Ennemis Internet

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    La bataille pour une information libre se joue de plus en plus sur le Net.La tendance gnrale qui se des-sine est celle d'un renforcement du contrle par un nombre grandissant de pays,mais aussi d'un accroisse-ment des capacits de mobilisation de net-citoyens toujours plus inventifs et solidaires.

    Internet, espace d'changes et de mobilisation

    Dans les pays autoritaires, o les mdias traditionnels sont sous la coupe du rgime,Internet offre un es-pace unique de discussion et d'changes d'informations, mais aussi de moteur de la contestation et de lamobilisation. Internet reprsente le creuset dans lequel des socits civiles touffes naissent et sedveloppent.

    Les nouveaux mdias, et en particulier les rseaux sociaux, ont mis disposition des populations desoutils de collaboration qui permettent de remettre en cause l'ordre social. La jeunesse les a pris d'assaut.Facebook est devenu le lieu de ralliement des militants empchs de descendre dans la rue. Une simplevido sur YouTube Neda en Iran ou la marche safran des moines birmans peut suffire exposer aumonde entier les abus de gouvernements.Une simple cl USB peut permettre de diffuser des informationsinterdites, comme Cuba o elles sont devenues les samidzats locaux.

    Les intrts conomiques et la dfense de la libert de circulation de l'information vont parfois de pair.Dans certains pays, ce sont les entreprises qui ont obtenu un meilleur accs Internet et aux nouveauxmdias, avec parfois des rpercussions positives pour le reste de la population. Obstacle aux changesconomiques, la censure du Web devrait figurer l'agenda de l'Organisation mondiale du Commerce.

    Plusieurs de ses membres, dont la Chine et leVit-nam, devraient tre contraints d'ouvrir leurs rseauxInternet avant de rejoindre le village global du commerce mondial.

    Reprise en main

    Le temps o Internet et les nouveaux mdias constituaient le champ rserv des dissidents et des op-posants est rvolu.Les dirigeants de certains pays ont t pris de court par cette mergence des nouvellestechnologies et lapparition dune nouvelle scne de dbat public. La prise de conscience a t brutalelorsque les Rvolutions de couleur sont devenues des Rvolutions Twitter. Il n'est dsormais plusquestion de laisser le contrle du cyber-espace aux voix discordantes.Censure de contenus politiques ousociaux grce aux derniers outils technologiques,arrestations et intimidations de net-citoyens,surveillanceomniprsente et fichage destins mettre en danger l'anonymat des internautes : les gouvernements r-

    pressifs sont passs l'acte.Une soixantaine de pays ont t concerns en 2009 par une forme de censureduWeb, soit deux fois plus que l'anne passe.Le WorldWideWeb se fait grignoter progressivement parla mise en place d'intranets nationaux, au contenu valid par les autorits.UzNet, Chinternet,Turkmen-Net, etc. Peu importe ces dirigeants si de plus en plus d'internautes sont victimes d'une sgrgationnumrique. LeWeb 2.0 se heurte au Control 2.0.

    Quelques rares pays comme la Core du Nord, la Birmanie ou leTurkmnistan peuvent se permettre dese couper totalement du World Wide Web. Le manque de dveloppement des infrastructures leur sertde prtexte. Mais du coup, le march noir des tlcommunications prospre, par exemple Cuba ou lafrontire entre la Chine et la Core du Nord.

    Les net-citoyens font les frais de cette rpression accrue.Pour la premire fois depuis la cration d'Inter-net, prs de 120 blogueurs, internautes et cyberdissidents sont derrire les barreaux pour s'tre exprimslibrement en ligne. Les plus grandes prison du monde pour les net-citoyens sont la Chine, largement en

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    tte avec 72 dtenus, suivie du Vit-nam et de l'Iran, qui ont lanc ces derniers mois des vagues brutalesd'arrestation.

    D'autres qui n'ont pourtant pas de stratgie labore de contrle ou de rpression du Net ont arrtdes net-citoyens ces derniers mois. Au Maroc, un blogueur et un propritaire de cybercafs ont t em-prisonns par des autorits locales. Ils auraient voqu la rpression d'une manifestation qui avait maltourn. En Azerbadjan, le pouvoir a pris en grippe Adnan Hadjizade et Emin Milli, deux blogueurs qui ontdnonc la corruption des autorits et les ont tourn en drision dans une vido diffuse sur YouTube.Quatre journalistes en ligne sont galement derrire les barreaux au Ymen. Il est encore trop tt pourdire si ces arrestations demeurent des cas isols ou s'il s'agit d'une reprise en main des nouveaux mdias.

    De plus en plus d'Etats envisagent ou se dotent de lgislations rpressives et commencent les appliquer.C'est le cas de la Jordanie, du Kazakhstan et de l'Irak. Les dmocraties occidentales n'chappent pas cettelogique de rgulation du Net. Au nom de la lutte contre la pdopornographie ou contre le vol de la pro-prit intellectuelle, des lois et dcrets ont t adopts ou sont en cours d'examen en Australie, en France,en Italie, en Grande-Bretagne notamment. Au niveau international, l'accord ACTA, destin lutter contrela contrefaon, est ngoci de manire confidentielle, sans consultation des ONG et de la socit civile.Il pourrait instaurer des mesures potentiellement liberticides tel l'instauration d'un systme de filtrage nonsoumis une dcision de justice.

    Les pays scandinaves empruntent un chemin diffrent. En Finlande, le dcret n732/2009 fait de l'accs Internet un droit fondamental pour tous les citoyens. En vertu de ce texte, chaque foyer devra bnficierd'une connexion d'au moins 1 mgabit par seconde au 31 juillet 2010. Dici 2015, elle devra tre d'aumoins 100 mgabit par seconde. De son ct, le Parlement islandais examine l'heure actuelle une propo-sition de loi ambitieuse, "Icelandic Modern Media Initiative" (IMMI), destine protger les liberts sur In-ternet, en garantissant la transparence et l'indpendance de l'information. Si elle est adopte, l'Islandedeviendrait un paradis cyberntique pour les blogueurs et les citoyens journalistes.

    La risposte des internautes

    La cyberguerre entre net-citoyens et autorits rpressives repose sur l'efficacit des armes mises la dis-position de chacun : systmes de filtrage et de surveillance de plus en plus performants contre cryptagedes e-mails, proxies et outils de contournement de la censure de plus en plus sophistiqus (Tor, les VPN,Psiphon, UltraReach, etc.). Ces derniers sont dvelopps grce la solidarit de net-citoyens du mondeentier. Des milliers d'Iraniens utilisent par exemple des proxies destins aux internautes chinois.

    Les pressions internationales comptent aussi. Les intrts gostratgiques des grandes puissances s'expri-ment aussi sur le Web. Les Etats-Unis ont rig, en janvier 2010, la libert d'expression sur Internet en pri-orit de leur politique trangre. Reste voir comment le pays va appliquer cette stratgie ses relationsextrieures et quelle sera la raction des pays concerns.

    Isols, les internautes, les dissidents et les blogueurs sont vulnrables. Ils commencent donc se regrouper,en associations ou au gr des combats qu'ils souhaitent mener. Ainsi sont ns une association des blogueursrusses ou une autre des Marocains, des groupes d'internautes blarusses qui lancent des campagnes contreles dcisions du gouvernement, d'autres de blogueurs gyptiens mobiliss contre la torture ou le cot dela vie, et encore des internautes chinois qui organisent des cybermouvements en faveur des manifestantsiraniens sur Twitter. Que leurs causes soient nationales ou mondiales, les combats qu'ils mnent rsonnent

    et dcideront du visage de l'Internet de demain. La rsistance s'organise.

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    Les Ennemis d'Internet 2010

    La liste des ennemis d'Internet tablie par Reporters sans frontires runit, cette anne encore, les piresviolateurs de la libert d'expression sur le Net : l'Arabie saoudite, la Birmanie, la Chine, la Core du Nord,Cuba, l'Egypte, l'Iran, l'Ouzbkistan, la Syrie, la Tunisie, le Turkmnistan, le Vit-nam.

    Parmi ces pays, certains dcident d'empcher tout prix leurs citoyens d'avoir accs Internet : la Bir-manie, la Coree du Nord, Cuba et le Turkmenistan. Autant de pays o les obstacles techniques et financierssont conjugus avec un contrle d'Etat et l'existence d'un intranet trs limit. Coupure d'Internet ouralentissement majeur sont monnaie courante en priodes de troubles. L'Arabie saoudite et l'Ouzbkistanoptent pour un filtrage massif et incitent leurs internautes l'autocensure. La Chine, l'Egypte, la Tunisie etle Viet-nm misent sur une stratgie de dveloppement des infrastructures des fins conomiques maiscontrlent de prs le contenu politique et social (les systmes de filtrage chinois et tunisiens sont de plusen plus sophistiqus) et montrent une profonde intolrance vis--vis des voix critiques. La grave crise in-terne qui traverse l'Iran depuis des mois a pris dans ses filets les net-citoyens et les nouveaux mdias, de-venus, leur tour, des ennemis du rgime.

    Parmi les pays sous surveillance, plusieurs dmocraties. L'Australie, en raison de l'implantation prochained'un systme pouss de filtrage du Net et la Core du Sud o des lois trop svres encadrent les inter-nautes, en remettant en cause leur anonymat et en incitant l'autocensure.

    La Turquie et la Russie font leur entre dans cette liste des pays sous surveillance. En Russie, suite au

    contrle exerc par le Kremlin sur la majorit des mdias, Internet est devenu l'espace d'change d'infor-mations le plus libre. Mais son indpendance est menace par des arrestations et poursuites de blogueurs,ainsi que des blocages de sites extrmistes qui ne le sont pas toujours. La propagande du rgime estde plus en plus prsente sur la Toile. Il existe un vrai risque qu'Internet ne se transforme en outil de con-trle politique.

    En Turquie, les sujet tabous tournent principalement autour d'Atatrk, de l'arme, de la question des mi-norits (kurde et armnienne notamment) et de la dignit de la Nation. A ce titre, plusieurs milliers desites sont bloqus, dont YouTube, suscitant des protestations. Les blogueurs et internautes qui s'exprimentlibrement sur ces sujets s'exposent des reprsailles, notamment judiciaires.

    D'autres pays, dont les Emirats arabes unis, le Blarus et la Thalande, restent dans la liste des pays soussurveillance, mais devront raliser des progrs pour ne pas basculer dans celle des Ennemis d'Internet.La Thalande, en raison des abus lis au crime de lse-majest, les Emirats cause du renforcement du fil-trage. Et le prsident blarusse vient de signer un dcret liberticide qui rgule le Net, et qui entrera envigueur l't, quelques mois avant les lections.

