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Études économiques de l’OCDE ZONE EURO Volume 2010/20 – décembre 2010 Supplément 2

Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

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Page 1: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

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Études économiques de l’OCDE

ZOnE EurO

Étud

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isbn 978-92-64-09002-6 10 2010 20 2 P-:HSTCQE=U^UUW[: Volume 2010/20 – décembre 2010

supplément 2

Volume 2010/20 – décembre 2010 supplément 2

Volum

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re 2010

issn 0304-3363 abOnnEmEnt 2010 (18 numÉrOs)

issn 1995-3658 abOnnEmEnt Par PaYs

Merci de citer cet ouvrage comme suit :

OCDE (2010), Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010, Éditions OCDE.http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-euz-2010-fr

Cet ouvrage est publié sur OECD iLibrary, la bibliothèque en ligne de l’OCDE, qui regroupe tous les livres, périodiques et bases de données statistiques de l’Organisation. Rendez-vous sur le site www.oecd-ilibrary.org et n’hésitez pas à nous contacter pour plus d’informations.

Études économiques de l’OCDE

ZOnE EurO thèmE sPÉCial : DÉsÉquilibrEs maCrOÉCOnOmiquEs

Italie, juin 2009Japon, septembre 2009 Luxembourg, mai 2010Mexique, juillet 2009Norvège, mars 2010Nouvelle-Zélande, avril 2009Pays-Bas, juin 2010Pologne, avril 2010Portugal, septembre 2010République fédérale de Yougoslavie, janvier 2003République slovaque, novembre 2010 République tchèque, avril 2010 Roumanie, octobre 2002Royaume-Uni, juin 2009 Slovénie, juillet 2009Suède, décembre 2008Suisse, décembre 2009Turquie, septembre 2010 Ukraine, septembre 2007Union européenne, septembre 2009Zone euro, décembre 2010

Dernières parutions

Afrique du Sud, juillet 2010Allemagne, mars 2010 Australie, novembre 2010Autriche, juillet 2009Belgique, juillet 2009 Brésil, juillet 2009 Canada, septembre 2010 Chili, janvier 2010Chine, février 2010Corée, juin 2010Danemark, novembre 2009Espagne, décembre 2010 Estonie, avril 2009États-Unis, septembre 2010 Fédération de Russie, juillet 2009Finlande, avril 2010France, avril 2009Grèce, juillet 2009Hongrie, février 2010 Inde, octobre 2007Indonésie, novembre 2010Irlande, novembre 2009Islande, septembre 2009 Israël, janvier 2010

Page 2: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010
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Études économiques de l’OCDE :

Zone euro 2010

Page 4: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ISBN 978-92-64-09002-6 (imprimé)ISBN 978-92-64-09003-3 (PDF)

Série : Études économiques de l’OCDEISSN 0304-3363 (imprimé)ISSN 1684-3428 (en ligne)

Études économiques de l’OCDE : Zone euroISSN 1995-3755 (imprimé)ISSN 1999-0812 (en ligne)

Crédits photo : Couverture © Comstock/Comstock Images/Getty Images.

Les corrigenda des publications de l’OCDE sont disponibles sur : www.oecd.org/editions/corrigenda.

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Merci de citer cet ouvrage comme suit :OCDE (2010), Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010, Éditions OCDE.http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-euz-2010-fr

Page 5: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

TABLE DES MATIÈRES

Table des matières

Résumé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

Évaluation et recommandations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Chapitre 1. Sortir de la crise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

La crise financière a déclenché une grave récession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

Les mesures publiques de soutien ont contribué à stabiliser l’économie

et à favoriser la reprise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

Une reprise modérée est en cours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

Une approche cohérente de la gouvernance économique s’impose aux niveaux

de la zone euro, de l’UE et des États membres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

Chapitre 2. Résorber et éviter les déséquilibres non soutenables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

Des déséquilibres extérieurs amples et persistants se sont accumulés durant

la phase d’expansion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

Les déséquilibres extérieurs sont imputables à des déséquilibres économiques

et financiers internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

Des mesures destinées à rétablir la stabilité à court et à long terme

sont nécessaires au niveau européen comme au niveau national . . . . . . . . . . . . . . 78

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92

Annexe 2.A1. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

Chapitre 3. Rebâtir les finances publiques et la discipline budgétaire . . . . . . . . . . . . . . . 97

Un assainissement budgétaire s’impose . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98

Une politique budgétaire saine contribuerait à une stabilisation économique

plus efficace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

Renforcer la discipline budgétaire. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 114

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133

Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134

Chapitre 4. Minimiser les risques de déséquilibre au sein du système bancaire européen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137

Le cycle du crédit bancaire n’était pas viable et a contribué aux déséquilibres . . . 138

Moderniser la réglementation et la surveillance pour réduire les risques . . . . . . . . 151

Bibliographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 179

Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 3

Page 6: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

TABLE DES MATIÈRES

Encadrés

1.1. Mesures prises face à la crise budgétaire en Grèce et en Europe. . . . . . . . . . . . . 34

1.2. Recommandations générales sur la sortie de crise . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

2.1. La stabilisation économique dans une union monétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

2.2. Écarts d’inflation aux États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

2.3. L’ajustement économique par le biais des migrations

vers les économies en surchauffe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

2.4. Synthèse des recommandations relatives aux déséquilibres macroéconomiques 90

3.1. L’expérience des crises budgétaires infranationales

dans les pays de l’OCDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

3.2. Le Bureau d’analyse de la politique économique des Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . . 130

3.3. Résumé des recommandations de politique budgétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

4.1. Comment mesure-t-on les créances bancaires internationales ? . . . . . . . . . . . . 144

4.2. Appartenance à la zone euro et avoirs transnationaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

4.3. Comparaison de la notion de levier financier aux États-Unis

et dans la zone euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

4.4. L’impact macroéconomique des nouvelles exigences de fonds propres de Bâle . . 154

4.5. La politique macroprudentielle en Espagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160

4.6. L’organisation du contrôle bancaire avant la crise et les réformes . . . . . . . . . . . 165

4.7. Vie mondiale et mort locale des grands établissements financiers :

le cas de Fortis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172

4.8. Groupe de stabilité transfrontalière des pays nordiques et baltes . . . . . . . . . . . 175

4.9. Synthèse des recommandations sur la réglementation et la surveillance

bancaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

Tableaux

1.1. Quelques indicateurs économiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

2.1. Échanges de biens et de services, par pays partenaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75

2.A1.1. Actifs financiers nets par secteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95

3.1. Objectifs budgétaires à moyen terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

4.1. Fonds propres des banques : exigences actuelles et futures . . . . . . . . . . . . . . . . 152

4.2. Ratios de levier pro forma selon les normes GAAP et IFRS. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 153

Graphiques

1.1. La zone euro a connu une grave récession . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

1.2. Écarts de rémunération sur le marché monétaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24

1.3. Taux des contrats d’échange sur risque de défaillance bancaire . . . . . . . . . . . . 25

1.4. Évolution du cycle du crédit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27

1.5. Prêts bancaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28

1.6. Actifs financiers nets et épargne des ménages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

1.7. Solde par secteur pour la zone euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

1.8. Le marché du travail est en train de se stabiliser. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

1.9. Les pressions inflationnistes restent faibles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

1.10. Taux d’intérêt des nouveaux prêts aux résidents de la zone euro . . . . . . . . . . . 33

1.11. Contribution à la croissance du PIB réel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

1.12. Croissance dans les pays déficitaires et les pays excédentaires . . . . . . . . . . . . . 36

1.13. Dépréciations potentielles des titres et prêts du secteur bancaire de la zone euro 38

1.14. Principaux engagements des banques en dette souveraine. . . . . . . . . . . . . . . . . 38

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 20104

Page 7: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

TABLE DES MATIÈRES

1.15. Masse monétaire au sens large et PIB nominal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

2.1. Soldes extérieurs des pays de la zone euro. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

2.2. Balance des opérations courantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

2.3. Position extérieure nette . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

2.4. Déterminants de la balance courante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57

2.5. Croissance et déséquilibres dans la zone euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

2.6. Soldes extérieurs, écarts de taux d’intérêt et compétitivité . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

2.7. Écarts d’inflation entre les zones urbaines des États-Unis et les États de l’UE . 64

2.8. Flux migratoires nets et demande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66

2.9. Croissance de l’emploi en Espagne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

2.10. Solde net de l’épargne et de l’investissement et balance courante. . . . . . . . . . . 69

2.11. La variabilité des prix des logements et le régime fiscal de l’immobilier. . . . . . 70

2.12. Croissance du crédit et déséquilibres dans la zone euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

2.13. Écarts entre la variation des prêts et celle des dépôts. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72

2.14. Les pays déficitaires connaissent l’ajustement général le plus important . . . . 76

2.15. Contribution à la croissance de la demande intérieure totale . . . . . . . . . . . . . . . 79

3.1. Les soldes budgétaires des administrations publiques se sont dégradés. . . . . . 99

3.2. Les primes de risque de crédit ont augmenté. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100

3.3. Dette brute des administrations publiques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

3.4. Le ratio dette/PIB a augmenté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102

3.5. Scénarios d’évolution de la dette des administrations publiques . . . . . . . . . . . . 107

3.6. Assainissements budgétaires prévus comparés à ceux observés par le passé . 110

3.7. Contributions aux variations du ratio dette/PIB de la zone euro . . . . . . . . . . . . . 111

3.8. Indicateur composite de rigueur des règles budgétaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117

3.9. Typologie des organismes budgétaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 128

3.10. Évolutions budgétaires et conseils budgétaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130

3.11. Impact des conseils budgétaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 131

4.1. Plusieurs pays ont connu une explosion du crédit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 139

4.2. Normes de prêts bancaires et croissance du crédit dans la zone euro . . . . . . . . 139

4.3. Provisions pour pertes sur prêts et croissance économique dans la zone euro . . . 140

4.4. Levier financier des principales banques de l’Union européenne. . . . . . . . . . . . 141

4.5. Ratio de levier financier et ratio de fonds propres de base. . . . . . . . . . . . . . . . . . 141

4.6. Les flux bancaires ont fortement contribué à l’accumulation des déséquilibres . . 143

4.7. Statistiques bancaires territoriales ou consolidées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144

4.8. Créances bilatérales consolidées des banques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145

4.9. Les banques nationales jouent un grand rôle dans les flux transnationaux . . . 146

4.10. Prestation transnationale de services financiers dans la zone euro . . . . . . . . . . 147

4.11. Actifs des succursales et filiales des établissements de crédit de la zone euro . . . 149

4.12. Provisions pour pertes sur prêts en Espagne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161

4.13. Système européen de surveillance financière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163

4.14. Personnel de contrôle bancaire des autorités nationales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 5

Page 8: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

TABLE DES MATIÈRES

Cette Étude est publiée sous la responsabilité du Comité d’examen des situationséconomiques et des problèmes de développement (EDR), qui est chargé de l’examen de lasituation des pays membres.

La situation économique et les politiques de la zone euro ont été évaluées par le Comitéle 28 octobre 2010. Le projet de rapport a ensuite été révisé à la lumière de la discussion etfinalement approuvé par le Comité le 16 novembre 2010.

Le projet de rapport du Secrétariat a été établi pour le Comité par Sebastian Barnes,Artur Radziwill, sous la direction de Piritta Sorsa. Isabelle Duong a apporté une aide à larecherche.

L’Étude précédente de la zone euro a été publiée en janvier 2009.

StatLinks2

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Page 9: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ns

363919

STATISTIQUES DE BASE DE LA ZONE EURO (2009)

Zone euro1 États-Unis Japon

PAYS ET POPULATIONSuperficie (milliers de km2) 2 526 9 167 395Population (millions) 325.6 307.0 127.5Nombre d’habitants par km2 129 33 323Croissance de la population (1999-2009, moyenne annuelle, en %) 0.5 1.0 0.1Population active (millions) 157.3 154.2 66.2Taux de chômage (%) 9.3 9.3 5.1

ACTIVITÉPIB (en milliards de USD, prix et taux de change courants) 12 409.5 14 043.9 5 068.9PIB par habitant (en USD, prix et PPA courants) 34 167 45 745 32 465En pourcentage du PIB :

Formation brute de capital fixe 19.6 15.7 20.7Exportations de biens et services 19.72 11.2 12.5Importations de biens et services 18.92 13.9 12.2

FINANCES PUBLIQUES (en pourcentage du PIB)Administrations publiques :

Recettes 44.0 30.7 31.9Dépenses 50.7 42.2 41.4Solde –6.2 –11.3 –7.1

Dette publique brute (fin de l’année) 86.3 84.4 192.7

TAUX DE CHANGE (monnaie nationale par euro)Moyenne 2009 1.3948 130.3Octobre 2010 1.3898 113.7

ZONE EURO3 – COMMERCE EXTÉRIEUR DE MARCHANDISES(principaux partenaires, en % du total des flux)

Exportations ImportatioDanemark, Suède, Royaume-Uni 18.7 14.0Autres pays membres de l’Union européenne 14.8 12.7Autres pays européens 10.8 10.5OCDE Amérique 14.4 12.3OCDE Asie/Pacifique 5.0 6.4Économies dynamiques d’Asie (non membres)4 et Chine 10.0 18.1

1. Pays de la zone euro membres de l’OCDE (sauf indication contraire).2. Tous les pays de la zone euro.3. Pays de la zone euro membres de l’OCDE hors Slovénie.4. Hong-Kong, Chine; Indonésie; Malaisie; Philippines; Singapour; Taipei chinois et Thaïlande.

PART DANS LE PIB DE LA ZONE EUROAux prix courants

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932

0

5

10

15

20

25

30

0

5

10

15

20

25

30

DEU

26.8

FRA

21.3

ITA

17.0

ESP

11.8

NLD

6.4

BEL

3.8

AUT

3.1

GRC

2.7

FIN

1.9

PRT

1.9

IRL

1.8

SVK

0.7

LUX

0.4

SVN

0.4

Page 10: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

RÉSUMÉ

Résumé

La zone euro a subi une profonde récession, suivie d’une crise de la dette souveraine dans certains

pays de la zone, dans le sillage de la crise financière mondiale. C’est la première fois qu’était

véritablement mise à l’épreuve la robustesse de la zone euro en période de récession. Un rapide

assouplissement de la politique monétaire, des interventions massives pour secourir le système

financier et une politique de soutien budgétaire ont contribué à stabiliser le système financier et à

atténuer la contraction de la demande privée.

Des déséquilibres excessifs d’ordre économique, financier et budgétaire, se sont accumulés dans

certains pays de la zone euro durant la période d’expansion, entravant le bon fonctionnement de

l’union monétaire, et se sont traduits par des fragilités croissantes. Il en est résulté des crises

économiques et budgétaires particulièrement graves dans certains pays, avec des retombées dans

l’ensemble de la zone euro principalement par le biais des marchés de capitaux.

Sortir de la crise. Une modeste reprise est maintenant en cours, mais des risques subsistent.

Les conditions financières se sont améliorées. L’activité s’est accélérée, mais la reprise sera

probablement faible. L’assainissement budgétaire est indispensable, mais il risque de peser sur la

croissance dans le court terme. Dès qu’apparaîtront des risques à la hausse pour la stabilité des prix

à moyen terme, il faudra mettre fin aux mesures de relance monétaire. Il convient de poursuivre le

démantèlement des mesures non conventionnelles parallèlement aux améliorations du mécanisme de

transmission de la politique monétaire. Il faut que le système bancaire retrouve sa bonne santé et que

les faiblesses qui perdurent soient éliminées. La série de tests de résistance réalisés au niveau de l’UE

en 2010 a représenté une initiative importante, qui a accru la transparence et renforcé la crédibilité

du secteur financier de la zone euro. Des réformes structurelles faciliteraient l’ajustement

économique en cours et ouvriraient des perspectives de croissance plus favorables.

Remédier aux déséquilibres au sein de la zone euro. Les amples déficits ou excédents de

la balance courante qui ont été observés dans les pays de la zone euro avant la crise étaient liés à des

déséquilibres sous-jacents d’ordre économique, financier et budgétaire. Les économies nationales

étaient soumises à tout un ensemble de pressions divergentes, accentuées par les fluctuations des

taux d’intérêt réels qui ont induit des comportements divergents de l’épargne et de l’investissement

dans les économies de la zone euro. Dans certains pays, le bas niveau des taux d’intérêt réels a

déclenché une forte expansion du crédit, de la consommation et du logement, tout en entamant la

compétitivité. Le système bancaire a transféré des financements des pays à forte épargne vers ceux

en déficit, dans le contexte des carences du dispositif de surveillance. La discipline de marché,

conjuguée aux mesures budgétaires et financières, n’a pu empêcher que s’accumulent dans l’union

monétaire d’importants déséquilibres que ne justifiaient pas les fondamentaux. Le rééquilibrage des

économies confrontées à des déséquilibres très marqués a déjà commencé, mais de nouvelles

réformes structurelles s’imposent pour faciliter le processus. Durant la crise, certains pays

déficitaires ont subi de très fortes pressions économiques, financières et budgétaires. L’ajustement

sera difficile et prendra du temps dans quelques pays déficitaires, en particulier lorsque les prix et les

salaires devront s’ajuster pour faciliter le redéploiement de ressources au détriment des secteurs

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 20108

Page 11: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

RÉSUMÉ

essentiellement axés sur le marché intérieur qui ont connu une croissance trop rapide durant les

années de forte expansion.

Éviter les déséquilibres non viables. Une nouvelle approche globale de la gestion

économique et financière s’impose pour stabiliser plus efficacement les économies nationales. Elle

devrait s’appuyer sur un large éventail de politiques permettant de s’attaquer aux sources des

déséquilibres macroéconomiques, notamment sur une politique budgétaire saine et sur la mise en

place d’instruments macroprudentiels. La stabilisation serait facilitée par des mesures structurelles

contribuant à l’ajustement économique, notamment en faisant en sorte que les mécanismes de

fixation des salaires fonctionnent bien et que la politique du logement n’amplifie pas les cycles dans

le secteur de l’immobilier. Il faudrait renforcer la surveillance, par les institutions de l’UE, des

déséquilibres économiques, budgétaires et financiers qui se produisent au niveau national.

Restaurer les finances publiques. La situation budgétaire s’est fortement dégradée, créant

des déficits très prononcés et gonflant un endettement déjà élevé dans certains pays de la zone. Les

écarts de taux se sont creusés pour la dette de certains pays et la Grèce a eu besoin d’une aide

extérieure. Il faut des plans pluriannuels détaillés et crédibles pour stabiliser les finances publiques.

Malgré tout, même en ramenant les déficits budgétaires à un niveau viable, un grand nombre de

pays resteraient lourdement endettés par rapport au passé. Un assainissement budgétaire prolongé

et des réformes seront nécessaires pour ramener la dette à un niveau plus prudent, augmenter la

capacité de résistance aux chocs futurs et faire face au coût futur du vieillissement démographique.

Améliorer la discipline budgétaire. Un grand nombre de pays de la zone euro n’ont pas su

profiter des conditions économiques favorables pour assainir les finances publiques. La discipline de

marché et les cadres budgétaires devraient être renforcés. Il faudrait mettre en place un cadre

permanent de gestion des crises, assorti d’une forte conditionnalité. Une plus ferme gouvernance

devrait être recherchée au niveau de l’UE grâce à un Pacte de stabilité et de croissance (PSC) renforcé.

Dans ce contexte, une profonde réforme législative de la gouvernance économique et budgétaire est

déjà engagée. Les normes budgétaires minimales fixées dans le PSC devraient être mises en œuvre

plus strictement : un ensemble de sanctions, notamment financières, devraient être applicables

quasi-automatiquement dans le cadre du PSC à un stade précoce de la procédure de surveillance, et

il faudrait déterminer une définition opérationnelle adéquate du désendettement nécessaire. Il

faudrait conforter les cadres budgétaires au niveau national. Des règles à moyen terme sont

nécessaires, par exemple des trajectoires ou des plafonds pluriannuels de dépenses. Des conseils

budgétaires nationaux indépendants, conçus de manière appropriée, chargés de formuler des

prévisions et d’évaluer les mesures budgétaires, amélioreraient la performance des finances

publiques et favoriseraient la transparence; toutefois, leur structure devrait refléter les spécificités

nationales.

Renforcer le système bancaire. Les faiblesses de la réglementation et de la surveillance

financières ont créé un environnement propice à une prise de risque excessive et à des cycles du crédit

intenables dans la zone euro comme dans les autres économies de l’OCDE. Les risques ont été sous-

estimés, les volants de fonds propres n’ont pas suffi dans certains cas et la gestion de la liquidité n’a

pas été assez rigoureuse. Des risques de grande ampleur ont été comptabilisés hors bilan. Les flux

transnationaux émanant des grandes institutions d’importance systémique ont en partie contribué à

aggraver les déséquilibres et les risques dans certains endroits. Les autorités de l’UE ont déjà pris des

mesures substantielles pour remédier à ces problèmes. Il faudrait mettre en place des règles

microprudentielles plus strictes, conformes à l’Accord Bâle III sur les fonds propres, comme le

prévoient les autorités européennes, dans le contexte d’une approche mondiale, ainsi qu’aux

initiatives de réforme en cours à l’UE. Un renforcement de la réglementation macroprudentielle serait

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 9

Page 12: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

RÉSUMÉ

également nécessaire, notamment sous la forme d’un volant contracyclique de fonds propres qui

serait fixé pour chaque pays conformément aux dispositions de Bâle III. Il faudrait une plus étroite

régulation des activités des banques systémiques. Une surveillance macroprudentielle efficace

devrait être mise en place via le Conseil européen du risque systémique, et également au niveau

national, pour remédier aux déséquilibres locaux d’ordre financier et économique.

Gérer les risques transnationaux. L’intégration bancaire dans la zone euro, étroite, mais

incomplète, de même que l’absence de système unique de réglementation et de contrôle des banques

au sein de l’UE, ont créé certains risques et compliqué le règlement des difficultés transfrontalières.

Le nouveau cadre de surveillance est une réalisation majeure. Des autorités européennes de

surveillance vont être mises en place, à côté d’un système renforcé de collèges de surveillance, afin de

bâtir un cadre de surveillance plus cohérent s’inscrivant dans l’architecture décentralisée. Après trois

ans au maximum, il est prévu de réexaminer le dispositif pour déterminer si de nouvelles mesures

s’imposent en vue d’une intégration plus poussée et si une autorité de surveillance unique serait plus

indiquée à cet effet. Il faudrait des accords de partage des charges pour toutes les institutions

transnationales d’importance systémique. Il faudrait aussi des dispositifs crédibles, efficaces et

harmonisés pour la résolution des défaillances dans tous les pays de l’UE. Sous réserve d’une

réglementation adéquate, l’élimination des obstacles à l’intégration financière contribuerait à créer

un système bancaire plus stable.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201010

Page 13: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010

© OCDE 2010

Évaluation et recommandations

La crise a véritablement mis à l’épreuve pour la première fois la résilience de la zone euro

Les pays de la zone euro ont connu leur plus grave récession depuis la fin de la guerre,

comme les autres économies de l’OCDE, suivie d’une crise de la dette souveraine dans

certains pays de la zone euro. Pour la première fois, la résilience de la zone euro depuis

l’union monétaire a été véritablement mise à l’épreuve. La fin, au milieu de 2007, d’une

longue période d’expansion rapide du crédit et de forte hausse des prix des actifs à l’échelle

mondiale a déclenché des turbulences sur les marchés interbancaires, lesquelles se sont

intensifiées et transformées en véritable crise financière internationale à partir de

septembre 2008, après la faillite de Lehman Brothers. Les échanges mondiaux ont

fortement chuté et la consommation et l’investissement privés se sont rapidement

affaiblis, cette évolution étant aggravée par une confiance en berne et un secteur financier

en état de faiblesse. Le chômage a nettement augmenté, bien qu’une sensible diminution

du nombre d’heures travaillées ait pallié en partie le faible niveau de la demande de main-

d’œuvre. Tandis que la hausse générale des prix à la consommation se montrait instable,

les tensions inflationnistes sous-jacentes ont reflué sous l’effet d’un ample volant de

ressources économiques inutilisées.

Dans son ensemble, la zone euro a évité certains des pires excès du cycle mondial du crédit

et s’est révélée assez résiliente durant la période de ralentissement de l’activité. La Banque

centrale européenne (BCE) a réagi rapidement à la tourmente financière en fournissant des

liquidités et son bilan s’est nettement gonflé. Les interventions temporaires des pouvoirs

publics, sous la forme de garanties et d’autres mesures, ont aussi contribué à empêcher

une contraction plus spectaculaire du crédit bancaire, au prix d’un transfert du fardeau des

créanciers privés aux contribuables. Les taux directeurs ont été rapidement réduits. De

plus, les gouvernements ont soutenu la demande par des mesures discrétionnaires de

relance budgétaire et ont laissé le solde budgétaire se dégrader énormément à mesure que

les recettes fléchissaient, la politique budgétaire ayant toutefois subi dans certains pays la

double contrainte de finances publiques en mauvais état et d’écarts de taux de plus en plus

marqués sur les titres d’emprunt.

Toutefois, dans certains pays de la zone euro, les déséquilibres économiques, financiers et

budgétaires s’étaient considérablement aggravés durant la période d’expansion. Les

pouvoirs publics et les marchés n’ont pas pu stabiliser les divers chocs qui ont frappé

différentes économies. Les déséquilibres se sont traduits par une mauvaise allocation des

ressources et ont accentué la vulnérabilité de certaines économies en déficit à un

ralentissement futur de l’activité. Dans certains cas, la faiblesse du cadre des politiques et

les problèmes structurels ont amplifié ces pressions.

11

Page 14: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

La reprise est maintenant en cours, mais elle sera faible

Les conditions financières s’améliorent et l’activité s’est accélérée. Une reprise progressive

et soutenue de l’activité sous-jacente est désormais en cours. Les massives mesures de

relance y ont contribué. La consommation et l’investissement ont commencé de

s’accroître. Malgré tout, la reprise sera probablement lente, le secteur privé reconstituant

actuellement ses bilans après la crise. Tandis que dans certains pays, l’expansion de

l’activité économique a été plus rapide qu’on ne l’avait prévu plus tôt dans l’année, dans

d’autres pays, l’ajustement aux déséquilibres macroéconomiques et financiers très

prononcés pèsera sur la performance d’ensemble de la zone euro. L’assainissement

budgétaire est primordial et raffermira la confiance, mais il pourrait freiner la reprise à

court terme. Dans le même temps, la crise a vraisemblablement réduit le niveau de la

production potentielle en entamant le stock de capital, en affaiblissant le marché du travail

et en alourdissant les primes de risque. Cela limitera davantage les possibilités de reprise.

Malgré tout, il devrait y avoir pendant un certain temps encore des capacités

excédentaires, ce qui atténuera les tensions inflationnistes. Dès qu’apparaîtront des risques à

la hausse pour la stabilité des prix à moyen terme, il faudrait mettre fin aux mesures de relance

monétaire. Cela contribuerait à éviter les distorsions dues au bas niveau des taux d’intérêt par

rapport aux moyennes de long terme. Il faudrait poursuivre le démantèlement des mesures

exceptionnelles parallèlement aux améliorations du mécanisme de transmission de la politique

monétaire. La reprise demeure entourée de lourdes incertitudes et il est crucial que le système

bancaire retrouve sa bonne santé pour soutenir la croissance. Des réformes structurelles sur les

marchés de produits et sur le marché du travail faciliteraient l’ajustement économique et

contribueront grandement à restaurer une vigoureuse croissance ces prochaines années.

Les interventions massives des pouvoirs publics ont soutenu le système bancaire

Les comptes publics se sont fortement dégradés pour sauver le système financier et

soutenir la demande. Les garanties des dépôts ont été relevées afin de maintenir et de

renforcer la confiance des déposants dans le système financier. Les garanties publiques sur

les autres engagements des banques ont été largement pratiquées, chaque pays adoptant

son propre dispositif conforme aux orientations coordonnées de l’UE fondées sur les règles

communes concernant les aides d’État. Quelques pays ont dû recapitaliser des banques

pour éviter l’implosion de leur système financier. Durant les premiers jours de crise, les

plans de sauvetage financier ont dû être appliqués très promptement. Les réactions

initiales étaient donc fragmentaires et ont abouti à renflouer les créanciers. Peu de pays ont

élaboré une démarche globale pour faire face aux faiblesses du système bancaire. Il faudrait

continuer de mettre fin au soutien du système financier lorsque les conditions mondiales et locales le

permettent, mais de nouvelles opérations de recapitalisation des banques pourraient être

nécessaires. Tous les pays devraient avoir un ensemble complet d’instruments crédibles, efficaces

et harmonisés pour le règlement des défaillances bancaires. Il y a eu à l’échelle de l’UE deux

séries de tests de résistance des banques. Le test de résistance de 2010 a été

particulièrement important pour répondre aux incertitudes concernant certains systèmes

financiers et il a contribué à une plus grande stabilité financière. Il faudrait que les tests de

résistance soient réalisés régulièrement et davantage harmonisés.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201012

Page 15: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

La politique budgétaire a amorti la récession, mais les finances publiques sont maintenant en mauvaise posture

La forte augmentation des emprunts publics a permis de stabiliser l’activité, en grande

partie sous l’effet des stabilisateurs automatiques et des mesures discrétionnaires de

relance budgétaire. Dans le sillage de la crise, un grand nombre de pays de la zone euro se

sont retrouvés avec un déficit de grande ampleur et une dette publique de plus en plus

lourde. Les recettes se sont contractées à cause du ralentissement économique et, dans

certains pays, la chute des rentrées fiscales est liée au cycle du crédit et du logement, alors

même que les dépenses publiques ont progressé. Dans quelques pays, le soutien du

système financier a eu lui aussi un coût substantiel. Parallèlement, les écarts de taux sur

les emprunts publics se sont fortement creusés pour certains pays. L’assainissement

budgétaire est la priorité immédiate pour stabiliser les finances publiques et devrait débuter en 2011

au plus tard dans tous les pays. L’assainissement est déjà en cours dans certains cas, mais il

faut que tous les pays élaborent des plans à moyen terme crédibles et détaillés. La politique

budgétaire gagnerait en crédibilité si les institutions budgétaires étaient renforcées.

Toutefois, même si l’on réduit les déficits pour stabiliser les ratios dette/PIB, les pays

resteront fortement endettés par rapport au passé, ce qui limitera encore la marge de

manœuvre pour faire face aux dépenses futures liées au vieillissement démographique et

pour parer à un éventuel ralentissement de l’activité. Une période prolongée d’assainissement

est donc nécessaire dans la plupart des pays pour ramener le ratio dette/PIB à des niveaux prudents.

La politique monétaire a eu un effet de stimulation

La baisse rapide des taux directeurs, qui a débuté à l’automne 2008, a assoupli les

conditions de financement et soutenu l’activité dans le contexte d’un affaiblissement des

tensions inflationnistes. Les taux directeurs sont plus bas que durant la période antérieure

de ralentissement de l’activité, bien que les taux d’intérêt à long terme se situent à un

niveau similaire. Des mesures non conventionnelles ont été adoptées pour parer à une

perturbation potentielle du fonctionnement normal du mécanisme de transmission de la

politique monétaire. L’allongement de l’échéance moyenne des opérations de

refinancement et la mise en place d’une adjudication de liquidités à taux fixe et d’un

montant illimité a contribué à atténuer les tensions sur les marchés. En conséquence, les

taux du marché pour les opérations au jour le jour sont tombés bien au-dessous du taux

directeur. De plus, la BCE a mis en place une facilité de swap en dollars US et a acquis des

obligations sécurisées à des fins de politique monétaire. Il en est résulté un quasi

doublement du bilan de l’Eurosystème depuis la crise, du fait surtout d’opérations de

rachat à long terme qui à l’heure actuelle sont progressivement annulées. En mai 2010 est

entré en vigueur le Programme pour les marchés de titres, qui consiste à acquérir des titres

d’emprunt publics et privés afin d’étayer le mécanisme de transmission de la politique

monétaire grâce à la stabilisation de certains marchés de titres.

Ces mesures exceptionnelles ont contribué à stabiliser l’économie durant la crise, mais il

faudrait en tirer des leçons. La crise a souligné l’effet déstabilisateur que les cycles des

actifs et du crédit peuvent avoir sur l’activité et l’inflation. S’il est vrai que la politique

macroprudentielle doit être l’instrument primordial pour gérer les cycles financiers, la

récente crise indique qu’il faudrait continuer d’accorder de l’attention aux facteurs susceptibles de

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 13

Page 16: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

présenter des risques à moyen et long terme, notamment les prix des actifs et le gonflement des

bilans. Via son pilier monétaire, la BCE se montre déjà très attentive à l’évolution de la

monnaie et du crédit. À cet égard, il est indispensable de continuer à renforcer l’analyse monétaire

en vue de l’intégrer plus efficacement et plus systématiquement à la formulation de la politique

monétaire.

La gouvernance de la zone euro pourrait être renforcée

Le système de gouvernance de la zone euro est venu compliquer la coordination de la

réponse à la crise, l’échelon national conservant un grand nombre de pouvoirs et les

échelons de l’UE et de la zone euro comportant de multiples acteurs. Le cadre

institutionnel a été renforcé depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne en

décembre 2009, avec pour la première fois la reconnaissance de l’Eurogroupe et de son rôle

dans l’amélioration de la coordination des mesures économiques. Le traité de Lisbonne

habilite les membres du Conseil de la zone euro à prendre des décisions formelles relatives

à certaines questions touchant la zone euro. Un cadre efficace de gestion des crises

faciliterait les actions de la BCE visant à remplir sa mission de stabilité des prix dans les

situations de crise.

Les déséquilibres très marqués dans certains pays de la zone euro se sont révélés problématiques

Certains pays de la zone euro ont accusé des déséquilibres extérieurs importants et

persistants durant la période d’expansion. Ces discordances entre l’épargne et

l’investissement paraissent trop prononcées pour qu’on puisse les expliquer par les seuls

fondamentaux économiques, et elles tiennent en partie à des déséquilibres sous-jacents

d’ordre économique, financier et parfois budgétaire au niveau national. Les pays ont été

exposés à tout un ensemble de pressions sous-jacentes de nature divergente, notamment

la croissance de « rattrapage » et des anticipations d’expansion trop optimistes dans les

économies à bas revenu, la libéralisation financière, les réformes structurelles nationales

et les diverses pressions démographiques. La divergence des taux d’intérêt réels a joué un

rôle déstabilisateur qui a contribué aux déséquilibres. Le bas niveau des taux d’intérêt réels

a déclenché dans certaines économies des cycles du crédit et des prix des logements. Dans

un contexte de faibles gains de productivité, certains pays déficitaires ont perdu de leur

compétitivité sous l’effet des pressions que les secteurs les plus porteurs ont exercées sur

les salaires et les prix. La vigueur de l’épargne et la faiblesse de l’investissement dans

certains pays excédentaires, se conjuguant aux déficiences de la réglementation

financière, ont entraîné des transferts de fonds vers les économies en surchauffe. La

stabilisation macroéconomique et financière au niveau national s’est révélée difficile vu

les pressions divergentes à l’œuvre dans les économies locales, la présence de problèmes

structurels et l’absence de discipline de marché. Dans certains cas, les déséquilibres

budgétaires s’y sont ajoutés. Les déséquilibres d’une ampleur paraissant excessive se sont

traduits par une mauvaise allocation des ressources, ont masqué les faiblesses

économiques sous-jacentes et ont accentué la vulnérabilité. Lorsque la crise financière a

éclaté, les pays qui accusaient un lourd déficit de balance courante ont été les plus exposés

et se sont trouvés confrontés à la fois à des bilans des ménages et des entreprises qu’il

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201014

Page 17: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

fallait reconstituer, à des systèmes financiers endommagés et à des finances publiques en

mauvais état.

Les mesures structurelles peuvent contribuer à réduire les déséquilibres

Rééquilibrer les économies très déséquilibrées, aussi bien déficitaires qu’excédentaires,

prendra du temps. Dans les pays déficitaires, l’ajustement sera difficile car les prix et les

salaires devront se modifier pour restaurer la compétitivité internationale et pour

redéployer des ressources à partir des secteurs axés sur l’économie intérieure, qui ont

connu une croissance trop rapide durant la période de forte expansion, au profit d’autres

secteurs. Cela pourrait nécessiter une très grande rigueur dans le domaine des salaires et

des prix. Il faudrait lever les obstacles institutionnels aux ajustements de prix nécessaires. Une

baisse des salaires et des prix ne saurait être exclue et, dans certains cas, pourrait devenir

inévitable. La politique structurelle a un rôle à jouer dans le rééquilibrage des économies. Dans les

pays déficitaires, les réformes peuvent améliorer la productivité et contribuer au

réalignement des coûts. Dans les pays excédentaires, le changement structurel pourrait

renforcer la demande intérieure et stimuler la productivité, notamment dans les secteurs

des biens non échangeables.

Une approche globale est nécessaire pour éviter les déséquilibres préjudiciables

Il faut désormais une nouvelle approche de la gestion économique et financière pour

stabiliser les économies nationales, parallèlement aux réformes structurelles qui

s’imposent pour que les économies soient plus robustes et plus équilibrées. Le cadre

d’action n’a pas suffi pour empêcher l’apparition de déséquilibres économiques, financiers

et budgétaires au niveau national, et il n’était pas préparé à faire face à la crise ultérieure.

Dans le contexte d’une politique monétaire commune et d’une monnaie unique, une plus

nette différenciation des autres paramètres est nécessaire pour stabiliser les économies

nationales, et il faut éviter à l’échelon national des politiques non viables qui peuvent avoir

des retombées extérieures. La nouvelle approche globale s’appuierait sur un large éventail

d’actions permettant de s’attaquer aux sources des déséquilibres macroéconomiques,

notamment des politiques budgétaires saines, la mise en place d’outils macroprudentiels

et l’application de réformes structurelles. Il faudrait que les mécanismes de détermination des

salaires prennent davantage en compte l’impératif de compétitivité. Sur le marché du logement, les

mesures à effets de distorsion qui accentuent le cycle devraient être éliminées. Il faudrait aussi

s’attaquer aux obstacles structurels qui entravent l’ajustement économique, les gains de

productivité et la croissance durable.

La surveillance et la maîtrise des déséquilibres devraient être renforcées

La surveillance au niveau de l’Eurogroupe et de l’UE, parallèlement au renforcement des

dispositifs nationaux, aiderait à détecter et éviter les déséquilibres préjudiciables. La mise

à niveau de ce dispositif de surveillance est déjà engagée et devrait être renforcée par les

propositions législatives actuelles. À l’échelle européenne, l’attention devrait se porter sur

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 15

Page 18: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

les retombées d’un pays à l’autre, essentiellement via les circuits financiers. La surveillance

devrait s’appuyer sur un large éventail d’indicateurs, à quoi s’ajouterait une évaluation qualitative.

Elle devra être étroitement coordonnée avec le contrôle financier et budgétaire. Il faudrait

disposer de statistiques comparables et cohérentes plus nombreuses sur l’évolution observée dans

les différents pays, en particulier pour le système bancaire. La surveillance au niveau de l’UE a

certes alerté sur les déséquilibres avant la crise, mais elle n’a pas débouché sur des

mesures correctrices. Il faut mettre en place une procédure graduée, avec une surveillance qui

s’intensifie à mesure que se manifestent des risques pour la stabilité de l’euro tandis que le Conseil

publie des recommandations et des mises en garde contre les déséquilibres qui présentent des risques

substantiels. La mise en évidence des déséquilibres préjudiciables ne va pas de soi, mais cela

ne devrait pas dissuader de mettre en place une procédure qui aiderait à détecter, éviter et corriger

les déséquilibres préjudiciables qui entravent ou menacent d’entraver le bon fonctionnement de la

zone euro.

Il faut améliorer la discipline budgétaire

La faiblesse des situations budgétaires sous-jacentes et le gonflement de la dette dans un

grand nombre de pays ont résulté de l’incapacité d’assainir les situations budgétaires en

accord avec le PSC dans les périodes économiques favorables. L’orientation budgétaire était

en particulier trop laxiste dans la plupart des pays et, dans certains cas, les recettes

exceptionnelles liées au cycle du crédit ont été dépensées au lieu d’être utilisées pour

améliorer la situation budgétaire ou anticiper le coût futur des retraites. Les politiques ont

été insuffisantes pour parvenir à des situations saines et ont contribué dans certains cas à

des déséquilibres excessifs. La faiblesse des finances publiques a limité les marges de

manœuvre budgétaires durant la crise. Un renforcement des institutions budgétaires au

niveau national et au niveau de l’ensemble de l’UE permettrait d’améliorer les résultats

budgétaires à l’avenir et de crédibiliser davantage les efforts d’assainissement actuels.

Pour renforcer la discipline de marché, il faut un mécanisme crédible de gestion des crises

budgétaires. La réduction de l’aléa moral et la place cruciale accordée à la conditionnalité

sont des éléments essentiels de tout cadre futur de gestion des crises. Pour les pays

solvables confrontés à des pressions sur la liquidité, le dispositif devrait comprendre un

mécanisme permanent de soutien de la liquidité, soumis à de strictes conditions. Si la clause de

conditionnalité n’est pas respectée, le soutien au financement devrait être supprimé et le cadre

devrait être conçu pour faire face à cette éventualité. Le risque souverain devrait être dûment pris en

compte dans les réglementations financières. Le programme de l’UE pour la Grèce devrait être

appliqué comme prévu de façon à atteindre le haut niveau de conditionnalité qui a été fixé.

Les normes budgétaires de base du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) de l’UE

devraient être appliquées plus strictement afin de protéger les économies de la zone euro

contre les situations budgétaires dégradées. Les prérogatives d’audit au niveau de l’Union

européenne ont été renforcées. Il faudrait améliorer la surveillance des situations budgétaires,

surtout au niveau de l’endettement et des engagements hors bilan, des soldes structurels et de la

gestion de la dette. Il faudrait que le Conseil applique systématiquement la « partie

correctrice » du PSC et que, dès qu’un déficit excessif est constaté, des fonds viennent alimenter

un compte non rémunéré. Il faudrait adopter une définition opérationnelle adéquate de la réduction

de l’endettement pour les pays dont la dette est supérieure à 60 % du PIB, afin de pouvoir

appliquer correctement le critère d’endettement. La « partie préventive » du PSC doit être

renforcée. Il faudrait la modifier de façon qu’elle comporte un régime de sanctions

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201016

Page 19: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

appliquées au début du processus de surveillance, s’inspirant des propositions législatives

actuelles, qui serait plus crédible que celui actuellement prévu par le PSC. Les sanctions

devraient aller de la surveillance interventionniste et des mises en garde du Conseil aux sanctions

financières. Les amendes devraient être assorties de l’obligation de versement sur un compte non

rémunéré jusqu’à ce que les mesures correctrices aient été exécutées. Les sanctions devraient être

appliquées quasi automatiquement grâce à l’adoption de la règle de la majorité inversée car, avec

cette règle, il serait plus probable que les analyses et les recommandations de la

Commission soient approuvées. Ces principes sont intégrés dans un ensemble de

propositions législatives actuellement en cours d’examen. Il faudrait envisager d’autres

mesures pour que la prise de risques budgétaires non conformes aux obligations budgétaires de l’UE

soit plus coûteuse, notamment en instituant des conditions moins favorables pour le traitement dans

les règlements financiers. La création du « semestre européen » pourra contribuer à la

coordination de la politique budgétaire avec les autres politiques et assurer une intégration

plus étroite avec les procédures budgétaires nationales. Il faudrait que la présentation des

programmes de stabilité soit davantage harmonisée et repose sur des prévisions indépendantes.

Il faudrait renforcer les cadres budgétaires nationaux

C’est en définitive chaque gouvernement national qui assume la responsabilité des

finances publiques du pays. S’il est vrai qu’un PSC plus efficace est indispensable pour

éviter les effets de retombées de l’instabilité budgétaire, un renforcement des cadres

nationaux à l’intérieur du PSC est crucial pour obtenir des finances publiques plus viables.

Tous les pays de la zone euro devraient adopter et respecter pour leurs finances publiques de larges

cadres à moyen terme comportant des trajectoires pluriannuelles ou des plafonds de dépenses

courantes et de dépenses en capital. Il faudrait encourager les dispositions allant au-delà des normes

minimales qui figurent dans la proposition de directive de l’UE. Il est important qu’à l’échelon

national, une volonté politique appuie les règles et qu’il existe une appropriation nationale

des cadres budgétaires. Dans de nombreux pays, il serait indiqué de mettre en place des conseils

budgétaires nationaux indépendants bien conçus, qui établiraient des prévisions officielles pour les

finances publiques et qui analyseraient et évalueraient la politique budgétaire. Si l’on veut

améliorer la gestion des finances publiques, il est crucial que les responsables politiques

soient garants de l’indépendance et de la compétence de ces institutions.

La stabilité financière exige une plus stricte réglementation bancaire

L’amélioration de la réglementation bancaire, le renforcement de la surveillance et un

meilleur alignement des incitations au sein du secteur bancaire seraient des facteurs de

stabilité financière dans le contexte plus large d’une réglementation mieux conçue du

secteur financier. Le gonflement du crédit durant la période d’expansion s’explique par un

relâchement des critères de prêt des banques, un faible niveau de provisions et

l’endettement croissant des grands groupes bancaires d’importance systémique. La forte

progression des activités bancaires transnationales sous l’effet de l’intégration financière

plus étroite qui a suivi la création de l’euro s’est traduite par des transferts de fonds des

systèmes bancaires à liquidité excessive aux économies en surchauffe dont le secteur du

logement était en forte expansion. Durant la crise financière, la brusque contraction des

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 17

Page 20: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

prêts transnationaux a aggravé les difficultés des pays emprunteurs. Des règles

microprudentielles plus strictes devraient être appliquées conformément à l’accord Bâle III sur les

fonds propres, comme le prévoient les autorités européennes, dans le contexte d’une approche

mondiale, et compte tenu des initiatives de réforme en cours à l’UE. Il faudrait pour cela, entre

autres mesures, augmenter le volume et améliorer la qualité des volants de fonds propres,

et fixer un taux global d’endettement servant de filet de sécurité. De plus, il faudrait renforcer

les réglementations en matière de liquidité et le système de pondération des risques, ainsi que la

gouvernance et la gestion des risques. Les limites à l’intégration des marchés de capitaux de

l’UE, surtout pour les opérations de détail, ont abouti à une forte concentration des risques.

Il faudrait que les autorités de surveillance adoptent une approche plus systématique et plus

harmonisée de la concentration géographique des risques lorsqu’elles évaluent les fonds propres

réglementaires. Les grands complexes financiers ont été l’un des principaux canaux des

activités transnationales et, par sous-estimation du risque pays et du risque crédit, ils sont

devenus durant la crise l’une des sources majeures de transmission des risques et du

risque systémique. Il faudrait aussi envisager une supervision plus stricte, des exigences de fonds

propres et des prélèvements supplémentaires pour les établissements d’importance systémique.

La politique macroprudentielle était en général peu utilisée avant la crise, même lorsque

des risques systémiques s’accumulaient. Certaines réglementations financières ont eu un

impact procyclique. Aussi bien la surveillance macroprudentielle que microprudentielle devraient

prendre en compte le risque sur l’ensemble du cycle. Les autorités de surveillance microprudentielle

devraient veiller à ce que les provisions des banques aient un caractère prospectif. Il faudrait mettre

en place un régime de fonds propres contracycliques reposant sur une règle numérique simple

appliquée à la croissance nationale du crédit, conformément aux documents actuels sur les

consultations à l’UE et aux propositions qui ont été formulées au niveau international. La création

du Conseil européen du risque systémique est une initiative judicieuse. Il est important que

sa prise de décision soit efficace et qu’il joue pleinement son rôle dans l’action à mener pour assurer

la stabilité macroéconomique. Les tests de résistance à l’échelle de l’ensemble de l’UE devraient être

poursuivis régulièrement et il faudrait les harmoniser davantage. Les politiques mises en œuvre

au niveau national pour remédier aux déséquilibres devant être différenciées, il faudrait que

tous les pays de la zone euro adoptent un dispositif macroprudentiel national adéquat,

parallèlement aux structures de l’UE.

Les carences de la surveillance transnationale constituent encore un risque

Le système de contrôle financier et de gestion des crises reste organisé nationalement, ce

qui reflète les compétences budgétaires des États, alors que les activités bancaires ont un

caractère de plus en plus transnational. À cause de ce problème, qui n’a pas été primordial

durant la crise financière, il s’est révélé plus difficile, lors de la reprise, d’appliquer des

normes cohérentes et harmonisées et de contrôler les banques. La création des autorités

européennes de surveillance (AES) et l’extension du système de collèges de contrôle à

toutes les grandes banques à activités transnationales constituent une avancée majeure. Il

faudrait appliquer de façon stricte les règles budgétaires de sauvegarde limitant les prérogatives des

AES. Une base de données commune sur les activités de surveillance devrait être créée pour les

grands établissements transnationaux, avec une définition harmonisée des principales variables. Au

bout de trois ans au maximum, il est prévu de réexaminer le nouveau dispositif de

surveillance pour déterminer si de nouvelles mesures s’imposent en vue d’une intégration

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201018

Page 21: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

ÉVALUATION ET RECOMMANDATIONS

plus poussée et si une autorité de surveillance unique serait plus indiquée à cet effet. La

tâche est d’autant plus lourde dans le domaine de la surveillance qu’à côté de certains

marchés de gros très intégrés dans l’UE, d’autres secteurs sont segmentés, ce qui se traduit

par des volumes massifs de flux bancaires transnationaux. Sous réserve d’une réglementation

adéquate, il faudrait éliminer les obstacles résiduels à l’intégration financière afin de favoriser une

structure bancaire plus stable.

La gestion de crise a été compliquée par les différences de structure juridique d’un pays à

l’autre et par la nécessité de répartir les coûts. Des accords de partage des charges devraient être

en place au moins pour toutes les institutions systémiques et il faudrait limiter le cantonnement

juridique des actifs lorsqu’il complique la résolution des défaillances. Il y aurait lieu d’harmoniser les

modalités pratiques des dispositifs de garantie des dépôts et de modifier le financement de ces

dispositifs de façon qu’il se fasse ex ante. On pourrait mettre en place des fonds de résolution des

défaillances bancaires financés par des prélèvements calculés en fonction du risque.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 19

Page 22: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010
Page 23: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010

© OCDE 2010

Chapitre 1

Sortir de la crise

La zone euro a connu une crise financière et une grave récession en même temps queles autres économies de l’OCDE, suivies d’une crise de la dette souveraine danscertains pays de la zone. La fin de la vive expansion mondiale des prix des actifs etdu crédit s’est soldée par des carences dans le secteur financier, qui ont commencé àapparaître en 2007. Cette dégradation s’est accentuée en septembre 2008 après lafaillite de Lehman Brothers, ce qui a entraîné une crise financière généralisée et unecontraction spectaculaire de la demande privée et du commerce mondial. Depuissantes mesures publiques de relance ont contribué à stabiliser l’économie à lafaveur d’un assouplissement rapide des conditions monétaires, d’une politiquebudgétaire de soutien et d’une aide publique massive au système financier.

Les conditions financières se sont améliorées et une reprise progressive est en cours,mais elle reste précaire. Son rythme sera vraisemblablement contrarié parl’assainissement indispensable des finances publiques et la nécessité de rééquilibrerla demande privée. La relance par la politique monétaire devrait êtreprogressivement supprimée dès qu’apparaîtront des pressions à la haussemenaçant la stabilité des prix. Il faudrait retirer les mesures de soutien au systèmefinancier dès que la situation le permettra. L’assainissement budgétaire devraitcommencer au plus tard en 2011; une période d’ajustement prolongée s’impose. Laproduction potentielle sera vraisemblablement plus faible après la crise, d’oùl’importance de réformes structurelles sur les marchés du travail et des produitspour stimuler la performance économique. Il convient de tirer les enseignements dela crise afin de rendre l’économie plus robuste et d’atténuer les risques liés àl’instabilité économique, financière et budgétaire.

21

Page 24: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

La crise économique et financière a été le premier grand test de la robustesse de la

zone euro, tout en permettant de se faire une idée de l’efficacité avec laquelle l’union

monétaire a fonctionné depuis sa création. L’euro s’est bien comporté à maints égards.

Dans le contexte du cycle du crédit international et des déséquilibres mondiaux, la

zone euro dans son ensemble a évité quelques-uns des pires excès de la crise financière et

s’est montrée relativement résiliente face à la récession (OCDE, 2010a). Une reprise

modérée semble s’être engagée dans l’économie de la zone euro (tableau 1.1). On observe

des signes encourageants de redressement de la demande interne. Les conditions

financières se sont raffermies. Cependant, d’importants déséquilibres dans certains pays

ont nui au bon fonctionnement de l’union monétaire et aggravé les risques, engendrant

des problèmes à l’échelle de la zone durant la crise et un ajustement douloureux dans

certains pays. La reconstruction des bilans privés, du système bancaire et des finances

publiques pèsera désormais sur la reprise, tout en suscitant des risques financiers

permanents et des fragilités dans le système.

Ce chapitre décrit les évolutions économiques et financières dans la zone euro ainsi

que les réactions des pouvoirs publics. Il en ressort des enseignements pour la gestion de

la crise financière et la conduite de la politique monétaire dans la zone euro, et l’on

souligne l’importance de réformes structurelles globales pour l’amélioration de la

performance économique. Toutefois, nombre des défis économiques qu’affronte

aujourd’hui la zone euro ont leur source dans des déséquilibres à l’échelon national qu’il

Tableau 1.1. Quelques indicateurs économiquesVariations annuelles

2007 2008 2009Prévisions1

2010 2011 2012

Produit intérieur brut réel (PIB) 2.8 0.3 –4.0 1.7 1.7 2.0

Consommation privée 1.7 0.3 –1.1 0.5 1.0 1.7

Consommation publique 2.2 2.3 2.4 1.0 –0.0 –0.1

Formation brute de capital fixe 4.6 –1.0 –11.3 –1.1 1.6 2.8

Stocks2 0.0 0.0 –0.8 0.5 0.1 0.0

Exportations nettes2 0.4 0.0 –0.7 0.9 0.8 0.5

Inflation globale (IPC harmonisé) 2.1 3.3 0.3 1.5 1.3 1.2

Inflation tendancielle3 1.9 1.8 1.4 0.9 1.2 1.2

Taux d’intérêt à court terme 4.3 4.6 1.2 0.8 1.1 1.8

Emploi 1.8 1.0 –1.8 –0.5 0.3 0.6

Taux de chômage (% de la population active) 7.4 7.4 9.3 9.9 9.6 9.2

Balance courante (% du PIB) 0.3 –0.8 –0.4 –0.2 0.4 1.0

Solde des administrations publiques (% du PIB) –0.6 –2.0 –6.2 –6.3 –4.6 –3.5

Dette publique (déf. de Maastricht, % du PIB) 66 70 79 84 87 89

1. Ces prévisions sont tirées des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88. 2. Contribution à la croissance du PIB.3. Hors énergie, produits alimentaires, boissons et tabac.Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201022

Page 25: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

faut corriger par des politiques budgétaires, une réglementation macroprudentielle et des

politiques structurelles nationales dans le cadre commun de la zone euro. Ces divers

points sont traités dans les chapitres suivants :

● Le chapitre 2 analyse les mécanismes qui ont engendré des déséquilibres insoutenables

et les politiques propres à réduire la probabilité de voir apparaître à l’avenir de sérieux

problèmes liés aux déséquilibres.

● Le chapitre 3 évoque le besoin immédiat d’assainir les finances publiques et les réformes

institutionnelles requises pour que la politique budgétaire s’inscrive à terme sur une

trajectoire plus viable et plus contracyclique.

● Le chapitre 4 recense les mesures susceptibles de renforcer la réglementation

microprudentielle et macroprudentielle.

En substance, tous les chapitres traitent différents aspects du même problème : il faut

renforcer les politiques budgétaires, financières et structurelles au niveau de la zone euro

pour améliorer son fonctionnement général, tandis qu’une différenciation nationale plus

marquée s’impose au sein de l’union monétaire pour instaurer plus de stabilité à l’échelon

national. La corrélation étroite des pressions dans les domaines financier, budgétaire et

structurel exige un ensemble cohérent de mesures transversales visant à consolider ces

trois piliers.

La crise financière a déclenché une grave récession La zone euro a traversé une grave récession. Par sa soudaineté et son ampleur, la

contraction de la production a été sans précédent depuis ces dernières décennies

(graphique 1.1). La production a baissé pendant cinq trimestres consécutifs à partir du

deuxième trimestre de 2008. Le recul cumulé entre le pic et le creux du cycle a atteint 5.3 %

du PIB, la production chutant au total de plus de 4 % au cours du dernier trimestre

de 2008 et du premier trimestre de 2009. Avec l’aggravation de la crise financière et

l’effritement de la confiance, la demande externe s’est effondrée ; la valeur des

exportations hors de la zone euro a baissé de plus d’un cinquième entre le pic et le creux.

L’incertitude ambiante, le durcissement des conditions financières, la montée du chômage,

Graphique 1.1. La zone euro a connu une grave récessionPourcentage de variation en glissement annuel du PIB réel

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932363938

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Zone euroÉtats-Unis

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 23

Page 26: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

la baisse des prix des actifs et la nécessité d’assainir les bilans ont entraîné une contraction

de la demande interne. Néanmoins, la consommation a relativement bien résisté, avec une

baisse de 1.7 % entre le pic et le creux, alors que l’investissement total a chuté de plus de 15 %.

La tourmente financière a débouché sur une crise généralisée

La récession économique dans la zone euro a été déclenchée par de sévères

turbulences sur les marchés financiers internationaux. Ces difficultés ont commencé en

août 2007 et ont atteint un point de crise à la mi-septembre 2008. La phase initiale de

tensions a été marquée par une situation d’illiquidité et des coûts de financement

anormalement élevés sur les marchés interbancaires, une chute des prix des actions et une

hausse généralisée des primes de risque et de l’incertitude sur de nombreux marchés.

Cette détérioration faisait suite à des taux de défaillance plus élevés que prévu sur les

crédits hypothécaires résidentiels de second ordre aux États-Unis (OCDE, 2009a). À partir

de la mi-septembre 2008, la tourmente a pris de l’ampleur, après la faillite de la banque

d’investissement Lehman Brothers. Les doutes persistants sur la santé des institutions

financières et la défaillance de certaines d’entre elles ont provoqué une quasi-panique sur

les marchés de capitaux. Les banques étaient très réticentes à se prêter les unes aux autres,

surtout de gré à gré. Les taux débiteurs interbancaires à terme ont grimpé en flèche, moins

toutefois qu’aux États-Unis; les écarts dans la zone euro ont culminé à près de 200 points

de base à l’horizon de trois mois, contre 5 points de base en moyenne avant la crise

(graphique 1.2). Les taux des contrats d’échange sur risque de défaillance de la dette

bancaire ont aussi fortement augmenté et les prix des actions des banques se sont

effondrés (graphique 1.3), parallèlement à un durcissement généralisé des conditions de

crédit, aussi bien pour les financements sur le marché que pour les financements auprès

des banques.

Une réponse énergique des politiques a été décisive pour stabiliser les marchés de

capitaux. Dès le 9 août 2007, la BCE a fait savoir qu’elle se tenait prête à maintenir des

conditions ordonnées sur le marché monétaire de la zone euro. Durant la phase initiale de

la crise, elle a utilisé les procédures opérationnelles existantes de manière plus flexible

pour réduire les tensions sur le marché interbancaire : opérations de refinancement

Graphique 1.2. Écarts de rémunération sur le marché monétaire1

Écarts des taux à trois mois, dernière observation : 2 novembre 2010

1. Écart entre le taux interbancaire à 3 mois (Euribor pour la zone euro, Libor pour le Royaume-Uni, les États-Unis etle Japon) et le taux des contrats d’échange à un jour.

Source : Bloomberg et Datastream.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932363957

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Zone euroÉtats-UnisJaponRoyaume-Uni

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201024

Page 27: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

supplémentaires à échéances de trois et six mois ; nouvelles opérations de réglage

conjoncturel; quelques opérations d’adjudication de montant illimité; modification du

calendrier des adjudications pour les principales opérations de financement, de manière à

avancer l’injection de liquidité pendant les périodes de garantie; recours à la facilité

d’adjudication à terme en USD (USD Term Auction Facility) pour fournir des liquidités aux

marchés européens. Le principal taux de refinancement a été relevé pour atteindre 4.25 %

en juillet 2008. La taille globale du bilan de la BCE n’a pas véritablement augmenté pendant

cette phase de la crise. Lorsque la crise s’est aggravée à la mi-septembre 2008, un certain

nombre de mesures complémentaires ont été prises :

● Le principal taux de refinancement a été rapidement abaissé de 50 points de base en

octobre 2008 et, par la suite, presque chaque mois jusqu’en mai 2009 où le taux a atteint

1 %, avec la diminution des pressions inflationnistes.

● Les opérations de refinancement principales et à long terme ont été proposées selon une

procédure d’adjudication à taux fixe et en quantité non limitée contre des garanties

éligibles.

● En octobre 2008, le corridor formé par les taux des facilités d’appel d’offres de part et

d’autre du principal taux de refinancement a été ramené de 100 à 50 points de base, mais

il a été ensuite élargi de nouveau en janvier 2009, avant d’être ramené à 75 points de base

en mai 2009.

● La liste des garanties éligibles a été étendue à certains prêts syndiqués et à des

instruments tels que les certificats de dépôt non négociés sur les marchés réglementés.

L’exigence minimale de qualité a été ramenée de A– à BBB– (sauf pour les titres adossés

à des actifs).

La crise perdurant, de nouvelles mesures ont été prises :

● Des opérations à 12 mois ont été introduites à partir de juin 2009.

● En juillet 2009, un programme d’achat d’obligations couvertes a été lancé, l’objectif étant

de racheter, sur une période d’un an, 60 milliards EUR d’obligations ayant une cote de

crédit minimum de AA ou équivalente.

Graphique 1.3. Taux des contrats d’échange sur risque de défaillance bancaire1

1. Taux moyen des contrats d’échange à cinq ans pour un groupe de grandes banques.

Source : Datastream.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932363976

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Zone euroÉtats-UnisRoyaume-Uni

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 25

Page 28: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

● Le Programme pour les marchés de titres a été lancé en mai 2010 pour remédier au

dysfonctionnement des marchés de titres et rétablir un mécanisme approprié de

transmission de la politique monétaire, grâce à l’achat de titres publics et privés. Des

opérations spécifiques sont menées pour réabsorber la liquidité injectée à l’aide de ce

programme.

Au total, ces mesures ont entraîné un accroissement considérable du bilan de la BCE.

Les prêts de la BCE aux institutions de crédit de la zone euro, qui avoisinaient 5 % du PIB de

la zone avant la crise, ont parfois largement dépassé 8 % du PIB. Ils sont revenus aux

alentours de 6.5 % du PIB et continuent de décroître. Dans la pratique, le volume

considérable des opérations à 12 mois, s’ajoutant à la réticence des banques à se prêter les

unes aux autres au-delà du très court terme, s’est traduit par un important excédent de

liquidités sur le marché. En conséquence, les taux d’intérêt du marché se sont rapprochés

de la limite inférieure de 25 points de base prévue par la facilité de dépôt à un jour de la

BCE. Les banques les plus affaiblies, qui éprouvaient des difficultés à se procurer des

ressources sur le marché, ont emprunté massivement au taux directeur, pourtant très

supérieur au taux du marché, faute de contreparties disposées à leur accorder des prêts.

L’irruption de la crise financière internationale généralisée en septembre 2008 a

suscité un soutien public massif au système financier dans les pays de la zone euro. Tout

d’abord, le 30 septembre 2008, l’Irlande a accordé une garantie unilatérale sur presque tous

les passifs, y compris les dépôts, des établissements bancaires ayant d’importantes

activités au plan national. Cela a poussé d’autres pays à émettre des garanties similaires

pour éviter une fuite des fonds vers des juridictions protégées. Le 7 octobre, le Conseil

ECOFIN a pris un certain nombre de décisions pour une réponse concertée à la crise1. Il a

notamment porté le niveau de garantie minimum des dépôts à 50 000 EUR, la plupart des

pays allant plus loin à titre individuel2. En outre, le Conseil a exigé plus de flexibilité dans

l’application du régime d’évaluation au cours du marché prévu par les normes comptables

IFRS (International Financial Reporting Standards). Le Comité économique et financier (CEF)

assurera des contacts quotidiens entre pays de l’UE sur les questions financières. Des

principes généraux ont été adoptés pour les interventions gouvernementales, les

institutions bancaires de l’UE ont été appelées à faire preuve d’une transparence totale et

la recapitalisation des institutions financières vulnérables mais importantes d’un point de

vue systémique a été jugée appropriée.

La crise a marqué la fin d’une expansion prolongée du crédit

La forte dégradation des conditions financières a marqué la fin d’un long cycle

mondial du crédit au cours duquel la faible aversion pour le risque et un excédent mondial

d’épargne ont contribué à abaisser les coûts d’emprunt jusqu’à des niveaux sans précédent

et à gonfler considérablement le volume du crédit. Il en est résulté une flambée

insoutenable des cours des actions et une vive hausse des prix des logements dans de

nombreux pays. L’assouplissement des conditions financières et la poussée des prix

immobiliers ont été plus modérés dans l’ensemble de la zone euro qu’aux États-Unis

(graphique 1.4) et dans quelques autres grandes économies, même si certains pays de la

zone euro ont connu un cycle du crédit particulièrement accusé (chapitre 2). Au sein de la

zone euro, les banques ont joué un rôle crucial dans le cycle financier. Les concours totaux

des institutions financières monétaires de la zone euro au secteur privé non financier ont

augmenté d’environ 40 % en termes réels entre 2003 et 2007. L’expansion du crédit a été

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201026

Page 29: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Graphique 1.4. Évolution du cycle du crédit

1. Pourcentage de variation en glissement annuel. Le prix des logements aux États-Unis est mesuré par l’Agence fédérale pourle financement du logement (FHFA).

2. Une baisse d’une unité de l’indice implique un resserrement des conditions financières suffisant pour induire uneréduction moyenne du niveau du PIB de ½ à 1 % après quatre à six trimestres. Voir détails dans Guichard et al. (2009).

Source : FHFA, Datastream et OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE et calculs de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932363995

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Indices des conditions financières

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 27

Page 30: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

facilitée par l’assouplissement des conditions de prêt et par un endettement croissant des

grandes banques d’envergure internationale (chapitre 4).

