39
Entreprise en folie Comédie 6 personnages (3 hommes, 3 femmes) * Auteur : Philippe Laperrouse *1 personnage masculin peut être féminisé (soit 2 hommes, 4 femmes) Philippe Laperrouse 1 (version 4 mars 2016)

Entreprise en folie Comédie 6 personnages

  • Upload
    hacong

  • View
    225

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Entreprise en folieComédie

6 personnages (3 hommes, 3 femmes) *

Auteur : Philippe Laperrouse

*1 personnage masculin peut être féminisé (soit 2 hommes, 4 femmes)

Philippe Laperrouse

5, allée de l’Ardelière

69290 Grézieu-la-Varenne

[email protected]

1 (version 4 mars 2016)

Note   de mise en scène  :

Décor

Le seul décor de la pièce est un bureau de cadre supérieur.

Personnages

Le directeur-adjoint de l’entreprise Duval et fils (50 ans). C’est le fils du PDG, surnommé « Petit Duval », il est au début de la pièce un personnage paresseux, incompétent, veule, détesté par tous qui attend patiemment que son père lui laisse les rennes de l’entreprise. Il évoluera.

Max (40-50 ans) : un ouvrier qui prend une part active aux négociations entre le chef d’entreprise, les syndicats et les repreneurs éventuels. Personnage solide avec « la tête sur les épaules ».

Jo Bontoux (25-30 ans), ouvrier, fiancé de Julie. Chargé de garder le prisonnier « Petit Duval », il va prendre un plaisir jubilatoire à l’accomplissement de sa mission.

Julie (25 ans) : fiancée de Jo, fille supposée de « Petit Duval » qui la prend pour une gamine sympa, mais bonne à rien. Très énergique, elle finira par imposer sa présence.

Louise (40-45ans) : Seconde épouse de Petit Duval qui la trompe allégrement. Elle l’apprend rapidement et signifie son congé à son époux. Actionnaire de la société, elle se ligue avec sa belle-mère pour éliminer Petit Duval de l’entreprise.

Marguerite (60-70 ans) : Belle-mère de « Petit Duval », elle le considère à juste titre comme un incapable paresseux. Avec Louise, elle fera le maximum pour en débarrasser l’entreprise.

Costumes modernes

2 (version 4 mars 2016)

AVERTISSEMENT

Le texte suivant a été téléchargé depuis le site http://www.leproscenium.com

Ce texte est protégé par les droits d’auteur. En conséquence avant son exploitation vous devez obtenir l’autorisation de l’auteur soit directement auprès de lui, soit auprès de l’organisme qui gère ses droits (la SACD par exemple pour la France).

Pour les textes des auteurs membres de la SACD, la SACD peut faire interdire la représentation le soir même, si l’autorisation de jouer n’a pas été obtenue par la troupe.

Le réseau national des représentants de la SACD (et leurs homologues à l’étranger) veille au respect des droits d’auteur et vérifie que les autorisations ont été obtenues, même a posteriori.

Lors de sa représentation, la structure de représentation (théâtre,MJC, festival…) doit s’acquitter des droits d’auteur et la troupe doit produire le justificatif d’autorisation de jouer. Le non-respect de ces règles entraîne des sanctions (financières entre autres) pour la troupe et pour la structure de représentation.

Ceci n’est pas une recommandation, mais une obligation, y compris pour les troupes amateurs.

Merci de respecter les droits des auteurs afin que les troupes et le public puissent toujours profiter de nouveaux textes.

3 (version 4 mars 2016)

Acte 1.

Scène 1 (Max, Duval)

(Max finit de ligoter et de bâillonner Duval sur un fauteuil)

Max : Parfait ! Ligoter le directeur-adjoint des entreprises Duval et fils et lui fermer sa gueule, ça faisait partie de mes fantasmes. Tu ne peux pas savoir ce que je te kiffe en ce moment, Duval.

(Gémissements du prisonnier)

Max : Toi et ton père, vous nous avez tous foutus dans la panade, maintenant il va falloir payer, Duval. Les négociations ont commencé avec ton vieux au rez-de-chaussée, les copains bloquent les grilles de l’entreprise, on va être entre nous !

(Gémissements)

Max : Tu vas nous servir de monnaie d’échange dans la discussion ! Si ton père ne comprend rien à nos revendications…Non seulement on va te déchirer ta chemise, mais le reste aussi ! Te balader à poil en ville me plairait bien.

(Gémissements)

Max : Il paraît que les Chinois veulent nous racheter ! Je ne voudrais pas être à ta place. S’ils deviennent propriétaires, tu auras peut-être droit à un bol de riz par jour !

(Monstrueux gémissements)

Max : Ce n’est pas tout ça, moi il faut que j’aille négocier ! Je vais te laisser entre les mains de Jo Bontoux. Il est chargé de te tenir compagnie. Tu vas voir, c’est un charmant garçon. Je ne sais pas comment il s’y prend, mais il te déteste encore plus que moi.

(Jo Bontoux entre)

Max : Salut Jo ! Je te confie notre trésor de guerre ! Tâche de le maintenir en vie.

Jo : Ne t’inquiète pas ! Je sens que nous allons être copains ! On va bien s’amuser. Hein, petit Duval ?

(Il lui donne des calottes. Gémissements)

Max : Bon, moi je vais voir ce que dit l’ancien. Je repasserai pour prendre des nouvelles !

Jo : Ok, Max, je prends la relève !

4 (version 4 mars 2016)

Scène 2. (Jo, Duval)

(Duval est ligoté sur une chaise, Jo tourne autour de lui)

Jo : Qu’est-ce qui lui arrive à mon petit Duval ? Il n’est pas à l’aise ? Il se sent à l’étroit ? Comme c’est dommage !

(Il donne quelques petites calottes au prisonnier)

Jo : Comme ils sont vilains, ces ouvriers qui ligotent mon petit Duval ! Des vrais rustres ! On serait plus tranquille sans eux. Il faut toujours qu’ils aient leurs revendications ! Hein, Duval ! Ils pourraient quand même se laisser exploiter gentiment !

(Le prisonnier émet des borborygmes)

Jo : Qu’est-ce que tu dis, Duval ? Je ne comprends rien ! Si tu veux quelque chose, n’hésite pas à le demander ! Pas de chichis entre nous ! Nous allons passer un bout de temps ensemble !

