23
Chapitre 6 Electrostatique des di´ electriques Un di´ electrique parfait est un milieu isolant ne comportant aucune charge mobile. Bien que neutre ` a l’´ echelle macroscopique, ce milieu poss` ede n´ eanmoins des propri´ et´ es ´ electriques qui se r´ ev` elent lorsqu’on le soumet `a un champ ´ electrique. Celles-ci sont bien sˆ ur imputables aux porteurs de charges microscopiques qui, li´ es entre eux, forment la substance du milieu et sur lesquels un champ ´ electrique peut agir. Prenons l’exemple d’un atome. Sa charge positive, due aux protons, est concentr´ ee dans son noyau que l’on peut consid´ erer ici comme ponctuel. La charge n´ egative, qui compense globalement celle des protons, est due aux ´ electrons r´ epartis spatialement autour du noyau et ce, de fa¸con uniforme lorsque l’atome est dans son ´ etat fondamental. Dans cet ´ etat, le moment dipolaire ´ electrique de l’atome est nul. L’action d’un champ ´ electrique sur ces charges se traduit par des d´ eplacements des ´ electrons d’une part, et du noyau d’autre part, en sens oppos´ es. Il en r´ esulte une nouvelle epartition des charges n´ egatives, qui restent li´ ees au noyau, et pour laquelle l’atome acquiert un moment dipolaire non nul. Les moments dipolaires ainsi induits dans la mati` ere sont susceptibles de produire `a leur tour un champ ´ electromagn´ etique qui va profond´ ement modifier la structure du champ en tout point. 6.1 Champ microscopique, champ macroscopique 6.1.1 Introduction La mati` ere est constitu´ ees de groupements stables, atomes, mol´ ecules ou ions. Dans les solides, ils occupent en moyenne des positions relatives fixes 1 . Dans les liquides et dans les gaz, ils se meuvent continuellement les uns par rapport aux autres. L’ensemble des charges contenues dans tous ces agr´ egats produit un champ ´ electrique -→ E micro qui est le v´ eritable champ ´ electrique`a l’´ echelle microscopique. Sur des distances atomiques ou inter-atomiques, ce champ varie dans des proportions consid´ erables, aussi bien en amplitude qu’en orientation. Pour donner une id´ ee des ordres de grandeur ´ elev´ es, on peut noter qu’`a une distance de 1 ˚ A, un proton produit un champ ´ electrique de l’ordre de 10 11 V/m. Ce champ est vite compens´ e par celui du cort` ege ´ electronique de l’atome d` es que l’on franchit les limites de celui-ci. Ce champ microscopique, impossible `a mesurer, nous est inaccessible. En revanche, nous pouvons en percevoir les effets sur des distances esoscopiques, de domaine interm´ ediaire entre le micro- scopique et le macroscopique. Ceci nous am` ene`ad´ efinir, comme l’a fait H.A. Lorentz (1902), une moyenne spatiale du champ microscopique sur un domaine de dimensions m´ esoscopiques. Cette proc´ edure permet de niveler le champ microscopique en le d´ ebarassant de ses ´ enormes fluctua- tions spatiales. Nous admettrons ici que, pour toute grandeur G, sa valeur g macro (M ) observ´ ee 1 Elles seraient bien d´ efinies en l’absence d’agitation thermique. 129

Electrostatique des di¶electriques · 2013-03-02 · Chapitre 6. Electrostatique des di¶electriques µa l’¶echelle macroscopique en un point M s’obtient en moyennant sa valeur

  • Upload
    others

  • View
    4

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Chapitre 6

Electrostatique des dielectriques

Un dielectrique parfait est un milieu isolant ne comportant aucune charge mobile. Bien que neutrea l’echelle macroscopique, ce milieu possede neanmoins des proprietes electriques qui se revelentlorsqu’on le soumet a un champ electrique. Celles-ci sont bien sur imputables aux porteurs decharges microscopiques qui, lies entre eux, forment la substance du milieu et sur lesquels unchamp electrique peut agir.

Prenons l’exemple d’un atome. Sa charge positive, due aux protons, est concentree dans son noyauque l’on peut considerer ici comme ponctuel. La charge negative, qui compense globalement celledes protons, est due aux electrons repartis spatialement autour du noyau et ce, de facon uniformelorsque l’atome est dans son etat fondamental. Dans cet etat, le moment dipolaire electrique del’atome est nul. L’action d’un champ electrique sur ces charges se traduit par des deplacementsdes electrons d’une part, et du noyau d’autre part, en sens opposes. Il en resulte une nouvellerepartition des charges negatives, qui restent liees au noyau, et pour laquelle l’atome acquiert unmoment dipolaire non nul. Les moments dipolaires ainsi induits dans la matiere sont susceptiblesde produire a leur tour un champ electromagnetique qui va profondement modifier la structuredu champ en tout point.

6.1 Champ microscopique, champ macroscopique

6.1.1 Introduction

La matiere est constituees de groupements stables, atomes, molecules ou ions. Dans les solides,ils occupent en moyenne des positions relatives fixes 1. Dans les liquides et dans les gaz, ils semeuvent continuellement les uns par rapport aux autres. L’ensemble des charges contenues danstous ces agregats produit un champ electrique

−→E micro qui est le veritable champ electrique a

l’echelle microscopique. Sur des distances atomiques ou inter-atomiques, ce champ varie dans desproportions considerables, aussi bien en amplitude qu’en orientation. Pour donner une idee desordres de grandeur eleves, on peut noter qu’a une distance de 1 A, un proton produit un champelectrique de l’ordre de 1011 V/m. Ce champ est vite compense par celui du cortege electroniquede l’atome des que l’on franchit les limites de celui-ci.

Ce champ microscopique, impossible a mesurer, nous est inaccessible. En revanche, nous pouvonsen percevoir les effets sur des distances mesoscopiques, de domaine intermediaire entre le micro-scopique et le macroscopique. Ceci nous amene a definir, comme l’a fait H.A. Lorentz (1902), unemoyenne spatiale du champ microscopique sur un domaine de dimensions mesoscopiques. Cetteprocedure permet de niveler le champ microscopique en le debarassant de ses enormes fluctua-tions spatiales. Nous admettrons ici que, pour toute grandeur G, sa valeur gmacro(M) observee

1Elles seraient bien definies en l’absence d’agitation thermique.

129

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

a l’echelle macroscopique en un point M s’obtient en moyennant sa valeur microscopique vraiegmicro(P ) sur tous les points P a l’interieur d’une boule de centre M et de rayon R

gmacro(M) = < gmicro > (M) =1τ

B(M,R)

gmicro(P ) dτ(P ) , avec τ =4πR3

3(6.1)

Cette moyenne depend generalement de la position du point M . Le champ electrique macrosco-pique sera donc defini comme

−→E macro (M) = <

−→E micro> (M) =

B(M,R)

−→E micro (P ) dτ(P ) (6.2)

6.1.2 Champ macroscopique en un point a l’exterieur du dielectrique

En un point P exterieur au milieu dielectrique, le potentiel electrique vrai cree par toutes lescharges du milieu est donne par la formule usuelle

Vmicro(P ) =1

4πε0

i

qi

PiP

Sa valeur moyenne en un point M exterieur au dielectrique est

Vmacro(M) =∑

i

14πε0

B(M,R)

qi

τ

1PiP

dτ(P ) (6.3)

Formellement, l’expression

14πε0

B(M,R)

qi

τ

1PiP

dτ(P )

peut etre consideree comme le potentiel electrique cree au point Pi par une distribution volumiquede charges distribuees uniformement dans la boule B(M, R) avec la densite qi/τ . Le point Pi etantpar hypothese a l’exterieur de cette boule, ce potentiel est celui d’une charge ponctuelle de valeurqi situee au point M ! On obtient donc

Vmacro(M) =∑

i

qi

4πε0

1PiM

≡ Vmicro(M) (6.4)

En tout point exterieur, les valeurs “microscopique” et “macroscopique” du champ coıncident. Ceresultat etait previsible car, en dehors du milieu, le champ vrai n’a plus les fluctuations intensesqu’il subit a l’interieur.

