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ECOLE DE PSYCHOLOGUES PRATICIENSUNIVERSITE CATHOLIQUE DE PARIS23, rue du Montparnasse75006 Paris
MEMOIRE DE RECHERCHEEn vue de l’obtention du
DIPLOME DE PSYCHOLOGUE
TITRE :
LE DEVELOPPEMENT AFFECTIF DE L’ENFANT
INTELLECTUELLEMENT PRECOCE
Effectué sous la direction du Professeur Madame SAINT-AUBIN
Par : Julia Legrand
Promotion : 2004
Option : Psychopathologie
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REMERCIEMENTS
Je tiens tout d’abord à remercier Madame Saint-Aubin d’avoir bien
voulu diriger mon mémoire, de m’avoir encouragée et soutenue dans
ma démarche.
Mes plus sincères remerciements à Madame Delage pour ses précieux
conseils et sa disponibilité tout au long de cette recherche.
Merci également à l’établissement qui m’a accueilli.
Je remercie tout particulièrement les enfants et leurs parents qui ont
accepté de participer à la recherche.
Une pensée spéciale pour Erwann, pour son aide et son soutien
quotidien, pour Saïdeh Reza, ainsi que pour ma famille, pour les
finitions de mon mémoire.
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TABLE DES MATIERES
Introduction p.7
Partie théoriqueI. Intelligence et précocité intellectuellep.12A) Intelligence, généralités p.121. Définition
p.122. Les principales théories de l’intelligence p.13a- Du facteur g aux conceptions multifactorielles p.13b- Des théories innovantes : Sternberg et Gardner p.143. Le développement cognitif selon J. Piaget
p.15a- Les concepts fondamentaux p.15b- Les stades de développement de l’intelligence p.154. Les tests d’intelligence p.16a- De l’âge mental au et Q.I.de développement p.17b- D. Wechsler : Q.I. et intelligence globale p.17c- Les tests piagétiens
p.18d- Autres épreuves d’intelligence p.19
B) La précocité intellectuelle ou le « surdon » p.205. Historique
p.206. Définition
p.22a- Désignation : Précoce ou surdoué ? p.22b- Définition quantitative p.24c- Des approches divergentes
p.251. Caractéristiques de l’enfant « surdoué » p.27d- Des capacités cognitives différentes p.27e- Une certaine précocité p.28f- Le goût des connaissances p.28g- La créativité et l’humour p.292. Dépistage de l’enfant « surdoué » p.30h- Les outils d’investigation p.31i- Impact sur l’enfant et sa famille p.32j- Hypothèse d’une mauvaise identification p.33k- « Surdoués » et mesures pédagogiques p.343. Origine du don entre génétique et environnement p.35l- Les facteurs génétiques et de milieu dans l’intelligence p.36m- Le poids de l’environnement dans le « surdon » p.36n- L’influence des facteurs génétiques p.37
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II. Développement affectif et précocité intellectuellep.39B) Le développement affectif de l’enfant p.391. Le développement psycho-affectif selon la théorie psychanalytique
freudiennep.40
a- Rappel sur les instances psychiques p.40b- Les stades pré-génitaux du développement libidinal p.412. Les étapes de l’enfance p.44a- Le complexe d’œdipe p.44b- La période de latence p.47c- La puberté et l’adolescence p.503. Les processus de maturation selon D. Winnicott
p.51a- Le self et le « faux self » p.51b- Les phénomènes transitionnels p.53c- Le jeu et la créativité p.53
C) L’enfant « intellectuellement précoce » p.554. Développement affectif et construction identitaire p.55a- La construction de l’image de soi p.55b- Les processus d’identification p.57c- La situation œdipienne p.595. Les particularités de l’enfant « surdoué »
p.60a- L’hypersensibilité p.60b- L’intolérance à la frustration p.61c- La dyssynchronie interne p.62d- La dyssychronie sociale p.636. Les mécanismes de défense privilégiés p.67a- L’intellectualisation p.67b- La rationalisation p.68c- La sublimation p.69d- Hypothèses explicatives de l’hyper investissement intellectuel p.707. Psychopathologie des enfants « surdoués » p.71a- Une certaine fragilité p.71b- Les troubles psychopathologiques p.72c- La prise en charge p.748. En conclusion p.75
Conclusionp.76
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Partie pratiqueI.Méthodologie p.79A) Méthodologie de la recherche p.79
1. Présentation de la population d’étude p.79a- L’école p.79b- Présentation de l’échantillon p.80
2. Présentation de la recherche p.81a- Présentation de le recherche aux parents p.81b- Rencontres avec les enfants p.82
3. Les outils d’analyse p.83a- L’entretien p.83b- Le test Patte Noire p.83c- Le test Phrases à compléter p.85
4. Les méthodes d’analyse p.87a- Analyse du test Patte Noire p.87b- Analyse du test Phrases à compléter p.89
B) Réflexion éthique p.901. Quelques définitions p.902. Questionnement moral et éthique autour de la notion de « surdon » p.913. Questions déontologiques sur les techniques d’évaluations p.934. Réflexion morale et éthique sur le travail du chercheur p.94
II. Présentation et analyse des résultatsp.97A) Analyse des protocoles du test Patte Noire p.971. Synthèses individuelles p.98a- Etude de cas n°1 : Sophie p.98b- Etude de cas n°2 : Noé p.101c- Etude de cas n°3 : Eric p.105d- Aperçus des conclusions des autres études de cas p.1092. Etude comparative entre les enfants « surdoués » p.116a- Tableaux récapitulatifs des images aimées et des identifications p.116b- L’image de soi p.121c- Maturité et construction identitaire p.125
B) Analyse des Phrases à compléterp.1301. Réactions en situation sociale de stress
p.130a- Les réactions face à l’autorité p.130b- Les réactions face à l’échec p.132c- Les réactions face au rejet p.1342. Le contact avec l’entourage p.136a- Les relations avec l’entourage p.136b- La personne préférée p.1383. L’image de soi p.139a- La représentation de soi p.139
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b- La maturité p.1414. L’anxiété p.143a- Les inquiétudes p.143b- Les causes de souffrance p.145c- La culpabilité p.146III. Discussionp.147A) Analyse des résultats à la lumière des hypothèses p.1481. Première hypothèse : les enfants « surdoués » sontmoins matures que les autres enfants
p.148a- Dans le test Patte Noire p.148b- A travers le test Phrases à compléter p.150c- Conclusion p.1542. Deuxième hypothèse : le développement affectif des enfants « surdoués » estdifférent des autres enfantsp.157a- Un Surmoi écrasant p.157b- Une construction difficile des identifications parentales
p.158c- Une situation œdipienne complexe
p.159d- Une prise d’autonomie conflictuelle p.1613. Troisième hypothèse : les enfants « surdoués » sont plus anxieux que lesautres enfantsp.164
B) Limites et intérêts de la recherchep.1661. Les biais concernant le test Patte Noire
p.1662. Les limites du test Phrases à compléter
p.1673. Réflexion sur nos groupes d’enfants étudiés p.1704. Intérêts et apports de notre recherche
p.172
CONCLUSION GENERALEp.173
Références bibliographiques p.178
Annexesp.182
1. Lettres aux parentsp.183
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2. La grille d’entretienp.185
3. Le test Phrases à compléterp.186
4. Les études de casp.187
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« Il n’est pas aisé d’être exceptionnel dans son enfance et l’onpeut penser que bien des sujets risquent de développer, au nommême de leur qualité intellectuelle exceptionnelle, des
difficultés d’ordre affectif qui peuvent peser sur leur avenir » Duché, D.-J. (1979).
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INTRODUCTION
Cette recherche a pour origine un désir d’étudier le vécu affectif de
l’enfant, sa manière de ressentir et de gérer une situation particulière ou
difficile. Ainsi, je me suis intéressée à diverses populations d’enfants :
difficultés scolaires, situation de divorce des parents, problèmes de
comportement (…). C’est par la suite, en discutant avec une
psychothérapeute travaillant avec des enfants, que j’ai pris conscience de
l’importance du « phénomène surdoué ». En effet, un grand nombre de
parents étaient en demande d’une passation de test de Q.I. afin d’avoir
confirmation ou non de « l’exceptionnalité » de leur enfant. Cette remarque a
suscité mon intérêt pour ce sujet, entraînant de nombreuses questions autour
de ces enfants et de leur vécu affectif.
Le thème des enfants « surdoués » est très médiatisé aujourd’hui. Il a
fait l’objet de plusieurs émissions grand public et d’ouvrages multiples
proposant des conseils aux parents. Cependant, il existe de nombreuses
confusions et des préjugés autour de ce sujet, que nous allons essayer
d’éclaircir dans cette étude.
Nous verrons que la réussite scolaire et le niveau intellectuel de
l’enfant sont devenus une préoccupation majeure des parents, à l’heure où la
pression sociale de notre société se fait de plus en plus forte. En effet, notre
civilisation est basée sur la compétition et le culte de la réussite
socioprofessionnelle qui semblent être devenus, depuis les années quatre
vingt, le garant d’un certain bien-être.
Ainsi, on assiste à une focalisation sur le développement cognitif de
l’enfant. Certains parents tentent de « créer » un enfant « surdoué », d’autres
voient derrière ce terme l’explication des divers troubles de leur enfant. De
ce fait, les demandes de consultations se sont multipliées avec l’objectif
premier d’obtenir le fameux quotient intellectuel.
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Quant au système scolaire, il cherche parfois des solutions mais paraît
bien souvent inadapté à l’enfant « intellectuellement précoce ». Les mythes et
les idées préconçues subsistent, et les enfants en paient souvent les
conséquences.
Les représentations autour de ce sujet sont multiples et inadéquates,
centrées sur le potentiel intellectuel de ces enfants, au dépend de leur
personnalité singulière. Le travail du psychologue est donc délicat et freiné
par des parents en attente d’un unique chiffre, puis par une visée égalitaire de
l’école. Selon C. Meljac1, il est « de la responsabilité des psychologues
d’aider nos concitoyens à se forger d’autres représentations du monde, plus
pertinentes et susceptibles de fournir des instruments de réflexion autrement
efficaces que les éternels rabâchages autour du miracle des surdoués ».
La vie mentale de l’enfant est caractérisée par une « prédominance de
l’aspect affectif dans tous les états et tous les processus psychologiques»2.
L’enfant est en prise avec de nombreuses émotions et sentiments qu’il ne
maîtrise pas toujours mais qui dominent sa vie.
Ainsi, de nombreux auteurs ont reconnu la correspondance étroite
entre le développement affectif et cognitif. Certains parlent de
« parallélisme »3 entre ces deux aspects, d’autres d’une « priorité de
l’affectif sur le cognitif »4. Quoiqu’il en soit, nous verrons que l’affectivité
est primordiale dans la vie de l’enfant et déterminante pour sa vie d’adulte,
puisqu’elle est le fondement de sa personnalité.
Chez l’enfant défini comme intellectuellement précoce, l’aspect
cognitif est alors sur le devant de la scène. Mais qu’en est-il de son
développement affectif et de ses caractéristiques?
1 Meljac, C. (2004). Alertez les surdoués. Le journal des psychologues, n°217, 58-60.2 Zazzo, R., Gratiot-Alphandéry, H. (1970). Traité de psychologie de l’enfant. Puf.3 Piaget, J. (1964). Six études de psychologie. Paris : Gallimard.4 Zazzo, R., Gratiot-Alphandéry, H. (1970). Les auteurs citent H. Wallon, pour qui il existeune précocité du développement affectif par rapport au développement intellectuel.
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Dans cette étude, nous nous intéresserons à la personnalité entière de
l’enfant « intellectuellement précoce », en cherchant à comprendre son vécu
interne, ses mécanismes et ses conflits intra-psychiques.
L’hypothèse principale de notre recherche est qu’il existe un décalage
entre les capacités intellectuelles supérieures et le développement affectif des
enfants « surdoués ».
Ainsi, une première hypothèse est que, sur un plan affectif, ces
enfants seraient moins matures par rapport aux enfants du même âge.
Une deuxième hypothèse met en valeur un développement affectif
différent des autres enfants : Surmoi excessif, construction des identifications
parentales difficiles, prise d’indépendance conflictuelle. De même, l’enfant
« surdoué » vivrait différemment la situation œdipienne, l’assumant plus
difficilement : de part ses capacités de raisonnement et de compréhension, les
sentiments ambivalents de la période œdipienne se vivraient de manière plus
angoissante.
Une troisième hypothèse est que ces enfants sont plus anxieux que les
enfants « normaux », mais ne le montrent pas ou l’expriment différemment.
Ils s’inquiéteraient plus facilement et auraient une perception d’eux-mêmes
et une vision de la vie plus douloureuses.
Afin d’étayer nos hypothèses, nous allons développer une partie
théorique, étudiant la littérature existant autour des enfants « surdoués », et
une partie pratique centrée sur notre travail personnel sur le terrain.
Dans notre partie théorique, nous effectuerons donc une revue des
différentes études et écrits effectués sur ce sujet. Ainsi, nous proposerons tout
d’abord un bref rappel sur la notion d’intelligence et sur les tests utilisés, puis
nous exposerons les difficultés existants autour de ce thème. De fait, nous
discuterons des diverses définitions de la « précocité intellectuelle », et du
dépistage de ces enfants. Ensuite nous développerons succinctement les
origines de cette particularité, entre génétique et environnement.
Dans un deuxième temps, nous centrerons notre exposé sur le
développement affectif de l’enfant. Nous étudierons d’abord, à travers
différents auteurs, les étapes du développement ainsi que les signes de
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maturité et d’équilibre affectif. Puis, nous nous intéresserons aux
caractéristiques du développement affectif de l’enfant « surdoué ». Nous y
exposerons les particularités du fonctionnement psychique de ces enfants.
Pour finir, nous évoquerons les troubles psychopathologiques rencontrés par
ces sujets.
Dans une deuxième partie dite pratique, nous exposerons, en premier
lieu, la méthodologie appliquée dans notre travail de recherche. Après une
réflexion éthique sur notre sujet, nous expliciterons la méthode et les outils
d’investigation, puis les outils d’analyse utilisés. De même, nous
développerons les méthodes d’analyse des tests de notre recherche.
Dans le second chapitre de cette partie, nous présenterons les résultats
de notre travail sur le terrain, auprès de neuf enfants dits « intellectuellement
précoces », en classe de sixième. Une analyse des protocoles du test Patte
Noire, sous forme de synthèses individuelles, sera effectuée. Ensuite, nous
recouperons ces résultats à l’aide de l’analyse thématique. Puis nous
exposerons une analyse comparative, à partir du test Phrases à compléter,
entre notre groupe d’étude et un groupe contrôle.
Enfin, une discussion sera proposée afin de confirmer ou d’infirmer
nos hypothèses au regard de nos résultats. Nous conclurons cette dernière
partie par une réflexion sur les biais et les limites de notre recherche, ainsi
que sur les intérêts et apports de ce mémoire.
Dans un premier temps, nous allons donc tenter d’éclaircir le lecteur
sur le principal acteur de cette étude : l’enfant « surdoué ». Et ce, en
établissant une synthèse des recherches et écris publiés dans ce domaine.
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PARTIETHEORIQUE
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I. INTELLIGENCE ET PRECOCITE
INTELLECTUELLE.
A) L’INTELLIGENCE, GENERALITES
On ne peut étudier l’enfant « intellectuellement précoce » sans définir
au préalable l’intelligence. Ainsi, cette première partie propose un aperçu des
diverses théories de l’intelligence et des tests psychométriques l’évaluant.
L’intelligence est considérée comme une valeur essentielle dans notre
société permettant la réussite sociale, le pouvoir, la richesse. Objet de
multiples recherches et théories, elle a suscité de nombreux débats et, encore
aujourd’hui, les scientifiques continuent à s’interroger sur de nouvelles
formes de l’intelligence.
1. Définition.
Les conduites intellectuelles sont diverses, variant «dans leur nature
suivant le but qu’elles se proposent et le niveau de développement du sujet
chez lequel on les observe »5. Depuis longtemps l’existence d’un facteur
commun à ces conduites est reconnue. Mais l’apparition des tests
d’intelligence a entraîné des divergences autour de ce facteur.
Etymologiquement, l’intelligence vient du latin intelligere qui signifie
comprendre. De nombreuses définitions se sont appuyées sur les notions de
compréhension et d’adaptation, caractérisant l’intelligence par une
aptitude à s’adapter à des situations nouvelles. Ainsi, l’intelligence
correspond aux « ressources et modalités cognitives engagées dans l’analyse
et la compréhension des situations, qui activent un répertoire de
comportement et visent l’adaptation au réel »6. Avec l’arrivée des tests,
l’intelligence a été réduite à l’aptitude à résoudre des problèmes concrets ou
5 Delay, J., Pichot, P. (1962). Psychologie. Paris: Masson6 Bernaud, J.L. (2000). Tests et théories de l’intelligence. Paris : Dunod.
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abstraits, dont l’ « aptitude à la conceptualisation »7, facteur commun à la
résolution de tous les problèmes.
2. Les principales théories de l’intelligence
Au cours du vingtième siècle, l’étude de l’intelligence a connu
différentes phases et fluctuations et la question de l’unité de l’intelligence n’a
cessé de se poser. De fait, il n’existe pas de définition scientifique de
l’intelligence mais des approches diverses selon les auteurs. Nous exposons
ici une revue succincte8 de certains modèles de la structure de l’intellect.
a- Du facteur G aux conceptionsmultifactorielles
La « théorie du facteur G », explicitée par Spearman (1920), aborde
l’intelligence de manière générale et spécifique. Selon l’auteur, les activités
intellectuelles sont dépendantes d’un facteur général, le « facteur g », et de
facteurs spécifiques. Cependant, cette théorie a été critiquée de part son
approche simpliste et uniforme.
L.Thurstone (1938), qui influença de nombreux théoriciens, proposa
un modèle des aptitudes multiples en identifiant sept facteurs caractérisant
les aptitudes intellectuelles (fluidité verbale, mémoire, vitesse perceptive…).
R.B.Cattel et J.L.Horn (1991) ont élaboré un modèle, un des plus
reconnu aujourd’hui, distinguant une intelligence fluide et une cristallisée9.
L’intelligence fluide correspond aux processus mentaux complexes, aux
capacités de raisonnement et l’intelligence cristallisée, façonnée par
l’expérience, est liée à la culture et à l’éducation.
Citons enfin J.B. Caroll (1993) qui a présenté une recherche
empirique synthétisant les travaux des factorialistes. Il s’agit d’un modèle
7 Delay J., Pichot, P. (1962). 8 Succinct car là n’est pas le sujet de notre étude. Cependant, un éclaircissement desprincipaux modèles existants et utilisés dans ce domaine nous paraît pertinent en vue desexposés suivants. 9 Cattel et Horn ont également mis en avant sept autres facteurs intervenants dans lesconduites intellectuelles, dont la mémoire, le traitement visuel et auditif, la vitesse …
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hiérarchique en trois strates : des facteurs spécifiques, des facteurs multiples
et un facteur général.
b- Des théories innovantes : Sternberg etGardner
R.J. Sternberg (1985) s’est intéressé aux processus mentaux et
raisonnements analogiques impliqués dans la performance intellectuelle. Sa
théorie « triarchique » considère trois pôles fonctionnant comme un
système10. Sternberg a également élaboré les notions d’intelligence sociale et
pratique, mises en jeu dans l’action directe quotidienne. Néanmoins, des
approfondissements théoriques semblent nécessaires à cette approche.
H.Gardner (1983) a proposé une théorie pluraliste des « intelligences
multiples ». Il distingue sept formes d’intelligences liées entre elles:
intelligence musicale, kinesthésique, logico-mathématique, langagière,
spatiale, interpersonnelle (l’intuition), et intra personnelle (la connaissance
de soi). Pour construire sa théorie, Gardner s’est intéressé à des sujets
atypiques, autistes, enfants « surdoués », personnes atteintes de lésions, et à
des sujets dits normaux. A travers son modèle, il avait pour ambition de
réformer l’école et de lutter contre les inégalités et exclusions, « en limitant
l’uniformisation synonyme d’échec, en maximisant le potentiel de chacun sur
la base d’une évaluation permanente (…)et permettre à chacun de se
réaliser»11. Cependant, malgré l’intérêt et l’innovation de ces travaux, ceux-
ci sont source de débats, de part le manque de justification théoriquo-
empirique12. Mais cette théorie mérite d’être approfondie et semble montrer
un intérêt, notamment dans l’approche des enfants « surdoués ».
10 Dans son approche, Sternberg étudie : les processus cognitifs mis en jeu dansl’apprentissage et la réalisation d’une performance, l’expérience en interaction avecl’intelligence, la relation au monde externe et l’adaptation à un contexte.11 Bernaud, J.L. (2000).12 Cette théorie a été critiquée notamment du fait qu’elle ne repose que sur des constats etobservations dans un contexte d’évaluation.
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3. Le développement cognitif selon J. Piaget
a- Les concepts fondamentaux
Dans sa théorie du développement cognitif, J. Piaget13 s’intéresse à la
structure logique utilisée et à l’évolution du raisonnement de l’enfant.
L’intelligence est, selon J. Piaget, une forme d’adaptation continue qui tend
vers une stabilité, due à une interaction permanente entre le sujet et son
milieu. Le développement cognitif est caractérisé par une « une mise en
équilibre progressive » à travers différents stades et selon deux mécanismes :
assimilation et accommodation14, permettant une « adaptation toujours
plus précise à la réalité. ». L’auteur précise que c’est l’action qui est au point
de départ de la vie psychique et non la conscience. Ainsi, le développement
cognitif consiste en une « mentalisation » de l’action.
b- Les stades de développement del’intelligence
Au fil de son développement, l’enfant traverse différents stades15 au
cours desquels il apprend à se décentrer et à accéder à une pensée concrète
puis abstraite, s’adaptant ainsi à la réalité. J. Piaget distingue quatre stades :
L’intelligence sensori-motrice, de la naissance à deux ans.
Ce stade est caractérisé par le déplacement du corps et de l’objet dans
l’espace. Selon Piaget, « au point de départ de l’évolution mentale il n’existe
aucune différenciation entre le moi et le monde extérieur »16. Vers un an,
l’enfant va progressivement prendre conscience de cet environnement et, en
13 L’œuvre de Piaget apparaît comme la plus élaborée dans ce domaine d’étude, s’appuyantsur des bases expérimentales solides (observations, méthodes cliniques et directes). Dans cetexposé, nous n’aborderons que certains aspects et concepts de ses travaux qui nousparaissent importants dans la compréhension de la naissance de l’intelligence chez l’enfant.14 Il s’agit d’ « incorporer les choses et les personnes à l’activité propre du sujet, donc àassimiler le monde extérieur aux structures déjà construites, et à réajuster celles-ci enfonction des transformations subies, donc à les accommoder aux objets externes ». Piaget, J.(1964).15 Il existe une constante dans l’ordre des acquisitions mais avec une chronologie variable.Chaque structure construite à un âge devient partie intégrante de l’âge suivant, et estreconstruite sous une forme plus élaborée, abstraite.16 Piaget, J. (1964).
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structurant l’objet, il se structure lui-même comme sujet. « Le choix affectif
de l’objet est corrélatif de sa construction intellectuelle ».
La période pré-opératoire (deux-sept ans).
Le langage permet le début de la socialisation, l’intériorisation de la
parole et donc l’apparition de la pensée et une intériorisation de l’action.
L’enfant va acquérir une image mentale de l’objet, lui permettant d’évoquer
cet objet en son absence. Sa pensée est égocentrique, l’aspect perceptif y est
dominant. Il s’agit d’une intelligence symbolique et intuitive17, caractérisée
par un finalisme (recherche des causes et finalités) et un animisme, (tendance
à concevoir les choses comme vivantes et capables d’intentions).
Le stade opératoire (sept-onze ans)
L’enfant sort peu à peu du raisonnement intuitif pour accéder à une
pensée plus concrète. Il acquiert la réversibilité logique18 et peut penser ses
actions, se libérant ainsi de son « égocentrisme social et intellectuel »19. A ce
stade apparaissent les sentiments moraux, la volonté, l’obéissance. Selon
Piaget, c’est à ce moment que se développe la personnalité de l’enfant.
La période des opérations formelles (douze-seize ans).
L’adolescent accède à la pensée formelle, il est capable d’émettre des
hypothèses et de raisonner abstraitement. A ce stade, le sujet peut se
représenter mentalement des propositions d’actions possibles.
4. Les tests d’intelligence
Dés le début du XXème siècle sont apparus les premiers tests
psychométriques et la notion d’âge mental. Ces tests ont entraîné de
nombreux conflits, aussi bien scientifiques que politiques et moraux.
Aujourd’hui ce débat n’est plus d’actualité et les psychologues reconnaissent
l’intérêt et les limites de ces techniques.
17 Le mécanisme d’intuition est une « simple intériorisation des perceptions et desmouvements sous la forme d’images représentatives et d’expériences mentales » Piaget, J.(1964). 18 Les notions de transformation et de conservation, de classification, de relation et denombre se mettent en place dans le raisonnement de l’enfant.19 Piaget, J. (1964).
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a- De l’âge mental au QI dedéveloppement
A.Binet (1904) fonde, avec T. Simon, la notion d’âge mental, dans le
but de dépister les enfants en difficulté scolaire. Dans cette approche,
l’intelligence est une dimension isolable de la personnalité, définie par les
savoirs et savoirs-faire d’un individu. L’âge mental est évalué par l’ensemble
des épreuves du test réussies par le groupe d’enfants d’un âge donné. Il s’agit
alors de comparer l’âge réel de l’enfant à son âge mental, et de mettre en
évidence une avance ou un retard20. Cependant, cette approche semble peu
valide, ne prenant pas en compte les différents rythmes de développement21.
En 1912, Stern reprend les travaux de Binet et conçoit la notion de
quotient intellectuel, indice de vitesse du développement. Ainsi, il divise
l’âge mental obtenu par le test par l’âge réel de l’enfant et multiplie ce
résultat par cent. Mais, ces travaux reposent, comme précédemment, sur le
principe d’un développement global et linéaire des acquisitions.
b- Wechsler : Q.I. et intelligence globale
Selon D. Wechsler, psychologue américain, l’intelligence ne peut être
séparée du reste de la personnalité, c’est « la capacité globale ou complexe
de l’individu d’agir dans un but déterminé, de penser d’une manière
rationnelle et d’avoir des rapports utiles avec son milieu »22. Son test, le
WISC III mesure le niveau d’acquisition et l’efficience globale d’un enfant
à un moment de son évolution. Il évalue deux niveaux de l’intelligence à
travers les échelles verbal et performance qui aboutissent à un Quotient
Intellectuel total. Suivant les subtests, différents aspects sont pris en compte,
notamment l’adaptation pratique et sociale, la scolarité, le milieu
socioculturel et les repères dans le temps et l’espace.
20 Par exemple, si un enfant de sept ans réussit les épreuves préparées pour les enfants deneuf ans, alors il aura deux ans d’avance.21 R. Zazzo a souligné qu’il était normal pour un enfant, jusqu’à l’âge de neuf ans, d’être enavance sur son âge, et d’être en retard ensuite22 Bernaud, J.L. (2000).
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Wechsler utilise des tables d’étalonnages23 afin de comparer un enfant
aux réussites des autres enfants de son âge et fait référence à la courbe de
Gauss normalisée qui définit une distribution « idéale ». Ainsi, 50% de la
population se situe au centre de la distribution, avec un Q.I. moyen compris
entre 90 et 109. Aux extrémités de la courbe, 2.2 % des sujets ont un score
inférieur à 69 (retard mental) et 2.2 % ont un Q.I. supérieur à 130, on parle
alors de précocité intellectuelle.
Le Q.I. apparaît donc comme le classement d’un sujet par rapport
à son groupe d’âge et une « approximation24, établie au centre d’une bande
d’erreurs possible »25. De fait, le Q.I. ne peut prédire avec précision une
performance particulière ou une réussite scolaire. Il indique une aptitude du
sujet à utiliser ses capacités au quotidien et s’adapter à diverses situations.
Ce test, aujourd’hui le plus utilisé, présente un intérêt lorsque les
données chiffrées, sont mises en relation avec l’analyse qualitative des
subtests et les observations cliniques. Ainsi, certains aspects psychiques de
l’individu (l’anxiété, les défenses…), son milieu socioculturel et les
conditions de passation (lieu, relation au psychologue) sont à prendre en
compte dans l’interprétation du test. « Le QI n’acquiert de la valeur qu’étant
compris comme la résultante d’un compromis intime entre le milieu culturel,
les aptitudes et le désir d’un sujet qui les porte ».26
c- Les tests piagétiens
Ces tests, dont les plus utilisées sont : l’UDN-II et l’EDPL27,
s’inspirent des divers travaux de Piaget. Ils permettent de saisir la dynamique
de l’enfant, en mettant l’accent sur les différents niveaux de raisonnement et
sur les processus cognitifs mis en œuvre dans la résolution d’un problème.
23 Les tables d’étalonnage résument les résultats ( sous forme de statistiques) obtenus pardifférents groupes d’âge au cours de l’étude préparatoire du test, permettant de fixer desnormes et de comparer un sujet à son groupe.24 Par exemple, si un sujet a un Q.I. de 104, son niveau se situe alors entre 98 et 11025 Meljac, C. (2003). Surdoués et sous-doués : rappels de quelques notions de base. Lejournal des professionnels de l’enfance,25, 21-24.26 Cognet, G. (2001). La pratique clinique des tests d’intelligence. Le journal despsychologues, n°186, 30-33.27 UDN-II : Construction et utilisation des notions numériques et logiques fondamentales deC.Meljac et G. Lemmel ; EDPL : Echelle du développement de la pensée logique de F.Longeot.
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Par de petites expériences, la manipulation d’objets et la discussion libre
avec l’examinateur28, celui-ci peut en déduire la structure logique de l’enfant
correspondant au stade de développement atteint.
Les épreuves piagétiennes sont corrélées avec les échelles de
Wechsler, « de .65 à.80 selon les études, sous-entendant ainsi qu’une
efficience intellectuelle élevée va de pair avec l’atteinte d’un stade de
raisonnement élevé »29.
d- Autres épreuves d’intelligence
Il existe de nombreux tests factoriels qui ne mesurent qu’un aspect
spécifique du fonctionnement de l’intelligence. Certains évaluent
l’intelligence fluide (les Matrices de Raven) et d’autres l’intelligence
cristallisée (tests de vocabulaire).
Des tests de créativité ont été construit récemment aux Etats-Unis
visant à mesurer la pensée divergente d’un sujet. Cependant ils sont encore
peu utilisés en France, leur validité étant à confirmer. En effet, des recherches
ont été menées, notamment sur les corrélations entre tests d’intelligence et de
créativité mais les résultats se contredisent. Pour certains les tests de
créativité ne mesurent pas une aptitude indépendante de celles qu’évalue un
test d’intelligence. Pour d’autres, la créativité est une aptitude mentale
indépendante de l’intelligence générale, identifiable à travers des processus
au niveau de la production d’idées30.
Tous ces tests sont utiles mais présentent un intérêt limité dans
l’évaluation de l’intelligence d’un enfant où tous les aspects du
fonctionnement cognitif sont à prendre en compte. Ainsi, on utilise
principalement les échelles composites, comme le WISC ou les épreuves
piagétiennes, qui permettent une approche globale du fonctionnement
intellectuel de l’enfant.
28 L’enfant doit justifier ses réponses, l’examinateur remettant en question ses réponses afinde comprendre son raisonnement. 29 Deborde, A.S. (2003). Y a-t-il des enfants précoces en échec scolaire ? Le journal des professionnels de l’enfance, n°25, 54-56.30 Le test de pensée créative de Torrance, P. (1985) (test de créativité disponible en France)évalue ces processus à partir de tâches d’expressions, d’imaginations verbale et graphique.
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B) LA PRECOCITE INTELLECTUELLE OU LE
« SURDON »
Nous avons évoqué précédemment la difficulté à définir l’intelligence
et les diverses approches de celle-ci. Comment alors définir et reconnaître un
enfant comme « intellectuellement précoce » ? Il semble que ce sujet soit
également source de divergences, aucune définition universelle n’étant
reconnue. Ainsi, malgré un intérêt grandissant pour les enfants « surdoués »,
un certain flou subsiste autour de ce thème et la recherche, en France, n’en
est qu’à ses débuts.
Nous exposerons donc, après un bref rappel historique, les difficultés
à définir clairement ce sujet. Puis, nous étudierons certaines questions
suscitées par le dépistage de ces enfants dits « surdoués ». Ensuite, nous
essaierons de comprendre l’origine du « haut potentiel » à partir de
recherches scientifiques. Enfin, nous décrirons les difficultés de l’enfant
« précoce » au sein de l’école et les solutions envisageables.
1. Historique
Toutes les époques ont eu leurs enfants « surdoués » mais au fil des
siècles et suivant le contexte social leur perception a évoluée. Associée à une
intervention divine dans l’antiquité, la précocité a connu son âge d’or durant
la renaissance31.
Au XVIIIème siècle, avec la philosophie des lumières, un changement
s’opère dans la vision de la famille et de l’enfant. Selon J.J. Rousseau,
l’enfant, incapable de jugement, doit grandir sans contrainte et rester à sa
place, « tout effort pour brimer le développement naturel de l’enfant doit
être proscrit et on tolère de moins en moins l’exceptionnel »32. A partir de
cette période, la reconnaissance des enfants doués devient donc plus rare et le
31 C’est dans le domaine des arts que les enfants prodiges étaient le plus reconnus : MichelAnge, Léonard de Vinci, ou encore Mozart et Beethoven.32 Vauthier, J. (2003). Les enfants précoces : une perception différente suivant les siècles. Lejournal des professionnels de l’enfance, n°25, 25-28.
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don est négligé « pour le plus grand bien d’une société ordonnée et
paisible »33
Au vingtième siècle apparaît le terme de « surdoué » et la méfiance
qui l’accompagne. Le système scolaire, plus efficace, s’ouvre à tous et
revendique l’égalité des chances, on s’intéresse alors aux élèves en difficulté.
Toutefois, l’école impose un modèle normatif et, à cette époque, il n’apparaît
pas nécessaire de mettre en avant un « indécent niveau intellectuel »34 .
C’est à partir des années cinquante qu’apparaît un réel intérêt pour le
« surdon » avec des écrits de De Craecker, Lebovici, Ajuriaguerra qui mettent
en avant les difficultés rencontrées par ces enfants : « La supériorité
intellectuelle n’entraîne pas forcément la réussite et la réussite
l’épanouissement personnel »35. R. Chauvin continua le débat avec son livre
« Les enfants surdoués » en 1975. Cependant, c’est J.C.Terrassier qui mena
un « inlassable combat face à la remarquable inertie de l’Education
Nationale »36. Il fonda en 1971, l’ANPES, association nationale pour les
enfants surdoués, dont le but est de promouvoir une meilleure connaissance
de ces enfants et de leurs besoins. Le premier congrès mondial sur le
« surdon » a lieu en 1975. Puis en 1978 est crée, à Paris, un centre de loisirs
et d’activités pour enfants « surdoués » : Jeunes Vocations artistiques,
littéraires et scientifiques.
Contrairement à la France, de nombreux pays comme l’URSS, la
Chine, Les Etats Unis ou encore Israël se sont intéressés très tôt aux enfants
« surdoués », pour des raisons diverses relevant parfois de la politique. Les
Etats-Unis ont été les pionniers dans ce domaine, fondant dés 1901 la
première école pour enfants « surdoués ». En 1925, L.Terman entreprit, une
enquête longitudinale sur mille cinq cents enfants scolarisés dont le Q.I.
dépassait 150. L’objectif de Terman était de démontrer que ces enfants
étaient supérieurs non seulement dans le domaine scolaire mais également
dans leur développement physique et social. Cependant les résultats, qui
confirment ses hypothèses de départ, sont à relativiser. En effet, l’échantillon
33 Adda, A. (1999). Le livre de l’enfant doué. Paris : Solar34 Ibid.35 Ajuriaguerra, J. (1974). Problèmes psychosociologiques posés par les enfants « surdoués ».In Manuel de psychiatrie de l’enfant. Issy-les-Moulineaux : Masson, pp929-940.36 Adda, A. (1999).
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de sa population d’étude apparaît peu représentatif, étant constitué d’enfants
brillants, désignés par leur professeur et d’un bon niveau social.
Ce sujet a fait couler beaucoup d’encre depuis et connaît un grand
succès de nos jours avec de nombreux ouvrages présentant les
caractéristiques du « surdon » et des conseils aux parents. Mais la recherche
continue et certains mythes existent encore.
2. Définition
Définir l’enfant « surdoué » est une tâche complexe. Derrière ce
terme, les auteurs y voient des caractéristiques parfois différentes. Certains
utilisent le terme de surdoué en référence à la scolarité et à un niveau
intellectuel. D’autres le lient à toutes sortes de dons notamment artistiques.
Cette difficulté à trouver un terrain d’entente est notamment liée à la
diversité des définitions de l’intelligence (approche factorielle ou pluraliste).
a- Désignation : précoce ou surdoué ?
Il existe tout d’abord un débat autour de la nomination du don. Un
certain malaise persiste face au flou des notions utilisées.
On parle généralement d’enfants « surdoués », terme initié par J. De
Ajuriaguerra (1970), puis repris par R. Chauvin et J.C. Terrassier. Mais ce
terme induit une notion de supériorité et prend une connotation négative
auprès du grand public, suscitant la méfiance. De plus, bien que les
professionnels utilisent souvent cette nomination, il semble que « surdoué »
soit trop souvent lié au niveau intellectuel. En effet, selon Le Petit Larousse
« surdoué : se dit d’un enfant dont l’efficience intellectuelle évaluée par les
tests est supérieure à celle obtenue par la majorité des enfants de son âge ».
Notons enfin que ce terme sous-entend une prédétermination, un caractère
inné. Or nous verrons plus loin dans ce chapitre le poids des divers facteurs
dans l’origine de l’intelligence et du « don ».
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Les Québécois utilisent le terme « douance » aisément et sans
connotation.
Le terme d’enfants « intellectuellement précoces » est plus
facilement utilisé avec son sigle EIP, « dont l’hermétisme atténue encore la
modestie »37. Pourtant celui-ci semble moins approprié puisqu’il dégage
l’idée d’une comparaison à une norme et d’une avance de développement
plus que des capacités hors normes. A.Adda qualifie ce terme précoce de
« pervers » car il « fait croire à ces enfants trop sensibles, ne sachant
comment acquérir une maîtrise efficace de leur don, que leur privilège
cessera un jour : ils vivent dans l’attente anxieuse du moment où tout va
basculer ». De plus, comme le précise M. Emmanuelli, il focalise l’attention
sur les performances, notamment scolaires, de l’enfant, laissant ainsi de côté
ses particularités et son évolution.
Pour D.-J. Duché38, il ne faut pas confondre enfants précoces et
enfants surdoués. Ces derniers ne seraient pas toujours précoces et un
« enfant dont le premier développement s’est trouvé retardé peut fort bien
devenir exceptionnellement intelligent ».
On utilise aujourd’hui plus volontiers la notion de « dons », terme
flou qui englobe une grande diversité de dons. Selon A.Adda, « il ôte sa
spécificité au seul don intellectuel, il le banalise, le rend plus acceptable ».
On parle également d’enfants « à hauts potentiels »39, ce qui rend bien
compte de la « multiplicité des dimensions en jeu ».