(Jo se sert à boire)

Jo : Ton whisky n’est pas terrible, Duval. Je ne sais pas quel est ton fournisseur, mais tu devrais protester. Ce n’est déjà pas très plaisant pour moi de te kidnapper, alors tu pourrais faire un effort de bienvenue. Regarde-moi ça… (il farfouille) … tu n’as même pas un paquet de cacahuètes dans ton bureau. Comment veux-tu prendre l’apéro dans ces conditions ?

(Silence)

Jo : Écoute ! Si tu promettais d’être raisonnable, je t’ôterais bien ton bâillon, mais tu vas encore me dire des choses désagréables ! Et comme je suis très susceptible, je préfère ne pas envenimer tout de suite nos rapports… On va attendre un peu, si ça ne te dérange pas. Il faut que les négociations entre les camarades et ton père avancent… Et comme ton vieux est un dur, je crains que ça dure … Tiens, ça rime !

(Nouveaux borborygmes)

Jo : Comment ? Qu’est-ce que tu dis ? Ah oui, la concurrence des Japonais, des Chinois… Vous êtes obligés de proposer 45 heures payées 35 ? Vous pourriez aussi rétablir l’esclavage pendant que vous y êtes. Eh ben… non. Albert et les copains ne sont pas vraiment d’accord. Ils ont comme qui dirait des objections. Et quand Albert s’énerve, il bloque toute l’usine. Avec son physique de pilier All Blacks, même les CRS n’osent pas lui rentrer dedans !

(Le téléphone sonne)

Jo : Allo ! Fred !... Oui, ici, ça ne va pas mal… Duval junior ? Il va très bien, pas très loquace, mais en pleine forme ! Il a l’air ravi ! Et de votre côté ? … Quoi ? Le vieux veut qu’on libère son fils avant de discuter ? …. Oui, je suis d’accord, il nous prend pour des cons ! Mort de rire ! Allez… à plus !

(Il se tourne vers Duval)

5 (version 4 mars 2016)

Jo : Eh bien, tu vois petit Duval, ton papa pense à toi ! Il ne veut pas qu’on te tabasse (il lui donne des petites claques) ! Tu en as de la chance d’avoir un papa aussi gentil ! Le mien rentrait bourré tous les soirs et j’avais plutôt intérêt à garer mes fesses.

(Nouvelle agitation du prisonnier)

Jo : J’ai l’impression que ça va être long, ton père n’y met pas beaucoup du sien ! Qu’est-ce qu’on pourrait faire en attendant (Il commence à fouiller les tiroirs et extirpe un dossier) ? … Tiens …. Un dossier sur le « Personnel » …. Voyons ça !

(Il feuillette le dossier)

Jo : Si je comprends bien, mon petit Duval, tu tiens une fiche sur chaque employé avec des appréciations flatteuses …. Euh…. Par exemple : Maryvonne Couturier : ‘besogneuse, pas très intelligente, il ne faut pas trop lui en demander ‘…. On ne fait pas plus charmant… et Benoit Quentin : ‘dangereux activiste, rouge, enragé, s’en débarrasser à la première occasion … Tiens ma fiche… Jo Bontoux : ‘arrogant, prétentieux, indiscipliné, ironique avec ses chefs, à mâter rapidement’…

(Nouveaux borborygmes)

Jo : Alors comme ça, on veut me mâter, petit Duval. Mais je t’en prie, n’hésite surtout pas ! On va se mâter entre nous, bien tranquillement !

(Une femme entre)

6 (version 4 mars 2016)

Scène 3. (Jo, Marguerite, Duval)

Jo : Madame Duval ! Quelle bonne surprise ! On vient aux nouvelles du petit. Ne vous faites pas de souci, j’en prends soin. Nous sommes des amis très liés. Enfin… surtout lui.

Marguerite : Je ne m’en fais pas ! Tenez-le bien, ça lui fera les pieds à celui-là !

Jo : Vous n’avez pas l’air d’aimer votre fils, Madame Duval ! Dois-je conclure à de la maltraitance enfantine? C’est très mal, vous savez ! C’est même tout à fait illégal !

Marguerite : Un fainéant comme ça ne m’inspire aucune pitié. Il n’a jamais rien foutu de ses dix doigts à part compter des billets de banque. Il attend tranquillement que son père disparaisse pour reprendre l’entreprise.

Jo : Intéressant ! (Il se tourne vers Duval). Tu vois Duval, ta maman n’est pas très contente de toi ! Tu devrais faire des efforts.

Marguerite : Je ne suis que sa belle-mère. Heureusement pour moi ! La mère a foutu le camp au Venezuela avec un peintre brésilien, elle ne veut même plus en entendre parler !

Jo (faussement apitoyé) :

Pauvre garçon ! Petit Duval ! Un enfant abandonné. Bon, puisque c’est ça, j’ai une idée. Je vais inaugurer une fiche pour compléter ta collection : nous disons donc … Nom : Duval… prénom : Petit… Appréciation : fainéant et mal élevé… ça commence bien ! Il va falloir progresser mon petit Duval ! Il a une sacrée marge de progrès ce petit Duval … Je vous offre un verre, madame Duval ?

Marguerite : Volontiers ! (Elle s’installe) Pour une fois que je peux contempler ce petit morveux sans qu’il me réponde ! À propos, est-ce que je pourrais le frapper un peu ?

Jo : Euh… Je vous le laisserais avec plaisir, Madame Duval, mais petit Duval est notre monnaie d’échange dans la négociation avec votre mari. Ma mission est de le conserver en vie et si possible en bonne santé.

Marguerite : Dommage, ça m’aurait fait du bien…

(Le téléphone sonne)

Jo : Allo, Fred ? Oui…. Il va toujours bien… pas très content. Il est assez casanier, il ne bouge pas beaucoup…. Comment ? Une hausse de 0.1 % des salaires ? Alors-là, il nous prend pour des supercons ! (Il clôt la conversation)

Jo : Tu ne vas pas me croire petit Duval. Papa Duval vient de nous faire un cadeau. Au lieu de 45 heures de travail payer 35, il propose 44 heures et demie et une hausse de 0.1 % des salaires !… Je suis sûr que même toi, tu n’oserais pas ! (Une femme entre)

7 (version 4 mars 2016)

Scène 4. (Jo, Duval, Marguerite, Louise)

Jo : Madame Duval Junior ! Tu vois, mon petit Duval, toute la famille vient te voir. Tu devrais dire bonjour à ta femme. Vous excuserez votre mari, Madame, je crois qu’il va rentrer un peu tard à la maison. Il est très pris en ce moment !