Decoupons ensuite le dielectrique en domaines ∆k de dimensions mesoscopiques et tels que lacharge totale contenue dans chacun soit nulle :

Qk =∑

ik

qik= 0 (6.5)

Nous les supposerons tous de meme extension ∆ et noterons Ak le point central du domaine ∆k.On peut ecrire

Vmacro(M) =∑

k

Vk(M) , avec 4πε0Vk(M) =∑

ik

qik

MPik

Christian Carimalo 130 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

Vk(M) etant le potentiel cree en M par les charges du domaine ∆k. Puisque M est a l’exterieurdu dielectrique, on a AkM À AkPik

, ce qui incite a effectuer un developpement du potentiel Vk

suivant les puissances de AkPik/AkM , limite au premier ordre non nul. On a

Vk(M) ≈ Qk

AkM+

−→AkM

AkM3

ik

qik

−→AkPik

Or, Qk = 0 et

−→pk =

ik

qik

−→AkPik

(6.6)

est le moment dipolaire electrique du domaine ∆k. On obtient ainsi

Vmacro(M) ' 14πε0

k

−→AkM

AkM3 ·−→pk (6.7)

On supposera alors que l’extension ∆ est suffisamment petite pour que la somme ci-dessus puisseetre assimilee a une integrale sur tout le volume V du dielectrique. Dans ce passage du discontinuau continu, nous definirons le moment dipolaire par unite de volume comme

−→P (Ak) =

1∆

−→pk (6.8)

et assimilerons ∆ a l’element de volume dV. D’ou l’expression finale du potentiel :

Vmacro(M) =1

4πε0

V

−→P (A)·

−→AM

AM3dV(A) (6.9)

Le moment dipolaire par unite de volume est aussi appele polarisation. On voit ainsi qu’en toutpoint a l’exterieur du dielectrique, la ou le champ ne presente pas de singularite, la descrip-tion macroscopique des proprietes electriques du milieu dielectrique en terme de polarisation estsuffisante 2.

Notons que le moment (6.6) peut encore etre exprime de la maniere suivante. Le domaine ∆k

contient un certain nombre Nkr de porteurs de meme espece, de charge qr. Leur contribution au

moment dipolaire est

(−→p k)r = qr

ir

−→AkPir= qr Nk

r

1Nk

r

ir

−→AkPir= qr Nk

r

−→dr

ou

−→dr =

1Nk

r

ir

−→AkPir

est, dans le domaine ∆k, la valeur moyenne du deplacement des porteurs de charge d’espece r.Soit nr le nombre de ces porteurs, par unite de volume 3. On a donc Nk

r = nr(Ak)∆. D’apres(6.8), on voit que la polarisation du milieu peut aussi s’exprimer comme

−→P (A) =

∑r

qr nr(A)−→dr (A) (6.10)

2On admet ici que les termes d’ordres superieurs dans le developpement du potentiel, qui font appel a desmoments multipolaires, sont negligeables.

3Elle peut varier de point en point.

Christian Carimalo 131 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

6.1.3 Distributions de charges equivalentes a la polarisation

L’expression du potentiel trouvee plus haut peut etre transformee pour obtenir une autre expres-sion montrant que la polarisation du dielectrique est equivalente a une distribution macroscopiquede charges, appelees charges de polarisation. La transformation repose sur l’identite

−→P (A)·

−→AM

AM3= divA

−→P (A)AM

− 1AM

divA

−→P (A) (6.11)

ou les derivees sont effectuees par rapport aux coordonnees du point courant A. Utilisant letheoreme de Green-Ostrogradski, il vient ainsi

Vmacro(M) =1

4πε0

( ∫

V

ρp(A)AM

dV(A) +∫

S

σp(A)AM

dS(A))

(6.12)

S etant la surface (fermee) delimitant l’echantillon de dielectrique, et ou l’on a pose

ρp(A) = −divA

−→P (A) , σp(A) =

−→n (A)· −→P (A) (6.13)

−→n (A) etant, au point courant A de la surface du dielectrique, le vecteur unitaire de la normalesortante.

Le calcul precedent pourrait sembler n’etre qu’un artifice mathematique, et les densites equivalentesintroduites n’etre que “fictives”. On peut cependant apporter a celles-ci une interpretation phy-sique. En effet, les charges de polarisation, de densites ρp et σp, ne sont pas seulement desequivalents mathematiques de la polarisation, mais correspondent a des excedents locaux, bienreels, de charges liees, dus a la polarisation du milieu. Pour le montrer, considerons dans le milieuun certain volume V0, delimite par une surface S0. La polarisation du milieu est le plus souventdue a un deplacement des charges consecutif a l’action d’un champ electrique exterieur. A cedeplacement correspond un flux de charges sortant a travers S0. En particulier, ceux des porteurs

d’espece r, de charge qr, en densite numerique nr et de deplacement moyen−→dr , qui auront tra-

verse un element de surface−→dS0 etaient initialement contenus a l’interieur de V0, dans un volume

d’extension δV0 =−→dr ·

−→dS0. Leur nombre est donc δNr = nrδV0 et ils auront contribue au trans-

fert de charge δQr = qrδNr. La charge totale qui aura traverse l’element de surface considere estdonc

δQ =∑

r

nr

−→dr ·

−→dS0=

−→P ·

−→dS0= σp dS0 (6.14)

soit, pour toute la surface S0,

∆Q0 =∫

S0

σp dS0 (6.15)

Initialement, le volume V0 etait globalement neutre. Apres deplacement des charges, il contientune charge opposee, soit

−∆Q0 = −∫

S0

−→P ·

−→dS0 =

V0

− div−→P dV0 (6.16)

A la surface S du dielectrique, les charges qui ont tendance a sortir du milieu et celles qui onttendance a y rentrer provoquent globalement sur la surface un excedent de charges de densitesuperficielle σp. Le milieu etant globalement neutre, il apparaıt correlativement dans son volumeV un excedent de charges distribue avec la densite volumique ρp.

