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Veille Juridique du Secteur Juridique du 14 septembre au 18 septembre 2015 FO Secteur Juridique : 01 40 52 83 54- : 01 40 52 83 48 [email protected] [email protected] Textes législatifs et réglementaires Formation des conseillers prud’hommes Le décret n°2015-1153 du 16 septembre 2015, relatif à la prorogation des agréments accordés à certains organismes et établissements publics et des conventions conclues avec ceux-ci pour assurer la formation des conseillers prud'hommes, est paru au JO du 18 septembre dernier. Jurisprudence Règlement intérieur autorisant les tests salivaires Une cour administrative d’appel censure un projet de règlement intérieur qui prévoyait la possibilité pour l’employeur de réaliser, afin de dépister la consommation de stupéfiants chez des salariés occupant des postes « hypersensibles », des tests salivaires aléa- toires. En cas de résultat positif, une sanction disciplinaire pouvait être prononcée (CAA Marseille, 21-8-15, n°14MA02413). La cour administrative d’appel a estimé que : « en faisant pratiquer ces tests par un supérieur hiérarchique et en prévoyant la possibilité d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement dans l’hypothèse d’un résultat positif » le projet de règlement porte « une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives par rapport au but recherché ». Inaptitude Portée du recours contre l’avis du médecin du travail Le Conseil d’Etat (CE., 31-7-15, n°383383) a jugé que : « en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le méde- cin du travail concernant l’aptitude d’un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l’inspecteur du travail, saisi par l’une des parties, ou le cas échéant au ministre en cas de recours hiérarchique, de se prononcer définitivement sur cette aptitude ; que cette apprécia- tion, qu’elle soit confirmative ou infirmative de l’avis du médecin du travail, se substitue à cet avis ». En conséquence, « seule la décision rendue par l’inspecteur du travail et, le cas échéant, par le ministre, est susceptible de faire l’objet d’un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ». Licenciement disciplinaire « Le fait qu’une infraction a été commise par un salarié avec l’auto- risation d’un supérieur hiérarchique ne retire pas à ses agissements leur caractère fautif » (Cass. soc., 1-7-15, n°14-12190). QPC Obligation d’emploi de travailleurs handicapés Le Conseil d'Etat a transmis au Conseil constitutionnel une QPC portant sur une potentielle rupture d'égalité entre les groupements d'employeurs et les entreprises de travail temporaire concernant les modalités d’application de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés à hauteur de 6% de l’effectif total (CE., 11-9-15, n°389293). QPC Financement des organisations syndicales Le Conseil d’État a transmis au Conseil constitutionnel, une QPC sur la répartition des fonds de financement des partenaires sociaux. Une rupture du principe d’égalité est soulevée. En effet, il ressort de l’article L 2135-13 que la répartition d’une partie des fonds se fait de façon uniforme pour les organisations syndicales de salariés et en fonction de l’audience ou du nombre des mandats paritaires exercés pour les organisations professionnelles d’employeurs (CE., 14-9-15, n°389127). QPC Paiement de frais d’expertise par l’employeur La Cour de cassation a admis la transmission au Conseil constitutionnel de la QPC suivante « les dispositions de l’ar- ticle L. 4614-13 du code du travail et l’interprétation juris- prudentielle constante y afférente sont-elles contraires aux principes constitutionnels de liberté d’entreprendre et/ou de droit à un procès équitable lorsqu’elles imposent à l’employeur de prendre en charge les honoraires d’expertise du CHSCT notamment au titre d’un risque grave, alors même que la décision de recours à l’expert a été judiciairement (et définiti- vement) annulée ? » (Cass. soc., 16-9-15, n°15-40027).

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septembe0

Veille Juridique

du Secteur Juridique du 14 septembre au 18 septembre 2015

FO

Secteur Juridique : 01 40 52 83 54- : 01 40 52 83 48

[email protected] [email protected]

Textes législatifs et réglementaires

► Formation des conseillers prud’hommes

Le décret n°2015-1153 du 16 septembre 2015, relatif à la prorogation des agréments accordés à certains organismes et établissements publics et des conventions conclues avec ceux-ci pour assurer la formation des conseillers prud'hommes, est paru au JO du 18 septembre dernier.

