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© Ed. Francis Lefebvre CLAUSES STATUTAIRES ET PACTES RELATIFS A LA TRANSMISSION DE DROITS SOCIAUX CHAPITRE 6 Clauses statutaires et pactes relatifs à la transmission de droits sociaux Plan du chapitre §§ SECTION 1 Différents types de clauses statutaires 36220 A Clause d’agrément 36220 1 Domaine d’application 36270 2 Procédure d’agrément 36390 3 Sanction de l’inobservation de la procédure 36520 B Clause de préemption 36650 1 Validité et domaine d’application 36700 2 Mise en œuvre 36770 3 Sanctions de la violation 36860 C Clause d’inaliénabilité 36980 1 Validité et domaine d’application 37035 2 Mécanisme 37125 3 Sanction de la violation 37150 D Clause d’exclusion ou de rachat forcé 37200 1 Validité et domaine d’application 37250 Objectifs poursuivis Dans le cadre de la structure juridique qu’ils ont adoptée, et pour optimiser les méca- nismes de transmission qu’ils ont choisis, les chefs d’entreprise sont souvent amenés à adapter à leur cas particulier les dispositifs de droit commun relatifs à la gestion de la société : étendue et répartition des pouvoirs conférés aux dirigeants ; exercice des droits de vote pour les prises de décisions, notamment en assemblée ; droit d’information des associés ou actionnaires, etc. Ces aménagements sont étudiés dans la partie sur la mise en société d’une entreprise individuelle (n os 22000 s.). Très généralement aussi, les intéressés portent une attention particulière aux clauses aménageant les conditions d’entrée et de sortie des associés ou actionnaires car elles permettent d’assurer la sécurité du schéma de transmission de propriété retenu en contrô- lant la géographie du capital de la société : par le jeu de ces clauses, il est possible, par exemple, d’éviter des cessions de titres inopportunes (clause d’inaliénabilité) ou l’entrée de tiers indésirables (clause d’agrément), voire dans les cas extrêmes d’écarter certains associés en place (clause de rachat forcé), ou de permettre à certains de ceux-ci d’acquérir des titres par priorité (clause de préemption), ou encore de conférer aux minoritaires le droit de céder leurs titres si les majoritaires cèdent les leurs (clause de sortie conjointe). C’est au régime juridique de ces clauses que sont consacrés les développements qui vont suivre. Soulignons à titre liminaire que les clauses limitant la libre cessibilité des titres ne peuvent en principe qu’aménager les conditions de la cession ; l’associé ou actionnaire ne peut pas être « prisonnier de ses titres » et empêché de se retirer de la société s’il le désire. Ce principe n’est toutefois pas applicable dans certaines sociétés où règne un fort intuitus 521 2 Mise en œuvre 37300 3 Sanctions 37325 E Clause de sortie conjointe 37400 1 Validité et domaine d’application 37425 2 Mise en œuvre 37440 3 Sanction de la violation 37450 F Clause de cession « intuitu personae » 37500 G Clause de tontine 37600 1 Validité et domaine d’application 37615 2 Effets 37640 SECTION 2 Pactes d’associés 38000 A Présentation générale 38000 B Contenu du pacte 38120 1 Clauses générales 38120 2 Clauses particulières 38260 C Sanctions de la violation du pacte 38600 36000 36001

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C H A P I T R E 6

Clauses statutaires et pactesrelatifs à la transmission

de droits sociaux

Plan du chapitre §§

SECTION 1Différents types de clausesstatutaires 36220

A Clause d’agrément 362201 Domaine d’application 362702 Procédure d’agrément 363903 Sanction de l’inobservation

de la procédure 36520B Clause de préemption 366501 Validité et domaine d’application 367002 Mise en œuvre 367703 Sanctions de la violation 36860C Clause d’inaliénabilité 369801 Validité et domaine d’application 370352 Mécanisme 371253 Sanction de la violation 37150D Clause d’exclusion