Christian Carimalo 132 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

6.1.4 Champ macroscopique en un point a l’interieur du dielectrique

Pour cette configuration, plus compliquee que la precedente, nous rechercherons directementl’expression du champ electrostatique macroscopique, plutot que celle de son potentiel. Le champ

microscopique en un point M a l’interieur du milieu se decompose en deux parties. L’une,−→E

int

mic,

est due aux charges situees a l’interieur de la boule B(M,R) ; l’autre,−→E

ext

mic provient des chargessituees a l’exterieur de cette boule, dans le volume V ′ complementaire de celle-ci. Le point M etanten dehors du volume V ′, il peut etre admis que cette seconde contribution du champ representeaussi bien le champ macroscopique cree en M par toutes les charges de ce volume (voir plushaut), et qu’on peut l’exprimer au moyen des densites macroscopiques de polarisation σp et ρp,via la formule

−→E

ext

mac=1

4πε0

V′dV ′(A)

ρp(A)−→AM

AM3+

SdS(A)

σp(A)−→AM

AM3+

Σ

dΣ(A)σp(A)

−→AM

AM3

(6.17)

ou Σ est la surface de la boule B(M,R) (sphere de centre M et de rayon R). Le champ macro-scopique du aux charges a l’interieur de B(M, R) est la moyenne

−→E

int

mac =∑

i

14πε0

B(M,R)

dτ(P )qi

τ

−→PiP

PiP 3(6.18)

ou les points Pi sont ici a l’interieur de la boule. Or, l’expression

14πε0

B(M,R)

dτ(P )qi

τ

−→PPi

PiP 3

peut etre consideree comme celle du champ cree au point Pi par une distribution volumique decharges distribuees uniformement avec la densite qi/τ a l’interieur de B(M, R). Le point Pi etanta l’interieur de la boule, ce champ vaut

qi

τ

−→MPi

3ε0

On en deduit

−→E

int

mac = − 13ε0

i

qi

−→MPi

soit, finalement,

−→E

int

mac = −−→P (M)

3ε0(6.19)

Le champ macroscopique du aux charges situees a l’interieur de la boule est donc uniforme et“anti-parallele” a la polarisation en M .

Considerons maintenant la contribution du dernier terme dans (6.17), plus precisement, l’integrale

−→J =

Σ

dΣ(A)σp(A)

−→AM

AM3

Christian Carimalo 133 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

Dans cette expression, σp(A) = − −→n Σ (A)· −→P (A) ou

−→n Σ (A) est le vecteur unitaire de la

normale a Σ au point A, orientee vers l’exterieur de Σ, dans le sens du vecteur−→MA. Explicitement,

on a

−→n Σ (A) =

−→MA /MA

Le rayon R de la boule etant d’ordre mesoscopique peut etre considere comme infinitesimal al’echelle macroscopique. Effectuons alors un developpement de la grandeur macroscopique

−→P (A)

au voisinage de M . Par exemple, pour sa composante indexee “z” on aura :

Pz(A) ' Pz(M)+−→MA ·[

−→gradA Pz](M) +

12

(x2 ∂2Pz

∂x2+ y2 ∂2Pz

∂y2+ z2 ∂2Pz

∂z2+

2xy∂2Pz

∂x∂y+ 2xz

∂2Pz

∂x∂z+ 2yz

∂2Pz

∂y∂z

)+ · · ·

ou x, y, z sont les coordonnees cartesiennes de A relativement a un repere cartesien d’origine M .

Considerons la contribution donnee par le premier terme :

−→J 1 =

Σ

dΣ(A)−→P (M)·

−→AM

−→AM

AM4

Pour effectuer l’integration, on peut choisir l’axe z′z du repere attache a M selon−→P (M),

c’est-a-dire de telle sorte que Px(M) = Py(M) = 0. Il vient alors

[−→J 1]x = Pz(M)

1R2

∫ ∫xz sin θdθdϕ , [

−→J 1]y = Pz(M)

1R2

∫ ∫yz sin θdθdϕ ,

[−→J 1]z = Pz(M)

1R2

∫ ∫z2 sin θdθdϕ ,

θ et ϕ etant les angles habituels definissant l’orientation de−→MA dans le repere de M . On montre

aisement que les deux premieres des composantes ci-dessus sont nulles (symetries). La dernierese calcule facilement en remarquant que

∫ ∫z2 sin θdθdϕ =

∫ ∫y2 sin θdθdϕ =

∫ ∫x2 sin θdθdϕ

=13

∫ ∫(x2 + y2 + z2) sin θdθdϕ =

4πR2

3

On en deduit

−→J 1= 4π

−→P (M)

3(6.20)

et que, finalement, la contribution de plus bas ordre du troisieme terme de (6.17) compenseexactement (6.19) ! Nous laissons au lecteur le soin de montrer que

−→J 2 =

Σ

dΣ(A)(

x−→MA ·

−→gradA Px(M) + y

−→MA ·

−→gradA Py(M)

+z−→MA ·

−→gradA Pz(M)

) −→MA

AM4=−→0

Christian Carimalo 134 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

et que les contributions d’ordre plus eleves, contenant des puissances de R superieures ou egalesa 2 (ce qui peut etre prevu par une analyse dimensionnelle), sont finis et peuvent etre negligees 4.

Par ailleurs, dans le premier terme de (6.17), l’integration peut etre etendue sans dommage atout le volume V. En effet, la difference entre les deux integrations est donnee par

14πε0

B(M,R)

dτ(A)ρp(A)

−→AM

AM3

dont le premier terme du developpement selon les puissances de R donne

ρp(M)1

4πε0

B(M,R)

dτ(A)

−→AM

AM3=−→0

tandis que les termes d’ordre plus eleves sont egalement finis, contiennent des puissances de Rsuperieures ou egales a 2 et peuvent aussi etre negliges. En conclusion, le champ electrostatiquemacroscopique un point M situe a l’interieur du dielectrique peut tout aussi bien s’exprimerde la meme facon que le champ en un point a l’exterieur du milieu en fonction des charges depolarisation, selon la formule

−→E mac (M) =

14πε0

VdV(A)

ρp(A)−→AM

AM3+

SdS(A)

σp(A)−→AM

AM3

(6.21)

6.2 Relations constitutives

6.2.1 Causes possibles de polarisation des milieux, polarisabilite

Pour un meme milieu dielectrique, il peut exister diverses causes d’apparition de moments dipo-laires sous une excitation electrique.

♣ La polarisation electronique resulte de la deformation des nuages electroniques sous l’action d’unchamp electrique. Pour de tres nombreux cas, et pour des champs appliques pas trop intenses, lemoment dipolaire induit dans chaque constituant elementaire (atome ou mol’ecule) est colineaireau champ local qui s’exerce sur lui.

H 0,67 He 0,21Li 12 Be 5,6 B 3,1 C 1,7 N 1,1 O 0,72 F 0,51 Ne 0,38Na 27 Al 8,8 Si 5,5 P 3,5 S 2,7 Cl 1,95 Ar 1,62K 34 Xr 2,46

Xe 3,99

αe/4π en A3 = 10−30 m3 pour certains corps purs

On peut alors definir une grandeur scalaire positive α, appelee polarisabilite electronique, telle

que la relation entre ce moment induit−→p et le champ local

−→E loc prenne la forme

−→p = ε0α

−→E loc (6.22)

Selon cette definition, le parametre αe a la dimension d’un volume. Dans le cas d’un milieunon polaire, si n est le nombre par unite de volume des constituants de polarisabilite αe, leurcontribution a la polarisation sera

4A titre d’exercice, montrer que la contribution en R2 est donnee parR2

30ε0

(∆−→P +2

−→grad div

−→P

).

