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E L O G E D U F L O U

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A R T U R O S A N G A L L I

Aux frontières des mathématiqueset de l'intelligence artificielle

Les Presses de l'Université de Montréal

É L O G E DU F L O U

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Données de catalogage avant publication (Canada)

Sangalli, Arturo, 1940-

ÉLOGE DU FLOU

Traduction de : The Importance of Being Fuzzy

ISBN 2-7606-1801-3

i. Informatique douce. 2. Systèmes flous. 3. Logique floue.4. Intelligence artificielle. 5. Informatique. I. Titre.

(̂ 76.9.86382614 2001 006.3 02001-941535-4

Dépôt légal : 4e trimestre 2001Bibliothèque nationale du Québec© Les Presses de l'Université de Montréal, 2001

L'édition originale de cet ouvrage est parue sous le titre :THE IMPORTANCE OF BEING FUZZY and other insights fromthé border between math and computerscopyright © 1998 by Princeton University Press

Les Presses de l'Université de Montréal remercient le ministère du Patrimoinecanadien du soutien qui leur est accordé dans le cadre du Programme d'aide audéveloppement de l'industrie de l'édition.

Les Presses de l'Université de Montréal remercient également le Conseil des Arts duCanada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec(SODEC).

IMPRIMÉ AU CANADA

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PRÉFACE À L'ÉDITION FRANÇAISE

Depuis la publication de la version anglaise de ce livre en 1998, l'intérêtpour la logique floue et ses applications n'a pas diminué. Il en est autantdes initiatives visant à mettre à profit la combinaison des différentes ap-proches « souples » dans la solution des problèmes qui échappent aux mé-thodes « exactes » traditionnelles. À titre d'exemple, un logiciel de lacompagnie DowPredict.com, capable de prédire la valeur de clôture del'indice boursier Dow Jones, est basé, entre autres, sur les réseaux de neu-rones, les algorithmes évolutionnistes et la logique floue, qui sont toutes destechniques «souples».

D'autre part, les efforts pour rapprocher les machines et la technologiede leurs utilisateurs humains sont bien illustrés par le thème de la ioe

Conférence internationale sur les systèmes flous, qui se tiendra à Melbourneen décembre 2001 : « Relevons le grand défi : la machine au service des gens ».Les domaines de recherche représentés à cette conférence organisée parl'Institut des ingénieurs en électricité et en électronique des États-Unis(IEEE) montrent bien la diversité des champs d'application des techniquesfloues : reconnaissance des formes et traitement de l'image ; la logique floueen robotique; le calcul flou et les systèmes hybrides: systèmes intelligentsde traitement de l'information, systèmes neuro-flous, calcul appliqué à

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6 PRÉFACE À L'ÉDITION FRANÇAISE

l'Internet; le contrôle flou; fondements mathématiques de la logique floue;le calcul évolutionniste.

Grâce à l'initiative des Presses de l'Université de Montréal, les principesde ces nouvelles techniques tels que présentés dans l'édition originale sontmaintenant accessibles aux lecteurs et lectrices de langue française. Je tiensà remercier toute l'équipe éditoriale et l'équipe de traduction des Pressespour leur enthousiasme et leur persévérance tout au long de la productionde cet ouvrage.

ARTURO SANGALLISherbrooke, Québec,

septembre 2001

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A V A N T - P R O P O S

« II semble que les Allemands soient en train de gagner la guerre »,fis-je remarquer. « Ils gagneront, à moins que nous puissions

arrêter nos pertes et ce, rapidement», répliqual'amiral Jellicoe, commandant de la marine britannique.(Il faisait allusion au torpillage des approvisionnements

britanniques et des pays neutres des derniers mois :536 ooo tonnes en février 1917, 603 ooo tonnes en mars et 900 ooo tonnes

prévues en avril.) «N'y a-t-il pas de solution au problème?»demandai-je.«Absolument aucune que nous puissions

entrevoir à l'heure actuelle. »

(A.J. MARDER, dans son historique compte rendu de From

thé Dreadnought to Scapa Flow)1.