Avec le retournement du cycle du crédit, le coût et l’offre de financements pour les

ménages et les entreprises non financières se sont nettement dégradés. Toutefois, cela

s’est produit dans le contexte d’une forte contraction de la demande de prêts de la sphère

réelle de l’économie, à la suite de la profonde récession. Il n’est donc pas certain que les

restrictions de l’offre de crédit aient été réellement contraignantes. Le coût des ressources

bancaires a été gonflé par l’augmentation des marges de prêt interbancaires et par les

dysfonctionnements sur le marché de l’argent, mais aussi par l’assèchement des

titrisations en tant que source de fonds pour les banques. L’enquête de la BCE sur la

distribution du crédit bancaire a montré qu’une forte proportion d’établissements ont

durci leurs conditions de prêt en raison de la morosité des perspectives et des contraintes

de financement. Ce resserrement a été plus marqué pour le crédit aux entreprises et, parmi

les concours aux ménages, pour les prêts à la consommation. Le resserrement des normes

de crédit semble avoir été plus marqué dans les pays confrontés à des difficultés

Graphique 1.5. Prêts bancairesTaux de croissance en glissement annuel, en pourcentage

1. Les données concernent les banques commerciales pour les États-Unis et les institutions financières monétairespour la zone euro.

Source : Datastream.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364014

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10

15

2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

Prêts au secteur privé non financier 1

Zone euroÉtats-Unis

-5

0

5

10

15

20

-5

0

5

10

15

20

2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

Prêts aux entreprises et ménages de la zone euroPrêts aux entreprises non financièresCrédit de consommation aux ménagesPrêts aux ménages pour l’achat de logement

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201028

Page 31: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

financières plus intenses. Le coût total des financements externes pour les entreprises

s’est encore alourdi lorsque les écarts sur les obligations de sociétés ont augmenté,

notamment pour les titres d’emprunt les plus risqués, et que les cours des actions ont

baissé. En définitive, la croissance des prêts des institutions monétaires et financières de la

zone euro s’est effondrée avec le retournement du cycle du crédit et l’encours des crédits

s’est quelque peu contracté, principalement à cause de l’atonie de la demande

(graphique 1.5). Cette cyclicité a été moins prononcée qu’aux États-Unis.

La demande privée s’est contractée sous l’effet des inquiétudes financières et de la reconstitution des bilans

La forte baisse de la demande privée a résulté du processus de reconstruction des

bilans après le cycle du crédit, tendance accélérée et amplifiée par les inquiétudes sur la

disponibilité du crédit et par les effets de confiance. L’accumulation excessive de dettes

privées avant la crise a abouti à une épargne accrue au lendemain de celle-ci. Le taux

d’épargne des ménages est passé de 9.5 % à 11.5 % du revenu disponible, alors même que

la valeur des actifs financiers nets s’est effondrée (graphique 1.6). De même, la forte baisse

de l’investissement s’est traduite par une contraction rapide des besoins d’emprunt des

entreprises non financières. L’augmentation du taux d’épargne, qui dans l’ensemble a été

plus modeste qu’aux États-Unis et au Royaume-Uni, dont les taux d’épargne étaient

initialement bien plus bas, apparaît particulièrement énergique dans les pays de la

zone euro qui avaient connu les flambées du crédit les plus importantes, tels que l’Irlande

et l’Espagne, alors que le taux d’épargne a été stable ou a même baissé dans quelques

économies de la zone euro (chapitre 2).

L’atténuation des déséquilibres internes, grâce à la réduction des emprunts nets du

secteur des entreprises et à la hausse de l’épargne des ménages, a été partiellement

neutralisée par le creusement des déficits budgétaires (graphique 1.7). Celui-ci a reflété le

jeu des stabilisateurs automatiques, l’érosion des recettes sous l’effet du cycle du crédit et

l’expansion budgétaire discrétionnaire coordonnée dans de nombreux pays de la

zone euro. Le déficit croissant du secteur public a contribué à atténuer les effets demande

Graphique 1.6. Actifs financiers nets et épargne des ménagesEn pourcentage du revenu disponible

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364033

180

190

200

210

220

230

240

8.0

8.5

9.0

9.5

10.0

10.5

11.0

1999 2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

Actifs financiers nets (éch. de gauche)Épargne (éch. de droite)

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 29

Page 32: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

de la correction rapide des déséquilibres du secteur privé. En outre, du fait des mesures de

sauvetage financier, les gouvernements ont pris en charge certains passifs accumulés par

le secteur privé, de sorte qu’il y a eu en parallèle un transfert limité de la dette privée à la

dette du secteur public.

Le chômage a augmenté, mais la réduction de la durée moyenne du travail a aidé à traverser la crise

Sous l’effet de la forte contraction de la demande, le taux de chômage de la zone euro

a augmenté rapidement, pour passer de quelque 7 % à près de 10 % de la population active

(graphique 1.8). Il s’est stabilisé à un taux à peine inférieur au pic historique du milieu des

années 90. La montée du chômage a été très prononcée dans certains pays déficitaires, où

les déséquilibres économiques et financiers sont en voie d’être corrigés. En Espagne, le

taux de chômage a bondi de 8 % à 20 %. En Allemagne, en revanche, il a à peine augmenté.

Dans l’ensemble, au regard des récessions précédentes, la baisse cumulée de l’emploi a été

faible par rapport à la chute de la production (OCDE, 2010a). L’atonie de la demande de

main-d’œuvre s’est accompagnée d’une réduction de la durée moyenne du travail et d’une

baisse de la production horaire, même si l’ajustement a eu tendance à porter davantage sur

l’emploi dans les pays qui s’ajustent à une demande interne excessive avant la crise.

Tandis que les dispositifs de chômage partiel et les craintes patronales de pénuries de

main-d’œuvre ont joué un rôle, la robustesse générale du marché du travail incite à penser

que les réformes structurelles passées ont contribué à rendre les marchés du travail plus

flexibles et plus résistants face au ralentissement conjoncturel. Ce facteur sera crucial pour

déterminer si le niveau élevé actuel du chômage persistera avec la reprise de l’activité. La

rétention de main-d’œuvre révélée par une productivité du travail inférieure à la tendance

accentue le risque d’une reprise faible en termes de croissance de l’emploi à très court

terme, tandis que le chômage élevé et l’atonie persistante de la demande dans certaines

économies périphériques peuvent induire des effets de stigmatisation au niveau de

l’emploi.

Graphique 1.7. Solde par secteur pour la zone euroSomme mobile sur quatre trimestres, en pourcentage du PIB

Source : BCE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364052

-8

-6

-4

-2

0

2

4

6

8

-8

-6

-4

-2

0

2

4

6

8

2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10

Capacité/besoin de financement

MénagesEntreprises non financières

Entreprises financières Administrations publiquesEnsemble de l’économie

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201030

Page 33: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

L’inflation s’est nettement modérée

Étant donné la faiblesse de la demande, l’inflation tendancielle est redescendue

jusqu’à un bas niveau, la variation moyenne annuelle des prix étant proche de 1 %

(graphique 1.9) mais supérieure au point bas du printemps 2010. Malgré cette modération

considérable, l’inflation tendancielle a simplement atteint un taux comparable à celui

observé durant le ralentissement de 2000. Cela peut paraître surprenant étant donné

l’ampleur du repli de la demande. L’inflation globale a ralenti plus fortement en raison de

la baisse mondiale des prix de l’énergie et des produits alimentaires, et une brève période

de déflation en rythme annuel a été observée au troisième trimestre de 2009. Cette

inflation faible s’est accompagnée d’une modération des salaires due à la situation difficile

du marché du travail : le taux de croissance annuel des coûts horaires de main-d’œuvre en

termes nominaux est revenu d’un pic de 4 % au dernier trimestre de 2007 à 1.6 % au

Graphique 1.8. Le marché du travail est en train de se stabiliser

1. Pourcentage de variation par rapport au trimestre précédent.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364071

Graphique 1.9. Les pressions inflationnistes restent faiblesContribution à la hausse des prix en glissement annuel

1. Pourcentage de variation en glissement annuel de l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH).

Source : Eurostat.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364090

-1.0

-0.8

-0.6

-0.4

-0.2

-0.0

0.2

0.4

0.6

0.8En pourcentage

6.0

6.5

7.0

7.5

8.0

8.5

9.0

9.5

10.0

10.5En pourcentage

2002 03 04 05 06 07 08 09 10

1Croissance de l’emploi (éch. de gauche)Taux de chômage (éch. de droite)

-2

-1

0

1

2

3

4

5En pourcentage

-2

-1

0

1

2

3

4

5En pourcentage

2002 03 04 05 06 07 08 09 10

1

Inflation sous-jacenteProduits alimentaires transformésÉnergie et produits alimentaires non transformésHausse de l’IPC harmonisé

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 31

Page 34: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

deuxième trimestre de 2010. Il apparaît que les anticipations inflationnistes restent bien

ancrées, en dépit de quelques fluctuations des rendements des obligations indexées.

Les mesures publiques de soutien ont contribué à stabiliser l’économie et à favoriser la reprise

La politique monétaire a été promptement assouplie et un soutien massif en liquidité a contribué à stabiliser les marchés

En réponse à la crise, la BCE a pratiqué une relance monétaire rapide et puissante. En

outre, des modifications des opérations monétaires ont contribué à soutenir le système

financier et à maintenir ainsi l’offre de crédit. Les taux d’intérêt nominaux à court terme

sont tombés rapidement jusqu’à des niveaux sans précédent, inférieurs de plus de

100 points de base aux taux observés au lendemain de la crise asiatique ou après

l’éclatement de la bulle Internet. En fait, les taux d’intérêt du marché au jour le jour étaient

très inférieurs au taux directeur à cause de l’abondance des liquidités sur le marché, même

si les écarts de taux d’intérêt sur les emprunts des sociétés et des ménages se sont creusés.

Compte tenu des anticipations inflationnistes à court terme, les taux réels ont été

sensiblement plus accommodants que lors de ces deux épisodes.

Les politiques de soutien, en particulier les mesures non conventionnelles de soutien

à la liquidité, ont joué un rôle clé pour stabiliser la situation sur les marchés de capitaux.

Les marchés monétaires ont commencé à fonctionner de nouveau et de nombreuses

banques ont retrouvé l’accès aux financements à court terme. Les conditions financières se

sont peu à peu améliorées du fait que les taux directeurs sont restés bas et que la confiance

s’est rétablie, même si des sources de fragilité ont été mises en évidence par des poussées

successives d’instabilité sur les marchés de capitaux. Tandis que les taux interbancaires à

3 mois n’ont pas décollé de niveaux extrêmement bas, la réduction des taux débiteurs

appliqués aux sociétés non financières et aux ménages n’a que partiellement reflété la

baisse des taux de financement des banques. Alors que les taux débiteurs de référence

appropriés diffèrent souvent des taux interbancaires à court terme, un indicateur de base

des écarts de taux sur les prêts aux sociétés non financières est passé de 130 points de base

avant la crise à 240 points de base (graphique 1.10). Le niveau élevé des marges sur prêts

par rapport aux marges déprimées d’avant la crise reflète sans doute en partie des primes

de risque plus importantes et un accès plus difficile aux capitaux. Ces effets pourraient

être durables dans la mesure où les risques ont été réévalués en permanence et où la crise

a affaibli la concurrence, par exemple en renforçant la concentration dans le secteur

bancaire.

Le taux de change effectif de l’euro a fortement fluctué à différents stades de la crise.

L’une des causes directes de la forte dépréciation survenue aux alentours de mai 2010 a été

la crise budgétaire dans la zone euro, qui a érodé la confiance générale dans la monnaie et

provoqué la vente de titres d’emprunt publics détenus hors de la zone euro. Cette baisse du

taux de change a été bénéfique pour l’activité, en particulier dans des pays tels que

l’Allemagne, dont une forte proportion des exportations est facturée en monnaies vis-à-vis

desquelles l’euro s’est déprécié. Un risque majeur pour l’euro réside dans le fait que la

faiblesse du dollar des États-Unis pourrait engendrer des pressions à moyen terme dans le

sens de l’appréciation, amplifiées par le rattachement au dollar sur de nombreux grands

marchés émergents. Pour certains pays de la zone euro, les liens importants avec des

partenaires commerciaux non membres de la zone, tels que la Suède, la Suisse et le

Royaume-Uni, ont beaucoup influé sur leur taux de change effectif durant la crise.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201032

Page 35: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Les conditions financières semblent se rétablir, en dépit de rechutes comme lors de la

crise budgétaire de mai 2010. La toute dernière enquête de la BCE sur la distribution du

crédit bancaire dénote une réduction de la proportion nette d’établissements qui

anticipent un durcissement de leurs normes de crédit aux entreprises et aux ménages. Les

concours bancaires aux ménages ont donné les premiers signes de progression au début

de 2010, tandis que le crédit aux entreprises non financières a cessé de décroître. Jusqu’ici,

le recul du crédit au secteur privé non financier n’a pas été surprenant car la baisse de

l’activité, et surtout de l’investissement, a automatiquement réduit la demande de

capitaux empruntés. Il reste à voir si les contraintes de crédit deviendront significatives

lorsque la demande de prêts se redressera. Cependant, la faible augmentation des

concours bancaires aux entreprises non financières, conjuguée à une émission massive de

titres d’emprunt par les sociétés au début de 2010, dénote sans doute une certaine

faiblesse de l’offre de crédit bancaire (FMI, 2010).

Le soutien budgétaire a été contrarié par des problèmes de viabilité

L’activité a bénéficié du creusement du déficit budgétaire de la zone euro, qui est passé

de 0.6 % du PIB en 2007 à près de 6.5 % en 2010 (chapitre 3). Cette dégradation reflète

largement le jeu des stabilisateurs automatiques, en réponse à la fois au ralentissement de

l’activité et à l’évaporation des abondantes recettes liées à l’euphorie financière. Les

mesures de relance discrétionnaires ont été généralement limitées dans la plupart des

pays, à quelques exceptions près telles que l’Allemagne (OCDE, 2010c). Les marges de

soutien budgétaire ont été amputées par la situation initiale défavorable des finances

publiques dans de nombreux pays de la zone euro, à quoi se sont ajoutés les coûts

inhérents à la crise financière. Dans beaucoup de pays de la zone euro, les écarts de taux

ont atteint des niveaux très élevés par suite de la dégradation rapide des situations

budgétaires et d’une aversion accrue pour le risque, même si les rendements sur la dette

publique sont généralement plus faibles dans l’ensemble.

Ces pressions ont atteint leur point culminant avec la crise du risque souverain en

mai 2010. La montée des pressions sur les finances publiques grecques faisait suite à une

perte de confiance, qui a commencé avec une réévaluation massive des données sur le

Graphique 1.10. Taux d’intérêt des nouveaux prêts aux résidents de la zone euro1

1. Prêts des institutions financières monétaires de la zone euro.

Source : BCE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364109

0

2

4

6

8

10

En pourcentage

0

2

4

6

8

10

En pourcentage

2003 04 05 06 07 08 09 10

Taux directeur de la BCETaux interbancaire à trois moisPrêts jusqu’à 1 milliard EUR aux entreprises non financières, taux variable, jusqu’à un anPrêts à la consommation, jusqu’à un anPrêts pour l’achat de logements, plus de 10 ans

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 33

Page 36: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

solde budgétaire en octobre 2009. La crise de confiance s’est propagée à d’autres pays de la

périphérie de la zone euro confrontés à des situations budgétaires difficiles. Le coût a été

d’autant plus lourd qu’il n’existait pas de mécanisme pour régler le cas des pays en proie à

des problèmes de liquidité ou de solvabilité. Par ailleurs, l’engagement d’aider la Grèce pris

en février 2010 ne comportait pas de modalités détaillées et manquait donc de crédibilité

aux yeux des marchés de capitaux, qui ont été incités à le mettre à l’épreuve, d’où des

tensions concernant les écarts sur la dette souveraine, qui se sont amplifiées de façon

spectaculaire en mai. Des programmes coordonnés de l’UE et du FMI avec la Grèce ont été

adoptés en mai; ils imposaient une stricte conditionnalité en termes d’assainissement

budgétaire et de réformes structurelles en contrepartie de financements sur trois ans

(encadré 1.1). En mai également, les États membres de l’UE ont décidé de créer deux

instruments supplémentaires : le Mécanisme européen de stabilisation financière (MESF),

destiné à la fois aux pays de la zone euro et à ceux qui n’en font pas partie, et le Fonds

européen de stabilité financière (FESF), mis en place pour fournir aux pays de la zone euro

un soutien financier soumis à des conditions strictes (chapitre 3). En même temps, la BCE

a mis sur pied le Programme pour les marchés de titres, qui prévoit des achats directs de

dette publique et privée en vue de rétablir un mécanisme approprié de transmission de la

politique monétaire grâce à la stabilisation de certains marchés de titres. Jusqu’en

septembre 2010, quelque 60 milliards EUR d’obligations publiques avaient été rachetées,

essentiellement à des pays de la zone euro éprouvant des difficultés à se procurer des

financements sur les marchés.

Encadré 1.1. Mesures prises face à la crise budgétaire en Grèce et en Europe

À la suite des vives pressions sur la dette souveraine de certains pays de la zone euro auprintemps 2010, en mai 2010 des mesures ont été annoncées pour faire face à la crisebudgétaire en Grèce et à l’augmentation des écarts sur les obligations dans un certainnombre d’autres pays de la zone euro.

Le soutien à la Grèce comporte deux volets et s’accompagne d’une stricte conditionnalitéen vue de réduire l’aléa moral :

● Des prêts bilatéraux des pays de la zone euro (hormis la Slovaquie), coordonnés etregroupés par la Commission européenne, pour un total de 80 milliards EUR sur troisans. Ces fonds sont fournis sur une base intergouvernementale, en fonction de la clé derépartition ajustée des pays participants pour la souscription au capital de la BCE.

● 30 milliards EUR fournis par le FMI dans le cadre de son accord de confirmation.

Un autre instrument de soutien potentiel a été mis en place avec le Mécanisme européende stabilité financière (MESF), qui élargit l’actuelle facilité de balance des paiements et estassorti d’une stricte conditionnalité. Le MESF autorise la Commission à lever pour lecompte de l’UE jusqu’à 60 milliards EUR pour l’octroi de prêts à tous les pays de l’UEaffectés ou menacés par de graves difficultés économiques ou financières.

Par ailleurs, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été mis en place; il peutfournir jusqu’à 440 milliards EUR de prêts aux pays de la zone euro, sous réserve d’uneforte conditionnalité. Ce fonds résulte d’un accord intergouvernemental entre les pays dela zone. Le FESF a pour mandat d’établir des accords sur de nouvelles facilités de prêt pourune période de trois ans. Doté du statut de société à responsabilité limitée, il peutemprunter sur les marchés de capitaux avec la garantie des pays de la zone euro. Chaquepays de la zone a accepté de garantir 120 % de chaque émission d’emprunt afin que le

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201034

Page 37: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Une reprise modérée est en coursUne reprise modérée est en cours (graphique 1.11). L’économie de la zone euro a

commencé de se stabiliser au deuxième trimestre de 2009 et la production a augmenté

pendant quatre trimestres consécutifs. Au départ, la reprise a été tirée par un rebond du

commerce et de la formation de stocks. Par la suite, son assise s’est élargie, la

consommation se redressant lentement à partir de la fin de 2009 tandis que

l’investissement est maintenant reparti. La progression de l’activité de près de 1 % au

deuxième trimestre de 2010 a été exceptionnellement forte, et elle ne résulte qu’en partie

d’un rebond lié à des conditions météorologiques favorables après la faiblesse observée au

premier trimestre, ainsi que d’autres facteurs temporaires tels que la dissipation des

incitations budgétaires et les augmentations attendues des impôts indirects.

Encadré 1.1. Mesures prises face à la crise budgétaire en Grèce et en Europe (suite)

FESF soit noté AAA, et le Fonds disposera d’une réserve de trésorerie pour rehausser laqualité de sa signature. Les garanties sont fournies au prorata, en fonction de la partajustée des pays au capital versé à la BCE.

Le FMI a annoncé son intention d’octroyer des fonds jusqu’à concurrence de la moitié dela contribution de l’UE et de la zone euro dans le contexte des programmes conjoints. Lemontant potentiel du programme global de soutien de l’UE et du FMI équivaut à un peuplus de 9 % du PIB de la zone euro. En outre, la BCE a mis en place le Programme pour lesmarchés de titres. La création de ces facilités a eu un effet stabilisateur immédiat sur lesmarchés de capitaux. Toutefois, ce train de mesures ne répond pas aux préoccupations desolvabilité à plus long terme qui résultent du poids considérable de la dette dans quelquesÉtats de la zone, et depuis lors, les écarts sur la dette souveraine sont remontés jusqu’àleurs points hauts. Des réformes s’imposent pour traiter efficacement les questions desolvabilité à long terme, au-delà de l’horizon du soutien offert par le nouveau train demesures de l’UE.

Graphique 1.11. Contribution à la croissance du PIB réelContribution à la variation par rapport au trimestre précédent

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364128

-3.0

-2.5

-2.0

-1.5

-1.0

-0.5

0.0

0.5

1.0

1.5Points de %

-3.0

-2.5

-2.0

-1.5

-1.0

-0.5

0.0

0.5

1.0

1.5Points de %

2002 03 04 05 06 07 08 09 10

Consommation privéeConsommation publiqueInvestissement totalAutres demandes intérieuresExportations nettesCroissance du PIB

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 35

Page 38: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

L’OCDE prévoit que la reprise modérée se poursuivra, alimentée à la fois par la

demande interne et par la demande externe (OCDE, 2010f). La croissance sera de plus en

plus tirée par la demande privée, compte tenu de la mise en œuvre des programmes

d’assainissement budgétaire. Toutefois, elle sera freinée par l’ajustement continu des

bilans dans le secteur privé. La consommation va sans doute croître à un rythme accéléré

grâce au redressement des patrimoines financiers, à la stabilisation des prix des logements

et au bas niveau des taux d’intérêt. L’investissement devrait continuer d’augmenter à la

faveur des bénéfices substantiels des sociétés, mais il sera freiné par les excédents de

capacité. Il est probable que le chômage ne reculera que lentement avec l’augmentation du

temps de travail, tandis que l’ample volant de ressources inemployées maintiendra les

tensions inflationnistes à un faible niveau dans le court terme. Une incertitude

considérable subsiste en ce qui concerne le rythme et la vigueur de la reprise, et même s’il

subsiste quelques risques notables de dégradation, dans l’ensemble, les risques sont à peu

près équilibrés.

Au cours des prochaines années, la résorption des déséquilibres inversera

probablement la structure de croissance régionale qui prévalait avant la crise. Les pays

confrontés à de lourds déficits courants s’efforceront de rééquilibrer leurs bilans, alors que

l’absorption intérieure peut encore s’accroître dans les économies excédentaires

(graphique 1.12). L’ajustement pourrait être particulièrement prolongé pour les pays qui

ont besoin d’améliorer leur compétitivité si des rigidités nominales à la baisse y font

obstacle. À la différence de la précédente reprise, la politique monétaire à l’échelle de la

zone euro tendra à être trop accommodante pour les pays excédentaires et trop restrictive

pour les économies en phase d’ajustement par suite d’une demande interne excessive,

compte tenu des écarts d’inflation attendus. Les tensions inflationnistes consécutives

pourraient aider à rééquilibrer les économies de la zone euro, parallèlement à l’ajustement

en cours de l’épargne et de l’investissement.

Les mesures monétaires de relance devront être progressivement retirées. En

l’absence de pressions à la hausse sur l’inflation, le faible taux directeur actuel peut être

maintenu à court terme, les taux d’intérêt du marché se raffermissant à mesure que les

liquidités d’urgence sont épongées. Toutefois, les taux directeurs devraient être relevés dès

Graphique 1.12. Croissance dans les pays déficitaires et les pays excédentaires1

Contributions à la variation en pourcentage du PIB de la zone euro en glissement annuel

1. Les pays déficitaires ou excédentaires sont définis par le solde moyen de leur balance courante en pourcentage duPIB entre 2002-07. Les pays déficitaires sont l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Portugal, la Républiqueslovaque et la Slovénie, tandis que les pays excédentaires comprennent l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, laFinlande, la France, le Luxembourg et les Pays-Bas.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364147

-8

-6

-4

-2

0

2

4

Points de %

-8

-6

-4

-2

0

2

4

Points de %

2002 03 04 05 06 07 08 09 10

Pays excédentairesPays déficitairesZone euro

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201036

Page 39: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

que des pressions à la hausse sur l’inflation commenceront à menacer la stabilité des prix

à moyen terme. La levée des mesures non conventionnelles a déjà commencé avec la

venue à échéance des opérations à 12 mois. Les opérations de réglage fin à court terme

contribuent à faciliter ce processus. Bon nombre de ces mesures peuvent être simplement

appliquées jusqu’à la date d’expiration, sous réserve que les conditions financières

s’améliorent suffisamment, de sorte que la transmission de la politique monétaire se

normalise. S’ils sont conservés jusqu’à l’échéance ou vendus lorsque les prix sont

favorables, les avoirs détenus dans le cadre du programme d’obligations sécurisées et du

programme pour les marchés de titres ne devraient pas engendrer de pertes, et en principe

ces positions devraient être dénouées sans difficulté dès que les conditions du marché le

permettront. Une incertitude majeure pour les prochaines années concerne le niveau de la

production potentielle, comme on le verra plus loin, et la rapidité avec laquelle les tensions

sur les prix apparaîtront avec l’expansion de l’activité. La politique monétaire pourra rester

plus accommodante pendant plus longtemps si l’assainissement budgétaire, qui freinera

sans doute la croissance de la demande dans le court terme, est mis en route comme prévu

et si des pressions à la baisse sur l’inflation viennent menacer la stabilité des prix à moyen

terme. Toutefois, une grande vigilance s’impose à l’égard des distorsions potentielles des

marchés de capitaux, qui pourraient apparaître si les taux d’intérêt restent en-dessous des

moyennes de long terme pendant une période prolongée. Maintenir longtemps les taux à

des niveaux excessivement bas comporte des risques, et cela pourrait avoir des

répercussions dans un contexte mondial, avec éventuellement des désalignements des

prix des actifs et des flux de capitaux aux effets préjudiciables.

Un assainissement budgétaire s’impose désormais pour remettre les finances

publiques sur une trajectoire viable. Les programmes actuels visent essentiellement à

ramener les déficits à moins de 3 % du PIB d’ici 2013. Cette démarche est en principe

modulée en fonction de la situation de chaque pays, mais dans la pratique les marges de

manœuvre sont limitées, et certains pays dont l’économie était en surchauffe ont dû lancer

un processus d’assainissement fortement procyclique par suite de la hausse des coûts de

financement. Comme indiqué au chapitre 3, des efforts énergiques et soutenus devront

être déployés pour ramener le ratio dette/PIB à son niveau d’avant la crise et, en particulier,

pour le faire redescendre sous le seuil de 60 % du PIB prévu par le Pacte de stabilité et de

croissance (PSC). Ce processus devrait être modulé en fonction de l’urgence des besoins

d’assainissement et de la situation économique de chaque pays.

En dépit d’un soutien public massif, l’état de santé du secteur bancaire européen

demeure le principal risque pour la reprise. D’une part, les bénéfices se sont améliorés

malgré l’ampleur des annulations de créances et des provisions pour prêts, à la faveur de

coûts de financement réduits, du montant net élevé des marges de financement et des

activités de banque d’investissement. Les banques ayant versé des dividendes

relativement modestes et levé d’importantes quantités de fonds propres sur les marchés,

elles ont renforcé leur position en capital en 2009 et amélioré la qualité des fonds propres

en convertissant une partie de leurs passifs hybrides en actions. Cependant, elles n’ont

probablement pas éliminé tous les actifs douteux de leurs bilans et elles continueront de

subir des pertes en raison des effets retardés de la récession. Les dépréciations potentielles

d’actifs demeurent élevées et un nouveau renforcement de la base de fonds propres se

révélera sans doute nécessaire pour assurer une offre de crédit appropriée

(graphique 1.13). Dans certains pays, les banques peuvent aussi éprouver des difficultés

pour satisfaire aux nouvelles exigences en matière de fonds propres, même si la période de

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 37

Page 40: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

mise en œuvre étendue devrait atténuer les pressions. La vulnérabilité des banques

continue d’engendrer des tensions sur le marché interbancaire, mais sans comparaison

avec ce qui a été observé au pic de la crise. Les marges entre les taux interbancaires à trois

mois et les taux moyens au jour le jour attendus, et en particulier les écarts de

rémunération des contrats d’échange sur risque de défaut des obligations bancaires,

demeurent très au-dessus des niveaux d’avant la crise, et ces écarts se sont révélés

sensibles à la crise budgétaire en mai 2010.

Les résultats des tests de résistance à l’échelle de l’UE (CECB, 2010) publiés en

juillet 2010 ont réduit l’incertitude. Selon les hypothèses utilisées et sous réserve du

maintien du soutien public, la très grande majorité des banques sont apparues capables de

respecter les obligations réglementaires même dans le scénario de tensions. Toutefois, il

ressort des données d’accompagnement que, dans certains pays, les banques détiennent

encore des engagements élevés et très concentrés, au titre des opérations bancaires et des

portefeuilles de négociation, sur la dette souveraine de leur propre pays (graphique 1.14).

Graphique 1.13. Dépréciations potentielles des titres et prêts du secteur bancaire de la zone euro

Source : BCE (2010), Financial Stability Review, juin.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364166

Graphique 1.14. Principaux engagements des banques en dette souveraineEngagements exprimés en pourcentage des fonds propres de base

Source : A. Blundell-Wignall et P. Slovik (2010), « The EU Stress Test and Sovereign Debt Exposures », Documents detravail de l’OCDE sur la Finance, l’assurance et les pensions privées, no 4, Direction des affaires financières de l’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364185

2007 2008 2009 2010 2011-50

0

50

100

150

200Milliards EUR

-50

0

50

100

150

200Milliards EUR

TitresPrêts

0

50

100

150

200

250

0

50

100

150

200

250Engagements vis-à-vis de :

Grèce Italie Espagne Portugal Irlande

GRC BEL DEU PRT LUX ITA BEL DEU ESP DEU BEL FRA PRT BEL DEU ESP IRL DEU PRT DNK

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201038

Page 41: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Les mesures d’urgences annoncées en mai 2010 pour faire face aux turbulences des

marchés financiers dans certains pays de la zone euro ont atténué sensiblement les

risques de pertes sur les actifs de la Grèce et des pays d’Europe du Sud détenus par les

banques. Néanmoins, la viabilité de la dette souveraine à long terme reste une gageure et

les banques de quelques pays périphériques, quoique fondamentalement bien

capitalisées, éprouvent toujours des difficultés pour se procurer des ressources sur les

marchés interbancaires. Elles restent donc très tributaires des liquidités fournies par la

Banque centrale européenne.

La production potentielle est sans doute plus faible par suite de la crise

La crise économique va probablement entraîner une baisse durable du niveau de la

production potentielle. Même avec la reprise, le PIB ne retrouvera sans doute jamais sa

trajectoire prévue avant la crise. L’ampleur de ces pertes est très incertaine, mais les

estimations actuelles de l’OCDE indiquent une réduction maximum d’environ 3 % du

niveau de la production potentielle dans l’ensemble de la zone euro (OCDE, 2010a). Dans ce

scénario, le déficit résulte pour deux tiers environ d’un coût présumé du capital qui est en

définitive plus élevé qu’avant la crise, ce qui fait baisser le ratio capital-travail et la

productivité de la main-d’œuvre. Le tiers restant devrait découler des évolutions du

marché du travail. À en juger par les sévères récessions précédentes dans les pays de

l’OCDE, les fortes poussées du chômage ont un caractère durable et souvent elles ne sont

pas complètement inversées au cours des reprises ultérieures. La hausse maximale du

taux de chômage structurel de la zone euro est estimée aux environs de 0.5 point de

pourcentage, encore que ce chiffre varie beaucoup d’un pays à l’autre. On présume qu’une

période prolongée d’atonie du marché du travail a pour effet de réduire le taux d’activité

tendanciel, les travailleurs les plus jeunes et les plus âgés étant les plus durement touchés.

Pour un pays moyen de l’OCDE, cet effet pourrait réduire la production potentielle jusqu’à

concurrence de 1 point de pourcentage dans le moyen terme. La baisse des dépenses de

recherche et développement (R-D) peut également peser sur la productivité totale des

facteurs, mais l’ampleur de cet effet est particulièrement difficile à évaluer.

L’investissement dans la R-D pourrait même être contracyclique dans les entreprises

moins affectées par des restrictions de crédit (Aghion et al., 2008). La crise elle-même ne

devrait pas affecter les taux de croissance potentielle dans le long terme, mais la

croissance tendancielle va sans doute continuer de ralentir, principalement en raison du

vieillissement démographique. La baisse du niveau de la productivité potentielle et la

faiblesse des tendances sous-jacentes soulignent la nécessité d’engager des réformes

structurelles sur les marchés du travail et des produits en vue de stimuler la croissance.

Des réformes structurelles globales sont indispensables pour limiter les effets à long

terme de la crise, porter la productivité et le taux d’utilisation de la main-d’œuvre jusqu’au

niveau des pays les plus performants de la zone OCDE et atteindre les objectifs de la

Stratégie Europe 2020 pour une « croissance intelligente, durable et inclusive ». Un

assouplissement des réglementations restrictives des marchés de produits et de la

protection de l’emploi est particulièrement important pour stimuler la croissance

potentielle dans de nombreux pays. Alléger la réglementation des marchés de produits

(RMP) néfaste à la concurrence permettra d’accélérer la croissance moyenne de la

productivité dans la zone euro et de soutenir la convergence réelle entre les pays. Les gains

de productivité découlant de ces réformes pourraient améliorer sensiblement la croissance

de la production potentielle grâce aux effets de retombée dans les différents secteurs

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 39

Page 42: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

(Bourlès et al., 2010). Durant cette crise, seules des mesures modestes ont été prises pour

réduire la RMP, or un alignement de la RMP anticoncurrentielle sur les meilleures pratiques

de l’OCDE serait susceptible d’augmenter de 2.5 % les niveaux du PIB par habitant dans le

pays type de la zone euro, sans même tenir compte des gains liés à l’accroissement de

l’emploi (Boulhol et al., 2008). L’intensification de la concurrence dans les industries de

réseau et l’incitation à une concurrence plus vive dans le secteur des services figurent

parmi les principaux défis (OCDE, 2010b), tandis que la redynamisation du marché unique

devrait s’attaquer aux « maillons manquants » et aux « goulets d’étranglement » (Monti,

2010). Les réformes du marché du travail peuvent aussi avoir des effets substantiels sur le

niveau du PIB par habitant dans le long terme : à titre d’exemple, une réduction de 5 points

des taux de remplacement des indemnités de chômage pourrait accroître les taux d’emploi

d’environ 2.5 points, ce qui correspond à une progression à peu près comparable du PIB par

habitant (Bassanini et Duval, 2006). Le relèvement de l’âge de la retraite et la réduction de

l’impôt implicite sur la poursuite de l’activité à un âge avancé apporteraient aussi une

importante contribution au PIB par habitant, comprise entre 0.5 % et 1 % dans le pays type

de la zone euro, dans le cas d’une réforme qui améliorerait les indicateurs respectifs d’un

écart-type par rapport à leurs valeurs les plus récentes dans l’ensemble des pays de l’OCDE

(Barnes et al., à paraître). Supprimer les obstacles à la mobilité de la main-d’œuvre en

augmentant la transférabilité des retraites et des prestations sociales et en facilitant la

reconnaissance des qualifications, contribuerait à améliorer le fonctionnement des

marchés du travail et à rééquilibrer le profil de croissance dans les différents pays. Des

réformes dans le domaine de l’éducation et des mesures visant à stimuler l’innovation

sont également susceptibles de renforcer la croissance à long terme, tandis qu’un rôle

pilote dans la transition à l’économie sobre en carbone donnerait à l’Europe un avantage

concurrentiel à long terme (OCDE, 2009b).

Le soutien au système financier a été ponctuel, tout en reflétant des directives coordonnées

Le soutien au système financier était fragmentaire au début de la crise, mais la

coordination entre les pays s’est améliorée à mesure que la crise a pris de l’ampleur, avec

les accords conclus en octobre 2008 pour une réponse européenne à la crise, à quoi se sont

ajoutées quatre communications de la Commission sur les aides d’État. Bien que la

législation communautaire assurant l’harmonisation du niveau minimum garanti soit en

vigueur depuis 1994, les systèmes de garantie des dépôts offraient encore des degrés de

protection variables et ont été ajustés en 2008. De nouvelles mesures d’harmonisation sont

actuellement proposées. La plupart des pays de la zone euro ont adopté des systèmes

nationaux de garantie, mais certains n’ont eu recours qu’à des mesures au coup par coup.

Peu de pays ont effectué d’autres interventions en liquidités. Les injections de capital n’ont

concerné qu’un petit nombre d’institutions et n’ont dépassé 5 % du PIB qu’en Belgique et

en Irlande. Quelques pays de la zone euro ont accordé un soutien pour les actifs bancaires

compromis. L’Allemagne et l’Irlande ont mis en place des structures de cantonnement

pour retirer les actifs compromis des bilans des banques. Certes, les problèmes bancaires

différaient d’un pays à l’autre, mais l’approche hétérogène qui a été adoptée incite à penser

que les pays ont tacitement poursuivi des stratégies différentes. Toutes les interventions

étaient soumises aux règles de l’UE en matière d’aides d’État et de concurrence. Le régime

des aides d’État a été temporairement assoupli en 2008 pour faire face à la crise financière3,

mais les mêmes règles ont continué d’être appliquées dans l’ensemble des pays de l’UE, ce

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201040

Page 43: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

qui a contribué à minimiser dans une certaine mesure les possibilités d’aggravation des

distorsions transfrontalières des marchés. Toutefois, nombre d’interventions financières

ont été conçues principalement pour des groupes bancaires nationaux, et tandis que les

établissements étrangers pouvaient s’y associer, rares sont ceux qui ont effectivement

accepté cette offre, étant donné les dispositifs de soutien disponibles dans leur propre

pays. Ce phénomène a pu contribuer à une désintermédiation au niveau transfrontalier

(chapitre 4).

À en juger par l’expérience acquise, on peut réduire les coûts budgétaires des crises

bancaires, et notamment l’impact de l’atonie de la demande, en intervenant précocement

pour recenser les banques qui sont solides, celles qui tireraient profit de mesures destinées

à étoffer leurs bilans et celles qui doivent être soumises à un mécanisme de règlement

(OCDE, 2002). Une intervention précoce évite les coûts qu’engendre le fait de laisser des

établissements en difficulté se débattre pendant des mois ou des années. La transparence

s’est également révélée utile. Aux États-Unis, la confiance a été stimulée par la publication,

le 7 mai 2009 des résultats d’un test national de résistance appliqué aux 19 premières

banques établies aux États-Unis. Un peu plus de la moitié des banques de cet échantillon,

dont les deux plus grandes, ont été invitées à lever des fonds propres supplémentaires. Les

premiers résultats des tests de résistance à l’échelle de l’UE ont été publiés le

1er octobre 2009. Ces tests couvraient 22 établissements, et les résultats publiés ne

mentionnaient que la position globale, même s’il était noté que dans le scénario de crise

aucune banque ne verrait son ratio de fonds propres de base tomber au-dessous de 6 %. Par

ailleurs, dans le contexte des mécanismes de garantie et d’autres mesures de soutien, de

nombreux pays ont rassemblé des informations supplémentaires sur leur système

bancaire. C’est seulement lors d’une seconde série de tests de résistance à l’échelle de l’UE,

publiée en juillet 2010, que les données détaillées par établissement sont devenues

disponibles (CECB, 2010). L’exercice a été étendu à 91 établissements, représentant

ensemble 65 % des bilans bancaires de l’Union européenne et au moins 50 % du marché

bancaire de chaque pays membre. En Espagne, toutes les banques ont été soumises aux

tests. Au total, sept banques européennes se sont avérées insuffisamment capitalisées et

des mesures ont été mises en place pour les aider. La publication des tests de résistance

financière a raffermi la confiance dans le système bancaire.

Il est important que les contrôleurs détectent et traitent les problèmes rapidement,

mais cela peut se révéler plus difficile lorsque l’opération exige une coordination

transfrontière et un partage du fardeau entre les pays. Il risque d’en résulter une certaine

forme de démission ou d’inaction des autorités réglementaires, soit en raison d’un

manque d’information parmi les différentes parties, soit à cause de la complexité du

problème à résoudre. Toutefois, dans l’hypothèse où les autorités nationales d’un pays se

trouveraient dans une position relativement forte face à un établissement en difficulté, ces

mêmes facteurs pourraient aussi conduire à une mise en route prématurée de la procédure

de règlement. Une coordination étroite s’impose donc dans le cas des institutions

transnationales.

Un problème important dans la gestion générale de la crise bancaire est le fait que le

secteur privé n’a supporté que peu de pertes, ce qui crée un risque d’aléa moral. Les

« principes communs » de l’UE ne mentionnent que les « actionnaires existants » comme

devant supporter toutes les conséquences de l’intervention, et de fait aucun détenteur de

créances n’a été jusqu’ici contraint d’assumer des pertes. Dans les pays de l’OCDE, on a

rarement vu les créanciers supporter des pertes, mais cela s’est produit effectivement

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 41

Page 44: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

pendant la crise, par exemple lors des faillites de Washington Mutual et de Lehman

Brothers aux États-Unis. Par ailleurs, les principes communs n’indiquent pas clairement si

seuls les établissements d’importance systémique devraient être renfloués. Tandis qu’il

peut s’avérer difficile d’évaluer si la défaillance d’un établissement aurait une incidence

systémique, il importe néanmoins, en principe, que les interventions soient ciblées sur les

institutions d’importance systémique, et il apparaît que certaines banques qui ont été

aidées ne revêtaient pas un caractère systémique en termes de taille, de complexité ou

d’interconnexion. De nombreux pays ne disposaient pas d’une panoplie efficace

d’instruments de règlement qui aurait permis de restructurer ou de liquider rapidement

les banques. De ce fait, il a été difficile d’éviter que l’État ne prenne la responsabilité du

soutien aux institutions financières. Les dispositifs de gestion des crises devraient être

renforcés et tous les pays devraient disposer d’une solide panoplie d’instruments

juridiques pour régler de manière prompte et efficace le sort des établissements financiers

en difficulté (chapitre 4). Des réformes substantielles de la gestion des crises financières

sont proposées pour remédier à ces carences (CE, 2010a).

Les conditions financières et la sévère récession ont mis la politique monétaire à rude épreuve

Dans l’ensemble, durant la crise, la politique monétaire a été efficacement déployée en

soutien de la demande nominale dans un contexte de faibles pressions inflationnistes, la

BCE ayant joué un rôle important pour maintenir la liquidité sur les marchés de capitaux

et éviter une crise du crédit. En outre, les ajustements apportés au cadre opérationnel de la

BCE étaient au total relativement limités et ont pu être établis de façon cohérente.

Cependant, au cours de la crise, la BCE a engagé des initiatives qui devront être prises en

compte dans la conception future de la conduite de la politique monétaire, et l’expérience

de cette première crise depuis la création de l’union monétaire devrait être mise à profit

pour anticiper une éventuelle crise future. Le système européen de banques centrales

(SEBC) a accru considérablement son bilan, principalement en allongeant l’échéance

moyenne de ses opérations de rachat, avec, parallèlement, une extension temporaire de

l’éventail des garanties éligibles, complétée par des mesures appropriées de gestion des

risques. En outre, compte tenu du fonctionnement des marchés monétaires de la

zone euro et du bas niveau des taux d’intérêt du marché, la BCE a probablement été en

butte à de puissants effets d’anti-sélection, les établissements les plus faibles ayant

tendance à recourir plus massivement au financement par la BCE, qui s’est vu soumettre

des garanties moins liquides. La Banque centrale européenne a également subi des pertes

très limitées sur ses opérations durant la crise liées à la faillite de Lehman Brothers. Ces

interventions anticrise n’ont probablement entraîné qu’une très faible augmentation

absolue du risque. La raison en est que les actifs risqués ne représentent encore qu’une

faible part du bilan et que les opérations monétaires reposent sur des prêts garantis, si bien

qu’une perte n’apparaîtra en principe qu’en cas de défaillance de l’emprunteur mais aussi

de l’émetteur de la garantie. De plus, les procédures de gestion du risque de la BCE

imposent des marges de valorisation qui se traduisent par une sur-garantie des positions.

Le Conseil des gouverneurs de la BCE peut demander une augmentation de capital aux

pays de la zone euro, pour protéger la BCE contre toute dégradation de son bilan. La BCE

réexamine régulièrement sa politique en matière de garanties, et il est souhaitable qu’elle

continue de le faire.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201042

Page 45: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Depuis la crise, le mécanisme de transmission de la politique monétaire souffre du

dysfonctionnement des marchés de capitaux. Outre qu’une inflation faible tend à faire

monter les taux réels, augmenter les écarts de rémunération et durcir les conditions de

prêt, ces facteurs conduisent à se demander s’il était justifié de prendre des mesures de

relance supplémentaires sous la forme de réductions des taux directeurs ou de mesures

explicites d’assouplissement quantitatif destinées à accroître la masse monétaire. Les taux

directeurs de la BCE sont restés légèrement supérieurs au plancher nominal zéro durant la

crise, tandis que les taux du marché au jour le jour sont tombés à des niveaux très bas.

D’autres grandes banques centrales ont réduit de nouveau légèrement les taux directeurs,

mais l’effet stimulant qui en est résulté a sans doute été très faible. L’une des contraintes

tient à l’ampleur de la différence requise entre les taux créditeurs et les taux débiteurs

marginaux. Cet écart doit être suffisant pour inciter les participants du marché à pratiquer

l’intermédiation les uns vis-à-vis des autres au lieu de recourir simplement à la banque

centrale comme chambre de compensation. De plus, vu le niveau très bas des taux

directeurs, le taux créditeur aurait dû devenir proche de zéro. En Suède, il est même devenu

négatif. En principe, les taux d’intérêt directeurs pourraient être inférieurs à zéro, sous

réserve que les services fournis par les dépôts au jour le jour restent plus intéressants que

la pénalité liée à la détention de ces dépôts. La BCE ne s’est pas lancée dans

l’assouplissement quantitatif selon les modalités adoptées par quelques autres pays de

l’OCDE, qui avaient pour but avoué de stimuler l’offre de monnaie. Toutefois, elle a effectué

des achats limités de titres de la dette publique sur les marchés secondaires en vertu du

Programme pour les marchés de titres, visant à garantir un fonctionnement approprié du

mécanisme de transmission en dépit de fortes tensions sur les marchés de la dette

souveraine.

Durant la crise, la BCE a pris des mesures sans précédent pour s’acquitter de son

mandat relatif à la stabilité des prix. Dans ce contexte, elle a indiqué clairement qu’elle

était prête à adopter des mesures non conventionnelles sur une grande échelle pour

protéger le mécanisme de transmission de la politique monétaire. En conséquence, la BCE

est devenue plus impliquée dans les questions financières et budgétaires. De façon tout à

fait directe, le Programme d’obligations garanties et le Programme pour les marchés de

titres ont conduit la BCE à acheter à la fois des dettes de sociétés et des dettes publiques.

La BCE a également participé à l’élaboration et au suivi du programme de sauvetage pour

la Grèce. Ces actions pouvaient se justifier dans une situation de crise. Par ailleurs, le solide

ancrage des anticipations inflationnistes laisse à penser qu’il n’y a pas eu d’effet négatif

sur la crédibilité de la BCE. Toutefois, un dispositif de gestion de crise efficace, s’ajoutant à

une gouvernance économique, financière et budgétaire plus saine, faciliterait les actions

prises par la BCE pour remplir son mandat en matière de stabilité des prix.

Les effets perturbateurs des cycles du crédit et des prix des actifs conduisent à se

demander si la politique monétaire peut réaliser plus efficacement son objectif de stabilité

des prix en prenant en compte ces tensions. La stratégie monétaires à deux piliers de la

BCE met déjà fortement l’accent sur les évolutions monétaires et du crédit. Toutefois, la

moyenne des carrés des écarts du taux d’inflation annuel en fréquence mensuelle par

rapport à l’objectif implicite n’a été que de 0.4 %, alors que la croissance de l’agrégat

monétaire M3 a toujours largement dépassé le taux de référence de 4.5 % et a atteint en

moyenne près de 8 %. Bien que le pilier monétaire ne puisse pas se prêter à une

interprétation mécanique, cet écart soulève de sérieuses questions. De surcroît, la relation

non conditionnelle entre la croissance de la masse monétaire au sens large et la croissance

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 43

Page 46: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

du PIB nominal s’est rompue de façon spectaculaire vers la fin de 2000 (graphique 1.15).

Selon des analyses empiriques récentes de la BCE, cela peut s’expliquer par des

fluctuations de patrimoine (voir Stark, 2010 pour une vue d’ensemble). Cependant, on peut

alors se demander si la valorisation des actifs n’a pas résulté elle-même de l’expansion

rapide du crédit et de l’abondance des liquidités. Il faudrait continuer d’accorder de

l’attention à des facteurs tels que les prix des actifs et l’expansion des bilans qui peuvent

présenter des risques pour la stabilité des prix à moyen et long terme. Le pilier monétaire

de la BCE implique déjà une surveillance étroite de l’évolution de la monnaie et du crédit.

Les modifications récentes de cette analyse sont décrites dans Papademos et Stark (dir.

publ.)(2010). Il faudrait continuer de renforcer cette approche pour l’intégrer efficacement

et systématiquement dans le processus d’élaboration de la politique monétaire et faire en

sorte que les anticipations inflationnistes restent bien ancrées.

La politique monétaire est un instrument peu efficace pour dégonfler des bulles, si ce

n’est à la marge4. Des politiques macroprudentielles efficaces s’imposent en conséquence.

S’il est difficile de détecter en temps réel des fluctuations insoutenables du crédit et des

prix des actifs, une évaluation raisonnable n’est pas impossible. La politique

macroprudentielle devrait s’attaquer aux causes structurelles des flambées des prix ou du

crédit, atténuer le caractère cyclique du système financier et autoriser des mesures

réglementaires discrétionnaires s’il apparaît néanmoins des bulles et des expansions

insoutenables du crédit. La création du Comité européen du risque systémique (CERS) ainsi

que d’autres mesures destinées à consolider les réglementations financières devraient

contribuer à résoudre ce problème (chapitre 4). Les informations émanant du pilier

monétaire pourraient contribuer très utilement aux travaux du CERS. En ce qui concerne la

politique monétaire, il est important que l’analyse monétaire continue d’intervenir de

façon symétrique dans les décisions de politique monétaire. La panoplie améliorée de

modèles monétaires de la BCE devrait être utilisée régulièrement à l’appui de l’analyse

monétaire développée dans le Bulletin mensuel (OCDE, 2009a).

Graphique 1.15. Masse monétaire au sens large1 et PIB nominalPourcentage de variation en glissement annuel

1. La masse monétaire au sens large est représentée par l’agrégat M3.

Source : BCE et OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364204

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14En pourcentage

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1982 84 86 88 90 92 94 96 98 2000 02 04 06 08 10

Masse monétairePIB nominal

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201044

Page 47: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Une approche cohérente de la gouvernance économique s’impose aux niveaux de la zone euro, de l’UE et des États membres

Les carences des politiques qui ont été mises en évidence aux niveaux de la zone euro

et des États membres sont à certains égards similaires par leur nature, sinon par leur

ampleur. La crise a révélé des interactions étroites entre les évolutions financières,

économiques et budgétaires, la montée des risques financiers se soldant par une grave

récession et un lourd fardeau pour les finances publiques du fait de la contraction

inattendue des recettes et, dans certains cas, des coûts élevés liés au soutien du système

financier. De même, à la veille de la crise, la dynamique du marché des capitaux a

contribué à la croissance et généré d’abondantes recettes budgétaires. Ces mêmes

pressions, avec parfois plus d’intensité au niveau national, ont été responsables

d’importants déséquilibres dans la zone euro. Ceux-ci ont résulté de l’incapacité des

marchés à l’échelon de la zone euro et au niveau national d’évaluer les risques et d’exercer

une discipline, tandis que les politiques mises en œuvre n’ont pas réussi à juguler ces

pressions.

Des réformes audacieuses et généralisées s’imposent aux niveaux de l’UE, de la

zone euro et des États membres afin d’améliorer la stabilité économique, financière et

budgétaire. Pour s’attaquer aux importants déséquilibres économiques, financiers et

budgétaires, il faut mettre en avant une plus grande différenciation des dispositifs d’action

nationaux dans un cadre commun renforcé de normes minimales. Le cadre approprié de

politiques monétaires est pour l’essentiel en place, mais les politiques budgétaires et

macroprudentielles doivent être ajustées à la fois au niveau européen et au niveau des

pays. Un large éventail de réformes sont actuellement examinées par les autorités de la

zone euro et de l’UE. Étant donné l’architecture politique actuelle de la zone euro et de

l’Union européenne, il faut mettre au point des solutions tenant compte de l’absence

d’union budgétaire et du fait que chaque pays est en fin de compte responsable de ses

finances publiques. Cet état de choses limite les possibilités de contrôler les politiques

budgétaires au niveau de l’UE et rend plus difficile, par exemple, la mise en route de

certains projets communs, par exemple un système intégré de surveillance bancaire.

L’application de la discipline de marché au comportement des agents économiques publics

et privés peut exercer un effet simulant mutuel vis-à-vis de solutions institutionnelles

telles que l’amélioration de la réglementation, du contrôle et des mécanismes

d’application. De plus, comme aucune des deux approches ne s’est révélée suffisante, leur

utilisation conjointe contribuera à rendre le système aussi robuste que possible. Dans de

nombreux domaines, y compris en matière de discipline financière et budgétaire, il

convient de mettre au point des instruments de gestion de crise plus efficaces afin

d’améliorer le traitement des crises et de renforcer la crédibilité ex ante de la clause de non-

renflouement.

Il faudrait donner la priorité aux réformes structurelles des marchés du travail et des

produits, afin non seulement d’améliorer le niveau de vie mais aussi de rendre la zone euro

et les économies nationales plus résilientes (Duval et al., 2007). Ces initiatives peuvent

amortir l’impact et la persistance des chocs économiques. Bien qu’il existe sans doute un

arbitrage entre ces effets, les données d’observation montrent que l’impact net de

politiques moins rigides sur l’économie est positif (Duval et Vogel, 2007). Des réformes

visant à réduire la viscosité des salaires et des prix seraient particulièrement efficaces,

étant donné l’ampleur relative des obstacles à l’ajustement dans de nombreux pays de la

zone euro par rapport aux économies les plus flexibles de la zone OCDE. Parmi ces

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 45

Page 48: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

obstacles figurent une législation de protection de l’emploi (LPE) rigoureuse, une

couverture très large des conventions collectives négociées entre les syndicats et les

entreprises, et une réglementation restrictive des marchés de produits (RMP). Tandis que

des cadres d’action relativement rigoureux ont probablement atténué l’impact initial de la

crise dans de nombreux pays de la zone euro, ils risquent maintenant de retarder la reprise

économique et peut-être d’engendrer des pertes de production cumulées plus importantes

qu’ailleurs, comme cela s’est produit au lendemain de la récession économique de 2000-01

(OCDE, 2006). Dans le passé, on a observé de fortes variations dans la réponse du chômage

de longue durée aux chocs; une RMP restrictive et des taux de remplacement élevés des

prestations de chômage ont amplifié cette réaction, tandis que les dépenses publiques en

faveur des politiques actives du marché du travail (PAMT) l’ont amortie. Les réformes

contribueraient à enrayer une hausse du chômage structurel et une baisse des taux

d’activité, et faciliteraient les changements structurels indispensables dans les secteurs

affectés durablement par la crise financière. Des politiques structurelles débouchant sur

un ajustement plus marqué des prix et une productivité améliorée sont particulièrement

importantes pour les pays déficitaires qui doivent rééquilibrer la demande, améliorer la

compétitivité-prix et combattre un chômage élevé (CE, 2010b; OCDE 2010d,e). Certes,

l’existence d’un marché unique flexible et intégré est une condition préalable au bon

fonctionnement de l’union monétaire, mais il est paradoxal que les pays de la zone euro se

montrent moins respectueux de la législation sur le marché unique que les autres pays de

l’UE (Monti, 2010).

La coordination de la réponse à la crise a été parfois compliquée par le cadre

institutionnel de l’Union européenne et de la zone euro, les compétences étant réparties

entre des organismes nationaux et supranationaux, mais aussi par la multitude d’acteurs

en présence. La rapidité et la cohérence des actions et de la communication peuvent se

révéler très importantes en temps de crise. Elles sont plus faciles à atteindre dans un État-

nation où le processus décisionnel est moins complexe. Avec l’entrée en vigueur du traité

de Lisbonne en décembre 2009, l’Eurogroupe a été reconnu pour la première fois comme un

organisme européen, certes informel, chargé de renforcer la coordination des politiques

économiques. En outre, le traité donne pouvoir aux membres du Conseil de la zone euro de

prendre des décisions formelles sur certaines questions relatives à la zone. L’article 136 du

nouveau traité donne aux pays de la zone euro la possibilité légale de renforcer la

coordination et la surveillance de la discipline budgétaire et d’adopter des lignes directrices

spécifiques pour la zone.

Encadré 1.2. Recommandations générales sur la sortie de crise

La reprise est désormais engagée, mais il subsiste des risques considérables. Larésorption des déséquilibres économiques, financiers et budgétaires qui se sontaccumulés dans certains pays sera une tâche longue et difficile (chapitre 2).

Mesures visant à stabiliser et assainir le système financier

● Le soutien public au système financier devrait être progressivement retiré à mesure queles conditions le permettront, notamment par un relèvement graduel du coût du recoursaux mesures de soutien. Les autorités devraient veiller à ce que les banques soientcorrectement capitalisées et se montrent transparentes sur l’étendue de leursdifficultés.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201046

Page 49: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

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Encadré 1.2. Recommandations générales sur la sortie de crise (suite)

● Les tests de résistance financière appliqués au système bancaire dans l’ensemble de l’UE devraient êrenouvelés à intervalles réguliers et davantage harmonisés.

● Tous les pays de la zone euro devraient disposer d’une panoplie complète d’instruments d’action porésoudre les difficultés financières, de façon à pouvoir régler le cas des institutions défaillantes en temvoulu et d’une manière ordonnée et efficiente (chapitre 4). Ces dispositifs devraient être conçus de tesorte que les coûts des défaillances bancaires soient pris en charge autant que possible par actionnaires et les créanciers.

Politique monétaire

● Les mesures de relance monétaire devraient être supprimées, dès qu’apparaîtront des tensions àhausse sur l’inflation.

● Les mesures non conventionnelles devraient continuer d’être retirées parallèlement aux amélioratiodu mécanisme de transmission de la politique monétaire, mais la politique monétaire devrait se teprête à réagir si les risques de dégradation dans le secteur financier se concrétisent.

● Il faudrait continuer d’accorder de l’attention aux facteurs tels que les prix des actifs et l’expansion dbilans qui peuvent présenter des risques pour la stabilité des prix à moyen et long terme. développement de l’analyse monétaire devrait être poursuivi en vue de l’intégrer efficacementsystématiquement dans le processus d’élaboration des politiques.

Politique macroprudentielle

● La création du Comité européen du risque systémique (CERS) est la bienvenue, parallèlement aux autmesures destinées à rendre le système financier plus robuste et réduire l’éventualité de cycles financiperturbateurs (chapitre 4).

Politique budgétaire

● L’assainissement budgétaire constitue la priorité immédiate pour stabiliser les finances publiques, edevrait commencer dès 2011 dans tous les pays (chapitre 3). Les mesures temporaires de relandevraient être retirées comme prévu. Une concentration des mesures en début de période est nécessadans quelques pays.

● Des plans d’assainissement prospectifs, pluriannuels, détaillés et crédibles devraient être élaborés datous les pays. L’assainissement devrait être axé sur les dépenses, en particulier les engagementsdépenses à long terme, et conçu de manière à minimiser l’impact sur la croissance, aussi bien à coterme qu’à long terme.

Améliorer la performance économique et créer de la croissance

● Des réformes structurelles sur les marchés du travail et des produits devraient être entreprises pofaciliter l’ajustement économique dans le court terme et renforcer la croissance de la productipotentielle. Cette action devrait notamment consister à réaliser les objectifs de la StratéEurope 2020 et à approfondir le marché unique. L’assainissement budgétaire offre une occasion réformer les systèmes fiscaux et de rendre plus efficace la prestation des services publics. La directeuropéenne relative aux services devrait être intégralement transposée et appliquée.

Gouvernance de la zone euro

● Les politiques nationales des pays de la zone euro devraient être traitées plus systématiquement comrelevant de l’intérêt commun, ce qui implique des liens plus étroits entre les politiques européennesnationales et une plus grande coordination entre les politiques macroéconomiques, budgétairstructurelles et financières.

● Le dispositif de gestion des crises devrait être renforcé par la création d’un mécanisme permanentrésolution des crises, assorti d’une forte conditionnalité.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 47

Page 50: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

Notes

1. Conseil de l’Union européenne, 2 894e réunion du Conseil, Affaires économiques et financières,Luxembourg, 7 octobre 2008.

2. L’amendement de mars 2009 à la Directive européenne relative aux systèmes de garantie desdépôts porte à 100 000 EUR cette limite, qui doit être progressivement mise en œuvre d’ici à la finde 2010.

3. Voir la communication de la Commission « L’application des règles en matière d’aides d’État auxmesures prises en rapport avec les institutions financières dans le contexte de la crise financièremondiale actuelle » du 13 octobre 2008.

4. Voir « La politique économique contracyclique » dans OCDE (2010a).

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201048

Page 51: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

1. SORTIR DE LA CRISE

OCDE (2009a), Études économiques de l’OCDE : Zone euro, OCDE, Paris.

OCDE (2009b), Études économiques de l’OCDE : Union européenne, OCDE, Paris.

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OCDE (2010b), Objectif croissance, OCDE, Paris.

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 49

Page 52: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010
Page 53: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

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Chapitre 2

Résorber et éviter les déséquilibres non soutenables

Certains pays de la zone euro ont accumulé des déséquilibres extérieurs importants et persistants durantphase d’expansion, lesquels ont mis au jour de sérieuses déficiences dans la gestion macroéconomiquel’union monétaire. L’Espagne, la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont enregistré des déficits de balance couraélevés par rapport aux périodes passées, alors que l’Allemagne, la Finlande et les Pays-Bas ont affiché dexcédents substantiels. Certains de ces déficits et excédents étaient plus prononcés que ne le justifiaiesemble-t-il, les fondamentaux économiques. L’accumulation massive de la dette a rendu les économdéficitaires vulnérables face aux chocs, compliqué leur redressement après la crise financière mondialeremis en cause la stabilité de la zone euro. Dans certains pays, la politique budgétaire n’a pu contrecarrera parfois même aggravé ces tensions.

Les déséquilibres extérieurs ont été nourris par des déséquilibres internes sous-jacents, dans les domainéconomique, financier et parfois budgétaire, imputables à la fois à une série de chocs par pays et à ustabilisation macroéconomique et financière insuffisante. Les variations des taux d’intérêt réels dans certapays ont contribué à des profils d’emprunt et d’épargne divergents qui ont alimenté une forte expansion crédit et suscité un affaiblissement de la compétitivité dans plusieurs pays déficitaires. Les déficiences deréglementation financière et les anticipations de croissance exagérément optimistes ont encouragé une prde risques excessifs dans les pays déficitaires comme dans les pays excédentaires.

Les déséquilibres néfastes impliquent des distorsions dans l’allocation des ressources et une vulnérabiaccrue. Lorsque la crise financière a frappé, certains pays déficitaires ont été confrontés à une combinaisonproblèmes : forte contraction de la demande privée, défaillance du système financier et fragilité des finanpubliques. La correction des déséquilibres extérieurs, dans les pays déficitaires comme dans les paexcédentaires, sera longue et difficile.

Une nouvelle approche pluridisciplinaire de la gestion économique et financière dans la zone euro s’imppour assurer un développement équilibré à l’avenir. Les chocs qui ont conduit à cette accumulationdéséquilibres ne se reproduiront pas nécessairement, mais des pressions du même type apparaîtrovraisemblablement au sein de l’union monétaire. La gestion macroéconomique, financière et budgétaire devêtre renforcée de façon intégrée, parallèlement à la mise en œuvre de réformes structurelles. La différenciatnécessaire à une plus grande stabilisation des économies nationales pourra ainsi être assurée, toutgarantissant la protection de la zone euro dans son ensemble contre les évolutions peu viables intervenadans les différents pays. D’importantes modifications législatives sont engagées au niveau de l’UE poaméliorer la surveillance des déséquilibres et veiller à ce que les mesures correctrices nécessaires soiengagées lorsque des risques se manifestent.

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Page 54: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Des déséquilibres amples et persistants au sein de la zone euro se sont accumulés

durant la reprise économique, engendrant des tensions qui ont contribué à la crise

économique et financière, même si la zone euro dans son ensemble avait une balance

courante proche de l’équilibre. Le présent chapitre commence par analyser les liens entre

ces déséquilibres de balance courante et le fonctionnement efficace d’une union

monétaire, en cherchant à déterminer dans quelle mesure les déséquilibres en question

ont été excessifs. On a observé dans certains pays de la zone euro d’amples excédents et

déficits de la balance courante, du fait de déséquilibres économiques, financiers et

budgétaires internes, associés à des défauts d’alignement et des rigidités de caractère

structurel. La stabilisation suite à des chocs sous-jacents n’a pas été efficace et les écarts

de taux d’intérêt réels ont parfois joué un rôle déstabilisateur, notamment dans les pays

déficitaires où des conditions d’emprunt faciles ont conduit à des cycles du crédit et des

prix du logement, associés à une érosion de la compétitivité des prix. La recherche de

rendements élevés a incité à la prise de risques excessifs dans les pays excédentaires.

L’épargne excédentaire accumulée dans les pays à excédents a été acheminée par le biais

des marchés des capitaux vers les pays déficitaires : alors que ce processus pouvait en

principe faciliter l’allocation efficiente du capital, celle-ci a été défectueuse en raison des

carences de la réglementation financière et d’anticipations qui se sont avérées trop

optimistes.