    Lucie MorillonResponsable du Bureau Nouveaux Mdias

    Jean-Franois JulliardSecrtaire gnral

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    LArabie saoudite fait partie des premiers pays avoir reu l'autorisation d'crire des noms de domaineInternet en arabe. Le taux de pntration dInternet, estim ce jour environ 38 % de la population, esten progression. Pourtant, le pays reste lun des plus rpressifs envers Internet.

    Filtrage svre et dlation

    Un filtrage trs strict cible tout contenu caractre pornographique ou moralement rprhensible .Des sites qui abordent la question de la religion, les droits de lhomme ou les prises de position de lop-position sont galement rendus inaccessibles. Loin de sen cacher, les autorits assument leurs choix decensure et revendiquent le blocage denviron 400 000 sites. LUnit des services dInternet en expliquedailleurs le principe sur son site www.isu.net.sa/saudi-internet/contenet-filtring/filtring.htm. Il tient la dis-position des citoyens un formulaire pour demander le blocage ou le dblocage dun site.

    Et ceux-ci ne sen privent pas. LAgence des tlcommunications et des technologies de linformation arcemment dclar que le nombre de ces demandes de blocage concerne entre 700 et 1000 sites par jour,

    soit une moyenne de 300 000 sites dnoncs par des citoyens par an. Un reprsentant de la mmeagence estime que 93% des sites filtrs sont caractre pornographique. Le reste concernerait des sitesqui diffusent de linformation contraire aux valeurs du royaume . L'agence reconnat pourtant dansune tude rcente que 55 % des utilisateurs sont proccups par ces blocages de sites et les trois quartsestiment que le filtrage actuel est exagr.

    Des cybercafs sous surveillance

    Les cybercafs se sont vu imposer des restrictions draconiennes en avril 2009. Ils doivent dsormais in-staller des camras caches, fournir une liste des clients et des sites consults, ne pas permettre lutili-sation de cartes prpayes ou de liaisons Internet par satellite non autorises, fermer minuit et ne pasaccepter de mineurs.

    Leurs propritaires encourent une peine de prison si leurs locaux sont utiliss pour diffuser des informa-tions contraires aux valeurs du royaume et ce en vertu de la nouvelle loi sur lutilisation de la tech-nologie, entre en vigueur en janvier 2008.

    Cette loi prvoit galement des peines de prison de dix ans pour les responsables de sites Internet quisoutiennent le terrorisme et cinq ans pour ceux qui diffusent des informations caractre pornographiqueou en violation des valeurs religieuses et sociales du pays.

    Des net-citoyens de plus en plus actifs

    LArabic Network for Human Rights Information estime 10 000 le nombre de blogs actifs, en arabe et

    en anglais, dans le pays.

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    ARABIESAOUDITENom de domaine : .saPopulation : 28.686.633.Internautes : 7.700.000Salaire moyen mensuel : environ 16 000 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 0Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :1,5 3 euros

    Les blogueurs sont confronts aux forces traditionnelles de la socit saoudienne, qui tentent dempcher In-ternet de devenir un espace de discussions libre. Un arsenal lgislatif est destin intimider les net-citoyens etfavorise lautocensure.

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    La nouvelle communaut de blogueurs face la c

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    Les blogueurs qui abordent des sujets sensibles sexposent aux reprsailles des censeurs. Pour la premirefois, les autorits saoudiennes ont emprisonn, en 2008, un blogueur, Fouad Al-Farhan, pour avoir publisur son blog (http://www.alfarhan.org) un article dcrivant les avantages et les inconvnients dtre musulman. En juillet 2009, le blogueur syrien, Raafat Al-Ghanim, rsidant en Arabie Saoudite, a sontour t arrt. Il nhsitait pas critiquer, sur des forums syriens et saoudiens, la situation sociale et poli-tique dans les deux pays. On est sans nouvelles de ce blogueur depuis son arrestation.

    Rcemment, les sites participatifs ont t tout particulirement viss par les censeurs. Le sitenewarabia.org, un forum de discussion politique, est inaccessible dans le pays. La plate-forme blogger.com,initialement bloque dans son intgralit, est dsormais lobjet dune censure cible de son contenu,

    preuve que les autorits ne peuvent pas non plus empcher les blogueurs dexister. Les autorits sen sontpris pour la premire fois aux utilisateurs saoudiens du site de micro-blogging Twitter en aot dernier. Lespages Twitter de deux militants des droits de lhomme, Khaled al-Nasser et Walid Abdelkhair, ont alors tbloques.

    La journaliste amricaine, Courtney C. Radsch, qui travaillait Duba pour le site Internet de la chane saou-dienne dinformations Al-Arabiya, a t licencie en octobre 2009 suite la parution sur le site Internetdun article sur les violations des normes de scurit par la compagnie arienne nationale Emirates Airlines.Perdant ainsi son visa de travail, elle a t contrainte de quitter le pays.

    Le site du journal Al Watan a t hack en novembre dernier. Sur la page daccueil apparaissait sur fondnoir linscription suivante : Il ny a de Dieu que Dieu et Mohammed est son prophte . Le journal feraitlobjet dattaques constantes depuis la parution dun article critiquant des religieux ayant dnonc lergime de mixit dans la nouvelle facult, King Abdullah University of Science and Technology.

    Le contrle du Net en Arabie saoudite est aussi rvlateur de la volont dassurer le maintien de l'ordresocial. Car le Net a fourni un espace dexpression indit aux femmes. Elles reprsentent plus de la moitides blogueurs et les deux tiers des internautes saoudiens. Elles y abordent des sujets tabous en public, telsque la sant.

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    ARABIESAOUDITE La nouvelle communaut de blogueurs face la c

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    Un firewall rigide

    Le 'firewall birman applique une censure stricte, qui cantonne les utilisateurs un intranet pur des cri-tiques du rgime. Seule l'utilisation de proxies ou d'autres outils de contournement de la censure permetl'accs au World Wide Web. Parmi les sites bloqus : les mdias birmans en exil, les proxies et autres outilsde contournement de la censure, certains mdias internationaux, des blogs et des sites qui proposentdes bourses d'tudes l'tranger. Les autorits assurent un blocage de sites et d'URLs. La censure n'estpas consistante : par exemple le site www.peoplemediavoice.com est filtr, mais sa version identique surwww.peoplemediavoice.net ne l'est pas.

    La consultation des messageries prives est galement restreinte. Officiellement, il est interdit aux inter-nautes dutiliser des services de messagerie autres que ceux fournis par le gouvernement. Les webmailsYahoo! et Hotmail sont bloqus dans le pays mais peuvent tre consults via des proxies.

    La vitesse de connexion, baromtre de la situation politique intrieure

    La vitesse de connexion ordinaire d'une ligne est de 512kb, soit l'quivalent d'une connexion individuelleADSL basique en Europe, mais une ligne est partage par plusieurs utilisateurs, ralentissant de fait les ac-tivits en ligne. Il faut compter une dizaine de secondes pour ouvrir un e-mail, ou charger une page. Passerpar un proxy acclre les choses. En revanche, les cybercafs, principaux points de connexion dans un payso l'abonnement individuel est trs coteux et soumis une autorisation tatique, doivent partager cetteligne 512 kb avec 10 15 ordinateurs, ce qui ralentit la vitesse de connexion. Une ligne 512kb est nces-saire pour utiliser Gtalk et Skype en temps rel.

    En cas de tensions politiques dans le pays, la vitesse de connexion connat alors un fort ralentissement,quand la junte ressent le besoin d'viter les fuites d'informations l'tranger. En mai et juin 2009, au mo-ment o la dirigeante de l'opposition Aung San Suu Kyi passait en procs pour avoir viol les termes desa rsidence surveille en hbergeant un ressortissant amricain, le rgime n'avait pas hsit couper leslignes tlphoniques et Internet de la ville o elle tait dtenue. Et les internautes birmans avaient constatun fort ralentissement des connexions au niveau national, avec pour consquence l'impossibilit d'envoyerdes vidos. Il fallait alors prs d'une heure pour envoyer un simple e-mail sans attachement. Selon dessources locales, le gouvernement serait prt couper nouveau l'accs Internet, comme il l'avait fait en2007, lors des lections d'octobre 2010, pour assurer un contrle total de l'information.

    Les sources d'information indpendantes, btes noires du rgime

    Les journalistes qui collaborent avec les mdias en exil et les blogueurs sont dans la ligne de mire des au-torits, et ce particulirement depuis la rvolution safran de 2007 et les condamnations internationalesqui ont suivi la large diffusion des images de la rpression. Elles utilisent sans vergogne une lgislation par-

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    BIRMANIENom de domaine : .mmPopulation : 48137 Internautes : 250 000Salaire moyen mensuel : environ 20 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 2Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :environ 0,40 euros

    Deux hauts fonctionnaires condamns mort pour avoir envoy des documents par e-mail l'tranger : on neplaisante pas avec la censure du Net en Birmanie. Filtrage massif de sites et ralentissement brutal en priodede troubles constituent le quotidien d'Internet dans le pays. La junte militaire considre les net-citoyens commedes ennemis. La lgislation qui rgit Internet l'Electronic Act est l'une des plus liberticides au monde.

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    Un rseau la botte des gnraux

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    ticulirement rpressive, lElectronic Act, adopte en 1996, et qui concerne Internet, la tlvision et laradio. Cette loi interdit limportation, la possession et lutilisation dun modem sans permission officielle,sous peine dtre condamn quinze ans de prison pour "atteinte la scurit de lEtat, lunit nationale, la culture, lconomie nationale, la loi et lordre". Nay Phone Latt (http://www.nayphonelatt.net/),arrt en 2008, a cop de 15 ans de prison pour possession d'un film subversif. Le blogueur a dveloppdes problmes de vision en prison.

    Le clbre comdien Zarganar a t condamn trente cinq ans de prison aprs avoir diffus sur Internetdes articles critiquant la gestion par les autorits de laide humanitaire suite au passage du cyclone Nargis.Son blog (lien) tait lun des sites birmans les plus consults lintrieur du pays. Le 31 dcembre 2009,

    Hla Hla Win, une journaliste vido qui collaborait pour la tlvision Democratic Voice of Burma (DVB),base en Norvge, a cop de 20 ans de prison. En janvier 2010, le journaliste Ngwe Soe Lin a t con-damn 13 ans de prison, lui aussi pour avoir travaill pour DVB. Il avait t arrt dans un caf internetdu quartier de Kyaukmyaung de Rangoon le 26 juin 2009.