... nous sommes en train d'examiner si oui ou non nous avons

un problème, et, si tel est le cas, ce que nous devons faire.

(Un porte-parole d'Hydro-Ontario, confirmant, en janvier 1997, qu'un problème

de corrosion peut affecter les réacteurs nucléaires de service)2.

Houston, nous avons un problème...

(Le commandant Jim Lovell, [Tom Hanks],dans lefilmApollo 13, deMCA-Universal.)

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8 A V A N T - P R O P O S

D epuis toujours, les êtres humains et les autres êtres vivants ont dû faireface à des problèmes variés, le premier et le plus pressant d'entre eux étantde rester en vie. Au cours du temps, ces problèmes se sont complexifiés etont gagné toute l'étendue des activités humaines, depuis les problèmessimples de tous les jours jusqu'aux problèmes compliqués et de grand por-tée qui menaçaient le bien-être et la survie de millions d'individus. Maiss'il y a partout des problèmes, il y a partout aussi des solutions, qui sont tropsouvent tenues pour acquises. Les êtres vivants eux-mêmes, dans la richessede leur diversité, apportent des solutions multiples au problème difficile dela survie dans un environnement changeant et hostile.

La qualité de vie des sociétés développées est directement liée à l'in-géniosité et à la débrouillardise des élites : scientifiques, ingénieurs, admi-nistrateurs et autres experts. Dans cette optique, la recherche de solutionsà des problèmes difficiles comporte très souvent un recours aux mathé-matiques et à l'informatique, parfois à un degré élevé. Ceci est vrai nonseulement des sciences physiques ou en génie mais aussi de domaines aussidivers que l'administration, la médecine, l'économie ou les sciences so-ciales. Considérons, par exemple, l'inquiétude actuelle concernant les consé-quences du réchauffement planétaire, problème qui vraisemblablementne sera pas résolu ou éliminé dans un proche avenir. Les climatologues ontdétecté une hausse d'à peu près 0,5 °C de la température moyenne à la sur-face de la planète depuis les cent dernières années. Les scientifiques quiétudient ce phénomène prévoient une nouvelle élévation de 3,5 °C d'icil'an 2100, si rien n'est fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serrequi retiennent la chaleur dans l'atmosphère. Ces prévisions ont été obte-nues par des simulations sur ordinateurs à partir de modèles mathéma-tiques de notre écosystème. Dans ce cas particulier, les mathématiques etles ordinateurs n'ont pas été utilisés pour résoudre un problème, mais toutsimplement pour nous avertir de sa présence.

Nous vivons à l'âge de l'information, qui est en train de devenir rapi-dement l'ère de la surinformation. Les multiples problèmes qui surgissentde la nécessité de traiter des quantités colossales de données seraient in-solubles sans l'aide des mathématiques et de l'informatique. L'informationne peut être stockée, traitée et retrouvée que si elle est codée sous une formeou sous une autre. Pour qu'un ordinateur puisse afficher une page de textecomme celle-ci, par exemple, les lettres de l'alphabet, les signes de ponc-tuation et les autres signes diacritiques doivent être codés en chaînes de

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chiffres binaires. Dans un autre domaine, celui de la télévision à haute ré-solution, l'énorme quantité d'informations disponibles exige que l'enco-dage soit aussi économique que possible. Les techniques utilisées, appeléescompression des données, sont d'abord des concepts mathématiques avantde devenir des signaux électromagnétiques et finalement une image surl'écran de télévision.

L'étude et la conception des codes constituent une branche des mathé-matiques que l'on appelle la théorie des codes. Son but général est de ré-pondre au problème qui fut posé par Claude Shannon, le père de la théoriede l'information. « Le problème fondamental de la communication, écri-vait-il en 1948, est celui de la reproduction, en un certain point, avec exac-titude ou approximativement, d'un message sélectionné en un autre point. »

