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Production & Environnement Bertonnier Laure Bonansea Valentina Bonnet Franck Duran Ramirez Camilo Etude du glyphosate (Roundup) Rapport Janvier 2012

Etude du glyphosate (RoundUp) - envitera.com · Etude du glyphosate (Roundup) Rapport Janvier 2012 . 2 Sommaire ... préconise notamment le désherbage total des parcelles en évitant

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Production &

Environnement

Bertonnier Laure

Bonansea Valentina

Bonnet Franck

Duran Ramirez Camilo

Etude du glyphosate (Roundup)

Rapport

Janvier 2012

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Sommaire

I Introduction ..................................................................................................................................... 3

I.1. Histoire des désherbants ......................................................................................................... 3

I.2. Définition du glyphosate ......................................................................................................... 4

II Utilisation ........................................................................................................................................ 5

II.1. Le monde agricole ................................................................................................................... 5

II.2. L’entretien des espaces verts et forêt ..................................................................................... 8

II.3. Le particulier (jardinier du dimanche) ..................................................................................... 8

III Etat des connaissances scientifiques ............................................................................................ 10

III.1. Toxicologie ............................................................................................................................. 11

III.2. Éco-toxicologie ...................................................................................................................... 12

IV Polémiques .................................................................................................................................... 15

IV.1. Histoire de l’entreprise Monsanto ........................................................................................ 15

IV.2. Condamnations pour publicités mensongères ...................................................................... 16

IV.3. Pressions politiques et focus sur la problématique en Amérique du Sud............................. 17

IV.3.a Le cas du quartier « Ituzaingó » à Cordoba, en Argentine. ........................................... 17

IV.3.b Décisions Institutionnelles ............................................................................................. 18

I.1.a Le cas des fumigations anti-drogue en Colombie. ............................................................ 18

IV.4. Controverses ......................................................................................................................... 20

IV.4.a Controverses scientifiques ............................................................................................ 20

IV.4.b Controverses médiatiques ............................................................................................. 22

IV.5. Contre-attaque de Monsanto ? ............................................................................................. 23

V Décisions institutionnelle .............................................................................................................. 24

VI Modèle économique du Roundup ................................................................................................. 26

VII Techniques alternatives & Conclusion .......................................................................................... 27

VIII Bibliographie complémentaire ...................................................................................................... 29

IX Tables des annexes ........................................................................................................................ 30

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I Introduction

Au lendemain de la seconde guerre mondiale, un contrat social a été passé entre la société et le monde paysan pour nourrir la population à bas prix, tout en fournissant des bras pour l'industrie et permettre la reconstruction. Le monde paysan est devenu progressivement agricole, puis agroalimentaire, grâce à la mécanisation et l'énergie très bon marché. Toutefois cette «révolution verte» doit une grande partie à la chimie de synthèse.

Le glyphosate inventé par la société Monsanto, vendu sous le célèbre nom Roundup, est le symbole de cette chimie de plus en plus décriée par l’opinion publique ce qui nous a amené à vouloir étudier l’utilisation qui en est faite, analyser les différents résultats scientifiques sur la toxicité du produit puis décortiquer les mécanismes de la polémique et d’en comprendre les enjeux économiques. Enfin, nous proposerons un état des connaissances sur les alternatives possibles.

I.1. Histoire des désherbants

Initialement le désherbage s'effectuait manuellement afin de limiter la concurrence des mauvaises herbes, puis progressivement il s’est fait de manière mécanique. A partir des années 60, le désherbage chimique à fait son apparition et s’est très vite imposé avec le développement de l’agriculture moderne. D’ailleurs, l’usage des herbicides à des fins militaires contribua très largement à accélérer la recherche dans ce domaine. De tout temps, la destruction des récoltes et des réserves alimentaires a contribué à diminuer la résistance de l'adversaire. Dès 1943-44, jusqu'à 12.000 défoliants furent testés aux USA et plus de 7.000 produits, utilisables au cours d'une guerre, furent découverts. La recherche continua et en 1950, l'armée britannique fut la première à utiliser les herbicides au cours de la guerre contre la guérilla en Malaisie. Durant la seconde guerre d'Indochine, les forces militaires américaines ont utilisé, en plus des armes conventionnelles, des produits chimiques toxiques sur la moitié sud du Viet Nam, mais aussi sur le Cambodge et le Laos, en particulier des herbicides et des défoliants, dont l'Agent Orange et sa composante, la dioxine, et cela pendant près de 10 ans, de 1961 à 1971.

C’est donc tout naturellement que la première génération d’herbicide, appelée les phytohormones de synthèse, (principalement le 2,4-D et le 2,4,5-T : di- et tri-chlorophénoxy acide acétique) doivent leurs découvertes au budget militaire. Ils furent développés en 1937 et étaient actifs contre les mauvaises herbes en agissant comme des hormones végétales, et ils furent utilisés dès 1940 en agriculture puis en sylviculture. Dès lors en moins de vingt-cinq ans, une très grande variété d’herbicides apparurent avecnotamment les carbamates, les Bypiridiles, les colorants nitrés (dérivé du benzène), Les Imidazolinones, les Triazines, Les Dinitroanilines, Les Urées Substituées ou encore les Dyphényls-éthers. Malheureusement, la toxicité de ces nouvelles substances ne fut étudiée qu'à court terme, sans tenir compte d'éventuels effets secondaires et du déséquilibre potentiel engendré dans les cultures. De plus, une grande partie de ces traitements possèdent une grande rémanence et impactent donc très souvent la culture suivante.

Le glyphosate arrive en 1974 sur un marché des herbicides déjà très étoffé mais avec des avantages qui en font rapidement un best-seller puisqu’il permet une destruction efficace des adventices ou des repousses et cela sans effet sur la culture suivante et accompagné d’un coût très réduit.

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I.2. Définition du glyphosate

Le glyphosate (N-(phosphonométhyl)glycine, C3H8NO5P) est aujourd’hui l'herbicide le plus utilisé dans le monde. C'est un désherbant total non sélectif, c’est-à-dire qui détruit l'ensemble de la végétation, qui est breveté et commercialisé de façon exclusive par la société Monsanto sous le nom de Roundup depuis 1974. Toutefois, le brevet principal est tombé dans le domaine public en 2000 permettant à ces concurrents de pouvoir le synthétiser et le commercialiser.

Afin de permettre la pénétration du glyphosate dans les tissus végétaux, un adjuvant (le POEA) est mélangé à celui-ci. Le mécanisme d'action est systémique en bloquant la synthèse des acides aminés aromatiques au niveau de tous les organes de réserve. Le glyphosate est un herbicide classé comme produit irritant, toxique et nocif pour les organismes aquatiques et dangereux pour l’environnement.

Il est important de savoir, comme décrit dans le schéma ci-après (figure1), que les herbicides appelés communément désherbants font partie de la famille des produits phytosanitaires et donc plus largement de la famille des pesticides. Les insecticides, fongicides (propriété de tuer les champignons) et bactéricides complètent la majeure partie de la famille des pesticides.

Schéma 1 : Les différentes catégories de pesticides

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II Utilisation

II.1. Le monde agricole

Le glyphosate est le premier herbicide total ayant permis de semer directement après usage et cela sans effet sur la culture suivante car l'effet désherbant apparaît uniquement en cas de pulvérisation sur les feuilles de la plante. La possibilité de planter vite juste après un désherbage efficace était une vraie rupture à l'époque de sa mise sur le marché. La diffusion du glyphosate a même permis de développer une nouvelle technique d’agriculture appelée « agriculture de conservation » qui préconise notamment le désherbage total des parcelles en évitant le labour du sol! Le succès spectaculaire du Roundup réside notamment dans le positionnement du produit dont les propriétés écologiques et environnementales ont été mises en avant et exagérées par Monsanto : « ne laisse pas de résidus dans le sol », « respecte l’environnement », « biodégradable ». Ces arguments et ces promesses se sont très vite transformés, dans le secteur agricole, en produit écologique et 100% biodégradable.

En France, selon l’Ademe, 15 000 tonnes de ce produit seraient utilisées chaque année. Voici d’ailleurs des extraits d’une brochure distribuée aux agriculteurs et qui a pour objectif de mettre en œuvre les bonnes pratiques d’utilisation chez les agriculteurs tout en essayant de limiter le risque de transfert de glyphosate dans l’environnement. Voici la liste des principales recommandations :

Adapter la dose de glyphosate à la situation (en fonction de l’adventice et de son stade).

Tableau 1 : Dose maximale pour chaque type d'usage du glyphosate

Source : La chambre d’agriculture

Appliquer le glyphosate dans de bonnes conditions climatiques : les températures extérieures doivent être comprises entre 15°C et 25°C en évitant les temps secs mais attention il ne faut pas de précipitations prévues dans les 6 heures après l’application.