    En s'en prenant ces internautes et journalistes, la junte tente d'intimider les critiques potentielles et decontraindre ses citoyens l'autocensure. Les publications en ligne sont soumises tout comme les mdiasd'Etat une censure pralable, qui crme sans piti tout sujet un tant soit peu sensible.

    Des sites de mdias birmans en exil, tels que Mizzima et Irrawaddy, ont nouveau t les cibles de cyber-attaques en 2009.

    Sous haute surveillanceLes propritaires des cybercafs subissent de plus en plus de pressions de la part des autorits. Ils avaientdj lobligation de prendre des captures dcran toutes les cinq minutes sur chaque poste et d'tre ca-pables de fournir le numro de la carte didentit de chaque utilisateur, son numro de tlphone et sonadresse si la police les demandait. Dsormais, il leur est spcifiquement interdit d'aider un client crerun compte de messagerie, notamment Gmail, ou utiliser un proxy, sous peine de fermeture. De nombreuxcybercafs ont mis la cl sous la porte ces derniers mois, en partie en raison des risques du mtier, maisaussi cause des problmes pratiques : coupures d'lectricit, frais lvs de maintenance, connexionlente, faible frquentation.

    Malgr tout, des blogs fleurissent. Un sondage ralis par la Burma Media Association, en aot 2009, a re-cens l'existence de plus de 800 blogs, hbergs principalement par Blogspot et WordPress. 80 % sont enbirman, 8 % en anglais et 10% sont bilingues. Les trois quarts des blogueurs ont entre 21 et 35 ans et ontfait des tudes. Plus de la moiti sont en Birmanie et ont commenc bloguer depuis moins d'un an. Laplupart se concentrent sur des thmatiques lies au divertissement. Seulement 6 % traitent de sujets lis l'actualit.

    Une possible ouverture la chinoise ?

    Alors que la Birmanie prsente l'un des taux de pntration d'Internet les plus faibles au monde, le rgimeest en train de construire sa Silicon Valley, dnomme Yadanabon Cyber City. Non pas pour dvelopperl'accs de ses citoyens un Internet libre, mais pour en centraliser le contrle avant les lections prvuespour l'automne 2010 dans le cadre de la feuille de route vers la dmocratie, un projet de rforme poli-tique lanc dbut 2003 par la junte. D'aprs des mdias d'Etat, ce centre d'affaires serait amen devenirle centre nvralgique des communications nationales. Pour le moment, priorit est donne l'tablissement

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    BIRMANIE Un rseau la botte des gnraux

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    de lignes de tlphone fixe et portable pour les entreprises qui s'installent dans ce centre d'affaires. Internetviendra ensuite. On ne se dbarrasse pas du jour au lendemain des rticences de certains gnraux vis--vis des communications.

    La junte utilise pour le moment un satellite tha pour connecter le pays Internet mais elle aurait pourprojet de lancer son propre satellite de communication, via une fuse chinoise ou indienne. Avec sa SiliconValley et son propre satellite, le rgime militaire semble s'engager sur la voie d'un dveloppement des in-frastructures d'Internet pour des raisons conomiques. Paralllement, il se tient prt couper toute con-nexion et isoler nouveau compltement le pays au moindre soupon de trouble intrieur.

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    BIRMANIE Un rseau la botte des gnraux

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    La polmique Google

    Le gant d'Internet Google a donn un vritable coup de projecteur sur la censure d'Internet en Chineen annonant, le 12 janvier 2010, qu'il renonait censurer la version chinoise de son moteur de recherche,google.cn, quitte devoir se retirer du march. Une dcision prise la suite de cyber-attaques trs so-phistiques ayant vis des dizaines de militants des droits de l'homme et journalistes. Un bras de fer estdepuis engag entre les autorits chinoises qui assurent qu'Internet en Chine est tout fait ouvert -et l'entreprise amricaine, devenue le porte-tendard des dfenseurs de la libert d'expression sur le Net.La secrtaire d'Etat amricaine Hillary Clinton a apport son soutien Google, dans un discours prononcle 21 janvier. Elle rige les Etats-Unis en dfenseurs d'un Internet libre, accessible tous, et fait de ladfense de la libert d'expression sur Internet une priorit de la politique trangre amricaine.

    La Grande muraille lectronique :le systme de censure le plus abouti au monde

    La Chine a la plus grande population dutilisateurs du Web au monde, avec 380 millions d'internautes,selon les autorits. Le systme de contrle y est lun des plus pousss. Il a t mis en place ds la crationd'Internet, afin de faciliter son dveloppement pour des raisons conomiques tout en en contrlant stricte-ment le contenu, et en vitant la diffusion d'informations caractre subversif.

    Les censeurs parviennent bloquer des dizaines de milliers de sites en combinant un filtrage des URLsavec la censure par mots cls, de Tiananmen au dala-lama en passant par dmocratie ou droits del'homme

    Depuis que les caractres chinois ont t introduits sur le Net et que la Chine contrle les noms de do-maine .cn, le rgime a mis en place un vritable intranet. Les noms de domaine en idogrammes donnentaccs des sites installs sur le territoire chinois. En tapant .com.cn, l'internaute est redirig vers la versionchinoise du site concern. Par consquent, tout internaute chinois utilisant les idogrammes est cantonnsur cet intranet, dconnect du World Wide Web.

    La censure s'est institutionnalise, elle dpend de plusieurs ministres et administrations. Au systme defiltrage s'ajoute le contrle des plus grandes plateformes de blogs. L'aide des entreprises trangres et no-tammment des moteurs de recherche de Yahoo!, de Microsoft, et encore l'heure actuelle de Google, leurrend la tche aise.

    Les principaux sites d'informations, tout comme les mdias chinois, reoivent chaque jour des directivesorales et crites du Dpartement de la Publicit qui prcisent quels sujets peuvent ou ne peuvent pas tre

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    CHINENom de domaine : .cnPopulation : 1 338 612 968Internautes : 384 000 000Salaire mensuel moyen : entre 160 et 200 euros

    Nombre de cyberdissidents emprisonns : 72Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :environ 1,50 euro

    Sur fond de polmique avec Google et les Etats-Unis sur le futur d'Internet, les autorits chinoises continuent renforcer la censure sur le Web, face une communaut en ligne de plus en plus dynamique. Louverture tantvante par les organisateurs des Jeux olympiques de 2008 naura t quune illusion. La Chine reste la plusgrande prison du monde pour les net-citoyens. Diffusion amplifie de la propagande, surveillance gnraliseet traque aux signataires de la Charte 08 sont de mise sur ce qui est devenu l'intranet chinois. Avec des cons-quences non ngligeables sur le commerce.

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    L'offensive Control 2.0 contenue par des net-citoyen

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    couverts et selon quelles modalits. Par exemple, ce dpartement a envoy les instructions suivantes afindempcher la couverture de laffaire de corruption dans laquelle est impliqu Hu Haifeng, le fils du prsi-dent Hu Jintao, en Namibie : "Hu Haifeng, Namibie, Enqute Corruption Namibie, Enqute Corruption YangFan, enqute corruption TsingHua TongFang, enqute corruption Afrique du Sud : faites en sorte quil nyait aucun rsultat de recherche pour ces mots cls". Les moteurs de recherche ont appliqu une censuredrastique sur cette affaire.

    Renforcement de la censure et intensification de la rpression

    L'anne 2009 a t marque par une srie d'anniversaires sensibles : la rvolte du Tibet (en mars), les dixans d'interdiction de Falungong et les vingt ans de la rpression sanglante de Tiananmen Square (en juin).Autre vnement politique marquant de l'anne : les soixante ans de la Rpublique populaire, le 1er oc-tobre. Les autorits ont ragi chaque fois en imposant aux mdias traditionnels et aux nouveaux mdiasune censure brutale.

    A la veille de la commmoration du vingtime anniversaire de la rpression de la place Tiananmen, unedizaine de sites tels que Twitter, YouTube, Bing, Flickr, Opera, Live, Wordpress ou Blogger ont t bloqus.Une grande majorit de jeunes Chinois ne connaissent mme pas lexistence des vnements de juin1989, tant le black-out a t maintenu au cours des vingt dernires annes. "La recherche nest pas en con-formit avec les lois, les rglements et les politiques." Voici la rponse quobtient linternaute chinois quandil tape "4 juin" sur les pages "Photos" du moteur de recherche Baidu, le plus populaire du pays.

    Avant l'anniversaire de la Rpublique populaire, les censeurs ont redoubl defforts pour empcher les in-ternautes dutiliser des logiciels de contournement de la censure, comme Freegate, en bloquant des mil-liers dadresses IP trangres souponnes de participer ce rseau.

    Le contrle administratif s'est renforc la fin 2009 et au dbut 2010. En dcembre 2009, les autoritsont annonc la mise en place prochaine de l'obligation pour tous les sites de s'enregistrer sur une listeblanche sous peine d'tre placs sur une liste noire. Potentiellement, des millions de sites pourraient trebloqus, ainsi que des sites trangers si cette rgle leur est applique.

    L'interdiction faite des particuliers de se procurer des noms de domaine .cn a t leve en fvrier 2010mais au profit de l'installation d'un systme draconien de contrle : les individus qui souhaitent crer unsite Internet doivent dsormais senregistrer en personne, en prsentant une pice didentit aux autoritsde contrle.

    La campagne contre la pornographie lance en janvier 2009 a conduit, selon les autorits, la fermeturede 15 000 sites un an plus tard, et l'arrestation de plus de 5 000 personnes. Elle a aussi conduit la fer-meture de sites qui n'ont rien voir avec le sujet. Le New York Times a t brivement bloqu en janvier2009. La plateforme de blogs Bulldog.cn, trs en vogue chez les blogueurs militants et les intellectuels, at ferme le mme mois. Elle publiait un grand nombre dinformations ngatives dans le domaine poli-tique, selon le ministre de lInformation. Elle avait notamment relay la Charte 08, une ptition publieen ligne demandant plus de liberts dans le pays, notamment sur Internet, et signe ce jour par plusieursmilliers de Chinois.

    Dans le cadre de cette campagne, le gouvernement a galement ordonn aux fabricants dordinateurschinois et trangers dinstaller sur leurs produits un logiciel de filtrage appel Green Dam Youth Escort,

    destin protger les jeunes internautes des contenus nfastes. Mais les options de filtrage inclueraient

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    la possibilit de bloquer du contenu politique et religieux. Face au toll suscit par la mesure, les autoritsont repouss linstallation obligatoire du logiciel.