Jurisprudence

► Règlement intérieur autorisant les tests

salivaires Une cour administrative d’appel censure un projet de règlement intérieur qui prévoyait la possibilité pour l’employeur de réaliser, afin de dépister la consommation de stupéfiants chez des salariés occupant des postes « hypersensibles », des tests salivaires aléa-toires. En cas de résultat positif, une sanction disciplinaire pouvait être prononcée (CAA Marseille, 21-8-15, n°14MA02413). La cour administrative d’appel a estimé que : « en faisant pratiquer ces tests par un supérieur hiérarchique et en prévoyant la possibilité d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement dans l’hypothèse d’un résultat positif » le projet de règlement porte « une atteinte disproportionnée aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives par rapport au but recherché ».

► Inaptitude – Portée du recours contre l’avis du

médecin du travail

Le Conseil d’Etat (CE., 31-7-15, n°383383) a jugé que : « en cas de difficulté ou de désaccord sur les propositions formulées par le méde-cin du travail concernant l’aptitude d’un salarié à occuper son poste de travail, il appartient à l’inspecteur du travail, saisi par l’une des parties, ou le cas échéant au ministre en cas de recours hiérarchique, de se prononcer définitivement sur cette aptitude ; que cette apprécia-tion, qu’elle soit confirmative ou infirmative de l’avis du médecin du travail, se substitue à cet avis ». En conséquence, « seule la décision rendue par l’inspecteur du travail et, le cas échéant, par le ministre, est susceptible de faire l’objet d’un recours devant le juge de l'excès de pouvoir ».

► Licenciement disciplinaire

« Le fait qu’une infraction a été commise par un salarié avec l’auto-risation d’un supérieur hiérarchique ne retire pas à ses agissements leur caractère fautif » (Cass. soc., 1-7-15, n°14-12190).

► QPC – Obligation d’emploi de

travailleurs handicapés Le Conseil d'Etat a transmis au Conseil constitutionnel une QPC portant sur une potentielle rupture d'égalité entre les groupements d'employeurs et les entreprises de travail temporaire concernant les modalités d’application de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés à hauteur de 6% de l’effectif total (CE., 11-9-15, n°389293).

► QPC – Financement des organisations

syndicales

Le Conseil d’État a transmis au Conseil constitutionnel, une QPC sur la répartition des fonds de financement des partenaires sociaux. Une rupture du principe d’égalité est soulevée. En effet, il ressort de l’article L 2135-13 que la répartition d’une partie des fonds se fait de façon uniforme pour les organisations syndicales de salariés et en fonction de l’audience ou du nombre des mandats paritaires exercés pour les organisations professionnelles d’employeurs (CE., 14-9-15, n°389127).

► QPC – Paiement de frais d’expertise par

l’employeur La Cour de cassation a admis la transmission au Conseil constitutionnel de la QPC suivante « les dispositions de l’ar-ticle L. 4614-13 du code du travail et l’interprétation juris-prudentielle constante y afférente sont-elles contraires aux principes constitutionnels de liberté d’entreprendre et/ou de droit à un procès équitable lorsqu’elles imposent à l’employeur de prendre en charge les honoraires d’expertise du CHSCT notamment au titre d’un risque grave, alors même que la décision de recours à l’expert a été judiciairement (et définiti-vement) annulée ? » (Cass. soc., 16-9-15, n°15-40027).

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Veille Juridique

du 14 au 18 septembre 2015

Secteur Juridique FO

F O C U S

Nouvelle victoire de FO sur la recevabilité de l’action en justice des syndicats !

Les syndicats peuvent devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent (art. L 2132-3 du code du travail).

A contrario, les syndicats ne peuvent, en principe, pas défendre les intérêts individuels des salariés. Pour soutenir les salariés dans la défense de leurs intérêts individuels, les syndicats peuvent uniquement intervenir, d’une part, dans le cadre de l’assistance voire la représentation des salariés et, d’autre part, via l’action en substitution dans des domaines limitativement énumérés.

