »

Risque

Support

Inondation Feux

de

forêt

Dispersion

liquide

polluant

Dispersion gaz

polluant

Prévention/

Surveillance

Aérien

(dont

drones)

Terrestre

mobile

(dont

robots)

Terrestre

fixe

Gestion de

sinistre /

temps réel

Aérien

(dont

drones)

Terrestre

mobile

(dont

robots)

Terrestre

fixe

En colonne figure une typologie des différents scénarii (tronquée dans la figure ci-dessus) de

sinistre provenant de la décomposition utilisée par les sapeurs pompiers des Bouches du

Rhône pour caractériser les sinistres sur lesquels ils interviennent. En ligne, nous suggérons

plusieurs contextes d‟intervention, prévention ou gestion du sinistre, ainsi que différents

points d‟analyse : aérien, mobile ou fixe. Comme exemple d‟utilisation, nous nous arrêterons

seulement sur un des cas exploité par l‟ONERA (Office national d'études et de recherches

aérospatiales). Contraint par cet outil à analyser tous les scénarii de sinistre, l‟ONERA a

proposé un capteur « inondation » qui jusqu‟alors n‟avait pas été envisagé. Ce vélocimêtre

laser, permettrait de mesurer à distance, donc en sécurité, voire par capteur aéroporté, le débit

d‟un cours d‟eau. Ce tableau permet à la fois de poser clairement les besoins à adresser,

- 42 -

pousse les partenaires à envisager de nouvelles solutions et facilite la synthèse des

contributions de chaque membre du groupement. Ce travail d‟animation qui est ici destiné à

trouver des briques des solutions à la gestion de sinistre pourra être reproduit en aval du

processus de conception système à l‟occasion de la conception architecturale. En effet, une

fois déterminées les grands sous-ensembles fonctionnels du système, le systémier et les

partenaires devront se livrer au même travail pour faire émerger l‟architecture globale du

système. Dans « The reconfiguration of existing product technologies and the failure of

establisher firms », Henderson et Clark distinguent la connaissance « composant », les

propriétés des composants seuls et la connaissance « architecturale », la façon dont on lie les

composants entre eux. La connaissance composant est détenue par chaque partenaire mais la

connaissance « architecturale » est une réunion des connaissances « composant ». L‟exemple

choisit par Henderson et Clark est celui d‟un ventilateur. Le fabriquant de pâle sait à quelle

vitesse doit tourner une pâle donnée pour aérer une pièce mais n‟a aucune idée du moteur

optimal. Le fabriquant de moteur, lui, ne connait rien à l‟aérodynamisme, mais sait que pour

produire tel couple un moteur électrique, thermique ou à inertie… sera adapté. La réunion de

ces deux connaissances « composant » permet la connaissance « architecturale » qui va lier

les deux composants pour faire fonctionner le système. Dans ce processus, le rôle du

systémier est également de faire émerger une connaissance nouvelle qu‟il ne possède pas.

La collaboration autour du projet

Pour réaliser cette phase de construction de l‟offre, plusieurs modes de collaboration sont

possibles entre systémier et partenaires. Ils conditionnent fortement le type de consortium à

venir. Comme nous le soulignons en introduction à cette partie, les phases amont de

construction de la solution ont une grande influence sur le déroulement et les chances de

succès du projet puisque le champ des solutions envisageable est encore large. Or B.J

Kolltveit et K Gronhaug montrent qu‟à ce niveau du projet, les partenaires, qui poursuivent

leurs intérêts particuliers, ont le pouvoir d‟infléchir considérablement les solutions retenues.

L‟organisation des échanges entre partenaires - systémier - utilisateurs est d‟autant plus

essentielle. Le projet BOSCA, se situe entre deux configurations :

Partenariat « ouvert » Partenariat « Relais »

- 43 -

Systémier

Systémier

Partenaires Partenaires

Utilisateurs

Utilisateurs

Dans un partenariat « ouvert », le systémier - chef de file se situe au même niveau que ses

partenaires dans la hiérarchie décisionnaire qui détermine le choix de conception.

Dans un partenariat « Relais », le systémier est le seul à avoir à la fois les points de vue

« utilisateurs » et ceux des spécialistes, industriels ou laboratoires et organise la progression

de la connaissance des techniques et des besoins par allers-retours successifs. Cette dernière

configuration permet au systémier de filtrer les informations et donc de choisir plus

facilement la solution qu‟il veut voir retenue. Il se positionne également plus favorablement

pour conserver la propriété des technologies développées par ses partenaires qui deviennent

quasiment des sous-traitants. En revanche, cela peut menacer la pertinence de l‟offre finale

puisque la diffusion des informations est perturbée.

- 44 -

2) Les difficultés de la mise en place

i) Les menaces qui pèsent sur l’objectif « système »

Page 42 : la réponse.

Rappelons-nous l‟étude de marché réalisée sur la partie « suivi de feux de forêt », désormais

l’enjeu stratégique « suivi de feux de forêt ». Elle satisfait la direction de Sagem mais ne

saurait justifier le financement de l‟ensemble du projet. La question de l‟identification

d‟autres enjeux stratégiques pour couvrir l‟ensemble de la problématique « gestion de

sinistre » se reposait logiquement. Sagem proposerait-elle une offre complète ou ponctuelle de

gestion de sinistre ? Réponse du directeur de la Division Optronique et Systèmes

Aéroterrestre : « Il vaut mieux commencer par ce que l‟on sait faire ». Comprenez, Sagem

préfère se concentrer sur les besoins déjà identifiés et pour lesquels elle détient, en interne,

des compétences technologiques.

Dans le travail de Sagem de construction de l‟offre, le fait d‟avoir eu ou non la maîtrise de

technologies clés était pourtant peu intervenu. Sagem possédait bien quelques briques

technologiques, comme les drones et la vision infrarouge, mais les travaux d‟échanges décrits

précédemment n‟ont pas été plus simples avec les départements de Sagem concernés par le

projet qu‟avec le reste des partenaires. Le risque à explorer des technologies étrangères à

Sagem n‟était donc pas lié à une question de fiabilité ou de validité de l‟offre développée.

Cette position du directeur de division était partagée par l‟ensemble des participants à la

réunion de montage de projet. Comment expliquer ce consensus qui allait apparemment à

l‟encontre des objectifs stratégiques de développement d‟offres système ? Il est vrai que la

réputation de Sagem a été bâtie sur son excellence technologique plus que sur ses capacités de

systémier. L‟analyse de B.Cova, R.Salle et R.Vincent dans « To bid or not to bid » à laquelle

nous avons fait référence précédemment montre également que les réseaux développés par

Sagem ne sont certainement pas ceux d‟un systémier. L‟importance du réseau n‟est toutefois

pas aussi capitale en dehors du cadre d‟un appel d‟offre, à savoir dans le cadre de BOSCA.

- 45 -

Conception proactive ou réutilisation proactive ?

L‟expérience du «proactif » tel que pratiqué chez Sagem par le passé contient peut être un

début de réponse. La quasi-totalité des efforts de développement a été conduite jusqu‟à ce jour

dans le cadre d‟appels d‟offre donc dans un cadre réactif. Les quelques démarches proactives

ont été des initiatives pour adapter des produits existants à de nouveaux marchés. Dans ces

conditions, Sagem peut se permettre une exploration des besoins clients très succincte.

L‟objectif est de tenter de petites adaptations techniques à moindre coût de développement

pour générer rapidement un chiffre d‟affaire incrémental. L‟effort s‟apparente plus à du

démarchage qu‟à un exercice de conception. Les conséquences se lisent au travers des choix

de conception qui sont parfois plus effectués en fonction des technologies que l‟on veut

replacer qu‟en fonction d‟un optimum pour le client. A ses débuts, les briques technologiques

de BOSCA semblaient avoir été construites sur ce mode, en aboutant des technologies

existantes. Outre la volonté d‟emploi des drones dont le modèle économique ne convenait pas

aux utilisations de la sécurité civile, le BSV (Border Surveillance Vehicule) faisait également

partie des technologies mises en avant pour assurer la mission de gestion de sinistre. Ce

véhicule de surveillance de frontière avait déjà été issu de la réutilisation des technologies

« caméra thermique » et « stabilisateur ». Il devait donc vivre une troisième « vie » au service

de la sécurité civile avant qu‟une démonstration in vivo ne révèle le décalage entre les

prestations proposées et les besoins des pompiers. Lancé avec cette volonté de réutilisation en

filigrane, le projet BOSCA a mis beaucoup de temps à s‟extraire de cette logique pour

reconsidérer le besoin client comme point de départ essentiel de la conception du système. On

pourrait imaginer qu‟il n‟y à rien à perdre à tenter ces adaptations. Nous mettons en garde

contre deux phénomènes : d‟une part la réaction des clients auxquels on propose une

technologie inadaptée et qui émettent des doutes sur la capacité de l‟entreprise à comprendre

leur besoin ; d‟autre part le tropisme qu‟exercent ces technologies historiques dans l‟examen

du champ des solutions possibles pour satisfaire un besoin et construire le système.

Les documents internes qui décrivent le déroulement d‟un projet confirment ces observations.

Dans le schéma ci-dessous, on remarque une très longue phase de conception en aval de la

phase de contractualisation. La place réservée à l‟élaboration de l‟offre qui sert de base à la

contractualisation est minime. Or, nous avons détaillé précédemment les étapes complexes et

chronophages de montage du consortium et de construction d‟une solution.

- 46 -

Excepté si le client a effectué ce travail au préalable, ce qui ne peut être le cas en contexte

proactif, ces étapes se situent inévitablement en amont de la contractualisation. On ne peut pas

contractualiser, et les exigences de l‟AII vont en ce sens, sur la simple expression d‟un besoin

système.