Louise : S’il pouvait ne pas rentrer du tout, ça m’irait très bien !

Jo : J’ai l’impression que Monsieur Duval n’est pas un bon mari, pourtant il est très apprécié dans l’entreprise…(ironie)

Louise : Pourtant… rien du tout ! C’est un personnage ignoble (elle s’approche du prisonnier et lui montre un téléphone) …. Mon pauvre ami, tu n’es même pas capable de ne pas laisser traîner tes vieux téléphones…. Karine, ça te dit quelque chose ?... (Ironique)… Elle va se faire du souci, Karine… Tu veux que je l’appelle pour la rassurer ?

(Gémissement du prisonnier)

Jo : Dois-je en conclure que mon petit Duval est un mari volage ? Ouh… quelle horreur ! Ce n’est pas bien du tout, ça ! Tu n’étais pas très haut dans mon estime, Petit Duval, mais là, tu viens de chuter encore.

Marguerite : Vous êtes sûr que je ne peux pas le frapper ?

Jo : La négociation, Madame Duval ! La négociation !

Louise (s’adresse au prisonnier) :

Si jamais, tu sors de là vivant, tu pourras faire tes valises évidemment. J’espère que Karine aura le sens de l’humour parce que je vais lui envoyer l’adresse de toutes tes autres maîtresses.

Jo : Mon petit Duval en SDF ! Quel ennui ! Décidément, c’est ta fête ! Ça se complique pour toi ! Tiens, si je ne me retenais pas, je te proposerais mon garage pour t’héberger !

Louise : En attendant, n’hésitez pas à le martyriser !

Marguerite : Si je ne peux pas le frapper, je vais réfléchir à des tortures mentales.

Jo : Tu entends, mon petit Duval. J’ai l’impression que tu n’as pas très bonne réputation dans ta propre famille. J’ai de la peine pour toi ! Prisonnier de la racaille ouvrière, méprisé par sa femme et sa mère, quelle vie ! Non, mais quelle vie de chien !

(Terribles grognements du prisonnier)

(Jo se tourne vers les deux femmes)

Jo : Je crois que le fauve a les crocs. Vous le nourrissez suffisamment ?

Louise : Il n’arrête pas de s’empiffrer. (Elle se penche vers lui) … Une petite diète, ça te fera du bien ! Hein, escroc !

8 (version 4 mars 2016)

Marguerite : Tu me donnes faim, Duval. Vous venez avec moi, Louise, je connais un petit resto à deux pas d’ici.

(Les deux femmes sortent)

Jo : Elles m’ont donné envie de manger aussi. Avec tout le boulot que j’ai à cause de toi, je n’ai même pas eu le temps de dîner ! (Il déploie un sandwich et l’attaque de bon appétit) …. (Il regarde Duval) … Je ne te propose pas de partager mon repas, tu n’as pas l’air très en forme !

(Son téléphone sonne)

Jo : Chérie ? … Oui, je suis occupé, ce soir. J’ai un petit problème à la boîte. Enfin… moins grave que d’autres (il regarde Duval)… mais tout de même ! Écoute Minou … Je te promets que nous rattraperons le temps perdu, mais là tu vois, j’ai des engagements envers les copains !... Tu vas sortir avec tes copines ? D’accord !... Tu veux profiter de ta liberté ? Mais bien sûr, ma chérie ! Profite ! Tu es libre ! Je n’ai jamais ligoté personne ! … Comment ça je ne suis pas très tendre ? Mais je suis l’homme le plus doux qu’il soit ! … C’est ça, ne te couche pas trop tard quand même ! Bisou !

(Il clôt la conversation)

(Max entre)

9 (version 4 mars 2016)

Scène 5. (Jo, Max, Duval)

Max : Qu’est-ce que tu fous, Jo ? Ce n’est pas le moment de te goinfrer ! En bas, le vieux nous mène la vie dure ! Il ne lâche rien. Il dit que l’entreprise est foutue et qu’il discutera avec des repreneurs, mais pas avec nous.

Jo : Pas de problème, Max ! Ne vous compliquez pas la vie ! Il suffirait de torturer le petit Duval pour faire céder son paternel et c’est bon !

Max : Pas encore, il y a plus urgent (Il commence à fouiller les tiroirs). Il faut trouver le dossier sur les importations de viande de bovins roumains…

Jo : Ah oui, les bovins roumains sans corne…

(Max fouille encore)

Max : Je l’ai ! Avec ça, on les tient. Si ça tourne mal, on fait fuiter leurs affaires foireuses dans la presse, ils ne sont pas près de s’en remettre les Duval.

Jo : Pendant qu’on est dans le sordide, tu pourras aussi parler de ça (il lui tend un dossier). Il tient un fichier d’appréciations peu flatteuses sur le personnel !

(Max le feuillette)

Max : Tiens, tiens… je suis un être frustre, mal élevé, j’ai mauvaise influence sur les autres… c’est ma femme qui va être contente… Et en plus, je suis à virer le plus vite possible….

(Il regarde ironiquement le prisonnier)

Max : Alors comme ça, tu ne m’aimes pas beaucoup Duval ? Tu sais que tu me fais de la peine ? Je suis sûr que si tu me connaissais mieux, tu changerais d’avis…

(Jo continue à fouiller dans les dossiers)

Jo : Tiens, Max ! J’ai trouvé ça aussi ! Des relevés bancaires d’une banque de Genève.

(Max feuillette rapidement et sifflote)

Max : De l’évasion fiscale… Eh ben, les Duval n’y vont pas de main morte !

Jo (ironique) : C’est fou, ça ! Il n’y a plus de morale dans les affaires !

Max (à Jo) : Bon… avec ces dossiers, ce serait bien le diable si le vieux Duval ne craque pas.

Jo : Euh… le problème, c’est qu’il est peut-être bien le Diable en personne.

Max : Ne t’inquiète pas Jo. (Taquin). Garde-nous plutôt ce petit diablotin bien au chaud ! On va mettre toute la famille sur la paille ! On ira peut-être s’inscrire à Pôle Emploi, mais ils seront avec nous.