Christian Carimalo 135 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

−→P e = n

−→p = nε0αe

−→E loc (6.23)

♣ La polarisation ionique, due a la deformation d’un reseau cristallin sous l’action d’un champelectrique. Elle est d’autant plus importante que le cristal est plus facilement deformable. Pourun cristal cubique tel NaCl, la polarisation est parallele au champ local. Par analogie avec (6.23),on definit une polarisabilite ionique αi via la relation

−→P i = nε0αi

−→E loc (6.24)

n etant le nombre d’ions par unite de volume. Dans le cas d’un cristal anisotrope, la relationentre polarisation et champ local n’est plus de proportionnalite, tout en restant lineaire, car lapolarisabilite prend alors la forme d’une matrice 3x3.

♣ Dans une molecule depourvue de centre de symetrie (HCl, H2O, NH3) les barycentres descharges positives et des charges negatives sont differents. La molecule possede alors un momentdipolaire permanent qui lui est propre. Elle est alors qualifiee de polaire. Une molecule ayant uncentre de symetrie (H2, CH4, C6H6) ne possede pas de moment dipolaire electrique permanent.Elle est dite non polaire. Elle peut cependant acquerir un moment dipolaire induit. La polarisationd’orientation resulte de la tendance qu’ont des molecules polaires a orienter leur moment dansle sens du champ applique. En l’absence de champ, l’agitation thermique du milieu fait queles moments sont orientes de facon egale dans toutes les directions et le milieu est, globalement,depourvu de polarisation. La polarisation d’orientation n’est generalement pas proportionnelle auchamp 5. Contrairement aux autres types de polarisation, elle varie fortement avec la temperature.Cependant, a la temperature ordinaire, elle est proportionnelle au champ local

−→P o = nε0αo

−→E loc (6.25)

ou αo est la polarisabilite d’orientation et n le nombre de constituants polaires par unite devolume.

H2O HCl NH3 H2S NO2 SO2 CO NaCl KCl C6H5Cl1,85 1,08 1,47 0,97 0,316 1,63 0,112 9,00 10,27 1,69

Moments dipolaires de quelques molecules, exprimes en debye (1 D ' 1310−29 C m)

A chacun de ces phenomenes est attachee une polarisabilite. La polarisabilite totale du milieu doitbien entendu prendre en compte les contributions de toutes les causes possibles de polarisation.

6.2.2 Le champ local

Dans un milieu dense, il est necessaire de prendre en compte les interactions des moments dipo-laires entre eux. Or, le constituant elementaire polarisable se polarise sous l’effet du champ il estreellement soumis. Ce champ est la somme du champ exterieur qui induit la polarisation et lechamp cree par tous les autres constituants polarises : on l’appelle le champ local. Il ne doit pasetre confondu avec le champ macroscopique.

Comme precedemment, placons le constituant considere au centre M d’une boule de rayonmesoscopique R. Le champ qui s’exerce sur le constituant comporte les contributions suivantes.

♠ Le champ exterieur en M :−→E0 (M).

5Voir complement.

Christian Carimalo 136 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

♠ Le champ cree en M par les dipoles exterieurs a la boule−→E ext (M). Or, nous avons vu que le

champ macroscopique de polarisation en M est

−→E macro (M) =

−→E ext (M)+

−→E int (M)

ou

−→E int (M) = −

−→P3ε0

est la contribution “macroscopique” des dipoles a l’interieur de la boule. On a donc

−→E ext (M) =

−→E macro (M) +

−→P3ε0

(6.26)

♠ Enfin, le champ cree en M par les dipoles situes a l’interieur de la boule, hormis celui se

trouvant en M , que nous notons ici−→E′ . Il n’y a generalement pas de relation simple entre ce

champ et le champ macroscopique. Ce n’est generalement que pour les milieux peu denses qu’ilpeut etre neglige.

Le champ local en M s’ecrit donc sous la forme

−→E loc (M) =

−→E0 (M)+

−→E macro (M)+

−→P3ε0

+−→E′ =

−→E (M)+

−→P3ε0

+−→E′=

−→E Lo (M)+

−→E′ (6.27)

ou

−→E (M) =

−→E0 (M) +

−→E macro (M) (6.28)

est le champ macroscopique total et

−→E Lo (M) =

−→E (M) +

−→P3ε0

(6.29)

Ce dernier champ est aussi appele champ de Lorentz.

C’est sous l’effet du champ local s’exercant directement sur lui qu’un constituant polarisableacquiert sa polarisation, comme cela etait deja indique dans la relation (6.22) et les suivantes.

6.2.3 Susceptibilite electrique

Pour de nombreux materiaux et pour les champs usuels pas trop intenses, on observe une relationde linearite entre le vecteur polarisation et le champ macroscopique que l’on ecrit sous la forme

−→P (M) = ε0 χe

−→E (M) (6.30)

ou−→E (M) est le champ macrocopique total (6.28). Par definition, χe est la susceptibilite

electrique du milieu, dont il caracterise l’aptitude a acquerir une polarisation 6. C’est une gran-deur sans dimension. Dans le cas des milieux anisotropes, χe revet la forme d’une matrice 3x3et prend le nom de tenseur de susceptibilite electrique. Pour les milieux isotropes, c’est un simple

6D’ou l’appellation de susceptibilite.

Christian Carimalo 137 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

coefficient, et l’experience montre qu’il est toujours positif, car la polarisation est toujours orienteedans le sens du champ.

Lorsque le materiau isotrope est homogene, χe ne depend pas des coordonnees du point Md’observation. Le milieu est alors qualifie de lineaire, homogene et isotrope, l.h.i. en abrege.

Considerons un milieu isotrope et supposons que le champ−→E′ soit negligeable. Le champ local

se reduit alors au champ de Lorentz et l’on a

−→P = ε0 χe

−→E = nε0α

−→E loc= nε0α

(−→E +

−→P3ε0

)

soit

−→P = 3ε0(

χe

nα− 1)

−→E = ε0 χe

−→E

d’ou l’on tire la relation entre susceptibilite et polarisabilite

χe =3nα

3− nα(6.31)

ou l’on voit que, par l’intermediaire de la densite numerique n, la susceptibilite χe peut dependrede l’etat thermodynamique du milieu, c’est-a-dire, dependre de la temperature et de la pression dumilieu, et d’autant plus concernant la pression si l’on a affaire a un milieu dilue. Par consequent, cen’est a priori que pour un etat thermodynamique bien defini du milieu qu’il y a proportionnaliteentre la polarisation et le champ qui l’induit.