Modélisation d’un projet (Document interne Sagem, Avril 2006)

Ce principe de réadaptation de produits existants (re-use) perdure d‟autant plus qu‟il est une

façon classique mais efficace de rentabiliser les investissements passés. En ajoutant à cela une

volonté affichée du management de recentrer, après plusieurs années de diversification, le

panel de technologies développé par Sagem, on explique plus facilement la décision du

directeur de division.

Risques et financement

Le financement est un autre passage obligé mais délicat pour les projets « système ». Le

financement interne est habituellement destiné à développer des projets associés à des contrats

certains. La gestion de ce type de risque et d‟incertitude est une nouveauté. Comme nous

l‟avons vu avec le projet Felin, les appels d‟offre « systèmes » émis par l‟Etat comprennent

fréquemment deux phases. Celle, largement représentée dans le schéma ci-dessus, qui

concerne la réalisation même de l‟offre jusqu‟à la production ; et celle précisément dont nous

remarquions l‟absence, qui aboutit à une proposition d‟offre. Outre la simple formalisation de

ces deux étapes, qui dans le cas Felin a aidé à l‟identification de deux taches distinctes alors

que BOSCA souffrait d‟un manque de clarté à ce sujet, la mise en place de deux équipes

différentes a également participé au bon déroulement de Felin. Cependant, ce sont tout de

même les solutions de financement associées à chacune de ces deux étapes qui ont le plus

contribuées à la réalisation de l‟objectif « offre système ». De l‟aveu de l‟initiateur du projet

- 47 -

Felin, si la dotation de 400.000€ n‟avait pas été associée, par la DGA, au travail de

préparation de la réponse à l‟appel d‟offre, Sagem n‟aurait jamais participé. Pour un contrat

de 800m euros, ces 400.00€ ne représentaient pourtant que 0,05% du chiffre d‟affaires. Un

ration (invest. R&D)/(C.A potentiel) de 0,05 serait considéré comme très attractif dans

beaucoup d‟autres secteurs.

Menaces et opportunités organisationnelles

Parmi les freins à l‟adoption de compétences systèmes, les questions organisationnelles jouent

un rôle prépondérant. Notre analyse a pourtant été limitée, voire stoppée, par le remaniement

organisationnel imminent qu‟allait connaître Sagem. Au-delà du faible intérêt que présentait,

pour Sagem, une étude centrée sur une organisation qui n‟était plus d‟actualité, nous avons

mené notre analyse dans un référentiel en perpétuel changement et avons seulement pu retirer

quelques observations ponctuelles difficiles à interpréter dans ce contexte. Nous souhaiterions

tout de même nous arrêter quelques instants sur ce critère essentiel dans l‟obtention d‟une

compétence système et rappeler ici les conclusions d‟une étude menée précisément sur ce

sujet. Dans « The project-based organisation: an ideal form for managing complex products

and systems?”, Hobday pose la question de l‟organisation optimale pour mener à bien les

projets systèmes (Complex Products and Systems, CoPS) et dresse la liste des avantages et

inconvénients de deux organisations types : les organisations « projet » (Project Based

Organisation, PBO) et les organisations matricielles. Les PBO sont des organisations dans

lesquelles le projet est « l‟unité de base » et où toutes les fonctions habituelles de l‟entreprise

sont gérées autour du projet. Les organisations matricielles suivent les grandes fonctions de

l‟entreprise. Ces dernières accordent à chaque produit une part de leurs ressources. Par sa

nature temporaire, l‟organisation projet est de fait plus flexible et reconfigurable. Il favorise

l‟innovation et confère au chef de projet un pouvoir réel sur les autres fonctions de

l‟entreprise. Il est également un avantage pour intégrer de nouvelles compétences et gérer les

risques. A l‟inverse, il rend très délicate la gestion des compétences à l‟échelle de l‟entreprise.

La capitalisation des connaissances est également plus difficile à réaliser d‟un projet à un

autre étant donné que « les réservoirs à compétences » situé dans les fonctions de l‟entreprise

n‟existent plus. Hobday remarque que dans certaines entreprises, les deux formes

d‟organisations co-existent puisqu‟à une organisation matricielle, se superpose une

organisation projet pour certaines taches complexes comme des campagnes de

communication ou des investissements R&D. Il insiste également sur le fait que le PBO

« pur » est une forme extrême de focalisations des moyens (y compris la finance et le

- 48 -

marketing, par exemple) de l‟entreprise autour du projet mais qu‟il existe plusieurs formes

hybrides. Selon Hobday cette seule forme d‟organisation ne convient qu‟à de très gros projet à

forts taux de risque.

Les organisations hybrides entre « matriciel » (A) et « projet » (F) selon Hobday

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

- 49 -

Une question de stratégie d’entreprise

Sans être réellement une menace, la question d‟adopter un positionnement de systémier est

tout de même suspendue à la stratégie d‟entreprise de Sagem. Au-delà, de la capacité ou non à

réaliser des offres système, la première des conditions est de savoir s‟il y a un avenir pour

Sagem en tant que systémier. Cette question était présupposée acquise au début de notre

réflexion mais la récente intervention du nouveau Directeur Général de Sagem Défense

Sécurité semble la remettre en cause. Selon lui, après Thales et EADS, il n‟y a pas la place en

France pour un troisième grand systémier. Sagem devrait donc se concentrer sur son rôle

d‟équipementier pour l‟améliorer et conforter sa position.

ii) Une application de la théorie Bowling Alley ?

Dans la partie précédente nous nous demandions comment expliquer la décision du

directeur de division qui « allait apparemment à l‟encontre des objectifs stratégiques de

développement d‟offres système » en privilégiant une offre « équipement » sur un domaine

connu : la géo-localisation de sinistre. Dans « il vaut mieux commencer par ce que l‟on sait

faire », il y a tout de même l‟idée d‟une étape à venir dans laquelle Sagem élargira peut-être

son domaine d‟intervention pour réaliser une offre « système » de gestion de sinistre.

Essayons d‟imaginer quelle pourrait être une suite à donner à ce premier pas dans le domaine

de la sécurité civile. Nous souhaitons rapprocher ici cette progression par étape à la

formalisation qu‟a réalisée G.Moore du cycle d‟adoption d‟une nouvelle technologie.

Le développement des sociétés de high-tech obéit, selon Moore, à un modèle spécifique :«The

Technology Adoption Cycle», hérité de la notion de « Courbe en S (S-curve) » qui constitue

une référence dans le domaine dans la high-tech aux Etats-Unis. La dynamique de ce modèle

est fondée sur les différences d‟attitude, d‟origine économique autant que sociologique, des

clients face aux coûts de transition (switching cost) induits par l‟adoption d‟un nouveau

paradigme technologique en regard du rapport risques / bénéfices lié à cette technologie. Les

clients pragmatistes du marché général (Main Market) s‟influencent largement les uns les

autres, leurs décisions d‟investissement au cours du temps ne sont pas indépendantes entre

elles. Pour éviter à tout prix des choix d‟infrastructure hasardeux, tout le monde attend puis

- 50 -

tout le monde se précipite sur la même offre. Cette attitude crée une prime importante et

durable aux market-leaders, bien supérieure à la classique prime au premier entrant. Les

visionnaires au contraire recherchent les risques et les technologies émergentes pour tenter de

bénéficier d‟avantages concurrentiels exclusifs. Ces changements de phases du marché ont un

impact profond sur la stratégie des entreprises qui doivent adopter des attitudes radicalement

opposées d‟une phase à l‟autre, avec les changements organisationnels brutaux que cela

suppose. Le modèle Technology Adoption Cycle décrit ainsi 5 grandes phases dans la vie

d‟une innovation :

Cycle d’adoption technologique (G.Moore)

Le gouffre (the chasm) est une période de latence qui sépare l‟adoption des visionnaires et

des pragmatiques. Pour franchir cette barrière, Moore recommande de cibler un petit groupe

d‟utilisateurs au lieu de saupoudrer les efforts et de répartir les risques. Il faut que ce soit un

segment ayant un besoin incontournable (« compelling reason to buy ») mal satisfait, et

justifiant les coûts et les risques du changement de paradigme. Il conseille également de

fournir à cette niche un produit 100% adapté et immédiatement utilisable (« whole

product »). Nous soulignons, à cette occasion, les dommages que peuvent causer

l‟introduction forcée de technologies existantes partiellement adaptées. En focalisant un

temps toutes les ressources sur cette niche, l‟entreprise doit gagner une position de leader,

puis s‟étendre à partir de là. Cette extension correspond au phénomène de « bowling alley ».

De proche en proche, de niche en niche, l‟auteur décrit l‟expansion du panel de clients

comme la chute des quilles de bowling, une quille en entrainant une autre. Chaque niche

- 51 -

servant de caution auprès de la niche suivante pour démontrer la pertinence du service. Dans

le cadre de BOSCA, deux lectures de cette théorie sont possible. La première, littérale, serait

d‟imaginer un élargissement de l‟utilisation de l‟équipement « géo-localisation de sinistre ».

Si la niche sécurité civile venait à adopter cet équipement, Sagem pourrait utiliser cette

source de légitimité pour conquérir d‟autres marchés comme les services de police, les

entreprises de surveillance, d‟assurance… Sans avoir été nommée, cette possibilité « du jeu

de quille » avait été évoquée pendant la réunion de montage de projet. Cela ne favoriserait

toutefois pas le développement d‟une offre système puisque le service proposé à chaque

client relèverait plus de l‟équipement que d‟une solution intégrée. C‟est pourquoi nous

proposons une autre utilisation de la légitimité constatée par Moore et conséquente à

l‟adoption de l‟équipement géo-localisation par la sécurité civile. Au lieu d‟utiliser un client

pour en gagner de nouveaux et diffuser une technologie, nous suggérons d‟utiliser une

technologie pour en diffuser d‟autres au sein de la même niche. De cette façon, Sagem

pourrait renouer avec ses objectifs systèmes initiaux et proposer à la fin de ce processus une

offre complète de gestion de sinistre.

