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Emmanuel Régent

Emmanuel Régent - Documentation artistique

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Emmanuel Régent - Documentation artistique, juin 2012

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RÉVOLUTION SILENCIEUSE

Entretien avec Emmanuel Régent Par Daria de Beauvais, février 2010

Tu as décidé pour ton exposition Mes plans sur la comète / Drifting Away dans un Module du Palais de Tokyo (1), de proposer au visiteur une sélection d’œuvres récentes ou inédites. Comment s’est opéré ton choix ?L’exposition fait suite au prix Découverte des Amis du Palais de Tokyo, j’ai préféré présenter un parcours de travaux réalisés pour le lieu avec d’autres plus anciens. Dans le cadre de ma pratique, cela me paraissait plus généreux de faire ce choix plutôt que d’exposer une seule pièce dans le Module comme je l’avais initialement envisagé.

Mes plans sur la comète (2006) est également le titre d’une de tes œuvres-clé, quelle en a été la genèse ?Cette sculpture est réalisée avec trois feuilles de grand format roulées dans une corbeille à papier. Ces feuilles sont symboliquement tous mes dessins et mes projets ratés, ceux que j’aimerais faire et que je ne fais pas, les travaux en attente ou irréalisables, qui finalement constituent le volume physique et poétique de cette sculpture qui prend la forme d’une comète.

Selon tes propres mots, ta pratique artistique consiste à « construire des espaces de projection ouverts, des espaces de suppositions, de divagations, de dispersions ». Peux-tu développer ?Dans une interview donnée à Paris en 1978, Jorge Luis Borges commença par répondre à son interlocuteur avec cette phrase : « Quand j’affirme quelque chose, je ne fais qu’avancer une possibilité. Je propose donc, avant de commencer, que nous émettions quelques locutions de doute, comme « peut-être », « probablement », « il n’est pas impossible que », etc. Le lecteur les placera lorsqu’il le croira opportun. » (2)Même si ma pratique du dessin intègre la notion de labeur et de temps passé, beaucoup d’idées me viennent presque par hasard, lors de moments d’attente, quand je ne travaille pas. Je dessine autant que je pêche, presque quotidiennement comme Noël Dolla (3). Je pratique principalement la pêche à la palangre qui consiste à déposer la veille au soir puis à relever au lever du soleil, une ligne horizontale de 60 hameçons entre 30 et 80m de fond. C’est un gros temps de préparation où il faut avant et après chaque calage entretenir la palangre. C’est à ce moment là que je rêve aux poissons du lendemain, c’est ce simple espace de spéculation que je recherche.

L’oubli, l’abandon, sont également des phénomènes récurrents – pour quelle raison ?Dans mes travaux, l’oubli et l’abandon sont des espaces de déplacement à la fois du regard mais aussi de la mémoire pour étirer la durée de lecture de l’œuvre ; la perception du sac dans un coin éclate à retardement (J’avais oublié, 2007), le cadenas en U abandonné renvoie au scénario du vol (UC, 2007) et mes actes manqués apparaissent dans une corbeille à papier.Ce qui m’intéresse avec l’oubli, c’est qu’il soit le pendant de la mémoire. On pourrait penser l’oubli comme une valeur positive. Il y a un oubli passif qui est un effacement inexorable des traces mais également un oubli actif qui conserve quelque chose de fondateur, qui relève de l’inaccessible plutôt que de l’ineffaçable. Je recherche cet effacement actif dans certaines de mes pièces.Je pense aussi à l’idée d’abandon dans les promenades de Francis Alys, avec son Paradox of Praxis (1997) où il fait petit à petit disparaître un bloc de glace en le poussant dans les rues et à ses Magnetic Shoes (1994) recouvertes de particules de métal.J’aimerais par ailleurs constituer une bibliothèque composée uniquement de livres trouvés dans les gares et aéroports, oubliés ou abandonnés par les lecteurs.