La deuxième section du chapitre met en évidence la nécessité immédiate de corriger

les déséquilibres existants, en commençant par stabiliser le secteur financier et les

finances publiques des pays qui ont subi les plus fortes récessions. Bien que certains

aspects des déséquilibres enregistrés au cours de la dernière décennie soient propres à la

période, des pressions du même type sont appelées à réapparaître au sein de l’union

monétaire. Une nouvelle approche pluridisciplinaire est requise pour empêcher que des

déséquilibres excessifs de même ampleur n’interviennent à l’avenir. Il faudrait pour cela

une large panoplie de politiques permettant de s’attaquer aux sources des déséquilibres,

notamment une politique budgétaire plus saine et des politiques macroprudentielles plus

efficaces, soutenues par des réformes structurelles. Il faut faire en sorte que les paramètres

de l’action des pouvoirs publics soient plus différenciés suivant les pays, tout en veillant à

ce que la zone euro dans son ensemble soit protégée de positions non viables au niveau

national. Il y aurait lieu en particulier de renforcer la surveillance des déséquilibres à

l’échelle de l’Eurogroupe et de l’UE. Les aspects budgétaires et financiers des réformes

nécessaires, aussi bien au niveau de l’UE qu’au niveau national, sont examinés plus en

détail respectivement dans les chapitres 3 et 4.

Des déséquilibres extérieurs amples et persistants se sont accumulés durant la phase d’expansion

Durant la reprise, certains pays de la zone euro ont enregistré des déséquilibres de

balance courante considérables, lesquels étaient parmi les plus élevés de la zone OCDE.

De 2002 à 2007, les déficits de l’Espagne, de la Grèce et du Portugal se sont établis en

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201052

Page 55: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

moyenne à plus de 7 % du PIB national (graphique 2.1, partie supérieure)1. À l’inverse,

l’Allemagne, la Finlande et les Pays-Bas ont affiché des excédents moyens de plus de 5 %

du PIB. Les déficits n’ont pas été financés principalement par l’investissement direct

étranger (IDE). La balance globale des opérations courantes de la zone euro a été proche de

l’équilibre, les emprunts de pays comme l’Italie et l’Espagne étant de fait largement

compensés par les importants excédents de l’Allemagne et, dans une moindre mesure, des

Pays-Bas (graphique 2.1, partie inférieure). Depuis le début de la crise financière, la

dispersion des soldes des opérations courantes s’est considérablement réduite, avec un

recul des excédents et, suite à l’effondrement de la demande intérieure, un rétrécissement

plus marqué des déficits, notamment en Espagne (OCDE, 2010a).

L’ampleur et la persistance des déséquilibres ont été plus marquées que lors des

décennies antérieures (graphique 2.2). En 1998, les déséquilibres de balance courante des

pays de la zone euro se situaient entre –5 % à 7 % du PIB, avec un déséquilibre moyen

Graphique 2.1. Soldes extérieurs des pays de la zone euro

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364223

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15Solde moyen de la balance courante des pays de l’OCDE En pourcentage du PIB national, 2002-07

Pays de la zone euro Autres pays de l’OCDE

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Contributions nationales au solde de la balance courante de la zone euro En pourcentage du PIB de la zone euro

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Page 56: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

absolu de 3 % du PIB. En 2007, la fourchette était de –14 % à 8 % du PIB et le déséquilibre

moyen absolu avait doublé pour atteindre 6 % du PIB. Bien que les pays de la zone euro

aient enregistré d’importants déséquilibres par le passé, l’Espagne et l’Irlande, par

exemple, accusant de très importants déficits au début des années 80, le creusement

considérable des déséquilibres extérieurs durant la reprise a été un phénomène nouveau.

Les amples déséquilibres ont contribué à une grande dispersion des engagements

internationaux nets. L’Espagne, la Grèce et le Portugal ont accumulé des engagements

extérieurs nets de plus de 70 % du PIB national en 2008 (graphique 2.3). Ce niveau

d’endettement extérieur, l’un des plus élevés de la zone euro, a été important par rapport

à l’expérience passée des pays de la zone. Seule la Finlande avait auparavant connu une

situation analogue, suite à l’effondrement de l’Union soviétique. Les positions extérieures

nettes des pays créditeurs ont aussi atteint un haut niveau, avec un solde positif net de

20 % du PIB pour l’Allemagne et de plus de 40 % pour la Belgique et le Luxembourg2. En

pourcentage du PIB, les positions nettes de ces trois derniers pays sont semblables à celles

du Japon et de la Norvège. La zone euro dans son ensemble a enregistré une position

extérieure nette proche de l’équilibre, les importants déséquilibres internes se compensant

dans une large mesure. Cependant, en valeur absolue, les positions extérieures nettes de

certains pays ont été importantes dans une optique mondiale : la position extérieure nette

de l’Allemagne en 2008 a représenté un peu moins de 40 % de celle du Japon exprimée en

dollars et près de 60 % de celle de la Chine.

Les variations des positions extérieures nettes au cours de la période 2002-07 ont été

prononcées. Les positions extérieures nettes du Portugal et de l’Espagne ont toutes deux

diminué de 25 points de pourcentage du PIB environ, alors que la position nette de

l’Allemagne s’est accrue de près de 20 points de PIB. Une importante dégradation est aussi

intervenue en France. Les pays ayant un endettement extérieur en 2002 ont aussi eu

tendance à accuser d’importants déficits, alors que les pays créditeurs ont affiché des

excédents, ce qui a exacerbé les différences initiales des positions extérieures nettes. Cette

incidence ne découle qu’en partie de la prise en compte dans la balance courante des

intérêts versés sur la dette existante ou du revenu encaissé sur les actifs extérieurs nets.

Les variations de la position extérieure nette en pourcentage du PIB ont été atténuées par

Graphique 2.2. Balance des opérations courantes1

En pourcentage du PIB national

1. La zone ombrée indique la fourchette située entre le 25e et 75e centiles.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364242

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Page 57: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

une forte croissance nominale dans certains pays débiteurs et par une faible croissance

dans les pays créanciers. Au total, les réévaluations et autres ajustements ont aussi eu une

incidence notable sur la position extérieure nette des pays de la zone euro (Lane, à

paraître). Bien qu’il soit impossible de distinguer ces facteurs, leur incidence cumulée est

fortement négative pour la plupart des pays de la zone euro sur la période 2002-07, sous

l’effet du désalignement monétaire affectant les positions des pays de la zone euro ainsi

que de l’affaiblissement du dollar.

Les déséquilibres extérieurs sont imputables à des déséquilibres économiques et financiers internes

L’ampleur des déséquilibres de la balance courante et les positions créditrices et

débitrices extérieures nettes cumulées de certains pays de la zone euro amènent à se

demander si des variations aussi importantes et sans précédent peuvent être justifiées par

des besoins économiques sous-jacents. En théorie, les déficits et excédents de balance

courante ainsi que l’épargne et le crédit au niveau international sont un mécanisme

important permettant aux économies ouvertes d’accumuler du patrimoine ou

d’emprunter, et de procéder au partage international des risques. Dans la mesure où ces

positions reflètent des préférences, des technologies et un patrimoine initial, elles font

partie des gains découlant du commerce et du financement au niveau international. De

fait, faciliter ces mouvements de capitaux en supprimant les risques nominaux de change

a été l’une des motivations de l’union monétaire. Si la solvabilité à long terme implique que

les pays ne peuvent continuellement accroître leur endettement plus rapidement que leur

revenu, certains emprunts extérieurs peuvent être jugés viables pour financer des

investissements productifs et lisser la consommation. Pour les économies matures ayant

une population vieillissante, la constitution d’actifs extérieurs peut être un moyen efficace

de financer la consommation future.

Graphique 2.3. Position extérieure netteEn pourcentage du PIB, 2008

1. Calculé sur la période 1985-2008 avec l’Allemagne, l’Australie (1986-2008), l’Autriche, la Belgique, le Canada,l’Espagne, les États-Unis, la Finlande, la France (1989-2008), l’Italie, la Nouvelle-Zélande (1989-2008), les Pays-Bas,le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse.

Source : FMI, Statistiques financières internationales.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364261

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Page 58: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Les fondamentaux n’expliquent qu’une partie des déséquilibres extérieurs dans la zone euro

Les données internationales confirment que les positions de balance courante sont en

partie déterminées par les facteurs économiques fondamentaux qui sous-tendent la

consommation et l’investissement relatifs à l’échelon national. Les différences dans les

niveaux de revenu, la croissance du PIB, les taux d’intérêt réels et les évolutions

démographiques jouent un rôle important (Chinn et Prasad, 2003). L’intégration croissante

des marchés des capitaux a atténué les contraintes en matière d’épargne et de crédit à

l’échelle internationale et a conduit à une dispersion tendancielle de plus en plus marquée

des positions de balance courante (Faruqee et Lee, 2009). D’autres facteurs économiques

observés mais moins profondément ancrés, comme les rigidités nominales, l’orientation

de la politique budgétaire et le niveau tendanciel du chômage jouent aussi un rôle (Cheung

et al., 2010). En principe, on aurait pu attendre de l’union monétaire qu’elle renforce le rôle

des fondamentaux pour les pays de la zone euro, et c’est ce que l’expérience a confirmé

(CE, 2009).

Ces facteurs fondamentaux semblent bien expliquer une part non négligeable des

déséquilibres de balance courante observés dans la zone euro ces dernières années, si l’on

se fonde sur une analyse empirique des pays de l’OCDE utilisant des techniques

économétriques sur données de panel avec moyenne temporelle (Barnes et al., à paraître).

Les résultats de cette étude sont globalement conformes à des analyses antérieures des

données internationales mentionnées plus haut. Il en ressort que les facteurs

démographiques ont joué un rôle peu important dans la plupart des cas. La situation

démographique de l’Allemagne aurait dû générer un important excédent, alors qu’un pays

ayant une population relativement jeune comme l’Irlande aurait dû enregistrer un déficit

(graphique 2.4)3. Les écarts de revenu et de croissance ont aussi eu une incidence sur la

balance des opérations courantes, en raison des flux de capitaux vers les pays à forte

croissance et à faible revenu, mais ces effets ont été relativement peu marqués. La position

extérieure nette initiale a eu une grande incidence sur les déséquilibres au cours de la

période 2002-07. D’autres facteurs ont aussi joué un rôle identifiable dans la détermination

du solde de la balance courante, même s’il ne s’agit pas de fondamentaux économiques

profondément ancrés et que ces facteurs peuvent même parfois refléter des excès

économiques. En particulier, les déficits budgétaires de la Grèce et du Portugal ont

beaucoup contribué à la faiblesse de la position extérieure de ces pays4. La vigueur de

l’investissement dans le logement, associée à une envolée peu viable de l’immobilier, joue

un très grand rôle dans le déficit de la balance courante de l’Espagne et de l’Irlande.

Néanmoins, l’ampleur des déséquilibres au cours de la période, aussi bien dans les

économies de la zone euro que dans d’autres économies de l’OCDE, ne peut être

totalement expliquée par les relations historiques. Si les facteurs observés et les liens

historiques expliquent généralement le signe du déséquilibre, ils tendent à en sous-

estimer l’ampleur. Entre 2004 et 2008, aussi bien les importants excédents de balance

courante de l’Allemagne et des Pays-Bas que les gros déficits de l’Espagne, de la Grèce et du

Portugal comportent davantage d’éléments inexpliqués dans ce modèle que cela n’est le

cas pour les autres pays de la zone euro. Il importe de noter qu’il existe aussi une forte

composante inexpliquée dans le déficit de la balance courante des États-Unis. Cet élément

est notamment plus élevé que lors des périodes antérieures5. Tandis que les résidus plus

importants ne peuvent par définition s’expliquer dans le cadre du modèle, une des

explications pourrait être une intégration plus forte des marchés de capitaux. Cependant,

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201056

Page 59: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

la dispersion croissante des positions de balance courante au niveau international durant

cette période semble aller bien au-delà des tendances sous-jacentes à la dispersion

(Faruqee et Lee, 2009). Ce phénomène se retrouve aussi bien dans la zone euro que dans les

autres pays de l’OCDE. Il est compatible avec les données montrant que le puissant cycle

du crédit et les tendances de l’épargne et de l’investissement observés au niveau mondial

au cours de cette période ont accentué les déséquilibres sous-jacents. Du reste, le cycle

mondial du crédit a pu fausser certains des facteurs fondamentaux traités comme étant

exogènes dans l’analyse, par exemple les écarts de croissance et les taux d’intérêt réels.

Compte tenu de l’élément inexpliqué exceptionnellement important des déséquilibres

récents et du rôle explicatif de facteurs comme la politique budgétaire et le boom de

l’immobilier, il semblerait que les déséquilibres de balance courante dans certains pays de

la zone euro comme ailleurs ont été beaucoup plus marqués que ne sauraient le justifier

les seuls fondamentaux.

Les déséquilibres sont dus à des pressions économiques et des déséquilibres intérieurs divergents

Les pays de la zone euro ont été exposés à un large éventail de pressions économiques

sous-jacentes divergentes au cours de la dernière décennie. Leur intégration économique

imparfaite et les rigidités structurelles, associées à ces facteurs de divergence, exigeaient

une gestion économique, macroprudentielle et budgétaire vigoureuse au niveau national,

compte tenu des exigences d’une monnaie commune et de l’absence connexe de politique

monétaire nationale. Le compte extérieur a fini par jouer un rôle important dans

Graphique 2.4. Déterminants de la balance couranteContributions au solde de la balance courante au cours de la période 2004-08

1. Somme des contributions de la dépendance des jeunes et de la dépendance effective et prévue des personnesâgées.

2. Somme des contributions du niveau du PIB par tête et de la croissance du PIB.3. Somme des contributions du taux d’intérêt réel et des autres facteurs.

Source : Barnes, S., J. Lawson et A. Radziwill (à paraître), « Current Account Imbalances in the Euro Area : AComparative Perspective », Documents de travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, OCDE, Paris.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364280

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1

2 3

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DémographieRattrapageSituation budgétaireAvoirs extérieurs nets

Investissement en logementAutresRésiduBalance courante

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 57

Page 60: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

l’absorption des différences de la demande nominale entre les pays, conduisant à des

déséquilibres importants, persistants et parfois excessifs (encadré 2.1). Pour un grand

nombre de pays de la zone euro, on a observé une relation étroite entre les soldes intérieurs

et extérieurs durant la dernière phase d’expansion de l’activité (graphique 2.5). Les pays

ayant une croissance supérieure à la moyenne, comme l’Espagne, la Grèce et l’Irlande, ont

souffert d’un certain degré de surchauffe intérieure, d’où l’apparition de déficits de balance

courante. Une demande privée très dynamique dans nombre de cas, suscitée par la

faiblesse des taux d’intérêt réels et la forte croissance du crédit, semble être la principale

explication de la vigueur de l’absorption nationale, à l’exception de la Grèce, où la politique

budgétaire laxiste a joué un grand rôle. En revanche, l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique et

les Pays-Bas ont enregistré une croissance inférieure à la moyenne de la zone et ont

également accumulé d’importants excédents de balance courante. Comme on l’a vu plus

haut, l’ampleur des déséquilibres extérieurs semble plus marquée que celle pouvant être

expliquée par les facteurs économiques sous-jacents. Les évolutions dans certains autres

pays de l’OCDE ont été plus en phase : l’Italie et le Portugal ont enregistré une très faible

croissance, une détérioration de la compétitivité et des déficits de balance courante. Dans

le cas du Portugal, cette faiblesse s’explique pour partie par une dépendance excessive à

l’égard de la consommation et de l’activité immobilière au début des années 2000, comme

on l’a vu aussi plus récemment dans d’autres pays déficitaires (OCDE, 2010c). La

consécutive faiblesse des gains de productivité du travail, conjuguée à une modération

insuffisante des salaires, a depuis fait obstacle au rééquilibrage de l’économie et ancré

dans la durée l’important déficit de balance courante. Dans le cas de l’Italie, le principal

facteur du déficit de la balance courante est la performance économique médiocre de ce

pays, suite aux problèmes structurels et à la restructuration de la production industrielle

(OCDE, 2009b). Comme envisagé dans les ouvrages sur la zone monétaire optimale, les

déséquilibres ont en général été particulièrement importants dans les pays où les chocs

étaient les plus asymétriques par rapport à la moyenne de la zone euro, mais aussi dans

ceux qui étaient les moins intégrés avec les autres économies de la zone et qui

rencontraient d’importants obstacles structurels à l’ajustement économique.

Graphique 2.5. Croissance et déséquilibres dans la zone euroMoyenne annuelle, 2002-07

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364299

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201058

Page 61: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

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Encadré 2.1. La stabilisation économique dans une union monétaire

L’objectif de la politique macroéconomique devrait être une croissance efficace et durable. L’efficacitcet égard intervient lorsque les coûts marginaux de production sont minimisés au fil du temps et queconsommation suit les préférences intertemporelles. Dans cette optique, il faut équilibrer la demandel’offre totale dans l’économie intérieure (équilibre intérieur) et s’assurer que la position de la balancourante est compatible avec le niveau d’efficience de l’accumulation ou de la réduction des flux capitaux extérieurs (équilibre extérieur) (Williamson, 1983). Si la position extérieure nette d’efficiens’établit à zéro, l’absorption nationale est égale à la production potentielle.

Ajustement économique aux chocs propres aux pays

Même dans un cadre stylisé simple, la dynamique de l’ajustement économique face aux chocs propaux pays est compliquée pour les petites économies ouvertes dans une union monétaire. Selon hypothèses d’un modèle Mundell-Fleming standard avec un taux de change nominal fixe et une mobiparfaite du capital, un choc affectant la demande nominale dans un pays a une forte incidence effective la demande globale, car l’offre de monnaie étant tout à fait élastique, il n’y a pas d’éviction du fait dehausse des taux d’intérêt (Flemming, 1962; Mundell, 1962). Les conditions monétaires sont parfaitemeaccommodantes.

Toutefois, les chocs affectant la demande nominale suscitent des pressions inflationnistes dal’économie intérieure. Dans l’hypothèse où les prix des biens échangeables sont fixés sur les marchinternationaux, seuls les prix des biens non échangeables augmentent face à un choc positif affectantdemande. Cela fait grimper le niveau global des prix.

La variation des prix des biens non échangeables par rapport aux biens échangeables conduit à une pede compétitivité, ce qui entraîne un déplacement des dépenses vers les biens échangeablL’accroissement de la demande de travail dans le secteur des biens non échangeables, pour sa part, doles salaires dans l’ensemble de l’économie et entraîne un transfert de la main-d’œuvre et de la productvers le secteur des biens non échangeables. La balance des opérations courantes se dégrade. Ce canal decompétitivité contribue à la stabilisation de l’économie nationale dans les hypothèses types, en absorbales chocs affectant la demande par le biais des exportations nettes et en atténuant ainsi les conséqueninflationnistes.

Étant donné que les taux d’intérêt nominaux sont fixes pour la zone euro, le canal du taux d’intérêt rest un facteur d’amplification et de déstabilisation. Un choc négatif affectant la demande intérieure, pexemple, tendra à réduire le niveau de prix et à accroître la compétitivité. À mesure que les prix diminuele taux d’intérêt réel augmente, pesant davantage sur la demande intérieure à court terme. En outre, du fdes rigidités des prix en termes nominaux, la politique monétaire optimale doit être conçue en partie pocompenser l’incidence conjuguée du choc initial et des rigidités (Galí et Gertler, 1999), de sorte ql’impossibilité pour les taux d’intérêt réels de s’aligner sur la politique optimale a un coût supplémentacomme suggéré, par exemple, par une règle de Taylor type. Ce coût sera d’autant plus élevé que les rigidinominales sont fortes.

Considérés globalement, ces canaux d’ajustement impliquent qu’un choc positif touchant la demannominale conduit à une situation où l’équilibre interne est rétabli par le biais de modifications des prix dbiens non échangeables, entraînant un changement des prix à la consommation au niveau intérieurmodifiant l’équilibre extérieur de l’économie, ce qui peut avoir pour corollaire une expansion deconsommation réelle sous l’effet de l’expansion intérieure pendant quelque temps. Cependant, cesituation est inefficiente car les coûts marginaux de l’économie s’écartent de leur niveau d’efficience et modifications de la position extérieure nette ne reflètent pas nécessairement les préférences soujacentes, le patrimoine et la technologie.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 59

Page 62: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

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La divergence des pressions économiques a eu plusieurs origines : l’Espagne, la Grèce

et l’Irlande ont traversé ces dernières décennies une période de rattrapage économique,

partant de niveaux de revenu faibles par rapport aux autres pays de la zone euro, ce qui a

engendré un certain nombre de tensions. Un processus similaire a eu lieu au Portugal, mais

il s’est enlisé au cours de la décennie écoulée et la correction a été prolongée.

Premièrement, la croissance de la productivité dans certains de ces pays, notamment

l’Irlande, est intervenue à un rythme plus rapide dans le secteur des biens échangeables, ce

qui a donné lieu à des pressions d’inflation lorsque des ressources ont été redéployées à

partir du secteur des biens non échangeables, conformément à l’effet Balassa-Samuelson.

Toutefois, cet effet n’agit pas systématiquement dans tous les pays6. Si cette inflation est

compatible avec l’ajustement vers l’équilibre, la baisse des taux d’intérêt réels qui en

résulte a un effet déstabilisateur. Deuxièmement, il peut être difficile de stabiliser une

économie en mutation rapide. Lorsque les gains de productivité futurs sont anticipés, la

consommation et l’investissement courants seront élevés par rapport à la capacité d’offre

de l’économie, ce qui peut entraîner une augmentation de la demande et des prix dans le

secteur des biens non échangeables supérieure à la progression effective de la productivité

dans le secteur des biens échangeables, évinçant ainsi certains des gains potentiels de la

performance à l’exportation (Corden et Neary, 1982). Par ailleurs, on peut aussi avoir du mal

à déterminer la fin de la période de rattrapage, notamment lorsque la demande intérieure

Encadré 2.1. La stabilisation économique dans une union monétaire (suite)

Les mécanismes d’équilibrage de la position extérieure, en revanche, sont plus subtils, l’équilibre debalance courante étant rétabli par la nécessité de rembourser des emprunts ou de puiser dans l’épargpour répondre à la contrainte de solvabilité à long terme. Cela peut se faire progressivement ou impliquune réévaluation spectaculaire, par les prêteurs, des perspectives des différentes économies. Même avecflexibilité des prix, les chocs peuvent se traduire par des écarts persistants du solde extérieur par rapporson niveau d’efficience, alors que les facteurs favorables à l’équilibre de la balance des opératiocourantes peuvent être affaiblis pendant de longues périodes. L’impuissance à respecter cette contraintlong terme, soit de la part des emprunteurs, soit de la part des prêteurs, peut contribuer à prolongerpériode d’ajustement.

Les effets d’accélérateur financier accentuent l’instabilité économique

La faiblesse des taux d’intérêt réels peut aggraver les déséquilibres lorsque l’économie est solide, déclenchant des cycles du crédit intérieur et des effets d’accélérateur financier. On distingue deprincipaux canaux conventionnels pour les effets d’accélérateur financier (Bernanke et Gilchrist, 1995)canal des bilans, par lequel la valeur des garanties ou les encaisses disponibles déterminent dans quemesure les emprunteurs potentiels peuvent s’engager à rembourser des prêts, et le canal des prbancaires, par lequel l’offre de crédit bancaire est affectée par la solidité des bilans bancaires. Le canal dbilans a un puissant effet spécifique au pays, car la valeur des biens immobiliers donnés en garantie, qest particulièrement importante pour les prêts aux ménages et aux entreprises, dépend du prix des bieau niveau local : une hausse induite par le crédit des prix des logements tendra à accroître la valeur dlogements dans la même localité. L’effet spécifique au pays d’un choc d’intérêt donné dépend aussi dcaractéristiques structurelles du marché national du crédit (Catte et al., 2004). L’appétit pour le risque peégalement être plus important lorsque les taux d’intérêt réels sont faibles : il est en effet relié au tamarginal temporel de substitution (Lucas, 1978). Étant donné que le taux d’intérêt réel au sein de l’unmonétaire varie du fait que les consommateurs des différents pays sont confrontés à des évolutiodifférentes des prix des biens non échangeables, les préférences pour le risque varieront également. outre, on peut observer une exubérance irrationnelle dans les pays où l’économie a été florissante.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201060

Page 63: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

est florissante et que la croissance globale de l’économie reste forte. Si l’on compare la

période d’expansion de 2002 à 2008 et la période comprise entre 1994 et 2000 en Espagne,

par exemple, on observe ce type de surréaction, la demande intérieure s’accélérant

légèrement pour atteindre une moyenne annuelle de 4.4 % et la croissance des

exportations tombant d’environ 11 % au cours de la période précédente à un peu plus de

4 %. En Irlande, la performance économique entre ces périodes s’est affaiblie sur la base de

la plupart des mesures, car l’activité est aussi devenue beaucoup plus axée sur le marché

intérieur (OCDE, 2009b). Cette situation d’affaiblissement de la performance économique

sous-jacente, associée à la bonne tenue de l’investissement et du crédit dans le secteur

immobilier, ressemble par certain aspects à l’« économie de bulle » du Japon de la fin des

années 80 (Hayashi et Prescott, 2002). Ainsi, les emprunts par des pays comme l’Espagne,

la Grèce, l’Irlande et le Portugal, ont été consentis alors que l’on s’attendait à une forte

croissance, qui ne s’est pas matérialisée.

La libéralisation financière et l’amélioration de la crédibilité de la politique monétaire

du fait de la création de l’union monétaire, qui ont ensemble permis de réduire le coût du

crédit, ont été des phénomènes particulièrement prononcés dans le groupe de pays qui ont

ultérieurement enregistré d’importants déficits. Durant les cinq années qui ont conduit à

l’union monétaire, le taux d’intérêt nominal à long terme a diminué de plus de 5 points de

pourcentage en Espagne, en Italie et au Portugal, contre une moyenne de 3 points environ

pour la zone euro dans son ensemble. La diminution des coûts nominaux du crédit tient à

la fois à la faiblesse des taux d’intérêt réels, au bas niveau de l’inflation escompté et à une

réduction des primes de risque. Le recul de l’inflation pourrait également atténuer les

contraintes de crédit au début de la durée d’un prêt, c’est-à-dire lors de la période où sont

concentrés les remboursements de capital en termes réels. Ces évolutions ont été

accompagnées d’une convergence généralisée des taux d’intérêt du marché entre les pays

(BCE, 2010). Pour certains pays, cela s’est traduit par une réduction des marges de crédit,

qui a encore accentué la baisse relativement importante des taux d’intérêt réels. Dans le

même temps, la mise en place du marché unique européen des capitaux a contribué à

accroître la disponibilité du capital pour les pays de la zone euro (OCDE, 2009c). Les petits

pays peuvent être confrontés à une très forte élasticité de l’offre de crédit dans une grande

union monétaire compte tenu de la suppression du risque de change et du fait qu’une plus

grande exposition à leur risque pays propre n’a pas une forte incidence sur les portefeuilles

globaux (chapitre 4). Ces flux de capitaux peuvent être trop importants à supporter pour

des systèmes financiers de petite taille et moins développés (Portes, 2001). L’union

monétaire semble avoir accentué l’élasticité des flux nets de capitaux face aux différences

de revenu entre les pays de la zone euro par rapport aux périodes passées, sans que cela ait

d’effet sur les flux de capitaux en provenance d’autres pays (Schmitz et von Hagen, 2007).

L’existence de pressions économiques fortement divergentes a aussi contribué aux

importants excédents affichés dans certains pays. Bien que, du fait de sa taille, l’économie

allemande ait un poids important sur l’économie de la zone euro (elle représente un quart

environ du PIB de la zone), la politique de la BCE ne permettra pas nécessairement de

stabiliser totalement les évolutions intérieures dans ce pays. Durant la période

d’expansion, l’Allemagne a connu une série particulière d’évolutions économiques,

totalement opposées à celles intervenant en Espagne, en Grèce, en Irlande et au Portugal.

Après le ralentissement économique de 2000, la première phase de la reprise a été

fortement influencée par l’ajustement continu aux conséquences de la réunification

allemande : la perte de compétitivité a dû être rattrapée et la fin de la forte expansion dans

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 61

Page 64: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

le secteur de la construction a continué de peser sur l’investissement (OCDE, 2010b). La

production a été restructurée et en partie délocalisée à la faveur de sorties importantes

d’IDE vers l’Europe centrale et orientale. Un degré élevé de priorité a été accordé à la

réforme structurelle, avec un grand nombre de réformes sur le marché du travail et une

refonte du système de retraite, qui a diminué les taux de remplacement et prévu un

relèvement futur de l’âge de la retraite à 67 ans. Cela a sans doute entraîné une

augmentation de l’épargne des ménages. Fait unique parmi les pays de la zone euro, les

prix des logements en Allemagne ont diminué au cours de cette période. Dans le même

temps, on a observé une restriction marquée des rémunérations qui a conduit à une

réduction des coûts unitaires de main-d’œuvre. Ces facteurs spécifiques à l’Allemagne ont

conduit à une expansion de la demande intérieure de seulement 0.3 % en moyenne en

rythme annuel au cours de la période 2002-07 (contre 1.8 % pour la zone euro), alors que les

exportations se sont accrues à un rythme annuel moyen de 7.5 %. Aux Pays-Bas, entre

temps, une forte augmentation des taux de cotisation au régime de retraite après

l’éclatement de la « bulle Internet » a considérablement affaibli la consommation, alors

que les efforts d’assainissement budgétaire ont aussi contribué à doper l’épargne

nationale.

La politique budgétaire n’a pas empêché l’apparition de déséquilibres et y a même contribué

Le rôle de la politique budgétaire dans la formation des déséquilibres varie suivant les

pays. L’expérience des différents pays donne à penser que la relation entre le solde

budgétaire et le solde de la balance courante est relativement peu marquée en moyenne.

Les analyses économétriques réalisées sur la base d’un vaste échantillon et d’une grande

diversité de techniques amènent à penser qu’un renforcement du solde budgétaire d’un

point de PIB conduit à une augmentation du solde de la balance courante d’environ 0.2 à

0.3 point de PIB (Abbas et al., 2010)7. Les effets peuvent être plus importants que la

moyenne si la modification de la situation budgétaire est considérée comme durable,

notamment pour les petites économies (Kumhof et Laxton, 2009). Durant la phase

d’expansion, l’Espagne et l’Irlande ont enregistré de petits déficits budgétaires, voire des

excédents. Ces excédents ont été insuffisants pour contrer les déséquilibres du secteur

privé et ont été dopés par des recettes fiscales dynamiques liées au cycle financier et à la

situation immobilière, mais la situation budgétaire n’a pas activement contribué au déficit

de la balance courante de ces pays et le rapport de la dette publique au PIB a sensiblement

diminué. En revanche, la Grèce a enregistré des déficits représentant en moyenne 5.4 % du

PIB durant la période comprise entre 2002 et 2007, alors que les déficits ont, en moyenne,

largement dépassé les 3 % du PIB au Portugal. Ces déficits peuvent expliquer une grande

partie du déficit global de la balance courante, bien que leur incidence totale ait sans doute

été plus faible, compte tenu des effets compensateurs des semi-élasticités indiquées plus

haut. Durant cette période, l’Allemagne et les Pays-Bas ont affiché des déficits, qui ont

cependant été largement compensés par la vigueur de l’épargne privée8. Le resserrement

budgétaire opéré au cours de cette période, tout en contribuant à la stabilisation budgétaire

à moyen terme, explique en partie l’augmentation du taux d’épargne nationale.

L’action de stabilisation des chocs n’a pas été efficace

Les pressions divergentes entraînant des chocs au niveau de la demande nominale et

la diversité des évolutions économiques sous-jacentes, associées à des rigidités

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201062

Page 65: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

structurelles, ont compliqué l’action de stabilisation économique et financière. Les

variations de la demande nominale alimentant l’inflation, les taux d’intérêt réels ont joué

un rôle déstabilisateur. Durant la phase d’expansion, les taux d’intérêt réels ex post ont été

en moyenne négatifs dans les pays à forte croissance comme l’Espagne, la Grèce et

l’Irlande, et à peine positifs en Italie et au Portugal. En revanche, les taux d’intérêt réels se

sont établis en moyenne à 1.8 % en Finlande, 1.5 % en Allemagne et 1 % environ en

Autriche, en France, au Luxembourg et aux Pays-Bas. Certes, il est intrinsèquement difficile

d’évaluer les taux d’intérêt réels ex ante, car les anticipations inflationnistes pertinentes

sont malaisées à observer, mais la persistance des écarts d’inflation au cours de cette

période était significative et les taux réels ex post ont probablement orienté les taux ex ante.

En outre, les soldes des anticipations des consommateurs, découlant de l’enquête de la

Commission européenne sur la perception de l’inflation, correspondent globalement aux

résultats effectifs, et ils étaient particulièrement élevés dans des pays comme l’Espagne, la

Grèce et l’Italie. Il existe également une corrélation étroite entre les positions de balance

courante et l’écart cumulé des taux d’intérêt réels par rapport à ceux obtenus par une

simple règle de Taylor (graphique 2.6)9. Ainsi, le principe de Taylor en matière de stabilité

économique, selon lequel les taux d’intérêt réels augmentent suffisamment pour atténuer

les pressions inflationnistes, n’a pas fonctionné. Des tensions du même type apparaîtront

vraisemblablement au sein des pays et dans d’autres unions monétaires, mais ces écarts

ont sans doute été relativement importants dans la zone euro. Les écarts d’inflation entre

zones urbaines aux États-Unis sont beaucoup plus faibles que ceux observés entre les pays

de la zone euro et, comme ils sont moins persistants, leur incidence sur le comportement

économique a plus de chances d’être transitoire et limitée (encadré 2.2).

La variation de la vigueur de la demande intérieure a contribué à des tendances

divergentes de la compétitivité. Les taux de change effectifs réels (dans l’optique du

déflateur du PIB) dans la zone euro et dans presque tous les pays se sont appréciés au cours

de la période 2002-07, à l’exception notable de l’Allemagne, où le taux de change effectif

réel est resté à peu près inchangé, et de la Finlande. L’appréciation a été particulièrement

Graphique 2.6. Soldes extérieurs, écarts de taux d’intérêt et compétitivitéMoyenne annuelle, 2002-07

1. L’écart de taux d’intérêt est défini comme la déviation des taux d’intérêt à court terme par rapport à ceux obtenuspar une simple règle de Taylor, avec des coefficients de 0.5 pour les écarts de production et d’inflation, un objectifd’inflation harmonisée sous-jacente de 1.9 % et un taux d’intérêt neutre de 2.1 %.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364318

-10 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8-3.5

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1

AUT

BEL FIN

FRA

DEU

GRC

IRL

ITANLD

PRT

ESP

-10 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 80

1

2

3

4

5

6

Variation du coût unitaire nominal de main-d’oeuvre

Zon

e eu

ro

Balance courante, % du PIB

AUT

BEL

FINFRA

DEU

GRC

IRL

ITA NLDPRTESP

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 63

Page 66: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Encadré 2.2. Écarts d’inflation aux États-Unis

Les problèmes soulevés par l’inefficacité de la stabilisation macroéconomique dans lazone euro devraient en principe aussi être observés dans d’autres unions monétaires. LesÉtats-Unis fonctionnent comme une union monétaire sous diverses formes depuis 1789 etconstituent le point de comparaison le plus évident pour la zone euro, eu égard à la fois àla taille économique et à la population. Les écarts d’inflation aux États-Unis ont-ils joué lemême rôle que dans la zone euro ?

Il est difficile de faire une comparaison exacte. L’indice des prix à la consommation (IPC)des États-Unis et l’indice harmonisé des prix à la consommation de l’UE sont construits demanière différente et mesurent des concepts quelque peu différents des prix à laconsommation. En outre, on ne dispose pas de données au niveau des États pour les États-Unis et les données les plus comparables couvrent seulement 14 zones urbaines. Enfin, ilest difficile de comparer la variabilité globale à laquelle on pourrait s’attendre, touteschoses égales par ailleurs, entre 13 pays et 14 zones urbaines.

Toutefois, ces réserves mises à part, il est tentant de conclure d’après ces données que lavariabilité est relativement similaire au sein de la zone euro et entre les zones urbaines desÉtats-Unis (graphique 2.7, partie de gauche). Cependant, l’IPC des États-Unis inclut unimportant élément « hébergement », qui reflète étroitement les prix de l’immobilier auniveau local, alors que l’indice harmonisé des prix à la consommation exclut les coûtsassociés aux logements occupés par leur propriétaire. Compte tenu de la variation large etimportante des prix des logements entre les zones urbaines des États-Unis ces dernièresannées, il peut exister une distorsion à la hausse de la variation de l’inflation dans leszones urbaines des États-Unis par rapport à la zone euro. Si l’on compare la hausse de l’IPCdans les zones urbaines des États-Unis en excluant le logement et l’inflation dans lazone euro fondée sur une mesure dérivée excluant les loyers, il apparaît que la dispersionde l’inflation entre les zones urbaines des États-Unis est sensiblement plus faible que ladispersion entre les économies de la zone euro au cours de la même période(graphique 2.7, partie de droite).

Graphique 2.7. Écarts d’inflation entre les zones urbaines des États-Unis et les États de l’UE1

Écart-type des zones/États

1. Indice de prix à la consommation (IPC) pour les États-Unis et IPC harmonisé pour la zone euro.

Source : Eurostat et US Bureau of Labor Statistics.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364337

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

1998 2000 02 04 06 08

IPC, ensemble des articles

États-Unis Zone euro

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

1998 2000 02 04 06 08

IPC, hors hébergement

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201064

Page 67: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

marquée en Espagne (15 %), en Irlande (13.5 %) et en Grèce (13 %). Plus généralement, on

observe les mêmes profils pour d’autres mesures de la compétitivité des prix et pour les

mesures du taux de change effectif dans la zone euro ou à un niveau plus large (CE,

2010a)10. Conformément à la théorie sous-jacente, les hausses de prix ont été

particulièrement marquées dans les secteurs des services non échangés des économies en

surchauffe et en particulier dans la construction (Égert et Kierzenkowski, 2010). Bien que

certains de ces mouvements aient sans doute correspondu à des ajustements à l’équilibre

des prix, d’autres reflètent plus probablement une demande globale d’un niveau non

viable.

Dans certains cas, les évolutions de la productivité sous-jacente et des variables

structurelles ont joué un rôle dans les déséquilibres globaux, notamment en cas de

déséquilibre entre l’évolution des salaires et des prix et la croissance de la productivité.

L’Italie, en particulier, a souffert d’une baisse prononcée de la performance à l’exportation

pour des raisons structurelles, laquelle n’a pas été compensée par une réduction des prix.

La faiblesse de l’économie portugaise après la forte expansion de la fin des

années 90 aurait été atténuée si la compétitivité avait été rétablie, d’où un rééquilibrage de

l’économie, au détriment de la consommation et au profit de la production de biens

exportables. Ces problèmes ont souvent été le résultat des paramètres de la politique

structurelle, comme la réglementation restrictive des marchés de produits et la stricte

législation de protection de l’emploi. Ces facteurs ont freiné la croissance et, pour certains

pays, ont ralenti l’ajustement aux chocs. En Espagne, la faible croissance de la productivité

sous-jacente, conjuguée à une vive hausse des prix, a pesé sur la compétitivité. Il ressort

Encadré 2.2. Écarts d’inflation aux États-Unis (suite)

L’effet déstabilisateur de l’inflation liée à la baisse des taux d’intérêt réels dépend nonseulement de la dispersion de l’inflation entre les économies locales mais aussi de lapersistance de ces écarts. Les écarts à court terme par rapport à l’inflation dans la zone, quise corrigent rapidement, ont vraisemblablement peu d’impact sur le comportementéconomique, alors que des différentiels persistants et prévisibles ont plus de risquesd’influer sur les décisions de crédit et d’épargne. Si l’on se fonde sur l’inflation à l’exclusionde l’hébergement, la persistance des taux annuels d’inflation entre les zones urbaines desÉtats-Unis est beaucoup plus faible que pour les pays de la zone euro. L’écart type de lavariation du niveau de prix avec la moyenne de la zone euro au cours de la période2002-07 est de 4.4 %, alors qu’il atteint à peine 0.4 % pour les zones urbaines des États-Unis.

La variabilité apparemment plus faible et moins persistante de l’inflation entre les zonesurbaines des États-Unis donne à penser que les pressions de l’union monétaire pourraienty être plus faibles que dans la zone euro. Par exemple, il n’y a pas de relation claire entre letaux d’intérêt réel implicite (fondé sur l’IPC hors hébergement) et la variation des prix deslogements durant la reprise économique, contrairement à ce qui ressort clairement dansla zone euro. Cette différence transatlantique pourrait tenir à l’ampleur ou à la structuredifférente des chocs ou bien à la plus grande flexibilité des prix entre les zones urbainesdes États-Unis. On observe aussi d’importantes différences dans la structure de l’unionmonétaire, notamment le grand rôle joué par l’administration fédérale aux États-Unis, unerigidité structurelle plus grande par rapport à certains pays de la zone euro et uneintégration bien plus étroite des systèmes financier et bancaire, y compris le systèmed’assurance fédérale des dépôts.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 65

Page 68: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

des indicateurs de l’orientation des réglementations des marchés des produits et des

marchés du travail que la Grèce et le Portugal sont à la traîne par rapport aux moyennes de

l’OCDE, et que les économies de ces pays sont relativement peu flexibles, tandis que des

possibilités de réforme subsistent en Espagne, en dépit des changements opérés au cours

de la décennie écoulée (OCDE, 2010d). En Allemagne, les obstacles structurels à l’évolution

du secteur des biens non échangeables ont réduit l’investissement et entraîné une

distorsion de l’activité en faveur du secteur exportateur (OCDE, 2010b).

L’action de stabilisation, notamment du solde extérieur, a été compliquée par plusieurs

autres facteurs durant la phase d’expansion. Premièrement, les prix se sont accrus et le taux

de change réel s’est apprécié dans les économies en surchauffe, mais l’effet correspondant a

été freiné par d’importantes entrées nettes de migrants (encadré 2.3). Dans ces conditions, il

a été difficile d’évaluer dans quelle mesure la demande était éloignée de son niveau de

viabilité. Deuxièmement, les rigidités des prix et leur persistance tendent à ralentir

Encadré 2.3. L’ajustement économique par le biais des migrations vers les économies en surchauffe

Dans les économies ouvertes, les transferts de facteurs de production jouent un rôle économiqueimportant et ils peuvent exercer un effet stabilisateur dans les unions monétaires, car ilscontribuent à neutraliser les chocs asymétriques. Si la mobilité de la main-d’œuvre en Europe estgénéralement beaucoup plus faible qu’aux États-Unis, la grande ouverture des pays de la zone euroconduit bien à des flux de migrants en provenance des pays de l’UE et d’autres pays. La mobilité dela main-d’œuvre est facilitée par le marché unique, qui s’est encore développé avec l’élargissementde l’UE, mais aussi par les liens avec les anciennes colonies.

Les facteurs qui favorisent et qui découragent les migrations sont complexes. Cependant, lacroissance et les déséquilibres de l’économie intérieure semblent avoir joué un rôle déterminantdans les flux migratoires de ces dernières années (graphique 2.8). Sur la base du flux annuel net demigrants non nationaux pour 1 000 habitants, la variation entre les pays du flux moyen a été peumarquée entre le milieu des années 80 et 2001. Les relations avec la croissance sont aussi ténues.

Graphique 2.8. Flux migratoires nets et demande

1. Entrées nettes de ressortissants étrangers par millier d’habitants.

Source : OCDE, Bases de données des Perspectives économiques de l’OCDE et des Migrations internationales.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364356

0 1 2 3 4 5 60

2

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16 Moyenne des entrées nettes

Croissance du PIB réel, taux moyen

1

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ESP• 1984-2001

•• •••

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2002-07

-10 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 100

2

4

6

8

10

12

14

16 Moyenne des entrées nettes

Solde moyen de la balance courante, % du PIB

1

AUT

BEL

FINFRA

DEU

IRL

ITA

NLDPRT

ESP • 1984-2001

• ••••

••

2002-07

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201066

Page 69: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Encadré 2.3. L’ajustement économique par le biais des migrations vers les économies en surchauffe (suite)

En revanche, les flux migratoires nets ont été beaucoup plus importants dans certains cas au coursde la période 2002-07. L’Espagne et l’Irlande ont enregistré des flux migratoires annuels moyens deplus de 1 % de la population existante au cours de ces années. Bien que le lien ne soit pas direct, lesmigrations sont indissociables de la croissance et des déséquilibres de la balance courante : unepartie de la forte demande intérieure a été absorbée par les migrations. On notera que cette main-d’œuvre supplémentaire semble avoir été fortement utilisée dans les secteurs des biens nonéchangeables, comme la construction et les services, plutôt que pour doper l’offre de main-d’œuvre dans le secteur des biens exportables. Depuis le point haut du cycle, les flux migratoiresnets se sont ralentis et inversés dans les économies en surchauffe.

Les flux migratoires élevés enregistrés en Espagne et en Irlande ont représenté une partimportante et croissante de l’augmentation globale de l’emploi durant la dernière partie de laphase d’expansion économique. En Espagne, la part des non-nationaux dans la population activeest passée de 4 % en 2001 à 13 % en 2007 (graphique 2.9). Des évolutions comparables ont étéobservées en Irlande, où les travailleurs étrangers ont fini par représenter environ 10 % de lapopulation active. On a aussi observé une augmentation des entrées nettes de migrants danscertains pays comme l’Italie, bien que dans une moindre mesure.

Graphique 2.9. Croissance de l’emploi en EspagneContributions au taux de croissance annuelle, en pourcentage

Source : Eurostat.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364375

Les importantes entrées nettes de travailleurs migrants dans les économies enregistrant uneforte demande intérieure durant la reprise ont vraisemblablement contribué à gérer cettevigoureuse expansion, en réduisant la réactivité des salaires et des prix à la demande. Bien qu’il aitcontribué à atténuer les pressions inflationnistes, ce phénomène devrait tendre à accroître ledéficit de la balance des opérations courantes du fait de l’augmentation de la consommationintérieure et des envois de fonds des travailleurs migrants. La planéité temporaire de la courbe del’offre induite par les flux migratoires complique l’évaluation des niveaux de production viables etle paramétrage de la politique économique, à la fois parce qu’il devient plus difficile d’évaluer lestensions inflationnistes et parce que la permanence des migrations est incertaine.

-6

-4

-2

0

2

4

6

-6

-4

-2

0

2

4

6

1997 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09

NationauxÉtrangersTotal

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 67

Page 70: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

l’ajustement par le biais des prix et les pressions sous-jacentes peuvent être difficiles à

détecter. Il n’est pas évident de déterminer dans quelle mesure la persistance des prix a

revêtu un caractère intrinsèque et dans quelle mesure elle a reflété une série corrélée de

chocs ou la vigueur du cycle long du crédit. L’expérience de l’Irlande est notable : l’inflation y

a été en permanence supérieure à la moyenne de la zone euro pendant de nombreuses

années avant la crise, mais le niveau des prix a depuis diminué de façon spectaculaire.

Troisièmement, les marchés des capitaux n’ont pas correctement évalué le risque associé

aux déséquilibres économiques et financiers dans les différents pays de la zone euro et les

conditions de crédit n’ont pas été resserrées dans les pays en nette surchauffe avant la crise.

L’expérience récente, tant dans la zone euro qu’ailleurs, a différé de l’expérience passée,

lorsque le solde de la balance courante s’inversait généralement quand les déficits

atteignaient 5 % du PIB (Freund et Warnock, 2007), peut-être en raison de la libéralisation

financière ou du boom financier qui ont caractérisé la « grande modération ». Cette situation

diffère aussi de celles observées antérieurement dans le cadre du mécanisme de change

(MCE), lorsqu’une inflation intérieure relativement élevée et des pertes de compétitivité se

traduisaient par des pressions spéculatives sur la parité de change, conduisant à des

modifications des taux de change nominaux. Dans une union monétaire, on ne peut plus

compter ni sur les signaux potentiellement importants donnés par les taux de change

nominaux ni sur la discipline du marché qu’ils imposent, alors que les marges de crédit n’ont

pas, jusqu’à récemment, réagi face aux amples déséquilibres.

Les déséquilibres de l’épargne et de l’investissement au niveau intérieur ont conduit à d’importantes modifications des bilans

Les déséquilibres de la demande et les taux d’intérêt réels déstabilisateurs, ainsi que

certains facteurs locaux, ont conduit à des positions créditrices et débitrices persistantes

dans les pays de la zone euro. La forte épargne nette dans les pays à faible croissance,

notamment, a été associée à des excédents de balance courante, alors que le faible niveau

d’épargne dans les économies en surchauffe a contribué aux déficits (graphique 2.10). Les

déficits publics ont expliqué pour partie la faiblesse des positions de la balance courante de

la Grèce, de la France, de l’Irlande et de l’Italie, la situation des finances publiques entrant

aussi pour une large part dans l’excédent en Finlande, encore que l’ampleur de ces

situations budgétaires amène à surestimer leur incidence économique sur le solde

extérieur. Le secteur des entreprises non financières a joué un grand rôle dans les

opérations globales d’épargne et de crédit, avec une position débitrice nette importante en

Espagne, en France et en Italie, et une forte position créditrice en Finlande et aux Pays-Bas.

Globalement, la situation des différents pays est compliquée, en raison de la grande

diversité des facteurs agissant sur chaque économie. Cependant, la relation entre l’épargne

des ménages et le solde extérieur est plus systématique, ce qui est compatible avec les

mécanismes d’ajustement économique sous-jacents. Le canal du taux d’intérêt réel devrait

sans doute avoir une plus forte incidence sur le secteur des ménages – du fait de ses effets

sur la consommation de biens non échangeables – que sur le secteur des entreprises, qui

est probablement plus sensible à la situation internationale.

Ces déséquilibres amples et persistants de l’épargne et de l’investissement ont conduit

à des modifications marquées du patrimoine financier net des secteurs économiques de

certains pays (tableau 2.A1.1). Le secteur des ménages en Espagne et en Irlande a souffert

d’une réduction de son patrimoine financier net d’environ 25 points de PIB de 2002 à 2007, en

raison de volumineuses opérations d’emprunt, la position financière nette par rapport au

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201068

Page 71: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

revenu de ce secteur se situant à un niveau inférieur à celui observé dans nombre d’autres

pays de la zone euro. Bien que le recul des soldes financiers ait été associé à l’augmentation

de la valeur des actifs immobiliers, une grande partie de la hausse des prix des logements

s’est révélée peu durable et a été ultérieurement inversée. En revanche, les ménages

allemands ont accru leur patrimoine financier net de près de 30 points de PIB au cours de la

même période, alors que des progressions d’environ 15 points ont été enregistrées en

Autriche et en France. S’agissant des sociétés non financières, la position financière nette

des sociétés espagnoles a reculé de 60 points de PIB environ, en raison de la faiblesse de

l’épargne et du niveau élevé de l’investissement. En revanche, les sociétés résidant aux Pays-

Bas ont renforcé leur position financière pour dégager un excédent net de plus de 15 % du PIB

sur la période. En Allemagne, des bénéfices élevés, de faibles versements de dividendes et

des investissements relativement faibles ont eu un effet similaire (OCDE, 2010b). Outre qu’ils

déterminent le patrimoine financier net, les taux d’intérêt réels ont aussi conduit à des

modifications du levier financier dans différents secteurs. Ces effets semblent plus marqués

et plus systématiques pour les ménages : le rapport de la dette des ménages aux actifs

financiers a augmenté considérablement en Espagne, en Grèce et en Irlande au cours de la

période allant de 2002 à 2007, alors qu’il a en fait diminué en Allemagne et en Autriche.

Des déséquilibres aggravés par l’envolée du logement et les cycles de crédit

La faiblesse des taux d’intérêt a déclenché dans certains pays une envolée du secteur

du logement et des cycles de crédit (Ahrend, 2010). L’évolution des prix des produits ne

faisant pas l’objet d’échanges internationaux a eu un impact très marqué sur le marché du

logement : dans la mesure où il s’agit essentiellement de biens d’investissement non

marchands, la demande de logements est particulièrement sensible aux variations des

taux d’intérêt (CE, 2006). En Espagne, les prix des logements ont ainsi augmenté de près de

80 % en valeur nominale entre 2002 et 2007, tandis que la hausse s’inscrivait à quelque

70 % en France et 45 % en Irlande. La part correspondant aux investissements dans le

logement a atteint le niveau record de plus de 13 % du PIB en Irlande et s’est établi à

environ 9 % en Grèce et en Espagne. Même si le stock de logements par habitant dans ces

pays était bien inférieur aux niveaux de la zone OCDE dans les années 90, et même si le

Graphique 2.10. Solde net de l’épargne et de l’investissement et balance couranteEn pourcentage du PIB, moyenne 2002-07

Source : OCDE, Bases de données des Comptes nationaux et des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364394

-15

-10

-5

0

5

10

-15

-10

-5

0

5

10

Solde net de l’épargne et de l’investissement :

GRC ESP IRL ITA FRA AUT BEL DEU FIN NLD

Entreprises non financièresEntreprises financièresAdministrations publiquesMénages et institutions à but non lucratif

Solde de la balance courante

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 69

Page 72: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

taux de croissance de la population y a été relativement rapide, la vitesse de construction

de logements n’en reste pas moins spectaculaire. Cette dynamique sous-jacente, combinée

à des taux d’intérêt réels très faibles, voire négatifs, a créé des conditions extrêmement

favorables à l’émergence de bulles immobilières. Une hausse des prix étant attendue,

emprunter pour investir dans le logement apparaissait rentable, quels que soient les loyers

réels ou imputés (Fuentes Castro, 2010). Par ailleurs, les prix élevés de la construction ont

largement contribué à l’éviction des exportations en pesant à la hausse sur les coûts

intérieurs (Égert et Kierzenkowski, 2010). L’effet de la forte demande intérieure sur le

logement a été encore amplifié, pendant la phase ascendante en Irlande et en Espagne, par

des arrivées massives d’immigrants, ce qui a encore gonflé la demande de logements.

Il existe une relation étroite entre les investissements dans le logement et les déficits de la

balance courante (Barnes et al., à paraître).

Les pressions exercées sur la demande de logements ont été aggravées par des

politiques publiques médiocrement conçues. Premièrement, la fiscalité généreuse dont

bénéficient les propriétaires-occupants fausse les incitations au logement et accroît les

gains après impôt obtenus par les propriétaires du fait de l’augmentation des prix des

biens, tout en alimentant la hausse du coût des logements pour les candidats à l’achat.

Traditionnellement, il existe dans les pays de la zone euro une relation étroite entre la

variabilité des prix des logements et les distorsions fiscales (graphique 2.11). Ces

distorsions fiscales amplifient l’impact de la libéralisation financière et de la baisse du

chômage sur le ratio prix du logement/revenu (Andrews et al., à paraître). Deuxièmement,

Graphique 2.11. La variabilité des prix des logements et le régime fiscal de l’immobilier

1. Écart quadratique moyen des prix réels des logements par rapport à la tendance exponentielle, 1970-2009.2. Différence entre le taux d’intérêt réel des prêts hypothécaires avant et après impôt; législation fiscale, taux

d’intérêt et inflation de 1999.

Source : Van den Noord, P. (2004), « Tax Incentives and House Price Volatility in the Euro Area : Theory and Evidence »,Économie internationale et calculs de l’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364413

1.5 1.0 0.5 0.0 -0.5 -1.0 -1.50.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

1.6

Variabilité des prix des logements

0.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

1.6

Variabilité des prix des logements

R2 = 0.88

Coin fiscal 2

1 1

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ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201070

Page 73: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

l’impact des variations de la demande sur les prix des logements est renforcé par la faible

élasticité de l’offre de logements dans la plupart des pays de la zone euro. Bien que dans

certains cas, cette évolution s’explique par une forte densité de population, les pratiques

de planification sont relativement restrictives dans les pays de la zone euro si on les

compare à celles en vigueur dans d’autres pays de l’OCDE, et obtenir un permis de

construire peut demander beaucoup de temps.

Le dynamisme de la demande intérieure et la faiblesse des taux d’intérêt réels ont

déclenché des effets d’accélérateur financier qui ont renforcé les chocs positifs initiaux de

la demande dans certains pays en état de surchauffe. Sur la période 2002-07, les prêts à

l’économie réelle ont augmenté à un rythme annuel proche de 20 % en Espagne, en Grèce

et en Irlande, alors qu’ils restaient stables en Allemagne et qu’ils progressaient de près de

5 % dans plusieurs autres pays affichant un excédent (graphique 2.12). Les activités de prêt

ont été étroitement liées aux déséquilibres extérieurs. Ces effets se sont manifestés en

partie par la hausse des prix des biens, qui a semblé renforcé la situation financière des

ménages et permis de constituer des garanties permettant de financer des emprunts et des

prêts supplémentaires. L’augmentation des prêts pour l’acquisition d’un logement s’est

faite selon le même schéma, elle aussi étant étroitement associée aux divergences des taux

d’intérêt réels estimées à partir d’une simple règle de Taylor. Les effets du cycle de crédit

qui, pour partie, s’auto-entretiennent, ont peut-être contribué à la persistance des

pressions de la demande interne et à l’ampleur des déséquilibres extérieurs. La croissance

rapide des concours au secteur non financier dans certains pays reflète les cycles de crédit

nationaux, en partie alimentés par les flux de crédits en provenance de banques

excédentaires dans d’autres pays.

Le recyclage de l’épargne de la zone euro des pays excédentaires vers les pays

déficitaires par le biais des systèmes bancaires de la zone a eu généralement pour effet de

concentrer les risques au niveau des pays. Comme indiqué au chapitre 4, en dépit du haut

degré d’intégration financière au niveau des opérations de gros, le système financier de la

zone euro conserve des caractéristiques profondément locales, en particulier dans les

activités de détail. Cela a conduit à une concentration locale des risques plutôt qu’à une

Graphique 2.12. Croissance du crédit et déséquilibres dans la zone euroMoyenne annuelle, 2002-07

1. Institutions financières monétaires.2. L’écart de taux d’intérêt est défini comme la déviation des taux d’intérêt à court terme par rapport à ceux obtenus

par une simple règle de Taylor, avec des coefficients de 0.5 pour les écarts de production et d’inflation, un objectifd’inflation harmonisée (IPCH) sous-jacente de 1.9 % et un taux d’intérêt neutre de 2.1 %.

Source : BCE et OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364432

-10 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8-5

0

5

10

15

20

25

30

Croissance des prêts des IFM aux non IFM, %

Balance courante, % du PIB

1

AUTBEL

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-4 -3 -2 -1 0-5

0

5

10

15

20

25

30

Croissance des prêts pour l’achat de logements, %

Écart de taux d’intérêt 2

AUTBEL

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GRCIRL

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NLD

PRT

ESP

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 71

Page 74: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

diversification efficiente dans toute la zone euro. En particulier, ce sont des banques

locales qui sont le plus souvent chargées de jouer le rôle d’intermédiaire entre les

emprunteurs non financiers et les déposants d’un pays. Ces banques vont alors financer ou

redistribuer les déséquilibres éventuels entre ces deux catégories d’acteurs en faisant

appel aux marchés internationaux ou à des ressources interbancaires. De ce fait, les

banques locales peuvent être amenées à supporter l’essentiel du risque, et des risques

supplémentaires liés au décalage entre les échéances peuvent également survenir compte

tenu de la nature plus volatile des financements sur les marchés. Cette situation renforce

par ailleurs les cycles de crédit au niveau des pays, dans la mesure où les effets

d’accélérateur financier ont tendance à s’exercer sur les marchés nationaux au sens étroit

plutôt qu’à l’échelle de la zone euro, provoquant ainsi des effets de rétroaction négatifs

plus marqués. Dans certains pays, les actifs des banques ont, en valeur absolue, pris une

importance considérable par rapport au revenu national11, évolution encore exacerbée par

la possibilité d’avoir accès à des financements de marché dans d’autres pays de la

zone euro. Des flux de capitaux très importants en provenance des banques et autres

institutions financières ont circulé, quittant des pays où la croissance du crédit au niveau

intérieur était modeste au profit de pays où les marchés du crédit étaient en surchauffe, et

ce phénomène a été encore facilité par le volume important des fonds disponibles et par

les carences de la surveillance financière. Cette évolution a contribué à creuser un large

écart entre la croissance des prêts et des dépôts intérieurs dans de nombreux pays de la

zone : dans les pays affichant un excédent extérieur, la progression des dépôts a été très

largement supérieure à celle des prêts, tandis que dans les pays déficitaires, c’est le

contraire qui se produisait le plus souvent (graphique 2.13). En ce qui concerne la zone euro

dans sa globalité, l’Allemagne et les Pays-Bas ont été de grands pourvoyeurs de fonds,

tandis que l’Espagne, la France, l’Irlande et l’Italie s’affirmaient comme les plus gros

emprunteurs. Les crédits bancaires internationaux ont été consentis le plus souvent à

court terme, créant ainsi dans les pays emprunteurs un décalage entre les échéances non

dénué de risques.

Graphique 2.13. Écarts entre la variation des prêts et celle des dépôts1

En pourcentage du PIB de 2004

1. Variation du montant des prêts moins la variation des dépôts des établissements de crédit aux autresétablissements entre 2004 et 2008.

Source : BCE (2010), Structural indicators for the EU banking sector et OCDE, Base de données des Perspectives économiquesde l’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364451

-4

-2

0

2

4

-60

-40

-20

0

20

40

60Écart en % du PIB de la zone euro (éch. de gauche)

DEU NLD BEL GRC SVK PRT FIN AUT IRL ESP ITA FRA

Écart en % du PIB national (éch. de droite)

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201072

Page 75: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Les défaillances de la réglementation et de la surveillance financières ont contribué à

une hausse significative des prises de risque au cours de cette période, elles-mêmes

facilitées par les lacunes de la réglementation dans certains pays de la zone euro et

l’absence de réglementation macroprudentielle efficace (voir le chapitre 4). C’est l’Espagne

qui a pris les mesures les plus énergiques pour contrer le cycle financier, par des

provisionnements dynamiques et par des mesures destinées à contrôler le recours à la

titrisation, mais cela n’a pas suffi à empêcher l’émergence d’un cycle de crédit et de

logement puissant, même si ces actions semblent avoir dans une certaine mesure protégé

le système bancaire. Les défaillances de la réglementation financière dans les pays n’ayant

pas connu de cycle de crédit prononcé ont tout de même renforcé les problèmes rencontrés

dans d’autres pays, car les marchés financiers ont joué le rôle de courroie de transmission.

Ce phénomène a été important dans les pays où la demande intérieure de crédit était

faible, et les activités bancaires comme les profits des banques en sont venus à dépendre

de plus en plus de l’octroi de crédits à l’étranger.

Les transferts de risques et de fonds ont accru le potentiel de contagion entre pays

ainsi que les risques macroéconomiques dans les pays enregistrant des afflux de crédits

massifs mais non durables. Les activités bancaires internationales peuvent impliquer le

transfert de risques entre les pays, ainsi que la circulation de flux de financement, mais

ceux-ci ne sont pas nécessairement identiques : une filiale bancaire étrangère peut être

financée par des engagements au niveau national, mais le risque de fonds propres est

transféré à la société étrangère. L’intégration financière a eu pour effet d’intensifier ces

transferts globaux de risques au fil du temps et les données de la Banque des règlements

internationaux (BRI) font état d’une forte augmentation au cours des années ayant précédé

la crise. Par exemple, la hausse des créances bancaires consolidées de l’Allemagne sur

l’Espagne pendant la reprise a représenté l’équivalent de 15 % environ du PIB espagnol (voir

le chapitre 4). En particulier, la volonté des étrangers de prendre des risques nationaux a eu

des effets importants sur les prises de risques globales des banques dans les économies les

plus modestes de la zone connaissant une euphorie au plan intérieur. Le partage des

risques constitue en principe une caractéristique souhaitable d’une intégration financière

plus poussée, mais s’il est mal géré il peut aussi accroître la vulnérabilité aux chocs dans

d’autres pays.

Lorsque la crise financière internationale a éclaté, de nombreux pays de la zone euro

étaient particulièrement exposés à d’énormes risques de crédit soit dans leur propre

système financier, soit par le biais des engagements transnationaux. L’intermédiation

bancaire et financière transnationale a enregistré une contraction marquée et la

disponibilité de financements pour des pays tels que l’Espagne, la Grèce ou l’Irlande s’est

fortement détériorée (voir le chapitre 4). Cette situation a été gérée grâce à un soutien

public conjugué à un appel massif aux financements de la BCE. En l’absence de système de

soutien financier transfrontalier, cette situation a accru les pressions budgétaires dans les

cas où le système bancaire bénéficiait d’un soutien public.

Les déséquilibres enregistrés dans certains pays ont eu des retombées dans d’autres économies de l’union monétaire

Le degré élevé d’intégration économique et financière entre les pays de la zone euro

crée de nombreux canaux par le biais desquels les évolutions intervenant dans un pays

sont susceptibles d’en affecter d’autres. En particulier, l’union monétaire compte en son

sein quelques pays ayant un grand poids. Ainsi, l’Allemagne représente plus d’un quart du

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 73

Page 76: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

PIB de la zone euro, la France environ un cinquième et l’Italie aux alentours d’un sixième.

Les évolutions intervenant dans ces pays, ou dans des groupes de pays dont les économies

sont fortement corrélées, peuvent créer des effets de contagion notables dans les autres.

Pour autant, les interdépendances entre pays ne sont pas nécessairement nocives.

Par exemple, un choc technologique positif dans un pays ayant pour effet de relever

temporairement les taux d’intérêt et d’attirer des capitaux en provenance d’autres pays de

la zone euro provoque de cette manière une réaffectation de ressources efficiente qui

bénéficie à tous, même s’il a pour effet de réduire pour un temps les investissements et la

consommation ailleurs. L’ouverture offre des possibilités précieuses de partage des risques

de sorte que les chocs ressentis dans un pays sont partiellement répercutés sur d’autres.

Ceci a pour effet d’amoindrir l’impact global de ces chocs et tous les pays bénéficient ce

faisant d’une assurance a priori, même si certains seront négativement affectés a posteriori.