- 52 -

II) Les scénarii « systèmes…

A – Introduction à travers BOSCA et FELIN

Au début du projet de Master, la mission portait sur les projets BOSCA et FELIN. Ces

projets et un groupe de travail intitulé « Plateau Système » ont permis de mener un RETEX –

RETour d‟Expérience. Ce retour d‟expérience constituait une opportunité de mieux connaître

l‟entreprise, ses produits et les différents acteurs des offres systèmes.

Ce RETEX nous a donné l‟occasion de capitaliser des connaissances, d‟étoffer la base

de travail afin d‟identifier a posteriori les facteurs clés de succès et les éléments critiques à

maîtriser pour répondre à des appels d‟offre système.

Nous avons étudié ces projets en essayant d‟identifier les points communs et les

différences qui nous permettraient d‟établir une topologie entre différents projets systèmes

menés au sein de DOSA.

Les questions qui se posaient sont les suivantes :

- Pourquoi faire du système ?

- Quels marchés viser (équipements, architecture) ?

- Quel positionnement adopter, fournisseur, maître d‟œuvre ?

- Est-il préférable pour DOSA de faire du système en technology push ou market pull ?

- Est-il préférable pour DOSA de faire du système avec ou sans technologies ?

- Est-il préférable pour DOSA de faire du système en se rémunérant sur l‟architecture,

les fournitures, ou encore la maintenance ?

En étudiant ces deux projets bien différents dans leur nature (l‟un que l‟on a qualifié

de réactif, et l‟autre de proactif), il est apparu que la question la plus importante était celle du

positionnement sur la chaîne de valeur, avec en question sous jacente celle du business model.

- Le projet BOSCA dans lequel SAGEM a la possibilité de se positionner en systémier

en adoptant une démarche proactive de proposition d‟offres.

- 53 -

- Le projet FELIN dans lequel SAGEM s‟est positionné en tant que maître d‟œuvre se

rémunérant sur les équipements, avec une approche réactive, suite à la réponse à un

appel d‟offre.

Dans le projet FELIN, DOSA a assuré le rôle d‟architecte et s‟est rémunéré sur les

équipements tandis que dans le projet BOSCA, l‟une des deux options s‟offrant à DOSA est

celle de fournisseur d‟un capteur aéroporté.

Il existe donc une nette différence dans le positionnement à travers la chaîne de valeur,

dans le cas FELIN étant susceptible d‟une plus forte création de valeur du fait du travail

portant sur l‟architecture.

Les changements en cours dans les marchés visés par Sagem et DOSA ont confirmé

l‟idée suivante : il n‟existe dans le civil aucun organisme spécifiant les besoins comme la

DGA pouvait le faire dans le domaine militaire. Il faut donc un maître d‟œuvre capable de

réaliser ce travail de spécification.

De plus cette distinction reste valable que ce soit pour la production d‟équipements, de

sous systèmes, de systèmes, de systèmes de systèmes ou même de services. Celle-ci reste

donc pérenne et ce quelle que soit l‟évolution du marché. Il est donc possible de s‟affranchir

de la définition stricte de système et de s‟en tenir à la présentation de ce terme vu

précédemment. Cette distinction semble universelle et applicable à tout type de marché.

Il convient donc de caractériser ces deux positions différentes (architecte et systémier)

et de considérer les avantages et les inconvénients inhérents à chacune de ces positions.

D‟autres scénarios pourront également être envisagés, ce pour être totalement exhaustif et

précis.

Système

Equipement

ProactifRéactif

Système

Equipement

ProactifRéactifOffreDémarche

Offre Sagem

classique

Projet BOSCAProjet FELIN

- 54 -

B – Volonté d’exhaustivité

Avant de développer les deux situations envisagées dans les pages précédentes, nous

allons nous attacher à définir rapidement ces deux situations de maître d‟œuvre et de

fournisseur qui correspondent à deux positionnements possibles pour DOSA dans un

environnement système.

Le terme de maître d‟œuvre (ou MOE) provient du secteur de la construction, il

désigne l‟entité chargée, par le maître d‟ouvrage, de concevoir et réaliser le produit

conformément au programme (spécification du besoin et échéances) spécifiées par le maître

d‟ouvrage. (MOA)

Dans notre étude, le MOE évoluera dans un environnement système, on le qualifiera

également de systémier, par opposition au fournisseur qui évolue également dans un

environnement système, mais fournit uniquement des produits et non des systèmes. Le

fournisseur travaille donc pour un maître d‟œuvre qui lui spécifie son travail.

Dans les paragraphes suivants, nous allons essayer de définir plus strictement ces

positions et voir les différents business model envisageable pour la position de maître

d‟œuvre.

- 55 -

1. La position de fournisseur

Ce scénario que nous appellerons « 4 » correspond à la situation où DOSA ne veut

ou ne peut prendre le rôle de systémier mais cherche à acquérir certaines compétences

« systèmes » pour mieux répondre aux attentes de ses clients systémiers.

Dans ce scénario on suppose que DOSA ne veut pas ou ne peux pas prendre le rôle

de systémier mais cherche à acquérir certaines compétences « système » pour mieux

répondre aux attentes de ses clients systémiers. SAGEM DS possède 100 % des

technologies d‟au moins un sous système.

Le capteur aéroporté évoqué dans la monographie du projet BOSCA est un

exemple d‟équipement que pourrait fournir SAGEM dans le cadre d‟offres systèmes.

Dans cette situation SAGEM serait amené à travailler en étroite collaboration avec

le systémier et développerait de fait des compétences systèmes. Il serait possible

d‟acquérir certaines compétences de systémier en développant des microsystèmes qui

seraient des équipements complexes. L‟apprentissage s‟effectue également lors de la

définition des interfaces entre les composants.

Si SAGEM se positionne en fournisseur il devra s‟adapter aux attentes de

l‟architecte, tandis que s‟il se positionne en architecte il faudra savoir spécifier finement

les besoins afin de garantir l‟interopérabilité des différents sous systèmes, tout en gardant

un certain flou permettant aux fournisseurs de faire preuve de créativité et de mettre en

œuvre des innovations (une ultra-spécification pouvant être castratrice). L‟apprentissage

pourrait être renforcé en adoptant dans un projet une position de fournisseur et dans un

autre projet une position d‟architecte afin de percevoir les difficultés propres à chaque

situation.

- 56 -

2. La position d’architecte

2.1. Généralités sur la position d’architecte

Il existe pour cette position d‟architecte différents business models ou le systémier va

se rémunérer sur l‟architecture, les équipements ou encore adopter une rémunération mixte.

Nous étudierons dans les sous parties suivantes ces différentes alternatives.

Quelque soit le business model retenu, pour ces trois positionnement SAGEM sera amené à

rassurer le client puis le management en interne (F. FOURCADE p.101) :

- « Rassurer le client sur ses connaissances en conception et développement de projets

sur des périmètres larges » (rassurer sur la vision système)

- Rassurer le management en interne : « À chaque demande d‟autorisation pour

travailler sur un nouvel appel d‟offres, il fallait pour rassurer en interne (le

management), apprendre à montrer un compte de résultat complet et un modèle

économique associé ».

Ce qui suppose le développement de compétences nouvelles, de compétences

systèmes que nous détaillerons dans la partie D.

2.2. La position d’architecte se rémunérant sur

l’architecture

SAGEM se positionne sur des systèmes en ne maîtrisant la technologie d‟aucun

composant ou sous systèmes.On peut prendre l‟exemple de l‟architecte dans la construction

- 57 -

d‟une maison. Il n‟est ni maçon, ni menuisier, ni plombier. Pourtant certains architectes

prennent une responsabilité de systémier en concevant l‟architecture générale en spécifiant les

sous-ensembles, en contractant avec différentes entreprises et en pilotant et coordonnant la

réalisation (on peut aussi penser aux agences de voyage qui assemblent hôtel, vol, circuit de

visites qui seraient un exemple de connaissance des clients).

L‟architecte doit alors légitimer son travail en faisant valoir sa connaissance du

marché et sa capacité à identifier les besoins et les traduire en spécifications techniques dans

la phase amont, il doit ensuite faire preuve de compétences en contractualisation, coordination

et pilotage pour le suivi du projet.

Ce positionnement pose la question de la légitimité d‟un systémier qui ne possède pas

de compétences technologiques sur les sous systèmes. Mais également celle de la valorisation

du travail et du mode de rémunération de systémier.

2.3. La position d’architecte adoptant un mode de

rémunération mixte

Dans cette situation, SAGEM se rémunère à la fois sur les équipements proposés et sur

la réalisation de l‟architecture et veut ponctuellement se positionner en tant que systémier sur

des marchés pour assurer des débouchés à ses technologies historiques.

Ce positionnement correspond au constructeur de maisons individuelles met en œuvre

un projet et le réalise. Il le conçoit (immatériel) et fournit la maison.

SAGEM développe des offres systèmes en se donnant toute latitude d‟intégrer dans

son offre les technologies qu‟elle maîtrise, des composants issus de l‟entreprise ou des

composants équivalents proposés par la concurrence.

THALES a adopté un positionnement semblable, et a fixé une règle interne qui fait

que les chefs de projet sont libres de choisir une solution proposée par un concurrent si elle est

au moins 10 % moins chère que la solution THALES.

- 58 -

2.4. La position d’architecte se rémunérant sur les

équipements vendus

SAGEM veut développer ponctuellement une position de systémier sur des marchés

existants sans imposer les technologies SAGEM à ces systèmes. SAGEM se positionne en

systémier uniquement sur des offres systèmes pour lesquelles elle à une maîtrise

technologique d‟au moins 50% des sous systèmes.