6.2.4 Equations locales du champ macroscopique, permittivite

Dans la situation la plus generale impliquant a la fois des conducteurs et des dielectriques, on estamene a classer les porteurs de charges en deux categories. D’une part les charges dites liees quisont celles qui participent a la structure d’un materiau dont elles ne peuvent s’echapper du fait deleurs fortes liaisons. Ce sont celles qui, par leurs deplacements sous l’effet d’un champ applique,donnent lieu aux densites de charges ρp et σp dont il a ete question plus haut. D’autre part, lescharges dites libres qui, ou bien ne representent qu’un surplus de charge dans un materiau sansparticiper a sa structure, comme les charges que l’on depose a la surface d’un isolant, ou bien,comme dans le cas des electrons de conduction dans les conducteurs, participent a cette structureen y etant toutefois tres peu liees. Dans les deux cas, ces porteurs libres peuvent effectuer desdeplacements importants dans le materiau. Nous noterons ρf et σf les densites volumique etsurfacique correspondantes 7. Les densites de charges totales seront donc

ρ = ρf + ρp , σ = σf + σp (6.32)

Ce sont les densites sources du champ electrostatique total 8. L’equation locale traduisant letheoreme de Gauss prend la forme

div−→E =

ρ

ε0=

1ε0

(ρf − div

−→P

)(6.33)

Definissons le champ auxiliaire

7Les deux mots “liees” et “libres” commencant par la meme lettre, les notations ρ` et σ` pour designer lesdensites de charges libres eussent ete trop ambigues. C’est pourquoi nous empruntons le “f” de freedom pour noterces densites.

8Il s’agit ici du champ macroscopique.

Christian Carimalo 138 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

−→D = ε0

−→E +

−→P (6.34)

appele induction electrique ou excitation electrique, plus rarement maintenant deplacement electrique.Il a la meme dimension que la polarisation et s’exprime donc comme une densite superficielle decharges, en C/m2.

Ce nouveau champ satisfait l’equation

div−→D = ρf (6.35)

ou seule intervient la densite de charges libres. Il ne faudrait pas en deduire pour autant que cechamp n’est determine que par les seules charges libres. En effet, comme le champ electrostatiquederive toujours d’un potentiel electrique :

−→rot

−→E =

−→0 ↔

−→E = −

−→grad V (6.36)

on en deduit

−→rot

−→D =

−→rot

−→P (6.37)

Des deux equations

−→rot

−→E =

−→0 , div

−→D = ρf

on deduit, pour le cas general, qu’a l’interface de deux milieux, les composantes du champelectrostatique paralleles au plan tangent separant localement les deux milieux sont continues,tandis que la composante normale a ce plan de l’induction electrique peut subir une discontinuite,mesuree par une eventuelle densite surfacique de charges libres :

DN2 −DN1 = σf (6.38)

Considerons un milieu lineaire pour lequel la relation (6.30) est verifiee. La relation entre l’in-duction electrique et le champ electrique s’ecrit alors

−→D = ε0(1 + χe)

−→E = ε

−→E , avec ε = ε0(1 + χe) (6.39)

Le parametre ε, qui prend la forme d’une matrice 3x3 dans le cas de milieux anisotropes, estappele permittivite du milieu. On definit egalement la permittivite relative, appelee aussi constantedielectrique, par

εr =ε

ε0= 1 + χe (6.40)

Dans le cas de milieux inhomogenes, ces grandeurs peuvent varier de point en point.

On notera qu’en fonction de ces grandeurs, la polarisation s’ecrit sous la forme

−→P = ε0(εr − 1)

−→E = (ε− ε0)

−→E (6.41)

En terme de permittivite relative, la relation (6.2.4) s’ecrit

εr − 1 =3nα

3− nα

Christian Carimalo 139 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

et conduit a cette autre relation

3=

εr − 1εr + 2

(6.42)

qui fait le lien entre la grandeur “moleculaire” α et la grandeur macroscopique εr. On peut yintroduire la masse volumique ρm en faisant usage de la relation ρm = nM/NA, ou M est lamasse molaire et NA le nombre d’Avogadro, pour obtenir la relation de Clausius-Mossotti 9

α NA

3=

εr − 1εr + 2

M

ρm(6.43)

qui est assez bien verifiee experimentalement pour les fluides de molecules non polaires, memedenses, dans un grand domaine de variation de la masse volumique ρm.

Substance εr Substance εr

Vide 1 Air sec 1,00054Petrole 2,1 Benzene 2,3NaCl 6,1 Soufre 4,1Verres 4 a 7 Mica 8

Diamant 5,5 Paraffine 2,1Eau pure 80,4 Titanate de Baryum ' 1500

Valeurs de εr pour quelques dielectriques (sous 1 atm et a 20 C)

6.2.5 Equations de continuite aux interfaces

Considerons maintenant uniquement le cas de milieux dielectriques l.h.i., et envisageons deuxinterfaces possibles, a l’equilibre electrostatique.

♣ Cas d’une interface conducteur-dielectrique.

A l’interieur du conducteur a l’equilibre, le champ electrostatique est nul, ainsi que l’inductionelectrique et la polarisation. Si le milieu exterieur au conducteur est le vide, il n’y a pas de chargesde polarisation, et l’on a uniquement des charges libres a la surface du conducteur. On a alors,en tout point de la surface

−→E =

σf

ε0

−→N ,

−→D = σf

−→N (6.44)

−→N etant le vecteur unitaire de la normale sortante a la surface du conducteur. Si le milieu

exterieur au conducteur est un dielectrique de permittivite ε, les relations precedentes deviennent

−→E =

σ

ε0

−→N ,

−→D = σf

−→N = ε

−→E (6.45)

Il vient alors

σf = εrσ = εr(σp + σf )

soit

σp = −σf (1− 1εr

) , σ =σf

εr(6.46)

9R. Clausius, “Die Mechanische Warmelehre”, Vieweg-Verlag, Brunswick, Allemagne, 1879, vol II, p94 ; O.Mossotti, Mem. Math. Fis. Modena, 24, II, 49 (1850).

Christian Carimalo 140 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

On constate donc qu’a une interface conducteur-dielectrique portant une densite de charges libresσf existe aussi une densite superficielle de polarisation σp, opposee a σf , puisque, χe etant positif,εr = 1 + χe est plus grand que 1. La densite de charges totale a l’interface s’en trouve reduitepar un facteur 1/εr.

♣ Cas d’une interface entre deux dielectriques.

Supposons ici que cette interface ne comporte aucune charge libre. Les equations de continuiteprennent alors la forme

ε1EN1 = ε2EN2 ,−→E T1=

−→E T2 (6.47)

ou ε1 et ε2 sont les permittivite respectives des deux milieux. A l’interface, les lignes de champdu champ electrostatique dans les deux milieux sont dans un meme plan. En notant θ1 et θ2 lesangles qu’elles forment respectivement avec la normale a l’interface, comme

tan θi =||−→E Ti

|||ENi |

, i = 1, 2

on trouve

tan θ1

tan θ2=

ε1ε2

(6.48)

ce qui signifie qu’il y a une “refraction” des lignes de champ a l’interface.

6.3 Exemples d’applications

Dans les applications considerees ci-apres, les milieux dielectriques envisages sont linenaires, ho-mogenes et isotropes et ne comportent aucune charge libre. Dans ces conditions, les equationslocales a l’interieur de ces milieux deviennent

−→rot

−→E =

−→0 , div

−→D = 0 = div(ε

−→E ) = ε div

−→E , donc div

−→E = 0 (6.49)

et le potentiel electrostatique satisfait alors l’equation de Laplace

∆V = 0 (6.50)

On sait que la solution de cette equation correspondant a des conditions aux limites donnees estunique, resultat dont nous ferons systematiquement usage.