ou de rachat forcé 372001 Validité et domaine d’application 37250

Objectifs poursuivis

Dans le cadre de la structure juridique qu’ils ont adoptée, et pour optimiser les méca-nismes de transmission qu’ils ont choisis, les chefs d’entreprise sont souvent amenés àadapter à leur cas particulier les dispositifs de droit commun relatifs à la gestion de lasociété : étendue et répartition des pouvoirs conférés aux dirigeants ; exercice des droitsde vote pour les prises de décisions, notamment en assemblée ; droit d’information desassociés ou actionnaires, etc. Ces aménagements sont étudiés dans la partie sur la miseen société d’une entreprise individuelle (nos 22000 s.).Très généralement aussi, les intéressés portent une attention particulière aux clausesaménageant les conditions d’entrée et de sortie des associés ou actionnaires car ellespermettent d’assurer la sécurité du schéma de transmission de propriété retenu en contrô-lant la géographie du capital de la société : par le jeu de ces clauses, il est possible, parexemple, d’éviter des cessions de titres inopportunes (clause d’inaliénabilité) ou l’entréede tiers indésirables (clause d’agrément), voire dans les cas extrêmes d’écarter certainsassociés en place (clause de rachat forcé), ou de permettre à certains de ceux-ci d’acquérirdes titres par priorité (clause de préemption), ou encore de conférer aux minoritaires ledroit de céder leurs titres si les majoritaires cèdent les leurs (clause de sortie conjointe).C’est au régime juridique de ces clauses que sont consacrés les développements qui vontsuivre.

Soulignons à titre liminaire que les clauses limitant la libre cessibilité des titres ne peuventen principe qu’aménager les conditions de la cession ; l’associé ou actionnaire ne peutpas être « prisonnier de ses titres » et empêché de se retirer de la société s’il le désire. Ceprincipe n’est toutefois pas applicable dans certaines sociétés où règne un fort intuitus

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2 Mise en œuvre 373003 Sanctions 37325E Clause de sortie conjointe 374001 Validité et domaine d’application 374252 Mise en œuvre 374403 Sanction de la violation 37450F Clause de cession « intuitu

personae » 37500G Clause de tontine 376001 Validité et domaine d’application 376152 Effets 37640

SECTION 2Pactes d’associés 38000

A Présentation générale 38000B Contenu du pacte 381201 Clauses générales 381202 Clauses particulières 38260C Sanctions de la violation du pacte 38600

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personae, et en particulier dans les SNC (nos 36285, 36395), mais nous paraît devoir êtrerespecté dans les SAS (no 36455).Soulignons aussi que parmi les clauses que nous allons examiner ci-dessous, même laclause d’agrément qui fait pourtant l’objet d’un encadrement légal spécifique laisse à sesrédacteurs une certaine plage de liberté, plus ou moins grande en fonction de la formesociale retenue : l’agrément est de règle dans les sociétés dites fermées dominées par unfort intuitus personae et ne peut faire l’objet que de peu d’aménagements contractuels ;il est facultatif dans les sociétés par actions dont les associés ou actionnaires ont unelatitude plus (cas des SAS) ou moins (cas des SA) grande pour en fixer les modalitésd’application.

Choix entre clauses statutaires et pacte extrastatutaire

On trouve fréquemment dans les pactes extrastatutaires des dispositions qui auraient pufaire l’objet de clauses statutaires (droit de préemption, interdiction temporaire de cession,rachat forcé, etc.). Le recours à une convention extrastatutaire s’explique par les diversavantages du pacte : limitation de l’accord à certains associés seulement, souci de discré-tion, caractère complexe des obligations respectives des parties, durée limitée de laconvention, sanctions particulières, etc. Les pactes peuvent en outre contenir des clausesqui ne pourraient pas être valablement stipulées dans les statuts.Mais si le pacte d’associés ou d’actionnaires offre plus de discrétion et de souplesseque les statuts, il présente certains inconvénients. Contrairement aux statuts, le pacte nes’applique pas aux associés qui ne l’ont pas signé, sauf ratification par eux. En effet, enapplication du principe de l’effet relatif des contrats (C. civ. art. 1165), les clauses du pacte nelient que les signataires ; elles sont inopposables aux tiers et à la société, sauf si elle estsignataire (pour un exemple, Cass. com. 12-5-1975 : Rev. sociétés 1976 p. 337 note J. H.). Nous verrons en outre(nos 38600 s.) que la violation du pacte est le plus souvent sanctionnée moins rigoureusementque la violation des statuts.Par ailleurs, en cas de contradiction entre une disposition des statuts et une clause d’unpacte, celui-ci peut se trouver privé d’effet (Cass. com. 15-2-1994 no 92-12.330 : RJDA 6/94 no 671).Soulignons enfin que dans les SAS, surtout celles qui comportent un petit nombre d’asso-ciés, les clauses limitant la libre cessibilité des actions sont très fréquemment prévues dansles statuts et, ainsi que nous allons le voir ci-dessous, font pour l’essentiel l’objet d’unrégime particulier.