    La liste des mots cls filtrs est rgulirement mise jour. Parmi les sites rcemment censurs : ImDb, unsite d'informations sur le cinma. YouTube, Blogger, Twitter, Facebook, BBC en chinois, FriendFeed, Daily-motion, Flickr, etc. Les censeurs sont particulirement intresss par le blocage de sites participatifs etd'change d'images. Le 30 mars, l'Administration de la Radio, du Film et de la Tlvision (SARFT) a publiune note sur le renforcement du contrle du matriel audiovisuel post sur Internet, qui dtaille unetrentaine de contenus interdits ou modifier.

    Des sites de militants des droits de l'homme, Chinese Human Rights Defenders (CHRD) et IndependentChinese Pen Center (ICPC) mais galement le site d'informations Boxun, ont t hacks en janvier 2010et rendus inaccessibles pendant des jours. Leur fournisseur d'accs tranger a t victime de ce qu'ildsigne comme l'attaque DDoS la plus intense qu'il ait jamais exprimente. Ces attaques ont tprcdes par l'installation de logiciels malveillants sur les sites des organisations concernes.

    Traitement discriminatoire du Xinjiang et du Tibetdans l'accs l'information

    La censure touche de plein fouet les provinces risque, comme le Tibet et le Xinjiang. La rpression syabat en permanence sur ceux qui tentent de faire circuler des tmoignages des violences commises parles forces de scurit. Des dizaines de Tibtains et d'Oughours sont dtenus, certains condamns laprison vie, pour avoir envoy des informations ltranger ou tent dinformer en dehors de la ligne duParti.

    Les sites tibtains hbergs en Chine Tibettl (http://www.tibettl.com/), connu pour hberger le blog delcrivain populaire Jamyang Kyi, et ChodMe (http://www.cmbpd.cn/index.html) sont inaccessibles depuisla plus grande partie du territoire chinois, notamment au Tibet. En aot 2009, l'internaute Pasang Norbua t arrt par les autorits chinoises Lhassa, pour avoir consult le site Radio Free Asia(http://www.rfa.org/english/). Lcrivain et photographe tibtain Kunga Tseyang a t condamn en no-vembre 2009 cinq ans de prison pour avoir notamment publi des articles sur Internet. Deux jours plustt, le fondateur dun site Internet littraire, Kunchok Tsephel, a cop dune peine de quinze ans de prisonpour "diffusion de secrets dEtat".

    Le Xinjiang a t coup du monde suite aux meutes de juillet 2009 et attend toujours d'tre reconnect Internet. Les autorits ont rtabli l'accs dbut 2010 aux seuls sites des mdias officiels Xinhua et Peo-ple's Daily et continuent de censurer tous les sites en langue oughoure ou ceux qui traitent du Xinjiang.Les internautes qui surfent depuis cette province ne peuvent pas laisser de commentaires, ni consulter lesforums des rares sites accessibles. Il est galement impossible denvoyer et de recevoir des mails. La cen-sure a t suivie d'arrestations. llham Tohti, professeur dconomie lUniversit centrale des nationalitsde Pkin et directeur du site uighurbiz.net, a t dtenu illgalement pendant plusieurs semaines l't2009. Les cyberdissidents et fondateurs de sites oughours Dilshat Parhat, Nureli, Obulkasim et Muhemmet,arrts l't 2009, sont toujours emprisonns.

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    La plus grande prison du monde pour les net-citoyens

    Trente journalistes et soixante-dix net-citoyens sont actuellement derrire les barreaux pour s'tre ex-prims librement. Les accusations portes contre eux sont la subversion ou diffusion de secretsd'Etat.

    Des peines de prison trs lourdes ont t prononces rcemment contre des net-citoyens et dissidents.L'intellectuel Liu Xiaobo a t condamn, en dcembre 2009, une longue peine de prison 11 ans - pouravoir crit sur Internet et particip au lancement de la Charte 08. Plus de cent autres signataires ont tinterpells, menacs, convoqus par la police politique, aux quatre coins du pays.

    Le cyberdissident Huang Qi a vu sa peine de trois ans de prison confirme en appel, et le blogueur TanZuoren a t condamn cinq ans de prison pour avoir os contredire la version officielle sur les victimesdu tremblement de terre de mai 2008 au Sichuan.

    Dautres militants des droits de lhomme reconnus croupissent toujours en prison, comme Hu Jia. Arrten dcembre 2007, il a t condamn en avril 2008 trois an et demi de prison pour avoir publi des ar-ticles sur Internet et accord des interviews des journalistes trangers dans le cadre de son combat no-tamment contre le sida et pour lenvironnement.

    Enfin, lavocat dfenseur des droits de lhomme Gao Zhisheng, arrt le 4 fvrier 2009, n'a plus donn denouvelles depuis, ce qui laisse craindre qu'il ait pu succomber sous le coup des tortionnaires.

    Surveillance renforce et propagande tout va

    La surveillance devient de plus en plus sophistique. La cyberpolice, qui compte plus de 40 000 membres,scanne constamment le Web, avec une vigilance particulire pour les lments subversifs.

    Dbut 2010, suite aux rvlations de piratage de comptes Gmail, des militants des droits de l'homme etdes journalistes ont constat que leurs comptes avaient t hacks et leurs e-mails rerouts vers une autreadresse e-mail, inconnue.

    Les cybercafs sont aussi placs sous haute surveillance. Leurs clients doivent montrer une pice d'identitet tre pris en photo. Le dtail de leurs connexions est conserv et mis disposition des autorits. Leurs

    activits sont observes en direct par des grants sous pression. La connexion entre les commissariatset des endroits sensibles comme des cybercafs ou des centres financiers a t dveloppe et amliore,dans le cadre du projet Safe City.

    Le gouvernement a pris le parti d'empcher l'accs toute information nocive et de la noyer dans desmessages prsentant la vision officielle des vnements. Car le rgime occupe le terrain, en nourrissantle cyberespace de sa propagande. Et il rpond systmatiquement en ligne aux critiques du rgime. Les fo-rums de discussion sont parcourus par des internautes connus sous le nom du Parti des cinquante cen-times, pays pour laisser des commentaires positifs. Bienvenue dans Control 2.0.

    Une communaut en ligne dynamique et inventive

    Toutefois, de nombreuses informations circulent sur l'intranet chinois et des discussions agites se tiennentdans les forums. Les blogueurs et les internautes utilisent de plus en plus de proxies et VPN pour con-

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    tourner la censure. Ils continuent leur travail de dnonciation des travers de la socit et des abus de lEtat.Ce qui oblige de plus en plus frquemment les mdias officiels couvrir ces affaires gnantes. Les nouveauxmdias aident ainsi les mdias traditionnels repousser les limites de la censure. L'annonce de l'incendiequi a touch l'une des tours de la tlvision d'Etat CCTV s'est faite via Internet et Twitter alors que lesmdias d'Etat, dont CCTV, avaient reu l'ordre de se taire.

    Des blogueurs comme Zola se sont fait connatre pour la couverture de sujets sociaux, comme les vic-tions forces. Le cyberdissident Huanq Qi a aid rvler la responsabilit des autorits dans l'effon-drement des coles suite au tremblement de terre dans le Sichuan.

    Les internautes disposent d'un certain pouvoir quand ils s'organisent. La Charte 08 a t publie en ligneet largement diffuse avant de subir les foudres de la censure, ce qui explique la traque lance contre sesrdacteurs. Une jeune femme, Deng Yuqiao, qui a tu un homme tentant de l'agresser, a bnfici d'unecampagne de soutien dans la blogosphre et sur Twitter. Une vritable traque a mme t lance par desnet-citoyens contre des officiels corrompus. Quand Twitter a t bloqu, des internautes en colre ontenvahi un site copieur de Twitter, t.people.com.cn, lanc par le trs officiel People's Daily, forant le site fermer.

    Les internautes ont recours l'humour et des jeux de mots pour ridiculiser les censeurs. Ils ont par ex-emple dtourn le slogan La politique du Comit central du parti est yakexi (bonne), chant par desOughours lors des dernires crmonies officielles du nouvel an chinois, en utilisant un homonyme deyakexi qui signifie lzard. Le lzard a alors envahi le Web chinois comme symbole de la condamnationde la censure. Tout comme l'histoire du lama Caonima, dont le nom prononc un peu diffremment estune insulte, et qui est attaqu par les crabes de la rivire symbolisant les censeurs. Le lzard et le lamaont connu une popularit sans prcdent. Ils ont t dclins en peluches, clips, chansons, dessins animset parodies de lmission le Monde des Animaux de la CCTV, la tlvision dEtat.

    Obstacle au commerce et contrefaon sur internet

    La censure d'Internet n'est pas seulement une question de droits de l'homme. Elle concerne aussi le com-merce et les affaires, handicaps par le manque d'accs une information fiable. L'importation de tl-phones et d'ordinateurs portables quips de Wifi a t interdite en Chine car sur ces derniers sontinstalles des technologies de filtrage qui rendent la surveillance plus difficile. L'iPhone a t lanc en no-vembre 2009 seulement, deux ans aprs le reste du monde, et sans sa capacit wifi. La censure en ligneest devenue aussi une manire de discriminer les entreprises trangres et d'accorder un traitementprfrentiel aux entreprises chinoises Les visiteurs de Google.com se sont retrouvs rerouts vers Baiduplus d'une fois. D'aprs le site Inside Facebook, Facebook est pass d'un million d'utilisateurs en juillet 2009 14000 fin 2009. Le site est bloqu. Ses quivalents chinois, Renren.com et 51.com notamment, dominentdsormais le march. Un quivalent local Twitter a t lanc une fois le site de micro-blogging bloqu.YouTube a lui aussi ses clones chinois, tels que Tudou.com et Youkube.com.

    Le Wall Street Journal a ainsi qualifi la censure d'Internet de protectionnisme dguis. La Chine avaitpromis en 2001, lors de son accession l'Organisation mondiale du commerce (OMC), de permettre auxentreprises trangres d'avoir un accs illimit de nombreux services, dont les services en ligne. Elle vienten dcembre 2009 d'tre condamne pour son rgime d'importation et de distribution de films, livres etmusique, jug discriminatoire par les Etats-Unis. L'OMC lui a recommand de se mettre en conformit.L'organisation internationale devrait aussi examiner au plus vite la question de la censure en ligne comme

    obstacle au commerce.