En revanche, les effets de contagion sont plus problématiques s’ils ont pour effet de

transmettre à d’autres des erreurs commises par les pouvoirs publics ou bien les

conséquences d’une absence d’ajustement efficient dans une économie nationale.

La vigueur de la demande dans un pays peut certes avoir des effets sur la demande

dans d’autres par le biais des échanges, compte tenu des variations de la demande

extérieure et des termes de l’échange, mais aussi par le bais des marchés tiers. Il est

toutefois probable que ces effets seront relativement modestes par rapport à d’autres

forces agissant sur l’économie. Premièrement, bien que les pays de la zone euro soient

relativement ouverts au regard des normes internationales, ce degré d’ouverture est loin

d’être uniforme, et dans nombre de grands pays le total des exportations ne représente pas

plus d’un quart du PIB (tableau 2.1). De plus, une large partie des échanges se font avec des

économies situées en dehors de la zone euro. Certains groupes de pays sont plus

étroitement interconnectés que d’autres : ainsi, les exportations à destination de

l’Allemagne représentent environ un cinquième du PIB en Autriche, en Belgique et aux

Pays-Bas. Toutefois, dans la plupart des pays de la zone euro, les exportations vers

l’Allemagne représentent moins de 5 % du PIB, alors que les importations sont

généralement plus élevées. Deuxièmement, les effets exercés par les variations, au plan

intérieur, de la demande et des prix sur la demande d’exportations et d’importations sont

modestes pour plusieurs catégories de dépenses. Les données économétriques montrent

que la propension marginale à importer dans les pays de la zone euro est

d’environ 0.2 pour la consommation privée, 0.1 pour la consommation publique et 0.4 pour

l’investissement (Pain et al., 2005). Par ailleurs, la propension à l’importation des

exportations est d’environ 0.4 en moyenne et elle est plus élevée pour les petites

économies ouvertes à l’échange telles que la Belgique, l’Irlande ou les Pays-Bas où de

nombreuses importations sont réexportées avec peu de valeur ajoutée. Tous éléments

confondus, l’importance des échanges avec d’autres pays de la zone euro et les élasticités

des échanges laissent à penser que le canal commercial a sans doute des effets plus

modestes que d’autres forces agissant sur l’économie, par exemple les taux d’intérêt réels.

Le canal financier s’est révélé un mécanisme beaucoup plus puissant de transmission

des évolutions survenant dans un pays à d’autres par le truchement des marchés de

capitaux, des relations existant entre les institutions financières et de l’évolution des

évaluations de marché. Une partie de l’expansion du crédit pendant la reprise a été

financée par des prêts transfrontaliers, en particulier grâce à l’intermédiation des banques

nationales entre l’économie réelle et les marchés bancaires internationaux. Cette courroie

de transmission entre les épargnants et les emprunteurs reflète en partie l’efficacité de la

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201074

Page 77: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

répartition du capital sur le marché financier unique de l’UE et entre les pays de la

zone euro. Toutefois, elle constitue également un mécanisme par lequel les défaillances

réglementaires ou les déséquilibres peuvent se transmettre d’une économie à l’autre. Une

fois le cycle du crédit inversé, ces liens ont été à l’origine de toute une série de retombées

négatives entre les pays. Les systèmes financiers nationaux ont été exposés à des risques

en provenance d’autres pays de la zone euro. Là où la contagion a été la plus grande, c’est

entre les pays dont les banques implantées dans d’autres pays devaient supporter des

coûts de financement plus élevés, à cause de l’opacité entourant leurs risques ou à cause

des craintes qu’elles soient confrontées aux mêmes risques que ceux déjà mis au jour dans

d’autres pays. Dans certains pays, les banques ont subi des coups d’arrêt brutaux, d’autres

établissements refusant de leur accorder des prêts et faisant état d’un important décalage

de liquidités sous-jacent.

L’orientation commune de la politique monétaire dans la zone euro peut également

constituer un facteur de transmission des chocs entre pays si le taux d’intérêt de l’euro est

modifié en réaction à des conditions en vigueur dans un pays mais ayant des répercussions

significatives sur la zone euro dans son ensemble. Cet effet compense partiellement

certaines des contagions entre pays évoquées plus haut. Alors que de nombreuses

économies de la zone euro sont trop modestes pour avoir un impact significatif sur

l’orientation de l’action des pouvoirs publics à l’échelle de toute la zone, même si leur

situation est très différente de la situation moyenne en vigueur dans la zone, les évolutions

dans les grands pays ou dans des groupes d’économies étroitement liées peuvent avoir un

impact plus important sur l’orientation de l’action publique au niveau de l’ensemble de la

zone. Par exemple, il est probable que la conjugaison, en Allemagne, d’une croissance

relativement faible et d’une demande intérieure atone ait, au cours de la décennie passée,

maintenu les taux d’intérêt dans la zone euro à des niveaux inférieurs à ce qu’ils auraient

Tableau 2.1. Échanges de biens et de services, par pays partenaireEn pourcentage du PIB, 2007

Exportations Importations

Total ZE131

Autres paysde l’UE (hors

Europe centrale et orientale)

Europecentrale et orientale2

Total ZE131

Autres paysde l’UE (hors

Europe centrale et orientale)

Europecentrale et orientale2

Autriche 57.6 30.6 3.5 6.8 53.1 31.6 2.4 4.8

Belgique 111.7 66.8 11.6 3.6 106.6 61.8 10.0 2.6

Finlande 47.2 12.9 8.5 3.2 43.0 13.5 8.4 2.5

France 26.8 12.7 3.1 1.1 29.4 14.3 3.4 3.2

Allemagne 46.6 19.2 5.4 4.2 40.3 15.4 3.7 3.5

Grèce 21.6 6.6 3.6 1.4 31.2 13.5 2.8 1.2

Irlande 82.0 31.5 18.3 1.6 70.3 18.2 18.3 0.8

Italie 28.7 12.5 2.6 1.8 29.8 13.4 2.0 1.5

Luxembourg 157.1 95.6 22.5 2.1 116.2 77.3 12.1 1.1

Pays-Bas 76.1 40.8 10.2 3.5 67.5 29.1 7.1 1.9

Portugal 33.5 20.0 3.9 0.5 41.7 26.7 2.6 0.6

République slovaque 65.2 42.3 4.4 18.8 87.4 30.3 2.7 19.2

Espagne 26.7 13.5 4.4 0.7 34.3 16.6 3.3 0.9

1. Les 13 pays de la zone euro (dont la liste figure dans la première colonne).2. Bulgarie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque et Roumanie.Source : OCDE, Statistiques mensuelles du commerce international.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 75

Page 78: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

été autrement, tandis qu’une part disproportionnée de l’inflation dans l’ensemble de la

zone euro peut être attribuée aux économies en surchauffe.

L’ampleur des déséquilibres aboutit à des ajustements coûteux

La correction de déséquilibres majeurs a entraîné de graves problèmes économiques,

financiers et budgétaires dans certains pays de la zone euro, notamment ceux qui faisaient

face à des déficits extérieurs, à une compétitivité insuffisante et à des niveaux

d’endettement élevés. Au cours de la baisse initiale de la production, les différents pays de

la zone ont eu une expérience à peu près comparable. Si l’activité en Irlande a chuté de

quasiment 10 % entre 2007 et 2009, le PIB de l’Allemagne qui affichait pourtant un large

excédent extérieur a aussi enregistré une chute relativement importante, de plus de 6 %.

Cela étant, les causes sous-jacentes de ces évolutions étaient radicalement différentes :

généralement, les pays excédentaires caractérisés par un haut degré d’ouverture ont été

durement touchés du fait de leur exposition au commerce extérieur, qui s’est fortement

contracté vers la fin de 2008 sous la double influence d’effets de confiance et d’une

tendance à compter sur une demande excessivement forte dans d’autres pays. En

revanche, dans les pays déficitaires, la chute de la production a reflété pour l’essentiel la

correction brutale des déséquilibres intérieurs.

Le regain de vigueur du commerce mondial va aider les pays excédentaires à éponger

leurs pertes, mais l’affaiblissement des économies dans les pays déficitaires est plus

durable du fait des restrictions du crédit et de la nécessité de reconstituer les bilans

(graphique 2.14). La chute brutale de la demande dans les pays déficitaires est étroitement

liée à une correction rapide des déséquilibres sous-jacents : entre 2007 et 2009, le taux

d’épargne des ménages a augmenté de 8.8 points de pourcentage en Espagne et de

7.6 points en Irlande, les consommateurs ayant eu besoin de rembourser leurs dettes et de

reconstituer leurs finances. En outre, on a observé un resserrement considérable du solde

financier du secteur des entreprises non financières, en particulier en Irlande et en

Espagne (CE, 2010b). Dans le même temps, le bâtiment et la construction de logements ont

chuté dans les pays où le marché du logement avait connu une forte expansion. Le

Graphique 2.14. Les pays déficitaires connaissent l’ajustement général le plus important

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364470

-10 -8 -6 -4 -2 0 2 4 6 8 10-15

-10

-5

0

5

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15

Solde de la balance courante, % du PIB, 2007

-15

-10

-5

0

5

10

15

Solde de la balance courante, % du PIB, 2007

% de variation du PIB réel, 2007-11

AUT

BEL

FIN

FRA

DEU

GRC

IRL

ITA

LUX

NLD

PRT

SVK

ESP

SVN

Zone euro

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201076

Page 79: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

chômage a progressé fortement en Irlande et en Espagne : dans ce dernier pays, le taux de

chômage est proche de 20 % et il dépasse les 10 % en Grèce, en Irlande et au Portugal. Ces

faits sont conformes aux données internationales montrant que les grands déficits sont

plus longs à corriger que les petits déséquilibres, et que pendant la période de

redressement du compte courant, ils sont associés à une croissance des revenus largement

inférieure à la tendance (Freund et Warnock, 2007), et qu’en outre, l’ajustement est

généralement plus sévère dans les pays où les déséquilibres extérieurs sont imputables à

la consommation ou à des flux bancaires de grande envergure. Les pays ayant emprunté

massivement auront du mal à rembourser leurs dettes si les fonds n’ont pas été utilisés

pour financer des investissements productifs; or, l’essentiel des emprunts a été consacré

au financement de la consommation publique ou privée et à des investissements de

grande ampleur dans l’immobilier liés à l’explosion des prix des logements. L’ajustement

sera probablement moins rude dans les pays excédentaires, mais ceux-ci restent

néanmoins sensibles aux hésitations de la reprise des échanges mondiaux.

Sous l’effet des pressions financières, il a fallu procéder à de grands ajustements et la

difficulté du rééquilibrage économique s’en est trouvé accrue. Dans les pays fortement

endettés, le fardeau monétaire et le poids de la dette ont encore renforcé la rapidité et la

force des pressions à la reconstitution des bilans, ce qui a pesé davantage sur la demande

intérieure. De plus, l’euphorie observée les années précédentes dans le logement et dans la

construction, alimentée par le crédit, s’est brutalement inversée. Les systèmes financiers

des grands emprunteurs et des pays excédentaires ont été soumis à de fortes pressions,

reflétant en partie leur très forte vulnérabilité aux cycles de crédit nationaux et aux prix

des actifs ainsi que le niveau élevé des risques. Ces pressions étaient déjà manifestes avant

le début de la tourmente sur les marchés de capitaux : en Irlande, le secteur du logement

avait connu son apogée en 2006 et, en Espagne, la croissance de l’activité dans ce secteur

avait déjà commencé à ralentir. Les pays fortement endettés étaient déjà extrêmement

vulnérables à la détérioration des conditions sur les marchés financiers internationaux.

Dans certains cas, la confiance a brutalement chuté dans les économies confrontées à de

lourds déficits courants, ce qui a provoqué des écarts de crédit particulièrement marqués

et restreint l’accès à l’emprunt. Au fur et à mesure de la contraction des activités bancaires

transnationales, ce sont les économies de taille relativement modeste fortement endettées

qui ont été le plus durement touchées par ces phénomènes (chapitre 4). À ce jour, les pertes

et les coûts des opérations de sauvetage financier ont d’ailleurs été particulièrement élevés

dans ces pays. En outre, il semble que les pays concernés aient fait très largement appel

aux financements de la BCE. L’exposition au risque des pays créanciers est plus difficile à

évaluer : en effet, si des pertes ont été enregistrées sur les activités à l’étranger de certaines

banques, les risques liés à des prêts aux banques dans d’autres pays ont été en partie

absorbés par les opérations de sauvetage des pouvoirs publics.

La faiblesse de la demande et la fin de l’euphorie du crédit ont pesé sur les recettes des

États et sur les dépenses des pays emprunteurs, tandis que le soutien public consacré aux

sauvetages financiers a entraîné des coûts substantiels au fur et à mesure que les dettes

privées étaient au final assumées par le secteur public. Entre 2007 et 2009, le ratio dette

publique/PIB a augmenté de quasiment 40 points de pourcentage en Irlande, de 19 points

en Grèce et de 17 points en Espagne. Ces pays ont été incapables ne serait-ce que de

permettre aux stabilisateurs automatiques de fonctionner à plein, et en conséquence

l’action discrétionnaire des pouvoirs publics a été procyclique12. Du fait de la détérioration

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 77

Page 80: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

des situations financières et de la plus grande vulnérabilité au risque, les écarts de crédit

pour les pays fortement endettés se sont fortement creusés.

Des mesures destinées à rétablir la stabilité à court et à long terme sont nécessaires au niveau européen comme au niveau national

L’ampleur des déséquilibres économiques, financiers et budgétaires dans la zone euro

a souligné la nécessité de conduire des politiques nationales compatibles avec les

exigences de l’union monétaire. Si la création de l’euro a eu de nombreux avantages, les

évolutions récentes ont bien montré qu’il est plus malaisé de stabiliser des économies

nationales au sein d’une union monétaire, car cela peut aboutir à des déséquilibres

macroéconomiques et financiers au niveau national. Dans le même temps, les autorités de

surveillance de la zone euro et de l’UE n’ont pas réussi à empêcher l’accumulation de

grands déséquilibres, ou à tout le moins n’y ont pas réagi. Alors que les taux de croissance

vont probablement rester très différents d’un pays à l’autre de la zone euro, l’union

monétaire doit être étayée par un éventail plus large de politiques conçues pour s’attaquer

aux sources des déséquilibres. La priorité immédiate consiste à s’attaquer aux

conséquences financières, économiques, budgétaires et sociales des déséquilibres qui se

sont accumulés ces dernières années. Cela étant, une nouvelle approche transversale doit

être adoptée pour réduire les risques et les coûts d’éventuels déséquilibres futurs. Ainsi, on

pourrait voir émerger une union monétaire plus aboutie et plus performante. On trouvera

dans la présente section une description du cadre permettant de s’attaquer à ces

problèmes. La réorientation de la politique budgétaire vers une trajectoire plus viable est

examinée de façon plus détaillée dans le chapitre 3 et le rôle dévolu à une surveillance

financière et macroprudentielle améliorée est abordé de manière approfondie dans le

chapitre 4. Les politiques structurelles peuvent également jouer un rôle important dans la

correction mais aussi dans la prévention des déséquilibres.

Une priorité immédiate : rétablir la stabilité macroéconomique et financière

Avant qu’une reprise durable puisse s’amorcer, il est nécessaire de pallier les

défaillances du système financier de façon qu’une intermédiation normale du crédit soit

en mesure de soutenir l’économie, et la politique budgétaire doit être inscrite sur une

trajectoire viable. Si cela vaut pour la zone euro dans son ensemble (voir le chapitre 1), cela

est particulièrement vrai pour les pays où l’endettement s’est révélé excessif. Des progrès

considérables ont été accomplis sur cette voie dans un certain nombre de pays. En plus de

mesures destinées à soutenir temporairement le système financier, l’Irlande et l’Espagne

ont ainsi adopté de larges trains de mesures destinées à corriger les faiblesses du secteur

bancaire. En Irlande, la National Asset Management Agency (NAMA) s’emploie à faire sortir

les prêts immobiliers des bilans des banques, cette mesure étant couplée à des injections

de capitaux de la part des pouvoirs publics et à la nationalisation de certaines banques

(OCDE, 2009b). En Espagne, les caisses d’épargne (cajas) ont été restructurées et, dans

certains cas, recapitalisées. Par ailleurs, pour améliorer la viabilité budgétaire face au

creusement des écarts de crédit, des mesures d’assainissement spectaculaires ont été

prises en Grèce, en Irlande, au Portugal et en Espagne.

Dans les pays de la zone euro, les déséquilibres extérieurs, après avoir atteint un pic,

se sont atténués. En Allemagne, l’excédent de la balance courante est ainsi passé de 7.7 %

du PIB en 2007 à 5 % en 2009, tandis qu’en Espagne, le déficit de quelque 10 % du PIB se

repliait à 5.4 %. L’évolution de la situation extérieure reflète les corrections substantielles

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201078

Page 81: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

qui ont été apportées aux déséquilibres économiques dans les différents pays de la

zone euro. En particulier, la demande intérieure privée a connu de fortes réductions en

Irlande et en Espagne (graphique 2.15). Cela étant, certaines de ces corrections sont

cycliques et pourraient s’inverser au fur et à mesure de la reprise. En outre, la réduction des

déséquilibres nationaux a amené la production bien en deçà de son potentiel, en

particulier dans les pays les plus gravement touchés.

Les déséquilibres doivent être ramenés à des niveaux tenables sur la durée

Un rééquilibrage durable des économies de la zone euro sera atteint lorsque l’activité

se sera rapprochée de son rythme viable et que les comptes extérieurs seront réalignés sur

les niveaux justifiés par les fondamentaux de l’économie. À court terme, il y a lieu de

soutenir la demande pendant la période d’ajustement. D’une manière générale, une

relance monétaire dans la zone euro contribuera à la reprise de toutes les économies, mais

elle sera insuffisante dans les pays ayant enregistré les récessions les plus graves.

Toutefois, les marges de soutien budgétaire au niveau national sont dans certains cas

fortement restreintes. Par ailleurs, des mesures doivent être prises pour remédier aux

déséquilibres dans les pays où ils sont les plus marqués : les pays excédentaires doivent

renforcer la demande de biens non échangeables, tout en faisant des efforts pour accroître

la productivité dans ce secteur. En même temps, les pays déficitaires doivent faire en sorte

que la demande se détourne des importations et que la production se tourne vers

l’exportation. L’épargne doit se modérer là où elle est excessive et les pays lourdement

endettés doivent rembourser. Dans la mesure où des taux d’épargne élevés ou bas reflètent

des inefficiences et des rigidités structurelles, il faudrait engager des réformes pour

éliminer ces entraves.

La demande publique a permis d’apporter un certain soutien aux économies soumises

à des ajustements sévères, même si dans les pays comme l’Irlande ou la Grèce, ce

phénomène a été limité par les tensions budgétaires. Si un assainissement budgétaire est

nécessaire dans ces pays, il est vital que les opérations de rééquilibrage de l’économie et

des finances publiques prévoient un certain délai d’ajustement et que le réalignement ne

Graphique 2.15. Contribution à la croissance de la demande intérieure totaleContribution à la variation entre T1 2008 et T2 2010, au taux annuel

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364489

-12

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2

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2

IRL SVN GRC ESP FIN ITA Zone euro

SVK LUX FRA PRT NLD AUT BEL DEU

♦ Demande intérieure totale

♦♦ ♦

♦ ♦♦ ♦ ♦ ♦ ♦ ♦ ♦ ♦ ♦

Consommation publiqueDemande privée et autres demandes

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 79

Page 82: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

soit pas abrupt et inefficient. Les pays débiteurs doivent pouvoir continuer à financer leurs

dettes tout en réduisant l’encours global de leurs engagements. Si l’offre de crédit à

destination des emprunteurs privés nationaux devait pâtir d’un choc de liquidité, il est

probable que les pouvoirs publics interviendraient pour les soutenir. Il est en conséquence

fondamental que les gouvernements solvables puissent continuer à avoir accès à des

financements. À court terme, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) peut fournir,

sous certaines conditions, une couverture en liquidités aux pays de la zone euro. Plus

fondamentalement, il est primordial que les gouvernements prennent des mesures pour

atténuer les risques de voir les chocs de liquidité se matérialiser, en menant des politiques

d’assainissement budgétaire ambitieuses et suffisamment concentrées en début de

période, qui définissent des orientations à moyen terme et s’appuient sur des réformes

structurelles conçues pour faciliter l’ajustement budgétaire.

Procéder aux ajustements requis est une tâche complexe, qui va demander du temps.

Dans les pays déficitaires, une amélioration de la compétitivité extérieure contribuerait à

dynamiser la demande externe et à préserver l’emploi à court terme. Une baisse globale

des prix relatifs est requise pour revenir à une position durable à long terme, ainsi que pour

accroître les exportations de manière à rembourser les dettes extérieures. Faute de la

souplesse nécessaire pour dévaluer le taux de change nominal, cette entreprise nécessitera

une limitation sévère des salaires et des prix et, dans certaines économies, une baisse du

niveau des prix ne peut pas être exclue. Si l’on se fonde sur des ajustements antérieurs de

la balance courante dans des pays industrialisés, on voit qu’en l’absence de souplesse au

niveau du taux de change nominal, les rigidités des prix intérieurs sont dommageables

pour la croissance (CE, 2010a). La modification nécessaire des prix relatifs est importante :

il faudrait ainsi cinq années de stagnation des prix en Grèce, en Irlande, au Portugal et en

Espagne avec une inflation à 2 % dans les autres pays de la zone euro pour que les taux de

change réels retrouvent leur niveau de 1999, même s’il est possible que cette opération

aboutisse à une limite supérieure dans la mesure où la situation de départ ne représentait

peut-être pas un point d’équilibre (OCDE, 2010a). Par ailleurs, l’impact sur la demande

d’une amélioration de la compétitivité des prix à l’extérieur serait relativement faible dans

les pays comme la Grèce ou le Portugal, peu ouverts aux échanges. Certains signes

semblent indiquer que cet ajustement est déjà en cours : l’Irlande connaît une période de

déflation depuis la fin de 2008 et le niveau des prix mesuré par l’indice sous-jacent des prix

à la consommation est quasiment inférieur de 7 % à son niveau le plus élevé. Dans d’autres

pays déficitaires, l’inflation a été également très modérée. À court terme, une inflation

faible ou négative aura tendance à faire augmenter le taux d’intérêt réel, ce qui entravera

la reprise en retardant la consommation et en réduisant l’investissement.

Il sera également difficile de procéder aux ajustements nécessaires des prix,

particulièrement dans les pays où les institutions du marché du travail provoquent une

rigidité des salaires nominaux. Au cours des précédents épisodes de rééquilibrage de la

balance courante, l’ajustement des salaires a joué un rôle important pour modérer l’impact

de l’ajustement global sur la croissance (CE, 2010a). Bien que l’indexation officielle des

salaires n’existe que dans un petit nombre de pays (dont l’Espagne), d’une manière plus

générale, il arrive quelquefois que les mécanismes informels ou que la structure des

négociations salariales rendent difficile un ajustement des salaires à la baisse. Comme on

l’a vu au Portugal cette dernière décennie, les rigidités des prix peuvent peser sur

l’économie pour de nombreuses années. Dans la plupart des cas, les mesures prises par les

pouvoirs publics n’ont qu’un impact direct limité sur les salaires et les prix dans le secteur

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201080

Page 83: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

privé. En revanche, les réglementations du marché du travail peuvent avoir prise sur les

salaires dans le secteur privé et sur la négociation salariale. En outre, la fonction publique

influence la demande globale de main-d’œuvre, et les salaires dans le secteur public

peuvent donner un signal important aux instances chargées de fixer les salaires dans le

secteur privé. Les plans d’assainissement adoptés en Grèce, en Irlande et en Espagne ont

ainsi prévu des baisses nominales des salaires dans la fonction publique. Les importantes

réformes du marché du travail actuellement en cours en Espagne pourraient aussi apporter

une contribution utile au processus d’ajustement.

Tout processus de déflation doit être géré avec soin. En principe, le risque de spirale

déflationniste induit par des anticipations inflationnistes fluctuantes ne devrait pas

concerner les différents pays de la zone euro, étant donné que la définition de la stabilité

des prix établie par la BCE assure l’ancrage des anticipations inflationnistes et que la baisse

des prix contribue nécessairement à déprécier le taux de change réel. L’expérience passée

des pays membres de l’OCDE en matière de déflation ne nous donne que très peu

d’indications, seuls la Finlande et le Japon ayant connu des phases de déflation marquées.

D’ailleurs, dans le cas du Japon, le recul du niveau des prix avait été relativement modéré.

L’un des problèmes de la déflation est que la chute des prix accroît la valeur réelle des

dettes libellées en valeur nominale, ce qui renforce le fardeau nominal de la dette. Le piège

de la conjonction dette-déflation (Fisher, 1933) pourrait freiner la reprise de la demande

privée et contribuer à créer des tensions budgétaires, en gonflant la valeur réelle de la dette

et en inversant l’alourdissement automatique de la fiscalité en termes nominaux.

Les politiques structurelles ont un rôle-clé à jouer dans le rééquilibrage des

économies, et une augmentation de la productivité peut alléger les pressions à

l’ajustement des salaires et des prix lorsque la compétitivité est médiocre. Dans les pays

connaissant d’importants déficits de balance courante, des réformes visant à rendre les

marchés de produits plus compétitifs amélioreraient la productivité (Boulhol et Turner,

2008). Dans le secteur des biens exportables, de telles mesures contribueraient à rendre les

biens plus intéressants sur les marchés mondiaux, tandis que la diminution du nombre

des obstacles à la concurrence dans le secteur des services non marchands orienterait les

prix à la baisse et permettrait de consacrer les ressources à d’autres activités. Les Études

économiques récemment consacrées par l’OCDE à l’Espagne, à la Grèce, à l’Irlande et au

Portugal contenaient des recommandations détaillées en ce sens. Dans les pays fortement

endettés, des réformes structurelles dopant la croissance rendraient la dette plus facile à

rembourser et à supporter. Dans les pays disposant de larges excédents extérieurs, des

réformes structurelles dans le secteur des services pourraient à la fois améliorer les

performances globales de l’économie, soutenir la demande intérieure dans son ensemble

et contribuer à déplacer la demande en faveur de la consommation de la production

nationale (OCDE, 2010b). Par exemple, aligner le niveau de la réglementation des marchés

de produits à l’échelle de l’économie en Allemagne sur les meilleures pratiques de l’OCDE

permettrait de relever l’investissement privé de 0.7 point de PIB (Koske et al., 2010).

Améliorer la gestion macroéconomique et financière au niveau national pour éviter les déséquilibres futurs

S’il est peu probable que l’enchaînement des événements ayant provoqué les

déséquilibres actuels se reproduise à l’identique, le risque demeure que des déséquilibres

surviennent encore à l’avenir, sauf si les pouvoirs publics prennent des mesures pour

améliorer la gestion macroéconomique. Les déséquilibres accumulés au cours de la

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 81

Page 84: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

période 2002-07 reflètent en partie des facteurs idiosyncratiques, en particulier les

tensions ressenties dans les pays en voie de rattrapage du fait de la création de l’union

monétaire elle-même et de l’émergence d’un cycle mondial du crédit inhabituellement

prononcé. De futurs chocs pourraient être provoqués par des modifications structurelles

telles que des évolutions démographiques ou des tendances de productivité divergentes,

ainsi que par des erreurs dans la définition de l’action publique ou de la réglementation

financière. Si de petites déviations par rapport à l’équilibre interne ou externe sont

inévitables, la difficulté principale consiste à éviter les déséquilibres importants,

persistants et coûteux du type de ceux qui se sont accumulés au cours de la décennie

écoulée.

La probabilité de chocs susceptibles de provoquer de tels déséquilibres dépend en

partie du degré de similitude entre les pays. D’après la théorie de la zone monétaire

optimale endogène, celle-ci peut s’accroître au fil du temps à l’intérieur d’une union

monétaire (Frankel et Rose, 1998). Or, bien qu’on ait la preuve que l’adhésion à l’union

monétaire ait accru l’intégration par le biais des décisions relatives aux échanges et à

l’investissement (Warin et al., 2009), cette intégration reste incomplète. Une intégration

plus poussée pourrait contribuer à réduire la possibilité de chocs asymétriques, mais une

plus grande spécialisation de la production pourrait avoir l’effet inverse. Une intégration

financière améliorant le partage des risques peut aider à stabiliser la demande nominale.

Toutefois, cela aussi reste imparfait, et une plus grande intégration financière peut

également aggraver les conséquences des chocs en générant des effets de richesse plus

forts (Hoeller et al., 2002). En outre, les réglementations touchant à la flexibilité nominale

des prix et des salaires et à la protection de l’emploi jouent un rôle dans le mécanisme

d’ajustement, et elles exercent une influence dans la mesure où des chocs communs ont

des effets spécifiques par pays sur la compétitivité des prix (Biroli et al., 2010).

Étant donné qu’une politique monétaire à l’échelle de toute la zone ne peut pas

corriger les déséquilibres locaux, il s’ensuit que cette correction est en premier ressort de

la responsabilité des différents États qui composent la zone euro. De plus, l’essentiel des

coûts d’un échec de la stabilisation de l’économie nationale retombe sur la population

concernée. En ce sens, un déséquilibre est un problème de premier ordre pour le pays

concerné, et un problème de deuxième ordre pour les autres pays exposés à certains

risques identiques. Néanmoins, les possibilités de retombées transfrontalières sont

importantes et peuvent justifier que des déséquilibres au niveau national soient

considérés comme une source de préoccupation pour la zone euro dans son ensemble. La

gestion macroéconomique de l’économie nationale doit être une priorité impérieuse dans

la mesure où il est impossible de penser qu’une politique à l’échelle de toute la zone suffira

à rééquilibrer chacune des économies qui la composent. De la même façon que pour la

définition de la politique monétaire, il est nécessaire de procéder en temps voulu à une

évaluation précise de l’état de l’économie, des forces qui agissent sur elle et des risques

encourus. Tout un éventail d’actions publiques est alors nécessaire pour gérer l’économie

et le système financier du pays, de la même façon qu’on le ferait avec la politique

monétaire nationale si tel était le cas. Quelquefois, cela peut vouloir dire que les dispositifs

nationaux devront s’écarter du niveau en vigueur dans la zone, tout en s’inscrivant dans

un cadre général de positions saines et viables. À titre d’exemple, un système de volants de

fonds propres contracycliques pour les banques, appliqué aux conditions nationales,

aiderait à obtenir le résultat escompté (chapitre 4).

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201082

Page 85: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Des réformes structurelles permettraient de réduire les risques de déséquilibres

Les réformes structurelles peuvent jouer un rôle important lorsque les déséquilibres

de la balance courante sont en partie dus au cadre structurel mis en place par les autorités

sur les marchés de capitaux et de produits et sur les marchés du travail ainsi qu’aux

systèmes relatifs à la fiscalité et aux prestations. Les politiques structurelles ont pour

principal objectif de relever les niveaux de vie. En même temps, elles peuvent avoir des

effets importants sur les décisions d’épargne et d’investissement des ménages et des

entreprises, ainsi que sur l’épargne et l’investissement publics (Blanchard, 2007). Les

politiques structurelles ont également une influence sur la vitesse à laquelle les

entreprises et les ménages calquent leur comportement en matière d’épargne et

d’investissement sur les évolutions de la situation macroéconomique. On dispose de

données montrant que plus les dépenses sociales sont fortes, les prestations de chômage

élevées et la législation de protection de la main-d’œuvre stricte, plus le taux d’épargne est

modeste et plus la balance courante est faible, très probablement parce que l’épargne de

précaution des ménages est alors plus modérée (Koske et al., 2010).

Des réformes structurelles visant à accroître la flexibilité économique permettraient

non seulement de s’attaquer aux conséquences des déséquilibres, mais contribueraient

également à garantir que les économies auront tendance à se développer de manière plus

harmonieuse, qu’il s’agisse de celles où la demande est excédentaire ou de celles où la

demande portant sur la production nationale est faible. Les structures économiques

doivent être adaptées aux règles de l’union monétaire. Il est essentiel que les hausses de

salaire soient maintenues à un niveau conforme à la productivité pour éviter toute

distorsion de la compétitivité. Il existe un large éventail de mécanismes de négociation

salariale dans les pays de la zone euro. S’il est difficile de tirer des conclusions générales

quant à la conception optimale de ces mécanismes13, il est important qu’à tout le moins ils

fonctionnent correctement. Le rôle explicite des pouvoirs publics dans la fixation des

salaires du secteur privé est généralement limité, même si les salaires dans le secteur

public influencent les négociations dans le secteur privé (Lamo et al., 2008). Cela étant, les

institutions du marché du travail peuvent avoir un impact sur la manière dont ces

mécanismes fonctionnent et il peut arriver que les pouvoirs publics jouent un rôle informel

dans ce processus. L’indexation automatique des salaires, qui existe sous différentes

formes en Belgique, au Luxembourg, en Slovénie et en Espagne, peut être un obstacle de

poids à l’ajustement. L’extension légale à tout un secteur du résultat des négociations

salariales est particulièrement problématique dans la mesure où les syndicats

n’internalisent pas complètement les coûts de leurs actions et où le résultat est loin de

celui qui serait atteint sur un marché décentralisé (Calmfors, 1993).

Une politique budgétaire judicieuse à l’échelon national devrait être la contrepartie de la politique monétaire de la BCE

En l’absence de politique monétaire nationale, la politique budgétaire est un

instrument de référence de la gestion macroéconomique au niveau d’un pays. Faute de

transferts budgétaires substantiels entre les pays, les chocs temporaires entre les pays de

la zone euro doivent être compensés par des modifications de l’équilibre budgétaire,

aboutissant à ce que les flux de capitaux appropriés transitent par les marchés financiers

plutôt que par un budget fédéral. Comme évoqué en détail dans le chapitre 3, la politique

budgétaire devrait être conçue de manière que les stabilisateurs automatiques puissent

fonctionner, aussi bien dans les périodes fastes où la tentation est grande de dépenser des

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 83

Page 86: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

recettes en pleine expansion que pendant les périodes de récession. Il faut éviter que des

politiques budgétaires non soutenables ne puissent contribuer à accentuer les

déséquilibres, même si ce sont généralement les déséquilibres du secteur privé qui ont

joué un rôle majeur au cours de la décennie écoulée. De plus, il faut laisser une marge

permettant de faire face aux urgences, par exemple un problème dans le secteur financier.

Ceci implique que l’encours de dettes doit être maintenu à un niveau dicté par la prudence.

Le chapitre 3 contient des recommandations spécifiques visant à améliorer les cadres

budgétaires, tant au niveau de l’UE qu’au niveau des différents pays. Il est peu probable

qu’une politique discrétionnaire visant uniquement à modifier l’orientation budgétaire

globale ait des effets puissants dans de nombreux pays, en premier lieu à cause des

déperditions à l’étranger et des ajustements compensatoires du comportement du secteur

privé; en tout état de cause, cette action doit prendre en compte la viabilité des finances

publiques. Une telle approche ne serait qu’un pis-aller dans la mesure où elle ne s’attaque

pas nécessairement de front aux causes intrinsèques des déséquilibres du secteur privé.

Compte tenu de ces contraintes, certaines actions de politique budgétaire ciblées

permettraient d’agir plus directement sur les déséquilibres, par exemple en modifiant les

dépenses publiques pour les biens non échangeables ou en adoptant des mesures fiscales

ciblées telles qu’une réduction des aides au logement. Ainsi, un train de mesures mises en

place en Irlande entre 1998 et 2002 et comportant de tels éléments a eu un effet

spectaculaire pour endiguer la hausse des prix des logements, même si ces dispositions

ont été finalement abandonnées14. Dans cette optique, la politique budgétaire devrait viser

à minimiser les distorsions sur les marchés.

La stabilisation opérée dans le sillage de la crise par le biais de la politique budgétaire

a joué un rôle important pour soutenir la demande intérieure à court terme dans les pays

où la demande privée s’était fortement contractée au moment où des emprunteurs déjà en

difficulté s’efforçaient de reconstituer leurs finances. Bien que des finances publiques

viables soient une condition préalable à un tel soutien, une aversion plus marquée pour le

risque empêche quelquefois les pays d’emprunter, même dans des cas où cela paraîtrait

justifié. Plusieurs possibilités sont offertes, par exemple la création de réserves pour

imprévus ou un système d’assurance groupée. Ce dernier est d’autant plus efficace que les

chocs ne sont pas corrélés entre les pays. Comme on le verra au chapitre 3, pour faire face

aux crises de liquidités, il conviendrait de mettre en place un mécanisme permanent

assorti d’une forte conditionnalité.

Les politiques macroprudentielles doivent être différenciées au niveau des pays

Une amélioration de la réglementation pourrait permettre de s’attaquer aux

déséquilibres financiers, y compris ceux qui puisent leur origine dans des évolutions

déstabilisantes des taux d’intérêt réels au niveau national. Comme indiqué au chapitre 4,

une réglementation microprudentielle plus efficace contribuerait à réduire les prises de

risques excessives et à protéger le système financier contre les pressions dues à une forte

demande de prêts et à une surévaluation des actifs. Une réglementation et une

surveillance microprudentielles plus fortes pourraient aussi rendre les systèmes financiers

plus résistants à ces pressions et augmenter la résilience du système financier au moment

où les risques se concrétisent. Par ailleurs, la création d’un système efficace de

réglementation macroprudentielle pourrait servir à la fois à garantir la pérennité du

secteur financier et à limiter les conséquences des cycles du crédit sur la macroéconomie.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201084

Page 87: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

La nature fortement internationale des marchés des capitaux de l’UE, qui a de

nombreux avantages, doit aussi être prise en compte lors de la conception des politiques

appropriées. Dans les pays de la zone euro, un endettement extérieur massif est allé de

pair avec des risques financiers particuliers qui tenaient à la très forte mobilité des

capitaux, particulièrement des flux de fonds, et au transfert de risques entre les banques

de différents pays. Comme préconisé au chapitre 4, il est particulièrement nécessaire de :

● Définir des politiques macroprudentielles au niveau national ou infranational, en plus

des mesures définies à l’échelle de la zone euro et de l’UE. Ces politiques devront

s’appliquer à tous les crédits consentis à un pays particulier, quelle que soit la

localisation ou l’identité du prêteur, grâce au principe de la réciprocité juridictionnelle.

La constitution de volants de fonds propres quasi-automatiques fondés sur la croissance

nationale du crédit devrait à cet égard constituer un instrument de premier ordre.

● Les concentrations nationales de risques devraient être systématiquement examinées

au regard du Pilier 2 du dispositif de Bâle pour déterminer le niveau des fonds propres

réglementaires.

● La réglementation de la liquidité devrait être renforcée de façon à réduire les

déséquilibres lorsque les banques font appel au marché interbancaire pour attirer des

fonds d’autres pays afin de financer leurs concours nationaux à long terme.

Les concentrations de risques au niveau local pourraient être réduites grâce à une

intégration financière plus large, y compris au niveau des activités avec les particuliers,

dans un cadre de réglementation et de surveillance approprié. Comme déjà mentionné, la

structure du système financier de la zone euro, marquée par des niveaux d’intégration

élevés dans certaines activités mais pas dans d’autres, a une tendance inhérente à créer

une certaine fragilité. Premièrement, elle intensifie les effets d’accélérateur financier au plan

local. Deuxièmement, en allégeant les contraintes de crédit, elle peut favoriser des flux de

capitaux à court terme qui contribuent à des prises de risques dans l’économie nationale

et accroissent la vulnérabilité aux risques de liquidité. Enfin, troisièmement, le caractère

limité de l’intégration dans les activités de détail signifie que les prêteurs sont souvent loin

des risques auxquels ils sont exposés et ceci accroît les asymétries d’information. Par

ailleurs, une intégration financière plus poussée pourrait contribuer à réduire les risques

liés aux effets négatifs des déséquilibres financiers, mais cela ne résoudrait pas

directement le problème lié à cette structure à risque.

Il convient aussi de veiller aux problèmes de répercussion à l’étranger des grands

risques inscrits dans les bilans des pays (voir le chapitre 4). En l’absence de tout

mécanisme transnational, il incombe à chaque pays de la zone euro d’aider les institutions

qui relèvent de sa juridiction ou qui ont un impact systémique sur leur territoire, et cela a

quelquefois fait peser un fardeau financier très lourd sur certains pays. Dans les systèmes

fédéraux, il existe généralement un filet de sécurité fédéral. Par exemple, aux États-Unis, la

Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC) offre un système d’assurance liée à la

surveillance au niveau fédéral.

Supprimer les distorsions dans les politiques du logement permettrait de réduire la

volatilité des marchés concernés. Le cycle du logement généré par des taux d’intérêt réels

très bas a été amplifié par les distorsions fiscales en faveur des propriétaires-occupants et

par les restrictions pesant sur l’utilisation des terrains, comme déjà indiqué. En particulier,

le traitement fiscal favorable (déductibilité des crédits hypothécaires et allégements

généreux pour les transactions immobilières) devrait être revu à la baisse. Ceci

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 85

Page 88: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

contribuerait également à améliorer les situations budgétaires structurelles. De plus, la

mobilité résidentielle dans les pays de la zone euro est généralement faible, le nombre de

ménages ayant changé de résidence au cours des deux années précédentes étant

généralement inférieur à la moyenne de l’OCDE (Andrews et al., à paraître). Des réformes

permettant d’améliorer le fonctionnement du marché du logement, telles qu’une

réduction des taxes élevées sur les mutations ou la levée des contraintes pesant sur l’offre,

pourraient aussi faciliter l’ajustement économique en supprimant des obstacles à la

mobilité de la main-d’œuvre.

Renforcer la surveillance et la coordination de l’action publique au niveau européen

Un renforcement de la surveillance et de la coordination des politiques économiques

au niveau européen contribuerait à accroître l’efficacité des mesures nationales destinées

à éviter les déséquilibres. La coordination des politiques pourrait en principe prendre des

formes très diverses, allant d’un examen par les pairs avec analyse référentielle à

l’utilisation coordonnée de politiques discrétionnaires, en passant par l’application de

normes communes. Ces stratégies peuvent se justifier pour deux raisons au moins.

Premièrement, dans la mesure où des retombées se font sentir entre pays de la zone euro, la

mise en œuvre de politiques nationales judicieuses est encore plus importante et devrait

être clairement considérée comme une question d’intérêt commun ailleurs. Deuxièmement,

une coordination étroite et une surveillance renforcée de la politique économique peuvent

aider les autorités nationales à définir et à s’engager à mettre en œuvre des politiques qu’il

leur serait autrement difficile d’appliquer. Dans le contexte de l’Union européenne, la

coordination des mesures visant à corriger les déséquilibres devrait être particulièrement

étroite en ce qui concerne les pays de la zone euro : outre qu’ils partagent la même

monnaie et la même banque centrale, ces pays sont généralement les plus intégrés

économiquement et financièrement. De surcroît, les économies de la zone euro sont plus

difficiles à stabiliser, étant donné le manque de flexibilité du taux de change nominal et

l’absence de politique monétaire nationale indépendante.

L’étendue des avantages qu’il est possible de retirer de la coordination de l’action

publique dépend de l’importance des effets de contagion. Ainsi qu’on l’a déjà indiqué, il est

probable que les effets d’entraînement commerciaux soient relativement faibles, si bien

qu’une économie aurait peu à gagner d’un changement de la politique dans un autre pays.

De fait, modifier la demande globale de biens dans un pays constituerait une méthode très

indirecte d’essayer d’aider une autre économie à atteindre l’équilibre. En revanche, les

effets de contagion financière sont très importants. De fait, la tension globale ressentie sur

les marchés de capitaux de la zone euro tient en partie à des faiblesses affectant quelques

pays spécifiques, et la crise des emprunts souverains de mai 2010 a eu des conséquences

graves sur de nombreux pays de la zone euro, même si la Grèce représente moins de 3 % du

PIB de la zone. À titre d’exemple, les variations des taux de change de la zone euro, les

hausses des écarts de taux sur la dette d’autres pays de la zone et l’évolution du marché

interbancaire ont suivi de près les nouvelles concernant la situation en Grèce. Comme

indiqué au chapitre 4, l’ampleur des mouvements de capitaux entre les pays peut avoir un

impact très important sur les pays pris individuellement, à la fois pendant la phase

ascendante du cycle de crédit et pendant la crise. Étant donné la nature des retombées, les

facteurs sous-jacents à l’origine d’un excédent d’épargne ainsi que d’une consommation

ou d’investissements excessifs doivent être considérés comme des sources de

préoccupation.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201086

Page 89: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

L’UE et l’Eurogroupe devraient exercer une surveillance plus musclée

Depuis longtemps, les déséquilibres économiques font l’objet d’une surveillance

internationale, de la part des institutions de l’UE et d’autres organisations internationales.

Cette surveillance a permis de compléter les analyses des autorités, institutions et

commentateurs nationaux. Par le passé, des mises en garde ont été lancées sur la scène

internationale contre les risques que faisaient courir les déséquilibres des économies

nationales des pays de la zone euro, qu’il s’agisse de pays déficitaires tels que l’Espagne, la

Grèce, l’Irlande ou le Portugal, ou de pays qui, comme l’Allemagne, conjuguaient de larges

excédents à une demande intérieure atone. Pour ce qui est de la Commission, la

surveillance des déséquilibres fait depuis longtemps partie intégrante de ses activités de

suivi permanent des évolutions et des politiques économiques dans la zone euro et dans

les pays de l’UE, et donne lieu à des évaluations qui sont régulièrement communiquées

dans le Rapport annuel sur la zone euro, publié depuis 2006, et qui étaient auparavant

exposées dans les différentes éditions de L’économie de l’UE : bilan et du Quarterly Report on

Euro Area. Des travaux analytiques de fond sur les déséquilibres ont été publiés dans The EU

Economy : 2006 Review (CE, 2006). Un suivi de ces travaux est publié dans Surveillance of Intra-

Euro-Area Competitiveness and Imbalances (CE, 2010a). Depuis 2005 au moins, la BCE revient

également régulièrement, au sein de l’Eurogroupe, sur l’importance de la compétitivité

intérieure et extérieure15.

Il semble qu’il y ait un accord quasi unanime sur les risques de déséquilibres qui

existaient avant la crise. Ainsi, en se fondant sur la situation de six pays de la zone euro

aux alentours de 2001, le Conseil de l’UE, le Conseil exécutif du FMI et l’OCDE étaient

parvenus à une évaluation similaire de la position cyclique et avaient lancé des mises en

garde semblables contre les risques de surchauffe/de demande excédentaire (Hoeller et al.,

2002). De telles évaluations sont généralement établies à partir d’une large gamme

d’indicateurs, même si l’étude de 2001 précisait que le classement des risques entre les

pays était très proche du classement en fonction de l’inflation. L’une des principales

difficultés consiste à évaluer la production potentielle qui, bien qu’inobservable par

essence, constitue un élément crucial pour pouvoir se prononcer sur le caractère excessif

des déséquilibres. Pour les mêmes raisons, il est difficile d’évaluer les effets Balassa-

Samuelson sur l’inflation liés aux chocs de productivité dans le secteur des biens

échangeables, et du coup, il est également difficile d’apprécier dans quelle mesure

l’inflation est alimentée par une demande excédentaire. Pour le groupe des six pays

considérés en 2001, on disposait d’un « large éventail de résultats » pour déterminer dans

quelle mesure les écarts d’inflation étaient dus à des facteurs sous-jacents (Hoeller et al.,

2002). Au total, le diagnostic ex ante concernant certains déséquilibres était correct, mais

l’ampleur et la nature du problème n’ont pas été pleinement appréhendées. Il reste

néanmoins possible d’améliorer la surveillance au niveau de l’UE, et en particulier de

mettre en avant les problèmes spécifiques auxquels sont confrontées les économies de la

zone euro. Cette surveillance devrait permettre de mettre l’accent sur le niveau auquel des

déséquilibres seront jugés excessifs et sur les risques encourus. S’il est vrai que les pays

devraient être, en dernier ressort, les mieux placés pour comprendre leur propre situation

économique, la surveillance par l’UE peut élargir la perspective et se nourrir de

l’expérience et des références des autres pays.

Pendant la période récente d’accumulation des déséquilibres, les mises en garde de la

Commission et d’autres organismes n’ont pas été suivies d’une réaction suffisante de la

part des pouvoirs publics. Au niveau national, ces mises en garde n’ont pas été considérées

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 87

Page 90: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

comme crédibles, voire elles ont été tout simplement ignorées, en particulier parce que les

instruments de l’action publique et les cadres institutionnels nécessaires n’existaient pas.

Au niveau de l’UE et de la zone euro, le Conseil ECOFIN et l’Eurogroupe constituent chacun

une enceinte pour discuter de ces questions. Pour autant, aucune politique efficace n’a

surgi de ces discussions. La seule mesure importante dans ce domaine a été l’adoption, par

le Conseil, des Grandes orientations des politiques économiques (GOPE), document de

référence destiné à orienter l’exercice de toute la palette des politiques économiques, au

niveau des différents pays et au niveau de l’UE. Sur le plan de la coordination de l’action

publique, les GOPE se distinguent principalement par le pouvoir que confère le Traité de

formuler une recommandation appelant à l’adoption de mesures correctrices lorsque les

politiques économiques « risquent de compromettre le bon fonctionnement de l’Union

économique et monétaire ». Ces orientations à l’intention des pouvoirs publics ont été ces

dernières années interprétées sous l’angle de la stabilité et de la durabilité, ce qui pourrait

s’appliquer au problème des déséquilibres. Cela étant, s’il semble que les GOPE aient, dans

une certaine mesure, suscité un débat utile sur ces questions et sur d’autres problèmes

économiques, la pression par les pairs n’a pas été efficace et n’a permis ni qu’elles soient

mises en œuvre au niveau de l’UE, ni qu’elles mobilisent des forces « internes » permettant

de s’attaquer aux défaillances économiques (Deroose et al., 2008). En particulier, une seule

recommandation incitant à prendre des mesures correctrices a été émise, à l’intention de

l’Irlande en 2001, et la réaction politique fortement négative qu’elle a suscitée semble bien

avoir mis un terme à de telles initiatives. Les discussions récentes au sein de l’Eurogroupe

ont également porté sur des questions liées aux déséquilibres. Il est difficile d’évaluer

l’impact de ces réunions dans la mesure où elles ne sont pas publiques, mais cette absence

de transparence elle-même nuit à la mise en œuvre de certains des mécanismes qui

pourraient rendre efficaces les examens par les pairs16.

En réponse à l’absence, dans le passé, d’un mécanisme efficace pour faire respecter les

dispositions visant les déséquilibres dommageables, d’importantes modifications

législatives sont engagées afin d’améliorer la détection des déséquilibres dans l’UE et de

faire en sorte que les mesures correctrices nécessaires soient prises, grâce à un mécanisme

de mise en application. Les propositions actuelles suivent une approche en deux étapes.

Dans la première étape, il y aurait une évaluation annuelle par la Commission du risque de

déséquilibres et de vulnérabilités macroéconomiques dans les pays de l’UE (CE, 2010c; EU

Taskforce, 2010). Celle-ci s’appuierait sur une batterie d’indicateurs macroéconomiques et

financiers, avec des seuils d’alerte inférieurs et supérieurs. Elle pourrait comprendre des

variables telles que la balance courante, la position extérieure nette, les indicateurs de

compétitivité, la croissance du crédit et les variations des prix des logements. La

Commission réaliserait un examen approfondi, prenant en compte un plus large éventail

d’informations et d’évaluations qualitatives, pour déterminer si les déséquilibres posent

un risque. L’évaluation de l’équilibre entre la demande et l’offre internes, mais aussi de la

production potentielle, devrait jouer un rôle essentiel dans cette analyse. Il est important

de sélectionner les indicateurs et de calibrer les niveaux d’alerte afin de parvenir à un

équilibre approprié entre les erreurs de type I (détecter à tort des déséquilibres

préjudiciables potentiels) et de type II (échouer à détecter des déséquilibres risqués). Les

coûts liés à la non-détection de vulnérabilités croissantes sont élevés, tandis que l’examen

approfondi consécutif à la détection initiale sur la base du tableau de bord contribuerait à

minimiser les conséquences des erreurs de type I imputables à ce tableau de bord.

Néanmoins, un système d’indicateurs qui n’établirait pas de différenciation suffisante

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201088

Page 91: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

entre les pays et qui entraînerait d’incessants examens approfondis pour un grand nombre

de pays pourrait perdre de sa crédibilité et bénéficier d’un appui politique plus restreint. Le

suivi des déséquilibres macroéconomiques serait intégré avec d’autres éléments de

surveillance, notamment en ce qui concerne les politiques budgétaires et structurelles, dans

la procédure de « semestre européen » (chapitre 3; CE, 2010a). Étant donné l’importance des

répercussions financières, il est particulièrement crucial que l’évaluation, les avertissements

et les recommandations du Comité européen du risque systémique (CERS) soient dûment

pris en compte et que le CERS lance une analyse détaillée des flux de capitaux

transfrontaliers et des concentrations de risques (chapitre 4). Le nouveau calendrier de

surveillance contribuerait à une large évaluation des cadres d’action susceptibles

d’engendrer des déséquilibres préjudiciables.

La seconde étape de l’approche proposée consiste à mettre en place un mécanisme de

mise en application pour veiller à ce que les politiques économiques des pays de l’UE ne

créent pas de risques en nuisant au bon fonctionnement de l’union économique et

monétaire (CE, 2010c; EU Taskforce, 2010). La Commission aurait le pouvoir de lancer une

alerte précoce si des problèmes étaient détectés au cours de l’examen approfondi. En cas

de déséquilibres graves, le Conseil pourrait déclarer qu’un pays est en « position de

déséquilibre excessif », sur recommandation de la Commission, décision qui devrait être

rejetée à la majorité qualifiée selon la nouvelle procédure de vote « quasi-automatique ».

Une série de recommandations financières ou structurelles seraient adressées au pays en

question, qui serait tenu de faire rapport régulièrement sur les progrès accomplis. La

Commission suivrait en outre l’application des dispositions. Certaines des mesures

requises pour corriger les déséquilibres ne relèvent pas directement des pouvoirs publics;

ainsi, les salaires sont largement déterminés dans le secteur privé. Par conséquent, les

recommandations et leur suivi devraient se focaliser principalement sur l’existence de

politiques appropriées, et non simplement sur les résultats en termes de déséquilibres.

Pour les pays de la zone euro uniquement, l’inobservation répétée des recommandations

du Conseil pourrait aboutir à l’imposition d’amendes similaires à celles qui s’appliquent en

cas de non-respect du Pacte de stabilité et de croissance.

La mise en œuvre de ces propositions permettrait d’améliorer considérablement la

surveillance des déséquilibres dans la zone euro et de créer un mécanisme de mise en

application plus étoffé. Néanmoins, il serait peut-être encore difficile de faire en sorte que

des mesures correctrices appropriées soient prises. En particulier, la détection des

déséquilibres préjudiciables et les moyens de les résorber sont par nature complexes et

exigent une certaine réflexion subjective. Définir les « déséquilibres excessifs » risque par

exemple de se révéler plus difficile que de détecter un « déficit excessif », lequel est plus

étroitement lié à de simples critères numériques. Cela nécessite une plus grande part de

jugement, à partir d’un éventail plus large d’indicateurs, ce qui peut créer des ambigüités

sur le point de savoir si une action est requise ou sur la forme qu’elle devrait prendre. La

mise en application de ces décisions dans le contexte des Grandes orientations des

politiques économiques adoptées par le Conseil s’est révélée inefficace dans le passé,

encore plus peut-être que dans le cas de la politique budgétaire (chapitre 3). En particulier,

l’avertissement donné par le Conseil à l’Irlande en 2001 a suscité une réaction politique et

déclenché un débat sur la légitimité de la gouvernance de l’UE (Deroose et al., 2008). Par la

suite, ces avertissements n’ont plus été émis. Il conviendrait d’évaluer l’efficacité des

nouvelles institutions, et si la mise en œuvre des mesures correctrices nécessaires se

révèle difficile, on pourrait envisager comme solution de rechange une simple norme

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 89

Page 92: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

quantitative qui impliquerait plus clairement que les pouvoirs publics doivent intervenir

contre les déséquilibres. L’absence par le passé d’une action efficace contre les

déséquilibres et les vulnérabilités croissantes exige une nouvelle approche. Les éventuels

obstacles à une application efficace des dispositions doivent être surmontés, et les

difficultés en cause ne devraient pas dissuader les responsables de mettre en place des

procédures pour détecter, éviter et corriger les déséquilibres préjudiciables qui menacent

de compromettre le bon fonctionnement de la zone euro.

Encadré 2.4. Synthèse des recommandations relatives aux déséquilibres macroéconomiques

Les déséquilibres économiques, financiers et budgétaires dans les différents pays de la zone euro ontentravé le fonctionnement efficace de l’union monétaire et engendré des vulnérabilités croissantes.

Pour stabiliser les économies nationales, il est nécessaire d’adopter une nouvelle approchetransversale de la gestion économique et financière, laquelle devrait s’appuyer sur un largeéventail de politiques permettant de s’attaquer aux sources des déséquilibres macroéconomiques,avec par exemple des instruments macroprudentiels, des politiques budgétaires judicieuses et desréformes structurelles. D’importantes modifications législatives sont engagées pour améliorer lasurveillance des déséquilibres au niveau de l’UE et veiller à ce que des mesures correctrices soientmises en œuvre.

Renouer avec la stabilité macroéconomique et financière

Ramener à l’équilibre des économies fortement déséquilibrées demandera du temps et desefforts. Dans l’immédiat, il est nécessaire de remédier aux défaillances du secteur financier, derestaurer la stabilité des finances publiques et de garantir aux États un accès approprié aux sourcesde financement (voir le chapitre 1). Par ailleurs, les pays présentant de larges déséquilibresextérieurs doivent :

● Faire en sorte que les prix et les salaires soient ajustés dans les pays déficitaires pour aider àredéployer les ressources à partir des activités non marchandes qui ont connu une expansionsurdimensionnée au cours des années d’euphorie. Ceci risque d’impliquer des restrictionsconsidérables sur les salaires et sur les prix. Les obstacles d’ordre institutionnel qui pourraiententraver les ajustements requis devront être levés.

● Entreprendre des réformes structurelles visant à améliorer l’efficience pour faciliter l’ajustement etcontribuer au rééquilibrage. Dans les pays déficitaires, s’attaquer aux obstacles qui entravent laproductivité permettrait d’harmoniser les coûts. Dans les économies excédentaires, les politiquesstructurelles pourraient renforcer la demande intérieure et améliorer la croissance de laproductivité, plus particulièrement dans les secteurs non marchands.

Éviter les déséquilibres non tenables sur la durée

● Les cadres budgétaires devraient être renforcés, tant au niveau de l’UE qu’au niveau desdifférents pays, pour éviter les situations budgétaires non tenables, améliorer la gestionmacroéconomique et éviter les crises budgétaires (voir le chapitre 3).

● La surveillance financière et macroprudentielle dans l’UE devrait être renforcée (voir lechapitre 4). Pour éviter les déséquilibres excessifs, la responsabilité de la politiquemacroprudentielle devrait être clairement définie au niveau national et à l’échelle de l’UE; laréglementation financière devrait éviter les concentrations de risques excessives au niveaulocal; enfin des volants de fonds propres contracycliques devraient être introduits en fonction del’augmentation des crédits au plan national. L’intégration financière devrait être recherchée,dans le cadre d’une réglementation appropriée.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201090

Page 93: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

Notes

1. La Slovénie et la Slovaquie, qui n’ont rejoint la zone euro respectivement qu’en 2007 et 2009, nesont pas prises en compte dans l’analyse ci-après, laquelle concerne la formation desdéséquilibres dans les années 2000.

2. D’après les Statistiques financières internationales du FMI. Il existe d’autres mesures des positionsextérieures nettes.

3. L’actuel taux de dépendance des personnes âgées dope la consommation courante par rapport aurevenu, alors que l’augmentation future de ce taux accroît l’épargne courante.

4. Le solde budgétaire est généralement positivement corrélé à la balance courante, mais l’effet estbien inférieur à un pour un.

5. Cela n’est pas le cas pour la Finlande.

Encadré 2.4. Synthèse des recommandations relatives aux déséquilibres macroéconomiques (suite)

● Dans chaque pays, les mécanismes institutionnels de fixation des salaires et le marché dutravail devraient être réformés pour faire en sorte que les évolutions salariales suivent lesévolutions de la compétitivité. Il conviendrait de supprimer progressivement l’indexationautomatique des salaires.

● Les politiques du logement inefficientes ou ayant des effets de distorsion qui renforcent lecaractère cyclique de la demande ou qui limitent inutilement l’offre devraient être abandonnées,de manière à amortir les cycles du logement.

Surveillance et suivi des déséquilibres

D’importants changements législatifs sont engagés à l’heure actuelle afin de renforcer lasurveillance des déséquilibres dommageables. Les propositions actuelles devraient êtreappliquées, de telle sorte que :

● La surveillance des déséquilibres par l’UE soit renforcée et mette l’accent sur les effets decontagion entre les pays, eu égard aux besoins spécifiques des pays de la zone euro. Ceprocessus devrait être intégré à la surveillance budgétaire et structurelle dans le contexte du« semestre européen », mais aussi s’appuyer sur l’analyse des flux de capitaux transnationauxet des concentrations de risques, ainsi que les recommandations et les alertes, émanantdu CERS.

● Une évaluation annuelle des déséquilibres soit réalisée, à partir d’un tableau de bord composéd’un large éventail d’indicateurs, à quoi s’ajouterait une évaluation qualitative. La positionextérieure nette, le solde de la balance des paiements courants, la croissance du crédit, les prixdes logements et les mesures de la compétitivité pourraient figurer au nombre de cesindicateurs. Des études par pays approfondies seraient nécessaires pour réaliser une évaluationglobale des risques.

● La disponibilité des statistiques comparables et cohérentes sur les pays de la zone euro soitrenforcée, surtout en ce qui concerne les systèmes bancaires nationaux et les fluxtransnationaux.

● Si l’on constate que des déséquilibres font peser des risques sur la stabilité de la zone euro, laCommission et le Conseil devraient engager vis-à-vis des pays de la zone une procéduregraduelle prévoyant une intensification de la surveillance et, en dernier ressort, la formulation,pour chaque pays concerné, de recommandations et de mises en garde. Les difficultésrencontrées pour détecter les déséquilibres dommageables ne devraient pas dissuader lesresponsables d’appliquer des sanctions lorsque les risques apparaissent élevés, et, en casd’inobservation répétée des recommandations, de prendre des mesures correctrices.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 91

Page 94: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

6. Dans le cas de l’Irlande, l’effet Balassa-Samuelson sur l’inflation est fort et positif, mais il estrelativement faible dans certains pays qui ont connu une inflation relativement faible (Égert, 2010).Toutefois, cet effet n’agit pas systématiquement dans tous les pays (voir aussi CE, 2009).

7. Cet effet s’accorde avec les estimations signalées dans Barnes et al. (à paraître) pour l’OCDE et lespays de la zone euro, ainsi qu’avec les études précédentes dont il est rendu compte dans lesouvrages sur la balance des opérations courantes.

8. Sauf en 2007, année où l’Allemagne a affiché un excédent.

9. On observe la même relation pour les taux d’intérêt réels. La règle simple de Taylor utilisée dans legraphique 2.6 part de l’hypothèse d’un objectif commun neutre pour le taux d’intérêt et le tauxd’inflation, et ignore en conséquence les différences potentiellement importantes entre les pays.En outre, elle dépend d’estimations très incertaines de l’écart de production.

10. Parmi les autres mesures figurent le taux de change réel fondé sur l’indice implicite des prix à laconsommation, les coûts unitaires de main-d’œuvre et les prix à l’exportation.

11. Voir l’encadré 1.1 « Quelle est la taille du secteur bancaire irlandais? » dans OCDE (2009b).

12. Dans le cas de l’Espagne, la relance budgétaire discrétionnaire a servi à amortir l’impact initial dela crise, mais cette action a été plus que compensée par les mesures de rigueur ultérieuresappliquées à un moment où la demande globale était très faible.

13. Voir le chapitre 3 « La fixation des salaires : aspects institutionnels et résultats » dans OCDE (2004).

14. Voir l’encadré 1 « Tax breaks for housing and policy flip-flops » dans Rae et van den Noord (2006).

15. Voir le discours d’introduction de Jean-Claude Trichet lors de l’audience du Comité des affaireséconomiques et monétaires du Parlement européen à Bruxelles, le 21 juin 2010.

16. « La France va évaluer la compétitivité de l’Allemagne », Le Figaro, 13 juillet 2010.

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2. RÉSORBER ET ÉVITER LES DÉSÉQUILIBRES NON SOUTENABLES

ent al

Variation2002-07

1.4

–9.9

11.9

–3.3

22.4

–43.0

–1.0

–7.8

33.0

–35.6

–28.1

–36.5

0.9

. .

rimoine

ANNEXE 2.A1

Tableau 2.A1.1. Actifs financiers nets par secteurEn pourcentage du PIB

Total de l’économie Sociétés non financières Ménages AdministrationsSecteur non financier,

net1

Solde del’investissem

internation

2002 2007Variation 2002-07

2002 2007Variation2002-07

2002 2007Variation2002-07

2002 2007Variation2002-07

2002 2007Variation2002-07

2002 2007

Autriche –20.3 –9.1 11.2 –80.6 –94.5 –13.9 97.1 114.0 16.9 –37.2 –30.7 6.4 –20.7 –11.2 9.5 –21.2 –19.8

Belgique 43.0 33.2 –9.8 –78.1 –103.5 –25.3 215.5 212.1 –3.4 –93.3 –73.3 19.9 44.1 35.3 –8.8 41.3 31.4

Finlande –35.4 - 30.0 5.4 –133.7 –171.3 –37.6 62.9 67.2 4.4 31.6 71.0 39.5 –39.3 –33.0 6.3 –40.9 –29.0

France 12.9 14.3 1.4 –74.8 –115.6 –40.8 115.9 133.0 17.1 –41.8 –34.0 7.8 –0.7 –16.6 –15.9 3.0 –0.3

Allemagne –1.8 19.3 21.1 –63.7 –71.5 –7.8 94.1 123.6 29.4 –40.8 –42.9 –2.1 –10.4 9.2 19.6 5.6 28.0

Grèce –56.2 –100.5 –44.4 –61.7 –92.8 –31.0 107.4 92.3 –15.2 –94.7 –70.4 24.3 –49.0 –70.9 –21.9 –58.9 –101.9

Irlande2 –18.0 –19.5 –1.5 –93.2 –76.0 17.2 90.0 64.6 –25.4 –14.0 0.3 14.2 –17.1 –11.1 6.0 –20.0 –21.0

Italie –4.3 .7 5.0 –103.7 –105.2 –1.5 193.6 188.6 –5.1 –95.7 –87.1 8.6 –5.8 –3.7 2.1 –15.3 –23.1

Pays-Bas –9 44.1 45.0 –99.8 –86.8 13.1 155.7 168.9 13.2 –60.3 –37.4 22.9 –4.4 44.7 49.1 –27.0 5.9

Portugal –56.6 –90.6 –34.0 –146.0 –167.8 –21.8 129.8 127.6 –2.2 –34.4 –44.2 –9.8 –50.6 –84.4 –33.8 –62.6 –98.3

République slovaque –27.5 –45.2 –17.7 –45.5 –53.3 –7.9 38.6 13.5 –25.1 –1.7 0.8 2.5 –8.5 –39.0 –30.5 –25.2 –53.3

Espagne –38.4 –77.0 –38.6 –96.0 –157.3 –61.3 94.1 95.5 1.3 –40.3 –19.0 21.4 –42.2 –80.8 –38.6 –46.9 –83.4

Slovénie –3.5 –21.8 –18.3 –92.1 –122.6 –30.5 66.9 79.1 12.2 14.2 17.6 3.4 –11.0 –25.9 –14.8 5.3 6.1

Zone euro –4.9 –2.5 2.4 –83.1 –104.0 –20.9 124.8 135.4 10.6 –52.5 –43.2 9.3 –10.9 –11.9 –1.0 . . . .