Les ordinateurs et les mathématiques contribuent également à assurerla confidentialité de l'information transmise par téléphone ou par les ré-seaux informatiques. Une façon de protéger un message contre l'indiscré-tion des yeux ou des oreilles est de l'encoder de telle sorte que seuls ceuxà qui il est destiné puissent le comprendre. Le problème de concevoir undispositif d'encodage et de décodage inviolables (et de le déjouer) relève dela cryptographie, science qui tire parti systématiquement des idées et destechniques mathématiques. Les opérations d'encodage et de décodage mo-bilisent d'imposants calculs, l'utilisation d'ordinateurs étant indispensablepour que ces opérations soient exécutées efficacement et rapidement. Unefois le message encodé, sa sécurité peut dépendre de la quasi-impossibi-lité de résoudre une énigme mathématique : celle de trouver les facteurspremiers de très grands nombres (longs de plus de 200 chiffres dans leurécriture décimale).

DES RECETTES QUI MARCHENT

Les mathématiques, que l'on décrit communément (mais incomplètement)comme la science de la dimension et du nombre, nous fournissent des ou-tils pour résoudre des problèmes généraux, ainsi qu'un langage adapté à leurformulation précise. Les mathématiciens se nourrissent de problèmes etne cessent d'en inventer de nouveaux, souvent pour le simple plaisir d'êtrecapables de les résoudre. La découverte d'une solution complète peutprendre des années et exiger les efforts conjugués de beaucoup d'entre eux;si quelqu'un se rend compte qu'aucune solution n'existe, la recherche cesseaussitôt. Mais, si le problème est finalement résolu, il cesse d'avoir de l'in-

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térêt pour le mathématicien. Pour les esprits pratiques, cependant, c'est lasolution elle-même qui importe et la façon dont elle peut être exploitéepour servir à résoudre d'autres problèmes plus terre-à-terre. D'habitude,ces pragmatistes se soucient fort peu de l'élégance de l'argumentation ma-thématique, pourvu que la récompense escomptée soit proportionnelleaux ressources requises (temps, argent, etc.).

À l'occasion, les solutions peuvent créer des problèmes plus grands queceux qu'elles étaient censées résoudre. Dans un ouvrage récent, l'historienEdward Tenner (« Why Things Bite Back: Technology and thé Revenge ofUnintended Conséquences») dresse un catalogue des solutions aux effetspervers. Parmi celles-ci, mentionnons les pesticides qu'on a épandus dansle sud des États-Unis durant les années 50 et 60 pour éradiquer les four-mis venues d'Amérique du Sud et qui ont fini par exterminer leurs pré-dateurs, ce qui en fait a accru la population des fourmis redoutées.

Depuis quelques décennies, notre capacité à résoudre les problèmes aété considérablement améliorée par le fabuleux progrès des ordinateurs. Jene veux pas dire par là que la théorie a pris du retard ou qu'elle n'a jouéqu'un rôle secondaire dans la quête des solutions. Grattez la surface d'unproblème pratique, et vous en trouverez souvent un autre qui est de naturemathématique. Il est possible que, si vous voulez résoudre le premier, vousserez amené à résoudre d'abord le second, avec, en règle générale, votre seulesprit. Néanmoins, à mesure que les machines deviennent plus intelligentes,leur rôle dans le processus de solution est en train de changer : de simplesauxiliaires qu'elles étaient, elles deviennent des partenaires indispensables.(Il n'est pas absurde d'imaginer que, dans un avenir relativement rappro-ché, les rôles se trouvent inversés et que les humains n'aient plus qu'unefonction accessoire.) Dans un sens très réel, étant donné que la puissancede l'informatique tend vers l'infini, le besoin d'ingéniosité de l'être humain(dans la conception d'algorithmes efficaces, par exemple) peut approcherde zéro. Ceci est certainement vrai pour beaucoup de problèmes d'opti-misation: si la vitesse des ordinateurs est suffisante, la recherche bête, caspar cas, d'une solution optimale devient une option plausible, même si unnombre astronomique de possibilités se présente.