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    Internet, une vague rumeur

    La Core du Nord est littralement coupe du monde et Internet ne fait pas exception. Le rseau inter-national n'est accessible qu' une faible minorit : quelques membres haut placs du rgime et les diplo-mates trangers, grce une liaison satellite avec des serveurs bass l'tranger. Kim Jong-il est connupour son obsession des gadgets lectroniques, et pour avoir demand l'ex-secrtaire d'Etat amricaineMadeleine Albright son adresse e-mail pour lui crire. En revanche, il tient le reste de la population com-pltement l'cart de la Toile. L'existence d'Internet, dans un pays o la proccupation principale deshabitants est de survivre, tient du domaine de la rumeur.

    Un intranet trs restreint s'est dvelopp, comptant une bote de rception d'e-mails, quelques sites d'in-formations relayant la propagande du rgime et un navigateur qui donne accs aux pages web des banquesde donnes des trois plus grandes bibliothques du pays : la Grande Maison d'tudes du peuple et les Uni-versits Kim Il-sung et Kim Chaek. Cet intranet n'est accessible qu' des universitaires, des hommes d'af-

    faires et des hauts fonctionnaires qui ont obtenu une autorisation spciale.

    Les trs rares cybercafs qui ont ouvert dans la capitale sont soumis un strict contrle du Korean Com-puter Center, le seul fournisseur d'accs du pays. S'ils permettent de se connecter l'intranet nord-coren,leurs clients les considrent en premier lieu comme des points d'accs des ordinateurs et des jeux.

    Le nom de domaine .kp a finalement t attribu par l'ICANN la Core du Nord, qui a nomm le prsi-dent de la section europenne du Centre des ordinateurs de Chosun, un Allemand, comme administrateur.Le pays possderait une trentaine d'adresses IP qu'il n'utiliserait pas pour le moment. Le site officiel del'Etat www.korea-dpr.com serait hberg aux Etats-unis, celui de l'agence de presse Chosun au Japon.

    Propagande en ligne

    La prsence trs minime de la Core du Nord sur la Toile est entirement ddie aux louanges de Kim Jong-il et de son pre Kim Il-sung, ainsi qu l'idologie d'auto-suffisance juche - prne par le rgime.Plusieurs dizaines de sites relaient ces prises de position... et sont bloqus en Core du Sud. Le site del'agence de presse Chosun, par exemple, ne diffuse que des informations positives sur le pays, que ce soitdes visites de Kim Jong-il ses compatriotes ou des nouvelles des trs rares groupes l'tranger qui sou-tiennent encore le pays. Toute information ngative est volontairement lude.

    La Core du Nord est galement souponne d'avoir conduit, l't 2009, une cyber-attaque de typeDDoS contre une trentaine de sites commerciaux et gouvernementaux amricains et sud-corens.

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    CORE DUNORDNom de domaine : .kpPopulation : 22 665 345Internautes : donne non disponibleSalaire mensuel moyen : 13 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 0Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :environ 6 euros

    Dans le pays le plus ferm au monde, l'immense majorit de la population ignore jusqu' l'existence d'Internet.Un intranet ultra-contrl a t cr, mais son accs est restreint. Le rseau est utilis par Kim Jong-il etquelques rares hauts dirigeants pour leur plaisir personnel et pour rpandre la propagande du rgime l'tran-ger. Seul lueur d'espoir : le march noir des communications la frontire avec la Chine.

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    Exclue de l're numrique

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    La contrebande des tlcommunications

    Un nouveau service de tlphone portable a t mis en place par la socit gyptienne Orascom depuisle dbut de l'anne 2008. Mais il est trs limit, concentr sur Pyongyang et quelques grandes villes du Sud,trop cher pour la majorit de la population et il est impossible dappeler ltranger. La police politiquetraque ceux qui seraient tents d'utiliser les tlcommunications pour briser le contrle. Un homme avaitt excut en 2007 pour avoir pass un coup de tlphone non autoris l'tranger. La Core du Nordest probablement le seul pays au monde o l'annuaire tlphonique est class top secret.

    Habitu des relations complexes avec la communaut internationale, le rgime oscille entre provocationet dialogue. Lorsqu'il entame un semblant d'ouverture et laisse des trangers pntrer sur son territoire,il leur accorde l'accs au World Wide Web. Ainsi, quand l'orchestre philarmonique de New York s'estrendu dans le pays, en 2008, les musiciens et les journalistes qui l'accompagnaient ont eu accs, dans leurhtel, au worldwide web une vitesse rapide. Certains sites touristiques bnficieraient galement parmoments d'un accs Internet.

    Le peu d'informations qui entrent dans le pays passent par la frontire avec la Chine, grce aux individusqui font la navette entre les deux pays, aux CDs et DVDs qui sont introduits clandestinement. Un marchnoir y prospre. Les tlphones en provenance de Chine permettent de passer des coups de fil en captantle signal la frontire. L'introduction rcente de tlphones 3G en Chine pourrait aussi permettre unmeilleur accs Internet dans ces rgions frontalires. Parmi les autres sources dinformations alternatives: le site Dailynk, anim par des rfugis nord-corens bass en Core du Sud. Les radios indpendantes

    qui mettent de la Core du Sud vers la Core du Nord, Free North Korea Radio, Radio Free Chosun,Open Radio for North Korea et North Korea Reform Radio, collectent notamment leurs informationsen appelant des stringers bass la frontire avec la Chine.

    La revanche du pouvoir

    Cependant, les autorits ont annonc, dbut 2010, un renforcement de la rpression contre les d-fecteurs et par la mme occasion un contrle accentu des moyens de communication la frontire,visant notamment les tlphones portables chinois utiliss en Core du Nord. Le rgime sest targudavoir les moyens dcraser les forces ractionnaires et aurait dores et dj montr lexemple enfaisant fusiller, la fin janvier, un ouvrier accus davoir utilis un portable chinois illgal. Ce dernieraurait, selon Open Radio for North Korea, divulgu des informations sur le prix du riz et ses conditions

    de vie un ami dfecteur vivant en Core du Sud. Radio Free Asia prcise que le gouvernement auraitfait lacquisition de matriel dinterception des signaux tlphoniques et intensifi le brouillage de ces sig-naux. Lquipement en question serait install la frontire avec la Chine dans des villes comme Shinuiju,Hyesan et Hweryong.

    Alors que le Cher Leader est malade, trs peu d'informations ont filtr sur son successeur potentiel, sonplus jeune fils, si ce n'est qu'il a tudi en Suisse. Ses positions sur le contrle de l'information sont donctotalement inconnues.

    Une chose est claire : le rgime actuel ne compte nullement permettre sa population, baigne dans unepropagande omniprsente, d'en savoir plus sur le monde extrieur. L'accs Internet, tout comme le faitd'couter les radios internationales, pourrait convaincre davantage de Corens du Nord de fuir le pays.

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    Quelques volutions positives

    En janvier 2010, le gouvernement a annonc que Cuba avait augment sa capacit de connexion Internetde 10 % le mois prcdent, grce une amlioration de la liaison satellite. S'il explique que l'le amliorerases services de tlcommunications qualitativement, il ne s'agit pas d'en permettre l'extension. La stratgiedu gouvernement est de privilgier l'accs collectif. Dans les faits, l'accs est rserv quelques privilgis.

    Raul Castro a suscit des espoirs d'ouverture en 2008. Il a annonc la leve de l'interdiction faite auxCubains de possder un ordinateur personnel et de se rendre dans les htels touristiques pour accder Internet. Cependant, ces nouvelles dispositions ne se sont pas traduites par une gnralisation de l'accs Internet. La priorit du gouvernement reste le contrle total de l'information. Boris Moreno, le ministredes Sciences informatiques et des Communications, a dclar en 2008 que lutilisation dInternet [doitservir ] dfendre la Rvolution et les principes auxquels [Cuba] croit depuis des annes.

    L'intranet cubain et ses drives

    Deux rseaux parallles coexistent sur l'le. Le rseau international et un intranet cubain trs contrlqui se rsume une encyclopdie, des adresses e-mail se terminant par .cu et des sites d'informations dugouvernement : Granma, etc. A l'extrieur des htels, seuls quelques privilgis disposent d'une autorisationspciale et ont la possibilit de se connecter au rseau international. Ce dernier fait galement les fraisde la censure, qui vise principalement les publications des dissidents sur des sites trangers.

    Le rgime n'a pas les moyens de mettre en place un systme de filtrage systmatique la chinoise. Maisil compte sur plusieurs facteurs afin de limiter l'accs Internet : le cot exorbitant des connexions en-viron 1,5 dollar de l'heure depuis les points d'accs l'intranet contrls par l'Etat, 7 dollars de l'heuredans un htel pour un accs au rseau international, alors que le salaire moyen mensuel est de 20 dollars; et les problmes d'infrastructure, notamment la lenteur des connexions. Ces obstacles permettent de

    restreindre le nombre d'internautes capables de surfer, ainsi que le temps pass en ligne. La plupart desinternautes se contentent de lire leurs emails et d'y rpondre. Ils n'ont pas le temps de naviguer et deflner en ligne.

    Un vritable march noir a prospr. Il propose le rachat ou la location des mots de passe et codes desquelques individus et socits qui ont reu du parti la permission d'accs Internet. La navigation cote50 dollars par mois et l'envoi ou la rception d'un e-mail 1 dollar. Les utilisateurs illgaux doivent se con-necter la nuit de prfrence.

    Les cls USB, samizdat du Web

    Sur les plus de 150 blogs cubains existants, une vingtaine de blogs se concentrent sur l'information et les

    commentaires de la vie locale. Mme l'Eglise catholique s'est lance sur la Toile en crant un blog. Lesblogueurs sont majoritairement non politiss et signent sous leur vritable nom. Ils prennent leurs

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    CUBANom de domaine : .cuPopulation : 11 451 652Internautes : donne non disponibleSalaire moyen : 15 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 0Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :1,20 euro pour le rseau national 4 5 euros pour lerseau international.

    Malgr quelques amliorations, l'accs au Net reste hors de porte de la majorit de la population, en raisondu cot et de la lenteur de la connexion. Le rgime maintient un rseau deux vitesses. Une petite communautde blogueurs, de plus en plus dynamique, est dsormais dans le collimateur du gouvernement.