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Connaître la dureté de l’eau car le glyphosate est sensible à certains ions (Ca2+, Fe2+ et Mg2+) et ajouter du sulfate d’ammonium en conséquence.

Connaître et respecter la réglementation sur les traitements des fossés ou des abords des champs et des exploitations (par exemple : interdiction de traiter les fossés qui sont habituellement en eau et les surfaces imperméables tels que les chemins, les cours et les allées).

Porter des équipements de protection individuelle (EPI) lors de chaque exposition et suivre scrupuleusement les règles suivantes afin d’éviter toute contamination :

o Veiller à entretenir et à renouveler régulièrement les EPI. o Exécuter parfaitement les procédures d’habillages et de déshabillage. o Ne jamais stocker les EPI avec les pesticides. o Ne jamais boire ou fumer durant les phases d’exposition. o S’interdire tous gestes contaminants tel que débouchage d’une buse à la bouche. o Prendre une douche après chaque application de pesticides.

Comme représenté dans la photo n°1, les EPI obligatoires pour les applications de glyphosate, comme pour les autres pesticides, sont des gants imperméables aux produits chimiques, un masque à cartouche, des lunettes ou visière et enfin une combinaison intégrale avec chaussures adaptées.

Photo 1 : Tracteur pulvérisant du glyphosate

Photo prise lors d’un record du monde établi en France avec 122hectares traités en 1h et près de 4500L de glyphosate utilisé

Photo 2 : Les EPI réglementaires

Source : Fédération REgionale de Défense contre les Ennemis des Cultures

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Utiliser le glyphosate à bon escient sachant qu’il existe parfois des alternatives intéressantes :

Tableau 2 : Cas de préconisation du glyphosate ou de son alternative

Source : chambre d’agriculture

Enfin, en France, il faut savoir que chaque agriculteur a l’obligation de recevoir un certificat appelé « Certiphyto » avant 2014lequel est intégré dans une formation réalisée en partenariat avec les chambres d’agriculture et la MSA (Mutualité Sociale Agricole). L’objectif étant de réaliser une prévention des risques professionnels sur l’usage des pesticides mais également d’aider les agriculteurs à mieux organiser et concevoir leurs traitements phytosanitaires (stockage, remplissage, protection, entretien des pulvérisateurs, gestion des effluents) et enfin de connaître parfaitement la réglementation en la matière.

Malheureusement, d’après la MSA, 20% des agriculteurs ont déjà subi des symptômes d’intoxication aigue dont 62% ne portaient même pas de gants ! Preuve que même les règles de base ne sont que peu respectées par les utilisateurs des pesticides. Il est vrai que les conditions d’usages du glyphosate sont très contraignantes mais il est inquiétant de constater que finalement les populations d’agriculteurs que l’on peut surnommer de « durs à cuire » sont les premières victimes de leurs manques de rigueur dans les précautions d’usage.

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II.2. L’entretien des espaces verts et forêt

Le glyphosate est également très utilisé pour l’entretien des espaces verts effectué par du personnel communal ou des paysagistes professionnels. Aux Etats-Unis, l’engouement est tel qu’en 1993, quinze villes acceptent de participer à un programme d’« embellissement » de leur cité sponsorisé par Monsanto avec l’idée de développer une phobie des mauvaises herbes. A l’inverse, depuis quelques années certaines villes pionnières comme Rennes décident de bannir l’utilisation du Roundup.

Photo 3 : Exemple de pulvérisation de glyphosate par des services communaux

Source : http://www.journarles.org/spip.php?article616

Les paysagistes sont également des grands utilisateurs de Roundup notamment pour la préparation d’un nouveau gazon. La première étape « classique » pour l’implantation d’une nouvelle pelouse est l’épandage de glyphosate sur la totalité de la parcelle. Nous avons contacté cinq paysagistes qui ont tous reconnu le caractère incontournable du Roundup dans leur métier. D’ailleurs un seul d’entre eux accepte de travailler, à la demande, sans Roundup et donc avec uniquement une technique mécanisée mais malheureusement le résultat final est sans garanti et surtout la facture est multipliée par trois ! Enfin, ils sont tous unanimes sur le potentiel dangereux du Roundup et d’ailleurs ne comprennent pas comment il est possible qu’il soit en vente libre et utilisable par des personnes non-averties et sans réel équipement de protection ! Est-ce une simple remarque corporatiste à l’encontre du jardinier du dimanche ou bien un avis éclairé de la part de professionnels qui appréhendent probablement mieux le risque que la personne lambda ?

Une autre grande application du glyphosate existe en sylviculture notamment pour aider au démarrage des semis et des jeunes plants en forêt. Cela évite la concurrence avec d’autres espèces végétales pendant les premières années de croissances des arbustes. Ce désherbage chimique est plus efficace et surtout beaucoup moins coûteux que le désherbage mécanique principalement dans des zones boisées difficiles d’accès pour des engins.

II.3. Le particulier (jardinier du dimanche)

C’est en 1988 que Monsanto crée sa division jardin pour élargir l’accès du Roundup au particulier. Depuis cette date, le produit s’est donc naturellement imposé chez de nombreux jardiniers du dimanche. On mesure encore mal les effets de l’utilisation de cet herbicide chez ces utilisateurs amateurs mais une chose est sure c’est qu’environ un tiers d’entre eux l’utilisent…

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Voici les recommandations données par Monsanto sur l’utilisation du Roundup pour son usage personnel :

1/ Vérifier les conditions météo ; 2/ Calculer la surface à traiter ;

Figure 1 : Recommandations émises par Monsanto

Source : www.roundup-jardin.com

3/ Ne jamais traiter à moins de 5 mètres d’un point d’eau ou de bouches d’eaux pluviales ou d’eaux usées.

4/ Les autres précautions à respecter sont notamment :

d’éloigner les enfants et les animaux domestiques de la zone traitée pendant environ 6h ;

de porter une tenue recouvrant intégralement son corps + gants et bottes ;

de rincer 3 fois son matériel après application (sans faire de rejet dans les eaux usées !).

Comme on peut le constater les recommandations sont très proches de celles émises pour les agriculteurs mais il apparaît encore plus utopique de penser que tous les jardiniers amateurs respectent l’ensemble de ces consignes très contraignantes. Le surdosage est quasi-systématique et surtout une contamination peut alors se faire au moment de l’application du produit par inhalation (pulvérisation), par ingestion, ou par contact cutané si l’on ne respecte pas scrupuleusement le mode d’emploi. Elle peut également se faire de façon continue lorsque le jardinier, peu après l’application, pratique des activités dans le jardin avec ses enfants ou encore par la présence de résidus de traitement sur les surfaces imperméables (allées en pavé, chemin goudronné, dalle béton …).

Après ce descriptif sur les domaines d’application du Roundup, il apparaît maintenant important de faire un état des lieux des connaissances consolidées en matière de toxicologie mais également d’éco-toxicologie.

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III Etat des connaissances scientifiques (toxicologie & éco-toxicologie)

L’état des lieux de connaissances scientifiques sur la toxicologie et éco-toxicologie du Roundup manque actuellement de transparence et d’unification des recherches. En effet, de possible effets sur la santé humaine et sur la biosphère sont soulignées dans l’opinion publique mais ces remarques manquent souvent de véritable support scientifiques pour les avérés ou les rejettes. C’est pourquoi nous avons tenté de dresser ici un état des connaissances scientifiques de la toxicologie et l’éco-toxicologie du Roundup lorsque les précautions d’utilisation sont respectées.

Pour l’établissement de cet état de connaissance, nous prendrons en considération les effets du Roundup sur la santé sans chercher à analyser lequel des produits qui le constitue en est la cause : le glyphosate ou ces différents adjuvants. Il est important de noter que lors de l’autorisation de commercialisation du Roundup, seul les effets de la molécule « active » : le glyphosate a été testé et non l’ensemble du produit mettant ainsi de côté les interactions entre les différents produits chimique le constituant. De nombreux adjuvants composent le Roundup et certains sont connus et reconnus comme dangereux comme le montre le tableau ci-dessous :

Tableau 3 : Les différents adjuvants contenus dans le Roundup et leurs toxicités

Source : Association Santé Environnement France

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III.1. Toxicologie

Les premières personnes touchées par les effets indésirables du Roundup sont les utilisateurs. Parfois, les consignes de précaution d’utilisation ne sont pas appliquées. Le non-port d’équipement de protection individuel peut entrainer par exemple, des dermites d’irritation cutanée, des irritations oculaires ainsi que de graves lésions oculaires (Institut national de recherche et de santé Fiche toxicologique n°273 édité en 2009, cf annexe 1).

