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Épochè 1 Épochè Épochè est un mot grec (ἐποχή / epokhế) qui signifie d'abord « arrêt, interruption, cessation ». En philosophie, ce terme désigne avant tout la suspension du jugement. Philosophie Chez les sceptiques, l'épochè désigne la suspension du jugement. On s'abstient de toute assertion, soit favorable, soit défavorable, pour ou contre. Pyrrhon lui-même, fondateur du scepticisme vers 322 av. J.-C., ne se prononce pas. Diogène Laërce (IX, 62) dit de Pyrrhon : "Il philosophe en suivant le principe de la suspension." Mais, à son époque, Pyrrhon se contente de prôner l'indifférence devant les opinions et les événements, car "aucune chose n'est plus ceci que cela" (Diogène Laërce, IX, 61), ce qui signifie, dit P. Hadot, que "l'homme ne peut pas faire de différence entre les choses, ni du point de vue de la valeur ni du point de vue de la vérité". Pyrrhon recommande, au fond, un genre de vie, une attitude faite d'indifférence, qui engendre l'ataraxie (l'imperturbabilité), c'est-à-dire la paix intérieure. Pour le disciple de Pyrrhon, Timon (vers 280 av. J.-C.), "Il faut demeurer sans opinions, sans penchants et sans nous laisser ébranler, nous bornant à dire de chaque chose qu'elle n'est pas plus ceci que cela ou encore qu'elle est en même temps qu'elle n'est pas ou bien enfin ni qu'elle est ni qu'elle n'est pas. Pour peu que nous connaissions ces dispositions, dit Timon, nous connaîtrons d'abord l' "aphasie" (c'est-à-dire que nous n'affirmerons rien), ensuite l' "ataraxie" (c'est-à-dire que nous ne connaîtrons aucun trouble)" (Eusèbe de Césarée, Préparation évangélique, XIV, 18, 2). Le concept d' épochè remonte - selon P. Couissin [1] - au stoïcisme. Pour Zénon de Cition, fondateur du stoïcisme vers 303 av. J.-C., le sage ne doit pas donner son assentiment (sugkatathesis) de façon précipitée à chaque représentation (phantasia) qui se présente à lui. Sur ce qui n'est pas certitude, "représentation compréhensive" (phantasia katalêptikê) le sage ne donne pas son approbation. Le véritable premier théoricien de l' épochè, c'est Arcésilas de Pitane, chef de la 2 e Académie de Platon vers 268 av. J.-C. : "C'est contre Zénon [de Cittium] qu'Arcésilas, d'après la tradition, engagea le combat...., à cause de l'obscurité des choses qui avaient amené Socrate à avouer son ignorance... Il pensait donc que tout se cache dans l'obscurité, que rien ne peut être perçu ni compris ; que, pour ces raisons, on ne doit jamais rien assurer, rien affirmer, rien approuver ; qu'il faut toujours brider sa témérité et la préserver de tout débordement, alors qu'on l'exalte en approuvant des choses fausses ou inconnues ; or rien n'est plus honteux que de voir l'assentiment et l'approbation se précipiter pour devancer la connaissance et la perception" (Cicéron, Les Académiques, I, 45). Non seulement Arcésilas théorise, mais il pratique : "Il agissait selon cette méthode, si bien qu'en réfutant les avis de tous il amenait la plupart de ses interlocuteurs à abandonner leur propre avis. Quand on découvrait que les arguments opposés de part et d'autre sur un même sujet avaient le même poids, il était plus facile de suspendre son assentiment, d'un côté comme de l'autre" (Cicéron, Les Académiques, I, 45). Carnéade, chef de la III° Académie de Platon vers 168 av., "probabiliste", ne donne d'assentiment à aucune représentation. Cependant, le philosophe peut tenir certaines représentations pour plus fiables que d'autres, même s'il ne se prononce pas sur leur vérité : c'est une "représentation probable" (pithanê phantasia), convaincante. "Probable" signifie ici : probatoire, soumis à l'examen. Son successeur, Clitomaque dit ceci : "L'affirmation 'Le sage suspend son assentiment' a deux sens. Selon le premier, le sage n'assentit absolument à rien [sur la vérité ou la fausseté de ses représentations]. Selon le second, il s'abstient, quand il donne une réponse, d'admettre ou de nier tel point [une représentation approuvable]" (Cicéron, Les Académiques, II, 104).

