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Pansard & Associés Évaluation de l'entreprise par la méthode de Monte-Carlo. On sait que la méthode d'évaluation la plus répandue est celle des cash-flows actualisés. Dans cette méthode, la prévision d'exploitation est actualisée avec un taux d'actualisation qui prend en compte le risque. Même si le lien entre le taux d'actualisation et le risque a fait l'objet depuis 50 ans de nombreuses recherches, beaucoup de praticiens considèrent que les modèles existants résistent mal à la plupart des tests empiriques. En effet, le Medaf, qui est certainement le modèle le plus répandu, est d'abord un modèle de portefeuille qui suppose que l'investisseur a parfaitement réparti ses risques, ce qui est rarement le cas dans les acquisitions d'entreprises non cotées en Bourse.

Évaluation de monte carlo l

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Évaluation de l'entreprise par la méthode de Monte-Carlo.

On sait que la méthode d'évaluation la plus répandue est

celle des cash-flows actualisés. Dans cette méthode, la

prévision d'exploitation est actualisée avec un taux

d'actualisation qui prend en compte le risque. Même si le lien

entre le taux d'actualisation et le risque a fait l'objet depuis 50

ans de nombreuses recherches, beaucoup de praticiens

considèrent que les modèles existants résistent mal à la

plupart des tests empiriques. En effet, le Medaf, qui est

certainement le modèle le plus répandu, est d'abord un modèle

de portefeuille qui suppose que l'investisseur a parfaitement

réparti ses risques, ce qui est rarement le cas dans les

acquisitions d'entreprises non cotées en Bourse.

Certains investisseurs se tournent donc vers des modèles

dans lesquels le risque est pris en compte par le biais non pas

du taux d'actualisation mais par celui de la prévision

d'exploitation.

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La méthode des scénarios a d'abord été utilisée. Dans

cette approche, l'analyste définit pour commencer trois

hypothèses, l'une représentant le cas optimiste, la seconde un

cas moyen et la troisième un scénario pessimiste. En règle

générale, les résultats obtenus selon les différentes hypothèses

sont tellement éloignés qu'il est difficile d'en tirer des

conclusions.

On peut alors affecter de façon subjective des probabilités à

chaque hypothèse et calculer une espérance mathématique.

Mais là encore le choix des probabilités est largement

arbitraire.

Les méthodes fondées sur la simulation apparaissent

alors comme le seul recours. Ces méthodes, que l'on recouvre

généralement sous le nom générique de méthodes de Monte-

Carlo, se sont largement développées en parallèle avec la

banalisation des matériels informatiques. Elles sont mises en

oeuvre grâce à l'utilisation de logiciels spécialisés qui

complètent les fonctionnalités des tableurs classiques.

L'exemple présenté ici a été réalisé avec X. L. SIM qui

est l'un des produits les plus simples du marché. Tous ces

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logiciels fonctionnent selon le même principe : les variables

d'entrée qui ont un caractère aléatoire sont représentées par

une loi statistique dont on définit les paramètres. Puis

l'ordinateur génère de façon aléatoire plusieurs milliers de

cas et calcule des valeurs de sortie dont on peut observer la

dispersion. Les valeurs d'entrée sont ici les chiffres d'affaires

annuels et les valeurs de sortie les cash-flows libres générés.

Dans le cas qui nous intéresse (voir le fichier joint) on

commence donc par créer un modèle classique de prévisions

d'exploitation très proche de ceux qui sont utilisés dans un

calcul de discounted- cash-flows. La différence principale

vient de ce que contrairement aux modèles classiques qui

comprennent en général deux périodes : la période dite de

visibilité qui couvre généralement cinq à 10 ans et la période

terminale qui s'étend jusqu'à l'infini, ce modèle fondé sur la

logique des LBO se concentre sur la première période. En

effet, cette période qui est en général de cinq à sept ans et

celle où l'entreprise doit supporter le remboursement de la

dette d'acquisition. C'est dans cette période que se situe le

risque principal et l'on peut considérer que le montant de

dettes que peut assumer l'entreprise durant cette période est

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une composante essentielle du prix qu'un investisseur

raisonnable peut être amené à payer. Les modèles

traditionnels de cash-flow actualisé aboutissent bien souvent à

une valeur terminale qui représente plus de 70 % de la valeur

totale et qui est très sensible aux hypothèses de croissance et

de taux d'actualisation.

Si par exemple l'on considère que la dette d'acquisition

peut représenter environ les deux tiers de la valeur

d'entreprise, le montant maximum de dette supportable avec

un niveau de risque acceptable devra correspondre au flux de

trésorerie minimal dégagé même dans des situations

défavorables.

Contrairement à un plan de trésorerie traditionnel, qui se

contente bien souvent d'extrapoler sur quelques années les

caractéristiques des exercices les plus récents, le modèle de

simulation va donc se concentrer sur la volatilité des cash-

flows. Les flux obtenus seront ensuite actualisés avec un taux

sans risque puisque l'incertitude a déjà été prise en compte.

On obtiendra alors une valeur moyenne mais surtout une

courbe de dispersion permettant de calculer la trésorerie

minimale dégagée dans par exemple 90 % des cas. Plutôt que

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de chercher à prévoir un taux de croissance l'analyste va donc

se concentrer sur la détermination de la volatilité.