Soulignons enfin, la distinction faite par H. Gardner, auteur de la
théorie des intelligences multiples. Il différencie les « gifted », enfants qui
ont une précocité « biopsychologique »40, terme réservé aux domaines de
l’expression et de l’intelligence ; les « prodiges » qui présentent une aptitude
exceptionnelle dans un domaine particulier ; les « experts » ayant des
compétences exceptionnelles dans un ou plusieurs domaines, sur une longue
durée ; et les « génies », qui sont des prodiges ou experts ayant atteint une
« dimension transculturelle ».37 Adda, A. (1999).38 Duché, D.-J. (1988). Les enfants surdoués. In Encyclopédie Universalis. Paris.39 Terme utilisé par Vrignaud, P., dans son rapport rédigé à la demande du cabinet duministre de l’éducation nationale, cité par Cognet, G. (2003). Le QI comme compromisintime. Le journal des professionnels de l’enfance, n°25,45-47.40 Gardner, H., cité par Pereira-Fradin, M., Lubard, T., Caroff, X. (2004). L’étude des enfants àhaut potentiel : une aventure scientifique ? Le journal des psychologues, n°219, 22-26.
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b- Définition quantitative
Il est globalement accepté qu’on définisse le « surdon » comme
« l’existence de compétences intellectuelles très supérieures à celles des
enfants du même âge, c’est à dire un Q.I. supérieur à 130, associées à un
talent exceptionnel dans un ou plusieurs domaines »41.
Notons cependant que certaines associations évoquent un Q.I. de 125,
et même parfois de 120 pour justifier des mesures comme un saut de classe.
Or, selon L. Roux-Dufort42, il est préférable de parler de « surdoué »
pour un enfant dont le Q.I. est supérieur à 140 et d’enfants « bien doués »
quand le Q.I. est supérieur ou égal à 130. De plus, « les enfants doués d’un
Q.I. de 170 diffèrent autant voir davantage d’enfants doués d’un Q.I. de 130
que ceux-ci diffèrent d’enfants normaux ».
Se posent alors certaines questions : à partir de quelle limite un enfant
est considéré comme « surdoué » ? Un Q.I. compris entre 125 et 140 est-il
signe de « surdon» ou seulement d’un très bon niveau intellectuel ? Il
apparaît délicat de répondre à ces questions et les auteurs semblent
s’accorder pour considérer le seuil de 130 comme signe de « surdon ».
Néanmoins, l’utilisation du Q.I. comme seul critère pour la définition
des enfants doués est fortement discutable. Se focalisant sur l’intelligence
de l’enfant, on met de côté les aspects tout aussi importants de son
développement et son équilibre affectif. De plus, comme l’explique
M.Emmanuelli (2003), à ne privilégier que les ressources intellectuelles, on
peut freiner l’accès de certains enfants à des « voies d’investissements
sublimatoires » autres que l’école où trouver des sources d’accomplissement
et de plaisir. De même, cet accent porté sur l’efficience intellectuelle entraîne
la mise à l’écart des capacités créatrices de l’enfant.
Par ailleurs, ce quotient intellectuel est source de polémique, et
malgré l’importance qu’on peut lui attribuer, n’a pas d’existence en soi. Ce41 Gibello, B. (2003). Problèmes soulevés par le surdon intellectuel de l’enfant. Le journaldes professionnels de l’enfance, n° 25, 37-40.42 Roux-Dufort, L. (1985). Les enfants intellectuellement surdoués. In Lebovici, S., Diaktine,R., Soulé, M. (1985). Nouveau traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Paris :Puf. T.3, pp2141- 2170. L’auteur a mené une étude longitudinale sur 71 enfants surdoués.
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thème a longtemps entraîné des débats, de part les diverses théories de
l’intelligence et les différentes formes de celle-ci. Il s’agit donc de relativiser
ce chiffre auquel on confère « un statut excessif d’explication des
différences »43 et qui comporte un risque d’erreur possible à ne pas négliger.
Rappelons enfin que certains enfants, selon D.-J. Duché (1988), au
cours de leur évolution, se révèlent exceptionnels alors que, au départ, ils
avaient un faible Q.I.. L’étude de G.Prat44, sur des enfants « surdoués » en
internat psychothérapique, confirme également cette remarque. Ces enfants,
admis pour des troubles du comportement, étaient considérés comme ayant
une intelligence normale, voire légèrement inférieure. Mais après deux ans et
demi d’internat, ils présentaient une intelligence supérieure ou brillante,
l’inhibition intellectuelle s’étant levée.
Ainsi Q.I. et don ne vont pas toujours de paire et, pour certains
auteurs, contrairement aux idées reçues, il ne faut pas forcément posséder un
Q.I. élevé pour être « surdoué ».
c- Des approches divergentes
Les Etats-Unis s’intéressent depuis longtemps à leur population de
surdoué et ont eu très tôt le souci de leur proposer une aide adaptée45. Les
Américains privilégient une approche multiforme de l’intelligence et la
notion de créativité est introduite et valorisée dans la définition du don. Les
enfants « surdoués » sont définis en deux catégories regroupées, les « super
gifted chidren », enfants qui réussissent dans toutes les matières et « talented
children », excellant dans un domaine particulier. Ainsi, est considéré
comme « surdoué » tout enfant avec un Q.I. supérieur à 130 et /ou qui a un
don dans un domaine quelconque. L’association américaine pour les enfants
surdoués a mis en avant six critères afin de les définir : Des capacités
intellectuelles générales, des aptitudes scolaires spécifiques, un talent pour
43 Feyereisen, P. (1984). Les bonnes intentions du psychologue. In Bruyer, R. (dir.) Lessciences humaines et les droits de l’homme. Bruxelle : Mardaga. Chapitre 4, pp99-106.44 Prat, G. (1979). Vingt ans de psychopathologie de l’enfant doué et surdoué en internatpsychothérapique. In Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 27, 467-474.45 L’état Fédéral a soutenu financièrement, dès 1972, les programmes spécifiques d’aide auxsurdoués. Cette aide a été supprimée entre 1981 et 1988, mais a repris en s’orientant vers lessurdoués « désavantagés économiquement » site Internet Douance, rapport de L’USdepartment of education.
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les arts visuels, une pensée créative, une qualité de leader et une habileté
psychomotrice.
Des études américaines critiquent la notion de quotient intellectuel, le
considérant « comme étant une mesure injuste, faussée par des a priori
culturels »46. E.Winner (1996) relativise l’usage des tests de Q.I. et remet
en cause l’équation entre « surdon » et Q.I.. Selon elle, un enfant peut se
montrer extrêmement doué dans des domaines autres que la scolarité comme
la musique et l’art, sans présenter un Q.I. supérieur. Ainsi, elle définit comme
« surdoués » les enfants ayant un Q.I. élevé et les enfants artistes et
musiciens. Pour l’auteur ces enfants présentent les mêmes caractéristiques et
se ressemblent par « leur précocité, leur originalité et leur motivation ». Elle
insiste également sur le fait que ces enfants présentent que très rarement un
« don polyvalent »47 : « Les dons des surdoués tendent à être précisément
définis et spécifiques à un domaine ». Il existe donc souvent des profils
contrastés, avec un don dans une matière et des difficultés dans une autre.
L’approche américaine des « surdoués » est donc assez différente de
l’approche française qui parle peu de la créativité de ces enfants qui semble
non évaluée par les épreuves d’efficiences intellectuelles. De même, la
majorité des auteurs en France prennent rarement en compte les enfants ayant
un don artistique ou musical avec un Q.I. moyen. Les « surdoués » sont
principalement définis à partir du Q.I. ou niveau intellectuel accompagné de
capacités supérieures dans différents domaines. De fait, un enfant avec un
don dans un domaine particulier avec une intelligence moyenne n’est pas
considéré comme « surdoué ».
Enfin, certains auteurs48 ont remarqué l’insistance en France sur les
aspects négatifs du « don ». En effet, on décrit souvent les problèmes
psychomoteurs, les difficultés sociales et affectives de ces enfants. Ces
variations seraient dues au manque de politiques éducatives adaptées à ces
enfants. « En France, où, pendant de nombreuses années, les enfants à haut
potentiel présentant des difficultés scolaires n’ont pas bénéficié d’une prise
46 Winner, E. (1996). Surdoués, Mythes et réalités. Paris : Aubier. L’auteur cite lesrecherches de Gould (1981). 47 Ibid48 Pereira-Fradin, M., Lubard, T., Caroff, X. (2004).
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en charge spécifique, il est compréhensible que ce soit les cas difficiles, ou
les manifestations négatives qui soient mis en avant. »
3. Caractéristiques de l’enfant « surdoué »
L’enfant « surdoué » diffère de l’enfant « normal » non seulement
quantitativement, mais aussi qualitativement. Ainsi, pour qu’un enfant soit
qualifié de surdoué, il doit présenter des traits de personnalité spécifiques.
Ces caractéristiques, diverses, ne se retrouvent pas au même degré chez tous.
a- Des capacités cognitives différentes
Selon J. Siaud-Facchin, l’enfant « surdoué » présente une intelligence
non supérieure mais autre. « Un enfant surdoué est un enfant qui, par sa
perception aiguisée du monde, par sa capacité à enregistrer simultanément
des informations en provenance de sources distinctes, par son réseau
puissant d’association d’idées et sa rapidité fulgurante de compréhension
fonctionne dans un système intellectuel incomparable à celui des autres
enfants. »49. Ainsi, ces enfants ont très souvent un profil intellectuel et des
structures de pensée atypiques.
Pour B. Gibello (2003), il semble également que « les surdoués
disposent de mémoire plus performante, de modes de pensée originaux(…)».
Leurs capacités cognitives leurs permettent donc une compréhension plus
rapide et leur capacité de mémorisation favorise l’accumulation des
connaissances. Cependant, selon les spécialistes, il ne faut pas confondre les
« surdoués » avec les calculateurs prodiges, pour la plupart psychotiques.
49 Siaud-Facchin, J. (2003). Les limites du QI dans le diagnostic des enfants surdoués : entregénie et folie. Le journal des psychologues, n°219, 27-30.
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b- Une certaine précocité
Selon E. Winner (1996), les enfants « surdoués » sont aussi précoces,
effectuant des progrès plus rapides dans certains domaines (scolaire,
artistiques, sportifs), grâce à leur capacité d’apprentissage. Cette précocité
s’exprime très souvent dans le domaine du langage.
Pour J.-C. Terrassier (1994), la moitié à deux tiers des enfants
« surdoués » savent lire avant cinq ans. Ils ont souvent appris à lire seul, vers
deux-trois ans, sans passer par les stades préalables.
Néanmoins, pour d’autres auteurs (D.- J. Duché), un surdon n’induit
pas toujours une précocité. Un enfant dont le développement s’est trouvé
retardé ou normal, peut devenir très intelligent.
c- Le goût pour les connaissances
D. Marcelli50 parle d’une frénésie et d’une « excitation dans le savoir
» des enfants surdoués. A. Adda insiste sur la curiosité dès la petite enfance
de ces enfants pour tout ce qui les entoure. Ils sont actifs avec un grand sens
de l’observation, regardant chaque manifestation de l’environnement et
essayant de les reproduire. Avec le langage, qui apparaît souvent tôt, leur
insatiable curiosité se traduit par de multiples questions à leur entourage sur
les pourquoi et les comment de tels évènements. « Pour eux, il est aussi
indispensable d’alimenter le besoin de connaissance que de fournir des
biberons à un bébé affamé »51. Mais, ce désir extrême de connaissance peut
devenir « vertigineux » pour ces enfants. Ainsi pour se rassurer, ils
choisissent souvent un sujet particulier à approfondir et dans lequel
s’investir.
Ces enfants sont capables de se couper du monde en se plongeant
dans un livre qui les passionne ou bien dans des « rêveries extravagantes ».
Ils montrent souvent un intérêt intense et une faculté de concentration
importante face au domaine qui les intéresse. Au contraire quand la tâche ne
les intéresse pas, « ils peuvent se montrer plus négligent qu’il n’est50 D. Marcelli (2004). Conférence, la 6ème journée de l’examen psychologique de l’enfant etde l’adolescent, « Ces enfants qu’on dit surdoués ».51 Adda, A. (1999)
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admissible (…) et s’habiller, manger, partir pour l’école les laissent parfois
complètement indifférents »52.
d- La créativité et l’humour
Les enfants « surdoués » se montrent également autonomes et
créatifs dans leurs découvertes et expériences, inventant des règles,
imaginant des solutions. Ils font « des découvertes seuls et trouvent des
solutions inédites »53.
Mais selon D.-J. Duché, cette capacité d’invention et de créativité
dans divers domaines doit s’accompagner d’une intelligence supérieure chez
l’enfant pour que celui-ci soit qualifié de « surdoué ».
Ces enfants sont également caractérisés par une aisance verbale et
un sens de l’humour qui apparaît souvent tôt. Cet humour est pour A. Adda
« la recherche précoce d’une mise à distance des évènements ». Ces enfants,
très sensibles, expriment peu leur ressenti qui pourrait perturber l’équilibre
familial si important à leurs yeux. L’humour leur sert donc parfois de refuge,
« un moyen commode de se rassurer tout seul …parce qu’ils ne déçoivent
jamais ceux qui apprécient le plaisir que procure leur usage habile »54.
D’autres caractéristiques ont été évoquées mais ne paraissent pas
justifiées et sont sources de débat. Certains parlent ainsi de l’origine ethnique
et de l’appartenance à un milieu socioculturel élevé55.
Pour conclure, définir l’enfant « surdoué » est donc une étape
difficile. Les avis divergent56 selon les définitions de l’intelligence, les
auteurs et les pays. La notion de Q.I. est controversée et apparaît limitée, le
Q.I. ne peut donc pas être le seul critère à prendre en compte. De plus réduire
52 Adda, A. (1999)53 Winner, E. (1996).54 Adda, A. (1999).55 Nous évoquerons ce critère du milieu socioculturel dans une autre partie (I.B) 5-)concernant les origines du surdon.56 Dans notre travail de recherche, nous avons limité notre analyse à celle de l’enfant à hautpotentiel intellectuel.
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l’enfant à un chiffre pose un problème éthique. Ainsi, il semble primordial
d’effectuer l’évaluation non pas de l’intelligence, mais de l’enfant, dans un
processus dynamique.
Enfin, nous retiendrons la définition de V.Dufour (2004) : « L’enfant
surdoué est un enfant qui a des aptitudes, des capacités ou des habiletés très
élevées par rapport aux enfants de son âge, pouvant se manifester, se
développer et s’actualiser ou non dans un ou plusieurs domaines et champs
d’activités »
4. Dépistage de l’enfant « surdoué »
« Dans la société actuelle où la course à la réussite commence de
plus en plus tôt, la performance de l’enfant est devenue la préoccupation
parentale -et parfois scolaire- majeure. »57. De plus avec la médiatisation
récente, cette question de la précocité de l’enfant se trouve au cœur des
demandes de consultations psychologiques offrant soudain aux parents une
explication des troubles de l’enfant : il s’ennuie, est inhibé ou agité donc il
doit être surdoué.
Pour J.C.Terrassier58, une identification précoce des enfants
surdoués est nécessaire afin de prévenir les difficultés futures. Pour d’autres
auteurs, comme F.Leurquin59, cette identification peut poser un problème
éthique car elle modifie le regard posé sur l’enfant envers qui les parents ont
généralement plus d’attentes. D.-J. Duché60 évoque également le risque quant
à un certain élitisme et explique le danger de préconiser une sélection le plus
tôt possible afin « de les faire bénéficier d’une éducation spéciale, qui
pourrait promouvoir les élites futures de la nation », au détriment de la
personnalité et du bien être de l’enfant.
57 Emmanuelli, M. (2003). Questions posées aux psychologues par les « enfants d’exeption ».Le journal des professionnels de l’enfance, n°25, 32-35.58 Terrassier, J.-C. (1994). Les enfants surdoués, ou la précocité embarrassante Paris : ESF.59 Leurquin, F. (1996). Identification des enfants surdoués. In Neuropsychiatrie de l’enfanceet de l’adolescence, 59-66.60 Duché D.-J. (1979). In Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence. 27, (10-11),435- 436.
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a- Les outils d’investigation
Dans l’identification de l’enfant « surdoué», l’observation à l’école,
dans la famille sont des éléments à prendre en compte mais doivent être
éclairés par une évaluation psychologique à travers divers outils. Cette
évaluation est indispensable mais se réduit trop souvent à l’établissement
d’un Q.I., le plus souvent issu de tests dits de facteur g, n’évaluant qu’un
aspect du fonctionnement de l’enfant. Il apparaît donc nécessaire d’utiliser
des épreuves dites composites qui proposent « des approches diversifiées du
fonctionnement cognitif »61.
Le WISC III est une épreuve souvent utilisée par les psychologues,
qui permet l’évaluation globale du fonctionnement cognitif. Néanmoins,
ces résultats chiffrés doivent être éclairés par des observations cliniques afin
de rendre compte du fonctionnement psychique et des particularités d’un
sujet. De plus, ce quotient intellectuel « ne mesure pas la précocité -avance
en terme de stades de raisonnement- mais une efficience intellectuelle »62.
L’évaluation de l’enfant à travers le test WISC n’est donc pas à elle seule
suffisante et des investigations complémentaires s’avèrent utiles et
nécessaires.
Les tests piagétiens, dont l’EPL, apparaissent alors plus adaptés à
l’identification des enfants « surdoués ». Ils permettent d’aborder les
stratégies cognitives de l’enfant, en alliant une approche quantitative (stade
atteint) et une approche qualitative (observations et justifications de l’enfant).
« Ces épreuves mettant en évidence l’accès à un stade de développement
cognitif, sont bien adaptées aux enfants jeunes et le concept de précocité
intellectuelle prend ici tout son sens »63.
L’évaluation du fonctionnement cognitif doit également être
complétée par des épreuves projectives afin d’aborder la sphère affective de
l’enfant, sa personnalité et la solidité de ses bases narcissiques. Certains
professionnels utilisent également des tests de créativité mettant en avant la
pensée divergente et l’imagination.
61 Cognet, G. (2003). Le QI comme compromis intime. Le journal des professionnels del’enfance, n°25,45-47.62 Deborde, A.S. (2003). 63 Cognet, G. (2003).
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J.C. Terrassier (1994) a construit un « inventaire d’identification »64,
permettant de poser l’hypothèse (à confirmer par des tests d’intelligence)
d’une précocité chez les enfants de six à douze ans.
Selon G.Cognet (2003), la question de l’identification des enfants « à
haut potentiel » est primordiale, mais s’avère compliquée de part le manque
de données scientifiques et la difficulté à définir ce sujet. De ce fait, elle
nécessite une approche multidimensionnelle afin d’aborder l’ensemble de la
personnalité de ces enfants. Ainsi, le psychologue se doit donc d’établir, un
« véritable bilan psychologique : Epreuves généralistes d’intelligence mais
aussi épreuves plus spécifiques, d’inspiration piagétiennes, tests de
personnalité, tests de scolarité…épreuves de dessin.»65.
b- Impact sur l’enfant et sa famille
On assiste aujourd’hui à une affluence des demandes par la famille ou
l’école d’évaluations psychométriques pour un enfant. Mais cet intérêt
soudain entraîne chez le professionnel certaines questions : qu’y a-t-il
derrière cette demande ? Quels sont les attentes des parents ? Que se passera-
t-il à l’annonce des résultats quels qu’ils soient ?
Le psychologue doit alors comprendre ce qui se joue derrière cette
fixation autour de l’intelligence de l’enfant, où d’autres inquiétudes peuvent
émerger.
Cette demande d’évaluation centrée sur le chiffre du Q.I. est souvent
présentée comme pouvant être la clef des difficultés de l’enfant. L’évaluation
psychologique apparaît ainsi délicate pour le psychologue car l’hypothèse de
précocité est déjà avancée par les parents qui attendent sa confirmation
comme une libération ou une solution. Cependant, seul 2% de la population
entre dans cette catégorie et une réponse négative à cette demande peut
engendrer une forte désillusion chez les parents et des effets néfastes pour
l’enfant. A l’inverse, quand l’annonce du surdon est bien présente, une64 Cet inventaire comprend 21 items pondérés par un coefficient et à partir de 14 points,l’hypothèse de la précocité a une chance sur deux de s’avérer exacte. Il est présent dans sonouvrage, les enfants surdoués ou la précocité embarrassante. L’auteur précise qu’il estsurtout utile et utilisable pour les enfants en difficultés scolaires.65 Cognet, G. (2003).
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étiquette est alors posée sur l’enfant, modifiant ainsi les représentations de
l’entourage et la propre image de l’enfant.
On peut alors se poser la question du bien fondé de ce diagnostic pour
l’enfant « surdoué ». Pour certains, cette identification sera ressentie comme
une reconnaissance de leur difficulté ou mal être. Pour d’autres, cela peut
devenir un poids face à un entourage trop exigeant ou rejetant. Il s’agit alors
pour l’enfant de cacher cette « précocité embarrassante »66 afin de paraître
conforme, « normal ».
c- Hypothèse d’une mauvaiseidentification
Une étude récente67, utilisant l’EPL, a été menée autour des enfants
dits précoces mais en échec scolaire. Cette recherche a mis en avant
l’hypothèse d’une mauvaise identification de certains enfants dits
« surdoués ». En effet, l’étude conclut que jusqu’à douze ans, les élèves
« précoces en difficulté » ne présentent pas d’avance, en terme de stade, en
comparaison avec les enfants « normaux » du même âge. A l’inverse, les
« enfants précoces en réussite » obtiennent un ou deux stades d’avance,
utilisant plus facilement un raisonnement hypothético-déductif. Ces deux
groupes d’enfants présentaient donc des fonctionnements cognitifs différents
malgré un Q.I. supérieur à 130. Selon l’auteur, les enfants « précoces en
échec » auraient donc un « haut potentiel » plutôt qu’une réelle précocité
intellectuelle.
D’après certains spécialistes, un tiers (33%) des enfants « précoces »
seraient en échec scolaire. Ces difficultés peuvent être liées à divers facteurs:
rejet des camarades, inadéquation familiale ou scolaire, problèmes personnels
(…). Peut-on cependant en conclure que ces enfants ne seraient pas
réellement « surdoués »?
Néanmoins, cette approche mérite d’être approfondie et élargie à une
population plus grande mais elle remet en question les réflexions sur les
enfants « surdoués » en échec scolaire et leur orientation.
66 Terrassier, J.C. (1994).67 Deborde, A.S. (2003).
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d- « Surdoués » et mesures pédagogiques
Selon F.M. Durazzo68, « les enfants précoces ne doivent pas payer à
l’école le prix de leur précocité mais jouir d’un enseignement qui suive leur
rythme ». Ainsi, ils devraient être considérés comme les enfants plus lents
ayant des difficultés d’apprentissage auxquels le rythme « normal » ne
convient pas.
Le rapport de P.Vrignaud69 met en avant quatre mesures principales
pour ces enfants: l’accélération, l’enrichissement (une pédagogie adaptée par
des professeurs formés), les classes spéciales d’enfants « surdoués »
exclusivement ou bien regroupés avec d’autres enfants, et les programmes
hors temps scolaire70. L’accélération et l’enrichissement sont les mesures les
plus fréquentes, mais les classes spéciales pourraient être une meilleure
orientation.
En France, l’éducation nationale, reposant sur une conception
égalitariste républicaine, apparaît peu adaptée aux enfants « surdoués ».
Ainsi, les principales initiatives sont mises en place par des associations,
pour des activités spécifiques, ou par l’enseignement privé, certains
établissements privés accueillant exclusivement des enfants « surdoués ».
Cette solution apparaît bénéfique pour les enfants en grande difficulté et en
rupture avec l’école mais entraînerait l’isolement et la marginalisation de
ses enfants déjà fragiles. Cela renforcerait le sentiment de différence et
n’aiderait pas à l’intégration de l’enfant « surdoué » dans la société, le
protégeant des difficultés et frustrations de la vie sociale.
D’autres établissements ont mis en place des classes « intégratives »,
regroupant les enfants « surdoués » avec d’autres enfants. Ces classes
apparaissent très bénéfiques pour l’enfant, lui proposant une pédagogie plus
adaptée, des professeurs sensibilisés et une intégration auprès d’autres
enfants. Mais cette solution n’est pas toujours possible de part le manque de
moyens financiers des parents ou l’éloignement géographique de ces écoles.
68 Grubar, J.C., Duyme, M., Cote, S. (1999). La précocité intellectuelle: De la Mythologie àla génétique. Paris : Mardaga.69 Vrignault, P. (2000), « surdoués et systèmes éducatifs », rapport I.N.E.T.O.P./ C.N.A.M.,cité par C Beylouneh (2003). 70 Programme qui complètent l’apport de l’école en proposant des activités spécifiquescomme l’apprentissage d’une langue, la découverte scientifique, le jeu d’échecs…
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Une étude américaine rapportée par J. Lautrey71 met en avant une
meilleure évolution des enfants ayant bénéficiés d’un saut de classe72. Cette
mesure, par ailleurs la plus fréquente, permet une meilleure réussite et
stimule la motivation de l’enfant. Néanmoins, elle comporte certains
inconvénients pour l’enfant qui doit s’adapter en faisant ses preuves auprès
de l’enseignant, de ses nouveaux camarades et de ses parents. De plus, un
nouveau regard est posé sur lui et suivant le contexte, cette adaptation est
plus ou moins difficile. Ainsi, « l’ambiance de l’école, l’attitude des
professeurs (…) des camarades, sont autant d’éléments déterminants pour
une bonne réussite et une intégration scolaire réussie »73. De même, la
propre maturité de l’enfant et son équilibre psychique sont à prendre en
compte.
Pour conclure, « plutôt que d’adapter l’enfant à la rigidité du
système », il est nécessaire que l’école s’adapte à l’enfant, et évolue «vers
une prise en charge scolaire qui respecte l’individu dans son originalité »74.
Notons enfin les limites de ces recherches qui n’ont été testées que
sur une durée limitée et avec des échantillons de taille réduite.
5. Origines du « surdon », entre biologie et
environnement
De nombreuses recherches scientifiques ont été effectuées concernant
les déterminants de l’intelligence. L’opposition entre deux postulats inné-
hérédité et acquis-milieu a longtemps été source de conflits idéologiques
mais également politiques entre les spécialistes.
Lorsque l’on aborde la question de l’origine du don, les deux
hypothèses inné/ acquis ressurgissent. Ainsi, pour certains, on acquiert un
don exceptionnel en travaillant dur, pour d’autres, on naît surdoué ou pas.
71 Lautrey J. (2004). 6ème journée de l’examen psychologique de l’enfant et de l’adolescent.72 Cette étude compare (à partir d’un test de connaissances) l’effet des différents modes descolarisation sur ces enfants : le saut de classe, les classes de niveaux, les groupes inter ouintra classe, les cours d’enrichissement et d’approfondissement et les classes spécialisées.73 Terrassier, J.C. (1994). 74 Ibid.
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a- Les facteurs génétiques et de milieudans l’intelligence
Bien que, sur ce sujet, « les connaissances scientifiques soient encore
très modestes»75, il apparaît aujourd’hui que l’influence génétique dans
l’intelligence soit évidente mais non totale.
L’influence du milieu familial et social76 a également été
démontrée. Il semble que l’expérience sociale et la présence d’un adulte,
orientant l’enfant dans ses apprentissages, permettent une base sur laquelle se
développe l’intelligence.
De nos jours, les spécialistes insistent sur l’interaction entre les
facteurs génétiques et environnementaux dans la genèse de l’intelligence,
« le développement résulte toujours de l’action conjointe des gènes et du
milieu »77.
b- Le poids de l’environnement dans le« surdon »
Selon M.Duyme78, « un environnement favorable peut augmenter le
Q.I. et ainsi, augmenter le nombre de sujets ayant un Q.I. supérieur à 130,
c’est à dire le nombre d’enfants précoces ». En effet, les études portant sur le
Q.I. des enfants selon leur milieu social montrent des différences
significatives entre les enfants d’ouvriers (Q.I. entre 92 et 95) et les enfants
de cadres supérieurs (Q.I. entre 112 et 115). De même, l’auteur explique
l’importance de l’environnement social dans l’élévation du Q.I. : chez les
enfants de cadres supérieurs, 12% aurait un Q.I. supérieur à 130, contre
seulement 0,6 % pour les enfants d’ouvriers. Ainsi, selon ces résultats, il y
aurait plus d’enfants « surdoués » dans les milieux favorisés.
De ce fait, selon M. Duyme, il est important de prendre en compte le
milieu social des parents dans le diagnostic de « surdon ». Ainsi, pour que75 Bernaud, J.L. (2000). 76 Vygotski, psychologue russe, cité par Bernaud, J.L. (2000).77 Winner, E. (1996).78 Grubar, J.C., Duyme, M., Cote, S. (1997).
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celui-ci soit valide, il faudrait « comme seuil de Q.I. non pas 100 plus 30
mais la moyenne de Q.I. du groupe social plus 30 »79. Ce seuil serait donc
de 122 pour les enfants d’ouvriers et de 142 pour les enfants de cadres
supérieurs. Cette étude remet en cause les critères quant à l’identification de
l’enfant « surdoué ». En effet, plus que le niveau intellectuel et le profil
psychométrique d’un enfant, il faut connaître l’histoire de son
développement cognitif et affectif.
D’autres recherches80 ont montré l’importance de l’entraînement, du
travail intensif pour l’acquisition d’un don. Cependant ces découvertes « ne
permettent pas d’exclure le rôle de l’aptitude innée »81 et une pratique
délibérée et persévérante ne semble pas suffisante. De même, on a longtemps
pensé que les enfants étaient « surdoués » du fait d’une pression parentale.
Mais les parents ne peuvent créer le don de leur enfant et, selon A.Adda,
« un certain enfant porté à bout de bras s’effondre dés qu’il est livré à lui-
même ». Par contre, un environnement stimulant est nécessaire pour
l’épanouissement des « surdoués ».
c- L’influence des facteurs génétiques
D’après M. Duyme, si nous savons aujourd’hui que le milieu social a
une influence sur le Q.I., il n’existe toutefois « aucune preuve d’un
déterminisme génétique des EIP ». Cependant , pour E. Winner, « s’il existe
une composante génétique de l’intelligence, il est probable qu’il existe une
composante génétique pour d’autres formes de dons. Et si c’est le cas, il est
probable que les enfants surdoués ne présentent pas un cerveau ordinaire ».
En effet, de récentes études82 ont démontré que les enfants ayant un
Q.I. supérieur à 130 avaient un fonctionnement cérébral différent des
enfants à Q.I. moyen : un taux de sommeil paradoxal (temps de régénération
du cerveau) plus important, l’utilisation d’aires cérébrales plus pertinentes
dans la résolution de problèmes. De plus, il a été prouvé que les « EIP
seraient physiologiquement plus avancés que les enfants de leur âge dans
79 Grubar, J.C., Duyme, M., Cote, S. (1997).80 A. Ericsson et B. Bloom, rapportées par Winner, E. (1996).81 Winner, E. (1996).82 Etudes de Grubar, J.C. et Jausovec, cités par Duyme, M. (2003).
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l’organisation et le développement de leur cerveau ou l’utilisation de leur
ressources »83.
Ainsi, ces enfants travailleraient de manière plus efficace que les
autres enfants. Néanmoins, cette particularité serait un frein dans les tâches
demandant une décomposition méthodique pour leurs résolutions.
Ces études confirment donc l’importance d’une pédagogie adaptée
pour ces enfants, tenant compte de leurs spécificités. Selon M. Duyme, il faut
cesser « d’obliger les EIP qui ont des difficultés scolaires à aller à un
rythme et selon un mode d’apprentissage qui ne sont pas les leurs ».
Pour conclure, le soutien familial, l’entraînement, l’éducation, le
milieu socioculturel peuvent encourager le développement ou la disparition
d’un don. Mais ces composantes ne sont pas suffisantes et de nombreux
travaux scientifiques ont attesté l’existence d’une composante innée de
l’intelligence. Ainsi, bien qu’il n’existe pas encore de preuves quant à un
fondement biologique du don, il a été démontré que les enfants « surdoués »
disposent d’un fonctionnement cérébral spécifique. « La biologie et
l’entraînement ont peut-être tous deux leur importance et interagissent sans
aucun doute »84.
83 Etude d’Alexander, J.E., citée par Duyme, M. (2003), dans laquelle des enfants« surdoués » de 13 ans ont présenté une activité cérébrale plus proche de celle des jeunes de20 ans que de celles des enfants du même âge. 84 Winner, E. (1996).
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II. DEVELOPPEMENT AFFECTIF ET
PRECOCITE INTELLECTUELLE
A) LE DEVELOPPEMENT AFFECTIF DE
L’ENFANT
De la naissance à l’adolescence, l’enfant traverse différents stades
afin de s’autonomiser et de construire sa personnalité et son individualité.
Le développement affectif est inséparable et complémentaire du
développement cognitif. En effet, on sait aujourd’hui que l’aspect affectif
peut perturber les processus intellectuels. J. Piaget avait d’ailleurs souligné,
dans sa théorie du développement cognitif, l’importance de l’affectivité :
« c’est l’affectivité qui assigne une valeur aux activités et en règle
l’énergie » 85. Ainsi, affectivité et intelligence sont indissociables et
« constituent les deux aspects complémentaires de toute conduite
humaine »86.
Dans cette partie, nous étudierons diverses notions caractérisant les
étapes du développement affectif de l’enfant. Cependant les travaux des
spécialistes dans ce domaine sont multiples, ainsi, par manque de temps et
dans un souci de clarté, cet exposé sera un aperçu général et synthétique de
concepts psychanalytiques de S. Freud et de D. Winnicott. En effet, en vue de
notre sujet, ces théories apparaissent pertinentes, de part la description des
étapes du développement et les indices de maturité chez l’enfant qu’elles
fournissent.
85 Piaget, J. (1964).86 Ibid.
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1. Les stades du développement psycho-affectif
selon la théorie psychanalytique freudienne
S.Freud, fondateur de la psychanalyse, a considérablement influencé
les sciences humaines et la vision de l’être humain. Nous tentons, ici,
d’expliquer brièvement les grandes notions, souvent complexes, de la théorie
freudienne du développement de l’enfant.
a- Rappel sur les instances psychiques
Après avoir décrit l’espace psychique selon trois systèmes
(l’inconscient, le pré-conscient et le conscient), S.Freud (1923) a construit
une deuxième topique, à travers trois instances constituant l’appareil
psychique : Le Ca, le Moi et le Surmoi.
Le Ca
Le Ca correspond aux pulsions inconscientes et apparaît, pour S.
Freud, dés le début de la vie. La pulsion87 recherche la satisfaction afin de
réduire la tension qu’elle produit, et si son but ne peut être atteint, la
frustration apparaît. Le Ca est donc le réservoir énergétique où la libido
cherche à se satisfaire par le principe de plaisir, évitant ainsi tout déplaisir.
Freud a décrit différents types de pulsions, dont la pulsion sexuelle88
(libido), composée de pulsions partielles qui s’unissent à travers différents
stades du développement et s’organisent définitivement durant la puberté.
Le Surmoi
Le Surmoi est considéré par Freud comme « l’héritier du complexe
d’œdipe »89, quand l’enfant renonce à la satisfaction de ses désirs oedipiens
et intériorise les interdits parentaux. Le Surmoi se construit ainsi à partir des
87 Une pulsion est une « poussée, exercée par le somatique qui s’impose ainsi à l’appareilpsychique et (…) fait tendre à l’action » Braconnier, A. (1991). In Doron, R., Parot, F.(1991). Dictionnaire de Psychologie. Paris : Puf.88 En 1920, Freud oppose la pulsion de vie, constituée des pulsions sexuelles etd’autoconservation, à la pulsion de mort.89 Pour certains auteurs dont M. Klein, le surmoi apparaît dés le début de la vie, au stadeorale, par introjection des bons et mauvais objets.
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processus d’identifications aux images parentales et d’intériorisations des
interdits familiaux et de la loi, puis des exigences sociales. Il a une fonction
de censure, de conscience morale, et d’idéal. « Le surmoi de l’enfant ne se
forme pas à l’image des parents mais bien à l’image du surmoi de ceux-ci ;
il s’emplit du même contenu, devient le représentant de la tradition, de tous
les jugements de valeur qui subsistent ainsi à travers les générations »90 .
Le Moi
Le Moi se développe à partir du Ca, et se construit par les
identifications à des objets extérieurs intériorisés. Le Moi est régi par le
principe de réalité, qui consiste en une adaptation au monde extérieur, en
différant le plaisir recherché et en acceptant les déplaisirs momentanés.
Permettant l’adaptation au réel et le maintien de la cohérence interne, le Moi
contient une part consciente (la connaissance, la mémoire), mais également
une partie inconsciente, dont les mécanismes de défenses contre l’angoisse.
Au fil de son développement, l’enfant va donc délaisser le principe de
plaisir (la satisfaction immédiate de ses pulsions), pour accéder au principe
de réalité. Il devra ainsi trouver des moyens différés de satisfaction afin de
s’adapter aux contraintes de son environnement. Le principe de réalité vient
donc limiter le sentiment de toute puissance de l’enfant et permet l’apparition
de la pensée et de la capacité à fantasmer. Chaque individu doit établir un
équilibre entre ces deux principes et réussir à les concilier.
b- Les stades pré-génitaux dudéveloppement libidinal
S. Freud a élaboré une théorie de la libido, décrivant la construction
de la sexualité et de la personnalité à travers différents stades. La libido, sorte
d’énergie vitale, se « définit par ses sources (zones érogènes), son but (la
satisfaction pulsionnelle) et ses objets»2.
L’enfant va donc évoluer à travers des stades qui s’enchaînent
successivement et entraînent des problématiques diverses. Celles-ci laissent
90 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967). Vocabulaire de la psychanalyse. Paris : Puf.2 Chartier, J.P.(1993). Introduction à la pensée freudienne. Paris : Payot et Rivages.
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des traces, parfois des points de fixations91, de fait, aucun stade n’est jamais
réellement dépassé. A chaque niveau de développement, la relation à l’objet
évolue et l’individuation se met en place.
Le stade oral
Durant cette première année de la vie, l’enfant découvre la préhension
d’aliments et d’objets, et le plaisir oral. Il s’agit d’un mode de relations par
incorporations92.
A ce stade, l’enfant est dépendant de sa mère et dans l’omnipotence,
percevant les objets, sources de satisfactions, comme faisant partis de lui-
même, ou étant crées par lui. Ne différenciant pas le soi du non soi, pour lui
« avoir l’objet en soi équivaut à être l’objet »93. Par la succion du pouce ou
suçotement des lèvres94, l’enfant va trouver un substitut au sein absent et se
dégager ainsi de la dépendance maternelle en accédant à l’auto-érotisme.
Pour Freud, c’est le sevrage qui va permettre, progressivement, de
clore cette relation fusionnelle avec la mère. Ainsi, l’enfant va prendre
conscience des objets extérieurs, en reconnaissant les objets familiers et en
faisant l’expérience du manque. L’attente et la frustration que la satisfaction
subit permettent la constitution de l’objet chez l’enfant.
Une fixation a ce stade peut être dû à un sevrage trop précoce, à une
oralité frustrée et se traduit par une personnalité « égocentrique »95,
dépendante aux autres, en recherche constante d’amour et d’affection.
Le stade anal
Freud distingue deux composantes dans l’érotisme anal : l’excitation
de la muqueuse anale (par le passage des scelles ou les soins de propreté);
puis la maîtrise et le contrôle exercé sur les scelles mais également sur les
personnes de l’entourage, objets partiels d’amour. Le plaisir anal est
91 Il existe un point de fixation à un stade, entraînant des éventuelles régressions vers celui-ci,lorsque la libido reste attachée à un mode particulier de satisfaction pulsionnelle. 92 L’enfant fait pénétrer et garde à l’intérieur de lui des éléments de l’extérieur, nourriture,parole, perceptions.93 Golse, B. (1985). Le développement affectif et intellectuel de l’enfant. Paris : Masson.94 La succion est la première activité des « pulsions sexuelles infantiles », selon Freud, S.(1923). Trois essais sur la théorie sexuelle. Paris : Gallimard.95 Anzieu, D. (1991). In Doron, R., Parot, F. (1991). Dictionnaire de Psychologie. Paris :Puf.
