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1 Elephantman 1923 La Controverse de Liverpool Dossier Pédagogique

Elephantman 1923...4 Synopsis 1923. Fedeick T ees publie ses mémoies de médecin où il elate, pami d’aut es sou Àenis, les quelques années passées auprès de son patient, Joseph

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Elephantman

1923

La Controverse de Liverpool

Dossier Pédagogique

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SOMMAIRE

Genèse p.3

Synopsis p.4

Distribution p.4

La compagnie p.5

L’auteur p.6

Le spectacle p.6

Sur la scénographie

Représenter Merrick

Sur la musique

Points de vue dramaturgiques p.8

Intérêts pédagogiques p.10

Au collège

Au lycée

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Genèse

L’histoire de Joseph Merrick, appelé L’Homme-Éléphant, est connue du public grâce au film

éponyme de David Lynch, sorti en 1980. Mais trois ans avant le film, un auteur anglais du

nom de Bernard Pomerance écrit une pièce à partir de la même source, Les Mémoires du

Docteur Treves, pièce qui connut elle aussi un succès considérable. La pièce et le film

racontent la même histoire, celle de la rencontre du Docteur Treves et de Joseph Merrick,

jeune homme souffrant de telles malformations qu’il est exhibé de foire en foire dans des

conditions inhumaines. Mais ils ne le font pas de la même manière. Lynch a déstructuré la

chronologie des événements, sans doute dans un souci de rythme, et pour profiter des

avantages du cinéma, qui permet des changements de lieu instantanés. La pièce, quant à

elle, peint des caractères et des sentiments plus complexes. Le théâtre et son langage

interrogent davantage l’ambiguïté des intentions des personnages, quand le cinéma

privilégie l’action et en induit un certain manichéisme. C’est en voyant le film qu’est née

l’idée d’un spectacle sur Elephant Man, et c’est en lisant la pièce, en constatant les points

communs et les divergences entre pièce et film que nous avons voulu en apprendre plus sur

la vie de Joseph Merrick, que nous avons lu les Mémoires du Docteur Treves ainsi que The

true history of the Elephant Man de Michael Howell et Peter Ford. Ce dernier ouvrage tente

de recoller les pièces du puzzle, procédant comme une véritable enquête, cherchant les

failles de la version subjective de Treves, replaçant l’histoire dans sa véracité historique et

allant sur les traces de tous ceux qui auraient pu croiser cet homme. On y trouve des archives

du directeur de l’Hôpital, le récit de la visite de la reine, Les Mémoires inédites de Tom

Norman (le montreur), l’autobiographie qu’Elephant Man vendait à la fin de ses exhibitions,

le poème avec lequel il signait ses lettres….

La réalité nous est apparue plus forte que les fictions. Les contrastes entre le tragique et la

légèreté y étaient souvent plus saisissants. Une évidence : la diversité des points de vue sur

la situation de Merrick et la question de leur légitimité serait au cœur de notre travail.

Voici comment est né ElephantMan 1923, La Controverse de Liverpool.

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Synopsis

1923.

Frederick Treves publie ses mémoires de médecin où il relate, parmi d’autres souvenirs, les

quelques années passées auprès de son patient, Joseph Merrick, mieux connu sous le nom

d’Elephant Man. Il y raconte comment il put le recueillir dans son hôpital et ré-humaniser cet

individu que les malformations dégénératives avaient condamné à une vie de monstre,

exhibé de foire en foire. Son ancien « impresario », Tom Norman, se sentant injustement

attaqué, demande une audience publique afin de rétablir la vérité. Les deux hommes vont se

livrer à une joute verbale et rejouer les passages les plus troublants de la vie d’Elephant

Man ; et ainsi tenter de reconstituer la véritable histoire de Joseph Merrick.

C’est le début de ce que l’on appellera plus tard « la Controverse de Liverpool ».