1. Sommes des sociétés non financières, des ménages et des administrations.2. Données non consolidées.Source : FMI (2010), Statistiques financières internationales ; OCDE (2010), Comptes nationaux des pays de l’OCDE – Comptes de patfinancier : Stocks, vol. IIIb.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 95

Page 98: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010
Page 99: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010

© OCDE 2010

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Chapitre 3

Rebâtir les finances publiques et la discipline budgétaire

La crise a mis à mal les finances publiques. Les emprunts publics ont enregistré une forte augmentation, sol’effet des stabilisateurs automatiques et des mesures discrétionnaires de relance budgétaire. Ce niveau éledes emprunts publics tient aussi à la fin du dynamisme des recettes lié au cycle du crédit, qui a servfinancer une hausse intenable des dépenses. Les aides apportées au système financier ont accru engagements des administrations publiques dans certains pays, alourdissant des dettes déjà globalemconsidérables. Les primes de risque souverain ont sensiblement augmenté pour de nombreux États, etconfiance reste fragile. Les pressions budgétaires ont été particulièrement fortes pour les pays amenécorriger un endettement privé ou public excessif.Des efforts considérables d’assainissement budgétaire seront nécessaires pour assurer le respect dengagements pris dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) de stabiliser et réduire le radette/PIB. Ces efforts ont déjà débuté dans certains pays. Revenir à un niveau d’endettement plus prudexigera une orientation restrictive de la politique budgétaire pendant de nombreuses années dans bnombre d’économies.La situation budgétaire dégradée qui prévaut actuellement trouve en partie son origine dans des politiqupubliques inadaptées et l’incapacité de parvenir en période économique faste à une situation budgétasuffisamment saine. Compte tenu de l’orientation trop accommodante de la politique budgétaire dansplupart des pays, ceux-ci ont été confrontés à une dégradation marquée de leurs finances publiques et à utrop faible marge de manœuvre budgétaire lorsque la crise a éclaté. Dans les pays caractérisés par d’ampdéséquilibres, la politique budgétaire n’a pas permis de contrebalancer ces pressions et les a mêaccentuées dans certains cas. Pendant les années de forte croissance des recettes, l’occasion de constituer dréserves en vue de couvrir les coûts futurs liés au vieillissement démographique a été gâchée. Du fait desituation dégradée de leurs finances publiques au commencement de la récession, certains pays ont contraints de durcir leur politique alors qu’ils subissaient une grave récession.L’application déficiente du PSC, en particulier de son volet préventif, n’a pas permis d’assurer une gestbudgétaire prudente. Il faut renforcer la discipline budgétaire afin de redonner aux finances publiques uassise plus viable et de dégager les marges de manœuvre nécessaires face aux chocs futurs. Une amélioratdes institutions budgétaires contribuerait à rendre ce processus plus crédible. Pour renforcer la disciplinemarché, il faudrait créer un mécanisme permanent d’apport de liquidités afin de soutenir les pays solvablsous réserve de conditions très strictes. Le risque souverain devrait être pleinement pris en compte dans réglementations financières et en particulier dans la fixation des normes de fonds propres. Il conviendraitrenforcer les institutions de l’Union européenne (UE), essentiellement par le biais de mesures destinéeaméliorer l’application des règles. De profondes réformes législatives sont en cours au niveau de l’UE poremédier à ces problèmes.Toutefois, ce sont les administrations nationales qui restent responsables au premier chef des finanpubliques. Dans le cadre des règles de base de l’UE, le renforcement des institutions budgétaires nationarevêt donc une importance cruciale. Tous les pays devraient être dotés pour leurs finances publiquescadres généraux à moyen terme fondés sur des trajectoires ou des plafonds de dépenses. En outre, tous pays devraient mettre en place des conseils budgétaires indépendants, chargés de réaliser des prévisioconcernant les finances publiques et d’évaluer l’orientation de la politique budgétaire. L’engagement politiqen faveur de l’indépendance et de la pertinence de ces institutions sera crucial pour leur bon fonctionneme

97

Page 100: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

La crise a mis à mal les finances publiques. La politique budgétaire menée pendant la

phase ascendante du cycle n’a pas été suffisamment prudente dans la plupart des pays de

la zone euro, et le dynamisme des recettes n’a pas été mis à profit pour améliorer la

situation budgétaire à long terme. En outre, la politique budgétaire n’a pas empêché la

formation d’amples déséquilibres dans certains pays, et elle a parfois activement contribué

à déstabiliser l’économie. Dans la première partie de ce chapitre sont évoqués les besoins

immédiats en matière d’assainissement budgétaire, ainsi que la nécessité de stabiliser les

ratios dette/produit intérieur brut (PIB) et de ramener l’endettement à des niveaux plus

prudents au fil du temps. Dans la deuxième partie sont présentées les insuffisances des

performances budgétaires au cours des années antérieures à la crise qui ont contribué à

une stabilisation économique inefficace. Dans la troisième partie, nous nous efforçons de

déterminer comment la conjonction de réformes structurelles et institutionnelles pourrait

améliorer les performances budgétaires en renforçant la discipline de marché et les

mécanismes d’examen par les pairs. Néanmoins, il sera essentiel de renforcer

l’engagement politique et les institutions au niveau national pour assurer la viabilité des

finances publiques, améliorer la stabilisation des économies nationales et éviter des

déséquilibres excessifs.

Un assainissement budgétaire s’impose

Les finances publiques se sont fortement dégradées

La situation des finances publiques de la zone euro s’est fortement dégradée

depuis 2008 : son déficit budgétaire global est passé de 0.7 % du PIB en 2007 à 6.3 % en 2010,

tandis que le ratio dette/PIB mesuré suivant la définition de Maastricht a augmenté de plus

de 9 points pour atteindre 79 % en 2009. Ces évolutions correspondent peu ou prou à celles

observées aux États-Unis et dans l’ensemble de la zone OCDE. L’augmentation annuelle du

déficit budgétaire en pourcentage du PIB est très importante au regard de l’expérience

passée, et elle est nettement supérieure à celles observées lors des précédentes récessions

de 1975, 1981, 1995 et 2001. Cette dégradation des finances publiques est imputable aux

effets de la crise économique et financière : les recettes ont diminué et les dépenses

augmenté en raison du jeu normal des stabilisateurs automatiques. Les recettes fiscales

liées aux booms observés sur les marchés de capitaux et le marché immobilier se sont

évaporées, et certains pays ont pris des mesures de relance budgétaire discrétionnaires

pour soutenir leur économie. Les dettes publiques se sont encore alourdies dans certains

pays du fait des engagements financiers découlant des aides accordées au système

financier, dont certains constituent en outre des éléments hors bilan.

Cette dégradation des finances publiques a été particulièrement marquée dans les

pays contraints de corriger un endettement excessif du secteur privé ou public.

Entre 2007 et 2010, le solde des administrations publiques a diminué de 12 points de PIB

environ en Irlande, même en tenant compte des importantes mesures d’urgence de

resserrement budgétaire et en excluant les principaux coûts liés à la recapitalisation des

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 201098

Page 101: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

banques, et de plus de 10 points de PIB en Espagne (graphique 3.1). La vive contraction de

la demande privée, parallèlement à la correction des déséquilibres économiques qui

caractérisaient le secteur privé, a débouché sur des effets prononcés des stabilisateurs

automatiques et une chute des recettes liées à l’envolée du secteur du logement. La prise

de risques excessifs par le secteur financier dans des pays caractérisés par d’amples

déséquilibres a encore alourdi ces coûts budgétaires. La dégradation du solde des

administrations publiques en pourcentage du PIB a été inférieure à la moyenne de la

zone euro en Allemagne, en Autriche, en Italie et au Luxembourg. Dans certains pays

comme l’Allemagne, des mesures discrétionnaires de relance budgétaire de grande

ampleur expliquent dans une large mesure la détérioration des finances publiques.

Les primes de risque sur les emprunts publics ont fortement augmenté pour de

nombreux pays de la zone euro depuis la crise, même si, dans la plupart des cas, le bas

niveau général des taux d’intérêt signifie que les taux à long terme sont moins élevés. Alors

que les rendements des titres de la dette publique étaient à peu près similaires dans

l’ensemble des pays de la zone euro pendant l’essentiel des dix dernières années, l’écart

entre l’Allemagne et d’autres pays de la zone euro a commencé à se creuser à la fin de 2008

et au début de 2009 (graphique 3.2). Ce creusement tenait en grande partie à une

accentuation de l’aversion pour le risque, accompagnée d’une différenciation accrue en

fonction des situations budgétaires nationales (Haugh et al., 2009). Il est possible que les

effets de fuite vers la qualité aient réduit quelque peu les rendements de la dette

allemande, amplifiant la différence par rapport aux autres pays. Néanmoins, les cours des

contrats d’échange sur risque de défaillance faisaient ressortir des hausses encore plus

fortes de la valorisation par le marché des primes de risque souverain dans la zone euro.

Sur fond d’amélioration générale des conditions financières courant 2009, les écarts de

rendement entre emprunts d’État se sont globalement réduits dans la zone euro.

Néanmoins, ces écarts se sont creusés de nouveau en 2010, la crise budgétaire grecque

conduisant à une réévaluation du risque de crédit dans la zone euro. Les primes de risque

souverain sont demeurées élevées même après le mois de mai 2010, lorsque le dispositif de

Graphique 3.1. Les soldes budgétaires des administrations publiques se sont dégradésEn pourcentage du PIB

1. Estimations de l’OCDE. Dans le cas de l’Irlande, le solde qui figure sur le graphique exclut les injections decapitaux dans le système bancaire.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364508

-12

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Page 102: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

soutien à la Grèce a été mis en place, le Fonds européen de stabilité financière (FESF) a été

créé et la Banque centrale européenne (BCE) a commencé à acquérir des obligations d’État

sur le marché secondaire dans le cadre de son Programme pour les marchés de titres.

Malgré une certaine diminution initiale, les primes de risque de crédit sont restées élevées

et ont été parfois soumises à de fortes pressions. Les rendements ne sont pas élevés au

regard de l’expérience passée pour la plupart des pays, ce qui tient au très bas niveau des

rendements obligataires à long terme en raison d’une préférence marquée pour les actifs

peu risqués, et à la faiblesse des anticipations de croissance et d’inflation. Seuls l’Espagne,

la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont des coûts d’emprunt à long terme similaires ou

supérieurs à ceux d’avant la crise. Néanmoins, le niveau actuel peut donner une fausse

idée des futurs coûts d’emprunt en cas de redressement cyclique des rendements

obligataires, accompagné d’un maintien des primes de risque souverain à leurs niveaux

actuels.

L’augmentation généralisée des écarts de rendement au début de 2010 semble tenir

aux effets d’entraînement de la situation grecque. Celle-ci a eu un impact limité, mais ses

effets de contagion ont été importants, du fait d’une réévaluation générale des

perspectives d’autres économies caractérisées par d’amples déséquilibres et des situations

budgétaires fragiles. Malgré des circonstances différentes, la dégradation de la situation de

la Grèce a été interprétée par certains acteurs du marché comme un signal concernant la

situation des finances publiques dans d’autres pays. En outre, le non-respect du Pacte de

stabilité et de croissance et les révisions de données budgétaires ont remis en question la

crédibilité du cadre budgétaire de l’UE dans son ensemble.

De nombreux pays sortiront de la crise avec un niveau d’endettement public trop élevé

Les ratios dette/PIB s’établiront à des niveaux historiquement élevés dans de

nombreux pays de la zone euro, même à supposer que les niveaux d’endettement se

stabilisent rapidement. Cette évolution s’inscrira dans le prolongement d’une tendance à

la hausse observée dans de nombreux pays de l’OCDE, dont bon nombre de membres de la

Graphique 3.2. Les primes de risque de crédit1 ont augmenté

1. Écart de rendement entre les obligations de référence à 10 ans et les obligations allemandes.2. Moyenne simple des écarts de rendement relevés pour l’Autriche, la Belgique, la Finlande, la France et les

Pays-Bas.

Source : Datastream.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364527

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jan avr jul oct jan avr jul oct jan avr jul oct2008 2009 2010

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Page 103: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

zone euro, depuis les années 70 (graphique 3.3). Le ratio dette/PIB des pays de la zone euro

était en 2009 légèrement supérieur au double de son niveau de 1979. Bien que ce ratio se

stabilise, voire diminue, généralement au cours des phases ascendantes du cycle

économique, cela n’a pas été suffisant pour qu’il retrouve son niveau initial, si bien que les

dettes publiques ont augmenté progressivement au fil des récessions. Les niveaux

d’endettement actuels sont élevés au regard de l’expérience passée. Le niveau prévisionnel

d’endettement de la zone euro est néanmoins nettement inférieur à celui du Japon, et un

peu en deçà de celui des États-Unis, tant en termes bruts que nets. La dette brute par

habitant de la zone euro exprimée en dollars est inférieure de moitié environ à celle des

États-Unis, et représente un quart de celle du Japon, sachant par ailleurs que les revenus

par habitant sont également plus faibles dans la zone euro, et que chacune de ces grandes

économies se trouve dans une situation différente.

Le niveau d’endettement varie cependant considérablement suivant les pays de la

zone euro (graphique 3.4). Les ratios dette/PIB de la Belgique, de la Grèce et de l’Italie sont

particulièrement élevés, tandis que la dette demeure relativement faible en Finlande, au

Luxembourg, en Slovaquie et en Slovénie. Sachant que les États de la zone euro émettent

dans une large mesure des titres d’emprunt libellés dans la monnaie commune, la charge

de la dette tendra à demeurer lourde dans les pays où la croissance nominale sera faible,

sur fond de rétablissement de la compétitivité, tandis que les baisses des prix accroîtront

l’encours de la dette en termes réels. En Grèce, au Portugal et en Irlande, le niveau élevé de

la dette publique se conjugue à une position extérieure nette fortement négative, si bien

que le niveau élevé d’endettement du pays considéré dans son ensemble est en partie

imputable aux administrations publiques.

Si l’endettement a eu tendance à augmenter dans de nombreux pays de la zone euro

au cours des dernières décennies, d’autres font figure d’exception. Ainsi, la Belgique, la

Finlande et les Pays-Bas ont réussi à réduire leur ratio dette/PIB de manière assez sensible

depuis 1995, et leur situation ne s’est que relativement peu dégradée à cet égard pendant

la crise. L’Irlande et l’Espagne ont également réduit leur dette au cours de cette période,

Graphique 3.3. Dette brute des administrations publiquesEn pourcentage du PIB

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364546

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(éch. de gauche)Japon Zone euro (éch. de droite)Allemagne (éch. de droite)France (éch. de droite)Espagne (éch. de droite)États-Unis (éch. de droite)

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 101

Page 104: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

mais ces progrès ont été facilités par une forte croissance et, en définitive, reposaient en

grande partie sur des recettes au dynamisme précaire et des déséquilibres excessifs, qui

ont entraîné une dégradation marquée de leur position débitrice pendant la crise.

À l’inverse, la dette a augmenté en Allemagne comme en France depuis 1995 et pendant la

phase ascendante du cycle économique. Ces évolutions expliquent en grande partie la

hausse tendancielle observée à l’échelle de l’ensemble de la zone euro, ainsi que la montée

de l’endettement en Autriche et au Portugal. La dette publique a reculé de manière

marginale en Grèce et en Italie pendant la phase de conjoncture haute, mais elle est

demeurée très élevée par rapport à la moyenne de la zone euro. En général, les baisses du

ratio dette/PIB observées pendant la phase ascendante du cycle résultaient d’un taux de

croissance nominal supérieur aux taux d’intérêt, et non de l’enregistrement d’excédents

primaires.

Cette tendance à la montée de l’endettement est indésirable, et il serait imprudent de

tenter de stabiliser la dette aux niveaux élevés auxquels elle s’établit actuellement.

Plusieurs facteurs militent au contraire en faveur d’une réduction de la dette.

Premièrement, des niveaux d’endettement élevés accroissent les besoins futurs de

refinancement de la dette et réduisent la capacité des États à surmonter les chocs sans

subir la pression des marchés. Si les marchés ont réévalué les risques budgétaires dans de

nombreux pays de la zone euro, l’effet induit sur les écarts de taux d’intérêt a été plus

ample pour les États dont le ratio du service de la dette était élevé et les antécédents

budgétaires médiocres. Ces effets ont été non linéaires en matière de dette, et des travaux

réalisés sur la question mettent en évidence un seuil situé dans une fourchette

approximative de 75 % à 90 % du PIB, au-delà duquel l’effet induit par le niveau

d’endettement devient nettement plus marqué (Égert, 2010). Ces problèmes peuvent se

poser avec davantage d’acuité aux petits pays dans une union monétaire, étant donné que

leurs emprunts obligataires peuvent généralement être remplacés par ceux d’autres États

– puisqu’ils partagent une monnaie commune – et peuvent donc être très sensibles aux

informations concernant la situation nationale. À d’autres égards, le financement de la

dette des petits pays est compliqué par le caractère moins liquide et plus volatil des

marchés de leurs titres d’emprunt. Deuxièmement, ces réactions des marchés rendent

Graphique 3.4. Le ratio dette/PIB a augmenté1

En pourcentage du PIB

1. Suivant la définition de Maastricht.2. Estimations de l’OCDE.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 88.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364565

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Page 105: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

plus ardue la stabilisation de l’économie : sur la base de données rétrospectives, il a été

établi que la politique budgétaire tendait à devenir procyclique lorsque le niveau de la dette

dépassait 90% du PIB, tandis qu’elle était relativement neutre au-dessus de 30 %, et

anticyclique lorsque l’endettement public se situait en deçà de ce niveau (Égert, 2010).

Troisièmement, le niveau élevé de la dette elle-même peut nuire à l’efficacité de la

politique budgétaire, en renforçant les préoccupations des ménages quant aux

ajustements budgétaires futurs, et en les amenant du même coup à réduire leur

consommation courante en prévision de ces ajustements. L’examen d’un échantillon de

pays de l’OCDE montre que l’effet de compensation des variations de l’épargne publique

par l’épargne privée induit à court terme par une relance budgétaire est plus ample pour

les pays dont la dette est supérieure à 70 % du PIB (Roehn, 2010). Globalement, des analyses

récentes laissent à penser qu’un niveau élevé d’endettement public a des effets négatifs

sur la croissance, même dans les pays développés. D’après Reinhart et Rogoff (2010), les

taux de croissance baissent de 1 point de pourcentage environ lorsque le ratio dette

publique/PIB est supérieur à 90 %1. Il convient cependant d’interpréter avec prudence ces

corrélations passées, notamment parce que des ratios d’endettement supérieurs à 70 % du

PIB correspondent d’un point de vue rétrospectif à un niveau d’endettement relativement

élevé, alors que de nombreux pays de l’OCDE afficheront dans les années à venir des ratios

dette/PIB situés au niveau de ce seuil ou au-dessus. L’expérience limitée dont on dispose

concernant de tels niveaux d’endettement ne permet guère de tirer des conclusions quant

au niveau absolu du ratio dette/PIB. En outre, au cours des dernières années, les taux

d’intérêt réels ont été plus bas que par le passé, et la persistance de ces faibles coûts de

financement rendrait plus aisément supportables des niveaux d’endettement élevés2.

Bien que les niveaux d’endettement actuels soient élevés en termes de comparaison

historique, il est difficile de déterminer quel niveau de dette peut être considéré comme

optimal ou prudent. La théorie économique n’offre guère d’indications sur le niveau

d’endettement approprié pour autant que la contrainte budgétaire à long terme soit

respectée, ce que permet un ratio déficit/PIB constant. Quatre principaux facteurs doivent

cependant être pris en considération.

● La capacité de financer la dette sur le marché. Cela devient plus difficile à mesure que

les niveaux d’endettement s’élèvent, dans la mesure où la viabilité de la dette devient de

plus en plus sensible aux dégradations brutales du solde budgétaire, aux coûts liés aux

désastres tels que la crise financière, ou aux variations prononcées des taux d’intérêt ou

des perspectives de croissance. Ainsi que l’a montré cette crise, ces effets tendent à jouer

dans le même sens, de sorte que la situation des finances publiques peut se dégrader de

manière spectaculaire. Il serait donc prudent de maintenir la dette nettement en deçà du

niveau auquel est anticipée l’apparition de contraintes, peut-être en conservant une

marge de 20 points de PIB. Cette marge pourrait être plus étroite s’il existe un

mécanisme d’apport de liquidités d’urgence.

● La capacité de financer la dette à long terme. Des perspectives de taux de croissance

plus élevé que les taux d’intérêt signifient que la capacité de remboursement de la dette

se renforcera à un rythme plus rapide que celui de l’accumulation de la dette. Avec des

perspectives d’expansion économique vigoureuse, les dettes courantes rapportées à la

taille de l’économie tendront à diminuer. Toutefois, compte tenu des perspectives de

croissance atone qui caractérisent globalement la zone euro, les dettes courantes

devraient continuer à représenter une lourde charge dans l’avenir. Cela dépend

également de ce que finance la dette : des investissements productifs, par exemple dans

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 103

Page 106: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

des infrastructures nécessaires, devraient se rembourser d’eux-mêmes grâce au surcroît

de croissance qui en résultera, alors que tel ne sera pas le cas de dettes accumulées pour

financer des dépenses de consommation. Néanmoins, l’investissement public en

proportion du PIB est inférieur à la moyenne de l’OCDE dans la plupart des pays de la

zone euro.

● Il faut minimiser les distorsions fiscales dans une optique d’efficience. Une dette accrue

se traduit par une charge d’intérêts plus lourde, et la viabilité de la dette implique que

cette charge doit être principalement financée par l’impôt. Les titres de dette détenus

dans le pays même ont certes un fort effet de redistribution des contribuables vers les

détenteurs d’obligations, mais une augmentation des impôts n’en reste pas moins

nécessaire. Toutefois, même pour un ratio dette/PIB de 100 %, la charge d’intérêts ne

représenterait sans doute que 5 % du PIB, de sorte que l’effet de distorsion induit ne

serait pas nécessairement important3.

● Le report des dettes sur les générations futures peut être incompatible avec le principe

d’équité intergénérationnelle. Il s’agit là d’une question éthique et pratique complexe,

dans la mesure où les générations futures hériteront à la fois d’une partie du patrimoine

et des dettes accumulés par les générations actuelles. On peut toutefois légitimement se

demander jusqu’à quel point les générations futures devraient assumer la responsabilité

de décisions qu’elles n’ont pas prises, et la possibilité de reporter des coûts sur les

générations futures a des effets d’incitation déplorables sur les contribuables actuels.

Une dette publique volumineuse et croissante est d’autant plus indésirable que les

engagements non capitalisés au titre des retraites futures sont importants, dans la mesure

où ces engagements risquent également de mobiliser une part importante des recettes

fiscales futures, et soulèvent en partie les mêmes questions d’équité intergénérationnelle.

Les coûts liés au vieillissement démographique sont déjà en train d’augmenter dans de

nombreux pays, et vont s’accroître dans bien des cas au cours de la décennie à venir.

En l’absence de réformes, les dépenses liées au vieillissement vont s’alourdir

considérablement dans nombre de pays de la zone euro au cours des prochaines années, et

les dépenses de retraite représenteront généralement à elles seules entre 10 % et 15 % du

PIB des pays de la zone dans les décennies à venir (CE, 2010b). Si l’on fait abstraction des

variations des recettes fiscales en proportion du PIB liées au vieillissement, et si l’on pose

l’hypothèse que les dépenses non liées au vieillissement demeurent constantes en

proportion du revenu national, des calculs simples indiquent que les coûts du

vieillissement démographique qui ne seraient pas couverts par la fiscalité actuelle sont

considérables et généralement du même ordre en valeur actualisée que l’encours de la

dette publique. Dans la plupart des cas, la valeur actualisée de ces coûts dépasse 100 % du

PIB, et elle est très nettement supérieure pour quelques pays. Des efforts considérables de

réforme des retraites ont été déployés dans les pays de la zone euro au cours des dix

dernières années (OCDE, 2009b) et de nouvelles réformes sont en cours dans certains pays.

Les possibilités d’augmenter la pression fiscale pour compenser les coûts du vieillissement

sont limitées, étant donné le niveau déjà élevé des taux d’imposition appliqués dans la

plupart des pays de la zone. Néanmoins, le remboursement de la dette publique ou le

préfinancement des retraites sont des stratégies qui permettront en partie d’honorer les

futurs engagements au titre des retraites, et d’éviter que les générations futures ne

subventionnent les travailleurs et les retraités actuels. Un lissage des dépenses de retraite

pourrait être particulièrement judicieux dans l’optique de la cessation d’activité des

groupes d’âge du « baby boom », laquelle se traduira nécessairement par une hausse suivie

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010104

Page 107: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

d’une baisse des dépenses de retraite, même en l’absence de modification des prestations

entre générations. La récente augmentation de la charge de la dette représente donc un

énorme revers en termes de préparation au vieillissement démographique futur, l’occasion

de préparer le départ en retraite des générations du « baby-boom » offerte par les années

de dynamisme des recettes ayant été en grande partie manquée.

Malgré la difficulté de déterminer le niveau d’endettement approprié, un certain

nombre de pays de l’OCDE se sont fixé des objectifs ou des plafonds en la matière : en

Nouvelle-Zélande, l’objectif budgétaire du gouvernement est une dette nette de 20 % du

PIB, tandis que le Royaume-Uni a plafonné sa dette publique nette à 40 % du PIB avant la

crise. En Pologne, la dette brute est limitée par la Constitution à 60 % du PIB, et l’objectif

défini pour cet agrégat est de 50 % à 55 % du PIB. À l’échelle de la zone euro, le Pacte de

stabilité et de croissance (PSC) plafonne la dette brute à 60 % du PIB, sachant qu’en cas de

dépassement, les États sont censés réduire leur endettement à un « rythme satisfaisant »

pour revenir à ce niveau. En tant que plafond, cette valeur de référence est raisonnable,

mais des efforts considérables d’assainissement budgétaire seront nécessaires pour que

cette limite soit respectée. Il est important pour la crédibilité du PSC que tous ses objectifs

affichés, notamment en matière d’endettement, soient poursuivis de manière cohérente.

L’assainissement budgétaire est une priorité immédiate et devrait viser à réduire l’endettement

La priorité est de procéder à un assainissement budgétaire afin de stabiliser la

situation des finances publiques. Les déficits doivent être réduits de manière à enrayer la

hausse des ratios dette/PIB, puis des mesures supplémentaires devront être prises pour

ramener l’endettement à un niveau plus prudent. Un processus d’assainissement

budgétaire ambitieux est déjà en cours en Espagne, en Grèce, en Irlande et au Portugal,

compte tenu du rythme rapide d’accumulation de la dette, de la montée des coûts

d’emprunt et de l’ajustement économique sous-jacent. Bien qu’un certain rééquilibrage

des comptes publics ait eu lieu dans d’autres pays parallèlement à l’expiration de mesures

discrétionnaires, l’assainissement budgétaire devrait débuter dans tous les pays en 2011 au

plus tard. Des programmes d’assainissement crédibles et précis au cours des années à

venir sont nécessaires pour préserver la crédibilité des politiques budgétaires et maintenir

les primes de risque souverain à un bas niveau. Sans quoi, les pays risquent de perdre le

contrôle du processus d’assainissement des finances publiques. L’absence de cette

crédibilité a eu des conséquences graves pour la Grèce, et il lui a fallu prendre des mesures

d’assainissement très rigoureuses pour regagner la confiance des marchés. Cette

crédibilité est également nécessaire à la stabilité financière, dans la mesure où la

dégradation des comptes publics peut se répercuter sur les marchés de capitaux et les

banques. Les États se sont engagés, notamment dans le cadre des programmes de stabilité

de 2009-10 présentés au début de 2010, à ramener leurs déficits à 3 % du PIB ou en deçà

dans la plupart des cas en 2013 au plus tard. Étant donné qu’une petite fraction seulement

des mesures nécessaires pour atteindre ces objectifs a été présentée avec précision, il est

important que des dispositions adéquates soient adoptées pour assurer la réalisation de

ces objectifs. La présentation par les autorités nationales, au début de 2011, des

programmes de stabilité et des stratégies budgétaires à moyen terme révisées ainsi que des

procédures budgétaires nationales sera l’occasion de clarifier les mesures de politique

budgétaire pour les années à venir.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 105

Page 108: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

L’ampleur de cette réduction des déficits, nécessaire pour reprendre le contrôle de la

dette publique dans les pays de la zone euro, est importante au regard de l’expérience

passée dans la zone OCDE, mais elle n’a rien d’atypique à la suite d’une grave récession. Le

déficit global de la zone euro est similaire, en pourcentage du PIB, au niveau auquel il

s’établissait au cours des années 80 et jusqu’au milieu des années 90, tandis que les

déficits les plus volumineux des pays de la zone sont maintenant similaires à ceux

qu’affichaient la Belgique, l’Irlande, l’Italie et la Grèce dans les années 80. Une différence

essentielle réside toutefois dans le fait que les taux d’intérêt nominaux et l’inflation

anticipée sont nettement plus bas que par le passé, si bien que le taux d’intérêt à long

terme pour l’ensemble de la zone euro, qui était proche de 11 % en 1990, est aujourd’hui

bien inférieur à 4 %. Néanmoins, le ratio dette/PIB est nettement plus élevé, de sorte que le

poids du service de la dette est assez similaire en proportion du PIB. Le solde budgétaire

primaire sous-jacent nécessaire pour stabiliser le ratio dette/PIB compte tenu du niveau

actuel des taux d’intérêt et de croissance correspond globalement à l’expérience passée.

Le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) constitue le cadre d’assainissement des

finances publiques à court terme. Tous les pays de l’OCDE appartenant à la zone euro, à

l’exception du Luxembourg, font actuellement l’objet d’une procédure de déficit excessif

(PDE). La plupart sont censés ramener leur déficit budgétaire en dessous de 3 % du PIB d’ici

à 2013, l’échéance prévue pour atteindre cet objectif étant fixée à 2012 pour l’Italie et la

Belgique, et à 2014 pour la Grèce et l’Irlande. Les programmes de stabilité publiés au début

de 2010 présentent les mesures prévues pour sortir de la PDE dans chaque pays, et un

certain nombre de pays ont annoncé des mesures complémentaires au cours de la crise

budgétaire de mai 2010. Néanmoins, dans la plupart des cas, les dispositions législatives

adoptées jusqu’ici en vue de la réalisation de ces objectifs ont été des plus limitées, et peu

d’informations précises ont été communiquées sur les décisions concernant les dépenses

et les recettes qui seront prises pour concrétiser l’assainissement budgétaire escompté. En

outre, les hypothèses économiques relatives à la croissance nominale, aux élasticités des

recettes fiscales et aux taux d’intérêt sur lesquelles reposent les programmes de stabilité

sont relativement optimistes, de sorte que des mesures discrétionnaires complémentaires

pourraient être nécessaires pour atteindre ces objectifs si le redressement anticipé des

recettes fiscales n’a pas lieu (CE, 2010b). À un horizon plus éloigné, les efforts

d’assainissement budgétaire supplémentaires déployés dans le cadre du PSC, sous réserve

que les PDE aient pris fin, seraient orientés par les objectifs à moyen terme (OMT) de solde

budgétaire structurel (tableau 3.1). Il est en effet peu probable qu’une réduction des déficits

effectifs à 3 % du PIB d’ici aux alentours de 2013 permette d’atteindre ces OMT compte tenu

de la situation probable de la reprise économique à ce stade. Le redressement cyclique de

l’activité se traduirait certes encore par des gains modestes, mais les déficits subsistants

seraient en grande partie de nature structurelle, de sorte que leur réduction exigerait de

nouvelles mesures d’assainissement des finances publiques. Il est important pour le

rétablissement de la crédibilité du PSC que des progrès suffisants soient accomplis pour la

réalisation de tous ces objectifs.

Deux scénarios stylisés d’assainissement des finances publiques sont illustrés par le

graphique 3.5 sur la base des trajectoires de consolidation fixée au début de 2010 et du

scénario à moyen terme de l’OCDE4. Le scénario de « réalisation des programmes de

stabilité » repose en substance sur l’hypothèse que les pays atteignent les niveaux de

déficit effectif indiqués dans leurs programmes actuels de stabilité publiés au début

de 2010. Aucune autre mesure budgétaire discrétionnaire n’est ensuite adoptée. Ils

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010106

Page 109: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

Tableau 3.1. Objectifs budgétaires à moyen terme

Solde structurel (% du PIB)

Allemagne –0.5Autriche 0.0Belgique 0.5Espagne 0.0Finlande 0.5France 0.0Grèce 0.0Irlande –0.5Italie 0.0Luxembourg 0.5Pays-Bas –0.5Portugal –0.5République slovaque 0.0Slovénie –1.0

Source : Commission européenne (2010b), « Public Finances inEMU – 2010 », European Economy, no 4, Bruxelles.

Graphique 3.5. Scénarios d’évolution de la dette des administrations publiques1

En pourcentage du PIB

1. Voir les hypothèses posées dans le corps du texte.

Source : OCDE, Base de données du Scénario de référence à moyen terme de l’OCDE et calculs de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364584

0

20

40

60

80

100

120

140

160

2008 10 12 14 16 18 20 22 24

Scénario de ’réalisation des Programmes de stabilité’

slovaque

AutricheFinlandeIrlandeLuxembourg

Pays-BasEspagneRépublique

0

20

40

60

80

100

120

140

160

2008 10 12 14 16 18 20 22 24

BelgiqueFranceAllemagne

GrèceItaliePortugal

0

20

40

60

80

100

120

140

160

2008 10 12 14 16 18 20 22 24

Scénario de ’convergence vers les objectifs à moyen terme’

slovaque

AutricheFinlandeIrlandeLuxembourg

Pays-BasEspagneRépublique

0

20

40

60

80

100

120

140

160

2008 10 12 14 16 18 20 22 24

BelgiqueFranceAllemagne

GrèceItaliePortugal

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 107

Page 110: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

ramènent généralement leur déficit à 3 % du PIB, ou légèrement en deçà. Pour la plupart

des pays de la zone euro, cela signifie que le ratio dette/PIB augmente quelque peu au cours

des années à venir, avant de se stabiliser aux alentours de son point culminant. Les pays

lourdement endettés voient leur fardeau s’alléger dans une certaine mesure, le solde

primaire associé à un déficit effectif de 3 % étant suffisant pour permettre une diminution

de la charge de la dette. Quant au scénario de « convergence vers les objectifs à moyen

terme », il débute comme le premier scénario, mais est fondé sur l’hypothèse que les pays

continuent ensuite à assainir leurs finances publiques, à un rythme qui permet d’améliorer

le solde structurel de 0.5 point de PIB potentiel jusqu’à ce que les OMT soient atteints. Dans

le cadre de ce scénario, le ratio dette/PIB reculerait dans la quasi-totalité des pays de la

zone euro. Néanmoins, cette baisse est modeste dans la plupart des pays, et 11 pays

afficheraient encore des ratios dette/PIB supérieurs à la valeur de référence de 60 % du PIB

à l’horizon 2020. Une incertitude considérable entoure naturellement les hypothèses sous-

jacentes à ces scénarios, en particulier à plus longue échéance, et les taux d’intérêt et de

croissance pourraient s’établir in fine à des niveaux moins favorables à la stabilisation des

finances publiques.

Il serait cependant prudent que les pays réduisent leur ratio dette/PIB à une cadence

plus rapide que le rythme modéré qui correspond dans la plupart des cas aux OMT actuels.

Reste que le rythme adéquat de réduction de la dette est difficile à déterminer et dépend

d’un certain nombre de facteurs propres à chaque pays. Jusqu’à présent, la procédure de

déficit excessif n’a pas fixé un critère quantitatif clair pour le rythme nécessaire, le traité

indiquant uniquement que le rythme de réduction de la dette doit être « satisfaisant ».

Comme la dette elle-même, ce rythme de réduction dépend du coût du niveau

d’endettement considéré et des risques de financement qui en résultent, du lissage des

distorsions causées par la fiscalité, et de l’équité intergénérationnelle. Un argument

classique fondé sur le lissage de la fiscalité est que la dette doit être dans une large mesure

considérée comme une donnée et remboursée progressivement au fil du temps à un

rythme régulier, ou tout simplement reconduite (Lucas et Stokey, 1983). Néanmoins, le

biais en faveur du déficit signifie que cette approche conduirait à une augmentation sans

fin de la dette. Des impôts prélevés de manière ponctuelle pour rembourser la dette, et non

pour réduire le déficit, pourraient avoir des effets de distorsion plus limités, en particulier

du fait de leur incidence sur l’accumulation de capital, à condition que leur caractère

ponctuel soit crédible. En termes d’économie politique, des ajustements de plus grande

ampleur peuvent également être plus coûteux, de sorte que la solution optimale consiste à

entamer l’assainissement budgétaire rapidement au lieu d’imposer des efforts plus

importants à un horizon plus éloigné, même si l’on utilise un taux d’actualisation

relativement élevé pour calculer le coût politique de cet assainissement pour les

gouvernants (Cournède, 2007). Des niveaux d’endettement élevés peuvent avoir un effet

non linéaire sur les coûts de financement, ce qui milite en faveur d’une concentration des

efforts de réduction de la dette en début de période dans ce cas de figure

(Koutsogeorgopoulou et Turner, 2008). Par ailleurs, les antécédents du pays considéré en

matière de réduction de la dette peuvent peser lourdement dans la balance (Ostry et al.,

2010). Les propositions législatives actuelles offrent une définition concrète de la réduction

requise du ratio dette/PIB dans le cadre du PSC, à savoir la réduction de l’écart par rapport

à 60 % sur les trois années précédentes au rythme d’un vingtième par an (CE, 2010c). La

définition d’une norme est une étape essentielle vers une application efficace du critère

d’endettement. Le rythme de réduction de la dette qui en découle est assez soutenu, et en

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010108

Page 111: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

établissant une moyenne sur trois ans, on ménage une certaine souplesse pour la vente

d’actifs et une marge de manœuvre limitée pour chaque créneau de temps. Mais la formule

précise implique une forte concentration de l’effort en début de période pour les pays

lourdement endettés5. Cela pourrait être souhaitable vu les risques liés à un niveau élevé

d’endettement, bien qu’il en résulte des coûts d’efficience par rapport à un ajustement

plus lent. En revanche, le rythme implicite de convergence pour les pays dont

l’endettement est plus proche de 60 % du PIB est très lent6. Malgré tout, se rapprocher des

OMT et s’y conformer devrait imposer une norme bien plus stricte que la formule de

réduction de la dette, de sorte que le critère d’endettement ne constituerait une forte

contrainte que pour les pays qui sont suffisamment éloignés de leur OMT.

Les efforts d’assainissement des finances publiques devront être considérables

Il sera difficile d’atteindre les objectifs fixés dans les programmes de stabilité, puis les

objectifs à moyen terme, compte tenu de l’ampleur des assainissements budgétaires

requis. Si l’on se fonde sur l’expérience de 84 épisodes d’assainissement des finances

publiques ayant eu lieu dans 24 pays de l’OCDE depuis la fin des années 70, l’ampleur

globale et la durée des assainissements prévus dans le cadre du scénario de « réalisation

des programmes de stabilité » correspondent dans l’ensemble aux observations

antérieures (Guichard et al.¸ 2007; graphique 3.6). Les principales exceptions sont la Grèce

et l’Irlande7. Toutefois, suivant le scénario de « convergence vers les objectifs à moyen

terme », l’assainissement à réaliser serait plus long et, dans un certain nombre de cas, plus

important que la normale antérieure. Des mesures complémentaires destinées à réduire la

dette plus rapidement exigeraient un effort exceptionnel.

Assainir durablement les finances publiques

Un assainissement budgétaire durable et de grande ampleur tel que celui requis

aujourd’hui dans la plupart des pays de la zone euro peut être économiquement et

politiquement difficile à réaliser. L’expérience passée laisse à penser qu’un assainissement

est plus susceptible d’être durable s’il est fondé sur des réductions de dépenses plutôt que

sur des hausses d’impôts, et s’il est étayé par des institutions budgétaires solides (Guichard

et al., 2007). Il peut être relativement aisé d’adopter des dispositions à court terme, mais les

mesures ponctuelles et les artifices budgétaires ne contribuent guère à améliorer la

situation sous-jacente (Koen et van den Noord, 2005). L’assainissement des finances

publiques peut être plus difficile à réaliser lorsque la croissance et l’inflation sont faibles,

car les recettes augmentent plus lentement et les gains résultant de l’alourdissement

automatique de la pression fiscale en termes nominaux et réels sont plus limités. Cela peut

être particulièrement handicapant pour les pays où la demande intérieure est atone et où

un ajustement à la baisse des prix relatifs est nécessaire pour renforcer la compétitivité, du

fait de la vigueur excessive de la demande intérieure pendant la phase ascendante du cycle

économique. L’effet à court terme de l’assainissement budgétaire sur la croissance est

difficile à évaluer et dépend des circonstances ainsi que de la nature de l’assainissement

réalisé : l’effet plus ou moins direct de contraction de la demande globale qui en résulte et

le faible effet compensatoire de la politique monétaire dans l’ensemble de la zone en

réaction aux mesures budgétaires nationales peuvent être contrebalancés par des effets de

confiance sur fond de rétablissement de la viabilité des finances publiques. En outre,

l’anticipation par les agents économiques de l’assainissement budgétaire futur peut les

amener à avancer certains achats. À plus long terme, l’assainissement des finances

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 109

Page 112: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

publiques offre l’occasion d’améliorer l’efficience du système fiscal et des dépenses

publiques, ce qui peut être bénéfique pour la croissance. En fait, la plupart des pays de la

zone euro disposent de marges de manœuvre considérables pour accroître la production

des services publics dans des secteurs tels que la santé et l’enseignement sans dépenses

supplémentaires, par le biais de gains d’efficience. L’assainissement budgétaire serait

étayé par des programmes pluriannuels crédibles et détaillés, assortis d’un horizon

suffisamment éloigné pour montrer comment la gestion de la dette permettra de la

ramener à un niveau raisonnable, ainsi que par une amélioration des institutions

nationales et de celles de l’UE.

Graphique 3.6. Assainissements budgétaires prévus1 comparés à ceux observés par le passé

1. Voir les hypothèses posées dans le corps du texte.

Source : Guichard, S. et al. (2007), « What Promotes Fiscal Consolidation: OECD Country Experiences », Documents detravail du Département des affaires économiques de l’OCDE, no 553, et OCDE, Base de données du Scénario de référence à moyenterme de l’OCDE et calculs de l’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364603

0 1 2 3 4 5 6 7 8 90

2

4

6

8

10

12

14

16

Amélioration de la situation budgétaire, % du PIB potentiel

0

2

4

6

8

10

12

14

16

Amélioration de la situation budgétaire% du PIB potentiel

Scénario de ’réalisation des Programmes de stabilité’

Durée de l’épisode d’assainissement (années)

• Assainissements antérieurs dans la zone OCDE

• •

••

••

••

••

•••

••

••

••

••

••

•• •

••

•••• •

••

••

••

••

••

Assainissements prévus

0 1 2 3 4 5 6 7 8 90

2

4

6

8

10

12

14

16

Amélioration de la situation budgétaire, % du PIB potentiel

0

2

4

6

8

10

12

14

16

Amélioration de la situation budgétaire% du PIB potentiel

Scénario de ’convergence vers les objectifs à moyen terme’

Durée de l’épisode d’assainissement (années)

• Assainissements antérieurs dans la zone OCDE

• •

••

••

••

••

•••

••

••

••

••

••

•• •

••

•••• •

••

••

••

••

••

Assainissements prévus

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010110

Page 113: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

Une politique budgétaire saine contribuerait à une stabilisation économique plus efficace

Dans la zone euro, la politique budgétaire a souvent joué un rôle de stabilisation

insuffisant. Pendant la phase ascendante du cycle économique, la zone euro dans son

ensemble n’a enregistré des excédents primaires conséquents que pendant deux ans, au

point haut du cycle, et la relative faiblesse de la croissance durant cette période n’a guère

contribué à réduire son ratio dette/PIB (graphique 3.7). Le solde budgétaire primaire corrigé

des variations cycliques de la zone euro n’a représenté que 3 % du PIB annuel sur

l’ensemble de la période de croissance. En 2007, dernière année avant la crise, la majorité

de ses États membres affichaient des déficits budgétaires, sachant que le solde budgétaire

de l’ensemble de la zone euro était déficitaire à hauteur de 0.65 % du PIB. D’après les

estimations actuelles de l’OCDE concernant les situations budgétaires structurelles, seuls

l’Espagne, la Finlande et le Luxembourg affichaient des excédents sous-jacents, tandis que

la zone euro dans son ensemble avait un solde budgétaire sous-jacent déficitaire à hauteur

de 1.3 % du PIB. En outre, la solidité de ces situations sous-jacentes était surestimée en

raison du dynamisme des recettes lié aux booms du crédit et du logement. Cela cadre avec

la tendance à l’asymétrie de la politique budgétaire qui se dégage sur le long terme, les

récessions s’accompagnant d’amples déficits et d’une montée de l’endettement, tandis

que les années d’expansion sont marquées par des progrès limités en matière de réduction

de la dette.

Lorsque la crise a éclaté, l’ampleur des mesures de relance budgétaire discrétionnaire

n’a été que de 1.5 % du PIB environ malgré la gravité de la récession, alors que le

mécanisme de transmission de la politique monétaire était grippé et que le taux directeur

était à un très bas niveau (OCDE, 2009c). Cet effort de relance budgétaire a été très

inégalement réparti entre pays, en raison des marges de manœuvre budgétaires limitées

dont disposaient de nombreux États : la moitié de cet effort était imputable à l’Allemagne,

et un autre quart à l’Espagne. Les mesures de relance prises en France et en Italie ont été

en revanche extrêmement modestes. Tous les pays de la zone euro doivent maintenant

Graphique 3.7. Contributions aux variations du ratio dette/PIB de la zone euro1

En pourcentage du PIB

1. Certaines transactions financières ne sont pas prises en compte.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, no 87.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364622

-8

-6

-4

-2

0

2

4

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10

12

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-2

0

2

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12

1995 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11

Versements d’intérêtsEffet de la croissanceSolde primaireVariation de la dette brute

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 111

Page 114: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

durcir l’orientation de leur politique budgétaire, même si la reprise vient seulement de

commencer. Qui plus est, l’Espagne, la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont activement

resserré leur politique budgétaire en période de crise aiguë sous la pression des marchés,

malgré l’atonie prononcée de leur activité économique du fait de la correction de

déséquilibres. L’ampleur de la dégradation de la situation des finances publiques en

Espagne et en Irlande, en raison du jeu des stabilisateurs automatiques et de la baisse des

recettes, a cependant été telle que les gouvernements de ces deux pays ont apporté un

énorme soutien à l’économie, en donnant davantage d’une main que ce qu’ils prenaient de

l’autre. Il semble cependant douteux, par exemple, que la réduction des recettes fiscales

provenant des transactions immobilières ait sensiblement contribué à soutenir la

consommation privée en Espagne et en Irlande.

Si la situation budgétaire sous-jacente était plus solide et plus prudente, le solde

budgétaire pourrait jouer plus efficacement à contre-courant du cycle. Étant donné le rôle

potentiellement déstabilisateur des taux d’intérêt réels au niveau national, une politique

budgétaire saine pourrait constituer un instrument clé pour éviter des déséquilibres

excessifs. L’efficacité des mesures budgétaires discrétionnaires est plus problématique. La

politique monétaire et le taux de change nominal ne sont certes pas affectés par les

changements d’orientation des politiques budgétaires nationales, mais les économies de la

zone euro sont très ouvertes, de sorte que les effets des mesures de relance tendent en

grande partie à se répercuter sur les autres économies d’Europe et du monde. En outre, il

est difficile de faire en sorte que les interventions budgétaires discrétionnaires soient

opportunes, temporaires et ciblées, si bien que l’effet de relance peut se concrétiser trop

tard compte tenu des décalages qui caractérisent le processus de prise de décision. Le

hasard a voulu que le ralentissement de 2008 intervienne à l’automne, alors même que de

nombreux budgets nationaux étaient en cours d’élaboration. L’efficacité de la politique

budgétaire sera sans doute moindre, en l’absence d’un cadre budgétaire clair dans lequel

puissent être adoptées des décisions discrétionnaires et temporaires, et plus difficile à

évaluer. La principale composante de la politique budgétaire réside donc dans la

stabilisation automatique, qui doit naturellement être ciblée, temporaire et opportune,

mais certains éléments indiquent que les stabilisateurs automatiques ont perdu en

efficacité au fil du temps (Debrun et al., 2008). Néanmoins, si l’on veut que ce mécanisme

donne les résultats attendus en période de récession, il est essentiel que la situation des

finances publiques soit suffisamment bonne pour que des problèmes de viabilité

n’entravent pas son fonctionnement. Pour remédier aux déséquilibres macroéconomiques,

il peut être utile d’élaborer des instruments budgétaires ciblant certains de ces problèmes,

destinés par exemple à influer sur les comportements financiers ou les termes de

l ’échange. Cela devrait s ’accompagner de la mise en œuvre de politiques

macroprudentielles et structurelles.

Pour que la politique budgétaire puisse amortir les effets des récessions, il est vital que

la situation des finances publiques soit bonne et que les pays puissent accéder aux

financements nécessaires pour compenser leurs déficits. Or, pendant la crise, l’accès aux

financements sur les marchés de capitaux est devenu plus coûteux pour certains pays. Si

cela tient en partie à une nécessaire réévaluation des risques, celle-ci pourrait

correspondre dans une certaine mesure à une aversion anormalement forte pour le risque.

Avant la crise budgétaire grecque, il n’y avait guère d’autre mécanisme de soutien aux pays

de la zone euro confrontés à une crise de liquidité que l’aide prévue pour les membres du

Fonds monétaire international (FMI). Le mécanisme de soutien de la balance des

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010112

Page 115: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

paiements géré par l’UE était trop modeste pour permettre d’apporter une assistance

significative aux pays de la zone euro, bien qu’il eût été renforcé pendant la crise pour aider

la Grèce.

Il existe en principe différents moyens d’éviter les problèmes de liquidité. En général,

la préservation de finances publiques saines et un cadre institutionnel solide se traduisant

par des engagements clairs quant à la viabilité future des finances publiques doivent

permettre aux États d’éviter de perdre l’accès aux financements sur les marchés de

capitaux. En outre, les besoins de refinancement dépendent à la fois du niveau de la dette

globale et de sa structure par échéances. En 2008, les dettes de la plupart des pays de la

zone euro étaient dans une large mesure à long terme, même si les dettes devant être

reconduites au cours de l’année à venir représentaient environ 20 % du PIB en Italie et au

Portugal (Eurostat, 2008). La Grèce, en revanche, était quelque peu protégée par la très

faible proportion d’engagements à court terme dans son encours de dettes, même si la

conjonction d’un ample déficit et des besoins de refinancement en 2010 est devenue

écrasante. Néanmoins, les titres d’emprunt émis dans la zone euro depuis le début de la

crise étaient à relativement court terme. Cela peut paraître attractif lorsque les taux

d’intérêt à court terme sont bas, dans la mesure où on peut ainsi réduire la charge

d’intérêts, mais une telle approche est risquée si les taux d’intérêt finissent par enregistrer

une hausse supérieure à celle anticipée par le marché, et cela créé des risques de

refinancement. Lorsque les conditions du marché deviennent défavorables en période de

crise, les pays peuvent puiser dans leurs réserves ou liquider des actifs. En fait, ils peuvent

constituer une épargne « de précaution » en prévision de tels risques. En Irlande, le

préfinancement considérable de futurs besoins de financement en 2009 et le Fonds

national de réserve pour les retraites (NPRF, National Pension Reserve Fund) – même s’il

n’avait pas été mis en place à cet effet – ont offert une certaine protection contre la crise et

réduit la nécessité d’emprunter sur les marchés de capitaux. Si les chocs affectant les

liquidités ne sont pas fortement corrélés entre pays, il est plus efficient de disposer d’un

système d’assurance suivant lequel les pays ayant accès aux marchés de capitaux prêtent

des fonds à ceux dont l’accès à ces marchés est restreint. Cela ne devrait en principe

impliquer aucun transfert budgétaire, à condition que ces prêts soient accordés à des taux

d’intérêt correspondant au risque que représente la situation budgétaire du pays

emprunteur. La simple existence d’un tel mécanisme d’assurance peut suffire pour qu’il ne

soit jamais nécessaire de le faire jouer concrètement.

Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) comble temporairement une lacune

dans l’architecture institutionnelle en offrant aux pays de la zone euro un mécanisme

d’apport de liquidités, soumis à des exigences de conditionnalités strictes. Il faudrait

mettre en place un mécanisme permanent de soutien de la liquidité pour les pays solvables

en prévision des crises futures, sous réserve d’une stricte conditionnalité. L’accès à ce

nouveau mécanisme devrait être subordonné à des antécédents de conformité aux

recommandations formulées dans le cadre du PSC. Il faudrait rétablir clairement le rang de

priorité des créanciers au titre de ce mécanisme. Il conviendrait d’envisager de permettre

au FESF d’intervenir pour stabiliser les marchés secondaires des titres de la dette publique,

ce qui pourrait avoir des conséquences en ce qui concerne le rôle du Programme pour les

marchés de titres de la BCE.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 113

Page 116: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

Renforcer la discipline budgétaireIl convient d’améliorer le cadre de la politique budgétaire, afin d’éviter des niveaux

élevés d’endettement, de gérer les pressions budgétaires à long terme, de permettre aux

stabilisateurs automatiques de jouer pleinement et de minimiser les risques de chocs de

liquidité. Ces objectifs sont étroitement liés les uns aux autres, et il est crucial d’éviter

toute montée de la dette pour réaliser les autres buts susmentionnés. Une union monétaire

pose des problèmes spécifiques en termes de discipline budgétaire, dans la mesure où les

dettes émises par les pays membres sont dans l’immense majorité des cas libellées dans la

monnaie commune. Il est en effet à craindre que chaque pays prenne des risques

budgétaires excessifs, étant donné qu’il ne détermine que dans une faible mesure la

situation des finances publiques de l’ensemble de la zone considérée. En outre, ainsi que

l’a montré la crise grecque de mai 2010, une forte contagion peut se produire entre les

situations budgétaires nationales, s’il est jugé probable que les pays membres se

soutiennent mutuellement. Les marchés peuvent également craindre que les systèmes

financiers nationaux n’accusent des pertes sur les titres de dette souveraine, pertes qui

peuvent ensuite elles-mêmes déboucher sur des coûts budgétaires. La forte corrélation des

variations des rendements obligataires entre les différents pays de la zone euro laisse à

penser que les évolutions observées dans un pays peuvent être perçues comme un signal,

ou renforcer l’attention accordée à la situation des finances publiques dans les autres pays.

Tant que ce risque de contagion existe, il est difficile de définir des règles de « non-

renflouement » qui soient cohérentes dans le temps. Conjuguer une amélioration de la

discipline de marché avec une réforme institutionnelle au niveau de l’UE et un

renforcement des institutions nationales constitue l’approche qui offre le plus de chances

d’améliorer les résultats budgétaires. Il s’agit d’éléments complémentaires et, dans la

mesure où l’efficacité d’aucun d’eux ne peut être garantie, renforcer chacun de ces piliers

est la meilleure stratégie pour améliorer les performances budgétaires.

La discipline de marché et une règle de « non-renflouement » plus crédible

La discipline de marché pourrait contribuer à améliorer la discipline budgétaire si les

politiques risquées sont sanctionnées par une augmentation adéquate des coûts

d’emprunt. Force est de reconnaître que le bilan des marchés est mitigé en matière

d’évaluation des risques, et qu’ils ont sous-estimé un large éventail de risques pendant

l’envolée du crédit. Les primes de risque souverain dans la zone euro étaient négligeables

avant la crise financière et elles étaient à peu près similaires dans les différents pays : les

écarts de rendement par rapport aux obligations d’État allemandes étaient de l’ordre de

25 points de base pour la Grèce, l’Italie et le Portugal. Le pouvoir prédictif des prix de

marché quant à l’évolution de la situation s’est révélé des plus limités pendant la crise, en

particulier pour l’Espagne et l’Irlande, dont le niveau d’endettement était relativement bas,

mais dont les recettes étaient assises sur des bases fragiles. Si la réaction ultérieure des

marchés a pu être excessive dans certains cas, les prix de marché se sont différenciés en

fonction des niveaux de risque présentés par les différents pays. Une plus grande

transparence concernant les situations budgétaires, conjuguée à une amélioration de la

réglementation financière, aiderait les marchés à mieux évaluer les risques.

L’efficacité de la discipline de marché est remise en question si le sentiment prévaut

que les dettes d’un pays seront remboursées indépendamment de sa situation budgétaire,

grâce à des mesures de renflouement. L’article 125 du traité sur l’Union européenne,

qualifié de clause de « non-renflouement », interdit aux États de prendre en charge les

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010114

Page 117: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

dettes d’un autre État membre de l’UE8. Néanmoins, il n’empêche pas de prêter des fonds

à un pays pour lui permettre d’assurer le service de sa dette ou de la rembourser. Avant la

crise, on pouvait douter de la possibilité qu’un pays de la zone euro soit soutenu par les

autres, étant donné qu’il n’existait aucun instrument spécifiquement prévu à cet effet.

Néanmoins, l’ensemble de mesures adoptées en faveur de la Grèce en mai 2010 a montré

qu’une assistance pouvait être apportée à un pays de la zone euro. Pour trois années, le

Fonds européen de stabilité financière (FESF) sera à même de fournir le cas échéant un

soutien globalement similaire à cet ensemble de mesures. L’existence de ce fonds pourrait

certes renforcer l’aléa moral en affaiblissant les contraintes budgétaires, mais ce risque

peut être atténué ou évité grâce à l’imposition d’une conditionnalité stricte. Ces conditions

rendent en effet ce financement coûteux pour les pays qui y ont recours, tout en

garantissant l’adoption de mesures destinées à remédier au problème sous-jacent. La forte

conditionnalité imposée à la Grèce, conjuguée à la participation du FMI, dissuadera

probablement tout État de voir dans le recours à cette assistance une solution de facilité.

Néanmoins, il importera, pour préserver la discipline budgétaire dans l’avenir, que la Grèce

soit tenue de respecter ses engagements actuels, même lorsque le retour à l’excédent du

solde budgétaire primaire atténuera la pression qui s’exerce en faveur de leur respect.

Il est difficile d’appliquer une règle de « non-renflouement », ainsi que le montre

l’expérience des administrations infranationales dans certains pays de l’OCDE

(encadré 3.1). Le problème de cohérence dans le temps signifie que, ex post, il peut ne pas

être dans l’intérêt à court terme des autres pays d’abandonner à son sort celui qui est en

proie à des difficultés, compte tenu des effets d’entraînement qui pourraient en résulter

par le biais des échanges, à travers le secteur financier et par contagion. En outre, si le

problème financier sous-jacent est un problème de liquidités, il est souhaitable que les

pays qui en disposent prêtent assistance à ceux dont l’accès à ces liquidités est entravé.

Une des façons d’assurer la crédibilité des engagements pris en matière de non-

renflouement consiste à se forger une solide réputation. Tel est le cas depuis fort

longtemps pour les États fédérés des États-Unis. Suivant la façon dont la crise grecque est

résolue, la zone euro pourrait établir un précédent similaire quant à l’application d’une

conditionnalité forte. Il est d’ailleurs frappant de constater qu’un certain nombre d’États de

la zone euro ont annoncé des mesures complémentaires d’assainissement budgétaire

alors même qu’un soutien était apporté à la Grèce. Des dispositions visant à réduire les

effets d’entraînement contribueraient également à renforcer la crédibilité de la règle de

« non-renflouement », dans la mesure où elles consolideraient les incitations ex post à ne

pas renflouer un pays. Ainsi, une concentration excessive des engagements des

établissements financiers de la zone euro et un manque de transparence concernant leurs

avoirs amplifient les conséquences des dégradations des situations budgétaires nationales

(Blundell-Wignall et Slovik, 2010). À cet égard, des obligations plus strictes en matière de

surveillance seraient non seulement bénéfiques pour la stabilité financière (chapitre 4),

mais renforceraient en outre la crédibilité de la règle de non-renflouement des États

confrontés à des problèmes d’insolvabilité.

Un système efficace de gestion de crise est également nécessaire pour renforcer la

crédibilité de la règle de « non-renflouement ». Il doit en particulier exister une possibilité

crédible de retrait du soutien si les conditions ne sont pas respectées. En l’absence d’un tel

mécanisme, une forte incertitude – quant à ce qu’il adviendrait lorsqu’un pays n’est plus

capable d’honorer ses engagements financiers, et aux éventuels effets d’entraînement qui

pourraient en résulter – risque de contraindre les autres États à renflouer un pays ayant

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 115

Page 118: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

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Encadré 3.1. L’expérience des crises budgétaires infranationales dans les pays de l’OCDE

L’expérience des administrations infranationales dans certains pays de l’OCDE apporte un éclairage la politique budgétaire à l’intérieur d’une union monétaire, puisque ces administrations n’émettent pleur propre monnaie. Au cours des dernières décennies, un certain nombre de crises budgétaiinfranationales ont eu lieu dans des pays de l’OCDE, notamment au niveau des régions en Italie en 1978,Allemagne avec la Sarre et Brême à partir de la fin des années 80, en Australie et au Canada au début dannées 90, et au Mexique où des collectivités locales ont été renflouées en 1995. Les cas de fortes pressiobudgétaires au niveau d’États fédérés sont plus fréquents. Ainsi, les États-Unis ont une longue histoiredéfaillances infranationales, un certain nombre d’États s’étant déclarés en cessation de paiements dans années 1830 et 1870, ainsi que diverses communes dans les années 30 (Inman, 2001). Un petit nombrecommunes ont été confrontées à de graves difficultés depuis les années 70, et d’autres entités publiquessont parfois trouvées en cessation de paiements. Certains États des États-Unis connaissent actuellemedes difficultés budgétaires, mais un renflouement fédéral explicite paraît très improbable.

Deux ensembles de facteurs alimentent les pressions budgétaires au niveau des États fédérPremièrement, un déséquilibre entre les compétences attribuées en matière de recettes et de dépenses csouvent des tensions, en raison d’exigences excessives concernant les dépenses ou de possibiliinsuffisantes de collecter des recettes. Deuxièmement, de faibles contraintes budgétaires peuveencourager les États fédérés à emprunter de manière excessive, dans l’espoir d’un transfert l’administration centrale. Étant donné que les compétences fiscales et les prérogatives en matière dépenses relèvent presque exclusivement des États-nations, ces pouvoirs sont équilibrés danszone euro, mais la question de la force de la contrainte budgétaire est plus ambiguë. Le fait quesurveillance du secteur bancaire soit une compétence nationale ajoute un risque budgétasupplémentaire pour les pays de la zone euro par rapport aux administrations infranationales de nomd’autres pays de l’OCDE, même si les banques cantonales suisses ont soulevé des problèmes budgétaire

S’agissant des administrations infranationales qui sont habilitées à emprunter, il existe deux approchfondamentales pour assurer la discipline budgétaire. Premièrement, des dispositions institutionnelpeuvent être adoptées. La plupart de ces administrations infranationales ont des règles d’équilibbudgétaire et leur capacité à emprunter est limitée par la loi (Sutherland et al., 2005). Ainsi, aux États-Un32 États ont des règles d’équilibre budgétaire intégrées dans leur Constitution, tandis que 11 autres ont ddispositions juridiques similaires à caractère non constitutionnel. De même, 6 sur les 11 provinccanadiennes sont dotées de dispositions juridiques contre les déficits. Deuxièmement, il est rare que emprunts infranationaux bénéficient d’une garantie explicite et cela devrait, en principe, créer udiscipline de marché. Néanmoins, l’impression prévaut fréquemment que ces dettes sont implicitemegaranties par l’administration nationale, et cela affaiblit l’effet disciplinant du marché. En appliquantmême méthodologie que Sutherland et al. (2005) à la zone euro, on obtient des résultats qui sembleindiquer que la rigueur des règles budgétaires est faible dans les pays de la zone euro par rapport aadministrations infranationales (graphique 3.8). Si la surveillance exercée est beaucoup plus approfonque pour la plupart des entités infranationales, les règles contraignantes destinées à garantir le respect dengagements budgétaires semblent faibles.

