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10 Chevalier Propulsée par Chloé

Entretien avec Chloé Chevalier

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à propos de "Véridienne", premier volume de la saga du "Demi-Loup", publié dans la Bibliothèque Voltaïque chez Les Moutons électriques : http://www.moutons-electriques.fr/livre-356

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Chloé

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Chevalier L’Indé : Véridienne est ton premier roman, peux-tu nous en dire un peu plus sur toi ?

Chloé : Premier roman, oui, et première vraie expérience d’écriture en général, car menée sur le long terme. À l’origine, il y a bientôt dix ans de cela (j’étais au lycée) l’histoire des Récits du Demi-Loup s’appelait Les Femmes du Demi-Loup et était... un film amateur que j’avais tourné avec mon groupe d’amies, un camescope et pas un centime, dans un bout de château humide en Saône-et-Loire, où j’habitais alors. J’avais écrit le scénario et, une fois le film fini, ne voulant pas lâcher cette histoire, que j’aimais, j’ai décidé d’en faire un roman. Roman qui est ensuite devenu tout un cycle, au fur et à mesure que je progressais dans l’écriture pour m’éloigner de plus en plus radicalement de ma trame de départ.

Je suis partie à Nantes, puis à Paris où je vis depuis, pour étudier le cinéma, et mon rythme d’écriture s’est fait plus aléatoire, selon la densité des années d’étude traversées, sans jamais s’interrompre tout à fait cependant – au moment de ma rencontre avec les Moutons cet hiver, j’en étais environ à la moitié du tome III. Il y a deux ans, j’ai terminé un Master de cinéma (sur la fantasy), et depuis je travaille comme scénariste. J’ai plusieurs projets de longs-métrages en cours d’écriture – mais aucun de fantasy, pour le coup !

Je m’efforce de partager mes semaines entre écriture scénaristique et romanesque, et cette activité occupe l’essentiel de mes journées et de mes soirées. Quand je lâche mon clavier ou mon cahier et que je ne suis pas au cinéma ou au théâtre, je pratique l’escrime (médiévale) et, plus irrégulièrement, le tir à l’arc ou l’équitation.

L’Indé : Tes personnages, et notamment les cinq héroïnes, ont des relations complexes mais extrêmement crédibles. On reconnaît facilement la dynamique d’un groupe de jeunes

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filles ainsi que la relation, distante, entre le roi et son fils... Alors, inspiration autobiographique ou imagination très productive ?

Chloé : Si inspiration autobiographique il y a, elle réside en effet essentiellement dans cette observation de l’intérieur du fonctionnement d’un groupe de jeunes filles, avec ses rivalités, ses passions, ses haines, ses périodes d’amitié fusionnelle entrecoupées de phases d’éloignement, etc. Autant de situations que j’ai pu vivre de plus ou moins près à l’époque où je commençais le roman, notamment avec le groupe d’amies avec qui j’avais fait le fameux film amateur. C’est pour cette raison, sans doute, que les relations qu’entretiennent les cinq héroïnes ont quelque chose de très réaliste, qui à mon avis ne peut que servir le reste de l’intrigue. Cela étant, Véridienne et ses suites ne sont pas des livres « de filles » pour autant ! Même s’ils sont essentiellement portés par un groupe de personnages féminins forts, et qui je l’espère sont très éloignés des archétypes que l’on rencontre parfois dans la fantasy.Pour ce qui est du roi, de son fils, et des autres personnages, non, rien d’autobiographique. Pas de manière directe en tout cas ! J’ai tendance à penser que l’imagination pure n’existe pas. On ne fait jamais que recomposer une nouvelle réalité à partir de la nôtre, des gens qui nous entourent, de notre passé, de ce qu’on a appris ici ou ailleurs, des histoires qu’on a lues ou vues – consciemment ou non, d’ailleurs. En tout cas, c’est ainsi que je fonctionne.

L’Indé : Ton roman mélange plusieurs points de vue et plusieurs supports de narration, journaux, témoignages, missives... Ce mélange peut être très risqué, au niveau du rythme comme de la cohérence. Comment as-tu fait fonctionner ton récit ?

Chloé : La forme chorale était là dès l’origine : les trois Suivantes, leurs princesses, le prince Aldemor, tous ceux qui gravitent autour d’eux. À partir du moment où j’avais décidé que quatre d’entre eux seraient des narrateurs réguliers, cette forme « composite » s’est imposée d’elle-même assez vite, car je n’avais pas envie d’un récit à la troisième personne, même si cela aurait été, certes, plus simple à manier d’un point de vue narratif. J’aurais pu, bien sûr, monter en parallèle plusieurs journaux intimes, ou plusieurs mémoires rédigés a posteriori par les personnages, mais mettre en place cette « compilation de documents » – deux des Suivantes reconstituent leur histoire à partir de leurs écrits, mais aussi de multiples autres fragments – me semblait plus intéressant. Cela permet de varier les tonalités : ce qui est écrit à chaud quand le personnage a douze ans, ou consigné des décennies plus tard, les lettres échangées, qui ont un caractère plus officiel, etc. Et ainsi de jouer avec la compréhension que le lecteur a de l’histoire, et qui varie selon qui la lui raconte, dans quel contexte. Car, dans ces conditions, quel point de vue choisir ? De qui soutenir les desseins ? Le choix peut paraître facile de prime abord, mais, quand les événements se gâtent et qu’on en apprend davantage sur les personnages, il devient de moins en moins évident, et cette indécision me plaisait.

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Après, effectivement, trouver le bon équilibre de cette forme a représenté un des principaux défis de l’écriture. Pour donner un exemple, dans les premières versions du tome I, le personnage d’Aldemor n’apparaissait qu’assez tard, dans la seconde moitié du livre, et prenait peu la parole. On ne savait presque rien de lui, à quelques bribes près. J’avais gardé tout cela pour le tome II, ce qui faisait que le tome I était un peu déséquilibré ! En plus de se passer à huis-clos dans le château de Véridienne, on ne quittait jamais les cinq filles et leur point de vue d’adolescentes sur les événements. Ramener le récit de l’histoire du prince dans le tome I apportait une bouffée d’air en nous faisant sortir régulièrement du château et remettait de façon plus visible au premier plan les enjeux plus vastes du récit – l’épidémie, la guerre.

L’Indé : On sent, à travers les témoignages des trois jeunes filles, qu’il y a une intrigue riche de trahisons, de morts, et d’autres terribles secrets, cachée derrière le récit, qu’est-ce que tu nous prévois pour la suite ?

Chloé : Il y aura de tout cela, oui, mais trop en dire serait dommage, surtout alors que je réponds à ces questions quand le premier volume n’est même pas encore sorti ! Le tome I est celui où se mettent en place toutes les intrigues politiques et humaines qui traverseront l’ensemble du cycle. Le deuxième sera un tome d’exploration plus poussée du Demi-Loup, et de voyages, parfois très loin au-delà des frontières du royaume. Un tome d’introspection, également, pour Aldemor qui nous livrera enfin ses derniers secrets.

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Parution le 20 août