Photo 4 : Pictogramme présent sur la fiche toxicologique du glyphosate n°273

Après utilisation, le Roundup est plus particulièrement le glyphosate se retrouve dans l’eau et peut causer des dermites de contact allergiques même lorsqu’il n’est présent qu’à 1% dans l’eau d’après Dermatoses professionnelles aux produits phytosanitaires, publié dans la revue Médecin du Travail

n°119 au 3ème

trimestre 2009.

Photo 5 : Exemple de dermatite de contact

http://www.atlasdedermatologieprofessionnelle.com

Des études ont mise en évidence que le Roundup ne causait pas que des « désagréments minimes » et de contact lorsque les équipements de protection individuelle ne sont pas correctement portés. Il peut avoir une influence sur les personnes vivants à proximités des épandages, ou ayant un quelconque contact avec les produits traités comme par exemple les cueilleurs de fruits ou les femmes d’agriculteurs.

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En effet, une étude de l’université de Caen en 2007 (« Time- and Dose-DependentEffects of Roundup on

Human Embryonic and Placental Cells » réalisé par N. Benachour, H. Sipahutar, S. Moslemi, C. Gasnier,

C.Travert et Gilles-Éric Séralini (2007)) mets en lumière l’impact des diverses formulations et constituants de cet herbicide sur les lignées de cellulaires humaines. Le Roundup aurait des effets néfastes sur les mitoses ou division cellulaires.

Les résultats de cette étude sont affirmés par une étude réalisée en 2009 par le professeur Gilles-Eric Séralini (« Glyphosate formulations induceapoptosis and necrosis in humanumbilical, embryonic, and

placentalcells »réalisé par Nora Benachour et Gilles-Éric Séralini et publié dans « Chemical research in

toxicology »). Cette étude montre que même à des doses très infimes (diluées à plus 100 000 fois), le Roundup entraine la mort des cellules humaines en quelques heures (en endommageant la membrane et l’ADN de la cellule).

Comme le Roundup entraine des problèmes de division cellulaire mêmes à des quantités infimes, il n’est pas étonnant de constater qu’une étude (étude épidémiologique de l’Ontario en 2000) mette en cause le Roundup devant l’augmentation de 100% des avortements spontanés tardifs. De plus des études (étude épidémiologie de Caroline du Nord et de l’Iowa aux Etats Unis) souligne la connexion entre l’augmentation des cancers notamment du lymphome non-hodgkinien (cancer du système immunitaire) chez la population agricole et l’utilisation du Roundup. Les mêmes résultats sont apportés en France avec la cohorte française AGRICAN qui souhaite améliorer ces connaissances sur les liens existant entre les cancers et les pesticides (« Cancers et pesticides » rédigé par Isabelle Baldi et

Pierre Lebailly publié dans LA REVUE DU PRATICIEN, le 15 JUIN 2007).

Cependant, les risques de contact avec le Roundup et les êtres vivants ne se limitent pas aux utilisateurs de ce produit. En effet, des connaissances précises sur les effets que pourraient avoir le Roundup sur les consommateurs d’aliments traités avec ce produit demandent encore du temps.

III.2. Éco-toxicologie

Comme il l’a été constaté dans le paragraphe précédemment, le Roundup comporte des risques sanitaires pour l’homme. Cependant, les interactions du Roundup avec les organismes vivants ne concernent pas que les hommes mais aussi tous les êtres vivants : la faune et la flore. Les interactions entre le monde vivant et le Roundup sont multiples et leurs impacts nombreux, ils peuvent être de nature direct ou indirect.

Les mécanismes cellulaires de l’homme et des autres êtres vivants sont sensiblement identiques. Il parait donc logique de penser que si le Roundup a des effets néfastes sur l’être humain, il en a aussi sur la faune et la flore. Cette logique a été affirmée par l’institut national de recherche et de santé a affirmé dans sa fiche toxicologique n°273 (édité en 2009) en stipulant que le Roundup était toxique pour tous les organismes aquatiques mais aussi pour les animaux chez qui il provoque notamment des troubles sur les tractus gastro-intestinal, le foie et sur les glandes salivaires.

Photo 6 : Pictogramme présent sur la fiche toxicologique de glyphosate n°273

L’utilisation de Roundup a aussi des effets indésirables sur la faune après son utilisation, car comme ce produit détruit la flore présente, il modifie et détruit le milieu de vie ou le réservoir de nourriture de toute la faune qui n’a d’autres choix que de migrer, s’adapter ou mourir(http://vertigo.revues.org,

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extrait cf annexe 2). Ainsi c’est toute la bio-diversifié qui est affectée et menacée par l’utilisation du Roundup.

De plus, la thèse de Rodolphe Poupardin sur les Interactions gènes-environnement chez les moustiques et leur impact sur la résistance aux insecticides(codirigée par Stéphane Reynaud et Jean-Philippe David,

préparée au sein du Laboratoire d’Ecologie Alpine (LECA), dans l'École Doctorale Chimie et Sciences du Vivant (EDCSV) du 5 avril 2011), met en évidence que le glyphosate entraine des modifications du comportement cellulaire permettant ainsi à des organismes comme des larves de développer une certaine forme de résistante et de tolérance à certains insecticides présent sur le marché.

Photo 7 : Larves résistantes à certains insecticides

http://www.salamandre.net/ogm-et-papillon-rsistant

Des phénomènes de résistance et de tolérance au glyphosate ont aussi été observés sur la flore, notamment sur EvilPigweed et l’Ivraie Raide.

En effet, des agriculteurs du sud des Etats-Unis ont été victime de la croissance et du développement de l’EvilPigweed résistante prodigieuse qui les a conduits à abandonner certains de leurs champs. En effet, la plante EvilPigweed résistante au Roundup, c’est développée très rapidement sur tous les champs traités au Roundup car cette plante ne rencontrait aucune concurrence pour si développé (seul le maïs génétiquement modifié pour résister au Roundup cohabiter avec elle). L’apparition de cette espèce représenterait une véritable menace pour l’agriculture selon l’Université de Géorgie (http://gaweed.com).

Le processus d’apparition de cette plante résistante ne fait pas l’unanimité dans la littérature scientifique, mais deux théories ressortent. Soit la résistance de cette plante serait dû à une utilisation trop intensive du produit qui aurait entrainé une évolution spontanée de son patrimoine génétique afin d’assurer sa survie. Soit elle serait due à un transfert du gène de résistance au Roundup contenu dans la semence de maïs génétiquement modifié.

Photo8 : EvilPigweed

http://carbon-based-ghg.blogspot.com/2009/04/super-weed-threatens-cropland-in-the.html

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En France, c’est plutôt l’Ivraie Raide qui pose problème dans nos cultures notamment dans nos cultures viticoles. Car cette plante répertoriée comme « mauvaise herbe » continuer de pousser malgré l’usage du Roundup. L’augmentation de ce phénomène d’apparition de plante résistante a été constatée par les vignobles français et le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche dans une note de service (DGAL/SDQPV/N2007-8166 du 9 juillet 2007).

Photo 9 : Ivraie Raide

http://xxi.ac-reims.fr/clemenceau/ressource/Site_web_flore/Poacees.htm

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IV Polémiques

IV.1. Histoire de l’entreprise Monsanto

En 1901 à Saint-Louis dans le Missouri (Etats-Unis), John F. Queeny crée la société Monsanto, ainsi nommée en hommage à son épouse, Olga Monsanto. L’entreprise produit à l’origine de la saccharine (édulcorant) et en devient le premier fabricant américain. Les grandes dates qui ont caractérisé l’histoire de l’entreprise Monsanto sont (d’après le site officiel de la firme Monsanto http://www.monsanto.fr) :

1960 : La Division Agriculture de Monsanto est créée en se spécialisant dans les engrais et les produits de protection des plantes.

1974 : Monsanto lance le Roundup, premier herbicide à base de glyphosate, qui révolutionne l’agriculture moderne en apportant une solution inégalée à ce jour pour contrôler la plupart des mauvaises herbes.

1982 : Les scientifiques de Monsanto sont les premiers à opérer une modification génétique sur une cellule de plante.

1996 : Monsanto lance le soja biotechnologique Roundup Ready.

1997 : Acquisition de DEKALB GeneticsCorp, ASGROW Agronomics et la division Semences de CARGILL, Monsanto devient alors un acteur majeur du secteur des semences.

2002 : Monsanto Company se sépare de Pharmacia et devient une société dédiée exclusivement à l’agriculture.

2005 : Monsanto acquiert SEMINIS Inc., leader mondial des semences potagères.

2007 : Monsanto et Dow Agrosciences LLC deviennent partenaires pour développer un maïs combinant pour la première fois huit événements génétiques (huit « traits » introduits dans la plante). Monsanto et BASF concluent un partenariat de recherche en vue de mettre au point des cultures tolérantes à la sécheresse. Bayer choisit également Monsanto comme partenaire à long terme pour mettre en marché des plantes biotechnologiques innovantes.