Tes œuvres restent toujours très ouvertes à l’interprétation : toute narration est-elle possible ? Tout retournement de situation est-il envisageable ?Un de mes romans de référence est Jacques le fataliste et son maître de Diderot qui est d’une incroyable modernité ; il nous amène avec ses personnages à partager de l’intérieur les aventures de Jacques. Nous sommes les témoins actifs d’une histoire où le narrateur joue avec le lecteur, lui parle et semble presque même faire évoluer Jacques et son Maître en fonction de ses réponses qui pourraient faire changer le plan de la narration. Il y a cette idée de basculement, de retournement, comme un sol deviendrait plafond et où d’un coup l’apesanteur s’inverserait en fonction de l’angle de vue.

Tes dessins se font dans la durée et représentent souvent des scènes posant justement la question de l’attente  : manifestations, files ininterrompues de personnes. Que représente ce temps pour toi ? Dans une société où le temps n’a jamais semblé être aussi rapide et où les distances ne se mesurent plus en km mais en heures ou en minutes, mon travail est une sorte d’éloge de la lenteur. Je dessine des file d’attente de personnes qui font la queue pour visiter un monument, aller au théâtre ou au cinéma ; mais c’est aussi faire la queue pour obtenir des papiers ou de la nourriture...

Que signifie dessiner pour toi ?Observer l’actualité, rester en éveil, être un témoin actif, se poser naïvement la question de la nécessité de dessiner de sa main aujourd’hui, essayer de faire des liens entre le geste ancestral d’un simple trait de charbon et le PAD extra sensible de mon nouveau Mac.Prendre le temps du « faire », organiser ma gymnastique, user des centaines de feutres, remplir du noir, préserver du papier, dessiner pour mieux voir en dehors de la feuille.Le dessin est un langage autonome qui peut se passer d’explication(s), c’est le plus simple moyen d’expression plastique, j’aime cette économie d’un « n’importe où, n’importe quand avec presque rien ».

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Visuellement, tes œuvres semblent autant jouer sur la disparition (Buées, 2000) que sur la démesure (Une partie d’un monde auquel, dit-il, je ne croyais pas, 2009 ; 3ème marche au dessus de l’autel, 2008) ?Pour Buée, le spectateur est invité à souffler sur du plexiglas afin de faire apparaître un dessin visible un court instant en fonction de la température ambiante. En ce qui concerne mes travaux de grands formats avec une visibilité plus directe, la « fixation » reste malgré tout temporaire et dépend souvent de l’angle de vue. Je pense à L’Enterrement à Ornans de Courbet (1850) qui malgré des dimensions imposantes et une mise en scène complexe, est totalement construit dans et par le trou du tableau, cet espace vide qui déborde de la peinture et englobe le mur, la salle, les spectateurs et le monde. Dans les films d’Antonioni y a aussi ce que l’on perçoit de central et ce qui défile hors champ dans les blancs. Au début de Blow-up, Thomas achète une hélice d’avion chez un antiquaire qui doit la livrer chez lui, l’histoire se déroule, puis, alors qu’elle a été complètement oubliée dans la narration, l’hélice est livrée et revient à l’écran.

Sans Retour (2007), Horizon (2006) : autant d’œuvres qui jouent sur la transparence. Quelle serait ta définition de la transparence ? Avec Sans retour, la transparence a pour but d’apporter une discrétion formelle puisque cette pièce est très peu visible fixée à un mur blanc. C’est aussi l’idée du découpage d’une vitre qui annonce un mouvement, un morceau de fenêtre en rotation, un bout de verre d’encadrement à la fois pour protéger le dessin et le mettre à distance. Au delà de la question de la fragilité, il s’agit plus pour moi de me poser la question du réel et du virtuel, des jeux de perception, de communication, des pertes de repères, du mouvement continu…Pour Horizon, la transparence permet de percevoir l’eau de chaque récipient, c’est l’alignement des niveaux qui crée cette ligne d’horizon. En dehors de mon attachement pour la « mer nostalgique », je pensais à la ligne droite du 42e parallèle retracée par les courriers de Douglas Huebler (4).