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caractérisé par la rétention, conservation des objets passés à l’intérieur de
soi, ou l’expulsion de ces derniers.
La distinction entre le dehors et le dedans, le soi et le non soi, apparaît
progressivement. L’enfant accède ainsi à une certaine maîtrise symbolique,
pouvant se représenter sa mère en son absence. Il connaît également le
sentiment de toute puissance, prenant conscience du contrôle qu’il peut avoir
sur ses scelles, parties de lui-même, et du pouvoir qu’il détient face à l’adulte
en attente de ce « cadeau ».
Afin d’acquérir une propreté sphinctérienne, les parents ne doivent
pas éduquer l’enfant de façon trop précoce ou rigide. Des fixations à ce stade
entraînent souvent une névrose obsessionnelle ou encore une paranoïa.
Le stade phallique
Ce stade se situe principalement vers les trois ans de l’enfant et
annonce la période oedipienne et l’affirmation de soi. « Les activités
sexuelles de cette zone érogène qui relèvent des parties sexuelles proprement
dites, sont le point de départ de la vie sexuelle normale ultérieure »96.
Cependant, l’organisation de la sexualité, bien que proche de celle de
l’adulte, n’est pas encore mature, l’opposition des sexes n’étant pas perçue.
En effet, à cette période, le sexe féminin n’existe pas, seul le sexe masculin
est reconnu avec l’alternative de posséder le phallus ou d’être châtré.
L’enfant exprime donc à ce stade une curiosité sexuelle infantile,
caractérisée selon Freud par le primat du phallus. Face à la constatation de
la différence des sexes, l’enfant ressent une forte angoisse de castration, la
peur de perdre une partie de soi et de son pouvoir. Ainsi, afin de se défendre
contre cette angoisse, l’enfant va nier cette différence des sexes, cette
absence ou présence du pénis.
Ce complexe de castration s’exprime différemment chez le garçon et
chez la fille, marquant le début de l’œdipe chez ces dernières et le déclin
chez les autres. La petite fille va donc exprimer son désir d’avoir le phallus et
éprouver des sentiments négatifs envers sa mère qui ne l’a pas pourvue de
pénis. Elle va choisir son père comme objet d’amour pouvant lui donner le
96 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967) : ce stade est caractérisé par une « unification despulsions partielles sous le primat des organes génitaux ».
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pénis ou son équivalent symbolique, un enfant. Le petit garçon va devoir
renoncer à son attirance « sexuelle » pour sa mère par crainte d’une menace
castratrice de la part du père. Ainsi l’angoisse de castration vient interdire
l’attirance incestueuse, met en place le surmoi de l’enfant et la fin de la
situation oedipienne.
Durant cette période, l’enfant manifeste souvent des comportements
exhibitionnistes et voyeuristes, liés au fantasme de la scène primitive. Ce
fantasme apporterait une explication à l’enfant sur son existence et son
origine. L’enfant se construit également des théories sexuelles autour de la
naissance et de la fécondation. Il s’agit d’activités en lien avec une « quête
de savoir », montrant ainsi « les interrelations entre la sexualité infantile et
le développement intellectuel »97.
2. Les étapes de l’enfance
a- Le complexe d’œdipe
Selon S.Freud98, « Chaque nouvel arrivant dans le monde humain est
mis au devoir de venir à bout du complexe d’œdipe ; celui qui n’y parvient
pas est voué à la névrose …»99.
La période œdipienne, se situant approximativement entre trois et sept
ans, joue un rôle majeur dans le développement de l’enfant, « dans la
structuration de la personnalité et dans l’orientation du désir humain »100.
La situation œdipienne correspond à des sentiments d’amour (attrait
incestueux) envers le parent de sexe opposé et des sentiments de haine
(rivalité) pour le parent du même sexe. Il existe également une forme dite
inversée ou négative du complexe d’œdipe, lorsque l’enfant ressent une haine
jalouse pour le parent de sexe opposé et de l’amour pour le parent du même
sexe. Souvent, l’enfant oscille entre ces deux formes, éprouvant des97 Tourrette, C., Guidetti, M. (1994). Introduction à la psychologie du développement dubébé à l’adolescence. Paris : A.Colin.98 S.Freud a mis en avant, dés 1897, l’ « universabilité » de l’histoire d’Œdipe-Roi de lalégende de Sophocle.99 Freud, S. (1923).100 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967).
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sentiments ambivalents envers ses parents. Ces sentiments sont parfois
sources de culpabilité et d’anxiété, voir de mouvements dépressifs.
Construction de la personnalité
La problématique œdipienne est donc une étape décisive et
structurante pour l’enfant. Tout d’abord il ne s’agit plus d’avoir ou pas le
phallus mais d’être un homme ou une femme. Elle permet donc la perception
de l’opposition des sexes et le jeu des identifications aux images parentales.
L’enfant va transformer son amour sensuel pour le parent de sexe opposé en
simple affection et sa rivalité pour le parent du même sexe en identification.
Son Moi se fortifie, l’enfant est capable de socialiser ses pulsions et de les
assumer sans culpabilité angoissante. Par la castration symbolique, il sort de
la relation duelle et dépasse l’autoérotisme infantile pour entrer dans la
triangulation, la reconnaissance de la différence des sexes et des
générations.
De plus, le dépassement de l’œdipe permet la formation du Surmoi et
de l’Idéal du Moi, par l’intériorisation des interdits parentaux. Ainsi, la
crainte d’une sanction des parents et l’anxiété sont remplacées par la crainte
du Surmoi et le sentiment de culpabilité.
Situation œdipienne et complexe d’œdipe
Selon L.Corman101, il est important de différencier la situation
œdipienne du complexe d’œdipe. La situation œdipienne est une étape du
développement normal de l’enfant qui éprouve des « tendances
pulsionnelles » envers ses parents, sans grande angoisse, ni culpabilité. Ces
tendances sont modérées et n’atteignent pas l’équilibre de l’enfant et le
développement de sa personnalité. Tandis que le complexe œdipien se
caractérise par des sentiments intenses, entraînant une angoisse importante et
insupportable chez l’enfant. Celui-ci utilise alors le refoulement afin de
réprimer ce ressenti, jusqu’à l’oublier, le nier.
Pour cet auteur, il existe trois voies de résolution de la situation
œdipienne : la perversion et l’associabilité, l’état névrotique, la voie
« normale ». Si le Moi est trop faible et l’entourage peu structurant, alors les
101 Corman, L. (1973). Le test Patte Noire, Manuel 2, Le complexe d’œdipe. Paris : Puf.
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pulsions, trop envahissantes, peuvent entraîner un passage à l’acte
dramatique. Cependant très souvent il y a un refoulement102 de ces pulsions
interdites, le sujet réprimant fortement ces pulsions. Il « barre la route à
toutes leurs manifestations, et par-là entretient en lui-même un état de conflit
permanent »103 Ainsi, des troubles névrotiques104 peuvent s’installer. Par
contre, si le sujet sublime ses pulsions, en les transformant en activités
socialement acceptables, alors il sera un adulte relativement équilibré. En
effet, la sublimation transfère l’énergie des pulsions vers d’autres buts, les
intégrant ainsi « au processus de maturation de la personnalité »105.
Entre ces situations il existe évidemment des voies intermédiaires
permettant une plus ou moins bonne adaptation. Selon Corman, « pour un
heureux équilibre, il faut qu’il y ait entre les deux domaines du Moi et des
Pulsions un jeu mouvant d’alternance, afin d’éviter le blocage de l’un par
l’autre, générateur tôt ou tard d’une situation pathologique .
Pour conclure, cette problématique œdipienne entraîne des
conséquences sur la personnalité de l’enfant, son comportement futur et sur
la formation d’éventuels conflits psychopathologiques. Le déclin du
complexe d’œdipe marque, selon Freud, l’entrée dans la période de latence.
Cependant, il est réactivé à la puberté entraînant la mise en place d’anciennes
défenses et des comportements parfois inadaptés.
102Le refoulement est un mécanisme inhibiteur, l’énergie des pulsions étant bloquée et nonutilisée autrement, et le Moi dépense une certaine énergie à maintenir ce refoulement. 103 Corman, L. (1973).104 Les troubles névrotiques sont caractérisés par un conflit entre ces pulsions instinctives etles défenses du Moi.105 Corman, L. (1973).
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b- La période de latence
Cette période se situe approximativement entre six et onze ans,
marquant le déclin de la sexualité infantile et de la période œdipienne et
prenant fin avec l’arrivée de l’adolescence.
Le développement de la sexualité de l’enfant ralentit ou s’arrête,
correspondant à un apaisement des conflits et à une baisse des activités et
pulsions sexuelles. Selon la théorie psychanalytique, la période de latence
« correspond à une intensification du refoulement- qui a pour effet une
amnésie recouvrant les premières années- une transformation des
investissements d’objets en identifications aux parents, un développement
des sublimations »106.
L’identification aux parents, puis aux amis et au groupe est une étape
indispensable pour la construction de l’identité de l’enfant. En effet, si les
mécanismes d’identification sont insuffisants, des troubles et une fragilité
narcissique peuvent s’installer.
Les relations avec l’adulte
Cette étape est caractérisée par la désexualisation des relations aux
parents entraînant des changements dans les comportements de l’enfant. Les
sentiments de désir sexuel ou d’agressivité de la situation oedipienne
deviennent une simple tendresse et respect. L’enfant, moins dépendant
émotionnellement, peut ainsi se tourner vers les connaissances et le monde
extérieur : « l’énergie pulsionnelle se libère pour un investissement
intellectuel »107. Par le mécanisme de sublimation, l’énergie sexuelle est
donc réinvestie sur des activités socialisées, permettant à l’enfant d’être plus
disponible pour apprendre et créer des relations.
On assiste également à des tendances obsessionnelles chez l’enfant, et
à la mise en place de formations réactionnelles. Celles-ci lui permettent à de
transformer ses diverses pulsions (agressives, exhibitionnistes, intérêt pour
ses scelles…) en pudeur, dégoût, et en « aspirations morales et
esthétiques »108. 106 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967). 107 Tourrette, C., Guidetti, M. (1994).108 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967).
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Au cours de cette période, l’enfant va petit à petit remettre en
question les qualités idéalisées, « divines » de ses parents. Il va constater,
souvent avec désarroi, que ses parents ne sont pas tout puissants, ne savent
pas tout et ont des imperfections.
Selon P.Galimard109, l’enfant entre six et onze traverse une « crise de
désarroi » liée à sa prise d’autonomie et à sa socialisation. Pour l’enfant,
c’est « une crise intérieure et une lutte entre les forces d’affirmation de soi
et les forces de régression et d’abandon ». Ainsi, il est fréquent, selon
l’auteur qu’apparaissent des manifestations caractérielles et des troubles de
l’humeur. De manière générale, vers huit ans, les régressions vers un âge
antérieur sont moins présentes et l’affirmation de soi l’emporte
progressivement.
Les relations entre amis
Les relations entre enfants jouent un rôle fondamental dans la
socialisation de l’individu. « La découverte de soi est corrélative de celle
d’autrui »110, ainsi, l’enfant construit sa personnalité au sein de sa relation à
l’autre.
L’apparition de la pensée logique modifie la représentation du monde
de l’enfant et ses relations aux autres. Il est capable de changer de
perspective et de rôle, d’ajuster son point de vue. Les relations amicales
deviennent stables et le sentiment d’appartenance au groupe commence à
jouer un rôle important.
L’école permet à l’enfant de se créer ses premières amitiés. Il s’agit là
de la première découverte véritable que l’enfant fait de l’autre, avec ses
qualités singulières et ses défauts. L’enfant se situe dans ce cercle social
comme un membre particulier avec ses qualités propres. « C’est là qu’il
s’initie à la vie sociale et qu’il peut faire montre d’une personnalité parfois
inconnue du milieu familial »111.
109 Galimard, P. (1962). Six à onze ans, vie affective, problèmes familiaux. Toulouse : Privat.110 Hurtig, M., Rondal, J.A. (1981). Introduction à la psychologie de l’enfant. Paris :Mardaga.111 Ibid.
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Les jeux, à valeur structurante, sont caractérisés par la compétition,
« le désir de se confronter aux autres et de l’emporter »112, par le respect des
règles et l’entente mutuelle.
Les expériences sociales permettent le développement de la maîtrise
de soi et de l’affirmation de soi. L’enfant devient capable de « renoncer à
un déplaisir ou de différer son assouvissement, d’échanger au lieu de
prendre, de collaborer au lieu de dominer, de se sentir quelqu’un parmi ses
égaux »113.
Consolidation du Moi
Certains auteurs (B. Bornstein, T.becker)114 divisent cette période en
deux temps, de cinq à huit ans puis de huit à dix ans. A la première période
les « mécanismes de régulation » et les défenses sont encore peu stables. Le
surmoi est très strict ou inefficace, entraînant parfois des régressions
temporaires. L’enfant accède également à la culpabilité, dont il va chercher à
se protéger en la déplaçant ou en s’identifiant à l’agresseur. A la seconde
période, les défenses contre les pulsions sont plus stables, le Surmoi moins
sévère et le Moi plus fort. « L’enfant de huit à dix ans est souvent content
de lui et de son univers »115.
Cependant la force des défenses et du refoulement semble restreindre
la vie imaginative de l’enfant et ainsi, le traitement psychanalytique des
enfants en période de latence. « L’association libre est vécue par l’enfant
comme une menace particulière pour l’organisation de son Moi ».116
Durant cette période, le Moi et le Surmoi se renforcent, « le Moi
prend pour ainsi dire possession de son domaine »117, et l’enfant est mieux
adapté à la réalité. « La période de latence apparaît comme un relais
important dans le développement, comme une sorte de premier palier
identificatoire pendant lequel les principales lignes de développement du
112.Tourrette, C., Guidetti, M. (1994). 113 ibid.114 Auteurs cités par Denis, P. (1985). La pathologie à la période de latence. In Lebovici, S.,Diaktine, R., Soulé, M.. Nouveau traité de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Paris :Puf. T.3, pp2141- 2170.115 Ibid.116 Bornstein, B. citée par Winnicott, D. (1970). Processus de maturation de l’enfant. Paris :Payot.117 Winnicott, D. (1970).
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Moi tendent à se fixer »118. Il s’agit donc d’une période d’élaboration du
narcissisme, l’enfant prenant confiance en lui et en sa valeur propre. Ainsi,
sa personnalité se constitue et il devient plus autonome et socialisé.
c- La puberté et l’adolescence
La puberté est marquée par le stade génital, stade du développement
psychosexuel, où les pulsions partielles s’organisent et s’unifient
définitivement, selon S. Freud. Cette période débouche sur le choix d’un
objet sexuel définitif et les pulsions partielles deviendront partie intégrante
des préliminaires dans le plaisir sexuel.
Cette période adolescente est centrée autour d’une crise narcissique
et identificatoire, avec de fortes angoisses et des préoccupations corporelles
et sexuelles. L’adolescent fait face à des modifications physiques et
somatiques mais également à une réactivation de la problématique
œdipienne et à des émergences pulsionnelles. On assiste également parfois
au retour de problématiques plus anciennes, notamment orales, avec des
comportements addictifs (anorexie, toxicomanie). De même, de part un
conflit interne, un certain mal être peut s’installer avec des passages à
l’acte, des mouvements dépressifs ou régressifs et des idées de mort. Durant
cette période, l’adolescent doit aussi faire le deuil des images parentales
idéalisées et le deuil de l’enfance.
A. Freud parle d’ « ascétisme de la puberté »119, qui consiste en un
refus de toutes satisfactions pulsionnelles. Cette réaction est liée selon elle à
la réactivation de l’œdipe et la culpabilité qui y est liée. Cet ascétisme a
généralement des conséquences sur l’alimentation et le sommeil. Face à ses
pulsions, l’adolescent peut également utiliser le mécanisme
d’intellectualisation. De cette façon, il maintient ses affects à distance et au
lieu de les ressentir, les traduit en idées générales et les maîtrise.
Pour cet auteur, ces deux mécanismes de défense, ascétisme et
intellectualisation, sont nécessaires à l’adolescent mais transitoires, ils lui
permettent de faire face aux émergences pulsionnelles angoissantes.
118 Denis, P. (1985). 119 Golse, B. (1985).
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A l’adolescence, les conflits avec les parents ont une fonction
organisatrice, et le groupe, un rôle crucial. En effet, le groupe d’amis offre
à l’adolescent « la possibilité d’assumer sans trop de culpabilité ni
d’angoisse son opposition à la personne des parents et à la société en
générale, et par-là de conquérir son autonomie, en lui renvoyant une image
revalorisante de lui-même »120.
3. Les processus de maturation selon D.
Winnicott.
Selon Winnicott, la maturation du Moi de l’enfant s’effectue grâce
aux soins de la mère, par ses fonctions de « holding », façon dont l’enfant est
porté et de « handling », façon dont il est traité, manipulé121. C’est grâce à
l’adaptation réussie de la mère aux besoins de l’enfant et à la fonction de
miroir de la famille, renvoyant à l’enfant une image positive et unifiée de
lui-même, que celui-ci va progressivement renoncer à son sentiment
d’omnipotence. Ainsi, l’enfant, structuré par les soins, l’éducation et les
valeurs morales, transmis par l’environnement, va pouvoir s’inscrire dans
l’espace potentiel et investir des objets transitionnels. Cet espace lui
permet de développer sa créativité et le jeu symbolique. C’est par
l’intermédiaire du jeu et la créativité que l’enfant devient autonome, évolue,
se découvre et se socialise : il devient ainsi lui-même.
a- Le self et le faux self
Selon D. Winnicott, le Moi se structure dès le début de la vie par les
diverses expériences vécues par l’enfant et se renforce grâce à l’expérience
d’omnipotence, lorsque la mère répond immédiatement aux besoins de
l’enfant. Ainsi, le nourrisson ressent déjà à cette période le « sentiment
d’être », qui constitue la base de son identité, de son self.
120 Tourrette, C., Guidetti, M. (1994). 121 Ces fonctions vont permettre les processus d’ « intégration », constitution du Moi et de « personnalisation », développement de l’espace interne et du fonctionnement mental.
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Le self apparaît pendant la phase de « dépendance relative », où
l’enfant fait l’expérience de la frustration. Le petit enfant prend ainsi
conscience des limites entre « soi » et « non soi, son Moi se différencie de
l’extérieur. Se constitue alors un Moi mature, un self (un soi) unifié et
global, qui lui permet de supporter les « ruptures dans la continuité
d’être »122. Le vrai self est, selon Winnicott, le geste spontané et créateur
mais également la capacité à s’adapter à l’environnement. Il s’agit donc
d’un noyau identitaire stable, permettant la construction de l’image de soi
puis de l’estime de soi.
Le « faux self » se constitue, selon Winnicott, pendant la phase de
dépendance à la mère. Celle-ci n’étant pas « suffisamment bonne »123,
l’expérience d’omnipotence est impossible et l’enfant, soumis à la mère, se
construit un faux self. Ainsi, l’enfant protège son vrai self, qui ne
s’exprimera que dans certaines conditions, par un faux self soumis aux
exigences de l’environnement : « Le faux self défend le self authentique ». A
un degré extrême, il peut exister un clivage entre ces deux selfs, au profit du
faux, l’autre « vrai » étant privé d’expression et de satisfaction. La
construction d’un faux self entraîne un conflit de conscience chez l’enfant,
entre être ce qu’il est, ce qu’il ressent ou ce que les autres attendent de lui.
Winnicott exprime le danger particulier d’un faux self lié à un haut
potentiel intellectuel. Selon lui, une dissociation peut apparaître entre
l’activité cognitive et le vécu psychosomatique, et ainsi « L’esprit tend(ra) à
devenir le lieu où réside le faux-self ». De ce fait, le sujet investit de manière
excessive la sphère intellectuelle et réussit brillamment, mettant de coté ses
difficultés afin de satisfaire les attentes de l’environnement. Mais il arrive un
moment où ces sujets se détruisent, décevant ainsi l’entourage qui n’avait
rien perçu. Ces réactions rendent ainsi la reconstruction encore plus difficile.
122 Winnicott, D. (1970).123 Terme initié par D. Winnicott pour exprimer la capacité qu’a la mère à répondre demanière satisfaisante aux besoins du nourrisson, lui permettant ainsi l’expérience del’omnipotence. Ce sentiment renforce le Moi faible de l’enfant, lui donnant l’impression decréer lui-même l’objet de satisfaction.
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b- Les phénomènes transitionnels
Les phénomènes transitionnels apparaissent pendant la période de
séparation à la mère. Ils désignent, selon l’auteur, « L’aire intermédiaire
d’expérience qui se situe entre le pouce et l’ours en peluche, entre l’érotisme
oral et la véritable relation d’objet, entre l’activité créatrice primaire et la
projection de ce qui a déjà été introjecté» 124. Il s’agit donc d’objets de
substitution (peluche, tissu, jouet…) qui remplacent la mère absente, en
symbolisant l’union avec l’objet maternel, et permettent d’apaiser l’angoisse
de séparation ressentie. Constituant un intermédiaire entre le monde interne
de l’enfant et le monde externe, il marque le passage à une relation d’objet
bien différenciée et « la progression de l’enfant vers l’expérience vécue ».
Souvent, l’enfant abandonne progressivement cet objet et développe
des activités symboliques, « Les phénomènes transitionnels deviennent
diffus et se répandent (…) dans le domaine culturel entier »125. Ces jeux,
ayant la même fonction de lien entre l’imaginaire et le réel, sont une
expérience créative et symbolique pour l’enfant.
Selon Winnicott, cette aire intermédiaire d’expérience existe tout au
long de la vie, caractérisée par le jeu, la créativité artistique, la religion, la
culture ou encore l’intérêt pour les sciences et la vie imaginaire.
c- Le jeu et la créativité
Winnicott souligne l’importance du jeu dans le développement de
l’enfant, qui « facilite la croissance et la santé ». Le jeu est une activité
créatrice nécessaire à l’enfant, lui permettant de se maîtriser, d’exprimer sa
singularité par l’imagination et l’invention. A travers le jeu et les activités
symboliques, l’enfant s’approprie la réalité, l’intègre. Le jeu lui permet de
réguler ses conflits psychiques, d’apaiser son angoisse en les mettant en
scène ou en s’inventant des histoires. Par le jeu, l’enfant ou même l’adulte est
capable d’être créatif, et cette créativité permet la découverte de soi. Jouer
permet également d’établir des relations sociales et de communiquer, de
124 Winnicott, D. (1971). Jeu et réalité. Paris : Gallimard.125 Ibid.
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s’inscrire dans la culture et dans la société. Ainsi, pour Winnicott, un enfant
qui ne joue pas va mal126, c’est un « symptôme majeur » qui doit préoccuper
le thérapeute.
Selon Winnicott, la créativité s’oppose à la soumission à la réalité
extérieure. C’est un « mode créatif de perception qui donne à l’individu le
sentiment que la vie vaut la peine d’être vécue »127. La créativité peut se
développer si le sujet ressent un état de détente, de relaxation lié à des
« conditions de confiance basées sur l’expérience vécue », et « une
expérience créative, physique et mentale manifestée dans le jeu ». Ainsi,
l’ensemble de ces expériences vécues, la confiance dans l’environnement et
la stabilité de celui-ci, permettent l’élaboration du « sentiment de soi », le
sujet se sent exister comme unité, est lui-même.
A travers les expériences, la créativité et le jeu, l’enfant se découvre
et développe son vrai self ainsi que la relation à autrui. Il a intériorisé un bon
objet stable et sécurisant, il est capable de supporter les frustrations et de
tolérer les sentiments d’ambivalence et de culpabilité. Ainsi, l’enfant accède
à l’autonomie et à la « capacité d être seul », signe de maturité affective et
d’intégration du Moi.
126 Winnicott, D. (1971) : « L’enfant privé est agité et incapable de jouer ; il montre unappauvrissement de la capacité de faire des expériences dans le champ culturel ».127 Ibid.
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B) L’ENFANT « INTELLECTUELLEMENT
PRECOCE»
L’enfant « surdoué » est souvent réduit à ses compétences
intellectuelles, au détriment de son affectivité. Mais, comme nous l’avons vu
précédemment, le développement affectif joue un rôle essentiel dans le
développement de l’intelligence et dans la construction de la personnalité.
Qu’en est-il donc de la sphère affective chez ces enfants « surdoués »?
1. Développement affectif et construction
identitaire
Les enfants « surdoués » diffèrent autant les uns des autres que les
autres enfants. On remarque cependant des particularités dans leur
développement et fonctionnement affectif mais celles-ci ne sont pas
constantes et systématiques. Cependant, J. Siaud-Facchin met en évidence
des dispositions affectives, bases sur lesquelles se construit l’identité,
communes à tous ces enfants « atypiques ».
Pour J. Guillemaut128, il existerait des différences inter-individuelles
dans la façon de penser en fonction du « stade d’évolution que l’enfant
préfère ». Ainsi, l’enfant ayant des fixations au stade oral présenterait une
curiosité insatiable, en dévorant des livres. Au stade anal, l’enfant aurait
besoin de tout retenir et de se remplir de connaissances. Enfin, au stade
phallique primeraient l’exhibition des connaissances et de l’intelligence.
a- La construction de l’image de soi
Il semble que la construction de l’image de soi et de l’estime de soi
soient plus délicates à se structurer chez l’enfant « surdoué ». En effet, sa
curiosité, son mode de pensée et d’appréhension, sa sensibilité et sa fragilité
émotionnelle, entraînent des difficultés dans la construction identitaire.
La première relation à la mère128 Guillemaut, J. (1979). L’enfant surdoué et les autres : une rencontre de quel type ? InNeuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 27, (10-11), 439-443.
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Pour J. Siaud-Facchin129, l’enfant « surdoué » est un bébé au « regard
très scrutateur » qui peut paraître étrange pour la mère. Elle peut ainsi se
sentir déstabilisée et parfois incompétente face à cet enfant, ayant des
difficultés à comprendre ses besoins et à y répondre de manière satisfaisante.
Une spirale d’interaction négative peut alors se mettre en place, chacun se
sentant frustré et déçu par l’autre. « Les expériences de frustration
l’emportent alors sur les expériences de satisfaction et créent un sentiment
de discontinuité du Soi »130. L’enfant ne peut acquérir un sentiment de
sécurité suffisant et intérioriser une image positive de lui-même.
Cette incapacité de la mère à ressentir les besoins de son enfant
« atypique » peut entraîner la mise en place d’un faux self. Afin de paraître
conforme aux désirs et attentes de sa mère, l’enfant restreint ses désirs et
besoins, empêchant ainsi « l’émergence de son vrai soi ».
Les relations avec l’environnement
Selon A. Adda, le « surdoué » est un bébé heureux, épanoui,
observateur. Les difficultés se font ressentir plus tard, quand l’enfant est
confronté au monde extérieur et notamment à l’école. Le processus
d’exclusion, auquel l’enfant peut faire face, a des répercussions au niveau de
sa scolarité mais provoque surtout un « désastre affectif »131.
B. Gibello (2003) explique également la difficulté pour ces enfants,
qui ressentent un décalage avec l’environnement, à se construire une
représentation stable d’eux-mêmes. Les camarades de classe les jalousent et
ne comprennent pas leur centres d’intérêts si différents. Certains professeurs
ne supportent pas leur impertinence, leur inattention et, se sentant mis en
difficulté par ces enfants, tendent à les exclure. Les parents sont épuisés par
leurs incessantes questions et ne comprennent pas toujours les réactions de
leur enfant.
Ainsi, les enfants « surdoués », face à divers rejets et
incompréhensions, ont des difficultés à trouver leur place et à se
construire une image positive d’eux-mêmes. Ils manquent de confiance en
129 Siaud-Facchin, J. (2002). L’enfant surdoué. L’aider à grandir, l’aider à réussir. Paris :Odile Jacob.130 Ibid.131 Adda, A. (1999). Le livre de l’enfant doué. Paris : Solar
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eux, ont une estime d’eux-mêmes fragile, « marquées de multiples blessures
narcissiques, de sentiments de persécutions souvent justifiés »132. Cette peur
d’être rejeté entraîne parfois l’enfant vers une hyper-adaptation. Il peut
devenir inhibé, en retrait et parfois entrer dans un état dépressif, « sa joie de
vivre s’entache peu à peu de grisaille…elle imprègne les émotions, les
sentiments, elle brouille l’expression spontanée, elle devient pernicieusement
réductrice, finissant par étouffer le désir, l’ardeur, la vitalité et même le goût
du plaisir »133 .
Les nombreux décalages entre la perception de soi et celle renvoyée
par les autres peuvent entraîner la construction d’un faux self.
b- Les processus d’identification
Les enfants construisent leur identité en s’identifiant à des modèles de
référence qui sont principalement les parents, figures idéales auxquelles
l’enfant veut ressembler, et plus tard les amis.
Cependant, ces identifications semblent plus délicates chez l’enfant
« surdoué » de part sa perception et sa compréhension fine de
l’environnement. En effet, avec sa sensibilité accrue, l’enfant perçoit
précocement « les limites voir les failles des adultes qui l’entourent »134.
Ainsi, les parents ne sont plus perçus comme tout puissants, sécurisants
et protecteurs et ne peuvent donc servir de modèles pour l’enfant « surdoué ».
Celui-ci doit ainsi chercher en lui-même « les ressources nécessaires pour
grandir ». D’après J. Siaud-Facchin, l’enfant « précoce » fait face à une
problématique adolescente, caractérisée par la remise en question des
parents, mais avec des capacités d’élaboration de son âge. Il est donc en prise
avec une situation complexe, non élaborable, et source d’angoisse.
L’identification aux enfants de son âge et le sentiment d’appartenance
à un groupe sont également problématiques pour l’enfant « surdoué ». En132 Gibello, B. (2003).133 Adda, A. (1999).134 Siaud-Facchin, J. (2002).
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effet, trop en avance intellectuellement pour discuter avec les enfants de son
âge, mais pas assez grand et physique pour jouer avec les plus âgés, l’enfant
« surdoué » a souvent des difficultés à s’intégrer dans un groupe. Il a
souvent connu des situations de rejet de la part de ses pairs. De plus, il n’a
pas les mêmes centres d’intérêts que les autres, ni les mêmes modèles, héros
ou encore projets. Ainsi, se sentant différent des autres et incompris, il peut
s’isoler et devenir inhibé, anticipant toute rencontre de manière anxieuse et
négative. Ces difficultés entraîneraient des problèmes identitaires et la
construction d’une image dévalorisée et douloureuse de lui-même.
Un conflit important autour de l’image de soi apparaît surtout chez les
enfants « surdoués » non identifiés. En effet, « l’impossibilité pour l’enfant
surdoué non dépisté de donner sens à cette différence est à l’origine d’une
angoisse diffuse, confuse et envahissante »135. Sa singularité n’étant pas
reconnue, la construction de son identité est chaotique entraînant des troubles
psychologiques divers.
J.Y. Chagnon136 souligne la présence d’une « forte pression des
instances morales et idéales » chez certains enfants « surdoués ». Selon
l’auteur, ces enfants présentent une problématique essentiellement
narcissique et une angoisse de l’échec. Un Idéal du moi élevé et un Surmoi
fort entraîneraient chez eux un sentiment d’incompétence et une
« évaluation jamais satisfaisante de leurs capacités risquant de les faire
basculer du côté de la dépression d’infériorité »
135 Siaud-Facchin, J. (2002).136 Chagnon, J.Y. (2003). Précocité intellectuelle, hyperactivité et évolution sociale actuelle.Le journal des professionnels de l’enfance, n°25, 67-69.
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c- La situation œdipienne
Selon V. Dufour137, la situation œdipienne apparaît particulière chez
les enfants « à haut potentiel ». L’auteur met en avant l’hypothèse d’une
image paternelle oedipienne (le père imaginaire) défaillante, en
particulier chez les enfants « surdoués » en difficulté. D’après ses études, le
père aurait plus une place de « copain » pour ces enfants, qu’un rôle
interdicteur : « Le père semble n’avoir aucune consistance de père puissant,
il est vécu comme un semblable, n’est pas paré du pouvoir phallique, (…). Le
père non phallique ne peut faire interdit ». Selon l’auteur, pour les enfants
« surdoués » en inadaptation, le père n’a pas le phallus et n’est donc pas
devenu le père oedipien. Ainsi, le père ne peut répondre au désir de la mère
et « l’intelligence de l’enfant va, le plus souvent, prendre cette place ». Il n’y
a donc pas d’interdit imaginaire et l’enfant est maintenu dans un sentiment
de toute puissance. Ainsi, l’accès à la situation oedipienne est difficile
« dans ce contexte pré-génital ». L’enfant « précoce » ne semble pas pouvoir
s’identifier au père « puissant et castrateur », ni entrer en rivalité avec lui,
positions structurantes sur le plan de l’œdipe. « Il n’y a pas de lutte pour le
pouvoir, ce qui empêche, d’une part, la mise en place des processus de
promesse oedipienne (quand je serais grand…) et, d’autre part, la projection
dans le futur ».
L’auteur souligne également le rôle, dans cette défaillance de la
fonction paternelle, d’une problématique narcissique maternelle qui ouvre
« à la question de l’emprise et de l’envahissement archaïque de l’enfant par
la mère ». Le père ne remplirait pas son rôle de privateur du phallus pour la
mère et l’enfant, ni son rôle de donateur du phallus répondant au désir de la
mère. L’intelligence aurait ainsi un rôle phallique faisant de l’enfant
« l’objet aimé et désiré de la mère ».
137 Dufour, V. (2004). La fonction paternelle et l’enfant surdoué, un éclairage sur lapsychopathologie moderne. Le journal des psychologues, n°219, 36-40.
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2. Les particularités de l’enfant « surdoué »
Les enfants « précoces » présentent des traits caractéristiques au
niveau de leur affectivité. Selon J.C.Terrassier138 les enfants « surdoués » ont
un « développement hétérogène spécifique » qu’il décrit sous le terme de
« dyssynchronies » internes et sociales. D’autres auteurs insistent sur
l’hypersensibilité de ses enfants : « L’enfant surdoué est aux prises avec des
mécanismes de fonctionnement qui dépendent étroitement de son
hyperreceptivité affective et de son hyperacuité intellectuelle »139.
a- L’hypersensibilité
L’enfant « surdoué » est d’une extrême sensibilité émotionnelle, ce
qui le rend très réactif aux variations et comportements de l’environnement.
« Tous ses sens sont exacerbés et il perçoit avec une acuité exceptionnelle
tout ce qui se passe autour de lui »140. Cet envahissement affectif est
tellement important que l’enfant a souvent peur d’être débordé par ses
émotions, de perdre le contrôle. Il préfère alors ne rien montrer, ne rien dire,
même à ses proches, jusqu’à ignorer lui-même ses sentiments en les
réprimant profondément. « Il y aurait une indécence à afficher une
souffrance aussi grande, et l’étalage de leur déception ne serait pas
supportable ; eux-mêmes risqueraient d’être effrayés par la description
objective de leurs sentiments refoulés »141. Ainsi, l’enfant « surdoué » est
capable de contrôler ses émotions et réactions, apparaissant parfois
indifférent à des situations plus ou moins graves. Mais ce contrôle n’est pas
sans effet et ces enfants présentent souvent des troubles dans l’après, comme
des angoisses, troubles du sommeil, difficultés scolaires142.
L’enfant « surdoué » a également tendance à dramatiser, de part son
imagination débordante, souvent teintée d’anxiété. Ainsi, il craint toujours de
décevoir ses parents à cause d’événements insignifiants qu’il amplifie.
138 Terrassier, J.C. (1994). Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante. Paris : ESF.139 Siaud-Facchin, J. (2002). 140 Ibid. 141 Adda, A. (1999).142 Terrassier, J.C. (1994).
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Pour cet enfant tout doit avoir un sens, tout comportement ou parole
a son importance et a une intention cachée devant être analysée. Sa
susceptibilité est très importante, tout le touche et provoque chez lui de
fortes émotions qu’il tente de contrôler.
Les capacités intellectuelles ainsi que l’hypersensibilité donnent à
l’enfant « surdoué » une compréhension fine des autres. Selon J. Siaud-
Facchin, il ressent extrêmement bien l’état émotionnel de l’autre, « avant
même que la personne concernée en ait pris conscience elle-même ». Il
possède également une lucidité et une compréhension approfondie de son
environnement, ce qui entraîne une « hyper vigilance émotionnelle » et une
tension importante. En effet, cette hyper vigilance s’accompagne d’une
nécessité et d’une « rage de maîtriser »143. Cet enfant a besoin de précision
et d’exactitude, puisque « aucun flou ne peut être toléré »144.
b- L’intolérance à la frustration
Ne pouvant gérer le doute et l’incertitude, l’enfant « surdoué » est
intolérant à la frustration. Il lui est très difficile de supporter cette distance
entre l’envie et la satisfaction qui entraîne une inquiétante incertitude
provoquant ainsi en lui un sentiment d’insécurité et une forte angoisse. J.
Siaud Facchin nous explique que cette intolérance à la frustration vient du
fait que durant cette attente, l’enfant ressent une « peur de penser qui
enclencherait un processus de pensée complexe et sans limites »145. Ces
angoisses entraîneraient des comportements parfois agressifs, opposants
chez l’enfant. J. Richelle146 évoque également des difficultés à gérer
l’ambivalence ainsi que les compromis. Les « surdoués » présentent une
forte résonance intime, provoquant facilement l’énervement chez eux, qui
n’est pas toujours extériorisé.
Ces enfants ont donc besoin d’un cadre solide, sécurisant et
protecteur, de sentir les limites et d’avoir des règles, afin de contenir leur
angoisse et de s’épanouir. J. Siaud-Facchin conseillent aux parents de ne143 Winner, E. (1997). Surdoués : Mythes et réalité. Paris : Aubier.144 Siaud-Facchin, J. (2002).145 ibid.146 Richelle, J. (2004). 6ème journée de l’examen psychologique de l’enfant et de l’adolescent, « Ces enfants qu’on dit surdoués ».
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pas céder aux colères de l’enfant, de poser des limites claires, de « tenir
bon, pour son bien ». Ce cadre stable sécurise également l’enfant quant à la
fiabilité de l’amour de ses parents et réduit son sentiment de toute puissance.
Enfin, il semble que ces enfants, de part leur capacité de
compréhension, ont une certaine faculté à produire de l’angoisse, selon G.
Prat147. L’auteur évoque surtout des angoisses métaphysiques ou angoisses de
mort et des angoisses névrotiques liées à la perception précoce de leurs
propres conflits ou de ceux de leurs parents.
c- La dyssynchronie interne
La dyssynchronie interne se manifeste, selon J.C. Terrassier, au
niveau affectif et psychomoteur. Ces traits particuliers peuvent être
exprimés lors de la passation d’un test de Q.I., où il existe un décalage entre
l’échelle verbale et l’échelle performance, au détriment de cette dernière.
le niveau psychomoteur
Globalement, « les enfants surdoués au plan intellectuel n’ont pas la
même précocité au plan psychomoteur »148. De fait, ils ont un développement
psychomoteur banal, correspondant à leur âge réel mais qui contraste avec
leurs capacités intellectuelles supérieures. En effet, ce sont des enfants
souvent mal coordonnés avec des difficultés au niveau graphique, ce qui en
classe les rend incapables de suivre le rythme demandé. Cette « maîtrise
anxieuse vers l’hypertonie»149 peut entraîner des situations d’échec difficiles
à tolérer et ainsi une attitude d’évitement et un investissement négatif de
l’expression écrite de refus.