Insertion des clauses dans les statuts

Si elles sont prévues dès la constitution de la société dans les statuts d’origine, les clauseslimitant les cessions sont réputées acceptées par les associés ou actionnaires lorsqu’ilssignent ces statuts et leur sont donc opposables.Toutefois, dans les sociétés par actions, il y a lieu de faire intervenir un commissaire auxavantages particuliers si la clause confère un avantage à une personne ou à un groupede personnes déterminés (C. com. art. L 225-8 et L 225-14), ou si elle est attachée à des actionsde préférence réservées à des actionnaires nommément désignés (C. com. art. L 228-15, al. 1 ; surle régime de ces actions, voir nos 32310 s.).

L’introduction de clauses de ce type dans les statuts en cours de vie sociale n’est, enprincipe, subordonnée qu’au respect des conditions générales de modification des statuts.Toutefois l’unanimité est parfois requise pour l’adoption ou la modification de certainesd’entre elles par la loi elle-même, notamment en matière de SAS (nos 36325, 37041 et 37251).S’il en résulte une augmentation des engagements de certains associés ou actionnaires,le consentement de ceux-ci sera requis (C. civ. art. 1836, al. 2).Dans les sociétés par actions, si la clause est appelée à ne profiter qu’à certaines personnesou si elle constitue un avantage attaché à des actions de préférence réservées à certainsactionnaires nommément désignés, la procédure des avantages particuliers devra êtrerespectée (intervention d’un commissaire aux avantages particuliers ; interdiction pour lesbénéficiaires de participer au vote) (C. com. art. L 225-8, L 225-10, L 225-14, L 225-147, L 225-148 et L 228-15).L’introduction des clauses dans les statuts, comme leur modification (pour un exemple,voir Cass. com. 31-5-2005 no 03-10.955 : RJDA10/05 no 1116) ou leur suppression, doivent faire l’objet demesures de publicité : insertion dans un journal d’annonces légales (art. R 210-3 et R 210-9) ;dépôt au greffe (art. R 123-103 et R 123-105).

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S E C T I O N 1

Différents types de clausesstatutaires

A. Clause d’agrément

Objet et intérêt de la clause d’agrément

Les clauses d’agrément permettent de filtrer l’entrée d’associés ou d’actionnaires poten-tiels au sein de la société et d’écarter des personnes dont la présence est, pour uneraison quelconque, jugée indésirable. Tel peut être le cas si le chef d’entreprise craint quel’admission de telle ou telle personne en tant qu’associé soit de nature à semer la discordeentre les associés en place.

ExempleSoit un chef d’entreprise qui a plusieurs enfants, dont certains travaillent avec lui. Ce chef d’entreprise :– apporte son entreprise à une SAS qu’il constitue avec ses enfants qui travaillent dans l’entreprise ; lecapital est réparti entre lui-même et ces enfants. Il est désigné comme président. Les statuts prévoient queles cessions entre vifs, entre associés comme à des tiers étrangers à la société ou au conjoint d’un associé,à ses ascendants ou descendants, devront faire l’objet d’un agrément ; ils donnent compétence au présidentpour accorder ou refuser l’agrément ;OU– apporte son entreprise à une SARL qu’il constitue avec les mêmes enfants. Les statuts prévoient que lescessions au conjoint d’un associé seront soumises à un agrément donné par la majorité des associés repré-sentant au moins la moitié des parts sociales.

Les clauses d’agrément permettent aussi de stabiliser l’actionnariat et d’organiser latransmission du pouvoir.