Plusieurs crises ont débouché sur le renflouement d’administrations infranationales. Un nombre tlimité de constitutions prévoient expressément ce type de soutien, généralement dans des circonstanctrès précisément définies, telles que des catastrophes naturelles. En Allemagne, les Länder (États fédérpeuvent demander une aide fédérale. Les mesures de renflouement peuvent également revêtir un caractimplicite lorsqu’elles reposent, par exemple, sur des mécanismes de péréquation budgétaire. Il existe pailleurs de nombreux exemples de soutien ad hoc, correspondant à la concrétisation de garanties implicit

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010116

Page 119: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

Encadré 3.1. L’expérience des crises budgétaires infranationales dans les pays de l’OCDE (suite)

Graphique 3.8. Indicateur composite de rigueur des règles budgétairesRésultats fondés sur des sous-indices

1. Administration centrale.2. Collectivités locales.

Source : Sutherland et al. (2005), « Fiscal Rules for Sub-Central Governments: Design and Impact », Documents de travail duDépartement des affaires économiques, no 465, OCDE, Paris, et calculs de l’OCDE pour la zone euro.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364641

Dans la zone euro, la fameuse clause de « non-renflouement » prévue par le traité sur l’Unioneuropéenne empêche tout État de prendre en charge les dettes des autres États membres, mais pasles États de la zone euro d’apporter des financements à la Grèce et aux autres pays de l’UE.

L’expérience des administrations infranationales dans les pays de l’OCDE laisse à penser qu’il estgénéralement difficile d’appliquer les règles de « non-renflouement », en raison du problème decohérence temporelle. Lorsqu’un État fédéré est en difficulté, l’administration centrale sera incitéeà agir dès lors qu’une absence d’intervention de sa part entraînerait des répercussionsmacroéconomiques, des pertes sur les prêts accordés par l’administration centrale ou d’autresÉtats fédérés, une instabilité financière due aux engagements des banques, des pressions exercéessur la banque centrale pour qu’elle octroie des crédits, ou un effet de contagion sur les coûtsd’emprunt des autres États, voire du pays dans son ensemble. Les États-Unis se sont forgé unesolide réputation à cet égard, puisqu’aucun renflouement explicite d’un État fédéré n’y a eu lieudepuis les années 1870. Dernièrement, l’administration fédérale s’est montrée peu disposée à aiderla Californie durant la crise. Au niveau des communes, un soutien a été apporté à New Yorken 1975, mais cette aide s’inscrivait « dans la tradition de renflouements locaux très limités »(Inman, 2001), et Philadelphie n’a pas sollicité l’assistance de l’administration fédérale pendant lacrise qu’elle a subie en 1990.

Les crises budgétaires débouchent souvent sur des réformes des finances des administrationsinfranationales. Il peut s’agir de réformes fondées sur une approche « descendante », comme cellemise en œuvre en Australie dans les années 90, lesquelles renforcent le contrôle exercé parl’administration fédérale sur les administrations infranationales en contrepartie d’un apport defonds destiné à régler les problèmes financiers immédiats des États fédérés. À l’inverse, la réformeengagée au cours des années 90 au Canada reposait sur une approche essentiellement« ascendante », les provinces durcissant leurs propres règles. Il reste à savoir jusqu’à quel point lacrise budgétaire traversée par la zone euro débouchera sur des réformes. Les processus de réformedes administrations infranationales ne sont pas toujours couronnés de succès. Ainsi, après lerenflouement des États fédérés mexicains, nombre des problèmes initiaux ont rapidementressurgi.

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Page 120: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

mené une politique budgétaire laxiste. Le risque souverain devrait être pris en compte dans

la conception des institutions budgétaires et de la réglementation financière (chapitre 4).

La création d’un mécanisme permanent de soutien de la liquidité assorti de conditions

appropriées serait une bonne chose à cet égard, puisqu’il offrirait un mécanisme défini

d’assistance aux pays ayant des problèmes de liquidités. Si les conditions ne sont pas

respectées, le soutien ne devrait pas être accordé en vertu de ce mécanisme et il faudra

mettre en place un dispositif remédiant à cette éventualité. Une plus grande transparence

devrait prévaloir quant aux engagements des pays de la zone euro les uns vis-à-vis des

autres, et la question du rang prioritaire accordé en principe aux prêts entre États devrait

être clarifiée. Étant donné que les émissions de dettes des pays de la zone euro relèvent

dans une large mesure de leur propre juridiction, toute modification juridique nécessaire

pourrait s’effectuer par le biais des dispositions législatives nationales. Le large éventail de

conditions spécifiques dont sont assortis les titres obligataires dans chaque pays ne

permet guère aux investisseurs d’évaluer la situation des différents États, et ce phénomène

est encore accentué par le fait que le droit communautaire relatif aux valeurs mobilières ne

s’applique pas aux titres de dette souveraine.

La réforme institutionnelle de l’UE

Le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) constitue le cadre de base de la politique

budgétaire dans l’Union européenne et dans la zone euro. Cet ensemble d’institutions est

destiné à remédier à l’aléa moral associé à la mise en œuvre de politiques budgétaires

nationales dans la zone, et à protéger la Banque centrale européenne (BCE) contre les

pressions résultant d’un fort endettement dans tous les pays. Le PSC comporte un volet

« correctif », constitué par la procédure de déficit excessif (PDE), et un volet « préventif »,

destiné à étayer la réalisation de cet objectif de manière plus générale. À la suite de la crise

économique, la quasi-totalité des pays membres de la zone euro sont sous le coup de la

PDE, dans la mesure où leurs déficits sont supérieurs à la valeur de référence de 3 % du PIB

définie dans le Protocole sur la procédure concernant les déficits excessifs. La clause du

Pacte relative aux « circonstances exceptionnelles », qui a été élargie en 2005 (OCDE,

2009a), n’a pas été invoquée malgré la gravité de la récession. Un ensemble de propositions

législatives est actuellement à l’examen, le but étant de renforcer le cadre budgétaire de

l’UE (CE, 2010c; CE, 2010d; CE, 2010e) et ces questions ont été étudiées par le Groupe de

travail sur la gouvernance économique (Groupe de travail de l’EU, 2010). L’intention est

d’adopter cet ensemble de réformes au cours de l’été 2011, le « semestre européen »

s’appliquant à partir de 2011.

Conception du cadre institutionnel

L’une des difficultés soulevées par la mise en œuvre du PSC tient au fait que son volet

« correctif » est surtout susceptible de s’appliquer pendant les phases de récession, car son

déclenchement se fonde sur le solde budgétaire effectif. Il est donc peu probable qu’il

fournisse des orientations efficaces en matière de politique budgétaire prudente pendant

les phases ascendantes du cycle économique. Cela a peut-être contribué à la tendance des

membres à ne guère profiter des périodes de conjoncture favorable pour renforcer leurs

finances publiques. À la fin de 2008, aucun pays membre de la zone euro n’était sous le

coup de la PDE. L’Italie et le Portugal avaient fait l’objet de la PDE de 2005 à 2008, tandis que

l’Allemagne, la France et la Grèce avaient été visées par la PDE pendant plusieurs années

jusqu’en 2007. Cette année-là, la France, la Grèce, l’Italie, le Portugal et la Slovaquie

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010118

Page 121: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

affichaient des déficits égaux ou supérieurs à 1.5 % de leur PIB. S’il est vrai que la crise a été

d’une gravité exceptionnelle, un grand nombre de pays avaient une marge de manœuvre

insuffisante pour faire face à un choc négatif, et même un ralentissement dans le cadre

d’un cycle normal se serait souvent traduit par un déficit excessif dans de nombreux pays.

En principe, une limite contraignante fixée à 3 % du PIB aurait pu encourager les États à

ramener leur déficit à un niveau suffisamment bas pour rendre improbable l’éventualité

d’un franchissement ultérieur de ce seuil, mais tel n’a pas été le cas.

À la suite de la révision du PSC en 2005, son volet « préventif » a été étoffé de manière

à améliorer les soldes budgétaires sous-jacents. L’objectif était de rendre moins probables

les dépassements de la valeur de référence de 3 % du PIB fixée pour le déficit, et de tracer

de meilleures perspectives d’évolution des situations budgétaires pour l’avenir. Un objectif

à moyen terme (OMT) de solde budgétaire structurel a été défini pour chaque pays. Ces

OMT consistaient en un excédent, un solde équilibré ou un déficit n’excédant pas 1 % du

PIB. La méthodologie pour la fixation des OMT a été récemment révisée de façon à prendre

en compte un indicateur d’engagements implicites liés au vieillissement, tout en

conservant un plafond de 1 % pour le déficit structurel. Cette méthodologie n’a pas été

rendue publique. Les pays n’ayant pas atteint leur OMT sont censés améliorer leur solde

budgétaire structurel d’au moins 0.5 point de PIB par an jusqu’à la réalisation de cet

objectif, cette amélioration pouvant être plus limitée pendant les périodes de conjoncture

défavorable, sachant que des progrès plus importants sont en revanche escomptés en

période favorable.

Le volet « préventif » du PSC présente un certain nombre de lacunes. Premièrement, la

moitié des pays de la zone euro n’avaient pas atteint leurs OMT en 2007 et les progrès

accomplis à cet égard étaient inégaux. De nombreux pays n’ont pas atteint leur OMT, et

ceux qui l’ont fait ont bénéficié de cycles financiers et de croissance exceptionnels et non

durables (OCDE, 2009a). Le processus de convergence a été entravé essentiellement par un

manque de volonté politique et par l’absence de définition concrète des périodes de

« conjoncture favorable » au cours desquelles les progrès accomplis dans la réalisation des

OMT devaient excéder 0.5 point de PIB. Deuxièmement, la mesure du solde budgétaire

structurel utilisée pour déterminer si l’OMT était atteint donnait une image extrêmement

trompeuse de la situation budgétaire sous-jacente. Le problème était double : l’écart de

production n’était pas correctement évalué, si bien que des recettes publiques

extrêmement dynamiques tendaient à améliorer l’estimation du solde structurel de l’État

considéré malgré l’absence de véritable renforcement du cadre de politique budgétaire. Ces

effets ont été amplifiés par le cycle du crédit et les déséquilibres économiques, qui se sont

traduits dans certains pays par une forte demande tandis que l’écart de production mesuré

était faible. Cela a permis d’engranger des recettes abondantes et éphémères liées aux

transactions financières et immobilières. Troisièmement, il y a peu encore, les pays

pouvaient, dans certaines limites, fixer eux-mêmes leur OMT, qui n’était pas

nécessairement fonction de leurs besoins budgétaires (OCDE, 2009a). Cette pratique

appartient désormais au passé, mais les OMT des différents pays s’inscrivent dans une

fourchette relativement étroite au regard des différences de pressions budgétaires à long

terme auxquelles ils sont soumis. Quatrièmement, il semble que les OMT ne soient guère

reconnus et acceptés comme cadre de la prise de décision budgétaire. Les objectifs à

moyen terme seraient donc plus efficaces si l’on améliorait la mesure des soldes

budgétaires sous-jacents, notamment pour tenir compte des déséquilibres économiques et

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 119

Page 122: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

financiers, et si les pays étaient tenus d’indiquer de manière plus précise comment ils

entendent progresser vers la réalisation des OMT au cours des années à venir.

Les propositions législatives actuelles énoncent un nouveau principe supplémentaire,

celui de « politique budgétaire prudente » (CE, 2010c). Il s’agit essentiellement de veiller à

ce que la croissance annuelle des dépenses ne soit pas supérieure à une estimation

prudente de la croissance à moyen terme, à moins qu’elle ne soit expressément

compensée par des mesures fiscales ou que l’OMT n’ait été « largement dépassé ». Lorsque

cette contrainte joue, la politique budgétaire devra être contracyclique via les stabilisateurs

automatiques, les dépenses augmentant à un rythme régulier et les recettes suivant le

cycle. En conséquence, le solde budgétaire effectif sera meilleur en période d’expansion

qu’en période de ralentissement de l’activité. Se situant dans une optique de croissance

structurelle, ce nouveau principe donne des orientations sur la façon de réaliser les OMT. Il

met aussi l’accent sur le rythme d’accroissement des dépenses. Il exige néanmoins une

évaluation de la croissance structurelle des dépenses, ce qui est intrinsèquement difficile.

Mais il évite d’avoir à estimer les élasticités structurelles des recettes publiques par rapport

à la croissance, exercice très problématique en présence de ruptures structurelles et de

non-linéarités. Du point de vue de l’application, la croissance des dépenses peut être

maîtrisée plus directement par les pouvoirs publics que les recettes fiscales, de sorte que

le respect de ce principe sera plus observable que la réalisation des OMT. Mais on court le

risque, en privilégiant l’optique des dépenses, d’inciter à réduire les impôts au lieu

d’accroître les dépenses, en utilisant en particulier les dépenses fiscales.

L’incidence du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) sur les décisions budgétaires

nationales a été limitée par le manque d’intégration des procédures budgétaires au niveau

de l’UE et au niveau national. Ainsi, les budgets nationaux de la plupart des pays de la

zone euro sont adoptés par le Parlement à la fin de l’année civile, et reposent sur des

prévisions élaborées à l’automne. Ces informations sont ensuite intégrées dans les

programmes de stabilité, préparés au début de l’année suivante et évalués par la

Commission européenne et le Conseil des ministres de l’Économie et des Finances

(ECOFIN) au printemps. Il était peu probable que cette évaluation ex post ait un effet ex ante

sur l’action publique, notamment parce que les principales décisions de politique

budgétaire concernant l’année en cours avaient déjà été prises au moment où était achevé

l’examen de l’UE, alors que les circonstances pouvaient changer sensiblement entre ce

moment-là et le budget suivant. La création du « semestre européen » à partir de 2011, qui

modifie le calendrier et les procédures de surveillance économique et budgétaire de l’UE,

contribuera à remédier à ce problème, les recommandations définitives en matière de

politique budgétaire étant alors formulées par l’UE en juillet. Cela coïncidera plus ou moins

avec le début du cycle budgétaire dans de nombreux pays, ce qui devrait renforcer

l’« adhésion » nationale aux objectifs et analyses budgétaires de l’UE9. En outre, une plus

grande importance accordée à la programmation pluriannuelle, évoquée ci-après,

contribuerait également à aligner les objectifs à long terme des programmes de stabilité

sur un débat national et des engagements ayant le même horizon. Néanmoins, l’efficacité

de cette approche demeurera subordonnée à l’existence d’une volonté politique, tant au

niveau de l’UE que des pays.

Application

Jusqu’à maintenant, le PSC n’a pas été très efficace parce qu’il n’a pas été

vigoureusement appliqué. Pour ce qui est du volet correctif du Pacte, l’application devrait

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010120

Page 123: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

en principe être relativement simple puisque la valeur de référence – un déficit équivalent

à 3 % du PIB – devrait être une grandeur observable. Mais un problème central est que les

seules pénalités dont on dispose sont des amendes ex post, qui ne sont guère crédibles,

puisqu’elles ne s’appliqueraient qu’à des pays ayant déjà des problèmes budgétaires :

l’exécution de ces sanctions ne ferait qu’ajouter à leurs difficultés. En outre, la longueur

des procédures et la difficulté d’établir la mise en œuvre effective des engagements de

correction ont empêché un retour rapide aux normes du PSC. Les propositions législatives

de la Commission entraîneraient un allongement de certains délais, qui passeraient de

quatre à six mois, mais clarifieraient les critères d’évaluation du respect des

recommandations en accordant plus d’importance aux variables qui dépendent

directement des autorités nationales, relatives notamment aux dépenses publiques (CE,

2010c). Mais, surtout, il est proposé qu’une somme équivalant à l’amende au titre de la PDE,

soit 0.2 % du PIB, soit déposée sur un compte non rémunéré dès le lancement de la

procédure de PDE, somme qui serait restituée au pays lorsqu’il met en place des mesures

correctives. Cela permettrait d’associer une sanction légère – les intérêts non perçus – au

coût budgétaire de la correction elle-même, ce qui serait probablement plus crédible que de

menacer de réclamer une amende d’un montant similaire lorsque le pays est aux prises

avec des problèmes budgétaires encore plus graves. De plus, il est envisagé d’adopter une

série de sanctions et d’amendes liées au budget de l’UE au moment de son renouvellement.

Le traité exige une décision du Conseil à chaque étape de la procédure de déficit

excessif, depuis le constat de déficit « excessif » jusqu’au prononcé d’une amende. Ces

étapes ne sont pas automatiques et une amende n’a jamais été prononcée. En 2003, le

Conseil a décidé de ne pas agir malgré la recommandation de la Commission visant à

renforcer la PDE à l’encontre de l’Allemagne et de la France. Cela a créé un mauvais

précédent. La Cour européenne de justice a jugé ultérieurement que le Conseil peut de facto

geler la PDE, même si cela va à l’encontre de la recommandation de la Commission, mais il

ne peut pas de sa propre initiative réviser les recommandations relatives à la PDE.

L’application par le Conseil est donc cruciale, mais elle n’a pas correctement fonctionné, ni

du point de vue de la mise en conformité avec le Pacte, ni du point de vue de l’effet de

dissuasion.

Les traités existants limitent le degré auquel des règles plus contraignantes pourraient

s’appliquer sans changement de comportement de la part du Conseil. Cependant, les

propositions législatives de la Commission européenne et les recommandations du Groupe

de travail de l’UE prévoient un mécanisme de « vote à la majorité inversée », dans le cadre

du traité existant, selon lequel une proposition de sanction, au titre du volet correctif ou

préventif du PSC, serait adoptée à moins que le Conseil ne la rejette dans un certain délai

à une majorité dûment qualifiée (CE, 2010c; Groupe de travail de l’UE, 2010). Il serait ainsi

plus probable que le Conseil entérine l’analyse technique de la Commission, puisque le

nombre de pays requis pour l’adoption de la recommandation relèverait de cette

procédure. Néanmoins, cette « quasi-automaticité » continue de dépendre de la volonté

des membres du Conseil de faire respecter la discipline budgétaire par leurs pairs. Le risque

existe que cette nouvelle procédure ait un effet pervers sur le vote : si les pays décident,

pour des raisons stratégiques, de ne pas sanctionner les autres afin d’instituer un

précédent limitant le risque qu’ils soient eux-mêmes sanctionnés, le vote à la majorité

inversée peut inciter certains pays à plus d’indulgence, ce qui neutraliserait les effets de la

réforme. De plus, même si l’expérience récente peut sensibiliser les pays aux risques

suscités par la position budgétaire intenable d’autres pays de la zone euro, il se pourrait

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 121

Page 124: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

que les nombreux pays qui seront sous le coup d’une PDE dans les années à venir (surtout

si le critère de la dette est appliqué) forment une alliance pour résister à une application

plus stricte des règles budgétaires.

La règle concernant la valeur de référence pour la dette publique – 60 % du PIB au

maximum – a fait l’objet d’une application moins stricte que celle relative au déficit. Cela

reflète en partie l’objectif général de la procédure de déficit excessif, par nature axée sur

l’équilibre budgétaire. En outre, peu de pays ont dépassé le seuil de référence pour la dette

au cours des années précédant la crise. Le critère de la dette peut déclencher une action « à

moins que ce rapport ne diminue suffisamment et ne s’approche de la valeur de référence

à un rythme satisfaisant » : ce libellé laisse une marge d’interprétation considérable. Même

s’il n’est pas raisonnable de s’attendre à un retour au seuil de référence en un court laps de

temps pour les pays qui l’ont dépassé de loin, les progrès constatés au cours du dernier

cycle sont très variables. Ainsi, alors que la Belgique est parvenue à réduire son ratio dette/

PIB d’environ 20 points de pourcentage sur une période de six ans, le ratio d’endettement

de l’Italie est resté pratiquement inchangé. Selon les propositions législatives actuelles, les

pays devront réduire l’écart par rapport à la valeur de référence du ratio dette/PIB

(moyenne pondérée sur trois ans) au rythme d’un vingtième sur une période de trois ans

(CE, 2010c). La proposition de définition opérationnelle de la réduction requise de la dette

est certes bienvenue, mais, comme on l’a indiqué précédemment, il est difficile de

formuler une règle précise.

L’application du volet préventif du Pacte s’est avérée plus difficile que celle du volet

correctif et a constitué la principale faiblesse du mécanisme. Le principale problème a été

l’absence de sanctions permettant de s’assurer que la politique budgétaire est définie en

période de conjoncture favorable de façon à éviter les problèmes lors des périodes de

récession et à éliminer le biais en faveur d’un endettement supplémentaire. L’application

de ce mécanisme reposait uniquement sur l’examen par les pairs pour réaliser les OMT et

converger vers ces objectifs. Les autorités nationales doivent soumettre un programme

annuel de stabilité. La Commission et le Conseil ont des pouvoirs de surveillance,

d’examen et d’évaluation des trajectoires nationales d’ajustement. Ils peuvent

recommander des mesures d’ajustement et, si des divergences persistent par rapport aux

objectifs, recommander des mesures correctives à mettre en œuvre rapidement. Cela a

permis d’identifier des situations de politique budgétaire déficiente, mais on n’a guère fait

en sorte que tous les pays parviennent à la viabilité budgétaire à moyen terme. Des

sanctions sont bien entendu plus difficiles à appliquer dans ce cas, car elles supposent un

élément de jugement plus important. Néanmoins, l’introduction de sanctions ex ante

pourrait constituer une réelle avancée pour ce volet du Pacte. On pourrait la renforcer par

une prise de décision quasi-automatique et par des critères plus clairs d’appréciation de la

conformité aux mesures correctives. La législation proposée par la Commission (CE, 2010c)

prévoit de nouvelles sanctions :

● De nouvelles sanctions de procédure, sous la forme d’un avertissement de la

Commission et, en dernier ressort, du Conseil. La Commission et le Conseil assureraient

une surveillance plus fréquente et plus intrusive à l’encontre des pays dont le cadre

d’action budgétaire n’est pas suffisamment rigoureux.

● Une pénalité financière consistant à placer 0.2 % du PIB sur un compte rémunéré aussi

longtemps que le pays est jugé être en infraction (CE, 2010c). Le pays pourrait devoir

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010122

Page 125: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

renoncer aux fonds ainsi placés s’il ne remédie pas à ses déficiences budgétaires, la levée

de cette sanction devant faire l’objet d’une décision unanime du Conseil.

L’application des propositions législatives actuelles constituerait une avancée

importante en corrigeant certains des principaux points faibles du système existant,

notamment la faible crédibilité des sanctions ex ante, le manque de pression des pairs pour

appliquer le volet préventif et en rendant les sanctions du Conseil « quasi automatiques ».

Si l’on peut se réjouir de ces nouvelles réformes, il est à craindre, au vu de l’expérience

passée, que le Conseil persiste dans sa faible application des sanctions et que la

Commission ne fasse pas usage de ses pouvoirs, même élargis10. Par essence, il est

impossible de dépasser complètement le fait que la responsabilité de la politique

budgétaire s’exerce au niveau national alors qu’on tente d’imposer une appréciation de la

politique économique établie au niveau de l’UE. Étant donné les vastes responsabilités qui

restent de la compétence nationale, il est important que la conception des structures

institutionnelles soit cohérente avec cette répartition des responsabilités. Cela devrait se

refléter dans la réglementation financière et les instances de surveillance financière

devraient être chargées de vérifier que la dette des pays qui mènent des politiques

budgétaires risquées est assortie d’un coût du capital approprié et que des engagements

excessifs sont évités.

Surveillance

Pour que le PSC soit mieux respecté, il faut améliorer le suivi des situations

budgétaires des pays de la zone euro ainsi que la transparence. Le dialogue budgétaire en

serait facilité au niveau national et de l’UE, et les investisseurs pourraient plus facilement

évaluer les risques. La Direction générale des affaires économiques et financières (DG

ECFIN) a accru ses ressources et procède actuellement à une restructuration interne pour

renforcer sa capacité de suivre l’évolution économique et budgétaire dans les pays de l’UE.

La présentation des programmes de stabilité devrait être améliorée, et les prévisions

présentées dans un format plus comparable pour tous les pays. Elle devrait distinguer

clairement entre un scénario fondé sur une hypothèse « sans changement » (n’intégrant

que des modifications législatives spécifiques) et les plans tenant compte d’éventuelles

décisions futures. Les prévisions devraient porter au moins sur les trois années suivantes,

ou sur la durée à prévoir pour atteindre les OMT. Elles devraient préciser le niveau attendu

des dépenses courantes, des dépenses en capital et des recettes fiscales, sur la base des

grandes lignes des mesures spécifiques prévues pour atteindre les objectifs fixés.

Les programmes de stabilité sont actuellement élaborés sur la base des prévisions

budgétaires nationales. Dans la plupart des cas, celles-ci sont établies par le ministère des

Finances et ne sont donc pas politiquement indépendantes. Elles ont tendance à être

excessivement optimistes et supposent donc un arbitrage plus facile entre les décisions en

matière de dépenses et l’accroissement des recettes (Jonung et Larch, 2006). Dans le cycle

actuel, la Commission a jugé de nombreuses prévisions « optimistes » (CE, 2010b). La

Commission et le Conseil fondent leur évaluation des programmes sur les propres

prévisions de la Commission. Toutefois, le dialogue sur les politiques à mener est en partie

brouillé par des différences dans les hypothèses économiques et budgétaires sous-

jacentes, et le problème est encore aggravé par le fait que les prévisions nationales

s’appuient sur les données de l’automne et non du début du printemps. Les organismes

nationaux de prévision, pour autant qu’ils aient reçu un mandat approprié, pourraient en

principe être mieux placés que la Commission pour établir des prévisions, en particulier,

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 123

Page 126: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

en ayant un accès privilégié à des données confidentielles très détaillées en matière de

dépenses et de recettes. Il serait bénéfique pour les programmes de stabilité qu’ils soient

élaborés sur la base de prévisions nationales émanant de conseils budgétaires

indépendants, comme indiqué ci-dessous. L’évaluation des mesures mises en œuvre en

serait ainsi facilitée, grâce à l’élimination du biais politique dans les prévisions nationales

et à un meilleur alignement des hypothèses entre les autorités nationales et européennes.

Il convient d’améliorer l’analyse des données issues du suivi des positions budgétaires

structurelles, car c’est le fondement du volet préventif du PSC, et les incertitudes des

prévisions budgétaires devraient être systématiquement mises en évidence. L’évaluation

des positions structurelles ne devrait pas se fonder uniquement sur les estimations de

l’écart de production, variable non observable et difficile à estimer en temps réel. Les

estimations de la position budgétaire structurelle devraient suivre une approche

désagrégée et prendre en compte les élasticités fiscales variant dans le temps et les

ruptures structurelles. Comme indiqué au chapitre 2, les déséquilibres économiques et

financiers couvrent un champ beaucoup plus grand que l’équilibre entre la demande et

l’offre intérieures. En outre, les flux de capitaux et l’immigration peuvent conduire à des

modifications de l’offre à court terme qui rendent l’écart de production particulièrement

difficile à cerner. La création du semestre européen et la coordination avec les grandes

orientations de politique économique devraient permettre d’intégrer les évolutions en

cours à une échelle plus large dans les recommandations de politique budgétaire

formulées par l’UE. Les effets du coût du crédit et du prix des actifs sur les recettes

devraient être systématiquement pris en compte. La présentation des prévisions du solde

budgétaire et des estimations de la situation budgétaire sous-jacente devrait refléter le

degré d’incertitude relative à l’économie, aux données et au modèle utilisé, et les

estimations ponctuelles devraient jouer un moindre rôle dans les prévisions budgétaires11.

Une telle démarche ajouterait certes à la complexité des débats, mais elle refléterait mieux

l’état des connaissances sur les futures situations budgétaires. En outre, elle contribuerait

à mettre en lumière les risques qui s’attachent à la situation budgétaire lorsque l’économie

est en bonne posture.

L’ampleur des corrections qu’il a fallu apporter au PIB et à la position budgétaire de la

Grèce a crûment mis en relief l’insuffisance de la collecte de données statistiques exactes

et actualisées. Ainsi, sur la base des données désormais connues, la Grèce aurait dépassé

la valeur de référence en 2008 et il n’aurait pas été mis fin à la PDE. Ces déficiences

affaiblissent encore la crédibilité du système. L’audit des situations budgétaires devrait être

renforcé et faire davantage appel à des ressources d’audit indépendantes. Eurostat a vu ses

pouvoirs de validation de données renforcés en juillet 2010, avec notamment un système

de visites méthodologiques et un accroissement de ses pouvoirs de contrôle dans la

préparation des statistiques budgétaires nationales12. Eurostat devrait allouer

suffisamment de ressources au suivi budgétaire et remédier aux points faibles des

processus d’audit nationaux, car la crédibilité des données budgétaires est fondamentale

pour le bon fonctionnement des institutions budgétaires de l’UE et de la discipline du

marché.

Le suivi budgétaire devrait être élargi selon deux dimensions. Premièrement, il

convient de renforcer la surveillance et la transparence pour les engagements hors bilan.

Au sens étroit, cela devrait couvrir les opérations hors bilan qui peuvent introduire une

distorsion dans les grands agrégats statistiques des finances publiques, ainsi que les

positions hors bilan importantes telles que les garanties accordées par l’État et les entités

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010124

Page 127: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

ad hoc, qui peuvent, à terme, donner lieu à un engagement de l’État, sans oublier les

obligations au titre des partenariats public/privé (PPP). Il faut veiller à ce que les lacunes du

suivi n’orientent pas les décisions des pouvoirs publics vers des formes de soutien moins

transparentes. Cela sera particulièrement important au cours des années à venir, lorsque

les restrictions budgétaires vont accroître la tendance à contourner la discipline

budgétaire. Plus généralement, les engagements au titre des partenariats public-privé

devraient être clairement comptabilisés dans les annexes budgétaires. Deuxièmement, le

suivi et la disponibilité des données sur la gestion de la dette devraient être renforcés. C’est

un point extrêmement important étant donné l’influence que peuvent exercer les besoins

de financement à court terme sur les pressions du marché; ils ont d’ailleurs été l’une des

principales voies de contagion pendant la crise. Étant donné ces risques de liquidité, ces

questions devraient faire l’objet d’un examen prioritaire, et tous les pays devraient

s’aligner sur les meilleures pratiques pour les dispositifs institutionnels et pour la gestion

des risques de liquidité et de marché. Des tests de résistance budgétaire devraient être

menés pour explorer ces risques et les mettre en évidence.

La réforme du cadre budgétaire au niveau national

La médiocrité des résultats budgétaires de nombreux pays de la zone euro laisse

penser, toutefois, que les autorités nationales ont rencontré deux types de problèmes. En

premier lieu, les incitations politiques conduisent souvent à des décisions à court terme et

à une prise de risque excessive. De plus, la situation de l’union monétaire, conjuguée à une

faible aversion au risque sur les marchés financiers, a pu affaiblir certains éléments de la

discipline du marché. Des pays comme la Grèce et l’Italie, qui n’ont pas fait grand-chose

depuis 2000 pour réduire leurs niveaux élevés de dette par rapport au PIB, ont

manifestement pris de grands risques sur le plan budgétaire. En second lieu, il est

techniquement très difficile dans la pratique de distinguer les recettes structurelles des

recettes conjoncturelles, et de constituer des réserves suffisantes. Malgré de bons résultats

budgétaires apparents à l’époque, il est évident a posteriori que certains pays auraient dû

faire de plus gros efforts pour améliorer leur situation budgétaire. En 2007, l’Irlande et

l’Espagne avaient ramené leurs ratios d’endettement à des niveaux figurant parmi les plus

bas de la zone euro et faisaient partie des rares pays à afficher un excédent budgétaire. Si,

à l’époque, certains signes indiquaient que la situation budgétaire de ces pays n’était peut-

être pas assez solide compte tenu de la surchauffe de la demande intérieure,

l’affaiblissement qui a suivi a été d’une ampleur surprenante par rapport aux prévisions

aussi bien des autorités que des observateurs extérieurs. Par ailleurs, il est sans doute

politiquement très difficile de justifier des excédents suffisants pour corriger ces

déséquilibres intérieurs. Pour remédier à ces faiblesses, les dispositifs budgétaires

nationaux devraient généralement être améliorés par la mise en place de règles de

finances publiques bien conçues (conformes au cadre du PSC) et, dans de nombreux pays,

de conseils budgétaires nationaux indépendants.

Des cadres budgétaires à moyen terme

Un recours plus général à des cadres budgétaires à moyen terme dans les pays de la

zone euro contribuerait à renforcer la performance budgétaire, avec des règles reposant sur

des principes sains de prise de décision budgétaire et aidant les gouvernements à

s’engager à élaborer leurs politiques suivant certaines normes. Il existe plusieurs types

fondamentaux de règles budgétaires, notamment en matière de déficit et d’endettement et

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 125

Page 128: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

aussi en matière de recettes et de dépenses. Il peut s’agir de définir un objectif ou de fixer

un plafond. Dans le domaine du déficit et de la dette, les règles en vigueur au niveau de l’UE

sont tout à fait adaptées, étant donné que les principales externalités de la politique

budgétaire entre les pays résultent de finances publiques non viables. Cependant, d’autres

types de règles peuvent être utiles au niveau national, surtout que celles qui régissent le

déficit et la dette sont sans doute moins contraignantes en période d’expansion

économique, lorsqu’il est difficile d’économiser. S’il est vrai que l’on peut, en principe,

surmonter ce problème en fondant les règles sur des estimations du solde budgétaire

structurel, cette mesure est impossible à observer et difficile à estimer avec précision. Les

règles concernant le déficit (notamment le PSC) sont les plus couramment utilisées en

matière budgétaire dans les pays de l’OCDE et il en existe, sous diverses formes, dans

presque tous les pays (Guichard et al., 2007).

Les règles de dépenses à moyen terme présentent de gros avantages par rapport aux

règles de déficit. Elles consistent à établir un programme ou un plafond pluriannuel de

dépenses publiques. Dans la pratique, cela revient, à juste titre, à considérer les finances

publiques dans une perspective pluriannuelle, à la fois pour avoir une vue sur l’ensemble

du cycle et pour éviter une alternance de phases d’expansion et de compression des

dépenses publiques. Ces programmes seront donc réalisés quel que soit le niveau effectif

des recettes publiques, de sorte que, si les recettes sont plus importantes que prévu, elles

seront économisées et non dépensées (Anderson et Minarik, 2006). À la différence des

règles de déficit, celles fondées sur les dépenses seront sans doute contraignantes tout au

long du cycle. De fait, l’inconvénient des règles de déficit tient au fait qu’elles requièrent

généralement un assainissement lorsque l’économie est déjà affaiblie. Les dépenses ont

pour avantage supplémentaire d’être généralement sous le contrôle plus direct des

autorités que les recettes, qui sont plus conjoncturelles et autonomes (Atkinson et van den

Noord, 2001). Il est donc plus facile d’observer les cas de violation des règles et d’y

remédier. Pour être efficaces, des règles doivent couvrir toutes les catégories de dépenses

afin d’éviter toute possibilité de manipuler le système en reclassant les dépenses dans des

catégories exemptes de plafond13. Cela plaide à l’encontre du recours à des « règles d’or »,

qui excluent l’investissement public, en raison d’une ambiguïté au sujet de la catégorie à

laquelle certains types de dépenses se rattachent (Fatas, 2005). Le principal argument

allant contre les règles de dépenses est le fait qu’elles peuvent nuire à la qualité des

finances publiques en faussant les décisions de dépense, conduisant, par exemple, à

réduire des investissements favorables à la croissance afin de respecter le plafond.

Cependant, avec une définition large des dépenses, ces problèmes ne devraient pas se

poser. Un grand nombre de pays de l’OCDE ont maintenant un système d’objectifs de

dépense tandis que d’autres ont des règles concernant l’utilisation des recettes fiscales

exceptionnelles, dont on peut considérer qu’elles sont susceptibles d’avoir un effet

analogue (Guichard et al., 2007). L’importance des règles fondées sur les dépenses est

reconnue dans le nouveau concept de « politique budgétaire prudente » énoncé dans les

propositions législatives actuelles de l’UE, qui impliquent une règle de base (CE, 2010c).

Dans l’ensemble, on observe que, lorsqu’il existe des règles budgétaires, les résultats

budgétaires sont meilleurs, même si la conception de ces règles et les circonstances dans

lesquelles elles s’appliquent jouent un grand rôle (CE, 2006b; Guichard et al., 2007). Dans la

zone euro, l’Autriche, l’Espagne, la Grèce, l’Irlande, le Luxembourg, le Portugal et la

République slovaque n’ont pas d’autres règles pour les finances de l’administration

centrale ou de l’ensemble des administrations publiques que celles de la procédure de

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010126

Page 129: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

déficit excessif et du PSC14. S’il est vrai que plusieurs de ces pays ont semblé obtenir de

bons résultats pendant la phase de reprise, c’est parmi eux que les problèmes budgétaires

les plus graves ont été observés durant la récession. L’expérience des pays en situation de

grave surchauffe économique soulève deux problèmes importants pour les règles de

dépenses. Premièrement, il y aurait eu durant la phase d’expansion d’énormes excédents

qui auraient fort probablement incité fortement les gouvernements à ne pas tenir leurs

engagements. Deuxièmement, les revirements de fortune dans ces pays ont été d’une

ampleur telle que même les programmes de dépenses prudents établis au bout de

plusieurs années de forte expansion auraient très vraisemblablement été totalement

irréalistes pour les années à venir. En fin de compte, ces considérations nous amènent à

conclure à la nécessité de clauses bien définies énonçant les cas exceptionnels dans

lesquels les règles peuvent être assouplies, tout en maintenant la discipline face à des

« explosions » de recettes. Il est peut-être difficile de préciser la conception exacte des

règles budgétaires, qui peut impliquer des arbitrages entre divers objectifs, comme la

stabilisation du cycle et le maintien du rythme de l’investissement. Les règles budgétaires

à appliquer pour permettre un assainissement des finances publiques dans les années à

venir doivent peut-être prendre en compte certaines considérations particulières, au-delà

de celles qui sont finalement requises pour maintenir les finances publiques sur une

trajectoire prudente. Il conviendrait d’élaborer des règles budgétaires à l’échelon national,

dans le respect des critères de limitation du déficit et de la dette énoncés par le PSC, afin

de tenir pleinement compte des circonstances, des préférences et des stratégies

nationales. Il est possible d’envisager un contrôle de l’UE pour s’assurer que ces règles sont

bien conçues, mais il est important que ces dernières soient soutenues par une volonté

politique au niveau national et que les pays s’approprient les cadres budgétaires.

Des conseils budgétaires nationaux indépendants

Le contrôle de l’application des règles et des résultats budgétaires serait amélioré si

tous les pays de la zone euro se dotaient de conseils budgétaires nationaux indépendants.

Ces derniers pourraient réduire les biais politiques, renforcer l’attachement aux règles et

élever le niveau de l’analyse et du débat autour de la politique budgétaire. En principe, des

institutions budgétaires indépendantes pourraient assumer des tâches diverses, allant de

la fixation des objectifs ultimes de la politique budgétaire à l’apport d’éléments techniques

dans le processus d’élaboration des politiques, sous forme de prévisions ou d’évaluation

normative de la situation budgétaire (graphique 3.9). Il y a toutefois de bonnes raisons de

limiter le champ d’intervention des organismes budgétaires indépendants davantage que

pour les banques centrales, en raison du plus faible degré de consensus au sujet des

objectifs et des effets redistributifs plus prononcés de l’action budgétaire. Aucun pays de

l’OCDE n’a d’autorité budgétaire indépendante au sens donné ci-après, mais de plus en

plus de pays ont adopté une forme de conseil budgétaire (Debrun et al., 2009). La création

de conseils indépendants ou l’amélioration de ceux qui existent déjà a été recommandée

dans les récentes Études économiques de l’OCDE sur la Belgique, la Finlande, la Grèce et

l’Irlande.

Les conseils budgétaires indépendants dans les pays de la zone euro devraient être

chargés de deux tâches :

● Établir des prévisions indépendantes concernant les finances publiques afin d’éliminer

les biais politiques.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 127

Page 130: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

● Procéder à une évaluation indépendante de l’action budgétaire. Il s’agirait, au minimum,

de voir si les règles budgétaires sont respectées. Cela est particulièrement important

lorsqu’un jugement est nécessaire. De manière plus générale, un conseil budgétaire peut

fournir une évaluation normative de l’état des finances publiques et aussi de

l’orientation de la politique budgétaire. Cette analyse peut aussi s’appliquer aux

manifestes des partis politiques.

Ce mandat améliorerait la transparence et la qualité du débat public sur les questions

budgétaires. Dans la plupart des pays, il existe déjà un large éventail de commentateurs de

l’action budgétaire, comme les instituts de recherche, les milieux universitaires et les

banques, mais ils n’ont pas de mandat officiel pour exercer ce contrôle et ils ne sont pas

investis de la responsabilité correspondante. Cela peut saper leur influence sur le débat

public. Par ailleurs, ces commentateurs ad hoc n’ont pas d’accès privilégié aux données

confidentielles officielles requises pour réaliser des analyses détaillées et robustes des

finances publiques. Les ressources dont ils disposent pour leurs analyses budgétaires sont

aussi généralement très limitées par rapport à celles dont ils auraient besoin pour effectuer

des analyses approfondies.

De nombreux pays de la zone euro et de l’OCDE ont déjà une institution qui remplit

certaines des fonctions d’un conseil budgétaire (CE, 2006a; Hagemann, à paraître). Bon

nombre de ces institutions ont un rôle de prévision, mais qui se limite habituellement à

établir des hypothèses macroéconomiques de base. Seuls quelques pays de la zone euro

ont un conseil budgétaire qui formule des prévisions concernant le solde financier et la

dette de l’État. Ces conseils procèdent généralement à des analyses de la politique

budgétaire, mais ils assurent moins souvent le suivi de la mise en œuvre ou l’analyse des

résultats des règles budgétaires. Leur rôle normatif se limite généralement à indiquer si les

règles ou les programmes budgétaires sont respectés et comment corriger les dérapages.

La mise en place dans tous les pays de la zone euro de conseils budgétaires, chargés à la

fois d’établir des prévisions indépendantes et d’évaluer la situation budgétaire,

représenterait par conséquent un changement important.

La conception des institutions budgétaires peut aider à en assurer l’efficacité. La

configuration optimale dépendra de la situation de chaque pays. Cependant, les mandats

des conseils budgétaires nationaux doivent être clairs et réalisables. Ces organismes

Graphique 3.9. Typologie des organismes budgétaires

Source : Debrun, X., D. Hauner et M.S. Kumar (2009), « Independent Fiscal Agencies », Journal of Economic Surveys, 23(1),pp. 44-81.

Organismesbudgétaires

Autorités budgétairesindépendantes

Fixer des objectifs(pour l’équilibrebudgétaire) dansle contexte d’unerègle budgétaire

Fixer des objectifsà long ou court

terme fondés surdes principes

généraux

Fournir uneanalyse objective

des politiquesbudgétaires

Ajuster certainsprogrammes

d’impôts et dedépenses

prédéterminés

Fournir desévaluations et

recommandationsnormatives

Fournir desprévisions

budgétairesindépendantes

Conseils budgétaires

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010128

Page 131: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

doivent avoir entière discrétion pour l’exécution de leur mandat. L’indépendance à l’égard

des influences politiques et du pouvoir exécutif est cruciale et il faut mettre en place des

pare-feu suffisants pour assurer l’indépendance des agents et des activités quotidiennes.

À l’inverse, ils doivent être démocratiquement comptables, devant les Parlements

nationaux, par exemple, de la réalisation de ces objectifs. De plus, le financement de ces

organismes indépendants doit être protégé, autant que possible, de toute influence

politique et être suffisant pour leur permettre de s’acquitter des tâches importantes qui

leurs sont confiées. Le développement de banques centrales indépendantes au cours de

ces dernières décennies peut, à certains égards, servir de modèle du point de vue de

l’indépendance, des capacités analytiques, de la collecte des données nécessaires à la

réalisation de ces analyses, et de l’importance croissante attachée à la communication et à

la transparence.

L’intégration des conseils budgétaires nationaux aux autres processus politiques et

budgétaires est un des principaux déterminants de leur efficacité. Cela explique pourquoi

ces institutions nationales pourraient arriver à des résultats là où la surveillance exercée

par l’UE ne le permet pas. Aux États-Unis, le Congressional Budget Office (CBO) établit une

référence au regard de laquelle les propositions budgétaires sont établies, encore que ce

rôle soit quelque peu limité par une obligation légale de suivre la législation en vigueur et

non un scénario d’action publique plus réaliste. Le CPB aux Pays-Bas est aussi hautement

intégré au processus politique et budgétaire (encadré 3.2).

L’expérience des pays qui disposent de conseils budgétaires indépendants est

encourageante, même si rares sont les pays de la zone euro à avoir le type d’institution

doté du mandat intégral proposé ici. Sur la période 1995-2005, la moyenne non pondérée

des résultats budgétaires des pays de l’OCDE où ces conseils existent, du point de vue du

solde primaire corrigé des influences conjoncturelles et de la réduction de la dette, a été

supérieure à celle des pays dépourvus d’organismes de ce type (graphique 3.10). Ces

observations confirment celles qui sont faites suivant la même méthodologie pour l’Union

européenne (CE, 2006a). À première vue, les données d’observation sont difficiles à évaluer

en raison de l’endogénéité de la décision de créer un conseil budgétaire. Un conseil

budgétaire est plus susceptible d’être créé dans les pays qui ont une discipline budgétaire

rigoureuse, encore que cette institution est peut-être moins nécessaire dans les cas où les

processus budgétaires sont déjà sains et bénéficient d’un soutien politique.

Une analyse plus détaillée des institutions budgétaires indique toutefois que ces

dernières peuvent exercer une influence. Une étude économétrique de l’ensemble des pays

de l’UE, réalisée sur la base d’indicateurs détaillés des institutions budgétaires, fait

apparaître une forte corrélation entre un indicateur synthétique de leur influence de jure et

leur impact perçu sur la discipline budgétaire (Debrun et Kumar, 2008). Par ailleurs, des

garanties officielles d’indépendance politique sont en relation positive avec l’influence

de jure de l’institution (graphique 3.11).

Même s’il existe peu d’institutions dotées de l’éventail complet des pouvoirs

nécessaires, certains éléments d’observation indiquent que ces organismes peuvent être

efficaces s’ils sont bien conçus et véritablement indépendants. Leur réussite dépend pour

beaucoup aussi de la disposition des décideurs publics à respecter la prudence budgétaire

et à laisser ces institutions se développer. C’est précisément ce lien avec la situation locale,

toutefois, qui donne sa légitimité au processus national d’action et à une forte intégration

au budget. Au niveau de l’UE, la Commission européenne joue déjà un rôle quelque peu

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 129

Page 132: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

Encadré 3.2. Le Bureau d’analyse de la politique économique des Pays-Bas

Créé en 1945 sous le nom de Centraal Planbureau (CPB), le Bureau d’analyse de la politiqueéconomique joue un rôle de premier plan dans le domaine de la politique budgétaire aux Pays-Bas.Il est chargé principalement de fournir des prévisions macroéconomiques et budgétairesindépendantes, mais il réalise aussi des analyses sur des questions très diverses, telles que l’Étatprotecteur, le marché du travail, la réglementation et l’économie internationale. Il procèdeégalement à des analyses coûts-avantages des grands projets publics, ainsi qu’à des études àhorizon lointain, portant notamment sur les problèmes environnementaux et l’impact duvieillissement sur les finances publiques néerlandaises.

La principale responsabilité du CPB consiste à soumettre des prévisions macroéconomiques etbudgétaires indépendantes. Le CPB n’émet pas de recommandations normatives. Ses prévisionsd’automne sont coordonnées avec la présentation du budget de l’État et tiennent compte des effetséconomiques et budgétaires estimés des mesures proposées. Il importe de noter que les activitésdu CPB et ses contributions à la préparation du budget ne lui sont pas imposées, mais s’inscriventdans le cadre d’une pratique habituelle. En fait, le CPB joue un rôle spécial, adapté à la politique decoalition néerlandaise dans la mesure où tous les partis politiques lui soumettent leur programmeéconomique pour évaluation, ce qui facilite les comparaisons. De plus, les organisations patronaleset salariales s’appuient aussi sur les prévisions du CPB pour les négociations salariales. Un degrétrès élevé de priorité est accordé à la transparence. Le directeur du CPB est régulièrement entendupar la Commission parlementaire des affaires économiques, et toutes les études du CPB sontlargement couvertes par les médias et alimentent souvent le débat public.

Bien qu’il fasse officiellement partie de l’administration centrale, le CPB a conquis très tôt, etconservé, une grande indépendance, imputable à plusieurs facteurs. Premièrement, sonfinancement sur ressources publiques est à la fois suffisant et assez sûr pour lui conférer assez deliberté pour l’établissement de son propre programme de recherche. Deuxièmement, sonindépendance à l’égard du pouvoir politique lui est assurée en contrepartie de sa non-ingérencedans le débat politique (Bos et Teulings, 2010).

Le CPB apparaît comme une institution qui, au fil des décennies, s’est pleinement intégrée auprocessus d’élaboration de la politique économique tout en conservant une solide réputation deprofessionnalisme et d’impartialité de ses analyses. Il emploie actuellement quelque 180 agents.

Graphique 3.10. Évolutions budgétaires et conseils budgétaires1

1995-2005

1. Conseils budgétaires tels que définis dans CE (2009), Public Finances in EMU – 2009 et calculs de l’OCDE.2. Pays de l’OCDE à l’exclusion du Chili, du Mexique, de la Slovénie et de la Turquie.3. Solde moyen au cours de la période considérée.4. Variation annuelle moyenne en points de PIB au cours de la période considérée.

Source : OCDE, Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364660

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1.52

2

3 4 4Solde primaire corrigé

des variations cycliquesVariation de la

dette bruteVariation des

dépenses

Pays de l’OCDE avec un conseil budgétaire en 2005Pays de l’OCDE sans conseil budgétaire en 2005

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010130

Page 133: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

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analogue en surveillant les situations budgétaires nationales et le respect des règles du

PSC. La Commission n’a pas la même indépendance politique que celle qu’il faudrait à une

institution budgétaire nationale. Elle a néanmoins pour mandat de préserver les intérêts

de l’UE et, à ce titre, elle ne doit pas subir l’influence des autorités nationales.

Graphique 3.11. Impact des conseils budgétaires

Source : Debrun, X. and M.S. Kumar (2008), « Fiscal Rules, Fiscal Councils and All That: Commitment Devices,Signaling Tools, or Smokescreen? », Actes du séminaire sur les finances publiques organisé par la Banque d’Italie (Bancad’Italia) à Rome. 1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364679

0 1 2 3 4 5 6 7 80

1

2

3

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6

7

8

Impact perçu sur la discipline budgétaire

Influence de jure sur la procédure budgétaire

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GBR

0 1 2 3 4 5 6 7 80

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2

3

4

5

6

7

8

Garanties formelles d’indépendance politique

Influence de jure sur la procédure budgétaire

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GBR

Encadré 3.3. Résumé des recommandations de politique budgétaire

La priorité immédiate est de stabiliser les finances publiques puis de ramener les ratios dette/PIB à dniveaux plus prudents ces prochaines années. Un renforcement du cadre budgétaire amélioreraitcrédibilité du processus d’assainissement des finances publiques. Un renforcement de la discipline marché et des cadres budgétaires s’impose pour éviter des politiques procycliques et assurer la viabilitlong terme des finances publiques. La conception de ce cadre institutionnel devrait refléter le fait que administrations nationales demeurent responsables au premier chef de la situation de leurs financpubliques, tandis que les institutions de l’Union européenne sont nécessaires pour éviter les effd’entraînement budgétaires et atténuer l’aléa moral.

De profondes réformes des institutions budgétaires de l’UE et de nouvelles normes pour les cadbudgétaires nationaux sont envisagées dans les propositions de mesures législatives pour l’UE et dansrapport du Groupe de travail chargé de ces questions. Elles devraient être largement en place au milde 2011.

Rebâtir les finances publiques

La priorité immédiate est d’améliorer les situations budgétaires :

● L’assainissement des finances publiques devrait commencer en 2011 au plus tard dans tous les paysla zone euro. Le rythme de cet assainissement devrait être différencié suivant les pays. L’assainissemedevrait être axé de manière générale sur la réduction des dépenses courantes.

● Il faudrait réduire le ratio dette/PIB à un rythme soutenu pour le ramener dans tous les pays dezone euro à un niveau n’excédant pas 60 % du PIB. Cela exigera un effort prolongé d’assainissement dfinances publiques dans de nombreux pays. Des progrès réguliers devraient être accomplis versréalisation des objectifs à moyen terme (OMT) prévus par le Pacte de stabilité et de croissance (PSC).

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 131

Page 134: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

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Encadré 3.3. Résumé des recommandations de politique budgétaire (suite)

Renforcer le cadre budgétaire au niveau de l’UE

Application

L’application des règles budgétaires de l’UE devrait être renforcée conformément aux propositioactuelles :

● Le volet correctif devrait faire l’objet d’une application systématique par le Conseil et les sanctiodevraient être exécutées dès lors qu’elles s’imposent. Des fonds devraient être déposés sur un compnon rémunéré dès qu’un déficit excessif est constaté. Les facteurs « exceptionnels et temporairedevraient être invoqués avec parcimonie comme ils le sont actuellement.

● Il faudrait mettre en place une définition opérationnelle claire de l’effort requis pour réduire le radette/PIB lorsqu’il dépasse le seuil de 60 %.

● Le volet préventif du Pacte devrait prévoir des sanctions lorsqu’il existe un risque sérieux dépassement des valeurs de référence de la PDE. Les sanctions devraient être appliquées dès le débutprocessus et comporter une surveillance plus intrusive et des avertissements du Conseil. Les pénalimonétaires devraient inclure le placement de fonds sur un compte rémunéré jusqu’à l’exécution dmesures correctives.

● Les décisions du Conseil concernant le nouveau dispositif de sanctions devraient devenir « quautomatiques » : la Commission devrait pouvoir faire des recommandations au Conseil, ce qimpliquerait un vote à la majorité inversée par rapport au système actuel.

Intégration dans la prise de décision économique

● Une mesure judicieuse est l’inscription des processus budgétaires de l’UE dans le cadre du « semeseuropéen » : l’importance accordée aux questions de calendrier devrait renforcer le rôle de la dimensieuropéenne dans les processus budgétaires nationaux. Il convient en outre de renforcer le lien entre considérations budgétaires et les autres champs d’action des autorités, comme les déséquilibres et réformes structurelles, tout en évitant les arbitrages entre objectifs.

Surveillance

● L’analyse des situations budgétaires structurelles devrait être améliorée et refléter les risques découlades déséquilibres, en particulier les cycles des prix des actifs. Elle devrait être moins axée sur estimations ponctuelles et pourrait comporter des analyses de sensibilité pour évaluer le degré de risq

● La communication des données budgétaires et leur suivi devraient tenir davantage compte desituation de la dette publique, des engagements hors bilan et conditionnels, et des questions de gestide la dette.

● La présentation des programmes de stabilité devrait être encore harmonisée et améliorée. Les prévisiodevraient clairement distinguer entre les mesures législatives adoptées et les intentions d’action.

● Les programmes de stabilité devraient être élaborés sur la base des prévisions économiquesbudgétaires établies par des conseils budgétaires nationaux indépendants.

Renforcer la discipline de marché grâce à un cadre de gestion des crises amélioré

Un mécanisme crédible de gestion des crises budgétaires s’impose pour apporter un soutien aux pasolvables confrontés à des problèmes de liquidités, et pour parvenir à une résolution efficace dans autres cas :

● Les dispositions envisagées par l’UE et le FMI concernant la Grèce devraient être mises en œuvre comprévu afin d’assurer le degré de conditionnalité indiqué.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010132

Page 135: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

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Notes

1. Caner et al. (2010) mettent en évidence un seuil situé aux alentours de 80 % du PIB.

2. L’effet induit par la réduction des anticipations d’inflation à travers les taux d’intérêt nominaux estplus complexe, dans la mesure où il dépend du fait de savoir si l’impôt prélevé par l’inflation estplus efficient que les autres impôts.

3. Ainsi, d’après les résultats de récents travaux de l’OCDE, la semi-élasticité de la charge fiscaleexprimée en proportion du PIB est seulement de l’ordre de –0.2, et ce chiffre peut-être réduit si lesimpôts sont collectés de la façon la plus efficiente possible (Arnold, 2008).

4. Dans ces deux scénarios, les hypothèses de croissance du PIB et de taux d’intérêt retenues dans lescénario de référence à moyen terme des Perspectives économiques de l’OCDE de juin 2010 (OCDE,2010) sont des variables exogènes. Les effets du cycle économique sont pris en compte à l’aide dela méthodologie classique de l’OCDE. Le scénario de « réalisation des programmes de stabilité » estfondé sur l’hypothèse que les pays atteignent les niveaux de déficit budgétaire effectif indiquésdans leurs programmes de stabilité de début d’année – exception faite de la Grèce, pour laquelleles données ont été mises à jour sur la base du programme mis au point avec le Fonds monétaireinternational (FMI). Il est ensuite supposé que le solde structurel demeure inchangé jusqu’à la finde la période considérée.

5. Un pays ayant un ratio dette/PIB de 100 %, une croissance nominale de 3.5 % et une charged’intérêts de 4.5 % devrait dégager les premières années un excédent primaire proche de 3 % duPIB. En revanche, un pays ayant un ratio dette/PIB de 70 % ne devrait dégager qu’un excédentprimaire de 1.5 % du PIB.

6. Sous les hypothèses indiquées dans la note précédente, il faudrait à un pays ayant un ratio dette/PIB de 80 % plus de dix ans pour ramener ce ratio à 70 %.

Encadré 3.3. Résumé des recommandations de politique budgétaire (suite)

● Un mécanisme permanent d’apport de liquidités devrait être mis en place pour les pays dont la situatibudgétaire est fondamentalement saine et qui sont confrontés à des problèmes de liquidités. mécanisme devrait être assorti d’une conditionnalité stricte. Il faudrait envisager la possibilité pourmécanisme d’intervenir directement sur les marchés secondaires des titres de la dette publique.

● Si la conditionnalité n’est pas respectée, le soutien à la liquidité devrait être retiré et il faudrait mettreplace un mécanisme pour faire face à cette éventualité. Il faudrait que la réglementation financiprenne pleinement en compte le risque souverain.

Renforcer les cadres budgétaires au niveau national

S’il est vrai qu’un PSC plus efficace aiderait à éviter les retombées de l’instabilité budgétaire, il indispensable de renforcer les cadres nationaux dans l’architecture d’ensemble du Pacte si l’on veut assuune plus grande viabilité des finances publiques et une meilleure gestion macroéconomique au nivenational. Les propositions législatives actuelles fixent des normes minimales pour les cadres budgétainationaux et envisagent la création de conseils budgétaires nationaux indépendants.

● Tous les pays de la zone euro devraient mettre en place des cadres budgétaires à moyen terme de porgénérale, fondés sur des trajectoires d’évolution ou des plafonds pluriannuels aussi bien pour dépenses courantes que pour les dépenses en capital (y compris les dépenses fiscales), devant assurerespect des obligations résultant du PSC.

● De nombreux pays de la zone euro auraient intérêt à mettre en place des conseils budgétaires nationaindépendants bien conçus, qui seraient chargés d’établir des prévisions budgétaires détaillées, danalyses de la situation budgétaire, et une évaluation ex post du respect des règles budgétaires. Corganismes devraient collecter les données nécessaires pour l’analyse de la politique budgétaireaméliorer la communication autour des finances publiques. L’attachement politique à l’indépendanceà la compétence de ces institutions est essentiel. Les conseils budgétaires devraient bénéficier d’financement suffisant.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 133

Page 136: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

3. REBÂTIR LES FINANCES PUBLIQUES ET LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE

7. Les efforts d’assainissement budgétaire de l’Irlande sont sous-estimés du fait de la méthodologieemployée pour construire le scénario de « réalisation des programmes de stabilité », car l’épisodeconsidéré a débuté avant 2010.

8. Aux termes de l’article 125 du traité sur l’Union européenne : « L’Union ne répond pas desengagements des administrations centrales, des autorités régionales ou locales, des autresautorités publiques ou d’autres organismes ou entreprises publics d’un État membre, ni ne lesprend à sa charge, sans préjudice des garanties financières mutuelles pour la réalisation encommun d’un projet spécifique. Un État membre ne répond pas des engagements desadministrations centrales, des autorités régionales ou locales, des autres autorités publiques oud’autres organismes ou entreprises publics d’un autre État membre, ni ne les prend à sa charge,sans préjudice des garanties financières mutuelles pour la réalisation en commun d’un projetspécifique. »

9. Ce changement a été approuvé par le Conseil ECOFIN le 7 septembre 2010.

10. Voir le chapitre 3 pour une question similaire qui s’est posée à propos de l’exécution desavertissements et des grandes orientations de politique économique dans le contexte irlandais.

11. Des indicateurs des risques macroéconomiques et budgétaires sont élaborés dans la partie IV.3 deCE (2010b).

12. Règlement du Conseil (UE) 679/2010 du 26 juillet.

13. Une exception est peut-être justifiée pour les dépenses de sécurité sociale liées au chômage.

14. En Espagne, il y a des plafonds de dépenses et plusieurs seuils de dettes pour les autoritésrégionales et locales.

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© OCDE 2010

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Chapitre 4

Minimiser les risques de déséquilibre au sein du système bancaire européen

Durant la phase d’explosion du crédit à l’échelle mondiale, le système financier de la zone euro a pris drisques excessifs qui ont abouti, dans quelques pays, à une augmentation insoutenable du crédit et à uflambée des prix des actifs et de l’immobilier. Ce processus a contribué au creusement d’importadéséquilibres au sein de la zone euro. Les banques ont joué un rôle majeur dans la transmission dressources financières des économies affichant des excédents importants vers les pays déficitaires, ce quconduit, dans certains cas, à l’accumulation de risques considérables pour les emprunteurs comme pour prêteurs.

Les lacunes du dispositif de réglementation et de surveillance ont contribué à ces problèmes danszone euro, comme dans les autres économies de l’OCDE. Les failles de la réglementation microprudentielle favorisé la propension à prendre des risques excessifs : les volants de fonds propres des banques étaient trfaibles, la qualité des capitaux n’était pas adaptée, les modèles utilisés par les banques sous-estimaient risques, et ces risques étaient sortis des bilans et échappaient ainsi à la surveillance des autorités de contrôDe plus, il n’y a pas eu de suivi convenable des risques de liquidité. Comme les autorités n’ont guère s’opposer à l’expansion du crédit, des risques systémiques ont pu s’accumuler. Certaines grandes banqud’importance systémique ont contribué à l’aggravation des déséquilibres et de la vulnérabilité du système.dispositif européen de surveillance décentralisé n’était pas assez efficace pour contrôler les grandinstitutions financières transnationales. Lorsque la crise financière a éclaté, la coordination des différeplans de sauvetage nationaux s’est avérée problématique et a contrarié le règlement efficient des faillites détablissements.

Il convient de renforcer la réglementation de façon à améliorer la stabilité financière. La première lignedéfense réside dans une réglementation microprudentielle efficace. Cette réglementation doit être amélioen appliquant l’Accord de Bâle III sur les fonds propres, comme l’ont annoncé les autorités de l’UE, aiqu’une série de mesures connexes. Il conviendrait d’envisager une accélération de leur mise en œuvre. réglementation macroprudentielle doit être nettement développée de façon à atténuer le caractère procycliqdu dispositif et à réduire les risques systémiques que présentent les grands établissements transnationaLa création du Comité européen du risque systémique est bienvenue. Pour améliorer la surveillantransnationale, l’Autorité bancaire européenne doit être dotée de prérogatives et de ressources suffisanpour qu’un système fondé sur une surveillance exercée à l’échelle nationale donne naissance à uréglementation cohérente et un contrôle efficace. En outre, il convient de mettre en place un dispostransfrontalier de gestion des crises à l’échelle de l’Europe. En résumé, les autorités européennes ont déjà pdes mesures substantielles pour s’attaquer à ces questions, et d’autres réformes sont en cours.

137

Page 140: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

La prise de risques excessifs au sein de la zone euro durant la phase d’expansion

mondiale du crédit a contribué à la crise financière, à la gravité de la récession et à

l’ampleur des coûts consécutifs pour les finances publiques. Même si, dans l’ensemble, la

zone euro a évité certains des pires excès, on constate néanmoins de graves problèmes

dans un certain nombre de pays, notamment ceux qui présentaient d’importants

déséquilibres extérieurs. La première section de ce chapitre décrira la façon dont les

banques ont multiplié les risques. On y verra aussi comment les flux bancaires

transnationaux ont largement contribué au creusement des déséquilibres

macroéconomiques et financiers à mesure que les disparités de comportements

d’emprunt et d’épargne entre les pays aboutissaient à un recyclage partiel des fonds

excédentaires de certains pays dans d’autres économies de la zone euro. Dans la seconde

section, on définira les grandes priorités stratégiques, à la fois pour éviter, de façon

générale, la prise de risques excessifs et pour prévenir des déséquilibres financiers

insupportables dans les pays de la zone euro. Ces enjeux supposent un renforcement de la

réglementation microprudentielle, le développement de la politique macroprudentielle, le

renforcement de la surveillance transnationale et la mise en place d’un dispositif

transfrontalier de gestion de crise.

Le cycle du crédit bancaire n’était pas viable et a contribué aux déséquilibres La vigueur de l’activité bancaire lors de la récente phase d’expansion dans les pays de

la zone euro, comme dans d’autres économies de l’OCDE, a abouti à un volume d’emprunts

insoutenable et a placé le système financier dans une position vulnérable. La croissance du

crédit a été nettement supérieure à celle du PIB (chapitre 1). Lorsque des doutes sont

apparus sur la qualité générale des créances en 2007, le crédit a commencé à ralentir, avant

de se contracter dès lors que les banques ont affiché des pertes importantes sur leurs

opérations antérieures et que la demande des emprunteurs a fléchi avec le ralentissement

de l’activité économique. Au sein de la zone euro, les déséquilibres économiques entre

pays sont allés de pair avec d’amples variations de l’expansion du crédit (chapitre 2). Le

rythme des emprunts dans plusieurs pays déficitaires a été extrêmement rapide en raison

de la faiblesse des taux d’intérêt réels, de la financiarisation de l’économie, d’anticipations

optimistes sur la croissance et de l’action d’accélérateurs financiers. De 2002 à 2007, les

grands agrégats de crédit ont été multipliés par deux, voire par trois dans certains cas

(graphique 4.1). En revanche, le crédit a affiché une croissance médiocre dans plusieurs

pays excédentaires et a largement stagné en Allemagne. L’expansion du crédit dans les

pays déficitaires est venue financer des écarts épargne-investissement excessifs et

alimenter l’envolée de la consommation, du logement et des prix des actifs. Elle a aussi

faussé l’affectation des ressources financières, en particulier au profit des secteurs du

logement et des biens non échangeables. Ces phénomènes ont amplifié les risques

macroéconomiques : la gravité de la récession de 2008-09 dans différents pays a reflété

la forte expansion du crédit durant la période 2004-07 qui a précédé la crise (Lane et

Milesi-Ferretti, 2010).