Le niveau affectif
147 Prat, G. (1979). 148 Terrassier, J.C. (1994).149 Ibid.
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J.C. Terrassier reconnaît également qu’il existe un décalage entre le
niveau intellectuel et le niveau affectif de l’enfant « surdoué ». Celui-ci serait
parfois immature du point de vue affectif. Il ferait face à des « situations
d’autant plus difficiles pour l’enfant que son intelligence fine lui permet un
accès à des informations qui vont être sources d’anxiété car son niveau de
relative immaturité affective ne les rend pas assimilables de façon
économique ». Ainsi, l’enfant cache ses difficultés par son comportement et
par des mécanismes de contrôle, mais celles-ci se réveillent souvent la nuit à
travers des peurs et angoisses non maîtrisables.
Ce décalage entre un développement intellectuel supérieur et une
maturation affective et motrice normale voire retardée peut être un frein à la
décision d’un saut de classe. En effet, on peut craindre que l’enfant soit
« handicapé dans l’apprentissage de l’écriture », ou que l’école soit source
« d’angoisses de séparations excessives » 150. De plus, l’organisation du
système scolaire semble peu adapté à ces enfants puisqu’il demande une
réussite homogène dans les différents secteurs d’acquisition.
d- La dyssynchronie sociale
Il existe également un décalage entre l’enfant « précoce » et son
entourage, que ce soit la famille, l’école ou les autres enfants.
La famille
Face aux capacités de compréhension et de réflexion mais aussi d’une
certaine immaturité de leur enfant, les parents ne savent pas toujours quelle
position adopter. Certains se sentent désemparés, ne sachant pas comment
gérer et aider un enfant qui « accepte mal le cadre et les limites »151 et
négocie tout. Néanmoins, bien souvent les parents sont à l’écoute de leur
enfant et, face aux difficultés, n’hésitent pas à consulter auprès d’un
spécialiste. Mais il existe des situations familiales plus compliquées, dans
lesquelles l’enfant ne peut s’épanouir.
150 Gibello, B. (2003).151 Siaud-Facchin, J. (2002).
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La situation devient difficile pour l’enfant « surdoué » quand il vient
d’un milieu culturel défavorisé. L’enfant réalise rapidement que ses parents
ne peuvent le comprendre. Il ressent alors un fort décalage et sa position
devient délicate. Soit il décide de rester solidaire avec sa famille et renonce à
ses dons et à son épanouissement. Soit il développe ses capacités mais au
risque de sentiments de culpabilité, de rejet et de perte d’amour de ses
parents. Il s’agit là d’un vrai conflit de conscience pour l’enfant
Les idéaux parentaux peuvent exercer une pression importante sur
l’enfant. « Il est difficile voire impossible pour de jeunes enfants de s’écarter
de l’idéal de leurs parents, ils ne peuvent et ne désirent pas les décevoir.
Mais c’est parfois au prix de leur propre désir »152. Certains parents,
exigeants et désireux que leur enfant réussisse, anticipent l’avenir de celui-ci,
souhaitant qu’il saute une classe et ne perde pas de temps. De même, on
accepte mal ses révoltes, ses échecs, ses colères, ses difficultés,
« l’émergence de toutes ses pulsions (…) et on lui demande d’être toujours
dans un idéal du moi très haut, dans des sublimations et intellectualisations
constantes»153. Ainsi, l’enfant « surdoué », réduit à ses capacités
intellectuelles, doit répondre à ce que les adultes projettent sur lui. Cet
objectif pèse sur lui, sur l’ensemble de ses comportements et lui impose une
forte tension difficile à relâcher. Sa personnalité peut donc être déniée, sa
marge de liberté, sa créativité et sa spontanéité en sont très restreintes.
L’enfant devient inhibé et parfois, se construit un faux self. « Il ne se fait
même pas entendre pour ne pas s’opposer à ce qui est attendu de lui »154et
ainsi ne pas décevoir ses parents.
Les amis
De nombreux auteurs soulignent les problèmes relationnels de
certains enfants « surdoués ». Ayant des difficultés à s’intégrer dans un
groupe, ils sont parfois solitaires voir inhibés. Selon J.C. Terrassier, le
meilleur ami de l’enfant « surdoué » est un autre enfant « surdoué ». Des
152 Gregorius, C. (2003). Surdoués à quel prix ? Le journal des professionnels de l’enfance,n°25, 29-31.153 Guillemaut, (1979).154 Gregorius, C. (2003).
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associations ont d’ailleurs été créées proposant des activités et loisirs
spécifiques155 .
L’école
De nombreux auteurs et parents dénoncent l’inadaptation du système
scolaire français aux enfants « précoces ». On évoque beaucoup l’ennui de
ces enfants peu stimulés qui engendre des comportements inadaptés en
classe. En effet, l’enfant « surdoué », de part son fonctionnement cérébral
particulier, intègre très facilement les apprentissages premiers, comprend et
retient sans effort. Néanmoins, il se centre souvent sur les activités
intéressantes et difficiles, ce qui entraîne une bonne réussite dans les
problèmes complexes mais un échec dans les tâches simples.
Pour certains enfants, des difficultés apparaissent souvent avec
l’entrée au collège, l’enfant n’ayant pas pris l’habitude d’apprendre et de
travailler pour réussir. Il n’a pas acquis les démarches nécessaires et va
éprouver des difficultés à échanger son apprentissage intuitif contre des
méthodes de travail rigoureuses. De ce fait, il se retrouve soudainement face
à l’échec et à la difficulté, qu’il ressent comme une blessure narcissique.
L’enfant est donc en souffrance, incapable d’apprendre et devient inhibé, en
retrait ou au contraire agressif, opposant en classe. Il en découle parfois un
véritable échec scolaire, qui déclenche « le jeu de la péjoration de soi et la
dépression »156.
Les attitudes des professeurs et camarades de classe peuvent
également influer sur le comportement et les résultats de l’enfant « surdoué ».
Les professeurs non avisés ont souvent des idées reçues sur ces enfants et une
attitude ambivalente. Certains sont admiratifs, fascinés, manifestant leur
intérêt ouvertement en classe mais provoquant ainsi la jalousie et le rejet des
autres enfants. D’autres enseignants se sentent dépassés et défiés par l’enfant
parfois inattentif voir turbulent. Selon B. Gibello (2003), il n’est pas rare que
ces enfants, entraînant l’agacement des autres élèves et parfois des
professeurs, soient des « souffres douleurs » à l’école.
155 L’ALREP, association de loisirs et de rencontres pour enfants intellectuellement précoces,l’association Jeunes Vocations artistiques, littéraires et scientifiques156 Gibello, B. (2003).
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Quand l’enfant est entouré par un environnement, école et/ou famille,
incapable de reconnaître ses capacités, celui-ci travaille en dessous de ses
capacités. J.C. Terrassier nomme ce phénomène « effet Pygmalion négatif »,
qui est un facteur de détérioration de l’intelligence. En effet, l’enfant a
besoin de se sentir comme les autres et face aux attentes limitées de son
entourage, ne peut assumer sa différence. Il tente alors de la réprimer afin
d’éviter tout rejet. Il en résulterait ainsi « des inhibitions intellectuelles
liées au sentiment que toute expression de l’intelligence est une source de
culpabilité »157. Sa propre représentation de soi est atteinte et l’enfant ne
peut se découvrir et s’épanouir.
« L’enfant surdoué n’est qu’un enfant, mais surdoué »158.
J.C.Terrassier insiste sur le fait que la dyssynchronie n’est pas une pathologie
mais un développement original. Selon lui, les difficultés rencontrées par
les enfants « surdoués » dépendent du « contexte sociopédagogique
inadapté ». L’enfant fait face à une pression aussi bien scolaire que familiale
ou amicale qui « l’incitent à un comportement normalisé…une régression
vers la moyenne… »159. Ce sentiment d’être différent amène certains enfants
à renoncer à exprimer leur don pour se comporter en sujet moyen et éviter
d’être marginalisé. D’autres peuvent s’enfermer dans un refus de la scolarité
et dans un échec, et parfois dans une dépression.
Selon J.C.Terrassier, une détection précoce est nécessaire afin de
mettre en place des mesures adaptées. Il s’agit souvent de jouer sur
l’environnement de l’enfant et de mieux répondre à ses besoins.
157 Coriat, A.(1987). Les enfants surdoués. Paris : Centurion.158 Terrassier, J.C. (1994).159 Ibid.
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3. Les mécanismes de défenses privilégiés
Les mécanismes de défense sont « tous les moyens utilisés par le Moi
pour maîtriser, contrôler, canaliser les dangers internes et externes »160. Ces
défenses, variées et nombreuses, ont un rôle adaptatif, protecteur, mais
d’autres peuvent s’avérer plus invalidantes.
L’enfant « surdoué » ressent de manière intense le monde qui
l’entoure et est en prise avec un vécu émotionnel interne « bouillonnant ».
Afin de ne pas se laisser déborder par cet afflux émotionnel et de parer à ses
angoisses, il doit donc mettre en place des mécanismes de défenses efficaces.
Selon J. Siaud-Facchin, l’enfant « consacre une énergie importante à
contrôler ses émotions pour ne pas se laisser envahir »161.
a- L’intellectualisation
Le mécanisme d’intellectualisation est un « Processus par lequel le
sujet cherche à donner une formulation discursive à ses conflits et à ses
émotions de façon à les maîtriser »162.
Une protection contre des affects envahissants
L’enfant « surdoué » a une forte tendance à utiliser
l’intellectualisation, qui lui permet de refouler ses instincts et pulsions
corporelles, sources d’angoisses, au profit des idées. Ce mécanisme,
réalisant « une traduction en langage intellectuel des processus
pulsionnels »163, permet donc à l’enfant de réprimer ses affects, diminuant
ainsi son angoisse.
J. Siaud-Facchin (2002) parle de « défense par la cognition », qui se
distingue de l’intellectualisation « par la transformation et la manipulation
cognitive systématique de toute perception sensorielle ». Ce fonctionnement
permet à l’enfant de se protéger contre le surplus émotionnel qui « pourrait
nuire à son adaptation ». Cependant, en mettant à distance toute charge160 Braconnier, A. (1991).161 Siaud-Facchin, J. (2002).162 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967). 163 Petot J.M. (1991). In Doron, R., Parot, F. (1991).
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émotionnelle et angoisse, ce mécanisme entraîne une dépense d’énergie
considérable, énergie qui ne sera pas disponible pour une autre tâche.
Pour M. Bergès-Bounes et S. Calmettes-Jean, l’hyper investissement
intellectuel « se propose de soulager cette angoisse qui témoigne de la
manière dont un sujet est affecté par la question du désir qui s’adresse à lui
dés avant sa naissance »164. Mais selon les auteurs, ce mécanisme ne peut
empêcher des résurgences et difficultés à l’adolescence, en particulier avec
l’émergence de la sexualité : « Une intelligence exceptionnelle ne dispense
pas de payer le tribu exigé par la castration »165.
Enfin, pour certains auteurs166, le surinvestissement intellectuel peut
être compris comme une défense contre l’ennui, contre « cet envahissement
par le vide, mais aussi comme façon de retenir le vide, de le garder contre
soi, comme un bien précieux (…)».
Les risques du surinvestissement intellectuel
Cette défense peut devenir un refuge pour l’enfant afin de ne rien
ressentir, entravant ainsi la construction de son identité. Ainsi, entraînant un
« appauvrissement et une rigidification de la vie psychique »167, une
personnalité désaffectivée, proche de la pensée opératoire, peut se structurer.
b- La rationalisation
L’enfant « surdoué » use également de la rationalisation, mécanisme
proche de l’intellectualisation. A la différence de ce dernier, la rationalisation
n’entraîne pas toujours un évitement des affects mais tend à les justifier, par
un raisonnement logique. « Par ce procédé, le sujet tente de (…) rendre
rationnel et cohérent, donc admissible pour la raison, un comportement
anormal ou dont les mécanismes inconscients lui échappent. Cette attitude
permet au sujet de masquer les diverses composantes conflictuelles qui le
nourrissent »168.
164 Bergès-Bounes, M. et Calmettes-Jean , S. (2003). Mon enfant est-il surdoué ? Clinique decette hypothèse. Le journal des professionnels de l’enfance, n°25, 41-44.165 Ibid.166 Bidaud, E. (2003). Ennui et créativité. Le journal des psychologues, n° 219, 41-45.167 Siaud-Facchin, J. (2002).168 Hardy-Bayle, M.C. (1991). In Doron, R., Parot, F. (1991).
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L’humour, « compromis entre la maîtrise affective par des outils
cognitifs et l’aménagement affectif »169, est également très utilisé par l’enfant
« à haut potentiel ». L’humour permet de rendre les affects tolérables, de les
maintenir à distance sans les supprimer.
c- La sublimation
Ce mécanisme a pour but de rendre socialement acceptables les
pulsions sexuelles. « La pulsion est dite sublimée dans la mesure où elle est
dérivée vers un nouveau but non sexuel et où elle vise des objets socialement
valorisés »170. La sublimation est caractérisée par deux types d’activités :
l’activité artistique, la créativité et l’investigation intellectuelle. Certains
enfants surdoués investissent particulièrement les activités intellectuelles,
valorisées par les adultes, mais bien souvent au dépend d’autres activités
sublimatoires où ils trouveraient des « sources de satisfaction et
d’accomplissement »171.
L’intellectualisation et la sublimation peuvent alors devenir des
défenses rigides pour l’enfant, lui permettant de maîtriser les frustrations, les
désillusions et l’angoisse, mais inhibant sa créativité et de sa spontanéité.
« L’enfant oublie qu’il a un corps, des instincts, oublie qu’il a le droit d’être
en colère et d’aimer, il préfère dessiner ou résoudre des équations
mathématiques que d’exprimer tout cela » 172.
J. Siaud-Facchin évoque un autre type de défense privilégié des
enfants « surdoués » : la création d’un monde interne. Ainsi, ces enfants se
réfugient dans leur monde afin de se protéger de toute menace extérieure et
d’« attaques identitaires »173.
d- Hypothèses explicatives de l’hyperinvestissement intellectuel
169 Siaud-Facchin, J. (2002).170 Laplanche, J., Pontalis, J.-B. (1967).171 Emmanuelli, M. (2003). Questions posées aux psychologues par les « enfantsd’exeption ». Le journal des professionnels de l’enfance, n°25, 32-35.172 Guillemaut (1979).173 Siaud-Facchin, J. (2002).
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M. Berges-Bounes et S. Calmettes-Jean174 avancent l’hypothèse d’une
fonction réparatrice du don de l’enfant. Ces enfants seraient souvent nés
d’un deuil impossible dans la famille « d’un impossible à accepter la mort
d’un proche ou la maladie (…), ou d’un deuil impossible de l’idéal : l’enfant
idéal, le couple idéal, une vie idéale ». Selon les auteurs, l’enfant, avec son
intelligence très développée et ses questionnements métaphysiques, se
présente comme un idéal. Ainsi, il pourrait représenter « un pansement de la
plaie douloureuse qui affecte l’un des parents ou l’enfant lui-même ».
L’activité cognitive et l’hyper investissement de la pensée apparaissent donc
comme « un refuge » pour l’enfant angoissé, « une tentative d’élaboration
psychique ». Cependant, cet investissement défensif n’empêche pas des
difficultés et une grande fragilité chez l’enfant « surdoué », souvent anxieux,
notamment face à l’échec. Par ailleurs, les auteurs se posent la question, non
résolue, du rôle de la pensée de ces enfants : « servirait-elle à esquiver la
castration symbolique ? ».
Il apparaît enfin important de comprendre le sens que ce don peut
avoir dans l’histoire singulière de l’enfant et sa famille, en tenant compte
« de la personne de l’enfant », parfois à travers un suivi psychologique.
V. Dufour175 évoque également, face aux difficultés de l’enfant
« surdoué », l’hypothèse d’une défense par l’intelligence. Ainsi, l’intelligence
de l’enfant pourrait masquer une souffrance : deuil, maladie grave,
dépression maternelle, pathologie d’un parent ou encore secret familial.
174 Berges-Bounes, M. et Calmettes-Jean, S. (2003).175 Dufour, V. (2004).
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4. Psychopathologie des enfants « surdoués»
a- Une certaine fragilité
D’après certaines études176, les enfants « surdoués » ne présenteraient
pas davantage de troubles psychologiques que les autres enfants. Néanmoins,
de nombreux auteurs177 évoquent une fragilité psychique liée au don
intellectuel. Selon eux, ces enfants souffrent plus fréquemment de « névroses
de caractère avec des symptômes obsessionnels qu’ils tolèrent bien mais
avec lesquels ils torturent leur entourage »178. Ainsi, une excellente réussite
scolaire peut cacher des troubles obsessionnels, surtout chez les enfants mal
entourés qui sur-investissent alors l’école et les apprentissages. Pour G.
Prat179, ils auraient une faculté à fabriquer une névrose, « de structure
œdipienne », afin de se défendre contre l’angoisse.
Pour B. Gibello180, il existe des « surdoués normaux » et des
« surdoués pathologiques ». D’après lui, les premiers dits « normaux » ne
présentent pas de structures psychiques pathologiques mais sont néanmoins
des sujets à risques, en raison de leur développement et caractéristiques
particulières. Ainsi, les difficultés relationnelles rencontrées dés l’école
primaire peuvent entraîner chez l’enfant des troubles anxieux, caractériels
ou régressifs, ou encore un renoncement à leur don. Au collège, l’échec
scolaire favorise une dévalorisation de soi et parfois une dépression. Chez
les « surdoués pathologiques », on rencontre divers symptômes181, notamment
des névroses d’abandon et d’importantes souffrances narcissiques.
Selon J. Siaud-Facchin (2002), le risque pathologique de l’enfant
« surdoué » est favorisé par un diagnostic trop tardif et/ou par un
environnement (famille ou école) non sécurisant. Cet enfant est vulnérable,
de par son hypersensibilité et son extra lucidité. Ainsi, des facteurs externes
176 Ziv, A. (1976), Kohler C. et Maer, M. (1963), cités par Winner, E. (1997).177 S. Lebovici ou G. Prat, cités par Roux Dufour, L. (1985). Les enfants intellectuellementsurdoués. In Lebovici, S., Diaktine, R., Soulé, M. (1985). 178 Ibid.179 Ibid.180 Gibello, B. (2003).181 Structures névrotiques, psychotiques, maniaco-dépressives, délires paranoïaques
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défavorables (rejet des autres) peuvent entraver la construction de sa
personnalité, entraînant une « fragilité narcissique majeure ».
b- Les troubles psychopathologiques
L’enfant « surdoué » peut souffrir de n’importe quel trouble classique
de l’enfance182 mais les formes les plus fréquemment évoquées sont
l’inhibition intellectuelle et la dépression.
La spécificité de l’enfant « à haut potentiel » en souffrance est qu’il
exprime ses maux de manière désaffectivée, en minimisant et en
rationalisant. Il lui est donc difficile de reconnaître sa souffrance et
d’accepter de l’aide extérieure.
L’inhibition intellectuelle
L’inhibition intellectuelle traduit une incapacité à utiliser ses
capacités intellectuelles. Mais chez l’enfant « surdoué », cette incapacité est
un choix, « un impératif vital »183. Il s’agit d’une autodestruction de
l’enfant. Face à un rejet ou à une agressivité de l’entourage, l’enfant inhibe
son expression intellectuelle afin de se faire accepter, de passer inaperçu et
de se protéger. J. Siaud-Facchin compare ce trouble à une anorexie
intellectuelle puisqu’il s’agit d’un « retournement de l’agressivité contre
soi »184. C’est un trouble sévère qui conduit à une destruction de l’identité de
l’enfant. Guillemaut (1979) parle de l’inhibition intellectuelle comme une
solution pour l’enfant de se camoufler : « ils s’infligent à eux-même une
castration pour ne pas la subir des autres ».
La dépression
L’ennui à l’école serait une des principales cause d’un mouvement
dépressif, ces enfants étant « particulièrement sensibles à la perte d’illusion
de leur puissance et donc menacés d’être confrontés à leur limites »185.
Cependant, dans la dépression de l’enfant « surdoué », le domaine
182 Troubles du sommeil, du comportement, alimentaires, psychosomatiques, dépression…183 Siaud-Facchin, J. (2002).184 Ibid.185 Berges-Bounes, M. et Calmettes- Jean, S. (2003).
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intellectuel et l’investissement scolaire sont souvent préservés, représentant
« le seul lien qui les maintient à la vie »186.
La dépression s’exprime chez l’enfant « surdoué » par « un vide
dépressif 187». Aucune émotion et souffrance ne sont exprimées, seul le vide
est présent protégeant l’enfant de toute pensée perçue comme dangereuse.
Pourtant l’enfant reste lucide, analyse, se pose des questions existentielles
autour de la vie et de la mort. Il ne cherche pas l’attention ou le réconfort
mais il veut comprendre « le sens de la vie »188 et est envahi par des
questions aux réponses impossibles. Selon J. Siaud-Facchin, deux
mécanismes sous-tendent la dépression de l’enfant « surdoué » : la
culpabilité et la problématique du deuil. L’enfant se sent coupable d’avoir
déçu ses parents, de ne pas être à la hauteur de leurs attentes. Il retourne
également cette culpabilité contre lui-même, considérant qu’il s’est trahi lui-
même. L’enfant « surdoué » dépressif ne peut penser des choses qui n’ont pas
de sens pour lui. Ainsi, il est incapable d’élaborer la perte et d’effectuer un
travail de deuil quant à ses idéaux et donc de se projeter dans l’avenir.
Le surdon défensif
Enfin, il semble important pour J. Siaud-Facchin d’éviter les
confusions entre l’enfant « surdoué » et le surdon défensif. Le surdon
défensif survient chez des enfants présentant un trouble précoce de la
personnalité. Ainsi, l’investissement intellectuel peut, dans certains cas, être
utilisé comme défense rigide contre des angoisses envahissantes voire
destructurantes, ne laissant pas « au sujet la capacité de maintenir une
marge d’adaptation minimale nécessaire aux échanges avec autrui »189.
Cette structure de personnalité est repérable par les résultats aux tests
d’intelligence : un Q.I. verbal très élevé en décalage avec un Q.I.
performance très bas. Ce sont des enfants instables, ayant des troubles du
comportement, qui trouvent très difficilement leur place à l’école. Mais à
l’adolescence, ce mécanisme de défense s’affaiblit et les troubles de la
personnalité apparaissent au premier plan. Selon M. Emmanuelli, une prise
186 Siaud-Facchin, J. (2002).187 Ibid.188 Ibid.189 Emmanuelli, M. (2003).
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en charge psychothérapeutique (parfois institutionnelle) et un travail sur les
angoisses et problématiques de l’enfant s’avèrent nécessaire afin d’éviter de
futures décompensations, notamment à l’adolescence. L’orientation dans une
classe spécialisée offre également à l’enfant un cadre sécurisant et « des
ressources canalisant ses intérêts ».
Ce diagnostic différentiel entre surdon défensif et « précocité
intellectuelle », souligne l’importance d’un examen clinique approfondi
afin de ne pas enfermer l’enfant dans une « spirale infernale »190, déniant sa
réalité. « Dans les limites, parfois déconcertantes entre les singularités de
fonctionnement de l’enfant surdoué et des tableaux de troubles précoces de
la personnalité, on voit combien l’apport d’un bilan approfondi prend toute
son importance et dans quelles méprises diagnostiques graves, certains
enfants peuvent être entraînés »191
c- La prise en charge
La prise en charge thérapeutique de l’enfant « surdoué » en souffrance
est primordiale afin que l’enfant se construise une estime de soi suffisante et
s’affirme en tant que sujet. Néanmoins, elle nécessite une certaine patience
de la part du thérapeute. En effet, selon J. Siaud-Facchin, l’enfant exprime
une colère envers le praticien liée à son propre sentiment d’impuissance, à
son incapacité à contrôler cette situation. Il tente de déstabiliser et de
manipuler le thérapeute, remettant tout en question. « L’objectif,(…) est de
s’assurer de la fiabilité et de la solidité du thérapeute et de son cadre
thérapeutique »192.
190 Siaud-Facchin, J. (2003). Les limites du QI dans le diagnostic des enfants surdoués : entregénie et folie. Le journal des psychologues, n°219, 27-30.191 Ibid.192 Ibid.
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5. En conclusion
L’enfant « surdoué » est, avant tout, un enfant comme les autres mais
avec des caractéristiques particulières et donc des besoins spécifiques.
En effet, cet enfant, de par son extrême sensibilité affective et
émotionnelle, a besoin d’une sécurité affective et d’un cadre solide. Selon
J. Siaud-Facchin (2002), « La solidité du cadre familial est un enjeu central
dans le développement de l’identité de l’enfant surdoué ».
Percevant chaque variation et tension émotionnelle, analysant et
interprétant minutieusement chaque événement, l’enfant « surdoué »
rencontre diverses difficultés au fil de son développement. D’une
construction identitaire délicate aux relations compliquées avec son
entourage, l’enfant est souvent pris dans un conflit de conscience : être
conformiste pour se faire accepter et renoncer à ses particularités, ou rester ce
qu’il est au risque d’être rejeté et non compris. Ce conflit majeur fragilise
l’enfant et la construction de son identité. La famille a alors un rôle important
dans la reconnaissance et la valorisation, la sécurité et la stabilité qu’elle peut
apporter à l’enfant « surdoué ». « Son besoin d’être accepté et reconnu est
indissociable de sa capacité à s’investir, intellectuellement, affectivement et
socialement. »193
Selon C. Weissman-Arcache194, il existe deux principales voies
d’évolution pour ces enfants «précoces ». Une issue positive est caractérisée
par des activités sublimées menant à « un certain épanouissement
professionnel et affectif ». A contrario, d’autres enfants « surdoués » ont un
développement plus rigide. Le besoin de « maîtrise du temps, du manque et
de la frustration » pourront entraîner un échec scolaire ou des difficultés
relationnelles.
193 Siaud-Facchin, J. (2002). 194 Weissman-Arcache, C. (2003). Les questions existentielles des enfants surdoués ou lesdestins de la pulsion de savoir. Le journal des psychologues, n°219, 31-35.
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CONCLUSION
Le thème des enfants « surdoués », très exploité par les médias, est
encore peu étudié en France de manière scientifique. En effet, une équipe de
recherche française195 a récemment effectué une revue de la littérature
internationale sur ce sujet. D’après les auteurs, les enfants « à haut potentiel »
n’ont pas présenté, ces dernières années, un « objet d’étude majeur pour les
psychologues français ». De ce fait, plus de 80% de la littérature étudiée a
été importée de l’étranger, notamment des Etats-Unis.
Les principaux thèmes abordés dans ces recherches portent sur
l’identification de ces enfants, le Q.I. et l’hétérogénéité des potentiels, la
créativité, ou encore les pratiques éducatives et les modes de scolarisations.
Ainsi, il semble que les études s’intéressent moins souvent au développement
affectif de ces enfants. De plus, les auteurs soulignent la présence de biais et
de lacunes méthodologiques dans plusieurs recherches, aussi bien étrangères
que françaises.
La recherche n’en ait donc qu’à ses débuts et de nombreux thèmes
restent à étudier et à approfondir.
Dans notre travail de recherche, nous nous intéressons à l’affectivité
de ces enfants « intellectuellement précoces », afin de mieux comprendre leur
ressenti. Comme nous l’avons évoqué précédemment, la construction de la
personnalité de l’enfant est caractérisée par une forte intrication entre le
développement affectif et le développement intellectuel. Ces deux sphères
interagissent entre elles. Nous pouvons donc nous demander ce qu’il en est
pour ces enfants ayant un haut potentiel intellectuel.
Selon certains auteurs, ces enfants présentent une hypersensibilité et
une dyssynchronie interne et externe. Ils trouvent difficilement leur place à
l’école, dans un groupe, ou au sein de leur famille. De plus, leur estime
d’eux-mêmes apparaît assez faible et leur construction identitaire délicate.
Ainsi, les auteurs évoquent souvent un décalage entre ces deux sphères voir
une immaturité affective.
195 Pereira-Fradin, M., Lubart, T., Caroff, X. (2004).
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L’hypothèse principale de notre étude est donc qu’il existe un
décalage entre les capacités intellectuelles et la maturité affective de
l’enfant « intellectuellement précoce ». Nous avons mis en avant trois
hypothèses différentes pouvant caractériser ce décalage :
Notre première hypothèse est que, sur le plan affectif, ces enfants sont moins matures que
les autres enfants du même âge.
Une deuxième hypothèse met en avant un développement affectif différent et spécifique
des enfants « surdoués ». Ces différences se situeraient notamment au niveau : d’un
Surmoi écrasant, d’une construction difficile des identifications parentales, d’une situation
œdipienne complexe et non assumée, et enfin d’une prise d’indépendance conflictuelle.
Enfin, notre troisième hypothèse est que ces enfants sont plus anxieux que les enfants
« normaux », mais ne le montrent pas ou l’expriment différemment. Ils s’inquiéteraient
plus facilement et auraient une vision de la vie plus douloureuse.
Avant d’exposer notre partie pratique, quelques rappels semblent
nécessaires. En effet, il semble important de préciser les critères concernant
un développement affectif mature et équilibré qui pourront être mis en
évidence afin de vérifier nos hypothèses au regard de nos résultats.
Selon l’exposé théorique qui précède, nous pouvons caractériser la
maturité affective par une situation œdipienne assumée, dont les pulsions
ont été sublimées. De même, le Moi de l’enfant doit être solide et ses
mécanismes de défenses efficaces. L’enfant en fin de période de latence est
en pleine structuration de son identité. Ainsi, il semble que les mécanismes
d’identifications aux parents puis aux pairs jouent un rôle important à cette
période. L’appartenance à un groupe et le jeu ont également une place
primordiale pour l’enfant. Enfin, l’enfant « mature » doit être capable de
prendre progressivement son autonomie, de s’affirmer, en étant lui-même
avec son vrai « self ».
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PARTIEPRATIQUE
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I. METHODOLOGIE
Dans cette partie nous exposerons tout d’abord les méthodes utilisées
dans notre travail sur le terrain. Ainsi, après avoir présenté notre population
d’étude et les démarches effectuées auprès des familles, nous développerons
les méthodes d’analyses du test Patte Noire, des entretiens et des Phrases à
compléter.
Dans un deuxième temps, nous proposerons une réflexion sur notre
travail et sur les problèmes que nous avons rencontrés.
A) METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
1. Présentation de la population d’étude
a- L’école
Afin de rencontrer notre population d’étude, nous avons effectué un
stage au sein d’une école privée, auprès d’une psychologue de l’éducation.
Cet établissement propose, depuis trois ans, des classes de type
« intégrative » pour les enfants dépistés « intellectuellement précoces ».
Le recrutement des enfants s’effectue sur dossier, avec un test de Q.I.
et selon certains critères (Q.I. supérieur à 130, difficulté ou besoin spécifique
dans certains domaines, problème relationnel ou d’intégration dans une
classe). La décision se fait sur étude des dossiers, en accord avec une
commission interne constituée de l’équipe pédagogique et de la psychologue
de l’établissement.
Ces classes (une ou deux par niveau, au collège), sont composées
d’enfants « surdoués » et d’enfants non surdoués mais ayant un assez bon
niveau scolaire. Un enseignement ajusté et approfondi196, dispensé par des
professeurs volontaires et avisés, est proposé à ces enfants.
196 Ces classes proposent une pédagogie adaptée : approfondissement des notions, ajustementdes méthodes, utilisation de supports ludiques, apprentissage de deux langues vivantes(anglais et allemand) dés la sixième…
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Deux rencontres annuelles avec les parents, animées par la
psychologue et en présence du responsable de division197 et du professeur
principal, ont été mises en place afin de travailler en lien avec les familles.
Ces réunions ont lieu en début et fin d’année et permettent aux parents de se
rencontrer, de discuter de leurs difficultés et d’échanger avec l’équipe
pédagogique.
b- Présentation de l’échantillon
Dans le cadre de notre travail de recherche, nous avons eu accès à la
classe « d’intégration » de sixième, composée de neuf élèves dits
« surdoués » et dix-neuf élèves non surdoués.
Notre échantillon est composé de deux filles et sept garçons, âgés de
neuf à douze ans et dont les Q.I. sont compris entre 130 et 150. Ces enfants
ont été dépistés « intellectuellement précoces » avant l’entrée en sixième, à
partir des résultats au WISC (Q.I. ), et parfois d’un bilan psychomoteur,
auprès d’un psychologue. Par ailleurs, nous avons eu accès aux comptes-
rendus et dossiers de ces enfants198.
Afin d’effectuer une étude comparative pour le test Phrases à
compléter, nous avons établi un groupe d’enfants non surdoués, en classe de
sixième, que nous avons rencontré lors d’une passation de groupe. Aucun
critère de sélection n’a été utilisé puisqu’il s’agissait d’avoir un groupe
d’élèves « tout venants » en classe de sixième. Aucun entretien n’a eu lieu,
les protocoles sont anonymes et seul l’âge des enfants est connu.
197 Le collège est divisé en niveau. Chaque division dispose de ses propres locaux (classes etcours de récréation) et d’un responsable de division qui anime l’équipe pédagogique(professeurs et élèves).198 Certaines données sont intégrées dans la présentation des enfants, en annexe.
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2. Présentation de la recherche
a- Présentation de la recherche auxparents
Rencontre avec les parents
Nous avons rencontré les familles des enfants « surdoués » lors des
réunions organisées par la psychologue.
Dans un premier temps, nous nous sommes présentés, au mois de juin
2003, aux parents des futures sixièmes199. Ainsi, nous avons expliqué le sujet
de notre mémoire, le projet de notre recherche et les méthodes utilisées200.
En octobre 2003, nous avons envoyé une lettre aux familles (cf.
annexe) expliquant à nouveau notre travail et demandant l’accord aux parents
quant à la participation de leur enfant.
Au mois de novembre, une nouvelle rencontre a été organisée entre
les familles et l’équipe pédagogique, afin de faire le point sur le début
d’année. A cette occasion, nous avons répondu aux questions de certains
parents. Celles-ci concernaient le retour des résultats de l’enfant par rapport
aux tests et l’accès à notre travail et à nos conclusions.
Retours aux familles
Au mois de mai 2004, nous avons rencontré, lors d’un entretien, les
parents souhaitant avoir un retour sur leur enfant. Nous avions, au préalable,
envoyé une lettre aux familles indiquant la fin de nos rencontres avec les
enfants et notre disponibilité pour les rencontrer.
Ces rencontres se sont effectuées dans le bureau de la psychologue du
collège, en sa présence. Dans un premier temps, la psychologue demandait
aux parents leurs impressions sur l’année écoulée dans cette classe dite
« spéciale ». Ensuite, nous effectuions un bref compte rendu présentant
certains éléments ou problématiques de l’enfant. Nous avons été très
199 Pendant la rencontre de fin d’année, d’abord les parents des sixièmes actuels sont présentsafin de faire un bilan de l’année passée. Puis une deuxième réunion est effectuée avec lesparents des futures sixièmes afin de répondre à leurs questions, inquiétudes et de rappeler leprojet pédagogique de cette classe.200 Nous avons présenté les outils utilisés de manière succincte, sans donner le nom des tests.
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prudents dans nos retours afin de ne révéler que des points « banals » ou
pouvant être compris et entendus par les familles. Ainsi, très souvent nous
avons valorisé l’enfant et appuyé sur ces besoins (avoir moins de pression
quant à la scolarité, encourager la relation avec le père…)
Présentations de la recherche aux familles des enfants non
« précoces ».
Pour le groupe d’enfants non « surdoués », nous avons transmis une
lettre aux parents (cf. annexe), précisant le caractère anonyme du test et la
date de passation. Les parents ou enfants refusant de participer devaient en
faire part à la psychologue en la contactant.
b- Rencontres avec les enfants
Au fil de l’année nous avons rencontré à trois reprises les enfants
« surdoués » : Tout d’abord sous forme d’un entretien clinique, puis dans le
cadre d’une passation du test Patte Noire ; et enfin, à l’occasion d’une
passation en groupe du test Phrases à Compléter.
Les rencontres individuelles pour l’entretien et le test Patte Noire se
sont déroulées durant une heure d’étude dont disposaient les enfants chaque
jeudi matin. Ces passations, d’environ cinquante minutes, ont eu lieu soit
dans le bureau de la psychologue quand celle-ci était absente, soit dans une
grande pièce servant de réunion ou de conseils de classe, ou encore dans une
petite salle de catéchèse. Par ailleurs, les passations dans la salle de réunion
étaient parfois perturbées par des entrées et des bruits extérieurs qui ont pu
déconcentrer l’enfant et biaiser quelque peu les résultats.
Les passations en groupe pour les enfants « surdoués » se sont
déroulées dans leur classe, durant une heure d’allemand, leur professeur
ayant accepté de nous laisser son heure de cours.
Concernant les enfants non « surdoués », la passation a eu lieu
pendant une heure d’étude, également dans leur classe. Nous leur avons
expliqué de manière floue et brève le sujet de notre étude (une recherche sur
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le vécu et le ressenti des élèves en classe de 6ème ). Seuls les enfants acceptant
d’y participer et ayant l’accord de leurs parents ont effectué la passation.
3. Les outils d’analyse
a- L’entretien clinique
Les éléments recueillis lors de l’entretien avec l’enfant nous ont
permis de compléter les tests projectifs et de constituer une sorte
d’anamnèse. De plus, l’entretien avait pour rôle d’instaurer une relation de
confiance avec l’enfant. Lors de cette première rencontre avec l’enfant, nous
lui avons également présenté brièvement notre projet afin de lui demander
son accord.
Nous avons privilégié l’entretien semi-directif avec des questions
ouvertes, afin de laisser une certaine liberté à l’enfant. Une grille d’entretien
(exposée en annexe), élaborée au préalable, nous a servi de base pour aborder
les grands thèmes nous intéressant : les relations avec la famille (parents et
fratrie), la scolarité, la socialisation (les relations aux paires, les activités
extrascolaires), la perception de soi et de son « surdon » et son ressenti.
Dans nos études de cas, une synthèse de ces entretiens est proposée,
permettant ainsi de connaître certains éléments de la vie familiale du sujet et
de sa personnalité.
b- Le test Patte Noire
Présentation
Le test Patte Noire est une épreuve projective pour enfants et
adolescents, élaboré et expérimenté par L.Corman et son équipe en 1961, au
centre médico-psychologique de Nantes.
Construit à partir d’images mettant en scène un petit cochon Patte
Noire, ce test présente un intérêt dans l’étude de la personnalité de l’enfant.
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En effet, les histoires construites par l’enfant permettent de comprendre et de
mettre en évidence sa problématique, sa structure de personnalité, ses
tendances et ses conflits, son mode d’adaptation et ses relations avec
l’entourage. Selon L. Corman, le choix des images n’est pas indifférent et
chacune d’elles est « susceptible d’amener à l’expression telle tendance de
la personnalité »201.
Ce test est composé de dix-neuf planches, en référence aux différents
stades d’évolution de l’enfant : des images dites « orales », « agressives » (en
lien avec l’agressivité orale ou anale) et « oedipiennes »202. ; des images dites
« punitives » liées à la notion de culpabilité et d’autres ayant trait au thème de
l’indépendance. On distingue également une image Frontispice, présentant
Patte Noire et sa famille, et une image Fée.
Modalité de passation
La passation du test comporte trois temps : les récits spontanés,
l’enquête (méthode des préférences et identifications) et les questions finales.