(Il sort)

10 (version 4 mars 2016)

Acte 2.

Scène 1. (Jo, Duval)

(Duval est toujours ligoté sur sa chaise. Jo fait le tour du bureau, il tombe en arrêt sur une vieille photo de classe).

Jo : Tiens… non, mais…. On dirait…. C’est toi là Duval ? Tu étais le Duval de la 1ere B au lycée Sainte-Marie… le seul et l’unique Duval ! … Ce n’est pas possible ! Tu te rends compte qu’on était presque copains de lycée ? Tiens, moi j’étais là, au second rang, derrière Dumollard ! Tu te souviens de Dumollard qui se marrait toujours comme un débile ?

Jo : Ah ! Ah ! Sacré Duval, va ! Qu’est-ce que tu as pu en faire comme conneries !

(Gémissement du prisonnier)

Jo : Tu te rappelles les cours de maths du révérend père Balandraud ? Celui qu’on appelait Gros Ballot ! Si… souviens-toi, tu l’avais enfermé toute une nuit dans les chiottes ! Et le père Turlu, celui qui nous donnait des cours de gym en soutane ! Si… on le surnommait Turlututu !

(Il se reverse une rasade de whisky)

Jo : Tiens ! Allez, il faut que je fête nos retrouvailles.

(Il boit)

Jo : Et tu te souviens de nos sorties au musée avec le Père Torgnaule ? Tu fichais le camp, à chaque fois, pour aller voir ta fiancée, la petite Maryse. Oui, oui, celle qui tient la pâtisserie de la place du marché, à deux pas d’ici. Je me souviens que tu l’avais engrossée un peu. Il a fallu que ton père soit très généreux avec la petite pour étouffer le scandale…

(Nouveaux gémissements)

Jo : Comment ? Qu’est-ce que tu dis ? Oui, bien sûr, tout ça restera entre nous ! Enfin… si tu restes convenable. Tu comprends … Moi, je ne suis pas du genre à me mêler des affaires des autres…. Tu as une si belle famille, je ne voudrais pas la déstabiliser. Surtout si ta fille apprenait qu’elle avait une demi-sœur ! Tu te rends compte ? Elle te gronderait sûrement !

(Silence)

Jo : Bon, je crois que je vais garder cette photo avec moi, ça me fera un bon vieux souvenir de notre soirée !

Jo : Récapitulons mon petit Duval : ta mère, ta belle-mère, ta femme ne peuvent plus te voir en peinture. Tu as une fille cachée que toute ta famille ignore. Tu n’en fiches pas une rame à part de tenir un fichier illégal du personnel. Tu pratiques de l’évasion fiscale à outrance…. Bravo ! Je vais pouvoir détacher le bâillon ! Bien entendu en cas de violence verbale, je serai obligé de te remettre le bâillon et de diffuser ce que je viens d’apprendre sur toi.

11 (version 4 mars 2016)

Les journalistes vont bien rigoler. Tu es mouillé comme un ministre des Finances !

(Il enlève le bâillon)

Duval : Ordure !

Jo : Non, Duval, non ! Je te fais confiance et tout de suite, tu en profites pour être impoli. Je ne suis pas content !

Duval : Enculé.

Jo : Et voilà, les grossièretés, maintenant. Essaie au moins d’être élégant. Au lycée Sainte-Marie, tu étais plus éloquent.

Duval (il se tortille dans ses liens) :

Libère-moi, Bontoux ! On discutera entre hommes !

Jo : Doucement, Duval ! Tu me connais, j’aime bien le débat. Mais je ne sais pas… un petit quelque chose me dit que tu n’es pas encore en état de dialoguer paisiblement. Bon, de toute façon, tout ça finit par user son homme, j’ai besoin d’aller faire un petit tour aux toilettes. Ne bouge pas Duval ! Ne bouge, surtout pas !

(Il sort)

12 (version 4 mars 2016)

Scène 2. (Julie, Jo, Duval)

(Une jeune femme entre sur scène)

Julie : Papa !

(Elle accourt pour délivrer le prisonnier)

Julie : Papa, ça va ? Qui t’a fait ça ?

Duval : Un connard ! Il va le payer !

Julie : Il faut prévenir la police.

Duval : Non, ce n’est pas le moment. De toute façon, les grévistes ne les laisseront pas entrer. Il faut régler ça en interne. Ne t’inquiète pas, Julie, ton père sait se défendre.

(Jo rentre dans le bureau, il ferme la porte à clé, il est de dos, il n’aperçoit pas tout de suite Julie)

Jo : Alors, mon petit Duval, j’espère que tu ne t’es pas inquiété.

(Il se retourne)

Jo : Julie !

Julie : Jo !

Jo : Qu’est-ce… qu’est-ce que tu fais là ?

Julie : Figure-toi que je viens délivrer mon père des griffes d’un petit minable ! Et toi ? Comment te trouves-tu ici ?

Jo : C’est ton père… ça ! Ce truc ? (Il le désigne dédaigneusement du doigt)

Duval : Non, mais dis donc Bontoux, pour qui tu te prends ?

Julie : Comment Jo ? C’est toi qui… C’est fini entre nous, Jo. Jamais je ne te pardonnerai ! Viens papa, on rentre !

Jo : Non. On ne rentre pas. Sinon….

(Il agite la photo de classe sous le nez de Duval)

Duval : Euh…. Écoute, Julie… rentre, toi. Moi, il faut que je reste. L’entreprise est en difficulté. Ton grand-père est en train de négocier durement. Un capitaine n’abandonne pas son navire en perdition et je vais régler son compte à ce lascar.

Julie : Comment as-tu pu me faire ça, Jo ?

Jo : Tu ne m’as jamais dit que ton père était ce… ce… ce personnage !

Julie : Je ne vois pas ce ça aurait changé.

Jo : Eh bien moi si ! Je ne pactise pas avec l’ennemi de classe !

13 (version 4 mars 2016)

Julie : Jo ! Mon ennemi, c’est toi désormais !

Jo : Julie !

Julie : Fiche moi la paix !

(Julie sort)

14 (version 4 mars 2016)

Scène 3. (Jo, Duval)

Duval : Si je comprends bien, Bontoux, tu sors avec ma fille !