La règle fixée en interne de l‟entreprise est une obligation de répondre avec des

technologies de l‟entreprise sur tous les sous systèmes ou elle peut proposer une offre.

On retrouve ce positionnement chez les négociants en semences et produits

phytosanitaires qui fournissent des plans de culture en fonction des caractéristiques de

l‟exploitation agricole et qui prodiguent des conseils, vont jusqu‟à fournir des plans de culture

pilotés par des logiciels et profitent ainsi de cette prestation intellectuelle fournie quasiment

gratuitement pour vendre des semences et des produits phytosanitaires.

Ce positionnement, tout comme le précédent réintroduit la concurrence à l‟intérieur de

l‟entreprise et pose à nouveau la question des prix de cession interne. Il peut être en effet plus

rentable pour un département de SAGEM de vendre ses équipements à un concurrent qu‟à un

autre département alors que ces deux acteurs cherchent à produire un système semblable.

- 59 -

3. La typologie

3.1. Présentation du schéma

Ces différents positionnements possibles pour SAGEM nous amènent cartographier

ces différents positionnement et mode de rémunération qui correspondent à 4 scénarii :

- 60 -

3.2. Positionnement de BOSCA et FELIN

Nous allons maintenant essayer de placer a posteriori les projets BOSCA et FELIN

dans les différents scénarios.

3.2.1. Le projet BOSCA

Le projet BOSCA offre aujourd‟hui deux possibilités à DOSA ; développer une

solution intégrée pour la gestion de sinistre, ce qui supposerait une analyse approfondie du

marché de la sécurité civile. Ou alors développer une technologie de capteur : un capteur

aéroporté qui serait réutilisable dans d‟autres projets.

Ces deux possibilités correspondent à deux scénarios : la première option est

assimilable au scénario 1 et est aujourd‟hui délaissée ; la seconde option correspond elle au

scénario 3 et est mise en attente.

3.2.2. Le projet FELIN

Le projet FELIN correspond lui au scénario 3 ou le mode de rémunération basé sur les

équipements.

- 61 -

C – Critères

Une fois les différents scénarios identifiés, notamment au moyen d‟une cartographie,

permettant de mettre en relief les différents positionnements/business models possibles pour

un industriel souhaitant évoluer dans un environnement système, il convient d‟aborder l‟outil

qui permet de façon pratique de déterminer quel scénario, quel business model adopter en

fonction de la situation considérée. En effet il n‟est pas concevable de définir a priori un

choix de business model , sans prendre en compte le mode de rémunération.

Il est possible de recenser un certain nombre de critères permettant de caractériser une

situation donnée et de lui associer le scénario le plus adapté.

Ces critères se doivent d‟être palpables, afin de permettre aux opérationnels, au

personnel en charge de répondre aux appels d‟offre d‟utiliser ces dits critères comme un outil

simple d‟aide à la décision. Ces critères présentent d‟ailleurs pour certains quelques

similitudes avec ceux que l‟on peut retrouver dans la « Revue Initiale de Proposition » ou la

« Fiche d‟approbation d‟offre ou de contrat », des documents internes à SAGEM.

1. La grille d’analyse

Ainsi la mise en relation des critères et des scénarios dans une grille d‟analyse

constitue un outil d‟aide à la décision. Cet outil prend la forme d‟un tableau à double entrée et

nous permet donc deux lectures, deux approches.

Portefeuille de projet ou grands projet unitaire

Taille des briques technologiques (fine)

-Réutilisées

- Sur mesure

- Sur étagère

Choix des technologies :

-Exportable

-Reproductible

-Série

- One shoot

Taille du marché :

Portefeuille de projet ou grands projet unitaire

Taille des briques technologiques (fine)

-Réutilisées

- Sur mesure

- Sur étagère

Choix des technologies :

-Exportable

-Reproductible

-Série

- One shoot

Taille du marché :

Cri

tère

s

- 62 -

1.1. Lecture verticale

La lecture par colonne est une approche correspondant à une démarche volontariste où

l‟on cherche à s‟adresser de nouveaux marchés en suivant un business model (=un scénario)

prédéfini. Cette lecture peut être utilisée dans le cadre d‟une démarche proactive. Elle sera

plutôt utilisée par le top management (chef de département, directeur de division).

1.2. Lecture horizontale

La lecture par ligne correspond elle à une approche réactive. Elle est utilisable quand

DOSA reçoit un appel d‟offre. Le personnel en charge de la réponse va alors identifier pour

chaque critère le scénario idéal. Une fois tous les critères considérés, cette personne va être

amenée à se positionner sur le scénario le plus adapté et répondra à la proposition en suivant

cette ligne directrice.

Ce mode de lecture permet de définir des orientations stratégiques de façon simple. En

outre, les scénarios ainsi adoptés sont susceptibles d‟évoluer au cours du temps pour que

DOSA suive les évolutions des marchés ciblés.

1.3. Utilisation de ces lectures

La lecture par colonne est davantage destinée aux décideurs (chef de département,

directeur de division) tandis que celle par ligne est destinée aux opérationnels comme les

chefs de projet ou encore le personnel répondant aux appels d‟offres.

- 63 -

2. Les critères

Les critères sont liés à trois aspects du système : la structure du marché, le choix des

technologies et la taille des briques technologiques.

2.1. La structure du marché

2.1.1. One Shot vs. réutilisable

Le caractère One Shot ou non d‟une solution est important dans la mesure où selon

que cette solution soit réutilisable ou non (reproduite, exportée…) les frais de développement,

qu‟ils soient architecturaux ou industriels seront ou non mutualisés sur plusieurs projets et la

rémunération sur les équipements en sera ainsi affectée. Toutefois la nuance entre solution

One shot et solution réutilisable n‟est peut être pas aussi marquée .Il existe , en effet une

« troisième voie » : un système peut être conçu One shot au départ sans souci de sa

réutilisation possible (parce que, par exemple, conçu dans l‟urgence ou adapté aux besoins

particuliers d‟un client important) et après utilisation être « recyclé » et donc réutilisé avec des

adaptations minimes. Cela sous-entend un « archivage » intelligent des projets permettant de

constituer une base de données accessible et réutilisable (partage des expériences dans

l‟entreprise).

FELIN peut être considéré comme un projet à priori One Shot cependant réutilisable,

dans le cadre de l‟export par exemple. À l‟inverse un système de cryptographie est un projet

One Shot non réutilisable, il ne peut en effet pas être revendu au monde entier, il y a une

relation exclusive entre l‟industriel et son client.

Dans le cas de projets systèmes reproductibles, où il y a eu apprentissage sur les

projets précédents, le travail portant sur l‟architecture se trouvera réduit. La rentabilité de tels

projets devient alors significative.

On peut prendre l‟exemple des systèmes de surveillance de frontières, dans lesquels

les technologies mises en œuvre répondent à des standards et ne diffèrent pour ainsi dire pas

d‟un projet à un autre. Au fur et à mesure des réponses aux appels d‟offres l‟expérience

s‟accumule et fait qu‟on peut aboutir à une solution proche d‟un pays à un autre. On peut

- 64 -

finalement créer un système de surveillance standard, que l‟on customiserait selon les attentes

du client. On réaliserait alors une plateforme que l‟on paramétrerait selon les besoins du

client. Le travail sur l‟architecture serait alors facilité et les gains plus importants.

De la même façon, adapter le produit FELIN aux besoins des pompiers pourrait être

considéré comme une « reproduction » avec un travail sur l‟architecture moins poussé. En

effet tout le système d‟équipements de liaison intégré pourrait constituer une base de travail,

une plateforme, sur laquelle viendraient s‟ajouter des éléments satisfaisant des besoins

propres aux pompiers.

N.B. : Un projet pouvant être exporté sera considéré comme reproductible ; on y

trouvera donc les mêmes avantages.

2.1.2. Série

La production en série d‟un système permet de réduire considérablement les coûts de

production qui se retrouvent amortis par unité produite. C‟est une reproduction à l‟identique.

2.1.3. Volume global du marché, volume à terme : intérêt

commercial de l’affaire, part de marché espérée par SAGEM

Une offre peut être réalisée afin d‟ouvrir de nouveaux marchés, d‟apprendre en

limitant les frais. Dans ce cas, même si l‟offre n‟est pas rentable dans l‟immédiat, elle peut

avoir valeur d‟expérience et se révéler essentielle pour adresser des futurs marchés. Elle peut

en outre, si elle fait l‟objet de quelque publicité vis-à-vis des prospects, notamment sur un

marché étroit et averti, renforcer l‟image innovante de l‟entreprise, constituer « une

performance » voire « une marque de fabrique ».

Le gain d‟un marché précis par une technologie ou un système donné serait également

une opportunité permettant à terme de vendre d‟autres technologies ou systèmes (théorie de

Bowling Alley). Ceci amène DOSA à prendre en compte la concurrence, pour percer chez

certains clients ou dans certains secteurs (secteur de la sécurité civile pour BOSCA et de

l‟équipement du fantassin pour FELIN par exemple).

- 65 -

Ce critère pourrait être quantifiable sous la forme d‟un ratio « investissement/CA

potentiel » et correspondrait à une prise de risque de la part de DOSA, comme cela a été le cas

pour le programme FELIN (pour rappel : 400 000€ de dotation pour répondre à l‟appel

d‟offre, CA : 800m€).

2.1.4. La concurrence

La nature des concurrents, leur nombre et leurs atouts peuvent influer sur la façon de

répondre à l‟appel d‟offre. En effet dans sa solution, DOSA va être amené à prendre en

compte les forces et les faiblesses de ses concurrents, qui peuvent devenir des partenaires sur

certains appels d‟offre afin d‟aboutir à une solution plus robuste.