2008 : Monsanto lance son Sustainable Yield Initiative (SYI) qui définit trois engagements de Monsanto d’ici 2030 pour une agriculture durable.

Donc Monsanto aujourd’hui est une compagnie à vocation exclusivement agricole qui souhaite investir dans la recherche pour une agriculture durable. Mais on peut voir, surtout dans l’histoire présentée sur le site web de « Combat Monsanto » que cette entreprise a fait des investissements dans bien d’autres secteurs. En effet pendant le XX siècle Monsanto commence à produire de l’aspirine et il se lance ainsi dans l’industrie chimique lourde avec la production et la vente de PCB, ensuite il élargit ses activités à la production de savon et de détergents industriels et des scientifiques travaillant pour Monsanto participent au « projet Manhattan » qui aboutira à la production de la première bombe atomique de l’Histoire. De plus Monsanto se lance dans la production d’engrais à base de dérivés pétrochimiques, dans la production du silicone ultra pure pour les industries de pointes et dans la production de l’herbicide Lasso (plus connu sous le surnom d’ « Agent Orange » qui a été vendu à l’armée américaine pour défolier la jungle vietnamienne de

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1961 à 1971). Monsanto rachète aussi l’entreprise pharmaceutique G.D Searle & Company en 1985 pour en faire sa filiale pharmaceutique.

Non seulement Monsanto peut difficilement se présenter comme un simple ambassadeur d’une l’agriculture durable, mais il y a aussi des événements dans son histoire qui brouillent cette l’image très positive que souhaite se donner Monsanto. On peut, par exemple, rappeler l’accident industriel à l’usine de Nitro en 1949, dans lequel de nombreux ouvriers ont été exposés à des produits chimiques contenant de la dioxine ou encore la pollution d’une zone à Palo Alto avec des déchets dangereux ou du Mystic River dans le Connecticut avec le déversement d’eaux usagées et polluées. Autre affaire très sensible avec l’Agent Orange puisqu’en 1987, Monsanto et les producteurs de ces herbicides versent 180 millions de dollars aux associations de vétérans de la guerre du Viêt-Nam pour « compenser » les conséquences désastreuses sur la santé humaine des combattants. Il existe encore plusieurs autres affaires impliquant directement la société Monsanto comme le retrait demandé par la Food and Drug Agency pour la fabrication de bouteilles en plastique de soda suspectées de poser un risque cancérigène ou encore l’affaire concernant le PCB contaminant le sang des populations sur le territoire d’Anniston et dernier exemple d’une liste qui n’est pas exhaustive, les expositions au benzène dans ses usines du Texas.

On peut donc facilement noter que l’image offerte par Monsanto est complètement différente de celle donnée par ceux qui la combattent. En réalité, sur le site de Monsanto on ne retrouve pas les événements négatifs et les condamnations judiciaires, ce qui souligne un manque de transparence de la part de l’entreprise. Et bien évidemment à l’inverse, les sites anti-Monsanto ne fournissent que des éléments à charge !Un doute persiste quant à la réelle volonté de Monsanto de vouloir se couper de ses démons passés qui lui ont valu plusieurs condamnations pour ses scandales. L’histoire ne joue pas en faveur de Monsanto en entrainant un manque de crédibilité évident auprès de l’opinion publique.

IV.2. Condamnations pour publicités mensongères

Dans l’histoire de Monsanto, deux condamnations de tribunaux concernent directement le Roundup pour des publicités reconnues comme mensongères. Les deux condamnations sont indépendantes et ne visent pas les mêmes campagnes de promotion : l’une a été réalisé aux Etats-Unis et l’autre en France sur des périodes différentes.

Photo 10 : Image extraite d'une publicité pour le Roundup diffusée en 2000

Source : INA Les spots publicitaires diffusés ainsi que les emballages de cet herbicide, mentionnent des termes comme "biodégradable", "laisse le sol propre" et "respect de l’environnement", laissant penser que le Roundup est un produit écologique et sans danger. Or après plusieurs études, il a été démontré que le glyphosate, substance active du Roundup, n’est absolument pas biodégradable et au contraire a des effets fortement nocifs sur la santé et l’environnement. C’est pourquoi en 2001 une plainte est déposée par les associations « Eau et Rivières de Bretagne » et « Consommation, Logement et Cadre

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de vie » pour publicité mensongère. Le 26 janvier 2007, le tribunal correctionnel de Lyon avait condamné Monsanto, suite à quoi Monsanto fait appel mais la cour d’appel confirme cette condamnation le 29 octobre 2008 et le dernier recours pour l’entreprise fut entériné le 15 octobre 2009 par la Cour de Cassation qui rendit définitive sa condamnation à 15 000 euros d'amende pour "publicité mensongère" sur le Round Up.

Il faut savoir qu’aux Etats-Unis une autre campagne publicitaire assez similaire avait déjà été condamnée par la justice en 1996.

http://www.lemonde.fr/planete/article/2009/10/15/monsanto-definitivement-condamne-pour-publicite-mensongere-a-propos-du-round-up_1254230_3244.html

http://www.civam276.org/Condamnation-de-Monsanto-pour

IV.3. Pressions politiques et focus sur la problématique en Amérique du Sud

Dans les années 90, le Roundup est devenu le désherbant le plus populaire et le plus vendu dans plusieurs pays de l’Amérique Latine. Quelques années plus tard, les paysans qui sont en contact direct avec ce produit commencent à trouver des effets nocifs pour la santé. La situation vécue en Amérique Latine montre l’utilisation irrationnelle d’un produit sans que la population ne soit informée des possibles dangers. Cette situation engendra de vives réactions de la part des personnes affectées et associé à un manque d’intérêt des gouvernements pour solutionner ce problème.

Pour donner un exemple, l’Argentine a augmenté le taux d’utilisation de glyphosate de 1 million de litres par an en 1991 à 200 millions en 2007. En ce moment les problèmes de santé des habitants deviennent évidents et plusieurs associations s’intéressent à ce sujet et au futur du Roundup dans l’agriculture Argentine.

(Source : http://www.ecoportal.net/Temas_Especiales/Salud/Toxicologia_del_Glifosato_Riesgos_para_la_salud_humanaet

http://www.ecoportal.net/content/view/full/81762)

IV.3.a Le cas du quartier « Ituzaingó » à Cordoba, en Argentine.

Le quartier Ituzaingó est placé au sud-est de la ville de Cordoba, en Argentine, dans la périphérie urbaine. Ce quartier est contigu à deux champs de propriété privée, de plantations de soja pour la plupart du temps. Les fumigations de ces plantations se font de façon terrestre mais aussi par avion, ce qui engendre une grande dispersion des herbicides vers la population de ce quartier. Des analyses ont montré que l’eau du quartier était polluée alors le gouvernement a fourni aux habitants des réservoirs d’eau, mais n’étant pas couverts, ces réservoirs sont également devenus contaminés à cause des fumigations aériennes. (Source :http://www.biodiversidadla.org/content/view/full/19340.)

En 2005 un ensemble de mères de famille du quartier ont publié un texte ou elles dénonçaient un taux très élevé de personnes malades dans cette zone depuis 2002 (femmes chauves, des cas de cancer très nombreux, des cas de leucémie …). Le gouvernement local a essayé d’enlever tout ce qui pourrait donner des preuves de contamination chimique et les habitants du quartier Ituzaingó n’ont pas reçu une réponse positive à leurs demandes malgré le soutien de plusieurs organisations à but non lucratif.

Les situations où l’intérêt économique prend le pas sur la santé de la population est malheureusement assez fréquent en Amérique Latine. Plusieurs associations se sont formés pour lutter contre ce type d’actes d’inhumanité, telles que RAP-AL (Réseau d’Actions en Insecticides et les Alternatives pour l’Amérique Latine), APROAL (Association de Professionnels dans l’Agroalimentaire et Produits de la Pêche), Ciceana, Greenpeace, etc.

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IV.3.b Décisions Institutionnelles

Pour le cas de Ituzaingó, en 2011, après plusieurs demandes de la part non seulement de la population affectée, mais aussi de nombreuses associations à but non lucratif, le conseil de la ville a enfin interdit l’utilisation du glyphosate et des produits agrochimiques dérivés dans la zone. Cette décision a été publiée le 27 Mai 2011, plus de 7 ans après le début des dénonciations de la part des habitants d’Ituzaingó (Source : Asociación Civil COEPSA http://ateaysublevada.over-blog.es/article-prohibicion-del-

uso-del-glifosato-en-ituzaingo-pcia-de-bs-as-argentina-80727301.html).