La consigne de départ expliquée à l’enfant est : « Nous allons
raconter les aventures du petit cochon Patte Noire ». Il est souvent
nécessaire de rassurer l’enfant en lui précisant qu’il n’y a pas de bonnes et de
mauvaises réponses.
Tout d’abord, nous présentons à l’enfant l’image Frontispice.
L’enfant doit situer les différents personnages, leur donner un sexe, un âge,
des liens parentés ou non. Puis, l’ensemble des images, excepté l’image Fée,
est donné à l’enfant, sans ordre précis. L’enfant doit alors choisir l’image ou
les images qui l’intéressent, à partir desquelles il va raconter une ou des
histoires. Il les étale devant lui et doit choisir par laquelle il veut commencer.
L’examinateur reste le plus neutre possible, cependant, il peut parfois poser
des questions dynamisantes ou relancer un enfant inhibé.
Dans un deuxième temps, les images sont rassemblées et présentées à
nouveau à l’enfant avec une nouvelle consigne. Ainsi, le sujet doit trier les
images en deux tas : celles qu’il aime d’un côté et celles qu’il n’aime pas de201 Corman, L. (1973). Le test Patte Noire, Manuel. Paris : PUF.202 Images orales: Tétée 1, Tétée 2, Chèvre, Hésitation et Portée ; images agressives : Jars,Bataille, Jeux sales, Auge ; images œdipiennes : Baiser, Nuit, Rêve maternel et Rêvepaternel ; images punitives: Jars, Charrette, Trou ; images d’indépendance : Trou,Hésitation, Départ
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l’autre. Les images « non aimées » sont étalées devant l’enfant qui doit
choisir celle qu’il aime le moins. A chaque image, il lui est demandé de
justifier son choix et d’indiquer à quel personnage il s’identifierait. Quand
l’enfant est en difficulté pour expliquer son choix, on peut lui demander ce
que le dessinateur pourrait changer sur l’image s’il devait la refaire.
La même démarche (justification et identification) est effectuée pour
les images « aimées », en commençant par celle que l’enfant préfère.
Le troisième temps de la passation est un moment de dialogue avec
l’enfant. L’examinateur peut revenir sur des points à préciser puis lui pose
des questions, à partir du frontispice, concernant les sentiments des
personnages et les liens entre eux :
« Qui est le plus heureux dans la famille et pourquoi ? Qui est le moins
heureux, pourquoi ? » ; « Qui est le plus gentil / le moins gentil,
pourquoi ? »
« Dans la famille, le père a-t-il des préférences pour un membre de la
famille ? Pourquoi ? Et la mère, les petits Blancs, Patte Noire ? Et
toi ?»
« Que va devenir Patte Noire plus tard, quand il sera grand ? »
« Que pense Patte Noire de sa tache noire ? »
« A quel âge Patte Noire est-il le plus heureux ? »
Enfin, l’image Fée est proposée à l’enfant, en lui expliquant que Patte
Noire rencontre sa marraine, la bonne fée, qui avec sa baguette magique va
exaucer trois souhaits de Patte Noire. On demande alors à l’enfant quels
seraient ces vœux. Cette dernière image entraîne une projection massive due
à l’abaissement des défenses en fin de test.
c- Le test Phrases à compléter
La méthode des Phrases à compléter est une technique projective, un
test écrit dit papier crayon. Introduit en 1916 aux USA, ce test a connu de
nombreuses modifications. Il existe diverses versions de phrases selon les
auteurs et les champs d’applications. Les principaux travaux ont été effectués
dans le cadre de l’orientation professionnelle, ou dans le domaine scolaire.
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Néanmoins, la méthode d’interprétation reste la même, fondée
principalement sur une analyse qualitative et intuitive.
Ce test présente un intérêt au niveau de l’adaptabilité de la méthode,
de la simplicité de la technique d’administration (orale, ou écrite,
individuelle ou collective), de la rapidité relative de correction et du caractère
anodin du test qui effraie moins les sujets que certains tests projectifs
(Rorschach, TAT). Cependant, ce matériel est moins riche et moins élaboré
que d’autres projectifs. En effet, faisant appel à un niveau plus conscient, il
renseigne sur le contenu de la personnalité (sentiments, attitudes, réactions)
plutôt que sur la structure de la personnalité profonde. De ce fait, il apparaît
utile afin de comprendre certains conflits du sujet, le contenu de sa pensée et
ses sentiments.
Selon D. Anzieu203, l’avantage de cette épreuve est « la possibilité
d’en fabriquer sur mesure, selon le problème que l’on veut étudier ». Ainsi,
pour notre travail de recherche, nous avons utilisé le test de Stein204 auquel
nous avons apporté quelques modifications. Nous avons retiré trois phrases
qui ne nous semblaient pas adaptées aux enfants et à notre étude, puis nous
avons ajouté neuf phrases, tirées d’un autre test de phrases à compléter205.
La méthode consiste à présenter une série de phrases à achever, de
façon à obtenir des phrases complètes. L’hypothèse fondamentale est que
« la personnalité du sujet lui-même va intervenir de façon importante et
souvent inconsciemment, dans le choix de la réponse exprimée »206. Ce test
fait ainsi appel à des réponses spontanées, de type émotionnel qui échappent
le plus possible à la censure et à la réflexion.
Par leur formulation, les phrases n’induisent pas le même type de
réponse, et ne facilitent pas la projection de la même manière. La plupart
203 Anzieu, D., Chabert, C. (1995). Les méthodes projectives. Paris : Puf.204 Le test de Stein (1947 « Stein sentence completion test ») a été adapté en France parG.Serraf.205 Les phrases ajoutées ont été tirées du « Test de Paul », révision de 1951 du test de Steineffectuée par D. Bonnet. Il s’agit des phrases : « Paul ne peut dormir à cause de », « Sesparents ne se doutent pas que », « Ce qui l’empêche de réussir, c’est », « J’ai souventbesoin de », « Je rêve beaucoup à », « Il se sent seul quand », « Il sera plus heureuxquand », « La famille de François est », « La chose la plus pénible ».206 Bonnet, D. (1954). Les méthodes des phrases à compléter adaptées à l’étude de lapersonnalité. Paris.
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d’entre elles contient un sujet à la 3èmepers facilitant ainsi le dédoublement du
sujet. Certaines induisent une projection directe et d’autres sont plus
impersonnelles.
Les phrases sont de longueurs diverses et de temps variant (passé
présent, future), favorisant ainsi plus ou moins la mise à distance ou
l’implication.
Les différents champs explorés sont : la vie familiale, les sentiments à
l’égard de l’entourage, de la vie et du futur, l’adaptation scolaire, les
aspirations, les préférences, les craintes et les causes de souffrance.
4. Les méthodes d’analyse
a- Analyse du test Patte Noire
Le test du Patte Noire est un outil exploitable puisqu’il a fait l’objet
d’un travail de recherche par l’auteur et son équipe, sur un échantillon
servant de population de référence. Ce test nous servira donc d’outil de
validation de nos hypothèses. Par ailleurs, l’intérêt du test Patte Noire est
qu’il laisse une grande liberté au sujet dans le choix des images, évitant les
blocages en imposant une image, et privilégie ainsi l’originalité de l’enfant.
Nos protocoles ont été analysés par la méthode d’analyse qualitative
en référence à l’approche psychanalytique, exposée par L. Corman dans son
manuel. Nous avons également utilisé l’analyse quantitative afin de comparer
nos résultats aux normes établies par L. Corman207.
Dans l’analyse d’un protocole, l’image Frontispice nous renseigne
tout d’abord sur la manière dont le sujet se projette sur le héros. Il donne des
indices sur l’identification psychosexuelle de l’enfant et son niveau de
maturité. De plus, il met en avant les relations intra familiales.
207 Notons cependant que le nombre restreint de notre échantillon nous amènera à relativisernotre approche quantitative et nos interprétations.
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Le choix de la première image signe, selon L. Corman, la
problématique majeure du sujet. De même, les images rejetées sont très
significatives et correspondent aux images frappées d’interdit. Elles
permettent d’appréhender le dynamisme des tendances et la manière qu’a le
sujet de les assumer. L’image fée et le thème de la tâche sont
particulièrement intéressants par rapport à l’affectivité de l’enfant et à son
ressenti quant à sa précocité intellectuelle.
Pour chaque enfant nous avons élaboré un compte-rendu
synthétique208 selon trois mouvements principaux :
-Les relations familiales et les images parentales
-Les tendances du sujet, les mécanismes de défense et
d’identifications, la force du Moi et le degré d’autonomie.
-L’analyse de la perception de soi, des angoisses et de la culpabilité.
Afin de discuter nos résultats et nos hypothèses, nous avons
également effectué divers tableaux récapitulatifs permettant de comparer les
réponses des enfants autour de certains thèmes. Ainsi, à travers ces tableaux
nous étudierons les images préférées des enfants et leurs identifications
privilégiées en comparaison aux normes de L. Corman. Ensuite, nous nous
intéresserons aux âges donnés à Patte Noire, ce qui nous donnera un indice
sur l’identification régressive. Puis, nous analyserons, à travers les diverses
perceptions de PN et le thème de la tache, l’image de soi des enfants. Enfin,
nous étudierons le thème des vœux (image Fée) et l’image Hésitation qui
nous éclairerons sur le niveau de maturité de notre échantillon de population.
208 Dans l’élaboration de nos synthèses individuelles, nous avons utilisé le plan du compte-rendu du cours Mme Soulié (cours sur le Patte Noire, de 3ème année)
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b- Analyse du test Phrases à compléter
Pour l’analyse des résultats obtenus à ce test collectif, nous avons
utilisé l’analyse de contenu et nous avons effectué une interprétation
qualitative des réponses.
Par ailleurs, nous nous sommes inspirés de la méthode d’analyse de
D. Bonnet209, qui a distingué six catégories dans sa feuille de dépouillement :
les motifs de soucis et de souffrance, les aspirations du sujet, les modes de
réaction devant les difficultés, les attitudes envers l’entourage, la réflexion
sur soi-même, et les stimulis ambigus. Dans chaque catégorie, l’auteur
regroupe plusieurs phrases, pouvant être interprétées ensembles.
Ainsi, nous étudierons : les réactions du sujet en situation sociale de
stress, le contact avec l’entourage, les intérêts du sujet ainsi que ses attitudes
face au passé et à l’avenir, l’anxiété et les causes de souffrance et enfin la
conception de soi. A travers ces domaines, diverses attitudes seront mises en
évidence : les réactions infantiles (pleurs, intérêts oraux et enfantins),
nerveuses (colère, impulsivité), passives (rêveries) et dysphoriques
(émotivité, anxiété, dépression).
Les réponses obtenues permettront donc de délimiter les tendances du
sujet, ses attitudes et réactions par rapport aux conflits, ses modes de
résolution ou ses mécanismes de défense employés face aux difficultés
soulevées.
Ce test servira d’abord de complément aux études de cas et aux
comptes- rendus du test Patte Noire de chaque enfant « surdoué ». Puis, Il
sera utilisé afin de comparer à un groupe contrôle les types de réactions et le
ressenti de ces enfants.
209 Bonnet, D. (1954).
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B) REFLEXION ETHIQUE
Dans notre première partie théorique, nous avons vu que la question
du « surdon » a engendré des confusions dans l’esprit du grand public et a
suscité de nombreux débats chez les parents, professeurs et professionnels.
Ainsi, notre travail de recherche ne saurait être abordé sans, au préalable, une
réflexion morale autour de notre sujet. De même, un questionnement éthique
et déontologique apparaît nécessaire sur notre pratique, en discutant de la
valeur de nos outils d’évaluation et des conflits de conscience auxquels nous
avons fait face.
1. Quelques définitions
La morale est un devoir absolu qui pose les interdits fondamentaux,
et se rapporte, selon P. Ricoeur210, « à des lois, des normes, des impératifs ».
E. Kant211 a définit quatre devoirs absolus : le respect de l’autre, le respect de
soi, la bienveillance envers l’autre et le perfectionnement de soi. La morale
est caractérisée par la recherche du bien suprême pour l’humanité, impliquant
ainsi un dépassement de l’intérêt personnel. Mais l’application telle quelle de
la morale peut induire des conflits de conscience et nous positionner dans
une impasse. Le jugement éthique apparaît alors indispensable.
L’éthique est de l’ordre de la réflexion, privilégiant le raisonnement
et l’engagement personnel. D’après J.-P. Resweber212 « Le jugement éthique
est un réajustement continuel des règles à la pratique qui réclame celle-ci ».
Il s’agit donc d’une amélioration de la morale, permettant une réflexion sur
ce qui est bon ou mauvais dans une circonstance donnée.
Enfin, la déontologie est un « ensemble de règles régissant
l’exercice d’une profession donnée… »213. Elle repose sur un
210 Ricoeur, P. (1990). Avant la loi morale, l’éthique, in « Symposium », (t.I)-encyc.universalis, pp.62-66211 Kant E. (1785). Fondement de la métaphysique des mœurs, Paris : Vrin, ré-ed.1980.212 Resweber, J.-P. (1992). La philosophie des valeurs. Paris, P.U.F- coll. « que sais-je ? »,(n°1728).213 Géadah, R. (1999). La déontologie aux risques de l’emploi, extrait de « Quels repèrespour les pratiques sociales de demain », CREAI- Bourgogne, pp.28-39.
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perfectionnement de l’acte professionnel accompagné d’une réflexion en
terme d’efficacité et de retombée morale.
Ces trois notions s’avèrent donc indispensables à la pratique du
psychologue, dont le travail quotidien est la réflexion et la remise en
question.
2. Questionnement éthique face à la notion de
« surdon ».
Nous avons exposé précédemment la difficulté à définir l’enfant
« surdoué », toutefois, il est globalement accepté que ce soit un enfant « qui
possède des aptitudes supérieures qui dépassent nettement la moyenne des
capacités des enfants de son âge »214 et dont le Q.I. est supérieur à 130.
Mais définir l’enfant « surdoué » en comparaison à une normalité
(référence à la loi normative de Gauss) de développement intellectuel, en
négligeant ses spécificités individuelles et le processus dynamique dans
lequel il est inscrit, nous pose un problème éthique. En effet, cette position
peut entraîner le déni de la place de l’enfant en tant que sujet et de ses
particularités en tant qu’individu. De plus, cela induit la notion de supériorité
et d’anormalité, ce qui engendre bien souvent une certaine souffrance et une
culpabilité chez l’enfant. Or, la morale se veut de rechercher le bien suprême
par les bons moyens. Est-ce alors moral d’étiqueter un enfant et de provoquer
ainsi un éventuel mal-être ?
Les enfants « surdoués » sont des enfants comme les autres, de plus,
comme le précise C. Weissmann (2003) « l’enfant surdoué n’existe pas mais
on peut rencontrer des enfants surdoués ».
Faut-il alors nier toute différence, au nom d’une morale ? Cette position est
utopique et il faut reconnaître que tous les êtres humains sont différents sans
poser, pour autant, la notion de supériorité ou d’infériorité. Il est donc de
l’éthique du psychologue de considérer cette différence sans porter de
jugement de valeur.
214 De Ajuriaguerra, J. (1974).
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Si l’enfant « surdoué » est celui qui sort de la normalité, est-il pour
autant anormal ? Doit-on parler d’une pathologie quant au « surdon »? Il
s’agit du débat entre le normal et le pathologique et d’une question
essentielle à laquelle le psychologue doit faire face : qu’est ce que la
normalité ? Existe-il un développement idéal auquel il faut correspondre ?
La définition normative nous dit qu’est normal celui qui répond à des
critères imposés de l’extérieur (scolaire, familial…). Dans ce cas, l’enfant
« surdoué », qui ne répond souvent pas aux critères de l’école, se révèle être
alors « anormal ». Mais le point de vue axiologique relativise cette notion.
Ainsi, la norme devient un idéal qui n’est jamais atteint dans la réalité.
En psychologie, le concept de normal fait référence à un meilleur
fonctionnement psychique possible en rejetant toute norme extérieure à ce
fonctionnement. Il s’agit donc d’un processus dynamique et d’une capacité à
s’adapter, à trouver un certain équilibre.
Mais qu’en est-il pour les enfants « surdoués » qui se comportent de
manière hyper adaptée à l’école ou dans la famille ; qui mettent en place un
faux self afin de parer à certaines angoisses et de paraître le plus normal
possible ?
J.Bergeret215 exprime à quel point ce concept est délicat, et le risque
d’arriver ainsi à « une conception doublement ambiguë de la notion de
normalité ». Il semble, selon lui, plus raisonnable de prendre du recul et de
se référer à l’appellation de « bien portant, quelle que soit la forme
d’adaptation à une normalité ou une pseudo-normalité ». Ainsi le sujet
normal ou bien portant en psychologie se rapporte à l’idée d’équilibre
psychique, à la capacité à se défendre sans grande agressivité ni angoisse et
d’entrer en relation avec les autres.
Telle est notre position éthique dans notre travail de recherche, en nous
intéressant au vécu affectif de ces enfants et à l’ensemble de leur
personnalité. De fait, nous ne stigmatisons pas l’enfant « surdoué » en le
réduisant à ses capacités intellectuelles, relativisant ainsi la notion de norme
et de développement normal.
215 Bergeret, J. ( 1972). Psychologie pathologique, théorie et clinique. Paris : Masson, 8ème
édition (2000).
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3. Questions déontologiques sur l’utilisation des
techniques d’évaluations et d’interprétations.
Les outils utilisés dans notre travail de recherche, l’entretien semi-
directif et les tests projectifs, comportent une série de biais à ne pas négliger
dans le travail d’interprétation.
Les méthodes d’évaluation impliquent un « jugement sur une
personne en fonction de certains critères »216, selon O. Bourguignon. De plus
ces techniques seraient « aliénables », produisant des effets que personne ne
contrôle. D’après l’auteur, aucune épreuve n’est parfaitement fidèle et valide
puisqu’elle porte sur des groupes alors que l’évaluation du psychologue se
fait sur une personne.
Il s’agit alors d’un problème éthique et il apparaît donc de la
responsabilité du psychologue de s’intéresser à la particularité d’un individu,
dans un processus dynamique et de s’interroger sur le pourquoi et le
comment de ces passations de tests.
Dans l’interprétation des tests projectifs, des éléments sont à prendre
en compte : La théorie de référence, les projections croisées entre le sujet et
l’examinateur, les projections du sujet sur le matériel. De plus, la marge de
liberté des tests projectifs laisse une grande place à la capacité interprétative
du clinicien, et augmente la probabilité de mettre en jeu «son propre système
de valeur et de représentation, quelque bon professionnel qu’il soit »217. Il est
donc nécessaire pour l’examinateur de s’interroger sur son propre
comportement, ses contre- attitudes et la manière dont il instaure la relation.
Les techniques d’évaluations (tests et entretiens) se révèlent donc peu
objectives puisque de nombreux biais218 y sont présents. Se pose alors la
question de leur utilisation et leur validité dans l’évaluation de la
personnalité d’un individu. Mais ces outils s’avèrent tout de même
intéressants et utiles dans la compréhension d’un individu.
Ainsi, il est de notre responsabilité et déontologie de prendre en
considération tous les biais existant pouvant influencer nos interprétations.216 Bourguignon, O. (2003). Questions éthiques en psychologie. Belgique : Mardaga-coll. « psych. et sc. Humaines » (n°250).217 Ibid.218 Nous expliquerons les biais rencontrés lors de nos passations de tests dans notre partiepratique, au cours de la discussion de nos hypothèses.
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Nous soulignerons donc ces biais dans notre discussion afin de ne pas tirer de
« conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité
d’un individu »219.
4. Réflexion morale et éthique sur le travail du
chercheur
Le code de conduite des chercheurs en psychologie expliqué par J.P.
Caverni220 met en avant des règles à respecter notamment vis à vis du sujet-
participant. Un questionnement éthique apparaît alors entre deux devoirs
moraux envers autrui: le devoir de respect et celui de bienveillance. En effet,
le chercheur se doit d’informer les personnes concernées de « tous les
aspects susceptibles d’influencer leur consentement, des objectifs et de la
procédure de la recherche », afin de recueillir leur consentement libre et
éclairé. Nous devons donc respecter l’autre en l’informant sur notre
intervention.
Mais M.-H. Lavallard221 explique que ce consentement n’est que
« relativement éclairé » puisque le propre des techniques d’évaluations est
justement de ne pas révéler les buts poursuivis. De plus, nous ne pouvons pas
expliquer aux sujets le but de notre recherche (étude de la personnalité de
l’enfant et du vécu affectif) et le caractère intrusif de nos outils (tests
projectifs). Ces termes psychologiques risqueraient d’être mal compris par
les participants, provoqueraient la mise en place de fortes défenses et
alimenteraient des fantasmes.
Devons-nous alors mentir au sujet ? Selon E. Kant222, le « devoir de
véracité » serait absolu et universel. Cependant, cette théorie a été contestée,
notamment par B.Constant223, et « toute vérité ne serait pas bonne à dire ».
Ainsi, le jugement éthique apparaît et une hiérarchisation des valeurs semble
nécessaire. 219 Article 19 du Code de déontologie des psychologues.220 Caverni, J.-P. (2000). Un code de conduite des chercheurs en psychologie. In « Bulletinde psychologie », 445, 53, p.48221 Lavallard, M.-H. (2000). Evaluation et déontologie, in « Bulletin de psychologie », 445,53, p.101.222 Kant, E. (1785).223 Morana, C. (2003). Thiel, M.-J., Thevenot, X., Le droit de mentir. Paris : Mille et une nuit
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La prudence visant l’intérêt d’autrui nous amène à privilégier le
devoir de bienveillance. Il s’agit alors de mentir par respect pour l’autre, en
n’utilisant pas un jargon qu’il ne comprendrait pas et provoquerait un malaise
ou une interprétation erronée. Nous nous devons donc d’adapter la vérité à ce
que l’autre peut entendre et comprendre. Ainsi, par bienveillance mais aussi
par déontologie professionnelle, nous nous devons d’ informer la personne en
nous adaptant à son langage et en limitant nos explications à ce qui s’avère
utile à sa compréhension. De fait, dans notre étude, les parents et enfants ont
été informé du sujet général de la recherche (par lettre, puis demande
d’accord écrit et signé ) mais non précisément du caractère intrusif des outils
et méthodes utilisés.
Une problématique morale entraînant un conflit de conscience
s’impose quant aux réponses à apporter aux demandes de retour des familles
et de l’établissement. Notons que le chercheur « est tenu au secret
relativement à tout ce qu’il aurait appris relativement à toute personne
particulière… »224 et que ce retour à la personne concernée est un droit
indiscutable. Il est du devoir déontologique du psychologue d’effectuer un
compte-rendu clair et compréhensible au sujet. De plus, comme le précise
O.Bourguignon225, on ne peut rien prendre de l’autre si on ne peut rien lui
rendre. Or, dans le cadre du mémoire, il n’existe pas de demande du sujet ou
de la famille. Il s’agit donc d’une position délicate puisque la demande vient
de l’étudiant. Comment faire alors un compte rendu sans demande ? Faut-il
faire un compte rendu écrit ou oral ?
Avant tout, un retour a été proposé à l’enfant, sous forme de
discussion. Puis, nous avons également rencontré les parents en demande.
Nous avons ainsi effectué compte-rendu oral226. Mais d’autres questions se
sont révélées : Que faut-il ou que peut-on dire ? Devons nous informer la
famille sur un éventuel mal-être de l’enfant ? Un conflit de conscience est
apparu entre le respect de l’enfant, la confidentialité des données et le respect
des parents, quant à leur droit à un retour.
224 Caverni, J-P. (2000).225 Bourguignon, O. (2003).226 Nous avons également précisé aux parents qu’un compte-rendu écrit pouvait leur êtretransmis sur leur demande.
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Il nous a semblé alors nécessaire de demander l’autorisation à l’enfant
de divulguer certaines informations à ses parents. Par la suite, nous avons
évoqué des « banalités » au sujet de l’enfant avec les parents, afin d’instaurer
une relation de confiance. Enfin, nous avons sélectionné les informations
utiles et nécessaires, pouvant être entendues par la famille et l’aider à mieux
comprendre l’enfant, dans l’intérêt de celui-ci.
Néanmoins, une autre question apparaît, au nom de quoi savons-nous
ce qui est dans l’intérêt de l’enfant, ce qui est bon pour lui ? O.Bourguignon
nous explique qu’un mal peut s’avérer adaptatif, être un moyen de
« s’ajuster aux traumatismes vécus », un signe de résilience. Ainsi, selon
elle, « savoir ne pas intervenir est une question technique, mais elle est aussi
dépendante de l’éthique du clinicien, c’est à dire des droits qu’il accorde en
lui à autrui »
La prudence, la tempérance et la prise de distance sont donc, une fois
de plus, indispensables. Nous devons éviter toute prise de position en terme
de supériorité mais aussi tout jugement sur l’enfant et sa famille. De plus, le
fait qu’il n’y ait pas de suivi nous amènera donc à être très prudent dans nos
conclusions et retours.
Dans le cas de l’école, la demande faite par le directeur était que le
mémoire soit présent et accessible au sein de l’établissement. Cependant par
soucis de confidentialité, le mémoire en entier et les informations (même
anonymes) sur les enfants ne peuvent être divulguées. Une synthèse sur les
conclusions du travail semble plus appropriée et sera donc transmise à
l’école.
Selon M.H. Lavallard (2000), « le psychologue est responsable de ses
conclusions et de ce qu’il en transmet ». Ainsi, l’attitude éthique a adopter
face à ce problème semble être le devoir de responsabilité quant à la
confidentialité des données recueillies, et donc le respect de l’enfant.
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II. PRESENTATION ET ANALYSE DES
RESULTATS
Cette deuxième partie concerne notre travail sur le terrain, auprès de
notre échantillon d’enfants « intellectuellement précoces ».
Une présentation et une analyse des résultats aux tests utilisés sont
proposées en deux temps. Ainsi, nous étudierons tout d’abord le test de Patte
Noire, à travers des analyses individuelles, puis sous forme de comparaison
interindividuelle à l’aide d’une approche quantitative. Dans un second temps,
nous effectuerons une analyse comparative du test Phrases à compléter, entre
notre groupe d’enfants « surdoués » et un groupe contrôle.
A) ANALYSE DES PROTOCOLES DU TEST
PATTE NOIRE
Dans cette partie, nous présentons les analyses des tests Patte Noire
effectués par les enfants « intellectuellement précoces ».
Une étude individuelle, sous forme de compte-rendu synthétique, est
d’abord proposée pour chaque enfant, afin de mettre en évidence les
différentes problématiques rencontrées. Nous exposons ici trois synthèses
détaillées, et les conclusions des six autres études de cas227. Puis à l’aide de
tableaux récapitulatifs, des recoupements sont effectués, afin de faire
ressortir les points communs ou divergences entre les sujets.
Au préalable, quelques précisions nous semblent nécessaires sur les
termes utilisés : PN signifie Patte Noire,
Id se réfère à la question sur l’identification de l’enfant
concernant les images,
3A signifie une image racontée, aimée et à laquelle
l’enfant s’identifie au héros, 3NA signifie une image non
227 Toutes les études de cas sont détaillées (synthèses des entretiens, Patte Noire et Phrases àcompléter) en annexe.
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racontée, non aimée et à laquelle l’enfant ne s’identifie pas au
héros (identifications dites d’esquives).
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1. Synthèses individuelles
a- Etude de cas n°1 : Sophie, 9 ans et demi(Q.I.V. : 151, Q.I.P. : 127)
Sophie, agréable et souriante, s’est montrée très participante et
concentrée durant toute la passation du test. Elle a construit ses histoires
autour d’un Patte Noire fille, de quatre ans, avec ses parents et ses amis,
qui deviendront ses frères et sœurs de deux-trois ans.
Les thèmes dominants sont des thèmes oedipiens et d’oralité, francs
et ouverts mais qui ne sont pas toujours assumés. Les thèmes masqués sont
ceux de l’agressivité et de la culpabilité.
Etude de la dynamique relationnelle.
Qualité des relations
On remarque une ambiance affective générale relativement
sécurisante, avec une insistance sur la complicité et la relation à la mère. Les
relations sont centrées autour des thèmes de jeux, de curiosité, et de
nourriture. Aucune relation hostile ou négative n’apparaît, elles sont, au
contraire, évitées. Cependant, on observe un sentiment de rejet et une
victimisation par rapport aux autres.
Etudes des différentes images
L’image maternelle est très valorisée. On assiste à une relation
assez fusionnelle et régressive avec une certaine revendication orale. Mais
ce rapprochement à la mère ne peut être assumé et semble source d’angoisse
ou de culpabilité. L’image du substitut maternelle semble accepté mais
angoissant et non assumable.
L’image paternelle apparaît rassurante mais dévalorisée par
rapport à la mère et dans l’ombre de celle-ci. Peu évoqué, et même parfois
scotomisé, le père n’est pas décrit dans un rôle d’autorité, ni même de
séparation avec la mère (Nuit). Un rapproché avec le père est néanmoins
possible mais n’apparaît pas assumé (Hésitation et Courte échelle).
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Les images parentales peuvent intervenir en cas de conflits (Bataille),
mais le thème de la punition n’apparaît pas. On remarque également une
agression envers le couple parental (Baiser), traduisant une éventuelle
jalousie oedipienne face au rapproché entre les parents. Mais cette
agressivité envers les parents est source d’angoisse parfois paralysante
(Auge).
La fratrie, d’abord évoquée comme amis (le sujet est enfant unique),
est très présente dans le jeu. Mais elle est également dévalorisée, rejetant un
PN victime, ou décrite comme fautive et agressive.
Dynamique de la personnalité du sujet
Les tendances
A travers une tendance à la régression et une forte dépendance
surtout à la mère (désir de relation privilégiée avec la mère et avidité
orale), une certaine immaturité affective apparaît. Un besoin de valorisation
et de reconnaissance sont aussi très présents (PN est le plus gentil, le préféré
de toute la famille). Néanmoins, un désir d’autonomie est présent, dans un
Départ assumé et non angoissant mais l’indépendance totale est encore
difficile.
L’angoisse et la culpabilité sont prégnantes, en particulier l’angoisse
d’être en faute, d’être rejeté et de ne pas satisfaire les parents. Les pulsions
agressives, fortement réprimées, sont sources de culpabilité et d’angoisse,
évoquant un Surmoi écrasant (thème de la faute à éviter à tout prix).
Les mécanismes de défense
Sophie utilise de manière privilégiée l’intellectualisation, la
rationalisation et la banalisation (dans la description), tentant d’éviter
l’expression des affects. Elle scotome parfois un personnage ou un thème,
afin d’éviter l’angoisse et la culpabilité suscitées par ses pulsions agressives.
Il y a donc un évitement voir une annulation de l’agressivité. Elle utilise
fréquemment des identifications d’esquive, afin de paraître conforme aux
désirs parentaux et d’éviter le rejet.
Adaptation
Sophie apparaît hyper adaptée et conforme aux idéaux parentaux,
évitant toute tendance agressive. Elle semble avoir une image d’elle-même
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fragile, se montrant dépendante aux autres et surtout à l’image maternelle.
Son Moi semble donc encore immature et faible, freiné par la culpabilité
d’un Surmoi très présent Cependant, certaines tendances sont assumées et
une ébauche d’autonomie apparaît. Un compromis et une adaptation
satisfaisante donc sont possibles et lui permettent de maîtriser son angoisse.
Discussion
Etude du conflit
Ce protocole est caractérisé par une avidité et une régression orale
non assumées, pouvant traduire une immaturité. De même, on remarque une
forte culpabilité et une angoisse, liées à l’agressivité réprimée et non
exprimable. L’image de soi semble dévalorisée et empreinte de culpabilité
et d’une peur du rejet. Le désir de grandir et l’identification à la mère
(l’idéal du Moi) sont présents malgré une tendance immature.
Hypothèses
Nous pouvons émettre l’hypothèse d’un conflit entre un désir
d’autonomie et un besoin de régression vers la mère, lié à une difficulté à
grandir ou bien à une relation fusionnelle avec la mère, dont il peut être
difficile de se détacher.
La culpabilité face aux pulsions agressives, source d’angoisse, peut
être liée à une crainte de perdre l’amour des parents, de les décevoir.
Nous pouvons aussi poser l’hypothèse d’une recherche d’identité
psychosexuelle et d’une difficulté à dépasser et assumer la situation
oedipienne. En effet, un conflit oedipien pourrait entraîner cette régression
orale. Bien que les thèmes oedipiens soient des images aimées, racontées et
assumées, le sujet y exprime une agressivité envers le rapproché des parents
et un désir de relation fusionnelle avec la mère. Ainsi, les sentiments
oedipiens ambivalents sont peut-être difficiles à assumer pour Sophie. Le
rapproché avec le père est peut-être délicat, celui-ci pouvant être dévalorisé
par la mère ou peu présent et sécurisant. Peut-être a-t-elle peur de perdre
l’amour de sa mère en se rapprochant du père, et que la rivalité à la mère ne
peut être assumée, source d’une culpabilité angoissante.
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Conclusion
La culpabilité et le manque de confiance en soi montrent une
immaturité du Moi de Sophie et un besoin d’être valorisée.
Dans le test des phrases à compléter, Sophie semble également dans
une relation de dépendance par rapport aux autres, montrant un besoin
d’aide, de valorisation et de reconnaissance. La mère y est très valorisée
alors que le père est agréssé et dévalorisé. Elle apparaît très angoissée par la
mort, anxieuse par rapport à l’avenir et à sa réussite, avec un sentiment de
culpabilité. Elle réagit activement par opposition ou colère quand la
situation ne lui convient pas, ou bien se réfugie passivement, dans la lecture.
Sophie a besoin d’être rassurée, valorisée et renforcée positivement
afin de se réaliser et d’exprimer ses sentiments même négatifs. Il paraît
nécessaire de favoriser des moments de complicité avec le père et
d’encourager son autonomie et son détachement, notamment vis à vis de la
mère.
b- Etude de cas n° 2 : Noé 10 ans et demi(Q.I.V. : 144 et Q.I.P. : 105)
Noé est un garçon qui paraît réservé et très sérieux. Cependant durant
la passation, il s’est montré très à l’aise et participant, s’exprimant
facilement.
Il présente un PN garçon âgé de 8 ans avec ses frères du même âge
et les parents. Le thème franc de ce protocole est celui de l’oralité et d’une
relation privilégiée avec la mère. Tout au long du test, il crée deux « clans »,
d’un côté PN et sa mère et de l’autre le père et les frères.
Etude de la dynamique relationnelle
Qualité des relations
L’ambiance affective semble relativement sécurisante, les parents
étant très présents. Cependant les relations à certains personnages entraînent
un certain malaise. On observe des relations difficiles entre PN et ses
frères, teintées d’agressivité et de persécution. Il existe des relations
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complices plus particulièrement entre PN et sa mère, et entre le père et les
frères.
Etude des différentes images
L’image maternelle est très valorisée et le rapprochement auprès
d’elle est ouvertement recherché et assumé. La relation privilégiée que PN
entretient avec elle est décrite comme particulièrement heureuse. L’image de
la mère de substitution (mère idéale) apparaît chargée de culpabilité et ne
peut être assumée. Ce thème semble frappé d’interdit, entraînant une forte
dévalorisation de PN et un malaise chez l’enfant (à partir de cette image, Noé
parle de Patte Blanche à la place de PN).
L’image paternelle est d’abord décrite comme rejetante et paraît
dévalorisée. Néanmoins, au fil des histoires son comportement change, le
père a finalement « bon cœur », venant aider PN (Trou). Le rapprochement
est donc possible et recherché (Courte-échelle). Cependant, on remarque, à
l’image Rêve P, un certain malaise face à la planche ainsi qu’une
dévalorisation (PN « se sent trop supérieur »). Cette remarque peut être liée
à l’image paternelle représentant un idéal trop fort, et peut-être une
identification difficile.
Les images parentales font souvent figure d’autorité, intervenant
lors des disputes mais ne sont pas toujours cohérentes entre elles (deux clans
mère/ père). Cependant les issues positives (réconciliation) montrent une
certaine entente parentale. De plus, l’autorité et la loi apparaissent stables et
justifiées (Jars).
La fratrie est décrite de manière très dévalorisée. La rivalité
fraternelle semble donc très présente, exprimée par des relations
conflictuelles entre PN victime et frères agresseurs. Cette agressivité
exprimée contre les frères est source de culpabilité, ne pouvant être assumée.
On remarque par ailleurs une certaine complaisance dans ce rôle de victime
que tient PN. Néanmoins, une relation positive avec les frères est possible
(Portée).
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Dynamique de la personnalité du sujet
Les tendances
On observe donc une demande d’affection et une régression auprès
de la mère, dont la relation privilégiée est valorisée. On remarque aussi une
curiosité oedipienne et un éventuel désir de rapprochement oedipien auprès
de la mère. Un désir de complicité avec le père est également présent, ainsi
qu’un besoin d’être valorisé par lui et de lui ressembler.
L’agressivité est très présente mais fortement culpabilisée. La
rivalité fraternelle est prégnante, à travers le thème de la différence et du
rejet. Un besoin de victimisation, accompagné d’une certaine passivité et
soumission, est exprimé mais non assumable. La peur du rejet, un mal être
répétitif et la culpabilité angoissante évoquent une position dépressive et une
prise d’autonomie difficile.
Les défenses
La rationalisation par des justifications est très présente. On
remarque également l’évitement de certain thème (Nuit, Hésitation, Tétée 2).
Les identifications d’esquive sont souvent utilisées afin d’échapper à
l’angoisse et la culpabilité. Les identifications aux parents sont parfois de
type identification au puissant (Bataille et Auge) afin de maîtriser
l’angoisse d’être agressé. Des réactions de fuite ou de soumission sont
mises en place afin d’éviter la confrontation et le conflit. Enfin, on relève un
lapsus dans le discours du sujet (« Patte blanche ») montrant un malaise
face à cette différence. Une issue magique apparaît aussi par rapport à ce
thème.
Mode d’adaptation
L’adaptation de Noé se révèle comme très conformiste, soumise aux
idéaux parentaux. Les pulsions agressives sont réprimées, ou déplacées sur
les autres afin d’éviter la culpabilité.
Des attitudes de soumission et de passivité sont très présentes liées à
un sentiment de rejet et à une victimisation. L’image de soi apparaît
dévalorisée, et fragile. Le Moi semble donc immature et faible, écrasé par
un Surmoi et un Idéal du Moi forts.
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Discussion
Etude du conflit
Dans ce protocole, on assiste à un conflit entre un Surmoi puissant
et un Moi faible, soumis. La culpabilité des pulsions agressives et l’angoisse
apparaissent inhibantes. L’ idéal du moi trop élevé entraîne une demande de
valorisation, de reconnaissance surtout envers le père.
Hypothèses
Nous pouvons émettre l’hypothèse d’une problématique oedipienne
liée à une image du père idéalisée pouvant rendre l’identification difficile et
la rivalité oedipienne angoissante. La régression vers la mère peut apparaître
plus rassurante et lui permettre d’éviter la confrontation à des désirs
oedipiens très culpabilisés. Les sentiments oedipiens peuvent être
culpabilisés et angoissants face à la menace de castration et de perte d’amour
du père.
Nous pouvons également émettre l’hypothèse d’une mère trop
fusionnelle entraînant une séparation et une indépendance difficiles et
culpabilisées, avec la crainte de perdre son amour.
Le manque de sécurité affective de la part des parents peut entraîner
cette difficulté à assumer ses tendances, à exprimer son agressivité et à
s’autonomiser.