Dans un essai récent, le mathématicien français René Thom a dénoncél'incapacité des théories scientifiques à expliquer la réalité. « Les scienti-fiques, dit-il, ont voulu débarrasser l'univers de la multitude des entités"occultes ou métaphysiques" qui l'encombraient, mais voilà qu'ils se sont

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mis peu à peu à encombrer le monde eux aussi. Ils l'ont rempli d'une fouled'éléments et de structures non observables, et de plus en plus difficile-ment imaginables, de moins en moins intelligibles. » Aux yeux de Thom,le progrès technologique ne fait que masquer la stagnation de notre com-préhension globale du monde. « Au lieu de nous aider à comprendre, lesscientifiques sont occupés à calculer, à faire tourner leurs ordinateurs »,déplorait le lauréat 1958 de la prestigieuse médaille Fields (l'équivalent duprix Nobel des mathématiques). «La science est devenue un gigantesqueensemble de recettes qui marchent »3.

On peut accepter que les philosophes, dans leur perpétuelle quête descauses ultimes, méprisent les produits pragmatiques de la science et de latechnologie; cependant, ceux dont le métier principal est de résoudre desproblèmes pratiques n'ont aucune difficulté à accepter des « recettes » qui« livrent la marchandise ».

DES SOLUTIONS SOUPLES

La question n'est pas de savoir si les machines un jour ou l'autre pourrontprendre la relève complète de l'être humain dans la résolution de certainsproblèmes, car, sans l'intervention de l'homme, les réponses de l'ordina-teur sont dépourvues de signification. En réalité, nous sommes plutôt té-moins de l'émergence de certaines façons de contourner les défauts ducalcul classique. Les ordinateurs numériques opèrent d'une manière sé-quentielle, exacte et déterministe sur un code binaire. Mais un tel moded'opération comporte des limites, théoriques et pratiques, que les ordina-teurs numériques ne peuvent franchir. D'autre part, la nécessité d'êtremunis d'un programme est une autre barrière à laquelle se heurtent lesordinateurs classiques. En même temps, certains nouveaux paradigmes in-formatiques font place à des dispositifs qui n'ont pas à être programmés,dans le sens traditionnel du ternie, mais peuvent « apprendre » par expé-rience, comme sait le faire notre propre cerveau.

L'intérêt pour les nouvelles idées vient également du désir de construiredes machines «intelligentes», dotées de capacités cognitives et décision-nelles semblables à celles de l'homme. (Malheureusement, le qualificatif« intelligent » est tellement galvaudé aujourd'hui qu'il est pratiquementdénué de sens.) Du reste, les ordinateurs numériques pourraient échouermisérablement. Car, même si l'ordinateur peut jouer aux échecs et battreles meilleurs joueurs, sa stratégie est loin d'être brillante. Ce n'est essen-

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tiellement qu'une technique de force brute fondée sur des arbres de déci-sions qui représentent des millions de possibilités et à partir desquelles lemouvement optimal est choisi. Le joueur humain adopte une approcheplus « intelligente », bien qu'il ne soit capable de prévoir que quelques coupsà l'avance.

Pour Lotfi Zadeh, qui a inventé les ensembles flous (voir ci-dessous),la différence entre l'intelligence humaine et celle de la machine repose surla capacité du cerveau de penser et de raisonner selon des termes impré-cis, non quantitatifs, capacité que les ordinateurs d'aujourd'hui ne possè-dent pas. Selon Zadeh, « c'est cette capacité qui fait que l'homme peutdéchiffrer une écriture peu soignée, comprendre une élocution déforméeet focaliser son attention sur une information qui soit pertinente. C'est cemanque d'aptitudes qui fait que les ordinateurs, même les plus sophisti-qués, sont impuissants à communiquer avec les êtres humains dans deslangages naturels — plutôt que dans des langages artificiellementconstruits »4. Si nous avons pour but de construire des machines qui « rai-sonnent » davantage comme des êtres humains, nous devons aller au-delàde l'ordinateur classique de Von Neumann.