2.2. Le choix des technologies

2.2.1. Sur étagère

L‟emploi de technologies sur étagères consiste à faire appel à des solutions éprouvées,

robustes et qui sont proposées dans des « catalogues » par des industriels, que cela soit par

DOSA, Sagem, ou encore des concurrents.

Ces composants sur étagères répondent à des normes, sont basés sur des standards et

de ce fait permettent de créer des systèmes à la fois plus ouverts, plus évolutifs et plus

économiques.

Néanmoins l‟emploi de telles technologies ne permet pas forcement de constituer une

parade efficace à de nouveaux acteurs sur le marché. En effet, un système qui s‟appuie sur des

technologies que plusieurs industriels peuvent mettre en œuvre (Wifi, Bluetooth…) ne permet

pas de se démarquer de la concurrence. Au contraire, la mise en œuvre de technologies

brevetées par Sagem, permet de prendre une longueur d‟avance sur le marché.

Dans le cas d‟une solution employant des technologies sur étagères, le Maintien en

Conditions Opérationnels (MCO) peut-être réalisé plus facilement par d‟autres acteurs qui

pourraient répondre à un appel d‟offre lancé par le client pour la maintenance.

- 66 -

2.2.2. Sur mesure

Faire appel à des technologies sur mesure, c‟est mettre en œuvre toutes les

compétences, tout le savoir faire Sagem, trouver une solution correspondant aux besoins d‟un

client.. Il s‟agit d‟une solution qui peut s‟avérer plus ou moins coûteuse quant à son

développement et qui permet non seulement d‟offrir les meilleures performances mais

également de se démarquer de la concurrence en utilisant un savoir-faire unique. Cette

solution si elle est perçue par le client comme unique sur le marché peut permettre de générer

des marges importantes (caractère d‟exclusivité) et également fidéliser le client (dépendance

de celui-ci au regard de la solution). Sur ce type de solution, une étude de rentabilité est

encore plus indispensable, non seulement à la création du produit mais également pendant sa

maintenance. En effet, la société ne dispose pas souvent d‟un retour d‟expérience sur ce type

de solution « spécifique ».

2.2.3. Réutilisées

La réutilisation telle quelle ou après un travail éventuel d‟adaptation aux spécificités

du projet, d‟une technologie utilisée dans d‟autres projets DOSA ou Sagem est un compromis

intéressant. En effet le fait de faire appel à des technologies « maison » qui sont donc

synonymes de robustesse et de performance est un gage de qualité et n‟a pas le même impact

financier que de développer une solution propre, dédiée. Ces solutions ayant déjà été

éprouvées sont fiables et ont déjà fait l‟objet de test grandeur nature, de plus les

investissements ont déjà été effectués ce qui permet de réaliser des bénéfices plus importants.

Le simple « habillage » d‟une solution standard en « sur-mesure » peut « à moindre

coût » constituer un avantage sur la concurrence (mettre en valeur l‟adéquation d‟une réponse

standard ou tout du moins préexistante aux besoins particuliers d‟un client).

- 67 -

2.3. La taille des briques technologiques

La taille des briques technologiques qui va être adoptée pour le projet système va

conditionner différents aspects du projet. Ce que l‟on appelle « brique technologique »

correspond à un ensemble d‟éléments assurant une ou plusieurs fonctions, il peut s‟agir d‟un

équipement, d‟un sous-système ou simplement d‟une carte électronique selon la

granulométrie employée.

L‟utilisation de briques technologiques fines facilite l‟emploi de solutions sur étagère,

et permet d‟élargir ses champs de marchés adressables en adaptant tout ou une partie du

système aux spécificités du client. L‟export se trouve facilité car la production à l‟étranger

devient plus simple ce qui permet de résoudre la question des offsets plus facilement.

Néanmoins des briques technologiques fines rendent le système plus facilement imitable, en

supprimant la barrière technologique à l‟entrée. La maintenance se trouve également facilitée

et donc peut être effectuée par une entreprise tierce.

Des briques plus grosses constituent des barrières à l‟entrée et peuvent permettre de

créer des synergies dans le système en mutualisant différents composants. Toutefois il en

résultera un travail d‟architecture et de conception plus important.

- 68 -

D – Les scénarios les plus favorables aux systèmes – Les

compétences à acquérir en phase d’apprentissage

3. Quel(s) scénario(s) pour un apprentissage système ?

Nous proposons de comparer l‟évolution de SAGEM DOSA d‟une position

d‟équipementier vers une position d‟offre de systèmes à celle d‟un fournisseur de l‟industrie

automobile qui a cherché à développer une offre de modules alors qu‟il ne fournissait

auparavant que des composants. Nous nous appuierons sur le travail de F. FOURCADE qui a

analysé ce processus de transformation chez un grand industriel français qu‟il a appelé

SYSMOD.

F. FOURCADE définit le module comme étant « un produit regroupant physiquement

des composants assemblés et livrés comme un seul produit unique ».

La partie – I Monographie des projets – présente des notions associées aux systèmes :

complexité, ensemble, pluridisciplinarité et autonomie (dans le sens où le système assure seul

la fonction à laquelle il est destiné).

Les ressemblances entre système et modules permettent de transposer au cas SAGEM,

le travail de F. FOURCADE.

On considère que les environnements « système » et « module » sont comparables,

que l‟on retrouve un industriel en phase d‟apprentissage, qui fait appel à des tactiques plus

qu‟à des stratégies. Sagem applique des plans à court terme, en effet l‟orientation actuelle

n‟est plus la même qu‟au début de notre projet et aujourd‟hui SAGEM et donc DOSA se

tournent vers l‟équipement.

F. FOURCADE analyse cette évolution comme un processus d‟apprentissage et

explique qu‟il n‟existe pas un scénario universel qui soit toujours favorable à SYSMOD et

colle à la situation. Il caractérise des étapes d‟apprentissage. Celles-ci n‟étaient cependant pas

identifiées par les acteurs a priori et ne sont pas nécessairement à enchaîner dans un ordre

prédéterminé.

- 69 -

F. FOURCADE définit la stratégie comme n‟étant pas un processus défini ex ante, mais

comme quelque chose émergeant au fur et à mesure que grandit la compréhension de l‟acteur.

La situation n‟est donc pas figée et le positionnement de l‟industriel peut être amené à évoluer

au cours du temps, au gré des appels d‟offre.

3.1. Le scénario 4 – SAGEM Fournisseur.

Ce scénario est écarté d‟emblée dans la mesure où il ne permet pas de se positionner

en architecte, mais simplement en fournisseur. Dans cette situation l‟apprentissage

s‟effectuerait essentiellement à travers les échanges avec le systémier.

3.2. Le scénario 3 – SAGEM Architecte se rémunérant sur

les équipements.

Le scénario 3 introduit, lui, un biais, dans la mesure où les équipes chargées de mener

les projets vont toujours être amenées à penser en équipementiers et à placer des équipements

DOSA. La transition est trop douce et ne permet pas de s‟affranchir des contraintes propres à

l‟équipementier.

3.3. Le scénario 2 – SAGEM Architecte se rémunérant sur

la prestation d’architecte ET sur les équipements.

On peut donc penser que le scénario 2 qui est le scénario permettant une rémunération

mixte, fondée à la fois sur l‟étude architecturale et sur la vente d‟équipements est formateur.

Ce scénario 2 permet à DOSA d‟apprendre à évoluer dans un environnement système, tout en

gardant ses compétences d‟équipementiers qui font sa force.

- 70 -

3.4. Le scénario 1 – SAGEM Architecte se rémunérant sur

la prestation d’architecte.

Le scénario 1 nous semble être LE scénario d‟apprentissage. En effet, dans un contexte

difficile, et dans une entreprise qui s‟appuie sur son excellence technique, un changement

radical semble formateur. Il permet de remettre en cause les habitudes et de se positionner en

systémier, et ce, quel que soit le secteur. Il suppose d‟intervenir sur des projets peu spécifiés :

Dès lors, l‟apprentissage s‟effectue sur toutes les phases du projet et avec tous les

partenaires. Les phases de construction de partenariat et de conception architecturale

permettent de nouer des contacts avec beaucoup d‟acteurs et d‟apprendre des différents

partenaires.

Ce scénario permet de ne se fermer aucune porte, tout comme chez SYSMOD où « en

1998, lors de la création de la division [personne] n‟avait proposé une telle trajectoire »

SAGEM peut se laisser une certaine marge de manœuvre sans s‟éloigner de l‟objectif actuel.

Tests de

validation

Tests

d’intégration

Tests

unitaires

Analyse des

besoins

Conception

architecturale

Réalisation

Conception

détaillée

Spécifications

par lots

Spécifications

transverses

Validation

besoins

Appel d’offre

prospectif

Appel d’offre

détaillé

Appel d’offre

spécifié

fonctionnellement

Démarche proactive

- 71 -

C‟est ce scénario qui permet de répondre à la plus grande variété d‟appels d‟offre puisqu‟il

s‟affranchit de la maîtrise technologique.

Ce scénario est le plus ouvert et permet donc un renouvellement fort des projets et une

grande diversité des marchés ciblés. Et comme le dit F. FOURCADE p.99, l‟apprentissage se

trouve grandement accéléré si l‟industriel traite avec des clients différents et pratique un

renouvellement fort des générations de projets. Cet aspect renforce les opportunités

d‟apprentissage du scénario 1.

On retrouve le même type de situation dans le domaine de l‟automobile. Les équipementiers

qui sont aujourd‟hui moduliers étaient des assembleurs de composants de ce module, ces

composants ayant été imposés par le constructeur qui demandait aux prestataires d‟acheter les

composants à des fournisseurs qu‟il précisait. Les équipementiers ont au fur et à mesure

étendu leur savoir faire à des pièces plus techniques qui leur imposaient de comprendre les

problématiques du produit automobile en général.