Un autre cas très intéressant est celui des fumigations de la part du gouvernement colombien sur la frontière entre la Colombie et l’Equateur. En 2006, l’administration d’Alvaro Uribe a décidé de reprendre les fumigations dans la région sud du pays pour arrêter la culture de feuille de coca. Trois semaines après cette reprise des fumigations, les paysans équatoriens qui habitent sur cette frontière ont porté plainte contre le gouvernement colombien. Ils arguaient la destruction indiscriminée de leurs plantations et des problèmes de santé à cause du glyphosate fumigée « en Colombie ». Apparemment, ce produit s’est répandu à cause du vent et il a touché le territoire Equatorien.

L’Equateur a dénoncé ce problème à l’OEA (Organisation de Etats Américains) en 2006 et en début 2007, les deux gouvernements ont finalement trouvé un accord bilatéral où la Colombie s’engage à prévenir au gouvernement Equatorien des fumigations à l’avance pour qu’ils puissent aller vérifier qu’il n’y a pas de glyphosate qui touche le territoire Equatorien (BBC Mundo, du 11 janvier 2007 http://news.bbc.co.uk/hi/spanish/latin_america/newsid_6251000/6251171.stm).

L’histoire des fumigations de glyphosate en Colombie est très particulière. C’est tout un ensemble de problèmes internes, pressions de gouvernements externes (notamment les Etats-Unis) et décisions Institutionnelles qui vont au détriment de la population concernée.

IV.3.c Le cas des fumigations anti-drogue en Colombie.

La fumigation en Colombie a été un des sujets les plus controversés par la volonté de l’état d’éradiquer les plantations de coca et de coquelicot. Les problèmes écologiques et les effets néfastes concernant la fumigation des plantations illicites en Amérique Latine ont été analysés par plusieurs auteurs, dont Rosa del Olmo, dans « Herbicidas y Derechos Humanos en América Latina » Editorial Nueva Sociedad, 1992.

Les sujets les plus polémiques du cas colombien sont d’un côté l’importance que le programme de fumigations a pris pour le gouvernement des Etats Unis, et d’un autre coté la toxicité des produits chimiques utilisés dans ce programme (dont le Roundup et plus récemment le Roundup plus, une version encore plus puissante que son prédécesseur).

L’intervention du gouvernement Américain dans le territoire colombien commence dans les années 70, lorsque ce pays était devenu le premier producteur et exportateur de marihuana aux États-Unis. A cette époque, il y aurait prétendument entre 25000 et 30000 hectares de culture de marihuana en Colombie (U.S. Congress, Select Committee on Narcotics Abuse and Control, Fact Finding Mission to Colombia and Puerto Rico, Washington D.C.: U.S. Government Printing Office, 1979 et Association Nationaled’InstitutionsFinancières, Marihuana: Legalización o represión, Bogotá: Bibliothèque ANIF, 1979).

Malgré les efforts du gouvernement de Jimmy Carter (1976 – 1980) pour lutter contre la production de drogues avec des produits chimiques, le président colombien a préféré lancer une opération militaire dans les zones de culture, pour anéantir le trafic. Le gouvernement Américain a signé plusieurs accords de lutte antidrogues avec le gouvernement colombien et celui-ci a tenu sa position de non utilisation de produits chimiques d’éradication jusqu’en 1984.

En 1984 la constante et montante pression des États-Unis pour utiliser des produits chimiques dans la lutte antidrogues et les problèmes internes du pays, ont fait que le gouvernement prenne la décision de fumiger à partir du 1º Juin de cette année-là. Les protestations contre cette mesure ne se

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sont pas fait attendre : pendant six mois les habitants de la zone affectée ont commencé un exode dû à la fumigation et ont fait un texte expliquant les effets nocifs du glyphosate. L’association d’agronomes de la région a constaté les protestations, surtout si l’application du glyphosate se faisait par voie aérienne.

Les résultats n’ont pas été satisfaisants : la production de marihuana s’est déplacée vers des zones plus productives où il y avait moins de territoire cultivé, mais la même quantité de marihuana produite. Avec le temps, la pression du gouvernement Américain montait et le gouvernement colombien perdait la marge de manœuvre dans la lutte antidrogue. Vers l’année 1986, le problème s’est accentué avec la montée en volume de la cocaïne. Malgré les efforts d’éradication, la consommation de drogues aux Etats-Unis n’avait pas diminuée et le principal fournisseur était la Colombie (environ 80% de la cocaïne et 25% de la marihuana). Avec ce problème incontrôlable et une situation interne très tendue dans le pays, les gouvernements suivants ont amplifié la fumigation de produits chimiques (notamment du glyphosate) dans plusieurs régions de Colombie. Les critiques de la population furent nombreuses, mais il n’existait pas une coalition capable de freiner les fumigations.

Photo 11 : Fumigation par avion en Colombie

http://sosbiodiversite.wordpress.com/2008/11/11/agro-industrie-industrie-de-guerre-les-liaisons-coupables/

En 1989, le gouvernement du président Barco avait pratiquement arrêté la fumigation de produits chimiques grâce aux résultats militaires positifs qui avaient réduit le trafic de drogues vers les Etats-Unis. Toutefois, après la découverte des plantations de coquelicot dans douze départements différents du pays pour la production de l’héroïne, en 1992 le gouvernement colombien a relancé la fumigation de glyphosate. En 1994, d’après quelques estimations faites par les Etats-Unis, il y avait 39700 hectares de feuille de coca en plantations ce qui poussa que le gouvernement à continuer d’autoriser la fumigation aérienne du glyphosate. Malheureusement plusieurs associations qui rejetaient la fumigation d’herbicides étaient complices du trafic de drogues ce qui entraina une perte de crédibilité évidente auprès du gouvernement. Ce dernier est d’ailleurs devenu sourd vers tout argument contre l’utilisation de produits chimiques d’éradication.

En 1994 le nouveau président colombien, Ernesto Samper, s’est proposé d’éliminer complètement les plantations illicites dans le pays. A partir de 1995 les fumigations de glyphosate et d’autres herbicides chimiques encore plus puissants que celui-ci ont augmenté d’une façon alarmante. Après 3 ans de gouvernance, plus de 100.000 hectares de cultures illicites avaient été fumigées, mais paradoxalement les plantations illicites ne faisaient qu’augmenter.

Bien que des organisations telles que Greenpeace, le « World wide Fund for Nature » et la firme « Dow Agrosciences » s’opposent à l’utilisation des herbicides, le gouvernement Américain a insisté et convaincu de leur caractère « inoffensif ».

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« L’insistance de cette tactique est improductive contre le trafic de drogues et est en train d’amener le pays vers une situation de catastrophe humaine, écologique et politique plutôt que vers une solution efficace du problème d’éradication des drogues» (TOKATLIAN, Juan Gabriel. « Estados unidos y los cultivos ilícitos en Colombia : los trágicos equívocos de una fumigación futil »).

IV.4. Controverses

IV.4.a Controverses scientifiques

Depuis la diffusion des cultures OGM, le glyphosate se classe au premier rang des ventes d’herbicides dans le monde. Rappelons que le glyphosate est le principe actif du Roundup, et qu’après plusieurs années de recherches et d’utilisation intenses sur les terres agricoles, certains résultats inquiètent et poussent plusieurs chercheurs à sonner l’alarme. D’ailleurs, des conférences scientifiques mais également des conférence-débats dans de nombreuses municipalités commencent à avoir lieu pour débattre de la problématique des pesticides et plus particulièrement du glyphosate :

Au Canada conférence de M. Jean Cantin, agronome au MAPAQ : « L’envers de la médaille de l’herbicide le plus vendu au monde: le glyphosate » http://www.gretess.uqam.ca/?p=185

Que deviennent les résidus des plants au sol traités au glyphosate ? (original title : « Fate of foliar herbicides glyphosate and sulcotrione reaching the soil with plant residues »). SETAC Europe 20th Annual Meeting, 23-27 May 2010, Seville. Les auteurs sont des ingénieurs de recherche à l’INRA (Mamy L., Doublet J., Barrusio E.)

Il existe de nombreuses controverses concernant le glyphosate parmi lesquelles nous présentons une liste non exhaustive de rapports et d’études s’y référent :

Un rapport américain publié en juin 2011 découvre que les autorités de réglementation savaient déjà en 1980 que le glyphosate a le pouvoir de créer des anomalies congénitales chez les animaux de laboratoire.

http://www.scribd.com/doc/57277946/RoundupandBirthDefectsv5 Source :« Roundup and birth defects: Is the public being kept in the dark? » (Roundup et anomalies congénitales : Le public est-il gardé dans l'ignorance ?) auteurs : Michael Antoniou, Richard C. Jennings&cie

Dans un rapport édité par Earth Open Source (EOS), une petite organisation non gouvernementale (ONG) britannique, une dizaine de chercheurs mettent en cause les autorités européennes pour leur manque d’empressement à réévaluer, à la lumière de nouvelles données, l’herbicide Roundup. Le texte rassemble les indices selon lesquels le pesticide de Monsanto est potentiellement tératogène – c’est-à-dire responsable de malformations fœtales. http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/environnement-securite-energie-thematique_191/le-roundup-de-monsanto-est-il-toxique-article_64529/

Article réalisé par l’Institute of Science in Society (ISIS) avec le titre explicite de “Le

glyphosate est toxique et le Roundup est encore pire! “en date du 07/03/05

http://organicagcentre.ca/Issues/iss_pesticides_glyphosate_f.asp. Les conclusions de l’article sont également très clairs: “Il existe maintenant une abondance de preuves qui justifient des mises en garde mondiales de santé publique et une révision de la réglementation concernant le glyphosate”.