Jo : Si je ne faisais que sortir avec …

Duval : Je te dispense des détails, Bontoux ! Tu comptes aller jusqu’où comme ça ?

Jo : Jusqu’au mariage ! Mais depuis que j’ai fait connaissance du beau-père potentiel, j’avoue que j’hésite un peu.

Duval : Non, mais dis donc, je ne te permets pas ! De toute façon, Julie est furieuse, tu peux dire adieu à tes beaux projets, Bontoux ! Oh !... Tiens, ça me fait de la peine pour toi !

Jo : Et tu crois qu’elle va être ravie quand elle apprendra que tu lui as caché une demi-sœur ?

Duval : Euh … euh… d’abord qui t’a permis de me tutoyer, Bontoux ?

Jo : Toi, beau-papa, tu viens de le faire.

Duval : Sors de là, Bontoux ! Ou je fais un malheur !

Jo : Désolé mon petit Duval, mais c’est moi qui commande. Avec tout ce que j’ai découvert dans ton bureau, il faut te souvenir que c’est moi le chef. Donc, primo, je reste. Secundo, toi aussi. Tertio, si tu franchis cette porte sans mon accord, toutes tes affaires sont dans les journaux dans le quart d’heure qui suit.

Duval (abattu) : Pourriture !

Jo : Duval ! Allons, allons, restons entre hommes bien élevés !

(Max entre dans le bureau)

Jo : Alors ? Comment ça se passe, Max ?

Max : Mal, très mal. Le vieux vient de reconnaître qu’il est sur le point de tout vendre à des Chinois ! Il paraît même qu’ils sont en cours de route pour venir discuter ici !

Jo : Eh bien, nous négocierons avec les Chinois.

Max : Tu ne les connais pas, Jo. C’est un autre monde. Même si on garde les Duval en otage, même si on menace de les découper en petits morceaux, ils s’en foutent complètement, les Chinois. Il va falloir inventer autre chose !

Jo : Pour le moment, gardons ce gros con ! Tu ne connais pas la dernière ? Monsieur est le papa de la pâtissière de la place du marché !

Max : Comment ça, Marie, la petite pâtissière, la championne de la tarte meringuée ?

Jo : Exactement, le petit Duval a une fille cachée qu’il a un petit peu oublié de déclarer à sa famille.

15 (version 4 mars 2016)

Max (sifflote) : Pfff… Ça fait beaucoup, mon petit Duval ! Papa va te disputer !

Duval : Si vous pouviez arrêter de m’appeler « mon petit Duval ».

Max : Je ne sais même pas si les voudront te serrer la main, ils n’aiment pas beaucoup la gaudriole… mon petit Duval !

Chinois(Le téléphone de Jo sonne)

Jo: Allo ! Fred?... Ah bon? ….. Oui, il va venir avec Max, de toute façon, on le tient. Avec les casseroles qu’on a sur lui, il ne peut s’échapper !

(Il se retourne vers les autres)

Jo : Fred dit que le vieux exige de voir son fils en bonne santé. Duval, tu vas descendre avec Max…. Je te conseille de ne pas faire le malin… Souviens-toi du père Nono ! (Il agite la photo de classe sur son nez)

Max : Sois tranquille ! Je l’ai à l’œil. Je te le ramènerai.

(Ils sortent)

16 (version 4 mars 2016)

Scène 4. (Jo, Julie)

(Julie entre, inquiète)

Julie : Jo ! Où est mon père ? Qu’est-ce que tu lui as fait ?

Jo : Pas de souci, Julie, il est descendu voir ton pépé !

Julie : Je suppose que tu es fier de toi !

Jo : Parfaitement, je suis fier de défendre notre emploi, Julie ! Ton père et ton grand-père nous exploitent honteusement dans cette maison !

Julie : Jamais de la vie ! C’est toi qui te comportes comme un sauvage. Dire que je t’ai cru quand tu me parlais de la justice sociale, d’égalité entre les hommes, etc… etc…

Jo : Mais c’est le sens de notre combat, Julie !

(Il commet l’erreur de s’asseoir sur la chaise où Duval était ligoté. Elle bondit sur lui et le ligote à son tour)

Jo : Julie ! Tu es folle ! Qu’est-ce que tu fais ?

(Elle le bâillonne. Gémissements. Duval entre à ce moment)

Julie : Papa !

Duval : Ah ! Ah ! Beau travail ma fille ! … (Il tourne autour de Jo) …. Alors mon petit Bontoux, tout va bien ? Tu te sens à l’aise ? D’un seul coup, il a l’air moins bavard, le petit Bontoux ! Qu’est-ce qui lui arrive ? Une petite gêne peut-être ?

Julie : Papa, laisse-moi le gifler !

Duval : Pas question ma fille ! Tu ne vas pas abîmer un si joli portrait. Et puis je n’ai pas envie qu’on dise que le patronat tabasse ces pauvres petits ouvriers. Ce n’est pas le genre de la maison. On va peut-être discuter tranquillement. Enfin surtout moi, parce que mon petit Bontoux, bizarrement, ne veut plus me parler…. Bon, Julie, il se fait tard. Je vais rentrer à la maison dans un petit moment, ce serait sympa que tu ailles me préparer un petit quelque chose à grignoter.

Julie : Bon d’accord ! C’est dommage, je l’aurais bien frappé ! Prends bien garde à toi !

Duval : Je suis indestructible, ma fille !

(Il s’assied en face de Bontoux)

Duval : Alors comme ça, le petit Bontoux a un découvert un dossier contre moi ! Fouiller dans les affaires des autres, c’est mal, c’est très mal, petit Bontoux ! Et la morale, là-dedans qu’est-ce que tu en fais ? C’est ton beau-père qui te parle, Bontoux ! Enfin ton ex futur beau-père…! Moi, tu me connais Bontoux, je suis un brave type ! A la limite, t’avoir pour gendre ne

17 (version 4 mars 2016)

m’emballe pas, mais j’aurais peut-être pu m’y faire ! Là, c’est dommage pour toi, mais Julie a l’air un petit peu contrariée. Tu noteras que je n’y suis pour rien, hein Bontoux ! 

(Nouveaux gémissements)

Duval : Bon… maintenant, parlons sérieusement ! D’accord, tu as un tout petit dossier contre moi. Ce n’est pas que j’y attache beaucoup d’importance, mais tu comprends …. Les gens sont méchants, ils parlent… il suffirait qu’un malappris tombe dessus pour qu’il me crée beaucoup d’ennuis. Je suis sûr que tu n’aimerais pas avoir un ex-beau-père repris de justice, hein Bontoux ?