1. Domaine d’application

La faculté de prévoir des clauses d’agrément est plus ou moins étendue selon la formede société en cause et selon que l’agrément concerne les transmissions entre associés ouà des tiers étrangers à la société.Nous n’examinerons ci-après que les transmissions entre vifs, les clauses relatives auxtransmissions par décès ayant été traitées nos 7500 s.

Remarques préliminaires

Notion de cession Le législateur utilise le terme de « cession » et non de « transmis-sion ». Par cession, il faut toutefois entendre tout acte de transmission de parts ou actionstel que vente, échange, donation, liquidation de communauté de biens entre époux (CA Rouen27-11-1986 : Gaz. Pal. 1987 p. 335 note APS) ou apport isolé (Cass. com. 21-1-1970 : JCP. 1970 II no 16541 note B. Oppetit).En revanche, ce terme ne vise pas les apports effectués au titre d’une fusion, d’une scissionou d’un apport partiel d’actif soumis au régime des scissions (CA Chambéry 26-11-2002 : D. 2003p. 1216 note Espesson-Vergeact ; CA Rouen 9-6-2011 no 10/05530 : RJDA 8-9/11 no 708 ; Cass. com.19-4-1972 : D. 1972p. 538), ou encore d’une confusion de patrimoine. Rien n’interdit toutefois d’étendre l’appli-cation de la clause d’agrément à ces opérations par une mention expresse dans les statuts(Cass. com. 3-6-1986 : Rev. sociétés 1987 p. 52 note Reinhard ; Cass. com. 6-5-2003 no 01-12.567 : RJDA 8-9/03 no 837 ; CA Paris9-2-2006 no 05-3072 : RJDA 7/06 no 789, et sur pourvoi, Cass. com. 15-5-2007 no 06-13.484 : RJDA 11/07 no 1110).Pour des exemples de clauses, voir no 36340.

Droits concurrents sur les titres En cas d’indivision sur les parts ou actions,chaque coïndivisaire a la qualité d’associé ou d’actionnaire. La cession des droits indivis àune personne étrangère à l’indivision (cas où les coïndivisaires n’ont pas exercé leur droitde préemption ; sur ce droit, voir nos 11305 s.) est donc, à notre avis, soumise à agrémentdans les mêmes conditions que la cession des parts ou des actions elles-mêmes.

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Cette solution est également applicable, à notre avis, en cas de cession de la nue-propriété des parts ou actions puisque la nue-propriété confère à son titulaire la qualitéd’associé ou d’actionnaire (no 88350).Le problème est plus délicat en cas de cession de l’usufruit de parts ou d’actions. Si l’onestime que l’usufruitier a la qualité d’associé ou d’actionnaire, ce qui n’est pas l’opiniondominante (no 88350), la solution ci-dessus est applicable. Même si l’on considère quel’usufruitier n’a pas la qualité d’associé et que, sauf clause expresse contraire, l’acquisitionde la qualité d’usufruitier ne requiert pas l’agrément, nous pensons que, dans les sociétésde personnes et compte tenu de l’intuitus personae qui régit les rapports entre associés,la possibilité pour l’usufruitier de participer à la vie sociale, et en particulier de prendrepart aux décisions collectives, est subordonnée à son agrément par les autres associésdans les conditions fixées pour les cessions de parts. Dans les sociétés par actions dontles statuts ont prévu une clause d’agrément, on peut être tenté de soutenir que l’insertionde cette clause traduit la volonté des actionnaires de renforcer l’intuitus personae dans lasociété et que, même en l’absence de clause expresse en ce sens, la procédure d’agréments’appliquerait en cas de cession isolée de l’usufruit. Toutefois cette solution est aléatoireet il est opportun de viser expressément la cession isolée de l’usufruit dans la claused’agrément si telle est la volonté des actionnaires.

SNC

L’agrément est obligatoire pour les cessions de parts de SNC : les parts sociales ne peuventêtre cédées qu’avec le consentement de tous les associés, toute clause contraire étantréputée non écrite (C. com. art. L 221-13) ; il n’y a donc pas de possibilité d’aménagementsstatutaires ou extrastatutaires et l’agrément s’impose même en cas de cession entreassociés.