La logique floue, les réseaux de neurones et les algorithmes génétiquesfont partie des nouvelles méthodes efficaces de calcul et de résolution desproblèmes. Les réseaux de neurones peuvent reconnaître des structuresmal définies en l'absence d'un ensemble explicite de règles ; la logique flouecontrôle des systèmes à partir d'une description partielle et imprécise deleur comportement ; et les algorithmes génétiques peuvent résoudre desproblèmes complexes par un processus évolutif dans lequel le hasard joueun rôle fondamental. Ces techniques, qui devraient être considérées commecomplémentaires plutôt que comme concurrentes, sont au cœur de l'ap-proche, par le « calcul souple », de l'intelligence artificielle. Certains desprincipaux caractères de cette approche sont le traitement des données in-certaines, ambiguës ou incomplètes, le parallélisme massif, le hasard, lessolutions approximatives et les programmes capables d'automodification.

L'avenir nous réserve probablement des changements plus profonds.En 1994, Léonard Adleman a démontré la faisabilité d'effectuer des calculsau niveau moléculaire. « On peut imaginer, écrit-il à la fin de son article5,l'émergence d'un ordinateur d'usage général qui ne consisterait qu'en uneseule macromolécule combinée à une collection d'enzymes semblable àun ribosome qui agirait sur elle. » Bien que ce ne soit encore qu'une pos-

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sibilité théorique, les ordinateurs quantiques (ces appareils qui utilisent lapolarisation des photons pour encoder l'information) pourraient un journous forcer à redéfinir ce que nous entendons par calcul.

Nous devons souligner, cependant, que les ordinateurs numériques,qui sont extrêmement rapides et précis pour exécuter certains tâches —par exemple, réaliser des suites d'opérations arithmétiques — ne sont pasprès de devenir chose du passé. La nouvelle technologie tend à être leurcomplément plutôt qu'à les remplacer. En outre, les nouveaux modes de cal-cul — flous, neuronaux, génétiques — sont, pour la plupart, effectués au-jourd'hui sur des ordinateurs classiques.

Là où les ordinateurs cherchent à exécuter des calculs plus rapides,les mathématiques s'empressent de trouver des algorithmes plus ingénieux.

Une idée qui réduit de moitié le nombre des étapes [d'un processus]est aussi valable qu'une puce qui double la vitesse [d'un ordinateur] .

('GILBERT STRANG, mathématicien au Mir)6.

Cet ouvrage présente les principes du calcul souple d'une manière assezbrève. Je me suis efforcé de rendre les concepts de base accessibles à unlarge public, sans accabler le lecteur de termes techniques, mais en dépas-sant les simples métaphores, et en jetant à l'occasion un regard critiquesur le sujet. Mon but premier a été d'exposer, de façon amusante en mêmetemps que rigoureuse, les idées (surtout mathématiques) qui sous-tendentla logique floue, les réseaux de neurones et les algorithmes génétiques, idéestrop souvent obscurcies par une terminologie de spécialistes. Ceci est ré-sumé dans la première et la troisième partie.

Les nouvelles idées ne peuvent être entièrement appréciées que si on meten évidence l'arrière-plan mathématique du calcul traditionnel. Dans lechapitre 3, je procède à un tour d'horizon des concepts qui sont au cœurde l'informatique classique, en insistant sur les limites des modes tradi-tionnels de calcul et en soulignant le rôle joué par les machines de Turinget par les problèmes NP-complets. Le chapitre 4 se concentre sur les fon-dements des mathématiques, en particulier sur le rôle des ordinateurs dansla recherche de la vérité mathématique. Après avoir rappelé une vieille maistoujours captivante histoire (celle du théorème d'incomplétude de Gôdel),j'explore l'idée, plutôt humiliante pour les humains, que certaines vérités

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mathématiques pourraient ne pas être vérifiables par notre esprit sansl'aide de l'ordinateur.

Les mathématiques et les ordinateurs se complètent : logiciel et maté-riel sont les deux côtés de la même médaille. Mais trop souvent, les genss'émerveillent devant le corps de la machine—avec ses puces et ses scan-ners optiques, ses animations en trois dimensions—et oublient (ou ne sa-vent jamais) que son âme est mathématique. L'un des objectifs de ce livreest de faire contrepoids à cette image partielle et partiale et de révéler lavaleur de la main invisible des mathématiques.