Distribution

Texte et musiques : Joseph Lecadre

Mise en scène : Joseph Lecadre et Morgane Maisonneuve

Aide à la dramaturgie : Lisa Paul

Scénographie : Cécile Gravot

Lumières : Romain Nail

Costumes : Patricia Nail

Avec :

Mathilde Clavier : Mrs Kendal, une soignante,

Clarinette, saxophone, mélodica

Amandine Dolé : Gomm, une étudiante

Violoncelle

Jane Héraud : Une malade, une étudiante, le policier belge

Pianos, flûte, mélodica, glockenspiel

Joseph Lecadre : Merrick (l’Homme-Elephant), Norman

Percussions

Simon Morant : Docteur Treves

Accordéon, percussion

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La compagnie

Le Théâtre des Cerises, compagnie nantaise, réunit un collectif d’artistes pluridisciplinaires

(comédiens, chanteurs, musiciens, écrivains, scénographes…). Son travail interroge les

différentes formes de théâtre musical et s’attache à expérimenter le mélange des arts dans

des créations originales (écriture ou traduction des textes, composition de la musique) en

vue d’un théâtre populaire et exigeant.

Après la création du Triptyque intitulé l’Enfer des Cerises, composé de Le Moine, Je vous

salue Jarry et La Nonne Sanglante, la compagnie continue d’explorer les genres et de

chercher de nouveaux public, créant opéra rock et opéra forain, textes classiques ou

contemporains, créations pour le jeune public, les lycéens, pour la rue. Plusieurs spectacles

voient ainsi le jour : L’heure du singe, L’Homme sans bras, Maxa on the rocks, Hansel et

Gretel, Carmen Murdered again, Le Conte d’hiver.

L’auteur et compositeur

Joseph LECADRE

Après plusieurs années d’études en guitare classique et en chant, ainsi qu’une formation de

comédien au Conservatoire d’Art dramatique de Nantes/2000-2002, Joseph Lecadre a vite

intégré de nombreux projets professionnels, ayant en commun le mélange des disciplines. La

question du rapport entre théâtre et musique s’est toujours posée dans sa pratique. Il intègre

le Théâtre des Cerises et participe aux compositions collectives et propose de nombreux

morceaux à chacune de ses créations ; il y interprète plusieurs rôles chantés d’importance et

continue de pratiquer la guitare dans de nombreux registres, notamment rock sur le

spectacle Maxa on the rocks/2009. En 2012, il assure la composition, l’instrumentation et la

direction musicale d’une grande majorité des musiques du Conte d’Hiver. Il participe

également aux compositions des musiques de spectacle et signe plusieurs d’entre elles au

sein de la Compagnie Bagamoyo (Chewing-gum/2005), du Théâtre d’Après (7 Histoires/2010,

Prends en de la Graine/2013) et du Théâtre Pom (9 Coriaces/2015). Il est aussi auteur et

compositeur de nombreuses chansons qu’il interprète dans plusieurs formations musicales

(Les Cordes Avides, la Fanfare des Cerises, Le Ferrand Maréchal Band) ainsi qu’en solo.

Toujours en lien avec sa pratique en tant que comédien, il écrit 2 pièces destinées au théâtre

sans parole (Les Petites Choses/2010, 2bis/2013).

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Le spectacle

« Mais il lui fallait quelque chose pour rendre plus réaliste son personnage de fiction. D’où

l’élégant nécessaire qui le transformait en gandin, de même que la couronne à deux sous et le

rideau font une grande dame d’une gamine en jupons courts ».

F. Treves - Mémoires du Docteur Treves

Nous assistons à l’affrontement de deux hommes. Ils témoignent et font le récit de certains

épisodes de la vie de Joseph Merrick. Mais dans ce plaidoyer viennent s’insérer des scènes,

illustrations subjectives de ce qui est décrit par les mots. De cette manière, le spectacle

débute comme si le public allait assister à l’exhibition de l’Homme-Éléphant. Il est invité à

rentrer au théâtre comme il rentrerait dans la tente de foire de Norman puis il se focalise sur

la partie que nous connaissons mieux, à l’hôpital, dans les mains de Treves. Cette bascule du

débat à la représentation, de l’épique au dramatique, laisse la place à la démesure, à la

distance, aux rêves et aux commentaires. Ainsi se superposeront deux plaisirs : celui de

s’entendre raconter une histoire et celui de voir les comédiens inventer les systèmes

permettant de transmettre cette histoire. Les comédiens endosseront plusieurs rôles et

rejoindront l’orchestre ou le vestiaire – tous deux à vue – sitôt leur scène terminée, ne

cédant rien ni à l’intensité musicale ni au plaisir du jeu. Le tout dans une sorte de tourbillon

mettant à profit une virtuosité et une urgence au plateau propice à un sentiment jubilatoire,

indispensable contrepoint à la densité du texte.