(Jo s’agite vainement)

Duval : Évidemment, je pourrais toujours te faire tomber par accident dans une de nos broyeuses. Des accidents du travail, ça arrive malheureusement, c’est même une vraie plaie… Ce n’est pas une solution. Nous ne sommes pas entre sauvages. Surtout qu’après il faudra nettoyer la machine de fond en comble. C’est très malcommode !

(Jo tape du pied)

Duval : On va en revenir aux bonnes vieilles méthodes Bontoux : tu la boucles et je te constitue une petite rente… disons 5000 euros par mois… et je te nomme directeur de production. Évidemment, tu n’en ficheras pas une rame. Tu peux même rester chez toi, ça ne me dérange pas. Qu’en penses-tu, Bontoux ?

(Il lui ôte son bâillon)

Jo : Ordure !

(Duval prend l’air faussement outré)

Duval : Oh ! Quelle grossièreté ! Mon gendre doit être beaucoup mieux élevé que ça ! Je suis déçu !

(Marguerite, la mère de Duval entre)

18 (version 4 mars 2016)

Scène 5. (Jo, Duval, Marguerite, Max)

Marguerite : Qu’est-ce que c’est que ce cirque, Benito !

Duval : Belle-maman, occupez-vous de vos oignons ! Et pour la centième fois, ne m’appelez pas Bénito.

Marguerite : Mes oignons ? Mais bien sûr que je vais m’en occuper, Benito. Figure-toi que les Chinois viennent d’arriver. Je ne sais pas encore si je vais décider de leur vendre mes parts. Ils paient très bien, les Chinois…. Et si je vends, tu n’es plus rien dans cette entreprise ni ailleurs. Je m’en occuperai ! (Elle désigne Jo). Libère-le ! Tout de suite !

Duval : D’abord, je ne m’appelle pas Bénito et ensuite ça ne va pas se passer comme ça ! J’ai le bras long !

(Il libère Jo de ses liens)

Jo : Merci, Madame Duval ! Mais faites attention, votre beau-fils est un vilain garnement.

Marguerite : Oui, ça j’ai remarqué depuis longtemps.

(Max arrive)

Jo : Quelles sont les nouvelles, Max ?

Max : Les Chinois sont là. Ils sont furieux. Ils disent qu’ils n’ont jamais vu un bordel pareil dans une entreprise et que ça ne mérite même pas le nom d’entreprise. Du coup, ils ne savent plus s’ils vont acheter. S’ils ne reprennent pas, on est fichus. Ce n’est pas le moment de flancher ! Maintenons la pression.

Marguerite : On pourrait leur donner celui-là en pâture ! (Elle désigne Duval)

Jo : Oui, s’ils achètent l’entreprise, on leur donne Duval Junior en bonus et il l’envoie bosser à quatre pattes dans leurs rizières.

Max : C’est tentant ! Mais pour le moment la priorité c’est de préserver l’emploi des camarades.

(Marguerite tombe sur la photo de classe)

Marguerite : Tiens, mais c’est une photo de classe de l’École Sainte-Marie, à l’époque où j’étais directrice.

Jo : Ce n’est pas vrai ! Incroyable ! Vous étiez donc notre directrice. Quelle coïncidence ! Figurez-vous que je suis ici et Duval Junior là ! (Il pointe le doigt sur la photo)

Marguerite : Dites-moi…. Ça me rappelle quelque chose…Le vol du coffre-fort de l’école… Vous vous souvenez ? On n’a jamais retrouvé le coupable…

Duval : Marguerite ! Vous n’allez tout de même pas mettre ça sur le dos !

19 (version 4 mars 2016)

Jo (sifflote) : Bravo, mon petit Duval ! Ton palmarès m’impressionne ! Tu as commencé tes conneries, très jeune !

Max : Un voleur ? Les Chinois vont beaucoup apprécier ! Bon, j’y retourne (il sort)

20 (version 4 mars 2016)

Scène 6. (Jo, Duval, Louise, Marguerite)

(Louise arrive avec une valise et la jette au pied de Duval)

Louise : Tiens Adolphe, j’ai fait un paquet de tes affaires, tu n’auras même pas la peine de passer les chercher.

Duval : Comment peux-tu me faire ça, Louise ? Après tout ce que nous avons vécu ? Souviens-toi de Capri, de Mykonos ! Et puis, ne m’appelle pas Adolphe !

Marguerite : Très émouvant, Benito ! Mais c’est fini, Capri !

Louise : Les Chinois sont scandalisés ! Ils s’occuperont de lui bien mieux que nous.

Jo : Euh… Le problème c’est que les Chinois vont s’occuper de tout le monde si vous leur vendez vos actions. J’ai une meilleure idée : gardons l’entreprise Duval et virons les Duval. Après tout, pourquoi ne pas nous débrouiller tous seuls ! D’autres l’ont fait avant nous. Une coopérative ouvrière, c’est la solution.

Marguerite : Intéressant, Bontoux ! Poursuivez !

Jo : Je pense que nous n’avons pas forcément besoin des Chinois…

Louise : Euh… les Chinois sont riches et la société est couverte de dettes, Bontoux !

Jo : Ce n’est pas la première fois. Écoutez-moi : on met le vieux Duval à la retraite et le jeune Duval au boulot…

Louise : Lui, au boulot ? Il ne sait pas ce que c’est !

Duval : Oui, moi au boulot ?

Jo : Il y a une place à prendre au nettoyage des ateliers. C’est à la hauteur de tes capacités, petit Duval ! Tu travailleras gratuitement, bien entendu ! Tu pourras même dormir dans le placard à balais, si ça t’arrange ! Jusqu’à racheter toutes tes fautes bien entendu !

Duval : Jamais !

Jo : On ne dit pas jamais à son futur gendre, petit Duval !

Duval : Il n’y aura pas de gendre qui tienne ni de futur !

Louise : Ta fille sera la seule à en juger, Duval !

Marguerite : Personnellement, le plan de redressement économique de Jo Bontoux me semble très raisonnable. Tous au boulot pour redresser la barre et Bénito Duval au balai, en voilà une mesure de vraie politique sociale. J’ai hâte de voir ça.