La dévalorisation de soi peut être également due à une difficulté à
assumer sa précocité intellectuelle et à un sentiment de différence et de rejet
important.
Conclusion
Noé présente donc une insécurité affective, pouvant être en lien avec
un conflit oedipien. Une difficile affirmation de soi et un manque d’estime de
soi s’expriment, révélant une immaturité et entraînant ainsi une régression,
source d’angoisse. Cependant des issues positives apparaissent, le rapproché
avec le père est possible et assumé, néanmoins c’est à un Patte Blanche. Le
poids de la différence et de la précocité semble ainsi peser sur l’enfant. Des
demandes d’apport narcissique et de reconnaissance sont ainsi exprimées.
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Dans les Phrases à compléter, Noé apparaît très anxieux, angoissé par
rapport à l’échec et à l’autorité. Une forte dévalorisation traduit une estime
de soi insuffisante, une culpabilité paralysante et source d’angoisse. Les
relations difficiles avec les paires sont sources d’angoisse et de
dévalorisation. Un sentiment de persécution et de rejet sont prégnants,
entraînant un sentiment de solitude et des affects dépressifs.
c- Etude de cas n°3 : Eric, 10 ans (Q.I. de 151 : QIV : 149 et QIP : 142)
Eric est un garçon qui se montre très timide et inhibé durant toute la
passation. Ayant des difficultés à élaborer des histoires ou à exprimer ce qu’il
pense, il a souvent besoin de relance. Il présente aussi des difficultés dans le
choix des images aimées-non aimées (temps de latence long) et demande de
faire un tas intermédiaire.
Eric construit ses histoires autour d’un Patte Noire âgé de cinq ans
avec ses amis, des grands de dix ans et des petits de cinq ans. La différence
d’âge est donc perçue mais la différence des générations et les
représentations parentales n’apparaissent pas.
Le thème dominant du protocole est celui de l’autonomie et de
l’indépendance, qui semblent recherchées par Eric.
Etude de dynamique relationnelle
Qualité des relations
Le protocole d’Éric est assez pauvre. Peu de relations intra
familiale apparaissent. Les parents ne sont pas reconnus comme tels. C’est
seulement à la fin du test, aux images tétées que l’enfant va nommer la mère,
puis les parents à la reprise du Frontispice. Les deux images racontées
décrivent un PN seul, autonome, n’ayant pas besoin des autres (Départ et
Trou). On assiste très souvent à une description banalisante et inhibée,
accompagnée d’une froideur affective. Le manque de complicité et de
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communication nous évoque un manque de sécurité affective et un
désinvestissement des parents pouvant être ressenti par le sujet.
Etudes des différentes images.
Au niveau de l’image maternelle, on remarque un certain malaise.
La mère n’apparaît pas sécurisante ni affectueuse. Le rapprochement avec la
mère est donc source de culpabilité et d’angoisse qui paralysent l’enfant
(images Orales où Eric est incapable de se positionner et décide d’en faire un
tas à part). La froideur descriptive suite aux relances évoque soit une oralité
non sécurisante et une mère peu affective, soit une dévalorisation et une
agression importante de l’image maternelle. Cependant une certaine
revendication et une régression orales sont présentes (Portée, Hésitation et
Chèvre). Le substitut maternel apparaît gratifiant mais cette préférence
n’est pas assumable pour le sujet et source de culpabilité.
L’image du père, bien qu’également peu présente semble plus
valorisée. D’abord au Frontispice, le père est le premier, après PN, à être
décrit comme copain et le seul nommé (« Patte Blanche »). La relation entre
PN et son copain (père), à l’image Courte-échelle est décrite comme
relativement heureuse et est d’ailleurs assumée. L’enfant exprime également
le désir de PN d’être comme son père.
Les images parentales n’interviennent pas dans un rôle éducatif,
d’étayage, d’affection. Elles sont très peu apparentes. A travers l’image Jars,
une loi arbitraire et angoissante apparaît. L’agressivité envers les images
parentales est exprimée, par leur non-reconnaissance et à l’image Auge
(aimée), mais non assumée et source de culpabilité.
Les images oedipiennes sont toutes 3NA et apparaissent source
d’angoisses pour le sujet. Aux images Rêves, Eric nous dit que le rêve est
comme son « ennemi ». Cette remarque nous évoque un fort besoin de
contrôle du sujet sur ses pulsions qui lui paraissent insupportables.
La fratrie n’est pas représentée ni nommée. La rivalité fraternelle
est évitée, et semble s’exprimer à la seule image Portée, où les cochons ont
envie d’aller boire mais en sont incapables. On peut voir une certaine jalousie
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accompagnant cette revendication orale. Mais l’agressivité est très
culpabilisée et évitée (« je déteste les personnes qui se battent »).
Dynamique de la personnalité
Les tendances.
Le besoin de contrôle et de maîtrise est présent à travers
l’inhibition, l’évitement des tendances. Un désir d’indépendance est mis en
avant par l’enfant. Cependant, il semble que cette tendance soit plus un désir
de solitude et d’isolement voir un retrait par rapport aux autres, qu’un réel
besoin d’indépendance. En effet, on remarque la présence de culpabilité et
d’affects dépressifs qui accompagnent cette tendance. Les images agressives
(Bataille et Jars : 3NA) mettent en avant un évitement des conflits et une
forte culpabilité. Une certaine revendication orale est exprimée (Portée,
Hésitation), ainsi qu’une régression mais celles-ci sont fortement
culpabilisées (sentiment d’incapacité à Portée, Hésitation, malaise face aux
Tétées). Ces revendications peuvent être liées à un désir de gratification, de
revalorisation narcissique (vœux à Fée). En effet, on assiste souvent à un PN
dévalorisé : passif, soumis, incapable (Jars, Portée, Baiser). Un désir
d’agressivité envers les parents est exprimé (Auge) mais ne peut être assumé.
Les défenses
L’inhibition anxieuse est très présente dans le discours d’Eric qui a
régulièrement besoin de relance. Des mécanismes de défense inhibant sont
utilisés : Blocage et déni de la perception (« j’ai l’impression qu’il n’y a
aucun dessin » aux images Tétées), description banalisante, froideur
affective. L’évitement de certains thèmes, la mise à distance par la
scotomisation des parents montrent un fort contrôle de la part du sujet. Le
désir de maîtrise des pulsions trop angoissantes est prégnant (le rêve est
son ennemi). On remarque également des mécanismes de rationalisation,
d’idéalisation et d’annulation (questions sur les préférences et l’avenir de
PN). Enfin, on assiste à des identifications d’esquive traduisant un refuge
dans la conformité et un refus de s’impliquer.
Mode d’adaptation
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Le compromis entre les différentes tendances du sujet se fait au prix
d’une dévalorisation, d’une inhibition et d’une maîtrise des pulsions afin de
paraître conforme. Ces défenses sont donc appauvrissantes entraînant une
adaptation limitée d’Eric. Le Moi du sujet apparaît faible, paralysé par les
interdits (surmoi puissant) et la culpabilité.
Discussion
Etude du conflit
Ce protocole semble évoquer un conflit entre un certain désir de
régression (besoin de valorisation et revendication orale) et un besoin
d’autonomie. L’indépendance et l’affirmation de soi sont ouvertement
recherchées mais s’accompagnent d’un manque de sécurité et d’angoisses.
Ainsi, il montre une certaine immaturité et un besoin de revalorisation. La
scotomisation des parents évoque un trouble dans la relation qui semble peu
sécurisante pour le sujet.
Hypothèses
L’hypothèse d’une situation oedipienne conflictuelle peut être
évoquée. En effet, on observe une forte angoisse et une culpabilité liée au
rapprochement oedipien. L’identification au père et les repères identitaires ne
semblent pas clairs. De plus, le rapproché avec la mère est source d’une forte
angoisse. Des images parentales insécurisantes peuvent rendre le vécu de la
situation oedipienne difficile et éventuellement entraîner le repli sur soi.
La difficulté du sujet à s’exprimer et à se positionner mettent en avant
une difficile construction identitaire et une image de soi fragile.
Conclusion
Eric montre une forte dévalorisation de lui-même traduisant une
certaine faille narcissique et une construction identitaire difficile. Le thème
de la tache de PN est source de sentiment négatif et de différence ( vœux à
Fée que la tache disparaisse). On remarque également des affects dépressifs,
liés à l’agressivité culpabilisée et un désir de retrait social, de repli sur soi. La
dévalorisation et le manque de confiance en soi sont importants. Le manque
est fortement ressenti et le refuge dans l’imaginaire semble être un moyen de
se préserver.
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Dans le test des Phrases à compléter, les images et repères parentales
semblent également floues. La valeur de l’enfant paraît être principalement
valorisée à travers la scolarité et la réussite. Le besoin d’être conforme à
l’autorité, la loi, se traduit par une soumission excessive à celle-ci. Les
relations sociales semblent peu importantes et sources de malaise. Enfin, on
note la présence d’une autonomie, d’une capacité à affronter des choses seul.
Il n’apparaît pas du tout être dépendant aux autres, mais plutôt solitaire, se
réfugiant dans son monde.
d- Aperçus des conclusions des autresétudes de cas.
Etude de cas n°4 : Clément, 12 ans (Q.I. de 132 : Q.I.V. :133
et Q.I.P. : 122)
Discussion
Etude du conflit
L’angoisse d’abandon et la dépendance exprimées face aux parents
peuvent être liées à une difficulté à grandir, à s’autonomiser. On peut
également y voir un besoin d’affection et de valorisation ainsi qu’une
immaturité, un mouvement régressif. Une certaine rivalité fraternelle
s’exprime aussi. On observe une soumission de PN, qui retient ses désirs
pour ne pas empiéter sur ses frères.
Hypothèses
Ces tendances peuvent être en lien avec des désirs oedipiens
culpabilisés entraînant une angoisse de perdre d’amour des parents. La
relation au père est valorisée alors que le rapproché maternel est source de
malaise. Ces remarques évoquent des sentiments oedipiens non dépassés ou
plutôt ravivés par l’entrée en pré-adolescence de l’enfant. Ainsi, il peut
s’agir d’un conflit de développement lié à l’adolescence qui approche.
Nous pouvons également émettre l’hypothèse d’un conflit réactionnel
lié à la situation vécue par l’enfant à travers l’internat et la séparation avec la
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famille. Cette situation peut être difficile entraînant un sentiment d’abandon,
une jalousie envers la fratrie et une colère envers les parents.
Conclusion
Clément montre donc une certaine immaturité à travers une
dépendance aux parents, et un besoin d’attention. Un désir d’autonomie est
cependant exprimé mais difficile à assumer. L’entrée en adolescence et la
situation de l’internat peuvent entraîner ce conflit entre indépendance et
besoin de régression.
Dans le test Phrases à compléter, on note la présence de l’agressivité,
accompagnée de culpabilité et d’affects de type dépressif, exprimant une
passivité, une incapacité. Ces attitudes peuvent être en réaction
compensatoire à un sentiment d’impuissance, à une indépendance difficile à
prendre, entraînant de l’angoisse. La vision de soi-même est accompagnée de
sentiments d’incapacité et surtout d’une anxiété liée à la peur de l’échec.
Etude de cas n° 5 : Antoine , 11 ans (Q.I.V. de 151 et Q.I.P.
de 111)
Discussion
Etude du conflit
Nous avons remarqué une tendance vers la régression orale non
assumable et une forte dépendance aux images parentales. L’agression
envers les parents est apparente et culpabilisée.
Hypothèses
Nous pouvons émettre l’hypothèse d’une situation oedipienne
conflictuelle, à travers un rapproché avec la mère culpabilisé. La tendance
à la regression pourrait être liée à une difficulté à assumer les sentiments
oedipiens, très chargés en culpabilité.
Mais une autre hypothèse se pose quant à une difficulté à grandir
liée à un besoin réassurance et une angoisse d’abandon. La demande
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affective et régressive envers la mère peut être due à une difficulté à
accepter sa précocité intellectuelle et une estime de soi insuffisante.
Conclusion
Antoine semble présenter un manque de maturité affective. Ses
tendances, notamment les pulsions agressives, paraissent très difficiles à
assumer et un fort sentiment de culpabilité est présent. L’autonomie, bien
que désirée, est encore difficile à prendre et semble freinée par une angoisse
et un manque de confiance en soi.
Aux tests des Phrases à compléter, un sentiment d’être différent
s’exprime de manière répétitive et semble source de souffrance. De plus, une
demande d’affection est très présente envers les parents. La dépendance aux
autres et un besoin d’être aidé révèlent le manque de confiance en soi et le
côté immature d’Antoine.
Antoine est donc un enfant angoissé, ayant besoin d’affection et de
protection et montrant une dévalorisation de lui-même. Sa précocité
intellectuelle semble également pesante, non acceptée et source de mal-
être.
Etude de cas n°6 : Jean, 12 ans et demi (Q.I. de 135 :
Q.I.V. : 129 et Q.I.P. : 134)
Discussion
Etude du conflit
Les pulsions agressives sont très présentes, et les parents, en tant que
repères identificatoires, ne semblent pas assez sécurisants. La frustration
semble difficile à accepter et une forte dévalorisation de soi est présente.
Le conflit peut être lié à une frustration affective et un manque de
sécurité, d’attention de la part des parents. En effet, une revendication
affective envers les parents apparaît mais quand le rapprochement a lieu, une
forte angoisse se révèle.
Hypothèses
L’agressivité et la culpabilité peuvent être liées à une rivalité
fraternelle ou de manière plus masquée à une problématique oedipienne.
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Nous pouvons ainsi évoquer l’hypothèse d’une identification difficile au
père et d’un rapproché avec la mère très culpabilisé face à des images peu
sécurisantes. Des besoins de régression, de valorisation et de réassurance
peuvent alors être ressentis par le sujet qui semble maîtriser difficilement son
angoisse.
Conclusion
L’immaturité exprimée par Jean traduit un manque de sécurité
interne et une image de soi défaillante. L’autonomie est difficile, freinée
par ce manque de confiance et des parents peut-être peu valorisants et
rassurants. Sa précocité intellectuelle semble difficilement assumable et
source de mal-être. Une construction identitaire fragile peut donc être
évoquée. Son comportement agité semble traduire une recherche d’attention
et une forte anxiété.
Dans les Phrases à compléter, une souffrance et une peur de l’échec
se révèlent. De même, l’image de soi apparaît dévalorisée, accompagnée d’un
besoin de soutien et d’aide. Un sentiment de rejet, voir de persécution est
également présent. Enfin, un désir de régression apparaît confirmant une
immaturité, l’age le plus heureux étant 4 ans, à la maternelle.
Etude de cas n°7 : Laurence, 10 ans (Q.I. de 131, Q.I.V. :
144 et Q.I.P. : 104)
Discussion
Etude du conflit
L’image de soi semble assez fragile et une demande de valorisation
est présente. La rivalité fraternelle est très culpabilisée. On remarque une
certaine agressivité envers la mère et un désir de rapprochement avec le père.
Une angoisse d’abandon s’exprime également entraînant la prise
d’indépendance difficile.
Hypothèses
L’angoisse d’abandon et l’agressivité envers la mère peuvent traduire
le ressenti d’une frustration affective antérieure de la part de la mère.
Cependant, il semble que le conflit soit plus de l’ordre d’un Œdipe non
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assumé. L’identification à la mère sur un mode oedipien (Baiser),
l’agressivité exprimée envers celle-ci et les réactions agressives envers les
parents (Nuit) évoquent une situation oedipienne non dépassée. Ce conflit
peut être du à une trop forte culpabilité de ses désirs oedipiens, face à une
mère peut-être perçue comme envahissante ou peu sécurisante, et un père peu
présent.
Conclusion
Un manque de maturité apparaît donc chez Laurence qui exprime un
besoin de valorisation et une angoisse de séparation. Elle n’assume pas
encore l’indépendance, ni ses pulsions agressives, sources de culpabilité.
Aux Phrases à compléter, la dépendance aux parents et l’angoisse
d’abandon sont également exprimées, ainsi qu’une angoisse liée à la mort.
Un désir d’être valorisée et rassurée, un besoin d’être hyper adapté, de réussir
sont aussi présents. On remarque cependant une capacité à « profiter » de la
vie et à assumer certaines tendances, notamment des désirs de type
adolescent.
Etude de cas n° 8 : Théo, 10 et demi (Q.I. de 146)
Discussion
Etude du conflit
Ce protocole révèle donc un fort sentiment de culpabilité et une
certaine insécurité affective. On peut également évoquer une ambiance
générale familiale peu affectueuse et peu sécurisante imposant une loi parfois
non justifiée. Face à des parents pas assez rassurant, l’indépendance peut se
révéler culpabilisante et entraîner une peur de perte d’amour des parents.. La
difficulté à s’autonomiser semble donc être liée à une angoisse d’abandon et
de séparation vis à vis des parents.
Un conflit entre ses deux besoins autonomie-dépendance
s’exprime et une demande d’aide est clairement présente. Pourtant une
certaine maturité apparaît mais elle peut être freinée par une angoisse liée
aux images parentales.
Hypothèses
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Les diverses tendances non assumables ou source de malaise révèlent
peut-être une oralité angoissante, non sécurisante. On peut également poser
l’hypothèse d’une mère envahissante, freinant et culpabilisant l’autonomie et
d’un père peu présent.
Une angoisse de castration peut également être évoquée, à travers
une image paternelle peu sécurisante. Nous pouvons ainsi émettre
l’hypothèse d’une situation oedipienne difficilement dépassable, face à ces
images parentales qui apparaissent peu rassurantes.
Conclusion
Des traits immatures se révèlent chez Théo qui semble envahit par
une forte culpabilité. La prise d’autonomie semble difficile et le sujet ne
peut assumer ses tendances trop angoissantes. Un sentiment de différence et
de rejet sont très présents entraînant une image de soi encore fragile.
Cependant, malgré ces tendances, l’enfant exprime parfois une certaine
maturité et un désir d’être grand.
Dans le test des phrases à compléter, une inquiétude concernant la
famille et une angoisse de mort apparaissent. L’angoisse d’abandon est
aussi présente ainsi qu’une certaine dépendance à la famille. On remarque
également la présence de stress et de nervosité, en lien avec la réussite.
Enfin, une forte dévalorisation de soi s’exprime, révélant une estime de soi
insuffisante et un sentiment d’incapacité.
Etude de cas n°9 : Gilles, 11 ans et demi (Q.I. de 137 :
Q.I.V. : 132, Q.I.P. : 131)
Discussion
Etude du conflit
Les différents thèmes abordés semblent mettre en avant une
intolérance à la frustration et une certaine revendication orale, une rivalité
fraternelle, et enfin une situation oedipienne culpabilisée et angoissante
(malaise face au rapproché avec la mère). Une certaine immaturité se révèle
donc avec une dépendance (régression) à la mère et des sentiments
oedipiens non dépassés. Le thème de la tache noire n'entraîne pas de
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culpabilité ni de dévalorisation (« il s’en fiche ») et met en avant un lien
privilégié avec la mère.
Hypothèses
Nous pouvons donc émettre l’hypothèse d’une situation oedipienne
non dépassée. Cette problématique peut être en lien avec un père pas assez
présent ou sécurisant, afin de permettre la mise en place d’une rivalité. Il peut
également s’agir d’une relation assez fusionnelle à une mère très protectrice,
entraînant la mise à l’écart du père et une difficile identification à celui-ci.
L’entrée en adolescence de Théo peut toutefois entraîner la reviviscence de la
situation oedipienne et de l’angoisse liée aux sentiments oedipiens.
Conclusion
Une certaine immaturité est repérée dans ce protocole avec une prise
d’autonomie apparaissant difficile. Cependant, le sujet assume certaines
tendances, et l’image de soi ne semble pas trop dévalorisée.
Dans le test des Phrases à compléter, une forte dévalorisation des
parents se révèle, accompagnée d’un besoin d’agresser ces images parentales,
de manière provocante. Une crainte de la punition et une peur de l’échec
s’expriment. De même une certaine dévalorisation de soi et un sentiment
d’incapacité peuvent être observés. On remarque donc dans ce test, un Gilles
en entrée dans l’adolescence, provoquant et opposant, préoccupé par le rock
et le skate.
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2. Etude comparative entre les enfants
« surdoués »
Dans cette seconde partie, nous proposons une étude comparative
entre les protocoles des enfants, à partir d’une approche plus quantitative.
A l’aide de tableaux récapitulatifs, nous allons comparer les résultats
de notre groupe aux normes établies par L.Corman. Ainsi, nous tenterons de
mettre en évidence les particularités de ces enfants, à travers les images
aimées et les identifications privilégiées.
Le thème de la tache et la représentation du personnage PN nous
permettront d’analyser l’image de soi et le vécu de ces enfants.
Enfin, nous étudierons l’affectivité et la maturité de notre population
à partir de tableaux autour des vœux à l’image Fée, de l’âge de PN et de
l’image Hésitation.
a- Tableaux récapitulatifs des imagesaimées et des identifications.
Le tableau A présente le pourcentage des enfants ayant aimé ou non
les différentes images. Le tableau B met en évidence le pourcentage des
différentes identifications effectuées par les enfants (identification à PN et
aux autres personnages). Pour chaque tableau figurent les normes établies par
L. Corman afin de les comparer aux résultats obtenus par notre groupe228.
228 Nous considérerons qu’il existe une différence significative entre les normes de L.Corman et les résultats de notre groupe à partir d’une douzaine de points.
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Tableaux A : les images aimées et non aimées
Image Aimée NormeImage NonAimée
I.Orales 62% 68% 37%Tétée1 55% 68% 45%Tétée 2 66% 59% 34%Chèvre 77% 58% 22%Hésitation 44% 76% 56%Portée 66% 80% 34%
I. Agressives 36% 49% 64%Bataille 22% 48% 78%Jars 44% 41% 56%Auge 33% 62% 67%Jeux sales 44% 44% 56%
I. Punitives 30% 32% 70%Jars 44% 41% 56%Charrette 22% 12% 78%Trou 22% 44% 78%
Départ 55% 69% 45%
I. Oedipiennes 55% 62% 45%Baiser 55% 76% 45%Nuit 33% 41% 67%Rêve M 66% 70% 34%Rêve P 66% 60% 34%
Courte échelle 88% 12%
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Tableau B : les identifications
Id.
PNNorm
e
Id.
Blanc
sNorm
e
Id.
puissan
tNorm
e
Id.
pers
.Norm
e
I.Orales
13
% 37% 33% 23% 22% 32% 24% 10%Tétée1 11% 52% 3% 11% 34% 55% 12%Tétée 2 22% 46% 33% 25% 0% 19% 11% 10%Chèvre 11% 37% 2% 22% 42% 55% 19%Hésitation 11% 27% 44% 32% 33% 32% 0% 6%Portée 11% 26% 22% 12% 44% 34% 0% 2%
I. Agressives
14
% 28% 61% 44% 17% 15% 8% 11%Bataille 22% 24% 33% 43% 33% 20% 11% 13%Jars 11% 34% 55% 38% 11% 11% 22% 12%Auge 11% 30% 77% 38% 11% 21% 0% 11%Jeux sales 11% 25% 77% 59% 11% 7% 0% 10%
I. punitives 11% 38% 18% 20% 11% 14% 51% 22%Jars 11% 34% 55% 38% 11% 11% 22% 12%Charrette 22% 40% 0% 12% 22% 14% 55% 19%Trou 0% 40% 0% 9% 0% 16% 77% 36%
Départ 33% 46% 44% 27%
I.
Oedipiennes 44% 50% 22% 23% 11% 26% 27% 12%Baiser 33% 43% 0% 18% 22% 32% 33% 8%Nuit 44% 38% 44% 29% 0% 16% 0% 16%Rêve M 55% 62% 11% 24% 33% 12%Rêve P 44% 56% 11% 32% 44% 11%
Courte échelle 55% 0% 11% 0%
Total 23% 40% 33% 27% 15% 22% 31% 16%
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Analyse des tableaux
Les images orales sont les plus aimées puisque 62% des enfants les
choisissent. On note donc une certaine tendance régressive mais celle-ci
n’apparaît pas significative puisqu’elle reste proche de la norme proposée par
Corman (68%). Nous remarquons tout de même une difficulté, pour notre
groupe d’enfants, à assumer cette tendance (13% d’identifications au
héros PN contre 37% dans la norme de Corman). Nous pouvons donc relever
une certaine attirance pour la relation privilégiée à la mère mais celle-ci, ne
pouvant être assumée (66% d’identifications d’esquive), révèle une
culpabilité importante des enfants face à leur désir de régression.
Nous remarquons également que l’image chèvre est la préférée (77%
dans notre échantillon pour 58% dans la norme de Corman). Ce thème
apparaît également assez régressif puisqu’il fait référence à la relation
précoce à la mère : il met en avant un désir de relation à une mère idéale et
non frustrante. Cet attrait pour cette image orale révèle ainsi une éventuelle
intolérance à la frustration et donc une immaturité. De plus, on remarque
que seule une identification à PN est établie (norme : 27%), ce qui souligne
la culpabilité derrière cette tendance.
Enfin, il est intéressant de noter que cette culpabilité face au thème
oral peut masquer une éventuelle problématique oedipienne (malaise face au
rapproché intime et culpabilité des sentiments oedipiens).
Les images punitives sont les moins aimées (70%). Ce thème suscite
donc chez ces enfants une certaine angoisse et révèle la présence d’une
culpabilité importante. Selon Corman, la culpabilité est assez rarement
assumée par les enfants (37% s’identifieraient à PN), néanmoins, nous
notons que dans notre échantillon, les identifications à PN sont de 11%
seulement. De plus, à l’image Trou, aucune identification à PN n’est possible
et on relève 77% d’identification à personne. Ces images punitives sont donc
très difficiles à assumer, et chargées de culpabilité et d’angoisse.
Les images dites agressives sont aimées à 36% alors que la norme de
Corman est de 49%. De plus, ces tendances sont très rarement assumées par
les enfants (14% Id à PN), et on remarque un nombre important
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d’identifications au cochon blanc innocent et conforme aux désirs parentaux.
De façon très significative, les images Auge et Bataille s’éloignent de la
norme, indiquant ainsi une forte culpabilité liée aux pulsions agressives
envers la fratrie et les parents. L’agressivité envers les images parentales
n’est pas du tout assumable et entraîne de manière massive des
identifications protectrices au blanc innocent. Il apparaît donc difficile pour
ces enfants d’assumer et d’exprimer leurs tendances agressives qui sont très
souvent réprimées et culpabilisées.
L’image Départ, liée au thème d’indépendance est inférieure à la
norme et peu d’identifications à PN y sont effectuées. Le nombre
d’identification à personne est important (44% pour 27% selon la norme de
Corman), indiquant ainsi une vive angoisse et la présence de culpabilité
concernant la prise d’autonomie.
Enfin, les images œdipiennes sont aimées à 55% (en dessous de la
norme de Corman de 62%) et sont relativement assumées (44%). Nous
remarquons tout de même qu’à l’image Baiser, 55% de notre population aime
cette image alors que selon Corman, 76% des enfants l’apprécieraient. De
même, l’image Nuit est souvent source d’angoisse, notamment d’abandon, et
n’est aimée qu’à 33% (contre 41% pour la norme). Cependant cette tendance
est une des plus assumée (44% d’identifications à PN). Cela peut évoquer un
certain malaise des enfants face au rapproché œdipien.
De manière générale, les identifications à PN sont assez faibles (23%)
par rapport aux normes rapportées par Corman (40%). Cela montre la
difficulté des enfants à assumer leurs tendances, et souligne la présence d’une
culpabilité restreignant l’expression des pulsions. On note également un
grand nombre d’identifications d’esquives, surtout aux blancs. Cette défense
met en avant une certaine immaturité. En effet, il s’agit pour l’enfant de se
mettre à l’abri de la culpabilité suscitée par la projection de ses tendances.
Ainsi, ces enfants montrent un désir de paraître conforme aux attentes
parentales, et d’éviter les conflits ainsi que la culpabilité.
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Le pourcentage d’identification à personne est également significatif
et révèle une inhibition et une angoisse chez ces enfants, face à l’expression
de leurs tendances.
En conclusion, on remarque donc une difficulté à assumer leur
attrait pour les images orales, agressives et punitives. Ces tendances
entraînent une forte culpabilité qui apparaît très présente chez ces enfants.
De même, dans les synthèses individuelles, nous avions souligné, de manière
répétitive, la présence de sentiments de culpabilité et de Moi fragiles,
souvent restreints par un Surmoi fort. Une immaturité affective peut ainsi
être évoquée à travers des tendances peu assumées et une intolérance à la
frustration.
b- L’image de soi
Tableau sur le thème de la tache noire
Sujet 1 S. 2 S. 3 S. 4 S. 5 S. 6 S. 7 S. 8 S. 9Tota
lDévalorisation X X X X 4Indifférence X X X 3Valorisation X X 2
Ce thème de la tache noire a souvent suscité chez les enfants l’idée
d’une différence difficile à assumer entraînant un rejet des autres. Ainsi,
nous remarquons que quatre enfants sur neuf évoquent une tache source de
difficulté, de souffrance et de dévalorisation. De fait, un désir d’être
différent, sans tache et comme les autres est clairement exprimé. Ce thème
souligne donc une estime de soi fragile chez ces enfants.
A l’opposé, seulement deux enfants mettent en avant la singularité de
la tache, qui différencie PN de manière positive et représente un lien à la
mère.
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Les trois autres enfants soulignent le caractère distinctif de cette tache
mais expriment une indifférence par rapport à celle-ci (« il s’en fiche »).
Ces cinq enfants montrent ainsi une capacité à assumer leur
singularité et une certaine maturité.
Ce thème peut, à l’évidence, être relié au ressenti des enfants face à
leur « précocité intellectuelle ». Nous pouvons ainsi conclure que cette
particularité semble pour certains (quatre d’entre eux) difficile à assumer et
source de malaise ou de sentiment de rejet. Notons cependant que tous, à
travers les tests et entretiens, mettent en évidence la difficulté plus ou moins
pesante de leur « dons ». Il apparaît toutefois ici que la majorité d’entre eux
assume et vit relativement bien cette spécificité.
Tableau sur les représentations de PN
Ce tableau229 met en évidence le comportement du héros PN, décrit
par chaque enfant, au fil des planches. A travers la projection, l’enfant
s’identifie à PN et la façon dont il décrit ce personnage peut nous renseigner
sur la manière dont il se perçoit lui-même. Ainsi, il semble que le héros PN
porte les tendances des sujets et représente l’image que les enfants ont d’eux-
mêmes.
229 Les chiffres de ce tableau représentent le nombre de fois où les enfants ont décrit lesdiverses attitudes de PN.
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Sujet
1 S. 2 S. 3 S. 4 S. 5 S. 6 S. 7 S. 8 S. 9 TotalPN capable : 2 0 2 1 4 0 1 0 3 13Compétent 3 1 4Autonome 2 2 1 1 1 7Actif 1 1 2
PN heureux : 7 3 2 5 2 3 1 4 4 31Joueur 4 1 3 1 1 3 4 17Curieux 3 1 3 7Content 3 1 1 1 1 7
PN dépendant : 7 2 0 2 4 3 1 4 4 27Recherche d'attention 3 2 2 2 3 1 4 3 20Régressif 4 2 1 7
PN incapable : 3 4 2 3 2 3 0 1 2 20Passif 2 1 1 4Fuyant 1 3 1 2 1 8Impuissant 1 2 2 1 1 1 8
PN victime : 2 7 0 5 6 1 4 4 1 30Rejeté 1 5 2 5 3 16Fautif 2 2 1 1 3 9Victime 1 1 1 1 1 5
PN dysphorique : 4 4 1 0 2 0 1 4 2 18Triste 2 4 2 1 3 1 13Peureux 2 1 1 1 5
PN agressif : 1 2 0 0 1 6 0 0 1 11Enervé 4 1 5Jaloux 1 2 1 2 6
Nous remarquons la présence importante d’un PN victime dans le
discours des enfants (présent chez huit enfants sur neuf). Le thème du rejet,
de l’injustice est récurrent comme nous l’avons étudié dans les synthèses
individuelles. Ce sentiment de rejet peut par ailleurs être relié à la « précocité
intellectuelle » des enfants et à leur sentiment de différence ressenti.
De même, nous notons un nombre significatif de PN incapable ou
dépendant. En effet, le héros est souvent décrit comme recherchant
l’attention et l’affection des parents. Un personnage soumis, incompétent ou
impuissant est ainsi souvent perçu par les enfants. Ces représentations du
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héros évoquent une difficulté de ces enfants à se détacher des images
parentales et à s’autonomiser.
Cette tendance à la victimisation et la dépendance aux autres
évoquent donc la présence de Moi fragiles et peu matures, assumant
difficilement les tendances.
La présence de sentiments dysphoriques, de tristesse est aussi
présente chez cinq enfants, révélant un vécu peut-être douloureux.
L’expression de sentiments agressifs à travers PN est beaucoup moins
prégnante. Un seul enfant exprime de manière importante cette tendance
agressive. Par contre, pour trois enfants, aucun sentiment négatif n’est
évoqué, montrant que cette tendance est très souvent culpabilisée et
réprimée.
On remarque tout de même un nombre important de PN heureux et
content. Cependant, ce thème est souvent lié à un personnage joueur et
enfantin, ce qui souligne encore le côté régressif des enfants.
Un sentiment de compétence peut être mis en avant par six enfants,
mais semble encore fragile et peu dominant par rapport au sentiment
d’incapacité ou de rejet.
Ces diverses positions de PN nous révèlent donc la présence d’une
perception dévalorisée de soi. En effet, les sentiments d’incompétence, de
dépendance et de rejet ainsi que la dévalorisation sont majoritairement
exprimés par notre groupe d’enfants. Nous pouvons donc conclure à une
difficile construction identitaire et à une image de soi fragile et peu
mature, de manière plus ou moins importante selon les enfants.
c- Maturité et construction identitaire
Les identifications régressives
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Age du sujet Age de PN Age d'orSujet 1 9 4 4Sujet 2 10 8 9Sujet 3 10 5 GrandSujet 4 12 5 17Sujet 5 11 8 8Sujet 6 12 5 6Sujet 7 10 6Sujet 8 10 10 10Sujet 9 11 4
De manière générale, tous les enfants ont donné à PN un âge
inférieur ou égal à leur propre âge. On remarque que six enfants sur neuf lui
ont donné un âge en dessous de six ans. Cette tendance régressive met en
avant un désir important des enfants de revenir à un stade de dépendance
aux parents. Avant six ans est une période de la vie de l’enfant où les
contraintes sont moins présentes, où il est libre, développant son imagination.
L’enfant n’a pas de réelles responsabilités et est au centre de la cellule
familiale. Il n’a pas encore vraiment affronté le monde extérieur et ses
exigences. De même, le regard des autres et les relations sociales ont encore
peu d’importance. Ainsi, la majorité des enfants exprime un désir de retour à
cette période d’insouciance et de dépendance aux parents. Cela peut traduire
une difficulté à envisager l’autonomie et à se projeter dans l’avenir.
Cependant, ce désir régressif peut également indiquer un désir de
retour à l’époque où la « précocité intellectuelle » n’était pas révélée. Pour
cinq enfants, l’âge donné à PN est antérieur à l’annonce de leur précocité.
Le sixième enfant donne au héros l’âge auquel il a appris sa différence. Il
peut donc également s’agir d’une nostalgie de cette période sans différence à
assumer et sans scolarité.
Trois enfants ( entre 10 et 11 ans) font de PN un enfant de 8-9 ans,
âge moins régressif. Ces sujets expriment tous un âge d’or de la même
période, l’assumant ainsi.
On remarque pourtant que, pour deux d’entre eux, il s’agit d’un âge
antérieur au dépistage de leur précocité. Un seul l’enfant donne à PN son âge
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réel (« post- dépistage »), montrant ainsi une certaine maturité et affirmation
de soi.
Dans notre échantillon, la question de l’âge d’or a été posée à sept
enfants230. Deux enfants ont exprimé un désir de grandir (âge d’or de « 17
ans » et « comme les parents») et deux autres un âge qui suit le vœu (à Fée)
de ne plus avoir la tache.
On peut donc souligner ici la diversité des profils et les différences
interindividuelles entre les enfants : certains apparaissent assez immature,
désirant régresser ou être différent, d’autres assumant leur âge ou désirant
grandir.
Toutefois, il semble nécessaire de nuancer ce choix régressif selon les
sujets et l’influence des facteurs biographiques (rang dans la fratrie,
naissance d’un enfant …).
230 Par manque de temps lors de deux passations, cette question n’a pas été posée.
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Tableau des vœux à l’image Fée
S. 1 S. 2 S. 3 S. 4 S. 5 S. 6 S. 7 S. 8 S. 9 TotalValorisation de soi X X X 3Disparition de la tache X X X 3Quête affective X X XXX X X XX XX 11Demande de réparation X 1Réalisation de soi X 1Désir d'indépendance XDemande type ludique X X 2Demande immature XX X 3Expression
d'agressivité X X 2
Les souhaits exprimés par les enfants sont de natures différentes
cependant on remarque de façon prégnante des demandes à forte résonance
affective. En effet, onze vœux (40%) expriment une quête affective, un désir
d’avoir plus d’affection ou d’attention de la part des parents, des frères ou
des amis.
Nous remarquons également, à six reprises (22%), une demande de
valorisation de soi et d’apports narcissiques (être « plus fort », ou faire que
la tache disparaisse), révélant ainsi une image fragile de soi.
Ces différents vœux évoquent une lutte des enfants contre leur
impuissance et leur dépendance. Une immaturité affective s’exprime donc à
travers un besoin de revalorisation et d’affection. Cette tendance immature
est également confirmée par la présence de vœux enfantins qui apparaissent
aussi chez quatre enfants(18%).
Les demandes de type indépendance ou réalisation de soi sont rares
(7%), ce qui révèle la difficulté des enfants à se détacher de la cellule
familiale et à se projeter dans l’avenir.
Tableau récapitulatif de l’image Hésitation
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S. 1 S. 2 S. 3 S. 4 S. 5 S. 6 S. 7 S. 8 S. 9
Tota
lProgression vers lamère X X 2Progression vers le père X 1absence de choix X X X X X X 6
Identification à PN X 1Id. à la mère 0Id. au père X X X 3Id. au blanc avec lamère X X 2Id. au blanc avec le père X X 2Id. à personne X 1
Ce tableau décrit les choix effectués par les enfants à l’image
Hésitation, où PN se retrouve seul, avec d’un côté sa mère et un frère et, de
l’autre côté, son père accompagné d’un autre frère. Le héros doit donc se
positionner en tant que sujet ayant une identité propre et choisir le modèle
identificatoire vers lequel se tourner. Le comportement de PN face à cette
situation nous apprend sur la maturité de l’enfant et la manière dont il gère
l’ambivalence.
A travers ce tableau récapitulatif, nous remarquons de manière
dominante l’absence de choix des enfants (six enfants sur neuf) face au
thème du dilemme identificatoire. Cet évitement évoque une immaturité de
la part des enfants. En effet, une négation de la frustration apparaît et
l’ambivalence semble difficilement assumée (aucune identification à PN
chez ces six enfants).
Certains décrivent une indifférence de PN (qui n’a pas faim et reste
seul), ce qui révèle une position de toute puissance et la négation de la
frustration. D’autres mettent en avant un manque d’attention de la part des
parents et ainsi une revendication affective. On relève également une position
passive de PN, qui attend qu’une place se libère, ce qui traduit une forte
inhibition et une difficulté à se positionner en tant que sujet.
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Ces différentes représentations d’un héros incapable de choisir entre
les deux modèles montrent ainsi une immaturité affective de certains enfants
et un Moi faible, incapable de s’imposer.