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    Privilgier l'accs collectif.... pour mieux limiter l'accs

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    distances la fois vis--vis du gouvernement et des mouvements dissidents sur l'le ou l'tranger. Ils seconcentrent sur les proccupations quotidiennes des Cubains et comblent ainsi un vide existant dans lesmdias d'Etat sous la coupe du rgime et qui se contentent de chanter les louanges du Consulante. Lesblogueurs vitent les ambassades trangres et leurs points d'accs Internet pour ne pas tre taxsd'agents de l'tranger. Tout ceci explique en partie pourquoi le rgime les a de prime abord laisss tran-quilles.

    Ces blogueurs ne peuvent accder directement leurs sites, qui ne sont pas hbergs sur l'le. Ils sont con-traints de faire publier leurs articles et posts via des amis l'tranger. Pour cela, ils suivent une procdurebien rode : prparation l'avance des crits, copis sur une cl USB, et envoi par e-mails depuis un htel.

    Les cls USB, galement passes de main en main, sont devenues Cuba les nouveaux vecteurs de lalibert d'expression, les samizdat locaux.

    La riposte du rgime

    Ces derniers mois, les autorits ont commenc voir d'un mauvais oeil cette diffusion d'informations quichappent leur contrle et prendre ombrage de la popularit croissante de certains de ces blogueurs,telle Yoani Sanchez, de Generacion Y. Dsigne en 2008 par Time Magazine comme l'une des 100 personnesles plus influentes de l'anne, elle a fait l'objet d'une vritable campagne de diffamation dans l'le. Accused'tre une mercenaire au service de l'tranger, son nom a t tran dans la boue par les mdias d'Etat.Le 6 novembre dernier, la police politique a brutalis Yoani Snchez et le blogueur Orlando Luis Pardo, la veille dune manifestation. Un troisime blogueur, Luis Felipe Rojas, a t arrt deux reprises en

    dcembre 2009 et assign rsidence.Un tudiant, Daro Alejandro Paulino Escobar, a t exclu de lUniversit de La Havane en janvier 2010pour avoir cr un groupe polmique sur le rseau social Facebook. Le groupe en question contenaitle compte rendu dune runion de lUnion des jeunes communistes (UJC)(http://www.facebook.com/group.php?v=wall&gid=93444203329).Les autorits tentent dsormais d'occuper un terrain qu'elles avaient jusqu'ici ignor : une association of-ficielle des blogueurs cubains a vu le jour. Et de lourds soupons psent sur les liens possibles entre le gou-vernement cubain et les hackers qui s'en prennent aux sites et blogs cubains hbergs l'tranger.

    L'arsenal juridique contre les critiques en ligne demeure particulirement rpressif. Les internautes cubainsrisquent jusqu vingt ans de prison sils postent un article jug contre- rvolutionnaire sur un site In-ternet hberg ltranger, et cinq sils se connectent au rseau international de manire illgale.

    Le rgime cubain accuse l'embargo amricain de le priver d'une bonne connexion la Toile en l'empchantd'accder aux rseaux internationaux. Ce problme devrait tre en partie rsolu en 2011, date laquellele cable sous-marin en fibre optique reliant Cuba au Venezuela devrait commencer fonctionner, dmul-tipliant la capacit de connexion de l'le au reste du monde. Le gouvernement cubain devra alors avancerde nouvelles excuses pour continuer justifier la censure, moins qu'il ne dcide, pour des raisons dedveloppement conomique, de revoir sa stratgie web. Il reste encore du chemin parcourir avant queles prvisions de Yoani Sanchez l'le relle commence se convertir en le virtuelle ne se ralisent.

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    CUBA Privilgier l'accs collectif.... pour mieux limiter l'accs

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    Populaire et puissant

    La blogosphre a connu un dveloppement vertigineux ces dernires annes, paralllement au programmede dveloppement du secteur des technologies de l'information initi par le rgime. L'Egypte connat l'undes meilleurs taux de pntration d'Afrique, mme si elle reste loin derrire certains pays du Moyen-Ori-ent. La compagnie de tlcom gyptienne, Telecom Egypt, a toujours le monopole des lignes fixes. Une con-nexion est souvent partage par plusieurs individus. Telecom Egypte possde le fournisseur d'accs TE Dataqui contrle plus de la moiti du march.

    Les blogueurs et net-citoyens utilisent ce formidable potentiel d'Internet pour dnoncer les abus desdroits de l'homme. C'est sur Internet que l'un des principaux scandales de la dcennie a t dvoil : suite la diffusion, par le blogueur Wael Abbas, de vidos de tortures dans des commissariats, les fonctionnairesde police impliqus ont t arrts et inculps.

    Le moteur de la contestation

    Les manifestations qui ne peuvent se tenir dans les rues, en raison de l'tat d'urgence, se transforment enmobilisation en ligne relaye par les rseaux sociaux. Les appels au changement dans la socit connaissentun cho particulier sur Facebook. En 2008, des blogueurs avaient soutenu une grve qui s'est tenue le 6avril au nord du Caire, Mahalla, sige de lusine de textile la plus importante du pays. Quand le 6 avril at dclar jour de colre en 2009 par des militants, le mot s'est transmis via SMS des milliers de per-sonnes en quelques jours. Des jeunes gens, jusque-l non politiss, ont dnonc les abus commis par lepouvoir ou les problmes sociaux qui les touchent, comme laugmentation du cot de la vie. Certains ontcommenc bloguer pour imiter des personnalits rendues clbres par leur activisme, telles que WaelAbbas. Le 6 avril est devenu une date symbolique, un rendez-vous annuel incontournable pour les con-testataires. L'mergence de ces nouveaux dissidents fait peur aux autorits. Le rgime se sent oblig derpliquer pour stopper le mouvement en invoquant le maintien de l'ordre.

    Des blogueurs mobiliss mais harcelsEn 2008, plus de 500 dentre eux ont t arrts pour atteinte la scurit nationale, principalementen vertu de la loi d'tat d'urgence. La rpression a continu en 2009 et les dtenus sont souvent victimesde mauvais traitements. La plupart ont t librs depuis, mais deux blogueurs sont actuellement incar-crs. Depuis janvier 2009, une plainte par jour en moyenne est dpose contre un journaliste ou unblogueur. Les poursuites judiciaires sont engages l'initiative des autorits, mais aussi de l'arme ou d'en-treprises prives.

    Le blogueur Abdel Kareem Nabil Suleiman, dit Kareem Amer, est toujours derrire les barreaux. Il faitfigure de bouc missaire. Arrt en novembre 2006, Kareem Amer a t condamn trois ans de prisonpour insulte au prsident et un an pour incitation la haine de lislam en raison dun commentaire

    laiss sur un forum Internet. Il dnonait rgulirement sur son blog les drives autoritaires du gouverne-ment et critiquait les plus hautes institutions religieuses du pays.

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    EGYPTENom de domaine : .eg Population : 83 082 869Internautes : 16 636 000Salaire mensuel moyen : 36 euros

    Nombre de fournisseurs daccs privs : plus de 200Nombre de net-citoyens emprisonns : 2Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :environ 0,15 centime deuro

    Internet est devenu un espace de mobilisation et de contestation. Si le blocage de sites demeure limit, les au-torits tentent de reprendre la main face des blogueurs de plus en plus organiss.

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    Un autre blogueur a t emprisonn dans des conditions trs particulires. Ahmed Abdel Fattah Mustafaa comparu le 1er mars 2010 devant une cour martiale pour des commentaires posts sur son blog dbut2009 faisant tat dune affaire de favoritisme dans une cole militaire. C'est pourtant un civil. Dtenu ausecret pendant plusieurs jours, cet tudiant tait accus de "publication de fausses nouvelles" sur larmeet "tentative de dgradation de la confiance du peuple envers les forces armes". Il a finalement t relchle 7 mars aprs avoir publi des excuses sur son blog.

    Le blogueur Tamer Mabrouk a, quant lui, t condamn en mai 2009 verser 45 000 livres gyptiennes(environ 5 700 euros) pour diffamation et outrage suite une plainte dpose par lentreprise TrustChemical Company, accuse de pollution dans lun de ses articles.

    Wael Abbas, considr comme lun des blogueurs les plus emblmatiques du pays, est victime d'un vritableharclement judiciaire destin le rduire au silence. Une stratgie visiblement voue l'chec. Suite de nombreuses dnonciations internationales, la peine de six mois de prison ferme prononce contre luien novembre 2009 a t annule en appel en fvrier 2010. Dans une affaire monte de toutes pices parles autorits, il avait t reconnu coupable de dgradation dun cble Internet. Poursuivi par ailleurs parTlcom Egypt, le blogueur a cop en fvrier 2010 dune autre peine de six mois de prison et duneamende pour utilisation illgale de sa connexion Internet, quil est acccus davoir partag avec dautresutilisateurs.

    Preuve de l'influence de ces blogueurs et militants : lorsqu'une vingtaine d'entre eux se rendent en janvier2010 dans la ville de Nag Hammadi, en Haute-Egypte, afin d'y rencontrer, par solidarit, les familles des sixCoptes tus dans une fusillade, la police les attend de pied ferme. Ils ont t renvoys vers le Caire parle premier train. Les autorits craignaient qu'ils n'enflamment l'opinion publique et n'appellent des man-ifestations, dans un contexte de tensions confessionnelles que les autorits tenteraient, selon les habitantsde Nag Hammadi, d'touffer.

    Net-citoyens sous surveillance

    Depuis le dbut de 2007, le gouvernement a renforc la surveillance de la Toile au nom de la lutte contrele terrorisme, sous la houlette d'un dpartement spcial au sein du ministre de l'Intrieur. Facebook estsurveill plutt que bloqu, afin d'identifier les militants qui doivent tre observs ou arrts. Les autoritssurveillent les e-mails et les appels tlphoniques de leurs concitoyens sans dcision judiciaire, en vertude la loi sur les Tlcommunications qui impose aux fournisseurs d'accs de mettre leur disposition lesservices et quipements de surveillance ncessaires.

    Depuis 2008, les conditions dutilisation du rseau Internet sans fil (WiFi) ont chang. La connexion estnon seulement devenue payante, mais elle ncessite galement une adresse e-mail laquelle sont envoysle mot de passe et le nom dutilisateur. Les compagnies de tlphonie mobile sont contraintes d'obtenirles donnes personnelles de leurs clients pour pouvoir leur vendre leurs services. L'anonymat est menac.

    La surveillance est aussi prsente dans les cybercafs, trs frquents par la population. Les autorits fontsouvent pression sur les grants pour obtenir l'accs aux donnes personnelles des internautes qui lesintressent. Certains cafs demandent leurs clients de prsenter leurs papiers en change d'un code PINpour accder au Net, mais leur nombre reste limit.