Précisions a. L’agrément ne peut pas être donné à l’avance pour tout acquéreur éventuel non indivi-dualisé (CA Paris 4-11-1964 : Gaz. Pal. 1965 I p. 280). Il est en revanche possible d’autoriser par avance une cessionau profit d’une ou plusieurs personnes nommément désignées.b. Les clauses statutaires prévoyant qu’à défaut d’agrément les parts de l’associé désirant céder sa partici-pation seront rachetées par la société ou les associés nous paraissent interdites. En effet, en soumettantmalgré toute clause contraire les cessions de parts au consentement de tous les associés, l’article L 221-13subordonne à l’accord de chacun la modification dans la répartition d’origine des droits sociaux ; celaparaît exclure la validité d’une clause de rachat puisque celle-ci permettrait une nouvelle répartition desparts contre la volonté du ou des associés qui se seraient opposés à la cession.c. En revanche, les associés peuvent, lors de la constitution de la société, s’engager réciproquement à serétrocéder à un prix forfaitaire (ou à déterminer en fonction d’éléments déjà définis), le nombre de partsnécessaires pour établir l’égalité de leurs droits dans la société (Cass. com. 12-11-1951 : Bull. civ. II no 327).d. Le silence d’un associé ne suffit pas à démontrer son accord à la cession (CA Rouen 27-11-1986 : Gaz.Pal. 1987 I p. 335 note APS).

SCS

En principe, les parts sociales ne peuvent être cédées, même entre associés, qu’avec leconsentement de tous les associés (C. com. art. L 222-8, I).Toutefois, les statuts peuvent valablement stipuler (C. com. art. L 222-8, II) :a. que les parts des commanditaires sont librement cessibles entre associés ;b. que les parts des commanditaires peuvent être cédées à des tiers étrangers à la sociétéavec le consentement de tous les commandités et de la majorité en nombre et en capitaldes commanditaires ;c. qu’un commandité peut céder une partie de ses parts à un commanditaire ou à untiers étranger à la société dans les conditions prévues au b. ci-dessus.

SARL

Cession à des tiers Les parts sociales ne peuvent être cédées à des tiers étrangers àla société qu’avec le consentement de la majorité des associés représentant au moins lamoitié des parts sociales, à moins que les statuts ne prévoient une majorité plus forte(C. com. art. L 223-14, al. 1).

Précisions a. Le texte n’autorisant qu’une majorité plus forte, les statuts ne peuvent pas, à notre avis,imposer l’unanimité.

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b. En l’absence de disposition légale contraire, l’associé cédant peut participer au vote et on doit lecompter pour le calcul de la majorité par tête et par parts, qu’il s’agisse de la majorité légale ou de lamajorité statutaire renforcée.

Cession entre conjoints Les parts sont en principe librement cessibles entre conjointset entre ascendants et descendants (C. com. art. L 223-13, al. 1). Cette dérogation au principed’ordre public de l’agrément des cessions à des tiers doit être interprétée restrictivement.Elle ne saurait être étendue à d’autres personnes que celles expressément visées, et notam-ment aux concubins, frères ou sœurs, beaux-frères ou belles-sœurs, beaux-parents ouneveux (CA Bordeaux 4-1-1961 : Rev. sociétés 1961 p. 65), ainsi qu’aux partenaires d’un Pacs.Toutefois les statuts peuvent déroger à ce principe et prévoir que le conjoint, un ascen-dant ou un descendant ne peut devenir associé qu’après avoir été agréé dans les condi-tions prévues à l’article L 223-14 ; à peine de nullité de la clause, la majorité exigée nepeut être plus forte que celle prévue audit article (C. com. art. L 223-13, al. 2).