Corine Lepage en tant que Présidente du CRIIGEN (Comité de Recherche et d’Informations Indépendantes sur le Génie Génétique) a demandé officiellement la suspension de l’autorisation de mise sur le marché du Roundup en mars 2009 par l’intermédiaire d’une lettre dans laquelle elle expose les nombreuses controverses et ses doutes quant à l’innocuité du glyphosate. Cette lettre adressée au ministre de l’agriculture et de la pêche de l’époque M. Barnier se trouve en annexe 3. Pour information, cette demande a été officiellement rejetée en juin 2009 par le ministère.

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Le glyphosate hautement cancérigène : telles sont les conclusions de 6 années de recherche du professeur Robert Bellé de la station biologique de Roscoff (source : http://www.brest-ouvert.net/breve3070.html?lang=fr). Ce chercheur, qui travaille au CNRS et à l'Université Pierre et Marie Curie, a indiqué que basé sur le “modèle de l’oursin” (développé par les Britanniques Tim Hunt et Paul Nurse et l’Américain Leyland Hartwell qui ont reçu un Prix Nobel en 2001 pour la compréhension des phases précoces de la cancérogénèse), il est en mesure de prouver que les effets du Roundup sur les mécanismes de la division cellulaire représente la première étape qui conduit au cancer. L’étude met en évidence le mécanique sur lequel intervient le Roundup à savoir l’ « apoptose » (mécanisme de « réparation » des erreurs de copie du patrimoine génétique lors de la mitose cellulaire : passage d’un chromatide à deux brins de chromatides). Ce mécanisme permet soit la réparation des erreurs, soit la mort de la cellule or le Roundup intervient justement sur ce mécanisme en endommageant ce processus d’autocontrôle.

En outre, nous souhaitons montrer qu’il existe une étrange corrélation entre les commanditaires des études et les résultats scientifiques, que cela soit pour le glyphosate ou pour d’autres substances actuellement controversées comme par exemple:

o Le bisphénol A : Au milieu des années 2000, 115 études sur les effets des faibles doses de BPA sur des animaux de laboratoire ont été publiées. Parmi elles, 104 avaient été financées par des fonds publics ou des universités, tandis que 11 avaient été commandées par des industriels. Résultat édifiant : 90% des études publiques détectent des effets biologiques significatifs. Quant aux travaux sponsorisés par l'industrie, aucun d'entre eux ne parvient à mettre en évidence le moindre effet. L’histoire montre désormais que les études publiques avaient raison de s’inquiéter! En France le BPA est interdit dans les biberons depuis 2010 (http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/10/28/bisphenol-a-un-

scandale-mondial_1595537_3244.html) Source : Environmental Health Perspectives, Frederick vom Saal (université du Missouri) 2005.

o L’aspartame :

Sur les 165 études conduit sur l’aspartame, 74 ont été financées par l’industrie (comme Searle ou Nutrasweet) et 91 ont été financées de manière indépendante. Le résultat est également impressionnant puisque 100 % des études financées par l’industrie concluent à l’innocuité de l'aspartame et à l’inverse 92 % des études financées individuellement ont identifié au moins un problème potentiel sur la santé Source : Survey of aspartame studies: correlation of outcome and funding sources, Ralph G. Walton, M.D. 1999

La raison de ces différences n’est pas forcément une corruption des scientifiques eux-mêmes mais plutôt des protocoles et des objectifs qui diffèrent. Dans le cas de l’industriel, les études cherchent avant tout à démontrer l’innocuité de son produit alors que dans le cas des études publiques, elles souhaitent analyser sans aucunes limites ces nouvelles substances et amener de nouvelles connaissances scientifiques.

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IV.4.b Controverses médiatiques

Les controverses médiatiques qui se sont développées autour du Roundup et de la société Monsanto ont pris plusieurs formes dont la plus visible est sur internet avec des blogs qui concentrent la plupart des informations véhiculant une méfiance autour de l’américain Monsanto : on peut citer «www.combat-monsanto.org » ou « www.stop-monsanto.qsdf.org ».

Participant récurrent aux polémiques, le Canard Enchaîné a publié un article le 24 juin 2009 intitulé « La patate chaude de Barnier » qui nous informe que l'autorisation de mise sur le marché français du Roundup pourrait être entachée d'illégalité faute d'avoir mentionné le POEA, un autre composant essentiel, augmentant la pénétration du pesticide dans les cellules de la plante. Cet article concernerait une note reçue par Michel Barnier, ministre de l'Agriculture, de la part de son prédécesseur, l'invitant à « mettre à la poubelle les autorisations de mise sur le marché du Roundup par son ministère ».

Dans le même sens, l'association écologiste MDRGF (Mouvement pour le droit et le respect des générations futures) demandent au ministère de l'Agriculture le "retrait immédiat" de deux herbicides Roundup (Monsanto), dénonçant une différence entre les produits testés et les formules déclarées dans le cadre des autorisations de mise sur le marché. Cette association a fait procéder à des analyses scientifiques par deux laboratoires distincts sur les herbicides Roundup Express et Roundup GT Plus. Or, les résultats de ces analyses montrent que ces deux Roundup ne correspondent pas aux formules déposées et homologuées par le ministère. Comme nous pouvons le lire sur un communiqué de presse (cf. Annexe 5), l’association demande d’abroger les autorisations de mise sur le marché de ces deux produits.

Nous pouvons également énumérer la décision de boycott du Roundup par les magasins Botanic. « Depuis le début de cette année, nos magasins français ne vendent plus de pesticides et d'engrais chimiques », explique Luc Blanchet, le président de Botanic. L'enseigne a ainsi sorti le Roundup de ses rayons. L’argument avancé est que les pesticides ont fait l'objet de publications scientifiques dénonçant les risques pour la santé induits par leurs utilisations. De plus, pour apprendre aux jardiniers à se passer de ces produits « miracle », Botanic a mis sur pied un dispositif de formation d'envergure. (Source : article Les Echos « Botanic boute le Roundup hors de ses

magasins »http://archives.lesechos.fr/archives/2008/LesEchos/20139-518-ECH.htm).

Le livre et reportage diffusé sur la chaine de télévision ARTE en 2008 appelé « Le monde selon Monsanto » a été le déclencheur de cette controverse médiatique à grande échelle. C’est le processus même d’homologation du Roundup qui est contesté dans cette enquête. En effet, un toxicologue de l’EPA notait qu’« une falsification routinière des données a été constatée … et qu’il difficile de ne pas douter de l’intégrité scientifique de l’étude, notamment quand les chercheurs expliquent qu’ils ont conduit un examen histologique des utérus prélevés sur des lapins mâles». Une deuxième affaire de fraude a entaché le Roundup puisque les propriétaires des laboratoires Craven ont été condamnés à cinq années de prison pour avoir falsifiés des études sur les évaluations de résidus de pesticides mais contre toute attente l’EPA a déclaré sains des niveaux de résidus de pesticides sans demander de nouvelles études non-falsifiées!

Ce fameux processus d’homologation repose sur le bon vouloir des entreprises chimiques qui fournissent les données des études qu’elles sont censées avoir réalisées pour prouver l’innocuité de leurs produits. Ensuite ces données sont examinées par des experts plus ou moins compétents, plus ou moins indépendants et plus ou moins courageux ! Autre point primordial est que le dossier toxicologique de chaque produit qui a pour but d’établir une dose journalière acceptable (DJA) laquelle a été extrapolé à partir de résultats obtenus sur des rats ou des lapins sans réelle méthode scientifique (puisqu’on utilise un facteur 100 de conversion pour n’importe quelles substances toxiques). De plus, malheureusement à aucun moment nous ne tenons compte de l’accumulation et de l’interaction possible entre les différentes substances actives que nous ingérons quotidiennement : pesticides, additifs alimentaires, conservateurs, colorants, COV ou encore

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médicaments. De la même manière, la réglementation fixe le taux de résidu de pesticides acceptable dans l’eau à 0.1microgramme/litre pour chaque pesticide (et toujours sans tenir compte de l’aspect cumulatif et effet cocktail de ces substances actives). Nous pouvons donc ingérer 30 fois 0.1 µg/litre quotidiennement alors que notre système d’épuration interne (foie et reins pour les nommer) possède vraisemblablement une limite à ne pas dépasser !