Duval : Ça ne va pas se passer comme ça ! Il y a des juges dans ce pays !

Jo : Mais absolument, petit Duval, nous avons d’excellents juges : nous pourrions discuter avec eux de ta situation fiscale, du fichage de tes

21 (version 4 mars 2016)

employés, de tes stocks de matières premières avariés… Bref, tu as raison, les sujets de conversation ne manqueraient pas.

Duval : Ordure ! Sors de là !

Jo : Ben, non petit Duval, je me sens bien ici, je sens que je vais rester encore un petit moment.

(Il s’installe confortablement)

(Rideau )

22 (version 4 mars 2016)

Acte 3.

Scène 1. (Jo, Duval, Louise, Marguerite)

(Louise, Marguerite, Jo sont assis ligotés. Duval tourne autour d’eux. )

Duval : Alors comme ça, on voulait me mettre au boulot. Moi, Louis-Gérard Duval travailler ! Quelle sottise !

(Gémissements des prisonniers)

Duval : D’abord vous, les deux vieilles, je vous garde jusqu’à ce que les Chinois soient partis, ça vous évitera de faire des bêtises ! Ensuite vous me signerez l’engagement de me conserver à mon poste…. Avec un salaire augmenté de…. Allez, je sais que nous sommes en crise : 30 % et on n’en parle plus. (Gémissements des prisonnières). Comment ça, vous n’êtes pas d’accord ? C’est ennuyeux… très ennuyeux pour vous Marguerite, je connais votre amour pour le jeu…. Mon père n’aimerait pas beaucoup que je lui en parle ! Et toi, Louise, tu me reproches … quoi ? De me détendre avec la petite Karine… charmante par ailleurs… moi, est-ce que je me suis intéressé à tes rencontres secrètes avec Charles, le mari de ta meilleure copine ? Non, tu vois comme tu me récompenses de ma discrétion ! Hein !

(Gémissement des prisonnières)

Duval : Quant à toi, mon petit Bontoux et ex-futur gendre, j’ai de bonnes nouvelles… Enfin de bonnes nouvelles pour moi !

(Il brandit un papier)

Duval : Tu connais ça ? C’est un extrait de ton casier judiciaire. Je suis peut-être un fumier, mais un fumier avec des relations de fumier. Alors..voyons : vol de vélos, insultes à agents, conduite de voiture sans permis, exhibitionnisme sur le voie publique … Ouh ! Qu’il est chargé, ce casier ! Je suis sûr que Julie va apprécier…. Bien sûr, si toutes les petites affaires que tu as découvertes restaient entre nous, je pourrais oublier tout ça ! Hein ! Bontoux ! Allez, je ne suis pas un cruel, je libère tout le monde…. Vous savez ce qui vous reste à faire. Restons entre gens du monde, ce sera beaucoup mieux.

(Ils les libèrent en parlant)

Marguerite : Pourriture !

Louise : Chiens Galeux !

Jo : Crapule !

Duval : J’ai dit : entre gens du monde ! Et mesdames, n’oublions pas notre petit engagement !

(Il leur tend un papier qu’elles signent en maugréant)

23 (version 4 mars 2016)

Scène 2. (Jo, Duval, Louise, Marguerite, Max)

(Max entre)

Max : Ça y est, les Chinois sont partis ! Ils ont dit qu’ils n’ont jamais une telle chienlit et qu’ils se sentent offensés par l’idée qu’on ait pu croire qu’ils allaient racheter un tel ramassis de rats malfaisants.

Duval : Parfait, on va pouvoir en revenir aux choses sérieuses.

Max : Absolument Duval. Pour commencer, les camarades et moi exigeons ta démission !

Jo : Non, Max.

Max : Comment ça, non !

Duval : La moitié du conseil d’administration, ici présente (il montre Marguerite et Louise), vient de signer un engagement (il montre le papier signé) me confortant dans ma fonction avec une toute petite augmentation !

Max : Louise ! Marguerite ! C’est une trahison !

Louise : C’est-à-dire…

Marguerite : C’est compliqué, Max…

Jo : Max, gardons-le…. C’est un pourri, mais nous savons à qui nous avons à faire. Ça vaut mieux qu’un nouveau patron dont nous ne connaîtrons pas les coups tordus !

Max : Tu te rends compte ? Ça change les données du jeu ! Nous n’avons plus d’otage ! C’est même lui qui nous tient en otages ! Les camarades ne vont pas être contents du tout !

Jo : Il s’agit de sauver des emplois, Max.

Duval : Oui, à commencer par le mien !

Louise : Crapule ! Tu vas peut-être sauver ton emploi, mais sûrement pas ton mariage !

Marguerite : Je vais faire en sorte que ton père te déshérite !

Max : Il y a de l’ambiance !

Jo : Max, il faut calmer le jeu !

Max : Je retourne à la table de négociations, mais ça devient trop compliqué pour moi!

(Son portable sonne !)

Max : Oui… Albert… Euh … non pas tout de suite ! Je sais… je sais, les discussions s’éternisent … euh..oui, je comprends, mais foutre le feu partout, c’est peut-être un peu prématuré ! (Il clôt la conversation)

24 (version 4 mars 2016)

Max (aux autres) :

C’est Albert et les copains, ils campent dans l’entrepôt… ils s’impatientent un peu. Albert est légèrement contrarié et quand Albert est contrarié, il vaut mieux appeler les pompiers tout de suite.

Duval : Casseurs ! Pyromanes !

Louise : Bon, je n’ai plus rien à faire ici (elle part)

Marguerite : Moi, non plus (elle sort)

Max : Quant à moi, il faut que je retourne à la négociation, nous n’en avons pas fini avec toi, Petit Duval ! Gare à tes miches ! (Il sort)

Duval : Rira bien qui rira le dernier !

25 (version 4 mars 2016)

Scène 3. (Jo, Duval)

Duval : Alors comme ça, mon petit Bontoux, tu veux épouser ma fille ! Tu veux me rappeler le montant de tes revenus…. Non ! Tu ne veux pas ? C’est gênant ? (Un temps)

Duval (consulte un dossier) :

Eh bien, tu gagnes généreusement 1050 euros par mois chez nous, Bontoux ! Et c’est avec ça que tu comptes entretenir ma fille chérie ? Tu te rends compte…1050 euros par mois et là-dessus, il va falloir payer le loyer, la télé pour suivre le foot … à crédit bien sûr… ta cotisation au club de pétanque…sans compter les robes de Julie… non, mais où on va là !