Te définirais-tu comme un artiste engagé ? Les œuvres J’avais oublié (2007), Solitude Grecque (2008) ou encore Révolution Silencieuse (2006) envoient en effet un message ambigu à celui qui les contemple.Je ne suis pas certain de la définition de l’engagement, c’est une question bien complexe ! Je suis engagé comme tous les artistes au sens politique mais pas au sens partisan, j’observe les choses, fais des liens, en suggère d’autres. Par exemple, la série Antiquités Grecques fait suite aux révoltes de décembre 2008 dans ce pays. (5)

Qu’est-ce que le précieux pour toi ? Qu’apporte à ton travail l’utilisation de l’or (Raissa, 2007) ou de l’argent (Reflet, 2006) ?Une grappe de raisins nue recouverte d’or, tout comme une pierre entourée de feuilles d’argent après avoir été ramassée sur un chemin  : il s’agit à la fois de recouvrir et découvrir, de faire briller ces espaces manquants, pour les rapprocher et les éloigner du quotidien. Ces métaux naturels sont une sorte de valeur refuge, historique, financière, esthétique aussi. L’utilisation de l’or est un pan énorme de l’histoire l’art, mais je pense surtout aux Zones de sensibilité picturale immatérielle d’Yves Klein. 

Quelles sont tes sources d’inspirations?Je réalise mes dessins à partir de croquis réalisés sur le motif, d’images piochées sur Internet en fonction de l’actualité ou de photos prises au hasard de mes rencontres. C’est un mixage de plusieurs sources qui alimentent mes travaux. D’une manière générale, en plus de mes lectures, de l’histoire et de l’actualité artistique, je suis influencé par des choses simples de mon quotidien comme la météo marine, l’entrée des cinémas le samedi soir et le 1er mai à Paris, les rochers du bord de mer, les gares et les aéroports, les objets trouvés…

Où vas-tu ?« … Est-ce que l’on sait où l’on va ? Que disaient-ils ? Le maître ne disait rien ; et Jacques disait que son capitaine disait que tout ce qui nous arrive de bien et de mal ici-bas était écrit là-haut. » (6)

(1) Module 2 du Palais de Tokyo, du 4 au 28 mars 2010(2) Entretien avec Ramón Chao, Le Monde Diplomatique, août 2001(3) Noël Dolla est pêcheur mais surtout une importante référence picturale avec la série des leurres, des gants à débarbouiller la peinture et des silences de la fumée (4) Dans 42e parallèle, Douglas Huebler envoie des récépissés postaux de 14 points situés sur le 42e parallèle de l’Ouest (Atlantique), à l’Est (Pacifique) des Etats-Unis au premier point (Ouest). (5) La mort d’un adolescent tué par un policier, le 6 décembre 2008, a déclenché les pires émeutes en Grèce depuis la dictature.(6) Diderot, Jaques le fataliste et son maitre, 1796

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Vue de l’exposition Mes plans sur la comète / Drafting away, mars 2010, Palais de Tokyo, Module 2, Paris

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Bleu+, 2010, papier de verre, 85 x 31 x 35 cm

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Sans retour, 2007, verre, 55 x 22 cm UC, 2007, cadenas, 40 x 20 cm

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Le grand chemin de mes rondes, 2009 - 2010, feutre à encre pigmentaire sur papier contrecollé sur dibond, 390 x 450 cm

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Vue de l‘exposition Printemps de l’art contemporain à Marseille, 2011, Chambre de Commerce et d’Industrie, Marseille

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Vue de l’exposition La parabole silencieuse, 2008, Chapelle des Calvairiennes, Mayenne

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Vues de l’exposition La parabole silencieuse, 2008, Chapelle des Calvairiennes, Mayenne

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Vue de l’exposition La couleur en avant, 2011, Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de la ville de NiceA droite : Nébuleuse (Giulia), 2010, peinture acrylique poncée sur toile, 168 x 300 cm

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Vue de l’exposition Le temps du territoire, 2011, CIAC Villa Arson, NiceLa dilatation des souffles, 2010 - 2011, contreplaqué bakélisé (phénolique) noir pour coffrage béton, 3,52 x 15,46 m