Voyons maintenant, comment se positionne Monsanto vis-à-vis de toutes ces controverses.

IV.5. Contre-attaque de Monsanto ?

Monsanto se tient très à l’écart du monde médiatique et ne préfère pas réagir aux différentes controverses, ne souhaitant pas rentrer dans les polémiques. C’est une stratégie que l’on peut appeler de profil bas.

Lors de la réalisation du reportage « Le monde selon Monsanto » la société n'a pas souhaité répondre aux demandes d'entrevue formulée par Marie-Monique Robin. A la suite de la diffusion du reportage, il n'y a pas eu de réponse officielle publiée, cependant Monsanto France a dans sa lettre d'informations n° 22 de mars 2008, indiquait que « le film et le livre dont il s'agit aujourd'hui ont été réalisés par des personnes opposées aux biotechnologies végétales et dont l'objectif est de discréditer ces technologies ainsi que les acteurs engagés dans leur développement »

L’unique réelle contre-attaque de Monsanto est présente sur son site internet avec une brochure de 24 pages intitulée « Coupons l’herbe sous le pied à quelques idées reçues » ayant pour objectif de rassurer le consommateur sur l’innocuité du Roundup. (Quelques extraits intéressants de ce document sont en annexe 6). Nous pouvons constater qu’il n’y a pas de grande communication sur ce document et qu’il n’est clairement pas mis en avant non plus sur le site internet : probablement, cela pourrait risquer de provoquer des doutes chez des consommateurs qui n’en avaient pas ! Nous pouvons penser que cette brochure est plutôt dédiée aux agriculteurs ou revendeurs de Roundup afin de rassurer ceux qui auraient des interrogations …

D’ailleurs l’AFSSA (Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments) ne s’interroge pas tellement puisqu’elle critique l’étude de l'université de Caen, publiée dans « Chemical Research in Toxicology » en décembre 2008 (et présenté précédemment en évoquant l’impact sur des lignées cellulaires humaines) notamment pour des raisons méthodologiques et d’interprétation de résultats. L'agence estime que « les auteurs [de l'étude] sur-interprètent leurs résultats en matière de conséquences sanitaires potentielles pour l’homme, notamment fondées sur une extrapolation in vitro-in vivo non étayée ». Extrait de l’avis de l'Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments relatif au glyphosate et

aux préparations phytopharmaceutiques à base de cette substance active en date du 26mars2009.

La conclusion est sans appel : « l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments estime que les effets cytotoxiques du glyphosate, de son métabolite AMPA, du tensioactif POAE et des préparations à base de glyphosate avancés dans cette publication n’apportent pas de nouveaux éléments pertinents qui soient de nature à remettre en cause les conclusions de l'évaluation européenne du glyphosate ni celles de l'évaluation nationale des préparations. »

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V Décisions institutionnelles

Partant du constat que le glyphosate se dégrade relativement rapidement mais que l’AMPA, qui est son principal produit de dégradation, peut persister plusieurs mois dans les sols, l’Institut français de l’environnement (IFEN), affirme que cette molécule est désormais le contaminant le plus fréquemment retrouvé dans les eaux de surface. De même plusieurs agences de l’eau régionale font le même constat. Face à cette situation, le Grenelle de l’Environnement a lancé un plan appelé Ecophyto2018 qui a pour ambition de diminuer de 50% la quantité de pesticides utilisées d’ici 2018.

Figure 2 : Plaquette d'information

Source : http://agriculture.gouv.fr/ecophyto

L’une des premières actions concrètes a été la signature d’un accord entre RTE (Réseau de Transport d’Electricité), filiale d’EDF et la Secrétaire d’Etat chargée de l’écologie de l’époque, Chantal Jouanno pour s’engager à réduire de moitié de l’usage des pesticides d’ici 2018 notamment pour le désherbage autour des transformateurs électriques. Chantal Jouanno souligne d’ailleurs que c’est « un des objectifs phares du grenelle de l’Environnement, dans la mesure où les pesticides sont aujourd’hui présents dans 90% des cours d’eau et 50% des eaux souterraines »

Une autre mesure importante a été la mise en place de lourdes amendes en cas de non-respect des règles d’usage du glyphosate, comme celui des désherbants en général. Par arrêté préfectoral, il est interdit d’appliquer tous pesticides (désherbants, insecticides, fongicides...) à moins de 5m des cours et plans d’eau, dans et à moins d’1m de la berge de tout cours d’eau, canal, fossé (même à sec) ou point d’eau. Aucun épandage ne doit être réalisé sur les caniveaux, avaloirs et bouches d’égout (Arrêté préfectoral du 1er février 2008). Le non-respect de cette interdiction peut coûter jusqu’à 75 000€ d’amende et 2 ans de prison.

Plusieurs collectivités (communes, départements…) se tournent vers des solutions alternatives non polluantes comme le désherbage mécanique ou thermique. C’est le choix qui a été fait dans certaines communes pour l’entretien des espaces verts. Par exemple, le Conseil Général de Seine et Marne a

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lancé une initiative en janvier 2010 visant à retirer différentes versions de l’herbicide Roundup selon le principe de précaution. Cet herbicide a en effet contaminé les réserves d’eau potable de cette région. (Source : http://www.criigen.org/SiteFr//index.php?option=com_content&task=blogcategory&id=71&Itemid=102). Une autre façon de préserver la qualité de l’eau et de l’environnement, c’est aussi d’accepter pour le citoyen que le désherbage ne soit pas fait systématiquement et d’accorder un peu d’existence aux « herbes folles ».

Autre décision institutionnelle mais cette fois-ci de l’autre côté de l’Atlantique, c’est au Québec que l’utilisation de tous les herbicides, (le glyphosate était le principal produit utilisé) en forêt publique est prohibée depuis 2001 suite à une évaluation environnementale mais il semble que la décision d’abolir son utilisation était plus politique que scientifique. (Source : J. Fortier, C. Messier et L. Coll publié dans la revue électronique en sciences de l’environnement VERTIGO en sept 2005 et qui est disponible en annexe 2).

Nous terminons cette partie avec des décisions de la MSA en France (Mutuelle Sociale Agricole) qui commence à reconnaître les premières maladies professionnelles pour les agriculteurs exposés aux pesticides (notamment maladie de parkinson et leucémie). (Sources : http://www.inforisque.info/actualite-du-

risque/index.php?post/2282/2010/05/10/Pesticides-les-agriculteurs-insuffisamment-proteges et

http://www.lafranceagricole.fr/actualite-agricole/phytos-sante-une-association-se-cree-pour-epauler-les-utilisateurs-professionnels-

40429.html ).

Par exemple, le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) a reconnu le lien entre la pathologie dont souffre un agriculteur de Charentes et une intoxication en 2004 par l'herbicide Lasso, fabriqué par le groupe Monsanto (source : http://www.ecologie-bio.com/modules/news/article.php?storyid=1 ).

Même si la MSA commence à déclarer au compte-goutte les maladies professionnelles puisqu’actuellement à peine une trentaine d’agriculteurs français ont été pris en charge, l’attitude a radicalement évolué en acceptant aujourd’hui d’être beaucoup plus proactif sur le sujet de la prévention avec notamment la mise en place d’un réseau de recensement et d’analyse d’accident en quasi-temps réel avec « Phyt’attitude » (N° vert 0 800 887 887).

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VI Modèle économique du Roundup

L’usage des pesticides et donc du glyphosate est lié à une agriculture exportatrice qu’a souhaité la France depuis quarante ans. Ce n’est pas la pérennité de l’agriculture qui est recherché mais une production des matières premières au plus bas coût. Nous avons donc des parcelles de plus en plus grandes, cultivées en monoculture, sans haies pour les protéger du vent et héberger de précieux auxiliaires. De plus, les variétés ne sont pas sélectionnées en fonction de leurs résistances à la maladie, mais de leur rendement. Dans ce contexte, les cultures sont fragilisées, et l’usage des pesticides vient pallier cette fragilité…

Il est intéressant de savoir que le chiffre d’affaire du Roundup est d’environ 4 100 millions de dollars et représentent environ 36% du chiffre d’affaire de la société Monsanto. Aujourd’hui, le glyphosate est donc bien LE produit phare pour Monsanto lui assurant une grosse partie de ses revenus et une rentabilité non négligeable puisque les coûts de production ont été largement amortis depuis le début de sa commercialisation il y a plus de trente-cinq ans (Source : http://monsanto.mediaroom.com/index.php?s=43&item=650). Pour l’avenir, le business Monsanto est tourné vers la complémentarité de ces produits pour aller jusqu’à un verrouillage du marché des agriculteurs clients puisqu’ils vendent la semence résistante au Roundup et le désherbant miracle lui-même ce qui permettra un traitement pendant la culture (et non uniquement lors de la préparation du sol). L’inconvénient de ce système est que l’agriculteur est quasiment pieds et mains liés avec Monsanto et donc en position de faiblesse notamment pour la négociation des prix des semences ou des produit phytosanitaires. Auparavant, le paysan était considéré comme un homme libre, maintenant, c’est plutôt un esclave de l’industrie agroalimentaire. La caricature de cette logique, c’est évidemment les OGM résistants aux herbicides, qui ligotent les agriculteurs en les obligeant à acheter les semences et le désherbant qui s’y rattachent (cf figure n°3).