Précisions a. La rédaction de l’article L 223-13, al. 2 du Code de commerce implique, à notre avis, quesi les associés ont retenu la majorité légale pour la cession aux tiers, les statuts ne peuvent pas retenirune majorité plus forte pour la cession aux conjoint, ascendants ou descendants et si, pour la cessionaux tiers, les associés ont retenu une majorité plus forte que la majorité légale, la majorité retenue pour lacession aux conjoint, ascendants ou descendants ne peut pas être plus forte que cette majorité statutaire.b. L’agrément peut n’être imposé que pour une catégorie des personnes énumérées, par exempleuniquement les ascendants ou uniquement le conjoint.c. L’agrément ne peut s’appliquer que si l’ascendant, le descendant ou le conjoint n’a pas déjà la qualitéd’associé. La Cour de cassation (Cass. com. 28-10-1974 : D. 1975 p. 209 note Y. Guyon) a en effet jugé que l’article44 de la loi du 24 juillet 1966 (désormais C. com. art. L 223-13) n’autorise une limitation statutaire à la libretransmissibilité des parts sociales par voie successorale que pour l’agrément des personnes qui ne sontpas déjà associées (no 7540). Cette solution doit être étendue aux cessions entre vifs aux conjoint, ascen-dants ou descendants, situations également visées par l’article L 223-13.Toutefois, l’accord des autres associés redevient, à notre avis, nécessaire si les statuts contiennent uneclause limitant la libre cessibilité des parts sociales entre associés car il s’agit alors, non pas de statuer surl’entrée d’un conjoint, ascendant ou descendant (seule hypothèse visée par l’article L 223-13 comme il ressort de l’alinéa 2de cet article), mais d’exercer un contrôle sur la répartition des parts entre les associés. Or, la possibilité dece contrôle est expressément prévue par le législateur dans l’article L 223-16 pour toutes les cessionsentre associés (no 36305), sans aucune distinction.

Cession entre associés Les parts sociales sont en principe librement cessibles entreassociés (C. com. art. L 223-16, al. 1). Toutefois les statuts peuvent contenir une clause limitantcette cessibilité ; les dispositions de l’article L 223-14 du Code de commerce (no 36295) sontalors applicables mais les statuts peuvent réduire la majorité prévue à cet article (C. com.art. L 223-16, al. 2).

Précisions a. Même si les termes employés par les articles L 226-13 et L 226-16 ne sont pas totalementidentiques, les précisions données ci-dessus (no 36300 a) sur les clauses statutaires de fixation de la majoritépour l’agrément des cessions entre conjoints, ascendants ou descendants nous paraissent transposablesaux clauses d’agrément en cas de cession entre associés.b. Rien ne paraît interdire de réduire la majorité en nombre des associés et pas la majorité en partssociales ou, à l’inverse, la majorité en parts sociales et pas en nombre des associés.

SA

Liberté de principe Les actions peuvent en principe être librement cédées aussi bienà des tiers étrangers à la société qu’entre actionnaires. Toutefois, les statuts peuventdéroger à ce principe en soumettant les cessions d’actions à agrément (C. com. art. L 228-23,al. 1).La clause d’agrément doit figurer dans les statuts eux-mêmes ; il ne suffirait pas qu’elle soitportée dans un autre document, tel que, par exemple, un règlement intérieur. Mais il nenous paraît pas nécessaire qu’elle soit décidée lors de la constitution de la société : ellepeut être insérée dans les statuts pendant le cours de la vie sociale en vertu d’une décisionde l’assemblée générale extraordinaire (Cass. com. 22-10-1956 : JCP 1956 II no 9678 note Bastian, sol. impl.).

Précisions a. Les clauses d’agrément peuvent également viser les valeurs mobilières donnant accèsau capital, y compris donc lorsque les valeurs mobilières en cause sont des titres de créance telles qu’obli-gations convertibles, échangeables ou remboursables en actions, ou obligations avec bons de souscriptiond’actions.