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La dilatation des souffles (détail), 2010 - 2011, contreplaqué bakélisé (phénolique) noir pour coffrage béton, 3,52 x 15,46 m

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Vue de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, Aperto, Montpellier

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Nébuleuse (Isabelle), 2011, peinture acrylique poncée sur toile, 40 x 80 cm

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UC, 2007, cadenas, 40 x 20 cm

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Détails de la réalisation de Nébuleuse (Carole), 2010, peinture acrylique poncée sur toile, 168 x 300 cmCollection permanente du Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de Nice

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Vue de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, galerie Eric Linard, La-Garde-des-Adhémar

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Vue de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, galerie Eric Linard, La-Garde-des-Adhémar

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Vues de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, galerie Eric Linard, La-Garde-des-Adhémar

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DÉBORDEMENT

Entretien avec Emmanuel RégentPar Hélène Lallier, avril 2012

L’image, son avènement, sa fuite ; l’infiniment grand et l’espace sont des composantes fondatrices de votre réflexion. Comment les intégrez vous dans votre pratique ?J’essaie de construire des échappatoires, d’organiser des fuites, d’ouvrir des sorties par le blanc du papier ou de creuser des accès vers la couleur en ponçant la peinture. Mon travail s’inscrit dans la lenteur, le manque : je construis des espaces de suppositions, de divagations et d‘égarements géographiques et temporels. Je mets en place des principes d’apparitions instables pour inviter le regardeur à combler des absences. Par des processus et avec des matériaux simples, je questionne les systèmes de communication invisibles induits par les nouvelles technologies, la circulation des images et l’effacement de leurs supports matériels. La pratique du dessin et de la peinture me permet d’ interroger tant la surproduction que la dématérialisation des images. Les grands formats me donnent la possibilité d’intégrer le corps du spectateur dans mes travaux.J’ai souvent appliqué la logique des matériaux : je choisis une matière, un support en fonction de l’idée afin de poursuivre le fond par la forme. De plus en plus j’essaie de me laisser envahir par les évènements, de lâcher du lest et d’accepter parfois de ne pas avoir d’idée de départ.Je prends mes sources dans mon quotidien, mes lectures, mes temps morts, j’essaie d’être attentif aux choses simples, banales, sans importance. Je ramasse des pierres, traîne sur le net, polis des hélices, dépose des sacs dans des endroits publics, réalise des dessins de files d’attente, de manifestants ou de bord de mer.

Dans Sortir de son lit en parlant d’une rivière, il y aura un mur en inox de dix mètres au Centre d’art contemporain des Adhémar: ce travail, et plus largement, votre pratique, traitent-ils, d’une sorte «d’archéologie du futur»?Réalisé grâce au soutien d’Aperam, ce mur sera la seconde sculpture d’une série qui a débuté avec une première pièce en inox réalisée en 2007. Il s’agissait de l’exacte reconstitution d’une pierre taillée avec ses morceaux brisés qui se trouvent dans la rade de Villefranche sur mer à quelques mètres de profondeur. J’ai mesuré précisément le bloc déplacé de son architecture initiale (certainement détruite) pour le faire reproduire à échelle 1 en inox soudé.Le mur présenté au château est composé d’une cinquantaine de blocs d’environ 30 x 40 cm. La sculpture mesure 10 m sur 1m50 de hauteur et pèse 900kg. La modularité de la construction permet de varier les possibilités autant dans la forme que dans la taille. Cette pièce imposante ne reproduit pas un mur de pierre sèche existant mais une fiction basée sur des faits réels ; une architecture métallique créée à l’aide de technologies récentes pour le découpage et la soudure, mais dans la tradition d’un savoir-faire manuel et artisanal (Alain Quénel et son équipe – Saragalla / Marseille). Construire un mur est un « geste premier » de sculpteur, une élévation verticale à la fois un espace de protection et de séparation : j’aime travailler avec un matériau « inoxydable », et aussi reconstituer une forme ancienne, basique, en intégrant la lente dégradation du temps sur la pierre comme modèle formel pour réaliser une pièce froide, lisse, chirurgicale qui renvoie à l’art conceptuel et minimal.Sortir de son lit en parlant d’une rivière est la définition du terme « Divagation » dans le Littré : l’archéologie est pour moi une divagation organisée. Celle de demain sera-t-elle la redécouverte dans le futur des formes nouvelles d’aujourd’hui ? Ma sculpture signifie l’inverse car un mur en ruine est une présence intemporelle. Notre civilisation a fait de la ruine une architecture à part entière, intégrée et assimilée aux paysages contemporains.Ce mur en inox est une interprétation symbolique, une archéologie imputrescible où forme et matière sont étrangères l’une à l’autre. Les éclats métalliques sont éparpillés et jonchent le sol comme les pièces manquantes d’un puzzle aquatique, d’une architecture égarée.Le mur sera présenté au MAMAC dans une exposition individuelle, en octobre 2012.