Figure 3 : Caricature humoristique

Source : Courrier de l'Environnement de l'INRA, n° 59 - oct. 2010

Il y a vingt-cinq ans, une étude de l’académie nationale des sciences des Etats-Unis recensait les dangers des méthodes agricoles modernes en révélant la production agricole américaine comme « remarquablement uniformes et remarquablement vulnérables ». Cette étude révèle le problème de « l’érosion génétique » qui est encore malheureusement accentué avec l’utilisation massive des semences RR (Roundup Ready) appauvrissant les variétés utilisées et augmentant le risque d’une attaque de maladies ou de parasites à grande échelle. D’ailleurs Al-Gore écrit dans son livre « Urgence Planète Terre » : « Il est certain que les biotechnologies sont capables de créer des variétés nouvelles aux caractéristiques impressionnantes sur le plan de l’uniformité, du rendement et même de la résistance aux maladies et aux parasites. Mais nous fermons les yeux devant cette vérité : les espèces sorties de nos laboratoires deviennent, après un court délai, vulnérables à des ennemis naturels qui mutent rapidement, quelquefois après quelques saisons seulement.»

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VII Techniques alternatives & Conclusion

Nous avons évoqué précédemment dans notre rapport, l’exemple de la ville de Rennes comme étant pionnière dans sa volonté d’éradiquer les pesticides dont le glyphosate. Il faut savoir qu’il a fallu quatorze ans (1991-2005) pour que les produits chimiques soient abandonnés dans le traitement des espaces verts de la Ville. Depuis, le mouvement a gagné toutes les grandes villes de France : Lille, Lyon, Poitiers, Limoges, Nantes, Montpellier et Paris ont lancé ce type de programme. Pour mutualiser leurs connaissances, les municipalités viennent de créer une nouvelle plateforme d’échange : « Plante et cité » où le jardinier amateur pourra également piocher pas mal de conseils pratiques.

L’usage des pesticides, engrais et désherbants peuvent avoir un impact sur notre environnement et notre santé il est donc important d’essayer de pouvoir s’en passer. Il existe d’ailleurs des guides permettant de montrer qu’il est possible de jardiner en respectant l’environnement et en préservant sa santé avec des techniques alternatives sans pour autant revenir à l’âge de pierre ! Nous avons mis en annexe4 un extrait d’un guide appelé « le petit guide vert du bio-jardinage » qui fait la promotion de ces techniques alternatives pour le « jardinier du dimanche » (source : http://www.asef-

asso.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=837%3Ale-petit-guide-vert-du-bio-jardinage-&catid=130%3Ale-petit-guide-vert-

du-bio-jardinage&Itemid=321).

Schéma 2 : Niveaux d'utilisation des pesticides en fonction du type d'agriculture

Source : Etude R&D conduit par l’INRA

Quant à l’agriculture, heureusement, il existe toute une palette de dispositifs et de pratiques qui permettent une diminution plus ou moins grande de l’utilisation des pesticides en agriculture comme l’indique le schéma 2 ci-dessus. L’agriculture biologique est celle qui offre aujourd’hui les meilleures garanties en matière de protection contre les pesticides de synthèse. En effet, elle s’est dotée d’un cahier des charges strict dans lequel il est prévu l’interdiction des pesticides de synthèse. Ne sont autorisés que des substances d’origine minérale comme le soufre, le cuivre ou d’origine végétale. Il existe également « La production intégrée », qui est un concept touchant non seulement à la protection des plantes mais également à l’ensemble des pratiques culturales. La production intégrée

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ne possède pas à l’heure actuelle de cahier des charges officiel en France, à la différence de l’Agriculture Biologique. Cependant cette méthode, si elle ne supprime pas totalement le recours aux pesticides de synthèse, réduit fortement l'utilisation de ces derniers. La production intégrée emploie les pesticides en dernier recours, après avoir mis en œuvre toutes les autres techniques possibles. C’est ainsi qu’elle est très pratiquée en Suisse, sur les trois quarts de sa surface agricole (http://www.agriculture.ch/franz/facts/oekolog/ip.htm).L’Agriculture Durable (http://www.agriculture-durable.org/) est aussi une autre méthode très intéressante, telle que mise en œuvre par le Réseau Agriculture Durable car elle permet d’être nettement plus économes en intrants et pesticides. Quant à l’agriculture raisonnée, son application et ses bénéfices sont plutôt controversés puisqu’elle trouve son origine dans la volonté de « combattre » et de créer une confusion avec l’agriculture bio.

Pour finir, nous souhaitons évoquer une problématique grandissante et qui mériterait plus de débat public : exemple en France, uniquement pour les pesticides nous utilisons 550 matières actives différentes sous un total de 2700 formulations commerciales homologuées. A aucun moment nous ne tenons compte de l’accumulation et de l’interaction entre ces différentes substances actives. Et pourtant, il apparaît crucial de se poser la question des effets cocktails potentiels de ces milliers de substances qui ne sont pas étudiés car bien trop complexe à réaliser !

Il y a une réelle prise de conscience générale, aussi bien en ce qui concerne le nécessaire respect de l’environnement et de la biodiversité, que les préoccupations en matière de santé. S’il ne s’agit pas de culpabiliser les uns ou les autres, chacun doit cependant se sentir fortement concerné par le problème de la biodiversité car tous les maillons d’une chaîne sont indispensables !

Les nuisances dues aux pesticides seront-elles l’objet d’un prochain scandale ? Si l’on peut regretter que les informations arrivent au citoyen par le biais de la peur orchestrée, on se féliciterait toutefois de voir ce sujet porté sur la place publique : on ne gagne rien à la politique de l’autruche actuelle, ni aux suppositions partisanes de camps qui se renvoient des informations contradictoires.

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VIII Bibliographie complémentaire

Le monde selon Monsanto écrit par Marie-Monique Robin (2008) aux éditions « La Découverte »

Urgence planète terre écrit par Al Gore (2007) aux éditions « Alphée »

Pesticides, révélations sur un scandale français écrit par Fabrice NICOLINO et François VEILLERETTE(2007) aux éditions « Fayard »

Notre poison quotidien écrit par Marie-Monique Robin (2011) aux éditions « La Découverte »

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IX Tables des annexes

IX.1. Annexe 1 : Extrait de la fiche toxicologique n°273 de l’Institut National de Recherche et de Sécurité .............................................................................................................................................. 31

IX.2. Annexe 2 : Tableau des effets observés sur la faune suite à la pulvérisation de glyphosate 32

IX.3. Annexe 3 : Lettre de la présidente du CRIIGEN au ministre de l’Agriculture et de la Pêche 33

IX.4. Annexe 4 : Extrait du guide « le petit guide vert du bio-jardinage » édité par l’association ASEF (Association Santé Environnement France) ............................................................................. 35

IX.5. Annexe 5 : Communiqué de presse du MDRGF (Mouvement pour les Droits et Respect des Générations Futures) ......................................................................................................................... 37

IX.6. Annexe 6 : Extrait de la brochure de Monsanto « Coupons l’herbe sous le pied à quelques idées reçues » .................................................................................................................................... 38

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IX.1. Annexe 1 : Extrait de la fiche toxicologique n°273 de l’Institut National de Recherche et de Sécurité

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IX.2. Annexe 2 : Tableau des effets observés sur la faune suite à la pulvérisation de glyphosate

Effets indirects observés sur la faune suite à la pulvérisation de glyphosate en milieu forestier extrait de http://vertigo.revues.org.

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IX.3. Annexe 3 : Lettre de la présidente du CRIIGEN au ministre de l’Agriculture et de la Pêche

Lettre de la présidente du CRIIGEN (Corinne Lepage) au ministre de l’Agriculture et de la Pêche demandant la suspension et le réexamen de l’autorisation de mise sur le marché du glyphosate :

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IX.4. Annexe 4 : Extrait du guide « le petit guide vert du bio-jardinage » édité par l’association ASEF (Association Santé Environnement France)

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37

IX.5. Annexe 5 : Communiqué de presse du MDRGF (Mouvement pour les Droits et Respect des Générations Futures)

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IX.6. Annexe 6 : Extrait de la brochure de Monsanto « Coupons l’herbe sous le pied à quelques idées reçues »