Sur la scénographie

La vie de Merrick est caractérisée par d’apparents bouleversements qui le mènent des mains

du bourreau (Norman) à celles du protecteur (Treves), de l’humiliation des foires au confort

d’un « chez soi ». Au fur et à mesure de l’histoire, la chambre où sera recueilli Merrick – et ce

avec de bonnes intentions de ses protecteurs - s’avèrera être un nouveau lieu d’exhibition

dont il n’aura finalement pas plus de possibilité de s’extraire. C’est donc une scène surélevée

et ronde, hérissée de barreaux, qui matérialisera à la fois les tréteaux d’exhibition et la

chambre. Une cage, une piste de cirque, un théâtre dans le théâtre où se jouent parades

monstrueuses et mascarades mondaines. Et qui lie le regardé et le regardant, le dedans et le

dehors, le vu et le caché représentant ainsi la notion de point de vue. Une tenture vient

compléter le dispositif pour fermer l’espace et ainsi permettre de jouer le hors-champ dans

un drame exclusivement centré sur Merrick. Et bien que nous laissions au spectateur la

liberté de l’émotion, la fabrique du théâtre reste toujours présente. Nous assistons à un

spectacle reconstitué, orchestré par ces deux hommes, Norman et Treves. Comme pour

mettre en scène un tribunal, les duellistes parlent à leurs pupitres placés de part et d’autres

de la scène. Les musiciens forment un orchestre en arrière scène, prêts au moindre signal à

souligner en musique les arguments de l’un ou de l’autre ; s’invitant même parfois sur le

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plateau pour donner la parole à certains personnages, réels ou imaginaires. Chacun use de

tous les artifices possibles pour convaincre le public. Et au clair-obscur des scènes

reconstituées s’ajoutent les lumières criardes d’un show télévisé. Les lumières ne montrent

que ce qu’il faut, laissant dans le noir les indispensables mystères et distribuant les espaces

de jeu comme autant de séquences. Meubles et costumes finissent de suggérer les

changements successifs, dessinant une fonction bien plus qu’une esthétique ou encore une

époque. Ce qui importe c’est en quoi ils font sens pour le spectateur d’aujourd’hui.

Représenter Merrick

MERRICK – Donc vous vous exhibez pour gagner votre vie. Comme moi avant.

KENDAL – Je n’exhibe pas ma vraie personne, Mr Merrick. Ce que le public

regarde n’est qu’une illusion. Ceci est qui je suis véritablement.

MERRICK – Et ceci est qui je suis, moi, véritablement.

Aveu grotesque ou désarmant : à la différence de Kendal (actrice), Merrick ne peut enlever

son costume. Il est un esprit enfermé dans un corps. Ce qu’il nous faut représenter c’est un

corps handicapé ; corps désaxé, aux articulations contraintes, au visage fixe. Et laisser le plus

de place possible au pouvoir d’imagination du spectateur. Suggérer plutôt que montrer.

Retarder la vue du monstre, entrevoir sa silhouette, évoquer les difformités sous l’habit.

Sur la musique

La musique est présente dans le texte, ou plutôt dans l’histoire. Mais bien au-delà de sa

fonction narrative, elle agit en véritable partenaire pour accompagner le théâtre, pour

permettre des respirations et apporter un nouveau souffle aux mots. Les soulignant ou les

effaçant pour mieux donner libre cours aux images et aux imaginaires.

Le texte est parsemé de Songs, chansons parlées-chantées qui apportent toujours un point

de vue, un éclairage différent sur la scène mais aussi sur les sentiments des personnages. Ils

sont en majorité des soli. Ils s’immiscent parfois dans une scène, ponctuent une idée ou

opèrent de manière autonome. Dans la narration ou en dehors.

Des ambiances de cabarets berlinois de Kurt Weil aux ballades claudicantes d’un Marc Ribot

(guitariste notamment aux côtés de Tom Waits), nos musiques sont à la fois épiques et

aigrelettes, solennelles et épurées ; légères dans leurs mélodies et érayées dans leurs

timbres. Notre orchestre, composé de multi-instrumentistes, est acoustique, c'est-à-dire au

même niveau que la voix parlée. Il est une sorte de fanfare désenchantée aux sonorités

entraînantes, qui racle, grince et sue ; à l’image de cette humanité à la fois généreuse et

crasse, splendide et terrifiante. Des musiques de théâtre qui nous aident à prendre du recul

sur ce qui se déroule sous nos yeux ou au contraire d'en mesurer toute la gravité.