3.5. Les scénarios 1 et 2 retenus

Ces scénarios 1 et 2 que l‟on qualifiera de scénarios d‟apprentissage permettent

également d‟identifier des « dynamic capabilities » ou capacités dynamiques

[EINSENHARDT & MARTIN] et des capacités de systémier qui seront utiles quel que soit le

scénario suivi dans un second temps.

F. FOURCADE a identifié chez SYSMOD sept capacités dynamiques, là encore on

observe avec plusieurs de ces capacités dynamiques de fortes similarités avec ce que l‟on a eu

l‟occasion d‟observer au sein des projets menés par DOSA.

- 72 -

4. Quelles compétences développer dans un temps

d’apprentissage ?

4.1. La création d’une compétence logistique de livraison

synchrone

Cette capacité dynamique n‟a pas d‟intérêt particulier pour SAGEM où il existe moins

de diversité pour un produit donné que dans le domaine de l‟automobile où coexistent pour un

véhicule différentes version (motorisation, couleurs…).

4.2. Le renforcement des compétences en recherche et

développement

Pour SAGEM DS, qui a su bâtir sa réputation sur la performance et la technicité de ses

produits, il s‟agit davantage d‟un élargissement que d‟un renforcement des compétences en

R&D. Il s‟agit également d‟une capacité de compréhension des besoins et d‟anticipation. La

veille, qu‟elle soit technologique ou orienté marché, apparaît comme essentiel dans le cadre

d‟offres systèmes.

La veille technologique permet de saisir de nouvelles opportunités notamment grâce à

des avancées technologiques : on peut satisfaire de nouveaux usages, ou encore les fonctions

accomplies par les nouvelles technologies permettent d‟identifier des besoins latents, ou alors

les nouvelles technologies remplissent la fonction beaucoup mieux que les technologies

précédemment employées (introduction d‟une innovation de rupture/saut dans la courbe en

S=>passage au WIFI/WIMAX=>augmentation du débit/de la portée=>nouveaux usages

possibles : images/vidéo // la taille de la BOA-Bulle Opérationnelle Aéroportée augmente).

BRUSONE et PRENCIPE (2001) insistent sur le fait qu‟il est important d‟étendre ses

connaissances bien au-delà de celles qui sont nécessaires à son périmètre de production :

- afin de créer de la valeur et de pouvoir élargir son périmètre de compétentes,

- 73 -

- afin de pouvoir se créer de nouvelles opportunités, identifier des nouveaux usages,

spécifier des interfaces et créer des barrières à l‟entrée

- afin de mieux apprécier les synergies possibles entre les différents constituants du

système et faire en sorte que 1+1=3

On peut prendre l‟exemple sur FELIN du textile : sans être capable de réaliser les

vêtements du fantassin, il a fallu pour DOSA être en mesure de comprendre et identifier les

besoins afin de faire réaliser ces derniers (F. FOURCADE utilise l‟exemple des matériaux

composites pour la structure chez SYSMOD).

F. FOURCADE insiste p.104 sur l‟apprentissage par l‟intermédiaire de transferts

technologiques entre les différents niveaux de la chaîne de valeurs. Cet apprentissage

collaboratif à travers une mise au point commune suit une logique gagnant - gagnant, voire

gagnant - gagnant - gagnant.

Dans le cas de SYSMOD la réalisation de modèles numériques avec les différents

niveaux de sous traitants a permis par la suite d‟accélérer les conceptions architecturales en

amont. Les deux parties sont gagnantes puisque le développement est accéléré pour

l‟architecte et le sous-traitant voit ses liens renforcés et plus durables avec l‟architecte.

4.3. La construction de nouveaux modèles économiques

Cette capacité dynamique amène à développer maintenant les questions des modes de

rémunération et de la justification de celle-ci.

F. FOURCADE explique que « Chaque projet est l’objet d’une nouvelle architecture,

de nouvelles contraintes d’encombrement, de nouvelles contraintes de normes, donc de

nouvelles solutions pour lever ces contraintes » ce qui colle parfaitement au scénario 1. Il en

résulte que la valeur d‟un architecte, à la manière d‟un consultant, est là pour faire face aux

problèmes et mettre en œuvre des outils particuliers de problem solving ou de réduction des

coûts afin de créer de la valeur sur un maximum d‟aspects.

- 74 -

4.4. Création d’une nouvelle intimité client

Cette partie a été développée précédemment dans :

II 1 i - Réunir les partenaires et « faciliter » l‟émergence d‟une solution.

4.5. Savoir adapter sa propre organisation

Cette partie a été développée précédemment

II 2 i - Les menaces qui pèsent sur l‟objectif système.

4.6. Apprendre à anticiper, voire contrôler les

mouvements dans la chaîne d’offre

Cette partie a été développée précédemment

II 1 i α - L‟intention stratégique, impulsion d‟une démarche proactive.

II 1 i β – Réceptionner les appels d‟offre dans un contexte réactif.

4.7. Savoir nouer des alliances stratégiques

Cette partie a été développée précédemment

II 1 i - Réunir les partenaires et « faciliter » l‟émergence d‟une solution.

- 75 -

E - Se rémunérer en tant qu’architecte

La question de la rémunération est une question essentielle pour les scénarios 1 et 2 ou

SAGEM base tout ou partie de sa rémunération sur l‟architecture. En effet il s‟agit d‟une

question nouvelle pour un acteur qui se rémunère classiquement sur les composants qu‟il vend

et qui intervient historiquement sur des marchés d‟équipements.

Dans un premier temps seront passés en revue les différents modes de rémunération

des entreprises de services (cabinets de conseil et stratégie, cabinet de banque d‟affaires et de

fusion/acquisition et cabinets d‟avocats) mais se basent sur des modes de rémunération

différents.

Dans un second temps, seront abordées les questions de la valorisation du travail

effectué et de la justification du travail architectural accompli.

1. Comment se rémunérer (forfait, %, mixte…)

Pour évaluer les modes de rémunération qui pourraient être utilisés par DOSA, il est

intéressant de regarder les modes de rémunération pratiqués dans différents secteurs : le

secteur du bâtiment puis d‟autres professions « intellectuelles » : conseils et avocats.

Les cabinets de conseil en stratégie, de banque d‟affaire, de fusion acquisition ou

encore d‟avocats sont confrontés à un même problème de même nature : ils sont amenés à

fournir une prestation « intellectuelle » à caractère immatériel et dont le résultat est parfois

difficilement quantifiable, d‟autant que ces professionnels sont le plus souvent soumis à une

obligation de moyen et non à une obligation de résultat. Le fruit de ce travail est en effet

constitué de recommandations, de conseils, de participation à des réunions, de séminaires, de

séances de formation voire de la participation à audiences judiciaires. Comment peut-on dès

lors facturer les différentes prestations effectuées au client ?

- 76 -

Ces cabinets proposent donc un travail de nature comparable mais pourtant leurs

modes de rémunération diffèrent :

- Un forfait pour le conseil en stratégie.

- Un pourcentage pour la fusion acquisition/Banque d‟affaire/introduction en

bourse, de plus en plus également pour les avocats qui se rémunèrent sur le gain

obtenu par leur client à l‟occasion d‟une action amiable ou judiciaire (à l‟instar de

ce qui se pratique aux USA).

- La vacation chez les avocats., les experts, les formateurs.

Pour tous ces modes, l‟importance de la rémunération est fonction :

- Du caractère exclusif de la prestation (adaptée spécialement aux besoins du client),

- De la complexité du dossier,

- De son degré d‟urgence,

- De la sensibilité du client au prix,

- Du positionnement tarifaire des concurrents,

- Du caractère réutilisable de la prestation,

- De la réputation du prestataire.

Ce montant doit donc tenir compte de l‟expertise de l‟industriel, DOSA, mais

également de la complexité du projet à accomplir.

1.1. La rémunération au forfait

Description

Ce type de rémunération fait l‟objet d‟un contrat qui résulte d‟une négociation entre

les deux parties. Ce contrat précise le montant de la rémunération et la nature des travaux

attendus.

L‟architecte doit décomposer alors son prix forfaitaire en différentes parties, cette

décomposition à pour but de permettre au client de voir comment DOSA arrive à ce prix et

permet également au client de négocier point par point le forfait.

- 77 -

Chaque sous partie de projet spécifiant la nature du lot, du travail et le montant

d‟heures à effectuer, la négociation peut s‟affiner puisque l‟on discute d‟avantage sur des taux

horaires, des pourcentages et des matières premières. Cette décomposition permet au client de

comprendre plus facilement la proposition technique de l‟offre et lui permet d‟évaluer sa

valeur technique mais également la façon dont l‟architecte va gérer le projet. La valeur de

l‟architecte semble plus forte s‟il précise qu‟il rencontrera les partenaires de façon

hebdomadaire plutôt que mensuelle.

Ce type de rémunération ne peut s‟appliquer que lorsque le système est suffisamment

spécifié (cf. cycle en V) afin de pouvoir déterminer pour chaque sous partie la nature des

travaux nécessaires.

Avantages

Si l‟étude prend moins de temps à réaliser que prévu, c‟est un bénéfice net pour

l‟entreprise qui réalise l‟étude. Il s‟agit d‟une forme de rémunération tout particulièrement

intéressante pour les entreprises ayant l‟habitude de faire du système et sachant évaluer

précisément ses charges d‟exploitation.

Inconvénients

Cependant il peut exister un risque pour le client : en effet, l‟industriel peut remettre

une offre volontairement sous évaluée et, une fois le contrat obtenu il cherche sans cesse à

négocier des avenants et à augmenter le forfait comme cela peut se pratiquer dans le secteur

du BTP (BOUYGUES).Un risque similaire existe également pour l‟industriel : si sa prestation

de départ est insuffisamment définie, le client risque d‟entraîner son fournisseur dans une

spirale inflationniste (des pénalités de retards peuvent avoir été négociées).