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    L'Egypte n'a pas mis en place de politique de filtrage du Web. Un tribunal administratif en 2007 a rejet lademande d'un juge de bloquer une quarantaine de sites, en voquant le besoin de dfendre la libertd'expression. Quelques sites djihadistes sont parfois temporairement bloqus. Cependant, en mai 2009,un tribunal du Caire a ordonn au gouvernement gyptien de bloquer l'accs aux sites pornographiques

    jugs choquants pour les valeurs religieuses et sociales du pays. Il faudra attendre le rsultat de l'appel etla raction des autorits pour voir si ce jugement introduit un systme de filtrage d'Internet en Egypte.Mais le ministre de la Communication et des Technologies de l'Information a pour le moment exclupubliquement cette option.

    Les blogueurs sont sortis victorieux de leurs derniers dmls avec les autorits : un projet du ministre

    des Communications prvoyait en 2009, d'aprs lArabic Network for Human Rights Information (ANHRI),de limiter les tlchargements mensuels des individus 2 GB de capacit pour une vitesse de 264 kb/s. Ils'agissait de mieux contrler la diffusion des informations, notamment des vidos. En octobre 2009, lesnet-citoyens ont appel un boycott du web au cours d'une campagne surnomme la rvolution des in-ternautes. Le ministre a finalement fait marche arrire face au toll suscit par cette initiative. Il a re-connu que les connexions Internet illgales ne sont pas le problme, c'est plutt l'usage de plus en pluscourant d'Internet qui pose problme. De tels propos laissent prsager que le bras de fer entre les au-torits et les blogueurs est loin d'tre termin, alors qu'une nouvelle mobilisation devrait voir le jour le6 avril prochain.

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    Un systme de filtrage bien rod

    La censure est inscrite au cur de lappareil dEtat. Les fournisseurs d'accs Internet louent la bande pas-sante la Companie des Tlcommunications dIran (CTI), contrle par les Gardiens de la Rvolution.Elle est charge d'ordonner le blocage des sites, ce qui assure une politique de censure homogne. Deslogiciels de filtrage dvelopps en Iran sont utiliss. Les critres de blocage sont dfinis par le Comit encharge de dterminer les sites non autoriss. Il runit des membres de plusieurs branches du gouverne-ment et de lorgane judiciaire : le ministre de la Communication et des Technologies de l'Information, leministre de la Culture et de l'Orientation islamique, le ministre des Renseignements et de la ScuritNationale et le procureur gnral de Thran.

    Les censeurs combinent blocage d'URL et filtrage de mots cls. Ils se montrent ractifs lactualit. Parmiles mots cls bloqus, on retrouve le terme femme en persan, mais aussi torture et viol aprs quel'un des leaders de l'opposition, Mehdi Karoubi, a dnonc, en aot 2009, les mauvais traitements infligs

    aux manifestants incarcrs dans la prison de Kahrisak.

    La vitesse des connexions individuelles en Iran est lente, limite 128 kb/s. Les foyers et les cybercafsne sont pas autoriss avoir accs au haut-dbit sur dcret du ministre de la Communication. Cet ob-stacle technique limite la capacit des internautes tlcharger photos et vidos. En priode de troubles,la vitesse est encore ralentie.

    Les autorits utilisent la loi sur la presse, le code pnal et la loi de 2009 sur la cybercriminalit pour pour-suivre les internautes. Larticle 18 de cette dernire prvoit jusqu deux annes de prison et une amendepour quiconque reconnu coupable de diffusion de fausses informations susceptibles de troubler lopinionpublique.

    Blocages de sitesL'Iran applique une politique de filtrage parmi les plus strictes au monde, qui s'est encore intensifie depuis

    juin 2009. Les autorits se targuent de bloquer des centaines de milliers de sites. Une chose est avre :des milliers de sites et des millions de pages associes sont aujourd'hui inaccessibles en Iran.

    Les autorits iraniennes filtrent traditionnellement des contenus religieux et des sites considrs commepornographiques ou obscnes. Depuis l'arrive au pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad, la censure touchede plus en plus de sites caractre politique ou en rapport avec le combat pour les droits des femmes.Parmi les sites fministes bloqus : www.we-change.org, www.roozmaregiha2.blogfa.com et www.par-gas1.blogfa.com. Le site des rformateurs, www.baharestaniran.com, est galement bloqu, ainsi que celuide l'ancien prsident Mohamed Khatami, www.yaarinews.ir.

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    IRANNom de domaine : .ir Population : 66 429 284Internautes : 32 200 000Salaire mensuel moyen : environ 300 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 13Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :70 centimes deuro

    L'Iran, l'un des champions de la cyber-censure, a encore intensifi la rpression et la surveillance en ligne depuisles troubles lis la rlection conteste de Mahmoud Ahmadinejad, le 12 juin 2009. Le rgime diabolise lesnouveaux mdias, quil accuse de servir des intrts trangers. Une douzaine de net-citoyens croupissent dansla prison d'Evin. Mais les internautes courageux continuent de se mobiliser.

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    Les nouveaux mdias, ennemis du rgi

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    La censure touche d'abord les sites d'informations en persan, mais le blocage des sites en anglais devientde plus en plus courant. Le site de la BBC en persan est bloqu depuis janvier 2006, la version anglaiseseulement depuis juin 2009.

    Les autorits ont tabli au printemps 2009, juste avant llection prsidentielle, une liste d'instructions en-cadrant la couverture de la campagne et la responsabilit des fournisseurs d'accs. Ces instructions d-taillaient une vingtaine de thmes censurs, dont la mise en danger de l'union nationale et la crationde sentiments ngatifs envers le gouvernement. Ainsi, les sites dinformations susceptibles de contesterla victoire de Mahmoud Ahmadinejad, et notamment une dizaine de sites Internet proches de lopposition,ont t censurs la veille de llection.

    Depuis le 12 juin, la censure a pris des proportions sans prcdent. Les autorits renforcent leur emprisesur tout support ou mdia qui pourrait contester la victoire. Les sites jugs proches de l'opposition,comme sahamnews.info ou des sites d'informations comme www.mizanews.com, sont viss. La censuretouche mme des sites proches des conservateurs, comme www.ayandenews.com, ce qui est rvlateurdes divisions au sein du pouvoir. Le site Parlemannews - site officiel de dputs rformateurs - est inac-cessible de manire intermittente depuis le 26 dcembre, suite la publication dun communiqu du Con-seil suprme de scurit nationale annonant linterdiction de toutes les crmonies la mmoire delayatollah Montazeri, un leader religieux iranien dcd le 20 dcembre dernier (http://www.rsf.org/En-terrement-de-l-Ayatollah.html). Des plateformes de blogs comme www.blogfa.com ne sont pas bloquesdans leur intgralit, mais des blogs individuels sont rendus inaccessibles.

    Les rseaux sociaux touchs de plein fouet par la censure post-lectoraleLe rgime iranien considre les rseaux sociaux comme des instruments de l'opposition. Facebook etTwitter, qui ont relay les appels aux manifestations, sont bloqus constamment depuis juin 2009. Mmetraitement pour MySpace.com et Orkut.com.

    Les sites participatifs d'changes de photos ou de videos sont parmi les premiers viss : Flickr.com,www.photobucket.com et YouTube.com sont bloqus. Les autorits cherchent en particulier empcherlenvoi via Internet de vidos prises par tlphone portable. La diffusion des images de la mort de la

    jeune manifestante Neda Agha-Soltan a fait trop de mal limage du rgime. La vido anonyme a reu leprestigieux prix du journalisme amricain George Polk en fvrier 2010. Au cours des manifestations du 7dcembre 2009 par exemple, les portables de certains manifestants ont t saisis par les forces de lordre.Un nombre encore indtermin de personnes qui prenaient des photos ou filmaient les vnements avecleurs tlphones auraient galement t arrts.

    La vitesse de connexion, indicateur des tensions

    Depuis l't 2009, l'approche de chaque rendez-vous de l'opposition ou de manifestations poten-tielles, Internet est fortement ralenti dans plusieurs grandes villes du pays. Jusqu' atteindre 56kb/sselon certains internautes contacts par Reporters sans frontires. Les autorits voquent un prob-lme technique. Elles ne peuvent pas se permettre de couper l'accs Internet sans nuire aux intrtsconomiques des Gardiens de la Rvolution, mais des coupures temporaires des moments critiquesont t constates. Ce fut le cas loccasion des clbrations du 31e anniversaire de la Rvolution is-lamique, le 12 fvrier 2010. De forts ralentissements des connexions, ainsi que des coupures totales oulimites certains quartiers, ont t observs dans plusieurs grandes villes du pays, notamment Thran, Mashhad, Ispahan, Ahvaz, et Shiraz. Certaines compagnies de tlphonie mobile ne permettaient

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    Autre mthode utilise : la redirection des pages daccueil de certains sites dinformations indpendantssur les pages de sites qui assurent la propagande du gouvernement. Cest le cas du site Balatarin, lun desbastions en ligne du mouvement de contestation.

    Le rgime a aussi cr de faux sites Internet dorganisations politiques ou de mdias trangers, sur lesquelsles internautes sont invits envoyer des e-mails, des vidos et poster des commentaires pour desrassemblements. Cette machinerie permet ensuite daccuser ces internautes despionnage pour le comptedorganisations trangres.

    La cyberdissidence tient bon

    La blogosphre iranienne est lune des plus dynamiques au monde. La jeune population du pays s'est prised'un vritable engouement pour Internet et la censure ne lui fait pas peur : elle utilise trs facilement desoutils de contournement tels que UltraReach ou FreeGate, dvelopps par le Global Internet FreedomConsortium aux Etats-Unis, et qui sont trs utiliss par les internautes iraniens.

    Autre exemple de mobilisation : des centaines d'Iraniens se sont habills en femme portant le hijab et ontpost la photo sur leur profil Facebook en dcembre 2009. Ils exprimaient ainsi leur soutien MajidTavakoli, un tudiant militant arrt Thran et accus de s'tre dguis en femme pour pouvoir sclipserdiscrtement dun rassemblement Thran au cours duquel il avait prononc un discours. Des inter-nautes du monde entier ont exprim leur solidarit avec les manifestants iraniens, comme ces net-citoyenschinois qui ont lanc la campagne #CN4Iran sur Twitter.