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Points de vue dramaturgiques

Qui a raison : celui qui prend l’autre comme il est et qui lui trouve une place, en

reconnaissant qu’il le fait également par intérêt, ou celui qui cherche, se croyant

désintéressé, à rendre à l’autre sa dignité d’homme en cherchant à le conformer à une

norme qui ne peut lui convenir ? Lequel, du réaliste cynique ou de l’idéaliste débonnaire

rencontre réellement l’altérité de Merrick, comprend ce que peut être son humanité ? Voilà

ce que soulève cette controverse, et voilà ce qu’elle ne parviendra pas à trancher. Une aporie

devant une telle situation : où est l’humanité de celui qui ne peut pas vivre comme un

homme ? Qui ne peut pas – au premier abord tout au moins - être regardé comme un

homme ?

MERRICK - Voyez-vous. Avant, lorsqu’on venait me voir dans les boutiques

ou dans les foires, personne ne songeait un seul instant à ce que je pouvais

éprouver. Aujourd’hui c’est pire. Tout le monde y songe mais personne n’y

peut rien changer.

Ce qui fait le drame de Merrick (et est aussi à l’origine de l’engouement populaire de son

histoire), c’est le fait que son humanité - faite d’ingénuités, de croyances, de désirs -

transperce finalement la peau du monstre. Qu’il a les moyens linguistiques et culturels

d’exprimer ses sentiments et ses idées. Et qu’il aspire aux mêmes plaisirs que ses

contemporains. Merrick souhaite – et c’est ce qui causera sa perte - « être un homme

comme tout le monde ». Mais est-ce seulement possible ? Détail aussi tragique que

grotesque : pourquoi désire-t-il un nécessaire de coiffure alors qu’il n’a pas de cheveux ?

Vouloir être comme les autres, posséder ce qu’ils convoitent, avoir les mêmes aspirations

spirituelles ou matérielles : plus il « s’humanise » moins il est lui-même. La norme vers

laquelle il tend efface son altérité. C’est plus confortable. Merrick, tout monstrueux qu’il est,

n’échappe pas à cette humanité-là.

Treves, Norman, Merrick, et aussi Gomm et Kendal, à savoir tous les personnages de cette

histoire sont traversés par des paradoxes, tissent une toile d’araignée dans laquelle la pensée

risque de s’engluer. Loin de la morale simpliste qui est souvent celle des pièces qui parlent de

la monstruosité (le monstre n’est pas celui qui en a l’air), la pièce ne se veut pas édifiante,

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loin de là. Elle interroge, sans réponses, les complexités d’une situation humaine qui se

trouve être une histoire vraie.

On se demandera en écoutant Treves si une bonne intention suffit pour faire une bonne

action, si une intention véritablement désintéressée est possible, ou si Treves ne fait pas de

Merrick l’objet qui lui permet de mesurer sa grandeur d’âme, un miroir dans lequel il se

contemple. On aura envie de demander à Norman et à Merrick si être humain, c’est être

comme les autres. Est-ce le regard de l’autre qui fait notre humanité ?

Si ces questions se rattachent ici immédiatement à notre histoire, elles touchent plus

largement la question du handicap et celle de l’altérité. Ne peut-on comprendre l’autre qu’en

en faisant un autre soi ? Peut-on le comprendre en le laissant être autre ? Questions

universelles et terriblement actuelles.

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Intérêts pédagogiques

Le spectacle offre un matériau riche et plusieurs portes d’entrée à une approche

pédagogique, en fonction de l’âge du public.

Si le spectacle se rattache, comme nous allons le développer, à plusieurs aspects précis des

programmes du collège et du lycée, il aborde des questions importantes parce qu’il interroge

notre rapport à l’altérité, comme cela vient d’être souligné : peut-on comprendre l’autre sans

réduire son altérité ? La pièce pose de façon aiguë le problème de la différence. Est-ce que

toute tentative de rencontre de la différence ne réduit pas cette dernière ? Comment

respecter l’altérité de l’autre ? On voit que la pièce peut être un point de départ pour

aborder de nombreuses questions contemporaines, dont, par exemple, celles du handicap et

de la discrimination en général.

Des séquences pédagogiques peuvent être mises en place par les professeurs, en lien avec les artistes. L’auteur et le metteur en scène peuvent éventuellement intervenir en classe, après la représentation.