- 78 -

1.2. La rémunération au pourcentage

Description

Typiquement, si l‟on suit l‟exemple précédemment abordé des cabinets de fusion

acquisition, les deux parties s‟entendent avant l‟étude sur la commission. Cette commission

correspond à un certain pourcentage du deal : le prix du rachat/fusion/vente étudié, ou dans le

cas de DOSA des travaux qu‟il fait réaliser. Il peut également s‟agir d‟un pourcentage sur le

gain obtenu par le client… ce qui constitue un argument décisif de vente « Vous n‟avez rien à

perdre et tout à gagner » :

- Avocats.

- Conseillers fiscaux.

- Cabinets de risk-managers, courtiers en assurance sur les risques industriels.

Avantages

Dans des situations où l‟étude architecturale est « simple » et répétitive (cas des

systèmes de surveillance par exemple) ; ce mode de rémunération peut sembler tout

particulièrement adapté dans la mesure ou les appels d‟offre se ressemblent et que l‟hyper

spécialisation dans l‟analyse, la compréhension et la spécification des besoin des personnes

répondant à ce type d‟AO permet des gains de temps substantiels.

Inconvénients

On peut se demander en quoi ce mode de rémunération est adapté tant aux besoins du

client qu‟à ceux du fournisseur (sauf en cas de pourcentage sur les gains du client). En effet il

n‟y a pas de lien entre le montant des travaux et la charge de travail à effectuer pour l‟étude

architecturale. Par exemple selon la nature des matériaux mis en œuvre, et le pays de

fabrication, on pourra observer une différence significative.

L‟architecte gagnerait donc plus à faire réaliser les produits dans un pays où le coût de

la main d‟œuvre est élevé, et n‟aurait pas intérêt à négocier avec les sous traitants… par

lesquels il pourrait également être rémunéré par une commission, bien évidemment, occulte

- 79 -

pour le client. L‟architecte n‟aurait donc plus intérêt à chercher à faire des économies pour

son client. Il remplirait un rôle strict d‟architecte et n‟assurerait plus la fonction de chef de

projet. Il n‟y a pas de corrélation entre la qualité des matériaux et le lieu de production avec sa

charge de travail. Ce mode de rémunération présente donc pour le client un risque

inflationniste non négligeable, sauf à « enfermer » au départ le coût global dans une

enveloppe prédéfinie.

On observe parfois une certaine forme de dérive dans le secteur du bâtiment qui

pourrait se retrouver sur le type d‟offres systèmes que propose DOSA ou, l‟architecte n‟ayant

aucun intérêt objectif à faire diminuer le coût des travaux peut être tenté prolonger ceux-ci, et

peut donc chercher à ne tenir ni les délais, ni les coûts.

Enfin, on peut penser caricaturalement que plus l‟architecte fait d‟erreurs, plus le

projet coûte cher, et plus il sera rémunéré auquel cas son incompétence et son manque de

professionnalisme ne seraient plus sanctionnés mais récompensés.

1.3. La rémunération à la vacation

Description

Dans ce cas, l‟entreprise facture au client le temps passé. En effet le travail

d‟architecte est une prestation intellectuelle, on est donc amené à facturer de la matière grise,

du temps de travail. On peut donc penser qu‟il est simple et « honnête » de prévoir une

décomposition basée sur le nombre d‟heures et le taux horaire.

Avantages

Aucun risque pour l‟entreprise qui réalise l‟étude. Ce mode de facturation permet au

client d‟apprécier le travail prévu et permet de détecter des erreurs de surestimation ou sous

estimation du temps de travail. Comme pour la rémunération au forfait, on peut se constituer

une idée de la valeur technique de l‟offre.

- 80 -

Inconvénients

Coût pouvant être inflationniste pour le client. L‟architecte peut être tenté, tout comme

pour les rémunérations au pourcentage, de ne pas tenir les délais.

1.4. Discussion

On peut se également se demander si un mode de rémunération par pièce dans le cadre

de production en série ne serait pas adapté, c‟est-à-dire une part fixe et ensuite une part

variable en fonction du nombre d‟équipements produits. On retrouve dans le domaine du

bâtiment une loi qui prévoyait que la rémunération du maître d‟œuvre serait basée sur la

surface de la construction. (n.b. : cette forme de rémunération se rapproche très sensiblement

d‟une rémunération au pourcentage dans la mesure ou le montant d‟une réalisation dans le

secteur du bâtiment est très fortement corrélée à la superficie du bâtiment.)

On peut affiner le mode de rémunération au forfait et à la vacation en utilisant des

sous parties, des sous systèmes et en précisant la nature des personnes affectées (chef de

projet, ingénieur, technicien, commercial, conseiller technique, secrétaire…).

L‟architecte doit donc apporter de la valeur au projet et le client doit non pas se

demander « combien me coûte l‟architecte ? » mais plutôt « quelle valeur apporte-t-il à mon

projet ? » car l‟architecte, bien que rémunéré fait faire des économies.

2. Comment justifier sa rémunération

Dans cette sous partie nous allons nous intéresser à la justification de la rémunération

et nous étudierons deux façons de légitimer celle-ci : tout d‟abord en rendant le travail

palpable, et ensuite en abordant la question de la nature du rendu.

Ces différents aspects permettent ainsi d‟augmenter l‟attractivité pour le client mais

également le montant de la rémunération (le taux horaire, le pourcentage, ou le montant du

forfait).

- 81 -

2.1. En rendant le travail « palpable », en faisant ressentir

la quantité de travail

2.1.1. Personnalisation du service

Le fait de détacher des équipes chez le client permet une meilleure spécification des

besoins et une meilleure compréhension de l‟organisation du client.

Toutefois le systémier doit faire attention à ne pas transférer son savoir chez le client

qui pourrait alors se passer de ses services dans les projets suivants.

2.1.2. Valorisation de l’expertise du fournisseur

En s‟appuyant sur les systèmes déjà réalisés pour vendre ses compétences. En

accompagnant son client chez ses anciens clients pour montrer les réalisations, comme

peuvent le faire les architectes du bâtiment.

Le fait de travailler pour l‟État français est par exemple un gage de sérieux. Les projets

FELIN et AASM démontrent les compétences technologiques fortes détenues par SAGEM

qui on permis de mener à bien de tels projets.

2.2. Par la nature du rendu

2.2.1. Rendu virtuel : Appel à la simulation

Le virtuel offre de réelles perspectives d‟évolution : il permet d‟explorer tous les

champs du possible ce qui modifie totalement les phases de conception en permettant

d‟expérimenter tout un univers de possibilités de façon plus large et sans inertie.

Toutes ces possibilités pouvant être exposées au client non plus sous la forme austère

de plan en deux dimensions mais sous la forme d‟images numériques, de films où l‟on peut

même voir évoluer/interagir les objets et systèmes dans/avec un environnement complexe.

- 82 -

Exemple du LTO de THALES

LTO est l‟acronyme de Laboratoire Technico-Opérationnel, il s‟agit d‟un outil

utilisable dans la conception ou la réponse à un appel d‟offre système. Un LTO permet en

partant d‟une feuille blanche, de prendre en compte tous les besoins et de réaliser les

compromis entre les différents besoins à satisfaire (endurance, capacité des capteurs,

autonomie…) afin d‟aboutir à la spécification du système.

Les LTO permettent de s‟immerger dans l‟environnement et donc de simuler les

interactions entre le système et son environnement. On peut donc apprécier et éprouver in

vivo des choix architecturaux pensés in vitro. Non seulement l‟architecture du système peut

donc être testée mais des besoins latents peuvent être identifiés. On peut également tester et

valider des choix architecturaux. Cette étude virtuelle permet de réaliser des économies

importantes.

Les LTO sont donc non seulement un moyen technique permettant de mieux faire

visualiser aux clients les propositions. Les LTO qui sont des moyens de conception totalement

novateur permettent alors de présenter aux clients différents options, lesquels clients peuvent

arbitrer plus facilement entre les différentes options possibles.

- 83 -

On peut illustrer cette idée par l‟utilisation qu‟a pu faire THALES d‟un LTO : dans le

cadre d‟un projet de surveillance maritime, la simulation a montré qu‟avec un radar plus

puissant et plus de drones, on pouvait diviser par deux le nombre d‟avions nécessaires pour la

même permanence opérationnelle. Si le client a spécifié dans son cahier des charges l‟emploi

d‟avions, le LTO peut permettre à THALES de proposer une alternative plus adaptée.

- 84 -

Les LTO représentent un intérêt stratégique aussi bien pour les concepteurs que pour

les prescripteurs voulant évoluer dans un environnement système (de façon proactive ou

réactive).

Actuellement, les LTO sont des outils en cours de développement, il est possible de

bénéficier de financements publics pour développer ces outils par l‟intermédiaire de

groupements entre laboratoires privés et publics ou par l‟intermédiaire de pôles de

compétitivité.

Utilisation d’outils de conception et modélisation comme CATIA

DASSAULT AVIATION couple l‟utilisation de CATIA à un système d‟imagerie en

trois dimensions afin d‟avoir un rendu spatial optimal lors de la conception des jets d‟affaires

de type FALCON.

L‟utilisation par SAGEM DS d‟outils semblables permettrait d‟une part un gain de

temps non négligeable dans les phases de conception, mais constituerait également un

formidable outil pour les réponses aux appels d‟offre, en particulier aux AO systèmes.

En effet l‟utilisation de tels outils permet au client d‟avoir une représentation fidèle du

système et surtout d‟appréhender celui-ci dans l‟espace, voire même dans un environnement.