La ligne d’horizon est un vecteur dans vos immenses formats, dans la construction des images. En quoi votre travail de peintre et de dessinateur fait-il appel à une forme de classicisme dans le traitement? Et pourquoi?La ligne d’horizon est une forme constante dans mon travail, principalement dans mes dessins et sculptures (Horizon, 2005, Entre deux lignes, 2007). Il s’agit là encore d’un geste premier : pour dessiner un paysage, l’action la plus simple consiste à tracer une ligne horizontale, c’est le début de l’évasion…Je dessine avec des feutres fins pour remplir les parties sombres. Il s’agit d’un grésillement graphique qui rappelle le pixel, mais dans un geste laborieux, progressif. Pendant les heures de remplissage, je m’évade en réfléchissant à mes sculptures et aux déplacements de l’hélice.Le poids des images et des livres se mesure aujourd’hui en kilo-octets. Je dessine la soustraction par l’économie du tracé. Je peins sur une toile spécialement étudiée pour recréer un grain rappelant les pixels du numérique : je recouvre de matière dans un premier temps, dans un lien plus charnel, physique, pour, après le séchage, poncer la couleur et retrouver la lumière du dessous. Je passe les couches de couleur au rouleau dans un certain ordre mais à rebours, comme on composerait une partition à l’envers. L’imagerie médicale, les vues spatiales, les courbes de chaleurs, la révolution numérique influent fortement ma pratique. Je cherche à voir comment ces technologies peuvent s’infiltrer dans une approche classique de la peinture : pigment + liant / acrylique + eau. Quand je pense « peinture », c’est à la fois liquide et solide : j’envisage la pensée liquide du faire, du mouvement, l’action avant le séchage ; puis la tension, le durcissement, la cristallisation du pigment et du liant en solides sur la toile ou le bois.J’utilise la ponceuse pour chercher la couleur, la réveiller. Ce geste me permet de retrouver la lumière de l’écran (par derrière) uniquement à partir de peinture acrylique sur de la toile. Sur le modèle des images médicales, j’utilise les contrastes colorés non pas à des fins esthétiques mais pour délimiter des secteurs de formes. Mes dessins identifient des objets identifiables alors que mes peintures identifient des objets non identifiables.

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Deneb du cygne, 2010 - 2012, escabeaux, dimensions variables

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Vues de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, château des Adhémar, MontélimarFacinisl (Odiam), 2012, lettrage adhésif, 250 x 350 cm

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Vue de l’exposition Sortir de son lit en parlant d’une rivière, 2012, château des Adhémar, Montélimar

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Nébuleuse (Angèle) (détail), 2012, peinture acrylique poncée sur toile, 300 x 500 cm

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Décisif (détail), 2007 - 2012, papier aluminium, 90 cm de diamètre

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Valles marineris, 2012, inox, 12 x 1,50 x 0,60 m. Oeuvre réalisée avec le soutien d’Aperam

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Valles marineris (détails), 2012, inox, 12 x 1,50 x 0,60 m. Oeuvre réalisée avec le soutien d’Aperam