Au collège Le spectacle peut être étudié afin d’approfondir les compétences liées à l’acquisition d’une

culture humaniste (Cf. Socle commun du collège).

Il peut être vu et travaillé en ce sens par des élèves dès la sixième, et sera particulièrement

intéressant à partir de la quatrième. Il rencontre en effet à plusieurs endroits le programme

du français en quatrième et troisième.

« Théâtre : Le professeur peut faire découvrir aux élèves le théâtre contemporain dans sa diversité et aborder la relation entre texte et représentation, en tenant compte de la collaboration entre les auteurs dramatiques et les metteurs en scène. » Extrait du programme du français au collège, BO n°6 du 28 aout 2008.

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La pièce relève plusieurs défis et questions quant à la représentation, par exemple :

- Comment représenter le personnage de Merrick, la monstruosité ? L’imagination – active lors de la lecture - n’est-elle pas plus terrifiante que les artifices du théâtre ?

- La pièce mêle deux registres dramaturgiques : elle commence par la controverse, l’argumentation (théâtre épique), et se poursuit par une forme dramatique plus classique. Comment la représentation épouse-t-elle chaque moment ? Qu’est-ce qui change ? Comment le théâtre peut-il rendre « vivants » de longs monologues argumentatifs ?

- La musique a une place très importante dans le spectacle. Pourquoi ? Quel est son

rôle ?

« Étude de l’image : En classe de Troisième, le professeur privilégie l’étude de l’image comme engagement et comme représentation de soi. C’est la fonction argumentative de l’image qui est développée. Le professeur fournit aux élèves des outils d’analyse pour l’image animée ; il les fait réfléchir à la problématique de l’adaptation d’une œuvre littéraire pour le cinéma ou la télévision. » Extrait du programme du français au collège, BO n°6 du 28 aout 2008.

Notre pièce comme le film de Lynch sont, chacun à leur façon, des adaptations des

Mémoires, de Fréderic Treves. Il serait pédagogiquement fructueux de « comparer » le

film à la pièce : que fait mieux le cinéma ? Que permet le théâtre ? En quoi l’image au

théâtre diffère-t-elle de l’image au cinéma ? Quel est le parti pris du film ? Celui de la

pièce ? Cinéma et théâtre sont-ils rivaux ou complémentaires ?

La question de la représentation se pose pour tout spectacle de théâtre. Mais la

représentation est ici également un thème de la pièce. La question du regard de l’autre est

centrale (est-ce le regard que l’on porte sur lui qui fait que Merrick est un homme ou un

monstre ?), ce que la scénographie matérialisera par exemple par la présence de miroirs sur

la scène. Montrer ce qui est caché, cacher ce que l’on voudrait voir. La construction d’une

image scénographique ajoute du sens à la pièce écrite. Elle en dit plus. Aussi peut-on

aborder cette question avec les élèves : qu’est-ce que le dispositif scénique, les images que

proposent scénographie et mise en scène ajoutent à la pièce comme matériau littéraire ?

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Au lycée

En seconde

« Genres et formes de l'argumentation : L'objectif est de faire découvrir aux élèves que les œuvres littéraires permettent, sous des formes et selon des modalités diverses, l'expression organisée d'idées, d'arguments et de convictions et qu'elles participent ainsi de la vie de leur temps. On s'intéresse plus particulièrement au développement de l'argumentation, directe ou indirecte, à l'utilisation à des fins de persuasion des ressources de divers genres et à l'inscription de la littérature dans les débats du siècle. » Programme de l’enseignement du français en classe de seconde générale et technologique, BO n°9 du 30 septembre 2010.

La première partie de la pièce se présente comme une « controverse », une forme de procès

imaginaire opposant Norman et Treves, chacun justifiant son attitude vis-à-vis de Merrick,

chacun accusant l’autre d’avoir instrumentalisé Merrick pour servir ses propres intérêts.

Chacun des deux protagonistes argumente, en vue de convaincre ou de persuader l’auditoire

qu’il a eu raison d’agir comme il l’a fait. La pièce peut être étudiée pour aborder cette partie

du programme : quels procédés argumentatifs sont à l’œuvre ? Sont-ils efficaces ? En quoi le

jeu de l’acteur contribue-t-il à la persuasion du public ? Et plus radicalement : qui a raison ?

Est-il possible de trancher face à une situation si complexe ?