La frontière entre intérêt collectif et intérêt individuel est poreuse. Il arrive que l’intérêt individuel soit également un intérêt collectif.

Très fréquemment la question de la recevabilité de l’action du syndicat fait débat devant le juge. Une affaire récemment gagnée par FO en témoigne (Cass. soc., 9-7-15, n°14-11752).

En l’espèce, FO a saisi le juge des référés pour non-respect, dans un établissement de la société Ikea, de la législation ainsi que des dispositions conventionnelles en matière de temps de travail. La demande formulée devant le juge consis-tait à ce qu’il soit accordé à chacun des salariés des repos légaux obligatoires mais aussi que soient respectées les durées maximales de travail et octroyée une somme provi-sionnelle à valoir sur la réparation du préjudice subi.

La cour d’appel a déclaré l’action de FO irrecevable pour deux raisons.

Le premier moyen énonçait que FO n’aurait pas démontré le bien-fondé de son action.

Concrètement, la cour d’appel estimait que l’élément produit par FO (à savoir une étude réalisée par les délégués du per-sonnel répertoriant les anomalies de badgeage et les consta-tations faites par certains salariés de l’établissement) ne démontrait pas « l’inexécution par l’employeur de ses obliga-tions réglementaires » et l’atteinte à l’intérêt collectif de la profession.

Fort heureusement, ce premier moyen est rejeté par la Cour de cassation qui souligne que « l’intérêt à agir n’est pas subor-donné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action ».

La démonstration du bien-fondé de l’action relève bien évidemment du débat au fond. Il s’agit ici d’une reprise de la

jurisprudence constante de la Cour de cassation (Cass. 2e civ., 6-5-04, n°02-16314 ; Cass. 3e civ., 16-4-08, n°07-13846).

Le second moyen avancé par la cour d’appel est que « la méconnaissance par la société des règles relatives à l’organi-sation du temps de travail ne pourrait concerner le cas échéant que certains salariés, et non tous, et que le syndicat ne justifie nullement exercer une action tendant à faire sanc-tionner une violation générale et systématique par la société de la réglementation et de l’accord collectif en matière de temps et de durée du travail ».

Sans surprise, ce second moyen est également cassé par la Cour de cassation qui rappelle que « l’action introduite par un syndicat sur le fondement de l’article L. 2132-3 du code du travail est recevable du seul fait que ladite action repose sur la violation d’une règle d'ordre public social destinée à protéger les salariés, la circonstance que seuls quelques salariés d'une entreprise ou d’un établissement seraient concernés par cette violation étant sans incidence sur le droit d'agir du syndicat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».

Pour que l’action en justice du syndicat soit recevable, il ne faut pas, fort heureusement, que la violation de la réglemen-tation soit effectuée à l’encontre de chaque salarié de la so-ciété. Ce qui importe est que l’inobservation de la réglemen-tation porte préjudice à l’intérêt collectif de la profession. En effet, de nombreux contentieux individuels soulèvent des questions de principe qui concernent la collectivité de salariés.

La Cour de cassation s’est, par cet arrêt, conformée à sa jurisprudence en la matière.

Par exemple, la Cour de cassation a admis la recevabilité de l’intervention d’un syndicat concernant un contentieux en requalification des CDD en CDI intenté par un seul salarié dans la mesure où « la violation des dispositions relatives au contrat à durée déterminée est de nature à porter préjudice à l'intérêt collectif de la profession » (Cass. soc., 28-9-11, n° 09-71139).

En matière de recevabilité de l’action en justice des syn-dicats, la Cour de cassation rappelle ainsi aux juges du fond qu’il ne faut pas regarder par le petit bout de la lorgnette pour apprécier l’ampleur de la violation par l’employeur de la réglementation du travail. Derrière un contentieux individuel, il y a très souvent l’intérêt de l’ensemble de la communauté de travail qui est en jeu.