Les trois parties sont largement indépendantes et peuvent être lues dansun ordre différent sans qu'il y ait perte de continuité. Certaines preuves ma-thématiques et quelques détails techniques ont été relégués en appendices.

J'ai écrit ce livre pour un large public, profane ou expert, en ne sup-posant de sa part qu'une connaissance élémentaire des concepts mathé-matiques. Des notions de calcul différentiel et d'algèbre linéaire sontnécessaires pour comprendre certains passages, mais un esprit curieux estla seule condition préalable à l'appréciation générale du texte.

Je tiens à exprimer ma gratitude à plusieurs personnes qui ont lu desparties du manuscrit et dont les critiques pleines de tact ou les éloges (exa-gérés ?) m'ont aidé à rédiger un meilleur livre : Peter Géczy, de l'Universitéde technologie Toyohashi, Japon; Michel Grabisch, du Laboratoire centralde recherche Thomson-csF, Orsay, France ; Kazuo Nakamura, du Labo-ratory for International Fuzzy Engineering Research, Yokohama, Japon;Andrew Watson, de l'Institute of Food Research, Norwich, Grande-Bretagne ; et Doron Zeilberger, de la Temple Universiry, Philadelphie.

Je suis également redevable au personnel des Presses de l'UniversitéPrinceton qui a collaboré à la production de ce livre, particulièrement à BillLaznovsky, pour son excellent travail de mise au point et le soin qu'il a ap-porté aux détails. Je remercie spécialement mon éditeur, Trevor Lipscombe,

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de sa patience, de ses commentaires abondants et précieux et de son apport

indispensable à cette entreprise.

ARTURO SANGALLI

Sherbrooke, Québec

juin 1998

Notes

1. A. J. MARDER, From thé Dreadnought to Scapa Flow, Oxford, OUP, 1961-1970,5 vol.

2. T. GRUETZNER, cité dans « Problem in Reactor May Be Widespread », The Globeand Mail, 10 janvier 1997.

3. R. THOM, dans Y. JOHANNISSE (éd.), La Magie contemporaine. L'Échec dusavoir moderne, Montréal, Québec/Amérique, 1994, pp. 19-35.

4. P. P. WANG et S. K. CHANG (éds.), Fuzzy Sets : Theory and Applications toPolicy Analysis and Information Systems, NewYork et Londres, Plénum Press, 1980,p. 196.

5. L. M. ADLEMAN, « Molecular Computation of Solutions to CombinatorialProblems», dans Science, vol. 266 (1994), pp. 1021-1024.

6. G. STRANG, «Wavelets», dans American Scientist, vol. 82 (1994), p. 255.

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P r e m i è r e p a r t i e

LES VISIONS BROUILLÉES

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c h a p i t r e i

La physique théorique exige le plus haut niveau possible de précisionrigoureuse dans la description des relations, comparable à celui

obtenu dans l'emploi du langage mathématique.

(ALBERT EINSTEIN, sur les structures de la physique théorique)1.

UNE MATHÉMATIQUE DES QUANTITÉS NÉBULEUSES

Dans un article publié en 19652, Lotfï Zadeh, professeur de génie électriqueà l'Université de Californie, faisait une observation fondamentale : la plu-part des collections d'objets que nous trouvons dans le monde réel ne sontpas définies de façon précise. Ainsi, il est clair que tout chien, tout chevalou tout oiseau entre dans la classe des animaux, alors que les roches, lesfluides et les plantes n'en font pas partie. Cependant, des objets tels queles étoiles de mer et les bactéries ont un statut ambigu, les termes contra-dictoires «animal» et «non-animal» semblant tous les deux leur conve-nir. Dans le même ordre d'idées, des appellations telles que « formesrondes», «vieilles voitures» et «basses températures» sont elles aussi dé-pourvues d'une définition précise.

Et pourtant, les classes aux frontières incertaines remplissent le langageet la pensée, et jouent un rôle important dans la communication de l'infor-

LES CLASSES AUX F R O N T I È R E S

I N C E R T A I N E S

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AGMV Marquis

M E M B R E D E S C A B B I N I M E D I A

Québec, Canada2002

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