Épochè

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poch1pochpochestunmotgrec(/epokh)quisignified'abordarrt,interruption,cessation.Enphilosophie,ceterme dsigne avant tout la suspension du jugement.PhilosophieChez les sceptiques, l'poch dsigne la suspension du jugement. On s'abstient de toute assertion, soit favorable, soitdfavorable, pour ou contre.Pyrrhon lui-mme, fondateur du scepticisme vers 322 av. J.-C., ne se prononce pas. Diogne Larce (IX, 62) dit dePyrrhon : "Il philosophe en suivant le principe de la suspension." Mais, son poque, Pyrrhon se contente de prnerl'indiffrence devant les opinions et les vnements, car "aucune chose n'est plus ceci que cela" (Diogne Larce, IX,61), ce qui signifie, dit P. Hadot, que "l'homme ne peut pas faire de diffrence entre les choses, ni du point de vue delavaleurnidupointdevuedelavrit".Pyrrhonrecommande,aufond,ungenredevie,uneattitudefaited'indiffrence, qui engendre l'ataraxie (l'imperturbabilit), c'est--dire la paix intrieure.Pour le disciple de Pyrrhon, Timon (vers 280 av. J.-C.),"Ilfautdemeurersansopinions,sanspenchantsetsansnouslaisserbranler,nousbornantdiredechaquechose qu'elle n'est pas plus ceci que cela ou encore qu'elle est en mme temps qu'elle n'est pas ou bien enfin niqu'elleestniqu'ellen'estpas.Pourpeuquenousconnaissionscesdispositions,ditTimon,nousconnatronsd'abordl'"aphasie"(c'est--direquenousn'affirmeronsrien),ensuitel'"ataraxie"(c'est--direquenousneconnatrons aucun trouble)" (Eusbe de Csare, Prparation vanglique, XIV, 18, 2).Leconceptd'pochremonte-selonP.Couissin[1] -austocisme.PourZnondeCition,fondateurdustocismevers303av.J.-C.,lesagenedoitpasdonnersonassentiment(sugkatathesis)defaonprcipitechaquereprsentation(phantasia)quiseprsentelui.Surcequin'estpascertitude,"reprsentationcomprhensive"(phantasia katalptik) le sage ne donne pas son approbation.Le vritable premier thoricien de l' poch, c'est Arcsilas de Pitane, chef de la 2e Acadmie de Platon vers 268 av.J.-C. :"C'est contre Znon [de Cittium] qu'Arcsilas, d'aprs la tradition, engagea le combat...., cause de l'obscuritdeschosesquiavaientamenSocrateavouersonignorance...Ilpensaitdoncquetoutsecachedansl'obscurit, que rien ne peut tre peru ni compris ; que, pour ces raisons, on ne doit jamais rien assurer, rienaffirmer, rien approuver ; qu'il faut toujours brider sa tmrit et la prserver de tout dbordement, alors qu'onl'exalte en approuvant des choses fausses ou inconnues ; or rien n'est plus honteux que de voir l'assentiment etl'approbation se prcipiter pour devancer la connaissance et la perception" (Cicron, Les Acadmiques, I, 45).Non seulement Arcsilas thorise, mais il pratique :"Il agissait selon cette mthode, si bien qu'en rfutant les avis de tous il amenait la plupart de ses interlocuteurs abandonner leur propre avis. Quand on dcouvrait que les arguments opposs de part et d'autre sur un mmesujetavaientlemmepoids,iltaitplusfaciledesuspendresonassentiment,d'unctcommedel'autre"(Cicron, Les Acadmiques, I, 45).Carnade,chefdelaIIIAcadmiedePlatonvers168av.,"probabiliste",nedonned'assentimentaucunereprsentation. Cependant, le philosophe peut tenir certaines reprsentations pour plus fiables que d'autres, mme s'ilne se prononce pas sur leur vrit : c'est une "reprsentation probable" (pithan phantasia), convaincante. "Probable"signifie