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    Censure massive des contenus caractre politique

    Le gouvernement a intensifi le contrle d'Internet, notamment la suite du massacre d'Andijan en 2005,afin de prsenter la population ouzbke sa seule version des faits. L'accs presque tous les sites Internetd'informations avait alors t bloqu. Les autorits tentent d'empcher l'opposition ouzbke, dans le paysou base l'tranger, de sadresser la population via Internet et les nouveaux mdias. Le nombre d'in-ternautes est pass de 2,4 7,74 millions entre le dbut et la fin de 2009, d'aprs les autorits.

    La liste des sujets sensibles est longue : la corruption des autorits, la critique du rgime ou la situationdplorable des droits de l'homme. Parmi les sites bloqus, le site de l'agence d'information Ferghana.ru etcelui de Nezavisimaya Gazeta (www.ng.ru). Le site d'informations rgionales centrasia.ru est partiellementbloqu, la majorit des pages restant consultables. En tentant d'accder aux articles dfendus, les inter-nautes sont redirigs vers la page d'accueil. Le site Central Asian News Service www.ca-news.org estgalement partiellement bloqu. La BBC en ouzbke est constamment bloque, la version en russe seule-ment priodiquement. Les rseaux sociaux tels que LiveJournal, MySpace, Facebook, Twitter, Blogger, Flickr

    et la plateforme de blogs la plus populaire en Ouzbekistan, kloop.kg, sont rendus inaccessibles de manireirrgulire. Les sites des tlvisions russes Russia 1 et Vesti 24 ont t bloqus aprs avoir diffus des in-formations sur la photographe ouzbke Oumida Akhmedova, poursuivie pour insulte et calomnie dupeuple, avant de bnficier d'une amnistie. L'artiste avait trait dans ses uvres de la pauvret et de la con-dition des femmes.

    La majorit des fournisseurs d'accs passent par le Rseau national de transmission de l'information,UzPAK, pour se connecter l'Internet global. Le filtrage est appliqu ce niveau. Mais l'un des FAI d'Etat,Tashkent City Telephone Network (tshtt.uz) bloque indpendamment des sites qui ne sont pas rendus in-accessibles par UzPAK. Chaque fournisseur d'accs doit obtenir une licence de la part du ministre desCommunications et de l'Information (UzACI).

    La version d'Internet auquel la population a accs une fois les sites nocifs rendus inaccessibles estsurnomme UzNet.

    D'aprs l'agence d'informations en ligne Ferghana.ru, une campagne destine justifier la censure d'Internetauprs du grand public a t lance dans les mdias contrls par le pouvoir. Le rdacteur en chef adjointde l'un des trois grands quotidiens, Halk Suzi, a soutenu la reprise en main de sites qui relaient des cri-tiques inacceptables. Il a galement propos de mettre en place un systme quivalent la Grande mu-raille lectronique de Chine.

    Un appareil lgislatif liberticide qui bafoue la Constitution

    La Constitution garantit l'accs l'information, mais ce principe est bafou chaque jour, notamment en rai-son de dispositions lgislatives multiples.

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    OUZBKISTANNom de domaine : .uzPopulation : 26 606 007 Internautes : 7 740 000Salaire mensuel moyen : environ 50 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 0Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :0,14 euros

    Dans ce pays priv de mdias indpendants, les autorits imposent une censure trs stricte d'Internet, tout enrefusant de l'assumer publiquement. Filtrage de sites, sanctions et intimidations l'encontre des voix potentiel-lement critiques... Les net-citoyens ont appris s'autocensurer.

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    Censure brutale dans l'indiffrence gnr

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    La loi de 2002 sur les principes et garanties de l'accs l'information autorise le gouvernement la re-streindre quand il s'avre ncessaire de protger quiconque contre l'influence psychologique de l'infor-mation ngative. Le dcret n216 de 2004 interdit aux fournisseurs daccs Internet et aux oprateursde diffuser certains types d'informations. Une interprtation large du contenu cibl est faite par l'oprateurnational UzbekTelecom. La loi sur les mdias de 2007 rend les diteurs et les journalistes responsablesde l'objectivit de leurs publications et s'applique aux mdias en ligne.

    Le service de scurit nationale (SNB) est charg de surveiller Internet et de s'assurer que ces rgles sontbien appliques par les fournisseurs d'accs et les cybercafs.

    Surveillance des net-citoyensLe millier de cybercafs que compte le pays sont soumis une surveillance ingale. L'utilisation de logicielsespions est rpandue. Des tests raliss par Reporters sans frontires ont montr que certains grantsragissaient l'installation d'un logiciel anti-espion sur l'un de leurs ordinateurs, tandis que cette manip-ulation passait inaperue dans d'autres cybercafs. Certains logiciels de contournement de la censure ontpu tre utiliss dans certains cafs mais pas dans d'autres. Des chercheurs de l'OpenNet Initiative ont tinterpells, en 2007, alors qu'ils testaient le filtrage de sites.

    Les e-mails sont galement surveills, ainsi que les chats, notamment les services de ICQ et Mail.ru Agent.Plusieurs personnes auraient t arrtes en janvier 2010 pour leur participation prsume des organ-isations religieuses extrmistes. Elles auraient t repres grce leurs conversations sur Mail.ru Agent.

    Les net-citoyens qui souhaitent s'exprimer librement en ligne risquent gros. Comment ne pas se souvenirdu journaliste en ligne Djamshid Karimov, neveu du Prsident, connu pour avoir dnonc la corruptiondes autorits de la rgion de Jizzak, et intern de force en 2006 ? Les rares journalistes indpendants quisont rests dans le pays sont sans cesse harcels par les autorits, convoqus au commissariat. Dix d'entreeux sont en prison. Parmi eux, Solidjon Abdourakhmanov a t condamn en 2008 purger une peine dedix ans de prison pour "possession de drogues avec lintention de les vendre", dans une affaire monte detoutes pices.

    L'hypocrisie des autorits et la lchet de la communaut internationale

    Malgr ce bilan accablant, les autorits nient l'ampleur de la censure, justifie par la prservation de la scu-

    rit nationale, et tentent mme de faire bonne figure sur le plan international. L'hypocrisie du gouverne-ment n'a pas de limites quand il souhaite faire croire une certaine ouverture du pays. Le prsident IslamKarimov a reproch aux mdias, dans un discours tenu en fvrier 2010, de ne pas tre assez agressifs. Selonlui, il est ncessaire de crer des conditions supplmentaires pour une meilleure couverture de la politiqueintrieure et internationale par les mdias. Il s'agit seulement de plaire aux investisseurs, Karimov n'a au-cunement l'intention de lever la censure.

    La stratgie du pays semble dans tous les cas fonctionner. Attire par les ressources nergtiques du pays,lUnion europenne sest engage dans une politique de rapprochement avec lOuzbkistan et a vot en2008, puis en 2009, la leve des sanctions imposes suite au massacre dAndijan.

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    OUZBKISTAN Censure brutale dans l'indiffrence gnr

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    Dveloppement contrl d'Internet

    Le nombre d'utilisateurs a connu une augmentation exceptionnelle en dix ans. Plus de 16,5 % de la pop-ulation utilise Internet. Les conditions d'accs ont t facilites. Dsormais, chacun peut acheter une carteprpaye d'accs Internet et se connecter. Plus besoin de donner des informations personnelles, celles-ci sont dj enregistres lors de l'acquisition de lignes de tlphone fixe. Mais les connexions via ADSLou 3G restent chres et donc limites. Les connexions par satellite sont interdites, sauf permission ex-presse des autorits.

    Le contrle d'Internet est confi deux organismes gouvernementaux, l'Etablissement syrien des Tlcom-munications (EST) et l'Organisation syrienne de l'Information (OSI), qui grent la bande passante. Depuis2005, plusieurs fournisseurs d'accs privs ont vu le jour, mais ils sont loin d'tre indpendants. Selonl'Arabic Network for Human Rights Information, alors que l'accs Internet s'est beaucoup dvelopp,l'infrastructure a peu volu, provoquant des problmes d'engorgement, des ralentissements de la vitesse

    de connexion et des coupures frquentes. Le ministre de la Communication a annonc le dveloppementglobal et la rforme de l'Internet, mais dans les faits, cette stratgie pitine. La qualit du cble qui reliela Syrie Chypre devrait tre amliore, ainsi que la capacit de la bande passante. Un nouveau cblesous-marin pourrait tre mis en place.

    Le gouvernement, qui a longtemps minimis sa prsence sur le Web, a fait volte-face : les sites de propa-gande ou ceux dfendant la position officielle se multiplient, comme la Syrian News Agency (SANA), oubien les sites de Syria News, Al-Gamal, Sada Suria and Sham Press.

    Le logiciel Thundercache est utilis par l'EST et l'OSI pour assurer un contrle centralis de la Toile. Il per-met, selon la propre dfinition de la compagnie qui le commercialise, Platinum Inc, de protger les com-munications Internet contre les logiciels espions, les virus, la navigation Web inapproprie, la messagerie

    instantane, le streaming et le partage de vidos en P2P, tout en ameliorant la performance du Web. Il in-staure une surveillance et un filtrage de sites en reprant des mots cls interdits dsigns par les autorits.

    Filtrage de contenus particuliers

    La censure s'est accentue depuis 2009. Plus de 200 sites sont bloqus ce jour. Les contenus touchsconcernent les critiques politiques, les affaires religieuses et les sites jugs obscnes, les sites traitant dela minorit kurde et ceux bass en Isral. Sont galement concerns les sites des partis d'opposition, decertains journaux libanais et des sites d'informations indpendants. Quelles sont les excuses avances parle gouvernement ? Empcher les troubles confessionnels et l'infiltration d'Isral.

    Les censeurs visent en particulier les rseaux sociaux et les plate-formes de blogs. Il s'agit d'empcher les

    dissidents de s'organiser et de recruter de nouveaux membres grce aux nouveaux mdias. Blogspot etMaktoob sont bloqus. YouTube est inaccessible depuis aot 2007 suite la diffusion de vidos dnonant

    28

    SYRIENom de domaine : .sy Population : 21 762 978Internautes : 3 565 000Salaire mensuel moyen : 791 euros

    Nombre de net-citoyens emprisonns : 4Prix moyen dune heure de connexion dans un cybercaf :1 euro 1.50 euro

    La Syrie renforce la censure des sujets gnants sur le Web et traque les net-citoyens qui osent s'y exprimer li-brement. Les rseaux sociaux sont touchs de plein fouet. La surveillance est omniprsente. Les amliorationstechnologiques annonces tardent se concrtiser. La mfiance des autorits envers le potentiel de mobilisationdes dissidents en ligne n'y est pas trangre.

    L e s

    E n n e m

    i s d I n t e r n e t

    Tolrance zro pour la libre parole sur Inte