6.3.1 Condensateur plan avec dielectrique

Nous modeliserons ce condensateur comme suit : la region I definie par x < 0 et la region IIdefinie par x > h > 0 sont celles des armatures conductrices du condensateur ; la region IIIdefinie par 0 < x < h est occupee par un milieu l.h.i. de permittivite ε. Les conducteurs I et IIsont portes aux potentiels V1 et V2 respectivement. Dans la region III du dielectrique, la fonctionV (x) = Ax+B verifie l’equation de Laplace et, par ajustement des deux constantes A et B, peutsatisfaire les conditions V (0) = V1 et V (h) = V2. C’est la fonction potentiel recherchee pour laregion III. Tout calcul fait, on trouve

V (x) = (V2 − V1)x

h+ V1 (6.51)

Dans cette meme region, le champ electrostatique est donne par

Christian Carimalo 141 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

−→E = −

−→grad V =

V1 − V2

h

−→ex (6.52)

D’ou le vecteur induction electrique

−→D = ε

−→E = ε

V1 − V2

h

−→ex (6.53)

La densite superficielle de charges libres sur le conducteur I est donc (les champs−→E et

−→D sont

nuls dans les conducteurs a l’equilibre)

σ1 = εV1 − V2

h(6.54)

La densite correspondante portee par la surface du conducteur II est σ2 = −σ1. Si S est lasurface commune des armatures en regard, on en deduit la charge Q = Sσ1 du condensateur puissa capacite C = Q/(V1 − V2)

C = εr C0 , avec C0 = ε0S

h(6.55)

ou C0 est la capacite du condensateur ayant le vide pour milieu dielectrique intermediaire. Commeεr > 1, on en deduit que le remplacement du vide par un dielectrique entre les armatures d’uncondensateur accroit la capacite de celui-ci. On peut encore dire qu’a tension V1 − V2 donnee,l’introduction d’un milieu dielectrique entre ses armatures accroit la charge du condensateur 10.

6.3.2 Condensateur spherique avec dielectrique

En notant r = OM la distance d’un point M a l’origine O d’un repere cartesien O, x, y, z, lageometrie du condensateur sera definie comme suit : la region I definie par r < R1 et la regionII definie par r > R2 correspondent aux armatures du condensateur. La region III definie parR1 < r < R2 est emplie d’un dielectrique de permittivite ε. L’armature centrale I est portee aupotentiel V1 tandis que l’armature externe II est portee au potentiel V2. La symetrie spheriqueautour de O de ce dispositif et des conditions aux limites correspondantes pour le potentiel imposea celui-ci d’avoir la meme symetrie. On sait que la seule solution generale a l’equation de Laplacequi possede cette symetrie est de la forme

V (r) =A

r+ B

ou A et B sont deux constantes que l’on doit ajuster pour satisfaire les conditions aux limitesV (R1) = V1 et V (R2) = V2. On trouve ainsi le potentiel dans la region III :

V (r) =1

R2 −R1

((V1 − V2)

R1R2

r+ V2R2 − V1R1

)(6.56)

puis le champ electrostatique (radial)

−→E = E(r)

−→er , avec E(r) =

V1 − V2

R2 −R1

R1R2

r2(6.57)

puis le vecteur induction electrique

−→D = D(r)

−→er , avec D(r) = ε

V1 − V2

R2 −R1

R1R2

r2(6.58)

10En 1837, Faraday avait montre que la capacite d’un condensateur devient 4 fois plus grande en coulant dusoufre entre les armatures.

Christian Carimalo 142 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

La densite superficielle de charges libres portees par l’armature I est

σ1 = D(R1) = εV1 − V2

R2 −R1

R2

R1(6.59)

et celle des charges de l’armature II est

σ2 = −D(R2) = −εV1 − V2

R2 −R1

R1

R2(6.60)

On en deduit la charge Q = 4πR21σ1 du condensateur, puis la capacite C = Q/(V1 − V2)

C = εrC0 , avec C0 = 4πε0R1R2

R2 −R1(6.61)

ou, ici encore, C0 represente la capacite d’un condensateur spherique ayant le vide pour milieuinter-conducteurs.

6.3.3 Condensateur spherique avec deux dielectriques non concentriques

Reprenons le dispositif precedent, mais pour lequel, cette fois, l’espace entre les deux armaturescomporte deux dielectriques differents. La region III definie par R1 < r < R2 et z > 0 contientun dielectrique de permittivite ε1, et la region IV definie par R1 < r < R2 et z < 0 contient undielectrique de permittivite ε2. Bien que le dispositif n’a plus, globalement, la symetrie spherique,les conditions aux limites pour le potentiel gardent cette symetrie. C’est pourquoi le potentiel etle champ electrostatique ont la meme forme que dans l’exemple precedent. Par contre, l’inductionelectrique change. Dans la region inter-conducteurs, on a maintenant

D(r) = ε1E(r) pour z > 0 , D(r) = ε2E(r) pour z < 0 (6.62)

On en deduit que sur la demi-sphere r = R1 , z > 0, la densite superficielle de charge est

σ1 = ε1V1 − V2

R2 −R1

R2

R1(6.63)

et que la densite superficielle de charges sur la demi-sphere r = R1 , z < 0 est

σ′1 = ε2V1 − V2

R2 −R1

R2

R1(6.64)

La charge totale du condensateur est donc Q = 2πR21(σ1 + σ′1), d’ou la capacite

C = 2π(ε1 + ε2)R1R2

R2 −R1(6.65)

La difference de permittivite provoque l’apparition d’une force s’exercant entre les deux armaturesdu condensateur. En effet, la force subie par les charges situees dans un element de surface dSde l’armature centrale est

d−→f1 =

σ21

2ε1dS

−→er pour z > 0

et

d−→f ′1 =

σ′212ε2

dS−→er pour z < 0

Christian Carimalo 143 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

On obtient alors la force totale subie par l’armature centrale comme

−→fc =

R21

2

(σ2

1

ε1− σ′21

ε2

) ∫ π/2

0

sin θdθ

∫ 2π

0

dϕ(cos θ

−→ez +sin θ(cos ϕ

−→ex + sin ϕ

−→ey )

)

= πR21

(σ2

1

ε1− σ′21

ε2

) ∫ 1

0

u du−→ez

soit, tout calcul fait

−→fc =

Q2

8πR21

ε1 − ε2(ε1 + ε2)2

−→ez (6.66)

Q etant la charge du condensateur.

6.3.4 Plaque dielectrique perpendiculaire a un champ uniforme

Un materiau dielectrique l.h.i. de permittivite ε et d’epaisseur h est suppose emplir toute la regiondefinie par 0 < x < h. Le materiau est place dans le vide, perpendiculairement aux lignes de

champ d’un champ electrostatique exterieur uniforme−→E0= E0

−→ex .