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En première

« La question de l'Homme dans les genres de l'argumentation du XVIème à nos jours : L'objectif est de permettre aux élèves d'accéder à la réflexion anthropologique dont sont porteurs les genres de l'argumentation afin de les conduire à réfléchir sur leur propre condition. On contribue ainsi à donner sens et substance à une formation véritablement humaniste. Dans cette perspective, on s'attache à mettre en évidence les liens qui se nouent entre les idées, les formes qui les incarnent et le contexte dans lequel elles naissent. Le fait d'aborder les œuvres et les textes étudiés en s'interrogeant sur la question de l'homme ouvre à leur étude des entrées concrètes et permet de prendre en compte des aspects divers, d'ordre politique, social, éthique, religieux, scientifique par exemple, mais aussi de les examiner dans leur dimension proprement littéraire, associant expression, représentation et création. Le professeur a soin de donner aux élèves une idée de la diversité des genres de l'argumentation et de leur évolution du XVIème au XXème siècle. » Programme de l’enseignement du français en classe de première littéraire, BO n°9 du 30

septembre 2010.

Comme cela vient d’être développé, la pièce est un support extrêmement pertinent pour

traiter cet aspect du programme. Premièrement parce que la forme théâtrale interroge la

forme et la force de l’argumentation, comme il vient d’être dit. Et particulièrement parce

qu’elle traite de la question de l’homme : Qu’est-ce qui fait l’humanité de Merrick ? Est-ce le

regard que les autres portent sur lui ?

Et dans l’autre sens : le regard de Merrick interroge la société, l’organisation sociale des

« normaux », et les normes elles-mêmes. Si certains personnages interrogent la norme

« physique », Merrick interroge la norme sociale. Il veut être comme les autres. Est-ce cela

qui lui confère son humanité ou est-ce à cause de cela qu’il perd son individualité ?

« Le texte théâtral et sa représentation, du XVIIème siècle à nos jours : L'objectif est de faire découvrir des œuvres théâtrales qui renouvellent les formes classiques étudiées en seconde, mais aussi de sensibiliser les élèves à l'art de la mise en scène, notamment dans sa capacité à enrichir l'interprétation. La réalisation scénique déterminant profondément l'écriture des textes dramatiques et permettant d'en faire jouer pleinement les effets, on s'attache à faire percevoir aux élèves les interactions entre texte et représentation. Prenant appui sur une programmation locale ou sur des captations, l'étude proprement littéraire du texte théâtral sera étayée par l'analyse de mises en scène comparées, et prendra ainsi en compte les données propres de la dramaturgie. » Programme de l’enseignement du français en classe de première littéraire, BO n°9 du 30

septembre 2010.

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Exemples de questions générales qui trouveront avec le spectacle des réponses

particulières :

- Est-ce le texte à lui seul qui suggère les idées de mise en scène ou viennent-elles s’ajouter à

l’œuvre littéraire ? Est-ce le fond (ce que dit la pièce écrite) qui appelle la forme (la mise en

scène), ou la forme façonne-t-elle le fond ?

- Comment peut-on traiter ce qui n’est pas dit par la parole des personnages ? Y-a-t-il des

didascalies ? Importance des sous-textes ? La parole doit-elle être contextualisée (lieu,

temps…) pour être comprise ?

- Le metteur en scène trahit-il la pièce en ne respectant pas sa réalité historique ? Est-il là

pour transmettre une œuvre ou pour apporter un point de vue sur l’œuvre ? Et peut-on

transmettre une œuvre sans y apporter un point de vue ?

- Quelle place la mise en scène laisse-t-elle à l’interprétation de la pièce par le public ?

- Quelle importance ont les registres de jeu, le rythme, mais aussi la distribution, la

scénographie (y compris costumes et lumières) et la musique sur la réception de la pièce et

la perception globale des idées ?

En terminale

La pièce est un matériau qui aborde plusieurs problématiques du programme de philosophie. Elle peut inspirer les sujets suivants (liste non exhaustive) :

- Peut-on agir de façon désintéressée ? - Suffit-il de vouloir bien agir pour bien agir ? - Comprendre autrui, est-ce renoncer à faire de lui son semblable ?

- Peut-on connaître autrui ?

- Est-ce le regard de l’autre qui décide qui je suis ?

- Qu’est-ce qui fait l’humanité d’un homme ?

- Qu’est-ce qu’être normal ?