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Sortir de son lit, 2012, feutre à encre pigmentaire sur papier, 300 x 130 cm

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Mes plans sur la comète, 2006 - 2012, corbeille, papier, plomb, 320 x 150 cm

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La surface des choses, 2010, feutre à encre pigmentaire sur papier, 30 x 40 cm

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Pensif (La Turbie), 2010, bois contreplaqué, 130 x 110 cm

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A ras du bord, 2010, verre extra-blanc, 140 x 55 x 0,6 cm

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Resdat’ilothi, 2009, livre posé sur socle ou étagèreAvec une forte envie de jeter les dés, j’ai amené l’un des milliers d’exemplaires de cet ouvrage chez un artisan relieur qui m’a délié le livre page à page pour que je puisse le remélanger au hasard, puis j’ai ensuite ramené le livre à l’artisan qui l’a relié à l’identique dans sa couverture d’origine mais avec toutes les pages désordonnées.Resdat’ilothir est une sculpture qui fonctionne sur un déplacement insidieux qui rejoue les dates, les noms, l’ordre et les œuvres de l’histoire de l’art comme un bug informatique, un bagage abandonné dans un aéroport ou un minuscule grain de sable dans la mécanique.

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Vues de la foire Art Paris (stand Caroline Smulders), 2011Dessins : Sans titre (rameurs), 2011, feutre à encre pigmentaire sur papier contrecollé sur dibond, 230 x 130 cm

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Révolution silencieuse, 2006, tissu, bois, 230 x 100 cm

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Vice & versa, 2007, bois, 250 x 20 cm

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Entre deux lignes, 2008, métal, 60 x 100 cm

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Décisif, 2010, performance : 2 Km d’aluminium enroulé et compressé durant 1h40Réalisée au FRAC Provence Alpes Côte d’Azur à l’occasion de la Nuit des Musées

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Raïssa, 2007, rafle de raisin, or, 30 x 7 x 6 cm

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EMMANUEL RÉGENT

Né à Nice, vit et travaille à Villefranche sur mer et à ParisDiplômé de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2000Représenté par les galeries Espace À VENDRE / Le Cabinet (Nice / Paris) et Caroline Smulders (Paris)

EXPOSITIONS PERSONNELLES (SÉLECTION 2010 - 2012)

2012Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de la ville de Nice (octobre 2012 - janvier 2013)Sortir de son lit en parlant d’une rivière (première définition), Centre d’art contemporain château des Adhémar, MontélimarSortir de son lit en parlant d’une rivière (seconde définition), Aperto, MontpellierSortir de son lit en parlant d’une rivière (troisième définition), galerie Eric Linard Editions, La-Garde-des-Adhémar

2011Docks Art Fair, Foire Internationale d’Art Contemporain, LyonLe réflexe du Parachute, Galerie Espace À VENDRE, NiceLe temps du territoire, Centre International d’Art Contemporain Villa Arson, NiceLe temps du territoire, 20 dessins d’architecture, MAMAC, NiceLa borne, POCTB, La-Ferté-Saint-Aubin

2010Mes plans sur la comète / Drifting away, Palais de Tokyo, Paris Parler pour ne rien dire / Beating round the bush, Galerie Le Cabinet, Paris

EXPOSITIONS COLLECTIVES (SÉLECTION 2010 - 2012)

2012Tout doit disparaître, Atelier des Vertus, ParisA l’origine Nice, Marlborough gallery, MonacoBête et méchant, galerie Window, ParisIch bin ein Pariser, galerie Immanence, ParisLa ligne, Paris, galerie le Cabinet, ParisLa ligne II, galerie Espace À VENDRE, Nice