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010138

Page 141: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Les banques ont pris des risques excessifs

L’expansion du crédit bancaire a été facilitée par un assouplissement des normes de

prêt, comme l’indique l’Enquête trimestrielle de la BCE sur la distribution du crédit

(graphique 4.2). Cet assouplissement du crédit a favorisé le développement des prêts

bancaires et accéléré la croissance du PIB (De Bondt et al., 2010). La croissance du crédit

avant la crise a été renforcée par l’évolution des bilans des agents économiques, les actifs

des ménages et des entreprises connaissant un gonflement et venant par là-même

accroître la valeur des nantissements. Elle a aussi été amplifiée par le biais du crédit

bancaire, les banques affichant d’énormes bénéfices leur permettant de financer des

apports supplémentaires de capitaux et de crédit (Hempell et Kok Sørensen, 2009). Ces

évolutions ont été influencées entre autres par la faiblesse des taux d’intérêt toutes

échéances confondues, par la multiplication des opérations de titrisation et les lacunes du

Graphique 4.1. Plusieurs pays ont connu une explosion du créditNiveau en 2007

Source : BCE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364698

Graphique 4.2. Normes de prêts bancaires et croissance du crédit dans la zone euro

1. Solde en pourcentage des personnes interrogées indiquant un relâchement des normes de crédit : moyenne desréponses relatives aux crédits aux entreprises, pour l’achat de logement et à la consommation.

Source : BCE, Bank Lending Survey.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364717

0

50

100

150

200

250

300

350Indice 2002 = 100

0

50

100

150

200

250

300

350Indice 2002 = 100

GRC IRL ESP LUX ITA FIN FRA AUT BEL PRT NLD DEU

Crédit au logementCrédit à la consommationPrêts aux entreprises non financières

-80

-70

-60

-50

-40

-30

-20

-10

0

10

20% de réponses

-1

0

1

2

3

4% de variation

2003 04 05 06 07 08 09 10

1

au secteur non financier, en % (éch. de droite)

Relâchement des normes de prêts , en % (éch. de gauche)Variation d’un trimestre à l’autre de la croissance du crédit

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 139

Page 142: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

contrôle bancaire (Maddaloni et Peydro, 2010). On a observé des effets analogues ailleurs,

notamment aux États-Unis (Bayoumi et Melander, 2008). Comme on l’a vu dans le

chapitre 2, ce mécanisme a été particulièrement important dans les pays déficitaires de la

zone euro, compte tenu de la structure des marchés de capitaux et de la tendance de tels

mécanismes de rétroaction à se manifester localement.

Les risques associés à la croissance du crédit n’ont pas été convenablement pris en

compte dans le volume des provisions constituées par les banques, volume qui a été

ramené à des niveaux historiquement faibles alors que l’activité et le crédit atteignaient

des sommets conjoncturels (graphique 4.3). Par rapport à la dynamique de la production

agrégée, les provisions ont diminué plus fortement durant la phase d’expansion que lors de

tout autre cycle récent du crédit, avant de se redresser brutalement au lendemain de la

crise. Ce n’est guère surprenant compte tenu de l’approche « au coup par coup » de la

constitution de provisions et de la limitation de la constitution de provisions générales par

les normes comptables internationales.

Comme dans d’autres économies de l’OCDE, la croissance des prêts et la prise de

risques ont été facilitées par des augmentations du levier financier des banques. Durant la

période 2002-06 qui a précédé la crise, les actifs ont progressé plus vite que les fonds

propres. Alors que l’augmentation du levier financier agrégé du système bancaire de la

zone euro a été limitée, elle a été substantielle dans le cas des principaux établissements

et de ceux qui présentent des risques systémiques majeurs. Dans le cas des grandes

banques, le ratio de levier, défini comme le ratio du total des actifs aux fonds propres de

base, a augmenté d’environ un tiers avant la crise (graphique 4.4). Cela étant, le ratio des

fonds propres de base pondérés en fonction des risques des principales banques de la

zone euro ne s’est que légèrement détérioré au cours de cette période. Cela témoigne d’une

disparité croissante entre les actifs totaux et les actifs pondérés des risques, ce qui pourrait

indiquer que les agrégats en fonction des risques n’ont pas correctement reflété l’évolution

de l’exposition totale aux risques. En outre, certaines positions de risque ont été sorties des

Graphique 4.3. Provisions pour pertes sur prêts et croissance économique dans la zone euro

Source : OCDE, Bases de données des Statistiques sur la rentabilité des banques et des Perspectives économiques de l’OCDE etcalculs de l’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364736

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4En pourcentage

5

4

3

2

1

0

-1

1988 90 92 94 96 98 2000 02 04 06 08

% de variation

Ratio des provisions pour pertes sur prêts (éch. de gauche)Croissance du PIB réel (éch. de droite inversée)

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010140

Page 143: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

bilans, si bien que les bilans des banques n’ont pas pu pleinement rendre compte de

l’augmentation de la prise de risques.

Dans les différents pays de la zone euro, le ratio des fonds propres réglementaires de

base a affiché des niveaux relativement proches (graphique 4.5). En revanche, les ratios de

levier sont généralement restés à des niveaux bien inférieurs dans les pays déficitaires (à

l’exception de l’Irlande) tandis qu’ils étaient plus élevés dans un certain nombre de pays

excédentaires dotés de grandes institutions financières averties. Ces décalages pourraient

aussi refléter des démarches divergentes de contrôle des différents pays, comme le

montrent, par exemple, les disparités de traitement des émissions structurées de billets de

trésorerie adossées à des actifs (Acharya et Schnabl, 2010). Au début des années 2000,

l’Espagne a ainsi imposé une couverture à 100 % par les fonds propres des actifs de ces

montages, de façon qu’il n’y ait plus de différence d’exigences de fonds propres entre actifs

inscrits ou non au bilan. En conséquence, les banques espagnoles ont évité de trop

Graphique 4.4. Levier financier des principales banques de l’Union européenne1

1. Les 10 principales banques de la zone euro ont été sélectionnées selon le total de leurs actifs en 2006, dernièreannée avant la crise, et comprennent BNP Paribas, Crédit Agricole, Deutsche Bank, ABN AMRO, Société Générale,ING Bank, Banco Santander, UniCredit, Fortis et Commerzbank.

2. Rapport du total des actifs sur les fonds propres de base.3. Rapport des actifs pondérés des risques sur les fonds propres de base.

Source : Base de données de The Banker et calculs de l’OCDE.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364755

Graphique 4.5. Ratio de levier financier et ratio de fonds propres de baseEn 2006

1. Ratio du total des actifs aux fonds propres de base.2. Ratio des actifs pondérés des risques aux fonds propres de base; données de 2005 pour l’Allemagne et l’Autriche.

Source : BCE, EU Banking Sector Stability, novembre 2006 et novembre 2007.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364774

26

30

34

38

42

46

10

9

8

7

6

5

1994 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 07 08 09

2

3Ratio de levier financier (éch. de gauche)Ratio de fonds propres de base inversé (éch. de droite)

0

5

10

15

20

25

0

5

10

15

20

25Ratio de fonds propres de base inversé1 2

FIN PRT GRC AUT ESP ITA FRA DEU IRL NLD BEL

Ratio de levier financier

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 141

Page 144: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

s’engager dans de tels montages et les opérations hors bilan n’y ont représenté que 6-7 %

environ du total des opérations de titrisation en Espagne (Fernandez de Lis et Herrero,

2008). En revanche, les banques régionales allemandes (Landesbanken) ont bénéficié de

leurs droits traditionnels aux garanties des pouvoirs publics régionaux, ce qui a réduit leur

coût de financement. Les autorités de contrôle ont permis à ces établissements d’investir

dans des montages qui, du point de vue de la réglementation, constituaient des opérations

hors bilan même s’ils figuraient dans les états financiers. Ces établissements ont

fortement investi dans ces montages financés par des emprunts à court terme. En

conséquence, ils ont été exposés à des actifs à risques créés sur des marchés étrangers en

pleine surchauffe et ils ont subi de lourdes pertes lorsque la crise a éclaté.

Les flux bancaires transnationaux ont amplifié les déséquilibres et les risques

L’accumulation de déséquilibres macroéconomiques au sein de la zone euro s’est

accompagnée d’amples flux bancaires transnationaux. Dans plusieurs pays, la position

extérieure nette des résidents vis-à-vis des banques étrangères, mesurée par les

statistiques bancaires territoriales, s’est rapidement détériorée (encadré 4.1). Cela

témoigne du lien étroit entre flux bancaires et variations de la dépendance globale des

résidents au financement externe (graphique 4.6, première partie). À l’inverse, le secteur

bancaire national détient une part substantielle des actifs et passifs étrangers agrégés

(graphique 4.6, deuxième partie). Cette part a fortement progressé dans plusieurs pays

déficitaires durant la phase d’expansion du crédit qui a précédé la crise, notamment en

Grèce où elle est passée de 17 % en 2002 à 31 % en 2007.

Les flux nets venant des grands pays excédentaires pour aller vers les pays présentant

des déficits des paiements courants et des marchés du crédit en expansion ont été

particulièrement importants (graphique 4.8). L’ampleur du décalage entre flux de sens

opposés a été considérable par rapport à ce que l’on observe traditionnellement et elle

semble s’être accentuée à partir du décollage du cycle du crédit après le début des

années 2000. Les créances consolidées sur certains des grands pays déficitaires ont été

considérables par rapport à leur PIB, alors que ces flux restaient limités du point de vue des

pays excédentaires : par exemple, les créances des banques allemandes sur la Grèce se

sont élevées à près de 1.3 % du PIB allemand avant la crise, alors qu’elles représentaient

13.5 % du PIB grec. Cela témoigne de la sensibilité des petites économies financièrement

ouvertes dans un marché unique des capitaux aux conditions régnant dans d’autres pays,

notamment dans des grandes économies dotées de grandes masses d’épargne et de crédit

bancaire à investir à l’étranger. Même une progression relativement modeste des avoirs

extérieurs d’un grand pays peut accroître spectaculairement l’ampleur des financements

mis à la disposition d’une petite économie déficitaire. Un volume relativement important

et déséquilibré de créances bilatérales consolidées s’est accumulé entre le Portugal et

l’Espagne, mais les déséquilibres entre d’autres pays déficitaires sont restés modérés. Les

créances bilatérales entre la France et l’Allemagne sont restées à peu près équilibrées.

Ce gonflement rapide des créances bancaires transnationales a fortement mis à mal la

capacité des banques à affecter ces fonds aux utilisations les plus productives (Portes,

2009). Les banques des pays excédentaires ont été particulièrement incitées à rechercher

des investissements rentables à l’étranger, car les possibilités de prêter des fonds sur le

marché national étaient limitées par la faiblesse de la demande agrégée et des obstacles

structurels au développement de certaines activités économiques axées sur le marché

national (chapitre 2). Les prêts transnationaux directs au secteur non financier sont restés

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010142

Page 145: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

faibles, car les banques ont avant tout prêté des fonds à d’autres banques ou investi dans

des instruments financiers d’une complexité croissante. Le caractère risqué de ces

investissements a été sous-estimé non seulement par les banques, mais aussi par les

autorités de contrôle bancaire. Il en est résulté de lourdes pertes durant la crise financière

au titre de certains investissements transnationaux. Les banques des pays déficitaires ont

principalement accru leur prise de risques sur le marché national mais ont aussi servi de

vecteurs à des financements étrangers. L’offre limitée de projets de nature à stimuler la

croissance ainsi que la distorsion de la demande de crédit imputable à la faiblesse des taux

d’intérêt réels ont amené les banques à financer la forte expansion du secteur du logement

et de la consommation. Ces expansions ont en tendance à se perpétuer d’elles-mêmes en

raison des accélérateurs financiers et faute d’ancrage des anticipations relatives aux prix

des actifs. Dans certains pays, la forte exposition au risque souverain national et la

dépendance excessive vis-à-vis d’opérations transnationales de financement à court terme

sur les marchés ont amplifié le problème. En Irlande, pays déficitaire qui s’est affirmé en

Graphique 4.6. Les flux bancaires ont fortement contribué à l’accumulation des déséquilibres

1. Calculés sur la base de statistiques territoriales.2. À l’exclusion des investissements directs étrangers détenus par les banques.

Source : BRI, Statistiques bancaires consolidées et FMI, Statistiques de la balance des paiements.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364793

-140

-120

-100

-80

-60

-40

-20

0

20

40% du PIB

-140

-120

-100

-80

-60

-40

-20

0

20

40% du PIB

Situation extérieure nette vis-à-vis des banques étrangères

-204

1

DEU BEL FIN FRA GRC AUT ITA NLD ESP PRT IRL

200020042007

0

10

20

30

40

50

60

70En pourcentage

0

10

20

30

40

50

60

70En pourcentage

Part du secteur bancaire national dans les actifs et passif extérieurs bruts , 20072

DEU BEL FIN FRA GRC AUT ITA NLD ESP PRT IRL

ActifsPassif

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 143

Page 146: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

tant que centre financier, les banques ont non seulement été exposées à une évolution

insoutenable du crédit intérieur, mais aussi à des marchés immobiliers étrangers, et elles

se sont lourdement endettées. La croissance du risque systémique a été masquée par

l’importance des bénéfices et des assises financières. Les mesures macroprudentielles

n’ont en fait été appliquées que dans de rares cas, notamment en Espagne avec le

provisionnement dynamique. Ces mesures n’ont pas réussi à empêcher l’accumulation de

risques excessifs au sein du système bancaire pour certains actifs (par exemple

Encadré 4.1. Comment mesure-t-on les créances bancaires internationales ?

Les statistiques bancaires territoriales de la BRI reposent sur le pays de résidence de labanque déclarante. Elles couvrent les positions vis-à-vis d’établissements étrangers etcomplètent des agrégats monétaires et de crédit, ce qui assure la cohérence de l’approcheavec les statistiques de balance des paiements et le système de comptabilité nationale(McGuire et Woolridge, 2005). Toutefois, la notion de banque résidente englobe lesopérations nationales des filiales de banques à capitaux étrangers, mais exclut les filialesétrangères des banques nationales.

En revanche, les statistiques bancaires consolidées de la BRI reposent sur la nationalitéde la banque déclarante, déterminée par le pays de son siège social. Ces statistiquesexcluent les positions internes aux groupes afin de ne rendre compte que des positionsvis-à-vis des contreparties non affiliées. Elles permettent un meilleur suivi des positionsde risque des banques. Les statistiques consolidées sont particulièrement utiles pourconnaître les créances bilatérales des pays, lorsque leur intermédiation se fait par descentres financiers établis dans des pays tiers.

La différence entre les deux approches est illustrée par le graphique 4.7. Pour lesstatistiques territoriales, les créances bancaires internationales pour le pays X sontreprésentées par les créances agrégées des banques B1 et B3 sur des résidents en dehorsdu pays X. Les statistiques consolidées présentent ces créances agrégées pour les banquesB1 et B2. Pour un centre financier, la banque B2 établie dans le pays Y peut jouer un rôleimportant dans la transmission du crédit du pays X vers le pays Z. Dans une telle situation,l’exposition effective du pays X à des emprunteurs du pays Z va apparaître dans lesstatistiques consolidées, mais pas dans les statistiques territoriales.

Graphique 4.7. Statistiques bancaires territoriales ou consolidées

Source : Banque des règlements internationaux.

Pays X

Pays Y

Pays X Pays Y

RÉSIDENCE

NA

TIO

NA

LIT

É

Statistiques consolidées

Statistiques territoriales

B B

B B 1

3

2

4

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010144

Page 147: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Graphique 4.8. Créances bilatérales consolidées des banquesCréances du pays X sur le pays Y en pourcentage du PIB des deux pays en 2007

Source : BRI, Base de données des Statistiques bancaires consolidées et OCDE, Base de données des Perspectives économiques.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364812

0.0

0.5

1.0

% du PIB de DEU

0

5

10

15

% du PIB de GRC

2000 02 04 06 08

Allemagne - GrèceDEU vis-à-vis GRCGRC vis-à-vis DEU

0

1

2

3

% du PIB de FRA

0

10

20

30

% du PIB de GRC

2000 02 04 06 08

France - Grèce

FRA vis-à-vis GRCGRC vis-à-vis FRA

0

2

4

6

% du PIB de DEU

0

20

40

60

80

100

% du PIB de IRL

2000 02 04 06 08

Allemagne - Irlande

DEU vis-à-vis IRLIRL vis-à-vis DEU

0

1

2

3

4

5

% du PIB de FRA

0

10

20

30

40

50

% du PIB de IRL

2000 02 04 06 08

France - Irlande

FRA vis-à-vis IRLIRL vis-à-vis FRA

0.0

0.5

1.0

1.5

% du PIB de DEU

0

5

10

15

20

25

% du PIB de PRT

2000 02 04 06 08

Allemagne - Portugal

DEU vis-à-vis PRTPRT vis-à-vis DEU

0.0

0.5

1.0

1.5

% du PIB de FRA

0

5

10

15

20

% du PIB de PRT

2000 02 04 06 08

France - Portugal

FRA vis-à-vis PRTPRT vis-à-vis FRA

0

2

4

6

8

10

% du PIB de DEU

0

5

10

15

20

25

% du PIB de ESP

2000 02 04 06 08

Allemagne - Espagne

DEU vis-à-vis ESPESP vis-à-vis DEU

0

2

4

6

8

% du PIB de FRA

0

5

10

15

% du PIB de ESP

2000 02 04 06 08

France - Espagne

FRA vis-à-vis ESPESP vis-à-vis FRA

0

5

10

% du PIB de FRA

0

2

4

6

8

% du PIB de DEU

2000 02 04 06 08

France - Allemagne

FRA vis-à-vis DEUDEU vis-à-vis FRA

0

10

20

30

% du PIB de PRT

0

2

4

6

% du PIB de ESP

2000 02 04 06 08

Portugal - Espagne

PRT vis-à-vis ESPESP vis-à-vis PRT

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 145

Page 148: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

l’immobilier en Espagne), ni à prévenir l’instabilité macroéconomique, mais elles ont

réellement contribué à la résilience du système bancaire pendant la récession.

Le rôle déterminant des banques nationales dans l’intermédiation des ressources

financières entre banques étrangères et emprunteurs nationaux reflète le caractère

incomplet de l’intégration et de la diversification financière sur le marché bancaire de

détail de l’Union européenne. Les banques nationales représentent généralement une part

dominante du volume global des positions et des créances nationales vis-à-vis des banques

étrangères (graphique 4.9). Cette configuration est conforme à l’intégration financière

croissante de la banque de grande clientèle et des opérations bancaires liées aux valeurs

mobilières en Europe par rapport aux banques de réseau (graphique 4.10). Dans la plupart

des pays, les dépôts transnationaux du secteur non financier sont réduits, représentant à

peine 6 % du total en moyenne. Dans le cas des pays où ces dépôts sont importants par

rapport aux prêts, ce sont les banques plutôt que le secteur non financier qui ont procédé

à l’affectation de ces ressources au moyen de prêts à l’étranger. De même, les données de

la BCE montrent que les crédits transnationaux à des entités non bancaires ne

représentent en moyenne que 5 % du total des prêts au secteur non bancaire, contre 3 %

dans les premières années de l’UEM. Le marché des services bancaires aux particuliers et

aux petites entreprises reste fragmenté, et on observe des différences non négligeables des

taux débiteurs et créditeurs pour les ménages et les entreprises à travers la zone euro.

Cette fragmentation n’est pas très surprenante, compte tenu de l’importance de l’origine

locale des informations ou de la langue dans l’évaluation des prêts aux petites entreprises

et aux particuliers, et des différences dans les régimes juridiques nationaux quant à

l’application des procédures de remboursement et de saisie. Toutefois, cette organisation

présente des dangers intrinsèques pour le système financier européen : les emprunteurs et

prêteurs en dernier ressort sont sans doute très éloignés les uns des autres du point de vue

de la géographie et de leurs marchés locaux. Tandis que les banques ayant une présence

locale pourraient être bien informées de la nature des risques locaux, cela ne ferait que

déplacer le problème d’asymétrie de l’information vers l’évaluation par les prêteurs

étrangers du degré de risque de la banque locale et de ses activités. Parallèlement, cela crée

Graphique 4.9. Les banques nationales jouent un grand rôle dans les flux transnationaux

Part des banques nationales dans l’encours total brut vis-à-vis des banques étrangères, 2007

Source : BRI, Statistiques bancaires consolidées et FMI, Statistiques de la balance des paiements.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364831

0

20

40

60

80

100En pourcentage

0

20

40

60

80

100En pourcentage

BEL FRA PRT AUT DEU FIN ESP ITA NLD IRL GRC

Actifs Passif

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010146

Page 149: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

une forte nécessité de surveiller efficacement les activités transnationales pour éviter, par

exemple, un phénomène excessif de transformation des échéances dû à l’acheminement

de flux transnationaux par l’intermédiaire des marchés interbancaires à court terme.

Même si l’intégration financière s’est déroulée lentement à certains égards, les flux

interbancaires transnationaux se sont développés extrêmement rapidement par le biais de

prêts, de dépôts et d’achats de valeurs mobilières, en particulier dans les pays de la

zone euro (encadré 4.2). Une des évolutions essentielles de ces dernières années aura été le

rôle croissant des engagements non constitués par des dépôts. Le financement obligataire

et la titrisation sont des sources de financement qui ont gagné en importance,

transformant ainsi les bilans des banques. Les prêts interbancaires transnationaux entre

établissements de la zone euro sont passés de 22 % du total des prêts interbancaires

en 2000 à 34 % en 2008 alors que le portefeuille de titres émis dans d’autres pays de la

zone euro passait d’un quart à la moitié du portefeuille total. L’importance croissante des

flux interbancaires transnationaux dans le financement des banques nationales, avec des

expositions très concentrées vis-à-vis des marchés locaux de services aux particuliers et

aux petites entreprises, les a rendues très vulnérables aux mouvements du segment du

financement de marché. De 2003 à 2007, les financements via le marché monétaire sont

passés de 12 % à 16 % du total des engagements tandis que le financement interbancaire à

court terme était porté de 0.1 % à 2.9 %.

Le rôle des grandes banques internationales s’est sensiblement accru dans les flux

transnationaux de crédit. Avant la crise, l’UE comptait 46 grands groupes bancaires (sur

8 000 banques) qui, ensemble, détenaient les deux tiers du total des actifs bancaires de

l’Union (BCE, 2007). Chacune des 16 plus grandes banques était dotée d’établissements

dans au moins un quart de l’ensemble des pays de l’UE et détenait au moins un quart de

ses actifs dans d’autres pays de l’UE. Dans le cas des plus grandes banques, la part des

actifs étrangers dans le total des actifs est élevée : 82 % pour la Deutsche Bank, 64 % pour

Santander, 62 % pour UniCredit, 41 % pour BNP Paribas et 29 % pour la Société Générale

(Claessens et al., 2010). Ces établissements ont été d’importants moteurs de l’intégration

financière en Europe. Alors que les bilans des banques de l’UE progressaient de 40 %

Graphique 4.10. Prestation transnationale de services financiers dans la zone euro1

1. Opérations transnationales en pourcentage de la prestation des services financiers dans la zone euro.

Source : BCE (2010), Financial Integration in Europe, avril.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364850

0

10

20

30

40

50

60

70En pourcentage

2000 02 04 06 08 10

Actifs Titres et actions non bancairesPrêts au secteur non bancaire Prêts interbancaires

0

10

20

30

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50

60

70En pourcentage

2000 02 04 06 08 10

Engagements

Dépôts non bancairesDépôts interbancaires

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 147

Page 150: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

de 2004 à 2007, les actifs des filiales de banques de la zone euro dans d’autres pays de la

zone euro augmentaient de 84 % (BCE, 2010a). Les grands groupes bancaires

internationaux ont joué un rôle particulièrement important dans l’acheminement du

crédit des pays excédentaires vers les pays déficitaires. Ces banques intervenaient sur de

multiples marchés et l’investissement direct étranger (IDE) dans le secteur financier a

réduit les taux débiteurs grâce à une intensification de la concurrence et une amélioration

de l’efficacité économique (Goldberg, 2007; De Blas et Russ, 2008). Les grandes banques

internationales se sont servies de leurs marchés financiers internes pour minimiser la

corrélation entre les rythmes de croissance des prêts et des dépôts de la clientèle (Navaretti

et al., 2010). Les filiales étrangères ont pu mettre leurs activités de prêt à l’abri des

fluctuations des fonds et ont pu ainsi mieux profiter des évolutions positives des

conditions de prêt dans les pays en expansion.

Même si cette forme d’intégration a sans doute présenté des avantages significatifs,

notamment une large diversification des risques, elle a pu aussi contribuer dans certains

cas à une augmentation de la prise de risques. Les disparités internationales des

réglementations et des régimes fiscaux ouvrent en effet des opportunités d’arbitrage qui

peuvent être exploitées au moyen d’opérations bancaires transnationales. Les distorsions

Encadré 4.2. Appartenance à la zone euro et avoirs transnationaux

Ces dernières années, l’intégration financière croissante aura été l’une des grandescaractéristiques de l’économie mondiale. Cela étant, l’Union monétaire, comme l’harmonisationde la réglementation au sein de l’UE, a contribué à ce processus et a intensifié l’intégration entrepays de la zone euro.

Une étude des avoirs bancaires transnationaux bilatéraux portant sur un échantillon de20 économies avancées sur une période de 30 ans montre que la participation à l’Unionéconomique et monétaire (UEM) accroît les avoirs bancaires bilatéraux de 40 % par rapport à uncouple de pays non membres (Kalemli-Ozcan et al., 2010). En outre, l’analyse montre que cet effetpositif est surtout imputable à l’élimination du risque de change entre membres de la zone euro.Qui plus est, l’harmonisation de la réglementation au niveau de l’UE a encore stimulé la détentiond’avoirs bancaires bilatéraux.

Dans des études antérieures, Blank et Buch (2007) ont appliqué un modèle de gravité aux actifset passifs bancaires transnationaux et mis en évidence un effet positif significatif de l’euro sur ladistribution des actifs bancaires, cet effet de l’euro étant en revanche plus faible dans le cas despassifs bancaires. Coeurdacier et Martin (2007) ont aussi observé un effet positif de l’euro sur lesprêts bancaires bilatéraux entre pays de la zone, effet venant s’ajouter à un gonflement des prêtsbancaires en provenance d’économies extérieures à la zone euro à des entités des États membres.

L’augmentation relative des créances bancaires bilatérales impliquant des États membres de lazone euro peut être attribuée à trois vecteurs (Spiegel, 2009). Premièrement, un effet « emprunteur »qui fait que l’appartenance à l’UEM accroît la solvabilité, favorisant les emprunts auprès de toutesles sources de financement. Deuxièmement, un effet « créancier » qui accroît l’intérêt queprésentent les banques d’un État membre en tant qu’intermédiaire financier, et qui amène lesmembres de l’UEM à accroître leurs prêts vers toutes les destinations. Troisièmement, un effet« couple » par lequel l’appartenance commune à l’UEM accroît la qualité de l’intermédiationlorsque le prêteur comme l’emprunteur appartiennent à l’union monétaire. Cet effet induit lui-même une concentration des opérations bancaires transnationales sur des couples de paysappartenant tous les deux à l’UEM. Cet effet « couple » semble constituer le facteur dominant.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010148

Page 151: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

des régimes de gouvernement d’entreprise et de la réglementation ont sans doute poussé

à une expansion à l’étranger (CSFM, 2010). Les dirigeants de banques ont pu aussi être

incités à accroître le bilan de leurs établissements par des acquisitions étrangères de façon

à augmenter les rémunérations liées à la taille de l’institution. En outre, cette expansion

internationale a pu faire en sorte que des banques deviennent « trop grosses pour faire

faillite » ou que leur liquidation devienne trop coûteuse, et qu’elles soient trop complexes

pour se prêter à une supervision efficace.

La formation de grands groupes bancaires a contribué à des problèmes de contrôle par

les pays d’origine et par les pays d’accueil, alors même que ces groupes prenaient une

importance systémique dans plusieurs pays où ils opéraient. Le recours aux filiales comme

forme dominante d’établissement à l’étranger au sein de la zone euro (graphique 4.11) a

ajouté à la complexité du contrôle : si l’on prend un échantillon de 30 « grandes institutions

financières d’importance systémique » (GIFIS) de l’OCDE, on observe que chacune détient

au moins 100 filiales contrôlées majoritairement et que plus de la moitié en détient 500 ou

plus (Claessens et al., 2010). L’expansion transnationale par l’intermédiaire de succursales

a pu parfois susciter des conflits, dans la mesure où ce sont les autorités du pays d’origine

qui assurent le contrôle des succursales tandis que les autorités du pays d’accueil sont

responsables de la stabilité du système financier local. Ces problèmes étaient difficiles à

surmonter, compte tenu de la fragmentation du dispositif de surveillance au sein de

l’Union européenne. Lorsque la crise financière a éclaté, la coordination des opérations

transnationales de sauvetage et de liquidation des établissements s’est avérée encore plus

problématique, ce qui a fortement alourdi le coût budgétaire de la crise.

La crise financière a entraîné une réduction du levier financier et une désintermédiation transnationale

Les préoccupations grandissantes quant au risque de crédit ont plongé les marchés de

capitaux dans la tourmente et le retournement du cycle a entraîné d’importantes pertes

(chapitre 1). Cela a produit un impact particulièrement sensible sur les économies et les

systèmes bancaires des pays déficitaires ayant connu une forte expansion tirée par le

Graphique 4.11. Actifs des succursales et filiales des établissements de crédit de la zone euro

Source : BCE (2010), Structural Indicators in the EU Banking Sector et OCDE, Base de données des Perspectives économiques del’OCDE.

1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364869

0

100

200

300

400

500En pourcentage

A. En pourcentage du PIB, 20082255 %

Succursales

NLD IT

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P

DE

U

GR

C

FR

A

PR

T

AU

T

SV

K

BE

L

FIN IRL

LUX 2004 2005 2006 2007 2008

0

5

10

15

20

25En pourcentage

B. Par rapport à l’ensemble des actifs de la zone euro

Filiales

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 149

Page 152: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

crédit, et a exercé des tensions croissantes sur leurs créanciers. Le manque de confiance

entre banques et la réévaluation des risques a entraîné une détérioration soudaine de

l’accès aux financements étrangers pour les banques de certains pays, détérioration suivie

d’un mouvement marqué de désintermédiation transnationale. Les banques ont durci

leurs normes de prêt, faisant ainsi pression sur les emprunteurs, et ont réduit leur voilure.

Cela a contraint le secteur privé à réduire lui-même rapidement son activité, notamment

dans les pays déficitaires lourdement endettés ayant connu des expansions importantes

de l’immobilier. La mauvaise santé des banques et la récession associée ont eu des coûts

budgétaires considérables. Tout cela s’ajoutant à une réévaluation des risques souverains,

plusieurs pays se sont trouvés en proie à des tensions financières et ont dû procéder à un

ajustement rapide de leurs finances publiques. Ce redressement des déséquilibres

économiques et budgétaires a eu lui-même un effet marqué de rétroaction sur le secteur

bancaire. L’interconnexion entre systèmes bancaires des différents pays et entre

emprunteurs souverains et banques a mis en évidence des phénomènes de propagation de

faiblesses locales à d’autres pays.

Au cours de la crise, on a assisté à un recul spectaculaire des mouvements

internationaux de capitaux et c’est dans le domaine des flux bancaires transnationaux que

la contraction a été la plus sensible (Milesi-Ferretti et Tille, 2010). Cette contraction a été

particulièrement marquée dans des pays détenant les plus fortes positions bancaires

brutes initiales et les plus fortes positions nettes négatives en matière d’actifs bancaires

extérieurs. Les bilans internationaux des banques se sont contractés de 12 % entre le pic de

mars 2008 et la fin de 2009, surtout du fait d’une diminution des créances interbancaires.

Les créances extérieures sur les pays de la zone euro ont diminué particulièrement

rapidement par rapport aux créances sur d’autres pays. Il s’agissait là d’un important

changement de stratégie de financement des banques, car le gel des marchés monétaires

et interbancaires institutionnels les a amenées à rechercher des sources de financement

plus stables, notamment par une intensification de la concurrence pour les dépôts (BCE,

2009a). En ce qui concerne le financement obligataire, les émissions nettes des banques

ont reculé. De plus, les banques se sont adressées au Système européen de banques

centrales (SEBC) comme source de liquidités. Pour se procurer des liquidités, les banques

ont également accru leurs réserves stratégiques d’actifs éligibles. Un marché à deux

vitesses est apparu après le déclenchement de la tourmente en août 2007, les banques de

premier plan étant les seules à intervenir sur le marché monétaire transnational et les

autres devant solliciter fortement des contreparties nationales (Cassola et al., 2010). Après la

faillite de Lehman Brothers en septembre 2008, la situation s’est encore détériorée, les

opérations transnationales entre banques de premier plan venant même à se tarir.

En outre, on a enregistré un recul substantiel des opérations transnationales de

fusion-acquisition dans le secteur bancaire de la zone euro (BCE, 2010b). La crise financière

a amené de nombreuses banques à se recentrer sur leur cœur de métier et sur leurs

principaux marchés en délaissant leur expansion transnationale. En outre, la priorité des

fusions-acquisitions s’est déplacée vers l’assainissement des systèmes bancaires

nationaux, en partie sous la houlette des gouvernements nationaux. Des plans de

sauvetage comme celui de Fortis ont eu tendance à être à l’origine du repli des activités et

structures bancaires transnationales. En revanche, certaines restructurations bancaires

ont abouti à une consolidation des activités transfrontalières; c’est le cas par exemple de

Fortis, BNP Paribas ayant finalement racheté une partie de cet établissement.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010150

Page 153: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Moderniser la réglementation et la surveillance pour réduire les risquesIl est nécessaire de réformer la réglementation et la surveillance pour tirer parti de la

financiarisation et de l’intégration financière de la zone euro, sans pour autant remettre en

cause la stabilité. Le renforcement de la réglementation microprudentielle élémentaire

doit constituer la première ligne de défense contre le risque systémique; néanmoins, une

surveillance macroprudentielle efficace est aussi nécessaire pour empêcher l’apparition de

mouvements cycliques excessifs du crédit. Une transmission appropriée de l’information

et une coopération étroite entre les autorités de surveillance macroprudentielle et

microprudentielle sont de nature à garantir des évaluations concertées et globales des

risques et des réponses des pouvoirs publics. Les actions des autorités de surveillance

doivent elles-mêmes être mieux coordonnées et harmonisées. Comme les opérations

bancaires transnationales se font principalement à l’initiative d’un nombre relativement

limité de grands groupes (BCE, 2010b), il est particulièrement important d’améliorer la

coopération entre autorités de contrôle des pays d’origine et d’accueil. En outre, il convient

d’instaurer un dispositif solide de gestion transnationale des crises.

Au-delà de ces grands aspects, plusieurs autres lacunes de la réglementation et de la

surveillance ont contribué à l’accumulation des risques qui a abouti à la crise bancaire

(Wehinger, 2008). Parmi ces points noirs, on retiendra la faiblesse du gouvernement

d’entreprise, l’insuffisance du contrôle de la gestion des risques et les pratiques

inappropriées en matière de rémunération au niveau des banques, le poids dominant des

opérations de gré à gré ainsi que les liens avec le système bancaire parallèle, notamment

les fonds d’arbitrage et de capital-investissement. Il faudra aussi faire des progrès

substantiels dans ces domaines et de nombreuses réformes sont d’ailleurs déjà engagées

dans ce domaine; néanmoins, on ne s’attardera pas plus avant sur ces questions dans le

présent chapitre.

La première ligne de défense doit résider dans le renforcement de la réglementation microprudentielle

Dans les années qui ont précédé la crise, la réglementation microprudentielle des

fonds propres ainsi que la gestion et la surveillance des risques n’ont pas suffi à empêcher

l’accumulation de risques systémiques. Les grandes banques ont accru leur levier financier

et leurs positions de risque, alors que la qualité de leurs fonds propres se détériorait

progressivement. Même si de nombreuses banques détenaient largement plus de fonds

propres que le minimum exigé, l’ampleur des distributions de dividendes, les programmes

de rachat d’actions et le versement discrétionnaire de primes avaient affaibli leur assise

financière au moment du déclenchement de la crise, alors même que les perspectives du

secteur financier se détérioraient. En conséquence, la capacité du système bancaire à

absorber les pertes correspondantes de transaction et de crédit s’est trouvée entamée. De

plus, le dispositif d’adéquation des fonds propres ne couvrait pas convenablement

l’ensemble des risques. C’est ainsi qu’il ne prenait pas correctement en compte

d’importants risques, figurant ou non dans les bilans, tout comme les positions sur

instruments dérivés. Or, ces risques se sont révélés fortement déstabilisateurs durant la

crise financière (Blundell-Wignall et al., 2009). Ce mouvement a été aggravé par les

pratiques de gestion des risques, la dépendance de la réglementation vis-à-vis des agences

de notation contribuant à amoindrir l’efficacité des mécanismes internes d’évaluation des

risques-client et des mesures de vigilance (Persaud, 2008). La réglementation en matière de

liquidité était relativement peu développée et son harmonisation restait limitée. De

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 151

Page 154: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

nombreuses banques détenaient des volants de liquidités insuffisants et dépendaient

fortement de financements de marché sous forme de dépôts interbancaires et d’émissions

de valeurs mobilières. Or, ce mode de financement s’est avéré dévastateur pour ces

banques durant la crise lorsque la liquidité du marché interbancaire s’est tarie.

Plusieurs de ces problèmes ont été abordés au niveau international dans le cadre du

train de réformes adopté en septembre 2010 par le Groupe des gouverneurs et des

dirigeants des autorités de surveillance, organe de supervision du Comité de Bâle sur le

contrôle bancaire. En dépit de la révision en baisse des propositions plus ambitieuses

formulées initialement et de la longueur des délais de mise en œuvre, ce plan de réforme,

désigné sous le nom de « Bâle III », doit assurer un renforcement substantiel de la stabilité

du secteur bancaire dans les années à venir. Parmi ses éléments principaux, on retiendra

l’amélioration de la qualité, de la cohérence et de la transparence de l’assise financière des

établissements, ainsi que l’introduction de ratios de levier et de liquidité. Une fois qu’il

aura été intégralement mis en œuvre le 1er janvier 2019, ce régime se présentera de la

façon suivante :

● La comptabilisation en actions ordinaires des participations dans d’autres

établissements financiers, des charges administratives transférables liées aux créances

hypothécaires et des reports de crédits d’impôt sera limitée à 10 % de la composante des

fonds propres sous forme d’actions ordinaires, l’élément le plus solide de ces fonds

propres. De plus, toute fraction du total de ces trois éléments en excédent de 15 % des

actions ordinaires devra être déduite.

● L’exigence minimale relative au niveau d’actions ordinaires passera du seuil actuel de

2 % des actifs pondérés en fonction des risques, avant l’application des ajustements

réglementaires, à 4.5 % après l’application d’ajustements plus stricts (tableau 4.1).

● L’exigence minimale de fonds propres de base, qui recouvrent les actions ordinaires et

d’autres instruments financiers éligibles sur la base de critères plus rigoureux, sera

portée de 4 % à 6 %.

● Le volant dit « de conservation » qui s’ajoutera aux exigences minimales réglementaires

sera fixé à 2.5 % et sera constitué d’actions ordinaires, après application de déductions.

Les banques seront soumises à de fortes contraintes en matière de distribution de

bénéfices et de versements de primes, lorsque leurs ratios de fonds propres tendront à

baisser pour se rapprocher des exigences minimales.

● Un ratio de levier indépendant du risque servira de protection supplémentaire contre les

tentatives de manipulation des exigences en fonction des risques et contribuera à

Tableau 4.1. Fonds propres des banques : exigences actuelles et futures En pourcentage des actifs pondérés des risques

Exigences actuelles1 Exigences en 20152 Exigences en 2019 (dont volant de conservation)2

Fonds propres de base sous forme d’actions ordinaires 2 4.5 7

Fonds propres de base 4 6 8.5

Total des fonds propres 8 8 10.5

1. Avant l’application de définitions plus strictes en matière de fonds propres.2. Après l’application de définitions plus strictes en matière de fonds propres.Source : Comité de Bâle sur le contrôle bancaire.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010152

Page 155: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

remédier au risque de modèle. Un ratio de levier minimum fixé à 3 % de fonds propres

de base sera testé pendant une période d’exploitation en parallèle, et devrait devenir

obligatoire en 2018 sur la base d’un examen et d’un calibrage appropriés. À des fins de

comparabilité, le ratio de levier réglementaire reposera sur une définition harmonisée au

plan international, ce qui est indispensable compte tenu des différences marquées entre

les méthodologies comptables d’une juridiction à l’autre (encadré 4.3).

● Un ratio de liquidité à court terme et un ratio structurel de liquidité à long terme seront

introduits et s’appuieront sur un ensemble d’instruments de mesure en vue d’aider les

autorités de contrôle à détecter et analyser les tendances en matière de risque de

liquidité au niveau aussi bien d’une banque que du système dans son ensemble.

Toutefois, le calendrier de mise en œuvre a été largement repoussé afin de minimiser

les éventuels impacts négatifs de la nouvelle réglementation sur le crédit et la croissance à

court terme (encadré 4.4). Les définitions plus restrictives des fonds propres seront

appliquées de façon progressive à compter de janvier 2013 sur une période de 10 ans.

L’application des exigences minimums de fonds propres se fera à partir de janvier 2013 et

devra être achevée en 2015. Après quoi, le volant de conservation sera mis en place d’ici

janvier 2019. Le ratio de levier sera testé à compter de 2013 et pourrait être intégré dans les

exigences de fonds propres en 2018, après révision et calibrage. À l’issue d’une période

d’observation qui débutera en 2011, le ratio de liquidité à court terme sera introduit le

Encadré 4.3. Comparaison de la notion de levier financier aux États-Unis et dans la zone euro

Des divergences de normes comptables affectent la comparabilité internationale des ratios delevier et des risques relatifs inhérents aux systèmes bancaires aux États-Unis et dans la zone euro.Ainsi, les conventions de compensation par liquidation légalement opposables au tiers avec descontreparties individuelles peuvent donner lieu à déduction des actifs aux États-Unis (dansl’optique des règles comptables US GAAP), mais pas dans l’Union européenne (dans l’optique desrègles comptables IFRS). Les bilans pro forma selon les deux normes font apparaître des différencessensibles des ratios de levier, et les divergences des normes comptables aboutissent à desconclusions très différentes sur le levier financier relatif des banques (tableau 4.2). En effet, lesbanques optimisent leurs bilans en fonction des normes réglementaires auxquelles elles sontsoumises. Il serait donc utile d’utiliser une définition commune du ratio de levier financier, telleque l’a adoptée le Groupe des gouverneurs et des dirigeants des autorités de surveillance enjuillet 2010.

Tableau 4.2. Ratios de levier pro forma selon les normes GAAP et IFRS

JP Morgan Chase Deutsche Bank

US GAAP IFRS pro forma IFRS US GAAP pro forma

Total des actifs1 2 032 3 517 1 501 891

Capital1 165 165 38 38

Levier (total des actifs/capital) 12 21 40 23

1. En millions USD pour JP Morgan Chase et en millions EUR pour la Deutsche Bank.Source : Rapports des banques, OCDE.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 153

Page 156: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

1er janvier 2015, tandis que le ratio structurel de liquidité à long terme pourrait entrer en

vigueur à partir de 2018.

La couverture des risques par le dispositif relatif aux fonds propres sera aussi

renforcée. Outre les réformes du portefeuille de négociation et de la titrisation, le Comité

de Bâle est convenu de renforcer les exigences de fonds propres pour les expositions au

risque de contrepartie découlant des instruments dérivés, des opérations de pension, et

des financements sur valeurs mobilières. Ces améliorations, qui seront appliquées à la fin

de 2011, viendront renforcer la résilience des différents établissements bancaires et réduire

le risque de transmission de chocs d’une institution à l’autre. Le renforcement des

exigences de fonds propres en matière de contrepartie accroîtra les incitations à faire

migrer les opérations de gré à gré vers des contreparties centrales et des bourses de valeurs

mobilières.

Le nouvel accord de Bâle III doit maintenant être transposé dans la Directive de l’UE

sur l’adéquation des fonds propres (DAFP) laquelle doit devenir la colonne vertébrale du

dispositif de réglementation microprudentielle au sein de l’Union européenne. La

Commission européenne présentera des propositions législatives en vue de la

transposition du dispositif Bâle III dans les Directives DAFP au premier trimestre 2011. Il

faudrait envisager d’accélérer le processus. En outre, le réaménagement de la surveillance

financière doit aller au-delà de Bâle III dans certains domaines, notamment en ce qui

concerne la concentration des risques, qui doit être mieux prise en compte par les

autorités de contrôle de l’UE, en particulier pour pousser les banques à mieux exploiter les

possibilités de diversification des risques au sein de la zone euro. L’amplitude des cycles de

crédit locaux s’en trouverait également réduite et la discipline du marché serait améliorée,

si les risques relatifs à la concentration géographique des crédits, et notamment de la dette

Encadré 4.4. L’impact macroéconomique des nouvelles exigences de fonds propres de Bâle

Des estimations réalisées par le Groupe d’évaluation macroéconomique (Macro-Economic Evaluation Group – MAG) du Conseil de stabilité financière (CSF) et par le Comitéde Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB) font apparaître qu’une augmentation de 1 point depourcentage du ratio fonds propres/actifs pondérés des risques entraînera une diminutiondu taux de croissance annuelle du PIB de 0.04 point pendant une période d’application dequatre ans. Les exigences de fonds propres de Bâle III, adoptées par le Groupe desgouverneurs et les dirigeants des autorités de surveillance du CBCB, impliquent unrelèvement du ratio minimum d’actions ordinaires de 2.5 % et du ratio de fonds propres debase de 2 % au 1er janvier 2015. Si les banques choisissent de maintenir les volants defonds propres discrétionnaires, à leur niveau actuel, il en résulterait un impact sur lacroissance annuelle du PIB d’environ - 0.1 point pendant cette période. Un impact similairepeut être attendu entre 2015 et 2018, lorsque sera mis en place un volant de conservationde 2.5 %. L’impact effectif sera sans doute encore plus faible car les banques pourraientutiliser leurs volants de fonds propres discrétionnaires, qui dépassent le niveau minimumréglementaire actuel, pour compenser en partie l’augmentation requise des fonds propresréglementaires. En revanche, ces estimations ne tiennent pas compte de l’impact de lanouvelle définition des fonds propres et des nouvelles pondérations de risques utiliséespour calculer le niveau requis de fonds propres, mais cet effet supplémentaire seraminime.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010154

Page 157: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

souveraine, étaient mieux gérés. Plus fondamentalement, l’accord de Bâle III ne règle pas

complètement le problème lié au fait que les « promesses » qui fondent tout système

financier ne sont pas traitées de la même façon, et il continue de permettre des arbitrages

entre éléments figurant ou non dans les bilans (Blundell-Wignall et Atkinson, 2010).

Il faut développer la politique macroprudentielle

La crise a mis en lumière les échecs de l’atténuation du risque systémique, ou « le

risque que l’instabilité financière ne prenne une telle ampleur qu’elle entrave le

fonctionnement d’un système financier au point de porter un préjudice notable à la

croissance économique et au bien-être » (BCE, 2009c). Le rôle d’une telle politique

macroprudentielle est principalement préventif et doit être distingué de la gestion et du

règlement des crises. Toutefois, il existe des relations importantes entre ces différents

volets de l’action des autorités. Par exemple, les insuffisances de la gestion et du règlement

des crises, notamment les opérations de renflouement aux conditions trop clémentes, sont

de nature à amplifier le risque systémique en accroissant l’aléa moral. Les interactions

avec la politique monétaire sont également importantes. Tandis que la politique monétaire

vise à maintenir la stabilité des prix à moyen terme, la politique macroprudentielle restera

le principal instrument de gestion des cycles financiers, et en évitant les cycles excessifs

des prix des actifs et des bilans, elle peut contribuer à la stabilité des prix dans le long

terme. En outre, la stabilité financière est nécessaire pour maintenir des mécanismes

appropriés de transmission de la politique monétaire (chapitre 1).

Le souci d’atténuer le risque systémique vise deux objectifs imbriqués (CSFM, 2010) :

● Renforcer la résilience du système financier à des chocs et des récessions économiques.

● Pouvoir endiguer ou freiner l’accumulation de risques financiers (y compris ceux qui

découlent de l’innovation et de modifications de la structure du secteur financier) qui

peuvent menacer le secteur financier et plus généralement l’économie.

Les banques centrales et les autorités de contrôle s’accordent généralement à penser que

la politique macroprudentielle peut parfois être efficace, mais qu’on ne peut

manifestement pas tout en attendre (CSFM, 2010). Améliorer la résilience du système

financier en recourant à des instruments fondés sur des outils microprudentiels classiques

passe pour être sans doute plus réaliste que des efforts plus généraux visant à s’opposer

aux mouvements du marché. Cela semble, par exemple, correspondre à l’expérience de

l’Espagne durant l’envolée de l’immobilier et la crise financière. La politique

macroprudentielle présente donc une forte complémentarité avec les autres politiques. Par

exemple, la meilleure façon de remédier à une poussée de l’immobilier consiste à associer

des mesures macroprudentielles qui durcissent les normes de crédit pour ce secteur à des

modifications des incitations fiscales et des obstacles à l’offre de logements.

L’efficacité de la politique macroprudentielle suppose d’avoir identifié les risques

systémiques. Une batterie d’instruments a été proposée à cet effet (BCE, 2010c). En dehors

des chocs exogènes, les risques systémiques présentent deux dimensions endogènes

(Borio, 2003) :

● Une dimension transversale liée à l’interconnexion entre institutions financières,

notamment celles d’importance systémique.

● Une dimension temporelle liée à l’accumulation de déséquilibres financiers au fil des

cycles.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 155

Page 158: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Les simulations de crise macroprudentielles évaluent la résilience du secteur bancaire

à des chocs externes importants mais plausibles. Les modèles de contagion et de diffusion

permettent d’évaluer la dimension transversale du risque systémique en analysant les

circuits et la rapidité de transmission des chocs à travers le système. Les modèles d’alerte

précoce apportent des mesures du risque lié à l’apparition de déséquilibres financiers.

Enfin, les indicateurs de stabilité financière témoignent de la stabilité effective à un

moment donné.

Les mesures visant à atténuer les risques systémiques doivent traiter des

vulnérabilités émanant des marchés de capitaux (règles en matière de dépôts de garantie

et marges de sécurité) et des infrastructures des marchés (contreparties centrales) ainsi

que des banques. Du point de vue du système bancaire, ces mesures ont deux cibles :

● Les bilans des banques. Ces mesures visent principalement à renforcer la résilience du

secteur bancaire et portent aussi sur l’offre de crédit et donc sur l’accumulation de

risques financiers. La dimension transversale du risque systémique peut être limitée par

un traitement différencié du risque de contrepartie et des exigences supplémentaires de

fonds propres et de liquidité imposées aux institutions d’importance systémique. Parmi

les mesures traitant de la dimension temporelle du risque systémique, on retiendra les

exigences minimums de fonds propres, le provisionnement prospectif, les volants de

fonds propres et les majorations conjoncturelles des exigences de fonds propres au titre

du risque futur. Ces questions peuvent aussi être résolues par l’application d’un

prélèvement calculé en fonction des risques lequel augmenterait le coût du risque pour

les établissements d’importance systémique. Toutefois, un prélèvement n’accroît pas la

capacité d’absorption des pertes des établissements, puisque les sommes

correspondantes ne sont pas détenues par les entreprises mais versées soit dans un

fonds spécial, soit dans le budget général.

● La demande de crédit. Ces mesures affectent directement l’accumulation des positions

de risques et visent souvent à prévenir l’accumulation excessive de levier financier dans

des secteurs spécifiques de l’économie, comme le logement et la construction. Ces

mesures prévoient en outre des limites sur les quotités de prêt ou les taux

d’endettement, des règles de nantissement et des marges de sécurité en matière de

nantissement. La plus-value apportée par ces mesures consiste à donner un signal clair

sur les risques systémiques émergents.

La plupart de ces mesures quantitatives reposent sur l’adoption à l’échelle du système de

règles microprudentielles classiques. Les mesures visant plus à s’opposer au cycle du

marché ont tendance à être plus macroéconomiques quant à leur application (elles

s’imposent à l’ensemble des institutions) et à être ajustables sur le plan dynamique (afin

de réagir rapidement à des changements de l’intensité et de la nature des risques

systémiques). Différentes combinaisons de mesures affectant les bilans et la demande

sont possibles. Par exemple, selon la directive DAFP, les crédits présentant de fortes

quotités de prêt donneraient lieu à des exigences supplémentaires de fonds propres, le

choix de la marge appropriée étant laissé à l’initiative des autorités nationales.

Les grandes institutions financières d’importance systémique doivent être soumises à une réglementation plus stricte et à un contrôle plus étroit

Les grandes institutions financières d’importance systémique (GIFIS) ont joué un rôle

majeur dans la crise financière (BCE, 2010c). Elles ont en effet contribué directement à la

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010156

Page 159: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

dimension transversale du risque systémique, en accroissant la complexité et

l’interconnexion des marchés de capitaux ainsi que le risque de contagion au sein du

système. Elles ont eu tendance à occuper une place disproportionnée dans l’accumulation

de déséquilibres, en raison de leur rôle dans les opérations transnationales de crédit et

dans l’accélération de l’adoption d’innovations financières. L’aléa moral associé à ces

établissements trop gros ou trop interconnectés pour faire faillite a sans doute fait baisser

les primes de risque de défaillance et encouragé la prise de risques ainsi que l’expansion

des bilans (Baker et McArthur, 2009). Comme leur taille est souvent très importante par

rapport aux économies nationales, ces banques peuvent facilement peser lourd dans le

financement d’une croissance rapide et excessive du crédit à l’échelle nationale. Or, malgré

ces caractéristiques particulières, les grands établissements transnationaux n’ont pas été

soumis à des mesures réglementaires spécifiques.

La contribution d’une banque au risque systémique est le produit de son importance

systémique et de son propre degré de risque. Même si la méthode d’évaluation des risques

des différentes institutions est relativement bien maîtrisée, la mesure de la composante

systémique pose des problèmes. Un large accord semble se dessiner sur l’idée que

l’importance systémique peut être évaluée en fonction de trois grandes dimensions : la

taille, l’interconnexion et la substituabilité (BCE, 2010c). Toutefois, il convient de tenir aussi

compte de plusieurs aspects qualitatifs de sorte qu’une éventuelle classification revêt un

caractère hypothétique. Il convient de considérer l’importance systémique comme une

mesure continue. Il vaut mieux établir un classement finement découpé que de dresser

une liste fermée de banques d’importance systémique qui risquerait d’aboutir à des

distorsions des perceptions de la réglementation, du contrôle et du marché entre

institutions situées de part et d’autre d’un seuil arbitraire.

Les mesures macroprudentielles visant spécifiquement les GIFIS ont deux objectifs

complémentaires. Le premier consiste à réduire leur importance systémique en modifiant

leur modèle économique et en simplifiant la résolution des défaillances. Cela peut se faire

par la séparation juridique et la réduction de la taille des différentes activités, comme la

négociation pour compte propre, les investissements dans les fonds de capital-

investissement et fonds d’arbitrage. Ce sont des considérations que l’on retrouve par

exemple dans la règle Volcker aux États-Unis. L’application de majorations d’impôt aux

grandes banques peut aussi contribuer à gérer le risque systémique en récupérant les

« rentes » des établissements trop grands pour faire faillite, et en neutralisant leur impact

sur le coût du risque. L’élaboration de plans de redressement et de liquidation contribue à

surmonter les obstacles à une résolution ordonnée des défaillances. Le second objectif

consiste à réduire la probabilité de défaillance dans le cadre du modèle économique

existant. L’application d’exigences prudentielles supplémentaires peut servir ces deux

objectifs en même temps. Cependant, l’accord de Bâle II était favorable aux grandes

banques dans la mesure où les normes de fonds propres qui leur étaient imposées étaient

relativement peu exigeantes, ce qui favorisait implicitement l’accroissement de leur taille

(Jokipii et Milne, 2006). Les prochaines dispositions de l’accord de Bâle III devraient y

remédier en pénalisant la taille et la complexité par l’obligation d’une plus forte capacité

d’absorption des pertes. Cela devrait passer par l’application conjuguée d’exigences

supplémentaires de fonds propres, de fonds propres conditionnels et d’une requalification

de dettes en fonds propres. La séparation des activités par la réglementation constitue un

scénario envisageable, avec une scission progressive des activités bancaires non

essentielles.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 157

Page 160: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

L’existence d’un contrôle plus efficace et plus étroit et de mécanismes améliorés de

règlement des défaillances qui minimisent les risques d’aléa moral est essentielle pour

traiter le cas des GIFIS. Même si l’application de normes prudentielles supplémentaires

semble offrir une solution intéressante, la complexité institutionnelle est souvent le reflet

de tentatives de contournement de la réglementation ou de la fiscalité. En conséquence,

l’introduction de nouvelles strates de règles visant à lutter contre la complexité des

institutions sans améliorer le contrôle risquerait d’avoir des résultats pervers. De plus,

même si un accord général semble se dégager sur la batterie d’instruments de contrôle

disponibles pour réduire le risque systémique des GIFIS, le choix du bon instrument

applicable à une institution donnée n’est pas simple (BCE, 2010c). Prendre des décisions sur

l’application d’exigences supplémentaires de fonds propres, de fonds propres

conditionnels et d’une requalification de dettes en fonds propres et sur la mise en œuvre

de mesures de surveillance plus strictes exige une étroite coopération entre l’autorité du

pays d’accueil et les autorités du pays d’origine, le collège des contrôleurs jouant un rôle

important à cet égard. Toutefois, de telles décisions doivent faire l’objet d’un examen par

les pairs et d’une coordination sous les auspices de l’Autorité bancaire européenne (ABE)

afin de prévenir les divergences des pratiques de contrôle et une application inégale de la

réglementation. Des principes de gouvernement d’entreprise renforcés et des incitations

adéquates sont également nécessaires pour modérer une appétence excessive pour le

risque.

Accroître la capacité de résistance aux mouvements cycliques

L’amplification procyclique des chocs par l’intermédiaire des banques et des marchés

des capitaux aura constitué l’un des risques systémiques majeurs ayant abouti à la crise

financière (Penetta et al., 2009). Une tendance à sous-estimer les risques en période faste et

à les surestimer dans les périodes défavorables a accru les possibilités de mouvements en

dents de scie sur les marchés du crédit et des actifs (OCDE, 2010). Alors que les effets

agrégés dans la zone euro n’ont pas été particulièrement marqués, cette tendance a été

très forte dans certains pays de la zone qui ont subi des taux d’intérêt réels déstabilisateurs

et des entrées de capitaux considérables, ce qui a contribué aux déséquilibres

économiques.

La réglementation a contribué au caractère procyclique du système à travers divers

circuits (CBCB, 2010) : les normes comptables concernant à la fois les actifs évalués aux prix

du marché et les prêts détenus jusqu’à l’échéance, les pratiques en matière de dépôts de

garantie et de provisionnement ou encore l’effet de levier entre les institutions financières,

les entreprises et les consommateurs. Cette procyclicité a pu aussi être amplifiée par les

variations cycliques des exigences minimums de fonds propres dues à la plus forte

sensibilité au risque de ces exigences aux termes de l’accord de Bâle II (Lowe, 2002; Borio et

Shim, 2007). Comme les banques et les autorités de contrôle n’ont pas su mesurer

pleinement les risques liés à des expositions émergentes, les exigences de fonds propres

ont été maintenues à un niveau trop faible, et il semble bien que le crédit bancaire risque

de devenir particulièrement cyclique lorsque les banques sont à la fois sous-capitalisées et

illiquides (BCE, 2009c).

La procyclicité du système n’a pas été convenablement traitée dans le processus de

contrôle, en dépit des mesures de sauvegarde suggérées par le Comité de Bâle en vue

d’atténuer les conséquences cycliques de l’accord de Bâle II. Ces propositions prenaient en

compte les horizons de long terme dans l’estimation des probabilités de défaillance,

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010158

Page 161: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

introduisaient des estimations de la défaillance pour un niveau donné de pertes ainsi que

le recalibrage des fonctions de risque. Les autorités de contrôle pouvaient aussi imposer

des normes de fonds propre plus strictes, sur la base d’indicateurs de tension prenant pour

hypothèse une augmentation du risque inhérent aux portefeuilles de crédit. Un examen

visant à évaluer l’impact de Bâle II sur la nature cyclique des fonds propres a aussi été mis

en place. Toutefois, le processus de contrôle est resté guidé par une vision de la situation à

un moment précis plutôt qu’à l’échelle de tout le cycle.

Pour atténuer le caractère procyclique du dispositif, l’accord de Bâle III prévoit

plusieurs modifications de la réglementation :

● Un ratio de levier devant servir de premier butoir contre des augmentations excessives

du total des actifs durant les phases d’expansion.

● Des volants de fonds propres de conservation visant à accroître la capacité de résistance

tout au long du cycle en favorisant une reconstitution plus énergique du capital durant

la reprise et sa protection dans une phase de récession.

● Des changements de méthode de calcul de la probabilité de défaillance afin d’atténuer le

caractère excessivement cyclique des exigences minimums de fonds propres reposant

sur des notations internes.

● Un accroissement du rôle du provisionnement prospectif afin de lier les provisions aux

pertes attendues durant une phase de récession, pertes qui peuvent être considérables

après une forte croissance du crédit durant une phase d’expansion (encadré 4.5). Ce rôle

doit être soutenu par un changement des normes comptables ajustant les principes

d’image fidèle à la réalité fortement cyclique de l’activité bancaire. Il importe également

que les régimes fiscaux ne pénalisent pas une augmentation des provisions traduisant

une approche prudentielle des pertes.

L’introduction de volants de fonds propres contracycliques supplémentaires devrait

protéger les banques contre les risques inhérents à une croissance excessive du crédit. L’un

des grands points faibles du dispositif de Bâle II aura été l’absence de lien avec

l’environnement macrofinancier dans lequel travaillent les banques. Alors que plusieurs

observateurs ont souligné les risques inhérents à des taux de croissance excessifs des

crédits, par exemple à la faveur de l’expansion de l’immobilier, les exigences de fonds

propres n’ont pas été à la hauteur de ces risques. L’approche uniquement fondée sur le

pouvoir discrétionnaire des autorités de contrôle s’est avérée largement inefficace.

L’accord de Bâle III sur les volants de fonds propres contracycliques témoigne désormais

d’une autre approche reposant sur une règle déterminée au niveau central avec des

implications flexibles. L’objectif premier du nouveau dispositif est d’amener les différents

établissements et systèmes bancaires à accumuler des fonds propres durant les périodes

de forte expansion du crédit, de façon à rester solvables et à pouvoir continuer de

distribuer des crédits à l’économie durant une récession ultérieure. Cela étant, ce volant de

fonds propres permet aussi de s’opposer à des cycles excessifs du crédit en relevant le coût

du capital par l’imposition d’exigences supplémentaires de fonds propres. Aux termes de

l’accord de Bâle III, des volants de fonds propres contracycliques compris entre 0 et 2.5 %

du capital constitué par des actions ordinaires ou d’autres fonds propres permettant

d’absorber intégralement les pertes seront mis en œuvre en fonction des contextes

nationaux.

La proposition de volants de fonds propres contracycliques lie les exigences de fonds

propres aux écarts par rapport aux tendances de long terme des ratios crédit/PIB dans les

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 159

Page 162: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Encadré 4.5. La politique macroprudentielle en Espagne

La Banque d’Espagne, qui assure aussi les fonctions d’autorité de surveillance financière,a fait appel à la politique macroprudentielle pour remédier à l’accumulation de risquesfinanciers durant la phase ascendante ayant précédé la crise actuelle. Cette politique avaitdeux objectifs : maîtriser la croissance du crédit et protéger les banques espagnoles defutures pertes, en tirant des leçons des crises bancaires qu’avait connues l’Espagne à la findes années 70. Un système de provisionnement dynamique (ou statistique) a été introduiten juillet 2000 à titre de principal instrument de réalisation de ces objectifs. Dans le cadrede ce dispositif, le total des provisions est égal à la somme de provisions spécifiques et deprovisions génériques. Les provisions spécifiques, calculées selon les normes comptablesIFRS, reflètent le risque inhérent au portefeuille sur la base des pertes courantes. Cetteméthode a tendance à être fortement procyclique. Comme les ratios de pertes sur prêts onttendance à être limités dans des périodes fastes, les provisions constituées s’avèrentsouvent insuffisantes ex post et les provisions augmentent très rapidement en phase derécession. La tolérance dont font preuve les banques et autorités de contrôle dans laconstatation des créances irrécouvrables est de nature à aggraver ce caractère procycliquedu système. La composante générique du dispositif en Espagne a été conçue pourcontrebalancer ces effets en alignant le ratio des provisions totales au crédit avec les pertesattendues à long terme et en maintenant ainsi une capitalisation bancaire suffisante pourempêcher une pénurie de crédit durant une phase de récession.