On peut par exemple modéliser le système et le placer sur un « mannequin virtuel », un

champ de bataille ou n‟importe quel environnement. Toutefois cette représentation n‟est que

« statique » contrairement au LTO.

2.2.2. Rendu physique : Appel à des maquettes => Cas de

JMM et de FELIN

Faire appel à des maquettes permet d‟offrir un meilleur rendu en offrant notamment

une meilleure perception en faisant appel à des nouveaux sens.

Il existe des perspectives énormes aujourd‟hui dans ce domaine grâce aux progrès

réalisés en matière de prototypage rapide.

- 85 -

L‟emploi de maquettes permet de plus de créer des connaissances selon en faisant

essayer le produit au consommateur, dès les premières phases de conception afin d‟obtenir un

retour et de se fermer le moins de courbes possible (cf. courbes de connaissance, de degré de

liberté et de coût en fonction de l‟avancement dans le projet d‟après C. Midler).

Les tests ergonomiques possibles permettent de valider ou d‟invalider des concepts

très rapidement.

Enfin l‟emploi de maquettes permet de se démarquer des concurrents, comme J.M.

MAZZANTI a su le faire dans le cadre du programme FELIN. En effet donner forme à un

système qui est difficile à se représenter de par sa nature complexe, permet de dialoguer plus

facilement avec le client. Le client perçoit ainsi les compétences en définition des besoins

mise en jeux ce qui est une façon pour DOSA de justifier sa rémunération et sa position de

systémier.

2.2.3. Qualité perçue des documents

Les documents remis aux clients dans le cadre d‟un appel d‟offre constituent la

première impression que les décideurs verront. Selon que l‟on remette un support numérique

et/ou un support physique et selon la qualité de ce support, on pourra transmettre une image

différente de l‟entreprise aux clients.

On peut prendre pour exemple les documents de réponse aux appels d‟offre visant à

attribuer des espaces de vente de détail dans les aéroports, qui prennent la forme de

documents particulièrement soignés.

- 86 -

Conclusion

Au travers de l‟étude de deux types de projets « système », l‟un proactif, l‟autre

réactif, nous avons cherché à identifier dans chacun des cas les toutes premières étapes de la

construction d‟une offre système, de la naissance du projet jusqu‟à la construction des

premières propositions de solution aux besoins systèmes.

Dans un contexte proactif, nous avons montré à quel point l‟impulsion initiale donnée au

projet était essentielle pour fédérer l‟ensemble des partenaires impliqués. En se référant au

cheminement d‟un nouveau produit de grande consommation, nous avons suggéré une

décomposition plus fine des phases amont de lancement de projet selon trois rôles successifs :

le marketing stratégique, le marketing développement et le marketing opérationnel.

Parallèlement, nous observons, dans un cadre proactif, les impacts de la disparition d‟un client

« maître d‟œuvre » (et dans une moindre mesure, de la concurrence) et proposons comme

substitut la notion « d‟enjeu stratégique » développée par Hamel et Prahalad.

La démarche réactive comporte d‟autres enjeux. A l‟origine du projet système réactif, il y a la

détection et le traitement de l‟appel d‟offre en cours ou à venir. Aussi nous proposons une

organisation spécifique permettant à la fois une connaissance précoce de l‟appel d‟offre et une

orientation optimale vers le département concerné.

Dans la construction d‟une offre système, l‟étape suivante réunie de la même façon les

démarches proactives et réactives. La formation d‟un consortium est un passage obligé de

toute offre système. A cette occasion, nous décrivons comment évolue le consortium, au gré

des arrivées et des départs de partenaires, jusqu‟à une phase de stabilisation. Pendant cette

même période, les propositions de solutions aux besoins système s‟élaborent faisant

apparaître de grands sous-ensembles fonctionnels. Ce processus d‟émergence de solutions est

orchestré par l‟industriel systémier qui doit stimuler et fusionner les savoirs de chaque

partenaire vers la satisfaction du besoin « système ». Ce travail, sorte de séance de créativité à

grande échelle, est comparable au rôle de « facilitateur » que nous décrivons.

Le cas particulier du projet BOSCA a fait apparaître plusieurs freins à l‟évolution de Sagem

DS vers un rôle de systémier. Les habitudes de conception en contexte proactif, la gestion de

nouveaux risques et modes de financement et une organisation matricielle peu appropriée ont

peu à peu infléchi les objectifs du projet. Mais peut-être que cette redéfinition du projet

permettra de reculer pour mieux sauter et d‟adapter à Sagem, la théorie de la « bowling

alley ».

- 87 -

Bibliographie

B.J Kolltveit et K Gronhaug; « The importance of the early phase : the case of

construction and building projects »

Friedman ; « Competitive bidding strategies », 1956

B.Cova, D.Bansard et J-P.Flipo ; « le marketing de projet : de la réaction à

l‟anticipation »

B.Cova ; « Nouvelles approches du marketing de la grande industrie »

C.Rogers ; “The flight of the Kittyhak”

Hamel et Prahalad ; « Strategic Intent »

B.Cova, R.Salle et R.Vincent ; « To bid or not to bid »

International Association of Facilitators , «Guide »

Henderson et Clark; « The reconfiguration of existing product technologies and the

failure of establisher firms »

Hobday; « The project-based organisation: an ideal form for managing complex

products and systems? »

G.Moore; « Crossing the Chasm »

- 88 -

Annexe : Division du projet BOSCA en lots de travail :

Niveau W P No Titre du Lot de Travaux Responsable Durée H/mois

00000 BOSCA T0

1 10000 Gestion 131

2 11000 Gestion de projet SAGEM DS 36 89

3 11100 Outil de travail collaboratif GET 36 12

2 12000 Stratégie Industrielle SAGEM DS 36 15

2 13000 Relations Etats/Collectivités SAGEM DS 36 15

2 14000 Comité Utilisateurs SAGEM DS 36

2 15000 Dissémination - Innovation - Emplois SAGEM DS 36

1 20000 Analyse opérationnelle et Fonctionnelle 562

2 21000 Analyse menaces et scénarios PôNT 6 27

3 21100 Analyse et scénario de crises - 1 6 12

3 21200 Analyse et scénario de crises - 2 6 13

3 21300 Analyse et scénario de crises - 3 6 10

3 21400 Analyse et scénario de crises - 4 6 10

2 22000 Exigences opérationnelles PôNT 6 90

2 23000 Etat de l'art et Références

3 23100 Etat de l'art des capteurs optiques, thermiques et radar ONERA

9 73

3 23200 Acquisition de situations de références ONERA 12 47

3 23300 Etat de l'art sur le géopositionnement 9 20

3 23400 Etat de l'art sur la détection d'évènement 9 33

3 23500 Etat de l'art de la robotique terrestre 9 22

3 23600 Etat de l'art sur la robotique aérienne 9 25

3 23700 Etat de l'art Simulation 9

2 24000 Concepts Système Intégré SAGEM DS 3 20

2 25000 Facteurs humains APSYS 36 110

2 26000 Exigences sociales, légales et ethiques APSYS 24 50

1 30000 Ingénierie Globale Système 717

2 31000 Architecture Système SAGEM DS 3 60

2 32000 Ingénierie senseurs ONERA 9 90

3 32100 Identification des capteurs 9 33

3 32200 Géopositionnement de l'information image 9 50

3 32300 Algorithmie mono-image 9 50

4

3235

0

Algorithmie séquence d'images aériennes

9 64

3 32400 Algorithmie multi-images 9 57

3 32500 Synthèse méthodologique et technologique 9 19

2 33000 Ingénierie des robots aéroterrestres ONERA 9 64

- 89 -

3 33100 Aérien 9 48

3 33200 Ingénierie robots terrestres 9 24

2 34000 Ingénierie réseau et transmission GET 9

3 34100 Réseaux de collecte 9 6

3 34200 Déploiement de réseaux éphémères 9 24

3 34300 Transmission 9 12

2 35000 Ingénierie SI et administration SAGEM DS

9 68

2 36000 Ingénierie simulation et modélisation Mines 9 48

1 40000 Développement de technologie 777

2 41000 Systèmes de Capteurs ONERA 15 142

2 42000 Transmissions données capteurs GET 15 42

2 43000 Systèmes de Communications GET 15 6

3 43100 Communication capteurs 15 116

2

44000 Développement et adaptation des systèmes et plates-formes

robotiques aériennes ONERA 15 54

3 44100 Etude et dvlpt plate-formes robotique aérien 15 128

3 44200 Etude et dvlpt plate-formes robotique terrestres 15 54

2 45000 Traitement de l'information SAGEM DS 15 39

3 45100 traitement des mesures capteurs 15 55

3 45200 traitement table tactique 15 39

2 46000 Outils d'aide à la décision Mines 15 96

3

46100 développement d'outils de suivi de situation et d'aide à la

décision

Mines

15 6

1 50000 Intégration 360

2 51000 Intégration Sous-systèmes SAGEM DS 9 51

2 52000 Validation des sous-systèmes SAGEM DS 9 6

3 52100 Validation des sous-systèmes capteurs 9 102

3 52200 Validation des sous-systèmes de robotique aérienne

9 30

3 52300 Validation des sous-systèmes robotique terrestre 9 24

3 52400 Transmissions et Communications 9 20

2 53000 Evaluations & Certification ONERA 9 17

2 54000 Préparation Infrastructures PôNT 9 12

2 55000 Simulation de fonctionnement de la bulle BOSCA Mines 9 66

3 55100 Simulation de fonctionnement des capteurs 9 32

1 60000 Validation 331

2 61000 Démonstration sous-systèmes SAGEM DS 3 102

2 62000 Démonstration finale PôNT 3 104

2 63000 Simulation de crise APSYS 3 36

2 64000 Retour d'expérience Mines 3 63

2 65000 Démonstration Opérationnelle 3 26

TOTAL

2878

- 90 -