2011ChezLeGrandBag, Monaco, galerie Art&RapyIci Nice, Chantier 109, NiceObsédés textuels, galerie RDV, NantesFestival Ap’Art, performance, Festival Ap’art, Saint-Rémy-de-Provence et les AlpillesLa couleur en avant, Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain, NiceLa sculpture autrement, Eco’parc MouginsOpening galerie Espace A VENDRE, Galerie Espace A VENDRE, NiceL’art au paradis, rue Paradis, Paradis design, MarseilleArt on paper, Galerie Espace A VENDRE / Le cabinet , Bruxelles White hotel, avenue Louise, BruxellesArt Paris, I Love My Job / Caroline Smulders, Grand Palais, ParisDrawing now, Galerie Espace A VENDRE / Le cabinet, Carrousel du Louvre, Paris2D / 3D, galerie Joseph, I Love My Job, ParisAl ghaib, aesthetics of the disappearance Ghaib, Centre d’art de Maraya-Sharjah, Émirats Arabes Unis

2010White Things, Espace Ugot togu, MarseilleEditions et Multiples, Librairie Mazarine, ParisAu bout de la main, Les Douches, Nuit blanche, ParisFigure libre, Mairie de GuyancourtDécisif, performance dans le cadre de la nuit des musées, FRAC, MarseilleSalon du dessin Contemporain, galerie Espace A VENDRE / Le cabinet, Carrousel du Louvre, One More Reality, Fabbrica del vapore, Milan, Italie.

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BIBLIOGRAPHIE & CATALOGUES (SÉLECTION 2010 - 2012)

2011Le temps du territoire, Ed. Les presses du réel, textes de Théodore Wilson et Claude ParentL’art Contemporain et la cote d’azur, 1951 - 2011, Ed. les presses du réel, textes de Michele Brun et Gilbert PerleinRoven #05, revue critique, D’apres photos ou quand le dessin regarde la photographie, article de Catherine MacchiAl ghaib, aesthetics of the disappearance, Ed. Silvana Editoriale, textes de Gaia Serena SimionatDu yodel à la physique quantique #04, Palais de Tokyo

2010Mes plans sur la cométe / Drifting away, Ed. Monographik, textes de Daria de Beauvais et Caroline SmuldersL’or dans l’art contemporain, Ed. Flammarion, d’Anne-Marie CharbonneauxCarnets d’inspiration+, Ed. Moleskine

PRESSE (2010 - 2012)

2012Archistorm #54, Débordements, article d’Hélène LallierMaison française #576, Talent à suivre

2011Le Figaro magazine, Ces nouveaux artistes qui épatent la galerie, A Nice Baraudou dévoile RégentCLGB #14, Le réflexe du parachute, entretien d’Isabelle GiovacchiniLMS, revue, dossier art contemporainMétro, Emmanuel Régent, Un peintre abrasif chez Espace A VENDRE, article de Michel BernouinNice-Matin, Le reflexe du parachute selon Emmanuel Régent, article de Nicole LaffontArt Press #380, L’art contemporain sur la Côte d’AzurArt Absolument #42, article d’Alexandra FauNice-Matin, Supplément ACCA, article de Nicole LaffontL’homme Deluxe #25Cote Magazine, L’art au paradis, article de Gérard Martin.La Strada #159, Emmanuel Régent, article de Michel SajnLes Inrockuptibles, supplément festivals d’été du 1er au 7juinLe Figaro Magazine, Coffret champagne Taittingerle Monde, Vitalité toute printanière pour Art Paris, article d’Harry Belletle Soir, Le papier c’est le pied, article de Jean-Marie WynantsCouleur Nice, Emmanuel Régent, une nébuleuse, texte de Géraldine GiraudConfidence pour un dessin : Joyce Jonathan et Emmanuel Régent, Canson, M6, Paris première, W9

2010Art Press #366, Salon du dessin contemporain Le Journal des Arts #320, Paroles d’artiste : Emmanuel Régent, entretien avec Frédéric BonnetLe Journal des Arts #321, Dessin dans le cadre d’une carte blanche au module du Palais de TokyoCôte magazine #183Artistikrezo, Rencontre avec Emmanuel Régent, entretien de Justine Vandendrdriessche

PRIX

2009Prix découverte des Amis du Palais de Tokyo

Page 110: Emmanuel Régent - Documentation artistique

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