Réunissant les deux types de provisions, la formule du provisionnement dynamiqueprésente effectivement deux composantes, la première étant liée à l’encours de crédit,assurant ainsi la stabilité du ratio de provisionnement, et la seconde reflétant l’expansiondu crédit, produisant ainsi un effet contracyclique. Les pondérations affectées à ces deuxcomposantes ont été reliées à des estimations des risques sur l’ensemble du cycle,obtenues à l’aide de modèles internes ou d’un modèle de référence fourni par la banquecentrale. La formule de base est la suivante :

Sous sa forme originale, l’introduction du provisionnement dynamique a produit uneffet contracyclique vigoureux, qui a cependant été atténué après la réforme du dispositifen 2004 (graphique 4.12). Certaines banques ont libéré une partie des provisionsaccumulées, tandis que d’autres les ont stabilisées en dépit d’une forte expansioncontinue du crédit. Durant la crise financière, lorsque l’on a assisté à un gonflement desprovisions spécifiques, les réductions des provisions génériques sont venues lisserl’augmentation du ratio de provisionnement total, sans pour autant le stabiliser. Celas’explique notamment par la forte aversion au risque justifiée par la profondeurexceptionnelle de la crise ; toutefois, les provisions existantes ont sans doute étéinsuffisantes également en partie du fait de l’introduction du plafond. En conséquence, laréforme de 2004 témoigne des diff icultés de l ’uti l isation des instrumentsmacroprudentiels avant la crise, parce que leur rôle et leur efficacité étaient contestés nonseulement par les banques mais aussi par les instances comptables internationales et lesautorités budgétaires (Fernandez de Lis et Herrero, 2010). On a ainsi abouti à un systèmepermettant des provisionnements moins cycliques des pertes sur prêt, mais quin’éliminait pas complètement la nature procyclique du dispositif. Le dispositif s’estmontré plus efficace en créant un matelas de protection en période faste qu’endécourageant une croissance rapide du crédit ou une augmentation du prix des logements.

total provisionst = spécifiquet + génériquet = spécifiquet + Ct + – Ct = Ct + Ct spécifiquet

Ct

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010160

Page 163: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

différents pays. Comme toute règle simple a ses limites, les autorités sont censées user de

leur faculté d’appréciation dans la fixation du volant de fonds propres pour leur juridiction,

mais l’orientation donnée par le ratio crédits/PIB servira de point de référence commun. Ce

volant de fonds propres n’est pas symétrique et il est censé rester nul la plupart du temps.

Seules des manifestations de croissance excessive du crédit déclencheront des décisions

d’application d’exigences supplémentaires de fonds propres et les banques auront 12 mois

pour respecter ces exigences. Dans les situations inverses, des réductions des volants de

fonds propres prendront immédiatement effet pour réduire le risque de pénurie de crédit.

Le volant de fonds propres contracycliques fonctionne selon le principe de la réciprocité

juridictionnelle. Même si les majorations des exigences de fonds propres au titre des

risques futurs applicables aux contreparties/emprunteurs dans chaque juridiction sont

décidées par les autorités compétentes, elles s’appliquent à l’ensemble des banques

créancières indépendamment de leur pays de résidence. De la sorte, le dispositif

uniformise les règles du jeu pour les banques de différents pays et, surtout, fait en sorte

que les exigences de fonds propres ne soient pas contournées par des opérations

transnationales de prêt. Toutefois, il faudra renforcer les contrôles pour empêcher d’autres

formes de contournement, notamment des crédits consentis par des filiales étrangères

non financières ou par le biais d’un développement des éléments hors bilan. Le fait de lier

les volants de fonds propres contracycliques au lieu où sont constitués les nantissements

peut être utile pour prévenir les contournements de la réglementation.

Lorsqu’elles seront mises en œuvre, les propositions de Bâle III pourraient être

complétées par d’autres instruments contracycliques dans le cadre du deuxième pilier du

processus de contrôle. Premièrement, les exigences de fonds propres pourraient être liées

aux taux de croissance du crédit dans des secteurs particuliers comme le logement et la

construction. Deuxièmement, des normes minimums relatives aux quotités de prêt et au

taux d’endettement pourraient être utilisées car elles se sont avérées efficaces pour

remédier à des cycles du crédit excessifs dans plusieurs pays (CSFM, 2010). Troisièmement,

Encadré 4.5. La politique macroprudentielle en Espagne (suite)

Graphique 4.12. Provisions pour pertes sur prêts en EspagneRapport des provisions sur les prêts au secteur privé

Source : Banque d’Espagne.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364888

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Page 164: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

le renforcement de la vigilance, l’examen par les pairs et la mise en œuvre déterminée du

contrôle demeurent essentiels si l’on veut limiter la procyclicité des secteurs bancaires à

l’avenir.

Le Comité européen du risque systémique

Le succès d’une politique macroprudentielle suppose l’existence d’un dispositif

institutionnel efficace pour sa mise en œuvre. Avant la crise, on ne savait pas quelle

institution, dans le dispositif de contrôle existant, était chargée de surveiller et d’atténuer

les risques systémiques dans le système financier européen intégré. La BCE ne jouait qu’un

rôle périphérique dans la surveillance financière (Hoeller et Rae, 2007). Elle ne disposait pas

d’un accès privilégié aux données de contrôle et, même si elle procédait à une surveillance

régulière de la stabilité financière dans la zone euro, il existait un décalage considérable

entre l’identification des risques systémiques et la possibilité d’une réaction des autorités.

La sensibilité croissante à la montée des risques avant la crise n’a pas permis d’influencer

les comportements des intervenants sur les marchés ni de contenir ces risques (BCE,

2010c). La crise et la prise de conscience du problème ont abouti à la création du Comité

européen du risque systémique (CERS), qui travaille en tandem avec les autorités de

contrôle européennes, notamment l’Autorité bancaire européenne (ABE), au sein du

nouveau Système européen de surveillance financière. Dans le cadre du nouveau dispositif

de contrôle, le CERS procédera à des évaluations des risques systémiques, publiera des

alertes assorties d’un code de couleurs, adressera à l’UE et aux autorités nationales des

recommandations avec des calendriers spécifiés pour une réaction pertinente des

autorités, y compris par des initiatives législatives, et suivra la mise en œuvre de ces

recommandations (graphique 4.13). Les autorités de contrôle et les banques centrales

nationales devraient aussi renforcer sensiblement leur contrôle macroprudentiel au

niveau national.

Le CERS sera un organisme dépourvu de la personnalité morale et dont les

compétences ne seront pas définies de façon très précise. L’évolution de sa pratique et la

réputation qu’il parviendra à acquérir seront déterminantes pour son efficacité. Le conseil

d’administration du CERS se composera du président de la BCE (qui assurera la présidence,

au moins pendant les cinq premières années de fonctionnement) et du vice-président de

la BCE, des gouverneurs de toutes banques centrales des pays de l’UE, d’un membre de la

Commission européenne, des présidents de chacune des trois autorités européennes de

surveillance, du président du Comité consultatif technique et du président et de deux vice-

présidents du Comité consultatif scientifique, tous disposant d’un droit de vote, tandis que

les représentants des autorités nationales de surveillance et le président du Comité

économique et financier en seront membres sans droit de vote. La BCE assurera le

secrétariat et le soutien analytique, logistique, administratif et statistique, et s’appuiera en

outre sur les avis des banques centrales nationales et des autorités nationales de

surveillance. En principe, les décisions sur les mises en garde et les recommandations

seront prises à la majorité simple, mais il est indispensable de mettre en place un

processus de décision interne efficace pour éviter les blocages et les retards dus à la taille

et à la composition complexe de son conseil d’administration. Le CERS jouera aussi un rôle

consultatif dans la déclaration des situations d’urgence financière. Pour être efficace, le

CERS doit disposer d’un accès complet aux informations sur les activités de surveillance et

être doté de ressources suffisantes pour construire et affiner en permanence l’ensemble

complet de modèles requis pour déterminer les différents aspects des risques

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010162

Page 165: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

systémiques. De même, les nouvelles Autorités européennes de surveillance devront aussi

avoir accès aux données pertinentes produites par le CERS, et il faudra donc mettre en

place de solides réseaux d’information et de coordination.

Le CERS ne dispose pas de pouvoirs contraignants, et l’efficacité de la procédure

« respecter les règles ou se justifier » dépend de façon cruciale de la volonté politique

d’agir. Le Conseil ECOFIN devrait aider à faire appliquer les recommandations du CERS en

exerçant des pressions sur les pays récalcitrants. Il est très important que le CERS se voit

accorder une indépendance suffisante, que son mandat soit clairement défini et qu’il

intervienne fermement pour parer aux oppositions à ses mises en garde et

recommandations qui risquent d’être fortement impopulaires dans les capitales

nationales et dans les sièges des établissements bancaires. On peut cependant craindre

que les objectifs du CERS ne soient trop ambitieux et ne contribuent ainsi à entretenir un

sentiment de fausse sécurité chez les autorités européennes, ce qui pourrait porter

préjudice à la crédibilité de cette institution nouvelle. Cela étant, le CERS doit chercher à

interpréter son mandat dans un sens large et à s’intéresser à des questions concernant non

seulement la résilience du système bancaire et des autres secteurs financiers, mais aussi

la stabilité macroéconomique, car les instruments macroprudentiels offrent une meilleure

solution que la politique monétaire pour remédier à certaines tensions macroéconomiques

et financières (chapitre 1).

Le CERS et l’ABE devraient coopérer étroitement pour faire en sorte que politiques

microprudentielle et macroprudentielle s’épaulent mutuellement et que les règles,

instruments et politiques de l’Europe permettent de traiter les risques émergents. Cela

passe par un échange régulier d’informations et un dialogue permanent dans le cadre

desquels le CERS publiera des mises en garde et des recommandations lorsque des règles

Graphique 4.13. Système européen de surveillance financière

1. Le Comité consultatif scientifique et le Comité consultatif technique seront également représentés, avec droits devote, au conseil d’administration du CERS, tandis que les autorités nationales de surveillance et le Comitééconomique et financier seront représentés sans droits de vote.

2. Autorité bancaire européenne, Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles et Autoritéeuropéenne des marchés financiers.

Source : BCE (2010), Financial Integration in Europe, avril.

Surveillancemacro-prudentielle

Autorités européennes de surveillance

AEAPP AEMFABE

Informations microprudentielles Informations sur le risque systémique

Autorités nationalesde surveillance des

assurances

Autorités nationalesde contrôle

bancaire

Autorités nationalesde surveillance

financière

Comité européendu risque systémique1

...

Présidents de l’ABEde l’AEAPP et de l’AEMF2

BCEBanques centrales de l’UE

Commissioneuropéenne

Alertes précocessur les risques

+Recommandations

d’action

Surveillancemicro-prudentielle

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 163

Page 166: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

simples ne permettent pas de répondre à de nouveaux problèmes et que le processus de

contrôle n’est pas efficace. Les deux institutions devraient calibrer conjointement la

concentration, l’importance systémique et la réglementation contracyclique, en tenant

compte des risques systémiques spécifiques aux pays et aux institutions. L’ABE élaborera

des normes techniques pour guider les décisions nationales et assurer la réciprocité

juridictionnelle dans l’utilisation des limites en matière de quotités de prêt/de taux

d’endettement et d’outils de surveillance similaires.

La mise en œuvre de la politique macroprudentielle, y compris ses volets

contracyclique et anticontagion, doit correspondre à une démarche discrétionnaire

encadrée qui conjugue des grandes règles et l’exercice d’une certaine faculté

d’appréciation de la part des autorités de contrôle. Même si l’existence de règles

contraignantes maximise la crédibilité et la prévisibilité du dispositif de contrôle, il est

extrêmement difficile de mettre au point des règles qui permettent de parer à toutes les

éventualités. Des règles contraignantes risquent aussi d’être brutales et donc de réduire les

incitations à améliorer les dispositifs de gestion des risques des banques (Borio, 2003). Il est

en outre vraisemblable que les différents cycles du crédit qui se succéderont s’avéreront

différents, de sorte que des règles trop spécifiques ou trop strictes ne permettent pas de

prendre en compte leur caractère changeant. Cela étant, les décisions purement

discrétionnaires en matière de contrôle, que ce soit au niveau des différentes banques ou

au niveau du système financier, risquent d’apparaître arbitraires et guidées par les

circonstances, et d’induire des distorsions des règles du jeu. De telles décisions risquent

aussi d’être plus sensibles aux pressions politiques, avec le danger que les autorités

n’attendent trop longtemps avant de prendre des mesures impopulaires en réaction à des

mouvements cycliques. L’exercice d’un pouvoir discrétionnaire encadré constitue donc

l’approche la plus prometteuse pour favoriser le caractère contracyclique du dispositif et

minimiser les risques de contagion, les instruments quantitatifs permettant de penser que

les autorités agiront dans des circonstances bien définies, mais avec une faculté

d’appréciation introduisant une certaine souplesse dans le dispositif. Un suivi approprié et

un examen par les pairs de l’application des orientations convenues contribueront aussi à

garantir des résultats harmonisés en matière de surveillance.

L’importance des déséquilibres économiques et financiers nationaux et de la

contagion tend à montrer que des dispositifs macroprudentiels nationaux doivent être mis

en place parallèlement au CERS. Alors que des déséquilibres ne concernant que des petits

pays peuvent susciter des risques à l’échelle de la zone pour le système financier, il peut y

avoir des cas dans lesquels ces problèmes sont plus locaux et apparaissent plus

rapidement aux autorités nationales. En outre, comme on l’a vu au chapitre 2, la politique

macroprudentielle n’est que l’un des grands instruments permettant de remédier aux

déséquilibres nationaux, en particulier dans une union monétaire. Il convient de disposer

d’un ensemble d’institutions nationales pour évaluer la situation et prendre des initiatives.

De nombreux pays ont déjà confié explicitement des tâches de stabilité financière à des

autorités nationales désignées, très souvent établies dans le giron de la banque centrale

nationale. Des organes de l’UE comme le CERS et les autorités européennes de surveillance

doivent soutenir les politiques nationales, le cas échéant en veillant à ce que toutes les

institutions financières de l’UE respectent les mesures prises à l’égard d’activités se

déroulant dans une juridiction particulière.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010164

Page 167: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Il faut un système efficace de surveillance transnationale

La conjugaison sans précédent d’une intégration de marchés de capitaux et d’un

contrôle organisé à l’échelle nationale (encadré 4.6) a gravement nui à l’efficacité du

contrôle au sein de l’Union européenne. L’intégration est synonyme d’accroissement des

risques de contagion et l’évaluation du risque de contrepartie s’en trouve compliquée. De

grands groupes transnationaux peuvent revêtir une importance systémique dans plusieurs

pays, alors même que les autorités de contrôle nationales ont tendance à se concentrer sur

des risques locaux. Des conflits risquent d’apparaître entre autorités de contrôle du pays

d’origine et du pays d’accueil. Appliquer le même régime à tous les intervenants suppose

de renforcer l’harmonisation transnationale des règles et des pratiques de contrôle. La

multiplicité et l’absence d’harmonisation de ces règles et pratiques sont également

synonymes de coûts de discipline élevés pour les établissements bancaires

transnationaux.

Encadré 4.6. L’organisation du contrôle bancaire avant la crise et les réformes

En 1993, la deuxième Directive bancaire a réglé les problèmes de contrôle transnationalen Europe en accordant un rôle prépondérant à l’autorité de contrôle du pays d’origine. Lesautorités de contrôle des pays d’origine sont responsables de l’agrément, de laréglementation et du contrôle des succursales transnationales, bien que les pays d’accueilse voient accorder le rôle de protéger les déposants dans des situations d’urgence etconservent le contrôle de la liquidité des succursales. Les autorités du pays d’accueil sontresponsables des filiales créées en droit local et une tentative de conserver le contrôle desinstitutions actives sur le plan national a contribué à faire des filiales la forme dominanted’établissement à l’étranger en Europe. Le rôle des collèges de contrôleurs a étéprogressivement accru depuis que la Directive sur l’adéquation des fonds propres a imposéleur création comme structures devant permettre de parvenir à un accord sur des tâchesessentielles de contrôle, notamment la surveillance permanente ainsi que la prévention etla gestion des crises.

Le processus « Lamfalussy » a été mis en place en 2004 pour améliorer la coordinationinstitutionnelle de la surveillance des groupes internationaux des secteurs de la banque etde l’assurance. Au premier niveau, la Commission, le Conseil européen et le Parlementeuropéen établissent des directives. Au deuxième niveau, des comités techniques de miseen œuvre de ces directives sont créés. Au troisième niveau, trois comités européens decontrôleurs sont chargés de coordonner et de conseiller les autorités de contrôlenationales dans le secteur bancaire (le Comité européen des contrôleurs bancaires – CECB),dans le secteur des valeurs mobilières (le Comité européen des régulateurs des marchés devaleurs mobilières – CERVM) et dans celui de l’assurance (le Comité européen descontrôleurs des assurances et des pensions professionnelles – CECAPP). Au quatrièmeniveau, la Commission européenne est chargée de surveiller la transposition des directivesen droit national.

Au lendemain de la crise financière, le rapport de Larosière a jugé inefficaces les accords« embryonnaires » élaborés par les comités de troisième niveau, évoquant un manque defranchise, de confiance mutuelle et de coopération entre autorités de contrôle nationales.Une nouvelle législation de l’UE doit renforcer le rôle de ces institutions, en leur conférantun statut d’autorité, notamment l’Autorité bancaire européenne (ABE). Afin de garantir lacohérence transversale des différentes activités, un comité conjoint coordonnera lesfonctions des trois nouvelles autorités de surveillance en ce qui concerne les conglomérats

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 165

Page 168: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

L’Autorité bancaire européenne doit être dotée de pouvoirs et de ressources suffisantes

L’Autorité bancaire européenne doit assurer une grande cohérence des règles et

pratiques de contrôle. Des disparités transnationales considérables persistent en effet

dans les domaines juridiques et réglementaires et peuvent se révéler préjudiciables à

l’uniformité des règles dans le secteur bancaire européen. Le pouvoir discrétionnaire des

autorités nationales est en effet préservé par des spécificités de la transposition des

directives en droit national. On en compte près d’une centaine pour la Directive sur

l’adéquation des fonds propres (Kager, 2006). La pratique consistant à ajouter des

exigences nationales supplémentaires à ce que prescrivent les directives de l’UE (la

« surenchère réglementaire ») vient aggraver les problèmes. De nombreuses règles

techniques sont ainsi déterminées au niveau national. Cela crée des risques d’arbitrages et

de concurrence entre réglementations. Les autorités de contrôle du pays d’origine des

divers groupes transnationaux peuvent avoir des points de vue différents sur les grands

enjeux de la surveillance bancaire, ce qui aboutit à des résultats différents s’agissant de

groupes directement concurrents. L’amélioration de la surveillance suppose donc :

● Une harmonisation passant par l’élimination des options et de la surenchère

réglementaire. L’ABE publiera des normes techniques contraignantes directement

applicables. Il faut que le champ d’application de ses prérogatives couvre un ensemble

suffisamment vaste de règles de façon à se rapprocher d’une réglementation unique. À

l’avenir, les nouveaux problèmes doivent être immédiatement réglés au niveau de l’UE

de façon à prévenir l’introduction de nouvelles disparités. Les nouveaux règlements

doivent être plus précis et laisser moins de marge d’appréciation aux autorités de

contrôle national.

● Des procédures de décision solides et transparentes sont nécessaires au niveau de l’ABE

pour pouvoir avancer rapidement vers une réglementation unique. Le vote à la majorité

qualifiée sera utilisé pour les décisions sur les normes techniques et les lignes

directrices. Toutes les autres décisions seront prises à la majorité simple. Le processus

par lequel la Commission européenne doit approuver les normes techniques obligatoires

Encadré 4.6. L’organisation du contrôle bancaire avant la crise et les réformes (suite)

financiers et d’autres aspects transversaux. L’ABE se verra confier plusieurs missions envue de régler un certain nombre de problèmes essentiels du contrôle transnational :

● Proposer des normes techniques.

● Régler les désaccords entre autorités de contrôle nationales, lorsque la législation leurimpose de coopérer ou de s’entendre.

● Veiller à l’application cohérente des règles techniques communautaires (y compris aumoyen d’examens par les pairs).

● Assurer un rôle de coordination dans des situations d’urgence.

Une autorité de surveillance intégrée unique à l’échelle de l’UE pour les grandes banquestransnationales pourrait constituer le dispositif de surveillance idéal dans le long terme.Toutefois, les complexités et les problèmes inhérents à ce modèle, notamment lesdifficultés que pose le partage transnational des charges, sont importants, et, au bout detrois ans au maximum, il est prévu de réexaminer le nouveau régime de surveillance pourdéterminer si de nouvelles mesures s’imposent vers une intégration plus poussée.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010166

Page 169: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

proposées par l’ABE (et qui prévoit dans certains cas que les pays et le Parlement

européen peuvent soulever des objections) devrait être appliqué de façon à éviter des

retards excessifs.

● L’ABE sera habilitée à enquêter sur toute application présumée incorrecte ou

insuffisante du droit européen par les autorités de surveillance nationales, l’enquête

étant suivie d’une recommandation. En cas de non-respect, la Commission européenne

aurait le pouvoir de formuler l’avis formel exigeant de prendre les mesures nécessaires

et, en dernier lieu et dans des circonstances exceptionnelles, l’ABE serait habilitée à

adopter des décisions s’adressant directement aux établissements financiers.

L’ABE aura des pouvoirs de médiation contraignants pour régler les éventuelles

divergences d’intérêts des autorités de contrôle des pays d’origine et d’accueil. Lorsqu’une

institution nationale se développe à l’étranger au moyen de succursales, l’autorité de

contrôle du pays d’origine peut avoir tendance à sous-estimer les risques correspondants

pour les pays d’accueil, comme l’a spectaculairement illustré l’expansion des banques

islandaises. Ces risques sont liés aux problèmes d’agence qui se posent lorsque le pays

d’origine assure le contrôle de succursales et que le pays d’accueil est chargé de la stabilité

du système, le tout dans un contexte d’asymétrie de l’information (Hoeller et Rae, 2007).

Pourtant, les pays d’accueil ont peu de moyens de contester les décisions et les initiatives

des autorités de contrôle du pays d’origine. En particulier, le processus d’examen par les

pairs mis au point dans le cadre des comités de troisième niveau s’est avéré inefficace

(Groupe de Larosière, 2009). De même, les autorités de contrôle du pays d’origine

manquaient de moyens efficaces pour contester les décisions des autorités de contrôle du

pays d’accueil, notamment en vue de protéger la stabilité des groupes bancaires

transnationaux. En particulier, le Comité européen des contrôleurs bancaires ne disposait

pas de pouvoirs suffisants pour intervenir dans le règlement de différends. Ces pouvoirs de

règlement de différends seront dévolus à l’ABE. À la suite d’une phase de conciliation,

l’ABE serait habilitée à prendre des décisions contraignantes et à exiger de l’autorité

nationale de surveillance qu’elle prenne des mesures spécifiques et, en cas de non-respect

de ces dispositions, à adopter des décisions s’adressant aux établissements financiers

concernés. Les institutions contrôlées devraient avoir un droit d’appel direct auprès de

l’ABE et il faudrait mettre en place un processus d’examen par les pairs beaucoup plus

solide pour assurer la cohérence des décisions de contrôle.

La principale mission de l’ABE sera de renforcer la surveillance et la coordination des

collèges et de formuler des lignes directrices précises quant à leur fonctionnement. Même

si ces collèges ont commencé à contribuer positivement à l’amélioration de la coopération

au niveau de l’échange d’informations entre autorités de contrôle nationales, leur rôle

avant la crise est resté limité. Dans le cas des grandes banques transnationales, ces

collèges ne sont obligatoires que depuis décembre 2009, un collège de contrôleurs devrait

être mis en place pour chaque groupe bancaire transnational d’ici la fin de 2010. Il sera

difficile d’assurer la cohérence entre collèges, étant donné leur grand nombre : on en

compte actuellement plus de 120 (Groupe de Larosière, 2009). Pour répondre à ces défis :

● L’ABE aura le pouvoir de collecter et de partager toutes les informations pertinentes en

collaboration avec les autorités nationales compétentes et avec les collèges nationaux;

de lancer et de coordonner des tests de résistance financière à l’échelle de l’UE; de

promouvoir des activités de surveillance effectives et efficientes; de superviser les

tâches exercées par les autorités compétentes; d’exiger de nouvelles délibérations de la

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 167

Page 170: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

part d’un collège; d’exiger que le collège de contrôle sur base consolidée organise une

réunion du collège ou ajoute un point à l’ordre du jour de cette réunion; d’élaborer des

projets de normes réglementaires et de normes techniques opérationnelles pour assurer

des conditions d’application uniformes concernant les dispositions relatives au

fonctionnement pratique des collèges de contrôle; et de publier des directives et des

recommandations.

● Il convient de prévoir des modalités pratiques pour le bon fonctionnement des collèges

amenés à surveiller des groupes financiers mondiaux et qui comptent parfois plus d’une

centaine de représentants nationaux. Dans la pratique, il serait logique de réunir plus

fréquemment le noyau dur d’un collège, dont les réunions plénières seraient plus rares.

Un autre problème va consister à organiser les interactions des collèges « européens »

avec les collèges « mondiaux » et d’éviter qu’il existe deux collèges distincts pour une

même banque. Pour assurer le bon fonctionnement de ce système, l’ABE aura besoin de

ressources très substantielles si elle veut peser de façon significative dans les

discussions au sein de ces collèges.

En matière de surveillance, les erreurs peuvent avoir des coûts budgétaires

considérables. De fait, il s’est avéré extrêmement difficile de mettre au point une réforme

plus complète des structures de surveillance en Europe, ce qui reflète le principe selon

lequel la responsabilité de la stabilité financière doit correspondre à l’organisation des

pouvoirs budgétaires (Goodhart, 2004; Goodhart et Schoenmaker, 2006). En l’absence

d’autorités budgétaires européennes, il est donc très difficile de mettre sur pied une

autorité de contrôle puissante au niveau européen. Ce problème s’est reflété dans les

clauses de protection budgétaire qui font que les pouvoirs de l’ABE ne doivent « en aucun

cas empiéter sur les responsabilités budgétaires des États membres ». Pour que l’ABE soit

vraiment efficace, les clauses de sauvegarde budgétaire doivent être limitées aux cas dans

lesquels l’impact sur les obligations budgétaires nationales est direct et sensible. Les

problèmes de répartition des charges constituent un obstacle majeur qui bloque tout

accord dans le sens d’un contrôle direct des grandes banques transnationales par l’ABE.

Compte tenu de ces contraintes, les pouvoirs de l’ABE doivent évoluer de façon progressive,

et un réexamen du nouveau dispositif de surveillance est prévu au bout de trois ans au

maximum afin de déterminer si de nouvelles mesures pour une intégration plus poussée

s’imposent et si une autorité de surveillance unique serait plus indiquée à cet effet.

En Europe, les missions des autorités de contrôle nationales diffèrent

considérablement, aussi bien du point de vue de leur portée que des pouvoirs d’exécution

dont elles disposent. Cela complique la coopération, notamment dans des situations de

tensions financières, et cela amplifie les risques d’arbitrage entre réglementations :

● Il faudrait procéder au renforcement institutionnel des autorités de contrôle de certains

pays. Les institutions tant européennes que nationales doivent avoir des mandats clairs

et une indépendance suffisante pour prendre des décisions politiquement impopulaires

(Rochet, 2008). Plus précisément, des objectifs de compétitivité sectorielle et des objectifs

d’action publique (comme des mesures en matière de logement) ne doivent pas porter

préjudice à la prise de décisions au niveau national.

● L’ABE organisera et conduira périodiquement des examens par les pairs de tout ou partie

des activités des autorités compétentes, afin de renforcer davantage la cohérence des

résultats en matière de surveillance, en instaurant des procédures uniformes et des

approches homogènes dans l’ensemble de l’UE. À cet effet, l’ABE élaborera des méthodes

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010168

Page 171: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

pour garantir l’objectivité des évaluations et des comparaisons entre les autorités

examinées.

● L’ABE jouera un rôle actif dans l’établissement d’une culture européenne commune et

intégrée de la surveillance. Les examens par les pairs évalueront le degré d’adéquation

des ressources et le régime de gouvernance des autorités compétentes. L’ABE

s’emploiera activement à mettre en place des programmes de formation sectoriels et

transversaux, en facilitant les échanges de personnel et en encourageant les autorités

compétentes à recourir plus largement aux programmes de détachement et à d’autres

instruments.

Il faut que l’ABE acquière une forte crédibilité. L’expérience d’institutions de contrôle

faîtières dans d’autres pays de l’OCDE est assez décevante. Aux États-Unis par exemple, le

Federal Financial Institutions Examination Council (FFIEC) n’a pas réussi à acquérir une position

suffisamment solide vis-à-vis des diverses autorités de contrôle. Comme les autorités de

contrôle nationales en Europe sont de grandes institutions ayant une longue tradition,

elles peuvent hésiter à renoncer à certaines de leurs prérogatives au profit d’autorités

européennes. L’ABE doit disposer de ressources suffisantes pour assurer l’harmonisation,

garantir l’efficacité des examens par les pairs et procéder au règlement des différends. Les

propositions actuelles prévoient un effectif relativement restreint (40 agents durant la

première année de fonctionnement, l’effectif devant être porté à 90 d’ici 2014). Bien que

l’ABE ne prenne pas en charge directement le contrôle des établissements, c’est tout de

même très peu par rapport au nombre d’agents chargés du contrôle bancaire travaillant

auprès des autorités nationales (graphique 4.14). Il conviendra que la Commission

européenne vérifie périodiquement si les ressources ainsi affectées sont convenables.

L’inefficacité de l’échange d’informations traduit souvent un manque de confiance

mutuelle lié à des intérêts contradictoires. Plus précisément, l’échange d’informations sur

des problèmes dans une juridiction risque d’aboutir à des mesures immédiates de

cantonnement dans d’autres juridictions. En conséquence, durant la période qui a précédé

la crise financière et les premières phases de cette dernière, les autorités de contrôle

nationales n’étaient pas disposées à parler ouvertement des points faibles de leur secteur

Graphique 4.14. Personnel de contrôle bancaire des autorités nationales2007, équivalent plein-temps1

1. Estimation de l’OCDE pour l’Autriche.

Source : Banque mondiale, Base de données 2007 sur la réglementation et le contrôle bancaires.1 2 http://dx.doi.org/10.1787/888932364907

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Page 172: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

financier. Cela étant, il existe plusieurs autres obstacles à un échange optimal

d’informations :

● Certains régimes juridiques nationaux peuvent compliquer un examen ouvert des

problèmes de contrôle transnational en raison de lois sur le secret commercial ou

bancaire. Il convient de revoir systématiquement ces lois et de les modifier en

conséquence.

● L’échange d’informations est compliqué par l’absence d’harmonisation de la définition

des notions essentielles de contrôle au niveau de l’UE, s’agissant par exemple des prêts

non productifs. Une harmonisation permettrait un véritable dialogue transnational, une

exploitation, une comparaison et une agrégation des données ainsi qu’une analyse du

risque systémique à l’échelle européenne. Cela réduirait en outre les coûts de

communication des informations. Ce processus d’harmonisation s’est engagé sous les

auspices de la Commission.

● L’organisation de la surveillance est très complexe et la multiplicité des circuits de

reddition de comptes dans les différentes autorités de contrôle des pays d’origine et

d’accueil peut aboutir à des décalages de l’information et à une duplication des tâches

dans ce domaine. L’ABE est aujourd’hui tenue de centraliser les informations reçues des

autorités compétentes concernant les établissements ayant des activités dans plusieurs

pays, et de partager ces informations avec les autres autorités compétentes concernées.

La création à l’échelle de l’UE d’une base de données du contrôle bancaire assurerait un

accès transnational quasi automatique aux données de contrôle. Le cas échéant, les

banques pourraient alimenter directement cette base de données.

● L’échange d’informations qualitatives est difficile faute de contacts opérationnels

intenses et fréquents. Le rôle moteur de l’ABE dans l’amélioration du fonctionnement

des collèges de contrôle est essentiel à cet égard.

La suppression des obstacles à la circulation de l’information est essentielle non

seulement pour améliorer le contrôle transnational, mais aussi pour accroître plus

généralement la qualité du contrôle. Par exemple, plusieurs banques dominantes sur leur

marché national n’ont pas d’équivalent dans leur pays, alors qu’il n’est souvent pas

possible de les comparer à des institutions analogues à l’étranger faute de véritables

échanges d’informations. Il est essentiel que les nouvelles instances européennes aient

pleinement accès à l’ensemble des informations nationales en matière de contrôle.

Des arguments solides plaident pour un renforcement de la discipline du marché

grâce à la transparence et la divulgation d’informations en matière de contrôle (troisième

pilier de l’accord de Bâle). Une meilleure divulgation d’informations a en effet été un

élément important de la réaction institutionnelle à la crise bancaire au Japon dans les

années 90, et les pays européens restent en retard par rapport aux tendances observées à

l’échelle mondiale. L’un des grands obstacles réside dans l’absence d’harmonisation des

règles de confidentialité en Europe. Plus fondamentalement, on observe une réticence des

autorités de contrôle nationales à placer les institutions relevant de leur compétence dans

une situation désavantageuse vis-à-vis de la concurrence. L’ABE devra régler ce problème

de coordination. Elle doit vérifier les niveaux de confidentialité dans les différents pays et

proposer un régime uniforme de divulgation d’informations qui serait cohérent avec la

constitution d’une réglementation unique.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010170

Page 173: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

L’intégration de la gestion des crises, facteur de réduction de l’aléa moral

L’expérience de la crise dans la zone euro a montré que les créanciers, y compris les

détenteurs de titres de dette non garantis, ont été protégés contre les pertes par

l’intervention des pouvoirs publics. Bien que la valorisation des actions ait

considérablement reculé, les placements en actions n’ont que rarement connu une

dilution de l’actionnariat. Cela a ajouté au coût budgétaire du règlement des faillites

bancaires, aggravant ainsi les problèmes des finances publiques au prix d’un transfert

substantiel de richesse. Cela a sans doute aussi donné aux institutions financières un

signal selon lequel des plans de sauvetage pourraient leur être proposés lors de crises

futures. L’élimination de cet aléa moral nécessite un dispositif de règlement ordonné et

rapide des faillites bancaires qui permette aux banques de déposer leur bilan sans

déstabiliser le système financier. L’existence d’un tel dispositif produirait un impact

majeur sur le comportement des banques en réduisant les problèmes d’aléa moral : les

actionnaires et les créanciers ne pourraient plus attendre que l’intervention des pouvoirs

publics les exonère de l’obligation de supporter tout le poids d’une faillite bancaire.

La gestion et le règlement des crises sont déjà difficiles au niveau national (on peut

citer par exemple les cas de Northern Rock, IKB ou Hypo Real Estate) mais s’avèrent

particulièrement problématiques dans le cas d’institutions transnationales d’importance

systémique. En cas de crise, il faut prendre des décisions rapides mais efficaces. Les

initiatives doivent être juridiquement solides, sans nécessiter des interventions judiciaires

chronophages. Les autorités compétentes doivent avoir les pouvoirs et les moyens

appropriés et il est important qu’elles soient dotées d’une chaîne de responsabilités claire.

Pourtant, plusieurs problèmes de contrôle transnational sont amplifiés dans des situations

de tensions financières, ce qui aboutit parfois à l’effondrement de la coopération. Il est

donc important que l’organisation du contrôle bancaire en Europe soit complétée par un

dispositif intégré de gestion et de règlement des crises, capable de faire face à la faillite de

grandes institutions transnationales complexes.

Dans l’Union européenne, la gestion des crises continue de relever dans une large

mesure de la responsabilité des autorités nationales, ce qui reflète les prérogatives

budgétaires de ces dernières. Toutefois, on lui a de plus en plus adjoint des dispositifs

transnationaux de coordination et d’échange d’informations. La Directive sur l’adéquation

des fonds propres attribue à l’autorité de contrôle consolidée la responsabilité de la

planification et de la coordination des mesures de contrôle dans les situations d’urgence,

et oblige l’autorité de contrôle principale à alerter dans les meilleurs délais l’ensemble de

ses homologues et des banques centrales concernées lorsqu’une urgence se présente de

nature à remettre en cause la stabilité du système financier dans l’un quelconque des pays

de l’UE. La coopération entre autorités de l’UE dans le domaine de la gestion des crises a été

améliorée par les lignes directrices du Comité européen des contrôleurs bancaires et par

des conventions volontaires sous forme de mémorandums d’accord non contraignants

entre diverses autorités. De telles conventions, qui prévoient des procédures de

coopération et d’échange d’informations en cas de crise, ont été adoptées au niveau

régional et bilatéral vis-à-vis de différentes institutions. En outre, une série de

mémorandums d’accord multilatéraux définissant le cadre général de la gestion des crises

ont été conclues entre toutes les parties concernées en matière de contrôle en 2003,

2005 et 2008.

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : ZONE EURO 2010 © OCDE 2010 171

Page 174: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Le dispositif existant de gestion des crises doit être renforcé pour relever les défis de la

crise bancaire transnationale et assurer la coopération voulue en matière de contrôle. Bien

que le scénario noir d’une faillite désordonnée d’institutions d’importance systémique ait

été évité, les coûts budgétaires de cette inefficacité se sont révélés très substantiels. Divers

exemples de difficultés de gestion de la crise (Fortis, les banques islandaises) ont

également montré qu’une coopération transnationale étroite est utile mais peut-être pas

toujours suffisante, et que des accords ex ante sur la répartition des charges se seraient

avérés utiles. On a souvent réagi au coup par coup à la crise, avec un repli des mesures de

contrôle sur les juridictions nationales et des reculs de l’intégration des marchés de

capitaux (encadré 4.7). Dans plusieurs cas (comme celui d’ING), les autorités du pays

d’origine sont intervenues seules au prix de coûts budgétaires très élevés, le repli des

institutions sur leur marché d’origine étant souvent implicitement ou explicitement

attendu (Fonteyne et al., 2010).

Le mémorandum d’accord, signé par les autorités de contrôle, les ministères des

Finances et des banques centrales en juin 2008, a marqué la reconnaissance croissante des

faiblesses du dispositif existant (Eisenbeis et Kaufman, 2006). Ce document énonce des

principes communs de gestion des crises, y compris sur les conditions d’utilisation de

fonds publics et sur la possibilité d’une répartition ultérieure des charges, une grille

d’analyse commune et des lignes directrices pratiques pour la gestion des crises. La

constitution de groupes de stabilité transfrontalière (Cross-Border Stability Groups – CBSGs)

est prévue pour tous les grands groupes financiers transnationaux, et ils doivent être dotés

Encadré 4.7. Vie mondiale et mort locale des grands établissements financiers : le cas de Fortis

Fortis était un grand groupe financier transnational européen affichant un total de sesactifs de l’ordre de 800 milliards EUR avant la crise. Issu de la fusion de sociétés belges etnéerlandaises d’assurance, ce groupe a racheté la Banque BGL du Luxembourg. À la suitedu rachat par Fortis de certaines activités d’ABN AMRO en 2007, le groupe a voulu leverplus de capitaux. Des doutes ont alors commencé à s’exprimer sur sa solvabilité en 2008,en pleine crise bancaire internationale, et les investisseurs ont rapidement perduconfiance dans sa viabilité.

Malgré la longue tradition de coopération des autorités de tutelle financière etl’harmonisation considérable des dispositifs juridiques des pays du Benelux, le processusde règlement de la faillite du groupe s’est déroulé en fonction de principes nationaux et aété compliqué, long et délicat (Lipsky, 2010). L’accord initial visant à sauver le groupe dansson ensemble n’a pas fonctionné, car il s’est révélé inefficace pour empêcher les sorties deliquidité de la banque, tandis qu’il s’est avéré difficile de trouver un dispositif acceptablede répartition des pertes. Les établissements néerlandais de Fortis ont finalement étérachetés par le gouvernement des Pays-Bas. Le gouvernement belge a injecté des liquiditésconsidérables dans l’entité résiduelle, dont 75 % du capital ont été cédés à BNP Paribas, lereste étant conservé par l’État belge. Le Luxembourg détient désormais un tiers du capitalde BGL, le solde appartenant à BNP Paribas. Ce résultat a été probablement plus coûteuxqu’une solution conjointe à l’échelle du groupe; il a marqué un revers pour l’intégrationfinancière dans les pays du Benelux et laissé un goût amer aux autorités de contrôlenationales (Fonteyne et al., 2010).

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

d’instruments communs pour permettre une coordination efficace entre les autorités

nationales impliquées dans une crise. Parmi ces instruments, on retiendra des critères

opérationnels et des principes ex ante en vue d’une répartition ex post des charges. Des

plans de redressement et de règlement des faillites des institutions contrôlées peuvent

être élaborés et des exercices réguliers de simulation de la gestion d’une crise peuvent être

réalisés. Toutefois, au moment de la conclusion de l’accord, l’idée de s’entendre sur des

dispositions précises de répartition ex ante des charges a été rejetée, par crainte de l’aléa

moral, d’un manque de souplesse du dispositif et d’un empiètement sur la souveraineté

nationale.

L’établissement du Système européen de surveillance financière a été une étape

importante vers une gestion plus efficace des crises transnationales. Le pouvoir de

déterminer l’existence d’une situation d’urgence est désormais conféré au Conseil, suite à

une requête de la Commission européenne, de l’une des Autorités européennes de

surveillance ou du CERS. Pendant la situation d’urgence, l’ABE s’emploiera activement à

faciliter et, si nécessaire, à coordonner les actions entreprises par les autorités nationales

de surveillance compétentes, et à assurer un échange harmonieux d’informations. Elle

sera habilitée à demander aux autorités nationales de surveillance de prendre des mesures

spécifiques pour remédier à une situation d’urgence. Elle pourra adopter une décision

individuelle à l’égard d’un établissement financier, lui enjoignant de prendre les

dispositions nécessaires pour s’acquitter de ses obligations en vertu de cette législation.

L’ABE pourra temporairement interdire ou restreindre certaines activités financières qui

menacent le fonctionnement ordonné et l’intégrité des marchés de capitaux ou la stabilité

d’une partie ou de l’ensemble du système financier. Toutefois, aucune décision adoptée par

l’ABE ne peut empiéter de quelque façon sur les prérogatives budgétaires des pays, ce qui

nuit à son efficacité dans une situation d’urgence.

Afin de renforcer le dispositif de gestion des crises au sein de l’UE, la Commission

européenne a publié en octobre 2010 une communication, débouchant sur une nouvelle

législation sur la prévention, la gestion et le règlement des crises (Commission

européenne, 2010). Ce dispositif devrait prévoir des mesures d’intervention immédiate, de

règlement des crises et d’insolvabilité et apporter une panoplie harmonisée d’instruments

pour chacune des phases, le tout s’appuyant sur les modifications juridiques et les

modalités de décision nécessaires. Les rôles et prérogatives des autorités nationales, des

collèges des contrôleurs et des groupes de stabilité transfrontalière, de l’ABE et du CERS

devraient y être précisés de même que le seuil de déclenchement des interventions et des

accords de répartition des charges :

● Dans la phase d’intervention précoce déclenchée par une infraction ou la possibilité

d’une infraction aux exigences prudentielles, les autorités de surveillance devraient

prendre des mesures ayant pour principal objectif de restaurer la stabilité et la solidité

financières d’un établissement en cas de problèmes. Des modifications correspondantes

de la législation nationale sont nécessaires pour que les autorités nationales disposent

de pouvoirs analogues de demander par exemple la levée de capitaux privés, la

restructuration des activités ou la cessation de certaines pratiques ou, si ces mesures

s’avèrent inadéquates, d’engager le processus de résolution.

● Le règlement d’une crise implique des mesures limitant l’impact d’une faillite bancaire

sur le reste du système financier. Il peut déboucher soit sur un retour à la santé

financière de l’institution après lui avoir imposé une profonde restructuration, soit sur

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Page 176: Etudes economiques de l'OCDE : Zone euro 2010

4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

une liquidation. Cela suppose que les autorités des différents pays soient dotées de

pouvoirs étendus mais harmonisés de prendre des décisions, y compris de céder des

actifs ou de transférer des passifs, de séparer les activités viables et les structures de

cantonnement, d’imposer des marges de sécurité aux créanciers non garantis, de forcer

la conversion de créances en actions et de répartir les pertes entre les actionnaires. Les

autorités doivent être habilitées à fournir des crédits relais, à nationaliser un

établissement, à recapitaliser des banques et à conclure des accords de fusion ou

d’acquisition.

● Les modifications possibles du régime des faillites doivent d’abord s’attacher à améliorer

les dispositifs nationaux dans ce domaine, mais aussi à éliminer les principales

disparités des lois nationales sur l’insolvabilité qui peuvent susciter des conflits. Ces

règles doivent permettre la transférabilité des actifs et une harmonisation des critères

d’engagement des procédures de faillite. À plus long terme, on pourrait envisager de

créer un régime de faillite spécial pour les banques transnationales.

L’un des grands problèmes de conception d’un dispositif de gestion de crise concerne

la répartition des charges entre contribuables de différents pays. Les décisions ex post qui

caractérisent le système actuel en Europe peuvent aboutir à un sous-provisionnement et

différer la recapitalisation des institutions car les pays ont intérêt à sous-estimer leur part

du problème de façon à ne supporter qu’une faible proportion des coûts (Freixas, 2003). De

ce fait, le pays d’origine est amené à décider s’il doit supporter lui-même les coûts ou

fermer la banque. D’un côté, les décisions ex ante sur la répartition des charges peuvent

accentuer l’aléa moral (OCDE, 2009). Il peut aussi s’avérer difficile de s’accorder sur de

telles décisions et de les faire respecter : même si l’accord sur le Groupe de stabilité

transfrontalière des pays nordiques et baltes reflète les principes relatifs à la répartition

des charges énoncés par le troisième mémorandum d’accord à l’échelle de l’UE

(encadré 4.8), « ses dispositions ne peuvent donner lieu à des recours juridiques de la part

d’une quelconque partie ou de tierces parties lors de leur mise en œuvre pratique ». La

conclusion d’un accord de gestion de crise efficace est en outre compliquée par les

mesures de cantonnement : lors d’une crise, les autorités des différents pays sont tenues

par la loi de protéger les déposants et les créanciers nationaux, par exemple, en saisissant

les actifs locaux d’une succursale locale d’une banque étrangère. Il convient donc de

modifier la législation de façon que les principes de répartition transnationale des charges

soient inscrits dans la loi et que les intérêts des autres pays soient pris en compte dans le

processus de gestion des crises. Étant donné que les compétences budgétaires des pays se

trouvent affectées, ces modifications législatives devraient être soigneusement conçues.

Les plans internes de redressement et de liquidation ou « testaments » (living wills)

sont des instruments importants qui peuvent assurer un redressement ou une liquidation

rapide de banques d’importance systémique en difficulté sans perturbation notable du

système financier. Ces plans internes doivent décrire la façon dont une banque réagirait à

toute une série de tensions envisageables, y compris en recourant à des plans de

financement d’urgence, des cessions d’actifs et d’activités, et ils permettent ainsi aux

autorités de liquider une banque de façon plus simple et moins coûteuse en créant un

« état de mobilisation permanente » (Bailey, 2009). Pour que ces plans restent efficaces, les

autorités de contrôle nationales et l’ABE devront définir conjointement les principaux

obstacles à une faillite transnationale et veiller à ce qu’ils restent précis, pertinents et

d’actualité, en les soumettant régulièrement à des indicateurs de tension et à des exercices

de simulation de crise. Enfin, pour être efficaces dans le contexte transnational, ces plans

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

Encadré 4.8. Groupe de stabilité transfrontalière des pays nordiques et baltes

Signé le 17 août 2010 par les ministres des Finances et gouverneurs des banquescentrales et les autorités de surveillance financière des pays nordiques et baltes*, l’accordde coopération sur la stabilité transnationale, la gestion et le règlement des crises a mis enplace le premier groupe européen de stabilité transfrontalière. Ce groupe (Nordic-BalticCross-Border Stability Group – NBCBSG) devrait servir de référence à d’autres groupes dumême genre, car il peut se prévaloir de bons antécédents en matière de coopération etd’une densité d’institutions d’importance systémique dans les pays nordiques. L’objectifde cet accord est de faire en sorte que les pays non seulement coopèrent efficacement pourprévenir les crises financières, mais soient également préparés à faire face aux situationsde crise. En arrêtant par avance des procédures de coopération, d’échange d’informations,d’évaluation et de règlement des faillites, cet accord vise à minimiser les coûts des crisesfinancières et, le cas échéant et dans la mesure du possible, à les répartir de façonéquilibrée et équitable. Les principales missions du NBCBSG sont les suivantes :

● Tenir à jour les bases de données nécessaires portant sur des informations pertinentes,financières ou autres, concernant les groupes financiers.

● Identifier les obstacles apparents, juridiques ou autres, à la coordination des décisionset à l’adoption de solutions conjointes et encourager les autorités à œuvrer à lasuppression de ces obstacles.

● Envisager, dans les limites convenues, la mise au point commune d’autres instrumentsde gestion et mécanismes de règlement des crises qui soient viables.

● Adopter le modèle d’échange d’informations et les procédures d’évaluation proposés.

● Lancer des simulations de crise et procéder à leur évaluation.

● Définir et mettre à jour les critères et modèles pour une éventuelle répartition des coûtsbudgétaires nets de règlement des faillites.

L’accord décrit l’algorithme initial de la répartition des charges qui repose sur leséléments suivants :

● L’importance relative du groupe financier (maison mère, filiale ou succursale) dans lespays, mesurée par les parts des actifs (leur total étant égal à 100 %).

● Les responsabilités en matière de contrôle d’une même institution dans les mêmes pays(soit une responsabilité à 100 % pour le pays d’origine avec le pouvoir intégral et exclusifd’intervenir et d’influencer les décisions, soit une répartition discrétionnaire del’ensemble des responsabilités entre les membres du collège des contrôleurs).

● Des facteurs complémentaires, notamment l’importance systémique dans un paysdonné, la part des actifs douteux, la qualité du dispositif de prévention des crises etd’alerte précoce ou encore l’existence d’une charge budgétaire exceptionnellementélevée.

Cet accord n’est pas juridiquement contraignant ; il reconnaît en outre que laresponsabilité de la gestion et du règlement des crises financières appartient auxdifférents pays et que la coopération restera entièrement volontaire. L’accord ne limite pasles possibilités de cantonnement, lorsqu’il existe une obligation juridique à cet égard,comme c’est le cas par exemple au Danemark, et il ne repose pas sur un régime commundes faillites. Les avantages du dispositif sont donc concentrés sur les phases d’alerteprécoce et d’intervention immédiate qui constituent ainsi une sorte de démarched’intervention correctrice rapide.

* Danemark, Estonie, Finlande, Islande, Lettonie, Lituanie, Norvège et Suède.

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

devront peut-être s’appuyer sur des accords contraignants de répartition des charges et, le

cas échéant, sur d’autres procédures de liquidation inscrites dans la législation nationale.

À l’heure actuelle, des propositions législatives visant à harmoniser intégralement les

dispositifs de garantie des dépôts sont en cours d’examen. Avant la crise, on observait des

disparités sensibles dans la conception de ces mécanismes selon les pays, car

l’harmonisation était limitée au niveau de couverture minimum. Bien que les pays

européens soient convenus durant la crise de relever progressivement les plafonds de leurs

régimes de garantie des dépôts pour les porter à un niveau commun de 100 000 EUR d’ici la

fin de 2010, les disparités ont néanmoins persisté quant au type de dépôts couverts, au

montant de la couverture, aux primes fondées sur les risques et aux mécanismes de

financement. Ces disparités incitaient les déposants à se livrer à des arbitrages entre

réglementations. C’est ce qui s’est produit chez les clients des banques britanniques qui

ont transféré leurs dépôts vers des succursales de banques irlandaises où ils pouvaient

bénéficier d’une protection illimitée. L’amendement prévu à la directive sur les systèmes

de garantie des dépôts limitera nettement ces différences en harmonisant le niveau de

couverture et l’éventail des déposants et des produits assurés. Pour rendre effectives ces

modifications de la réglementation, l’Autorité bancaire européenne devrait désormais

jouer un rôle important dans les examens par les pairs et les dispositifs nationaux

d’indicateurs de tension, et contribuer à remédier aux éventuelles incohérences, de façon

à éviter les phénomènes d’incertitude et de contagion transnationale des faillites

bancaires. Le pays d’accueil devrait aussi avoir le droit de demander la confirmation que le

pays d’origine a les moyens financiers de protéger efficacement les dépôts des clients des

succursales de façon à éviter un transfert de facto de charges vers le pays d’accueil, comme

cela s’est produit lors de la crise des banques islandaises.

Les mécanismes de financement représentent un complément important du dispositif

de gestion de crise. Même si le coût final de la liquidation doit être supporté par les parties

prenantes privées, il peut s’avérer nécessaire de recourir à un financement immédiat et

temporaire par les pouvoirs publics pour assurer la liquidation des banques tout en

couvrant différents coûts et en préservant la continuité de certains services essentiels.

Toutes les possibilités devraient être étudiées, notamment la création de fonds de

liquidation préfinancés alimentés par des prélèvements calculés en fonction des risques,

mais aussi un élargissement du mandat des systèmes de garantie des dépôts, déjà instauré

dans certains pays, de sorte que ceux-ci assurent notamment des financements relais, des

transferts d’éléments d’actif et de passif et un financement de la séparation entre actifs

viables et irrécouvrables. La solution retenue ne devrait pas avantager les actionnaires, les

dirigeants et les créanciers non garantis, de façon à prévenir l’aléa moral et les distorsions

de concurrence. L’harmonisation du financement des opérations de résolution doit refléter

l’intégration croissante des dispositifs de surveillance et la coordination étroite des

initiatives des autorités nationales de règlement des défaillances. Sinon, l’introduction de

mécanismes de financement des procédures de résolution risque d’avoir des répercussions

négatives sur l’équité de la concurrence et contribuer moins efficacement qu’escompté à la

gestion transnationale des crises. Pour autant, les deux premières structures assimilables

à des fonds de résolution sont actuellement mises en place de façon unilatérale.

Une synchronisation des réformes aboutissant à une plus grande harmonisation

internationale de la supervision microprudentielle, de la surveillance macroprudentielle et

du dispositif de gestion des crises en vigueur est indispensable pour garantir la stabilité et

l’équité de la concurrence dans le système bancaire européen. Un examen régulier des

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

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nouveaux dispositifs déterminera si de nouvelles mesures vers la mise en place d’un

dispositif intégré à l’échelle de l’UE pour les institutions financières transnationales

seraient susceptibles de contribuer à ces objectifs.

Encadré 4.9. Synthèse des recommandations sur la réglementation et la surveillance bancaire

La priorité immédiate consiste à veiller à empêcher que le fonctionnement du système financier negrippe et à remédier aux points faibles du système bancaire (chapitre 1). Les autorités de l’UE ont dengagé des réformes substantielles visant à renforcer la réglementation du système financier etsurveillance transnationale. Ces réformes doivent être complétées de façon à assurer un dispositif pefficace de réglementation et de surveillance du système financier européen.

Renforcer la réglementation microprudentielle

Il convient d’accroître l’efficacité de la réglementation financière dans l’esprit de l’accord de Bâle III. L’prévoit déjà de mettre en œuvre celui-ci dans le cadre de l’approche globale et il conviendrait d’envisaun raccourcissement des délais de mise en œuvre. Les principales priorités sont les suivantes :

● Accroître le volume des volants de fonds propres et améliorer la qualité des fonds propres en s’appuyaplus sur le capital constitué en actions ordinaires, à l’inclusion des bénéfices mis en réserve.

● Introduire un ratio de levier servant de butoir à l’égard des mesures en matière de fonds proppondérés par les risques et visant à décourager un recours excessif à l’endettement dans le système.

● Renforcer la réglementation de la liquidité.

La nouvelle Directive sur l’adéquation des fonds propres doit aussi tenir compte d’autres priorités :

● Améliorer le système de pondération en fonction des risques de façon à assurer un traitement cohérede l’ensemble des risques indépendamment de leur position dans le bilan.

● Les évaluations des risques ne doivent pas s’en remettre indûment aux notations.

● La concentration des expositions à des risques géographiques et souverains spécifiques doit être prisecompte dans le calcul des exigences de fonds propres.

Réduire le risque systémique en réglementant les institutions d’importance systémique

● Veiller à ce que les exigences prudentielles appliquées aux entreprises d’importance systémiqcorrespondent au coût de leur défaillance, notamment en imposant à celles-ci d’accroître leur capacd’absorption des pertes; pour ce faire, jouer à la fois sur des exigences supplémentaires de fonds proprsur les fonds propres conditionnels et sur la requalification des dettes.

● Envisager les avantages d’une séparation plus rigoureuse entre les activités bancaires et d’autactivités à risque, notamment par l’imposition de règles plus strictes sur la négociation pour compropre, les opérations sur instruments dérivés et les opérations hors bilan.

● Compléter la réglementation par une surveillance plus efficace et plus étroite et par des mécanismesrésolution des défaillances améliorés qui minimisent le risque d’aléa moral.

● Envisager de pénaliser la taille et la complexité des groupes bancaires en imposant des surtaxes ou dprélèvements modulés en fonction du risque.

Développer la réglementation macroprudentielle pour atténuer la procyclicité du dispositif

● Adopter une approche du risque et des exigences minimums de fonds propres couvrant l’ensemble cycle et promouvoir le provisionnement prospectif.

● Introduire un système de volants de fonds propres contracycliques reposant sur des règles communsimples, conformément aux propositions de Bâle et qui s’appliquerait à toutes les juridictions.

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

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Encadré 4.9. Synthèse des recommandations sur la réglementation et la surveillance bancaire (suite)

● Utiliser d’autres instruments, comme les règles relatives aux quotités de prêt et au taux d’endettemeainsi que les règles sur la protection des consommateurs, pour atténuer les cycles du logement.

Mettre en place des institutions robustes de surveillance macroprudentielle

Une réglementation macroprudentielle efficace devrait contribuer à la stabilité économique et elle reune importance particulière pour les pays participant à une union monétaire. La mise en œuvre d’une tesurveillance demeure à l’état embryonnaire. Toutefois, les institutions de l’UE doivent être à l’avant-gardans ce domaine.

● La création du Comité européen du risque systémique (CERS) est la bienvenue, mais il convient de suide près ses progrès pour que ses décisions soient efficaces et que ses recommandations soient misesœuvre de façon qu’il joue pleinement son rôle en matière de stabilité macroéconomique et financièredevra être doté de ressources et d’un accès à l’information convenables pour pouvoir mettre au point dinstruments d’alerte précoce et d’évaluation des risques systémiques.

● Il faut mettre en place des dispositifs macroprudentiels au niveau national, en prévoyant une répartiticlaire des responsabilités et des ressources ainsi que des relations claires entre la surveillanmacroprudentielle et les autres interventions des pouvoirs publics.

Renforcer la surveillance transnationale

Un marché unique des capitaux suppose l’existence d’un système efficace de réglementation et surveillance micro et macroprudentielle communes, conjugué à un judicieux dispositif de gestion de critransnationales. Lors de ses futurs réexamens de la nouvelle structure européenne de surveillance,Commission devrait évaluer si une autorité de contrôle intégrée unique à l’échelle de l’UE pour les grangroupes bancaires transnationaux serait plus indiquée à cet effet. Tandis qu’un système plus centralisésurveillance pourrait constituer un objectif de long terme, il est primordial que les réformes actuels’efforcent de contribuer efficacement à une surveillance homogène, cohérente et efficace des grangroupes bancaires transnationaux. Dans ce contexte :

● Il convient de recourir plus largement au niveau législatif à des règlements directement applicablplutôt qu’à des directives qui nécessitent une transposition en droit national. La marge d’appréciatides autorités nationales à cet égard doit être très limitée.

● Veiller à ce que l’Autorité bancaire européenne (ABE) dispose de pouvoirs suffisants, y compris matière de fixation de normes techniques contraignantes, pour parvenir à une réglementatieuropéenne unique.

● Pour éviter de diluer les pouvoirs de l’ABE, il faudrait limiter l’application des règles de sauvegarbudgétaire à des cas exceptionnels ayant un impact direct et substantiel sur les obligations budgétainationales.

● Attribuer suffisamment de ressources à l’ABE pour s’assurer qu’elle fonctionne efficacement et qu’epuisse, le cas échéant, contester les analyses et les positions des autorités de contrôle nationales.

● Les autorités de contrôle nationales en Europe devraient atteindre des normes minimales compétence élevées, et l’efficacité des examens par les pairs sera primordiale.

● Faciliter la surveillance transnationale et le suivi du risque systémique par une harmonisation ddéfinitions des principales variables, par exemple les prêts non productifs, et mettre en place une bade données commune en matière de contrôle.

● Renforcer la discipline du marché en améliorant la transparence et la communication d’informationscours du processus de contrôle.

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4. MINIMISER LES RISQUES DE DÉSÉQUILIBRE AU SEIN DU SYSTÈME BANCAIRE EUROPÉEN

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Encadré 4.9. Synthèse des recommandations sur la réglementation et la surveillance bancaire (suite)

Introduire des mécanismes transnationaux de gestion des crises

● Les autorités nationales doivent disposer d’une panoplie efficace d’instruments de règlement dfaillites bancaires qui soient aussi harmonisés que possible. Ces procédures doivent veiller à faire peles risques sur les actionnaires et créanciers, y compris en recourant à des conversions forcées de deten fonds propres pour les détenteurs d’obligations et en imposant des marges de sécurité aux créancinon garantis.

● Veiller à ce que toutes les grandes institutions transnationales d’importance systémique soient dotéde groupes de stabilité qui fonctionnent, soutenus par des plans internes de redressement et liquidation régulièrement actualisés et par des accords de répartition des charges entre les pays qsoient inscrits dans les législations nationales, de façon à limiter les mesures de cantonnement.

● Éliminer les principales disparités des régimes de faillite nationaux qui aboutissent fréquemment à dconflits entre autorités de contrôle nationales, y compris en ce qui concerne le lancement de procédude faillite et leur transférabilité.

● Les modalités des systèmes de garantie des dépôts, notamment le niveau de couverture et l’éventail ddéposants et des produits assurés, doivent être harmonisées et ces systèmes doivent être préfinancé

● Il conviendrait d’envisager des mécanismes de financement du règlement des faillites bancairescompris par des prélèvements en fonction des risques, pour couvrir les coûts temporaires dinterventions des pouvoirs publics. Une harmonisation internationale est essentielle pour assul’uniformité des règles applicables et éviter de déplacer la charge d’un pays à l’autre.

Améliorer le bon fonctionnement du marché financier unique en Europe

● Sous réserve de l’adoption d’une réglementation efficace, des mesures doivent être prises pour lever obstacles à l’intégration des marchés financiers au sein de l’UE, notamment en ce qui concernebanque de réseau.

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Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010

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Glossaire

ABE Autorité bancaire européenne

BCE Banque centrale européenne

BRI Banque des règlements internationaux

CBCB Comité de Bâle sur le contrôle bancaire

CECB Comité européen des contrôleurs bancaires

CEF Conseil économique et financier

CERS Comité européen du risque systémique

CSF Conseil de stabilité financière

CSFM Comité sur le système financier mondial

DAFP Directive sur l’adéquation des fonds propres

FESF Fonds européen de stabilité financière

FMI Fonds monétaire international

GAAP Generally Accepted Accounting Principles

GIFT Grandes institutions financières internationales

GIFIS Grandes institutions financières d’importance systémique

GOPE Grandes orientations de politique économique

IDE Investissement direct étranger

LPE Législation de protection de l’emploi

MESF Mécanisme européen de stabilisation financière

MCE Mécanisme de change européen

OMT Objectif à moyen terme

PAMT Politiques actives du marché du travail

PDE Procédure concernant les déficits excessifs

PSC Pacte de stabilité et de croissance

R-D Recherche et développement

RMP Réglementation des marchés de produits

SEBC Système européen de banques centrales

UEM Union économique et monétaire

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ORGANISATION DE COOPÉRATION ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES

L’OCDE est un forum unique en son genre où les gouvernements œuvrent ensemble pour relever les défis

économiques, sociaux et environnementaux que pose la mondialisation. L’OCDE est aussi à l’avant-garde des

efforts entrepris pour comprendre les évolutions du monde actuel et les préoccupations qu’elles font naître.

Elle aide les gouvernements à faire face à des situations nouvelles en examinant des thèmes tels que le

gouvernement d’entreprise, l’économie de l’information et les défis posés par le vieillissement de la

population. L’Organisation offre aux gouvernements un cadre leur permettant de comparer leurs expériences

en matière de politiques, de chercher des réponses à des problèmes communs, d’identifier les bonnes

pratiques et de travailler à la coordination des politiques nationales et internationales.

Les pays membres de l’OCDE sont : l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Canada, le Chili,

la Corée, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande,

l’Islande, Israël, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas,

la Pologne, le Portugal, la République slovaque, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Slovénie, la

Suède, la Suisse et la Turquie. La Commission européenne participe aux travaux de l’OCDE.

Les Éditions OCDE assurent une large diffusion aux travaux de l’Organisation. Ces derniers

comprennent les résultats de l’activité de collecte de statistiques, les travaux de recherche menés sur des

questions économiques, sociales et environnementales, ainsi que les conventions, les principes directeurs

et les modèles développés par les pays membres.

ÉDITIONS OCDE, 2, rue André-Pascal, 75775 PARIS CEDEX 16

(102010202 P) ISBN 978-92-64-09002-6 – no 57618 2010

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www.oecd.org/editions

Études économiques de l’OCDE

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isbn 978-92-64-09002-6 10 2010 20 2 P-:HSTCQE=U^UUW[: Volume 2010/20 – décembre 2010

supplément 2

Volume 2010/20 – décembre 2010 supplément 2

Volum

e 2010/20 – sup

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écemb

re 2010

issn 0304-3363 abOnnEmEnt 2010 (18 numÉrOs)

issn 1995-3658 abOnnEmEnt Par PaYs

Merci de citer cet ouvrage comme suit :

OCDE (2010), Études économiques de l’OCDE : Zone euro 2010, Éditions OCDE.http://dx.doi.org/10.1787/eco_surveys-euz-2010-fr

Cet ouvrage est publié sur OECD iLibrary, la bibliothèque en ligne de l’OCDE, qui regroupe tous les livres, périodiques et bases de données statistiques de l’Organisation. Rendez-vous sur le site www.oecd-ilibrary.org et n’hésitez pas à nous contacter pour plus d’informations.

Études économiques de l’OCDE

ZOnE EurO thèmE sPÉCial : DÉsÉquilibrEs maCrOÉCOnOmiquEs

Italie, juin 2009Japon, septembre 2009 Luxembourg, mai 2010Mexique, juillet 2009Norvège, mars 2010Nouvelle-Zélande, avril 2009Pays-Bas, juin 2010Pologne, avril 2010Portugal, septembre 2010République fédérale de Yougoslavie, janvier 2003République slovaque, novembre 2010 République tchèque, avril 2010 Roumanie, octobre 2002Royaume-Uni, juin 2009 Slovénie, juillet 2009Suède, décembre 2008Suisse, décembre 2009Turquie, septembre 2010 Ukraine, septembre 2007Union européenne, septembre 2009Zone euro, décembre 2010

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