La volatilité des flux de trésorerie dépend pour l'essentiel

de quatre paramètres :

-- la volatilité du chiffre d'affaires

-- la structure des coûts de fonctionnement, en d'autres termes

la part des frais qui varient proportionnellement au volume.

-- le besoin en fonds de roulement exprimé en pourcentage du

chiffre d'affaires.

-- le montant des investissements.

La volatilité du chiffre d'affaires dépend à la fois du

secteur d'activité et de la dispersion de la clientèle. Les

secteurs cycliques tels que les biens d'équipement ont

naturellement une volatilité plus élevée que les biens de

consommation ou les consommables industriels. De la même

façon, les entreprises qui opèrent avec un nombre réduit de

clients auront en général une plus grande volatilité de leur

activité.

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On mesure en général la volatilité en calculant l'écart

type du chiffre d'affaires observé au cours des sept ou huit

années qui ont précédé l'évaluation. Lorsque l'on divise l'écart

type par la moyenne on obtient un résultat normalisé appelé le

coefficient de variation. Pour les entreprises qui ne traversent

pas une période exceptionnelle de croissance ou de déclin, ce

coefficient se situe souvent dans une fourchette de 5 % à 15 %.

Le modèle va donc incorporer une ligne appelée aleas.

Celle-ci correspondra à une valeur calculée par tirage

aléatoire par le logiciel avec une moyenne nulle et un écart

type égal à l'écart type observé sur le chiffre d'affaires de

l'entreprise. Cette ligne sera ajoutée au chiffre d'affaires de

base qui est celui de la dernière année précédant l'évaluation.

Le résultat servira d'élément principal au calcul du cash-flow

de l'année correspondante.

Le second paramètre important du modèle est le

pourcentage de frais variables par rapport au chiffre

d'affaires. Même si cette estimation est souvent imprécise, elle

donne à l'analyste une indication précieuse sur la sensibilité

du résultat aux variations de volume. Il est évident

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intuitivement que plus une entreprise est intégrée plus une

baisse de chiffre d'affaires aura un effet négatif sur son cash-

flow. On comprend donc pourquoi les fonds de L. B. O

préfèrent externaliser les fonctions non stratégiques dans le

but de réduire la volatilité. Cette même idée est exprimée par

le dicton qui affirme que lorsqu'on accroît le levier financier il

faut réduire le levier opérationnel.

Le troisième paramètre important est représenté par le

besoin en fonds de roulement exprimé en pourcentage du

chiffre d'affaires. Plus ce pourcentage est élevé, plus ce

paramètre jouera comme un amortisseur qui neutralise

partiellement la variation des résultats d'exploitation.

Pour illustrer ce fait prenons l'exemple d'une entreprise

industrielle qui réalise 15 millions d'euros de chiffre d'affaires

avec un BFR de 20 % soit 3 millions d'euros. Son résultat net

est de 900 000 EUR. Si son chiffre d'affaires baisse de 10 %

son résultat net baissera d'environ 50 % soit une diminution

d'environ 450 000 EUR. Mais le BFR étant réduit lui aussi de

10 %, l'entreprise retrouvera 300 000 EUR de liquidités ce qui

fait que le cash-flow libre ne sera réduit que de 150 000 EUR.

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Cet effet mécanique a pour conséquence paradoxale que les

entreprises à cycle long supportent mieux sur le plan financier

les ralentissements d'activité.

Enfin le quatrième paramètre à prendre en compte dans le

modèle est le montant des investissements. Là encore

l'application mécanique des investissements réalisés en

moyenne au cours des années précédentes est rarement

opportune. Il convient avant tout d'examiner quels sont les

montants minimums à investir pour maintenir l'activité de

façon à pouvoir différer en cas de nécessité tout ce qui n'est

pas réellement indispensable. On touche ici du doigt une des

limites majeures de tous les modèles de calcul qui est de

négliger l'intervention des managers en fonction de l'évolution

de l'environnement. Cette capacité d'adaptation, qui porte

aussi bien sur l'évolution des frais de fonctionnement que sur

les équipements à mettre en œuvre , ne peut pas être prise en

compte par un modèle qui fonctionne de façon essentiellement

mécanique.

La simulation est alors lancée sur quelques milliers de

cas. Le résultat est un cash-flow libre pour chaque année. La

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valeur moyenne, comme nous l'avons indiqué, est proche de

celle d'un modèle classique. Elle ne présente donc que peu

d'intérêt. Par contre, la courbe de dispersion permet de mieux

apprécier le risque encouru. On peut considérer par exemple

que la charge de remboursement doit être inférieure dans 90

% des cas au montant du cash-flow dégagé. Connaissant la

charge de remboursement on peut donc évaluer la dette

maximale et à partir de celle-ci le prix d'acquisition qu'il est

possible de payer.

En conclusion, même si cette approche de l'évaluation

par la méthode de Monte-Carlo reste largement rudimentaire,

un modèle aussi simple ne pouvant rendre compte de toute la

complexité du réel, nous pensons qu'elle permet de

s'affranchir des difficultés provenant du choix des taux

d'actualisation. Elle se concentre aussi sur l'observation

détaillée de l'entreprise et non sur des prévisions toujours

hasardeuses. Elle représente donc un premier pas vers un

traitement du risque adapté à chaque cas d'entreprise.

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