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b. A notre avis, sont licites les clauses statutaires prévoyant que toute modification dans le contrôle ducapital ou des droits de vote d’un actionnaire personne morale sera soumise à agrément et qu’à défautd’agrément les actions détenues par cette personne morale seront acquises par ses coassociés, par lasociété elle-même ou par des tiers agréés par elle. Certes, dans une affaire concernant une société exploi-tant une entreprise de presse, la Cour de cassation a rejeté une demande d’exclusion de deux sociétésactionnaires dont le contrôle avait été pris par un tiers mais en se fondant sur le fait que « la loi du24 juillet 1966, tout comme les statuts de la société du Journal, ne prévoit la procédure d’agrément quepour la cession des propres actions d’une société, et non pas pour la cession des parts ou actions compo-sant le capital de ses actionnaires » (Cass. com. 13-12-1994 : RJDA 3/95 no 292). En visant non seulement la loimais aussi les statuts, la Cour de cassation semble admettre implicitement que la solution aurait pu êtredifférente si une clause statutaire avait expressément soumis à agrément les changements de contrôlepouvant survenir dans les sociétés actionnaires. Il est vrai que, dans un tel cas, le refus d’agrément entraînel’exclusion ou le rachat forcé des titres de la société actionnaire ; mais cette conséquence n’a pas échappéà la Cour de cassation puisque, dans le même arrêt, elle affirme la validité de principe des clauses statu-taires prévoyant la possibilité d’exclure un actionnaire. Dans le même sens, CA Lyon 4-3-1994, inédit.Sur le régime de ces clauses de rachat forcé, voir nos 37200 s.

Modulation de la clause Il est, selon nous, possible de limiter les clauses d’agré-ment à certaines actions et pas aux autres. On se trouve alors en présence de deuxcatégories d’actions, les unes dont la cession est soumise à contrôle, les autres dont lacession est libre, ce qui permet de créer, dans une certaine mesure, un « noyau dur » ausein de la société.Cette disposition statutaire est, sans aucun doute, licite lorsqu’elle figure dans les statutsd’origine puisque, dans ce cas, tous les actionnaires l’ont acceptée en signant les statutslors de la constitution de la société. Elle est valable aussi, à notre avis, lorsqu’elle estintroduite dans les statuts en cours de vie sociale sur décision d’une assemblée généraleextraordinaire sans qu’il soit nécessaire de recueillir l’accord unanime des actionnaires carelle ne constitue qu’une simple restriction des droits des actionnaires, laquelle ne peut,en soi, être considérée comme l’équivalent d’une augmentation de leurs engagements(Cass. civ. 9-2-1937 : D. 1937.1 p. 73 note Besson). De surcroît, l’actionnaire auquel cette clause seraitimposée ne serait pas fondé à la contester car elle ne porte pas atteinte à son droit decéder ses actions (no 36432).

Cession entre conjoints La clause d’agrément est écartée en cas de liquidation durégime matrimonial ou de cession, soit à un conjoint, soit à un ascendant ou à un descen-dant (C. com. art. L 228-23, al. 3), sauf dans le cas suivant (C. com. art. L 228-23, al. 4) : elle figure dansles statuts d’une société qui réserve des actions à ses salariés et elle a pour objet d’éviterque ces actions ne soient dévolues ou cédées à des personnes n’ayant pas la qualité desalarié de la société.La liste des personnes qui ne sont pas soumises à la clause d’agrément est limitative, desorte que la clause peut, par exemple, être opposée au gendre du cédant (CA Colmar 30-1-1970 : Rev. sociétés 1970 p. 299 note P. Nocquet).

SAS

Les statuts peuvent soumettre toute cession d’actions à l’agrément de la société (C. com.art. L 227-14), ce qui donne toute liberté aux associés pour déterminer le champ d’applica-tion de l’agrément : cession à des tiers étrangers à la société ; cession entre associés ;cession au conjoint, à un ascendant ou à un descendant ; création de deux catégoriesd’actions, les premières dont la cession est libre, les secondes dont la cession est soumiseà agrément ; application de la clause à certains associés seulement, ou pour une certaineproportion d’actions détenue par chaque membre de la SAS, ou encore dans le seul casde cession à des tiers déterminés ; etc.

Précisions a. Les associés sont expressément autorisés à prévoir dans les statuts l’exclusion de toutesociété associée dont le contrôle est modifié, cette mesure pouvant s’appliquer également à l’associéqui a acquis cette qualité à la suite d’une opération de fusion, de scission ou de dissolution (C. com.art. L 227-17).Sur le régime des clauses de rachat forcé fixant les conditions de cette exclusion, voir nos 37200 s.b. Les clauses visées ci-dessus ne peuvent être adoptées ou modifiées (et donc, à notre avis, supprimées)en cours de vie sociale qu’avec le consentement unanime des associés (C. com. art. L 227-19).