Néanmoins, trois enfants effectuent un choix. Cependant, pour deux
d’entre eux, ce choix se tourne vers la mère. Cette position est, selon L.
Corman, la plus fréquente et révèle un besoin de sécurité et de réassurance.
Il s’agit d’un désir de conserver la relation privilégiée à la mère et donc d’un
comportement régressif montrant une immaturité affective et une
éventuelle fixation orale. On remarque également deux identifications au
blanc tétant la mère, ce qui va également dans le sens d’un désir régressif,
mais peut aussi signifier un désir de rapprochement œdipien.
La progression vers le père, exprimée chez un enfant seulement, est
un indice de maturité, traduisant une prise d’indépendance de l’enfant. On
relève par ailleurs deux identifications possibles aux blanc près du père, mais
celles-ci étant exprimées par les filles, révèlent plus un rapproché œdipien
qu’une esquisse d’autonomie.
Pour conclure sur cette partie, les analyse des tests Patte Noire nous
ont permis de mettre en évidence des tendances et des traits particuliers chez
ces enfants « surdoués ». Cependant, les différences entre les sujets sont
importantes et nous rappellent que ces enfants ont leur singularité, leur
personnalité et leur histoire personnelle qui influencent sur leur vécu et leur
construction identitaire.
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B) ANALYSE DES PHRASES A COMPLETER
Afin d’étayer nos hypothèses et de compléter les analyse des tests
Patte Noire, nous avons fait passer ce test Phrases à compléter aux neuf
enfants « surdoués » et à douze enfants « non surdoués » en classe de sixième
également.
Dans cette partie nous proposons une analyse thématique de ce test.
Ainsi, nous allons étudier, par le regroupement de certaines phrases, les
réactions des enfants en situation sociale de stress, les types de relation qu’ils
entretiennent avec leur entourage, la représentation qu’ils ont d’eux-mêmes
et enfin le thème de l’anxiété.
Chaque tableau compare le pourcentage de type de réponse de notre
groupe contrôle et de notre groupe d’enfants « précoces ».
1. Réactions en situation sociale de stress
a- Les réactions face à l'autorité
Réactions générales face à l’autorité : phrases 7 (Lorsqu’on
dit à Henri de rester tranquille...) et 53 (Lorsqu’on lui dit que
c’est dangereux...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Besoin desoumission 58 50Besoin d’opposition 42 50
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Réactions face à l’école : phrases 45 (Lorsque Michel avait
des devoirs supplémentaires à faire, il...) et 27 (Quand Pierre
pense à l’école, il...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Besoin de soumission 30 11Besoin d’opposition 21 28Besoin de réussite 8 5Besoin d'évasion 4Anxiété 17 17Attitude positive 12Attitude négative 8 17Réaction infantile 5Réaction nerveuse 5Autre, évitement 11
De manière générale, nous relevons à travers ces deux tableaux, un
besoin d’opposition plus élevé dans le groupe des enfants « surdoués » et un
besoin de soumission plus présent dans le groupe contrôle, face à l’autorité.
L’école entraîne un éventail de réactions plus important dans le
groupe d’enfants « précoces ». Ainsi, nous observons des réactions
infantiles (pleurs) et nerveuses (colère) chez ces enfants, face au travail. De
même, une vision négative de l’école et une attitude d’opposition et de
provocation sont plus présentes dans ce deuxième groupe.
Ces attitudes négatives et d’opposition face à l’autorité et au travail,
nous évoquent une tolérance à la frustration plus faible dans le groupe
d’enfants « surdoués ». La difficulté pour ces enfants à se soumettre aux
exigences de l’extérieur révèle peut-être un besoin de chercher les limites ou
bien de faire soi-même ses expériences et donc de s’affirmer.
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b- Les réactions face à l'échec
Ressentis en situation d’échec : phrases 18 (Quand il a une
mauvaise note, il...) et 33 (L’échec de Marc le rendit...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Réaction typeinfantile 37 17Réaction type nerveux 13 33Passivité 11Anxiété 21 17Persévérance 21 17Réaction contraire 8Indifférence 5
Face à l’échec, les réactions des enfants sont diverses. Nous relevons
cependant un nombre plus important de réactions infantiles chez les enfants
du groupe contrôle que dans le second groupe.
Dans le groupe d’enfants « surdoués », ce sont les réactions de type
nerveux (colère) qui dominent. Ce type de réaction peut être lié à la
difficulté de supporter l’échec et la frustration et à une estime de soi
insuffisante.
Réactions face à la réussite d’autrui : phrase 29 (Lorsqu’il vit
que d’autres réussissaient mieux que lui...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Besoin compétition 58 22Réaction type infantile 25 33Réaction type nerveux 17 22Réaction typedépressif 22Indifférence 11
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La réussite des autres entraîne un besoin de compétition plus élevé
chez les enfants « non surdoués » alors qu’elle provoque des réactions
infantiles voir dépressives (par exemple : « il se dit nul ») dans le groupe des
« surdoués ». Celles-ci peuvent être mises en lien avec un manque de
confiance en soi chez ces enfants.
Causes de l'échec : phrase 11 (Ce qui l’empêche de réussir,
c’est...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Rejet sur lesautres 75 22Auto-accusation 25 44Présence de stress 33
Les enfants du groupe contrôle déplacent plus facilement les causes
de leur échec sur l’environnement. Cette réaction permet aux enfants de se
déculpabiliser et de se revaloriser.
A l’opposé, les enfants « surdoués » montrent une image plus
dévalorisée d’eux-mêmes et ont une plus grande conscience de leur anxiété
et de leurs limites. Leurs réponses apparaissent donc plus censées et adultes
que celles des autres enfants.
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c- Les réactions face au rejet
Phrases 49 (Quand on se moque de lui...), 20 (Chaque fois qu’il ne fut pas
invité...) et 24 (Ne trouvant personne pour l’aider, Jean...).
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Moquerie Rejet Solitude Total Moquerie Rejet Solitude Total
Infantile 33 25 25 28 22 33 18Nerveuse 25 17 8 17 44 22 22Indifféren
-ce 17 25 14 0Att.
positive 17 8 42 22 11 22 11Passivité,
fuite 8 25 25 19 33 22 22 26Sentiment
abandon 11 11 7Attitude
dépressive 44 15
Face aux moqueries des autres, les enfants « surdoués » répondent
souvent par des comportements agressifs, alors que les enfants du groupe
contrôle réagissent plus par des attitudes infantiles de pleurs.
Le rejet des autres entraîne par contre des réactions infantiles dans le
groupe « surdoués » et des attitudes diverses dans le groupe contrôle
(infantile, indifférence, passivité).
Le sentiment de solitude est très mal vécu par le deuxième groupe,
provoquant des réactions dépressives. A contrario, dans le groupe contrôle,
les attitudes positives, d’autonomie, sont dominantes.
De manière générale, les réactions de fuite ou de passivité sont
majoritaires dans le groupe « surdoués », exprimant des sentiments
d’incapacité et d’impuissance ressentis par ces enfants. Nous remarquons
dans ce groupe, des réactions parfois extrêmes qui évoquent une position
dépressive (par exemple : « se tua »). De même, nous notons un sentiment
d’abandon qui n’est pas non plus présent dans le premier groupe.
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Les attitudes positives et matures (affirmation de soi, autonomie) sont
peu exprimées dans ce groupe « surdoués » alors qu’elles sont le deuxième
type de réaction du groupe « contrôle ». Néanmoins, des réactions infantiles
(pleurs) sont dominantes dans le premier groupe, révélant aussi des attitudes
immatures et passives.
Le rejet est donc vécu de manière plus intense par le deuxième
groupe « surdoués », entraînant des réactions inadaptées à 90%. Aucune
indifférence ne peut être ressentie contrairement au premier groupe où une
prise de distance est possible. Ces réponses immatures et inefficaces sont
certainement liées au sentiment de différence ressenti par ces sujets qui ont
très souvent vécu des situations de rejet et de solitude.
Ce thème, provoquant des réactions fortes de colère, d’impuissance et
de désespoir, révèle donc une insécurité interne et une estime de soi
insuffisante chez les enfants « surdoués ». Ces réactions nous montrent
également la grande sensibilité et la fragilité de ces enfants. L’affirmation de
soi et la prise d’autonomie semblent ainsi plus difficiles pour ce groupe.
Motifs de colère : phrases 6 (Vincent se sentit agacé quand...)
et 13 (Rien ne peut rendre Nicolas plus furieux que...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Référence à l'école 8 28Relation aux autres 21 27Relation auxparents 8 5,5Rivalité fraternelle 21 11Valeur morale 8 5,5Frustration 8 5,5Ennui 5,5Esquive-banalité 12,5 5,5Autre 12,5 5,5
Dans ce tableau, nous remarquons la diversité des réponses des
enfants. Nous notons tout de même que les motifs invoqués par le groupe des
enfants « surdoués » sont principalement liés à l’école et aux relations
sociales. L’échec scolaire et le rejet des autres sont souvent ressentis par
ces enfants comme source de colère
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Pour le premier groupe, les références à l’école sont moins
importantes. Par contre, la rivalité fraternelle et les relations aux autres sont
les causes dominantes d’agacement.
2. Le contact avec l’entourage
a- Les relations avec l'entourage
Phrases 30 (La famille de François est...), 23 (Sa mère...), 43 (Le père de
Stanislas...), 40 (Ses frères et sœurs sont...) et 19 (Quand ses camarades
s’approchent...).
Groupe
contrôle
Groupe
« surdoués »La famille Valorisation 66 33
Dévalorisation 8 33Evitement 25 33
La mère Valorisation 58 33Dévalorisation 25 44Evitement 8 22
Le père Valorisation 25 33Dévalorisation 33 44Evitement 42 22
La fratrie Valorisation 66 22Dévalorisation 33 55Evitement 8 22
Groupe
contrôle
Groupe
« surdoués »Les amis Besoin de relation 58 44
Evitement 42 11Agressivité 44
Ces tableaux mettent en évidence le ressenti et le type de relation que
les enfants entretiennent avec leur environnement.
Tout d’abord, de manière générale, nous observons une
dévalorisation des différents membres de l’entourage plus forte chez le
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groupe d’enfants « surdoués ». Ainsi, nous remarquons 44% de
dévalorisation des images maternelles et paternelles dans ce groupe.
A contrario, dans le premier groupe, la famille et notamment la mère
sont très valorisées. La représentation du père est par contre dévalorisée et
entraîne des réponses banales voir un évitement.
Ces remarques évoquent une certaine agressivité du deuxième groupe
envers les parents. Diverses hypothèses peuvent être avancées quant à ce
ressenti. Ainsi, il peut s’agir de réactions d’opposition du type intolérance à
la frustration, ou provocation adolescente. Nous pouvons également émettre
l’hypothèse d’images refusées et dévalorisées en tant que repères
identificatoires. Enfin, il peut s’agir de sentiments oedipiens refoulés, sources
de malaise.
La fratrie est également plus dévalorisée chez les enfants « précoces »
que chez les autres. Cette agressivité révèle une rivalité fraternelle plus
forte dans ce groupe. Il peut s’agir d’un sentiment de jalousie vis à vis des
parents et donc un désir d’exclusivité de l’attention parentale. Ce sentiment
peut également être en lien avec le sentiment de différence, et donc un désir
d’être « normal » comme eux.
Au niveau des relations sociales, un fort besoin de relation s’exprime
dans les deux groupes, mais de manière plus importante dans le groupe
« contrôle ». Nous remarquons dans le groupe de « surdoués », des réactions
de type agressivité, non présentes dans le premier groupe. Cette agressivité
peut être une défense contre un sentiment d’insécurité ou un sentiment
d’infériorité. Nous pouvons également lier ce comportement aux situations
d’exclusions souvent vécues par ces enfants « surdoués ».
Enfin, nous notons que les enfants du groupe contrôle expriment leur
malaise par un évitement, un comportement passif, alors que les enfants du
second groupe expriment leurs sentiments de manière plus excessive et
impulsive. Ces attitudes peuvent être en lien avec une image de soi
dévalorisée, un manque de confiance en soi, entraînant des réactions de
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défense plus ou moins fortes. Il peut donc s’agir de tentatives d’éviter la
souffrance d'un éventuel rejet.
b- La personne préférée
Phrase 28 (La personne qu’il aime le plus est...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »La mère 17 11Le père 25 11Les parents 8 11La fratrie 22Amoureux(se) 33 22Un animal 8Autre 22
Nous remarquons un nombre plus important de rapprochement avec
les parents dans le premier groupe (50%). Ces réponses ( père ou mère) sont
souvent de type relation oedipienne (pour trois enfants) mais évoquent
également (pour deux enfants) une attitude plus mature d’identification au
parent du même sexe.
Chez les enfants « surdoués », les références à la mère ou au père sont
de l’ordre de l’identification. Ce groupe exprime une attirance moins
importante pour les parents et des préférences pour la fratrie. Ces remarques
évoquent une prise d’indépendance de ces enfants, mais elles peuvent
également révéler une dévalorisation des images parentales, perçues comme
des repères identificatoires insuffisants. On peut aussi émettre l’hypothèse
d’un évitement et d’un déni de leur dépendance aux parents.
Des préoccupations adolescentes sont plus présentes chez les enfants
« non surdoués ». De manière générale les relations amoureuses apparaissent
plus importantes dans les protocoles du premier groupe, même si elles ne
sont pas prégnantes. Néanmoins dans le groupe des « surdoués », ces
préoccupations existent aussi, notamment l’attitude typique adolescente, se
traduisant par l’adulation d’un groupe de rock et de sa star rebelle.
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3. L’image de soi
a- La représentation de soi
Perception de soi : phrase 52 (Pierre est un garçon qui...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Image valorisée 33 11Besoin de réussite 17Besoin desoumission 22Image dévalorisée 8 44Affirmation de soi 8 11Autre 8Evitement 17 11
Nous observons, à travers ce tableau, une image de soi positive pour
le premier groupe ainsi qu’un besoin de réussir, évoquant un désir d’être
valorisé et de plaire.
A l’inverse, le groupe d’enfants « surdoués » exprime davantage une
image négative et dévalorisée de soi-même ainsi qu’un besoin de
soumission, révélant leur besoin d’être conforme.
L’affirmation de soi est présente mais peu significative au sein des
deux groupes.
Besoins revendiqués : phrase 12 (J’ai souvent besoin de ...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Besoin d'aide 42 44Besoin d’évasion 25 44Besoin de réussite 8Evitement 17 11Autre 8
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A première vue, nous pouvons remarquer qu’un fort besoin d’être
soutenu et réconforté apparaît dans les deux groupes. Cela nous montre que
ces enfants sont encore dépendants aux autres, surtout aux adultes.
Un besoin d’évasion, en référence à la lecture ou à la musique est
mis en avant de manière plus dominante dans le groupe des enfants
« surdoués ». Ce besoin de se ressourcer et de s’évader est peut-être plus
nécessaire chez ces enfants du fait de leur précocité et de leur tension interne
(et éventuellement de pressions extérieures).
Dans le groupe contrôle nous remarquons des préoccupations quant à
la réussite qui n’apparaissent pas dans le second groupe.
Image de soi selon les autres : phrase 47 (On pense de moi
que...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Dévalorisation 33 55Valorisation 67 33Autre 11
La représentation de soi par les autres, imaginée par les enfants, est
plus dévalorisée dans notre échantillon d’étude (« pénible », « nul », « sans
cœur »). De plus, on observe une réponse particulière révélant un sentiment
de différence (« je suis EIP »).
Une image de soi valorisée est deux fois moins importante que dans
le groupe contrôle. Il apparaît donc que ces enfants ont une estime de soi
relativement faible en comparaison aux enfants du premier groupe.
b- La maturité Age d'or : phrase 54 (L’âge le plus heureux de la vie est...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Désir de grandir 42 55Désir de régression 33 11Angoisse 8Age actuelRationalisation,évitement 33
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A travers l’âge préféré des enfants, nous observons, dans le groupe
contrôle, un désir de régression plus fort et la présence d’angoisse de mort.
Au contraire nous remarquons un désir de grandir plus net chez les
« surdoués ». Cependant des réponses plus rationnelles sont présentes. Ces
mécanismes de défenses peuvent traduire une tentative de ces enfants de
maîtriser une angoisse révélée par cette phrase, voir même de lutter contre un
besoin régressif.
Attitude devant la vie : phrase 34 (Ma vie...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Dévalorisation 17 44Valorisation 67 56Angoisse 17
Concernant la vision de la vie, on observe une plus grande
dévalorisation du côté du groupe des « surdoués ». Ces dévalorisations sont
parfois fortes (« ma vie est un enfer », « est nulle », « brisée »), et révèlent
une souffrance et une vision négative de soi. Nous notons cependant, une
perception positive décrite par la majorité des enfants.
Pour le groupe contrôle, on observe un nombre plus important de
vision positive de la vie mais on note la présence d’une angoisse concernant
la mort qui n’apparaît pas du même ordre dans le second groupe.
Ainsi, nous pouvons en déduire qu’une peur de l’avenir s’exprime
chez les enfants « non surdoués », alors qu’un mal-être actuel est mis en
avant par les enfants « précoces ».
Attitude face à l’avenir : phrase 14 (Jean pensait que son
avenir...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Vision positive 42 66Vision négative 50 33
Projection dans l’avenir : phrase 36 (Plus tard, il...)
Besoin de réussite 58 55
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Absence de projection àlong terme 17 22Présence d’anxiété 8 11Attitude infantile 8Besoin de liberté 8 11
Un besoin de réussite et une projection dans un futur métier sont bien
présents pour les deux groupes.
Un avenir positif est majoritairement perçu par les enfants du second
groupe, contrairement au premier groupe « contrôle », où le pessimisme est
légèrement dominant. Ce groupe exprime une insécurité par rapport au futur
(avenir « fichu », « « très mauvais »…), alors que les enfants « surdoués »
semblent ici moins anxieux quant à leur avenir. Cependant, une absence de
projection à long terme, dont une forte dévalorisation (« sera fou ») et un
évitement, est à souligner pour ce deuxième groupe.
4. L’anxiété
a- Les inquiétudes
Motifs de peur : phrase 8 (J’ai surtout peur de...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »Peur infantile 50 11Angoisse abandon 25 22Référence à l'école 17 22Relation aux autres 8 22Autres 22
Nous remarquons des causes de peur de type plus infantile et
immature (peur du noir, des araignées…) dans le premier groupe.
Le groupe « surdoués » exprime des peurs plus diversifiées,
notamment par rapport aux autres, à la perte de la famille, ou encore à
l’échec. Ces différentes craintes peuvent être mises en lien avec un manque
de confiance en soi.
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Causes de tourment : phrases 5 (Paul ne peut dormir à cause
de ...) et 25 (Ce qui tourmentait le plus Henri, c’était...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Anxiété en lien avec l'école 29 17Relation aux autres 12,5Sentiment de culpabilité 8 17Angoisse diffuse 8 33Banalité 37,5 17Intellectualisation-évitement 17Autres réponses 4
Motifs d’inquiétudes : phrase 42 (Ce qui m’inquiète le plus...)
Groupe contrôle
Groupe
« surdoués »Peur de l'échec et avenir 66 22Angoisse liée à la précocité 11Relation aux autres 8 22Angoisse liée à la mort,maladie 8 33Autres 17 11
Dans ces tableaux, nous observons, pour le premier groupe
« contrôle », des inquiétudes très souvent liées à l’école et aux notes.
Pour le groupe des « surdoués », cette préoccupation semble moins
importante. En effet, une angoisse diffuse, parfois liée à la mort et à la peur
de l’abandon, est beaucoup plus présente.
b- Les causes de souffrances
Phrases 39 (Maxime pense qu’il souffre à cause de...) et 51 (Il se sent
malheureux quand...)
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Groupe contrôle Groupe « surdoués »La famille 4 11Les amis (rejet) 21 11L’école (notes) 17 17La solitude 21 11Sentiment de culpabilité 4 22Souffrance personnelle 8 28Référence infantile 8Evitement 4
Ce tableau met en évidence les causes de souffrances ressenties par
les enfants. Ainsi, nous remarquons que le rejet des autres et la solitude sont
moins bien supportées par les enfants du groupe « contrôle ». Pour ces
enfants « non surdoués » un besoin de relation sociale est clairement
exprimé.
Concernant le groupe d’enfants « précoces », la culpabilité et une
souffrance plus personnelle sont mises en avant. On note d’ailleurs des
réponses pouvant être mises en lien avec la « précocité » (souffrance à cause
de « sa maladie », « sa différence », « sa blessure »).
Les causes de mal-être apparaissent donc de natures différentes selon
les groupes. La présence de sentiment de culpabilité et d’angoisse diffuse
sont à souligner dans le groupe d’enfants « précoces ». Elles évoquent une
souffrance plus profonde en lien avec l’identité des enfants. A la différence
de ces sujets, le groupe contrôle exprime des craintes et souffrances plus
définies, en lien avec la réussite, les relations sociales ou des références plus
infantiles.
c- La culpabilité
Phrase 37 (Il se sentait coupable de ...)
Groupe contrôle Groupe « surdoués »La Famille 25 22Les amis 33 22Faute-bêtise 33Forte culpabilité 8 44
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Concernant le thème de la culpabilité, nous notons dans le groupe des
enfants « surdoués », des réactions très fortes et excessives, révélant un fort
sentiment de culpabilité, parfois diffus, sans causes apparentes (« de tout
faire », « de l’avoir tué »…).
Dans le groupe « contrôle », les réponses sont plus de type banal, se
référant à une bêtise passée (mensonge, tricherie, mauvaise note…), et la
culpabilité semble moins importante.
Au cours de cette analyse thématique et comparative, des différences
significatives ont été notées entre les deux groupes d’enfants dits
« surdoués » et d’enfants « non surdoués ». Ainsi, les réactions et les ressentis
des enfants face à la frustration, aux relations avec les autres, à l’anxiété et à
l’image de soi, se révèlent souvent de nature différente.
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III. DISCUSSION
Notre pratique sur le terrain, à travers l’utilisation des tests Patte
Noire et Phrases à compléter, nous a permis de mettre en évidence des
éléments spécifiques quant au développement affectif des enfants
« intellectuellement précoces ».
Dans le test du Patte Noire, à partir d’analyses individuelles et de
tableaux récapitulatifs divers points communs et caractéristiques ont été mis
en avant concernant l’affectivité de notre groupe d’enfants « surdoués ».
Au cours de l’analyse du test Phrases à Compléter, des différences
entre le groupe d’enfants « surdoués » et le groupe contrôle ont été
remarquées à travers les types de réaction et les ressentis de ces enfants.
Dans cette dernière partie, nous proposons d’abord une discussion de
nos résultats en lien avec nos hypothèses et avec des éléments exposés dans
notre partie théorique. Puis, dans un deuxième temps, nous exposons une
réflexion sur les limites et les biais de notre travail de recherche.
Rappelons tout d’abord notre hypothèse principale et les sous-
hypothèses qui en découlent.
Hypothèse principale : il existe un décalage entre les capacités
intellectuelles et le développement affectif de l’enfant
« intellectuellement précoce ».
Première hypothèse : sur le plan affectif ces enfants sont moins matures
que les autres enfants.
Deuxième hypothèse : le développement affectif de l’enfant surdoué
s’effectue de manière différente des autres enfants :
-au niveau de la formation du surmoi
-des identifications,
-de la prise d’indépendance,
-de la situation œdipienne.
Troisième hypothèse : les enfants « précoces » sont plus anxieux que les
autres enfants.
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A) ANALYSE DES RESULTATS A LA LUMIERE
DES HYPOTHESES
1. Première hypothèse : les enfants « surdoués »
sont moins matures que les autres enfants
a- Dans le test Patte Noire
Au fil de nos analyses individuelles et quantitatives, nous avons
évoqué à plusieurs reprises une immaturité chez ces enfants.
En effet, la plupart des sujets assument très difficilement leurs
tendances afin de paraître conformes aux idéaux parentaux et d’éviter de la
sorte les conflits. Nous avons ainsi souligné le faible nombre
d’identifications au héros PN, traduisant la difficulté à assumer les actions
de ce personnage central. De même, le nombre important d’identifications
d’esquives, en particulier aux petits blancs, met en avant une position
immature. Par ces identifications de défense, l’enfant évite la culpabilité et
l’angoisse suscitées par certaines images. Il choisit la place du cochon
innocent, conforme aux attentes des parents.
Le thème de l’image Hésitation, par l’absence de choix des enfants,
révèle leur difficulté à se positionner en tant que sujet ayant des désirs
propres. Dans l’analyse de ce tableau, nous avons noté la présence de
revendication affective et de position de toute puissance ou de passivité.
Ces remarques mettent en évidence un Moi faible et dépendant à
l’entourage. Ainsi, l’affirmation de soi et la construction identitaire
apparaissent difficiles chez ces enfants.
La dépendance aux parents, les tendances à la régression et les
besoins de valorisation et d’attention sont exprimés à travers la
représentation de PN et l’âge qui lui est donné. En effet, nous avons
remarqué de manière récurrente la description d’un PN dépendant,
incompétent ou encore victime.
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Les vœux effectués à l’image Fée traduisent également une tendance
immature, à travers une forte quête affective, un besoin de valorisation et
d’attention. Nous pouvons y voir une difficulté à grandir et un manque de
maturité.
Une difficulté à supporter les frustrations peut également être
révélée à travers l’image Hésitation, mais aussi par les thèmes régressifs et
par l’attrait pour l’image Chèvre.
Enfin, ces enfants présentent, de manière générale, une estime de soi
dévalorisée et un Moi faible et fragile par rapport à un Surmoi important.
Ainsi tous ces éléments confirment l’hypothèse d’une immaturité
affective de notre groupe d’enfants.
Cependant, les différences individuelles sont à souligner et ce manque
de maturité semble plus ou moins important selon les enfants. Néanmoins, il
semble bien que leurs capacités intellectuelles, qui leur donne un âge mental
supérieur à leur âge réel, ne soit pas au même niveau que leur maturité
affective.
Ainsi, leur développement affectif correspond davantage à leur âge
réel, mais nous pouvons également parler d’un âge « affectif » parfois
inférieur à leur âge réel. En effet, nous avions cité, dans notre partie
théorique, le point de vue de B.Bornstein231 sur la période de latence. Selon
elle, entre huit et dix ans, le Surmoi de l’enfant est moins strict et le Moi se
renforce, permettant ainsi l’affirmation de soi et l’autonomie. Dans notre
échantillon, la présence excessive du Surmoi et la difficulté d’affirmation de
soi appuient donc l’hypothèse d’une immaturité sur le plan affectif.
231 B. Bornstein, citée par P. Denis (1985).
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b- A travers le test Phrases à compléter
Réactions en situation difficile
Face à l’échec et au rejet des autres, il nous est apparu que le groupe
d’enfants « précoces » réagissait moins souvent par des attitudes infantiles
(pleurs) que les autres enfants. Néanmoins leurs réactions, de type nerveux
(colère, opposition) ou bien passif (fuite) évoquent un manque de maturité de
la part de ces enfants. En effet, les attitudes d’oppositions révèlent une
intolérance à la frustration et une difficulté à supporter l’échec. De plus,
les attitudes provocatrices face à l’autorité soulignent le besoin pour certains
de ces enfants « surdoués » de rechercher les limites.
La passivité, mais aussi des réactions dépressives ou anxieuses,
traduisent un sentiment d’incapacité et d’impuissance.
Nous avons également remarqué des réactions de types infantile,
nerveux ou des positions dépressives quant à la réussite d’autrui, alors que
dans l’autre groupe, un besoin de compétition s’exprime.
Ces réactions, inefficaces et assez immatures, indiquent un manque
de confiance en soi et une difficulté à supporter la frustration.
Néanmoins, les causes d’échec avancées par les enfants « surdoués »
révèlent une conscience de leurs limites et de leurs difficultés. En effet, ils
rejettent moins la faute sur l’extérieur que les enfants de l’autre groupe. Par
ailleurs, en évoquant un stress important comme cause de leur échec, ces
enfants expriment le ressenti d’une tension intérieure.
Les situations de rejet et de solitude entraînent des réactions intenses
de désespoir et d’impuissance. Ainsi, nous observons une sous estimation et
une méconnaissance de leurs compétences, provoquant ainsi une incapacité
et un retrait ou un retour de l’agressivité contre soi. De plus, ces
comportements mettent en évidence une forte sensibilité et une insécurité
interne qui rendent ces enfants dépendants à leur entourage.
Des attitudes positives d’affirmation de soi et d’autonomie s’avèrent
moins présentes dans ce groupe d’étude que dans le groupe contrôle. Ainsi,
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les besoins d’aide et de soutien sont fortement exprimés et montrent leur
faible estime de soi.
Toutes ces réactions, souvent extrêmes (colère, provocation ou
désespoir), diffèrent des attitudes moins intenses des autres enfants non
surdoués. Ces attitudes révèlent une fragilité, et une estime de soi
insuffisantes qui freinent la prise d’autonomie et l’affirmation de soi.
Elles évoquent ainsi un manque de maturité chez ces enfants.
Les relations avec l’environnement
Concernant les relations avec l’entourage, dans le groupe d’enfants
« précoces », les parents apparaissent moins valorisés que chez les autres
enfants et une rivalité fraternelle s’exprime de manière importante.
L’agressivité ou l’indifférence (phrase sur les préférences)
exprimées par ses enfants envers les images parentales peuvent être mises en
lien avec une désidéalisation précoce de ces images, due à une perception
aiguë de la vie chez ces enfants. En effet, leur compréhension rapide et leur
fine analyse des choses peuvent les amener à démystifier leurs parents à un
âge plus jeune que les autres enfants. Dans cette hypothèse, une certaine
maturité s’exprimerait chez ces enfants, mais également une difficile
construction identitaire, les repères parentaux étant perçus comme fragiles et
peu stables.
Ces réactions peuvent également être liées au refoulement de
sentiments œdipiens, qui, sources de malaises, entraîneraient un évitement
ou une dévalorisation du parent œdipien. En effet, lors de nos analyses du
test Patte Noire, nous avions émis, chez la plupart des enfants, l’hypothèse de
conflits œdipiens non résolus. Cependant ces hypothèses sont difficiles à
confirmer et la prudence est de rigueur. Néanmoins, dans le cas de sentiments
œdipiens refoulés, une immaturité affective s’exprimerait.
La fratrie est également dévalorisée chez la majorité de ces sujets,
alors qu’elle est valorisée par le plus grand nombre d’enfants « non
surdoués ». Un sentiment de jalousie paraît donc plus prégnant dans notre
échantillon d’étude. Ces réactions peuvent être provoquées par un désir de
retour à la période où cette fratrie était absente ou moins présente, et où
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l’attention des parents était exclusive. Il s’agirait là d’un désir régressif et
immature.
La relation aux pairs entraîne des réactions parfois agressives chez les
enfants « précoces », attitudes d’ailleurs non présentes chez les autres
enfants. Cette agressivité révèle un sentiment d’insécurité dans la relation et
une peur du rejet. En effet, cette réaction peut être liée à une peur d’être soi-
même agressé ou rejeté, ainsi l’enfant se défendrait par une identification à
l’agresseur, en agressant avant d’être soi-même agressé.
Autour du thème de la personne préférée, les enfants « non précoces »
font majoritairement référence aux parents, alors que les enfants « surdoués »
répondent de manière diverse, avec une préférence pour la fratrie, la relation
amoureuse ou autres. Les enfants du premier groupe montrent un attachement
plus important à la famille, par rapport aux enfants « surdoués ».
Ainsi, les enfants du groupe contrôle semblent plus dépendants à la
famille et donc peut-être moins matures que les « surdoués ». Cependant,
nous pouvons interpréter les réponses des enfants « précoces » comme un
évitement de la dépendance aux parents, ou un malaise dû à des
sentiments oedipiens refoulés. Cela évoquerait également un manque de
maturité dans ce groupe.
Des réponses de type adolescent semblent plus présentes dans le
groupe des enfants « tout venants », montrant le début de cette période
adolescente. Elles sont également exprimées chez deux enfants « surdoués »
mais de façon moins importante. Nous pouvons donc en déduire que ces
enfants sont encore, pour un plus grand nombre que dans l’autre groupe, dans
la période de latence. Cependant, il est important de rappeler que les enfants
du groupe contrôle ont tous entre onze et douze ans, alors que les enfants du
groupe « surdoué » se situent entre neuf ans et demi et douze ans. Il apparaît
donc normal de retrouver des préoccupations adolescentes plus nombreuses
dans le premier groupe.
Un manque de maturité peut donc être perçu dans la perception de la
relation aux autres. Nous pouvons émettre l’hypothèse d’une situation
œdipienne non assumée, et d’un désir d’attention exclusive des parents
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(rivalité fraternelle). De même, des réactions de type immature sont présentes
dans la relation aux pairs. Cependant, toutes ces attitudes peuvent être en lien
avec le ressenti particulier des enfants, dû à leur précocité intellectuelle.
Enfin, soulignons que les réactions des enfants « non surdoués »
n’apparaissent pas, de manière significative, plus matures que celles de notre
échantillon.
Image de soi
L’image de soi se révèle fragile et dévalorisée dans le groupe des
enfants « précoces », contrairement aux autres enfants qui expriment une
image plus positive d’eux-mêmes. Cette dévalorisation de soi traduit une
estime de soi insuffisante et un besoin de valorisation et de gratification.
Cette image fragile que ces enfants ont d’eux-mêmes provoque chez certains
des comportements de soumissions afin de paraître conforme et de
répondre aux attentes extérieures. D’autres enfants semblent réagir par des
comportements opposés. Des attitudes agressives et provocatrices peuvent,
en effet, être un moyen de rechercher l’attention des autres et de se défendre
contre l’angoisse.
Un besoin d’aide et de soutien est mis en évidence par les deux
groupes. Nous avons également remarqué un besoin d’évasion, de repos et
de répit mis en avant par les enfants « surdoués ». Ce besoin peut être lié à un
désir d’autonomie et d’indépendance. Il peut également s’agir d’un besoin
de se ressourcer, ou encore de se réfugier, en se renfermant sur soi.
Un désir de grandir est exprimé de manière dominante par les
enfants « surdoués », ce qui révèle également un désir d’autonomie et
d’indépendance plus important dans ce groupe. Un âge régressif et
l’expression d’angoisse sont évoqués par les autres enfants, montrant ainsi,
un désir d’indépendance moins présent. Notre groupe d’étude semble donc
ici plus mature que les autres enfants.
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c- Conclusion
A travers l’analyse des deux tests, certaines caractéristiques
concernant les enfants « surdoués » se sont révélées et évoquent une certaine
immaturité affective.
Tout d’abord, nous avons remarqué une difficulté à tolérer les
frustrations, notamment face à l’autorité et à l’échec. Nous avons également
évoqué une recherche des limites à travers des comportements provocateurs,
face à l’autorité.
Selon J. Siaud-Facchin232, cette intolérance à la frustration,
caractéristique de ce groupe d’enfants, est liée à un sentiment d’insécurité.
En effet, la distance entre l’envie et la satisfaction provoquerait une
« inquiétante incertitude » et des angoisses. De fait, les enfants réagissent,
d’après l’auteur, par des comportements agressifs et d’oppositions. Ces
attitudes ont d’ailleurs été remarquées de manière récurrente dans notre
échantillon d’étude.
Ainsi, comme le précise l’auteur, ces enfants ont besoin d’un cadre
solide et protecteur afin de contenir leurs angoisses et de les sécuriser.
Cependant cette agressivité n’est pas toujours extériorisée, comme
nous l’avons noté au test PN, et semble culpabilisée et donc réprimée. En
effet, nous avions souligné dans la partie théorique, le besoin de ces enfants
de contrôler leurs émotions et leurs réactions, afin de ne pas se laisser
déborder par leur ressenti.
De même, nous avons remarqué des comportements hyper-adaptés
mis en avant par ces enfants (synthèses individuelles du PN). Cette attitude
est due, selon B. Gibello233, à un manque de confiance en soi et à une image
fragile d’eux-mêmes. De plus, la peur du rejet, de la non-compréhension de
l’entourage et de la perte d’amour des parents, entraînent ce besoin de
paraître conforme, « normal ».
232 Siaud-Facchin, J. (2002).233 Gibello, B. (2003).
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Dans l’analyse de nos tests, une image dévalorisée de soi et une
faible estime de soi sont très présentes. Un sentiment d’incapacité et
d’impuissance sont également soulignés à travers différents thèmes. De
même, nous avons remarqué une difficulté à se positionner en tant que
sujet et à s’affirmer. Enfin, cette dévalorisation de soi s’accompagne d’un
besoin d’aide et d’une dépendance aux autres. Leur construction
identitaire nous semble donc fragile et délicate. B.Gibello souligne
d’ailleurs la difficulté de ces enfants à se construire une représentation stable
et une image positive d’eux-mêmes. En effet, il semble que les situations
difficiles rencontrées par les enfants, leur mode de pensée et leur fragilité
émotionnelle, entraînent une insécurité interne et une construction difficile
de l’identité.
Nous avons également noté une hypersensibilité chez ces enfants à
travers des réactions intenses et inadaptées. D’après J. Siaud-Facchin,
l’enfant « surdoué » est d’une extrême sensibilité émotionnelle et très réactif
à ce qu’il se passe autour de lui. Cette hypersensibilité se traduit par un
envahissement affectif qui suscite chez l’enfant une peur d’être débordé par
ces émotions.
Des comportements excessifs de type dépressif ont aussi été relevés
chez ces enfants face à l’échec et traduisent des affects intenses et
débordants. Selon B. Gibello l’échec scolaire entraîne une blessure
narcissique et une souffrance chez l’enfant et peut effectivement déclencher
des réactions dépressives.
Un manque de maturité chez ces enfants semble ainsi révélé à
travers ces différents traits et comportements : intolérance à la frustration,
difficulté à supporter l’échec et le rejet, sentiment d’impuissance, estime de
soi insuffisante, hypersensibilité et enfin dépendance aux autres.
L’affirmation de soi et la prise d’autonomie apparaissent ainsi difficiles et
peuvent être interprétées comme les signes d’une immaturité affective.
Cependant nous avons aussi relevé des réactions de types infantiles et
immatures chez les enfants du groupe contrôle (réactions de pleurs ou
nerveuses, peurs infantiles, anxiété par rapport à l’avenir, dépendance aux
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parents). Nous avons également souligné la présence chez les enfants
« surdoués » d’attitudes plus matures, comme la conscience des causes
d’échec, une vision positive de l’avenir et un désir de grandir.
Nous pouvons donc nous demander si ces attitudes et ressentis
particuliers des enfants « surdoués » sont réellement l’expression d’une
immaturité affective. En effet, d’après nos analyses et interprétations, il nous
apparaît que ces comportements soient davantage liés à une insécurité
interne et à une hyper sensibilité qu’à des désirs régressifs, à une difficulté
à grandir et à se détacher de la famille. De ce fait, une image de soi
dévalorisée et une estime de soi fragile peuvent entraîner les réactions
immatures que nous avons relevées précédemment. Peut-on alors réellement
parler d’immaturité affective quant à une estime de soi dévalorisée et à une
hypersensibilité ?
Il nous semble que nos diverses remarques confirment plus des
spécificités dans le développement de ces enfants, un mal-être intérieur et
une insécurité, qu’une réelle immaturité. Ainsi, l’hypothèse d’un manque de
maturité par rapport aux autres enfants est à relativiser et ces attitudes
semblent plus liées à des caractéristiques particulières dues à la « précocité
intellectuelle » de ces enfants. L’hypothèse d’un développement affectif
particulier chez ces enfants nous apparaît donc plus probable.