La geometrie du dispositif est telle que le potentiel electrostatique ne doit pas dependre descoordonnees “laterales” y et z. L’equation de Laplace a laquelle le potentiel doit satisfaire danschacune des regions x < 0, 0 < x < h et x > h se reduit alors a

d2V

dx2= 0

qui conduit a la solution

V (x) = Ax + B

les constantes A et B devant etre ajustees dans chacune des regions, de telle sorte a assurerla continuite du potentiel et la continuite de la composante normale de l’induction electrique,puisqu’aucune charge libre n’est presente. Comme nous pouvons fixer l’origine des potentiels enx = 0, nous poserons

V (x) = A1x pour x ≤ 0 , V (x) = A2x pour 0 ≤ x ≤ h

V (x) = A3x + B3 pour x ≥ h

Il vient (continuite de Dx)

ε0A1 = εA2

pour x = 0 et

A2h = A3h + B3 , εA2 = ε0A3

pour x = h. On obtient ainsi A1 = A3 = A, A2 = εrA et B3 = (εr−1)Ah. Pour fixer la constanteA, nous admettrons que, loin du materiau, dans les regions ou |x| À h, le champ doit coıncideravec le champ exterieur applique. Ceci donne A ≡ E0. On en deduit

Christian Carimalo 144 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

−→E = E0

−→ex pour x < 0 ou x > h

−→E =

E0

εr

−→ex pour 0 < x < h (6.67)

Le vecteur polarisation dans le dielectrique est donc

−→P = ε0(εr − 1)

−→E = ε0

−→E0 −ε0

−→E (6.68)

d’ou

−→E =

−→E0 −

−→Pε0

(6.69)

Comme l’on a ici div−→P = 0, il n’y a que des charges de polarisation superficielles : avec la

densite σp = P = ε0E0(1 − 1/εr) > 0 sur le plan x = h, et la densite −σp sur le plan x = 0.La relation ci-dessus montre que cette distribution de charges cree dans le dielectrique un champ

depolarisant −−→Pε0

qui s’oppose au champ inducteur−→E0 (elle produit un champ nul a l’exterieur

du dielectrique).

6.3.5 Plaque dielectrique parallele a un champ uniforme

Reprenons le dispositif precedent, mais cette fois avec un champ exterieur oriente parallelement

aux surfaces de la plaque dielectrique :−→E0= E0

−→ey . Tout plan parallele au plan xOz est un plan

d’antisymetrie pour le champ inducteur qui lui est orthogonal. Il est alors naturel de supposerque le champ electrostatique total, l’induction electrique et la polarisation dans le dielectriquesont parraleles au champ inducteur. De par la geometrie de l’echantillon, la variable y n’estpas (au moins approximativement) une variable sensible. Il en resulte que ces champs doiventaussi etre uniformes. La continuite des composantes tangentielles du champ electrostatique auxsurfaces laterales de la plaque impose que le champ a l’interieur du dielectrique soit egal au champexterieur applique :

−→E '

−→E0 (6.70)

Le champ depolarisant est donc inexistant, et le champ exterieur penetre completement le dielectrique,conduisant a la polarisation

−→P = ε0(εr − 1)

−→E0 (6.71)

Tout ceci est compatible avec le fait qu’une telle distribution de polarisation est equivalente ades charges superficielles localisees aux extremites de la plaque (|y| → ∞), creant un champnegligeable aux points qui en sont eloignes.

6.3.6 Boule dielectrique dans un champ uniforme

Considerons une boule de centre O et de rayon R, faite d’un materiau dielectrique l.h.i. de

permittivite ε, placee dans le vide ou regne un champ uniforme−→E0= E0

−→ez . Par rapport a un

repere cartesien O, x, y, z centre sur O, nous repererons la position de tout point M au moyen deses coordonnees spheriques r, θ, ϕ.

Christian Carimalo 145 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

Le dispositif etudie possedant la symetrie cylindrique autour de l’axe Oz, le potentiel electrostatiqueV (M) ne peut dependre de l’angle ϕ. On a donc V (M) = V (r, θ). Les charges libres a l’originedu champ inducteur etant supposees se trouver a distance infinie de la boule, le potentiel satisfaitl’equation de Laplace en tout point a l’interieur de la boule et en tout point a l’exterieur de laboule. Elle se reduit ici a

∂r

(r2 ∂V

∂r

)+

1sin θ

∂θ

(sin θ

∂V

∂θ

)= 0

On sait que les solutions de cette equation peuvent s’exprimer comme des combinaisons lineairesde solutions “elementaires” ayant la forme d’un produit f(r)g(θ) d’une fonction ne dependantque de r et d’une fonction ne dependant que de θ. Ces fonctions doivent satisfaire l’equation

1f

d

dr(r2f ′) = − 1

g sin θ

d

dθ(sin θg′) = constante (6.72)

On peut en fait restreindre fortement l’ensemble des fonctions g(θ) admissibles grace au raison-nement suivant.

On sait que la polarisation de la boule peut etre decrite en terme de distributions de charges depolarisation. Celles-ci sont confinees dans la boule et sur sa surface. En consequence, le champqu’elles creeent en un point situe a l’exterieur de la boule et a grande distance de celle-ci est

certainement negligeable devant le champ inducteur uniforme−→E0 . Il s’ensuit qu’a grande distance

r, le potentiel V (r, θ) doit se confondre avec le potentiel Ve(M) du champ inducteur, potentielqui s’ecrit, a une constante additive pres,

Ve(M) = −E0z ≡ −E0 r cos θ

En consequence, pour le potentiel V (r, θ) = f(r)g(θ) a l’exterieur de la boule, on a necessairementg(θ) = cos θ (la constante multiplicative est rejetee dans l’expression de f(r)). D’un autre cote, lacontinuite du potentiel pour r = R conduit a une equation du type fint(R)gint(θ) = fext(R) cos θ.Celle-ci ne pourra etre verifiee pour tout θ que si l’on a aussi gint(θ) = cos θ. En conclusion, lepotentiel en tout point est necessairement de la forme V (r, θ) = f(r) cos θ ou la fonction f(r)doit satisfaire l’equation differentielle

r2 f ′′ + 2r f ′ − 2f = 0 (6.73)

obtenue a partir de l’equation de Laplace. Il paraıt evident que cette equation est satisfaite par des“fonctions puissances” du type rα ou α peut etre positif ou negatif. Posons alors f(r) = rαu(r).En reportant cette expression dans l’equation differentielle, on obtient

rα+2u′′ + 2(α + 1)rα+1u′ + rαu [α(α + 1)− 2] = 0

On peut annuler le troisieme terme du membre de gauche de l’equation en choisissant α de tellesorte que α(α+1)−2 = 0. On trouve alors deux solutions α = 1 et α = −2. Si l’on choisit α = 1,la fonction u doit satisfaire l’equation

4u′ + ru′′ = 0 =1r3

[4r3u′ + r4u′′

]=

1r3

d

dr(r4u′)

d’ou u′ =K1

r4et, integrant une nouvelle fois, il vient u =

A

r3+ B, et, finalement,

f(r) =A

r2+ Br (6.74)

Christian Carimalo 146 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

ou A et B sont deux constantes. Le choix α = −2 conduit a la meme expression pour f(r). Lasolution generale pour le potentiel s’ecrit donc

V (r, θ) =(

A

r2+ Br

)cos θ (6.75)

Il faut prendre garde au fait que les constantes A et B peuvent avoir des expressions differentesselon qu’on se trouve a l’exterieur ou a l’interieur de la boule. Dans cette derniere region notam-ment, le potentiel ne peut y avoir de singularite en r = 0, alors que la boule est exempte de chargeponctuelle libre et que la distribution equivalente de charges de polarisation pour r < R est denature volumique. Ceci impose de prendre A = 0 pour r ≤ R. Nous ecrirons donc le potentielsous la forme

Vint = Bint r cos θ , pour r ≤ R

Vext =(

Aext

r2+ Bext r

)cos θ , pour r ≥ R

Nous savons que pour r À R, on doit avoir Vext ' Ve = −E0r cos θ. Cette deuxieme conditionimpose que l’on ait Bext = −E0. Les deux constantes Aext et Bint sont ensuite determinees enimposant la continuite, pour r = R, du potentiel et de la composante normale de l’inductionelectrique.