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© E d . F r a n c i s L e f e b v r e CLAUSES STATUTAIRES ET PACTES RELATIFS A LA TRANSMISSION DE DROITS SOCIAUX

SCA

Droits des commandités La cession des droits d’un commandité est soumise auxrègles prévues pour la cession des parts des commandités dans les SCS (C. com. art. L 222-8 surrenvoi de l’article L 226-1, al. 2 ; no 36295) : accord préalable de tous les commandités et, en principe,de tous les commanditaires ; en cas de cession d’une partie seulement des droits ducommandité à un commanditaire ou à un tiers, possibilité pour les statuts d’écarter l’obli-gation de consentement unanime des commanditaires et de retenir la majorité en nombreet en capital de ceux-ci.

Actions des commanditaires La cession des actions des commanditaires estsoumise aux règles prévues pour la cession des actions dans les SA (C. com. art. L 228-23 surrenvoi de l’article L 226-1, al. 2 ; nos 36310 s.) : liberté de cession sauf clause statutaire prévoyantun agrément en cas de cession à des tiers étrangers à la société ou entre actionnaires ;clause inapplicable en cas de cession au conjoint, à un ascendant ou à un descendant(sauf cas d’actions réservées aux salariés).

Précisions Lorsqu’un associé commandité possède des actions, la cession de ces actions n’est pas, ànotre avis, subordonnée au respect des dispositions contraignantes de l’article L 222-8 du Code decommerce qui ne s’appliquent qu’aux parts des commandités. En effet, l’intéressé cumule deux qualités,celle de commandité et celle de commanditaire. Lorsqu’il cède ses actions, il agit en qualité de commandi-taire et l’opération est donc soumise aux mêmes conditions que celles applicables aux autres commandi-taires.

Illustrations

Les exemples qui suivent montrent quelques possibilités d’aménagements statutaires dansles formes de sociétés les plus couramment retenues. Ils mettent en lumière dans quellemesure il est possible d’adapter le domaine d’application de la clause et les conditions dela prise de décision par l’organe compétent, la liberté laissée aux associés ou actionnairesétant plus ou moins grande suivant la forme sociale

Exemples de clause d’agrémentsuivant la forme sociale

SARLToute transmission de parts sociales, même entre associés, au conjoint d’un associé ouà l’un de ses ascendants ou descendants, à quelque titre que ce soit (à titre gratuit ouonéreux, y compris par voie d’apport, d’échange, de fusion, de scission ou d’apportpartiel d’actif soumis au régime des scissions, ou encore d’adjudication volontaire ouforcée), et alors même que cette transmission ne porterait que sur la nue-propriété oul’usufruit des parts, doit, pour devenir définitive, être autorisée à la majorité des associésreprésentant au moins la moitié des parts sociales OU majorité plus forte, dans les condi-tions suivantes…

SAToute transmission d’actions à des tiers/même entre actionnaires, à quelque titre que cesoit (à titre gratuit ou onéreux, y compris par voie d’apport, d’échange, de fusion, descission ou d’apport partiel d’actif soumis au régime des scissions, ou encore d’adjudica-tion volontaire ou forcée), et alors même que cette transmission ne porterait que sur lanue-propriété ou l’usufruit des actions, doit, pour devenir définitive, être autorisée parl’assemblée générale ordinaire/le conseil d’administration ou le conseil de surveillance/uncomité spécialisé (….) dans les conditions suivantes….

SASToute transmission, même entre associés, à quelque titre que ce soit (à titre gratuit ouonéreux, y compris par voie d’apport, d’échange, de fusion, de scission ou d’apportpartiel d’actif soumis au régime des scissions, ou encore d’adjudication volontaire ouforcée), et alors même que cette transmission ne porterait que sur la nue-propriété oul’usufruit des actions, doit, pour devenir définitive, être autorisée par la collectivité desassociés statuant à la majorité des (…)/par le président/par tel groupe d’associés/par telcomité spécialisé. Cette autorisation est donnée dans les conditions ci-après…

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