ici : probatoire, soumis l'examen. Son successeur, Clitomaque dit ceci :"L'affirmation 'Le sage suspend son assentiment' a deux sens. Selon le premier, le sage n'assentit absolument rien[surlavritoulafaussetdesesreprsentations].Selonlesecond,ils'abstient,quandildonneunerponse, d'admettre ou de nier tel point [une reprsentation approuvable]" (Cicron, Les Acadmiques, II, 104).poch2L'pochs'imposedansleno-scepticisme,surtoutchezSextusEmpiricus(dbutduIIIs.).Lasuspensiondujugement(poch)estlerefusd'accordersonassentimentunereprsentation(phantasia)oularaison(logos)parce que les arguments contraires ont une gale force. La suspension est le but du scepticisme et l'unique moyen delutter efficacement contre l'imagination et la raison."Lasuspensionestl'tatdelapenseonousnenionsnin'affirmonsrien.Quitude(arrepsia),c'estlatranquillit et la srnit de l'me" (Sextus Empiricus, Hypotyposes pyrrhoniennes, I, 10).ChezHusserletdanslaphnomnologie,l'pochdsignelamiseentreparenthsesdelathsenaturelledumonde, c'est--dire la croyance la ralit extrieure du monde. Mais il ne s'agit pas du tout de douter de la ralit dumonde.Cettemiseentreparenthsesapourbutdenelaisserquelephnomnedumonde,quiestunepureapparition, et qui n'affirme plus la ralit de la chose apparaissant."L'phnomnologique.laplacedelatentativecartsiennededouteuniversel,nouspourrionsintroduirel'universelle,ausensnouveauetrigoureusementdterminquenousluiavonsdonn.(...)Notreambitionestprcismentdedcouvrirunnouveaudomainescientifique,dontl'accsnoussoitacquispar la mthode mme de mise entre parenthses (...). Ce que nous mettons hors de jeu, c'est la thse gnralequitientl'essencedel'attitudenaturelle(...).jeneniedoncpascemondecommesij'taissophiste;jenemetspassonexistenceendoutecommesij'taissceptique;maisj'oprel'phnomnologiquequim'interditabsolumenttoutjugementportantsurl'existencespatio-temporelle.Parconsquent,touteslessciences qui se rapportent ce monde naturel (...) je les mets hors circuit, je ne fais absolument aucun usage deleurvalidit;jenefaismienneaucunedespropositionsquiyressortissent,fussent-ellesd'unevidenceparfaite"(Husserl,Idesdirectricespourunephnomnologiepureetunephilosophiephnomnologique(1913), Gallimard, coll. "Tel", p. 101-103).PsychanalysePour les psychanalystes, l'poch est la suspension de tout jugement de ralit, dans le but de permettre de naviguerdans l'univers des fantasmes et de l'inconscient de l'analysant.Notes et rfrences[1] P. Couissin, "Le stocisme de la Nouvelle Acadmie", Revue d'histoire de la philosophie, III, 1929, p. 241-276.Portail de la philosophieSources et contributeurs de larticle3Sources et contributeurs de larticlepoch Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?oldid=94718707 Contributeurs: Ahbon?, Bap, Bibi Saint-Pol, CHEFALAIN, Camion, Cdang, Charles Dyon, Dhatier, HYUK3, Introvert,Jastrow, Jbdls lyon, Jonathan.renoult, Jrome Bru, LilyKitty, Markadet, Methexis, Proclos, Sebleouf, Smeet666, Sylvain Theulle, VlaamSource des images, licences et contributeursFichier:Auguste Rodin - Penseur 50px.png Source: http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Fichier:Auguste_Rodin_-_Penseur_50px.png Licence: GNU Free Documentation LicenseContributeurs: retouche par WalkLicenceCreative Commons Attribution-Share Alike 3.0//creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/