La continuite du potentiel pour r = R est assuree pour tout θ si

Bint =Aext

R3+ Bext

La continuite de Dr pour r = R s’exprime par l’equation

−(

∂Vext

∂r

)

r=R

= −εr

(∂Vint

∂r

)

r=R

qui conduit a ecrire

−εrBint = 2Aext

R3+ E0

On trouve ainsi

Bint = − 3εr + 2

E0 , Aext =εr − 1εr + 2

R3E0

Le potentiel a l’interieur de la boule est donc

Vint = − 3εr + 2

E0 r cos θ ≡ − 3εr + 2

E0 z (6.76)

Le champ dans cette region est donc uniforme et parallele au champ inducteur

−→E int=

3εr + 2

−→E0 (6.77)

La polarisation est elle aussi uniforme

−→P = ε0(εr − 1)

−→E int= 3ε0

εr − 1εr + 2

−→E0 (6.78)

et le champ de depolarisation est

Christian Carimalo 147 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

−→E int −

−→E0= −εr − 1

εr + 2

−→E0= −

−→P3ε0

(6.79)

Lea charges de polarisation ne se trouvent qu’a la surface de la boule, avec la densite superficielle

σp = P cos θ = 3ε0εr − 1εr + 2

E0 cos θ (6.80)

A l’exterieur de la boule, le potentiel s’ecrit

Vext = −E0 r cos θ + Aextcos θ

r2= Ve +

14πε0

(4πε0Aext)cos θ

r2(6.81)

et se presente donc comme la somme du potentiel Ve du champ inducteur et du potentiel d’undipole place au centre de la boule et dont le moment dipolaire vaut

−→P = 4πε0

εr − 1εr + 2

R3−→E0=

3R3

−→P (6.82)

Christian Carimalo 148 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

6.4 Complement : Polarisation d’orientation

La Thermodynamique Statistique nous enseigne que la probabilite pour qu’un systeme thermo-dynamique soit dans un etat d’energie E alors qu’il est en equilibre thermique avec un thermostatde temperature T est proportionnelle au facteur de Boltzmann

e−βE , avec β =1

kBT(6.83)

ou kB est la constante de Boltzmann. Si les constituants elementaires du systeme sont independantsstatistiquement les uns des autres, la probabilite totale pour le systeme en entier est le produitdes probabilites individuelles s’appliquant a chaque constituant. Imaginons qu’il s’agisse d’uneassemblee de dipoles pouvant orienter librement leur moment dipolaire. Nous supposerons que lemileu constitue par ces dipoles est suffisamment dilue pour que l’on puisse negliger les interactionselectriques des dipoles entre eux. Ainsi, les dipoles peuvent etre approximativement considerescomme statistiquement independants.

Lorsqu’elle agit seule, la perpetuelle agitation thermique dans le milieu entraıne une repartitionisotrope des moments dipolaires et aucune polarisation n’apparaıt au niveau macroscopique : lemilieu n’est pas polarise. Si est un champ electrique exterieur est applique, chaque dipole demoment

−→p peut alors acquerir l’energie potentielle

U = − −→p ·

−→E = −pE cos θ

ou θ est l’angle entre la direction du moment dipolaire et celle du champ−→E s’exercant sur le

dipole (dans la suite la direction du champ est choisie pour definir un axe z′z de reference).Libre de s’orienter, la tendance naturelle du dipole est d’aligner son moment dipolaire selon lechamp applique. Cependant, cette tendance est contrariee par l’agitation thermique qui tend aucontraire a repartir les orientations au hasard. L’equilibre entre ces deux tendances opposees faitemerger, pour chaque dipole, une probabilite de realisation d’une orientation particuliere de sonmoment dipolaire. Ainsi, la probabilite pour que le moment dipolaire pointe a l’interieur d’unangle solide dΩ = sin θdθdϕ autour d’une direction moyenne definie par les angles spheriques θet ϕ est donnee par

dP =1Z

e−βUdΩ

ou Z est une constante servant a la normalisation des probabilites, c’est-a-dire telle que l’integrationde la probabilite elementaire donnee ci-dessus sur tous les angles possibles soit egale a 1 :

1Z

∫ π

0

sin θdθ

∫ 2π

0

dϕ e−βU = 1

On trouve

Z = 4πsinhx

x, avec x = pβE (6.84)

Avec cette loi de probabilite, calculons la valeur moyenne du moment dipolaire de chaque dipole :

−→p = p

(cos θ

−→ez +sin θ(cos ϕ

−→ex +sin ϕ

−→ey )

)

Comme la loi de probabilite ne depend pas de ϕ, les valeurs moyenne de px et de py sont nulles.Celle de pz est

Christian Carimalo 149 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

< pz >= − 1E

< U >=1

ZE

∫ ∫U e−βUdΩ =

1ZE

∂β

∫ ∫e−βUdΩ =

1ZE

∂Z

∂β=

1E

∂ lnZ

∂β

On obtient ainsi

< pz >= pd ln Z

dx= pL(x) (6.85)

ou

L(x) = coth x− 1x

(6.86)

est la fonction de Langevin 11. C’est une fonction positive, strictement croissante, dont la valeurest nulle pour x = 0 et tend vers 1 vers les grandes valeurs de x (pour x petit on a L(x) ' x/3.et pour x grand on a L(x) ' 1− 1/x).

Fonction de Langevin

Dans les cas usuels, les grandes valeurs de x correspondent a de basses temperatures, en toutcas des temperatures telles que T ¿ pE/kB . L’agitation thermique est plus faible et les dipoless’orientent plus facilement dans le sens du champ. A l’inverse, pour T À pE/kB , l’agitationthermique est plus importante et l’on comprend que pour de tres hautes temperatures ou pour deschamps faibles, la polarisation est plus faible et disparait a la limite, les orientations dipoles etant anouveau redistribuees au hasard. Meme pour les temperatures usuelles (T ' 300 K), le parametrex est generalement encore suffisamment petit pour que l’on puisse utiliser l’approximation

L(x) ' x

3

ce qui donne

< pz >' p2

3kBT

On en deduit la polarisabilite d’orientation

αorient =p2

3ε0kBT(6.87)

11Cette fonction fut introduite par Langevin en 1905 lors de son etude theorique du paramagnetisme : P.Langevin, J. Phys., 4, 678 (1905).

Christian Carimalo 150 Cours d’Electromagnetisme

Chapitre 6. Electrostatique des dielectriques

On notera que, contrairement aux autres types de polarisation, cette polarisabilite d’orientationdepend fortement de la temperature : c’est ce qui permet de la distinguer experimentalement.

Christian Carimalo 151 Cours d’Electromagnetisme