Jo : J’aurais Julie d’une façon ou d’un autre, Duval. Nous nous aimons.

Duval : Eh bien, moi je ne t’aime pas tellement, Bontoux.

Jo : Nous allons vivre ensemble, Duval.

Duval : Euh… je n’ai aucune envie de vivre avec toi, Bontoux.

Jo : Ne fais pas le malin, je parlais de Julie et moi.

Duval : Justement, parlons-en. Je vais te surprendre, Bontoux. Je t’autorise à courtiser et même à vivre avec ma fille, à une condition….

Jo : Certainement pas !

Duval : Je disais … à une condition : tu me racontes ce que disent et ce que font tes copains du syndicat… Point par point ! Et en plus, je te confirme ma proposition de petite rente mensuelle !

Jo : Quoi ! Tu veux que j’espionne mes camarades à ton profit ! Mais tu es un être odieux, mon petit Duval ! Un truc malfaisant ! Un machin puant !

Duval : Jo… Jo… tu permets que je t’appelle par ton prénom ?

Jo : Non !

Duval : Jo… tu t’emballes trop vite. Réfléchis un peu : je te donne ma fille et je te conserve ton emploi, agrémenter d’une bonne paie, malgré ton entêtement à me ligoter… en échange, je te demande un tout petit service !

Jo : Va te faire voir, Duval !

Duval : Tu vas le regretter, Jo.

26 (version 4 mars 2016)

Scène 4. (Julie, Jo, Duval)

(Julie entre)

Duval : Qu’est-ce que tu fais là, Julie ?

Julie : J’ai vingt-cinq ans, papa ! Je fais ce que je veux ! De toute façon, les piquets de grève ne laissent sortir personne, surtout pas la fille du patron.

Duval : Écoute, la situation est compliquée.

Julie : Je sais, je sais, compliqué… Tu n’as que ce mot à la bouche ! Mais je suis capable de comprendre, figure-toi ! D’abord, j’ai réfléchi ! Je me suis énervée trop vite. J’aimerais bien savoir pourquoi Jo t’a ligoté. Jo ne ligote pas sans raison.

Duval : Ce n’est rien, Julie…Euh… nous étions en train de discuter paisiblement et puis un léger malentendu a surgi.

Julie : Ligoté et bâillonné sur ta chaise, je n’appelle pas ça discuter, ni un léger malentendu. C’est la guerre !

Jo : Julie ! (Il met un genou en terre) Veux-tu vivre avec moi !

Julie : Jo… 

Duval : NON !

Julie : Mais papa, sois raisonnable ! J’avoue que les évènements m’ont un peu secouée, mais nous nous aimons !

Duval : Pas moi ! Tu ne penses pas te mettre avec ce… ce….

Julie : PAPA ! Jo est un être humain !

Duval : Peut-être… mais alors un petit être humain ! Un tout petit ! Quand je pense que Bertrand Mignard n’attend qu’un geste de ta part !

Jo : Qui c’est celui-là ?

Julie : Personne ! Un type prétentieux ! Enfin… c’est le fils des biscuiteries Mignard… sans intérêt.

Duval : Sans intérêt ? 80 millions d’euros quand même… C’est autre chose que le salaire pitoyable de cet individu duquel je vais d’ailleurs me faire le plaisir de retrancher les retenues pour jours de grève, sans compter mon whisky qu’il s’est enfilé ! !

Julie : Mais c’est odieux, papa !

Duval : Oui, mais ça me fera du bien !

27 (version 4 mars 2016)

Scène 5. (Jo, Julie, Duval, Marguerite, Louise, Max)

(Marguerite et Louise entrent)

Marguerite : Les Japonais sont là !

Duval : Comment ça, les japonais ? Qu’est-ce qu’ils viennent faire là-dedans, les japonais ? On s’est débarrassé des Chinois, ce n’est pas pour vendre aux Japonais.

Marguerite : Ils sont en train d’étudier le dossier.

Louise : Eh bien, figure-toi, mon gros lapin que si les Chinois sont partis complètement dégoûtés par le bazar que tu entretiens dans ton entreprise, les Japonais les ont remplacés et les Japonais…. Ils rigolent encore moins que les Chinois…

Marguerite : Et si tu suis bien la situation, mon petit Minou…. Il se pourrait que nous leur vendions nos parts… auquel cas… notre arrangement ne tient plus puisque nous n’aurons plus de lien avec cette entreprise !

Louise : Et toi non plus ! D’ailleurs, ils nous ont déjà dit que ton poste de directeur-adjoint, ils s’en tamponnent le kimono !

Marguerite : C’est ballot ! tu me feras penser de te donner l’adresse de Pôle Emploi.

Julie : Papa ! Ce n’est pas possible, défends-toi ! Et d’abord, qu’est-ce que c’est que cet arrangement !

Louise : Ma pauvre enfant ! Figure-toi que ton père nous fait chanter !

Julie : Papa, ne me dis pas que tu es un maître chanteur !

Jo : Écoute, Julie, c’est compliqué !

Julie : Encore ! Tu me feras signe quand ça devient simple ! Vous me prenez tous pour une idiote ! Je veux comprendre ce qui se passe !

(Max entre)

Max : Les Japonais veulent voir Petit Duval !

Duval : Euh… c’est-à-dire que je n’ai pas forcément envie de les voir ! Qu’ils prennent rendez-vous avec le secrétariat !

Max : Exécution Duval, tu n’es pas en position de faire le malin ! J’aime autant te dire qu’ils sont un peu énervés…

Duval : Je m’insurge….

Max : Insurge-toi si tu veux, mais tu n’as pas le choix… En avant !

Julie : Papa ! Je crois que tu ferais mieux d’y aller !

Duval : Bon… j’y vais… mais c’est bien parce que c’est moi qui l’aie décidé ! On ne me convoque pas, moi !

28 (version 4 mars 2016)

Marguerite : Je vous suis !

Louise : Moi aussi, j’ai hâte de voir ça !

(Duval sort, poussé par Max, Louise et Marguerite)

29 (version 4 mars 2016)

30 (version 4 mars 2016)