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2. Deuxième hypothèse : le développement
affectif des enfants « surdoués » est différent
des autres enfants
a- Un Surmoi écrasant
Au niveau de la formation du surmoi, nous avons remarqué chez ces
enfants, dans le test Patte Noire, la présence récurrente et importante d’une
culpabilité, freinant l’expression de leurs tendances.
En effet, les identifications au blanc innocent et la difficulté des sujets
à assumer le rôle de PN révèlent la culpabilité et l’angoisse ressenties par ces
enfants, face à leur pulsions. Nous avons également noté la position d’un PN
victime décrit par certains sujets.
Le sentiment de culpabilité est présent de manière récurrente pour
chaque thème abordé par le test du PN : images orales, agressives, punitives
et œdipiennes. Les images punitives sont d’ailleurs les moins aimées et
provoquent un malaise chez ces sujets, entraînant le plus grand nombre
d’identifications d’esquives (notamment à personne).
L’agressivité est également très rarement exprimée et assumée. Nous
avons également souligné une forte culpabilité liée aux pulsions agressives
envers les parents et la fratrie.
Le Surmoi apparaît donc imposant dans notre groupe d’enfant,
écrasant souvent un Moi faible et réprimant l’expression des désirs et des
besoins des enfants. De ce fait, il entraîne la mise en place de
comportements hyperadaptés, soumis et conformes aux attentes
parentales. Cette culpabilité semble ainsi freiner la construction identitaire
des enfants, qui se positionnent difficilement en tant que sujet avec leurs
propres besoins.
Dans le test Phrases à compléter, le thème de la culpabilité est abordé
par certaines phrases, et révèle des réactions différentes entre les deux
groupes. En effet, la culpabilité apparaît de manière beaucoup plus intense
dans le groupe des enfants « précoces » que dans le groupe contrôle. Ce fort
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sentiment de culpabilité n’est pas relié à une cause spécifique et se révèle
diffus et envahissant.
De plus, des réponses en référence à un sentiment de culpabilité sont
plus importantes chez les « surdoués » concernant les thèmes de souffrance et
de tourment. Cette forte culpabilité confirme donc la présence d’un Surmoi
plus développé chez les enfants « surdoués » que chez les autres .
Selon J.Y. Chagnon234, certains enfants « surdoués » souffrent en effet
d’une « forte pression des instances morales et idéales ». Pour l’auteur, les
pressions extérieures, notamment parentales, jouent là un rôle important,
entraînant une angoisse de l’échec. De plus, ces enfants n’évalueraient pas
leur capacités à leur juste valeur, se dévalorisant.
b- Une construction difficile desidentifications parentales
Nous avons remarqué dans le test Patte Noire (dans le tableau
récapitulatif sur les diverses identifications effectuées par les enfants) que le
nombre d’identifications aux parents et aux puissants était inférieur à la
norme proposée par L. Corman. De même, à l’étude de l’image Hésitation,
nous avons noté la difficulté des enfants à choisir un modèle identificatoire.
Ces remarques peuvent appuyer notre hypothèse concernant une
construction difficile des identifications aux parents. Cependant ces résultats
sont à nuancer, pouvant être liés à d’autres problématiques (difficulté à
supporter la frustration ou l’ambivalence, problématique œdipienne,
difficulté à se positionner, ou encore histoire familiale particulière).
Cette sous-hypothèse apparaît donc difficile à étudier et à confirmer à
travers le test Patte Noire.
Dans le test Phrases à compléter, les images parentales sont plus
dévalorisées ou agressées par les enfants « surdoués », alors qu’elles
apparaissent plus valorisées dans le groupe contrôle. De même, la personne
234 Chagnon, J.Y. (2003).
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préférée est moins souvent les parents chez les enfants « surdoués » que chez
les autres.
Cette dévalorisation peut être liée, comme nous l’avons déjà évoqué,
à plusieurs hypothèses : provocation et opposition adolescente, sentiments
œdipiens refoulés, perception désidéalisée des parents.
L’hypothèse d’une désidéalisation précoce des images parentales
pourrait justifier la dévalorisation des parents. En effet, comme le précise J.
Siaud-Facchin235, de part leur compréhension et analyse fine de
l’environnement, ces enfants perçoivent précocement « les limites et failles
des adultes ». Ainsi, les parents, n’apparaissant plus tout puissants et
suffisamment protecteurs pour les enfants, ne peuvent servir de modèles pour
grandir. Selon l’auteur, il s’agit là d’une problématique adolescente à laquelle
l’enfant doit faire face. Les parents sont ainsi remis en question et
représentent des repères identificatoires fragiles et insuffisants auquel
l’enfant s’identifie difficilement.
Cette situation est complexe et source d’angoisse pour l’enfant qui
doit trouver en lui-même « les ressources nécessaires pour grandir ». La
construction de son identité se révèle ainsi difficile.
Cette hypothèse semble donc renforcée par les caractéristiques
relevées, à travers nos tests, mais une étude plus approfondie avec davantage
d’éléments serait nécessaire.
c- Une situation oedipienne complexe
A travers l’analyse du test Patte Noire, nous pouvons voir que la
situation œdipienne semble souvent source d’angoisse et de culpabilité dans
le groupe d’enfants « surdoués ».
D’après nos hypothèses interprétatives élaborées dans les synthèses
individuelles, nous avons remarqué que cette période œdipienne semblait peu
assumée et peu dépassée par notre groupe d’enfants.
Dans notre approche quantitative, le pourcentage d’images aimées
œdipiennes se situent en dessous de la norme de L. Corman. De plus, l’attrait235 Siaud-Facchin, J. (2004).
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non assumé pour les images Tétées peut évoquer un rapprochement avec la
mère source de malaise, en lien avec des sentiments œdipiens culpabilisés
et refoulés. Enfin, dans l’étude de l’image Hésitation, nous avons relevé des
identifications aux blancs pouvant également être en lien avec un désir de
rapprochement intime au parent œdipien.
Dans notre partie théorique, nous avions exposé le point de vue de V.
Dufour236, qui met en avant l’hypothèse d’une image paternelle œdipienne
défaillante. Selon l’auteur, plus particulièrement pour les enfants
« surdoués » en difficulté, le père ne détiendrait pas le phallus et n’aurait
donc pas la place du père « puissant et castrateur ». Face à cette défaillance
de la fonction paternelle, l’enfant ne pourrait pas entrer en rivalité avec le
père œdipien, ni s’identifier lui. La situation œdipienne serait ainsi
difficilement dépassable.
Dans nos protocoles du test Patte Noire, nous avons remarqué chez
plusieurs enfants la présence limitée du père, parfois non décrit dans un rôle
d’autorité et de loi. De même, un nombre assez faible d’identifications au
père a été noté. Cependant, face à ces éléments très limités, il nous semble
difficile de confirmer l’hypothèse de l’auteur. De plus, les histoires
personnelles et familiales particulières de chaque enfant sont à prendre en
compte, et certaines situations spécifiques peuvent influencer sur le vécu de
la situation œdipienne ou sur la perception des parents.
Les différences interindividuelles sont également à prendre en
considération : certains enfants sont proches de l’entrée dans l’adolescence
qui ravive souvent la problématique œdipienne; d’autres expriment un désir
de régression envers la mère qui peut être lié à une revendication affective ou
à une intolérance à la frustration.
Il apparaît donc difficile de conclure de manière générale à une
situation œdipienne non résolue ou complexe pour ces enfants. Nous
relevons cependant la culpabilité sous tendant ce thème, qui traduit un
certain malaise des enfants.
236 Dufour, V. (2004).
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d- Une prise d’autonomie conflictuelle
Nous avons remarqué chez la majorité des enfants, à travers le test
Patte Noire, une difficulté à se détacher de la cellule familiale et à prendre
leur indépendance. L’autonomie (image Départ) apparaît souvent source de
culpabilité et d’angoisses d’abandon (peur de perdre l’amour des parents).
Cette tendance à la dépendance semble renforcée par un manque de
confiance en soi et une image de soi souvent dévalorisée. Aux vœux
effectués à l’image Fée, nous avons relevé un nombre important de demandes
affectives (demande d’attention, de valorisation), qui souligne la
dépendance de notre groupe d’enfant à leur famille. Une image de soi fragile
et incertaine (représentation de PN et thème de la fée) révèle également la
difficulté de ces enfants à prendre leur autonomie. De même, l’âge souvent
régressif donné au héros par les enfants confirme leur difficulté à sortir de
l’enfance.
Enfin, à plusieurs reprises, nous avons observé un conflit entre un
désir de grandir et un désir de régression.
Dans les Phrases à Compléter, une dépendance aux autres et un
besoin d’aide sont exprimés de manière importante dans les deux groupes.
Cependant le sentiment d’incapacité des enfants « surdoués » évoque une
dépendance plus forte aux autres.
De plus, la prise d’autonomie et l’affirmation de soi apparaissent plus
difficiles dans notre groupe d’étude que dans le groupe contrôle. En effet,
chez les enfants « non surdoués », ces attitudes d’indépendance et
d’affirmation, bien qu’elles ne soient pas dominantes, sont plus présentes,
notamment face aux situations stressantes. L’autonomie semble donc plus
délicate dans le groupe d’enfants « précoce », et apparaît liée à une image
incertaine et dévalorisée de soi.
Néanmoins, un désir de grandir se révèle plus dominant dans ce
groupe d’étude en comparaison au groupe contrôle. En effet, un âge d’or
supérieur à l’âge de 18 ans est exprimé par ces enfants, alors qu’un âge plus
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régressif et une angoisse de mort sont évoqués par les enfants « non
surdoués ». Ce désir apparaît donc en contradiction avec la difficulté à
s’autonomiser et traduit, chez les enfants « surdoués », un conflit entre un
désir de grandir et une difficulté à prendre son indépendance.
Dans le groupe contrôle, au contraire, le désir de grandir et d’être
indépendant est moins exprimé. La dépendance aux parents semble donc
davantage présente et assumée. Toutefois, des attitudes d’autonomie et
d’affirmation de soi sont possibles dans ce groupe.
Cependant, le jeune âge de la plupart de nos sujets
« intellectuellement précoces » (9-11 ans) explique l’attachement encore
important de ces enfants à leur famille. Le conflit dépendance-indépendance
est caractéristique de cet âge, où il est parfois difficile de se positionner entre
la sortie de l’enfance et l’arrivée de l’adolescence. Selon P. Galimard237, entre
six et onze ans, l’enfant traverse une crise intérieure entre « les forces
d’affirmation de soi et les forces de régression ».
Nous pouvons tout de même souligner la difficulté à assumer leurs
tendances et à s’affirmer, le besoin de paraître conforme aux idéaux
parentaux et d’être valorisé. Ainsi, une estime de soi souvent dévalorisée et
un Moi fragile peuvent aisément freiner la prise d’indépendance.
Nous pouvons donc conclure qu’un désir d’indépendance est présent
mais semble inhibé par une insécurité interne et une estime de soi fragile.
La prise d’autonomie apparaît donc plus conflictuelle pour ce groupe que
pour les autres enfants.
Certaines de nos sous-hypothèses peuvent donc être vérifiées : le
Surmoi apparaît très présent voir écrasant pour certains enfants, la situation
œdipienne semble souvent source de culpabilité, la prise d’indépendance est
clairement conflictuelle et difficile. Les hypothèses concernant la
construction délicate des identifications parentales et la situation œdipienne
sont difficilement confirmées, nécessitant plus d’indices et d’éléments.
A la vue de tous ces éléments, nous pouvons néanmoins affirmer que
le développement affectif de notre échantillon d’enfants « intellectuellement
237 Galimard, P. (1962).
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précoce » est particulier et semble différent du développement dit
« normal ».
Pour conclure, nous avons relevé, au fil de l’analyse du test Phrases à
Compléter, des différences significatives dans les réactions des deux groupes
face à des situations stressantes.
Ainsi, nous avons noté des réactions infantiles ou passives
dominantes chez les enfants « non surdoués » et des réactions nerveuses
(colère et opposition), passives et parfois dépressives plus importantes chez
les enfants « précoces ». En effet, les enfants du groupe contrôle répondent de
manière infantile, en régressant (pleurs), face aux situations difficiles. Il
s’agit de réactions immatures, de défenses face aux angoisses suscitées par la
situation. Notons cependant que ces enfants semblent plus capables de mettre
en place des attitudes positives d’autonomie ou d’affirmation de soi.
Dans le groupe d’enfants « surdoués », nous avons relevé des
réactions intenses qui révèlent une hyper sensibilité. Ces attitudes évoquent
un débordement des affects, une importante angoisse et un sentiment
d’incapacité face aux situations stressantes. Cet envahissement par les
émotions empêche la prise de distance et la résolution d’un problème. Il
s’agit de comportements immatures mais qui apparaissent extrêmes en
comparaison à l’autre groupe. Un fort sentiment d’insécurité interne et une
estime de soi fragile semblent à l’origine de ces comportements inadaptés.
Il s’agit là d’une différence importante à relever entre les deux
groupes. Les enfants répondent pour la majorité de manière inefficace et
immature, en situation de stress mais l’intensité des affects des enfants
« surdoués » montre un développement affectif plus fragile et donc différent.
Cette différence se situe au niveau de la représentation plus dévalorisée que
ces enfants ont d’eux-mêmes et de l’hypersensibilité qui semblent entraîner
une construction fragile de l’identité. Ainsi, la tolérance au stress, à l’échec,
au rejet apparaît plus faible chez les « surdoués », en raison d’une insécurité
intérieure.
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3. Troisième hypothèse : les enfants
« surdoués » sont plus anxieux que les autres
enfants.
Concernant cette dernière hypothèse, dans l’analyse du test Phrases à
Compléter, il nous apparaît que l’anxiété est très présente dans nos deux
groupes mais se révèle de nature différente.
Dans les motifs de peurs, nous relevons plus de craintes de type
infantile chez les enfants du groupe contrôle, alors que dans le groupe des
« surdoués », les peurs se réfèrent davantage à l’école ou aux relations.
Rappelons d’ailleurs les comportements agressifs et rejetant notés, chez
certains enfants de ce groupe, qui traduisent une insécurité et une anxiété
quant aux relations sociales.
Concernant les causes de tourment et d’inquiétude, l’anxiété
exprimée par les enfants « tout venants » est liée à la peur de l’échec, du rejet
des pairs, ou à des évènements plus quotidiens et banals. De même, les
causes de souffrance sont principalement en lien avec l’échec scolaire, les
conflits avec les pairs ou avec la solitude.
Dans le groupe des enfants « précoces », nous remarquons également
des inquiétudes liées à l’avenir et à la réussite mais une angoisse plus
diffuse est exprimée. Une souffrance plus personnelle et profonde, ainsi
qu’un sentiment de culpabilité sont mis en avant.
L’anxiété exprimée par le groupe d’enfants « précoces » semble donc
moins liée à des préoccupations adolescentes ou de la vie quotidienne,
comme pour les enfants du groupe contrôle. Cette anxiété, dont les causes
apparaissent plus floues, touche davantage l’identité des enfants et la
représentation qu’ils ont d’eux-mêmes. Il s’agit d’angoisses liées à une
insécurité interne, à une fragilité et à un sentiment de culpabilité.
Une différence est également présente quant à la vision de l’avenir.
Alors que les autres enfants mettent en avant une anxiété par rapport au futur
et un besoin de réussite, l’avenir est perçu de façon plus optimiste par les
enfants « surdoués ».
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Cependant, cette confiance dans l’avenir est en contraste avec la
vision négative qu’ils se font du présent. En effet, les « surdoués »
expriment une souffrance et une insécurité actuelle, à travers une vision
pessimiste de leur vie. Selon J. Siaud-Facchin (2002) une « hypervigilance
émotionnelle » caractérise ces enfants. De part leur lucidité et leur
compréhension approfondie de l’environnement, tout événement les touche
et ils ressentent une tension interne importante.
Des préoccupations que nous pouvons qualifier de « normales »
(anxiété par rapport à l’avenir et à la réussite scolaire) sont donc mises en
avant par le groupe contrôle alors que des angoisses plus diffuses, en lien
avec la construction fragile de l’identité et une culpabilité importante,
sont évoquées par les enfants « surdoués ».
Ainsi, la présence d’anxiété est apparente dans les deux groupes.
Cependant un ressenti plus douloureux de soi-même est exprimé par les
enfants de notre échantillon d’étude.
Nous pouvons donc conclure que l’anxiété des enfants « surdoués »
est différente de celle des autres enfants, et apparaît plus importante. En effet,
elle se manifeste par une angoisse diffuse et un sentiment de culpabilité.
Cette anxiété semble liée à l’identité des enfants, à une vision dévalorisée
d’eux-mêmes et à une insécurité interne. Ainsi, comme le précise G.Prat
(1979), ces enfants présenteraient une faculté particulière à produire de
l’angoisse.
Notre dernière hypothèse semble donc vérifiée : les enfants
« surdoués » sont plus anxieux, et ont une image d’eux-mêmes et une vision
de la vie plus douloureuses. Il nous semble également que ces enfants
expriment peu leurs craintes et leurs angoisses. En effet, cette anxiété a très
peu été exprimée de manière directe par les enfants (dans les entretiens).
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B) LIMITES ET INTERETS DE LA RECHERCHE
Certaines hypothèses sont donc confirmées par nos analyses et nos
interprétations. Cependant, une réflexion sur les biais rencontrés et les limites
de notre travail s’avère indispensable et relativise nos conclusions.
1. Les biais concernant le test Patte Noire
Tout d’abord, des questions déontologiques s’imposent quant à la
validité des passations et de nos interprétations de ce test projectif proposé
aux enfants.
En effet, dans notre étude, les passations du test Patte Noire se sont
déroulées au sein de l’établissement, soit dans le bureau de la psychologue,
quand celle-ci était absente, soit dans une grande salle de réunion. Dans cette
salle, nous avons été interrompus, à deux reprises, des conseils de classe
devant y avoir lieu. De plus, il est arrivé que des professeurs y entrent sans
frapper. Notons également le temps limité dont nous disposions (cinquante
minutes en moyenne, entre deux heures de cours), qui nous a obligé à
effectuer une passation de Patte Noire en deux temps et à raccourcir deux
autres.
Ces conditions, le manque d’un lieu défini et confidentiel, ainsi que
les interruptions, posent ainsi un problème déontologique quant à la
neutralité du lieu et à la disponibilité de l’enfant. Ce sont des biais importants
à prendre en compte, qui nous amènent à considérer avec prudence nos
interprétations.
Il est également important de souligner le nombre restreint de notre
groupe d’enfants. En effet, notre échantillon, n’étant composé que de neuf
enfants, s’avère peu représentatif de la population générale d’enfants dits
« surdoués ».
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De plus, au sein de ce groupe, l’âge des enfants varie entre neuf et
douze ans. Ces différences d’âge peuvent donc justifier des comportements et
des ressentis plus ou moins matures selon les enfants.
Enfin, nos conclusions sont à relativiser du fait que, par manque de
temps, nous n’avons pas pu comparer nos protocoles du test Patte Noire à un
groupe contrôle d’enfants « non surdoués » du même âge. Nous avons malgré
tout utilisé les normes de L. Corman et mis en lien nos résultats avec certains
concepts du développement de l’enfant. Toutefois, ces éléments ne nous
semblent pas suffisants afin de confirmer de manière valide nos hypothèses.
2. Les limites du test Phrases à Compléter
L’utilisation de ce test Phrases à compléter nous est apparu
intéressante de part la simplicité et la rapidité de la méthode de passation en
groupe. Cependant l’interprétation de ce test a été compliquée et une
réflexion, quant à la validité des réponses et de nos analyses, s’impose.
Tout d’abord il n’existe pas de méthode spécifique d’interprétation,
liée à une théorie de référence. Selon D. Bonnet « Chacun peut interpréter
les réponses en fonction de son orientation doctrinale personnelle. Ce qui
compte essentiellement c’est l’expérience psychologique du correcteur »238.
Notre expérience limitée nous amène donc à relativiser nos interprétations.
Concernant les réponses des enfants, nous nous questionnons sur la
validité de ce test. L’auteur nous dit que certains sujets, « bien équilibrés et
intelligents », peuvent biaiser l’épreuve en donnant des réponses expéditives
ou humoristiques, afin de ne pas laisser apparaître leurs sentiments. De
même, des sujets « troublés » peuvent répondre par des banalités afin
d’éviter ou de masquer un malaise face à certaines phrases.
Toutefois, selon D. Bonnet, ces biais sont diminués si les réponses
des sujets sont rapportées aux types de réponses fournies par le groupe238 Bonnet, D. (1954).
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auquel il appartient. Cependant, des questions quant à la sincérité des
réponses restent en suspens. En effet, certaines réponses utilisant un
vocabulaire intense peuvent être interprétées comme une provocation de la
part de certains sujets, ou bien être l’expression d’une réelle souffrance. De
plus, comment savoir si l’enfant parle de lui, en son nom, ou d’une autre
personne ? De même, comment être sûr que le sujet n’a pas tenté de donner
une image autre de lui-même ?
Il semble important, afin d’évaluer la sincérité des réponses, de
prendre en considération l’histoire du sujet. Mais cette démarche n’a pas été
possible pour le groupe contrôle et par manque de temps aucun entretien n’a
été effectué. Cependant, les réponses nous intéressant plus particulièrement
sont celles des enfants « surdoués ». Pour ce groupe, une analyse plus
complète (entretien et Patte Noire) a eu lieu, nous permettant de mieux
comprendre les comportements de ces enfants.
Ce test est dit projectif mais fait appel à des réponses plus conscientes
que les autres techniques projectives. Ainsi ce test met en avant des aspects
de la personnalité d’un sujet plus que ces tendances profondes. Il est donc
utilisé le plus souvent en complément d’autres tests, non isolément. De ce
fait, une fois encore, une analyse plus profonde des sujets du groupe contrôle
aurait été plus intéressante, notamment une passation du test Patte Noire,
comme pour les enfants « précoces ».
Il est également important de noter la « puissance inductrice » de
certaines phrases qui peuvent induire un certain type de réponses par un
« mécanisme intellectuel » ou par simple « automatisme »239, perdant ainsi
leur valeur projective. De plus, d’autres types de stimulis sont trop vastes ou
« équivoques » dans leur tournure, rendant l’interprétation difficile.
Dans nos analyses nous nous sommes inspirés de la méthode de D.
Bonnet, qui prend en compte les remarques précédentes en rapprochant les
items comparables selon : l’idée induite par le début de phrase, la forme
grammaticale et le contenu des réponses correspondantes. Cependant, la
diversité des réponses données par les enfants a rendu difficile le
239 Bonnet, D. (1954).
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regroupement par type de réponse pour certains thèmes. Ainsi, la
comparaison de ces réponses était parfois complexe.
La validité de nos tests est également à relativiser en raison du lieu où
les passations ont été effectuées. En effet, les passations en classe, entre deux
heures de cours ne nous semblent pas être des circonstances idéales et
suffisamment neutres, en particulier pour des jeunes élèves de 6ème.
Il est aussi important de souligner les différences entre les sujets des
deux groupes. Le groupe contrôle était composé de douze enfants, entre 11 et
12 ans, dont trois filles et neuf garçons ; le groupe d’enfants « surdoués »
était constitué de neuf enfants, âgés de neufs ans et demi à douze ans, dont
deux filles et sept garçons. Les différences d’âge peuvent influencer le type
de réponse donné par les enfants, justifiant ainsi le manque de maturité de
certaines réponses et les différences intergroupe relevées.
Notons enfin, le nombre limité de nos sujets dans chaque groupe qui
nous amène à relativiser l’analyse quantitative effectuée. Une passation
auprès d’un plus grand échantillon nous semblerait plus pertinente.
Pour conclure, nous pensons qu’une passation d’un test plus projectif,
pour les deux groupes, aurait peut-être permis de mettre en évidence des
différences plus significatives et plus valides. Ce test des Phrases à compléter
nous éclaire sur quelques éléments de réflexion, mais une analyse plus
approfondie semble nécessaire afin de confirmer les hypothèses avancées.
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3. Réflexion sur nos groupes d’enfants étudiés
Nous avons souligné les différences d’âge entre les enfants, au sein du
groupe « surdoué », puis entre les deux groupes. Ainsi, certains se situent
encore dans la période de latence alors que d’autres entrent dans la période
adolescente. Ce décalage entre les étapes de développement des enfants
empêche tout d’abord une comparaison valide.
De plus, ces périodes de l’enfance comportent des caractéristiques qui
peuvent rendre difficile l’analyse de l’affectivité de ces enfants. En effet, D.
Winnicott et B. Bornstein240 insistent sur l’importance du refoulement durant
la période de latence. Les auteurs soulignent ainsi la difficulté, notamment en
psychanalyse d’enfants, d’accès à leurs représentations inconscientes. De ce
fait, la force du refoulement a pu, chez quelques enfants, nous empêcher de
percevoir certaines tendances.
De même, durant la puberté, une crise narcissique et identificatoire se
révèle, faisant partie du développement « normal » de l’enfant. Ces
difficultés particulières à l’adolescent ont pu influencer et biaiser certaines de
nos interprétations.
Ainsi ces caractéristiques, propres aux étapes de l’enfance, peuvent
influer sur les comportements observés chez les enfants, et donc sur nos
interprétations et nos conclusions.
Une autre réflexion nous est apparue au fil de notre travail de
recherche : dans notre groupe d’enfants « surdoués », tous les enfants sont-ils
réellement « intellectuellement précoces »? En effet, les écarts entre les Q.I.
verbal et performance sont parfois importants. De plus, pour M. Duyme
(2003), comme nous l’avons développé dans notre partie théorique, il semble
que le milieu social soit à prendre en compte. Nous retrouvons ici la
difficulté à délimiter et à définir ce thème du « surdon ».
Cette différence entre les Q.I. verbal et performance nous évoque
également l’hypothèse d’un surinvestissement cognitif plutôt qu’une réelle
précocité. Dans cette optique il pourrait donc s’agir d’une défense rigide
240 Bornstein, B., citée par Winnicott, D. (1970).
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contre des angoisses envahissantes241. Mais comment mettre en évidence une
utilisation défensive de l’intellectualisation ?
Il apparaît ainsi complexe de distinguer l’enfant à « haut potentiel »
issu d’une famille peu favorisée, de celui qui dispose d’un environnement
stimulant et cultivé. De même, il semble difficile de différencier l’enfant qui
prend du plaisir à stimuler son fonctionnement mental de celui qui travaille
intensément sous la contrainte de pression interne et d’angoisses.
Ainsi, les auteurs comme J.Siaud-Facchin ou V. Dufour (2004)
insistent sur l’importance d’un bilan psychologique approfondi afin de
confirmer le diagnostic de « surdon ».
Concernant notre groupe d’enfants, ces questions restent en suspens
puisqu’il nous manque des éléments diagnostiques et familiaux sur les
enfants. Notons néanmoins que ces sujets répondent aux principaux critères
de « précocité intellectuelle », à savoir un Q.I. supérieur à 130 et des
spécificités dans le développement (apprentissage de la lecture précoce,
ennui à l’école et saut de classe, quête de connaissances, questions
métaphysiques, difficultés diverses...).
Pour conclure, il est de notre responsabilité et de notre déontologie de
prendre en compte tous les biais existant, et de ne pas tirer de « conclusions
réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité d’un
individu »242. De ce fait, la confirmation de nos hypothèses est à nuancer.
Enfin, une étude plus approfondie sur un échantillon homogène plus
grand, en comparaison à un groupe contrôle permettrait d’établir des
conclusions plus valides concernant l’affectivité de l’enfant
« intellectuellement précoce ».
241 Nous avons exposé dans la partie théorique la définition du surdon défensif selon J. SiaudFacchin (2004), et M. Emmanuelli (2003).242 Article 19 du Code de déontologie des psychologues
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4. Intérêts et apports de notre recherche
Malgré les nombreux biais rencontrés, notre travail de recherche
présente des intérêts à différents niveaux.
Tout d’abord, nos conclusions vérifient ce qui a été développé par
certains auteurs et, d’autre part, proposent un autre point de vue concernant le
développement de ces enfants.
En effet, notre étude a permis de confirmer et de souligner des traits
caractéristiques des enfants « surdoués », déjà évoqués par les spécialistes :
une hypersensibilité, une difficulté à supporter les frustrations et le rejet, une
estime de soi fragile ou encore une tendance à l’hyper adaptation.
Nous avons également mis en évidence des éléments peu ou pas
présents dans la littérature étudiée. Ainsi, nous avons remarqué la difficulté
de ces enfants à s’affirmer en tant que sujet et à prendre leur autonomie.
Nous avons aussi noté les besoins de valorisation, de soutien et de
réassurance qui traduisent un sentiment d’incapacité et une image de soi
dévalorisée. La culpabilité s’est révélée très présente empêchant souvent
l’expression des tendances des enfants. Enfin, nous avons souligné un Moi
fragile, un Surmoi prégnant et une insécurité intérieure.
L’apport de notre travail est donc de mettre en évidence la spécificité
du développement affectif de ces enfants « intellectuellement précoces »,
plutôt qu’un « retard » ou une immaturité affective. Nos conclusions
confirment ainsi la nécessité d’un encadrement spécifique pour permettre à
ces enfants de s’épanouir.
Notre objectif était également d’éclaircir ce thème, entouré de
confusions et d’idées reçues. Nous avons donc tenté d’apporter des éléments
de réflexion et de démentir les préjugés, en proposant une image plus
représentative des enfants « surdoués ».
Enfin, ces différents résultats pourront servir de base de données, ou
d’introduction à d’éventuelles recherches futures. Il serait en effet intéressant
de vérifier et d’approfondir ces conclusions, à travers une étude réduisant le
plus possible les différents biais existants.
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CONCLUSION GENERALE
A travers notre mémoire, nous avons eu pour ambition d’étudier
l’affectivité de l’enfant « surdoué » afin de mieux comprendre son vécu, son
ressenti et ses spécificités. Notre hypothèse principale était qu’il existe un
décalage entre les capacités cognitives de l’enfant « surdoué » et son
développement affectif. Autour de ce thème, trois hypothèses ont donc été
construites, puis étudiées au fil de notre travail.
Afin de vérifier ces hypothèses, nous avons également mis en avant
des critères définissant l’enfant « mature ». Ainsi, nous avons considéré que
la prise d’indépendance, l’affirmation de soi, l’intégration dans un groupe et
un Moi solide avec des défenses efficaces, caractérisaient l’équilibre et la
maturité affective.
Au fil de l’analyse des tests utilisés dans notre recherche, nous avons
remarqué la difficulté pour ces sujets à s’affirmer et à se positionner en
tant qu’individu. En effet, ces enfants assument difficilement leurs tendances
et apparaissent souvent hyperadaptés, soumis aux attentes des autres. De
plus, nous avons souligné la présence importante d’un sentiment
d’impuissance et d’incapacité, traduisant une méconnaissance de soi et une
auto-dévalorisation. Des besoins de valorisation et de réassurance, montrant
une dépendance aux autres, se sont révélés prégnants chez ces enfants. Nous
avons également relevé une difficulté à supporter l’échec et la frustration,
ainsi qu’une hypersensibilité. Enfin, la culpabilité nous a semblé très
présente, indiquant un Surmoi puissant chez la plupart de nos sujets. Nous
avons également souligné une image de soi fragile et dévalorisée traduisant
un Moi faible et peu mature.
Ces différents éléments mettent ainsi en avant une insécurité interne
et une estime de soi fragile. De fait, la prise d’autonomie et l’affirmation
de soi apparaissent plus difficiles chez ces enfants.
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Bien que la prudence et la nuance soient de rigueur en raison des biais
rencontrés, notre hypothèse principale est ici confirmée : il existe un
décalage entre le domaine cognitif et celui de l'affectif.
Cependant, comme nous l’avons exposé dans notre discussion, il nous
semble difficile d’affirmer la présence d’une immaturité affective chez ces
enfants. De plus, dans notre comparaison avec un groupe contrôle, notre
groupe d’enfant « surdoué » ne nous est pas apparu, de manière significative,
plus immature que les autres enfants.
C’est pourquoi notre hypothèse concernant un développement
affectif différent, avec des caractéristiques particulières, se révèle plus
adaptée mais aussi mieux justifiée par nos résultats. En effet, la difficile prise
d’autonomie nous semble liée au fait que ces enfants, de par leur « surdon »,
ont une estime de soi insuffisante, une hypersensibilité ainsi qu’un Surmoi
écrasant parfois un Moi faible. De même, nous avons souligné l’insécurité
interne ressentie par ces enfants, qui fragilise leur construction identitaire et
donc l’affirmation d’eux-mêmes. Une souffrance est également parfois
exprimée, en lien avec cette « précocité » et avec un fort sentiment de
différence et de rejet. Enfin, nous avons aussi remarqué des réactions
différentes selon les groupes d’enfants, face aux situations difficiles.
Notre troisième hypothèse a également été vérifiée par nos résultats.
En effet, une anxiété plus diffuse s’est révélée dans notre groupe d’enfants
« surdoués » en comparaison au groupe contrôle. Les principales raisons de
cette anxiété sont un fort sentiment de culpabilité et une insécurité
intérieure. Ainsi, ces sujets semblent avoir une vision d’eux-mêmes et une
perception de la vie plus douloureuses.
A la lumière de notre travail, le développement affectif de ces enfants
semble donc plus proche de leur âge réel que de leur âge mental. Ce
développement comporte des traits particuliers, dus à cette « précocité », qui
rendent la construction identitaire plus complexe que pour les autres enfants.
Non seulement les enfants « surdoués » présentent un développement cognitif
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différent, plutôt que supérieur243, mais leur développement affectif est aussi
particulier.
Ainsi, l’enfant « intellectuellement précoce » a des besoins
spécifiques qu’il est important de prendre en compte afin de lui permettre de
s’épanouir. La nécessité de mettre en place des conditions particulières,
notamment au niveau de la scolarité, nous apparaît donc confirmée. L’enfant
« surdoué » a besoin de stimulations sur le plan intellectuel et de soutien,
ainsi que d’un cadre sécurisant, sur le plan affectif.
Toutefois, il nous semble nécessaire de rappeler le poids des
différences inter individuelles et la difficulté à généraliser. En effet, chaque
enfant, « surdoué » ou non, est différent, avec sa personnalité singulière, son
vécu personnel, son histoire familiale et scolaire, et son propre ressenti.
Ainsi, son développement et son épanouissement sont fonctions de ces
différents facteurs. Dans notre étude, nous avons perçu les différences de
personnalité et de ressenti entre les enfants. De ce fait, il nous semble délicat
de conclure de manière générale sur ces enfants et leur affectivité. En effet,
certains sont en difficulté, en souffrance, alors que d’autres apparaissent plus
équilibrés, gérant leurs difficultés. A ce propos, il nous semble d’ailleurs que
l’ambiance et le soutien familial aient un rôle primordial, en donnant les
armes nécessaires à l’enfant pour affronter la vie.
Ainsi, une approche individualisée apparaît plus pertinente pour
appréhender le vécu et le ressenti de l’enfant « surdoué ». La démarche du
psychologue est d’ailleurs de s’intéresser à la singularité d’un individu avec
son histoire particulière. De plus, selon C. Weissmann-Arcache244, « l’enfant
surdoué n’existe pas », mais on peut « rencontrer des enfants surdoués ».
Néanmoins, dans le cadre d’une recherche, nous pensons que
certaines caractéristiques concernant le développement affectif de ces enfants
peuvent être mis en avant. Ainsi, nous avons pu retrouver certaines
particularités exposées dans notre partie théorique (hyper sensibilité, estime
243 Dans notre partie théorique (I, B), 3), nous avons exposé le point de vue de différentsauteurs (B. Gibello, M. Duyme, J. Siaud-Facchin) concernant le fonctionnement cognitifatypique de ces enfants.244 Weissmann-Arcache, C. (2003).
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de soi faible…). Nous avons également pu souligner des éléments peu
évoqués par les auteurs, notamment l’importance d’un sentiment culpabilité
et la rigueur du Surmoi, la difficulté à assumer leurs tendances (besoins et
désirs) et à s’affirmer en tant qu’individu.
Certaines de nos hypothèses ont difficilement été étudiées, et c’est là
notre regret. En effet, l’étude de la situation œdipienne et celle des
représentations parentales nous intéressaient particulièrement mais se sont
avérées difficiles à mettre en évidence. Certains éléments ont pu être mis en
avant, à travers les tests utilisés, mais se sont révélés insuffisants.
Toutefois, nous continuons à penser, à la lumière de nos résultats et
de la littérature, que la situation œdipienne et les identifications aux
parents sont complexes pour l’enfant « surdoué ». En effet, les auteurs
expliquent que cet enfant a une perception et une compréhension aiguës des
choses qui l’entourent. De plus, il est souvent en prise avec un envahissement
interne de ses affects, en raison de son hypersensibilité. Dans notre travail, il
nous a semblé qu’une culpabilité était liée à ces sentiments œdipiens.
Nous pouvons alors nous demander comment cet enfant, qui a besoin
d’être rassuré et valorisé par ses parents, vit-il les sentiments ambivalents de
la période œdipienne ? De même, comment se situe-t-il par rapport aux
adultes qui l’entourent ? Certains auteurs nous expliquent que ces enfants ne
peuvent se servir de leurs parents comme des modèles identificatoires
satisfaisants, se rendant compte précocement de leurs limites et défauts. Mais
comment construisent-ils leur identité s’ils doivent trouver en eux-mêmes les
ressources nécessaires alors qu’ils ont souvent une estime d’eux-mêmes
fragile ? Ces hypothèses restent donc à vérifier et mériteraient d’être le centre
d’une étude plus approfondie.
Une recherche plus valide, sur une population plus grande, en
comparaison à un groupe contrôle du même âge, à travers un test projectif,
pourrait ainsi vérifier nos résultats et approfondir ce thème passionnant. Nous
pensons également que la passation d’autres tests projectifs seraient
intéressante. Notamment, une passation du test Rorschach pourrait mettre en
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évidence et vérifier certains éléments concernant la vision de soi et des
autres.
Pour conclure, ce sujet est très médiatisé, objet vulgarisé d’émissions
télévisées et d’ouvrages de « qualité scientifique discutable »245. Ainsi, les
demandes de consultation et de passation de test d’intelligence se sont
multipliées, le « surdon » offrant soudain aux parents une explication des
troubles de l’enfant. Toutefois, de nombreux mythes subsistent autour de ce
thème et les différends théoriques sont très présents, entraînant des débats
souvent passionnés. De plus, la recherche scientifique dans ce domaine n’en
est qu’à ses débuts et de nombreuses questions restent à approfondir.
Quoiqu’il en soit, l’enfant « surdoué » est une personne et il ne
peut être réduit à ses capacités cognitives. « La pensée et l’intelligence
doivent être interrogées en tenant compte de la personne de l’enfant, elles ne
peuvent être dissociées, sauf à courir le risque de dénier à l’enfant un statut
de sujet »246. En tant que psychologue clinicien, nous avons là un rôle
essentiel en nous intéressant à la dynamique interne de l’enfant, à ses
particularités et ses contradictions, et non à un seul et unique trait, comme la
« précocité intellectuelle ».
De plus, comme le précise C. Meljac, il est de notre responsabilité
d’éclaircir et d’élargir les représentations construites autour de ce sujet, afin
d’approfondir les réflexions et les débats.
Ce sujet, vaste et parfois confus, mérite encore de multiples
investigations, et selon les spécialistes : « Nous avons devant nous un long
chemin semé d’embûches »247.
245 Meljac, C. (2004). Alertez les surdoués. Le journal des psychologues, n°217, 58-60.246 Berges-Bounes, M. et Calmettes-Jean, S. (2003)247.Pereira-Fradin, M., Lubart, T., Caroff, X. (2004).
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